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Full text of "Mémoires de mathématique et de physique, presentés à l'Académie royale des sciences, par divers sçavans & lûs dans ses assemblées"

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MÉMOIRES 


MATHÉMATIQUE 
DE PHYSIQUE, 


Préfentés à T Académie Royale des Sciences, par 


divers Savans, & lus dans fes FETES 


Tome Quatrième. 


À PA RES, 
DE L'IMPRIMERIE ROYALE. 


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Des Mémoires contenus dans ce Volume. 
a pre ES fur la caufe phyfique de l'adhérence de la 


couleur rouge aux Toiles peints qui nous viennent des 


côtes de Malabar &r de Coromandel, Pax M.Vabbé Mazéas, 


Correfpondant de l'Académie. Page t 
Méthode pour refoudre plufieurs Problèmes inderermines. Par 
. M. DE LA BOTTIERE. 33 
Maniere de faire. les fleurs dans les feux d'Ariifice Chinois. 

Par le P. D'INCARvVILLE, Jéfuite Mifionnaire. 66 
Solution de quelques Problèmes de Méchanique. Par M. NECKER, 

Correfpondant de l'Académie. 95 


Obfervations Méréorologiques , faires à Touloufe pendant dix 
annees , depuis © compris l'année 1747 jufqu'en l'année 
1756, inclufivement. Par M. MarcorEL. , Correfpondant 


de l’Académie. 109 
Extrait d'une Lettre de M. Marrigues , Chirurgien à Verfailles, 
écrite à M. Morand, le 9 Novembre 1758. 123 


Olfervationes quædam Aflronomicæ à Mereorologicæ 1bitæ 
Upfalæ ao M. Dccx x x1x. Ab ANDREÂ CELsio. 1 29 


Sur l'exploiation des Mines d'Alface 7 comte de Bourgogne, Pa 
M. DE GENSANNE, Correfpondant de l'Académie. 141 


Obfervations de la Cométe de 1682, 1607 & 1551, faites 
en Mai 1759: Par M.JEAuRAT, Profefièur de Mathé- 
matiques à l'Ecole Royale Miliaire. 182 


Maladie du Cheval, que, par un préugé vulgaire, on artribue 
à Ja morfire où à la pigñre d'une Mufaraigne: Par Mo 
Larosse, Maréchal des Écuries du Roi 190 


L'AMB EL UE, 
Memoire fur les Quarrés magiques. Par M. RALLIER 
pes OURMESs, Confeiller d'honneur au Préfidial de 
Rennes. 196 


Aurores boréales obfervées à Rouen le 31 Mars & jours Juivans. 
Par M. Bouin, Correfpondant de l Académie. 242 


Journal d'Obfervations , dans les différens voyages qui ont été faits, 
pour voir l'éruption du Véfuve. Par M. D'ARTHENAY. 247 


Olfervatio Echpfs Lune, die 27 Mari anni M. ncCLv habita 
Uliffippone in demo Patrum Congregationis Oratorii. À Jo ANNE 
CHEVALIER, Scientiarum Academiæ Correfpondenti. 28 1 


Recherches Jur le phénomène des Anneaux colorés. Par M. Du 
Tour, Correlpondant de Académie. 285 


Obfervations du paflage de la Lune par ls Hyades, le 25 
Septembre 175$ © le 7 Mars 1756, faites à Rouen. 
Par M. DuLaGue, Profefieur d'Hydrographie. 313 


Projetion géometrique des Éclipfes de Sokil, affijéie aux règles 
de la perfpelive ordinaire. Paxy M. JEAURAT, Profefleur 
de Mathématiques à l'École Royale Militaire. 318 


Obfervations fur la caufe de la chüûte du bois ou des cornes des 
.… Cerfs. Par M. le Comte DE ViLLIAMSON, Chambellan 
de Sa Majefté le Roi de Pologne. 336 


Confftuétion d'une Chaïfe roulante , avec laquelle on peut Je mener 
Joi-même fur les grands Chemins. Pay M. BRODIER. 351 


Second Mémoire fur les maladies des bles. Par M. AYMEN. 358 


Relation d'un Voyage aux Îfles de France dr de Bourbon, qui 
contient plufieurs Obfervarions Affronomiques , tant pour la 
recherche des Longirudes fur mer, que pour déterminer la 
pojition géographique de ces Îfles. Pay D'APRÈS DE 
MANNEViLLETTE, Correlpondant de l’Académie. 399 


Obfervarions fur l'Hydrocéphale de Begle. Pa M. MARCOREL, 
Correfpondant de l'Académie, A58 


TABLE. 
Mémoire fur un Échinite fingulier. Pw M. DE Luc, Citoyens 


de Genève. 467 
Mémoire contenant l'analyfe d'une eau colorée , qui Je trouve dans 
une fontaine à Douai. Par M. D'ABOVILLE. 470 


Extrait d'ume Eettre de M. Bauflau du Bignon à M. de 
Reaumur, contenant quelques Expériences pour faire éclorre 
des poulets par la fermentation du Tan. 4383 


Anabfe d'une Eau minérale fingulière, qui fe trouve à Douai 
en Flandre. Pa M. BAUMÉ, Maitre Apothicaire de 
Pass {x 490 

Addition au Mémoire intitulé, Difcuffion d'une queftion 
d'Optique, imprimé dans le troïfième Volume des Mémoires 
des Savans Etrangers , page $ 14 © fuivantes. Par M. Du 
Tour, Correfpondant de l'Académie. 499 


Obférvarions faites à Rouen fur la ronte de la Cométe qui a 
paru dans les mois de Septembre & d'Odobre 1757. Pax 
M. Bouin, Correlpondant de l’Académie. s12 


Copie d'ume Lettre écrite à M. l'Abbé NoLLET par M. DE 
Roms. s14 


Mémoire fur la Terre folie du tartre. Pa M. CADET, Apo- 
thicaire-major des Invalides. | 518 


Mémoire fur le mouvement des Planêtes , à moyen de calculer leur 
équation du centre pour un temps donné. Pax M. J£AURAT, 


Profeffeur à l'École Royale Militaire. 524 


Obfervation de l'Oppofition de Jupiter, faite à Rouen le 2 Mai 
1757. Par M. Bouin, Correlpondant de l'Académie. $ 41 


Defcription d'un Fœtus mal conforme, dont les Os a oient une 
mollefle contre nature. Pax M. BORDENAVE, Protefleur 
Royal en Chirurgie. 545 


Obfervarion de F'Échpfe de Lune du 3 Février 1757, faite 


F, À PL Te 
à Rouen, au Prieuré de Saint- Lo. Pax M. Bouin, Cor- 
refpondant de l’Académie. S51 


Memoire fur la caufe des bulles qui fe trouvent dans le verre. Pax 
M. Bosc D'AntTic, Correfpondant de l’Académie. 5 5 3 


Olfervation de T'Échpfe de Lune, faite à Rouen le 30 Juillet 
1757: Par M. Bouin, Correfpondant de l'Académie. $ 62 


Olfervation de F'Échpfe d'Aldebaran par la Lune, faire à 
Touloufe le 2$ Février 1757. Par M. Garipuy, Corref- 
pondant de l'Académie. 567 


Mémoire fur la caufe des fouffllures des Méraux coulés ou jetés. 


Par M. Bosc D’Anric, Correfpondant de l'Académie. 5 69 


Mémoire [ur la fenfibilité des pariies des Animaux. Pa M. 
GERARD DE VILLARS, fils. 580 


Déelineatio à Obfervatio Aurore borealis, die 16 Septembris 
anni 1757, fadla Haga-comiitis. À PETRO GABRY. 597 


Détermination dirette de la diflance d'une Planète au Sokil, 
de fa Parallaxe à de fon diametre horizontal pour un temps 
donné. Pa M. JEAURAT, Profeffeur de Mathématiques 
à l'Ecole Royale Militaire. Got 


Obfervations Meïtéorologiques , faites à Bayeux en 1756 . Par 
M. l'abbé OuTuier, Correfpondant de Académie. 612 


Occulation de Mars par la Lune, avec des différences d'afcen- 
fion droite 7 de declinaifon, prifes à Rouen le 14 Mai 1758. 
Par M. Bouin, Correfpondant de l'Académie. 614 


Supplément au Livre fur l'ufage des feuilles dans les Planres. 
Par M. Bonnet, Correfpondant de l'Académie. 617 


Occuhation de € 2 de la Baleine par la Lune, faire à Rouen 
20 Décembre 1757. Par M. Bouin, Correfpondant 
de l'Académie, 621 


» 


TS A. BHLRE, 

Mémoire Jur la cubature des Corps gauches, où l'on explique 
leur formation , la maniere de les toifer fans être obligé de les 
décompofer ; ©’ les différentes propriétés de ces Corps par 
rapport aux courbes que lon peut y trouver par l'interfection 


d'un plan. Pax M. MAUDUIT. 623 


Mémoire fur un nouveau genre de Crabes de mer (Notogaftropus) , 
qui a des pattes fur le dos &r fous le ventre. Par M. VOsMAER, 
Correfpondant de l Académie. 635 


Problème de Dynamique. Par M. CHABANON DE 
MaAuGRis, 646 


Faute à corriger dans ce Volume. 


Au Réfultat inféré à la page 122, col. r°"*, lgñe dernière, 1576, 
Jifez 1756. 


poster th ee | 
EH} 105 Ex ; ; 
MARERUT me 00 > l 
WEESSR LEE Ë 
#7. 
PRÉFACE. 
E Volume eft le quatrième de cette collection, 
il comprend trente - quatre Mémoires & onze 
Obfervations détachées. 
De ces trente-quatre Mémoires, fept appartiennent 
à l'Hifiore Naturelle ou à la Phyfique, fix à l’Ana- 
tomie, fix à la Chimie, deux à la Botanique , trois à la 
Géométrie, quatre à l’Aftronomie , deux à l'Optique, 
un à la Dynamique, & trois à la Méchanique. 
Le premier de la partie PHYSIQUE, contient des Page 109. 


Obfervations météorologiques , faites à Touloufe, 
depuis 1747 jufqu'en 1756 inclufivement , par M. 
Marcorelle, de l'Académie royale des Sciences & 
Belles-Lettres de cette même ville, & Correfpondant 
dé l’Académie: il y, marque avec foin la quantité d’eau 


de pluie tombée dans tous les environs de Touloufe , 


les brouillards, les vapeurs lumineufes, fes météores, 


les vents, les degrés de chaud & de froid, la pefan- 
teur, de: l'air, la déclinaifon de l'aiguille aimantée , 


les tremblemens de terre, & les naiflances, morts & 
mariages dans cette grande. ville. On y reconnoit par- 
tout l'Obfervateur exaét; mais ce qui doit en faire le 
principal mérite, ce font les conclufions qu'il en tire 
& les réflexions judicieufes qu il fait à ce fujet; elles 
donnent, pour ainfi dire, l'ame & Ja vie au refte de 
r Ouvrage. 


Fo étrang. Tome IV. a 


P. 247: 


ij PRÉFACE. 

Le fecond, communiqué à l’Académie par M. de 
Genfanne, fon Correfpondant, a pour objet l’exploi- 
tation des mines d’Alface & du comté de Bourgogne. 
L'auteur y indique, dans le plus grand détail, toutes 
les mines qui fe trouvent dans ces provinces, tant 
celles qui ont été autrefois travaillées par les Romains, 
que celles qui ont été ouvertes de nos jours; il y décrit la 
nature du terrain où elles fe trouvent, celle de la gangue, 
c’eft-a-dire, de la pierre dans laquelle le minéral peut 
être engagé, le métal qu'elle donne & fà quantité, 
les travaux qui y font néceflaires , & finit par des ré- 
flexions intéreflantes fur les caufes qui peuvent faire 
languir les travaux des mines &:fur la manière d'éviter 
ces inconvéniens. 


Le troifième contient la relation qu'a donné M. 
d’Arthenay , de la dernière éruption du Véfuve: il 
là commence par la defcription de l’état où étoit cette 
fameufe montagne avant l'éruption de 163 1 ; état dans 
lequel on auroit bien de là peine à reconnoitre le 
Véfüve de Pline & celui d’aujourd’hui : il donne enfuite 
les diférens changemens que la montagne a éprouvés 
depuis le commencement de la dernière éruption. Il 
réfulte de toutes les obfervations de M. d’Arthenay, 
qu'il ne faut pas s'étonner des différences qui fe trouvent 
dans les defcriptions du Véfuve qui ont été données 
par divers Auteurs: il n’eft'prefque jamais huit jours 
de fuite dans le même état; & fi leurs defcriptions 
font différentes , c’eft que ce n’eft pas le même Véfuve 
qu'ils ont décrit. Les Anciens avoient mis un Protée 
dans l'empire de Neptune , ne pourroit-on pas regarder 
le Véfuve comme celui de l'empire de Vulcain? 


PER ÉNFIMANC ‘E. - 
Le quatrième contient la defcription , donnée par », 46. 

M." de Luc, Citoyens de Genève, d’un Échinite 
foflile fingulier , trouvé dans les collines de craie de 
la province de Kent en Angleterre. Cette pièce fait 
voir évidemment que ces corps, connus dans Îles 
Cabinets fous le nom de pierres judaïques , ne font 
que les piquans de l'échinite pétrifié : les pierres 
judaïques ne font probablement pas les feuls foffiles qui 
aient une femblable origine , & l'obfervation de M." de 
Luc a paru très-propre à guider les Naturaliftes dans 
une femblable recherche. 


Le cinquième indique la méthode indiquée par p- 483. 
M. Bauffan du Bignon, pour employer au lieu de la 
chaleur du fumier, celle de la tannée pour l'incubation 
des œufs. Les Mémoires de feu M: de Reaumur ont 
appris depuis long-temps qu’on pouvoit fubftituer la 
chaieur d’un tas de fumier à celle de la poule, mais 
cette matière eft fouvent difficile à trouver, & elle 
perd affez promptement fa chaleur ; M. Bauflan du 
Bignon lui a fubflitué avec fuccès la tannée, c’eft-à- 
dire, le tan qui a fervi à la préparation des cuirs, & 
qui n’eft plus bon qu'a faire ce qu'on nomme deszrorres 
à briler. a trouvé, par fes expériences, qu’elle étoit 
pour le moins auffi aétive que le fumier, qu'il étoit 
aifé de lui rendre fa chaleur lorfqu’elle l’avoit perdue, 
& qu'elle coñtoit beaucoup moins: elle peut, avec 
des précautions qu’il indique, fervir plufieurs années 
à cetufage, & être encore au bout de ce temps bonne 
à brûler. C’ef ajoûter à un art utile, que de procurer 
des moyens faciles de lexercer. 


Le fixième a pour,objet les recherches qu'a fait p. 514. 
47 


p- 625. 


P. 123. 


iv PIRE HANCIE. 

M. de Romas, pour effayer de fe préferver des acci- 
dens qui peuvent accompagner les expériences dans 
lefquelles on tire l'Electricité des nuées orageufes : il 
en fait remarquer tout le danger , & fon récit eft bien 
propre à engager les Phyficiens à ne les tenter qu'avec 
la plus prudente circonfpeétion. I propofe enfuite des 
moyens de fe mettre en pareil cas à l'abri du danger , 
& donne la defcription d’une machine très - fimple 
qu'il a imaginée pour cet effet. C’eft rendre un grand 
fervice à la Phyfique que de mettre les Phyficiens 
à portée de tenter, fans rifque , les expériences qui 
doivent en accélérer le progrès. 


Le feptième & dernier Mémoire de Phyfique & 
d'Hiftoire Naturelle, eft la defcription d’un nouveau 
genre de Crabes de mer, qui ont des pattes fur le 
dos comme fous le ventre, par M. Vofmaer , Cor- 
refpondant de l’Académie. Cet appareil fingulier de 
pattes lui a paru deftiné à faire marcher l’animal indif- 
féremment fur le dos & fur le ventre;: on auroit ce- 
pendant befoin de plufeurs obfervations faites fur 
l'animal vivant pour en étre afluré : en attendant, on 

eut toûjours regarder l’idée de M. Vofmaer comme 
très-vrai - femblable , & fon obfervation comme une 
des plus fingulières qui ait été donnée depuis long-temps 
fur un femblable point d'Hiftoire Naturelle. 


Li partie ANATOMIQUE comprend fix Mémoires. 


Le premier contient la defcription d’un Fœtus 
humain monfirueux, envoyée par M. Marrigues, Chi- 
rurgien à Verfailles: on y verra, avec étonnement, 
le défordre fingulier de toutes les parties de ce petit 
fujet , & on ne pourra certainement s’empêcher d’être 


PRÉFACE. v 


furpris qu’il ait pu croître & fe conferver jufqu’au terme 
de l'accouchement avec une conformation fi fingulière 
& fi peu analogue à celle de tous les êtres vivans de 
fon efpèce. 


Le fecond, de M. Lafoffe, Maréchal de la grande 

Ecurie du Roi, a pour objet une maladie du cheval, 
attribuée jufqu'ici , mal à propos, à la morfure de la 
Mufaraigne. M. Lafoffe fat voir d’abord que la mufa- 
raigne ne peut être caufe des maladies des chevaux, 
qu'on attribuoit à fa morfure , parce qu'elle ne peut 
abfolument entamer la peau du cheval : il afigne de 
plus les véritables caufes de ces maladies, & rapporte 
le traitement qu'il a employé pour les guérir. Cette 
obfervation a paru d'autant plus intéreffante , que le 
préjugé qu'elle combat avoit été adopté par les plus 
célèbres auteurs d'Hippiatrique , & que c’eft rendre un 
fervice eflentiel au Public que de l’en défabufer. 


Le troifième a pour objet la chûte & la reproduc- 
tion du bois des Cerfs: M. le comte de Williamfon, 
Chambellan de Sa Majefté le Roi de Pologne, Duc 
de Lorraine, qui en cit l’auteur , a fi bien épié la 
Nature, qu'il la furprife, pour ainfi dire, au moment 
de cette opération fingulière. Ses obfervations & les 
recherches Anatomiques qu'il a faites à ce fujet, l'ont 
mis à portée de donner une caufe très-vrai-femblable , 
non feulement de la chûte & de la reproduction du 
bois de cet animal, mais encore de plufieurs autres 
fingularités qu'offre fon Hifloire. Il eft très-ordinaire 
en Phyfique qu’un phénomène bien expliqué conduife 
à l'explication de plufeurs autres. 


P: 


190% 


LE 


US 


Le füjet du quatrième , eft la maladie fingulière p. 458. 


a iy 


* Voy. Hifl, de 
l'Acad 175 7, 
114; Üles 
Men, p.541 


p. 580. 


vj PRÉFACE. 


d’un enfant qui fut amené à Paris en 1756, & dont 
la tête étoit tranfparente : cette maladie étoit une vé- 
ritable hydrocéphale ou hydropifie de cerveau. Cet 
enfant étant retourné à Birambis, dans lg paroiffe de 
Begle près Bordeaux, y mourut, & M. Marcorelle, 
Correfpondant de l’Académie, ayant affifté à l’ouver- 
ture de la tête, en envoya tout le détail à l’Académie, 
avec les obfervations qu’il avoit faites à Narbonne 
peu de temps auparavant fur l'enfant vivant, & le 
crane même de l'enfant, dont il fit préfent à ’Aca- 
démie, & qu’elle garde avec foin dans fon Cabinet. 
On avoit bien vu jufqu'a préfent des exemples de 
cette maladie, mais on n’en avoit aucun dans lequel 
elle eût produit des effets auffi finguliers que ceux que 
contient la Defcription de M. Marcorelle. 


Le cinquième eft de M. Bordenave, Chirurgien 
de Paris: il y décrit un Fœtus humain de fept mois, 
dont les os avoient une molleffe contre nature. La 
defcription de M. Bordenave, faite avec une très- 
grande exactitude , a paru donner à ce fœtus un ca- 
ractère de reflemblance avec la nommée Supiot, de 
l'état de laquelle l'Académie a publié le détail en 
1753 *; mais il y avoit cette dilérence effentielle , 
que la nommée Supiot n’avoit eu les os ramolis que 
par une maladie, & que la mère du fœtus en queftion 
étoit très-faine. 


Le fixième & dernier Mémoire anatomique a pour 
but de prouver, contre l'opinion de M. Häller , que 
plufieurs parties du corps animal, que ce célèbre 
Anatomifte regarde comme infenfibles, font au con- 
traire douées d'une fenfbilité très-exquife. M. Gerard 


PRÉFACE. vij 


de Villars fils, emploie, pour prouver fon fentiment, 
les mêmes expériences qu'avoit tentées M. Haller & 
des animaux fémblables à ceux qui en avoient été le 
fujet. I réfuite des Expériences de M. Gerard de 
Villars, que ces parties étant irritées par les piqûres, 
les coupures, l’action des acides, &c. ont toujours 
donné, par les mouvemens & les cris des animaux , 
des marques de la fenfibilité la plus complète, fr ce- 
pendant on en excepte la peau, qui, dans bien des 
cas , n’en a donné aucun figne. Une oppofition fi 
marquée au fentiment adopté par M. Haller, mérite 
bien qu’on faffe les plus grands efforts pour lever cette 
incertitude. Les plus grands progrès de la Phyfique 
font fouvent dûs à des difputes de cette efpèce. 


Sous la CHIMIE font rangés fix Mémoires. 


Dans le premier, M. l'abbé Mazéas, Doéteur en 
Théologie de la Faculté de Paris, de la Maifon de 
Navarre, Membre de la Société royale de Londres, 
& Correfpondant de l’Académie , recherche-la caufe 
Phyfque de l’adhérence de la couleur rouge , tant 
aux toiles peintes qu'aux écheveaux de coton qu’on 
apporte des côtes de Malabar & de Coromandel. 
Les expériences faites ici:avec les mêmes drogues & 
par les mêmes procédés qu'on emploie aux Indes, 
ont bien donné dés couleurs auffi belles ; mais pas, à 
beaucoup près, la même folidité: M. l'abbé Mazéas 


en a cru trouver laraifon dans la qualité des eaux qu’il 


a foupçonnées de tenir de la chaux ou de la félénite 
en diflolution; & effectivement , ayant fait diffoudre 
de ces matières dans l’eau qu'il a employée, il a eu 
une teinture de la plus grande folidité : à l'égard des 


Page 1. 


pp. 470 & 
490: 


vii) PRÉFACE. 

écheveaux de coton, ila trouvé que la préparation avec 
le fain-doux ou les autres graiffes animales fubflituées 
aux huiles végétales , afluroit très-bien la couleur, mais 
qu'elle n’étoit pas auffi belle que celle d’Andrinople ; 
nouveau fujet de recherches. Toujours eft-il vrai que 
M. l'abbé Mazéas a tranfporté chez nous un Art dont 
on croyoit la pratique impoffible ailleurs qu'aux Indes, 
& que nous pouvons d'autant mieux exercer que nous 
poflédons prefque toutes les matières premières qu'on 
y emploie. 


Un événement fingulier a donné lieu aux fecond 
& troifième Mémoires: M. d’Aboville, Ingénieur du 
Roi, fit remettre à |’ Académie un Mémoire fur une 
Eau minérale, découverte à Douai depuis quelques 
années. Le hafard avoit fait découvrir cette éau & le 
baflin qui la contenoit, au fond de la cave d’une 
maifon fituée au plus haut de la ville; on voyoit bien 
qu'on n’avoit épargné ni foin ni dépenfe pour cet 
ouvrage , mais il n’exiftoit aucune tradition qui pût en 
apprendre le temps; niles ufages de cette eau. Sur les 
éclairciffemens que l’Académie demanda, M. Baumé, 
Apothicaire de Paris, & connu pour fæ capacité en 
Chimie, fe procura une quantité de cette eau fuff- 
fante pour pouvoir la foumettre 2 al ‘analyfe chimique : 
il réfulte de cette analyfe, 1.” que l’eau de Douai eft 
favonneufe, puifqu’elle contient del’huile & de l’alkali 
fixe; 2.° que non feulement elle contient l’alkali qui 
fert de bafe au fel marin, mais encore un alkali fixe, 
tel que le fourniffent les végétaux, puifqu’avec le pre- 
mier de ces deux fels , l'acide vitriolique a formé du 
fel de Glauber, & avec le fecond du tartre vitriolé : 
3.° qu’elle contient du fel marin en fubftance ; 4.° enfin 

qu'elle 


PRÉFACE. ix 


qu’elle donne aufli de la terre en affez petite quantité 
& du fer attirable par f'aiman, & ce qui eft de plus 
remarquable, c’eft que ce fer y eft tenu en difiolution, 
non par un acide comme à l'ordinaire, mais par un 
alkali fixe. C eft à l'expérience à a prononcer fur les 
avantages qu'on peut tirer de cette eau minérale, foit 
pour la Médecine, foit pour les Arts; l'analyfe qui 
en a été faite eft fufhfante pour mettre à portée de 
l’effayer avec prudence. 


Le fujet du quatrième Mémoire, eft la Terre foliée 
du Tartre: cette efpèce de fel neutre a, comme on 
fait, l’alkali du tartre pour bafe, & pour agide celui 
du vin contenu dans le vinaigre, mais on ir peu 
d’ufage en Médecine, tant parce qu'on n'eft pas afluré 
de fes effets, que parce qu'il eft toujours d” une cou- 
leur qui le rend défagréable ; ce n’eft pas qu ‘on ne 

üt lui conferver fa blncheur, mais c’étoit en le dé- 

ouillant de fon huile, qui en fait une partie effentielle ; 
auffi M. Pott condamnoit-il beaucoup cette opération. 
M. Cadet, Apothicaire-major des Invalides , a trouvé 
qu’en évaporant très-doucement, & même pour la plus 
grande partie, au bain-marie , le mélange de la diffolu- 
tion de tartre & de vinaigre diftillé, on obtient la terre 
foliée très-blinche, fans lui rien ÉSe perdre de fon 
onctuofité, fans mauvais goût, &, ce qui eft encore bien 
plus effentiel, que les effets du remède ainfi préparé, 
font fürs & conftans. Ce n'eft pas la première fois 
qu'une manipulation mal conduite a rendu les meilleurs 
remèdes inutiles ou défagréables. 


Les deux derniers Mémoires de la partie Chimique 


p. 518. 


PP. 553 & 


ont pour objet les bulles ou foufflures qu’on ne ren- 5°? 


Jar. étrang. Tome IV. 


x PRÉFACE. 


contre que trop fouvent dans le verre & dans les 
métaux coulés : M. d’Antic, Correfpondant de l’Aca- 
démie, qui en eft l’auteur, & qui a été long-temps 
à portée de faire des expériences à la Manufature 
de Saint-Gobin, fait voir dans le premier, qui regarde 
les foufflures du verre, que c’eft une erreur que de 
les attribuer à l'air, qui ne pourroit jamais exifter dans 
une matière auffi violemment chauffée que le verre, 
mais qu’elles font dûes à un mélange de fels, qui fe 
trouve dans le verre, fur-tout à la furface des pots, 
& qu’on nomme /é/ ou fiel de verre ; & effectivement, 
en dépouillant le verre de ce fel, foit par une plus 
forte fufi@h , foit en l’éteignant tout rouge dans de l’eau 
froide le faifant enfuite refondre, il a obtenu du 
verre fans fouffure; & pour s’aflurer encore plus que 
fa conjeéture étoit véritable, il a rendu les foufflures 
au verre, en introduifant dans la fonte ce même fel 
qu'il en avoit té. 

La même théorie l’a conduit à la caufe des foufflures 
des métaux : l'air n’y a pas plus de part qu'à celles 
du verre, & elles ne font dûes, felon M. d’Antic, 
qu'aux particules expanfbles que la chaleur du métal 
fait échapper des moules & des noyaux, quelque fecs 
qu'ils paroiflent; auffi a-t-il obtenu du cuivre fans 
fouflures , en le laiffant refroidir dans le fourneau même 
où il avoit été fondu. Il appuie ce fentiment de plu- 
fieurs expériences , & finit par propofer les vües aux- 
quelles elles l’ont conduit fur la fonte des canons: 
on ne peut que fouhaitter que M. d’Antic continue 
de s'appliquer à un objet fi intéreffant & fi digne de 
fes recherches. 


A la BOTANIQUE appartiennent deux Mémoires. 


PRÉFACE. xj 


Dans le premier, M. Aymen, Correfpondant de 3. 58. 

l’Académie, rapporte les expériences qu'il a faites fur 

la maladie des grains, qu'on nomme le charbon: ce 
Mémoire eft comme une fuite de celui qu'il avoit 

donné précédemment fur la Nielle, & que 1’ Académie 

a fait imprimer dans le Volume précédent *. Il fait Voyre Sam 
voir dans celui-ci que les meurtriflures du grain, le PE + ri 
germe même percé ou entamé , ne contribuent en 

rien à produire du blé charbonné , mais qu'on peut 
regarder comme certain que les terres qu'on enfe- 

mence pendant l'année du repos avec du maïs ou des 
légumes , produifent beaucoup de blé noir ; que la 
pouffère du blé charbonné , même celle de la vefle- 
de-loup, paroit être contagieufe & contribuer à faire 
produire du blé noir à la meilleure femence ; que les 

terres femées plus tard que les autres, produifent aufli 

plus de blé charbonné ; que les pluies qui arrivent 

dans le temps des femailles, contribuent auffi au même 

effet; que les grains qui ont été recueillis avant leur 
parfaite maturité, font auf très-fujets à donner du blé 

noir lorfqu'on les emploie en femence, & qu’enfin 

Î on coupe des tuyaux de feigle ou de froment avant 

la fleur, il en repoufle d’autres dont le grain eft char- 
bonné, pour la plus grande partie, fi c’eft du froment, 

ou ergoté fi c’eft du feigle. Ce Mémoire eft terminé 

par une efpèce de. fuite du premier Mémoire dont 

nous avons parlé: elle contient une énumération des 
différentes caufes qui peuvent occafonner la nielle 

& les précautions qu’on doit prendre pour fe préferver 

de cette contagion. 


Le fecond contient quelques nouvelles Expériences p. 617. 
de M. Bonnet, Correfpondant de l’Académie, relo.- 
by 


Po 33° 


xij PRÉFACE. 


tives à celles qui forment fon Ouvrage fur l’ufage des 
feuilles dans les plantes. Il y fait voir, 1.” que dans 
les plantes d’eau comme dans celles de terre, il y a 
une furface de la feuille qui, étant appliquée fur l’eau, 
en tire affez pour entretenir long-temps la fraîcheur 
de la feuille féparée de la plante , tandis que l’autre 
furface , mife dans la même pofition , n’en tire pas 
aflez pour la conferver un jour; 2.° que les tuyaux 
du blé ne fortent pas feulement pendant l’hiver de 
certains nœuds qu'il avoit indiqués , mais encore de 
la tige qui a pouffé la première; 3.° qu'il eft faux que 
le blé puifle jamais dégénérer en yvroie, & que les 
hivers rudes font périr beaucoup de cette dernière 
plante; 4.° que les plantes élevées à lobfcurité & 
qui avoient pris une couleur blanchitre, reprennent, 
quoique féparées même de leurs racines, une couleur 
verte, dès qu’en les entretenant fraîches par le moyen 
de l’eau dans laquelle on les fait tremper, on les ex- 
pofe à la lumière & qu'eiles ne reprennent point cette 
couleur dans la même température d’air fr elles n’y 
font expofées , preuve évidente que la lumière agit 
fur elles comme lumière & non comme chaleur ; 
5 enfin, que malgré l’entrelaffement des fibres du 
bourlet dans les greties, la sève du fujet y pañle fans 
trop fe décompofer, ce dont M. Bonnet s'eft affuré, 
en faifänt pomper de l'encre au fujet d’une grefle & 
en remarquant qu'elle fortoit de la branche gretiée fans 
avoir prefque rien perdu de fa noirceur. Ce Mémoire 
eftune efpèce de fupplément à l’Ouvrage de M. Bonnet 
que nous venons de citer. 


Trois Mémoires appartiennent à la GÉOMÉTRIE. 
Le premier, dont l'auteur eft M. de la Bottiere, 


PRÉFACE. xiij 


contient une méthode, par le fecours de laquelle on 
peut réfoudre plufieurs Problèmes indéterminés. La 
partie la plus effentielle de ce Mémoire, eff la folution 
-d’un problème d’Arithmétique, tentée par plufieurs 
Géomètres, dont aucun, fi on en excepte M. Euler, 
n’en avoit donné une fatisfaifante: M. de la Bottiere 
a paru renchérir encore fur cette dernière folution, 
il donne même à fa méthode un degré de perfection 
qu'aucun autre n’avoit, celui de-connoître dès le com- 
mencement, les cas où cette folution eft impoñlible, 
ce que les autres ne font connoitre qu’à la fin du calcul 
& lorfqu’on a inutilement perdu beaucoup de temps 
& dé peine. La folution de M. de la Bottière a paru 
exacte , générale , facile & mériter l'attention des 
Géomètres. 


Dans le fecond , M. Rallier des Ourmes, Confeiller 
d'honneur au Préfidial de Rennes, traite des Quarrés 
magiques. Les quarrés dans lefquels la fomme de tous 
les nombres qui compofent chaque bande prife ho- 
rizontalement ou verticalement , eft toüjours la même 
& égale à celle des nombres qui compofent les diago- 
nales, ont fait depuis long-temps le fujet des recherches 
de plufieurs favans Mathématiciens: M. Rallier des 
Ourmes a enchéri fur tout ce qu'on avoit fait avant 
Jui fur cette matière: les règles qu'ilpropofe dans cet 
Ouvrage pour la confiruétion des quarrés pairement 
pairs, pairement inpairs & par enceinte, ont paru 
fimples & clairement démontrées, & laifler peu de 
chofe à defirer fur ce fujet. 


Le troifième a pour objet la Cubature des corps 
gauches de ces folides, qui, au lieu d’être renfermés 
bi 


p. 196. 


p+ 623. 


ph 
182, 313» 
S12, 541 
551» 562) 
567 » 612, 
614 & 621. 


p.281. 


xiv PRÉFACE. 

par des furfaces planes , ont une ou plufeurs de leurs 
furfaces courbes, & fouvent de plus d’un fens & de 
la manière la plus irrégulière. M. Mauduit, Auteur 
de cet Ouvrage, a trouvé moyen d’aflujétir au calcul 
infinitéfimal ces corps en apparence fr rébelles ; & 
malgré le grand nombre de termes-que contient l’ex- 
preflion différencielle à laquelle il parvient , il trouve 
cependant le moyen d'en déduire une règle de pratique 
aflez fimple, & qui le devient encore plus en f’appli- 
quant à chaque cas particulier ; avantage d'autant plus 
grand , que le calcul de ces corps gauches eft le cas 
le plus ordinaire des excavations ou de la confiruétion 
des terraffes qu'on peut avoir à mefurer, la Nature 
ne fe piquant pas ordinairement de nous épargner le 
calcul. L'auteur à joint à cet Ouvrage l’examen des 
courbes qu'on peut tracer fur ces furfaces gauches, 
lorfqué la bafe a deux de fes côtés parallèles : on voit 
bien que ces courbes feront à doubles courbures & 
que leur équation aura trois variables. Malgré toutes 
ces difficultés, M. Mauduit a trouvé une manière de 
foumettre ces courbes à un calcul auf fimple que la 
matière pouvoit le permettre, & cet Ouvrage a paru 
devoir être très -utile dans la pratique. 


La partie ASTRONOMIQUE eft compofée de 
quatre Mémoires, plufieurs Obfervations d'Éclipfes 
de Lune & de Soleil, d’Etoiles & de Planètes par la 
Lune , d'Oppofitions de Planètes, de hauteurs du 
Pole , de Comètes, & quelques Obfervations météo- 
rologiques , faites par M.° Ceifius, Jeaurat, Bouin, 
Dulague , l'abbé Outhier & Garipuy. 


Le, premier contient quelques Obfervations 


PRÉFACE. XV 


d’éclipfes des fatellites de Jupiter, & de deux Éclipfes 
de Lune, faites à Lifbonne par le P. Chevalier, Prêtre 
de l'Oratoire & Correfpondant de l’Académie ; la 
dernière eft même accompagnée d’une circonftance 
très-fingulière. Le P. Chevalier a cru s’apercevoir 
que l’immerfion des taches dans l’ombre fe faifoit 
quelques fecondes plus tôt lorfqu’il interpofoit un verre 
bleu entre fon œil & la lunette, que lorfqu'il obfervoit 
fans faire ufige de ce verre, mais ces différences font 
fi petites ; qu'on peut raifonnablement les attribuer 
plutôt à l’efpèce d’obfcurciffement que caufe un verre 
coloré quelconque qu'à telle ou telle couleur, & 
peut-être à bien d’autres caufes, qui produifent fou- 
vent dans les obfervations des différences bien plus 
confidérables. 


Le fecond eft de M. Jeaurat, Profeffeur à l'École 
royale Militaire: il y traite du calcul des Éclipfes de 
Soleil. On fait que ces fortes ‘d'Éclipfes fe calculent 
ou en réduifant pour un lieu & pour un temps donné 
l'orbite vraie de la Lune à l'orbite apparente, par le 
moyen de la parallaxe, ou en employant la méthode 
bien plus élégante, de fuppofer l'œil du fpeétateur 
très-éloigné & regardant le difque de la Lune pañfer 
fur la projection régulière du Globe terrefire. On a 
par ce moyen, en calculant les différentes parties de 
cette projection , non feulementles phafes de l'éclipfe 
pour un lieu donné, mais encore ce qu'elle doit être 
dans tout l’hémifphère éclairé : c’eft cette dernière 
méthode qu’adopte M. Jeaurat ; mais au lieu d’em- 
ployer pour le calcul les parties du globe, défigurées 
par la projection, il calcule la pofition des licux par la 
Trigonométrie fphérique , & les projète enfuite fur 
le plan, aufli-bien que les longitudes & les latitudes 


p. 316. 


2399: 


xv) PRÉFACE, 


de la Lune. Cette méthode a paru très -exacte, & 
quoiqu'il n'y ait que peu à gagner fur la longueur du 
calcul, c’eft toujours un moyen de plus pour arriver au 
même but; il ne fauroit y en avoir trop en Aftronomie. 


Le troifième, eft la Relation d’un voyage fait par 
M. d’Après de Mannevillette, Capitaine des vaiffeaux 
de la Compagnie des Indes & Correfpondant de 
JAcadémie , pour déterminer la pofition géographique 
des Iles de France &.de Bourbon, & pour fare des 
expériences fur la manière de déterminer les longitudes 
en mer. L’incertitude de la pofition & du gifement 
de la côte orientale d'Afrique, à laquelle les vaiffeaux 
des Indes font quelquefois obligés de relâcher, le 
naufrage même du vaiffeau le Centaure , arrivé en 1750, 
furent les motifs qui déterminèrent la Compagnie des 
Indes à charger M. d’Après de déterminer tous ces 
points avec une précifion fufhfante. On verra dans fa 
Relation le détail de toutes fes recherches, la defcrip- 
tion des Infrumens dont il s’efl fervi & les méthodes 
qu'il a employées pour en reconnoitre les erreurs: on 
y reconnoîtra auffi l'avantage immenfe des obfervations 
de la diftance de la Lune aux Étoiles, pour fixer la 
longitude du vaiffeau. Cette méthode, de laquelle M. 
d'Après n’avoit pu tirer, dans fon précédent voyage, 
toute l'utilité dont elle eft fufceptible , à caufe du peu 
de perfection de fes Inflrumens, a prefque par- tout 
redreffé l’eftime dans celui-ci, & a fait connoître des 
erreurs monflrueufes & quiauroient pu devenir funeftes. 
M. d’Après a déterminé la pofition du cap de Bonne- 
efpérance & des Ifles de France & de Bourbon; & 
on doit en être d’autant plus für, que M. l'abbé de 
la Caille, qui a depuis fait les mêmes déterminations, 

s’eft 


PRÉFACE. xvi 


s’eft trouvé prefque par-tout entièrement d’accord 
avec lui. Il a relevé, avec le plus grand foin, toutes 
les côtes orientales d'Afrique qui fe trouvent aux 
environs du canal de Mozambique. Enfin on peut 
dire qu'il n’a rien négligé pour bien remplir l'objet 
important dont il étoit chargé & pour procurer à cet 
égard toute la füreté poflible aux vaiffeaux qui vont aux 


Indes ou qui en reviennent. 


Le quatrième, du même M. Jeaurat , duquel nous 
avons déjà parlé, ‘contient une folution du fameux 
Problème de Képler : ce grand Aftronome eft, comme 
on fait, le premier qui ait afligné aux orbites des Pla- 
nètes la figure elliptique & qui ait avancé que leurs 
rayons vecteurs décrivoient autour du Soleil, placé 
à un des foyers , des aires égales en temps égaux: c’eft 
la mefure de ces aires qui doit par conféquent déter- 
miner le mouvement de la planète, & c’eft à l’obte- 
nir qu’eft employé le problème qui porte le nom de 
Képler. Plufieurs favans Géomètres en ont donné des 
folutions ; celle qu'a donnée M. Jeaurat eft extrème- 
ment exacte , il a pouflé la précifion jufqu'a faire 
entrer dans les coëfficiens des termes jufqu’aux fix 
premières puiflances de l’excentricité. Sa formuie pour 
trouver l’anomälie vraie , eft compofée de fept termes, 
mais une partie de cestermes peut fe négliger lorfque 
l'orbite n’eft que peu excentrique, & on voit au coup 
d'œil ce que la fouftraétion de chacun de ces termes 
peut faire perdre de précifion. Ce Mémoire fera le 
dernier de M. Jeaurat qu’on trouvera dans ce Recueil ; 
l’Académie qui l'a admis au nombre de fes Membres, 
fera déformais paroître fes Ouvrages dans fes propres 
Mémoires. 


Jay. érrang. Tome IV. «€ 


PISE 


p. 285- 


* Voyez Sa, 
étrag, Tome 11, 
dr 26 


PA49 9 


* Voyez Sar, 
érrang, Tome III, 
Pr S14 


xvi] PRÉFACE. 
Les deux Mémoires qui concernent l'OPTIQUE 


font tous deux de M. du Tour, Correfpondant de 
l’Académie. 


Le premier contient des Recherches fur le phéno- 
mène des anneaux colorés qui fe forment entre deux 
verres plans appliqués l’un fur l’autre. M. l’abbé Mazéas 
avoit déja traité cette matière dans un Mémoire pré- 
fenté à l’Académie, & qu'elle a publié dans le fecond 
Volume de ce Recueil * : il avoit remarqué dans ce 
Mémoire que la preffion feule de deux verres plans 
Fun fur l'autre, n’étoit pas fufhfante pour leur faire 
produire des anneaux colorés, mais qu’il falloit pour 
ÿ parvenir employer le frottement. M. du Tour prouve 
que la caufe de ce phénomène ef Fair qui refte entre 
deux lorfqu’on ne fait que les preffer, & qu'on en 
chafle par le frottement ; il fait voir même qu’en 
appliquant fur les verres un léger enduit gras, de l’eau 
même, qu'on efluie , on peut, en appliquant les 
verres l’un fur l’autre, leur faire produire les anneaux 
colorés par la fimple preflion. Quoique les expériences 
de M. du Tour ne donnent pas abfolument la caufe 
de ce phénomène, elles jettent un très-grand jour fur 
cette matière & femblent indiquer que la formation 
de ces anneaux dépend d’un autre fluide qui prend 
la place de l'air. H propofe à la fin de fon Mémoire 
quelques vûes pour pénétrer plus avant dans fes Re- 
cherches, mais ce doit être la matière d’un autre 


Ouvrage. 


Dans le fecond, M. du Tour donne une addition 
au Mémoire intitulé Difcufion d'une queflion d'Oprique, 
imprimé dans le précédent volume de ce Recueil * ; 


PRÉFACE. xix 
il yavoit fait voir que lorfqu'on fait attention à d'image 
d’un objet formé dans l’un des deux yeux, celle qui 
eft formée au fond de l’autre œil n’eft nullement fen- 
fible. Celui-ci contient de nouvelles preuves de cette 
affertion , qu'il tire d’une feuille de papier regardée 
en même temps par les deux yeux, armés l’un d'un 
verre jaune & l'autre d'un verre bleu: fi les deux 
images étoient à la fois fenfibles , la feuille de papier 
devroit, par le mélange des deux couleurs, paroitre- 
verte : elle paroît cependant alternativement bleue & 
jaune ; preuve évidente qu'il n’y a qu'un des deux yeux 
qui voie à la fois & qui femble indiquer que lorfqu'on 
regarde avec les deux yeux un objet un peu grand , 
h vifion diftine eft prefque toûjours l'effet des images 
des parties de cet objet, vues les unes par un œil & 
les autres par l’autre. Il tire de là l'explication de plu- 
fieurs faits finguliers , & penfe même que cette difpo- 
fition de l'organe a été ainfi établie, afin que les deux 
yeux ne fe fatigaflent pas à la fois & puffent fe repofer 
alternativement fans nuire à la continuité de la vifion. 
Cette Addition a paru contenir un fupplément de 
preuves qui fortifient beaucoup celles dont M. du Tour 
avoit appuyé le fentiment qu'il foutient dans fon pre- 
mier Mémoire. 


Un feul Mémoire appartient à la DYNAMIQUE. 


M. Chabanon de Maugris y donne la folution d’un 
problème de Dynamique, qui confifte à trouver la 
viteffe d’une verge inflexible fans pefanteur, gliflant 
entre deux plans inclinés à l'horizon, & faifant un 
angle quelconque & mûe par l’action d’un poids fixé 
à cette verge, le tout ayant égard au frottement, La 


cÿ 


p- 646. 


. 66. 


xx PRÉFACE. 


difficulté de ce problème eft la perturbation, s’il m’eft 
permis d’ufer de ce terme, que le mouvement du 
corps, déjà compofé de la pefanteur & de fa première 
direction, éprouve de la part des plans entre lefquels 
il fe meut, il en réfulte à chaque inflant une deftruc- 
tion de forces & un changement continuel de direc- 
tion , qu'il faut examiner pour déterminer la route réelle 
du corps en mouvement. Pour y parvenir, M. Cha- 
banon fait ufage du principe de Dynamique de M. 
d’Alembert: il auroit pu employer aufli celui de la 
confervation des forces vives, mais ce dernier principe, 
très-aifément applicable lorfqu'on regarde*les plans 
comme infiniment polis & fans frottement, ne s’ap- 
plique plus de même dès qu'on en fuppofe. Il parvient 
à une équation intégrable ou conftruétible par le moyen 
des quadratures ; & non content de donner la folution 
du problème dans le cas propofé, il le charge encore 
de nouvelles conditions auxquelles fa folution, qu’on 
peut regarder comme très-ingénieufe, fufht également. 


La MÉCANIQUE a fourni trois Mémoires. 


L'auteur du premier eft le même P. d’Incarville, 
Jéfuite, Miffionnaire à la Chine, duquel nous avons 
annoncé la mort au Public dans le Volume précédent, 
à l’occafion d’un Mémoire fur la manière dont fe fait 
le vernis de la Chine: dans celui-ci, qui n’eft parvenu 
à l’Académie qu'après fa mort, il donne la manière 
de faire les fleurs dans les feux d’artitice des Chinois. 
On fait que cette induftrieufe Nation s’eft extrémement 
appliquée à cet objet & y a très-bien réufr , mais on 
ignoroit la méthode qu’ils emploient pour produire ces 
fleurs & ces fruits de feu, defquels on a depuis fi 


PRÉFAC'E. xx) 


long-temps entendu parler. Le P. d’Incarville donne 
tout ce détail, & fait voir que la matière de ces fleurs 
eft la fonte de fer réduite en poudre plus ou moins 
fine: la figure des fleurs dépend abfolument de ce 
degré de finefle, & leur couleur des différentes ma- 
tières qu'on y Joint; mais un point extrêmement 
important, c’eft la figure du cartouche & le diamètre 
de fon ouverture. Il faut que la poudre de fer qu'il 
contient en forte, & qu’elle en forte fondue & allumée : 
fi l'ouverture eft trop grande, relativement à la force 
de la compolition , la fonte de fer ne fera ni fondue 
ni allumée quand elle fortira , & on n’obtiendra point 
de fleurs fi elle eft trop petite, la compofition ne fortira 
qu’en partie & un grand nombre de fleurs fe confu- 
meront dans le cartouche & en pure perte. Le P. 
d’Incarville donne toutes ces proportions avec la plus 
grande exaétitude : il enfeigne de même comment 
avec du foufre en poudre & mêlé avec divers ingré- 
diens, ils enduifent des fils de fer, des figures même 
en relief, faites de tiges de gros mil & de bambou, 
qui leur fervent d’ofier , & recouvertes de papier; ces 
figures une fois allumées , repréfentent des fruits, des 
animaux & tout cé qu'on veut leur faire repréfenter 
en les formant. Ce Mémoire a paru propre à augmenter 
la perfeétion d'un Art, qui, s'il n’eft pas au rang des 
Arts directementutiles, peut contribuer à l'amufement 
dés particuliers & à l’ornement & la magnificence des 
fêtes publiques. " 


Dans le fecond, M. Necker, Citoyen de Genève 
& Correfpondant de l'Académie ;: donne la folution 
de quelques problèmes de Mécanique : le premier 
confifte a trouver la tautochrone, c’eft-à-dire; la courbe 

c 


P- 


95- 


pP: 351- 


xXxij PRIE PA A CAE: 

dont des arcs égaux font parcourus par un corps pefant 
en temps égaux, En fuppofant que le mouvement fe fafle 
dans le vuide, & ayant égard au frottement qu'il fup- 
pofe en raifon donnée de la preflion, & il trouve que 
cette courbe eft une cycloide, foit qu’on fafle def- 
cendre le corps felon cette courbe, foit qu'on l'y faffe 
remonter. 

Le problème devient bien plus difficile fi on fuppofe 
que le corps, au lieu de fe mouvoir dans le vuide, 
fe meuve dans un milieu réfiftant comme le quarré 
de fà vitefle; M. Necker l'attaque cependant fous 
cette forme, & le réfout au moyen d’une équation qui 
fe peut conftruire , en intégrant une fraétion rationnelle. 
La folution même a lieu, en fuppofant que le milieu 
réfifte comme une fonétion quelconque de la viteffe, 
pourvu que l’intenfité de la réfiflance foit très-petite, 
& la courbe cherchée eft en ce cas très-peu difiérente 
de la cycloide. 

M. Necker recherche enfuite la ligne fur laquelle 
un corps pefant fe mouveroit uniformément dans f’hy- 
pothèfe du vuide & du frottement, en fuppofant qu'il 
commençät à fe mouvoir avec une viteffe donnée , & 
il trouve que cette ligne eft une droite inclinée à l'hori- 
zon , fuivant un angle qu’il détermine. Enfin, le tout 
eft terminé par une fcholie affez étendue, dans laquelle 
il fait voir que les connoïflances phyfiques que nous 
avons fur les loix du frottement, font encore très- 
imparfaites. 


Letroifième& dernier Mémoire eft-de M. Brodier; 
il contient la defcription d'une chaife roulante de fon 
invention, avec laquelle on peut fe promener foi-même 
& aller fur les chemins : l’Auteur, qu’une infrrmité 


PRUÉ EjA ONE. XXii) 


avoit privé d’aflez bonne heure de l’ufage de fes 
jambes, a occupé le loifir forcé de fa fituation à 
l'étude des Mathématiques, qui lui ont rendu, pour 
ainfi dire , le mouvement progreflif dont il étoit 
privé. Comme fa fanté étoit très-bonne d’ailleurs & 
fes bras très-vigoureux, il a conçu le deflein d’une 
chaife qu’il pourroit faire mouvoir avec des manivelles ; 
il a calculé la force qu'il y pourroit employer , ce que 
les différens frottemens en pouvoient faire perdre , 
ha réfiflance que la voiture, chargée de fon poids, 
éprouveroit dans les chemins unis , montans ou 
defcendans , & il a trouvé qu’il lui reftoit encore fuffi- 
famment de forces. Il a donc fait exécuter fa voiture 
avec la plus grande attention : il a fait la plus grande 
partie des mouvemens lui-même, & n’a rien négligé 
pour y introduire tous les avantages dont une exécu- 
tion parfaite pouvoit la rendre fufceptible ; auffi n’a-t-il 
rien eu à rabattre de fon calcul, fa machine fupplée 
parfaitement à l'organe qu'il avoit perdu & lui rend 
une grande partie des avantages dont il fembloit devoir 
être privé pour jamais ; exemple bien propre à faire 
voir quelles reffources l’étude des Mathématiques & 
de la Phyfique peut procurer à ceux qui s’y appliquent, 
& combien ces Sciences font dignes de lattention 
& du travail de ceux qui ont reçu de l’Auteur de la 
Nature un génie propre à y pénétrer. 


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. MÉMOIRES 
D E 
MATHÉMATIQUE 
DE PHYSIQUE, 


Préfentés à l'Académie Royale des Sciences 
par divers Savans, & lûs dans fes Affemblées. 


| É RIEICUAUER CU TIE,S 


Sur la caufe phyfique de l'adhérence de la couleur 
rouge aux Toiles peintes qui nous viennent des côtes 
de Malabar è7 de Coromandel. 


Par M. l'Abbé MAZÉAS, Correfpondant de l'Académie. 


E problème que les Indiens nous propofent, eft devenu 

célèbre par le grand nombre de tentatives que l’on a 

faites pour le réfoudre. Ce problème confifte à donner au 
Sav. étrang, Tome 14’. » À 


2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 

coton un rouge capable de réfifter aux épreuves les plus fortes, 
fans néanmoins employer d'autre mordant qu'une fimple dif. 
folution d’alun. Le peu de fuccès de ceux qui ont travaillé 
fur cette matière d'après des Mémoires faits par des Obfer- 
vateurs exacts, le partage d'opinions dans les Obfervateurs eux- 
mêmes fur la véritable caufe du phénomène que nous offrent 
les toiles des Indes, le doute où nous fommes encore à cet 
égard, tous ces motifs excitèrent ma curiofité, & me firent 
envifager la matière que je vais traiter comme un objet qui 
mérite autant d'intéreffer les Phyficiens, qu'elle peut répandre 
de lumières fur l'art de la teinture. x 


J'avois entre les mains la Defcription du P. Cœurdoux, 
les Oblervations de M. Poivre, & {a copie d’um manufcrit 
que feu M. du Fay avoit fait venir des indes. Le procédé 
contenu dans ces Mémoires me parut fort fimple, & je réfolus 
de l'éprouver; mais à peine avois-je commencé, que je vis 
naïtre des difficultés fans nombre: je compris alors combien 
il eft difficile de découvrir la Nature, d’après des obfervations, 
Jorfque les Obfervateurs eux-mêmes ignorent le principe d’où 
partent fes opérations, 


La méthode que j'ai fuivie, a été de comparer les effets 
qui ont réfulté de mes expériences à ceux qui ont été obfer- 
vés par les Auteurs qui me fervoient de guides; & lorfque 
jai vû la Nature fe préfenter fous mes yeux comme elle 
s'eft préfentée fous les leurs, j'ai tiré des induétions qui n'ont 
conduit à deux principes généraux, dont les conféquences 
peuvent influer fur l'art de a teinture. Sans décider fi ces 
principes font en effet ceux que la Nature obferve aux Indes, 
je me crois obligé de les foûmettre aux lumières de la 
Compagnie célèbre devant laquelle j'ai l'honneur de parler, 
puifque c'eft à fes travaux que les Arts font redevables de Ja 
perfection dont ils jouiffent & de la gloire qui en rejaillk 
für Ja Nation. | 


Die: sh Sc; x: EN) Gers: 3 


OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES, 


Abrégé de la méthode des Indiens. 
O N fait tremper la toile dans de l'eau où l'on a délayé 


des crottes de brebis, on l'y laiffe pendant un jour & une 
nuit, enfuite on la lave &.on l'expole au foleil pendant trois 
jours, en farrofant de temps en temps. La deuxième opéra- 
tion confifle à tremper la toile dans une infufion de cadoucaïe, 
qui eft un fruit analogue à la noix de gale, à bien battre 
cette toile & à l'imbiber de lait de vache ou de buffle. Selon 
le P. Cœurdoux, on préfère le lait de buffle, parce qu'il eft 
plus onétueux & qu'il produit pour les toiles le mème effet 
-que la colle pour le papier, c'eft-à-dire qu'il l'empêche de 
boire. On prépare enfuite la couleur rouge de la manière 
fuivante. 


On met dans une bouteille expofée au foleil deux onces 
d’alun fur deux pintes d’eau, & on y ajoûte quatre onces de 
bois de fapan réduit en poudre. Selon 1a remarque de M. 
Poivre, ce bois de fapan eft notre bois de Brefil, & cette re- 
marque eft confirmée par le Mémoire de M. du Fay. Au bout 
de trois jours, la couleur fe trouve en état d'être employée: on 
Tapplique fur la toile avec un pinceau; & quand la peinture 
eft sèche, on lave la toile & on la bat une feconde fois, 
enfuite on la trempe, dans une cuve de chayaver , que l'on 
fait bouillir pendant deux heures environ. Ce chayaver, felon 
le P. Cœurdoux, eft un gallium à fleurs bleues, felon M. 
Poivre, le gallium à fleurs blanches, & felon l'Auteur de 
mon manufcrit, une efpèce de garance. 


Ce qu'il y a d'important, felon le P. Cœurdoux, c'eft 
que pour difloudre falun on ne doit pas fe fervir de la pre- 
mière eau qui fe préfente; il faut prendre de l'eau äâpre, 
c'eft-à-dire, de l'eau de certains puits, à laquelle on trouve 
ce goût. C'eft une néceffité de s’en fervir, difent communé- 
ment les Indiens, parce qu'autrement le rouge ne tiendroit 
pas, &, fuivant d’autres, parce qu'il ne feroit x fi beau. 

1] 


Lettres édif. 
26. Recueil, 
pages 198 Ÿ 
199: 


* Remarques 
fur la Letrre de 
M. Poivre. Lett, 
édif. 27.° rec, 
P: 442: 

b Lettre de 
M. Poivre au P. 
Caœurdoux. Lett. 
édif. 27.° rec. 
P:421. 


MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
M. Poivre aflure que l'on donne encore plus d'éclat à k 
couleur, fi au lieu de bois de Brefil on fe fert de bois de 
Fernambouc, ou mème de carmin. 

La toile ayant été retirée de la cuve de chayaver, on Ia 
fait fécher, & on lui donne trois leflives pendant trois jours 
confécutifs avec des crottes de brebis, ce qui fait perdre à la 
toile le rouge fale qu'elle avoit contracté par l’ébullition de 
la cuve. 

Telle eft Ta defcription que les trois Auteurs cités ci-defus 
nous donnent des manipulations indiennes. L’adhérence de 
la couleur rouge, fuivant le P. Cœurdoux*, doit s’attribuer 
principalement à la vertu du cadoucaïe & à la nature des 
eaux : ce Miflionnaire cite en fa faveur l'autorité des naturels 
du pays. Selon M. Poivre, le cadoucaïe n'a d'autres pro- 
priétés que celles de l'engalage, & il attribue ladhérence de 
la couleur à la décoétion du gallium : il cite en fa faveur les 
expériences qu’il dit avoir faites. L’Auteur de mon manufcrit 
ne porte aucun jugement, il cite les opérations telles que je 
viens de les décrire, il affure en avoir été témoin oculaire, 
& ne va pas plus loin. 


De la nature du Chayaver à du Cadoucaïe. 


Tout le monde convient aujourd’hui que la plante appelée 
Chayaver fr les côtes de Malabar, & Raye de chaye fur la 
côte de Coromandel, eft une efpèces de gallium. Le P. 
Cœurdoux dit que fa fleur eft petite & bleuâtre; que cette 
plante croit naturellement fur les côtes de Malabar, mais 
qu'on ne laiffe pas de la femer pour Fufage. Je trouve que 
la defcription, & la figure qui y eft jointe, conviennent 
très-bien à notre caillelait à fleurs bleues, qui eft une plante 
annuelle, & dont la racine donne une couleur rouge fupé- 
rieure à celle des autres efpèces. 

Quoi qu'il en foit, toutes ces racines ont la même pro- 
priété pour la teinture, relativement aux principes que j'é- 
tablirai dans la fuite. Le choix ne peut avoir lieu que pour 
da beauté de la couleur, & nullement pour l’adhérence. J'ai 


DE: Shore lNt CNE s. 
fait des épreuves, qu'il feroit trop long de rapporter ici, fur 
nos trois efpèces de caillelait , fur la garance de France, {ur celle 
de Hollande, & fur celle qui croit deflus les Alpes, connue fous 
le nom de Rubia levis Taurinenfium. De toutes ces racines; 
celles qui, réduites en poudre, m'ont donné le plus beau 
rouge, font le caillelait à fleurs bleues & la garance des Alpes. 
Dans les expériences relatives à ce Mémoire, je ne me füis 
fervi que de la garance grappe de nos Droguiltes, parce 
qu'elle donne fa teinture en plus grande abondance. 
. Pour ce qui concerne le cadoucaïe, M: Poivre aflure 
que c'eft le fruit connu dans nos boutiques fous le nom de 
Mirobolans citrins *. Le P. Cœurdoux n'en dit rien, mais , Vo. la Lettre 
il a fait des expériences fur ce fruit, qui prouvent que M. Paye Le 
Poivre a raïon, & les épreuves que j'ai faites fur les mirobo- 
lans confirment le même fentiment; ils m'ont donné précif 
ment les mêmes réfultats qu'au P. Cœurdoux P. + Voy. Letrres 

Après m'être afluré que nous poñlédions en Europe les pie 
drogues principales employées aux Indes, j'ai commencé mes” ” 
expériences. Je vais d'abord rapporter les faits tels qu'ils fe 
font pañlés fous mes yeux ; enfuite j'établirai mes raifonnemens 
fur l'accord & l'analogie qui doivent fe trouver entre ces mêmes 
faits & ceux qui ont été obfervés fur les lieux. 

J'ai mis en pratique ‘tout ce qui eft prefcrit dans a def Première 
cription des trois Auteurs cités ci-deffus : j'ai eu des couleurs Obfrvation. 
qui ont réfiflé au débouilli du favon & à l'action du grand 
air au delà du temps fixé par nos ordonnances pour les rouges 
de bon teint. J'ai pareillement expofé au grand air des mor- 
ceaux de toiles peintes aux [ndes, qui me fervoient de pièces. 
de comparaifon: j'ai mouillé les toiles cinq à fix fois par 
jour, & j'ai và que mes couleurs s'afloiblifloient, tandis que 
celles des Indes ne recevoient pas la moindre altération. 

J'ai répété l'expérience une feconde fois, en fubflituant fx 
noix de gale aux mirobolans, & nos trois efpèces de caillelait 
à la garance grappe; Je n'ai trouvé d'autre différence entre les 
couleurs provenues de cette cuve & de la précédente, fon 
que les dernières ont été plus pâles, 

A ii 


*X Voy. l'Art de 
la teinture, par 


M. Hllor. 


Deuxième 
Obfervation. 


6 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 

Je füpprime tous les détails & toutes les combinaïfons que 
m'a fourni le procédé des Indes, tels que je viens de lénoncer: 
ces détails n'ont point été plus fatisfaifans que ceux dont je 
viens de rendre compte. Je conclus alors, avec M. Poivre, 
que ce n'eft pas aux mirobolans que la teinture des Indes doit 
fa folidité, comme avoit penfé le P. Cœurdoux, & que ce 
n'eft pas non plus à fa garance précifément ni aux caillelaits, 
comme l'avoit cru M. Poivre. Cependant, comme les faits 
que je pouvois citer en ma faveur étoient encore en trop 
petit nombre pour juflifier toute l'étendue de ma conféquence, 
Jai voulu m'afiurer fi la qualité du Breñi n'ahéroit pas la 
folidité de ma teinture. C’eft une remarque utile, que lon 
doit à M. du Fay, & qui a été vérifiée par M. Hellot *, 
que jamais une drogue de faux teint, unie à une drogue de 
bon teint, ne donnera un mélange bien folide. Je fubftituai 
donc le carmin au bois de Brel, comme M. Poivre dit 
l'avoir fäit, & voici ce qui en eft réfulté. 

Je pris quatre échantillons préparés fuivant le procédé des 
Indes: le premier fut marqué avec une teinture de carmin 
alunée, le fecond avec de la cochenille, le troifième avec le 
Kermès, & le quatrième avec le brefil. 

Je mis d'abord l'échantillon teint avec le. bois de Brefil 
dans la cuve de garance, que j'échauflois lentement, & dans 
laquelle j'avois placé un thermomètre pour mieux régler les 
degrés de chaleur. À chaque degré je retirois mon échantillon, 
& j'aperçüs que la couleur du brefil, qui étoit auparavant d'un 
très-beau rouge, commençoit à pâlir : chaque degré de chaleur 
opéroit le même effet d'une manière plus fenfble ; enfin la 
couleur difparut entièrement, & je ne vis plus mon deffein 
fur la toile. Je replongeai de nouveau mon échantillon dans Ia 
cuve, & lorfqu'elle fut prête à bouillir le rouge parut. Ce rouge 
n'étoit plus celui du brefil, mais celui des atomes colorans de 
la garance, & il n'étoit guère poflible de s'y méprendre: la 
couleur ne fit qu'augmenter deformais par la chaleur du bain, 
& jachevai cette cuve à l'ordinaire; elle ne me donna 
point une couleur plus adhérente que les précédentes. 


DIE $ 80 1:ÉN CHELS. 

+ Tous les bois analogues au brefil ont conftimment produit 
le mème eflet ; mais ce qu'il y a de fingulier, c'eft que les 
ingrédiens de bon teint font dans le même cas; le kermès, 
la cochenille, la gomme laque, le carmin, ne tiennent pas 
mieux que le brefil; tous ces atomes étrangers font chaftés 
de deflus la toile par ceux de Ja garance, qui viennent prendre 
leur place & fe précipiter fur alun; d'où je puis conclure 
en toute füreté que les couleurs que les Indiens mettent für 
leur toile en y appliquant leur diflolution d’alun, ne fervent 
qu'à colorer le mordant & à guider le Peintre; que fi M. 
Poivre a eu une couleur plus belle en fe fervant de carmin, 
c'eft certainement parce qu'il avoit employé une efpèce de 
chayaver plus belle qu’à l'ordinaire. à 

Comme le lait de buffle, felon M. Poivre, eft employé 
à caufe de fa fubftance épaifle & ondueufe, & que c'eft par 
cette raifon qu’on le préfère au lait de vache, je tâchai de 
trouver quelque fubftance analogue à ce lait. Je pris diffé- 
rentes matières glutineufes, telles que la gomme arabique, la 
gomme adragant, & des colles de différentes efpèces; mais 
ilarriva que ces gommes & ces colles, qui font aifément dif. 
folubles par l'eau, emportoient la plus grande partie de falun 
lorfque la toile étoit dans la cuve. Je fis attention que le blanc 
d'œuf, en fe cuifant & fe durciffant fur la toile par la chaleur 
du bain, feroit l'effet que je defirois. Je ne fus pas trompé 
dans mon attente; mais toute la fürface du coton étant de- 
venue d’un rouge fale fort adhérent, je m’avifai de faire bouil- 
lir l'échantillon dans une leffive de foude: cette leffive, loin 
de remédier au mal, l'augmenta, & il ne me fut plus poffible 
de reblanchir la toile. 

Je penfii dès-lors que puifque les alkalis avoient fi peu 
de prife fur les atomes de garance qui viennent fe fixer fur 
le blanc d'œuf, il en feroit de même de toutes les autres 
fubftances animales, & que ce principe, auquel nos Obfer- 
vateurs ont penfé fr peu, pourroit avoir beaucoup de part à 
tout ce myftère. Je fus confirmé dans cette opinion par 
l'Auteur de mon manufcrit, qui fait un détail très-circonf 


Troificme 
Oblervation: 


8 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
tancié de la manière de préparer les crottes de brebis pour les 
écheveaux de coton que on veut teindre. Le tout confifte 
à faire une efpèce de favon avec des alkalis fixes, de l'huile 
& des crottes de brebis; manipulation qu'on m'a dit être pa- 
reillement en ufage à Andrinople & dans quelqués manufac- 
tures de France. Ce favon animal m'a très-bien réufli pour 
les écheveaux, mais très-mal pour les toiles de coton; car 
lorfque la préparation eft bien faite, il ef impoffible d'ôter 
le rouge qui couvre toute la furface de la toile & qui cache 
le defein. 

Je me trouvai donc forcé de m'en tenir, comme les Indiens, 
aux excrémens des animaux; mais il sagifloit de découvrir 
quelle eft la partie qui, dans ces fortes de fubftances, paroît 
avoir tant d'affhnité avec l'alun & la garance. J'avois toujours 
éprouvé qu'en expofant à la rofée les échantillons préparés 
fuivant la méthode des Indiens, il en fortoit une bave colorée 
d'un rouge très-vif, & il eft évident que cette bave, ou ef 

èce d’écume, n’eft autre chofe que la terre blanche de l’alun 
mélée dans des fibres de la toile avec la fubftance animale. 
H ne m'avoit jamais été pofhble de faire tenir fur le coton 
cette efpèce d’écume, & de lui faire foûtenir l'action de la 
rofée; ce qui me prouvoit bien clairement qu'il ne falloit 
attendre aucun effet des parties groffières des fubftances 
animales. 

Je me fervis de Ja putréfaétion pour defunir les principes 
qui compolent les excrémens : je laiflai croupir de l'eau où 
j'avois délayé des crottes de brebis ; & quand l'odeur de pu- 
tréfaction fe manifefla, j'y verfai un peu d'eau de favon; 
l'odeur ceffa tout à coup. Par ce moyen, je retenois les prin- 
cipes que la putréfaction avoit defunis, & je les empêchai de 
fe volatililer. J'y laïffai tremper ma toile de coton pendant 
deux fois vingt-quatre heures, je la fis fécher enfuie & je 
la avai. La même opération fut répétée pendant huit jours, 
& jé remarquai que chaque jour la toile, expofée au grand 
air & fréquemment lavée, acquéroit un blanc brillant & 
foyeux. J'engalai cette toile avec les mirobolans, & je la 

trempai 


DIÉASERS C' TIFINCELEUS 
trempai enfuite dans du lait de vache: j'y traçai un defiein 
avec une teinture alunée de brefil, & j'achevai l'opération 
en Ja faifant bouillir dans une cuve de garance. La couleur 
qui en provint fut plus belle, plus faturée & plus adhérente 
que toutes celles que j'avois encore eues. Je dirai bien -tôt 
en quoi elle difiéroit de celle des Indes. 

Cette expérience fait voir que peu à peu il s'infinue dans 
les fibres du coton un principe animal, qui dans la fuite ré- 
fiftera à toutes les épreuves, puifqu'il réfifte à la plus forte, 

ui eft l'action du foleil jointe aux fréquens lavages. Je voulus 
m'affurer fi l'alkali favonneux que j'avois employé étoit né- 
cefaire à l'opération, & je fis en conféquence quelques expé- 
riences, dont voici les principaux réfultats. 

1. Les alkalis ne n'ont paru néceflaires que dans le cas 
où il y auroit putréfaétion dans les fubftances animales; car 
alors les alkalis volatils emportent avec eux les parties qui 
pourroient fe fixer fur le coton, & ne laifent que la partie 
terreufe, qui eft tout-à-fait inutile, comme je m'en fuis con- 
vaincu en me fervant d'excrémens qui s’étoient defféchés 
après avoir fubi la putréfaction. : 

2.7 En employant des crottes de brebis bien fraîches, on 


“parvient à donner à la toile l'apprêt néceflaire, pourvû qu'on 


Y'arrofe fréquemment au foleil & qu'on la laïffe tremper toute 
la nuit dans la fubftance animale. Cette opération dure long- 
temps, fi la chaleur du foleil n’eft pas afiez forte pour enle- 
ver, par l'évaporation, les parties animales qui ne doivent 
pas refter fur le coton ; d'où il fuit que le temps de deux 


où trois jours tout au plus, que l'on emploie aux Indes pour 


donner l'apprèt, ne fufhit pas pour nos climats. 

3 J'ai éprouvé que le feu faifoit le même effet: en 
mettant fur des planches auprès du foyer mes toiles imbibées 
de crottes de brebis, & en les arrofant fréquemment, je me 
fuis aperçû que jy infinuois des parties animales dont j'ignore 
la nature, mais dont l’exiftence eft bien conftatée par l'odeur 
forte que reçoit la toile, & par l'efpèce particulière de blancheur 
qu'on lui communique. H eft évident pareïllement que cette 


Say. étrang. Tome IV. ‘ 


10 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
opération eft une rofée artificielle, car ce n'eft que par la 
facilité avec laquelle les vapeurs s’'infinuent dans les pores des 
toiles, & avec laquelle elles s'évaporent, qu'elles viennent à 
bout d'en enlever tous les atomes étrangers & de les blanchir. 
Par conféquent, fi fon infinue peu à peu dans les pores des 
toiles quelque principe inacceffible à l'action de ces vapeurs, 
& qui ait de l'affinité avec les atomes colorans de la garance, 
on rendra la teinture auffi folide qu'elle peut l'être. 

4 Après avoir retiré la toile de la cuve de garance & 
Yavoir blanchie avec des crottes de brebis pour retirer le rouge 
fale qui couvre fa furface, on a toutes les peines du monde à 
paffer le degré de blancheur que la toile a reçü avant qu'on l'ait 
engalée ; ce qui fait voir que les parties animales qui s’infinuent 
dans les pores du coton, acquièrent une adhérence plus forte 
par l'action de l'engalage & l’ébullition de la garance. 

s Le principe qui fe détache de la partie terreufe des 
fubftances animales pour s'identifier avec le coton, abonde 
beaucoup plus dans les excrémens qui fortent par la voie des 
inteftins, que dans les urines. J'ai tâché d'animalifer des 
toiles avec cette dernière fubftance, mais il eft toûjours 
arrivé que Îa couleur a été foible & peu adhérente: il ne faut 
pas chercher d'autre raïfon de cet eflet, que la grande abon- 
dance d'alkalis volatils contenus dans l'urine, foit que ces 
alkalis, en fe volatilifant, emportent avec eux le principe 
avec lequel la garance a de l'affinité, foit qu'en reftant fur ja 
toile ils féparent l'acide vitriolique de la terre blanche de 
Valun ; décompofition qu'il faut toûjours éviter. 

C'eft vrai-femblablement par la même raïfon qu'il y a pa- 
reillement un choix à faire dans les matières fécales des diffé- 
rens animaux : ceux, par exemple, qui mangent de la chair 
ou qui prennent des alimens chargés de fels, ne m'ont point 
fourni des excrémens propres à préparer le coton; les crottes 
de brebis, la boufe de vache, la fiente de cheval, font les 
feuls qui n\'aient réuffi: le fang des animaux & le lait réuffiffent 
auffi, mais il faut plus de temps, parce que les parties étant 
plus groflières , pénètrent plus difficilement, 


DES SCIENCES. tt 

Revenons maintenant à la comparaifon des couleurs reçües 
fur ma toile, à l'aide des préparations que je viens d’expoier, 
& des couleurs qui nous viennent des Indes. Les miennes 
foûtinrent pendant plus d’un mois, à compter du moment 
qu'elles fortirent de la cuve, l'aétion du foleil, de la rofée & 
des fréquens lavages; mais ces couleurs, après s'être avivées, 
commencèrent à s’afloiblir dans un temps où les couleurs des 
Indes n’avoient pas reçû la moindre atteinte; & comme s'il 
eût été dit que je ne pouvois faire un pas fans rencontrer 
de nouveaux obfacles, je vis que mon principe des fubftances 
animales, tout perfeétionné qu'il étoit, ne fufhifoit pas encore 
pour donner adhérence dont je cherchois la caufe phyfique. 

En appliquant ma teinture alunée de brefil fur le füjet Quatrième & 
que je voulois peindre, je m'aperçüs de deux effets. r.° Toutes éemière 
les fois que je me fervois du pinceau pour appliquer falun, 
je n’avois qu'une couleur foible, & fouvent point du tout: 
2." en examinant avec la loupe les couleurs appliquées fur 
la toile avec force, par le moyen d'une plume, je retrouvois 
toûjours fur la furface une partie de l'alun, quoique leu & 
la teinture dont la toile étoit chargée pénétraffent bien avant. 
I étoit tout naturel de conclurre de ce phénomène, que l'alun 
ne fe joignoit pas d’une manière bien intime avec l'eau dont 
je me fervois, puifqu'ellé abandonnoit fon fel en fe filtrant 
à travers la toile. Toutes les autres eaux, celle de pluie, celle 
de fource, celle de rivière & celle de puits, ont produit le 
même eflet. Il ne me reftoit done plus que deux partis à 
prendre, ou de reconnoître dans les eaux des Indes une 
qualité différente de celle des nôtres, ou de regarder lalun 
dont fe fervent les Indiens, comme une efpèce différente par 
la nature de fa terre. 

Le premier fentiment paroît le plus vrai-femiblable , d'après 
ce que dit le P. Cœurdoux. « Ces puits, dit-il, dont l'eau 
eft äpre, ne font pas fort communs dans l'Inde ; quelquefois « 
il ne s'en trouve qu'un feul dans toute une ville. J'ai goûté « 
de cette eau, je ne lui ai point trouvé le goût qu'on lui « 
attribue, mais elle m'a paru moins bonne que l'eau ordinaire : « 


Bi 


y 
ÿ 


12 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
on fe {ert de cette eau préférablement à toute autre, afin que 
le rouge foit plus beau, difent les uns; & fuivant ce qu'en 
difent d’autres plus communément, c'eft une néceffité de s’en 
fervir, parce qu'autrement la couleur ne tiendroit pas. » 

IL paroît en eflet que le diflolvant dont fe fervent les 
Indiens, donne à l’alun la propriété de fe joindre & de s'in- 
corporer de la manière la plus intime avec les fubftances 
animales : un phénomène fort ordinaire dans les toiles qui 
nous viennent des Indes, femble prouver ce que j'avance ; 
la plufpart des traits formés par la main du Peintre ne pé- 
nètrent pas la toile de part en part, on en voit même qui 
touchent à peine les fibres de l'étofle, & cependant le rouge 
que nous offrent ces traits eft tout aufii adhérent que celui 
qui perce & qui pénètre le tiflu de la toile. 

Il eft d'abord évident que quelque qualité que l'on fuppofe 
aux eaux, avec les Indiens & le P. Cœurdoux, elles ne 
peuvent contenir ni des acides, ni des alkalis, ni aucun 
fel neutre formé de l'union de ces deux fels. Une preuve in- 
conteflable de ce que j'avance, c'eft que les Indiens pilent le 
chayaver qu'ils mettent dans la cuve, en l’arrofant de l'eau 
qui fert de diflolvant à Falun: or, fi on met dans une cuve 
de garance un acide, un alkali où un fel neutre, je puis ré- 
pondre que la couleur ne tiendra pas, comme je le ferai voir 
plus bas. Refte donc à avoir recours à des félénites. 

On fait que toutes les eaux en contiennent plus ou moins. 
J'entends ici fous le nom de félénite, ces efpèces de fels dont 
la nature ne nous efl pas encore bien connue, qui diffèrent 
des terres folubles en ce qu'ils fe cryftallifent , qui diffèrent 
des acidés en ce qu'ils n'ont aucune faveur & qu'ils ne rou- 
giffent pas la teinture de tournefol, qui différent des alkalis 
en ce qu'ils ne précipitent pas la teinture des végétaux extraite 
par le moyen de l'alun. Tel.eft, par exemple, l'efpèce de 
fel qui fe manifefle en petits cryftaux fur la furface de l’eau 
de chaux : tel eft celui qu’on nous apporte des Indes fous le 
nom de, borax. 

‘Une propriété générale & bien impoïtante dans ces (ls, 


: 


DES SCIENCES. 13 
ceft que par leur moyen lalun contraéte, avec le véhicule 
qui le tient en diflolution , une affinité fi marquée, une union 
{1 intime, que par-tout où le véhicule pénètre, l'alun pénètre 
aufli & s'attache même avec une force fi grande, que fi le 
véhicule n'a fait que laver fimplement les fibres de l'étoffe, 
fans la pénétrer, la tache qui en provient à la teinture eft tout 
auffi ineffaçable que fi l'alun avoit pénétré de part en part. 

Je n'attendois pas cet effet d’une reflource auffi foible que 
celle qui me refloit: je me fuis attaché à le bien conftater, 
& je me fuis afluré que lorfque le coton avoit été animalifé 
fuivant la méthode que j'ai prefcrite, & enduit d'une diffo- 
lation d’alun, faite avec des eaux féléniteufes, alors ma teinture 
pouvoit être mife en toute füreté vis-à-vis de celle des Indes, 
& ne lui cédoit en rien, non feulement pour l'adhérence, 
mais encore pour la faturation & l'intenfité de Ia couleur ; 
de forte que fi je n'ai pas réuffi à découvrir la véritable pro- 
priété des eaux dont parle le P. Cœurdoux, j'ai du moins 
la confolation d'en donner une aux eaux d'Europe, qui nous 
mettra fans doute en état de ne pas regretter celles des Indes, 
par la perfeétion qu'on pourra leur donner. 

Les deux efpèces de félénites auxquelles je me fuis le plus 
attaché, font celle de la chaux & le borax purifié. Voici en 
peu de mots les obfervations que j'ai faites fur ces deux 
efpèces de fel. 

1. Comme le borax n'eft autre chofe que le fef fédatif, 
dont nous ignorons la nature, uni à la bafe du fel marin, 
j'ai décompolé le borax par la précipitation, pour éprouver 
fi la propriété que je venois de découvrir étoit l'effet du fel 
fédatif ou celui de fa bafe du fel marin. 

Le fel fédatif divife avec tant de force les atomes colorans 
de la garance, qu'il n'eft guère poflible de employer feul : 
mis en même dofe que l'alun fur le fujet que je voulois co- 
lorer, je n’ai eu qu'un brun rougeûtre, mais tellement adhérent 
à la toile, qu'il ne m'a jamais été poffible de l'aviver. 

2.” La bafe du fel marin, féparé du fel fédatif & uni 
à l'acide vitriolique qui a fervi à décompofer le borax, tire 

Bi 


Voy. l'Art de 
le Téinture des 
laines, par A. 
Hellor, 


14 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

de la garance un aflez beau rouge, mais qui n’a point de 
folidité; ainfi c'eft à l'union des deux principes qui compofent 
le borax que je dois l'effet qu’elle a produit fur le coton. 

3.” L'eau qui tient en diflolution les parties folubles de 
la chaux, a produit le même phénomène, & je n'ai trouvé 
aucune différence bien fenfible dans l'adhérénce des couleurs 
provenues de la diflolution de l'alun dans l'eau de borax ou 
dans l'eau de chaux. 

4. Ces deux fubftances produifent encore deux effets 
analogues à ceux que donnent les eaux des Indes: le premier, 
c'eft que par leur moyen on peut nuancer & dégrader les 
couleurs en fe fervant du pinceau, & la couleur ainfi appli- 
quée eft toute aufr adhérente que fi on lappliquoit avec force 
par le moyen d'une plume; phénomène que j'ofe regarder 
comme impoflble,. fi lon diflout l'alun dans les eaux telles 
qu'on les trouve aux environs de Paris. 

Le fecond effet, c’eft qu'en pilant les racines de caïllelait 
à fleurs bleues, ou les racines de garance, & en les arrofant de 
temps en temps avec une petite quantité d'eau devenue félé- 
niteule par la méthode que je propole, on vient à bout d’en 
tirer une couleur rouge plus belle & plus faturée; au lieu 
que fr on ne les arrofe qu'avec nos eaux des environs de 
Paris, on n'aura Jamais une couleur bien vive, à moins 
qu'on ne garde long-temps les racines ainfi pulvérifées, afin 
que la couleur fe développe à laide de la fermentation qui 
s'excite dans cette poudre, comme l'a penfé M. Hellot. 

Au contraire, fi l'on pulvérife la garance avec une eau acide, 
c'eft autant de perdu pour l'adhérence de la couleur; car l'acide 
qui fe trouve alors dans la cuve, s'empare des atomes colo- 
rans & les empêche de fe précipiter fur l'alun dont la toile 
eft impreunée: c'eft ainfr que l'on préfenteroit en vain du 
fel de tartre à l'acide vitriolique, quand une fois ce fel & cet 
acide font au point de faturation. 

5s+ Par le moyen de mon eau féléniteufe, j'ai communi- 
qué pareillement aux toiles de lin & de chanvre une couleur 
tout auffi adhérente qu'au coton ; expérience qui a pareillement 


here «Per EN CRE 1$ 
réuffi entre les mains de M. Poivre. J'ai trouvé cependant 
que dans mes toiles les couleurs n'étoient pas fi belles que 
fur le coton, & qu'elles n'avoient point, à beaucoup pës, 
le même degré de faturation. 

C'eft vrai-femblablement en vertu de la force avec laquelle 
le borax & la chaux fe joignent à l'alun, que ces deux efpèces 
de fels ont la propriété de diminuer confidérablement laftion 
de l'air fur les couleurs de la garance; mais comme nous ne 
connoiffons encore que très-imparfaitement la nature des 
félénites, & que nous ignorons quel eff le principe qui, dans 
Fatmofphère, agit fi puiflamment fur les couleurs, je m'en 
tiens aux effets que je viens d'obferver. 

Ce qui femble mettre dans un nouveau jour le principe 
des fubftances animales que je viens de découvrir, ceft la 
méthode dont les Indiens fe fervent pour teindre les éche- 
veaux. Cette méthode paroït tout-à-fait différente, & même 
contradictoire aux principes des toiles peintes. Ils animalifent 
les écheveaux, en formant un favon imparfait avec fhuile, 
les alkalis fixes & les fubflances animales, & ils teignent 
enfuite avec le chayaver, fans appliquer auparavant fur le fujet 
qu'ils veulent colorer, ni alun, ni acide pur, ni aucun fel 
neutre; méthode qui paroït impraticable, & que je regardois 
comme impofüble, lorfque l'expérience m'en a enfin déve- 
loppé art & les principes. 

Cette deuxième branche de teinture offre des phénomènes 
trop variés & trop étendus pour les expofer ici ; je les réferve 
pour un autre Mémoire, où sd avoir fuivi Ja Nature pas à 
pas, je ferai voir que les eflets qui, dès les premières ten- 
tatives, paroiflent autant de paradoxes, font des conféquences 
naturelles des principes que je viens d'expoler. 


Remarque générale fur les Expériences précédentes. 


Le premier des deux principes qui ont fait l'objet de ce 
Mémore, fait voir que les Indiens connoifloient ayant nous 
Yaffhnité fingulière de la garance avec les fubftances animales, 


* Tranfactions 


découverte en Angleterre par M. Belchier *, & pouffée plus Le ; 


3 Mém. de 
l'Acad. année 
1739 Pr 1e 


D Mém. de 
l'Acad. année 


17375» Page 
2j 64 


» 


16 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
Join par M." du Hamel & Guettard. Le premier de ces deux 
Savans Académiciens , a prouvé, par fes expériences *, qu'il 
y a dans les animaux une fubftance qui s'incorpore avec les 
atomes colorans de la garance, & qui les porte dans les os. 
Je viens de retrouver la même fubftance dans les excrémens 
des animaux, fans avoir pû néanmoins en connoître la nature. 
M. Guettard nous a prouvé de fon côté, que l'affinité de Ia 
garance avec les fubflances animales eft commune à toutes 
les plantes de la même claffe; découverte qui nous difpenfe 
d'aller chercher dans les caïllelaits des Indes des richeffes que 
nous poffédons en Europe. Si j'ai eu quelque fuccès dans mes 
travaux , j'avoue que j'en fuis redevable aux lumières que j'ai 
puilées dans les obfervations de ces favans Phyficiens. 

Je dois encore un hommage à la vérité; M. de Montami, 
très-connu de l’Académie, a travaillé fur cette matière, & 
il s'eft trouvé que, pour les fubftances animales, nous avons 
fuivi précifément la même route; mais il a ceflé malgré moi 
fes expériences, dès qu'il a fü jufqu'où j'avois pénétré : il ne 
s'eft fervi que de la cochenille , mais ni cette drogue employée 
feule, ni fon mélange avec la garance, comme l’employoit 
M. du Fay P, ne peuvent donner une couleur d'une adhérence 
comparable à celle des Indes. Au refte, M. de Montami a 
par-deflus moï un mordant compofé d'alun, d'étain & d'une 
très-petite quantité d'or, qui, par le peu d'épreuves que j'ai 
déjà faites, tirera certainement de la garance une couleur fu- 
périeure aux miennes, pour l'éclat & pour la beauté. 

Je m'eftimerois heureux fl ce commencement de mes 
travaux pouvoit engager nos Ârtiftes à examiner le parti qu'on 
en pourroit tirer pour l'Art de Ja teinture. Je me préterois 
volontiers aux éclairciffemens qu'ils exigeroient de moi, & 
je me ferois un honneur de recevoir les leurs fur ce qui pourtroit 
leur paroître faux ou douteux dans mes expériences. Le pro- 
grès des Arts fera rapide, tant qu'on fe fouviendra qu'il n’y a 
que fa vérité d'eftimable, & que la gloire de fervir à patrie 
ef Ja feule qui foit digne d'entrér dans le cœur d’un citoyen. 


APPENDICE 


DAS SET E NC E. D. 17 


APPENDICE au dernier Mémoire [ur la couleur rouge 
des Indes. 


J ‘ANNONÇAI dans le dernier Mémoire que j'eus l'honneur 
de préfenter à l'Académie, qu'il étoit poflible de teindre le 
coton avec les feules fubftances animales, fans employer l'alun 
ni la noix de gale, comme on le fait en Europe : je viens 
lui rendre compte de ce phénomène, & lui faire part de fa 
première expérience qui m'a réufli. 

Les premiers écheveaux de coton teints à limitation du 
procédé des Indes, nous ont été envoyés d’Andrinople par nos 
Ambafadeurs, avec une defcription de la méthode employée 
par les Turcs. Cette méthode ; que l'on pratique maintenant 
en Normandie & dans quelques äutres provinces, renferme 
une partie des manipulations indiennes, & en tire évidem- 
ment fon origine. On trempe les écheveaux de coton dans 
une liqueur favonneufe, faite avec des excrémens d'animaux, 
de l'huile & une leflive d’alkalis fixes : on expofe les éche- 
veaux à l'air pendant plufieurs jours. Les Indiens en reftent 
là: au bout de huit à dix jours ils lavent leur coton dans la 
leflive qui a fervi à former leur premier favon, & enfuite 
dans de l'eau fimple, après ils fe teignent avec le Raye de 
chaye. 

Il eft vrai-femblable que les Turcs, après avoir eu con- 
noiflance du procédé des Indiens, ont eflayé de teindre 
comme eux, & que n'ayant pü réuflir, ils ont eu recours à 
la pratique ufitée en Europe pour les laines, c'eft-à-dire 
d’engaler & d’aluner leurs écheveaux. 

D'où vient cette différence? les Indiens auroient-ils caché 
le méchanifme de leur teinture, ou bien ceux qui ont exæ 
miné de près les opérations des Indes en ont-ils faifi la caufe 
& le principe? c'eft ce que je vais examiner. 

J'ai d'abord effayé de teindre les écheveaux de coton, en 
nemployant que les fubftances animales réduites à la forme 
de favon, comme on le pratique aux Indes. Six mois entiers 


Say. érang. Tome IV. . C 


13 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ÀACADÉMIE 
d'expériences infructueufes m'avoient prefque rebuté, & à mon 
peu. de fuccès fe joignoit l'autorité de ceux qui font au fait 
de la teinture d'Andrinople: tous unanimement ont regardé 
celle que j'entreprenois comme impoffible. 

D'un autre côté, je ne pouvois foupçonner d'erreur es 
Mémoires d’après Res je travaillois ; ils avoient été envoyés 
de deflus les lieux à feu M. du Fay par un homme, qui non 
feulement a fait travailler en fa préfènce, mais qui a lui-même 
opéré avec fuccès. Enfin, au mois de Mars de cette année, 
M. de Rabec, Négociant de S.* Malo, qui arrivoit des Indes, 
me fit communiquer * fon Journal du procédé, tel qu'il 
avoit été exécuté en fa préfence, & ce Journal fe trouve exaéte- 
ment conforme aux Mémoires de feu M. du Fay. Je remets: 
les uns & les autres entre les mains de l'Académie, & je: 
vais lui rendre compte de mon travail. 

Les Indiens, fe fervent, pour difloudre leur huile & leurs- 
fubftances animales, d’un alkali fixe tiré des cendres d'une: 
plante nommée naervi ou tangusjefe, faivant le Mémoire de 
M. du Fay, & sayourouvi fuivant M. de Rabec. Les naturels: 
du pays prétendent que l'alkali tiré de: cette plante eft préfé- 
rable à tout autre: j'ai éprouvé de mon côté que moins l'äl 
kali attiroit l'humidité de air, plus il étoit propre à l'opéra- 
tion ; ainfi j'ai préféré la foude. L'huile fur laquelle on verfe la 
leffive de cendres de rayourouvi , eft appelée huile de f£fame, de. 
gengely, où jugioline. Ceue huile fur le champ devient laiteufe, 
comme. il arrive à l'huile d'olive lorfqu'on la. mêle avec une: 
leflive alkaline. A cetie. huile, ainfr blanchie, les Indiens 
ajoûtent des croties de brebis délayées dans un peu de leflive. 
de ayourouvi ; & c'eft dans, cette liqueur favonneufe qu'ils- 
tempent leurs écheveaux pendant la, nuit, en les expofant 
pendant le jour au.foleil le plus ardent, comme loblerve Ms. 
de Rabec. On continue l'opération pendant huit à.dix jours, 
après quoi on fait dégorger les écheveaux, dans la, leffive, 
enfuite dans de l'eau claire, & puis,on les teint. 


*,. C’eft à M: Foucher, Principal du collége. de, Navarre, que. j'en ah 
l'obligation, 


DES 'SCTÉNCES 19 

Je ne me fuis point appliqué à deviner l'effet que pouvoient 
faire deux infufions à froid , dans léfquélles on trempe le coton 
avant de le mettre dans la teinture du zaye de chaye. La pre- 
mière de ces infufions fe fait avec les feuilles d’un arbre 
nommé cacha ‘où alicheton , la deuxième avec l'écorce d’un 
arbre nommé ona ou logar. Ces deux infufions fe font fépa- 
rément à Pondichery, & ‘on les mêle l'une avec lautre à 
Mafulipatan. Je ne regarde pas ces deux téiniures comme 
néceffaires au fond du méchanifme que j'entreprends d'éclair- 
cir: la première teinture eft jaune, & peut, tout au plus, 
modifier la couleur de la garance; la deuxième eft rouge & 
de faux teint, comme le remarque l’Auteur du Mémoire de 
M. du Fay : à Pondichery même on ne fe fert du bois de 
logar , fuivant le même Auteur, que lorfque le coton a reçû 
le rouge de garance; il ne m'en faut pas davantage pour 
Y'abandonner. Venons à l'effentiel. 

Le favon animal que j'ai formé avec la foude, les crottes 
de brebis & prefque toutes nos huiles d'Europe éprouvées 
fucceflivement , ne m'a jamais réuff. Au bout de huit jours 
mon coton, dépouillé de {on favon par la leffive, comme 
on le pratique aux Indes, ne prenoit qu'un rouge de garance 
très-fauve & peu durable. el 

Le favon de nos boutiques , avec lequel j'ai mêlé des fub- 
ftances animales, ne m'a pas mieux réuffi: il faut cependant 
remarquer que ce favon rend le coton très-propre à recevoir 
la couleur de 1 garance, pourvü que l’on emploie l'engalage 
& l'almage ; & fi Von fait difloudre l’alun dans de l'eau dé 
chaux, la couleur rouge adhère alors aux écheveaux avec tant 
de force, que ni le favon, ni la leffive, ni la rofée ne font 
capables de l'aviver. Je communiquai cette teinture au fieur 
Scalogne, Fabriquant à Abbeville, qui en fit voir des écheveaux 
à M. Bernard de Juffieu. IL cherchoït par-tout des moyens 
d'aviver cette couleur, fans pouvoir y parvenir : la rofée 
commence à difloudre & à pourrir les écheveaux lorfque le 
rouge fe développe. 

H eft conftant que ce favon ne produit d'autre effet fur le 

Ci 


20 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
coton que de dilater fes pores & de les rendre propres à recevoir 
Y'alun : on le voit à l'œil fi fon trempe dans de l'eau f'extré- 
mité de deux écheveaux, dont l'un foit préparé, & l'autre 
fans préparation; l'eau monte dans le premier avec beaucoup 
de rapidité, & très-lentement dans le fecond. 

Il eft évident pareillement que ce n’eft pas le favon dont 
on empreint les écheveaux, qui fe colore aux Indes; outre 
que cette idée eft contraire à tout principe, on ôte ce favon 
au bout d’un certain temps. On ne peut donc guère conce- 
voir que les atomes colorans de la garance tombent fur autre 
chofe que fur la fubftance animale dans le procédé des Indes, 
de même qu'ils tombent fur la terre blanche de l'alun dans 
le procédé d'Andrinople & de Darnetal. 

En examinant de près les fibres du coton qui ont été en- 
duites du favon animal, & puis lavées dans une lefive alka- 
line, on remarquera encore fur ces fibres une efpèce de fuint 
ou de graifle, que les alkalis fixes ne détruifent qu'avec beau- 
coup de peine, lors même qu'on fait bouillir la leffive. Je 
conçus dès-lors que fi je pouvois unir la fubftance animale 
avec ces molécules graifleufes, je parviendrois à les colorer; 
mais toutes les huiles que j'avois éprouvées jufqu'alors étoient 
un moyen infufhfant pour y parvenir. 

J'en étois là lorfque je reçûs le Mémoire de M. de Rabec : 
dans l'endroit de ce Mémoire, où il eft parlé de l'huile de 
jugioline, il eft dit en même-temps qu'au défaut de cette 
huile on produit le même effet avec le fain-doux : j'ai fuivi 
ce confeil, & il m'a réufli. Les graiffes ne font autre chofe 
que des huiles animales, par conféquent très- propres à fe 
joindre aux molécules des excrémens qui ont la propriété de 
fe laifler teindre par la garance. 

J'ai trempé un petit écheveau de coton * dans le favon 
fait avec le fain-doux, une leffive de foude très-forte & des 
crottes de brebis délayées dans un peu deleffive: il eft effentiel 


* II faut obferver que le coton dont on fe fert doit être écrû, & 
que le degré de blancheur qu’il acquiert par le favon animal, eft la feule 
marque qu’il eft fuffifamment préparé pour la teinture, 


DIE s .$S:€T1 E N © ES 2F 
de dofer cette dernière fubftance, elle doit être proportionnée 
à la quantité de fain-doux ; il en faut mettre toûjours un peu 
moins: je l'ai expofé quinze jours au foleil, ayant attention 
de mettre l'écheveau tous les foirs dans le favon, & d'aug- 
menter de temps en temps la compofition , en y verfant un 
peu de leflive, & j'ai jugé, par la blancheur que le coton 
avoit acquife, qu'il étoit fufhfamment préparé; je l'ai lavé 
dans une leflive de foude, & enfuite dans de l'eau claire. Cet 
écheveau, mis à la cuve de garance avec un peu de fang de 
bœuf, comme on le pratique à Andrinople, a très-bien pris 
la couleur, qui a réfifté au débouilli du favon. 

1 fuit de Rà que les huiles animales font plus propres 
à l'opération que celles que nous tirons des végétaux en Eu- 
rope; mais par quel méchanifme ces huiles. retiennent - elles 
les parties imperceptibles qui, dans les excrémens animaux, 
fe joignent aux atomes colorans de la garance? 11 eft d'autant 
plus difficile de l'expliquer, qu'on ne remarque aucune dif 
férence fur les fibres qui ont été empreintes du favon tel que 
je viens de le décrire, foit que lon fupprime ou non Îes 
excrémens animaux. Cependant cette fuppreffion fait une 
grande différence pour la couleur, car le coton ne la prend 
pas toutes les fois que l'on emploie le fain-doux fans em- 
ployer les crottes de brebis ; preuve évidente que les graifles 
des animaux ne contiennent point les molécules avec lefquelles 
la garance a tant d'affinité. 

S'il n'étoit permis de me livrer à des conjeétures, je croi- 
rois que toute l'opération fe réduit à dépouiller le fain-doux 
qui s'eft joint aux molécules excrémentielles de toute fa partie 
grafle, & qu'il ne refte plus für les fibres du coton que la 
partie terreufe de cette graifle indiffoluble aux alkalis favon- 
neux : mais il eft bien difficile de s'en affurer par l'expérience; 
ici la Nature difparoït à nos yeux, ou pluflôt elle fe voile 
fous un méchanifme fr délicat, qu'à peine laifle-1-elle quelque 
prife à l'imagination. 

Je me borne donc au fait que je viens d'établir. I y auroit 
encore bien des recherches à faire pour approfondir de plus 


C iÿ 


22 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

en plus les autres opérations, dont le but eft de rendre Ja 
couleur plus belle & plus vive. Par exemple, j'ai fupprimé 
les fept cuves, je n'en aï fait qu'une; je n'ai tenu aucun compte 
de la nature des eaux qui, fuivant le Mémoire de M, de 
Rabec, influent beaucoup fur l'opération. L'effentiel, avant 
d'aller plus loin, étoit de conflater le principe & de faire 
voir que dans cette ‘efpèce de teinture, les atomes colorans 
de la garance fe jettent immédiatement fur la fubftance animale, 
& non fur la terre blanche de f'alun, comme ül arrive dans 
la teinture d'Andrinople. J'examinerai dans un Mémoire féparé 
les moyens de fuppléer aux avantages que les Indiens ont 
fur nous du côté des eaux & de la matière colorante. 


FAÇON DE TEINDRE LES TOILES EN ROUGE 
aux Indes. 


L ES Teinturiers indiens s'y prennent de trois façons, que 
j'expliquerai ci-après, chacune en fon rang, en avertiflant 
auparavant que la première manière, bien plus compofée, eft 
auffi la meilleure, & donne une couleur plus adhérente que 
les deux autres, & que la dernière eft la plus imparfaite. 


Première façon. 


Pour teindre un coupon de toile de coton /4) de cinq 
coudées de longueur, on fait ce qui fuit : 

On prend d'abord la tige d’une plante nommée sayourouvi, 
rameaux & feuilles, que l'on fait bien {écher , puis brüler pour 
en avoir la cendre, qu’on délaie dans un vafe de terre, con- 
tenant environ neuf pintes d'eau de puits dans laquelle on 
laifle infufer cette cendre pendant trois heures. 

Nos Indiens ont attention de choiïfir par préférence les 
eaux les plus âpres, comme ils s'expliquent : il n’eft pas trop 


poflible de définir quelle eft cette äpreté /2). Au refte, l'on 


(a) Les Indiens veulent que la | ne font pas fort communs dans l’Inde; 
toile foit écrûe; blanchie, elle ne | quelquefois il n’y en a qu’un feul dans 
prendroit pas fi bien la couleur. toute une ville. J’ai goûté de cette 

(@) Ces puits, dont l'eau eft âpre, | eau, je ne lui ai point trouvé le goût 


DÉS SCIENCES 23 
fait qu'en Europe, aufli-bien qu'ici, les T'einturiers préferent 
cærtaines eaux, dans lefquelles fe trouvent quelques qualités 
propres à leurs teintures. Par exemple, l'eau du ruiffleau des 
Gobelins pañle à Paris pour la meilleure en ce genre. 

L'eau de cendre étant infufée, enfuite paflée dans un linge, 
on en prend une quantité fufhfante pour pouvoir mouiller & 
bien impregner les cinq coudées de toile qu'on veut teindre; 
on y délaie des crottes de cabrit, de la groffeur d’un œuf, 
toutes réunies, auxquelles on joint la valeur d'un verre ordi- 
naire de levain, de la compofition duquel je parlerai ci-après ; 
enfin on verfe fur le tout une ferre /a) d'huile de ffime ou 
de jugioline (4). Ayant bien mêlé & délayé toutes ces drogues, 
fi, les cendres font: bonnes, l'huile rendra l’eau blancheître & 
ne furnagera pas : le contraire arriveroit, frelles étoient mêlées 
avec celles d'autre bois que le nayourouvi. 


Cette préparation faite comme on vient de Ie dire, on 
ÿ trempe la toile, qu'on pêirit bien dans le fond du vale, 
où on la laifle enfuite ramaflte pendant douze heures, c'eft-à- 
dire du matin au foir. Alors on verfe deffus un peu d'eau 
de cendre icuie fimple, afin d'y entretenir l'humidité nécef- 
faire pour pouvoir, en la pêtriffant encore, la pénétrer dans: 
toutes fes parties ; après quoi on la laifle encore ramaflée dans 
le fond du même vale jufqu'au lendemain matin. 

Ce fecond jour on agite la toile, on la prefle & on la pätrit 
comme la veilie, de façon qu'elle le trouve himeélée évalement ; 
enfuite l'ayant tordue à un certain point & fecouée pluffeurs fois, 
on la met bien étendue fécher au foleil le plus chaud jufqu'au 


qu'on lui atiribue, mais elle m’a paru 
moins bonne que l’eau ordinaire. 
On fe fert de certe eau, préféraf le- 
ment à toute autre, afin que le rouge 
foir beau, difent lesunss &, fuivant, 
ce qu’en difent d’autres plus commu- 


(4) La ferredont on parle ici, ef 
,une mefure cylindrique, de trois, 
pouces de diamèrre, &:d’autaut: de 
profondeur. 


(b) Au défaut d’huile de jugio- 


nement, cet une néceflité de s’en 
févir, parce qu'autrement le rouge 
ne tiendroit pas. Le P, Cœurdoux, 


Lertres édifiantes , XA V1 Recueil, , 


Page 207. 


line, on peur fe fervir de lain-doi x 


iliquéfé & non liquéfié. Cewe huile 


de, f-fame: ou: jugioline eft appelée: 
aux: Indes, du mor poriugais, Aule 
de gengely, r 


24 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
foir, qu'on la replonge & agite dans la fufdite préparation 
que l'on a eu foin de réferver, & dans laquelle on lui laïffe 
encore pafler la nuit; mais comme cette préparation fe trouve 
diminuée, on remplace ce qu'elle a perdu par de l'eau de 
cendre fimple, qui, en la rendant plus liquide, la rend 
auffi plus propre à s'étendre & à fe partager dans toutes les 
parties de la toile. 

L'opération dont on vient de parler, doit fe répéter pen- 
dant huit jours & huit nuits. 

On va expliquer ce que c'eft que le verre de levain qu'on 
met dans la préparation ci-deflus. Ce levain n'eft autre chofe 
que cette même préparation, que les Peintres ont foin de: 
conferver dans des vafes de terre pour s’en fervir une autre 
fois : mais s'ils avoient perdu l'autre levain, la façon d’en faire 
de nouveau eft de prendre de l'eau äpre, dans laquelle on 
aura fait infufer des cendres de nayourouvi, d'y délayer la 
fiente & l'huile de féfame, comme on l'a expliqué ci-deflus, 
& de laifler le tout fermenter pendant quarante-huit heures ; 
ce qui formera un nouveau levain. 

La toile ayant été préparée, comme on l'a dit, pendant 
huit jours & huit nuits, on la lave dans de l'eau de cendre 
fimple, pour en tirer l'huile, jufqu'a ce qu'elle blanchiffe un 
peu, & de-là dans de l'eau ordinaire, mais toüjours âpre ; 
enfuite on la fait fécher au foleil. 

Pendant les opérations dont nous venons de parler, on 
aura préparé, fait fécher & pulvérifé de la feuille de cacha /a), 
dont on prend une ferre /4), qu’on détrempe dans de l'eau äpre 
toute fimple, & en quantité fufhfante pour impregner bien la 
toile qu'on y agite cinq ou fix fois, & qu'on laïfle paffer la nuit 
dans cette eau. Ceci ne fe fait qu'une fois. 

Le lendemain au matin on exprime, à un certain point ; 
l'eau de cacha de la toile que lon fait fécher au foleil jufqu’au 


(a) Le cacha eft un grand arbre | leufe, plus courte, & arrondie par le 
commun aux Indes, & dont la feuille | bout: fa fleur elt bleue. 
eft d’une confiftance aflez femblable (b)_ Sorte de mefure, telle qu’on 
à celle du laurier, mais plus moël- | l'a expliquée, page 22. 
foir; 


DES SCIENCES. E: 
foir; cette préparation lui donne un œil jaunâtre. Etant 
achevée, on paffe à celle dont je vais parler. Ayant bien 
fait fécher & pulvérifer la peau ou l'écorce des racines d'un 
arbre, nommé zona (a) par les Indiens, &, à ce qu'on nra 
dit, mancoul par les Portugais de ces pays-ci, on prend une 
ferre, de melure, de cette poudre, qu'on délaie, comme celle 
de cacha, dans une même quantité d’eau fimple, mais toûjours 
âpre, dans laquelle on plonge & agite pareillement la toile, 
qu'on y laifle auffi pañer une nuit, pour l'en rétirer le lende- 
main, en exprimer à un certain point l'eau de nona, & la 
faire fécher jufqu'au foir, qu'on la replonge dans la même 
eau pour y pafler une feconde nuit, d'où on la retire le 
troifième jour pour la faire encore fécher. Cette dernière 
préparation lui communique une couleur rougeätre, à laquelle 
le chayaver dont on va parler donne l'adhérence & Ja force. 

Pendant qu'on prépare la toile, comme nous venons de 
le dire, on doit auffi préparer la racine de chaïa ou chaya- 
ver {? ) ; ce qui fe fait, en prenant de ces racines que l'on 


(a) Le nona eft un grand arbre, 
dont les feuilles font longues d'environ 
wojs pouces & demi, & larges de quinze 
lignes; fon fruit eft à peu près de la 
groffeur d’une petite noix, & couvert 
d’une peau verte, contenant dans des 
cellules cinq à fix pepins ou noyaux. 
Les Indiens mangent ce fruit en 


achars, c’eft-à-dire préparé à la façon - 
> prep 


de nos-cornichons, 


(b) Le chaïa ou le chayaver, 
eft une plante qui naît d’elle-même, 
& on ne laifle pas d’en femer aufli 
pour le befoin qu’on en 2: elle ne 
croît de terre qu'environ d’un demi- 
pied ; fa feuille eft d’un verd dir, 
Jarge de près de deux lignes, & lon- 
gue de cinq à fix. La fleur eft extré- 
mement petite & bleuâtre ; la graine 
n’en eft guère plus groffe que celle 
du tabac. Cette petite plante poufle 
en terre une racine qui va quelque- 


fois jufqu’à près de quatre pieds, & 
Say. étrang. Towe IV. 


ce n’eft pas la meilleure; on lui pré- 
fère celle qui n’a qu’un pied ou un 
pied & demi de longueur. Cette racine 
eft fort menue ; & quoiqu’elle poule 
fi avant en terre & tout droit, elle 
ne jette à droite & à gauche que fort 
peu & de très-petits filamens. Elle eft 
jaune quand elle eft fraîche, & de- 
vient brune en fe féchant : ce n’eft 
que quand elle eft sèche qu’elle donne 
à l’eau la couleur rouge; fur quoi je 
remarquai une particularité qui m'é- 
tonna. J’en avois mis à wemper dans 
de l’eau qui étoit devenue rouge: 
pendant la nuit un accident fit répan- 
dre la liqueur; mais je fus bien furpris 
de trouver le lendemain au fond du 
vafe quelques gouttes d’une liqueur 
jaune qui s’y étoit ramaflée : je foup- 
çonnai que quelque corps étranger , 
tombé dans le vafe, avoit caufé ce 
changement de couleur. J’en parlai à 
un Peintre, il me dit que cela ne 
marquoit autre chofe, finon que le 


L1 


26 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
émonde, & dont on rejette les extrémités du côté du gros 
bout de la longueur d'un pouce ; enfuite on hache ce qui 
refte de la fongueur de fix à huit lignes, pour le piler plus 
ficilement dans un mortier de pierre en quantité d'une ferre 
de mefure, en l'humectant avec de l'eau fimple, tant pour 
former une efpèce de pâte de cette racine, que pour empê- 
cher que la poufière ne s'élève & ne fe perde. Ce chayaver 
ainfi préparé, & enfuite délayé dans environ neuf pintes 
d’eau fimple, mais âpre, on y plonge & agite la toile qui 
y pafle la nuit, pour en être retirée le lendemain matin, 
pour, après en avoir un peu exprimé l'eau de chayaver, la 
faire fécher au foleil pendant huit jours confécutifs, en la faifant 
fécher le jour & la laïffant la nuit dans fa teinture. Chacun 
de ces huit jours charge de plus en plus cette toile de couleur, 
qui parvient enfin à un rouge foncé. 

Ces huit jours expirés, l'on prend deux ferrées de la même 
poudre de chayaver, qu'on met dans un autre vale de terre 
avec environ dix pintes d'eau, qu'on fait chauffer fur un feu 
modéré jufqu’à ce que l'eau s'élève un peu, qui eft le moment 
où on y plonge la toile; après quoi on augmente le feu; & 
quand feau bout bien fort, on retire le bois qui refte fous 
Je vafe qu'on laiffe fur fa braife, fur laquelle la teinture refroidit 
petit à petit à mefure que le feu fe confume: dix-huit heures 
après, on en retire la toile pour la laver dans de l'eau fimple 
& fraiche, & enfüuite {a fufpendre pour la faire fécher; & 
de cette façon la toile eft teinte en rouge foncé de la pre- 
mière forte. 

Pendant toute cette cuiflon de la teinture, l’on a grand 
foin d’agiter la toile avec le bout d'un bâton, afin que cette 
teinture en pénètre plus également toutes les parties. 

Une remarque très-eflentielle à faire, eft que quand on a 
commencé une teinture avec une forte d'eau, il ne faut plus 
fe fervir de celle d’un autre puits, füt-elle âpre auffi, mais 
continuer avec la même toutes les opérations jufqu'à la fin. 


chaïa dont je m’étois fervi étoit de | xxW1.° Recueil des Letrres édifs 
bonne efpèce, &c. Le P. Cœurdoux, | page 208, à 


D ES 

Une autre remarque encore à faire, c'eft que les plus 
fraiches racines de chayaver font les meilleures, fuffent-elles 
tirées de terre le jour même, pourvü qu'elles aient eu le temps 
de fécher, ce qui peut fe faire bien promptement, vû a fineffe 
de cette racine; cependant au bout d'un an elles font encore 
bonnes ,& méme elles peuvent fervir jufqu'à trois ans de 
veillefle, mais toûjours en déchinant de bonté. 

J'ajoûterai à ce que ie P. Cœurdoux dit du chayaver, dont 
Jextrait eft en marge, le fentiment de M. Poivre, ci-devant 
des Miffions Etrangères, qui, pendant fon féjour à Pondichery, 
s'eft fort attaché à pénétrer les fecrets de nos Peintres, ayant 
même peint lui-même quelques effais, où l'on n'aflure qu'il 
a fort bien réuff. 

« Le chayaver eft la plante que M. Tournefort appelle, 
Gallium album vulgare. La defcription que ce favant Botanifie 
fait de fa plante, eft abfolument la même que celle qu'on pour- 
roit faire du chayaver ; au moins eft-il vrai que les deux plantes, 
f: elles font différentes, ont un même effet, qui eft de faire 
cailler le lait: c’eft une expérience que j'ai faite ». Dans une 
Lettre qu'il écrit au même P. Cœurdoux. 

J'ajoûte à ce que ci-deffus, que le chayaver croit dans les 
terres légères & fablonneufes. y 


Seconde façon de reindre les Toiles en rouge. 


Pour teindre un coupon de toile de coton de cinq cou- 
dées de longueur, on commence par la faire blanchir, après 
quoi l'on prend des fruits {ecs, nommés cadou * ou cadoucaïe, 


SCIENCES. 27 


* Le fruit cadou fe trouve dans 
les bois fur un arbre d’une médiocre 
hauteur : il fe trouve prefque par-tout, 
mais principalement dans le Malleya- 
lam , pays montagneux, ainfi que le 
fignifie fon nom , qui s'étend confi- 
dérablement le long de la côte de 
Malabar. Ce fruit fec, qui eft de la 
groffeur d’une mufcade, s’emploie 
ici par les Médecins, & il entre fur- 
tout dans les remèdes qu’on donne 


aux femmesnouvellementaccouchées. 
IL eft extrémement äpre au goût ; 
cependant quand on en garde un 


morceau dans la bouche pendant un 


certain temps , on lui trouve, à ce 
que difent quelques-uns, un petit 
goût de réolifle. Si aprés en avoir 
humeété médiocrement & brifé un 
morceau dans la bouche , on le prend 
entre les doigts, on le trouve gluant: 
c’eften bonne partie à ces deux qua- 


D i 


An 
# 


CS 


38 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
au nombre de deux pour chaque coudée de toile à teindre: 
par conféquent pour celle-ci on en prendra dix, que l'on 
caffera pour en tirer le noyau, qui weft bon à rien dans le 
cas préfent. On broyera le refte, en roulant un cylindre de 
ierre fur une autre pierre plate & unie, ayant attention 
de lhumecler de temps en temps avec de l'eau (j'entends 
toûjours de l'eau âpre), de façon que le tout forme une efpèce 
de pâte plus sèche que liquide, qu'on délaie dans de l'eau 
en quantité fufhfante pour bien humeéter les cinq coudées 
de toile à teindre. Cette toile ayant été agitée pendant un 
quart d'heure, & humectée de l'eau de cadou, on la tord, 
fans cependant la deflécher trop; puis après l'avoir fecouée, 
on l'étend & on la laifle fécher à l'ombre. Cette préparation, 
qui lui donne un œil jaunâire, la difpofe à recevoir & s'atta- 
cher plus intimement la couleur du chayaver dont il fera 
parlé ci-après. 

La toile étant dans l'état qu'on vient de le dire, on prend 
un vafe de terre, dans lequel on fait un peu chauffer envi- 
ron une pinte d'eau, dans laquelle on vefe un palam * 
d'alun pulvérifé, qui fond fur te champ, & auffi-1ôt on retire 
de deflus le feu le vale, dans lequel on verfe environ deux 
autres pintes d'eau fraîche: enfuite on étend la toile fur l'herbe 
au foleil, & l'on prend un chiffon de linve net que l’on trempe: 
dans cette eau & que l’on pafle fur le côté apparent de ceute 
toile d’un bout à l'autre, en retrempant d’inftant en inftant 
le chiffon dans cette eau. 

Quand ce côté de la toile eft bien empreint, on la retourne 


liés, je veux dire à fon âpreté & à 
fon onctuofité, qu’on doit attribuer 
Tadhérence des couleurs dans les toiles 


lam, dont nos Droguiftes connoiffent 
cinq elpèces; favoir le citrin, indien 
ou noir, le chebule, l’emblique & 


indiennes, & fur-tout à fon âpreté ; 
c’eft au moins l'idée des Peintres 
indiens , &c. Le P. Cœurdoux, 
XXV1* Recueil des Lettres édif. 
page 178. M. Poivre, déjà cité dans 
le préfent Mémoire, prétend que 
Je cadou qu’emploient les Peintres 
indiens, n’eft autre que le mirobo- 


le bellerique : il ajoûre que ces 
Peintres ne fe: fervent que du citrin 
& du noir, qui ont beaucoup de fel 
eflentiel & d'huile. Dans fa même: 
Lettre au P. Cœurdoux. 


* Le palam eft un poids indien. 
qui équivaut à une once un huitièmes. 


DES ASC 1 E'NICUELS. 2 
fur l'autre, auquel on en fait autant; après quoi on ha life 
fécher pour la porter enfuite dans l'étang, où on l'agite trois ou 
quatre fois pour enlever une partie de l'alun & étendre plus 
également le refte. Delà, on l'étend encore fur l'herbe, où on 
Jui donne une feconde couche de la mène eau d’alun, comme 
il vient d'être expliqué, & on la laiffe fécher. Nora, que cette 
dernière fois il ne faut pas attendre que la toile foit abfolu- 
ment sèche pour lui donner la feconde couche d'eau d’alun, fans 
doute afin que celui-ci en pénètre plus facilement & plus 
également tous les fils. 

Cette double opération faite, & la toile ayant bien féché, 
on la reporte encore dans l'étang, où on la plonge une 
vingtaine de fois, en la frappant chaque fois d’une dixaine 
de coups fur les pierres de taille placées exprès fur le bord 
de ces étangs; ce qui fe fait en fronçant & ramaflant cette 
toile & la tenant par le côté d’un de fes lés, & en reprenant 
enfuite à la main le côté de l'autre lé. 

Ceci fait, on renverfe l'opération, en fronçant la toile & 
lempoignant p:r un de fes bouts : ainfi froncée, on commence 
à en frapper la pierre par une de {es extrémités, en revenant 
peu à peu jufqu'à fon milien, & la retournant alors pour en 
faire autant en commençant par l'auue extrémité. Les Tein- 
turiers fixent auf le nombre de ces derniers coups à deux 
cens; je crois cependant que le plus ou le moins ne pouiroit 
guère déranger cette opération. 

Cette toile ainfi lavée, on l'étendra au foleil où on la laiffera 
fécher. 

Alors on prend la quantité de cinq livres & demie de ra- 
cine de chayaver, qu'on prépare ainfi qu'il efl expliqué dans 
la première fiçon, & qu'on Jette dans un grand vafe de terre, 
contenant environ quinze pinteg d'eau plus que tiède, mais 
qui ne bouillonne pas, encore. Ayant bien remué ceue eau 
pendant une demi-heure, on y plonge la toile, après quoi 
Ton augmente le feu de façon à faire fortement bouillis jen- 
dant cinq heures le tout, qu'on laïfle encore trois heures {ur 


le feu , fans l'alimenter davantage de nouveau bois. 


- 


o' MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 

On obférvera pendant toute cette opération de foulever 
& remuer la toile avec un bâton, au moins de demi-heure 
en demi-heure, afin qu'elle puiffe être plus également péné- 
trée de la teinture. 

Après les fufdites huit heures expirées, on retire la toile 
du chayaver pour la fecouer, la tordre & la laiffer ramaflée 
fur elle-même pendant une nuit, Le lendemain matin, l'ayant 
lavée dans l'étang pour en détacher les brins de chayaver & 
autres ordures qui auront pü s'y coller, on la fera fécher au 
foleil, en l'étendant bien. Moyennant ce que deflus, cette 
toile fe trouvera teinte en rouge de la feconde forte. 


Tioifième façen de reindre les Toiles en rouge avec le 
Bois de fapan. 


L'on prépare la même longueur de toile * que dans les 
précédentes façons , avec le cadou broyé & détrempé, comme 
dans la deuxième manière, & on Îa fait fécher de même 
à l'ombre. 

Après que cette toile eft bien féchée, on la trempe dans 
l'eau ainft préparée. 

On prend du bois de fapan brifé en plufieurs petits mor- 
ceaux de la longueur d'un doigt, plus ou moins, que l'on 
lifle infufer pendant douze à quinze heures dans neuf à dix 
pintés d’eau fraîche, & toûjours äpre, laquelle on fait enfuñe 
chauffer, jufqu'à ce qu'elle ait fait trois à quatre bouillons, 
après lefquels on la retire du feu pour la féparer de fon fé- 
diment, en la verfant, par inclination , dans un autre vale de 
terre, où on la laifle refroidir. Dans cet état, on en prend 
une partie dans laquelle on plonge la toile, qu'on y agite 
un peu & qu'on retiré auff-tôt pour la faire fécher à l'ombre, 
après en avoir exprimé f'eaû à un certain point. 

Auffi-tôt, ou quand cette toile eft sèche, on recommence 
cette opération, qu'on répète trois fois, & même quatre f 
l'on remarque que la couleur ne foit pas affez foncée, 


* II cit indifférent que cette toile foit blanchie ou écrûe, 


DES SCIENCES ME 

Cela fait, on met dans un vafe de terre environ une 
chopine d'eau, dans laquelle on jette le poids d'un demi- 
palam d'alun pulvérifé, & l'on fait chauffer le tout , feule- 
ment jufqu'au point de voir frémir l'eau, que fon verfe 
aufli-tôt dans un autre vafe, contenant une pinte d’eau fraîche. 
Ayant bien agité le tout, on y, plonge la toile, que, bien 
imbibée & pénétrée de cette compofition, lon tord léoère- 
ment, de peur d'en détacher la couleur; après quoi on l’étend 
& on la fait fécher à lombre, ce qui achève cette forte de 
teinture, à la vérité aflez imparfaite, puifqu'elle fe détache 
à la leflive, & fe pañle & s’affoiblit au foleil & au grand air. 

J'ai remarqué que cette dernière préparation d'alun occa- 
fionnoit un changement notable dans li couleur de cette toile, 
qui, d'un rouge orangé, pafle auffi-tôt à un rouge affez foncé 
& tirant fur la couleur de fang de bœuf. 


EXPÉRIENCES faires [ur l'eau que les Peintres è7 les 
Téinturiers indiens emploient dans leurs reintures. 


Comme je crois que la: qualité de lleau contribue à l'adhé- 
rence des couleurs qu'emploient nos Peintres & TT einturiers ; 
il me paroît à propos de la faire connoître plus particuliè- 
rement pour aider aux recherches qu'on pourroit faire en 
France des eaux les plus propres'aux teïntures dont je viens 
de donner les différentes façons, n'étant pas impoflible qu'on y 
pût rencontrer des qualités homogènes à celles dont je viens 
de parler. Voici comme le fieur Cairefourq, Chirurgien- 
major de cette ville, s'en explique à ce fujet. 

« Par l'analyfe que je viens de faire de l'eau fervant aux 
teintures des toiles que vous m'avez envoyée, j'ai trouvé 
qu'elle étoit plus légère que celle d'Oulgaret *, dont on 
boit ici par préférence à toute autre; favoir , fur une livre 
14 onces, poids de marc, de 28 grains =; & ayant auffi 
comparé l'eau d'Oulgaret à celle d'un des puis de la ville 


* Puits fitué hors de la ville de Pondichery, à une lieue environ du: 
bord de la mer. 


e 
= 


32 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ACADÉMIE 
» le plus fréquenté par ceux qui n’ont pas la faculté de fe faire 
» apporter de la première, j'ai trouvé que cette dernière, dont 
» le puits eft fitué à environ cent toifes du bord de la mer, 
» étoit, pour une livre de 1 6 onces, de 48 grains plus pefante 
» que celle d'Oulgaret. De-là réfulte, calcul fait, que l’eau 
» qu'adoptent vos Teinturiers, eft de 60 grains 3 plus légère 
» que celle de la ville, que lon boit cependant, au contraire 
» de celle des Teinturiers, qu’il ne feroit pas poffible de boire, 
» à caufe de fon goût infipide, cependant point âcre, mais 
» tirant un peu fur le goût minéral, quoique je n'y aie trouvé 
» aucun fel de cette dernière efpèce après en avoir fait éva- 
» porer 30 onces au bain de fable, lefquelles ne m'ont donné 

que 11 grains d'un fel gemme très-blanc ». : 


MÉTHODE 


MES SÛC 1 E NICLELS. 33 


MÉTHODE 


Pour réfoudre plufieurs Problèmes indéterminés. 


Par M. DE LA BOTTIERE. 


E commence par établir fur les nombres en général, 
quelques Lemmes dont j'aurai befoin par la fuite. 


LE. M ME . I 
Soient deux nombres entiers inégaux quelconques a & 6, 
dont / eft le plus grand divifeur commun, je dis que 
eft le plus petit multiple commun de a & de 6. 
DÉMONSTRATION. 
Puifque / divife exaétement a & à, — & + font des 


: : 2 a SCT 
nombres entiers. Ainfi, 1° a x TrOU TX b, c'eft-à-dire 


eft multiple de a & de b. 


Puifque / eft Je plus grand nombre qui divife tout à fa 
fois a & b, s'il y a quelqu'autre nombre qui divife exacte- 
ment a & b, il faut que ce nombre, que je fuppofe être d, 


foit plus petit que 7; ainfi — eft néceflairement plus petit 
que 2, Donc 2° eft le plus petit multiple de a & 


de 2, 
Cort or tLiA nR RuED TE 


Si les nombres a & à font premiers entr'eux, c'eft-à-dire 
b . : : 
fl :3, _ deviendra 48; ainfi le produit de deux 


nombres premiers entr'eux eft leur plus petit multiple commun. 


Say. étrang, Tome 1V. . E 


34 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


C'o'rRtomamANreR et DT 


. . a a : o 
Si l'on a la fraétion —, & qu'en divifant fes deux termes 
par leur plus grand divifeur commun, on la réduife à {es 
d 
moindres termes, en forte que lon ait = — —, ae où 


bd fera le plus petit multiple commun de a & de b; 
fi 7 eft é cie Eee divifeur commun de 4 & de D, on aura 


ab 
L'ile =; ainfi HERO es 


7 
L'enM MTOE TL 


Soient trois nombres entiers & inégaux quelconques a, 
B, c; foit 7 le plus grand divifeur commun de a & de b, 
FR L L \ 

en forte que — foit leur plus petit multiple commun par 
le RU neE Lemme. Si » eft le plus’ grand divifeur commun 


b à ë s 
de = & dec , fera le pius petit multiple commun 


ju trois nombres a, b, c. 


DÉMONSTRATION. 


ë ai 0 
Puifque #1 divife exaétement — &c, 2 & — feront 


: Ë b 5 
des nombres entiers: ainfi x c eft multiple Fe c, 8 


ab 


als æ eft multiple de < + Mais . eft multiple de 4 


ab $ , x Li 
& de &; donc auffi 1.° Tr X €» Où + x —, c'eft-à-dire, 
m 1/11 


Puifque # eft le plus grand divifeur commun de = & 
dec, sil y a quelqu'autre nombre tel que 2 qui divife: 
exactement ee & «, ce nombre e, quelque grand qu'il 


D'E 4 / S°C ï É N'ICTE’S. 35 
puiffe être, doit néceffairement être plus petit que #; aïnfr 
ab abc 


_ efl plus petit que ——- 


plus petit multiple commun des trois nombres a, b, « 


c , o abc 
; par conféquent 2. LS eft le 


C0 R OL HLAULRUE. 


Si on a / = 1 & m — 1, c'eft-à-dire, fi les trois 
: ; abc . 
nombres 4, b, c font premiers entr'eux, —— deviendra abc; 
m 


ainfi le produit de trois nombres premiers entr'eux eft leur 
plus petit multiple commun. 


C'OMRMNONL LUAVDR EMGÉINLÉ Rh AVES 


Des deux Lemmes précédens, on peut condurre que f 
lon a une fuite compolée de tant de nombres qu'on voudra, 


comme 4, b,c, d, e, f, g, &c. & que / foit le plus grand 
divifeur commun de à & de à, m celui de & dec, 


. b : bcd : 
a celui de © & de d, o celui de © & de 6, p celui 
Im Imn 


de “4 & de f, g celui de LU & de g, &c, 


Îmne Imno 
abcde fo, &c. 
Imnopg, &c. 


a, b,c,d,e,f, &c. 
PRANIRMEREMENTIU TETE 


Soient deux nombres entiers inégaux quelconques 4 & 6, 
dont / eft le plus grand divifeur commun; foient ma & 
nb deux multiples inécaux de ces nombres, je dis que la 
différence ma —— nb où nb — ma de ces multiples, 
ne peut jamais être plus petite que le plus grand divifeur 
commun /. 


fera le plus petit multiple commun des nombres 


DÉMONSTRATION. 


Puifque 7, par la fuppofñition, divife exaétement a & 4, 
E ji 


36 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
 divifera aufli exaétement ma & nb, ma — nb ou 
nb — ma; donc ma — nb où nb — ma ne peut 
être plus petit que /. 


ENOUR OL L'A I R:E 


ma— "ub 


De-h il fuit que ; 


entier pofitif ou négatif. 
PRO D L'É ME EL 


eft néceflairement un nombre 


Deux nombres entiers inégaux quelconques étant donnés, on 
demande deux multiples inégaux de ces nombres, dont la 
différence foit la plus petite qu'il eff poffible, c'efl-à-dire, 
dont la différence foit (par le troifième Lemme) le plus grand 


divifeur commun des deux nombres propofes. 


M. Saunderfon , dans fon Algèbre, a réfolu ce Problème; 
mais la folution qu'il donne, ne m'a pas paru démontrée. 
C'eft pourquoi j'ai cherché la nouvelle méthode que je 
propolfe. 

Cette méthode eft fondée fur deux principes très-élémen- 
taires. Le premier eft l'opération bien connue de trouver le 
plus grand divifeur commun de deux nombres; le fecond 
principe eft cette vérité évidente à quiconque connoît Ja 
définition de la divifion, favoir, que le refte de toute di- 
vifion eft égal au dividende, moins le produit du quotient 
par le divifeur. 


Les deux nombres propolés dans le Problème peuvent 
être fimples ou compofés; s'ils font compofés, ou le premier 
eft multiple du fecond, ou chacun d'eux eft multiple d'un 
même nombre différent de l'unité; ainfr pour réfoudre le 
Problème dans ces trois cas, je vais propofer trois exemples, 
auxquels j'appliquerai les principes précédens. 


DE 5 : SÛC 1 EN«C:E,5 37 
EXEMPLE L 
Que les nombres propofés foient 270 & 117. 


Faifant ufage du premier principe, je divife 270 par 112, 
ce qui donne 2 pour quotient, & 46 de refte; appliquant 
ici le deuxième principe, j'aurai l'équation 
(A) 270 — 2 x 112 — 46. 

Continuant l'opération, je divife 112 par 46, ce qui 
me donne 2 pour quotient, & 20 de refte; d'où je tire 
112 — 2 x 46 — 20. Prenant dans l'équation (A) la 
valeur de 46, & la fubflituant dans la dernière équation, j'ai 
après les réduétions {B) $ x 112 — 2 x 270 — 20. 

La divifion du premier refte 4.6, par le fecond 20, donne 2 
au quotient, & 6 de refle; ainfi 46 Be 20 ==TSÉ, 
Mettant dans cette équation la valeur de 46, prife dans /A), 
& celle de 20, prie dans /B), il vient après toutes les 
réductions {C) 5 x 270 — 12 x 112 = 6. 

La divifion du fecond refle 20, par le troifième 6, donne 3 
pour quotient, & 2 pour refle; donc 20 — 3 x 6 — 2. 
Faifant les fubflitutions des valeurs de 20 & de 6, prifes 
dans /B) & (C), ona (D) 41 x 112— 17 x 270 — 2. 

La divifion du troifième refle 6, par le quatrième 2, fe 
faïfant exactement, c’eft une preuve que le quatrième refte 2 
eft le plus grand divifeur commun de 270 & 112; mais 
l'équation /D) nous préfente deux multiples de 112 & de 
270, qui diffèrent de 2 : cette équation réfout donc le Pro- 
blème propolé. 


REMARQUE. 


Cette équation n'eft pas la feule qui réfolve le Problème. 
En opérant {ur elle, on en peut trouver une infinité d’autres 
qui fourniront de nouvelles folutions du Problème propolé, 

Le fecond membre de l'équation / D) devant néceffai- 
rement être égal à 2, tout ce qu'on peut faire fur elle c'eft 
de lui ajoûter ou d'en fouftraire des quantités qui, prifes 
enfemble, {e réduifent à zéro, 

ù E iij 


38 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Le nombre 2 étant le plus grand divifeur commun des 
deux nombres 112 & 270, fi fon divile par lui les deux 
termes de la fraction 2%, on aura 2 — 26; d'où l'on 
tirera (Æ) 135$ x 112 — 56 x 270 — o. 

Ajoûtant léquation {£) à l'équation / D), jai [F) 
176 x 112 — 73 x 270 — 2, nouvelle équation 
qui réfout le Problème. Si j'ajoûte /Æ) à /F), la fomme 
donnera une troifième équation dont le fecond membre fera 
toûjours 2, & j'aurai par conféquent une nouvelle folution. 
Ainfi l'équation / £) ajoütée continuellement à l'équation 
(D), fournit une infinité de folutions. 

Si lon fouftrait l'équation /£) de l'équation /D), le refte 
fera 39 x 270 — 94 x 142 — 2; équation qui donne 
une nouvelle folution du Problème, & qui en donnera une 
infinité, fi l'on en Ôte continuellement l'équation /Æ). 

On aura donc deux fuites d'équations qui réfoudront toutes 
k Problème; favoir : 


Première fuite. Seconde fuite. 
A1 X 112 — 17 x 270 — 2 39 X 270 — 94 x 112 — 2 
176 x 112 — 73 x 270 — 2 9$ X 270 — 229 x 112 — 2 
311 X 112 — 129 X 270 — 2 1$1 x 270 — 364 x 112 — 2 
426 x 112 — 185 x 270 — 2 207 x 270 — 499 x 112 = À 


&c. &c. 


La première fuite donne tous les multiples de 112, qui 
furpaffent ceux de 270 de la plus petite quantité poffhble; 
& la feconde fuite donne tous les multiples de 270, qui 
furpaffent ceux de 112 de la mème quantité, 


ExEMPLE, IL 
Que les nombres donnés foient 420 & 3, 


Divifant 420 par 3, je trouve 140 pour quotient 
exact ; ce qui me fait connoître que le nombre 3 eft 
le plus grand divifeur commun des deux nombres 420 


& 3. 


DES SCIENCES. 39 
Si au lieu de prendre 140 pour quotient exaét de 420 
divifé par 3, je prends 139, la divifion de 420 par 3, 
donnera un refle 3 égal au divifeur; d'où je tirerai l'équation 
(A)'1 x 420 — 139 x 3 — 3, qui nous donne deux 
multiples de 420 & 3, dont la différence eft égale à leur 
plus grand divifeur commun 3, & qui par conféquent 
réfout le Problème propolé. 


REMARQUE.: 


Divifant les deux termes de la fraction —2- par leur plus 


20 
grand divifeur commun 3, on aura 15 me <— ; d'où l'on 
tirera (B) 1 x 420 — 140 x 3 — 0. 

Si à l'équation / A) Ton ajoûte ou l'on Ôte continuelle- 
ment l'équation /B), on aura deux fuites d'équations, dont 
chacune réfoudra le Problème. La première fuite donne tous 
les multiples de 420, qui furpaflent ceux de 3 de Ja plus 
petite quantité poflble ; & la feconde fuite donne tous les 
multiples de 3, qui furpaflent ceux de 420 de la même 
quantité. 


Premiere fuite. Seconde fuite, 
1 X 420 — 139 x 3 — 3 1.X 3.— 0 x 420 = 3 
2 X 410 — 279 X 3 — 3 I4I X-3l== 1 X 420 — 3 
30N 420 "— 1419 x 3 —13 281 x 3 — 2 x 4120 — 


&c. Mec. 
ExEMPLE IIl 
Que les deux nombres foient: 272) 113. 
3 Divifant 272 par, 153, jai 2 pour quotient, & 46 
de refle; ce qui me donne /4) 272—2 x 113 —46. 
Divifant ï 13 par 46, je trouve 2 pour quotient, & 27 
derefle ; d'oùrje tire (2) $ x 113— 2x272— 21. 
- La divifion du premier refte 46, par le fecond 2 1, donne 


2 au quotient & 4 au refte, & après les fubftitutions, j'ai 
(C)' 5x 272 — 12x113 = 4 


r 


4o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

La divifion du fecond refte 21, par le troifième 4; 
donne $ au quotient, & 1 pour refle, & de plus, 
(D) 65 x.123=2027%x 272 = 1. 

Le refte de la dernière divifion étant 1, je fuis afluré 
que les deux nombres 272 & 113 nont point d'autre 
divifeur commun que l'unité, ou qu'ils font premiers entre 
eux; ainfi le Problème eft réfolu par l'équation /D) qui 
nous fournit deux multiples dont la différence eft 1. 


REMARQUE 


1 faut faire pour ce troifième exemple fa même remarque 

ue l'on à faite pour les deux premiers. 

Divifant les deux termes de la fraction 22 par leur plus 
grand divifeur commun +, on aura Li = +4; d'où l'on 
tire (E) 272 x 113 — 113 x 272 = 0. 

Si à l'équation / D) jajoûte & jôte continuellement 
l'équation /Æ), j'aurai deux fuites d'équations qui réfoudront 
toutes le Problème. La première fuite donnera tous les mul- 
tiples de 113, qui furpaflent de 1 ceux de 272; & a 
feconde donnera tous les multiples de 272, qui furpañfent 
de r ceux de 113. 


Première fuite. Seconde fuite. 


1 86 x 272 — 207 x 113 

337 X 113 — 140 *x 272 199 x 272 — 479 * 113 

Go9 x 113 — 253 x 272 L 312 X 272 — 9$1 x 113 
&c. &c. 


CoOROLLAIRE. 


ES x 113 — 27,x 272 


On voit par les trois exemples précédens, & par les 
remarques qui les accompagnent, que deux nombres entiers 
pofitifs quelconques d' & d”, dont d' eft le plus grand, 
étant donnés, on parviendra toüjours à trouver deux équa- 
tions, dans lefquelles deux multiples inévaux de ces nombres 
auront pour différence leur plus grand divifeur commun, 
que je fuppofe être D’; que dans l'une de ces équations 

le 


DES SCIENCES. 4T 
le multiple du plus grand nombre furpañlera celui du plus 
petit, & que dans l'autre, le multiple du plus petit nombre 
furpafféra celui du plus grand, ceft-à-dire, qu'on aura 
deux équations de cette forme : 

? M'd' a ph) md" D' 
M'd" — m'd' 1 & A 
Il eft clair auffi, par les mêmes exemples, que dans {a 
première de ces équations, #1° fera toûjours plus petit que 
d", & que dans la feconde, A7" fera moindre que 4”. 


PR -ORLÉ MIE. I L 


Trouver des nombres entiers pofitifs, tels que fi lon divife 
chacun d'eux par deux divifeurs pofitifs donnés, d' & d”, 
dont d' efl le plus grand, les refles foient refpedivement deux 
nombres inégaux donnés x' à" x". 


Il |] 


SHONLHUNELL ON. 


M. Saunderfon a réfolu ce Problème dans fon Algèbre; 
mais la folution qu'il donne eft défetueufe par plufieurs 
endroits. 1.° Elle eft fondée fur celle du Problème précé- 
dent, qui n’eft pas démontrée. 2. Elle conduit M. Saun- 
derfon à trouver des nombres négatifs au lieu des nombres 
pofitifs qu'on demande; & pour que ces nombres négatifs 
fatisfaffent au Problème, il eft obligé d'y faire une correétion. 

© L'auteur Anglois ne trouve pas immédiatement par fa 
méthode le plus petit des nombres demandés. Ce plus petit 
nombre étant préférable aux autres, puifqu'il donne une 
folution plus fimple, doit naturellement être trouvé avant 
eux. 

J'ai cherché une nouvelle folution qui n'eût aucun de ces 
défauts. Voici la manière dont je procède. 

Soit g un des nombres qu'on cherche, & D' le plus 
grand divifeur commun des deux nombres donnés d' & d”. 
Puifque D’ divife exactement d’, & que d' divife exacte- 
ment g— r', il faut que D’ divife exaétement g — r'; 

Say. étrang. Tone IV. . 


42 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

de même puifque D” eft un divifeur exaét de d”, & que d” 
left de g — r', D' doit divifer exactement g — 7", 
Ainfi D' divife exaétement les deux nombres g — r' & 
g — 1", & par conféquent aufli leur différence r' — 7° 
ou r" — r', felon que r' eft plus ou moins grand que r”. 


Dedà il fuit que fi le Problème eft poflble, _ È 2 ou 


7" 23 r 


doit être un nombre entier pofitif. 


g —7r Dr : . aie ES 
<—— eft un nombre entier pofitif que je puis égaler à un 
nombre indéterminé A1" ; ce qui donnera g = M'd' + r’, 
£ ex 7" 
d" 


nombre indéterminé 41"; d'où je tire g = M'd" + r", 


eff aufli un nombre entier pofitif que je puis égaler au 


Comparant les deux valeurs de g, j'aurai 
Md' + 7 = MAR x". 

Si l’on fuppole r’ > r”, on aura M'd' < M'd”". Ainfi 
dans le cas où le premier refte r’ eft plus grand que le 
deuxième 7”, le multiple de d' contenu dans le nombre 
cherché g, doit ètre plus petit que le multiple de 4” contenu 
dans le même nombre. 

Si l'on fuppofe r’ < r”", on aura M'd' > M"d". Aïnfr 
dans le cas où le premier refle 7’ eft plus petit que le 
deuxième 7", le multiple de d' contenu dans le nombre g, 
doit être plus grand que le multiple de 4" contenu dans le 
même nombre. 

En opérant fur les nombres 2’ & 4” de la manière expliquée 
dans le premier Problème, on parviendra à ces deux équations : 

(A) M'd' — m'd' = D' 
(B) M'd” — m'd' — D". 

1. Je fuppole r’ > 7”. Nous venons de voir que dans 
ce cas on a M'd' < M'd" ; mais l'équation (B) offre un 
multiple de 4” plus petit que celui de 7”. Je me fers donc de 
cette équation pour réfoudre le Problème dans ce premier cas, 


DYE:S4, SNC TE NICENS 43 

De (B) on tie M'd" — m'4' + D', Si l'on diviloit 
chaque membre par d', le refte feroit égal à D’. Afin qu'il 
foit r’, il fuffit de multiplier cette équation par PL ce qui 


donnera /C) M'd" x Le —> md 4 e —+ r'; équation 
dont chaque membre eft divifible exaétement par d", & 
laiflera r' pour refte, fi on le divife par d’. 

De /B) on tire auf M4" — D' — m'd', Si l'on 
divifoit chaque membre par d", le refle feroit — D. 


Afin qu'il foit r", je multiplie l'équation par — ne & 


jai (D) M'd" x — FF + 7 = md! x — Si 
équation dont chaque membre eft divifible exaétement 
par d’, & laïflera r“ pour refte, fi on le divile par d”, 
Ajoûtant /C) à {D}, j'aurai 
; ; M —7r" 
(£) M'd" x . 
équation dont chaque membre fatisfait aux deux conditions 
du Problème dans tous les cas où r’ eft plus grand que”. 
Car le premier membre étant divilé par d”, laïflera r" pour 
refle; & puilqu'il eft égal au deuxième, fi on le divife par 
d', on aura 7’ pour refle, 


Puifque D° eft le plus grand divifeur commun de 


da“ 


+ 1" = md! x 


d'! D" \ E 
& d"', on aura T'ES d'où l'on tire 
"Dr 1 


2 MAT PT PR 
(FE) re * D Er À d'; équation dont chaque membre 


eft divifible exactement par d” & par d’, 


Si le premier membre de /F) étoit continuellement 
ajoûté au premier membre de /Æ), il en réfülteroit une 
fuite infinie dont chaque terme réfoudroit le Problème. 
Plus on séloigneroit du premier terme de cette fuite, & 
plus les nombres qu'elle donneroit feroient compolés : ainff 
F ï 


44 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

le premier terme devroit être pris préférablement aux autres, 
fi l'on étoit affuré qu'il fût le plus petit des nombres poffibles; 
mais rien ne détermine ce premier terme à être le plus petit 
des nombres qui fatisfont au Problème, & on en aura d'autres 


" 


M —7r A 
FR on peut O(Er 


[4 
= , fans que le refte ceffe d'être un entier pofitif. 


évidemment plus petits, fl de M" x 


Pour favoir combien de fois on peut faire cette fouftrac- 
4 “# ( 
tion, il fuffit de divifer A7" x —— par et Je fuppofe que 
4 [2 ” 

Q’ eft le quotient; {A"x>x — — Q'x +) KA EE: 
fera donc la formule qu'il faudra employer pour trouver le plus 
petit nombre pofitif, qui, divifé par deux divifeurs pofirifs 
donnés d' & d', dont d' eff le plus grand, laiffera pour reftes 
deux nombres donnés x' © x”, dont x' ef? fuppofé le plus 
grand. 

Ce plus petit nombre étant trouvé, fi on lui ajoûte con- 

 Jn 
tinuellement Ts qui ( Lemme premier} eft Je plus petit 
multiple commun des nombres d' & 4”, on aura autant 
d’autres nombres qu'on voudra qui réfoudront le Problème. 

2 Je fuppole r’ < 7". Nous fivons qu'alors on a 
M'd' > M'd", Mais léquation (4) nous préfente un mul- 
tiple de 4’ plus grand que celui de 4”; aïnfi j'emploie cette 
équation pour réfoudre le Problème dans ce cas. 

De /A) on tire M'd' — M'd" + D". Si on divi- 
foit chaque membre par d”, le refte feroit D’. Afin qu'il 


. . . . 7: . r + 
foit 7”, je multiplie Féquation par =>; ce qui donne 
r" y" ÿ s 
(G) Md'x =; = m'd" x =; + r", équation dont 


chaque membre eft divifible exaétement par d', & laiffera 
r" pour refle, fi on le divife par 4”. 

De /A) on tire aufi M4 — D' — m'd". Si Von 
divifoit chaque membre par d', le refle feroit — D, 


p'Eus : SNC 14€: N° C Es. 45 


Afin qu'il foit r', je multiplie l'équation par — >; ce ss 
7 11 
donne (4H) Md'x— = +r = md x — m1 , 


équation dont chaque membre eft divilible exactement par 
d", & donnera r' pour refte, fi on le divife par d’. 
Ajoûtant /G) à (H), j'aurai 
1 y M —r ri ess nn jJn M —r 
RUE Omer vire RL =; "7 X D 
équation dont chaque membre fatisfait au Problème dans les 
cas où r” eft plus grand que r'. Car le premier membre 
étant divifé par d', donnera r' pour refte; & comme il eft 
égal au deuxième, fr on le divile par d”, il reftera r”. 


7 
+7; 


Ajoûtant continuellement au premier membre de cette 
d' 
; + D, AE rs 
équation le premier membre decelle-ci, +, x 4 = xd" 
on auroit, comme ci-deflus, une fuite infinie, dont chaque 
terme fatisferoit au Problème, mais d’une manière d'autant 


moins fimple, qu'il feroit plus éloigné du premier terme. 


Je fuppofe que Q" repréfente le nombre de fois que = 


: 7 LA tin 
eut être Ôtéde AL x ——— , fans que le refte A1’ x 
P D q 


d' no à" : 
— Q" x — cefle d'être un entier pofitif, 


D — 7» 
2’ 


—7r (1 d ! ’ 
(Mix Q * D) d' + 7 fera la formule 
dont il faudra [e fervir pour trouver le plus petit nombre, qui, 
divifé fucceffivement par deux divifeurs pofitifs donnés d' #& d", 
dont d' eff le-plus grand, donnera pour refles deux nombres 
pofitifs donnés x° 7 x", dont x" eff fuppofé le plus grand. 

Ce plus petit nombre étant trouvé, fr on lui ajoûte conti- 
d à’ É . 
nuellement =: plus petit multiple commun de d & 4”, 
on aura autant d’autres nombres qu'on voudra qui réfoudront 
le problème Propolé. 
F ii 


46 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'AÂCADÉMIE 


C'ORMORAENA TRE UL 
. :\ — rt. d' 
Si dans la première formule {A" x —— — Q" x ) 


71 


x d' + r", on fuppole r = 1, r" = 0, & que les 
divifeurs d' & d” foient des nombres premiers, en forte que 
D'foit — 1, cette formule fe réduit à 41" d”, parce que 
M" étant plus petit que d', Q' devient nul: ainfi 41" d" 
n L P . . . [y ! ä 2 
exprime le plus petit nombre, qui, divifé par d’, laifle # 
de refte, & qui divifé par d”, ne laiffe rien, les deux nombres 
d' & d" étant fuppofés premiers entr'eux. Si l’on multiplie 
| ppols p eux: Si lon mulipli 
M d" par un nombre S$ plus petit que d’, le produit 
Pa qe RESSAPENE A P 
M" d"S étant divilé par d’', donnera S pour refte, & fera 
P 1/4 P 
divifible exactement par d”. 


1 Pr Ce" 
Si dans la feconde formule /47” x Sie FO 0 

x d'+-r', Von fait — 1 &r'— o, & qu'on fuppofe les 

deux divifeurs d' & d” premiers entr'eux, ou D'— 1, cette 


formule fe réduira à #1’ d”, puifque A7° étant moindre que 
d”, Q" devient — o. Ainfi les deux nombres d' & d' 
étant premiers entr'eux , A7” d' exprime le plus petit nombre, 
qui, divifé par d”, donne 1 de refle, & divifé par 4! 
ne laifle rien ; & fi L eft moindre que 4”, M’ d' L étant 
divifé par d", donnera Z de refte, & fera divifible exacte- 
ment par d’. 


Ajoûtant A’ d'L avec M'd"S, la fomme M'd'S 
+ M'd' L étant divifée par d', donnera S pour refle, & 
étant divifée par d”, laïflera L de refle. Puifque les deux 
nombres d' & d" font premiers entreux par fuppofition, 
leur produit d'4” eft leur plus petit multiple commun. 
Si Q eft le nombre de fois que d' 4" eft contenu dans 
M'd'S+ Md'L, M'd'S + M'd'L—Qdd" 
exprimera le plus petit nombre, qui, divifé par d', laifle S 
de refte, & qui divilé par d', donne ZL pour refle. 


LDrEUS À SCT ENNICHENS. 47 


C'otRto Li tAix RE UE 


Pourvû que d” foit un nombre premier par rapport à d” 
M' d' exprime le plus petit nombre, qui, divilé par d”, 
donne 1 de refle, & qui divifé par d', ne laïffe rien; ainfi 
d' peut être le produit de deux nombres, tels que ce produit 
& le divifeur 4” foient premiers entr'eux. Suppofons, par 
exemple, que d' — 19 x 15 — 285$, & que d"— 28, 
les deux nombres 285$ & 28 feront premiers entreux, & 
on trouvera M'd' — 4845; & fi S'eft moindre que 
ou 28, 4845 S étant divifé par 28, donnera S de refle, 
& fera divifible exaétement par 19 & par 15. 

PRTON RIT d—— 28 X LS > 420, & d' = T9: 
M d' deviendra 4200; & fuppofant L moindre que 19, 
4200 L étant divilé par 19, donnera ZL. de refle, mais 
divilé,par 28 & par 15, ne laifféra rien. 

De même, en fuppofant d' — 28 x 19 = 532, & 
d" — 15, on trouvera M d' — 6916; & fuppolant Z 
moindre que 15, 6916 Z étant divifé par 15, donnera Z 
de refte, & fera divifible exactement par 28 & par 19. 


Ajoüûtant ces trois différentes valeurs de A1’ d', leur fomme 
4845 S + 4200 L + 6916 J étant divifée fucceñive- 
ment par 28, 19, 15, laiflera refpectivement S, L, 7 de 
refte. Les trois nombres 28, 19, 15, étant premiers entre 
eux, leur produit 79 80 eft leur plus petit multiple commun. 
Si donc g eft le nombre de fois que 7980 eft contenu 
dans le nombre 484$ $ + 4200 L + 69167, on 
aura 4845 S + 4200 L + 69161 — 7x7980 
pour le plus petit nombre, qui, divilé par 28, 19 & 15, 
hifle refpectivement S, L, / pour reftes. 


Pour S, on peut prendre tout nombre moindre que 28, 


pour ZL tout nombre plus petit que 19, & pour Z tout 
nombre moindre que 15. 


48 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
EXEMPLE L 


On demande le plus petit nombre entier pofitif qui, divifé fuc- 
ceffivement par 270 © par 112, done FOR ENEE 
27 © 9 pour refles. 


Je trouve par le premier Problème les deux équations 
fuivantes, dont chacune répond à léquation générale qui 
eft vis-à-vis. 

41 X112 —17x270—2 M'd'— md — D" 
39 x*270 —94x112—2 M'd'—m d'—=D'; 


LU 


Ain D' = 2; & puifque LE — 2772 ==? 


eft un entier pofitif, le Problème propolé eft offible. 


Comme le premier refte 7” eft plus grand que Ie 
deuxième 7”, je fais ufage de la première formule 
(M %* —— — Q'x 2) xd" + r" 

Ici M'— 41 & M" x - _u — ATX 0 RES 


2 


de plus, _ —= 222 = 135 ; ainf divifant 3 69 par 135; 


on trouvera, pour le refte de Ia divifion, le nombre 


# — 7" d’ ñ 
99 = M'x = — Qu & par conféquent 
9" d' 
(M'x——Qx-)xd + Pop x 112 


+ 9 — 11097. Le nombre 11097 eft donc le plus 
petit, qui, divilé par 270 & par 112, laifie 27 & 9 
pour refles. 

Ayant fü, depuis la compofition de ce Mémoire, que 
M. Euler avoit travaillé fur la même matière, j'ai confié 
fon Mémoire, qui fe trouve parmi ceux de Péterfbourg ; 
Tome V11, page 46. En appliquant à l'exemple précédent 
la règle donnée pour générale par ce Géomètre au 5. X1v.° 

de 


DhE‘S) SSUC'I/EUNMCUELS, 49 
de fon Mémoire, je trouve 234 x 112 + 9, qui n'eit 
pas le plus petit nombre demandé, pi qu'on en peut ôte le 
plus petit multiple commun de 270 & 112, qui eft 
1315 % I 12: 

ExXEMALEt IT 


On demande le plus petit nombre, qui, divifé par 420 & 
par 3, laifle 46 © 1 de reftes. 


Par le premier Problème on a les deux équations fuivantes 

correfpondantes aux équations générales qui font vis-à-vis. 
l “ 8 q 

Ex 420—139x  3—=3- M'd — m'd" — D' 
1x 3— Oox420—3 M'd'— md = D; 
l Le pt — 7" 46 —: Vie 
É NY) = EN c'e De = 3 —=!$- 

Le premier refle étant plus grand que le deuxième, 
J'emploie la première formule 


1 f—7r ! d' (1 " 
(Mk — Qx x) x d” + r", dans laquelle 
mettant les valeurs convenables, je trouve 46 pour le nombre 


demandé. 


On voit par cet exemple, que toutes les fois que le 
premier divifeur d' fera multiple du deuxième 4", on aura 


d' — D & M" — 1, en forte que la formule 
1 M —r" ! d' 1 " ie CÉCORE RE 
(M" * RL LU TN Alt © fe réduira à 
1x(r— 1") — Q'd'+r'; & comme 7 — 7" 
eft toûjours plus petit que d', Q' fera — o. Ainfi 
1xfr—"r") — Q'd + r" deviendra = 7” qui 


fera le plus petit nombre, qui, divifé par d' & par d”, 
laifle »’ & r" pour refles. 

M. Euler prouve auffr dans fon Mémoire, que lorfque 
Jun des deux divifeurs eft multiple de l'autre, le plus petit 
nombre demandé eft-égal au premier refle donné ; muis ce 
cas n'elt pas renfermé immédiatement dans la règle qu'il 
propole comme générale. 


Sav. étrang. Tome 1V, . G 


so MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
ExEMPLE IIL 


On demande le plus petit nombre, qui, divifé par 272 à 
par 113, donne 9 © 39 pour refles, 


Le premier Problème donne les équations fuivantes : 
6$ x113— 27x272—1 M'd'— md = D"; 
86x272—207x113—=1 M'd'— md =D; 
AUD —— Loic ame — FT — 30 étant un 
nombre entier pofitif, le Problème eft poffible. 

Puifque le premier refle eft plus-petit que le deuxième, 
je fais ufage de fa feconde formule qui ef 
(M x» es Q" x = x d' + r', dans faquelle 
fubflituant les valeurs convenables, je trouve 25577 pour 
Je plus petit nombre demandé, & c'eft aufli celui que donne 
la règle de M. Euler. 


On peut faire du Problème qui vient d'être rélolu, des 
applications utiles; c'eft ce qui paroîtra par les trois queflions 
fuivantes. 


PREMIÈRE QUESTION. 


On demande l'année du foigième fiècle de l'Ére chrétienne, 
dans laquelle le Cycle folaire a été 8, à le Cyde 


lunaire x 0. 


Si la première année du Cycle folaire avoit commencé 
avec la Naïflance de J. C. en divifant une année quelconque 
de l'Ere Chrétienne par 28, qui eft la durée d'un cycle, 
on verroit combien il s'eft écoulé de cycles depuis cette 
Naiflance, & le refte de la divifion que je fuppole être r', 
marqueroit l'année du dernier cycle, dans lequel fe trouveroit 
J'apnée propofée ; & sil ne reftoit rien, l'année propolée 
feroit la vingt-huitième ou la dernière du Cycle folaire. 


D ES. SiC I-E NuC.ELs. St 
Mais la première année du Cycle folaire dans lequel 4. C. 
eft né, a précédé cette Naïflance de 9 ans ; ainfi le véritable 
Cycle folaire fera r° + 9 dans le cas où r° + 9 ne fera 
pas plus grand que 28, & r'° + 9 — 28 dans le cas 
où r'—+ 9 fera plus grand que 28. On aura donc dans 
le cas préfent r + 9 — 8, où r + 9 — 28 — 8. 
La première égalité doit être rejetée, puilqu'elle donne- 
roit une valeur négative de 7. 
La deuxième égalité donnera r! — 27. 


Comme le Cycle lunaire dans lequel J. C. eft né a com- 
mencé un an avant cette Naiflance, fi l'on divife une année 
quelconque de l'Ére Chrétienne par 19, qui eft la durée de 
ce Cycle, & que le refte de la divifion foit r",r" + t 
fera le Cycle lunaire pour cette année, dans le cas où il ne 
fera pas plus grand que 1 9-+ Mais s'il arrive que r" + r 
foit plus grand que 19, 7" + 1 — 19 fera le Cycle 
lunaire. On aura donc dans le cas préfent r" + 1 — 10, 


OÙ F7" + 1 — 19 — 10. 
La deuxième équation donneroit r" — 28; ce qui eft 
impoffble. 


La première équation donnera " = 9. 
Ï! sagit donc de trouver un nombre, qui divifé par 28 
8 5 q P 
& par 19, laïfle 27 & 9 pour reftes. 
On aura par le premier Problème ces équations : 

P Ï q 
3X19— 2x 281 17x28 —25x19—1 
M'xd"—m d' =D"  M'd' — m'd" —D,, 

qui donnent D'— 1 & M" — 3. 
Le premier refle étant plus grand que le deuxième, j'em- 


ploie la formule / A1" x MELLE CS Qx=)xd"' + 7 


qui me donne $03 pour le plus petit nombre, qui, divifé 
par 28 & par 19, laifle 27 & 9 pour refes. 

L'année $03 eft donc la première de l'Ére Chrétienne 
dans laquelle le Cvydle folaire a été 8, & le Cycle lunaire 10. 


Maïs comme l’année demandée eft une de celles du feizième 
G i 


LL 


52 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fièclé, à s03 j'ajoûte deux fois le plus petit multiple commun 
de 28 & 19, qui eft 5 32 ; & la fomme 1 ; 67 eft f'année 
du feizième fiècle, dans laquelle le Cycle folaire a été 8, 
& le Cycle lunaire 10. \ 


SECONDE QUESTION. 


Le Cycle folaire étant de 8 dr le Cycle lunaire de 10, trouver 


l'année correfpondante de la Période vitlorienne. 


La période viélorienne étant le produit des deux cycles 
folaire & lunaire entiers 28 & 19, il n'y a qu'une année 
de cette période qui puifle avoir en méme-temps les deux 
Cycles donnés. Il s'agit donc de trouver le plus petit nombre, 
qui divifé par 28 & par 19, laifle 8 & ro de refles. 

Je reprends les deux équations précédentes. 
3X19 —2xX28—;r1 17x28 — 25 x19— 1, 
M d'amande 
d'où je tire M'— 3, M — 17. 

Subfituant les valeurs de A1" & M, d',d", d'd", & 
mettant 8 pour S & 10 pour Z dans la formule 47" d" 
S + M'd'L — Qd'4d" du premier corollaire du 
fecond Problème, je trouve 428 pour l'année demandée de 
la période victorienne. 

Quels que foient les Cycles folaire & lunaire S & L, les 
nombres A1’ & M", d' & d" feront toûjours les mêmes: 
ainfi 41" d” fera conftamment — 57, & M'd' — 476. 
La formule précédente deviendra donc $7$ + 476L 
— Q x 532, qui donne une règle générale pour trouver 
l'année de la période viétorienne , lorfque les Cycles font 
connus. 


Il faut, fuivant cette règle, multiplier par 57 le cycle 
folaire S, & par 476 le cycle lunaire L: la fomme de ces 
produits étant divifée par 532, le refte de la divifion 
donnera l'année demandée. 


DE US 1 SAC 11 E NC HER: 53 
TROISIÈME QUESTION. 


Étant donnés les trois Cycles du Soleil, de la Lune & de 
l'Indiélion, on demande l'année correfpondante de la Période 
julienne à de l'Ere chrétienne. 


1.” La période julienne étant le produit des trois Cycles 
entiers 28, 19 & 15 du Soleil, de la Lune & de lIndic- 
tion, il n’y a qu'une année de cette période qui puiffe avoir 
les trois Cycles donnés; & f1 le nombre qui exprime cette 
année ft divilé par 28, 19 & 15, les reftes doivent être 
les Cycles fuppofés. Si donc S, L,  repréfentent les Cycles 
donnés, pour déterminer l'année demandée de Ia période 
julienne, il faut trouver le plus petit nombre qui, divifé par 
28,19 & 15, laifle refpectivement S, L, 7 pour refles. 
On a vü dans le deuxième corollaire du fecond problème, 
que ce plus petit nombre eft 
4845 S + 4200 L + 69161 — gx7980. 

M. Keill, dans fes Leçons d’Aftronomie, trouve pour 
les deux queftions précédentes les mêmes formules que moi: 
on voit qu'elles ne font ici qu'un corollaire de la méthode 
générale que j'ai donnée. 

2° On fait que la première année du Cycle folaire, dans 
laquelle J. C. eft né, a précédé de neuf ans cette naïffance; 
que la première année du Cycle lunaire correfpondant à 
commencé un an, & la première année du Cycle de l'In- 
diétion trois ans avant cette naiffarce : ainfi la première année 
de l'Ére chrétienne a 10 de cycle folaire, 2 de cycle lunaire, 
& 4 pour cycle de Fndiction. Mettant 1 0 pour $, 2 pour 
L, & 4 pour / dans la formule générale 
4845 S + 4200 L + 69167 — 3x7980, elle 
donnera 4714 pour l'année de la période julienne corref 
pondante à la première année de l'Ére chrétienne. I s'eft 
donc écoulé 471 3 ans de la période julienne avant la naif- 
fance de J. C. Si l'on ôte 471 3 de la formule précédente, 
le refte ‘ 

- G ii 


54 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
4845S+4200L + 69161— gx7980— 4713; 
donnera l'année de l'Ére chrétienne, dont les trois cycles, 
S, L, 1, font fuppofés connus; mais 
4713 — 7980 — 3267. Ainfi l'on aura 

4845 S + 4200 L+ 691674 3267 — [q + 1) x 7980, 
ou pluflôt, en fuppofant 9 + 1 = 9’, 
4845S8+ 42001 + 69161+ 3267 — g'x7980, 
pour la formule dont il faut fe fervir pour trouver l'année 
de l'Ere chrétienne, dont les trois cycles S, L, 7, font 
donnés. 

Suivant cette formule, il faut multiplier le Cycle folaire S 
par le nombre 4845, le Cycle lunaire L par le nombre 
4200, le Cycle de l'Indiétion Z par le nombre 6916; 
ajoûter ces trois produits avec le nombre 3267, divifer 
cette fomme par 79 80, le refte de cette divifion fera l’année 
demandée de l'Ére chrétienne. 


PURE BAR EME" TTL 


Trouver des nombres entiers pofirifs, tels que fi chacun d'eux 
eff divifé par trois divifeurs pofitifs donnés d', d", d", dont 
def? le plus grand, les refles foient trois nombres donnés 
r',1",1, dout les deux premiers font fuppofes inégaux. 


SOLUTION. 


. * V4 
“Soit À un des nombres demandés : on aura À — 1" d" 
[144 


—+ 7°, M" étant fuppofé un nombre entier pofitif. De 
plus, fi D” eft le plus grand divifeur commun de d’& d", 


PAM EL , un, pd'd" 
5 fera divifible exaélement par d' & par d”, DT 


le fera auf, p étant un nombre entier. 
Suppofons g = M'd'+ r — M"d" + r" comme 
d' 4" Arbre 
Pr + g étant divifé par 
d', donnera 7’ pour refle; & étant divifé par d”, laïffera »" 


dans le dernier Problème, & 


DIEUSUNS © 'EN ER S s5 
de refle; & cela, non feulement lorfque p fera un entier 
pofitif, mais encore lorfque p fera — o. 

Si l'on fuppole M & M” les plus petits qu'il eft poffñble, 
g fera le plus petit nombre, qui, divifé par d' & par d”, 


[2 


donnera r’ & r” pour refte, & fera toûjours moindre que 


DNI 


Mais fuivant l'énoncé du Problème, il faut que le nombre 
q 
demandé # étant divifé par d', d”, d"',laïfle r' r",r"° pour 
reftes. Ainfr lon doit avoir en même-temps ces deux égalités 
d' d" j h FF 
— + g&h= M" d" + r"ou EE — p, 
D' 


ha 


BE = pp 


4n 
r 


Si l'on veut que 4 foit le plus petit des nombres demandés, 
les mêmes équations auront lieu. Aïnfi pour réfoudre le Pro- 
blème propolé de la manière la plus fimple, il faut commen- 
cer par chercher le plus petit nombre g, qui divifé par d’ 
& d", donne r' & r" pour refles: enfuite il faut trouver le 


d' d' 


plus petit nombre #, qui divifé par ——, plus petit mul- 


LA 


tiple commun de d’ & d", donne g pour refte, & qui divilé 
par d”", laïfle r"’ de refte. 


Ce plus petit nombre 4 étant trouvé, fi on lui ajoûte 
continuellement le plus petit multiple commun des trois 
nombres d', d', d'', on aura autant d’autres nombres qu'on 
voudra, dont chacun réfoudra le Problème. 


REMARQUE. 


On fait, par le deuxième Problème, que pour avoir le 


4 r! > 7" 2 4 : 
nombre g, il faut que —— ou —— foit un nombre 
entier pofitif, D” étant le plus grand divifeur commun de 
£ + y! 7" 2 £ 


d' & d”, & que pour avoir 4, doit être 


ou 


(e) 


56 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


un entier pofitif, en prenant © pour le plus grand divifeur 


d' d' 5h 
commun de = &c'de 7”. Ù 


De-là il fuit que fi le Problèmé précédent eft poffible, 


r 7" 


D! 
négatifs. 


y J ” Ë ; 
& <—— doivent être des entiers pofitifs ou 


IH peut arriver que la première condition ait lieu, fans 
que la feconde foit remplie: pour lors le calcul qu'on a fait 
pour trouver g, ne fert qu'à prouver que le Problème propofé 
eft impoffible. N'y auroit-il pas quelque moyen de s'épargner 
un calcul qui peut être très-long, & qui, quand il ne le 
feroit pas, paroitroit toüjours tel à caufe de fon inutilité? 
Voici comment je m'y prends pour trouver ce moyen, qui 
n'a point été donné par M. Euler, dont la méthode expofe 
à faire en pure perte beaucoup de calcul. 

pdd" 


Puifque À + 8— M"d" + r", & que, 


g= Mid + r = M'd" + 1", h fera donné par 
chacune des trois équations fuivantes : 


d'd' 
2 MT A HrHE, 
d'd" 
== M'd" { r" L es 3 


V Fri TANT | PA 


Comparant la première valeur de # avec la feconde, j'ai 
gs —r" —= M'd" — M'd'; équation dont chaque 
membre fera pofitif ou négatif, mais ne peut jamais être 
zéro, puifque r' & r” font fuppolés inégaux. Mais D’ étant 
M'd' se M'd!' 

; eft 


par le corollaire du troifième Lemme un entier pofitif ou 


le plus grand divifeur commun de 4’ & 4”, 


>» De — r" 20 ‘ à 
négatif; donc auf —— doit être un entier pofitif ou 


négatif. 
La 


DÉS SCT ÉINICRE S 
La première valeur de 4, comparée avec la troifième, 


1 “1 HE jt 1 7 ? d' d* 
donne r— #" — M"d" — M'd'  — 
’ Hi ju 1 y! d Ts & pd'd" 
M" d"', M! d' font des entiers, - 
fi p eft entier, ou fera — o fip — o; ainfi, ou 
chaque membre de l'équation précédente fera un entier, 
foit poftif, foit négatif, ou il fera — 0. De plus, fi 


; mais 


le fera auffi, 


D" eft le plus grand divifeur commun de d' & d", 


y. 4 d'" PES M V5 "4 » d' d' s 
ne & D 7 font ou entiers ou nuls. Donc 
. 
M" d" Fans, M d' pd! d' L 7! 2: 7" 
D° = TD Dr ? & fon égal D" , eft un 
entier pofiif ou négatif, où — o. 


La comparaifon de la deuxième valeur de 4 avec la troi- 

$ d' d' 
fième, donnera #" —#" — M" d" — M" d" — = 5 
équation dont chaque membre fera — o, ou entier pofitif 
ou négatif; & fi D" eft le plus grand divifeur commun de 


é M" d"' = M d" pd’ d" 5 r" ATY 7" 
U Q- Jui > 
TS a ie pa à lon él 
fera un entier, foit pofitif, foit négatif, où = o. 
d + r" = 7” r :2 #3 F 
Sur quoi il faut obferver que fn rer 
2, LU r! Le 7! r Vis 7" | 
doit être un entier; & que fi ne de fera 
néceflairement entier; car fi lon avoit tout à la fois 
PA AS FT 7 F s” y" 


pr 0 &—-— oo, il en réfulteroit = 7", 


ce qui eft contre la fuppofition. 

Ainfi dans le cas où il y a trois divifeurs & autant de 
reftes, & où par conféquent le nombre demandé eft donné 
par trois équations, trois conditions font néceflaires pour que 
le Problème propolé {oit poffible , c'eft-à-dire autant de con- 
ditions qu'il y a de manières de comparer deux à deux ces 
équations; & ces conditions font telles, que D' étant 

Say. étrang. Tome IV. FI 


«8 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
le plus grand divifeur commun de d' & 4", D" celui de 
d' & d"', D" cedui de d” & d”, le premier des nombres 
pi np" pr" 
M M T2 
foit pofitif, foit négatif; les deux autres peuvent être des 
entiers pofitifs ou négatifs, ou Fun des deux entier & l'autre 
= 0s 

Suivant M. Saunderfon , qui a donné du Problème pro- 
pofé une folution toute différente de la mienne, les nombres 
fers = Aye ms PE _… doivent néceffairement être tous 
des nombres entiers. Je viens de démontrer que 1e Problème 
eft poffible quand deux feulement de ces nombres font en- 
tiers, pourvû que l'autre foit — o. La méprife de cet Auteur 
vient de ce qu'il a fuppofé gratuitement que les trois reftes, 


sl U1l 


r,r,r', font inégaux. 

En adoptant la règle angloife, il y auroit une infmité de 
Problèmes qu'il faudroit regarder comme impoffibles. De ce 
genre feroient ceux qui font l'objet de la queftion fuivante. 


, doit être néceffairement entier, 


QUESTION. 


On demande le plus petit nombre qui, divifé fucceffivement par 
105, 40 © 36, donne refpeélivement 0, 15 & 15 


pour refles. 
SO LIU T TION. 


"005, V2 TA, d'in 30 
. IEEE (UPS TES WIRE 2e 

Ici4 7 — 0, A Te M 

1 7 TSI d 

DEEE Dit Di £: 

: ne PPT Ven rl ro 
np CRU Er 

D" TT 


Comme il n’y a que les deux premiers nombres qui foient 
entiers, & que le troifième == 0, M. Saunderfon auroit 


DES SCIENCES. F 
régardé cette queftion comme infoluble; & cependant, fuivant 
ce que j'ai démontré, c'eft tout le contraire. 

Appliquant ici la méthode du Problème précédent, je trouve 
735 pour le plus petit nombre demandé. 

M. Saunderlon fuppofe, pour deuxième exemple de cette 
queftion, que les divifeurs d', d”, d", font 9, 8, 6, &il 
avance que fi le Problème eft poffible, les reftes TEL TS 


FA Es p" r" IE r" s A À 
» & foient l'un & l'autre 


des entiers. On vient de voir que l'un étant entier, l’autre 
peut ètre = o. 
Pour troifième exemple de la même queflion, M. Saun- 


derfon fuppofe les divifeurs d', d', d'" égaux aux nombres 
PF . 1 (LA g . 
6, 5, 4; &, felon lui, les reftes '’, r’, r”' doivent être tels 


doivent être tels que 
2 


73 


foit un entier. J'ai prouvé que le Problème froit 


poffible quand = 


& r° — r" foient entiers. 


Cette queflion auroit pà être réfolue d'une manière plus 
fimple, en cherchant, par le deuxième Problème, le plus 
petit nombre qui, divifé par 106$, laifle o de refle, & qui, 
divifé par 360, plus petit multiple commun de 40 & 36, 
donne 15 de refle; car tout multiple commun de 40 & de 
3 6 eft divifible exaétement par le plus petit multiple commun 
360 de ces nombres; & fi un multiple quelconque de 40 
& de 36 eft augmenté je 1 5, la fomme étant divifée par 
360, laïffera pour refte le nombre 1 S- 


Pi 
que 


froit — o, pourvû que # — 7" 


ERO BR EME IV 


Trouver des nombres entiers pofitifs, tels que Ji chacun d'eux 
efl divifé fucceffivement par quatre divifeurs pofitifs donnes 
d', d”, d”, d’”, dont d' eff le plus grand, les refles foient 


UU 


quatre nombres donnés x', x',x"", x", dont les deux premiers 


Jont fuppofés inégaux. 
H ji 


* 


6o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’'ACADÉMIE 
SOLUTION. 


Soit Æ le plus petit des nombres demandés, on aura 


K= M"'d" + r", M" étant un nombre a De 
plus, fi O eft le plus grand divifeur commun de < En 1 & de 
d' d'à d" 
d",—— eft un multiple commun de d, d d"'; 
d' d' d" e 
LE le fera aufir, en fuppofant g entier. 
Suppofons que 4 = M"d" +" = M'd' + r 
a ) d' d' d dd 
L M M'd' + r + , comme dans le 
à Par aa 
Problème précédent, & pour lors —— + 4 étant 


divifé par d', d', d”, donnera r', r’, r'' pour refles, 4 étant 
entier ou zéro. 

Dans l'équation 4 — M"'d" + r",f1 A1" eft le plus 
petit qu'il eft pofñble, 4 fera le plus petit nombre qui, 
divifé par d, d”, d"', donne r, r', r'' pour refte, & fera 
toûjours moindre que Er 

D'0 
Suivant l'énoncé du Problème, on doit avoir en même 


d' d” qd" 
temps 1O— Late RU & K — M" AU ETES 7 


[EN 772E 
x— K— 7" 
ou ——— g &—— — M". 
dt d' dt A4 
D’ O0 


De-l il fuit que pour réfoudre le Problème de la manière 
la plus ven il faut chercher le plus petit nombre # qui, 
divifé par d', d”, d"', donne r', r',r" pour reftes, & enfuite 

d' d' d'# 
chercher le plus petit nombre Æ qui, divilé par —— aie 
plus petit multiple commun de d’, d”, d”, & par 4”, laiffe 
h & r°” pour refles. 

Ce nombre Æ étant trouvé, fr on lui ajoûte continuelle- 
ment le plus petit multiple commun des quatre nombres 


| DAE S 4S C'LEN Ciers 6: 
‘d', d', d'', d'", on aura autant d’autres nombres qu'on 
voudra, dont chacun fatisfera au Problème. 


REMARQUE. 


ice - 
doit néceffairement 


Pour avoir #, nous avons vü que 


7" r" 7" 


être entier; & que fi les deux nombres PR 
D° D" 

ne font pas entiers, Fun doit l'être, & l'autre — 0; mais 

pour avoir X, il faut de plus que, A étant le plus grand 


d' dd! h— 7 


dite [ELA . 
divifeur commun de md & de d"", —— foit un 


entier pofitif ou négatif. 
Les trois premières conditions peuvent avoir lieu, fans que 


Er). s : 
Te foit un nombre entier; pour lors tout le calcul qu'on 


a fait pour trouver 4 devient inutile. 


Pour n'épargner ce calcul, qui eft inévitable dans a mé- 
thode de M. Euler, j'emploie le moyen dont j'ai fait ufage 
dans la remarque qui fuit le troifième Problème. 


La folution du préfent Problème dépend des deux équa- 


d' d' dd g 
q + 4 & K — M" dial, mais 


tions À —= Tr TT 


d'd' 1 qui 1 T1 
= —— + g= M"d" +7". De plus, g = M'd’ 


+ 7 = M'd' + 7; ainfr j'aurai quatre valeurs de #, 


favoir ; 
K — pee + 2e = 0 PE 
Rise Lee pee <iM'd' + 1. 
| K — 1122 UM Nr". 


at D" 
K — M d'" ue r" 
Comparant la première valeur de Æ avec Ia deuxième &c 


la troifième, & la deuxième avec la troïfième, j'aurois les: 
H ii 


62 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


mêmes équations que j'ai trouvées dans la remarque précé- 
AU / . . . , . \ VV! 
dente; d'où je déduirois, comme je l'ai fait à, que = 


doit être un ñombre entier, & que les deux nombres 


a 


r' 22 r" LL =S 
D" , D" 
& l'autre = o. 
mr la première valeur de Æ'avec la quatrième, j'aurai 


peuvent être entiers, ou l'un des deux entiers 


FEES nn pin 1 E 4 d' d' d" P d' d' 


. d' d' d" d'a" 
M" site M'd {ont des entiers ; =, Sn 


auffi, ou égaux à zéro. De plus, fi D” eft le plus grand 
TRE EU 1 M! d' qd dd" 
. : 5 ht Rx 
divifeur commun de d' & 57 Da? DOD" 


» d' d' d' M" ad"! = M' d' 
LR De font aufr, ou égaux à zéro. Ainfi 


gd d'a" d" pd'd" d' d' 
AD Sp & fon égal © = fera un entier, 


foit pofitif, foit négatif, ou — o. 
La comparaifon de la deuxième valeur de Æ avec la 
quatrième donnera 7" — 7" — LA A MMS 


le font 


D" 


qd d'd Hay NA 
po pe? CuANON dont chaque membre fera 


un entier pofitif ou négatif, où — 0: &-f" D" 
Cage M"! d'! — M'd"' 
plus grand divifeur commun de d' sé RE 0 


D" 
q d'à d" _pd'd"_ d" gp" 
A VU &fon égal 2 TRES fera un entier, 


{oit pofitif, foit négatif, ou — o. 
Enfin, fi l'on compare a troifième valeur de Æ avec la 


quatrième, on trouvera que D" étant le plus grand divi- 
7" 

feur commun de 4” & HE ot être un entier 

pofitif ou négatif, ou — o. 


1 — p" Pl pl " — 


TD? TDi? ss , deux au 


Des trois nombres 


DES/SCrENCE.S 63 
plus peuvent être égaux à zéro; car fi tous les trois étoient 
égaux à zéro, il en rélulteroit  — r”; ce qui eft contre 
la fuppofition. 


. . CAT Or ET 
Mais nous favons que des trois nombres Poe 
v” 2 7" 


— 5; ; le premier eft néceffairement entier, & qu'un feuf 


des deux autres peut être égal à zéro. 

1 —v P— 7" D! 71 
DONNE De 

ne font pas tous entiers pofitifs 


Donc fi les fix nombres 


D — 7" pt put M 


a 
77] , 777 , 777] 
D' D D’ 


ou négatifs, trois au plus peuvent être égaux à zéro, & les 
trois autres feront néceffairement entiers pofitifs ou négatifs 
lorfque le Problème propofé fera poffible. 


PREMIÈRE QUESTION. 


On demande le plus petit nombre qui, divifé fucceffivement par 
7» 6, 5, 4, donne refpeélivement Oo, x, 1 & 1 pour refes. 


SOLUTION. 


4 {1 11 LIU 
DT NME À di nd; 
} Me MS le —2ù PE EL PIE dei 10 D 


D'—=1, D—=x, D'=1, PUR, D'"— 3, DM — 71. 


En fubftituant les valeurs convenables aux lettres, on trou- 


r #44 | r! "4 ER 7" r' er Fa 
véra que D pes Le RL Dr — 0; 
* 1 FE r te Fins 7" pe Es Poe) 10 
D" RER CI » D" — 0 , Dur — © » & par 


conféquent il eft poffible de trouver le nombre demandé. 
Je cherche d'abord le plus petit nombre qui, divifé par 
7, 6, $, donne o, 1 & 1 pour reftes, & je trouve 9 1: 
Je cherche enfuite le plus petit nombre, qui, divifé par 
210, plus petit multiple commun des nombres 7, 6, 5, 


& par 4, laifle 91 & 1 pour refles; & j'ai 301, qui, 


64 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
divifé par 7, 6, 5, 4, donnera o, 1, 1 & 1 de refles. 
Cette queftion & la fuivante pourroient être réfolues avec 
moins de calcul, en cherchant, par le deuxième Problème, 
le plus petit nombre, qui divifé par 60 , plus petit multiple 
commun des nombres 6, 5, 4, donne 1 de refte, & qui, 
divifé par 7, ne laifle rien. 


SECONDE QUESTION. 


ne 
On demande un-nombre qui, divife fucceffivement par 2, 3, 4, 
S, 6, 7, laiffe refpedivement x, x, 1, 1, 1 © © pour reftes. 


S'O TI ULT T'ON: 


1! femble d'abord que ce Problème renferme fix condi- 
tions; mais ces fix conditions fe réduifent évidemment à 
quatre: en effet, puifque le nombre demandé étant divifé 
par +, donne 1 de refle, fi on le divife par 2, qui eft fous- 
multiple de 4, on aura le même refte. On peut dire la même 
chofe de 6 & de 3. 

Il s'agit donc de trouver un nombre qui, divifé par 4, 
$: 6, 7, donne 1, 1, 1 & o pour reftes, ou qui, divifé 
par 7, 6, 5, 4, life o, 1, x & 1 de refles. | 

On vient de voir que 301 eft le plus petit nombre qui 
fatisfafle, & on en aura une infinité d'autres, en ajoûtant 
continuellement à 301 le plus petit multiple commun des 
nombres 7, 6, $, 4, qui ef 420. 

Ainfi le nombre demandé eft un terme quelconque d'une 
progreffion arithmétique, croiffante à l'infini, dont le premier 
terme eft 301 & 420 la différence, 


SVCERMONENT E. 


Dans le deuxième Problème, le nombre demandé a deux 
valeurs, & une feule condition fuffit pour le trouver. 

Dans le troifième Problème, le nombre cherché a trois 
valeurs, & deux conditions font néceffaires pour le trouver. 

Dans le quatrième Problème, le nombre demandé eft 


fufceptible 


mes ESC :1'E IN CHENS: 65 
fufceptible de quatre valeurs, & fix conditions font néceffaires 
pour le trouver. 

En général, fi » eftle nombre des divifeurs & des reftes, 
2 fera auffi celui des valeurs du nombre demandé: & pour 
Yavoir , autant de conditions feront néceflaires, qu'il y aura 
de manières de comparer deux à deux les équations qui 
donneront les valeurs du nombre cherché. 

On voit par-là que le nombre des divifeurs & des reftes 
étant un de ceux de la fuite naturelle 2, 3, 4, 5, &c. le 
nombre des conditions néceflaires pour réfoudre le Problèmé 
eft un de ceux de la fuite des triangulaires r, 3, 6, ro, &c. 

Quant à la nature de chacune des conditions nécefaires 
pour réfoudre le Problème avec tel nombre donné de divifeurs 
& de refles qu'on voudra, on pourra toûjours la déterminer, 
en comparant deux à deux les équations qu'on aura, comme 
on l'a fait dans le troifième & le quatrième Problèmes. 

Enfin, il eft clair que pour réfoudre le troifième Problème, 
il en faut réfoudre deux femblables au deuxième; que pour 
réfoudre le quatrième, il en faut réfoudre trois femblables 
au deuxième; & en général, fi » eft le nombre des divifeurs 
& des reftes, il faudra réfoudre autant de Problèmes fem- 
blables au deuxième qu'il y aura d'unités dans » — 1, 
lorfque tous les reftes donnés feront inégaux. 

Si deux ou un plus grand nombre des refles font égaux, 
on fimplifiera beaucoup le calcul, en opérant comme dans 
les trois queftions précédentes. 


Say. étrang. Tome LV. I 


66 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


- 


M ANIÉRE 
De faire les fleurs dans les Feux d "Artifice Chinois. 


Par le P. D'INcARvILLE, Jéfuite Mifionnaire. 


| hs matière de ces fleurs n’eft autre chofe que dela fonte 
de fer réduite en fable: felon que ce fable de fer a 
pafié par des tamis plus ou moins fins, les fleurs qu'il donne 
font plus ou moins grandes. On fait ledit fable avec de 
vieilles marmites caflées ou hors d'état de fervir, on les cafle 
par morceaux de la largeur de la main, après quoi on les 
fait rougir à un feu de forge; au fortir du feu, on les jette 
dans un baquet rempli d’eau fraîche , où on les laifle refroidir ; 
ainfi calcinés , la rouille en tombe par écailles, & on les 
réduit bien plus facilement en fable : on les cafle première- 
ment en parcelles de la largeur d'un travers de doigt. Il faut 
que l'enclume & le marteau dont on fe fert pour réduire 
ces parcelles en fable, foient auffi de fonte; l'acier aplatit 
les grains de fable. Les angles des grains de fable doivent 
être vifs, ce font ces angles qui forment les fleurs: quand 
par la force du feu le fable fond en l'air, il retombe en grains 
bien ronds, percés & vuides. 


Celui qui fait le fable de fer eft affis au milieu d'un petit 
parc, fermé d'un drap pour retenir le fable qui s'écarte de 
tous côtés en battant. Il ne faut écrafer que deux ou trois. 
petits morceaux de fonte à la fois; on y va plus vite, & 
on eft moins fujet à aplatir es grains, parce qu'on va à 
petits coups. On prend dans la main gauche une poignée 
defdits morceaux de fonte, qu'on laifle tomber peu à peu, 
écartant à mefure avec le marteau, ou de la main gauche, ce 
qui eft réduit en fable, & le faifant tomber à terre. Quand 
on à une certaine quantité de fable, on le tamife, commen- 
çant à {e fervix d'un tamis de foie très-fin, en fecond lieu d'un 


DES SCIENCES. 67 
-tamis de foie moins fin, en troifième lieu d'un tamis de foie 
clair. On fait encore paffer ce fable confécutivement par trois 
tamis de crin, les uns plus clairs que les autres, en lorte 
que le dernier feroit bon à pafler de gros fon. On met à 
part chaque efpèce de fable; ce font ces diflérens fables qui 
donnent les différentes fleurs. Les Chinois, qui y trouvent de 
la reffemblance avec certaines fleurs naturelles, leur en donnent 
les noms, par exemple, de matricaire, d'œillet, de grenade, 
&c. Selon que la compofition des fufées où entre le fable 
de fer a plus ou moins de force, les fleurs s’écartent plus 
ou moins, montent plus droit, ou décrivent une ligne parabo- 
lique en retombant; d'où leur viennent encore différens noms, 
comme de bambou, de faule, dont les branches font pen- 
dantes. Selon que la plante qu'on veut repréfenter a plus ou 
moins de fleurs, on force ou l’on diminue de fable ; on fe fert 
de plus ou moins gros, eu égard à la grandeur des fleurs 
naturelles: on donne au feu de ces fleurs la couleur jaune, 
rouge ou blanche, fuivant la couleur des fleurs de la plante 
qu'elles repréfentent. En variant les dofes de la compofition 
des fufées, & changeant la quantité & la qualité du fable, 
on peut varier beaucoup. 

Les cartouches de ces fortes de fufées doivent être pro- 
portionnés au fable; fi le cartouche eft d'un diamètre trop 
grand ou trop petit, ou le fble ne fondra pas, ou il fondra 
avant de fortir du cartouche. À de petit fable il ne faut qu'un 
feu modéré, à de gros fable il faut un feu violent. On peut 
faire l'expérience du petit fable , ou de celui qui a pañlé par 
les tamis de foie, à la flamme d’une allumette: on en Jaifle 
tomber fur la flamme de l’allumette une pincée peu à peu, & 
on en voit l'effet. Pour le fable le plus fin, un cartouche, 
dont l'ouverture n'aura que 2 ou 3 lignes de diamètre, fuffit ; 
pour le fable du fecond ordre, 4 ou $ lignes; pour celui 
du troifième ordre, 6 ou 7 lignes; pour celui du quatrième 
ordre, 9 où 10 lignes ; pour celui du cinquième ordre, 
1 pouce; enfin pour le plus gros fable, 1 pouce =. 

Les cartouches qui m'ont paru faire un plus bel effet, font 

L'ij 


68 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
ceux dont le calibre augmente par degrés , qui par conféquent 
font faits fur une baguette à rouler de différentes groffeurs. 
Les defleins que j'envoie, en attendant les modèles qui ac- 
compagneront le Mémoire que je prépare, faciliteront l'in- 
telligence de ce que je dis ici. Pour faire ces cartouches, on 
coupe des bandes de carton de différentes largeurs, felon les 
longueurs qu'on a données aux différens diamètres de la ba- 
guette à rouler. Le premier diamètre, ou le bout de la baguette 
qui touche à l’étranglement de la fufée, a ordinairement 6 
à 7 lignes; le fecond diamètre en remontant vers le gros 
bout de la baguette, a 10 lignes, le troifième diamètre 1 
pouce. Le premier diamètre a 1 pouce 3 lignes de long, 
le fecond a 2 pouces, le troifième a 3 pouces + On peut 
changer un peu ces proportions fans conféquence; ce n'eft 
qu'un exemple que je donne. Pour fe premier diamètre, ou 
celui de 6 à 7 lignes, on fe fert du fable du troifième ordre, 
ou qui a paflé par Île tamis de foie clair: pour le fecond 
diamètre, ou celui de 10 lignes, le fable du quatrième ordre, 
ou qui a paffé par le tamis de crin fin: enfin pour le troi- 
fième diamètre, ou celui d’un pouce, le fable du cinquième 
ordre, ou qui a paflé par un tamis de crin un peu clair. 
Cette forte de cartouche m'a mieux réuffi que celui dont je 
vais donner les proportions, à caufe du gros fable qui a de 
la peine à fondre. 

La plus groffe baguette à rouler, pour faire des cartouches 
de diflérens diamètres, a 9 lignes à fon plus petit diamètre 
fur 2 pouces de long; fon fecond diamètre a 1 pouce 3 
lignes fur 2 pouces 9 lignes de long ; fon troifième diamètre 
a 1 pouce + fur 3 pouces de long; fon quatrième diamètre 
a 1 pouce 9 lignes fur 4 pouces de long. Pour le premier 
diamètre, on fe fert du fable du troifième ordre; pour 1e 
fecond diamètre, celui du quatrième; pour le troifième dia- 
mètre, celui du cinquième ; & au quatrième diamètre, le gros 
fable, ou du fixième ordre, c'eft-à-dire, qui a paffé par le 
tamis de crin le plus clair. On voit, par ces proportions, 
qu'on peut changer fans conféquence les diamètres des 


< Desk 28 %C 1 EN CENTS 69 
cartouches, pourvü cependant qu'il n'y ait pas une grande 
différence. De la proportion du diamètre du cartouche avec 
le fable, dépend beaucoup la réuffite des fufées à fleurs. Je 
crois qu'en Europe, où lon raifonne fur la force de la poudre 
plus pertinemment qu’à la Chine, on trouvera le moyen de 
{ fervir de plus gros fable; les fleurs en feroient beaucoup 
plus belles. Pour ne pas perdre de carton, l'on a égard à fa 
grandeur du papier dont on veut le faire, & on y conforme 
les dimenfions de la baguette à rouler, ajoütant où diminuant 
tant foit peu fur les épaifieurs & longueurs. Si la baguette 
à rouler, après avoir été tournée, n'a pas été raclée avec un 
morceau de verre, on aura de Ja peine à la tirer du cartouche 
qui aura été roulé deflus. 

En cas qu'on fe ferve de cartouches d'un feul diamètre 
dans toute leur longueur , quel ‘que foit le diamètre, il faut 
toüjours, pour amorcer la fufée, mettre un peu de la com- 
pofition où entre le fecond fable. environ une bonne pincée, 
On peut aufli fe fervir d’un culot de fer en forme de cone; 
cela revient un peu au cartouche de différens diamètres. Pour 
diftinguer, fi l'on veut, les différens fables entre chaque com- 
pofition, lon met deux ou trois lignes de compofition lente, 
ce que lon peut faire aufli en chargeant les cartouches d’un 
feul diamètre; c'eft ce qui fe pratique à Pékin. I faut avoir 
égard à proportionner le fable aux cartouches. 

FC cartouches des fufées chinoifes, excepté ceux des pétards, 
font faits d’un carton mince, compofé feulement de deux 
feuilles de gros papier. Le carton dont font faits les cartouches 
des fufées volantes quel'on tire chez l'Empereur, eft compolé 
de trois feuilles de papier, que les Chinois appellent mao-teou- 
tchi ; c'eft celui dont mes paquets font enveloppés, il eft fait 
de chanvre. Il y a une chofe digne de remarque dans la 
manière dont es Chinois font la colle des cartouches de fu- 
fées ; c'eft pour obvier aux accidens du feu, & pour empé- 
cher les cartouches de crever. En délayant la colle, pour une 
livre de farine, ils jettent dedans une bonne poignée de fel 
main, Avant de mettre fur le feu la farine délayée avec le 

[ii 


o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fe, on détrempe de F'argille en confiftance de boue un pew 
claire. Quand la colle eit faite, on la retire du feu, & on 
y mêle à peu près autant d'argille détrempée qu'il y a de 
colle; on a dû par conféquent faire la colle bien claire. On 
mêle bien le tout enfemble, remuant avec un bâton; Fargille 
empêche le carton de prendre fi facilement feu, & par-là 
il eft moins fujet à crever; le fel fait que le feu qui a pris 
au carton s'éteint promptement: fans cette précaution, l'on ne 
feroit pas aflez hardi pour tirer des fufées volantes dans les 
villages qui font remplis de tas de paille, gros comme des petites 
meules de foin. Les Chinois difent que jamais il n'arrive 
accident avec ces cartouches faits de carton ainfr préparé. 

Les cartouches peuvent avoir depuis deux lignes jufqu'à 
trois lignes d’épaifieur. 

Le falpétre qui entre dans la compofition des fleurs, doit 
être bien purifié. On fe fert de charbon fait de branches de faule , 
qu'on dépouille de fon écorce avant de le piler. Toutes les 
matières, excepté le fable de fer, doivent avoir pañlé par le 
tamis de foie fin: on mêle les matières avec un peu d'eau- 
de-vie la plus forte, autant feulement qu’il en faut pour qu'elles 
pelotent. S'il y a trop d'eau-de-vie, on n'aura point de fleurs. 
On humecte d'abord le fable, enfuite on le méle avec le 
foufre, puis on y ajoûte le falpêtre, le charbon & les autres 
matières qui quelquefois y entrent pour varier fa couleur 
du feu. 

On charge les cartouches comme ceux des fufées volantes; 
mais il n’eft pas néceffaire de tant fouler la matière, la moitié 
des coups qu'on donne à chaque charge d’une fufée volante 
fuit pour les fufées à leurs. On commence par placer la 
mèche, la moitié fortant dehors du cartouche; & cette moitié, 
pour plus grande füreté contre le feu, eft enveloppée d'un 
morceau de papierqui déborde, & qui n'eft entortillé autour 
de la mèche qu'à l'endroit où elle entre dans la fufée. De deux 
ou trois coups de baguette à charger, on aplatit la mèche 
au fond du cartouche, ce quien fort s'aplatit auffr, parce 
que le cartouche porte à terre ou fur un banc quand on frappe. 


DÉS  SACL RE INC 4215 ÆS 

Pour les cartouches qui ont différens calibres, il faut autant 
de baguettes à charger qu'il y a de calibies. En chargeant, 
on ne remplit jamais les cartouches; on laifie environ deux 
pouces de vuide. Dans ce vuide, on frappe avec un bon maffif 
un tampon de papier de l'épaiffeur d'un travers de doigt 
(toutes les bagueties pour les fufées à fleurs font des maffifs). 
Par deflus Je tampon de papier on ajoûte un demi- pouce 
d'argile un peu humide, pour qu'elle pelote, & on la foule 
en frappant fur le maflif fept à huit bons coups de muillet; 
le refte de la fufée demeure vuide. Une fulée peut demeurer 
quinze jours chargée fans fe gâter. 

Pour contenir ces fufées quand elles tirent, il fuffit de les 
mettre entre deux briques pofées à plat : i! eft bon de les 
élever un peu, fur-tout quand la compolition n'a pas beaucoup 
de force, afin que les fleurs paroiflent toutes avant que le 
fable foit tombé à terre. 


PROPORTIONS CHINOISES pour la matière des Fleurs. 


Salpétre. Soufre. Charbon. Sable de fer. 
10 taels. | 8 mafles......|7 malles......| 2 mafles le plus fin, 


4 taels. | 9 mafles.... 9 mafles...... | 2 raels, 2.4 ordre. 
4 taels. l'r tael.…. .N 5 Pr tael...%... 2 taels 4 mafles, 3.° ordre, 
taels. | 1 tael r mañle... | 1 tael 1 mañle.. | 2 taels 6 mafles, 4.° ordre, 
4 » 4 
taels. | r tael 2 mafles.. | 1 tael 2 mañles. , | 2 taels 8 mafles, <.° ordre. 
# » 5 
taels. | r tael 3 mafles.. | 1 tael 3 mañles.. taels + mañles, 6.° ordre ou gros fables. 
+ + ; gr 


La livre chinoife eft compolée de 16 onces ou taels, 
le tael eft compolé de 10 mufles, le mafle de 10 jen. 


Quelques compofitions parriculières , à leurs noms chinois. 


Salpêtre.  Soufre. | Charbon. Sable, 
Li- hoa. 
z'tal.,... 37 $f..... 2" $f.,.. 6" des fix fortes mélées.. 
Tfing-lo- fan, 


ztad..., 275... 3m... rite 


2° forte, 27 5f, 


72 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Salpétre.  Soufre. Charbon. Sable. 
Mou - tan, 
aitacl. 5 2 PR ei 2iie a cire 410 (0ItE Ie 
cérufe 5f. 
Lo =ti- lieou, 
rotachelopees 11 64e 13 ele nee) 4e forte 37. 


Ta-fivé - hoa, 


1e ROME AS RER D ACREEURS des fix fortes mêlées 5". 
Pour amorcer une fufee. 
DCS D ML M ES ARE 24 ordre $". 
= Ta - kiu - hoa, 
1 tacle Divuferale (ds lee 2 EN alelshe le JOX(TORO ASE 
Siao - li - hoa. 
x tal, Re eee Zheiriciets s'etD PIOITCUS PIE 


Cette compofition peut fervir à amorcer. 
Ta-li-hoa. 
mAtaclih ee 2 ee en lee ep lOrte 7 use 
Man - chou -li-hoa, 
r tal. . 2e 27 66,0 6° forte Sn 4re 
Pan-chou-li-hoa, 


Total, eZ ralentie inenereleletere 29 AOC 0 


Compofition lente. 


Une LVTO ie Dire viens e Qcieieee se Al OIOTE 41265 Se 
mn fignifie mafle, f fignifie fer. 


J'ai beaucoup d’autres de ces compofitions, que je garde 
pour joindre au Mémoire que je dois envoyer dans la fuite; 
le peu que j'envoie fuffit pour faire voir qu'en changeant les 
dofes des compofitions, l'on peut varier à l'infini. On peut 
faire des expériences en petit, à peu de frais; on peut tirer 
ces fufées dans une petite cour fans danger de feu. 

Raifns 


DÉEL SA SAC/I ET NT CES: 72; 


Raïfins des feux d'artifice Chinois. 


La matière de ces raïfins n’eft autre chofe que du foufre 
réduit en poudre impalpable, dont on fait une pâte avec de 
la colle de farine: cette pâte doit être en confiftance un peu 
dure. Pour que le raifin ait une couleur plus violette, les 
Chinois préferent la chair de jujube à 1a colle de farine. On 
fait cuire des jujubes, que l'on dépouille enfuite de leur peau, 
& à qui on Ôte le noyau, réfervant la chair pour s'en fervir 
au lieu de colle de farine. Avec cette pâte, on garnit des 
lettres faites de fil de fer double, pour que la matière tienne 
plus facilement. On peut faire ainfi telle figure qu’on jugera 
à propos, non feulement des lettres, mais des armoiries, 
comme fleur-de-lys, animaux, &c. qui dureront en feu aufit 
long-temps qu'on voudra, à proportion de la quantité de 
matière qu'on y emploiera. Afin que tout prenne feu en 
même temps, on ne doit pas épargner la mèche autour de ces 
lettres ou figures: outre les mèches, on enveloppe le tout de 
papier, qui, en prenant feu, le communique dans un inftant 
par-tout. Cette garniture de papier a fon agrément ; on lui 
donne telle figure que l'on juge à propos; on le peint, on 
repréfente deflus des enblèmes, des devifes, &c. Avec des 
tiges de gros mil, dit 4ao-leang, dont je parle dans le Mémoire 
fur le kien-tcheou, es Chinois font toutes fortes d'animaux, 
dans le goût des chevaux d’ofier dont nous nous fervons fur 
les théatres: comme nous, ils collent du papier deflus, qu'ils 
peignent avec les couleurs qui conviennent à l'animal qu'ils 
veulent repréfenter. Dans un feu d'artifice, on voit en un 
moment un lion, un tigre, un dragon, un poiflon, &c. 
fe changer en caraétères de feu qui repréfentent une devile: 
on peut en faire fortir bien des chofes frappantes & fort 
agréables à Ja vüe. I] faut réferver le refte pour le Mémoire. 


“ 


F1 


Say, érrang. Tome IV. 


Du Salpétre. 


MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
74 


RÉPONSES aux queflions qu'on n'a faites fur les 
feux d'Artifice Chinois: elles ferviront de fupplément 


au Mémoire préliminaire que J'ai envoyé. 


UOIQUE Îa Pyrotechnie foit beaucoup plus ancienne 
en Chine qu'en Europe, les feux d'aitifice font néanmoins 
plus perfeétionnés en Europe. Les Chinois fe conduifent, 
pour l'ordinaire, plus par coûtume que par principe: ils font 
induftrieux, mais railonnent peu conféquemment. Les Euro- 
péens, au contraire, fuivant les principes des Arts, fe piquent 
de les perfectionner. 

Les fleurs & les raifins ont été bien recûs en France; je 
m'y attendois. Quand, parmi toutes les compofitions que 
jenvoie, on aura choifi celles qui fatisferont davantage, ou 
qu'on en aura fait d'autres à limitation, ce qui eft facile, on 
pourra en former des jets de feu, des fontaines, des nappes, 
des pots de fleurs, des gerbes, &c. qui trouveront place 
dans nos feux d'artifice. La compofition des raifins, dont les 
Chinois forment aufli des lettres, des figures d'animaux, &c. 
pourra nous fervir aux mêmes ufages: on peut en former 
des armoiries; j'ai eflayé une fleur de lys, qui réuffit fort bien. 
Un avantage qu'ont ces feux d'artifice, c'eft que chacun, 
à peu de frais, peut exécuter & inventer beaucoup de jolies 
décorations pour nos réjouiffances. 

Je réponds article par article aux queftions qu'on n'a faites. 
I! paroît que le falpêtre de Chine vaut mieux que le nôtre; 
il fe fait auffi plus aifément & à moins de frais : les terres dans 
bien des endroits en font remplies, mais certaines terres en 
donnent plus que d’autres. Les terres de fable n’en produifent 
point, les terres élevées. n’y font pas favorables, on le tire 
ordinairement des terreins bas. On connoît les terres qui con- 
tiennent du falpêtre, quand on les voit fermenter à leur fuper- 
ficie: les plus fortes gelées n'empéchent point cette fermen- 
tation. Les terres d’où l'on tire le 4er, ou la couperofe de 
Chine, fermentent comme celles du falpêtre ; on y eft fouvent 


sæ 


DAENS, JSAC- ILENN CES UN 75 
trompé, ce n'eft qu'au goût qu'on peut diftinguer les unes 
des autres : celles du falpèire laitlent fur la langue une impref- 
fion fraîche, celles de couperofe y laiflent une impreffion äcre. 
Selon que l'impreflion eft forte, on juge de la quantité de 
falpêtre que les terres contiennent. On ramafle touie l'année 
les terres de falpêtre, excepté quand il y a eu de grandes 
pluies, qui l'ont entrainé avec elles à une certaine profondeur: 
il faut attendre que la terie fermente de nouveau, c'eft-à-dire, 
que le falpêtre ait remonté à la fuparficie, ou qu'il s'en foit 
formé d'autre. Ceux qui ramaffent la terre de falpêtre , enlèvent 
avec un rateau environ un pouce de la fuperficie, & en forment 
des monceaux, qu'ils tranfportent enfuite dans l'endroit où 
on fait le falpêtre. Telle terre donnera cette année du falpètre, 
qui n'en donnera pas l'année d'enfuite: une autre, qui n’en 
fournifloit pas auparavant, en produira. 

Pour filtrer l'eau du falpêtre, au lieu de cuviers, les Chinois 
fe fervent de grandes urnes de terre verniflée, auxquelles ils 
percent un trou au bas, comme chez nous aux cuviers à couler 
la leflive. Ils commencent par mettre au fond de lurne 
deux ou trois pouces d'épais de grofle paille, fur laquelle ils 
étendent une natte pour recevoir la terre du falpètre, mélée 
de cendres, fans quoi l’eau empreinte du falpêue ne couleroit 
que très-difficilement. [ls rempliffent l'urne jufqu'à trois ou 
quatre pouces du bord, & verfent deflus cette terre de l'eau, 
jufqu'à ce que cette eau, de roufle qu'elle fort d'abord, de- 
vienne jaune : alors elle contient peu de falpêtre; pour l'en 
tirer, il en coûteroit plus qu'on n’en retireroit de profit. On 
Ôie la terre, pour y en fubfiituer de nouvelle: on continue 
çette opération tant qu'on le juge à propos. 

Les chaudières dont on fe fert ici pour évaporer l’eau de 
falpêtre font de fer, peu profondes, mais très-larges : elles 
font mâçonnées {ur le fourneau, pour épargner la confom- 
mation du bois ou de la paille de grand mil, avec quoi on 
entretient le feu fous les chaudières. Quand l’eau de falpêtre 
eft confommée jufqu'à pellicule, on verfe deflus de l'eau 
de colle forte; celle de poiffon eft trop chère, Fa n'a garde 

1 


Du Soufre. 


= 


76 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
de s'en fervir, celle de peaux d'animaux pouvant fuffire. Dans 
certains endroits, au lieu de colle forte, on fe fert d’eau où 
Jon à fait bouillir des radis: on verfe de l’eau de colle forte 
par cuillerées, c'eftà-dire, quatre ou cinq onces à la fois, & 
on enlève à mefure avec une écumoire la craffe qui furnage. 
On verfe ainfi de Feau de colle forte jufqu'à ce qu'il ne 
furmonte plus de crafie: alors le falpètre eft net, il ne refte 
plus qu'à en féparer le fel marin qui y eft mêlé. En continuant 
de faire bouillir l'eau, le fel fe forme en grains; on le tire 
à mefure avec une écumoire : tant qu'il sen forme, on 
continue le feu fous la chaudière, détachant, avec une petite 
pelle de fer, garnie d'un long manche de bois , le {el marin 
qui s'attache au fond. Tout le fel étant foigneufement tiré , 
on eflaie fi une goutte d'eau, qu'on laiffe tomber fur un 
morceau de fer froid, sy congèie & fe réduit en fl; c'eft 
le point où il faut la verfer dans des terrines, où on la laiffe 
cryftallifer, couvrant exaétement les terrines. Le lendemain 
le falpètre eft en pain, tout couvert de belles grandes aiguilles : 
il refte au fond des terrines l'eau mère, dont les Chinois, 
en {a faifant bouillir jufqu'à pellicule, tirent des pains d’un 
fef roux, qui a fon ufage pour faire cailler une efpèce de fromage 
mou, fait de lait de haricots, qu'ils appellent #eou-fou: il s'en 
vend beaucoup en Chine. L'eau mère de falpètre eft un poifon 
dont fe fervent aflez fouvent ceux qui fe veulent donner Ja 
mort: comme il en entre très-peu dans le #ou-fou, on pré- 
tend qu'il n’y a r'en à craindre; l'Empereur même en mange. 

Tout ce que je viens de dire du falpêtre eft fondé fur 
Je rapport des Chinois: j'ai fur-tout conlulté une perfonne 
qui a intérêt à ne me pas tromper, & que j'ai envoyée fux 
les lieux; elle eft de l'endroit & connoît des Salpêtriers. Si 
Javois pû me tranfporter fur les lieux & voir par moi-même 
là fuite de la manipulation, peut-être aurois-je remarqué 
quelque autre chofe de particulier. 

H y a beaucoup de foufre en Chine; il paroît fort beau 
quand il eft pur : on en tire quantité, fur-tout dans la province 
de Chan- fi. On le purifie fur les lieux : ft on craint qu'il 


D.-E $S SCI ÉIN C£E1s. 77 
n'ait pas été bien purifié, on le fait fondre & on écume la 
crafie qui furnage. Les Artificiers fe donnent rarement cette 
peine; ils fe contentent d'en éprouver la force par quelques 
petits eflais, & ils en augmentent ou diminuent la dofe, felon 
que l'eflai en petit leur a indiqué: ils en font de même du 
falpêtre. Au palais, chez l'Empereur, où on leur fournit ‘des 
matières choifies, ils font fürs de l'effet, ä n’eft pas néceflaire 
de faire des effais. 

On n'a point d'idée en Chine de foufre compolé. 
Si la poudre de Chine vaut mieux que la nôtre, cela vient 
pluftôt de Ja bonté des matières que du foin que les Chinois 


prennent pour la faire bonne; ils fa grainent très-mal & ne 


favent pas la liffler: elle eft fort vilaine à voir. Ils font une 
poudre particulière pour amorcer les armes à feu, qu'ils difent 
être plus vive que celle dont ils fe fervent pour charger. Pour 
les pétarts, au lieu de charbon de faule, ils en font de tiges 
d’abutilon & de mayenne: ils difent que ce charbon écarte 
& fait plus de bruit. On trouvera à la fin de cet Écrit les 
compofitions de ces différentesspoudres. 

J'ai envoyé ces années paflées la manière dont les Chinois 
font là poudre à canon; je la répète ici, de peur qu'on n'ait 
perdu ce que j'ai écrit fur ce fujet. Si le falpêtre n'eft pas 
bien pur, il faut le purifier & le pañler par un tamis fin, 
auffi-bien que le foufre & le charbon. Ce charbon doit étre 
fait de jeunes jets de faule dépouillés de leur écorce : je ne 
fache pas qu'il y ait de bourdaine en Chine, du moins les 
Chinois ne sen fervent pas pour le charbon de Ja poudre. 
On mêle la poudre de charbon avec celle de falpêtre dans 
une poêle de fer; on verle deflus de l'eau à niveau feulement 
des matières, & on leur fait jeter quelques bouillons, après 
quoi on ver{e le tout fur une meule placée horizontalement : 
1 matière s'étend deffus. Sur cette matière étendue, on tamife 
le foufre, l'étendant également avec la main, & on broie le 
tout enfemble pendant fix heures. La béte qui tourne la 
meule, doit marcher fentement. Pour grainer cette poudre, 
les Chinois l'arrofent d'eau, dans laquelle on a lavé du gros 

K iÿ 


DelaPoudre 


78 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

mil cuit: cette eau eft glutineufe, Enfuite ils contournent la 
matière dans une grande corbeille plaie, garnie d’une natte 
mince & clitlee fin (les naites de Chine ne font pas comme 
Jes nôtres, elles valent mieux à bien des ufages ); ils ne fé- 
parent pas même le pouflier. 

.Je ne fais ce qu'on a voulu dire par la compofition liquide 
en confiflance de bouillie, qui senflamme aifément & fait 
plus d’eflet que la poudre ordinaire. Je me fuis informé aux 
Artificiers, ils ne connoiflent point cette compofition: peut-être 
le Chinois seft-il mal expliqué, ou FEuropéen n'a pas 
conçû ce qu'on vouloit lui dire ; je foupçonne que c'eft la 
“poudre dont je viens de donner la façon. Les Chinois l'appellent 

Poudre cuite. Poudre cuite, parce qu'après l'avoir abreuvée d’eau, ils lui font 
jeter quelques bouillons. Ils eftiment plus cette poudre que 
Poudre œue. celle qu'ils font à fec, qu'ils appellent poudre crue. On en 
trouvera auffi 11 compofition avec l'autre. 
Mutères Je crois qu'on ne s'attend pas à avoir des couleurs bien 
solrantes. … diftinétes: on verra parmi les compofitions quelques ingrédiens 
qui donnent des nuances de: couleurs, comme lorpiment 
donne une couleur jaune, la cérufe & le camphre un feu blanc; 
quelques-uns emploient l'indigo pour le bleu, mais je doute 
de cette couleur. Pour un feu brillant dans les fleurs, il faut 
avoir de la fonte dont le grain foit fm. Le fer des environs 
de Pékin eft groffier & donne des fleurs peu brillantes , tirant 
fur Le rouge, au lieu que celui des provinces méridionales, 
ui eft fin, donne des fleurs blanches, brillantes & à fix rayons; 
celui de Pékin n’en donne que quatre. Outre cela, le fable fait 
de fonte fine fe conferve long-temps fans fe rouiller ; celui de 
fonte groffière {e rouïlle d'abord. On dit que le cinabre minéral 
donne un feu rouge; jene m'en fuis pas autrement aperçü. 
Les Chinoïs n'ont point l'ufage des étoupilles, leurs mèches 
ne font autre chofe que des bandes de papier, dans lefquelles 
ils enveloppent une traînée de poudre. Je ne n''arréterai point 
à décrire la manière dont ïäls font ces mèches, les nôtres 
étant plus commodes & plus faciles à faire: j'en ai déjà en- 
voyé le deffein & l'explication, je ne fais ft on les a reçüs. 


Des méches, 


SR: ASIC L'E NICE, 

La compofition de la poudre des mèches fe fait dans un poëlon 
fur un feu doux: on fait d'abord fondre le fälpêtre dans une 
fufffante quantité d’eau; lorfqu'il eft fondu, on y jette du 
charbon fait de chenevote non battu, c'efkà-dire, toutentier, 
& on remue, fans difcontinuer, jufqu'à ce que la! matière fe 
réduife facilement en poudre fous les doigts. Les chenevotés 
ici font de tiges d'abuilon: on peut auffr fe frvir de tiges 
de mayenne. 

Les cartouches des fufées de Chine font pour le moins 
auffr fermes que les nôtres, & fe font, ce me femble, plus 
facilement : en voici le détail. On commence par étendre fur 
une table les feuilles de carton ou de papier en recouvrement, 
ou les unes fur les autres, chacune débordant d’ün travers 
de doigt: on en met plus ou moins, felon l'épaifeur qu'on 
veut donner aux cartouches. Lorfque ces feuilles font ainfi 
arrangtes, on trempe dans l'eau une petite brofle, & on 
humeéte depuis Tendroit où doit être l'étranglement jufqu'au 
bord, c'eftä-dire environ un pouce de large, pour que le carton 
ou le papier ne cafle pas & qu'on puifle étrangler plus facilement 
le cartouche après qu'il fera roulé ferme : on couche enfuite 
fur les feuilles la baguetté à rouler, & on roule deflüs à la 
main toutes les feuilles à la fois. Lé cartouche eft alors-très- 
lâche & roulé un peu de biais pour fordinare: on le drefé, 
en ayant retiré la baguèute & frappant quelques petits coups 
für la table du bout par lequel le carton déborde, Pour le rouler 
ferme, les Chinois ont un banc folide, haut feulément de 
deux pieds, afin que celui qui roule les cartouches ait plus de 
force pour appuyer en rolant. On pole d'abord fur le banc 
en'arrière le cartouche garni de-fa baguette à rouler; énfüite 
on fe fert d'un-morcéau de bois pefant , en forme de varlope; 
&'monté à peu près dé même {on en trouvera les dimien: 
fions au bas du defleir). On pofe le menu bout dudit morceau 
de bois en travers fur fe cartouche garni de fi baguette, & 
en appuyant fermé de'toüte fi force ; on “poitie “ei avant 
le cartouche roule entré ce morceau de’ bois & 1e banc: On 


ramene fe cartouche au bout’du banc &! on roulé chrfiné 


Des cartouches: 


8o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

la première fois, ce qu'on répète cinq ou fix fois, plus ou 
moins, felon qu’on veut que le cartouche foit dur. Cela fuffit 
pour les cartouches des fulées à fleurs & ceux des pétarts; 
mais pour ceux des fufées volantes, on a un autre banc fem- 
blable au premier, garni d'un chaflis, où eft attaché un Cy- 
lindre mobile fur fon axe, placé au deflous de la planche du 
banc. À la traverfe du chaffis, qui eft au deflus du banc, 
eft attachée une planche épaifle ; entre cette planche & le banc, 
on roule le cartouche garni de fa baguette, comme on a fait 
auparavant avec le morceau de bois en façon de varlope : 
la planche attachée au chaffis fait levier, ainfi elle a bien une 
autre force. Quand on a roulé le cartouche trois ou quatre fois 
entre cette planche & le banc, il eft prefque dur comme du 
bois. Voyez les figures. 

Les cartouches des fufées volantes qu'on tire devant l Em- 
pereur font faits d'un carton mince, qui n'a que trois feuilles 
de mao-teou-tchi, tel que celui qui fert de modèle du moule 
à fleurs que j'envoie: ce papier eft fait de chanvre. Si on 
craint pour le feu, on met trois ou quatre gros d'alun par 
livre de colle de farine. Les cartouches des pétarts font faits 
du papier le plus caffant qu'on peut trouver: j'ai fait voir à 
un des Artificiers de l'Empereur de notre papier gris à filtrer, 
il la trouvé excellent pour faire le carton des cartouches des 
jets de feu, en collant trois feuilles enfemble. 

Pour étrangler les cartouches des fufées à fleurs, ou jets 
de feu, les Chinois fe fervent d'une machine qui reffemble 
aux couteaux en ufage dans les communautés pour tailler le 
pain, excepté que cet infbrument a deux lames, qui vont à 
fe rencontrer quand le couteau eft fermé. Ces deux lames 
ont des entailles, qui forment des ouvertures rondes étant 
rapprochées.. La Jame fupérieure a un manche, & à l'autre 
extrémité elle eft attachée à la manière du couteau de cuifine 
dont j'ai parlé: la lame inférieure eft fixe. Ces lames ont 
deux lignes vers le dos, & une ligne à l'endroit des entailles, 
On pofe d'abord le cartouche à l'endroit où on le veut étrangler 
dans d'entaille la plus large; & en fermant le couteau , on 

appuie 


DST SVG: r. E: Nr GES 8r 
appuie à petits coups, tournant un peu le cartouche à chaque 
coup. Quand les deux entailles joignent, on pole le cartouche 
dans une autre entaille moins grande, & on continue ainfr 
jufqu'à ce que le cartouche foit fuffifamment étranglé : ordinai- 
rement la troifième entaille donne cet étranglement. J'ai dit 
dans mon Mémoire préliminaire, qu'on délayoit de l'argille 
dans la colle dont on fait le carton de ces cartouches; ainfx 
ce carton fe conferve humide, & par conféquent il n'eft pas 
néceflire de l'humeëter à l'endroit de l'étranglement. Le cou- 
au à étrangler ne peut fervir pour les cartouches des fufées 
volantes, A font trop durs, ils cafleroient; on les étrangle 
comme chez nous. : 

Les cartouches des plus grandes fufées volantes de Chine, 
telles que font celles qu'on tire devant l'Empereur, n'ont au 
plus que cinq pouces & demi de long fur un pouce deux 
lignes de diamètre, compris l'épaiffeur du cartouche, qui a 
trois lignes ; ainfi F° diamètre intérieur n'a que huit lignes. 
Les Artificiers comptent fur un pied de longueur de baguette 
pour un pouce de longueur de fufée, ainfi les baguettes de 
leurs grandes fufées volantes ont quatre pieds & demi. au 
moins ; elles peuvent en avoir plus fi elles font légères, à raifon 
de l'efpèce de bois dont on s'eft fervi, ou parce qu’elles font 
trop menues: les leurs font, pour lordinaire, de bambou, 
qui eft un bois pefant ; ils les arment affez fouvent d’ailerons 
en bas, ils prétendent que les fufées en montent plus droit. 
En cas de vent, ils attachent ces aïilérons avec des viroles, 
pour qu'ils tournent au gré du vent. On a dù recevoir de ces 
fufées volantes avec leurs baguettes garnies d’ailerons. 

On perce en Chine les fufées volantes au tour avec un 
foret ; jamais on ne les charge fur un culot garni d’une broche : 
les Artificiers Chinois difent qu'on ne foulera pas fi bien fa 
matière. Quand ils chargent leurs fufées volantes, ils font 
toüjours deux; fun tient la fuf'e, qu'il tourne à mefure que 
Vautre frappe, comme font nos Mineurs: celui qui frappe, 
tient le maillet à deux mains & frappe à petits coups fecs, 
pour être plus für de frapper droit, Ils divifent leurs fufées 

Say, étrang. Tome 1F. E 


Pluie de feu, 


Jets de feu, 
ou 
Fufées à fleurs. 


82 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
volantes en quatre parties & demie; ils en percent trois, en 
Jaiffent une fans être percée, & une demie vuide. On en 
trouvera les compofitions à la fin. Ils ne comprennent pas 
comment nos grofles fufées volantes peuvent réuflir ; les leurs 
rattent peu, elles montent ordinairement fort droit : ils n’ont 
pas l'ufage des étoiles; ils coëffent leurs fufées de boules de 
feu, de pétarts, de ferpentaux & d’une efpèce de grofles 
mèches luifantes, dont on trouvera aufli les compofitions. 
J'ai voulu leur apprendre à faire des étoiles; ils ne font point 
envieux de faire rien de nouveau, ils s'en tiennent à leur 
routine. 

Les Chinois, pour faire la pluie de feu, fe fervent du plus 
petit fable de fer: ils font les cartouches de ces fufées Jongs de 
fept à huit pouces ; ils en rempliflent environ a moitié d'argile 
pour les pouvoir tenir à la main tant qu’elles font leur eflet, 
& parce que le fable fondroit dans le cartouche avant de fortir 
fi la charge avoit trop de profondeur; la compofition n'auroit 
pas la force de le poufler dehors. 

On ne fait point en Chine de trompes de feu ni de balons 
d'air. 

Quand j'ai parlé des diamètres des catouches des fufées à 
fleurs , j'ai donné les diamètres des baguettes à rouler; ainfi 
j'entendois le diamètre intérieur des cartouches, & non du 
trou de la gorge ou de l'étranglement: la règle ordinaire eft 
un peu plus du tiers du diamètre intérieur du cartouche. Au 
furplus, les Chinois ne font pas fi fcrupuleux qu’on left chez 
nous fur cet article ; pourvû que la proportion foit à peu près 
gardée, cela leur fuffit. Ils aiment mieux faire le trou de la 
gorge de la fufée un peu plus grand que trop étroit; les jets 
de feu montent un peu moins, mais on eft plus für de leur 
effet. Il eft certain que fi le trou de l'étranglement n'eft pas 
proportionné non feulement à la grandeur du cartouche, 
mais aufli à la force de la compofition, l’on ne réuffira pas: 
fi le feu eft violent & Kouverture de 1a gorge étroite, le 
fable fondra dans le cartouche, ou la fufée crevera ou fe dé- 
foncera : fi l'ouverture eft trop grande, le fable fortira fans 
fondre. 1 


DéersvISAC F EN. e #6 83 

J'ai appris depuis peu à faire des cartouches d’argille, dont 
l'effet eft charmant ; le premier dont j'ai fait l'eflai me donna 
une gerbe de fleurs qui s'élevoit à plus de cinquante pieds: 
de haut : je tiens ce fecret d’un des Artificiers de l'Empereur, 
avec qui j'ai fait connoiflance, & qui me vient voir de temps 
en temps. On trouvera ci-joint le patron en papier du 
moule fur lequel on fait les cartouches en queftion; il n'y 
aura qu'à faire tourner un morceau de bois felon fes dimmen- 
fions. C’eft proprement une profile quille d’un pied de haut, 
dont le pied a 4 pouces 9 lignes de diamètre, & la tête 3 
pouces: on peut lui faire le pied de $ pouces de diamètre, 
en diminuant infenfiblement jufqu'à 3 pouces, cela reviendra 
au même. Ce moule eft percé par le haut d’un trou rond de 

lignes de diamètre & d’un pouce de profondeur , pour y 
inférer une fiche de 9 lignes de grofieur, de 6 pouces de 
long, bien unie, qui entre un peu à force. Cette fiche {ert 
à donner le trou de la gorge du cartouche & à retirer le 
moule du cartouche quand il eft à demi-fec, le couchant 
fur le côté, & frappant quelques petits coups fur la tête de 
la cheville, Pour faire ces cartouches, on détrempe de l'argille, 
dans laquelle on mêle de la filafle hachée & dépecée pour 
qu'elle foit plus liante: elle doit être bien pêtrie dans le goût 
de celle que nos faifeurs de fourneaux pêtrifient : on en forme 
enfuite de gros magdaléons, dont on couvre le moule de 
deux bons pouces d'épais; pour plus grande füreté, on les 
couvre d'une légère couche de filaffe de chanvre, qu'on re- 
couvre elle-même de deux lignes de la même argille. En 
finiflant, on trempe fe: mains dans l'eau & on leur donne 
le poli. Le cartouche étant fec, on y colle, fi l'on veut, du 
papier fur lequel on peint ce qu'on juge à propos, c'eft un 
ornement. On charge dans ces cartouches de terre jufqu'à fix 
livres de matière, laïffant trois pouces & demi ou quatre pouces 
de vuide, qu'on remplit de terre qui pelotte tant foit peu. 
Lorfqu'on veut charger ces cartouches, on en bouche le trou 
de ia gorge avec un tampon de papier qui déborde en dedans, 


& qu'on y aplait de deux où trois coups de maillet fur la 
L ij 


84 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 
baguette à charger. Cette baguette a la forme d'un pilon ; elle 
eft plus groffe par un bout que par l'autre, mais coupée unie 

ar les bouts pour qu'elle porte bien à plat; le petit bout fert à 
charger d’abord , enfuite on fe {ert du gros bout, le cartouche 
étant en cone: ce pilon peut avoir deux pieds de long. On 
renverfe le cartouche, le trou de la gorge pofant contre terre; 
une perfonne le contient, tandis qu'une autre le charge. On 
met à la fois environ demi-livre de compofition, que je 
fuppofe qu'on a tamifée au moins deux fois pour la bien 
mêler, & avec le pilon on la foule bien, moins cependant 
qu'on ne feroit une fufée volante ; une trentaine de coups 
de pilon fufhfent à. chaque charge de demi-livre. Les 
Chinois aiment des repos dans ces fortes de fufées: pour 
cet effet, après avoir chargé le tiers de la compofition, ils 
appliquent deflus une feuille de papier un peu épais, qu'ils 
trempent dans l’eau immédiatement auparavant. Ce papier eft 
taillé de la grandeur & forme de l'endroit où on l'applique : 
on le taille comme nous faifons les entonnoirs de papier gris à 
filtrer; on le couche fur la compofition avec le pilon, en 
frappant doucement : on fait la même chofe après avoir chargé 
le fecond tiers de la compofition. Ces repos ont leur agrément ; 
on croit la fufée finie, & on eft agréablement furpris de la 
voir recommencer, cela dépend du gout. 

Les Artificiers difent que le plus tôt qu'on peut tirer les 
fufées à fleurs, c'eft le mieux, parce qu'il eft à craindre que 
le fable ne rouille, & que rouillé il ne donne point de fleurs : 
Jai cependant l'expérience de quelques-unes de ces fufces, 
qui furent tirées plus d'un mois après avoir été chargées, 
qui eurent un effet charmant, & qui furent plus belles que 
d'autres femblables tirées en même temps, & qui venoient d'être 
chargées par le même Artificier qui avoit chargé les anciennes 
de la même compolfition. Je crois que pourvü qu'on mette 
les fufées chargées dans un endroit bien fec un peu élevé de 
terre, elles peuvent sy conferver très-bien plufieurs jours : 
je l'ai vû faire ainfi plufieurs fois, & les fufées réuffifloient 
fort bien. IL faut prendre garde à trop humeéter d'eau -de-vie 


are. SEC EE N € ES 85 
la compofition; il n’y en faut précifément que ce qui eft né- 
ceflaire pour qu'elle pelote un peu, pour pouvoir la fouler 
mieux : il faut pluftôt lhumecter à plufieurs fois lune après 
Jautre; on pourroit même, pour plus grande füreté, en faire 
une petite épreuve. La compofition trop humectée ne donne 
prefque point de fleurs. 

. J'ai oublié de dire ci- deflus qu'avant d'appliquer fur le 
moule de bois les magdaléons d'argille préparée, il falloit l’en- 
tourer par-tout du haut en bas d’une feuille ou deux de papier 
mouillé, pour que largille ne s'attache pas fur le moule : fans 
cette précaution, l'on ne pourroit en détacher le cartouche. 

La fulée étant chargée, on retire le tampon de papier qui 
bouche le trou dé la gorge, & on y insère une mèche de Ia 
grofleur d'une plume à écrire. De peur du feu, on entoure 
ce qui en fort, après en avoir un peu foulé fur la matière l'autre 
extrémité, d’un morceau de papier, qu'on fait enfuite entrer 
dans le trou de la gorge, pour l'en retirer feulement lorfqu'on 
voudra tirer la fufée; on peut mème attendre à ce temps-là 
à l'amorcer. 

Les Artificiers del'Empereur ne diftinguent que trois fortes 
de fable, fable fin, moyen fable & gros fable; le refte eft du 
pouffier qu'ils rejettent : ils difent que ce pouffier peut fervir 
à faire une pluie fine de feu. Le fable fin, où premier fable, eft 
de la groffeur de notre petite cendrée pour tirer aux moineaux ; 
le moyen fable eft comme du plomb à cailles, & le gros 
fable comme du plomb à perdrix: j'en envoie un peu de chaque 
efpèce pour fervir d'échantillon. Du fable oros comme du 
plomb à lièvre donneroit de plus belles fleurs; mais chez 
Empereur on aime mieux que les fleurs s'élèvent davantage 
& ne foient pas fi grandes: il me femble que les grofles font 
un plus bel effet; laiflons cela au goût d'Europe. 

On trouvera parmi les compofitions une efpèce de fleur 
particulière que donne le noir de fumée; elle a quelque 
reffemblance avec nos fleurs d'œillet. Cette compofition ne 
fe charge que dans de petits cartouches de carton, de la groffeur 
du doigt ou de dix lignes de diamètre, compris le cartouche, 

Lij 


Feuxpourtirer 
fur l’eau, 


86 MÉMOIRES PRÉSÉNTÉS À L'ACADÉMIE 

qui a deux lighes d'épailleur ; ainfi eur diamètre intérieur eft 
de huiït lignes, l'ouverture de l'étranglement de deux lignes & 
demie: il ne faut que prefler cette compolition avec la baguette 
en tournant fans frapper; on met aufli un peu d'eau-de-vie 
dans la compofition, pour qu'elle pelote un tañt foit peu. Les 
cartouches ont huit pouces de long ; on n'en remplit que la 
moitié de compofition, pour qu'elle ait la force de pouffez, 
les fleurs dehors, le refte fe remplit de terre comme les autres 
dont j'ai parlé: on les tire à la main fans qu'il y ait rien à 
craindre. Si les cartouches font coupés bien unis, on peut les 
planter comme des quilles, la fufée fait fon eflet fans fe ren- 
verfér. Pour en voir mieux l'effet, on les tire tout proche 
de foi à fes pieds. Il y a des Artificiers qui mélent du fable 
de fer dans la compofition; chacun fait comme il l'entend. 
Ces fortes de fufées ont leur agrément, je les vois toûjours 
avec un nouveau plaifir; elles font très-faciles à faire; on peut 
les tirer dans une chambre, fous la cheminée, en plein jour, 
mais il faut tirér les rideaux & rendre la chambre obfcure. 

Je ne connois en Chine que deux fortes d'artifice d’eau, des 
canards & dés rats, c’eft-à-dire que par deffus une fufée volante 
on ajoûte du papier, auquel on donne la forme de canard ou 
de rat; on les péint même fi l'on veut. À la groffe fufée on en 
joint quelquefois d'autres petites garnies de même, qui ne 
paroiffent que quand Ja grande a prefque fini fon eflet, & qui 
s'en détachent : ce font autant de petits canards autour de leur 
mère. Les Chinois n'ont pas le fecret de communiquer le 
feu fous l'eau ; la fufée pafle bien fous l'eau, mais elle ne 
communique le feu qu'en fortant. 

Les foleils & les pots à feu n’ont point lieu dans les feux 
d'artifice Chinois. Leurs mèches à mettre le feu au canon 
font des cordons de filaffe de chanvre, qu'on met tremper 
dans l'eau de leffive & qu'on fait enfuite fécher, les détirant 
avant qu'elles foient sèches avec un morceau de toile qu'on 
tient dans la main, férrant le plus qu'on peut; ce qui leur 
donne un coup d'œil liffe. 

Leurs feux pour éclairer font des mèches de la groffeur 


DES SCIENCES 87 
du petit doigt, remplies d’une compofition particulière, 
dont on trouvera ci-après des recettes. Is en allument 
grande quantité : felon qu'elles font difpofées elles font de 
loin un bel effet. Ils font quelquefois des pyramides garnies 
de ces mèches pendantes; on diroit d'autant de diamans 
d'un éclat furprenant. Le cartouche de ces mèches brûle à 
melure qu'elles s’ufent: pour les fufpendre plus fürement, 
ils enveloppent dans le cartouche, en le roulant, un fil 
de filaffe de chanvre. Ces cartouches font faits d'un grand 
carré de papier plié en deux, qu'on roule fimplement à 
la main, laiffant déborder un des deux feuillets, en de pliant, 
_ de trois ou quatre lignes: on pafie avec une broffe un peu 
de colle de farine fur ce bord- de papier fimple pour coller 
le cartouche en le finiffant; enfuite on retire a baguette à 
rouler de dedans le cartouche de la longueur d'un pouce & 
demi, & on ferre cet endroit vuide entre les doigts pour 
l'aplatir: c'eft par cet endroit aplati qu'on fufpend ces mèches. 
On les ferme en renverfant le bord fur la compofition de 
deux côtés oppolés. 

Les Chinois goûtent fort des efpèces de grandes lanternes, 
dont ils font tomber fucceflivement différentes figures, des 
raifins, des dragons, des deviles, quelquefois une grande 
quantité de petites lanternes toutes allumées, jufqu’à cinq cents 
à Ja fois: on a de Ja peine à comprendre comment je tout 
peut être renfermé dans un fi petit efpace, Le tout eft de 
papier plié, & ne {e déploie qu'en tombant, demeurant fuf 
pendu tant que Lefiet dure. Si on vouloit exécuter de ces 
Janternes en Europe, le plus court & le plus für feroit de 
charger quelque Subrécargue de la Compagnie des Indes d'en 
faire faire à Canton; la chofe eft très-facile & de peu de 
dépenfe. Une explication détaillée de ces danternes feroit dif. 
ficile à donner, & peut-être encore plus à entendre, au lieu 
qu'en en voyant une on fera d'abord au fait, 

Dans des mêmes cartouches de groffes mèches à éclairer, 
on charge auffi une compofition de fleurs *. On tire ces 
petites fufées à la main par le bout aplati: on les emplit, 


* Fin 108, 


98 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

en plongeant le bout du cartouche dans la compofiion ; il 
en prend quelques lignes qu'on poulie au fond, & qu'on 
foule à che fois de quelques coups de baguette: on peut 
aufli tirer ces petites fufées fous une cheminée, comme les 
fufées où il entre dans la compofition du noir de fumée au 
lieu de fable de fer. 


A VLENRT A SSIEUM ENT: 


On trouvera dans les compofitions fuivantes l'expreffion 
des trois fortes de fables : on n'entend pas qu'on en mette égales 
parties de chaque elpèce, mais qu'on tamife avec le tamis 
du gros fable une certaine quantité de fable, dont on a feu- 
lement féparé le pouflier. 

Si on veut fe fervir une feconde fois des cartouches de 
terre, il faut, quand ils font encore chauds, en retirer la 
terre qu'on a mile par-deflus la compolition ; autrement on 
auroit de la peine à en venir à bout. 

Toutes es compofitions que j'envoie m'ont été données 
comme éprouvées, cependant je ne les garantis pas; quelques- 
unes paroiflent mal dofées. J'ai marqué d'un aftérifque celles 
que j'ai éprouvées, ou que je regarde comme füres: les n.” 
vis-à-vis de chaque compofition ferviront à dénoter celles fur 
lefquelles on voudroit explication, difant tel n°. 


Différentes compofiions des feux d'artifice Chinois. 


SALPÈTRE.| SOUFRE. [CHARBON. 


taels. maffés, fen,|raels. malfes. fen.|tacls. males. fe: 
Poudre à canon cuites... 16. Wa 2010 Lui 3. ui 


Poudre à canon non cuite.. 16. # "| 3. 2. n| 2. 4. w 
Poudre des! mèches . +... 4 “lu 4 us nù | x LS. 
Poudre des pétarts.. ..... 4 #1 uw 418 nÂlu | Zur 
Grandes fufées volantes. ... 10. # nu | nu 3 
Petites fufées volantes. .... 10. # | 4 5. ù | 5e « 
Salpêtre 4 taels, foufre 2 taels, 
camphre 4 mafes, réfine 4 males, 


Boules de feu ....,..<€ poudre à mèches 2 taels, poudre à 
canon 2 taels. On mêle le tout avec un 


peu d'eau gommée, 
* Mèches 


DhE S4 SCIENCE 89 


Salpètre 10 taels, foufre 5 taels, 


# Mèches pour éclairer, . .. 3 
Mèches po orpiment 2 taels. 


s Salpêtre 2 tacls, foufre 4 mafes, 

Autres couleur d'or. : . : . 4 cérufe 3 mafles, gomme gutte 2 mafles, 
orpiment $ mafles. © 

Salpêtre 1 tael, foufre 3 tacls, cérufe 


» 
Autres couleur d'argent. . . j 4 mafes. 


COMPOSITIONS, DES FLEURS, 
Sable fin. 


SALPÈTRE.| SOUFRE. | CHARBON.| SABLE. 
taels. mal. ‘Jen. |raels'maff fen. | taels. moff fen. |taels. aff: fe: 
sl TG 0 Qu re ere) 2 Ur, VOGUE: : ni 
2210. 1 0 MO A, el |3e CU 
Lo. ru lues 4, ll, 2. P4 


4 nu un fn 8. u |u* 8. y» | 2. Pour amorcer les fufées 
des fleurs, fi l'on veut. 


2 PA e) LE 4 4 


15. EC INT OZ. LAURE 2SUIE 
MG log. Nr | no 2 Sn 72 
Ce OS PR 1 LEE IR 22 NS sy 
128.) 1° n ln 22. tu 63 ur rw 


1 

6 

3 3 
22. 1. 0 Wu 2. n Vu 7e 8] se nv 
gs]. Le 4 OUT. [SAT S 3 


Say. étrang. Tome 1Y. . M 


90 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Sable fin. 


SALPÈTRE.| SOUFRE.| CHARBON 


taels, maff. fem |saels. maff; fem 


I. 


4 


1 


[/2 
LA 


4: 


taels. maf. fer 


/1 


SABLE. 
tæls, maffr fem 

[/1 9e # 

[24 5* 4 

[22 2 11 

1072 Ier 

n 8 

HS Hu 

HO Se N 

1O. 4 #4 

3 Sr 

3° !H 11 

Se. 1 

RE HOT 

D PHRQNE 

8. u 

16.2 Ur 

6. “NUE 

6. mn 1 

7e [74 4 

6. camphre 1 tack. 
7e H 11 | 
10H 

8. mou-hiang.- 
14 WU g 
3. u 4 
to 

ne 2 

u ft g 

# 3: #4 

LU [71 7 

u 5. à 


34: 
55: 
56. 


57: 


66. 


67. 
68. 


racls, maf. fen. 


I, 
1. 


[2 


H 


DES 


ñ 
" 


1 


W . 


[/4 
H 


vacls, maff. fen. 


4 
* 


SCIENCES LES 
Moyen Sable. 


SALPÈTRE.| SOUFRE. CHARBON.| SABLE. 


[/4 


raels, mal], feu. |taels. maff. fen. 
LLC 74 HI. cérufe KT fer 


3. 5+ Compofñition lente 
pour les repos des 
cartouches de papier, 

3. 6. 1.116: 6: à 


& HW 0 D: 24 ur 

. Grande ouverture 
de gorge, 6 lignes. 
1/4 $. [1 ZAC UT 

2. ” 1 Î10, Grande ouverture. 
HU 4 HU 4x M 


ON N1 3° 5 [74 


2. 8. n | 7. camphre une mañfe. 
2. 5. 4 | 7. 5. Pour le petit car- 

touche de terre. 
2. 5e no 


8. Pour le grand cartou- 
che de terre. 


dE LANTA le: 0 16 
2. 4e [LA 
HZ 2NIUINGE NS 


Mi 


p2 MÉMoiREs PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Différens Sables mélés. 


SALPÊTRE. 
raels. mal: fen. 


* 82.1 1. 
83.| 1 
84.| 1. 
85.) 1. 
86.1 1. 
874 
88. r. 
809. 1. 
90.| 1. 
91.|10. 
92. ré: 


H 


1 


[/4 


[24 


[LA 


1! 


[24 


SOUFRE. 


1! 


[/4 


b 


3 


5 
5 


/L 


a 


LA 


2 


CHARBON. 
raels, maff: fen.|taels. maff. fen. 


[14 


[LA 


3° 


SABLE, 
taels. ma. ,fen 
. Sable fin. 


? She ei Cérufe $ fen: 
$:- moyen. 
27 sf moyen.? cinabre minéral 4 
2e Ge. gros. fen, orpiment 5 fen. 
1. 6. fin. 
j 6. moyen. 


2... gros. 
6.moyen.$ Arfenic 2 maffes.” 
He = 0 - fe 


5" des trois fortes. 
F7 5f moyen. Large ouverture, 
na fes.gron$ caf 90. 


{ 37" des trois fortes. 


erreur, C'efl 89. 
rot Sable fin. 


Compofiion avec noir de fumée au lieu de charbon: 


#*93.[10. 
94.|10. 1 
SOPATET EE 
06: MAC 
DIN ML ONE 
98.| 1. 
99.1 1. 
100. “I. / 


. 


1! 


[LL 


2 


2. 


8.noir. 


uoU 
Ho 1 


2e 1 


2. 4 
2. 4 


3e | 


AR 


F. [1 


Arfenic 2° 2% 
Sable fn. 
3" 5° fable fin. 
Arfenic 7f, 
Arfenic 8f, 
Arfenic DS 


Arfenic 1" 
Cinabre es 4f. 


ie sf fable fin. 


oir de fumée 17 5f. 


Sable fin 5" 
_ Arfenic 4e 


BES Sel1ENCESs 93 


SALPÈTRE.|SOUFRE.| CHARBON.] SABLE. 
raels. maff: fon. |taels. ma. fen.|raels, maff. fen. | taels. mal: fen. 
r03.| 1. w nu ln 1. $ ln 2. n | Sable moyen 2". 


104.| 1. 4 u |” 2. 3 |n 2. 4 | Sable moyen of. 


Sable moyen 2° 5". 
1205.10. # 1 |4 nu |2, $. # Petit cartouche, petite ouver- 
ture 2 lignes. 


r06.|10. un |4. n un |2, n n | Cartouche mou. 


” Arfenic 1°, 
107.|10. WW 4 HW [2 HN Sable fin 3°. Petite ouverture. 


*108./10. ” « lu AIN LATE | 6. Sable fin. yrg -/o. 


1° fignifie 1 fael, 1" une maffe, 1° 1 fen. 


Nota. Si on foupçonne que Ie noir de fumée ne foit pas pur, il 
faut le faver, & ne prendre que ce qui furnagera. On le fera bien 
fécher avant de s’en fervir. 


On donne ordinairement 2 lignes d'épaifleur aux car- 
touches du fable fin, 4 lignes à ceux du moyen fable, & 
6 à ceux du gros fable. Le diamètre intérieur des cartouches 
du fable fin eft depuis 4 lignes jufqu'à 10, celui du moyen 
fable eft depuis 6 lignes jufqu'à 1 pouce 2 lignes, celui du 
gros fable depuis 1 pouce 2 lignes jufqu'à 2 pouces & plus. 
L'ouverture de la gorge ou étranglement, doit avoir pour 
le moins le tiers du diamètre intérieur du. cartouche : on ne 
rifque rien à la faire un peu trop grande; les fleurs en mon- 
teront moins haut, mais on eft plus für de l'effet. Les petits 
cartouches de yrg-lo de 4 lignes de diamètre intérieur & 
d'une demi-ligne d'épaifleur, ne font point étranglés, non 
plus que ceux des mou-hiang, qui ont 10 lignes de diamètre : 
on en bouche fimplement le fond avec un tampon de papier; 
& on les remplit de compofition fans y ajoûter de terre. 
L'ouverture étant de toute la largeur du cartouche, la com- 


pofition a affez de force pour pouffer le fable dehors. 


M iij 


94 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


EXPLICAIION DES FIGURES. 


PART AMNECNENLE : - I 


Le: Figures 1 èr 2 repréfentent la manière de rouler des car- 
touches avec l'inflrument ou morceau de bois monté en formé de 
varlope; il doit être de bon bois dur, bien uni en deflous. Si le 
cartouche eft gros, on met les deux mains fur l'inftrument , une fuffit 
pour les petits cartouches. ’ . 

La figure 3 fait voir la manière de rouler un cartouche de fufée 
volante avec la planche qui fait levier. 

Fig. 4, chaffis auquel eft attachée la planche: ce chaflis ne tient 
point au banc, il avance & recule à volonté, 

Fig. $, cylindre qui eft mobile fur fon axe. Fig. 6, aa, coins 
qu'on met deflus ou deffous la traverfe 4, fclon que le cartouche 
-cft plus ou moins grand. 

La fs. 7 défigne la façon d'étrangler une fuféc. 

Fig, 8, couteau pour étrangler les cartouches des fufées à fleurs, 


PÉTRAUN CHE SLA. 


La figure 1 repréfente un cartouche d’argille , pofé fur un efcabeau; 
‘on tire ordinairement ces fufées un peu élevées, l'effet en eft plus 
beau. 

Fig. 2, petit cartouche d'argille, dans lequel font quatre groffes 
fufées les unes au deflus des autres; on met des pétards entre chacune. 
IT vaut mieux attacher ces fufées à un piquet, de peur qu'elles ne 
crèvent. 

La figure 3 fait voir la façon de tirer une fufée de la compofition 
mou - hiang , où l'on met quelquefois des boules de feu. Ce cartouche 
ne s’étrangle point, on en bouche un bout avec un tampon de 
papier, & on emplit le cartouche de compoñtion; es fleurs ont 
tout le diamètre du cartouche pour fortir. Ce cartouche a un pied 
de long, fon diamètre intérieur a 10 lignes, & 4 lignes d’épaiffeur. 

La fs. 4 repréfente une main qui verfe de l’eau dans une fufée a 
fleurs qui commence à faire fon effet: c’eft un jeu pour faire croire 
à ceux qui ne font pas au fait, qu'il faut de l’eau pour que Îa 
fufée fafle fon effet; il ne peut y en entrer. 

La fig. 5 fait voir une grande lanterne d’où pendent des raifms. 
D'une même lanterne il fortira quelquefois quatre à cinq fortes de 
différens feux d'artifices. 


CÉRE 


Ja. Etrang. Tome 17 Page 94 PL, Z. 


Ÿ S 
à, Er [I 


2 ———————— 


far, Etrang Time N° Page gg. PL I. 


g4 PLI. 


Jav. Fitrang. Tome VW: Page 


fn Pétrang Tome IF Pare 94. PL 1. 


DES SCIENCES 9$ 


MAO EU T I ON 
DE QUELQUES PROBLÈMES 
DE MÉCHANIQUE. 
Par M. NECKER, Correfpondant de l'Académie. 
LEMME. 


OIENT pour un point quelconque € d'une courbe, 
labfcifle AB = x, Varc AC = r, & le rayon de 
k développée R ; foit de plus dx — gdr, je dis que 


RT' dr +4, ke figne + fervant lorfque la 


Vi — 49) 
courbe tourne fa concavité vers fon axe des abfciffes, & le: 
figne — lorfqu'elle eft convexe vers cet axe. 


Car, foient C 2, cb deux ordonnées infiniment proches, 
foit auf Ca tangente au point C, ac perpendiculaire fur 
Ca, ao parallèle à CB, co parallèle à AZ, & l'on aura: 


Bi — 4x, Cc—dr,c0—E ddx, cg = V(dr' — dx). 


Maintenant les triangles femblables a co, C cg, donnent cg 
+ drddx 


:Cc—= co :a4a ci doncac — + Or, ac 
Ce = Cc:R; donc R = CRT Tan: 
—  — D Mais dx = jar, & E ddx = ddr, 
en fuppofant ji conftant ; donc R — ‘dr = Per 


GS) CNED; 


* Si on faïfoit dx conftant & dr variable, on twouveroit encore 


FA à 
R=dr= +1, 
1=19 


Figure 3. 


96 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
PRUVONBALLE ME T 
Trouver la courbe fur laquelle un corps ghiffant par [a pefanteur 


dans le vuide, de quelque point de la courbe :qu'il commence 
à defcendre , parviemne 1oëjours dans un temps égal au point 
le plus bas, en Juppofant la réfiflance provenant du frot- 
tement comme une partie déterminée de la preffion qu'exerce le 


corps fur la courbe. 


J'embraffe cette hypothèfe fur la nature du frottement, 
parce qu'il me paroïît qu'elle eft la plus généralement reçüe 
des Phyficiens, & qu'elle eft d'ailleurs affez conforme aux 
expériences qui ont été faites fur cette matière. 

Soit donc la couibe DCA Ia tautochrone demandée : 
que la ligne B À, perpendiculaire à l'horizon, foit fon axe 
des abfciffes ; foit aufr pour un point quelconque € de Ia 


.couïbe , 


Labvitelle Se UT ee sons ace 5 MNT 
D'ABEME A à pre à ee ee ele te 
LAC ARR. LE le nc cit à aie CORRE 
Le rayon de la développée. . . . . . . …. + . . R, 
Lapeñnsens 7 LU 6. d'ercredete RNCS 
LÉ 


La preffion qui en réfulte fur la courbe... g— 


v° 


R ‘ 


Celle qui réfulte de la force centrifuge. . . . . 


Le frottement à la preffion comme # à », 


dx mgVWdr — dx) my 
LON AA ra PETER nr e-) 
& To dr adr n R PSE 


lexpreffion de la force qui follicite à un point quelconque C, 
le corps tombant de D vers À; donc 


o dx mg Vdr° — dx) mu? dr 
£ NET TN: eh — = — dv; 
dr ndr u R y f 


ou g dx — _ gV(dr — dx) — LS + vdv—0. 


Pour 


DESASCIENCES 97 
Pour intégrer cette équation, jen multiplie tous Jes termes 


Era , ALL Ah 
par 2C : FAIR qui me donne, après l'intégration, 


Deere NUE 28 fe [R<" dr 
(dx — = V(dr — dx); doù fon tire 


— 2m 


— fRT'4 
C—ig fc f d Cds — — Var — dx )] 

VO — RER ; 
çe —JRT'dr 

È RS HER 

donc di — paille e3 : 
—fRZ dr 

VC sf ds — 7 Var —d#)]) 


Pour avoir maintenant l'équation de [a tautochrone cher- 
‘chée, je me fers de la méthode de M. Bernoulli, donnée 
dans les Mémoires de l’Académie royale des Sciences, année 
1730. Elle confifte à égaler cette éxpreflion de 47 à quelque 
fonction femblable de dimenfion nulle, comme, par exemple, 
à TA4=FD a 7? qui eft la différencielle d’un angle dont À 
eft lé rayon & P le cofinus, & dont l'intégrale exprime un 
angle droit , quelque valeur qu'on donne à À, lorfque P — 0. 


Faifons donc AA=C, — c A SRSES pbs dP, 


& 2g feed De Tfdr ptdr di) =PP: 
on tire de- la feconde de ces trois équations, - 


—= fe ee a rjube par conféquent, 


28fc° Lx dr —d#)] PER 


re en différenciant, & divifint enfuite de Jul & d'autre 
Sar. étrang. Tome 1 #Ù ÿ: 


TR Gr 


R='4r 


a) 


SA 
— pm dq 
ss —14) 


98 men PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
RD 
ou 20 KE FR f , on 4 


EE ax 2 {ar — dé)] —dr fc LR dr 


Soit maintenant dx — gdr; donc (Lemme précédent) 
R'Adr=syirts 

Vi — 49) 

AS Der & chaque terme étant divifé par dr, ona. 


ee [vi 9) =f " a 


": différenciant de nouveau, & divifant toute l'équation 


: ces valeurs étant fubftituées dans 


—m Âq 
par le terme commun € * RTE) , ona pour l'équation 
de la tautochrone cherchée, 


re mgd. 
Lg vi —99)] fe Par er, sé 


ou fimplement © gdq — dr; donc - Ÿ ga 
M - és os =, Es Er 


+ Br + D ; équation qui peut être celle d'une cycloïde, 
fuivant que les conftantes £ & D feront déterminées. 
Pour cet effet, je remarque que la conftante D doit être zéro, 
puifque fa courbe devant pafler par le point À, à x = ©. 
doit répondre r = 0. 
La conftante Z2 &Rc détermine par cette condition , qué 
PE: niet r — 0:0or nous avons vû ci- deflus 


que P LAN EP RRe” dr =fRT ET Er d? 


= ge a PAS D (g — = Vi —gg); donc lorfque 
— fR—'dr FN 
7 —0,ge ? [2 — + Vi —39)]=0 


donc aufi 9 = —_ V{1 — qq) ou dx = = (dr. — dx}: 


DES SiErr Ein cEs 99 


à Bd Bdr 
or dx = ET ; donc lorfque r = 0 ——— — © 
me + nr m+Hn 7 
Se / #0) 


£Z' dr: 2 ‘ e D 2 2 
yL" Tee | , d'où Ton tire B — er 
FE md “ 


donc l'équation de Ja tautochrone eft 2g ( = _ - ) Er: 
4 2 2 x 2 2 
DR ER our faifant g (= = de 


n° 


4amr 
Von +)" 

La tautochrone demandée eft donc une portion d’une 
cycloïde renverfée dont le cercle générateur a pour diamètre 


£ (- 2 S- ) — 4, & dans hquelle le point À que jai 
pris pour l'origine des abfcifles, & à l'égard duquel Ja courbe 


eff tautochrone, eft celui où 4x : V(dé — dx) = mix, 
c'eft-à-dire, le point le plus haut où le corps puifle être placé 
fans commencer à tomber. En conftruifant la courbe entière, 
on s'apercevra aifément que l'arc de cycloïde compris entre 


4ax = Tr + 


. . r x 2zam 

ce point & le point le plus bas eft égal à 7 rap 

Si le frottement eft infiniment petit & comme nul, # 

4zam 
VW + n°) 

s'évanouit, & Féquation de la tautochrone eft ARTE 

ce qui marque que le point À eft alors le point le plus bas 

de la cycloïde. Ce qu'on favoit d'ailleurs. 


PROBLEME IL 


Tout étant Juppofé comme dans le Problème précédent, trouver 
la tautochrone pour un corps qui monte. 


devient infiniment grand par rapport à #1; le terme 


IL eft aifé de s'apercevoir qu'il n'y a de différence entre 
ce cas-ci & celui de la defcente, finon que faction de la 
pefanteur & la réfiflance provenant du frottement, conf- 

N ji 


100 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

pirent pour retarder un corps qui monte, au lieu qu'elles 
font oppolées l'une à l'autre lorfque ce corps defcend ; d'où 
il fuit que pour réfoudre ce Problème il faut changer Îles 


227 , nm * 7 
fignes des quantités affectées de — dans le calcul précédent, 


ce qui donnera pour expreffion de la force retardatrice, 


gdx mg Vdré — dx) m'v* & 
dr +, adr 1R° 
cm fR =" dr 
ene dy ,: 
ie = en 
2 fR= "4 + 
AR TCE as © var — dst)]) 
a , s dP A 
; on l fi ER 
faut enfuite égaler cette expreffion APT STE P 


exprime non le cofinus, comme ci-devant, mais le finus 
d'un arc dont le rayon eft À, il en réfultera P —|A lorfque 


TRE 


= 2g fe 1 [dx + = V(dr — dx)], 


ceft-à-dire, lorfque v — o, ce qui arrive quand le corps 
eft monté auffi haut que fa viefle primitivement imprimée 
& la réfiftance qu'il éprouve le lui permettent; mais lorfque 
PA ;'alors tr = — angle droit; ce 
qui eft a condition néceflaire pour le tautochronifme. En 
pourfuivant le calcul, comme dans le Problème précédent, 


mOn 


on parvient à la même équation ——— gdq — dr, ou 
1 


2 =E 2 Fr 
See —2+r + Br+ D;la conftante D y ef auffr 
= à 
zéro, BP s'y détermine encore par fa condition que P = o 
lorfque 7 — o, & a même valeur que ci-devant; d'où äl 
réfulte que la même portion de cycloïde qui eft tautochrone 
{1 le corps defcend , l'eft auffi quand le corps monte. 


Voilà donc la cycloïde connue déjà pour tautochrone dans 
le vuide, lorfqu’il n'y a aucune réfiftance au mouvement d'un 


nes Sic'r'ENNC ES Tor 
corps, & auffi dans un milieu qui réfifte comme la viteffe, 
devenue maintenant tautochrone dans une nouvelle hypothèle, 
qui eft celle d'une réfiftance proportionnelle à a preffion 
qu'exerce le corps fur la courbe. 


PLR:O!B EE EUM'E: PIE 


Suppofant encore le frottement proportionnel à la preffion. fur la 
courbe, trouver la tautochrone dans un milieu qui refiffe 
comme le quarré des vitelles. 


Soit f.l'intenfité de cette réfiflance ; donc 
PDA ER 7 A CUT © NEED d'ERREE 7 , 
Le RE UN CE MIex- 
preffion de la force accélératrice qui agit à chaque inftant 
fur le corps, les fignes — fervant lorfque le corps deftend, 
m V{dr® — dx°) 


ñn 


& les fignes + lorfqu'il monte; donc gdx = 


m 


sr + f) v'dr + vdv — 0. Cette équation 


mdr 
Ce 


multipliée par 2 c , & intégrée, donne 


mdr 
ER ee fr) £ 
C—2gfe Ldx ZE © ar —ds)] 

Tv —= mdr Non 

Fa (= fi) 

€ 1 

EN + fdr) 
| — ” d 

CDI — 2 L » 


mdr 
F2 RE fer) sl 
VIE agde (dr Eva 4) 
De cette dernière équation, comparée, comme nous avons 


fait ci-deflus, avec la quantité Fr 


Tv . 
TAA= PF)" on tire pour 


DL dr) 


N ü 


"HAUPIÉE gl 
l'équation de fa tautochrone (fe 


Figure 4. 


te Da EE 


xoz MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


—— 
— 


dans cette équation dx = gdr, qu on la ee enfuite 


: ut TJS + far) 
& qu'on la re on aura fe dr 
EN ——— + far) : 

Le D Ebe ne «IF V: — 97/1. Différen< 
cions de nouveau, & réduifons, nous aurons 

PTE mag BE 
di =Fé (Tr — 94) + fdr) . res "(i — 9q)] 

QU: TL ES (n° + n°) gdg 
as gg) PE fer g — fem — qq) 
équation dans Jaquelle les indéterminées font féparées, & qui 
s'intègre par les fractions rationnelles, en faifant difparoître 


le radical ÿ/1 — 94) par la fubftitution de _ -àg, 


af + far) 
2g fc (ds Var — dr) : Si l’on fait 


pourvû qu'on ait les facteurs du dénominateur ainfi tranf- 


formé. 


P'RAONB L E ME 4 V. 


Dans la même hypothèle fur le frottement , trouver la tautochrone 
dans un milieu qui réfifle comme une fonction quelconque 
de la viteffe, en fuppofant cette réfiflance infiniment petite, 


Soit AËF Ia courbe demandée, & Acd la tautochrone 
dans le vuide, ces deux courbes doivent différer infiniment 
peu. Soit l'arc AE pris par-tout égal à AC = r, & foit 
AG —= x’, la force accélératrice dans la courbe AE F 


IAMALES mgv(dr — dx? mu 1 ; 
ic en fev", f étant 


une quantité infiniment petite qui défigne l'intenfité de la 
réfiftance du fluide; & comme les vitefles & & +’, qui font 
celles des corps dans les deux courbes dans les points corref- 
pondans € & E, diffèrent infiniment peu, on peut mettre 
dans le terme f@v', v au lieu de +’, puifquela différence 


qu'il y a entre v & v', multipliée par la quantité f infini- 


DE STSIC TE N CEIS 10% 
méni petite, donneroit un terme infiniment petit du fecond 
mgV(dr? — de? 


AE. nl r 
ordre, que nous négligeons ici; donc g4x — = 


— mv'°dr 1 , 
— fovdr Se en v'dv' — 0: 0r nous avons 


trouvé dans le premier Problème, 


— 21m 


—— fRT'dr 
C— 218 f° f . [dx — « War — dx°)] 
vv —= = — — ———; 
——— fRT' dr 
€ n 
la conflante C s'y détermine par la condition que # — o 


lorfque r — 6, défignant un arc quelconque parcouru 


depuis le commencement de Ja chûte jufqu'en 4, & par le 


4amr 

Vi +5) 
réduire l'expreffion de vw à ne contenir d'autres variables 
que r; donc 4 — p, c'eft-à-dire, v — fonction der, 
mgvV(dr — d#° mv'dr- 
ET fopdr — 
— dv — 0. On tire de cette équation, comme dans 
k premier Problème, 


moyen de l'équation 4ax = r° + » on peut 


ainfi gdx — 


21m 


— {R'T'dr 
Cafe * f . [eds — EE — fopdr] 
VU —= 
= [RE dr 
—— [JR "dr 
€" dr 
& dt = ER 


nr nt) BRAIN 
[e-2% - f RAR 


TE SR dr F 
dr 3, (. À ) 
= — VAA PP) , & par conféquent € dr 


—— fR— ar MURS ERA AA 
=» ff £ . (gdx! ZE — ford), 


AIS 


Figure 5. 


rog MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
équation qui, différenciée & réduite, donne 


—" 

AT mgv(dr® — dx?) 
D de . [gdx' — ee — fepdr]|: 
Soit dx — gdr + mdr, & comme x & x" ne different 
qu'infiniment peu, æ eft une quantité infiniment plus petite 


= fR'T 'dr = mfR dr 
que g; donc fc DR € [ga + gr 
ls — — 2 TX! . 
Rue — 7) — f9p]. Différenciant de nouveau, & 
[24 
FT x . = dj + d7 
réduifant, après avoir obfervé que fR'T "dr — er 
2/4 = 


Von aura dr = gdq + gdr — d(f@p) + —— 


gd di + 7 
EE D PALIER" TE pre = 


n° avi — 99) 
mfopdgq m° + d 
Li MEPPER" fin uatior 
+ d'(Jer) FC gdg, équation 
toute féparée, puifque l'équation 4ax = r° —— 
P ? P q ] (n° + n°). 
d — LR En intégrant, on aura donc 
one g — — ag Eni grant, on aura do 
me + n fepdq 
a rl ras ce à 


+ B, & par conféquent Mrs gx =ir + Br+D 
en [Fr — Se | . Les conftantes 2 & D 
fe déterminent comme dans le premier Problème, & y ont 
mème valeur. 


PERCONRIL'E:MUE CV, 


Dans la même hypothèle fur la nature du frottement , trouver 
la courbe fur laquelle un corps commençant à fe mouvoir avec 
une vitefle finie à, perfevère dans un mouvement uniforme. 


Que DCE foit Jacourbe demandée, foit la verticale 43 
l'axe des abfciffes, menez l'horizontale AD & l'ordonnée C B 


parallèle à Ad, foit AB = x, DC = r, & Yon awa 
gx. 


a 


RE LS ed ue à 


DES SCIENCES. 10$ 
gdx RL mgv{dr® — dx) te mr dr Lcoprrepesiegns VE 
dr ndr nR v Save 

mgv{dr* — dx) mudr __ 

tenter ae See 
‘ Jarsy == 

équation qui, multipliée par == 2c 
ZE ER dr Æ 
CH 28 fe n . (dx — VW — dx) 


2 


—[RT'dr 
= , donne 


. La conf 


UU —= = 
+ — fRT'dr 
FC F 
tante C fe détermine par la condition, que lorfque r — 0, 
Æ [SR dr 
n 
v — a: 0r, lorfque 7 — 0,6 — "M Vire 


[Tax — {dr — dx)] — 0, comme on peut 


s'en aflurer, en faifant dx — gdr; donc 
+ 2 JRT'dr k 
LEE CL LM » & par conféquent 


TR "dr 
28 [€ ï 


Lx — Vian — dx) 


CURE OC = = 
HE —[RT'dr 


€ n 


Mais par la nature de la queftion, non feulement vv — aa 
lorfquer — 0, maisauffi en un point quelconque dela courbe ; 


pa JR 'ar 
done toûjours 2gfc (dx — = V{dr° — dx!) 


— 0; donc l'équation de Ia ligne demandée eft 4x — . 


V(dr° — dx), où faïfant BC = y, x — =) = conf. ; 


ce qui marque que Îa ligne demandée n'eft pas une courbe, 
mais une droite, qui fait , avec la verticale AB, un angle dont 


la tangente eft —. 
n m 
SCHOLIE. 


J'ai fuppofé dans a folution de ces Problèmes, que Ja 
Say. étrang, Tome 1V. | . Q 


106 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÀACADÉMIE 
réfiftance provenant du frottement éft proportionnelle à Ja 
preffion qui applique lune à l'autre les furfaces frottantes, 
& qu'elle agit pour détruire le mouvement, comme la pefan- 
teur ou toute autre force morte, c'eft-à-dire, par une action 
continuelle. Je l'ai fait, comme je l'ai déjà dit, pour me confor- 
mer au fentiment le plus généralement reçû des Phyficiens, 
quoique peut-ètre cette fuppofition ne foit pas entièrement 
conforme à la réalité. Il eft für que la preffion par laquelle 
les corps qu'il faut mouvoir font appliqués l’un à l'autre, eft 
une des principales confidérations qu'il faut faire entrer dans 
l'évaluation du frottement : il eft für auffr que, toutes chofes 
d'ailleurs égales, une augmentation dans la preffion en occa- 
fionne une dans le frottement; mais qu'il y aït un rapport 
conftant entre l'un & F'autre, que, par exemple, le frottement 
foit toûjours le tiers ou le quart, ou quelqu'autre partie déter- 
minée du poids, c'eft ce qui me paroït pouvoir être contefté. 
Les expériences de M. Muffchenbroek ne fe conforment point 
à cette règle; celles de feu M. Camus, gentilhomme Lorrain, 
y font-autli un peu oppofées ; & ces deux autorités, jointes à 
plufieurs autres qu'on pourroit alléguer, montrent évidemment 
qu'un rapport conflant entre le frottement & la preffion n'eft 
point encore fuffifamment prouvé. 

L'hypothèfe que j'ai embraffée s'écarte peut-être encore de 
la réalité, en ce que la réfiftance qui provient réellement du 
frottement, ne détruit point le mouvement par une action 
continuelle, mais comme par de petits chocs, non feulement 
de parties élaftiques contre d'autres parties élaftiques, mais 
encore de parties dures contre d'autres parties dures. De-là, 
& de leur: difpofition fort irrégulière fur les furfaces des corps, 
il doit réfulter que ces chocs ne font point égaux & ne fe 
faccèdent pas à des intervalles de temps égaux, & qu'ainfi la 
vitefe d’un corps qui fe meut, par exemple, fur un plan 
horizontal, diminue, il eft vrai, prefqu'à chaque inftant , fans 
pafler néanmoins par tous les degrés intermédiaires entre ce 
qu'elle efl au commencement & le zéro, ou du moins qu'elle 
n'y pañle pas avec cette régularité que le calcul fuppofe. 

Enfin ma fuppoñtion pourroit bien encore n'tre pas 


DES SCIENCES. 107 
entièrement conforme à la nature des chofes, en ce que je n'y 
fais entrer la confidération de la vitefle du corps que comme 
augmentant, par la force centrifuge qu’elle occafionne, la pref 
fion fur la courbe, & par-là le frottement. If fuivroit de Îà, 
que quandun corps glifle fur un plan incliné, fa vitefle ne 
devroit entrer pour rien dans d'eftimation du frottement, & 
que la réfiftance feroit la même, foit que le corps eût un 
ou cent degrés de viteffe. M. Mufichenbroek nous rapporte 
cependant qu'il a fait des expériences, dont il ne donne point 
le détail, par lefquelles il lui a paru que lorfque la vitefle 
étoit très-grande, le frottement augmentoit beaucoup : M. Euler, 
au contraire, foupçonne * que le frottement doit diminuer 
uand la viteffe augmente; il en allègue des raïfons très- 
plaufibles, & il indique en même temps une façon de s'en 
aflurer par l'expérience. Je n'ai pü jufqu'à cette heure le tenter, 
mais je ne tarderai pas de le faire: ce point me paroît aflez 
curieux & intéreffant pour mériter d’être un peu approfondi. 

Malgré toutes les raifons que j'ai eues de douter que la 
fuppofition que je faifois fur la nature du frottement fût vraie 
en tout point, je nai pourtant pas cru devoir lui en pré- 
férer une autre, qui auroit été moins généralement reçüe, & 
peut-être plus incertaine. 

Si le frottement n’eft pas exactement proportionnel à Ia 
preflion, l’on ignore du moins fuivant quelle fonétion de celle- 
ci il augmente: fi la vitefle doitentrer dans l'évaluation du frot- 
tement, on ignore aufli comment: enfin, fi cette réfiftance ne 
détruit pas le mouvement par une ation continuelle, comme 
les autres forces mortes, il eft pourtant vrai que l'on peut la 
fuppofer telle, fans qu'il en réfulte d'erreur confidérable. 

Qu'il me foit permis de remarquer, avant de quitter cette 
matière, combien nos connoiflances fur la nature & les 
véritables loix du frottement font encore éloignées de la pré- 
cifion & de la certitude qu'on pourroit y defirer. On ne 
peut former à cet égard prefque aucune propofition générale 
qui ne foit conteftée. 

1. Les matières huilées ou graiffées, de quelque nature 

O i 


* Mém. de 
l'Ac. de Berlin, 
année 1748. 


108 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
qu'elles foient , ont-elles toutes le même frottement? quelques 
Phyficiens le foûtiennent, d'autres allèguent des expériences 
oppolées. 2° La grandeur des furfaces influe-t-elle fur la quan- 
tité du frottement? M. Amontons dit que non, M. Defaguliers 
le répète, nombre d’Auteurs penfent comme eux; cependant 
M. l'Abbé Nollet & M. Mufichenbroek nous apprennent le 
contraire, & leur autorité eft d'un très-grand poids. 3.° Le 
frottement eft-il proportionnel à Ja preflion? ne dépend-if 
point auffi de la vitefle des parties? j'ai déjà remarqué que 
nous ne pouvions répondre avec certitude à ces queflions. 
4 Le frottement fuppole-t-il néceflairement quelque force 
qui applique l'une à l'autre les furfaces des corps qu'on veut 
mouvoir? ne feroit-il pas bien poflible que cette force fût 
nulle, & qu'il y eût pourtant quelque frottement? l'exemple 
de deux fcies fufpendues verticalement l'une à côté de l'autre, 
de façon que les dents de lune fe logent entre celles de l'autre, 
ne femble-t-il pas montrer que quoiqu'aucune force n'applique 
l'une contre l’autre deux furfaces quelconques, les inégalités 
de June peuvent apporter quelque difficulté au mouvement 
de l'autre? & ceft ce qu'on nomme frottement. 5° Enfin, 
nul principe n'a paru plus inconteftable fur cette matière , que 
celui qui établit qu'une roue qui tourne fur un pivot d'un 
certain diamètre, a d'autant plus de facilité , que la roue reftant 
la méme, le diamètre du pivot eft plus petit, & que la dimi- 
nution du frottement fuit exaétement la même proportion 
que celle du pivot; cependant j'ai ouï dire à d'habiles 
Horlogers, qui avoient fait des expériences fur cette matière, 
que quand les pivots étoient d'une certaine petitefle, ils ne 
trouvoient pas le frottement diminué en raifon du pivot, & 
que fi on établifloit, par exemple , cette proportion, une 
demi- ligne eft à un pouce, comme Ja réfiftance qu'apporte 
le frottement au mouvement d’une roue fur un pivot de 
demi-ligne, eft à celle qu'elle éprouve quand elle tourne fur 
un pivot. d'un pouce, il en réfulteroit pour ce dernier cas 
un frottement beaucoup au deflus de la réalité. 


ECTS 


| av Etrang Tome D Page 108, PL 711. 


DÉENSUMSI CIE NchEts 109 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, 


Faires à Touloufe pendant dix années , depuis à compris 
l'année 1747 jufqu'en l'année 1756, inclufivemenr. 


Par M. MARCORELLE, Correfpondant de l'Académie. 


N a fi fouvent parlé de l'utilité des Obfervations météo- 

rologiques, qu'il feroit fuperflu d'en donner ici de 
nouvelles preuves ; il fuffra de remarquer qu’elles font, pour 
ainfi dire, les principes fondamentaux de la bonne Phyfique, 
& que d'elles dépend la folution des queftions les plus impor- 
tantes & les plus curieufes de cette Science: mais pour en 
retirer tout le fruit qu'on eft en droit d'en attendre, il ne 
fuflit pas d'en avoir une fuite de plufieurs années de quelques 
pays, il feroit effentiel d'en avoir de tous les pays de la terre, 
parce que dans chaque pays l'état de l'atmofphère eft di- 
verfement modifié. Pour concourir à l'exécution de ce vafte 
deffein, je me fuis déterminé à en faire à Touloufe: ce 
Mémoire contiendra celles de dix années, depuis l'année 1 747 
jufqu'en année 1756. Pour fatisfaire les Savans qui les 
demandent, & les rendre par-là plus utiles au Public, je 
vais en dépofer les réfultats dans le fein de l'Académie. 


Eau de Pluie, 


Pour mefurer Ja quantité d’eau de pluie qui tombe à 
Touloufe, j'ai placé fur une tour découverte une cuvette 
cylindrique de dix-huit pouces de diamètre fur environ fept 
pouces de hauteur, doublée en dehors d'une caïffe de bois 
peinte à l'huile, & liée de deux cerceaux de fer. Le fond de 
ce vaifleau a un peu de pente vers l'un de fes bords, auquel 
eft foudé un robinet de cuivre, difpofé de manière que lorfqu'il 
eft ouvert, le vaifleau fe vuide entièrement. 

Pour mefurer l'eau contenue après la pluie dans la cuvette 
cylindrique, on ouvre le robinet & on la reçoit dans un godet 


O iij 


110 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
cylindrique de trois pouces de diamètre fur trois pouces de 
hauteur, laquelle eft divifée en douze parties égales. Puifque 
le diamètre du godet n’eft que la fixième partie de celui de 
la cuvette, la bale n’en eft que la trente-fixième, & par con- 
féquent l'eau qui remplit le"godet, dont la hauteur eft de 
trente-fix lignes, ne doit s'élever que d'une ligne dans la 
cuvette, & chaque divifion du godet marque un douzième 
de ligne de hauteur d’eau dans la cuvette. 

Parmi les différences qu'il y a entre cette machine & celles 
de M." Sedilau & de la Hire, une des plus remarquables eft 
que la furface eft circulaire, au lieu que celle des autres eft 
carrée: j'ai préféré la circulaire, foit parce qu'elle demande 
moins de matière & qu'elle eft mieux aflujétie par les cerceaux, 
foit parce qu'à caufe de fa régularité elle reçoit également l'eau 
de pluie dans quelque diretion qu'elle foit pouffée par le vent. 

C'eft cette méthode que j'ai fuivie pour mefurer l'eau de 
pluie tombée à Touloufe. IL réfulte des obfervations, que la 
quantité moyenne eft de 17 pouces une ligne +2: on voit 
par-là que ce pays eft un peu plus pluvieux que celui de Paris, 
où la quantité moyenne d'eau de pluie a été fixée en 1743 
à 16 pouces 8 lignes. On pourroit attribuer cette différence 
au voifinage où nous fommes des montagnes des Pyrénées, 
qui font aflez régulièrement chargées de neige pendant fept 
à huit mois de l’année. Des caufes à peu près femblables font 
que certains pays font plus fecs les uns que les autres, qu'il 

en a où il ne pleut que rarement ou point du tout, tandis 
qu'il y en a d’autres qui font fort pluvieux : de cette dernière 
claffe font les pays méridionaux. Ne pourroit-on pas préfu- 
mer que le Créateur a voulu tempérer, par cette abondance 
d'eau, les vives chaleurs auxquelles ils font expofés, & con- 
ferver par-là un certain équilibre dans la Nature? 

Les mois les plus pluvieux ont été en général ceux de 
Mars, d'Ayril, de Mai & de Juin: les pluies des trois premiers 
de ces mois contribuent à rendre à T'ouloufe les terres fécondes 
en grains & en fourrages. Les mois les plus fecs ont été ceux de 


Février, Juillet, Août, Oftobre, Novembre & Décembre, 


DES : SICA:E NICE Se 111 

Le 18 Juillet 1755 a été le jour le plus pluvieux de ces 
dix années; il tomba 1 8 lignes -£ d'eau : fouvent il a plu des 
journées entières, & il n'en étoit tombé que 2, 3 & 4 lignes 
de hauteur; les gouttes de la pluie étoient alors fort menues. 

Le nombre des jours humides & pluvieux eft à Touloufe, 
dans le cours de l'année, au nombre des jours fecs, comme 
reftäs. 

Les mois pendant lefquels il tombe ordinairement de fa 
neige à Touloufe, font ceux de Janvier, Février, Novembre 
& Décembre: la neige tombée dans le cours de ces dix 
années n'a jamais demeuré fur la terre, fans fe fondre, plus 
de huit jours. 

La fécherefle de quelques-unes de ces dix années fit tarir 
les puits, les fontaines, & réduifit les eaux de la Garonne 
à la moindre hauteur où elles euflent été depuis long temps. 
Je profitai de cette circonftance pour déterminer les limites 
dans lefquelles on peut regarder comme renfermées les dif- 
férentes élévations où cette rivière parvient dans la partie de 
fon lit qui répond à cette ville. Par la comparaifon de la 
hauteur où les eaux étoient le 13 Août 1753, à celle où 
elles étoient dans les plus fortes crües, il en réfulte 1 $ pieds 
4 pouces pour la plus grande différence de hauteur. Ces 
+ obfervations peuvent fervir à déterminer les précautions né- 
ceflaires pour fe garantir des funéftes effets des inondations 
de la Garonne. 

On à fouvent vüû les eaux de la Garonne déborder, fans 
que celles du Tarn s'élevaflent au deflus de feur hauteur 
ordinaire ; mais en 1751, qu'il y eut des pluies continuelles 
pendant cinq mois, les eaux du Tarn fortirent de leur lit, 
quoique très-profond, & causèrent de grands defordres dans 
toute l'étendue du pays qu'elles parcourent, tandis que celles 
de Ja Garonne ne débordèrent point. On ne doit chercher 
la caufe de cette différence que dans l'éloignement où les fources 
de ces deux rivières font entr'elles. Tout le monde fait que 
la fource de la Garonne eft dans les Pyrénées, & celle du : 
Tarn dans les Sévennes : on croit avoir remarqué que quoique | 


112 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

la fource de la Garonne foit plus méridionale que celle du 
Tarn, les eaux en font cependant plus froides; la raifon en eft 
fans doute que la fource de la Garonne eft au nord par rapport 
aux montagnes des Pyrénées, & que celle du Tarn eft au 
midi par rapport aux montagnes des Sévennes. 


Brouillards, Feux è7 Vapeurs lumineufes. 


Ïl y a eu des brouillards dans le cours de chacune de ces 
dix années, mais celle où ils ont le plus régné eft l'année 
1749 : les mois pendant lefquels il y a ordinairement le plus 
de brouillard , font les mois de Janvier, Novembre & 
Décembre: les brouillards des mois de Mai, Juin & Juillet 
font les plus nuifibles à la récolte. 

Le 1 $ Janvier 1747, vers les deux heures de l'après-midi, 
il parut fur {a Garonne, près du port de la Terrafle, un feu 
de la grandeur & de la figure d’une groffe gerbe. Ce feu, qui 
dura environ un quart-d'heure, étoit placé fur la furface des 
eaux vers le milieu de Ja rivière, & fans mouvement, quoique 
dans le même temps il fit un vent de fud-eft très- violent, 
qui déracina des arbres & enleva des toits aux environs. La 
partie de la Garonne où étoit ce feu, fe trouve, à raïfon de 
la fituation de fes bords, à l'abri du vent de fud-eft. 

Le 10 Juillet 1748, vers les quatre heures du matin, 
on obferva à Margaftau , près de Verdun-fur-Garonne, que 
l'air étoit chargé de brouillards épais, & la terre femée de 
petits points lumineux, formés par la vapeur qui fe ramañloit 
dans les petites cavités de la furface de la terre; les éminences 
ne brilloient point. Une feuille de papier chiffonnée, expolée 
au brouillard, ne devenant point lumineufe, on conjeétura 
que la chaleur de la terre, fortifiée par la réflexion des cavités, 
pouvoit contribuer à rendre ce brouillard Jumirieux. Pour 
vérifier la conjedure, on fit chauffer une main de papier, & on 
Texpofa au brouillard après avoir chiffonné Ja première feuille ; 
les creux donnèrent de la lumière au bout de quinze minutes, 
tandis que le papier chaud, qui n'étoit point chiffonné, ne 
brilla pas, même après un temps plus confidérable : Les feuilles 

des 


DES SCIENCES 113 
des arbres ne brilloient pas non plus. A un quart de lieue de 
Margaftau, & dans un terrein pierreux, les cailloux paroifloient 
en feu. Vers les fix heures & demie, le foleil diffipa ce brouil- 
lard , qui caufa quelque dommage aux vignes, quoiqu'il furvint 
peu après une pluie abondante, Cette vapeur, qui n'endom- 
mageoit point la peau des perfonnes délicates qui y furent 
expolées, teignoit d'un rouge fanguin les étofles & le linge 
qu'elle touchoit, fans néanmoins les altérer ; elle n'étoit point 
humide, & formoit, aux lieux où elle fe ramafloit, un corps 
que le froiffement réduifoit en poudre fubtile, dont les grains, 
vüsau microfcope, paroifloient fphériques & percés de quantité 
de trous ronds. 

Le 6 Septembre 175 2, à deux heures & demie du matin, 
après un vent de fud-eft, qui avoit foufflé pendant deux jours 
avec violence & qui fut fuivi d’un grand orage, on aperçût 
fur l'ouverture de laqueduc de la place du Salin à Touloufe, 
un feu en forme de gerbe d'environ 2 pieds de diamètre & 
de 4, pieds de hauteur , lequel dura près de 40 fecondes, 
& fe diffipa enfuite vers la rue de l'Inquifition, en forte qu'il 
Savança vers le fud-fud-eft. Il eft à remarquer que le jour 
précédent le mercure du baromètre étoit defcendu de 3 lignes, 
que celui du thermomètre divifé en cent parties étoit monté 
au 28.° degré au deflus de la congélation, & qu'il tonna & 
tomba 7 lignes + d’eau de pluie dans la nuit où l'on aperçüût 
le feu. Plufieurs perfonnes ont vû fouvent pendant des nuits 
d'été, & après un grand vent de fud-eft, des feux femblables 
fortir du même aqueduc & prendre la même route. 


Tonnerre. 


Le tonnerre seft fait entendre fouvent dans le cours de 
chacune de ces dix années, mais celle pendant laquelle il a 
tonné le plus fréquemment eft l'année 17 $0. Le tonnerre 
ne fe fait entendre ordinairement que pendant l'été, on l'a 
néanmoins entendu quelquefois durant fhiver. Comme on 
re peut guère remonter aux caufes que par les effets, on ne 
feuroit trop raffembler de ceux que produit le tonnerre; 

Sav. étrang. Tome IV. A 


y14 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÂCADÉMIE 
peut-être que leur multitude bizarre & leur comparaifon fer- 
viront un jour à nous faire connoître le principe de ce météore. 
Ce motif me détermine à en rapporter ici quelques-uns, qui 
me paroiffent aflez finguliers. 

Le 12 Septembre 1747, vers les cinq heures du foir, 
Je ciel étoit pur & ferein, & on n’y apercevoit qu'un feul 
nuage qui paroifloit à la vüe exactement rond & de 1 $ à 1 6 
pouces de diamètre : tout-à-coup la foudre gronda & éclata. 
Une femme de Bordenave près Grenade, qui en fut frappée, 
fat brülée à la mamelle droite, fans que fes habits euffent 
reçû la moindre atteinte. Les. yeux ouverts & fixes, le corps 
fans aucun mouvement , le pouls arrêté, on la crut morte, 
& elle refta dans cet état depuis cinq heures du foir jufqu'à 
une heure après minuit : alors elle recouvra la parole, à trois 
heures la vüûe, à cinq heures l'ouie, fans aucun fouvenir de 
V'accident. Demi-heure après, il lui furvint une toux exceffive ; 
on la faigna inutilement pour faciliter la refpiration, la difficulté 
fubffta jufqu’au dernier moment de fa vie, arrivé vingtscinq 
heures après le coup de foudre. Cet événement pourroit donner 
lieu à des conjectures défavorables au fentiment de ceux qui 
expliquent la formation du tonnerre par l'air comprimé entre 
deux ou plufieurs nuages. 

La fille d'un Maçon de Leguevin, faine, robufte & bien 
conftituée, fe trouva dans une maiïfon fur laquelle la foudre 
tomba, & tua près d'elle deux perfonnes. Tous fes habits 
furent brûlés, ainfi que fa peau depuis la tête jufqu'aux pieds, 
en forte qu'on la crut morte. On s'aperçût bien-10t après 
qu'elle refpiroit, & on s'emprefla de lui donner du fecours ; 
fa brûlure augmenta néanmoins pendant les huit premiers 
jours qui fuivirent cet accident, elle diminua enfuite, & quinze 
jours après cette fille fut prefque entièrement guérie. Il lui 
refla cependant une furdité aflez fingulière; elle n'entendoit 
point le bruit du tonnerre, quoiqu'elle entendit tous les 
autres bruits, les plus foibles comme les plus forts, celui 
de l'enclume d'un Forgeron du voifinage, le fon des cloches 
& la voix humaine, fur quelque ton qu'elle fût. Cette fille 


prets S'cnE Nr'omie 115 
demeura dans cet état environ deux mois, fans avoir entendu 
le bruit du tonnerre, quoiqu'il eût grondé plufieurs fois pen- 
dant cet intervalle. Au bout de ce terme, étant occupée à 
travailler dans fon jardin, elle l'entendit pour la première 
fois, & il lui parut qu'il fortoit alors un bouchon du dedans 
de fon oreille. Depuis ce moment, elle a continué d'entendre 
ce bruit comme les autres. 

Un Maçon de Touloufe, âgé de vingt-trois ans, fut atteint 
vers la mi-Janvier de l'année 1748, de la maladie qu'on 
nommoit communément la grippe; il en eut tous les fym- 
ptomes, & principalement un grand mal de gorge: il ne prit, 
pendant le temps que dura fa maladie, que quelques bouillons 
faits avec des jaunes d'œuf, qu'il avaloit toüjours avec peine. 
Environ deux mois après fa guérifon , fon mal au gofier fe 
renouvela, & il lui furvint tout-à-coup une difficulté de s'ex- 
primer & une furdité fi grande, qu'il n'entendoit ni la voix 
humaine, ni le bruit du tonnerre, ni celui de l'enclume, ni 
le fon des cloches, ni le bruit qu'il faifoit lui-même en taillant 
la brique. Le 11 Juillet de la même année, pendant qu'il 
étoit occupé de fon travail, fa foudre grondoit, & il n’en 
entendoit pas le bruit; mais vers les fix heures du foir il fut 
éblouï par un de ces violens éclats de tonnerre qui causèrent 
de fi grands defordres à {a maifon profefle des Pères Jéfuites 
& à la Mefagerie ; épouvanté, il recula & fe réfugia dans 
un réduit où il pouvoit à peine fe foûtenir fur fes jambes. 
Depuis ce moment, ce Maçon a recouvré l'ufage de l'ouïe, 
il entend le fon des cloches, le bruit du tonnerre, la voix 
humaine, dont il diftingue les différens'tons, & il ne fent plus 
la difficulté qu'il avoit de s'exprimer. 

En hafardant une courte réflexion fur cette fingularité, ne 
pourroit-on pas dire qu'une humeur avoit engourdi les fibres 
nerveufes des organes de l'ouïe & de la voix qui ont une grande 
analogie entr ‘elles, & que leur jeu fut rétabli par la difipation 
de cette humeur, que la forte agitation de l'air, occafionnée 
par l'éclat violent du tonnerre, dût produire? Ne feroit-il 


pas permis de penfer auffi qu'on pourroit guérir la furdité, 
Pi 


716 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
du moins celle d'une certaine efpèce, en frappant vivement le 
tympan de l'oreille par l'agitation & le trémouflement de l'air, 
occafionné par un bruit qui approcht de celui du tonnerre ? 
Ce bruit eft à un certain ton, & il ne feroit pas difficile par 
conféquent d'en trouver un qui füt à l'uniffon de celui-là. 


Vents. 


Si des obfervations faites fur les vents qui ont régné pen- 
dant ces dix années on vouloit déduire la durée moyenne 
de chacun dans le cours d'un an, il en réfulteroit que le vent 
d’eft devroit fouffler à Touloufe 1 0 jours, celui d’oueft 95, 
de fud 6, de nord-eft 2 5 , de nord-oueft 89, de fud-oueft 13, 
de fud-eft 89, & de nord 38. 


Froid à chaud obfervés par le Thermomètre. 


Les obfrvations fur le froid & fur le chaud ont été faites 
avec un thermomètre, dont l'efpace entre le terme de l'eau 
bouillante & celui de la congélation eft divifé en 100 parties 
égales. Le plus grand froid qu'il ait fait dans le cours de ces 
dix années, fut le 7 Janvier 175 5 ; le mercure du thermo- 
mètre defcendit au 12." degré au deffous du terme de la 
congélation. Pendant la nuit, les eaux de Ja Garonne fe gla- 
cèrent, & la glace étoit fi forte, qu'on traverfoit entièrement 
cette rivière à pied. La plus grande chaleur a été le 7 Juillet 
1753 ; la liqueur du thermomètre parvint ce jour-là au 3 8.° 
degré au deflus du terme de la congélation. Le chaud qu'il fit 
pendant le mois de Février 1747 eft remarquable; le mercure 
monta dans le thermomètre au 24.° degré + au deflus de 
la glace: on ne doit fans doute attribuer cette irrégularité 
qu'au vent de fud-eft qui régna dans le cours de ce mois. 

Deux thermomètres, dont les marches étoient proportion 
nelles, furent expos à l'air extérieur, lun au nord & à 
couvert des rayons du Soleil, & l’autre au midi. Ce dernier 
étoit placé à midi précis àun poteau ifolé, de manière que 
la liqueur ne recevoit que les rayons directs du Soleil. I£ 
réfulte des oblervations faites fur ces deux thermomètres pen 


DES | SCTNE-NrE Es C 117 
dant plufieurs beaux jours de l'été, depuis midi jufqu'à quatie 
heures du foir, que le rapport de la chaleur direéte des rayons 
du foleil eft à celle qu'on éprouve à l'ombre à Touloufe , 
comme $ à 4; que la liqueur des thermomètres parvient 
vers une heure & demie du foir à fon plus haut degré, & 
qu'elle refle fixe au même point environ À d'heure, & quel- 
quefois un peu plus, fur-tout lorfque la chaleur eft vive. 


Poids de l'air, obfervé par le Baromerre. 


La plus grande hauteur du mercure pendant ces dix années 
a té le 15 Avril 1751, de 28 pouces 5 lignes, & le 
plus grand abaiflement le 20 Mars 1751, à 26 pouces 
6 lignes +. L'année 175 1 eft donc de toutes, celle où l'élé- 
vation & l'abaiflement du mercure ont été les plus grands; 
Ja différence eft d'un pouce 10 lignes £, En examinant les 
variations du baromètre en détail & fur ces dix années, on 
voit que les plus grandes hauteurs & les plus grands abaif- 
femens arrivent prefque toûjours en hiver. 

Le 14 Juin 1747, on fit choix de deux baromètres très- 
fenfibles, entièrement privés d'air, parfaitement correfpon- 
dans, qui avoient 2 lignes de diamètre intérieur. On plaça 
un de ces baromèëtres, qui ne varia point pendant l'obferva- 
tion, au pied du clocher de la Dalbade; le mercure y étoit 
fufpendu à la hauteur de 27. pouces 7 lignes: on porta l'autre 
baromètre à la première galerie de ce clocher, diftinte de 
treize toifes du rez-de-chauflée; le mercure fut à la hauteur 
de 27 pouces 6 lignes +, & il ne parvint qu'à la hauteur 
de 27 pouces 4 lignes 15 à la feconde galerie, diftante de 
vingt-cinq toifes : Félévation du mercure dans le baromètre fur 
le bord de la Garonne, étoit de 27 pouces 7 lignes +. Pendant 
cette obfervation, faite par un temps pluvieux & un vent 
d'oueft, la liqueur du: thermomètre de Lyon étoit au 1 6.° 

- degré au deffus de la congélation. 


Déclinaifon de l'Aiouille aimanrée. 


Tout le monde fait que l'Aïguille aimantée ne { dirige: 


P ii 


118 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
pas exactement vers le pole du monde, & qu'elle en décliné 
plus ou moins à l'eft ou à l'oueft, fuivant les différens lieux, 
& en différens temps dans le même lieu. Il y a plus d'un 
fiècle que fa déclinaifon étoit à l'eft; elle diminua en ce fens 
jufqu'à ce qu'en 1 666 elle devint nulle; elle a depuis prefque 
toûjours avancé vers l'oueft. Pendant ces dix années, la dé- 
clinaifon de l'aiguille aimantée a été du nord à l'oueft ; la 
plus grande a été de 164 45’, & la moindre de 1 $ degrés. 
Quelque grandes que foient les variations de l'aiguille aiman- 
tée, elles paroiflent fondées fur certaines règles, & on ne peut 
efpérer de les découvrir qu'en multipliant les obfervations en 
‘différens temps, en différens lieux de la Terre, & en les 
continuant avec foin fans aucune interruption. 


Tremblemens de terre. 


Dans l'efpace d'environ douze ans on a reffenti quatre fois 
à Touloufe des tremblemens de terre; le premier arriva le 
7 Mars 1743, vers les 9 heures + du loir; il fe fit auff 
fentir à Caftel- Sarrazin, à Moiffac, à Bordeaux & à Bazas. 
Prefque tous les endroits qui font le long de la Garonne à 
droite & à gauche, à la diftance de dix lieues, l'éprouvèrent. 
Ce tremblement fe fit en deux fecoufles, & l'intervalle de 
lune à l'autre fut d'environ 6 minutes: la première fut peu 
fenfible ; la feconde, qui fut violente, renverfa à Moiffac des 
livres, des tables & ébranla les murailles d’une maifon: plu- 
fieurs perfonnes, qui fe trouvèrent dans les rues de cette ville, 
pouvoient à peine fe foûtenir, elles trouvoient le pavé mouvant 
fous leurs pieds: une glacière s’éboula à Caftel-Sarrazin, & 
il y eut beaucoup de vitres caffées à Bordeaux : un Religieux 
Minime aperçüt alors un éclair & entendit un bruit confus 
qui lui fuccéda. 

Le 24 Mai 1750, vers les 10 heures 15 minutes du 
foir, on reflentit à Touloufe un autre tremblement de terre; 
il fe fit en deux fecouffes , & l'intervalle de l'une à l’autre ne 
fut pas confidérable: la première, qui fut la plus violente, 
ne dura que quelques fecondes ; elle fut trop courte pour caufer 


D:ES /S:C:1L:E:N.€ E:s EI LI 
du dommage. Il en fut à peu près de même dans la Guyenne, 
la Gafcogne, la Saintonge & le Languedoc : le tremblement 
de terre fut plus violent du côté des Pyrénées, fur-tout à 
Lourde, à Juncalas & autres lieux du voifinage ; il {e fit fentir 
dans ce pays le même jour & à Ja même heure. La première 
fecouffe , qui dura l'efpace d'une minute, fut füivie de plufieurs 
autres, qui furent moins violentes: ces, fecouffes, plus ou 
moins vives, f font répétées à différens intervalles jufqu'à 
la fin de Juin, tantôt le jour, tantôt la nuit, mais toujours 
à des heures différentes. Ces tremblemens étoient ordinaire- 
ment précédés d'un bruit: fourd, à peu près femblable à celui 
du tonnerre. On remarqua dans les derniers tremblemens, 
que les premières fecouffes étoient de bas en haut, & les 
fuivantes horizontalement. Une voûte de l'églife cathédrale, 
de Tarbes fe fendit en plufieurs endroits, lors de la fecoufle. 
du 27 Mai: pendant celle du 1 $ Juin fuivant, les cloches 
fonnèrent à Lourde; les verres & les bouteilles furent ren- 
verfés fur les tables & Ja vaiflelle caflée dans les buffets. Dans 
les mêmes lieux de Lourde & de Juncalas, plufieurs maifons 
ont été ébranlées & d'autres entièrement renverfes : les ha- 
bitans alarmés fe retirèrent dans la campagne, où ils reftèrent 
fous des tentes. Les eaux des fontaines furent troublées & 
rendues femblables à de l'eau de favon, non feulement par 
leur couleur, mais encore par une qualité abferfive qui leur 
étoit reflée, Le 24 Mai, jour où l'on reffentit à Touloufe ce 
tremblement, le mercure du thermomètre étoit, au lever 
du Soleil, au 14.° degré au deflus de Ja glace, & celui du 
baromètre à 27 pouces $ lignes +, par un vent de fud-eft 
& par un temps d'orage & de tonnerre. É 

Dans la nuit dur 1 au 12 Janvier 175 2, vers le minuit 
& demi, on reffentit à Touloufe un tremblement de terre sil 
fe fit en deux différentes fois, & dura environ 2 minutes: il 
fe fit fentir encore plus vivement au voifinage des Pyrénées, 
& en particulier à Mirepoix: des habitans de cette ville 
furent éveillés par une fecoufie de ce tremblement : les rideaux 
de leur lit furent agités , leurs chaifes dérangées , les portes 


120 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& les fenêtres de leurs maifons ébranlées ; un d'eux entendit le 
carillon de plufieurs clefs fufpendues dans une armoire; un 
autre s’aperçût, pendant la durée du tremblement, d'un bruit 
femblable à celui du feu d'une forge animé par les foufllets: 
on trouva plufieurs éboulèemens de terre & des males de fel. 
Pendant cette nuit & la fuivante, il tomba une f1 grande 
quantité de neige, que le pays en fut couvert. Le mercure 
du thermomètre étoit le 12, au lever du Soleil, au terme 
de la congélation, & celui du baromètre à 27 pouces $ lignes, 
par un vent de nord. 

On reffenti auffi à Touloufe te 1.” Novembre 175 5, le 
tremblement de terre qui fe fit fentir fi vivement le même jour 
à Lifbonne, & qui caufa dans cette ville de fi grands ravages 
& des defordres f1 affreux. Le mercure du thermomètre étoit 
ce jour-à, au lever du Soleil, au 3." degré au deflus du 
terme de la glace, & celui du baromètre à 27 pouces 10 
lignes, par un vent d’oueft. 


Naiïfances, Morts à Mariages. 


Pendant le cours de ces dix années il eft né à Touloufe 
15705 perfonnes, & il n'en eft mort que 14351, fans 
y comprendre des Religieux, les Religieufes & les pauvres 
de l'Hôtel-Dieu. ILeft établi que tout ce qui naît & refpire eft 
fujet à Ja mort; il eft cependant vrai que dans un temps dé- 
terminé il naît tous les ans plus de perfonnes qu'il n'en meurt, 
& que ce nombre iroit en croiflant fr le cloître ne rendoit 
inutiles beaucoup de fujets, & s'il n'arrivoit quelquefois des 
accidens qui caufent une grande mortalité. [left naturel-qu'il y 
ait à Touloufe plus de naiffances que de morts ; premièrement, 
parce qu'outre les femmes de cette ville, celles des environs 
viennent y accoucher, à caufe des fecours qu'elles y trouvent; 
fecondement, parce que lorfqu'elles font accouchées, elles en- 
voient leurs enfans en nourrice à 2,3, 4, 5, 6 lieues, d'où 
elles ne les retirent qu'à l'âge de trois ou quatre ans; & alors 
le temps de l'enfance, qui eft le temps de la grande morta- 
lité, eft prefque paffé, {r-tout pour les enfans nés dans les 

‘ : villes, 


DES /S CI EN CES 121 
villes, qui vivent moins que ceux qui font nés dans les cam- 
pagnes , foit parce qu'ils ne font pas nourris de leur lait naturel, 
{oit parce que des Nourrices étrangères n'en ont pas autant 
foin qu'en auroient leurs véritables mères. 

En général, le nombre des garçons qui viennent au monde 
en Europe furpafle toûjours celui des filles: cette règle fe 
vérifie à Touloufe, puifqu'il y eft né 800 $ garçons & 7700 
filles feulement, ce qui eft comme 22 eft à 21. Au contraire, 
le nombre des hommes morts eft moindre de 137 que celui 
des femmes, qui eft de 7244; ce rappoit eft comme celui 
de 52 à 53- Cette différence vient fans doute de ce que les 
femmes font plus fédentaires & quittent moins la ville que 
les hommes : il eft vrai que ceux-ci pourroient être remplacés 
par les Étudians & les Plaideurs, mais on doit faire attention 
que les premiers n'y vont guère avant l’âge de dix ans, & 
que les feconds n'y reftent pas après l'âge de cinquante ou 
foixante ans; ainfi les uns n'y arrivent qu'après avoir pañlé 
les mortalités de l'enfance, & les autres s'en retournent avant 
que la mortalité de la vicilleffe arrive. 

Ji nait à Touloufe, année commune, 1570 perfonnes ; 
fans y comprendre le nombre des Enfans-trouvés, qui eft 
de 208. L'année où il y a eu le moins de naïiffances eft 
celle de 175 2, il ne naquit que 1 3 84 perfonnes; les années 
pendant lefquelles il y en a eu le plus font les trois dernières, 
1754, 1755 & 1756. Le nombre des mariages de ces 
mêmes années furpaffe aufli d’un cinquième celui des précé- 
dentes. On doit juger par-là que le fyftème de la population 
fait des progrès dans cette ville, où d'ailleurs il fe rend de- 
puis quelque temps un plus grand nombre d'Étrangers. 

Les mois pendant lefquels if y a le moins de naiffances, 
foit des garçons ou des filles, font ceux de Juin & Juillet; 
ceux au contraire où il y en a le plus font Janvier, Oftobre 
& Novembre; la raïfon en eft que ces mois fe trouvent les 
neuvièmes après ceux qui précèdent ou qui fuivent le temps 
de l'Avent & celui du Carême, pendant lefquels on ne célèbre 
point de mariages fans une difpenfe de l'Églife. 

Say. étrang. Tome IY. y a 


122 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À 'L' ACADÉMIE 

Il meurt communément 1435 perfonnes, fans y com- 
prendre les Religieux , les Religieules & les pauvres de l'Hôtel- 
Dieu. Les années pendant lefquelles il y a eu le moins de 
morts font 1747, 1749 & 1754; l'année où il y en a 
eu le plus eft celle de 1752, il y en eut 2880, fans compter 
les pauvres, dont le nombre des morts fut de 2506. Pour 
en indiquer la raïfon, je rappellerai avec douleur le trifte 
fouvenir de cette maladie épidémique qui régna pendant le 
cours de cette année, & qui jeta la confternation, non feule- 
ment dans cette ville & dans la province dont elle eft la 
capitale, mais encore dans une partie du Royaume. 

Les mois où il y a le moins de morts font ceux de Février, 
Mars & Avril, & les mois où il y en a le plus font ceux 
d'Août, Septembre & Octobre, quoiqu'il y ait alors moins 
de perfonnes qui habitent la ville, les Etudians, les Plaideurs & 
la plufpart des habitans la quittant pour aller dans les campagnes 
fe délaffer de leurs travaux & de leurs fatigues. On pourroit 
conclurre de là que les habitans de Touloufe ont plus à craindre 
des changemens qui arrivent dans la température de Fair à 
l'équinoxe de l'automne, que de ceux qui furviennent à l'équi- 
noxe du printemps. 

Le nombre des garçons morts eft plus grand que celui 
des filles, parce qu’il en naît plus, & qu'il en eft bien plus qui 
ne fe marient pas que de filles. I y a moins d'hommes ma- 
riés morts que de femmes, à caufe des fuites funeftes des 
couches auxquelles les femmes font expofées. 

On pouroit conclurre des autres combinaïfons qui ont 
été faites, qu'on vit plus long-temps à Touloufe dans l'état 
du mariage que dans le célibat, qu'il y a plus de femmes que 
d'hommes qui paflent un âge avancé, qu'il meurt dans cette 
ville à peu près la quarantième partie des habitans, & que 
Ja vie moyenne y eft d'environ 43 ans. Cetie vie moyenne eft 
plus longue que celle de la plufpart des villes où elle eft connue ; 
d’où l'on pourroit peut-être inférer que dans nos climats l'air eft 
plus pur, & que les produétions de la terre y font meilleures. 


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EAU | THERMOMÈTRE DE LYON. 


Plus grande Hauteur. 
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BAROMÈTRE 


LUMINEUX. 


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Plus grande Haureur, 
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13 Déc. SE. 


20 Déc. E. 


23 Nov. SE. 


21 Janvier N. 


is Avril N. 


19 Mars SE. 


19 Mas N. 


21 Janvier N. 


8 Dé. O. 


14 Fév. N.O. 


wi- 


» 


R) Hauteur. 


13 Mai ON. 27. 


3 Nov. N. 26. 


7 Nov.E.S.f.26. 


17 Août N. 26. 


20 Mars SE. 26. 


2 Fév. SE. 26: 


27 Nov. S, 27. 


9 Nov. S. 26. 


7 Mars O. 26. 


RÉSULTAT des Obfervations SE A Eu dépuis l'année 1747 jujqu'a 1756. 
| 


ineux PECUN 


aimantée, 
LS. 10 
15. 0 
15. 19 
16, 15 
16, o 
15" 45 
16 45 
16, 40 
1ÿ. 0 


NAISSANCES. 
pe ULLE] 


Fee 86.M.688 
ne 64.8. 787. 


587 M:1447 


Sav. Étrang. tome IV. 


MonrTs, 


—— 
797-M:5859, ER M.176. 
(743F 552 F. 124. 

et 80.M.663 rt) M253 
708. F.6z1. F. 183 


764.M.5 63. 
DE 6o5. 


697-F. 1433 


$771.M717 M:262 

8.F 1427 

G 710. F.211 
875.M.563 Aer M.288. 
RAT SALE 115 
8 M.64 
Goo) 
d835.F. 664. F 108. 


non compris œux des Couvens. 


(D AR EN 


BAPTÈMES. ÎPAno1ssES.| Hôres-Diru, 


*STOYIHYIN 


2 


= Wen 
F2374 7 


DES SCIENCES. 123 


ENT R A LT 


D'une Letrre de M. MARRIGUES, Chirurgien 
à Verfailles, écrite à M. MORAND, le 9 
Novembre 175 8. 


*AI l'honneur, Monfieur, de vous envoyer la figure & 
la defcription d'un Monftre, pour vous prier de les 
communiquer à l'Académie Royale des Sciences, fi vous les 
en trouvez dignes. La figure eft tant {oit peu plus groffe que 
n'étoit le naturel, parce qu'il ne me fut pas poffible, à caule 
du peu de temps que j'avois pour en copier le deffein, d'en 
prendre toutes les dimenfions avec exaélitude; néanmoins 
toutes les parties extérieures font repréfentées dans la fituation 
où elles étoient, le monftre étant couché fur le dos. 

Je fis {a diffetion de ce monftre en préfence de M. Coulon 
Médecin, de M.” André, Gautier & Nazaret, mes Confrères, 
& de plufieurs Sages -femmes de la ville. - 

Je pañle à la defcription. 

Vers la fin de Novembre 1757, une femme d'un aflez 
bon tempérament accoucha à terme d’une fille bien confor- 
mée : la Sage-femme ayant reconnu qu'il y avoit encore un 
enfant, en fit l'extraction ; mais elle fut bien furprife de trouver 
un monftre dont le volume étoit femblable à celui d'un 
fecond enfant à terme. Le cordon ombilical de ce monftre 
n'ayant qu'environ fix pouces de longueur, & étant attaché 
au placenta des deux fujets, elle n’en fépara le montre qu'après 
avoir délivré la femme. On porta ce monftre chez une Sage- 
femme, après l'avoir féparé du placenta, ce qui nous empêcha 
d'examiner ce corps vafculeux. 

Nous remarquames que la tête étoit très-groffe; les os du 
crâne étoient aflez écartés les uns des autres, mais les deux 
pièces du coronal l'étoient infiniment davantage, 2. Cet écar- 
tement, joint au défaut des deux os du nez qui manquoient 


Q ji 


124 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
abfolument , occafionnoit une dépreffion À, à la partie fupé- 
rieure de la face, ce qui la rendoit fort hideufe. La partie 
inférieure du vifage étoit aflez bien conformée. 

Les yeux étoient bordés d'un cercle de peau irrégulier €, 
qui leur tenoit lieu de paupières: le globe de l'œil gauche 
étoit plus gros que le droit; mais ces deux globes, où l'on 
remarquoit {enfiblement les cornées opaques & tranfparentes, 
ne contenoient pour toute humeur qu'une liqueur limpha- 
tique qui avoit moins de confiftance que l'humeur vitrée & 
un peu plus que l'humeur aqueufe; elle étoit affez tranfparente. 
Les humeurs ordinaires des yeux, le cryftallin, la membrane 
choroïde, l'iris, la rétine & les nerfs optiques manquoient 
abfolument, les mufcles feuls étoient comme dans l’état naturel. 

Deux petites éminences circulaires D, D, en forme de 
bourlet, tenoient lieu de pavillons de l'oreille; le conduit 
auditif étoit imperforé, cependant toutes les parties internes 
de l'oreille n’avoient rien de diflorme. 

Le cerveau ne nous parut pas mal conformé ; les nerfs 
olfaétifs, optiques & moteurs manquoient, quoique leurs 
couches à leur origine dans Île cerveau nous paruflent comme 
dans l'état naturel, autant que la mollefle de ces organes 
nous permit d'en juger. Le cervelet & Ia moëlle alongée 
n'avoient rien de diflorme: les nerfs qui partent de cette 
dernière étoient dans l'ordre naturel, ce que nous obfer- 
vames aflez bien : les os de la bafe du crâne n’avoient aucune 
diformité. 

I y avoit aux parties latérales du col deux groffes éminences 
graifleufes Æ, Æ, recouvertes de [a peau, qui donnoient à la 
tête & au col beaucoup de difformité. 

Ce monftre n'avoit point de bras: on découvroit du côté 
droit G deux éminences graiffeufes 7, 2, qui formoient une 
efpèce de moignon affez diflorme, fous lequel il ne fut pas 
poffible de trouver d'omoplate ni de clavicule. La fubftance 
graifleufe qui formoit ce moignon étant très-adhérente aux 
côtes fupérieures du côté droit F, le moignon étoit plus 
alongé: nous trouvames qu'il étoit compofé d’une omoplate, 


DE S SCIENCES. 125 
ou d’une efpèce d'os irrégulier qui en tenoit lieu, & fitué à 
la place ordinaire de l'omoplate ; d'une clavicule qui, quoique 
plus petite que dans l'état naturel, avoit pourtant la mème 
figure, & de trois petits os qui n’avoient pas plus d'étendue 
que les trois phalanges d'un des doigts de la main d'un 
enfant nouveau-né, & dont les articulations fe reffembloient 
parfaitement. 

On remarquoit à la partie antérieure de fa poitrine deux 
grofles éminences H, H, qui étoient caufées par la préfence 
d'une grofle veflie remplie d’eau claire, qui occupoit toute 
la capacité de la poitrine & qui en dilatoit les parois outre 
mefure. Cette veflie ne communiquoit point avec la bouche 
ni avec aucune autre capacité : apparemment que cet épan- 
chement s’étoit fait par des vaifleaux exhalans, fitués dans les 
parois de cette veflie ou kifle, & qui s'ouvroient dans fa 
cavité. 

On obfervoit un conduit qui partoit du fond de la bouche, 
qui reflembloit à lœfophage, & qui fe perdoit dans la partie 
fupérieure & poftérieure de la poitrine, & dans un petit 
nombre de follicules membraneufes adhérentes aux vertèbres 
du dos. Ces follicules fe gonfloient lorfqu'avec un tube on 
introduifoit de l'air par l'efpèce de conduit œfophagien: ils 
étoient de fa nature du tiflu cellulaire que l'on remarque dans 
toutes les capacités du corps. 

La poitrine ne contenoit aucun des organes propres aux 
fonétions vitales ; car le cœur, les poumons, la trachée-artère, 
l'artère-aorte, la veine-cave, le médiaftin & le thymus man- 
quoient abfolument ; & malgré nésrecherches, il ne nous 
fut pas poffible de trouver de parties qui puffent y fuppléer. 

Nous trouvames une membrane-qui tenoit lieu de dia- 
phragme, qui n'avoit rien de charnu :‘elle étoit percée dans 
fon milieu d'un trou d'environ un pouce & demi de diamètre. 
Ce faux diaphragme defcendoit très-bas dans l'abdomen : cet 
abaiflement me parut occafionné par le poids de la veffie 
que j'ai dit fe trouver dans la poitrine, & qui occupoit auffi 
les deux tiers de la capacité de l'abdomen. 

Q ïj 


126 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÂCADÉMIE 

Le nombre & la forme des côtes ne différoient en rien de 
l'état naturel, mais le fternum étoit très-différent : cet os étoit 
large d'environ un pouce, & affez mince; il n'étoit formé que 
d'une feule pièce, qui s'étendoit depuis la partie fupérieure 
de la poitrine jufqu'aux os pubis, partie fupérieure avec laquelle 
il fe joignoit par une fymphyfe cartilagineufe. Cet os, aplati 
dans toute fa longueur, occafisznoit extérieurement une efpèce 
de dépreffion 7, qui faifoit reflortir les deux éminences Æ, H 
caufées, comme j'ai dit ci-devant, par l'extenfion forcée des 
parois de la poitrine, moins réfiftantes en #7, H qu'en JL 

L'abdomen avoit très-peu d'étendue, il ne contenoit qu'une 
putie d'une mafle d’inteftins, le refte étant fitué hors du 

‘ventre L, dans une dilatation du éordon ombilical 47. Ces 
inteflins pafloient par une ouverture d'environ un pouce & 
demi de diamètre, qui tenoit lieu d'anneau ombilical : cette 
ouverture étoit ceinte dans toute fa circonférence d’un liga- 
ment tendineux #; fa fituation étoit au côté droit de l'abdomen, 
partie moyenne. Le refte du bas-ventre étoit occupé, aux 
deux tiers de fon étendue, par la partie inférieure de la grofle 
veflie que j'ai dit remplir toute la poitrine. 

Nous ne trouvames point d’eflomac, de foie, de rate, de 
pancréas, de capfules atrabilaires, de reins, d'uretères ni de 
veflie: nous ne trouvames pas non plus de parties de la gé- 
nération, tant intérieurement qu'extérieurement, & confé- 
quemment point de fexe. , 

Les inteftins étoient divifés en trois portions prefqu'égales, 
qui ne communiquoient point entrelles, c’eft-à-dire que 
chaque portion avoit fes deux extrémités fermées & féparées 
totalement des extrémités des autres portions, de manière 
que l'on pouvoit féparer ces trois portions, ifolées par leur 
bout , les unes des autres: les efpaces qui féparoient ces trois 
portions pouvoient avoir deux à trois lignes de diamètre. Le 
méfentère, qui attachoit ces portions d'inteftins aux corps des 
vertèbres des lombes , n’étoit point divifé par portions comme 
les inteflins, ce qui nous donnoit la facilité de melurer les 
intervalles des portions inteftinales. Le méfentère étoit comme 


DES OYCLILEU NC EVE 127 
une membrane fimple; on n'apercevoit à la vûe dans toute 
fon étendue aucun genre de vaifieaux ; les portions inteftinales 
ne contenoient point de meconium , mais une mucofité 
blancheître. 

Nous ne trouvames point de parties de la génération, 
comme je l'ai dit plus haut: on obfervoit que depuis la fym- 
phyfe des deux os pubisjufqu'à l'endroit de l'anus, qui manquoit 
auffir, il régnoit une ligne enfoncée P, en forme de raphé. 

Le cordon ombilical de ce monfire n’avoit, comme nous 
Yaflura la Sage-femme, qu'environ fix pouces de longueur ; 
il étoit compolé de plufieurs follicules membraneux, revétus 
d'une membrane commune: mais quelqu'attention que nous 
eumes à obferver, il ne nous fut pas poffible de découvrir 
les vaifleaux ombilicaux ; nous remarquames feulement de 
petits vaiffeaux rouges aufli fins que des cheveux, & même 
en aflez grand nombre, lefquels rampoient dans le tiffu du 
cordon , & dopt l'ufage nous a paru fuppléer aux vaiffeaux 
ombilicaux. Nous n'avons pü les fuivre dans leurs diftribu- 
tions, à caufe de leur petitefle. 

Les os du baflin étoient comme dans l'état naturel; & 
quoique les vifcères qui y font pour l'ordinaire contenus 
manquaflent ici, l’efpace compris entre les os ifchions, pubis, 
facrum, & coccyx ne laifloit pas d'être rempli par une portion 
d'inteflin, par des graifles & des membranes. 

Les extrémités inférieures étoient très-mal conformées. 
La cuifle droite © étoit faite d’un femur très-court & un 
peu courbé de derrière en devant ; fon extrémité inférieure 
S'articuloit par gynglyme avec un petit os très-irrégulier, qui 
sarticuloit lui-même, en recevant dans deux cavités les 
éminences de deux phalanges longuettes qui formoient deux 
efpèces de doigts garnis d'ongles 77, 7’: firrégularité du 
fecond os de cette extrémité, articulé avec le femur, formoit 
un. coude très- vicieux, à l'extrémité duquel fe voyoit un 
appendice S de la nature de la corne. 

L'os de la cuifle de l'extrémité gauche Œ avoit la forme 
d'un arc; il avoit beaucoup plus de longueur que celui de 


» 


128 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

la cuiffe droite, il étoit articulé en W avec l'os de {a jambe Q 
qui étoit auffr contourné; la rotule n’y manquoit pas, mais la 
jambe n’étoit faite que d'un feul os *. Cet os fe joignoit à une 
efpèce de tarfe Z, compolé de cinq oflelets aflez irréguliers, 
dont les facettes concaves recevoient les éminences de quatre 
phalanges ifolées qui formoient quatre doigts, dont le pied 
étoit garni : ces doigts avoient leur ongle. La peau de la jambe 
gauche Q étoit tellement adhérente avec celle de fa cuifle, 
depuis le genou F’jufqu'au tarfe Z , qu'il nous fut impoflible 
de l'en féparer fans le fecours du fcalpel. Cette adhérence 
donnoit à la jambe l'attitude que prennent à peu près celles 
des Tailleurs, quand ils font fur leur établi. 

Telle étoit la ftruéture de ce monftre, qu'il ne me fut 
pas poffible de garder, & que j'aurois foûmis à un examen 
plus fcrupuleux, je veux dire l'examen des mufcles qu'il fallut 
détruire pour pénétrer dans les capacités, fr lon eût voulu 
me J’abandonner. Cependant, Monfieur, fi vous me faites 
l'honneur de recevoir cette obfervation, je vous ferai part 
de quelques autres faits anatomiques qui ne font pas moins 
curieux que celui-ci. Je fuis, &c. 

* Voilà la feconde fois que je | dans toutes les parties de fon corps, 
trouve la jambe compofée d’un feul | auquel néanmoins il manquoit les 
os. En 1755, une Sage-femme | deux péronés , les jambes n'étant 
m'envoya un enfant mort-né, mais | faites que du tibia feulement. 
veau à terme & trés-bien conformé 


sk 
ET +, 
ons de > 


SES 
# 


OBSERVATINNES 


. Tome 177 Pa9.128 IF 


x 


à 
Ë 
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S 
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à 


DAPISY SEL TUE NE -E. 5 


129 


OBSERVATIONES QUÆDAM 
ASTRONOMICÆ sr METEOROLOGICÆ 


HAPBITÆ UPSALIÆ ANNO M. DCCXXXIX, 


Ab ANDREÂ CELsI10o. 


Alitudo Po Upfalenfis, nov methodo, fine notitiä 


refractiomum determinata. 


D: 20 Decemb, 1739, flylo veteri. 


Ârrrruno app. maxima fupra polum d Caffiopeæ. 90° 


sos. 67 
Eadem ad refraét. in zenith h. ê. nullam reduéta. .. 00. 59. 7 
Altitudo apparens minima fub polo ejufdem ftellæ. 28. 46. 27 
ÆEarumdem fumma. . ..... eteloteléele raie RU NO 45020 
dimidium feu elevatio Poli apparens, in 
quà abundat dimidia refraétio altitud. 28°1..7 59. 52. 44 
Altitudo meridiana € Orionis. . . ........,.. ZOO SE 
Ejufdem ftellæ declinatio-auftralis, obfervata noviter 
fub#Æquatore in, Peruyi&. . . . . . ... . HA 
Elevatio Æquatoris affecta refractione altit. 28°. 30. 10. 26 
Altitudo Poli apparens, fupra inventa. ....... 59+ 52. 44 
Summa altitudinum appar. Poli & Ædquatoris. ... 90. 3. 10 
Pars tertia exceflus fupra 90°, æqualis 2, refractioni 
altit. 28°, ab elevatione app. Poli fubtrahenda. Ye. 3 
CVAEIOP POMENEE dE. foie che sel clessle sise dferste ANS OR Se A 
Alio modo. 
Altitudo polaris maxima . ...... SD lee NO Te 15721122 
MMA! 1 ste tete) tels) 9 mb 2 57 AZ N 20) 
Summa obfervatarum altitudinum. .......... 119. 44. 49 
Cujus femiffis altitudo Poli APPAIENS « « . eo ee SM59. (52. 247 
Differentia altitudinum polaris ............. LMD Ok 7 
Varietas refraétionum proxime vera ex Hirio . . . 7 
Diférentia precedens COrreétai... de e . . O4 10, 4 


Say. étrang, Tome IV. .R 


V. Atr. Affron. 
CL Horrebowi, 
P- 37° 


LI 


130 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Semiffis eft diftantia a Polo vera... ........ bi EDR 
Complementum eft declinatio polaris ........ 87. 54. 58 
Altitudo fuperioris limbi Solis æftivi, an. 1739. 53. 53. 19 
Semi-diameter Solis. . ... els chchele : . 15. 49 
Altitudo centri in Solftitio........... 4105513750 
Para s CAHonena ee eee es stat tee 6 
Altitudo a parallaxi liberata . . ............ S3:371310 
Altitudo polaris minima............... US 7 4720 
Altitudo fuperioris limbi Solis in Solfitio æfliv. 53. 53. 19 
DOVE EME HE SEM este 3 Sa tu7 
Marctisiretrictionnn Mie tete ee (ete 8 


Subtrahenda ab altitudine centri Solis fupra inventä. 53. 37. 36 


Eadem altitudo ad tenorem polaris reduéta. .... 53. 37. 28 


Altitudo polaris infra Polum............. s7-VA7N2G 
Diftantia polaris a Polo vera ............. 2.65 1004 


Altitudo Poli fita, in quà abundat refractio polaris 
PATRONS le ee ec ele eee epia ie s 59: 52. 30 
Altitudo Solis in Solit. æftiv. ad tenorem polar. red. 53. 37. 28 


Obliquitas Eclipticæ fubtrahenda . ...,...... 23: 020002 
Altitudo Æquatoris fiéta . . . . .. rene tiers 70 0 LO RS 
Élevatio Politétit 4. eee = ete tie cela ÿ9+ 52. 30 
Summa altitudinumfictarum. . . ... NS bic DOTE 
Elevatio vera Poli cum ea Æquatoris. ....... 90. ©. 0 
Exceflus pro duplici refraclione polaris . . . .... RE ne 
Semiffis fimplex refractio polaris infra Polum . .. 49 
Éevatio (Pol Éta) I eee este eitiiele $9- 52. 30 
Refduum , altitudo Poli RAREMENT ONE CRUE à NT US OST EAN 


vel... 59. 51. 40 


In altitudinibus Solis & Stellarum meridianis capiendis, 
ufus fam quadrante aftronomico 3 ped. a celebri Parifienfium 
artifice Langlois confeéto. 


LL 


NES ITS IC ITNE NICE S 


131 


Aliquot Obfervationes pro longitudine Upfaliæ invefliganda. 


1739. d. 2 Febr. ft. v. 6" 16°  o” appulfus Lunæ ad 2 


11 Aug. 
18. 

27. 

19 Sept. 
12 Octob. 
20 Déc. 


£ Ceti. 


12. 42. 22 Immerfo Satellitis primi #. 


14. 38. 13 
fl CN 
TENTE) 
ME LA 


14 2, 41 Emerfo Satellitis primi #. 


Eclipfis Solis d. 24 Jul, horis pomeridianis. 


Ob nubes denfiores initium & finem obfervare non potui; 
per rariores tamen imterdùm nubes, fine ope vitri obfufcati, 
macularum in Sole aliquot immerfiones & emerfiones telef- 
copio 20 pedes longo notare, ut & quantitates partium 
lucidarum tubo 8 pedes longo & micrometro Grahamiano 
inftruéto menfurare licuit. 


4h 59° 17" Immergere incipit macula 4. 
Nr 3e OM PENMEA TOSTONL 
RONA STE Te DE UNE h 
SCORE EE oh sjéle o2e Le 
HR A ANT Dr ee el or - . 3, 
5- 23. 10 Digiti obfcurati Fe 2 
CRELAQUMMNERS CEE 9. 49 
Se V20.:1S 1 UMR ve ne + 9. 49 
SMAR EST Sete ee st 012$ 
CINE NOUS ENST RE 9- 22 
$. 46. 50 Emergere incipit macula z. 
SAS AO EU ei et Spots et delta et à à 0 
6. o. 21 Digiti ébfeuran CLR 
CN EN CITE SRAR EL. 4 52 
6. 5. 42 Emergere incipit macula & 
CRT ON EURE 0: pus se fe 
6 NO: 028. S'ÉTAIENT k. 
6. 11 


+ 31 Digiti obfcurati 3% 39° 


132 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Eclipfis Sols d. 19 Decembris, horis matutinis. 


9h 


’ 


9 


0” 


Sol margine inferiori, valde tremulo & crifpato, ho 
rizontem vifbilem radit, 


14. 30 Initium certe faétum eft; ipfe autem luminarium con- 


. 38 


18 


«+ 12 
. 23 
- 54 
. 25 
. 40 


5° 


AE 


tactus obfervari non potuit, quia margo Lunx cum 
limbi folaris fluétuantis inæqualitatibus hactenus con- 
fundebatur. 


Diameter Solis verticalis æqualis 1211 part. microm. 
Partesslucitee #4. .0.0-p- EU 1105. 
SAts ONLINE 12 NE Le ve DR OUR EE TL 1031 
Ro ON MO NOTONS CMOS CANONS 963. 
SA OUT HER CERTES MERS ER : 943. 
hé SALE ASSURER IL RTS UNIES 
Sagitta partis obfcuratæ . . . . . . . . . . 221$ 
Partésalucidet.- (0015 ER PEN TU US 947 
RAMÈNE Le LES) SPAM EAR 975. 
Sagitta partis obfcuratæ . . . . . . NV OULZOR: 
Partes MUCIdRN EN: ets Re Ut 1014, 
PR nd fee le let arte tte oeitete GORE 1057. 
Sagitta partis obfcuratæ. . . . . . . . . N 67 
PAétES AUCIde a Pot Tute 1 LIENS 1101. 
Diftantia lineæ cornuum à limbo Solisremoto. 1265. 
Pare Huet ie ETC sr  INIO 
UT lesteetie ae te Mallet D SL PRES IN72e 
See eee oattelue Le OUEN TNT Rene 1280 
ROLL SI REUTERS - P: SE LL 2 TO2IONS 
Finis Eclipfeos. 


Ipfo meridie Diam. Solis verticalis. . . . 1393. 
horizont. . . . 1414, 
Poft merid. diam. Solis verticalis. . . . . 1372. 


DES 


SCTE NC ES 133 


Obfer vationes metcorologicæ anni 1739. 


Barometri aftitudines cujuflibet menfs maximæ & minime, 
A . .. . « « 
menfur& pedis regii Parifini æflimate. 


Syl. ve. D.|H. 
Januar. 10! 22 
sl10 
Februar. 17| 7i 
2| 81 
Martius 30| 9 
15/10 
Aprilis 3o| 6: 
3 10 
Maius 22| 82 
28| 7+ 
Junius  6| 9+ 
4| 87 
Julius 3] 4 
21| 3È 
Auguft. 13| 7= 
31| 74 
Septem. 22| 7i 
1| 8 
Octobr. 24| 9 
18| 82: 
Novemb. 2| 8 
241 9 
Decem. 28|107 
13] 97 


PU pp ppp D p PDU DT pp p pp p p pv 
BSBSHSHSESSSSHSESSSHHHS 


Dig. Lin, Dec. 
28. 3. 8 | W.N.W.1.|Nubilum. 
26. 10. 9 N.O. 3.|INix. 
262 Li.) 8 S.W. 1.|Tenues nubes. 
2 0. 4 S. 1.|Ferè fercnum. 
28.105410 NT. 
27000710 W. Se 
280 a ENS We 0: 
2 A RO N.O. 3. Nix. 
20.0 ALLO O. :1.|Serenum, 
2700 SA W. 2./Nubes fparfe. 
26, O8 S.W. 1.|Serenum. 
7 MRC S.O. 2.|Nubilum. 
28. 1. 7 | S.W: 1.lSerenum. 
27. 6. $ | W.S:W. 1.|Pluvia. 
28. 3. 3 | N.W. 1.) Nubes fparfe. 
AMP TE S.W. 1.|Serenum. 
265240 ENT WT. 
27-1020 SW: NT, 
24000 S.W. 1. }Nubilum. 
DAS NE Na UT 
28. 5$. 2 | N.W. o: 
26. 9. 6 | S.S.W. 1.| Nivofum. 
28. 9. o |N.N.O. 2.| Nubilum. 

o. Sa 


27. 


.|[Nebulofum. 


Annua Barometri variatio 1 dig. 11 lin. 4 dec. 


R ii 


134 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Thermometrorum alrivudines maximæ à minime. 


Domini Domini Domini 
Haukibée. | Resumur. | de l'ile, 


em 


Fr D|A Gr D| Gr. D\G. D. 
Januar. 8| 9£a. m.|122,5|— 17,21185,6 Serenum. 
14| 22p.m.| 69,0[+ 2,6|147,51S.8. W. 3.|Pluviofum. 
Februar. s| 62p.m.|115,2|— 14,3|180,6 W. 1 
24/12 p.m.| 60,0 + 6,0/141,5 We. 13: 
Mart. 16| 8£a.m.li102,o|— 8,81166,5 NW. Tr. - 
Serenum. 
24| 2 p.m.| 58,7|+ 6,0|141,0 N. 1 
Aprilis 1811 15 p.m.] 90,4]— 5,0 162,0 N.N.W. 1 
28 8 a m.| 53,2|+ 8,61134,5 W. 1. 
Maius 31 722. m| 67,44 2,6|146,7 N. 1./Sol inter nubes. 
23 8 p.m.] 20,7l+ 18,61118,0| S.W. 2.|Nubesad horizont. 
Junius 6! 72a. m| 48,5|+ 8,8|135,2| W.N.W.2.| Nubilum. 
27| 45p-.m.) 26,7|+ 17,3l119,7IS.S.W. 1 
Julius 22| 7+a m.) 47,9/+ 8,61135,3| NW. 3 
12| 32p.m.| 22,6|+ 18,51117,6| S.W. 1 
Aug. 13] 7zam) 59,5|+ 5,2l141,5| NW. 1. Serenum. 
2 $s p-m.| 25,3|+ 17,61119,3 SE Er, 
Sept. 21, 9 a. m. 68,8|+ 2,ol147,51 N.W. 1 
1| 8 a m.l 48,314 8,71135,2| S.W. 1. 
Octob.23| 8Fa. m. 87,8|— 4,51161,0| W.N.W.1.|Nubilum. 
21 8 a. m.| 55,3|+ 6,61139,8| W.S.W. 2.|Pluviofum. 
Nov. 13| 8p.m.| 92,6|— 6,41164,3|W.S.W. 1.|Serenum. 
24| 95 p.m.] 60,0[+ 5,11142,4| S.S.W. :.|Nebulofum. 
Dec. 31| 9, a. m.|105,8— 11,31173,6 W. o.|Nivofum. 
10| 9£p.m:} 60,7|+ 5s,0l143,0| S.S.W. 2.|Nubilum. 
PANIERS CUT TEE RENE EN ES 2 CES | 
Annua variatio, 101%8%, 358%, 676%. 


Bus SCIENCES 135 


Altitudines pluviæ dr nivis liquefatlæ, digitis pedis Parifini 


men/uratæ. 


Dig. Lin. Dee. 

Januarius . .... 1. 4. 3 

Februarius. . . . . 45010 

Martins data pod SR FIAT Quantitas nivis in 
PAprilis. 11 2- ME 0 Pi uali ad 
L'ÉCRAN CON, dem liquatam , ut 
SAIS 4 se 1010 HÉROS 2 500 ad 16. 
Ce, 1e 19 3  d. 9 Januar. Nix ad camdem 
Auguñlus . .... LENCE liquatam , ut 38 ad 1. 
September .... 2. 7. 9 

October. . . . . De 123.74 

November . . ...\) 11e 15.13 

December. . . .. CAPES Eat 

Totiusannialtitudo 18. 6. 7 


Conflitutio aëris à ventorum, &c. 


JANUARIUS. 


FEBRUAR. 


MARTIUS... 


APRILIS,., 


MAIUS .. : 


Nivofum & nubilum. 

Venti regnantes S. N. & W. 

Nives cum vento N. & N. N. O. Venti fortiores 
d. ÿ N.O-. 3, d. 14. S.S.W. 3, & d. 15 procel- 
lofus W.N.W. 4. 

Nubilum plerumque & nivofum. 

Ventus S.W. frequentior & fortior. 


Nix non raro humida & cœlum mite, imprimis circa 
medium menfis. d. 24 W. 3. 


d. 15 vefperi, ex denfiffima nebula ingens caligo. 

Inconftans cœlum & venti variabiles nunquam gradum 
fecundum fuperantes, fi exceperis noétem inter diem 
14 & 15, quà impetuofus N. nives advexit, 

Nix humida plerumque & nubes. 

Venti boreales frequentiores. d. 3, nivofus N.O. 3. 

Circa initium menfis traharum adhuc ufus; verfüs finem 
vero agri primum fulcabantur. 


Plerumque ferenum, circa initium tamen pluviofum, 


136 MËM 


JUNIUS. .. 


JULAUS 


AUGUSTUS.. 


SEPTEMBER. 


OCTOBER: 


NovEMBER. 


DECEMBER. 


OIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Venti N. & S. cum collateralibus alternatim. 

d. 13, 14 & 23 S.W. 3. 

d. 18, procellofus N.W. 3, cum tonitru & fulmine; 
eodem die in vicinia Upfaliæ nimbus infolitæ mag- 
nitudinis grandines advehens, teneras adhuc fegetes 
opprimebat. 


Nubilum & pluviofum, circa finem vero ferenum. 
Ventus S.W. frequentior & fortior. 
d. 19, tonitru. 


Initio & fine menfis ferenum, circa medium pluviofum. 

S. & S.W. frequentiores. d. 22, N.W. 3. 

d. 12, pluvia cum tonitru & fulmine. 

d. 18, ictu fulminis aliquot pagi circa Upfaliam ac- 
cenfi. 

à d. 7 ad d. 20, fœnum fecabatur. 


Plerumque pluviofum. 

Venti frequentiores S. & W. fed parum fortes, fr 
exceperis noctem inter 14 & 15, qua S.W. 3 
fpiravit. 

à d. 8 ad 13 ind. N.W. 2. 

d. 18 & 19, nimbus cum grandine & tonitru. 

d. 21 & 24 pluvia & tonitru. 


Ab initio ad medium, venti meridionales pluviam 
fatis largam attulerunt ; a medio vero ad finem 
menfis, Ventis borealibus ceffarunt quidem pluviæ, fed 
fæpius nubilum. 


d. 19, W.N.W. 3. 


Toto menfe cœlum nubilum. 


Venti occidentales frequentiores. d. 14, S.W. 3, & 
d. 27, S.S.O. d. 7" 11° p. m. halo lunaris, cujus 
diameter $ fere Lunæ diametris æqualis. 


Nubilum & pluviofum , S.W. & N.W. alternatim fpi- 
rantes. d, 22 & 23, S.O. & S.5.O. 3, nivoñ & 
pluviofi. 

Cœlum femper fere nubilum. 

Venti inconftantes. W. & S.W. frequentiores, 


d. 9, S.S.O. 3, pluviofus. 
Obfervariones 


hr 


DES SctrEeNcEs 137 
Obfervationes de Lumine boreali. 


PAIE, AR LUS 


Die 15. St. v. h. 7 poft meridiem, lumen boreale. 

Die 19, h. 11 poft meridiem, lumen furgens à N.O. per zenit 
ad S.W. maximè irregulare, cujus præcipua pars verfus 
boream exititit. 

Die 29, h. 112 poft meridiem, veftigium auroræ borealis circa ho- 
rizontem boreum. 


FAP BRU ZAUR «I US. 


Die 16, h. 95 poft merid. Lumen totum fere cœlum occupabat 
ftriis irregularibus, mobilibus, & verfus zenit coeuntibus; 
circa zenit radii lucidiores. 

h. 11, adhuc radii ab horizonte boreali ad zenit afcendebant. 

Die 22, vefperi exiguum Îumen boreale. 

Die 23, h. 72 poft meridiem, fub Caffopez è N.O. pcr zenit fefe 
extendebat lumen irregulare valde lucidum. 

h. 72, lumen ex eodem loco furgens, arcum formabat 
40 grad. fere altum. 


Ædes ulteriorem profpeétum impediebant. 
Toto hoc tempore ventus fortis S.W. 3. 


MARTIUS. 


Die 1, lumen boreale inter horas vefp. 7 & 9, arcum fatis lucidum 
formabat, 35 gr. altum & è N.O: furgentem. Specta- 
bantur præterea alii arcus ufque ad zenit afcendentes. 

Circa horam 10, lumen fatis forte & coloratum præcipue in 
plaga N.W. radiis deinde perpendicularibus & valde mo- 
bilibus coronam :4 zenit adornans. Media nocte adhuc 
durabat. 

Die 3, h. 9, poft merid. radïi. per cœlum fparf, fed obfcuriores, 

h. 10 8 min. coronam fine coloribus lucidam, formabant, 
per vices concurrentes ad à Urfæ majeris, 

Die 16, inter horas 9 & 10, lumen totum fere cœlum occupabat, 
undulans & in N. rubicundum, 

Die 19, h. 11-poft meridiem, lumen fparfim per totum cœlum 
fluétuans. 


Sav. ctrang, Tome IV. DT 


138 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 

Die 21, h. 10 poft merid. arcus borealis fatis latus & 30 gr. altus; 
circa mediam vero noélem lumen per vices in omni fere 
cœli plaga apparcbat. 

Die 24, h. 103 p. m. exiguum & humile in feptentrione lumen. 


Die 25, h. 9 & 10 poft merid. nonnihil auroræ borealis. 
A, Pl, L: 1,5 


Die 9, h. 9 poft meridiem, lumen boreale rubicundum. 

Die 17, h. 9 poft merid. exiguum lumen boreale. 

Die 18, h. 114, circa horizontem boreum radii aliquot humiles. 
Noëu inter 20 dies & 21, h. 122, lumen in meridio- 
nali plaga fpeétabatur, nihil vero in borcali. 

Die 21, circa mediam noctem, radii ab horizonte boreali verfüs zenit 
furgebant, parum lucidi fed mobiles. 


Dic 23, vefperi nonnihil luminis in feptentrione. 
JUPE NIQUNS 
Die 22, h. 11 poft merid. è plaga N.W. aliquot radii perpendi- 


culares ufque ad zenit furgebant, mox evanefcentes. 

h. 127, lumen borcale. 

h. 122, fafcia quædam lucida per zenit verfus N.W. ex- 
tendebatur. 

h. 12}, lumen non amplius apparuit. 

Die 30, h. 11 10° poft merid. arcus lucidus apparebat, cujus margo 

exterior tangebat ffellam Capellæ, interior vero ftellam 
n Urfæ majoris, adeo ut medium arcüs attolleretur fupra 
ftellas « & B Urfæ majoris. 


AUGUSTUS. 


Die 1, h. 102 poft merid. fafcia lucida fcre horizontalis & 10 gr. 
alta; cujus medium in ipfo fere fuit meridiano boreali. 

Die 10, h. 10 poft meridiem nonnihil luminis undulantis. Noctu 
inter dies 18 & 19, h. 2, radii aliquot perpendiculares 

: in parte cœli boreali. 

Die 19, h. 9 poft merid. arcus borcalis lucidus & 15 gr. elevatus. 
Lumen hocce variis deinde modis mutabile totà nocte 
duravit, & tandem diluculo extinétum. 

Die 25, h. 10 poft merid. lumen boreale fluctuans. 


h, 102, arcus non fatis lucidus & 15 gr. altus, 


Die 


Die 
Die 


Die 
Die 
Die 
Die 


Die 


Die 


Dic 
Die 
Die 
Die 
Die 


Die 


Die 


Die 


DES SCIENCES. 139 
26, h. 92 poft merid. arcus lucidus valde irregularis, cujus me- 
dium fuperioris marginis tangebat 8 Urfæ majoris. 
27, h. 11 poft merid. radii perpendiculares in N. 
28, h. 95 poit meridiem, radii ex horizonte borco ufque ad 
zenit afcendentes. 


SRE RPITYE AMP GER. 


15, h. 10 poft merid. areus lucidus 15 gr. altus. 

16, h. 10 poft merid. fafcia lucida per zenit extenfa. 

17, h. 11 poft merid. Zdem. 

19, h. 9 poft merid. Iumen boreale apparebat, per totam denique 
noclem durans; circa mediam noctem valde mobile & un- 
dulans totum fere cœlum occupabat, radiis ad zenit folitam 
coronam efformantibus; nulli tamen colores, nec fatis 
forte lumen. 

20, h. 9 poft merid. arcus borealis 14 gr. altus, pone nubes 
apparebat. 

22, h. 82 poft merid. lumen verfüs omnes fere cœli plagas 
fparfum. 


ONCLTNO"B'ENR; 


13, inter horam 8 & 9 poft merid. nonnihil Iuminis borealis. 


14, vefperi ab h. 82 ad h. 10. fumen valde mobile, radiis è 
W.N.W. furgentibus per zenit ufque ad auftrum. 

18, h. 10 poft meridiem , exiguum lumen. 

19, h. 8 poft meridiem. Jdem. 

20, h. 4 matutina, lumen ad zenit undulans, ufque ad hori- 
zontem boreum. 

21, h. $ poft merid. Ilumen boreale apparebat, & h. 7, totum 
cœlum, maxime vero ejus partem borealem occupans, 
radiis valde Jucidis & mobilibus ad zenit inter caudam 
Cygni & caput Cephei concurrentibus. Totà nocle deinde 
duravit. 

22, h. 8 poft merid. arcus parum lucidus per Urfam majorem 
extendebatur, & cujus medium verfüs plagam N.W. 
dirigebatur. 

24, h. $ poft merid. arcus borealis 30 gr. altus. Lumen deinde 
per zenit & totum cœlum difperfum, præcipue circa me- 
diam noctem valde mobile, & ufque ad horam 4 matu- 
tinam perdurans; quo tempore etiam ventus S.W. adeo 
fortiter fpirare defiit. 

Si 


140 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Die 25, h. 6 poit merid. arcus borealis humilis & parum lucidus, 
femperque fere immobilis. h. 12, nihil luminis apparuit. 

Die 31, totà vefperà ad multam noctem, lumen boreale valde fluc- 
tuans arcus repræfentabat tam verfus boream quam auftrum, 
è quibus radii perpendiculares verfüs zenit afcendebant. 


NOV'E MBE R. 


Die 12, h. 9 20° poft merid. fafcia non fatis lucida, præ fe ferens 
duos arcus concentricos, quorum fuperior per ©, inferior 
vero prope » Urfæ majoris tanfiit. 

Die 16, h. 7 poft merid. paululum auroræ borealis; horà vero 10, 
inflar floccorum per cœlum boreum difpergebatur. 


D.E CE. M,B ER. 


Die 24, h. 10 poft merid. nonnihil luminis ad feptentrionem. 


LA 


D Æis À S\ ce mi GC :E1 SE 141 


SÉRRA TETE AE LIT T AL LOUN 


DA IROMAMIENCE SDS D'A LE SAC 
ET COMTÉ DE BOURGOGNE. 


Par M. DE GENSANNE, Correfpondant de l’Académie, 


ES montagnes des Vauges, qui féparent l'Alface de Ja 

Lorraine & de la Franche-Comté, font très-abondantes 
en différens minéraux : on y trouve des mines de plomb, 
de cuivre, d'argent, d'antimoine de Cobolt & de Magnéfie, 
de charbon de terre, & de plufieurs autres fubftances terreftres ; 
& cela eft d'autant plus fréquent dans ces cantons, qu'il feroit 
difficile d'y faire une demi-lieue de chemin fans y apercevoir 
des indices de quelque minéral. Il eft vrai qu'en général les 
filons n’y font pas riches, mais il en eft plufieurs qui méritent 
la plus grande attention. Parmi ces derniers il ÿ en a qui ont 
été travaillés anciennement, d'autres qui n'ont été découverts 
que de nos temps, plufieurs enfin qui ne demanderoient qu'une 
recherche un peu exacte pour devenir l'objet d'un travail 
également fructueux & confidérable, 


Nous nous fommes fait une loi dans le détail que nous 
allons faire de ces mines, d'éviter un écueil auquel on n’eft que 
trop fujet, qui eft d'aprécier ces fortes de choles au-deflus de 
leur valeur : c’eft une efpèce de manie parmi tous les Mineurs 
de l'Univers, de ne regarder les mines que du côté qu'elles 
flattent, & d'écarter comme un mal toute idée qui pourroit 
les faire envifager du côté oppofé. On ne veut point s'ima- 
giner qu'un filon de quatre ou cinq pieds de mine pure peut 
fe réduire à rien au bout de quelques toiles; c'eft cependant 
ce qui arrive très-fouvent, fur-tout dans nos montagnes des 
Vauges. Les filons uniformes ou conftans n’y font pas com- 
muns, ils ne donnent, la plufpart, que par bouillons, c’eft-à- 
dire par intervalles’, & ils ont cela de commun avec toutes 

Mi S if 


x42 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

les mines de l'Univers. C’eft encore une erreur que de regarder 
comme une règle générale, que plus on approfondit une 
mine, plus elle doit fe trouver riche; cette règle n'a lieu que 
pour certains filons, c’eft tout le contraire dans d’autres. Ce 
détail au furplus eft étranger à l'objet que nous nous fommes 
propolé dans ce Mémoire, que nous avons divifé en deux 
parties. 

Dans la première, nous allons détailler les différentes mines 
d'Alface & de Franche-Comté, que nous avons vües & dont 
nous avons une entière connoiflance, en les diftinguant de 
celles que nous ne connoiffons que par des rapports ou des 
Mémoires qui nous ont été communiqués. 

La feconde renferme quelques obfervations fur Ia raïfon 
pour laquelle le travail de ces mines languit & n'ef point porté 
au degré de vigueur dont elles feroient fufceptibles. 


PREMIÉRE PARTIE. 


Avant que d'entrer dans le détail des mines dont if ef ici 
queftion, il eft bon d'être prévenu que ces travaux ont été 
fuivis fucceflivement, tantôt par des Allemands, tantôt par 
des François, & le plus fouvent par les uns & les autres en- 
femble, & que la plufpart des termes dont on y fait ufage, 
font un mélange de françois & d'allemand dont il convient 
d'être préalablement au fait. 

Nous appelons indifféremment un filon ou une gangue, 
une veine de pierre, de fable ou de terre qui parcourt un 
certain terrein & qui renferme quelque minéral. 

La pierre dont nos filons font compofés eft un quartz, un 
fpath , de F'ardoïfe, du caillou de différente couleur ; leurs 
parties terreufes font d'une terre grafle marneule, fouvent 
feuilletée, dont les couleurs varient fuivant les métaux qu'elles 
renferment. Nous lappelons moulme. 

Les quartz font durs, compactes , de couleur blanche, grie, 
rouge ou noire; le fpath au contraire éft moins dur: il a une 
apparence talqueufe, quelquefois tranfparente; nous en avons 
de plufieurs couleurs, du blanc, du verd aïgue-marine, 


| DES. S CUE E N CG ES 14 
améthyfte, brun, cendré, &c. ileft en général tendre & friable, 
Toutes ces fubftances ont ici le nom de gangue. On trouve 
encore des filons, que nous appelons de la mine en fable ; c'eft 
en effet un fable quelquefois mouvant, & plus fouvent de Ja 
confiftance du grès. On reconnoit ordinairement par leur 
couleur le genre de métal qu’ils renferment, quelquefois auffi 
on ne fauroit les diftinguer que par l'épreuve: tel eft celui qu’on 
trouve par fois dans le filon de Notre-Dame à Planché, qu'on 
a pris long-temps pour du fpath brifé, & qu'on a enfin re- 
connu pour de la mine d'argent; il tient en effet jufqu’à 
trente-deux lots de ce métal. 11 refflemble parfaitement, par 
la couleur & la confiftance, au fucre ordinaire en pains. 


On dit ici que le filon fe fuit, ou qu'un tel filon eft réglé, 
lorfqu’il contient du minéral fans interruption dans toute fa 
longueur, quand même il ne feroit pas toûjours de la même 
richefle. Ceux-ci font rares dans les montagnes des Vauges ; 
les filons, comme nous Tavons déjà obfervé, n’y donnent 
ordinairement de la mine que par bouillons, c'eft-à-dire par 
intervalles. 


Mines de Franche - Comiré. 


Les principales mines qu'on trouve dans la partie des 
Vauges, fituée en Franche-Comté, font celles de Planché, la 
Vieille- Hutte, Ternuay, le Mont-de-Vannes, Château- 
Lambert, Faucogniey & Saint- Breffon. 


Planché. 


La première mine qu'on a travaillé à Planché, eft celle 
appelée a Grande-montagne ; c'étoit une rencontre de plufieurs 
filons qui formoient dans cet endroit un bloc de minéral, 
que les Allemands appellent ffock. Le minéral eft mélé de 
plomb, de cuivre & d'argent : lorfque la mine eft bien pure, 
ou, ce que nous appelons, mine:entière, elle rend foixante à 
foixante-cinq livres de plomb, deux à trois livres de cuivre, 
& deux lots d'argent par quinual ; elle eft très-difficile à fondre, 
äcaufe de la quantité de bleinde & d’arfénic qu'elle renferme, 


La Grande: 
montagne, 


S.t°- Barbe. 


S.'- Jacques, 


Notre-Dame. 


144 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
& qui, malgré toutes les précautions poffibles , vitrifie toû= 
jours une partie du métal à la fonte. 

Cette montagne au refte eft épuilée; elle eft fendue dans 
toute fa hauteur de part en part, il n’y refle que quelques 
rameaux qui ne méritent pas attention. Ces travaux font pouffés. 
à une profondeur confidérable au deffous même du niveau 
du pied de la montagne: il eft vrai que dans cette profondeur 
on y trouveroit encore beaucoup de minéral; mais l'abondance 
des fources, & l'idée fur-tout où l'on eft que l’eau de la rivière 
y pénètre, font caufe qu'on n'a point relevé cet ancien travail. 
On pile encore actuellement les décombres qui y font en 
quantité, & le minéral qu'on en retire rend à la grande fonte 
douze à quinze livres de plomb, deux à trois livies de cuivre 
& une once d'argent par quintal. 

A un quart de lieue au-delà de ce travail, il y a deux 
autres travaux, appelés Sainte-Barbe & Saint-Jacques , fitués 
fur le même filon. Le minéral y eft dé la même qualité que 
celui ci-deflus; il rend cependant un peu plus de cuivre: ce 
travail, fur-tout celui de Sainte-Barbe, eft encore très-vafte. 
Il fut r'ouvert en 1740 ; on y travailla quelque temps; mais 
comme il y avoit fort peu de minéral, l'abondance de l'eau, 
& fur-tout le peu de folidité du terrein, le firent abandonner 
les décombres font très- bons pour le pilon, & on les pile 
actuellement avec ceux de la Grande-montagne. Tous ces 
travaux font à gauche de la rivière en montant dans le vallon 
de Planché. 

A droite de la mème rivière & vis-à-vis la Grande- 
montagne, eft une autre mine appelée MNorre- Dame ; c'eft 
un ancien travail qui n'eft pas confidérable: il fut r'ouvert 
en 1738. C'eft une des plus riches mines d'argent qu'il y 
ait dans le canton; elle a rendu jufqu'à deux marcs d'argent 
par quintal, cinq à fix livres de cuivre & quinze à vinot livres 
de plomb: on y a trouvé quelque peu d'une mine d'argent 
très-riche & fort rare: elle reflemble parfaitement au fucre 
cominun en pain. On pourfuivit ce travail jufqu'en 1741, 
qu'on fut obligé de l'abandonner, parce que le filon fe trouva: 

entièrement 


DES SCIENCES 145 
entièrement coupé par un roc fauvage. Depuis ce temps-là 
j'ai fait un grand nombre de tentatives pour retrouver ce filon, 
perfuadé qu'il devoit fe prolonger au-delà du roc fauvage : 
en effet, au mois d'Oétobre dernier 175 $, je le retrouvai à 
environ 200 toiles au deflus des anciens travaux fur fon 
alignement, qui eft prefque eft & oueft, & il y a lieu de 
croire qu'il ne fera pas infruétueux. 

Au revers de la même montagne, eft une autre mine appelée 
le Loury. U y a ici deux filons joints enfemble qui fe fuivent 
parallèlement; l'un eft de cuivre, l'autre de plomb: ils ne 
donnent que par bouillons; & ce qu'il y a de fingulier, c'eft 
qu'ils donnent aiternativement, tantôt l'un, tantôt l'autre, & 

ue la mine de cuivre eft piquaflée de mine de plomb, & que 
celle de plomb eft piquaffée de mine de cuivre. Le minéral 
y eft excellent & facile à fondre, il rend enfemble à la grande 
fonte douze à quinze livres de cuivre, trente à trente-cinq 
livres de plomb & trois lots & demi d'argent. Cette mine, 
à la petite épreuve, rend auffi jufqu'a deux gros d'or, mais 
à la grande fonte cet or refte uni avec le cuivre, & il en 
pañle fi peu dans le plomb, que l'argent qui en provient ne 
mérite pas le départ. J'ai fait bien des tentatives pour tirer 
au grand fourneau cet or dans fon entier, mais jufqu’à préfent 
je n'ai pü y parvenir ; je le retrouve toûjours dans le cuivre. 

Ce filon fe prolonge jufqu’au revers d'une montagne voi- 
fine, appelée / Cramillor. J'y ai un petit travail: le filon y 
change de nature; ce ne font plus deux filons particuliers, il 
eft réduit à un feul, qui eft de la mine de fer à la furface de 
la terre. À trois ou quatre toiles de profondeur, c'eft de la 
mine de cuivre; plus profond ce n’eft prefque que de la mine 
de plomb, qui, à mefure qu'on approfondi, fe convertit en 
mine d'argent. Le minéral y tient également de l'or, mais 
peu & bien moins qu'au Loury. 

Comme ces filons ne donnent que par intervalles, ils 
payent à peine les frais. Il conviendroit de les attaquer par un 
percement qu’il faudroit pratiquer au pied dela montagne, mais 
jufqu'ici la dépenfe que cela occafionneroit nous en a détournés. 


Jar. étrang. Tome IV. za Là 


Le Loury: 


Le Cramillot. 


Le Cuivre. 


La 
Vieille - hutte. 


146 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

‘En montant le vallon, du même côté de la rivière, tout 
auprès de la Verrerie de Saint-Antoine, on trouve un ancien 
travail, appelé Ze Cuivre. U y a ici plufieurs filons d'une pierre 
de quartz blanche tirant fur le fpath, mais très-dure : le 
peu de minéral qu'elle renferme ne tient que du cuivre, 
& il paroît par les décombres qu'elle n'eft pas abondante, 
Il y a eu ici une ancienne fonderie, dont on voit encore les 
crafles & quelques veftiges; les hals ou décombres méri-: 
teroient d'être pilés sil y avoit un pilon auprès, mais ils ne 
font pas en aflez grand volume pour y en conftruire un, & 
ils ne valent pas la voiture éloignée. 

En füuivant toùjours le même vallon à une lieue plus haut, 
tout auprès des frontières de Lorraine, on trouve un endroit 
appelé 4 Wieille-hutte. M y a ici un volume immenfe de 
fcories ou craffes de fonderie: il ne refte aucune tradition de 
ce travail, mais, à en juger par les indices , il paroît étrele plus 
ancien & le plus confidérable qu'il y aït eu dans tout le canton. 
On y avoit bâti il y a une trentaine d'années une Verrerie, 
qui a été détruite depuis deux ans: en fouillant en différens 
endroits pour les bâtimens & jardins des Verriers, on y a 
trouvé quelques lingots d'argent, plufieurs grandes plaques de 
métal compofé, à peu près femblable à ce que nous appelons 
cuivre noir. Je ne faurois m'imaginer à quel deffein ni comment 
on formoit ces plaques; elles avoient deux à trois pieds en 
quarré irrégulier & un bon demi-pouce d'épaiffeur : ce régule, 
à l'épreuve, m'a rendu du cuivre, de la fpeis & un peu d'argent. 
IT eft très-arfénical ; il me paroît auffi qu'il avoit été plombé 
par la voie des mattes. On y a trouvé plufieurs outils, mais 
aucun de ceux dont on fait ufage dans les travaux à da 
poudre: l'endroit du cimetière qu'on a découvert, eft auffi 
fpatieux que les cimetières des paroiflès ordinaires. Il y a 
une dixaine d'années qu'un Ouvrier de la Verrerie y trouva 
quelques efpèces d'argent monnoyé, d’une figure particulière : 
comme je ne me trouvois pas dans le-pays, je n'eus pas la 
fitisfaction de les voir, & FOuvrier a difparu depuis cette 


trouvaille ; mais fur le rapport qu'on m'en a fait, ces efpèces 


DES SCIENCES. 147 
étoient les unes carrées, les autres tiangulaires, marquées d’un 
poinçon fur les angles d'un côté feulement, à peu près comme 
les pièces de cuivre que nous appelons monnoie de Suede, 
On y découvre journellement de la fpeis : c'eft une efpèce de 
régule compolé de cuivre, de plomb, d'argent, & fur-tout d’une 
grande partie d'arfenic. Ce régule, employé dans. la fonte des 
cloches en petite quantité, les rend très-fonores; j'en conferve 
un morceau qui pèle bien deux cents cinquante livres. Tous ces 
indices prouvent que ces travaux n'ont pas été abandonnés 
par la faute de Ja mine, mais que les Ouvriers & autres ont 
péri tout à la fois par quelque calamité, 

Lorfque les Verriers sy étoient établis, cet endroit étoit 
un défert couvert d'une forêt épaifle; & le térrein qui y eft 
en pente y a tellement changé depuis qu'on y travailloit aux 
mines , que ce n'eft qu'à la faveur d'un gros ravin d’eau arrivé 
il y a quatre à cinq ans, que j'ai pu reconnoître l'endroit d'où 
ils tiroient leur minéral, quelque peine que je me fuffe donné 
jufqu'alors. Il y a trois gros filons qui fe fuivent parallèlement 
& qui forment enfemble plus de trois toifes de largeur. Les 
Anciens ont travaillé à jour, c'eft-à-dire qu'ils ont creufé fur 
Ja longueur des flons une fente de plus de cent toifes de long, 
on ne fauroit en connoître la profondeur, cette excavation 
étant prefque entièrement comblée: ce qu'il y a de für, c'eft 
que le minéral doit être profond. 

Le filon dans l'endroit, où du moins proche de ce travail, 
eft compolé d'une pierre jaunätre, molle & feuilletée, du genre 
dés calcaires, entre-coupée de petites veines de quartz blanc: 
fa direction eft par les douze heures, c'eft-à-dire nord & 
fud. Un peu plus loin, & fur-tout fur les décombres que j'ai 
fait découvrir, la pierre eft un quartz gris très-dur, mêlé de 
bleinde cubique & de quelque peu de glautfcobalt: on y voit 
aufli quelques grains femblables à de la mine d'argent gris, 
& qui, comme elle, font entourés d'une efpèce de rouille 
aigue- marine. Ce qu'il y a de fingulier , c'eft qu'il m'a été 
impo(üble d'y trouver, ni furle travail, ni dans les décombres, 
la groffeur d'un petit pois de mine bien caradtérifée, 

Ti} 


148 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Les fcories de la Fonderie font parfemées de grenailles de 
plomb; j'y ai trouvé aufli quelques morceaux de belles mattes 
de cuivre & d'argent, & on verra en eflet ci-après que c'eft 
une mine de cuivre, de plomb & d'argent ; Jy foupçonne 
aufli de Fétain, ou tout au moins une efpèce d'arfenic fixe 
qui fe régulife avec le plomb, parce que le métal que fai tiré 
de ces fcories en grand a toutes les propriétés de étain, fe 
on excepte les phénomènes de la coupelle, où il ne fait aucune 
bourfouflure, comme nous le dirons bien-tôt. 

Dès que j'eus aperçü la direction du filon, il ne me fut pas 
difficile de fuivre fon alignement ; je reconnus avec plaifir que 
les Anciens avoient marqué cet alignement fur la longueur 
d'une bonne demi-lieue, par des /chourffs pratiqués à dix ou 
douze toiles de diftance les uns des autres (les fchourfis font 
des petits puifards qu'on fait fur les filons pour en marquer la 
direction }, & c'eft ordinairement à la vifite de quelques 
Supérieurs ou de quelque Expert dans ces fortes de travaux 
que les Anciens marquoient la direétion des filons ; quelquefois 
aufh ce font des tentatives qu’on fait pour trouver du minéral, 

En faifant cette recherche, je trouvai dans un précipice ces 
trois filons, découverts par la chüte des eaux d'un petit ruiffeau, 
qui fe précipite en bas des rochers: les trois filons y font 
très-gros, & les mêmes que dans les anciens travaux , avec 
cette différence qu'il »y en a qu'un ici qui ait confervé fa 
nature de pierre jaune. Je le foupçonne de plomb; il tient la 
droite, c'eft-à-dire le côté de l’eft des autres. Celui du milieu 
eft un quartz parfemé de mine de cuivre jaune & de malachite 
bien caractérifée : le troifième à gauche eft une marne noire 
entre-coupée d'un quartz bleuâtre mêlé de bleinde & de quelques 
yeux de mine d'argent. Comme cet endroit eft impraticable, 
Jai commencé un percement au pied du précipice à environ 
cent toiles de hauteur perpendiculaire plus bas : il ne me 
reftoit au mois de Mars dernier 17 $ 6, qu'environ douze toifes 
à faire pour parvenir au gros filon. Le roc qui accompagne 
ces filons eft une efpèce de quartz tirant fur le granit tout 
parfemé de bleinde à plus de dix toifes de diftance des filons. 


DES SCIENCES. 14 

J'ai pilé & lavé le quartz gris dont j'ai parlé ci-defus; ï 
rend un lavin très-femblable à la mine d’étain brun, tirant un 
peu fur la couleur de bifmuth ou de gorge de pigeon & fort 
approchant d’une efpèce de mine de zink dont parle Valerius. 
Cela m'avoit d'abord fait croire que le métl qui en provient 
eft une efpèce de mélange de plomb & de zink; mais ce 
métal réduit en chaux & pouffé par une longue calcination, 
ne rend pas la moindre fleur de zink, non plus que par une 
longue fufion. 

Ce lavin contient trois fortes de bleindes, qu'on ne peut 
diflinguer que par la calcination : la première, qui eft la plus 
abondante, eft d'une couleur aflez femblable à la galène de 
plomb. Je l'ai tenue douze heures confécutives au plus grand 
feu fans avoir pû lui faire perdre fon brillant : je l'ai fondue 
avec trois parties de litarge & fix parties du meilleur flux, 
les fcories ont encore été parfemées de brillant: elle tient 
beaucoup de fer & quelque teinture d'argent. 

La feconde rougit feulement au feu, devient lésère & fur- 
nage à l'eau ; elle prend à ce degré de feu une très-belle cou- 
leur d'or: il s'en trouve beaucoup dans les décombres des 
Anciens; il y en a aufli quelque peu qui eft jaune naturelle- 
ment, & qui n'a pas befoin d’être rougie au feu pour prendre 
cette couleur. 

La troifième enfin, qui eft la plus métallique, prend à fa 
calcination la couleur de gris-cendré, tout femblable à celle 
que prend Ja mine de plomb; elle rend en eflet à l'épreuve 
une efpèce de plomb très-fingulière : il reflemble au plus bel 
étain ; il eft très-fonore, d'une belle couleur d'argent ; il n’eft 
pas plus malléable que l’étain dont il a toutes les propriétés, 
excepté fur la coupelle, où il ne donne aucune chaux ni 
bourfoufflure. H coupelle avec des fleurs comme le bifmuth , 
mais le bouton de fin qui en provient eft toûjours couvert 
d'une pellicule de chaux blanche, tout femblable aux boutons 
d'argent qu'on tire de l'étain. La même chofe arrive au bouton 
d'argent que je:tire des fcories de l'ancienne Fonderie: Il eft 
bon d'ajoûter ici que la fonte des Anciens n'étoit pas exacte, 


T ii 


r$o MÉMOIRES, PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
parce que les fcories prifes au hafard, rendent encore quatre 
à cinq livres de ce métal par quintal. A en juger par le gros 
volume des gâteaux de fcories qui fubfiftent, ils fondoient cette 
mine dans un grand fourneau à forge de fer, & en retiroient 
le métal dans des grands caffins comme on tire la gueule, & 
c'elt peut-être de la forme carrée de ces grands caffins qu'ils 
tiroient ces plaques d'une efpèce dé cuivre noir, dont nous 
avons parlé plus haut. Ils retiroient ces pliques de deflus le 
plomb à melure qu'elles fe figeoient, de la même manière 
qu'on retire les mattes cuivreufes lorfqu'on fépare l'argent du 
cuivre par la voie des mattes. 

Pour revenir au métal qui provient de ce minéral, nous ob- 
ferverons qu'il eft extrêmement rongeant & qu'il ne fauroit être 
coupelé que fur des coupelles de cendres d’os bien purifiées : 
celles-ci même en font fouvent percées d'outre en outre; ce 
qui fait qu'il eft très-difhcile, pour ne pas dire impofüble, 
d'avoir des eflais égaux. J'en ai eu qui m'ont donné jufqu’à 
neuf onces d'argent au quintal, & j'en ai fait un grand nombre 
d'autres qui ne m'ont rien donné du tout, J'ai fondu dix à 
douze quintaux de cette mine lavée au fourneau à manche, elle 
ne m'a rendu qu'environ cinq pour cent de ce même métal, 
que les Fondeurs ont d'abord pris pour de l'argent, mais qui 
n'étoit rien moins que cela; je le regarde comme un mélange 
de plomb & de régule d'arfenic, produit par la quantité de 
cobalt qui fe trouve dans cette mine, 

D'ailleurs, l'efpèce de minéral dont nous avons fait ufage 
dans ces épreuves, n'eft point caractérifé ni pris dans l'intérieur 
des filons; nôus l'avons tiré en pilant l'efpèce de quartz ou 
granit qui accompagne immédiatement ces filons. 

Je me fuis un peu étendu fur cet article, parce que malgré 
la mauvaife qualité du minéral qui fe trouvé à la furface & 
aux environs de ces filons, je ne les regarde pas moins comme 
les meilleurs & les plusriches que nous ayons dans la Province, 

En defcendant & à l'iffue du vallon de Planché, au revers de 
la montagne du Mont-Ménard, il y a un filon de plomb que 
j'ai actuellement en plein travail: ce filon eff fur les limites de 


DES SCIENCES. SOL 
Franche-comté & tout proche des mines d'Auxel, appartenant 
à M. le Duc de Mazarin. I faut obferver que les gros filons 
de mine de plomb de Saint-Jean d’Auxel fe jettent en Franche- 
comté à très-peu de diflance des travaux de M. de Mazarin, 
& viennentcroifer le filon que je fais exploiter dans cet endroit, 
à environ 125 toifes de mon travail; en forte que ce ne fera 
que dans quelques années que nous parviendrons à cette croifée, 
Le minéral que j'y fais tirer eft tranfporté à Planché;'il eft 
de la même qualité que celui d'Auxel ; il rend à la petite 
épreuve deux lots d'argent & foixante à foixante-cinq livres 
de plomb; maïs fondu tout {ul à la grande fonte, il n’en 
rendroït pas vingt-cinq, il faut abfolument le méler avec 
d'autres mines fr on veut en tirer parti, & fur-tout avec des 
mines cuivreufes & ferrugineufes. Cette mine renferme quan- 
tité de bleinde antimoniale, qu'on ne fauroit diftinguer d'avec 
la mine de plomb, & qui à la fonte emporte ou vitrifie la 
plus grande partie du métal de cette dernière, fi on n'y ajoûte 
des matières propres à abforber cet antimoïne, J'ai effayé en 
vain de fondre ce minéral au fourneau anglois, tant feul, 
qu'avec différens mélanges, le tout fe réduit en un bain très- 
liquide, fans que le métal fe fépare des fcories ; ce qui forme 
une efpèce de mate grife & terreufe, dont on ne peit prefque 
plus rien tirer. Cetie mine ne fue point fon métal, comme 
cela arrive aux mines qu'on exploite en Bretagne : dès qu’elle 
commence à pâter, elle tombe en fufion & forme cette efpèce 
de matte dont nous venons de parler, Le meilleur moyen 
que nous connoiffions pour en tirer parti, eft de la fondre crûe 
au fourneau à manche avec des refles de mattes cuivrenfes & 
ferrugineules , & à leur défaut, avec de la mine de cuivre tenant 
argent & dés fcories de forge. Toutes les mines de plomb des 
Vauges ont cette qualité, fi on excepte celle de Saint-Breflon, 
qu'on pourroit fondre fur l'aire avec des fagots, comme on 
fond là mine de bifmuth. H y a encore aux environs de 
Planché nombre d'autres petits travaux, mais qui ne font pas 
afléz confidérables pour mériter ici une digreffion; ce ne font 
d'ailleurs, la plufpart, que des tentatives qui n'ont pas eu de 
fuite. 


is2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Avant que de quitter les mines de Planché, il eft bon de 
dire un mot fur ce que fa tradition nous apprend desleur 
ancien travail. 

Ce vallon s'appeloit anciennement froides Montagnes ; ce 
n'étoit que des forêts incultes. Depuis la découverte des mines 
on commença à y bâtir, & on l'appela a mine tout fimplement ; 
on dit aujourd’hui Planché-la-mine, & plus fouvent la Mine, 
pour le diftinguer du village de Planché, qui eft fitué à une 
bonne lieue plus bas, & qui eft l'endroit de la paroiffe. La 
mine n'eft plus aujourd'hui ce qu'elle a été il y a quelques 
fiècles ; le village étoit entouré de murailles dont il ne refte 
aucun veftige. Il y avoit une Jurifdiétion ou Confeil des 
mines; on voit encore aujourd'hui la prifon: il y avoit un 
marché toutes les femaines, où perfonne ne pouvoit rien 
acheter qu’à une certaine heure & que les Mineurs ne fuffent 
fournis: on fufpendoit pour cet effet un tableau au poteau du 
carcan au milieu de la place; & pendant que ce tableau étoit 
fufpendu , les feuls Mineurs avoient droit d'acheter leurs pro- 
vifions : à une certaine heure on toit le tableau, & pour 
lors tout le monde étoit admis à faire leurs emplettes. On 
prétend qu'on y a battu monnoie, on défigne même l'endroit 
où elle étoit, mais j'ai de la peine à me le perfuader, parce 
que ces mines n’ont jamais pü fournir de quoi entretenir une 
Monnoie, à moins qu'on ne tiràt l'argent de la Vieille-hutte, 
qui eff dans le même vallon; mais ce dernier travail me paroït 
plus ancien, puifqu'il n’en refte aucune idée *. 

Au furplus, outre les Mineurs libres, on y employoit les 
Galériens ou gens condamnés 44 metalla ; Yon ne connoifloit 
point encore nos pilons, car on broyoit le minéral fous des 
meules de moulin. On commençoit par faire une efpèce 
d’aire, fur laquelle on étendoit une certaine quantité de bois, 
comme nous faifons dans nos grillages; on mettoit enfuite 

* IT faut convenir d’un autre côté |. denrées & les gages des Ouvriers, le 
que Château-Lambert feul pouvoit | commerce & le payement des travaux 
fournir plus de cuivre qu’on n’en | ne fe pouvoient guère faire qu’en 
pouvoit frapper , & nous favons | monnoie de cuivre, 
d’ailleurs qu'au prix où étoient les 

un 


DU S'AMOGI ÉN CES 153 
un volume confidérable de pierres, que nous appelons mine 
de pilon ; on y mettoit le feu, qui, joint au foufre du minéral, 
ne manquoit pas d'embrafer tout le tas; & lorfque tout étoit 
rouge, on y conduifoit l'eau par un canal, ce de rendoit la 
mine tendre & friable. Il y a quelques années qu'en faifant 
creufer des décombres pour les piler, nous trouvames trois de 
ces moulins enterrés & en place; les bois & les fers étoient 
réduits en terre, mais les meules étoient entières; les dormans 
ou meules inférieures étoient creufées en forme de coquille 
d'environ cinq pouces de profondeur ; les meules fupérieures 
étoient convexes & rempliffoient prefque la concavité des 
inférieures, Il n'y avoit aucune rénure ni échancrure comme 
on le pratique aux meules dont on fait ufage dans les mines 
qu'on travaille par le mercure. Le diamètre des volans ou 
meules fupérieures étoit d'environ deux pieds; les inférieures 
étoient plus grandes & carrées en dehors. La qualité de ces 
pierres, eft d'être extrêmement dures; c'eft une efpèce de 
granit qui n'eft pas rare dans les Vauges; nous nous en fervons 
pour les palliers des tourrillons des roues, il eft cependant 
rare d'en trouver de gros morceaux fans fils. Il nous refte 
des indices de quatre Fonderies dans le vallon de Planché- 
la-mine; celle d'aujourd'hui occupe l'emplacement d'une des 
anciennes. Les travaux foûterrains ont été la plufpart faits 
au feu: il ne paroït pas que les Anciens y aïent jamais em- 
ployé la poudre. I y en a d'autres qui font faits au fimple 
cifeau & d'une grande propreté, telle eft la Stole ou galerie 
de Saint-Jacques & celle de Sainte- Barbe. 

Il faut convenir que cela leur étoit bien facile, car nous 
voyons par d'anciens regiftres, que les Mineurs avoient fix 
deniers ou tout au plus un fou de gages par jour, & que les 
Houtmans ou Sergens des mines avoient treize fous quatre 
deniers par femaine : nous favons encore que le fou de cuivre 
de ce temps-là n'excédoit pas le poids des nôtres, au contraire; 
en forte que les gages d'un de nos Mineurs en auroient 
payé trente dans ce temps - à, & par conféquent un quintal 
ou un cent pefant de cuivre dans ce temps-là faïoit autant 


Sav: érrang. Tome IV. e V 


Ternué, 


Freffe, 


154 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

que trente quintaux aujourd'hui. Faut-il s'étonner après cela, 
fi dans ces premiers temps on senrichifloit dans les mines 
& fi on sy ruine à préfent? ils pouvoient alors travailler 
nombre de filons avec un profit confidérable, qu'il feroit de 
la dernière imprudence d'attaquer aujourd'hui, & cela par 
ha feule raifon qu'une livre de plomb, de cuivre ou d'argent, 
vendue fur le même pied qu'aujourd'hui, ce qui arrivoit en 
effet tout au moins, leur faifoit autant d'effet que nous en 
feroient trente; & il ne faut pas simaginer que les mines 
produifent moins de nos jours que dans ce temps-là; nous 
en avons pour le moins d’auffi riches qu'ils en avoient. Nous 
voyons d'un autre côté qu'il s'en faut de beaucoup que leurs 
fontes fuflent pouflées à un degré de perfeétion que nous 
n'avons pas; car quoique nous foyons bien éloignés en France 
d'avoir perfeétionné nos fontes autant qu'on l'a fait en Alle- 
magne & en Angleterre, il n'eft pas moins vrai que nous 
pourrions piler & fondre avec profit la plufpart dés fcories 
d'un nombre d'anciennes Fonderies qu'on trouve dans les 
montagnes des Vauves; ce qui prouve que ce n'eft point fur 
la façon de travailler qu'il faut jeter cette différence, mais 
fur la difproportion des prix du travail, des bois & des denrées 
néceflaires à la vie. 


Mines de Térnuay, Freffe à le Mont- de - Vannes. 


A deux petites lieues an couchant de Planché-les- Mines, 
dans la paroïfle de Fernuay ou Ternué, il y a une mine 
de plomb qui a étéouverté par les Anciens: je la fs décom- 
brer en 1748, & je trouvai que cette mine va par roignons, 
c'eft-à-dire par pelotons difpercés çà & 1à fans aucun filon 
réglé. La gangue eff un quartz blanc mêlé de fpath-renfermé 
dans F'ardoile, & il paroît qu'il faudroit poufler les travaux 
à une grande profondeur pour trouver le filon en règle: le 
minéral au furplus éft de très-bonne qualité; il rend foixante- 
dix livres de plomb par quintal & deux lots d'argent. Il tient 
peu de bleinde, & eft par conféquent facile à fondre. 

Un peu plus haut, dans h paroïfle de Frefle, on trouvé 


DéEiS SCIE IN CE is 155 
un ancien travail d'une grande profondeur : le filon qu'on à 
ouvert en 1739, donne du cuivre, du plomb & de F'argent, 
mais en fi petite quantité qu'on n'a pas cru devoir en pour- 
fuivre le travail. 

A un quart de lieue de 1à, eft la montagne du Mont-de- 
Vannes: if y a ici plufieurs petits travaux commencés par 
les Anciens fur des filons de mine de plomb. En général, ces 
dernières mines font peu confidérables & ne paroifient pas 
mériter qu'on y hafarde une dépenfe. 


Fauconniey. 


Au mois d'Oftobre dernier 1755, on découvrit dans Ja 
paroifle de Fauconniey un aflez beau filon de mine de plomb; 
Jy ai placé quelques Mineurs qui en tirent du minéral de 
très-bonne qualité. Le filon y eft gros, d’un quartz très-blanc, 
mais la mine n’y eft point encore bien pure; elle eft difper- 
fée dans le quartz par pelotons de la groffeur du poing, plus 
ou moins forts. 

A une demi-lieue de là il y a une mine de Magnéfie ou 
Braunnflein, tès-abondante. Comme la confommation n’en 
eft pas confidérable, je n'en fais tirer qu'à mefure qu'elle fe 
vend: elle eft parfemée de quelques fleurs de cobolt, qui 
ne paroiïffent que quand on l'a pilée & lavée; elle tient près 
de quatre lots d'argent au quintal ; malgré cela, la dépenfe 
du travail, de la voiture & de fa fonte abforbe prefque 
entièrement ce produit. Je foupçonne que ce filon pourroit 
bien fe convertir en mine d’argent dans la profondeur. Cette 
magnéfie eft auffi bonne dans les Verreries que celle qu'on 
tire de l'Italie & de la Forêt noire: fi on calcine cette ma- 
gnéfie & qu'on en jette un peu dans une difiolution de cuivre 
faite par l'elprit de nitre, & par conféquent verte, elle la 
convertit en bleu au bout de quelques heures & la rend fem- 
blable à la diflolution de cuivre par l'efprit de fel. Ce minéral 
eft très-fufible, malgré la quantité de fer qu'il contient : il 
augmente la vitrification de la mine de plomb de Planché & 
d'Auxel, qui pèchent par leur trop de vitrifcibilité; ce qui 

Vi 


Mont-de 
Vannes. 


156 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
prouve qu'il feroit très-difficile d'en retirer en grand l'argent 
qu'il contient. 


Saint - Breffon. 


La paroifle de Saint-Breflon eff fituée à une lieue de Fau- 
conniey , fur les frontières de Lorraine: il y a dans cet endroit 
plufieurs filons de mine de plomb: le minéral y eft d'une 
qualité excellente, & fi facile à fondre, qu'en mettant fimple- 
ment Ja mine pure à fcorifer fous la mouffle, elle rend prefque 
tout fon plomb: elle rend foixante dix à foixante-quinze livres 
de plomb & une once d'argent par quintal. Il eft ficheux que 
les filons ne foient pas riches; ils ne donnent que par bouil- 
Jons & par petits pelotons de minéral difperfés çà & là. Le 
travail y eft diflicile, à caufe du peu de folidité du terrein; 
les filons font d'un fpath tendre, tranfparent & de toutes 
fortes de couleurs. Le minéral qu'on en tire aétuellement eft 
wanfporté à la fonderie de Planché, où on le mêle avec 
celui de ce dernier endroit, dont il facilite la fonte. 

Je ne connois point de mine qui donne tant de cryftalli- 
fations différentes que celle-ci, à caufe du grand nombre de 
fentes ou crévaffes dont les filons font entre-coupés. Nous 
avons rencontré lannée dernière une de ces fentes d’une gran- 
deur confidérable; fa capacité intérieure avoit la forme d'une 
lentille d'environ quarante-deux pieds de diamètre ; les 
parois étoient couvertes de flalactites ou cryftaux, dont la 
figure varie à l'infini; cette croûte a un demi- pouce d'épaif 
feur dans les parties les plus minces; dans d'autres endroits 
elle à jufqu'à quatre pouces. La partie fupérieure de la fente 
étoit entièrement vuide: f'inférieure étoit remplie, jufqu'à 
un peu plus de moitié, d'une efpèce de gur rougeître & 
coulant ; lorfqu'il eft fec on le prendroit pour de la terre 
figillée ou efpèce de glaife très-fine; il ne contient pas le 
moindre atome de fable. Aux effais ordinaires, il ne donne 
aucune efpèce de minéral; mais la curiofité m'ayant porté à 
le traiter, d'après l'expérience de Becker, avec l'huile de lin, 
Jen ai tiré un petit grain d'argent: par cette voie, il ne 
donne aucune marque de fer; ce qui prouve qu'il diffère de 
la glaife ordinaire. 


DES SCIENCES. 157 


Cette mine ne donne que du plomb & de Fargent; on 
y trouve cependant de temps en temps quelques grains de 
lapis ou mine afurée, mais en très-petite quantité, 


Chäreau- Lambert. 


Les travaux des mines de Château- Lambert font très- 
anciens & très-vaftes; on y à travaillé en différens temps & 
à différentes reprifes. Ce travail a commencé tout au fommet 
de la montagne, fur les limites mêmes qui féparent la Franche- 
comté de la Lorraine, & à mefure qu'on a approfondi, on 
a ouvert différens percemens pour faciliter la fortie des ma- 
tériaux & procurer l'écoulement des eaux ; en forte que depuis 
l'endroit où l'on a commencé ce travail jufqu'au fond des 
wavaux aétuels, il y a environ deux cents toifes de hauteur 
perpendiculaire fur une longueur d'une grande étendue : le 
filon partage la montagne en deux fur les limites de Lorraine 
& de Comté & fe jette enfuite en Lorraine, où font les 
mines du Tillot. 


Les Mineurs de part & d'autre fe joignirent anciennement 
au centre de la montagne, de façon qu'on peut aller fous terre 
de Comté en Lorraine: on voit encore aujourd'hui les {imites 
marquées dans ces foûterrains par les Commiflaires des Maifons 
d'Autriche & de Lorraine. On voit auffi dans le centre de 
cette montagne deux emplacemens de roues taillées dans {e 
roc: on failoit venir l'eau de près d’une demi-lieue de loin ; 
elle entroit par un percement pratiqué vers le fommet de la 
montagne, tomboit enfuite fur ces roues & fortoit par une 
flot ou percement pratiqué vers le milieu du côteau. 


Le filon va par les trois heures, c’eft-à-dire nord-eft & fud- 
oueft, & n'eft point par conféquent perpendiculaire à J’hori- 
zon; il couche fur le côté de Lorraine d'environ 2$ degrés, 
tantôt plus, tantôt moins. Nous appelons ces fortes de filons 
flackengangh : À eft de l'efpèce de ceux qu'Agricola appelle 
filons branchus, vene ramofe. M jette en. effet plufieurs 
branches, fur-tout du côté du Hang; c'eft le côté qui le couvre 

V ii 


158 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& qui eft oppolé au côté fur lequel il eft couché, qu'on 
appelle Ligeht. Les Anciens avoient commencé un percement 
prefque au pied de la montagne au deflous du village de 
Chäteau-Lambert; ils y travailloient par le feu : il fut continué 
enfuite dans un autre temps avec la poudre, mais différem- 
ment d'aujourd'hui : les avirons ou aiguilles des Mineurs, 
avoient près de deux pouces de diamètre & étoient fort longs; 
deux Mineurs les foûtenoient pendant qu'un troifième les 
frappoit à grands coups de mafle, ce qui devoit être un 
travail fort long & pénible. 

Nous l'avons enfir repris en 1734, & je l'ai heureufement 
fini en 1748, fur la longueur de deux cents toifes dans un 
roc fi dur, que j'y aï vü faire jufqu'à quatre-vingts coups de 
Mineurs l'un auprès de f'autre fans faire fauter un pouce de 
roc, les coups partoïient comme un coup de canon fans le 
moindre effet. L'air nous y a tellement incommodés, que 
nous avons été bien des fois fur le point d'y renoncer, & ce 
n'eft qu'à la faveur d’un expédient dont je m'avifai que nous 
en fommes venus à bout. 

Comune cet expédient peut être d'une très- grande utilité 
dans les travaux foûterrains & dans les endroits où l'air eft 
mal fain & incommode, il ne fera pas hors de propos d’en 
faire ici le détail. 

J'avois fait conftruire à l'entrée de ce percement un grand 
foufflet, qui, par le moyen d'un tuyau qui régnoit dans toute 
fa longueur, portoit l'air extérieur & frais auprès du Mineur, 
dans le goût du ventilateur de M. Halles. Cela fit fon eflet 
pendant quelques jours, au bout duquel temps Fair n'en 
devint que plus épais, au point qu'il n'étoit pas pofhble d’y 
refpirer, & encore moins d'y tenir de la lumière; en forte 
que nous nous voyions réduits à la néceffité d'abandonner ce 
travail qui avoit déjà coûté confidérablement; ce qui me fit 
naître une réflexion toute fimple, qui eft qu'on neft point 
fufloqué dans les travaux foûterrains & autres endroits mal 
fans, faute d'air, comme on le croit communément, & que 
c'eft précifément tout le contraire, c'elt-à-dire que c’eft par 


2e 4 AT C0 Se RU AÉORE EE 159 
ce qu'il y éft trop denfe & trop chargé de parties Hétérogènes 
qui en empêchent la circulation. Je conclus de-1à, qu'en intro- 
duifant de nouvel air, je ne faifois qu'augmenter le volume 
de celui qui y étoit déjà, & qui étant plus pefañt que celui 
de latmofphère, ne pouvoit être chaffé dehors par celui 
que jy portois avéc mon ventilateur ; que par conféquent 
au lieu de penfer à introduire de nouvel air dans cé travail, 
je devois au contraire m'attacher à en rétirer célui qui y étoit. 
Je fis conftruire pour cet effet une autre efpèce de foufflet, 

ui au lieu de refouler l'air comme le premier, faifoit au 
contraire l'effet d’une pompe afpirante; & à mefure qu'il afpi- 
roit le mauvais air du fond par le moyen du tuyau ci-déflus, 
le poids de l'atmofphère en introduifoit dé nouveau par le 
pércement même ; en forté qu'en moins de vingt-quatre heures 
Y'air fut auffi fain dans le fond de ce travail qu'il l'étoit en 
dehors, ce qui a toüjours continué depuis. 

Je reviens à la mine de cette montagne; on y trouve prefque 
de toutes les efpècés de mines dé cuivre connues : la plus 
grande partie efl d'un rouge brun, appelée foie de cuivre, & 
de la mine de cuivre blanche & jiune. On y trouve de temps 
ét temps quelque peu de mine d'irgént, & même quelques 
grains d'argent-vierge, mais cela ef rare: il y en a d'üne efpècé 
qui, à la petite épreuve, m'a donné une once d'or par quintal: 
celle-ci ne sy rencontré qué rarement ; éllé eft d’ün jauné 
œil de perdrix, entré-coupée de petites veines fanguinés. On 
fait par tradition qu'anciennement on tiroit de l’or de ces mines, 
& que c'étoit par le moyen du charbon de terre ; ce qui paroït 
aflez fingulier, car ce charbon ne peut guèré être employé 
qu'aux fourneaux de réverbère, & on fait que ces fourneaux 
ne font pas d'une ancienne invention ; d'un autre côté ce n'étoit 
pas fauté de bois. Ces travaux étoient dans cé temps-là au 
centre des forêts: on a fü auffi, par quélques vieux regiftres, 
qu'on à tiré de cette montagne jufqu'à cent foixante milliers 
de cuivre par an, & qu'on n’y payoit les Ouvriers que comme 
à Planché; favoir treize fous quatre déniers par femaine aux 
Houtmans, & fix deniers par jour aux Mineurs ordinaires. 


160 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Outre le grand filon, dont nous venons de parler, cette 
montagne eft toute entre-coupée de petits filons du même 
métal, qui font tous horizontaux ou par bancs, ce qui provient 
de la ramification du grand filon. 

Ces travaux aujourd'hui ne rendent pas du minéral en 
abondance, mais d'un autre côté le cuivre qu’on en retire eft 
de la meilleure qualité. 

À une demi-lieue de là, eft une mine de plomb, appelée 
le Baudy ; le minéral y eft parfemé dans un quartz blanc ; 
il n'y a encore qu'un puifard ou fchaet, d'environ 30 pieds 
de profondeur ; les fources y font confidérables, & on travaille 
actuellement à un percement pour en procurer l'écoulement. 
Comme ces mines fe trouvoient trop éloignées de Planché, 
nous les avons cédées depuis trois ans à une Compagnie qui 
les fait exploiter. 


Mines du Mont Jura, fiuées en Franche - comté. 


Outreles mines fituées dans les Vauges, dont nous venons 
de faire le détail, il sen trouve encore de plufieurs efpèces 
le long des montagnes du mont Jura, qui féparent la Comté 
de la Suiffle & du pays de Neuf-châtel. Il y a quelque part 
dans le bailliage de Baume & à peu de diftance d'Ornans, 
un filon de mine d'argent, qui ma rendu à l'épreuve au- 
delà de trois marcs au quintal: elle eft bleue, couleur du lapis, 
entre-coupée de mine d'argent blanc : le Payfan qui m'en a 
remis de très-beaux morceaux , m'aflura que le filon eft très- 
gros. Ce pauvre homme mourut il y a quelques années, le 
même jour qu'il nous avoit donné rendez-vous pour nous la 
montrer : quelques informations que jaie pû faire depuis, je 
n'ai pü en avoir aucun indice. 

A quatre lieues de Saint-Hypolite, à un endroit appelé 
Blanche-roche, y a un gros filon, ou pluftôt une veine 
de terre noire fablonneufe, que les Suiffes viennent chercher 
dans des havre-facs pendant la nuit. J'ai vû ce travail au mois 
de Février dernier, & la ftole que les Suiffes ont faite, à environ 
trente toifes de longueur fur dix à douze pieds de largeur. 

Entre 


Del si (S'ICICE IN CEFISMAIM ax 
Entre la terre noire & le roc il y a’une petite veine ‘d'une 
efpèce de terre glaife pourpre; nous y trouvames les outils 
des Suifles & plus d’un tombereau de cette terre toute frai- 
chement tirée. Le roc qui accompagne cette veine eft une 
pierre calcaire & farineufe: cette efpèce de pierre règne dans 
toute l'étendue des montagnes du mont Jura. J'ai déjà fait 
nombre d’effais fur cette terre fablonneufe ; mais jufqu’à préfent 
je n'ai pû encore découvrir quel peut être le motif qui engage 
les Suifles, & fur-tout les habitans de la Chaude-fonte, à en 
venir chercher clandeftinement fur leur dos. En lavant cette 
terre elle dépofe un fable brillant ; ce font des petits cryftaux 
angulaires, la plufpart cubiques, & qui, à la fimple vüe, 
paroiffent un lavin de mine de plomb : fa plufpart de ces 
cryftaux prennent à fa calcination une belle couleur de topafe, 
le furplus prend la couleur de fciure de buis. Si on calcine 
la terre pure, elle perd fa couleur noire & prend une couleur 
de fciure de bois. Les petits cryftaux fe diflolvent fur le champ 
avec eflervefcence dans l'efprit de nitre, à caufe de leur qualité 
calcaire ; ils dépofent une efpèce de chaux tout-à-fait femblable 
à la chaux d'or dans le départ, & ce dépôt, qui eft affez copieux, 
fe fait dans l'inftant de la diffolution; les mêmes cryftaux fe 
diflolvent également dans l'efprit de fel, mais il ne s'y pré- 
cipite aucune chaux: cette chaux fe dépofe auffi dans l'acide 
vitriolique, mais là diflolution dans ce dernier menftrue:eft 
toüjours trouble & imparfaite. Étant calcinée, elle prend une 
couleur de pourpre & paroît réellement métallique : elle entre 
facilement dans le bain de plomb & dans celui d'argent, 
mais elle ne laïfle aucun grain de fin dans la coupelle: fi on 
la fond fimplement dans le bain d'argent, elle en augmente le 
poids & paroït lui donner une légère teinture d'or du Rhin, 
fur-tout fi: on jette l'argent dans l'eau auffi-tôt qu'il eft figé: 
je ne l'ai pas encore fondue toute feule ni avec l'or; mais je 
me doute que l'ufage qu'on en fait, eft un ufage frauduleux 
& qu'on la fait entrer dans ce que nous appelons or de Genêve, 
pour en augmenter le poids & le volume, & peut-être auffi 
pour en exalter la couleur. | 


Sav. étrang. Tome 1V. pig . X 


162 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Je ne connois aucune matière plus réfraétaire à la fonte 
que la terre & le fable-dont nous parlons; je n'ai pü en obtenir 
qu'une fcorie très-pâteufe, au point que les grains de plomb 
qui fe reffufcitent de la Jitarge y réflent fufpendus en grenaille 
imperceptible, fans pouvoir pénétrer jufqu'au fond du creufet 
& s'y raflembler. Le plomb n'y prend aucun fin; cependant 
les {cories font d’une couleur de pourpre violet, fur-tout fi 
on emploie la potaffe dans le fondant, ce qui dénote une 
qualité métallique. J'ai tout lieu de foupçonner que c'eft par 
da yoie des cémentations & du flogiftique qu'on fait ufage de 
cette terre, à peu près de la manière dont on fait le laiton. 
Cette matière né tient aucun fer ni zink, où du moins elle 
n'en donne aucune marque; cependant on en fait un ufage 
confidérable, car, à en juger par le travail de cet endroit, 
on en a bien enlevé deux cents tombereaux en peu de temps : 
jen ai fait conduire quelques tonneaux à Planché, dans le 
deffein de fuivre ces épreuves. 

Cette veine eft connue depuis plufieurs années: dans le 
temps de M. le Régent on arrêta un faux Monnoyeur, qui 
promit d'enfeigner une riche mine d'or fi on vouloit lui fauver 
la vie, ce qui lui fut accordé: il emmena en cet endroit les 
Commiffaires qu'on lui nomma: on ouvrit cette veine en 
préfence du Subdélégué de Baume, & on en tira quelque 
peu qu'on tranfporta à Befançon. Dans cet intervalle, le faux 
Monnoyeur eut l'adrefle de s'évader ; & n'ayant rien trouvé 
par les épreuves qu'on fit à Befançon , on en demeura là : 
ce n'eft que par la grande quantité que les Suifles en tirent 
actuellement, que j'en ai été averti & que j'ai eu occafion 
d'obferver ce que je viens de dire. 

A fix lieues de-là, proche de Morteau, on trouve quantité 
de charbon de terre de très-bonne qualité, dont on ne fait 
aucun ufage & dont on pourroit tirer un grand avantage en 
y étbliflant les Verreries, qui abiment tous les bois de la pro- 
vince. À peu de diftance de cet endroit on trouve quantité 
de terres alumineufes, & dont on pourroit tirer beaucoup d’alun 
à peu de frais, à caufe dela proximité & de Fabondance du 
charbon de terre. 


D'É S /$ C'1E N C Es 163 

Je ne doute pas qu'il ne s'y trouve de la calamine, car 
outre l'abondance d’alun , qui en eft un mdice prefque certain ; 
le terrein m'y paroit être de la même qualité que celui 
de Calmefberg, proche d’Aix-la-Chapelle, où l'on tire une 
grande quantité de ce minéral. J’obferverai ici en pañfant, que 
les indices les plus prochains de la calamine, font les char: 
bons de terre, les terres alumineufes, & fur-tout des fables 
diverfement colorés & entre-coupés de petites veines couleur 
de lilas. J'entre dans ce petit détail, parce que cette découverte 
feroit de la dernière importance pour l'Etat. | 

On trouve auffi auprès de Salins quelques indices de mine 
de charbon. I y a quelques années qu'on a découvert à demi: 
lieue de cette ville une veine de grenats: je n'ai point vû-cette 
mine, mais on m'en a remis un morceau dont les grenats font 
gros & aflez bien colorés. 

Entre Champagnolles & Château-vilain, il y a un petit 
flon de mine de plomb: le minéral paroït beau, mais en 
petite quantité. Wülsab 

Depuis Salins jufqu’à Château-chälons, on trouve tout Je 
long des montagnes une quantité prodigieufe de pyrites figurées 
de différentes efpèces, & j'ai remarqué que ces pyrites, les 
cornes d’'ammon fur-tout, fe trouvent toûjours dans une efpèce 
de glaife noire-ou blancheätre. pb, 

On y trouve auffr plufieurs filons de marcaffite, comnie 
à Longe-chaux, Poutin, Arboïs & autres endroits. Ces 
marcaflies, que nous appelons kis, tiennent la plufpart pour 
tout métal du foufre, de l'arfenic & du fer. Tous ces minéraux 
font, aux yeux d'un certain public, de riches mines d'or qui 
fe convertifient en marcaflites dans un inflant aux yeux de 
Œux qui y voient un peu plus chair. Telle eft la mine d'or 
de Saint: Martin-les-Juffays, dont parle Dunot, qui pour tout 
or, ma rendu à l'épreuve vingt livres de fer & prefqu'autant: 
de foufre par quintal. 

Nous favons cependant que les Romains tiroïent beaucoup 
d'or de cette province, fur-tout du Mont-Jura; on y :voit. 
encore plufieurs traces de leurs anciens travaux. IL yen a eu 

X ij 


164 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

un fur te Mont-d'or entre Jogne & Valorbe, dans lequel je 
fuis defcendu à une grande profondeur fans pouvoir atteindre le 
fond, où le travail s'élargit confidérablement. Cet ouvrage a 
été travaillé une partie au cifeau & l'autre partie au pic, parce 
que ce filon et une efpèce de tale fpatheux jaunâtre: affez 
tendre; je n'y ai pas aperçü la moindre marque de minéral 
caractérilé ;!& à moins. que ce talc ne foit de l'efpèce de ceux 
de Norvège, dont parle Becker, & qu'il dit très-riches en 
or, je ne faurois défigner quelle efpèce de minéral les Romains 
tiroient de cet endroit; les hals ou décombres, quoique tout 
coûverts de gazon, paroiflent en grand volume: ils avoient 
à deux lieues de là une Fonderie proche le village de Motte, 
tout auprès de la fource du Doux: on y voit encore des 
fcories : on y trouve affez fouventune efpèce de monnoïe de 
cuivre fort petite, qui porte d'un côté une tête couronnée 
& de l'autre fe nom d'un Conul. 

On trouve auprès de là, au deflus du village de Moutabier, 
dela mine de fer verte, qu'on fond à la forge de Roche-Jean; 
Ceft uni fable pétrifié parfemé de taches vertes, tirant fur l'aigue- 
marine. Il arrive aflez fouvent que lorfqu'on finit les fontes, 
on trouve dans le fond du fourneau une efpèce de matte que 
ce minéral dépofe & qui eft très-riche en argent. 

A quatre lieues au midi de cet endroit, près du village de 
Moret, ily:a un autre-travail au haut de la montagne de 
Guëéulan : l'entrée de 1 ftole eff fort grande ;.j'y fuis entré à 
quelques toiles en avant , mais ici le roc eft tombé & on ne 
fauroit y pénétrer. L'eau qui en fort feroit tourner un moulin : 
le filon eft un quartz blanc, & le minéral eft de cuivre. I y 
a dans ce canton plufieurs autres travaux que je n'ai point vifités, 
parce que j'ai ÿü que le minéral dans ces endroits, que les 
Biabitans prennent pour de l'or, n'eft qu'une mine de cuivre 
très - difperfée dans des roches fort dures, qu'on ne fauroit 
travailler fans perte. 

Un peu plus loin, proche du village de Long-chaumois, 
je fuis defcendu dans un autre travail à environ trente pieds 
de: profondeur. Ce travail paroît avoir été aflez confidérable : 


{lt « 


DEN ASTÈTMEUNIC ENS: 165 
le filon eft un quartz blanc taché de rouge. Le minéral que 
j'ai pris au fommet de ce filon eft une mine de fer parfemée 
de taches couleur de rofe, qui refiemblent à des fleurs de 
cobalt : il m'a donné à l'épreuve un peu plus d'un gros d'or 
par quintal. J'eftime que ce filon mérite attention : on m'a 
affuré qu'aux environs de Saint- Claude il y a plufieurs de 
cés anciens ouvrages que je n'ai point vifités. 

Aux environs de Lons-le-Saunier, on trouve quantité de 
charbon de terre. À quelque diftance de là, tout auprès du 
village de Sainte- Agnès, on trouve une couche d'une efpèce 
de matière foffile, qui reflemble à une forêt renverfée & 
convertie en jayet. J'en ai fait tirer des morceaux de quatre 
à cinq pieds de long & de cinq à fix pouces de diamètre ; 
ils ne font pas ronds, mais ovales & un peu aplatis; leur 
écorce eft très-bien confervée & reflemble à celle du chêne; 
la partie ligneufe, fi on peut l'appeler ainfr, eft d'un brun noir 
& reffemble fort au jayet. Lorfque ces tronçons ont été un 
certain temps à l'air, ils fe caflent tranfverfilement, & la 
caflure qui eft très-luifante laifle voir très - diftinétement les: 
cercles de croiflance, comme ceux qu'on voit au bout d'un 
fapin qu'on a fcié, avec cette différence feulement qu’au lieu 
de cercles, ce font des ovales conceñtriques : on m'en a remis 
un morceau entièrement femblable, qu'on trouve en quantité. 
dans les fameufes mines de fel de Williska en Pologne, & 
j'ai remarqué en effet que toutes les fources falées que j'ai vûes 
en Franche-comté, en Alface & ailleurs, font toûjours envi- 
ronnées d’un terrein bitumineux. Ce font là toutes les mines 
que nous connoiflons en Franche-comté, & l'état où elles 
fe trouvent en la préfente année 1756. ‘ 

Je ne fuis point entré dans le détail d'un grand nombre 
de mines de fer qu'on exploite dans cette province, ni des 
marbres de toute efpèce qu'on y trouve. Il y a près de Pontarlier, 
de fa brocatelle qui ne le cède en rien à celle que nous tirons 
de l'Etranger , des brèches de toute efpèce, des granits dans 
les Vauges, & plufieurs autres fortes de marbres. 

.… Nous paflons aux mines d Alface. 
Art 4 X ii} 


166 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


DES MINES DE LA HAUTE-ALSACE. 
Giromagny. 


Les mines de Giromagny appartiennent, par donation de 
nos Rois, à la Maifon de Mazarin, qui en perçoit le dixième 
au moyen de certains avantages qu'elle fait à ceux qui les 
exploitent. II y a dans ces mines, qui font en grand nombre, 
des travaux immenfes ; nous allons rendre compie des prin- 
cipaux, & fur-tout de ceux que nous avons vüs lorfque 
nous en avions l'exploitation. 


La première mine qu'on trouve fur les terres de M. de 
Mazarin, en paflant de Comté en Alface , eft Saint-Jean- 
d'Auxel; c'eft une mine de plomb qui tient jufqu'à foixanté- 
quinze livres de ce métal par quintal, deux lots d'argent & 
quelque peu de cuivre : elle eft très-diffcile à fondre, & a 
les mêmes qualités que celles de Planché. 


I y a ici trois filons qui fe croïfent au centre des travaux ; 
le premier court nord & fud, ou pour parler le langage des 
Mineurs, va par les douze heures ; le deuxième par les onze 
heures, & le troifième à dix heures, c’eft-à-dire que ce dernier 
fait un angle de 30 degrés avec la méridienne, & fuit par 
conféquent la ligne de nord, nord-ouet & fud-fud-eft. Tous 
ces filons fe jettent en Comté; le dernier fur-tout vient croifer 
celui que je fais travailler à peu de diftance de l'endroit où 
font mes Ouvriers. 

Le minéral dans les travaux de Saint-Jean, eft d’une abon- 
dance furprenante. Ce travail a été commencé par les Anciens 
vers le milieu du côteau de la montagne du Mont-Ménard, 
& de-là, en defcendant de percement en percement, on eft 
parvenu jufqu'au dernier dont on fe fert aujourd'hui, à une 
profondeur de plus de deux cents toïfes. Ici ne pouvant plus 
pratiquer de percement à caufe de la fongueur du chemin & 
du travail qu'il auroit fallu faire, on a approfondi par des 
puifards, au nombre de dix les uns fur les'autres, de cent dix 
à cent vingt pieds de profondeur chacun ; ce qui fait environ 


DES! :S CEE IN CES 167 
deux cents vingt toiles au deflous du dernier percement ; en 
forte que ces travaux, depuis l'endroit où ils ont été commen 
cés julqu'à celui où üls aboutifient , ont plus de quatre cents 
toifes de hauteur perpendiculaire. Y'A filon eft compolé de 
toutes fortes de quartz, la plufpart blanc mélé de fpath. 

Les Anciens tenoient ces travaux à fec, au moyen d'une 
machine placée au centre de la montagne, pour laquelle ils 
faifoient venir l'eau de fort loin. Les fources ÿ font fort petites; 
tous les puifards au deflous du percement font actuellement 
remplis d'eau, & on ne travaille préfentement que prefqu'au 
niveau du dernier percement : le filon eft aufi riche dans 
la profondeur que dans le haut. Les travaux aétuels four- 
niflent, comme nous avons dit, quantité de minéral, qui 
eft tranfporté à la fonderie de Giromagny. 

Un peu plus avant, dans le milieu du village d’Auxel, il 
ya une autre mine, appelée le ele hat, c'eft-à-dire compagnon 
des autres. Cet ouvrage n'a pas été ouvert depuis les Anciens 
& doit être onde ble: à en juger par les décombres, ce 
filon et la plufpart de mine d'argent, mêlée de nine de plomb 
& de cuivre. 

Nous obferverons ici que généralement parlant, toutes les 
mines d'argent des montagnes de Planché & de Giromagny 
font de la même efpèce ; elles font d’un gris:cendré rembruni, 
ou -couleur d’antimoine. 

Sur la même montagne, un peu plus haut, il y a trois 
ouvertures de mine de la même efpèce & à peu de diflince 
les unes. des autres, appelées Saint. Martin, Sainte- Barbe à 
Saint- Urbain, cette dernière {ur-tout eft affez abondante : les 
filons n’y donnent que par bouillons; le minéral efl de cuivre, 
de plomb & d'argent. Tous ces travaux font abandonnés 
depuis que nous avons fini notre traité avec M. le Duc de 
Mazarin en 1744. 

Au revers de ceite montagne du côté de Giromagny, eft 
la mine appelée Sainr- Daniel ; elle peut avoir au plus deux 
cents pieds de profondeur : le travail n'y eft pas fpacieux ; le 
minéral rend communément quinze à dix-huit livres de cuivre 


168 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& depuis trois jufqu'à quatre onces d'argent au plus avec 
quelque peu de plomb. On peut choifir des morceaux de 
cette mine, qui tiennent jufqu'à vingt-quatre lots d'argent au 
quintal, mais ces morceaux font rares; le filon n'eft pas même 
abondant en mine pure, & ne donne ordinairement que de 
la mine de pilon & par bouillons. 

Ce filon {e prolonge jufqu'auprès de la Fonderie, où il y 
a un autre travail, appelé Phénigtourne (tour aux Phénins ). 
Les ouvrages font ici aflez profonds; il y a onze puifards les 
uns fur les autres, & le douzième commence : nous les avons 
vuidés jufqu'au feptième, après quoi le peu de minéral, le 
défaut d'eau pour les roues de la machine, & fur-tout les 
dépenfes immenfes que ce travail nous occafionnoit , nous 
rebutèrent de cet objet. 

On commence à trouver quelque peu de minéral au troi- 
fième puifard ou fchaet : aux cinquième & fixième le minéral 
eft un peu plus abondant & plus argenteux, mais ce n'eft 
par-tout que de la mine de pilon, & les travaux n'y font 
pas de grande étendue. 

Ce même filon entre Saint-Daniel & Phénigtourne, eft 
traverfé par un autre, où les Anciens ont eu un ouvrage 
confidérable, appelé sich grunt (terre allemande ). Ce travail 
n'a pas été relevé; nous ouvrimes la flole ou galerie d'entrée 
jufqu'à environ cent toifes en avant, nous y trouvames le 
terréin fi peu folide & il nous falloit une f1 grande quantité 
de bois, que nous fumes forcés d'abandonner ce projet: le 
minéral eft la plufpart de mine d'argent des plus riches de 
ce canton; les décombres y font en grande quantité & la 
plufpart bons à piler. 

À loppofite de ce dernier travail, de l'autre côté de Ia 
rivière, eft la grande mine de Saint-Pierre : c'efl le plus pro- 
fond & le plus vafte des travaux de l'endroit, c’eft auffi celui 
où nous avons le plus travaillé. I y a treize /chaets ou puifards, 
qui forment enfemble une profondeur de plus de quinze 
cents pieds depuis le fol de la rivière qui eft tout auprès. II 
ya quantité de galeries fort longues en avant & en arrière 


fur 


DES, Ste TE NlT 18 169 
fur l'alignement du filon: le minéral eft d'argent, mélé d'un 
peu de mine de cuivre. Le quintal rend de quatre à fix lots 
d'argent & quelques livres de cuivre: c'eft au neuvième pui- 
fard, à l'endroit appelé 44 Haute-coche , que le filon eft un peu 
paflable; il y a environ deux à trois pouces de mine pure 
par bouillons ; dans la profondeur il diminue confidérablement, 
au point que tout au fond du travail la mine n’a pas un demi- 
pouce, & quelquefois moins. Ce travail eft aétuellement com- 
blé d'eau, & je n’eflime pas qu'il füt prudent de le rétablir, 
à caufe de la quantité d'Ouvriers qu'il faut pour en retirer 
les décombres & le minéral, joint à Ja dépenfe confidérable 
qu'occafionne fa machine néceffaire pour le tenir à {ec. 

Ïl ÿ a fur ce mème filon, un peu plus haut, un autre ouvrage 
appelé Saint-Louis, qui communique par une galerie dans les 
ouvrages de Saint-Pierre: le filon y eft piquaffé de mine de 
plomb & de cuivre, mais de peu de conféquence. 

En remontant la rivière du côté de la montagne du Balon, 
on trouve fur un même filon les travaux de Sainte-Barbe & 
de Saint-André; c'eft une mine de plomb qui eft fort bonne 
& qui donne paflablement. Le filon eft un quartz blanc & 
noir avec quelque peu de fpath. 

Visà-vis la mine de Sainte- Barbe, de l'autre côté de fa 
rivière, eft un autre travail appelé Saint-François ; le minéral 
eft de plomb, il y a deux puifards, & un troifième commencé; 
au fond de ce dernier la mine ceffe tout-àfait; on n'y trouve 
plus qu'une pierre noire fauvage , fans efpérance de minéral. 
Nous abandonnames ce travail en 1743, après un procès- 
verbal qui fut dreffé en préfence de tous les Mineurs , qui 
la jugèrent de nulle valeur. 

Un peu plus loin fur fe même côteau, en venant vers 
Ja montagne de Saint-Antoine, on trouve un filon de mine 
d'argent, où les Anciens ont fait quelque travail qui na point 
été relevé. 

En montant jufque vers le fommet de la montagne de 
Saint-Antoine, il ÿ a un affez joli filon de mine de cuivre 
Jaune & malachite, qu'on a ouvert dans ces derniers temps. 


Say. étrang. Tome IV. .Y 


170 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Il me paroït être le même que j'ai rencontré par pur hafard 
dans le percement que j'ai fait pour parvenir aux gros filons 
de la Vieille- Hutte. La qualité de la guangue & du minéral 
font abfolument les mêmes, & leur direction, qui coupe la 
montagne en deux, eft précifément fur le même alignement. 

Il y a à Giromagny & aux environs un grand, nombre 
d’autres ouvrages de peu de conféquence, qui peut-être ne 
demanderoient qu'un peu de dépenfe pour devenir inté- 
reffans; le minéral y eft profond, & nous remarquons que 
les filons qui donnent, de la mine au jour font rarement 
avantageux. Nous les, appelons Coureurs de jour ; on leur 
donne le même nom en Tirol & en plufieurs autres endroits 
d'Allemagne. 

Toutes les montagnes qui féparent Planché de Giromagny, 
font entrelaflées d'un nombre prodigieux de différens filons 
qui les traverfent en tout fens. Toutes ces mines donnent du. 
cuivre, du plomb & de l'argent. Du côté de Giromagny, 
le cuivre n'y eft pas abondant ; le plomb au contraire. y eft 
en grande quantité : à l'égard des mines d'argent, fi on excepte 
Saint- Daniel, Saint- Urbain , le Selchaft & quelques autres, 
on ne feroit pas für d'en retirer les frais qu’elles occafionneroient 
pour les mettre en état, & j'aimerois mieux tenter quelques 
nouveaux filons de cette efpèce qui n'y font pas rares, que 
de hafarder de reprendre des anciens travaux épuifés, & qui 
vrai-femblablement n’auroient pas été abandonnés, fi on avoit 
pû trouver de quoi fe dédommager des frais de leur exploitation; 
ce qui eft vérifié par la plufpart de ceux qu'on a rétablis dans 
ces, derniers temps. 


Mines du Val Saint- Amarin. 


Je ne connois que deux filons de mine d'argent dans Ja 
vallée de Saint-Amarin, celui de Vercholts & celui que j'ai 
nommé Saint-Antoine, qui eft proche de la fonderie d'Orbey. 
La mine de Vercholis eft un ancien travail qui doit être fort 
vafte, à en juger par les décombres : le minéral eft la plufpart 
d'argent parfemé de quelques, grains de mine de plomb. J'en 


/ 


DES SCIENCES. 171 
ai ramaflé quelques morceaux qui m'ont donné à l'épreuve 
jufqu’à dix lots d'argent au quintal: on y voit encore un vieux 
puifard qui avoit été relevé par le feu Prince de Lewemfteim , 
Abbé de Murback, qui abandonna ce travail après y avoir 
fait des dépenles confidérables, à caufe de la quantité d’eau 
dont cette mine eft inondée. II eft cependant vrai qu'on 
pourroit attaquer ce filon d’une manière plus avantageufe ; auf 
affure-t-on que ce Seigneur fut trompé par les Ouvriers à qui 
il fe confia. Cette mine au refte eft un concours de plufieurs 
filons de même efpèce qui fe croifent dans cet endroit. 

Quant à la mine de Saint-Antoine, les Anciens y avoient 
fait quelques tentatives de peu de conféquence; jy ai fait 
ouvrir une ftole, & j'ai reconnu, par la qualité du filon qui 
y eft fort large, qu'on peut occuper les Ouvriers plus avan- 
tageufement fur les mines de cuivre, qui dans la haute vallée 
fur-tout y font en grande quantité, au point que j'en connois 
au moins vingt-cinq de cette efpèce, qui donnent de belle 
mine : il eft vrai qu'on ne doit pas s'attendre que tous ces filons 
donnent dans la profondeur, mais il y en a d’autres qui pro- 
mettent beaucoup. Je ne ferai mention ici que des principaux, 
& fur-tout de ceux où je fais travailler depuis quatre à cinq 
ans que j'en ai la conceffion. 

Le premier, en montant à droite du village d'Orbey, eft 
Saint-Jofeph; les Anciens en avoient commencé le travail, qui 
n'étoit pas bien avancé. On y tire de très-belle mine de cuivre 
de toutes les efpèces; il y en a une forte entrautres, dont il 
n'eft point fait mention dans aucun Auteur, & que je n’avois 
jamais vüe: elle eft d’un pourpre vif, tigré de jaune & d’une 
matière blanche qu'on prendroit pour du fpath & qui eft 
cependant de la pure mine de cuivre; le fon va par les trois 
heures, c'eft-à-dire nord-eft & fud-oueft ; il eft quelquefois 
accompagné d'une efpèce de quartz feuilletéextrémement blanc 
& beaucoup plus pefant que la mine de plomb la plus riche, 
Cette pierre eft très-réfractaire & ne donne aucun métal. A 
peu de diftance de là, il ÿ en a un gros filon tout pur qui 
va croifer celui de la mine: cette efpèce de fpath eft parfemé 


Yi 


172 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'AÂCADÉMIE 


de taches d’un beau vert & renferme quelques yeux de mine 
de cuivre jaune & malachite. 

Le filon de cette mine ne donne que par intervalle, & 
le cuivre qui en provient eft de la meilleure qualité ; auflt le 
minéral ne tient aucun autre métal, fi on excepte un peu de 
fer; elle eft très-aifée à fondre. 

A gauche d'Orbey, au deflus du village de Storkenfon, 
eft un très-beau filon de cuivre qui règne tout le long d’un 
ruiffeau jufqu'au fommet de la montagne. La mine eft œil 
de perdrix; il y a des morceaux choifis qui n'ont donné 
jufqu'à quarante livres de cuivre au quintal: ce filon eft tra- 
verfé fur fa longueur par plufieurs autres de même efpèce, 
& d'un en pariculier qui tient de la mine d'argent mêlée de 
mine de cuivre azur, l'afur erts : ce filon n'avoit point été 
ouvert jufqu'à préfent, je l'ai attaqué par une flole au pied 
de la montagne, à caufe des fources qui y font abondantes. 

En revenant du côté d'Oibey, fur la grande route qui 
conduit en Lorraine, i y a plufieurs fllons de cuivre, entrautres 
celui appelé Sainte- Barbe, que j'ai fait ouvrir au mois de 
Mars 1754; la mine y eft jaune couleur de rofette; elle eft 
un peu ferrugineufe, mais le cuivre en eft excellent; le roc 
au furplus y eft très-dur, c'eft un quartz rouge parfemé d’une 
efpèce de bleinde, que nous appelons Æifen-raunt où fleur 
de fer. Les eaux y font abondantes & le filon ne donne 
que par bouillons ; mais lorfqu'il donne, il a jufqu'à un pied 
de mine pure. 

En montant de-là à la montagne de Steingraben, on 
trouve plufieurs filons de mème métal; celui qu'on y 
exploite eft prefqu'au fommet de la montagne, il eft fort 
large; & ce qu'il y a de fingulier, c'eft qu'il eft très-tendre, 
quoiqu'enfermé dans un roc d’une efpèce de quartz vert auffi 
dur que l'acier. La mine eft partie bleu de montagne, quelque 
peu de mine jaune, & la plus grande partie de pech erts où 
mine de cuivre bitumineufe; c’eft la sinera picea de Cramer : 
le fommet du filon eft une mine ferrugineule brûlée, toute 


Dfels lSlNer rien CRE LS 173 
femblable au mâchefer : on voit affez fouvent pendant la nuit 
fortir des grofles flammes de cet endroit, les Mineurs n'y 
font cependant pasincommodés & l'ouvrage jufqu'à préfent y 
eft fort fain. Il ne nous eft pas non plus encore arrivé d'avoir 
vû ces flammes dans les travaux, qui ont aétuellement plus 
de 1 5 o pieds de profondeur. La mine entière ne s’y trouve que 
par bouillons, mais le filon donne régulièrement de la mine 
de pilon où mine piquaffée; on s’y fert rarement de poudre ; 
le travail s'y fait prefque tout au pic. Les bouillons de mine 
entière y font fmgulièrement arrangés; ce font des morceaux 
de minéral de différentes grofleurs, enveloppés d'une rouille 
rouge, entaflés les uns fur les autres fans aucune liaifon , tout 
comme une voiture de moëllons : en forte qu'après les avoir 
dégarnis par le bas, un feul coup de pic en fait tomber une 
demi- voiture: fe minéral n'eft pas riche, il ne rend guère 
que huit à dix livres de cuivre par quintal, & veut ètre fondu 
avec d’autres mines. 

Ce filon eft traverfé par un autre petit filon de mine de 
cuivre malachite & jaune, & quelquefois d'une belle couleur 
de rofe & de lilas: cette dernière m'a quelquefois donné à 
l'épreuve un petit bouton d’or, mais en trop petite quantité 
pour mériter attention ; l'efpèce de mâchefer dont j'ai parlé 
ci-deflus, donne aufi conflamment un petit bouton d'or à 
l'épreuve, mais jufqu'à préfent il ne m'a pas été poffible de 
le tirer à la grande fonte fans perte. A l'endroit où ces deux 
filons fe croilent, on trouve quantité de ghur ou efpèce de 
matière blanche femblable au blanc de cérule, que quelques 
Chymiftes appellent /ac lunæ. Je ne fais fi cette matière a 
toutes les propriétés que ces derniers lui attribuent, mais un 
fait bien conftant, c'eft que c'eft un tres-violent poifon pour 
toutes fortes d’infectes. 

La direction de ce filon eft par les trois heures, c'eft-à-dire 
nord-eft & fud-oueft; & une remarque conftante que j'ai 
faite dans les mines de cette vallée, c'eft qu'en général tous 
les filons qui ne tiennent que du cuivre vont par trois ou 


par neuf heures, au lieu que ceux qui tiennent du fin ont 
Y ü 


174 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
leur direétion par fix où douze heures, c’eft-à-dire les dernières 
nord & fud, & les premières eft & oueft. 

Toute cette montagne ( je dis celle de Steingraben ) qui 
eft extrêmement haute & «efcarpée, eft remplie de flons de 
cuivre & de fer; c'eft à fes côtés qu'on a trouvé quelques 
morceaux d’un fpath fort blanc qui renferme des feuilles d'or 
vierge, d'un haut titre. M. de Vanolles, ci-devant Intendant 
à Strafbourg , y a fait faire à cette occafion quelques recherches 
qui ont été infruétueufes, & il n’y a pas de peines que je 
ne me fois données depuis quatre ans pour découvrir la veine 
de ce précieux métal fans pouvoir y réuffir; il y a apparence 
que ce font des morceaux détachés que le hafard produit. 
On n'ôteroit pas de l'idée des habitans du lieu qu'il y vient 
de temps à autre des Etrangers chercher de ce minéral ; 
le feu fieur Schneider, Maire d'Orbey, m'a afluré avoir vû 
deux Étrangers qui en emportoient dans leurs fics, & que 
c'étoit une terre très-noire mêlée de pierre blanche. Un 
fait encore plus conftant, c'eft qu'il y a environ deux ans, 
le nommé Kentfeler Tirolien, que nous avions chargé de 
vifiter quelques endroits dangereux où je n'ofois aller, y 
trouva une bèche cachée au haut des branches d'un fapin, 
mais cela n'eft pas une preuve certaine de la mine, cet outil 
pouvoit fort bien y avoir été oublié par quelque Berger. II 
faut encore convenir qu'il y a certains filons dans cette 
montagne, d’une matière très-fingulière & différente des filons 
ordinaires; c’eft une efpèce d'ocre ou fable couleur d'orpi- 
ment, entrelaflé de petites veines de quartz blanc; la pierre 
qui les accompagne eft d'un grain brut & fablonneux, & 
reflemble aflez, pour la couleur, au marbre brocatelle ou 
faracolin. Cette matière eft fort fulfureufe & rend à l'épreuve 
une matte qui ne tient aucun fin. 

Au revers de la même montagne, dans le vallon de 
Brukback, il y a encore plufieurs filons de mine de cuivre; 
jy fais travailler à deux endroits, la mine n'y eft pas abon- 
dante, mais elle eft de très-bonne qualité. 

Un peu plus bas dans le même vallon, on trouve un ancien 


D4BIS | S:Cvl E: NyCtExs. 175 
wavail, qu'on m'afluroit être une riche mine d'argent, mais 
ayant fait fouiller les décombres, j'ai trouvé que c'étoit une 
mine de cuivre qui tient un peu d'argent , mais en petite quan- 
tité. I y a eu là une petite Fonderie, & il paroît que ceux 
qui exploitoïent cette mine n'entendojent rien aux fontes, car 
le peu de fcories qui y reftent font remplies de métal à demi- 
fondu. 

Je ne finirois pas fi j'entreprenois de détailler tous les filons 
des montagnes d'Orbey & de la haute vallée de Saint-A marin ; 
ilne manque à cet endroit que les moyens d'y faire des avances 
un peu confidérables pour rendre ces mines les plus forif- 
fantes & les plus avantageufes qu'il y ait dans ce genre. On 
trouve. aufh dans cette vallée des cryftaux de roche d’une très- 
belle eau & bien taillés; il y a aufi une efpèce de grenat 
d’une couleur admirable aux environs de la mine de Saint- 
Antoine, mais les grains en font fort petits. 


Sreinback. 


A deux lieues de Saint- Amarin au deflus de Cernay, eft 
Je village de Sieinback. Il y a ici une riche mine de plomb 
à en juger par les décombres; elle a été exploitée ancienne- 
ment & r’ouverte il y a quelques années par des particuliers 
qui lont abandonnée, n'ofant pas y faire des établitiemens 
fans y être autorifés. Un de mes Mineurs n'a affuré que dans 
l'intérieur de cette montagne, le filon de cette mine de plomb 
eft croilé par un filon de mine d'argent noir, qui eft le plus 
riche qu'il aie vü, & j'aurois fait ouvrir cet ouvrage, fi on 
pouvoit être moins en garde fur tout ce que ces fortes de 
gens nous débitent. Un peu plus haut, il y a encore quelques 
vefliges d'un ancien travail fur un filon de cuivre que je n’ai 

s vifité. 

Entre Gerwiller & Valtwiller, tout au fommet d'une haute 
montagne, il y a un endroit qu'on appelle S/ber- lock où trou 

‘argent ; il y a là une quantité de crafes d’une fonderie. Je ne 
faurois comprendre quelle étoit leur manière de fondre, car 
il étoit impoflible de conduire l'eau à cette hauteur; ces fcories 


176 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
font d'une mine de plomb & argent; il y a beaucoup d’appa- 
rence qu'ils fondoient leur mine fur l'aire; mais comment en 
féparoient -ils leur argent? d'un autre côté ces crafles font 
très-nettes, & il n'eft guère poffible de fondre auffi parfaite- 
ment en plein air, pas même avec des fourneaux à réverbère. 
La fonderie des Romains, près du Mont-d'or en Franche- 
comté, eft dans ce même cas: j'ai auffi remarqué fur une 
montagne, à quelques lieues d'Auxerre, des tas prodigieux de 
crafles de mine de fer, & tout cela dans des endroits où 
aucun ruiffeau ni rivière n’a jamais pû atteindre; ainfi à moins 
qu'ils ne-fifflent mouvoir leurs foufHets avec des animaux ou 
à bras d'homme, il ne leur étoit pas poffible de faire leurs fontes 
aufli exactes fans avoir quelque méthode qui n'eft pas venue 
jufqu'à nous. 

Dans la vallée de Guerwiller il y a auffi plufieurs anciens 
travaux, la plufpart fur des filons de mine d'argent ; je ne 
les ai point encore vûs, mais j'ai quelques échantillons de ces 
mines qui font aflez beaux. 

À deux lieues de Guerwiller, dans la vallée de Sultsmatt, 
contre le village d'Offenback , il y a une très-belle mine de 
cuivre azur que Je fais exploiter. Les Anciens y avoient 
quelques travaux; on appelle encore cet endroit Gulden afel, 
c'eft-à-dire l'âne d'or: ce nom lui a été donné, à ce qu'on 
dit dans le pays , parce qu’en travaillant cette mine on y trouva 
un âne converti en minéral: le filon contient peu de mine 
entière, mais il rend quantité de mine de pilon très-riche; 
le minéral tout brut rend à la fonte huit à dix livres de 
cuivre & quatre lots d'argent par quintal ; le filon eft un quartz 
noir extrêmement dur, tout parfemé de mine couleur de 
lapis avec quantité de cobalt. Je fais tranfporter ce minéral 
à la fonderie de Planché, où je le fonds non feulement avec 
quelque profit , mais il eft encore un excellent fondant pour les 
mines de cet endroit, dont il corrige la vitrification. Il ya 
dans le Val de Munfter quantité d'anciens travaux , la plufpart 
fur des filons de mine d'argent : les décombres feroient ex- 
cellens pour le pilon s'il y en avoit un dans les environs. 


Nous 


tx 


DES SCIENCES 177 
Nous terminons ce détail par une obfervation générale fur 
les mines : celles qui font dans la partie des Vauges, au midi 
de Saint-Amarin, font ordinairement de plomb, de cuivre 
& d'argent. Aux environs de Saint-Amarin ce n'eft prefque 
que des mines de cuivre; celles au contraire qui font au nord 
de Saint-Amarin font prefque toutes mines d'argent, quelque 
peu de cuivre & prefque point de plomb. 


SEC, ORNEDLE; RPdeR, Ti. LuE 


D ’APRÈS le détail que nous venons de faire de la quantité 
de mines qu'on trouve dans les montagnes des Vauges, tant 
en Franche-comté que dans la province d’Alface, on ne peut 
qu'être furpris que leurs travaux languiffent, & que œux qui 
les font exploiter sy ruinent la plufpart. 

La furprife ceffera fi l’on fait attention que cela provient de 
plufieurs caufes auxquelles pourtant il feroit aifé de remédier ; 
la première, & fa plus préjudiciable, eft le défaut d'habiles 
Fondeurs , la non-jouiflance des priviléges accordés à ces 
fortes de travaux, la dévaflation & exportation des bois, 
enfin le manque de facultés des Conceflionnaires qui ayant 
d'abord confommé la plus grande partie de leur bien, ne 
font plus en état de pouffér ces travaux an point d’en retirer 
leurs avances & leurs pertes. Tels font les principaux obftacles 
qui s'oppofent aux progrès des mines, & il fera aifé de s'en 
convaincre par le détail qui fuit. 

Nous avons obfervé que les mines des Vauges font ordi- 
nairement très-difficiles à fondre; chaque efpèce de minéral 
demande une différente fonte, & j'ai quelquefois vü le minéral 
d'un même filon aller paffablement bien à fa fonte pendant 
un certain temps, & ne pouvoir plus être fondu de la même 


+ pendant un autre; la mine n’a qu'à devenir plus 
u 


Ifureufe, plus chargée de bleinde, d'arfénic ou d’autres 
matières étrangères, pour exiger une manière de fondre toute 
dfférente. Les mines de plomb fur-tout font ici chargées 
d'une efpèce de bleinde arfénicale, qu'on ne fauroit diftinguer 
du vrai minéral, qui dans la fonte abforbe la plufpart du 

Say. étrang. Tome IV. « Z 


178 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
métal, fi on n'eft pas attentif à y mêler des matières propres 
à R corriger. 

Les Fondeurs du pays, fur afiduité defquels on pourroit 
le plus compter, font des pay fans fans émulation, qui tra- 
vaillent machinalement parce qu'ils ne font pas inftruits ; ils 
ne connoiflent pas méme leur fourneau, ni, à plus forte rai- 
fon, l'art de conduire & de corriger une fahnés Les É trangers 
leur cachent foigneufement le peu qu'ils favent : je dis le peu, 
car il ne faut pas nous flatter d’avoir des habiles gens, même 
parmi ces derniers ; un homme capable ne fort guère de fon 
pays, où il eft foigné & bien entretenu: ceux qui nous 
“viennent ont toûjours. eu, pour quitter leur patrie, quelques 
raifons qui ne fauroient être qu'à notre defavantage. 

Hs font tous en général fainéans, inconftans & infolents, 
la plufpart ivrognes, & quelquefois pires: ils fe donnent toû- 
jours pour habiles & ont tous, fans exception, fa manie de 
blimer & de trouver mauvais tout ce qu'on a fait avant eux; 
& après avoir bien dépenfé en changemens & en tentatives, 
ils font contraints de faire eux-mêmes ce qu'ils blämoient 
dans les autres, Ces gens-là ne cherchent qu'à s'infruire à 
nos dépens, fans s'embarraffer de ce qu'il en peut arriver; & 
le jour même qu'ilsentrent dans nos travaux , ils conmencent 
à méditer celui auquel ils en fortiront : les engagemens. 
font inutiles avec eux dès qu'ils s'ennuient ; ils nous forcent 
malgré nous à les chafler par leur mauvaife conduite & leur 
mauvais travail dont ils nous écrafent. Eh qui ne fait pas que 
le plus grand mal qui puifle arriver dans une Fonderie, eft 
celui d'être obligé de changer fouvent de Fondeurs? dans ces 
embarras je confeille aux. Conceffionnaires de fe mettre aû 
fait de leurs travaux, de la qualité de leurs mines, & fur-tout 
de la manière de les fondre, s'ils veulent éviter leur roine gi) 
font-ils tous en état de le faire, même de. s’y livrer? 

Quel avantage ne feroit-ce pas pour l'État, fi on établiffoit 
des écoles de Fondeurs, comme! on en a établi tant d'autres 
dont nous reflentons tout le fuccès? en vain enverrons-nous 
des jeunes gens dans des Fonderies étrangères pour$’y infhuire,,. 


DES, S1C-L EN: C ES 179 
les mines de chaque pays ont, généralement parlant, leurs 
qualités particulières ; ils reviendront chez nous, où ils trou- 
veront toute une autre befogne que celles qu'ils ont vûes; 
ils front obligés d'étudier & de tàtonner fur nouveaux frais; 
c'eit fur les minéraux qu'ils auront à fondre qu’il faudroit les 
exercer. La preuve de cette vérité, c'efl que dans nos fon- 
deries des Vauges, nous ne trouvons pas de Fondeur qui faffe 
mieux que ceux du pays de Hefle, où les mines font ana- 
logues aux nôtres. Dans toute l'Allemagne & en Angleterre 
en ne s'embarrafle point des fontes, les Fondeurs en font 
refponfables; & tant que nous ne parviendrons pas à ce point, 
nous ferons toüjours la victime du produit de nos mines. 
On ne doit pas craindre de manquer de minéral nien Comté 
ni en Alface; toute la difficulté fera de le bien fondre & de 
faire en forte que le produit des fontes réponde à celui de 
la mine qu'on livre aux Fonderies. La docimafie eft peu 
connue dans, nos mines; c'eft cependant par la voie des 
épreuves qu'on parvient, à peu de frais, à connoïtre les dif- 
férentes qualités de chaque minéral, les mélanges qui leur 
conviennent le mieux dans les fontes en grand, que nous ne 
connoiflons en France que fuperficiellement & que nous ne 
connoîtrons point à fond tant que nous n’aurons pas de 
Fonderies royaes ou des Ecoles pour inflruire & exercer dés 
jeunes Élèves à ce genre de travail. 

La non-jouiflance des priviléges accordés aux travaux des 
mines, eft encore un grand obftacle à leur progrès : tous les 
Seigneurs, en Alface fur-tout, fe croient les maïtres des mines 
qui fe trouvent dans leurs terres. Veut - on y faire travailler, 
on vous fait fur le champ fignifier des défenfes; un Concef- 
fionnaire qui hafrde fon bien, préfère de les laifler pluftôt 
que d'avoir des procès, & fe voit par-là forcé de renoncer 
à des établiflemens qui deviendroient également avantageux 
à ces Seigneurs & à l'Etat. On ne jouit dans ce pays-là prefque 
d'aucune exemption , & cela fous prétexte que les ordonnances 
des mines ne font point reçûes ni en Comté ni en Alface : 
tout cela difcrédite ces travaux, & für-tout ceux qui, fuivant 


Zi 


180 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

le préjugé du public, ont la folie d'y facrifier leur temps & 
leur bien. Le produit des mines n’eft cependant pas moins 
néceflaire à l'Etat que la plufpart des autres denrées ; les métaux 
font certainement une des principales branches du Commerce ; 
on ne fauroit fe paffer de plomb, de cuivre & d'argent, que 
nous tirons à grands frais de l'Etranger, & ïl eft certain que 
les mines-du Royaume bien exploitées en fourniroient au- 
delà de ce dont l'État peut avoir befoin : il ne faudroit pour 
y parvenir, qu'une protection décidée pour ces fortes d'éta- 
bliflemens. 

Le commerce des bois eft devenu dans les Vauges le 
commerce de tous les habitans, c’eft à qui en abattra davan- 
tage, & les forêts en peu de temps y feront entièrement 
détruites: les Seigneurs même préfèrent de les vendre aux 
Forges & aux Verreries, parce qu’elles en confomment davan- 
tage. On ne fait point attention qu'on peut avoir des forges 
par-tout, parce qu'en France nous avons par-tgut des mines 
de fer. 11 y a peu de provinces où l'on ne trouve abondam- 
ment du charbon de terre aufli propie pour lés Verreries que 
les bois: en y établiflant ces ufines, on fe procureroit un 
double avantage, la confommation de ces charbons & la 
confervation des bois. I n'en eft pas de même des mines 
de cuivre, de plomb & d'argent, elles ne fe trouvent que 
dans certains cantons, & on ne peut compter fur leur produit 
qu'en confervant les bois de leur voifinage, 

Enfin le défaut de faculté des particuliers qui entreprennent 
ces fortes de travaux, n'eft pas moins préjudiciable à leur fuccès. 
Lorfqu'on commence ces établiffemens, on ne fait point 
aflez d'attention aux dépenfes préliminaires qu'ils occafionnent ; 
on ne prend point garde qu'il ny a pas d'entreprife dans le 
monde qui exige plus de talens de la part de ceux qui font 
chargés de l'exécution : 'efprit d'économie, la connoiflince 
des bois & des charbons, l'art d'être en garde contre tout 
ce qu'on nous débite des mines d’un endroit, que diffcrentes 
vûes font plus apprécier où plus méprifer qu'il ne faut, la 
connoïffance des filons & des mines qu'ils produifent, & 


DEUST SCT MAN, CIENS 181 
par conféquent de l'Hiftoire Naturelle, qu'on n’acquiert que 
par une longue habitude, la connoïflance des fontes, Ia 
Chymie, la Géométrie foûterraine, l’Architedure, & fur-tout 
les Méchaniques ; toutes ces parties, dis-je, font d’un ufage 
journalier dans les travaux des mines; & faute de les con- 
noître, on s'expofe fouvent à des dépenfes inutiles. If arrive 
de-là qu'on fe rebute, & plus fouvent encore qu'on n'eft 
plus en état d'y fournir, & qu'on fe voit forcé d'abandonner 
un établiffement au moment qu'on fa mis en état de nous 
dédommager de nos penes & de nos dépenfes. Ne feroit-ce 
pas l'imérêt de l'État de foûtenir ces travaux par quelques 
avances; je ne dis pas qu'il faille prodiguer ces {écours, mais 
après s'être bien éclairci qu'il ne manque à un Entrepreneur 
que d'être foûtenu pour réuffir, il feroit intéreffant de ne pas 
les lui refufer. Tout ce qu'on retire du fein de la terre ef 
un Bien réel dont FEtat s'enrichit & dont il fe prive faute 
de fecourir ceux qui le procurent. 

Tels font les moyens que je crois les plus propres pour 
faire fleurir nos mines, ce ne font au furplus que des réfle- 
xions que je foûmets volontiers à des lumières plus grandes 
que les miennes. 


Z ï 


182 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


À Bo LR EF A TT ON:S 
DE LA COMËÈTE DE 1682, 1607 à 1531; 


LS 


faites en Mai 1759. 


Par M. JEAURAT, Ingénieur-Géographe du Roi, & 
Profeffeur de Mathématiques à l'École Royale Militaire. 


A Comète qui vient d'occuper les Aftronomes, & qui 
j les avoit déjà occupés en 1682, 1607 & 1531; 
celle qui fixa leur attention en 1680, & qui et différente 
de celle-là; toutes deux n’ont été obfervées dans le refte de 
l'Europe qu'après avoir été vües en Saxe: ce qu'il me paroïît . 
raifonnable d'attribuer à un vent d'eft qui y domine, qui y 
porte peu de nuages, & qui y entretient conféquemment un 
ciel pur & une férénité favorable aux opérations Aftrono- 
miques. Notre pofition eft moins avantageufe, & c’eft un 
phénomènte aflez raré que nous ayons pü obferver avec fuccès 
pendant plus de quinze jours la dernière Comète : mais fr nous 
fommes affez heureux pour recueillir d'ailleurs de bonnes ob- 
fervations faites dans les premiers mois de l'année, nous aurons 
de quoi déterminer, avec unegrès-grande précifion, les élé- 
mens de fa théorie, & conféquemment des principes fürs pour 
calculer avec affez de certitude ur lieu quelconque de la 
Comète, pour un de fes retours quelconques. 
Quoique ce calcul dépende & de à plus haute Géométrie 
& des meilleures obfervations , on à vü néanmoins avec 
SRE étonnement * les fuccès prodigieux de M. Clairaut, qui 
res 77 n'avoit de fecours extérieur que celui de la Géométrie, mais 
qui avoit en foi cette merveilleufe fagacité qui déméle nette- 
ment toutes les conféquences les plus éloignées des principes 
les plus compliqués de la Géométrie. 
Qu'y a-t-il donc que l’Europe n'eût pü attendre des travaux 
de cet illuftre Académicien , s'il eût eu des obfervations auffi 


DES SCIENCES. 183 
bien conftatées que pourront l'être celles de la dernière appa- 
rition : il ne faut à des génies de cette force que des obfer- 
vations füres & en quantité fufhfante pour déterminer les 
loix générales & particulières de la Nature. 

C'eft donc pour contribuer de mon mieux à l'exécution 
de cette entreprife, également difficile & importante, que 
je produis ici mes obfervations. Trop heureux fi l Académie 
juge mes efforts dignes de fon approbation ! 

Le défaut des Inftrumens & d'un lieu propre à obferver, 
auroit cependant été un obflicle invincible au defir fincère 
que j'ai de mériter l'honneur de cette approbation, f1 je n'euffe 
trouvé, dans la complaifance ordinaire de M. de Fouchy , 
des fecours que je n'avois pas en propre. 

Lui & moi, dans les premiers jours de Mai, nous atten- 
dimes inutilement le paffage de la Comète au mural, parce 
que nous ne favions pas encore que fa lumière trop foible, 
quoiqu'elle égalât à peu près en groffeur une étoile de Ja 
première grandeur, devoit être effacée par celle du crépufcule; 
Finutilité de nos effais nous le fit enfin foupçonnér, nous 
penfames à prendre d'autres melures, & notre premier fuccès 
fut de l'apercevoir à la fimple vüe. 

Le 5 Mai, à 9 heures du foir, nous remarquames que la 


Comète paroifloit en €, formant un triangle rectangle BCA Fig. 


avec deux étoiles À & 2, dont Flamfieed donne les pofitions 
fuivantes pour 1690. 


Étoile ANT ee Longitude . de sf 138 45° s6" 
: Latitude auftrale .. 23. 29. $0 


16 4 Ni Longitude, . +, . 5121 58 27” 
_ { Latitude auftrale.. 23. 14 2 


d'où il fuit qu'en 1759, on a pour le 5 Mai, 


, : d ‘ ” 
on # - Péronne droite.. 1564 44 30 
Déclinaifon auftrale, 15. 38. 16 


\ 3 Afcenfion droite.. 156% 9° 31” 
Étoile B. . ... { Déclinaifon auftrales 45: 6, 27 (, 


Fr> 


Fig. 1, 


184 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
J'ai donc trouvé pour cet inflant, 


AZI ICI — GARE 2287 
B Z1= 66. 41. 22 
AZP TNT LA ESS 1? 


BAPI=ENCAZPI=NS7. 33. 32 


; ZP. CI panti23 132" 1208 40S 
ce qui donne. ” GPS SUES $ 


Afcenfion droite..... 156% 3° 26” 
AR Dédlinéifon auftrale. .. : 15. 28, 25 
Longitude... 2.1: 514 os 14 


Latitude auftrale: . . .. 23.136282 


Nous continuames de la voir les jours. fuivans, mais la 
petitefle du quart-de-cercle ne nous permettoit pas d'en établir 
exactement la pofition. ; 

Je me déterminai donc à faire l'acquifition d’une pendule 
à fecondes de M. Lepaute, & de M. Canivet un inftrument 
des paflages, que je fis pofer au donjon de 11 Doëtrine 
chrétienne, chez M. de Chubéré, Confeiller honoraire au 
Parlement : c’eft moins à l'honneur d’être connu de lui depuis 
vingt ans, que je fuis redevable des fecours & des commodités 
qu'il me procura, qu'a la protection décidée qu'il accorde 
par goût aux Sciences & à ceux qui les cultivent. Voici le 
réfultat des obfervations que j'ai eu la facilité de faire chez lui. 

Ma première opération fut de caler linftrument; mais 
comme j'y trouvai de la dificulté, je me contentai de le 
fixer d’une manière flable, & courus les rifques de faire dé- 
crire à ma lunette un cercle quelconque dans le Ciel au lieu 
d'un vrai vertical. 

C'eit en eflet ce qui m'eft arrivé, & je calculai en cette 
manière la pofition de mon vertical. 

Le 20 Mai, j'obfervai le paffage du centre du Soleil, 


4 [72 


Par le 1.°° fil de ma lunette... à 2h 2° 1 


Parle 2 PEN RE A At Temps vrai. 
Par le 3.° & dernier. ,....4 à 2. 17. 27 


»- 


Ce 


DES SCIENCE:s. 185 
Ce qui donne pour le fecond fil, SPZ = 2h 14° 34" Fig 2. 


UE EE Le 
, P—:124 58" 8 
& pai conféquent, $ NAS is: 

Le 21 Mai, j'obfervai « de l'Hydre par fon paflage au 


même vertical à 8h so‘ 44", temps vrai. 
Ainfi retranchant ce temps (8h 50° 44") de (5h 23" 30") 
celui de fon pañlage par le méridien , il me refta 327014 
— 50448" 30", qui eft l'ange Z Pa, & je trouvai 
Ph sizs ok a 7éhap" 7! 
Je nai pas manqué d'employer les petites équations, 
connues fous le nom de préceflion, de déviation & d’aberra- 
tion ; ce qui ma donné, pour fafcenfion droite apparente 
de &, 1384 56° 22°, & pour fa déclinaifon auftidé, 
7° 37° 38". 
Ainfi on a dans le triangle SZ a, 
SZa— PZx—SZP= 12589 37"— 124458 8"— o111’ 29" 
Fig. 1 Pig ER oc ok ER DEAR EL ES RATES AE Lau AU 72220. 07 s 
MR. ete à de brise ce AL RS 39. 25° 36 


ce qui donne 


LAC NOR HR FAN CIE Aer 

ZaS — Zap — 0. 13: 25. 24 
ÉNGER 26e 1704230, 92 38 

LS Que ha qre Axn2Ose ABo22 

re) LOBt=—- s#"46.: 20: ,9 
Fig- 3. AAC IOR == 8 PT 25. 13% 40: WG 
C3 A CC D 72: 29. 9: o 

LD Ein apte 23e 39°.34e 37eu., O 

QT St ee «lol 5 te :5 O. 15 39. Oo 

PIDIEE:S rats 40. S4 II. O 


Cette détermination eft exacte, car les deux obfervations 
Say. étrang, Tome 1V. . Aa 


186 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
dont je viens de me fervir ont été vérifiées pendant lefpace 
de huit jours, & chaque jour par le paffage de trois fils. 


REMARQUE. 


Fig. 4. Les hauteurs de la Comète, pour les inftans des pañages 
par mon vertical, ont été déduites de celles qui ont été 
obfervées après ce paflage, & doivent en outre être réduites 
du vertical Za B au cercle p« À, que décrit la lunette. Ainfi 
je fais Aa égal au complément « @, 724 29° 9", puis retran- 
chant ce complément 174 30° 51" de Be (17439 53"), 


j'ai 9° 2" pour fa correction des hauteurs vraies. 


RSR ES TE LE SUPER 7 MRSNEN TANT TS 
AU POLE, intervalle 
compris entre le paffage 


PASSAGE de la Comète par _ 


a AUTEUR u Méridi 
mon Inftrument. rs ÉRRRRE a éridien 
‘ AUGE & celui de mon vertical. 
LC TEEN qu'il faut corrigée. 
Temps de la pendule. Temps vrai. rss en Dire Ten Re. 
————— 


er me eee ee RE SES 


1759. $ Mai. 
18. 9h 59! 37 9h 7! 16/ rod 33! gl 19d 24! 1” so4 47! 7u 38 23! a 


19- 9: 55: 57.| 9:,52- 30 |19. 52. o |19. 42. $8 |so. 36: 53 |3. 22.27? 
20. 9. 52.30 | 9.47. 57 |20. 11. 1$ |20. 2.13 |$o. 26. 29 |3. 21. 46 
21 9. 49. 12 | 9. 43-332|/20. 27. 40 |20. 18. 38 | so. 17. 37 |3. 21. 10 + 
22e 9.45. 51 | 9-39. 6 |20. 44. 59 |20. 35. 57 |so. 8. 17 |3. 20. 33 
23: 9- 42.30 | 9. 34. 39+[20. 58. 57 |20. 49. 5$ |so. 0.46 |3.20. 3 
24: do 39. r7 1 9:30. 20 Jar. rot s7 fat. 14554954. 18 |3. 10. 370 
2 9,36. «| 9: 26. 1 [21.23 2 [21.14 © |49. 47. 47 |3. 19. 11 


I I DE ERP I RE 2 GE CRE 


ASCENSION DROITE 


PASSAGE ma 
ASCENSION x Déclinaifon 
de la Comète db: de la Cométe. de ai Donc 
ES ae. $ lame. “4 
Le É du Soleil. = on) la Cométe. Le 
pie, 1 en Temps. | en Dégrés. Longitude. Latitude auf. 


1 


f'14d o14|23436'32" 


s Mai. 7h 34° 26” 5 

18. 6.34. 85] 3h40" 28/|roh 14 36/5/153430" S"l64 2/18" [5. 7: 50.20 15.48. o 
19. 6.30. 2113.44 27 |10.14.209 +|1$3. 37-22 |5.46.20 |5- 7.42.33 |15:33-50 
20. 6.26. 11 |3. 48.26 lro. 14.37 |153- 39. 19 15.30. 6 15. 7: 38-16 |15.18. o 
LE 6. 22.23 | 3. 52-2$ |10. 14: 48 153.40 58 ls. 16. 15 $* 7-35-25 |15. 4.10 
22e 6. 18.33 | 3. 56.20 |1ro. 14.54 |153:43- 32 |5. 1.38 |$. 7-31.20 |14.50. o 
23e 6. 14. 362| 4 o.25%l10.15. 1 #|153. 45: 27 [440.51 |5s. 7-28. 40 |14 38.20 
24 6. 10.43 |4. 4.275[10. 19. 10411953. 47. 33 |4. 39-44 |5* 7:26. $o [14.28.10 
ai 6. 6.50 |4. 8.27 |ro. 15.17 |153-49- 13 |4.29. $- 7-24 40 |14.18. o 


DES SCIENCES. 1 #87 
Je calcule ainfi mes Obfervations. 


Le complément des hauteurs corrigées me donne la dif: 
tance C?; 


— ! "n 
J'ai en outre TR ont 
CO 125: 13. 40. 

Ainfi la folution du triangle fphérique me détermine 
gPC & CP. 

Je convertis l'angle @ PC en temps, à raifon de 3 60 degrés 
pour 24 heures; je retranche ce temps de celui du pañlage par 
le vertical, ce qui me donne le pailage par le méridien. 

Je calcule enfuite pour cet inftant l'afcenfion droite du 
Soleil ; puis ajoûtant cette afcenfion droite au pañlage par le 
méridien , j'ai lafcenfion droite de la Comète en temps, & 
je la réduis en degrés. 

Enfin les afcenfions droites & les déclinaifons étant données, 
jen calcule les longitudes & les latitudes cherchées, 


OBSERVATIONS d'un lieu de la Lune, à compa- 
raifon des Tables de M” Clairaur à Mayer, avec 


les Olfervations de M. le Monnier, faites au Collége 
d’Harcourt. : 


A} 
© ES fortes d'obfervations doivent être faites avec le plus 
de précifion qu'il eft poflible, puifqu'elles fervent à corriger 
la théorie de nos meilleurs Géomètres; perfonne n'eft plus 
en état de les pourvoir d'obfervations exactes & füres que 
M. le Monnier, & perfonne aufli ne fait un meilleur ufage 
de la perfpicacité aftronomique que ce favant & laborieux 
Académicien. . 

Ce feroit peut-être un ouvrage utile de réduire d’auffir 
bonnes obfervations, & de les comparer en même temps 
aux meilleures Tables, par exemple, à cellesde M. Clairaut 
&' Mayer. Ce travail ferviroit à conftater le degré de pré- 
férence que l'une des deux théories peut avoir fur l'autre : 


Aa ij 


Fig. ç. 


LS 


183 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Jai commencé cet effai fur un petit nombre- d'obfervations 
choifies, & je joins à la fin de ce Mémoire ce que j'en ai 
calculé avec grand foin, ainfi que l'Obfervation fuivante. 


OBSERVATIONS du 10 Juin 17f9. 


Le 10 Juin j'obfervai le pañlage du centre de la Lune 
au mural de M. de Fouchy, à 12 12°21", temps vrai. 


Dans le même champ de la Lunette j'obfervai les paflages 
des deux Etoiles u fous l'œil du Verfeau. 


v La précédente à 13h 24° 27" 
v La fuivante.:. à 13. 25. 23 


Temps vrai. 


_Le bord fupérieur de {a Lune étoit plus haut que 
l'Étoile précédente v, de 15° 16” 45"'; ce qui donne pour 
la hauteur apparente du bord fupérieur de la Lune 


Corrigée della réfrattionnisa MN RER ner 
Sa diftance apparente au zénith. .... OT EAN er à 
Sa vraie diflance au zénith. . . . .. PATATE Re 17 Ocx 3125 

Enthicelletdupcentrerde 12; Lune "171-200 OMNA7 UD 


Et par conféquent à 12? 12 21", 10 Juin 1 75,9. 


AcegionNdioie deC. he eee 56 - 26105900 
Déclinaifon auftrale € ........ Peel ele 2 SEM 
Longitude. vraie €, ..n .... . HU 22-428205 
Latitude boreale CL EEE Et OR AS be Le 1:-.18.422 


HAUTEUR Diamètre |[LONGITUDE| LATITUDE 
TEMPS VRAI. apparente. obfervé. obfervée. obfervée. 
Ce, 


1740. 7Maïi  ghur/15"| € 44424 o!|30/ 42269 2d 1435" Z. 
3 Mai. 6.1#41 [€ 60.10.32+|30. 7+|4.12.41. 13 | B. 2. 17.14 
10. Avril. 11.17. 1 | € 42.13.20 |3o. 55 |6. 7. 37-30 |.B..4. 54: 32 
$ Avril. 7.34. 1 | € 61.19. o |30. 10 |4 5$.24, 39 | B. 1.26, 41 
s Mars. 6.25. o | € 60.59.32+|30. 42 +|2.20. 20. $7 | 4. 2. 37.49 
1759. 10 Juin. 12. 12,21 | € 18. 34.52 8.22.28.35$ |B. 1.18. 22 


Jùv. Etrang. Tome WLuge 288.PLJ. 
—"— - 


Horizon 


[e 


ji vi A 
4 W 
| Comete SC EC 


D'EMS MN Sic'IlE NC E 


ERREURS des Tables de M, Clairaut. 


a, NN 


En longitude, | En latitude. En diamitre. 


" 


— 040 38" | od0° 14” | — od0° 9 


—- ©. O0. 41 | — O. O. 59 [ — 0. 0. 3 
+ 0. 0. 46 | + 0. 0. 19 | — 0. 0. 13 
+ 0. 0.45 |+o.o. 7 | — 0. 0. 7 
+ 0. 0. 16 | — 0. 0. 27 | — 0.0. 8 
— 0. 1.12 | — 0. 0. 48 


Erreursdes Tables de M. Mayer. 


nn. AN 
En longitude, | : En latitude. 
+ 0° 47"| + 0° 38" 
7. © d|É SE 
— 1. 16 | + o. 51 
+ 1. 26 | + o. 23 
+ 1. 20 | — o. 39 
— 1. 6 DE o. 18 
5 


Aa ii} 


100 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


MALADIE DU CHEVAE, 


Que, par un préugé vuloaire, on attribue à la 
morfure où à& la piqure d’une Mufaraigne. 


Par M. Larosse, Maréchal des Écuries du Roi. 


Fe figure de cet animal, qu'on nomme mufaraigne, ap- 
proche également de celle de la fouris & de celle de la 

taupe: les Écuyers, les Maréchaux, le Public prétendent que 

cette bête mord ou qu'elle pique, & qu'elle eft vénéneufe. 

* Vitale & Soïleyfel * parle de cette bête en ces termes: Certains ani- 

parfair Marech. ) PR P 5: i x s gu 

pige Sig. MAUX Vénéneux, faits comme des fouris, qui font plus gris & 

qui ont le nez plus pointu ;  aflure que les chevaux meurent 

quand ils en font mordus, fi le fecours n’eft prompt & bien 

ordonné, & que le cheval meurt dans deux fois vingt-quatre 

heures s'il n'eft pas fecouru. Il donne pour remède à cette 

prétendue morfure, de mettre, «fi-tôt qu'on s'en aperçoit, 

» les jarretières avec du ruban de fil, large d’un pouce; bien 

» lier au deflus de l'endroit, afin que l’enflure ne puifle paffer 

» outre, & battre la partie enflée bien fort avec une branche 

» de grofeiller blanc, jufqu'à ce que la partie enflée foit toute 

» de fang à force de la battre, puis la frotter avec de l’orviétan 

» fans l'épargner à cela, & en faire avaler au cheval en même 

» temps une once par la bouche dans du vin. Le {lendemain 

» il faut frotter encore avec de l’orviétan en abondance, & en 

» donner demi-once au cheval par la bouche, après quoi, dit-il, 

5 Nouv. parf. Ve cheval fera en état de guérifon ». M. de Garfault ? appelle 
Maréchal, page cette bète une mufuraigne, & c'eft fon véritable nom: il en : 

T4 a donné la figure gravée, Il peut arriver, ditl, qu'elle morde 

les chevaux, ce qui eft, je crois, aflez rare, & il ajoûte: 

on dit que quand elle la mordu... fe cheval en eft fuffoqué, 

& cela en deux fois vingt-quatre heures. M. de Garfault 

donne pour remède à cette prétendue morfure; ff on s'en 


DAEUS LSNE TE NC iris 191 
aperçoit [ur le champ, de mettre vite un‘ bouton de Jeu fur la 
morfure , ou bien de fuivre un traitement qui eft le même que 
celui que Solleyfel indique, & que j'ai rapporté. : 

Ces deux Aïteurs nous donnent des remèdes pour guérir 
cette prétendue morfure ou piqûre, & ne nous citent aucun 
exemple particulier de leur téuñirte. Comment auroient-ils 
pü le faire, puifque ces remèdes font direétement oppofés 
aux principes? 

Dans le temps que j'étois encore moins inftruit que je 
ne le fuis, j'ai, fur la foi de ces Auteurs, fait ufage de leurs 
remèdes, & ils ne n'ont jamais réuffr, non plus qu'à mes 
Confrères: celui dont je me fers actuellement a toûjours eu 
un fuccès entier. I eft à remarquer que ni ces deux Auteurs, 
ni perfonne, ne nous aflurent avoir vü de ces mufaraignes 
mordre ou piquer les chevaux. 

Ce mal furvient fubitement au cheval dans l'écurie, il en 
boite; il fe manifefte par une petite tumeur à la partie fupé- 
rieure interne de la cuifle , avec dégoût, trifleffe, abattement, 
friflon , fièvre, refpiration génée, & la mort s'enfuit de près. 

J'ai vû beaucoup de chevaux affligés de ce mal ; les derniers 
dont il me fouvienne, font un appartenant à M. le Préfident 
de Rofambaut, un autre à l'Hôpital, un autre à Madame de 
Champeron, & un autre à M. le Comte de Lorge: ils 
moururent tous. Je fis attentivement la diffeétion de celui-ci, 
je trou vai dans la tumeur une quantité innombrable de vaiffeaux 
lymphatiques, qui étoient gros comme des plumes à écrire, 
& remplis d'une matière plâtreufe qui les avoit diftendus à 
une grofleur extraordinaire & contre nature. Je fis des fec- 
tions tranfverfiles; je vis les trois genres de vaiffeaux , très- 
aifés à diflinguer les uns des autres , par la couleur rouge des 
artères , la couleur noirâtre des veines & la blancheur des 
vaifleaux lymphatiques , le volume de ces derniers étant, 
comme je l'ai dit, d’une grofleur confidérable. 

Je jugeai, par ces obfervations, que la caufe de ce mal 
n'étoit pas externe; & comme je n'avois jamais trouvé fur 
la peau aucune marque de morfure ni de piqüre, je penfai 


192 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
que ce ne pouvoit être ni la morfure ni la piqûre d'uné 
mufaraigne, mais que ce mal avoit une caufe interne. 
._ J’eus à panfer de ce mal en l'année 175$ une jument 
appartenant à Madame la Marquile d’Aligré; je trouvai cette 
bête boiteufe; je lui fentis une petite tumeur au plat de la 
cuifle, avec dégoût & des friflgns légers. A ces fignes je re- 
connus que c'étoit fa maladie qu'on attribue à la morfure de la 
mufaraigne: je voulus profiter des obfervations que j'avois 
faites; je jugeai à propos de faire des fcarifications, je demandai 
la permiffion de les faire à M." la Marquife; je lui repréfentai 
que cette opération étoit le feul remède à la maladie de cette 
jument, & que je comptois réuffir, fuivant les idées que m’avoit 
fournies la diffeétion des chevaux morts de femblable maladie. 
Avant de faire l'opération, j'examinai de nouveau la tumeur; 
elle s’étoit étendue en moins d'une heure jufqu'à la mamelle : 
la jument refpiroit avec plus de peine & étoit plus abattue. 
Sur le champ je lui fis des incifions jufqu’aux mufcles de 
près de deux pouces de profondeur fur dix ou douze de 
longueur ; il en fortit des férofités qui coulèrent pendant deux 
jours ; il fortit auffi de plufieurs vaiffeaux 1ymphatiques une 
lymphe coagulée dont ils étoient remplis & groflis extré- 
mement. Je vis de diflance en diftance des cellules à y placer 
une féve, remplies de cette même lymphe qui ne demandoit 
qu'à fortir. Je panfai la jument, elle fut guérie & remife au 
carrofle le dix-huitième jour. 

Le 23 Juillet 1757, M. Joly de Fleury, Procureur 
général du Parlement de Paris, envoya chez moi un de fes 
chevaux, mordu, difoit-on, de la mufaraigne ou petite bête. 

Enhardi par mes précédentes expériences, je fcarifiai fur 
le champ la tumeur à fa profondeur & longueur ci-deflus; 
il fortit par les incifions & des vaifleaux lymphatiques quan- 
tité de lymphe qui s'y étoit coagulée. Ces vaifleaux étoient, 
ainfi que ceux dont je viens de parler, gros comme des plumes 
à écrire. Une partie de cette Iymphe étoit de couleur jau- 
nâtre, l'autre blanche avec des taches noires: je trouvai 
beaucoup de cellules dans ces vaiffeaux, remplies delymphe. 


DES SCIENCES I 
If coula auffi de cette incifion le fong de la jambe pendant 
trois jours, des férofités jaunes, à la quantité à peu près de 
deux pintes & chopine. La jambe, qui étoit extrêmement 
grofle, diminua peu à peu. 

Ce cheval eut une grande difficulté de refpirer pendant 
quatre jours , & durant l'efpace de trente heures il lui prenoit 
un râlement lorfqu'on le promenoit. Quoiqu'il fût attaqué 
fi violemment, il fut guéri au bout de feize jours. 

Le 27 Août fuivant, il me vint un cheval attaqué de 
la même maladie, appartenant à M. de Beaupré, Confeiller 
d'État : il avoit les mêmes fymptomes que ceux ci-deflus 
décrits, à l'exception qu'il y avoit très-peu de vaiffeaux lym- 

hatiques remplis de la Iymphe coagulée, & aufli moins de 
Érofié dans le tiffu cellulaire; cependant l'enflure étoit auffi con- 
fidérable. Ce cheval fut au carroffe au bout de dix-{ept jours. 

Le 2 Novembre 1757, j'ai traité & guéri du même mal 
un cheval appartenant à M." la Marquife de Montande. 


Panjemens èr Remèdes. 


I! faut, dès qu'on s'aperçoit de ce mal, coucher le cheval 
à terre, lui fendre la peau de toute la Iongueur de la tumeur 
& enfoncer le biftouri jufqu'aux mufcles; mais comme il eft 
à craindre de couper la veine cutanée, qu'on nomme autre- 
ment crurale externe, que la tumeur empêche de voir & de 
fentir, il faut, avant de faire les fcarifications, faire une 
ligature au deflous, c'eft-à-dire à la partie inférieure feule- 
ment, pour éviter l'hémorragie ; remarque que je fais faire 
ici, parce qu'une partie des Maréchaux ignorant fa circulation , 
font inutilement deux ligatures, l'une en haut, l'autre en bas. 
Si on venoit à couper quelqu'artère, il faudroit y appliquer 
du lycoperdon pour arrêter hémorragie, & le tenir avec le 
doigt à l'ouverture de Fartère pendant trente minutes pour 
plus grande füreté. 

Auffi-tôt que les fcarifications font faites , il faut les baffiner 
avec de l'effence de thérébentine trois ou quatre fois dans 
l'efpace de cinq ou fix heures, afin d'empêcher la gangrène 

Jay. étrang, Tome IV. . Bb 


194 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
qui pourroit furvenir, & enfuite baffiner avec de l'eau d’Ali- 
bourg, jufqu'à guérifon, huit ou dix fois par jour. 

I faut promener le cheval dans les commencemens cinq 
ou fix fois par jour, quatre minutes à peu près chaque fois; 
lorfque la refpiration eft génée, le faigner , lui donner des 
lavemens émolliens, lui donner à boire de l'eau blanche pen- 
dant deux ou trois jours pour toute nourriture ; après le nourrir 
de fon, en lui donnant cependant la moitié d’une botte de 
foin par jour, & cela, pendant quatre ou cinq jours, enfuite 
promener le cheval deux où trois fois par jour pendant une 
demi-heure chacune ; fi la jambe eft bien grofle, lui faire un 
bain émollient, en frotter le cheval fix fois par jour jufqu'au 
bas de la jambe : dès que les incifions ne fourniront plus de 
{érofité, lui faire prendre par la bouche un fudorifique pour 
aider le refte de l'humeur à fortir par la tranfpiration. If faut 
avoir attention de bien couvrir le cheval & le tenir en lieu 
chaud, après quoi on lui donnera à manger à l'ordinaire, 
& le cheval fe trouvera guéri & en état de fervir au bout 
de trois ou quatre jours. 

1.” Les expériences & les réflexions que j'ai faites me font 
croire que la caufe de cette maladie eft interne, & que l'on 
peut y remédier par les opérations & panfemens que J'ai 
mis en ufage. 

2.” Que cette maladie n'eft pas l'effet de la morfure ou 
piqûre de la mufaraigne ou petite bête, comme on fe l'eft 
imaginé jufqu'& préfent; car je n'ai jamais vû fur ces tumeurs 
aucun veftige de morlure ni de piqüre, ce qui fufhroit pour 
établir mon opinion ; auffi ce n'eft que par furabondance que 
j'ajoute les raifons fuivantes. 

1.” Si cette bête piquoit, elle ne. pourroit le faire que 
par le moyen d'un dard; or elle n'en a point. 

2.” Le cuir du cheval ne peut être mordu de cette petite 
bête, parce que fa gueule ne peut s'ouvrir que d'une ligne 
& demie ou de deux lignes tout au plus: or, pour pincer 
la peau du cheval à l'endroit même où elle eft le plus mince, 
quoique cet endroit ne foit que de deux lignes d'épaifleur, if 


Ne : à 


DHE:s *SIGI2ENN ©) EUS Zur 
faudroit au moins cinq ou fix lignes d'ouverture à la gueule 
du petit animal, afin qu'il eût l'aifance de ramener cette peau 
pour la doubler, ce qui eft proprement mordre. 

3 La ftruéture de la gueule de la mufaraigne fait voir 
clairement qu'elle ne peut mordre quelque chole d'auffi épais 
que le cuir du cheval; c'eft ce qui a été démontré fur le 
fujet devant M. le Préfident de Rofambaut & M. le Procureur 
général, tous deux intéreflés, tant pour le bien public qu'en 
leur particulier. On pourra juger que ce que j'avance eft au 
moins très-probable, à J'infpeétion de cette petite bête, que 
Yon voit dans un bocal au Cabinet du Jardin du Roï: j'en 
ai une aufli chez moi. 

4 Si ces tumeurs étoient l'effet de la morfure ou de a 
piqüre d’une bête, elles fe formeroient aufli-bien en d’autres 
endroits qu'au plat de la cuifle, comme aux environs de 
Vanus , aux fourreaux, entre les jambes & aux environs de la 
bouché, car tous ces endroits font aufli minces & aufli tendres 
que le plat de la cuifle, & aufli attrayans pour la petite bête. 

se Lorfqu'un cheval éft afiligé de ce mal, il fe trouve 
dans l'écurie avec plufieurs autres qui ne font point attaqués 
du mème mal: fi c'eft une morfure, pourquoi les autres ne 
font-ils pas auffi mordus? 

Toutes ces raifons font fufhfantes, je penfe, pour appuyer 
amon fentiment, pour détruire le préjugé & pour faire reve- 
nir de leur crainte ceux qui appréhendent toüjours que leurs 
chevaux ne foient mordus, qui, par précaution contre la 
mufaraigne, font dépaver leurs écuries, décrépir les murs, 
qui craignent que ces bêtes, prétendues fi dangereufes, ne 
paffent du voifinage dans leur maifon, & qu'en mourant 
elles ne laiflent une famille aufli dangereufe qu'elles-mêmes. 

Enfin, je penfe que cette tumeur n'eft autre chofe qu'un 
vice dans la lymphe de cette partie, j'en ignore la caufe; 
tout ce que je fais, c'eft que dans cette même partie il y a 
quantité de glandes inguinales, & que le vice n'ayant point 
encore été charié des glandes dans le fang, les fcarifications 
“ont le vrai & le feul remède pour la guérifon. 


RUES 
É Bb i 


196 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


MÉMOIRE 
SUR LES QUARRÉS MAGIQUEJ. 


Par M. RALLIER DES OURMESs, Confeiller d'honneur 
au Préfidial de Rennes. 


SAUVEUR, ainfi que le rapporte lHiftorien de 

e l’Académie, dans fon Eloge, demandoit prefque par- 

don de s'être occupé des Quarrés magiques : comme l’emploi 

que je puis faire de mon temps n'importe pas à beaucoup près 

tant au Public, je me crois difpenfé d'entrer à cet égard en 

aucune juflification; je croirois pluflôt avoir à excufer ma 

témérité d’ofer retoucher un fujet manié déjà par tant d’habiles 

mains, fi je ne favois que l’Académie a pour principe d’exa- 

miner fimplement ce qu'on lui prélente, fans nul égard à ces 
circonftances étrangères. 

Je me propofe, 1.° de donner des méthodes de conftruc- 
tion, faciles & nouvelles, pour toutes les efpèces de quarrés, 
même pour ceux qu'on nomme par enceintes, 

2. De joindre à chaque méthode f1 démonfiration. 

3° De rechercher le nombre de variations dont chaque 
efpèce de quarré eft fufceptible, fans perdre la difpofition 
magique. 

Avant que d'entrer en matière, il fera bon d'éclaircir 
quelques points qui y ont rapport, & de déterminer le fens 
de quelques expreflions que, pour plus de commodité, je 
me propofe d'employer. Si je femble un peu long fur ces 
préliminaires, c’eft pour être court ailleurs, où il eft plus 
eflentiel de l'être. 

IL. Je confidérerai la fuite propofée pour être difpofée 
magiquement, d'abord dans le quarré. géométrique corref- 
pondant, & puis en elle-même & hors du quarré. 

II. Je nommerai ce premier quarré, guarré naturel, parce 
que je fuppofe que la fuite y a té tranfportée fuivant l'ordre 


DES. SCIENCES. I 
paturel de fes termes. Il faut d'abord examiner fi elle eft 
fufceptible ou non d'une difpofition magique, & voici la 
règle. Si vous voyez une différence conftante ( ce qu'on dit 
d'une diflérence arithmétique doit s'entendre également d’un 
expofant géométrique), fi vous voyez, dis-je , une différence 
conftante régner entre les termes de chaque bande horizontale, 
& en même temps une différence aufli conftante, gwand 
même ce ne feroit pas celle qui doit réfulter de la première, régner 
entre ceux de chaque bande verticale, concluez que la fuite 
propofée peut être difpofée magiquement ; finon, qu'elie ne 
peut l'être. 

C'étoit donc s'exprimer d’une manière trop vague, que 
d'établir en général que toute progreflion, foit continue, foit 
interrompue , peut être difpofée magiquement : il étoit néceflaire 
de faire connoître fous quelle condition elle peut être inter- 
rompue. Celle-ci, par exemple (1.2.3.8.9.10.15.16.17) 
eft très-fufceptible d'une difpofition magique ; car en lui faifant 


Je 2, 3 
fubir Fépreuve | 8. 9. 10 |, elle fe trouve remplir Ia 
15% 16, 17 


condition; mais interrompue fous toute autre loi qui ne 
renfermeroit pas celle-ci, elle ne le feroit plus. 

III. Pour plus de fimplicité, on fe bornera aux fuites qui 
Mnent une progreflion arithmétique; & pour être à lieu 
d'en défigner généralement quand il paroîtra néceffaire, un 
terme quelconque, on en nommera 

PEN DÉÉRNEn 042 echelle see De 
La différence horizontale. . . . . . . . 4. 
Pa: différence verticale }2%. 1. "2... , 
Le côté du quarré géométrique. . . . . 4 

Le nombre des termes fera (aa) ; la fomme des extrêmes 

(2p+ [(V+#4).(a — 1)]), que, pour abréger, 


Je nommerai e. 
La fomme de tous les termes fera fe ); & comme 
Bb ij 


Figure 1. 


198 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

il y a autant de bandes dans le quarré que d'unités au côté, 
en divifant cette quantité par 4, on aura la fomme égale de 
chaque bande du quarré magique futur, ou, fi lon veut, 


a 
LE (e. +). 
2 
Si a eft impair, aa le fera auffi, & la progreflion aura 


€ . 
un terme moyen {#) —= — ; en forte que fubftituant #1 


. € . 
au lieu de — dans la dernière formule, on aura, pour les 
2 
quarrés impairs, fous une expreffion plus fimple S— /m.a). 


IV. Pour comprendre lartifice de la conflruétion magique, 
il eft important de bien connoître le quarré naturel; c'eft 
pourquoi nous en allons faire une efpèce d'analyfe. 


On le peut concevoir comme formé de diverfes enveloppes 
ou enceintes concentriques & renfermées les unes dans les 
autres, dont, pour les mieux 
diftinguer, on a ici marqué 
le pouftour par un trait plus 
gras & plus nourri. Chaque 
enceinte réfulte du concours 
de quatre bandes affemblé 
à angles droits, dont a 
horizontales & deux verti- 
cales : il y en a autant dans le 


2 
1 


Quarré naturel de 6 au côté. 


’ a — 
ualTé que 
quarré que — 


(felon qu'il 
eft pair ou impair) exprime 
d'unités; car on ne compte 
P 
point pour une enceinte ni 
la cafe unique qui occupe le centre des impairs, ni les quatre 
qui occupent le centre des pairs ; elles ne doivent en effet 
être confidérées que comme le royau de la figure, puifqu'elles 
ont fimplement renfermées, u'elles-mêmes n - 
font fimplement renfe & qu'ell e renfer 
ment rien. 


D ENS L'OICHRENNICRENS I 

V. Deux bandes, toutes deux horizontales ou toutes deux 

verticales, feront dites de méme nom ; & deux bandes de même 

nom qui ne en à former la 

même enceinte, feront dites cor- 
s refpon«lantes. 

Deux termes de la même bande 

10 À qui s'y trouvent, chacun de fon 


7 | 8 | [ve faui sy trouvent, chaeun < 
côté, à diftance égale du milieu, fe- 
12 | 13 | 14 | 15 À ront aufli nommés œrrefpondans. 
18 | 19 


Quarré naturel de ÿ au côté. 


5 | 4 


6 
11 


———+ VI. Deux termes, qui pris 
16 | 17 | 20 Ê enfemble font une fomme — e, 

Rod [A7 feront dits réciproquement le cont- 
=] 22123! 241 25 À plment l'un de autre. 

Chaque terme dans Île quarré 
naturel a fon complément dans la cafe qui lui efl oppolée 
centralement , c'eft-à-dire, qu'une ligne droite tirée du terme 
par le centre, & que celui-ci partageroit par la moitié, fe 
termineroit au complément. Pour le fafimencore plus füre- 
ment, comptez {2 a 1) (a défigne ici, non le côté du 
quarré total, mais le côté particulier de l'enceinte) comptez, 
dis-je, {2a— 1) en tournant l'enceinte dans quel fens 
vous. voudrez, & dites wn fur la cafe de laquelle vous partez, 
& qui renferme le terme dont vous cherchez le complément; 
le complément même fe trouvera dans celle où vous abou- 
tirez. Si, par exemple, je veux (fig. r) avoir le complément 
du terme (9 ), comme il appartient à l'enceinte dont le côté 
eft 4, je compte wn fur la cafe qui contient le terme (9), 
& pourfuivant jufqu'à /epr, je tombe fur la cafe où je trouve 
le terme (28) complément.de 0. 

VIT. En appliquant cette règle aux diagonales de tout 
quarré & aux deux bandes, qui, dans les impairs, fe coupent 
en forme de croix au centre de la figure, il réfulte que chacun 
de leurs termes a fon complément dans la même bande de 
Pauue côté du centre. Chaque bande eft donc formée de 
termes, qui, pris deux à deux, font une fomme — e; & 
comme le nombre en eft 4, la fomme de la bande entière 


Figure 2. 


* Mém. de 
l'Acad. anuée 


€7S 0. 


200 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

eft ( , =) , c'eft-à-dire qu'elle eft par elle-même, & fans 
2z 

autre myflère, difpôfée magiquement. Le fait fautoit aux yeux, 


mais perfonne, que je fache, ne favoit démontré. 


VIIL Il eft évident que les complémens de deux termes 
corréfpondans fe correfpondent auffi entr'eux & de {a même 
manière dans leur bande, & par une fuite que les quatre 
font en proportion, en les nommant dans le même ordre 
qu'ils ont été écrits dans le quarré. Quatre termes ainfi choifis, 
forment ce qu'on nommera ci-après une quadrille de termes, 
& dont on prévient qu’il fera fait un perpétuel ufage. 

IX. Comme les enceintes font les élémens du quarré, les 
quadrilles le font de l'enceinte, & leur nombre y eft déter- 
miné par le côté de celles-ci, diminué de funité: elles y 
terminent, tantôt un quarré, comme {fg. 1) la quadrille 
( un ) , tantôt un parallélogramme, comme méme figure) 

21 $e x . FETE à re Co 

300 tantôt, ce qui eft particulier aux quarrés IMPas, 
3 

une lofange, comme /fg. 2) 11. 15... Les quadrilles de 
23 

la première efpèce font en tout quarré les élémens particuliers 

des diagonales, comme celles de la dernière le font dans les 

impairs des deux bandes qui forment la croix. Ces bandes étant, 

par une fuite de leur pofition, fans correfpondante, elles s'en 

fervent mutuellement en cette occafion, & lune marie deux 

de fes termes avec deux de l'autre pour former une quadrille. 


X. Confidérons maintenant la fuite propofée Lors du quarre. 
On pourroit l'étendre fur une feule ligne, mais il fera plus 
commode de fuivre la pratique indiquée par M. d'Ons-en- 
Bray *, On en écrira donc d'abord tout fimplement la première 
moitié, puis l’autre moitié terme à terme fous la première, 
dirigeant cette feconde ligne à contre-fens, & remontant de 
droite à gauche, comme on voit ici la fuite dont on s'eft 
fervi (fig. 1) pour remplir le quarré de 6 au côté, 

Lo 


ES N'OSE IE MN CES 201 
Te 2. 3. 475. 16 7.018.) 9. 10 vitrage 14 15 617108 
36:35: 342 33:32, 31 | 30.29, 28.27. 26. 2ÿ | 24,23. 22. 21.20. 19 
XI. Le premier avantage qui réfulte de cette difpofition, 
c'eft que chaque terme s'y trouve apparié avec fon complé- 
ment. Si de plus on fait fur cette lifte ( par un trait vertical) 
des divifions de a en 4, on y pourra faire les mêmes obfer- 
vations qu’on à faites fur le quarré naturel, dont elles peuvent 
tenir lieu : chique divifion repréfente par ordre deux bandes 
horizontales correfpondantes. La différence verticale fe retrouve 
entre les premiers termes, & plus généralement entre les 
termes qui ont le même quantième en chaque divifion. Deux 
termes qui fe correlpondent dans la même divifion, repré- 
fentent, avec leurs complémens, une quadrille du quirréi 
mais il eft à remarquer que les deux inférieurs y ont changé 
entr'eux de pofition; celui qui là étoit à la droite, fe trouve 
ici à la gauche, & réciproquement ; la raifon s’en tire de {a 
conftruétion mème de la lifle, dont la ligne inférieure a été 
tracée à contre-fens. Pour retrouver la proportion, il faut 
donc nommer les quatre termes dans ordre qu'ils ont été 
écrits fur la lifle, & qu'ils auroient en eflet, fi elle étoit dé- 
ployée fur une feule ligne, 


XII. Puifque chaque divifion repréfente deux bandes 


horizontales, & le nombre de celles-ci étant 2, celui des 
à a . . . a . 
divifions eft — ; mais quand a eft impair, — eftune fraction, 
2 2 


c'eft-à-dire qu'à l'égard des quarrés impairs, la dernière divi- 
fion eft incomplette & n'a que la moitié des termes qui fe 
trouvent dans les autres. De plus, le terme moyen, qui en 
fait partie, n'ayant point de complément, fe trouve feul & 
ifolé ; c'eft ce qu'on peut voir dans la lifte relative au quarré 
de ÿ au côté, fig. 2. 

6. 7e 8. 9. 10 | 11. 12 
20. 19, 18. 17. 46 | 15. 14 F 


OU D TA 

25: 241 23: 22. 21 

: XIIT. Venons enfin au détail & à la conftruétion même des 

quarrés magiques. Pour fe faire mieux entendre, on appliquer 
Say. étrang. Tome IV. GE 


5 


202 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
immédiatement chaque méthode à un exemple; & pour plus 
de fimplicité, la fuite fans qu'il foit beloin de le répéter à 
chaque exemple) fera toüjours celle des nombres naturels; 
laquelle ne variera que par le nombre des termes, felon les 
difitrens quarrés qu'elle fera deftinée à remplir. De cette 
fiçon on aura toûjours p = 4 = 1 K v — a. 
QUARRÉS MAGIQUES SIMPLES. 
Quarrés pairs. 
XIV. On diflingue les quarrés pairement pairs, c'eft-à- 
dire dont la racine peut fouflrir deux divifions confécutives 
par 2, ou une feule par 4, comme 4, 8, 12, &c. & les 


quarrés impairement pairs , c'eft-à-dire dont fa racine, divifible 
par 2, ne l'efl pas par 4, comme Gin POp Ldrs EC 


Quarrés parement pairs. 


Soit pour exemple le quarré de 8 au côté. | 
X V. La lifle étant faite, numérotez-en tous les termes ; 
les numéros qu'il faut employer, font les nombres naturels, 


depuis & y compris (1) jufqu'à ( =, inclufivement. On, Jes 
pofcra en caractère minufcule au deffus de chaque terme de 


la lille. 
Pour la première divifion. Vous les écrirez d’abord dans leur 


. nu a a 
ordre naturel, puis à rebours (1:2...—.—...2.1); 
2 2 


en forte que deux termes correfpondans dans la même di- 
vifion foient affectés du même numéro. 

Pour la féconde divifion. Le numéro qui occupoit le milieu 
dans la première , eft rejeté aux extrémités dans celle-ci, & 
d'ailleurs les autres confervent entre eux le même ordre, 


a a — 2 dd — 2 a 
Ur - ATEN PIE + 


2 2 2 2 
En général, le numéro qui occupoit le milieu dans la divi- 
fion précédente, eft rejeté aux extrémités dans Ja divifion 


D'E si S'CHIEINIC ES - 203 
fubfiquen:e, les autres conlervant d'ailleurs entrevx le même 
ordre; c'eil ce qui fe comprendra mieux par la figure. 


NE UE Jp 4 4 B 2/7 pan DE Au PES DEN UD 
Line. $ M 2e ae 5 6.  7:1,8 9+ 10. 11. 12. 13. 14+ 19, 16 

À 64. 63. G2a 61e Go, $9. 58: 57 | 56. 55- 54. 53. 52. 51. 50. 49 
OP ET NC La 2. -Îr 4 3 2 


Life 17. 18. 19: 20. 2r. 22423. 24 |l25. 


HT. 413,54 
2 CA 
48, 47.146, 45. 44. 43. 42. 41 | 40. 39. 


3 
6. 27. 28. 29. 3 
9. 38 37: 36.35. 

XVI: Au refle, chaque numéro appartient également 
aux deux termes auxquels il correfpond , à l'inférieur comime 
au fupérieur, c'eft-à- dire que le numéro de chaque terme 
lui.eft commun avec fon complément. 


On peut obferver que les quatre termes qui concourent 
à former une même quadrille, font en chaque divifion affe&tés 
du même numéro. 


On remarquera auf, chemin faïfant, que deux quadrilles 
confécutives dans la même divifion, auffi-bien que deux autres 
qui tiennent le même rang en deux divifions confécutives , 
ont des numéros de di érent nom, C'eft-à-dire fun pair quand 
l'autre eft impair, & réciproquement. 


XVII. Cela fait, i n'y a plus qu'à parcourir & à devider 
d'un bout à l'autre touie la lifte dans le même fens qu’elle a 
été formée , & à la tranfporter terme à terme dans le quarré 
géométrique, obfervant fimplement de laifler tels qu'ils font 
les termes affectés d'un numéro impair, & de fubflituer aux 
autres leur complément, ou reciproquement. Quand on fera 

arvenu au bout de la ligne fupérieure, on reprendra f'autre 
à rebours, & alors le terme principal fera l'inférieur , & le 
complément celui d'au deflus, 


Cci 


204 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Au moyen de 
cette uniquerègle, 
tout quarré ma- 
gique  palrement 
pair fe trouvera 
formé, commen 
voit ici celui de 
notre exemple. 


me 8 


s1| ON ES 


La fomme égale 
de chaque bande 


Démonflration de AE Méthode. 


XVIIL. I faut concevoir qu'on remplit tout d’un temps 
deux bandes correfpondantes, & que les —-, quadrilles né- 


ceffaires à cet effet, font auffi employées deux à deux dans 
le même ordre qu'elles fe trouvent fur la ifte. 

Celles qui rempliflent deux horizontales correfpondantes, 
font prifes dans la même divifion & l'épuifent: c’eft là première 
divilion qui les fournit aux première & dernière bandes; Ja 
feconde divifion aux deuxième & pénultième bandes, &c. 

Celles qui rempliffent deux verticales correfpondantes, 
font prifes par ordre dans toutes les divifions, une dans 
chacune , & c'eft dans chaque divifion celle qui y occupe le 
même rang que les deux bandes où elle doit pafer, occupent 
dans le quarré; c'eft-à-dire que la première verticale & fa 
correfpondante font remplies par les premières quadrilles de 
chaque divifion; la feconde & fa correfpondante, par les 
deuxièmes de chaque divifion, &c. 

On a vù /art. x 1) que deux quadrilles , foit qu’elles foient 


DES SCIENCES. 205$ 
confécutives dans la même divifion, foit qu’elles aient 1e même 
quantième en deux divifions confécutives, ont des numéros 
de différent nom. N eft d'ailleurs évident qu’en deux quadrilles 
ainfi choifies, les petits termes d'une part, & les grands ou 
leur complément de l'autre, forment une double proportion, 
puifque, par conftruétion, le fecond terme de chaque raifon 
eft pris de part & d'autre dans la même progreffion, à mème 
diftance du premier. 

C'eft fur ces deux points, de la proportion des termes, 
tant grands que petits, de deux quadrilles conjointes, & de 
la différence de nom de leurs numéros, que porte la démonftra- 
tion, laquelle dès-là n'a plus de difficulté. En effet, prenons 
pour exemple les première & dernière bandes horizontales, & 
pour les deux quadrilles conjointes, celles qui, dans la pre- 
mière divifion, font numérotés (1) (2), leurs termes, pris 
dans l’ordre qu'ils auroient fi la lifte étoit déployée fur une 
feule ligne, & qu'ils ont en effet dans le quarré naturel, 
font, les petits, 1. 2. 7. 8, & les grands, 57. 58. 63. 64, 
& l'on a 

1-22: 17721018 1 LB —2+L7 

Donc 
57. 58: 63. 64 57: + 64 = 58. + 63 
Donc encore (1+8)+(58+63) — (247) +(57 + 64). 

Et c'eft le partage que fait néceflairement entre les deux 
bandes l'emploi alternatif, déterminé par le numéro, qu’on fait 
du terme même.ou de fon complément, du petit ou du 
grand terme, c'eft-à-dire qu'il met dans l'une des bandes a 
fomme des extrêmes de la première proportion avec celle 
des moyens de la feconde, & dans l'autre la fomme des 
moyens de la première proportion avec celle des extrêmes de la 
feconde. Ce qu'on vient de dire des deux premières quadrilles 
aura lieu pour les deux fuivantes, &: pour tant d’autres qu’en 
comportera l'exemple, La méthode diftribue donc également 
entre les deux bandes la fomme dela divifion entière; mais 
cette fomme eft évidemment /e.a) ; celle de chaque bande 


fera donc /e. . 
Ccii 


206 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Quant aux diagonales , les termes qui les rempliffent étant 
tous affectés du n° (1) impair, doivent refler dans le quarré 
magique les mêmes qu'ils étoient dans le quarré naturel: 
or, on a vü ci-deflus (7) que dans celui-ci la fomme de 


chaque diagonale eft /e.=). 


XIX. Pour favoir maintenant en combien de manières 
on peut varier le quarré, fans que la difpofition magique ÿ 
{oit altérée, il faut confidérer qu'elle ne le fera point fi Von 
échange entrelles deux bandes correfpondantes quelconques, 
& plus généralement que, quelque changement qu'on fafle 
entre les bandes, pourvü que celles qui fe correfpondoient 
avant le changement fe correfpondent encore après, la difpo- 
fition magique fubfiftera : il faut donc préalablement réfoudre 
ce problème. 


Un nombre a de termes étant donné, déterminer de combien 
de permutations ils font Jufceptibles entr'eux , fous la condition 
que deux termes qui Je correfpondoient avant le deplacement 
Je correfpondent encore après. 


Or j'ai trouvé que ce nombre eft exprimé par le produit 
continu des nombres pairs pouffé jufqu'à celui énclufivement, 
qui eft défigné par a, c'eft-à-dire par (2.4. 6... a); mais 
comme ce qui a lieu pour les bandes d’un nom, l'a également 
pour celles de l'autre, ce n'eft pas ici fimplement ce nombre 
qu'il faut prendre, mais fon quarré. 

La formule du nombre de variations que peuvent fübir 
les quarrés magiques pairement pairs, eft donc en général 
(2.4... a)°; & Vappliquant à notre exemple, on trouve 
(222 0 0) = 027) Or 

XX. J'ai fuppolé qu'un changement quelconque entre 
les bandes, pourvû que la correfpondance entr'elles fût con- 
fervée, ne fait point perdre au quarré la difpofition magique, 
& la preuve en eft aifée. 

Deux bandes correfpondantes peuvent changer, où entre 


DÉS SCTENCES. 207 
elles, ou avec deux autres bandes aufli correfpondantes de 
même nom. 


D'abord il eft manifefte que les deux bandes déplacées fe 
tranfportant avec tous leurs mêmes termes, leur fomme dans 
Jun & dans Fautre cas, refte la même. Il n'eft pas moins 
évident que dans les bandes de l'autre nom, les termes fub- 
fiftent toujours aufi les mêmes, quoique dans chacune il y 
en ait deux qui changent entreux de fituation ; ce qui ne 
fait rien à la fomme. Le changement ne peut donc intéreffer 
que les diagonales, ni dans celles-ci, que la quadrille qu'elles 
ont commune avec les deux bandes déplacées. 


Chaque terme de cette quadrille (7) a fon complément 
dans la cafe qui lui eft oppofée centralement, & par une fuite 
la fomme des deux termes qui appartiennent à chaque dia- 
gonale eft /e); mais lorfqu'il s'agit des quarrés pairement 
pairs, toute autre quadrille du quarré magique a, par conf 
truétion, la mème propriété. Lors donc que cette quadrille 
eft changée, ce qui arrive dans le fecond cas, elle eft rem- 
placée par une autre qui ne peut manquer d'avoir la propriété, 
& la fomme refte la même dans chaque diagonale fous une 
autre expreffon. La chofe eft encore plus palpable dans le 
premier cas, car alors la quadrille même ne change point, 
& les deux diagonales ne font qu'échanger entrelles leurs 
deux termes. 

Quand la conflruétion du quarré magique eft telle, que 
toute quädrille n'y conferve pas la propriété qu'elle a dans 
le quarré naturel, que chaque terme y foit oppofe centralement 
à Jon complement , aiors le fecond changement peut n'avoir 
plus lieu, comme on le verra bien-1ôt. 


Quarrés impairement pairs. 


Soit pour exemple le quarré de 6 au côté. 


RS AN EEE IBMA ni tneadl 22 ea ing 2 


Li le 2e 3e ‘4 Se 6 |7- 8. 9. 10.11.1213. 14. 15, 16. 17. 18 
d 36. 35- 34: 33: 32 31 |30. 29. 28. 27. 26 25 |24. 23. 22. 27. 20. 10 


208 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
XXI. Commeil y a ici plus de numéros impairs que de 


. . a . , . . 
airs, puifque — qui repréfente leu re € 
païrs , puifque — qui reprélente eur nombre eft impair par 


fuppofition, la méthode précédente ne peut avoir lieu, au 
moins dans fa totalité, & le dernier numéro laifleroit néceffai- 
rement quelque compenfation à faire, foit dans la direétion 
horizontale, foit dans la verticale. On ne la fuivra donc que 


+ . 2 CT mn ET UC : 
jufqu’aux deux derniers & plus grands numéros ( —— — ) 
2 2z 


exclufivement ; c'efkà-dire qu'omettant les cafes où tombent les 
termes qui en font affectés, on remplira d’ailleurs toutes les 
autres de la manière qui vient d’être dite, en traitant des 
quarrés pairement pairs. Cela fe réduit dans l'exemple préfent 
aux feuls termes numérotés ( 1 ), qui donneront les deux 
diagonales. 

XXII. Quant aux deux numéros reftans, voici l’ufage 
qu'il en faut faire. 


o 4 / a Ce: . 
I. Des quatre termes numérotés ( » ICI 2 qui 


font pärtie de chaque divifion de la lifle, faites paffer en 

haut ceux qui font en bas, & réciproquement, fans d’ailleurs 

troubler l'ordre qu'ils ont entr'eux. Ainfr, dans notre exemple, 

la quadrille de la première divifion de fa life ( Fa f ) 

deviendra dans Île quarré magique ( HER }» & ainfi de 
2. $ 


toutes les autres marquées de ce même numéro; au refle, le 
quantième de la divifion détermine celui de Ia bande où il 
faut tranfporter les termes, comme le rang qu'occupe le nu- 
méro dans la divifion, détermine les cafes de la bande, 


o 4 4 a . . 
2.7 Des quatre termes numérotés (<, ici 3 } , faites 
paffer le plus petit des deux d’en haut dans la cafe oppofée cen- 


tralement, & que l'autre prenne fa place; après quoi faites 
correfpondre à chacun fon complément dans Ja méme bande 


horizontale, Ainfi Ja quadrille de la première divifion di $ ) 


deviendra 


D'ÉS SCIENCES. 20g 
deviendra dans le quarré magique ( M : ): & ainfi des 


autres quadriiles qui ont la même étiquette. 


135] 4 6 
Au moyen de ces deux | 
règles, aflez funples, tout | 12| 8 | 28 25 
quarré magique impaire- (PERS PETER 
ment pair {e trouvera formé, 15 .16| 20 | 19 


comme on voit ici celui de 


>| 21 22) 4 [18 


6 au côté. $ — (e. —) 


2 1 EEE 

ÉNORIAN = TL Le 39 qu Ur TA 7 
31 | 2 ARE 36 
RC 


D'EUM Oo" N ST, RAA TI OX. 


X XIII. Elle eft la même que pour les quarrés pairement 
pairs à l'égard des deux diagoniles, qui fe forment ici comme 
là précifément de la même manière. 

Elle eft encore la même pour les bindes même horizontales 
& verticales jufqu'aux trois derniers numéros, lorfque l'exemple 
en comporte davantage, puilque le procédé eft le même. Ces 
numéros furabondans, fuivant les règles des quarrés pairement 
pairs, & étant eux-mêmes cn nombre pair, ne peuvent manquer 
de laifler en règle les bandes ébauchées. Refte donc à voir ft 
femploi qu'on fait de ces trois derniers numeros ne trouble point 
l'égalité de fomme déjà établie entre les bandes’, où fi les fix 
termes qu'ils font entrer dans chacune y forment une fomme 
= e pris trois fois; au refte, il fuffira d'obferver ce qui fe 
pañle à l'égard d’une bande de chaque nom, comme de l'hori- 
zontale fupérieure & de la feconde verticale. 

D'abord la quadrille numérotée (1) de la première divi- 
fion, met dans l'horizontale. (1 + 6 ) = 7; mais Îa 
fomme moyenne des deux termes ou e, eft ici 37; c'eft 
donc de moins 37 — 7 — 0. 


Sav. étrang, Tome 1V, | - Dd 


210 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


La quadrille (2) de la même divifion "A ) devenant, 


5» 32 


par le changement qu'elle reçoit, | 7 ? 4 ) met dans la même 


horizontale (35 + 32) = 67 > 37 de 30, & le défaut 
eft compenfé. En effet, (35 + 32 ) font précifément tes 
mêmes termes que le procédé afeété aux quarrés pairement 
pairs y feroit entrer: feulement chacun de ces deux’ termes 
a fous lui fon complément, au lieu d'y avoir celui de fon 
correfpondant; ce qui eft ménagé pour mettre la fomme 
moyenne dans chacune des deux verticales auxquelles ils 
appartiennent auf. 


Eafin, la quadrille (3) de la même divifion ( à o ) 


£ changeant en | #&,33 


3 


34 


) , met dans l'horizontale (4 + 33) 
— e; & l'équilibre, déjà rétabli par le numéro précédent, 
y eft maintenu par celui-ci. 

Quant à la féconde verticale, on vient déjà de voir que 
Ja quadrille (2) de la première divifion, par les deux termes 
(4 ) , y met la fomme moyenne, & la laifle en règle. 

Zz 

La quadrille (1) de la feconde divifion, y met (8 + 26) 
— 34< 37 de 3, & l'équilibre eft rompu; mais la qua- 
drille (3) de la dernière divifion ( PAT ) fe changeant en 

23. 20 

Le aile y met (17 + 23) — 40 > 37 de 3, & 
l'équilibre eft rétabli. 

En général, tout quarré impairement pair eft en règle, par 


à TAVENAQ E ! $ nl 2i SL AÈTR N 
conftruétion , jufqu’aux trois derniers n.° ( rar 2) 
2 2 2 


« , a — 
exchifivement. Le numéro s: 


rompt l'équilibre, mais il 


eft rétabli par Fun des deux numéros fuivans & maintenu 
par l'autre ; de façon que celui qui le rétablit dans hori- 
zontale, le maintient dans la verticale, & réciproquement. 
C'eft en quoi confifle tout l'artifice de la méthode. 


D'RETS, IS DATE MN CES 2II 

XXIV. Pour déterminer le nombre de variations que 
cette efpèce de quarrés peut fubir, fans que la difpofition 
magique en foit altérée, il faut indé que, par une fuite de 
conitruétion les quadrilles afleñtées des deux ae numéros, 
n'y confervent pas la propriété qu elles ont dans le quarré 
maturel, que chaque terme y Joit oppofé centralement à fon 
complément. Quand donc on vient à changer deux bandes 
correfpondantes avec deux autres de même nom, il peut 
arriver que la quadriile, qui après le changement appartient 
aux diagonales, foit une de ces quadrilles irrégulières, qui ne 
manqueroit pas d'y altérer la difpofition magique. Deux bandes 
correfpondantes ne peuvent donc, en général, changer ici 
que entr'elles ; ce qui ne donne que deux variations. C'eft 
donc 2 qu'il faut muliüplier par lui-même autant de fois 
qu'il y a de paires de bandes correfpondantes , c'eft -à -dire 


3 Ne mais il faut doubler cet expofant | parce que ce 


qui a lieu pour les bandes d'un nom, Ja auffi pour {es bandes 
de l'autre nom. La formule jufque là eft donc (2*). 

Refte à déterminer quand Ie changement de deux bandes 
avec deux autres peut avoir lieu, & quand ïl ne le peut pas, 
c'eft-à-dire dans quels cas le changement mettroit dans les 
diagonales quelqu'une de ces quadrilles irrégulières dont nous 
venons de parler. 

Pour prendre une idée de l'ordre qu'elles gardent entre 
elles dans le quarré magique, il fera bon d’en conftruire un; 
qu'on remplira d'ailleurs, à la réferve des cafes où tombe- 
roient les termes des deux derniers numéros, fuppofant la 
chofe exécutée, 

Voulez-vous favoir en particulier fi une paire de bandes, 
dont le quantième dans le quarré eft /m) , peut changer avec 
une autre paire dont le quantième y eft /) 7 examinez la 
cafe dont le rang elt » dans la Hide m, & .celie dont le 
rang eft » dans la bande 7; fi l'une ou l'autre ou toutes les 
deux font vuides, 1e changement n'aura pas lieu, il laura 
dans l'autre cas. 


Dä à 


212 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Si on veut favoir plus généralement avec combien d'autres 
chaque paire de bandes peut changer, voici la règle. Telle 
eft dans le quarré magique la difpofition des quadrilles irré- 
gulières, qu'une paire quelconque de bandes ne peut changer, 
ni avec les deux les plus voifines, ni avec les deux les plus 
éloignées du même côté. H fuit que chaque paire de bandes 


3 a— 10 Ê À 
ne peut changer qu'avec ( —,—/ autres; car il faut ôter 
de, qui exprime le nombre total des paires de bandes du 

2 


quarré, & celle même Qui fert de terme de comparaifon & 
les quatre autres avec lefquelles elle ne peut changer, c'eft-à- 
dire $ ou “=. 

De cette expreffion même il réfulte que le changement 
entre deux bandes correfpondantes & deux autres de même 
nom, ne peut avoir lieu quand a — 10, ni à plus forte 
raifon quand a — 6. La formule complette pour ces deux 
cas eft donc (2°), qui fe traduit en notre exemple 24 — 64; 
mais quand a > 10, il entre dans le calcul un nouvel élé- 
ment, qu'on déterminera fans grande difficulté, en appliquant 
aux principes que nous venons d'établir les règles des com- 
binaifons. 


Quarrés impairs. 


Entre plufieurs conftruétions qui fe font préfentées, on a 
cru devoir donner la préférence à celle qui fuit, comme à 
la plus méthodique & à la plus fufceptible de démonftration. 


Soit pour exemple le quarré de 7 au côté: on peut ici 
fe pañler de la lifle, d'ailleurs onap=4 = 1, V —7. 
XX V. Tout dépend de la pofition de cinq termes, du 


moyen qui occupe la cafe du centre, du premier de la fuite 
& de celui dont le quantième eft exprimé par la racine du 
quarré, avec leurs complémens. Les quatre derniers fe rangent 
autour du moyen dans l'ordre que préfente la figure.  * 


p'8s 7 SCENIC Ets 213 


Piste 14 LP) À) ï (a HU 1/] Ce qui fe traduit 


P+ [4 (a — 1)] om pp + [y (a — 1)] en notre exemple. 
?: 


Ces cinq termes ainfi difpofés, font comme le verme & 
l'embryon du quarré futur, qui s'achève par des accroiflemens 
uniformes & réguliers qu'il prend en tout fens, fuivant les 
loix que nous allons expliquer. 

XXVI. 1° Pour achever les deux bandes, qui ne font ici 
qu'ébauchées, & qui, par leur interfeétion au centre du quarré, 
y forment une croix, obfervez que 2 $ & 49 d'une part, 25 
& 1 de l'autre, font les premiers termes refpedifs de deux 
progreffions alternatives, dont la différence commune ef 
(V + h) ou 8, décroiffantes depuis 25 vers le haut, & 
croiffantes depuis 25 vers le bas. Je nomme ces progref- 
fions alternatives, parce que les termes de chacune d'elles 
ne rempliffent pas dans Ja bande des cafes confécutives, mais 
en fautent toûjours une, où l'autre dirigée vers le même côté 
place les fiens : 2 $ , par exemple, confidéré comme le premier 
terme d'une des progreflions dirigées vers le haut, mettra 
fon fecond terme (25 -— 8) ou 17 au deflus de 49, & 
confidéré comme le premier terme d'une des deux progreflions 
dirigées vers le bas, il mettra fon fecond terme (25 +- 8) 
ou 33 au deflous de 1 ; de même 49 mettra fon fecond 
twrme (49 — 8) ou 41 au deflus de 17, & 1 mettra 
le fien (1 + 8) ou 9 au deflous de 33, &c. 

Oblervez pareillement que dans horizontale 25 & 7 
d'une part, 25 & 43 de l'autre, font les premiers termes 
refpelifs de deux progreflions alternatives, dont la différence 
commune eft /}— À) ou 6, croiflantes depuis 25 vers 
la gauche, & décroiffantes depuis 2$ vers la droite. 

Ces doubles progreffions pouffées, chacune fuivant fa di- 
retion, jufqu'aux limites du quarré, rempliront des deux 


bandes, comme on le voit, figure 3. 
Dd iïj 


fe 


| 
is] 


nneramenes monnaies 


— 


Figure 3. 


#1 Æ MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Chaque terme de ces deux bandes eft l'origine de 
UE autres progreflions dirigées par les angles, ainfi que 
le marquent les lignes ponéluces de la figure. 

Celles qui tendent 
vers le haut font décroif- g= 
fantes, fuivant la diffé- | 
rence À ou 1 du côté 
gauche, & fuivant la 
différence F ou 7 du À 
côté droit. Ê 

Celles qui tendent ! 
vers le bas, font croif- — 
fantes, fist la diffé- À 
rence du côté gauche, 
& À du côté droit. L 

XXVIL Dès-là le ! 
quarré magique fe forme 
avec la plus grande faci- 
lité, comme on voit ici celui de notre exemple. 


On a la fomme de chaque bandeou S—({m.a) —=(25.7) 
EN r7$ 


DÉMONSTRATION. 


XXVIIL. Commençons par les deux bandes qui forment 
la croix, & ne confi- 
dérons d'abord que la 
——} verticale. 


22 


HAE 16 HAE 4 


7 Las 11 | 29 
24 | 49 36 Bélis 


sie loi 


e 


Les deux progreffions 


(l'une décroiflante vers 
le haut, l'autre croiffante 
un a Dr vers le bas, fuivant la 
mtihisés: même différence, dont 

25 eft le 1.” terme 


58 | 14 Pre AE 26 126 | 44 4 
comniun) peuvent évi- 


He 3» | 8 |33 | 2 RUE demment être prifes 
pour une feule, qui au- 


40. | 9 | 34 28 'roit 25 pour terme 


mors 


20 


46 Lis 


D\E 5 AS IC EUN CLELS 215$ 
moyen : Ja fomme fera donc 25 ou m, pris autant de fois 
qu'il y a de termes qui appartiennent à ces deux progreffions. 

Les deux autres progreffions, dont 49 & 1 font les pre- 
miers termes refpeclifs, étant l'une croiffante, l'autre décroil 
fante, fuivant /4 méme différence , 4 eft clair que la fomme de 
deux termes correfpondans quelconques, pris fun dans une 
progreflion, l'autre dans l'autre, fera égale à celle des deux 
premiers termes ; mais celle-ci eft (par conflruétion) e ou 
2m, puifqu'elle eft (25) formée de fon terme & de fon 
complément. 1] réfulte de ces deux obfervations réunies, que 
la fomme de la bande entière eft 7 pris autant de dois qu'il 
y a de termes dans la bande ou d'unités dans 4, c'eft-à-dire 
(ma). On fera le même raifonnement pour l'horizontale. 


Quant aux autres bandes, parallèles à celles qui forment 


R croix, il fufhra d'en démontrer une. Que ce foit, fi l'on 

veut, l'horizontale qui eft immédiatement au deflis de celle du 

” milieu, elle a un terme commun avec Ja verticale du milieu 2 

& par conféquent donné; ceft 49 — 25 + (8. Fi 
ad — 1 


ou généralement — "1 +- [ (V+ h). = ] , trop 
grand de cette quantité /W + 4). (= — = ). IL faut donc, 


pour remettre la bande en règle , que les termes avec lefquels 
on f'achevera la perdent fur leur totalité. Leur nombie eft 


= ; d'ailleurs 


a — 1, & en les prenant deux à deux 


ils font (conftruélion) les feconds termes des deux pro- 
greflions décroiffantes, lune fuivant la différence J vers la 
droite, l'autre fuivant la différence 4 vers la yauche , dont 
les premiers termes font dans la bande d'au deflous, o 
pris corefpondans deux à deux, ils forment * une Jomme 
— 2 m. Chaque deux termes de la bande à former auront 
donc pour fomme / 2m — VF — h), c'eft-à-dire que deux 
perdent fa quantité /W + 4), & tous enfemble, la quan- 


tité (VW + 4) ( — ) ; & l'excès du terme donné f 
trouve compenfé. 


* Démonffration 
de l'article pré= 
cédent, 


216 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Pour les deux diagonales, comme elles font (par conftruc- 
tion) deux progreflions continues, qui ont l'une & l'autre 
pour terme moyen, il eft clair que leur, fomme refpetive 
eft ce terme moyen multiplié par le nombre des termes ou 
(m.a). 

XXIX. Pour déterminer le nombre de variations dont 
cette efpèce de quarrés eft fufceptible, fans perdre la difpo- 
fition magique, il faut confidérer que le terme moyen devant 
néceflairement refler au centre, les deux bandes de diférent 
nom, auxquelles il appartient, c'eft-à-dire celles qui forment 
la croixs ne peuvent fe déplacer: mais d'ailleurs, comme 
dans toutes les quadrilles chaque terme a fon complément 
dans la cafe qui lui eft oppofée centralement, les bandes laté- 
rales, tant horizontales que verticales, peuvent (20) fubir 
entr'elles tous les déplacemens poffibles, fous la fimple condi- 
tion que la’ correlpondance foit confervée. 

IL fuit que la formule cherchée, eft [2. 4... {a —1})]°, 
c'eft-à-dire la même que pour les quarrés pairement pairs, 
fi ce n'eft que à eft ici change en (a — 1) ; & Vappliquant 
à notre exemple, on trouve ( 2. 4. 6) —(48)" = 2304. 

On ne compte point pour variations réelles, les quatre 
fituations qu'on pourroit donner au quarré , en le faifant tourner 
fur fon centre par quatre quarts de converfion fuccefñifs & 
dirigés dans le même fens, parce que par-là fa difpofition 
intérieure ne change point, & qu'on ne fait que rapporter {es 
différentes faces à différens points extérieurs. 


OBSERVATION fur les Mérhodes précédentes à 
fur les Démonffrations qui y font relatives. 


XXX. Les unes & les autres font telles, que fi, pour 
remplir le quarré, au-lieu d'une progreffion arithmétique , 
on fait choix d'une progreffion géométrique, foit continue, 
foit interrompue, fous Ja condition prefcrite, elles auront 
également lieu, pourvü qu'on ait égard à f'analogie du produit 
& de fomme, d’expofant & de diflérence, &c. e. par exemple, 
repréfentera le produit des extrêmes de la fuite ; le Ms 

un 


D E.S | S QC 1:E N:1C-E,S 217 
d'un terme fera fon co-faéteur , relativement au produit €: 
le produit égal de chaque bande du quarré magique fera gé- 


, a . . . . a 
néralement e—; & pour les impairs en particulier m°, le 
2 


dernier & plus grand terme fera p. (V his re 


paroît donc inutile de s'y arrêter davantage. 
Quarrés magiques par enceintes. 


XX XI. Outre la propriété qui leur eft commune avec 
les quarrés magiques ordinaires, on fait que ceux qui portent 
ce nom ont encore celle-ci, qui {eur eft particulière; c'eft 
que fi du quarré total, dont la racine eft À, & qu'on fuppofe 
difpolé magiquement, on enlève l'enceinte extérieure, reftera 
un quarré plus petit, dont {a racine eft / À — 2 ), difpofé 
aufll magiquement : fi lon enlève l'enceinte extérieure de 
celui-ci, reftera encore un quarré plus petit, dont la racine 
ft (A — 4), auffi difpofé magiquement, & ainfi de fuite 
jufqu'au dernier & plus intérieur, que je nomme le 4oyau, 
lequel doit pareillement conferver la difpofition magique. 

XXXII. Le noyau eft d'une feule cafe pour les quarrés 
impairs, parce que le plus petit quarré impair eft 1 ; mais 
pour les quarrés pairs, il eft non de quatre cafes, comme il 
femble qu'il devroit l'être, puifque le plus petit quarré pair 
eft 4, mais de 16. La raifon de cette différence eft qu'un 
feul terme peut être, qu'il eft même néceffairement , difpofé 
magiquement, puifqu'il préfente toüjours la même fomme, 
à quelque direction qu'on le rapporte; au lieu que quatre 
termes ne peuvent l'être, parce qu'en quelque proportion 
qu'on les fuppole, & de quelque manière qu'on les arrange 
ils ne peuvent, étant pris deux à deux, offrir es tout Jens la 
inême fomme. Le quarré pair, dépouilléufqu'au noyau, ne 
Jouiroit donc plus de la propriété, & voilà pourquoi l'on 
prend pour noyau le quarré de feizé cafes, lequel fe conftruit 
par la méthode des quarrés fimples pairement pairs. 

XXXTIIT. Les quarrés pairs & les impairs fuivent encore 
ici dans leur formation différentes règles; mais ils en ont de 


Jay. étrang. Tome IV. Sp CDR 


Li 


318 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
communes, par où nous allons commencer. 4 défignera [le 
côté du quarré total, & a celui d'une enceinte quelconque 
confidérée à part. À 

1.” On commencera, fi lon veut, par former le noyau, 
& l’on comptera pour première enceinte celle qui le renferme 
immédiatement ; pour feconde, celle qui renferme immédia- 
tement celle-ci, & ainfi de fuite. Il y en a autant dans le 


# A A = . . . . 
aise 
quarré que —— ({elon que À ef impair ou pair } exprime 


d'unités : feurs côtés font par ordre dans le premier cas, 
3e 5-7, &c. & dans le fecond, 6.8. 10, &c. Le nombre 
des cales d'une enceinte quelconque, eft généralement 
[{a — 1).4]. 

2.” À chaque terme de l'enceinte magique, doit corref- 
pondre fon complément vis-à-vis de lui dans la cafe qui lui 
eft oppolée, verticalement s'il fait partie d'une bande horizon- 
tale, Aorigontalement S'Â appartient à une bande verticale, & 
centralement s'il occupe un des angles. La néceflité de cette 
oppofition eft évidente pour conferver au quarré plein que 
renferme l'enceinte la difpofition magique qu'on lui fuppofe. 

On a donc l'enceinte entière dès qu'on en a, ou deux 
bandes de différent nom, dont le concours repréfente une 
équerre ou la moitié de chacune des quatre bandes; de façon 
qu'en deux bandes correfpondantes, la moitié pleine de lune 
foit oppolée à la moitié wuide de Fautre. On emploiera le 
dernier procédé pour les quarrés pairs, & le premier pour 
les impairs, & l’on prévient que les deux bandes auxquelles 
on { fixera pour ceux-ci, feront l'horizontale fupérieure, 
que pour abréger on nommera première , & la verticale gauche, 
que fon nommera cond. 

V” & h font des quantités conftantes pour toutes les en- 
ceintes du même quarré, mais p & a varient d'enceinte en 
enceinte. 


Quarrés par enceimes ; impairs. 


XXXIV. I n'entre dans l'enceinte magique que les 


LA 


DES SCIENCES. 219 
mêmes termes qui forment lenceinte correfpondante du 
quarré naturel, en forte qu'il n'y a que {eur difpofition à 
changer, ? 

XX XV. À chaque egceinte qu'on conflruit, if faut faire 
une lifte particulière des térimes qui y entrent, mais elle n'a 
pas befoin d'étrenumérotée. Pour la commodité de l'expref 
fion, deux termes qui s'y correfpondent l'un fous l'autre, 
c'eft-à-dire un terme avec fon complément, n’y feront defor- 
mais nommés que comme un feul terme. 

XXX VI La première divifion eft complète, mais c'eft 
Ja feule; toutes les autres n'ont que deux termes, & la dernière 
même n'en a quu”; la raifon en eft évidente , dès qu'on 
fait attention que chaque divifion de la lifte repréfente (11) 
deux bandes horizontales correfpondantes; car il n'y a que 
la première & la dernière de celle-ci qui aient tous leurs 
termes ; les intermédiaires n'en ont que deux, le premier 
& le dernier, & de plus celle du milieu eft ifolée & fans 
correfpondante. 

I fuit de-cette explication même, que les divifions in- 
complètes (à l’exclufion de la dernière, qui n'a qu'un terme} 
forment des raifons égales, puifque dans chacune le conféquent 
eft pris, dans la même progreffion, à même diflance de fon 
antécédant. Quant à la première divifon , c’eft une progreflion 
continue. 

XXXVIT. On nommera de la premiere claffe les termes 
de la première divifion ; & de la feconcle clafle, ceux de toutes 
les divifions incomplètes prifes conjointement. Le nombre 
des termes de la première clafle eft 4, celui des termes de Ja 
feconde eft /a — 2); la fomme 24 — 2, dont le double 
4a— 4 où [ {a — 1).4] eft en effet le même nombre 
qui a été déterminé plus haut (33) pour celui des cafés 
de chaque enceinte. 

XX XVII. H faut encore diflinguer les enceintes impaires 
& les paires ;, dénomination au refle qu'on voit bien ne 
pouvoir tomber fur Je côté même de l'enceinte, toûjours 
impair par fuppofition. Elle n'eft en eflét relative qu'au rang 

| Ee ij 


220 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
que tient l'enceinte dans la fuite des autres du même quar 
Les enceintes impaires {eront donc celles dont les côtés font 
par ordre 3.7. 11, &c. & les paires celles dont les côtés 
font $- 9.13, &c. 2" 

La conftruétion de l'enceinte magique n'a, par elle-même, 
nulle difficulté, & elle ne roule que fur deux opérations 
très - fimples. 

XXXIX, Enceintes impaires. M faut placer trois termes 
dans chacune des deux bandes, c'eft-à-dire remplir les angles 
& telle autre cafe intermédiaire qu'on voudra, comme celle 
du milieu. Les termes à employer, font généralement & 
dans le même ordre. 


2 [FE à 5 raies) anse CRM 


pæ+lh.(a — 1)] 


5er — 1] +[4(——)] 


3P+ {+ ) = fr+n. (= 


IL eft évident que jufque-là les deux bandes ont une fomme 
égale, puifque, 1. elles ont un terme commun, & que 
d’ailleurs les deux autres termes, pris dans une bande, font 
réciproques aux deux autres pris dans Fautre, c'efl-à-dire que 
le petit de la première eft au petit de la feconde, comme 
le grand de celle-ci au grand de celle-là; ce qui établit 
Fépalité entre la fomme des extrêmes qui 4.1 la première 
bande, & celle des moyens qui remplit la econde; où bien 
qu'on fe donne la peine de faire féparément la fomme de 
chaque bande, on trouvera, pour l'une comme pour l'autre, 


“>. 


Mais p me Ken a: =) — m}; c'eft-à-dire 


que non feulement les deux fommes fônt égales, mais encore 


eus D. 


DES SCIENCES 221 
que chacune en particulier eft le terme moyen, pris autant 
de fois qu'il y a de termes dans la bande, 

Si donc à chaque terme on oppolfe fon complément, ainfi 
qu'il a été dit, on aura, par cette feule opération, la première 
enceinte impaire, dont le côté eft 3. 

XL. Mais pour les enceintes impaires fubféquentes, dont 
les côtés font 7. 11.15, &c. il reftera refpectivement dans 
chaque bande 4. 8. 12, &c, cales à remplir, & dans chaque 
clafle de la lifte pareil nombre de termes qui n’ont pas été 
employés. Or, partagez les termes de la premièfe claffe en 
deux moitiés, en forte que l'une comprenne lès termes du 
milieu, & l'autre ceux qui d'un & d'autre côté renferment 
ceux-ci ; laiflez-en une telle qu'elle eft, & aux termes de 
Vautre fubftituez leurs complémens, puis tranfportez le tout 
dans l’une des deux bandes, dans la première fi vous voulez. …. 
répétez la même chofe fur les termes de la feconde clhafle, 
pour remplir la deuxième bande; & tout eff fait. 

XLI Ænceintes paires. M faut ici placer cinq termes dans 
chacune des deux bandes, c'eft-ä-dire remplir les angles & 
trois autres telles cafes intermédiaires qu'on voudra, celle du 
milieu par exemple, & les deux qui tiennent elles-mêmes 
le milieu entre celle-ci & chacun des angles. Les termes à 

employer font généralement & dans le même ordre. 
r.p+[r =) Jr +) ep (ta ep + than 


2 + 


| NT 11+[4/2)] 


Pot [V(a—)] 

| Jufque-Rà les deux bandes ont une fomme égale, puifque 
(laïflant à part le terme commun) les quatre autres, pris deux 
à deux dans une bande, font réciproques aux quatre autres 


Ee iij 


QUARRÉ NATUREL, 
d'où l'on tirera les PA F1 Û 
relatives aux te 


enceintes. 


_422 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


pris aufli deux à deux dans l’autre, c’eft-à-dire que la fomme 
des extrêmes de la première bande eft à celle des extrêmes 
de la feconde, comme la fomme des moyens de celle-ci eft 

à la fomme des moyens de celle-Hà. 

-Si l'on fe donne la peine de faire féparément la fomme 
de chaque bande, on trouvera pareillement que la fomme 
ef} a même dans l'une & dans l’autre; & dans chacune le 
terme moyen pris cinq fois, c'eft- à-dire autant de fois qu'il 
y a de terres dans la bande, 

En oppofant à chaque terme fon complément , on aura 
donc, par cette feule opération, Ja première enceinte paire, 
dont le côté eft 5 ; mais pour les enceintes paires fubféquentes, 
dont les côtés font 9. 13. 17, &c. il reflera refpectivement 
dans chaque bande 4. 8. 12, &c. cafes vuides, lefquelles 
on remplira, en fuivant de point en point le même procédé 
qui vient d'être indiqué pour les enceintes impaires, 

XLIT Soit, pour exemple, à remplir le quarré géomé- 
yique de neuf QE au côté, compolé, outré le noyau, de 
Rte 

2 


naturels, ou aura pour toutes les enceintes re : è . 


(DODGAGARE 
Fe offre De 
DSDROOUDE 
ce 138 prie 41 42) DE 
[46147 47 aa | 49 53 | 54 


a layer ol 


ESC | a 


ou quatre enceintes: Ja fuite étant celle des nombres 


DAPISI SCALE NM CES, x LR 223 
1.” Laiffant au centre le terme moyen (41), pour fervir 
de noyau, la lifte des termes de fa premiére enceinte impaire, 
LE et one M tte 
51. 50. 49 | 42 AE) à 
Subflituant dans la formule des enceintes impaires, les deux 
bandes conjuguées fe trouvent 40. $1. 32 


33 
32 
& oppofant à chaque terme fon complé- fa 
, . un 49 | 51 32 
ment, l'enceinte-entière eft......... 
La fomme de chaque bande complète | 33 49 
ou S— (m.a) = (41.3) — 123. sal 
ST 
2. La lifle des termes de la premiére enceinte paire de 
s au côté, eft... ©!" 22.23. 24.25 30. 34 E EATANE P—21I 
1. 60. 59.58. 57|52.48]43 EU 


 Subftituant dans la formule des enceintes paires, les deux 
bandes conjuguées fe trouvent 21. 48. 59. 52. 25 


24 
43 
6o 
57 » 
& oppofant à chaque terme fon 
Le arret ss 2148 | 59 | 52 25 
complément, l'enceinte entière : 
RD st om là 2+ | | 58 
= /m.a)—={4i.s)—205: 
ES PS, 
6o | | 22 
57 | 34 23 | 30 | 6: 


3° La lifte des termes de Ia /éconde enceinte impaire de 
7 au coté, eft 


224 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


x x = x 


38 de P=MS 
44 EE = 
Subftituant dans la formule des enceintes impaires, les deux 
bandes’ ébauchées fe trouvent 
38..71..14 - 
. Nota. On à marqué par une 


croix fur la lifte les termes qu ’em- 
7 porte cette première opération. 


11.12. 13. 14 1» 16. 17 | 20. 26 | 29. 35 
71: 70. 69. 68. 67. 66. 65 | 62. 56 | 53. 47 


68 


a2 022 1 LE 
Les termes reftans font, de la 1." clafle ( 3725 ) 


70. 69. 67. 66 


. 26. 29. 3 Ë ; 

de la feconde [E " 48 } On laiflera, fi l'on veut, les 
56. 53-47 

deux extrêmes tels qu'ils font, & l'on prendra les complémens 

de ceux du milieu; puis tranfportant ceux de la première claffe 

dans la première bande, & ceux de la deuxième dans a {e- 

conde bande ou réciproquement, les deux bandes complètes 


feront 38. 12. 69. 71. 67. 16. 14 


20 
FREE à 69 Rte 67 


56 


a 


53 
35 

4 La lifle des termes de la féconce enceinte paire, de 9 

au’ côté, eft 


68 


Et l'enceinte entière. ... 


S— (ma) = (41.7) = 287] 35 


r 
£&r 


D'E:s/ S CL E NiC Es. 225 


k * x x x ER « 
1. 2. 3e 4 $5. 6. 7. 8. 9 | 10.18 | 19.27 | 28. 36 | 37 
81. 80. 79. 78.77. 76. 75. 74. 73 | 72- 64 | 63. 55 | 54. 46.| 45 


Subfituant dans la formule des enceintes paires, les deux 
bandes ébauchées fe trouvent I. Sÿe 77+ 63. 9 


& 
45 
72 
73 
Les termes reftans font, de la 1." clafe ( alertes ) 


8 80. 78. 76. 74 

. 18. 28. 36 : 

de la feconde ( PES Le }: On en remplira les deux 
72- 64. 54. 46 


bandes, en fuivant le même procédé que pour l'enceinte pré- 
cédente ; puis oppofant à chaque terme fon complément, on 
aura l'enceinte entière, dans laquelle renfermant toutes les 
précédentes avec le noyau, le quarré complet fera tel qu'on 
le voit ici. 


S=—(n. 4 )= (4129) = 569 


33 ré 


41 | 49 139 


28 


5° 22 


one 47 | 3 


LE: 


pre AS 


27 
Say. étrang. Tome IV. EF 


PIE 


D 


226 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


DÉMONSTRATION. 


XLIIT. Elle a deux objets, l'un de prouver l'égalité de 
fomme entre les deux bandes de l'enceinte particulière qu'on 
conftruit, l'autre de prouver l'égalité de fomme entre toutes 
les bandes du quarré plein que renferme l'enceinte, & dont 
elle-même fait partie. 

1.” L'égalité de fomme a déjà été démontrée pour les 
deux bandes, à l'égard des trois & des cinq termes qu'on y 
place d'abord. Refte à faire voir que ceux de l'une & de 
l'autre claffe, qu'emploie la feconde opération, mettent dans 
chacune des deux bandes le terme moyen, pris autant de 
fois qu'il y refte de cafes vuides. 

On l'aura fait, fi l'on montre, 1° que la première opération 
laifle autant de cafes vuides dans chaque bande, qu'il refte 
de termes dans chaque clafle; 2.° que les termes reflans dans 
chaque claffe, y font une fomme égale à /2m1), pris autant 
de fois qu'il s'y trouve de termes; 3.” que le procédé, que 
prefcrit la méthode, place dans chaque bande la moitié pré- 
cife de cette fomme. 

On oblfervera d'abord que, quoiqu'il paroifle trois termes 
dans chaque bande de-la première formule, & cinq dans 
chaque bande de la feconde, ce qui femble en devoir faire 
là 6 & ici 10 pour les deux bandes conjuguées, il ny1 
pourtant dans le premier cas que quatre termes, & dans le 
fecond' que huit termes de la lifte employés; car d'abord les 
deux bandes ont un terme commun, ce qui réduit déjà le 
nombre total à $ & à 9 ; & d'ailleurs les derniers de chaque 
bande, étant complément lun à l'autre, ne doivent, fuivant 
ce qui a été dit plus haut (35), être comptés que pour un 
terme dans la lifte. 

Maintenant, des quatre termes qu'emploie la première for- 
mule, trois font pris dans la première claffe, & un dans la 
feconde: le nombre des termes de celle-là étoit a, & celui 
des termes de celle-ci {a — 2) ; le nombre des termes reftans 
eft donc, depart & d'autre {a — 3)..... Pareillement, 


DES SCIENCES. 227 
des huit termes qu'emploie la feconde formule, cinq font 
pris dans la première clafie & trois dans la feconde : le nombre 
des termes reflans, eft donc, de part & d'autre, /a — 5 ); 
mais {a — ?) eft évidemment le nombre refpectif de cafes 
vuides que laïfle en chaque bande la première opération, 
felon qu'il s'agit d'enceintes impaires où paires. Le premier 
article eft donc pleinement démontré. 

Le fecond ne peut faire de difficulté, car chaque terme 
de chaque claffe faifant avec fon complément une fomme 
— e — 2m, il eft clair que la fomme des termes de la 
claffe entière eft / 2m), pris autant de fois qu'il s'y trouve 
de termes. 

Le troifième n’en fera pas davantage, dès qu'on aura prouvé 
que les termes reftans dans chaque claffe, font entreux, en 
proportion, pris 1 à 1 quand ils ne font que 4, 2 à 2 quand 
ils font 8, 3 à 3 quand ils font 12, &c. car alors leurs 
complémens y feront aufli. La fomme des extrêmes de Ia 
première de ces deux proportions, jointe à celle des moyens 
de la feconde, fera donc la moitié précife de la claffe entière; 
mais ce font ces deux fommes que la feconde opération fait 
pafler en chaque bande conjuguée ; elle y mettra donc la moi- 
tié précife de chaque claffe, &, par une fuite, le terme moyen 
pris autant de fois qu’il y refte de cafes vuides. 

Or, pour reconnoître que les termes reftans en chaque 
claffe font en effet entr'eux en proportion, il fuffit de jeter 
un coup d'œil fur la lifte des deux dernières enceintes, & 
de remarquer le rang qu'y tiennent les termes qu’en emprunte 
la première opération. On a déjà averti qu'ils y étoient mar- 
qués d'une croix. 

Ce font, quant à la premiére clafle, les deux extrêmes & 
celui du milieu, quand l'enceinte eft impaire ; & quand elle 
eft paire, ces trois mêmes termes, & de plus les deux qui 
font, d’un & d'autre côté, à diftance égale de celui du milieu 
& de l'extrême voifin. Ces trois ou ces cinq termes appar- 
tiennent à une progreffion (36); & par le rang qu'ils y 
tiennent, ils font eux-mêmes entr'eux en progreffion. lis 


Ffij 


228 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
laiffent donc ceux qui reflent en proportion ou continue, 
ou du moins difcrète, ce qui fuffi ici. 

Quant à la féconde claffe, le terme unique qu’en emprunte 
la première opération lorfque l'enceinte eit impaire, eft celui 
qui forme tout feul la dernière divifion, & les trois qu’elle 
en emprunte, quand l'enceinte eft paire, font d’abord ce même 
terme, & de plus les deux qui forment la divifion du milieu, 
Dans l'un comme dans l'autre cas, il ne refte donc que des 
raifons égales (36), dont les termes forment naturellement 
une proportion, pris 1 à 1 s'il ny en a que 4, 2 à 2 sil 
yena8, &ec. 

[ On pourroit demander ici pourquoi, ayant tranfporté la 
moitié des termes d’une claffe dans l’une des deux bandes, 
on ne remplit pas tout de fuite l'autre de la moitié reftante des 
termes de cette mème clafle, pluftôt que d'aller prendre 
ailleurs d’autres termes, qui ne font, après tout, que la même 
fomme..... 11 eft vrai que par-là les deux bandes fe trou- 
veroient également complètes; mais on fe mettroit dans a 
néceffité de contrevenir à la loi fondamentale, fuivant laquelle 
à chaque terme doit correfpondre vis-à-vis de lui fon complement 
dans la bande oppofée, & Y'enceinte feroit manquée ]. 

2. L’enceinte étant démontrée, il eft aifé de démontrer 
le quarré plein. Pour cela, confidérons la première enceinte, 
dont le côté eft 3 d’une part, & de l'autre le noyau, qui eft le 
terme moyen (#1). La fomme des bandes complètes de l'enceinte 
eft (3m), & celle des incomplètes /2 m) : le noyau n'ajoûte 
rien aux premières, auxquelles il ne correfpond pas ; & il ajoûte 
m à chaque incomplète, c'eft-à-dire précifément ce qui lui 
manquoit. pour être égale aux complètes. Le quarré plein ne 
peut donc manquer d’être difpofé magiquement..… Confidérant 
ce premier quarré plein comme le noyau de l'enceinte fublé- 
quente, le même raifonnement aura lieu pour cette feconde 
enceinte, & ainfi de fuite. En général, la fomme de chaque 
bande complète d'une enceinte quelconque eft [ /#.4a) | ; 
celle de chaque bande incomplète eft /m.2). Le quarré plein 
quelconque, qui tient lieu de noyau en rempliflant l'intérieur 


Dons / SICHELN: CES 229 
de l'enceinte, laiffe la fomme des complètes telle qu’elle étoit, 
& ajoûte à chaque incomplète [wr. (a — 2)]; mais /m. 2) 
+ [m.(a— 2)] —(m.a). 

LIV. Pour déterminer le nombre de variations dont 
une enceinte quelconque, prife en particulier, eft fufceptible, 
fans perdre la difpofition magique qui lui convient, il faut 
confidérer que tous les termes compris entre les angles d’une 
bande complète quelconque, péuvent, fans conféquence, 
changer entr'eux de fituation de toutes les manières poflibles, 
pourvü que leurs complémens fuivent les mêmes mouvemens 
dans la bande oppofée & ne ceffent point de leur correfpondre. 
Le nombre de ces termes intermédiaires eft en chaque bande 
(a — 2). M faut donc prendre le nombre de permutations, 
dont {a — 2) termes font fufceptibles entr'eux, & le quarrer, 
parce que ce qui a lieu pour deux bandes correfpondantes d'un 
nom, l'a pareillement pour les deux de l’autre nom. C’eft donc 
déjà [1.2.3.... {a — 2)°]. 

De plus, chaque bande complète peut changer avec fa 
correfpondante; ce qui donne le nouvel élément (4). 

Il n’y en a pas d'autre pour les deux premières enceintes, 
June paire, l'autre impaire, à l'égard defquelles la deuxième 
opération n'a point lieu; mais les fuivantes en admettent 
encore deux autres. 

D'abord les termes qu'on emploie pour compléter une 
bande, peuvent êtré pris indifféremment de l'une ou de l'autre 
claffe; ce qui donne l'élément (2). 

S’étant déterminé à une clafle, on peut faire de différentes 
manières la fomme requife, en combinant différemment entre 
eux les petits & les grands termes. Cette combinaifon exige, 

ur condition unique, que chaque terme concoure avec fon 
correfpondant dans la claffe, à former la même fomme, foit 
des extrêmes, foit des moyens, dans chacune des deux pro- 
portions; c'eft-à-dire, fuppofant le nombre des termes de {à 
claffe repréfenté par z, quil faut chercher combien de fois 


Æ termes peuvent être pris à Te On trouve pour les 
pl 
Ffiÿ 


* Mém. de 
J’Acad. année 
4750: 


230 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
valeurs fucceffives de », qui font 4. 8. 12. 16, &c... cetié 
autre fuite. ... 2. 6. 20. 70, &c. 

Mais 2, qui eft relatif à la féconde enceinte, eft le fecond 
terme du deuxième ordre; (comptant celui des unités pour 
le premier) 6, qui fe rapporte à la troifiéme enceinte, eft le 
troifième du rroifième ordre; 20 , qui fe rapporte à la quatrième 
enceinte, eft le quatrième du quatrième ordre, &c. c'eft-à-dire 
que le nombre de variations, dont l'enceinte eft fufceptible 
de se chef, eft déterminé par fon quantième dans la fuite de 
celles de même nom; car ce quantième eft aufli celui, & de 
Vordre où il faut prendre le terme qui exprime le nombre de 
ces variations, & du terme même dans fon ordre, 


Comme d'ailleurs 


—_ ) exprime généralement le. 


quantième d'une enceinte quelconque, prenant le figne fupé- 
rieur quand elle eft impaire, & l'inférieur quand elle eft paire, 
on peut prendre pour dernier élément (le terme de l’ordre 
a +1 dr 
sun 
XLV. Pour avoir toutes les variations d'une enceinte en 
a+: 


, dont le rang y eft auffi 


particulier, on obfervera donc d'abord fi 


eft plus 


grand que 1 ou non. Dans le premier cas, on fera Île produit 
es quatre élémens ci-deflus ; dans le fecond, on s’en tiendra 
aux deux premiers. 

Pour avoir toutes celles du quarré total, on les cherchera 
féparément pour chaque enceinte particulière, puis on fera le 
produit de tous les réfultats : on trouvera dans l'exemple préfent 


4: 144 230400. 406425600 — 53936903946240000. 
Quarrés par enceintes pairs. , 


XLVI. M. d'Ons-en-Bray * emploie, pour la conftruc- 
tion des quarrés magiques fimples, dont le côté eft un nombre 
impairement pair, une méthode, dont je n'ai pas cru devoir 
faire ufage lorfqu'il étoit queftion de ces quarrés, parce que Îa 
mienne m'a paru plus fimple, mais elle peut être très- 


DES SCIENCES 2317 
heureufement appliquée à l'efpèce dont il s'agit ici, avec les 
additions (s'entend) & les changemens néceffaires, pour la 
faire quadrer à un objet que l’Auteur n'avoit pas en vüe; elle 
nous difpenfera même de diftinguer, comme fans cela il feroit 
néceflaire, les enceintes, dont le côté eft pairement ou im- 
pairement pair, parce qu'elle peut convenir aux unes tout 
comme aux autres ; mais ce ne fera plus l'enceinte correfpon- 
dante du quarré naturel qui fournira les termes de l'enceinte 
magique, le choix en devient, jufqu'à un certain point, ar- 
bitraire, comme il va être plus amplement expliqué. 


XLVIL Un quarré pair quelconque étant propolé à for- 
mer magiquement par enceintes ; après avoir fait la lifte des 
termes à l'ordinaire , mais fans la numéroter, déterminez-y 
ceux que vous deftinez à remplir le noyau & les enceintes 
fucceflives, c'eft-à-dire, partagez-là par des traits verticaux 


en ( HA ) lifles partielles, dont la plus petite comprendra 


2 

huit termes avec leurs complémens, & fera pour le noyau, 
& les autres en auront refpectivement 10. 14. 13, &c. 
en augmentant toüjours de 4 pour remplir les enceintes 
proprement dites. Au refte, peu importe en quel endroit de 
la life générale vous preniez chacune de ces liftes partielles, 
pourvû que les termes qui y entrent reftent confécutifs, comme 
ils l'étoient dans la lifte générale ; ce qui donne déjà le moyen 
ren 


de varier le quarré en ‘autant de façons qu'un nombre 
de termes peut recevoir d'arrangemens différens. 

XLVIIT. Lorfque vous vous ferez fixé à quelqu'un de 
ces arransemens, vous formerez le noyau par la méthode 
indiquée pour les quarrés fimples pairement pairs; puis vous 
procéderez aux enceintes. 

XLIX. Au lieu de remplir eux bandes en entier, comme 
on l'a fait pour les quarrés impairs , on remplit ici les 4 à demi, 
c'eft-à-dire qu'on met dans. chacune — termes, y laiflant 

z 


pareil nombre de cafes vuides. I[ faut que les termes qu'on 


« 


232 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
met dans une bande correfpondent aux cafes vuides de Ja 
bande oppolée , lefquelles font deftinées à recevoir leurs 
complémens. 

Ces premiers termes qu'on emploie, font les petits ou ceux 
qui forment la ligne fupérieure de la life (ce n'eft au refte 
que pour rendre les opérations plus fimples, car on pourroit 
tout aufli-bien prendre les grands). Ils doivent faire dans 
chaque bande une fomme égale, laquelle d'ailleurs peut varier 
dans la même enceinte. 

L. Pour déterminer cette 
fomme & les termes dont 
elle réfulte, on nommiera 
ceux-ci (a. b.c), & on les 
difpofera comme les voit ici 
dans l'enceinte, dont le côté 
eft 6, qui nous fervira d'e- 
xemple. Les trois termes 
défignés par ces trois lettres, £ 
ne font pas les mêmes dans 
chaque bande; mais comme 

- ils y doivent faireune fomme 
égale, on a cru pouvoir les repréfenter par les mêmes lettres. 

On voit que c sy trouve quatre fois, mais a & b ne s’y 
trouvent ni lun ni l'autre que trois fois, parce qu'occupant 
chacun un des angles, ils fe rapportent en même temps à 
deux bandes différentes. La fomme totale eft donc (34 + 36) 
+ 4c, qui repréfente celle des petits termes de la lifte. 

On partagera donc celle-ci en deux parties, telles que 
lune étant divifible par 3, l'autre le foit par 4. On trouvera 

lufieurs manières de le faire, ce qui donnera autant de fo- 
He) à l’exclufion néanmoins de celles d'où réfulteroit pour 
(a + b) où pour « une valeur qui ne feroit pas compatible 
avec les circonftances particulières de exemple. Lorfqu'on 
fe fera arrété à une de ces manières de diftribuer la fomme 
des petits termes, le quotient de la partie divifible par 
donnera la valeur de /a + 6), & celui de la partie divifible 


par 


a 


à c | 


DES SCIENCES. 23 
par 4 donnera celle de c. Entre les termes de fa lifle, on en 
choifira deux qui faflent une fomme égale au quotient de 
li divifion par 3, qu'on fubflituera dans les angles au lieu 
de a & de b; & un autre, égal au quotient de la divifion 
par 4, qu'on fubflituera au lieu de c, & la bande fupérieure 
fe trouvera en règle. ? 

[ Pour éviter les doubles emplois, à mefure qu'on fait 
pafler un terme dans le quarré, il eft bon de l'eflacer fur la 
life. Nous nous contenterons cependant, dans l'exemple qui 
va fuivre, de défigner, par un numéro placé au deflus de 
chaque terme, le quantième de la bande où il a paflé, au lieu 
de l'effacer, ce qui pourroit caufer de la confufion, & n'inf 
truiroit point le Lecteur fur l'emploi particulier qu'on en a fait. 
L'horizontale fupérieure fera réputée la premiere bande, la 
verticale gauche la feconde , la verticale droite la sroifiême ; les 
termes qui fe trouveront fans numéro, feront cenfés appartenir 
à la quatrième bande ou à l'horizontale inférieure ]._., 

LI. On remarquera la fomme des trois termes fubftitués 
dans la première bande: cette fomme — a fera la valeur 
de /b —+- c) dans la feconde. Ceite même fomme — 3 
fera la valeur de /a + c) dans la troifième : fur quoi l'on 
fe règlera pour y fubftituer les termes convenables de la lifte; 
après quoi il n'y en reflera plus que trois, qu’on fubilituera 
aux indéterminées de la dernière bande, leur fomme étant 
néceflairement celle qui convient. 

Les chofes amenées là, il n’y a plus qu'à oppofer, fuivant 
la règie générale, à chaque terme fon complément, & l'on 
aura l'enceinte complète. 

LIT. Lorfque le côté de l'enceinte eft plus grand que 6, 
comme 8. 10. 12, &c. aux trois indéterminées (a. b. c), 
on en ajoûtéra autant de nouvelles /4. e. f, rc.) qu'il fera 


néceffaire pour que leur nombre total foit “—. Le quotient 
2 


de la divifion par 3, fera toûjours la valeur de /a + b); 
mas celui de la divifion par 4, repréfentera, non plus € 
feulement, mais la fomme qu'il forme avec toutés les autres 


Say. etrang. Tome 1V, , Gg 


234 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
indeterminées qui le fuivent. Cette fomme, réfultant d'u 
plus grand nombre d’élémens, ne fe formera pas tout-à-fait 
avec tant de facilité; mais avec un peu d'attention, & d'ordre 
fur-tout, on n'y éprouvera jamais de difficulté réelle: 

LTIL On à déjà obfervé que lorfqu'il eft queftion de 
diftribuer la fomme des petits termes en deux parties, divi- 
fibles l'une par 3, & l'autre par 4, on en peut rencontrer que 
les circonflances particulières obligent de rejeter. Pour ne point 
perdre le t:mps à en rechercher qui feroïent inutiles, & pour 
s'épargner même toute recherche à ce fujet; p reprélentant 
le premier terme de la lifle particulière de l'enceinte, & 4. la 
difiérence qui règne entre fes termes, il n’y a qu'à prendre pour 
première valeur utile de /a +- b), (2p + hou 2p +- 34), 
felon que le côté de l'enceinte eft un nombre pairement ou 
impairement pair. Les autres valeurs utiles de /a + 4) forment, 
avec cette première, une progreffion croiflante, dont la diffé- 
rence eft (4 h) & le nombre des termes /a —— } ) des deux 
termes qui ont le figne — commun, prenant le fupérieur 
quand a eft pairement pair, & l'inférieur dans l'autre cas... 
D'ailleurs, pour avoir les valeurs correfpondantes de /c + d 
+ de) il faut multiplier par 3 celle de /a + b), dr 
le produit de la fomme des petits termes, & divifer le refte 
par 4: elles forment auffi entr'elles une progreffion, mais 
décroiffante, dont la différence eft /34). Tout cela va 
s'éclaircir par un exemple. 

LIV. Soit propofé à remplir par enceintes le quarré de 
10 au côté, la lifle générale eft : 

1,253 AS NÉE 708. 9-1 O-r Te. F2. USE TAN MO T7 
i 100, 99. 98. 97: 96. 95. 94- 93-92-91. 90. 89. 88. 87. 86. 85. 84. 83 | 
j 19. 20.21. 22. 23. 24. 25. 26. 27. 28. 29. 30. 31. 32 | 33- 34° 35-36 


82. 81. 80.79.78. 77. 76. 75.74.73. 72. 71.70. 69 | 68. 67. 66. 6$ 
: 37- 38 39.40. 41.42]43.44. 45. 46.47. 48.49.50 4 + 
Ggn 632 62. 65. 60. 59|58. 57. 56. $5. 54. 53. 52. 51 1 L 
€ ==: r0f 
z 


Elle fe trouve partagée par les traits verticaux en 


DES SCIENCES. 235 
ou quatre lifles partielles, qui contiennent refpeétivement 
18. 14. 10. & huitetermes. On a pris ceux qui doivent 
former le noyau à la fin, pour réferver Îles plus petits à la 
dernière enceinte, laquelle demande le plus de difcuffion, 

1.” La lifte particulière du noyau eft 


El 47-48. 49. 50 {7 —43 


58. 57: 56. 55 | 54. 53 52 52°" 
É 22 


On le formera fuivant Ja méthode À 43 | 57 | 56 |46 
générale des quarrés pleins pairemen = —— 
pairs, & il fe trouvera comme on le 49 | 5: 

j 47 
58 


voit ici. FE 
53 


S=(e. = )—(101.2)— 202" et — 
55 |45 | 44 | 
RER DC 
2. La life relative à la première enceinte, dont le côté 
eft 6, eft 
ap SP EN rep t 
no Etain 
68. 67. 66. 65. 64. 63. 62. 61. 6o. 59 
[ Les numéros ne fervent ici qu’à indiquer, par leur quan- 
tième , la bande de l'enceinte où l'opération qu'on va détailler 
a fait pañler chacun des petits termes auxquels ils fe rapportent]. 
La fomme des petitstermes eft (75. 5) = 75,1 
faudroit partager en deux parties, divifibles l'une par 3, l'autre 
par 4, pour en tirer les valeurs de /a + 4) & de c: mais, 
fans s'embarquer dans cette recherche, on a dire‘tement, par 
la formule /2p +- 3 h), la première valeur utile de (a + b), 
& indireétement celle de c; d'où fe déduifent les autres. 
Valeurs de (a + b) Valeurs correfpondantes de c. 
69 AN ON LE 4 S 
PS UE die a TA Een ie set 20 
PA here eheteitne ets lel.curr220 


mr eeerse se 33 


Ggi 


236 MÉMOIRES PRÉSENTÉS } À L'ACADÉMIE 
Tenons-nous-en, fi on veut, à la première: partageant 


b 
€ — 42, qu'on fubftituera dans la première bande. 


la fomme 69 en,3 3 & 36,0on aura © F3 : , & d’ailleurs 


La fomme eft 111.... 
111 — 33 — 78 fera 
donc celle des deux termes 
à fubftituer dans la feconde 
bande. Prenons 37 & 41... 
111 — 36 — 75 fera 
celle des deux autres à fup- 
pléer dans la troifième. Pre- 
nons 35 & 40, reftent 


(34+38—+39)—111 
pour la dernière. | 34 | E | 39 Lel»] | | 


Oppofant à chaque terme = 
fon complément, on aura l'enceinte entière, comme on la 
voit ci-deffous. 


La fomme égale de chaque 
bande complète, ou 


s= (+ = J=to:3)=303 


3.” La lifte relative à la feconde enceinte, dont le côté 
eft 8, eft 
Lt Li 2 3 3 ; 2 2 3 Le 
19.20. 21. 22. 23: 24 25e 26. 27. 18. 29. 30. 31. 32 à dis 19 
4 81, 80, 79. 78e 77. 767$: 741 73: 72,75: 70.69 ‘Mae 


DES SCHENCES. 237 
La fomme des petits termes eft (51.7) = 357: la 
formule {2p +- 4) donne 


Valeurs de (a + b) Valeurs correfpond. de (ce + d) 
He lee ellelle ee le 2aiiete 60 
MA Umhe slelsrefs pla ep le 57 
AT able ll able dep ste lie ray e s4 
SE pee te oilan eastieuslsriieles SI 
ST scies sets igésgelhelà s 48 
(0 POP MERE POP GEAR 45 
GE NOUS ER ER PES 42 


Tenons-nous-en, fi lon veut encore, à la première; & 
: = , c—= 28 
faifant d’une part © — ‘?, & de l'autre , tranfportons 
P P 
b— 20 d'— 32 


ces quatre termes dans la première bande. 


Leur fomme eft | !? | | | | QE As 
LE lie CL ER 
— 80 repréfente a 
donccelledestrois >À 
termes à placer 
dans la feconde 30 


bande : prenons 


(21.29.30)... 

99—20—79 

eft celle des trois 

termes à fuppléer 

dans la PS PTE CIC 

bande : prenons : Jolals[el | 24 | 25 
22,26: 5): 


ce qui laifle (23 + 244 25 + 27) — 99 pour TEA 
dernière. 

Il ne refte plus qu'à oppoler à chaque terme fon complé- 
ment, pour avoir l'enceinte entière, qu'il paroiît inutile de 


Gg ii 


238 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


_ a ? 

tracer ici. On y aura S — (ei) (101 ‘TRE 

4° La lifle relative à la troifième enceinte, dont le côté 
eft 10, eft 


LT SAS MAEPE ST 2 3 3: Sy Ni do 


j 1.12: 03-145 167. 8.090. LIil12: 13: 14 5-6: 17118 
100. 99: 98. 97. 96. 95. 94. 93. 92. g1. 90. 89. 88. 87. BG. 85. 84. 8; 


La fomme des petits termes, eft (19.9) — 171. La 
formule (2p + 34) donne 
Valeurs de (a + b) Valeurs correfp. de (c + d + e) 


$ haie ele ef le se 39 
DA eus re Tee eee ee 30 


Lire ce ne INDE AS eee 82 
ARMOIRIES RENE | 
Dies here AR nn ntteE 27 
De Ne mleted e à sul ee AE 
2oNakesehatoe ie set ele 
20m: fusions cles NoLe ITS 


Prenons encore la première , & faïfant d’une part 


(LL 


ï cC—S$ e 
, & de Fautre = 16, tranfportons ces cinq termes dans 
+ e = 18 


a 
5 
la première bande; leur fomme eff 44.... 44 — 1 
— 43 eit donc celle des quatre termes à fubflituer dans 
la léconde. Pienons (2. 9. 15. 17)... 44— 4 = 40 
eft celle des quatre autres à fubftituer dans la troifième: 
prenons (3. 10.13 14); ce qui hifle (6 + 7 + 8 
+ 11 + 12) — 44 pour 1 dernière, 

Oppofant à chaque terme fon complément , on aura l'en- 
ceinie entière, dans laquelle renfermant les précédentes avec 
le noyau, on obtiendra enfin le quarré complet tel qu'on 
le voit ci-après. 


E Sf 2SICALENN CjElS 239 


EEE 


s= | 53 | 47 F | 22 | 3 


91 [75 | 61 |55 | 45 


44 | 58 | + 26 RAA 


88 Ed 6; Se EL | 39 [55 Les 31 | 13 
87 87 | 8: 23 | 24 Le E a TEA 82 | 14 


97 | 6 Ed Del | 6 8; 


240 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
La fomme de chaque bande:complète de la dernière en= 
ceinte ou d'une bande quelconque du quarré total, eft 


(ei) (== N So: à 


DÉMONSTRATION. 
LV. La méthode la porte avec elle-même. Puifque fa 
fomme des petits termes eft égale en deux bandes cor- 
2 


refpondantes, celle de leurs complémens l'eft aufli; c'eft 
donc la même chofe de mettre dans une bande les complé- 
mens des termes qui y font déjà ou les complémens de ceux 
qui fe trouvent dans la bande oppolée; mais il eft évident 


que dans le premier cas la fomme de la bande feroit ( — ) : 
elle left donc auffi dans le fecond. 


Voilà pour les enceintes. Quant aux quarrés phins , fa 
démonftration eft la même que pour les quarrés impairs. 

LVI. I eft clair qu'à l'égard des quarrés pairs comme 
des impairs, on peut, fans préjudice de la difpofition magique 
qui convient à l'enceinte, faire fubir tous les changemens 
d'ordre poffibles aux termes compris entre les angles d'une 
bande complète quelconque, pourvü que ceux qui leur cor- 
refpondent dans la bande oppolfée y fuivent les mêmes mou- 
vemens, & de plus que chaque bande complète peut changer 
avec {a correfpondante; ce qui rend communs aux deux 
efpèces de quarrés les deux premiers élémens de ce calcul 


({r23..... (a— 2)]° x 4). Voyez mn XLIVe 
Jufque-là chaque bande eft fuppofée conferver fes mêmes 
termes; mais fi elle vient à les changer, il en naît, pour. 
l'enceinte, un nouvel ordre de variations, que nous avons* 
bien déterminées pour le cas où fon côté eft impair, mais 
dont le nombre n'eft pas fi aifé à déterminer généralement 
quand ce côté eft pair, quoiqu'on puifle le faire jufqu'à un 
certain point, 
Ce 


DME-S, ASC DIE UN C'É/S 241 

Ce font les angles mêmes qui changent, ou les termes 
compris entre deux angles. 

1. Les angles peuvent varier, ou parce qu’ils font des fommes 
différentes, relatives aux différentes valeurs de /a + &), 
ou parce que la même fomme eft exprimée diverfement. Le 
nombre des variations, quant au premier chef, eft déterminé 
par celui des différentes valeurs utiles de /a + L), que nous 
avons vü /art. Ly) être a — +. Le nombre des variations qui 
réfulient du fecond chef combiné avec le premier, eft géné- 
(a— 1) Hi 


ralement n ) : des deux fignes qui fe rapportent 


2 
au terme commun 1, on prendra le fupérieur quand à eft 
pairement pair, & l'inférieur dans l'autre cas. 

2. Voilà bien pour les angles ; mais ceux-ci fixés, on peut, 
avec les termes reflans , exprimer la valeur de /c + d + rc) 
dans la première bande de bien des façons différentes. Chacune 
de celles-ci en fera naître d’autres pour rendre, avec les termes 
reflans, celle de /8 + c + d + rc) dans la feconde; 
& chacune de celles-ci encore d'autres, pour rendre, avec 
les termes reftans, /a + c + d +- dc.) dans la troifième. 
(On ne tient point compte de la quatrième bande, parce 
qu'elle eft toüjours déterminée par les trois précédentes ). 

Or voilà fur quoi il ne na pas paru poflible d'établir rien 
en général, parce que l'indétermination roule ici, non feule- 
ment fur les fommes à former, mais fur les teumes mêmes 
avec lefquels on doit les former. En faifant cette recherche 
en détail fur trois ou quatre exemples, & comparant les 
réfultats, peut-être découvriroit-on entr'eux quelque rapport 
fixe qui donneroit la folution du problème; mais qui aura le 
loifir & le courage de s’y embarquer! 

LVIT. Pour avoir toutes les variations du quarré total, il 
faudroit les trouver féparément pour chaque enceinte en parti- 
culier, puis faire le produit de tous les réfultats, qu'on mulriplie- 


roit encore (art. XLV11) par l'élément [re s He e _ JA 


PPS 
Sav, étrang. Tome IV. LE 


242 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


AURORES BORÉALES 
OBSERVÉES A ROUEN 
LE 31 MARS © LES JOURS SUIVANS. 


Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 
N ous étions montés, M. Dulague & moi, à lobferva- 


toire de Saint-Lo, pour examiner loccultation d’une 
fixe qui devoit arriver vers le lever de la Lune: il étoit une 
heure environ après minuit. En jetant les yeux vers le nord- 
oucf}, j'aperçus l'horizon fort éclairé; la Lune ne devoit fe 
lever que trois quarts d'heure après, & les montagnes qui font 
du côté de l’orient devoient encore en retarder l'effet. Je pen- 
fai donc qu'une clarté pareille ne pouvoit être qu'une Aurore 
boréale ; je ne me trompai pas, & j'obfervai les phénomènes 
fuivans. 

Un arc d’une lumière blanche, femblable à celle des nuages 
légers éclairés par la Lune, s'étendoit dans un intervalle de 
plus de 85 degrés, commençant par une de fes extrémités 
entre l’oueft & l’ouefl-nord-oueft, & fe terminant par l’autre 
plufieurs degrés au-delà du nord: il pouvoit en avoir environ 
deux de large; fa partie la plus haute s’élevoit autour de 15 
degrés au deflus de l'horizon. 

Le fegment compris entre cet arc & l'horizon, paroïfloit 
d’un noir foncé; les étoiles qui fe trouvoient, tant dans l'arc 
que dans le fegment, ne perdoient rien, ou prefque point de 
leur éclat. Ce fegment étoit partagé en deux parties inégales 
par une lumière toute femblable à celle de l'arc dans lequel 
elle fe terminoit par en haut, tandis qu’elle fe perdoit par en 
bas derrière les montagnes qui bornoient ma vüe de ce côté-là, 
Sa figure étoit fort irrégulière, & reflembloit à un nuage dont 
a forme varioit. 

Au-deflus de Farc & dans toute fa longueur, régnoit une 


DELSA ISLE PEN CES 24) 
fumière moins vive, affez femblable à celle de la voie laétée 
dans un ciel ferein. Sa largeur étoit fort confidérable, & par- 
tout la même; fa plus grande hauteur étoit d'environ 23 
degrés, de foite que la partie de la circonférence de l'horizon 
qu'elle occupoit devoit être de plus de 100 degrés. Quelques 
bâtimens me cachoient une de fes extrémités. 

De plufieurs endroits de l'arc lumineux , mais fur-tout des 
deux extrémités, s'élevoient, à la hauteur de 3 $ degrés, des 
filets de lumière très-déliés: ils n’étoient point perpendiculaires 
à l'arc, & ils n'étoient point non plus dirigés au zénith, mais 
un peu obliques; de forte que leur direction étant prolongée 
de part & d'autre de l'arc, les cercles ou lignes courbes fe 
feroient coupés par en haut entre le zénith & l'occident, & 
en deffous entre le nord & le centre du cercle, fermé & 
terminé par l'arc lumineux d'où ils fortoient. Ceux de ces 
filets qui étoient vers le nord , avoient une [lumière plus écla- 
tante que les autres. 

Talle étoit cetie aurore lorfque je l'aperçus, comme j'ai dit, 
vers une heure du matin; mais elle avoit commencé bien 

lus tôt, & un Membre de l’Académie de Rouen l'avoit vûe 
du côté de Louviers dès les 1 r heures du foir. Peu de temps 
après je vis dans toute la longueur de l'arc s'élever tout-à- 
Ja-fois, felon la direétion, des filets de feux qui avoient l'appa- 
rence de vapeurs enflammées & bleuâtres. Leur éclat étoit à 
peu près égal à celui de l'arc: ils formoient , parallèlement à 
l'arc, des ondulations non continues, mais entre-coupées ; 
de forte que les parties divifées étoient quadrangulaires & en 
forme de trapèzes, dont la longueur, dans la direétion de 
celle de l'arc, étoit un peu plus confidérable que la largeur. 
Leur mouvement étoit fort précipité, & les portoit jufqu'à 
35 degrés au deflus de l'horizon. 

L'arc & le nuage lumineux qui couvroit une partie du 
fegment obfcur, me parurent avoir un mouvement lent qui 
les failoit avancer vers le nord : cependant j'en doutai d’abords, 
craignant que ce mouvement ne füt qu'un eflet apparent d'une 


augnientation de arc’, qui avoit effectivement lieu, tant vers 
Hhij 


244 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

le couchant que vers lorient; car à 1"2+ l'arc occupoit fur 
l'horizon une corde de plus de 90 degrés; à 11 £ il enoccu- 
poit une d'environ 1 10 ; à 2} une de près de 140 degrés, 
mais il s'étoit alongé beaucoup plus vers lorient que vers 
l'occident. Son plus grand alongement de ce dernier côté, 
ne fut que de 1$ degrés, au lieu que fon augmentation du 
premier côté pafla 35 degrés. | 

Ce nuage lumineux, qui partageoit le fegment en deux 
parts inégales, avoit un mouvement moins lent que celui 
de Farc. Lorfqu'il eut gagné le milieu de celui-ci, & que le 
fegment fe trouva auffi coupé également, le phénomène pré- 
fenta deux arcs rangés à la fuite l’un de l'autre, en manière de 
fefton renverfé; celui du nord étoit plus régulier que celui 
qui étoit vers l’oueft. 

Quelque temps après ces arcs fe fendirent, & la matière 
lumineufe qui les formoit, {e replia à chaque fente fur le feg- 
ment & s’y mélangea irrégulièrement. De ces différens replis 
s'élevèrent des filets d'un éclat tout pareil, & femblables à 
ceux dont nous avons déjà parlé. 

A 2h ro, l'arc le plus nord fe diffipa, occidental fe ré- 
pandit en partie fur fon fegment, & forma un nuage femblable 
à celui que j'avois vû dans le premier arc: comme lui il fé- 
paroit le feyment en deux parts inégales ; comme lui il avança 
peu à peu vers le nord, aufli-bien que l'arc. 

A 2h2+, les ondulations recommencèrent comme celles 
que nous avons décrites ci-devant, mais celles-ci étoient 
plus fortes, plus vives & d’un mouvement encore plus pré- 
cipité. Les filets parurent en plus grand nombre, non fule- 
ment aux extrémités, mais fur différens points de l'arc. 

A 2h 20’,la Lune commença à paroître au deflus des 
montagnes qui font vers le fud-eft : les filets s'élevèrent plus 
haut qu'auparavant, & montèrent jufqu'à 45 degrés, & 
quelques-unes des ondulations femblèrent s'élever juiqu'à 5 5 
degrés de hauteur. 

À 2h21, les ondulaitions continuoient toûjours, mais les 
filets avoient difparu : l'arc & le fegment , mélangés l'un avec 


DES SCIENCES 245$ 
Yautre, avoient l'apparence d'un nuage un peu foncé. Bien- 
tôt après les ondulations diminuèrent, & le tout s’afloiblit. 

Quelques minutes écoulées, l'arc fe forma de nouveau, 
mais il n'étoit.pas fi fumineux, & ne s’'étendoit plus que 
depuis l'oueft-nord-oueft jufqu'au nord; fon fegment étoit 
encore interrompu par un nuage blanc de même nature que 
l'arc; ce nuage avoit d'abord commencé par un filet qui ne 
s'élevoit pas au deflus de l'arc: il parut quelques ondulations, 
mais elles étoient foibles & rie montoient pas à plus de 25 
à 30 degrés. | 

A 2h+, le tout s’affoiblit de nouveau, & je ne vis plus 
dans cette partie de l'horizon qu'une lueur femblable à la voie 
lactée, vüe dans une belle nuit. Il ne fe paffa plus rien 
d'intéreffant. 

Enfin à 3° L toute cette lueur fembloit s'être ramañée au 
nord en un nuage d’une figure irrégulière, dont l'éclat étoit 
aflez femblable à celui du dernier arc qui avoit paru: il en 
fortoit quelques ondulations rares, foibles & peu confidérables, 
& le crépulcule ne tarda pas à faire difparoître le tout. 

Voilà ce qui fe pafla la nuit du 31 Mars au 1. Avril: 
après douze jours d’une pluie abondante, le ciel s’étoit dé- 
couvert depuis trois jours, & durant cet intervalle il n'y avoit 
pas eu le moindre nuage ; l'air avoit été doux. Un thermo- 
mètre, réglé fur les principes de M. de ReaumurŸ étoit monté 
à 16 degrés au deflus de la glace durant le jour, & pendant 
la nuit il n'étoit pas defcendu plus bas que 8 à 9. Un vent 
eft-fud-eft avoit été prefqu'infenfible : l'hygromètre étoit 
monté vers les deux tiers de {à plus grande hauteur, & n’avoit 
prefque point varié. Le baromètre, monté auffi-tôt après les 
pluies à 28 pouces 2 lignes, étoit defcendu peu à peu, durant 
ces trois jours, à 27 pouces g+lignes. 

Le 1 Avril il s’éleva, après fe midi, des vapeurs qui 
formèrent dans l'atmofphère quelques nuages légers. Avant 
le coucher du Soleil, l'horizon fe borda à l'occident d’un 
nuage noir & épais: fur les neuf heures Le Ciel étoit par-tout 
fmé d’une grande quantité de petits nuages obfcurs fur un 


Hh ii 


246 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fond blanchetre, à travers lequel on voÿoit briller les Etoiles, 

Sur les 10 heures ces petits nuages, que le vent pouffoit 
fort lentement du côté de left, s'étant tout-à-fait diflipés, je 
continuai de voir certe elpèce de brouillard ou de vapeur 
blanche répandue de tous côtés, excepté dans la partie du 
zénith & du nord, qui préfentoit mieux l'apparence d’un ciel 
ordinaire. Je ne prétends pas aflurer que ceci füt l'effet d’une 
aurore boréale; je ne vis point de ces marques décifives, arcs, 
filets, feux, ondulations. Je [uis fort porté à croire que c'en 
étoit une qui répandoit fa clarté fur les vapeurs dont fatmo- 
fphère {e trouvoit remplie : je me contenierai de rapporter les 
phénomènes fuivans, qui me parurent finguliers. 

A travers cette vapeur blancheäire, les étoiles, comme je 
l'ai dit, paroifloient avec beaucoup d'éclat; on voyoit mème 
briller jufqu’à celles de la cinquième grandeur, telles qu'il s'en 
trouve dans fa tête d'Orion. Je fuis myope; & à l'aide de 
mon verre de cinq à fix pouces de foyer, je les vis toüjours 
très-diflinétement, ainfi que d'autres qui ont moins d'éclat. 

L'horizon étoit bordé d'un brouillard fort fombre & fort 
épais en apparence; je ne ceflai point d'y voir les Pléïades 
toutes prêtes à fe cacher derrière nos hauteurs, au moins fous 
la forme d’une nébuleufe fort éclatante & extrêmement large. 

En approchant vers le nord le brouillard difparoifloit, & 
Fhorizon étoit terminé par une efpèce de crépufcule, qui ne 
s'ctendoit d’abord que depuis le nord-oueft jufqu'au nord, 
mais qui auginenta enfuite & occupa depuis l'oueft-nord -oueft 
juiqu'au nord-nord-eft, fans que le milieu de f'arc changeât 
fa hauieur, qui pouvoit être de 12 à 15 degrés. 

Enfin à 11 heures il me parut diminué; & à caufe de la 
fatigue de la nuit précédente, jointe à celle du jour, pendant 
lequel j'avois meluré un efpace de plus de 640 toiles pour 
fixer la valeur de mon micromètre, je ceflai d’obferver pour 
aller prendre du repos. 


e+ 


Dis À SC CAES 247 


MO LR N A L 
AND TBI SE RU AT 10 NV 


Dans les différens Voyages qui ont été faits pour voir 
l'éruption du Véfuve. 


| Par M. D’ARTHENAY. 
P our rendre plus intellig'ble ce que j'ai à dire de l'éruption 


du Véfuve, je crois devoir commencer par donner ici 
une efquifle de cette montagne. 

Comme elle ne tient par aucun côté à la chaîne des 
Appennins, qu elle eft abfolument ifolée, & qu'on n'y voit 
pas une continuité de pierres ou de rochers de même elpèce, 
féparés par couches horizontales; on ne penfe pas que cette 
montagne ait toûjours fubfifté. Le fentiment le plus général 
eft, ou qu'elle s’eft élevée tout d'un coup par une explofion 
de. feux foûterrains, comme le onte-novo , aux environs du 
lac Lucrin, où qu'un volcan s'étant fait jour en cet endroit, 
& ayant lancé en l'air une quantité prodigieufe de pierres, 
de bitume, de fcories & de cendres, ainfi qu'il arrive dans 
prefque toutes les éruptions ; ces matières fe font amoncelées 
les unes fur les autres d'autant plus facilement, qu’elles font 
encore molles dans le temps de leur chûte, & ont formé peu 
à peu la montagne que nous voyons. 

Quoi qu'il en foit, il paroït certain que fon étendue étoit 
bien moindre originairement qu'elle ne left aujourd'hui, 
puifque dans le fond des énormes ravins qui font fur fon 
penchant, du côté d'Ottajano & de la Tour-du-Grec, on 
aperçoit encore fur pied les reftes digciens édifices, bâtis 
dans le goût de ce qu'il y a de plussntique en ce genre. 
Je n'ai point vérifié ce fait par moi-même , mais il eft atielté 
par un bon Oblervateur, qui parle pour avoir vü. 

Il rapporte qu'entre la terrible éruption de 1631 & la 


Dom Ionazie 


enr Hift. 
delmonte Vefuvio 
Gb. 1, cap, 1 5. 


Lib, Z, cap. 1. 


248 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
précédente il s’'étoit écoulé plufieurs fiècles ; que pendant cet 
intervalle, l'efpèce d’entonnoir que forme l'intérieur du Véfuve, 
s'étoit revêtu d'arbres & de verdure; que la petite plaine qui 
le terminoit étoit abondante en excellens pâturages; qu'en 
partant du bord fupérieur du gouffre, on avoit un mille à 
defcendre pour arriver à cette plaine, & qu'elle avoit vers fon 
milieu un autre souffre, dans lequel on defcendoit également 
pendant un milie par des chemins étroits & tortueux, qui 
conduifoient dans un cfpace plus vafte, entouré de cavernes, 
d'où il fortoit des vents fi impétueux & fi froids, qu’il étoit 
impoffible d'y réfifier, Voilà donc deux milles qu'on avoit 
à faire pour pénétrer jufqu'où il étoit praticable d'aller dans 
l'intérieur de la montagne; & fa fommité, fuivant le même 
Auteur, avoit alors cinq milles de circonférence. 

Quelle différence prodigieufe entre ce tableau du Véfuve 
& l'état où il eft actuellement! Après des changemens auffr 
extraordinaires, doit-on s'étonner que les meilleurs Phyficiens 
du pays s'accordent à penfer que ce qui femble former au- 
jourd'hui deux montagnes, n'en étoit qu'une autrefois, comme 
d'anciens deffeins * la repréfente; que le volcan étoit au centre; 
mais que le côté méridional s'étant éboulé par l'effort de 
quelque éruption, avoit formé ce vallon, qui femble féparer 
prélentement là partie qu'on appelle Somma , d'avec celle qui 
eft connue fous le nom de Véfuve, & que cette féparation 
étoit devenue plus fenfible, à mefure que de nouvelles érup- 
tions avoient amoncelé des matières dans l'endroit où le vol- 
can s’étoit fait un autre foüpirail ? 

L'auteur que j'ai déà indiqué, croit, d’après le Jéfuite 
Giannaflafo, que la circonférence du Véfuve, dans fa partie 
la plus baffle, n’eft que de Vingt-deux milles ; mais elle a été 
portée jufqu'à quarante milles par une Société d'habiles gens, 
qui fe réunirent à à de 1738 pour examiner & mefurer 
cette montagne. Ils eftimèrent que fa hauteur vers le midi, 
en partant du niveau de la mer, étoit de 740 toiles, & de 


* I] v a un de ces deffeins entre les mains de M. Taitbout, Conful 
général de France dans les Royaumes de Naples & de Sicile. 
784 


DES.  SiCct-E: Nu Eu $e 249 
784 du côté du nord; que le gouffre, à fon ouverture fu- 
périeure, qui eft prefque ronde, pouvoit avoir 300 toifes 
de diamètre, fa profondeur vifible environ 100 toiles, & 
le fond 230 de circonférence. 

Ces deux dernières mefures n'ont paru affez exactes, autant 
que j'ai pû le reconnoître depuis 1741 jufqu'à 1746; mais 
le fol du fond, qui jufque-là n'avoit préfenté qu'une furface 
très-unie, & quelquefois couverte de neige, changea alors 
d'afpeét ; il s’entrouvrit en plufieurs endroits : les flammes 
commencèrent à fortir par les crevafles, & foit que cette 
efpèce de voûte qui faifoit le fond du gouffre, füt élevée par 
les matières brülantes qui s’accumuloient continuellement au 
deflous avec une fermentation toûjours plus violente, foit que 
les débordemens de matières qui fe failoient par les ouver- 
tures, remplifient par degrés l'intérieur du gouffre, fa profon- 
deur, en 1750, n'alloit plus qu'à 35 toiles, & elle n’en 
avoit pas 20 à la fin de 1751, lorfque le Véfuve fit une 
éruption qui dura pendant trois mois. 

Un épanchement de matières fi long & f abondant, fem- 
bloit aflurer pour long-temps la tranquillité de ce volcan, ce- 
pendant il ne difcontinua prefque point de jeter des flammes; 
il s'éleva même dans le fond de l’entonnoir plufieurs cheminées 
en forme de monticules, par où les flammes avoient leur 
iffue. Ces monticules étoient détruits & reproduits d’un jour 
à l'autre : il en fortoit de temps en temps une grêle de minéraux 
fondus, qui, après avoir été portés plus ou moins haut, re- 
tomboient dans le grand gouffre & contribuoient à le remplir 
infenfiblement ; de manière que vers la fin de 1754 fa pro- 
fondeur n’étoit guère que de 12 toiles. ‘ 

Enfin le 3 Décembre la montagne s’ouvrit à l'eft, à deux 
ou trois cents pieds de, fon fommet , & prefqu'au même 
inflant elle creva un peu plus bas, au deffus d’un endroit 
dont la pente eft interrompue par un repos qui forme une 
efpèce de terrafle, fur la fuperficie de laquelle la lave s'étant 
répandue, déborda bientôt par différens côtés, & fe partagea 

Say. étrang. Tome IV. . li 


3 Décembre 
1754 


10 Décembre. 


250 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 
en deux branches, l’une coulant vers Ottajano , l'autre vers 
Trecale. 

Trois jours après, j'allai la voir en ce dernier endroit : elle 
avoit fait alors peu de chemin & marchoit fort lentement de 
ce côté-là, mais le cours de l'autre branche, que nous aper- 
cevions à notre droite, nous paroïfloit très -rapide. 

N'ayant pas pleinernent fatisfait ma curiofité dans ce premier 
voyage à la lave, j'en fis un fecond le 10 Décembre, en 
nombreufe compagnie & par le plus beau temps du monde. 
Nous quittames nos voitures dans le bourg même de Fr ecale, 
pour monter fur des bourriques, qui nous conduifirent pai- 
fiblement de collines en collines pendant environ trois milles, 
traverfant tantôt des vignes, tantôt d'anciennes laves, & toû- 
jours en montant. 

À notre paflage nous trouvames une branche de la nouvelle 
lave qui étoit déjà arrêtée, mais encore brûlante: nous fumes 
bien-tôt obligés de quitter nos pacitiques montures pour ef- 
calader des digues de {cories chaudes & fumantes, qu'il falloit 
franchir à pied avant que d'arriver fur le bord d’une rivière 
de feu, large d'environ quinze pieds, coulant prefqu'auff 
uniment & aufhi vite que du métal fondu, quoique fur un 
plan dont la pente étoit infenfible. Un peu plus haut elle 
marchoit à couvert d'une voute qu'elle s'étoit faite avec fon 
écume, & qui fe prolongevit environ un demi - mille en 
montant. En cet endroit il s'étoit fait dans la voûte une 
crevafle, qui pouvoit avoir quatre pieds de d amètre en tout 
fens, fur le bord de laquelle nous allames, non fans péril, 
pour voir couler la lave, qui nous parut là encore plus en- 
flammée & plus fluide que dans le canal, où elle formoit 
une rivière. 

À un autre demi-mille environ, au deffus de cette ouverture, 
nous en trouvames une feconde un peu plus grande; mais 
c'étoit à quelques centaines de pas plus haut, qu'on rencontroit 
celles qui méritoient le plus d'attention : les exhalaifons qui 
fortoient par les trois foûpiraux que la lave s’étoit faits en cet 
endroit dans fa propre écorce, avoient formé, en fe condenfant 


/ DES SCIENCES, 2$1 
fur le bord de ces foûpiraux, une efpèce de berceau ou de 
four haut d'environ douze pieds, large de cinq ou fix, & 
terminé par une voûte en dôme, avec deux pyramides creufes 
dé même hauteur, l'une en avant, l’autre en arrière, à des 
pinces prefque égales; en forte que la fymmétrie étant affez 

1 obfervée, il réfultoit de cet aflemblage un coup d'œil 
fort agréable, & d'autant plus fingulier, que les différens 
fels qui le compoloient, participant de la nature des divers 
minéraux dont ils s'étoient exhaltés, avoient rendu ces efpèces 
de cryftallifations comme marbrées, tant il régnoit de va- 
riété dans leurs couleurs, cependant le citron & le verd y 
dominoient mélés avec un peu de rouge. 

Quelque fraichement coupée que füt une branche d'arbre, 
elle s'embraloit aufli-tôt qu'on la préfentoit à la bouche du 
four; nous en fimes plufieurs fois l'expérience. A douze ou 
quinze pieds en deflous, on voyoit couler la lave avec le 
mème bruit & la même impétuofité que l'eau d'un moulin, 
_& l'activité du feu qui en fortoit étoit infiniment plus grande 
que celle du feu des forges ou des verreries. C'étoit-là ce 
qu'on appeloit la grande bouche; en eflet, c'étoit la plus 
Clevée & la plus voifine du volcan, 

Pendant que nous nous repofions entre cette bouche & 
celle qui fournifloit l'autre fave, nous entendions, par inter- 
valles aflez égaux, mugir horriblement la montagne; on auroit 
dit d'un tonnerre foûterrain, dont le bruit alloit toûjours en 
augmentant. À chaque mugiflement, nous vimes fortir im- 
pétueufement de l'intérieur du Véfuve un gros globe de fumée 
noirâtre qui s’élevoit perpendiculairement, laiflant après elle 
une traince en fpirale comme une bombe, & finiflant par 
former dans les airs un cercle blanc ou couleur de feu, qui 
nous fembloit d'une rondeur parfaite. Nous remarquames 
cette fingularité jufqu'à fix fois de fuite, & toûjours avec la 
même uniformité: nous obfervames aufli que dans l’empla- 
cement où nous étions, la terre étoit en plufieurs endroits 
entr'ouverte de cinq ou fix pouces, dans des efpaces qui s’éten- 


doient fort au doin du côté d'Ottajano. | 
lii 


15 Janvier 
1755 


252 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

A l'entrée de la nuit, nous commençames à jouir du plus 
beau & tout-à-la-fois du plus terrible fpeétacle qu'on puifle 
imaginer: il fembloit que de toutes parts nous fufions envi- 
ronnés de fleuves de feu, les uns plus près, les autres plus 
éloignés, ce qui provenoit des finuofités de leur cos: 
quelques-uns paroifloient couler fur le fommet des an 
circonvoifines, d’autres rouler fur des côteaux ou fe préci- 
piter dans des vallons. 

Vers une heure de nuit, nous nous remimes en marche, 
& nous allames voir à fa naiffance & à fa chûte ce qu'on 
appeloit la cafcade: en effet, c'en étoit une de feu; elle fe 
formoit à la faveur d'un grand efcarpement qui fe trouve au 
milieu de deux collines, entre lefquelles une branche de la 
lave avoit pris fon cours. Elle avoit, à l'endroit où commen 
çoit la nappe, environ trente pieds de largeur, & vingt pendant 
le refte de fa chüûte, qui paroiffoit être de plus de cent pieds 
& prefque perpendiculaire. La lave tomboit fi uniment & 
fi rapidement, qu'il fembloit que ce füt un mur de cryftal, 
derrière lequel il y auroit eu des tourbillons de feu le plus 
vif & le plus brillant. On ne fauroit mieux s'en former une 
idée, qu'en fe reprélentant en feu la fameufe cafcade de 
Tivoli. 

A notre retour nous trouvames une nouvelle lave qui avoit 
débouché depuis notre pañlage : elle s’étoit divifée en deux 
branches, formant la fourche, l'une coulant fur le haut de 
la colline, l'autre fuivant fa pente & s'avançant très-vite vers 
le bourg de Trecafe, mais elle fe ralentit beaucoup pendant 
la nuit même & fit peu de chemin les jours fuivans. 

Le 1 $ Janvier je retournai voir l'éruption pour la troifième 
fois, à la fuite de M. le Duc de Penthièvre & de M. le 
Marquis d'Offlun: on conduifit fon Alteffe Séréniffime par 
le bois d'Ottajano, où nous trouvames Îa lave encore em- 
brafée, mais ne coulant plus que dans un endroit entre deux 
digues qu'elle s'étoit faites avec fes fcories: fa furface étoit 
unie & fon cours très-lent. Nous étant enfuite avancés quelques 
centaines de pas plus haut, pour la voir fous une autre forme, 


DE! sn S'EVRM EN CE 2 

à peine y fumes- nous arrivés, qu'un courant de lave fe fit 
dans un moment un petit lit femblable à celui dont je viens 
de parler; & que fes enveloppes ayant crevé un peu plus 
haut par le côté, elle commença à s'étendre à nos pieds comme 
une pâte molle, & nous obligea de reculer à mefure qu'elle 
gagnoit du terrein. Elle étoit bien moins compaéte qu'elle 
ne left ordinairement, car j'y enfonçai deux fois un bâton 
de bois verd en appuyant aflez médiocrement; & par le 
mème moyen, quelques-uns de nos gens en enlevèrent des 
portions, qui, en tournant le bâton auquel elles étoient fuf. 
pendues , prenoient une figure circulaire. En fe refroidiffant 
elles devenoient noirâtres, fpongieufes & très- fragiles : je 
crois que M. le Vicomte de Caftellane a confervé un de 
ces efpèces d’anneaux. 

Le corps de la lave recommença auffi à fe mouvoir. Qu'on 
fe repréfente un amas énorme de mafñles de fcories où de 
mâchefer enflammées, la plufpart groffes comme des quartiers 
de roches, qui s'avancent avec un cliquetis fourd, en roulant 
doucement les unes par-deffus les autres. Telles font ordi- 
nairement toutes les laves à leur extérieur: mais l'éruption 
que nous avons préfentement , en fournit qui font bien diffé- 
rentes, ainfi que je l'ai déjà fait preffentir. Celle dont il eft 
queftion, occupoit une grande étendue de terrein , ayant alors 
parcouru environ quatre milles depuis fa fource, & ayant à 
fon extrémité plus de cinq cents pas de largeur, fuivant ce 
qui nous fut rapporté par les gens du pays. 

D'où nous étions, on voyoit fur la croupe de la mon- 
tagne une cafcade de feu, mais beaucoup moins rapide & 
moins perpendiculaire que celle dont j'ai crayonné le tableau 
dans ma relation du 10 Décembre. On découvroit auffr, à 
la gauche de cette cafcade, l'autre lave qui couloit le long 
du côteau, en fe portant vers Trecafe; mais le mauvais temps 
_ nous déroboit le fpectacle de ce qui fe pafloit au fommet de 
la montagne; nous y apercevions feulement une grande lueur, 
comme au travers d'un brouillard fort épais. 

Le Véfuve commença deux jours après à jeter tant defeu, 27 Janvier. 

Li ïij 


254 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
que ce fut un motif pour moi de faire le mème voyage dès 
le 27 Janvier. Nous trouvames toutes les laves arrêtées, à 
l'exception d'une petite branche qui couloit encore à mi-côte ; 
la plufpart même fembloient éteinies & confervoient fi peu 
de chaleur, que nous nous promenames pendant plus d'une 
heure fur cette grande lave qui couvre aétuellement une par- 
tie du bois d'Ouajano. Je remarquai qu'elle ne reflembloit 
nullement aux anciennes, dont la fuperficie ne préfente que 
des mafles d’une efpèce de mächefer plus où moins grofles, 
éntaflées confufément & avec tant dirrégularité, qu'il eft 
fort pénible de traverfer ces laves; au lieu qu'on marche 
aifément fur la nouvelle, à caufe de l'égalité de fa furface, ce 
qui prouve qu'elle eft d'une matière, ou plus liée, ou moins 
métallique que les autres. En eflet, les {cories de celles-ci 
font arides, dures & aflez pefantes : celles de la lave dont 
je parle, font grafles, bitumineufes , très-fragiles & fort légères. 
Les mugiffemens du Véfuve fe faifoient entendre par inter- 
valles, mais ce m’étoit qu'un bruit fourd dans la diftance où 
nous étions, 

Nous avions commencé dès le matin à découvrir le fommet 
d'un monticule , qu'on difoit s'être élevé depuis quelques jours 
dans F'intérieur du Véfuve. Lorfqu'il fut nuit, nous vimes 
que ce monticule jetoit à plein tuyau un feu très-vif, & qu'il 
lançoit continuellement en l'air une grofle gerbe de matières 
enflimmées qui, s'épanouiflant à melure qu'elles s'éloignoient 
de leur fource, produifoient aflez l'effet d’une girandolle de fulées 
volantes, & qui, après avoir été portées à peu près à la même 
hauteur, autant que nous pouvions en juger, retomboient 
comme une grêle de feu, les unes fur le monticule même, 
ce*qui en augmentoit fucceflivement le volume, les autres 
dans l'entonnoir du Véfuve, ce qui contribuoit à le remplir. La 
plus grande partie de ces matières n’étoit que des cendres, 
mais il y avoit aufli, & mème en afiez grande quantité, de 
groffes mafles de fcories qui étoient lancées fi haut, qu'en 
les prenant dans le dernier point de leur élévation, nousavons 
compté depuis un jufqu'à quarante-fept avant qu'elles foient 


1 MES SEL EN or US 255$ 
rétombées dans lentonnoir, c'eft-à-dire que la durée de 
leur chûte étoit de douze à treize fecondes. 

Ces explofions continuèrent & ailèrent même en augmen- 
tant jufque dans les premiers jours de Février; tellement 
qu'il y avoit fouvent de grofles maffes de matières enflam- 
mées qui tomboient fur le revers du Véluve, & qui, en 

. roulant après leur chûte, triçoient des fillons de feu, qu'il 
étoit aflez fingulier de voir courir au milieu de la neige qui 
couvroit alors la montagne jufqu'à fon fommet. 

Mais les explofions cefsèrent dès que le volcan eut rompu 
fes digues : le Véfuve creva de nouveau dans trois endroits 
du côté d'Otrajano, prefqu'à la naïfiance du vallon qui le 
fépare de la partie qu'on appelle Somma, & les laves recom- 
mencèrent à couler avec plus de vélocité & d'abondance 
qu'elles n'euflent encore fait depuis que nous avons cette 
éruption. 

On racontoit les changemens furvenus, avec des circonf- 
tances fi merveilleules & fi peu uniformes, que voulant 


m'aflurer par moi-même de la vérité des faits, ainfi que je’ 


Yavois pratiqué foigeufement à l'égard de ceux que j'ai déjà 
rapportés, je crus ne pouvoir m'aflocier à un Obfervateur 
plus exaét & plus hardi que M. Taitbout, Conful général 
de France à Naples, & je fis avec lui le 20 Février un 
cinquième voyage au Véfuve. ", 

Nous quittames notre voiture dès Refina: des bourriques 
nous conduifirent enfuite par un chemin affez commode, 
pratiqué du côté de Portici, dans le vallon qui fait la fépara- 
tion des deux montagnes. Il nous fallut un peu plus de deux 
heures pour arriver au milieu de li gorge, qui forme une 
petite plaine, à laquelle on donne 2 30 toifes de largeur. 

Ce fut là où j'eus lieu de convertir en certitudes les con- 
jeftures que j'avois formées fur ceite féparation & que j'avois 
miles par écrit, telles qu'on les trouve au commencement 
de cette relation, avant que je me fufle traniporté fur les 
lieux. Non feulement nous reconnumes très diftinétement , 
depuis le fommet de la montagne de Somma jufqu’au fond 


20 Février. 


256 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

de la gorge, les mêmes elcarpemens, les mêmes calcinations, 
les mêmes couches de laves & de terres brûlées, le même 
cahos de matières entaflées confufément & en tout fens, les 
mêmes veftiges d'embrafement qu'on voyoit dans le Véfuve 
avant qu'il fût rempli; mais nous remarquames de plus qu'il 
{e trouve comme embrafié par un demi-cercle que forme 
encore l'autre montagne, & nous reflames très-perfuadés qu'il 
ne tenoit que la place de Ja partie du cercle qui s’étoit ébou- 
lée, & que toute fon élévation depuis la gorge étoit l'ouvrage 
de fes différentes éruptions. 

Si nous avions pü en douter, nous en aurions été convain- 
cus quand nous fumes fur fon fommet, où nous arrivames 
à deux heures après midi. Je ne lavois jamais vü qu'avec un 
gouffre en entonnoir d'environ cinq cents pieds de profondeur. 
Quelle furprife pour moi de trouver qu'il étoit confidérable- 
ment baifié par les éboulemens qui s'y font faits! qu'en con- 
féquence fes bords, fr étroits depuis 1740 jufqu'en 1745, 
qu'à peine pouvoit-on y placer le pied , font tellement élargis, 
que plufieurs perfonnes peuvent aétuellement y marcher de 
front & commodément! que cet immenfe entonnoir étoit 
prefque totalement rempli, & que ce monticule, qui s'étoit 
formé au milieu & qui n’avoit encore que très-peu de grofleur 
& d’élévation il y a fix femaines, étoit préfentement une vé- 
ritable montagñe, que nous jugeames avoir environ un quart 
de lieue de circonférence , & près de trois cents pieds de 
hauteur. 

Quoiqu'il ne foit pas poffible que la crête du Véfuve fe 
fût abaiflée fans s'élargir, puifqu'il eft de figure conique, nous 
conjecturames cependant, par le volume de [a nouvelle mon- 
tagne, qu'il falloit que le diamètre de celle qui la contient, 
eût bien plus d'étendue qu'on ne l'avoit cru jufqu’à préfent, 
d'autant qu'il ne laifle pas d'y avoir encore loin des bords 
de fon fommet au pied de là nouvelle. 

Le bruit que celle-ci faifoit continuellement infpiroit de 
l'horreur : il redoubloit de temps en temps de manière à faire 
croire que tout alloit s’abimer. Je ne puis mieux le comparer 

À 
qu'à 


| D/E'sA SUOMI ENT CIS 2$7 
qu'à celui qu'on entend fur mer lorfque les flots vont brifer 
contre des rochers pendant une tempête affreufe accompagnée 
de tonnerre: nous reftames cependant plus d'une heure & demie 
fur la crête du Véfuve, dont nous fimes prefque entièrement 
le tour, foit pour mieux obferver, foit pour éviter les tour- 
billons de fumée que le vent rabattoit fur nous & qui nous 
fuffoquoient. Elle m'empéchoit fouvent de voir à mes pieds; 
& quoiqu’en tournant nous euffions cherché à prendre le deffus 
du vent, elle nous incommoda toüjours beaucoup, fortant 
non feulement de la nouvelle montagne, mais de toutes les 
parties qui la féparent des bords de l'ancienne. 

Du côté où ils font le plus bas, comme vers Ottajano, 
le Véfuve eft plein jufqu'à leur niveau, & il l'eft plus ou 
moins dans les autres endroits, à proportion que fes bords 
font plus ou moins élevés. 

En confidérant l'aflemblage informe de la matière qui le 
remplit, on croiroit voir les murs d’une fortereffe qu'une mine 
viendroit de faire fauter, & dont les vaftes débris auroient 
été renverfés confufément les uns fur les autres, & dans toutes 
fortes de pofitions. 

On conçoit bien que ces matières n'étoient plus liquides; 
elles confervoient feulement une fi grande chaleur, qu'on ne 
pouvoit marcher deflus qu'à fort peu de diftance des bords. 
Le volume & la figure des mafes nous firent penfer que ne 
pouvant pas être forties de la nouvelle montagne en l'état où 
elles étoient , if falloit que ce fuffent les ruines de la voûte qui 
fafoit ci-devant le fond du Véfuve, & qui vrai-femblablement 
avoit été brifée par l'effort qui fe faifoit en deflous, propor- 
tionnémient à la fermentation & à l’accroiflement des matières 
enflimmées, au deffus defquelles ces débris avoient toûjours 
furnagé; car quelle que foit leur pefanteur, ils en ont beaucoup 
moins qu'un pareil volume de ces matières, dont ils ne font 

ue l'écume. 
. Elles font d'ailleurs tellement liées, que dans les canaux 
où la lave coule nette & dépouillée de fes fcories, quelque 
fluide qu'elle foit, elle ne l'eft jamais affez pour que les plus 
Say. étrang. Tome IV, AE 


255 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L' ACADÉMIE 

grofles pierres , lancées avec force, pénètrent au-delà de deux 
ou trois doigts dans fa furface, qui les fait même rebondir fans 
céder fenfiblement ni au poids, ni à la percuflion, lorfqu'on 
en fait l'expérience un peu loin des bouches. J’avois été trop 
fouvent témoin de l’efpèce de contradiétion qui fe trouve 
entre cette impénétrabilité & la fluidité de la lave, pour n'être 
pas furpris en voyant, le 15 Janvier, qu'on pouvoit en- 
foncer un bâton de bois verd dans le petit courant de lave, 
qui déboucha aux pieds de M.*' le Duc de Penthièvre. 

Un moment avant que nous abandonnaffions le fonmet 
du Véfuve, ce bruit effroyable que nous avions entendu juf 
qu'alors, cefla tout-à-coup; ce qui nous fit préfumer qu'il 
pouvoit avoir été occafionné par l'effort que failoit le volcan 
pour s'ouvrir quelque nouveau foüpirail, & nous eumes bien- 
tÔt lieu de nous confirmer dans cette conjecture. 

En quittant la crête du Véfuve, nous eumes foin de diri- 
ger notre courfe vers les endroits que nous avions été à portée 
de reconnoïtre d'en haut pour les plus curieux. Ce fut en 
face du bois d'Ottajano que nous defcendimes : nous allames 
d’abord voir une nouvelle lave éteinte, fur laquelle s'étoient 
élevés depuis peu trois monticules à quelque diftance les uns 
des autres, reflemblant affez pour la forme à de vieux colom- 
biers, ou pluftôt aux reftes de certains tombeaux antiques 
qu'on voit aux environs de Rome. Ces monticules n'étoient 
pas fort éloignés de la gorge qui fait la féparation entre le 
Véluve & la montagne de Somma. Comme ils nous paroif- 
foient ne jeter ni feu ni fumée, nous montames fur le plus 
voifin; mais lorfque je penchai la tête pour l'examiner inté- 
rieurement, il me fut impoflible de foûtenir la chaleur qui 
en fortoit. 

Nous montames auffi fur le fecond : rien ne nous empêchà 
d'en confidérer le dedans, qui nous parut à peu près comme 
un farge tuyau de cheminée, dont l’enduit feroit d'une terre 
rouffeâtre & calcinée. Mais avant que de parler du troifième, 
ikeft à propos de remarquer qu'ils ne font point compofés 
de fcories & de cendres, comme la nouvelle montagne élevée 


DES SCrTENCES. 25 
dans le Véfuve, & que ce font feulement des amas de différens 
féts, reflemblant beaucoup à ceux qui formoient le four & les 
pyramides que nous vimes le ro Décembre. J'ai cru que cette 
obfervation devoit fervir de préliminaire à la defcription du 
troifième monticule. Nous montames donc fur fa voûte, & 
ayant reconnu de-là qu'on pouvoit y entrer, nous defcendimes 
dans le canal d'une lave éteinte tout récemment; & après 
avoir paflé fous une efpèce d'arcade, nous nous trouvames 
dans ce monticule. Son intérieur préfentoit un fpeétacle char- 
munt ; c'étoit comme une grotte entièrement tapiflée de grappes 
de raïfin noir * : nous en arrachames plufieurs, ce qui fe faïloit 
fort ailément. Elles étoient trop fragiles pour que nous puf- 
fions croire que ce fuffent des éclats échappés de la lave pendant 
qu'elle pafloit dans ce canal; il étoit beaucoup plus vrai- 
femblable que les fels qui compoloient tout l'édifice de cette 
grotte, fondus peut-être en partie par l'humidité qu'ils rece- 
voient du déhors, avoient, en s’épurant, formé peu à peu 
ces groflés gouttes que l'aélivité du feu avoit arrondies & 
defféchées avant qu'elles puffent, par leur propre poids, fe 
détacher entièrement des parois de la voûte. 

Quoi qu'il en foit, ce fut dans le voifmage de ces mon- 
ticules que nous nous arrêtames pour diner: le déclin du jour 
nous engagea bien-tôt à nous acheminer vers Trecale, en 
faivant l'empattement de cette partie du Véfuve, qui eft to- 
talement de fable & de cendres. Nous avancions néanmoins 
en montant fur notre droite, mais fi peu, que c'étoit prefque 
marcher fur la même ligne d'où nous venions de partir. 

Après avoir paflé trois laves nouvelles, mais déjà refroidies 
à leur extérieur, nous arrivames fur une quatrième encore 


* Plufieurs de ces grappes, qui 
étoïent effeétivement couleur de rai- 
fin noir, lorfque je les enlevai avant- 
hier fur les lieux, ayant été mouillées 
dans le tranfport, je les mis hier auprès 
du feu pour les fécher; ce matin je 
lesai trouvées toutes faupoudrées d’un 
fel blanc comme la neige, qui eft 
extrêmement piquant fur la langue, 


& dont la quantité augmente à vüe 
’œil. Les concrétions d’autres ef- 
pèces ont aufli changé de couleur, 
les citrons étant devenues vertes, les 
vertes foucis, les foucis citrons, Îes 
blanches bleuâtres, les noires comme 
parfemées de fucre candi très-brillant 
& tout cela ‘en vingt-quatre heures, 


Kk i 


260 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
chaude: nous aperçûmes de-là quelques-unes des bouches, 
d'où fortoient les laves qui couloient aétuellement. La nuit 
étoit venue fur ces entrefaites ; nous nous approchames , autant 
qu'il fut poffible, de la principale fournaite: on l'auroit prife 
pour un grand édifice, dont le comble, abimé par un incendie 
affreux, laifloit le pañlage à une grêle de matières enflammées, 
qui étoient continuellement pouffées en l'air à une grande hau- 
teur, & qui, par leur feu blanc, reflembloient parfaitement aux 
étoiles d'artifice qui terminent quelquefois les fufées volantes. 
Ces explofions n'étoient accompagnées que d'un bruit encore 
plus fourd que celui d’un mortier lorfqu'il en part une bombe. 
Une voûte fort large, fort élevée & fermée en arcades, fervoit 
à cette fournaife de communication avec une autre bouche 
plus petite, qui, quoiqu'éloignée de la grande, n’en paroifloit 
être qu'un foûpirail , lui tenant lieu des regiftres qu'ont les 
fourneaux des Chimiftes. L'extrémité d’une coupole, ouverte 
par fon centre, peut donner une affez jufle idée du foûpirail 
dont il s’agit. Il ne jetoit qu'une gerbe de feu par fa crevafle 
fupérieure; mais le {ouffle impétueux qui en fortoit à chaque 
inftant, par intervalles affés réglés & comme par fecoufles , 
produifoit une forte de fifHlement qui approchoit affez du fon 
que rendent les chats quand on dit qu'ils jurent. Tout cet 
aflemblage tenoit la place du four & des pyramides que nous 
vimes au même endroit le 10 Décembre. Qu'on Juge par 
un pareil changement, des étranges métamorphofes qui arrivent 
dans ce pays-là d'un jour à l'autre ! 

Nous montames enfuite vers deux nouvelles laves qui nous 
parurent très-fortes: elles s'avançoient à peu près fur la même 
ligne vers Ottajano : celle qui étoit le plus près de nous, couloit 
uniment dans fon milieu, fe faifant comme une bordure des 
fcories dont elle fe dépouilloit, & qu'elle poufloit auffi devant 
elle. Nous ne pouvions voir l’autre que par le côté qui n'avoit 
rien de remarquable. 

Quoiqu'elles marchaffent aflez vite, leur cours étant favo- 
ifé par la pente rapide qui fe trouve en cet endroit fur x 
croupe de là montagne, elles navoient fait encore que fort 


D'Étsi SiGhiE Nuc'Ens 261 
peu de chemin; circonftance qui nous fit préfumer qu'elles 
devoient être très-récentes, & qu'elles pouvoient bien avoir 
commencé à déboucher dans le temps'que nous étions fur le 
fommet du Véluve, & que nous ceflames d'entendre le bruit 
horrible qu'il avoit fait jufqu'alors. 

Du voifinage de ces laves nous en comptions quatre autres 
en mouvement, qui barroient le chemin devant nous. Comme 
une grande partie de leur cours fe déroboit à nos regards, & 
ne reparoifloit qu'après de longues finuofités ; il nous fembloit 
qu'il y eût des laves de tous côtés, même fur les montagnes 
les plus éloignées & les plus hautes: illufion que les feux 
produifent ordinairement pendant la nuit. L'obfcurité exagé- 
roit tellement ceux que nous découvrions vers Ottajano, 
qu'on les eût pris pour un grand lac enflammé qui auroit 
occupé toute la plaine. 

Ce fut à ce point de vüe que nous terminames notre 
courfe : nous avions marché pendant fix heures, car il en 
étoit plus de huit lorfque nous retournames fur nos pas pour 
aller chercher nos bourriques que nous avions Jaiffées dans 
la gorge des montagnes. En repaflant vis-à-vis des trois 
monticules que jai décrits, nous aperçümes une lueur très- 
vive à l'empattement du premier; & dans le doute que ce füt 
une petite crevaffe faite tout récemment, nous envoyames un 
de nos Guides pour nous affurer de la vérité, mais nous le 
vimes bientôt revenir, portant à fa main ce que nous avions 
pris pour le commencement d’une nouvelle bouche, & l'objet 
devenoit même plus lumineux à mefure qu'il s'avançoit vers 
nous. Ce n'étoit autre chofe que la feuille de papier qui avoit 
fervi d'enveloppe à notre diner, & qui depuis environ trois 
heures qu'elle étoit au pied de ce monticule, s'étoit vrai- 
femblablement chargée de particules qui avoient la nature du 
phofphore. 

Le 17 Mars, on fentit à Portici quelques légers tremble- 
mens de terre, occafionnés par les fecoufles du Véfuve, dont 
les éclats fe firent entendre jufqu'à Naples comme des coups 
de canon tirés au loin : d’ailleurs, on apercevoit à peine depuis 


KK ii 


20 Mars 
1755» 


262 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'AGADÉMIE 
quelques jours le fommet de la petite montagne qui s’eft élevée 
dans d'entonnoir dela grande, L'envie de reconnoïtre ce qui 
s'y étoit paflé de nouveau, m'engagea hier à me tranfporter 
fur les lieux par la même route que nous avions tenue le 20 
Février, & j'eus l'agrément de faire ce voyage avec M. Taitbout 
&Mademoifelle fa fille , qui quoique jeune & délicate, compta 
la fatigue & le danger pour rien, en comparaifon du plaifir 
de voir & d'apprendre. Pendant que nous étions dans la gorge 
des deux montagnes , mes obfervations ne fervirent qu'à m'af- 
fermir de plus en plus dans l'opinion que j'ai pris la liberté 
d'expofer {ur deur féparation & fur l'ancienne fituation du 
gouffre. Les trois monticules fubfiftent encore tels que je les 
ai reprélentés; mais cette efpèce d'édifice, qui renfermoit la 
principale fournaife , eft entièrement abimé, ainfi que le mon- 
ticule qui lui fervoit de foüpirail, & la longue voûte par 
laquelle is communiquoient. Nous montames fur leurs ruines 
& nous les parcourumes avec foin, malgré la grande chaleur 
qui en fortoit & la difficulté qu'il y avoit à paffer de fune 
à l'autre. La lave couloit encore fous ces débris: nous la vimes 
par quelques-uns des intervalles qu'ils faifent entr'eux & par 
une crevafle que nos Guides firent exprès dans l'écume qui 
la couvroit en forme de voûte. Toutes les autres laves nous 
parurent éteintes. 

De 1à nous nous acheminames vers le fommet du Véfuve, 
en fuivant les canaux de celles qui avoient commencé à courir 
le 20 Février: il s'eft aflemblé à leurs bouches une prodigieule 
quantité de ces fels, mélés de foufre, dont j'ai parlé plufieurs 
fois. Les formes qui réfultent de feur union font fi bizarres, 
qu'il me feroit impoflible de les décrire: ce font des grottes, 
des antres, des aqueducs, des berceaux, des cavernes, enfin 
tout ce qu'il plait à l'imagination de fe figurer. Le citron, 
lorangé & le verd, font les couleurs qui brillent le plus dans 
ces capricieufes produétions des feux foûterrains. Nous diri- 
geames enfuite notre route vers là première ouverture qui fe 
fit à la montagne le.3 Décembre, & nous arrivames für fon 
fommet à quatre heuresaprès midi: nous trouvames qué le fond 


DÉS À LICE INC LES 263 
étoit baïffé de quelques toifes, & que ce cahos de débris, qui 
le remplifloit le 20 Février, étoit actuellement couvert en 
certains endroits par de la cendre & du fable; en d’autres, par 
une lave nouvellement fortie de la petite montagne, mais déjà 
affez refroidie pour qu'on püt la parcourir. Elle nous donna 
la facilité de traverfer deux fois le gouffre en différens fens, 
afin de mieux voir la petite montagne, qui, quoique fort 
élevée encore, eft néanmoins confidérablement diminuée de 
hauteur, par les éboulemens qui fe font faits à fon fommet, 
& qui vrai-femblablement ont été caufés, ou par les fecoufles 
qu'elle éprouve dans fes explofions, ou par les efforts qu'elle a 
faits en crevant pour ouvrir un pañlage à la lave, où par 
l'ébranlement qu'elle a fouffert à mefure que le fol, fur lequel 
elle eft élevée, eft venu à baifler. Son contour eft pluftôt 
ovale que rond, & elle eft fort efcarpée du côté d'Ottajano : 
au refte, elle faifoit peu de bruit, mais beaucoup de fümée, 

Nous avions projeté d'attendre la nuit fur le haut du Véfüve; 
mais la pluie, qui nous avoit harcelés depuis midi, augmenta 
fi fort fur le foir, il s'y joignit une grêle fi piquante &'un 
vent fi froid, que nous fumes forcés d'abandonner f'entre- 
prie & de nous en retourner. Cet inconvénient rendit notre 
voyage extrêmement pénible, & cependant M." Taitbout 
le foutint avec un courage admirable dans une jeune perfonne 
de fon fexe , étant venue par-tout avec Monfieur fon Père 
& moi, fans marquer jamais la moindre frayeur ni fe plaindre 
de la fatigue; ce qui me paroït un phénomène digne d'être 
rapporté. s 

Lorfque nous repaffions dans la gorge des deux montagnes, 
le Véfuve recommença à tonner comme il avoit fait le ro 
Décembre, ainfi il eft encore fort douteux que nous tou- 
chions à la fin de l'éruption. 


264 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÂCADÉMIE 


SUITE DES OBSERVATIONS pendant l'éruption 
du Véfuve. 


ur voudroit décrire tous les changemens que le Véfuve 
opére pendant fes éruptions, auroit chaque jour un tableau 
différent à préfenter aux regards des Curieux; je m'en fuis 
affuré de plus en plus dans un feptième voyage que J'ai fait 
le 9 Avril à cette montagne. 

J'ai trouvé toute fa fommité couverte de petites pierres 
fpongieufes, très-légères, noires intérieurement, & jaunes à 
l'extérieur: le volcan les a vomies depuis peu dans fes explo- 
fions, car elles n'exiftoient point le 19 Mars. 

Dès-lors je n''étois aperçû que le fond du Véfuve avoit 
baiflé, & j'ai reconnu aujourd'hui. que faffaiflement étoit 
devenu depuis ce temps-là beaucoup. plus fenfible. On dif- 
tingue fi bien, contre les parois de l'entonnoir, les endroits 
d'où la voûte s'eft détachée, qu'ils pourroient fervir de règle 
pour mefurer fon épaifleur; & je l'aurois fait, fi ce n’eft que 
la chaleur m'a forcé de quitter aufli-tôt toutes les places où 
j'ai voulu m'établir pour cette opération; mais, autant que 
j'ai pà en juger à l'œil par les angles que. cette voûte a laifés, 
je ne penfe pas qu'elle ait plus de huit à dix pieds d'épaifleur, 
ce qui feroit bien peu cependant, eu égard à fon étendue 
& au poids énorme qu’elle fupporte. Au refte, elle à bien 
moins defcendu vers le midi & le couchant, que vers le 
nord & left, par la raifon fans doute que de ce-dernier côté 
les parois de l'entonnoir ont moins d’inclinaifon que de l'autre; 
& comme il va toüjours en fe rétréciffant, il n'y a-pas d'ap- 
parence que la defcente de ce fond du baffin devienne fort 
confidérable jufqu'à ce qu'il fe brife: elle ne paroïît être pré- 
fentement que d'environ cinquante pieds dans les endroits 
mêmes où il seft le plus aflaiflé. 


Les éboulemens que la nouvelle montagne qu'il fupporte 
a foufferts, l’ont extrémement diminuée de hauteur: il y a 


même un de fes côtés qui s'eft prefque entièrement écroulé, 
| & 


DÉS / SICUTIE INSC?ES. 265$ 
& c'eft précifément celui qui £ trouve {ur la partie de la voñte 
qui a le plus defcendu. Quoique la grande brèche qui s'eft 
faite ait rendu l'accès de la nouvelle montagne beaucoup plus 
praticable qu'il ne l'étoit précédemment, il n'eft pas aifé 
néanmoins d'arriver fur fon fommet, tant parce que l'efpace 
qui efl entre la brèche & les bords du Véluve, fe trouve 
rempli de vafles débris, dont il eft fort difficile de fe débar- 
rafler, que parce qu'il fort des exhalaifons brülantes par tous 
les intervalles que ces débris laiflent entreux. De-là vient 
qu'ils font aétuellement chargés de diflérens fels qui leur 
donnent les plus brillantes couleurs. 

Parvenu fur le haut de fa nouvelle montagne, où perfonne 
mavoit encore été, je me fuis avancé fur le bord du gouffre 
qui en fait le centre; c’'eft comme un puits immenfe parfai- 
tement rond & creulé à pic, fes parois étant perpendiculaires, 
elles font couvertes d'un enduit blancheître, & auffi uni que 
s'il avoit été appliqué avec le plus grand foin; le diamètre de 
ce puits m'a paru d'environ cinquante ou foixante pieds : quant 
à fa profondeur, elle doit être extrême, car il n'a été im- 
poffible de la découvrir, quoiqu'il y ait eu des momens où 
la fumée me permettoit de voir auffr loin que ma vüe pou- 
voit s'étendre, & d’ailleurs j'ai jeté de très-grofles pierres dans 
cet abime fans m'être jamais aperçû de leur chüûte. Le bruit 
qu'on entend dans le fond , eft abfolument le même que celui 
de la mer lorfqu'elle eft agitée: il en fort de grofles colonnes 
d’une fumée blanche, humide & fi mordante, que pour peu 
qu'il en entre dans les yeux, elle y caufe beaucoup d'irritation. | 
Ces tourbillons s'élèvent avec tant de rapidité, que la colonne 
ne fe courbe ordinairement qu'après être parvenue à une 
très-grande hauteur au-deffus du fommet. Les bords de 
l'abime font couverts de groffes mafles de matière verdâtre, 
très- molle, fort pefante, & fi grafle qu'elle imbibe le papier 
prefque aufli promptement que la pommade le pourroit faire. 
Il en fort une huile qui fait venir fur le champ une rouille 
très-tenace fur l'acier le mieux poli. . 

L’extrème profondeur du gouffre indique que la matière 


. Sa, étrang. Tome IV. El 


266 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

enflaminée eft defcendue fort bas, & que par conféquent 
il n'y a pas d'apparence que nous ayons de long-temps 
aucune éruption; cependant j'ai trouvé aujourd’hui au haut 
du Véfuve, & même fur tout fon revers, infiniment plus 
. de chaleur qu'il n'y en avoit le 19 Mars, ce qui femble 
d'autant plus fingulier, qu'alors une lave couloit encore, & 
qu'elles font toutes arrêtées depuis plus de quinze jours. 

Ce que j'ai dit de la voûte qui couvre le fond du grand 
entonnoir, fait affez entendre que je fuppole un vuide au 
deffous de cette voûte; mais fi jamais il fe remplit, comme 
il eft arrivé dans cette dernière éruption, il y a tout à craindre 
que la partie orientale du Véfuve ne réfifte pas au poids & 
aux chocs de la matière enflimmée, car de ce côté-1à fur- 
tout il eft non feulement entr'ouvert depuis fon fommet jufque 
vers le tiers de fa hauteur, mais on voit en divers endroits 
de grands quartiers de cette montagne qui font foûlevés de 
plufieurs pieds. Les fentes ne font remplies que d'un fable très- 
mouvant, dont on diftingue aifément les fillons, qu'on évite 
de crainte de s'y enterrer. 

Pour defcendre du fommet du Véfuve, j'ai choifi le côté 
qui regarde le bourg de Trecafe, & j'ai été fucceffivement 
vifiter toutes les bouches qui fe font faites fur le revers de 
cette montagne pendant fa dernière éruption: j'en ai d'abord 
vû trois, qui ne font reconnoifiables que par une trace de 
lave refroidie; on la prendroit pour une petite chaîne de rochers 
qui auroit une de fes extrémités enfevelie dans le fable. Cha- 
cune des autres bouches, indépendamment de fon canal, 
conferve fon ouverture, qui cependant ne s'étend pas fort 
loin fous terre, étant fermée ou par des quartiers de rocher, 
ou par la lave même qui s'y eft arrêtée. IL n’y a qu'une feule 
bouche dont il ne n'a pas été poffible d’apercevoir Île fond : 
fon ouverture eft prefque ronde, & fon diamètre peut avoir 
douze pieds; c'eft comme une longue caverne percée horizon- 
talement dans la montagne. J'ai tenté de m'introduire dans 
cet antre, pour examiner les efpèces de cryftllifations dont 
il eft tapiffé; mais la grande chaleur qui en fortoit, ne n'a 


DIE S! "SICUITENN EE NS 267 
pas même permis de m'arrêier à l'entrée. Les autres bouches 
ne font guère plus acceflibles; celle qui étoit la principale, 
eft encore fi brülante, qu'on peut à peine en approcher : ce- 
pendant j'en ai trouvé une aflez refroidie pour que j'y fois 
entré ; elle eft fituée précifément fur le repos qu’on rencontre 
à l'empattement de cette partie du Véfuve, qui eft toute com- 
pofée de cendre & de fable: c'eft la plus baffle & fa plus 
voifine de la gorge qui fépare les deux montagnes. Sa forme 
extérieure eft exactement celle d’un dôme: en dedans, c'eft 
une grotte revéiue en partie de fels blancs comme la neige, & 
en partie de groffes mafles de matière réduite en une efpèce de 
moufle roufleätre, plus légère que celle qu'on fait avec le fucre, 
& tiès-fragile: un ouvrage en filigrane n'eft pas d'un travail 
plus délicat. A d'égard des fels, en quelques endroits ils font 
par larmes ou par aiguilles, à peu près comme l'antimoine ; 
en d'autres, par couches épaiffes de trois ou quatre doigts, 
& quelquefois en petits globes alongés, qu'on prendroit pour 
des œufs. À moins qu'on ne touche la première efpèce fort 
légèrement, elle fe réduit en pouffière; mais les deux autres 
font fi folides, qu'on ne les détache des parois qu'avec beau- 
coup de peine. Les œufs fur-tout ne font guère moins durs 
que ne le feroit un morceau de verre du même volume; leur 
extrème blancheur n’eft qu'au dehors, l'intérieur eft tranfparent 
& du même verd que l'aigue marine un peu päle. Cette folidité, 
qu'ils ont quand on les arrache, ne fe maintient pas long- 
temps; car malgré la beauté du jour, j'ai trouvé à mon retour 
du Véfuve qu'ils étoient humides, friables & déjà diminués 
de groffeur. Tous ces {els font extrêmement piquans; je les 
crois aufli ftyptiques, attendu qu'après les avoir ramaffés, j'ai 
fenti dans les mains une contraétion qui m’empéchoit de les 
ouvrir aufli facilement qu'à l'ordinaire, Ils diffèrent beaucoup 
de ceux qui fe font accumulés dans les autres bouches & à 
leur entrée, ces derniers étant mélés de matières graffes & 
fulfureufes, qui varient leurs couleurs à l'infini. J'en ai fuff- 
famment raffemblé de chaque efpèce pour qu'un Chymifte pût 
en faire l'analyle. 

eh 


2683 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Tel eft l'état du Véfuve au 9 Avril 1755, mais je me 
garderois bien de répondre que dès demain même on ny 
trouvâät pas de grands changemens, l'expérience n'ayant fait 
connoître que c'eft un pays où les plus étonnantes métamor- 
phofes font quelquefois l'ouvrage d'un moment. 

En repañlant entre les deux montagnes, je me fuis arrêté 
à confidérer ce que ce pouvoit être que ces efpèces de murs 
qui entrecoupent celle de Somma depuis fa cime jufqu'au 
niveau de la gorge: j'obfervois que chacun de ces murs étoit 
de Ja même épaifleur dans toute fon étendue; que les uns 
s'élevoient perpendiculairement; que les autres étoient plus 
ou moins obliques; qu'il y en avoit d'horizontaux & dans 
toutes fortes de pofitions, de manière qu'ils fe croifoient fort 
fouvent. J'en ai fait rompre quelques morceaux , & au pre- 
mier coup d'œil, j'ai reconnu que ces murs m’étoient autre 
chofe que des filons ou rameaux d’une lave très-pure ; d'où 
jai conclu qu'elle avoit rempli les fentes qui s’étoient faites 
anciennement de ce côté-là par l'effort des éruptions; & il 
feroit impoffible que cela füt arrivé, s’il n'étoit pas vrai que 
originairement le Véfuve & Somma ne formoient qu'une 
même montagne, & que la gorge qui les fépare aujourd'hui 
faifoit alors partie de fon gouffre. 

On fe perfuade aflez généralement que la Solfatare jette 
des flammes lorfque le Véfuve brûle, & qu'elle ceffe d'en jeter 
lorfqu'il s'éteint ; d'où l’on infère que ces volcans fe commu- 
niquent par des cavernes foûterraines. D'un autre côté, lon 
fuppofe que le foyer des volcans ne fe trouve ni au pied, ni 
au centre des montagnes, mais qu'il eft voifm du fommet. 

Si je l'ofe dire, ces deux hypothèfes impliquent contradic- 
tion. En eflet, s'il eft vrai qu'il y ait une communication 
entre le Véfuve & la Solfatare, ce ne peut être que par des 
cavernes, qui devant néceffairement s'étendre, ou fous Naples, 
ou fous le golfe, font conféquemment à une profondeur qui 
pafle de beaucoup le niveau de la mer; & dès-là il ne peut 
pas être vrai que le foyer des volcans foit fort près de la cime 
des montagnes. 


DA 5° SÜCRRIENN: CAES 269 

Ils les auroient bien-1ôt détruites entièrement, fi c’étoit 
d'elles qu'ils tiraffent cette immenfité de matières qu'ils con- 
fument & répandent dans leurs éruptions: mais pour fe 
convaincre que c'eft dans l'intérieur de Ja terre qu'ils la trouvent, 
il ne faut que fuivre les différens états par où ils pañfent fuc- 
ceffivement, 

1. Îls tombent quelquefois dans un calme fi grand, qu'on 
les croiroit éteints pour toüjours. Tel étoit le Véfuve avant 
Péruption qui arriva fous l'empire de Titus, & avant celle 
de 1631: on favoit fi peu que la première eût été précédée 
par aucune autre, que Strabon, en décrivant le Véfuve, n'en 
parle point comme fachant par tradition qu'il avoit brûlé, 
mais feulement comme le conjeurant. Il falloit bien auffi 
qu'avant f'autre éruption cette montagne fût reftée long-temps 
en repos, puifque dans fon intérieur il étoit venu une forêt 
où l'on alloit chaffer aux bêtes fauves; cependant il paroît 
très-probable que pendant cette inaétion apparente du volcan, 
les matières s’aflemblent & fe préparent. 

2. De leur mélange naït la fermentation. Dans fes com- 
mencemens elle eft fi peu fenfible au dehors, qu'à peine peut-on 
fe douter que le volcan ait ceffé d'être parfaitement tranquille; 
& lorfqu'elle fe manifefte, c'eft par des fumées qui, en augmen- 
tant chaque jour, font connoître fon redoublement. 

3° L'inflammation qui en réfulte après un temps plus ou 
moins long, a aufli fon accroiffement progreflif: elle s'annonce 
d'abord par une lueur qu'on aperçoit de nuit au haut de la 
montagne, enfuite par des flammes qu'on y voit pointer de 
temps en temps, enfin par leur continuité. 

4 Les explofions ne tardent pas à fe faire entendre, fins 
qu'on en voie les eflets tant que les matières fondues ne font 
pas foûlevées à une certaine hauteur dans le foüpirail; mais 
une fois parvenues à ce degré, dans leurs bouillonnemens elles 
lancent de tous côtés des éclats de leur écume, & même 
des quartiers de rocher, qui s'échappant par les ouvertures 
de la voûte, viennent bien-tôt à paroître dans f'entonnoir, & 
peu à peu au deflus de fes bords. 

LI iïj 


270 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

5 Alors l’embrafement acquiert fans ceilé une nouvelle 
violence; les matières liquéfices fe dilatent à l'extrême; l'in- 
térieur de la montagne fe remplit de plus en plus; elle verfe 
enfin ou crève par fon côté le plus foible, & voilà ce qu'on 
appelle l'éruption. Elle dure tant qu'elle trouve une aflez grande 
affluence de matières dans les réfervoirs de la montagne : 
l'embrafement fe ralentit à melure qu'elles diminuent, & il 
finit lorfqu’elles manquent; car on ne conçoit pas qu'il pût 
ceffer s'il trouvoit de quoi s'entretenir. 

H feroit encore plus difficile de comprendre comment un 
volcan, après être reflé éteint pendant des fiècles entiers, 
comme l'a été le Véfuve, pourroit fe rallumer, fi l'on n’admet- 
toit pas que fes magafins ayant été épuifés, il a fallu ce temps- 
à pour les remplir ; hypothèfe qui fuppofe la reproduétion, 
ou du moins le remplacement des matières. 11 femble en 
effet que ce ne puifle être qu'autant qu'il en vient en plus 
ou moins d'abondance, qu'on voit arriver ces ralentiffemens & 
ces redoublemens qui font fi ordinaires pendant l'éruption. 

C'eft un fait conftaté par l'expérience de tous les temps, 
que plus le volcan s'approche de ce dernier état, moins on 
eft fujet aux tremblemens de terre, fi lon en excepte les 
fecoufles qui fe font quelquefois fentir dans fes environs : 

v'au contraire, plus il approche de l'état d’inaétion , plus les 
tremblemens de terre font fréquens, étendus & terribles ; 
& qu'on eft long-temps fans en effuyer lorfqu'il a fait une 
éruption confidérable. Une pareille correfpondance marque 
bien que ces deux phénomènes ont pour caufe commune les 
feux foûterrains, dont les volcans ne font que les évents & 
les foûpiraux ; aufii fouffre-t-on beaucoup moins à Naples 
des tremblemens de terre que dans tout le refte du Royaume, 
par la raifon fans doute que cette Capitale fe trouve fur une 
mine, éventée d'un côté par la Solfatare, & de l'autre par 
le Véfuve. En un mot, tout concourt à perfuader que les 
matières, dont linflammation fubite ébranle une partie du 
continent, font les mêmes, qui, par leur fur'abondance, forment 
les volcans: qu'ainfi elles doivent avoir leur dépôt dans les 


DES SCIENCES. 271 
entrailles de la terre, & que par conféquent le foyer des 
montagnes ardentes eft fort éloigné de leur fommet. 

Si l'embrafement ne fe faifoit pas même au defous de leurs 
racines, comment cauferoit-il ces tremblemens de terre, ou 
pluftôt ces fecoufles qui fe font fouvent fentir aflez au loin 
dans tous fes environs ? il n'ébranleroit au plus que leur fommet, 
d'autant qu'il n'eft pas befoin d'un grand efort pour y faire 
une ouverture, attendu que cette partie fupérieure n’eft com- 
pofée que de cendres, de fables & de petites pierres, qui 
n'ayant aucune cohérence , fe remuent, fe déplacent & fe 
foülèvent très-aifément. Peut-on fe difpenfer d’ailleurs d'ad- 
mettre des cavités immenfes, quand on confidère l'énorme 
quantité de matières qui fortent dans chaque éruption, & 
qu'on fe repréfente combien il doit en avoir été confumé par 
le feu ? mais que faut-il de plus pour démontrer la profondeur 
des volcans que celle de labime, qu'on voit aétuellement au 
milieu de la nouvelle montagne qui s'eft élevée depuis trois 
mois dans l'entonnoir du Véfuve! 

Quant à la communication qu’on fuppole entre ce volcan 
& la Solfatare, il eft aflez vrai-femblable qu'elle exifte; mais 
ce n'eft pas aflurément par la correfpondance de leurs effets 
qu'on peut en Juger, car ils n'en ont aucune; & je n’en puis 
pas douter, ayant reconnu par moi-même, perdant éruption 
de 1751, & pendant celle que nous venons d’avoir, qu'il 
n'étoit furvenu aucun changement à la Solfatare, puifqu'il n'y 
paroïfloit pas la moindre flamme, & qu'elle ne fumoit ni 
plus ni moins qu'avant l'embrafement du Véfuve. 

Plufieurs Phyficiens du pays veulent auffi qu'il y ait quelque 
relation entre ce volcan & celui qui eften Sicile. Pour accré- 
diter cette opinion, les uns difent que le premier ne s'allume 
jamais fans que le fecond s'embrafe auffi-tôt; & que de même 
il n'arrive point d'éruption à 'Etna, fans qu'il y en ait une 
en même temps au Véfuve: d'autres prétendent au contraire, 
que fi l'un de ces volcans s'enflamme, l'autre s'éteint {ur le 
champ. 

II fe peut que ces évènemens fe foient quelquefois ren- 


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termes de la , 
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272 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
contrés de l'une ou de l’autre manière, avec une exactitude 
de rapports telle qu'on l'allègue; mais voici des faits récens 
qui font bien oppofés à à cette combinaifon. 

Nous eumes ici en 175$ 1 une éruption qui dura pendant 
trois mois, & il n'y en eut point en Sicile: il eft vrai que 
l'Etna en fait une actuellement, mais ce n'’eft que depuis les 
premiers jours de Mars, & celle du Véfuve avoit commencé 
dès le 3 Décembre. D'ailleurs, on ne peut pas dire que la 
fm de lune ait été l'époque de l'autre, puifque toutes deux 
ont fubfifté en même temps pendant plufieurs femaines. 

Comme celle de l'Etna a été accompagnée de circonftances 
qui peuvent aider à reéifer fes connoiflances qu'on a déjà fur 
les volcans; je crois devoir rapporter ici ce qui s ’eft pafié de plus 
fingulier dans cette éruption. Elle s’annonça par un fr grand 
embrafement , qu'il éclairoit plus de vingt-quatre milles de 
pays, du côté de Catanea: les explofions furent bien-tôt 
fi fréquentes, que dès le 3 Mars on apercevoit une nouvelle 
montagne au deflus du fommet de l’ancienne, de la même 
manière que nous l'avons vü au Véfuve dans ces derniers 
temps. Enfin, les Jurats de Mafcali ont mandé le 1 2 à cette 
Cour: « Que le 9 du même mois les explofions de l'Etna 
devinrent terribles ; que a fumée augmenta à tel point, que 
dès quatre heüres après midi tout le ciel en fut obfcurci, 
malgré la fureur de l’embrafement : qu'à l'entrée de la nuit 
il commença à pleuvoir un déluge de petites pierres, pefant 
jufqu’à trois onces, dont tout le pays & les cantons circon- 
voifins furent inondés ; qu'à cette pluie affreufe, qui dura cinq 
quarts d'heure, en fuccéda une autre de Rire noires, qui 
continua toute la nuit; que le lendemain, fur les huit heures 
du matin, le fonimet de l'Etna vomit un fleuve d’eau com- 
parable au Nil: que les anciennes laves les plus impraticables , 
par leurs montuofités, leurs coupures & leurs pointes, furent 
»en un clin d'œil converties, par ce torrent, en une vafte 
plaine de fable, fur laquelle on pouvoit fe promener en car- 
roffe : que el qui heureufement n'avoit coulé que pendant 
un demi-quart d'heure, étoit fi chaude, qu'un Payfan s'y 

étoit 


DÉE S' SCIE IN CLEIS 273 
étoit brûlé les doigts; que les pierres & le fable qu'elle avoit 
chariés avec elle, ne différoient en rien des pierres & du fable 
de la mer; que de plus, on leur trouvoit abfolument la même 
odeur & le même goût de fel ; qu'après l'inondation il étoit 
forti de la même bouche un petit ruifleau de feu qui coula 
pendant vingt-quatre heures; que le 1 1, à un mille environ 
au deflous de cette bouche, il fe fit une crevafle par où dé- 
boucha une lave qui pouvoit avoir cent toifes de largeur; 
qu'enfin cette lave avoit déjà deux milles d'étendue, & qu'elle 
continuoit fon cours au travers de la campagne ». 

L'inondation dont if eft parlé ici, & le charroi de matières 
entièrement femblables à celles qui fe rencontrent au fond 
de la mer, n'eft pas un phénomène fans exemple, mais il 
nen mérite pas moins d'attention. Les Phyficiens qui ont 
pénétré le plus avant dans les fecrets de [a Nature, f'attribuent 
à l'eau des pluies ramaffées dans les cavités des montagnes où 
font les volcans; mais pour qu'un pareil fyftème eût quelque 
probabilité, il faudroit fuppofer une quantité immenfe de ces 
eaux, puifque celles qui furent rejetées par le Véfuve en 1631 
étoient en fi grande abondance, qu'elles formèrent plufieurs 
torrens, qui s'étant répandus de tous côtés, ravagèrent les 
campagnes, déracinèrent les arbres, détruifirent les édifices, 
engloutirent plus de cinq cents perfonnes qui étoient en pro- 
ceffion vers la Tour-du-Grec, noyèrent un grand nombre 
d'habitans dans les environs du Véfuve, & portèrent la défo- 
lation jufqu'auprès de Naples, ayant entraîné à la mer une 
foule de malheureux qui fuyoient vers la Capitale. IL faut 
® certainement un prodigieux amas d'eau pour qu'il en réfulte 
d'auffi grands effets; & quand il feroit poffible que les pluies 
euffent été fufffantes pour la fournir, comment auroit-elle 

à fe raffembler dans des cavités, où il y a toüjours beau- 
coup plus de chaleur qu'il n'en eft befoin pour diffiper ces 
eaux en vapeurs à mefure qu'elles tombent, d'autant que plus 
elles font abondantes, plus cette chaleur augmente, comme 
l'expérience le prouve ici Journellement ? 

Ïl y a plus, cet affemblage énorme d'eaux de pluie ne 

Say. étrang. Tome 1V. . Mn 


274 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fauroit être l'ouvrage d'un moment, il faudroit donc qu'il 
fe füt fait avant l'éruption ; & en ce cas, elles auroient été 
rejetées dès le premier inftant de l'embrafement incompatible 
avec ces eaux, qui d'ailleurs auroïent cédé la place aux mi- 
néraux fondus, infiniment plus pefans qu'elles. Or l'éruption 
du Véfuve en 1631 ,commença le 1 6 Décembre au matin, 
& l’inondation n'arriva que le 17 : léruption de l'Etna fubfif- 
toit dès les premiers jours de Mars, & ce n'a été que le 10 
qu'il a vomi tout-à-coup une aflez grande quantité d'eaux 
pour qu'elles formaffent un fleuve comparableau Nil. Dira-t-on 
que depuis le premier inftant de inflammation jufqu'à celui 
de leur débordement elles avoient bouilli pêle-méêle avec les 
matières grafles, métalliques & bitumineufes qui s'étoient 
embrafées? ce feroit fuppoler limpoffible. N'eft-il pas plus 
naturel de penfer que ces eaux étant entrées fubitément dans 
le gouffre de 'Etna, en ont été auffi-tôt chaffées par l'effer- 
vefcence d’une matière plus pefante, à laquelle elles étoient 
entièrement hétérogènes ? 

Si les partifans de l'opinion contraire en ont douté, c’eft 
que faute d’avoir vû par eux-mêmes, ou d'avoir vü d'affez 
près, ils ont cru que le foyer des volcans réfidoit vers le haut 
des montagnes; c'eft qu'ils ont regardé cette prétendue proxi- 
mité comme une conféquence de l'abaiffement du fommet 
pendant les éruptions: mais les faits que nous avons aétuelle- 
ment fous les yeux, prouvent évidemment que ce foyer 
pénètre fort avant dans les entrailles de la terre; & s'il 
arrive quelquefois que les montagnes ardentes diminuent de 
hauteur, c'eft qu'étant ébranlées par les explofions, leur partie 
fupérieure s'écroule plus où moins, & d'autant plus aifément, 
qu'elle n'eft, ainfi que je l'ai déjà dit, compofée que de cendres, 
de fable, de pierres & de fcories, amoncelées fans aucune 
cohérence. La petite montagne qui s’eft élevée en dernier lieu 
fur la crête du Véfuve, ne montret-elle pas que fes éruptions 
ont pü également le haufler ou le baifler, & que par confé- 
quent la rune de fon fommet ne prouve rien contre fa pro- 
fondeur? Il ne faut que des explofions multipliées pour qu'il 


D'E s) SCIE N CE'S 275 
furpaffe en hauteur de mont Etna, & même, fi l'on veut, 
le Pic de Tenerife. 

Quand même ces montagnes auroient été à moitié détruites 
par le feu, il ne faudroit pas en conclurre qu'il eût trouvé 
fon aliment dans leur {ein. Pour qu’il en füt ainfi, il faudroit 
que les parties fuflent plus grandes que le tout, car le volume 
d'une lave fortie du Véfuve excède de beaucoup la mafle 
de tout ce qu'il peut perdre dans une éruption. Avec le temps, 
le feu confume les fourneaux les plus folides, & cependant 
ilste fournifient rien à fon entretien. Il en eft de l'intérieur 
des montagnes ardentes, comme du tuyau d’une cheminée 
qui donne paffage à la fumée & à la flamme, fans contribuer 
à leur nourriture. Les fels & les foufies qu'on voit dans ce 
foûpirail ou fur fes bords, fe font exaltés des minéraux fon- 
dus, ou font venus des cavernes foûterraines avec les matières 
enflammées, qui ne pouvant plus y être contenues à caufe de 
leur extrême dilatation, fe font poriées où elles ont trouvé le 
moins de réfiftance, & fe font élevées dans le foùpirail à pro- 
portion du degré de chaleur qui les raréfioit. 

* Enfin, fi les volcans fe trouvent dans les hautes montagnes, 
ce n’eft point qu'elles contiennent en elles-mêmes des matières 
inflammables dont ils foient l'ouvrage, mais ces montagnes 
exiftent par la feule raifon qu'il y a là des volcans qui les ont 

roduites, ou tout d’un coup, comme le Monte-nuovo, près 
de Poufoles, & l'ifle voifine de Santorin, ou par des explo- 
fions fucceflives, comme les nouvelles montagnes qui cou- 
ronnent préfentement le Véfuve & l'Etna. 

Lorfque les feux foûterrains, trop refferrés dans leurs ca- 
vernes, fe font fait jour fur la furface de la terre, c'étoit 
certainement par le côté qu'ils ont trouvé le plus foible, & 
dès-là ce ne pouvoit pas être au travers d’une haute montagne; 
mais dans la fuite cette montagne s'eft formée par le jet des 
cendres, des fcories & des pierres, qui, en retombant, fe 
font amoncelées les unes fur les autres autour de l'ouverture 
par où le volcan les avoit lancées dans les airs. Une mixtion 
épaifle de toutes fortes de minéraux fondus avant bien-tôt 


Mni; 


276 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
furmonté l'édifice naïflant, & s'étant débordée de toutes parts, 
en a confolidé & accrü les premiers fondemens : le foûpirail, 
qui { trouvoit au centre, fournifflant toüjours au volcan le 
même débouché, il eft furvenu de nouvelles explofions, fui- 
vies d'autres verfemens de matière enflammée, tellement 
qu'au moyen de ces éruptions réitérées, ce qui n'étoit d'abord 
qu'un monticule, eft devenu fucceffivement une grande mon- 
tagne, confervant toûjours dans fon milieu lévent & le canal 
des matières dont elle eft la production. Qu'on la confidère 
intérieurement, on n'y verra point ces couches horizoïitales 
& parallèles qu'on trouve dans toutes les autres montagnes. 

ll fe peut qu'après une éruption, cette ouverture faite par 
le volcan, paroïfie remplie ; mais elle n’eft que fermée par 
une voûte que l’écume des matières fondues a conftruite: le 
feu étant venu à manquer, leur fuperficie s’eft d’abord con- 
gelée toute en une mafle, qui s’eft accrochée où le canal 
s'eft trouvé trop étroit pour fon paffage , tandis que les matières 
continuant à baifler, foit par leur écoulement, foit par {eur 
condenfation , ont laiffé un grand efpace entr'elles & la voûte 
qui s’en eft détachée. Qu'on la frappe avec un peu de force, 
le vuide qui eft au deflous eft décélé par ie retentiflement 
que le coup produit:.le volcan vient -il à fe rallumer, les 
matières enflammces fe dilatent, montent dans le canal, & à 
l'aide de l'air comprimé entrelles & la voûte, la foûlèvent , Ja 
crèvent ou la font fauter en éclats, & il s'en forme une autre 
lorfque l'activité du feu vient à fe ralentir. 

Ce n'eft donc ni par le plus ou le moins d'élévation de 
cette voûte, ni par la ruine que le fommet de la montagne 
peut fouffrir pendant une éruption, qu'on doit juger de la 
profondeur des volcans: & dès qu'on a reconnu que cette 
profondeur eft immen{e, quelle raifon peut-il refter pour ne 
pas croire que les eaux qu'ils vomiflent quelquefois en fi 
grande abondance, font effectivement celles de la mer? creu- 
fant de leur côté, tandis que du fien le feu mine fous terre, 
une communication s'ouvre à la fin entrelles & le volcan : 
une fois engouffrées, ces eaux que prefle continuellement 


BUENS ;SIGRILE 1N, CES 277 
la colonne énorme de celles qui les fuivent, & qui font 
chaffées par l'ébullition de la matière enflammée, s’évaporent, 
fe difperfent, fe portent par-tout où elles ont de moindres 
obftacles à vaincre; & comme la violence du feu à raréfé 
l'air à l'extrême dans toute l'étendue du canal, elles y montent 
jufqu'à ce qu'elles trouvent une iflue pour s'échapper au dehors ; 
mais la communication fe ferme bien-1ôt, ou par les fables 
qu'elles entrainent, ou par la congélation d'une partie des 
minéraux fondus, ou par quelqu'autre digue, qui ne peut 
manquer de fe former dans le bouleverfement affreux qu'excite 
infailliblement le contrafte de ces eaux avec des matières 
graffes, métalliques, bitumineufes & réduites en fufion. 

: Comment auroit-il pû arriver que dans Æerculanum, non 
feulement les lieux découverts, mais tous les édifices, fe fuffent 
exactement remplis d'une efpèce de ciment bien moins dur 
que la lave, fi ce n'avoit été à l'aide des torrens de cendre 
& de fable chariés par les eaux? Pline le jeune fait affez en- 
tendre d'où ces eaux provenoient, lorfqu'il dit que pendant 
ce defaftre, dont il avoit été témoin, la mer fembloit alter- 
nativement s'engloutir en elle-même, & être repouflée par 
les fecoufies de la terre. 

Les auteurs qui ont décrit l'éruption de 1631, après en 
avoir été fpectateurs, s'accordent tous à dire qu'immédiatement 
avant que le Véfuve rejetàt cette prodigicufe quantité d’eau 
qui caufa tant de ravages, la mer baiffa confidérablement dans 
le golfe; quelques-uns affurent même que le port de Naples 
étoit refté un moment à {ec, & qu'après l’inondation on trou- 
voit dans les lits qu'elle s'étoit faits toutes fortes de coquillages 
qui avoient contracté l'odeur du foufre. I femble d’ailleurs 
que l'influence de la mer, dans ce terrible évènement, foit 
un fait confacré par les infcriptions qui furent faites alors. 

L'éruption de 1698 fut précédée cinq fois, pendant 
l'efpace d'une heure, d'un reflux de la mer fi fenfible, que 
les Pêcheurs qui venoient de jeter leurs filets, au lieu de 
prendre le poiflon dans l'eau, le ramafsèrent fur le fable, & 
bien-tôt après il furvint une pluie abondante, qui ne s'étendant 


M m ii) 


278 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
point au-delà des environs du Véfuve, tomba toûjours péle- 
mêle avec les cendres qu'il lançoit en l'air dans fes explofions 
continuelles. Il paroït d'autant moins douteux que ce fut l'eau 
de la mer, qu'il ne plut que dans l'enceinte où les cendres 
fe portèrent; que le ciel étoit très-ferein par-tout ailleurs ; 
que les herbes, les fleurs & les feuilles, pour peu qu'elles 
euffent été mouillées de cette eau, fe defléchoient à F'inftant, 
quoique ce füt au mois de Mai; qu'elle étoit d’un froid à 
glacer ; que par-tout où la terre en fut humeétée, elle fe 
trouva couverte d’un fel blanc comme la neige, ayant le goût 
du fel marin ; que le lit de quelques torrens qui fe formèrent, 
étoit parfemé de toutes fortes de coquillages, fentant le foufre, 
comme il étoit arrivé en 1631, & qu'après cette pluie, la 
mer rejeta fur le rivage une grande quantité de poiïflons morts; 
circonftance qui femble prouver que fr l'inondation ne fut 
pas plus confidérable alors, c'eft que les matières enflammées 
refoulèrent la plus grande partie des eaux, & les forcèrent à 
rentrer dans la mer, où elles portèrent la contagion, le foufre 
ayant été fufhfant pour les corrompre. 

Suivant toute apparence, il y eut un pareil refoulement 
des eaux pendant l'éruption de 1714, car if ne tomba qu'une 
pluie corrofive, femblable à celle dont il vient d'être parlé, 
quoiqu’on eût obfervé à Naples que la mer s'étoit retirée de 
fept pas, laiflant les poiflons à fec; qu'elle n'étoit rentrée dans 
fon lit ordinaire qu'un quart d'heure après, & que le mou- 
vement de fon retour avoit été très-fubit. 

Ces fortes de phénomènes ont accompagné beaucoup 
d’autres éruptions, & peut-être même plus qu'on ne croit, 
faute d'avoir obfervé la mer aflez foigneufement pendant 
qu'elles ont duré. Elle eft voifine de toutes les montagnes 
ardentes, celles qui s'en trouvent éloignées de quarante ou 
cinquante lieues pouvant également lui communiquer par des 
cavernes foûterraines; & cette proximité eft une circonftance 
bien remarquable. Qui fait fi le fuintement de fes eaux, fiktrées 
au travers des corps intermédiaires, n’eft pas la première caufe 
de Ja fermentation? fi une quantité médiocre n'occafionne 


D'E1S. SCIE N CE 279 
pas l'embrafement? fr un peu trop d'abondance n'excite pas 
les explofions & enfuite les éruptions? au moins paroit-il très- 
probable qu'une affluence exceflive produit ces inondations 
dont l'Etna vient de nous donner un exemple; car peut-on 
les attribuer à d'autres eaux qu'à celles de la mer, quand on 
examine la nature, le goût & la conformation du fable & 
des cailloux fortis de ce volcan avec limmenfe quantité d'eau 
qu'il a rejetée. 

Ce n'eft pas, après tout, qu'une pareille inondation ne 
puifle être caufée par les neiges, lorfqu'elles s'accumulent en 
aflez grande quantité fur une montagne ardente, & qu'elles 
viennent à {e fondre par fon embrafement ; mais ce cas étant 
fort rare, il peut fervir d'exception & non pas de règle. 

Si je me fuis permis ces réflexions, ce n'eft pas affurément 
que j'aie voulu m'ériger en critique ou en réformateur de 
lopinion où l'on eft aflez généralement fur les caufes & les 
eflets des volcans; mais ayant fuivi de près & fort attentive- 
ment les opérations du Véfuve pendant deux éruptions très- 
longués, j'ai cru qu'il ne pouvoit être qu'utile que je rappor- 
tafle exactement des obfervations conftatées par un examen 
réitéré & des conjeétures appuyées fur des faits certains, efpé- 
rant qu'elles pourroient contribuer à la découverte de quelque 
vérité phyfique, dont je laifle fa recherche à ceux qui en 
font leur principale étude, & à qui la Nature femble avoir 
déjà révélé la plus grande partie de fes myftères. 


P.S$. Comme on ne s'étoit point aperçû qu'il fût arrivé 
rien de nouveau au Véfuve depuis le 9 Avril, je n'imaginois 
pas devoir y retourner fi promptement, mais je n'ai pû 
refufer de partager, avec M. Taitbout , honneur d'y accom- 
pagner aujourd'hui M.5" le Margrave de Bareith. 

I etoit plaifant de voir le beau-frère du Roi de Pruffe 
monté fur un äne, affis fur un bât, ayant pour gardes quatre 
Payfans en chemife, en caleçons & pieds nuds. C’eft dans 
ce brillant appareil que Son Alteffe eft arrivée entre les deux 
montagnes; de-là elle a efcaladé le Véfuve, remorquée par 


De Portici le 
4 juin 1755 


280 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
deux de fes Satellites, & pouffée par les deux autres. Un 
moment après elle s'eft tranfportée fur la nouvelle montagne. 

Les feuls changemens que j'y aie remarqués, font; r.° que 
les bords du gouffre qui en fait le centre, s'étant éboulés 
intérieurement, fes parois ne font plus perpendiculaires, & 
fe trouvent prefque par-tout dépouillées de l’efpèce d’enduit 
qui les revêtifloit. 

2.7 Qu'en conféquence de ces éboulemens, l'ouverture 
du gouffre s'eft élargie. 

3. Que le bruit qui fe fait entendre dans le fond, ne 
paroït pas dans un fi grand éloignement qu'il m'avoit femblé 
l'être au 9 Avril, & qu'il eft préfentement accompagné 
d’explofions. 

4° Enfin, qu’en jetant de grofles pierres dans cet abime, 
on entend le bruit de leur chüte, tel que l'occafionneroit un 
corps pefant qui tomberoit dans üne citerne où l'eau feron 
très - profonde. 

I réfulte de ces changemens, que le volcan travaille beau- 
coup, que les matières fe font élevées dans le gouffre, & 
que, fuivant les apparences, elles font dans une grande fufion ; 
conjectures d'autant plus vrai-femblables, que la fumée a con- 
fidérablement augmenté depuis quelques jours, & que la 
plufpart des bouches qui font fur le revers du Véfuve exhalent 
une grande chaleur. 

Le Prince a tout examiné en Philofophe: M. de Ia 
Condamine étoit de ce voyage, ce qui ne pouvoit manquer 
d'en augmenter infiniment les agrémens pour quiconque eft 
auffi fenfible que moi au plaïlir d'entendre raifonner un 
Académicien célèbre qui a tant vü, & fi bien vû. Vifa melus, 
quäm audita narrari pofunt. 


At 


OBSERVATIO 


DIS S CAEN C Ets 28r 


OBSERVATIO ECLIPSIS LUNÆ,; 
DIE 27 MARTII ANNI M. DCCLV 
1 AU D'AUTESA CO ETES" SR PE PRORNEE 
IN DOMO PATRUM CONGREGATIONIS ORATORIL. 


À JOANNE CHEVALIER, ejufdem Congregationis prefbytero, 
Regiæ Londinenfis Societatis Socio, Regiæque Parifienfis 
Scientiarum Academix Correfpondenti. 


Toro optico oto pedum peraéta eft obfervatio, cœlo 
fereno ac claro. 
Horä pofimeridiana 
RAT. veri, 
ro, 29250! ! Initium penumbræ dubium. 
10. 33. 35 Initium Eclipfs dubium. 
10. 34 5 Certo jam inceperat. 
10. 44 © Umbra ad mare Humorum. 
10. 44. 53 Umbra ad Grimaldum. 
10. 47. 58 Grimaldus totus in umbrä. 
10. 51. 14 Mare Humorum totum in umbrä. 
10. 53. 29 Tycho incipit mergi. 
10. 5$. 14 Tycho totus mergitur. 
11. 8. 4 Umbra ad Reinhoïldum. 
11. 19. 22 Umbram ingreditur Copernicus. 
1f. 24. 52 Umbra ad mare Neétaris. 
11. 33. 50 Totum in umbrä. 
11. 35. 24 Umbra ad mare Tranquillitatis: 
11. 45. 46 Promontorium acutum in umbrä. 


IMMERSIONES. 


EMERSIONES. 


12. 4. 38 Incipit emergere ab umbrä Copernicus. 
12. 7. 40 Totus Copernicus extra umbram. 

12. 9. 38 Incipit egredi Grimaldus. 
12. 12. 38 Totus Grimaldus extra umbram. 


Say. étrang, Tome 1V. . Nn 


282 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Hor& poflmeridiana k 


temporis vert. 
12. 31. 37 Incipit emergere mare Fœcunditatis; 
12. 36. 41 Emergit mare Humorum. 
12. 39. 40 Incipit emergere Capuanus. 
r2. 48% 30 Egreditur Schicardus. 
12. 51. 40 Emergit Tycho. 
12. 58. 9 Totum mare Neclaris egrediturs 
13. 13. 2 Finis Eclipfs. 
13. 16. so Finis penumbræ dubius. 


EMERSIONES, 


OBsERVATIO Eczrpsis LUNÆ, habita Uliffippone- 
in regià domo bearfine Virinés à MNeceffitaribus ,. 


die 4 Februarii anni 1757. 


Hanc obférvationem peregi cum focio meo P. Theodoro 
de Almeida, Philofophiæ publico Profeffore. Lunam obfer- 
vavi tubo optico novem pedes longo, cujus lens ocularis 
focum habebat ad quatuor pollices & unam ineam. Vitrum 
cœruleum planum adhibui ad obfervandam ingreflum ma- 
cularum in umbram, quem citiüs evenifle reperi, quäm cum 
folo tubo optico ufus fam, quantitate eà temporis quam infrà 
defignabo. Vitrum rss comparare non potui : Lunæ imago 
adhibito vitro cœruleo, alba apparebat, quin oculos offen- 
deret. 

Initio Eclipfs celum férenum clarumque fuit;:poftea nu- 
bilum faétum, obfervatio interrupta fuit. 


ÎIMMERSIONES, Manë, tempore vero: 
Initium penumbræ . . . .. Mo on tt get 06 
Initium dubium Edclipfs. . . . .. Dear M FA: 
Certo inceperat. . . .... +. ee MAR 7130 
Umbra ad Ariftarchum, vitro cœruleo Dfcrentia: 
adhibitos: rat tierce SO ol 2 , 
Solo tubo optico adhibito . ..:.... 5. ©. 50 


Keplerus obfervatus tubo optico & vitro 
cœruleo, umbram ingreditur. . .... S. 13. 4 40 


Sole tubo opticos estelle eee ete Ds Rens Qi 


D'Eis. S'a t'E N'c/rNe 283 


IMMERSIONES, Manë, temspore vero. 


umbram. .... Lee D'hte rte Se ET ee 38”, 
SOIOE DO NOPECO oies a iele ee) 028 ele Se (D SU O , 
Umbra ad Eudoxum. . ..... Ho 27e UE 
Mare Serenitatis ingreditur umbram. . . 5. 30. 10 


Umbra ad Copernicum, vitro cœruleo 
QUHIDITO Re ee mte eee sUobe se #era 5: 36. 48 34 


SO10NEUDD | OPHCO Us ee Le ce se le ele ge 97e 22 


Plato vitro cœruleo obfervatus ingreditur Differentia: 


Nubes Lunam occultant ufque ad horam 5. 52. 10 
Marc Crifium ad umbram. . . .. HR USE 
NICE A TRE le de © ele ele oc le 5.159.180 x 
HOFUNR MEN PIUTS à Eee do ielele cho ele ee (HOME 


Mare Fæœcunditatis umbram ingreditur.… 6. 7. 41 
Umbra ad Promontorium acutum. . .. 6. 8. 33 
Mare Nectaris umbram ingreditur. . . . 6. 22. 51 
Umbra ad Langrenum. ........ PC CPMOE CN: 


Maxima tunc fuit obfcuratio, pofteäque nihil ampliüs 
obfervare potui, tm ob vapores horizontis, tüm ob cla- 
ritatem jam incipientis die. 


OBSERVATIONES EGCLIPSIUM SATELLITUM Jovis, 
Jfañæ Ulffippone, rele[copio Gregoriano 7 pedum. 


ÂAnno 1755, die 8 Maïi, emerfo primi Satellitis 

horä poflmeridianä, temporis veri. . .., 10" 20° 30". 
Die 16 Maï, Emerfo quarti Satellitis, horà poft- ; 

meridianà . .....:. GERS NEO BOL D3e ES 
Anno 1757, die 21 Marti, Immerfo totalis primi 

Satellitis, horä poftmeridianà, temp. veri 11. 1 gtx 
Die 22 Martii, Immerfo totalis tertii Satellitis, 

ROMA IUT EMEA ENT TL Mo: 02 
Lux Satellitis minui cœpit ...... DÉtous jet lé SHOT 54 
Die 7 Junii, cœle fereno, Emerfo primi Satellitis, 

horä poftmeridianà , temporis veri. . ... 10. 29. 21 
Die 8 Junii, cœlo nubilo, Emerfo fecundi Satellitis, 


horâ pofimeridianä, . .....,.,,.... 8. 32. 48 
Nni 


284 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Anno 1757, die 8 Junii, cœlo fereno & claro, emerfro 
tertii Satellitis, hora poilmeridianà . . ... 9h 36° 25” 


Nalla erat lux Lunæ, fed cœlum clarum, cùm factæ funt 
obfervationes. 


Nota. Le Père Chevalier remarque dans la* Lettre qui ac- 
compagnoit ces Obfervations, que dans la dernière Échipfe de 
Lune, il u'a pä avoir de verre jaune pour en faire l'épreuve, 
comme il l'auroit fouhaite ; qu'il n'a eu que des verres colorés 
en rouge à en bleu, mais que le verre rouge obfcurciffant trop 
la Lune, il ne s'eft fervi que du verre bleu, lequel étoit plan ; 
que ce verre ne lui a pas donné de J! grandes différences que 
celles que M. de Barros avoit remarquées à Paris: ce qu'il 
croit venir de ce que le verre bleu qu'il a employé n'avoit pas la 
méme nuance 7 etoit moins foncé que celui de M. de Barros. 
1] ajoûte qu'il faut auffi avoir égard à la différence de longueur 
des lunettes. 

Le ciel a été affez clair au commencement de l'Éclipfe, mais 
peu après il eff furvenu des nuages qui ont caché la Lune peu- 
dant quelque temps. 


DE S 1910 EN CUS 285 


ROFOUALE RCA Es 


SUR LE PHÉNOMÉNE 
DES 
ANNEAUX, COLORES 


Par M. pu Tour, Correfpondant de l’Académie. 


IE E phénomène des Anneaux colorés, obférvés par 

M. l'Abbé Mazéas, entre deux verres plans, ou pour 
mieux dire, fuppofés plans *, eft une découverte dont il a judi- 
cieufement profité, & qui nous a valu de fa part une fuite 
d'expériences d'autant plus intéreffantes, qu'elles fe rapportent 
à une branche de l'optique fur laquelle ce que Newton nous 
a donné, eft plus propre à faire admirer l'empreinte de fon 
génie qu'à convaincre & fatisfaire entièrement lefprit. De 
nouveaux faits femblent nous annoncer de nouvelles Iümières. 
Après avoir répété ces expériences, je les ai comparées avec 
celles des expériences de Newton, auxquelles elles font ana- 
logues: ce travail m'a conduit à quelques obfervations qui 
feront la matière de cet Ecrit. 


IT. Afluré, par les épreuves que je fis, que le frottement 
étoit prefque toüjours néceffaire, ainfi que le rapporte M. 
Abbé Mazéas, pour produire, entre des glaces planes, les 
couleurs ique la feule préffion produit entre une furface plane 
& la furface courbe d'un objeëtif de téleicope, tels que ceux 
que Newton a employés, je commençai par chercher à déméler 
quelle part le frottement pouvoit avoir à cet eflet, & je foup- 
çonnai qu’il pouvoit fervir à détacher de deffus les furfaces des 


* Je dis fuppofés plans , parce | appeler plans dans la füite, pour 
qu'ils ne le font qu’en apparence*, | les diftinguer des verres employés 
& que s'ils l'étoient abfolument, | par Newton, qui diffèrent beaucoup 
le phénomène n’auroit pas lieu; je | plus d’être plans. 
ne laiflerai pas cependant que de les 


Na ii 


Vey. Mém: 
des Sav. étrang, 
tome II, p. 26. 


Ibid, page je; 


Hiff. de l'Acad. 


1731P. 1e 


“ 


286 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
glaces, entre lefquelles ce frottement s'exerce, l'air qui y étoit 
adhérent. 

III. M. Petit le Médecin, nous a appris que l'air mouille 
le verre & la plufpart des corps folides ; en forte que les gouttes 
d'air, s’il eft permis de s'exprimer ainfr, ou les flocons d'air, 
qui font éparpillés fur leurs furfaces, & qu'il a fü y rendre 
vifibles, oppofent une certaine réfiftance à s'en laiffer détacher. 
On conçoit que fa les furfaces des deux glaces planes qu'on 
applique l'une fur l'autre, font revêtues de pareils flocons 
d'air, elles en font moins difpolées à fe toucher immédiate- 
ment, cs flocons d'air devant faire alors l'effet de toute autre 
matière logée entre les deux glaces : ils feront comprimés & 
aplatis quand on preffera les glaces l'une contre l'autre, mais 
ils ne le feront que jufqu'à un certain point, & il y aura 
toûjours un intervalle quelconque entrelles, capable, foit par 
fon épaifleur, foit en vertu de l'air qui occupe, d'empêcher 
le développement des anneaux colorés. Ce qui l'indique évi- 
demment, c'eft qu'on ne parvient point alors, quelque for- 
tement qu'on prefle les deux glaces planes, à y produire 
cette tache noire, qui eft l'effet & la marque d’un contact 
immédiat entre deux parties correfpondantes des deux glaces; 
car on fait que l'apparence de cette tache noire provient de 
ce que la lumière qui parvient à cet endroit ne s'y réfléchit 
pas, & fuit fa route directement comme à travers un milieu 
homogène, c'eft-ä-dire, comme fi en cette partie les deux 
glaces n'en faifoient qu'une. 

IV. C'eft toujours au point de contaét des deux glaces, 
ou du moins autour d'un point où il s'en faut infiniment peu 
qu'elles ne fe touchent, que fe forment les anneaux colorés, 
& on ne doit pas s'attendre de les voit naître entre des fur- 
faces planes fournies de flocons d'air, capables d'empêcher 
cette jonction immédiate ou ce rapprochement extrême: a 
preflion feule, quelque forte qu'on la fuppole, ne peut fuffre 
pour expulfer ces flocons d'air dé l'intervalle qui les fépare; 
elle tend à refouler cet air, fans tendre à le déplacer ; le frotte- 
ment y fupplée, & il eft fenfible qu'on peut l'employer avec 


DES SCIENCES. 287 
avantage à cet égard, en faifant gliffer les deux glaces l’une 
fur l'autre. On poufle & on chaffe en avant les flocons, d'air 
adhérens: & à force de répéter ce manége, on vient à bout 
de les détacher, ou tous , ou prefque tous; il reftera du moins 
des portions de ces glaces qui en feront totalement dépouillées. 
‘C'eft fur ces portions, qui dès-lors pourront fe toucher 
immédiatement, que fe formera la tache noire qu'envelop- 
pent les anneaux colorés. 

V. On a encore une indication manifefte de l’exiflence 
de cet air entre les deux glaces avant le frottement, & de 
fon expulfion opérée par le frottement, en ce que, fans le 
frottement, on tenteroit en vain, en les comprimant, de les 
faire tenir l’une à l’autre, comme elles fe tiennent quand elles 
ont convenablement été frottées lune contre l'autre. 

VI. J'ajoûterai que M. l'abbé Mazéas a lui-même obfervé 
que fi on fépare fubitement deux pareilles. glaces, où les 
anneaux colorés étoient formés, & qu'on les replace tout de 
fuite l'une fur Fautre, la fimple preffion fuffit alors pour y 
faire reparoître les couleurs, fur-tout fi ces glaces ont été 
précédemment chauffées ; ce qu'on doit attribuer à ce que 
le court intervalle de temps qui s'écoule entre le moment de 
la défunion & celui de la réunion des glaces, ne permet pas 
aux flocons d'air, qui en avoient été détachés en premier 
lieu, de s'y fixer de nouveau en afez grande quantité pour 
empècher que les glaces ne fe touchent nulle part immé- 
diatement. Quand les glaces ont été chauffées, les ocons 
d'air éprouvent encore plus de difficulté à s'y accrocher. 

VII. Si dans le cas où les anneaux colorés ne fe déve- 
loppent pas entre deux glaces appliquées l’une fur l'autre, if 
faut s'en prendre aux flocons d'air logés entr'elles, il en réfulte 
que pour faire réuffir l'expérience à l'aide de la fule preffion , 
& fans employer le frottement, il n'y a qu'à enduire. les fur- 
faces des glaces d’une légère couche d'une matière tenue, 
& avec laquelle Flair nait pas d'adhérence; la graiffe de 
mouton entrautres a ces qualités, mais il eft néceffaire 


que lenduit foit extrèmement mince. J'ai réuffi à préparer: 


Mém. des Sava 
étrang. tome IL, . 


page 29. 


288 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
mes glaces convenablement dans cette vüe, en écrafant un 
globule de fuif de la groffeur d’une tête d’épingle, & en 
l’étendant fur leurs furfaces, que j'effuyois enfuite légèrement 
avec un linge jufqu'à ce qu'elles ne paruflent prefque plus 
grafles. Il fuffloit alors d'appliquer les deux glaces l’une fur. 
l'autre pour produire des anneaux colorés, qui fe développoient 
prefque dans tous les endroits où je les preflois le moins 
du monde. 

VIIE Un procédé encore auffi fimple, & qui m'a réuffi 
également, eft de tremper les deux glaces dans de l'eau, où 
on frotte leurs furfaces avec le doigt pour en détacher les 
flocons d'air adhérens. J'ai éprouvé que fi on les effuie enfuite 
avec un morceau de peau, & qu'on les applique lune fur 
Jautre, la feule preflion fufft pour faire naître des anneaux 
colorés. 

IX. Pour m'aflurer de la valeur de mes conjettures à cet 
égard, & fi en effet en frottant mes verres dans l'eau, je les 
dépouillois des flocons d'air que je fuppolois y être adhérens, 
jai placé, dans un vafe plein d'eau, un morceau de glace 
que j'avois ainfi préparé, en mouillant fa furface & la frottant 
avec le doigt, & un autre morceau de glace qui n'avoit pas 
été frotté du tout: le vafe fut mis fous le récipient de a 
machine pneufatique; & loffque l'air eût été raréfié, la fur- 
face du morceau de glace qui n'avoit pas été frotté, parut 
couverte d'une infinité de bulles d'air, tandis que fur l'autre 
morceau il y en avoit très-peu, & qui y étoient difperfées 
de loin en loin. 

X. Arrétons-nous cependant à une queftion qu'on pour- 
roit me faire; fi le fuccès de l'expérience tentée avec des 
glaces planes, exige que l'air en ait été détaché de façon ou 
d'autre, comment arrive-t-il qu'elle réuflifle quand, en y 
employant des verres convexes, on n'a recours qu'à la feule 
preflion? n’adhère-t-il pas de même des flocons d'air aux 
furfaces des verres convexes? Ils y adhèrent de même, & ïül 
eft également néceffaire de les en détacher pour y faire déve- 
lopper les anneaux colorés; mais on en vient aifément à bout 


par 


s 


* 


TE LS ASS CIRE MNIICHIE SE 289 
par la fimple preflion, car il eft différent à cet égard, d'exécu- 
ter l'expérience avec des glaces planes ou qu'il y en ait une 
des deux qui foit convexe. Dans le premier cas, comme je 
l'ai déjà remarqué, les ocons d'air ne font pas follicités par 
la preffion à f déplacer, ils ne font que refoulés & aplatis, 
quelque rétréci que devienne lefpace où on les reflerre ; au 
lieu que dans le fecond cas, l'enare où les Hocons d'air font 
reflerrés par la preflion des glaces, formant néceffiirement 
un angle, qui, à commencer du point où les verres font le 
plus rapprochés l'un de l'autre, s'élargit à mefure qu'il s'avance 
vers les verres, donne lieu à ceux de ces flocons d'air, qui 
font preffés vers le centre, de gliffer vers les bords: ils ont 
ainfi la facilité d'abandonner leur premier pofte. Il en eft des 
flocons d'air, dans ces deux cas, comme d'un noyau de cerile | 
qu'on prefle entre les doigts, qui s'élance au loin fi les deux 
plans, entre lefquels il eft placé, forment un angle, mais qui 
y feroit fixé fi ces deux plans étoient parallèles. 

XI. On pourroit m'objecter de plus que les verres plans, 
placés dans le vuide, n’y deviennent pas plus propres à donner 
des couleurs, Jorfqu'on fe borne-à les preffer l'un contre 


Tue c'eft que le vuide de la machine pneumatique 


n'a pas pour dépouiller les vêrres des flocons d'air collés 
fur leurs furfaces. Il eft aifé de s’en affurer, en plongeant les 
verres dans l'eau; malgré {a raréfaétion de l'air ambiant qu'on 
pomper, ils ne laifferont pas que d'être tapiffés d’une infi- 
nité de bulles d'air, devenues fenfibles par leur dilatation. 

XII. Au refle, indépendamment de toute conjedure, il 
ny a, à l'égard de ces différentes expériences, qu'à s’en tenir 
aux faits. Dans celles oùyon emploie un verre convexe, Ja 
preffion fait paroître fa tache noire ; ce qui ne laifféra aucun 
doute que les furfaces des verres ne fe touchent en cet endroit : 
dans celles au contraire où les deux verres font plans, & dans 
leur état naturel, la feule preflion n’y produit en aucun endroit 
la tache noire. Ils font donc toüjours féparés, malgré la pref 
fion, par un intervalle continu que l'air occupe. 

XII. Comme ceft toûjours autour de Ja tache noire, 


Sav, étrang. Tome IV. . Oo 


290 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
ceft-à-dire autour du point où les deux verres fe touchent 
immédiatement, que les anneaux colorés fe forment, il en 
réfulte que fi les glaces, qui, quelques planes qu'elles pa- 
roiflent, ont toûjours quelques parties de leurs furfaces qui 
s'élèvent au deflus des autres, font difpofées, foit naturelle- 
ment, foit en vertu de la preflion qu’elles efluient, de façon 
qu'elles s'entre-touchent réellement en divers endroits dif- 
tans les uns des autres, il en réfulte, dis-je, qu'il doit y avoir 
alors autant de taches noires & autant de fuites diftinctes 
d'anneaux colorés ; & c’efl ce que les obfervations confirment. 

XIV. S'il eft des cas où la tache noire pourroit n'être: 
pas enveloppée par les anneaux colorés, ce feroit celui où 
les deux glaces fe toucheroient réciproquement dans toute 
. Yétendue de leurs furfaces; alors elles ne formeroient qu'un 
feul corps homogène, que les rayons de lumière traverferoient 
directement, fans fe réfléchir fur le plan de contact que la 
tache noire occupoit en entier. 

XV. Quand les deux glaces fe touchent en deux endroits 
différens, & que les deux taches noires font aflez près l'une 
de l’autre, les anneaux colorés, qui enveloppent l’une de ces 
taches, fe confondent plus où moins avec en enve- 
loppent l'autre, en forte qu'on remarque des anneaüiX ou des 
arcs colorés qui font communs aux deux taches noires. , 

XVI. I neft pas abfolument néceflaire que les deux 
glaces fe touchent immédiatement pour donner lieu à l'appa- 
rence des anneaux colorés, il fuffit que leurs furfaces foient 
rapprochées à un certain point, que l'expérience indique; & 
c'eft ce qui arrive, quand, au lieu de la tache noire, on voit 
au centre des anneaux colorés une lame jaunâtre ou blancheître. 
Si dans ces circonftances on prefle ces deux glaces à l'endroit 
qu'occupe cette lame colorée, cette lame s'étend en tout fens, 
il s'en développe des anneaux diverfement colorés, & enfnr 
on fait paroître Ja tache noire, qui apprend que la preflion 
a été au point d'opérer le contact mutuel des deux glaces 
en cet endroit. 


XVI. LH eft aïfé de vérifier que quand il y a au centre 


DE s A SICER NICIENS 291 
des anneaux colorés une lame blancheître, les glaces font 
plus rapprochées lune de f'autre que quand ce centre eft occupé 
par une lame jaunâtre. En eflet, en preflant les glaces dans 
le premier cas, on fait d'abord paroiître la tache noire; au 
lieu que dans le fecond cas, en les preflant par degrés, on 
voit fuccéder à la lame jaunâtre une lame b'ancheätre, que la 
tache noire remplace à fon tour. 


XVIII. Si on prefle {ur les bords deux glaces où les 
anneaux colorés foient déjà formés, ils fe déplacent, s'étendent 
& s’avancent vers le côté où s'exerce la preflion *; & fi elle 
eft fufffante pour forcer ces deux bords correfpondans à fe 
toucher, on y voit naître la tache noire qu'enveloppent des 
demi-cercles colorés, dont il ne refte fouvent plus de traces 
à l'endroit où il y en avoit en premier lieu, parce que la 
réunion des deux glaces vers les bords qu'on preffe, n'a pü 
fe faire fans qu'elles ne s'écartaffent ailleurs l'une de l'autre. 


XIX. Si on approche la flamme d'une bougie des deux 
glaces, vers les bords où les anneaux colorés font formés, 
les couleurs fe déplacent encore; mais comme fi elles fuyoient 
la flamme, elles fe retirent vers le côté oppolé, où elles dif 
paroiffent les unes après les autres ?. La flamme agiffant d'abord 
für le peu d'air qui fe rencontre entre les glaces, vers le côté 
dont on l'approche, le dilate, & cet air dilaté les écarte en 
cet endroit lune de autre à un certain point; ce qui y attire 
l'air logé vers le côté oppolé, & donne lieu à l'air ambiant de 
de faire rapprocher vers ce côté oppofé, les glaces l'une de 
l'autre. Ainfi , la préfence de la bougie allumée produit, à 
l'égard du côté oppolé, le même effet q:'y produiroit la preffion 
des doigts ; au moyen de quoi, les couleurs doivent fe retirer 
vers ce dernier côté, pour fabandonner enfuite & difparoître 
totalement, quand l'air, qui fe dilate de plus en plus, vient 
à l'être par-tout, au point que les glaces foûlevées ne reftent 


* M. l'abbé Sauvage a obfervé le même phénomène fur des morceaux 
de cryftal d’Iflande traités de même. Mém. de l'Acad. 1746, p.721: 


b Mém. Say. Étrangers, tome II, page 22. 


Oo ij 


* Mém. Sav. 


ÆEtrons., rome 1/, 


Pages 32), 33: 


Ilid. page 3 3. 


292 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
en aucun endroit aflez rapprochées pour que le phénomène 
des anneaux colorés y fubfifte. 

XX. Ce que j'ai dit ci-devant, que l'air interpofé entre 
une furface plane & une furfacé convexe qui fe touchent, a 
fa fortie libre, en vertu de la difpofition de l'efpace qui le 
renferme, & qui va en s'élargiffant de plus en plus du point 
de contact vers les bords, tandis que celui qui eft logé entre 
deux furfaces planes contigues, y eft comme emprifonné, 
fournit une folution naturelle & fatisfaifante à ce que M. 
Vabbé Mazéas a obfervé *, que les anneaux colorés, formés 
entre les verres plans, fe déplaçoient & difparoifloient lorfqu'on 
les expoloit à l'aétion de la flamme, au lieu que les anneaux 
colorés, formés entre les verres de Newton, c'efl-à-dire entre 
une furface plane & une furface convexe, mis à la même 
épreuve, n'y efluyoient aucune altération. En s'en tenant aux 
caufes immédiates de ces réfultats, on reconnoît aïfément que 
Y'air contenu entre les deux glaces planes, ne pouvant s'étendre 
hors de l’efpace où il eft renfermé, ne peut manquer, à mefure 
que la préfence de la flamme le fait dilater, d’écarter de plus 
en plus ces glaces ; ce qui opère le déplacement & la difpa- 
rition des couleurs ; au lieu que l'air, entre les verres de 
Newton, ayant toûjours une iflue libre vers les bords, s'étend 
aifément , lorfqu'il fe dilate, hors de l'efpace borné par les 
deux verres, au moyen de quoi les verres n'en continuent 
pas moins qu'auparavant à être rapprochés l'un de Fautre. 

XXI. M. Fabbé Mazéas ayant mis fous le récipient de 
la machine pneumatique fes verres & ceux de Newton, la 
raréfaction de l'air ambiant ne produifit aucun changement 
fur les anneaux colorés des uns ni des autres. À l'égard de 
ceux de Newton, cela n'eft pas étonnant , par Îes raïfons dont 
je viens de faire ufage; mais à l'égard de ceux de M. l'abbé 
Mazéas, il femble que {a raréfaétion de l'air ambiant auroit 
dù faire dilater d'autant celui qui pouvoit fe rencontrer entre 
les deux verres. Peut-être qu'au moyen du frottement qui 
avoit précédé, il en avoit été expulfé d'avance totalement, où 
en aflez grande partie, pour que le refte n'ait pas été fufhfant 


TRES PACS LIEN ICE NS 2 
pour faire, en fe dilatant, un effort capable d’écarter les deux 
verres collés dans les endroits où ils fe touchoient immédiate- 
ment : peut-être aufit la raréfaction de l'air dans le récipient 
n'avoit-elle pas été pouffée bien loin; M. l'abbé Mazéas n'en 
fpécifie pas le terme. 

XXII. II paroit donc réfulier de l'expérience, que pour 
Ja produétion des anneaux colorés entre deux verres appliqués 
Fun fur l'autre, il faut que leurs furfaces corréfpondantes foient 
rapprochées à un certain point ; car l'endroit où elles fe touchent 
ne réfléchit pas la lumière, & ceux où elles font trop écar- 
tées l’une de l'autre, la réfléchiflent non décompofée. Mais 
en vertu de quel méchanifme concevra-t-on que l'intervalle qui 
fépare les deux furfaces, étant réduit dans de certaines limites 
peut opérer la décompofition des rayons lumineux? avant de 
chercher à le deviner, tâchons d'ouvrir de nouvelles voies 
pour y parvenir. Le phénomène des anneaux colorés par la 
complication d'une multitude de rayons, dont la décompofi- 
tion y eft variée de mille façons, ne permet guère de fe 
promettre qu'en l'embraflant dans fa totalité, on puifle éviter 
de prendre le change , & s’en faire une idée nette & exacte. 
J'ai cru qu’il feroit avantageux de le confidérer pluftôt par 
parties, de s'attacher à un rayon ifolé, & de le fuivre dans 
fa marche & dans fes diverfes inflexions. Je vais expofer les 
obfervations que cette méthode m'a procurées, après que 

“j'aurai décrit le procédé que j'ai employé pour remplir mes 
vües à cet égard. 

XXIIT 42 eft une planchette d'environ dix pouces de 
longueur fur quatre de largeur, qui, dans fa partie inférieure, 
a deux appendices qui s'engrènent dans deux efpèces de 
charnières C D , fixées fur la planche horizontale ££ ; au 
moyen de quoi la planchette À B peut fe mouvoir autour 
de l'axe CD, & décrire le quart de cercle FZ. Elle eft percée 
felon fa Iongueur, & d'un bout à l'autre par une cavité paral- 
lèlépipédique, qui a fix lignes de largeur & demi-ligne d'épaif- 
feur; & elle l'eft de façon, que la ligne CD, axe de fa 
rotation coincide dans le plan que porteroit cette cavité, en 


Oo ii 


Fig. 1 & 2% 


Première 
Obiervation. 


Fig. 


1. 


294 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

deux portions égales dans le fens de fa longueur. Ainfr fa 
planchette À B eft une efpèce de tuyau: fous fon orifice in- 
férieur À, entre les charnières C & D, on place deux verres 
plans réunis G, entre lefquels il s'eft formé des anneaux co- 
lorés, & on les place de façon que la même ligne CD coin- 
cide dans le plan de contaét des deux verres. En conféquence 
de ces diverfes difpofitions, on voit qu'en faifant tourner le 
tuyau AB fur les points C& D, les rayons de lumière que 
le tuyau À B tranfmet, tomberont fucceflivement fous diffé- 
rens angles, fur la même portion de la matière logée entre 
les deux verres G. On peut, avec des diaphragmes ajuftés 
aux deux orifices du tuyau À, en diminuer à volonté l'ou- 
verture. Dans les obfervations dont il fera queftion ici, les 
deux orifices n'avoient qu'environ une ligne en quarré. 

Deux petites planches AÂHP, LLMAM, noircies en 
dedans, ainfi que tout fe refle de cet appareil, font élevées 
de côté & d'autre du tuyau À P: l'intervalle HALL & 
une partie du deflus HP LM, font couverts de morceaux 
de drap noir, & on difpofg, tout de façon que le tuyau AB 
étant incliné vers la fenêtre d'une chambre qui ne reçoit de 
jour d'aucune autre, on ne laïffe tomber fur les verres plans G 
aucun autre rayon de lumière que celui qui paffe par le tuyau 
A B: Au refte, il n'eft nullement néceflaire que ce rayon de 
lumière vienne direétement du foleil ; & à moins que le temps 
ne foit extrêmement fombre, les expériences dont je vais 
rendre compte réuffiffent toüjours : je ne me fuis fervi d'un 
rayon provenant direétement du foleil, que dans les expériences 
où j'en ferai mention expreflément. 

XXIV. Si on fait tomber le rayon de lumière À G, qui 
paffe par le tuyau A , fur quelque portion des efpaces annu- 
laires fufceptibles d'être colorés, lefquels féparent les deux 
verres C, il arrivera que d’un certain point qui fe rencontre 
au-delà de la perpendiculaire /G, on diftinguera fur les verres 
G trois images quarrées, difpofées felon la même direétion 
& contigues, ou feulement féparées par des traits obfcurs. La 
plus éloignée de l'œil de l'Obfervateur, eft blanche, c’eft-à-dire 


DES LS CUT EN. CES » 
fimplement lumineufe; celle qui fuit eft colorée, & celle qui 
eft la plus rapprochée de l'Oblervateur, eft terne & quelque- 
fois chargée d'une teinte de vert ou d’un rouge foible. Je 
diftinguerai, dans Ja fuite de cet Ecrit, ces images fous le nom 
de première, feconde à troilième , relativement à l'ordre que 
je viens de fuivre en les décrivant, 

XX V. Il n'eft pas douteux que la production de ces trois 
images diftinétes ne dérive des réflexions que différentes par- 
tions du même rayon AG efluient féparément fur les plans 
qui terminent ou féparent les deux verres. De ce rayon AG, 
qui tombe fur la furface antérieure FN du verre fupérieur, 
il fe réfléchit de cette furface une portion, qui va former dans 
l'œil de l'Obfervateur l'apparence de la première image. L'autre 
portion fe réfracte; & parvenant à l'efpace OO, qui fépare 
les deux verres, elle s'y décompofe fenfiblement & sy par- 
tage encore. La plufpart des rayons d’une certaine efpèce fe 
réfiéchiflent de P en 7, tandis que ceux des autres efpèces 
fe tranfimettent vers R: c'eft à ceux de ces rayons qui font 
réfléchis de l'efpace OO, qu'eff düe l'apparence de la feconde 
image : ceux qui { tranfmettent vers À, arrivent à la furface 
poftérieure S'S du verre inférieur, qui en laifle aufli pafler 
une partie au-delà vers 7, & réfléchit de Æ en L f'autre, 
qui forme l'apparence de la troifième image. Cette troifième 
image, qui eft terne, ou bien foiblement colorée, concourt 
à confirmer ce que les couleurs plus décidées de la feconde 
image nous indiquent de la décompofition de Ia lumière dans 
lefpace OO. 

XXVI. Les rayons qui forment la première image, 
c'eft-à-dire ceux qui font renvoyés de la furface antérieure FN 
du verre fupérieur, sy font réfléchis fous un angle /GK, 
égal à celui de leur incidence /G A. On peut dire la même 
chofe de ceux qui fe font réfléchis en P de l'elpace inter- 
médiaire OO, & en À de la furface poftérieure S'S du verre 
inférieur. I! paroïît en effet que l'axe du faïfceau, formé par 
ces derniers, eft parallèle à l'axe du faifceau formé par ceux 
qui fe réfléchiflent de la furface FN, car if n’eft aucun point 


Fig. 3- 


Deuxième 
Obfervation. 


Fig. 1. 


Troifième 
Obfervation, 


Quatrième 
Obfervation. 


Fig. 1. 


296 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

fur la direction prolongée GX’, d'où on ne diftingue la {e- 
conde & fa troifième image, de même qu'on diltingue fa 
première. 

XXVIT. L'obfervateur n'aperçoit la feconde image qu'au- 
tant que fon œil fe rencontre fur ou près de la ligne GX, 
qui forme avec /G un angle de réflexion /G K°, égal à l'angle 
d'incidence 2/6 À, & il ceffe de l'apercevoir s'il s'en écarte un 
peu; de plus, cette feconde image paroît toüjours uniformé- 
ment colorée, de quelque diftance qu'on la regarde. 

XXVIIT. Il en réfulte que les rayons réfléchis en P de 
l'efpace OO, qui font ceux qui viennent peindre dans l'œil 
la feconde image, font parallèles entreux, & ne divergent 
pas, ou du moins n'ont aucune divergence rélultante de la 
diverfité refpective de leurs réfrangibilités. 

I en réfulte encore, que lorfqu'on confidère hors de Fappa- 
reil les anneaux colorés, ceux des rayons de lumière qui, ré- 
fléchis fur une portion quelconque de ces anneaux, viennent 
fe peindre dans l'œil, font toujours, & uniquement ceux qui 
s'étoient dirigés vers cette portion, des anneaux colorés fous 
un angle d'incidence égal à celui de réfraction. 


XXIX. Queique inclinaifon qu'on donne au tuyau AP, 
ou, ce qui eft fa même chofe, fous quelqu'angle qu'on fafle 
tomber un rayon de lumière AG fur une portion d’un de fes 
efpaces annulaires colorables des verres G , la feconde image, 
où image intermédiaire, paroït toüjours colorée. 

XXX. Il en réfulte que par-tout où f'efpace OO, qui 
fépare les deux verres, eft tel qu'il puiffe décompofer la lumière, 
elle s’y décompofera fous quelqu'angle qu'elle s'y dirige. 

XXXI. Si on fait parcourir au tuyau AZ l'arc 7F, 
pour faire tomber un rayon de lumière AG fucceflivement 
fous différens angles, fur la même portion d’un des efpaces 
annulaires colorables des verres G, il s’en faut bien que la 
feconde image foit toûjours teinte des mêmes couleurs; tantôt 
elle paroïtra enluminée de rouge, tantôt de vert, &c. 

XXXII. Il en réfulte, que toute portion du fluide 


renfermé 


ts M eur 


DES SCIENCES. 297 
enfermé entre les deux verres G, décompole différemment 
le faifceau de lumière AG, felon les différens angles de fa 
direétion. Sous certains angles, les rayons rouges font réflé- 
chs, & les verts tranfmis: fous un autre, ce font les rouges 
qui font tranfmis, & les verts font renvoyés, &c. 

XXXIII. Pour saflurer dans expérience précédente 
que la portion du rayon AG, qui forme la feconde image, 
fe réfléchit toûjours fur la même portion de l'efpace qui fé- 
pare les deux verres, il faut tendre fixement un fil fur le verre 
fupérieur au deflus du trait obfcur qui fépare la première de 
la feconde image; & à mefure qu'on change l'indlinaifon du 
tuyau AB, ménager les chofes, c'eft-à-dire, avancer ou reculer 
les verres réunis, de façon que le fil fe rencontre toûjours 
fur ce mème trait obfcur. Par ce moyen, l'endroit de l'efpace 
intermédiaire qui paroît coloré, eft toûjours le même, à favoir 
celui qui eft précifément au deffous du fil tendu fur Le verre 
fupérieur. 

XXXIV. Si les couleurs affectées aux efpaces annulaires 
colorables des verres G, varient felon les angles fous lefquels 
le rayon de lumière fe dirige fur l'efpace qui fépare les deux 
verres, c'eft toujours avec un certain ordre. Suppofé que du 
point Z, le plus élevé de l'arc Æ7, on mène le tuyau À B vers 
le point F'} alors la fucceffion des couleurs fera telle, que le 
bleu, par exemple, viendra après le vert, l'indigo après le 
bleu, le pourpre après l'indigo, le jaune après le pourpre, 
le vert après le jaune, &c. & jamais dans un ordre renverfé. 
Si au contraire on élevoit le tuyau À B du point Æ vers le 
point Z, la fucceffion des couleurs fe feroit précifément dans 
un ordre contraire à celui que je viens de décrire. 

XXXV. Le tuyau AB étant incliné fixement fous un 
angle quelconque, Î1 on fait mouvoir horizontalement les 
deux verres réunis, en forte que Île rayon de lumière qui 
traverfe le tuyau 42, tombe fucceffivement fur diflérentes 
parties des efpaces annulaires colorables, on verra changer 
de place en place les couleurs de la feconde image. 

XXXVI. N'y a-til pas lieu d'inférer de cette fixième 

Jar, étrang. Tome IV, . PP 


à 


Cinquième 
Obfervations 


Sixième 
Obfervationÿ 


* Von XIII 
& XIV. 


298 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
obfervation, que le degré d’obliquité, fous lequel le rayon 
de lumière AG tombe fur les efpaces annulaires colorables, 
ne décide pas, du moins feul, du genre de couleur qu'on 
aperçoit. 

XXX VIT. On pourroit foupçonner à Ja vérité que les 
rayons de lumière parallèles , qui tombent fur différentes por- 
tions d’un diamètre de l'efpace colorable, ne coupent pas fous 
le même angle la furface poftérieure du verre fupérieur. En 
effet, confidérons; 1° que la coupe de deux verres, l'un 
plan, l'autre convexe, faite par un plan qui foit perpendi- 
culaire à celui de leur jonétion & qui pafie par le point central 
du contact, repréfente de part & d'autre des efpaces angulaires 
BAC, DAF, en forte quil eft manifefle que le point 4 
du contaét eft comme le point commun du concours d'une 
infinité de pareils angles, qui font formés tout autour & de 
toutes parts par linclinaïlon mutuelle des furfaces corref- 
pondantes des deux verres. La fomme de tous ces efpaces 
angulaires, ou, ce qui-eft la même chofe, l'intervalle total qui 
fépare les deux verres, peut donc être regardé, s'il eft permis 
de s'exprimer ainfr, comme un imervalle prifmatico-circulaire 
compolé par des plans inclinés, qui, contigus vers le point 
de contact des deux verres, vont'en s’écartant l’un de l'autre - 
en tout fens à mefure qu'ils s’éloignent de ce point de contaét: 
3.° qu'il en eft de même de deux verres plans en apparence, 
lorfque appliqués lun fur l'autre ils donnent des anneaux co- 
lorés, du moins à l'égard de l'endroit occupé par les anneaux 
colorés: car, felon ce que nous avons remarqué précédem- 
ment * dans ces circonftances, les furfaces correfpondantes des 
verres ne peuvent fe toucher dans toute leur étendue, & elles 
né fe touchent que dans le centre commun des anneaux co- 
lorés. Or, il eft plus qu'appärent que de ce point de contat, 
les deux furfaces qui bordent l'efpace intermédiaire vont en 
s'écartant l'une de l'autre à mefure qu'elles s'en éloignent, & 
cela jufqu'à une certaine diftance: 3.° qu'enfin il y a peut-être 
lieu de préfumer qu'en conféquence de la preflion employée 
à contenir les deux verres réunis, il arrive que dans les miens, 


DÆis! S'C/TE NICE 6 299 

comme dans ceux de Newton, les furfaces correfpondantes 
qui terminent l'efpace colorable, ne font pas formées par la 
révolution d'un angle reétiligne FA A autour du point de Figure 6. 
contact A,mais par la révolution d'un angle curviligne où 
mixtiligne B AC; en forte que les portions correfpondantes Fig: 74 
dd, ee, ff, érc.\ des deux furfaces forment entrelles des 
angles différens, & d'autant moins aigus, qu'elles fe trouvent 

be éloignées ni point de contaét des deux verres : les parties 
dd feront celles qui formeront d'angle le plus aigu; celui que 
formeront les parties e, fuppolées prolongées le fera moins, 
& le fera plus cependant que l'angle formé par les parties f F, 
auf fuppofées prolongées ; mais en même temps ileft évident 
que dans les verres de Newton, comme dans ceux que j'em- 
ploie, la courbure de Ia furface repréfentée par la ligne BA; Fig. s2 
ne la fait pas aflez différer d’une furface plane, & que les 
rayons de lumière parallèles qui tombent fur fes divertes parties, 
y forment avec elles des angles trop peu inégaux entreux 
pour qu'on doive attribuer à la feule différence de angles celle 
des décompofitions qu'y efluient ces rayons de lumière paral- 
Ièles. On eft donc conduit à chercher la caufe de ces différentes 
décompofitions qu'offre {a fixième obfervation dans Ja difpo- 
fition des efpaces colorables; mais en ce cas y influe-t-elle en 
tant qu'ils font plus ou moins minces, ou relativement au degré 
d’inclinaifon des plans qui les terminent, ou en tant que le 
fluide qui les occupe eft plus ou moins rare? &c. 

XXXVIIL Si la feconde image eft colorée en rouge; Septième 
la troifième paroît chargée ordinairement d’une teinte de vert rain. 
très - décidée. 

XXXIX. Si {a feconde image eft colorée en vert, la Pas: : 
troifième a quelquefois une teinte de rouge foible. FO 
XL. Puifque du faifceau de lumière AG, qui tombe en 
P fur l'efpace OO ; la plufpart des rayons d'une certaine efpèce Fig. 3« 
font réfléchis , la pente de ces rayons interceptés peut devenir 
fenfible dans la teinte de la troifième image, produite par 
ceux des rayons qui, tranfmis en OO, ont été fe réfléchir 
en À fur le plan SS Si les rayons réfléchis en 2 font les 


Ppi 


Neuvième 
Obfervation, 


oo MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


rouges & les orangés, il ne parviendra au plan SS que les 
jaunes , les verts & les bleus, & il n'eft pas étonnant que a 
troifième image foit colorée en vert: fi au contraire les rayons 
réfléchis en P font les verts ou les jaunes & les bleus, ce feront 
alors les rouges qui fe tranfmettront jufqu'au plan SS, & la 
#inte de la troifième image doit alors tirer fur le rouge. 
XLI. Si la décompofition des rayons en O0 O étoit com- 
plète, c'eft-à-dire, fi tous les rayons d’une certaine efpèce 
étoient tran{mis, & fi tous ceux des efpèces différentes étoient 
réfléchis fans mélange des deux côtés, la teinte de la troïfième 
image ne devroit jamais être équivoque ou terne, comme je 
Yai trouvé le plus fouvent , mais elle devroit avoir une couleur 
tranchante & décidée, rouge ou verte, &c. L'altération de 
cette troifième image donne lieu de foupçonner que la dé- 
compofition des rayons en O O n'eft pas entière & complète, 
& que quoique les rayons d'une certaine efpèce y foient 
tranfmis par préférence à ceux des autres efpèces, il ne laifle 
pas que de s’y en tranfmettre de toutes. Cela fera établi plus 
inconteftablement par la onzième & la douzième obferva- 
tion, & fur-tout par la neuvième & la dixième. J'ai trouvé 
que lorfque la teinte de la troifième image devoit être en. 
vert, elle étoit décidée, au lieu que lorfqu'elle devoit être en 
rouge, elle étoit foible : cela ne viendroit-il pas de ce que mes 
verres font naturellement difpofés à tranfmettre les rayons verts. 
plus aifément que les rouges : c'eft ainfr qu'un rayon rouge, 
détaché du faifceau par le prifme, traverfe régulièrement, & 
prefqu'en entier, un verre coloré en rouge; au lieu que s'il 
tomboit fur un verre coloré en bleu, Îa plus grande partie de ce 
rayon s'y éteindroit ou feroit irrégulièrement difperfée. 
XLIT. Si dans une chambre obfcure on fait pafler par 
un tuyau étroit, adapté à un volet de fenêtre, un rayon du 
foleil, & qu'il tombe avec une certaine obliquité fur un des 
efpaces annulaires colorables des verres réunis pofés vertica- 
lement fur une table, trois portions de ce rayon réfléchies 
fur la furface antérieure, l’entre-deux & la furface poftérieure 
de ces verres, formeront, {ur un carton où on les recevra, 


DES SCIENCES 301! 
trois images prefque contigues, dont la feconde & Ia troifième 
font colorées; & le refte de ce rayon qui s’'avance au-delà 
des verres, ira former fur un autre carton une quatrième 
image, dont la blancheur ne paroit altérée par aucune teinte 
fnfible des couleurs primitives. 

XLIIE. Si on regarde à travers un prifme cette quatrième 
image, elle fe changera, pour FObfervateur, en un fpeétre 
folaire auf entier & refpectivement aufli éclatant dans toutes 


fes parties que le lui donneroit l'image d’un rayon de lumière 


qui feroit parvenu immédiatement fur le carton. 

XLIV. Il réfulte des deux obfervations précédentes ; 
11° que l’efpace intermédiaire, décoré des anneaux colorés, 
peut tranfmettre des rayons de toute efpèce, quoiqu'il n’en 
réfléchiffe que d'une certaine efpèce; 2.° que la portion du 
rayon lumineux, échappée aux réflexions qui ont lieu {ur 
les diverfes furfaces des verres & qui pafle au-delà, peut fe 
retrouver dans l’état de proportion afleété naturellement à 
tout faifceau lumineux, du moins à un point tel, que ceux 
des rayons d’une efpèce qui pourroient, relativement aux autres, 
excéder la dofe proportionnelle, ne l'excèdent pas affez pour 
altérer la blancheur de l'image vüe à l'œil nu, ni les couleurs 
du fpectre qui en réfulte lorfque ces rayons pañent à travers 
un prifine. 

XLV. Si au moyen d'une bande de papier noirci, pofée 
de champ fur les verres G au-deflus du trait obfcur qui fépare 
la première image de la feconde, & d’une autre bande auf 
de papier noirci, pofée à plat fur la troifième image, on fait 
en forte qu'on ne puifle apercevoir des différens points de la 
ligne G À que la feconde image feulement, & qu'on la regarde 
alors à travers un prifme, on apercevra un fpectre folaire 
qui eit tronqué, ou dont les couleurs, fr on y aperçoit toutes 
celles du fpectre ordinaire, font afloiblies en l’une ou en 
l'autre de fes extrémités, felon la couleur que la feconde 


image renvoie à la vüe fimple. Si la couleur de [a feconde 


image eft rouge, la bande rouge dans le fpectre eft la plus: 


vive; & les bandes bleu, indigo & violet, font confules, 
in Pp ii 


Dixièmé 
Obfervatiom, 


Onzième 
Obfervations- 


Fig. 1. 


Douzième 
Obfervation. 


Fig: 1, 


302 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

la couleur en eftlafloiblie. Si au contraire la couleur de fa 
feconde image, telle qu'elle paroît à la vüe fimple, eft bleue, 
la bande rouge du fpeétre eft terne, & cède, en vivacité, 
aux bandes violet, indigo & bleu, qui font très-éclatantes : 
au refle, ce fpectre tronqué ou terne en quelqu'une de fes 
parties, ne left jamais que dans l'une ou dans l'autre de fes 
extrémités, & non dans toutes les deux à la fois, ni dans la 
partie intermédiaire, qui n'a jamais moins de vivacité que les 
extrémités, 

XLVI. Il en réfulte que, felon que le remarque M. 
Yabbé Mazéas, la couleur de fa feconde image n’eft pas pri- 
mitive, ceft-à-dire que les rayons réfléchis de l'efpace O0 Q 
vers /, ne font pas d’une feule efpèce ; en. forte que la cou- 
leur de la feconde image eft le produit combiné de piufieurs 
ef pèces de rayons, par exemple, tantôt des rouges, des orangés 
& des jaunes, réfléchis enfemble en plus grande abondance 
que les autres, felon la direction P7, & tantôt des verts, 
des bleus & des violets, renvoyés aufii conjointement & en 
plus grande abondance que les autres de P vers Z. Aïnfi leur 
première décompofition en P eft fufceptible d'être fuivie 
encore d’une feconde qui s'opère dans le prifme ; laquelle ne 
fauroit avoir lieu fi les rayons qui {e réfléchiffent en 2 étoient 
homopènes. { 

XLVIT. Siau moyen de pareilles bandes de papier noirci 
convenablement difpolées , la troifième image foit la feule qui 
puifle être aperçüe des points compris fur la ligne GX, & 
qu'on la regarde à travers un prifme, on diflinguera encore 
un fpe@tre peint des diverfes couleurs affeétées aux rayons du 
faifceau lumineux, & auffi avec certaines différences qui dé- 
pendent de la teinte dont cette troifième image paroît chargée 
à la vüe fimple. Si cette teinte tire fur le rouge, le fpeétre 
produit par le prifme a alors la bande rouge infiniment plus 
éclatante que la bande violette, qui n'affeéte que foiblement 
la vüe; mais fi la teinte de la troifième image eft verte à la 
vüûe fimple, la bande violette dans le fpectre l'emporte en 
vivacité fur la bande rouge. 


D'ES SCIENCE!S 303 

XLVTIIT. Il en réfulte, 1.” que les rayons qui parviennent 
au plan poftérieur SS du verre inférieur, ne font rien moins 

homogènes, puifque l'épreuve du prifme manifefle parmi 
eux l'affemblage de rayons de toute forte d’efpèces: 2.” que 
ces rayons cependant ne font rien moins non plus que dans 
la proportion affelée naturellement au faifceau lumineux, 
puifque le fpeétre qu'ils forment enfuite, en paflant à travers 
le prilme, eft altéré à un certain point. 

XLIX. Remarquons que pour faire les obfervations 
onzième & douzième, il convient fur-tout de donner beau- 
coup d'inclinaifon au tuyau À B ,afin que le rayon AG tombe 
bien obliquement {ur les verres G, car alors les traits obfcurs 
qui fparent les trois imiages, font plus larges, & il eft plus 
aifé de ne voir précifément que celle qu'on veut, en mafquant 
les deux autres avec les bandes de papier noirci. 

L. Si ayant fait tomber le rayon AG qui paile à travers le 
tuyau À 2, fixé fous un ang'e tel qu'on voudra, fur une portion 
quelconque des efpaces annulaires colorables, on retourne les 
verres G bout pour bout, & que le rayon AG foit encore 
reçü fur cette même portion des efpaces annulaires colorables, 
la couleur affectée à la feconde image fera la même dans 
les deux cas. 

LI. Pour exécuter exactement cette expérience, il faut 
tendre un fil fur les verres G parallèlement à leur largeur, & 
les placer dans leurs deux différentes pofitions, de façon que 
le fil fe rencontre toûjours également en Z fur le trait obfcur 
qui fépare la première image de la feconde. L’infpeétion de 
lh figure fait connoître qu'alors le rayon de lumière tombera 
fur le même endroit du plan OO qui fépare les deux verres, 
foit que fe dirigeant de T vers P, il fe réfléchie de P 
vers F”, foit que fe dirigeant de F vers Pil fe réfléchiffe de 
P vers TZ. 

LIL. I réfulte de l'obfervation précédente, que fur toute 
portion des efpaces annulaires, {a décompofition d'un rayon 
de lumière d'une obliquité déterminée eft li même, ou, ce qui 
eft la mème chofe, que lefpèce de rayon qu'elle réfléchit par 


Fig. 3. 


Treizième 


Obfervation, 


Fig. 4: 


304 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
préférence, eft là même en quelque fens que ce rayon sÿ 
dirige. 

LIT. C'eft conféquemment à ce phénomène, obfervé fur 
un point particulier d'un des efpaces annulaires colorables, 
que la couleur du contour total de chaque anneau eft uniforme. 
En eflet, en regardant la ligne BAD comme très-peu diffé- 
rente d'une ligne droite, & confidérant qu'à des diftances 
égales G & T° du point de contact, l'épaiffeur de l'efpace 
intermédiaire doit être communément la même: le cas du 
rayon de lumière qui fe dirige de S'en Z’eft à peu près le 


même que celui du rayon qui de À fe dirigeroit en G. Or, 


par la treizième obfervation, le rayon RG efluieroit en G 
la même décompofition & rendroit la même image que le 
rayon SG ; donc le rayon ST, parallèle à SG, doit effuyer 
en 7° la même décompofition & produire la même image 
que le rayon RG en G; & la même chofe a lieu fans doute 
à l'égard de tous les rayons de lumière qui tombent fur les 
autres points de l'anneau où font compris les points G & T° 
avec une obliquité égale à celle du rayon SG, 

LIV. Dans ce que je viens d’expoler fur les changemens 
de direction & les décompolfitions qu'efluye un rayon de lu- 
mière AG qui tombe fur les deux verres réunis G, on ne 
trouvera que les conféquences immédiates des obfervations 
que je rapporte; conféquences qui s'étendent, à cet égard, 
aux effets compliqués de la multiplicité des rayons de lumière 
dans le phénomène des anneaux colorés obfervés dans fa 
totalité Mais de-là à la connoiffance du méchanifme, en 
vertu duquel s’opèrent ces décompofitions, il y a encore une 
grande diftance ; je fuis d'autant moins tenté d'effayer de la 
franchir, qu'il ne me paroïît pas que la route qui peut y 
conduire foit encore affez marquée. Quand c'eft à fon ima- 
gination qu'on ef réduit à en laifler le choix, il y a trop de 
rifque de s'égarer: je me permettrai cependant d’expofer à 
ce fujet quelques remarques fur des circonftances relatives à 
ce phénomène, qui m'ont paru mériter d’être examinées. 

LV. Nous avons vü que le phénomène des anneaux 

colorés 


= AD MES BNC IF'EUN IC ENS 305 
colorés n'avoit lieu qu'autant que l'air avoit été convenablement 
expulfé d’entre les furfaces correfpondantes des deux verres 
réunis : l'obftacle que l'air paroit oppofer à ce phénomène, 
confifte-t-il feulement en ce que des flocons d'air logés entre 
les deux verres les empècheroient de fe rapprocher fufhfam- 
ment, ou bien de plus en ce que la préfence de l'air dans 
l'efpace qui fépare les deux verres, ne permettroit pas à la 
lumière de s’y décompofer, comme il le faut, pour le déve- 
loppement des anneaux colorés? 

LVI. Ne doit-on pas être tenté de foupçonner que Ia 
circonftance effentielle, pour leur développement, eft moins 
le rapprochement des glaces, que l'expulfion ou l'extrême raré- 
faction de l'air dans l'endroit de l'efpace intermédiaire où ils fe 
développent, lorfqu'on fait attention, 1.° que l'air peut effec- 
tivement être expulfé de certains cantons de lefpace qui 
fépare les deux verres, ou du moins y être extrêmement 
raréfié? 2. que cette expulfion ou raréfaétion de fair y a 
lieu toutes les fois qu'on y voit paroïtre les anneaux colorés : 
3-° qu'on peut produire ce phénomène entre des glaces con- 
venablement préparées avant qu'elles foient rapprochées au 
point où le font d’autres, entre lefquelles les anneaux colores 
refufent de fe manifefter. Or, ce font trois chofes qui réfultent 
des faits que nous avons expolés ci-devant. 1.° Il eft certain 
que l'expulfion ou l'extrème raréfaction de l'air a lieu dans 
le cas de l'expérience du numéro X VE, où les anneaux 
colorés fe forment entre des glaces qui ne fe touchent im- 
médiatement en aucun endroit; car dans ce cas, les glaces 
ne Jaiflent pas que de fe tenir collées l'une à l'autre avec 
beaucoup de force *; & le poids de la glace inférieure ne fuff- 
roit pas, à beaucoup près, pour opérer leur féparation. Si 
ici l'intervalle, qui ne laïfle communiquer immédiatement 
en aucun endroit les deux glaces réunies, étoit occupé dans 
la totalité de fon étendue par une lame d'air qui fût en même 
temps continue, & d'une denfité égale à celle de l'air exté- 
rieur ; comment , dans le moment où on foûlèveroit les deux 
glaces, en ne foûtenant que la fupérieure, inférieure ne s'en 


Jay. étrang. Tome 1Y. - Qq 


* Mén. des 
Savans étrmg, 


tome [, p. 29, 


L 


06 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À l'ACADÉMIE 
détacheroit-elle pas, entraînée comme elle l'eft par {on propre 
poids, puifque cette lame d'air balanceroit dès-lors, avec des 
forces égales, la preflion de l'air ambiant fur leurs furfaces 
extérieures, laquelle n'eft capable de retenir les deux glaces 
réunies, qu'autant qu'elle agit avec une force fupérieure? IL 
faut donc néceflairement que dans ces circonftances une por- 
tion au moins de l'intervalle qui fépare les deux verres, 
n'admette pas d'air, ou ne contienne qu'un air très-raréfié ; 
& cette portion eft fans doute celle où la lumière décompofée 
donne l'apparence des anneaux colorés, puifque c'eft dans cet 
endroit .que cet intervalle eft le plus rétréci. 2.° L'expulfion 
ou l'extrême raréfaction de l'air dans tous Îles cas où l'on 
voit paroître les anneaux colorés, devient une conféquence 
bien naturelle de la même expérience; car fr dans un cas où 
les glaces ne font point rapprochées au point de s’entre-toucher, 
il eft néceffaire d'admettre qu’une portion de l'efpace qui les 


 fépare ne contient pas d'air, ou ne contient qu'un air extré- 


mement raréfié, à combien plus forte raifon ne faudra-t-if 
pas faire une pareille fuppofition, dans le cas où la tache noire, 
qu'enveloppent les anneaux colorés, indique que les glaces fe 
touchent? Un rapprochement, augmenté Jufqu'au contact im- 
médiat dans une partie, ne peut fe faire fans qu'entre les autres 
parties les intervalles ne foient rétrécis d'autant, & au point 
de devenir de plus en plus inacceffibles à l'air. 3.° L'expé- 
rience du numéro V IT, felon laquelle deux glaces légèrement 
& convenablement enduites de fuif, produifent des anneaux 
colorés, prouve que ce phénomène peut fe manifefter fur 
des glaces moins rapprochées l’une de l'autre qu'il eft nécef- 
faire qu'elles le foient, lorfqu'elles n’ont pas été enduites de 
fuif. Les molécules de fuif soppolent au contaét immédiat 
des glaces, comme les flocons d'air s'y oppofent dans le cas 
où deux glaces non enduites de fuif font appliquées lune fur 
Vautre fans qu'on y emploie le frottement : or, on ne fauroit, 
je crois, fuppofer que les particules de fuif puiffent être plus 
amincies & plus refoulées que les particules d'air font fufcep- 
tibles de l'être; & partant que dans le premier cas l'efpace 


DES SCIENCES. 07 
qui fépare les deux verres foit moins rétréci qu'il l'eft dans 
le fecond, où les couleurs ne fe développent pas. Le degré 
de rétréciffement de cet efpace ne paroït donc pas être fa 
caufe immédiate du développement des couleurs. 

LVIL I y auroit pluftôt lieu de préfumer qu'il n’y contri- 
bue, ainfi que je lai déjà infinué, qu'autant que l'air, au 
moyen d'un certain degré de rétréciffement de l'efpace inter- 
médiaire, ou en eft exclus, ou y eft extrémement raréfié, 
Par-là, cet efpace devient peut-être acceffible à quelqu’autre 
fluide plus propre que l'air à occafionner ce développemenr, 
en opérant la décompofition des rayons de lumière. Au refte, 
il réfulte des expériences de Newton, que les couleurs de 
nos anneaux, du moins quant à la vivacité, dépendent 
beaucoup de fa qualité du milieu qui occupe l'efpace qui 
fpare les deux verres: cet illuftre Phyficien rapporte qu'ayant 
fait glifier un peu d'eau entre les deux objedifs, décorés alors 
d'anneaux colorés , les couleurs en devinrent plus languiffantes. 
M. l'abbé Mazéas, qui a fait la même épreuve avec des verres 
plans, a eu le même réfultat; j'ai de plus obfervé que quel- 
. quefois l'eau, en s'infinuant entre les verres, faifoit difparoître 
totalement les couleurs qui y brilloient auparavant. 

LVIIL On n'aura pas manqué fans doute de s'apercevoir 
combien les induétions , auxquelles nous fommes conduits par 
les obfervations précédentes, font conformes à celles que M. 
Yabbé Mazéas a tirées des obfervations qui lui font propres : 
elles fui ont fait préfumer que les couleurs ne dépendent point 
des différentes épaifleurs de la lame d'air qui fe trouveroit 
renfermée entre les deux verres, mais de quelqu'autre fluide 
plus füubtil qui s'y rencontre, & que la preffion ou le frottement 
femble faire fortir des pores mêmes du verre: cet accord ne 
doitpas cependant Jaifler oublier que ces induétions s’écartent 
peut-être en même temps de la théorie adoptée par Newton à 
l'égard de cette branche de l'Optique, & que fon autorité ne 
peut guère être balancée que par ce qui porteroit un caractère 
marqué d'évidence ou de démonftration, que les conjectures 
que je viens d'expoler font encore bien éloignées d'avoir. 


Qqi 


PV.n" XXVI 
Ÿ XX VII. 


08 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

LIX. Je pafle à une feconde remarque, & je demande 
fi Ja forme de l'intervalle qui fépare les deux verres, conçu 
comme compolé de plans inégalement inclinés & tel que je 
lai décrit au numéro XX XVII, n’entreroit pour rien dans 
le développement des anneaux colorés qui sy manifeflent ? 
Ne feroit-ce pas de là que proviendroit ce que l'on obferve, 
que la largeur des anneaux colorés n'eft pas, à beaucoup près, 
la même entre difiérentes couples de verres? Dans les verres 
qui ont beaucoup de courbure, l'inclinaifon mutuelle des par- 
ties correfpondantes dd, ee, ff, varie plus fur une étendue 
quelconque des furfaces , que ne le fait fur une pareille étendue 
l'inclinaifon des parties correfpondantes de deux verres qui 
ont moins de courbure ; & en conféquence, entre les premiers 
de ces verres , les anneaux colorés ne feront-ils pas plus rappro- 
chés les uns des autres ou plus étroits, & en même temps 
en plus grand nombre fur des étendues égales qu'entre les 
deux autres de ces verres? 

LX. Ma troifième remarque roulera fur le caraétère de Ja 
décompofition des rayons de lumière dans f'efpace qui fépare 
les deux verres réunis. Au fortir du prifme, les rayons dé- 
compolés font divergens; & c'eft conféquemment à leur 4di- 
vergence que, féparés les uns des autres relativement à leurs 
différens degrés de réfrangibilité, ils vont fe peindre fur le 
fpectre avec des couleurs diflinétes. I paroît qu'il n'en eft pas 
de même des rayons réfléchis du plan où les anneaux font pro- 
jetés entre les deux verres: les rayons qui partent d'une portion 
quelconque d’un tel plan, quelque petite qu'elle foit, ne font 
pas homogènes, & c'eft ce qui eft évidemment indiqué par 
la onzième obfervation *. Cependant ces rayons pourfuivent 
leur route, pour ainfi dire, parallèlement, n'ayant aucune 
divergence réfultante de leurs diverfes réfrangibilités, mais 
feulement celle qui eft naturelle à tout trait de lumière émané 
d’un point, & qui s'élargit à mefure qu'il s’'avance, ainfi qu'il 
réfulte de la feconde obfervation P. La lumière fe décompofe 
donc dans l'efpace qui fépare les deux verres d’une façon dif: 
férente qu'elle ne le fait dans le prifme. 


DRE ES TONCNIENNETCHENS. 309 

LXTI. Confidérons de plus que le faifceau de riyons hé- 
térogènes , qui font toüjours conjointement réfléchis de toute 
portion du plan décoré d’anneaux colorés, & qui, dans ces 
circonftances, doit être néceffairement combiné dans une 
proportion différente de celle qui eft naturelle au faifceau 
lumineux, remarquons, dis-je, que ce failceau eft combiné 
de façon, que ceux des rayons des diverfes efpèces qui y 
manquent, où y font en moindre nombre que les autres, font 
ou les plus réfrangibles feuls, ou bien les moins:réfrangibles 
feuls, & non à la fois & indiflinétement des plus & des 
moins réfrangibles, ni non plus feulement ceux dont la ré- 
frangibilité eft moyenne. Ainfi dans un tel faifceau réfléchi, 
les rayons rouges & les orangés pourront être les moins nom- 
breux ; dans un autre ce feront les violets & les indigo qui 
manqueront en partie; mais il ne paroît pas que dans le même 
faifceau le déchet tombe à la fois fur les rayons rouges & fur 
les violets, ni non plus qu’une partie des jaunes & des verds 
foit détournée , tandis que les rouges & les violets font dans 
la proportion naturelle & dans le nombre ordinaire. Mes 
prélomptions, à cet égard , font fondées fur ce que lorfqu’on 
confidère la feconde image à travers un prifme / n'XLV), 
le fpeétre qui fe préfente n’eft altéré que dans une de fes 
extrémités, relativement à l'autre. Si Ja bande violette y eft 
effacée, la rouge eft toûjours éclatante; fi c’eft la bande rouge 
qui a perdu fon éclat, la violette n’en eft que plus vive, & 
jamais la jaune ou la verte ne font ternes & languiffantes, 
tandis que la rouge & la violette feroient brillantes. 

LXIT. L'effet de la décompofition de la lumière entre 
les deux verres eft donc tel, que la partie du faifceau lumineux, 
qui tombant, fous un certain angle, fur une portion quelconque 
du plan où les anneaux colorés font développés, eft réfléchie, 
left de façon que la proportion des rayons hétérogènes, qui 
reftent parallèles entr'eux, va en augmentant depuis les moins 
réfrangibles jufqu'aux plus réfrangibles, ou en décroiffant depuis 
les moins réfrangibles jufqu'aux plus réfrangibles, relativement 
du moins à la proportion naturelle, 

Qq i 


310 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

LXIHIT La décompofition de la lumière dans F'efpace qui 
fépare les deux verres, peut être comparée à celle qui réfulte 
de l'expérience 1x du Livre I. de Optique de Newton, 
où il arrive qu'à l'émergence du faifceau lumineux hors du 
prifme dans air, une partie plus ou moins complète de ce 
faifceau rebrouffe chemin ; en forte que la réflexion qui, fous 
une certaine obliquité, eft particulière à la feule efpèce de 
rayons qui eft la plus réfrangible, devient de plus en plus 
générale & s'étend par degrés à ceux qui le font moins, & 
ce, à mefure que lobliquité du faifceau augmente. En effet, 
ces deux phénomènes conviennent entr'eux à divers égards; 
1 en ce que dans tous deux le faifceau de lumière eft 
partagé, en forte qu'une partie eft réfléchie & l'autre partie 
tranfmife: 2.° en ce que dans. tous deux les rayons de la 
partie réfléchie, quoique non homogènes, confervent leur 
parallélifme , ou du moins n'ont aucune divergence dérivée de 
leurs différentes réfrangibilités. Mais ces deux phénomènes 
diffèrent cependant en ce que dans le fecond, la proportion 
naturelle au faifceau lumineux n'efl altérée, à l'égard des rayons 
réfléchis, que dans des limites très-étroites, & feulement 
d'environ 42 minutes * Jorfque l'angle du faifceau incident, 
avec la perpendiculaire, eft d'environ 40 degrés; au lieu que 
dans le premier de ces phénomènes, l'altération de fa pro- 
portion naturelle des rayons de différente efpèce dans le faif 
ceau lumineux, a lieu fous quelqu'angle qu'il vienne tomber 
fur le plan qui fépare les deux verres ; & encore en ce que 
dans le premier ce font toüjours les plus réfrangibles qui font 
réfléchis par préférence; au lieu que dans le fecond, fi tantôt 
les plus réfrangibles le font auffi par préférence, if arrive de 
plus que les moins réfrangibles font à leur tour réfléchis, 
tandis que les plus réfrangibles font tranfinis. 


LXIV. Au refte, c’eft à ces deux dernières particularités 


* Les rayons violets qui fe réfléchiflent les premiers, ne commencent 
à fe réfléchir que lorfque l'angle d'incidence eft de 394 55’; & les rouges 
qui fe réfléchiffent les derniers, font tous réfléchis quand cet angle eft 


de 40% 37. 


SE I 


DRE: Si SYCHMEI NT C ENS. 311 
que paroît fe réduire la difficulté de l'explication du phéno- 
mène des anneaux colorés, c'eft-à-dire qu'il feroit queftion 
de s'attacher à démêler les circonftances dont elles dépendent. 
Les obfervations expofées dans cet Écrit, quoïque propres 
peut-être à répandre du jour fur ce point, n'en répandent 
pas encore afiez pour écarter tous les nuages : ce feroit beau- 
coup fi je pouvois me flattér que procurant des notions plus 
exactes & plus précifes, elles indiquaflent , d'une ficon moins 
vague , la route qu'il faut fuivre pour en rechercher les caufes. 


AMPLI PE N'DUI CE. 


D Es recherches ultérieures à celles dont je viens de rendre 
compte, n'ont fourni quelques autres obfervations, & m'ont 
indiqué d'autres épreuves que je me propofe de tenter : le 
tout pourra dévenir l'objet d'un fecond Mémoire; mais en 
attendant, j'ai cru devoir joindre ici ces nouvelles obferva- 
tions, en m'abftenant cependant d'en tirer aucune conféquence. 

Si on fait tomber fur les deux verres réunis G un rayon 
de lumière, de façon qu'il pafie par lendrojtle l'efpace in- 
termédiaire où eftglg tache noire, on ne diftingue plus que 
deux images, la première & la troifième. Mais il faut remar- 
quer que ce réfultat varie en certaines circonftances ; quelque- 
fois l'endroit de lefpace intermédiaire où tombe le rayon, 
paroïît comme parfemé d'un grand nombre de petits points 
lumineux. 

Les anneaux colorés des verres plans fe touchent immé- 
diatement les uns les autres: ils ne font pas féparés, comme 
entre les verres de Newton, par des anneaux fimplement 
lumineux; le feul de cette efpèce qu'on y remarque, enve- 
loppe la tache noire. 

- Et fi on regarde des verres plans, à laide de Ia lumière 
tranfmife , les anneaux qu'on y déméle font foiblement colo- 
rés, & je ne crois pas non plus qu'il y en ait parmi eux dont 
on puifle dire qu'ils font fimplement, ou obfcurs, ou lumi- 
neux, fi ce n'eft celui qui avoifine le plus la tache intermé- 


diaie lumineufe, lequel anneau doit être fimplement obfcur. 


Quatorzième 
Obfervation. 


Quinzième 
Obfervation, 


Seizième 
Obfervation. 


Dix-feptième 
Obfervation. 


Dix - huitième 
Obfervation. 


Dix-neuviëme 
Obfervation. 


312 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Si on expole les verres G, décorés d'anneaux colorés, aux 
rayons de lumière diverfement colorés qui fe feront réfractés 
à travers un prifme, ces rayons fe réfléchiront fur les verres 
& iront peindre fur un carton qu'on leur préfentera l'image 
des verres; & dans cette image on reconnoîtra les divers 
anneaux colorés, non par la diftinétion de leurs couleurs propres, 
car on n’y remarquera alors que celles des différentes bandes 
du fpectre difpolées felon leur ordre naturel, mais par des 
différences de vivacité dans la teinte de ces anneaux. L’anneau 
blanc, & ceux qui fur les verres G font colorés en rouge, 
feront répréfentés fur le carton par des anneaux très-brillans, 
au lieu que la tache noire & les anneaux, qui dans les verres 
G font colorés en vert & en bleu, feront rendus fur le carton 
par des anneaux plus obicurs; & les mêmes différences ont 
lieu, foit qu'on expole les verres aux rayons-violets réfraétés 
par le prifme, foit qu'on les expofe aux rayons rouges ou à 
quelques autres que ce {oit des rayons intermédiaires. 

Si on reçoit fur un carton les rayons diverfement colorés 
par le prifme, qu'on aura enfuite fait traverfer les anneaux 
colorés des verres G, on verra fur le caÿgn quelques arcs ou 
anneaux obfcurs, qui rendent fans doute, dans cette image, 
les anneaux, qui fur les verres G paroïflent, par la lumière 
réfléchie, colorés en rouge; mais les parties obicures de cette 
image ne tranchent pas affez & ne font pas auf diftinéles , 
à beaucoup près, que celles de l'obfervation précédente. 

Si on fait tomber un rayon de lumière fur le plan de 
féparation des deux verres réunis G en un endroit qui, hors 
de l'appareil , ne paroît pas coloré , aucune des trois images 
ne fera colorée, fous quelqu'angle que ce rayon de lumière 
fe dirige vers ce plan. 


SF 


OBSERVATIONS 


Ja, Etrang. Tome IV. Page. 312. PL. PT. 
— RP 


Æinysy Time IF Lage.313. PL JT. 


DES SCTENCES. 313 


ONBGRE RFF A TL OIN,S 


DOM HS AGE. DE :L'A° LUN E 
P'ASRE LES PA'YEACD ES"; 

LE 2$ SEPTEMBRE 17$$ ET LE 7 Mars 1756, 
HA DES) AR. O0.  E:N. 


Par M. DuLaGuEz, Profeffeur d'Hydrographie. 
I: y a quelque temps que parcourant le Journal des obfer- 


vations que nous avons faites, M. Bouin & moi, à 
lOblervatoire de Saint-Lo, j'y trouvai que nous avions vü 
éclipfer les deux 8 des Hyades fous le difque de la Lune, le 7 
Murs 1756. L'obfervation étoit marquée füre ; mais comme 
nous n'avions vü aucune des deux émerfions, ni pris aucune 
différence d’afcenfion droite & de déclinaifon, nous l'avions 
négligée. J'en aï tiré parti par une méthode fort fimple, dont 
nous aurons occafion de nous fervir plus d'une fois; car if 
fe rencontre aflez fouvent que l'on peut voir les immerfions 
de deux Étoiles voifines, fans que lon en aperçoive les 
émerfions. Outre le mouvement diurne qui peut porter la 
Lune fous l'horizon, outre les nuages qui peuvent furvenir 
dans Finftant, un Obfervateur eft fréquemment trompé dans 
ces fortes de cas: nous avons bien des fois éprouvé qu'il n'eft 
pas aifé de faifir l'inftant de la fortie d'une Étoile de derrière 
le difque de la Lune: quand le moment feroit connu, l'endroit 
précis de la circonférence du difque où elle paroîtra ne l'eft 
pas, & l'œil demande d’être fixé quelque temps pour décou- 
vrir un objet qui jette fi peu de lumière en comparaifon du 
Satellite. La difficulté eft encore plus grande fi la Lune va 
de fa conjonction avec le Soleil vers fon oppofition, parce 
que l'Etoile alors reparoît dans la partie éclairée. Les immer- 
fions ne fontspoint fujettes à ces fortes d'inconvéniens; on 


Jav, étrang, Tome IV. RE 


314 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
peut aifément apercevoir l'étoile quand elle eff loin; & lorf 
qu'elle eft près, on peut la fuivre, fans la perdre de vüe, 


jufqu’à ce qu’elle fe cache. Enfin, if peut arriver fréquemment - 


que lon n’obferve que les immerfions de deux Étoiles, fur- 
tout dans le pañlage de la Lune par les Pléïades, les Hyades, 
la Nébuleufe du Cancer ou d’autres. 

Suivant le midi pris ce jour-là & quelques jours après, 
en fuppofant la marche de la pendule uniforme, limmerfion 
de la plus boréale de nos deux Étoiles arriva à 8h $9" 19", 
celle de la plus auftrale, à 9" $" 7"; temps vrai à Rouen, 


lp Orien£, 


F 
Nord. 


La figure A TJ E repréfente le difque entier de la Lune. 

J'appelle À ke point. de la circonférence de la Lune où 
s'eft caché 8 auflral, & 2 celui où s'eft éclipfé 8 boréal: je 
fuppofe qu'à l'inflant de limmerfion de 8 auflral le diamètre 
de la Lune £T repréfente la portion du parallèle à l'écliptique, 
dans laquelle fe trouve le centre de cette planète en L; donc 
H1 fera une partie du cercle de latitude; AG, BF feront 
aufir des parallèles à l'écliptique : par conféquent À D fera la 
différence en latitude entre le point À & le centre de la 
Lune, & D L fera fa différence en longitude, 

Pour parvenir à favoir ces différences, j'ai deux points de 
la circonférence de la Lune, dont je peux trouver les lieux 
pour deux inflans différens, puifque le lieu du point 2 étoit 
le même que celui de 8 borcal à l'infant de l'immerfion de 
cette Etoile, comme celui du point À eft le même que 


A en, + 


DES SCIENCES 315 
celui de 8 auftral au moment que cette dernière Étoile a 
difparu. 

Or, pour connoître les lieux de nos deux Étoiles, j'ai 
pris celui que M. l'abbé de la Caille affigne à & Y dans 
{es Affron, fandamenta, pour le commencement der 7 50, puis 
fuppofant 11 différence refpective des deux 4 à cette Etoile, 
tant en afcenfion droite qu’en déclinaifon , fuivant le Catalogue 
du nouveau Zodiaque, j'en ai déduit l'afcenfion droite & la 
déclinaifon vraies de nos deux Étoiles, que j'ai enfuite réduites 
en apparentes, pour le jour de l’obfervation, par les calculs 
ordinaires. J'ai donc eu, par ce moyen, aux deux inftans 
ci-deflus les lieux apparens 

Longitude, Latitude aufl. 
du point B... 644 32! 188.4... 5446" 3% 
du point À ... 64. 32: 46,3 +++. Se 51 38+ 
mais il convient de les rapporter au même moment; car 
depuis l'inflant de limmerfion de 8 boréal jufqu'à celui de 
limmerfion de 8 auftral, la Lunea changé, tant en longitude 
qu'en latitude: le point 2 a eu le même mouvement. La libra- 
tion de cet aftre dans l'intervalle de quelques minutes n'eft 
pas capable de faire varier ce point de manière à tenir uné 
autre route; ainfi on n'y doit point avoir égard. 

J'ai donc cherché, par les Tables des Inftitutions, le mou- 
vement apparent de la Lune pendant l'intervalle des deux 
immerfions ; je lai trouvé de 2° 26” en longitude & de 9",3 
en latitude. Aiïnfi à l'inflant de limmerfion de 8 auftral, la 
longitude apparente du point 2, étoit 64% 34 44,8, fa 
latitude 5446 1 2"1; d'où j'ai conclu la diflance des points , 
A & B de:346"<. 7 

Dans Je triangle ifofcèle AB L, connoiffant les trois côtés, 
puifque les deux autres font des demi-diamètres apparens de 
la Lune, trouvés de 897"+, j'ai cherché angle 8 A L 7H 
5222"; d'où retirant l'ange BAC—= 1945335" (déjà . 
trouvé en calculant la diflance AB), il eft refté l'angle 
DAL = 58158 47 A 69 

Rrij 


316 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Dans le triangle reétangle À D L, l'hypothénule AL & 
fes angles font connus; j'ai conclu 4 D, différence en latitude 
apparente entre le point À & le centre de la Lune, de 7° 
42”,5, dont le centre étoit plus nord, & DL, différence 
en longitude réduite en petit cercle, de 12° 53", dont le 
centre de la Lune étoit plus occidental : ôtant donc ce nombre 
de la longitude du point À égale à celle de 8 auftral ; favoir, 
644 32° 46",3, le refte 644 19° 53",3, fera la longitude 
apparente du centre de la Lune au moment de l'immeïfion 
de cette Étoile; & fi de la latitude du même point À on 
retranche 7’ 42,5, on aura alors $4 43° 55",8 pour la 
latitude apparente de la Lune auflrale, 


La longitude du nonagéfime à 9" 57”, étoit.. 3f 254 16° 22° 
Donc diftance apparente de la Lune au nonagéfime. 1. 20. 56. 29 
Par conféquent la parallaxe en longitude. ..... + 36.45 
Celle detlalniudent. tn real ele 128565 


Donc le 7 Mars 1756 à 9h 5" 7", temps vrai, méridien 
de Rouen. 


Longitude vraie de la Lune obfervée en..... 11 41 56° 38",3 
Latitude vraie obfervée auflrale. .......... $+ 15+ © 


En 1755, le 25 Septembre, nous avions auffi obfervé 
le paflage de la Lune par les Hyades, & nous avions pris 
les immerfions des deux mêmes Étoiles avec l'émerfion de 8 
auftral. Le calcul fait, en employant l'immerfion & lémerfion 
de 6 auftral, nous avoit donné le lieu apparent de la Lune 
à 13° 25° 30", en x 4d 24° 2,3, avec une latitude 
de 5439 19",4 auftrale. 

J'ai employé ma méthode par les deux immerfions ; 
jen ai conclu pour le même inftant la longitude apparente 
x 4%24' 8,6, la latitude apparente auftrale 54 39° 15"; 
ce qui diffère du lieu trouvé par limmerfion & l'émerfion 
d'une quantité fi petite, qu'on la peut prendre pour l'erreur 
“inévitable dans les meilleures obfervations. 

De ces deux réfultats, fi l'on prend le milieu, on aura fa 


DES Sciences 31 
longitude Say 2 de la Lune en x 44 24° 5"2, & 
latitude 54 39° 17",2. 


V4 
B 


Or le nonagéfime étoit à 13" 25° 30", de.... 11 12421" 26° 


La diftance apparente de la Lune au nonagéfime. . 22023830 
Donc parallaxe en, longitude. . ........... — 16. 19,4 
EU dé RURIEBRMEE ee die cjots eioisle s |e — 35. 37:5 


Le 25 Septembre 1755, à 13h 25/30" à Rouen, on 


avoit donc 


La longitude vraie de la Lune, obfervée en... 7x 44 7’ 46" 
La latitude vraie, oblervée auflrale, de...... $+ 3° 397 


Rr üij 


318 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


PROJECTION GÉOMÉTRIQUE 


DES 


ECC ER PASSES DE SNS ONE MINE 
Afiyétie aux règles de la perfpeélive ordinaire. 


Par M. JEAURAT, Ingénieur - Géographe du Roi, & 
Profefleur de Mathématiques à l'École Royale Militaire. 


UNIQUE difficulté qu'il y ait à déterminer la différence 
des méridiens, par les obfervations des Édliples des 
fuellites de Jupiter, confifte à les faire avec des lunettes à 
peu près de même longueur & de même bonté, & dans des 
temps également favorables. Les obfervations des écliples de 
Soleil, ainfi que celles des occultations des Etoiles fixes par 
la Lune, exigent beaucoup plus de travail, & cependant cette 
feconde méthode eft préférée à la première par quelques 
Aftronomes : une raifon plaufible de cette préférence, eft la 
facilité qu'il y a à obferver le commencement & la fin des 
éclipfes de Soleil, ainfr que limmerfion & l'émerfion infian- 
tanée des Étoiles; mais fi l'on fubftitue de fimples projections 
graphiques aux longs calculs néceffaires pour parvenir à l'exac- 
titude, cette méthode, qui n'a d'autre titre de préférence que 
celui de l'exactitude même, deviendra dès-lors inférieure à 
l'autre; en forte qu'il eft évident que tout l'avantage eft du 
côté du calcul. Je me propole ici d'en prefcrire les règles, 
fans fuppoler l'œil dans le Soleil, comme on fait ordinaire- 
ment, mais fur la furface de la Terre. 

Je me borne uniquement à la projeétion des éclipfes de 
Soleil, vües d’un lieu quelconque de la Terre, parce qu'il 
eft facile de fuppléer les changemens ou additions néceflaires 
pour les occultations des Étoiles fixes par la Lune. Ainfr 
Jindiquerai, premièrement la méthode convenable pour la 
projection des écliples de Soleil, & je finirai par la forme 


DE! SUSYCLI-EN CE SA 319 
du calcul. La vüe feule des réfultats, que je joins à ce Mémoire 
en forme de Table, fufhra à ceux qui font un peu verfs 
dans cette partie des Mathématiques. 


Je fuppoferai donc l'œil de FOblervateur placé en un lieu 
quelconque de la Terre, d'où les aftes paroiffent fe mouvoir, 
dans l'efpace de vingt-quatre heures, d'orient en occident 
par un mouvement qui leur eit commun, tandis que leur 
mouvement particulier fe fait d'occident en orient. Le Soleil 
fe meut en ce fens dans l'efpace d'un an, & la Lune dans 
celui de 29i 121 44° 3", & à peu près 24h 48’ pour re- 
venir au même méridien ; ce qui eft caufe que fon mouvement 
paroît retarder tous les jours fur celui du Soleil d'environ 
trois quarts d'heure. Ces apparences feront repréfentées fur un 
plan interpofé entre l'œil & les aflres qui doivent s’éclipfer. 

Je fuppoferai ce plan perpendiculaire à celui de l'écliptique, 
auquel doivent fe rapporter tous les mouvemens. Par ce 
moyen, je donnerai l'afpect naturel des objets, ou, ce qui 
eft le même, leur perfpeétive, qui n'eft autre chofe que l'art 
de les reprélenter tels qu'ils paroiffent à nos yeux: pour cet 
effet, il ne fra pas néceffaire d'approfondir les difficultés dont 
Jai traité en 1750; je me bornerai à une projection de 
points, qui fe fera toüjours dans une perpendiculaire au plan 
de l'écliptique. 


Définitions des principaux termes de perfpetive employés 
dans cette projeétion. 


L’horizon eft un plan AZ, qu'on fuppofe paffer par l'œil Z 
du fpetateur pour lequel on calcule : il eft toûjours parallèle 
au plan horizontal, & marque par conféquent l'élévation de 
Yoœiïl fur le plan horizontal. 

Je prendrai pour plan horizontal celui de l'écliptique ASC, 
& les lignes Zp, PC, érc. qui lui feront perpendiculaires , 
feront appelçes lignes verticales. 


D'où il fuit qu'il n'y aura de verticale dirigée au centre C 


de la Terre ou de l'éclipiique, que la feule PC pañfant par 


Fig. 1. 


Fig. 3. 


« 


220 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


fe pole P de l'écliptique. Le plan de l'œil eft le point p; 
interfection de la verticale Z p avec le plan horizontal A4 SG. 

De méme, fi de la Lune on abaifle une perpendiculaire 
fur le plan horizontal, ou, ce qui eft la même chofe, fur le 
plan de lécliptique, la commune fection de cette perpendi- 
culaire avec le plan horizontal, fera nommée plan de la Lune. 
Enfin, ces perpendiculaires ou verticales feront les élévations 
ou abaiflemens de la Lune fur le plan horizontal, felon que 
fa latitude {era boréale ou auftrale. 


Mérhode de projedtion des Éclipfes dé Soleil" 


Je fuppofe l'œil du fpectateur en Z, regardant le point S 
au travers du plan diaphane de projettion D £GH, polé 
verticalement fur le plan horizontal SG, dans lequel fe 
trouve la ligne SP, menée du point objectif S au point P, 
plan de l'œil Z. 

La verticale Z P fera par conféquent parallèle au plan de 
projection D EG H, & la repréfentation du point S fur ce 
plan fe trouvera dans la fection Z de la verticale LB & du 
rayon viluel SZ. De cette manière on trouvera, fur le plan 
de projection, la trace de tous les points imaginablés. 

La queflion fe réduit donc à trouver pour les inftans donnés, 
& par rapport au point de l'écliptique où fe trouve le Soleil 
dans ce même inftant, la longitude & latitude du point Z, 
zénith du lieu pour lequel on fait le calcul ; ce que je pratique 
en cette manière. 

Le lieu du Soleil & fon afcenfion droite étant calculés 
pour un inflant donné, trouver au pole de l'écliptique l'angle 
formé entre les plans des cercles de longitude qui paffent par 
le Soleil & par le zénith du fpeétateur , ainfi que la diflance 
de ce zénith au pole de l'écliptique. 

Soit D KPp M le colure des folftices, PC celui des 
équinoxes, M D l'équateur, CX l'écliptique, P le pole du 
monde, p le pole de l'écliptique, PZ H le méridien du lieu, 
Z le zénith, & S le Soleil. 

CS, longitude du Soleil, fera fa diflance au colure des 


équinoxes; 


\ dre détient tt mm n'ai 


DES :S'C'I'ENN CES. 321 
équinoxes; SX, complément de la longitude, fera fa diftince 
au colure des folftices, mefurant l'angle XpS, formé au pole 
de l'écliptique, entre le colure des folftices & le Soleil. 

L'heure étant donnée, fon complément à 1 2 heures, réduit 
en degrés, donnera, au pole du monde, l'angle 8 PH entre 
le cercle de l'afcenfion droite du Soleil & le méridien: j'y 
ajoûte BD , complément de l'afcenfion droite du Soleil, ce 
qui me donne l'angle DPAH; & fon fupplément 4 PM 
fera l'angle au pole du monde, formé par le méridien & le 
qe des folftices. 

ans le triangle PpZ , on a l'angle Z Pp & les côtés Pp, 
PZ, qui font les diftances du pole du monde à celui de 
l'écliptique & au zénith, l'une égale à l'obliquité de l'écliptique, 
& l'autre à l'élévation de l’Équateur fur l'horizon du lieu: 
donc la folution de ce triangle donnera au pole de l'écliptique 
l'angle PpZ, qui étant comparé avec l'angle PpS, donnera 
l'angle SpZ compris entre les cercles de longitude du Soleif 
& du zénith du lieu. » 

La folution de ce triangle PpZ donnera auffi la diftance pZ 
du pole de l'écliptique au zénith: or, le complément Z L de 
cette diflance pZ, ainfi que l'angle Sp L, donne a longi- 
tude & Ja latitude de l'œïl Z , eu égard à la pofition du Soleif, 
pour un même inflant donné. Ce qu'il falloit déterminer. 


REMARQUE. 


Si au pole de l'écliptique, l'angle formé par le colure des 
folftices & par le cercle de longitude qui pafle au zénith, eft 
plus grand que celui de la longitude du Soleil avec cs même 
colure, le zénith fera occidental par rapport au Soleil: fr c'eft 
au contraire celui du Soleil avec le colure qui eft plus grand 
que celui du colure avec le zénith, ce zénith fera oriental. 
Dans Fun & dans l'autre cas il faudra toûjours prendre la 
différence de ces angles pour avoir l'angle cherché. 


Soit ADT le plan de l'écliptique terreftre pris pour le Fig. 4. 


plan horizontal , p le pole de cet écliptique, & € {on centre: 
je le prendrai aufli pour celui de fa Terre, Par la raifon que 
Sav. étrang, Tome IV. 1, 


Fig. 4. 


Fig. 4& 5. 


Fig. 


? 


LÉ 


322 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

h partie Ss de l'écliptique que le Soleil parcourt pendant 
cette durée, n'eft au plus que de fix minutes; ce qui ne peut 
produire aucune variation fenfible dans les diftances du Soleif 
à la Terre. 

Cela polé, on aura au centre C de Ia Terre l'angle ACs 
ou ACT égal à l'angle ApT où ZpT, qui vient d'être trouvé 
au pole p de lécliptique entre les cercles de longitude du 
Soleil & du zénith du lieu. 

La diflance Zp du pole de l’écliptique au zénith vient auffr 
d'être trouvée; ainfi il fera facile de calculer la hauteur: 
de l'œil Z, & la diftance € P du centre C de la Terre ou 
de l'écliptique au point ?, commune feétion de la verticale Z P 
avec le plan de l'écliptique. Ce point P eft appelé, comme 
je l'ai dit, le plan de l'œil. 

Pour réduire au plan P de l'œil Z les angles ACS, AC5 
trouvés au centre © de la Terre, on aura dans les triangles 
rectilignes CPS, CPs, le côté CP, diflance du centre de 
la Terre au plan de l'œil, celle du centre de la Terre au 
Soleil, & l'angle au centre € de la Terre, égal à la différence 
des longitudes de l'œil & du Soleil; donc la folution de ces 
triangles donnera les angles au plan 2 de l'œil entrele centre C 
de la Terre & le Soleil S ou s, ainfi que la diftance du 
plan P de l'œil Z au Soleil S'ou s. 

Ces calculs, ainfi que les fuivans, fe feront pour tous les 
inflans choifis de la projection. 

Pour trouver la diftance du Soleil au rayon principal PR, 
je fuppofe que ce rayon PR partage en deux parties égales 
Vangle SPs, qui eft la différence des deux angles CPS, 
CPs; je fais CPR égal à la moitié de la fomme du plus 
grand angle CPS & du plus petit angle CP5. Si de cet 
angle CPR, égal aux demi-fommes, on ôte les angles CPs 
qui font moindres, on aura les déviations orientales du Soleil 
à l'égard du rayon principal PR}; & fi au contraire on 
fouftrait cet angle CPR des angles CPS, qui feront plus 
grands, on aura les déviations occidentales. 


Dans cette nféthode je fuppofe le plan de projection DEGHA 


DÉE,S SCI ENIC Es. 323 
perpendiculaire au plan de l'écliptique, c'eft-à-dire aux lignes 
PC, Ps, PR; la verticale Z P étant perpendiculaire à ces 


mêmes lignes, fera par conféquent parallèle au plan de pro- - 


jeétion. En outre, je fuppoferai, pour la facilité du calcul, le 
plan de projection perpendiculaire au rayon principal PR, 
de manière que les angles ANP, PNG feront droits. Ainfr 
faifant conflamment la diftance perpendiculaire P N égale à 
une grandeur convenable pour l'exactitude du calcul, par 
exemple, au nombre exprimé par le logarithme 6.0000000, 
il fera facile de calculer les diflances NB, NE, égales aux 
diftances /Q, AK du Soleil à la verticale fN, fur le plan 
de projection D EG, ainfi que les diftances obliques PZ, 
PE du plan de l'œil aux points 2, Æ, correfpondans aux 
points Q, #, projection des points 5, S. 

Pour avoir les diftances Q X, Æ L à Ja ligne horizontale 
LX dans les triangles Z Ps, Z PS, oriental & occi- 
dental, tous deux rectangles en P; on calculera les angles 
ZsP, ZSP, égaux aux angles XZQ à lorient, LZXK à 
l'occident. Or, on connoît dans ces triangles rectangles, Z P 
hauteur de l'œil, & les diftances Ps, PS, du plan d. lœil 
au Soleil; ce qui donnera à lorient ZsP — XZQ, & à 
l'occident ZS P — LZK. 

Pour avoir les diftances du Soleil à la ligne horizontale, 
onaura dans le triangle Q XZ, rectangle en #”, angle XZ Q, 
& la diftance Z X égale à la diftance oblique PB ; ce qui 
donnera la détermination de la diftance XQ du Soleil à {a 
ligne horizontale L . 

On déterminera de la même manière LÆ, qui eft 
occidentale. 

Pour la Lune, on prendra pour chaque inftant la diffé- 
rence de fa longitude avec celle du Soleil, calculée pour ce 
même inflant. 

Ces différences du Soleil à la Lune, c'eft-à-dire, celles 
qui feront occidentales par rapport au Soleil, ou, ce qui eft 
la même chofe, celles qui précèdent l'inftant de la conjonc- 
dion, {e fouftrairont desangles trouvés au centre de la Terre 


Sfi 


Fig. s. 


Fig. s. 


Fig. 6. 


Fig. 5. 


Fig. 5. 


Fis. 6 


324 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
entre le plan de l'œil & le Soleil. La raifon en eft, que ce 
mouvement étant contraire au mouvement journalier, fait 
que la Lune paroît rétrograder par rapport au Soleil: au 
contraire, les différences de la Lune au Soleil, c’eft-à-dire, 
celles qui fuivent la conjonétion & qui font par conféquent 
orientales, s’ajoüteront aux angles trouvés. 

Ces fouftraétions ou additions étant faites, on aura au 
centre de la ‘Terre les vrais angles compris entre les plans 
des cercles de longitude de la Lune & de l'œil. 

On trouvera auffi les diftances du centre € de fa Terre 
an plan À de la Lune /, parce qu'ayant une hatitude 74, 
elle ne fe trouve point dans le plan de l'écliptique, mais au 
deflus ou au deffous, felon que fa latitude eft boréale où 
auftrale. Avec ces diflances & celles de la Terre au plan de 
l'œil, ainfi que les angles à ce centre éntre le cercle de lon- 
gitude de la Lune & celui de l'œil, on calculera, comme 
on a fait pour le Soleil, les réduétions CPS, C Ps au plan P 
de l'œil Z : filon en te l'angle R PC, on aura les déviations 
occidentales N PE de la Lune au rayon principal PN; & fr 
au contraire on les Ôte de l'angle RPC ou NPE, on aura 
les déviations orientales. É 

Ces angles orientaux & occidentaux de la Lune, par 
rapport au rayon principal PN, étant trouvés, & ce rayon 
PN étant le même que celui qui a été adopté pour les calculs 
du Soleil, on calculera les triangles PNB, PNE rectangles 
en NV; ce qui donnera les diflances NB, VE de la Lune à 
la ligne verticale Nf ainfi que les diftances obliques PB, PE. 

Dans le triangle Z }/reétangle en p, on a Zp— ZP—pP, 
élévation de l'œil fur fa Lune, & /p — AP, diflance du 
phin de l'œil à celui ds: la Lune; ce qui détermine l'angle 
ZIP EEE, 

Dans le triangle FZ K, rectangle en , outre Pangle KZ F, 
on a Ja diflance ZF— PB, diftance oblique de la Lune; 
ce qui détermine par conféquent Æ #, diftance de la Lune 
à la ligne horizontale. 

Le Soleil & la Lune étant calculés à fa verticale & à 


DES SCIENCES. 325 
l'horizontale, on trouvera les diftances du Soleil à la Lune 
fur le plan de projeétion. 

Les traces du Soleil & de la Lune ainfi calculées fur un 
plan, il fera facile de trouver les phafes de l'éclip£e, lorfque 
la fomme des demi-diamètres fera projetée, . 


Projedtion de. la fomme des demi- diamètres. 


Soit, premièrement , trouvé le demi - diamètre apparent 
de la Lune. 

Avec la parallaxe A/C de Ia Lune & fa diftance /C à la 
Terre, on trouvera A/: avec cette diftance & l'angle D A1, 
demi-diamètre de la Lune, on trouvera dans le triangle À D/ 
rectangle en /, le demi-diamètre D7 dont il faut avoir le 
demi-diamètre apparent. Pour y parvenir, on calculera (fig. 6) 
Z 1, diftance de l'œil à la Lune; puis /fg. 7) dans le triangle 
ÎEZ , reétangle en £, on aura le côté /£ —7D ; & faifant 
le côté /Z (fig. 7) égal à la diftance trouvée /Z /fig. 6) de 
Tœil à la Lune, on trouvera (fig. 7) l'angle £Z/, qui eft 
le demi-diamètre apparent cherché. 

Le demi-diamètre apparent de la Lune, fe diminuera de 
quelques fecondes, parce que dans l'obfervation des éclipfes 
de Soleil, la Lune étant noire fur un fond brillant, doit pa 
roître plus petite que lorfqu'on l'obfervera brillante fur un 
fond obfcur, qui eft le Ciel, pendant la nuit. Ce demi- 
diamètre ainfi corrigé, sajoûtera avec le demi-diamètre 
horizontal du Soleil ; pour lors on aura la fomme des demi- 
diamètres corrigée. 

Enfin, faïfant un triangle reétiligne ZZS des diftançes 
de l'œil à la Lune & au Soleil fur le plan de projecti 3 
ainfi que de celle du Soleil à la Lune fur ce même plan, on 
aura la fituation de la fomme des demi -diamètres, & le calcul 
fait, donnera le vrai diamètre de projection. 

Ce calcul fait pour ie commencement & 1a fin de l'éclipfe; 
donnera le réfultat des Tables pour la prédiétion de ces 
inflans, j 

Sfiij 


Fig. 7 


Fig. 8. 


326 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
ForME Du CALCUL 


La méthode que je donne n'eft que pour le cas ou l'on 
voudra trouver, avec la plus grande précifion, le réfultat des 
Tables. 

Ce calcul paroîtra, fans contredit, très-long, mais j'efpère 
qu'il conduira au vrai réfultat : heureux fi le fuccès répond 
à mes efpérances. | 


Exemple du calcul de l'Éclip e du 12 Mai 1706. 


Je prends pour élémens du calcul ceux de M. l'abbé de 
+ Mém, Acad. a Caille *, c'eft-à-dire, les lieux du Soleil & de la Lune, 
1744 ainfi que les latitudes, parallaxes & demi-diamètres horizon- 
; taux, tirés des Tables aftronomiques de M. Caflini. 
Je trouve pour chaque inflant donné l'afcenfion droite du 
Soleil, qui eft à 8h 20° du matin, de 484 36° 11" 46": 
fon complément 41% 23" 48" 14" eft la diflance du Soleil 
au colure des folflices ; j'y ajoute le complément du temps 
vrai à 12 heures, qui, réduit en degrés, eft de 5 $ degrés. 
La fomme 964 23° 48" 14", efl la mefure de l'angle formé 
au pole du monde par le méridien & le colure des folflices. 


Avec le fupplément 83% 36° 11° 46" de cet angle, & 
la diflance des poles 234 28° 40", ainfi que celle du pole 
du monde au zénith de Paris, 41% 9" $0”, Je trouve au pole 
de l'écliptique Fangle 704 25° 12° $ 5" entre le colure des 
folftices & le cercle de longitude paflant par le zénith de 
Paris. 

Retranchant de cet angle 70 25° 12" 55°”, le complé- 
ment 384 57° 25" de ladonpitude dif Soleil, j'ai 314 27° 

“s5"— E pour l'angle formé au pole de l'écliptique entre 
le plan du cercledelongitude du Soleil & celui du zénith, ou bien 
l'angle au centre de la Terre compris entre ces mêmes cercles. 
La folution de ce triangle fphérique donnera auffi la diftance 
du pole de l'écliptique au zénith, de 434 58° 6" 27". 

On calculera de la même manière pour les différens inftans 


DES SCIENCE, 7272 
donnés de Ja projection, & on trouvera les réfultats corref. 
pondans à ceux que je viens de trouver. 

Je fais Ja diftance du Soleil à la Terre — 7, rayon des Fig. 9. 
Tables: delà s'enfuit que le demi-diamètre ZC fera ex- 
primé par le logarithme fmus 5.68 $ 5749 de la parallaxe 
du Soleil, que j'appelle +. 

Appelant p la parallaxe de li Lune, on aura pour diftance 
de la Lune à la Terre Te 

Le rayon CZ de la Terre étant exprimé par æ, & la Fig. 4 
diftance p Z du pole de l'écliptique au zénith, qui eft 434 58” 

6" 27", déterminera dans le triangle"CZ P rectangle en ?, 
l'élévation ZP de œil Z fur le plan de l'écliptique, & 
CP diftance du centre de la Terre au plan de l'œil; ainfi 


PA se aides Ps 348931, RNCS fin. 7 . fin A 


Eee ET RP € 
* Pour réduire au plan P de l'œil les angles PCS, formés Fig. 4. 

au centre © de la Terre entre les cercles de longitude. du 
Soleil & du zénith, j'ai, à 8" 20’, l'angle au centre C de 
la Terre, de 31427 47" 55 ";la diflance CP de ce centre 
au plä? de l'œil, de 336588, & la diflance de ce même 
centre au Soleil, de r0000000000 =, rayon des Tables. 
Ainfi la folution de ce triangle CPS donnera la diftance PS 
du plan de l'œil au Soleil, exprimée par le logarithme 
9999987 5—0, &l'angleCPS,de 1484 328"27"—/L 

Dans ces réfultats 47, je prends le plus grand 1754 11" 
47" 58", & le plus petit r484 32° 8” 27"; je fais Ja 
moitié de leur fomme 1614 $1° $8" 12" — a: pour lors 
j'ai a — M — AN pour les déviations orientales du Soleil 
à l'égard de la ligne verticale, & M — a — AN pour les 
déviations occidentales. 

La tangente de l'angle XZ Q, formé à l'œil entre Fhori- Fig s, 
zon Zf & le Soleil 5, fe trouvera, par cette analogie, 

SATA ri 

je , te ZSP= AZQ— = — B —log. 5. 5427522: 


+! 


328 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Fig. 5. PN=—=zg, rayon de la projeétion étant égal au nombre 
exprimé par le logarithme 6.0000000 , on aura pour les 
cf. NPB,PN 
sr PB 2 — 


N .9 SEM Un 


diftances obliques 


—= log. 6.0118620. 
Et enfin, pour les réfultats des diftances du Soleil à la 
verticale & à l'horizontale, on aura 


co NPB.PN::fn. NPBE fin. N. 
NB —= PET 2360558, 
Fig. S: cf M . 9.:: fin. N cof. M es 
diflances du Soleil à la ligne verticale; r. PAC 1 2 


ou Fr XQ nee R—=53$ -9, diftances du Soleil à la 


ligne horizontale. 


Calcul des réfuliats de la Lune. 


fin 


Fig. 10. Les diftances c/ de la Lune à la Terre, font Es éd; 


par conféquent les élévations À 7 de la Lune fur le plan de 
Yécliptique, feront ua , & les diflances du centre C de 


r 


la Terre au plan À de {a Lune, feront 


g.cof. L 


. 
r 


La différence des longitudes du Soleil & de la TR. 2 
chacun des inftans correfpondans, donne les angles 4 occi- 
dentaux ou orientaux. Si on les fouftrait des angles Z, 
pris dans les calculs du Soleil, ou fi on les ajoûte à ces angles, 
on aura les angles e — E + d. 


Avec ces angles & les diflances G du centre de Ja Terre 
au plan de la Lune, & avec celles de Æ’prifes dans les calculs du 
So!eil , on réfoudra, par l'angle compris, les valeurs # & m. 

Les valeurs de # fe trouveront de la même manière que 
celles de Vfe font trouvées dans les calculs du Soleil, c’eft-à- 
dire, que l'angle au plan de l'œil, entre le centre de la Terre 
& le rayon vertical, étant de 1614 51° 58" 12" — a, 
on aura, pour les déviations orientales de la Lune, a— mn, 
& pour celles qui feront occidentales, m — a =». 


On 


s «me De tdi 


MDUE S Sri. EN CES 32 
On prendra auffi, felon ce qui a été dit, la différence des 
élévations de l'œil & de la Lune fur le plan. de Re 
ce qui donnera les élévations 4 de l'œil fur la Lune. 


En fe rappelant ce qui a été dit des calculs we Soleil, on 


verra que la tangente de l'angle formé à l'œil = — — 4. 


De même, les logarithmes des diftances STARS feront 


7 r 
égaux au rayon g de la projection, multiplié par —? 
= cof.# 


c'eft-à-dire à 27 —S, 
cof. 7 À 
Enfin, on, trouvera les diflances de la Lune à la ligne 
verticale & à la ligne horizontale, de la même manière qu'on 
a trouvé celles à Soleil. 
Prenant ces différences: ou fommes pour les deux. côtés 


d'un triangle rectangle, on aura, pour hypothénulfes, les 
diflances du Soleil à a: Lune fur le plan de projection. 


Calcul de la fomme des  demi- diamètres du Soleil 
& de la Lune fur le plan de projedtion. 


Soit, prernièrement trouvé Je demi-diamètre apparent de 


la Lune. ; 

J'ai à 8° 20! fon demi - diamètre : horizontal D A7, de 
od 16° 36" 49", & fa parällaxe A7/C, de: r1d 1° 27" 0", 
avec laquelle je À EN dans le triangle / À C rectangle en À, 
le côté A/— log. 7.4332806. 


\ Avec.le demi, diamètre horizontal DAI, je trouve dans’ 


ar triangle ADL, rectangle en l, le côté, DI — LE 


Be 5- «117 74e. G * 
Je, trouve enfuite le logarithme de fa diflance de l'œil à à 
la Lune, AE 5 £: 4286973, que je fais CRM NS ins 
Puis, par f'analogie fuivante, je trouve le demi- -diamètre 
apparent TE la Lune JZ:rilE fm EZI — of 16" 
47. 24 , demi- diamètre apparent dont je retranche 1 5", 


qui eft £ ‘quantité. que M. l'abbé. de la Caille à ppole 


Say. érrang. Tome IV. : ANT 


Fig. 


Fig. 114 


Fig. 114 


Fig. 12. 


330 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
être conftante dans les obfervations des éclipfes de Soleil. 

J'ajoûte à ce demi-diamètre de la Lune, ainfi corrigé, 
celui du Soleil 1 $" 5 3"; ce qui me donne, pour la fomme 
des demi-diamètres corrigés, 32° 25" 24”. 

Avec la diflance XS du Soleil à la ligne horizontale, 
qui eft, à 8h 20’, de 35" 9", & avec Z X—PF, diftance 
oblique du Soleil, dont le logarithme eft 6.0118620, je 
cherche dans le triangle Z XS, rectangle en X, la diftance 
ZS, 1027689,6, qui eft la diftance de l'œil Z au Soleil 
fur le plan de projection. 

De même, avec la diftance AZ de la Lune à la ligne 
horizontale, qui eft, pour ce même inftant, de 401 2,9, 
& avec Z A, diflance oblique, dont le logarithme eft 
6.0109559, on trouvera dans le triangle Z AL, rectangle 
en À, la diftance ZL 102555 5,6 de Fœil à la Lune fur 
le plan de projection. 

Or, formant un triangle Z S L des trois diflances connues; 
favoir, celle de l'œil à la Lune, 1025 5 5 5,6 ; celle de l'œil 
au Soleil, 1027689,6; & celle de la Lune L au Soleil #, 
20270,3, on trouvera la folution fuivante. 

Angles du triangle. Côtés du triangle 
AIO AE EC MAO À 10270,3 
Nr td 038 26 1025555,6 
L 101. 42. 43,37 1027689,6 


Ce qui marque évidemment la fituation du diamètre de 
projection cherché. 

Cela pofé, j'imagine que la ligne Z B forme l'angle LZ B 
égal à celui de la fomme des demi-diamètres, 32° 25" 24‘; 
pour lors j'ai dans le triangle Z L B le côté Z L 102555 5,6; 
& les angles LB = 32 2"24", Z LB) 104 
4243" 37°", & par conféquent le côté LB, diamètre de 
projection. 

Imaginant aufli l'angle BZS égal à la fomme des demi- 
diamètres, 32° 25" 24", j'aurai, dans le triangle BZS,; 


les angles BZS = 32° 25" 24", ZSB = 77 43! 


Die s S'ÉHE.N.CE-s. 321 
38" 23", ainfi que le côté ZS — 1027680,6, & par 
conféquent BS pour le fecond diamètre de projection. 
Prenant la moyenne diftance entre Z L & BS, diamètres 
de projeétion, j'aurai 9898,7 pour le vrai diamètre de 
projeétion cherché. 


Calcul du commencement de l'Éclinfe du 12 Mai 1706. 


Je prends la différence 38 38,2 entre la première diftance 
des centres du Soleil & de {a Lune fur le plan de projec- 
tion 10270,3, & fa feconde diftance des mêmes centres 
6432,1, & je fais cette différence 3838,2 — à. 

Je prends auffi la différence 7209,2 entre la première 
diftance 10270,3, & a troifième 3961,1, que je fais 
égale à 4. 

Enfin, je prends Ja différence 37 1,6 de la première dif 
tance des centres du Soleil & de la Lune 10270,3, & de 
Ja fomme des demi-diamètres de la projection 9898,7, 
& je fais cette différence 3716 =. 

La formule {25 — a) xx + (2a —14)x — k 
donne le rapport de tous les temps. aux diftances corref. 
pondantes. 

Faïfant donc 14 4 — 223,005 d'ou 
2344 —d, & 2a — 1h — 4071,8 == f far, 
429 

24 467.2 
rapport des temps, dont l'intervalle eft de 24 minutes: par 
conféquent lanalogie fuivante donnera fa partie qu'il faut 
ajoüter au premier inftant, 8 20", pour avoir le commen- 
cement de léchiple, 467,2 : 42,9 :: 24°: 2° 12" 14" 
Donc le commencement de l'Éclipfe a dû arriver, 

Selon les Tables, à........ LED de She: 14 
Selon M. l'abbé de la Caille, à «....... 8.022.0 r.L08 


Calcul de la fin de l'Éclipf. 


Je prends 340 8,6 — 4, 6719, = 6, & par confé- 
quent 139,05 = d, 3637,65 = f. 


pour plus petite racine, x —= RENE #46) à = 


Ttij 


2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Le diamètre de PROECAIES étant, à 10h44" de 99494, 
ge LA 0 av? 


j'aurai Roues == VA, 6e qui. me: ‘donné x = Sie 


1 


— 6! 35" 39", qu'il faut retranchér' de ‘10h 441. 


Ainft la fin de l'Éclipfe a dû arriver à..... pa 10 37' PAU 2PT 
Selon M. l'abbé de la Caille, à... ..."10: 37.11. 00 
Calcul’ di milieu de 1 Éclip e.. 
Je prends les différences 2645,2 a, 1158,2 — 8, 
des diftances qui répondent à oh s 6”, & les deux précédentes, 
Je fais la différencielle de léquation [16 — 4) 


ï 


24— à 
— 27'21"48". Retranchant cette quantité 


xx + (2a—+b) x — 0; ce qui me donne x — 
47113 
41322 

27!.24° 48 %yde oh 56; 


J'ai le milieu de l'Éclipfe.à .....,..,.. 9h28’ 38" 12% 
Selon M. d'abbé. de la /Caille . «........ 2. 9- 29. 8. oo 
Selon M. Caffini, .. +... ah Bel. aie see + ,9:28.:,00:00! 


Calcul de la grandeur de 1 "Éclipfe. 


Soit trouvée la plus petite diftance des centres du Soleil 
à la Lune fur le plan de projection. 

Je fais? b— a — — 20661 = — d;a—28 
= 20061 BG NL GES HER EPS - 
2a— D— 41 32,2 = m, & par conféquent m—4d— 4 

2a— Eh UT 
É Hi Pere 
dans la formule /2 4 — 4) XX Hi ts rio Le. x hr; 


= 2066,1: Je fubilitue la valeur ex 


cette Hurnitité 268 5,8, de 42293 33 tn des centres du. 
Soleil & de la Lune à 9h 56’, j'aurai à 1287 5 qui eft la plus. 
petite diflance cherchéé. 

Soit trouvée la fonume dés bd es de projeélion, 


- 
DES ASCCTMEL NC ot 158 

Je’trouve avec le demi-diamètre horizontal de la: Lune ; 
qui, à 9" 8', eft de 16° 36". 32", fon demi - diamètré 
apparent 16° 48" 55, que je diminue de 1 $ fcondes, & 
J'y ajoûte le demi-diamètre du Soleil 1 $ 53" 0"; ce qui 
me donne, pour la fomme des demi- diamètres corrigée, 
3226" 55%. 

Calculint enfuite la fituation de cette#demi-fomme fur fe 
plan de projection , où, -ce qui eft le méme, le triangle 
formé par l'œil, la Lune & le Soleil, dont on connoit les 
trois diftances, on trouvera [a folution fuivante. 


| Logarithme des côtés 
Angles du: triangle, pour 9% 8’. du triangle. Nombres naturels, 
Z,1Œ@il.... jod:10°28",54"| 34858775 3061,1 


S, leSoleil.. 86. 56. 14. 33 | 6.011004 | 1002537,a 
Z, la Lune... 92. 53. 16. 33 | 60011692 | 1002695,8 
Ainfi la fomme 32° 26" 5 5” des demi-diamètres corrigée, 
donnera, à oh 8”, la fomme des demi-diamètres de projec- 
tion de 947 6,6. 

De même on trouvera, à 9":32', Ja fomme des demi 
diamètres de projection, de 9441,5 ; & à 9".56", de 
2327: DA 

Souftrayant de la plus grande fomme des demi-diimètres 
de projection 9 512,7 les deux précédentes, on trouvera 
ZL20 = 3610, 4 7 20 SAIS —= d, 
24—+b— 124,35 —=f,& 2a—b— 106,30 —m, 


Aïnfi la formule 4 — _. donnera, pour là valeur de #, 


73:59; laquelle étant retranchée de la plus grande fomme 
des demi-diamètres de projetion 9 $ 12,7, donnera la vraie 
fomme des demi-diamètres de projetion de 9441,11. 

Enfin, on trouvera le diamètre de projection du Soleil, 
àl9" 8, de 9127,3; à 9h 32’, de 9095,4; à op 56’, 
de 9166,3; & par conféquent le vrai diamètre de projec- 
tion du Soleil, de 909 3,55. 

Or, la moindre diftance des centres du Soleil & dela Lune 

Tt ii] 


334 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIÉ 
ur le plan de projection, étant de 1 533,5, la fomme des 
demi-diamètres de projection de 9441,1 1, & le diamètre de 
projection du Soleil de 909 3,5 5, la grandeur de l'éclipfe fera, 
Sion les Tables, den. MM tt Ne roma 
Selon M. labhétde#: Calle 1.7... * CAES bat CEE: 
Selon Ia projection graphique de M. Cafini...... 10. 48 
Ld z 
Vérification de la grandeur de l'Eclipfe. 
Angles des wiangls nul di | dot le 
Z olt10'28"54"| 34858775 3061, 
A 9h 8"< S 86. 56. 14. 33 | 6.0011004 1002 537,0 
L 92. 53: 16. 33 6.0011692 1002695,8 


Z : Ge. u$0 24 42 31970323 15741 
A 9" 32"< 589. 50. 25.00 | 6.0000025 1000005,8 
L 90. 4.10.719 6.0000039 1000009,9 
Z 0.14. 23. 55 3.6252404 4219,3 


A 9h 56 4 S 84 37. 13.00 | 6.0012797 100295$1,0 
Jos. zen 6.0014232 1003282,4 


Soit trouvé le plus petit angle formé à l'œil entre les centres 
du Soleil & de fa Lune. 

Je fouftrais du finus 4188 3548 de l'angle où 14 23" 
55", les finus 15740848 & 30480930 des deux angles 
des inftans qui le précèdent, favoir, oh $' 24" 41", of 10° 
28" 54"; ce qui donnera les différences 26142700 =a, 
11393618 — bd. 

J'aurai par conféquent à — + — 20445891 = d, 
2a—1b—46$88591—=f2a—b—40891782—=m; 
ffd 
rithme finus de l'angle od 5" 7" 2 5°", lequel étant retranché 
de of 14° 23" 55°’, me donne le plus petit angle poflble, 
formé à l'œil entre les centres du Soleil & de la Lune, de 
od s' I 6" 3 ©’. 


ainfr l'équation 


— 74238930, me donne le loga- 


Sa Etang Time IV Page 33,4 PL TT. 


J'av. Lltrang Tome IT Page 33.3. PL. PI. 


d'a. Btrans Tèma I Tqse 334 PL FIL. 


Des S'clr E Nic Es 

Soit trouvée la vraie fomme des demi - diamètres. 

Elle eft, à 9h 8’, de od 32° 26" 55"; à 9h 32°, de 
od 32° 27" 24"; & à 9" 56’, de ol 32° 27" 47" : leurs 
finus font 94387783, 94411217, 94429804; ce qui 
donnera 18587 —4,42021 —b,a—+b——2423,5 
= — d,2a — 3b = 16163,; =f, 2a — b 
—— 4847,0 —= — m; ainfi l'équation I donnera 
od o’ o" 57". Retranchant cette quantité de 32° 27" 47", 
on aura, pour la fomme des demi-diamètres cherchée, 
od 32° 26" so": 0r, retranchant le plus petit angle trouvé 
od 5’ 16" 30", on aura 09 27° 10" 20", lequel, à pro- 
portion du diamètre du Soleil, od 3 1° 16" 0", pour 1 2“#* 
vaut rod 26’, qui eft la grandeur de l'Éclipfe cherchée. 


) , 
336 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


OBSERVATIONS 


SUR T'A 


CAUSE DE DAICHUT A DDILB OS 
OU 
NES CORNES DÉSICERES. 


Par M. le Comte DE. ViLLIAMSON, Chambellan de 
Sa Majefté le Roi de Pologne. 


| *0B3ET que je me propole d'examiner, ne fe borne 
pas à raconter fimplement quand & comment les Cerfs 


mettent bas leur bois ou leur tête; j'ai deffein de donner 
des remarques propres à découvrir la caufe de cet évènement. 
M. de Reaumur eft le premier qui ait refufé d'adopter le 
fentiment des Anciens, qui, jufqu'à préfent, a attribué cet 
eflet à des vers rongeurs. Ce fyflème ridicule s’eft foûtenu 
des fiècles entiers, mais les obfervations de M. de Reaumur 
l'ont renverfé de: façon à ne plus fe relever & à faire revenir 
tout bon efpritfde ce préjugé, qui, comme prefque tous 
les autres, prenoit fon origine dans l'ignorance & dans le 
défaut d’obfervations jufles , détaillées & bien fuivies. Ces 
cara@tères, qui font en particulier ceux de M. de Reaëmur, 
manquoient à ce que tous les Chafleurs avoient vû fur ce 
fujet. Nous favons donc maintenant l'origine, les fonctions 
de ces vers, & il eft démontré qu'ils ne cherchent, foit dans 
Je uofier du cerf, foit dans fa peau, que la nourriture qui 
leur eft deftinée dans ces endroits. 

M. de Reaumur, content de nous avoir éclairé fur une erreur 
fi ancienne, n'a pas cherché à expliquer comment cette chüte 
du bois des cerfs fe faifoit; ce n'étoit pas alors fon objet, 
G'auroit été trop s’écarter de la matière qu'il traitoit dans cette 
occafion, & il n’y a pas lieu de douter que des yeux aufit 
accoûtumés à bien voir que les fiens n’euffent mis dans tout 

fon 


p'E-s4-S CL REN c'xts. 337 
tout fon jour la vérité de ce qui fe paffe dans cette opération 
de la Nature, s'il eût cherché à s'en aflurer. 

Ce que M. de Reaumur n'a pas fait fe trouve ébauché 
dans ce que M. du Hamel nous a donné au fujet des cornes 
accidentelles des coqs ou de ces ergots qu'on ente fur la tête 
de ces animaux, & qui, au moyen de nouvelles parties que 
la Nature produit, sy articulent, y prennent nourriture & 
augmentent confidérablement : ce n’eft pourtant, dans le vrai, 
que fur la produétion des cornes des bœufs & des autres 
animaux femblables que les obfervations de M. du Hamel 
peuvent jeter des lumières. Le bois du cerf poufle, prend de 
la croiflance, & tombe d’une façon bien différente de celle 
qui s'obferve dans les cornes des bœufs, lorfqu'elles paffent 
par ces différens états. 

Pour moi, ne voulant que chercher la caufe prochaine 
de la chûte de la partie du cerf dont il s'agit, & donner 
quelques vües fur fa reproduction, je me bornerai à ce feuf 
objet, & m'en tiendrai même prefqu'à l'expofé des obfer- 
vations que j'ai faites fur ce qui fe paffe dans lun & l'autre 
cas; & fi j'y joins quelques autres remarques, ce ne fera 
que pour donner quelqu'ordre à ce que j'ai à rapporter, pour 
y jeter plus de lumière & en faciliter conféquemment 
l'intelligence. 

Le cerf, comme tout le monde fait, eft appelé for en 
maiffant : tous les cerfs ne font pas de même taille ou de même 
corfage. Ce feroit une erreur de croire, avec le commun des 
chaffeurs, que ce font les vieilles biches qui font toñjours 
les grands cerfs, & que les jeunes donnent naiffance aux 
petits. Les chaffeurs qui ont quelqu'ufage & qui ont fà faire 
attention à ce qui fe pafle tous les jours fous leurs Yeux, 
favent le contraire de ce préjugé: ils voient des fions de 
grand corfage fuivre de jeunes biches qui font leurs mères, 
& des faons de petit corfage à Ia füite de vieilles biches qui 
font les leurs. Cette différence ne viendroit-elle pas de celle 
qui feroit dans la nourriture? il n'y a pas trop lieu de le 
foupçonner, puifqu'il s'élève dans le même canton de l'une 

Say, érang. Tome 1V. e Vu 


38 MÉMoiREs PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& de l'autre forte de cerfs. Il en eft de ces animaux comme 
de tous les autres, & de l'homme mème, dont fa gran- 
deur de la taille ne dépend pas plus de la nourriture que de 
Yâge de la mère, un enfant bien nourri étant fouvent très- 
petit, tandis qu'un autre de la même femme, lequel aura 
eu une mauvaife nourrice, fera très - grand. On ne peut 
probablement trouver de caufe bien naturelle d'un femblable 
fait que dans le plus ou le moins de duétilité dans les parties 
dont le corps eft formé, & qui peut varier dans des indivi- 
dus d'une même mère, & qui les aura eus d'une même 
grofleffe. 

La peau des faons eft femée de mouchetures de poils blancs, 
qu'on appelle Avrées. Ces livrées ne diftinguent pas plus les 
mâles que les femelles; ils en font tous également marqués. 
Is les quittent lorfqu'ils font ägés d'environ quatre mois, & ce 
changement arrive communément vers le mois de Septembre. 

Le faon, à l'âge de huit mois ou à peu près, commence 
à fentir les premiers eflets de la produétion de fon bois: l'os 
du front, qui jufqu'alors a été uni & femblable à celui de 
la biche, donne des marques de cette efpèce de végétation. 
I fe forme deux boffes qui s'élèvent jufqu’à la hauteur d'en- 
viron trois pouces, & elles en ont un en groffeur : la peau 
s'étend pour les envelopper & les couvrir, ainfr que les autres 
parties du corps. Depuis le temps que ces bofles ont com- 
mencé à croître jufqu'à celui où elles ont acquis leur groffeur , 
on leur donne le nom de #éres, Aufli-tôt que ces bofes font 
parvenues à leur dernier degré de perfeétion, ce qui arrive 
lorfque ces faons ont un an, il fort de ces boffes, qu'on 
peut appeler pivots, un corps, le fujet de notre curiofité, 
Farme & l’ornement de cet animal, la marque diftinélive de 
fon fexe & qui lui fait donner dès-Jors le nom de cerf. 

Une obfervation que le hafard m'a fournie, & qui prouve 
que les boffes ne commencent point à végéter lorfque l'animal 
eft renfermé dans le fein de fa mère, mérite d'être rapportée 
ici. Ayant trouvé une biche, étranglée probablement par les 
loups, & qui fentoit déjà mauvais, j'aperçüs qu'elle portoit 


DES SCHRENC,ES 

un faon mâle prêt à fortir: je coupai la partie de la tête de 
ce fion que je voulois obferver; j'en détachai la peau & fa 
chair, Je trouvai les os du crâne encore fort délicats & peu 
durs; je les trempai dans de l'eau prête à bouillir pour les 
bien nettoyer. Au moyen de cette opération, je remarquai 
que bien loin de trouver les commencemens des boffes dont 
il s’agit, ces os étoient unis & à peine formés : les endroits 
du frontal , où les pivots qui portent les cornes doivent poufér, 
font feulement plus lifles, plus offifiés & plus blancs: vûs 
à la loupe, on ne diftingue plus, ou prefque plus, l'organi- 
fation qui fe remarque dans le refte de l'os; ici c'eft une 
efpèce de réfeau, dont les maïlles font plus ou moins grandes, 
au lieu que dans l'endroit d'où les pivots doivent {ortir, on ne 
diftingue que difficilement des fibres très-fines & très-déliées, 
qui font un corps continu. Ces fibres ne font que les ner- 
vures principales des mailles qui fe font rapprochées; ou bien 
les mailles s'étant remplies, le total eft devenu un corps 
fimple, life & uni. - 

Cet endroit eft en quelque forte le centre de l'offification, 
c'eft du moins celui qui a acquis plus de dureté, & cette 
dureté eft d'autant plus grande que la portion offifiée eft 
près du centre. Les bords font encore en réfeau, mais ce 
réfeau eft à mailles plus rapprochées; elles font dilatées fur 
le corps de l'os, & poftérieurement fur-tout: cependant vers 
la partie de os où eft la future qui divife le coronal en deux, 

È les mailles font plus petites, mais beaucoup plus multipliées. 
| Il en eft de même des mailles dont les parties antérieures & 
poltérieures, & qui font à la bafe de los, font compofées, 
On peut ainfi dire en général que cet os n'eft vraiment 
os que dans fon centre, & prefque membraneux dans fa 
circonférence, 

Cette affertion n'eft pourtant vraie qu'autant qu'on ne fera 
attention qu'à la moitié de l'os frontal, comme je l'ai fait 
ici. Cet os eft réellement formé de deux os bien diftinéts 
& même féparés dans le fœtus ; il n’y a même aucun veftige 
de fa future qui les lie dans l'adulte, leurs ie ne finiflent 

Vuij 


À 


340 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

que par une partie membraneufe. Ainfi on voit aifément que 
je n'ai pû dire que le frontal soffifioit par le centre, que 
parce que je n'en confidérois qu'un côté. Si on imaginoit 
donc que ces os n’en fifent plus qu'un, il faudroit alors dire 
que l'offification commence, de part & d'autre, vers le milieu 
de la Jongueur des côtés extérieurs de cet os & un peu au 
deffus de la crête fupérieure de l'orbite qui renferme l'œil. 

L'offification fe fait fans doute de cette façon dans l'une 
& l'autre furface de ces os, é’eft-à-dire tant intérieurement 
qu'extérieurement; mais je ferai obférver que la fnface in- 
terne s'offifie fa première, elle étoit du moins liffe & unie 
prefque dans toute fon étendue & les mailles y étoient plus 
rares; ainfi il y a lieu de penfer que ce n’eft que parce que 
loflification étoit plus avancée, 

On en doit dire autant des pariétaux: on y remarquoit 
la même fubftance, & l'offification étoit plus apparente dans 
la furface interne que dans celle qui eft externe; ils n'en dif- 
féroient que parce qu'on n’y remarquoit pas un endroit de 
la furface externe plus offifié que tout le refte de cette furface. 
Une autre différence confiftoit en ce que l'offification fe faïloit 
également dans chaque finface , confidérée féparément & in- 
dépendamment lune de l'autre. Il paroïfloit auffr que cette 
offification s'y fait pluflôt de la circonférence au centre que 
dans le fens contraire; il y avoit du moins un trou au milieu 
de chacun de ces os. Les bords de ces trous étoient encore 
membraneux ; d’où il y a lieu de penfer que ces trous fe 
feroient bouchés par la fuite au moyen de offification de 
ces membranes : il leur feroit arrivé ce qu'il arrive à la mem- 
brane de la fontanelle. Cette partie, qui étoit confidérable 
dans la tête-de ce fœtus de faon, étoit, de même que le 
refte de Ja fubftance des pariétaux , moins offifiée en dedans 
qu'en dehors, & le réfeau étoit ainfr beaucoup plus fenfible 
far le deffus qu’en deflous; ce qui fe remarquoit aufli dans la 
partie du fond des orbites, qui étoit reflée attachée aux 
frontaux que j'ai décrits ci-deflus. 

Cette defcription {uffit fans doute pour prouver que les 


< 


LS 


DES) SCI FIN CES 341 
bofles ou les endroits de ces os qui doivent s’alonger en pivots, 
ne font que a fuite de l'accroiflement de l'animal, & non 
Fefiet de l'organifation première. J'ai toûjours penfé qu'il ne 
commençoit à {e former des élévations fenfibles fur le crâne 
des faons mâles, que lorfqu'ils avoient quitté leurs livrées ou 


 mouchetures; ce qui arrive dans les mois de Septembre & 


d'Oétobre, comme je ai dit plus haut. 

Il feroit curieux, conféquemment à ces remarques, de 
faire couper deux faons de cet âge, & d’extirper, à un feu- 
lement, un des dentiers ou des tefticules, & d'enlever à l'autre 
les deux : il faudroit en ufer de la même manière à l'égard 
de deux cerfs de mème âge, qui euffent des dagues perfec- 
tionnées ou qui les euflent jetées , ou qui euffent refait une 
feconde & troifième tête; il y a lieu de penfer que ces cerfs 
ainfi mutilés étant réunis dans des parcs avec des biches & 
d’autres cerfs, offriroient, en vivant, des fingularités dignes 
d'attention. J'ai eu plufieurs exemples fous les yeux qui m'ont 
convaincu que cette partie eflentielle à la génération, a beau- 
coup de rapport avec la tête du cerf ou avec fon bois, 

L'accroiffement de cette partie fe fait autrement que celui 
des pivots: ces pivots, en fe formant, acquièrent une dureté 
femblable & égale à celle de os du crâne : le bois n’eft, dans 
fon origine, qu'un amas de fang fans dureté, femblable, en 
quelque forte, à une tumeur. La peau du front s'étend feu- 
lement pour recouvrir les boffes ou les pivots; & plus les 
pivots s'étendent, plus Ja peau prend elle-même d’extenfion ; 
elle y eft intimément attachée, & fi tendre, que la piqüre 
d'une mouche commune fait facilement {ortir le fang à travers. 
Elle eft couverte d'un poil doux, & tel qu'on penfe toucher 
du velours lorfqu'on pafle la main par-deflus. Il tranfpire 
de cette peau une humeur huileufe & crafle qui s'attache 
facilement à la main: malgré fon adhérence au bois, elle ne 
fubfifie pas cependant autant que ce qu'elle recouvre. Lorfque 
le bois a pris toute fa crüe, elle fe defsèche peu à peu, & 
Je defféchement total fuit même de près : l'animal eft enfuite 
porté, par fon inftinét, à détacher cette enveloppe alors inutile: 

Vuiij 


342 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
il emploie à cette opération quatre ou cinq jours; & ce n'eft 
qu'en frottant de temps en temps fon bois le long des arbres 
ou d’autres corps femblables, qu'il parvient à s’en débarraffer. 
Voilà en général le méchanifme que la Nature emploie 
dans la formation de cette fingulière partie. Mais par quels 
degrés de dureté cette partie pafle-t-elle pour acquérir toute 
fa confiflance? & comment cette confiftance s'acquère-t-elle ? 
quelles font les parties qui la lui procurent? ce font-là des 


myftères qu'il n'eft pas trop ailé, pour ne pas dire qu'il eft - 


impoffible, de découvrir & de développer. Je ne chercheraï 
pas à y entrer, je me contenterai feulement de rapporter 
des faits qui ont rapport à ces phénomènes & qui pourront 
mettre fur la voie ceux qui feroient curieux de les pénétrer : 
je ne rapporterai au refte que des évènemens que j'ai vüs avec 
toute l'attention dont je fuis capable, Il eft certain que ce 
corps ne devient dur qu'avec le temps & à proportion de 
la croiffance qu'il prend ; en forte que toutes fes extrémités 
font toujours molles comme des tumeurs, tant que la tête 
n'eft pas formée & endurcie, & que les canaux des fucs nour- 
riciers ne font pas devenus inutiles, refferrés & totalement 
fermés. La fcherefle de la peau & les autres accidens qui 
fuivent de près, femblent en être la preuve. De plus, le 
bois qui fe forme fous cette peau eft pluftôt dur à fà cir- 
conférence que dans fon centre : ce {centre eft même toûjours 
moins compaét que la circonférence. Il refle, en devenant 
dur , fi rempli de pores très-vifibles, qu'il n’eft jamais folide, 
jamais blanc, jamais capable d’être poli. Cette fubflance cel- 
lulaire femble tenir dans le bois du cerf la place que tient 
une fubflance femblable dans le milieu des os & des pivots, 
qui ne font réellement que des efpèces d’apophyfes des os du 
front. La fubftance fibreufe de ces apophyles femble fe com- 
muniquer avec la fubftance fibreufe du bois, & la cellulaire 
des apophyfes avec celle de ce bois; elles font du moins 
femblablement arrangées. Ainfi il n’y a guère lieu de douter 
que le bois du cerf ne foit une continuité des pivots. 

On doit fur-tout moins faire de difficulté poux la formation 


DES SCIENCES. 343 
du premier bois, qu'on appelle /es dagues en termes de Vé- 
nerie. On pouroit plus difficilement foufcrire à ce fentiment, 
au fujet des bois qui fe produifent après la chûte de ce premier ; 
il n'y a pas cependant lieu de penfer qu'il y ait de différenee 
entre ces deux actions, qui arrivent dans des âges diférens, 
mais cependant dans une faifon à peu près la même: toute 
la différence qu’on peut y trouver vient probablement de ce 
qu'on revarde la formation des dagues ou de la première tête 
comme un mouvement continué dans les liqueurs produc- 
trices & propres à cet effet; au lieu que dans le fecond cas, 
c'eft une aétion renouvelée; la Nature paroït {e réveiller après 
un aflez long affoupiffement. 

En effet, j'ai obfervé plufieurs années qu'au mois de Février, 
c'eft-à-dire au temps qui précède celui de la chûte du bois 
de quelques femaines, il fe fait alors dans l'os du crâne & 
dans les pivots un changement digne de l'attention de tout 
Obfervateur. Pendant toute l'année, l'os du crâne & fes pi- 
vots, ce qu'on appelle en vénerie le #affacre, font fort durs & 
peu chargés de liquides, comme il eft prouvé par l’expérience 
fuivante, que les Chaffeurs font tous les jours. 

Il eft d’ufage de tout temps de lever le maffacre des cerfs 
lorfqu'on les a mis à mort: on a apparemment voulu par-à 
être toüjours les maîtres de pouvoir comparer la beauté & 
la variété de cette partie dans les différens cerfs. Pour que 
ce maflacre püt fe conferver fans fe gâter, on a employé 
différens moyens. La méthode la plus ancienne, eft de le 
garder avec fa peau chargée de fon poil; & pour en empé- 
cher la corruption, on mettoit des charbons ardens dans a 
cavité du crâne, la chaleur en faifoit évaporer les liquides, 
fujets ou favorables à la corruption: par ce moyen, le 
maflacre d'un cerf étoit, après trente & quarante années, 
tel, en apparence, que le jour qu'il avoit été levé. 

L'ufage a changé: cette peau chargée de poil a déplu; 
on l'a enlevée, afin que l'os fut à nud, que fa blancheur 
parut, & qu'on püt écrire fur cet os l'hifloire du cerf. P. 
parvenir à avoir los en cet état, les Uns emploient ea 


344 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
bouillante, les autres ont continué de fe fervir des charbons. 
11 étoit néceffaire de deflécher Los pour le rendre blanc, fur- 
tout dans la faifon où la Nature paroït mettre tous les liquides 
en mouvement. Par l'opération faite avec les charbons, j'ai 
reconnu , à plufieurs repriles, que l'aétion du feu fait fortir 
des cellules de l'os du crane ou maflacre, & même des pivots, 
cette liqueur rouge, qui empêcheroit l'os de prendre la blan- 
cheur qu'on defre qu'il ait, & c'efl lorfqu'elle y eft plus 
abondante que les os font plus mols, comme il eft facile de 
le voir dans le mois de Mars. Dans ce temps, los & les 
pivots de: iennent faciles à entamer avec le couteau ; leur fubf= 
tance eft dilatée, & ces pores élargis contiennent une liqueur 
rouge, épaifle & qui paroit être du fang. Les charbons ar- 
dens mis dans la concavité d'un maflacre levé pendant ce 
temps, font fortir, il ett vrai, grande partie de ce fang ; mais 
comme l'os en eft imbibé d'une plus grande quantité que dans 
un autre temps, on ne peut parvenir à rendre le maflacre 
auffi blanc que ceux qu'on a eus dans d'autres faifons. 


Voilà une circulation établie dans une partie qui y paroifoit 
peu difpolée, auffi étoit-il néceffaire qu'il y coulât une grande 
quantité de liqueur pour former ces grandes têtes que nous 
admirons. Lorfque j'eus aperçû & reconnu cette fenfible di- 
latation du maffacre, & cette quantité de fang parvenu juqu'à 
une partie offifiée & incapable alors de compreflion & de 
dilatation, je crus entrevoir la caufe naturelle de la chûte du 
bois & le commencement de la production de la nouvelle 
tête: en eflet, dans le commencement de la chüte de cette 
partie, il fort des pivots une quantité de fang affez abon- 
dante pour qu'ils en foient couverts, & il en tombe aflez de 
fuperflu. IL fe forme auffi-tôt une pellicule & une efpèce de 

ale, qui tombe au bout de huit ou dix jours: alors le bois 
a déjà de la hauteur, & il s'achève enfüuite, comme il a été 
dit ci-defius. 


Jne PE j'ai faite cette année, peut fervir à 
éblir cette explicätion. Je la rapporte ici d'autant plus 
volontiers, 


pe s' OIC'IVEUN C'ELS 345 
volontiers, que des obfervateurs fe trouvent rarement au 
moment précis de la chûte du bois d’un cerf: ce hafard heureux 
m'eft arrivé deux fois l'année pafñlée 175 6; la première le $ 
Avril. Je chaflois alors un cerf dix cors, jeune, dans la forêt de 
Cinglais: il portoit encore {à tête ; mais un demi-quart d'heure 
avant fa fin, un des côtés tomba dans une fourrée, où ila 
été perdu. Dès que F'animal fut terraffé, je m’approchai promp- 
tement pied à terre: mon Piqueur voulant lever la tête pour 
me montrer la meule fanglante, prit le bois, qui, au moindre 
effort, lui refta dans la main. Je fus prompt, j'étois difpolé ; 
je vis fortir du fang d'une quantité de cellules du pivot, mais 
d'aucune de fa peau: cette partie s'eft difpofée, quelques 
Jours auparavant, à cette féparation, elle s'eft détachée de la 
meule, & s'eft gonflée en forme d'ourlet : on s'aperçoit déjà 
que cet ourlet eft une augmentation qui ne fera pas de la 
même nature que la peau du corps & des pivots. Je fis faire 
ces remarques à M. le Chevalier de Chabot & à plufieurs 
perfonnes qui étoient venues voir chaffer. 

La feconde occafion favorable où je me füis trouvé, na 
été offerte chez moi-même. On y nourrit depuis douze ans 
un cerf dans une écurie: un des côtés du bois de ce cerf 
étant tombé, & la peau de l'autre étant dans la difpofition 
dont j'ai parlé plus haut, je me rendis attentif à ce qui fe 
pafferoit dans Ja chûte du côté qui étoit encore fur Ja tête; je 
vis l'animal fe débarraffer de ce côté. C'eft fur ces obferva- 
tions réitérées & confirmées que j'ai cru pouvoir aflurer ce 
que j'ai avancé: on ne peut réellement guère douter, après 
ces remarques, qu'en certains temps & en certaines circonf 
tances, des liqueurs quelconques font mifes en mouvement. 
& portées, par certains canaux, vers cette partie, c'eft-à-dire 
vers l'extrémité des pivots; & qu'y trouvant un corps aufi 
incapable de les recevoir que left alors la meule ou le bas 
du bois, la défunion de cette partie n'en foit une confé- 
quence néceffaire. L'abord du fang à cette meule & loppo- 
ftion qu'il y trouve, font prouvées par la‘teinte rouge & 
finguinolente qu'il donne à Ja furface des meules qui porte 


Say, rang. Tome IV. DER 


346 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fur les pivots: trois meules que je conferve*, & qui font 
des têtes que le cerf que je nourris a dépofées, en font, entre 
plufieurs autres que j'ai vües, des exemples bien fenfibles. 
Cette dernière remarque, & l'explication que je donne. 
conféquemment de la chûte du bois du cerf, font bien con- 
traires au fentiment des Auteurs qui prétendent que cette 
partie tombe par un méchanifme femblable à celui auquel la 
chûte des feuilles dans les arbres eft dûe. Les feuilles tombent 
lorfqu'elles manquent de sève, cette liqueur ne s'y portant 
plus & n'ayant plus la force de s'élever jufqu'à ces parties: 
c'eit ici le contraire; lorfque le fang vient avec plus d’abon- 
dance aux pivots, le fuc nourricier par conféquent étant plus 
abondant, le bois du cerf fe détache & tombe. C’eft done 
par un méchanifme tout contraire que ces deux opérations de 
la Nature fe pañlent ; & V'analogie qu'on voudroit établir entre 
les arbres & le bois de cerf, au moyen de cette prétendue fimi- 
litude dans la chûte des feuilles & des bois de cerf, fe trouve 
bien afloiblie par les obfervations que je viens de rapporter. 
Jufqu'à préfent j'ai tâché de faire voir comment le bois des 
cerfs fe produifoit, de quelle façon il fe détachoit, & par 
quel méchanifme il fe reproduifoit. Il me refte à chercher, 
sil eft poffible, le moyen d'expliquer certaines fingularités 
de ce bois: la première qui fe préfente, & qui n’eft pas des 
plus aifées à comprendre, eft cette partie du bois qu'on appelle 
la meule. Cette partie ne fe trouve qu'aux bois des cerfs qui 
ont une fois mis bas ; ceux des daguets n’ont jamais de meule, 
Pour comprendre cette différence, il faut fe rappeler ce qui 
a été dit plus haut, que les dagues fe montrent’ auffi-Ôt que 
les pivots font dans leur perfection: elles ne font, en quelque 
forte, qu'une même production, & l'effet d'une puifflance 
qui eft dans un mouvement continué & uniforme ; au lieu que 
le bois du cerf n'eft, en une certaine façon, qu'un corps 
ajoûté fur un autre, & qui croît en fouffrant des impreflions 


* Elles font maintenant dans le Cabinet de S. A. S. M.5° le Duc 
d'Orléans, avec les os de la tête du fœtus de faon dont il a été parlé 
plus haut, 


dns el ee oi por he dd 


DES SCIENCE Ss. 347 
différentes, qui doivent, dans le contact de ces deux parties, 
occafionner une efpèce de difcontinuité & de dérangement. 
On entrera dans cette idée, fi on fe rappelle encore qu'on 
a dit, en expliquant en général comment fe bois pouffoit, 
que ce n'toit prefque dans fon origine qu'une mafle de chair 
& de fang. Cette maffe implantée fur le bout des pivots, 
reçoit une impreflion intérieure, qui, pouffant les fluides avec 
force, la fait gonfler & étendre en tout fens, & même plus 
latéralement que dans la direction perpendiculaire; ce qui ne 
vient que de ce que cette mañle étant molle & membraneufe, 
le fang & les autres fucs doivent, lorfqu'ils ont été portés 
jufqu'à l'extrémité fupérieure de cette mafle, refluer latérale- 
ment, s’y accumuler en quelque forte, faire diftendre ainfr 
cette maffe & lui faire prendre une figure circulaire à la vérité, 
mais irrégulièrement hériflée, vû les diférentes impreflions 
que les membranes doivent fouffrir, tant de la part de a 
caufe qui poufle ces fluides, que de l'impreflion variée de 
l'air extérieur, où cette partie charnue fe trouve comme 
flottante. 

Cette opinion paroïtra plus vrai -femblable, fi Jon fait 
attention que cette partie charnue fe trouve poufler, entre 
l'extrémité fupérieure des pivots & l'inférieure, des dagues 
dans les jeunes cerfs, & de la meule du bois dans ceux 
qui ont déjà mis bas une ou plufieurs fois, cette partie 
ainfi preffée doit s’aplatir circulairement, fe bourfouffler la- 
téralement & donner ainfi naïfflance à la meule. Lorfque le 
bois eft tombé, & que cette partie n'eft plus comprimée 
par ce corps dur, on remarque aifément que cette partie, qui 
doit donner naiffance au bois, eft recouverte d’une certaine 
croûte, formée probablement de la partie craffe du fang ou 
de la liqueur rouge fortie des pivots dans le premier moment 
que les fluides fe font remis en mouvement. Cette croûte 
fert, autant que je peux le croire, à la réunion de la peau ; 
c'eft du moins fous elle qu'elle fe cicatrife, fe réunit & s'ar- 
rondit, en fe plifflant à peu près de la même façon que l'eft 
une bourf dont on a tiré les cordons. 

X x ij 


348 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Une feconde fingularité des bois de cerf, dont je dois 
dire quelque chofe, eft cette efpèce d'irrégularité qu'on y 


remarque fouvent, & qu'on appelle en Vénerie du nom de 


Dijarrerie, mot ancien de bizarrerie. M y en a de plufieurs fortes ; 
mais fans entrer dans ce détail, je dirai feulement que j'ai cru 
en avoir découvert différentes caufes, telles que peuvent être les 
coups & les contufions que ce corps peut recevoir lorfqu'il 
eft encore mou : la nourriture devenue meilleure ou plus mau- 
vaife, qui influant fur la fanté de l'animal, contribue fouvent 
à former des inégalités remarquables ; les maladies, les efforts, 
l'extrême laffitude empêchent que ce bois ne foit tel qu'il 
eût été fans ces accidens ; il en eft fenfiblement appauvri. 

Une autre caufe, qui n’eft peut-être pas des moins com- 
munes, vient de la conformation même de la partie antérieure 
de la tête ou du frontal: perfonne n'a, je crois, fait attention 
jufqu'ici à cette caufe; elle confifte dans l'inégalité de gran- 
deur que les deux os du front ont entr'eux; cette partie eft, 
comme je l'ai déjà dit, divifée en deux par une future lon- 
gitudinale lorfque Fanimal eft jeune. Cette future partage 
fouvent le front en deux parties égales, mais j'ai oblervé aufft 
que plus fouvent elle le divife négalement : il fuit vifiblement 
de cette remarque, que fi le bois de cerf eft compofé de deux 
troncs égaux dans beaucoup de cerfs, il le doit être dans 
beaucoup plus d'autres de troncs inégaux ; inégalité qui eft une 
des bizarreries qu'on remarque dans les bois de cerf. 

H faut encore remarquer qu'il y a des pays où les cerfs 
font communément des têtes bafles, mais dont le mérain a 
plus de groffeur & dont les andouillers font plus courts & 
plus gros; c'eft ce que nous voyons dans la forêt de Cinglais, 
partie du duché d'Harcourt. Cette forêt eft de bois taïllis; dans 
les forêts de haute fütaye, comme celle de Touques, on voit 
des cerfs porter des têtes ou des bois extrêmement élevés : 
ainfi on peut dire, généralement parlant, que dans les pays 
de taillis fourrés, les cerfs font des têtes moins élevées que 
dans les fütayes & les pays clairs, comme fi la Nature portoit 
fon attention jufque {ur lincomumodité dont cette partie peut 


Dies. Sue EN c'E 
être à l'animal dans certains bois de 11 nature des taillis. 

Voilà bien des caufes des bizarreries qui arrivent dans es 
têtes des cerfs : une, qui probablement en produiroit plufieurs 
autres, féroit l’extirpation d'un des dentiers, mais nous ne 
favons encore rien de ce que cette opération occafonneroit ; 
ce font des expériences à faire & qui ne pourroient qu'être 
curieufes , mais qu'il faut attendre du temps & de l'envie que 
quelques grands Princes pourroient avoir de confirmer ces 
idées. Nous favons, & je l'ai rapporté, qu'il y a une grande 
analogie entre ces parties & la tète du cerf; on pourroit 
mème, fans craindre de fe tromper, dire que ce qui {e pañle 
dans ces parties, influe même fur tout le corps de cet animal, 
& que lorfque ces parties, non feulement font extirpées, mais 
qu'elles font agitées par les mouvemens qui portent l'animal 
à fe reproduire, l'habitude du corps en reçoit des changemens 
notables, dont il ne fera pas hors dé propos de dire quelque . 
chofe ici, tant il y a de connexion entr'eux & les expériences 
que je viens de propofer. 

Ce mouvement, fi néceffaire à la reproduétion des cerfs, 
s'appelle le zur: les cerfs changent alors de pays, courent 
çà & là, le col leur enfle d'une fingulière façon : cette enflure 
n'exifle que dans les chairs, qui font auffi belles qu'aupara- 
vant, & l'on naperçoit point que cette enflure foit dûe à 
quelque liqueur qui fe foit accumulée ; il paroït qu'elle n'eft 
qu'un mouvement tonique ou fpafmodique. Ce gonflement 
fe fait & augmente peu à peu en huit jours, & diminue 
enfuite fucceflivement jufqu'à ce que ces animaux mettent 
bas leur bois & jettent leur vieux poil. 

C'eft encore dans le temps du rut qu'arrive ce grand 
changement dans la moëlle des os de cet animal, que le 
vulgaire attribue à la lune: en été la moëlle qu'on trouve 
dans les os eft blanche, dure, facile à fondre & capable ainf 
d’être confervée pour notre ufage. Après le rut, ces mêmes 
os ne fourniflent qu'une matière molle rouge, femblable à 
du fang coagulé: fr on la met fur le feu, elle fe réduit en 
grurheaux noirs & fecs; elle brûle & ne laifle aucunes parties 

X x iij 


o, MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


grafles ni capables de fe raffembler en corps, comme fait la 


graifle en fe refroidiffant ; cet état de la moëlle fubfifte juf- 
u’au rétabliffement de l'embonpoint de l'animal. 

IL eft refait au plus tard en Juillet, & il l'eft quelquefois 
à un point, que fanimal eft fort gras; il eft couvert d’un poil 
nouveau ; la tête eft ornée d'un bois qui l'eft auffi : ces gros 
vers fi connus, dont il a été queflion plus haut, & qui font 
appelés par quelques-uns verdelets, font fortis des tumeurs où 
ils étoient renfermés & font entrés en terre : de plus, les cerfs 
croiflent encore dans cette faifon ; la moëlle des os prend cet 
état de perfection qui la rend précieufe à bien des gens, les 
pivots reprennent peu à peu leur première dureté, & ont 
acquis, par la dilatation qu'ils ont foufferte , une augmentation 
proportionnée à cette dilatation ; mais s'ils gagnent en cette 
dimenfion, ils perdent en hauteur, ils deviennent chaque 
année moins hauts. Effin, c’eft encore dans ce temps que 
les cerfs font plus vigoureux, à l'exception de ceux qui fe font 
trop chargés de venaifon, qu’ils jouifient de la meilleure fanté, 
& que leur tête eft dans fon plus bel état, & ce n'eft qu'au 
mois de Septembre que cet embonpoint commencera à chan- 
ger, par le rut, & qu’il fe perdra; de façon que Fanimal 
reflera toûjours maigre en hiver, malgré les pommes ou le 
gland qu'il aura ramaflé & qui n'auront pü tout au plus que 
le remettre de fa fatigue fans le rétablir entièrement. En 
Décembre on leur trouve, entre cuir & chair, ces gros vers 
auxquels on attribuoit anciennement a chüte du bois ou des 
cornes de ces animaux ; circonftance de la vie des cerfs que 
je m'étois principalement propolé d'examiner & d'éclaircir, 
autant que je l'ai pü, par les obfervations, les remarques & 
les réflexions que j'ai rapportées dans cette Differtation. 


AGO 
PSE 


à 


dé alt -sanetars = 


D'E"S 'S'CUNE N C'E’S, 351 


CONS TRUC THON 
D'UNE CHAISE ROULANTE, 


Avec laquelle on peut Je mener foi-méme fur les 
grands chemins. 


Par M. BRoODIER. 


HAE eflayé mes forces, j'ai trouvé que je pouvois 
faire avec mes bras, étant aflis, un effort de 27 livres, 
& même au-delà, pendant quelque temps : je crois qu'on peut 
admettre que cet efort peut fe faire à raifon de 6ooo pieds 
par heure. 

Je pèle cent foixante-onze livres: & ayant calculé le 
poids d'une voiture folide à trois roues, j'ai trouvé qu'il 
pourroit aller à 207 livres, ce qui fait 378 livres pour le 
poids total. 

J'ai fait niveler la butte de Picardie proche Verfilles, 
elle a 8 degrés de pente. Les grands chemins n'ayant, je 
crois , que 5 pouces de pente par toife ou 4 deurés, je prendrai 
cette montagne pour repréfenter le chemin le plus difficile : or 
la longueur de fà pente étant de 1200 pieds, on aura 1 67 
pieds pour la hauteur perpendiculaire où on doit élever le poids. 

La puiflance, le poids & lefpace qu'il doit parcourir étant 
déterminés, il eft aifé de déduire en combien de temps 
je pourrai faire le chemin propolé; car il eft à une heure 
5: 378 x 167 : 27 x 6000, ou il eft égal à 
— 0.39 d'heure — 23 minutes, ce qui fait 3130 pieds 
par heure fur un chemin de 8 degrés; & faifant 27 : 378 
ou 1 :14:: 167: 2335 pieds, ce dernier terme fera l'efpace 
que la puiflunce doit parcourir en 2 3 minutes de temps. Onr 
voit donc, indépendamment de Ja conftruétion de la machine, 
que le fuccès en eft poffible, 


Fig. 1. 


352 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
CONS TR D. CTI ONE 


Soit la chaife repréfentée par le profil d'une feule roue Q7, 
placée fur l'horizontale #19 ; par le centre © & par le point 
de contaét 7, je tire la droite C7, qui fera la direction du 
poids ; & par le même centre €, je tire la droite C4, faifant 
avec Cg Vangle dCg de 8 degrés. Par le point 4, où Cd 
coupe la circonférence de fa roue, je mène la tangente do, 
qui repréfentera le chemin propofé à caufe des angles égaux 
dCg, dgm; & le même point d repréfentera un point 
d'appui, fur lequel la roue peut tourner fans gliffer : du point à, 
je mène für C7 la perpendiculaire de, laquelle fera le bras 
de levier du poids; mais faifant C7 ou Cd — 22 pouces, 
on aura de — 3.06 pouces; donc 1:14:: 3.06 :42.84 
pouces, levier de la puiffance. Ce levier 4 À" ne pouvant pas 
furpaffer le diamètre de la roue, je le termine en L, & je 
cherche un autre levier qui produife le même eflet que fa 
partie retranchée, & auquel la puiflance foit continuellement 
appliquée, de la façon la plus commode pour un homme 
aflis entre les deux roues. Pour cela, du centre C par ZL, je 
décris un cercle qui coupe les douze rais de ma roue aux 
points L, £, ére. & fur ces points je place, perpend'culai- 
rement au plan de la roue, douze tourillons de fer pour y 
mettre douze rouleaux foûtenus par un anneau de fer plat. 
Sur l'aiflieu , qui eft fixe à l'égard de la roue, & autour duquel 
elle doit tourner, j'élève une tige de fer CN dans une di- 
rection perpendiculaire au chemin do, laquelle tige doit 
avoir deux branches, afin d’y pratiquer deux paillers pour y 
mettre un arbre, dont le bout tourné vers le plan de la roue 
portera un pignon GG , éc. qui engrainera dans es rouleaux, 
& l'autre une manivelle p N. On aura donc le levier de, 
ayant fon point d'appui en d, & l'autre p N ayant fon point 
d'appui en A, dont il faut déterminer les longueurs & le 
nombre des dents du pignon. Dans le cas d'équilibre, ces 
leviers donnent 1:14::dex NL:LdxpN, & on a 
1:14:: de:dF; donc de: dexNL::dF:LdxpN, 

ou 


= & - . 


CE 7 


DÉS: SC IsE Nici Es 357 


œùu1:NL::dF:LdxpN;don NLxdF—= LdxpN; 


mais pour vaincre l'équilibre & les frottemens, j'augmente 4Æ 
d'environ un tiers & je le fais de $9 pouces; & à caufe 
des ornières, les points L, L, érc. doivent être placés à 
6 pouces de a circonférence de la roue, ce qui fait Ld de 
38 pouces; d'ailleurs, un homme affis ne peut pas être appli- 
qué à une manivelle dont le coude ait plus de 9 pouces; 
ainfi je fais pN de 8.33 pouces. On aura donc NL, 
— _— = $.4 pouces; & faïfan CL:NL ou 
16:5.4:: 12:4, ce dernier terme fera le nombre des 
dents du pignon. Ainfi, avec un eflort de 27 livres, on 
pourra monter un plan incliné de 8 degrés, en parcourant 
1200 pieds de longueur en 23 minutes de temps. 

Cette folution fuppofe que l'effort de la dent fur le rouleau 
fe fera toûjours de la manière Ja plus avantageufe; ce qui 
dépend de la figure des ailes du pignon. Pour la trouver, 
j'ai fuivi la méthode que M. Camus prefcrit dans fa A£chan. 
lv. x, & avec les rayons primitifs L N, LC, j'ai taillé les 
dents du pignon en forme d'épicycloïde, qui ont la circon- 
férence du pignon pour bafe & le cercle primitif des rouleaux 
pour cercle générateur. De cette conftruétion, à caufe du 
rouleau circulaire & de la figure du pignon, il fuit que fi 
on tire une perpendiculaire au point de contact Y, elle paf- 
fera par les points L, Æ ; & fi fur cette droite L Æ on abaife 
des points d'appui NV, d, les perpendiculaires N/, du, à 
caufe des triangles femblables N L/, d Lu, on aura NL 
: Ld:: Nl:dn; ce qui fait voir que dans toutes les révo- 
lutions de la manivelle, la puiflance fera toûjours la même, 
tout le refte étant égal. 

Les deux roues étant mües de la même manière, on tour- 
nera la manivelle du côté droit, lorfqu'on voudra faire tourner 
la chaife à gauche, & réciproquement; & lorfqu'on voudra 
reculer, on tournera les manivelles en fens contraire. Dans 
tous ces cas, une petite roue placée derrière fous le brancard, 
füivra les direélions des deux grandes roues. Pour cela, il faut 

Say. étrang, Tome IV. UT 


54 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
qu'elle fe meuve en même temps fur un aiflieu horizontal & 
fur une tige perpendiculaire, dont la direction foit éloignée du 
centre de la petite roue d'environ les deux tiers de fon rayon. 

Nous avons trois frottemens, au moyeu €, au tourillon 
du rouleau L, & à l'arbre de la manivelle W; fi on regarde 
la roue comme une poulie mobile, on aura le frottement du 
moyeu égal à la moitié du poids moins celui des roues, 
X+ 
38 
— 1.8 livres; & faifant ZL : de :: 378 livres eft à l'effort de 
la dent en À, ou 38: 3.06 :: 378 : 30.4 livres; à quoi il 
faut ajoûter 1.8 livres trouvées ci-deflus, on aura 3 2.2 livres, 
dont on prendra le tiers, qu'il faut multiplier par le diamètre 
22 
3 ÿ S 
— 1.4 livres pour le frottement des rouleaux. A l'égard 
du frottement de l'arbre de la manivelle en !, en la fuppo- 
fant dans la fituation la plus défavantageufe, on a pN': NL où 
8.33:5-33:: 33-6 livres font à la preflion, laquelle eft de 
5-1 livres, dont la moitié eft 27.6 livres, & le frottement 
27 . 61 x glisn. 


multiplié par le rayon de laïffieu divifé par 4ZL, ou Re 


du tourillon divifé par celui du rouleau, ou 


— 1.1/1, On aura donc pour le frottement total 


1o0lign. 
1,81 1.4 ri! — 4.3l, ce qui fait environ + 
de {a puiffance; ainfr il eft environ moindre de moitié que 
je ne l'ai fuppolé. 

On a trouvé, par expérience, que l'obflacle caufé par les 
inégalités du pavé, équivaut à 14 37' de pente; donc de 
— 0.62 pouces, & Ld xpN:de x NL :: P:p où 
38x8.33:0.62x5$.33::378:3.9 livres; à quoi 
ajoütant le frottement — 1.8 +- 0.3 + 0.2 2.3 livres, 
on aura p — 6.2 livres. 

La manivelle ayant 16.66 de diamètre, elle aura $z 
pouces de circonférence, efpace qu'un homme peut parcourir 
avec une force de 3 livres à chaque main, en une feconde 
de temps; mais le pignon ayant 4 dents, la roue 12, & fa 
circonférence 11.5 pieds, en faifant 3": 11.5::60":230 


ESS 


r- À 


DÉS S'CTENCE!S 355 
pieds, ce qui étant multiplié par 60, donne 13800 pieds 
par heure. 

On a dCe— 7 degrés, &, à caufe du pavé, — 84 37'; 
ainfi la puiflance fera à peu près la même que s'il falloit 
avancer {ur la butie de Picardie; mais la chaife , en defcendant 
un peu vite, acquiert une force qui l'aide à remonter. 

On aura donc le finus verle eg — 2 pouces, & 

-de= Vi(Eg} — (Ce)T=vl(22)} — (20)] 
= 9.1 pouces; donc 38 x 8.33 :9.1 x 5-33::378:57 
livres ; à quoi ajoütant environ 5 livres pour le frottement, 
on aura la puiflance de 62 livres, mais cet eflort n'eft que 
dans le premier inflant, & il faut le réduire à la moitié ou 
au tiers, f1 l’obflacle n’eft que fous une ou deux roues. 

Si le chemin alloit en defcendant, alors 4e deviendroit 
négatif, ainfi que p; ce qui fait voir que la puiffance agiroit 
en fens contraire, & la voiture iroit toute feule lorfque le 
poids relatif feroit plus grand que le frottement. Si on fup- 
pole que p — 27 livres foit le plus grand eflort qu'on puiffe 
faire pour retetenir les manivelles, ajoûtant 4 livres pour le 
LaxpNxp 

NLxP 

— 4.8 pouces; ce qui répond à une 


frottement, on aura 31! —p; donc de — 
___ 38*x8.33x31 
5-33*378 
pente de 124 36", pour repréfenter Je chemin für lequel je 
pourrai refter en équilibre; au-delà il faudra en rayer. 

Ce cas-ci eft la méthode ordinaire de faire aller les voitures: 
alors pN & NL font détruits, & Ld devient C4; donc 
Cd':de :: R:fdce :: P:p}; à quoi il faut ajoûter le frotte- 
ment de laiflieu — — * — — 2 ivres. Pour 
appliquer ceci à un chemin de 8 degrés, y compris l'obftacle 
caufé par le pavé, on aura À : fin. 84:: 378 : 2 livres, & 
Pp=—= 55 livres: ce qui fait voir qu'un homme ne pourroit 
pas me conduire fur un tel chemin. 

REMARQUE. 


Comme je tire mes principaux efforts de l'aétion des 
Yyi 


356 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
amufcles: ces efforts ne peuvent pas être de longue durée; 
& la refpiration eft bien-tôt gênée; c'eft pourquoi je ne vais 
avec facilité que fur un chemin à peu près horizontal de terre 
dure ou de pavé; malheureufement je ne crois pas qu’on puiffe 
mieux faire. Je pourrois bien doubler le nombre des rouleaux, 
& tout le refte étant de même, j'aurois une facilité double, 
mais j'irois moins vite dans la même raifon. 

J'aurois p faire la voiture moins pefante, fi ce n'eft qu'elle 
auroit été moins folide, & j'aurois perdu l'avantage d'y pou- 
voir attacher un cheval entre deux brancards, que je lâche 
à volonté, & alors elle peut aller à trois ou à deux roues, 
comme ces jolies voitures auxquelles on a donné le nom 
ridicule de Cabriolets. Ce qui m'eft le plus commode, c'eft 
qu'à l'aide d’une perfonne qui me poule, âgée feulement de 
quatorze à quinze ans, je n'ai point trouvé de chemin ni de 
montagne, foit à la ville, foit à la campagne, qui m'ait ar- 
rêté. On fent bien que cette invention ne peut être utile 
qu'à ceux qui, comme moi, ont perdu l'ufage de leurs jambes 
& auxquelles il refte de bons bras; ce n'eft que pour eux & 
pour moi que j'ai travaillé, perfuadé que 
© Woloutiers gens boiteux haïffent le logis. 1 rontaine. 


EXPLICATION. DE SAERG DRMERE 


[Er FicurE 1° repréfente les deux grandes roues, qui ont 
44 pouces de diamètre ; le moyeu 7 pouces, il eft garni d'un canon 
de cuivre, & enfuite tourné fur fon axe & fur celui des rais, lefquels 
ont 1 pouce de groffeur, & des épaulemens à chaque bout. Ils font 
viflés dans le moyeu & attachés à la jante avec des vis de fer: cette 
jante eft tout d’une pièce, & les deux bouts font affemblés un fur 
T'autre à queue d’hyronde : le bandage eft auffi tout d'une pièce & 
tient à la jante avec des clous à vis & écrou. Les rouleaux ont 39 
lignes de diamètre & 12 d'épaifleur, avec des paliers de cuivre: les 
tourillons font placés fur les rais à égales diflances. Ils font tournés & 
attachés aux rais & fur l'anneau plat avec des écrous. 

Le fupport de l'arbre de la manivelle eft garni de deux paliers de 
cuivre, & fortement attaché aux brancards avec des boulons à vis & 
écrou. Le pignon a 7 pouces 4 lignes de rayon vrai, 2 pouces d’en- 
grénage , 2 lignes de jeu; & les dents 4 pouces 10 lignes dans 


DE S! SCTrEeNcCEE 557 
eur plus grande largeur; ce pignon eft attaché fur un quarré de 
Jarbre de la manivelle avec deux plaques qui fe croifent à angles 
droits. 

La petite roue eft conftruite comme les grandes ; fa tige perpendi- 
culaire tourne fur un pivot renverfé & dans un palier de cuivre placé 
dans une pièce de fer, attachée aux points À, à (fig. 2) de la traverfe 
du brancard & à l'aiffieu par le moyen de la tringle B, 8. Au devant 
des brancards, il y a des étriers de fer, afin de placer le brancard 
pour le cheval, & derrière des poignées de fer pour pouffer ; À efl un 
cric avec fa détente pour lâcher Îe brancard & le cheval à volonté. 

La fig. 2 fait voir l'aiffieu, qui a 4 picds de long, 14 lignes d’écar- 
riflage au milieu: les bras font tournés & ont la figure des cones 
tronqués de 8 & 12 lignes de diamètre, garnis de rondelles de fer 
& de cuir; il eft encaîtré deffus les brancards & foûtenu par deux 
plaques de fer , attachées avec deux boulons à vis & écrou. Les bran- 
cards font ceintrés de 4 pouces; ils ont deux pouces de large & 2 
pouces & demi d’épaiffeur : ils font liés à la traverfe avec des bou- 
ons à vis & écrou. Les foùpentes font attachées fur la traverfe & 
fur les deux crics, lefquels font foûtenus en l'air par une tringle de fer 
qui fe lève & fe baïfle par le moyen d'une charnière. 


La Chaïfe eft repréfentée fur une échelle plus petite de moitié ; 
elle porte une tige ceintrée, fur laquelle il y a un parafol qui s'attache 
auffi au bout des brancards avec des cordons. Cette chaife peut s’avan- 
cer & fe reculer; elle eft liée à vis & écrou fur quatre traverfes qui 
portent fur ces foûpentes. Le marchepied eft attaché par en haut à 
vis, fur une de ces traverfes & au milieu de fa longueur, par deux 
tringles qui tiennent à deux autres traverfes. La portion de jante, 
pour empêcher la chaife de fe renverfer, eft attachée à charnière au 
marchepied , & elle fe hauffe & fe baïffe par le moyen d'un arc de 
fer qui s'arrête en différens points. 


La fig. 3 démontre la voiture mife en perfpective par le moyen 
de la chambre obfcure. 


Remarque. Toute la voiture peut fe démonter : il y à huit mois 
que je m'en fers fans que rien fe dérange ; & ce qui peut s'ufer à Ja 
longue, peut aifément fe réparer. Quoique cette conftruction paroiffe 
affez fimple, je ne crois pas qu'aucun Charron puifle en venir à 
bout , j'ai été obligé de tout faire moi-même, excepté ce qui dépend 
de la forge; c’eft pourquoi, dans la crainte d’occafionner de mauvais 
fuccès aux perfonnes incommodées qui pourroïient en avoir befoin, 
je crois devoir leur offrir les fecours qui dépendront de moi, comme 
Jaurois fouhaité qu'on eût fait à mon égard. 


Yy iÿ 


353 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


SECOND MÉMOIRE 
SUR LES MALADIES DES BLÉS 


Par M. AYMEN. 
D) ANS le premier Mémoire que j'ai 1à à l'Académie, 


jai donné les caufes & les progrès de la nielle; dans 
ce fecond, je me propole de détailler les caufes du charbon, 
de l'ergot, de fa ftérilité des épis, & les moyens de prévenir 
ces maladies. Ces différens fujets n’ont aucune liaifon entre 
eux, ainfi je crois que le bon ordre exige de les traiter chacun 
dans des articles féparés. 


Du charbon. 


Avant de décrire ce vice, il eft néceffaire de faire remar- 
quer que le grain de blé eft compofé de deux portions, du 
germe qui eft placé dans une alvéole, fituée à l'extrémité 
inférieure, & des deux capfules qui forment la plus grande 
partie du grain. Les capfules font d'une fubflance farineufe 
& fervent de nourriture au germe ou à la plantule pendant 
les premiers jours de la végétation. 

Le charbon, qu'on nomme vulgairement & improprement 
dans la Guyenne, 44 noir, efk un vice qui rend les grains de 
froment plus courts, plus ronds, plus légers qu'ils ne font 
dans l'état naturel. Les grains charbonnés ont leur membrane 
extérieure brune: cette membrane fe, déchire très-aifément 
& ne contient qu'une pouflière noire très-fine, fans odeur 
& d’un goût fade. Quelquefois ces pouffières font raffemblées 
en une maffe d'une confiflance très-légère : quelquefois il n'y 
a que la moitié du charbon qui foit réduite en une pouffière 
noire, pendant que l'autre eft confervée fous la forme d’une 
farine blanche ou grife. Il eft vrai que cette farine n'a point 
de confiftance & qu'elle fevéduit facilement en une pouffière 
très-fine. 


Jar ÆEtrang Tome 117 Tage 368.PLIX 


À 
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Echelle de à Leds 


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Jar. Elrana. Tom. W7 Pase358.PLX. 
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Lans de le Voiture 


Fu. 3 


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Profil de la Uhanre 


ID LPase 358 PLAT. 


Jeav Ælrang Tome 


_ 


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CPE rKS 
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SR +, 


DES SCIENCES. 359 

La figure des grains charbonnés varie; les uns font plus 
gros que les grains de froment ordinaires, les autres font plus 
petits, & les troifièmes font à peu près du même volume, 
Dans ces grains, le fillon eft quelquefois totalement effacé; 
quelquefois auffi il eft très -apparent , mais en général il eft 
moins. marqué qu'il ne left dans la femence naturelle: on 
voit les ftiles & les ftigmates fecs attachés encore à leur ex- 
trémité fupérieure : le grain charbonné furnage dans l'eau: 
dés bales font brunes, mais très-faines: rien n’eft affeté dans 
cette maladie que la feule femence, 

Le grain charbonné eft dans fon commencement très- 
difficile à diftinguer des autres ; il a à peu près la même 
forme que les embryons des femences faines, avec cette dif- 
férence qu'il eft un peu plus rond & plus renflé. Les éta- 
mines de ces grains font pluflôt épanouies, & ces grains font 
beaucoup pluftôt remplis que les femences faines : à mefure 
que le charbon croît, on voit à travers l'enveloppe commune 
quelques points noirs qui occupent la partie inférieure des 
capfules farineufes ; peu à peu la membrane externe devient 
noïre, les points noirs intérieurs occupent un plus grand ef 
pace, de forte que lorfque ce grain eft à demi rempli, la 
fubftance blanche qu'on voyoit peu de jours auparavant, a 
difparu tout-à-fait. On peut obferver dans le même temps, 

ue le grain vicié eff divifé en quatre parties égales par autant 
de fillons, ces fillons difparoïffent à mefure que le charbon 
parvient à fon état de croïffance. 

Le charbon attaque le plus fouvent toutes les femences 
d'un épi, quelquefois auffi | en épargne quelques-unes; j'ai 
trouvé jufqu'à feize femences faines dans un épi malade, j'ai 
vû aufli plufieurs épis qui avoient tout un côté garni de 
femences faines, & l’autre de grains charbonnés ; les femences 
faines de ces épis charbonnés, mis en terre, ont conflamment 
produit de très-bon grain; tous les épis d'un même pied 
ne font point charbonnés , le plus grand nombre eft pour 
l'ordinaire exempt de ce vice, c'eft toüjours les épis tardifs 
qui en font attaqués; c’eft pourquoi j'ai fouvent fait venir 


360 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

des épis charbonnés fur des pieds qui n'en avoient pas. Pour 
cet eflet, je coupois tous les épis d'une patte de froment, 
la racine en poufloit de nouveaux, qui, pour l'ordinaire, 
étoient viciés; auflt voit-on beaucoup de blé noir dans les 
champs fur lefquels 1 gréle a tombé les premiers jours de 
Mai, parce que la grêle ayant brifé tous les épis printanniers, 
la racine en poufle de nouveaux; c'eft ce qu'on obferva en 
-plufieurs endroits de la Guyenne en 1738. Au refle, j'ai 
obfervé cette maladie dans les différentes elpèces du froment, 
& j'ai vû que dans toutes elle étoit parfaitement la même. 

Je n'ai vû le charbon tel qu'il vient d'être décrit, que dans 
le froment, dans l'épautre & dans le millet; j'ai bien vû dans 
le feigle, dans l'orge & dans quelques autres graminées, une 
maladie qui en approche beaucoup, mais elle a quelques 
fymptomes différens , c'eft pourquoi J'en remets la defcription 
à un article particulier, 

Le charbon eft donc une maladie toute différente de Ia 
nielle: rien de commun entre ces deux vices; le premier 

. rend fa femence monftrueufe, le fecond ronge & détruit 
toutes les parties de la fleur avant qu'elles foient épanouies, 
par conféquent avant que le grain foit formé. On ne doit 
donc pas dire que le grain eft niellé, mais on doit dire que 
la fleur eft niellée; la nielle détruit tous les épis d’un même 
pied, le charbon en épargne la plus grande partie. Souvent 
on trouve des épis niellés & des grains charbonnés dans le 
même champ; fouvent aufli on ne trouve que l’un ou l’autre. 

Le charbon attaque d'autres plantes qué les graminées; j'ai 

*Porfcaria uns obfervé cette maladie fur une efpèce de perlicaire*, & je 

LE.  . crois fort que la nielle, que Menzel dit avoir vû fur cette 
plante, n’ett autre chofe que notre maladie. Je vais en donner 
la defcription. 

Les épis viciés de cette plante portent le plus fouvent des 
grains charbonnés & des femences faines; j'en ai vû, mais 
rarement, qui n'avoient que des grains malades. Dans les pre- 
miers, les femences faines font quelquefois en plus grand 
nombre; quelquefois aufli ce font les grains charbonnés. 

On 


D'E'S, SOUPE N C Ers 36r 
On voit affez fouvent dans ces épis des embryons avortés. 

Les grains viciés font plus gros, plus longs que les femences 
naturelles ; leur extrémité inférieure eft ronde & affez confi- 
dérable, l'extrémité fupérieure eft une pointe, de forte que 
le charbon de perficaire forme un cone; l'enveloppe de ce 
grain eft rougeâtre & fe brife facilement, elle contient une 
pouffière purpurine qui eft d’un goût piquant. 

Les pièces du calice font fouvent dans l'état naturel, quel- 
quefois aufli elles font altérées, c’eft-à-dire qu’elles font tu- 
méfiées & qu'elles contiennent une pouflière de {à même 
couleur que celles des grains charbonnés. 

Les pièces du calice font affeétées dans les épis, dont toutes 
les femences font viciées; elles font faines dans les épis où 
l'on trouve des grains naturels: font-ce deux maladies diffé- 
rentes ? je ne le crois pas, puifqu'on trouve F'une & l'autre 
fur le même pied. 

Le même pied de perficaire porte des épis fains & des 
épis malades; les épis qui font charbonnés, font ordinairement 
ceux qui font les plus tardifs. 

Le maïs, cette efpèce de blé fr connue dans plufeurs pro- 
vinces, & qui fert même de nourriture à des peuples entiers, 
eft fujet à une maladie, qui, quoique très-confidérable & 
très-ficheufe pour le Laboureur, n'a pas été jufqu'ici obfervée, 
ou du moins décrite par aucun des Ecrivains que je connois. 
Cette maladie eft la même que celle que nous avons décrite 
dans la perficaire ; & comme elle provient des mêmes caufes, 
l'ordre exige de la décrire avant que d'établir quelles font 
ces caufes. 

Les épis charbonnés du blé de Turquie font beaucoup plus 
gros & plus courts que les épis fains ; ils font courbés & 
inégaux. Lorfqu'on a enlevé les feuilles de a gaîne, l'épi 
malade ne paroît qu'un aflemblage de tumeurs, dont Îes unes 
font grofles comme des œufs de canard, les autres comme 
des noifettes, & les troifièmes enfin tiennent le milieu entre 
ces deux termes. 

Quoique dans l'épi malade if ne paroifle que des grains 

Say. étrang. Tome 1V. . Zz 


362 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À I'ACADÉMIE 
charbonnés, il ne faut pas conclurre d’abord que tous les grains 
font viciés de la même manière; car après avoir enlevé les 
charbons, on voit une grande quantité de femences flétries, 
dont l'enveloppe ne contient aucune fubftance; elles font donc 
fimplement fériles. | 

La furface externe des grains charbonnés eft d’abord blan- 
cheître, mais elle brunit enfuite; elle eft formée par une 
membrane qui a quelquefois plus d’une ligne d’épaiffeur, & 
quelquefois beaucoup moins. La fubflance interne eft noire; 
elle eft compofée de filets, qui d'abord font blancs & qui 
bruniflent enfuite: ces filets vont d’une extrémité à l'autre, 
ils font couverts d’une poufière noire. 

La figure des charbons de ce blé varie beaucoup, tantôt 
ils font ronds, tantôt ils font larges, plats & recourbés ; 
fouvent ils ont une furface inégale, angulaire, conoïde, droite 
ou oblique, & toüjours l'extrémité fupérieure eft plus groffe 
que celle qui eft attachée au fupport. On ne peut guère 
déterminer la longueur des grains charbonnés, elle varie autant 
que leur figure; j'en ai vü qui n'avoient que huit lignes, J'en 
ai vü qui avoient quatre pouces de long. 

Tous les épis d'un même pied font rarement charbonnés ; 
fouvent on ne voit fur la même tige qu’un feul épi de vicié, 
tandis que les autres font fains. L'épi en entier eft fouvent 
malade ; quelquefois il n'y a que la partie fupérieure ou infé- 
rieure qui foit affectée, quelquefois auffi on ne trouve qu'un 
feul grain ou quelques-uns répandus d'un côté & d'autre de 
Yépi qui foient charbonnés. 

L'épi charbonné du maïs fe connoît par fa figure: on dif 
tingue, dès les premiers jours, les grains maladés d'avec les 
fains, en ce que les premiers font plus gros, leur fubftance 
interne eft blanche, & ce n'eft qu'après quelques jours qu'on 
aperçoit à travers leurs membranes quelques points noirs, 
qui font enfuite beaucoup de progrès. 

Les ftiles des fleurs femelles font viciés, leur partie, qui eft 
unie au grain , eft tuméfiée & bourfoufflée fi confidérablement, 
qu'elle égale en groffeur une plume de poulet, quoique cet 


DES SCIENCES. 363 
organe ne foit, dans l’état naturel, pas plus gros qu'un cheveu. 
Le vice occupe pour l'ordinaire la bafe des fliles de la lon- 
gueur d'un pouce, & quelquefois de deux à trois: dans le 
commencement de la maladie, cette partie de l'organe femelle 
ft blanche, mais elle brunit enfuite tout comme le grain 
charbonné. On trouve quelquefois des grains de maïs, dont 
une portion forme une tumeur plus ou moins confidérable 
& remplie d’une pouflière noire, & dont l'autre partie eft 
dans l'état naturel & contient une bonne farine ; cette tumeur 
pourroit être occafionnée par quelques coups que le grain 
auroit reçu, & qui ayant rompu quelques vaifleaux , la sève 
fe feroit épanchée & figée en pouffière noire : on diftingue 
cette maladie du charbon, 1.° en ce qu'une partie du grain 
contient une bonne farine, 2.” en ce qu'on y trouve toüjours 
le germe, ce qu'on ne trouve jamais dans le charbon. 

J'ai obfervé aux feuilles de la gaïne & aux tiges de ce 
blé des tumeurs, qui quelquefois font auffi groffes qu'une 
belle orange ; la fubftance interne de ces tumeurs eft d'abord 
blanche, elle devient enfuite jaune, & quelques jours après 
elle ne paroiît être formée que par.une quantité de pouffères 
très-fines & très-noires : le forgo * eft fujet à la même 
maladie. 

Perfonne n'ayant diftingué cette maladie de a nielle, 
perfonne auffi n’a dû en diftinguer les caufes ; le détaif fuivant 
démontrera que la connoiffance de ces caules eft nouvelle. 

Lorfqu'on ouvre fextrémité inférieure d'un grain de 
froment, de maïs, &c. on aperçoit tout de fuite le germe 
recouvert des capfules. 

Lorfqu'on ouvre la même extrémité d’un grain charbonné, 
de froment, de maïs, &c. on n'y voit point de germe, 
quelqu'attention qu'on y apporte; auf ai-je eu beau femer 
ces grains viciés, Je n'en ai jamais vü lever aucun; d'où 
il eft facile de conclurre, fans fe tromper, 1.’ que le char- 
bon n'eft autre chofe qu'un grain qui n'eft point fertililé, 
2.° que la caufe de cette monftruofité eft le défaut de 
fécondation. 

Zzij 


* Min 
œindinacen , 
Jubrotundo fermine 
luteo , forgo , T0 
minatum. C, B, 


Pin, 26, 


364 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Pourquoi le grain n'eft-il pas fertilifé? Il ne l'eft pas, 1 
Jorfque les fliles ou les ftigmates font viciés ; 2." lorfque la 
pouffière des étamines n’eft pas propre à la fertilifation. Dans 
la defcription du charbon du blé de Turquie, nous avons 
fait remarquer que le vice des ftiles étoit très-confidérable & 
très-facile à être diftingué; dans le charbon du froment, le 
vice des ftiles & des ftigmates eft vilible; ils font plus 
fecs, plus courts que dans Vétat naturel, leurs mamelons 
font racornis, ils ne peuvent donc pas recevoir les impreffions 
de la farine fécondante; peut-être même qu'il y a quelque 
vice dans les vaiffeaux de ces organes, qui fait que les par- 
ties font confervées adhérentes fur le grain charbonné, ce 
qu'on ne voit pas fur les femences faines. Cette caufe eft, 
felon moi, la feule qui puifle priver les grains de la fertili- 
fation, du moins eft-elle peut-être la feule qui puifle être 
démontrée ; je ne voudrois cependant pas nier la feconde, car 
comme ce font les épis tardifs qui font viciés , ne pourroit-on 
pas dire que dans ces épis la pouffière des étamines n'eft pas 
affez travaillée, & que conféquemment fon aétion fur le piftile 
ne fera pas fuffifante pour opérer la fécondation : cette mauvaife 
qualité de la pouffière pourroit venir auflr de quelque vice 
des étamines. Il eft vrai que quelqu'attention que j'aie eue, 
je n'ai pà voir, même avec la loupe, aucun vice dans les 
étamines des grains charbonnés ; j'ai vü feulement, & conf- 
tamment, l’état contre nature des fligmates. 

Souvent lorfque les blés font en fleur, il furvient une 
pluie abondante qui entraîne les pouffières & Îes met en action 
aufli-tôt qu'elle les touche; ce qui a fait foupçonner à quel- 
ques-uns que c'étoit la caufe pour laquelle Les germes de bien 
des fleurs n'étoient pas fécondés; car, difent-ils, les pouffières 
agiffent avant qu'elles foïent dans les mamelons ou avant que 
les organes femelles foient préparés à cet aéte, Cette idée eft 
faufle ; dès que les fligmates font développés, ïls font 
toûjours préparés à tranfmettre la matière de la fécondation, 
la moindre impreffon de la pouffière eft fufhifante pour que 
le germe foit fertilifé; & dès que la pluie fait tomber les 


DES SCIENCES 365 
pouffièrés, il eft impoffible qu'il n’y en ait pas quelqu'une 
qui foit portée fur les organes femelles, ce qui fuflit. Les 
plantes femelles font fécondées par les plantes mâles du même 
individu, quoiqu'éloignées les unes des autres. Nous lifons 
dans Pontanus *, qu'un palmier femelle fut fertilifé à Orrante * Dakchomp, 
par les pouflières d’un palmier mâle qui étoit à Brindes: RS De 
enfin, la pluie ne peut concourir à produire le charbon, qu'en cp. RATES 
ce qu'elle affaifie les fligmates avant qu'elles foient épanouies. 


Le manque de fécondation dans les grains, fait qu'ils n’ont 
que l'apparence d’une mole, qu'ils font une mafle de matière 
autrement colorée, figurée & renfermée fous des enveloppes 
de confiftance & de nature différentes; en un mot, une mafle 
fans embryon & par conféquent fans vie. 


RECHERCHES [ur la nature des pouffières noires 
de la Niclle à du Charbon. 


La noirceur des parties qui font affeétées dans les maladies 
dont nous venons de parler, eft un fymptome de ces mala- 
dies; aufli eft-elle un effet des caufes que nous avons fait 
connoître, mais quelle ‘eft la nature des pouffières de la nielle 
& du charbon! pourquoi cette pouffière eft-elle noire? c'eft 
ce qui demandoit d'être examiné. J'y travaillai, & j'eus lieu 
d’être fatisfait des obfervations & des expériences que je fis 
à ce fujet: elles fatisferont, j'efpère, l’Académie; je les détail- 
lerai après avoir rapporté les trois faits fuivans, dont elles 
fervent de preuves. 

Le fuc qui fert de nourriture aux plantes, eft une liqueur 
compofée de corps globuleux, qui ont une figure, une gran- 
deur & un mouvement déterminé. 

La sève de plufieurs plantes, épanchée hors de fes vaiffeaux, 
devient noire à mefure que les parties les plus liquides 
s'évaporent; elle reprend fa première couleur à melure que 
humidité lui eft rendue. 

Les pouflières noires du charbon & de la nielle viennent 
de la sève ; ainfr on doit trouver en elles quelques phénomènes 

Z ii 


366 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
femblables à quelques-uns de ceux qu'on voit dans la sève, dans 
le fuc ou dans l'infufion de quelque partie des plantes faines. 


Preuves du premier fait. 


J'ai pris de la sève de bouleau & de noyer, j'en ai mis 
dans un verre objectif concave du microfcope, j'y ai vû, avec 
phifir, plufieurs petits corps globuleux qui furnageoient & 
qui fe mouvoient en plufieurs fens. 

J'ai vû la même chofe dans le fuc que j'avois extrait des 
feuilles, des racines de navet, de chiendent, dé rofeau: 

> Defériprio & Joblot *, long-temps avant moi, avoit obfervé ces corps 
Fe globuleux mouvans dans plufieurs infufions des plantes. 

J'ai fendu des grains de froment, que j'ai fait macérer 
long-temps; & après les avoir mis fous le microfcope dans 
quelques gouttes d'eau, j'ai vû que les fibres longitudinales 
fe déchiroient & laifloient échapper les globules jaunes qui 
venoient à la furface de l’eau. K 

M. de Buffon a vüû les mêmes globules dans fes femences 

» Hif. Na. d'œillet b; M. Hill, dans l'infufion des graines d’une plante ‘; 
t. 111,p:329+ M, Needham, dans l’infufion d'amandes d; le même a vû, 
of mien dans l'infufion de blé broyé, des végétations qui étoient com- 


page 142. polées de cinq à fix globules en manière de chapelets *, 
d Loc. cit. 


Page 190. Preuves du Jecond fair. 
€ Ibid. p, 222, Us à " : 
é J'ai coupé des branches d'agnus caflus, de toxicodendron 


& de noyer; j'en ai ramaflé quelques gouttes de sève, & j'ai 
vû plufieurs fois que cette sève devenoit noire à mefure que 
l'humidité s’évaporoit. 

Le fuc de genipayer appliqué {ur la peau ou fur quelqu'autre 
chofe, noircit tout de fuite. 

J'ai obfervé que les Laboureurs ayant-emporté les fleurs 
mâles du maïs, da tige de ce blé fuintoit le plus fouvent à 
l'endroit où elle avoit été coupée, un fuc, qui en peu de jours 
s'épaiflifloit & devenoit d'une couleur brune ou noire. 

:. Lorfque par une caufe quelconque la sève eft portée en 
plus grande quantité dans quelque endroit de la paille ou des 


DES SCT EN CES 367 
feuilles de la paille de froment, &c. elle s'extravale & y 
forme des taches noires. 

J'ai vû aflez communément à la tige & aux feuilles du 
blé de Turquie, des tumeurs aflez confidérables ; ces tumeurs 
ne contenoient qu'une poufhère noire; aufli ayant enlevé la 
tumeur, j'ai aperçû plufieurs vaifleaux qui étoient rompus. 

Quelques chiendents, le plus grand nombre des boraginées, 
& plufieurs autres plantes, noirciflent en fe defléchant, & 
elles reprennent leur première couleur lorfqu’on les fait infufer 
pendant quelque temps. 

J'ai mis dans l'eau la sève de noyer, d'agnus caflus , qui 
étoit devenue noire en perdant fon humidité; elle à repris 
fa première couleur dès qu'elle a été pénétrée de ce liquide. 

J'ai pris des pouffières noires de la nielle & du charbon, 
je les ai miles dans l'eau, & je me fuis aperçû qu'elles devez 
noïent jaunes à mefure que l'humidité les pénétroit. 

La fubftance interne de lergot, dont nous parlerons dans 
peu, eft blanche; mais lorfqu’on la fait macérer long-temps, 
on voit plufieurs vaiffeaux fe rompre & laïffer échapper des 
globules noirs qui quittent cette couleur à mefure qu'ils 
s'étendent dans l'eau. 


Preuves. du troifième far. 


M. Bernard de Juffieu, qui le premier a fait, avec le mi- 
crofcope, plufieurs obfervations fur les pouffières fécondantes 
des plantes *, nous a appris que lorfqu'on les met dans 
une goutte d'eau, elles fe meuvent promptement de côté & 
d'autre, en fuivant des direétions différentes. M. Needham 
a fait les mêmes expériences plufieurs années après, mais avec 
moins de fuccès, car il avoue n'avoir jamais aperçü le mou- 
vement des pouflières, qui font blanches & tranfharentes ; 
cependant je doute qu'il y ait de farine fécondante qui fe 


meuve avec plus de force & plus vifiblement que celle de 1a. 


valériane, & cette pouffière eft blanche & tranfparente *. 


# Ceux qui feront bien aifes de | peut-être pas fâchés de mrouver ici les 
répéter ces expériences, ne feront | moyens les- plus propres à obfèrver 


* Mén. & 
l'Acad, année 
1739: 

D Obfervat: 
microfcep. pag. 

90 gi: 


# Jour. des Sav. 
année 1678, 
Past 331- 

b Découvertes à 
ufage des mi- 
crofcopés 


368 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

J'ai vû dans le fuc de plufieurs plantes, avec le fecours 
du microfcope, plufieurs globules qui fe mouvoient avec 
vitefle : Huighens *, Joblot ? ont obfervé la même chofe; 
ils ont pris ces corps mouvans pour des animaux. 

J'ai fendu des grains de froment, d'orge & de feigle; & 
après les avoir fait macérer long-temps dans l'eau, j'ai vû 
les fibres longitudinales fe mouvoir en fe tortillant, & qui 
laifloient échapper des globules qui fe mouvoient en différens 
fens. : 

J'ai pris deux à trois gouttes d’eau que j'ai mifes dans fe verre 
objedif concave du microfcope; j'ai examiné attentivement fr * 
cette eau ne contiendroit pas quelque animalcule, & après 
n'y en avoir vû aucun, j'ai enlevé, avec un canif, fa matière 
des taches noires de la paille, & je l'ai mile dans cette eau. 
J'ai obfervé que la matière de ces taches eft un compofé de 
petits globules ronds, qui fe meuvent prefque du premier 
moment qu'ils font dans l’eau ; avec moins de force à la vérité 
que ne font les pouffières des étamines. 

J'ai pris un épi d'orge niellé, dont j'ai Ôté avec le canif 
une certaine quantité de pouffières noires, que j'ai mifes dans 
deux gouttes d'eau, contenues dans un verre concave placé fous 
le microfcope; j'avois auparavant examiné fcrupuleufement cette 
eau: les pouffières de la nielle n'ont paru moins groffes, mais 
plus rondes que celles des taches de la paille; leur mouve- 
ment eft très-prompt. Lorfque ces pouflières ont agi, elles 
forment une végétation particulière & tiennent les unes aux 
autres par des petits filets qui font un réfeau admirable. On 
voit des globules faire des efforts pour fe détacher de ce réfeau ; 
plufieurs même s’en détachent & nagent en toute direction. 
A mefure que les globules fe féparent les uns des autres, ils 
deviennent jaunes. 


le mouvement des pouflières des 
étamines. On met deux gouttes d’eau 
dans le verre concavedu microfcope, 
l’on examine f1 cette eau ne contient 
point quelque animalcule ; l’on prend 
cafuite Le point de vüe, & lorfqu'on 


voit bien es gouttes d’eau, lon 
prie quelqu’un de verfer dans cette 
liqueur la poudre qu’on veut exami- 
ner, & qu'on a placée pour cet effet 
au bout d’une aiguille botanique. 


, 
al 


D'E st SNclTRENNIrC El S 369 
J'ai fait les mêmes expériences fur les pouflières noires du 
charbon du froment & du maïs, te mouvement, le réfeau 
de ces pouffières , eft le même; elles fubifent le même chan- 
gement, c'eft-à-dire qu'elles deviennent jaunes, lorfque par 
J'action de l'eau les slobules ont été féparés les uns des autres. 
De toutes ces obférvations, qui-ont été faites avec le 
même microfcope, il fuit; 1.” que la sève contient une 
quantité de corps globuleux ; 2. que le fuc nourricier de 
plufieurs végétaux devient noir à mefure que les corps glo- 
buleux s'approchent & s'uniflent les uns aux autres; 3." que 
les globules de la sève ont un caraétère eflentiel qui les dif- 
tingue : ce caraélère eft leur mouvement & leur figure ; 4.” que 
les pouffières de la nielle & du charbon ont des corps glo- 
buleux qui ont le même mouvement, la même figure que ceux 
qu'on découvre dans la sève. Ils font donc de même nature, 
ils viennent donc du fuc féveux, 
Il füit auffi de ces obférvations, que la noirceur des pouf- 
fières de la nielle, du charbon, des taches de la paille, &c. 
dépendent de la réunion, de la jonétion de plufieurs corps 
globuleux, de la nature de ceux qui fervent de nourriture, 
aux différentes parties de la plante. La sève une fois épan- 
chée de fes vaifleaux, la partie la plus aqueufe s'évapore , 
& les autres fubftances de la sève reftent fous une forme 
folide & ronde: l'évaporation de la partie aqueufe & fa réu- 
nion des globules, d'où s'enfuit la couleur noire, font aflez 
prouvées par les expériences que j'ai rapportées; mais comme 
il pourroit arriver que quelques perfonnes ne trouvent pas ces 
preuves fuffifantes, je vais rapporter quelques obfervations que 
j'ai faites, & qui démontrent clairement le point dont il s'agit. 
J'ai pris foixante femences de froment charbonné, dont 
la fubftance interne n'étoit point encore noire , elles peloient 
un peu plus de vingt-un grains; après avoir été féchées au 
foleil, elles ne peloient plus que douze grains: je les ouvris, 
leur fubftance n'étoit plus blanche , elie étoit formée de petits 
tuyaux remplis de globules noirs, qu'on diftinguoit avec la 
loupe. On voit la même chofe, mais plus fenfiblement, fur 


Say. étrang. Tome 1V, . Aa 


370 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

fe charbon de blé de Turquie: j'ai fait la même expérience 
fur les femences faines de froment & de maïs que j'avois 
écraftes, & qui font devenues noires lorfque l'humidité a été 
évaporce. 4 

J'ai pris des grains charbonnés de maïs, dans lefquels je 
n'apercevois pas le moindre point noir: je les ai écrafés, j'en 
ai retiré un fuc blancheâtre, qui brunifloit à mefure que la 
portion la plus tenue s'évaporoit. Il s'évapora les deux tiers 
de cette liqueur, & ce qui en refta, forma une croûte noire 
très-friable. J'ai répété cette obfervation fur le fuc que j'avois 
extrait des tumeurs qui viennent aux tiges de ce blé. 

Jai pris trois vefles de Joup qui étoient encore fous terre, 
& dont la fubftance interne étoit alors blanche; elles peloient 
un peu plus d’une once & demie ; je les coupai par le milieu, 
& je les expofai au foleil, trois jours après elles ne pefoient 
aurenviron une once : on voyoit plufieurs vaiffleaux qui tra- 
verfoient d'une extrémité à l'autre, remplis d'une pouffière 
noire; trois jours encore après , ces vefles de loup ne peloient 
que trois quarts d'once, & leur fubftance interne étoit toute 
réduite en’ une. pouffière noire & très -tenue. 

La farine ordinaire de froment, examinée au microfcope, 
paroît être compofée de corps globuleux, mais ces globules 
font fept à huit fois plus petits que ceux du charbon du 
même blé. Les globules de Ja farine ordinaire, mis dans Veau, 
agiffent & ne fe fubdivifent pas; les corps globuleux du char- 


bon, au contraire, mis dans l'eau, agiflent & font divifés en 


globules-jaunes ; donc les globules firineux font fimples ; donc 
une pouffière du charbon efl compolée de plufieurs corps 
globuleux réunis enfemble. 

Outre ces obfervations, on en peut puifer d'autres dans la 
Nature, qui démontrent parfaitement l’évaporation de la partie 
aqueufe & la réunion des autres fubftances fous une forme 
globuleufe: ne voit-on pas au commencement de l'automne 
uné quantité de grains globuleux fur les feuilles des vignes & 
des autres arbres. 

J'ai fait les mêmes expériences que j'avois faites fur Îes 


D'E S SYCAIE NN NES: 371 
pouffières de la nielle, &c. fur les pouffières purpurines du 
charbon de perficaire & fur des pouflières rouges qu'on urouve 
fur les feuilles de cette efpèce de millet, qu'on nomme /0r30. 
Dès que ces pouflières ont eu agi, elles ont été décompolées 
en globules jaunes ; quelqu'exaélitude , quelqu'attention que 
aie apportées à examiner fi je pourrois découvrir de combien 
de globules jaunes étoient compoites ces différentes pouflières, 
je n'ai pü réufhr. Les corps globuleux de la nielle, du char- 
bon, &c. font trop petits, leur mouvement eft trop prompt 
pour qu'on puifle compter ceux qu'on met dans une goutte 
d'eau; il m'a paru cependant, & bien diftinétement, que les 
poufières noires {e divifoient en beaucoup plus de globules que 
les pouflières rouges, & que celles-ci étoient compolces d'un 
plus grand nombre de corps globuleux que ne le font les 
pouffièies purpuriness auffi ai-je obfervé très-fouvent que les 
pouffières purpurines étoient les plus petites, & les pouffières 
uoires les plus groffes. 

Ces obfervations n'ont-elles pas beaucoup d'analogie avec 
celles que Leuwenhoek a faites fur la couleur du fang ; les mêmes 
phénomènes s'y rencontrent. Le fang eft un compolé de corps 
globuleux , fix de ces globules forment un globule jaune, fix 
globules jaunes compofent un globule rouge, un plus grand 
nombre fait un rouge plus foncé ; lor que < ce dernier globule 
eft décompofé, on ne voit plus de couleur rouge, on voit à {a 
place fix globules d'un ordre inférieur & qui font j jaunes *, 


De l'Ergor. 


Ce qu'eft le charbon au froment, l'ergot l'eft au feigle ; 
ces deux vices font produits par la même caufe; dans l'un 
* & dans l'autre la femence eft monftrueule, par un défaut de 
fécondation ; & fi ces deux maladies diffèrent entr'elles, ce n’eft 
qu'à caufe que la fubftance interne de J'ergot n'eft pas de la 
même nature ; différence qui vrai-femblablement dépend de 
la diverfe nature des vaiffeaux qui compoent fa femence. 

L'ergot eft un vice qui rend les grains de feigle beaucoup 
plus gros & plus longs qu'ils ne font dans l'état naturel; ce 

Aaa ij 


# Leuwenhock ; 
arcan, nat. pifls 
LVI, p. 8 


372 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

qui fait qu'ils fortent des bales. Les grains ergotés font quel- 
quefois droits, quelquefois courbés extérieurement ; ïls font 
noirs ou bruns & couverts d’inégalités, ils ont ordinairement 
trois rainures qui prennent d'un bout à l'autre. On trouve 
fouvent plus où moins de rainures, l'extrémité fupérieure du 
grain eft conflamment beaucoup plus grofle que celle qui eft 
attachée au fupport, l'enveloppe commune de l'ergot eft fouvent 
déchirée, & l'on y aperçoit quelques fiffures, & quelquefois 
des cavités creufées par des infeétes. Dans une grande partie 
des ergots, le bout fupérieur eft fendu en deux ou trois portions 
couvertes de pouflières noirâtres: on ne peut guère détermi- 
ner la groffeur de ces grains viciés, leur longueur ordinaire 
eft de huit à neuf lignes, il y en a de plus courts; j'en con- 
ferve un dans mon herbier qui a plus de vingt-fix lignes de 
long ; lorfqu'on rompt l'ergot, la fubftance interne paroît 
blanche & dure, mais facile à fe brifer; cette fubftance de- 
vient moins blanche à mefure qu'elle s'approche de l'enve- 
loppe commune ; alors elle eft rougeñtre. J'ai vû quelquefois, 
mais rarement, que la fubftance interne étoit noire & prefque 
réduite en pouflière, comme eft celle du charbon; ces grains 
mis dans l'eau, furnagent d'abord & fe précipitent enfuite. 
J'ai écrafé des ergots entre les dents, & après que les mor- 
ceaux eurent reflé un moment fur ma langue, j'y ai fenti 
des picotemens. 

Les bales qui enveloppent le grain vicié paroiffent faines, 
elles font cependant plus brunes que les autres; les pétales, 
la paille, &c. ne font altérés en rien; l'épi n'eft jamais vicié 
en entier, il ne contient, pour l'ordinaire, que deux à trois 
ergots; quelquefois auf il en a fix ou fept. J'en ai trouvé 
quatorze fur un feul épi; tous les épis d'un même pied font 
fouvent attaqués de ce vice, fouvent auffr il n'y en a qu'un 
feul ou bien deux ; l'ergot fe détache plus facilement que les 
autres grains. Nombre d'Auteurs ont décrit fous le même 
nom l'ergot & la nielle; perfonne, que je fache, n'en a exac- 
tement déterminé l’efpèce, prefque tous ont cru que cette 
maladie provenoit de l'abondance des pluies ou des autres caufes 


D} E SÙù ISNCILE N CE s. 373 
que nous avons réfutées en parlant de la nielle. Je ne connois 
que M. Geoffroi qui l'ait attribuée au défaut de fécondation *; 
c'eft cé défaut de fécondation qui cependant en eft la vraie 
& l'unique caufe, car la place du germe eft conflamment 
vuide & flétrie. J'ai ouvert, avec toute forte de précautions, 
un grand nombre de grains ergotés, & j'ai toûjours vû que 
le germe leur manquoit. J'ai femé plufieurs fois, avec atten- 
tion, des ergots, & je n'en ai vü lever aucun. 

Cette maladie dépend donc des mêmes caufes que le 
charbon; je ne les rappellerai pas ici, j'obferverai feulement 
que les deux fligmates des ergots font plus gros & plus 
tuméfiés que ceux des grains naturels. Dans ce vice, les 
deux ftigmates font non feulement unis enfmble, mais ils 
le font encore avec les étamines : j'ajoûterai que comme il 
n'y a que le plus petit nombre des grains d’un épi qui foient 
ergotés, on pourroit foupçonner que les étamines étant unies 
enfemble, ils n'ont pas aflez de force pour écarter les bales, 
ils reftent étouflés; ou s'ils viennent à vaincre a réfiftance 
qui s’oppole à leur fortie, ils paroiffent trop tard, les fligmates 
ne font plus en état de recevoir Fimpreflion des pouffières, 
elles font flétries & féchées. 

- De même que le charbon, l'ergot conferve Iong-temps 
les ftigmates unis à fon extrémité fupérieure, ce qui prouve 
que le vice de ces organes eft le mème dans ces deux ma- 
ladies ; de forte que f1 ces vices paroiffent être différens, ce 
n'eft que par quelques fymptomes qui n'établiffent pas le 
genre de la maladie, mais feulement l'efpèce. 

On remarque très-peu de chofe dans l'accroiffement de 
lergot; on ne peut d'abord le diftinguer des autres grains, 
qu'en ce qu'il eft plus brun & plus gros; lorfqu'il eft parvenu 
à une certaine grofleur, on voit à fa bafe plufieurs taches 
noires, qui ne font point pénétrantes & qui occupent feule- 
ment l'enveloppe: peu à peu cette enveloppe fe noircit, le 


# Quand les blés font en fleurs, on craint la nielle: qu’arrive-t-il 
enfuite, l’épi noircit, Îles grains inféconds noirciflent, s’alongent & 
forment une corne fans germe. Mém, de l'Acad. année 1711, 


Aaa iij 


» 

222 

? 

* Obfervation 

microfcopique, 
page 104. 


ÿ 


b Jhid, page 
Wo7 


374 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
grain vicié croit, il fort du calice & devient plus noir; 
l'enveloppe extérieure fe fend en plufieurs endroits; enfin 
l'extrémité fupérieure fe fend en deux ou trois portions ou 
tombe en pouflère noire. 

Lorfqu'on partage d'un bout à f'autre les grains ercotés, 
la fubftance blanche ou interne paroît être compofée de longues 
fibres. Si l'on examine avec le «microfcope ces fibres mifes 
dans quelques gouttes d'eau, on obferve qu'elles prennent un 
mouvement. Ce mouvement a d'abord été connu par M. 
Needham, qui l'a trop bien décrit-pour que je ne me ferve 
pas ici de {es propres termes. « Lorfqu'on applique de Feau 
à ces fibres, on les voit en un inftant prendre vie & fe mou- 
voir révulièrentent, non d'un mouvement progreffif, mais 
en tortillant chacune de leurs extrémités, & perfévérer dans 
cette agitation jufqu'au lendemain * ». Cet Auteur, d’ailleurs 
célèbre, mais trop amateur du merveilleux, prit ces fibres 
mouvantes pour des animaux, qu'il nomma anguilles : avoit 
cependant obfervé que cette aélion étoit la même dans les 
ergots confervés depuis plufieurs années & dans ceux qui 
étoient cueïllis du jour même. 

Nous avons dit plus haut qu'on apercevoit le même mour- 
vement dans les grains naturels, mais nous devons ajoûter 
qu'il eft dix fois plus confidérable dans les fibres de l'ergot; 
preuve certaine que ce mouvement n'eft point dû aux parties 
organiques de la plantule, puifqu'il n'y en a pas dans le grain 
vicié, Ceci foit dit par le pur amour de la vérité, & nullement 
pour démontrer faux le fyflème que de grands Phyficiens 
ont mis au jour depuis peu d'années. 

Le mouvement qu'on voit dans ces fibres, n'eft dû qu'aux 
corps wlobuleux de la sève, contenus dans les vaifleaux fari- 
neux : ceci n'eft point conjecture, car le traduéteur de M. 
Needham a obfervé qu'il arrive affez fouvent à ces anguilles 
de fe rompre, & alors on voit fortir de leurs corps plufieurs 
petits globules noirâtres, enveloppés d'une fine membrane P. 
Ces globules ont 11 même forme & le même mouvement 
que ceux que nous avons obfervés dans les pouflières de Ja 


DE SE AGREE CC /EUS 37S 
nielle & dans la sève: ils font donc de même nature. 

Cette aétion de {a fubftance blanche de l'ergot, qui avoit 
été fi bien remarquée par l'Auteur anglois, ne me fuffloit 
pas; j'eufle defiré que cet Ob!ervateur eût pouffé fes recherches 
plus’ loin, qu'il eût examiné a fubffance noire. Je crus quelle 
devoit avoir le mème mouvement, & je travaillai à nren 
éclaircir, après que j'eus vérifié, par des expériences réitérées, 
le mouvement des fibres internes. 

Je ratiflai avec un canif la furface des ergots, & par ce 
moyen j'enlevai des petites portions de la matière noire, que 
je mis, avec quelques gouttes d’eau, dans le verre objectif 
concave du microfcope : je vis cette matière fe mouvoir irré- 
gulièrement .de toutes parts, moins promptement que les 
pouflières de la nielle, mais avec plus de force : il s’en fépara 
des petits globules, qui devinrent jaunâtres & me parurent 
en tout conformes aux pouflières du charbon. Au refte, ce 
mouvement de la fubflance noire n’eft pas, à beaucoup près, 
auffi confidérable que celui de {a fubftance blanche. 

Mais, & c'eft ce qu'il faut examiner, pourquoi ces deux 
fubftances ne font-elles pas de la même couleur? pourquoi 

uffi la fubftance interne de l'ergot & celle du charbon ne 
{ont-elles pas de la même nature, dès que ces maladies font 
produites par la même caufe ? 

La fubftance farineufe du feigle eft très- mucilagineufe ; 
par conféquent ces vaiffeaux font propres à réfifler à l'exten- 
fion que peut occafionner l'abondance de Ja sève qui y eft 
apportée. Les vaiffeaux peuvent donc être dilatés fans être 
rompus ; l'enveloppe commune au contraire eft d'un tiffu 
beaucoup plus fin & plus ferré; elle ne peut pas réfifter à 
Ja même diftenfion, elle eft fendue. Quelque portion de la 
sève s'épanche donc; de-là la réunion des globules, de-fà 
la noirceur. Cette théorie, qui eft la même que celle de la 
caufe de la noirceur du charbon, eft prouvée, en ce qu'il y 
a à l'extrémité fupérieure de fergot des pouflières noires 
femblables à celles de la nielle, & qui, étant mifes dans l'eau, 
produifent les mêmes phénomènes. Cela devoit étre ainfr, 


* Defcriptio 
morborum ex efu 
clavorum fecals, 
cap, V. 


376 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
parce que cette extrémité étant divifée aflez profondément, 
plufieurs vaiffeaux ont été rompus : dans les-cavités creufées par 
les infeétes, on voit la même pouflière & la même couleur. 

J'ai coupé tranfverfalement plufieurs ergots qui n'étoient 
pas mürs & qui étoient attachés à leurs épis; quatre jours 
après j'ai vû, fur la partie amputée, une quantité de pouf- 
fière noire. ÿ 

Plufieurs ergots ont leur bout fupérieur plus blanc, plus 
molet que d’autres; dans ceux-là cette partie blanche fe change 
en pouflière noire, parfaitement femslable à celle du charbon. 
Cette pouffière eft enlevée par le vent, & le grain refle 
tronqué. 

J'ai partagé en deux des ercots qui n'étoient pas mûrs; je 
les ai expolés au foleil, & j'ai và la portion de la fubftance in- 
terne, qui étoit expofée au foleil , devenir rouge & enfuite 
noirâtre : j'y ai expolé des ervots fecs que j'avois fendus en 
deux, je n'y ai pas vü le moindre changement de couleur. 

Lorfque les vaiffeaux de la fubftance interne font brifés, 
il en fort des globules noirs, comme nous l'avons déjà re- 
marqué: ajoûtons que Nicolas Langius, Médecin, qui a fait 
plufieurs obfervations fur l'ergot , nous a appris que lorfque 
le grain vicié a été macéré pendant vingt-quatre heures dans 
Veau chaude, il s'eft féparé une matière qui s'élève à {a fu- 
perficie de l'eau & y fait une croûte de diverfes couleurs *; 
couleurs qui certainement ne viennent que du divers arran- 
gement des corps globuleux. J'ai vérifié cette obfervation. 

Ces obfervations démontrent, fi je ne me trompe, que 
la fubftance interne de l’ergot eft blanche, à caufe que fes 
vaifleaux ont prêté & qu'ils n'ont point rompu. La dilatation 
de ces vaifieaux eft vifible: dans les expériences que j'ai faites 
pour voir les anguilles de M. Needham, j'ai toüjours vû que 
les fibres de l’ergot étoient huit à neuf fois plus grofles que : 
celles d'un grain naturel. 

Ces mèmes obfervations doivent peut-être nous faire con- 
jecturer que la fubftance interne du charbon n’eft noire que 
parce que les vaifeaux farineux du froment étant moins 

mucilagineux 


DES L SNCIUEL NS CE 5 377 
mucilagineux que ceux du feigle, ils fe rompent plus facile- 
ment, & que par conféquent la liqueur qu'ils contiennent eft 
extravafée, 

L’ergot eft plus long & plus gros que les grains naturels, 
à caufe que le fuc nourricier y eft porté en plus grande quan- 
tité, les tuyaux de l'ergot étant plus faciles à fe prêter, puilque 
les capfules de toute forte de femences font d’un tiflu bien 
moins fin & moins ferré que le germe; d’ailleurs, le fuc 
nourricier, qui devoit fervir au développement & à la nour- 
riture du germe, fert à l'augmentation des capfules. C'eft par 
cette raifon que les piflaches qui ne font pas fécondées de- 
viennent plus groffes que les autres, comme je l'ai obfervé 
fur un piftachier femelle du jardin des Chartreux de Paris. 

Je viens de décrire l'ergot tel qu'on le voit danse feigle, 
mais cette defcription peut s'appliquer aux ergots des auires 
graminées ; j'ai trouvé de ces grains viciés dans les épis de 
l'orge & de l'efpèce de chiendent, qu'on nomme Gramen 
aquaticum fluitans , C. B., Pin. M. Bernard de Juffieu n'a fait 
voir une branche d'une belle efpèce de fouchet qui lui a été 
envoyée de la Louifiane: on voit fur cette branche cinq à fix 
grains ergotés. 

Non feulement l'ergot fe rencontre dans les graminées, 
mais il infeéte encore d’autres plantes. Les fruits de palmier, 
qui ne font point fertilifés, deviennent beaucoup plus gros 
que ceux qui font fécondés ; ils font d'une figure monftrueufe 
& d’une couleur noire, comme cela eft rapporté par plufieurs 
Auteurs “. Si M. Logan eût fait toutes ces oblervations, 
il n'eût pas voulu établir que le défaut de fécondation pro- 
duifoit uniquement dans les plantes la ftérilité b. 

Ceci n'eft pas tout, devons-nous paffer fous filence l'efet 
que produit l’ufage des ergots ? non fans doute, le public auroit 
lieu de nous reprocher cet oubli; mais comme ces accidens 
ne font pas de notre fujet, nous ne les traiterons qu’en paffant. 

Lorfque dans les années où il y a beaucoup d’ergots les 
payfans les font moudre avec les bons grains, ces payfans, 
dis-je, après quelqu'ufage de ce pain, commencent à reffentir 

Say. érang. Tome IV. ë . Bbb 


# Mén. de 
l'Acad. année 
1711,p.226. 
b Tranfact. Phil. 
année 1736, 

n. CCCCXL. 


* Mifel. Nat. 
eur. decad. 111, 
am. 2, ohferr, 
CCXXIV. 

» Lettre d M. 
Dodard, Mém. 
de l'Acad, 1. X, 

© Mercure de 
France, Janvier 
174 8,p.75 


Juiv. 


4 Loc. citat. 
cap. XVI, 


378 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

une efpèce d’engourdiffement dans les jambes ; la partie fe 
tuméfie, fans qu'il paroifle fe moindre figne d’inflammation 
ni de fièvre : le mal fait des progrès dans les mufcles & dans les 
parties couvertes des enveloppes communes, il attaque enfuite 
la peau; alors, ou la partie fe fépare d'elle-même des chairs 
faines, ou elle devient sèche, racornie, noire, incorruptible 
& femblable en tout aux membres d'une mumie, Lorfque 
la malidie a fini aux jambes, elle attaque les bras & y produit 
les mêmes eflets; le feul remède qu'on connoifle pour ce mal, 
eftl'amputation. On a nommé cette maladie gangrène seche. 

Brunner eft le premier qui ait obfervé en Saxe cette efpèce 
de gangrène #; après lui M.* Dodard P, Salerne”, Font vüe 
dans le Blaïlois, l'Orléanois, le Gâtinois, la Bretagne & 
le Berri: Nicolas Langius, fameux Médecin de Bâle, la 
obfervée en Allemagne 4, Les ergots ne produifent pas tous 
les ans cette terrible maladie ; il y a des années dans lefquelles 
ils font plus malins : lorfqu'on donne ces grains à des animaux, 
ou ils ne veulent pas en manger, ou ils en meurent. Plus 
l'ergot eft frais, plus il eft dangereux. 

L’ergot n'occafionne pas feulement la gangrère, il produit 
encore des fièvres putrides & malignes, il tarit le laït aux 
femmes, il enivre, il afloiblit les fens; enfin, quoique 
Lonicerus le vante comme un bon antihifférique , fon ufage eft 
très-pernicieux & doit être évité foigneufement. 

On a là plus haut que les palmiers étoient fujets à avoir 
des fruits ergotés; &, ce qui n'eft pas moins particulier , c'eft 
que les ergots de ces arbres produifent des effets auffi ficheux 
que ceux du feigle: on en trouveroit peut-être la raïfon dans 
le grand rapport qu'il y a entre ces deux plantes. Les Bota- 
niftes favent tous qu'il n'y a aucun ordre naturel dans le règne 
végétal qui ait plus de rapport avec un fecond ordre, qu'en 
ont les palmiers avec les graminées. 


Moyens de prévenir la Nielle. 


Quoique ni les Agriculteurs, ni les Phyficiens ne fe foient 
pas appliqués à connoître exactement ni les caules, ni les 


D'E'$ LS GT EN CEE 379 
progrès de la nielle, ils ont cependant beaucoup travaillé à 
découvrir les moyens de prévenir cette maladie : l'énuméra- 
tion des remèdes qu'ils ont propolés pour parvenir à cette 
fin, en eft une preuve aflez folide. Cetie diverfité de remèdes 
que nous allons détailler, eft auffi une preuve que les Agri- 
culteurs n’en ont connu aucun de fufhfant pour détourner 
cette maladie de deflus les blés. En effet, parmi eux certains 
ont propolé pour remède de faire macérer les femences dans 
un mélange d'eau & d'urine ou dans une décoétion de feuilles 
de cyprès : plufieurs ont mis les grains des femences dans ” Plin. His 
; ar. lib. VI 
des leflives de chaux, de falpêtre, d'un, de verd-de- 4, Colum. 
gris, de vitriol, de fel commun, de cendres de plantes b; # reraf. di. 11, 
d’autres les font tremper dans le fuc de joubarbe ou de quel- Fa Lcd 
qu'autre plante froide‘, dans le marc d'olives 4: quelques- 4% NUE 
uns les échaudent *, quelques-autres penfent qu'on peut ?#° 7°: 
prévenir la nielle en lavant les grains dans l’eau courante F: ,;. es 
nos Laboureurs mêmes, ceux de toute la Guyenne, & peut-être  reruf. li. X, 
ceux de la plus grande partie de la France, mélent les grains bail 
qu'ils doivent femer avec la chaux vive, qu'ils brifent très- ag. Georg. 
menu. Les Bretons, pour prévenir l'ergot, mélent le feigle #?:! 
avec un dixième de {el commun £. Je paffe fous filence ce; "#7": x. 
moyen ridicule qu'on a propofé férieufement; c'eft de prendre +4 és 4 
à deux une longue corde, & de la faire pañfer fucceflivement Œcoom. prud. 
fur tous les épis d’un champ en fecouant la pluie. FL 
Les anciens, qui connoifloient prefque tous ces moyens, 46. //,cap.13. 
en pratiquoient d'autres ; les voici. Ils plantoient des rameaux * Sa, Lee 
de laurier au milieu de leurs champs, parce qu'ils fe perfua- 
doient que la nielle quittoit les blés pour s'attacher aux feuilles 
de cet arbre *; plufieurs méprifoient cette croyance & 5 pie, Hif. 
donnoient cependant dans un auffi grand ridicule, puifque SsAArs 
où ils couvroient d'une peau d'hyène les paniers dont ils fe "7 
fervoient pour femer ï, ou ils mettoient dans leurs champs, Come! be. 
avant de les labourer, une grenouille verte renfermée dans %: Fa! Rail 
un pot de terre “. Ce dernier procédé, que les Romains x pe, ci, 
obfervoient religieufement, me paroït avoir pris fa fource 
chez les T'ofcans : enfin , prefque tous obfervoient de ne point 


Bbbij 


* Virg. Georg. 


b Sub titul. de 
fvjurits aliifque 
deliétis, lib, 1X, 
altit. 1r, 


380 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
femer le cinquième jour de la Lune, comme étant un jour 
maudit #, Parmi ces différens moyens, les derniers font 
fuperftitieux : on peut placer au même rang les cérémonies 
que les Romains faifoient avant de femer, celles qu'ils prati- 
quoient dans les fêtes de Cérès & dans celles qu’ils nommoient 
Rubigales ; le dirai-je, cette fuperftition n’occupoit pas feule- 
ment le payfan, elle s’étoit emparée de tous les efprits: le 
Sénat, ce corps fi augufte, n’en fut point à l'abri, il crut 
qu'on pouvoit gâter les blés par les enchantemens ; auffr dé- 
fendit-il, par une loi des douze Tables, d'enchanter les 
guérets, fous peine de punition b. 

Nous ne porterons pas le même jugement des premiers 
moyens préfervatifs que nous avons rapportés; ils font très- 
utiles, 1.” pour étoufler les germes des petits infeétes qui 
pourroient être dans les grains, 2.° pour que les grains im- 
bibés étant amers ou piquans, ils foient à l'abri des vers, des 
fcarabées & des autres infeétes. 

H y en a même un dans ce nombre qui empêche que la 
moififfure ne s'attache au grain, & qui par conféquent prévient 
Ja nielle, c'eft l'eau de chaux; les Agriculteurs l'ont employée 
tout comme nous, mais avec moins de fuccès, parce qu'ils 
ont eu moins d'attention & qu'ils ont pris moins de précau- 
tion. Pouvoit-il en être autrement? ils ignoroïient la caufe 
de cette maladie, ils ne travailloient pas à fa connoître; par 
conféquent ils ne faifoient attention qu'à la maladie, & ils pen- 
foient que pour la prévenir il étoit indifférent de faire tremper, 
en quelque temps que ce füt, dans la leffive de chaux les 
grains de femence ; & même s'ils fe fervoient de cette leffive, 
ce n'étoit que parce qu'elle avoit réufli à quelqu'un. Auffi 
cette pratique fut-elle bien fautive, on vit paroître de la nielle 
dans les champs qui avoient été enfemencés des grains trempés 
dans l’eau de chaux. On crut ce remède infufffant, & l’on 
en chercha d’autres qui n'eurent pas plus de fuccès. 

On ne fera point furpris que cette préparation des femences 
des blés n'ait point produit un bon effet, lorfqu’on aura fait 
avec nous les remarques fuivantes. 


D'E St/S GLINEUNN CES, 38r 

Un grand nombre des grains de blé qu'on met dans les 
greniers , eft fouvent attaqué de la moïfiflure, foit qu'elle foit 
produite par l'humidité du lieu ou par humidité du blé 
même, qui n’étoit pas bien fec lorfqu'on fa ferré, & c'eft 
la raifon pour laquelle la nielle eft plus commune certaines 
années que d'autres. 

La moififlure attaque les grains contenus dans les épis; 
lorfque ces épis reftent long-temps entaffés en gerbes , fur-tout 
lorfqu'il a plu deflus; cette humidité fuffit même fouvent pour 
les faire germer. 

J'ai trouvé quelquefois des grains moifis dans les épis de 
blé qui étoient encore fur pied : le chaume de ces épis étoit 
rouilleux & moifi. 

Les femences faines, qu'on met tremper dans l'eau dé 
chaux pendant vingt-quatre heures, ne font plus fujettes à 
la moififlure, pourvü qu'après avoir été tirées de cette leflive, 
elles foient bien féchées. J'ai pris des grains d'orge ainfr 
préparés & bien féchés, je les ai expofés à l'humidité fans qu'ils 
aient été attaqués de la moïfiflure. J'ai femé deux ans de 
fuite des grains d'orge trempés dans l'eau de chaux, je n'ai 
vû aucun épi niellé fortir de ces grains. 

J'ai femé les mêmes années & dans le même terrein de 
Yorge qui n'étoit point préparé , & il en eft forti plufieurs 
pieds nielleux. Les grains moifis qu'on met dans l'eau de 
chaux, ne reviennent plus dans leur premier état : fi on les 
sème, ils ne produifent que des épis malades, comme je l'ai 
vérifié deux fois. 

II fuit de ces faits, que l'eau de chaux défend les grains 
de la moififfure, mais qu'elle n'en corrige point les effets ; 
par conféquent, quiconque voudra prévenir la nielle, doit, 
le plus tôt qu'il pourra, mettre tremper dans l’eau de chaux 
les grains qu'il garde pour enfemencer fes terres. Pour cet 
effet, la pièce où le blé eft le plus beau, doit être choifie 
& gardée pour femence. 

Lorfque le blé de cette pièce eft bien mür, on le coupé 
deux heures après le lever du Soleil; on le porte tout de 

Bbb iij 


382 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
fuite dans l'aire, on le fait battre le même jour, & le foir 
on met les grains dans l'eau de chaux, qu'on a eu foin de tenir 
prête. On y laifle ces grains vingt-quatre heures; & après 
avoir rejeté tous ceux’ qui furnagent, on fait bien fécher les 
autres, pour les conferver dans un endroit fec. 

Après avoir pris toutes ces précautions, je fis enfemencer 
de froment ainfi préparé plufieurs arpens de terre; j'ai exa- 
miné plufieurs fois ce champ fillon par fillon, & je n'y ai 
trouvé que quatre à cinq pieds nielleux; quantité qui dans 
un champ confidérable peut être, je penfe, comptée pour 
rien. J'avois fait femer dans le même terrein du froment qui 
mavoit point été préparé, J'y vis beaucoup de nielle. 


Moyens de prévenir le Charbon à7 l'Ersot. 


Avec le même foin que les Agriculteurs avoient employé 
à trouver quelque moyen propre à garantir les blés de la nielle, 
ils travaillèrent à prévenir le charbon & l'ergot, qu'ils croycient 
être des efpèces de la première maladie ; ils mirent en ufage 
les mêmes remèdes, & ce fut fans le moindre fuccès : outre 
même qu'ils ne prenoient pas les précautions néceflaires, les 
caufes de ces maladies étant totalement différentes, les re- 
mèdes qui réuflifloient quelquefois dans l’une, ne produifoient 
jamais le moindre eflet dans l'autre; c'eft l'expérience que 
je fis, lorfque je cherchois avec attention les moyens de pré- 
venir ces maladies. Je mis en ufage, non feulement les dif- 
férentes faumures, fucs, infufions ou décoétions que vantent 
les Ecrivains, mais encore plufieurs autres que je croyois 
devoir ètre plus efficaces; mes premiers effais ne réuffirent 
pas, je vis des pieds nielleux & des épis charbonnés fortir 
de ces femences fi différemment préparées. Ce ne fut qu'après 
bien des peines, bien des expériences répétées fouvent, que 
je parvins à trouver les moyens de prévenir ces vices ; ce 
furent ces expériences qui me firent connoître que les caufes 
du charbon & de lergot ne pouvoient être corrigées par 
aucune préparation du grain, mais feulement par la culture. 

J'oblervai que dans la culture des terres maigres, qu'on 


DES A SIC A EN IC ENS: 333 
n’avoit labourées que deux fois & dans lefquelles on n'avoit 
point porté de fumier, le froment & le maïs étoient fort 
fujets au charbon, & le feigle à l'ergot. 

J'ai obfervé que ces blés étoient fujets aux mêmes maladies 
dans les terres graffes & fertiles qu'on ne laiffe jamais en 
guéret, & dans lefquelles on femoit une année le maïs ou 
quelqu'autre légume, & l'année fuivante le froment; terres 
qui par conféquent ne font jamais vuides. 

Les Religieux Grands-Carmes de Caftillon, après avoir 
fait dans un champ de bonne nature une récolte abondante 
de maïs, y firent femer du froment fans y avoir porté du 
fumier ; le blé n'y réuffit pas bien , & les trois quarts au moins 
des épis furent charbonnés. C’eft par une raïfon à peu près 
femblable que les terres qui font, comme on dit, mangées 
par les arbres, produifent beaucoup d'épis charbonnés. 

Après un débordement de Ja Dordogne, qui arriva au 
mois de Mars 1751, les blés qui avoient été couverts par 
les eaux, épièrent fort tard & eurent beaucoup de charbon. 

Au mois de Juillet 1751, à la veille de couper les fro- 
mens , la grêle ravagea les environs d'Aimet en Périgord ; 
M. de Vococourt, Gentilhomme de ce pays, voyant que’ 
les grains étoient bien mürs, & qu'ils étoient répandus fur 
tous les fillons, crut qu’ils pourroient pouffer fi on labouroit 
bien les champs: il les fit Jabourer, les grains levèrent fort 
bien, ils donnèrent une récolte très-abondante & dans laquelle 
on naperçüt aucun grain charbonné. 

En 1752, un Avocat de mes amis, fit enfemencer de 
bonne heure une pièce de terre confidérable: dans tout ce 
champ on ne trouva aucun épi charbonné, mais on en vit 
beaucoup dans une pièce contigue qui avoit été enfemencée 
fort tard. 

Je fis femer le 1 $ Février 1752, de l'efpèce de froment, 
qu'on nomme k de Mars, il vint fort bien & n'eut point 
d'épis charbonnés : je fis femer de ce même blé le 1.” Avril 
de la même année, beaucoup d’épis charbonnés fortirent de 
ces dernières femences. 


384 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

En 1753, les pluies furent très-modiques & les chaleurs 
fort confidérables ; qu’arrivat-il ? les fromens épièrent fort tard 
& eurent beaucoup de grains charbonnés, 

Ces obfervations me firent foupçonner qu’on pourroit éviter 
le charbon & l'ergot; 1.” fi on labouroït bien & plufieurs 
fois les guérets, 2.° fi on fecouoit avec le fumier les terreins 
maigres, 3.° fi l'on ne chargeoït pas trop les terres, 4.° fi 
l'on femoit les blés de bonne heure: une heureufe expérience 
me le confirma. 

Je fis femer du feigle, le 23 Septembre 1752, dans le 
terrein le plus maigre, où j'avois fait porter du fumier & 
que j'avois fait labourer plufieurs fois : dans toute cette pièce 
je ne vis aucun ergot, & les feigles voifins, qui avoient été 
femés environ un mois plus tard dans des terres moins bien 
préparées, en étoient remplis. 

Une pièce de terre de très-bonne nature, avoit été enfe- 
mencée de froment en 175 1 ; en 175 2 on la remplit d’aricots 
& de blé de Turquie; je permis au Métayer de faire de la 
moitié de ce champ ce qu'il jugeroït à propos, à l'exception 
de deux fillons que je fis enfemencer felon la méthode de 
M. du Hamel: je fis Jabourer l'autre moitié deux fois de 
plus que Pautre ne l'avoit été, jy fis même, contre l'ordinaire, 
porter un peu de fumier, après quoi j'y fis femer du froment ; 
je fis encore femer dans cette partie deux fillons, felon la 
méthode de M. du Hamel. Dans la moitié que je fis préparer, 
il n'y eut pas un épi de charbonné; dans l'autre, j'eftimai 

w'il y en avoit environ un douzième: il y en avoit moins 
dans les deux fillons femés felon la méthode de M. du Hamel. 

Le 24 O&tobre 1752, je fis femer du froment dans une 
pièce bien préparée, il ny eut point de charbon: le 18 Dé- 
cembre de la même année, je fis femer de ce blé dans une autre 
terre bien préparée, j'y trouvai plufieurs épis charbonnés. 

Par conféquent tous les Agriculteurs, tous les Laboureurs 
qui prépareront les blés de femence de la façon que nous 
avons décrite dans l’article précédent, qui fémeront enfuite & 
de bonne heure ce bé dans des terres bien préparées, & 

fecourues 


D Æ SC T'ELN CG Es; 385 
fecourues à proportion de ce qu'elles feront d'une nature plus 
ou moins maigre, ces Laboureurs verront, dis-je, ces blés 
parvenir à la moiflon fans qu'ils foient infectés de la nielle, 
du charbon ou de l'ergot, à moins qu’il ne furvienne, la faifon 
étant avancée, ou quelque débordement, où quelque déran- 
gement de faïfon, ou quelque orage, accidens qu'il n'eft pas 
permis à la fagefle humaine de prévenir. 

J'ai dit qu'il falloit fumer les terres, mais je dois ajoûter 
que quant à ce point, il y a une précaution d'importance 
à prendre; il faut que le Laboureur éparpille bien le fumier, 
car s'il le laifle trop épais en quelqu'endroit, le blé y poufle 
beaucoup de feuilles & il en fort beaucoup d'épis charbonnés 
ou ftériles. 

Ces moyens, quoique bons, ne font pas fuffifans pour 
prévenir le charbon du maïs : dans cette maladie, il faut non 
feulement les employer, mais il faut avoir recours encore à 
autre chofe. Le blé de Turquie diffère des autres blés, en 
ce que les fleurs mâles & les fleurs femelles font féparées les 
unes des autres; les fleurs mâles forment une panicule 
qui occupe le haut de la tige, les fleurs femelles font affem- 
blées en épis attachés aux nœuds des tiges. Les Laboureurs 
coupent les panicules des fleurs mâles en certain temps, mais 
ils péchent, en ce qu'ils les coupent trop tard; de-là les fleurs 
femelles font privées de la sève qui eft apportée dans les pani- 
cules pour le développement des étamines, d’où les ftigmates 
n'ayant pas une quantité fufñfante de fuc, fe defsèchent; de-[à 
les épis font ftériles & plufieurs autres charbonnés. 

En 1752, année dans laquelle on vit beaucoup de char- 
bon de maïs, je fis couper les panicules avant que les éta- 
mines fuffent épanouies ; j'en laiffai cependant quelques-unes 
de diftance en diflance, c'eft-à- dire la quantité que je crus 
être fufhfante pour fertilifer tous les pieds de ce blé : tous les 
pieds dont j'avois fait couper de bonne heure les panicules, 
ne furent point charbonnés ; quelques-uns de ceux auxquels 
Javois laiffé les fleurs mâles, furent infectés de cette maladie, 
J'ai répété cette expérience en 1753. 


Sa, étrang, Tome IV, Ce 


386 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Pour fertilifer les fleurs femelles , il fuffit de laifer de vingt 
en vingt pieds les fleurs mâles. 

Ainfi les moyens de prévenir le charbon de maïs, fe ré- 
duifent à le femer de bonne heure dans une terre bien préparée, 
& à couper les panicules avant que les étamines foient 
épanouies. 

Je finis cet article par certains préceptes fort connus des 
Agriculteurs: 1.” on doit changer de temps en temps les 
femences, les choiïfir groffes, bien nourries, provenantes 
d'un bon fonds, éloigné de quelques lieues de celui dans 
lequel elles doivent être jetées; 2.° les grains qu'on doit 
femer ne doivent être ni cariés ni vieux; 3.° il faut femer 
chaque efpèce de blé dans une terre dont la nature lui con- 
vienne; ainfi le froment doit être mis dans un fonds gras & 
fertile, le feigle dans un champ fablonneux, découvert, 
expolé en entier à l'ardeur du foleil; Forge & Yavoine dans 
une terre légère, 


De la Srériliré. 


De toutes les maladies que nous venons de décrire, quelques 
cruelles qu'elles foient, il n'y en a aucune qui foit plus pré- 
judiciable aux provinces que celle qui rend les épis de blé 
inféconds; ce vice attaque également toutes les efpèces de 
blé & n'épargne aucun pays. 

Outre la nielle, le charbon & l'ergot, nous trouvons fou- 
vent dans nos guérets des épis de froment, de feigle, &c. 
qui font alongés, maigres & blancs; j'ai ouvert plufieurs de 
ces épis, dans les uns toutes les fleurs avoient lés étamines 
sèches, tranfparentes & racornies; les organes femelles étoient 
plus petits qu'ils ne font ordinairement, ils ne paroiffoient 
pas bien nourris, ils étoient plus blancs, moins velus, & 
foit que leurs vaifleaux fuflent viciés, foit que la sève ne 
fût pas portée en affez grande quantité, ces organes ne fe 
développoient pas, le germe refloit étouffé. Voici quelques 
autres vices que j'ai obfervés, & qui peut-être concourent à 
produire la flérilité. 


“ 


D''ERS : 9.CUF EN OU EAE 387 

Les étamines ont fouvent les filets plus gros qu’à l'ordinaire, 
les fommets paroiffent alors vuides de pouffières, les ftigmates 
ne paroiflent pas bien développés. 

J'ai vü quelquefois les étamines & les ftigmates de toutes 
les fleurs d'un épi devenir sèches, grillées, lorfqu'un vif rayon 
de foleil a paru après la pluie. 

On rencontre fouvent les fommets plus gros qu'à l'ordinaire, 
ils font renflés , inégaux ; peut-être cela provient-il de {a mor- 
fure de quelque infeéte. Mais de quelque caufe que cela 
provienne, la poufière féminale eft viciée; vüe au microfcope, 
elle paroït plus groffe & d'une figure toute différente des 
autres : dans cés mêmes fleurs les fligmates paroiflent être 
plus petits qu'à l'ordinaire. 

Lorfque les blés font femés dans des champs gras & fer- 
tiles, les pieds mettent beaucoup en feuilles & les épis font 
ftériles. Les Agriculteurs qui ont fait cette oblervation , nous 
apprennent que pour prévenir ce vice, on fait brouter les 
blés par les troupeaux, c'eft ce qu'on pratique encore en bien 
des pays. ; 

Dans un grand nombre d'autres épis flériles, je n'ai trouvé 
aucun ftile, aucun ftigmate, quelque attention que j'aie eu 
à en examiner toutes Îles fleurs: ces épis étoient donc flériles, 
par là feule raifon que leurs fleurs contenoient feulement les 
parties mâles. Théophrafte avoit déjà remarqué que les fleurs 
des orangers ne tomboient Je plus fouvent qu'à caufe qu'elles 
étoient privées de leur pilon: quelques Obfervateurs ont en- 
fuite vû la même chofe fur le pêcher. J'ai fuivi cette obfer- 
vation, je l'ai faite fur tous les arbres de nos potagérs, fur 
tous nos blés & fur un grand nombre de plantes; j'ai vû que 
le plus fouvent la férilité des leurs n'étoit dûe qu'au manque 
des organes femelles ou à leur avortement ; j'ai vû que la chûte 
des fleurs des arbres fruitiers étoit dûe le plus fouvent à cette 
caufe, rarement à la morfure des infeétes & jamais à l'influence 
de la Lune ou à quelqu'autre caufe femblable. 

La gelée rend très-fouvent les fleurs ftériles, en attaquant 
feulement les fligmates; c’eft ce que j'obfervai au mois d'Avril 

Cccij 


383 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
1753 fur les fleurs de fraifier; dans ces fleurs, je tronvai 
toûjours les pétales & les étamines en très-bon état, mais 
je vis les organes femelles noirs, féchés, enfin totalement 
gangrénés ou perdus. Je fis dans le même temps la même 
oblervation fur les épis du feigle. 

On trouve rarement les femences dans les fruits qui de- 
viennent fort gros & fort fucculens, ou du moins s’il fe rencontre 
quelques femences, elles ne font pas dans un état fain, elles 
font vuides, sèches, &c. c'eft ce qu'on voit communément 
dans les groffes pêches, dans les poires d’Auch & dans plu- 
fieurs autres fruits /a). 

Ces caufes ne font peut-être pas les feules qui produifent 
la ftérilité, je n'aflure point qu'il ne puifle y en avoir quel- 
qu'autre, mais je doute fort que celle dont je vais parler foit 
de ce nombre. M. Rolander, Suédois, Etudiant en Médecine, 
obferva en 1751 qu'un petit infeéte, qui fe métamorphofoit 
enfuite en phalene, piquoit les chalumeaux du feigle & sy 
logeoit : il obferva fans doute auffi que tous les épis qui étoient 
portés fur ces chalumeaux étoient ftériles, puilqu'il établit 
pour caufe de la ftérilité la piqüre de cet infecte; M. Linnæus, 
Profefleur de Botanique à Upfal, communiqua cette obler- 
vation à M. Bernard de Juffieu, qui me fit l'amitié de m'en faire 
part dans une de fes lettres /2): depuis M. Linnæus na 
détaillé plus au long cette obfervation, & il m'a même marqué 
qu'i ne pouvoit pas m'envoyer cette phalène, parce qu'il 
étoit fi difhcile d'en attraper, qu'il n’en connoifloit que deux 
dans toute la Suède, dont l’une étoit dans*fa collection & 
J'autre dans le Cabinet de la Reine. 


(a) J'ai obfervé fur cette efpèce | albas effætas, in agris fecalinis copio- 


d'oranger, nommé par les Améri- 
Cains, Pampelinous ou chadec, que les 
femences étoient vuides & ne con- 
tenoient point d'amandes. 

(b) Voici comment M. Linnæus 
s’explique dans fa lettre à M. de 
dures : Srudiofus quidan infor- 
mator filet, nunc exclufit iftud infec- 
zum quod apud nos caufat fpicas 


Siffimas; evadit phalena.Unicus ejufce 
vernis intrat fæpe plurimos culmos , 
êT infinitam noxam adfert colonis, 

Ce favant Naturalifte m’a marqué 
qu'il avoit nommé cette phalène, 
Phalena feticornis , fpirilinguis fafti- 
culata, alis depreffis grifeo-fuftis. 
A latino infcripris, Aéta Stockolm, 
1752; pag. 62. 


| 


Là. 


E 


D'ir, SENSUEL NN CES 389 

Cette obfervation me paroît devoir être répétée avec atten- 
tion, je doute que ce loit avec fuccès ; je le répète, j'ai peine à 
concevoir que la piqure de quelque forte de vers qui fe niche- 
roient dans les chalumeaux du feigle, fût une des caules de la 
ftérilité de plufieurs épis de ce blé, car j'ai vû très-fouvent dans 
lä tige & dans lame du blé de Turquie un ver, ou, pour 
mieux dire, une chenille qui fe métamorpholoit enfuite en 
une phalène. Diofcoride, Mathiole*®, M. de Reaumur P ont 
obfervé un ver dans la tige & dans la tête du chardon à 
foulon; j'ai vù très-fouvent la même chofe, mais j'ai vü de 
plus que cette chenille fe changeoit en une petite phalène 
brune, marquée fur les ailes de petites taches blanches, dont 
Ja plus grande eft en forme de cœur. On trouve communé- 
ment ces chenilles dans ces plantes, & je n’ai jamais obfervé 
qu'elles y produifent ni la flérilité ni d’autres maladies. Nous 
avons encore un exemple femblable dans une efpèce de 
chiendent”, dont les chalumeaux fe trouvent fouvent piqués 
par des infeéles , qui occafionnent , dans les endroits où ils fe 
nichent, une tumeur chargée de filets & comme crépue à 
l'extérieur ; cependant malgré les différentes tumeurs dont ce 
chiendent eft quelquefois bien garni, il porte des panicules, 
dont les fleurs n’avortent point : la même chofe arrive dans 
d’autres plantes qui font fujettes à fervir de loges à des infedtes, 
& dont les fleurs n'avortent pas, comme on l'obferve dans 
Y'églantier 4, le chardon hémorroïdal®, 'hieracium myophorum ©, 
&, comme-je l'ai obfervé, dans la petite falicaire £. 

J'ai cherché pendant deux étés fur un nombre infini d'épis 
flériles du feigle, Finfeéte dont m'avoit parlé M. Linnæus, 
je ne l'ai point trouvé, par la raïfon qu’il n’eft peut-être pas 
en France. Ce ver auroit-il la propriété de rendre ftériles 
les épis des chalumeaux dans lefquels il fe niche, ou pluftôt 
cet infefte ne fe nicheroit-il pas indifféremment dans le 
chaume des épis ftériles & dans les tuyaux des épis fertiles? 
c'eft ce que je penfe. 

Les vers cependant font non feulement tomber beaucoup 
de fruits de bonne heure, & même quelques fleurs, mais 

Cccii 


+ De mediciral. 
Mat. lib, 111, 
COPe 115 MES 
J'a8- 254. 

b Flifl. des infeée. 
1. 11, p. 474 


© Gramen pra: 
tenfe , paniculat. 
Majus Cu 
folo, cum fpon= 
gioës. Vaill 
Bot. Par, j 7. 


d Rofa filveftris 
vulgaris, flore 
odorato incarnat, 
C: B.p. 493. 
*Cirfium arvenfe 
fenchi fol.radice 
repente, fl. purp. 
Jrf. R.H.748, 

£ Hieracium 
murorum , folo 
pilofiffimo. Fa 

B. Pin. 

E Salicaria Af- 
Jopi folio laticre, 
BR AH, 


396 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
encore ils rendent bien des fleurs flériles, comme je lai 
remarqué fouvent fur fa garence & fur le aphaniffrum, en 
rongeant où piquant le germe avant qu'il foit fécondé. J'ai 
nourri quelques vers, que j'avois pris dans les fleurs de la 
dernière de ces plantes, ils fe font métamorpholés, & n'ont 
donné des mouches. 

Les mouches ne détruifent pas toûjours en entier les germes 
des plantes, fouvent elles les rendent feulement flétries & 
vuides, pour la plus grande partie, de la farine: le célèbre 
M. Linnœus, s'étant aperçû que fur l'orge qu'on cueille en 
Suède, il y avoit au moins un dixième de grains vuides de 
farine & fort légers, en chercha la caufe, & m'écrivit qu'il 
l'avoit trouvée dans une petite mouche qui fe logeoit dans le 
calice de fa fleur /a). 

Quelque flatté que je fois d'avoir connu ces caufes de Ia 
ftérilité, jeufle goûté un plaifir bien plus doux, fi j'eufle 
trouvé en même temps les moyens de les prévenir: je les aï 
cherchés ces moyens avec toute l'attention poffible, mais inu- 
tilement; je doute même qu'aucun Obfervateur foit jamais 
plus heureux que moi. En effet, eft-il poffible de changer 
Ja nature d'un grain qui doit poufier des épis qui n'auront 
que des fleurs mâles? y a-t-il quelque moyen de prévenir 
J'intempérance des faifons, les piqures des infectes, les acci- 
dens qu'occafionne le foleil, lorfqu'après une pluie il paroît 
tout-à-coup à travers les nuages. 

(a) Voici dans quels termes M. | fingula habitat intra glummur floris, 
Linnæus me communiqua cette ob- | /Vec obfervata fuit ab ullo antequam 
fervation au mois de Mai 17$3- | ame, pulice minor, Hordeum malum 
Eff alias mufca minima, quæ in Sue- | fit T evadic minus àT leve, quod 


cia, ad minimum deftruit quotannis | itaque dant gallinis èT pecoribus, 
decimam partem hordei omnis, quæ 


D.E S) 9: CI ESN C\E, S 391 


SUPPLÉMENT aux Mémoires [ur les maladies 
des Blés. 


D EPUIS les deux Mémoires que j'ai donnés à l Académie 
des Sciences, fur les maladies des blés, j'ai fait de nouvelles 
obfervations; le fujet me paroït trop intéreflant pour l'aban- 
donner fi-tôt. J'ai répété pendant deux années les expériences 
que j'avois déjà faites, j'en ai imaginé de nouvelles, je Les ai 
tournées de différentes façons, j'ai apporté dans toutes l’atten- 
tion la plus fcrupuleufe , auffi ai-je reçû de mes travaux la 
récompenfe la plus douce, j'ai vü croître chaque jour fous 
mes yeux la confirmation de ce que j'avois écrit; J'ai découvert 
de nouvelles caufes du défaut de fécondation des grains, j'ai 
vü que ces caufes étoient celles qui procuroient communé- 
ment le charbon; &, ce qui eft bien plus flatteur pour moi 
& plus intéreffant pour le public, je me fuis afluré qu'il 
étoit facile d’écarter ces caules. 

J'avois connu depuis long-temps que le défaut de fécon- 
dation produifoit le blé noir, toutes mes expériences me l'ont 
confirmé; mais le vice de fécondation eft occafionné par bien 
des caufes : dans mon Mémoire j'en indiquai plufieurs, depuis 
j'en ai découvert d’autres ; peut-être en refle-t-il un plus grand 
nombre à connoitre. M. Tillet en a trouvé une, c’eft la 
pouffière même du blé corrompu, cette caufe produit cer- 
tainement cette maladie, mais elle n'eft pas, à beaucoup près, 
la feule; cette caufe n'a point lieu dans les endroits où 1a 
femence, prife dans un champ qui ne portoit pas un feul 
épi charbonné, produit l'année fuivante une grande quantité 
de blé noir: cette caufe n'a point lieu lorfque du blé choif 
dans le même champ, pris dans le même boïffeau , ne produit 
dans un canton que de bonnes femences, tandis que dans un 
autre il porte plus du tiers de blé corrompu. 

Je ne me propofe pas de donner le détail de toutes les 
expériences que j'ai faites, & tel qu'il eft couché fur mon 
Journal, ce ne feroit que des répétitions prefque continuelles, 


392 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& ce détail feroit aufli inutile qu'il feroit fec & ennuyeux ; 
je me bornérai à donner le précis exact de toutes mes obfer: 
vations & le réfultat de mes expériences; j'écarterai tout ce 
qui eft fupertlu & je n'oublierai rien de ce qui me paroîtra 
ètre utile. x 

J'ai coupé quelquefois l'extrémité fupérieure des grains de 
froment, de feigle & d'orge, d’autres fois j'en ai enlevé une 
plus grande partie, d’autres fois mème j'en ai retranché fa 
moitié; les femences ainfi mutilées ont levé, pour la plufpart, 
& donné des épis qui font parvenus à leur maturité : beaucoup 
de ces épis, fur-tout dans le feisle, étoient flériles & ne con- 
tenoient prefque que des fleurs mâles. Dans les épis fécondés, 
les grains étoient moins gros & moins longs qu'ils ne le font 
ordinairement , avec cette différence, que plus confidérable 
étoit Ja partie qui avoit été enlevée de la femence, plus petits 
étoient le chaume, les feuilles & le grain. 

J'ai ramaffé des grains de froment , qui dans l'aire avoient 
été écrafés par le fléau ou les pieds ; une grande partie de ces 
grains ont levé & n'ont point produit de charbon, j'ai feu- 
lement obfervé que ces épis renfermoient beaucoup de grains 
racoïnis ou en grande partie vuides de farine. 

J'ai enlevé une partie du germe, la femtence a levé & a 
produit de bon grain, mais ce grain étoit plus petit que 
les autres. 

Plufieurs autres expériences, où j'ai traverfé le grain dans 
fes différentes parties avec des aiguilles, des pointes de canif, &c. 
m'ont donné le même réfultat. 

J'ai percé en plufieurs endroits, avec une aiguille, le grain 
de froment, j'ai rempli les petites ouvertures de pouflière 
de nielle ou de charbon; je l'ai femé, & il a produit de 
très- bon grain ; quelques pieds ont eu des épis charbonnés; 
d’autres ont porté des épis, defquels une partie étoit char- 
bonnée, & l’autre très - bonne. 

J'ai femé dans des endroits différens des grains de fro- 
ment, ou couverts de pouflière de charbon & de nielle, 
ou qui après avoir trempé vingt-quatre heures dans de l'eau 

noircie 


ms CON A 


| DES P SC LEN'CE.S 39% 

noircie avec cette efpèce de pouffière, ont été enfuite fau- 
poudrés de blé charbonné; dans quelques endroits tous les épis 
font devenus charbonnés, dans d’autres il y en a eu environ 
la moitié, dans d'autres enfin il n’y en a prefque pas eu. 

J'ai fait faire des couches fur lefquelles j'ai répandu beau- 
coup de pouflière de nielle & de charbon; j'ai femé du froment 
deflus , il m'a donné le même réfultat que le précédent. 

Un de mes amis qui cultive avec fuccès la Phyfique, a 
fait la même expérience; il a fait préparer dans fon jardin 
une planche qu'il a enfemencée de froment moucheté ou 
noirci de différente façon avec la pouffière du grain char- 
bonné: le blé a crü fous fes yeux chaque jour, il l'a obfervé 
avec foin, & il m'a fait voir qu'il n'avoit pas produit un feul 
épi de charbon. 

. Un Curé de mes voifins fit dans le même temps la même 
expérience, le blé que produifit fon femi fut prefque tout 
noir. 

J'ai choifi dans un champ où il n’y avoit point de noir 
les épis les plus beaux, j'en ai femé des grains dans plufieurs 
cantons différens & dans des temps éloignés; dans les uns, 
il na produit que de très-bons épis; dans d’autres, if a pro- 
duit beaucoup d'épis charbonnés. Il eft à remarquer que ces 
derniers avoient été femés fort tard. 

J'ai ramaffé plufieurs gerbes de blé charbonné, j'en ai choifi 
les bons grains qui étoient mêlés avec ceux qui étoient cor- 
rompus ; la plufpart de ces grains étoient mouchetés: j'en ai 
fait des femis en divers temps dans des terreins de différente 
nature, & écartés les uns des autres: dans quelques-uns de ces 
endroits, j'ai trouvé beaucoup d'épis charbonnés ; dans d’autres 
il n’y en avoit prefque pas. 

En 1754, la récolte qu'on fit dans la Guyenne fut 
très-belle, on ne vit prefque pas de blé charbonné ; les 
femences dont on fe fervit étoient très-faines, cependant en 
1755 on eut une quantité de noir fi confidérable, que dans 
bien des cantons elle alloit au tiers: on {€ fervit du même 
blé pour faire les femailles , ce qui fit qu'une grande partie des 

Sav. étrang. Tome 1Y. . Dd 


394 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
femences étoient mouchetées : toutefois la récolte de 1756 
ne s'eft pas reffentie de ce vice, & iln'y a eu que très-peu 
ou prefque pas de blé noir. J'ai femé du froment choifi dans 
plufieurs planches où j'avois répandu beaucoup de pouffière 
de vefle-de-loup; dans les unes, tous les épis étoient char- 
bonnés ; dans d'autres, il y en avoit une moitié ; dans les 
dernières, il n’y en avoit prefque pas. 

Il fuit de ces obfervations, 1.” que les femences de fro- 
ment qui ont été écrafées, ou defquelles on a enlevé une 
partie, lèvent très-bien fi elles ne font pas privées du germe 
en entier, elles produifent de bons grains ; mais comme ces 
grains font petits, que les épis qui les portent ne font pas 
bien garnis, ils doivent être rejetés par les Agriculteurs, & ne 
doivent jamais fervir pour les femences; 2.° que les pouffières 
du charbon & de la nielle produilent très- fouvent du blé 
noir; 3.” que des femences mouchetées ou noircies avec du 
blé charbonné, produifent fouvent de très-bon blé; 4. que 
des grains de froment bien mûrs, bien choifis, point mou- 
chetés ni tachés de blé noir, produifent très-fouvent beaucoup 
d'épis charbonnés : d’où l'on doit conclurre que les pouffières 
du blé corrompu ne produifent pas toüjours le charbon, 
qu'elles ne font pas la caufe générale & unique de cette ma- 
ladie, & qu'il doit y avoir quelqu'autre caufe. En effet, qui 
a occafionné les premiers épis charbonnés? 

Il fuit encore de la dernière obfervation que la pouffière 
de veffe-de-loup corrompt les femences faines, & produit 
la même maladie que les pouffières de nielle ou de blé noir: 
d'où cela peut-il provenir! Ne feroit-ce pas de ce que les 
pouflières viennent également de la sève épanchée hors de 
fes vaifleaux, & qui, privée de {es principes actifs, permit 
aux autres fubftances de fe réunir fous une forme folide ? 
Ces différentes pouflières ont la même fource, la même 
couleur, la même figure , mifes dans une goutte d'eau, & 
placées dans le verre objectif concave d’un microfcope , elles 
préfentent les mêmes phénomènes, leur goût eft le même, 
pourquoi leur effet ne feroit-il pas le même ? 


DES: S'CTTNNGE S 

J'ai femé les grains de froment qui furnagent dans l'eau, 
la plus grande partie n'a point levé, ceux qui ont pouffé 
n'ont porté que des épis ftériles ou des épis charbonnés. 

J'ai recueilli du froment avant qu'il fût mur, les grains 
ont perdu en féchant beaucoup de leur poids, ils font de- 
venus racornis ; femés, ils n'ont produit que du charbon. 

Durant la floraifon, j'ai traverfé avec une aiguille les bales 
& le germe, plufieurs des grains auxquels j'avois fait cette opé- 
ration devenoient charbonnés, d’autres féchoient. De cette 
obfervation ne pourroit-on pas conclurre que fi un infecte 
pique un grain de froment dans le temps de la floraifon, il 
en réfulte le blé charbonné. 

J'ai tenté les mêmes expériences fur le feigle, elles n’ont 
point réuflr, ou les germes font devenus fecs, ou, ce qui eft 
arrivé le plus fréquemment, ils font parvenus à une parfaite 
maturité. 

Je fis préparer quatre planches fur lefquelles je fis mettre 
une couche de fumier d'un pouce d'épaiffeur, deux furent 
enfemencées de grains choifis & trempés dans l'eau de chaux, 
les deux autres le furent de femences choifies & point chau- 
lées , les blés devinrent très -touffus & versèrent en partie, 
la moitié des épis étoient charbonnés, il y en avoit beau- 
coup de ftériles ; les grains des bons épis étoient flétris & 
donnoient peu de farine. 

Je fis préparer avec attention un petit champ, je le fis 
mettre en planches, & le deftinai aux expériences fuivantes. 

Dans les différens femis dont je vais donner le détail, 
on fera attention qu'une des planches étoit préparée avec le 
fumier, & que la feconde n'avoit point d'engrais. 

Après une pluie abondante , je fis femer dix de ces 
planches; deux furent remplies de froment noirci avec les 
pouffières du charbon; deux le furent de femences prifes dans 
des épis noircis, & qui avoient le bout ou le toupet noir ; 
deux autres furent enfemencées de très-bon froment pris 
dans un champ où il n'y avoit point de grain corrompu ; 
les deux fuivantes eurent du froment choifi préparé avec l'eau 


Ddd ji 


396 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

de chaux : enfin, je mis dans les deux dernières planches 
des grains qui avoient été cueillis avant leur maturité. Ce 
femi fait, il plut encore pendant quatre jours, toutes ces 
femences levèrent fort bien; dans les quatre premières & dans 
les deux dernières planches, prefque tous les épis furent 
charbonnés ; dans les quatre autres il y eut une moitié de 
blé charbonné. 

Le dernier jour de la pluie je fis enfemencer le même 
nombre de planches avec les mêmes grains & Je même 
ordre que j'ai détaillé ci-deflus; les femailles faites, le temps 
fut très-beau, ces planches produifirent de très -beaux épis, 
il y eut un peu plus des deux tiers d’épis corrompus dans es 
planches enfemencées de blé noirci avec les grains char- 
bonnés; il y en eut un quart dans celles qui avoient été 
remplies de femences mouchetées, les grains cueillis avant 
leur maturité ne produifirent que du blé noir, les femences 
choifies eurent très-peu de blé charbonné, & les femences 
chaulées n’en eurent pas du tout. 

Je choifis un temps très- beau & très-fec pour faire les 
mêmes femis, ces femences levèrent fans pluie, les blés de- 
vinrent très - beaux, & je ne vis qu'une vingtaine d'épis 
charbonnés dans les planches femées de blé noirci & de blé 
moucheté ; les épis des femences qui n'étoient pas venues à 
leur maturité étoient tous corrompus. \ 

J'ai répété les mêmes expériences, que j'ai données dans 
mon fecondMémoire fur les maladies des blés, elles m'ont offert 
la même chofe; & comme ces expériences font détaillées au 
long dans fe Mémoire, je n'en donnerai ici que le précis. 

Dans les terres qu'on ne laïffe jamais en guéret & qui font 
prefque toûjours remplies de maïs ou de quelqu'autre légume, 
quelque choifies que foient les femences, quelques prépara- 
tions qu'elles aient reçües, elles produifent toüjours beaucoup 
d'épis charbonnés. 

Les terres qui font enfemencées tard produifent toûjours 
du blé noir. 

Lorfqu'on enlève les premiers épis du froment , la racine 


ST 


PET 


D'E's: SCT EN. C-B;5; 397 
en pouffe de nouveaux, & ces épis fecondaires font prefque 
tous charbonnés ; la même opération produit l'ergot dans le 
feigle : cette expérience eft commune dans cette province, 
on y sème beaucoup de feigle pour le bétail, à peine eft-il 
en épi qu'on le coupe; il furvient de nouveaux épis qui font 
chargés d’ergots. 

JL fuit de ces obfervations, 1.° qu'on ne fiuroit être trop 
attentif fur le choix des femences; les grains qui ne font 
pas bien murs, ceux qui furnagent produifent le charbon, 
quelque préparation qu'on leur fafle, ces femences ont un 
vice interne que rien ne peut corriger: pour y parvenir, 
j'ai employé les différens moyens que détaillent les auteurs, 
tous ont été inutiles : ces moyens f1 efficaces pour diminuer 
ou enlever les effets des pouffières des grains charbonnés, ne 
produifent ici aucun changement; heureufement rien n'eft plus 
facile que de féparer les femences viciées , tous les grains qui 
ont été cueillis avant d’être mürs furnagent, il eft donc ailé 
de les rejeter. 

2. I fuit qu'il n'eft “pas indifférent de femer après un 
temps beau & fec, ou après des pluies abondantes; mes ex- 
périences m'ont démontré que dans le dernier cas il furvient 
beaucoup de charbon. Cette obfervation eft fingulière, & ne 
m'a pas peu furpris, après l'expérience faite par M. du Hamel, 
répétée par M. T'illet; je ne penfois pas qu'une quantité d’eau 
püût produire le blé charbonné, peut-être cela provient-il de ce 
que l'eau a une aélion fur la femence, & que la pénétrant en 
uop grande quantité, elle y occafionne un dérangement 
interne, au lieu qu'elle ne produit point cet effet lorfque le 
blé eft levé & que les racines ont acquis une certaine force, 

3° On doit conclurre des dernières expériences, que le 
charbon eft plus fréquent dans les terres qu'on ne laiffe pas 
en gueret, & dans les champs qui ont été enfemencés tard. 
Il eft donc effentiel pour éviter cette maladie de femer le 
blé de bonne heure, & de le femer dans des terres bien 
préparées & traitées à proportion de ce qu'elles font plus 
ou moins maigres. 


Ddd ij 


398 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

4° D'autres caufes occafionnent le charbon , telles font la 
quantité de fumier & les piqüres des femences avant la ma- 
iurité. Il eft aifé d’écarter la première de ces caufes, j'en ai 
donné le moyen dans mon fecond Mémoire, c'eft de bien 
éparpiller Le fumier : quant à la feconde, j'avoue que fi la piqüre 
de quelque infecte produit le même eflet que la piqüre d'une 
aiguille, je ne connois aucun moyen de le prévenir; mais 
cette caufe eft de toutes peut - être la plus rare. 


Après toutes ces expériences il eft aifé de s’'apercevoir 


que la culture & la préparation que l'on donne aux grains, 
font deux moyens également propres à empêcher le charbon; 
le premier en corrige toutes les caufes que j'ai indiquées, 
le fecond prévient les eflets de la moucheture & des pouf- 
fières du charbon. 

Avant de finir, je crois qu'il eft eflentiel de rapporter 
trois ou quatre faits fur la nielle. 

J'ai depuis cinq ans dans mon jardin des pieds d'œillets 
fauvages & de favonnières qui n'ont porté chaque année que 
des fleurs niellées. 

J'ai trouvé des champs de feigle où la nielle étoit auffi 
fréquente qu'elle l'eft ordinairement dans un champ d'orge, 
quoique quelques auteurs aient affuré que le feigle n'eft pas 
fujet à cette maladie. 

M. Tillet, qui a fait fes obfervations dans les environs 
de Troies, aflure que l’efcourgeon n’eft pas fujet à la nielle; 
cependant dans les environs de Paris, dans cette Province, 
& dans toutes celles que j'ai parcourues, de toutes les plantes, 
l'efcourgeon eft celle qui eft la plus fujette à cette maladie, 
elle y eft même plus fujette que l'orge. Le climat produiroit-il 
une auffi grande différence ? 


UE RE. Us PP TT 


Eee En + 


Di £LS » SICJALEUN ICE, 399 


RELATION UN FOOTAGE 
AUX 
ISLES DE FRANCE ET DE BOURBON, 


Qui contient plufieurs Obfervations Aftronomiques, 
tant pour la recherche des Longitudes fur mer, 
que pour déterminer la pofition géographique de 
ces Îfles. 


Par M. D'APRÈS DE MANNEVILLETTE, Capitaine 
des Vaifleaux de la Compagnie des Indes , & Corref- 
pondant de l’Académie. 


E defir de perfectionner le Recueil des Cartes des Indes, 

que j'ai mis au jour en l'année 1745, & de l'aug- 

menter de la partie qui comprend la côte orientale d’Afrique 

& les ifles qui font à l'eft, m'engagea d'entreprendre de faire 

par moi-même les obfervations dont j'avois befoin pour rem- 
plir cet objet. 

Comme rien ne pouvoit mieux m'en procurer les occa- 
fions que les Voyages que le fervice de la Compagnie des 
Indes me donnoit lieu de faire dans ces mers, je follicitai 
particulièrement ceux qui me parurent le mieux convenir à 
mon projet. 

Les plaintes des Navigateurs touchant les erreurs des Cartes 
fur la partie de la côte d'Afrique qui s'étend à left du cap 
de Bonne-efpérance, & l'exemple récent du vaifleau le Cen- 
taure, qui fit naufrage au cap des Aiguilles au mois de’ 
Janvier 1750, ayant fait connoître à Ja Compagnie l'utilité 
d'en faire faire un examen exprès, elle me confia cette opé- 
ration, & me donna en conféquence le commandement du 
vaiffeau le Gorieux, qu'elle vouloit y employer. Ce vaiffeau 
étant principalement deftiné pour porter aux ifles de France 


« 


400 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

. & de Bourbon, les vivres & les autres effets qu'on y envoié 
annuellement, le voyage à la côte d'Afrique ne devoit avoir 
lieu qu'à fon retour en France. 

Je n'étois propolé long - temps auparavant de vérifier la 
longitude du cap de Bonne - efpérance, fur laquelle les fen- 
timens des meilleurs Géographes étoient très-différens; j'ai 
fait voir dans mon routier des Indes que l'obfervation des 
Pères Jéfuites, en 168$ , n'étoit rien moins que décifive à 
cet égard, que ces Pères l'avoient defavouée, & qu'elle ne 
s’accordoit point avec les routes de vaifleaux qui vont de 
cet endroit à l'ifle Sainte-Hélène, dont la fituation eft exac- 
tement connue. Je demandai donc à la Compagnie la per- 
miflion de pafler au Cap, & de profiter de cette relâche 
pour y faire les obfervations néceflaires ; elle me l'accorda, 
& me chargea en outre de déterminer également la pofition 
géographique des ifles de France & de Bourbon, elle me fit 
même les avances des inftrumens. 

J'employai le féjour que je fis à Paris avant l'armement 
du vaiffeau à acquérir les connoiffances dont j'avois beloin, 
& en particulier à me mettre au fait des obfervations que 
je me propolois. Le fieur Canivet, Ingénicur d’inftrumens 
de Mathématiques, fut chargé de me céder lun des deux 
octans qu'il avoit eu ordre de conflruire pour les Officiers de 
la marine que le Roï envoyoit en différens lieux pour per- 
fectionner la Géographie. 

Cet inftrument , beaucoup plus portatif que les quart- 
de-cercles ordinaires, & fufhfant au même ufage, étoit de 
22 pouces de rayon garni de deux lunettes à deux verres 
convexes, l’une placée le long du rayon, l'autre perpendi- 
culaire, & chacune avoit aû foyer deux fils à angles droits, 
& deux obliques à 45 degrés. Voici les dernières obferva- 
tions qui fervirent à le vérifier. 

Le 29 Juillet 1750, ayant mis l'oétan dans le plan du 
Méridien, on a obfervé que A d’Æercule employoit 47 
fecondes de temps à pañfer du fil vertical au fecond oblique, 


le fil à plomb battant fur 664 10°. 
La 


| 


plÉ S STATEUN CIS AO 
sr pendule donnoit la révolution des fixes de 23h 
; donc à proportion de 3° par jour , il faudroit ajoûter 
environ .6""; donc l'arc du parallèle de l'étoile compris entre 
le fil vertical & le fecond oblique eft de od 11° 47" 
qu'on a réduit en arc de grand cercle par cette analogie. 
Le rayon eft au cofinus de la déclinaifon de l'étoile 2e 
11”, comme l'arc du parallèle 1 1° 47" + eft à l'arc de 
grand cercle, ou à la différence entre 664 10’ & la hauteur 
méridienne de l'étoile que l'inftrument auroit donné fi l'étoile 
eût pañlé par le centre des fils. 

On trouve par le calcul la différence de 10° 40", donc 
la hauteur méridienne de S\ d’Aercule eft, fuivant cette ob- 
fervation , de 664 20° 40". 

Par un femblable calcul on a trouvé que la hauteur méri- 
dienne de w d'Hercule, qu ‘on a obfervé de 694 0° + 19"+ 
de temps, eft de 694 4° 19"; & celle de 9 du Sagiusire, 
qu' on a obfervé par la Lin à perpendiculaire de 57% 20° +- 
s1" de temps, eft de 574 31° 5”. 

Le 19 Juillet, on avoit obfervé la hauteur méridienne 
d'e d'Hercule de 724 30° 20". Or le 1 © Janvier 1750 
la déclinaifon vraie-étoit de 314 18° 42", mettant + 10 
pour l'aberration, — 3" pour la préceffion, + 414 8° 33" 
pour la hauteur de l'équateur, & + 1 8” pour la réfraction, 
la hauteur apparente a dû être 724 27° 40", & par confé- 
quent la lunette du rayon de loétan haufle de 2° 40". 

. déclinaifon vraie de 4 d'Aercule Jelr.# Janvier, eft 
259" 11"; donc ajoütant 10" aberration, Otant 2" pré- 
ceffion, ajoûtant 41% 8° 33" pour la hauteur de l'équateur, 
& 2 6" pour la réfraétion , la hauteur apparente de cette étoile 
a dû être de 661 1 8° 1 8”, on l'a obfervée de 664 20° 40"; 
donc loétan haufle de 2' 22”. 

La ot vraie de y d’Hercule, le 1. Janvier 175 0, 
eft de 274 53° 8" ; mettant donc + 10"aberration, — 1" 
préceflion, + quid 8° 33" hauteur de ne + 24" 
réfraction , fa hauteur one a dû être 694 2° 14’, elle 
a été obfervée de 694 94" 19"; donc f'oétan hauffe de 2° $", 

Sav, étrang. Tome IV. r£ée 


I 
2 


LA 


LUNETTE 
perpendiculaire, 


a 4612 


402 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

& prenant un milieu, on trouve que la lunette de l’oétan 
placée le long du rayon haufle de 2'°25", qu'on doit par 
conféquent Ôter de toutes les hauteurs obfervées avec cette 
lunette. 


La déclinaifon de Ÿ du Sagittaire étoit le 1. Janvier 


1750, de 294 5425" auftrale; mettant donc — 1 + aber- 
ration, 3 + préceflion, on a 294 54’ 20” de déclinaifon 


apparente le 19 Juillet 1750 ; l'ayant ôtée de 414 8° 33", 
hauteur de l'équateur, & ajoûtant au refte 4 52" pour la 
réfraction, on a la hauteur apparente de 114 19° 5”, & 
comme on la obfervée avec la lunette perpendiculaire de 
l'oétan de $74 31° 5’; il s'enfuit que cette lunette haufle 
de 464 12° 0" qu'il faut Ôter de toutes les hauteurs qu'on 
obfervera avec cette lunette. 


Comme j'avois deflein de m'appliquer en même -temps, 
pendant le cours de mes voyages , à l'oblervation des dif- 
tanices de la Lune aux étoiles; je fis faire à Londres, fous 
les yeux de M. Short, par le fieur Morcan, dont je con- 
noiflois l'exactitude, un octan de réflexion, ces inftrumens 
étant les feuls avec lefquels on puiffe les obferver à la mer, 
fans que le mouvement du vaiffeau y foit nuifible. 

Je m'étois exercé à la pratique pendant le voyage que je 
fis à fa côte d'Afrique en l'année 1749, fur le vaifleau le 
Chevalier marin que je commandois ; j'en connoiflois la faci- 
lité, les erreurs qu'on pouvoit commettre, & la fiçon de 
les éviter. Le peu de fuccès de mes premiers effais provenoit 
de Finflrument que j'avois alors, dont les miroirs n’étoient 
pas plans, & la graduation défectueufe. 


Quoique les occultations des étoiles par la Lune, foient, 
fans contredit, de tous les moyens ceux dont on doit attendre 
le plus de précifion pour déterminer les longitudes, foit à 
terre, foit à la mer ; ces phénomènes pour les étoiles de la 
première, feconde & troifième grandeur, qui font celles qu'on 
aperçoit commodément avec une lunette qu'on puiffe fixer 
pendant un inftant fur un vaifleau, ne font pas affez fréquens 


DES SCIENCES. 403 
pour faire connoître aux Navigateurs les erreurs de l'eftime, 
lorfqu'ils ont le plus d'intérêt à les connoître. 

Il n'en eft pas de même des diflances, qu'on peut aifé- 
ment obferver toutes les fois qu'il fe trouve une étoile de 
la première ou de la feconde grandeur, voifine du parallèle 
de la Lune ; ces diftances peuvent, dis-je, fuppléer aux occul- 
tations, ou du moins donner une approximation fufffante, 
lorlque l'Obfervateur eft muni d’un bon inftrument, & qu'il 
eft affez exercé, pour bien juger du point de contaét de l'image 
réfléchie de la Lune à l'étoile, ou de l'étoile à la Lune : ceci 
dépend entièrement de fa pratique. 

Je fais qu'il eft rare de trouver un inftrument affez parfait 
pour compter fur les arcs de diftance à 2 ou 3 minutes près ; 
mais on peut connoître ces mêmes erreurs en vérifiant l'oétan, 
Je me fuis fervi utilement pour cet effet de la comparaifon 
des diftances apparentes des étoiles entr'elles , avec les diftances 
obfervées. Cette méthode m'avoit mis en état de compter 
affez exactement fur ces dernières. 

Il eft encore effentiel d'avoir égard aux erreurs des Tables 
lunaires, tant dans le calcul des diftances que dans celui des 
occultations, fans cela on ne peut guère fe flatter d’une ap- 
proximation fufhfante pour en déduire la longitude des lieux. 
Il feroit donc néceflaire à la rigueur d’avoir l’obfervation 
correfpondante pour être plus certain du lieu réel de la Lune : 
mais comme l'erreur des Tables eft à peu-près la même au 
bout d’une période de 223 lunaifons, c'eft-à-dire, d'environ 
18 ans 11 jours +, lorfqu'il ne fe trouve pas plus de quatre 
années biflextiles renfermées dans cette période, ou bien 1 8 
ans 10 jours + lorfqu'elle en comprend cinq ; il fera facile 
à un Obfervateur intelligent de corriger lerreur des Tables, 
en confultant les obfervations de M. le Monnier qui corref- 
pondront à celles qu'il aura faites, & il pourra compter enfuite, 
à une minute près, fur le lieu réel de la Lune. Je me fuis 
fervi de l'abacus de M. Halley & de fes Tables lorfque Ja 
correfpondance l'a exigé; mais comme la période de M. le 
Monnier, dont les cahiers ont été imprimés au Louvre, eft 


Eee i 


404 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
maintenant complète & plus récente, on doit deformais s'en 
fervir par préférence. 

Toute la difficulté ne confifte que dans le calcul, qui 
exige beaucoup de patience , d'attention, & qu'on ait au 
moins les premiers principes de l'Aftronomie : comme il eft 
très-peu de Marins qui veulent s'y appliquer, cette raifon 
arrêtera toûjours le progrès de ces fortes d'obfervations & de 


bien d'autres, quelque utiles qu'elles puiflent être pour la. 


Navigation. 

Je ne dirai rien des différentes méthodes qu'on peut em- 
ployer pour le calcul, cette matière ayant été traitée par 
plufieurs Savans avec toute l'étendue dont elle eft fufcep- 
tible, & après eux par M. de la Caille avec qui j'ai eu très- 
fouvent occafion d'obferver & de travailler; je dirai feulement, 
qu'il m'a paru eflentiel d'avoir la hauteur obfervée de la Lune 
pour linflant de la diftance, tant pour faciliter le calcul des 
parallaxes, que pour une plus grande précifion ; c'eft à quoi le 
même Obfervateur peut fuffire en prenant la hauteur avant & 
après avoir pris la diftance, ou bien en faifant obferver cette 
hauteur par quelqu'autre perfonne. - 

On trouvera ci-après le détail des obfervations que j'ai 
faites, le rapport qu'elles m'ont paru avoir avec leur objet, 
& combien elles m'ont été avantageufes dans les différentes 
circonflances de ma navigation. 

Je me rendis au port de l'Orient à la fin d’Août pour 
y faire travailler à l'armement & à l'expédition du vaifieau 
qui m'étoit deftiné. 

… L'Académie ayant jugé à propos de faire obferver au cap 
de Bonne -efpérance les parallaxes des planètes, comime cet 
ouvrage demandoit un Obfervateur qui féjournât long-temps 
en cet endroit, & que cela ne pouvoit convenir en ce cas 
ni à mon état actuel, ni à la deftination du vaifleau, l'Aca- 
démie fit choix de M. Fabbé de la Caille, qui fe propofa 


en outre d'y travailler en. même-temps à former un cata- 


logue exact des étoiles auftrales. La Compagnie des Indes. 


lui accorda de pafler fur le vailleau le Gorieux : je fus charmé 


DE Us 'SMCTMENNTOENS 465$ 
‘de mon côté d’avoir occafion de profiter des fumières d’un 
Savant dont le mérite eft généralement connu ; je lui fuis 
redevable en particulier de l'attention qu'il a eue pour moi 
pendant le voyage, & même par la fuite, ainft que de la 
complaifance & du zèle avec lequel il a bien voulu me favo- 
rifer de fes inftruétions. 

Le 21 Novembre 1750, ayant reçü mes derniers ordres, 
& les vents qui fouffoient depuis quelques jours du nord-eft 
à left étant favorables pour le départ, je fis voile de l'Orient 
avec la petite frégate la Sainte -Reine & le fenau la Autine, 
deftinés pour f'ifle de France ; je devois les accompagner 
jufqu'’au cap de Bonne-efpérance. 

Deux jours après, la Sainte - Reine démâta de fon grand 
mât par la mauvaife qualité du bois. La direétion des vents 
ne lui permettant pas de joindre aucun des ports de France, 
je lui dorinai ordre d'aller à Lifbonne pour s'y réparer. 

Nous vimes le cap Finiftère le 24 dans l'éloignement de 
quatorze à quinze lieues vers le fud-eft. Le 26, le fenau la 
Mutine fe plaignit d’une voie d'eau confidérable ; je foup- 
çonnai d’abord qu'elle étoit caufée par l'agitation de la mer 
jointe au défaut de calfatage dans les œuvres-mortes de ce 
bâtiment, & je comptois y faire remédier dans un parage 
plus tranquille, je l'affiflai en attendant d’un fupplément d'é- 
quipage pour aider au travail des pompes. 

Je faifois route alors vers l’ifle de Madère, & je pañai x 
fa hauteur le 2 Décembre fans en avoir connoiïflance, quoique, 
fuivant l'eftime de la longitude, nous eufflions dû fa voir. 
Ce défaut me fit juger qu'il y avoit erreur dans l'eftime de 
la longitude; je n’en fus point furpris, vû qu'il eft afez or- 
dinaire de trouver des diflérences à left dans le trajet de France 
aux Canaries ; j'en prélumois encore du changement fréquent 
de voilure & de route à quoi m'obligeoit la Mine, foit pour 
Yattendre, foit pour m'en rallier; j'étois cependant fort éloigné 
de penfer que notre erreur fût dans un fens contraire, c'eft- 
à-dire, du côté de l’oueft, comme je le reconnus enfuite. 

Je continuai de cingler au fud prenant de l’oueft de façon: 

Ece ij 


406 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
à pafler à mi-canal des ifles du Cap-verd & de la côté 
d'Afrique, & le 11 Décembre j'étois à la hauteur de l'ifle 
Bonavifte. L'agitation continuelle de la mer ne me permettant 
as de faire travailler au radoub du fenau , je réfolus pour 
cet effet de relächer à la rade de Sant-Yago, l’une des ifles 
du Cap-verd, & je fis gouverner à l'oueft pour y aborder. 

Nous courumes,fuivant l’eftime,beaucoup au-delà de ces ifles 
fans rien découvrir ; j'aurois dû cependant rencontrer S.'-Y ago 
fuivant la latitude que je parcourois, & celle que plufieurs 
Cartes donnent à la partie du nord de cette ifle, principale- 
ment celles du dépôt de la marine: malgré cela, je n'en eus 
pas le moindre indice ; je foupçonnai cependant le 12 au 
foir voir l'ifle de Feu par une noirceur à l'horizon du côté du 
fud-oueft femblable à celle qu'y forment les terres; je le fis 
même remarquer à M. l'abbé de la Caïlle, mais la différence 
de l'eflime, qui dans cette fuppofition devoit être confidérable, 
m'en fit douter : nous ne tardames pas d'en être certains par 
’éclipfe de Lune que nous obfervames le 1 3 au matin. 

Ayant réglé une montre à fecondes par quatre hauteurs 
de Sirius, nous obfervames le commencement à 2h" $ 5" 3" 
de temps vrai, & limmerfion totale à 3h $0’ 54”. L'inf 
tant de ces phales étant comparé à celui que donnent fes 
calculs de la Connoiflance des temps, les Ephémérides de 
M. de la Caille, les Tables de M. Halley, & l'Almanach 
de Berlin; après, dis-je, avoir pris un moyen entreux, il 
s'enfuivoit que nous étions alors fous un méridien de 284 
s 8" plus occidental que celui de l'Obfervatoire royal de Paris, 
au lieu que l'eftime donnoit 2 24 22, erreur de 109 lieues 
fur ce parallèle, & je le répète, contraire à l'erreur que trouvent 
fouvent les vaifleaux, en forte qu'il falloit, fuivant la route 
des jours précédens, que nous euffions paflé, pendant Ja nuit 
du 10 au 11, entre l'ifle de Sel & l'ifle Saint- Nicolas, qui 
font éloignées de vingt-quatre lieues Fune de l'autre, & les 
plus feptentrionales de celles qu'on appelle ordinairement les 
ifles du Cap - verd. 

La pofition où nous étions à l'égard de Sant- Yago nç 


DE S:.S CII E°NCES. 407 
nous permettant plus d'y aller avec les vents alifés qui règnent 
en ces parages , nous fimes route vers la ligne équinoxiale, & 
après quelques jours de calme aux environs, nous la paffames 
le 6 Janvier 1751 par 30 degrés de longitude occidentale, 
fuivant l'eflime. 

On obferva le même jour à midi l'inclinaifon moyenne 
de l'aiguille aimantée de 264 30", étant alors par 1 2 minutes 
de latitude méridionale, dix jours après, par 1 34 $' de même 
latitude, & par 364 30’ de longitude réformée : cette incli- 
naifon fut trouvée o, de forte que nous étions fous l'équateur 
magnétique. * 

Ayant fait faire une vifite exacte du fenau la Aurine, 
dont la voie d'eau continuoit dans les mers les plus calmes, 
on reconnut qu'elle venoit du fond de ce bâtiment, de forte 
qu'il falloit néceflairement Je caréner pour le mettre en état 
de continuer fon voyage. Comme cette opération ne pou- 
voit fe faire que dans un port, je choïfis celui de Rio-Janeiro 
par préférence à la baye de T'ous-les-Saints, que je connoif- 
fois moins commode ; & , toutes réflexions faites, je pris le 
parti d'y aller avec le vaiffeau que je commandois pour le- 
plus grand intérêt de la Compagnie. 

Quelques jours après je fis l'obfervation fuivante. 


Le 21 Janvier 175 1 au matin, étant à la mer par 204 
41" de latitude méridionale, & par 35% 50” de longitude 
occidentale, c'eft-à-dire, fous un méridien de 2h 23° 20"à 
» , de Pari fuiv l'efti x h ! 131 
occident de Paris, fuivant l'eftime, à 4h 42° 9" à la montre, 
j'ai obfervé la diftance de l'étoile nommée Antarès au bord 


de la Lune le plus prochain, de 1 54 26’, 
Avant l’obfervation j'ai pris les hauteurs ci-après. 
HAUTEURS d’Anrarès, Hauteurs du bord inférieur de la Lune. 
BA CO NOIe: RAL AE NAME 20120 rater. 5,04: 4" 
4.128. 44 -.+ AT. 39 40360 30 + ee 57e 14 
EU ele 4 3057 AAC AO MENT 21,58 6 


* Voyez la defcription de l’inftrument dont on s’eft fervi, à la fuite.des: 
obfervations faites à l’ifle de France, 


408 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Comme j'étois élevé de 16 pieds au deflus du niveau de 
la mer, jai fouftrait 4 minutes de chacune de ces hauteurs 
pour linclinaifon de l'horizon &c l'effet dont la réfraction a 
dû augmenter leur hauteur; j'ai calculé féparément enfuite 
chaque hauteur d'Antarés pour vérifier la montre, d’où j'ai 
conclu l'heure vraie de l’obfervation à 4? 45° 1 0” du matin. 


Pour trouver la hauteur de l’étoile & celle de la Lune 
au moment de l’obfervation , j'ai pris, premièrement, l'inter- 
valle de temps entre la première & la dernière obfervation; 
2.° Ja différence des hauteurs ; 3.° l'intervalle de temps entre 
l'heure de l'obfervation de la diftance & l'heure que la hauteur 
la plus prochaine a été obfervée: j'ai fait enfuite cette règle 
de proportion. Comme l'intervalle de temps entre les deux 
hauteurs eft à fa différence des hauteurs, ainfi l'intervalle de 
temps entre l'obfervation de la diftance & la hauteur la plus 
prochaine, eft à la différence proportionnelle entre la hauteur 
la plus prochaine & la hauteur à l'inftant de l'obfervation. 


J'ai trouvé pour la hauteur d’Antarés. . . ....... 441 si 35" 
— 4! inclinaifon de l'horizon + 5 5" réfraétion = +- ARS 
Hauteur vraie d'Antarës au moment de l'obfervation. 44. 46. 407 
Et pour la hauteur du bord inférieur de Ia Lune. . . 581 207 
— 4‘ inclinaifon de Fhorizon — 33" réfraction + 

15° 3"£diamète = +............... 10. 30 
Hauteur du centre de la Lune. ........... - 58230. 30 


Pour connoître à quelle heure à Paris la Lune a été à fa 
même diftance obfervée de l'étoile, j'ai calculé pour cet effet 
le lieu de la Lune à Paris pour l'inflarit de l'obfervation , fui- 
vant leftime, & pour une heure plus tard , afin d'avoir fon 
mouvement horaire en longitude, en afcenfion droite, fa 
latitude , à déclinaifon, &c. après quoi j'ai fuppofé, 1° la 
différence des méridiens égale à celle de l'eflime, 2.° que 
cette même différence étoit de 20 minutes plus grande, ce 
qui donne deux inflans différens, pour chacun defquels j'ai 
cherché la diftance de la Lune à Ausares, 


Heure 


DES. S CHEN NeC ENS 469 


2.7 Suppofition. 2° Suppofirion, 

Heure vraie de l'obfervation le 20 Janvier. 16h 45° 10” 1OP AS 10! 
Différence des Méridiens fuppofés. . . .. 2:25 20 PARA 2.0 
Inflans fuppolés à Paris. , . . .. ADO CE L921,.8.040 19. 28. 30 
Lien OO OO ME CRE 1of rd 0 30” Ho er IT Er 4 
MMEMIde IH UNE ee et ele oies à T2 O SES ON Ze MAO 18-40 
Latitude de la Lune auftrale. . ....... 2. 40. 10 2. SO 
Parallaxe horizontale de la Lune. ..... O. 54e 3 
Déclinaifon de la Lune auftrale. . ..... 20.22. 37 20: 24-38 
Demi - diamètre de la Lune réduit à la hau- 

CHROME NS REA O0. 15.03 
Heure vraie réduite en degrés. ....... DS PEAR O ZE. 17-20 
Afcenfion droite du Soleil. ......... BOAT ART 303. 14. 54 
Afcenfon droite du milieu du Ciel. .... 194. 31. 31. 194. 32. 24 


Comme on connoît la hauteur de la Lune au moment 
de l'obfervation, & fa déclinaifon, on a cherché l'angle pa- 
. » # . » . 
rallaétique, & on l'a calculé une feconde fois pour l'avoir plus 

exactement avec la déclinaifon apparente de la Lune. 


Hauteur apparente du centre de la Lune. ..... 58% 30° 30 
Hauteur du pole méridional.............. 20. 41. © 


Angle du vertical de ia Lune avec le cercle de décli- 
naifon , ou angle parallactique réduit à l'apparent. 83. 18. 44| 83421 53" 


Pariliderdeiautenret mette Lie 28. 14 

Eauteurivraie de laLnnerss JR en ten:272." 58. 58. 44 

Parallaxe de déclinaifon.. . .............. — 3.16 3. 16 
Déclinaifon apparente. ....,........... 20-210 211M20.21. 19 
Afcenfon droite vraie de Ja Lune. ........ 2262155 0801l227) 6. 25 
Parallaxe d’afcenfion droite, ............. + 29. 54 29. $$ 
Afcenfion droite apparente de la Lune... ..... 227. 25. 50 |227. 36. 20 
Afcenfion droite apparente d’Antarés. . ...,., 243. 32. 45 1243. 32. 45 
Différence des afcenfons droites. . . ..,. Dé DOME rs. 56. 25 


Déclinaifon apparente d’Antarés À. ........ ISA 
Diftance de l'étoile à la Lune fuivant le calcul. .. 15. 48. 26 | 15. 38. 35 
Diftance obfervée du bord de la Lune à 
Antarès + 15° 3” demi - diamètre...) = + 15. 41. 18| 15.41. 18 
+ 15" réfraction... , .. 


Différence Ia Lune moins avancée, ...,...... © 7. 8] + 2.43 


Say. étrang, Tome IV. SRE 


410 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

On voit par-là que lorfqu’il étoit 19" 8° 30" à Paris, il 

s'en falloit 7° 8" de mouvement horaire en afcenfion droite 

ue la Lune ne füt auffi près de l'étoile qu'on l'a obfervé, & 
qu'à 19h28" 30" la Lune étoit de 2° 43" plus près de l'étoile 
qu'on ne l'a trouvé. 

Pour avoir le temps proportionnel à ces différences, fr 
on fait; comme 9’ 51” de mouvement eft à 20’ de temps, 
ainfi 7° 8"; on aura 14° 9” de temps, lefquelles étant ajoûtées 
à 21 23° 20", première différence des méridiens fuppofée, 
on aura 2h 37° 20" pour la vraie différence des méridiens, 
ou 39% 22° 1 5" de longitude occidentale; d’où il fuit que 
jétois 34 32" 1 5" plus vers l'occident que je ne comptois 
être, ce que je vérifiai deux jours après. 

Comme j'avois deflein de relâcher à Rio -Janeiro, je fis 
route pour atterrer au cap Frio, & j'en eus connoiffance le 
23 Janvier; ce cap eft fitué par 224 54’ de latitude méri- 
dionale fuivant la hauteur méridienne du Soleil que j'obfervai 
le même jour, il eft éloigné de vingt lieues marines à f'eft 
de Rio-Janeiro, ou d’un degré cinq minutes plus oriental : 
or la longitude de cette ville étant exactement connue de 
454 5’ à l'occident de Paris, celle du cap Frio eft de 444. 

Ayant eftimé, avec autant de précifion qu’on le peut faire 
à la mer, le chemin que j'avois fait à l’oueft depuis le moment 
de l’obfervation du 21 jufqu'à celui où j'étois fous le méri- 
dien de ce cap, j'ai trouvé que ce même chemin répondoit 
fur le parallèle moyen à 44 23° de différence de longitude, 
lefquels étant ajoûtés à 394 22° 1 5” que j'avois obfervés, font 
43%45" 15", de forte que fuivant mon obfervation mon 
point ne différoit à cet atterrage que d'environ cinq lieues, 
tandis que fuivant l'eftime de la route du vaifleau, j'aurois 
été encore à foixante-quinze lieues de ce cap. 


Le rapport de ces obfervations, ou pour mieux dire, lappro-. 


ximation qu’elies donnoient pour les longitudes, nous engagea, 


M. de la Caille & moi, d'en perfectionner les élémens & la : 


pratique; nous profitames du féjour que nous fimes à Rio- 
Janeiro, où j'arrivai le 26 Janvier, pour vérifier de nouveau 


me 


DES SICHIENCES 411 
la graduation de nos oétans. Par plufieurs diftances obfervées 
d'une étoile à une autre, voici les erreurs que je remarquai 
dans les différens arcs du mien auxquelles j'ai eu égard dans 
les obfervations que j'ai faites avec cet inftrument. 


NOMS DiISTANCE| ERREUR 


: Dis TANCE 
DES ÉTOILES Fe VRAIE de la 
dont la diftance a été obfervée. | ??/ETVée. _& apparente. |GRADUATION. 
: D. M. DALMALS M. S 
De Caftor à Pollux. . ...| 4. 28.| 4. 30. 40. | — 2. 40. 
De 8 d'Orion à y d'Orion.| 14. 46. | 14. 47. 20. | — 2.20. 
De Procion à Pollux. ...| 22. 44. | 22. 46. 20. | — 2.20. 


De Sirius à Procion. ....| 25. 41. | 25. 39. 40. | + 1.20. 
De Procion à Caftor. ...| 26. 35. | 26. 35. 30. | — o. 30. 
De Procion à Regulus. . .| 37. 21. | 37. 24.0. | — 3. o. 
De Sirius à Aldebaran. . .| 45. 57. | 46. o. 50. | — 3. 50. 
De Sirius à Capella. . . ..| 65. 45. | 65. 47. 10. | — 2. ro. 


Diffances obfervées à Rio - Janeiro. 


Le 4 Février à 7° 52’ 34" du foir à la pendule, j'ai 
trouvé la diftance de B du Taureau (autrement nommée /a 
corne boréale) au bord éclairé de la Lune, qui étoit le plus 
éloigné de l'étoile, de 124 28’. 

La pendule retardoit à midi de 2° 52", & en 24 heures 
de 1° 16". 

Donc l'heure vraie de l'obfervation. .. 7" 55" $0"| 7% 55° 50" 
Différence des Méridiens fuppofée. .. 2. 58. 5o.| 3. 18. 50. 
Inftans fuppofés à Paris. . ....... 10. 54. 40.|11. 14. 40. 


Lieu du Soleil pour les inftans fuppofés. . . rof 154 53 rs"l1of 151 54" 6" 


Lieu de la Lune réduit au lieu réel, fuivant 


apacusde M Haley RE". cie 2e 27. 20 ess 37e 
Latitude de la Lune boréale... .:...... 108 x 6. 1e 9: 17 
Parallaxe horizontale. . ..,......., en o. 58. 20. 
Demi - diamètre apparent. .....,,,.. 0. 16. 19. 
Tree D 


FIF ÿ 


.412 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Heure vraie de l'obfervation réduite en degrés. . . 118% 57° 30"|1184 57° 30° 
Afcenfon droite du Soleil... ............ 318. 21. 18 1318. 22. 8. 
Afcenfon droite du milieu du Ciel....,..... 77. 18. 48.) 77. 19. 38. 
Afcenfon droite de la Lune. ....,.:...... 65.26. al 65. 39. 8, 
Diflance de la Lune au méridien vers l’occident. .. 11. 51. 54. ir. 40. 30. 
Déclinaifon de la Lune. ............... 22./42- 126.022. 4530; 
Parallaxe en déclinaifon. ...,........... 41. 29. 41. 32e 
Déclinaifon apparente de la Lune. ......... 23.23. 55. 23 27+ 2 
Déclinaifon apparente de B du Taureau. . ..... 13. 10. 14.| 13, 10. 14 
Parallaxe d’afcenfion droite de la Lune. . ..... — 12.13. 121027 
Afcenfon droite apparente de la Lune... ..... 65. 14. 41.| 65. 27. 6. 
Afcenfion droite apparente de 8 du Taureau. . ... 77. 39. 2.| 77. 39. 2. 
Différence des afcenfons droites. . ......... 12.24. 21.| 12.11. 56. 


Diflance de l'étoile au centre de Ia Lune, fuivant 


Iccalcul CRIE tite Ps ENONCE O NON OMALE dE LE a A ee e 
D'iftance obfervée de l'étoile au bord de 

Ta Lune. 42 EEE RENE 124 28 
Demi-diamètre de la Lune — 16’ He è COTE SRE OS 
Réfraétion + ....... MAMIE TE eu 


Différence. La Lune — & + avancée. . ... — 1. 14. + 10, 50. 


‘ 


Si 12° 4": r200%:: 11 14°“l2h al, première 
différence des Méridiens fuppofée . . ...... D AIHICE 


Temps proportionnel à fa iHiCrENCE ele ee cave 2 32 


Vraie différence des Méridiens fur l’obfervation. .. 3" o.| 53. 


Le s Février à 7h 53" 52" à la pendule, j'ai trouvé la 
diflance d'A/debaran au bord éclairé de la Lune qui en étoit 
le plus prochain de 1 54 58" 30". 

Je pris enfuite plufieurs hauteurs du bord fupérieur de fa 
Lune pour avoir fa hauteur au moment de loblervation, & 
plufieurs hauteurs d' Aldebaran. 


Ces hauteurs ont été Rene avec loftan de 22 pouces 
de rayon garni de deux luneties à deux verres convexes, 
dont j'ai donné ci-devant la defcription. 


D'EISÉ CARE NT GES 413 
« Hauteurs du bord fupérieur de la Lune ; 

Æ (3 la lunette M en Hauteurs d'Aldebaran. 
AARIADMLO Ne se 29 S 042 | A7 Pr OMR O tetes CFO 
7e 3le IO.ess 89. 14. 50.| 7. 38. 10..., 50 3. 

7 33: 10e 89. 18. 30.] 7. 40. 10....49. 56. 


À la lunette du rayon. | 7e. 42e 10. + : 49° 48: 3Q 
ANS 62e + 430208 DZ» NS ARS As vista 40e RD 0e 
BE. ain re 40-027: À 8" CAO eee AU-IZ OR 

> Halle OS EN M 2 © 38. Les hauteurs ci-deffus ayant été prifes 


x avec la lunette du rayon, il en faut ôter 
Les premières hauteurs de la Luneont| ,, Shot É 5 

. . 2 ]. 
été prifes avec la lunette perpendiculaire, |? 2? PORE OREer l'erreur de l'inftru- 


il en faut ôter 464 11° 18” pour l'angle 
de cette lunette. Il faut également ôter 
2! 20” des hauteurs prifes avec la lunette 
du rayon. 


J'ai trouvé par la méthode rapportée ci - devant à l'obfervation du 
21 Janvier, que la hauteur apparente du bord fupérieur de la Lune 
au moment de celle-ci, étoit de...,......... 43426 20” 
— 2° 20" Erreur de l'inflrument. ... 

— 16. 3. Demi-diamétre. .......8 — — ... TO 2iSe 
— 1. 2, Réfration. ...., 0 0 
Hauteur apparente du centre. ...,. 43. 6. 55. 

Diftance a0/zEBithe 0-11 0 0 ee ect 40e 153209 
———— 


On a également ôté 2° 20” de la déviation de l'inftrument 
dans la hauteur d’A/debaran , & 40" pour l'effet de la réfrac- 
tion, de forte que la hauteur de l'étoile au moment de l’obfer- 
vation de la diflance étoit de 464 $ 3° 20". 

À l'égard de l'heure, la pendule retardoit le 5 à midi de 41188 
Et en 24 heures, de 1° 18”; donc en 7 53° 52", on 
DR tele lie lee olete nee ete (NN 2 ia lab Nb 273 le 26. 


SEE D 
Eleure a a)pendule CB Drap NS 2e 


Heure vraie de l’obfervation. . ...... 7. 58. 26. 


J'ai calculé enfuite à quelle heure à Paris la Lune étoit à la 
diftuice obfervée de l'étoile, par les deux fuppofitions fuivantes, 
Heure vraie de l’obfervation. ....... 74 58 26"| 74 58’ 26" 
Différence des Méridiens fuppofée. . .. 3. o. o.| 3.20. o. 
Laltans fuppofés à Paris, .,,.,,.,., 10. 58. 26.|11. 18. 26, 


Fifi 


414 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Lieu du Soleil pour les inftans. ......... 10f 164 54’ 32”|10f 164 55° 22° 


Lieu de la Lune réduit au lieu réel, fuivant 
l'obfervation correfpondante de M.Halley. 2.21. 22. 13 | 2.21. 33. 45$ 


Latitude de la Lune auftrale. ......... “e Oo 5. 52 o 6.54 
Parallaxe horizontale de la Lune. ........ o 58. II 
Demi - diamètre réduit à la hauteur. . ..... Oo 16.11 ONTIGANTET 
Heure vraie réduite en degrés. .......... 110 09 0108 0 MINT) ES 68 30) 
Afcenfon droite du Soleil. ............ 319.22.%° 6, [l319.122-#55 
Afcenfion droite du milieu du Ciel........ 78. 58. 36 78. 59. 25 
Afcenfion droite de la Lune. . .......... 80. 36. 42+ 80. 49. 182 
Diftance de la Lune au Méridien avant le 

pañlage. . . ..................... 1. 38. 62 1. 49e $3% 
Hauteur apparente du centre de la Lune.... 43. 6. 55 
Hauteur du pole méridional. . .......... 22. #20 
Vraie parallaxe de hauteur. ............. 0. 42. 28+ 
Angle du vertical avec le cercle de déclinaifon. 2. 5. 423 2. 20. 40 
Déclinaifon de la Lune B ...... DENT OL EMI 2 2921005 
Parallaxe en déclinaifon. .............. + 42.2 + 42. 26 
Déclinaifon apparente. . ............. 23e 47. 59 723. 47: 40 
Déclinaifon apparente d'Aldebaran. . ...... 5 AS 010 
Parallaxe d’afcenfion droite de la Lune. . ... + I. 25+ + 1. 35 
Afcenfion droîte apparente de la Lune. ..... So 80. 50. 54 
Afcenfion droite apparente d’Aldebaran..... 65. 25. o 6152526100 
Différence des afcenfons droites. . ....... DS NTO FSU 2S SA 
Diflance des centres fuivant le calcul. ..... POI NN 16, 29. 21 
Diflance obfervée. ............. 154 58" 30” 
+ 16! 11° Demi-diamètre. . . . 
+ 2.20 Erreur de ni + o 18. 51 16. 17. 21 16. 17. 21 
+ o 20 Effet dela réfraétion. 
Donc la Lune plus avancée par l’obfervation, 

HE NII Ne sie ee alelsistele cie sIRieioieie + eIME + 12. 0 


Comme la première fuppofition ne differe que de trois 
minutes de mouvement de l'obfervation qui valent cinq mi- 
nutes de temps, on aura donc 3" o° 5" pour la différence 
des méridiens qui en provient. 


Le 10 Février, à 10" 40° 56” de temps vrai, j'ai obfervé 


LEE. 


DES SCIENCES. ATS$ 
la diflance de l'étoile nommée & m, ou l'Épi de la Vierge, 
au bord de la Lune le plus prochain, & j'ai trouvé cette 
diftince de 494 47°. 

Comme je n'ai point trouvé d’obfervation correfpondante 
dans les Tables de M. Halley pour en déduire le lieu réel de 
la Lune, je me fuis fervi des Tables des Inflitutions Aftro- 
nomiques pour le calcul fuivant. 


Heure vraie de l’obfervation. . ... SANTE 1040/8506] 10 "4066 
Différence des méridiens fuppofée. .....,. . 3. oO. 53. Di 20H5e 
Inflans fuppofés à Paris. .............. 13- 41. 49. 14. Po 
Lieu du Soleil pour les inftans. ......... 10 22% 4 36" 10H22 05278 
Lieu de la Lune , un degré. ....... sen Sat toEun2: 281151, 0. 12.134 
Latitude de la Lune auftrale, ..,......... 4 AS 17 4. 45. 36 
Parallaxe horizontale . . ........ AFRIES DS 43 

Demi diamètre réduit à la hauteur. ...... ©. 15: 34 

Parallaxe de latitude. .....,.. Me aiets +. — 0.33. 40 | — o.33.4r 
Latitude apparente, . . se... AT. 33 4. Ile 55 
Latitude de l'Épi de la Vierge, apparente. . . DEAN 

Parallaxe de longitude. ............7... + 0.11. 36| + o.11.47 
Longitude apparente de la Lune. ........ SONT A ANLNS 0.124. 2IT 
Longitude apparente de l’Épi de la Vierge. 6.20.22. 6| 6. 20.22. 6 
Différence des longitudes. ....,......,.. SO Dr 22 49. 57. 45 
Diftance des centres fuivant le calcul. . ... so. 6.13 49. 55° 38 
Diftance obfervée. . ........... 49947 o" 

Erreur de l'inftrument + .. 2° 35” 

Dermi-diamètre de la Lune + 15. : (= 19. $0 HART A à Don, 62 50 
Effet de la réfraétion + ... 1.41 à 


Différence, lz Lune plus avancée par l'ob- 
RÉRYATIONS ee eelliele lelelalle te Lele Peu ete + 0 37'| + AE > 


D'où il fuit que la différence des Méridiens fuppofée ef 
trop grande d'une quantiié de temps proportionnelle qu'on 
trouve être d’une minute dix fecondes pour les trente -fept 
fecondes de la première fuppofition. La vraie différence des 
Méridiens eft donc, fuivant cette obfervation, de 2P 59° 43°. 


416 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Réfuliat des diflances obfervées à Rio - Janeiro. 


Le 4 Février, par Ia diftance de B du Taureau à Ia Lune, la différence 
des: Méridiens a été trouvée de . :...........:. LE 


Le 5; Février, par la diftance de la Lune à A/debaran. .. 3. 0. 5$ 
Le ro Février, par la diftance de la Lune à & nm. .... 2. 59. 43 


Différence moyenne. .............. 30. "TAS 


M. de la Caille ayant obfervé en même-temps plufieurs 
autres diflances, fes obfervations comparées aux miennes 
donnent pour réfultat moyen 3h" ‘1 pour la différence des 
Méridiens de Paris à Rio-Janeiro, qui répondent à 454 1 5° 
de longitude occidentale. M. Godin a obfervé par deux im- 
merfions du premier Satellite de Jupiter, 3" o' 20",ou 454 s’. 


On voit par les obfervations que je viens de rapporter, 
que les diflances de la Lune aux étoiles peuvent être employées 
avec fuccès en mer pour connoître les erreurs de l’eftime, & 
qu'on peut même s'en fervir à terre au défaut des autres moyens 
pour déterminer la fituation en longitude, ou la différence 
des Méridiens des lieux , avec plus d'exactitude que celle qui 
provient des routes des vaifleaux, ou de l'eftime du chemin 
des Voyageurs. 

Je fis voile de Rio-Janeiro le 2$ Février pour me rendre 


au cap de Bonne-efpérance, & j'y arrivai le 19 Avril après 


avoir été retardé aux environs par les vents contraires & par 
les courans, qui me portèrent vers le nord, malgré fes pré- 
cautions que J'avois prifes pour en prévenir les effets. 

Je defcendis à terre le lendemain avec M. l'abbé de fa 
Caille, qui devoit y réfider pour y faire les obfervations qui 
faifoient l'objet de fa miflion; je profitai du peu de féjour 
que j'y fis avec lui pour vérifier de nouveau l’oétan-dont j'ai 
ci-deflus donné la defcription, & après plufieurs obfervations 
comparées, nous trouvames que la lunette du rayon haufloit 
de 2° 20", & que la lunette perpendiculaire étoit horizontale 
lorfque le cheveu d'aplomb battoit fur 464 1 2°. 

Comme j'avois remarqué en atterrant au cap que la latitude 

de 


Dj E} S,:/ SICURENE CE se 417 
de cet endroit étoit très-différente de celle que les PP. Jéluites 
difent y avoir oblervée en 1685, & qu'on avoit eflimée 
jufqu'ici comme exacte, mon premier foin fut de m'en aflurer 
par les obfervations fuivantes. 


Le 28 Avril 1751. j'ai obfervé à la lunctte perpendiculaire fa hauteur méridienne 


Ad DionsidentL rie: eat CRE Li Noa Et 864 20° 30" 

Angle de la funette à déduire. ....... CITE AGE 2 SOË 
Réfraétion — . .... té ais Set 1. 10 Î46. roi 
Hauteur vraie. . . 4... . ALICE GE. ERTTET- 40. 7.020: 

Dédlinaifon feptentrionale le 1.%° Janvier. . ...... ESS 2e" 
— 6" préceffion, — 2" aberration, — 9" nutation = — 17 27: FC 
Hauteur de l'Équateur. ARE D MEN RSC. 4025 
Tantuderdulien eur Re r EL OnRe Eee 55.025 

Le 29 Avril, hauteur méridienne du bord inférieur du Soleil à 
Haiménierlunetterst M EN ELIEEE LE 88. 8. 30 
Anbleldela unten rue Tetra fe IA ee ah Slate 46.012, NO 
4I. 56. 30 

— 15° 56” Demi- diamètre, réfraction & parallaxe. . ....,., 
= — 58 sa Weiss sd 0 ss... ais ais/eln AT TE — 1 54 
Hauteur vraie du centre. ........ sesssesetisse 4e 39. 36 
Déclinaifon feptentrionale. ................... 14. 25. 18 
Hauteur de l'Équateur RATE ERRRE MIO IAS DORE 4054 
atimde tee RO VO Mer OD rene nier A2 LS SE : 6 

Le même jour, hauteur méridienne de l'Épi de la Vicrge à la 
lunette) (URTAVONS Nasiele ab spi etes Ce cdi ire ltée 65. 58. 40 
Erreur de Îa lunette — 2° 20", réfraction — 20"—......... Oo. 2. 40 
Hauteur vraie de l'étoile. . ..,....,.... Hobbs sen 0 5. 150. © 

Déclinaifon le 1. Janvier 1751, M........... 9% s1° 4" 
+ 6” préceffion, + 7+aberration, — 7: nut. —.... o. 6 È ARR 
Hauteur de l'Équateur. sent deteste so. 56. 4. di 


ETAT CAS PSE IR SORA RE 33- 55+ 10 


Ayant pris un terme moyen entre ces trois obfervations, 
j'en ai conclu Îa latitude de la ville du Cap, de 3 34 5 5’ 17". 

M. de la Caille, par un grand nombre d'obfervations, 
Ja déterminée de deux fecondes de moins, ce qui differe 


Say, érrang. Tome 1. - Geg 


418 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À I'ACADÉMIE 
confidérablement de celle des PP. Jéfüites, qui prétendent 
Vavoir trouvée de 344 1 5’, c'eft-à-dire, près de vingt minutes 
de plus, erreur très-importante fur un pareil objet, & quon 
ne foupçonne pas ordinairement dans des obfervations aftro- 
nomiques. 

La proximité de Ja faifon pendant laquelle le féjour de Ja 
rade du Cap eft dangereux pour les vaifleaux, m'obligea d'a- 
bréger celui que je comptois y faire pour repoler mon équi- 
page, de forte que j'en fortis le 4 Mai pour continuer ma 
traverfée, & me rendre aux ifles de France & de Bourbon. 

Quoique le vrai cap de Bonne-efpérance ne foit éloigné 
que d'environ dix lieues de cette rade, je ne pus cependant 
le doubler que le 11, à caufe des vents du fud & de l'eft 
que je trouvai aux environs ; ce cap termine du côté du fud 
la chaine des montagnes qui commencent & s'élèvent au- 
deflus de fa ville du Cap, & dont la montagne de la Table 
fait partie, il borne du côté de l'oueft un grand enfoncement 
qu'on appelle /a fauffe baye , c'eit celui que découvrit Bar- 
thélemi Diaz en 1487 ; il eft prefque fous le Méridien de 
ha ville du Cap, & de vingt-neuf minutes plus méridional, 
fuivant les remarques de M. l'abbé de fa Caille. 

Convaincu de l'utilité des diftances de la Lune aux étoiles 
pour rectifier l'eftime de fa longitude, je rcfolus d'en faire 
ufage dans cette traverfée ; mais, malgré mon envie & mon 
attention, les occafions n’en furent pas auffi fréquentes que 
je le defirois. La difficulté ne confifle pas feulement à trouver 
une étoile de la première ou de la feconde grandeur dans le 
parallèle de la Lune; les temps nébuleux, qui font fréquens 
en ces parages, & l'agitation de la mer, ne permettent pas 
toûjours de profiter des circonflances favorables & néceflaires 
à ces fortes d’obfervations: ce ne fut que le 6 de Juin que 
jen trouvai linftant. 

A 6h45" 45" du foir, à la montre, j'obfervai la diftance 
d'Antarès au bord éclairé de la Lune, qui en étoit le plus 
éloigné de 174 33". Je m'eflimois pour lors par 27% 57° 
de latitude méridionale, fuivant la hauteur du midi précédent, 


Rs 


D'E S S CI'E‘NGCGE 5, 419 
& fous un méridien de 5 54 8 à lorient de Paris, fuivant 
l'eftine de la longitude. 

Je pris avant & après l'obfervation plufieurs hauteurs de la 
Lune, pour avoir celle du moment de la diftance oblervée, 
& pour vérifier l'heure, les hauteurs d’Aurarés & d'Arclurus 
ci - après. 

Haureurs du bord frpérieur de la Lune, auteurs d'Antarès, 

AO TND NAT AA 0 2 00% 0 Les à age Tel 
RME QT ET + OMAN ON ENZON SO 
Sd 2 LR Le 310 et ie ps 

58 BARON OS ste de EL 
LE OS CHE OR EP ROTe) 
D'où j'ai conclu pour Ja hauteur du bord fupérieur de la Lune au 


GS A 2 OR AE A Se 


momentide loblervation. . 221. 0.054. ue 0e ASE SOUL O0 

— 14° 55" demi-diamètre, — 4° pour l’élevation 
au deffus de l'horizon , — 1° 3" réfraction. . :. — — 19. 58 
Donc hauteur vraie du centre... ... SC UE CEE 


Ayant calculé les hauteurs d’ Antares & d'Arélurus pour 
avoir l'heure, j'ai trouvé que la montre retardoit de 1° 20"; 
ainfi l'heure vraie de l'obfervation eft à 6" 47’ 5”. 

Pour trouver à quelle heure à Paris.la Lune étoit à fa 
diftance obfervée, j'ai fait Le calcul pour les deux fuppofitions 
fuivantes. 


Heure vraïe de l'obfervation.:.... . 5: ..,161,47 5° das" 

Différence des Méridiens fuppofée. ....... 3. 37. $ 7e Se 
Inftans fuppofés à Paris... ..... 3. ro. o 3. 30. o 

Lieu du Soleil pour les inftans. , . . .... ZOMENERRENPMIRE Sd 2 52. 


Lieu de la Lune réduit au lieu réel, fuivant 
102015 de MATE EE MA re, MrBao mel 8. 51. 6 


Latitude de la Lune auftrale. . ....... 2 pates 574 2. NO 

Parallaxe horizontale. . .....,....... 53- 36 

Demi-diamètre apparent. ....,....., De 

Heure vraie réduite en degrés. ,...... 101. 46. 15 TOI. 46. 15 

Afcenfion droite du Soleil, ,...,.... 74 9: 55 HÉROS 
Gesi 


420 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Afcenfion droite du milieu du Cicl....:..:... 175456 10"|175447 3! 
Afcenfon droite de la Lune vraie. . ... tetes IS 22 SE 


LE 131229 « 45-54 

Diftance de fa Lune au méridien vers lorient. . .... 49. 39. 3| 49.48.50 
Hauteur apparente. du centre obfervée. . .... HAMSTER 2 M2) 
Hauteur du poletauftral. 1.4 MMM NN. 027 57. 
Vraie parallaxe de hauteur. .........:...... 38.48 
Angle du vertical avec le cercle de déclinaifon de 

la Lune réduit à l'apparent. .......... halte HO D NT 27 CEE NZ 
Déclinaifon vraie de la Lune 4............. 19::28.33 0901815 
Parallaxe Venfdéclinadon "tr CET re + — 13.22 — 13.27 
Déclinaifon apparente de la Lune......... LE IN 9-hr san) ne 
Déclinaifon apparente d'Anturés A..... Ale Be 21.5 5122 
Parallaxe d’afcenfion droite de la Lune........ + 38.25 + 38.41 
Afcenfion droite apparente de la Lune. ........ 226.13.48| 226.24.3$ 
Afcenfion droite apparente d’Antarès. ......... 243. 33: 40| 243. 33. 40 
Différence des afcenfons droites. .........,... 17. 19. 52 171008 
Dillance des centres fuivant le calcul. . . . RON PATENT EAN 
Diflance obfErpée du bord éloigné... 17433 o A M Re dc ee 
Demi - diamètre apparent — 14.55 

Différence... .. ..... © 0. 3 0.10. 11 


Delà il fuit qu'à nl 10" à Paris, la Lune étoit feulement 
de 3 fecondes plus près de l'Étoile qu'on ne l'a obfervé ; 
lefquelles 3 fecondes répondent à 6 fecondes de temps; & 
comme à Lune, par fon Roues s'approchoit de l'Étoile, 
on doit conciurre qu'il étoit af 95 à Paris, à Pinftans 
de l’obfervation, tandis que Je com Pie 6h 47. 5": jétois 
donc alors fous un méridien de 3h27, te - plus aient 
ou par 544 17° 45" de longitude, c'eft-à-dire 50° 1 5” plus 
à l'occident que je wellimois être. 

Le 9 Juin au matin, ayant réglé ma montre par deux 
hauteurs de la Claire de l'Aigle, j'obler vai les phales fuivantes 
de l'éclipfe de Lune. 

À 3"49°2 de temps vrai, Commencement de l'Éclipfe du côté de 
Grimaldus. 
30155 = Grimuidus dans l'ombre. 


DES ‘SYC'IMENN.C E & 421 
À 4ï 3 o"Képler entre dans l'ombre, 
4. 24. 20 Immerfion de Copernic. 
4.49 © Menelaüs dans l'ombre. 


Les nuages me cachèrent enfuite la Lune, de forte que 
je ne pus obferver aucune des auues phafes. 

Le commencement de cette écliple a dû arriver à Paris, 
Suivant Ja Connoiffance des Temps, le 9 Avril. .... o* 8° 6” 
Suivant les Éphémérides de M. de la Caille. ....... o. 8.49 
Suivant le calcul que j'en avois fait. .....,...... o.10.1$ % 


Ayant pris un terme moyen, j'ai trouvé. ..,..... ©. 9. 32 
Je lailob{ér véto delete nt 2 49:30 


La différence du méridien où j'étois alors à cclui de 

FObfervatoire 1oyai, répond à 55% 6° 45" à | 3- 40.27 

longitude. 

J'eftimois étre alors par 564 1”, c'eft-à-dire environ $ 5 
plus à lorient. 

Le réfultat de cette obfervation fe rapporte, à très -peu 
de chofe près, à celui de la diftance de la Lune à Arares, 
que j'avois obfervée le 6. 

Le 18 Juin, j'eus connoiffance de lIfle de France, & 
Jy atterrai le même jour. Ayant comparé ma longitude, efti- 
mée à celle qui provenoit des deux obfervations que je viens 
de rapporier , j'ai trouvé que ces dernières ne différoient que 
de quatre ou cinq lieues de la vraie longitude du point de 
Jattérage, au lieu que, fuivant l'eflime, j'en aurois éié encore 
éloigné de vinot-trois lieues. J'arrivai nf an Port du nord- 
cuit de cette Île, autrement nommé le Port-Louis le 19 
Juin après midi. 

Comme je m'étois propolé, fuivant Îes intentions de l Aca- 
démie, de faire les oblervations néceffaires pour en déterminer 
exactement la latitude & la longitude, je comniuniquai mon 

“deflein à M. David, Gouverneur général, qui voulut bien: 
y contribuer, en me donnant une mailon commode & toutes 
les facilités dont j'avois befoin: à la vérité je ne pouvois 
guère en avoir le temps qu'après mon retour de lIfle de: 

Gug ii 


422 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Bourbon, où je devois remettre la cargaifon du vaifleau que 
je commandois; mais pour ne rien négliger d'utile, j'employai 
le peu de jours que j'y reftai aux oblervations fuivaes, 


Le 25 Juin, ayant tracé une ligne méridienne par quatre points 
d'ombre, pris avant & après midi, d’un file de trois pieds, j'ai 
placé l'octan à lunette dans le plan du méridien, & j'ai obfervé la 
hauteur méridienne d’'Ar&urus au fil horizontal de la lunette du 


d d 4 “ 
Nino co So Let D: Loi 0 Di Pair Je 49434 44 
Erreur de l'inftrument — 2° 20", réfraction — 56" =... SAUI 
F° Hauteur vraies 10 2000 49. 20. 44 
Diflance au zénith. ...... Leaf 40. 39. 16 
Déclinaifon vraie le 1° Janvier 1750...... 204 29° 59/10 20. 29. 34 
— 25" préceff. + 6 + aberr. — 6 nutat. = — 25 + 

latituderdur ent PREMAEREELant ,20. 9.42 

Le 27, par une feconde obfervation de la hauteur mé- 
ridienne d’Arélurus , la latitude auroit été de ..... 2OM/D (82 


Le 28 , hauteur méridienne de & de la Lyre à la lunette 
perpendiculaire. ................... AL EE à 77- 29-30 


Angle de la lunette — 461 #2”, réfraét. — 1° 50"—= —. 46. 13. 50 


Hauteur vraie. .4 .. 23.5, : 3141540 


Difflance aul zénith: 2220 CCR TRre 53.44.20 
Déclinaïfon le 1.7 Janvier 1750...,..,.... 384 34 24" 38. 34: 32 
+ 3" + préceff. + 4” nutat. + % aberr, = — 8 2 
Tatithde dhAlieu CPE Cet 204 9. 48 
Le 1.‘ Juillet au foir, hauteur méridienne de l'Épi de 
Ja! Vierge..." oc ns iciete rade or 70.43 10 
Erreur de la lunette — 2° 20” réfraét. — 12° = —.., PRIE 
Fauteurivraie. 2212000126 79. 40, 28 
Diffancetanizénithe see CV 10. T9. 32 
Déclinaifon le 1." Janvier 1750. M. ........ 9. 49s 372 1 
LA A LR "4 72 59; 5 
28”: préceff. + 2”+ aberr. + 7" nutat. = + 38 
Tatitudeidu line; CHERE ci: 20. 9.47 


Hauteur méridienne de B de la Lyre à la lunette per- 
PERLE CIE Ce -eL PR otre 82. 58. o 


"1 


Angle de la lunetie — 46% 1 2° réfract. — 1° 10"—=—.. 46. 13. 10 


Hauteur vraie. ..,........ 36. 44:50 


DES SCIENCES. 423 


Déclinaifon Je 1. Janvier 1750. ....... .,. 3345" nl S371500r0 * 
+ 5” préceff, + 1 + aberr. + 44 nutat, = +, LAS DS Te 
Ltiiuderduilien eme) CRC 
La latitude moyenne qui réfulte des cinq obfervations 
PICÉRTENTE RMC EE ec leite cle lee delere ee 20. 9. 47 
a, 
Diflance de la Lune à l'Epi de la Vierge. 
Le 2 Juillet a 10" 34° 30" à la pendule, j'ai obfervé Ia diftance 
de l'Epi de la Vierge au bord éclairé de la Lune, qui en étoit le 
Husprochameder tee tee at A 1420090" 
À ro 47° 50", la même diftance étoit de....... 14.26. 
D'où on a conclu la diflance moyenne de........ 14: 23. 
7, nm $ Demi-diamètre apparent + 14 58” d 
h 
SCIE Po de l'Inftrument + 1. 20 È erxS 
. 14. 39.18 
Éfettdedatréfaction st hé lan AELURE re ES + 15 
Diflance du centre de la Lune à l'Épi de la Vierge... T4. 39. 33 
Après l’obfervation, j'ai pris les hauteurs fuivantes de la 
Claire de là Couronne pour avoir l'heure vraie, 
Hauteurs 
LITERIE E MENT HeB CRE ON corrigées de l'erreur de l'inf- 
DRNTURSÉEN Er 27 A 0030 NT URI 
Suivant ces hauteurs, la pendule retardoit de 1 $’ 36"; 
donc l'heure vraie de Tobfervation, 10" 56° 46", pour 
lequel temps j'ai cherché la diflance de la Lune à l'Épi de la 
Vierge à Paris, en fuppofant la différence des méfidiens de 
3° 40' ou de 3h 20’. 
Heure vraie de l'obfervation.. ..,........ 10 5646%| ro' 56° 46° 
Différence des Méridiens fuppofée.. . ..... 3214.0% 3. 20. 
Pnftans fuppofés à Paris... 12, ..... x 7. 16. 46. 7e N3 6, 2408 
- | ne) 
Lieu du Solcil.....…, Ste mise CHER MRE DEE RCE TIME TETE PME ES 


Licu de la Lune réduit au lieu réel, fuivant 
J'obfervation correfpondante de M, Hailcy 


du 9 Jun 1733.24. 4... nes Tele SE Sel 7e Se 497 & 


424 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Latitude de la Lune A4........ PA ont à MAP ad 8,5" 3 719" 
Parallaxe horizontale... ..,.....,..... Er SAR AR 
Demi-diamétre réduit....,..,.....:..... 14. 58 
Heure vraic réduite en degrés. NC OU MIOUR 164. 11. 30 [164 11. 30 
Afcenfon droite du Soleil................ 101. 18. 37 |[101. 19. 29 
Afcenfion droite du milieu du Ciel........... 265. 30. 7 |265. 30. 59 
Afcenfion droite de 141 Lune. "CE NEME EN NN. 212. 11. 37 |212. 21. 34 
Diflance de la Lune au Méridien après le pañlige.. 53. 18. 30 | 53. 9.2 
Hauteur apparente du centre de la Lune. ...... 38. 48. 38 | 38. 57. 38 
Hauteur du pole MÉLAIONA TE tte le Bhel a ere 20-90 4x 
Angle du vertical, avec le cercle de déclinaifon 

réduit à l'apparent.......-............ 77) 7e 19) | 77 101 
Vraie parallaxe de hauteur. ....... ....... 41 55 41. 50 
Déclinaifon de la Lune vraie 4A............ TON UTOMEr GS 2-5 
Parallaxe en déclinaïfon..,............... PT Von Eee otre 
Déclinaifon apparente de la Lune. ressesssses 116-1302 OAIMET C3 3-01 
Déclinaifon apparente de l'étoile. ....... AS DD EE 
Parallaxe d’afcenfion droite de la Lune. ....... — 42. 37 2. 33 
Afcenfon droite apparente................ ZT: 29 VOIS TT, SONT 
Afcenfion droite apparente de l'Épi de la Vierge.. 198. 1.47 |198. 1. 47 
Différence des afcenfions droites ............ H9N 27030 077 
Diftance des centres fuivant le calcul. ........ 14. 40. 59 | 14. So. 44 
Diftance obfervée. . ... or Elo Ho tns 14. 39. 33 | 14. 39.133 

Différence, la Lune plus près par l'obfervation. . : + 1:26 | + 11.11 


Il fuit de ce calcul, qu'à chacun des iniftans fuppofés à Paris, 


la Lune étoit plus éloignée de l'étoile qu'on ne l'a obfervé: 
or comme elle s'en écartoit de 9° 45” en 20’ de temps, il 
étoit donc moins tard à Paris de 2° 58" au premier inflant 
fuppofé, & la différence des méridiens qui convient à cette 
ob'ervation eft par conféquent de 31 42° $ 8", qui répondent 
à 55% 44 30" de longitude. 

Le 4 Juillet, j’obfervai encore Ia diftance de Ja même étoile à 
ro" 52° 43" de temps vrai, elle étoit diflante du bord inférieur de la 
Lune, qui en étoit le plus prochain, de. ........ 38016 ero 
+ 3° erreur de l'inftrument, + 14° 5 9" demi-diametre, 

RS à ee Me EN eine e PS 17. S9. 
Diflance de l'étoile au centre de la Lune, . .. 38. 23. 509. 
| A 0 


Je 


— 


DE s\ "STo Nr ÉNIC ENS 425 
Je pris les hauteurs fuivantes du bord inférieur de la Lune 
avant & après l'obfervation, 
AOMI2-7A 02 ist O2 a I 2e 
: Aiiis corrigées de l'erreur de f'inftrument 


DUAL 62. 7. 11 & de la réfraétion. 
42% 10. -.. 59. 47. 10 


J'ai conclu de ces trois hauteurs celle du centre de la Lune lors de 


l'obfervation de la difance Desk 2 IBM APTE TM À CES AIISON 
La hauteur vraie de l'Epi de Ia Vierge au même inflant 
Lio MS Oo AE RARES SR EETAS AN PRE IEEE 


“J'ai cherché enfuite la différence des méridiens par un 
calcul femblable au précédent. 


Heure vraie de l'obfervation......,....... JO S 2040 
Différence des méridiens fuppofée. ........ 3e. 20. 
Inflans fuppofés à Paris. ............... PA ed 
Lieu du Soleil àchacun des inftans. ....... 312418 57" 
Lieu de la Lune réduit au lieu réel. ......., 29-21-0110 
Latitude de la Lune auftrale. ............ I. TO, 4I 
Parallaxe horizontale. Le UENT LE 
DEMI dIAMELEE TEE set Pa ala EU ds nues 
Heure vraie réduite en degrés............ 163% 10° 45” 
Alfcenfon droite du Soleil.............. 102-022420 
Afcenfion droite du milieu du Ciel, . *...... AGORA S 
Afcenfon droite de la Lune vraie. ........, 236.152 5 
Diftance de la Lune au méridien réduite à l'ap- 

parent... .......,.... ses. 30. 9. 20 
Hauteur apparente du centre de la Lune obfervé. 
Hauteur du pole méridional. . ...... A ASH 
Vraie paralaxe de hauteur... .. . .:2.:L%.. 
Angle du vertical avec le cercle de déclinaifon. 81. 48. 43 
Déclinaifon vraie de la Lune 4............ CA RTONMNE | 22ENNT IN 210 
Parallaxe de déclinaifon, ............... + 2.38 | + -3. 39 
DÉCHAUON pparentE +»... + dead ve pme « 21.012 39 | 2Ie014. 59 


- Déclinaifon apparente de l'étoile 4,....... CARE) 


Say, étrang. Tome IV. i: hh 


426 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Parallaxe d'afcenfion droite. ............. — 27 20°] — 27 12° 
Afcenfion droite apparente de la Lune. ...... 24 53 
Afcenfion droite apparente de l'étoile. ...... 1. 4h 
Différence des afcenfons droites .......... DA RTS 
Diflance des centres fuivant le calcul. :..... 34 21 
Diflince obfervée tt, PAR TER TM 23. 59 

Différences AMI TP SENS Ce 105% 


Comme la Lune fe trouve, dans la première fuppofition, 
moins éloignée de l'étoile qu'on ne l'a obfervé, la différence 
de 9”, qui répond à 17° de temps, doit être ajoutée au 
premier inflant fuppofé, d'où s'enfuit que la différence des 
méridiens qui convient à cette obfervation, eftde 3" 39'43", 
ou 54455 45" de longitude. 


La difpofition du temps ne me permit pas d’obferver au- 
cune des immerfions du premier ni du fecond fatellite de 
Jupiter pendant le premier féjour que je fis en ce port ; j'en 
fortis le 1 3 Juillet à quatre heures après midi, & j'arrivai à 
Saint-Denys de l'ifle de Bourbon le lendemain à cinq heures 
du foir. 


M. des Loziers-Bouvet, Gouverneur de cette ifle, m'ayant 
donné un logement au Gouvernement dont la fituation étoit 
favorable aux obfervations que je devois y faire, j'y plaçai 
mon octan à lunette & ma pendule, & le 1 6 Juillet je pris 
les hauteurs fuivantes pour la régler. 

857 201..:" 700202380708 r ARS ARE 
8: 47: 22 ..7 72,130!) 120 49 NES 4 1 
DNA DE 72-050 

BUS ST C7 Fe 20 MT TONNES MR 
8. 73040 07 TAN CIE PUISE 


EAU MA 
Midi/moyen 1..." Oo. 4. 52 
Cexrettion-=. 25 1: — 0. 44 

Midi vraies Dares dit Le CENT Re 


Le même jour au foir ayant mis l’oétan dans le plan du méridien, j'ob- 
fervai la hauteur méridienne d’ du Bouvier à la lunette perpendiculaire 


DES SCIENCES. 427 


de Einitomem de PTT 21 ea stp eueietr e RUN ete Men 0701230 
— 464 12° 0", angle de la lunette, + D'TÉNRACHION CN ve telenaleLe 46. 13. 
ÉQutebF Vrafere et d'u e Crctre tale elle ee one 40. 59. 30 
Dilncean anis 04 PIN Qu 2HNONPNE 49. ©. 30 
Déclinaifontle 1" Janvier 1750.,.,......... 2H DD 31 228 APR 
— 24" préceflion, — 5’ nutation , + 1 0” aberrat, = — 19 
MÉÉCOU EME  TET  SRENP SE POPIORE PES, he VO 
Le 17, hauteur méridienne d’« de la Couronne. ........... 871470 
— 464 12’ angle de la lunette, + 1° réfraction — — ....... 46.195000 
Ébiennvraié- he: itrhie elle ts Miar. 344000) 
Diflince adlzénith eh tu le ci a a LEE de à 48. 26. o 
Déclinaifon le 4, Janvier 1750: 44,0. 402 « 27423 
— 19" préceflion, — 3" nutation, + 1 1”aberrat. = — II la. FEAR 
: rar CET ep EE ARE AN EN Hoi 1. 1481) 
Le 18, hauteur méridienne du Soleil à la lunette du rayon de RERO TOUR 
Fee Bord'fupénienr fee RIM. HE 1 48. 20. o 
— 2° 20",erreur de la lunette, — 1° réfraction, — 1 5° 50" demi- 
diamètre Om denpara Axe En ere le te 191100 
Etantengyraleideneentrenn ELA te den colis BL. to 
Diitince AUCUNE ME Meet nat die y Te et si male) à AT, 159. o 
Déclinaifon feptentrionale . .................. DOME OUR: 
PAURUE EN LUE M MEME Ne Hotels ONU: 20 
Hauteur méridienne d’Aréurus à la même lunette. ........., 48. 42. oo 
— 2° 20”, erreur de la lunette, — 50 réfraétion =— ....... CHOME SR 
Franteur Vraie eme AR IR AE 48. 38. 50 
Diffenre aquizenith ee Ci Ale CARTE AT. 21. 10 
Déclinaïfon Je 1. Janvicr 1750... ...... 20429" $9°+ À 
_ 267 préceflion , + 1 0+ aberration, — 5£ nut, — — 22 :f2 “ CNE 
| Latittde MR LL CU un, NA L20. Than 


J'ai répété le même jour l'obfervation de la hauteur méridienne 
de du Bouvier & de Ja Claire de-la Couronne, j'ai trouvé gerer du 


A GRECE A PREAINRE RER ER 204 52’ 8” 
AT) pat ei deN4iGONIOPNC. en bn «sise > cle» 20 MA NE 
Hhh ji 


428 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Le 20 Juillet, hauteurs du Soleil pour l'horloge. 


DPI Mr OR ONE rat RECRUE 
DL AO AR ZEN ANNE AS SONO Ta A 
9. 19:47: 0079. 110 12, 43.260 0.0r.023 
9e 21. 39... 79. 30 2.4.2 0: I. 337 
MNUPMOyEN. EME ©. 1. 33+ 
Correction . ...... — 5 
NIET. SOC RAS ESS C'r218 


Le 2r,le Ciel a été couvert jufqu'à midi & demi. 
Le 22, je rai pu avoir que les hauteurs du matin, à caule 
des nuages qui fe font élevés de la partie du fud. 


Le foir, le Cicl étant ferein, j'ai obfervé la hauteur 


méridienne de # de l'Aigle à la lunette du rayon, de 60% 57° 0° 


— 2°20" erreur de Ja lunette — 35" réfraction — — 22515 
ÉTatteReAU Een ERA CCE 60. 64 5 
Diflance au zénith.......... EE 
Déclinaifon le 1 Janvier 1779 0ehete sie /lle UE Sh 13° A g.14 0 
+ 13” préceff. + 4%+ aberr. + 5"+ nut, = + 222 


LANGE FC EEE EI 20.05 1-45 


Le 23 Juillet, j'ai obfervé, avec une lunette de 1 6 pieds +, 
Yimmerfion du premier fatellite de Jupiter à 5" 22° 35" à 
la pendule. 

Le temps, qui a été couvert pendant tout le matin, m'a 
empéché d'obferver les hauteurs pour vérifier l'heure. 


Le 24 Juillet, hauteurs du Soleil pour régler la pendule. 
DPI AT AE TS 6) 2 
DONS ONE 77 2 ONNNTEIN ONE 

QU 11. 43 - + 77. 40 2- 58.16 

CRUE TRE NE ENONCE 

9. rÿ, 32 .... 78:20 2. 54. 28 

Midi moyen........ GR 
Correction . :.... 


DES S'CMENCE S. 429 


Midi vrai le 20. ..:.1:. CRT 2187 
Midi vrai le 24....... oO: 4 55 
La pendule à avancée en quatre jours... o. 3. 2 
Donc en 24 heures...... 51+ 


Et comme l'immerfion a été obfervée 30h 32 2 % avant 
le midi 24, on doit retrancher 1° 6” des 4" 55" dont la 
pendule avançoit alors, on aura 3° 59” pour fa différence 
au moment de l’obfervation ; donc heure vraie de l’immer- 
fion le 23, 5° 18 46" du matin. 


Le 7 Août, hauteurs du Sokil pour la pendule. 


‘ “ 


BAT Te TA NA ON ONE AVANT TS MS AS UE 
DA UND LE ANA LOT OST TE SI. 
DAT NON A7 15e TON PB TAN 20 ŒNTE SNS T2 
37H AT NS AO Es 29 En ts. 2 
Midi moyen......... T1. 55e 12 

Gorrectionk 5: . 1 7 

MICHNTALe els ele ART ER OS 


Le 8 Août j'ai obfervé, avec la lunette de 16 pieds +, 
Vimmerfion du premier faellite de Jupiter, à 3° 32° 37" 
du matin à la pendule. 


Hauteurs du Soleil le méme jour. 


SroRsGipr- eo toineal Ar ESA RIT TE SO 


‘ Ce 
LARÉCEF D ie 70. 2ONM 72.30.70 UT SON 2 
ONTAULS NES 70. 40 13,137. SO. ‘LI 6: U2E 


re PER OS RES PACE ONE 3 CICR De CONS 2 APR D'OR EU 
8. 17: 35°... 71. 20 


Midi moyen ..... ERPHTTET AE 
Correttion. .......  — 2 

Midi vrai le &........ RIRE NS 52.5 6 < 
Midievreilenz2e 5.521 Hess alle 
La pendule avance en 24 heures... SI 


+ Donc. 33"en 15" 32° 27". 


430 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Heure de l'immerfion à la pendule. . ....,. UHR 2 97 


Retardement de la pendule le 7 à midi. ... 4° 55” it 
Elle a avancé jufqu’à l'heure de l'immerfon.. 33 LENS 
Heure vraie de l'immerfion. . .... s = 3e 36259 


Le 14 Août, le temps a été pluvieux tout le matin, de 
forte qu'on n’a pü obferver les hauteurs. 

Le 15, à $" 18° du matin, le premier fatellite de Jupiter 
étoit encore vifible : à $" 1 9° les nuages ont couvert Jupiter, 
& ne fe font diflipés qu’à 5" 36'; alors le premier fallite 
ne paroifloit plus. 


Hauteurs du Soleil obfervées le 15 pour la pendule. 
BP 6 our Got nr os ES ANTUIOR 2 hat 


SPL r eee 69: 20 1535617 10.2. 4147 
Be RO AD elelelete 69. 40 3. S4I4T OO. 2. 14€ 
De Te 24e « 7O NO INI3,053e 4 | 0. 20147 
Dar Om lele TOM OMS SALE 2 ONE 2 TA 
Midi moyen. ........ 0244 

Correction. ....,,. . — : 

Mdr lnenerietes FO 207 


Le 18 Août, à 4h 57" 28" du matin à la pendule, 
immerfion du deuxième fatellite de Jupiter. 


Haureurs du Soleil pour le même jour. 


8h20 29.176801 527 ab Von 6? 

8. 42-07 A6 I2O) 03. 20 2 ROUAANAT 

8.43. 45..... 76. 40 3.24.23 0.4 4 

BA ASN2De- Cie pass ON LR A OU AS 
Dr oo 7e 120 

Midiëmoyens 184.120 0420 5 

Correction. . ..... — 7 

y Midi vrai le 18...... Ce AC ET: 

Midi \vaidelts 46 ve Morte. 

|DATRESRESES RE RARE LED 


DES SCIENCES. 431 


La pendule à avancé en trois jours. .... oh 1° 51 
Donc en 24%heures, . 1... 375: 


19 
Ou 11” depuis l'obfervation jufqu'au midi 18. 
D'où il fuit pour l'heure vraie de fimmerfion du 
EME MEN AREA LE cielelelele elerslr es ere eee 453 LT 
Le même jour au foir, j'obfervai la hauteur méri- | 
dienne de « dé Perfée a la lunette perpendiculaire, .. 664 26’ 0" 
— 46% 12" angle de lunette + 2° 50" réfract. = —.. 46. 14. 50 
ÉTRATEUTAVTAIE 2e chee ee OU IHETO: 
Diftance au zénith.......... 69. 48. 50 


Dédlinaifon le 1. Janvier 1750..... 484 56° 49" 


+ 22° précefl. — 9"E aberr. + 3'Inut = + 16 Las. Le) 


2 


Landes eee ie 0: TON ds 


Le 19 au foir, hauteur méridienne de « du Serpentaire 
a lonete dulrayon: 7... 2. "1.2 5 6s1215..20 


— 2° 20” erreur de la iunette + 40" réfraction = — 3. Oo 
À Hauteur vraies... 1. 56..22. 20 
Diftance au zénith......:... 33. 37. 40 

Déclinaifon le 1. Janvier 1750..... 124 45° HA 


— 5” préceff. + 10” aberr. +2" nutat, = + 12.45. 58 


Fotitudesmeept ir 0201 Sr.) 42 
Hauteur méridienne de B du Serpentaire. . . ..... "64. 29. 30 
— 2° 20" erreur de l'inftrument + 30" réfract. — 2. $o 
Hauteur vraie... .,.... 6426.40 
Diflance au zénith. ........, 25. 33- 20 
Déclinaifon le 1. Janvier 1750..... s AUATUA43E 
— 4" préceff. + 8" aberr. + 2" nutatt = + 6 AREA 


Latitude... . ........ 20.16. 31. 
CR € ns 


Le 24, ke Ciel étant couvert pendant a nuit, je n'ai pù 
obferver limmerfion du premier fatellite. 


Le 29 Août, j'appareillai de la rade de Saint - Denys. 
pour me rendre à Saint-Paul, qui en eft éloigné d'envirom 
fept lieues, 


Le 


432 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


RÉSULTAT des hauteurs meéridiennes obfervées à S' Denys. 


Par « du Bouvier, obfervation moyenne... ..,.... 204 $2° 13" 
a de la Couronne moyenne des deux obfervations. .. 20. $1. 43 
Par la hauteur méridienne du Soleil. . ......... 20, 51. 39 


ATCATIS EEE ee eee le ste same ele eee 0-19 
andentAislene ne ARR. -Lietorta 20 NS TeRAS 
æ du Serpentaire....................... 20. 51. 45 
B du Serpentaire.. .............. DD 0 c 120: SAZ 
Latitude de Saint- Denys. ................ 20. SI. 44 


Je me contentai de déterminer la latitude de Saint-Paul 
par les hauteurs méridiennes fuivantes, n'ayant pas eu le temps 
d'y faire aucune autre obfervation. 


Le 4 Septembre, hauteur méridienne de « de Ia Lyre à Ia lunette 


perpendiculaire. . ............ APE 0 AE CR 
Angle de Ia lunette 46° 12" + 1° 50" réfract. = + 46. 13. 50 
Hauteur vraie. .. . .. se MCE 25. 30. 
Diflance autzénithie "re 759. 34 30 


Déclinaifon Ie 1." Janvier 1750... 384 34° 24"2B. 


Ur 


+ 4"£ préceff. + 1 6" aberr. + 4" nut. = +25 (ss. 34: 497% 


Latitnder tata et. cuir 120.59 408 
Le 6 Septembre, hauteur méridienne de # de l'Aigle 
à la lunette du rayon. ..,.,........., 211160149410 
Erreur de la lunette — 2° 20", réfraction — 3 5° = — 248 


Hauteur vraie, -, ...…...". 60. 465 
Diflance au zénith. 21.1. 5. 052 9 15 °555 
Déclinaifon actuelle, corrigée de la nutat. & aberrat... 8. 14. 16 


PAnUde RER Rev 20. 59. 39 
Hauteur méridienne de 4 du Serpentaire. . . . . . .. 756. 17.20 
Erreur de la lunette — 2° 20" réfraét. — 40" —— 2.00 

Hauteur yraie. 4-10 2 756. 14 20 


Diflancef@u/zénith.:. JL 00 33.45.40 
Déclinaifon actuelle, corrigée de l'aberrat. & nutat. .. 12. 45. 56 
Latitude. . ........-* 20. 59: 44 


La moyenne de ces trois obférvations donne 20% 59" 41" 
pour 


1 afnént 


JU 


DME S SISICUI:E N:CJEIS: 433 


pour la latitude du bourg de Saint-Paul en Fifle de Bourbon, 
fous le parallèle de l'églife dudit lieu. 


D EC ONEDNE ; PHATRTIE 


J E fis voile de la rade de Saint-Paul, pour aller à l'ifle 
de France, le 1 2 Septembre: les vents qui foufflent dans ces 
mers de la partie du fud-eft à left, pendant prefque toute 
J'année, rendent ce trajet long & pénible; & tandis qu'on 
n'emploie ordinairement que vingt-quatre heures pour venir 
de l'ifle de France à l'ifle de Bourbon, il faut fouvent trois 
femaines pour retourner. On eft obligé de cingler vers le fud, 
pour atteindre le parage des vents variables, à l'aide defquels 
on s'élève à left, jufqu'à ce qu'on {oit aflez au vent de l'endroit 
où l'on veut aller, pour fe {ervir enfuite des vents généraux 
pour y aborder. 

Cette règle des vents, quoiqu'affez conftante, eft cependant 
fujette à des variétés : lorfque le Soleil eft dans la partie auftrale, 
c'eft-à-dire dans les mois d'O&tobre, Novembre, Décembre 
& Janvier, il y change en quelque façon l'état de l'atmofphère ; 
on voit alors fouvent régner des brifes du nord au nord-eft, 
quelquefois même du nord-oueft, qui fervent aux Vaiffeaux 
à remonter d’une Îfle à l'autre, en beaucoup moins de temps 
que pendant les autres mois de l'année. 

Malgré mon attention à profiter des circonftances favorables, 
la faifon où j'étois ne m'en offrant aucune, je fus contraint 
d'aller jufque par 28%+ de latitude, pour rencontrer les vents 
variables, & de m'élever enfuite à l'eft, de façon que je n’eus 
la vüe de l'ifle de France que le 24 Septembre au matin. 

Le même jour à midi, me trouvant aux environs de Ia 
partie méridionale de cette ifle, j'eus occafion d’en déterminer 
la latitude par la hauteur méridienne du Soleil que j'ob- 
fervai avec l'oétan de réflexion. Ayant égard à la diflance 
& au rhumb de vent où me reftoit l'extrémité d’une baffe 
terre qui termine ffle, je crus devoir la conclurre de 204 


Sav. étrang, Tome IV. s ii 


434 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

3 1° *, ce qui différoit beaucoup de celle qu'on lui fuppoloit, &c 
diminuoit d'environ À l'étendue de cette Ifle; en eflet, cette 
latitude comparée à celle dû port du nord-oueft, & augmentée 
de {a diftance de celui-ci à la partie de l'Ile la plus avancée 
vers le nord, ne lui donne en tout qu'environ douze lieues 
marines de longueur du nord au fud, au lieu que les plans 
qu'on eftimoit les plus corredts, la fuppofoient de vingt-une 
lieues. 

H paroït furprenant que depuis trente ans que nous habitons 
cette [fle, & que les vaifleaux la fréquentent, on eût ignoré 
juiqu'alors un objet de cette importance. 

Cette erreur fur la latitude de la partie méridionale, fert 
à expliquer un événement arrivé à plufieurs Vaifleaux , d'avoir 
manqué l'ifle de France & l'ifle de Bourbon, en parcourant 
un parallèle fuivant lequel ils auroient dû aborder la partie 
du fud de la première, ou celle du nord de la feconde; ce 
qui devient poflible, quand on confidère que la latitude de 
celle-ci diflere de 20 minutes de l'autre, & qu'on peut en pafier 
à trois lieues, dans une nuit obfcure, fans s’en apercevoir. 

J'arrivai au Port-Louis de l’'ifle de France, le 2 $ Septembre; 
les jours fuivans, je fis tranfporter mes inflrumens au même 
endroit que j'y avois occupé avant mon départ, & je me 
difpofai aux obfervations que j'avois projeté d'y faire. 

Depuis le 1. Otobre jufqu'au ro, les vents de nord 
& de nord-oueft qui furent fréquens, rendirent le temps 
tellement couvert & pluvieux, qu'il ne fut pas poffible de 
rien obferver; je ne pus même avoir les hauteurs correfpon- 
dantes pour la pendule qu'une feule fois, dans lefpace de 
dix-huit jours : quelquefois le ciel étoit ferein le matin & 
couvert de nuages l'après-midi; cette difpofition du temps eft 
affez ordinaire en cette faifon, & quelqu'affidu que puiffe être 
un Obfervateur, il y perd fouvent fes peines & fes veilles. 

Le 17 Oétobre, le ciel étant un peu plus clair que les 


* M. l'abbé de la Caïlle, qui l’a obfervée en 1753 avec plus de pré- 
cifion qu’on n’en peut attendre à la mer, fur -tout quand on eft obligé 
d'eftimer la diftance, l’a trouvée de 204 31° 7. 


mis nas jh = +-# ait ln. ed 


DMES ASCII /E NICE 8 435 
jours précédens, je m'attendois à obferver limmerfion du 
premier fatellite de Jupiter, lorfqu’il s’élevatout-à-coup, des 
montagnes qui cernent le port, plufieurs petits nuages qui me 
cachèrent cette planète depuis fon fever jufqu'à 11 heures 
40 minutes, alors le premier fatellite ne paroifloit plus. 


Le 24, hauteurs du Sokil pour régler la pendule. 
OL (AB de DO IQ USR 245 35 Mr PL ire 


HD ET 07204009. 0r0 Ab PQ TN SITE 
GAL TE 46: BHO rA.5277 MATSIATI EF 
243 re NS 0 ULONES 03H IST 
44. DONC 2 O3 Us 40) RTS. 

Midi moyen........ IDTELIRUE 
Si la Correction — 4"2, Midi vrai... ... DES BUZZ 


Pour la PARALLAXE de la LUNE, 


Le foir du même jour 24 Oétobre, à 9° 18°32"à la 
pendule, immerfion de l'étoile 4 de l'arc du Sagittaire, fous le 
difque obfcur de la Lune, un peu au deflus du mont Paropa- 
mifus , en entrant vers le mont Sinaï. 


Haureurs de la Lune, apres l'occuk. à la lunette perpendiculaire. 

Bord inférieur. 

10 061.1 ,)52420%— 46° 12", angle de la lunette, réfraction 
— 8° 55" demi- un + 14" 52"; donc hauteur 
apparente 64 135 

BOMTO 47h SI 20" — 46 12% UT de Ia Junette, réfraction 
— 10° 30”, demi-diam. + 14° 52; donc hauteur 
apparente 54 1222”. 

Pendant Ja nuit du 24 au 2$,à 12" 57" $" à la pendule, 
immerfion du premier fatellite de Jupiter. 


Le 25, hauteurs du Soleil pour verifier la pendule. 
SAR O "eve AMAR 20380 TRES 47 
DS 224. AIS ÉDONAT A UETT ETS. 47e 


DSL 9e. sed 0: OL MZ 0. 46) Lei 47 
8, 57e 14..7,140- 20102, 58, 21— 3,14: 57.472 


iii 


6 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
43 


Midi/moyen. : 2m 0.0" 11h 57 47È 
Corrections meet ist — 2+ 
MÉNAGER NES Ua ris $7: 490 
Midi vraile24......... TN 80 
La pendule retarde en 24 heures de..... 22 
Heure de l'occult. de 4 du Sagittaire D à la pendule... 9. 18. 32 
La pendule retardoit le 24 à midi....... 10058 Lise 
Du midi 24, à 9"£ du foir........... 8 
Donc heure vraie de l’occultation. . ..... 0207128 
Heure vraic de limmerfion du 1.°' fatellite de Jupiter 12, 59. 10 
Hauteur méridienne de B d’Andromède......... Bid45 30". 
Angle de Ia lunette — 46% 12°+ 1. 30, réfract... 46. 13. 30 
Fantenravraie ler cts 35-22:100 
Difance anzénite ee SERIE 54- 28-110 
Déclinaifon le 1. Janvier 1751... 34% 17" 41” AIR 
précell. + 1 6"aberrat. + 9"nut. +7"—=+ 32 ES 79? 13 
Latitude... ............ 20. 9.47 
Hauteur méridienne d'« d'Andromède........... FEETOCN 


Angle de a lunette — 46° 12", réfract. — 1°10"—— 46. 13. 10 
Hlauteuravraies she: tie 42. 6-50 
Diflance au/zénith. 1.1.2. 47e 53-10 
Dédinaifon B le 1." Janvier 1751... 27442" 56" (, 
+ 17” préceil. + 6” aberr. + 8"nut = + 31 La 


Tabtudes eee ... 20. 9: 43 


Le 27 Octobre au matin, hauteur méridienne de 
> d'Orion à la lunette du rayon de l'inftrument. - .. 63. 47. o 


Erreur de la lunette — 2° 20", réfraét. — 32" —... 22 
Lou 

Hauteur vraie... 1: - +. « 00 ANR 

Diflancelau zénith. . > EME ZONES SA 


Déclinaifon le 1. Janvier 1751 B.... 64 6° 10° 
7 2 “: ” 6. 6. 17 
+ 3"2 préceff. + 5"+ aber, — 2° nut. = + 


latitude Crete 20 M 9MAD 
= 
Hauteur méridienne de d d'Orion. .. .. d'A 790. 22. 40 


Erreur de la lunette — 2°29”, réfraét, —25"—=.., 2, 
; 5 45 


D'E S SCI BINNC ES 437 
Hauteur vraie. 6202. 17 0iToisis? 
Diane au Æmthe Are 19. 40. 5 
Déclinaifon le 1." Janvier 179) 1 A ,.0129 59 ; 
29° 47 
— 3" précefT. — 6" aberr. — 2"! nutat. = — 114 


Étienne <a 20 DRE 

Hauteur méridienne de Sirius. ,......,.,... 86.16. 0 

Erreur de la lunette — 2° 20", réfraction — 3°.... 2425 

- EMRÉEDTANEAIE. Ne eric less 86, 13. 37 

Diftance au\zénithe, je 4. «ele ee 2: 40-123 

Déclinaifon le 1." Janvier 1750 A... 164 23° 26": it le” 

+ 7" 2 préceff, —-1 1" aber, — 5” nutat. = — 8 + 

Tatitotcrente et eines #20 9: 41 

Hauteur méridienne de Procyon. . .. : 64% 2.40 

— 2°20", erreur de la lunette — 32" réfradt. = —. 252 
HantourVraie 01. 1.017 63. 59 BL 

Dancetauirentmer re ie TIL 26. 1N0-R12 


Déclinaifon le 1." Janvier 1750 B... À 59° 38” ë 
— 16” précefl, + 5” aberr. — 6’nut = — 17 703 
Latitude 10/5). 1, ce AO MAI ALSIT 


Hauteur méridienne de « des Gemeaux à la lunette 
perpendiculaire. . . . ... : PMR ete ee ie 83. 39. 20 


— 46% 12" angledelalunette, réfral. — 125" —— 46. 13.25 


ÉIAUIERRONTAIC + 2: à ee laioie CEA ENS 
Diflance au zénith. .... us ae 02e PAS US 
Re le 1. Janvier 1751 B.. 324 24 32" 4 de De 
— 53 préceff. — 4" aberr. — 6"inut. =— 16 
LRU AA er 20. 9.49 
Hauteur méridienne de B des Gemeaux. , ...... 87. 27. 20 
— 46% 12", angle delalunette, réfract, — 1°12"=— 46, 13. 12 
Hauteur vraie. ..... es. Ale 14. er 
Diftance au zénith...,......... 48,45. 52 
Déclinaifon le 1." Janvier 1751 B... 284 36° 18” La g 
UE: 2 “ “1 TE 36 3 
— 6"+ préceff, — 3” aberr. — 5’Enut. =— 15 
AR SPORE SEPT IEP Tr 


li ijj 


438 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À 


Le 31, midi vrai par cinq hauteurs correlppnignses de 
Aria 4e teerstele STe done Nielle de AT TUNIS ES PA OS 
La pendule retarde, . .... oser 4 13% 


Le 31 Octobre, pendant la nuit, à 14h 48" 3" à fa 


D] 


L'ACADÉMIE 


pendule, immerfion du premier fatellite de Jupiter. 


Le 1°" Novemb. midi vrai i par a hauteurs 


correfpondantes de 6242 à 64%%, ..... 11" 55" 282 
Midi vrai le 31 Octobre, Brioicuo Sete LAS AG RAIOES 
Retardement en 24 heures. ........ 5 18 


La pendule retardoit, fuivant les hauteurs 


précédentes, lors de l’immerfon, de. . 4 24 


Donc heure vraie de limmerfion du premier 


fatellite de Jupiter le 31 Octobre à... .. 14.522 


Le 2 Novembre, haweurs di Soleil 


‘ “ 


LR SO OMS Vo ETES 
42 SI UP O2 7-13 RTS Lit 
AA Liste 2 SO AO 2 OS T2 TES ele 
4e 43e. 59 O 2.446 T1. $5. 147 
47e Drasse $9 20 2e 3: 20, T1. 5. 147 
MidiMmOyEn rer ile ilot II. $5. 147 
Gorrecton ere ere — 2 

Le2, midi vrai par cinq hauteurs cor- 
refpondantes , de 52 a 5942..... 11. 55. 122 
Tampendulerretanden ete tee 4s A7E 


Immerfion du premier fatellite de Jupiter, à 
EM GE Ba Hbiidin dep oe à 9e 15e 35 


1oh 
10. 
10. 


Ta M2 en 020 
no - 301-1064 0.136. (T0 NNTIT. 0 d'A ZE 
Midi moyen...... AUDE ADO de AR 
COTTECHOn ER ee ele PAL. EE 3 


Le 3 Novembre, hauteurs du Sokil. 


PAS SA ACNO AS 2 OM T ATOM MRITETE NS 21 1 772 
9e 20 +. 64 40 I. 40. 34 LI, 54 57 


Le 3, midi vrai par qua re haut. correfp. 11. 54. 54 


D ENS MSICLELN,C E 5. 4 439 
Heure de limmerfion à la pendule, le 2 Novembre, .fuivant les 


hauteurs du 2 & du 3,à..... sie plaie ele elsja le iete NN OMIS 
T'alpendulEMrE ardt den. ele. iee 1.182 rie 4 54 
Heure vraie de limmerfion à......... pelouses 10 2 0210) 


Le 4 j'ai avancé la pendule. 
Le 6, midi vrai par cinq hauteurs correfpondantes.., 11. 58. 40 


Le 7 je n'ai pû avoir les hauteurs, le Ciel étant couvert : 
le même foir, à 11° 10° 35” à la pendule, immerfion du 
deuxième fatellite de Jupiter. 

Le 8 au matin, temps civil: à 4h 45" 30" à la pendule, 
immerfion du premier fatellite. 

Midi vrai l2 8, par cinq hauteurs correfpond. 11" 58° 35” 
Midi vraie 6......,........,...... 11. 58. 40 
La pendule retarde en 48 heures... .... s 


Heure de l'immerfion du 2.° fateHite à la pendule. .., 11. 10. 3 
La pendule retardoit , fuivant les hauteurs. . , De 22 


Donc heure vraie de limmerfion. . .. 11. 11. 582 
Heure de l'immerfion du 1." fatellite à la pendule. .. 4. 45. 30 
Retardement de la pendule. . ........ 1. 24 
Donc heure vraie de limmerfon. . .. 4. 46. 54 


Le 1r Novembre , hauteur méridienne du bord 


LOpÉTHENMAdUNI SOIN LT TEE RL TE 87. 32. 30 
— erreur de la lunette 2° 20”, réfraction — 2", demi- 
HAS TON OM ele ele eheleohe/aheher ele 18. 39 
Hauteur vraie du centre, .....,...... 87. 13. 51 
Difancorau zénith. EU ci LL OL 0 
Déclinaifon méridionale +4........... Lohorerigl7:22u2S 


Latitude. 41,10 se. 201034 


Le 12, midi vrai par quatre hauteurs correfpondantes.… 11. 58. 43 


Jmmerf. du 3." fatell. de Jupiter, avec une lunette de 1 6 pieds +, 
A 102 o” à la pendule, il commençoit à perdre fa lumière vers 
la partie inférieure de la planète. 

10. 2. 30. On ne le voyoit qu'avec peine. 
10. 4. 30. Il ne paroiffoit plus; d’où je conjecture l'inftant de 
limmerfon à la pendule, 10" 3° 0”. 


440 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Le 13, midi vrai par trois hauteurs correfpondantes... 11" 58" 46" 


Suivant les hauteurs du 12 & du 1 3, la pendule retar- 
doit le; 12;, 2: 101M,34,1d0 0 NAME EL 11e 


Donc heure vraie de l'immerfion du 3."° fatellite, à... 10. 4.15 


Le 15 Novembre au matin, temps civil, immerfion du 
deuxième fatellite de Jupiter. 


A 146 25° Sa lumière étoit très-foible. 
1. 46. 30. Je foupçonnois le voir encore. 
1. 46. 35. Je l'ai perdu de vüe. 


Le 15, midi vrai par quatre hauteurs correfpondantes. . r1P 58° 55° 


Le rt AM hot inde GE ste isiete se. 11.105846 
La pendule avance en 48 heures. . ..... : 9 

Donc heure vraie de limmerfion du deuxième fatellite, 
de sr san imaine ambre rime tie 1. 47. 38 


Lerry au matin, temps civil, immerfion du premier 
fatellite de Jupiter, à 1" 6° 6" à la pendule. 


Le 18, hauteurs du Soleil pour la pendule. 


F : ” , h ’ “ 
10926052 ce CZ O OMR Le 25 MT 2 ET AIS 9) 


2 
LO, 35e 43-.ee 70 40.7 1° 22. 26. II. $9. 4 
1037008 eee 7 Tam OS RTL 2 1. LT: NTI NS ONCE 

4 
4 


- 
= 
= 


Dim b}n bin pl 


10: 3834 ....l71-020. 01. 19 35. TT. 059. 
Le 18, midi vrai par quatre haut. correfpond.. 11. 59. 
Heure vraie de limmerfon , fuivant les hauteurs 


comparées le 17 au matin, à. ...,.... ME LS Er 
Le 2 Décembre, midi vrai par cinq hauteurs 
correfpondantes. en, 4... aie ele elle 12. O. 49 


Le 3 Décembre, les vents qui ont régné hier pendant 
tout le jour, de la partie du nord-oueft, ont rendu le ciel 
nébuleux, de forte que je n'ai pû obferver le commencement 
de Féclipfe de Lune; j'ai feulement diftingué les phafes fui- 
vantes que j'ai réduites au temps vrai. 


A 12h 


D NO EN INNTS 


DIE SSI" ENT C BR RE 44r 
À 12h 39° 5" L'ombre à Menelaüs. 
12. 49. 10 L'ombre à Archimède. 
12. $4 33 Au bord de Mare crifium. 


Les nuages mont empêché de voir les autres phafes ; & 
comme le ciel étoit plus ferein du côté de J upiter, j ai obfer vé Ë 
Témerfion du premier fatellite à 1° 42° 35 du matin, à 
la pendule, temps civil; on n'a pü avoir les hauteurs pour 
vérifier l'heure. 

Le 4, le temps a été pareil au jour précédent, nébuleux 
& pluvieux; je comptois cependant oblerver l'émerfion du 
premier fatellite de Jupiter, le ciel étant un peu plus ferein 
fur le foir; mais un nuage mince qui étoit fur cette planète, 
ne m'a pas permis de la bien diflinguer qu'à 8 14° 50”, 
alors le premier fatellite étoit vifible & très-proche de Jupiter. 


Le $ Décembre, hauteurs du Soleil pour la pendule. 


9° 38° 40° 57. 0'[2 2547 O2 13% 
seto ss RTE AMOR MELLE nr ue ATEN 
DRE OUR le ets 20772 AO 2:2 2. 150 PO M2 NTI 
DAS Us 6RRON 2 aire, SION (ere 
DA 2 des RO I2 0 2: 20 A MID 2. T4 

Le 5, Midi vrai par cinq hauteurs correfpond. ... ©. 2.13 
RNA PIE RCE RL eo. a, 119 
La pendule avance en trois jours, à . .. 142.4: 


Donc heure vraie de l'émerfion du 3."° fatellite….. 1. 41. 30 


Le 10 Décembre, à 3° 36’ 40" du matin, temps civil, 
à {a pendule, émerfion du premier fatellite de Jupiter. 

Comme je devois partir le même jour au matin, je ne pus 
régler la pendule par les hauteurs correfpondantes ; mais fuivant 
tois hauteurs de l'épaule orientale ou & d'Orion, & trois 
hauteurs de l'étoile du milieu du Baudrier, je trouvai que la 
pendule avançoit de 6° 8" lors de J'obfervation; d'où il fuit 
que l'heure vraie de l'émerfion a été 3" 20° 32". 


Say, étrang, Tome 1V. . Kkk 


442 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


RÉSULTAT des hauteurs méridiennes obfervées au Port- Louis. 
de l'ifle de France, pour en déterminer la latitude. 


Mois à Jours.| ASTRES ohfirvés. | Hauteurs apparentes. Latitude. 
meme 
1751. 
Juin 25. | Ardurus.... }. | 494 21° 40"| 204 9! 42? 
27. | Ardurus.. 0. 49 2050120: 32 
28e detatEvrer. sr ME M one , 48 
Juillet D Manet trot ar Wæallizo. 47 


&'de la Lyre... | 36. 46. 0 | 20. 

Octobre 25. | À d'Andromède. | 35. 33. 30 | 20. 
a d'Andromède, | 42. 8. o | 20. 

27. |» d'Orion.....| 63. 44. 40 | 20. 

A d'Orion....| 70. 20. 20 | 20. 


+ 
LVL 


Syraust ei te 86. 13. 40 | 20. 
Procyon.. 4, 644 0. 201|120. 
a des Gemeaux. | 37. 27. 20 | 20. 


EN 
NO 


B des Gemeaux. | 41. 15. 2 20. 


Novemb:r1."|}Solcilla et ve. 187. 1353 N20: 


Le 
SA 


34 
La moyenne donne, pour la latitude dudit lieu, 204 9" 43". 


ECLIIPSES des fatellites de Jupiter, obfervées au Port-Louis 
de l'ifle de France, © réduires au temps vrai civil, pour 
Jervir à en déterminer la longitude. 


1751. 25 Otobre à ‘o" 59° 10" du matin, immerfion du 1.‘ Satel. 
1°" Novemb. à 2. 27 dumatin, immerfion du même. 
o. 29 du feir, immerfion du même. 


Fosssese à 11. 11. 58: du foir, immerfion du fecond. 


8.......2à 4.46. 54 du matin, immerfion du 1.‘* fatel. 
12...-..- à 10. 4.15 du foir, immerfion du troifième. 
T$:-.....à 1. 47. 38 du matin, immerfion du fecond. 
HAS ciste ele à 1. 7. 7 du matin, immerfion du 1.°' fatel. 


3 Décemb. à 1. 41. 30 du matin, émerfion du r.°" fatel, 
LOve vole de 32 du matin, émerfion du méme. 


2 

MS 
. 
Le) 
S. 


DE s' S'COTEN'cE;:sS 
L'heure vraie de cette dernière a été conclue par les hau- 
teurs abfolues de « & de € d'Orion. 


Inclinaifons de l'Aimant. 


M. de la Caille ayant bien voulu me confier une bouflole 
d'inclinaifon, de la conftruétion de M. Magny, qui appartient 
à l'Académie, pour en faire l’obfervation aux ifles de France 
& de Bourbon; j'ai obfervé le 4 Juillet 1751, cette incli- 
naïlon, au Port-Louis de l'ifle de France, favoir: 

Le côté de la bouflole, marqué d’une fleur-de-lys, étant 
tourné du côté du nord magnétique, l'aiguille étoit inclinée 
de Sr 45", à compter de la ligne horizontale. 

Le même côté étant tourné, elle donnoit s4 

Le 9 Août, à Saint-Denys de l'ifle de Bourbon, {a fleur- 
delys au nord magnétique, l'inclinaifon étoit de 534 30’, 
& la fleur-delys du côté du fud, $ 54. 

Le Confeil de l'ifle de France ayant jugé à propos de 
garder le vaiffeau £ Glorieux pour le commerce de cette ifle, 
& de me le remplacer par le vaifleau /s Treize -cantons, 
Tabfence de ce dernier , qui marriva en ce port que de 12 
Novembre, jointe au temps néceffaire pour leréparer & l'armer 
de nouveau, y prolongèrent mon féjour, & ce retardement fut 
très-préjudiciable aux opérations que je devois faire en retour- 
nant en France. 

J'avois ordre de parcourir la côte orientale d'Afrique, 
depuis l'entrée du canal de Mozambique, jufqu'au cap des 
Aiguilles, d'en vifiter les ports , d'en obferver le gifement, 
de même que la latitude des principaux endroits, ce qui 
demandoit un temps favorable : je ne pouvois guère m'en 
flatter qu'en partant des ifles les premiers jours du mois 
d'Oftobre, & ce n'avoit été que fous cette condition que 
je m'étois chargé de cette miffion; il fallut cependant, malgré 
mes repréfentations, céder aux circonftances & tirer le meilleur 
parti qu'il étoit poffible de celle où je me trouvois. 

Je fortis de l'ifle de France le 10 Décembre; je mouillai 
le 12 à la rade de Saint-Denys de J'ifle de Bourbon, où 

KKK ij 


44 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
je ne reflai que le temps néceffaire pour y remettre les grains 
qu'on y envoyoit de l'ifle de France, former le plan de 
l'arrimage , y charger quatre milles balles de café, avec les 
vivres & les provifions dont j'avois befoin: j'en partis enfin 
le 24 Décembre, avec deux fenaux qui devoient naviguer 
fous mes ordres & me feconder. 

Je dirigeai d'abord ma route vers l'ifle de Madagafcar , 
je reconnus la baye du Fort: Dauphin , le 1 "Janvier 1752; 
de-là prenant mon cours par K partie méridionale de cette 
ile, je vérifiai l'erreur des cartes anciennes fur la latitude 
qu'elles y donnent: après avoir doublé cette ifle, je cinglaï 
vers le cap des Courans. 

La direction du vent, jointe à la violence des courans qui 
m'obligèrent de louvoyer pendant plufieurs jours, ne me 
permit pas d'atterrer à ce cap, & je n'eus la .vüe de la côte, 
entre lui & la baye du Saint-Efprit, nommée par quelques- 
uns, baye de Laurens-Marquez, que le 1 $ Janvier: je reconnus 
cette baye deux jours après, & j'y ferois entré fans la proxi- 
mité de la nuit pendant laquelle il me furvint un coup de 
vent de la partie du fud , qui me jetoit fur une côte d'autant 
plus à craindre qu'elle eft inconnue & environnée d'écueils; 
la violence du vent dura près de trente-deux heures, pendant 
lefquelles j’eus prefque toûjours le plat bord du vaiffeau- dans 
Jeau, & je perdis de vüe un des bâtimens qui m'accompa- 
gnoient; les courans, pendant ce temps-, m'écartèrent de 
la côte fur laquelle le vent me Jjetoit, & me firent dériver 
tellement au deflous de ia baye du Saint-Efprit, que je ne pus 
y entrer que le 29: je comptois y trouver le fenau qui 
m'avoit quitté & auquel j'avois donné ordre de s'y rendre, 
en cas de féparation , mais je n'en eus aucune nouvelle *. 

L'avancement de la faifon ne me permit pas de refler en 
cet endroit autant de temps qu'il en auroit fallu pour en 
prendre une parfaite connoiffance: je penfai me perdre fur 


* Le Capitaine de ce bâtiment fut fr épouvanté du danger qu'il avoit 
couru, qu'après s'être relevé de la côte, il retourna à l'ile de France, 
& y aflura que j'avois péri, 


[ 
k 
| 
, 


DE s" SCOR IENN ChE’S 445 
les bancs de fable dont la baye eft remplie: comme les 
mauvais temps fe fuccédoient & qu'ils n'expoloient au même 
danger, je pris le parti d'en fortir le 6 Février. 

Je continuai de-là de parcourir la côte, d'auffi près 
qu'il m'étoit poflible, pour y faire les remarques néceflaires, 
fans pouvoir toutefois aborder en aucun endroit ; je fus 
même fouvent forcé de prendre le large pour me garantir 
des vents de la partie de left & de l'agitation de Ja mer qui 
me jetoient fur la côte ; je profitois enfuite des intervalles 
de beau temps pour m'en approcher & la cotoyer : fouvent 
ces mêmes temps, quoique plus modérés, étoient accom pagnés 
d'un brouillard épais qui s'étendoit en forme de rideau fur la 
côte, & m'empéchoit d'en diflinguer les objets prochains, 
tandis que le ciel étoit ferein par -tout ailleurs. Au relle cette 
côte, depuis la baye du Saint-Efprit, jufqu'au cap das Serras, 
ne m'a paru formée que par une chaîne de dunes & de mon- 
tagnes de fable, couvertes de brouffailles & de quelques ar- 
brifleaux; de-là jufqu'au cap des Aiguilles, qui en elt diflant 


de foixante-dix-huit lieues vers l'oueft, on découvre de très- 


hautes montagnes fur le terrein, couvertes de grands arbres; 
mais le bord de là mer ne préfente prefque par-tout qu'un 
terrein inégal, fablonneux, aride & fans aucuns ports; ceux 
auxquels les Portugais ont donné ce nom, ne font que des 
anfes ouvertes pour la plufpart depuis l'eft nord-eft jufqu'au 
fud, dans lefquelles par conféquent les vents de l'eft au fud- 
eft, font les plus fréquens & les plus impétueux, principalement 
ceux de la faifon où j'étois. 

Le fenau qui me refloit, s'étant féparé de moi pendant 
une nuit orageufe & obfcure, il fut dans l'anfe nommie baye 
de Lagoa où i croyoit me rencontrer, il y mouilla d'un très- 
beau temps & envoya à terre fa chaloupe avec un Officier 
& huit Matelots, pour y faire de l'eau; deux heures après 
il s'éleva un vent du fud-eft qui agita la mer de façon que 
le fenau fut en danger de périr à Fancre, fa chaloupe fut brife 
au rivage, & l'équipage que cet accident mit dans l'impofi- 
bilité de retourner à bord & d'en être fecouru, fe vit contraint 

KKk ii 


446 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 

de gagner par terre les habitations hollandoifes, voifines de 
Mofel-baye: fa plulpart périrent dans ce trajet par la faim & 
par les bêtes féroces, le fieur Perrot, Officier de ce bâtiment, 
avec un Contre-maitre, furent les feuls qui arrivèrent au cap 
de Bonne-efpérance. 

Le défaut du fenau, joint aux cbflacles que je rencontrai 
de la part des vents, des courans & des brouillards, m’obli- 
gèrent de me borner à prolonger la côte, à en remarquer 
le gifement & à obferver la latitude des principaux endroits, 
que je trouvai très- différente de celle que marquoient les 
Cartes & les Routiers. Comme j'ai rendu compte à l’Académie 
de mes obfervations, dans un, Mémoire qui accompagnoit 
les cartes que j'ai données au Public en 1753, & que j'en 
deftine le détail pour la feconde édition de mon Neptune 
oriental, j'ai cru devoir medifpenfer d’en faire ici mention. 

Après avoir reconnu cette côte jufqu'au cap des Aiguilles, 
& avoir confommé la provifion d’eau & les vivres, je fis 
route pour relâcher au cap de Bonne-efpérance. 

J'arrivai le 3 Mars à l'ouverture de la baye, & j'y ferois 
entré le même jour, fans un coup de vent furieux du fud-eft 
qui me força de prendre le large, & je n'y rentrai que cinq 
jours après. 

Je retrouvai au cap M, l'abbé de la Caille qui y continuoit 
fes obfervations, je lui communiquai le journal de celles que 
j'avois faites aux ifles de France & de Bourbon; il les examina 
& les jugea fufhifantes pour en déterminer exactement la 
pofition géographique; & ce fut avec d'autant plus de furprife 
qu'il reçut quelque temps après un ordre du Roï d'y aller 
pour le même objet, 

Cet ordre avoit été follicité par la Compagnie des Indes, 
qui, ayant appris ma relâche à Rio-Janéiro, ne prévoyoit pas 
que j'eufle eu enfuite à ces ifles le temps néceflaire pour 
exécuter ceux que j'avois à cet égard, étant perfuadée, d'un 
autre côté, que j'avois dû en partir au commencement d'Oc- 
tobre pour la côte orientale d'Afrique: au refle, le voyage 
de M. de la Caïlle à ces ifles, m'a d'autant plus flatté, qu'il 


DES LS CHIEN CEÆESS, v. 
a été à portée, par ce moyen, de vérifier l'exa@itude de mes 
obfervations , & d'en faire lui-même de très-importantes , 
tant fur l'obliquité de l'écliptique que pour le plan de l'ifle 
de France; & je ne puis me difpenfer d'être en particulier 
très-reconnoiflant du témoignage avantageux qu'il m'a rendu 
dans les différens Mémoires qu'il a publiés depuis fon retour. 

Je reftai au cap jufqu'au 17 Avril, pour y rétablir es 
malades de mon équipage & m'approvifionner de l'eau, des 
vivres & des rafraîchifiemens dont j'étois entièrement dépourvû 
en y arrivant; je comptois en fortir le 1 2, fans un orage qui 
furvint la veille, accompagné d’un efpèce de coup de vent de 
nord-oueft, & quoiqu'il ne füt pas des plus violens, la mer 
qui fut beancoup plus agitée qu'elle n’auroit dû l'être, à pro- 
portion de la force du vent, mit plufieurs Vaifleaux de fa 
rade en danger de faire naufrage; celui que je commandois 
y fut un des moins expolés, étant un des mieux poflés ; 
plufieurs chaloupes & canots qui étoient au rivage, y furent 
brifées, & la mienne fut de ce nombre; cet évènement retarda 
mon départ de cinq jours. 

Je n'étois propofé pendant le coùrs de mon voyage, de 
profiter de la traverfée de mon retour en France, pour une 
recherche utile à l'Etat & avantageufe à la Compagnie des 
Indes en particulier: voici quel en étoit le motif & l'objet. 

Toutes es Nations qui naviguent d'Europe aux Indes & 
des Indes en Europe, reconnoiffent unanimement l'impor- 
tance d'un endroit en deçà du cap de Bonne-efpérance, où 
les Vaïfleaux puifflent trouver à leur retour, l'eau, le bois & 
les rafraichiflemens dont ils ont befoin; de-là dépend non 
feulement la fanté des équipages & la confervation d’un grand 
nombre de fujets qui périflent par le forbut qu'occafionnent 
toüjours les longs trajets fur mer, mais encore la füreté du 
commerce, par les précautions qu'on peut prendre pour le 
retour, fuivant les circonflances des affaires en Europe, dont 
on eft bien plus tôt informé que dans les mers orientales. 

La colonie des Hollandois au cap, ne leur laiffe rien à 
défirer à cet égard, foit par fa fituation, foit par la température 


\ 


448 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
de Fair, foit enfm par l'abondance des vivres qu'on y trouve; 
les Anglois ont F'ifle Sainte-Hélène, & les Portugais le Brefil. 

La fituation des ifles que la plufpart des cartes anciennes 
placent entre la côte du Brefil & celle d'Afrique, entre le 
19 & 204 de latitude méridionale, fous les noms de Marrin- 
vaz, Sancta-Maria d'Agoflo, rc. paroifiant très-favorable pour 
le retour, la Compagnie des Indes expédia au mois de Sep- 
tembre 173 1, les deux bateaux l'Oifeau & l'Hirondelle , pour 
reconnoitre ces ifles, les vifiter & en prendre pofñleflion ; ils 
fuivirent exactement à la vûe l'un de l'autre, leur parallèle 
fuppolé, & y louvoyèrent plufieurs jours fans en avoir aucune 
connoiflance, de forte que cette expédition n'eut aucun fuccès. 

L’elpérance de trouver un port fur la côte occidentale 
d'Afrique, engagea la Compagnie l'année fuivante, d'y envoyer 
les deux frégates la Weéuus & V'Affrée , qui la parcoururent 
depuis le 32% de latitude, jufqu'au tropique du Capricorne, 
n'y trouvèrent que des anfes ouvertes au vent d'oueft & 
quelques bayes un peu plus clofes; mais le terrein qui environne 
les unes & les autres, n'offroit que des rochers couverts de 
moufe ou des fables arides, fans arbres, fans rivières & fans 
fources; en un mot, un pays inhabitable, même à une très- 
grande diftance du bord de la mer. 

M. des Loziers-Bouvet, commandant a frégate la Marie, 
à fon retour des terres auftrales, fuivit le parallèle de l'ifle de 
la Trinité, fans en rencontrer aucune autre. 

Pendant le féjour que je fis à Rio-Janéiro, ayant eu plufieurs 
fois occafion de m'entretenir avec quelques Capitaines qui 
avoient fouvent fait le trajet de la côte d’Angol au Brefil, 
pour le tranfport des Nègres, ils m'aflurèrent avoir vü les ifles 
Marrin-vaz, & quelques-uns d’entr'eux y avoir abordé, y avoir 
fait de l'eau & du bois, dont ils les difoient abondamment 
pourvües ; ils les diftinguoient parfaitement de l'ifle de fa 
Trinité que nous connoiflons, & des quatre iflots qui en 
font diftans de huit lieues à l'eft + nord-eft, que quelques cartes 
nomment des Afarrin-vaz: plufieurs me dirent avoir vüû les 
unes & les autres dans le même voyage, & eflimoient les 

vraies 


DRE S 9:C LE NC Fis 449 
vraies Martin-vaz de cent vingt lieues plus-vers lorient que la 
Trinité; qu'à la vérité les cartes Hollandoiles & les anciens 
Routiers les marquoient très-mal par leur latitude; que les 
deux principales ifles de Martin-vaz étoient entre 21 & 214 
15’, ce que je vérifiai fur les*cartes particulières dont ils fe 
fervoient ; ils ajoûtèrent que leur élévation les pouvoit faire 
aifément apercevoir de quatorze à quinze lieues. Le nouveau 
routier Portugais imprimé à Lifbonne en 1746, dont l'exac- 
titude eft affez connue, diflingue également ces ifles par 
première, feconde & troifième Aartin-vaz, dont la première 
différe des deux autres de 1% 14’ en longitude, & celle qu'il 
appelle Santa - Maria d'Agofta, eft d'environ quatre-vingts 
lieues plus à l'occident & de 20 minutes plus méridionale, 

La conformité de ces diflérens témoignages, qu'on pouvoit 
regarder comme une certitude morale de l'exiftence de ces 
ifles, me détermina d'autant mieux à en faire la recherche, 
qu'elle ne pouvoit manquer de procurer un bien: en effet, 
{1 le fuccès étoit avantageux, le défaut difpenfoit la Compagnie 
de faire une entreprife exprès fur ces nouveaux indices; je ne 
prolongeois d’ailleurs ma traverfée que de trois femaines, fans 
en compromettre la fureté, 

En partant du cap de Bonne-efpérance , je fis route au 
nord-oueft + oueft , jufqu'au 8 Mai, que me trouvant par 
214 10’ de latitude, & fous un méridien d'environ trois 
cents cinquante lieues plus oriental que celui des ifles , je 
cinglai à l'oueft fur ce parallèle, avec la précaution de mettre 
en panne tous les foirs & de m’entretenir ainfi bord fur bord, 
de façon à me trouver le matin du jour fuivant, à très-peu 
de chofe près, au même endroit où j'étois la veille; J'avois 
foin en outre, de vérifier la latitude par la hauteur méridienne 
des étoiles, dans la crainte que la dérive ou les courans ne 
m'euffent écarté de celle où je voulois me conferver. 

Après avoir fait environ quatre cents lieues, fuivant l'ef- 
time, fur ce parallèle, nous aperçumes un grand nombre 
d'oifeaux, de 'efpèce de ceux qu'on voit communément aux 
environs des ifles éloignées des continens, & qui ne s'en 


Say. étrang. Tome IV, HE 


450 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 


écartent que de vingt-cinq à trente lieues, ce qui me fit 
efpérer d'en voir quelqu'une le lendemain, mais en vain; je 
ne vis ni ifles ni oifeaux, & je fis encore cent lieues de plus 


à l’oueft, fans rien découvrir. 


Malgré mon attention, jointe à celle des Officiers & des 
Pilotes, de bien eftimer chaque jour, le chemin du Vaifleau, 
je ne pus m'empêcher, par les indices des jours précédens, 
de foupçonner une erreur dans l'eftime de fa longitude; & 
pour m'en aflurer, j'eus recours à l’obfervation des diftances de 


la Lune aux étoiles, dont je connoiflois l'utilité à cet égard. 


Le 24 Mai, la Lune étant dans le parallèle de l'étoile 
nommée l’Æpi de la Vierge, à 9" 6” 10" à la montre, j'ob- 
fervai la diflance de l'étoile au bord éclairé de la Lune, qui 
en étoit le plus prochain de 84 3 s' 


Ayant pris trois hauteurs d’Anrarés, avant & après l'obfer- 
vation, pour vérifier l'heure, je trouvai par le réfultat moyen 
du calcul, que la montre avançoit de 45 30"; donc l'heure 
vraie étoit 9h 1' 40": je fis enfuite le calcul fuivant pour 


trouver la différence des méridiens. 


17° Suppoñition. 


Heure vraie de l'obfervation. ....4....... 
Différence des méridiens fuppofée 


Inflans Muppofés a Paris... "EE TR iC 
Lieu du Soleil Pour ies nitans er NEC RER 
Lieu de Ja Lune réduit au lieu réel par l’abacus 

LAMY NS EMA AIRE 6: 29. 10. 27 
Hattude vderla, une AMIE En 24 14. 48 
Parallexe horizontale AMP ET ARE ES 54. 45 
Demi-diamètre réduit à la hauteur. ....... 15.17 
Heure vraie réduite en degrés. ........... 12520080 
Afcenfon droite du Soleil. .....::.:.... 62.712928 
Afcenfion droite du milieu du Ciel. ........ 197: 27. 28 
Afcenfion droite vraie de la Lune. ......... 206, 17: 54 
Diflance au méridien, avant le pañfage , réduite 

à l'apparent, He AE A ANICREE 8. 58. 38 


2 


«&e Suppofition: 


CL 1’ 40" 


SENS OU 


6: 


QE 31. 40 


29. 20. 45 
2.14 © 


152500 
62-13-0018 
197. 28. 18 
20612802 


92 75 


| 
| 
1 
1 
< 


D ES ISNGII ENT CUETS 457 
1." Suppofition. | 2.4 Suppoñition. 


Hauteur apparente du centre de la Lune . ..... TB TMS MIN B 14" Lo 
Hauteur du pole auftral. ........... sr N20 5; GO 

Vraie parallaxe de hauteur... .....:...... Ares ME ON 
Déclinaifon vraie de la Lune 4........... 113-017-4ON0IS. 20-142 
Prralaixe de déclianfon . 2 .1/2#439.% uaie — 7. 42 7- 40 
Déclinalfon apparente ns re eee 2te à 1014 he bahre ÉD 19275 HeNTS NE 
Déclinaifon apparente de « fp..,... MÉETIRe 9. 50. 36 

Parallaxe d'afcenfion: droites. 3.1.2... .1.. + 8.12 8.20 
Afcenfion droite apparente de la Lune. ..:... 206.26. 6 |206. 36, 22 
Afcenfion droite apparente de l'étoile. ...... 19643-20411 198. 3.20 
Différence des afcenfions droites .......... Bar A6 823302 
Diftance des centres fuivant le calcul... ..... Sin, 6 ge 1-56 
Diftance obfervée, + le demi-diam. de la Lune. 8. so. 17 8. 50. 17 


Différence de la Lune, moins avancée 
par LOHIEEVATIQRS 2.1. ea etele nt 49 11. 39 


Comme la Lune s’éloignoit de l'étoile, & qu'elle en étoit 
plus écartée à chacun des inflans fuppofés qu'on ne favoit 
obfervé, il étoit donc alors moins tard à Paris, & la différence 
des méridiens moins grande à proportion dans l'un & l’autre 
cas; c'eft pourquoi fi on diminue de 2h 30’, dont on l'a 
1° fuppofée, 1° 30" pour les 49" de mouvement en diftance, 
on aura 2h 28" pour la différence des méridiens qui convient 
à l’obfervation. Je la réitérai 37 minutes après, & le réfultat 
me donna 2P 27’ 10"; de forte que prenant un milieu entre 
Jun & autre, j'aurois été à 9" 20’ du foir par 364 $7’ 30“ 
de longitude occidentale, au lieu de 30% 42° que donnoit 
l'eflime; en un mot, j'étois de cent dix-{ept lieues plus près 
de la côte du Brefil que je ne comptois être, & quatre-vingt- 
quinze lieues en deçà de l'ifle de la Trinité: il étoit donc à 
préfumer que les oifeaux que j'avois vüs trois jours auparavant, 
étoient de ceux qui repolent fur cette ifle dont je croyois être 
alors très-éloigné. 

Une troifième obfervation que je fis le 2$ au foir, ne 
différant des deux précédentes que du chemin que j'avois 

LIT ïj 


2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L' ACADÉMIE 
fait à l'oueft pendant cet intervalle, elle me confirma tellement 
mon erreur d’eftime, que je pris fur le champ le parti de 
changer de route & de tenir le plus près du vent, pour ne 
pas approcher davantage la côte du Brefil, dont je n’aurois pü 
que difhcilement me relever avec les vents d'eft, & doubler 
enfuite le cap Saint-Auguftin. 

Quant aux ifles de Martin-vaz , je n’en ai eu aucune con- 
noiflance, quoique j'aie parcouru exaétement le parallèle où 
on les fuppole, depuis trois cents cinquante lieues à left, 
jufqu'à deux cents lieues à l’ouefl : le temps clair & ferein que 
j'ai toüjours eu en faifant cette route, joint à l'attention d'avoir 
des découvertes: au haut des mâts, m'auroit fait apercevoir 
non feulement des ifles d'un terrein élevé, mais même un 
banc de fable, s'il s'étoit trouvé voifin de ma route. L'erreur 
de ma navigation ne porte aucun préjudice à cette découverte, 
& foit que cette erreur provienne d’un défaut d'eflime, foit 
qu'elle vienne des courans, leur effet augmentant feulement 
chaque jour le chemin à foueft n'auroit fait rencontrer 
ces ifles plus tôt que je ne m'y attendois, fans toutefois 
m'empêcher de les diftinguer; & d'ailleurs n'ayant point quitté 
leur latitude, je ne pouvois manquer de les aborder: je crois 
donc pouvoir aflurer que ces ifles n’exiftent pas. 

Il en eft de même de celle que les Cartes & les Routiers 
placent environ quatre-vingts lieues à l’oueft de l'ifle de la 
Trinité, fous le nom d’Afcenfion, & que les Navigateurs ap- 
pellent F'Afcenfion du oueff, pour la diftinguer de celle de ce 
nom qui eft au nord-oueft de l'ifle Sainte-Hélène; j'aurois 
dû la voir, fi fon exiflence étoit auffi réelle que les Portugais 
le difent. Olivier de Noort, Commandant de quatre vaiffeaux 
Hollandois, & quelque temps après le docteur Halley, ont 
traverfé directement de l'ifle de la Trinité à la côte du Bref, 
fins voir aucune autre ifle; les différens afpedts de celle-ci, 
lorfu'on l'aperçoit à des rumbs de vent différens, ont fait 
croire aux Navigateurs que ce nétoit pas la même ifle. 

Nous vimes le 2 Juin, la côte du Brefil, par 1 of 45’ de 
latitude; les vents que j'avois toûjours eu variables de l'eft au 


D'ÆE S. SIC/ILEUN CES 453 
nord-eft, contre l'ordinaire de la faifon, ne nyavoient pas 
permis de prendre Le large, & je fus obligé de louvoyer 
les jours fuivans, pour doubler le cap Saint-Auguftin, dont 
j'étois alors éloigné de quarante-cinq lieues au fud-oueft. 

Cette vüe à laquelle je m'attendois, confirmoit parfaite- 
ment mes obfervations précédentes & n'en différoit que de 
fix à fept lieues, erreur que je pouvois fort bien avoir com- 
mile depuis; au lieu que fuivant l'eftime, j'aurois été éloigné 
de cent dix lieues de cette côte: cet exemple fait voir lim- 
portance de ces obfervations fur mer, puifqu’on éviteroit par 
ce moyen les évènemens fâcheux qui font fouvent les fuites 
des grandes erreurs de l'eftime; il feroit feulement à fouhaiter 
qu'on pût fubflituer aux longs & pénibles calculs qu'il faut 
faire, une méthode abrégée & facile, qui foit à la portée 

_des Navigateurs qui méprifent & rejettent ordinairement tout 
objet d'application , quelqu'avantageux qu'il puiffe être. 

Après avoir doublé le cap Saint - Auguflin , je cinglai vers 
la ligne équinoétiale & je la paflai le 14 Juin; j'aurois dû 
voir dans ce trajet l'ifle Fernande de Noronha, fi fa pofition 
étoit telle que le fuppofe la Carte du dépôt de la Marine, 
à cent cinq lieues de la côte du Brefil: mais cette Carte eft 
la feule qui la place à cette diftance, toutes les autres & les 
Routiers ne l'en éloignent que de foïxante lieues, ainfi je 
mavois garde de lapercevoir. Cette erreur de fituation eft 
d'autant plus à craindre, que plufieurs Vaifleaux, & tout 
récemment le Vengeur & 1à Compagnie des Indes ont manqué 
d'y faire naufrage, lorfqu'ils s'en croyoient encore éloignés 
de quarante-cinq lieues. 

De la ligne équinoétiale, je continuai ma route vers le 
nord ; nous rencontrames les vents alifés du nord-eft par 
104 de latitude feptentrionale, & enfuite les vents variables 
par 33% Le 16 Juillet, nous paffames à quatre-vinet-dix 
lieues à loueft des ifles Corvo & Flores qui font les plus 
occidentales des Açores; de-là prenant mon ‘cours au nord- 
eft + eft, jufque par 47% 3 0’ de latitude, & enfuite à l'oueft, 
J'atterrai à Bélle-ifle le 30 Juillet. Comme j'avois eu deux 

LH ii 


454 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

fois occafion, depuis la vüe de la côte du Brefil, de rectifier 
J'eflime; notre erreur, à la vüe de cette ifle, n'étoit que de dix à 
douze lieues. Nous arrivames enfin au port del'Orient le 3 1. 


OBSERVATIONS faites à Foulpointe, fiué à la partie 
orientale de l’ifle de Madagafcar. 


C OMME la longitude de cette partie de l'ifle de Mada 
gafcar, n'a été déterminée par aucune obfervation aftrono 
mique, & que la fituation qu'elle a fur mes nouvelles Cartes, 
provient de fa diflance des ifles de France & de Bourbon, 
fuivant les routes des Vaiffeaux; j'ai profité de la relâche que 
j'y. ai faite en 1757, en allant aux Indes, pour vérifier fa 
pofition, ou, pour mieux dire, pour m'en aflurer par des 
moyens plus certains que me procuroient l'émerfion du pre- 
miet fatellite de Jupiter, qui devoit y arriver peu de jours après 
que j'y eus abordé, & l’éclipfe de Lune du 30 au 3 1 Juillet. 
Je defcendis mes inftrumens à terre le 2 $ Juillet au matin; 
& après avoir monté ma pendule, je pris les hauteurs fuivantes. 


Hauteurs du Sokil 


20474278 an AD 40 UT USA JT TE COS 
10450 385. + 4020 1.,.0,7.1. 1e 5050 
10. 52. 15 -... 49: 30 I. 7.2 II. $9. 49% 
1020532 501 :- 6 Æ40- YONNE S- ATINTTe S9S 0 
ROM Se date AUS ON T0 3-05 CETTE ET 0 470 
10-57-20 SONO Te 2: LOT T5 0- GC 


Midi moyen.......... ITS OS Oo 


Ayant placé le foir l'oétan dans le plan du méridien, j'ai obfervé 
11 hauteur méridienne de la Claire de Ia Couronne à Ia lunette du 


TAYONL, : dE sb ci-r eee ee n-e-c ne 44149 0" 
Déviation de la lunette — 2° 20”, réfraét. — 44"— — ER | 
Hauteur vraie. ...,... 44 45. 56 4 
Diflance au zénith. ......... 45. 14 4 
Déclinaifon le 1. Janvier 1750 B.. 271 3418" { 
Variation pour feptans+, +25 Jours..— 1. 35 FT TT AE 
Latitude. . .,...,...4. 17. 41.24 


_ 


DES : SAC IEUN CHE 6i 455 


Haut. mérid. de £ du Sagittaire à la même lunette... 73415 40” 
Déviation de la lunette — 2° 20", réfraét. — 14"— — 2: 34 


Hauteur vraic........ 73 ENG. 
Diftance au zénith......... 16. 46. 54 
Déclinaifon le 1. Janvier 1750 4... 344 28° 17" 
je s 10e — 34 20-012 
Variation pour fept ans? — 25 jours..... — 5 
Pattudese-ee ter SON EAVE 


Le même jour 25 à 8 heures du foir, il s'éleva plufieurs 
nuages du côté de la mer, qui couvrirent le Ciel de façon 
que je ne pus diftinguer Jupiter. 


Le 26 au foir je réitérai l'Obfervation de Ia hauteur méridienne 
de « de a Couronne; elle fut, comme Ie jour précédent, 


COPIES AR D LSS  ER ETS 444 49° 0” 
J'obfervai auffi la hauteur méridienne de la Claire 
de la Lyre à la lunette perpendiculaire, de.... 179. 57. 30 
Angle de Ia lunette — 46% 12”0",réfraét. — 17" = 46.13. 7 
Hauteur vraie... ..... 33. 44. 23 
Diftance au zénith. ,....... 56. 15. 37 
Déclinaifon B le 1." Janvier 1750.. 38434 o 


Variation pour 7 ans 6 mois 25 jours... — 19 = 3823 19 
Fatitude./#5es De a M7 Are 18 


Suivant ces obfervations, la latitude de Foulpointe, " 
prife au village où le Roi fait fa réfidence, eft de 7 41.20 


Ma pendule ayant arrèté le 27 & le 28, je fus obligé 
de la démonter, & je ne Îa remis en mouvement que Îe 
29 au foir. 


Le 30, midi vrai par huit hauteurs correfpondantes.. 115 26’ 20° 
La pendule retarde de, ...... Pat 0e Je - 33- 40 

Le 30 au foir, le ciel étoit nébuleux, je craïgnois qu'if 
ne continuât de s’obfcurcir comme les jours précédens ; mais 
vers les 1 1 heures les nuages fe diffipèrent & me permirent 


d'obferver les phafes fuivantes de l'écliple. A 12h 46’ à la 


456 MÉMOÏRES PRÉSENTÉS. À L'ACADÉMIE 
pendule, la pénombre commença à paroître fur le bord du 
difque, affez fenfiblement ; à 12° 48’, l'ombre me parut 
entamer le bord , & elle fe fit aifément diftinguer enfuite de 
la pénombre : le commencement fe fit vis-à-vis de Aare 
lumorun. 


Ar2h ss 2*le bord de Afare humorum entre dans l'ombre. 
1. 2. 55 entrée de Tycho. 
1. 11. 12 Lanfberg. 
T. 14. 28 Rernoldus. 
1. 19. 31 le milieu de Copernic. 
1. 27. 27 Ératofthènes. 
1. 34. 4 la tache lumineufe entre Ératofthènes & Héraclides. 
1. 47. 45 entrée du bord inférieur de Mare neétaris. 


Les brouillards ont enfuite couvert le ciel, de façon que 
je n'ai pü obferver Ia fortie. 


Pour n'aflurer de l'heure vraie, au cas que ma pendule 
vint à s'arrêter, ou que la difpofition du temps m'empêchät 
d’avoir les hauteurs, j'ai pris les hauteurs fuivantes de la Claire 
de l’Aigle, après fon paffage au méridien. 


A 1"43 2" à Ja pendule... 814 ro’, lunette perpendiculaire. 


Ze MO: 20e AS NICE 
2e HO Oreresrsenese 7$e 20e 


Ces hauteurs réduites & corrigées de la réfraction, donnent 
pour le temps vrai, favoir; 

La première. OP COR CES 2 T4 NS OE 

La deuxième... 29. 36. 30. 2. 38. 19: 

La troifième.... 29. 6.42. à 2. 40. 39. 


à 
a 


AE :3È% 
Le 31, midi vrai par fix hauteurs correfpondantes.. 11 30° 34 


Suivant les hauteurs du 30 , la pendule retardoit du 
TITI TANPAUC, lee ele ele els eue cOsie elle ele 33: 40 


Et le 317 à midi, de... ............. 29.22 


Elle avançoit par conféquent fur le mouv.' journalier. 4+ 18 


Ayant 


DES SCIENCES 457 

Ayant maintenant égard au retardement de {a pendule & 

à l'accélération de fon mouvement, on trouvera pour l'heure 
vraie des phafes de l'Eclipte, 


Le commencement, temps vrai, à. .....,,.,. PE dt 10 CE 
Entrée du bord de Mare humorum . .. ...... ++ 1.26, 24 
Eycho Er ets sels shit RS ROLE do I. 34. 14 
VAMPIRES UNE NIIRAMEANNS ss à (1.442. 30 
ERP TIAUS EN TE EU elS (ere le atele eitdie eloia « » sois amet CT AI Se 4,6 
Le milieu de Copernic. . .......... ee ss ete I. 50. 49 
Ératofthènes. . . ...... orreeeseeesesesee 1. 58. 43 
La tache lumineufe entre Ératofthènes & Héraclides.. 2. $.20 
Le bord inférieur de Mare neétaris., . .. .. .... 2. 18. 57 


Le 1.” Août je fis voile de Foulpointe avec l'efcadre. 


Say, étrang. Tome IV. : Mmm 


458 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


OBS E ROV AT A ON.S 


SUR 


L'HYDROCÉPHALE DE BEGLE. 


Par M. Marc oR EL, . Correfpondant de l'Académie, 


L£ fille de Begle, attaquée d'une Hydrocéphale remar- 
quble, a, pendant fa vie, fait tant de bruit dans le 
monde favant, donné lieu à tañt AT & les Journaux en 
ont tant parlé *, que le public me faura gré peut-être, de 
lui faire part de quelques nouvelles obfervations faites après 
fa mort. Je me détermine d'autant plus volontiers à les fui 
préfenter, qu'elles peuvent répandre un nouveau jour fur 
celles qui lui ont été déjà communiquées, & tourner à 
Vavantage de la Médecine & de lAnatomnie. Entièrement 
étranger à ces Sciences, je n'ai entrepris d'en parler, que 
pour conferver des faits dont on na point encore fait 
mention, & qu'il m'a part important de ne pas laifler périr 
dans Fobfcurité d'un filence en quelque forte injurieux à 
humanité. 

Le 23 Avril 17558 la nommée HR Chéraud, du 
village de Birambis, de la paroiïffe de Begle, diocèfe de Bor- 
deaux , époufe de Guillaume Ravot, Vigneron du même 
lieu, accoucha d’une fille, à a fuite d'une groffeffe heureufe 
& exempte de toute incommodité; la tête de cet enfant, 
plus grofle d'un tiers qu'elle ne-devoit l'être dans l'état na- 
turel, fuivant le rapport du Chirurgien-accoucheur, fit que 
laccouchement fut précédé de quelques douleurs aiguës. Huit 
jours après fa naïflance, les parens s’'aperçürent que fa tête 
groffifloit de plus en plus & qu'elle devenoit tranfparente ; 
is remarquèrent encore que les autres parties de fon corps, 


* Journal de Médecine, mois de Septembre 1755 ; PRE &” 
Jui uivantes ; mois de Novembre, même année, pages 381 àT fuivantes x 
mois de Février _ pages 8 à fuivantes, 


450. PL. XII 


7 


D. 


VAE. 


3 Tom 


Eran 


et 


DES SctrenNcCEest"iM 459 
fines & bien conformées en apparence, maigrifloïent cepen- 
dant, quoïiqu'elle fuçät avec facilité le Jait de fa mère, & 
qu'elle en prit la quantité convenable à fon âge. 

Ces particularités déterminèrent Ravot & fa femme à 
parcourir le royaume, afin de faire voir celle qui en étoit le 
fujet: pour remplir leur deflein & fe procurer par-là des 
reflources que la fortune leur avoit refufées, ils allèrent füc- 
ceflivement de ville en ville, s’arrétèrent plus Jong-temps dans 
les principales, mais leur plus long féjour fut dans la capitale, 
conune la plus digne de pofiéder le phénomène qu'ils offroient ; 
par-tout leur enfant, ont-ils dit, attira les regards des curieux, 
® fixa l'attention des Savans & des Académies, & intéreffa 
même fa curiofité du Roi. 

Le 6 Décembre 1756, ils arrivèrent à Narbonne, où 
J'étois alors ; le récit de toutes ces merveilles, me porta 
à en devenir le témoin: voici quelles furent d'abord mes 
obfervations. Cette fille âgée alors de dix-neuf mois treize 
jours, avoit la phyfionomie trifle, pâle, vieille, & rouloit 
des yeux livides, faillans & fort baiffés vers la paupière 
inférieure ; elle n'avoit prefque point de fourcils ni de cils 
aux paupières, fon nez étoit aplati & écrafé, fon front 
monftrueufement grand fe jettoit en dehors, fes cheveux, 
d'une couleur pluftôt jaune que blonde, étoient courts, fins 
& en petite quantité, fon crâne paroifloit mou & très-mince, 
il avoit vingt-huit pouces de circonférence: enfin, le corps 
de cet enfant qui n'avoit que deux pieds de hauteur, languifloit 
fous le poids énorme d'une groffe tête qu'un col fort mince 
pouvoit à peine foûtenir. 

Cette tête fingulière , au lieu d'être fphérique, comme 
elle left pour l'ordinaire dans la plufpart des perfonnes, 
étoit alongée & aplatie fur les côtés ; elle étoit fi tranfparente, 
qu'en plaçant une lumière à un des côtés, & la regardant par 
le côté oppolé, j'aperçus tout le trajet de la faux, je vis même 
diftinétement les ramifications des gros vaifleaux fanguins, 
mais il ne me fut pas poffible de voir le mouvement du fluide 
qu'ils contiennent , ainfi qu'on me f'avoit annoncé. 

Mmn ji 


460 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

: Deux jours après l’arrivée de la fille de Begle à Narbonne; 
elle y devint malade, d'une maladie que fa mère attribuoit 
à la fortie des dents, mais qu'on pourroit attribuer avec plus 
de fondement, au progrès de lhydrocéphale dont elle étoit 
attaquée; fon mal ayant augmenté, elle fuccomba & mourut 
lé 14 du mois de Décembre 175 6, âgée de dix-neuf mois 
vingt-un jours. 

Le bruit de fa mort fe répandit bien vite dans la ville; 
M." Ferrand & Bragard, Chirurgiens, en furent des premiers 
inflruits; leur zèle pour le progrès de leur art, les porta à 
demander aux parens la permiflion de difléquer la tête du 
cadavre , ils l'obtinrent au moyen de quelques largefles , & 
ils ne s’occupèrent plus que de la difleétion; ils la firent en 
préfence de leurs confrères, de quelques Médecins & de plu- 
fieurs curieux ; comme j'étois du nombre de ces derniers, il me 
fera aifé de donner un détail fuccinét de leurs obfervations. 

Ces Chirurgiens dépouillèrent d'abord la tête des parties 
molles qui la recouvroient , le crâne n’offrit alors qu’une boîte 
irrégulière , partie membraneufe, partie offeufe; fuivant les 
dimenfons qu'ils en prirent, la circonférence de ce crâne, 
felon f ligne horizontale, étoit de vingt-quatre pouces; fa 
longueur depuis la racine des os du nez jufqu'au trou de 
Foccipital, de vingt-deux pouces; & fa largeur depuis l'apo- 
phyfe maftoïde d'un temporal, jufqu’à la même apophyfe du 
temporal oppolé, de vingt pouces. Ù 

Pour vuider les eaux renfermées dans le crâne, l'on plon- 
gea à la partie fupérieure ou vertex , la pointe d’un biftouri, 
à linflant il en fortit un jet d’une eau auffr claire & auffz 
tranfparente que celle de fontaine; le poids de l'eau contenue 
dans le crâne, étoit d'environ huit livres. 

L'eau étant évacuée, la partie membraneufe du crâne s'affaiffa, 
& on reconnut que les os qui le formoient, étoient mous & 
flexibles, & que la plufpart n’étoient joints enfemble que 
par cette partie membraneufe & par quelques futures peu 
folides & fort pliantes encore; ces os changeoïent de conft- 
guration à da plus légère preffion. AL 


PT 


Se de — 


DES SCIENCES. 461 

Pour procéder à l'examen des parties contenues dans fe 
crâne, M.° Ferrand & Bragard pratiquèrent une feétion 
longitudinale depuis le bas de la fontanelle qui commençoit 
à la diftance d'un pouce & demi des os du nez, jufqu'à 1a 
partie fupérieure de foccipital. Le crâne ainfi ouvert, ils 
obfervèrent; 1° que la dure-mère étoit fort adhérente à fa” 
face interne, tant membraneufe qu'offeufe;.2 .° que l'évacuation 
des eaux avoit laiffé un grand vuide entre les parois fupérieures 
& latérales de ce crâne & le cerveau; 3." que les lobes 
oviformes de ce vifcère, fitués à la bafe du crâne, n'avoient 
que treize lignes de diamètre, & qu'ils n'étoient féparés & 
diflans lun de Fautre, après l'enlevement de la faux, que 
d'environ un pouce; 4.° qu'on ne diftinguoit pas fenfiblement 
les deux fubftances du cerveau, c'eft-à-dire, la cendrée ou 
corticale, de la médullaire; 5° qu'il n’y avoit point , au 
rapport des mêmes Chirurgiens, de glande pinéale ni de 
glande pituitaire; 6.° que la moëlle alongée & celle de l'épine, 
étoient beaucoup plus petites que dans l'état naturel; 7. que 
le cervelet & Îles membranes qui féparent fes lobes, ne fe 
reflentoient point de la mauvaife conformation des autres 
parties; 8.° enfin, que Îa tente du cervelet étoit rougeñtre 
& engorgée de fang. 

De ces différens faits, ne pourroit-on pas déduire Îes 
conféquences fuivantes? 1.” que l'hydrocéphale qui fait le fujet 
de cette obfervation , étoit, felon toutes les apparences, venue 
de naiffance; 2.° qu'elle étoit de l'efpèce de celles nommées 
par les auteurs , Aydrocéphale interne ; 3. que le fiége de la 
maladie étoit depuis long-temps entre la dure-mère & le 
cerveau; mais eft-ce là où elle avoit commencé! l'épanche- 
ment de l’humeur ne s’étoit-il pas fait d’abord en quelqu’autre 
endroit? & les hydragogues à petite dofe , les cautères, les 
fetons, les ponétions ménagées avec prudence, n’auroient-elles 
pas pû la détourner, l'empêcher de fe reproduire, procurer 
la prolongation des jours de la malade, & même fa guérifon? 
4. que le cerveau & la moëlle alongée n’avoient jamais pris 
leur accroiflement ordinaire, ou, ce qui paroït plus vrai 

IP Mmnm iij 


462 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
femblable, vû la grandeur des fofles moyennes du crâne, 

welles s'étoient fondues en férofité; $.° que ces organes, à 
caufe de leur petiteffe, ne féparoient pas & n'avoient point 
aflez de ce moteur fubtil qui nous eft inconnu & qui anime 
nos parties, d’où devoient néceflairement s'enfuivre la langueur 
& l'amaigriflement du corps de la fille; 6.° que le cervelet 
feulement, qui étoit dans l'état naturel, avoit entretenu, en 
quelque manière, fa vie, en fourniffant à quelques fonétions 
vitales. 

Ce font-là tout autant de queftions dont je laïffe Ia réfo- 
lution aux maîtres de l'art, elles peuvent donner lieu à une 
foule de fyflèmes dont la variété empêchera peut-être de 
reconnoître le vrai: je me garderai bien d'en former un 
en particulier, cette entreprife eft au deflus de mes forces, 
& elle exige des lumières & des connoiffances que je n'aï 
point; je me borneraï ici à donner fa defcription du crâne 
de la tête de la fille de Begle, & à rapporter les mefures 
des différentes parties qui la compofent; il eft effentiel d'avertir 
que ces melures n'ont été prifes qu'après que le crâne a été 
macéré dans l’eau-de- vie & enfuite féché. 

Ce crâne eft compofé d'une membrane mince unie; 
polie, forte & tranfparente, qui en fait à peu près la troifième 
partie ; des os imparfaits forment les deux autres parties. 

La membrane occupe principalement le haut de fa partie 
antérieure, de la fupérieure & de la poftérieure du crane, & 
elle eft continuée aux régions latérales & inférieures. 

Au coronal, elle commence à {a diflance d’un pouce & 
demi de la racine des os du nez, & forme, en montant & 
fe portant en arrière, un lofangé irrégulier de fept pouces 
de hauteur & de fix pouces & demi de largeur, qui repréfente 
aflez bien une fontanelle confidérable ; elle s'étend enfuite 
vers loccipital, fait dans fa route, la fonction de future 
fagittale, & a ici fix pouces de longueur & huit pouces & demi 
de largeur; dans ce dernier trajet, elle eft parfemée de 
plufieurs points d'offification plus ou moins grands & plus 


DES SCIENCES 463 
ou moins compactes : parvenue à la partie poflérieure des 
pariétaux & à la fupérieure de l'occipital, elle repréfente de 
nouveau, par le défaut d'offification des angles de ces os, 
une autre efpèce de fontanelle d'environ deux pouces de 
hauteur & de quatre pouces de largeur; cette fontanelle différe 
dé la première, en ce qu'elle fe trouve offifiée en quelques 
endroits. 

A Îa partie fupérieure de l'occipital, la membrane dont 
il eft queftion, fe partage en deux & fe porte de chaque 
côté de cet os, où elle fait l'office de future lambdoïde: {à 
longueur de chaque côté, eft à peu près de trois pouces, 
mais fa largeur n'eft pas égale, elle eft d'environ dix lignes 
à la droite & de cinq lignes feulement à la gauche: cette 
bifurcation eft également offlifiée, & les petits os qu'on y 
trouve, ont fix, huit, dix lignes de longueur, fur trois, quatre, 
cinq lignes de largeur ; leur figure eft à peu près pyramidale, 
& leur arrangement eft tel que la plufpart font placés en fens 
contraire , de manière que la bafe d’un de ces os répond à 
k pointe de celui qui lui eft oppolé: à la partie fupérieure 
de cette bifurcation, on trouve de chaque côté un petit os 
de figure triangulaire; ces deux os & ceux dont on vient de 
parler, font mieux formés du côté droit que du côté gauche, 
ils reflemblent aux os wormiens & aux éminences offeufes 
qui font communément en forme de tenons & de mortoifes 
aux bords des pariétaux & de l'occipital, & dont l'ufage eft 
d'engrainer ces os entr'eux. 

La membrane qu'on décrit eft continuée & fe termine 
entre les pariétaux & les temporaux qu'elle unit enfemble , 
fa longueur eft de chaque côté d'environ trois pouces quatre 
lignes, fa largeur n’eft pas égale, du côté droit elle eft d’un 
pouce quatre lignes, & du côté gauche, de fix lignes ; fa 
confiflance n'eft pas non plus la même, la partie de cette 
membrane qui avoifine l'occipital dans la longueur de deux 
pouces , eft entièrement parfemée d’offifications ; celle au 
contraire qui eft près de la future coronale, eft nette, unie, 
polie & tranfparente: dans cet efpace, ce corps membraneux 


464 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
eft de figure ovalaire, fa longueur du côté droit où il eft plus 
grand , eft d’un pouce dix lignes, & fa largeur d'un pouce. 

On a déjà remarqué que la membrane qu'on vient de 
décrire, fait à peu près la troifième partie du crâne de a fille 
de Begle, & que les deux autres parties font formées par des 
fubflances membrane - offeufes ou des os imparfaits. Il refte 
donc à donner la defcription & les melures de ces os. 

Ils font diaphanes, minces, flexibles, élaftiques, foit dans 
leur centre, foit, & encore plus, dans leur circonférence ; dans 
prefque tous on y voit, fans le fecours d'aucun verre, des 
fibres offeufes, groffes, longues, diftinétes, ifolées, couchées 
& appliquées fur fa membrane qui les entoure & dans laquelle 
elles fe perdent : en les examinant, il femble qu'on les voie 
Soffifier & qu'on prenne, pour ainfi dire, la Nature fur le fait, 
dans la formation de cet ouvrage. L'examen réfléchi de cette 
organifation ne feroit-il pas plus propre à faire connoître a 
manière dont s'opère l'oflification que les théories les plus 
brillantes & les hypothèfes les plus ingénieufes ? 

Le coronal eft très-difforme, il ef partagé en deux; Ia 
grande échancrure qui fert à la formation de la fontanelle, 
lui donne une figure qui approche de celle d’un cœur dont 
la pointe feroit en bas & la bafe en haut; dans fes parties 
latérales, cet os forme en devant deux boffes confidérables 
qui répondent à des cavités creufées dans le crâne. La partie 
inférieure du frontal qui concourt à {a formation des foffes 
orbitaires, eft prefque tout-à-fait membraneufe, elle eft 
convexe dans ces fofles, le tou ou échancrure furcillière 
manque entièrement ; la hauteur du coronal, à la prendre 
du milieu du rebord furcillier, eft de chaque côté de quatre 
pouces huit lignes, & fa plus grande largeur eft de neuf 
pouces. 

Les pariétaux ne font pas moins remarquables, fans une 
partie de leur angle antérieur & inférieur du côté des temples, 
leur figure feroit prefque ronde, elle eft affez reffemblante 
à celle d’une calotte; le trou que lon trouve ordinairement 
près leur bord fupérieur, manque de chaque côté, fa 

profondeur 


Sa : à 


DES SCIENCES 465 
profondeur de la concavité du pariétal droit, eft d’un pouce 
trois lignes, celle de la concavité du pariétal gauche d'un 
pouce cinq lignes; la hauteur de ces os, depuis le bord 
temporal jufqu'au fagittal, eft de fix pouces, leur largeur prife 
du bord coronal jufqu'au bord occipital, n'eft pas égale, celle 
du pariétal droit eft de fix pouces, & celle du pariétal gauche 
de fix pouces quatre lignes ; leur circonférence eft auffi inégale, 
celle du parictal droit eft de dix-neuf pouces, tandis que celle 
du pariétal gauche n’eft que de dix-huit pouces cinq lignes, 
la texture de celui-ci eft plus ferrée & plus compacte que 
la texture de celui-là. 

L'occipital repréfente un lofange irrégulier, fes bords 
fupérieurs ne font point denielés & anguleux, il y a affez 
d'échancrure & d’inégalités aux bords inférieurs; cet os eft 
partagé en deux pièces par une future tranfvérfale qui reflemble 
affez à une double S romaine, fon apophyfe bafilaire eft encore 
epiphyfe, fon grand trou impair ou fpinal eft plus petit que 
de coùtume, les petits trous condiloïdiens antérieurs peuvent 
à peine être aperçus, les poftérieurs manquent totalement ; 
Voccipital a depuis le bord de fon échancrure jufqu’à l'extré- 
mité de lapophyfe bafilaire, cinq pouces trois lignes de 
longueur , & cinq pouces cinq lignes dans fa plus grande 
largeur; cet os eft le plus ferme de tous ceux du crâne. 

Les temporaux n'offrent rien de remarquable , ils font 
d'ailleurs fi défigurés, foit pour avoir été tels d’origine, foit 
par la difficulté qu'il y a à bien difféquer un corps monftrueux, 
qu'il ne feroit pas aifé de les décrire: la longueur de ces os, 
prife de devant en arrière, eft de deux pouces fix lignes, 
& leur largeur melurée de haut en bas, eft de deux pouces. 

Il faut obferver que les bords des différens os dont on 
vient de parler, fe trouvent unis aux endroits où ils fe 
joignent à la membrane décrite plus haut , au lieu d’être den- 
telés comme ils le font quand ils fe joignent entre eux. 

Les apophyfes ou épiphyfes externes du fphénoïde ont 
été mutilées, ainfi que celles des temporaux , leurs petites 
ailes font prefque tout-à-fait membraneufes ; on ne trouve 

Say. étrang. Tome 1V. . Nan 


466 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

point les apophyfes clinoïdes antérieures & les trous maxillaires 
fupérieurs du fphénoïde, les autres trous ou fentes pratiquées 
à cet os, ou à fa formation defquelles il contribue, n’exiftent 


qu'imparfaitement, elles font couvertes d’une membrane qui - 


les dérobe au premier coup d'œil; la longueur du fphénoïde, 
prife dans le crâne, eft d’un pouce fept lignes, & la largeur 
depuis l'une de fes grandes ailes jufqu'à l'autre, eft de quatre 
pouces fept lignes. 
L'ethmoïde a été prefque entièrement détruit par Ja 
diflection ; le peu qui en refte paroît pluftôt membraneux 
u’offeux. 4 
Telles font les obfervations qui ont été faites fur l’hydro- 
céphale de Begle; il en eft certainement bien d'autres qu'on 
pourroit faire encore, mais mon deffein n’eft pas de m'en 
occuper. Pour mettre /les Savans- en état d'y fuppléer & de 
corriger en même temps les erreurs dans lefquelles je puis 
être tombé, j'ai l'honneur d'envoyer à l Académie le crâne 
dont je viens de donner la defcription ; je me croirai heureux 
fi elle daigne agréer ce préfent & le recevoir comme un 
hommage que je rends à la fupériorité de fes lumières, & 
comme un gage de mon zèle pour le progrès des Sciences. 


Dies} SIC HUE NICENS 467 


M É MOIRE 
SUR UN ÉCHINITE SINGULIER. 


Par M.* DE Luc, Citoyens de Genève. 
N ous croyons devoir aux Naturalifies en général, & 


principalement à ceux qui font une étude particulière 
de l'Oryétologie , la communication d'une découverte inté- 
reffante dans ce genre-là; les conféquences qui en réfulient, 
pourront fervir de réponfe aux objections que l'on fait encore 
aujourd’hui contre f’analogie de certaines pétrifications avec 
les corps marins qui leur reffemblent , & réaliferont les 
conjectures d’un grand nombre d'Obfervateurs fur Ja nature 
d'un foffile très-connu fous le nom de Pierre judaïque. 

Un des argumens de ceux qui penfent encore que les 
pétrifications dont nous venons de parler, font des foffiles 
naturels à la terre, eft tiré de ce que plufieurs de ces foffiles 
n'ont aucun rapport avec des corps marins connus; tels font, 
la bélemnite, la pierre judaïque, Ya corne d'ammon ; on mettoit 
aufli de ce nombre les sérébratules & les entroques. 

D'heureufes découvertes ont déjà coupé plufieurs des 
branches auxquelles ces Naturalifles s'arrêtoient; on trouve 
des térébratules naturelles , ce font ces coquilles nommées 
le cog & la poule , becs de perroquets où anomies : nous en 
avons de quatre efpèces dans notre Cabinet, dont les unes 
font unies & d’autres ftriées. On a trouvé l'animal marin 
qui donne les entroches étoilés ; M.” de Boisjourdain le 
pofsède dans fon Cabinet, M. Guettard vient d'en informer 
les Naturaliftes, par un Mémoire très-inftruétif fur les corps 
marins de cette efpèce, tant foffiles que naturels. 

Mais ce n'eft pas feulement par des corps analogues tirés de 
la mer, que l'on peut déterminer la nature de certains foffiles, 
ou du moins les faire rentrer dans la claffe de ceux qui 
reflemblent à des corps marins; il ne faut pour cela que 

Nnnij 


468 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
démontrer qu'ils ont la même origine, c'eft ce que nous pouvons 
faire pour la bélemmite. Nous avons dans notre Cabinet une 
huitre pétrifiée, de l'efpèce nommée crére- de -cog , attachée 
fur une fort groffe bélemnite , dont elle embraffe la moitié 
de la circonférence ; ces deux corps ont donc {a même 
origine, puifqu'ils font adhérens l'un à f'autre. 

Les pierres judaïques qui font ici notre principal objet, 
font regardées par quelques Naturaliftes comme des fofliles 
naturels, des pierres qui ont une forme régulière, telles que 
les cryftaux, les flalactites, &c. d'autres les ont prifes pour 
des fruits pétrifiés; cependant examinées par de bons obfer- 
vateurs, elles ont été placées par analogie dans la clafle des 
piquans d'ourfins : mais on n'en avoit point trouvé jufqu’à 
prélent qui fuffent adhérentes à un échinite, & par conféquent 
on m'avoit point encore de démonfiration. 

C'eft pour lever ce doute, que nous avons l'honneur de 
préfenter à l'Académie , le deffein d’un Sïlex , fur lequel eft 
un Échinite avec plufieurs de fes pointes, que nous poffédons 
dans notre Cabinet. x 

Ce beau morceau a été trouvé dans les carrières de craie, 

rès de Gravefend , bourg fitué dans la province de Kent, 
fur le bord de la Tamife. Un ouvrier chargé par M. Pourd, 
Naturalifte Anglois, de lui conferver tout ce qu’il découvriroit 
de curieux dans ces carrières, lui apporta cet Échinite auffitôt 
qu'il l'eut trouvé, & cet intéreflant foffile fit dès-lors un 
des plus beaux ornemens du Cabinet de M. Pound. Ce Natu- 
ralifle mourut quelques années après, fes héritiers firent une 
vente publique de fon Cabinet; & Jun de nous étant alors 
à Londres, & préfent à cette vente, acheta le lot dont cet 
échinite faifoit partie : perfonne n'en ‘avoit connu le prix 
jufqu'au moment de l'expédition, on ne tarda pas à le faire, 
& chacun alors le regretta. 

La première figure repréfente un côté de cet échinite; 
fa partie fupérieure eft enfévelie dans le filex, dont il eft 
lui-même rempli, comme on le voit à fa bafe qui eft rompue. 
« eft une pierre judaïque , où pour mieux dire, un des 


Jar Ætran 4 Lom.L. Page 468.X11. 


ZIagrars Salp 


DE ‘S ASE TI Er N'ES 469 
piquans adhérent au filex, & attaché fur un des mamelons 
de l'échinite; à eft un autre piquant prefque enféveli; c eft 
l'empreinte d'un troifième , dont le pédicule fort au travers 
d'une éminence du filex. On voit en 4, le pédicule d'un 
quatrième piquant un peu déphcé , & dont l'empreinte eft 
auffi fur le filex, rompu dans cet endroit-là. 

Le même échinite eft repréfenté dans un autre fens, par 
la feconde figure; 4 eft un piquant de la même elpèce de 
ceux qui font défignés par a à dans la figure première, c'eft- 
ä-dire, dont le bout eft arrondi; #2b4 font quatre autres 
piquans, ils font pointus & répondent parfaitement à l’efpèce 
de pierre judaïque la plus abondante. Tous ces piquans ont 
été un peu déplacés ; « & d font les impreflions & fragmens 
défignés par les mêmes lettres dans la figure première. 

Cette pétrification ne laifle donc plus aucun doute fur Ja 
nature & la vraie origine des pierres judaïques ; elle prouve 
encore qu'un même ourfin peut avoir des piquans de figure 
différente. 

On trouve dans Ia craie des mêmes carrières dont ce 
morceau a été tiré, & fur les pierres à feu qu’elle renferme, 
des piquans arrondis en forme de bouteilles & de plufieurs 
autres figures; mais tous font ifolés, de même que toutes - 
les autres pierres judaïques trouvées jufqu'à préfent : on ne 
doit pas en être furpris, puifque les ourfins naturels perdent 
leurs pointes fi facilement que prefque tous ceux que l'on 
voit dans les Cabinets des Naturaliftes, en font dépouillés. 


Y 
AÆESS 


Nnn ïj 


470 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


MÉMOIRE 


CONTENANT 


.L'ANALYSE D'UNE EAU COLORÉE, 
: QUI 
SE TROUVE DANS UNE FONTAINE A DOUAI. 


Par M. D'ABOVILLE. 


P°:* arriver à la fontaine dont il s'agit, on defcend 
par un efcalier de quinze à dix-huit marches, dans une 
cave voütée très - vafte, fituée à l'endroit de la ville le plus 
élevé ; cette cave eft terminée par une galerie qui donne 
entrée à plufieurs caveaux: c'eft au milieu d'un de ces caveaux 
que fe trouve la fontaine; à quelques pas plus loin, dans Ja 
mème galerie , eft placé un puits d’eau ordinaire dont le 
niveau eft beaucoup plus bas que celui de l'eau colorée. Le 
baflin qui contient cette eau, eft quarré, chaque côté ayant 
12 pieds +; il eft pavé, revêtu & voûté de briques: au 
milieu de la voûte eft une ouverture quarrée dont les côtés 
ont dix-huit pouces; elle fe ferme avec une pierre plate, qui 
s'étant trouvée couverte de terre, laifloit ignorer depuis un 
temps immémorial, lexiftence de cette fontaine, jufqu'à 
l'année 1744 qu'on la découvrit par hafard. 

Les propriétaires de la maifon où fe trouve cette fontaine, 
difent que leurs ancêtres paroiflent n’en avoir jamais eu con- 
noiflance ; l'Hiftoire particulière de Douai n'en parle point, 
& l'on ne trouve aucun papier qui en fafle mention. 

En mefurant les dimenfions de fon baflin, je remarquai 
qu'un pied droit de la voûte du caveau portoit fur celle de 
la fontaine; obfervation qui prouve qu'elle eft au moins 
auffi ancienne que la maifon, laquelle fubfifte depuis plufieurs 
fiècles. 

Je ne penfe pas, comme le font plufieurs perfonnes, que 


D'E s/SfeEMensS L 47 
cette fontaine ait été confhruite pour de l'eau ordinaire, & 
que par la fuite, étant furvenue une eau qui ne pouvoit fervir | 
aux ouvrages domeftiques, on ait été obligé de l'abandonner:; 
li grandeur feule de ce baffin paroît annoncer qu'il a été fait 
pour contenir une eau qui avoit des ufages particuliers. Il eft 
vrai que plus on fuppofera qu'elle en a eu, & plus il faudra, 
pour concilier l'oubli où elle étoit tombée, reculer le temps 
où elle avoit des propriétés connues, ce qui n'apporte aucune 
difficulté. Je ne fais fi c'eft le préjugé où je fuis, qui me fait 
apercevoir, dans ce qui environne cette fontaine, des marques 
qui le favorifent : une porte de la cave, aflez grande, conf- 
truite de marbre brut, & qui donne fur la rue, l'étendue 
mène de cette cave, les caveaux, la galerie qui conduit à 
une cour de derrière, femblent laifier entrevoir les traces d’une 
difpofition relative à la fontaine; foit que cette cave fervit, 
ainfs que les caveaux, à avoir toûjours des approvifionnemens 
d'eau en bouteilles, foit qu'avec la cour qui y communique, 
ce füt un attelier où l'on failoit fubir diverfes opérations à 
cette eau, ou pour en extraire les principes, ou pour les 
combiner avec d'autres fubftances. Mais il fera plus raifonnable 

_de faire un examen de cette eau, qui conduile à favoir fi 
elle pourra être de quelqu'utilité, que de $arrêter à former 
des conjectures fur celles qu'elle peut avoir eues. 

Cette eau eft brune, tranfparente & d'une couleur exaéte- 
ment femblable à celle du café parfaitement clarifié: elle mouffà 
lorfqu'on la verfe dans un vafe; elle n’a aucune odeur, & prefque 
point de goût; un palais délicat y aperçoit cependant une 
foible faveur qui rappelle Le foie de foufre ou l'œuf pourri, 
Sa pefanteur fpécifique eft à celle de l'eau de pluie non di. 
tillée, à peu près comme 155 à 1 54. 

Des perfonnes qui ont demeuré dans la maifon où eft 
cette fontaine, m'ont dit que l'ayant fait vuider plufieurs fois 
avec des pompes, elles avoient remarqué qu'il ne falloit qu'un 
quart d'heure pour que l’eau revint à fon niveau ordinaire, 
qu'on a remarqué être, fans jamais varier, de 2 pieds 10 
pouces au deffus du fond du bafin. Ce réfervoir ayant 


472 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
156 pieds + quarrés, c'eftenviron 442 pieds & cubes d'eaù 
qui y entrent en quinze minutes ; & comme elle sy trouve 
alors en équilibre avec celle de la fource, il s'écouleroit ie 
double de cette quantité dans le même temps, fi on ne la 
laifloit point s'élever au deflus de l'orifice par où elle fort, & 
que je fuppofe être au fond du baffin; ce qui feroit plus de 
s9 pieds cubes que cette fource pourroit fournir par minute. 
Je ne doute pas qu'on ne m'ait exagéré de beaucoup, en 
me difant qu'il ne falloit qu'un quart d'heure pour renouveler 
l'eau de ce bafin; mais fallüt-il une heure, cette fource feroit 
toûjours abondante, pouvant fournir environ 1 $ pieds cubes 
d'eau par minute. t 

Il eft à remarquer que quelque épuifement qu'on ait fait, 
la couleur. de l’eau n’a jamais paru s’afloiblir ; elle ne pourroit 
cependant continuer à venir toüjours aufli chargée, fi elle ne 
failoit qu'un pañlage de peu de durée dans les matières qu'elle 
dépouille. Ces matières doivent être jugées fe rencontrer en 
quantité d'autant plus grande, qu'on fuppofera qu'il faille plus 
de temps à l'eau pour en détacher les principes qu'elle leur 
enlève, & proportionnément auffi à l'abondance de la fource, 
foit que venant de fort loin, elle ait une longue route à par- 
courir fur ces matières, foit que les imbibant, elle tranfpire 
& s'échappe à la fois d'endroits d'autant plus nombreux que 
cette filtration fe fait plus lentement, 

Je demanderai ici à ceux qui ont cru que l'eau de cette 
fontaine pouvoit tirer fà teinture de quelque cloaque ou de 
quelques latrines des environs, comment ils conçoivent qu'une 
telle caufe puiffe fournir, fans altération, à une fource auffr 
abondante? comment a-t-on pü s’imaginer qu'une telle ean 
pôt être fans goût fenfible & entièrement fans odeur, toù- 
jours très-tranfparente & ne fe corrompant jamais? J'ai vû 
une bouteille de l'eau qui fe trouva dans la fontaine lorfqu'on 
en fit l'ouverture, & qu'on ne peut douter y avoir féjourné 
très-long-temps: j'ai comparé de cette eau , encore gardée 
jufqu'à préfent, avec celle qu'on y puife aujourd'hui, & je n'ai 
aperçü aucune différence. Je ne cite tout ceci que a 

es 


D EST SCIE NC: EUS 47) 
des raifons qui devoient fe préfenter d’elles-mêmes contre 
l'établiffement d'une opinion ridicule, que je n’aurois point 
rapportée, fi elle ne m'avoit paru aflez accréditée pour écarter 
l'attention des perfonnes qui pourroient faire quelques recher- 
ches fur cette fontaine; mais pour détruire cette opinion, 
il fuffra de faire connoître les fubftances auxquelles cette eau 
doit fa teinture. 

Je vais donc expofer , avec autant d'ordre & d’exaétitude 
qu'il me fera pofhble, les expériences que j'ai faites à ce fujet; 
mon peu de connoiflance en Chymie, le défaut de commo- 
dités & d'inflrumens ne m'ont pas permis de les faire mieux ; 
mais je n'ai fait que fuppléer au filence des Chymiftes; ainfi 
je mériterai de l'indulgence fi ce Mémoire vaut mieux que 
rien. 

1. L'eau brune verdit.le firop violat & plufieurs autres 
couleurs bleues ou violettes des végétaux, & rétablit celles 
qui ont été légèrement rougies par un foible acide. 

2. Elle fe décompolfe par le mélange des acides; à mefure 
que l’on y en verfe, elle fe trouble, & il s'y forme des coa- 
gulum , qui d'abord furnagent prefque tous & fe précipitent 
enfuite; mais quelque concentrés que foient ces acides, en 
quelque quantité qu'ils foient & de quelque manière qu'on 
sy prenne, ils ne peuvent jamais précipiter entièrement la 
partie colorante de cette eau, elle conferve, après la précipi- 
tation, une couleur de vin de Malaga. 

3.° Si l'acide eft en petite quantité ou trop foible, il ne fe 
fait aucune décompofition : c’eft fans doute par cette dernière 
raïfon que la crême ou les cryftaux de tartre, ni l'efprit de 
vinaigre ne la troublent nullement. 

4+ Si lon ajoûte une certaine quantité de cette eau à celle 
qui a été précipitée par un acide, les coagulum fe diflolvent, 
& Ja liqueur reprend fa tranfparence. 

5 La même chofe arrive fi au lieu d’une nouvelle quantité 
de la même eau, on y ajoûte un alkali fixe ou volatil. 

6.” L'on juge bien par article précédent , que fi l'on joint à 
cette eau pure un alkali , il ne doit nullement altérer fa couleur 


Sav. étrang, Tome IV. : Ooo 


474 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
ni fa tranfparence, il la met au contraire en état de recevoir 
une plus grande quantité d'acide fans fe décompoler. 

7. Les acides qui, comme nous l'avons dit ci-deffus, 
ne peuvent , lorfqu'ils font purs, précipiter entièrement la 
fubftance qui colore l’eau que nous examinons, deviennent, 
fans en excepter l'acide végétal, en état de le faire, lorfqu'ils 
font combinés avec certaines fubflances, particulièrement avec 
les fubflances métalliques; de forte que les aluns, les vitriols 
de cuivre, de fer & de zinc, les diflolutions d'argent & de 
mercure dans l'acide nitreux , celle d'étain dans l’efprit de {el 
& le fucre de faturne, laifent la liqueur, après la précipitation, 
parfaitement limpide. 

8.” J'ai dit que les acides devenoient en état de produire 
cet effet, lorfqu'ils étoient combinés feulement avec certaines 
fubftances ; premièrement, parce que les fels neutres, qui ont 
pour bafe des alkalis, font entièrement incapables de produire 
aucun effet fur notre eau, & que d’ailleurs plufieurs combi- 
maifons d'acides avec des fubflances métalliques, n’en produifent 
guère plus que des acides purs. T'els font le fublimé corrofif 
& la diflolution d'or. 

Mais à propos de celle-ci, je me fuis propofé, avant d'aller 
plus loin, de rapporter en paflant quelques particularités , qui 
ne me paroiffant devoir fournir aucunes lumières pour arriver 
à notre but, n’auroient point trouvé ici de place, fi elles ne 
m'avoient paru affez fingulières pour ne devoir pas être paflées 
fous filence. 

Ayant verfé fur un vérre de notre eau brune quelques 
gouttes de diflolution d'or, au bout de quelques jours, les 
coagulum étant tous précipités, la furface de I liqueur fe trou- 
voit comme poudrée d’or & parfemée d’yeux, tels qu'on en 
voit fur du bouillon. Ces yeux étoient d'une belle couleur 
d'or; les parois intérieures du verre étoient tapiffées de rami- 
fications de la même couleur, & toute la maffe de la liqueur 
chargée de parcelles d'or, qui, s'étant rapprochées les unes 
des autres, avoient acquis aflez d'étendue pour être vifibles. 
Comme l'eau régale que j'avois employée étoit fi peu chargée 


D'ÉVS TN SXCUT E Nc Hit 475 
d'or, que j'eufle même douté qu'elle en tint la moindre partie, 
fins les phénomènes que je viens de rapporter, j'efpérai les 
voir d'une manière encore plus marquée, en employant une 
diffolution qui contint autant d'or qu'il feroit poffible; mais 
je n'ai au contraire pü les faire reparoître que très-foiblement. 
Les yeux, au lieu d’être de couleur d'or, n'avoient qu'une 
couleur métallique purpurine & fans opacité, & point de 
yamification aux parois du vale. Je ne crois pas cependant 
que le fuccès de cette expérience dépende du plus où moins 
d'or que l'eau régale tient en diflolution, mais pluftôt de 
quelqu'autre circonftance qui sétoit rencontrée la première 
fois. Ce qui m'autorife même à penfer ainfr, c'eft que malgré 

ue dans les répétitions que j'ai faites de cette expérience, 
la diffolution fût la même, quant à la quantité de métal, 
puifqu'il y étoit jufqu'à parfaite faturation, néanmoins les 
phénomènes paroifloient plus difpofés à fe montrer certaines 
fois que d'autres, fans que cela fuivit la façon dont je m'y 
étois pris, foit en verfant la diflolution goutte à goutte 
fur l'eau, ou en verfant l'eau petit à petit fur la diflolution, 
ou en les uniflant brufquement enfemble. 11 m'a paru qu'en 
général ils étoient d'autant plus éloignés de paroître, que lors 
du mélange, le précipité prenoit une couleur plus approchante 
de celle de l'or fulminant : peut-être tout le myflère dépend-il 
de la proportion où font les deux acides, Fun par rapport à 
Yautre, dans la compofition de l'eau régale, que je n'ai fait 

u'à vüe d'œil à mefure que j'en ai eu befoin. Mais voici 
un épifode aflez long, revenons à notre objet. 

9 J'ai, par le moyen de la trituration & à l’aide d'un 
peu de chaleur, fait diffoudre de l'huile d'olive dans l'eau 
brune, en petite quantité à la vérité, & ce mélange étoit 
trouble ; néanmoins l'union étoit aflez intime pour que des 
filtrations réitérées n'aient pà féparer l'huile. 

10 Puifque l'eau brune diffout les huiles, à plus forte 
raifon les favons; aufli conferve-t-elle avec eux une grande 
partie de fa diaphanéité; mais ce qu'il y a de particulier, c'eft 
que le moindre mélange d'eau de puits ef plus capable qu'un 

| Oooï 


V. le fapplémenr. 


276 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
foible acide, tel que le vinaigre, de coaguler le favon qu'elle 
tient en diflolution. 

11. Lorfqu'on a précipité l'eau brune par quelques-unes 
des fubftances falines mentionnées à article 7, & qu'on l'a 
filtrée, il refte fur le filtre une matièrequi a la confiftance de 
gelée, qui fe durcit en féchant, & devient brune, friable & 
Juifante dans fes caflures; tout cela plus où moins, fuivant la 
fubflance qui a fervi à la précipiter, avec la bafe de laquelle 
elle fe trouve mêlée. Cette fubflance a toute l'apparence d'un 
vrai bitume ; elle a, comme lui, la propriété de s'amollir 
par la chaleur, d'être inflammable & de fe réduire en char- 
bon, d'être difloiuble dans l'efprit de vin * & par les alkalis, 
& de ne donner aucune prife à l'eau ni aux acides. 

52. Quant à l’eau qui a paffé par le filtre, elle ne montre 
aucune qualité acide ni alkaline, du moins s'il n'a été employé 
de précipitant que ce qui étoit néceflaire pour produire la 
précipitation entière. 


Ayant raflemblé les eaux que j'avois décantées de deflus : 


des précipitations faites par des aluns & des vitriols, & les 
ayant fait évaporer jufqu'à un certain point, il s'y eft formé 
des cryflaux en aiguilles très-petits & très-déliés® refflemblant 
! Ÿ . . , . [7 
à ce fil de verre dont on fait des aigrettes, qu'on auroit brifé. 
Je n'ai pas eu une aflez grande quantité de ce {el pour 
pouvoir l'examiner. 
13. J'ai diftillé dans un alambic de verre, à la chaleur da 
bain-marie, environ trois pintes d’eau brune. Quoique j'euffe 
se de 
difpofé, pour accélérer la condenfation des vapeurs, un robinet 
qui verfoit fans ceffe de l'eau froide fur le chapiteau, il nr'a 
fallu environ trente - fix heures pour retirer à peu près là 
quantité d’eau que j'avois mife en diflillation. Celle qni a 
paffé dans le récipient eft parfaitement claire & limpide ; elle 
* J'ai mis au nombre des ana- | peut s'être développée dans la 
logies de cette fubftance avec les | fubftance que nous lui comparons, 
bitumes, fa diflolubilité dans l’ef- | par l’union qu’elle avoit avec un 
prit de vin, parce que les bitumes | alkali, comme cela arrive aux huiles 


ne paroiflent guère éloignés d’avoir | qu’on retire des favons. 
cette propriété , laquelle d’ailleurs . 


* 
l 


DE S'ASVERIE EUNEICAENSI 

a un petit goût d'amertume & une odeur defagréable, ref 
femblant un peu, lorfqu'elle vient d'être diflillée, à cette odeur 
aigre que l’on fent en approchant du lit d'un homme qui a 
la vie: le lendemain elle a plus de rapport à celle de levain 
de pâte, & enfin au bout de quelques jours ce n'eft plus 
qu'une petite odeur de fumée, femblible à celle de l'eau de 
goudron, qui diminue à mefure que l'eau eft gardée, & s'éteint 
par la fuite entièrement, de même que le goût d’amertume, 
fans qu'il refte la plus foible apparence de goût ni d'odeur, 
quoique cette eau ait toüjours été dans des bouteilles bien 
bouchées. Cette eau diftillée eft un peu plus légère que l'eau 
de pluie; elle n'altère en aucune manière les couleurs bleues 
végétales, diflout parfaitement le favon, & ne fe trouble nul- 
lement en recevant des acides, des alkalis ou toutes autres 
fubftances falines : les diffolutions d'argent & de mercure 
dans l'efprit de nitre, ni le {el de faturne, fi propre à déceler 
limpureté de l'eau qu'il ne s’en trouve guère qui foûtienne 
ces épreuves, ne font éprouver à celle-ci aucun changement 
que celui de fe trouver unie à ces els métalliques. Elle n’en 
éprouve pas davantage de l'efprit de vin parfaitement pur ; 
fi celui-ci eft altéré par quelque huile, le mélange prend une 
couleur laiteufe. En un mot, je croirois cette eau diflillée 
parfaitement pure, fr, lorfque je l'ai foûmife à ces expériences, 
elle eût été auf infipide qu'elle l’eft devenue Ps avoir été 
gardée «quelques mois. 

14. Il refte au fond de la cucurbite un réfidu qui a la 
confiftance de miel, une couleur brune prefque noire & l’odeur 
de fumée ; fa faveur eft alkaline un peu falée. Ce réfidu def. 
féché attire fortement l'humidité de l'air ; il verdit les couleurs 
bleues des végétaux, & fait ébullition en s’uniffant aux acides, 
avec lequels il prend une confiftance plus folide. Ces com- 
binaïfons font diffolubles dans l'eau; il y a cependant une 
partie qui fe précipite. 

L'acide vitriolique contracte, en s’uniffant à cette fubftance; 
l'odeur de l'efprit fulfureux volatil. 

Outre le réfidu dont nous venons de parier, l'intérieur de 

| O 00 iij 


478 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

la cucurbite étoit enduit d’une terre feuilletée, mais qui ne 
doit pas, je crois, être regardée comme un principe parti- 
culier à cette eau. Toutes celles qu’on diflille en fourniflent 
de femblables. 

15. Si lon diflout du réfidu dans Feau provenue de la 
diftillation, ou même de l'eau de pluie, jufqu'à ce qu'elle ait 
pris la même couleur que celle de 11 fontaine, cette eau ré- 
générée recouvre toutes les propriétés qu'elle avoit avant d'être 
décompolée, à cette différence près, que fi c'eft l'eau diftillée 
qu'on emploie, elle conferve encore, après être rejointe à fon 
réfidu, le goût & lodeur qu'elle a acquis dans la diflillation, 
mais il m'a paru qu'elle le perdoit plus promptement après 
cette opération ; de forte qu’au bout de quelques jours, l'amer- 
tume étant tout-à-fait pañlée, on retrouve cette fadeur de 
l'eau brune, & alors cette eau régénérée ne differe plus en 
rien de celle qu'on puife à la fource. 

16. Il fe trouve au fond de la fontaine trois ou quatre 
pouces de limon, qui n'eft en plus grande partie que des 
fragmens de briques & de ciment qui fe font apparemment 
détachés de la voûte: l'autre partie eft une terre argilleufe. 
L'odeur de ce limon eft la mème que celle de cette crafle 
onctueule qui fe ramafle dans l'intérieur des armes à feu: 
Jorfqu'il eft fec, fon odeur eft très-fulfureufe. 

J'ai mis une poignée de ce limon defféché fur une tuile 
placée fur un fourneau, avec un gobelet de cryflal renverfé 
deflus , il s’eft d’abord condenfé contre l’intérieur du gobelet 
un phlesme d'une odeur très - fétide ; enfuite eft venue une 
huile brune épaiffe, de la même odeur que le phleome, mais 
encore plus forte & plus defagréable : j'avois foin de renouveler 
de gobelet lorfque les gouttes étoient prêtes à tomber für la 
tuile. Lorfqu'il ne s'éleva plus d'huile, & que le limon eut ceffé 
d’exhaler cette odeur fétide, je le couvris d'un gobelet, au 


fond duquel j'avois fufpendu une pièce d'argent, & je pouffai 


le feu vivement pendant plus d'une heure; la pièce d'argent 
prit, mais très - foiblement, les couleurs que le foufre donne 
ordinairement à ce métal, 


CARE 


_— 


+ 


Te LÉ nee ro vu 


DES SCIENCES 479 

J'ajoûterai à lexpofition de mes expériences, que le 
propriétaire de la maifon où fe trouve la fontaine, m'a dit 
avoir bu & fait boire de fon eau à plufieurs perfonnes, & 
même en quantité aflez confidérable, fans qu'ils en aient fenti 
la moindre incommodité; mais que quelques perfonnes, ex- 
citées, par bravade ou par défr, à en boire en grande quantité, 
en avoient été purgées, mais fans aucune tranchée ni aucun 
accident. 

Je n'aï pas cru devoir étendre chaque article par d'inutiles 
réflexions fur mes expériences: je me fuis contenté de rendre 
compte avec exactitude des plus petites circonftances, de 
celles même que j'aurois jugées indifférentes, & qui pourront 
ne pas l'être pour un Phyficien plus éclairé. 

L'idée générale que cette ébauche d'analyfe peut donner 
fur l'eau brune, eft qu’elle tient cette couleur d'une fubftance 
bitumineufe, rendue diffoluble dans l’eau par le concours d’un 
alkali fixe, lequel même eft dans cette eau furabondant à la 
mixtion favonneufe. Je laifle aux Chymiftes à examiner plus 
particulièrement ces principes, & aux Médecins à juger fi 
Veau, dans laquelle ils font combinés, peut être propre à 
détruire quelques vices du corps hunuin. 

L'analogie qu'elle a avec celies de Plombières, en tant qu’elles 
font favonneufes l’une & l'autre, me fait penfer qu'elles pour- 
roient avoir quelques propriétés communes, mais étant diffé- 
rentes à d'autres égards, elles en ont fans doute chacune qui leur 
font propres. Ne pourroit-on pas efpérer de rencontrer dans 
celles de Douai la propriété que le fameux remède de M.'e 
Stephens a confirmé appartenir fpécialement aux fubftances 
favonneufes’ Je me permettrai contre la loi que je m'étois faite, 
une réflexion à ce fujet fur la décompofition de l'eau brune par 
les aluns. L'acide vitriolique feul ne pouvant, en suniffant à 
l'alkali, médiateur entre le bitume & l’eau , le détacher entière- 
ment du premier, il ne peut acquérir cette puiffance dans Falun 
que par le fecours que lui prête la bafe qu’il quitte pour s'unir à 
l'alkali, laquelle pour lors , tirant le bitume de fon côté, achève 
de le féparer de l'alkali, que l'acide tire du fien. L'afhnité que 


‘ 

480 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
cette expérience démontre entre les terres abforbantes & Ja 
fubftance bitumineufe de l'eau brune, eft un préjugé de plus pour 
croire qu'elle ne doit pas être moins que tout autre médicament 
favonneux, un menftrue propre à diffoudre la pierre de la veffie, 
& elle aura, dans toute occafion, l'avantage fur la plufpart des 
remèdes de cette efpèce, de réfifter aux acides jufqu’à un certain 
point fans fe décompofer ; inconvénient qui fait que les autres 
peuvent rarement paffer les premières voies fans altération, qu’on 
ne peut en attendre de bons eflets qu'avec certains eftomacs, & 
qu'ils aflujétiffent à un régime étonnant fur le choix des ali- 
mens. Mais je me laifle entrainer hors des bornes que je m'étois 
prefcrites; trop heureux fi je pouvois attirer fur cette eau 
quelques attentions; j'en dois laiffer annoncer les vertus par 
qui a droit de les approuver. 

Si cette eau, dans fon état naturel, ne peut prêter aucun 
fecours à la Médecine, les Arts ne pourront-ifs pas y trouver 
des reflources? Son bitume, qui eft difloluble dans l'efprit 
de vin, feroit peut-être propre à des vernis; & en fe fervant 
de Falun pour le précipiter, on pourroit en recueillir du fef 
de Glauber, dont le prix excède beaucoup celui de l'inter- 


mède qu'on auroit employé. En attendant enfin qu’on lui ait 


onflaté des propriétés plus étendues, cette eau peut être 
employée très-avantageufement à un ufage domeftique, favoir 
au blanchiflage , auquel elle doit être très-propre, foit pour les 
leflives, foit pour favonner. If eft inutile de dire qu'il ne fau- 
droit point laiffer fécher le linge enfuite fans l'avoir auparavant 
bien lavé dans de l’eau commune, 


SUPPLÉMENT, 


3. ‘AJOÛTE ici quelques expériences que j'ai faites depuis le 
préfent Mémoire écrit, dans le deflein de connoître l’efpèce 
de l'alkali fixe de l'eau brune; j'ai employé pour cela le réfidu 

qui me refloit de la diftillation. 
Je le réduifis d'abord en une matière charbonneufe, qui 
me parut avoir beaucoup de peine à fe confumer entièrement ; 
Je 


Fe hen = 


DES Si C1 EN CES 487r 
je jugeai que cela venoit de la quantité de fel fixe dans laquelle 
la fubftance inflammable fe trouve abforbée. Comme cette 
raifon me fit penfer que cette matière pourroit bien entrer 
en fufion avant d'être confumée, je craignis qu'en employant 
un vaifleau de terre pour achever la combuftion, elle ne pé- 
nétrât le vale: un vaiffeau de verre fe feroit fondu d'autant 
plus aïfément, que l’alkali lui en auroit facilité le moyen. Un 
vaifleau de grès auroit été le plus convenable ; à fon défaut 
je me fervis d'une cuiller de fer qui me tomba fous la main, 
mais elle ne me préferva pas de l'inconvénient que j'avois 
appréhendé du vafe de terre. En effet, cette matière char- 
bonneufe entra en fufion aufi-tôt qu’elle fut bien rouge, & 
pour lors ia fubftance inflammable {e diffipa par petites fimmes 
fort vives, qui en s’échappant de la furface du liquide, faifoient 
un petit bruit, imitant celui qu'un fumeur fait avec les lèvres 
en expulfant la fumée. Lorfque ce phénomène eut ceffé, je 
retirai la cuiller du feu, & j'y trouvai au fond des ampoules, 
que ce fel alkali y avoit fait lever en pénétrant le métal avec 
lequel il avoit formé une efpèce d'hépar, ayant l'odeur ordi- 
naire de ces fortes de compolés, l'odeur d'œuf pourri. Je favois 
bien que le fer pouvoit être tenu en diflolution par les alkalis; 
mais je ne fache pas que perfonne jufqu'à préfent en ait 
diflout immédiatement par ce menftrue : l'aikali fixe qui reftoit 
dans fa cuiller, & qui n'avoit point eu le temps de s'unir au 
fer, ne tarda pas, après être refroidi, à tomber en déliquinmr, 
en quoi il paroitroit diflérer de la bafe du fel marin ; cepen- 
dant le fel neutre que cet alkali produit avec l'acide vitriolique, 
paroit être du fel de Glauber; il en a la faveur; fes cryftaux 
font parallélepipèdes , fe diflvlvent aifément dans l'eau & de- 
viennent farineux lorfqu'ils font expofés à l'air. D'ailleurs, ayant 
Jaiflé dans une foucoupe la liqueur que j'avois décantée, après 
avoir précipité l'eau brune par l'intermède du fel de faturne, 
j'ai trouvé dans cette foucoupe, dont l’eau s'étoit évaporée, des 
cryftaux, qui ne paroifloient pas moins être du {el de Seignette 
que ‘autre du fel de Glauber. | 

Le compolé ferrugineux qui s’étoit formé de l'union de 


Say. étrang. Tome IF. . Ppp 


482 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Yalkali avec la fubflance de la cuiller qui le contenoit, & 
ue l'on: peut nomimer foie de Jer où hépar de Mars , décom- 
poié par l'intermède de l'acide vitriolique, a fourni aufli du 
fl de Glauber, & de ce fel cryftallifé en aiguilles dont 
j'ai parlé au fecond paragraphe de farticle 1 2; mais je re- 
maïquai que n'ayant point verfé d'abord affez d'acide pour 
s'emparer de tout l'alkali de l'hépar martial, il ne fe forma 
que du fel de Glauber ; qu'au contraire en ayant verfé enfuite 
plus qu'il ne falloit, il s'eft formé du fel en aiguilles, qui, 
étant beaucoup moins difloluble dans l'eau que l’autre, s'eft 
cryflillilé le premier. Cette obfervation me fit conjeéturer 
que devant s'être formé cette fois du vitriol de l'acide fur- 
abondant avec une partie du fer que l'alkali avoit abandonné, 
ce fel métallique, avec celui de Glauber, produifoit celui qui 
fe cryftallife en aiguilles : ces deux fels ayant d'ailleurs pu fe ren- 
contrer la première fois que j'aperçus des aiguilles dans l'ex- 
périence de l'article 12, rien n'empêchoit de m'arrêter à ma 
conjecture, qui femble confirmée par l'expérience fuivante, 

J'ai mis environ un demi-gros de vitriol de Mars, avec 
à peu près autant de fel de Glauber, dans un verre d'eau de 
pluie que j'ai expofé devant le feu; une partie de la terre du 
fer s’eft précipitée. J'ai filtré fa liqueur & l'ai remife devant le 
feu , après y avoir rajoûté autant d'eau qu'il s'en étoit évaporé, 
il s'eft précipité de nouveau du fafran de Mars. Après un 
grand nombre de précipitations & de filtrations alternatives, 
lorfqu'enfin il nes'eft plus précipité de terre martiale, la liqueur 
s'eft chargée de petites aiguilles parfaitement femblables à celles 
dont j'ai parlé. 

I ne me refle, après cette expérience, qu'à vérifier une 
feconde conjedure; favoir fi en procédant de la même façon 
avec le vitriol de Mars feul, on n'auroit pas 18 même réfultat. 
Au refle, fi cette expérience me laifle quelques doutes à cet 
égard, elle n'en hiffe point fur l'objet qu'on fe propofoit 
d'éclaircir, relativement à l'expérience de l'article 1 2. 


LRRËRE 


DES SCIENCES. 483 


EXTRAIT d'une Lettre de M. BAUSSAU 
DU BIGNON à M. DE REAUMUR, 
contenant quelques Expériences pour faire éclorre 
des Poulets par la fermentation du Tan. 


D: que vous le difiez, Monfieur , votre parole étoit 
À un für garant que le Tan pouvoit être employé au 
lieu du fumier, pour faire éclorre des poulets ; cependant 
quelque certaine que fût cette propofition, vous avez bien 
voulu me témoigner que vous verriez avec plaifir le fuccès 
de, mes expériences fur cette matière: voilà donc un petit 
Mémoire de mes obfervations à cet égard. 

C'eft avec ce tan que les ‘Tanneurs donnent aux peaux 
les derniers apprèts néceflaires pour en faire du cuir; ne 
parlons que des cuirs forts: lorfque les peaux de bœuf, de ces 
bœufs d'Irlande, y font difpofées , les Tanneurs, aufli-tôt 
qu'ils les ont tirées de l'eau, les couchent dans les fofles & 
sèment de cette poudre fur chaque peau, de façon qu'aucune 
partie d'un cuir ne touche à une autre, fans qu'il y ait de 
la poudre entre deux. Pour que le cuir foit tanné à fon point , 
il faut qu'il foit mis cinq fois dans la foffe; la première fois 
pendant trois femaines, la feconde fix femaines ou deux 
mois, & chacune des trois dernières fois pendant trois mois: 
une foffe qui contient cinquante cuirs d'Irlande eft une fofie 
commune ; on met peu de poudre la première fois, la feconde 
un peu davantage, & chacune des trois dernières fois autant 
que les deux premières enfemblé; pour ces cinquante cuirs 
on met chacune des trois dernières fois une charretée de tan, 
ce qui fait quatre charretées pour que le cuir foit prêt. Quand 
le cuir eft garni de toutes parts de cette poudre, & que le 
Tanneur a mis dans la fofle ce qu'il y deftine de cuirs, il 
verfe de l'eau froide deffus, jufqu'à ce que tout foit imbibé, 
& il en verfe à raifon de vingt {eaux d’eau par pipe de tan. 

Quand les Tanneurs lèvent leurs cuirs des fofles, il s'y 


Pppi 


484 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

fait un amas de tan mouillé qu'ils jettent à mefure, & c'eft 
ce tan qu’ils appellent alors de /a rannée , qui jufqu'à préfent n'a 
été employée qu'à faire ces mottes dont on fait de pauvre feu. 
C'eft quand on tire ces cuirs qu'il faut faire provifion de cette 
tannée, fi on fe propofe de s’en fervir pour faire couver des 
œufs: elle ne fe vend ici qu'en mottes, qu'on achette quatre 
ou cinq livres le millier. Pour un millier de mottes il faut une 
charretée de tannée; le prix pour la façon eft de douze fols 
par mille: ce n'eft pas le plus coûteux ni le plus difficile, 
c'eit de les faire fécher; de forte que le prix d'une charretée 
de tannée fortant des fofles, peut être fixé ici à quarante à 
cinquante fols, au lieu que le fumier y coûte fix à {ept livres 
la charretée. Une charretée de tan qui a été mis dans la foffe 
avec les cuirs, produit deux charretées de tannée : il ne faudroit 
pas alors les acheter au poids , parce qu'il y a plus pefant d’eau; 
il faudroit la laifler égoutter, en laiffer fortir l'eau , ou l'acheter 
moitié moins cher. 

Cette poudre humeétée & même imbibée, qui a fervi à 
tanner le cuir, & que les Tanneurs appellent ici sannée, eft 
donc cette matière dont on peut former, à peu de frais, des 
couches qui s’échauflent par la fermentation, dont je me füis 
fervi pendant trois ans pour entretenir la chaleur des fours 
où font éclos plufieurs poulets en différentes faifons. 

Mais il eft bon de favoir comment on peut parvenir à 
faire éclorre des poulets dans cette tannée, pour ne pas efuyer 
les défagrémens que j'ai éprouvés, dont le principal a été par 
rapport à la manière de faire prendre de la chaleur. Sans les 
décrire & fans faire l'énumération des différens procédés & 
des expériences réitérées par lefquelles je me fuis enfin affuré 
du fuccès, il fuffit de dire ce que je fais de certain & à quoi 
on peut sen tenir. 

Ï faut tâcher de fe procurer de la tannée nouvellement 
tirée des fofles, parce qu'elle fervira plus long-temps; il ne 
faut point la laiffer mouiller davantage, elle ne l'eft que trop. 
On en formera d’abord une couche affez haute & aflez large 
pour que Je vaifleau, dont on veut faire un four à poulets, 


D'E. S *SSC MEN CES 485 
foit de toutes parts environné de trois fois autant de tannée 
qu'il a de diamètre. 

La tannée, à la fortie des foffes, a une odeur aigre, mais 
qui n'eft rien en comparaïfon de celle des cuirs verds & de 
la tannerie. Les Tanneurs ne fe plaignent point de cette odeur, 
qui d'ailleurs n'eft pas mal -faine ; quelques malades même 
prennent le bain dans les cuves où l’on a coudré les menus 
cuirs; ce qui fe fait en les remuant vite dans une cuve pleine 
d'eau chaude & femée de tan. Il eft aifé de ne point {entir 
cette odeur, en fe difpenfant d'approcher de cette tannée les 
quinze premiers jours, en la faifant remuer à l'air fans en être 
proche: fi l'on veut attendre plus long-temps, il n'y aura de 
perte qu'un peu de retardement. On peut de même prendre 
de la année tirée des foffes d'un mois & plus; pourvü qu'elle ne 
foit pas pourrie, elle fervira; mais plus elle fera anciennement 
tirée, & moins elle conviendra. Il eft intéreffant auffi qu'elle 
ne foit pas trop humeétée; on en fera diminuer l'humidité 
& l'odeur en li remuant fouvent. 

Il ne faut point fouler ce tan ou tannée, non plus que le 
fumier, lorfqu’on en entoure le four ; elle ne s'entafle que trop 
d'elle-même, on en fait feulement un monceau avec une pelle 
le plus légèrement qu'on peut. Il n'eft pas poffible de donner 
au monceau ou à la couche la forme qu'on voudroit ; c'eft 
pourquoi il faut le faire plus gros qu'il n'a befoin de l'être 
dans la fuite, afin de le tailler forfque la tannée fera un peu 
aflaiffée ; car il s’écrouleroit fans ceffe auparavant. Lors donc 
que la tannée eft un peu aflaiffée, elle acquiert un peu de 
confiflance, au moyen de quoi on peut parer le monceau 
& le tailler quarrément ou circulairement & fe faciliter le 
moyen d'approcher du milieu; mais on a befoin d'une échelle 
faite exprès, afin de ne pas le fouler: on pourroit, pour le 
plus commode, mettre la tannée dans un lieu garni de planches 
aifées à ôter & à remettre par le moyen de coulifiés, 

Selon le plus ou le moins d'humidité de la tannée, elle 
s'échauffe plus tôt ou plus tard; fi dans le premier mois elle: 
ne s'eft pas échauffée, c'efl marque qu'elle étoit trop humide :: 


Ppp ü 


486 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
pour la décharger de cette humidité, il faut la remuer en 
la dérangeant entièrement d'un endroit en l’autre, comme on 
le pratique pour un monceau de bled, la remuer même tous 
les deux jours, ou tous les huit ou quinze jours, felon qu'elle 
eft humide, rompre les mottes qui fe font formées, & refaire 
le monceau mis le plus en poudre qu'il eft poffible ; une pelle &c 
un râteau font les inftrumens que j'ai employés pour cet effet, 

En quinze jours ou trois femaines, un mois au plus tard, 
la tannée s'échauffera au degré qu'on le defire; fi elle ne 
s'échaufloit pas encore par trop d'humidité, il faudroit la 
remuer de nouveau, & comme elle s'aflaifle à proportion 
de fon humidité, il faut la remuer plus d'une fois fi elle eft 
très-affaiflée & en mafle. 

Si le tan n'eft pas trop humide, (il left ordinairement 
beaucoup nouvellement tiré des fofles) & quand il a acquis 
fon degré convenable d'humidité ou de ficcité, ce qu'on peut 
connoître {1 d’une poignée on ne peut pas exprimer une feule 
goutte d’eau & s'il ne refte que très-peu d'humidité à la main 
qui l'a preflé, alors il s'échaufle ordinairement dès les quinze 
premiers jours: on peut ailément s'aflurer de fa chaleur en 
introduifant dans ce monceau une baguette ou petit bâton 
qui le traverfe d’un bout à l'autre; on le retire un inftant après , 
& en le maniant, on juge du degré de chaleur. 

Je confeille d’avoir deux couches de tannée en deux endroits 
différens, ce fera le mieux, & fur-tout à couvert, & de les 
difpofer quinze jours ou trois femaines l’une après l'autre, 
par ce moyen on aura toûjours un degré de chaleur fufffant. 

Je fais, pour l'avoir expérimenté, que la tannée s’échauffe 
au point qu'un thermomètre mis dans un vaiffeau bien fermé, 
& qui en étoit environné, eft monté à 45 & même à 5 o degrés: 
il eft aifé de diminuer la chaleur en ouvrant le couvercle & 
baiflant la couche de tannée. Je fais que le tan peut conferver 
fa chaleur à 3 2 degrés pendant un mois entier, fans autre foin 

ue de tenir l'ouverture du four plus où moins fermée, & 
que la chaleur sy conferve naturellement trois mois de fuite 
au 28.° degré. 


PEL Sen 2 


DES, SCI EN C;E,s. 487 

Il faut faifir le moment qué le tan commence à s'échauffer, 
ce qui eft dès le quinzième jour, & même quelquefois dès 
les huit premiers jours qu'il a été remué, étant à fon point 
d'humidité; comme il augmente de chaleur pendant quelque 
temps, on ne doit pas s'inquiéter fi la chaleur n’eft pas encore au 
3 2." degré: il faut deux ou trois jours pour s’affurer de fa conf. 
| tance, pour la fixer & diffiper les vapeurs & l'humidité intérieure 
du vaifleau ou du four, pendant ce temps on aura le 3 2." degré: 
comme la chaleur augmente infenfiblement pendant quinze 
jours ou trois femaines, & qu'elle baifle de même paflé ce 
temps, il eft aifé de ne pas fe laiffer furprendre, le couvercle & 
Jes différens regiftres fuffiront pour prévenir les inconvéniens. 

On n'a pas befoin d'autres réchauds que de cette feconde 
couche de tan faite un mois ou trois femaines plus tard 
que la première; elle fera prête à recevoir les œufs & les 
pouffins, lorfque la première paroîtra {e trop refroidir. Pendant 
la chaleur de la feconde, on remuera auffi-tôt la première, & 
elle rendra dans la fuite le même fervice à la feconde, & on 
pourra continuer ainfi au moins trois ans de fuite. 

I y a trois ans que le tan fur lequel j'ai faites expériences 
qui mont afluré de ce que j'avance, eff tiré des foffes, & il 
n'a fervi cet été à faire éclorre les poulets dont je vous prie 
de goûter: je compte encore l’employer en peu. 

Je fais par la fuite de ces expériences, que la tannée n'en- 
gendre point de vapeurs nuifibles aux poulets; fi cependant 
Ja tannée étoit trop humide , qu'on ne l'eût pas remuée d'abord 
& qu'elle füt dans un lieu trop renfermé , elle produiroit 
des moififlures, des moufles & des efpèces de champignons, 
mais elle ne feroit pas encore propre à s'échauffer. Quand 
on remue la mafle il fe forme une vapeur dont quelques 
perfonnes pourroient être incommodées ; j'ai été quelquefois 
obligé de quitter la partie, lorfqu'un domeftique où un 
journalier ne s'apercevoit de rien; mais fi les couches font 
en deux endroits différens, la vapeur d'une couche qu'on 
remuera, ne fera pas tort à l'autre: au refle cette vapeur fe 
diflipe dans le jour & dans l'heure méme qu'on a ceffé de 


488 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
remuer la couche, quelque enfermé que foit le lieu où on 
Yaura placée, n'y eùüt-il que deux ou trois pieds d'ouverture, 
Lorfque la tannée eft à fon degré d'humidité & qu'elle procure 
la chaleur requile, il fe fait en quelques parties de la couche 
une légère fumée, mais qui n'incommode rien ; comme les 
bords de la couche sèchent d’abord, on peut s'en approcher 
auffi-tôt qu'elle eft en état de produire le degré de chaleur 
requis, fans craindre de gâter fes habits; le noir même n'en 
eft aucunement fali; on peut manier la tannée fans avoir be- 
foin de fe laver. 

Si après un ou deux ans, la tannée qui aura fervi avec 
fuccès par le moyen des remuemens, ne s’'échaufloit plus, 
ou ne s'échaufloit pas aflez ayant été remuée de nouveau, 
ce fera alors faute d'une humidité fufhfante; il eft aifé d'y 
remédier. Pour cet effet, lorfque toute la couche eft remuée, 
il fufiit de l'arrofer avec de l’eau froide, par le moyen d'un 
arrofoir fin; un jeau d'eau fur une charretée, eft pour les 
premières fois la mefure dont je me fuis fervi, & la tannée 
de deux ans a repris la chaleur qu'on lui demande. Il eft 
néceflaire de remuer affez le tan pour que l'humidité foit par- 
tout égale. 

Après s'être fervi d'eau froide, on peut employer l'eau 
bouillante pour échauffer la tannée, mais il ne faudroit s’en 
fervir pour échauffer le tan, que lorfque par la fuite de plufieurs 
années il feroit devenu femblable à la tannée; l’eau bouillante le 
brüleroit & lui feroit perdre fa force dans fon commencement. 
L'eau bouillante pourra produire fur la tannée un effet plus 
prompt que l'eau froide. Voilà comme j'ai fait ufage de l'eau 
froide & de l'eau bouillante, mais fur-tout de l’eau bouillante. 
Ayant fait rompre une couche de tannée, je l'ai divifée en 
deux parties: de lune j'ai fait un monceau; & lorfqu'on 
verfoit l'eau deflus, un autre homme jetoit incontinent la 
tannée de l'autre partie, & couvroit auffi-tôt tout ce qui étoit. 
arrofé, de façon que la chaleur de l'eau bouillante fe trouvoit 
renfermée dans le tan, & il devenoit en état de s’échauffer 
€n quinze Jours. 

C'eft 


DES SCIENCES. 489 

C'eft ainfi que j'ai plufieurs fois réchauffé du tan que je ne 
croyois plus fufceptible de fermentation. J'ai des preuves que 
du tan fermente plus de trois ans après qu'il a été tiré des 
foffes : j'ai fenti plufieurs fois la chaleur excitée en différens 
monceaux de tan expolés à l'air & qui avoient efluyé les 
différentes pluies de plus de trois années, fur-tout de 1751 
& 1752. Lorfque la tannée eft déchargée par la fécherefle 
& le foleil de fon trop d'humidité, pourvü qu'elle ne foit 
pas pourrie, elle eft fufceptible de fermentation. 

Je puis donc aflurer, d’après vous, Monfieur, qu'on peut 
faire avantageufement ufage de la tannée pour faire éclorre 
des œufs. Les Curieux qui ont du tan, s'en fervent pour 
entretenir la chaleur dans leurs ferres, ils auroient fans doute 
un agrément de plus s'ils voyoient des oifeaux naître, pendant 
les mois les plus rigoureux, dans des lieux où l'on verroit 
en même temps des plantes qu'on ne cultive que dans les 
climats chauds. Ce feroit pour eux un double plaifir produit 
par la même caufe. 

Enfin, quand cette tannée, après avoir fervi pendant plu- 
fieurs années, ne peut plus être échauffée, & qu'elle eft 
comme pourrie, elle n’en eft pas moins propre à faire des 
mottes ; ainfi il n'y a rien de perdu. 


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490 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


A MA EU ES 


D'UNÉ EAU MINÉRALE S/NGULIÉÈRE, 
QUI 
SE TROUVE À DOUAY EN FLANDRE, 


Par M. BauMÉ, Maitre Apothicaire de Paris. 


N doit confidérer les Eaux minérales, comme étant les 

lavures du laboratoire chymique de la Nature; fi l'on 
mettoit à part les débris & les rinçüres d’un laboratoire, 
qu'on les leflivät enfuite, je ne doute pas qu'on ne fit des eaux 
minérales aufli compliquées & auffi difficiles à examiner que 
la plufpart de celles quela Nature nous offre; ces eaux minérales 
artificielles feroient aflujéties aux mêmes variations que le font 
les naturelles, c’eft ce qui fait que l'analyfe des eaux minérales 
eft le travail le plus difficile & celui qui ef le plus fufceptible 
de contradictions. Plufieurs excellens Chymiftes ont fait, en 
différens temps, l’analyfe des mêmes eaux minérales, & 
n'ont prefque jamais trouvé que les analyfes qu'ils failoient, 
fe rapportaffent à celles qui avoient été ffites avant eux: & 
lon obferve aflez fréquemment que la dernière analyfe 
contredit toû;ours les précédentes. 

La plufpart de ces analyfes paroiflent avoir été faites avec 
toute l'exaétitude poflible, & le peu de rapport qu'il y a 
entrelles , vient des viciflitudes auxquelles font expolées les 
eaux minérales : un courant d’eau caché dans le fein de Ja 
terre, qui vient accidentellement fe joindre à l'eau-ininérale 
qui a été examinée, change non feulement la proportion 
des principes de ces eaux, mais encore les décompole fouvent, 
fur tout fi c’eft une fource d’eau chargée d’autres principes 
propres à cela, comme on le voit arriver tous les jours : il fe 
forme de nouvelles combinaifons, ce qui dénature ces eaux, 
au point qu'elles ne font plus les mêmes, quoiqu'elles foient 


D'E s À Sic HIEN°C'E Se 491 
reçûes dans le même baffin ; c’eft à quoi il me paroïît qu'on 
wa guère fait attention depuis que les eaux minérales font 
fi fort préconifées dans la Médecine. 

Je n'ai pas connoiffance que l'efpèce d'eau minérale qui 
fait le fujet de ce Mémoire , ait jamais été examinée chymi- 
quement : quoique l'endroit d'où on la tire, paroifle avoir 
été arrangé avec beaucoup de foin , on peut préfumer que 
le travail qu'on a fait pour cette fource, n'avoit pour objet 
que de pouvoir jouir de l'endroit où elle ef fituée, fans être 
incommodé par cette eau. 

L’hiftorique & la defcription de cette fontaine ont été 
faits avec beaucoup d'exactitude par M. d'Aboville qui a 
déjà donné une analyfe de cette eau, ainfi je n’en ferai point 
mention ici: il n’en fera pas de même de plufieurs de mes 
expériences que je crois devoir rapporter en entier, quoi- 
qu'elles aient été faites auffr par M. d'Aboville, parce que 
les miennes font rapportées avec des oblervations & des 
détails qui les rendent confidérablement différentes à plu- 
fieurs égards. 

Cette eau a, comme l'a dit M. d’Aboville, auteur de l’analyfe 
dont nous venons de parler, une couleur de café à l'eau qui 
feroit un peu rougeitre ; lorfqu'on l'étend dans de l'eau ordi- 
naire, elle prend une aflez belle couleur orangée , elle eft très- 
claire & très-limpide, elle a une odeur & une faveur affez 
defagréables d'eau croupie , fans mélange d'odeur d'#epar ni 
d'alkali volatil ; elle perd cette odeur & cette faveur en aflez 
peu de temps, lorfqu'elle eft expolée à l'air, fans rien laiffer 
précipiter ; pour lors il ne lui refte qu'une faveur douceütre, 
à peu près femblable à celle de nos eaux de puits, cette faveur 
eft cependant fuivie d'un peu d'âcreté: j'ai gardé de cette eau 
pendant trois années dans une bouteille de verre, fans qu'il 
lui (oit arrivé aucun changement fenfible. 

Cette eau moufle avec une grande facilité pour peu qu'on 
l'agite, & la moufle fubfifte à peu près aufli long-temps que 
celle de l’eau de favon. Je ferai voir dans la fuite de ce Mé- 
moire, qu'effectivement cette eau eft très-favonneufe. 


Qgq ÿ 


2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À I ACADÉMIE 

L'infufion de noix de gale n'a rien fait d'abord fur cette 
eau, mais dans l'efpace de huit à dix heures le mélange a 
un peu noirci, la couleur a changé après cela peu à peu, & 
quelques jours après elle a paflé au vert. 

L'huile de tartre & la leflive des Savonniers n’ont rien 
fait avec cette eau, même par le féjour. 

L'elprit volatil de {el ammoniac n'a rien fait non plus 
d'abord, mais il a fait précipiter, par le féjour, un peu de 
terre blancheñtre. 

L'eau de chaux n'a rien fait d'abord, mais par le féjour 
il s'eft précipité auflr un peu de terre. 

La difflolution de mercure dans l'elprit de nitre, mêlée avec 
cette eau, a occafionné fur le champ un précipité blancheâtre 
en gros flocons légers qui fe font élevés à la fnface de la 
liqueur : quelque temps après ce précipité eft tombé au fond, 
fous la forme d'une gelée ou d’un coagulim; la liqueur fur- 
nageante étoit très-claire, point colorée, c’eft-à-dire que notre 
eau minérale avoit perdu fa couleur naturelle; dans la partie 
la plus bafle du verre il y avoit un précipité très- pefant, 
jaune, femblable au turbith minéral. 

Les acides minéraux non concentrés ont oceafionné tous 
un précipité rougeitre fans eflervefcence fenfible , ils ont 
feulement dégagé quelques bulles d'air, par le féjour il s'eft 
développé dans ces mélanges une très-égère ardeur de foie 
de foufre; ces précipités ont auf perdu en partie leurs couleurs, 
& les liqueurs furnageantes font devenues citrines: le précipité 
formé par l'acide marin a été un peu plus rouge & a conf 
tamment confervé un peu plus de couleur que les précipités 
formés par les autres acides. 

L’acide vitriolique concentré, a fait, à très-peu de chofe 
près, le même effet que celui qui étoit affoibli ; l'efprit de 
vin n'a occafionné aucun changement , même par le féjour. 

La diflolution d'argent de coupelle, faite par l'efprit de 
nitre, a été précipitée en blanc fale, ce précipité étoit très- 
fin & n'étoit pas en coaguhm, comme il a coûtume d'être 
loifqu'il eft formé par le fel marin ou l'efprit de fl, quoique 


DES; SYCNE:NIC'E!S. 493 
cette eau minérale en contienne un peu, comme je le ferai 
voir dans un inflant ; la liqueur furnageante étoit d'une belle 
couleur ambrée. 

La diflolution d'or faite par l'eau régale, a préfenté les 
mèmes phénomènes que les acides purs. 

Cette eau a verdi le firop violat fur le champ, fa couleur 
violette a reparu peu à peu, elle s'eft précipitée en flocons, 
& laliqueur n'avoit qu'une couleur pâle de vieux firop violat, 
c'eft-à-dire que la couleur verte a difparu entièrement. 

Cette eau a diflout parfaitement le favon, & la liqueur 
étoit auffi mouffeufe que fi la diflolution eùt été faite dans 
de l'eau de rivière. 

La diflolution d'alun a occafionné fur le champ un précipité 
brunâtre, à peu près femblable à ceux qui ont été formés 
par les acides purs ; il s’eft élevé d'abord à la furface une 
légère pellicule graffe repréfentant des iris, laquelle a difparu 
par le féjour. 

La diflolution de vitriol de mars a occafionné un précipité 
couleur de tabac, avec une pellicule grafle, ce précipité eft 
devenu par le féjour d'une bell@couleur de rouille, la pellicule: 
s'eft épaiflie un peu & a confervé la couleur du précipité; la: 
Jiqueur étoit très-claire, mais d’une belle couleur de paille. 

La diflolution de vitriol de cuivre a occafionné un pré- 
cipité verdâtre avec une pellicule grafle, la couleur verte a 
difparu prefque entièrement par le féjour, & le mélange eft 
devenu auffi épais qu'un mucilage fort épais. 

Le vinaigre diftillé, concentré & non concentré, a occa- 
fionné,. de même que les acides minéraux, un, précipité 
rougeûtre , mais. moins abondant, avec un très-léger mouve- 
ment d’effervefcence. ? 

Le vinaigre de faturne à occafionné un précipité brunâtre, 
avec une pellicule grafle; quelques jours après ce précipité 
seft rediflout, mais ça été par un mouvement de fermen- 
tation inteftine ; la liqueur éoit fort épaifle & parfemée 
d'une infinité de bulles d'air, 

La diflolution de {ublimé corrofif n’a rien fait d'abord 


Qi 


494 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
& par le féjour elle n'a occafionné qu'un très-léer précipité 
brunätre avec quelques bulles d'air. 

Certe eau a dépagé l'alkali volatil du fel ammoniac, avec 
une grande facilité, mème à froid, & vivement en faifant 
chaufler un peu ce mélange. 

Ces expériences préliminaires font voir d'abord, que cette 
eau n'eft point acide, puifqu'elle ne fait aucune effervefcence 
avec les alkalis qui au contraire n’y occafionnent en général 
que peu ou point du tout de changement; les acides qui 
font avec cette eau , des effervefcences plus ou moins fenfibles , 
accompagnées de précipitations, démontrent que cette eau 
minérale eft de nature alkaline & qu'elle tient en diflolution 
des matières terreufes & métalliques. 

L'alkali volatil que cette eau dégage du fel ammoniac, 
démontre d’une manière fatisfaifante , que f'alkali qu'elle 
contient eft fixe; les expériences fuivantes l'affureront davan- 
tage & feront voir que cet alkali eft de la nature de celui 
du fel marin. 

J'ai mis, d'une part, une livre d’eau minérale en diftilla- 
tion dans une cucurbite deerre; d’une autre part, j'en ai 
mis autant à évaporer à l'air libre dans une capfule de verre, 
June & l'autre au bain de fable : je ne parlerai d'abord que 
de celle qui a été mile à diftiller. 

La liqueur qui a paffé n'avoit aucune couleur, elle avoit 
odeur & le goût de l'eau de lait, il eft monté avec elle, 
pendant la diftillation, un peu de matière grafle flottant dans 
la liqueur, femblable à celle qu'on remarque dans l'eau de lait 
diflillé; cette liqueur ne failoit rien à la diffolution d'argent 
ni au vinaigre de faturne, & enfin n'altéroït en rien la couleur 
du firop violat non plus que celle du tournefol. 

Le réfidu de la cucurbite étoit fec à pouvoir être mis en 
poudie, il peloit quatre-vinat-feize grains, il avoit une odeur 
fétide aflez forte , tirant fur le charbon de cire: peu de temps 
après cette odeur s'eft diflipée, fa couleur étoit brune foncée, 
néanmoins tranfparente. Pendant que cette matière s'eft 
defléchée, il s'eft attaché aux parois de la cucurbite, à un 


DES SCIENCES. 495 
pouce au deffus de cet extrait, un peu de terre léoère, grisâtre 
ou blancheître, en forme de, végétation; j'en ai mis fur les 
charbons ardens, elle répandoit une très-légère flamme bleue, 
qui n’étoit point durable, qui n’avoit point l'odeur de foufre, 
mais un peu celle de bitume, tirant fur le charbon de terre; 
ce réfidu attiroit puiffamment l'humidité de l'air; j'en ai mis 
deux gros dans une cornue de verre, & je l'ai poufié par 
degrés jufqu’à faire rougir la cornue, il a diflillé huit à dix 
gouttes d'huile fétide, noire, d’une odeur empyreumatique, tirant 
{ur celle des huiles animales & de pétrol, & un gros de liqueur 
rouffeâtre qui étoit très-volatile, pénétrante, & qui avoit toutes 
les qualités des alkalis volatils, car elle verdifloit le firop violat 
& faifoit effervefcence avec les acides : ceci doit paroître 
d'autant moins furprenant qu'on fait que les alkalis fixes font 
volatilifés par les huiles ou les matières graffes quelconques ; 
comme notre eau minérale en contient & que fon réfidu en 
a rendu par la diflillation, il n'eft pas étonnant que j'aie retiré 
de Falkali volatil qui n'eft que l'ouvrage du feu dans le cas 
préfent, & qui n'eft pas originairement contenu dans cette 
eau minérale. 

L'opération étant finie, j'ai caflé la cornue pour féparer 
la matière faline qui étoit caffante & luifante, je l'ai fait fondre 
dans fufhfante quantité d'eau, j'ai filtré la liqueur, laquelle 
étoit alkaline & très-limpide, fans couleur ni odeur , it eft 
refté fur le filtre une matière charbonneufe dont je parlerai 
après; j'ai faturé cette liqueur alkaline avec fufhfante quantité 
d'acide vitriolique, & cette combinaifon m'a donné de vér:- 
table fel de Glauber avec quelques cryftaux de tartre vitriolé 
& un peu de fel marin. 

J'ai fait calciner légèrement dans un creufet la matière 
charbonneule refte fur le filtre, elle a brülé d’abord & elle 
répandoit une flamme légère; auffi-1ôt que la flamme a cefñé, 
je l'ai rétirée du feu, cette matière étoit alors attirable à 
Jaimant en grande partie. 

J'ai pouffé à Ja fonte, avec différens fondans, tel que le flux 


496 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÂCADÉMIE 
noir & le borax, de ce réfidu retiré direétement de l'eau miné- 
rale, je n'ai obtenu que les {els vitrifiés & rien de plus. 

Je reviens préfentement à la livre d’eau minérale que j'ai 
mife évaporer à l'air libre; cette eau s’eft légèrement troublée 
pendant fon évaporation, elle a dépofé autour de la capfule 
une matière vifqueufe & terreftre, il nageoit à la furface une 
pellicule de matière de la même nature: la liqueur a été 
réduite à trois onces par l'évaporation, elle n’a‘laiffé dépofer 
dans l’efpace de quatre jours qu'une terre blancheître, légère, 
il ne 54 eft point formé de cryftaux; cette liqueur n'avoit 
aucune odeur, étoit légèrement falée & failoit effervefcence 
avec tous les acides, comme je l'ai déjà dit plus haut; je l'ai 
mife à évaporer jufqu'à ficcité, & le réfidu que j'ai obtenu 
de cette évaporation à l'air libre, s'eft trouvé en tout femblable 
à celui qui m'étoit refté après la diftillation. 

Cet extrait bien fec n'a communiqué dans l'efpace de 
quinze jours, à de l'efprit de vin très-reétifié, qu'une très- 
légère couleur ambrée, fans même fe ramollir, quoique je 
Yaie laiffé pendant huit mois en infufion à froid. 

J'ai mis de ce même réfidu dans un creufet & je l'ai pouffé à 
la plus grande violence du feu, il s’eft bourfoufflé beaucoup, 
il a répandu une fumée blancheätre & d'une odeur de pierre 
à fufil qui viendroit d'être battue, tirant fur le charbon de 
terre, la matière s'eft fondue avec beaucoup de difficulté, 
j'ai caflé le creufet & je n'ai féparé qu’un fel alkali mélé d’un 
peu de terre & de fer, que j'ai féparé par la lotion & qui 
étoit attirable à l'aimant. 

J'ai ajoûté à plufieurs de ces effais différentes proportions 
de borax calciné, afin de faciliter la fufion de ce réfidu que je 
foupçonnois contenir quelques autres fubftances métalliques, 
mais ç'a toûjours été inutilement & je n'ai retiré que les fels 
fondus. 

Pour être en droit de conclurre affirmativement que cette 
eau minérale ne contenoit point d'autres fubftances métalliques 

ue le fer, j'ai fait encore les expériences fuivantes. 

J'ai faturé deux livres & demie de cette eau avec demi- 


once 


D'É,S 2SYCHSEMNLCMENS. 497 
once d'acide vitriolique foible, il s'eft excité une foible 
effervefcence qui a été fuivie d'un précipité rouge très-léger 
& qui paroïfloit fort abondant; mais Jorfqu'il a été féché, 
il sen eft trouvé fi peu qu'à peine a-t-il {uffi pour deux 
expériences : cependant je me fuis afluré par des barreaux 
aimantés, que cette matière n'étoit pour la plus grande partie 
que du fer, le refte étoit une terre très-divilée qui s'étoit 
precipitée en même temps. 

La liqueur mife à évaporer, n'a pû former qu'une cryftalli- 
fation mauvaile & irrégulière, à raifon de fa matière grafe 
que les fels ont retenue, ce qui m'a obligé de la deffécher 
entièrement & de Ja calciner pour l'en priver : j'ai réitéré 
cette opération dans une cornue, il a diftillé d'abord une 
liqueur infipide qui avoit l'odeur de l'eau de lait diftillé, elle 
ne faifoit aucune impreffion fur la diffolution d'argent, fur le 
vinaigre de faturne & fur le firop violat. 

Lorfque la matière a été bien defléchée, j'ai changé de 
récipient & j'ai augmenté le feu, elle faifoit quelque décré- 
pitation de temps en temps, il a diftillé un demi-gros de 
liqueur alkaline volatile très-pénétrante, fur laquelle na- 
geoient quelques gouttes d'huile noire, épaifle & empyreu- 
matique; la liqueur avoit toutes les propriétés des alkalis, 
elle verdifoit le firop violat & faifoit effervefcence avec les 
acides ; la maffe de la cornue fondue dans l'eau & filtrée, n'a 
fourni du fel de Gfauber, du tartre vitriolé & du {el marin. 

JL eft refté fur le filtre une matière charbonneule qui a été 
en partie attirable à l'aimant. 

Il réfulte de toutes ces expériences, que l'eau minérale de 
Douai eft véritablement"favonneufe, puifque j'en ai retiré du 
fl alkali & de fhuile; la plus grande partie de l'alkali qui 
en fait la bafe, eft de la nature de celui du fef marin, puifque 
Jen ai retiré du {el de Glauber par le mélange de l'acide 
vitriolique. : 

Outre l'alkali marin, elle contient encore un fl alkali 
analogue à celui du tartre, puifque j'en ai retiré du fe de 
duobus. | 

Sav, étrang. Tome IV. . Rrr 


498 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Cette eau contient encore du fel marin, puifque je l'ai 
retrouvé dans les différentes cryftallifations. 

Enfin elle tient du fer en diflolution, qui s'eft manifefté 
par l'aimant & un peu de terre non métallique, 

J'aurois fouhaité pouvoir rendre un compte exact des 
proportions de toutes {es fubftances qui compolent cette 
fingulière eau minérale; mais n’en ayant pas eu affez pour 
recommencer cette analyfe, il ne meft pas poffible de les 
déterminer au jufte, ainfi je me contenterai de rapporter ces 
chofes feulement par approximation. 

Voici donc à peu près les proportions des différentes 
fubftances que m'ont indiqué mes expériences. 

Une livre d'eau minérale contient à peu près ; 


Alkali marin. .... 60 grains. 


Alkali ordinaire... 12 grains. 
Sel'marin . 1. "1. 12 grains. 
AMEL eos ie ee 4 grains. 
REP 2 tie a alors 4 grains. 
EE tee NA NOTA ins" 


I eft bien évident par toutes les expériences rapportées 
dans ce Mémoire, que l'eau minérale de Douai contient du 
fer, quoique ce métal n'y foit qu'en très-petite quantité; 
mais ce qui fait fa fingularité & qui la diftingue de toutes 
les autres eaux minérales ferrugineufes connues , ceft que 
dans ces dernières le fer eft toüjours tenu en diflolution par 
un acide, au lieu que dans celle-ci, ce métal eft difout par 
des fels alkalis fixes, ce qui me met en droit de la comparer à 
la teinture martiale alkaline de Stahl, & doit faire préfumer 
qu'elle auroit à peu près les mêmes vertus médicinales. 


SE 


DES SCIENCES. 499 


A:D'D'E TE CN 


Au Mémoire intitulé, Difcuffion d'une queftion 
d'Optique, imprimé dans le troifième Volume 
des Mémoires des Savans Étrangers, pages s 14 
& fuivantes. 


Par M. pu Tour, Correfpondant de l’Académie. 
XX VI. Le expériences que j'ai rapportées dans le 


Mémoire, dont celui-ci eft une fuite, pour 
établir que lorfque l'ame eft affectée fenfiblement par l'image 
d'un objet peint fur la rétine de un des yeux, l'impreffion 
de l'image reçüe fur la portion correfpondante de la rétine de 
l'autre cœil, eft inefficace & comme nulle, ont paru concluanies; 
mais elles ont le defavantage d'exiger qu'on croife les axes 
optiques à un point que les yeux-en font fatigués, & il eft 
difficile de les tenir dans cetie direction refpedlive trop forcée 
pendant un intervalle de temps, même peu confidérable. On 
me fit cette obfervation lorfque j'eus l'honneur de lire mon 
Mémoire à l'Académie ; auffi me fuis-je cru engagé à imaginer 
fur ce fujet de nouvelles expériences exemptes de cette con- 
trainte pour les yeux, qui rend les premières peu praticables. 
En voici deux qu'on peut leur fubftituer, & qui font plus 
ailées à exécuter. 

XX VII. J'ajuftai deux difques de verre, d'un pouce de 
diamètre, colorés fun en bleu, l'autre en jaune, & qui réunis, 
me repréfentoient les objets que je regardois à travers teints 
en verd\; je les ajufai, dis-je, chacun à un tube de carton noirci 
en dedans, long de trois ou quatre pouces, & d'un diamètre 
égal à celui du difque de verre. J'appliquai fun des deux 
tubes à mon œil droit & l'autre au gauche , & les fixant alors 
tous deux fur une feuille de papier blanc tendue à quatre à 

Rrr ij 


24 Janvier 
1761. 


Première 
Expérience. 


Seconde 
Expérience. 


500 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

cinq pieds de diftance, elle me paroifloit tantôt bleue, tantôt 
jaune, mais elle ne me parut jamais verte, ainfi qu'il auroit 
dû arriver, fr les impreflions reçües en même temps fur les 
portions correfpondantes des deux rétines, euflent influé 
enfemble dans le jugement que je portois de la couleur de fa 
feuille de papier. | 

XX VIII. Quant à ce que je la jugeois tantôt bleue & tantôt 
jaune, on voit bien que cela provenoit de ce que la confi- 
guration de mes yeux varioit dans le cours de l'expérience ; 
en forte que la réunion des rayons partis de chaque point de 
l'objet, fe failoit en certains momens plus près de la rétine 
pour les bleus dans un œil que pour les jaunes dans l'autre, 
& qu'en d’autres momens c'étoit le contraire. Ceux de l'efpèce 
des rayons bleus ou jaunes, qui peignoiïent l'image le plus 
diftinétement , devoient par préférence affecter l'ame; ils don- 
noient leur couleur à l'objet. 

XXIX. Qu'on applique un prifme tenu verticalement à 
Jun de fes yeux, de façon qu'il n’y puifle parvenir d'autres 
rayons de lumière que ceux qui fe réfraétent à travers le 
prifme, & que l'autre œil étant nud, on les tienne tous les 
deux ouverts, il eft certain qu'alors il fe peindra fur des por- 
tions correfpondantes des FE rétines des objets tous diffé- 
rens; & par conféquent, fi Tes impreffions reçües fur deux 
portions correfpondantes des rétines, pouvoient l'une & l’autre 
en même temps affecter l'ame, fon aperception feroit alors 
celle d’un tableau confus & femblable à celui que préfenteroit 
une feuille de papier, fur laquelle on auroit imprimé fuccef- 
fivement & l'un fur l’autre deux deffeins totalement différens : 
mais ce n'eft pas là celui que m'a offert l'épreuve que j'ai 
faite; tantôt je ne voyois que les feuls objets peints dans l'œil 
nud, tantôt je ne voyois que ceux qui fe peignoient dans 
l'œil couvert du prifme, & quelquefois les objets peints dans 
Yun, me paroifloient entre-mélés avec les objets peints dans 
Jautre, & cela toûjours relativement à a quantité refpective 
de lumière que réfléchifloient les objets ou à la configuration 
actuelle de mes yeux ; car d'un moment à l'autre je parvenois, 


p'E' s SC DEN @ Es soi 
par les mouvemens que j'imprimois à la cornée ou à la capfule 
du cryftallin, à avoir dans le tableau de nouveaux objets qui 
en remplaçoient d’autres que j'y avois vüs auparavant. Or, 
dans tous ces cas il étoit toujours diflinét en toutes fes parties ; 
tout y étoit nettement tracé, coloré & terminé. 

Si au lieu du prifme, on tient un petit miroir aflez près 
de l'un des yeux pour qu'il ne puiffe être frappé que par les 
rayons de lumière que le miroir réfléchit, & defquels il n’en 
parvienne aucun à l'autre œil, tous deux étant ouverts, on 
aura les mêmes phénomènes que par le procédé précédent, 
auquel ce dernier eft parfaitement analogue. 

XXX. On conçoit aifément que le cas où il arrive quep 
le tableau repréfente en même temps des objets peints dans 
l'œil droit & dans le gauche, & eft, pour ainfi dire, formé 
de pièces rapportées, ne doit pas être regardé comme un 
defordre produit par le concours de deux impreflions reçûes 
fur deux portions correfpondantes des rétines, mais que cet 
effet rélulte de ce qu'il n'y a alors que certaines portions de 
June des rétines qui foient affectées efficacement, à l'exclufion 
des autres qui ne le font pas ainfr, & dont les correfpondantes 
far l'autre rétine y font les feules qui y reçoivent des impreffions 
qui paflent jufqu'à l'ame, & cela par des caufes femblables à celles 
que j'ai énoncées au n° X XV IIT; à favoir, parce que, tant 
dans l'un quédans l'autre œil, les images des objets ne font pas 
toutes, également diftinétes ou également indiftinétes, & que 
quelques-unes font plus diflinétes, par exemple, dans l'œil 
droit que leurs correfpondantes ne le font dans l'œil gauche, 
tandis que c'eft le contraire pour le reflant des images de 
l'œil droit, qui font moins diftinétes que leurs correfpondantes 
de l'œil gauche. Or, il arrive toüjours que de deux images 
correfpondantes , la plus diftinéte efface l'impreffion de celle 
qui left moins, & ceft par-Rà, & auffi à caufe de l'inégale 
quantité de lumière que peuvent réfléchir les objets peints 
dans fun ou l'autre œil, que les deux contribuent, chacun 
pour fa part, à la produétion du tableau. Tout eft analogue 
ici aux expériences des n° VIII & X XIIT. 

Rrrii 


so2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

XXXI. I eft à propos d'obferver que lorfque le tableau 
eft ainfi formé de pièces rapportées, certains des objets qu'on 
y diflingue, font quelquefois moins éclatans & quelque peu 
moins diflinés que fi l'œil où ils font peints étoit le feul 
qui fût ouvert ; ce qu'on pourroit d'abord attribuer au trouble 
que pourroit caufer dans la vifion la peinture d'objets diffé- 
rens fur des portions correfpondantes des deux rétines: mais 
fi c'en étoit la véritable caufe, pourquoi ne remarqueroit-on 
pas de même un pareil défaut de netteté & de vivacité dans 
le tablean, lorfqu'il ne repréfente que les feuls objets peints 
dans l'œil nud ? en voici une autre à laquelle il me paroît plus 

aturel de s'en prendre. On peut concevoir les circonftances 
telles, qu'en conféquence de l'inégalité de djftance des objets 
peints dans l'un & l'autre œil, & à caufe des inflexions que 
{ubiffent les rayons qui parviennent à l'un à travers le prifme, 
& dont ceux qui parviennent à l'autre font exempts, les rayons 
partis de chaque point des objets refpectifs qui s'y peignent, 
exigent, pour qu'ils puiffent fe réunir dans les deux yeux 
également fur les rétines ou à d'égales diflances des rétines, 
(ce qui eft néceffaire pour que la vifion foit également diftinéte 
de la part des deux yeux) exigent, dis-je, des configurations 
trop différentes enu'elles, au point, par exemple, que les 
degrés de convexité des deux cornées, trop difproportionnées, 
puflent difficilement fubfifter enfemble; au moyen de quoi 
il devient comme impoffhble que tous les objets.qui entrent 
dans la compoñition du tableau foient également diftinéts. Or, 
ces circonftances font fans doute celles qui ont lieu dans le 
cas dont il eft ici queftion. 

XXXIL Dans les exemples où l'aperception de l'ame 
eft le réfultat des portions d'images fimultanées reçûes dans 
les deux yeux, qui font rapportés dans mon premier Mémoire, 
c'eft tout un côté de l'image peinte dans l'un des yeux; à 
favoir, ce qui eft à la droite de fon axe optique, & tout le 
côté oppolé de l'image peinte dans l'autre œil, à favoir ce 

ui eft à la gauche de fon axe optique, qui fe repréfentent 
ajuftés bout à bout l'un de l'autre dans 'aperception de l'ame 


. 
L 
i 
“ 


ui - 


LS 2. 


Di E 9: 9 GRR UN NC, ES 503 
ou le tableau. On voit de plus dans l'expérience du prifme 
ou du miroir, #2.” XX1X, que des portions quelconques de 
l'image de l'un des yeux, peuvent être comme inférées dans 
le tableau en un ou en plufeurs endroits détachés & ifolés 
parmi ceux qui occupent les portions non correfpondantes 
des images de l’autre œil. Les obfervations fuivantes l'indique- 
ront encore plus clairement. 

XXXIII Qu'on couvre l'un des yeux, le gauche, par 
exemple, avec un verre coloré en rouge, & qu'on fe place 
en face d'une grande fenêtre, dont les carreaux paroîtront 
rouves, f1 on le regarde avec le feul œil gauche ; qu'on ferme 
d’abord celui-ci & qu'on tienne un doigt élevé entre l'œil 
droit & la fenêtre, en forte que cet obflacle cache à l'œil 
droit une rangée intermédiaire & verticale des carreaux de 
la fenêtre, h enfuite, fans déplacer le doigt, on vient à tenir 
les deux yeux ouverts, les carreaux que le doigt cache à l'œil 
droit paroîtront colorés en rouge; & ceux-là feuls, car les 
autres ne paroïitront efluyer aucun changement dans la cou- 
leur qui leur eft naturelle. I] eft certain que l'image des carreaux 
colorés en rouge ne peut exifter que dans l'œil gauche, & 
que celles des carreaux non colorés ne peut exifter que dans 
l'œil droit; & puifque dans ces circonflances on aperçoit une 
rangée de carreaux colorés en rouge entre des rangées de car- 
reaux non colorés, il devient évident que dans l'aperception 
de fame, ce qui eft produit par l'image de l'œil droit eft 
coupé en deux & féparé par ce qui eft produit par l’image 
de l'œil gauche. . 

XXXIV. Et nous allons voir que les impreffions des 
images reçues dans les deux yeux peuvent s’entrecouper à 
l'infini dans M de l'ame. Qu'on applique un prifme 
à fon œil gauche & qu'on difpofe les chofes de façon que 
de celui-ci feulement ainfi couvert, on puifie apercevoir une 
quantité quelconque de petits difques de papier blanc attachés 
{ur un fond brun, & que de l'œil nud on voye une boiferie 
peinte uniformément d'une couleur moins voyante que celle 


du papier, mais plus voyante que celle du fond fur lequel 


504 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

es petits difques font attachés, les deux yeux étant alors ouverts, 
les difques de papier paroîtront appliqués fur la boilerie, 
c’elt-à-dire autant de portions de l'image de l'œil gauche pa- 
roitront parfemées entre des portions de l'image de l'œil droit. 
On exécutera encore plus facilement & avec un pareil fuccès 
la même expérience, en fubflituant au prifine un petit miroir, 
qu'on appliquera à foœil gauche, conimé dans celle du 
n° XXIX. 

XXX V. Les conféquences que j'ai tirées de ces deux 
obfervations, peuvent être employées pour expliquer comment 
une feuille de papier blanc peut paroïître plus éclatante lorf- 
qu'on là regarde avec les deux yeux, que lorfqu'on ne la 
regarde qu'avec un feul. 

La furface de la feuille de papier a des inégalités affez 
fenfibles, & on peut la confidérer comme formée d’une in- 
finité de petites monticules & de petits creux : dès-lors elle 
ne fauroit être vifible pour Fun ou fautre de nos ÿeux par 
tous fes points. De ces points, il y en a fürement qui ne fe 
peignent pas fur la rétine de l'un & qui {e peignent cependant 
fur la rétine de l’autre, & fur chacune des rétines il y a de 
petites portions non peintes, & où les impreflions de l'image 
ne portent point; defquelles portions les correfpondantes fur 
Jautre rétine font atteintes par des rayons partis des points 
du papier non vifibles au premier œil. Par là on doit décou- 
vrir en effet plus de points de a furface du papier, & fa 
furface en doit paroïtre plus brillante quand on a les deux 
yeux fixés deffus que lorfqu'on n'y en a qu'un feul; & il en 
réfulte que la totalité de l'aperception de Fame, plus mar- 
quée dans le premier cas, peut m'être produite encore ici 
que par des impreffions reçües fur des portions non corref- 
pondantes des rétines qui font entre-mélées dans le tableau, 
dans le fens que j'ai dit ci-devant, & n'exige nullement que 
les impreffions, fur des portions correfpondantes, deviennent 
fenfibles en même temps. 

XXXVI. Voici encore un autre fait qui fe prête à fa 
même explication. J'ai obfervé, après avoir appliqué à l'un de 

mes 


DES SCIENCES. sos 
mes yeux un verre coloré, qu'une feuille de papier ne me 
paoifloit pas aufli blanche lorfque je la regardois des deux 
yeux, que lorfque je tenois fermé celui qui étoit couvert par 
le verre coloré : la différence étoit légère; elle l'étoit au point 
de n'être faifie que lorfque je faifois alternativement l'épreuve 
de regarder la feuille de papier d’abord avec l'œil nud feule- 
ment & tout de fuite avec les deux yeux : autrement, & fi 
on commençoit par la regarder avec les deux yeux, on la 
jugeoit affez blanche pour ne pas foupçonner que fa couleur 
fût altérée; mais il eft toüjours vrai cependant que certains 
des rayons tran{mis par le verre coloré, peuvent influer fur 
l'aperception de lame, quoiqu’elle foit principalement & 
prefque totalement produite par ceux des rayons qui par- 
viennent à l'œil nud ; fur quoi on peut dire, comme à l'égard 
de lobfervation du numéro précédent , que ceux des rayons 
tranfmis par le verre coloré qui affeétoient l'ame, étoient ceux 
qui tomboient fur des portions de la rétine de l'œil mafqué, 
correfpondantes avec certaines portions de œil nud, fur 
lefquelles il n'abordoit aucun des rayons, qui de la feuille de 
papier fe rendoient à celui-ci. 

XXX VIT J'ajoûterai que je n'ai pas remarqué de pa- 
reïlles différences , lorfque mes yeux étant tous deux armés 
de verres colorés, mais diverfement, l'un bleu, par exemple, 
& l'autre jaune, je regardois alternativement le papier d’abord 
avec lun ou l'autre œil, & enfuite avec les deux yeux à Ia 
fois, le papier me paroifloit toûjours, ou également jaune, 
ou également bleu, fans aucune dégradation dans l'éclat ou 
la nuance de la couleur; ce que je crois deveir attribuer à 
ce qu'une altération, qui eft aifément fenfible {ur un objet 
blanc, peut l'être infiniment moins fur un objet teint d'une 
toute autre couleur, par la même raifon qu'une étoffe blanche 

aroît pluftôt ternie qu'une étoffe bleue ou verte. 

XXX VIII. Les explications que j'ai données des faits 
mentionnés aux n° XXXI, XXXV, XXXVI, font des 
folutions d'autant de difficultés qu'on eût pu oppofer pour 
établir, contre mon opinion, que des parties correfpondantes 


Say, étrang. Tome 1V. . SIT 


506 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

des deux images peuvent influer efficacement fur la vifion 
J'ai encore à prévenir une autre objeétion, qui roule fur ce 
que la vûe eft pluftôt fatiguée forfqu'on n'a qu'un feul œil 
ouvert fur l'objet que lorfqu'ils le font tous les deux enfemble. 
L'eflort qu'on eft obligé de faire pour tenir en même temps 
un œil fermé & autre ouvert, pourroit fans doute y contri- 
buer; mais le même effet ne laifferoit pas d’avoir lieu quand 
pour éviter cet effort, qu'il faut employer pour tenir un 
œil fermé tandis que l'autre eft ouvert, on couvriroit feu- 
lement le premier avec la main ou tout autre corps opaque, 
de façon à n'y laïfler aborder, quoiqu'ouvert, aucun rayon 
de lumière; & par conféquent il eft indifpenfable de recou- 
rir, à cet égard , à d’autres caufes. Pour les reconnoître, remar- 
quons d'abord qu'on peut diftinguer deux fortes de vifron, 
June exacte &, pour ainfi dire, active, & l'autre vague &, 
pour ainfi dire, pañive: la vifion adive eft celle qui a lieu 
quand on s'applique à confidérer un objet de façon à en aper- 
cevoir nettement la forme & les parties dont il ef compolé, 
comme, par exemple, lorfqu'on lit, cette efpèce de vifion 
exige toüjours, ou prefque toüjours, que certaines portions 
de l'œil prennent une configuration différente de celle qui 
leur eft naturelle & qu'elles ont dans les momens où l'œil 
eft dans l’inaétion ; par exemple, que la pupille s’étrécifle ou 
fe dilate, ou que la cornée devienne plus convexe, ou que 
la portion antérieure de la capfule du cryflallin le devienne 
moins; ce qui ne peut fe faire fans un eflort quelconque. La 
vifion paffive a Lieu quand on ne fait une attention marquée 
à aucun objet en particulier, & que les yeux, confervant leur 
configuration ordinaire, on y reçoit indifféremment les images 
des objets qui sy peignent, foit diftinétement, foit confufé- 
ment, fans vouloir ou fans fonger à faire aucun effort pour 
en diftinguer nettement la forme & les diverfes parties. Dans 
ce dernier cas, je croirois volontiers qu'on n'eft guère plus 
fatigué quand on ne tient qu'un feul œil ouvert que quand 
ils le font tous deux. D'un autre côté, & dans le cas de la 
vifion aclive, il paroït que les efforts néceffaires pour donner 


: 
| 


D EÏS ASC) Et NC, ES s07 
à quelqu'une des parties de l'œil une configuration qui ne 
lui eft pas naturelle, ne pouvant manquer de fatiguer à {a 
longue, fatigueroient plus fans doute fi on étoit obligé de les 
exercer à la fois fur Fun & l'autre œil, que fi on ne les exerçoit 
que fur l'un des deux uniquement; c'eft-à-dire, fi pour voir 
un objet diflinétement on vouloit employer les deux yeux 
enfemble , que ft on fe contentoit de ne fe fervir que d'un 
feul. De-là il fuit que même lorfque nous avons les deux 
yeux ouverts, nous ne devons chercher à le voir diftinéte- 
ment qu'avec un feul des deux, en laiflant l’autre dans l'inac- 
tion ; ce qui étant admis, nous met fur la voie pour expliquer 
comment la vüe eft pluflôt fatiguée fi on n'a qu'un feul œil 
ouvert fur l'objet qu'on veut voir diftinétement que s'ils le 
font tous deux. Suppofons en effet que dans le cas où les 
deux yeux étant ouverts ils ont à efluyer quelques changemens 
de conformation, & par conféquent à employer quelque 
effort pour voir un objet diftinétement, il n'y en ait qu'un 
feul qui s’y prête, & que l'autre garde la configuration qui 
lui eft naturelle, celui-ci, où l'image fe peint confufément 
ou moins nettement que dans le premier, ne fera aucunement 
fatigué, tandis que le premier ne manquera pas de l'être au 
bout d’un certain temps, & fera cependant tout aufli-tôt 
foulagé, parce qu'on lui laiffera reprendre fa configuration 
naturelle, en chargeant de l'exercice de la vifion l'autre œil, 
qui difpofera fa cornée & fon cryftailin de façon à voir dif 
tinétement l’objet qui n'étoit que confus pour lui le moment 
d'auparavant. Les deux yeux s'entre-céderont ainfi leurs fonc- 
tions, fe relayeront & fe remplaceront tour à tour: aucun des 
deux ne fera excédé, parce que chacun des deux agira & 
fe repofera par intervalles; mais quand lun des deux eft 
fermé ou couvert, & que l'exercice de la vifion roule totale- 
ment fur l’autre, celui-ci fixé fans reliche fur des objets qu'on 
veut voir diftinétement, ne peut manquer d'être excédé à la 
fin par l'effort trop continu qu'il eft obligé d'employer pour 
contenir certaines de fes parties dans une difpofition forcée. 
Au refle, nous avons une indication bien manifefte du fait 


S{f ij 


LS 


508 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
que je viens d'avancer, que les deux yeux ouverts à la fois 
fur un objet ne s’emploient ordinairement qu'alternativement 
& un feul à la fois à l'exercice de la vifion diftinéte, dans 
les réfultats des épreuves rapportées aux n.* II & XX VIT, 
felon lefquels mes yeux étant fixés tous deux en même temps, 
Yun fur un objet teint en bleu, l'autre fur un objet teint en 
jaune, je voyois tour à tour le jaune & le bleu, 

On doit de plus s’en prendre à une feconde caufe, de ce 
que l'exercice de la vifion diftincte fatigue pluftôt fi on n'a 
qu'un œil ouvert que s'ils le font tous deux; à favoir, aux 
impreffions de la lumière fur la rétine qui la bleflent, fi elles- 
font trop vives ou trop continues. Lorfqu'il n'y a qu'un feul 
œil ouvert & appliqué à voir diflinélement , il efluie fans 
interruption Îes impreffions des gerbes de rayons partis de 
chaque point de l'objet; & il les effuie felon toute leur inten- 
fité, puifqu'alors ces gerbes de rayons ont leur point de réu- 
nion fur la rétine ou très-près de la rétine : au lieu que comme 
lorfque les deux yeux font ouverts, ils n'exercent les fonétions 

. de la vifion que tour à tour & fe repofent chacun par inter- 
valles, ni lun ni l'autre des yeux ne refte trop long -temps 
de fuite expolé à des impreflions trop vives de la part de la 
lumière ; car il n’y a que la rétine de l'œil qui eft actuellement 
en exercice qui efluie dans toute leur intenfité les impreffions 
des gerbes des rayons partis de chaque point de l'objet. Par 
a configuration que prend Fautre œil qui eft dans l'inaction, 
les foyers de ces gerbes de rayons fe rencontrent fort en 
de-çà ou fort en de-là de la rétine; au moyen de quoi, l'image 
de l'objet occupant une plus grande place, & les rayons qui 
la peignent étant partagés fur un plus grand nombre de parties, 
ha rétine en eft moins ébranlée, & d'autant moins que le rayon 


* Efai adm de diffipation, felon la doctrine de M. Jurin *, approche plus 


difinét and in- 


diflinc? vifion, 


d'égaler, ou excède davantage le rayon de la vraie image. 
XXXIX. Obfervons cependant ici que quoique cette 
alternative d'action de la part des deux yeux leur foit comme 
naturelle & ait lieu communément, nous ne laiflons pas, 
Jorfque nous voulons les y forcer, que de contenir à la fois 


DES SCIENCES 509 
l'un & lautre csil dans un état qui leur rend à tous deux les 
objets fuffifamment diftinéts; mais dans ce cas même,de s 
images qui s'y peignent nettement, il ny a, comme je l'ai 
expliqué ci-devant, que les parties non correfpondantes qui 
affectent l'ame fenfiblement; & de plus, cet état n'eft-il pas 
un état de contrainte? 

XL. En eflet, les confidérations énoncées au n° XX XVIIT, 
nous conduifent de plus à foupçonner qu'il doit y avoir une 
caufe naturelle, en vertu de laquelle les images peintes fur les 
parties correfpondantes des rétines ne peuvent peut-être jamais 
produire que des impreflions bien inégales entr'elles, en forte 
que l'une des deux foit effacée par l'autre qui agit fupérieu- 
rement. Si, comme Je fai avancé, les yeux, pour n'être pas 
excédés par l'exercice de la vifion, ont befoin de fe relayer 
& de ne regarder de façon à voir diflinétement que par in- 
tervalles, & par conféquent que l'un apres l'autre & tour à 
tour, le Créateur, dans les vües duquel la néceffité de cette 
alternative d'exercice & de relâche entroit fürement, a dû 
employer les moyens propres à empêcher qu'ils ne fe fati- 
gaflent pas tous les deux à la fois, & à tenir ainfi l'un dans 
Tinaction tandis que l'autre agit, afin que la vifion-diflinéte 
n'en fût pas moins continue. Îl ne nous appartient fürement 
pas de décider de ceux que fa fagefle a choifis; mais il femible 
qu'un moyen auffi fimple que convenable pour ce deffein, 
étoit que les deux yeux qu'il donnoit à l'homme ne fuffent 
pas abfolument femblables, mais au contraire difpofés de façon, 
que lorfque dans lun la courbure naturelle de fa cornée &z 
du cryftallin faifoit aboutir précifément fur les rétines les 
pointes des pyramides de rayons qui y peignent un objet 
placé à une certaine diftance, de pareils rayons, au moyen 
d'une convexité un peu différente dans Ja cornée ou le cryf 
tallin de l'autre œil, ne s’y réuniflent qu'un peu au-delà ou 
un peu en deçà de la rétine, en forte qu'on ne pût voir de 
ce dernier œil l'objet auffi diftinétement , fans faire un effôrt 
quelconque capable, en changeant la courbure de fa cornée 
ou du cryflallin, d'augmenter où de diminuer la convergence 


Sff üi 


s10o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
des rayons de chaque faifceau dans cet œil. Ces différences 
dans les yeux de chaque individu, dont la fuppofition doit 
paroïtre d'autant plus phufble, qu'elle eft plus éloignée d'exiger 
entr'eux cette exacte conformité, dont de célèbres Philofophes 
prétendent que la Nature ne fournit pas d'exemples, étant 
une fois admifes, on conçoit que dès qu'un objet fe peindra 
diftinétement dans l'un des yeux, {on image doit naturellement 
être moins nette dans l’autre, parce que l’Obfervateur le dif 
tinguant fufifamment, en vertu de limpreflion de l'image 
reçüe dans le premier, s'épargnera volontiers une contrainte 
& un effort fuperflus, pour rendre fon image aufli diflinéte 
dans le fecond. Il n’y aura donc dans les cas ordinaires 
qu'un feul œil employé à la fois à l'exercice de la vifion 
diftincte, tandis que dans ce moment l'autre fe repolera & 
fera la fonétion négligeamment, fauf à lui à avoir fon tour 
pour voir dans les momens de relâche qu'exigera le premier. 
XLI. Cette non conformité refpeétive des deux yeux 
peut ainfi être cenfée générale ; & peut-être que s’il fe trouvoit 
quelque individu qui eût les deux yeux naturellement con- 
formés de même, feroit-ce une exception fmgulière? c'eft un 
fait déjà reconnu , que dans la plufpart des hommes les deux 
yeux n'ont pas fa vifion diftinéte dans les. mêmes limites. 
Au refte, avec la fuppofition que je propofe, on conçoit 
bien aifément comment dans les cas ordinaires & où la vifion 
eft, pour ainfi dire, laiflée à elle-même, les impreffons, 
faites par les images peintes fur les deux rétines étant inégales, 
il y en a une qui, par préférence, affecte l'ame qui ne fait 
aucune attention à l'autre; & aufli pourquoi, dans les cas ordi- 
paires, toute la portion diftinéte du tableau ou de l'aperception 
de l'ame ne dérive que d’une fuite des deux images ; & même 
à l'égard des cas où la vifion eft contrainte & où l'on fait 
effort pour employer à la fois les deux yeux pour confidérer 
un objet, on doit imaginer que comme il n'eft pas néceflaire, 
pour voir diflinétement l'objet, que les rayons de lumière 
partis de chacun de fes points foient réunis précifément fur 
la rétine, on ne pouffe jamais l'effort au point que ces rayons 


i 


SR PO PTE 


DES SCYTEN CES sit 
#oient également réunis fur les rétines ou à d’égales diftances 
des rétines dans les deux yeux, & qu'ainfr il y a toüjours 
une des deux images qui eft plus netteinent deffinée que 
V'autre, & qui par-là a l'avantage d’affeéter l'ame par préférence. 
On peut même imaginer de plus qu'elles différeront affez à 
d'autres égards encore, pour que leurs impreffions n'aient 
jamais ou prefque jamais cette égalité qui les rendroit toutes 
deux efficaces en même temps. 

Il me refteroit encore à étendre le principe auquel j'ai eu 
recours pour expliquer comment nous Jugeons fimples les 
objets dont les images font doubles dans nos yeux, à quelques 
phénomènes que nous offre le ftrabifme , mais ce fera la matière 
d'un Mémoïe particulier. 


ÆERRATA pour les Mémoires de M. Du Tour, imprimés 
dans le troifième Volume d2s Savans Etrangers. 


Page 234, ligne 25 , au lieu de montées, lifey moulées. 


236, 7, au lieu de poids, lifez point. 

237 7, au lieu de ce qui, lifez & qui. 

243» 24, à la fin de la ligne, effacez le mot ce. 
SI 22, au lieu de cordon, lifez carton. 

526, 33, au lieu de marquoient, Xfez mafquoient. 


Au fujet de la Planche jointe au Mémoire d'Optique, i faut 
remarquer que faute par le Graveur d’avoir fait ufage du miroir pour 
graver Îles figures 3, 4, $, 6, 7, 10 & 11, ce qui devroit être 
à droite y eft à gauche, & réciproquement: le Lecteur eft prié d’y 
fuppléer, en lifant dans les endroits où on renvoie à ces figures 
droit ou droite par-tout où il y a gauche, & réciproquement gauche 
par-tout où il ya droit ou draite, ou bien, ce qui feroit équivalent, 
£n retournant de bas en haut la planche où font les figures. 


RIER 


s12 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Q:.B, SE; RO A ONE 
FAITES A ROUEN 
SUR, LA ROUTE DE LA COMPRE 


Qui a paru dans les mois de SEPTEMBRE 
à dOCTOBRE 17$7- 


Par M. BourIn, Correfpondant de l’Académie. 


UN . 
pr que nous fumes avertis, par les Nouvelles. 


publiques, qu'on avoit vü une Comète à la Haye, 
nous nous préparames, M. Duligue, Profeffeur d'Hydro- 
graphie, & moi, à en fuivre le cours; le lieu où l'Obfervateur 
de la Haye Favoit vüeles 1 $ & 16 Septembre, & ce qu'il 
marquoit de fa direction & de fon mouvement, me firent juger 
qu'elle devoit être alors vers la fin du Lion ou au commence- 
ment de la Vierge. Nous nous mimes donc à chercher le 
1." Odtobre: la Lune qui étoit alors dans fa troifième qua- 
drature & proche du méridien, faifoit tort à la clarté des 
Étoiles ; ainfi nous ne pouvions compter {ur la foible lumière 
de la queue de la Comète pour nous la faire diftinguer. Nous 
eumes donc recours à un télefcope de 16 pouces & à une 
lunette de 4 pieds à deux verres. 

J'eus plus de bonheur que mon co -opérateur, je rencontrat 
la comète; j'en avertis M. Dulague, il vint regarder l'endroit 
du Ciel vers lequel ma lunette étoit dirigée, & il aperçût, 
à la vüe fimple , un point fumineux plus foible que les Étoiles 
de la quatrième grandeur. Il tourna fon inftrument vers ce 
point, & diflingua la Comète. Un brouillard furvenu tout- 
à-coup nous empècha de comparer lafcenfion droite & Îa 
déclinaifon de cet aflre avec celles de quelque étoile voifne, 
& nous ne pumes ce jour-là qu’eftimer à la vüe fa longitude 
en mp $%15’, fa latitude où 20” auftrale, 


Le 


D- HS; 29-G UE Ni CES 513 

Le 2 Oétobre, nous la comparames deux fois avec la 
plus occidentale des deux étoiles placées dans la Carte du 
fieur Dheuland, dans le quarré formé par le feptième degré de 
la Vierge & le fecond de latitude auftrale : cette étoile, felon 
le Catalogue du nouveau Zodiaque que nous avons füivi, 
étoit au commencement de 1755, en #p 74 23° 43", & 
avoit 14 15° 59” de latitude auftrale. Le micromètre étoit 
adapté à ma lunette de 4 pieds: l'étoile fuivoit le fil parallèle 
à l'équateur & précédoit la Comète, qui paroifloit au deflous 
du fl. Ces obfervations nous donnent fon lieu apparent à 
17h 3° 40”, temps vrai à Rouen, en m 74 35° 36", avec 
une latitude auftrale de 14 6° 24". 

Le 3, fur les 1 6" 30’, la Comète étoit fort proche d'une 
étoile fr petite, qu'on la voyoit à peine dans la lunette. Nous 
ne trouvons pas cette étoile dans le nouveau Zodiaque ; 
d’ailleurs il n'étoit pas poflible d'éclairer affez les fils fans fa 
perdre tout-à-fait de vüe. Je tentai, à diverfes reprifes, de 
mefurer la diflance de la Comète à une autre étoile de la 
fixième grandeur, placée dans la Carte de M. Dheuland, dans 
le quarré du neuvième degré de la Vierge & du premier de 
latitude auflrale, mais le champ de ma lunette n’étoit pas 
affez grand. Nous avons eftimé fon lieu en mp 94 45’, & 
fa latitude auftrale environ 14 30’. 

Le 4, nous primes cinq fois fa diflance à l'étoile du Lion ; 
appelée 4. L'étoile fuivoit encore le parallèle à l'équateur ; 
la Comète étoit en deffous & pañloit après. En prenant un 
milieu, tant dans les heures que dans les pañfages & les dif 
tances, nous avons trouvé qu'à 17" 10° 23" elle étoit en 
np 114 59° 6”, & qu'elle avoit 14 57° 57" de latitude 
auftrale. | 

Les $, 6,7, 8 & 9 Otobre, les brouillards, la pluie 
ou un ciel toujours couvert, ne nous ont pas permis de la 
fuivre, & nous ne l'avons pas vüe depuis. Dans les calculs 
nous avons eu égard à Ja préceflion, la déviation & laber- 


ration des Étoiles. 
AE AE 


Say, étrang, Tome IV. ST Et 


MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
514 | 


CoP1E d’une Lettre écrite à M. l'Abbé NOLLET 
par M. DE ROMAS. 
De Nérac le 26 Août 1757. 


V ous jugeates, Monfieur, que ma première expérience 
électrique du cerf-volant, où j'eus le plaifir de voir des 
lames de feu de fept à huit pouces de longueur, méritoit 
d’être connue du Public, puifque vous m'avez fait l'honneur 
de l'inférer dans le fecond Volume des Mémoires fournis par 
les Étrangers à votre Académie; mais les effets électriques 
du même cerf-volant ont été bien autre chofe dans une ex- 
ptrience que je fis le 16 de ce mois, pendant un orage que 
j'ofe dire n'avoir été que médiocre, puifqu'il ne tonna prefque 
point & que la pluie fut fort menue. Imaginez-vous de voir, 
Monfieur , des lames de feu de neuf ou dix pieds de longueur 
& d'un pouce de grofleur, qui faifoient autant ou plus de 
bruit que des coups de piftolet: en moins d'une heure j'eus 
certainement trente lames de cette dimenfion, fans compter 
mille autres de fept pieds & au deflous. Mais ce qui me donna 
le plus de fatisfaétion dans ce nouveau fpectacle, c'eft que 
les plus grandes lames furent fpontanées, & que, malgré 
l'abondance du feu qui les formoit, elles tombèrent conftam- 
iment fur le corps non éleétrique le plus voifin. Cette conftance 
me donna tant de fécurité, que je ne craignis pas d'exciter 
ce feu avec mon excitateur , dans le temps même que l'orage 
étoit aflez animé, & il arriva que lorfque le*verre, dont cet 
inftrument eft conftruit, n'eut que deux pieds de long, je 
conduifis où je voulus, fans fentir à ma main la plus petite 
commotion, des lames de feu de fix à fept pieds avec h 
même facilité que je conduifois des lames qui n'avoient que 
fept à huit pouces. De-là j'ai tiré quelques conjeélures qui 
pourront me déterminer à propofer un jour plufieurs queftions, 
fur-tout une très-fameufe que vous avez fortement com- 
battue; favoir, s’il n’y avoit pas moyen de fe mettre à l'abi 


D ES SC DEN C'ELS ss 
du tonnerre, en dirigeant ce feu qui eft fi docile, pourvû 
qu'on lui fournifie un conduéteur fuffifant & qu'on lui oppofe 
des corps électriques qu'il paroît fr fort relpeéter, sil eft 
permis de parler ainfi. J'entrevois des difpofitions très-diffé- 
rentes de celles propofées par Franklin, mais que je ne vous 
dévoilerai qu'après que j'aurai fait une expérience que j'ai 
dans l'idée; ce que je ne négligerai point dès que l'occafon 
fe préfentera. En attendant, je vais vous entretenir un moment 
* des circonftances qui, Je crois, m'ont procuré l'éclatante ex- 
périence du 16 de ce mois. 

J'attribue la grandeur des James qu'on peut obtenir avec 
le cerf-volant à trois chofes principales; 1.” à la longueur 
de la corde, 2.° à la continuité du fil trait de métal dont 
j'enveloppe cette même corde, 3.° à la difpofition des orages. 

En premier lieu, la longueur de la ficelle contribue beau- 
coup à augmenter fes eflets; c'eft une chofe certaine qui 
s'accorde très- exactement avec les premières obfervations des 
Electriciens, qui ont décidé que l'éleétricité augmente plus 
par la furface des corps qu'on électrife que par leur mañle, 
& plus encore par leur longueur que par leur mafle & leur 
furface. Or, la corde que j’employai dans l'expérience du 1 6 
de ce mois, étoit de moitié plus fongue que celle dont je me 
fervois dans celle du 7 Juin 1753, & j'ai foupçonné depuis 
que la ficelle qui me fervit lors de cette première expérience 
ne devoit pas être confidérée fuivant toute fa longueur, à 
caufe d'un ou de plufieurs défauts dont je vais parler. 

En fecond lieu, quelque longue que foit la corde, fi le 
fil trait de métal n’y eft pas continu, on ne doit compter 
fa longueur que depuis fa dernière interruption jufqu'au cordon 
de foie; car fi cette interruption eft d’une étendue à laquelle 
les explofions ne puiffent pas fe faire, le feu ne paffera pas du 
fl trait fupérieur à inférieur, Dans le cas contraire & fi 
pendant l'orage il ne tombe pas affez de pluie pour bien mouil- 
ler la corde, elle ne manque guère de fe brûler en cette partie 
dès Ja première explofion; accident qui m'a fait manquer 
beaucoup d'expériences: or, il eft fort aifé que le fil trait fe 

Tttij 


516 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
calie, quoiqu'il n'ait pas encore ferVr, c'eft ce qui m'eft arrivé 
plufieurs fois : pour prévenir ce fichieux inconvénient, je pré- 
pare le fil trait, & voici de quelle forte. Je choifis de bon 
chanvre; j'en fais faire cinq ou fix fufeaux de fil, gros à 
peu près comme celui dont on fait le linge moyen; je doube 
ce fil & j'y ajoûte en même temps le fil trait de métal, 
après quoi je les fais tordre tous trois enfemble: en forte que 
les deux fils de chanvre & le fil trait de métal ne forment 
plus qu'un même tout: le fil trait acquiert une force capable 
de réfifter à de très-forts tiraillemens & à de très-rudes frot- 
temens. Cette préparation achevée, je difpofe ce nouveau 
fil fur la corde, felon l'ancienne méthode; mais j'ai une attention 
de plus, je l'arrête de deux en deux pieds avec du fil ordi- 
naire, que je pafle dans la corde deux ou trois fois avec une 
aiguille à coudre; ce qui procure beaucoup de folidité & d’autres 
avantages : par exemple, fi le fil venoit à fe cafier, la difcon- 
tinuité ne va pas bien loin, de plus on l'aperçoit très-aifément. 
Enfin, il faut moins de temps pour réparer le défaut, que 
sil s'en défiloit trois ou quatre toifes, ainfi que j'ai eu le dé- 
plaifn de le voir très - fouvent. 

En troifième lieu, il y a des orages plus animés Îes uns 
que les autres, & il eft très-probable que les plus animés font 
plus éleGtriques; mais if ne dépend pas de celui qui veut 
tenter une expérience d'en profiter. Prefque toüjours le vent 
ne fe lève que quand l'orage eft déjà fort proche ou qu'il a 
commencé de pleuvoir ; & dans fun ou autre de ces deux 
cas, il feroit très-dangereux de lancer le cerf-volant, parce 
qu'il faut pour cette manœuvre tenir néceffairement la corde. 
L'ayant voulu faire le 21 Juin de l'année dernière, dans un 
temps où il ne tomboit point de pluie, le tonnerre grondant 
feulement fur ma tête, je reçus un coup fi terrible, fans voir 
pourtant nullement le feu, que j'en fus renverfé par terre, 
& cet accident, qui m'a rendu depuis plus circonfpett, 
m'a fait manquer encore beaucoup plus d'occafions que le 
précédent. Pour ne pas en perdre autant, j'ai cherché s’il n'y 
auroi pas moyen de lancer le cerf-volant fans jamais toucher 


DUELS /'SUCHMENNI CE, S S17 
Ja corde. Enfin, après bien des méditations, je fuis parvenu 
à conftruire une petite machine, que je tiens de fort loin 
avec trois cordons de foie, auxquels if m'eft loifible de donner 
une longueur arbitraire, laquelle machine, dis-je, que je puis 
faire avancer, reculer & difpoler felon le befoin, n'eft qu'un 
petit chariot qui développe la ficelle auffr vite ou lentement 
qu'il me plaît; & le développement étant achevé, le cerf- 
volant fe trouve ifolé par le fecours, d'une corde de foie auf 
longue qu'on le juge à propos. 

J'ai imaginé de plus pour les opérations où il y avoit du 
rifque à être trop près, un excateur diflérent de celui qui 
eft de verre, que vous connoiffez: le dernier, qu'on peut 
alonger ou accourcir à difcrétion, eft compofé d’un cordon 
de foie mis au bout de vingt pieds de corde pareille à celle 
du cerf-volant, & laquelle forme, avec celle de ce chaflis, 
une fourche, tellement qu'elle ne doit être confidérée que 
comme formant une branche de fa principale. J'ai 
l'honneur d’être, &c. 


Tttiy 


518 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


MÉMOIRE 


SUR 


LA TERRE FOLIÉE DU TARTRE. 


Par M. CADET, Apothicaire-major des Invalides. 
Le Terre foliée eft un fel neutre, compofé de l'acide du 


vinaigre combiné au point de faturation avec l'alkali du 
tartre.” 

Ce fel eft d'une nature délicate, il n’eft pas facile en le 
compofant de lamener au point jufte de faturation ; & lorf- 
qu'il eft fait, il s’altère, fe décompofe facilement, au moins 
en grande partie, par l'action du feu ; ce qui vient fans doute 
du peu d’adhérence qu'ont enfemble acide & Falkali dont 
il eft compofé. 

Lorfque ce fel eft bien fait, il doit être par petits feuillets 
& reflemblans à du talc doux & onctueux au toucher, à 
caufe de l'huile qu'il contient, d’une faveur aflez vive & pi- 
quante, fans cependant qu'on y puifle déméler celle de l'acide 
ou de l'alkali : il shumecte à l'air & fe réfout en liqueur avec 
une promptitude furprenante. Tous les Auteurs qui en ont 
parlé font affez d'accord fur les qualités que doit avoir la terre 
foliée du tartre bien faite ; mais il n’en eft pas de même de 
fa couleur, quelques Chymiftes demandent qu'elle foit par- 
faitement blanche, & d’autres prétendent que ce fel eft égale- 
ment bon, quoique d'une couleur plus ou moins brune. Du 
nombre de ces derniers, eft le célèbre M. Pott, qui a donné 
une belle Differtation fur cette matière ; cet habile Chymifte 
fait fi peu de cas de la blancheur de notre fel, qu'il la traite 
de propreté exterieure & inutile, taxant même de charlatannerie 
ceux qui en font partifans. 

La diverfité d'opinions des Chymiftes fur les qualités que 
doit avoir ce médicament, regardé généralement comme très- 
bon & recommandé par de très-habiles gens qui fe plaignent 


DES. SCIENCES. s19 
de ce qu'il eft trop peu_ufité, m'a paru méritér quelque 
attention ; & comme l'expérience eft le feul moyen qu'on 
ait en Chymie pour éclaircir fes points douteux, c'eft à elle . 
que j'ai eu recours pour eflayer de jeter quelque lumière fur 
cet objet. 

Avant de commencer le travail que j'avois defiein de faire, 
je me fuis procuré un aflez grand nombre de terres foliées, 
toutes préparées par différens Artifles ; & les ayant examinées 
féparément , elles mont paru eflentiellement différentes les 
unes des autres. Îl y en avoit de toutes les nuances, depuis 
le brun jufqu'au blanc : dans les unes on déméloit une faveur 
alkaline très-marquée; dans d’autres c'étoit l'acide qui fe faifoit 
fentir tant au goût qu'à l'odorat. J'en aï trouvé une très- 
blanche, dans laquelle on apercevoit très-diflinétement le 
piquant de f'acide & Väcre de l'atkali. H y en avoit enfin qui 
étoient douces au toucher, grafles, onétueufes & feuilletées; 
c'étoient celles qui avoient une couleur brune; d’autres qui ti- 
roient un peu fur {e blanc, étoient sèches, dures & grenues. 

Ces diverfités me furprirent moins qu’elles ne me démon- 
trèrent la difficulté qu'il y a à préparer la terre foliée d'uné 
manière conflante & uniforme, qui puifle donner la combi- 
naïfon la plus parfaite des deux principes dont ce fel eft 
compolé; elles me firent apercevoir en même temps la raifon 
de 1a diverfité des opinions des auteurs à fon fujet; & la caufe 
qui vrai-femblablement empêche que ce médicament ne foit 
employé par les praticiens autant qu'il mérite de l'être, c’eft 
fans doute l'inconftance des effets qu'il doit produire, étant 
toüjours, en quelque forte, fi peu femblable à fui-même. Ces 
obfervations ont été pour moi de nouveaux motifs de faire 
les expériences que j'avois projetées: je me mis donc à 
combiner enfemble du vinaigre diftillé & du fel de tartre, 
en obfervant tout ce que les auteurs prefcrivent pour la réuflie 
de l'opération, & il m'arriva pendant très-long-temps d'avoir 
toüjours une terre foliée trèsbrune. Comme mon intention 
étoit de voir s'il ne feroit pas poffible de la faire blanche fans 
avoir recours à une manipulation indiquée par M. Pott, que 


s20 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

je regardois comme inutile & même comme nuifible, par 
les raifons que j'en donnerai bientôt, j'obfervai avec patience 
tous les phénomènes de la deficcation de notre fel, qui eft le 
point critique, & je fuis enfin parvenu à l'avoir tel que je le 
defirois par le procédé fuivant. 

Diflolvez une livre de fel de tartre dans fuffifante quantité 
d'eau froide, après avoir filtré cette diflolution par le papier 
gris; mélez-y peu à peu autant de vinaigre diftillé qu'il em 
faudra pour la faturation parfaite, & même un peu au-delà, 
il s'excitera une eflervefcence aflez vive, mais qui s'appaifera 


x 


dans le moment: mettez après cela la liqueur à évaporer 
lentement & fans bouillir dans une terrine de grès à un feu 
très-doux ; continuez d’évaporer jufqu'à pellicule. Lorfque la 
liqueur eft à ce point, il faut achever l'évaporation au bain- 
marie; elle acquiert peu à peu une confiflance huileufe & une 
couleur brune aflez foncée : il fe forme à fa furface une 
écume blancheâtre, qui, enlevée & refroidie, paroît un amas 
de petites lamines brillantes & argentines. Agitez alors la 
liqueur avec une fpatule d'ivoire pour aider lévaporation, 
il s’en élevera une légère odeur de vinaigre furabondant un 
peu plus forte que dans le commencement, la liqueur s’épaiflit 
de plus en plus & fe convertit entièrement en une écume 
femblable à celle dont on vient de parler, qui annonce la 
fin de l'évaporation. I faut divifer la matière en la remuant 
continuellement; elle fe change, par ce moyen, en une poudre 
bien blanche, feuilletée & argentine, que vous acheverez de 
deffécher parfaitement, en mettant la terrine dans un fourneau 
chaud , & la difpofant de manière que les bords entrent dans 
le fourneau & en foient entourés. 
H eft facile de voir que par ce procédé, qui eft très-fimple, 
& qui diffère très-peu des procédés ordinaires pour faire Îa 
terre foliée, on obtient ce fel doué de toutes les qualités qu'on 
peut lui defirer, puifqu’étant fait de cette manière, on lui 
conferve la matière grafle dans laquelle confifte une bonne 
partie de fon mérite, fans cependant lui donner la couleur 
brune qui ne plait pas également à tout Ie monde. Le point 
effentiel 


D'E)S\ SCT) EXNI CES s21 
effentiel pour réuflir, eft de favoir ménager affez à chaleur 
néc\ffaire pour l'évaporation, & fur-tout d'avoir recours à 
temps au bain-marie, qui à fa vérité la prolonge un peu, 
mais aufli par le moyen duquel on parvient fürement à a 
faire réuflir: c'eft vrai-femblabiement faute d'avoir affez de 
patience que les Artifles ne font que des terres foliées, de 
couleur brune, & je crois même qu'on ne peut guère attri- 
buer la plufpart des autres défauts qu'on remarque à cette 
préparation , qu'aux différens degrés de feu dont on fe fert 
pour la deffécher. Il eft vrai que prefque tous les auteurs qui 
parlent de cette opération, recommandent de la faire à une 
chaleur très-modérée, mais ils n’ont pas fuffamment infiflé 
fur ce point eflentiel ; & quelques-uns d’entr'eux, faute d'avoir 
aflez oblervé les inconvéniens d'une chaleur trop forte, qui 
donne à coup für la couleur brune à une terre foliée qu'on n'a 
pas dépouillée de fa matière grafle, ont mieux aimé regarder 
cette couleur comme fans conféquence , que de chercher, pour 
l'éviter, d’autres moyens que celui de lui enlever cette même 
matière grafle. Ils ont attribué la couleur brune de la terre 
foliée à la partie huileufe du vinaigre, & l'ont, à caufe de 
cela, regardée pluflôt comme un avantage que comme une 
imperfection : on ne peut difconvenir qu'ils ont penfé très- 
jufte fur le premier point. Il eft très-certain que c'eft cette 
partie huileufe qui donne en même temps à notre fel fa cou- 
leur rouffe & fes bonnes qualités; mais en eft-il de même 
du fecond point? eft-il indifférent que la partie huileufe ait 
où non une couleur brune? Un très-grand nombre d'expé- 
riences n'ayant démontré que cette couleur eft toüjours l'effet 
d'une trop vive aétion du feu qui rôtit & brüle la partie 
huileufe, je crois qu'il n’y a pas à balancer fur le parti qu'on 
doit prendre à fon fujet, puifqu'il eft très-certain qu'une huile 
quelconque, réduite en cet état, a toujours une âcreté empy- 
reumatique, qui ne peut que donner de l'imperfetion à un 
médicament que l'on cherche à rendre le plus doux qu'il eft 
poffble. Plufieurs Chymiftes indiquent, pour faire la terre 
foliée d'un très-beau blanc, un moyen dont ils ont fenti eux- 

Say. étrang, Tome IV. . Vuu 


s22 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
mêmes une partie des inconvéniens ; aufli ne le propofent -ils 
pas dans l'intention d'ajoûter aucune perfection réelle à ce fel, 
mais feulement en faveur de ceux qui font curieux & qui 
fe contentent des apparences extérieures de perfection. 

Ce moyen confifte à difloudre dans fufhfante quantité 
d’efprit-de-vin la terre foliée qu'on veut blanchir: on filtre 
la diffolution ; on en retire l'efprit-de-vin en diftillant jufqu'à 
ficcité ; on fait fondre enfuite la mafle reftante dans un creulet, 
à l'aide d'un feu doux, après quoi on la diflout dans de l'eau. 
On filtre cette feconde diflolution; on la fait évaporer à une 
chaleur douce d’abord, qu'on augmente à mefure que l’éva- 
poration approche de fa fin: la matière fe bourfouffle & forme 
de groffes bulles qui fe crèvent, retombent les unes fur les 
autres & forment des feuillets talqueux & blancs. J'ai exécuté 
ce procédé, & les obfervations qu'il m'a donné lieu de faire, 
m'ont convaincu qu'il étoit très-défeétueux. Le but de cette 
manipulation eft, comme en conviennent eux-mêmes les Chy- 
miftes qui da propolent , d'enlever à la terre foliée la partie 
huileufe qui la brunit : fur quoi j'obferverai, premièrement, 
que f'efprit-de-vin dans lequel on prelcrit de difloudre d'abord 
h terre foliée, & qu'on en fépare enfuite par la diftillation , 
eft une chofe abfolument inutile; il diffout à la vérité très- 
bien la terre foliée & la matière huileufe qui lui eft adhé- 
rente; mais comme il eft infiniment plus léger que cette 
huile, il monte feul dans la diftillation & laiffe l'huile en 
entier, combinée avec la terre foliée, comme elle étoit aupara- 
vant, fans en enlever avec lui une feule goutte. C’eft donc 
perdre fon temps & fa peine que de s'arrêter à cette première 
partie du procédé. Secondement, la fufion qu'on fait éprouver 
au fel ne fait que le brüler & le décompofer davantage, comme 
je m'en fuis convaincu par l'odeur d'empyreume & de vinaigre 
qui s'en exhalent: à la vérité on fépare enfuite, par la filtra- 
tion, les parties huileufes boulées qui reftent fur le filtre, fous 
la forme d'une matière noire & charbonneufe ; mais on ne 
gagne prefque rien par cette manœuvre, car il refte encore 
affez d'huile après cela dans ce fel pour fe brüler de nouveau 


DE SQL EN: G Æ fe s2 
& lui donner la même couleur & les mêmes défauts, fi on 
lexpofe enfuite à un degré de feu un peu trop fort, tout cela 
n'eft que du plus au moins. 

Lors donc qu'on veut blanchir de la terre foliée qui a une 
couleur brune, au lieu d'avoir recours aux manipulations 
longues, embarraffantes & difpendieufes, dont nous venons 
de parler, il ne s'agit que de diffoudre tout fimplement ce 
{el dans de l'eau froide, de filtrer la diflolution & de la faire 
évaporer, comme il a été dit dans le procédé que j'ai propolé : 
on lui donnera, par cette manœuvre facile & peu couteufe, 
toute la blancheur qu'on peut defirer, pourvü, je le pète, 
qu'on ne retombe pas une feconde fois dans l'inconvénient 
qui a originairement altéré fa couleur, en ne ménageant pas 
fufffamment le feu pendant l’'évaporation. 

La terre foliée blanchie par cette méthode, n'a pas, à Ja 
vérité, autant d'onctuofité & de favonneux que celle qui a 
d’abord été bien préparée, parce qu'une portion de fon huile, 
rôtie dans la première deflication, en eft féparée par le filtre 
fur lequel elle refte, mais elle eft infiniment moins âcre, 
moins dure & moins sèche que celle qui eft blanchie par 
Jautre moyen, parce qu'on lui conferve autant de fon huile 
qu'il eft pofüble de lui en conferver, 

Ce fel n'eft point non plus dans un état auffi parfait que 
celui qui n'a point été brülé, il a perdu une partie de fon 
acide & a des propriétés alkalines , par conféquent il ne doit 
point étre employé pour les ufages de la Médecine. II faut 
donc, pour lui rendre la neutralité qu'il doit avoir, y ajoûter 
une nouvelle portion de vinaigre; & dans ce cas, c'eft en 
quelque forte recommencer l'opération, mais c’eft encore un 
inconvénient bien moindre que celui de perdre les matières 
qu'on avoit employées ou d'avoir un médicament infidèle 


& défectueux. 
+0$ 


Vuu ÿ 


Is24 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L' ACADÉMIE 


MÉMOIRE 


SUR L:E 


MOUVEMENT DES PLANÉTES, 


Et moyen de calculer leur équation du centre pour 
un temps donné. 


Par M. JEAURAT, Profeffeur de Mathématiques à l'Écoie 
Royale Militaire. 


É:2 RDRE & l'harmonie que nous voyons régner entre 
les différentes parties de l'Univers, & la diverfité des 
mouvemens des Corps célefles, ont été de tout temps l'objet 
de la recherche des Savans; ce n'eft qu'à l'aide des obferva- 
tions réitérées que l'on eft parvenu à pouvoir en donner 
des explications raifonnées ; & les Philofophes, par différentes 
hypothèles qu'ils ont imaginées, ont décrit plus où moins 
exactement la marche de ces Corps. 

Ces hypothèfes ont été appelées Syfémes du monde, 
& portent le nom de ceux qui leur ont donné le plus de 
célébrité. 

Ptolomée a fuppofé le Soleil fe mouvoir uniformément 
fur la circonférence d'un cercle excentrique à la Terre: à 
laide de cette excentricité, il a fatisfait aux inégalités appa- 
rentes de fon mouvement. 

H a fuppofé auffi les Planètes f mouvoir à la circonférence 
d'un cercle excentrique à la Terre; mais il rapportoit l'égalité 
de leur mouvement à un point pris dans la direction de leur 
apogée, ce qui diminuoit la vitefle vers l'apogée & l'aug- 
mentoit vers le périgée. 

Selon cette hypothèfe, le Soleif, Mercure & Vénus avoient 
la méme excentricité, & les deux derniers fe mouvoient fur 
des épicycles, dont le centre étoit peu éloigné de celui du 


D'ELSÉ SCD EN CES s25 
Soleil; ce qui fatisfailoit affez bien aux mouvemens apparens 
de quelques-uns de ces aftres. 

Copernic plaça le Soleil au centre du monde, & attribua 
à la Terre trois fortes de mouvemens; 1e premier fur fon 
axe, d'occident en orient dans lefpace de vingt-quatre 
heures , en décrivant le cercle équinoétial ; le fecond autour 
du Soleil dans l’efpace d'un an; enfin un troifième, appelé 
de déclinaïfon, mais en fens contraire, c'eft-à-dire d'orient 
en occident. 

Copernic fuppofa auffi les Planètes fe mouvoir autour du 
Soleil, & plaça le centre d'un épicycle à fa circonférence de 
Jexcentrique de chaque Planète. Il attribua à la Planète un 
mouvement périodique fur l'épicycle, & au centre de cet 
épicycle un mouvement fynodique. 

Enfin Képler a réduit cette hypothèfe à fa plus grande 
fimplicité , il donne aux Planètes un mouvement à la circon- 
férence d'une ellip{e, dont le Soleil occupe d'un des foyers, 
& dont la vitefle eft telle que le rayon tiré de la Planète au 
Soleil, parcourt des aires toüjours proportionnelles aux temps 
employés à les parcourir. 

L'avantage de cette hypothèfe eft de fatisfaire au mouve- 
ment des Planètes fort excentriques, & à plus forte raifon 
de celles qui le font peu. 

Kébpler eft redevable de cette découverte aux Obfervations 
du fameux Tycho-Brahé, & cette même découverte à pro- 
curé enfuite à Newton celle de la vraie Phyfique des Corps 
céleftes. 

Quoi qu'il en foit, la règle de Képler eft fe vrai principe 
du calcul de l'équation du centre des Planètes, & j'entreprends 
ici de donner, par ce principe, la folution du problème auquel 
il donne lieu. 

Celle qu'en a donné Képler lui-même, eft longue, embar- 
raffante & indirecte : divers Aftronomes fe font efforcés d'en 
donner de plus faciles; mais aucunes ne font & ne peuvent 
être fans inconvénient. 

On en trouve une dans l'Afronomie de Gregori; une 

Vuu ii 


6 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
de M. de la Hire dans les Mémoires de l'Académie, année 
1710 ; une dans Keil, Profefleur d'Aftronomie à Oxford, 
publiée dans les Tranfaétions philofophiques de l'année 171 3; 
une de Newton, inférée dans les Inflitutions Aftronomiques 
de M. le Monnier; une de M. Caffini dans les Mémoires 
de l'Académie, année 1719 ; une autre dans les Flémens 
aftronomiques de M. abbé de 1 Caille, qui peut donner 
exactement le réfultat du problème & paroître par-là préfé- 
rable aux précédentes; enfin il y en a une de M. Clairaut 
dans fa Théorie de la Lune; & celle que je propole aujourd'hui 
feroit Ja même que celle de cet illuftre Académicien, fr je 
n’euffe pouffé les calculs plus loin qu'il ne me paroît d'avoir fait. 

H eft évident qu'il avoit fes raifons pour donner des bornes 
à fes calculs; le beloin qu'il en avoit dans fa favante Théorie 
de la Lune, n'exigeoit rien au-delà de ce qu'il y a inféré ; 
il falloit qu'il les poufsät jufqu'à fa troifième puiffance de 
Yexcentricité de l'orbite, & le refle n'auroit pà être qu'une 
digreffion dans un Ouvrage dont la queftion préfente ne fai- 
foit qu'une partie très-peite & prefque accidentelle. 

Mais le même problème qui n’étoit dans les mains de M. 
Clairaut qu'un inftrument, eft le feul objet des recherches dont 
je préfente ici le réfultat. Je me fuis propofé d'en pouffer les 
calculs jufqu'à la fixième puiflance de l’excentricité, afin que 
ma formule puifle également fatisfaire à toutes les excentri- 
cités des Planètes : & il ne falloit pas une moindre différence 
entre la pofition de M. Clairaut & la mienne, pour m'enga- 
ger à m'occuper d'un objet qu'il a déjà traité & qui fait partie 
d'un Mémoire couronné par l’Académie de Péterfbourg. 

J'avoue que j'ai trouvé des difficultés dans la conftruction 
de ma formule, mais jen fuis amplement dédommagé par 
les avantages qu'elle procure. 

Par fon moyen on peut conftruire, d’une manière très- 
directe, l'équation du centre de toutes les Planètes; & quoi- 
qu'on ne puifle pas en donner da quantité abfoiue dans Ja 
rigueur géométrique, parce qu'elle fupppole la quadrature du 
cercle & de lellipf, elle donne cependant da précifion à 


DES SCIENCES, 527 
l'exactitude d'une feconde, ce qui eft plus que fufñfant pour 
les befoins de l'Aftronomie, & fupérieur de beaucoup à a 
précifion même des oblervations les plus fcrupuleufes & faites 
avec le plus d’habileté, 

Si cette formule eft avantageufe en ce fens pour les progrès 
de l'Aftronomie, elle left dans un autre pour la commodité 
des Aftronomes; elle reftreint fa pratique, dans tous les cas 
poffibles, à deux additions pour le Soleil & Vénus, à trois 
pour la Lune & Saturne, à quatre pour Mars, & à fept au 
plus pour Mercure, que l'on fait être la plus excentrique de 
toutes les Planètes. 

Comme ces fortes de folutions exigent l'emploi des for- 
mules de Trigonométrie, exprimées par des féries infinies , 
ainfi que de celles dont nous fommes redevables à M.° Euler 
& Cliraut, je joins ici celles dont j'ai fait les calculs pour 
tous les cas poffibles, ce que l'on ne trouve nulle part & ce 
qui peut-être n'a jamais été fait. 

C'eft à laide de ces formules que je me fuis trouvé dif 
penfé d'employer le calcul intégral & différentiel. 

Soit le rayon — 1, foit aufli 4 un arc quelconque, 
J Yexpreffion de fon finus, « celle de fon cofinus, : celle de 
fa tangente, & z celle de fon finus verfe: on aura 


= a 22 + = SE 2 63 11 231 13 

“ k 6 S 40 1: ei JA en L 25€) Sul + &c. 

ZE SAR RS 18 A DES PPS ANS ER ER RQRE 1 63 11 237 13 bd. 
RES te AU NC DE D — nc — a £ — &e, 


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AI — où + — cot? — — ot + —eot7 — or? + —— cor. — &e, 


OS ot AP eines D 
J=2 me + 30 £ 5040 TT 362880 æ 39916800 4 + &c 
7 CO ST NA 300 Ge 
[=: A 8 = 16° ELA 356€ : Fo24 TT 14336 € 4 229376 Care &c. 
2 


=au— À 


— x 3 3 35 
f=i- ++ Lo + ro — &c. 


zx 
= THEN con he + cor. — À co.° HE TL — &ec. 


528 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L' ACADÉMIE 


10 


ie + at + + a"? — &c. 


8 da et L: L: 
24 # . ce 3628800 479001600 


Pi 231 3003 4 
C—i— E 14 FINE — ef — . fa a Et ie ne aus relie er Dom 2 


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E— cote — — con —+- cou — = cor 7 + 2 Es cot.? — 


—————2 


— 2 UE. a RER eg ED 29° CASTRES TS 
= Te "4 == DRE a ET Eur 3628500 4 479001600 4 SUR &c. 


231 on , 
a f + ft ES + SR URCE ele ele AU té are) Er &G 


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ER ES oi cot.3 — + cor.) + ni cot.7 — Li cor” 2 cor." — 8rc. 


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É—iu+ zu + au + sut + Eu + 7u + Bu7 + &c. 


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Li 
3 45 945$ 4725 
POUR UT ee el nf &c 


got — ce Lot He + 7 + IE 0 + &c 


a7 — &c. 


Li 
fin a— = fin 32 
Ink 4009 
—;cf2at+zcf4a 
z FA à 


fin. .aÿ = fin.a— À fin. 3 a + fin. $ 


cof.22 + À cof 4 4 — ni L 


fn. a7 — 5 (fin 2 En fin. 3 a+ fin. $a — %= fin. 7 4 


—— 7 CS z 2 
God — 5 TE AÂ2a+ F cof 4 a — NA 6a+ = cof. 8 z 


fin, 


DES SCIENCES. s29 


fa. a°° — % MAC NÉE #E cof éa+ De cf 5a— & cof 104 

fn a = EE fin 8 — 5 fin 3 a + ES fn. sa— 55 ci  ‘ a+ re = Gi. ga— ln 114 

fin er ne cof. 2a+ ref 4a— it cof. OR EE NT 2045 go 124 

fin. a°3 — Les do je HE eee paul _. 2 fn. .9a— Zouë 1 lat ln 134 
LC TO RS SEEN ces TT. ler Cu ad Caen ee ee a TI ART Sr — 


2 2 
of. a? — £ «of a+ —cf 34 


his L 1 
af af — 5 + = cof 2a + 5 cf 44 
cof. 45 — À cof. à + -5 cof. 3a+ + of Sa 
«of.  — + DCE nf nn Ca 
ZRËE x = 
col. 27 & coLa+ Lieof 3 a + Zoeof Sa + a cof. 74 


Rens 7 LEA El : 
+ Z cof 24 + Se cof 4a+ = cof. 6a + —— cof. Be 


_ cof. 94 


eof a? — nt cof. a + = col. 3a+ Z x cf see rte 


cof. 104 


La =: D 1 A cof. AE NT . cof 64 re cof 8 a+ + 


165 1 x 
LPS à 
cof. a Paie 1 cof.3 a+ use cf 72 — Z CS PE CEE à 
ee -fagr 455 55 33 - Ce 1 
cof. 4 Tr — 2% cof. 2 a + = g cf. a+ 532 cof. 6a + FT 8a + TES of. Does cof. 124 


39 13 1 
cof 7 a + nes cof. 94 + age ei 1 tag cof 1 24 


13 479 1287 IPS te 143 
5 col a+ Te PAR rpm) 


a —————_— ———— — 


ds AS BAT ee 2 Min pee 297. L 39 
gi. a ee fin. a? 56 fn.a Su ina gigglin a 5 — ri) fin. a 7— Ge 


in. 2 a—2 fin. a— fin a - fin. a — 


6n. 3 a — 3 fin. a —4 fin. a? 
7 3 11 13 12 35 1 357 8 
fin 4 a —= 4 fine a— 1 0 fin. 23 Z fim aÿ + EMA ET 7 ee TEE 3+ eine + _ ? fin. a°7+-&c; 


7344 
fn. $a — $ fn. à — 20 fin. a + 16 fin. aÿ 


fin. Ga — 6 fin. a — 35 fn.a +2 fin. aÿ — 5? fine 27 T2 fin. 2 — LT fin. a°* — &c, 


fin. 7 a — 7 fin. a — 56 fin. & + 117 fin. a) — 64 fin. 47 


fin. 8a— 8. fin. a — 84 fin. a+ 2 3 1 fin. 25 — ET fin. a7 + fin, & — 27 fin. 4° + &c. 


fin. 9 a = 9 fin. a— 120 fin. a? + 477 fin. & — 576 fin. 47 + 256 fin. a? 
— D = 2008 fn as 272 fn So77s 20995, 1 
fin, soa— fin. a— 165 fin. a + 2 fin. a 5 fin. &7 + 5 fin. a? 128 fin. a +&o, 


Go. 172— 11 fin a— 220 fin. d + 1452 fin. 45 — 28 1 6 fin. 47 + 28 1 6 fin. à — 1024 lin. 4°! 
45 4 r 


Say. étrang. Tome IV. MACXX 


530 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


cof. 24=—=— 1 + 2 cof. a° 

cof. 3 a —— 3 cof. a + 4 cof. ai 

cof. 4 a — 1 — 8 cof. 4° + 8 cof. at 

cof. $a — 5 cof.a — 20 cof. a + 16 cof. ai 

cof. Ga—— 1 + 18 cof. a° — 48 cof. a+ 32 cof. af 

cof.7a—— 7 cof.a + 5 6cof. a?— 1 17 cof. aÿ +- 64 cof. a7 

cof.8 a — 1 — 32 cof. a + 160 cof.a*— 256 cof.ai+ 128 cof. af 

cof. ga — 9 cof.a— 120 cof. a? + 477 co. aÿ — 576 cof. a7 + 256 cof. &? 

cof.10a—— 1 + $ocof. a° — 400 cof.a# + r120 cof. a5— 1280 cof. a + $ 12 cof. 4° 
cof,r1a—— 11 cof.a + 220 cof. a — 1452 cof.aÿ + 2816 cof.a7 — 28 1 6 cof. 49 + 1024 cof. a" 


cof. 12a— 1 — 72 cof. a° + 840 cof. af — 3 584 cof. a + 6912 cof. af — 6144 cof. a'°+ 2048 cof.a'* 


cof 2 a — 1 — 2 fin. a° 
7 8 33 10 
fin. a° + 256 fin. «°° + &c. 


2z 
128 


cof za 1 — 2 fin. 4° + EE fin, at + Ze fin. 5 + 


cof 4a — 1 — 8 fin. 4° + 8 fin. a# 


165 
128 


cof. Sa— 1 — 33 fin. 4° + “5 fin. a4 — 5 fin. & — fin. dd — né fin. a°° — &e, 
cof. Ga — 1 — 18 fin. 4° + 48 fin. a# — 32 fin. 4° 

eof. 8a— 1 — 32 fin. a + 1 60 fina# — 256 fin.a6 + 128 fin. aÿ 

of. 104 — 1 — $0 fin. 4° + 400 fin. a — 1 120 fin. a + 1280 fin. a — $12 fin. a'* 


sof 12 4— 1 — 72 ina + 840 fin. 4 — 3 5 B4fin.a5 + 69 1 2 fin-aŸ— 6144 fin. a'° + 2048 fin. a'* 


Détermination de l'équation du centre d'une Planête quelconque ; 
ou folution du Problème de Képler, dans lequel on fe propole 


de couper l'aire ellivtique en railon donnee. 
pi p 


Soit AHP Yorbe elliptique 
d'une Planète L, & S l'un de fes 
foyers où foit placé le Soleil ; 
foit auffi la ligne ZC prolongée 
vers Z, & la ligne SP qui lui P 
foit perpendiculaire. Dans cette 
hypothèle, l'aire ALS'eft à Faire 
entière de l'ellipfe, comme le temps que Ja planète emploie 
à parcourir l'arc AL eft au temps qu'elle emploie à parcourir 
toute la circonférence de l'ellipfe, ou encore comme l'arc AD , 
appelé anomalie moyenne, feroit à la circonférence entière du 
cercle. 


DES SCIENCES s3t 

Soit donc l'arc À D pris pour le mouvement moyen corref- 
pondant à l'arc À L,, & la circonférence entière du cercle pour 
le mouvement moyen qui convient à la révolution entière. 

Onaura : l'arc A D eft à la circonférence du cercle ce que 
l'aire ASL eft à l'aire entière de l'ellipfe, où comme DC'A 
eft à l'aire entière du cercle; & par conféquent l'aire ASL 
à l'aire entière de fellipfe, comme DCA à toute aire 
du cercle. 

On a auffi (propriété de F'ellip{e) : l'aire ASL eft à l'aire 
entière de l'ellipfe, ce que l'aire ZSA eft à l'aire entière 
du cercle. 

D'où il fuitque DCA eft à l'aire du cercle, comme l'aire 
ÎS A eft à la même aire du cercle. 


Donc DCA = ISA, & par conféquent SC/— CD, 
ou SB ES Ne , ou enfin SB— DJ. 


2 
De-là s'enfuit que l'anomalie moyenne 4 D étant donnée, 
on trouvera l'anomalie À /de lexcentrique, lorfque l'on aura 
fait l'arc D/ — à la droite SZ. 
Enfin , l'anomalie À 1 de Fexcentrique étant trouvée, on 
déterminera l'angle ASL, appelé anomalie vraie, qui eft ce 
que l'on fe propole de trouver, lorfque l'anomalie moyenne 


€ft donnée, & à quoi je procède de la manière fuivante. 


D A = u anomalie moyenne, 
Soit À Î — V' anomalie de lexcentrique, 
LSA —W anomalie vraie, 
SEC —e,excentricité de l'orbe de la Planète, 


DI=SB — efin. F. 
AI EE DI= Ve fin. V1. 


Soit donc a = 1 + 6, léquationu—# + e fin. V 
deviendra 


Onaura 


ri 


un fin. 15 + &ci 


1 œ À 124 
Ge + 3 fine E fine 10 TE fin 7 EE fn 0 TE ne 


= afin W+ à fin. ++ fin. V5 + 3 fin W7 + Bic. 3 


Xxxij 


532 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


D'où l'on tire par les règles ordinaires du calcul des fuites , 
fin. V—= Efin.u + dfin.u? + ffin.uÿ + gfineu7 + fin. + 4 fin. n° + f fin. #9 + &e. 
cof. V = à — dfin ut — m fin, n# — nfin.u — pfin.us — gfin.n"° — fin — &c. 


dont les indéterminées feront 


bi —ete 0 pet —e5 + ef — &c. 1—= —++2 —20+ Let 35 + Z 6 &e. 
2 
7 55 83 6 ë 
d— de 4009 Tr 45e T6 + &c. 1 3 8 1 
Aer ain Pr 3 1 6 ve LT CN Clan- GOTR Ln um ur el: 
se 203704 125 94x00, ET 6% 
—£{ 2%, Le e 6 — &c. 6 
f 8 TZ 1 24 120 0 40 n= 4 ge AIR TE 6 IPS 7 4e ce 
g=< 16 105tes 10807 06 + Bec: $ j'le 95 13237 ,6 à 
16 48 240 720 Psp et ge 00 Ie gs ef — fase + &c. 
8 
RES A9} jh 1627 js a ZA PAS ET dei pe 1 1 - : 196 
125 34° | i920 4637 = Fe Se dus = dl TE te 
k— 7 £ JON 27597 RARE 259757 eo + &ec 21 6 1 
— 3 . A PRES RTC EN OIE RE LUN 0 
258 768 3840 80640 ES TEA + 20x A — &c. 


REMARQUE. 


Ceux qui auront pour but la feule détermination de l'ano- 
malie de l'excentrique, telle qu'on l'a pratiquée, comme un 
moyen de parvenir à l'anomalie vraie, pourront faire ufage 
dela valeur du cofinus de V/, pourvû qu'ils introduifent dans 
la valeur du cofinus de F” celle du cofinus de l'anomalie 
moyenne. 

Dans ce cas, la queftion fe trouvera réduite à la détermi- 
nation de la partie qu'il faudra retrancher du cofinus de 
Yanomalie moyenne, pour avoir celui de anomalie de l’ex- 
centrique. . 

Pour lors la férie deviendra plus convergente, & donnera 
le réfultat cherché. Un peu d'habitude dans le calcul fera 
voi que cela eft impraticable pour la valeur du finus de }, 
& que celle de fon arc feroit préférable à celle de fon cofmus. 

Dans la fuppofition de cette introduction dans l'équation, 
of V— 1 — Jfinnt — mm fin — nfin.u$ — p fin. uf, 
— gfnu —ifinu? — dc. on remarquera dans les 


formules précédentes qu'un cofinus quelconque = 1 —+ 


fin, 0° — + fin nt — JE fine nf — de. 


DE SK ST em'EN CE 532 

— Or; fouftrayant cette feconde équation de la première, on 

aura : cof. W— cof.u + (—1+- +) finnt + (—1+4+) 

fin. nf + (—m + =) fin.uf + dre. ce qui détruit les 

conftantes des coëfficiens. 

Quant à lufage que j'en fais, il eft néceffaire qu'elles y 
reftent, & je pourfuis ainfi mon calcul. 

Dans la pratique de l’Aftronomie, on a coûtume de faire 

== 1 la moitié du grand axe de fellipfe d’une Planète; les 

autres dimenfions s'expriment en décimales. Suivant cet 


ufige, on aura CA — 1 — e*, & par conféquent le 
petit axe CH de l'ellipfe, que j'exprime par À, fe trouvera 
A 


2 8 16 j 
On trouvera auf FL — CH. in. — Afin. V — Ab. 
fin.u + Ad fin.u? + Affin.u + Ag fin. + AÀ fin. 4° 
+ AKfin. °° + Affin.u'5 + dre. dont les indéter- 


minées feront ra 

Es AUS 

Ab ie + — S LFAe Le PTIT &c, 
2 8 r6 


e— 3 Da 35—$oet ls 36165 — 51965 


Ad= + &c. 
2 12 48 
e 6: 125$ 13843 7877 
NT ReS VN et PA RS an eZ EP EG auter 
Æ 8 48 RL 24 960 Hi 240 “ &cs 
ME IUÉ Ar SA Si POSSOTR SE 
96 1920 645120 
Pre 18144006— 6834240 5 + 42097104 e — 9089600407 rt 
46448640 
joe 42e— 139€ 23 203758632 eÿ ESA 
1536 DROLE 
die 3 
AL —= SOFIA pe. 
24576 
On aura auf SF = SCHCF = + of V — #5 
4 6 — Jin n° — m0 fine 2Ë — fin. 6 — p fin. — dre, 
puis SF.FL::1.tang. W; ce qui donnera tang. W— FL. 
na — "Din LD ie dE Enr fin 2 


+ GCfinu + Hinn! JR Jin w'? + di dont les 
XxXx ü 


534 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


indéterminées feront , 


" 2 6 
FEPRENTENES IN SREPR NL SPA E) e5 + RTE #5 7 &c, 
2 8 4 16 16 u 
D A A 4 GONE HENRI Aie SONO ARR EEIPES SET EE PS EUR 
: 4 3 48 6 384 
FUnsH pH als : Bors A 192256 5 + 3816776 
16 3 192 1920 
F=——3e+ és  — Le e 2214 2 5 + &c. 
16 32 3 128 15 
c=-25- e + CE I SET AUS + — &c. 
128 256 3 3072 
Fe SR RER LE TU LCL MELLE LR age" ln 
256 s12 27648 55296 
= ED LÉ rMaErs — EE pete A ER EN 
1024 2048 3 8192 ‘ 


Enfin, faïfant l'arc W —= L fin. w + M fin. 1 + 
Nfin. 05 = Pfin.n7 + Rfn. ° + T'ün.u' + X fin. u'? 
+ Jin. u'5 + Zfin.#'7, on trouvera 


MEL DST 4 Ge, 


16 

Met None LEE PE Et RO 
LE ON tr Ch me ur 
Bio ac Er dl 

— FE en Dee Le =: et— EE 5 + &c 
re Mer Ga 
RE a 0e aa 

= LUE é + LOX 4 — 8e 
Le 6435 ___ 15015 AC DB 4 &c, 


557056 458752 5595024 


Le un arc quelconque # — fin. # + fin. #? + fin.uf 
+ TE fin, #7 + = fin. #? + fi fin." + RTE 


finu'? + dre. où bien o— # — fin. u— > fin. — À 
fn u— de. 


EN RE Sp) fn 7 


112 EE 


DUE, s ÉS CHE N'c:E’s, 535 
Ainfi ajoûtant cette équation avec la précédente W — L 
fre 20 MA in, 4° HN fn) À Pin 4 dc. 
on aura W = 1 + (L — 1) fin. + (M — =) 
fin. 19 + (N — à) fin. 2 + (P — D) fin. + 
(R— 5) fin.w? + de. ou, ce qui eft le même, 
=u+(— 2e + re — se )finu+ (+ Le 
2et +2 €) fin. 204 (—he + Le) fin. 3x 
(RÉ EE 61) fin qu (RS 6) 2 


969 
1223 ,6 
+ ee fin. 6. 


— 


L'avantage de cette dernière transformation eft confidérable: 
car, par ce moyen, on fubftitue la valeur géométrique des 
- fuites infinies des e*, e?, e“, e, ef ; ainfi mon équation les 
contient tous en totalité, & ne néglige précifément que les 
e7,e,e?, dre. Dedà s'enfuit que la convergence tombe uni- 
quement fur les coëfficiens du finus de l'anomalie moyenne, 
& non fur ce finus; ce qui fait que ma formule n’a point de 
cas ficheux, & donnera une folution auffr exacte lorfque le 


finus fera égal à l'unité que Jorfqu'il fera moindre que l'unité. 


Outre l'avantage de l'exactitude & de l'univerfilité, cette 
transformation a encore celui de fimplifier l'opération. 


Pour la facilité du calcul des coëfficiens de cette formule, 
je joins ici les logarithmes conftans des fraétions de l’excen- 
tricité dans les différentes parties des coëfficiens du finus de v, 
du finus de 2w, éc. ce que je pratique en cette manière. 
Je fouftrais du logarithme du numérateur de la fraétion celui 
de fon dénominateur. 


D'où il fuit que les fraétions qui font au deflus de l'unité, 
ont un logarithme logiftique pofitif. 

Dans ce cas, il s’ajoûtera avec le logarithme de Fexcentricité 
élevée à la puiffance indiquée, & réciproquement lorfque le 
contraire eft; ce qu'il eft aifé de concevoir. 


536 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'AÇADÉMIE 
Logifliques des coëffciens de la formule = u + 
(RER Le )inu+ de 

9 


2 =t+ 0.0969100 ; 
Pour + —=—0.6020600 Dares Poe = —=-+0,0347621 
fn u À, RE ——0.3388185 fin 3) 43 
= — 12835012 = 01727115 
1 
on ——1.0$28523 
103 mr cé 
Pour ) 56 9:0305060 Pour 1007 Pour 1223 is bon 
fn. 4 4 ÉHLLES. 6 fin. 5 4 960 0097555 fin. 6u 960 ÿ 55 
Le = — 0:0270647 
4 


Suppofons avec M. Caffini, dans fes Élémens d’Aftronomie, 


que les excentricités font pour 


Vénus, 0,00714.7 
Le Soleil, 0,0 168$ 
La Lune, 0,04344 
Saturne, 0,05693 
Mars, 0,09287 
Mercure, 0,20578 


Ma formule W — u+(—26+ je — je) 
fn.u + (+ À Lé — 5 Et +Z €) fn.2u0 + 
TE ee 


De 


fin. qu —7 6 fin. su + LE ef fin. 6u, donnera 


Pour Vénus, W—4— 0,01429.4fn.1+0,00006.0 fin. 24 
Pour le Soleil, W—4— 0,03370 fin.#+ 0,0003 $ fin. 24— 0,00000$.fin. 34 
Pour Ja Lune, W—u— 0,08686 fin.u + 0,002 36 fin. 24 — 0,00009 fin. 34 


Pour Saturne, W— 4 — 0,11381 fin.4+ 0,0040$ .fin. 21— 0,00020.fin, 3x 
—- 0,00001.fin.4# 


Pour Mars, W—u— 0,185 54 fin. #+0,01075 fin. 2 4—0,00086 fin. 34 
+ 0,00008 fin. 44 
Pour 


LE 


prés SCtENcCE $ # 537 


Pour Mercure, W—u— 0,41 $ 31 fin. # + 0,05362 fin. 2 — 0,00959 fin. 3 « 
—+ 0,00196 fin. 44 — 0,0004$ fin. $u + 0,00011 fin. 6x. 


Ce qu'il faudra réduire en fecondes, de manière que la 
moitié du grand axe — $74 17° 48"; ce qui fe connoît 
par cette analogie; 355$ demi-circonférences du cercle eft 
à 180 degrés, comme 1 1 3 demi-diamètres — 1 eft à 574 
17° 48",8 ; valeur du rayon replié fur la circonférence de 


fon cercle. 


Cette réduétion en fecondes pour les coëfficiens de ma 
formule, fe fera donc en ajoûtant aux logarithmes de ces 
coëfliciens, le logarithme conflant 0,3 1442 5 1 ; pour lors 
on aura 


Pour Vénus, W—u— 2948"fin.u+ 13" fin. 22 

Pour le Soleil, W— u — 6951"fin.u +73" fin. 2u— 1" fin. 32 

Pour la Lune, W—u— 17916” fin.u + 486"fin. 2u — 18"fn.3# 

Pour Saturne, W—u— 23476" finx+ 835$" fin.2u— 41"fin.;u + 2/fin.4æ 
Pour Mars, W—u— 38270"finu+2217"fin.2a— 178"fin.3u + 1 6'fin.qæ 


Pour Mercure, W—u— 85663" fin.u +%11060! fin. 2 # — 1979" fin. 3u 
+ 404” fin. 4u — 93" fin. çu + 22” fin. 6x. 


Enfin on aura à la diftance de 3 fignes, ou, ce qui eft 
le même, à 90 degrés, 


VÉNUS. |LE SoLEiL.| LA LUKE. SATURNE. | MaARs. MERCURE. 


a 
DM S|D MC S|D MIS DA STD M. SD M Ss 


Selon les Tables 


de M.Cafini. | 0-49: 4. 58.20 | 6. 30.38 |10.35, 6 


23. 1$° $6 


Selon 


ma Formule. | 9:49: 4. 58. 17 | 6. 30-34 |10: 34. 52 |23. 16. 17 


Ce qu'il auroit 


0. 49. | 1, 55: 50 |4. 58. 17 | 6. 30. 34 | 10. 34, 52 |23. 16. 8 


fallu trouver. 


Pour calculer avec ma formule, on obfervera que les finus 
des fix premiers fignes font pofnifs, & que ceux des fix 
derniers font négatifs: dans ce dernier cas, il faudra prendre 
le figne contraire. 


Sav. étrang. Tome IV. .Yyy 


538 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
EXEMPLE. 


Soit arc w donné de 90 degrés: finus # fera pofitif, 
fin, 24 — o;fin. 3u négatif, fin. 44 — 0o,fin. $ # 
pofitif, &c. ainfi l'équation générale du Soleil /W — u 
— 6951" fin. # +73" fin 24 — 1" fin. 3 w) deviendra 
W—=u — 6951" finu + 1" fi. zu. Dans ce cas, fa 
fomme (— 6951" + 1"—— 6950") des coëfhciens 
fera le nombre de fecondes cherché, par la raifon que le 
finus u = 1. 


AUTRE EXEMPLE, 


Soit l'arc # — 92 degrés: fin. v de 92 degrés fera pofitif, 
fin. 24 de 184 derés fera négatif, fin. 3w de 276 degrés 
fera nécatif, fin. 4u de 368 degrés, ou, ce qui eft le même, 
de 8 degrés fera pofitif; ainfi l'équation générale du Soleil 
W— u — 6951" finu + 73" fin 2u — 1° 
fin. 3u... deviendra W = u — 6951" fin u — 73" 
fin. 24 + 1" fin. 34. 


Dans ce cas, on ajoütera lelogarithme 3.842 04 du coëff- ! 


cient 69 5 1” avec celui de fin. # (999973 ) de 92 degrés; 
puis on retranchera 10 de la caractériftique , ce qui donnera 
le logarithme 3.84178 — — 6947". 

De méme on ajoûtera le logarithme 1 8 63 3 2 du coëflicient 
73" avec celui du finus 24 (88435845) de 1 84 degrés; 
ce qui donnera le logarithme 0.70690 = — 5”. À l'égard 
du troifième terme, il ne donnera pas + de feconde; ainft 
on le négligera. 

Enfin, la fomme des deux réfultats — 6947" — 5" 
= — 6952"—=— 1455" 5 2" fera l'équation cherchée. 


OBSERVATIONS fur la différence des réfulrats de ma 
formule d'avec ceux des Tables de M. Caffini. 


La plus grande différence qui fe trouve entre les Tables 
de feu M. Caffini & le réfultat de ma formule, eft de 24 


711 


DE s "SGITENN ONEtS 

fecondes ; ce qui n’arrivera que lorfque les Planètes feront 
fort excentriques : mais ces différences font peu importantes 
pour ces fortes de planètes, vû que ce font celles dont la 
thécrie eft le moins bien fixée. 

D'ailleurs on ne peut pas conclurre de a différence qu'il 
y a entre les Tables de M. Caflini & mes réfultats, que lun 
ou l'autre de nous deux foit éloigné du vrai réfultat de Ja 
valeur de cette différence. 


EXEMPLE. 


L'équation de l’anomalie moyenne pour Mercure à la dif 
tance de 3 fignes, eft, felon M. Caffini, de 234 15° 56”; 
felon ma formule, elle eft de 23% 16° 17", & elle doit 
être de 234 16° 8”; ce que j'ai connu par la folution de 
'inverfe du problème. 

L'excentricité de l'ellipfe étant donnée de 0,20878, & 
l'anomalie vraie de 66% 43° 43", on demande fon anomalie 
moyenne. Je procède ainfi avec M. l'abbé de la Caille. 

Comme la racine quarrée de [a diftance périhélie o,7 9122 
eft à fa racine quarrée de la diftance aphdlie 1,20878 , ainfi 
le logarithme tangente 98 1 8 5459 de la moitié de l'anomalie 
vraie 664 43° 43" eft au logarithme tangente 99 105709 
de la moitié de l'anomalie de l'excentrique 7 84 17° 3". 

Puis, comme le rayon eft au logarithme finus 9 9908568 
de l'anomalie de l'excentrique 78% 17° 3", ainfi l'excentricité 
réduite en fecondes eft à 114 42° 47", qu'il faut ajoûter à 
lanomalie 784 17° 3" de l'excentrique, pour avoir 894 59‘ 
50”, anomalie moyenne. 

” Or, ceite quantité 894 59” 50" devroit être de 904 0'0”; 
ce qui indique à peu près une erreur de 10 fecondes dans 
mon équation du centre 234 16" 17”. Suppofant donc 'ano- 
malie vraie de 664 43° 53", au lieu de 664 43° 43", on 
trouvera de la même manière lanomalie moyenne de god o’ 
1"; ce qui indique une feconde d'erreur dans {a fuppofition 
de 664 43° 53" pour l'anomalie vraie. 

Suppolant enfin lanomalie vraie de 664 43° 52", on 


Yyyi 


s4o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
trouvera l'anomalie moyenne de 904 o* 0”, qui eft pour Lors 
la vraie anomalie moyenne cherchée, 

Donc la vraie équation du centre eft 234 16’ 8"; donc 
enfin mon réfultat différoit du vrai de 9 fecondes, & celui 
de M. Caffini de 12 fecondes. 

Quoi qu'il en foit, cette remarque ne porte aucune atteinte 
au moyen que je propofe pour le calcul de l'équation du centre 
d’une planète quelconque; cela indique feulement qu'il faudra 
pouffer les calculs aufir loin que les excentricités l'exigeront, 
& que je ne m'en fuis tenu à Ja fixième puiffance de l'excen- 
tricité, que parce que cela étoit réellement fufhfant pour la 
-conftruétion des Tables de l’équation du centre. Ce qu'il 
falloit démontrer. 


DE s "S cir ré ce mis s41 


OBS ETF ON 


DE 
ÆCOPPODILIONCD E SU PAT-EURE 


Faite à Rouen le 2 Mai 1757. 
Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 


E 2 Mai dernier, je me préparai à faire l'obfervation 
de l'oppofition de Jupiter, avec M. Dulague, Profeffeur 
d'Hydrographie à Rouen & Membre de l’Académie de cette 
ville. J'avois depuis peu un micromètre fait par un Ouvrier 
intelligent, & dont j'avois moi-même fait les divifions : il ef 
dans la forme ordinaire; le pas de vis qui fait mouvoir le 
fl mobile, eft environ d’un quart de ligne; le cadran eft 
divifé en cent parties. Cet inftrument peut s'adapter à une 
lunette de 17 pieds & à une autre de 9 ; mais pour l'Oblfer- 
vation dont il s'agit, je l'avois adapté à une excellente lunette 
de 4 pieds à deux verres. Je fixai cette lunette de manière 
qu'elle ne pût être dérangée pendant la durée d’une obfervation. 
Le 2 Maï, nous primes dnq fois la différence de Jupiter 
à la luifante & de la Balance, tant en afcenfion droite qu'en 
déclinaifon. Le 3 , nous répétames onze fois nos opérations ; 
le Ciel étoit beau : le 4 nous en fimes fept. Nous primes 
aufli e diamètre de Jupiter, pour connoître les parties qu'il 
falloit ajoûter ou retrancher, afin d’avoir la différence en 
déclinaifon pour le centre. 

Toutes ces obfervations furent réduites à trois feulement, 
en prenant pour chaque jour un réfultat moyen, tant dans les 
différences d'afcenfion droite prifes en temps, que dans les diffé 
rences de déclinaifon fournies par les parties du micromètre : 
& à caufe du mouvement particulier à la Planète, nous primes 
auffr, pour les heures de ces réfultats, une heure moyenne entre 
les obfervations de chacun de ces trois jours, & il vint, 


Yyyii 


fs 42 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


| 
Temps vrai. Différences en afcenfion droite, Différ, en déclinaif. 
EE _ 
en temps. en degrés. 


Le2à 14h32", 9"| + 9° 47% 24 26° $0°,6| 04 14 480 
Le3à 12.48. 47 | 4 9. 192% — 2. 19. 45,6 | o. 16. 53,3 
Ledärr. 12 8 | + 8: 515 —2. 17 47,5 | o. 18, 57,2 


Pour connoître le temps vrai, j'obferve le paflage du Soleil 
par le moyen de deux ficelles tendues à une aflez grande 
diftance l’une de l’autre, dans le plan d'un méridien tiré d'abord 
à l'Étoile polaire, mais rectifié par des hauteurs correfpon- 
dantes, trouvées avec deux fortes d'inflruinens , dont l’un à fa 
vérité n'a que neuf à dix pouces de rayon; l'autre équivaut 
à un rayon de fix pieds, mais eft expolé à fe déjeter par l'ar- 
deur du Soleil, parce qu'il n'eft que de bois. 

J'ai auffi deux gnomons, dont l'un a neuf pieds, l'autre 
quinze à dix-huit de hauteur ; cependant pour prendre le midi, 
je préfére l'ufage des deux ficelles, En prenant même le paffage 
des deux bords par les gnomons, j'ai toujours craint de n'avoir 
le paffage du centre qu'à $ à 6 fecondes près, à caufe de la 
pénombre, lors même que le Ciel eft le plus net. Or, il 
arrive fouvent, quand il y a des vapeurs où des nuages légers, 
que cette pénombre n'a pas fes mêmes degrés d'apparence au 
pañlage de fun des bords qu'au pañlage de J'autre: par la 
manière dont je prends le paflage, je fuis exempt de ces 
inconvéniens. 

Si l'on expofe au Soleil deux cordes à quelque diftance 
June de l'autre, par exemple, de cinq à fix pieds, & que 
lon reçoive les deux ombres fur un papier diftant de deux 
ou trois pieds de la corde la plus proche du papier, ombre 
de celle-ci fera plus forte, mieux marquée, mais moins large 
que l'ombre de la corde la plus éloignée. Qu'on metie ces 
cordes dans un méme plan avec le Soleil, on voit l'ombre la 
plus forte divifée en deux par une clarté très-ferfible, pour 
peu même que les nuages laiffent quelque paffage aux rayons 


le) 
du Soleil. Si donc ces cordes font toutes deux dans le plan 


té 


De s1-ST'EMREMNNC PES 
du méridien, cette clarté défignera que le Soleil y eft aufii; 
& lorfque fon centre y paffera , Ja clarté féparera l'ombre 
forte en deux parties égales. 

Voila effectivement ce qui m'arrive avec mes deux ficelles 
placées dans le plan du méridien; & l'eflet en eft tel, qu'en 
été, dans la plus petite diftance des ficelles, laquelle eft 
de fix à fept pieds, je ne refte jamais plus d'une ou deux 
fecondes indécis pour le pañlage du centre: de plus, j'ai pris 
très-fouvent le paflage par ces cordes dans un temps où l'on 
n'avoit pü diftinguer l'image des rayons échappés par l'ouver- 
ture des gnomons. 

J'ai fuppolé les Élémens de l'Étoile & de la Balance , tels 
que M. l'abbéde la Caille les donne dans fon nouvel Ouvrage, 
intitulé Fundamenta aflronomiæ, dc. 


Afcenfion droite, Déclinaifon. 

a de Ja Balance 1." Janvier 1750 ....... 219416" 23",1|14% 59° 8”,3S 
Préceffion moyenne: .:....:.....4... 
Équation équinoxiale Ris: tale meet: 
Équation & déviation. ............... + 1.45, 
Abktrationtiie 2e NE REIN. ÉD Oo. 6,2 
Donc élémens apparens le 2 Maï, à 12 heures, 

tCMPSAEVTAÏ. he ous on ele le oioe le aa oo ne 1- 10,29 
Différence de Jupiter le 2 Mai à 14h 32° 9 

ROUE NAS cie eieE + 2. 26. 50,6] — 14. 48,9 
Donc à cet inftant Jupiter obfervé a...... 221. 49. 26,4 |14. 46. 11,45 
Adele, Balante ie def la, 219. 22. 35,8 My. Tr. 0,38 
Différence de Su A 3 à ae 47". 2e 19. 45,6| — 16. 53,3 
Donc alors Jupiter à....,...»......: 221. 42.02M1,4|14 44 7,0S 
idea Balances y ee AM 21 209122: 7628 0nSN 7. 0,35 
Différence de Jupiter le 4-a 11128"... +2. 12. 47,5 | — 18. 57,2 


Donc felon l'obfervation , Jupiter avoit. ... 221. 35. 23,3 |14. 42. 3,18 


Suppofant, avec M. l'abbé de a Caille, l'obliquité de l'écliptique, 
en Mai1757, 23% 28° 9", j'en ai déduit, 
Longitude apparenté. | Latitude apparente, 


Mer tt 3250 9 MUR NM mis 52° 56,8] 14 18° 54”,7N 
SEM PA PE CCC ER EP 13. 45. 47,2 | 1. 18. 1,4 
Por Maralrr. 12. 8... NACRE 13: 38.44,2 | 1, 18. 49,3 


\ 


s44 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Pour dépouiller la Planète de l'effet de l'aberration & de 

Ja déviation, j'ai fuivi les méthodes données par M. Clairaut, 

dans les Mémoires de l'Académie de 1746, & j'ai trouvé, 


Aberration en longitude, ..... PS Lac he RÉ _ TT, S 
ERMTAULUUE RAA Te Re miser etes eee + 0,1 
Déviatione nr}. ae Me die « 60 0e HR AL US PRET AE + 11,2 
Aberration & déviation. ..............:..., _— 0,3 
Lieu vrai obfervé de Jupiter le 3 Mai à 12P48'47",Mmi3t4s" 47" 

Matitides ts PAT ERE IRAN CURE TRE » MOT. TONNES 


Pour avoir l'erreur des Tables de Jupiter, j'ai calculé, par 
Jes Tables de M. Halley, la longitude & la latitude géocen- 
triques de Jupiter au même inflant. 


Longitude géocentrique CAGE Eee MT SENS 

Donc erreur des Tables .......... or + 6. 8 

Latitude géocentrique CalEtlées ee fe SPORE Te OT UN 
+ ©. 24,5 


Enfin, pour connoitre l'heure précife de l’oppofition de 
Jupiter, j'ai cherché dans les Tables de M. Halley le vrai lieu 
du Soleil le 3 Mai à 12P 48° 47” à Rouen, ou 12P 53" 
46" à Paris, je l'ai trouvé à 119439: 45"; donc la dif- 
férence du lieu de Jupiter à l'oppolé du Soleil, od 6° 2”. 
Or, connoiflant le mouvement horaire du Soleil de 2° 25", 
celui de Jupiter en longitude de 19 fecondes, on a le mou- 
vement compofé de 2° 44", comme le mouvement compofé 
2’ 44" eft à 1°; ainfi la différence de Jupiter à loppofite 
du Soleil, 6 2",eftäa 2° 12° 36", qu'il faut ajoûter à 
12h 48’ 47"; heure pour laquelle on a calculé le lieu du 
Soleil, & on aura l'heure de l'oppofition de Jupiter au Soleil 
à Rouenà 15" 1"23",ou 1 5" 3", temps moyen à Paris *. 

* Si l’on corrige le lieu du Soleil fur les dernières Obfervations, il faudra 


augmenter le lieu du Soleil de 7 fecondes, & l'on aura le temps moyen de 
l'oppofuion à Paris, 1 5! o’ dans M 13445’ 6”. (Note de M. de la Lande). 


LNYERS 
DESCRIPTION 


dosané . 


DFE S TSTCNTENTC ES s45 


DE SC RAM HON 
. D'UN 
FEŒETUS MAL CONFORMÉ, 


Dont les Os avoient une molleffe contre nature. 
Par M. BORDENAVE, Profefieur Royal en Chirurgie. 


| Be Foœetus mâle de fept mois que j'ai eu l'honneur de pré- 
fenter à l Académie le 10 Mars 17 $s9 , n'offroit rien 
de vicieux dans la conformation du tronc, mais feulement 
dans celle des extrémités fupérieures & inférieures : il avoit 
de longueur neuf pouces & demi depuis le fommet de la 
tête jufqu'aux talons, qui touchoient aux fefles. Les extrémi- 
tés fupérieures reffembloient pluftôt, quant à li conformation 
extérieure, aux extrémités antérieures d'un ours qu'à des bras, 
& portoient feulement de longueur, depuis l'épaule jufqu'à 
l'extrémité du doigt du milieu, deux pouces neuf lignes : 
les extrémités inférieures étoient conformées de façon qu'elles 
repréfentoient deux courbes, dont la convexité fe portoit en 
dehors; les jambes étoient repliées horizontalement du côté 
des fefles, & les talons y touchoient; en forte que les deux 
pieds venoient fe terminer au deffous des bourfes, les pouces 
tournés añtérieurement. Par cette difpofition, les extrémités 
inférieures n'ajoûtoient prefque rien à la longueur du fujet. 

Quoique l'Académie ait déjà dans fes Mémoires un très- 
grand nombre d’obfervations fur des fœtus mal conformés, 
dont beaucoup méritent une attention particulière par leur 
fingularité, j'ai cru que celui-ci pourroit encore avoir quelque 
confidération, non par fa conformation vicieufe, mais par 
l'état de molleffe complet dans lequel paroifloient être les os, 
qui ont ordinairement à cet âge quelque folidité, & qui 
fervent à donner la forme aux parties molles, en eur four- 
niffant un appui. 


Say. étrang, Tome IV. 2, Zzz 


16 Mai 
1759: 


546 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

En eflet, lorfque ce fœtus a été examiné, j'ai remarqué 
que toutes les parties qui tenoient lieu d'os, avoient une molleffe 
contre nature. Le crâne, qui dans le fœtus de ce terme a 
quelque folidité, ne préfentoit dans celui-ci aucune réfiftance, 
& on pouvoit le pétrir dans tous les fens: la bafe du crâne 
n'éloit pas plus folide, elle cédoit étant comprimée d’une 
tempe à l'autre, & le toucher ne faifoit fentir aucun des os 
de la face, pas même fa mâchoire inférieure. Le tronc étoit 
de même fingulièrement flexible; les côtes préfentoient à 
peine une légère réfiftance, & les vertèbres étoient les feules 
parties du corps que l'on püt foupçonner d'avoir quelque ten- 
dance à l'offification & qui fiflent fentir quelque folidité. Les 
extrémités fapérieures & inférieures étoient de même flexibles, 
&, ce qui paroîtra furprenant, les os de la cuifle & du bras, 
ces os les plus gros & les plus maffifs, étoient de même 
flexibles comme de la cire molle, & pouvoient être diverfe- 
ment contournés fans une plus grande réfiftance. 

Les os manquoient-ils dans ce fujet? étoient-ils malades? 
l'offification étoit-elle feulement retardée? étoit-elle vicieufe? 
les os préfentoient-ils quelques particularités? enfin d’où venoit 
leur mollefle? ce phénomène demandoit des recherches ana- 
tomiques fur la conformation des os de ce fujet, & je vais 
rapporter ce qu'un examen fuivi n'a laiflé apercevoir. 

Le crâne de ce fujet, préparé avec foin & dépouillé de 
toutes les parties, n'a préfenté aucun os, excepté vers la bafe ; 
& au lieu d’une boîte offeufe , il formoit une capfule mem- 
braneufe, qui,-après avoir été diftendue & féchée, laifloit 
apercevoir, particulièrement du côté de la bafe, quelques 
commencemens irréguliers d'offification. 

I n'y avoit point d’os pariétaux, on apercevoit feulement 
à leur place, dans l'épaiffeur des membranes, des filets irré- 
gulièrement tracés, dont la difpofition pouvoit être juflement 
comparée à celle des aiguilles de la glace naïffante, & qui 
au lieu de partir d’un centre commun, comme on l'obferve 
ordinairement dans la formation des pariétaux, formoient au 
contraire plufieurs amas d’aiguilles ou filets offeux, ayant 


Sd an À a 


D'ELs. S'CTE UN CES. S47 
chacun un centre d'où elles s'écartoient en rayons: ce cen:re 
paroifloit réticulaire ou poreux. J'ai auffi obfervé à la loupe 
des filamens ofieux, tranfparens & ifolés. L'infpeétion a 
démontré, dans ce cas, que l'offification de ces os commence 
par des filamens formés dans l'épaifleur des membranes par des 
molécules de fuc offeux. 

Le coronal étoit de même membraneux, excepté à l'endroit 
des boffes frontales, où il y avoit un très-léger commence- 
ment d'offification rayonnée entre les membranes. 

L'occipital laifloit apercevoir, dans l'épaiffeur des mem- 
branes de fa partie poftérieure , des filets offeux qui formoient 
un commencement d'offfication : les condyles & la partie 
de cet os qui fe joint au fphénoïde, faifoient trois portions 
offeufes diftinctes. 

La partie des temporaux, qui tenoit lieu de ce que l’on 
appelle ordinairement la partie écailleufe , étoit purement mem- 
braneufe & ne préfentoit, dans l'épaiffeur des membranes, 
aucun commencement de filets offeux; la feule partie qui 
forme la roche étoit offifiée; & cette partie, ordinairement 
d'une très-grande dureté, étoit comme fpongieufe & flexible, 

L'os ethmoïde étoitentièrement membraneux &tranfparent; 
los fphénoïde m'étoit un peu offifié que dans fon corps, & 
fes ailes avoient à peine quelques légers commencemens 
d'offification. 

Tous les os de la face étoient entièrement membraneux 
& tranfparens ;excepté la voûte du palais, où l'on remarquoit 
une apparence de folidité offeufe, & 11 mâchoire inférieure, 
qui, flexible d'abord, devint enfuite folide en fe féchant & 
parut ofleufe. Après avoir parlé des autres os du corps, on 
verra, par l’obfervation de leur ftruéture particulière, la raifon 
de leur flexibilité & de leur mollefle. 

Ainf toute la tête de ce fujet formoit une efpèce de boîte 
tranfparente, où il n’y avoit rien d'offeux que vers la bafe. 
Le germe des dents laifloit apercevoir quelques commence- 
mens de folidité. 

Le tronc offroit peu de particularités; les vertèbres étoient 

Zzz ij 


548 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
es parties les plus formées, mais elles avoient une ftructure très- 
molle; les côtes avoient quelque chofe d'ofieux juiqu'aux 
deux tiers de leur étendue, elles étoient plus épaiffes qu'elles 
ne doivent l'être à pareil âge, & en les coupant en travers, 
on les trouva poreufes ; le fternum n'avoit aucun point d'offi- 
fication; le baffin n'avoit rien de particulier, finon l'extrême 
flexibilité des parties qui avoient déjà contracté un peu 
d'offification. 

La conformation fingulière des os des extrémités, ainft 
que leur moileffe, ne mérite pas moins d'attention. 

Les clavicules étoient très-fHlexibles ; & les omoplates, plus 
épaifles qu'elles n'auroient dû l'être, Héchifloient à la moindre 
preflion. 

Les humérus, plus g gros & très-courts, n'étoient pas feule- 
ment flexibles à raifon de leur ftruéture poreufe, il y avoit 
encore un méchanifme particulier qui facilitoit cette flexibilité; 
ces os étoient compolés de plufieurs pièces , entre lefquelles 
il y avoit une efpèce de fubftance cartilagineufe, qui per- 
mettoit à l'os de fléchir particulièrement en cet endroit ; celui 
du côté droit étoit compolé de trois pièces, & le gauche de 
deux feulement. 

Les cubitus & les radius, tortüeux par la conformation , 
étoient de même compolés de plufieurs pièces. 

Le fémur droit étoit contourné en 5, le sauche formoit 
une courbure irrégulière en dehors; ces os étoient auffr com- 
polés de plufieurs parties, unies par une fubftance très-fouple, 
dont on aperçoit la trace fur le fquelette. 

Les tibia & les péroné ne formoient pas de même une 
fubftince continue: les tibia particulièrement avoient un 
volume aflez confidérable, ils étoient courbés; le droit étoit 
compolé de trois pièces & le gauche de quatre. 

Telles font les particularités que j'ai obfervées dans chaque 
os, mais la conformation & la ftruéture de la fubftance propre 
des os ne méritoient pas moins de confidération dans ce 
fujet. En effet , au lieu d’une fubflance qui commence à avoir 
quelque folidité, blancheâtre & ordinairement coinme fibreule 


É 
3 
4 


RS Sn A LS 


DES SCIENCES. S49 
dans les jeunes fujets, celle de ces os étoit molle, rougeâtre, 
fpongieufe ; elle rendoit une liqueur fanguine lorfqu'on la 
prefloit, & depuis qu'elle a été defféchée, on voit dans les 
endroits d'où le périofle a été enlevé, que la fubflance de 
los et poreufe, grifâtre & friable; elle ne laiffe apercevoir 
aucune apparence de fibres, & les molécules terreules qui la 
forment, ne font que très-foiblement unies. Le périofte de 
ces os étoit un peu épaiffi & fort rouge. 

Cette efpèce de conformation de la fubftance de l'os, paroît 
avoir quelque analogie avec celle qui a été obfervée dans les 
os de la femme Supiot *. Cette femme avoit les os {pon- 
gieux, un peu flexibles, & ils étoient fanglans loi fqu'on les 
prefloit; mais il y a cette différence, que dans la femme 
Supiot cet état étoit la fuite d’un état morbifique, au lieu que 
dans le fœtus dont nous donnons la defcription , on ne trouve 
point une caufe femblable, & la mère jouifloit pendant fà 
groffefle, & jouit encore d'une parfaite fanté. 

On voit, par ce que j'ai expolé fur la ftruéture des os 
de ce fujet, que la mo lefle contre nature qu’ils avoient, dé- 
pendoit en général de leur ftruure interne, différente de ce 
qu'elle eft dans les os d'un fujet de pareil âge, & que leur 
flexibilité étoit augmentée dans les grands os, tels que les 
humérus & les fémur, par une conformation particulière, 
ces os étant compofés de plufieurs pièces unies entr’elles par 
une fubftance intermédiaire. 

Cette ftruéture propre à ce fujet, n'a rien de commun avec 
ce que l'on obferve dans les os d’un fœtus, même plus jeune : 
& fi on compare le fquelette d'un embryon de trois mois 
feulement, on voit dans les os des différences bien fenfibles. 
À cet âge, quoique les os foient très tendres, on aperçoit déjà 
les os de la tête en partie formés ; en fe féchant, ils fe foû- 
tiennent, on leur trouve quelque folidité, ainfi qu'aux extré- 
mités, & les mêmes progrès font encore plus fenfibles dans 
un terme plus avancé. Dans notre fujet au comraire, quoiqu'au 
terme de fept mois, toute la tête ne forme qu'une caplule 
membraneule excepté vers la bale; ces parties ne {e pouvoient 

|; Zzz ii 


* Mém. de 
l’Acad, 1 75 2: 


so MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
foûtenir, & les autres os n’avoient prefque rien de folide, Cet 
état, qui lui étoit propre, étoit donc abfolument différent de 
ce que l'on obferve dans les autres fœtus, 

Je n'entrerai dans aucun détail fur la nature de ce phéno- 
mène, il me fuffit de rapporter ce que l'examen m'a démontré, 
& j'ai cru cette defcription intérellante, en ce qu'elle fournit 
un nouvel exemple d'une molleffe, contre nature, des os dans 
un jeune fujet, 


P.S. Depuis la ledure de ce Mémoïre, j'ai mis dans un mé- 
lange d'eau & d'efprit de nitre une extrémité fupérieure entière 
de ce même füjet : l'ayant laiflée pendant environ trois femaines, 
j'ai obfervé que les os fe font non feulement ramollis, mais 
même qu'ils font tombés dans une efpèce de diflolution, fans 
laifler prefque aucun parenchyme. Cette expérience fimple 
laifle entrevoir la différence fingulière de la ftruéture intérieure 
des os de ce fujet. 


EXPLICATION DE LA PLANCHE. 


A, H UMÉRUS du côté droit, compofé de trois pièces, fépa- 
rées par deux efpèces de cartilage intermédiaire, défigné par les deux 
lignes ponctuées ; 4, lhumérus gauche, n’ayant que deux pièces & 
un cartilage intermédiaire, défigné par la ligne ponctuée. 


Bb, les cubitus & les radius de chaque côté, compofés de plufieurs 
pièces, dont la ligne ponctuée indique la principale. 


Cc, les fémurs, compofés chacun de trois pièces , féparées par 
deux cartilages intermédiaires. 


D d, les tibia, dont le droit eft compofé de deux pièces feulement, 
& le gauche de trois pièces féparées par un cartilage indiqué par 
les lignes ponétuées. Les péroné font faits chacun de deux pièces, 
que l’on n'a pü défigner, étant cachés par les tibia. 


SET 


és 


DORA | 


> OL 


DES SCIENCES. s5t 


OBSERVATION 


DE. L'EÉCLIP SE D EULUMNE 


DU 3 FÉVRIER 17$7, 


Face à Rouen, au Prieuré de Saint - Lo. 


Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 
\ 5} ae cette Obfervation il y a des intervalles un peu 


confidérables, où je femble avoir été fans rien faire. 
Je failois rouler les verres bleus & jaunes pour vérifier l'opi- 
nion de M. de Barros; je me fuis confirmé dans l'idée, que 
plus un verre eft foncé en bleu, en verd, en jaune, plus il 
fortifie la pénombre & fait paroître l'ombre réelle plus confi- 
dérable; je me fuis même perfuadé que le brouillard fait le 
même eflet, & que fi l'horizon a été plus net à Paris qu'il 
ne la été ici, on doit trouver bien de la différence entre les 
obfervations parifiennes & mes dernières, par rapport à l'éten- 
due de l'ombre, que mes carreaux me donnoient à 1 8 heures & 
de près de 8 doigts & demi. En général, pendant toute l'obfer- 
vation la Lune n’a pas été bien nette, & les taches ne fe 
diftinguoient qu'avec une forte de peine. 
. Je comptois avoir un micromètre pour obferver cette 
Éclipfe, mais il n’a pü être fait aflez à temps; j'ai été obligé 
d'employer un réticule à carreaux. Je me fuis afluré de leur 
égalité, par l'égalité du temps que le bord de la Lune a mis 
à les parcourir: chaque intervalle a été conftamment de 26 
fecondes. Un heureux hafard a fait rencontrer que le äifque 
couvroit, avec beaucoup de juftefle, cinq de ces carreaux ; 
jen ai profité pour prendre de temps en temps les doigts 
éclipfés. Les heures font en temps vrai, méridien de Rouen. 


Pénombre fenfible a............ TN 17h 26". o° 
COLE EC mA M CANNES 17: 330,0 
rés -lOrté desire AREAS VANETATS 

Bord bien fombre à..................... 17. 39. 8 


552 MÉMOIRES PRÉSENTÉS à L'ACADÉMIE 
Encore plus fombre à......,.....: 17" 40° 33° 


Commencement préfumé à................ 17. 41. 24 
L'Eclipfe eft certainement commencée à........ 17. 42. 0 
Diflance des cornes , deux carreaux à ......... 17. 46: 34 
Trois carreaux à ....:. ACER AN PONTS ET 
Ariflaïque à moitié plongé à........ ie MIS AT ES Oo 
Hauteur de lombre, un carreau à........,.., 17 56. 8 
Képler entièrement dans l'ombre à........... 18. 2. 18 
THADERATISCOUVE LA ARE EL EEEREE A UETE ANS Az 
Diftance des cornes, quatre carreaux à......... 18. 9. 2a 
La mer de Sérénité touche l'ombreà.......... 18.11. 28 
Copernic à moitié couvert à ..:#..,.......,. 18. 17. 26 
Poffidonius couvert à demi à..:"........... 18. 20. 2 
Hauteur de l'ombre, deux carreaux à.......... 18. 20. 40 
Manilius entièrement couvert à...........,. 18. 27: 12 
Merelaus\de Meme ae ee ee ter LOI 7-0 
L'ombre à la mer des Crifes à.............. 18. 34 10 
Le brouillard & fes vapeurs commencent à devenir très-fenfibles. 
Hauteur de l'ombre, deux carreaux À à........ 18, 37. 20 


La mer des Crifes paroît à moitié couverte de l'ombre ; 

Grimaldi commence à s'y plonger ; la diflance des 

cornes eft de quatre carreaux À à........... 18. 38. 44 
La Lune fe brouille ee , & Grimaldi eft 

pérdu dans l'ombre are ER REP EL LOMME 


La mer des Crifes ne s'aperçoit plus à......... 18. 42. 15 


Le brouillard augmente, & l'ombre femble He Le 

& traverfer la mer de Fécondité, paffer un peu 

au deflous de Catharina, couvrir Ptolémée, 

traverfer la mer des Nuages, laifler la mer des 

Humeurs entièrement à découvert & fe terminer 

entre Grimaldus & Ia tache étoilée qui paroït au 

deffus dans la lunette à deux verres, & que 

Riccioli appelle Crugerus, à.............. 18. 44 o 
On ne diftingue plus de taches; & les vapeurs for- 

tifiant la pénombre, la partie éclairée de la Lune 

ne femble être que d’un carreau & demi en hau- 

teur: l'ombre ne paroît pas s'étendre fi loin à la 

vüe fimple que vüe dans la lunette, à....... 18. 45. 0 


La Lune fe cache derrière la montagne à...... 19. 3. 39 
LOT 
MÉMOIRE 


DES SCIENCES. de 2 


MÉMOIRE 


SUR LA CAUSE DES BULLES 
QUI 
SE TROUVENT DANS LE VERRE, 


Par M. Bosc D'ANTIC, Correfpondant de l’Académie, 


’ART de la Verrerie efl un des plus curieux & des plus 
dignes d'occuper les vrais Phyficiens, fes phénomènes 
font très-finguliers & l'utilité de fes ouvrages eft très-étendue ; 
il s’en faut cependant beaucoup qu'il n'ait été-approfondi autant 
qu'il peut l'être. Les Traités de verrerie les plus eftimés n'en 
donnent que des idées imparfaites : on ne voit dans Agricola, 
Neri, Merret, Kunckel, Henckel, d'Ablancour, &c. prefque 
aucun principe folidement établi, aucun phénomène clairement 
expliqué. Tout fe réduit dans ces auteurs, à peu de chofe 
près, à des méthodes, à des préceptes relatifs aux matières 
des pays qu'ils ont habités & aux fourneaux dont ils fe font- 
fervis, & conféquemment peu utiles à ceux qui ont à opérer 
dans des circonftances différentes. Ils n’ont rien dit de fatif- 
faifant fur fa matière, la préparation & la conftruétion des 
fourneaux , fur la compolfition & la figure des creufets, fur la 
proportion qu’il doit y avoir entre les creufets & le fourneau, 
fur le degré de feu le plus avantageux, fur la nature des ma- 
tières à convertir en verre, fur les caufes de la dépuration, 
de la tranfparence, des couleurs, du plus ou moins de folidité, 
des bulles, des nuages, des graïfles, de la rouille ou plombé 
du verre, fur la nature & les effets de la bonne recuiflon , &c. 
auffi dans les pays où ces Auteurs font le plus connus & où 
la Nature paroït être le plus favorable à la Verrerie, on ne 
fait de beau verre qu'en tâtonnant & à grands frais. 
Quelle peut être la raïfon pour laquelle l'art de la verrerie 
a fait fi peu de progrès! je me flatte de Favoir devinée; c'eft 
Sav. étrang. Tome IV. . Aaaa 


554 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

que le plus grand nombre de ceux qui, par état ou par intérêt, 
le cultivent, manquent des lumières néceffaires pour en dé- 
velopper la nature, & que le petit nombre des perfonnes 
capables d'en pénétrer les myflères, n'ont pas eu occafion dé 
travailler dans le très-grand, feul moyen d'en découvrir les 
vrais principes. Dans les laboratoires ordinaires, les traits de 
la Nature ne font pas fenfibles : dans les petites verreries, ces 
traits font encote trop déliés pour être facilement aperçüs ; 
c'eft dans les plus confidérables, dans les manyfaétures de 
glaces, que ces traits font frappans. 

Je me fuis trouvé dans les circonftances les plus heureufes 2 
fi mes lumières & mes talens euflent été proportionnés à 
ma bonne volonté & à mes efforts, j'aurois laiflé peu à faire 
fur cette matiè.e. 

L'Académie eft le Juge le plus compétent des recherches 
& des découvertes qui ont trait au bien de l'État & au pro- 
grès des Sciences; tel jugement qu'elle croie devoir porter 
de celles que j'aurai l'honneur de mettre fous fes yeux, je la 
prie de les regarder comme une preuve de mon zèle & du 
defir fincère de mériter fon fuffrage. Si ce Mémoire lui eft 
agréable , il fera fuivi de plufieurs autres. 

Tous ceux qui ont traité de l’art de la verrerie, ont re- 
gardé le fuin, le fel ou le fiel de verre comme un fel alkali 
fuperflu ; les Verriers en ont la même idée. Peu de Chymiftes 
en ont parlé; M. Pott eff, je crois, le premier qui l'ait exa- 
miné avec attention; fes recherches ont été couronnées du 
plus grand fuccès. I a démontré que le fiel de verre n'étoit 
point un fel alkali, mais un compolé de différens els neutres, 
le {el admirable de Glauber, le tartre vitriolé & le {el marin. 
Les expériences que j'ai eu occafion de faire fur ce fel, ne 
m'ont rien appris de contraire à celle de ce favant Chymifte: 
fon Mémoire, qui fe trouve dans ceux de l Académie de 
Berlin, mérite beaucoup d'être 1ü. 

Le même auteur a afluré, dans fa Lithogéognofie, que le 
fel de verre ne fe vitrifioit en aucune façon avec la terre 
vitrifable & qu'il n'entroit aucunement dans la compofition 


DES SCIENCES S55 
du verre, Je ne puis douter de la vérité de cette affertion : 
de telle manière que j'aie traité le fiel de verre avec le fable, 
je n'ai jamais pû obtenir la moindre apparéncé de matière 
vitrifiée ; j'ai toüjours trouvé le fable dans le creufet fans qu'il 
parût avoir éprouvé aucun changement. Cette expérience 
prouve bien démontftrativement que le {el de verre n’eft point 
un fel afkali fixe. 

Il eft fâcheux que M. Pott n'ait pas pouffé plus loin fes 
recherches, qu'il n'ait pas fuivi le fiel de verre jufque dans 
le creufet du Verrier, ou encore mieux, dans la fonte & 
l'affinage du verre & la confection des glaces. Quel vafte champ 
pour un Obfervateur de cet ordre! quelle moiffon n’auroit-il 
pas faite ! la Verrerie doit regretter que le temps ou l'occa- 
fion lui ait manqué, 

Le fiel de verre joue un rôle très-étendu dans les verreries : 
il a un grand nombre de bons & de mauvais effets, que je ne 
fache point avoir été, jufqu'à préfent, foupçonnés. Quiconque 
les connoîtra exactement, aura une des principales clefs de 
l'art de la verrerie. Un pareil fujet ne pourroit être traité, 
je penfe, avec trop de détail; il me fournira la matière de 
plufieurs Mémoires, je me bornerai dans celui-ci à un effet 
fingulier du {el de verre, 

Les bulles ou bouillons, en termes de Verrier, qu'il n’eft 
pas rare de voir dans toute efpèce de verre, ont été toûjours 
regardés comme l'ouvrage de l'air. J y a, dit-on, de l'air 
par-tout ; celui qui eft dans le verre, eft pouffé vers le centre 
par le refroidiflement de la furface extérieure; il forme des 
cavités prefque vuides, lorfque le refroidiffement parfait lui 
a permis de fe condenfer : d'autres aflurent qu'il n'y a des 
bulles dans le verre que parce qu'onvn'a pas fü faifir le mo- 
ment où il étoit bon à travailler ; à l'inftant qu'on arréte le 
feu, difent-ils, la matière eft en grand mouvement: cette 
agitation doit néceflairement faire des interftices , que l'air fe 
hâte de remplir. Si l'on travaille le verre avant qu'il ait chaffé 
Fair par fon propre poids en s'affüiffant, il n'eft pas étonnant 
qu'il y ait des bulles dans les ouvrages. Je ne m’arréterai pas 

Aaaa i} 


Voy. Polimiére, 
pag. 137 de fa 
Phyfg Le Mém. 
d M Leclerc fur 
la fabrique des 

es, 


glac 


s56 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
à faire remarquer le peu de fondement de cette dernière 
explication. ‘ 

Cette caufe nr'avoit toûjours paru fufpeéte ; je n'avois jamais 
pû comprendre comment l'air pouvoit être ou s'introduire 
dans une matière auffi ardente, ni qu'il fût capable de cet effet 
au point de raréfaction & d'afoibliflement où il devroit être 
sil y avoit été employé. J'avois à cœur de découvrir la vraie, 
fur-tout depuis que je m'occupois plus partitulièrement de 
Ja verrerie ; il fallut chercher long-temps, j'eus enfin le bonheur 
de réuflir. 

Vers la fin de 1755, j'eus lieu de foupçonner que les 
bulles étoient l'effet d'une matière beaucoup plus groffière 
que l'air. Je fis une compofñition qui s'afhna très - mal ; 
le” verre fut rempli de bouillons de différentes grofeurs, 
quoique j'eufle pris les plus grandes précautions, & quoiqu'il 
eût été expolé très-long-temps au feu le plus violent. Ce 
phénomène me parut trop fingulier, & il m'importoit trop 
d'en connoître la vraie raifon, pour ne pas l'obferver de nou- 
veau & avec toute l'attention dont j'étois capable. Je fis la 
même compofition ; tout ce qui avoit paru dans la précédente 
fe manifefla dans celle-ci. Je fis tirer du fourneau le vafe qui 
la contenoit, il fe forma à la furface du verre une efpèce de 
couenne, où on voyoit une infinité de bulles; cette couenne 
fut enlevée; auffi-tôt il s'éleva une vapeur blancheätre, qui 
diminua à mefure qu'une nouvelle couenne fe forma. Il n'y 
avoit pas moins de bulles dans celle-ci que dans la première ; 
je fis répéter plufieurs fois cette opération, & j'obfervai à cha- 
cune les mêmes chofes, la vapeur & les bulles : dès ce moment-là 
il me parut certain que cette vapeur étoit la caufe des bouil- 
lons. J'étois très-impatient d'en connoître la nature, elle 
m’avoit paru avoir beaucoup de reflemblance avec les dernières 
fumées de la fonte, celles qui fuccèdent aux noires & aux 
rougeâtres. Quelques difficultés qu'il y eût, je raflemblai & je 
condenfai une quantité fufhfante de ces fumées blancheätres, 
pour m'aflurer qu'elles n'étoient autre chofe que le fiel de 
verre réduit en vapeur. Je fis, pour la troifième fois, la 


DES SCIENCES. 557 
compofition dont j'ai parlé plus haut, mêmes phénomènes; 
la couenne fut enlevée jufqu'à ce qu'il n'y eût plus de verre 
dans le vafe & jetée dans l'eau. J'avois fait recevoir les vapeurs 
dans une efpèce de cloche de carton qui avoit été humedtée 
& bien pénétrée d'eau. Après l'opération, ce carton fut mis à 
macérer dans l'eau : le lendemain je l'exprimai fortement ; je 
filtrai la liqueur; & Fayant fait évaporer, je trouvai une très- 
petite quantité de fiel de verre. Je fis aufii évaporer l’eau où 
le verre avoit été jeté, elle me donna une once & quelques 
grains de fel de verre. Si le verre eût été plus chaud, l'eau 
l'auroit divifé davantage & en auroit détaché une plus grande 
quantité de fl: dès-lors je ne crus pas devoir douter que le 
{el de verre ne fût la caufe des bulles. 


Le vafe dans lequel j'avois fait les trois expériences, con- 
tenoit environ deux cents cinquante livres de verre; une partie 
dé fel alkali fixe, extrait de la cendre de tabac, & une partie 
& demie de fable blanc, formoient la compofition. 


Nous allons ajoûter quelques oblervations qui nous pa- 
roiffent. autant de preuves de la vérité que nous croyons avoir 
établie. Les larmes d’eflai qu'on fait tirer des creufets, font 
d'autant moins chargées de bouillons, que les fumées approchent 
plus de leur fin. Au commencement de la fonte il n’eft pas 
rare de voir des larmes, pour ainfi dire, creufes, & leur creux 
au tiers ou au quart plein de fiel de verre pur. I y a d'autant 
moins de bulles dans le verre, toutes chofes égales d’ailleurs, 
qu'il a été expolé à un feu plus violent & plus long-temps. 
Dans les petites Verreries ordinaires le feu eft foible, & on 
travaille Je verre auffi-tôt que les fumées font pañées; auf 
leur verre eft-il extrêmement chargé de bouillons. Au moment 
qu'on remue le verre d’un grand creufet, celui de la fürface 
ne paroit que bulles : fi on tire une larme à deux pouces de 
profondeur, il y en a beaucoup moins; effet fans doute de fa 
vapeur qui s'eft dégagée & s'eft élevée du fond à la faveur 
du mouvement de finftrument dont on s’eft fervi: plus 
le verre d'une compofition bien proportionnée a été jeté très- 


Aaaa iij 


L'art de la 
Verrerie, Liv. 1, 


shop. 9. 


9 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À F ACADÉMIE 
chaud dans l’eau froide, moins il a de bulles, parce qu'à 
chaque fois l'eau fe charge d'une partie de fel de verre. 

L'ufage d'éteindre le verre dans l'eau eft fort ancien, mais 
on ne faifoit pas cette opération dans la vûe de prévenir les 
bouillons; c'eff (dit Neri) afin que le Jel s'en fépare, parce 
que ce Jel fait rort au cryffal, qu'il rend! obfeur & nebuleux, à 
que le cryflal le pouffe vers Ja Jurface lorfqu'en l'a travaille. 

Quelque certain & évident qu'il me parût que le fiel de 
verre réduit en vapeur étoit la caufe des bulles, il manquoit 
une chofe à ma fatisfaétion, de voir une certaine quantité 
de verre purgé du fuin où. je ne puffe remarquer aucune bulle. 
Je fis, à cette intention, un verre fort tendre; il fut mis en 
fufion quatre fois, & à chacune éteint dans l'eau froide : à 
Ja cinquième fufon, j'eus beau remuer avec une verge de fer 
bien propre, il ne parut point de bulles dans les larmes que 
j'en fis tirer. Je mis dans le creufet du fel de verre à différentes 
reprifes & je le fis bien mêler avec le verre, les bulles repa- 
rurent dans les larmes. 

Il me reftoit une épreuve rigoureufe à faire fubir au verre 
puigé de fel de verre, autant qu'il étoit poffible: je penfai 
que les larmes bataviques rendroient fenfible la plus petite 
quantité de vapeur de fel de verre ; que chaffée vers le centre de 
la larme, par le refroidiffement prefque fubit de l'extérieur, elle 
produiroit une ou plufieurs bulles : que fi j'obtenois des larmes 
bataviques fans bulles, je porterois par-là ma découverte au 
plus haut deuré de certitude, & que je déciderois une queftion 
qui a occupé les plus grands Phyficiens de l'Europe ; favoir 
fi les bulles qui avoient toûjours accompagné les larmes ba- 
taviques, leur étoient effentielles ou inféparables. Je fis jeter, 
en la manière accoûtumée, plufieurs gouttes de notre verre 
dans un feau d'eau froide, les larmes que je trouvai au fond du 
feau n'avoient point de bulles, fe brifoient avec éclat & fe ré- 
duifoient en une infinité de parties lorfqu'on en rompoit la 

ueue : j'eus l'honneur d'en faire voir l’année dernière à M." 
l'abbé Nollet &. le Camus. Toutes les fois que j'ai répété 
l'expérience, elle a eu le même fuccès: je n'eus garde d'oublier 


DES SCIENCES. 

de mêler du fuin avec le verre, il y eut des bulles dans les 
larmes bataviques qu'on en forma. J'ai obfervé conftimment, 
1.” qu'il réuffifloit un bien plus petit nombre de larmes avec 
le verre purgé de fuin qu'avec tout autre, très-probablement 
par la raïfon que le verre du centre cède moins que la va- 
peur à la contraction violente que le refroidiffement fubit caufe 
aux couches extérieures: 2.° que plus l'un & l'autre étoient 
chauds, moins il y avoit de larmes manquées: 3.° que les 
larmes produifent un effet d'autant plus grand que l'eau dont on 
s'étoit fervi étoit plus froide. 

ILeft, je pente, bien démontré que les bulles ne fe trouvent 
qu'accidentellement dans les larmes bataviques : il ne me paroïé 
pas moins certain que ceux qui ont voulu expliquer ce phé- 
nomène fihgulier des larmes bataviques par les efforts de l'air, | 
où, comme Rohault & Polinière, par l'affluence & l'action 
des matières fubtiles fabriquées à plaïfir, étoient très-éloignés 
de fa vérité, c'eft à M. l'abbé Nollet qu'étoit réfervé l'honneur 
d'en donner la vraie explication. On ne peut rien voir dé 
plus fatisfaifant & de plus conforme à l'expérience que ce 
qu'il a dit à ce fujet vers la fin du-quatrième Volume de fes 
Leçons de Phyfique expérimentale. Lorfqu'on examine avec 
quelque attention la figuré, les couleurs d'une groffe lirme 
batavique, il me fémble qu'on ne fauroit douter que le verre 
ne fe foit refroidi par couches, & que les intérieures, en fe 
refroidiffant , n'aient obligé def plier vers elles les extérieures 
déjà refroidies. 

Des grains de pouffière, un morceau de finge, du bois, 
üne goutte d'eau, totit ce qui donne une vapeur par l'embra- 
fement , peut produire des bulles, mais ces caufes particulières 
font d'une petite conféquence, & avec un légér degré d’atten- 
tion’, ouvrier peut en prévenir l'effet : il n’en eff pas de même 
de la caufe générale que novs croyons avoir démontrée, elle 
à fa fource dans la compofition, & il n'eft pas aifé de l'en 
chaffer. 

Dans les Verreries oh arrête le feu lorfqu'’on eflime le verre 
fufifamment cuit; on bouche exaétement le fourneau, & on 


560 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

ne travaille Le verre que lorfqu'il a äcquis, par une diminution 
infenfible de chaleur, une confiftance convenable. On croit 
par-là avoir donné au verre le temps & les facilités de chaffer 
l'air en s'affaiffant. S'il n'y a pas de bulles dans le verre, ou 
sil yena moins, ce nel pas parce que l'air a été difipé, 
mais parce que la vapeur faline n'a pü fe raffembler & eft 
également difperfée dans toute la mafle du verre. L'expérience 
pe prouve que trop que des verres où les bulles font rares, 
cachent dans leur fubftance beaucoup de {el de verre: expofés 
à une humidité chaude, ÿ/s le pouffenr vers leur furface & le 
reffuenr. Prefque tous les cryflaux que nous avons font dans 
ce cas-là. Lorfqu’on fait rougir dans un fourneau un morceau 
un peu gros de ce cryftal tendre & qu'on fupprime tout d'un 
coup le feu qui le tenoit dans un haut degré desramolliffe- 
ment, il s'y forme un grand nombre de bulles. Ce phéno- 
mène étoit inexplicable; il eft aifé aujourd'hui d'en rendre 
raifon. J'aurai occafion, dans un autre Mémoire, de faire 
voir pourquoi les verres les plus communs ne pouffent point 
de fel, quoiqu'ils n'en cachent guère moins que les fins. 

Il eft indubitable que le plus fur moyen de prévenir les 
bulles, eft de purger le verre de fiel de verre; on y parvient 
par les extinétions du verre bien chaud dans l'eau, en le re- 
muant plufieurs fois avec un bâton de bois vert, en le pilonant 
avec la bale, en le mêlant avec une poche de fer, en y intro- 
duifant des matières volatiles, l'arfénic, lantimoine, &c. en 
employant le feu le plus violent & long-temps continué, & 
fur-tout par des compofitions bien proportionnées. Il eft in- 
différent pour les bulles d'enlever ou de ne pas enlever le 
fel de verre raflemblé au deflus du verre. On s'attend peut- 
être que je donnerai ici les proportions les plus avantageufes 
des compofitions; ce détail nous meneroit beaucoup trop 
loin, & il trouvera encore mieux fa place dans d’autres Mé- 
moires. Nous croyons devoir renvoyer aufli à un autre temps 
à dire avec quelles reftriétions on doit prendre ce qu'ont 
écrit Merret & Kunckel; l'une, qu'un creufet qui contient deux 
cents livres de matières de la meilleure qualité, donnera jufqu'a 

cinquante 


DES ScrENCES. sôt 
cnquante livres de fel alkali, de Jel de verre ; Yautré, que tous 
Les fels extraits des cendres des végétaux étoient de la même 
uature. 

Avant de terminer ce Mémoire, il ne fera peut-être pas 
inutile de dire que le fel de verre n'eft pas moins la caufe 
des bouillons dans les émaux que dans fe verre; on s’en 
affurera fi on fe donne la peine d'appliquer à l'émail les 
obférvations & une partie des expériences que nous avons 
faites relativement aux bulles du verre. Les moyens que nous 
avons indiqués pour les prévenir dans l'un, font également 
Eons pour les prévenir dans l'autre. 


Say. étrang. Tome IV. . Bbbb 


62 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ÂACADÉMIE 
ÿ 


À BIS ERA CT ONUN 
D PIEUAIC LP PARC EPP ET LE" CT 
Faie à Rouen le 30 Juillet 1757. 


Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 


E Ciel avoit été couvert durant une partie du jour; il 
étoit même tombé de la pluie par un vent d'oueft : les 
nuages fe diffipèrent fort à propos fur les neuf heures du foir. 
M. Fourré, Hydrographe du Roï à Dieppe, venu exprès 
pour obferver l'Écliple , & deux Académiciens de Rouen, 
voulurent bien nous prêter leur fecours; cela fit que nous par- 
tageames l'obfervation, M. Duligue, Profefleur d'Hydrogra- 
phie à Rouen, & moi: M. Dulague fe mit à la lunette de 
4 pieds armée d'un micromètre, & je me chargeai d'obfer- 
ver, avec un télefcope de 16 pouces de la façon du fieur 
Paris, les immerfions & émerfions des taches : pendant tout le 
temps de l'écliple, ils comptèrént à voix haute les ofcillations 
du pendule, & marquoient les minutes fur un papier, que 
ceux qui écrivoient confultoient à melure. 


9h45 o” Diamètre de la Eune au micrornètre. . .. 176 xr. 
10. o. o© Pénombre très-fenfble entre Grimaldus 
& Schickardus\ 
o Pénombre forte. 
o Pénombre très -forte. 
7 Éclipfe déjà commencée. 


3 
5 
6 
ro. 7. 36 La part. éclairée dela Lune n'eft plus que de 17. 25 
13. 12 L'ombre atteint Grimaldus. 

15. 12 Grimaldus entièrement couvert. 

0. 34 Gafferdus entre dans l'ombre. 


ro 16 2hiPartichéciaiée SE AN RUE 14: 


pb 
LA 


10. 19. 37 Commencement de l'immerfion de Tycho. 
10, 20 7 esse is severe. Has 


DLE, S/ S\E-REIN CES S 


12” Fin de limmerfion de Tycho. 
10. 22. 12 Pitatus fur le bord de l'ombre. 


10. 24. 37 creer ene eee ses : 12" 
MO 26 MSN el te MELON diet. ele de die Irc 
(5 SE AMC MERENRNRRS. TER CESR RSR RE SENTE rie 
NOTONS EN SR RAS Si E 10. 
10. 36. 7 Copernic a moitié dans l'ombre 
TO -IE7A Een -: JOURS CE ED Un, 9. 
10. 38. 32 Ariftarque entre dans ombre. 
10. 42. 10 L'ombre atteint Fracaflerius : on voit fur 
le bord de l'ombre une petite tache claire 
au deflous de Copernic, entre Ératoflhènc 
& Ariftarque. 
LOS A2 2 AN ep, - 2e Da fe ciel sieeibiele de 8. 
10. 44. 22 Snellius à moitié. 
10. 44. 42 Furnerius de même, 
nO- 240. 217 ace 00-Me- ete on fete le . 6. 
10. 50. 7 Manilius dans l'ombre. 
RON ST DZ EP Led RER ee atele ETAT 
or RE D ES A RAT LEo tie PU ESS É ÿe 
10. 55. 22 Menelaüs fur le bord de l'ombre. 
10. 57. 7 Langrenus à moitié; Héraclides prêt à en- 
trer, & Pline déjà enfoncé dans l'ombre. 
10.581452 Particéclairée1. "2 10 pr tee. 4 
10. 59. 22 Taruntius avec Héraclides fur le bord de 
l'ombre. 
11: 1. 12 Héraclides couvert. d'ombre. 
11. 3. 37 L'ombre atteint fc promontoire du Sommeil. 
RU RAS Zoe 2 MEN CU seen à ee UN 2 41% 73 


11. 6.12 Le mont Hélicon. 

x1. 8. 42 Pofidonius. 

11:13. 37 Platon commence à entrer. 

LI. 15. $8 Platon tout-2-fait entré. 

51. 31. 22 Hermès fur le bord de l'ombre. 
11. 33. 12 On ne voit plus Hermès. 


I 
3 
4 

MTS 2 Prochise 
6 
8 


Bbbb ij 


75 


75 


5 *“ % ÿ 
564 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE. 


11% 39° 22" L'ombre femble immobile: les bords de Ja 


Lune font plus clairs que le milieu ; qui 
eft d'un brun rougeätre; cependant la 
partie du bord oppofé à la partie claire 
eft plus fombre que le refle des bords, 
& paroît comme le milieu du difque, 


Diamètre de H1 Lune au micromèëtre. . .. 
Partie éclaté PU SUN NUQUE 
DonciparticobfemernrEnter ere 
11. 58. 12 Le mont Hélicon fort de l'ombre. 
11. 59. 22 L'ombre quitte Heraclides. 
12. Oo. 12 On commence à voir le bord de Platon. 
12. 1. 32 Platon entièrement forti. ! 
12. 1. 57 Ariflarque hors de f’ombre. 
12. 8. 12 Grinaldus commence à paroitre, 
CO EN En ME CE HEART CE DCI ANR EE ACER E 
12. 10. 2 Grimaldus entièrement dégagé. 
12: 14. 22 Képler fort de l'ombre. 
FE 0e MES 2 din Die inde de pre qui cie 
12: 20.47... 04e eee een on 
12. 21. 22 Copernic à moitié éclairé. 
TRSI2 0052 VE IP EE PERD METIER A 
12} 262 2NAIRES TERRIER CE Mo 0 Eee a 
LANDE CIe ER CIC ee M cine 
ra D id io nionbDocionr 
12. 33. 42 Pofidonius à moitié dehors. 
12. 34. 12 Manilius fort. 
12. 27. 32 Menclaës à, etai: yaron.2sbi 12 
12. 41. 22 Tycho commence à fortir. 
12,-41.:52 Pline fort. 
12.43. 8 Second bord de Tycho. 
RNA 2 LE It AIR d.ra08.84 
ARNO T NES PP PR eee EURE LS 25 TS 
FRA DURE Que ie less rue TNT M ITAMIEOS AMEL TE 
12. 50. 42 Promontoire du fommeil. ...:...:... 
12. 51. 52 Proclus éclairé. 


12. 52, 42 L'ombre au promontoire aigu. 


1 rés 6É7rr 


1: 
16. 


TI. 
El. 


9 
58 


75 


"1 


DES SCIENCES. 565 


FE A arr A CRD a LEA MR CRE à. ind Lin 
12. 57. 42 JTaruntius. 
12. 58. 12 Fracaflorius paroît à moitié, 
13. 5. 2 Srellius à moitié. 
S- 37 Furnerius de même. 
13. 7.12 Petavius paroît hors de l'ombre. 
8. 32 L'Éclipfe femble approcher de fa fin. 
8. 52 Elle ne paroît pas encore finie. 
Depuis 1 3 heures la Lune ne fe voit qu'à 
travers des nuages, qui nuifent à la 
certitude des obfervations. 
13. 9.12 L'Éclipfe paroît finie: on voit quelque 
pénombre à travers des nuages moins 
Cpais. 
13. 9. 52 L'Éclipfe paroît tout-à-fait finie à travers 
des nuages un peu plus clairs: on ne 
voit qu'une légère pénombre. 
13. 30. © Diamètre de Ia Lune.......,....,... 17. 59 


Si l'on compare les phafes correfpondantes, prifes avec le 
micromètre, le rnilieu de l'Éclipfe peut être déterminé vers 
auh 37° 33", temps vrai, méridien de mon Obfervatoire, 
& la grandeur de l'Éclipfe a été de 11% 16. De ces 
obfervations & de l'angle apparent de l'écliptique & de l'orbite, 
pris dans les Tables, ainfi que le mouvement horaire de Ja 
Lune, M. Dulague a conclu l'heure de loppofition à Rouen, 
à 11 32° 19". Si donc on fuppole pour lors le lieu du 
Soleil, tel que le donnent les Tables des Inftitutions, en 
4° 79 48" 18", le lieu de la Lune, conclu de Fobfervation , 
feraen 107448" 1 8” ; mais felon les Tables des Inftitutions, 
le lieu calculé de la Lune auroit été en 10f 74 45° 24°. 
Les l'ables donnent donc fa longitude de la Lune trop foible 
de 2° 54”. En appliquant à ces Tables les correétions de 


1 


M. d’Aiembert, l'erreur feroit réduite à — 1° 4”, 
Je ne parle point de l'erreur des Tables en latitude: felon 
notre Oblervation, les Tables donneroient la latitude boréale 


de la Lune trop foible d'environ 25 fecondes; mais pour 
Bbbb iij 


566 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
déterminer cette erreur avec certitude, il faudroit être plus affuré 

ue nous ne le fommes de la grandeur véritable du diamètre 
de la Lune, de fa parallaxe, & fur-tout de l’eflet de l'atmo- 
fphère terreftre, pour l'augmentation du demi-diamètre de 
l'ombre *. Je fais d’ailleurs que d'autres Oblervateurs ont trouvé 
la grandeur de léclipfe plus confidérable que ne l'a fait M. 
Dulague, & qu'en conféquence, de leurs obfervations doit 
réfulter une moindre erreur des Tables en latitude. 

En oblervant les immerfions & émerfions des taches, j'ai 
employé des verresidiverfement colorés, felon l'avis imprimé 
de M. de f'Ifle. J'avois féparé mes verres en plufieurs mor- 
ceaux pour être plus en état d'examiner l'effet des différentes 
nuances, en les doublant & les triplant; c'eft ce que j'ai fait, 
fur-tout par rapport au verre jaune: je crois-qu'il fufht de 
dire que j'ai trouvé cette fois, comme dans l'éclipfe du mois 
de Février dernier, que ces verres agrandifloient l'ombre 
en proportion de leurs nuances plus où moins fortes. Cette 
augmentation de l'ombre répondoit à plus d'une demi-minute 
de temps, par rapport aux taches qui fe trouvoient le plus 
directement dans le chemin de Fombre: il na paru auffr 
que des nuages légers faifoient paroître dans Pombre des taches 
avant qu'elles y fuflent réellement ; c’eft ce que j'ai obfervé 
dans limmerfion du promontoire du Sommeil & dans celle 
du mont Hélicon. J’avois fait marquer ces taches dans l'ombre, 
tandis que la Lune étoit couverté d’un nuage, & je ne les 
aperçüs y entrer véritablement que long-temps après, le 
nuage étant pañié. s 


* J'ai évalué cet effet à 30 fecondes. 


DES SC4ENCESS. 567 


OBSERVATION 


DE L'ÉCLIPSE D 'ALDEBARAN 
PARC T AN L'OLNE;, 


Faite à Touloufe le 25 Février 1757. 


Par M. GaArRIPuY, Correfpondant de l’Académie. 
} I AUTEURS de la Lune & d’Aldebaran après qu'ils 


eurent paflé le méridien, l'angle azimutal_étant d’en- 
viron 24 $0”. 


Bord intérieur de la Lune............ 624 10° — 395 part. 
62.40 LA 
Hauteur d’Aldebaran................ 62. 10. + 494 part. 
62:122,28,6 
Temps vrai. Temps de la pendule. 
5" 48" 7": Pañfage de la Lune au fil vertical du 
quart-de-cercle, 1.®’ bord. . ... 5" 59° 34" 


st. 11  Paff. d’Aldebaran au fil vertical. .. 6. 2. 372 
25. 42 + Immerf. d'Aldebaran dans Ja partie 
obfcure de © pres de Galilée, à 6. 37. 9 très-exaa. 


7. $2. 532 Émerfon d'Aldebaran de la partie 
éclairée, entre Langrenus & la 
mer des Crise 77... .. 8. 4. 19 affez exatt.. 


Divers pafages de la Lune & d'Aldebaran par les fils 


horizontal © vertical du petit quart - de -cercle. 


Temps vrai. I. Temps dela pend. 
8h 5’ 29"e Ÿ ou Aldebaran à l'horizontal. .. ... 8h 16° 54” 
8. s. 31 Bord inférieur de la Lune à l'horizontal... 8. 16. 56 
8. 7. 26 Premier bord de la Lune au vertical. ... 8.18. sr 
8. 7. 37 Aldcbaran au vertical............. 8. T9. z 


NJ N wa a 


$68 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Temps vrai. I I. Temps de la pend. 
8h r3° 1” Aldebaran à l'horizontal...:.,...... 8h 24 26" 
8. 13. 14 Bord inférieur de la Lune à l’horizontal.. 8. 24. 39 
8. 13. 49 Premier bord de la Lune au vertical. . . .. 8.25. 14 
8. 13. 53 Aldcbaran au vertical. . ... :. ...,... CESSE C) 

III. 
8. 16. 16 Aldebaran à l'horizontal............ 8272 45 
8. 16. 36 Bord inféricur de la Lune à l'horizontal.. 8.28. t# 
8. 18. 25 Premier bord de la Lune au vertical . .... 8. 29. so 
8. 18. 26 Aldebaran au vertical. ............ BIOS 
HAVE 
8. 21.29 Aldebaran à l'hoizontal. .. ..... AE er 

8. 21. 56: Bord inférieur de Ia Lune à l’horizontal.. 8. 33. 212 
8522-31 Aldebaran au Vertical =: 8. 33. 56 
8. 22. 35 Premier bord de la Lune au vertical. ... 8. 34. 


MÉMOIRE 


DES SCIENCES. 569 


MÉMOIRE 
SUR LA 
CAUSE DES SOUFFLURES DES MÉTAUX 
COTES orAuJ EUR ÉS 


Par M. Bosc D'ANTIC, Correfpondant de l’Académie. 


ES métaux coulés avec la plus grande attention , par les 

Fondeurs les plus intellisens & les plus confommés dans 
la pratique, ne font pas parfaitement compaéts & exempts de 
toute matière hétérogène ; il n’eft point d'Offcier d'Artillerie 
qui ne puiffe en fournir des preuves : les deux tables de cuivre 
allié, fur lefquelles on coule les glaces à Saint-Gobin, & 
qui font un chef-d'œuvre de l'art & du fieur Maritz l'aîné, 
en offrent une des plus frappantes. Lorfque ces tables furent 
polies, il y*parut un grand nombre de foufllures, qu'on eut 
foin de boucher avec des vis de même métal. La première 
glace qu'on coula, en manifefla beaucoup qui avoient échappé 
aux recherches du .Fondeur. Il n’eft pas encore de mois qu'il 
ne s’en découvre de nouvelles; on a déjà été obligé de mettre 
plus de quatre mille vis fur une de ces tables, l'autre eft 
meilleure. 

Depuis long-temps on fe plaint de ce défaut des métaux 
coulés ou jetés; on a defiré & même cherché les moyens de 
le prévenir, fans trop s'attacher à en connoitre a caufe ; aufir 
le fuccès n'a jamais été complet, & les Artifles les plus 
intelligens feroient fort embarraffés pour rendre raifon du 
bien qu'ils ont opéré. Les heureux eflets d'un remède font 
moins les fruits du favoir que du hafard, lorfqu'on n'a pas 
une jufte idée du mal. 

Cette matière me paroît avoir une certaine liaifon avec celle 
que jai traitée dans mon premier Mémoire. On attribue les 
foufflures des métaux à la même caufe à laquelle on aturibuoit 

Say. étrang. Tome IV. . Cccc 


70 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
les bullés du verre, à l'air: celles-à ont quelque reffemblance 
avec celles-ci, & la connoifflance de la caufe des unes m'a 
conduit à la découverte de la caufe des autres: c'eft ce qui 
m'a déterminé à renvoyer à un autre temps la fuite que J'ai 
promife fur les bons & mauvais eflets du {el de verre. J'ofe 
me flatter que l Académie n'improuvera pas cette préférence. 

IH ne m'avoit jamais paru vrai-femblable que fair füt la 
caufe des chambres, des fouflures des métaux coulés : comment 
concevoir l’exiflence ou l'intromiffion de l'air dans une matière 
aufli ardente, même qu'il fût capable de cet effet, raréfié & 
affoibli, au point où il devroit l'être, s’il y avoit été enveloppé? 

On ne peut douter, avec fondement, de la vérité de la- 
xiome reçù parmi les Fondeurs, que le métal coulé eft d'autant 
plus compaét & d'autant plus homogène, que la matière a 
été mieux fondue & le moule mieux defféché. Cet axiome 
ne me paroit pas favorable à l'opinion qui établit l'air pour 
la caufe des chambres, des foufHures : plus la matière eft fluide 
& les réfervoirs chauds, & plus les fcories & les corps étran- 
gers, qui ont pü s’y mêler orfqu'on la fait couler du fourneau 
dans les réfervoirs, ont de facilité à s’en dégager, à monter 
à la furface. Mieux le moule a été defféché, & plus il a acquis 
de dureté, moins le métal, en coulant, en détache des parties , 
& des parties capables de donner une vapeur par l'embrafement. 

En 175 6, j'eus lieu de penfer que les foufflures des métaux 
étoient l'effet d’une vapeur plus groffière que Fair: je vis 
couler plufieurs fois le fer de gueufe dansdifférens fourneaux 
du Hainault autrichien. On coule les longues barres de potin 
dans un canal tapifié de pouffière groffière d'argile, de charbon, 
de fcories de fer, &c. & on couvre le métal, au moment 
que le canal eft plein , avec la pouffière de charbon: on voit 
dans ces barres refroidies une infinité de foufHlures de diffé- 
rente grofleur. Lorfqu'on coule la même matière en chaffis, 
fur un fable bien féché, la plaque eft afez unie; on y remarque 
beaucoup moins de foufflures. Y a-t-il moins d'air dans les 
interftices que forment les grains de fable que dans les pouf 
fières dont nous venons de parler? ou pluftôt n’y at-il pas 


be 


LI 
DÉSLSCGTENTES s71 
plus de matière propre à donner une vapeur par l'embrafe- 
ment des parties aqueufes & falines dans celles-ci que dans 
ceux - là ? 

J'examinai avec attention un grand nombre de foufHures 
des plus groffes, il fe trouva dans plufieurs une très- petite 
quantité de pouflière, qui me parut quelquefois de la nature 
de la terre aikaline des végétaux, & le plus fouvent de nature 
argilleufe; elle n'avoit aucun rapport, du moins autant que 
j'en püs juger , ni avec la matière des fcories, ni avec les écailles 
de fer. D'ailleurs, je me fuis afluré depuis que, ni les fcories, 
ni les écailles, mêlées avec le métal, ne produifoient aucune 
foufflure, ne formoient qu'un défaut d'homogénéité, à la vérité 
guère moins dangereux, & qui peut dégénérer en chambre. 
N'eft-il pas plus que probable que ces foufHlures étoient l'effet 
d'une matière expanfive, que l'exceflive chaleur avoit forcée 
dans la pouflière que j'y trouvai ? 

Toutes les fois qu'on coule un métal, il s'y méle nécef- 
fairement quelques matières étrangères, & fouvent au moment 
que le métal n'a plus affez de fluidité pour s'en débarraffer. 
Le tampon, lorfqu'on fond le fer ou fa mine, eft d'argille; 
elle fait, avec la bourre & le crotin de cheval, la compofi- 
tion des réfervoirs, des moules & des noyaux. Ces matières 
expofées fubitement à une chaleur beaucoup plus violente 
que celle qu'elles ont foufferte, peuvent fournir une vapeur : 
mais, dira-ton, ces matières ont été defléchées avec foin, 
ont été rougies, il n’y refte plus aucune efpèce d'humidité: 
les fumées qui fortent par les évens, me paroiffent la preuve 
du contraire. Il n'eft pas probable que les fels du crotin aient 
été diflipés, ni que toute la bourre ait été mife hors d'état 
de donner une vapeur. Ceux qui fe font donné la peine d'exa- 
miner les argilles par la diftillation, favent le temps & le 
degré de feu qu'il faut employer pour en détacher les der- 
nières particules de phlegme, de matière expanfive. Si on 
expofe dans un fourneau de verrerie, à un feu de fufion, 
pendant une demi-heure, un creufet recuit à l'ordinaire, on 
le trouvera rapetiflé & diminué de poids. 

Ccccij 


LEA 


. « 

72 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

L'expérience fuivante me paroit mériter quelque attention: 
J'avois imaginé qu'on pouvoit couler le verre fur J'argille 
recuite ; je fis un moule avec foin, il fut bien recuit & chauflé 
avant de m'en fervir : le verre, quoique très- bien affiné à 
Vinfant que je l'y coulai, fe bourfouflli en un grand nombre 
d'endroits, acquit, par les foufflures, au moins deux fois fon 
volume. Ce phénomène fingulier ne peut, je penfe, être attri- 
bué qu'à la matière expanfive que la chaleur du verre força 
l'argile de lâcher. 

À mon retour du Hainault, loin de perdre de vüe mes 
oblervations fur l1 caufe des fouflures, je cherchai à les porter 
au degré d'évidence dont je les croyois fufceptibles. Je fis 
fondre du cuivre allié de différentes manières, & je le laïflai 
refroidir dans le creufet même où il avoit été fondu, il ne 
parut point de foufilures ni de matière hétérogène dans les 
culots ; j'eus beau les ratiffer , les faire fcier en plufieurs fens, 
je les trouvai par-tout également compacts, également homo- 
gènes. Cela arriva très-probablement que parceque le feu étant 
fupprimé, il ne s’étoit mêlé avec le métal aucun corps étranger 
& aucun corps capable d’expanfion. Dans la vüe de m'en aflurer, 
je fis fondre du cuivre jaune dans un creufet ; après que le 
métal m'eut paru bien fondu, je fis enlever avec foin les fcories 
& je fupprimai le feu: on verfa la matière dans un autre 
creufet qui avoit été rougi ; & à mefure qu'on verfoit, j'y fis jeter 
de la pouffière d'argile compofée de bourre & de crotin; il fe 
trouva dans le culot des foufflures bien fenfibles. J'ai été obligé 
de répéter plufieurs fois cette expérience, elle ef difficile à faire; 
fi la matière eft bien fluide, la pouflière monte à la furface, 
& par conféquent le peu de vapeur qu'elle a donnée s'échappe: 
fi la pouffière n'a pas été defléchée convenablement, il fe fait 
une explofion dangereufe pour ceux qui opèrent. 

D'après les obfervations & les expériences que nous avons 
rapportées, il me paroiffoit certain que la caufe des chambres 
&. des foufflures ne pouvoit être que dans les matières hétéro- 
gènes, fur-tout de la nature de celles des réfervoirs, des moules 
& noyaux qui fe mêlent avec le métal au moment qu'on le 


NP. LR. TT 


D'Ee is, SOIR EBINACIE:S 

coule; qu'elle étoit étrangère aux métaux & à leur fufion. Ïf 
me reftoit une légère inquiétude que je me hâtai de diffiper; 
la plus grande attention ne m'avoit fait découvrir aucune 
foufHlure dans les culots refroidis, dans les creufets mêmes où 
ils avoient été fondus; mais je n’étois pas afluré qu'il n'y 
en eût de celles qui fe dérobent à Fœil le plus perçant, 
armé même de la meilleure loupe. Je favois que le verre en 
fufon étoit le moyen le plus für pour découvrir les foufflures 
de la nature de celles dont je viens de parler: dans l'inten- 
tion de foûmettre à cette épreuve rigoureufe ce métal refroidi 
dans le vafe même où il a été fondu, je is faire un fourneau, 
dont le baflin étoit plan & peu profond; je mis dans ce 
baflin fix cents livres de cuivre compolé: lorfque je me fus 
convaincu, par les moyens ordinaires, que tout étoit bien 
fondu, que la matière étoit dans fa plus grande fluidité, je 
fupprimai le feu; deux jours après j'eus un plateau de cuivre 
de trente-quatre pouces de longueur & de vingt-deux pouces 
de largeur, où l'on ne put découvrir la moindre apparence 
de foufflure. J'en fis fcier quelques morceaux, on en leva d'un 
côté, fur l'épaiffeur, plus de deux lignes : aucune foufflure ne 
fe manifefla, au grand étonnement de celui qui avoit poli, 
en grande partie, les deux tables fur lefquelles on coule les 
glaces à Saint- Gobin: le plateau bien uni & chauflé con- 
venablement, j'y fis couler deflus du verre auffi chaud qu'il 
fat poffible, il ne parut point de foufflures. L'expérience a 
été répétée un grand nombre de fois, dans des temps difiérens 
& après avoir expoléle plateau à l'humidité, toüjours avec le 
même fuccès : comme cette expérience avoit trait à un objet 
particulier, il en a été dreffé un procès-verbal, & le plateau 
exifle encore dans fon entier. 

J'ofe me flatter d'avoir démontré folidement la vraie fource 
des foufflures des métaux coulés ; mais quel fruit peut-on tirer 
de ma découverte? Il ne me paroït pas qu'on doive la regar- 
der comme ftérile : l'expérience a déjà prouvé qu'elle étoit 
très- utile pour un objet important. Je fuis fâché qu'une dif- 
crétion, peut-être mal entendue, car l'intérêt des Arts femble 

Cccc ii 


574 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'AGADÉMIE 
n'en fouffrir aucune, ne me permette pas de rendre compte 
dans ce Mémoire de l'heureule application que j'en ai faite. 

Les canons font pour Etat un objet de très-srande confé- 
quence; on fait combien les chambres, les foufflures leur font 
préjudiciables. Pour les en garantir, iln'eft point de recherche, 
de tentative qu'on n'ait faite depuis leur invention: les plus 
grands efforts avoient été fans fuccès jufqu'au temps où le 
fieur Maritz a paru en France & a établi fa méthode admi- 
rable de forer les canons. Ceux qui ont examiné fa machine, 
l'ont trouvée d'une fimplicité qui prouve le génie de l'Inventeur, 
& il eft certain qu'elle produit un effet auffi für que prompt: 
j'ai lieu d’efpérer que perlonne, pas même le fieur Maritz, 
pour lequel je fuis rempli d'eftime, ne trouvera mauvais que 
j'examine ici, avec quelque attention, les eflets de cette nou- 
velle méthode ; autrefois on couloit les canons avec un noyau, 
& ils avoient beaucoup de fouflures ; il femble qu'on devoit 
s'y attendre. Il eft naturel de penfer que le métal, en coulant 
dans le moule, détachoit quelques parties de la matière du 
noyau, qui, enveloppées par ce métal tout en feu , donnoient 
une vapeur capable de faire des chambres, & que la chaleur 
employée pour le defféchement du moule, n’avoit pü diffiper. 

Le grand Artifle que nous venons de nommer, coule les 
canons pleins & les fore enfuite en même temps qu'il les 
tourne: il prévient ainft un grand nombre de foufllures , fur- 
tout dans l'intérieur, où elles font le plus dangereufes; ce 
qui fait le grand avantage de fa méthode. En fupprimant le 
noyau, il eft certain que la fource des chambres eft confi- 
dérablement diminuée, mais elle n'eft pas entièrement tarie. 

Il peut fe détacher également de la matière des réfervoirs- 
& des parois intérieures du moule; l'expérience ne prouve que 
trop que les canons forés ne font pas exempts de foufflures; 
M. Dupuget, Officier d’Artillerie, très-favant & d’un très-rare 
mérite, me l'a afluré très-pofitivement. Qu'il me foit permis 
de faire voir en deux mots à quel prix nous achetons cette 
perfeélion des nouveaux canons; 1.” en coulant plein, .on 
n'a par fonte qu'environ moitié du nombre des canons qu’on 


D'£8 SCIENCES s75 
avoit par fonte avant la fuppreflion du noÿau; 2.° le moule 
fans noyau eft moins folide, & il a à foûtenir le double environ 
de métal ; auffi arrive-t-il quelquefois que la pièce n'eft pas 
droite, ce qui la rend inutile ou eft très-difhcile à réparer ; 
3° les canons forés font plus tendres, bavent plus prompte- 
ment que les canons coulés avec un noyau : deux bons Juges 
en cette matière, M. Dupuget & le Baron de Mêlé, me 
l'ont afluré, & cela paroît très-conforme à l'idée que nous 
avons de l'effet des refroidiflemens plus ou moins prompts ; 
4. il en coûte fans doute aflez gros pour monter, entretenir 
& faire aller {a machine à forer, & en perte de métal, ne 
fit-on attention qu'au déchet de la feconde fonte. Ces incon- 
véniens ne doivent pas diminuer les obligations que nous 
avons au fieur Maritz, & je ne les ai certainement pas fait 
remarquer dans cette vüe. 

L'excédant des chambres des canons coulés avec un noyau, 
ne procédant évidemment que des matières détachées de ce 
même noyau, il eft à préfumer qu'on pourroit corriger avan- 
tageufement l’ancienne méthode, & peut-être attendre de ces 
corrections, des canons qui ne le céderoient en rien à ceux de 
la nouvelle : tout Fart confifteroit, felon moi, à faire des noyaux 
tels, que le métal en coulant nn détachit aucune matière & ne 
pôût en faire fortir aucune vapeur ; a chofe ne me paroiït pas 
impofñlible. Je vais hafarder ce qu'une affez longue étude des 
argilles & dela manière de les traiter peut m'avoir appris de 
plus relatif au fujet dont il s'agit. Je commencerois par écarter 
la bourre & la fiente de cheval : ces matières n'entrent dans 
la compofition des moules & des noyaux que pour empêcher 
les gerçures, mais il y a d'autres moyens auffi efficaces : elles 
font un obftacle à une étroite liaifon des parties argilleufes & 
mélées avec F'argille, il ny a qu'une chaleur exceflive qui 
puifle en chaffer tout ce qu'elles ont d’expanfif, comme nous 
Vavons fait remarquer plus haut. Je n'employerois pour les 
noyaux que des argilles pures préparées avec foin : on en trouve 
de très-bonnes dans prefque toutes les provinces , à la Bélière: 
en Normandie, à Autrages dans la Flandre, à Forges dans 


576 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

le Hainault, à SuZi en Picardie, à Villentrode en Cham- 
pagne, &c. I convient de faire paffer cette argille par plufieurs: 
lotions, pour en extraire tout ce qu'il peut y avoir de falin 
& la matière grafle la plus groffière, qui monte toüjours à 
la furface de l'eau, lorfqu'on laifle à celle-ci le foin de péné- 
trer & de délayer largille. Après que cette argile eft defféchée, 
on en fait brüler environ moitié à une flamme bien claire, 
& aflez longtemps pour que, pilée & délayée dans l'eau, 
elle n'ait plus de liaifon. I faut que cette terre pilée foit 
paflée par un tamis d’abord très-fin, & enfuite par un moyen; 
{ile ciment, en termes de Verrerie, étoit trop gros, il nuiroit à 
la folidité; s'il étoit trop fin, il rendroit le defféchement difficile 
& occafonneroit des gerçures. On doit mêler quatre parties de 
cette aroïlle brûlée & tamifée avec cinq parties de celle qui ne 
l'a pas été, & les faire pêtrir à l'ordinaire avec la plus grande 
attention : la pâte doit être d’une confiflance moyenne; fr elle 
étoit trop dure, les différentes couches ne fe lieroïent pas bien 
enfemble : fi elle étoit trop molle, le noyau pourroit fe déjeter, 
le defléchement en feroit plus long & la retraite plus confi- 
dérable. Il eft néceffaire de faire le noyau hors de la foffe : 
le feu qu'on a employé pour deffécher le moule, ne fuffrroit 
pas pour le recuire parfaitement ce noyau peut être fait dans 
un calibre de bois bien fec & bien folide, dont l'ouverture 
ait trois quarts de pouce de plus que celui du canon. Je fixerois 
au centre de ce calibre un bâton bien droit de bois fec, d’un 
pouce environ de diamètre & de deux pouces plus court que 
le noyau, de façon qu'il ne fortiroit que d’un bout du noyau ; 
le vuide que laifieroit ce bâton, lorfqu'il feroit confumé par 
le feu, ne porteroit aucun préjudice à la folidité du noyau, 
diminueroit le danger des gerçures & faciliteroit l'intime re- 
cuiffôn : ce, calibre doit être rempli par petites portions, & 
il faut avoir foin de bien preffer l'argile & regrater avant d'en 
mettre de nouvelle. Les noyaux faits de cette manière, doivent 
être defféchés très-lentement & bien fecs, mis dans un four- 
neau pour y fouffrir un feu violent pendant huit ou dix jours; 


le feu fupprimé, on bouchers exactement toutes les ouvertures 
du 


DES SCIENCES. 577 
du fourneau, & on ne lui donnera de air que lorfqu'on n'y 
{entira plus de chaleur : on aura, par ce moyen, des noyaux 
très-durs, très-folides, dont le métal, en coulant, ne détachera 
rien & qui ne donneront aucune vapeur. Il conviendra de 
les ufer avec un grès dur, autant qu’il fera néceflaire, pour les 
rendre parfaitement unis. Un Fondeur intelligent trouvera dans 
la méthode que je viens de donner fur la compofition des 
noyaux, les idées néceflaires pour perfectionner la compo- 
fition des moules ; il peut fubftituer avec avantage au crotin & 
à la bourre, le foin, appelé regain, haché en rejetant les brins 
les plus forts. 

Je crois quel'ancienne méthode, ainfi corrigée, donneroit 
des canons auffi bons que la nouvelle; mais il ne faut pas 
fe faire illufion, ni fune ni l'autre n’en donnera jamais de 
parfaits: telles précautions que l'on prenne, il pourra fe mêler 
avec le métal, au moment qu'on le coule, quelque matière 
capable de donner une vapeur par lembrafement, & pañer 
avec le métal dans le moule au moins quelques parcelles de 
fcories ; ce qui formera un défaut d'homogénéité dangereux. 

Je füuis perfuadé qu'il n'y a qu'un moyen d'avoir des canons 
tels qu'on peut les defirer, c'eft de ne pas les couler; mais 
ce moyen €ft-il praticable? je vais l’envifager fous différens 
points de vüe ; l'Académie jugera ce qu'on en peut raifon- 
nablement attendre. Il eft poffible de faire un fourneau, dont 
le baffin foit plane ou incliné dans fa longueur de deux pouces, 
& qui-ait cinq pieds & demi de largeur fur dix pieds & 
demi de longueur & vingt - deux pouces de profondeur. Si 
Yon met dans ce baflin une fufhfante quantité de cuivre allié, 
pour qu'il foit plein après la fufion, & fi, lorfque la matière 
fera bien fondue & bien dépurée, on la laiffe refroidir dans le 
fourneau, on aura une table de cuivre aufii parfaite que le 
plateau dont nous avons parlé plus haut. Cette table, fciée 
en trois fur fa longueur, fournira de quoi faire trois pièces 
de vingt-quatre, par le fecours de la machine à forer du fieur 
Maritz, auffi compacts & auffi homogènes qu'il foit poffible, 
inais il en coûteroit fans doute beaucoup pour fcier & pour 


Say. étrang. Tome IV. . Dddd 


578 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
tourner ces canons. Je penfe qu'on pourroit fe procurer Îe 
même avantage d'une manière plus fimple & moins difpen- 
dieufe; il n'y a qu'à faire le moule du canon dans le baffin 
du fourneau, comme il eft repréfenté dans le plan en DD; 
à mefure que la matière fondroit, le moule fe rempliroit, 
les canons feroient pleins, aufr bons que par la méthode pré- 
cédente, & il n'y auroit qu'une arête de quelques pouces à 
emporter. Il feroit bien à fouhaiter qu'on püt s'épargner la 
peine & la dépenfe du forage: je ne vois qu'un moyen, ce 
feroit de mettre un noyau, qui d'un bout feroit foûtenu dans 
le pied droit du baffin, & du côté de la culafle du canon, 
par un tenon fixé au fond du moule /voy. Æ, F). Les noyaux 
que j'ai propolés ci-deflus, feroient aflez folides, mais le tenon 
laifféroit une ouverture fâcheufe: pourroit -elle être bouchée 
folidement avec une vis de même métal ou par quelqu'autre 
moyen ? quoiqu'un Fondeur de province aflez intelligent me 
Vait afluré, je n'oferois décider la queftion. Si cela étoit pof- 
fible & fans danger, il feroit peut-être auñii fimple d’ajoûter 
après coup une culafle. Ces méthodes ont fans doute de très- 
grandes difficultés ; comment conftruire un fourneau de cette 
étendue, aflez folide & propre à donner une chaleur capable 
de fondre promptement fa matière? fi la réuffite ne dépen- 
doit que de là, je crois qu'on pourroit s’en flatter. Les ref 
fources de la Pyrotechnie ne font certainement pas épuifées 
dans les fourneaux ordinaires des Fondeurs : il me femble 
qu'il faudroit ignorer les vrais principes de cet art, pour douter 

u'on ne puifle changer les dimenfions des fourneaux fans 
perdre la folidité néceffaire & fans fe priver du degré de feu 
le plus avantageux. J'oferois efpérer de le démontrer, fi je 
n'étois certain que cela me meneroit trop loin. 

En donnant au baffin une fi grande étendue, il fe perdra, 
dira-t-on, beaucoup de métal; cela arriveroit indubitablement 
fi on fondoit à l'ordinaire. Il eff certain que le feu prive d’au- 
tant plus de métal de fon phlogiftique, toutes chofes égales 
d’ailleurs, que la furface fur laquelle il agit eft plus grande, 
Le moyen de prévenir, où du moins de diminuer confidé- 


DES) SCTENCErSs s79 
rablement cette perte, eft connu; if ne faut que donner au 
métal de nouveau phlogiflique à mefure que le fien lui eft 
enlevé. Lorfque je fondis le plateau dont j'ai déjà parlé plufieurs 
fois, je fis jeter fur le métal beaucoup de corne de cheval, 
je n'eus qu'un déchet d'environ trois pour cent. 

On peut encore objecter qu’à chaque fonte il faudroit un 
nouveau fourneau: quand cela feroit, je penfe qu'il y auroit à 
gagner fi cette méthode donnoit de beaucoup meilleurs canons, 
comme il me paroît qu'on ne peut guère en douter. Je crois 
que pour tirer les canons, il fufhiroit de démolir une portion 
du fourneau : pour en fondre de nouveaux, on n’auroit qu'à 
réparer folidement la brèche & refaire les moules dans le 
baflin. N'en coute-t-il pas autant pour vuider une fofle & 
reconfruire les moules? peut-être même y auroit-il moyen 
de fe procurer une économie précieufe. Les canons de fer, 
faits fuivant cette méthode, feroient-ils de beaucoup inférieurs 
à ceux de cuivre allié coulés à l'ordinaire? Cet objet demande 
de nouvelles recherches & pourra me fournir dans la fuite le 
fujet d'un Mémoire. Je ne me flatte pas d'avoir levé toutes les 
difficultés de la méthode que j'ai propofée; cela demanderoit 
des expériences qu'on ne peut attendre d'un particulier : 
n'eufai-je que donné de nouvelles vües fur une matière auffi 
importante, je m'eftimerois très- heureux. 


PAPLICATION DE LA PLANCHE. 


A À, Ârr ES pour le feu. 
BB , ouvertures des cendriers. 
CC, ouvertures pour la communication du feu dans le fourneau. 
DD, Canons pleins vüs dans leurs moules. 
Æ, Canon où les lignes ponétuées défignent le noyau. 


F, place de la lumière fous laquelle fe trouve le tenon qui foûtient 
j le noyau. 


GG, ligne à laquelle fe termine la repréfentation des moules dans 
le deffein du fourneau. 


SES 
Dddid ji 


20 Janvier 
1759- 


s$8o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


MÉMOIRE 


SUR LA 
SENSIBILITÉ DES. PARTIE. 
DEF S OMAN ET MAN UIEXE 


Par M. GERARD DE ViLLaARs, fils. 


DE: que la Médecine a été réduite en principes, 
jamais opinion n'a paru plus vrai-femblhble que celle 
qui a attribué de la fenfibilité à la plufpart des parties des 
animaux ; l'expérience journalière, les oblervations fréquentes 
faites fur les plaies; de fimples réflexions fur la mobilité, 
l'élaficité , l'aétion réciproque des folides fur les fluides, fur 
les différentes fonétions du corps fain, & les différens états 
du corps malade, tout fembloit prouver & autorifer cette idée 
fi naturelle: auffi depuis Hippocrate jufqu'à Boërhaave n'y 
a-t-il eu parmi les Médecins prefque qu'une même voix 
fur la fenfibilité des parties. Cependant Galien , parmi les 
anciens; Job Van- Mekren, Bryan Robinfon, Thomfon, 
Schligting, Cardan, Chéfelden parmi les modernes, ont femblé 
révoquer en doute la fenfiblité de quelques parties. On ne peut 
compter à la vérité qu'un petit nombre d’Auteurs oppolés au 
fentiment le plus généralement reçü; mais ce petit nombre 
n'auroit-il point été le plus éclairé, & dans le plus grand la 
force du préjugé & de l'habitude n’auroit-elle point prévalue? 
C'eft ce qu'a prétendu démontrer M. Häller, par une 
foule d'expériences qu'il a publiées, & que plufieurs de fes 
Dilciples ont tâché de confirmer. Cette nouvelle opinion fe 
répandit bien-tôt ; & quelque extraordinaire qu'elle füt, elle 
prit faveur dans plufieurs Univerfités de Médecine : l'autorité 
d'un Maître aufli célèbre que M. Häiler, fembloit déjà 
avoir acquis force de loi, On a vû la doctrine de l'infenfibilité 


J'eav Lilrana Tome 1 Page 580. PLXIV 
—| 


CR 9 10 U 12. Pédr 


Echelle 


lu Zirang Jome AT Pro 580, PLXIW \ | 


D, ES { SJCUJ-ÆEN.C.E,.S s81 
des parties, enfeignée à Gottingue, à Eeyde, à Edimbourg, 
à Paris même. C'eft ainf que la Médecine changeoït tout 
d'un coup de face, fi des expériences, contraires à celles de 
M. Haller, n’euffent fufpendu le jugement des Médecins. 

M. Bianchi, premier Médecin du Roi de Sardaigne, fort 
furpris de ce nouveau fentiment, voulut s’aflurer s'il étoit dans 
l'erreur depuis foixante ans qu'il profefloit à Turin une doc- 
trine toute contraire. Malgré fon grand âge, il entreprit, avec 
beaucoup de courage, d’éprouver fur Les animaux vivans fi 
le fentiment de M. Hailer étoit bien fondé: toutes les ex- 
périences qu'il fit, le confirmèrent plus que jamais dans 
l'opinion qu'il avoit toujours eue fur la fenfibilité des parties. 
M: Bianchi publia fes expériences, & on les a lües dans le 
Journal de Médecine de l'année 17 5 6. 

Quoiqu'en 17 5 1 & 175 2 j'eufle été témoin à Montpellier 
de quelques expériences contraires à celles de M. Haller, 
& qu'en 175 5 je les eufle confirmées à Paris, j'héfitois encore 
à prendre un parti décifif: l'autorité de M. Häaller étoit 
pour moi un nuage que je n’ofois percer & qui me cachoit 
la vérité. Enfin, M. Bianchi me réveilla; je tentai de nou- 
veau les expériences fur des chiens & des chats vivans: j'en 
communiquai le réfultat à M. Ferrein , avec toutes les circonf- 
tances qui n'avoient frappé, & il voulut être le témoin de 
ce que je lui avois annoncé. Je ne parlerai point ici de ma 
reconnoiffance pour les confeils que me donna alors ce favant 
Profeffeur, qui m'a accoûtumé à fes bontés depuis plufieurs 
années. Flatté & encouragé par le fuccès de mes expériences, 
je les répétai avec une nouvelle ardeur:: je les fs devant plufieurs 
Médecins, & tous étoient du même avis; M. Ramfpeck 
même, difciple de M. Häaller, aujourd'hui Profefleur à 
Bâle, aflifla aux expériences, qui eurent en fa préfence tout 
le fuccès que je lui avois annoncé. 11 voulut s’en convaincre 
par lui-même; il prit les inftrumens, & craignit d’avoir 
trop vü. 

Pour déterminer au jufte ce que je devois penfer fur le 
fentiment de M. Haller, je me fuis frvi des mêmes moyens, 

Dddd iij 


" 


82 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
& j'ai obfervé fcrupuleufement’ les mêmes précautions qu'il 
indique dans fon Mémoire fur la fenfibilité des parties des 
animaux. Pourquoi donc & par quelle fatalité nos réfultats 
{e font-ils trouvés fr différens ? eft-ce defir d'innover de la 
part de M. Haller? eflt-ce efprit de contradiétion de mon 
côté? l'expérience peut-elle être oppofée à elle-même, & 
enfeigner dans un pays tout le contraire de ce qu'on obferve 
dans un autre? cette différence énorme dans les réfultats vien- 
droit-elle de Ia nature des animaux foùmis aux expériences , 
& les chiens de Gottingue difièrent-ils effentiellement des 
chiens de Paris, de Montpellier ou de Turin. M. Häaller fe 
retranche aujourd’hui à dire qu'il a fait fes expériences fur 
des chiens molofles : j'ai répété exprès les expériences fur trois 
chiens moloffes de Paris, & je n'ai point trouvé des réfultats 
différens de ceux que m'avoient fourni des chiens ordinaires 

ris au hafard. J'ai donné le précis de mes expériences fur 
la fenfibilité des parties, dans une Thèfe que j'ai foûtenue à 
la Faculté de Paris au mois de Janvier 1757. J’entrerai ici 
dans un détail plus circonftancié; & en montrant les preuves 
des faits, je tâcherai de faire fentir l'utilité des expériences 
que je foûmets au jugement de Académie. 


DJ EXPÉRIENCE. 
Sur la Peau. 


L'épiderme & tout le corps réticulaire de Malpighi, pa- 
roiflent être privés de toute fenfibilité : il n’en eft pas de même 
de la peau, fuivant M. Haller, qui la regarde comme la 
règle de la fenfibilité. Cependant j'ai pincé, piqué, coupé 
quelquefois la peau des chiens vivans avec des fcalpels ou des 
cifeaux , fans que les animaux aient jeté des cris, fe foient même 
agités. Bien plus, j'ai trouvé la peau infenfible, tandis que 
l'irritation des tendons du même animal caufoit une douleur 
évidente: je ne dis pas pour cela que les animaux, fur a 
peau defquels j'ai verfé de acide vitriolique & de acide 
nitreux, fans qu'ils criaflent ou même qu'ils paruffent impatiens, 


DE s' SCUEN çCE.s M 563 
ne fouffrifent réellement : foufirir, & donner des marques 
de fenfibilité par la rétraétion des parties irritées, par les agi- 
tations, les cris, les convulfions, font des choles très-différentes. 
La crainte, le trouble, le faififlement, peut-être une apathie 
ou moindre fenfbilité naturelle dans certaines parties, toutes 
ces chofes ne peuvent-elles pas mettre des différences frap- 
pantes dans les expériences, & jeter dans l'erreur celui qui 
fe contente de légères tentatives. 

H s'enfuit de ce que je viens de dire, 1.° que lirritation 
de la peau ne donne pas toûjours des marques de fenfibilité, 
2.° que dès-lors on ne peut pas prendre la peau pour le degré 
fixe de la fenfibilité. Ces deux conféquences font direétement 
oppolées aux prétentions de M. Häiller. 


LÉ SPEIRONENICE 
Sur les Tendons. 


Cet article eft des plus importans, & M. Haller appuie 
trop fur l'infenfibilité des tendons, & étaye fon opinion de 
raifons trop plaufibles, pour que je n'aie apporté toute l'atten- 
tion & le temps convenable, à difcuter cette queftion. 

J'ai fait, comme M. Häller, la plufpart des expériences 
fur le tendon d'Achille. Tous les tendons font recouverts 
d'une membrane cellulaire lâche, traverfée par des nerfs, qui 
n'eft fenfible que dans les endroits où lon peut fuivre des 
nerfs; mais j'ai obfervé une membrane propre du tendon 
qui eft plus intérieure que la précédente, comme collée au 
tendon; elle eft blanche, tranfparente, d'un tifiu fort férré. 
Cette feconde membrane eft extrêmement fenfible, & je n'ai 
guère trouvé de parties dans les animaux, fi l’on en excepte 
les nerfs, qui fuffent douées d’un fentiment plus exquis. C'eft 
fans doute cette membrane, & non le tendon, que faifit avec 
des pinces le Chirurgien dont parle M. Wanfvieten dans 
fes Commentaires fur Boërhaave, ce qui caufa au malade 
des douleurs énormes & même des convulfions: & quoique 
M. Wanfvieten attribue toutes les douleurs à l'irritation du 


Tome 1, page 
219% édit, de 
Paris, 1745. 


84 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
feul tendon dépouillé de toute membrane, fes propres paroles 
rendent ma conjecture plus que vrai-femblable; les voici : 
Aobili viro valida inflammatio totum pedem à genu ad malleolun 
ufque occupaverat ; valida fimul aderar febris, © in corpore Jatis 
cacochymico , tantæ inflammationis refolutio expetlari minime po- 
terat ; oriebantur hinc inde colleéliones purulentæ, © ichorofe 
materiæ, © magna pars tunicæ cellulofæ feparabatur imprimis 
circa malleolum internum , confumpté omni pinguedine , ipfifque 
Vaginiis tendimnm Jeparatis, uudi apparebant tendines. Monuerat 
Clirurgum celeber. Boërhaavius ne tangerer ; neglexit ille hoc mo- 
nitum , à credens tunicæ cellulofæ partem effe , tenaculo prehendit 
tendinem , ut auferret Ê ipfo momento, mifer æger convulfus UiL 
rotus a capite ad calcem cum immani dentium flridore ; ficque 
per aliquot momienta tetanodes faclus , obriguir. 

Ce pañlage latin fournit ces condlufions naturelles. 1° Que 
la membrane cellulaire extérieure avoit été entièrement dé- 
truite par la fuppuration, ainfr que les gaines des tendons: 
2.° que la membrane propre du tendon , auquel elle eft comme 
collée dans l'état naturel, s’en trouvoit détachée par les fufées 
du püs; 3.° & qu'ainfr cette membrane fort fenfible, faifant 
alors faillie , avoit été faifie, & non le tendon, avec les pincettes 
du Chirurgien. J'ajoûte de plus, que la fenfibilité naturelle 
de cette membrane étoit vrai-femblablement augmentée; 
1. par linflammation de toutes les parties environnantes , 
ce qui avoit donné lieu à un érétifme général; 2.° par l'ir- 
ritation des particules âcres du pûs qui abreuvoit continuelle- 
ment cette membrane propre du tendon. Ne fait-on pas que 
les os qui paroiffent infenfibles dans l'état naturel, deviennent 
fort fenfibles dans certaines maladies. 

Quant au tendon lui-même, dépouillé de toute membrane, 
les nombreufes expériences que j'ai faites fur les tendons, ne 
me laiflent aucun lieu de douter qu'ils ne foient fort fenfibles. 
J'ai pincé, piqué, coupé en partie le tendon d'Achille, je lai 
brûlé avec la pierre infernale, j'ai verfé deffus des acides 
minéraux : & l'animal, le plus fouvent, s'eft agité & a jeté 
des cris : quelquefois pourtant, malgré ces mauvais traitemens, 


il 


D'ENSh SPGIPEMN CES 585 


il na donné aucun figne de fenfibilité ; & quelques inflans après, 
faifant les mêmes expériences fur d'autres tendons, le même 
animal donnoit des fignes d'une grande fenfibilité M. 
Häller auroit-il toûjours trouvé le cas le plus rare, & qui ne 
fait peut-être pas phyfiquement exception à la règle? Peut-i 
conclurre de bonne foi que les tendons font infenfibles ? 
Dirai-je que la peau eft infenfible, parce que je l'ai trouvée 
telle quelquefois? 

M. Häller, pour foûtenir l'infenfibilité des tendons, oppofe 
des expériences faites fur des hommes vivans, par lui ou 
fes difciples : il allègue auffi pour complément de fes preuves, 
lobfervation fingulière de M. Farjou, Médecin de Montpellier. 
Sans vouloir nier les faits que M. Haller aflure avoir vüs, 
ou répandre le moindre foupçon fur ceux qu'on lui a com- 
muniqués, je lui oppolerai d'autres exemples bien frappans, 
vûs par des témoins qui n'avoient d'autre intérêt que celui 
de la vérité. En 1756, à l'hôpital de la Charité de Paris, 
un malade parmi les bleffés, avoit un des tendons extenfeurs 
du pied entièrement à découvert, par une longue fuppuration ; 
M. Verdelhan, Médecin de quartier, pria M. Andouillé, alors 
Chirurgien en chef de l'Hôpital , d'examiner fi le malade fouf- 
friroit quand on irriteroit ce tendon découvert. M. Andouillé 
irrita légèrement avec une petite fonde d'argent le tendon par 
trois fois (le malade w'étoit pas inflruit ni gagné, & la 
penfée sen préfenta fur le champ). À chaque fois le malade 
jeta de hauts cris, difant qu'il fouffroit beaucoup ; fes douleurs 
& fes cris cefsèrent quand on cefla d'irriter le tendon. Plus 
de trente perfonnes de l'Art, Médecins ou Chirurgiens, ont 
été témoins de ce fait, & M. Verdelhan, bien digne de foi, 
me l'a encore certifié depuis. 


M. Chomel, Ex- Doyen de a Faculté de Médecine de 
Paris, m'a afluré qu'étant Médecin à l'Hôtel- Dieu, il avoit 
irrité légèrement le tendon extenfeur du gros doigt du pied, 
qui étoit dépouillé de toute membrane, & que le malade 
avoit donné des marques d’une très-vive douleur. 


Say. étrang. Tome IV. + Eeee 


586 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Quelques autres perfonnes m'ont dit avoir vü des faits 
femblables dans les hôpitaux & les armées. 

Quant à lobfervation de M. Farjou, il eft bien permis 
de croire que fi la jambe malade, où le tendon étoit à dé- 
couvert, nétoit pas gangrénée, il falloit au moins que a 
fenfibilité naturelle en füt bien diminuée & qu'on defefpérât 
de rétablir la partie en fanté, pour percer le tendon avec des 
épingles & verfer deflus de l'acide vitriolique, comme a fait 
M. Farjou. 

De ce que j'ai dit fur les tendons, on peut conclure; 
1.” que les tendons font fenfibles , mais que leur membrane 
propre , qui eff fort ferrée & élaftique, eft encore plus fenfible 
que les tendons; 2.° que fi les tendons ont paru quelquefois 
infenfibles, on n'en peut pas plus légitimement déduire leur 
infenfibilité naturelle, que celle de la peau qui quelquefois a 
paru infenfible ; 3.° qu'aux expériences faites fur des hommes 
vivans, rapportées par M. Haller, on en oppole d’autres 
auffi authentiques, faites par d'habiles gens devant des 
témoins nombreux, qui n'avoient envie que de voir la 
vérité. 

IEEE XP ÉIR I ENICIE 


Sur les Aponévrofes. 


Les aponévrofes ne font que des tendons épanouis ; il n'eft 
donc pas furprenant que j'y aie trouvé de la fenfibilité. J'ai 
fait mes expériences fur les aponévrofes des mufcles du bas- 
ventre, du. fa/cia- lara, du biceps des pattes de devant , après 
les avoir dépouillées de leurs membranes. M. Haller & M. 
Zimmerman, fon difciple, difent qu'ils ont toujours trouvé 
les aponévrofes infenfibles, même en fe fervant des acides 
corrofifs : j'ai fait voir le contraire plufieurs fois, & j'ai fou- 
vent trouvé plus de fenfibilité dans les aponévrofes que dans 
les tendons du même animal. Cette différence vient peut-être 
de ce que le tiffu des aponévroles eft moins compact & plus 
délié que celui des tendons. 


PVR "F3 


DES. SVCN EANICIENS 587 


IV EXPÉRIENCE: 
Sur les Livamens, 
[»] 


J'ai irrité les ligamens de la rotule & les coëffes aponé- 
vrotiques des articulations; les animaux ont donné des marques 
d’une fenfibilité évidente. J'ai irrité plufieurs fois les ligamens 
croifés de l'articulation du fémur & du tibia, & les animaux 
ont toûjours donné des marques d’une douleur non équivoque. 
J'ai coupé quelquefois un ligament jufqu’à la profondeur d'une 
ligne ou plus, J'ai verfé alors un acide corrofif, où appliqué 
la pierre infernale, que j'avois humettée auparavant ; dans le 
moment l'animal a donné des marques de la plus grande fen- 
fibilité, & écumant de rage, il s'eft agité & a hurlé beaucoup, 
peut-être parce que le corrofif fe trouvoit comme emprifonné 
dans les lèvres de la plaie faite a ligament. J'ai répété plufieurs 
fois cette expérience, & le plus fouvent avec ie même fuccès. 

Quand on a enlevé le ligament de la rotule, la glande muci- 
lagineufe d'Havers fe préfente à la vüe. Si lon comprime cette 
glande entre les deux branches d'une pince à diffeétion , l'animal 
donne fouvent des fignes de fenfibilité : fi lon verfe fur cette 
glande un acide minéral, fouvent l'animal jette de hauts cris. 
Je puis afurer-que l'acide minéral étoit comme cantonné dans 
la glande, fans frapper la peau ni aucun nerf apparent. 


NN Ex 'PLÉ RTE INICIE. 
Sur les Membranes & fur la Dure- mere. 


La dure mère eft le périofte interne du crâne; elle eft 
immobile dans l'état naturel, à caufe de fa forte adhéfion au 
crâne: elle fert de rempart au cerveau & de foûtien à plu- 
fieurs vaifleaux de différens genres : c'eft une membrane fort 
élaflique, dont le tiflu approche plus de la nature tendineufe 
ou aponévrotique que de la celluleufe, quoiqu'en dife M. Haller 
avec M.° Zinn & Zimmerman fes difciples. 

J'ai éprouvé plus d’une fois la fenfibilité de la dure-mère 

= Ecee ij 


588 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
avec un fuccès prefque toüjours égal, & je n'ai jamais conçû 
comment il pouvoit fe faire que M.° Häaller, Zinn, Caftel, 
Zimmerman aient toûjours trouvé la dure-mère infenfible. 

Après avoir trépané un chien vivant, j'ai piqué la dure- 
mère, l'animal a donné des marques de fenfibilité: enfuite je 
Tai coupée & j'ai faifi, avec les branches d'une pince à ditlec- 
tion, un des bords de la dure-mère fans la tirailler ; l'animal 
a crié: M. Ferrein répéta quarante fois de fuite cette expé- 
rience, & l'animal crioit chaque fois qu'on pinçoit la dure- 
mère & reftoit tranquille quand on ne Pirritoit plus. La même 
expérience fut répétée cent fois de fuite fur le même animal, 
qui donna toüjours des marques d’une fenfibilité évidente : à 
la vérité je n'ai jamais trouvé de chien dont la dure-mère 
füt plus fenfible & plus propre à convaincre tout homme 
impartial. 

J'ai verfé fur la dure-mèré un acide corrofif, fans que le 
cerveau pût en fouffrir la moindre atteinte ; l'animal devenoit 
furieux , s’agitoit beaucoup & jetoit des cris affreux , pourtant - 
fans convulfion. J'ai oblervé néanmoins fur un chien, que 
quand j'irritois la dure-mère du côté droit, les mufcles de la 
face & de la patte de devant de ce même côté entroient en 
convulfion; & quand j'irritois la dure-mère du eôté gauche, 
il n'y avoit que des fignes de fenfibilité fans mouvemens 
convulfifs. 

Au refte, quand j'irritois la dure-mère avec des acides 
minéraux , elle sexfolioit & fe féparoit par petites lames : [a 
même chofe m'eft arrivée aux ligamens, aux tendons & aux 
aponévrofes un peu épaiffes. 

Je ne puis rien dire de pofitif fur la fenfibilité de la pie- 
mère & de la membrane arachnoïde du cerveau. 


VIS EXPÉRIENCE 
Sur le Périofle. 


Le grand nombre des Anatomiftes ne fe contente pas 
de définir le périofle une membrane qui entoure les os, ils 


DES SIC DE IN C.IES Se 589 
ajoûtent que cette membrane eft d’un fentiment très-exquis. 
M. Häaller penfe bien différemment, & il prétend que le 
périofte eft abfolument infenfible: fondé fur une expérience 
de M. Zimmerman, il n'ofe pourtant pas afurer que le péri- 
crâne, qui n'eft que le périofte des os du crâne, foit dépourvû 
de toute fenfibilité. M. Chefelden penfoit que le périofte étoit 
infenfible; quelques Anatomiftes de Paris l’enfeignent de 
même, & difent qu'il n'y a que le périofe interne de la cavité 
des os qui foit fenfible. J'ai irrité le périofte externe, qui a 
donné des marques d'une fenfibilité évidente: en le touchant 
fimplement avec ie bout de l'ongle, l'animal retiroit la patte 
& fouvent crioit. J'ai verfé un acide minéral fur le périofte, 
zprès l'avoir dépouillé du tiflu cellulaire & de tout nerf ap- 
parent (précaution que j'ai obfervée dans toutes mes expé- 
riences ), & l'animal a donne des fignes d'une douleur très- 
vive; je puis auffi aflurer que le péricrâne n'a paru, & à 
plufieurs fpeétateurs, fort fenfible. Des Obfervateurs exacts 
ont même remarqué qu'en ratiflant le péricrâne, des malades 
qu'on avoit été obligé de trépaner , avoient donné des marques 
de douleur. On fait d’ailleurs que les os font infenfibles dans 
état naturel. 

On objeéte contre Jarfenfibilité du périofte, que dans 
quelques amputations , le périofte, coupé & ratiffé, a quelque- 
fois paru infenfible; je réponds, 1.” qu'on ne fe détermine 
le plus fouvent à faire l'amputation d'un membre que quand 
la gangrène, la carie ou le fphacele l'ont déjà attaqué; 2.° 
qu'avant d'atteindre le périofte, on a été obligé de couper fa 
peau, des nerfs , des mufcles, fouvent des ligamens, des ten- 
dons, des aponévroles, toutes parties fort fenfibles, & que 
de vives douleurs en étouffent de moindres ; 3.” queles ligatures 
ou le tourniquet gènent & compriment les nerfs, empêchent 
l'influx de l'eprit animal, & eaufent une efpèce de paralyfie, 
un engourdiffement, une infenfibilité forcée dans les parties 
fituées au deffous de la compreifion. 

L'opinion de ceux qui foûtiennent que le périofte externe 
eft infenfible, tandis que le périofte interne, qui défend la 

À : Eeee ii 


o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
moëlle des os, eft fenfible, me paroït bien difficile à démon- 
trer; 1.° le périofte interne et un prolongement du périofte 
externe; 2.° il eft très-diffhcile de pouvoir s'iflurer à priori 
que le périofte interne eft fenfible: ce n'eft pas que j'aie le 
moindre doute fur fa fenfibilité *, Quel délibrement ne fouf- 
friroit pas un animal avant qu'on püt parvenir au périofte 
interne; & les douleurs antérieures qu'il a néceffairement 
éprouvé, ne pourroient-elles pas fe réveiller dans le moment 
-qu'on feroit des expériences fur le périofte interne. En un 
mot il faut opter, & il eft impoñlible que le périofte interne, 
qui n'eft que la production du périofte externe, ait des pri- 
viléges diflérens de celui-ci, leur origine & leur ftructure 
étant les mèmes. 


VIL® EXPÉRIENCE. 


Sur la Plevre èr le Périroine. 


J'ai fouvent tenté, mais inutilement, de conflater [a fenfi- 
bilité de la plèvre, & je crois qu'il eft très-diffcile d'en porter 
un jugement politif; 1.” à caufe de la fineffe de cette mem- 
brane, d'où il arrive qu'on ne peut la faifir avec de petites 
pinces ou la toucher avec un acide corrofif, fans qu'el'e ne fe 
déchire ou ne foit percée : de -là vient que fi l'animal crie après 
qu'on s'eft fervi d'un acide minéral, il eft plus vrai-femblable 
de croire que la douleur eft caufée par l'irritation des nerfs 
voifins ou des mufcles intercoftaux que par lirritation de la 
plèvre; 2.” parce qu'un animal fe fentant la poitrine ouverte, 
crie, S'agite; & qu'au milieu de ce trouble, après avoir coupé 
la peau, les mufcles, les nerfs, il eft difficile de diftinguer 
de petites douleurs étouffées par des douleurs plus vives: les 
mêmes raifons regardent aufli le médiaftin & le péricarde. 
Cependant je fuis bien éloigné de douter de la fenfibilité de 


* Ne pourroit-on pas rapporter à la fenfibilité du périofte interne une 
partie des douleurs qu'exprimèrent les animaux fur lefquels M. Duverney 
voulut s’aflurer de la fenfhbilité de la moëlle des os. Voyez les Expériences 
de M. Duverney, Mém, de l'Acad, année 1700. 


DENIS S'OTCHMENNECIESS so1 
la plèvre ; le feul exemple de la pleuréfie vraie fuffit pour me 
convaincre. M. Haller dit, pour défendre. fon opinion, que 
la pleuréfie vraie a fon fiége dans les mufcles intercoftaux 
internes. Je ne m'arrêterai pas à réfuter cette idée, démentie 
par l'ouverture des cadavres & par l’oblervation conflante de 
tous les Médecins. Quant au péritoine, l'expérience ne m'a 
rien appris de bien décifif fur fa fenfibilité: M. Häaller le 
croit infenfible; & pour le prouver, il dit, page 35 de fon 
Mémoire fur la fenfibilité des parties. « Le célèbre M. Starch, 
à ce qu'il paroït par le Journal de la maladie dont il eft mort, 
ne fentit rien, quand , en lui faifant la paracentèfe , le trois- 
quart perça le péritoine »; mais, 1.” un hydropique a-t-il le 
fentiment fort exquis, fur-tout des parties abreuvées d'eau; 
2.” avant de percer le péritoine, n'avoit-il pas été néceffiire 
de percer la peau, les mulcles, les nerfs, toutes parties fen- 
fibles? & comment pouvoit-il fe faire que M. Starch, que 
je fuppolerai, fi lon veut, le plus grand partifin de M. 
Haller, difinguât fenfiblement l'inftant indivifible où le trois- 
quart perçoit fon péritoine? 


VAIO PIE QUE NIC-E; 
Sur les Mufiles. - 


Tous les mufcles font plus ou moins fenfibles, mais beau- 
coup moins que les tendons. Je parlerai des autres effets que 
Yirritation produit fur les mufcles, dans un fecond Mémoire 
fur l'irritabilité, qui {e trouvera naturellement lié avec celui-ci. 
Je dirai feulement ici que le diaphragme eft doué d’une très- 
grande fenfibilité, & qu'aucun mufcle du corps na donné, à 
irritation égale, des marques d'une auffi grande fenfibilité: je 
ne doute pas non plus que le cœur ne foit fort fenfible, 
quoiqu'il ne m'ait pas été poffible de déterminer au jufte fi 
les différentes agitations de l'animal, pendant que j'irritois le 
cœur, n'étoient que l'effet de l'irritation. 

M. Häaller prétend que le cœur eft moins fenfble qu'un 
autre mufcle de même volume; je réponds que fi l'expérience 


n 


€ 


s92z MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L’ACADÉMIE 

né peut décider la queftion, le raifonnement peut au moins 
affoiblir l'idée de M. Haller, & il eft probable que, de 
méme que le cœur & le diaphragme font plus irritables que 
les autres mufcles du corps, ils font aufli plus fenfibles; car la 
feufbilité, ainfi que l'irritabilité, dépendent de la même eaufe, 
favoir des nerfs. 


IX ERP. É RE ELNYCUE, 
Sur les Glandes, fur les Arières à les Veines. 


De toutes les glandes que j'ai irritées, il n’y a que les ulandes 
falivaires , & fur-tout les parotides, qui ont donné des marques 
évidentes de fenfibilité. 

Pour les artères, elles m'ont paru fenfibles le plus fouvent. 
Je n'oferois rien aflirmer pour les veines, 


XSA EUX NERO EP NICIE: 


Sur les Vifcères àr [ur le Cerveau. 


J'ai enfoncé la lame d’un fcalpel dans la fubftance du cer- 
vgau , à la profondeur de plufieurs lignes, l'animal n'a point 
donné de marques de fenfibilité, pas même quand j'ai verfé 
quelques gouttes d'un acide minéral *; mais quand j'ai irrité 
le corps calleux & la moëlle alongée, l'animal eft entré en 
convulfion, a hurlé & écumé de rage, 

Le cervelet m'a paru plus fenfible que le cerveau: la moëlle 
épinière, qui n'eft que la continuation de la moëlle alongée, 
paroît avoir une fenfibilité exquife. 

Je placerai tout de fuite ce que l'expérience m'a appris 
fur les nerfs qui tirent tous leur origine de la moëlle alongée 
& épinière: ils font doués d'une très-grande fenfibilité. J'ai 
fait maintes expériences fur les nerfs, & j'ai toûjours vü que 
quand jeles irritois dans les animaux vivans, ceux-ci fouffroient 


* Je ne fais pourquoi M. Haller veut ici que le cerveau foit fenfble ; 
il ne parle pas de la moëlle alongée, mais des deux fubftances médullaire 
& corticale du cerveau, avant que d'atteindre le corps calleux. 


cruellement ; 


Msn dues nd SU de Se ed te de 


D'ETS PONGENN: CE, E: 593 
cruellement, mais fur-tout quand je preflois {es nerfs entre 
les branches d’une pince à difieétion. Je crois que les animaux 
n'éprouvent jamais de douleurs plus vives que lorfqu'on pince 
ainfi le nerf fciatique : ils crient, ils s’agitent, ils écument & 
entrent dans une fureur qui tient du défefpoir. Si l'on verfe 
un acide minéral, les pattes fe roidiflent, & quelquefois j'ai 
vü fuivre un eranos général. Je parlerai encore des nerfs dans 
le Mémoire fur lirritabilité: je dirai feulement que le vif 
fentiment que l’Auteur de la Nature a imprimé aux nerfs, 
ne doit point être attribué à leurs membranes, puifque les 
nerfs font plus fenfibles quand ils font dépouillés de leur 


enveloppe. 
Sur le Poumon. 


Il eft difficile de conftater la fenfibilité des poumons; elle 
m'a toüjours paru fort légère, même en les irritant avec des 


acides minéraux. 


Sur l’Eflomac. 


La partie fupérieure de l'eftomac, qui eft continue à l'élo- 
phage , eft fort fenfible ; le refte de l’eftomac, dans fon contour 
extérieur , eft plus ou moins fenfible. L'eftomac eft fort fen- 
fible dans toute fa furface intérieure, fur-tout vers fon orifice 
fupérieur ou le cardia ; la fenfibilité de la membrane veloutée 
paroit encore plus grande quand on a enlevé la mucofité, qui 
la lubréfie & {a défend de l'irritation des corps étrangers : fr 
lon verfe alors un acide minéral, l'animal éprouve de très- 
vives douleurs & des convulfions. 


Sur les Zueflins. 


Les inteflins ont. une fenfibilité bien marquée, fur-tout 
dans leur partie intérieure ; ils deviennent le théatre d’un grand 
nombre de maladies, fans doute à caufe de leur grande irri- 
tabilité & fenfibilité : il en fera queftion dans le fecond 
Mémoire. 


Say. étrang. Tome IV. . Ffff 


594 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Jur le Foie. 


Le foie paroït avoir peu de fenfibilité, plus cependant que 
le poumon ; la membrane qui accompagne la diflribution de 
la veine- porte, & qu'on appelle la capfule de Giffon, paroit 
plus fenfible que la fubflance même du foie. 


Sur la Rate. 
La rate eft très-peu fenfible, à peu près comme le poumon. 


Sur les Reins. 


Les reins paroiflent plus fenfibles que fe foie. J'ai trouvé 
dans les uretères une fenfibilité plus marquée que dans les reins. 
Je ne parle point du pancréas ni du méfentère; je n'ai 
pû conflater leur fenfibilité, non plus que celle des glandes 
méfenteriques. 


Sur la Vefle urinaire. 


Le corps de la vefie urinaire eft fenfible, fa partie infé- 
rieure, qu'on appelle fon col, l'eft encore plus, mais l'intérieur 
de la veffie eft doué d'une fenfibilité exquife; & fr après avoir 
ratifié fon wmwcus , on y verfe de Facide vitriolique ou qu'on 
fafle T'irritation avec la pierre infernale, l'animal manifefte 
des douleurs énormes. 


Sur les Paries de la génération. 


L'urerus des chiennes paroît fort fenfble, fur-tout dans 
fa furface interne. 

Les teflicules, l'épididyme & les canaux déférens font fen- 
fibles... Il eft difficile de déterminer la fenfibilité des véfr- 
cules féminaires & de la proflate.... L'urètre a une grande 
fenfbilité, ainfi que le gland, qui eft un prolongement de 
lurètre; les corps caverneux font auffi fenfibles. 

De toutes les expériences que j'ai rapportées, on en peut 
conclurre; 1° que la plufpart des parties des animaux font 
fenfibles, mais qu'il fera toûjours difficile de pouvoir former 


DES SC TE N°C ES 
une échelle parfaitement graduée de la fenfibilité des parties ; 
cependant on peut dire que les Anciens croyoient, avec quel- 
que vrai-féfnblance, que la fenfibilité des parties étoit pro- 
portionnée à leur degré de tenfion & d'élaficité : cette opinion 
fe trouve fortiñée par le plus grand nombre des expériences 
que j'ai rapportées. 

2. Qu'une partie peut être fenfible, quoiqu'elle n'ait 
donné par f'irritation aucun figne de douleur. 

3 Que les bleflures des tendons & des aponévrofes font 
très-dangereufes. Les accidens graves qui furviennent quel- 
quefois après la faignée du bras, font dûs à la piqüre de l'apo- 
névrofe ou des membranes du tendon, ou du tendon du 
biceps, & non pas, comme l'a prétendu M. Haller, à la 
piqüre d'un petit rameau nerveux, qui n'accompagne pas 
toûjours la veine médiane. Je ne parle pas de Ia piqure de 
l'artère, c'eft un de ces cas malheureux qui arrive bien rare- 
ment à d'habiles Chirurgiens. A ce propos, je dirai que 
j'ai guéri deux chiens, dont l'un eft vivant, auxquels j'avois 
coupé tranfverfalement la moitié du tendon d’Achille, avec 
de l'huile effentielle de thérébentine & un fimple bandage, 
fans la moindre future. Les tendons, & en général toutes les 
parties, me paroïffent avoir un bien moindre decré de tenfion 
& de fenfibilité dans les chiens que dans l’homme. 

4° Le périofle étant fort fenfible, doit être regardé comme 
le fiége de différentes douleurs. Ne doit-on pas rapporter au 
tiraillement & à la diftenfion du périofte, les vives douleurs 
que caufent certains gonflemens des os, fur-tout les exoftofes 
véroliques : c'eft aufii en partie à caufe de cette fenfibilité du 
périofte qu'il faut, dans le cas des ulcères étendus & des 
fiftules profondes, empêcher que les matières purulentes ou 
ichoreufes baïgnant Le périofte, ne multiplient les douleurs & 
le danger. 

5- Que la glande d'Havers, les coëfles aponévrotiques, 
les ligamens des articulations étant fenfibles, font le fiége de 
plufieurs maladies douloureufes, comme la goutte; & que les 
plaies fituées dans le voifinage des articulations environnées 


Ffff à 


96 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
de tendons, d’aponévrofes & de ligamens, font dangereufes. 
Fondé là - defius , il ne faut pas croire qu'on dût relpecter 
ces parties, fi un abfcès confidérable ou un corps étranger 
qu'elles pourroient renfermer, dernandoit leur ouverture. 

Je ne faurois finir ce qui regarde ce cinquième corollaire 
fans parler d’uné opération propolée l'année dernière, dans un 
Difcours public fur les amputations dans l'article. L’Auteur 
du Mémoire fonde, en grande partie, la poffibilité de cette 
opération fur l'infenfibilité des parties ; il trouvoit fans doute 
les expériences de M. Haller trop favorables à fon opinion 
pour vouloir lafloiblir en les répétant, quoiqu'il n'ignorät pas 
que d’autres perfonnes euflent fait des expériences contraires 
à celles de M. Haller. Ne vaudroit-il pas mieux faire mourir 
trois cents chiens que de rifquer a vie d’un feul homme! 

6.” Que la fenfibilité exquife de la dure-mère, qui eft le 
périofle interne du crâne, peut être le fiége de bien des ma- 
ladies douloureufes qu'on rapporte au cerveau: Qu'on doit 
éloigner de la dure-mère tous les corps étrangers qui pour- 
roient la comprimer & l'irriter. Je ne dis pas pour cela qu'il 
ne faille la couper, fi on foupçonne qu'après une fracture 
du crâne elle cache du fang extravafé. 

Je bornerai fà mes expériences & les conféquences qu'elles 
m'ont fournies fur la fenfibilité des parties des animaux. Tout 
ce que j'ai dit fervira à fortifier un fecond Mémoire fur d'irri- 
tabilité, qui a une liaïfon naturelle avec la fenfbilité. Je le 
foümettrai bien-tôt au jugement de l’Académie. 


DIE S° HS GrALE IN GES 597 


DELINEATIO ET OBSERVATYO 
AUR Gil Æ 18 Q R E A Lol S 


Die 16 Septembris anni 175 Pod 
PA CT AG AG Æ SCO ET LINE 
À PETRO GaABRy, J. U. D. 


Pr LO poft horam oétavam vefpertinam, hic Hagæ-comitis, 
fub 52 grad. $ min. latitudinis borealis, phænomenon 
quoddam valdè clarum, five ingens lumen boreale à me 
confpiciebatur, radiorum ab occafu versds Septentrionem 
ejaculantiom formam exibens. Hoc lumen, quod albicantis 
erat coloris, nullum obfcurum circuli feymentum ad hori- 
zontem exhibebat, ut aliàs fepiùs fieri folet. 

Poftquam toto die ferenum fuiflet coœlum à primo mane ad 
{eram ufque vefperam, Aquilone fpirante, primi impetüs, aer 
tüm fuit défecatifimus atque tranquillus, & plufquam tem- 
perati caloris ; nam Thermofcopium Prinfiañum, mercurio 
repletum , dies noétefque fub dio fufpenfum , meridie de- 
monflraverit 72 gradus, fed decimä vefpertinà 64 grad. 
Barofcopium autem ejufdem auétoris, altitudinem hydrargiri 
29 pollic. Rhenol. & 2 lin. indicaverat. 

Phænomenon jucundum , miffis hinc inde radiis, præbebat 
fpeétaculum. Hoc itaque cùm confpiceremus, candentes radii 
perpendiculariter:afcendebant ab horizonte in fublime, lentiùs 
tamen quam pyroboli in altum evehi folent ; rutuli verd 
aut ignei non erant coloris, fed lucidas referebant columnas, 
quarum quædam quafi conculfæ tremebant, & prope hori- 
zontem clariorem edebant fulgorem. Radii ifti modo huc 
modo illuc vibrabantur, non tamen concitito motu , ut fulgur, 
fed adnodum lente & quafi deliberato. Numerum radiorum 

Ffff ïi 


598 MÉMoIREs PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
inire non potui, quia non conftanter, fed alternatim pro: 
micabant , ita ut uno radio evanefcente, alius continud alium 
occuparet locum. 

Hoc phænomenon primè ab antérioribus Urfe majoris 
pedibus ortum ufque ad ea, quæ extremam Caudæ Urfinæ 
conftituunt partem , fidera porrigebatur. 

Horà poft olavam dimidià vefpertinà radii nitentes ce- 
lerrimo motu afcendebant, primo ex anterioribus Urfæ majoris 
pedibus, mox ex ejufdem femore dextro, deinde ex lumbo 
inferiori ; paulo poft ex annulo Armillæ Charæ. 

Plerique radii lineâ reétà afcendebant, alit in hanc aut 
illam partem inclinare videbantur ; cùm evanefcere inciperent, 
breviores quidem, fed & latiores apparebant, antea autem, 
cùm in fummam protenfi effent fublimitatem , aliquot gradus 
fupra horizontem noftrum eminebant. Radiorum jaëtus hoc 
tempore frequentiffimi erant, meteori altitudo maxima. 

Hoc tamen habuit fmgulare, quod plerique inter paucos; 
quos emittebat radios, ferè ad fupremum cœli verticem 
afcenderent , atque his celeriter evanelcentibus alii in eorum 
fuccederent focum , ita ut finguli radii vix paucorum fecun- 
dorum fpatio cernerentur. 

Unus iftorum radiorum afcendebat à ftella 7° in humero 
dextro auftrali Urfæ mujoris, per S in humero dextro bo- 
reali, ufque ad polarem 4, mox autem difparebat. Per eum 
quoque ftellæ quartæ & quintæ magnitudinis, nempe À in 
collo boreali, & P ad aurem fequens, perlucebant. Nudis 
enim oculis, ftellæ in capite Urfæ majoris percipiebantur ; 
poflmodüm alie fixæ in ejufdem lumbo & caudà, per alios 
radios cernebantur. 

Quadrante ante nonam vefpertinam, vibrabantur radii à 
commemorato lumine vago , tam alte afcendentes, ut fuperior 
phænomeni pars tanquam in fplendidas , albidas tremulafque 
linguas divifa , ad Draconis & Urfæ minoris altitudinem 
ferri interdüm videratur. In imo radii arétiores erant. Parte 
fummâ patebant latiüs atque in plures ramos fcindi videbantur, 
iique modo albefcentes & quafi cinerei modo fplendentes 


RÉ 


DES" SC I 'EUN CES 599 
fieri, interdûm contrahi, identidem laxari, fæpe ex fummi 
Aurorà fele foras emittere, nonnunquam retrahi, & infra 
ejus marginem abdi, & cum cæterà phænomeni parte con- 
fundi. 

Omnes hæ viciflitudines in occidentali potifimum meteori 
parte obfervabantur ; reliquum erat tranquillius. 

Horä nonà elapfa, radii fenfim minui & tandem evanefcere 

*cœperunt. Lumen ipfum boreale conflanter manfit; vergebat 
tamen paulatim, quanquam imperceptibiliter , in horizontem : 
{enfibilem. 

Paulo poft totum phænomenon cœpit pallefcere, deprimi, 
languefcere fenfim atque extenuari, tm in duas partes dif 
cindi, minorem alteram ad Occafum, alteram majorem 
fplendidioremque ad Septentrionem. 

Horä vero decimà vefpertinä, oculis fubdutum ef; flellatum 
tamen cœlum adhuc aliquanto lucidits Boream versüs quam 
in aliis locis exiftebat, 

Ut autem hoc phænomenon clarits appareret , adjunxi hic 
ejus figuram, in quà habentur radii lucidi, aded tenues & 
perlucidi, ut flelle per eos cernantur, tüm etiam nonnullæ 
fixæ in Conféllationibus Urfæ majoris minorifque, Canis 
venatici, Charæ & Draconis. In annexà tabellà indicantur 
denominatio Stellarum fixarum, earumque Charaéteres Bayeri, 
Ordo Ptolemæi & Tychonis, magnitudo, longitudo, latitudo 
& declinatio, accurätè ad diem horamque fupputata, quibus 
Soydueror obfervaveram, 


6oo MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L ACADÉMIE 


Q ORDO| 4 = | 
=: STELLARUM à | LoncrTupo. | ATITUDO | DECLINAT. 
male = DENOMINATIO z ‘| BOREALIS. | HOREALIS. 
22] 5 || 1IN CONSTELLATIONE 3 
= m a a —————— | ——— 
= s s URSÆ MAJ ORIS. 8 Ve Cr. Min Sec.| Gr. Min Séc Gr. Min. Sec. 
a l16|17|AlIn latere. Dubhe. 2.18 11.45.57|49.40.23|63. 4.24 
& |17l18|28'In ventre. De 15:59-34|45$. 7-14157.42. 4 
& |18|19|C In Dorfo. 3-| 27-35: 19151. 38. 35|58.2;.47 
y |19/20|2 In coxà. 2.] 27. ©. 1|47. 8. o|$s. 4 6 
« |25,26|£ Prima caudæ. Afath. |2:|m 5-27. 39154. 19. o|$7. 17.12 
& |26/27|7 Media caudæ. 2.|[ 12:11.20/$6.23.17|$6-13.11 
y |27128|G Ultima caudæ. 2.| 23-27-28|$4.25. 7|50. 32.28 
8 |1ili2|Ælnarmo dextroauftr. |3.[® 3-56-19/34. 54.43152.45.10 
0 1| 1/7 In roftro fequens. 4.[S 19-36. 53/40. 12. 17/60. 30. 14 
b | 7 Æ In mayxilla præcedensauftr. | . 22.28. 2|42.17. 40,62. 50.18 
HIS L In maxilla fequens & bor.|4.| 24: 9.$50|44.209. 56,64. 27.30 
A | 2! 3|/1 Ad oculum præcedens. .|$.| 18-31-3144. 32. 5|65.52.50 
zx | 3| 2|/V Adoculum fequens autr. |4. 19-23-11|43. 57: 40165. 8.26 
p | 4| 410 Ad aurem præcedens. |4.| 20: 46.17|47- $2+ 068.27. 59 
c s| 512 Ad aurem fequens. s+| 21: 55:26/47.47.27|168. 5.30 
c |30| 71Q In collo aufr. 5.| 25-51-15|42-47.12162.24. 34 
k |31| 8/R In collo boreal. 4| 27-23-45145- 5: 0164 4.34 
v | o|10{$5 In humero dextro bor. |4.|& 2- 56 8142. 36:18/60. 7.19 
e liolri [7 In humero dextro auftr, |4.| 5-53: 54|38-13-27]55.12. 3 
x !22/30!V In femore dextro. 4m O0.27.42/41.36. 16,49. 5.56 
7220 108 91 2.425.113: 21166. : 34 o|88. 2 14 
€ | s| 616 Humerus. 2.18 9-43: 7|72:56:23|57. 9.34 
y | 4! 7lc In peétore. 3.| 17-58: 30|75- 14. 30/72.42. o 
& | 71 4ld'in dorfo: 4.1 23-54.20|7$. 4. 30/78. 31. 14 
n | 6| s|e In latere five ventre. S- 27. 14: 35|77: 47: 43176: 13.44] | 
« | 3| 3|f Prima caude. 4]  5:43-49/73-51. 8182.23. 24 | 
d' | 2| 2/2 Media caudæ. 4.14 27-51-3969. 54. 0|86. 30.42 
| CANUM VENATIC. 
h In annulo Armille Charæ.|2.[m21. 9.35|40. 7.23|30.37. 33 £ 
| | DRACONIS. 
æ |29/29|1 Prima caudæe. 2.[m 3.54:35/66.21.20|65.33.15 
x |30|30|4 Penultima caudæ. 3-[8R 12.45-13161.44. s0|71. 8.58 
a |31131// Ultima caudæ. 3 6.51:58|57. 10.47|70. 59.25 


2 DÉTERMINATION 


J'av. Etrans Tom IV L'age 6vo, PL.XT. 


5 
| 


a 


ba Jensibiles inter Occasum et Jeplentrion 
pres VABEL EURE +beh 


0, PLX 


= 


J'av Ztrans Tom Lars 6e: 


2% 


=* 


= 
De : 
EE —  —_— _— 


carun cé Jeplntrionen 
DATANT 


“= 
Ë S 
A = 
Ÿ 


DES" OC 'E E IN. C ES Got 


DÉTERMINATION DIRECTE 


DE LA 
DISTANCE D'UNE PLANÉTE AU SOLEIL, 


DE SA 
PARALLAXE ET DE SON DIAMÉTRE HORIZONTAL 


POUR UN TEMPS DONNÉ. 


Par M. JEAURAT, Profeffeur de Mathématiques à l’École 
Royale Militaire. 


ANS un Mémoire précédent, page 524, j'ai donné 

la détermination de l'anomalie vraie par l'anomalie 
moyenne ; dans celui-ci je fais ufage d'une partie du calcul 
contenu dans le premier; mais dans l'un & dans l'autre j'ai 
furmonté fi heureufement les difficultés du calcul, que des 
Tables conftruites par le moyen de mes formules, me fem- 
bleroient préférables à celles que l'on conftruiroit de toute 
autre manière directe, parce que mes formules contiennent 
géométriquement les valeurs de l'excentricité de l'orbe de la 
Planète élevée à la puiffance où je me fuis borné. 

Elles ne différeroient donc du vrai, que dans le cas où je 
n'aurois pas pouflé les calculs affez loin pour l'excentricité 
donnée; mais il n’y a pas lieu d'être jamais trompé dans fon 
attente, parce qu'il fera toûjours aifé de favoir fur quoi l'on 
peut compter. 

Ainfi il eft facile de voir, par exemple, que l'emploi des 
premières & fecondes puiflances de l'excentricité, du Soleil 
fuffiront pour les calculs du Soleil, & à plus forte raifon pour 
ceux de Vénus; que la troifième devra être employée pour 
la Lune, Saturne & Jupiter; que la quatrième devra être 
employée pour Mars, & que là cinquième, tout au-plus, 
fera néceflaire pour Mercure, que l'on fait être la plus excen- 
trique de toutes les Planètes. 


Say. étrang, Tome IV. . Gegg 


6o2 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Or, l'équation que je propofe pour le calcul du rayon 
vecteur, eft pouffée jufqu'à la huitième puiffance, & a confé- 
quemment plus d'exactitude & de füreté que n’en exigent 
les beloins du calcul des Planètes. 


Qu'il me foit encore permis d'obferver que mes formules, 
comme j'en ai déjà fait la remarque, font auffi favorables à 
la commodité de l'Aftronome qu'au progrès de l Aftronomie. 
Pour la détermination du rayon vecteur, elles reftreignent 
la pratique dans tous les cas poffibles, à deux additions pour 
le Soleil & Vénus ; à trois pour la Lune, Saturne & Jupiter; 
à quatre pour Mars, & à cinq au plus pour Mercure. 

À l'égard de la détermination du diamètre & de la paral- 
laxe, tant du Soleil que de la Lune, fa pratique en reftreindra 
auffi les calculs à deux additions au plus. 

Enfin, chacune de ces formules contient directement la 
folution cherchée, puifqu’elle ne fuppofe de donnée que lano- 
malie moyenne & fexcentricité de la Planète. S'il arrivoit 
donc qu'on fe füt trompé dans le calcul de anomalie vraie, 
il n'en réfulteroit rien de ficheux contre la vérité de la dé- 
termination du rayon vetteur, du diamètre ou de la paralaxe ; 
au lieu que dans toute autre efpèce de calcul, une première 
erreur a une influence univerfelle fur tout le refte. 


DÉTERMINATION DIRECTE du rayon vecteur 
d'une Planère ou de fa diffance au Soleil, dont on 


connoit feulement l’anomalie moyenne àr l'excentricié. 


Arc D A — w ,anomalie moyenne. 
Arc À 1 —V, anomalie de lexcentrique. 
Soit £ Arc À L — W,, anomalie vraie. Fer 
SC — e,excent. del’orbedela Planète. 
SL = r,rayon vecteur cherché, 


MES JS CFPTN CES 603 
Par mon précédent Mémoire, on a 


Fi = fin. V — 6 fine + dfin + ffin.n + g fm + Afin + &c. 
CF = cof. V— 1 — Piment — mfin.ut — n finu$ — pin. — g fin, °° — &c. 


FL = Abfin.u + Adfim.u + À ffin. ÿ + Agfin.w#7 + &c 
dont les coëfficiens font 
b—ieté—é +4 dr 627 + B— &c.||—i—etie—2945 Det—ze +7 6 47 + Be. 
OLA His? +2 7 —&c. m—=S— Le + e et 136 — FL 
Le 


L4 
z 
SE | LEE PL" TAIT QG EST 47 = LFP: TS 54 12131 x 
I=5 ALES 120 © 40 4 ° cn 7 — 5e ARE LE mn D+ ge — &c 


16— 1664 Bet — Be + Get — Ge + se — &c. 
Ab= SR ss De 
16 N 
24e—gre + 1408 — 23664 + 3606 — $r9e + &c. 
48 ; 
1206 — 12208 + soooet — 138436 + 31508 5 — &c. 
A — $ 3043 3175 
960 
+ &c. 


Mais un cofinus quelconque 
ui + fin —+# fin. #— fin. uf u8— &c. 


ouo — cof.u — 1 ++ pue ++ 2 finré + fin. #f 
+ fin + &c. 
Ainfi ajoûtant cette dernière équation avec celle-ci, 
cof. V—1— 7 fin. 2° —m fin, a —nfin.uf — pfina$ — &c. 


À d = 


on aura 
cof. V— cofu + (E — 1) fin. n° + (5 — m) fin.uf 
 : x 6 
+ (5 — 1) fin. u5 + &c. 
ce qui délivre entièrement les: coëfficiens de leurs conftantes. 


Pour lors la férie fuivante fera plus convergente que la 


précédente. 
cof, V—cof.u+(e — Lé+id—iet+38—7 Zetae—2e ) fin. 2* 
PE 8 ér et nd + Dé — a+ jfinut, 


Le Fées) zgzur 6 
e as ) fin. x 


3 
+ (+ Das nr dE 
"Geggÿ 


Fig. 1. 


LA 


604 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


312 95 4 13237 ,6 16384 862219 s) 8 
(= e — 22 EE —— — © ,7 = 
Œ AE 1440 315 € 4480 ë) fin. x 
15, 200 175044 219649 6h) 100601 9h," 15625 9 Lo 
+(53e PER E Tire te € Cie ne ) finex 8 
CEE 415 12 
+( 5e Te A + &c.) fin. « 


Cette détermination de cofinus }, donne auffi celle de 
SE = SC CE — e + cof. V. Élevant donc SF & 
FL au quarré, & la fomme de ces quarrés à la puiffance +; 
on aura SL, valeur cherchée, mais on y parviendra plus 
facilement de la manière fuivante. 

La propridé de Fellip{e donne r = 1 + e cof. F 


DÉMONSTRATION. 


Ona CT = SR CRE RE eZ 


on aauftCX*.CH':: FT .FL° FL — cf Va—e"2} er" cop 2 
Lie ::finr ce qui donne 
eco) D 4 


Soit aufli SF — e + cof. J........ on aura SF—e + 2ec0of + cof V2 
Donc SL RAILS lac cer 2 ee 


e on Lion etats UT: ao NS Akop7 


Ce qu'il falloit démontrer. 


De cette formule, on peut auf déduire celle-ci, 


YŸ— 1 . x . . 2 
cof. V — , laquelle fervira à vérifier la diftance trouvée: 
€ 


car le rayon vecteur r étant déterminé, on trouvera, par 
le moyen de cette formule, l’anomalie de l'excentrique; & 
cette anomalie de l’excentrique étant trouvée, il fera facile de 
trouver fon anomalie moyenne. Or, cette anomalie moyenne 
fe trouvant précifément la méme que celle pour laquelle le 
calcul du rayon vecteur a été fait, ce rayon vecteur eft donc 
celui qu'on cherche. J'en pourfuis ainfi la détermination. 

La propriété de l'ellipfe donne, comme je viens de lé 
démontrer, r = 1 += e cof. V’; donc 


D\E st S\e/TENt CES 605 
DA ei er IS 5) finut 


(2 
+ 
M3 ASS AE 4 ,6___ 12131 7 3848 8 6 
+(3 °c prete 360 e + LÉ 5) fin. 
(2 Les 25. 5 + REZ 7 — Ses) fin.u3 


cn 32 192 1440 
OR PES RL CEE ER RP EE EET) 1e 
See 68 ir; 0€ ie € ) fin.u 
j Le— Le? cof. 2u— 6; fin. #° 
2 z 
3 
— 6 (cof.u—cof. ju) —=—Xéfinn + 2 efinut +2 6 fin. 1° + FES e3 fin, 5 + . &fin.x'° + &c: 
Mais & ef (cof. zu — cof. au) = 2 et fin.u* — 5 ef fin. u# | 
5 15. —=— + RS 
+ À (cof.2u) — Le 65 (cof. 3 2) = — + 65 fin. a+ 5 65 fin.ut — _ € fin.uf = &c: 
ce 


Faifant ainfi fucceflivement jufqu’à e° les fubftitutions que je 
viens d'indiquer, on transformera fa valeur précédente de 7 en 
la fuivante ; & on aura pour réfultat cherché, une équation dans 
laquelle on a annullé les fuites infinies des £°, ef, e’, e6, e7, es, 
& dans laquelle on a par conféquent la valeur géométrique 
de l'excentricité élevée à ces puiffances. 

On ne néglige donc uniquement que les valeurs des 
e ,e'°,e'', &c. qui ne donnent rien dans le calcul des 


Planètes connues. 
Outre l'avantage de l'exactitude & de l'univerfalité que 


cette transformation donne à ma formule, elle a encore celui 
de fimplifier Fopération. 


RÉSULTAT CHERCHÉ. 


ei — TA e?) cof.# 

+ (ie ref — Ref + ie) cof. 20 (+ 3e 
SEZ. 57 Le APR 8 

— #50 + HZ. e7)cof. 34 + (—+e + $e — et) 


125 3 487,7 2 

cof. qu (ire pire) cof. Su + (— 57e 
6807 ,7 128,8 ù 

+ Let )cof 6 + Ze” cof. 7u — HF efcof. 8 v + &c. 


Pour la facilité du calcul des coëfficiens de cette formule, 
je joins ici, comme dans le Mémoire précédent , les loga: 


Gggg il 


606 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
rithmes conftans des fractions de l’excentricité dans les diffé- 
rentes parties des coëfliciens; ce que je pratique en certe 
manière. 

Je fouftrais du logarithme du numérateur de {a fraétion 
celui de fon dénominateur. 

D'où il fuit que les fraétions qui font au defüs de l'unité 
ont un logarithme pofitif. Dans ce cas, il s'ajoûtera avec le 
logarithme de l'excentricité, élevé à la puiflance indiquée. 


; — — — 0.3010300 : 
+ ——0.42$9688 É + = — 04259688 
2 0, 1212 
Pour D ——1.58433r2 Pour / ? . Pour Be = — 0453997$ 
cof. u és Su 7 — — 12041200 cf 34 567 
paré — 31194445 : : Sas — 0.95 56869 
= = — 2.255272 
1%0 
ess Bi RONA Pour ses = — 04874212 Pour = = — 04717262 
au ne — — 0.3979400 Le su = ——0:3135644 cof. 6u = — 02376430 
= 0.750122$ 
Pour cof 7 FA = — 04380223 
Pour cof. 84 2 — — 0:391100$ 


Suppofons, avec M. Cafini, les excentricités fuivantes ; 
dont les moyennes  diftances font uniformément de 


1.00000 parties. 


Mercure... .., 0,20878. 

VÉNUS NAIRUTNE 0,00714.7 

La Terre. ..... 0,01685. E 4 
Mars ep ee .. 0,09289.7 RCENXRICIRES 
Jupiter. :. . .... . 0,04816.54 

Saturne. . . . . . 0,05693. 1 


Ma formule donnera 


Pour la Terre 7 — 1,00014 + 0,0168$ cof. # — o,o0014cof. 1m 
Pour Vénus, r — 1,00003 + 0,0071 5 COfeu — 0,00003 cof, » # 
PourSaturne,r — 1,00162 +0,05 68 6 cofu— 0,001 62 cof, 244 0,00007cof.34 


DES" SICITE IN CES. 6o7 
Pour Jupiter, — 1,00116+-0,04812 cof.u—0,00116cof.2u+ 0,00004cof. 3x 


Pour Mars, —1,0043 1 + 0,0926ocof4— 0,00429 cof. 24 + 0,00030 cof. 3x 
— 0,00002 cof. 44 


Pour Mercure, r— 101179-+-0,205 3 8cofu — 0,021 17cof.24 + 0,00327cof.3x 
— 0,00060 c0f.41+-0,0001 2 cof. $4 — 0,00003 cof. 6u + 0,000006 cof.7u 


Mais les” moyennes diftances rapportées à une échelle 
commune, font, felon M. Cafimi, 


DU SOLEIL 
à Mercure, de 038760 
à Vénus , de 072340 
la Terre, de 100000 
Mars , de 152373 
Jupiter, de 520290 
Saturne, de 954180 5 


2 


MOYENNES DIiSTANCESs. 


2 np ps 


Ainfi les formules que je viens de donner pour chaque 
Planète, doivent être réduites à cette échelle commune. Or, 
cette réduction fe fera, en ajoûtant aux logarithmes des 
coëfficiens ou en en fouftrayant celui que j'indique ici pour 
la formule de chaque Planète. 


LOGARITHMES de la redufion de l'échelle uniforme à 
l'échelle commune. 


Mercure... 0.5883804 négatif. 
Vénus..... 0.1406215 négatif. 
la Terre... 0.0000000 zéro. 
Mars ...—+ 0.1829080 pofitif. 
Jupiter... + 0.5202900 poñitif, 
Saturne... + 0.979630 3 poñtif. 


Pour les formules de... .. 


La réduction précédente étant faite, on aura 


Pour la Terre, r — 1,00014+ 001685 cof.# — 0,000 14 cof.22 
Pour Vénus, 7 — 0,72342 + 0,00$ 17 cof.u — 0,00002 cof. 2 x 


Pour Saturne , 7 — 9,55726 + o,$4255 cof# — 0,01543 col. 24 
TH 0,00066 cof, 3 4 =» 0,90003 cof. 4x 


608 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Pour Jupit.r — 520893 + 0,2$038 cof.x—0,00602 cof.24—+-0,00022 cof. 3 


Pour Mars, — 1,53030 Ho,14109 cof.u—0,006ç4cof. 24 0,0004$ cof. 3 # 
— 0,00004 cof. 4& 


Pour Mercure, r — 0,3960$ + 0,07960 cof.# — 0,00810 cof, 2 # 
+ 0,00127 COf. 34 — 0,00023 cof.4u + 0,00005 cof. $ # 


Enfin pour trois fignes, on trouvera 


E Selon ma Formule, SRE 1 
DU SOLEIL MUR EENT Me 24 
à Mercure. ..... 040403.3443 040404. 
AV ÉHISR Ve 072 343.68 072 344. 
aa Dérenrene 100028.40 100030. 
2 Mars eee 153680.44 153679. 
a Jupiter. -:. $521495-00 521490. 
A SAUCE Ie 1 957265.80 | 957260. 


OBSERVATION générale pour toutes des formules de 
finus dr cofinus. 


Les finus font pofitifs depuis zéro jufqu'à fix fignes, & 
négatifs depuis fix fignes jufqu'à douze. 


Les cofinus font négatifs depuis trois fignes jufqu'à neuf, 
& pofitifs depuis neuf fignes jufqu'à trois. 
AUTRE OBSERVATION. 


La vérification de {a détermination du rayon vecteur d'une 
planète quelconque fera facile à faire. 


EXEMPLE. 


Soit ma détermination du Soleil à Mercure de 4040334437 


Cette détermination fuppofe fa moyenne diftance du Soleil 

à Mercure de 387605 ,. & l'excentricité coryelpondante à 
celte moyenne diflance, de 80925. 
Soit 


« 


DES "SCIENCES 603 


R—38760,5.... moyenne diflance. 
2 B09 2:15: excentricité de l'orbe. 


Soit donc £ r —40403,3443. rayon vecteur dont on cherche 
la vérification. 


Pico shoes anomalie inconnue de l'excentr. 
r— R 

ou cof. V — 

€ LA 


114 42° 47", & par conféquent V — 784 17° 13”. 


T — 1 


La formule cof. Ÿ — , donne 


Puis, comme le rayon eft au finus de l'anomalie de l'ex- 
centrique 784 17° 13", ainfi l'excentricité 0,20878 (de 
la moyenne diflance 1,00000), réduite en fecondes, eft à 
11442" 47", qu'il faut ajoûter à l'anomalie de l’excentrique 
78417" 13" pour avoir l'anomalie moyenne cherchée. 

Or, cette anomalie moyenne eft précifément la même 
que celle pour laquelle le calcul a été fait; donc ce rayon 
vecteur 40403,3443 eft exaétement celui qu'il falloit 
trouver. 


DÉTERMINATION DIRECTE de la parallaxe 
horizontale d'une Planète quelconque , dont on connoît 
feulement l'anomalie moyenne à l'excentricité. 


La différence d’apparences entre Ia fituation d'un aftre Fig. 2. 
confidéré du centre de la Terre, & celle d'où on f'aperçoit 
à quelque endroit de fa furface, s'appelle parallaxe ; & Y'aflre 
vû à l'horizon, 4 une parallaxe qu'on nomme /origourale : 
c'eft celle dont j'entreprends ici la détermination. 

Soit le Soleil en S, la Terre en 7”, & un Obfervateur 
à la circonférence en L, de manière que SLZ, SLT foient 
droits. 

Dans ce cas, le Soleil S fera vû par l'obfervateur L fous 
l'angle droit SL Z, & il feroit vü du centre 7 de là Terre 
fous l'angle STZ. Or, SLZ — STZ — LST eft la 
parallaxe horizontale cherchée. 


Soit ST—r—=r HEre + fe — je) cola 
Sar, étrang, Tome IV. l . Hhhh 


«” 


io MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
+ (—+e+-+e) cof. 21 + &e cof. 3u— +e* cof.qur 

Soit aufi p la parallaxe de laphélie; 

On déterminera le rayon conftant LT par cette PRE 
Comme le fmus total — 1 eft à la diftance aphélie 
— 1 + e, ainfi le finus p, parallaxe de l'aphélie, eft à. 
LT = (1+-e)fn.p; valeur conftante & correfpondante- 
à celle d'où ma formule 7 eft prife. 

Soit donc æ parallaxe cherchée , * 
on aura ST. 1 :: LT. fin #; ce qui donne fin. x 

r (1 +e)fin.p 


br Lee “7 ; d'où l’on voit qu'il faut élever à Ja puiffance— 1 :. 


Pour le faire avec plus de facilité, je donne à l'équation 
r—= 1e +-(e—£e) cof. u+{[—+e + +et) 


cof. 24 + e? cof. 3u—+e" cof. 4u, cettenouvelleforme,, 
T7 I+e—$e PR te + Se). 
cof. w° + +e? cof.u? — £ e* cof. nf. 

D'où je tirer —"— 1 —e* + À Re Ze’) 
cofu+ (2e — te) cof. — Ze? SUR IANT ef cof. w,. 


ou, ce qui eftle même," = 1 + (—e + 1e )cof u: 
+ (e° —+e) cof. 2u— ei cof. zu +-#e co. 4. 
Et enfin pour réfültat cherché, fn. =/1 + e) fini 
— © } cofufin.p + (e* +e TA A 
— 0) cof. 34 fin. p +- #ef 


pile pete 
cof. 2ufin.p + (— 
cof. 4u fin. p 


DÉTERMINATION DIRECTE du demi-diamètre 
horigontal MLS d'une Planère go pour un: 
temps donné \. 


La parallaxe horizontale LST = étant déterminée comme 
il vient d'êue indiqué, ainfi que le rayon vecteur ST = r; 


{ 


DES S'CHENCES Gr 
on aura dans le triangle reflangle S LT deux angles & le 
côté ST; aïinfi il fera facile de déterminer SZ, 

Dans le triangle S AZL,, rectangle en 27, on déterminera 
ainfi le demi - diamètre S /1: comme le finus total — 1 eft 
à la diftance aphélie ou périhélie — 1 He, ainfi le finus d 
du demi-diamètre de l'aphélie ou du périhélie eft à SAZ, 
demi-diamètre conftant. 

Pour lors le calcul de Yangle A7LS — D fera facile: 
car dans ce triangle A7LS on connoiît l'angle droit A7 & 
les deux côtés SA, SL; donc on aura le demi-diamètre 
cherché. 

Mais fr SZ eft fenfiblement égal à ST, comme cela fe 
trouve dans les calculs du Soleil ; alors SL =r = 1 ++ e* 
+ (e) cou — Le cof. 2u. 

Donc appelant 4 le demi-diamètre de F'aphélie, & D le 
demi-diamètre cherché, on aura dans ce cas l'équation fui- 
vante, qui donnera d'une manière très-direéte le diamètre 
cherché. 

fin. D=/1+e) fin d+ (—e — e°) cof. u fin. d 
H e* cof. 24 fin. d 

Enfin, faifant attention que l'angle 4 eft fort petit, on 
verra que les deux premiers termes feront plus que fufffans ; 
ce qui réduit la formule précédente à la fuivante , fn, D 
= (1e) find — e cof. » fin. 4 


Hhhp ïj 


612 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE' 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, 
FAITES À BAYEUX EN 1756. 
Par M. l'Abbé OUTHIER, Correfpondant de l’Académie. 


QUANTITÉ de la pluie tombée à Bayeux pendant l'année 1 75 €. 


TJ AINVIER. 34: 3 AO EI UT DNE Tee gps 2 liens. À 
PÉNVIRITIE Reese ii DUR NOID T Er ee I. 10 
NA RSS Fort ste 1 4 SEPTEMBRE... 1. 4 
AV IRL en RS PE Rs 2 43 OCTOBRE..... I. 10% 
NAT. : o. 6 NOVEMBRE... 2. 13 
HUINE 2. 2 2+ | DÉCEMBRE... o. 8 
10. 1e 12. CE 
TOTAL GENERAL... 22e 2 


Le 25 Janvier, le temps qui étoit fort pluvieux, s'eft mis 
au beau fans être froid, le vent étant au nord" Le baromètre 
a monté à 28 pouces 7 lignes. 

Le temps qui avoit toûjours été aflez doux, eft devenu 
froid le 11 Mars, & il a gelé toutes les nuits jufqu'au 22 
du mois. 

I n'a, pour ainfi dire, point fait de beau temps pendant 
tout l'été, que quatre ou cinq jours vers le 10 de Mai, ce 
fut Ja plus grande chaleur de tout l'été: le thermomètre fut 
près du 25.° degré. Il a fait encore deux ou trois jours de 
beau temps vers le 1 2 de Septembre, médiocrement chauds. 

Les limaçons à coquilles, qui ordinairement font en quan- 
tité prodigieufe, l'ont été beaucoup moins cette année, mais 
il y en a eu effroyablement de petits, noirs fur le dos & 
jaunes en deflous & fans coquilles, qui ont fait aux plantes 
un mal étrange. Il n’étoit pas ordinaire d’en voir: ils ont 
réfifté long-temps aux gelées de Novembre & de Décembre. 

A la fin de Novembre il a fait quelques gelées, le ther- 
momètre étant à zéro, 


Jav. Etrana Tome 7 Pro. 612. PLXPL. ‘ 
————— — — 


Ææi, 


Ju, Etrans Tome Fo, 613 AIN 


£ 


Des! S'GTEN’CE ES 613 
Les premiers jours de Décembre il eft tombé un peu deneige : 
ke 9 du mois, le thermomètre à 1 degré au deflous de zéro. 
MEXTOLAE.. SUN ter eretele DUR 
Len A@ head dre 4 0769 aile a. M9 
Les r2 an, Nadal tee sin er 1@r radouct 
jufqu'aux 25, 26 & 27, quil eft revenu à la gelée; les 
28 & 29, moins froid;le 30 le vent étant à left, le 
thermomètre zéro, il a gelé très-fort: le 31, même vent, 
thermomètre — 1. Le 1° Janvier, même vent, thermo- 
mètre — 3: le 2, thermomètre 1. d 
Il m'a paru que dans ces derniers froids le thermomètre 
n'étant qu'à zéro au terme de la glace, la terre étoit gelée 
beaucoup plus ferme qu'elle ne létoit dans les froids des 
9 & 10 de Décembre, lorfque le même thermomètre étoit 
à 1, & même à 2 degrés au deflous de zéro. 


Hhhh iïj 


614 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


OC CU LT A TOM 
DE, MARS, PAR, INA FEMUINSE, 


AVEC DES DIFFÉRENCES 
D'ASCENSION DROITE ET DE D ÉCLINAISON, 


Prifes à Rouen le 14 Mai 175 8. 
Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 


HEURES Part. du microm, 
à la pendule. réduites, 


CS TA E Pussac E du bord de Ia Lune, précé- 
dent & éclairé. : 
6. 51. 44  Paffage de la corne fupérieure au méridien. 


6. 52. 23 Paffage de a corne inférieure qui fuivoit 
le fl horizontal. 


6, 53. 1— Paffage de Mars, plus boréal que le centre 
de Ia Lune, maïs-plus auftral que Îa corne 
boréale den 0 RL RQ ET ee 610 


LA 


Dans cette obfervation, les deux Planètes n'ont pas bien 
fuivi le fil. 


6. 56. 14— Le bord précédent. 

6. 56. 57— Corne méridionale. 

6. 57.37 Corne boréale. 

6. 58. 827 Mars plus mérid. que la corne bor. de.,., 5$. 4,1 


Les deux Planètes ont mieux fuvi les fils que dans l'obfer- 
vation précédente, mais non encore exactement, 


7. 1. 1— Le bord. 

7. 1. 44— Corne méridionale. 

7. 2. 25 Corne feptentrionale qui avoit fuivi le fil 
très - exactement. 


Tandis que l'œil étoit occupé à voir fr cette dernière 
corne approchoit du fil horaire, la Planète difparut : la pendule 


DES SCfENCES. 615 
marquant 7" 1° 54", elle ne fe voyoit plus, mais limmerfion 
ne peut avoir eu lieu que 2 à 4 fecondes au plus auparavant. 
“La défection de la lumière étoit attribuée à quelque brouillard 
ounuage léger. Soit donc l'immerfion , temps vrai, à 6"40' 40". 


HEURES Part. du microm.- 
à la pendule. réduites, 
7" 35 25” Mars, avec une lunette de 9 pieds, me 
Sr ro parut à moitié {orti du difque de Ia Lune. 
M. Dulague, avec la lunette de 4 pieds, 
77 LA US avoit cru, 4 fecondes auparavant , qu'il 
de temps vrai.. commençoit à fortir: nous comptons 


cependant qu'il a été plus d'une demi- 
minute à dégager fon diamètre. Il eft 
forti vers le milieu de l'arc du difque de Ia 
Lune, compris entre Ariftote & Hermès. 
7: 55 5T Bord de la Lune au fil horaire. 
7e 56: 24— Mars qui fuivoit le fil parallèle, & étoit 
plus boréal que le bord feptentrional 
de Lime, des... 3.14 s'ncarut) 2 06 


7+ 56. 36— Corne méridionale. 
7 57 15m Corne feptentrionale. 
8. 3. 48 Bord précédent de 14 Lune. 


+ 10 Mars plus boréal que le bord feptentrional 
UM PURE, dB ee se 4 1,27 


4 

4. 33  Corneméridionale. 
5 12 Corne feptentrionale, 
+ 53 Bord de la Lune: 


N 


8 
8. 38 Corne méridionale. 
9. 16 Corne fuivante. 


11. 40 Corne précédente. 
12. 20 Corne fuivante. 
14 4 Bord de Ia Lune: 
1401 — Mars 00e 7.7.0 vossesesrecres ÿe 30,3 
14 50 Corne précédente. 
+ 15. 28— Corne fuivante, 


o 90 co 99 ge 07 do So go eo ce co 90 de 
2 
o 
LA 
Le] 
[el 
9 
[-# 


* 


616 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


HEURES Part. du microm, 

à la pendule, è — réduites, 
8 17° 21” Bord. 
8, 17.230 Mars te iaetole ad as eh email 
8. 18. 6 Corne méridionale. 
8. 18. 44 Corne feptentrionale. 
8: 20. As Mars au Hifboraires-t,..1#0. LE 6, 15,4 
8. 20. 6 Bord de la Lune au même fil. 
8. 20. $2— Corne auftrale. 


8. 21. 30 Corne boréale. 


Nous ne vimes point d'étoiles dans le champ de Ja 
lunette, & le défaut de quart-de-cercle ne nous permit pas 
de comparer les Planètes à quelque Etoile éloignée. La 
même caufe nous a fait manquer l'obfervation de la conjonc- 
tion inférieure de Vénus. 

Au paflage du Soleil par le plan du méridien, la pendule 
marquoit, le 1 4 Mai, 11h 38° 59", & le 1 $ elle marquoit 
IPS 7e 

A Paris: le jour fuivant, le Ciel s'étant découvert à 6% 
50’ 23"+ de temps vrai, le 1.” bord de la Lune a paflé 
après Mars, oh 43° 18"+, & après Regulus, oh 24° 18"+. 


DisTAnNcEs au Zénit obfervées dans le Mféridien. 


Mars ever dd AS Soidobrete ee à ta UN es 52h47 45" 
Regulus . un sssseresesessesssssssssse Dis 84 2RSS 
Bord fupérieur de Ia Zune. .... MAC DUR Ce 35: 41. 50 


Ces Obfervations ont été faites fous la latitude, comme 
Yon fait, de 484 52° 10". 


Fe 


SUPPLÉMENT 


DÆ:5É SemEN,c:E.S 617 


SUPPLÉMENT 


AU LIVRE 
SUR SL'UBAGELDES EE UILIES 
DANS LES PLANTES. 


Par M. BONNET, Correfpondant de l’Académie. 
D EPUIS la publication de mes Recherches fur l'ufage des 


feuilles dans les planes, j'ai fait quelques nouvelles 
expériences relatives à celles qui font le fujet de ce Livre: 
en voici un léger précis. 

I Dans mon premier Mémoire, & au commencement du 
cinquième , j'ai rapporté les expériences que j'ai faites pour 
m'inftruire de l'ufage des deux furfaces des feuilles. Je n'avois 
tenté ces expériences que fur les feuilles des planteszerreffres, & 
il devoit paroître intéreffant de les étendre aux feuilles des 
plantes aguariques : ÿ'ai commencé à le faire fur les feuilles 
du #s d'eau. 

Le 2 Août, de grandes feuilles de cette plante, égales & 
femblables, ont été miles en expérience fur des verres pleins 
d’eau, de la manière que j'ai décrite dans l'article III de 
mon Livre. 

Au bout d'environ vingt-quatre heures, les feuilles qui 
étoient pofées fur l'eau par leur furface fupérieure, étoient à 
peu près aufli sèches & auffi fannées que des feuilles égales 
& femblables que j'avois laifées fans nourriture. Les feuilles 
qui étoient polées fur l'eau par leur furface inférieure, étoient 
au contraire très-vertes, & telles que des feuilles qui n’au- 


roient point été détachées de la plante : elles n’ont commencé 


à paffer où s'altérer que le 18 du même mois. 

La furface inférieure des feuilles du 4s d'eau a donc plus 
de difpofition à pomper l'humidité que n'en a la furface 
Jupérieure. faudroit tenter cette expérience fur d’autres efpèces 

Say. étrang. Tome IV. AA DE 


7 Juin 
1758. 


6:3 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

de plantes aquatiques, les réfultats en deviendroient plus dé- 
cififs & plus intéreffans. C’eft ce que je me propofe d'exécuter, 
fi des occupations d'un autre genre me le permettent. 

Au refte, les feuilles du /ys d'eau , comme celles de beau- 
coup de plantes aquatiques, s'élèvent à La fuperficie de l’eau, 
& prélentent à Fair leur furface Juperieure. Cette furface eft 
très-lifle; elle eft enduite d’un vernis naturel qui a du luftre, 
fur lequel l'eau a peu de prife. La furface inférieure n'a pas: 
un femblable vernis, & l'eau s’ysattache facilement : ces diffé- 
rences entre les deux furfaces-s'obfervent dans prefque toutes 
les plantes terreftres ; je l'ai dit dans mon Ouvrage, art. II. 
On peut conjecturer , avec fondement, qu’une des principales 
fonétions de la furface fuperieure dans les feuilles du /ys d'eaw 
& dans celles de beaucoup de plantes aquatiques, eft d'in- 
troduire dans le corps de la plante de lair frais & élaftique. 
J'ai rapporté dans l'article X 1 un grand nombre d'expériences 
qui prouvent que l'air adhère en très- grande quantité à Îa 
furface des feuilles. 

II. J'ai obfervé de nouveau la manière dont le blé 14; 
j'ai vû que ce n'eft pas feulement des nœuds My, repréfentés 
fig. 9, pl xxXx1 de mes Recherches, que partent les zuyaux,. 
mais qu'il en part encore de l'ancienne tige 7 ; ceux-ci m'ont 
toüjours paru plus petits & moins nombreux que les autres : 
je ne me rappelle pas d'en avoir vü plus de deux outrois 
dans la même plante. 

IL. Jai répété, pour la quatrième fois, l'expérience que 
jai décrite fort au long dans l'article CX, & dont le but 
étoit de démontrer la faufleté de Fopinion de ceux qui pré- 
tendent que le 2% degénére en ivroye. Le réfultat de cette- 
quatrième épreuve a été le même que celui des trois pre- 
mières : le blé qui a été exceffivement arrofé, ne n'a offert: 
ni dégénération, ni altération. M a beaucoup plus talé & fruc- 
tifié que le blé qui n'a été humecté que par l'eau des rofées 
& des pluies. 

J'ai remarqué quele froid exceffif de 175 5 a été beaucoup 
plus nuifible à Fiyroye qu'au froment, A Thonnex, petit village 


DE 15 ! S'CAHEINIC ES 619 
à trois quarts de lieue au levant de Genève, & où j'ai fait 
ces expériences , le froid a été tel le 10 Février, qu'il a fait 
defcendre la liqueur du thermomètre de M. de Reaumur à 
20 degrés au deffous de la congélation : il a été moins grand 
à Genève d'environ 3 à 4 degrés, 

IV. Je me fuis beaucoup occupé de l'éiolement dans les 
articles LXXIX & CXIII de mes Recherches. Cette alté- 
ration fi remarquable, qui furvient aux plantes qu'on élève 
dans des lieux renfermés & obfcurs, méritoit l'attention des 
Phyficiens, & je ne fache pas qu'ils aient cherché à en dé- 
terminer Ja caufe par des expériences décifives. On a vû dans 
les articles que je viens de citer, celles que j'ai tentées fur 
ce fujet intéreffant; toutes ont paru prouver que ce n'eft ni 
dans le défaut d'air, ni dans le défaut de chaleur, ni dans 
l'excès d'humidité, mais uniquement dans le défaut de lumière 
qu'il faut placer la caufe de létiolement. Voïci encore une 
expérience qui confirme celle-là. 

Des #aves qui avoient crû dans un cellier très-obfcur, S'y 
étoient fort éfioles ; leurs tiges s’'étoient exceffivement alongées, 
& leur couleur étoit d’un blanc très-vif; les feuilles n’avoient pà 
achever defe développer, & leur couleur étoit d’un blancjaunâtre. 

Je coupai les tiges d'un grand nombre de ces navets, j'en 
introduifis fe bout inférieur dans des vafes pleins d'eau ; je 
portai ces vafes dans un jardin, où je les plaçai les uns à 
côté des autres à la même expofition: je mis quelques-uns 
de ces vafes fous des tubes de carton, recouvert de papier 
bleu , qui interceptoient abfolument la lumière; les uns étoient 
exactement fermés, les autres étoient ouverts à leur bout 
fupérieur : des thermomètres furent renfermés dans ces tubes, 
un autre thermomètre fut placé à côté & à l'ombre. 

Ce fut le 19 Août 1755 que je fis cette expérience, il 
faifoit fort chaud ce jour-là ; le thermomètre placé à l'exté- 
rieur des tubes, & ceux renfermés dans les tubes, fe tenoient 
à 20 ou 21 degrés au deffus de la congélation: un ther- 
momètre que je laiflai quelques heures dans le cellier, ne 
sy éleva qu'à 10 degrés & demi. 

liii ji 


620 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Au bout de vingt-quatre heures, les tiges expofées à {a 
Jumière fe teignirent de vert; celles qui étoient fous les tubes 
ne changèrent point de couleur, & au bout de plufieurs jours 
elles étoient d'un blanc auffi net & aufr vif que le premier 
jour : le thermomètre prouvoit pourtant qu'elles étoient expo- 
fées à la même chaleur que celles qui n'étoient point ren- 
fermées dans des tubes. 

V. On a conjeéluré que le Bourlet qui fe forme à l'endroit 
de l'infertion de la greffe avec fon fier, étoit une efpèce de 
fire, qui féparoit du fier les fucs propres à la greffe ; le re- 
pliment & l'entrelacement des vaiffeaux dans le Zour/er, augmen- 
toient la probabilité de cette conjecture. On avoit cru y re- 
connoître une ftruéture analogue à celle des organes fécretoires: 
j'ai commencé à tenter des expériences pour m'aflurer de Ja 
bonté de cette conjecture. L'idée de ces expériences n'a été 
fournie par celles que j'ai faites pour découvrir la route de la 
sève. On a vû dans le cinquième Mémoire de mes Recherches 
le grand fuccès qu'ont eu ces expériences: elles ont confifté à 
faire tirer aux plantes des liqueurs très-colorées, par exemple, 
de la teinture de garance & de l'encre. Si la féparation des fucs 
propres à la greffe fe fait dans le bourlet dont j'ai parlé, il eft 
affez évident que fi l'on fait tirer de l'encre au fer, cette 
liqueur ne doit parvenir dans la greffe que très-décolorée, & 
même qu'elle ne doit point y parvenir du tout, au moins, 
fi lon fuppofe que ce bourler eft un fre auf fin qu'on femble 
Javoir préfumé. | 

J'ai donc fait tirer de l'encre à un fep de vigne qui portoit des 
raïfins violers , & fur lequel on avoit enté en fente un rameau 
qui avoit appartenu à un fep qui portoit des raifins &lancs. 

J'ai vû la matière colorante paffer, fans altération fenfible,. 
du fijet dans la greffe, & s'élever par les fibres ligneufes ju 
qu'au fommet de celle-ci. 


D'EXS  ASNCITENNIC ENS! 621 


ON CREUNE ATEN EN 
DE £2 DE LA BALEINE PAR LA LUNE, 


Faite à Rouen le 20 Décembre 1757. 


Par M. Bouin, Correfpondant de l’Académie. 
ne fe fit fous la partie obfcure du difque, 


à 5" 20° 44”, temps vrai à Rouen. Je ne vis point 
lémerfion, elle eut lieu par la partie claire qui jetoit beau- 
coup d'éclat dans a lunette de quatre pieds dont je me fer- 
vois. M. Dulague, Profeffeur d'Hydrographie, & moi, nous 
primes après l'émerfion trois différences en afcenfion droite 
& en déclinaïfon. 


En tirant de ces trois différences un réfultat moyen, ainfi 
qu'un milieu dans Fheure, nous avons conclu la diftance 
des centres, de 1983" à 7h 13° 29", temps vrai, même 
méridien. 

Le diamètre apparent de la Lune, pris avec le micromètre, 
fut trouvé conforme aux Tables des Inftitutions, à une fe- 
conde près. En tirant des mêmes Tables le mouvement 
apparent & l'inclinaifon de l'orbite, il vient pour différence 
de longitude apparente du centre à l'Étoile, 1$' 10”,7, 
fouftractives de celle de l'Étoile ; & pour différence en lati- 
tude apparente, 4° 21,6, additives. 


M. le Monnier a obfervé cette Étoile le 20 Janvier 
fuivant, & a eu la bonté de m'envoyer fon afcenfion droite 
avec fa hauteur & celle du pole pour fon Obfervatoire; ce 
qui équivaloit à fa déclinaifon, ayant égard à la réfraction. 
J'en ai déduit pour le 20 Décembre, jour de l'Occultation, 
la longitude apparente en ÿ 44 5° 18",2, & la latitude, 
auffi apparente, 5% 52° 34,6 méridionale; d’où l'on doit 

Liii üj 


622 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
conclurre la longitude apparente obfervée de la Lune en 
9 3% 50" 7",5; la latiude 54 56 56,2 fud. 

Le nonagéfime, à l'inflant de l'émerfion , étoit à 1 64 39° 
39"; donc la diflance apparente de la Lune au nonagéfime, 
174 10° 28", ce qui donne la parallaxe en longitude 
— 11109, & en latitude — 45° 35,9. Aïnfi la 
longitude vraie de la Lune, obfervée le 20 Décembre 
1757, à $5 20° 44’ à Rouen, étoit en # 3438" 57", 
& fa latitude vraie, sd 11° 20" auftrale. 


APIs SPCPT EN C'E"S 623 


MÉMOIRE 


SUR LA 
CUBATURE DES CORPS GAUCHES, 


Où l'on explique leur formation, la manière de les 
toifer fans être obligé de les décompofer ; e7 les 
différentes propriétés de ces Corps par rapport aux 
courbes que lon peut y trouver par linterfection 

‘un plan. 


Par M MaAubuIrT. 


THÉORÈME fervant de lemme à la propofition générale. 


E S' lon a un quadrilatère quelconque À BC D compofé 

de deux triangles quelconques 4CB, ACD, dont 
les furfaces feront repréfentées par £e, 19, & qu'aux angles 
B,C,D,4, s'élèvent perpendiculairement au plan ABC D 
des hauteurs BF, CG, égales entrelles, & deux autres 
lignes À £, DH, aufii égales entrelles, dont les deux pre- 
mières feront défignées par @, & Îles deux autres par y, 
je dis que le folid ABCDHEFG fera exprimé par 

2sep + 2d\d'y + 6ey + dhp À 
3 


DÉMONSTRATION. 


Sur les verticales 4£E, DH, foient prifes les lignes À X,. 
DJ, égales entr'elles & à laligne BF"; par les points Z, #, F, G,. 
foit conçu un plan /Æ FG parallèle à celui de la bafe, il eft 
vifible que le folide renfermé entré ces deux plans parallèles;,. 
eft égal à fee + 49) x y. Refte une efpèce de coin: 


ÎHEKFG, qui contient trois pyramides, dont lune 
£EKFG ayant pour baf le triangle XFG, & la ligne EK 


re 


1. 
PROPOSITION, 


2 € 
PROPOSITION. 


Fig. 3. 


624 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


pour hauteur , eft égale à ? e 2 x4e. Les deux autres GHEXK, 


GHIK, égales entrelles, ont enfemble pour leur folidité, 


ru RE de ri 
7%. x 2 dd, Si Von ajoûte ces différens corps, on awa, 


5 : 9 À 2eep+2d'd\y+eey +d\dp 
après les réductions nécefaires, = — ; 


3 
Ce qu'il falloir demonrrer. 


Définiion à génération des Corps gauches. 


II ABCD eft un quadrilatère irrégulier quelconque ; 
aux angles duquel s'élèvent trois hauteurs inégales AR, BY, 
DO, perpendiculaires à ce plan (on verroit aifément que le 
cas de quatre hauteurs fe réduiroit à celui que nous examinons 
ici). Si après avoir tiré les lignes CO, CS, RO, RW, 
on imagine une règle qui parcourt dans le même temps les 
lignes oppofées CS, RO, il en réfüitera un corps terminé 
par le quadrilatère 4 BCD, par plufieurs furfaces verticales , 
qui feront toutes des triangles ou des trapèles, & enfin par 
une furface courbe ROCS, décrite dans le mouvement 
de la règle fur les lignes CS & RO ; c'éft à ce corps que 
Fon a donné le nom de Corps gauche, à caufe des formes 
fingulières qu’il affecte, felon l'inégalité plus ou moins grande 


des lignes verticales AA, BS, DO. 


PROBLEME I 


III. Suppofant la définition précédente, trouver la Jolidié d'un 
corps gauche quelconque. 


SOLUTION. 


Soient prolongés les côtés oppofés AD, BC du quadri- 
Jatère qui fert de bafe jufqu’à ce qu'ils fe rencontrent en un 
point G: foit pareïllement prolongée la ligne OR, jufqu'à cœ 
qu'elle rencontre À D en Q, & foit abaïffée du point À la per- 


pendiculaire ÀE fur le côté oppolé BC; enfin foient nommées, 
les 


PES SCIENCES. 625 
AE "a, DC :s, 


ks données “É ed 
AD-—= 07 BS == #, 
PC DO: 4; 
APS, 
DE AX, 
& les indéterminées £ 41 — £*, 
mM —Æ%, 


.C b+-6 bc byx 

on trouvera aifément PX— TE & mL — _— 
a 

Ces deux lignes mefurent les hauteurs des triangles MPm, 


Pmp, qui forment a bafe du folide démentaire : ce qui 
donne le triangle AZPm — bg + her x dx = ec, & le 


2ac 
Bcf+ gx 


24ac 


x dx = DA. 


Pour avoir enfuite une des hauteurs du folide élémentaire, 
on cherchera d'abord AQ par cette analogie, OD — AR 
: AD:: AR:AQ, & en lettres g — m:c::m gt 


; + gx — 
d'où Jon tire PT — "EI" = y. On trouvera 
[4 


de même MAX — —— 1 
Cela pofé, il eft aifé d'avoir l'expreffion du folide élémen- 
taire, par le moyen des lignes que l'on vient de trouver & par 


, CEA JA 
da formule du Lemme de f'art. 1,1 222227 +77? 


triangle Pmp — 


3 
Suivant nos dénominations, cette formule devient 


ebcgn + bcgnx —ab — 26€ 
£ gax abgnx gnx EI Le |] 
3 acc 3 


be fm + bcfgx — bcfmx + Lcgms + bgqx° AY PE Ad 


3acc 


Say. étrang. Tome IV. - KKkKkk 


Fig. 3. 


626 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


je fa ces = efRRE Gr E, e— fd\e | 
6ac ; "a —+= 
LEE ben COUT ee Die de 
ac ET: 
se NN bon + ab Dcfm +-.b 
dont l'intégrale eft Dabgn + abgm + bcfn cfn dx 


Gac 
20cgn —abgn—abgm—befn — bcfm + bcfq + abgq—+bcgm ver 
GA GRR LEE 2 ET TE 


12 acc 


Bgq — bgm—5b 
+ IE x3, Si l'on fuppofe x = «, on aura, 
acc 


après toutes les réduétions néceffaïres, la folidité du corps 


ABCDORSC— Ex PIE LR NE, ia 


2 6 24 6 


be 29 +m+n S u 
LES = — ; ce qui donne la conftruction 
24 


fuivante, - 
IV. Du point 2, on imaginéra une droite BK parallèle 
à AD, qui rencontre le côté CD dans un poñit À; & du 
point À on mènera les lignes AK & AC, lefquelles partageront 
la bafe du corps gauche ‘en trois triangles #4C, D'AK, 
CAK; enfüite, 1° on ajoûtera enfemble deux fois a hau- 
teur ZS qui fe trouve fur le triangle ABC, une fois AR, 
& une fois DO; & par la fixième partie de la fomme, on 
multipliéra la fürface du triangle ABC, ce qui donnera la 
première ‘partie du corps, repréfentée par LE x 2 
2° On ajoûtera pareillement enfemble deux fois AR, 
deux fois DO & une fois feulenient PS, qui ne fe trouve 
pas fur le triangle ADK; & par la fixième partie de a 
fomme, on multipliera le triangle AKD, ce qui donnera 
5 Fe , r Bcf 2m+2q+n 
la feconde partie du corps, défignée par = x 
3 Enfin, on ajoûtera encore deux fois DO, une fois 
AR & une fois BS, & lon multipliera le triangle CAX 
par la fixième partie de la fomme ; ce qui donnera la troifième 


: bc 29+ m + 
partie de la formule + x = — . 


RQ Sn hr R er 


bEs SCIENCES. 627 


Démonfiration de la dernière conflruétion. 
V. Toute cette démonftration fe réduit à faire voir que 
les triangles DAK, CAK font repréfentés, l'un par 2 Ê 
Jautre par _ , ce qui eft ailé à faire voir. Pour cela, 


foit abaiffée du point 2 la perpendiculaire 2 F fürle côté AD, 
les triangles re‘angles AG, BFG font évidemment fem- 
blables ; donc on aura AG (2): AE (b) :: BG (D'SET 


== — * donc puilque 8 Æ eft parallèle, par confiruétion , 
à DA, on aura KL — BF; donc le triangle DAK 


= _ Il n'eft pas moins évident qué le triangle BAC 


b : . $ 
©; refle donc à faire voir que le triangle CAK 
2 


= “E. Pour cela, on remarquera que la furface du tra- 
pèze ABCD eft égale à celles des deux triangles 2 AC, 
CAD, Yexpreffion du triangle 2 AC eft “£., comme on 


vient de le voir. Il ne s'agit donc plus que d’avoir celle 
du triangle C AD ; pour cela, il fuffit de chercher la perpen- 
diculaire C'Æ par le moyen des triangles refangles femblables 
AËG, CHCG, qui donnent AG (a) : AE (6) :: GC 


(f + &) : CH — ee: donc la furface du triangle 
ACD = Me - , mais celle du triangle DAK2ÈT > 


donc CAKX — Tr Ce qu'il falloit démontrer, 


24 


CORMROLLATRE L 
VI. Si lé quadrilatére devient un trapèze à bafes parallèles, 
on aura dans ce cas f — + » & la formule deviendra 
KKkk ij 


« 


628 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


bo 2n +9 + bg 2m 04 2 bcp: 

y IT HE x EE LE, 
2 6 2 6 24 
+ . FT US En — b 

x = — , ce qui fe réduit à £g PRE ARE PE 

24° 


+ + 1 D EN ; 
21777 ; d'où l'on déduit une première méthode pour 
ce cas particulier. Ayant tiré la ligne AZ parallèle à BC, 
on aura évidemment dans cette hypothète ABCZ = bgy 
ainfi il faudra muliplier cette furface par le quart des trois 
hauteurs. Le triangle ADZ eft auflr vifiblement égal à 

bcg 


—"-; car à caufe des lignes AZ, BC, fuppofées parallèles, 


la perpendiculaire abaiffée du point D fur AZ, fera égale à. 


be : . . 
— ; donc pour avoir la feconde partie du corps, fuivant 
a 


cette formule, il faudra multiplier la furface du triangle par 
deux fois DO, une fois À R & une fois BS, le tout divilé 
par 6. 

1.” Au lieu de réduire la formule comme nous venons 


« LI A y . . Ë 
de le faire, on auroit pû la décompofer comme il fuit, —£ 
- 2 


2Mm+ 2h + bc b MH + 2 é, 
+ 


l'on tire cette feconde formule. 
Ayant partagé le trapèze en deux triangles ABC & ADC, 
on multipliera le premier, qui eft <e par deux fois les 


hauteurs PS & AR qui fe trouvent fur ce triangle, & une 
fois DO, & l'on divilera le produit par 6. 2.° On multi- 


bcg 


pliera le triangle ADC, qui eft évidemment égal à 


ae _. par une fois les hauteurs AR & LB, qui lui 
font communes avec le triangle À AC, & deux fois Ja hauteur 
DO, qui n'appartient qu'à lui, & lon divifera le produit 
par 6; ce qui donnera la feconde partie de cette nouvelle- 


D\Ë: 5 / SÂCHENNC:E:S 629 
formule. Ce réfultat eft précifément celui auquel on arrive 
en cherchant direétement le cas particulier. 


GO 'r Or LL AST RE MIL 


VIT. Si la bafe du corps eft un parallélogramme , dans fa 


FAI b 22+I+m bc 2Mm+2/+# 
formule générale ME: MNT A ol LÉ ane 
2 6 24 6 
bcg 29m : , > : 
HE x ————, il n'y a qu'à fuppofer les lignes 


a & f chacune égale à l'infini: il eft évident qu'il n'y a que 


be 
#_ devenant 
24a 


les deux premiers termes qui reftent, puifque 


bc , . y . A 
#_, ou zéro doit s'évanouir. I n'y aura donc qu'à mul- 
[e °] 


tiplier la bafe par Je quart des trois hauteurs, puifque tout fe 


mn + 


réduit à éc x . Ce feroit la même chofe s’il n'y 


avoit que deux hauteurs ou même une feule : il faudroit 
encore s'y prendre de la même manière dans Je cas où il 
auroit quatre hauteurs inégales; & toutes les formules de ces 
cas particuliers fe déduifent aifément des confidérations pure- 
ment géométriques, comme il eft aifé de sen convaincre 
par foi-méême. 

SCA OVL TUE; 


VIIT. Ty a déjà long-temps que l'on fe fert des corps: 
dont nous venons de parler: le befoin continuel où l'on fe: 
trouve d'en avoir le cube dans le calcul des déblais ou des: 
terraffes, n'a pas permis d'ignorer long-temps leur utilité dans 
ces fortes de travaux; aufli plufieurs en ont-ils recherché les 
propriétés rehtives à la pratique, mais je ne connois perfonne. 
qui ait donné la cubature de ce corps, lorfqu'il a pour bafe 
un quadrilatère irrégulier, fins doute parce que ce cas eft 
aflez rare dans la pratique, ou peut-être même parce que pour 
Jors les Praticiens fe contentent de partager le corps en deux 


parties, dont l'une fe toife comme un corps qui a pour bafe: 
KkkK if 


630 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIF 

un trapèze à deux côtés parallèles, & l'autre comme une 
efpèce de coin ; méthode qui anéantit, comme on le voit, 
Ja génération uniforme de ce corps. Aïnfi pour établir quelque 
chofe de plus général, on a tâché ici d'éviter les décompo- 
fitions dont on a fait ufage jufqu'à préfent dans ce cas parti- 
culier. On voit aflez le rapport de la furface de ce corps avec 
celle des terres qu'il faut enlever dans les ouvrages qui ont 
rapport aux fortifications & aux grands chemins : d'ailleurs , 
quand la furface du terrein s’éloïgneroit quelquefois de la for- 
mation de la furface courbe des corps gauches , il fuffit qu'elle 
s'en éloigne peu ordinairement, & que l'on puifle calculer 
d'autant plus aifément, que d'ordinaire tous les déblais ont des 
parallélogrammes pour bafe, en regardant les témoins, que l'on 
laifle de diftance en diftance, comme les hauteurs des corps 
dont on veut avoir la folidité, fauf à les déterminer par les 
profils ou par quelqu'autre méthode toûjours très-facile à 
imaginer. 


AUTRES propriétés des Corps gauches. 


IX. Outre les propriétés dont on vient de parler, & qui 
font les plus intéreffantes, puifque l'on n'examine ici ces 
fortes de corps que pour trouver une méthode facile dans 
la pratique de déterminer leur folidité; il y «en a encore 
un grand nombre d'autres, qui ne font pas moins intéreffantes 
pour ceux qui ne cherchent que la théorie. Nous allons exa- 
miner quelques-unes des plus curieufes dans le refle de ce 
Mémoire. 

PROBLÉME Ik 


X. Trower l'équation qui exprime la nature de la furface courbe 
des. corps. gauches. 


Comme on peut aifément fe convainere que la nature de 
cette, fürface eft toüjours Ja même, ceft-à-dire, qu'elle ne 
doit point pafler une équation du fecond degré à trois va- 
rables, & que d’ailleurs les calculs deviennent exrtémement 


DE S SCIENCES 637 
longs & compliqués, lorfque lon recherche cette furface dans 
Je cas où la bafe eft un quadrilatère dont aucuns côtés ne 
font parallèles, nous nous contenterons d'examiner feulement 
celui où deux côtés font parallèles entr'eux. | 
Soient nonymées les lignes connues AB—a, BC— b, Fig. 4. 
DC=c, AD = d, & AF = f; les hauteurs verti- 
cales AL — m, BG = n, CE —= g; les inconnues, 
AP, x; PQ, 7; QN, y; on aura, comme ci - devant, 


AK — am , PM = Se PS Et 


+ 
Z—m a a 


Rp fd + dx 
On fuppofera la ligne AZS prolongée en Z, jufqu'à ce 


qu'elle rencontre PR, aufli prolongée autant qu'il eft nécef- 

(F4 + dx)xq% 
Frames mx 9%)" 
on cherchera enfuite Q NV ou y par cette analogie, RZ : RS 
:: ZQ : QN, ou en mettant les valeurs analytiques 


(fd + dx)xqx RSR (fd + dx)xgx + (fd+ dx — fr) x (am ns mx — 9x) L 


fire, & lon trouvera que RZ — 


flame nx— mx — gx) j TA fram+nsx —mx— 9x) Jr 
d’où l'on tire pour l'équation de la furface courbe demandée, 
adxy + adfy—=qdxx + qdfx + (fd + dx —f1) 
x (am + nx— mx — 4x) ; équation qui appartient à 
une furface courbe hyperbolique : Ce qu'il falloit démontrer. 


Clo Ro Er AUTRE TL 


XI. Si dans cette équation .on fuppofe que z ait une 
relation conftante avec RP, en forte-que fon ait r:4 


DE fd + dx rf+rx 


mette cette valeur de 7 dans l'équation, elle deviendra, après 


; d'où l'on tire 7 — , & qu'on 


A— M 


avoir divifé chaque membre par x f, 


r 
ML 
x (MX —nx + qx — am) y, quieft une équation. 


DA 


à Ja ligne droite; d'où il fuit que la furface du corps gauche 
eft telle, qu'on peut également la concevoir comme formée 
par le mouvement de la règle fur les côtés ED, GL, ou 
fur les côtés oppolés LD, GE ; car puifque l'on a fuppofé 
z:RP::r: d, il senfuit que les lignes RP, AD, & 
par conféquent les lignes AD, BC font parcourues en 
même temps, donc, €7c 

On voit auffr, avec la même facilité, qu'en fuppofant x 
conflante, on retombe dans une équation du premier degré, 
ce qui eft une fuite néceffaire de a génération de ce corps. 


632 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


Co r'o/rL2'AUT RTE TE 


XII. Si l'on fuppofe que z foit toujours à une partie 


i L AM 
— de b dans le rapport de x à 4, ou, ce qui revient au 


lbx A— 11 


même, fi l'on fait z =—— ,onauraxy + fy — 


48 
flbx 
aadg 


amf 
d 


X X 


X (IX —UX + qx — am) + 


a 


+ 
l'hyperbole entre fes afymptotes, puifque le plan xy fe trouve 
dégagé de tout coëfficient, & que d’ailleurs il n'y a qu'une 
des indéterminées qui fe trouve élevée au quarré. 


; équation qui défigne néceflairement un lieu à 


(CO RON LUL ANR CE UT 


XIIT. Si lon fuppofe que le quadrilatère qui fert de bafe 
foit un parallélogramme , dans ce cas f devient une grandeur 
infinie; ainfi il faut divifer l'équation par f, qui devient 
alors , en,ne gardant que les termes qui fe trouvent multi- 

(lbm — nbl + 1bq) 
aagd 
ain pile 
RSS laquelle eft évidem- 


pliés & divifés par f, y — 


271 mlb 
La — 


X # 


+- 


agd 
ment une équation à {a parabole. 
COROLLAIRE 


4 


A+ an —m " 
f de 


CERSRESREL TU NE TT 


D'EIS, SiCAE:NiC281S 0m M G37 
C‘oër 0, L:1/A TRE IVe 


XIV. Si l'on fappofe y — o, l'équation générale 'de- 


ee UE 2e UE Ted 
a a ad! 
—+ mf — 0, qui eft encore une équation à hyperbole ; 


d'où il fuit que ff dans le même temps que la règlé AS 
décrit la furface du corps gauche, par un mouvement qui lui 
fait parcourir uniformément les lignes D Æ, GL,, elle glifle 
jufqu'à la rencontre du plan qui fert de bafe, elle tracera dans 
le mouvement, & par fon interfeétion continuelle avec le 


plan, une hyperbole qui paflera par le point C; d'où il 


fera facile de déterminer les afymptotes, en faifant 2 
æ 
AM HA — NX 


= ———\, où fimplement gx —= am + 1x—mx; 
a 


am 


d’où lon tire x — rat: dont la conftruction n’a 
q a 


aucune difficulté. 


CoOROLLAIRE V. 


X V. II fuit encore de cette génération des corps gauches, 
& de ce que nous avons démontré au corollaire premier, fur 
les deux manières dont on peut concevoir fa formation, que 
de toutes les furfaces courbes qui peuvent terminer un corps, 
celle-ci eft la moins courbe poffible, c’eft-à-dire qu'elle ap- 
proche plus que toute autre de la furface plane. Pour sen 
convaincre , il n'y a qu'à faire attention que, fuivant ce qui 
précède far. X1), on peut appliquer une règle & la faire 
mouvoir en deux fens diflérens fur toute l'étendue de cette 
furface, en forte qu'elle feroit abfolument plane fi on pouvoit 
la faire mouvoir fur le corps dans une troifième pofition. 

On remarquera encore que cette furface a beaucoup d’ana- 
logie avec celle d’un corps annulaire, engendré fur le tour 
par la révolution d'un cylindre auquel on préfente obliquement 


Sa, etrang, Tome IV. EI 


rA 


63à MÉMOTRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

à l'axe du mouvement le tranchant d’une lame d'acier, égale- 
ment large dans toute fon étendue. On trouve dans ce corps, 
aïifi-que dans, celui que nous venons d'examiner, les diffé- 
rentes feclions coniques ; on peut aufii appliquer à fa furface 
courbe, une ligne droite qui la parcoure en deux fens diffé- 
rens dans toute fon étendue. 

H nous refleroit encore bien des chofes à dire fur d’aûtres 
propriétés des corps gauches , & principalement fur leurs centres 
de gravités, fur la quadrature de leur furface, qui dépend de 
celles des feétions coniques. Cette matière fera le fujet d'un 
fécond Mémoire. . 


J'av, Etrang. Tome IF Page 634. PL XFVIT. 


D'ES SCIE N GES: M 635 


MÉMOIRE 
Sur un nouveau genre de CRABES DE MER 


Se. ele qui a des pattes fur le dos 
7 Jous le ventre. 


Par M. VosmaER, Correfpondant de l’Académie. 


1L étoit pofible de connoître toutes les productions de 
la Nature, il n’y a pas de doute que cette conhoiflance 
ne fût d’une utilité très-confidérable pour Ja fociété; j'en 
appelle au témoignage de ceux qui ont la moindre idée des 
avantages que nous avons déjà retirés des recherches qu ’on 
a faites fur quelques-unes de ces productions. C’eft à cela 
qu'aboutiffent les eflorts que ne ceffent de faire tant de grands 
perfonnages, devenus fameux par leur favoir (les Membres 
iluftres de cette Académie royale) : ce n’eft même qu'en 
fuivant cette voie, que la Médecine, pour ne nommer 
qu une feule Science, a fait de fi grands & de firapides pro 
grès, en examinant avec foin & les plantes & les animaux. 
Il ya plus encore, il nous importe extrêmement de bien 
connoître la nature des animaux, leur génie, leurs mœurs, 
leur manière de fe conduire & de fe gouverner, Ils peuvent 
fouvent nous donner lieu de faire de nouveaux progrès dans 
la découverte des loi générales de la Nature. 


© Je ne fache pas que, jufqu'à prélent, aucun Écrivain où 
Naturalifte ait fait la moindre mention d'un animal, qui, 
étant garni de pattes & de la faculté de s'en fervir, puifle 
indifféremment marcher, avancer, foit qu'il ait fe dos ou 
le ventre tourné contre terre *. 


* L'ourfin de mer eft le feul | doit ajoüter foi à ce que les Natu- 
animal connu qui paroïfle approcher | raliftes nous difent de l’ufage du 
de cette propriété fingulière ; fi l’on | grand nombre de pointes dont ce 


Li 


836 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
€'eft à la découverte de ce qu'il y a de remarquable dans 
cette produétion que j'ai deftiné ce Mémoire; & pour y 
rocéder avec ordre, je crois devoir entrer auparavant dans 
le détail de quelques circonftances particulières qui y ont 
rapport, lefquelles j'accompagnerai de la defcription de F'ani- 
mal imème dont.il s'agit. . 

Tous les divers genres de, crabes de mer, qui forment 
June des clafles du fyflème des cruftacées, ont de chaque 
côté du corps quatre pattes, fans compter les deux ferres ou 
pinces : ces pattes font placées de manière qu'elles fe trouvent 
toutes dans une ligne prefque droite fous Je ventre même de 
l'animal, où elles exercent li manœuvre qui leur eft propre. 

Ayant donc remarqué dans notre nouveau crabe une conf 
truction de parties toute oppofée à celle des crabes ordinaires, 
je fixai mon attention fur un objet fi fingulier & qui devoit 
naturellement piquer ma curiofité : c'eft en eflet une efpèce 
nouvelle, toute difiérente de celles dont je viens de parler 
& qui s'écarte de certe loi ordinaire de la Nature, fuivant 
laquelle les membres deflinés, ‘dans tous les animaux, à leur 
mouvement progreffif, n’occupent jamais d'autre place que 
fous le ventre. Les autres efpèces ont, comme je l'ai déjà dit, 
huit pattes, quatre de chaque côté. Dans notre crabe, on ne 
voit fous le ventre que deux pattes de chaque côté; les quatre 
autres font placées fur le dos, deux d’un côté, deux de l'autre, 
préciféiment au deflus de celles du ventre. 


coquillage elt hériffé : maïs je vou- 


plus vrai-femblable que ces pointes 
drois bien favoir fi un corps, arrondi 


leur tidfinent lieu d'armes, pour 


de cette manière , peut avoir la 
fermeté requife pour un mouvement 
progreffif, füur-tout lorfqu'il repofe 
fur des piquans inégaux, qui, dans 
la plufpart de ces animaux, font 
très-aigus & très-déliés, fouvent 
même très-caflans, & d’une lon- 
ueur furprenante *. Il eft donc 
* Rumphius, Amb. Rariteit- Kimer, 
Tome X111, cap. X , n° $. Klein, Ordre 
naturel des Ourfins de mer, Tomes XV11, 
XVIII, XXVI, de. D 


défendre & garantir de tut danger 
leur fragile coquille, &, en cas de 
befoin, pour fe remettre dans leur 
première fituation lorfqu’ils viennent 
à êtr renverfés par le mouvement 
de l’eau, ou autrement. Les petits 
piquans, dont la bafe platte eft gar- 
nie, font peut-être deltinés à favo- 
rifer un mouvement lent progreffif, 
quoiqu'ils aient encore un autre 
moyen pour fe le procurer. 


D'ENS | S\CUEIN:CIE.S 637 

Quelque examen que je fife d'abord d’un être fi extraor- 
dinaire & f1 digne de remarque, je reflois cependant toûjours 
dans l'incertitude de ce que je devois en penfer : quoique je 
trouvaffe fes autres parties très-bien conformées, je ne favois 
s'il falloit le mettre au rang des monftres, ou fi les jointures 
des quatre pattes du dos n'étoient peut-être pas difpofées de 
telle manière que ces pattes puffent fe jeter en arrière, afin, 
d'aider par-lRà celles du ventre, mais rien moins que cela. 
La première idée ne peut avoir lieu, puifque je produirai 
ci-après un autre crabe parfaitement femblable à celui-ci; & 
à l'egard de la feconde penfée, de nouvelles recherches ne 
tarderent pas à me convaincre qu'elle n’eft pas mieux fondée. 

J'examinai effectivement fi les membres des pattes fupé- 
rieures pouvoient fe courber en embas; mais tous les efforts 
que je fis pour cela furent inutiles. La fituation des pattés 
inférieures empêchoit les fupérieures de fe plier en embas : 
de plus, les articulations des pattes du dos ne permettoient 
pas qu'on les abaïfsät fuffifamment pour pouvoir les courber, 
foit en arrière, foit fur les côtés. Qu'on ne s’imagine pas que 
Y'état où fe trouvoit actuellement l'animal, devoit s'oppoler 
au fuccès de mes nouvelles tentativés ; on avoit eu foin de me 
l'envoyer dans une très-bonne liqueur, il s'y étoit très-bien 
confervé, & dans le même état que le repréfente la figure 
exaéte qu'on a jointe ici; en un mot, tous fes membres étoient: 
flexibles & même très-mobiles. 

En réfléchiffant davantage fur une propriété fimerveilleue 
je me reflouvins d'avoir fouvent admiré un corps femblable, 
mais defléché & beaucoup plus petit, parmi les animaux de 
cette efpèce, qui font partie de la riche colletion du Cabinet 
de curiofités naturelles de S. A. S. M. le Prince d'Orange, 
laquelle a été confiée à mes foins. Lorfque j'eus bien confi- 
déré ce corps, je vis bien1ôt que mes conjeétures n’étoient 
pas fans fondement : à la vérité, on lui avoit enlevé toutes 
fes pattes, à l'exception d’une feule qui étoit encore adhérente 
au dos; mais malgré cette défeétuofité, jointe à fa petitefle, 
les marques des endroits où les pattes avoient été attachées, 


LA i 


638 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
indiquoient que ce crabe étoit abfolument de la même efpèce 
que l'autre, & qu'à cet égard, il n'y avoit entreux nulle 
différence : on auroit donc tort de les prendre ou pour des 
monftres ou pour des jeux de la Nature. 


Mais ce qui augmenta ma faisfation, c'eft que quelque 
temps après que je me vis poffefleur d'une produétion fi rare, 
je fs encore l'acquifition d’un autre crabe de a même forte. 

Ayant reçû chez moi M. Remy & Gallois, qui trafiquent 
Yun & l'autre à Paris de ce que l'Art & la Natre offrent 
de plus curieux; & ce dernier n'ayant fait voir quelques 
productions naturelles qu'il avoit apportées, je découvris 
d'abord un crabe, qui ne différoit des précédens qu'à l'égard 
de l'emplacement des pattes du dos, comme j'aurai foin de 
Je fire remarquer dans la defcription qu'on en trouvera 
ci-deflous. 


Ce nouveau crabe eft un mâle, les précédens font des 
femelles : la différence qu'il y a entre les uns & les autres, 
c'eft que la queue des femelles eft beaucoup plus large que 
celle du mile. 


Les membres de la queue, qui, dans la femelle, forment 
une grande partie du dos, fe recourbent dans le male beau- 
coup plus fous le ventre; & comme les pattes du dos font 
placées immédiatement derrière l'écaille des crabes, à côté 
des membres de la queue, if s'enfuit auffi naturellement qu'étant 
par-là plus pouffées en arrière que dans celui qui fait le 
principal fujet de ce Mémoire, elles doivent moins paroïtré 
ce qu'elles font en effet. II y a cependant tout lieu de croire 
que ce font de vraies pattes, & que ce crabe, qui autre- 
ment reflemble en tout aux précédens, peut aufli marcher 
fur le dos, même avec d'autant plus de facilité que les deux 
dernières pattes de derrière, du moins dans celui que jai 
reçû de M. Gallois, fe trouvent fituées de telle manière 
qu'il eft prefque impofñible qu'elles fe dirigent & agiflent en 


embas. 
< Parmi tous les Ecrivains qui ont traité de ces animaux, 


“ 


DES | SCENE, 639 
je n'ai trouvé que J. Plancus * qui fafle mention de l'efpèce 
extraordinaire dont il eft ici queftion. Il décrit un crabe 
femblable à celui de M. Gallois, dont je viens de parler 
fous la dénomination fuivante : Cancer hirfutus perfonätus maris 
Juperi, vulgo Facchino Ariminenfibus dilus : W en donne auffi 
une figure dans la planche V, mais qui eft très-défectueufe 
à plufieurs égards. Tout ce qu'il nous apprend de ce crabe, 
qu'il dit être connu fous le nom de facchino , concerne princi- 
palement la forme de fon écaille, qui eft effectivement fin- 
gulière. On voit par la figure que c’eft un mäle, de même 

ue le précédent :tout ce que l'auteur dit des pattes, c'eft 
qu'elles font fort velues, & que l'on pourroit bien, par mé- 
garde, en compter douze, y compris les pinces ou ferres ; 
mais je ne vois p# du tout que l'on puifle fe tromper à cet 
égard, puifque le nombre des pattes eft très-diftinétement 
de dix, en y comprenant les pinces, comme on le remarque 
même clairement dans fa figure. 

Je ne fuis pas, à tous égards, fort furpris que ce Savant, 
qui d'ailleurs eft'aflez éclairé, n'ait fait fur ces quatre pattes 
poftérieures ou du dos, aucune remarque qui s'accorde avec 
l'idée que je n'en fuis formée: fr je n'euffe vû que le feul 
crabe de Plancus, & que je n'euffe pas connu celui qui fait 
le fujet de ce Mémoire, je n'aurois peut-être pas ofé, non 
plus que lui, mettre fon facchino au nombre des crabes garnis 
de pattes fur le dos & fous le ventre; je me ferois peut-être 
contenté de le regarder comme un phénomène furprenant, 
quoiqu'il foit certainement bien moins fmgulier que le mien. 
J'ai cru néanmoins devoir les ranger lun & l'autre dans la 
même chfle; & voici fur-tout pourquoi: 1.° parce que les 
quatre pattes poftérieures du facchino, lequel j'ai aétuellement 
devant moi, font fituées plus vers l'écaïlle & en enhaut 
que dans la figure que lAuteur en donne, & parce que ces 
pattes, principalement celles de derrière, ne paroiflent pas 
du tout difpofées pour pouvoir manœuvrer en embas ; 2.° parce 


* Janus Plancus, Ariminenfis, de Conchis minus notis, Part, II, 
chap. 11, pag. 36. 


64o MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

que le refte de la forme de ce crabe fait affez voir qu'il eft 
abfolument de la même efpèce que le mien. S'il y a entre 
eux quelque petite différence, elle ne vient peut-être que 
du lieu de leur naiffance ou de ce qu'ils ne font pas du 
même fexe. 

Cependant lorfque je jette les yeux fur la figure que 
Plancus nous donne de fon facchino & fur l'emplacement des 
deux pattes poftérieures, je fuis un peu furpris que cet habile 
homme n'ait fait aucune remarque fur une pareille fituation; 
ce n'eft en effet que l'infpection de la figure qui me fait 
tirer cette conféquence , que dans le crabe même qu'elle re- 
préfente, de même que dans le mien, lequel j'ai maintenant 
fous les yeux, ces pattes poftérieures font certainement fituées 
encore tout autrement & plus fur le dos: la raifon en eït, 
que les membres de la queue ou proprement les parties a- 
térales, qui, dans ces animaux , forment le dos avec quelques- 
uns de ces membres, doivent paroïtre moins courbées & 
plus longues que dans la figure. 

Mais il n'arrive que trop fouvent qu'un rien nous jette 
dans l'erreur, & que nous avons befoin d'un plus grand 
nombre d'objets pour connoître la vraie conftitution & les 
propriétés naturelles d’un corps extraordinaire. La fhuéture 
fingulière de l'écaille peut facilement nous donner le change, 
de même que ces plaifans jeux de la Nature que l’on remarque 
fouvent dans les agates & dans les pierres figurées nommées 
graproles. Ce qu'il y a de furprenant, c'eft que l'on voit 
encore aujourd'hui des Savans & des Naturaliftes qui s'occupent 
de ces fortes de jeux & qui fe plaifent à nous en donner la 
defcription, au lieu de tâcher d'en expofer la vraie nature. 

Perfonne n'ignore que ceux qui joignent à l'étude des autres 
parties de l’Hiftoire naturelle la connoiffance des corps pétrifiés, 
ont fouvent befoin d'en avoir un grand nombre d'une feule 
& même efpèce, pour bien connoître celui qu'ils ont à exa- 
miner : lezribolus & V'anrropomorphite du docteur Shaw peuvent 
fervir ici d'exemple. 

J'avois pouflé mes recherches jufqu'ici , Horfqu'il me vint 

en 


DE 51 S CIT'ENNNCÉE 64t 
en penfée de confulter encore quelques anciens Ecrivains, & 
entrautres Alfrovandus (a), que j'avois négligé, ou pluftôt 
oublié. En jetant les yeux fur cet auteur, j'y découvris d'a- 
bord avec furprife l'animal qui fait le véritable objet de ce 
Mémoire, & même fous la dénomination de cancer lirfutus : 
comme dans la figure qu'il en donne, les quatre pattes fupé- 
rieures font parfaitement bien placées fur le dos, je crus que 
Javois travaillé inutilement, en décrivant un animal déjà 
connu: mais je ne tardai pas à me defabufer ; la defcription 
qui s'en trouve dans ce Naturalifle, eft toute différente de 
celle que j'en donne, & je ne vois pas d'ailleurs qu'il ait 
fait la moindre remarque fur l'emplacement & l'étrange dif- 
pofition des pattes du dos. 

Je reçüs auf alors fort à propos, & comme par hafard, 
le nouveau Syffême de la Nature du très-célèbre & favant 
M. Linnæus: je remarque qu'il y fait mention, au n.° XXIIT, 
du perfonatus (b) de Plancus, qui a comme deux pattes 
fupérieures ou fur le dos ; d'où l’on peut déjà conclurre que 
Linnæus à fait plus d'attention que Plancus à la fituation fin- 
gulière de ces pattes. On trouve encore dans le même Syfeme , 
au n° XXX VII, un dorfipes de Rumphius & de Pettiver, 
garnis de pattes fur le dos ; mais il n’y a point de Naturalifte, 
pour peu qu'il connoiffe l'animal dont il eft ici queftion, qui 
pe juge d'abord, en examinant la figure qu’en donne Rum- 
phius /c), que cette efpèce ne fauroit être regardée comme 
un véritable chancre à pattes fur le dos, lequel foit difpofé 
de telle manière qu'il ait effectivement la faculté de marcher 
dans une fituation renverfée. | 

Ï y a lieu de croire qu'il eft de la Méditerranée. 

Son écaille reflemble à celle des crabes précédens, excepté 
qu'elle ef plus plate & armée de chaque côté, vers le milieu, 
d’une petite épine ou aiguillon. 


(a) Vide Aldrovandi , de molüibus, | editio decima reformata , Hobnie ; 
cruffaceis , teffaceis 7 7zoophytis. | 1758 , tom. 1, pag. 628 & 630. 
Bononiæ, 1606 , pag. 194- GC) Rumphius Muf. Tab. X, 

(b) Linnæi, Syflema Naturæ , | fol. 3. 

Sav,etrang, Tome IV. .Mmmm 


642 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 

Derrière l'écaille paroît la queue, qui eft plus de Ja moitié 
moins large que celle des crabes précédens, & ne forme une 
partie du dos que d'un peu plus de deux de ces membres 
dont elle eft compolce. 

Les deux pattes poflérieures du dos font placées un peu 
plus en arrière ou en embas; elles fe trouvent néanmoins à 
une hauteur aflez confidérable pour pouvoir être appelées 
pattes du dos, & fur-tout les deux antérieures: elles font 
fortes & couvertes de petits poils déliés. 

Sous le ventre, la queue va en rétréciflant & devient pointue, 
comme cela fe remarque ordinairement dans les mâles de ces 
animaux ; les femelles, au contraire, ont befoin d'avoir une 
queue très-large, pour pouvoir cacher leurs œufs deflous. 

La partie la plus épaifle des membres des quatre pattes 
inférieures , eft plus large que dans l'efpèce précédente, & fe 
trouve hériffée en dedans de quantité de petits aiguillons. 

Plancus prétend que cette forte de crabe n'eft pas bonne 
à manger, à caëfe de fa petitefle. 

Ce qu'il y a donc fouvent de ficheux, c’eft que lorfqu'on 
nous envoie quantité de chofes des pays étrangers, on néglige 
d'ordinaire de nous en apprendre la moindre circonftance, 
comme cela eft arrivé à l'égard du crabe qui fait le fujet de 
ce Mémoire. Cet inconvénient regarde fur-tout les animaux, 

uil n'eft guère poflible de nous faire parvenir en vie, à 
caufe de l'éloignement des lieux d'où on nous les envoie: 
que refte-t-il donc alors à faire? le feul parti qu'il y ait à 
prendre, c'eft d'examiner ces curiofités telles que nous les 
recevons, les unes defféchées, les autres confervées dans des 
liqueurs: quant au refte, Ja raifon, foûtenue d’un bon juge- 
ment naturel, fupplée, autant qu'il eft poflible, à ce qui 
manque d’ailleurs, & nous apprend à appeler à notre fecours 
Vart de bien tirer les conféquences, lequel eft fondé fur 
l'expérience. 

Mais que cette route eft difficile à fuivre, dans les cas 
fur-tout où l'Anatomie ne fauroit nous être d'aucun fecours 
pour l'examen de certaines parties ! il n'arrive que trop fouvent 

” 


D'ES/S CIENCES. 643 
que les tégumens membraneux les plus tendres, de même 
que les parties nerveufes, deviennent fragiles & fe durciffent 
dans les liqueurs: fans cet inconvénient, quelle merveilleufe 
organifation ne découvririons-nous pas dans cette double 
manoeuvre des pattes qui agiflent en en haut & en embas! 

C'eft ce qui fe vérifie à l'égard du crabe dont je joins ici 
la defcription, accompagnée d’une figure très-exacte. Lui 
ayant trouvé les pattes fituées en partie fur le dos, ce qu’on 
ne remarque pas dans les autres animaux que nous connoif- 
fons, j'ai cru pouvoir en conclurre tout naturellement qu'elles 
font placées en cet endroit pour s'acquitter de la même fonc- 
tion que nous voyons exercer à celles du ventre. 


Il me fufit donc, pour le préfent, d’avoir augmenté la 
connoiffance des animaux , par la découverte que je crois 
avoir faite le premier d'un être dont les pattes font placées 
tant fur le dos que fous le ventre: & quoique les pattes de 
deflous, comme étant les plus grofles & les plus pefantes, 
femblent être principalement deftinées pour marcher, il paroit 
néanmoins, tant par la ftruéture de celles du dos que par la 
manière dont elles font difpofées que l'animal peut aufir s’en 
fervir facilement pour le même ufage lorfqu’il fe trouve dans 
une fituation renverfée. 


Defcriprion de la première forte de Crabe à pates fur 
le dos à fous le ventre. 


Ce crabe de mer, qu'on a envoyé de l'ifle d'Amboine, 
eft une femelle, commme le fait voir fa large queue, qui 
fe ferme étroitement fous le ventre. 

Je ai reçüe de M. Van-Hæy, Docteur en Médecine, 
très-connu à la Haye, tant par les heureux fuccès de fa pra- 
. tique, que par fa belle colleétion de curiofités naturelles. 

Quoiqu'il foit déjà très-différent de tous les autres animaux 
connus de cette claffe, par le feul emplacement de fes pattes, 
il en diffère encore extrêmement par fa forme: celui néanmoins 

Mmmm ij 


644 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
avec lequel il a le plus de reflemblance, à l'égard de l'écaille, 
ceft le cancer fpinofus de Rumphius. | | 

Ii eft jaunûtre, d’un gris-fale, rude, grenu. 

Le n° 1 en repréfente la partie fupérieure dans fa gran- 
deur naturelle: on y voit les quatre pattes du dos placées 
immédiatement derrière l'écaille tout proche les unes des autres 
& tournées en en haut. 

L'écaille eft parfemée de tubercules réguliers, mais iné- 
gaux & un peu enfoncés dans le milieu. 

La queue commence à la partie poftérieure de l’écaille , 
qui fe termine par un rebord étroit, & elle fe divife en fept 
membres jufque fous le corps. Les trois premiers de ces 
membres forment, dans cette efpèce, une partie du dos: le 
premier & le fecond membres font relevés en pointe dans le 
milieu : de plus, le troifième & le quatrième font armés de 
chaque côté d’un aïguillon. Les quatre pattes du dos fe trouvent 
placées à côté de l'origine des membres de la queue, de forte 
qu'elles font proprement ifolées & ne fauroient être courbées 
en embas par les membres de la queue. 

Ces pattes fupérieures font plus déliées, mais plus arrondies 
que les inférieures; leurs extrémités font garnies de petits 
ongles tant foit peu crochus : es pattes fupérieures, de même 
que les inférieures, font compofées de fix pièces qui tiennent 
les unes aux autres & au corps à l'aide de fix jointures. 

Les yeux font fitués fur le devant à côté de la bouche, & 
défendus de chaque côté par une pointe faillante de l'écaille. 

Au deflus de la bouche, dans le milieu, fe trouvent comme 
deux petites antennes qui fe divifent en plufieurs parties. 

Le n.° 2 fait voir la partie inférieure de ce crabe. 

On remarque en bas les quatre autres membres de la queue 
recourbés , qui font garnis à leurs extrémités de petits fila- 
mens déliés, & s'appliquent très-étroitement contre le corps, 
comme dans tous les autres animaux de cette clafie. 

De chaque côté paroiffent les deux pattes inférieures, qui, 
de même que les fupérieures, font garnis de longs ongles à 
leurs extrémités : elles font auffi divifées en fix pièces & autant 


fur. rang . Tome IT Tage 044. 


PL XVII 


D Euws ;, S GIE N CES. 645 
de jointures ; elles font placées un peu plus fur Je devant 
ue les fupérieures ; mais cette diflérence eft peu de chofe. 
es quatre pattes du ventre font plus larges où plus plates 
que celles du dos; leurs ongles font auffi beaucoup plus longs 
que ceux des pattes fupérieures, qui les ont très-petits. 
Sur le devant, près de la tête, font fituées les deux petites 
ferres ou pinces recourbées. 
Pour ce qui eft de la poitrine & de Ia bouche, on n'y 
remarque nulle différence dans la plufpart des animaux de 
cette famille. 


Defériprion des différences qui [e trouvent dans le fecond 
crabe de cere efpèce, qui eff proprement le 
* Facchino & J. Plancus. 


Ce qui prouve que ce crabe eft un mäle, c’eft qu'il a la 
queue étroite. 

Il eft de couleur rouge, ce qui vient peut-être d'avoir 
été cuit. 


de 
Mmmm ii 


Fig. 1. 


646 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE - 


PROBLÈME DE DYNAMIQUE. 


Par M. CHABANON DE MAUGR1s. 


AO, AR ont deux plans inchinés comme on voudra à l'hori- 
on, © qui comprennent entr'eux un angle quelconque O A R; 
OR cff une verge inflexible [ans pefanteur, chargée en m d'un 
corps M qui lui eff fixement attaché, à qui l'oblige, par [a pe- 
Janteur, de gliffer le long des. deux plans ; on demande quelle 
fera la virefe du corps M , eu égard au frottement. 


Je confidère en général la réfiftance que le frottement 
oppofe au mouvement d'un corps fur un plan comme une 
. force appliquée au corps, & je fuppole que cette force foit à 
la preffion dans le rapport donné de g à 4; ainfi un corps étant 
placé fur un plan horizontal, qu'il preffe pamfa pefanteur p, 
je fuppofe qu'il faille lui appliquer, dans le fens du plan, une 
force —= <- P; pour vaincre la réfiflance caufée par le frot- 
tement & mettre le corps fur le point de fe mouvoir dans 
la direction de la force appliquée. 


Soit Am la ligne que décrit le corps dans un inftant 
quelconque, met — Min, & dans la même direction eft 
la ligne qu'il décrifoit dans Finflant fuivant, égal au premier 
s'il étoit abandonné à lui-même & qu'aucune force accéléra- 
trice n’altérât fon mouvement: foit #4 l'efpace que fa pefan- 
teur tend à lui faire parcourir dans le fecond inflant ; enfin 
au lieu de venir en 4, comme il y viendroit s’il n'étoit point 
fixement attaché à la verge, fuppofons qu'il vienne en y. 


Je décompofe le mouvement #14, que le corps auroit eu, 
en deux autres, doñt l'un 7 & eft celui qu'il fuit, & dont l'autre 
m e eft détruit ; d’où il fuit que la ligne we prolongée, doit 
concourir en un point Z, avec les droites oL, RL, tirées 
des extrémités de la verge fous cette condition, que chacun 


LL 


D'ÉS/ SICTEN CES. 64y 
des mouvemens LY, LA, dans lefquels fe décompole 1 
mouvement Ly ou #4, foit détruit, 1° par la réfiflance 
perpendiculaire de chacun des plans, 2.° par le frottement. 

Cette condition détermine les directions des lignes O Z, 
R L. En efet, des points O & À on n'a qu'à tirer des per- 
pendiculaires 00, Rp, & prendre fur AO & fur AR des 
parties 00", R R', qui foient aux perpendiculaires ow, Rp 
dans le rapport de g à #, les diagonales ow', Rp' des paral- 
Jélogrammes formés fur les côtés 00, 00 & RR', Rp, feront 
dans les directions que doivent avoir les lignes OL, RL, 
pour que les mouvemens L'Y, LA foient détruits. 

Si on mène perpendiculairement à o À les ordonnées 
PM, p'm, p'u, &c. de la courbe décrite par le corps, & 
Ie, Z L qui leur foient parallèles; de plus, fi on tire parallè- 
lement à o À la droite m7” T & la droite a ni, on formera 
les triangles femblables ain, mT L ; par conféquent on aura 
cette proportion, ai : wi:: mT': TL. Le problème fe 
réduit donc à exprimer analytiquement chaque terme de 
cette proportion. 

J'appelle Om, a; mR, L'; les ablcifies AP, x ; les ordon- 
nées PM, y; le finus de l'angle droit, tr ; le finus de l'angle 
nea, ou de Fangle O AV, que forme le plan A0 avec 
l'horizon , #; fon cofinus #, p la pefanteur du corps, v fa 
vitefle en 47, : le temps que le corps a employé à venir 
en M, an fera = npdt, en = mpdf , ni —= ddx, 
mh — — ddy. (Je traite Zdx comme pofitif & dy 
comme négatif, parce que les différences premières de x & 
de y vont en décroiflant; or ces différences premières font 
— dx & —+- dy, puifque z croïffant, y croît aufli & que 
x diminue). Donc ai — ddx + npdf, pi = ddy 
+ mp dr, (M faut remarquer que les valeurs de ai & de 
mi feroient les mêmes fi le point z tomboit au-delà de ; 
par rapport au point a, & fi le point # tomboit en deçà de y 
par rapport au plan AO, car alors ai vaudroit an — ni; 
or #1 feroit — — ddx, puifque 7 croïffant, — 4x+ croitroit 
auflr, & pi vaudroit 4 + ph, or hi feroit = + ddy). 


LS 


648 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 
Ayant lexpreffion de ai & celle de ui, il ne refte à cher- 
cher que celles de »m T° & de TL. 

Soit #7 X parallèle à O L, ms's parallèle à R L, puifque 
r:g:h::0L: LZ :02, la valeur de O L trouvée, on aura 
les valeurs de LZ & de OZ ; de LZ retranchant ZT ou y, 
on aura LT’; & ajoûtant OZ à Op = V{aa — yy), 
la fomme fera p'Z ou m= T. H s'agit donc de déterminer 02, 
ce qu'on fera par le moyen des triangles femblables oms”, 
0 RL, dès qu'on’aura l'expreffion de OS". OS" — OT" 
+ S'Z'oumX + ST; les triangles O LZ, Xmp' {ont 


femblables. Ainfi #1X — _ &pX— 2; donc o *À 


où MT = V{aa — y) + Le. Tous les angles du 


triangle #1 7" font connus; par conféquent # 7” eft à S° 7” 
dans un rapport donné. : : g :r, par exemple, S' 7” étant 
par-à déterminée, & m X ou o T' l'ayant été auffr, OS" left, 
par conféquent o L ; & en füivant les opérations indiquées ci- 


dfisontomes nf" 1 0 Vs RER 
n ————  — 


aq 

Be Ta SAT) 2 la be gp bras 9) +8, 

DE ahq ? 
la, proportion ai : wi 4: m7 : TL devient donc 
npdi + ddx : mpdf + ddy :: ahq {aa — y) 
+ (ag + bg) Toy + hr V(aa — 3) + 8ry] 
(a+ dl) gy + has — 33) + gr] — hay; 
ce qui donne /»pdË — ddx) [(ah + bh) 
(II + MM 39) Bey) — #43] 
= (mp dé + ddy) [ahqV(aa — yy) + (ag + bg) 
(43 -+ hrV(aa—yy) + gry)1; 0x on a la valeur dey 
en x, puifqu'on connoît fa courbe que décrit le corps ; donc 
on a une équation de cette forme, dx + X'ddx 


ares X" 4 LE o. X, #7, X" étant des fonctions de =, 
dans lefquelles la variable z ne fe trouve point ; donc fi l'on 
fait 


DS Es M SIC ELNTC Hi 8) 649 
fait dt = gdx, on aura une équation entre les différences 
premières de 7 & de x; équation qui fera intégrable ou conf- 
tructible par le moyen des quadratures. Cette équation fera 


x dt ORNE - l'a 
donc connoître 7 ou et d'où l'on tirera la valeur de +. 
x 


Fee 


REMARQUE L 


Il fe pourroit faire que le point S tombât en decà du 
point 7 par rapport au point Z, ce qui introduiroit quelques 
changemens dans les fignes de l'équation : de plus, on a pris 
le point O’ entre À & ©, & le point À’ au-delà de À par 
rapport à À, ce qui fuppofe que la verge gliffe entre les deux 
plans, de manière que fon extrémité O s'approche continuel- 
Jement du plan AR; or la verge peut gliffer de manière 
que le point © s'éloigne continuellement du plan A À; dans 
ce cas À" tombera entre À & À, & O entre À & ©, ainfi les 
angles LR 4, LO H feront obtus, par conféquent le point 
Z fera enffe À & O, ce qui changera encore les fignes 
de l'équation trouvée. 

I! eft aifé de s'affurer fi l'extrémité o de la verge s'approche 
ou s'éloigne du plan AR, il ne faut pour cela que chercher 
fur la courbe O À #1 Fo, dont le corps 42 parcourt un arc, 
le point Æ le plus élevé au deflus de l'horizon: fuivant que 
par la pofition initiale de la verge, le corps 1 fe trouvera 
entre À & Fou entre À & ©, il s'approchera du plan 4R 
ou du plan A0. Quant au point #, on le déterminera faci- 
lement, il n'y a qu'à tranfporter l'équation de la courbe des 
co-ordonnées Ap, p M aux co-ordonnées AN, NM /AN 
étant horizontale & NM verticale), & chercher enfuite le 
point W du nouvel axe des abfciffes, auquel répond un 
maximum d'ordonnées ; ce maximum {era VK. 

Si lon fait le calcul, on trouvera (en fuppofant, pour 


abréger, que Fangle O AR foit droit) 


AT — Lan, (bb—aa)] vV(aann + bbmm) __ mnb* — mnaa \ 
TT v[aabb+ [mn.(bb—aa)]*]  v(bbn + aam) ” 


d'où lon voit que le point Æ fera différemment placé, felon 
Say, étrang. Tome IV. . Nunn 


Fig. 2, 


PRE 3: 


65so MÉMoIREs PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


les différentes pofitions des plans à l'égard de horizon, & 
felon les différentes valeurs de à & de 4. Si mn ou — 0, 
c'eft-à-dire fi lun des deux plans eft vertical, } tombera fur 
le point À, ce qui d'ailleurs eft évident: les points À & F 
fe confondront encore fi a — b; en effet, dans cette fup- 
potion, la courbe O X M Fo fera un cercle, dont l'axe ho- 


rizontal des abfciffes fera un diamètre. 


APP CADET ON: 


Je fuppofe les plans parfaitement polis; en ce cas, g — 0, 
h — 1, & Féquation du problème eft /»pdf + ddx) 
[{ar+ br) V{aa — yy) + bgy] — (mpdf + ddy) 
ag V(aa— y), qui devient, en fuppofant l'angle O À R droit, 


(updË + ddx) D — (mpdf + ddy)V{aa — y). 
Si lon met dans cette équation au lieu de y & de ddy, 
leurs valeurs tirées de l'équation de Îa courbe, on aura 
(ddx + npdf) = V(DE — xx) = [mpdf 
+ + ddV(bb—xx)] x Multipliant par 5: 


bdx + 2bnpdx? 
SAT ERA RPCER == == mpd 


& intégrant, on trouve. 


2 a 
V(bb — xx) — — D + Kdr ; d'où Ton 
; di [—2bnpx — 2abmpV(bb — xx) + 2baRT (DE — xx} 
Om TE TEPS ESP 
[—260px— 2 abmpVhb— xx) + 2 ab K][40(bb— xx) + aax ] 
Mm 


&vy— 


en mettant pour 41 fa valeur , & par conféquent 


VV = — 21px — + V(bb— xx) + — ; Ja 


conftante # fe détermine par la pofition initiale de la verge, 


REMARQUE Σ 


S'il y a deux corps attachés à la verge, il faudra que la 


DES SCIENCES. sx 
réfultante des mouvemens perdus, #6, m'e où au, a'u' 
pafle par le point Z; donc, fi l'on décompole chacun de ces 
mouvemens en deux autres , 44 & wi, ai & wi, dontfun 
{oit parallèle au plan Ao & f'autre lui foit perpendiculaire, 
OM aura M. ci TELE M. at AL = Mint 
+ M' ui mr /[X) Or, appelant, comme ci-deflus, 
les abicifles À P, x ; PM, y; les ablcifles 4 Q, x’ ; les ordon- 
nées QM', y", on aura ai, wi, TL, mT exprimées en 
x, dx, ddx & dt; de même on aura ai, w'i,1L,m't 
exprimées en x’, dx, ddx'& di ; or on trouvera aifément le 
rapport de x'à x ; donc l'équation X{e changera enune autre, 
compolée de x, dx, ddx & dr; cette équation fera (en fap- 
ofant toüjours, pour abréger le calcul, les deux plans Pre 


ment polis & l'angle O AR droit, & appelantom, a; mn, D; 
eo M. Ph = CM A Pi u c) — xx] 


Mr Lt 
és — xx] ) = 
+ M'[mpdf += «té AI + — xx] Je 
Je multiplie par LM ee , & j'intègre, cela me donne 
2Mnpxdf + Mdx + dt 
lee, 2 Mampdr A GNT à M a a 
er ee Ur = G+J" 
x dx° ; a + b : à 
re rs ae me P dt AVE) — xx | 


, (a+ x dx s ù 
po Poor et RER RU Kdr .ou Mdx 


Maa ed M'cc 3 
ES re PE ap CE 
En oiStae à voa: 
+ M =) > pop pee ler [x — 2 Mipx 
€ arr = 1. € 
— 2Mpn=—Vlb+ J'exx] 2 M PE 


Nnnnij 


Fig. 4. 


652 MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE 


_— 2 M'pm VI (+ c)° —xs] |d#; d'où lon 


tire en termes finis l'expreffion de [a viteffe, 
REMARQUE 111 


On auroit pü réfoudre le problème, en employant le prin- 
cipé de la confervation des forces vives. 

MVV+M'yv=K + MUU + Mu, eftl'équa- 
tion que donne le principe, en appelant F7 & y les vitefles 
des corps M & M, U & v les vitefles que les corps auroient 
eues, fi, en vertu de leur pefanteur, ils fe fuflent mûs libre- 
ment fur leurs courbes : or la relation entre F & y eft donnée 
par la relation connue des petits arcs que parcourent les cor 
dans les mêmes inftans; donc U/& + reftent feuls à déterminer. 
Or, UdU — qdr, en appelant dr la ligne Mm, & @ 
l'action de la pefanteur fuivant la courbe. Je détermine +, en 
tirant fe parallèle à l'axe des abfciffes 1/1, eQ verticales, 
mu, et horizontales. p : @ :: dr : Mn, ou Mt — eQ, 
ou —#dx —mdy; donc UdU= —pndx —pmdy; 
donc UU — G — 2npx — 2pmy. On trouvera de 
même que vv — G — 2npx — 2npy, donc 
MVV + Myv = K — 2Mnpx — 2 Mpm 
x === VI(b + c) — xx] — 2 M'pn L 
— 2M'pm ne VI(b + c)° — x°]; équation qui 


b+c 
eft précifément celle que l’on a déjà trouvée. 


X 


bc 


REMARQUE 1. 


Le principe de la confervation des forces vives, qui, 
comme on vient de le voir, s'applique heureufement à la 
folution du problème dans le cas où les plans font parfaitement 
polis, femble ne devoir pas s'y appliquer auffi heureufement 
lorfqu'on a égard au frottement. En eflet, pour déterminer 
en ce cas la vitefle que chaque corps auroit s’il fe mouvoit 
librement {ur fa courbe, en vertu de fa force accélératrice, 


DE sf SEEN CT 653 
il faut connoître cette force accélératrice, par conféquent il 
faut déterminer l'effort que le frottement fait fur chaque corps 
pour diminuer l'eflort de fa pefanteur, ce qui eft un fecond 
problème à réfoudre. 


EC 0-R'ONEVL AR IE 


Si dans l'équation donnée par les remarques IT & III, 
on fait M° — zéro ; tous les termes affectés de 47 difpa- 
roiflant, 17 multipliera tous les termes reftans de l'équation ; 
d'où l'on concluera (ce qu'on a déjà pu remarquer } que le 
mouvement d'un corps attaché feul à une verge fans pefan- 
teur, ne dépend point de fa mafle, au lieu que s’il y a plufieurs 
corps, le mouvement de chacun d'eux dépend de toutes les 
mafies. Par cette fuppoñition {1° = zéro) , on retrouvera 
l'équation qui a donné le mouvement d'un feul corps. 


REMARQUE V. 


S'il y avoit plus de deux corps attachés à Ia verge, ïl 
eft vifible que la difficulté ne feroit pas plus grande, pourvu 
que le nombre des corps füt déterminé ; le cas feul où la 
verge feroit chargée d’une infinité de petits corps, c’eft-à-dire 
où elle deviendroit elle-même pefante, peut faire naître 
quelque difficulté : c'eft le cas qu'il faut examiner. 

Je fuppofe que chaque point de la verge foit chargé d’un petit 
corps, dont la mafe foit repréfentée par une fonction quel- 
conque À de fa diflance 4 à l'extrémité o de la verge. L’équa- 
tion dproblème, qui doit être généralement A7.ai. TL 
+ Mar tL+&c—=Mui.mT + M ui. 
mt + &c. fera (en confervant les mêmes dénominations 


que ci-deflus, & appelant 0, e ) (A da. (npdf + ddx) 
PS 22 — fAda (mp dé + ddy) V{aa—yy); équation 


5 

qui s'intégrera, ou au moins qui fe réduira aux quadratures, 

fi lon y fubflitue à x, 7 — {aa — yy)ou Ao — Ap' 
Nnnn ii 


| 654 MÉMOIRES PRÉSENTÉS A L'ÂCADÉMIE 
(en appelant 40, 7), & que l'on métte à la place de y 


1 valeur — V(ee — 72). Par ces fubftitutions, on transfor- 
meta l'équation trouvée en celle-ci; fi [Ada{updr 
. de —— lee — 7)] = fTAda 
(mp di + the — at): =]; dont on prendra 


+ 


d'abord l'intégrale pour une pofition quelconque de la verge, 
en ne traitant que a comme variable, & enfuite pour toutes 
les pofitions de la verge, en faïfant varier c 

Je fuppofe la première intégration faite, & j'écris ainfi l'équa- 


tion ,2p dr'V{ee—ur).f Ada. ; : —+ ddyv (ee — 7x) 
f Ada — F — mpdr.z [ Ada — 


—+ zddV(ee — 77) . [Ada : = ; je multiplie par 


2 d7 
V(ee — tt) 


[Ada + dr. .fAda. (==) 


, & jintègre, cela me donne 22p7dt° 


. —œ — 2mpdé V(ee — 77) . f Ada. — 
tTdt aa dx 
da = + Kdr. ou <= 


[K—2npg fade = T2 mpWee— 11) JAda Je —7%) 


— 
— 


+ zU Ada. —< 
ce 


(= 


& [ mettant pour di” fa valeur CERTES dy + — 


ee (ES) 


zy4r* 
ce qt LE =afRifee UF C IA ] 
x —————— OÙ —___———————————— 
LA vy.(ee — y) .ce 


[fe— a)" (ee — 71) +aart] [an Ada — É ample fada? | 
2 - 


és (ee — 77) JAda le — a) + xfAda.aa 


Srav. Etrangers Tom: IT Pag. 654 PI XIX. 


dl 


DE SW SUGIT-E\N CES 655 

Si on veut que la verge foit également pefante en tous 
fes points, il n'y a qu'à faire À — une conftante. Soit cette 
conflante 1, on aura vu = [/e— a)" {ee — 77) + aazt] 


RP en En 2mp V(ee — 74). = È 
ne 2; & comme 
ci 3e a— za + à & 
ER) ——— ————— + 1 — 
3 3 


on prend l'intégrale pour toute la longueur de la verge, il faut 
mettre e pour a dans les termes délivrés du figne / par l'intégra- 
tion; ainfi on a vv — [/e — a)° (ee — 77/+aaz | 
3K — 3enpz — 3emp Vee — 77) 
ei 
ARo —=s5, l'angle ean (dont le finus eft m, & le cofinus » ) 
—=c,onauraz —fin.s &vv — [aa+-{/1—2a) cof.s°] 
x [3 # — 3 pin. /c +5) ]; ainfi la vitefle du centre de 
gravité eft exprimée par + V[3 À — 3 pfin. {ce + 5)]. 
Si le plan Ao eft vertical, l'extrémité © de la verge sap- 
prochera continuellement du plan ÀR, comme on fa vû 
dans la remarque 1, & la vitefle du centre de gravité fera 
exprimée par + {3 À — 3 pfin.s) ; ainfi quand l'extré- 
mité o de la verge arrivera au plan AR, la vitefle du 


Oo 


centre de gravité fera + V3 &. 


. Soit é — 1, l'angle 


FIN du quatrième Volume. 


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