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Full text of "Me?moires de l'Acade?mie royale des sciences, des lettres et des beaux?arts de Belgique."

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Library of the Museum 
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| COMPARATIVE ZOÖLOGY, 
AT HARVARD COLLEGE, CAMBRIDGE, MASS, 


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No. LI J 


MÉMOIRES 
DE L'ACADEMIE ROYALE 


SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS 


DE BELGIQUE. 


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LE 


MÉMOIRES 


DE 


L'ACADÉMIE ROYALE 


DES 


SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS 


DE BELGIQUE. 


TOME XLV. 


BRUXELLES, 


F. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE, 


rue de Louvain, 108. 


"1884 


RTE 


LISTE DES MEMBRES, 


DES 


` 


CORRESPONDANTS ET DES ASSOCIÉS DE L'ACADÉMIE. 


(1% juillet 1884.) 


A 


LE ROI, PROTECTEUR. 
9 


M. Éd. Duronr, président pour 1884. 
» J.-B.-J. Liacre, secrétaire perpétuel. 


COMMISSION ADMINISTRATIVE. 


Le directeur de la Classe des Sciences, M. Éd. Duronr. 
» » des Lettres, M. Aug. WAGENER. 
» » des Beaux-Arts, M. Ern. SLINGENEYER. 
Le Secrétaire perpétuel, M. J.-B.-J. Lracrr. 
Le délégué de la Classe des Sciences, M. J.-S. Sras, trésorier. 
» » des Lettres, M. Ch. Farr. 
» » des Beaux-Arts, M. L. Azvin. 


M. Mancnaz (Chev. En). Secrétaire-adjoint de l Académie. 


e G 


Tome XLV. j 


DT S EEA 


M. 


DRE 


CLASSE DES SCIENCES. 


M. Éd. Duronr, directeur pour 1884. 


» J.-B.-J. Liacre, secrétaire perpétuel. 


30 MEMBRES. 


Section des sciences mathématiques el physiques (15 membres). 


Sras, Jean-S.; à St-Gilles-lez-Bruxelles. . . Élu le 14 
DE Koninck , Laurent-G.; à Liège. . . . . — 15 
Mezsens. Lotel he à Bruxelles 1...  — 45 
Liacre, 3.-B.-Joseph ; FR Ml. : + {D 
Houzrau , Jean-C. ; à Bruxelles. . . . . . — 15 
Mavs, Henri-J.; à Ixelles . . . . . . . — 15 
Dis, F oi D DUAL eg 
Mownrieny, Charles; à Schaerbeek. . . . . — 16 
Sreicuen, Michel; à Ixelles. . . . o — 45 
naar. Alexis-H.; à St-Josse- ten-Noode i — 45 
Fou, François; è à T O ; — 15 
Maiy, Édouard-N.; à Saint-Josse- BH NEA — 15 
De Tiny, Joseph; à Anvers >.: : : . . — 16 
Van per MensBRUGGuE, G.; à Gand . . . . — 14 
N. 


Section des sciences naturelles (15 membres). 


. Van Bexepen, Pierre-J.; à Louvain. . . . Élu le 15 
pe SeLys Loxccmames, le baron Edm.; à Liège. — 16 
Gruce, Théophile; à Bruxelles . . . . . — 45 
Dewargoue, Gustave; à Liège . . . . . . — 16 
Canpèze, Ernest; à Glain (Liège) . . . . . — 145 
Dupowr, Edouard ; à Ixelles . . . . . .  — 15 
Morren, douar; à Liège. E a a O 
Van rs Éd. a Liège; "4 26 
Mazaise, Constantin: ù Gabios. R O 
Berart, Alphonse; à Mariemont . . . . . — 15 
Prana PO: à Gand: 40, , 49 


décemb. 
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décemb. 


1841. 
1842, 
1850. 
1856. 
1864. 
1866. 
1867. 
i868. 
1869. 
1874. 
1876. 
1878. 
1885. 


1842. 
1846. 
1849. 
1859. 
1864. 
1869. 
1871. 
1872. 
1875. 
1874. 
1874. 


PE 


M. Crérin, Francois; à Bruxelles. . . : . . Élu le 45 décemb. 1875. 
» Corner, François-Léopold; à Mons . . . . — 15 décemb. 1878. 
» Van Bamgeke. Charles; à Gand . . : . . — 15 décemb. 1879, 
he Gui Alred-ra Liege. oe geanne RIVES 15 décemb. 1880. 


CORRESPONDANTS (10 au plus). 


Section des sciences mathématiques el physiques. 


M. Henry, Louis; à Louvain . >. + > + à Élu le 15 décemb. 1865 
vo Varmus. Henri: à Gand 4. Ke 15 décemb. 1869. 
» Sperme, Waltère; à Liège . . +. +. . T 14 décemb. 1877. 
se Manson: Paula Gand tic ons er 7 15 décemb. 1882. 
DN, 
Section des sciences naturelles. 

M. Mouron, Michel; à Bruxelles. . . : : . Élu le 15 décemb. 1875. 
Se Drmopunidé ie Liege 5... poker 14 décemb. 1877. 
te Erepanco Leona Lies. His" ire 15 décemb. 1879. 
sis Magross Victor; à-Liège. 42 «roue 15 décemb. 1880. 
ES RP A LU CO TO Noa Aug 15 décemb. 1882. 


50 ASSOCIÉS. 


Section des sciences mathématiques et physiques (25 associés). 


M. Amy, Georges Binnezz; à Greenwich . . . Élu le 15 décemb. 1855. 
SKRU Au üsta à Bonn 4 e PE a 15 décemb. 1864. 
» Bunsen, Robert-G.; à Heidelberg . + + + — 15 décemb. 1865 
»  Cararan, Eugène-C.; à Liège ie . + + : 45 décemb. 1865. 
» VON BARYER, Jean- Jacques; à Berlin. . . : — 15 décemb. 1868 
> Kircnnorr, Gustave-Robert; à Heidelberg. . — 15 décemb. 1868. 
» Hinn, GAA Sa Colmar (Alsace) + + n + + — 16 décemb. 1872. 
ste De Corne d'ours à Luxembourg: in o ie 247 10 décemb. 1875. 
»  Herwnozrz, H.-L.-F.; à Berlin . . . . — 15 décemb. 1875. 
>  Mevasrea pe Var-Dora, le Mis Ls-Fic; à koii . — 15 décemb. 1874. 
» - Srruve. Otto; à Poulkova . . + + + + + — 15 décemb. 1874. 
»  Czausius, Rodolphe-J.-Em.; à Bonn. . . + — 15 décemb. 1875. 
»  Crevreur, M.-Eugène; à Paris. . . +: + + > 15 décemb. 1875. 
»  Buys-Bazcor, C.-H.-D.; à Utrecht. . + + + — 15 décemb. 1875. 


Sa Majesté Dom Prpro Il, n’ALcaNTARA, empereur 
du Brésil: i à Rio-de-Janeiro. — 15 décemb. 1876. 


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oh 


M. Weser, Guillaume; à Gottingue. . . . . Élu le 44 décemb. 1877. 
»  Boussineauzr, J.-B.-J.-D.; à Paris . . . . — 16 décemb. 1878. 
| po Fave He a Rams a LU, arm Le te 16-décemb. 1878. 
» Fadieon, W.; à Glasgow . . . . . . … — 16 décemb. 1878. 
| » Pasteur, Louis; à Paris. . . . . . . — 15 décemb. 1879. 
»  ScuiAPARELLI, Jean-Virginius; à Milan. . . — 15 décemb. 1879. 
»  Gexoccur, Angelo; à Turin. . . . . . . — 15 décemb. 1881. 
»  Tynpazz, John; à Londres. . . . . . . — 414 décemb. 1883. 
aa N: 
» N. 


Section des sciences naturelles (25 associés). 


| M. Owen, Richard; à Londres. . . . . . . Élu le 17 décemb. 1847. 
» EpwaRDs, Henri-Milne; à Paris . . . — 15 décemb. 1850. 
| » Dama, daiacsD; ; à New-Haven abalhio. — 15 décemb. 1864. 
1 » Davion Thomas; à Brighton . . . . . — 15 décemb. 1865. 
» DE Eéerire, Alphonse ; à Genève ... . . — 15 décemb. 1869. 
| »  Donpens, F.-C.; à Utrecht. . . . . . . — 15 décemb. 1869. 
| » Hooker, Jos. Dalton; à Kew (Atiilbtemet. . — 16 décemb. 1872. 
| » sn, Andee rombie; à Londres. . . . — 146 décemb. 1872. 
| » STEENSTRUP, 1 Jap: à Copenhague. . — 16 décemb. 1872. 
T »  Huxcey, Thomas-Henri; à Londres. . . . -— 45 décemb. 1874. 
| »  Princesuemm, Nathaniel; à Berlin. . . . . — 15 décemb. 1874. 
i » Von Decuex, Ern.-Henri; à Bonn. . . . . — 15 décemb. 1875. 
1 o Gossaert Jules: à Lille. . : : .:,,:4,:1.: 15 décemb. 4876. 
i »  DAUBRÉE ORT a Pars ti . . . — 44 décemb. 1877. 
» Von Rouet. Albert; à Wurzbourg . . « — 14 décemb. 1877. 
| » pe Saporta, le marquis G.; à Aix (France). . — 14 décemb. 1877. 
. » VON Sabot. Ch.-T.-E.; à Munich . == « — 16 décemb. 1878. 
É » De Bary, Antoine; à Strasbourg. . . . . — 15 décemb. 1882. 
»  GEcexBaur, Charles; à Heidelberg . . . . — 15 décemb. 1882. 
»  Kowazewsky, Alex.; à Odessa. . . . — 15 décemb. 1882. 
» De QUATREFAGES DE jte J.-Q.-A.; à Paris . — 14 décemb. 1885. 
» Srur (Dionys) Rud.-J.; à Vienne. . . . . -- 14 décemb. 1885. 
» N. . . . . . . . . . . 
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yN: 


—_— 4%) — 


CLASSE DES LETTRES, 


M. A. Wacener, directeur pour 1884. 


J.-B.-J. Lace, secrétaire perpétuel. 


50 MEMBRES 


Section des lettres et Section des sciences morales et politiques réunies. 


M. Gacmarp, Louis-Prosper; à Bruxelles . . . Elu le 9 mai 1842. 
» Van Praer, Jules; à Bruxelles . . . : . — 10 janvier 1846. 
» De Decker, Pierre-J.-F.; à Schaerbeek. . . — 10 janvier 1846. 
»  Leczerce, M.-N.-J.; à St-Josse-ten-Noode. . — 17 mai 1847. 
> pe Wirm, le baron Jean-J.-A.-M.; à Anvers. — 6 mai 1851. 
» FADER, Charles: S Bruxelles ie hiver mnt 1855. 
o Kervyn pe Lerrennove, le bon J.-M.-B.-C.; à 

Saint-Michel (lez-Bruges) >. . . + + — 4 mai 1859. 
pia Guaron Remer: asixelles 0 4 "Ati 4 mai 1859. 
»  Tnonissex, J.-J.; à Louvain 9 mai 1864 
vi Jusme: Théodore; à Ixelles, :,: 5,1, 2% 5 mai 1866. 
» Nève, Félix; à Louvain. Ha Er - A1 mai 1868. 
» Waurers, Alphonse; à Bruxelles . . . + — AL mai 1868. 
Jont Laverite, Émile: à Diege a 46, 20, 6"tmai 1872. 
»  Nyrecs, J.-S.-Guillaume; à Liège. . . . . —- 6 mai 1872. 
» Le Ror; Alphonse; à Liège. dant Mes CARS E RAR 1875. 
» DE BORCHGRAVE, Émile; à Belgrade . . . . — 12 mai 1875. 
»  Lracre, J.-B.-Joseph; à a Re a ee, o 1874. 
»  Wacener, Auguste ; à Gand . =o . . . — 10 mai 1875. 
»  Warcems, Pierre; à Louvain . . . . . : — 14 mai 1877. 
» : Tiecemans , F.; à Ixelles. . . . .. — (HA 1878. 
» Rorm-Jaeguemyns, Gustave: à Brazelles Léon en, 6 mai 1878. 


» Bormans, Stanislas: à Liège A à ec D 1879. 


eu See DEN RE POP E AU PNR oem er mets 


M. Pior, Charles-G.-J.: à St-Gilles-lez-Bruxelles . Élu le 5 mai 1879. 
» Poia, Charles; à kedis PM a vo ON RE 1881. 
DSC Jea Liese MALI, AND deori ra ma 1881. 
»  LauneNr, François: à Gand. . . . . : .  — 9 mai 1881. 
» Lamy, T.-J.; à Louvain . . . 1000 Ce à OC TO 1882. 
» Alphonse; à Dräteleas: D aa a A 1885. 
» SCHELER, Angtstet sa xeles Piee D ARR TC mai 1884. 
n  HenrarD, Paul; à Anvers . . . . . . . — D mai 1884. 


CORRESPONDANTS (10 au plus). 


M. Loise, Ferdinand; à Uccle . . . . . . . Élu le 12 mai 1875. 
Do GANTAD EE, Ja Gand + à +... e ee, OH 1881. 
» Loomans, C.: saLiege à o . — 9ļ9ma 188i. 
» TIBERGHIEN, Guillatirés à St- Josse- Nood. — 8 mai 1882. 
Ste Roersma à Liege Li un 4e. eat Se MA 1882. 
» De Harzez, Charles: à Louvain . . . . . — ‘7 mai 1885. 
»  VanperkiNpere, Léon; à Ixelles . . . . . — 2 juillet 1883. 
» Henne, Alexandre ; à Ixelles . . . . dou 0 1 Mal 1884. 
paske Ne 

DIN. 


50 ASSOCIÉS 


Ds, Léopold a Berin = ©; +. Élu le 45 décemb.1840. 
» Leemans, Conrad; à Leyde . . . . . . . — 11 janvier 1847. 
»  Nozer pe BRAUWERE van Srerranb, J.; à Vilvorde . — 7 mai 1849. 
» pe Rosst, le chevalier J-B.; à Rome . aF — 7 mai 1855. 
» pe Reumonr, Alfred; à Borcette (Aixi Chapelle) — 26 mai 1856. 
» DE CZOERNIG, le Daon Ch.; à Ischl (Autriche) . — 4 mai 1859. 
»  Minervini, Jules; à Naples . . . . . — 4 mai 1859. 
» DE Kôuxe, le b™ Bernard; à S SUP dtersbowiğ . — 15 mai 1861. 
3 Canro. César; a Milan. © . o PR SR OU. PS madi 1861. 
» Von Löner, François; à Munich . . . . . — 15 mai 1862. 
5: De Vars, Mathieu; à Leyde  :° . : 2° g = 49-mat 1865. 
» von ARxeTu, le chevalier Alfred; à Vienne. . — 9 mai 1864. 
5. Rever. Léon: a Parise © o ooe MERS A0 mai 1865. 
» Mommsen, Théodore; à Berlin . . . . . . — 5 mai 1866. 


» Von Dôzuinerr, J.-J. Ignace; à Munich . . . — 5 mai 1866. 


ER 


Srernani, Ludolphe; à Saint-Pétersbourg 
Eccer, Émile; à Paris ; 

von Syser, Henri-Ch.-L.; à Berlin. 
JARRARA, François; à Pise a 
pe Hozrzenporrr, le baron F.; à Munich . 
Brunn, Henri; à Munich . 

p’Anras, le chevalier M.; à Londres . 


ALBERDINGK Taym , Jos.-Alb.; à Amsterdam . 


Curtius, Ernest; à Berlin à 
Ravier, Alphonse; à Saint-Gilles . 
Franc, Adolphe; à Paris 
Desmazes, Charles ; à Paris . 
Opprerr, Jules; à Paris. . 
Jowckecorr, W.-J.-A.; à La Haÿe à 
TENNYSON, Alfred ; à Londres 
Lepsius, Richard; à Berlin . 
Derste, Léopold; à Paris 

ARNTZ. Égide ; à Ixelles ; 
Camprsecz, F.-G.-H.; à La Haye. 
Bancrorr, George; à Washington . 
Sarıroros, Nicolas; à Athènes . 

pi Giovanni, Vincenzo; à Palerme. 
Cozmerro , Manuel ; à Madrid. 
D'Ouvecrona, Canut; à Stockholm. 
Bouz, Joan; à Amsterdam 
Canovas peL CasriLLo, Antoine; à Madrid 
Castan, Auguste; à Besançon 
Gzapsrone, W.-E.; à Londres . 
GOMES DE AHORN, F r.; à Lisbonne. 
Mirer, Emmanuel; à Paris. 
Warrz, George; à Berlin . 
Daresre, Rodolphe; à Paris . 
Bréaz, Michel; à Paris 

N. 


N. 


. Élu le 


6 
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1867 

1869. 
1869. 
1870. 
1871. 
1871. 
1872. 
1872. 
1872. 
1875. 
1875. 
1874. 
1874. 
1874. 
1875. 


i 1875. 


1875. 
1876. 
1877. 
1877. 
1878. 
1878. 
1880. 
1880. 
1881. 
1881. 
1881. 
1882. 
1882. 
1882. 
1884. 
1884. 
1884. 


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CLASSE DES BEAUX-ARTS, 


M. E. Suinceneyer, directeur pour 1884. 


» J.-B.-J. LiAGRE, secrétaire perpétuel 


50 MEMBRES. 


Section de Peinture: 


M. De Keyser, Nicaise; à Anvers 

»  Garrair, Louis; à Schaerbeek 

»  Porraezs, Jean; à St-Josse-ten-Noode 
»  SLINGENEYER, Ernest; à Bruxelles. 

» Rogert, Alexandre; à St-Josse-ten-Noode. 
»  Gurrens, Godfried; à Schaerbeek 

»  Waurers, Émile; à Bruxelles. 

»  CLays, Paul-J.; à Schaerbeek. 

»  VerLar, Charles; à Anvers. 


Section de Sculpture : 


M. Gers, Joseph; à Anvers (res 
»  Frakin, Charles-Auguste; à dcbubrbenhe 
» JAQUET, Joseph; ; à Schaerbeek 

»  Decroor, Guillaume; à Bruxelles 


Section de Gravure : 


M. Demannez, Joseph ; à S'-Josse-ten-Noode . 
> Bior, Gustave; à Ixelles 


Elu le 


Section d'Architecture : 


M. Bazar, Alphonse; à Ixelles 


Élu le 


. Nommé le 1er décemb. 
der décemb. 


& janvier 


11 


10 


avril 
avril 
janvier 
janvier 
er mars 
janvier 


janvier 
janvier 
janvier 
janvier 


janvier 
janvier 


9 janvier 


1845. 
1845. 
1855. 
1870. 
1870. 
1876. 
1882. 
1885. 
1884. 


1846. 
1847. 
1885. 
1884. 


1885. 
1884. 


1862. 


ss: dus 


M. De Max, Gustave; à Ixelles. . . . . . Elule 12 janvier 1865. 

» Pat, Adolphe; à GR, — 6 janvier 1875. 

»:. SCHADDE, Joseph; à Anvers . . «4 à — 10 janvier 1878. 
Section de Musique : 


M. pe Bursure, le chevalier Léon ; à Anvers. Elu le 9 janvier 1862. 


» Gevaert, Auguste F.; à Bruxelles . . . — & janvier 1872. 
» SamurL, Adolphe; à Gand. . . . . . — 8 janvier 1874. 
» … Rapoux, Théodore; à Liège . . . .: . == 5 avril 1879. 
n. 4 Benorr, Pierre; à Anvers . . . . . — 5 janvier 1882. 


Section des Sciences et des Lettres dans leurs rapports avec les Beaux-Arts : 


M. Azvin, Louis-J.; à Ixelles. . . . . . Nommé le ler décemb. 1845. 


» Férıs, Édouard; à Bruxelles, . . . . Élu le 8 janvier 1847. 
» Sirer, Adolphe; à St-Nicolas. . . . . — 12 janvier 1866. 
»  Lracre, J.-B.-Joseph; à Ixelles . . . . — 5 mai 1874. 
»  Srappagrts, Félix ; à Bruxelles . . . . — 6 janvier 1876. 
»  Pıncaarr, Alexandre; à St-Josse-ten-Noode — 11 janvier 1885. 


CORRESPONDANTS (10 au plus). 


Pour la Peinture : 


M. Dyckmans, Joseph-L.; à Anvers. . . . Elu le 8 janvier 1847. 
»  MarkezBacu, Alexandre; à Schaerbeek. . — ler mars 1885. 
» . STALLAET, Joseph: à dxelles o s o 2. — ler mars 1885. 


Pour la Sculpture : 


Pour la Gravure: 


M. Meunier, Jean-Baptiste; à Ixelles . . . Élu le 40 janvier 1884. 


Pour l'Architecture : 


M. Bevaerr, Henri; à Bruxelles. . . . . Élu le 4° mars 1885. 


Pour la Musique : 


M. Busscnor, Jules; à Bruges. . . . . . Elu le 44 janvier 1885. 
» Van Errwyex, le chev. X.; à Louvain . . — 11 janvier 1885 


Tome XLV. 2 


LA es 


Pour les Sciences et les Lettres dans leurs rapports avec les Beaux-Arts : 


MarcuaL, le chev. Edmond-L.-J.-G.; à Saint- 
. Elu le 4er mars 


Josse-ten-Noode. 
Hymans, Henri ; à Ixelles . 


50 ASSOCIÉS. 


Pour la Peinture : 


Hacue, Louis; à Londres . 

Rogerr Fzeury, Joseph N.; à Paris . 
Géroue. Jean-Léon; à Paris 

pe Manrazo, Frédéric; à Madrid. 
BENDEMANN, Édouard ; à Dusseldorf. 
Mrıssonier , Jean-L.-E.; à Paris . 
Hiserr, Aug.-Ant.-Ernest ; à Paris 
Becker, Charles ; à Berlin. 

Frrru, William-Powell; à Londres. 
Von Prory, Charles; à Munich 
Baupry, Paul; à Paris 

MakarT, Jean; à Vienne `. . 
Wicems, Florent; à Paris. 


Pour la Sculpture : 


pe Nieuwerkerke, le comte Alf.; à Paris 
Caveuier, Pierre-Jules; à Paris 
Monteverde, Jules; à Rome 
Bonnassieux, Jean; à Paris 

Guisraume, Eugène ; à Paris 

Tuomas, Gabriel-Jules; à Paris 
Kunpmann, Charles ; à Vienne. 


Pour la Gravure : 


Henwriquez Duronr, Louis-P.; à Paris 
Ounié, Eugène-André; à Paris . 


. Elu le 


4er mars 


8 janvier 
7 janvier 
12 janvier 
12 janvier 
9 janvier 
7 janvier 
12 janvier 
8 janvier 
8 Janvier 
6 janvier 
10 janvier 
5 janvier 
7 décemb. 


Elu le 22 septemb 


7 janvier 
8 janvier 
6 janvier 
6 janvier 
Al janvier 
A1 janvier 


Élu le 8 janvier 


8 janvier 


1883. 
1885 


1847. 
1864. 
1865. 
1865. 
1868. 
1869. 
1871. 
1874. 
1874. 
1875. 
1878. 
1882. 
1882. 


1852. 
1864. 
1874. 
1876. 
1876. 
1885. 
1885. 


1847. 
1857. 


M. 


François, Alphonse; à Paris. . . . . . . Elu le 
Sranc, Rudolphe; à Amsterdam . . . . . — 


Pour l'Architecture : 


Doxazpson, Thomas L.; à Londres . . . . Elu le 
Bus, C; a SUTEA RE a 
Diis. Cesar a Paris ooo RE E a a 
Lagrouste, Théodore-F.-M.; à Paris. . . . — 
Vespiaxant, le comte Virginio; à Rome . . . — 
De Contreras, Raphaël; à Grenade . . . . jati 
Rascavorrr, J.-C.; à Berlin . . . . . . .  — 
N. 
Pour la Musique : 


Lacuner, Francois; à Munich . . . . . . Élule 
Tomas, Ch.-L-.Ambroise; à Paris. . . . . — 
Verni, Joseph; à Busseto (Italie) . . . . .  — 
Gounor. Félix-Charles ; à Paris. . . . . . — 
Baisevr, Abraham: a Florence 2 n l n 
Hitter, Ferdinand; à Cologne. . . . . . — 
MASSE. Victor: a Parnis 57.0, PENTIER 
Limnanper pe Nieuwennove, le baron Armd; à 
Moignanville (Oise).  —— 


(0e) 


janvier 
janvier 


0a 


6 février 
7 janvier 
12 janvier 
9 janvier 


12 janvier 


8 janvier 
5 janvier 


8 janvier 
8 janvier 
12 janvier 
4 janvier 
janvier 
6 janvier 
4 janvier 


H~ 


9 janvier 


Pour les Sciences et les Lettres dans leurs rapports avec les Reaux-Arts: 


Ravaisson, Félix-J.-G.; à Paris. . . . . .Klule 


Gaizmapaud, Jules; à Paris à: . 5... … — 
Luske, Guillaume; à Stuttgart . . . . . . — 
V'osmams Gb Lea Ne un he à ds ie er — 


Decagorpe, le vicomte Henri; à Paris . . . — 
Sourinpro Monux Tacore, le radja; à Calcutta .  — 
ScaLiemann, Henri; à Troie (Dardanelles) . .  — 
Taausie, Charles; à Vienne . . . . . . — 


N. 


10 janvier 
9 janvier 
9 janvier 
9 janvier 
8 janvier 
4 janvier 
5 janvier 

A1 janvier 


1874. 
1874. 


1846. 
1864. 
1865. 
1868. 
1871. 
1880. 
1882. 


1847. 
1865. 
1865. 
1872. 
1872. 
1876. 
1877. 


1879. 


1856. 
1868. 
1875. 
1875. 
1874. 
1877. 
1882. 
1885. 


Z — 


NÉCROLOGIE. 


CLASSE DES SCIENCES. 


Prareau (J.), membre, décédé à Gand, le 45 septembre 1883. 
Duprez (F.-J.), membre, décédé à Gand, le 14 mai 1884. 

Von Biscuorr, associé, décédé à Munich, en décembre 1882. 
VazenTIN (G.-G.), associé, décédé à Berne, le 24 mai 1883. 
Samine (Ed.), associé, décédé à Londres, le 26 juin 1883. 
Herr (0.), associé, décédé à Zurich, le 27 septembre 1883. 
Nizsson (S.), associé, décédé à Lund, en décembre 1883. 
ScnveceL (H.), associé, décédé à Leyde, le 17 janvier 1884. 
Dumas (J.-B.), associé, décédé à Cannes, le 11 avril 1884. 
Wurrz (A.), associé, décédé à Paris, le 12 mai 1884. 


CLASSE DES LETTRES. 


Pouuer (Edm.), membre, décédé à Louvain, le 42 décembre 1882. 
Conscience (H.), membre, décédé à Ixelles, le 10 septembre 1883. 
Heremans (J.), membre, décédé à Gand, le 15 mars 1884. 

Hymans (L.), correspondant, décédé à Bruxelles, le 22 mai 1884. 
Farr (W.), associé, décédé à Londres, le 14 avril 1883. 

LapouLayE (Éd.), associé, décédé à Paris, le 25 mai 1885. 
Lenormanr (Fr.), associé, décédé à Paris, le 2 décembre 1883. 
Micner (F.), associé, décédé à Paris, le 23 mars 1884. 


CLASSE DES BEAUX-ARTS. 


Franc (J.), membre, décédé à S'- Josse-ten-Noode, le 15 janvier 1885. 
Guers (G.), membre, décédé à Schaerbeek, le 49 janvier 1883. 

De BraëkeLeEr (F.), membre, décédé à Anvers, le 16 mai 1885. 
Jenorre (L.), correspondant, décédé à Bruxelles, le 3 février 1884. 
Manner (Ed.), associé, décédé à Berlin, en octobre 1882. 

Von Fersrez, associé, décédé en 1885. 

Dumont (A.-A.), associé, décédé à Paris, le 28 janvier 1884. 

Mercuri (P.), associé, décédé à Bucharest, en mai 1884. 


SE ED A — 


ss 


TABLE 


DES 


MÉMOIRES CONTENUS DANS LE TOME XLV. 


SCIENCES. 


Mémoire sur les courbes du troisième ordre (seconde partie); par F. Folie et C. Le Paige. 


Une Baleine fossile de Croatie, appartenant au genre Mésocète (avec 2 planches); par 
P.-J. Van Beneden. 


Sur l’addition des fonctions elliptiques de première espèce; par E. Catalan. 


Bibliographie analytique des principaux phénomènes subjectifs de la vision (troisième 
supplément comprenant les années 1880, 1881, 1882); par J. Plateau. 


Sur un point de la théorie des séries de Fourier; par P. Mansion. 
Notes sur la théorie des fractions continues et sur certaines séries; par E. Catalan. 
Théorie des mouvements diurne, annuel et séculaire de l'axe du monde; par F. Folie. 


Recherches expérimentales sur les mouvements respiratoires des insectes (avee 7 planches); 
par F. Plateau. 


BEAUX-ARTS. 


Le réalisme. Son influence sur la peinture contemporaine; par Henri Hymans. 


MÉMOIRE 


SUR 


LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE 


PAR 


M. F. FOLIE, 


MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE 


ET 


M. C. LE PAIGE, 


PROFESSEUR A L'UNIVERSITÉ DE LIÉGE. 


(SECONDE PARTIE.) 


(Présenté à la Classe des Sciences, dans la séance du 4 mars 14882.) 


Tome XLV. 4 


| 
f 
| 
| 
\ 


MÉMOIRE 


SUR 


LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


CHAPITRE PREMIER. 


HOMOGRAPHIE. 


Dans la première partie de ce travail, nous avons exposé successivement 
les théories de l'homographie, de l'involution et du rapport anharmonique 
du troisième ordre. 

Nous nous proposons maintenant d'en faire l'application aux cubiques. 

Nous devrons faire connaître d’abord quelques conséquences se déduisant 
sans peine des résultats donnés au commencement de notre mémoire : nous 
nous bornerons d’ailleurs à rappeler les propositions que nous aurons à 


employer, en renvoyant, pour la démonstration, aux notes spéciales publiées 
sur ce sujet. 


Nous avons dit : la relation 
f= DANY = 0, 


définit trois séries homographiques. 

Parmi les covariants de la forme f, nous avons surtout fait remarquer les 
trois formes quadratiques 2,, 2., 2, et le covariant trilinéaire k. 

On peut vérifier sans peine que les trois formes X ont un même discrimi- 
nant A; nous l'avons appelé le discriminant de f. 


4 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


, A 


Si A n'est pas nul, les covariants Z, égalés à zéro, ont des racines dis- 
tinctes. 

Représentons par w,, Wz; Vi, Vaj Wi, Wos les facteurs linéaires de ces trois 
formes quadratiques : nous avons fait voir (*) que, dans ce cas, f peut s'écrire 


f = Midi + NUWA o 4 ee ee (1) 


Si, au contraire, A = 0, deux cas peuvent se présenter. 

Lorsque, en même temps que A, deux covariants > s’'annulent identique- 
ment, la forme f est décomposable (**); si cette condition n’est pas remplie, 
les trois covariants > sont des carrés, et la forme trilinéaire ne peut être 
ramenée à la forme canonique (1). 

Comme seconde expression canonique de f, nous avons employé 


f = Aa — dyXa) (Ya — die) (Zi — Fiza) + Aalt, — daa) (Ya — daÿa) (Z1 — 0272) 
+ (2 — 03%) (y: en dzY2) (z1 E ezza). . (2) 


Les propriétés dont nous venons de parler nous seront fort utiles dans la 
suite de ce travail. | 


Taéonëme I. — Le lieu des intersections des rayons homologues de trois 
faisceaux homographiques est une cubique, passant par les centres des trois 
faisceaux. 


Si nous représentons par 
a = 0, p=0, y = 0, 


les trois côtés d’un triangle qui a pour sommets les centres des faisceaux, les 
équations de trois droites passant par ces sommets pourront s'écrire 


xa — mp = 0, YyB—yy—=0, zy —rma—0 . . . . . (5) 


(*) Voir, sur les formes trilinéaires, outre la première partie de ce travail, les Mémoires sui- 
vants de M. C. Le Parce : Comptes rendus, t. XCI, p. 1048 et p. 1103; Atti dell” Accademia 
de Nuovi Lincei, t. XXXIV; Bull. de l Acad. roy. de Belg., 3° série, t. I, p. 40. 

(**) I° partie, p. 11. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 5 


Si ces droites appartiennent à trois faisceaux homographiques, nous aurons 
la relation 
= Rne = S Toona à 4 41(4) 


En éliminant les x, les y et les z entre les équations (3) et (4), nous 
trouvons, conformément au principe de la théorie des faisceaux (*), le lieu 
des points triples de ces intersections. 

Nous avons ainsi l'équation 


(CM -p üo) By au Qa p + Aia y? + Aap + Uwy + Azap? a Ep aab? =0, . (5) 
équation d'une cubique passant par les centres des trois faisceaux. 


Taéorëme I. — Toute courbe du troisième ordre peut étre engendrée par 
les intersections des rayons homologues de trois faisceaux homologues, ayant 
leurs centres en trois points quelconques de la courbe. 


En représentant (*) encore par 


a —0, B—0, y —0, 


les côtés d’un triangle qui a ses trois sommets en trois points quelconques 
d’une cubique G;, l'équation de cette courbe peut s'écrire 
] 5) 


Aab + Ay + A i08” aus ABY + Azay’ + Aap? + 2A23aPy — 0. . , (6) 
Pour l'identifier avec l'équation (5), il suffira de poser 


Qu = Å + 0; ue = An, Qia = Ås, Gau = As; 


Qi = Aus das = Åj, on = Aass, (aa = Ajo — 0. 


La forme trilinéaire dépend, on le voit, d'une indéterminée 4. 
Par suite, c'est d'une infinité de manières que l’on peut engendrer une 


(+) F. Four, Bull. de l’Acud. roy. de Belg., 2° série, t. XLVI, p. 195; Bull. de Darboux, 
2e série, t. II, p. 278. ; 
(*) C. Le Paice, Sur la théorie des formes trilinéaires, C. R., t. XCII, p. 264. 


6 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


cubique donnée par les intersections de trois faisceaux homographiques, 
ayant leurs centres en trois points donnés de celte courbe. 

Ceci va nous conduire à la démonstration de propriétés essentielles des 
cubiques. 

Si nous calculons le discriminant de la forme trilinéaire 


f= (As a CDEAUIEA + AYZ + AussliYerr + Auto + Ansty + Aya o17a 


+ Aoz + (Aus — 0)%2ÿ 222 » 


nous aurons 


aSk - o + 20° [AnA — As + AzA + AnA] + 40[ Asso 5 — Auo 155À 25 | 
-+ [Afas + VALVE + Ass + Moss — DA F5 (A 95 15 + Asso + Aus o55) 
— DA AAA — 2A 55e oss — DA 10/55 À 115 À 295 
Re BP à à a eh. fn En 7 W) 


D'après cela, nous pouvons donner à 8 une infinité de valeurs qui rendent 
A négatif; alors les trois équations 


auront leurs racines réelles. 
Pour toutes ces valeurs de 9, qui n’annulent pas A, la forme trilinéaire peut 
s'écrire 
= AMW + A'UWW; 


ou, plus explicitement, 
E dite) (Ya — diya) (am dia) + da (2, — daa) (Ya — days) (21 — d'y). 


Nous nous occuperons tantôt de ce cas. 

Mais, de plus, nous pouvons choisir 9 de quatre manières distinctes, de 
telle sorte que A s’annule. 

Alors puisque, en général, aucun des covariants 2 ne s'évanouit identique- 
ment, ces trois covariants > sont des carrés, et la forme canonique (1) est 


impossible. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. ay 


Il vient, en conséquence : 
3 = (£, de) Ba = (Ya — dy); Bs = (ri — %73) 
Les trois droites, représentées par les équations 
u—B—0; B—d%y—0, y —dia—0, 


sont les côtés d’un triangle inscrit à la cubique. 
En effet, d’après la propriété essentielle des formes > (*), si l'on donne à 


= et à A les valeurs 3, 3, % est indéterminé. 
2 ER 


2 
Par suite, on a la propriété suivante, connue : 


Tutorème II. — Étant donnés trois points sur une cubique, on peut, en 
général, inscrire à celle cubique, quatre triangles dont les côlés passent par 
ces trois points. 


La forme biquadratique (7) est assez remarquable. 
Représentons-la par B. 
Elle possède deux invariants 


i = (BB); j = (BB'}(B'B"Y (BB). 
On vérifie aisément que ces deux invariants č et j sont les deux invariants, 
multipliés par des facteurs numériques, de la forme ternaire (6), invariants 


que nous désignerons, suivant l'usage, par S et T. 
Nous aurons 


En conséquence, le discriminant de la quartique Bọ est donné par 
R = # — 6j? = 64 (S? — 6T’). 
Comme on le fait d'ordinaire, nous dirons que 
S — 6T? 


est le discriminant de la forme cubique. 


(*) F° partie, p. 6. 


8 SUR LES. COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Ainsi : 

Le discriminant du discriminant de la forme trilinéaire, regardé comme 
une fonction de 0, ne diffère, que par un facieur numérique, du discriminant 
de la cubique. 

Si nous ne démontrons pas directement le caractère d’invariance des fonc- 
tions S et T, c’est afin de ne pas allonger inutilement notre travail, en reve- 
nant sur des points connus des géomètres : ce caractère ressortira d’ailleurs 
de ce qui va suivre. 

On remarquera seulement, croyons-nous, combien la théorie que nous 
exposons introduit, d'une manière simple et naturelle, la notion des deux 
invariants fondamentaux de la forme cubique ternaire, invariants dont la 
découverte, on le sait, est due à M. ArownoLn (*). 

Nous allons faire voir, brièvement, comment on peut déduire, sans diffi- 
culté, de ce qui précède, l'interprétation des relations telles que 


R—0; S—0, T—0, ete. 


Si nous choisissons la relation d'homographie déterminée par une des 
valeurs de 9 qui annulent A, les trois covariants Z sont des carrés. 
Mais on a la relation (*) 


l ; REO f 
5 21242; a 3 Af’ = + k?, 


k étant un covariant trilinéaire de f, dont l'expression développée est : 
, |! 


k = [uta + 2ail — CM + ados + Gauss) ]rciy1%s 
rE [aiea + 2t taa — Ayo (Malu + Aull + yton) | Ya 
ETE [ainan + 2ail — Qia (Aut + Aul + i0222) (014221 
pi [aidsa + 2di1 a2% — Qas (Maaa + Malo + nds) |(2Y12 
La [aidons + Zoo — Aya ( 1110292 + Aalia + dan) |21Y222 
AE [aan + 2al — oo (ar12 + hati + Gaga) |oÿa Ta 
+ | datna + 2an l — M (Mna + Aü + una) |2222 


2 5 o 
re CEN + 2mlm — Aa (Au2l + Myla + A210422) |02 222 TEE E) 


©) Journal de Crelle, t. XXXIX. 
(**) C. Le Paice, Bull. de l’Acad. roy. de Belg., 3° série, t. IH, p. 45. 


SUR LES COURBES DU TROISIEME ORDRE. 9 


Par suite, si A = 0, + est le produit des racines carrées des trois cova- 
riants 2, Zo, 23e 

Supposons maintenant R = 0. 

L'équation A = 0 a une racine double, qui est en même temps racine de 


$7 . dà papa À 4 
l'équation -5 = 0, c'est-à-dire de 
+ 6 [AusA os + Aus + AnA — Ass] sr [AAAs P A nsAis5A os | —0. . (9) 


Or, si, dans l'expression de k, donnée plus haut, nous remplaçons les 
lettres a; par les A, l'interprétation de (9) est aisée. 

En effet, représentons par à, ci, d4!, comme nous l'avons fait ci-dessus , 
les racines doubles des 5, on a 


k = m (x, — dite) (ya — Ya) (Z1 — 9122). 


L’équation (9) revient à 
ddid = 1. 


Comme nous savons que le covariant k est décomposable en trois facteurs 
linéaires, lorsque A = 0, puisque les trois covariants 2 s’annulent identique- 
ment, il suffit de vérifier que l’on a 


— k 
Anda ee a OÙ a lès em 0. 
kin 
Or 
ku = (Auas hF 0) (Aias vers 0) + 2AA A2 — (A25 er 0) AugAoss + AussÂye + AssAus |, 
nga ka= (Ais Pg 0) (Aus nE: 0) + 2AA ous — (Aies TUE 0) [AAs + ÅA + AsosAuus |. 
L'équation 


ku + ka = 0, 


ne diffère donc pas de l'équation (9). 
Par suite, les droites représentées par 


a — NB = 0, BE— dy —0, y — dix 0, 


concourent. 
Tome XLV. 9 


10 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Donc, pour la racine double de l'équation A = 0, les trois côtés du triangle 
inscrit à la cubique concourent. Deux des quatre triangles coïncident et se 
réduisent à un point. 

Il n’en peut être ainsi que si la cubique a un point double. 

En conséquence, on retrouve ce théorème connu : 


Lorsque le discriminant de la cubique s’annule, la courbe possède un poini 
double. 


Si l'on a, à la fois, S = 0, T — 0, ou, ce qui revient au même, : = 0, 
j = 0, l'équation A = 0, possède, comme on le sait, un facteur triple. 

On démontrerait, par une méthode analogue à celle que nous venons 
d'employer, que, dans ce cas, la cubique possède un point de rebroussement. 

Comme nous le faisions observer plus haut, de ceci ressort le caractère 
d'invariance des fonctions S et T, car la propriété de posséder un point 
double ou un point de rebroussement se conserve dans la projection. 

On sait encore que la forme biquadratique A est le carré d'une expression 
quadratique lorsque A ne diffère de son hessien que par un facteur. 

Cette condition entraine les deux relations suivantes : 


AAA us — AAA = 0, l (10) 
Aus u55À 100 + AzA À 2055 + AAAA — Aas (A 19 155 À 295 agé À 199 115A 853) = \ 


Et l'on voit sans peine que, dans ce cas, la cubique se décompose en une 
droite et une conique. 

Il en est encore ainsi lorsqu'il est possible de déterminer une valeur de @ 
annulant identiquement un des covariants > : Z,, par exemple. 

Nous avons vu (*) que, si >, = 0, on a les conditions 


0 


Amt — Godin = 0, 
Agl — lala = l, 


(Ailo — Müa) (Minaa eme CIE TPM) = 0. 


(*) 4" partie, p. 40. 


f 
| 
| 
| 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. di 


Si nous remplaçons les a par les Ax, ces conditions deviennent 


(Aiz + 0)Aus — AnA = 0, 
(Ais SE 0)A 395 RESTE A5 9 == 0 , 


d’où l’on déduit : 


2A yes 115 À 995 el Au5Ao5sA 99 en AAA = 0; | 


et (11) 
(AuoA955 Fe Au5A 925) (Ass À 199 SE A u5Â 25) = 0. | 
De 2, = 0, ou de >; = 0, on déduirait des conditions analogues : 
2A 15 99 155 ae A5 9551 199 ar AA 155 995 a 0 ad (12) 
(A5 925 T AA 155) (A2 155 AA 955) ému 0; 
2A 95À 19/9535 Fa À usA 953 À 390 EE AÅ 155A 905 Er 0 şs ! (13) 
(AgoA 155 A 191 55) (AA 55 FH A 151995) = 0. ; 


Si Pun des systèmes (10), (44), (12) ou (13) est vérifié, la cubique est 
décomposable. 
Ces quatre systèmes de conditions correspondent aux cas où la forme ter- 
naire (6) a un facteur linéaire de la forme 
pa + + TY, 
ou d’une des formes 


pa + qB, QB+ry, Try + pa. 


Il y a encore le cas, tout à fait simple, où ce facteur est «, B, ou y. 
L'emploi des formes trilinéaires nous conduit encore à une notion impor- 
tante, celle du genre. 


D'après ce que nous venons de voir, nous pouvons considérer les rapports 
Ti Yı 5 


ne Ye? =, comme caractérisant chaque terne de rayons homologues. 
a LS k # 


Pour avoir trois rayons donnant un point de la courbe, il faut que . 
iii = LY Za. 


Représentons par 2, u, », les trois rapports donnés. Nous aurons, pour 
déterminer les différents points de la courbe, les équations 


MAy + MAk Æ AMY + Mav + llà + Aua + Gen” + A = l, (44) 


uy — 1 = 0. 


12 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Ces deux équations peuvent être considérées comme caractérisant une homo- 
graphie du troisième ordre et du premier rang (”). 
On peut done énoncer ce théorème : 


Tuéorème IV. — Toute cubique peut étre engendrée par les intersections 
des rayons homologues d’une Hi. 


Nous pourrons exprimer deux des rapports à, # en fonction du troisième. 
En effet, en éliminant », par exemple, nous aurons : | 


A? (Get + Ga) + à | Auot” + (u + xx) Se d] vai (C Ps Clan) = 0, 
Si nous employons les coefficients de la cubique, cette équation devient 


2 (Anw? m Azt) A À [Ae + 2A + A TUR (Azze Eu Ass) = QE 


On en déduit 

ES Auot + DA + Aus + VP $ 
2 (An + Aus) i 
2 (Anu + Aus) FE Anal + 2A ose re Ass sit VP 


Ar + 2A + Ass + VP 2 (Aage UE Ass) 


y =s 


3 


P = Ainut + 4 (AA — AnzAa)p + (A Mas + DA nos — HA no os — AA usa) 
+ A (Asus — Anz) + AT ent re eue à store ON 


Cette forme P, égalée à zéro, donne un des groupes de ramification de (14). | 
On en déduit ce théorème : 


Par un point donné, sur une cubique, on peut, en général, mener quatre 
tangentes à la courbe. 


La forme P a les mêmes invariants que A. 

Comme on vient de le voir, les coordonnées de la cubique peuvent, en 
général, s'exprimer à l’aide de fonctions rationnelles de p et d'un radical 
carré portant sur P, expression du quatrième degré en p. 

La cubique la plus générale est donc du genre un. 


(*) 4"° partie, p. 15. Voir, sur le système de deux formes trilinéaires, un Mémoire de M. C. Le 
Paige, inséré aux Atti dell” Accademia de’ Nuovi Lincei, t. XXXV, 1882. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ‘ORDRE. 15 


Il wen est plus de même quand le discriminant de A, et par suite de P 
s’annule. 


En effet, si l’on a seulement 


2? 


ë — 6’ = 0, 
ou, à la fois, 
i= 0, j= 0, 


le radical ne portera plus que sur une expression quadratique de p. 

Nous avons vu, plus haut, que la courbe avait alors, soit un point double, 
soit un point de rebroussement. 

Par suite, 

Les cubiques à point double ou à point de rebroussement sont du genre zéro. 

De la signification géométrique de l'équation P—0, il résulte encore que, 
dans ces deux cas, les cubiques sont de la quatrième classe ou de la troisième. 

Bien que ces théorèmes soient connus, nous n’avons pas cru inutile de faire 
voir qu'ils se déduisent facilement de la méthode que nous avons employée. 

Ils découlent, en quelque sorte, immédiatement et nécessairement, de l’idée 
des faisceaux homographiques. 

Nous aurions pu augmenter le nombre de ces propositions connues, ou 
nouvelles, qui dérivent de cette notion fondamentale : notre but n'étant pas 
d'écrire un traité des cubiques, mais un simple mémoire sur ces courbes, il 
nous a paru suffisant d'indiquer les méthodes générales. 

Nous avons dit ailleurs (*) que notre méthode contient, comme cas parti- 
culier ou comme conséquence, les méthodes de CnasLes, de Grassmann et de 
SCHRÔTER. 

Cela est à peu près évident pour la première. En effet, si nous laissons fixe 
un rayon du premier faisceau, les deux autres appartenant à une H?, décrivent 
une conique. À chaque rayon du premier faisceau, correspond une conique, 
el vice versà. De plus, on s'aperçoit que les coniques correspondant aux 
différents rayons forment elles-mêmes un faisceau. 


Quant à la seconde méthode, rappelons d'abord brièvement en quoi elle 
consiste, 


(*) Bull. de l’ Acad., 3° série, t. I, p. 645. 


14 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Soient deux triangles ABC, abc : le lieu des points x tels que les droites 


xA, æB, æC rencontrent les côtés bc, ca, 
N ab en trois points situés en ligne droite 
n est une cubique passant par les sommets 
des triangles et en outre par les points 7, 
r!, rl", intersections des côtés ab, AB; bc, 
BC; ca, CA. 

Comme nous le voyons, la relation 
X a d'homographie correspondant à ce mode 
de génération est complètement déter- 
minée : elle a la forme 


messes” 


LYZ + LYZ = 0. 


Les trois covariants > sont représentés par les droites Ab, Ac; Be, Ba; Ca, Gb. 
Il résulte de là que ces six droites constituent un système de deux trilatères 
se coupant en neuf points de la courbe (*). 
En conséquence Ab, Ba, par exemple, se coupent en un point p de la courbe. 
On voit, par suite, que le quadrilatère ab, AB, aB, bA a ses six sommets 
sur la courbe. 
Les points a, À, b, B, c, C constitueront six points de Schröter; ils per- | 
meltent de construire linéairement autant de points de la courbe qu'on le | 
voudra, mais comme une suite discontinue. En effet, p, r forment un nouveau | 
couple de points et on peut les employer comme on l'a fait pour a, À et ainsi | 
de suite. 
Nous nous bornons à cette simple indication : elle suffit pour montrer que 
le système de Grassmann se déduit, comme cas particulier, de notre méthode 
et de quelle manière celle-ci conduit aux points conjugués de Schröter. 


(*) Voir plus bas les propriétés de ces trilatères. 


Sur la méthode de Grassmann et sa comparaison avec celle de Scurôrer, voir un Mémoire de 
CLenscn, inséré aux Math. Ann., t. V, p. 424. 


CHAPITRE II. 


INVOLUTIONS. 


Taéorème V. — Toutes les cubiques ayant sept points communs sont 
coupées par une transversale et des points qui appartiennent à une B 
(involution de troisième ordre et du second rang). 


Ce théorème se démontre pour ainsi dire sans calcul. 
Prenons pour centres des trois faisceaux trois des sept points donnés. 
L’équation de la cubique prendra la forme 


Cs = App + Arty + Apa + AY + Aus) a + Aaby? + 2A mapy = 0. 


Si, de plus, la cubique doit passer par quatre autres points donnés, il sera 
possible de déterminer linéairement quatre des paramètres en fonction des 
trois autres, de telle sorte que l'équation deviendra 


GENC a aO a AO = O 


De la résulte immédiatement le théorème énoncé. 

Nous avons vu, précédemment, que toute cubique peut être engendrée 
par les intersections des rayons homologues de trois faisceaux homogra- 
phiques. 


Soit 
f=0, 


l'équation d’homographie caractérisant une cubique donnée, équation qui 
contient, nous l’avons vu, une indéterminée 0, 


16 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


f peut toujours prendre la forme (2) 


[= M (£1 — a) (Ya — days) (Z1 — dia) + Aala, — Iaa) (Ya — da) (Z1 — data) 
+ As (X1 — daa) (Ya — 93Y2) (Z1 — 9522) = 0. 


La cubique peut donc toujours étre représentée par une équation de la 
forme 
C: = Aie — Ap) (E — dir) (y — d'a) + A(x — df) (B — dy) (y — d'a) 
+ Asla — aple — ar — à)= 0, 
ou 


Co = MUPYA + Aapa + Astay = 0. oaa . . .. (16) 


Nous avons ici un système de trois trilatères, en involution avec la courbe. 

Lorsque nous n’imposerons aucune condition particulière à ces trois trila- 
tères, nous dirons qu'ils sont involutifs avec la courbe. 

Il résulte, de la forme même de l'équation (46), que l’on peut énoncer ce 
théorème : 


Taéorëme VI. — Une transversale rencontre une cubique el un système 
de trois trilatères involutifs avec la courbe, en douze points qui sont en 
involution KE. 


Cette même équation (16) peut être interprétée différemment. 

En effet, la distance d’un point quelconque à la droite dont l'équation est 
a = 0, est proportionnelle à la fonction «,, où l’on remplace les coordonnées 
par celles du point donné. 

On arrive donc au théorème suivant : 


Tuéorème VII. — K existe une relation linéaire entre les produits des 
distances d’un point de la cubique aux côtés de trois trilatères involutifs. 


Mais nous pouvons particulariser davantage les systèmes de trilatères 
associés. 

En effet, comme nous l'avons vu, nous disposons d’abord de l’indéter- 
minée 6; ensuite, lorsque les coefficients de f sont entièrement déterminés par 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 17 


le choix de 6, trois des neuf quantités 9 sont encore complétement arbi- 
traires (*). 
Nous pourrons done nous imposer les quatre conditions suivantes : 


EE = 1, 
Ds = À, 
ND, = |, 


daore À 


Les trois trilatères associés auront alors, outre les trois centres des fais- 
ceaux, quatre autres points communs. 

Nous dirons, dans ce cas, qu'ils sont trijugqués. 

Les théorèmes VI et VIT sont évidemment applicables à ces figures, dont 
nous verrons, par la suite, l’utilité, 


TuéorÈmE VIH. — Toutes les cubiques qui ont huit points communs sont 
coupées, par une transversale, en des points qui appartiennent à une l}. 


Ce théorème peut se démontrer comme le théorème V, mais il peut aussi 
être regardé comme une r de cette proposition. 

En effet, soient 1, 2, 5, 4, 5, 6, 7, 8, les points donnés. 

Toutes les buse qui passent par ces points appartiennent, à la fois, 
aux deux faisceaux 


F0 D et FL 2. 0, 8): 
Par suite, elles déterminent, sur une transversale, les groupes communs 


aux deux involutions 13, caractérisées par ces deux faisceaux. 
. Or ces groupes communs appartiennent à une 15 (**). 


(*) C. Le Parce, Sur la théorie des formes trilinéaires, Arti peur’ Acc. pe’ Nuovi Lincei. 
(**) 4° partie, p. 20. 


Tome XLV. 5 


18 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


De cette propriété découle, immédiatement, le théorème connu : 


Tnéorème IX. — Toutes les cubiques passant par huit points ont un 
même neuvième point commun. 


Soient, de nouveau, 1, 2, 3, .... 8 les points donnés, et soient C,, C4, 
C4, etc., des cubiques qui passent par ces huit points. 

Deux d’entre elles C, CS, par exemple, se coupent en un neuvième point 9. 

Par 9, menons une transversale 9X qui coupe C, et C4 en des points 
ab, ab. 

Or, si dans une involution I}, il existe un point tel qu'il lui corresponde 
deux groupes distincts de (n—1) points, cette involution se décompose en un 
point fixe (le point donné) et une involution ~ (*). 


(©) Ce théorème est presque évident, car soient 


Pr = 0, 
Péquation du point, et 


PEL ue n—1 __ 
an t=0, b= 0, 


l'équation des deux groupes qui lui correspondent. On pourra prendre comme groupes carac- 
téristiques 


n—i 


Praz = 0; patin =0, 


et l'équation de l'involution deviendra 
par + pt = pa (an! + 11) = 0. 


Si cette démonstration ne paraissait pas suffisante, en voici une seconde, un peu moins 
simple. 


Soient 


akasi, 0, 


les deux équations qui définissent deux groupes. 
La relation entre les points en involution est donnée par 


np nn 
AD ea, 0e 
a = |); 


(£y) 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 19 


Dans l’'involution déterminée par les cubiques C}, €}, C4, ete., sur la trans- 
versale 9X, au point 9 correspondent les groupes distincts, a, b; a, b’ : par 
suite, le point 9 fait partie de tous les ternes de l’involution et toute cubique 
de ce faisceau passe par 9. 

On sait que le théorème que nous venons d'établir peut se démontrer de 
bien des manières distinctes; nous avons employé la méthode précédente 
afin de déduire, autant que possible, toutes les propriétés fondamentales des 
cubiques, des théories de linvolution et de l’homographie. 


CoRoOLLAIRES. — Í. Si parmi les neuf points d'intersection de deux cubi- 
ques, il y en a six sur une conique, les trois autres sont sur une droite; ct 
réciproquement. 


lI. Si un triangle ABC rencontre une cubique en neuf points €, c’, cl'; 
a, a', a''; b, b', b'', situés sur les côtés AB, BC, CA, on a la relation 


Ac. Ac’. Ac”. Ba. Ba’. Ba’’.Cb.Cb'.Cb” 
Ab. Ab'. Ab”. Ca . Ca'. Ca”. Be . Bc’. Be” 


AE (Théor. de Cannor.) 


Menons les transversales ch’, c'b' c''b, qui coupent la cubique en trois 
nouveaux points æ, y, Z, situés en ligne droite, et BC en trois points 
æ', y', 2. 


mais 


UO AUS 


wS A E e E E E tre 7) 


où C; est l'élément du résultant calculé par lá méthode de Cauchy. 
Si pour une détermination 41, Ya l'équation (17) a plus de (n — 1) racines, cette équation doit 
être identique : par suite le résultant de az et de b} sera nul et lon aura 


a+ = pales +) 1)=0, 


ce qui démontre le théorème. 


20 SUR LES COURBES DU TROISIÈUE ORDRE. 


On a les égalités 

Ac. Bæ’. Cb” 
Ab”. Ca’. Be 
Ac. By’. Ch’ 
MeO Bes 
Ac”.Bz'.Cb 
Ab. Cz’. Be” 

D'où, en multipliant, 


Ac. Ac’. Ac”. Cb. CU. Cb”. Bx’.By'.Bz’ 


Ab. Ab", Ab”. Be. Bc’. Be”. Cx’.Cy.Cz' 


Mais les deux trilatères ac”, a'c', a'c; AB, AC, xz, sont en involution I? 
avec la cubique. 


En employant une des formes de linvolution I} (*), on a 


Bx’. By’. Bz’ Cx’. Cy’. Oz’ 


Ba. Ba’. Ba” Ca. Ca’, Ca” ` 


En combinant avec l'égalité précédente, on trouve le résultat énoncé. 
Dans le chapitre précédent, nous avons vu que l’on peut toujours, et cela 
d’une infinité de manières, choisir 9 de telle sorte que la relation d’homo- 


graphie, caractéristique de la cubique donnée, puisse se mettre sous la 
forme (1) 


Ê= da (X4 — dite) (Ya — NYa) (Za — Å’ za) + da (E, — dre) (ya — daya) (21 — dza). 


Par suite, l'équation de la courbe peut toujours s'écrire 


C; = 


d (a — Ap) (B — Ay) (y — H'a) + agla — dB) (6 — dy)(y — d'a) =0, 
ou i 


CESS AA A O a S E S ETR (18) 


() C. Le Pace, Mémoire sur quelques applications de la théorie des formes algébriques, 
p- #1. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 21 
Les deux trilatères dont les côtés ont pour équations 


«a =0, B=0, y1—0; 


“= 0, Br = 0, va = 0, 


se coupent en neuf points qui appartiennent à la cubique. 
Nous avons dit que ces lrilatères sont conjugués à la courbe (*). 
Il résulte de l'équation (18) : 


TuéorëME X. — Une transversale coupe la cubique et les côtés de deux 
trilatères conjugués en neuf points qui appartiennent à une IÈ. 


La démonstration qui précède établit, du même coup, l'existence de ces 
systèmes de trilatères conjugués, passant par trois points pris à volonté sur 
la courbe. 

On en déduit également la généralisation du théorème de Pappus. 


Tnéorème XI. — Le rapport des produits des distances d'un point de 
la courbe, aux côtés de deux trilaières conjugués, est constant. 


CoROLLAIRE. À une cubique, on peut inscrire un système de deux qua- 
drilatères conjugués. 


Nous appelons quadrilatères conjugués à une cubique, deux quadrilatères 
tels qu'un côté du premier rencontre tous les côtés du second, un seul 
excepté, en des points situés sur la courbe. Les côtés qui ne se rencontrent 
pas sur la courbe sont dits opposés (**). 

Considérons les transversales 123, 1'2/3!; puis les droites 414', 22’, 


() F. Four, Fondement d’une Géométrie supérieure cart., p. 3. 
€”) Ibidem, pp. 13 et 22. Voir dans le même travail une démonstration différente des théo- 
rèmes X, XI et XII. 


22 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


33!; 12', 23', 31, qui déterminent deux nouvelles transversales 172/!3/’, 
allo! 
DT 
Les deux quadrilatères 


11/1 Ce 99/97: 35/3’, Par) 
25r", 31'p”, 12g", o 


satisfont à la définition donnée plus haut. 

L'existence de ces quadrilatères conjugués est importante, parce qu'elle 
permet d'établir un théorème remarquable, extension, aux cubiques, du 
théorème de Pascal. 

Appelons d,, d> $, %5; 91, 0, dh, d; les côtés de deux quadrilatères conju- 
gués, d, d1; d, ch, etc., étant les côtés opposés, et conservons, pour le surplus, 
les notations précédentes. 

Soient A et B les points d’intersection des deux premiers couples de côtés; 
menons la transversale AB. 

Cette transversale rencontre la cubique en trois points a, b, c, et les côtés 
d, ob; à, à, en des points p, p'; q, q', que nous supposerons distincts pour 
le moment. 

Nous pouvons observer que les six droites 


HA r TT y Ts F23 TTS 
et 
A2'giis IDT 4 5p”, 19%, 4'23/; p'q'r", 


forment deux systèmes de trilatères conjugués. 
AB rencontre le premier système en des points A, B, p; £, t, q' et le 
second, en des points À, B, p'; t, t, q. 
Par suite, d’après le théorème X, les systèmes suivants sont en involu- 
tion I}: 
a birt VA Bip r ES AA HE 


a, b,c; A BP re h te 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 25 
De là se déduisent les égalités 


Aa.Ab.Ac  Ba.Bb.Bc  pa.pb.pc 
At.AT.AQ  Be.Bt.Bq pt.pl.pq 


Aa.Ab.Ac  Ba.Bb.Be  p'a.p'b.p'e 


ALAU. Aq  Bt.Bt.Bq p'tptpq 


D'où 


En conséquence, q coïncide avec g', el de même p avec p'. 
On en conclut ce théorème : 


Tuéorème XI. — Les côtés opposés de deux quadrilatères conjugués à 
une cubique se coupent en quatre points situés en ligne droite (*). 


Autrement encore : 

Soient ddd; d19,%9,, deux quadrilatères conjugués à la courbe. 

Par la notation d (pqr), nous indiquerons que le côté 9, rencontre la 
cubique aux points p, q et r. 

On aura ainsi, conformément à la définition : 


ù (pqr), d(p'p'P'")s 


d(p'q'r'), d; (gg t : 
da (prar) (re'r) : 
AP AT s & (p, q', 2A 
2! p''gq''rr! sont sur une conique, puisque la cubique ddd rencontre la courbe 
P 1q 1723 


donnée en neuf points, dont trois p qg'r!! sont sur la droite 3}. (Théor. IX, 
corol. I.) 


C) F, Four, F. G. S: C, p. 22. 


24 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Par suite, les droites d,d}; 294; d9! se coupent en trois points situés sur 
une droite A (Théor. de Pascal). 

De même p' p! q q'''pq' sont sur une conique. 

Ad; ddh, 9 se coupent sur une droite qui ne peut différer de A, puis- 


qu’elle a, avec celle-ci, deux points communs. 
On peut démontrer la même chose pour les autres combinaisons de trois 
couples de côtés opposés. 


CHAPITRE III. i 


RAPPORT ANHARMONIQUE. 


Ainsi que nous venons de le voir, la cubique donnée peut toujours être 
représentée par l'équation 


Cr Ab YA + Maty A A insBe9s — 0,0.  ., (16) 
où les équations : 


ayi = 0; APV = 0, a5039 5 = 0, 


représentent trois trilatères trijugués à la courbe. 

Ces trois trilatères ont sept points communs. Nous appellerons points 
trijugués les six points composés des trois centres des faisceaux et des trois 
points d’intersection des côtés «i, Bs, ya5 as Bis 7338s Ba Ye 

Soit m un point quelconque de la courbe, dont les coordonnées sont p, q, r. 

Désignons par 4, 2, 3, 4, 5, 5, 6 les points trijugués; soient #;, y;, Z; les 
coordonnées du point ?, # prenant les valeurs 4, 2, 3 ..., 6. 

L’équation (16) pourra s'écrire 


Tome XLV. 4 


26 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


chacun des déterminants représente laire d’un triangle : cette égalité devient 
donc 


4, (m42) (m34) (m56) + A(mi4)(m36)(m52) + 13(m16)(m32)(m54) = 0. 


Remplaçant l'aire par le produit de deux côtés et du sinus de l'angle 
compris, sinus que nous représenterons par (dk), on a : 


a.mi. m2 (12)m3. m4 (34m5. m6 (56) + ^4. m1 .m4(14)m3 . m6 (36)m3 .m2(52) 
+ às m1 . m6 (16)m3 . m2 (52)m5 . m4 (54) = 0. 


On en déduit encore 


a (12) (54) (56) + 2(14)(56) (52) + às (16) (52) (54) = 0. 
Si l’on divise par le premier terme, cette égalité devient : 


, (14) (56) (52) Per (16) (32) (54) 
(12) (54) (66)? (12) (5%) (56) ` 


Les quotients qui figurent dans le premier membre sont des rapports 
anharmoniques (*). 
Nous les représenterons par 


m m 
4629 Isu rl 


pour indiquer à la fois, par l'indice supérieur, l'origine du faisceau des 
droites, et par l'indice inférieur, l’ordre de ces rayons. 
Nous pouvons donc énoncer le théorème suivant : 


Taéorème XIII. — I existe une relation linéaire entre les rapports anhar- 


(*) F° partie, p. 29. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 27 


moniques, du troisième ordre, du faisceau oblenu en joignant un point 
quelconque de la cubique à six points trijuqués (*). 


Soient m, m',m'', trois points de la courbe, on a les égalités 


L Me + hu = 0, 
1 + Me + Vin = 0, 


1 ue + Mix = 0. 


On en déduit la relation 


A m n 
1 462 624 
' 
a mi a éco (0 
1 mi! m" 
462 624 


Si nous exprimons le théorème sur la constance du rapport anhar- 
monique des coniques, à l’aide des mêmes notations, nous obtiendrons la 
relation de forme tout à fait identique 


1 3% 


13 


0 


Le théorème XIII, ou celui qui est exprimé par l'équation (19), 
peut être ramené aisément au théorème VI, appliqué aux trilatères 
irijugués. 

Supposons que les trois points m, m', m'! soient en ligne droite, et dési- 
gnons par I, H, HE; V, W, NL; 1", H”, TI’, les points où cette droite ren- 
contre les trois trilatères trijugués; puis, comme tantôt, par maj, Mos, etC., 
les distances de m aux droites «, «z, etc. 


(*) C. Le Pace, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2° série, t. XLV, p. 94. 


28 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 
On a 
2(m12) — 12.ma; 2(m42) = 12.m'o; 2 (m'49)—12.m/"e, ete. 


De plus, 
ma M'o m'a ja 2 (m12) 


ml m'i m”I m.m?’ 
Par suite, 
12 .ma 19.ml 


= p- y) 
mi .m2 mi. m2 


(12) = 


et d’autres formules analogues. 
En introduisant ces expressions dans (19), on arrive à la relation 


mi.ml mil. mI. mil. mI. mI". mI”. mI” 
mI. mI. mI. m.m I. mI. mim N”. m H” 0) 


m'Lm Um, m'em Um I. m'm” A m NI” 


équation qui exprime que les quatre ternes de points m, m',m'';1, IE, HI; 
rW, H; 1°, H”, H appartiennent à une E (*). 

Les deux théorèmes XII et VI sont donc, chacun en un certain sens, plus 
généraux l’un que l’autre, et cessent d’être complètement identiques, comme 
ils le sont dans la théorie des coniques. 

À un autre point de vue, on peut signaler l'identité de forme entre les 
théorèmes XII et VI. 

En effet, si nous développons le déterminant (19), nous avons la relation 


tadon — Bou digs + Vila — Vidon + Iioados — Vin Vis = 0. 
D'un autre côté, le théorème VI peut s'exprimer par l'égalité 


Dde — DD + Wde — D + D — 1%; — 0 (*). 


(*) C. Le Paice, Mémoire sur quelques applications, ete., p. 57. 
(**) I° partie, p. 19. j 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 29 


Le théorème VI peut se conclure immédiatement du mode de génération 
des cubiques, en se rappelant la propriété suivante de l'homographie du 
troisième ordre et du second rang. 


Si neuf points 


sont tels que les ternes de points obtenus en formant les termes du détermi- 
nant composé de ces neuf éléments appartiennent à l'homographie, les points 
triples de cette homographie sont en involution KE avec les ternes composés 
des colonnes de ce déterminant (*). 


Les considérations qui précèdent ont pour but de faire voir jusqu'à 
quel point les théorèmes fondamentaux des cubiques s’impliquent entre 
eux. 

Occupons-nous maintenant des trilatères conjugués. 

Deux de ces trilatères se coupent en neuf points situés sur la courbe. 

Choisissons six de ces intersections, de telle sorte que chacun des six côtés 
contienne deux de ces points; nous exeluons, par exemple, parmi les neuf 
intersections, les trois points pris comme centres des faisceaux. 

Ces points seront les sommets des deux trilatères. 

Alors, en partant de l'équation 


5 = MUPa + AdB = 0, 


et en faisant les calculs analogues à ceux qui précèdent, nous arrivons à 


cetle propriété : 


Tuéorème XIV. — Le rapport anharmonique du faisceau de six droites, 


(©) C. Le Pare, Atti dell’ Accad. de” Nuovi Lincei, mémoire cité. 


30 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


obtenu en joignant un point quelconque de la cubique aux sommets de deux 
trilatères conjugués, est constant (*). 


A son tour, le théorème XIV peut conduire au théorème X, et ce dernier 
peut se déduire immédiatement de la génération des cubiques. 
Nous ne répéterons pas la démonstration de ces proprositions, démonstra- 


tion entièrement semblable à celle que nous avons donnée plus haut pour les 
trilatères trijugués. 


() F. Fore, Bull. de l’Acad. roy. de Belgique, 2° série, t. XLIV, p. 473. 


CHAPITRE IV. 


CONSTRUCTIONS. 


Nous devons maintenant appliquer les théories qui précèdent à la construc- 
tion des cubiques. Pour y arriver, nous employerons les théories exposées 
dans le chapitre I, 1"° partie, et dans le chapitre IL de la seconde partie, 
c’est-à-dire celles qui sont relatives à linvolution. 

Nous commencerons par résoudre un certain nombre de problèmes fon- 
damentaux dont nous aurons à nous servir ensuite. 

Bien que nous ayons toujours traité jusqu'ici, suivant en cela l’ordre qui 
nous paraissait le plus logique, l'involution I} avant Pinvolution If, nous 
croyons préférable, dans le cas actuel, de suivre l’ordre inverse. 

Nous aurons l’occasion de nous appuyer sur deux théorèmes, en quelque 
sorte évidents, que nous rappellerons d’abord, pour ne pas interrompre, dans 
la suite, l’ordre des déductions. 


A.) Toutes les coniques qui passent par trois points fixes, dont l'un situé 
sur une conique C,, délerminent, sur cette conique, des points appartenant à 


une iż. 


B.) Toutes les coniques qui passent par quatre points fixes, dont l'un 
situé sur une conique Ca, déterminent, sur celle conique, des points apparte- 


nant à une Ñ. 


ProsLème l. — On donne sept points 1, 1, 1!!; 2, 2!, 2/!; 3 d'une invo- 
lution F5; construire les deux autres points du terne 3, 3', 3". 


32 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Supposons que les sept points donnés soient distribués sur une droite 
quelconque. 

Par 3, menons une droite arbitraire 0. 

Joignons À et 2, 1’ et 2! à deux points arbitraires I, I de o. 

Au trilatère 4T, 21, I, inscrivons un triangle dont les côtés passent 
respectivement par 1", 2! et a, intersection de AL et de XT (*). 

Soit 9’ le côté de ce triangle, passant par a et I’, p, q ses sommets. 

Les cubiques 4'1’, 11, 41!" et 2'T', 21, 2'i” se coupent en neuf points, 
dont six, I, [', I’; p, q, a, sont situés sur les droites ð d; les trois autres 


(UE, 21} = as ON, PP eos (AT, 2 TP), 


sont donc situés sur une droite d”. 

Les intersections de d, d’ avec la droite de 32//9'...1 déterminent les 
points 3/, 3”. 

Ce problème a été résolu différemment par Poncezer et par M. Ex. 
Weyr (*). 


PROBLÈME ll: — On donne onze points 1, 1’, 4"; 9, 21, 91,8 ,3! 3/': 


SRAD € 


4, k', d'une involution I5; construire le douzième 4!'. 


Première solution. Au moyen du problème précédent, complétons les 
involulions 


BAS CREER EN LS ST A 
Nous obtenons ainsi des ternes 
hs dk, 


qui appartiennent à l’involution donnée. 


() Sreiner,: Werke, 4" Bè, s. 511. Cuasces, G. S., 4° éd., p. 222. 

() Poncerer, Traité des propriétés projectives, ete., t. Il, p. 242. 

Em. Weyn, Gründzüge einer Theorie der cubischen Involutionen, pp. 25 et 37. 

Pour les cas particuliers, même mémoire passim. Ce travail contenant la solution de | 
part des problèmes relatifs à une If, nous n’avons pas eru nécessaire de nous étendre 
sujet. 


a plu- 
sur ce 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 33 


Mais, dans une involution FE, à un point fixe correspondent des couples de 
points appartenant à une If. 

Dans le cas actuel, cette involution quadratique est déterminée par les 
couples 4/41 ; 4AL4}. I suffira done de chercher le point 4'', homologue de 
4!, dans cette involution. 

Bien qu’il semble, à première vue, que l'on doive employer des construc- 
tions du second degré pour arriver à la détermination de 4//, nous allons voir 
qu'il n’en est rien. 

Nous pouvons toujours supposer que les points donnés soient transportés 
sur une conique, de telle sorte que nous ayons les points 


XXXs; YYY, Zatats, Ua. 


Menons les droites 4,%,; YıYa qui se coupent en B. 

La droite u,B déterminera , sur la conique, le point A. 

L;A et yA détermineront, par leurs intersections avec x,%,, y,y2, les 
points A’ et B’. 

De même, #,%, et 3,3, se coupent en un point B,. 

B,u, donne le point A, et les droites x;A,, z;A, donnent, par leurs inter- 
sections avec æ,%,, 2122, les points A!, Bi. 

Les deux droites A'B', A!B! se coupent en un point à. 

En joignant & au point %,, nous obtenons, sur la conique, le point u. 

En effet, nous voyons que, par la première partie de la construction, celle 
qui donne la droite A'B’, nous avons déterminé le couple complétant, avec u,, 
Pinvolution déterminée par les deux ternes æ,2,%, ; YiYaÿse 

Car les couples de côtés opposés du quadrangle ABA/B sont des coniques 
satisfaisant aux conditions du théorème (B). 

Nous pouvons remarquer, dans cette construction, que les couples de 
points VL; Yiÿa, 3123 peuvent être imaginaires, ou être donnés par couples, 
de telle sorte qu’il n’est pas nécessaire de les construire individuellement, 
c’est-à-dire de chercher les intersections de la droite x,x,, par exemple, avec 
la conique. 

Le couple u,u, pourrait même être imaginaire sans que la construction 


devienne impossible. 
Tome XLV. 5 


„oee a QC OR RL 


54 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


En effet, supposons que lon ait construit le groupe des éléments neutres, 
ou la droite qui, par ses intersections avec C,, détermine ce groupe : cette 
droite coupe la droite ww, en un point S; il suffira de mener, par S, une 
droite qui coupe la conique en deux points réels uiu, : ces deux points peuvent 
être substitués à w,u, pour la construction de tz. 

Pour le démontrer, observons que, à ttz, il correspond des couples de 
points u,a, ulu,, ete., en involution. Les éléments neutres en font néces- 
sairement partie, de telle sorte que ww, et ces deux points caractérisent 
l’involution. 

Quant à la construction du groupe neutre (ou hessien des points triples), 
on peut faire usage de la solution suivante, ou chercher, par exemple, les 
involutions 12, 1? correspondant à des points arbitraires p,, p; et construire 
le groupe commun à ces deux involutions. Toutes ces constructions sont 
d’ailleurs linéaires. 

En effet, dans la solution précédente, il suffit de s'arrêter à la détermination 
du point 6, relatif à un point «,. En déterminant de même un point p relatif à 
un autre point U, , la droite &p est la droite cherchée. 


Seconde solution. Nous avons vu que la relation d’homographie f= 0 peut 
s'écrire | 
[= MUU + ototauts = 0, i 
ou 
(æ — d) (Ya — à) (ri — M) + Aaw — d) (Ya — À) (a — à) = 0, 


les æ, y, z,-et les ð représentant des distances à une origine fixe sur une 
droite, par exemple. 
Par suite, si %1 Yo 213 Xi, Yi, Zi représentent deux groupes de l’homo- 
graphie, on a 
Cr a à) (dit) ES mi DC e (a — da ) 90 
S AT e aa arp ares S 


` 


d Si les points appartiennent à une J5, les trois covariants Z deviennent 
Li. identiques entre eux et au hessien des points triples (*). 


(*) 17° partie; p. 17. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 55 


On a 


De l'équation (20), on conclut que les deux points 3, %, appartiennent à 
toutes les 1%, caractérisées par deux ternes quelconques de l’involution FE 
donnée. 

Supposons maintenant que les trois groupes de points 42,2; ; YYY; 
ZZZ; Soient représentés sur une conique C,, et rappelons-nous le mode 
suivant de représentation d’une lf : 


Tous les triangles inscrits à une conique C, et circonscrits à une seconde 
conique 3, déterminent, par leurs sommels, une involution 1% (*). 


Par suite, on retrouve ce théorème : 


Lorsqu'on inscrit trois triangles à une conique C, les trois coniques 
inscrites à ces triangles, pris deux à deux, ont une tangente commune. 


Cette tangente peut d’ailleurs se construire linéairement. Désignons-la 
par À. 

Elle détermine, d'après ce qui précède, par son intersection avec C, les 
éléments neutres de l’involution donnée. 

Mais, outre les neuf points £££, YiYoYs, 212233, Qui nous ont servi à 
déterminer À, nous nous sommes donné deux points d’un terne : u, t. 

La conique déterminée par les cinq tangentes £, £a, Lals, LXi, Wla, h 
permettra de construire u,, en achevant le triangle circonscrit, dont deux 
des sommets sont u,, Wa (”). 

Il existe encore d’autres solutions de ces questions que nous n’exposerons 
pas, du moins pour le moment. 


PROBLÈME lll. —— Connaïssant les points triples d’une involution Fse 
deux points dun terne, compléter ce terne. 


(*) Ex. Weyr. Op. cit. 
(**) C. Le Paice, Sitzb. der k. Akad. der Wiss. zu Wien, Bd. LXXXIV, s. 256. 


56 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Supposons que les points triples 4, la, ls, et les deux points donnés w,, 
ua Soient sur une conique C,. 

Construisons les tangentes à la conique en £,, ła, t5; ces trois langentes 
constituent un nouveau triangle T,T,T,. 

Les côtés opposés 44, TiTa; LL, TT; tsli, T,T,, des deux triangles 
se coupent en trois points «z, ai, «z; Situés sur une droite A. 

Cette droite n’est autre chose que la hessienne des points triples; en 
effet, toutes les coniques qui passent par «i, as, ls déterminent, sur GC, 
une l; (théor. A). 

Or, une droite quelconque, passant par f, constitue, avec À, une de ces 
coniques : par suite les deux intersections de L avec C, donnent bien les 
éléments neutres de l’involution. 

Pour compléter le terne, il suffit de faire passer une conique par 
3 y Ís, W, Ua; elle coupera C, en uz; ce problème est linéaire, car on 
connait déjà les trois points communs f;, Ui, Ua. 

La construction suivante mène d’ailleurs aisément à la détermination de uz. 

Joignons les points w,, +, par une droite qui coupe C, en p. 

La droite {,p coupe À en #, et ku, rencontre la conique au point cherché u,. 

En effet, appelons A,, h, les points d’intersection, réels ou imaginaires, 
de h avec C. 

Les trois ternes uhh; U, Pla, uuu, font partie de linvolution. Donc u; 
est homologue de u, dans l’involution quadratique déterminée par les deux 
groupes hha, pla 

La construction précédente repose sur la détermination du groupe neutre 
de l'involution ; mais cette détermination ne peut plus s'effectuer à l’aide des 
deux triangles llat, T,T,T;, lorsque deux des points triples l, tz, par 
exemple, sont imaginaires. 

Dans ce cas, on peut y substituer la détermination suivante de la droite Ah. 

Par {, menons la tangente à C,. Cette tangente coupe la droite taf, en 
un point S. 

Menons la seconde tangente S4/. 

Puis, par le même point S, une transversale $444. 

Les deux tangentes en {,{} se coupent en un point a situé sur 4, ti. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 57 


Les deux droites 1411, {Lt}, déterminent sur La, ta, deux points A,B, et 
la droite AB passe par S. 

A chaque droite St! correspond donc une droite SAB, et réciproquement. 
Il suffira de construire, dans cette H?, le rayon correspondant à S4; t- 

La démonstration de cette construction serait un peu longue : il nous 
suffira de dire qu’elle repose sur le théorème suivant : 


Les points triples d’une involution V, forment un groupe de l'involution 
particulière T} qui a pour points triples les deux éléments neutres. 


Ce théorème se déduit immédiatement d’une propriété connue, des formes 
cubiques, à savoir qu’une telle forme peut toujours s'écrire : 


ač + by, 


č et n étant les facteurs du hessien, propriété qui est un cas particulier du 
théorème que nous avons mentionné plus haut sur la forme canonique d'une 
forme trilinéaire (*). 

D’après la remarque faite au problème IT, la solution sera toujours 

possible, même si le groupe donné, 
U, est imaginaire. 

La construction suivante de la 
hessienne des points triples est en- 
core plus simple. 

Soient a, , &, &; les points triples; 
les tangentes à la courbe en 4,, a, 
a; déterminent, sur les côtés du 


triangle, les trois points, en ligne 
droite, ai, az, az. 

Soit, de plus, p, le pôle de a,a;. On voit que aa, est conjuguée harmo- 
nique de a,@,@;, par rapport aux deux droites «p, «t, 


(*) C. Le Paice, Comptes rendus, t. XCI, p. 1049. 


38 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Comme il est toujours possible de construire le pôle de a,a;, même si ces 
deux points sont imaginaires, la construction précédente de la hessienne a 
toute la généralité désirable. 


PROBLÈME IV. — Construire les points triples d'une involution déterminée 
par trois lernes de points XXXs, YiYaYs» Zi2a2se 


Soient 4,, fa, ls les points triples. 

Ils sont conjugués harmoniques des groupes &,4,%;, YiYoÿs, 217925 (i 

En conséquence, /, lal; peut être regardé comme un terne appartenant à 
la fois aux trois involutions qui ont pour points triples les groupes x, £ £z, 


YYY, Z1 222z 
On est donc ramené à la solution de cette question : 


ProsLème V. — Construire le groupe commun d trois involutions 
15, 155, 125, données par leurs points triples. 


Supposons que ces points triples soient donnés par les équations 


Les trois involutions sont alors définies par les équations : 


AXILL + A (X112 + Lol; + X:%4) Æ (ds + Le + xz) + a; = 0, Ee Ar Ea (a) 
bo Xl + bi (XX2 + Lolz + Axa) + bali + £a + æ) + bs =0, . . . (b) 
CXXX + Ci (Lla + Xola + Las) H- Ca (Xi + La + Xa) + GO e.. (c) 


Les groupes communs à (a) et à (b) forment une lf; ceux qui sont 


communs à (b) et à (c) une involution 1/5. | 
ll faut donc construire les deux coniques d’involution de ces deux 17, 15, 
ce qui est aisé puisqu'il suffit de construire deux groupes de ces involutions. 


(*) 47e partie, p. 16, théor. I. Combiné avec la définition des points conjugués harmoniques, 
p. 22, théor, IX. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 39 


Ces deux coniques ont quatre tangentes communes. L'une est la hessienne 
du groupe b —0; les trois autres forment un triangle inscrit dont les som- 
mets représentent les points cherchés. 

Pour démontrer ce qui précède, il suffit d'éliminer æ, par exemple, 
entre (a) et (b), puis entre (b) et (c); puis d'éliminer y entre les deux équa- 
tions obtenues. 

On trouve finalement l'équation 


(bb')b,b, [(ab) (be) (ca)a, bc, |? A EEN 


ce qui démontre le théorème. 

Quant à la construction d’un groupe de lf, par exemple, choisissons un 
point pı. A ce point, dans (a) et (b) correspondent deux involutions quadra- 
liques faciles à construire, par le problème Il; le groupe p,p,, commun à 
ces deux involutions, constitue, avec p,, un terne de P. 

Nous nous sommes quelque peu étendus sur ces diverses questions, parce 
qu'elles nous seront utiles dans ce qui va suivre, et aussi parce qu’elles nous 
paraissent offrir quelque intérêt au point de vue de la représentation des 
formes algébriques. 

En général, il suflit de connaitre neuf points d’une cubique pour détermi- 
ner complètement la courbe, comme cela ressort immédiatement de ce qui 
précède. 

La construction des cubiques reviendra donc à déterminer autant de 
points de la courbe qu'on le voudra, à l’aide de neuf points donnés. 

Nous ramènerons ces questions à la solution de trois, ou plutôt de deux 
problèmes, car le premier ne nous sera même pas nécessaire, el, si nous 
le donnons, c’est afin de ne laisser de côté aucun des problèmes fon- 
damentaux. 


PROBLÈME VI. — Etant donnés neuf points d'une cubique, déterminer les 
intersections de cette courbe avec une droite A. 


() C. Le Pace, Sitzb. der k. Akad. der Wiss. zu Wien, Bd. LXXXIV, s. 255. 


0 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


NS 


Soient 4, 2...,6, a, b, c, les neuf points donnés. 

Le faisceau de cubiques F} (4, 2, ..., 6, a) détermine, sur A, une involu- 
tion I} (théor. V, p. 15). Pour obtenir des ternes de cette involution, nous 
pourrons employer les cubiques décomposables (12345)(6a), (12346)(Ba), 
(1348a)(23), par exemple (*). 

Par le problème IV, nous déterminerons les points triples de cette invo- 
lution. 

En faisant la même chose pour les faisceaux F5(1, 2, ..., 6, b), 
F$(1, 2, …., 6, c), nous n’aurons plus qu’à appliquer le problème V, car la 
cubique à construire, appartenant aux trois faisceaux, détermine, sur A, le 
groupe commun aux trois involutions. 

Il peut se faire que les neuf points ne déterminent pas une cubique; nous 
verrons, au problème VIL, dans quel cas cela pourra se présenter. 


PROBLÈME VH. — Etant donnés neuf points d'une cubique, déterminer les 
intersections de celte courbe avec une droite A qui passe par un des neuf 
points donnés. 


Soit c le point par lequel passe A. 

Les deux faisceaux F5(1,..., 6, a), F5(1, ..., 6, b) déterminent sur A deux 
involutions 15. Dans chacune d'elles, au point c correspond une involution É, 
facile à déterminer par le problème Il}. Le groupe commun à ces deux invo- 
lutions quadratiques est le couple d’intersections à construire. 


ProBLème VIN. — Etant donnés neuf points d’une cubique, déterminer 
la troisième intersection de cette courbe avec une droite à qui passe par deux 
des neuf points donnés. 


Soient b et c les points situés sur A. 
Le faisceau F3(1, 2, …, 6, a) détermine sur A une I$. 


(*) Par (12345), ete., nous désignons la conique passant par les cinq points 1, 2, 3, 4, 5. 
Par FX, nous désignons les courbes d'ordre n en nombre We infini qui passent par les 


points donnés. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 44 


Par le problème 11, nous déterminerons le point qui complète le terne 
dont on connait be. 

Si le groupe bc représente le hessien des points triples de l’involution 
caractérisée par le faisceau, le problème est indéterminé, car be constituant, 
avec un point quelconque de A, un terne de l’involution, il existera une 
infinité de cubiques passant par les neuf points. 

Il est donc toujours facile de déterminer si, par un groupe de neuf points 
donnés, il passe une seule cubique, ou s’il en passe une infinité. 


ProsLème IX. — Étant donnés neuf points d’une cubique, construire un 
Système de trilatères trijugués à la courbe. 


Soient 1, 2, …, 9, les points donnés. 

Choisissons-en quatre arbitrairement, 1, 2, 5, 4, par exemple. 

Par le problème VIH, on peut contruire les points d'intersection 11,28 9’ 
de la courbe avec les transversales 14, 24, 34. 

Les points 11, 22’, 33! sont six points trijugués. 

Les trois systèmes de droites 13/, 29/, 31! ; 197, 2438/5415:28": 89, 
constituent un système de trois trilatères ayant sept points communs avec 
la courbe. 


PROBLÈME X. — Etant donnés neuf points d'une cubique, construire un 
Système de trilatères conjugués à la courbe. 


Choisissons encore arbitrairement quatre points 1, 2, 3, 4. Puis détermi- 
nons les intersections 1’, 3’ des droites 12, 34 avec la courbe. 

Les droites 13, 24, 1!3' coupent la courbe en trois nouveaux points 
111, 2'1, 3", situés en ligne droite. 

Nous avons maintenant les deux systèmes suivants de trois droites 
124', 8437, 119181; 1847, 2421", 11878" qui constituent deux trilatères 
conjugués. 


PROBLÈME XI. — Construire une cubique dont on connaît neuf points. 
Tome XLV. 6 


42 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Première solution. À l'aide de ces neuf points, construisons un système 
de trois trilatères trijugués; puis prenons deux des neuf points donnés, 89, 
par exemple, non compris parmi les sommets des trilatères. 

La transversale 89 coupe les trois trilatères en neuf points qui caractérisent 
une 5. 

Il suffira, par le problème Il, de compléter le terne 89. Si nous 
employons deux autres points, 87, nous déterminerons un nouveau point de 
la courbe. 

Celui-ci, joint au précédent, nous permettra d'en construire un troisième, 
el ainsi de suite, à l’aide d’intersections de lignes droites. 


Seconde solution. A l’aide des neuf points, construisons un système de 
deux trilatères conjugués. 

Puis autour d'un des neuf points donnés, 9, par exemple, non situé sur 
les côtés des trilatères, faisons pivoter une transversale. 

Dans chacune de ses positions, cette transversale coupera les deux trila- 
tères en deux ternes de points, caractérisant une li. 

Il suffira, par le problème I, de compléter le terne dont 9 est un point. 

Nous ferons observer que, de l’ensemble des constructions qui précèdent, 
il résulte que l'on peut construire, par des intersections de lignes droites, 
autant de points d’une cubique, qu’on le veut, étant donnés neuf points qui 
déterminent cette courbe. 

En effet, cette question a été ramenée au problème VIH. 

Dans le faisceau F3 (1, 2, ..., 6, a) que nous avons employé pour 
résoudre cette question, nous pouvons employer les cubiques décompo- 
sables suivantes : 


(42345) (6a), (12546) (Ba), (12456) (5a). 
Ces cubiques donneront trois ternes de points : 


Xalolss YaYoYs5 ZatoRs 


sur la droite A. 


j 
à 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. ` 45 


Parmi ces points, les trois £, ya, Z3 seront toujours réels. 

Les trois couples xi%, Yiÿo, ZiZa, intersections de A avec une conique, 
peuvent être imaginaires. 

Mais, comme nous l'avons fait observer à l'occasion du problème II, cette 
circonstance importe peu. 

En effet, il faut représenter les neuf points sur une conique C, quelconque. 
Voyons donc comment sera représenté, sur celte conique que nous pouvons 
choisir arbitrairement, et supposer donnée, par exemple, par cinq points 
À, B, C, D, E, un couple tel que x, 

Il faut trouver les intersections de A avec la conique (12345) (*). 

Menons les droites 12, 23; 14,2%; 15, 25 qui détermineront, sur A, des 
couples a) an Ê; B! 5 Ys y 

Si parmi les cinq points A, B, C, D, E, nous en choisissons un arbitraire- 
ment, il faudra déterminer les intersections de cette conique avec les droites 
Aa, Aa', ... Ay’, problèmes linéaires, puisque l’on connait une des intersec- 
lions À. 

Nous obtenons ainsi, sur la conique C, six nouveaux points p, p'; q, q'; 
r, r! qui définissent une homographie. 

Par des intersections de lignes droites, il sera possible de trouver la droite 
qui, par ses intersections avec C, représente les points doubles de cette 
homographie. 

Ces intersections représentent les intersections de A avec C. Elles peuvent 
être imaginaires, puisque, pour la solution du problème I, il nous suffit de 
connaitre la droite qui unit ces deux points. 

Nous n’entrerons pas dans le détail des modifications que cette construction 
peut présenter lorsqu'un certain nombre des points qui déterminent la 
cubique sont imaginaires, parce que ces questions touchent plutôt à la théorie 
des coniques. 

On aurait, par exemple, à résoudre des questions analogues à la 
suivante : 


(*) La solution de cette question est celle qui a été donnée par STEINER, Werke, I°% Band, 
S. 519. 


44 SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 


Trouver les intersections d'une droite A avec une conique passant par 


trois points et par les intersections d’une droite ò avec une conique C (”). 


t ' De la remarque finale du problème I, il résulte même que les deux 
points de la cubique, passant par A, peuvent être imaginaires, sans que la 


solution cesse d’être possible. 


Rien n'empêche, par exemple, que la cubique soit déterminée par quatre 
couples de points imaginaires et un neuvième point réel. 
+ Nous avons vu, dans le chapitre premier, que les trois centres des fais- 
ceaux homographiques étant donnés, les trois covariants 2 sont représentés 


par un système de trilatères conjugués. 


On peut donc demander de représenter en quelque sorte graphiquement 


o" — 7y 


A 


et les deux trilatères P''AB; Q”BP', Q'CP; 


les éléments de lhomogra- 
phie, et, pour cela, de con- 
struire un système de trila- 
tères conjugués passant par 
trois points situés sur la 
courbe. 

Soient À, B, G les trois 
centres donnés. 

Par À menons une trans- 
versale quelconque qui ren- 
contre la courbe en deux 
points P!’, Q, déterminés par 
le problème VIT. 

Ensuite P''B détermine Q'; 
Q'C, P; PA, Q!'; Q''B, P'; 
P'C passera par Q. 

En effet, la courbe donnée, 


Q''AP, P''BQ', P'C ont huit 


(*) Voir, par exemple, Fenter, Darstellende Geometrie, 2° Auf.s. 117. 


SUR LES COURBES DU TROISIÈME ORDRE. 45 


points communs. Donc les trois cubiques passent par le méme neuvième 
point, c’est-à-dire que P'C coupe la courbe en Q. 

Les droites PAQ, Q''AP ; P'BQ/, QBP’; P'CQ, Q'CP représentent les 
trois covariants 3. 

L'une de ces six droites est choisie arbitrairement. 

Parmi les six points P, P’, P”, Q, Q', Q” deux exigent une construction 
du second degré; mais la construction de tous les autres se fera par la ligne 
droite (*). 

Nous sommes ainsi ramenés aux conclusions du chapitre premier. Li 

Le choix arbitraire d’une des six droites correspond au choix de l’indé- 
terminée 9; de plus, les trois covariants 3 ayant même discriminant, dès que 
l'une des racines de l’un deux est connue, les racines des autres peuvent 
s'en déduire par des équations linéaires. 

Il est facile de voir qu’un système de cinq points, tels que ABP/!Q'!C, peut 
être employé pour la génération de la courbe par la méthode de CHasLes : les 
quatre points ABP” Q” constituant la base du faisceau de coniques, et C, le 
. Centre du faisceau de droites. 

On voit que l’on peut prendre arbitrairement quatre de ces cinq points. 


() Voir C. Le Paice, Comptes rendus, t. XCII, p. 509. 


UNE 


BALEINE FOSSILE DE CROATIE, 


APPARTENANT AU GENRE MÉSOCÈTE, 


PAR 


P.-J. VAN BENEDEN, 


MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 


(Mémoire présenté à la Classe des sciences de l'Académie dans sa séance du 3 juin 1882.) 


Tome XLV. 1] 


| 
| 
| 


$ 


UNE 


BALEINE FOSSILE DE CROATIE, 


APPARTENANT AU GENRE MÉSOCÉTE. 


ll y a trois ans, le D" Pilar, professeur à l’Université d’Agram (Croatie), 
pendant un court séjour qu’il fit en Belgique, me fit part de la découverte 
d’ossements de Cétacés fossiles indéterminés qui se trouvaient depuis long- 
temps dans les galeries du Musée national de minéralogie et de géologie 
d'Agram, et qui avaient été déterrés dans les environs de cette ville. 

M. Pilar, comprenant tout l'intérêt qui s'attache à la détermination de ces 
ossements, me fit obligeamment l'offre de me les communiquer, et, grâce au 
concours bienveillant du directeur du Musée de zoologie, le professeur Brusini, 
je reçus, quelque temps après, la collection complète, telle qu’elle avait été 
déposée dans les galeries. Toutes les pièces étaient encore entourées de la 
marne dans laquelle elles avaient été recueillies. 

J'ai déjà fait part de cet envoi à l’Académie dans la séance du 3 février 1879, 
en faisant remarquer combien les restes de ces animaux de haute mer excitent 
l'intérêt, non-seulement au point de vue des affinités qu'ils ont avec les autres 
Cétacés, mais également au point de vue des changements qu'ont subis les 
mers d'Europe et surtout la mer Noire pendant la longue période de l’époque 
tertiaire; celle mer, intérieure aujourd’hui, qui nourrissait à l'époque de la 


ei 


4 UNE BALEINE FOSSILE 


mollasse supérieure de Suisse des Baleines véritables, c’est-à-dire des Cétacés 
à fanons, ne renferme plus aujourd’hui que trois espèces de Cétacés, toutes 
les trois de la famille des Dauphins, et qui ne lui sont même pas propres, 
puisqu'on les trouve également dans la Méditerranée et dans l'Océan. Les 
eaux de la mer Noire dans lesquelles ces Baleines prenaient leurs ébats 
s'étendaient alors au sud jusqu'aux pieds de l'Himalaya et au nord couvraient 
en partie jusqu’à l'Autriche, la Bavière, le Wurtemberg et même la partie 
basse de la Suisse; la vallée du Danube communiquait avec la vallée du 
Rhône, et les Cétacés qui se rendaient de la mer Noire. à la Méditerranée 
par ces vallées, ont laissé partout des traces de leur passage. 

Les mammifères terrestres de celte époque étaient également bien diffé- 
rents de ceux d'aujourd'hui. C'était une riche et noble végétation qui 
recouvrait l’Europe à ce temps de la mollasse, dit un paléontologiste célèbre ; 
les Pachydermes dominent encore parmi les mammifères terrestres, les 
Mastodontes apparaissent comme précurseurs des Éléphants et les Hipparions 
annoncent l’apparition des Chevaux. 

Le travail que nous avons l'honneur de communiquer aujourd'hui a pour 
objet la description de ces ossements du Musée d’Agram; ils se composent 
d’une portion de crâne et de vertèbres appartenant à diverses régions du 
corps. 


On a signalé depuis longtemps la présence de Cétacés fossiles dans le 
voisinage de la mer Noire; les premiers auteurs qui en ont fait mention, après 
Pallas, sont G. Fischer, qui a fait connaître des vertèbres de ces animaux 
dans les Mémoires de la Société des naturalistes de Moscou. Il les avait reçus 
du botaniste russe C.-A. Meyer. 

En 1833 le professeur Rathke, visitant le Musée d’antiquités de Kertsch, 
y découvrit une portion de crâne de Cétacé fossile, provenant du promontoire 
de Takale dans la presqu'ile de Taman, qui avait été déterrée avec d’autres 
' ossements près de la forteresse d’Anapa. Le professeur de Königsberg fit 
connaître cette découverte dans les Mémoires des savants étrangers de l’Aca- 


DE CROATIE. 5 


démie impériale de St-Pétersbourg et reconnut parfaitement les affinités de ce 
nouveau Cétacé avec les Balénoptères qui vivent encore aujourd’hui. 

Quelques années plus tard (1841), l'Académie des sciences de St-Péters- 
bourg reçut directement quelques ossements recueillis, comme ceux décrits 
par Rathke, à Anapa; il y avait parmi eux une omoplate, un humérus, et une 
vertèbre caudale; le D" Brandt, directeur du Musée de l’Académie les rap- 
porta avec raison au même animal que Rathke avait déjà fait connaître, mais, 
ne le croyant pas aussi voisin des Balénoptères que son confrère, il proposa 
le nom de Cetotherium en dédiant l'espèce au professeur de Königsberg. 

Trois ans plus tard, Brandt, après avoir comparé d’autres matériaux, crut 
reconnaitre certaines affinités entre les Cetotherium et les Siréniens (wodurch 
die Balæniden und Sirenien einander etwas näher gebracht würden, dit- 
il). 11 y a évidemment une erreur. Des restes de Siréniens étaient sans doute 
mêlés avec ceux de Cetotherium, et attribués au même animal. 

Nordmann fait également mention, en 1860, dans sa Paléontologie de 
la Russie méridionale, de restes de Cétacés de Taman, de Kertsch et de 
Kischenew (Bessarabie) qui sont déposés au Musée d’Helsingfors. Le profes- 
seur de l'Université de Finlande cite parmi les Balænodea, le Cetotherium 
priscum, dont il figure, planche XXVI, figures 1-2, un fragment de mandi- 
bule, provenant de Kertsch, et figures 5-6, méme planche, une vertèbre 
lombaire, probablement, dit-il, de la presqu'île de Taman. Nordmann a figuré 
encore un fragment de côte de Kertsch, planche XXVI, figure 4, qu’il rapporte 
au même animal. Il fait mention aussi de Mystacocètes, trouvés en Bessarabie, 
et parmi lesquels il signale une autre espèce naine du méme genre; il figure, 
entre autres, une caisse tympanique, des vertèbres de différentes régions et 
même un humérus. 

La vertèbre de Kischinew, que le professeur de Helsingfors rapporte au 
genre Balenoptera, est attribuée par Brandt à un Cétodonte, sous le nom de 
Delphinapterus (Pachypleurus) fockii. 

On a fait mention aussi d’une vertèbre de Baleine trouvée dans le bassin 
de la mer Caspienne. 

On en a déterré également en 1865 dans les environs de Nikolajew, pro- 
venant d’un jeune animal, qui ont été envoyés au Musée de l’Académie impé- 


6 UNE BALEINE FOSSILE 


riale des sciences de St-Pétersbourg et dont Brandt a fait une espèce sous 
le nom de Cetotherium Klinderi. 

Indépendamment de ces deux espèces, Brandt a encore établi le Cetothe- 
rium helmerseni, avec des ossements déterrés au promontoire de Tekla sur le 
bord de la mer Noire, le Cetotherium priscum, le Cetotherium Mayeri et le 
Celotherium ambiguum. 

Le Cetotherium priscum est le même animal qu'Eichwald avait nommé 
Ziphius priscus. Le Cetotherium ambiguum repose, pensons-nous, sur des 
vertèbres normales de Pachyacanthus. 

De Verneuil a recueilli également pendant son voyage en Crimée, des 
vertèbres de Cétacés fossiles qui sont déposées au Muséum à Paris; Laurillard 
les attribuait à une petite espèce de Baleine, ou à une grande espèce de 
Ziphius. 

Dans le voyage de Demidoff, Hyot fait mention également d’une vertèbre, 
trouvée dans largile rouge près de Ak-Burun et que Brandt rapporte au 
Cetotherium priscum. On a recueilli encore des ossements de Cétacés sur 
les bords du Dniester et du Bug à Kischenew et à Nicolajew, à l'est de la 
mer Noire. 

Enfin, dans un travail sur les ossements de Cétacés d'Europe, fossiles et 
sous-fossiles, le D' Brandt passe en revue (1873) toutes les découvertes qui 
ont été faites sur les Cétacés de la mer Noire : 


Nous citons ici les principaux travaux qui ont eu pour objet les ossements 
de Cétacés découverts dans le bassin de la mer Noire. 


Parras, Kleine Art Cete, Bemerkungen auf einer Reise in die südlichen Staalthalterschaften 
des Russichen Reiches, vol. II, p. 289. 


G. Fiscuer, Fischwirbel, Mémoires de la Société. des naturalistes de Moscou, t. VIT, 
1829, p. 298 PI XXI. 


Rarake, Den lebenden Balenopteren verwandtes, aber davon abweichendes Thier, Mém. 
des sav. étrang. de l’Acad. Imp. de S'-Pétersbourg, t. II, 1835. 


F. Jacer, Fossile Säugethiere von Wurtemberg, Stuttgart, 1855, pl. 1, fig. 26. 


De Verneuil, Formation tertiaire de la Crimée, Mém. de la Soc. géologique de France, 
t. I, part. I, 1837. 


DE CROATIE. 7 


Eicawazn, Der gattung manatus, Bull. scient. de l'Acad. imp. de S'-Pétersbourg, 
t. VI, 1838. 


Eicawaip, Die Urwelt Russlands, St-Pétersbourg, 1840. 


J.-F. Branor, Bullet. cl., phys., mathém., Acad. imp. des Sc. de St-Pétersbourg, 1841, 
t. I, p. 146. | 


Al. v. Norpmann, Bullet. de l Acad. imp. des Sc. de S'-Pétersbourg, t. 1, p. 202. 
H. v. Mever, Jahrbuch für Mineralogie, 1841, 1842 et 1843; Paleontographica, vol. VI. 
Hyor, Voyage de Demidoff, t. IT, 1842. 


H. v. Meyer, Balænodon lintianus. N. Jahrb. für Mineralogie, 1849, p. 549; 1850, 
p. 205. 


Enruicx, Ueber die Nordöstlichen Alpen, Linz, 1850. 

EicawaLn, Lethaea rossica ou Paléontologie de la Russie. Stuttgart, 1853. 
Picrer, Traité de Paléontologie, 2° édit., vol. T, p. 379, 1855. 

GieseL, Die Säugethiere, p. 111. 

Norpmann, Paléontologie Sudrusslands, Helsingfors, 1860. 

ErcawaLp, Bull. de natur. de Moscou, 1860. 


Van BENEDEN, La côte d Ostende et les fossiles d'Anvers, Bullet. de l’Acad. roy. de Bel- 
gique, 2° sér., t. XII, 1862, p. 479. 
Quexsrenr, Handbuch der Petrefactenkunde, 2 Aufl. Tubingen, 1867. 


P.-J. Van Benenen et Paul Gervais, Ostéographie des Cétacés vivants et fossiles, Paris, 
1869. 


J.-F. Branpr, Bullet. sc. d. l'Acad. impér. des sc. de St-Pétersbourg, t. XVI, 1871. 


— Bemerkungen über die Bartenwale des Wiener Beckens, Sitzb. d. Wiener Akad. 
Bd. LXV (1872). 


—  Blicke auf die Zahnwale, Sitzb. d. Wiener Akad. Bd. LXVII (1875). 


— Untersuchungen über die fossilen und subfossilen Cetaceen Europa's, S'-Péters- 
bourg, 1875, et Ergänzungen zu den fossilen Cetaceen Europa's, St-Pétersbourg, 1874, 
p. 50. 


P.-J. Van Bengnen, Les Thalassothériens de Baltringen (Wurtemberg), Bulletins de 
l’Académie royale de Belgique, 2"° sér., t. XLI, n° 5; mars 1876. 


P.-J. Van Benepen, Sur un envoi d'ossements de Cétacés fossiles de Croatie, Bulletins de 
l'Académie royale de Belgique, 2™° sér., t. XLVII, 1879. 


8 UNE BALEINE FOSSILE 


On connaît aujourd’hui plusieurs Musées qui renferment des ossements 
de Cétacés recueillis dans le bassin de la mer Noire. Les principaux sont 
ceux de St-Pétersbourg : cabinet de la Société de Minéralogie, le Musée de 
l’Académie des sciences et l’Institut impérial des Mines. Ce sont les ossements 
qui ont été recueillis à la côte est de la mer Noire et de la mer d’Azov, à 
Kertsch et à la presqu'ile de Taman, à Anapa. 

Au Musée de l'Université d'Helsingfors se trouvent plusieurs pièces inté- 
ressantes des mêmes localités que Nordmann a fait connaître ; indépendamment 
des Phoques, il fait mention de restes de Ceiotherium, de Balenoptera, de 
plusieurs Delphinides et même, en exprimant toutefois un doute, d’une vraie 
Baleine. Le professeur d'Odessa fait mention d’abord des Cetotherium de 
Taman et de Kertsch, puis de restes du même ordre trouvés en Bessarabie. 

A Paris, au Muséum d'histoire naturelle, on conserve les vertèbres rappor- 
tées de Crimée par de Verneuil. Le Musée de Tiflis possède également 
quelques ossements de Cétacés. 

Le Musée de Vienne (Hofmineralien Cabinet) renferme depuis 1854 
une vertèbre dorsale, découverte à Pod, près d’Agram, dit l'étiquette, et qui 
appartient sans doute au même animal que celui qui nous occupe. Le mot Pod, 
désigne, d’après M. Pilar, la même localité que Poduset. Nous avons vu 
également dans ce même Musée une vertèbre provenant du Leithakalk, 
recueillie dans les environs de Vienne même. Nous pouvons encore faire 
mention de débris de Delphinides déterrés dans les environs de cette ville 
et qui se trouvent en partie au Musée de minéralogie et en plus grand 
nombre dans le Musée particulier de Letocha. Ce sont presque tous Delphi- 
nides recueillis dans le Tegel de Hernals (environs de Vienne), qui corres- 
pond au terrain à fossiles d’Oeningen. 

On possède au même Musée de minéralogie un humérus, que Brandt 
rapporte au Cetotherium priscum, qui a été déterré à Margarethen, dans le 
Leithakalk. Nous avons eu en main tous ces ossements des Musées de 
Vienne, de St-Pétersbourg et d'Helsingfors, et, à l'exception de l’humérus du 
Musée de Vienne, tous sont fort mal conservés; nous n’oserions du reste 
affirmer que la plupart des différences que présentent ces os ne sont pas 
des différences individuelles ou le résultat de modifications survenues par la 
fossilisation. Tous ces os sont très-lourds et imprégnés de fer. 


| 


DE CROATIE. 9 


A Linz on trouve au Vaderland. Museum un squelette assez complet 
d’un Cétacé recueilli dans les environs de cette ville et que nous avons fait 
connaître sous le nom de Aulocetus. Herman v. Meyer avait proposé le nom 
de Balenodon lentianus. Il est voisin de celui qui nous occupe. 

Nous avons vu également des ossements de Gétacés au Musée de Munich, 
provenant de la mollasse des environs de Lindau. Nous pouvons citer encore 
des ossements de Cétacés recueillis dans la mollasse de Suisse, et que nous 
avons pu comparer à Zurich. 

Nous avons vu une tête de Cétacé au Musée de Stutigard qui a été 
recueillie à Oedenbourg en Hongrie. Elle appartient à un Ziphioïde et se 
trouve au château de Katzendries, propriété du comte de Beroldingen. 
Indépendamment de la tête, la région cervicale est conservée depuis la pre- 
mière jusqu’à la cinquième vertèbre. 

Le Musée de Stuttgard possède également une vertèbre qui a beaucoup 
d’analogie avec celle de l’aulocète de Linz et qui provient de la mollasse 
supérieure d’'Oberschwalben. Elle a été trouvée à côté de restes de Squalo- 
don et d'Halitherium. 

Entre Ulm et Biberach, sur la route qui conduit au lac de Constance, 
dans l’Oberschwalben, se trouve un endroit nommé Baltringen, qui est par- 
ticulièrement riche en ossements d'animaux marins. Le pasteur Probst de 
Essendorf en possède de fort intéressants dans sa collection et qu'il a eu 
lobligeance de me confier !. A côté des Squalodons on voit surtout des restes 
de deux Delphinides que H. von Meyer a désignés sous le nom de Delphinus 
(Platyrynchus) canaliculatus et Orcopsis acutidens?. Ces deux Cétacés 

paraissent avoir été extrêmement abondants à l’époque où la mollasse s’est 
déposée en Suisse et en Bavière. A côté d'eux vivaient encore deux autres 
Dauphins. 

Il y a tout lieu de croire que tous ces ossements proviennent d'animaux 
contemporains qui hantaient la mer Noire à une époque où on pouvait la 
comparer par son extension et ses communications avec l'Océan atlantique. 


! Van Benenen, Les Thalassothériens de Baltringen, Bullet. de l'Acad. roy. de Belgique, 
2° sér., t. XLI; mars 1876. 

2? Ce Dauphin vivait également sur les côtes de Portugal. — Van Delli a figuré une de ses 
dents sous le nom de Physeter. 


Tome XLV. | 2 


10 UNE BALEINE FOSSILE 


DESCRIPTION. 


Parmi les ossements que M. Pilar a bien voulu nous communiquer, nous 
trouvons, comme nous l'avons dit, toute la partie postérieure d’une boîte 
cränienne, le condyle d’une mandibule, plusieurs vertèbres appartenant à 
diverses régions du corps et un fragment de côte. Ces os semblaient d’abord 
provenir de deux individus différents, mais, après les avoir débarrassés de la 
marne qui les enveloppait, il n’était pas difficile de voir que quelques-unes 
de ces vertèbres, plus grandes que les autres, étaient des lombaires se rap- 
portant exactement à une seule et même colonne vertébrale. 


Boîte crânienne. 


Les os qui constituent la boîte crânienne sont si parfaitement conservés 
que leurs caractères ne sont pas moins distincts que s'ils appartenaient à un 
Cétacé vivant: une des caisses tympaniques est encore en place et de chaque 
côté on voit l’apophyse mastoïde enchâssée dans la partie correspondante du 
temporal. La partie supérieure de la boîte crânienne est moins complète; la 
portion écailleuse de l’occipital est brisée, et toute la partie supérieure de 
Poccipital a pénétré dans la cavité crânienne. L'animal a sans doute été tué 
sur place. 

En avant la boîte crânienne est tronquée obliquement à la hauteur du 
sphénoïde antérieur, de manière que le rostre manque; la coupe a mis 
en évidence, indépendamment du corps du sphénoïde, en dessous le vomer 
et le palatin, sur le côté le temporal et le pariétal, en haut loccipital. Cette 
coupe, du reste fort irrégulière, doit avoir été faite quand la tête était 
solidement enchâssée dans la marne et c’est probablement au moment de 
l'extraction que la tête a été brisée. Il n’en est pas de même de la fracture 
de l’occipital qui a eu lieu probablement du vivant de animal, ou du moins, 


DE CROATIE. 11 


pendant qu’il était encore en chair. Cette interprétation s'accorde avec le 
passage d’une lettre de M. Pilar au sujet de l’âge de la marne qui renferme 
ces ossements : « Le calcaire de Leytha est développé dans les environs de 
Sused, dit-il, et dans ce calcaire on trouve assez de restes pour qu'on puisse 
le ranger dans le Helvétien de Ch. Meyer. Or un bloc de ce calcaire de 
Leytha se trouve enchâssé dans les marnes grises, et, selon mon avis, il y 
est arrivé comme bloc erratique qui s’est précipité dans la mer du haut d’un 
rocher dolomitique rongé par les vagues. » 

Le Cétacé entier a été pris sans doute dans cet éboulement et nous 
voyons les ares neuraux de plusieurs vertèbres dorsales chevaucher sur le 
corps de los. 

Ainsi, toutes les parties de la base du crâne sont, comme nous venons de 
le dire, parfaitement conservées; en arrière on voit les apophyses condy- 
loïdes saillantes de l’occipital et entre elles le sillon qui les sépare sous 
forme d’une gouttière. Le condyle de gauche est seul en place; sa surface 
mesure, en suivant la courbure, 12 centimètres en longueur et 5 centi- 
mètres en largeur. 

Le grand trou occipital n'est pas sans présenter un intérêt particulier : la 
direction de la surface articulaire du condyle montre que la tête n’est point 
articulée à l’atlas comme celle des Cétodontes, mais plutôt comme celle des 
Mystacocètes, c’est-à-dire qu’elle forme un angle avec la colonne vertébrale, 
au lieu de se placer dans l'axe du corps. Le Cétacé à fanons nage la bouche 
ouverte et le rostre levé, tandis que le Cétodonte tient la bouche fermée en 
Poursuivant sa proie. 

La partie squameuse ou écailleuse de l’occipital est brisée de manière que 
le bord même de l'os, qui forme la partie supérieure du trou occipital, a 
pénétré dans la cavité du crâne et a même bouché la partie supérieure de 
l'entrée, Le cerveau comme la partie antérieure de la moelle épinière ont 


dû être écrasés en même temps. 

La face supérieure de cette portion de l'occipital présente une crête sur 
la ligne médiane, qui augmente d'arrière en avant et toute cette région, au 
lieu d’être bombé, présente une forte dépression; sur les bords il se relève 
au-dessus des pariétaux. Il en résulte que la boîte crânienne, au lieu d’être 


42 UNE BALEINE FOSSILE 


arrondie à la surface est, au contraire, creusée comme dans les Aulocètes. 

La portion écailleuse du temporal recouvre une grande partie du pariétal 
qui est remarquable par la grande épaisseur de ses parois. C’est dans la 
coupe, que nous figurons plus loin, que l’on voit bien ce développement 
extraordinaire. On voit fort bien aussi au-devant de la caisse tympanique, 
qui est placée à droite, on voit fort bien, disons-nous, la gouttière qui loge la 
trompe d'Eustache et son entrée dans un repli de los palatin. Tous les os de 
la boîte crânienne portent les traces d’une pression exercée obliquement de 
haut en bas. 

La face inférieure de la portion basilaire de l’occipital est régulièrement 
unie entre les deux protubérances, à côté desquelles se trouve la caisse 
tympanique ; ces protubérances existent dans plusieurs Mystacocètes fossiles 
et, dans le Cétacé qui nous occupe, c’est entre elles que l’on voit le bord 
postérieur du vomer; ces protubérances ont à peu près le volume des caisses 
tympaniques. Les Balénoptères vivantes ne montrent qu’une légère saillie à 
la place qu’elles occupent ici. À côté de ces protubérances on voit la cavité 
du temporal dans laquelle est logée la caisse tympanique. A la manière 
dont elle est sertie dans cet os on voit également bien que le Cétacé d’Agram 
est un Mystacocète. 

Le vomer s'étend en arrière jusqu’au milieu des protubérances dont nous 
venons de parler et qui sont bien indiquées sur la planche qui accompagne 
ce travail; il recouvre le corps du sphénoïde. Le dessinateur n’a pas d’abord 
reproduit le bord postérieur de cet os, croyant sans doute, que la ligne 
transverse du bord libre est un repli accidentel. Sur la ligne médiane du 
vomer apparaît une crête, qui se développe d'arrière en avant et forme le 
commencement de la cloison qui sépare les fosses nasales. On voit donc 
parfaitement dans le dessin l’origine des évents. Le vomer représente bien les 
os en V des vertèbres crâniennes. 

La caisse Lympanique est remarquable par sa forme régulière ; toute sa 
surface externe est parfaitement arrondie. Cette caisse, vue par-dessous, est 
comparativement large et son diamètre antéro-postérieur est un peu plus 
grand que son diamètre transverse : le premier mesure 7 centimètres, le 
second en mesure 4 1/2. En avant elle est terminée par une ligne légèrement 
oblique, qui remonte du bord externe au bord antérieur, En arrière la caisse 


DE CROATIE. 15 


se rétrécit et prend une forme conique; sur le bord externe on voit, dans l'os 
en place, le repli derrière lequel se trouve lorifice de la membrane du 
tympan. Cet os est figuré en place planche I. Nous l'avons figuré, seul, par 
sa face interne, planche I, figure 14. Il est remarquable surtout par la ligne 
diagonale qui le sépare en deux moitiés presque égales en étendue. 

L'apophyse du tympanal, auquel nous avons conservé le nom de mastoi- 
dienne et qui n’est pas sans offrir des caractères fort importants pour la 
distinction des genres et des espèces, est en place des deux côtés. Cette 
apophyse est étroite, allongée et se fait remarquer surtout par sa forme parti- 
culière, puisqu'elle conserve à peu près la même largeur dans toute son 
étendue. Sa longueur n’a rien d’extraordinaire; elle est plutôt grêle que mas- 
sive et présente un bord saillant sur une grande partie de sa longueur. Elle 
est figurée des deux côtés en place, planche I. On la voit dans toute la 
largeur de la gouttière qui lui est formée par le temporal. Cette apophyse 
diffère notablement de toutes celles que nous connaissons dans les Cétacés 
fossiles d'Anvers ; celle du Plesiocetus hupschii, figurée dans notre Ostéogra- 
phie, planche XVI, figure 47, et celle du Plesiocetus dubius, figurée dans 
le même ouvrage, planche XII, figures 2, 3 et 4, sont celles qui s’en appro- 
chent le plus. Au-devant de cette apophyse, on voit une gouttière large, 
profonde et qui loge le conduit auditif externe. Derrière la caisse tympa- 
nique le temporal est creusé par une espèce d’enlonnoir que nous avons vu 
également chez d’autres Mystacocètes fossiles. 

Le palatin n’est visible que du côté droit de l'animal; à gauche il est 
complétement absent. Il n'offre quelque intérêt que par la coupe, qui le 
montre dans ses rapports avec les autres os du crâne; par son bord interne, 
il semble être la continuation du vomer, passe ensuite sous le pariétal et le 
temporal, puis se replie en dessous pour former le plancher des fosses nasales. 

Le ptérigoïdien est représenté dans le dessin par une bande assez large 
Située entre le tympanal et le palatin. Toute la partie postérieure est brisée de 
manière que la gouttière, qui établit la communication entre les fosses nasales 
et l'oreille moyenne, est mise à nu. 

En comparant la base du crâne du Mésocète d'Agram avec cette même 
région des Balénoptères vivantes, on voit des différences notables qui les 
éloignent considérablement les uns des autres; d’abord, l’espace qui sépare 


14 UNE BALEINE FOSSILE 


les condyles de l’occipital des os ptérigoïdiens est beaucoup plus grand dans 
les Mésocètes que dans les autres, et les condyles eux-mêmes sont plus éloi- 
gnés entre eux; et ce qui distingue ensuite les espèces fossiles, c’est la forte 
tubérosité qui se trouve de chaque côté du tympanal et entre lesquelles il se 
forme une gouttière à laquelle conduisent les deux fosses nasales. Cette por- 
tion basilaire de l'occipital présente ainsi des caractères propres. 

La partie postérieure du crâne des Mésocètes ne présente pas moins de 
différences, si on la compare avec cette même partie des Balénoptères 
actuelles; on est frappé d’abord de sa grande largeur, qui résulte de l'écar- 
tement des os temporaux et qui les rapproche plus des vraies Baleines que 
des Balénoptères. Il en résulte que le contour du temporal est changé com- 
plétement; cet os, vu par sa face inférieure, qui correspond au condyle de 
la mandibule, affecte une forme triangulaire dont la base est en dehors et le 
sommet en dedans; dans les Mésocètes, au contraire, l'os est peu étendu 
d'avant en arrière et le bord externe est parfaitement arrondi, au lieu de 
former la base d’un triangle. Il en résulte que la mandibule a beaucoup moins 
de jeu dans les Mésocètes et que le temporal laisse à nu la gouttière du 
conduit auditif, l’'apophyse mastoïde et la partie postérieure de l'occipital. 

Si nous comparons ensuite la partie supérieure du crâne dans ces deux 
Cétacés, nous voyons l'occipital s'étendre à peu près de la même manière en 
se rétrécissant en avant; mais sur le côté c’est à peine si le temporal déborde 
l'occipital dans la Balænoptera rostrata, tandis que dans le Mésocète, ce 
temporal dépasse notablement l’occipital en dehors et élargit la base du crâne. 

Nous ne pouvons ne pas faire remarquer que la forme que prend l'occi- 
pital en avant, dans sa partie qui constitue la voûte de la cavité crânienne, 
fait ressembler complétement les Mésocètes qui nous occupent aux espèces 
du même genre trouvées à Anvers, c’est-à-dire que, dans les uns comme 
dans les autres, cet os se termine en avant en pointe et se relève sur le côté; 
la voûte, au lieu d’être bombée, comme dans les crânes en général, est au 


contraire creusée au milieu. Les parois du crâne, formées par l’occipital, ont 
notablement plus d'épaisseur dans le Mésocète que dans la petite Balénop- 
tère et le cerveau, à en juger par la cavité qui le loge, est bien moins volumi- 
neux et moins étendu en avant. Toute la boite crânienne a pris de 
l'extension en largeur. 


DE CROATIE, 15 


Le crâne du Mésocète d’Agram est brisé derrière los frontal de 
manière que nous avons une coupe transversale de cette région qui nous 
montre en dessous le corps du sphénoïde antérieur, en dessous de celui-ci 
la lame du vomer qui forme les parois de la partie inférieure des fosses 
nasales; en dehors de celui-ci le palatin formant les trois quarts des parois 
des fosses nasales; puis, sur le côté, en dehors, on voit le temporal aminci 
dans cette région et couvrant le pariétal qui a acquis une grande épaisseur; en 
haut on voit la partie antérieure de l’occipital, dont toute la partie qui forme 
la voûte du crâne est défoncée. Le crâne est séparé des os de la face comme 
si l’on avait fait une coupe pour juger des rapports des os entre eux; aussi, 
pour apprécier les affinités des Mésocètes avec les Balénoptères actuelles, 
avons-nous fait faire une coupe tranversale d’une tête de Balænoptera 
rostrata, passant en dessous, à travers le vomer, le sphénoïde et le palatin, 
sur le côté, à travers le temporal et le pariétal, en dessus, à travers 
l'occipital. Cette coupe correspond exactement avec la fracture du crâne de 
Mésocète. 

En comparant cette coupe de Balænoptera rostrata avec celle de Meso- 
celus, on est frappé de voir une différence notable dans la disposition géné- 
rale des os; la tête de ces derniers est étendue en largeur, à sa base surtout, 
et cette extension a lieu aux dépens de la hauteur, de manière que la boîte 
Crânienne est notablement plus élevée dans cette espèce vivante que dans 
l'espèce fossile; le corps du sphénoïde a au moins deux fois plus de largeur 
que de hauteur, tandis que le corps du sphénoïde de la Balænoptera rostrata 
a le double en hauteur ; le palatin consiste dans une lame qui se replie de 
manière à former une cavité qui s'étend horizontalement sous le sphénoïde 
dans le Mésocète et à peu près verticalement de bas en haut à côté du 
Sphénoïde ; c’est par cette cavité formée par le ptérigoïdien que l’oreille 
moyenne communique avec les fosses nasales. 

Le frontal a une épaisseur considérable pour constituer les parois de la 
cavité crânienne dans le Mésocète, et le temporal le recouvre sur les flancs 
Comme l’occipital le recouvre au-dessus; nous reproduisons ici ces deux 
Coupes, qui, sans être faites au même point, montrent cependant la différence 
énorme qui éloigne ces Mystacocètes vivantes des fossiles. 


16 UNE BALEINE FOSSILE 


Fig. 4. Coupe du crâne de Meso- 
cetus agrami, derrière le frontal. 


Fig. 2. Coupe du crâne de Balæ- 
noptera rostrata à travers le frontal. 


He) Dans les deux figures a indique le 


sphénoïde, b le palatin, c le pariétal, 
Le 4 d l'occipital. 


DE CROATIE. 17 


La mandibule du Cétacé d’Agram est représentée par la partie la plus 
importante de cet os, c’est-à-dire, par le condyle articulaire ; cette partie de 
los, comme nous l'avons déjà fait remarquer, présente de grandes variations 
qui sont en rapport avec le genre de vie de l'animal. Ces variations sont en 
effet directement en rapport avec le régime et ont l'importance des dents 
des Mammifères terrestres. 

Pour bien juger de cette importance il est bon de placer quelques mandi- 
bules de Baleines, de Balénoptères et de Dauphins les unes à côté des autres ; 
de prime abord on est frappé du peu de ressemblance qui existe entre les 
Mystacocètes et les Cétodontes sous le rapport du condyle de la mandibule et 
de la face glénoïde du temporal; la face glénoïde est presque horizontale 
dans la Baleine franche, comme le montre le dessin de la tête publié par 
Cuvier, tandis que les Cétacés à dents ont cette surface presque verticale; 
dans les jeunes Baleines elle est entre les deux et l’on peut dire que les 
Baleines franches, jeunes, sont, sous ce rapport, également plus près des 
Dauphins que les adultes. Il résulte de cette disposition de la face glé- 
noïde que la face articulaire du condyle doit présenter des modifications 
correspondantes dans sa forme, dans la place qu'il occupe et dans sa 
direction. On comprend le motif de ces modifications. 

Les premiers, les Baleines franches, ne se nourrissent que de Mollusques 
et de Crustacés de petite taille qui fourmillent dans la mer et elles nagent la 
bouche ouverte pour engouffrer cette proie de petite dimension. C’est comme 
l'ouverture du chalut qui traine au fond de la mer. Cette bouche ne se ferme 
guère; les Cétacés à dents qui se nourrissent de poissons, nagent la bouche 
fermée et ne l’ouvrent que pour happer la proie; ils ferment la bouche pour 
ne pas la laisser échapper. 

Une Baleine véritable, qui rencontre un banc de manger, avance douce- 
ment el, nageant la bouche ouverte, engouffre l’eau avec les Crustacés ou 
Mollusques vivants ; la mâchoire se relève ensuite légèrement avec ses lippes, 
la langue se rapproche du palais et l’eau est chassée à droite et à gauche à 
travers le treillis formé par les fanons. 

La mandibule des Gétodontes est toute différente de celle des Mystacocètes : 
d'abord elle est droite, au lieu d’être courbée et, en général, vers le milieu de 


Tome XLV. 3 


18 UNE BALEINE FOSSILE 


sa longueur, elle s'élève insensiblement, de manière qu’elle est souvent plu- 
sieurs fois plus haute en arrière qu’en avant ; l'os est tronqué en arrière et 
consiste dans une lame mince qui s'élève verticalement montrant une surface 
articulaire étroite vers le milieu de sa hauteur. Cette surface articulaire 
semble occuper le milieu de la hauteur; l’apophyse coronoïde s'élève pour 
ainsi dire au-dessus du condyle et l’échancrure sigmoïde est à peine distincte. 

Comme différence entre la mandibule des Baleines et celle des Cétodontes 
on doit signaler encore l'entrée du canal dentaire; dans les premiers, il y a un 
orifice véritable à une certaine distance du condyle ; dans les Cétodontes 
il n’y a pas d’orifice proprement dit : l'entrée commence immédiatement au 
devant du condyle et occupe toute la hauteur de l'os. La mandibule est 
pour ainsi dire formée de deux lames juxtaposées, laissant un certain espace 
entre elles, dont l’interne ne s'étend pas aussi loin en arrière que l’autre; 
l’espace qui sépare les deux lames fait fonction de canal dentaire. Autant cet 
os est épais et solide quand il y a des fanons autant il est mince et délicat 
quand il y a des dents. 

Dans le mammifère en général, l'apophyse coronoïde est séparée du con- 
dyle par un col et une échancrure sigmoïde très distincte, tandis qu'ici, 
comme nous venons de le dire, l'échancrure sigmoïde est peu prononcée et 
l’apophyse coronoïde est élevée au-dessus du condyle. Le bord postérieur 
forme avec le bord inférieur à peu près un angle droit dans les divers Céto- 
dontes. Entre cette mandibule de Baleine et la mandibule de Cétodonte on 
trouve tous les degrés intermédiaires dans des Balénoptérides, de manière 
que chaque modification correspond à une différence dans la manière de . 
vivre de l'animal. Il y a donc, sous ce rapport, une différence très-grande 
entre le Cétacé à fanons et le Cétacé à dents. C’est cette considération qui 
nous a fait attacher une grande importance au condyle de la mandibule, pour 
établir des coupes génériques parmi ces grands Cétacés. 

La face postérieure du condyle de Mésocète que nous décrivons est un 
peu plus haute que large, bombée vers le milieu et sur le bord externe 
couverte de sillons qui partent de la protubérance centrale. En dessus le 
condyle est entier, en dessous il est cassé juste à l'endroit qu’on peut 
appeler le col et qui loge le nerf du maxillaire inférieur avec les vaisseaux 


DE CROATIE. 19 


qui l'accompagnent. Ce condyle a 8 centimètres en largeur, 9 en hauteur. 
Il est représenté planche XI, figure 10, vu de face. En dessus et en dessous 
nous avons complété le dessin. Ce n’est pas un condyle saillant et arrondi 
comme une téte de fémur ou d’humérus, c’est une surface aplatie et élargie 
avec des limites précises indiquées par des lèvres qui la bordent tout autour. 
La mandibule est tronquée et c’est par le milieu de la troncature que la face 
condyloïdienne s'adapte à la face glénoïde à peu près verticale. En dessous 
de la face du condyle on voit le bord interne de l'os s’échancrer pour loger 
le nerf et les vaisseaux qui se rendent au canal dentaire. La partie qui est 
en dessous de cette échancrure correspond au talon qui est extraordinai- 
rement développé dans l’Erpétocète dont nous: avons parlé précédemment. 

La face interne est remarquable par une excavation profonde qui s'étend 
en haut et une saillie arrondie à la partie inférieure qui doit servir de 
plancher au nerf, sous la protection du bord du condyle. L'échancrure 
sigmoïde ne commence pas immédiatement au-devant du bord du condyle; 
il y a une partie qui se trouve sur le même plan que lui. La face externe 
est ondulée comme l’interne et se creuse légèrement vers le milieu de sa 
hauteur. Comme los est brisé nous voyons parfaitement la différence de son 
épaisseur en dessus et en dessous; en dessus la mandibule s’amincit extraor- 
dinairement et n’a pas plus d'épaisseur qu'une feuille de carton; en dessous 
elle s’épaissit de manière qu’à la hauteur du col, elle a quatre ou cinq fois 
celle épaisseur. Nous ne pouvons rien dire ni du bord supérieur ni du bord 
inférieur ; ils sont tous les deux brisés. 


Colonne vertébrale. 


La portion de crâne que nous venons de faire connaître est accompagnée 
de treize vertèbres, appartenant aux diverses régions du corps. Il n’y a que 
les vertèbres cervicales qui manquent. Ces vertèbres indiquent bien l'âge 
adulte de l'animal; si les dorsales ont encore leurs épiphyses libres, les 
caudales les ont au contraire complétement réunies, ce qui est conforme aux 

- Observations faites d’abord par Flower que la réunion des épiphyses com- 


20 UNE BALEINE FOSSILE 


mence dans la région caudale. Ce qui prouve la justesse de cette observation, 
c’est que nous avons un squelette de femelle de Globiceps, qui est venue 
à la côte, dans un état de grossesse à terme, et dont les épiphyses de la 
région caudale sont soudées tandis que celles de la région dorsale sont encore 
toutes séparées. 

Nous avons tout lieu de croire que la vertèbre que nous figurons planche H, 
figure 1, est la première dorsale, aussi bien, à en juger, par l’épaisseur du 
corps, l’origine et la direction du pédicule neural, la largeur du canal verté- 
bral, que par la face articulaire de la côte qui est placée très-bas. Si nous 
comparons cette vertèbre à la première dorsale de la Balænoptera rostrata, 
nous trouvons que le corps est comparativement plus épais et que l'arc neural 
comme les apophyses sont plus robustes ; l'impression de la tête de la côte 
est aussi plus accentuée. Nous avons tout lieu de croire que ce Célacé de la 
mer Noire était plus solidement bâti que la petite Balænoptera rostrata des 
temps actuels. 

La première dorsale à une épaisseur de 35 millimètres sur 95 de largeur 
et 65 de hauteur. Les épiphyses sont soudées tout en indiquant parfaitement 
leurs limites dans toute la circonférence. 

Le canal vertébral est fort large, et le pédicule de Parc neural qui indique ses 
limites est fort délicat. 

La face latérale de la vertèbre est déprimée au milieu, et sur la ligne 
médiane légèrement bombée au-dessus ; en dessous elle montre une saillie 
en forme de crête sur la ligne médiane et à côté de laquelle on voit une 
légère dépression. 

Ce que cette vertèbre offre surtout de remarquable, c’est la forte surface 


articulaire pour la tête de la côte et le bord nettement relevé qui entoure 
toute celte surface. 


Tous les caractères de la première vertèbre se reproduisent naturellement 
dans la vertèbre suivante ; nous n’avons qu’à signaler son augmentation en 
diamètre antéro-postérieur. La crête médiane à la face inférieure est plus 
prononcée et s'étend d’une épiphyse à l’autre. La troisième vertèbre dorsale 
a une épaisseur de 50 millimètres en y comprenant les épiphyses: il est 
assez curieux de voir que l’épiphyse antérieure est en place et se trouve 


DE CROATIE. 21 


accolée à Pépiphyse de la vertèbre précédente ; l’épiphyse postérieure 
manque. Il résulterait de ceci que l’épiphyse antérieure se soude mieux 
ou plus vite que la postérieure. Par suite du. développement de la crête 
médiane à la face inférieure, la vertèbre devient carénée. Ces trois vertèbres 
ne se suivent pas, comme l'indique l’épiphyse antérieure. Quand nous disons 
troisième dorsale, nous voulons dire troisième de cette région qui est en 
notre possession et qui, à en juger par comparaison, est réellement la troi- 
sième en rang. Le pédicule de larc neural prend racine un peu plus haut 
que dans la vertèbre précédente. Cette vertèbre est représentée vue de face 
planche XI, figure 7; elle se fait remarquer par son étendue en largeur aux 
dépens de la hauteur ainsi que par la largeur du canal vertébral. Le disque 
mesure en largeur 10 centimètres, en hauteur 7 centimètres. Ces trois 
vertèbres sont représentées planche XI, figures 1, 2 et 3, vues de profil ; 
elles montrent fort distinctement la fossette articulaire. Ces fossettes sont 
placées très-bas dans la première dorsale et montent dans les vertèbres 
Suivantes. 

Au Cabinet de minéralogie de Vienne se trouve une vertèbre dorsale, sans 
indication de nom, provenant, d'aprés l'étiquette qui l'accompagne, de Pod, 
près d’Agram (Croatie). Elle a été remise en 4854. D’après l’épiphyse, elle 
provient d’un animal adulte; sa facette articulaire est très-marquée immé- 
diatement en dessous du pied du cercle neural, ce qui dénote qu’elle est 
postérieure à la troisième dorsale. Nous avons tout lieu de croire que c’est 
la cinquième dorsale. Nous ne doutons pas qu’elle ne provienne de la même 
espèce qui nous occupe ici. 

Nous avons en outre cinq autres vertèbres de la même région dont on dis- 
tingue aisément la place relative, par le diamètre antéro-postérieur qui 
augmente de vertèbre en vertèbre, par l’apophyse transverse qui prend 
naissance de plus en plus bas, ainsi que par le canal médullaire qui se rétrécit 
Successivement. La première est figurée même planche, figure 4. Le disque 
ne mesure plus en largeur que 8 1/2 centimètres et 7 1/2 centimètres en hau- 
teur, D’avant en arrière, en y comprenant les épiphyses, cette vertèbre mesure : 
T centimètres. Comme la troisième dorsale ne mesure que 5 centimètres, il y 
à tout lieu de croire que c’est la cinquième et que la quatrième manque. À sa 


22 UNE BALEINE FOSSILE 


face inférieure, cette vertèbre n’est pas carénée, mais on voit sur le côté une 
excavation assez profonde qui augmente depuis la ligne médiane jusqu’au 
pied de l’apophyse transverse. Les apophyses transverses s'élèvent encore 
très-haut, c’est-à-dire que le pédicule de larc est placé à la hauteur du 
canal vertébral, et l'apophyse proprement dite qui porte la côte s'élève peu 
de bas en haut, mais beaucoup plus de dedans en dehors. Le pédicule 
s'étend davant en arrière, c’est-à-dire dans presque toute la longueur de 
la vertèbre comme dans tous les Mystacocètes. Dans les Cétodontes, il y a 
toujours un grand espace entre les pédicules des vertèbres. En avant il 
s'élève presque sur le bord en disque et à la même distance que l’apophyse 
transverse et en arrière il n’est séparé du disque que par la longueur d’un 
centimètre. Nous n'avons pas de zygapophyses conservées. On en voit seule- 
ment des traces. Le corps à la longueur de 7 centimètres, à 4 millimètre 
près la hauteur est égale à la longueur et la largeur a près de 2 centimètres 
de plus, à la hauteur des apophyses transverses. L’are neural est assez bien 
conservé pour juger de l'ampleur du canal vertébral. A la base, il mesure 
4 centimètres en largeur et en hauteur 2 ‘/2 centimètres. La face antérieure 
porte son épiphyse en place et l’épiphyse postérieure de la vertèbre précé- 
dente est encore réunie. Cette dernière a faiblement glissé sur elle. La dorsale 
suivante, la cinquième a un 1/2 centimètre de plus en longueur et en hauteur 
que la précédente, et elle a conservé la même largeur. La face inférieure est 
moins arrondie et mérite presque la qualification de carénée. L’apophyse 
transverse nait un peu plus bas et présente évidemment plus de largeur à sa 
base, et plus de solidité. Ni l’une ni l’autre de ces vertèbres ne portent de 
traces de facette articulaire pour les côtes. 

La vertèbre qui suit a le pédicule de larc neural incomplet, de manière 
que lon ne peut bien juger des dimensions du canal vertébral. Il n’a 
guère changé si on le compare avec celui de la vertèbre précédente. Le 
corps de la vertèbre a très-peu changé aussi; seulement son apophyse trans- 
verse naît un peu plus bas que dans la précédente. Les zygapophyses sont 
brisées jusqu'à la base et tout l'arc a été déplacé de manière qu'il a perdu sa 
direction naturelle. Le corps mesure en largeur 9 centimètres, en hauteur 
A centimètre de moins, et en longueur sans les épiphyses, également 9 centi- 
mètres. 


DE CROATIE. 23 


La vertèbre suivante est intéressante sous divers rapports; d’abord son 
épiphyse antérieure manque en avant et l’on voit un fragment à la face pos- 
térieure de la vertèbre précédente qui a glissé de manière à ne plus couvrir 
que le quart du corps de la vertèbre ; les apophyses transverses sont fort 
larges et s'étendent horizontalement vers le milieu du corps. Nous ne savons 
au juste quelle largeur elles atteignent. L’are neural est incomplet; il a été 
brisé de manière qu'une partie du pédicule est seule conservée. C'est une 
fracture très-curieuse qui montre avec quelle violence tous ces os ont dû être 
mutilés avant de s’ensevelir dans la marne. Cette vertèbre a 9 centimètres de 
large, 8 de long, sous les épiphyses, et 7 1/2 de haut. La face inférieure est 
encore parfaitement arrondie et légèrement creusée en dessous de l’apophyse 
transverse. 

La huitième vertèbre que nous possédons est une lombaire fort bien con- 
servée, à l’exception de larc neural. Elle est figurée planche l, figure 5, 
vue de profil et figure 8 vue de face. Elle mesure un ‘2 centimètre de plus 
en longueur et à peu près autant en hauteur; la face inférieure n’a guère 
changé, si ce n’est que la carène est devenue plus saillante. L’apophyse 
transverse nait un peu plus bas que dans la précédente ; par la direction de 
celte apophyse comme par son origine on voit que ces dernières dorsales se 
suivent comme les trois premières. Le canal vertébral a considérablement 
perdu en largeur, puisqu'il ne mesure plus que 3 à 3 ‘/2 centimètres de lar- 
geur. Comme les vertèbres suivantes, elle a conservé ses deux épiphyses. 
Cette vertèbre, la neuvième en nombre, a la même largeur et ne diffère de 
la précédente ni en hauteur ni en largeur ; la carène de la face inférieure se 
dessine plus nettement et les apophyses transverses se dirigent un peu plus 
en avant, En dessus comme en dessous de l’apophyse tranverse, elle est 
plus ou moins creusée à sa surface de manière que le bord du disque 
déborde légèrement. L'espace qui la sépare de l'arc neural est un peu plus 
grand. Le canal vertébral a 3 centimètres de large au milieu et le plancher 
est pourvu d’une crête sur la ligne médiane au moins dans la partie 
recouverte par larc neural. Un fragment d’apophyse logé dans le canal 
Verlébral montre que ces os ont dû être pendant assez longtemps le jouet des 
vagues, Cette vertébre s'allonge, en même temps que les deux diamètres, 


24 UNE BALEINE FOSSILE 


vertical et transversal, de manière qu’elle est devenue plus volumineuse 
dans tous les sens ; à la face inférieure, la carène est devenue plus saillante 
et le corps est plus profondément creusé au-dessus comme au-dessous de 
l’apophyse transverse. L'arc neural est devenu plus étroit et le plancher 
conserve les mêmes caractères. Au milieu il n’a plus que la largeur de 
2 centimètres. Le corps mesure en largeur 10 1/2 centimètres, en hauteur 8 
et en largeur, mesuré à la surface de lépiphyse, 9. I y a une lacune entre 
cette vertébre et la première caudale que nous possédons. Cette vertèbre 
s’allonge un peu puisqu'elle mesure 10 centimètres et 2 ou 3 milli- 
mètres; en même temps la carène est plus prononcée à la face inférieure du 
corps et le côté est plus profondément creusé. Les apophyses transverses ne 
sont pas élargies avec la longueur du corps, à en juger par la racine qui 
se dirige plus obliquement de dedans en dehors et d'arrière en avant. En 
hauteur elle a au moins 9 centimètres et 10 en largeur. En comparant les 
vertèbres de la région caudale à celles de la Balænoptera rostrata, nous 
estimons que les cinq premières caudales manquent et que nous possédons 
les cinq suivantes. 

Nous avons plusieurs vertèbres caudales qui se suivent à peu près; les 
premières sont comme ailleurs les plus grandes et les plus fortes de toute la 
colonne vertébrale. C’est dans cette région que l'effort est le plus grand pen- 
dant la natation. Il faut les examiner avec soin, quand elles ne sont pas 
complètes, pour reconnaitre leur véritable position. 

Il est à remarquer que les épiphyses de toutes ces vertèbres sont complé- 
tement soudées. La première a encore un canal vertébral distinct mais il est 
fort étroit, puisqu'il ne mesure pas plus de À centimètre dans sa plus grande 
largeur. Les apophyses transverses sont très-fortes, mais courtes. La saillie 
des surfaces articulaires des os en V est peu prononcée en avant, mais, au 
contraire, très-forte en arrière. Le disque est plus petit en avant qu’en arrière ; 
il mesure en avant : hauteur, 10 centimètres, largeur 10 1/, centimètres ; la 
longueur du corps est de 44 centimètres. C’est la plus forte vertèbre que 
nous possédons de cet animal. 

La vertèbre suivante est entière; le canal neural est naturellement plus 


étroit, mais il est encore complet: lare qui le protège porte au milieu une 
2 Fi 


DE CROATIE. 25 


apophyse épineuse peu saillante, mais à côté deux zygapophyses s'élèvent 
qui mesurent à leur base 4 centimètre d'épaisseur. L'apophyse transverse est 
très-forte et large, occupant presque toute la largeur de la vertèbre. La saillie 
articulaire des os en V en arrière est très-prononcée, de manière que la ver- 
tèbre vue de profil présente au milieu une profonde échancrure. Elle mesure 
en largeur ‘/ centimètre de moins que la précédente et a, à peu de chose 
près, la même hauteur. Le disque en avant est plus fort qu’en arrière, de 
sorte que la grosseur diminue rapidement. 

La vertèbre suivante subit peu de modifications ; elle est bien conservée 
comme les deux précédentes et nous en pouvons par conséquent mieux juger 
les caractères. L’arc neural est complet avec son apophyse épineuse qui est 
trés-courte et les deux zygapophyses sont un peu plus développées que 
dans celle dont nous venons de parler. Nous avons fait dessiner cette vertèbre, 
vue de face, planche IF, figure 6. Les apophyses transverses sont beaucoup 
plus faibles et sont percées au milieu pour le passage de l'artère. En dessous 
la vertèbre est fortement échancrée au milieu quand on la voit de profil. 
Elle mesure en longueur 10 centimètres, autant en hauteur et 1 centimètre 
de plus en largeur. 

La quatrième caudale présente encore un arc neural dont l’apophyse 
épineuse est représentée par un bourrelet sur la ligne médiane que l'on 
n'aperçoit même pas quand on la voit de profil. Les zygapophyses anté- 
rieures ont encore la grosseur d’une amande, tandis que les postérieures ne 
dépassent pas la grosseur d’un gros noyau de cerise. L'apophyse transverse 
manque complétement et on voit le trou de l'artère vers le milieu de l’espace 
qui devrait être occupé par elle. A sa face inférieure elle est creusée d’une 
gouttière longitudinale dans laquelle on peut loger un doigt. En avant et en 
arrière les facettes articulaires pour les os en V sont peu prononcées. Le 
disque est de forme ovale sur la face postérieure comme sur la face anté- 
rieure et celui de devant a ses deux diamètres, transversal et vertical, un peu 
plus grands que celui de derrière. 

La dernière vertèbre que nous possédons est une cinquième caudale. Elle 
est complète comme les précédentes. Il existe encore un canal vertébral dans 
lequel on peut passer un tuyau de plume, mais tout larc neural est réduit 


Tome XLV. 4 


26 UNE BALEINE FOSSILE 


à une lame mince sans saillie qui recouvre le canal. C’est tout au plus si l’on 
peut dire qu'il existe encore des traces de zygapophyses. Sur les flancs, au lieu 
d’une apophyse transverse, la vertébre présente une large gouttière d’un 
troù à l’autre, de manière qu’en avant comme en arrière le disque déborde 
légèrement. À la face inférieure, on voit une gouttière longitudinale pro- 
fonde dans laquelle on pourrait cacher une amande, et des facettes articu- 
laires faiblement creusées en avant et en arrière. La face antérieure est 
légèrement creusée; la postérieure, au contraire, est légèrement bombée ; on 
pourrait dire à la rigueur qu’elle est procælique. 

Ainsi les cinq vertèbres dont nous venons de parler se suivent et leurs 
épiphyses sont complétement soudées en avant comme en arrière. On voit bien 
ici la confirmation de l'observation faite d’abord par M. Flower, que c’est 
à la région caudale que la coalescence des vertèbres avec leurs épiphyses 
commence et qu’elle peut être complète dans cette région, quand ailleurs 
elles sont encore séparées. Ces cinq vertèbres se distinguent en même temps 
en dessus par la gouttière vertébrale qui, dans la dernière que nous possédons, 
laisse à peine passer une plume de pigeon, en dessous par la gouttière qui 
résulte de la fusion des surfaces articulaires des os en V antérieures avec les 
postérieures. L’artère, au lieu de passer au milieu de la vertèbre entre les 
saillies de ces os, perce, comme dans tous les Cétacés, à travers les parois 
de la gouttière, puis entre l’apophyse transverse à travers le corps de Fos lui- 
même, et pénètre par une gouttière derrière l'arc neural dans le canal de la 
moelle. Ces cinq vertèbres se rapetissent rapidement : la première a encore en 
largeur 10 centimètres, la seconde, 9, la troisième, 8, la quatrième, 7, et la 
cinquième ne mesure plus que 5 centimètres. En hauteur comme en largeur 
on voit la même décroissance : la première mesure 10 centimètres de hauteur 
sur 11 de largeur; la suivante, 9 1/2 sur 10 1/2; la troisième s’allonge de haut 
en bas et la vertèbre, vue de face, prend une forme ovale; sur 9 1/2 centi- 
mètres de hauteur elle wen a plus que 9 de largeur; la quatrième, sur 8 centi- 
mètres n’en mesure plus que 7 en travers, et la dernière, sur 8 en hauteur en 
a encore 7 en largeur; cette vertèbre diminue en largeur sans changer ses 
autres diamètres. 


DE CROATIE. 27 


Côte. 


Nous avons un fragment de côte qui est figuré planche XI, figures 12 et 13. 
La coupe ne nous offre rien de particulier, si ce n’est qu’elle indique une 
côte fort solide, aplatie en dedans comme en dehors, en dessus et en dessous, 
ce que nous ne trouvons ni dans les côtes des Balénoptères ni dans celles 
des Baleines. 


MESOCETUS AGRAMI. 


Tous les os dont nous venons de donner la description se rapportent 
à un seul animal, dont nous avons déjà fait mention en 1879 dans les 
Bulletins de l'Académie royale de Belgique. 

Cest par la forme particulière du condyle de la mandibule, condyle qui 
occupe le milieu entre le condyle des Mystacocètes et celui des Denticètes, 
que le Mésocète se distingue surtout des genres voisins. 

Si nous comparons les vertèbres que nous venons de décrire, avec celles 
du Musée de Linz, appartenant au genre Aulocetus, nous trouvons des diffé- 
rences notables surtout dans celles de la région caudale ; à Linz, il y a trois 
Caudales qui se suivent. En comparant notre cinquième caudale, figurée 
planche XI, figure 9, avec les trois caudales, figurées par Brandt, planche XVII, 
fig. 9°, 40° et 11° nous voyons les zygapophyses élevées comme deux ailes 
dans ces dernières, tandis qu’elles dépassent à peine l’apophyse épineuse dans 
l'animal d’Agram, et cependant, à en juger par la direction des apophyses qui 
Sont beaucoup plus développées dans l'animal de Linz, ces vertèbres devraient 
être plus voisines des dernières caudales. 

Comme nous ne connaissons de l’Aulocète de Linz que la partie supérieure 
du crâne et de notre Mésocète seulement la partie inférieure, il est difficile 
d’apprécier le degré d’aflinité qui existe entre la tête de ces deux Cétacés; 


28 UNE BALEINE FOSSILE 


mais nous pouvons comparer la base du crâne de notre Cétacé d’Agram avec 
le Cetotherium de Crimée figuré par Brandt, planche I, figure 2, et il résulte 
de cette comparaison que les caisses tympaniques sont placées beaucoup plus 
en dehors, dans le Cétacé de Crimée, que ses os palatins sont beaucoup 
plus allongés et que la saillie de la base de l’occipital, si caractéristique dans 
l'espèce d’Agram, fait complétement défaut ici. 

Comme nous l'avons vu plus haut, ces ossements ont été recueillis dans 
les marnes à Podused, près d’Agram, en Croatie. Ces marnes sont moins 
anciens que le Leithakalk et ils peuvent être considérés comme contemporains 
des dépôts sarmatiques. Ces dépôts s'étendent jusqu’en Perse, se trouvent 
entre des couches marines et des couches saumâtres et représentent la fin 
d’un dépôt marin. Ces marnes appartiennent à une époque où la mer Noire 
couvrait encore une grande partie des pays qui sont émergés aujourd'hui. 

On sait que le bassin de la mer Noire avait encore une grande extension 
à cette époque géologique, du moins si on le compare avec celui d'aujourd'hui; 
elle renfermait alors des Baleines véritables, des Dauphins, des Squalodons, 
des Phoques et des Siréniens. Les affluents et les embouchures nourrissaient 
sans doute comme aujourd'hui ces derniers Thalassothériens. Les Squalodons 
remplissaient probablement le rôle des Orques des temps actuels. 

A la suite de soulèvements, les eaux se sont retirées, le bassin s’est rétréci, 
la mer est devenue insensiblement saumâtre, et tous les grands Cétacés 
propres à la mer Noire ont été successivement anéanlis. 

On est loin de l’époque où l’on croyait à l’existence d’une Balénoptère 
propre à la Méditerranée, puisqu'on sait aujourd’hui d’une manière positive 


que tous les Cétacés que l’on observe dans cette mer intérieure viennent de 
l'Océan. 


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DE CROATIE. 29 


EXPLICATION DES PLANCHES. 


PLANCHE 1. 


La base du crâne de grandeur naturelle vue par sa face inférieure; on reconnaît en dessous 
et en arrière les deux condyles de l’occipital, les ailes du même os, la caisse tympanique qui est 
en place d'un côté, les apophyses mastoïdes des deux côtés; en dedans de la caisse tympanique 
on aperçoit une forte saillie de l’occipital qui se termine en avant par une crête médiane; à 
côté de cette crête médiane on voit la partie antérieure du palatin et entre lui et la caisse le 
sillon qui loge la trompe d’Eustache. 


PLANCHE IT. 


(Toutes ces figures sont de grandeur naturelle comme celle de la planche première.) 


Fig. 4. Première vertèbre dorsale. 


Seconde vertèbre dorsale. 


z 
R J 
X 


Troisième vertèbre dorsale. 


Sixième vertèbre dorsale, vue de profil. 


Onzième vertèbre lombaire, vue de profil. 
Sixième vertèbre caudale, vue de profil. 


Troisième vertèbre dorsale, vue de face. 


. 


Onzième vertèbre lombaire, vue de face. C’est la même représentée fig. 5. 


Ez 
4 
& @ NN © À o 


Cinquième vertèbre caudale, vue de face. 
Fig. 10. Condyle de la mandibule. 

Fig. 44. Caisse tympanique. 

Fig. 42. Côte. 

Fig. 45. Coupe de la côte. 


[em. de l'Acad. Royale.Tome XLIV. 


MESOCETUS AGRAMI. 


Mém. de l'Acad. Royale. Tome XLIV 


SUR | 


0 LADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


à 


DE PREMIÈRE ESPÈCE; 


PAR 


E. CATALAN, | 


ASSOCIÉ DE L'ACADÉMIE. 


PR RE ll 


(Présenté à'la Classe des sciences, dans la séance du 5 août 1882.) 


TER || 


Tome XLV. 


nn lasse x sé a x i á rasé FF 7 ani si és és si è dt ét =. 
jl $ 5 ; ERI alet TORN = pre g - = x i s 


EEEE moe dans À dé 


SUR 


L'ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 


Le petit travail que jai l'honneur de présenter à l’Académie peut être 
Considéré comme un complément à deux Notes, déjà anciennes, relatives à 
la même question (*). Aujourd’hui, après avoir reproduit une partie de la 
seconde Note (en y faisant quelques corrections), je déduis, de la méthode 
qui y était indiquée, la plupart des formules connues; après quoi je donne 
diverses propriétés du triangle de Lagrange, et une interprétation géomé- 
trique de la transformation de Landen. 


I. INTÉGRALE D'EULER. 


1. L'équation 


dx dy 
+ = 0 ‘ à . 4 " A $ r è . . (4) 
A(x:  A(y) 
élant mise sous la forme 
Ade A dy e ete en e doi 0) 


observons que, pour rendre le premier terme intégrable, on peut le multi- 
lier a ; 
P par cosza’ OU encore par cos?g [1 + tg? æ (Ay)’] 


È) Bulletins, février 1869; Comptes rendus, 25 mai 1874. 


4 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


En effet, 
> A(y)dx 
T cos? x 
Or, 


cos’x[1 + tgx(Ay) | = 1 — e sin?x sin?y = cos y[1 + tgy(Ax)*]. 


Nous pouvons donc prendre, au lieu de l'équation (2), 


__ A(yx $ miaii 
cos*xj 1 + tg’ (4y)°] cos y[1 epy g 


0. 


Soient, d’après la formule (3) : 
tga —1gx(Ay), tgp = tgy (Ax); . 
et, par conséquent, en posant 
1 = esinte siny = L: 


d (Ay)dx Sing cosx sin y cos ydy 
La = —— — —- ) 


L f L(Ay) 
LE (Ax)dy , Sin x cos x sin y cos yda 
es L(Ax) F 


puis, en vertu des équations (4), (2) : 


da + dB = 0. 


(4) 


(6) 


(7) 


(8) 


L'intégrale cherchée est donc, indifféremment, « + 8 = const., ou 


tg (a + 8) = const. ; savoir : 


arc tg[tgæ (Ay)] + are tg[ tgy (Ax) |] = «, 


sinx cosy (Ay) + siny cosx (Ax) 


à ire e 
cosx cos y — sin x sin y (Ax) (Ay) ee) 


(A) 


(B) 


(*) Après avoir démontré cette formule, Legendre ajoute : « Si l’on prenait deux angles 


» auxiliaires «, 8, tels que 
tga = tg vAly), tgl —=tgyA(x), 
» il en résulterait 
K=&+P, 


» ce qui est un moyen de calculer aisément par les Tables de sinus. » Comment l’illustre auteur 
du Traité des fonctions elliptiques ne s'est-il pas aperçu que ces variables «, 8 réduisent l’équa- 
tion (1) à la forme (8) ? 


mener er nee ren en ne ren 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 5 


2. Remarque. D’après les valeurs (7) : 


dx dy | (Ax)(Ay) — € sin x cosx sin y cosy (D) 


l dur] at 

o + Ty) L 
Ainsi, pour transformer, en une différentielle exacte, le premier membre 
de la proposée, il suffit de le multiplier par 


Ax) (Ay) — c?sin x cos x sin y cos} 
, — (à) (Ay) ee y cosy a 


Tout à l'heure, nous reviendrons sur ce sujet. 


3. Diverses formes de l'intégrale. Dans (B), la somme des carrés des 
deux termes de la fraction est 


cos?x cos*y + sin°x sin*y (1 — œ sin? x) (1 — c*sin°y) 
+ sin?æ cosy (1 — c* sin?y) + sin? y cos’x (1 — c? sin? x). 


Si l’on écrit ainsi celte quantité : 


Act + Be + C, 
ona: 


A= sin x sin‘y, 
B = — sin?x sin?y (sin?x + sin? y) — sin°x sin? y (cos*x + cos? y) = — 2 sin? x sin? y, 
C = cos? cos?°y + sin°x cos? y + sin?y cos*x + sin*æ sin*y = 1. 


Par conséquent, 


Act + Be? + C = (1 — c° sin? x sin*y) 
La formule (B) donne donc, si l'on prend convenablement les signes : | 


sing cos y (Ay) + sin y cos x (Ax) 


F AN R E E N 
08 : — si i Ax) (A 
cos x cos y — sin x sin y (Ax) (Ay) hieu ei a a 


| 
| 
| 
L | 
Fe ct | 
4. Suite. Pour æ = 0, y = p, à se réduit à (Ag) = V1 — c?sin?y. Je dis | 
que l’on a toujours | 


(Ax) (Ay) — œ sinx cosx sin y cosy 


A te a a | 


EE EEN EEN EP à dd S éd dd Sd CE US SL SG tee 


L 


6 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


de sorte que l'équation (E) est encore une intégrale. Cette proposition connue, 
assez visible à priori, sera démontrée si l’on vérifie que l’on a, identique- 
ment (*), 

[(Ax)(Ay)— sinx cosg siny cosy c| sing cos y (Ay)+sin y cosx (Ax) P=(4 ~oan sin yje (11) 
ou 


(1— ê sin?x) (1— e sin’y) + c'sin?x cos’x sin?y cos? y 
+ &sin*xcos*y(1— ¢ sin? y) + c’ sin? y cos? x (1 — csin°x)— 1 — 20 sin? sin?y + esinta sint y; 


ete, (*). 


Ə. Remarque. On a, simultanément, 


(1—csin?x sin*y}=[sinæ cosy(Ay)+siny cosx(Ax) = [cosx cosy — sin x sin y (Ax) (Ay) |? | (12) 


= [(Ax) (Ay)— œ sing cosxsiny cosy}? + Le sin x cosy (Ay) + csin y cos x (Ax)F 
Voici donc un carré décomposé, de deux manières différentes, en une somme 


de deux carrés. 


6. Une transformée de l'équation (1). D’après l'intégrale (C) : 


d e= cosy (Ay) + siny cosx e» | 6 
POP Re np: 19 L r on 7 La = , 


ou 
ne [=] an [es ?| „ S7 cosy [Ayda æ (A) dy] = 0; 


L L 


ou, en vertu de la proposée, 


208 y (Ay) os x (Ax 
inaa [A | Me inya | 25 | E A (do) 


Cette équation (15) est la transformée dont il s’agit. Comme on peut l’établir 
E LV: z ; o 

à priori (**), il en résulte une seconde méthode d'intégration, sur laquelle 
nous n'insisterons pas. 


(*) En vertu de (C). 
(*) Nous supprimons ce dernier calcul : il n'offre aucune difficulté. 


(***) Par un calcul assez long. 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 7 


7. Courbes intégrales. Chacune des équations (A), (B), (C), (D), (E), si 
lon y attribue à p une valeur déterminée, représente une certaine courbe. 
Ces cinq courbes sont identiques. En effet, elles coupent, en un même point, 
l'axe des ordonnées (*); et chacune pourrait être construite, par points, au 
moyen de l'équation différentielle 


Cette courbe intégrale coïncide encore avec les lignes ayant pour équations, 
soit 


cos x cosy — sin x sin y (Ax) (Ay) = cose, . Ne Me ee D) 
soit 
7° di + dy UE 
J-a d @n / %w 


J'ignore si la discussion de ces courbes intégrales, probablement très 
épineuse, a été faite. 


S. Système orthogonal. Ces courbes, de première espèce, que lon peut 
représenter aussi par 
Bite Éd silnnilome te ARE crc 


Sont orthogonales aux courbes de seconde espèce, ayant pour équation 


RE nl à, 4. 
En effet, pour les premières, 

dy (Ay) 

dx ON 
et, pour les autres, 

dy _ (Ax) 

da (Ay) 


* 
(*) La constante x est l’ordonnée à l’origine. 
"x ps n F0 . A x . 
(**) Pour éviter toute difficulté, j'écris, sous le signe /, z au lieu de «. 


8 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


IL. Sur L'ÉQuATION Mdæ + Ndy = 0. 


9. Du multiplicateur 2. Rappelons une proposition connue : 
Si 
A (Mdx + Ndy) = du, 
el que 
8(Mdx + Ndy) = dv; 
on a 
GE AU), 


Voici une remarque complémentaire : 


Si u est fonction du multiplicateur ù, tout autre multiplicateur est donné 
par la formule 
TEO (N e ARE a 0 one le) 


10. Suite. On a trouvé, ci-dessus : 


(Ax) (Ay) — ¢ sin x cosx siny cosy 


LE í C 
L , (40) 
i Ay) + siny cosx (A 
u ne cosy (Ay) : siny cosx (Ax) © 


D'ailleurs, à = A (u) est fonction de u = sin x (*). Conséquemment, la 
formule (44) est applicable, et l’on a ce théorème (**) : 


> dx dy 
1 = y “| g0 


est une différentielle exacte ; 
2° Si i 
dx dy 
—— + —— |o 
(Ax)  (Ay) 
est une différentielle exacte, 
o= p (à); 


() =i cut. 


(**) Énoncé, en partie, dans les Comptes rendus. 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 


3° Si 


on peut prendre, comme intégrale de l'équation (1), 


v = const. 
11. Application. Soit 


Alors 


Cette expression peut être réduite. En effet, 


dx dy du 
D A à 
(Ax) (Ay) (Aw) 
donc 
dv = (Ag) du = d .E (p). 
Et comme 


d. E (x) — (Ax) dx + (Ay)dy — êd (sing siny sing) (*), 
il s'ensuit que : 


1° La quantité 


| dx dy | e (Ay) — œ sin x cos x siny cosy |? 


TEU CARRE wani 
1 -— c sin’ x sin°y 


(Ax) (Ay) 
est une différentielle exacte, identiquement égale à 


(Ax) dx + (Ay) dy — èd [sine sin y NON) e y 


1— č sin°x sin°y 


C) Legendre, t. I, p. 43. 
Tome XLY. 


|: 


i 
à 


10 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


2° Une intégrale de l'équation (1) est 


F (Ax)dx + a (Ay) dy pe (Az)dz= œ sing hiy AAY prae 


( 


(9). (L) 


1 — ë sin’x sin?’ y 
12. Vérification. La première partie du théorème consiste en légalité 
|a + gh Jam anas + (Ay)dy — êd. (sinx siny sing). . . (15) 


Comme les deux membres sont des fonctions symétriques, il suffit de vérifier 


que 


À 2 
e = (Ax) — csiny sn H COSX + Sin x cose A 


4 


Or, 
de _ (Ay) p. 
Ta TE ). 
Donc légalité devient 


(Ax? = (Ax) — c’sin y | sin x cosx (Ax) + sing cosy (Ac) |. 


Il resterait à remplacer, par leurs valeurs, sin x, cos u, (Au). Mais il est plus 
court d'employer la formule 


sin p cos x (Ax) — sin x cos x (Ap) 


sin y = OEE N 
1 — csin u sin x 


On trouve ainsi, après une réduction évidente, 
(sin’x — sin? p) (1 — cêèsin? u sin°æ) = sin? cos*y (1 — e sin? u) — sin? u cos? (1 — sin? æ) 
= (sin*x — sin? p) — c sin? p sin?’ a (cos? u -— cos? x); 


ce qui est identique. 


C) Autrement dit, l'intégrale immédiate 
? dx >Y di e dz 
pans evo EE J W — — = 0, 
“ (Ax) 4 (Ay) o (AZ) 
peut être remplacée par (L). 


(**) On arrive à la même conclusion en observant que 


du da dB (Ax) (Ay) — c’ sin æ cosæ sin y cosy 
wo u e L (A) A 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. Al 


43. Remarque. Le théorème précédent (11) semble en défaut dans le 
cas où, comme l’a fait M. Despeyrous (*), on met la proposée sous la forme 


| dx dy | cosg cos y (Ax) (Ay) 
—— + —— 
L 


(Ax), (Ay) 


cos æ cos y (Ax) (AY) 


s ve 
i > nest pas fonction de 


En effet, le multiplicateur, 


(Ax) (Ay) — csinx cosx siny cosy 
L 


Mais la quantité 
cos x cosy (Ay) 
L 


cos y cos x (Ax) 


dx + dy 


N'élant pas une différentielle exacte (**), l'exception n’est qu'apparente. 


() Srurm, Cours d’ Analyse, t. I, p. 529. 
(”*) Cette proposition, assez visible par le calcul effectué au paragraphe (6), peut être prouvée 
directement, comme il suit. 


La condition 


dM aN 
dy | do 


devient, dans le cas actuel, 


c?co c? sin? æ cos "| 


SY 
cos æ [i (Ay) + L cosy a + cosy (Ay) siny 


c? cosg c?sin*ycosæ | . 
+ COS B (AD) |sinr. 
(A) 


= C0 4) [i (Ax) + L cos & 


Or, pour x — 0, y = u, cette égalité, qui devrait être identique, se réduit à 


cos? u 
[aw + c? Fee) sin = 0; 
(Au) J 


Puis à 


sing = 0. 


12 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


JI]. SUR LE TRIANGLE DE LAGRANGE E 


14. Préliminaires. Soit ACB un triangle sphérique, dans lequel 
€ AB=w, CB—x, CA =y. 
eoo y Il en résulte (**) : 
cosC= — (Apg), cosA—(Ax), cos B= (Ay), 
B sinA sinB sinC | 


A —— = —— = —— 


sing siny sing 


P x De plus, si l’on abaisse l'arc CP perpen- 
diculaire à BA, on a : 


cos A = cotytg AP, cosB = cotx tg BP; 
ou 


tg AP = tgy (Ax), tg BP = tgx (Ay). «+ , . . . . (6) 
Ces valeurs sont celles que nous avons désignées par 8, a (1) (**). Donc 


Ben APE, 7, ue one rte 


(*) Théorie des fonctions, (1813), p. 446. 
(**) Lecendre, Fonct. ellipt., t. I, p. 20 


("*) Legendre ne fait pas cette dernière remarque; mais, après avoir fait observer que la 
considération du triangle de Lagrange conduit à 


dæ dy 


= 0 
ao  (p  ? 


il ajoute : 


« Ainsi, une application fort simple de la trigonométrie sphérique aurait suffi pour trouver 
» l'intégrale algébrique complète de l'équation transcendante 


. DE PREMIÈRE ESPÈCE. 15 | 


15. Suite. Si l'arc AB, dont la longueur est constante, glisse entre les 
c côtés de l'angle C, cet arc enveloppe une 

certaine courbe sphérique, facile à con- 

_struire par points. Menons, en effet, les | 
arcs AM, BM, respectivement perpendi- | 

culaires à CA, CB; et soit M leur point | 

d'intersection. Il est visible que M est, 

relativement à BA, le centre instantané | 

derotation(”). Conséquemment, le point Q, 

commun à l'enveloppée AB et à lenve- 

loppe, est la projection sphérique de M. 


ji 
ll 
|| 
| 
| | 
Cela posé, soient | 
BQ—«, AQ—$, BM—x, AM=y': | 


il s’agit d'évaluer «' ou p. 
On a, par les triangles rectangles CBM, CAM, 


| 
cosx cosg’ = cosy cosy’. | 
Le triangle BAM donne | | | 
cosg’ = cosy cosy" + sin « sin y’ sin À. 
De plus, dans le triangle AQM, 
tgp’ = sinA tgy’. 
On tire, des deux premières équations, en éliminant cos x’, 


COSY — COSV COS p 


eU rm 


cosx sin p sin À 


$ () Si cette proposition n’est pas admise à priori, on peut la démontrer au moyen de l’angle 
es OACBM, O étant le centre de la sphère. Quand langle OAB glisse entre les faces du 
lêdre OBCA, il tourne autour de la droite OM; ete. 


14 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


ou, parce que le numérateur égale sin æ sin y cos B : 


RAS cos B 
y == He 
53 ’ sin A 
Conséquemment, 
tgp’ = tgx cos B, 
ou 
EO O duree à a du E a A IS) 
et, à cause de la symétrie, 
PR TE aire see spa aa + re. (19) 


Chacune des formules (18), (19) détermine la position du point Q sur le 
côté mobile AB. 


16. Remarque. La comparaison des valeurs (16), (18), (19) donne : 
AQ=BP, BQ— AP. 

Ainsi : ; 

Quand un quadrilatère sphérique a deux angles opposés droits A, B; les 


projections (sphériques) de deux côtés opposés, sur la diagonale AB, sont 
égales (*). 


IV. SUBSTITUTION DE LANDEN. 


17. Jacobi a donné une élégante interprétation géométrique de la formule 
de Landen(*). En voici une autre, moins simple que celle de l'illustre 
Géomètre, mais assez remarquable. 


() Pour le quadrilatère plan, cette propriété est intuitive. 
(*) Ou Échelle de Lagrange. BenrranD, Calcul intégral, p. 657. 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 15 


Soit une ellipse ABA'B’, dans laquelle 


Hi OA— OA'—1, OF=0F =c. 


p H 


1° Si l’on mène les rayons 

vecteurs relatifs à un point 

quelconque de la courbe, et 
p que lon fasse 


MFA— 9, MF'A = 9 — 99, 


À à 


pI A ona 


(4 2 
tgp. (20) 
+ C 


ee Ha 


B' gente en M, limitée aux tan- 
Sentes indéfinies HA, A'H', en A, A'; PF, PF’ sont, d’après une propriété 
connue, les bissectrices de AFM, AF'M. De plus, 
AP = AF tgọ' = AF' tg (p — +); 
etc. (*). 
2° Les bissectrices FP, FP', des angles AFM, A'FM, sont perpendicu- 
laires entre elles. Si donc l'angle droit PFP! tourne autour de F, l'hypoté- 
nuse PP', du triangle variable PFP', enveloppe l'ellipse. De même pour 


PF'P’, En outre, le point de contact M est facile à déterminer. Enfin, l'angle 
P'PH égale p. 

3° Ona, dans le triangle MFF' : 
a Ai DE ne 
sin (4p° — 29) sin (4p' — 2o) 


pi r $ . p À Q . . A LA Là 
i () Le théorème exprimé par l’équation (20), assez peu connu, je crois, peut être énoncé 
ainsi : 


Dans toute ellipse, les tangentes des demi-anomalies vraies, d’un même point, ont un rap- 
Port constant. 


On déduit facilement, de cette propriété, la relation entre l’anomalie vraie et l’anomalie 
excentrique. 


En effet, PP’ étant la tan- 


16 SUR L'ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


done 
sin (4g' — 29) =c [sin (2p — 2’) + sin 3g; 


ou, par la suppression d’un facteur commun, 
sin (29 — ọ) = ¢ sin ọ; . 
formule de Landen ou de Lagrange (*). 


4° On tire, de l'équation (20), 


cos (p — p’) = ; 


yi AE 
A+ c)? f 


cosg’ = cos (p — p') A (c',9'); . 


ou 


pourvu que l’on suppose 
Vve 


pc: 


5° L'équation (21) donne, immédiatement, 
cos (2p — ọ) == A (c, o); . 


et, si l’on divise par cos® les deux membres, 


sin 20 
NA J 
c + COS 2p 
6° On déduit, de cette valeur : 
sin 29 c + cos 29” 


sin Ọ = -—— 


ETE a ET 


(*) Legendre, t. 1, p. 79. On voit qu'il est plus simple de prendre d’abord 
mise, si l’on veut, sous la forme 


tg (P — p') =b tgp. 


(21) 


(22) 


(25) 


(24) 


(25) 


la relation (20), 


DE PREMIÈRE ESPÉCE. 17 


puis, à cause de 
cos (2p° — q) = cosy cos 2 + sing sin 2° : 


c cos 2p° + 1 


cos (2p° — p) = Deoa y > (26) 
Mais | 
cos (20 =e g EA O + Re a | 
donc | 


(4 æ c)A(e, qi A (e',g) == 1 + ccos 29 a + (7) | 
| 
| 


7° En différenciant l'équation (21), on a 
cos (20° — p) (2dọ' — dy) = c cosody, | | 
ou | 
2A (c, ọ)dg' = [e coso + cos (29° — p)] do. | 
| 


D’après les formules (25), (26), le coefficient de dọ est 


c + 2c cos 2g' + 1 = (4 + c) — deiei Drega | 
(+ c)A(c,9) (1 = c)A(c,9) | 


donc l'équation différentielle, entre ọ' et ọ, se réduit à 


Co EN ap (28) | 

A (c, g’) 2 AGO shi | 

n consequence, ; | 
1c 

Peppa a. RCD AR ee E à mat (OU) | 


Ce dernier calcul me semble, non plus court, mais plus simple que celui 
que l’on trouve dans le Traité des fonctions elliptiques. 


C) On arrive plus rapidement à cette relation, peut-être nouvelle, en A ie que P’F est | 
& somme des projections de P'F’ et de FE’. (ll 


Tome XLV. 5 | 


18 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES 


ADDITION. 


V. ÉLÉMENTS D'UN QUADRILATÈRE SPHÉRIQUE. 


18. Dans la figure de la page 13, on a 


cos CM = cos x cos x’. 


Nous avons trouvé 


pi cos B 
y == (p X — 
“ie 5 © sin À 
Mais : 
sin À = c sin x, cos B = (Ay); 
donc 
(A? 
gy == 2 (50) 
; C COS x 
On tire, de cette formule, 
AY € COS & 
sin y = 2n et cos y = AO) 
À + — €? (sin? x + sin? y) VA + — e (sin? x + sin? y) 
puis, par un changement de lettres : 
ar Ax c cos 
sin © = Ca ; COS 4 (02) 
V4 + c— c'{(sin?x + sin° y) VA + — €? (sin? x +sin? y) 
Conséquemment, 
CE C COS x COS Y (55) 


VA + — à (sinx + sin’ y) 


| 
| 
[ 
Í 
| 


=] 


DE PREMIÈRE ESPÈCE. 1 


Il résulte, de cette valeur : 


` 4 — c? sin? x sin? y 
sin CM = - i TES ne 
1 + c— c sin x + sin” y) 


€ COS £ COS Y 


cot CM — 


\ 
l ER 
VA — € sin? x sin? y \ 
19. Représentons par 0, y les angles BMC, AMC, dont la somme est 
AMC = M. Les triangles rectangles BMC, AMC donnent : 
cos 0 = cot MC - tg x’, cos ÿ = cot MC : tg y'; 


c'est-à-dire : 
cos x(Ax) 


Coso eee — a dan + + 0) 
1 — c* sin? x sin” y 
cos y (Ay) 
eu (O0) 
V1 — č sin? x sin? y 


Il résulte, de ces valeurs : 


7 ; 1 + Ê — (sin x + sin” y) ? 
sin 0 = sin x — STENET TRA : E E r nes E A 
À — ¢* sin" x sin” y 


/ 2 ET nea ay) 
£ à 1+ ê — è (sin*x + sin” y) 
sin ọ = sin y anaiai 


4 — & sin? x sin” y 


20. Ona 


sin M = sin 0 cos y + cos Isin y, 


ou 


sin x cos y (Ay) + sin y cos +) 


4 — ¢ sin? x sin” y 


sin M=V1 + — é (sin? x + sin? y | 


Le second facteur équivaut à sin u. 


20 SUR L’ADDITION DES FONCTIONS ELLIPTIQUES, ere. 


Done, finalement, 


sin M 


Te dE (sin x + sin y) (°) - 
sin & 


(*) Pour vérifier ce résultat, il suffit d'observer que, dans le triangle AMB : 


sin M cos À (Ax) 
sinu sing’ sina 
D ei 


(59) 


RARES 


BIBLIOGRAPHIE ANALYTIQUE 


DES 


PRINCIPAUX PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION; 


PAR 


J. PLATEAU, 


MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 
CORRESPONDANT DE L'INSTITUT DE FRANCE, DE LA SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES, 
DE L'ACADÉMIE DE BERLIN, ETC. 


+ 


TROISIÈME SUPPLÉMENT ', 


COMPRENANT LES ANNÉES 1880, 1881 ET 1882, 


(Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 3 février 1883.) 


Voir, pour l'ouvrage et le premier supplément, le t. XLII, et pour le deuxième supplément, le t. XLII des 
M. de l'Acad. royale de Belgique. 


Tome XLV. 1 


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BIBLIOGRAPHIE ANALYTIQUE 


DES 


PRINCIPAUX PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION. 


PREMIÈRE SECTION. 


Génération et persistance des impressions sur la rétine. 


1860. Rocers. On our inability from the retinal impression alone to détermine which 
relina is impressed. (Proceed. of the American Association, p. 192.) 


Le titre indique suffisamment la question traitée; expériences. 


1864. Nicouaïnés. Sur le lieu des intersections de deux courbes mobiles. (Nouvelles Annales 
de Mathématiques, 2"° série, t. LE, p. 59.) 
A cause de la relation avec le second des articles J. Plateau 1828, avec les articles Le François 
1829, et l’article Van der Mensbrugghe 1863, dans la Bibliographie simple qui suit la première 
section analytique. 


1867. Weger. Theorie des À northoscops und der Anorthoscopischen Figuren. (Zeitschrift 
für Mathematik und Physik [Schlômilch], 12° année, p. 153.) 


EN i à 2A ; SA 
1875. Maver. Researches in Acoustics. (Philos. Magaz., 4° série, t. XLIX, p. 5592.) 
Persistance des impressions auditives; son étude ; emploi d’un disque percé tournant. 
1876. Kimner. Zur Theorie der intermiltirenden Netzhautreizung. (Zeitschrift für die 
gesaminten Naturwissenschaften, Neue Folge, t. XIV, p. 135.) 


echerche, au moyen de disques tournants à secteurs blancs et noirs, de la relation entre le 
degré d'éclairement et la durée d’intermittence due au passage des secteurs noirs, pour la 
plus petite vitesse qui donne une teinte uniforme. La courbe qui représente cette relation 
parait être une hyperbole équilatère. 


4 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


4877. Hezmuourz. Lehre von den Tonempfindungen., (4™ édition, p. 234.) 


Persistance des impressions auditives. 


1878. Movrnince. Photographies instantanées. (Journ. anglais Nature, t. XXVI, 1882, 
p. 196, 2° colonne.) 
Représentations par la photographie des phases successives et très rapprochées d’un mouvement 
rapide, tel que celui du galop d’un cheval, ete. 


1879. Eusnis. À new method of studying wave motions. (Proceedings of the American 
Academy of arts and sciences, new series, t. VII. De mai 1879 à mai 1880, 
p. 218.) 


Pointe de platine mise électriquement en vibration de manière à plonger, à des intervalles égaux, 
dans une couche de mercure couverte d’un voile de lycopode; les étincelles éclairent les ondes 
formées. 


Senwanrz. Effect of distance on appreciation of color. (Ibid., ibid., p. 229.) 


Bande étroite de papier coloré appliquée sur un fond blanc ou noir et observée à différentes 
distances : pour un éloignement suffisant, la sensation de la couleur disparaît. 


Trowsripee. Simple apparatus for illustrating periodic motions. (Ibid., ibid., 
p. 252.) 


Modification de la méthode de Lissajous, 


Küune. Chemische Vorgänge in der Netzhaut. (Handbuch der Physiologie von 
Hermann, t. HI, p. 235; voir à partir de la page 326.) 


Examen chimique de l’action de la lumière sur la rétine. 


Conn. Détermination du sens chromatique à la lumière solaire directe et à la lumière 
électrique. (Supplément aux Klinische Monatsblätter fur Augenheilkunde, 
Stuttgard, 1880, Voir les Ann. d'oculistique 12% série, t. I, p. 68.) 

Distances auxquelles des surfaces d’un millimètre de diamètre et teintes des différentes couleurs 
sont reconnues comme présentant ces couleurs, tant à la lumière solaire qu’à la lumière 
électrique, 


1880. Revnaun. Le Praxinoscope-théätre. (Journ. La Nature, n° du 7 février.) 


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Modification du Praxinoscope (voir à 1878 Reynaud dans le 2me supplément). 


Ferner. Analyse des phénomènes lumineux produits par les décharges électriques 
dans les gaz raréfiés. (Comptes rendus, t. XC, p. 680.) 


Emploi du miroir tournant. 


à 
: 


PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3ve SUPPLÉMENT. 5 


1880. Lecnar. Des vibrations à la surface des liquides. (Ibid., ibid., p. 1545.) 


Large faisceau de lumière parallèle ou à peu près tombant obliquement sur la surface du liquide, 
et réfléchissant l’image de celle-ci sur un écran blanc. 


Cuanpenrien. Sur la sensibilité de l'œil aux différences de lumière. (Ibid., t. XCI, 
p. 49.) 
Recherche de la différence d’intensité qui doit exister entre deux lumières successives de même 
nature pour que l'œil juge ces deux lumières inégales, 


Sur la sensibilité différentielle de l’œil pour de petites surfaces lumineuses. 
(lbid., ibid., p. 240.) 


Pour deux surfaces lumineuses contiguës très petites, il faut une différence d'éclat considérable 
pour que l’œil puisse la distinguer : pour deux carrés de 2m" de côté, et observés à la 
distance de 5 mètres, elle a dù être de 0,60. 


Sur les variations de la sensibilité lumineuse suivant l'étendue des parties 
rétiniennes excitées. (Ibid., ibid., p. 995.) 

Au-dessous de certaines dimensions d’une image rétinienne, le minimum de sensibilité diminue, 
et cela proportionnellement à l'étendue de la surface excitée. 


Sur la sensibilité visuelle et ses rapports avec la sensibilité lumineuse et la 
sensibilité chromatique. (Ibid., ibid., p. 1075.) 

Si, dans une obscurité complète, plusieurs espaces très petits sont éclairés d'une lumière graduel- 
lement croissante, ce n’est qu'à partir d'une certaine intensité que l'œil perçoit et distingue 
nettement les points en question {sensibilité visuelle). — Si les points sont éclairés par une 
couleur simple saturée, la couleur est perçue avant que les points soient distingués (sensibilité 
chromatique). 


Sur la quantité de lumière nécessaire pour percevoir la couleur d'objets de 
différentes surfaces. (Ibid., t. XCII, p. 92.) 


Petits carrés colorés, l'un de 12mm de côté, l’autre de grandeur successivement croissante, à 
L 
partir de Omm,7, observés dans l'obscurité à la distance de 20 centimètres. 


Le sens de la lumière et le sens des couleurs. (Archives d’Ophthalmologie, 
novembre et décembre.) 


La sensibilité pour la lumière et la sensibilité pour les couleurs sont deux fonctions différentes de 
l'appareil visuel; expériences remarquables. 


Narori. Un nouveau photomètre. (Séances de la Société française de Physique, 
séance du 19 mars.) 


Les deux lumières à comparer sont placées à la même distance de l'écran, et Pon affaiblit la plus 
intense au moyen d’un disque percé tournant. 


6 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1880. Mercanier. Sur la détermination des éléments d’un mouvement vibratoire. (Journ. 
de Physique de D'Alméida, t. IX, pp. 217 et 282.) 


Lignes obscures dans l'ombre commune de deux styles légers fixés l’un au corps vibrant, l’autre 
à un diapason connu. 


Govi. Sur une nouvelle expérience destinée à montrer le sens de la rotation imprimée 
par les corps à la lumière polarisée. (Comptes rendus, t. XCI, p. 517.) 


Expérience curieuse fondée sur la persistance des impressions. 


Decuarue. Formes vibratoires des pellicules circulaires de liquide sapo-saccharique. 
(Ibid., ibid., pp. 625 et 666.) 


Faits analogues à ceux que l’auteur a observés sur les bulles; voir à 1879, dans le 2me supplément. 
8 j Ppp 


H. Durour. Appareil pour montrer les courbes de M. Lissajous. (Bullet. de la 
Société vaudoise des sciences naturelles, 2"° série, t. XVII, p. 79.) 


Application de la méthode de projection de M. Terquem (voir l'article 1877 Terquem dans le 
premier supplément) : les courbes sont tracées sur un écran par l’image d’un point lumineux 
produite au foyer d'une petite lentille, le point lumineux et la lentille étant mis en vibration. 


Roop. Newton's use of the term Indigo with reference to colour of the spectrum. 
(Journ. de Silliman, 5™° série, t. XIX, p. 155.) 


Emploi des disques tournants à secteurs colorés. 


On the effects produced by mixing white with coloured light. (Ibid., t. XX, 
p. 81.) 

Emploi de disques tournants présentant des secteurs colorés alternant avec des secteurs blancs: 
le résultat est toujours l'addition d'une certaine quantité de violet. 


CarmIGHAEL. Presentation of sonorous vibrations by means of a revolving lantern. 
(dbid., t. XIX, p. 512.) 


Un jet de gaz d'éclairage soumis à des vibrations sonores brùle à l’intérieur d'un tube de mica, 
lequel tourne rapidement dans un plan; l'anneau lumineux apparent se montre dentelé. 


Taowpson (Silvanus). A new illustration of persistence of vision. (Journ. of the 
Franklin Institute, 3™° série, t. LXXIX, p. 53.) 


L'explication de Tobin est insuffisante (voir l’article 1879 Tobin dans le 2e supplément). 


Kônic. Untersuchungen über die Schwingungen einer Normalstimmgabel, (Ann. de 
Wiedemann, t. IX, p. 594.) 


Emploi d’un microscope oscillant et des procédés de Lissajous. 


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PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3% SUPPLÉMENT. 7 


1880. Bresina. Ueber die Schwingungen der Luft in der chemischen Harmonika. (Progr. 
Archigymnasium Soest, 1880-1881, p. 1.) 


Emploi dun miroir en mouvement. 


Grossmann. Ueber die Messung der Schärfe des Farbensinnes, (Gentralblatt f. pr. 
Augenheilk., t. IV, p. 298.) 


L'appréciation de la couleur varie avec la distance et avec l’étendue de la surface colorée. Les 
couleurs qui se reconnaissent le plus loin sont le vert et le jaune, etc, 


1881. Monrieny. De l'intensité de la scintillation pendant les aurores boréales. (Bullet. de 
l'Acad. de Belgique, 5° série, t. I, p. 251.) 


Emploi encore de son scintillomètre (voir les articles 1856 et 1864 Montigny, dans la Biblio- 
graphie simple qui suit la première section analytique). 


J. Prareau. Quelques expériences sur les lames liquides minces. (Ibid, ibid., 


t. I, p. 8.) 


Exemple curieux de longue persistance d’une impression. 


Rosensrieur. Détermination des couleurs qui correspondent aux sensations fonda- 
mentales, à l’aide des disques rotatifs. (Comptes rendus, t. XCI, p. 244.) 


Les trois teintes fondamentales sont l’orangé, un jaune vert e' un bleu : elles reproduisent, par 
le mélange de leurs sensations deux à deux, le rouge, le vert et le bleu les plus intenses, 


Détermination des sensations colorées fondamentales, par létude de la répar- 
tition des couleurs complémentaires dans le cercle chromatique. (Ibid. ibid., 


p- 557.) 


Même sujet. 


Discussion de la théorie des trois sensations colorées fondamentales. (Hbid., 
ibid., p. 1286.) 


Caractères de ces sensations, 


Détermination de la distance angulaire des couleurs. (1bid., t. XCHI, p. 207.) 


Emploi des disques tournants à secteurs colorés. 


Recherches sur les lois de la vision des couleurs. (Bullet. de la Société indus- 
trielle de Mulhouse, séance du 28 septembre 1881. Le Mémoire a été 
imprimé à Mulhouse en 1882.) 


Développement du contenu des articles ci-dessus. Applications. 


8 BIBLIOGRAPHIE DES. PRINCIPAUX 


1881. Cuanpenrier. L'examen de la vision au point de vue de la médecine générale. Paris. 


Détermination de la limite du champ visuel; étude de la sensibilité visuelle, de la sensibilité 
chromatique et de l’acuité visuelle. 


Nicorra. Recherches sur les sons résultants. (Journ. de Physique de D’Alméida, 
t. X, p. 55.) 


Effets de la persistance des impressions auditives. 


Decnarme. Formes vibratoires des pellicules circulaires de liquide sapo-saccharique. 
(Ann. de Chim. et de Phys. de Paris, B™° série, t. XXII, p. 502.) 


Mémoire in-extenso (voir, plus haut, l’article 1880 Decharme), 


Crova. Projection des figures de Lissajous avec des différences de phases variables 
à volonté. (Journ. de Phys. de D'Alméida, t. X, p. 255.) 


Emploi d’un aimant pour faire varier les phases. 


Laremnorr. Le dynamomètre optique. (Journ, L'Electricien, t. L, p. 36.) 


Application ingénieuse de la persistance des impressions. 


Macé De Lépinay et Nicati. Recherches sur la comparaison photométrique des 
diverses parties d’un même spectre. (Ann. de Chim. et de Phys. de Paris, 
5" série, t. XXIV, p. 289.) 


L'auteur vérifie le fait déjà signalé par Newton et contesté par Draper, que l'intensité maxima 
est dans le jaune, etc. 


Contribution à l'étude du champ visuel des couleurs. (Archives d'Ophthal- 
mologie, t. I, pp. 437 et 506.) 


La sensibilité est la moindre pour la Inmière rouge et le champ visuel est aussi le plus étroit. 


.... Les Zootropes. (Journ. La Nature, n° 448, 10™° année, p. 71.) 


Modification simple du Praxinoscope (voir l’article 1878 Reynaud, dans le 2me supplément); modi- 
fication du Thaumatrope (voir l’article 1825 Paris, dans la Bibliographie simple qui suit la 
Bibliographie analytique de la 47° section). 


Forges et Younc. Nouvelles expériences pour mesurer la vitesse de la lumière. 
(Journ. anglais Nature, t. XXIV, p. 155. 


Méthode de Fizeau modifiée (voir l’article 1849 Fizeau dans la Bibliographie simple qui suit la 
Bibliographie analytique de la 1re section). 


Erperimental Determination of the Velocity of white and of coloured light. 
(Proceedings de la Soc. Royale de Londres, t. XXXII, p. 247.) 


Idem; la lumière colorée marche d'autant plus vite qu’elle est plus réfrangible. 


PEYTONS 


PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3ve SUPPLÉMENT. 9 


1881, Srorriswoovs. The electrical discharge, its forms and its functions. (Journ. anglais 
Nature, t. XXIV, pp. 546 et 569.) 


Emploi du miroir tournant. 


Lord Rayren. Experiments on colour. (Ibid., t. XXV, p. 64; voir p. 66.) 


Appareil faisant tourner rapidement sur elle-même l'image de l’ensemble immobile de deux 
disques de Maxwell, ensemble qu’on peut ainsi ajuster pendant la rotation. 


Weap. On combining colour disks. (Ibid., ibid., p. 266.) 


Modification de l'appareil ci-dessus. 


Burt. A new method of examining and numerically expressing the colour percep- 
tion. (Transact. of the Intern Med. Congress, Londres, t. IH, p. 49.) 


Roop. Théorie scientifique des couleurs et leurs applications à l’art et à l’industrie. 
Traduction française, Paris. 


Étude générale du sujet. — P. 177 : à cause d’une illusion due à la persistance des impressions, 
les photographies instantanées de la mer agitée ne représentent pas exactement l’aspect des 
vagues. 


V. Frey et V. Kries. Ueber Mischung von Spectralfarben. (Archiv. de Reichert et 
Dubois, p. 356.) 


Les proportions de deux couleurs spectrales nécessaires pour produire par leur mélange une 
teinte déterminée, varient avec les observateurs, etc. 


Gran. Ueber Apparate zur Untersuchung der Farbenempfindungen. (Archiv. für 
die gesammten Physiologie, t. XXIV, p. 507.) 


Divers appareils pour la comparaison et pour le mélange des couleurs spectrales. 


Dosroworsky. Ueber die Veränderung der Empfindlichkeit des Auges gegen Spectral- 
farben, bei wächselnder Lichtstärke derselben. (Archiv. de Pflüger, 
t. XXIV, p. 189.) 


L’œil est beaucoup plus sensible au bleu qu'au rouge. 


Unsanrsemrsen. Zur Lehre von Schallempfindung. (Ibid., ibid., p. 374.) 


Persistance des impressions auditives. 


Ueber das An- und Abklingen akustischer Empfindungen. (Ibid., t. XXV, 
p. 523.) 
Génération et persistance de ces impressions. 


Tome XLV. 2 


10 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1881. Kornice, Ueber die Beobachtung der Luftschwingungen in Orgelpfeifen. (Ann. de 
Wiedemann, t. XII, p. 569; voir p. 580.) 


Emploi du miroir tournant. 


Lommer. Einfaches Verfahren die Stroboskopischen Erscheinungen für viele gleich- 
zeitig sichtbar zu machen. (Carl’s Repertorium, t. XVII, n°7, p. 465.) 


Un faisceau de lumière vive reçu sur la face postérieure d’un disque de Phénakisticope en rotation 
est renvoyé par un miroir sur la face antérieure du disque. 


| ' Dvokáx. Ueber einige akustische Bewegungserscheinungen, insbesondere über das 
| Schallradiometer. (Bullet. de l'Acad. de Vienne, 2° partie, t. LXXXIV, 
octobre.) 


5 Emploi de la méthode stroboscopique pour montrer la formation des anneaux de fumée sous 
l'influence de vibrations énergiques, 


V. Fuuscuz. Physiologisch-optische Notizen. (Bullet. de l'Acad. de Vienne, 
3e partie, t. LXXXIII, p. 199.) 


Nous ne pouvons savoir d'une manière immédiate si nous voyons monoculairement ou binocu- 
Jairement. 


Stricker. Beiträge zur Kenntniss der Organgefühle. (Med. Jahrb. der kk. Ge- 
sellsch. der Aertze zu Wien, p. 545.) 


Objections contre l'assertion ci-dessus de Von Fleischl. 


1889. Monticeny. Notice sur une particularité de l'aurore boréale du 2 oclobre 1882, et 
sur l'accroissement d'intensité de la scintillation des étoiles pendant les 
aurores boréales. (Bullet. de l'Acad. de Belgique, 3™° série, t. IV, p. 303.) 


Toujours emploi de son scintillomètre. 


Macé pe Lérinay et Nicati. Recherches expérimentales sur le phénomène de Pur- 
kinje. (Journ. de Phys. de D'Alméida, 2"° série, t. I, p. 35.) 


Étude de l’acuité visuelle correspondante à chacune des couleurs du spectre. 


Relation entre la loi de Bouguer-Masson et le phénomène de Purkinje. 
(Comptes rendus, t. XCIV, p. 785.) 


| Le rapport entre la plus petite différence perceptible d'éclat de deux espaces juxlaposés de 
3 même couleur et l'éclat de Pun d’eux, est constant pour toutes les couleurs simples tant qu'on 
n’approche pas trop du violet; mais il va ensuite en augmentant. 


Huron. Détermination des ventres des tuyaux sonores à l’aide des flammes mano- 
métriques. (Journ. de Phys. de D’Alméida, 2™° série, t. I, p. 136.) 


Emploi du miroir tournant. 


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PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 5% SUPPLÉMENT. 11 


1882. Marey. Sur la reproduction, par la photographie, des diverses phases du vol des 
oiseaux. (Comptes rendus, t. XCIV, p. 685.) 


Description d'un appareil perfectionné; les images successives disposées sur un Phénakisticope 
reproduisent l'aspect de l'oiseau qui vole. 


Bicuar et BLonpror. Oscillations du plan de polarisation par la décharge d’une 
batterie. Simultanéité des phénomènes électrique et optique. (Ibid. ibid., 
p. 1590.) 


Emploi du miroir tournant. 


L. L. Les roues d'une voiture et la photographie. (Journ. La Nature, 10° année, 
n? 471, p. 19.) 


Dans la photographie instantanée d’une voiture traînée par un cheval au trot, la partie supé- 
rieure des roues paraît beaucoup moins nette que la partie inférieure; pourquoi, 


..... Le Phénakisticope de projection. (Ibid., ibid., n° 473, p. 64.) 
Petit appareil propre à être placé dans les lanternes de projection ordinaires, et projetant sur un 
écran les effets agrandis. 


Reynaur. Le Praxinoscope à projection. (1bid., ibid., n° 499, p. 557.) 
Modification du Praxinoscope. (Voir, dans le 2e supplément, l’article 1878 Reynaud.) 


CHarpenTier. Sur la durée de la perception lumineuse dans la vision directe et dans 
la vision indirecte. (Comptes rendus, t. XCV, p. 96.) 


Mesure du temps qui s'écoule entre l'instant de l'apparition d’une lumière devant l'œil, et celui 
de la perception de cette lumière. Pour l’auteur et la lumière du jour, ce temps est, en 
moyenne, dans la vision directe, de 0”,15; il est plus considérable dans la vision indirecte, Etc. 


Sur la visibilité des points lumineux. (Ibid., ibid., p. 148.) 


Influence du diamètre des points lumineux, de leur distance à l'œil, de leur éclairement. 


Nouvelles recherches sur la sensibilité de la rétine. (Archives d'Ophthalmo- 
logie, mai et juin.) 

La quantité minima de lumière nécessaire pour distinguer l'un de l'autre deux points lumineux 
voisins est indépendante de leur écartement, et cet éclairement est en raison inverse de leur 
surface. — Photométrie physiologique. — Etc. 


Recherches sur la distinction des points lumineux. (Ibid., juillet-août.) 


Nouvelles vérifications de la loi établie dans le travail précédent; seulement l’écartement des 
points lumineux ne doit pas dépasser, dans l'œil, la largeur de la fovea centralis. L'éclaire- 
ment minimum est indépendant du nombre des points lumineux. 


12 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1882. Cuarpenrier. Étude de l'influence de la coloration sur la visibilité des points 
lumineux. (Archives d'Ophthalmologie, novembre et décembre.) 


La loi en question est indépendante de la coloration des points. 


Note complémentaire relative à l'influence de la surface sur la sensibilité 
lumineuse. (Archives d’Ophthalmologie, novembre et décembre.) 


Les variations du diamètre de la pupille sont sans influence sur la loi. 


Description d’un Photoplomètre différentiel, Paris. 


Appareil propre à étudier une série de questions, telle que la plus petite différence perceptible 
d'intensité entre deux espaces lumineux contigus. 


Rosensten.. De l’emploi des disques tournants pour l'étude des sensations colorées. 
Intensité relative des couleurs. Extrait. (Comptes rendus, t. XCIV, 
p. 1411.) 


De la sensation du blanc et des couleurs complémentaires. (Hbid., t. XCV, 
p. 1275.) 

Propriétés de la lumière blanche obtenue par l’union de deux couleurs simples complémentaires 
ou d’un plus grand nombre de couleurs simples. 


De l'intensité relative des couleurs. (Séances de la Soc. française de physique, 
avril-juillet, p. 103.) 


Emploi des disques tournants à secteurs colorés pour déterminer l'intensité de coloration 
d’une couleur matérielle donnée, etc. , 


Recherches sur les lois de la vision des couleurs. Trois conférences (Bullet, de 
la Société industrielle de Rouen, mars-avril.) 


Développements étendus. 


F. Gairon. À rapid-view instrument for momentary attitudes. (Journ anglais 
Nature, t. XX VI, p. 249.) 
Instrument au moyen duquel l'œil reçoit directement une impression instantanée, ou plusieurs 


impressions instantanées successives séparées par de courts intervalles, et distingue ainsi les 
diverses phases d’un mouvement rapide. 


Loro Raveien. Further observations upon liquid jets. (Proceed. de la Société 
royale de Londres, t. XXXIV, p. 130.) 


Etude détaillée de l’action des sons sur une veine liquide lancée horizontalement, etc, Emploi du 
disque percé tournant. 


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PHÉNOMEÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 5me SUPPLÉMENT. 13 | 
1882. Bowpirem et Harr. Optical illusions of motion (The Journal of Physiology de [i 


Foster, t. II, p. 297.) 


Études des illusions décrites par Silvanus Thompson. (Voir Particle 1877 Silvanus Thompson, 
dans le 2me supplément.) 


WorTiNGron. On impact with a liquid surface. (Proceed. de la Soc. royale de 
Londres, t. XXXIII, p. 347 et t. XX XIV, p. 217.) 


Éclairement instantané par l'étincelle électrique. 


Cnonin. Ueber die Abhängigkeit der Karbenempfindung von der Lichtstärke. 
(Collection de Preyer des Mémoires de physiol., 1" série, 7° livr,; cité 
sans date par Albert dans l’article ci-après.) 

Lorsque l'éclairement diminue, ce ne sont pas le bleu et le violet, mais le jaune, l’orangé et le | 
vert qui prédominent. 


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1 
3 


Auserr. Ueber die Aenderung des Farbeniones von Spectralfarben und Pigmenten | 
bei abnehmender Lichtstärke. (Ann. de Wiedemann, t. XVI, p. 129. 
; Objections contre les conclusions de Chodin. 


SCHELSKE. Versuche über Farbenmischungen. (Ibid. ibid., p. 549.) 


Recherche, au moyen de lappareil de Helmholtz à prisme et à eollimateurs, des couples de 
couleurs spectrales qui donnent du blanc par leur mélange, et des couples qui donnent une 
couleur spectrale déterminée. 


Boas. Ein Beweis des Talboïschen Satzes und Bemerkungen zu einigen aus 
demselben gezogenen Folgerungen. (Ibid., ibid., p. 359.) 


Démonstration mathématique de la loi (voir le second des articles 1834 Talbot, dans la Bibliogra- 
phie simple qui suit la 4re section analytique). Objections contre les résultats énoncés par 
Fick, 


DEUXIÈME SECTION. 
Couleurs accidentelles ordinaires de succession, 


860. Rocers. Some experiments and inferences in regard to binocular vision. (Procee- 
dings of the American Assoc., p. 187.) 


Vision stéréoscopique d'images accidentelles. 


14 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1875. Kuewer. Expériences d'optique physiologique. (Vierteljahrschrift der naturfor- 
schenden Gesellsch. in Zürich, t. XX, pp. 474 et 488.) 


A cause de la relation avec le principe de la réaction de l'organe, 

Mouvements relatifs apparents opposés à des mouvements relatifs réels qu'on a contemplés. Ces 
mouvements apparents sont dus à une véritable sensation. — Expérience curieuse de cou- 
leurs accidentelles. 


1880. J. Prareau. Une application des images accidentelles. (Bullet. de l’Acad. de Bel- 
gique, 2% série, t. XLIX, p. 516.) 


Évaluation approchée de la distance à laquelle on rapporte la lune. 


Macé ne Lérinay et Nicari. De la distribution de la lumière dans le spectre solaire. 
[Spectre des daltoniens]. (Comptes rendus, t. XCI, p. 1078). 


Objection contre la théorie de Hering. 


Le conte. On some phenomena of binocular vision. (Journ. de Silliman, 3™° série, 
t. XX, p. 83.) : 


Emploi des images accidentelles pour constater la rotation des yeux autour de leurs axes 
optiques, lors de certains mouvements de leur ensemble. 


Tuompson (Silvanus). Optical illusions of motion. (Journ. Brain, octobre.) 


A cause de la relation avec le principe de la réaction de l'organe. L'auteur décrit comme nou- 
velles, des expériences connues. Les mouvements apparents opposés qui succèdent à la 
contemplation des mouvements réels, sont dus à ce que la rétine perd peu à peu la conscience 
du mouvement réel, de sorte qu’un objet en repos lui paraît ensuile, par contraste, animé 
d'un mouvement contraire. 


Zeuvuss. Ueber Bewegungsnachbilder, (Ann. de Wiedemann, t. IX, p. 672.) 


À cause encore de la relation avec le principe de la réaction de l'organe. Le mouvement appa- 
rent opposé qu’on observe après la contemplation d’un mouvement réel, est un phénomène 
physiologique, et non psychique, il se produit dans la rétine même. 


Pescnez. Experimentelle Untersuchungen über die Adaptation der Netzhaut für 
Farben. (Archiv. de Pflüger, t. XXI, p. 405.) 


Objections contre les théories de Young-Helmholtz et de Hering. 


1881. J. Piareau. Une application des images accidentelles, deuxième Note. (Bullet. de 
l'Acad. de Belgique, 3° série, t. I, p. 281.) 


Évaluation approchée de la distance à laquelle on rapporte la voûte céleste à une assez grande 
hauteur au-dessus de l'horizon. 


Gier pe GRanpmonr. Sur un procédé expérimental pour la détermination de la 


PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3ve SUPPLÉMENT. 15 


1881. sensibilité dè la rétine aux impressions lumineuses colorées. (Comptes 
rendus, t. XCII, p. 1189.) 


Un effet curieux de couleurs accidentelles ; le Chromatroposcope, instrument. destiné à le 
montrer, ; 


Ennert. Grössenverhältnisse der Nachbilder. (Klin. Monatsblatt für Augenheil- 
kunde, t. XIX, p. 443.) 


Paraît ne contenir que l'estimation connue de la grandeur d’une image accidentelle d'après la 
distance à laquelle on la projette. 


Zenenver. Remarque à la suite du Mémoire ci-dessus. 


L'œil normal à l’état de repos n'est adapté que pour une distance de quelques pieds ; en effet, 
l'image accidentelle paraît moindre que l'objet, quand celui-ci est à plus de 2 mètres de 
distance, et plus grande, au contraire, quand la distance est plus petite que 2 mètres. 


Tscueruax. Zur Physiologie des Gesichtsorgans. Das Plateau-Oppelsche Phänomen 
und sein Platz in der Reihe gleichartiger Erscheinungen. (Archiv. für 
Augenheilkunde, t. XI, p. 241.) 


A cause de la relation avec le principe de la réaction de l'organe. Théorie particulière des 
mouvements apparents opposés qui succèdent à la contemplation des mouvements réels. 


Drener. Neue subjektive Farbenwahrnehmungen auf Grund von Kontrastwirkung. 
(Journ. Die Natur, nouvelle série, 7™° année, p. 571.) 


Dans certaines conditions un papier enduit de la matière qui donne, dans l'obscurité, après 
insolation, une lumière phosphorescente verte, montre d’abord une lumière verte peu durable, 
puis une lumière pourpre très éclatante, 


Unganrsenrrscu. Zur Lehre von der Schallempjindung. (Archiv. de Pflüger, 
t. XXIV, p. 574.) 


Expériences curieuses sur la diminution de la sensibilité de l'oreille par l’action prolongée d'un 
son intense, 


1882. Cuevneus. Mémoire sur la vision des couleurs matérielles en mouvement de rotation, 
et sur les vitesses respectives évaluées en chiffres, de cercles dont une moitié 
diamétrale est colorée et l’autre moitié est blanche; vitesses correspondant 
à trois périodes de leur mouvement à partir de l'extrême vitesse jusqu’au 
repos. Extrait. (Comptes rendus, t. XCV, p. 1086.) 


Lė titre indique suffisamment la nature du contenu. 


Hannay. Colour perception. (Journ. anglais Nature, t. XXV, p. 604.) 


Teinte complémentaire observée sur un objet peu lumineux qu'on fait mouvoir rapidement 
dans une chambre qui ne reçoit la lumière du jour qu'à travers des verres d’une couleur 
déterminée, 


16 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1882. Le conte Srevens. Notes on Physiological Optics. (Philos. magaz., 5"° série, t. XIV, 
p- 312; voir p. 515.) 


Images accidentelles stéréoscopiques. 


Bownirem et Harr. Optical illusions of Motion. (Journ. of Physiology de Foster, 
t HIT, p. 297.) 


Observations curieuses sur les mouvements apparents qui succèdent à la contemplation de 
mouvements réels. A cause de la relation avec le principe de la réaction de l'organe. 


V. Friseure. Physiologisch-optische Notizen, 2° communication. (Bullet. de 
l Acad. de Vienne, t. LXXXVI, 5" partie, p. 8 ; voir le § VI de la Note.) 


Observation analogue à celles de Bowditch et Hall (voir l’article précédent). 


V. Kries. Die Gesichtsempfindungen und ihre Analyse. (Archiv. für Physiologie 
de Du Bois Reymond, vol. supplémentaire.) 
Discussion sur la fatigue de la rétine. 


P. 126: Si l’on se donne une image accidentelle prononcée par la contemplation d’un petit objet 
blanc sur fond noir, et si l’on promène rapidement le regard sur ce fond, l’image disparait. 


TROISIÈME SECTION. 


Images qui succèdent à la contemplation d'objets Pun grand éclat 
ou même d’objets blancs bien éclairés. 


1877. Roon. Observations on a property of the retina first noticed by Tait. (Journ. de 
Silliman, t. XIH, p. 52.) 

L'auteur, après une exposition prolongée à la vive lumière du jour à l'extérieur, voit les objets 

blancs teintés d’une couleur rouge tirant sur le pourpre, ceux d’un vert intense d’une nuance 


grise, et les verts prononcés très réduits en intensité, et s'il entre dans une chambre obscure, 
elle lui paraît remplie pendant plusieurs secondes d’un brouillard verdâtre. 


1880. Seeuin. Sur les images accidentelles des objets blancs. (Ann. de Chim. et de Phys. 
de Paris, t. XIX, p. 450.) 


Nouvelle étude du phénomène. 


1881. F. Smtu. Apparent decomposition of sunlight by intermittent reflecting surfaces. 
(Journ. anglais Nature, t. XXIV, p. 141.) 


Roue tournant rapidement au soleil et portant des rais qui réfléchissent la lumière de cet astre ; 
la couleur perçue par celui qui l'observe varie avec la rapidité de la rotation. 


PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3m SUPPLÉMENT. 47 


1882. Macé pe Lépinay et Nicati. Sur un phénomène d'optique physiologique. (Journ. de 
physique de D'Alméida, 2° série, t. I, p. 86.) 

Apparence verte prononcée des lumières artificielles le soir, après un séjour prolongé, dans la 
journée, au milieu de champs de neige en plein soleil. C’est que la fatigue de la rétine pour le 
rouge persiste beaucoup plus longtemps que pour les autres couleurs ; expérience de véri- 
fication. 


Gaure. (Journal La Nature, 10™° année, n° 470 [boite aux lettres].) 


Après avoir observé, pendant une heure et demie, l'éclipse de soleil du 17 mai, à l’aide d'une 
lunette dont le verre noir était trop peu fumé, l’auteur a vu, le soir, les flammes de gaz teintes 
de vert, puis le lendemain teintées de bleuâtre, et le surlendemain de violacé; mêmes effets 
depuis cette époque. 


Hannay. Colour perception. (Journ. anglais Nature, t. XXV, p. 604.) 


Couleurs qui se manifestent sur un disque blanc présentant des dessins noirs, et tournant avec, 
une vitesse modérée. 


Napier Smia. Colour perception. (Ibid., t. XX VI, p. 50.) 


Objections contre l'explication donnée par Hannay dans l’article ci-dessus. 


Swan. Perception of colour. (Ibid., ibid., p. 246.) 


Après une exposition de deux ou trois minutes à une forte lumière, telle que celle d'un 
papier blanc éclairé par le soleil, la sensibilité des yeux de l’auteur pour des couleurs placées 
dans une lumière faible se trouve modifiée ; elle est presque annulée pour le rouge. Si le 
rouge est exposé au soleil, la sensibilité pour cette couleur est, au contraire, exaltée. 


QUATRIÈME SECTION. 
Erradiation. 


1828. J. Sourn, On the occultation of ò Piscium by the Moon, observed in Blackman- 
Street, etc.; references to recorded observations of occultations, in which 
peculiarities have been apparently seen, either at the Moon's Limb or upon 
her disk; ete. (Mem. of the Astronomical Society of London, t. II, 1829, 
p- 503.) 


Historique des occultations avec projection sur le disque lunaire. L'auteur combat l'hypothèse 
qui attribue le phénomène à l’irradiation. 


1881. ANDRÉ et Ancor. Origine du ligament noir dans les passages de Vénus et de Mer- 


Tome XLV. 3 


18 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX 


1881. cure et moyen de l’éviter. (Ann. scientifiques de l'École normale supérieure, 
Qme série, te X, p. 525.) 
Le ligament noir n'est pas dù à Pirradiation , C'est un phénomène de diffraction; expériences 


nombreuses. 


1882. Leroy. Vision centrale, irradiation et acuité visuelle. (Archives d’Ophthalmologie, 
janvier, février, et juillet-août.) 
L'irradiation est due à ce que l’image d’un point sur la rétine n’est pas un point, mais un petit 


cercle. 


Kuunr. Ueber farbige Lichtinduction. (Graefe’s Archiv. fur Ophthalmologie, 
t. XXVII, p. 1.) 


Dans ce que Hering appelle induction lumineuse simultanée et induction lumineuse successive, 
chaque couleur induit simplement sur le fond noir sa propre teinte, laquelle est d'autant plus 
vive que la contemplation est plus prolongée. 


CINQUIÈME SECTION. 
Phénomènes ordinaires de contraste. 


1797. Gortue. Schweizerreise im Jahre 1797. ( OEuvres posthumes de Goethe, Stuttgart 
et Tubingue, 1885, t. IH, p. 150.) 


Phénomène de contraste observé sur une chute d’eau. 


1881. Girauo Teuron, La vision et ses anomalies. Cours théorique et pratique sur la 
physiologie et les affections fonctionnelles de l’appareil de la vue. Paris. 


Le contraste simultané entre un espace coloré et un espace blanc est dû à ce que les milieux 
de l’œil rendus fluorescents par la couleur inductrice, absorbent dans la lumière blanche les 
rayons de cette même couleur. 


W. J. HerscueL. Effect of green in painted Windows. (Journ. anglais Nature, 
t. XXIV, p. 583.) 


Observation d'un vitrail formé de pièces les unes rou ges, les autres vertes, où le rouge domine., 
A dix pieds de distance, l'effet général est rouge; à cinquante pieds, le tout paraît nuageux 
et d’un léger vert d’eau. 


Roop, Théorie scientifique des couleurs et leurs applications à l’art et à l’industrie. 
Traduction française, Paris. 


Étude détaillée du contraste simultané; observations variées. 


PHÉNOMÈNES SUBJECTIFS DE LA VISION, 3ve SUPPLÉMENT. 19 


1881. SzıLacyı. Ueber simultancontrast. (Centralblatt für die Med. Wiss., t. LVII, p. 849.) 


Le contraste simultané se produit non dans l'œil, mais dans le cerveau; il ne repose pas sur une 
illusion du jugement. Expérience. 


1882. CuevreuL. Mémoire sur la vision des couleurs matérielles en mouvement de roia- 
tion, ete. [Voir l’article 1882 Chevreul, plus haut dans la 2™° section. ] 
(Comptes rendus, t. XCV, p. 1086.) 


Relation entre le contraste rotatif et le contraste simultané. 


Trécur. Noir vu en rouge orangé. (Ibid., ibid., p. 1198.) 


L'auteur regardant un voile noir, fait d'un réseau à mailles assez étroites éclairé par le soleil, a 
vu tous les nœuds du réseau extérieurement colorés d’un rouge orangé. 


Wue. À natural experiment on complementary colours. (Journal anglais 
Nature, t. XXVI, p. 5753.) 


Contraste de couleurs observé sur une cascade. 


J. H. Complementary colours. (Ibid. t. XXVII, p. 78.) 


Contraste de couleurs observé sur un cours d'eau. 


Cross. Complementary colours. (Ibid., ibid., p. 150.) 


Contraste de couleurs observé sur les ondes qui viennent se briser à la côte. 


Manan. Complementary colours at the falls of Niagara. (Ibid., ibid., p. 174.) 
Le titre suffit. 


V. Kries. Die Gesichtsempfindungen und ihre Analyse. (Archiv. für Physiologie de 


Du Bois Reymond, vol. supplémentaire ; voir p. 1422.) 


Discussion sur les phénomènes de contraste. 


SIXIÈME SECTION. 


Ombres colorées, 


1882. Cross. Complementary colours. (Journ. anglais Nature, t. XXVII, p. 150.) 


Ombres pourpres des nuages sur océan. L'auteur mentionne simplement le fait, sans indiquer 
dans quelles conditions il se montre. 


20 BIBLIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX PHÉNOMÈNES, zre. 


NOTA. 


Les articles suivants, que je n’ai pas eus à ma disposition, semblent, d'après leurs titres, 
devoir trouver place dans ce troisième supplément; je les indique à tout hasard. 


\ 


1879. Coun. New investigations on the furthest limits of colour perception by direct sun 
light and by electric light. (Brit. Med. Journ. [octobre], p. 531.) 


1880. Orr et Prenpercast. The rapidity of perception of colored Lights. (Journ. of new 
en mental diseases, nouv. série, t. V, p. 258.) 


Hopre. Die Scheinbare Bewegung des Ufers in einer dem Wasser entgegengesetzten 
Richtung beim stehen em flissenden oder doch bewegten Wasser. (Memora- 
bilien, t. XXV, 3° série, p. 108.) 


1881. Cossour. Observations on certain optical illusion of motion. (Brain, IV, p. 75.) 


3 
A Sd ` PiN 
SUR UN POINT 
DE 
| 
P LA . LA ij 
LA THÉORIE DES SÉRIES DE FOURIER: 
1d {3 à UD UN, 
| 
| 
| PAR 
M. P. MANSION, 
CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, | 
a 
(Présenté à la Classe des sciences, dans la séance du 3 février 1883.) 

l 
, a [i 
| lome XLV. à a || 
1 à 
| 
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| 
| 


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nsc sidi sauté ï sa it 


f 
| 
| 


LL à nn OE EITE E ENTA NEEN TEOR 


lee be chi EEE RAEN NA ETETEN A EON EYY ETE 


SUR UN POINT 


DE 


LA THÉORIE DES SÉRIES DE FOURIER. 


§ I. PRÉLIMINAIRES. 


1. Objet de la présente Note. Depuis que M. Weierstrass a introduit 
explicitement, en analyse, la notion d’égale convergence (*) des séries dont 
les termes sont des fonctions d'une variable æ, les géomètres ont dû sou- 
mettre à une revision attentive les principes fondamentaux de la théorie 
des séries trigonométriques, tels qu'ils avaient été exposés par Fourier, 
Poisson, Cauchy, Dirichlet, Riemann , etc. 

MM. Lipschitz, P. du Bois-Reymond, Heine, G. Cantor, Harnack , Dini, 
Ascoli, Jordan, etc., ont élucidé la plupart des points difficiles signalés dans 
les travaux antérieurs, et ont, en outre, traité maintes questions nouvelles, 
Plus générales que celles dont leurs devanciers s'étaient occupés. 
Néanmoins, parmi les formules anciennement admises comme démontrées, 
il en est une sur laquelle les géomêtres cités plus haut n’ont pas, croyons- 
nous, porté leur attention. 


[k 
C) En allemand gleichmässige Convergenz. Dans son Cours d'analyse, t. l, p.116, M.Jordan 


SORT tls Dour Rte sK : á Ea 
sert de l'expression un peu différente convergence uniforme, pour traduire ce terme alle- 
manq. 3 


f Sur la convergence égale ou uniforme des séries, voir le § V du Mémoire sur les 
Onetione A: x 5 rA 1,010 
nections discontinues de M. Darboux, dans le t. IV de la 2° série des Annales de l'Ecole 
nor: HIS GREN X ; i 

rmale supérieure (février et mars 1875), pp. T1 et suivantes. 


4 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


Dirichlet, on le sait, a établi, d’une manière simple et rigoureuse que 
z A 2 (2e 2 
la série 


1 
3 ao + (a, cos% + bisinx) + (as cos 2x + ba sin 2æ) + +, . . . . (1) 
dans laquelle 
I AT (l a+r r 
a, —=— À flcosntdt, b, =- $ E O a E E E O 
Te FC 
m -7r 
a pour somme 
1 | 1 ; 
G —0)+ f(x + 0)] ou io r+0)+/f(r—0)], . . . (3) 


selon que æ est compris entre m et +r, ou égal à l’une de ces valeurs 
extrêmes. La fonction fæ est supposée vérifier les conditions de Dirichlet, 
c’est-à-dire qu'elle est finie et na qu’un nombre fini de discontinuités, de 
maxima et de minima, entre — x et + 7. 

On déduit aisément de ce premier résultat de Dirichlet la sommation de 
la série (1), dans le cas où 


{J s ae 4 (12 
an=; f fi eos nt dt, na- f M SNEON a e e a UC) 
Te Fe 
[A I 


c et g étant des limites finies quelconques. Cette somme est égale à celle 
d'un nombre fini d'expressions analogues à (3). 

Lorsque l’on veut étendre la nouvelle formule ainsi obtenue au cas où 
l’on a, ensemble ou séparément, g = — œ, c= œ, on reconnait bientôt qu’il 
se présente une difficulté spéciale qui ne permet pas d'arriver immédiatement 
à la sommation désirée. Dans le premier cas, quand les coefficients ont la 
forme (2), la différence :, entre l’une ou l'autre des expressions (3) et la 
somme des (n + 1) premiers termes de la série (4) est une quantité indé- 
finiment décroissante avec 4. Quand les coefficients ont la forme (4), la 


n 


différence analogue est de la forme 


EE den E E E A (5) 


k étant un nombre entier supérieur, au plus, de deux unités, au rapport 


de (c — g) à 2r, et en, eny Enpe En), élant encore infiniment petits en même 


DES SÉRIES DE FOURIER. | 5 
temps que $. Quand g = — œ, ou c= œ, ou bien, à la fois, g = — œ, 


c= œ, on a k= œ; et la suite (5) est remplacée par une série dont la 
somme est fonction de n. Il est impossible de voir, dans ce cas, sans une 
discussion approfondie, si cette somme a encore pour limite 0, en même 
temps que À. 

L'objet de la présente Note est de faire cette discussion, dans un cas 
Particulier assez étendu. Nous nous servons, pour cela, de la méthode 
Primitive de Dirichlet, sans y faire intervenir le remarquable théorème de 
M. P. du Bois-Reymond, si utile dans toutes les autres recherches relatives 
aux séries trigonométriques. Comme application, nous démontrons une belle 
relation de la théorie des fonctions /héta, qu'il n’est pas facile d'établir 
autrement avec une entière rigueur (*). 


2. Résultats obtenus dans cette Note. Voici, en résumé, les deux propo- 
Sitions établies dans ce petit travail : 


I. On a 
se 4 
S f(x + nr) a” do + (& cos x + b, sin x) + (a, cos 2x + b, sin 2x) + --- 
D a 
ou 
4 1-00 1 +00 
a, —=— ftcosntdt, b, =- ft sin nt dt, 
Ta Te 
Žo -%0 


Moyennant les conditions suivantes : 1° les coefficients a,, b, sont finis: 


2° la fonction. 
my) = f(x + Irm + 24) + f(x + Irr + 2r — 21) 


est positive et décroissante quand » varie de O à 17, pour toute valeur de x 


() Cette relation a été donnée, pour la première fois, explicitement par Poisson , Mémoire 
sur la théorie des intégrales définies et sur la sommation des séries (suite) (t. XIL, 19° cahier 
du Journal de l'École polytechnique, 1823, pp. 404-509), p. 420. Caucuy, dans l’article inti- 
tulé Sur les fonctions réciproques (Exercices de Mathématiques, t. I, 1827, pp. 141-156), 
a 156, établit la même formule, en la déduisant d’une autre plus générale exposée par lui, 
dès 1817, dans le numéro d'août du Bulletin de la Société philomathique. Dès 1817 aussi, 
Cavcny avait prouvé la formule pour le cas particulier où z — 0. Les démonstrations de 


Poisson et de Cauchy donnent lieu à des objections analogues à celles que nous venons de 
are à la démonstration habituelle par les séries de Fourier. 


6 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


et de r, sauf si x + 2rq a une valeur comprise entre deux limites finies g, €. 
Dans l'intervalle de g à €, il suffit que fx vérifie les conditions de Dirichlet; 
3° les séries 


sont continues aux environs de » — 0. 


IL. Les conditions précédentes sont vérifiées pour la fonction e"*". Par 


ne Cu mL e + 
S € P = a S e="? cos2rz, 
La — 00 


— 


suite, On a 


formule qui permet de ramener les fonctions /héta d'une variable imagi- 
naire, aux fonctions fhéta d'une variable réelle. 
§ IE. FORMULE GÉNÉRALE. 


3. Première transformation de la somme cherchée. Soit à trouver la 
somme de la série 


1 ; À 
F = zm + (a cosx -+ b, sinx) + (as cos 2x + b, sin 2x) + etc., 
dans laquelle 
4 > 4 œ 
a, =- ftceosntdt, b, =- fl sin ntdt, 
Ta Te 


ft étant une fonction telle que, pour toute valeur de n, a, et b, soient finis. 
Appelons F, la somme des (n + 1) premiers termes de la série F. Nous 
aurons 


1 AA A i 
F, =- f ft l; + cos (t — x) + cos 2 (t — x) + -+ cosn (t w| dt, 
T 


e 


DES SÉRIES DE FOURIER. 


I 


ou encore, en faisant {— x + 26, 


4 se : ; 
F, =-= F f(x + 26) [1 + 9 cos 20 + 2 cos 46 + ... + 9 cos 2n0 | da 
T 


il ps sin (2n + 1)9 
=- A f(x + 20) aree B A - ) dé 
7 sin 4 
_Posons 
4 mT : sin (2n + 1)9 
Gi LE 1 f(x (um 26) ae D Cm Te do. 
F, sin 0 
Alors ; 
Klina E a lt 
Soit 
Caa 
= =lr + -r +g, 
2 2 


æ élant positif et inférieur ou égal à< 7z. On pourra décomposer, de la manière 
Suivante, l'intégrale G,» : 


Gun = + Ua T pa Æ ve + Uata 
en supposant 


1 (EUDTES sin (2n + 4)0 I re sin (2n + 1)6 
U=- f O remet Ve J ACC) UE 


Tr sin 4 r sin 4 
THE TO 17 


r est successivement égal à l + 1, {+ 2, ...,m—1. 
Dans l'intégrale u,, posons 9 = rz + n. Il viendra 


sin (2x + 1)y 
ne f(x + 2rr + 24) ——— dy 


sin 4 


in (2n + 1)" ; in (ln +1 
= FUEL orr a eea a a Op ee + En f(x +2rr + 2 Fire J" dy. 


sin y 


Dans la dernière intégrale, faisons n =z — ¢ , puis remplaçons de nouveau 
č par z. Nous trouverons 


Ja (2n + Lee 
m (le 


sin y 


4 ir 
U, = n [f(x + Qrr + 2y) + f(x + 2ra + 2r — 2y) 
` 


8 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 
On peut transformer la valeur de u, d’une manière analogue. On obtient 
ainsi 
1 fr 2n + > in (2n + 1)x 
u, = — $ e dose si a “fie t Alek Jodra Ur. 
T. sin # sin y 
irto 


Pour n infini, la première partie de u, a pour limite zéro, d’après le théorème 
2 L 5) 
de Dirichlet; la seconde devient 
1: 
A + Jr + 2r). 
Si l’on fait 
Gin = wt t Hy n° H n == Ua E Ur ee t Unt 


on aura donc 


1 ; 
F= slt + Ur + 2r) + lim, [lime [Hu n] t. 
Nous allons chercher une valeur approchée de H,, ,. 


Remarque. Si lon avait 


il viendrait simplement j 
E= lime iaae Hna 


À. Valeur approchée de u;. Soit 
maly) = f(x + Irn + 24) + f(x + 2rr + 2r — 24); 
supposons que À(7) soit une fonction positive décroissante, quand > varie 
, entre deux limites, l’une supérieure, 
l’autre inférieure, par le procédé de Dirichlet. 
On a Rens en employant une notation abrégée 


de O à 57. On pourra enfermer u 


T r 
2 


es 2 an- B > 3 anpi aih a Gi 
U, = a TAT ae 


i) 
n re En Ps Mer 


—— 1e (2n + 1) dy. 
siny 


DES SÉRIES DE FOURIER. 9 


Dans la première intégrale, sin (2n + 1)4 est positif ou nul; dans la 
deuxième, il est négatif ou nul; dans la troisième, il est de nouveau positif 
ou nul, etc. Quant au facteur ne : sin n, il n’est jamais négatif. Nous pou- 
vons donc écrire 


, = An — A, + Ao ani À; AN US (1 —)'A 


n? 


les quantités A,, A, A2, ..., À,, toutes positives, étant définies par les 
égalités 


7 ¡= (+ or Cp M dia s dy, iaa 2, ss n—1], 


sin y 


7 sin (2n + 4) 
s= f a(x) = ) dy. 
sin y 


Soient maintenant 


īri sin (2n + 1)y Fi F sin(2n -+ n(2n + 1)x i 
gr — dy, KE SER: a. en re go UV 
sin # sin # 


In- TE 
masin (2n - + LE 3 z sin sin (27 + 1) 
n= e o ar Ee SEd 
$ siny e sin y 
ar nT 


Inti IFI 


Ces quantités Aos Xis Xas + & SONL encore positives. De plus, elles forment 
une suite de grandeurs décroissantes, car les facteurs = sin (2n + 1)n, du 
numérateur, passent, dans chacune de ces intégrales, la dernière exceptée, 
par toutes les valeurs que prend le sinus d’un angle, quand cet angle varie 
de 0 à m. Le dénominateur sin n, au contraire, va sans cesse en croissant. 
Quant à 4, Cette quantité est moindre que 


nT- akg 


+1 sin (2n + 1}y 
Pom eur 


nr 


du 


laquelle, d’après un raisonnement analogue au précédent, est inférieure 
à æn; donc a, eSt aussi inférieur à «,_,. 


Tour XLV. b 


I 


10 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 
Dans chacune des intégrales A, remplaçons successivement ì (x) par ses 


valeurs extrêmes; savoir, celles qui correspondent aux limites de l'intégrale 
considérée. On trouvera ainsi, pour la première, 


er sin (2n + 1)y a | ju (Qn+1)4 r or sin 2n+1)# 
0) f ji el 7 dy UE 5 ARE dy > sf J. na LL dy, 
5 sin y sin # 9n+1/, sin y 
0 


ou 


Aa 
In + 5 ° 
De même 


Tai 
— À (D) cat 180 
Ən a 4 %, n ral 9 n 


De ces inégalités et de celles-ci 


o ar Ga D Us Dre D Ans 
on déduit 
FD D De 


Soit 2s un nombre pair quelconque inférieur à n. On aura 


O == [(Ao } + (A — A3) + ce + (Aasa — A1) | + (Az — Aou) + ee + (— 1A, 
= [( A9 — À n (Ao — A3) + + + (Asso — Ama) + An] — (Asai — Au) — + + ee 1j'A,. 


Donc 
u, > Ao — A; + Aa — À; + ce + Åg — A, 
u, < Ao — Ai + A — A; + ee + Ag 0 — Ag + An 


Dans la première de ces inégalités, remplaçons chaque quantité À précédée 
d'un signe +, par une quantité plus petite; chaque quantité A précédée 


DES SÉRIES DE FOURIER. 11 


3 . Vis . . 
d'un signe —, par une quantité plus grande; faisons l'inverse dans la 
seconde. Il viendra ainsi 


lee E ) 
SP ee OS Rs nd Ne | hu, 
nd on +1)" RSA) deu 


= -— J z = — z) A 
À Eu | 0 TT © ROME 2s—1 9 
2n + 1 ur An +1 e 


2r Ir 4r 
u, < a0) —a( Ja +al jamal jus + 


2n +1 In + 1 On + 1 
257 ) ( lsr ) 
se — À | — O + À Kasy 
An +1 In + 1 


1 A e rd . A 
e est-à-dire, en réunissant les termes deux à deux, 


Up > | g ) (to — a) + x | H Jas as) oee + À 7) (at25- 2 — 951) 


dn + 1 An +1 On +1 
u, € A(0 à 2r | a år ) É af Isr | 
r — — | (ay — %) + ec? ee — e E 
Jæ In + 1 es On + 1 si In In +1 (es x) 


On aura donc, à plus forte raison, puisque (x) est une fonction décroissante, 


f DS 257 x 
UKEN TEET [æo — o + Qa — az H ee H aag — sas 
2n +1 


257 
u, AO) 45 — À Loi — xo + a 


(7 en ON Ces mL LT TE rem LU 
2n + 1 


ou encore 


287 27 
Un € a p (0) — à ( =e — ] + À (2) [čo — ai + aa — agt ee Han a — #6]: 


An + 1 


Remplacons, dans ces inégalités, les quantités « par leurs valeurs. Nous 


trouverons 
27 
Isr Inri sin (2n +- Å 
w>al Fe Ve, 
2n + 1/, SIN # 


0 


In +1 


27 
2s mti sin (2n + À 
a 5 E am e A M 
e 


sin # 


12 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


si l'on fait 


$ x PA stir 
k EA anti sin (2n + 1)y 27 [ npa sin (2n + 1)y 
n= | ÀA{(0 } — dy +à 4 
WP MO = A re ; s EPa me J ; dy 
In + 1/1], sin y In + 1/0 sin y 
0 27 
Üni 


Pour abréger, nous écrirons encore 


287 É 
257 ani sin (2n + 1)4 
v, = À|— ne Es SEE 
On + 1/. SIN # 


0 


Alors les deux dernières inégalités deviennent 


Dit e L Vi Ds 

5. Limite de Yigit Yia te H Vm- lm, n Prenons pour 2s le plus 
grand entier pair compris dans la racine carrée de 2» + 1, de sorte que, 
pour n = œ, Où ait 2s = %; el, en même temps, 


On sait que l'intégrale 


287 


ei sin (2n -+ A) 
——— dy 
sin 4 


0 


a pour limite 47 lorsque n croit indéfiniment. Nous la représenterons par 
I 


(¿n — e), e ayant pour limite O en même temps que n. 
On aura 


{x OST 1 [r á ; 4ST i 7 4sr \ 
v == a e E | =|- e | | f(x +2rr + —— ] + f |x 2rr + 2r— z] |]. 
2 2n +1 A) 2n +1 2n +1 


on a 


i A, Asr 3 4 J 


On + 1/ 


DES SÉRIES DE FOURIER. 15 


Pour m= æ, cette expression deviendra 


Annnika ne Asr i Asr 
hoa E E E + 2x + —] + f(x + 2rr + 2r — ; 
i 2 alia 2n +1 On + 1 


Supposons la fonction 


AD=S f(x + rr + t) + f(x + 2rr + 2r — t) 


continue, aux environs de £ = 0. En faisant n = œ, el nous souvenant de 
` 4 ia . 
l'hypothèse faite sur s, nous trouverons 


ps c 


f | 
I ai y "Ip Opar a pem - 4 RS PUS PE “Lo = 
mu 3 S, [f(x + 2rz) + f(x + 2rr + 27)] = X, [(x + 2rr) — 5 f(x + Ur + 27). 


6. Limite de ds Wii Wan Es Æ Wwa e Oha 


| 27 EET | 
== Q À 0 hii À m + Oos À > MENT 
Ei (0) On + 1 Dr ET 


w, 


ou explicitement : 


wW, = o [fix + 2ra) + f(x + 2rr + 27)] 


i 4ST ; hsr \| 
— do | f| + Dr + —— | + f|x + rr + 27 — 


An + 4 2n + I 


F 4ST 4 Asr 
+ a | [| x + Irr + + f\x + 2rr + 27 — ——| |. 
; ; 2n + | On +1 


dau , . 
al consequent, si 


l 


Jmn = Wis + Wipo Hit + Wais 
n a, pour m = œ, 


o 


don = 4 S [ft + 2rr) + [(x + 2rr + 27) 
Li 


SE A 4Sz 4 Asr 
Eau S je (x sia liae + fix + 2?rr + 2r — — 
ti 2n + 1 On + 1 


nes 
l 


€ i 4sr \ 5 4sr 
Hayy | {la rr f| Dre e Ds mn |, 
LA 2n + 1 A 2n + í 


14 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


On sait que, pour n = ©, lim a= 4 7, lim aa, = 0; d’ailleurs, d’après lhypo- 

thèse faite sur la continuité de la fonction y(t), la seconde série du second 

membre de J„ „ a pour limite la première pour n= œ, puisque z$ a zéro 
, 2n 4 1 

pour limite. Done enfin 

— 0. 


7. Valeur de F. D’après ce qui précède, 


Lx H, < Finn ar: + 


En passant à la limite, pour m d’abord et pour n ensuite, il vient 


1 
Hima lin a e ae EN fr) MG + lr + 27). 
A 


Ajoutant de part et d'autre 

À : ; 

AU + Jr + 27r), 
nous trouvons 


PS f(x + 97) . Rs a our eo LA) 


141 


ce qui est la formule cherchée. 


Remarque. Si 


on a (n° À, remarque finale) 


y ay Le 
Pi Sir fr) ar 22) ei eue) 


t44 


8. Formules analogues à (A) et (A!) dans le cas où les limites sont — œ 
et g, ou — œ et + œ. Il semble difficile d'étendre les formules (A) et (A') 
au cas où la fonction ì (n) vérifie simplement les conditions de Dirichlet. 
Mais on peut démontrer qu’elle subsiste encore si les limites sont — œ et g, 


DES SÉRIES DE FOURIER. 15 


ou — œ et + œ, moyennant les conditions indiquées au courant de la 
démonstration précédente. 
Si les limites des intégrales &„, b, sont — œ el g, on trouve 


F ine lini lG al} 


4 a sin (2n + À 
Gua = — T f(x + 26) m — Je dô, 


sin 9 


Giu n = Um + Unya H e H Ua + U; 


1 prr sin (2n + 6 i IT + Ta 0! sin (2n + 1)9 
u, = — T f(x + 20) i EU eE do, ui = A f(x + 20) a iR do, 
T . 
ar lr 


sin ô sin 8 
z 
GEN <! 
=lr + -r Eu, a<r. 
2 9 ege 


F= S fe t arr) . ea de a e re AS) 


SI æ est inférieur à 47; et si g — x = (2 + A}r, 


F = Ș fle + 2ra) + È fle + Ur + 7) a acte UD) 


-%0 


En ajoutant ce résultat à celui qui a été obtenu à la fin du n° 7, dans 
: 
l'hypothèse où g=c, et posant maintenant 


1 +00 4 +00 
ae f ft cos nt dt, w= S ft sin ntdt, 
r T, | 
-%0 


on a enfin 
4 : Foy 
5 % + (cosx + bisin x) + (a, cos 2x + basin 2x) + ete. = Y f(x +2rr) . (C) 


—œ 


16 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


Mais cette dernière formule subsiste même s'il y a un intervalle degàe, 
par exemple, où la fonction 2(7) ne vérifie pas les conditions dont il est 
parlé aux n° 4, 5, mais où fæ vérifie seulement les conditions de Dirichlet. 
En effet, la formule (C) s'obtient, dans ce cas, en ajoutant les formules 
(A) et (B), ou (A) et (B'), ou (A') et (B), ou enfin (A) et (B) à la formule 
de Dirichlet dans le cas où les coefficients a,, b, sont de la forme 


ye 


l i 
de [leos ntdt, b, = 


La formule (C) est donc vraie pourvu que les conditions indiquées plus 
haut pour 2 (x) subsistent de — œ à g et de c à + œ, et que les condi- 
tions de Dirichlet subsistent de g à c. 


nue? 


$ II. APPLICATION A LA FONCTION € 


9. Premier lemme préliminaire. Soit fx = e~“. Dans ce cas, 


— a2(x +27 +-27)2 petrn +T —27) 


PA= € + 


7 


ou 


—a2(X—1)2 = (Xp) 
, 


ril) = € Fe 
si l’on pose 

Cr re r EEN, Ÿy—r — 1. 
Voyons si, en général, 2 (n) est décroissante quand ; varie de O à 27, ou 


si cette fonction est croissante quand Z varie de Oà ». On a 


E ERO E oT ETO a p A g ChI XT; 


expression dont la dérivée est, par rapport à £, 


AGE et [K Sh2aXt — 1 Ch2aX1]. 


DES SÉRIES DE FOURIER. 17 


On peut supposer X positif, puisque +2 (;) ne change pas quand on remplace X 


par — X. Soient 
X = pCh&, 1—pSha, 


ce qui donne 


X? — P — o,  2aXt— ap Sh2a, XSh2a’Xt — t Ch228 Xt — p Sh (2a°Xt — à). 


Supposons r assez grand pour que l’on ait 


et, par suite, 


Il viendra 
ou 7 EEDENI A Sh2« > 24, Sh(2a’Xt — a) > 0. 


La dérivée de la fonction (n), par rapport à z, est donc positive, si X? égale 
OU surpasse z + 7°; autrement dit, dans ces conditions }(4) décroit lorsque 
n Varie de O à 17. 

En général, la fonction e™®® vérifie donc l'une des conditions supposées 
au § I, pour l'existence du théorème qui y est démontré. Il est facile de 
Voir qu’il y a réellement des valeurs de x et de r pour lesquelles le contraire 
arrive, telles, par conséquent, que 2 (n) croit avec n ou décroit avec t. Cela 
arrive notamment pour X=0, puisque alors 


maA (y) = 2e, 


Mais cette circonstance n'a aucune influence sur la démonstration du théo- 
reme que nous avons en vue, comme nous l'avons remarqué à la fin du n° 8. 


10. Second lemme préliminaire. I. La série 
S eT e+ 2ra) 


ESI 


“St également convergente pour toute valeur de x +1 entre deux limites 
données, En effet, posons 


x + 2kr + t= u, 


Tome XLV. c 


18 SUR UN POINT DE LA THÉORIE 


k étant pris assez grand pour que au soit supérieur à lPunité lorsque x + 4 
varie entre les limites données. On aura 


t0 
par 7 +)? eee -a2{u+27)? 


+ € ous p er ER 


An+n7T)? A(u+-2 27)? atiu n 74-47) 
R, E m A a E T a aaa a LD E a e aa D... 7 


puis, successivement , 


R, Le e au T) ED: a(u+-2n7T +27 ) LD aÇu-HInT+AT) Es 
-2na T —2nar— ar ~man —kar 
Rae +e +e T ph eeey 
lar 
à 
R z2 g 2207 G 
à 2 Von! 


quantité aussi petite que l’on veut pour n suffisamment grand, quel que 
soit u où æ + t 


H. La série 


pe) 
5 aa ania 


141 


est également convergente pour toute valeur de x — t entre deux limites 
données. 
Même démonstration. 


HI. La série également convergente 


pe) 


> aco aii LD Fe on A) 


me 


dont ious les termes sont des fonctions continues de t, est une fonction 
continue de t (*). 


*) D’après un‘ théorème général. Voir DarBoux, Mémoire sur les fonctions discontinues 
Annales de l'Ecole normale, 2° série, 1875, t. IV), p. 78. 
, ] Į 


i 


DES SÉRIES DE FOURIER. 19 


IV. La série 


S Jon AENA a AIREA E] 


-c 


est aussi une fonction continue de t. 
En effet, on peut la remplacer par celle-ci : 


~a —1 42r T — 2T) —a?(--e42r r —t)?] 
fe i pe [> 


TASS 


qui ne diffère pas essentiellement de la précédente. 


De ces diverses propositions résulte le second lemme préliminaire : La 
fonction y(t) considérée au n° 5 et les fonctions analogues considérées au 
n° 8 sont continues, si fx = e7 ®® 


0 


14. Formule de Cauchy et de Poisson. On trouve, en appliquant à la 
fonction e~ les formules générales qui donnent &,, b,, quand les limites 


Sont infinies, 
f AAA 1 
nie eÀ? dt = ——, 
m Vra 


= 00 
Ee Fes 
a e”. cos nidt = —— e **, | 
dr Vra | 
l Š 2,2 . 
b, —- ee snnt = 0, 
Lg 
Par suit z 
suite, 
S 1 SR Res 
S er etrr) = p E S e īa? cos rx |. 
Die Vra 2 I 


Posons &—2z, k@—+, cette relation prend la forme 


ou encore 


+o (a+rT Ei % 
a RE è Nb — 120 ce Oy 
e Eac wN e EGOS 2NR 
ERA : 
ne Ciil 


ce qui est la 


formule cherchée. 


20 SUR UN POINT DE LA THÉORIE DES SÉRIES DE FOURIER. 


NOTE. 


Les inégalités relatives aux quantités À, «, À du n° 4 peuvent s'établir d’une 


manière 


générale, comme M. Catalan nous l’a fait remarquer, et elles conduisent au théorème 


suivant sur les suites finies ou infinies. 
Soient 29, %1, Za, Zz, elc., des quantités positives décroissantes, Ag, A4, A», 
el dos Mo ho, 5, etc., d’autres quantités positives telles que 


Ao ere A, Ao 
E A A A A De ho pa -pa Ag ObC 
Zo “y La 
Si l’on fait 
S = Ao — A; + A — A; +- +(—1)A,, 


S = æa — a + do — 03 o + (— Aa, 
on aura 


AnS L S < (0 — An) o + AnS. 
En effet : 1° Des inégalités (1) on déduit 
A5 2 1006 — A; > — Au, As >, — À; > — us, etc. 


puis, par addition , 
S > d (xo — ai) + àz (ao — az) + etc. 


Dans le second membre , tous les termes sont positifs; donc, à plus forte raison, 


S > A, [zo — à + 0 — 0; + etc.], 


u 
DAS: 
2 Les inégalités (1) donnent encore 
A aa EN AS Dos Aa L aða, — Az L — Mt, ete. 


puis, en ajoutant, 
S <L Ago — ha lay — aa) — da (as — a4) — etc. 


Dans le second membre , le premier terme seul est positif; de plus 


n Aa ta A a 4, + ete.] L ho (dy — 23) + A (a3 — 04) + etc. 


À 
Donc 


S <L Ato — À, lou — 09 + 43 — 0, + ete], 


ni 


ou enfin, 
S < (A5 — À,) do + ÀS 


La démonstration subsiste évidemment si n est infini et si S ets sont des séries 
gentes, 


Az, etc., 


(1) 


conver- 


NOTES | 


LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


SUR CERTAINES SERIES; 


PAR 


E. CATALAN, 


ASSOCIÉ DE L'ACADEMIE. 


{Présenté à la Classe des sciences, dans la séance du 2 juin 1883.) 


Tome XLV. À 


it TA A im 


NOTES 


LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


SUR CERTAINES SÉRIES. 


a G — 


I Théorème de Kramp. 


1. Lemne. Soit une fraction continue 
gam GC ror Qa Fa G Ay recni 
dont les réduites successives sont 


N E po R 


At B? o „3 P” Q?’ R”? 
Soit ensuite la fraction continue auxiliaire 
Y=, T, 8 b. 


Les dénominateurs des réduites de cette fraction ont pour valeurs, respec- 
lvement : 


(PQ — QP'}(—1), (PR'— RP')(— 1), {PS — SP'}(— 1}, ….; 


À élant en o R ME 3 * 
le rang du quotient incomplel p ( J 


* 
2 le Az . . nr A ALE 
(C) Pour Ja démonstration, voir les Nouvelles Annales (1849), p. 166. 


4 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


2. Changeons de notation; et soit 


OS URL Pate D Pro EAU A SE Pa a D te br LE) 
Prenons les trois fractions auxiliaires : 
Y = (gris gta es ns 


Z = (nyis Qnes es rs 


U = (gyi gras ce) Ae 


La valeur de y est une fraction ordinaire, fonction des indices g + 1, h. 
Soient donc 


N, 
h44, k JA jx 
1 = Cernana LA = —— u SE . . 0 . . 0 . 2 
4 Don Dirie Dix l ) ; l 


En vertu du Lemme : 


N,D, — DN, = (— 1} Dyas, n 
N,D, Lane DN, beso (— Dini 
ND, — DN, = (— 1 YH D e 


Multipliant par D,, D,, D,, et ajoutant, on trouve 


0 = DiD ppi, n — Diana + (— 1) D D, à 
ou 


De Diet ND D. 
De même, 


N O I,A n N,D, pig = E aN DA 


Les relations (A), (B) constituent le théorème de Kramp (*). 


Č) D’après cette notation, les réduites de +, répondant aux quotients 4,, qu, (a, seraient : 
Niy Nih A 


Die D DO 


Pour simplifier, nous les représenterons par 


Ng Na N; 
DocDD. 


kk 7 E , E g . ; Eo 

(”) Je ne connais ce théorème que par la mention qu’en a faite Lebesgue, dans le Journal 
de Mathématiques (t. V, p. 286). Il ne mwa pas été possible de consulter PArithmétique uni- 
verselle, de Kramp. La démonstration ci-dessus est beaucoup plus simple que celle qui a 


été insérée aux Nouvelles Annales. Enfin , le défaut de symétrie, de la formule rapportée par 
Lebesgue, a disparu. 


F ji 
| 

ET SUR CERTAINES SERIES. 5 | 

| 

Ə. APPLICATION. Soit 

| 

x = 3, 2, 1, 4, 2, 1, 5, 5, 2, 1. il 

Ii 

Les réduites sont : | 
í 

3 7 40 47 404 454. 557 2936 6429 9565 | 

E 5° 4! 51.45 166. 875 1016 2791 | 

| 

| 

Prenons | 
| 

g=5, h—7, k= 10; | 

nous aurons | 
N, =10, D, =3, N, = 357, D, =166, N,=9365, D,— 2791. | 

Quant aux fonctions | 
Ii 

Du, hs Dji t Dri to Il 

elles sont égales, respectivement, aux dénominateurs des fractions | 


4,2,4,3; 4, 2,1,3,5,2,1; 3,2,4; 


ii, 185, 5. ii 
On trouve, conformément au Théorème : | 
| 
2794 . 41 — 466.185 = -— 3.5, | 
9 368.11 — 557. 185 = 10.5 | 
| 
| 

IT. Fractions périodiques. 
l 
Ii 
4 E x s 2: A i 
+ LEMME., Soit | 
UE (HU Gti te) | 
ne fraction périodique simple. Soient | 

E, Eu 
y, == = Y: =s —— 

Yi E? Yi44 Ei | 
les péduiros ; 018 : T | 
réduites que l'on obtient en prenant i périodes et i + À périodes. | 
| 
| 
|| 
t | 


6 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Ona: 
4° Bus DE DE, Bu BE + DB + à . 4. (3) 
2e DE —DEu=HE, EE — B Ep = F E; ();. . . . . (4) 
5° Abe Ne Li, en oc 


Ə. Remarques. I. D’après les formules (4), si, comme on doit le sup- 
poser, E;, E, sont premiers entre eux, E,,,, E;,, sont également premiers 
entre eux. 


IL Tous les dénominateurs E, sont divisibles par E, (**). 


HI. Si, dans légalité (5), on remplace E,.,, E; par leurs valeurs (3) 
on trouve la relation 


7 


BE? + (D — E) BE; = DE} = EB, à, 4 4, O) 


à laquelle satisfont, nécessairement, les valeurs de E,, E.. D'ailleurs, par la 
remarque précédente, cette relation se réduit à 


Fe Ea TRS MI AE 
E + (D, —E,)E, | =) — DE; (=) =+41 . ‘a’, (7) 
E;/ E 


IV. Par conséquent, si quatre nombres entiers D,, D!, E,, Ei, sont liés 
par la condition 


DE; — Dib = + 1, 
il suffit, pour résoudre en nombres entiers l'équation 


z + (D; — E) zu — DEiut= t4, o 0. Lo, G (8) 
de prendre 


E E; 9 
ee A a et AR ER a LE à RTS S Pa 
E (9) 


(*) Nouvelles Annales, t. VIIL, pp. 177, 178. 
(”) Conséquence du premier Lemme (1). Dans l'application de la formule, on devra 
prendre le signe +, si le nombre des termes de la période est pair. Et, si ce nombre est 


impair, on prendra le signe + ou le signe —, selon que i sera pair ou impair. 
(m Boe CU, DD 178, F9. 


| 
ET SUR CERTAINES SERIES. 7 
6. VÉRIFICATIONS ET APPLICATIONS. Soit 
SO a A 
Les premières réduites sont 
SUD 17 | 
Fos d (| 
de manière que | 
D= 10, D =53, E=17,, E—5 | 
Les formules (3) donnent ensuite : | 
E, = 559, E;,—6765, E=—154991, E= 9691657, E= 55 698 219, | 
E, = 100, E;=—1995, E;— 59800, E;== 794005, E; 45 840 500. | 
ni , k ; y a | 
Conformément à la Remarque IT, tous les dénominateurs sont divisibles | 
par E, = 5. | 
En outre (5 : | 
BE; — EE, = 17.100 — 5.339 = 1 700 — 1 695 = 5, | 
| 
EE; — EE, — 559.4 995 — 400.6 765 = 676 505 — 676 300 = 5, i 


EE; — LE, — 6 765.59 800 — 1 995.154 921 — 269 167 400 — 269 167 595 = 5, 


E,E; — EE, = 154 921,794 005 — 59 800.2 691 657 
= 107 1927 948 605 — 107 127 948 600 = 5, 

BE, — EE, = 2 691 657.45 840 500 — 794 005.55 698 219 
— 42 656 654 577 100 — 49 656 654 577 095 = 5. 


Ta aA 2 $ . 
D’après les données, l'équation (8) est 


z? —- l4zu — 50u’ = 1. 


Celle-ci ; 
Ælle-çi admet, comme solutions : 


AUTEUR z= 67453, u= 599; g= a4 Y2; n = 7 960; 


z = 559 


elc. se 


559? — 14,559 . 20 — 50 . 202 = 114 921 — 94 920 — 20 000 — 1, 
de 6 765? — 14.6 765.599 — 30.5992 = 45 758 169 — 57 778 118 — 7 960 050 — 1 : 


8 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


7. GÉNÉRALISATION. On peut, évidemment, réunir deux, trois, quatre, ... 
périodes, et en former une seule. Les propriétés rappelées dans les Para- 
graphes 4 et 5 peuvent donc être ainsi généralisées : 

41° Eban = heban ÉD a e a) 

* 


2° Tous les dénominateurs E, sont divisibles par E, et par E, (©). 


MI. Série de Lamé. 


8. La fraction périodique la plus simple est 
y ={(1), 


dont les réduites successives sont 


=> 
N 


Les dénominateurs de ces réduites ESD donnent lieu à la célèbre série de 
Lamé ou de Fibonacci : 


PR ST S Lo e S, 89, ES, DID a us a AN 


Si up, Ug, Up Sont trois termes de cette série, il résulte, de la dernière 


pq 
proposition, que u, 
M. Epouarp Lucas, et dont il a déduit des conséquences fort importantes (***). 


On peut l’énoncer autrement : 


est divisible par u, et par u,; propriété signalée par 


Les termes de la série de Lamé, pris de trois en trois, sont divisibles 
par 2; pris de quatre en quatre, divisibles par 3; pris de cinq en cinq, 
divisibles par 5 ; pris de sept en sept, divisibles par 43 ; etc. 


() Parce que l'indice nk est une fonction symétrique de k et den. Dans l'exemple ci-dessus, 
E; = 15 840 300 est divisible par E, == 100 et par E; = 1 995. 

(**) Et aussi les numérateurs. 

(**) Sur la théorie des nombres premiers, p. 5 (1876). 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 9 


9. On sait, et l’on vérifie aisément, que 


u, =- : j0 + vs- avy] E a a a el) 


n — 


ak 
Donc, d’après la propriété précédente : 


LAVE — (1—5) : 
( aA d pei se — entra, 


20 eV (V5 


ou 


(4 T apu aj (i bi V'5}o-2 (1 | 5j M E (A Lis v 5pu Diis JO 9r (4 1}; 
ou encore, par le changement de q en q + 1: 


(1 + LV Dee ia a a V Bp me (Re Vos MT." . . (13) 


10. GénérazisaTion. Soit y =a, a étant un nombre entier. On trouve, 
de la même manière, 


Hi Sn pe ——— k 
C ATE WAP a (a Vaa A (a -Va + AP + oe a (a V a + = DNE, (14) 


D) 
Prenons, par exemple : 
Ft RUE aa eS 


Nous devons trouver 


(8 + V29) + (5 + 39) (5 — V29F + (8 + V29) (8 — V29) + (5 — V29 = M. 64 
ou 


A Be 15.54.00 10 020 a 00 4 (4 (25 + 20 =L D2, 
l 


Dose AD DENAN. B 20 a 29% NE 62. 
Si l'on remplace 5° par — 7, 29 par — 3, cette égalité devient 
A E E 4145.7,09 497 TC :5%; 
°U; après quelques autres réductions, 


- TAT 6A5.1721506972e MNC:52 
Où enfin 


340 + 12 = JIC. 52. 


loue XLV: B 


Sa 


10 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


114. Remarque. Dans l'égalité (14), posons 


a = 2 cot o. 


Il résulte de cette transformation : 


pai 1 —_—— À 
a+Vé+hk=2co-9, a— Va t t= tg 59: 
puis 
: A ? f ; 
LEA nig -1) Eae” p(g—2) L ? LOUER aah — A port L — entier : 
COUT e (cotn SRE sr cot 58 9 * + (— 1) tg 5 = erler; 


ou, sous une forme un peu plus simple : 


{ ) à ; ọ ; g 
cour? + (—1 Je co? 4 cout 0? + (- 4)? cowu-® T eai (— 14) cov” = entier. (15) 
2 2 2 2 2 


Autrement dit : 
Si larc o est tel que sa tangente soit 2, a étant un nombre entier, la 
fonction 


Πlas q (69) 
amey 2f g K 
TE e A a e D EUA E pe ery a OR UE RE 
Ə 2 ( 1) ig 9 tg 2 ( / ® y 


se réduit à un nombre entier. 


42. Nous donnerons ici les quarante-cinq premiers termes de la série de 
Lamé. Ceux de ces termes qui sont premiers sont désignés par un asté- 
risque. 


meee e o == TERTS 
| n 4 Le OR o Sn lact 7 Ce JE ET EE 12 | 145 | 14 | 15 46 | 
D Te E G AT E OT 801 08 NSI, | 610 | 987 | 


n 17 18 19 20 21 22 25 24 25 26 | 
u, | 1 597*| 2 584 | 4181"! 6 765 | 10 946 | 17 714 | 28 657* | 46 5368 | 75 025 | 121 da 


n 27 28 29 50 51 52 55 54 


u, | 196418 | 517 811 | 514 229* | 852 040 | 1 546 269* | 2 178 309 | 3 524 578 | 5 702 887 


ñ 53 | 36 57 58 39 20 
u, | 9227465 | 14950352 | 24157817 | 59088169 | 63245986 | 102554153 


n 41 42 45 4h 45 


u 165 580 141 267 914 296 455 494 457 701 408 755 1 134 905 170 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. ti 
13. Remarque. D’après les premières valeurs de «,, il semblerait que t, 
est premier si n est premier. Mais il n’en est rien : 
Usa = 2h 457 817 = 149.162 133; 
et, comme l’a trouvé M. Lucas : 
| un = 165 580 141 — 2 789.59 369. 


Quant au nombre 433 494 437, nous pensons qu'il est premier (*). 
iV. Série des inverses. 

14. Pour abréger, nous appelons série des inverses celle dont les termes 
sont les inverses des dénominateurs des réduites d'une fraction continue 
illimitée. S'il s'agit, par exemple, de la fraction (1), qui donne lieu à la 
série de Lamé, la série des inverses est 
1 
GE 


R ne d 
18. Lemme. La série (16) est convergente. 
À . . E , Q : 1° 
Cette proposition, bien connue (*), résulte, immédiatement, de ce que 


4 
ipga an 9 (Par f 
lim tt — a = = rer. 0 Ga. 
l 1V5 2 
u 


16. Tuéornèue. Toute série des inverses est convergente. 
Soit, sous forme abrégée, 


<= 4; b, C, d, yo. 


* y. | n | | 
C) Si nos calculs sont exacts, ce nombre wadmet aucun diviseur premier, d’où résulterait 
qu'il est premier. 


P Se Done E E EO A : 
a S. Dans le beau Mémoire intitulé : Recherches sur plusieurs ouvrages de Léonard de 
ise, N es ERA K i TER ET 4 
ie M. Lucas arrive à cette même conclusion. Ainsi, le nombre considéré est premier. 
de Annales (1864, p. 260; 1878, p. 253); Nouvelle Correspondance, t. IU, 
Det AR , 
5 OC. 


12 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


les termes @, b, c, ..., étant, bien entendu, des nombres entiers. Les déno- 


minateurs 
A De Ca 


surpassent, en tout ou en partie, les termes correspondants de la série de 
Lamé; donc leurs inverses sont, respectivement, égaux ou inférieurs aux 
termes de la série (16). Conséquemment, la série 


est convergente. 


47. PROBLÈME (*). Trouver la limite de la somme des termes de rang 
impair, dans la série (16). 
Soient, dans la série de Lamé, les termes de rang #mpuir : 


j G K Pre 
LS 5 16,647, 


Il est facile de vérifier que, v, étant le terme général de cette série, on a 


O = ona er US FT te 
et, par conséquent, 
DA on por A ne  C1S) 


Dans cette formule, «, £ désignent les racines de l'équation 


À RD Us Or neue a ea 
savoir : 
VE 34/5 4 
ra D de cent E LAURE à En ont AU 
F q P 3 r (E) (20) 


g anm 


(*) Proposé par M. E. Lucas (Nouvelle Correspondance mathématique, t. II, p. 223). Nous 
reproduisons ici, en grande partie, la solution publiée dans les Nouvelles Annales (1878, 
p. 253). 

(**) Cette relation est une conséquence de celles-ci : 


Ui E Ui--1 + Ui-2, Ui = Ui- + Us, — Ui- = — Uiz — Uik 
(**) Comme on pouvait s’y attendre d’après la formule (12), 


Ha ( — AI Es ( ee) 


9 


9 


A ET SUR CERTAINES SÉRIES. 13 


Déterminant, au moyen des conditions initiales, les valeurs des con- 


| stantes A, B, on trouve, au lieu de la formule (18), | 
i 

j 
4 +g 1] 

e ne LE I 

ou 

4 ge | 

— = (I + q) -n 0... ‘ťa’ A | 

ee A (21) 

| 


Telle est, sous la forme la plus simple, l'expression du terme général de la | 


Série proposée. Conséquemment, si S est la limite cherchée, on a | 
| 
| 

S © (ème | 
r ps ad n-i ' (22) | 
Cad Eg, | 
Or, avec les notations de Jacobi et de M. Bertrand, | 
1 q i k | 
e 1 ns x Paa JO aS (25) 
1+qg 1+39 1+q 2V q 
Donc aussi 
1+0 
SEE En 
QV q 
ou, à cause de 
+ q DVE Pre 
vq 2 Ve —921/5 
2 
V5 
= ho (24) 
2r 


18. REMARQUE. Par une autre formule connue : 


= TETE e E (9. 


* 

©) Fundamenta nova... , p. 103. 

[XX . ` r, RA) 

C) Recherches sur quelques produits indéfinis, p. 2. 


14 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


A , ko . vy ` ` 
En égalant les deux valeurs de =; on a done cette identité, à peu près 


évidente : 
4 p ; 
+ 1 = + 7 ++ +g + g+...ÿ. : . . (C) 
lime Le 1e 


19. PROBLÈME (*). Trouver la limite de la somme des termes de rang 
pair, dans la série (16). 

Désignant par S’ cette limite, et opérant comme ci-dessus, on trouve, au 
lieu de la formule (22), 


SUR E ur à à à 1.1 100) 


J'ai cherché, en vain, la sommation de cette nouvelle série, sommation qui 
parait dépendre de celle de la série de Lambert. 
Soit, en effet, 

Q q? q” 

BRA l 1 


- is LR : 9 
Pre 17 Pre ne oa 
et, par conséquent, 
q? q° q” OA 
ke eg LÉ poer ati = f: 
Il résulte, de ces deux égalités, 
w q” 3 ; 
D a . . . . . . . @7 


20. Remarques. I. Réciproquement, si la somme de la série (25) était 
connue, on pourrait, peut-être, en déduire la somme de la série de Lambert. 
Car si l'on pose 


+ : . nd 


A ge 


de manière que 
0) =f) — F); 


*) Egalement proposé par M. Lucas (loc. cit.). 


É 
J 
l 
l 
| 
| 
| 


| 
| 
i 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 15 
on aura, à cause de f (q°)= 0 : 
f (a) = p(q) + P (9°) + pq") + paf) + . . . . .: . (29) 


IL. La relation (27) équivaut à 


ei de en et dd 
ERE TE qs er TR er 


identité dont la vérification est facile. Elle est, pour ainsi dire, conjuguée 
de celle-ci : 


( 2 5 z 
1 ee q S q Ten J r Ai e 
1+ deg deg 1—q 1—¢ 1—09 


donnée par Jacobi (*). 
En les combinant par addition, on trouve 


g 


ag ms (E) 


Pour démontrer, directement, cette nouvelle identité, il suffit de développer 
les deux membres, suivant les puissances entières et positives de la variable : 
de part et d'autre, le coefficient de q” est le nombre des diviseurs de n, ayant 
la forme hy + 1. 


V. Généralisalion de la série de Lamé. 


o) 4 aaar à . . KSE) ` yoe . 
24. Tuéorëme. Soit a un nombre entier, supérieur à 2. Soil x une racine 
de l'équation 


L nano al EAN. ner et. O e OO 
& Quantité 
de nl en Gus aire : 3 
Ur mal HAUT RS OL) 


est un nombre entier. 


* 
() Fundamenta... p. 108. 
{ A i x i 
| L’équation (19) en est un cas particulier. 


16 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


On a 
A Ds a" À Er ant z 
Dop assassinée Lot 3 Ge m aa lg : 
Va EE +a, Ynya a TER jat aa 
puis 
l y E a a TE a") 
Ynya epn Yn Saari (1 ES aê) grr? ? 
ou 
1 
Job en A 
On conclut, de cette relation générale : 
he Yna Ry peer ; 


š ECE, ë 1 
puis, par l'élimination de — : 


l 
Ynes Ce ia =) Yn = Ynsis 


ZA 


ou 
E UE. a a a À + (08 


Ainsi, les valeurs de y, ,, forment une suite récurrente. De plus, si Ya el Yo 
sont des nombres entiers, Y,,, est un nombre entier. 
Or : 


1 f 
Cape a aa = B’ + aa = (aß — 1) + aa = a? — 1, 


Y= ala — 1) + P= (a — 1) + (a — 1) b — a= ð — 24; 


B étant la seconde racine de l'équation (30). 
Ces valeurs sont donc entières, et le Théorème est démontré (*). 


22. Remarque. Le terme général peut être écrit sous la forme : 


Le ; 
Yn fe r sp (x pi (2 
ou, parce que 


aB= 1, 


© Ou plutôt, la réduction numérique est effectuée. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 17 
Sous celle-ci : 
1 — a” 


PNA n+1 n—1 
US 0 jet Se PU Eu PEU ee 


La réduction au dénominateur commun donne enfin 


4 


TNT DE pr RS D E 


Invk4 
D ALus (2 


Ainsi, le second membre est un nombre entier (o: 


23. Tutorème. Soient les séries : 


is ilg; Us, at 


n? 


N N A a a AU 
AD NN SAUNA a AN 


Si lon veut que la troisième reproduise la première (sauf le premier terme 
de celle-ci), on doit prendre : 


TE A] 


u, = Ag" + Bg”, q= ——— ; (54) 
En effet, la condition 
» Mu, siy Ungt 
Équivaut à 
Ua — 90 FU, = 0. 
a 0 
Cette loi de récurrence donne l'équation (19), puis les formules (34). 
24. Remarque. On a 
4 q" 
u. . A bg (a0) 


Si A de na a i 
A= qet B = 1, on retrouve le terme général de la série (22). De même, 
our À — y ; Hanan 

Pour A = 4, B = — 14, la formule (35) reproduit la série (25). 


o 


ansformation analogue à celle que nous avons indiquée précédemment (9). 


Tome XLV. c 


18 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


VI. Fractions tournantes. 


25. Soient deux fractions continues, telles que l’on passe de la première 
à la seconde en effectuant, sur les termes de la première, une permutation 
tournante. Par exemple : 


T0 bh CRC y0, eG d 6e Qi 


Nous dirons que æ, y sont des fractions tournantes. 


26. TaéorÈme. Soient deux fractions tournantes, et les deux dernières 
réduites de chacune : le dernier numérateur et avant-dernier dénominateur 
forment une somme constante. 

Pour fixer les idées, considérons les fractions écrites ci-dessus. Soient 


les réduites de æ, et 
p y Ò £ a 
g' y" UT a" 


les réduites de y. Soit, en outre, la fraction auxiliaire 


z— a, b,.c, d, €, à, 
ou 


Il est visible que les réduites de z sont : 


qa = 


A 
A 
Par conséquent : 

4° B=B, y—C, =D, =F, a=4E + D'; 


æ Gf—B—aB, y'—=C—aC', d—D—aD, #—E—0ËE, «'= (Ea + D)— ax; 


50 a+ =E +D, 


conformément à l'énoncé. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 19 


27. Remarques. I. Si, après avoir formé y au moyen de æ, on déduit, 
de y, une fraction z, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le cycle soit complet; 
les réduites de ces fractions tournantes dépendent les unes des autres, 
Comme on le voit dans le tableau suivant : 


FRACTIONS TOURNANTES. RÉDUITES. 
DT de 20 1 OU 
Dem Dio, A 2A hu CNT IAE EE “+ 
Se Lolo 20 TU 
T n E DT 315 2 
15-20 10 00 OÙ 
41524; 9; 0; 1 2’ 9° 2 gg? 
EN a A E E R) 
ER 14 9° T 


v— 4, 2, 5, 1, 2; D en a de 
E S el 9 25 
DE RO US) 
x = 92, 5, 1; 2, À 1° 5° FHE m: 48 . 


En outre : 
100 ce 4 eh 107: 2 15 cé 100 a 90 eu ft ns: 


I. Si la fraction æ est périodique, y l’est également; et la propriété 
Précédente subsiste pour chacune des périodes. 
Exemple : 


x = (2, 5, 1, 2, 4), y=—=(5, 1,2, 4, 2). 


Les réduites de x sont : 


2 7 9 925 109 243 838 41081 3000 15081 
(07: 500 476 1501 V700- 


3 4 41 48 107 569 476 4321 5760 1284 | 
1 15 100 129 558 1561 5480 | a 


109 + 44 = 107 + 15, 143081 + 1 321 — 19 841 + 1 561, … 


20 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


VII. Développement de VA. 


28. A étant un nombre entier, soit a la partie entière de VA. On sait que 
VA af, gs hs 08 Ms ls Di Q20) () à ice. ui + à. (66) 


Afin d'obtenir des résultats simples et d'éviter les discussions relatives 
aux signes, nous supposons, une fois pour toutes, que le terme q soit de 
rang pair : dans le cas contraire, on prendrait, comme période unique, 
l'ensemble de deux périodes (7). Soit = la réduite répondant à ce terme q : 


7 
elle surpasse V A. 
29, FORMULES FONDAMENTALES. Si nous prenons n périodes, nous aurons 


VA ü, fogs -s ps 4 20, fa Jr -e15 Pa Qr 2a, ee, 24, f9,- Pq a + VA. (57) 


car le diviseur (24, f, 9, h, ..., M, n, p, q) égale a+ VA. 
En conséquence, et par le raisonnement habituel, 


Qla EAE P.. 


A Rs SE RS RE oaa 
Q, (a + A) + P, (58) 
puis 
P, = AQ a, Pim Qem auon oiii oahi (59) 
puis encore, par l'élimination de a : 
TR dE D SE A a 


30. Surre. Soit 


Qi i i ; 
T f des Beg 24, f, 9, eis Pi q, 20, HOUR EE 
nA 


(*) De plus, q = f, p = g,...; en sorte que la période est symétrique. Mais cette propriété 
n’a pas d'influence, croyons-nous, sur les recherches suivantes. 


EIAN, EAN ; APS Q / ; 
(e2) 0 étant de rang par, 0! Pest également; donc © > 1/A; ete. Nous avons cru devoir 
n 


rappeler les relations (38), (39), (40), quoiqwelles soient bien connues. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 21 


> période étant prise n — 1 fois. La réduite qui suivrait, immédiatement, 
n—A 
qa à pour valeur 


Que P 2a FI De 


sd : À 
Dans cette expression, remplaçons 2a par a + 5: : nous obtiendrons de; 
Savoir : 


Q, E Dam Pia a 00, 
a 
a ) AE 2 
= Quant Pis QQr 
Q 


ou, par les formules (39), 


Q, EE AQQ,_1 + QQ, à i 
Q, Q:Q,-à T QQ, à 5 


puis : 

Q, == ADO E QiQus Om Qu E QO  , .°, . (M) 
el, en outre : 

QQ, FON: AQ:Q, > Oris QQ, py QQ, S, Qui () . . . . 4 (42) 


31, Aurres RELATIONS. 1° Dans la seconde des formules (41), changeons x 


en n- 1: elle devient 
Quya TA QQ, Fe QQ 


Donc, par la combinaison avec la seconde des égalités (42) : 
C a ea e der: 0 


Ainsi, comme Pa fait observer M. Lucas (*), la loi de récurrence des déno- 
Mminateurs Q1, Qo, Qg, .…, est celle qui régit les cosinus des multiples d'un 
arc x, 


2° Les formules (41) donnent, comme cas particulier : 


dau D De Q de 0 


Qi, sont premiers entre eux, si, comme on le doit sup- 


n? 


a 
o | Ces égalités prouvent que Q 
ser 
0,4, À le sont. 
PA D 4 1 : ) 
) Nowelle Correspondance mathématique, t. HE, p. 375. 


22 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


D'ailleurs, 
AQP =Qi— l; 
donc 
D L O a 4 do aD) 


3° Réunissant n périodes, pour en former une, on a ces deux formules 


générales : 
O 2 1 O SO a a « . E) 


32. Remarque. Il résulte, de celles-ci : 


Q@, _1 È z] 
Mende A 
Q, 2 Gi Q, 


ou, sous une forme plus simple, 


4 A 
Lan = — (x, + a : . . . . . . . . . . (46) 
2 


Ainsi, x, étant une valeur approchée de VA, on obtient une nouvelle valeur, 
plus approchée, en appliquant la formule (46) (**). Celle-ci, d'après une 
remarque de M. Bertrand, s'accorde avec ce que donnerait la formule du 


binôme. 


33. Tuéorème. Soient Ai, Aa, A4; Ag, .. une suite de nombres entiers, 
indéfiniment croissants, satisfaisant à la condition 


a 


Soient B,, Ba, B}, Bg, ..., une autre suite de nombre entiers, satisfaisant à 
la condition 
Bi anton A Là naaar ont 8) 


non 


{) Si la période (f, g, h, ..., n, p, q, 2a) avait un nombre impair de termes, la formule 


serait 
Q, = 20; +1. 


(*) Cette formule a été indiquée par M. Serrer (Journal de Liouville, t. XII, qui ne paraît 
pas avoir aperçu la première des relations (F). 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 25 


lo | 
Faa SR, E | 

PR at DUR ee es 

p D B? 


2° Les fractions 


tendent, indéfiniment, vers VC. 
En effet, | 
A 21  4AÏaAM A1 


m Ne SRE 


34. Remarques. I. Ce théorème constitue, pour ainsi dire, une réci- 
Proque de toutes les propositions précédentes. 


IL. Le nombre C peut être fractionnaire. 


HI. Si ce nombre est entier, les fractions 


sont irréductibles. 


IV. Dans le premier cas, ces fractions ne sont pas, nécessairement, des | 
réduites de la fraction continue équivalente à vc. | 


L) p i 
39. APPLICATIONS. l. 


A, == i A7, em 07, ue 18 817; 5 
B—1, B=4, B—56, B— 10864, ..….; 
24 7—4 97—14 18817 —1 
1 4? 56? 10 864? 
En effet, 


VB=1 (1,2); | 


> 7 


19 96 74 97 | 265 362 989 1551 5691 5042 13775 18817 | 


11 145 41 56 | 183 209 571 780 2151 2911 7953 10864 | ` | 


24 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


IL. 
A = 8, A,= 127, A,—532957, A= 2 084 028 097, …; 
B; = 3, B= 48, B, = 12192, B= 7860 554688, ...; 
8—1 127—1 32 257° — 1 


C = == = = e = 7, 


5° 48° 42 1927 


Si lon développe 7, en fraction continue, on trouve 
V7 = 9 (1, 1, 1,4), 


puis les réduites : 


23/14 17 51 48 |225 971 494 765 3554 4519 7875 12192 | 


2 5 5 8137 45 82 1927 | 590 717 1507 2024 9403 114927 920830 32257 
TETE 


III. 
T E a a E 
B—3%, B =12 B108, B=— 52 899, ..: 
21 TP—A1  97—1 


1 
3° 12? 168° 5 


5 1 i ; PAL 
Le développement de —=> en fraction continue, donne les réduites 
v3 ? 


te OM AN 41 06 db 
f LS D 71:07 D. 


parmi lesquelles ne se trouvent pas les fractions 


A 97 18847 


IV. 
| est A ine ee 77, 7 ses 605 887,44 
‘à Bo D moe 408 : B A70 8800. 
ce A APE BTP A 666857 — 1 : 
n  CHEUE a a ATOS 7 E. 
etc. 


(*) Ces dernières sont égales, respectivement, à 


1 oy ESITE 


56 3 


, 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 


O 
Oz 


VIH. Analyse indéterminée. 


36. Des formules 


qe ten AQ Qoi tar 0.Q, -49 Q, fs QIQ, or 0:10, 1, . % . . ` (41) 
on déduit 


Qn + QU'A = Quii (Qi + QIVA) + Quai VA (Q + Qi VA), 
ou 


Qu + OA (Qi + Qt A)(Q + QAR AT 
Par conséquent : 
1° Les binômes 
D'ÉOVETOEDUA QG EdiE 


forment une progression par quotient : 


Do 
Q,.+ Qi (On O AT E a o 
3° 
j 
T e OERA OA a 69 
Qu e à QU A) (0 PAPA TR 
WA 


4 L'équation 


eSt vérifiée par 


37. ProsLème. Trouver tous les nombres entiers tels que le carré de 
chacun d'eux soit la somme de deux carrés consécutifs. 
Le . 
L’équation 
x? = y +(y+l) 


C 
apr 


À r * À . M . FLE r NEATE, Ne Ron 
tte démonstration me paraît plus simple que celle qui a été donnée par M. SERRET, 
€s LAGRANGE (Cours Œ Algèbre supérieure, 3% édit., t. I, p. 15). 


Tome XLV. D 


26 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


étant mise sous la forme 


DE ER OT A ET RAR ee (OA) 


on a, par les formules connues : 


4 — — AREE 1e $ j * 
x= 372 (v + ‘À rio + tes Le y= lv? + 4)” (7/9 — jet 9) 


(55) 


Le problème, on le voit, est des plus simples; mais il fait découvrir des 
propriétés intéressantes. 


38. Ecrivons ainsi la première expression : 


V9 +1 6 V) À eaa] 5 > 1/2) i 
u, = — (3 + IV J a e (3 Iam ya) a . . . (86) 
ave 2e a 


La somme des binômes 


3#91/2, 3—91/2 
est 6; leur produit est 1. Par conséquent, la suite 


EEE E EEN N EN 


est récurrente; et lon a 

Ua O Te ERE ee A E E N 
Le calcul direct donne 1 

EEA E 
après quoi l’on trouve 


uz; = 29 


; LSN, u I8 i = D (*) 


39. Les nombres 
E 00 260,2 088 DH TAL +. 


jouissent d’une propriété remarquable. 


&) Morer-BLaxc (Nouvelles Annales, 1882, p. 261). 


rm 


+ Pret 


| 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 27 


On a 


21749, 99—091+ 5, 169—5° + 1%, 985 — 19? + 997, 5 741 — 297 + 70°, n. 


On est donc conduit à supposer 
Ut = 0 Die ce ee a De (08) 
en appelant v, le #°"° terme de la suite récurrente 


hoc ao de PO 


dans laquelle 


Uni gor 2v ERa . . . e : a R 4 z S (59) 


h! 
Cette équation donne 


n= [A +2) — (1 Ha]. e ooo o o (60) 


À cause de 


| ER 
de TA E Ra) EL UE (88) 


21/2 


on doit. +; Pi Si T pe 
n doit, si la relation (58) est générale, avoir, identiquement : 


1 2 1 /0\2 1 | 
nr A eve) | 
i (61) 


4 3 á { 
LG ea (are fa eva (var Ti 


A0. Vérimicarion. Le second membre égale 
1 5 
slt +2)” + A 12) + (1 + VO + (1—2) — 9 pr 2(— jy | 


E 
ES [0 + 72) (4 + 21/9) + (1 — 1/2)” (4 — 2 /2)] 
Æ 


CEE 


LU + a) (2 + 1 + (1/2 (72 — 1) 


4 
gza LU + vae — (1 — yae], 


= 


28 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


44. L'identité (61) étant vérifiée, les hypothèses précédentes le sont 
également; et, en conséquence : 


4° Le nombre 


due n=l ; s\n 
T, vva (A ya 


est la somme des carrés de deux nombres entiers ; 

2o Si le carré d’un nombre entier égale la somme de deux carrés consé- 
culifs, ce nombre est la somme de deux carrés. 

42. Remarques. L A cause des formules (60) et (55) : 


1° Si 


m= 2k — 1, v == U; 


20 Ni 


neS Dk Opa AE 


Ainsi, les nombres v, de rang impair, ne diffèrent pas des nombres u. 
D’après cela, reprenons l'égalité 


U E E TE A E LT E NLRA a PAIO) 
Si n est impair, et égal à 2k — 1, 
O U 


À < : h APR 0 2 
Mais, par hypothèse, u? est la somme de deux carrés consécutifs, ?, (441). 
Conséquemment : 


RS DE ne à E e a a a a E O 
Si n est pair, et égal à 2k, 
E A a C EU): 


puis 
a a ea a a pe ue a) 


Nous pouvons done résumer ainsi les propositions précédentes : 


Si le carré d’un nombre entier est la somme de deux carrés consécutifs, 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 29 


ce nombre, égal à la somme de deux carrés, est égal, aussi, à la somme de 
trois carrés, dont deux au moins sont consécutifs (*). 


U. Les valeurs de 2y + À, satisfaisant à l'équation (54), forment la suite 


récurrente : 
WT LE 9 1393 S119, 


On en conclut les valeurs de y : 
0, 5, 20, 419, 696, 4059, 
Les valeurs correspondantes de x sont, comme on l’a vu ci-dessus (39) : 
4, D 99, #64: vel: D 741, 
En effet, conformément à l'énoncé du problème : 


LAS DR AR Dre pr DOC 01100 14107. "120 


985: — 696? + 6972, 5 741? — 4 059 + 40607, a (*). 


48. Ivevrrrés. D’après le paragraphe précédent : 


t= + (Va) Uoryi = (Va) + (Ura) A RN R e Es (64) 
9 
D'un autre côté : 
(| $ 
ua = zoz [V2 + 1e (2 — 1] | 
‘ 3 (55) 
Ua = a (2 da gje 4e (V PAO A BEST | 
Me jf ane T], | 
| (55) 
/ , 1 - äl i 8 ie 
o ONT [72 +1) — (2 AT o RV ERE Van 4 proli; | 
(va)? =" [W LS a EEN DA ne aeo) 


. ARR9 
*) Cet énoncé complète un curieux théorème de M. Gerono ( Nouvelles Annales, 1882, 
p. 439, 


[kk 

C) Les vérifications se font rapidement, au moyen de la Table des quarrés et des cubes, 
a 
par C. Séguin l'ainé (Paris, an IX). 


50 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Par conséquent, les égalités (64) deviennent : 


mA [72 + a a (72 — AT = (2 + Pt — (72 — 1P— 0} | n 
E ï [72 + 4e (214 2 aps + 16 (4/9 17 | 
1 
y ali peH + (2 — 13] a + AP (79 — jH -27 | 
E zire + AH — (y 2—1 + 2P M [v V2 + 1 (2 — 1}. he 


Ces identités, assez curieuses, complètent celle qui a été donnée au 
n° 40 (*). Elles sont comprises dans l'identité unique : 
4 RER 


wen w 9 4 4) 2 —1 pay LT Vo n—1 7 jy- op 
T NEA Je le y 7e 9 > 2) | - 
a) 
o e S ; j | 
+ Ua ao ete faste e) 
16 l 
dont la vérification est facile (**). 
GÉNÉRALISATION. Soit, au lieu de l'équation (54), 
AS PR dl ne) mine cn own tt (UD) 
d'où 
| 
De == [(py'A + Q) q= = (py A — q)” dg A N) 
9 v A 
en supposant 
AD a eee A (CU) 


Essayons si lon peut avoir, identiquement : 
1 
2V/A 
1 
k% HA? 


LEA eap Agy e a oA +) p A mga) | 
m | (70) 


o A 
[( PVA + q) —(pV'A— qe +9 + E L(p VA + q)" — (py å — a ) 


(*) On ne doit pas oublier que chacun des termes est un nombre entier. 

(**) Dans celle-ci, les termes ne sont pas nécessairement entiers. Si, par exemple, n = 4, 
ona: 
1 


, TRUE 
(es En pe dr Enr re 
4 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 51 
Le second membre, multiplié par 24°, devient 


(PVA + qg} (PA — qT + 4 + [VA + M —(pyA— a] 
=(pV A + q + (PVA — + (PVA + q)” + (py A — q)" 
= (pV A + q" (Ap + q? +1 2pqV/A) + (pA — q (Ap Q + 1 — Ipq}/A) 
= 2(pV/A + QT (Ap° + pq V/A) + 2(pV/A — q)"— (Ap° — pq V/A) 
= 9p VA [(pV/A + gt + (p/A — a 


La relation (70) se réduit donc à 


À de D. (74) 
A . N 
Substituant dans (69), on trouve 
RE PEAR CR E 


ou 


(2pŸ = (2q) + 4. 


D'après Fermat, les seuls nombres entiers qui vérifient cette équation 
SON p = 1, q=14 (*). 

Mais comme les nombres A, p, q, satisfaisant aux conditions (69), (D; 
(72), Sont admissibles, quoique irrationnels, nous avons l'identité suivante, 
laquelle remplace l'égalité (70) : 


AVe +1 K l ET Va — EE ] 
9 Vera q)” era” ve te 1 er AE (gyi + q)" co Vri S g i 2 y (H) 


+ [Mri I OET A g 2} 


Dans celle-ci, q est une quantité quelconque. 


FA A: a . 
45. APPLICATION. Soient 


re 
n—%, q =V 15. 


* 

$ LEGENDRE, Théorie des nombres, t. I, p. 12; Brassine, Précis des œuvres mathématiques 
; Perin, Journal de Mathématiques (1875), p. 345. Je dois ces renseigne- 
avaient échappé, à l’obligeance de M. Realis. 


de Fermat, p. 164 
ments, qui m’ 


52 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES. 


On doit trouver 


A6 [(4 + ABF + (4 — V15F] = 2 [4 + 145) — (4 — v13) F 
+ [( + 1/45) — (4 — 1/15) — 2 + [k + 1/15) — (4 — V18 + 92)F, 
ou 
32[4+5.4.15] = 92[161V/145 + (21/45 — F + (21/15 + 2), 
ou 
128.61 = 2.256.145 + 8.45 + 8, 


ou enfin 
GE -= 4 45 erl 


46. Surte. Pour rendre l'identité (H) plus symétrique, posons 


qe, VAT = z VEz eet: 
a, b, c sont trois nombres vérifiant la condition 
OE U ME OERE E E E e a V E a nel A D 
Notre identité se transforme en celle-ci : 
ka [(a + ea a (a — à sel = 9 (a + c)” — (a — ojal | (K) 


+ (a AC) me DATA PE + [(a + GMT — (a — ec)! + 9" e | 


A7. Remarques. l. D’après l'égalité (73), a, b, c représentent les côtés 
d'un triangle rectangle. Ces côtés satisfont done à l'identité (K). 


lH. Soit un cercle O, ayant pour rayon b. 
Si, d'un point extérieur M, on mène une 
tangente MT et le diamètre MAOB, on 


aura 


40m [ MB" " =- MA” ‘| 2 [0B — ma 


+ [MB — Ma — MT MT + [MB = MA a MT PMT C) 


*) Sauf les célèbres théorèmes de Matthieu Stewart, il wen est guère dans Pénoncé des- 
quels certaines longueurs sont élevées à des puissances quelconques. À ce point de vue, la 
deuxième propriété, malgré sa grande simplicité, me semble assez curieuse. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 33 
IHI. Si les nombres 4, b, e sont entiers, l'égalité (K) peut être formulée 
ainsi : 
Le nombre entier 


ha [(a + co) a (a — oea 


est la somme de quatre carrés, dont deux sont égaux (*), et dont les deux 
autres sont divisibles par b?. 


48. TuéorèmE. Si trois nombres, a, b, c, satisfont à la relation (K), ces 
nombres mesurent les côtés d'un triangle rectangle; c'est-à-dire que 


here 
La relation (K) peut étre écrite ainsi : 
+ [la + ce! — (a — 0) F0 + [(a + c)” — (a — c)" P — 2a [a + 0” + (a —c)”-"]=0; 
Puis sous cette forme un peu plus simple : 
U [la + op- — (a — op PO — (ad e) [la + ot ae] 9 (a — 0. (74) 
Supposons que a, c soient donnés, et que a surpasse c. D’après le théo- 


reme de Descartes, l'équation a une seule racine positive ; savoir, b=a?— e. 
Le théorème est done démontré. 


49, REMARQUE. Pour diviser le premier membre par b? + c°—«?, on 
Peut le transformer ainsi : 


4 [oy — (a? — E + [a + CT — (a — oa (b? + — a’) + 4 (a?— è)" 
ae [a + e)" (a — 0)" An (a? — c?) — [a + + (a — c)” za (a — è) — 2 (a?— e)". 


©) Par 3 
| Par exemple, en prenant a = 5, b = 3, c = 4: 


ci | 20 (97 + 1) = 2. 6 560° + 2 022? + 2 5467: 
» plus Simplement, 


5 (97 + 1)= 2.5 280? + 1 0442 + 1 1752. 


Il est yisi i | 
L Visible que cette réduction a lieu dans tous les cas. Autrement dit : 
€ nombre entier 


a[(a + c)" + (a — c)?»—] 


esi | 
Somme de quatre carrés ; etc. 


Tome XLV. 


34 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 
L'ensemble des deux dernières lignes égale 
al — ey — 2 (a? — e (a — 0°) = 0. 
Donc l'équation (74) devient 
Oy =a = 2) | + [la Pa Pb + a) 0; «à (78) 
et, suppression faite du facteur b? — (a? — ¢°), elle se réduit à 
[bra b ae) D (al ce a] [a+ — (0) = 0. (76) 


Celle-ci est impossible si, comme on le peut admettre, a surpasse c. 


IX. Développements en séries. 


50. DÉVELOPPEMENT DE VA. Reprenons encore les formules 
Qi = AQQ, à + Qu, Qa = Qi + Qu . . + . . (#1) 
Il en résulte, par l'élimination de Q,, 
Q,Q, — 0,0, = Qi (Qia — AQ, 1). 


Mais 
AS RS RE A Ce E E) 


Donc 
ST a T E E E 


Cette relation montre, une fois de plus, que les dénominateurs Osj Quinn 
sont divisibles par Qi 
En écrivant ainsi : 


Q, Qoi Q 


De OU 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 59 


On en conclut : 


de bn 
D 0 7 O0 
Mn Le 
On. Que UE 


Puis, par le raisonnement connu, 


Feu ne 1 al Fire 


GR er i eaea à EE res 
Q; QAQ QQ QQ; 
Ə1. AUTRE DÉVELOPPEMENT. Des formules 


Q:, Era 2Q; a 4, Qon Res 2Q,Q,, . . . . . . . : (E) 
on déduit : 


Q;:Q@, ve Q,0Q:, Het Q, 3 . aS EN, . . ‘ . . (78) 
égalité qui généralise celle-ci : 
QOO a mot e 07) 


Un calcul semblable au précédent donne ensuite : 


ras Lin ag”) M 
baal STan a 


oiei 4 Q , 
Voici done deux développements de VA, très différents, et dont le second 
est beaucoup plus convergent que le premier (**). 


“) P i : 

i lus exactement, elles rentrent Pune dans Pautre, à condition que l'on prenne 
Périodes Pour en former une. 
C) La conv 


S ergence du premier développement l'emporte, déjà, sur celle de la série 
l connue : - 


1 = 
qe —— ee — A, 
C'H’ v 


1 
F’ F'G’ 


36 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


82. Arpricarion. Soit À = 7. On a 


V7=2(1,1,1,4); 
et, par conséquent : 


0 8 q 127 Q 20% Q 32957 Qy 514088 Q, 8193151 


A 3 @ 48° Q@ 76? Q 1219 @ 192507 Q 5006720 


La formule (L) donne ensuite 


8 1 1 1 1 1 
et ee 192 12192.194507 194 507. 5 096 720 | 


1 1 1 1 1 
+ + — + + = + |, 
: 16 16.255 255.4064  4064.64769 64 769.1 032 240 | 
Pour appliquer la formule (M), il suffit d'observer que 
Qi = 2Q; . Q; = 2.59 257.12 199 — 786 B54 688. 


On trouve, ainsi, 


+, a 1 1 
"ra aS to RoBo | 


Le terme qui suivrait le troisième est bien inférieur au quart du carré de 
celui-ci (*). Si l'on réduit en décimales, on peut donc conserver les unités 
du dix-huitième ordre. Effectuant, on a : 


8 
er 2,666 666 666 666 666 666 + 


1 
re Me 0,020 853 555 555 535 533 — 


12 


= 0,000 082 020 997 575 328 — 


12 192 

4 
786 554 688 
1/7 = 2,645 151 511 06% 590 5914. 


= 0,000 000 001 271 367 414 — 


(*) En vertu de la relation 
Qu = 20,0%, 


dans laquelle Q, surpasse 2Q,. 


beaute | L 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 37 


98. REMARQUE. La formule (M) peut être écrite ainsi : 


œ ® Oi qis 


Qi ati re 
TORT Hd 


À cause de 
gaer ere de A0 


le second membre équivaut à 
Q—V Q — 1. 
De plus, les termes du premier membre sont égaux , respectivement, à 
Qi Q G à Q@ 


a T T T T 


ou, d’après la relation 


À 1 
LEE (F) 
s Qon 2Q, 
egaux à 
1 1 1 
20,7 20.20: 20.20.20. 
Si done nous posons 
Za Iura ee 


Į o Ji CP 
^us aurons, au lieu de l'égalité (M), 


1 1 4 


1 BEE A 
a ES e N A OS 
Z Ka ZZ, pai ZZZ Sw st i i — 4) (N) 


Cette formule remarquable est due, je pense, à M. le capitaine Moreau (*). 
a ‘ 7 ` t i FRE a í 
a l'appliquer, on doit, après avoir pris arbitrairement Z, > 2, faire usage 
e la relation 


D a Dr su an. 19 


Hotel... à 
k 
” Nowvelles Annales, 1878, pp. 139 et 156. 
Per théorie des équations réciproques, si l’on fait, suivant l'usage, 
ON a aussi : 2 a Loan 


Lin = 15 — 2, 


38 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


54. APPLICATION. Soit Z, = 3; et, par conséquent, 


ZT, LA Z= 2907, o = 870847, m; 


puis 
Toi 1 1 1 À 
dE 2 ; TR ESA AN 
3 5.1 3.7.47 3.1.41.2207  3.7.47.2 207.4 870 847 aor 
résultat curieux obtenu par M. Lucas (*). 
55. AUTRE REMARQUE. On sait que 
j 1 
N—1—N—1 + 
A 
À + 
1 
2N — 2 + — 
1 
À + 
2N — 2 + 
Donc 
R 1 
Q— VR —1=1— 
1 
1 + 
1 
20, — 2 + 
1 
l + y 
20, — 2 + 
ou 


(4—VÉ—4)=1— 


Ni = 
> 


Z — 2 + 
å 
À + ) 
Z — 2 + 
ou encore, par une transformation connue, 
À —— , 1 
1 
Z, — À + 
4 
A + 
| 
Z — 92 + 
4 
1+ 
Z — 2 + 


() Nouvelles Annales, 1878, p. 138. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 


Par conséquent : 
La fraction continue périodique 


x=0, A—1(, Z— 09) 


dans laquelle Z, surpasse 2 , équivaut à la série 


À 4 4 il 
— + + — + + ($). 
Z 22 Lol, ZZZ 


X. Relation entre deux séries. 


96. Nous avons trouvé : 
DO CN l 
TE E E Í 
a S cas D a E e E EE AE S ET 
QQ? Qs QQ di 
À 1 1 Q;—Qi VA 
as ce, Le ef o ee M 
QE T Q e 
De plus, à cause de 
Uo a A 
l = g oee 


*X\ Q: ; 
7 Signalons, ici, une particularité assez curieuse. 
3 
1 Pon suppose 
Z, =2 cos o, 


On trouve 
Li == ROSE, 1,19 


Z, = 2 cos 2w, Z= 2 cos 4w, 


puis, par l'application illégitime de la formule (N) : 


1 anart EN 
… = cos © — V — 1 sin w. 


1 1 
+ 
25 COS w. COS 2. COS 4w 


a 


3 -+ 
COS & 22, COS w COS 2w 


Ce rés ; i de 5 ` 
e resultat, qwadmettraient certains Disciples de Wronski, est complètement absurde 


40 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


la formule (43) est la même chose que 


cs Dr 
Qu; 0 OT RS E EEN AAT AA er (OIL) 


et 
Q VQ—410 


os Ai ai 


Q—QV'A— 


Remplaçant Q, par v,, et représentant par S et Ÿ les sommes des deux 
séries, nous avons : 


Va 
M do v, v, Una 9 (83) 

4 1 1 1 l 

S = — + — + — Ho — E E E. É + . . 

üt aata <V oi | l EU Se 

1 4 1 1 ete 
He io praen ... == — sit LEE 2 4 
Do a : je à de 2 [v Va? U a ea 2 D 
DR a a ne dot 0 à a 


On peut donc énoncer la proposition suivante. 


57. THÉORÈME. Soit une série 


dont les termes satisfont à la loi de récurrence : 


Ve 
Von = a 
vi 


v 


n 


Si lon en déduit les séries convergentes : 


on a, entre les sommes S, X, la relation 


5 US: 


En outre, ces sommes sont données par les formules (84), (85). 


1 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 4l 


58. Remarque. En multipliant, par un facteur convenable, tous les termes 
d’une série, on peut la faire commencer par 1 (*). Cela étant, si l’on suppose 
v, — 1, on a; au lieu des formules précédentes : 


D UD tir a SR ue ms 107) 
1 1 1 4 | | 4 4 PETERE 
DE E a a EE 2 E ere E a V k (P) 
Vo Vous Vs Dan Up Dis Ug 2 


Y 


59. Arpucarions. l. Soient v, = 1, v= 3; et, par conséquent : 


8, v, =21, v= B5, v= 144, v—577, v= 987, …. Co 


On trouve 
1 l A 1 1 1 í 1 1 
RU ep ue he Es EN ORRE nt tie du die. ve ce te (Den 17 0e 
5 ‘5.8 ‘8.21 ‘ 21.55 55.144 3 1 "V7 9 ) 


Comme ci-dessus (54). 
II. 


On obtient 


i ; : rl | 4 1 | 
— RUN ee 2 8 16 7 
a E , Dirt 16 ; 
résultats connus. 
UL. Prenons 
Fi 1— xt 
v = PAEA EIER 
F nia 


Il ré AE 
l résulte, de ces valeurs initiales, 


(Ce LE CE ARE 
— = — = — + rT ; 
VA œ x 
E Ce facteur Ka K3 3 
e cteur est, évidemment, l'inverse du premier terme. 
| es nombres sont les termes de rang pair, dans la série de Lamé (14). 


Tour XLV. à 


42 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


puis : 


È | (- ) |; 1 Fa 
v, == |- -+ x)| |— — x’ | — | — — x’ | = — — 7x" = - ; 
: x x° x’ w” xt 


et, en général, 


a a E S UN a a a 


D'un autre côté : 


(1— xt) ; (A ax (1— x) 


De F an = e 
A E 1— x’)? à 
vo — V vi — Av? — e l z ) {gA x), 
g? T 
S = a—Č— == . 
(1 — x°)? 2 1— 2° 
Donc, par les formules (84), (85) : 
x° x x? xË ko 
WER e ahe ap a o aa ue i € 
(1— x°) (1 — x‘) a (1 — x) (1— x) (1 — x) (1 — x’) (1 — x)? (89) 
x? x* x? gi x? 
fie lan. EE 1 DER e AE ATEN (90) 
60. Remarque. À cause de 
x? x x 


(*) Ce petit calcul est celui que Pon rencontre dans la réduction des équations réciproques. 
D'ailleurs, la valeur de v, résulte aussi de la formule générale 


; Da = Aa” + Be”, 
jointe à Péquation 
1 
ee (o+=)e+i=o, 
LA 


dont les racines sont 


UD es 


Sr 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 45 


ou par le changement de x° en æ, la dernière identité devient 


o > ue Pa ae PET 


1 —- x 


x x L 


+ 4 

Ant ta 1—r 

Quant à la relation (89), si l’on supprime le facteur commun +”, et que 
, G 4 CPE 
l'on change encore x? en x, elle se réduit à 


4 x£ me 4 


OI Ma MU Se, Co 
puis à 


4 x w 


+ = ~ - - 
tx (+x) (A++) (+x a) x + x + x) 


XI. — Sur la formule (Q). 


61. Nous avons obtenu cette formule en supposant æ positif, mais 
moindre que l'unité, Si + égale 1, elle se réduit à 
Fi 1 


e a a Eire 
PA a A S E) 


resultat exact, déjà indiqué (59, I). Attribuons donc, à la quantité æ, des 
Valeurs supérieures à l'unité. 
En général, 


g 
(+ x + x? + + at (+x+a +... + x") 
1 l 
À dat ie ce RE Ve r mt 
Donc, identiquement : 
w x? x" 
me = Ho + 
te  (A+x)(+x+x) + x +. + a (A + x + + x) 
1 


À — 


A+r+a +. + x 


K à] sl j; 
à ) Celle-ci est connue; mais on n’aurait pu s'attendre à la déduire de la théorie des 
factions continues. 


44 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


ou, si l’on appelle S, la somme des n premiers termes de la série (Q) : 


ou, plus simplement, 
D A be NS à à D cc 


De cette formule générale, on conclut : 

4° Pour x < 1: lim S, = 1; comme ci-dessus; 

20 Pour x > 1: lim S, =. 

Ainsi, quand x surpasse À, la relation (Q) doit être remplacée par 
celle-ci : 


1 x de 


1 
+ ai - —+s.—— . (94 
Aux (A+a)ft+æ+a) (+x+x) (+ x + a + x) x ee 


62. Le terme général de la série (92) est 


Ua) (1 — a) 


Développé (*), il devient 
at! fl + où + 2% LE a + | [1 pe geri y 2 D pt DE ai 


Dans ce produit, supposé effectué, chaque terme a la forme 
go (+ 
Soit 
k—1 + ka + (k+ 1)p=n, 
ou 
le e SANT e e RS re (95) 
De ce qui précède, nous pouvons d’abord conclure les propositions sui- 
vantes : 
4° Dans le développement de la fraction 
ax 
A— x) (1 — xt)? 


(*) On suppose x < 1. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 45 


le coefficient de x" égale le nombre des solutions entières (non négatives) de 
l'équation (95) ; 

2 Dans le développement, suivant les puissances entières et positives 
de x, de la série 


| x w L 
Ce oue ae A SE 


le coefficient de x" égale le nombre total des solutions entières (non négatives) 
des n +4 équations : 


4+ 2B=n, 2- Ip=n— 1, 3a + 4p=n— 2, .., (n+) (n+ 2)p=0. (96) 


63. TnéorÈme. Si lon considère les solutions entières (non négatives) de 

chacune des n + À équations (96), le nombre total de ces solutions est n +1. 

: , , RER -2 X 

En effet, dans le développement de —; = (1 — x)" * (92), le coeffi 
Gent de æ” est n + 1. 


64. Remarques. I. Ce coefficient égale le nombre des équations (96). 


II. Le nombre des solutions entières (non négatives) de l'équation (95) 
est, comme on sait, égal à l’un des deux quotients entiers de n—k +1 
Par (k + 1). Telle est done l'expression du coefficient de æ", dans le 
développement de la fraction 


xt! 


ECOLES 


HI. La dernière des équations (96) est 
(n + 1jo + (n + 2)8 = 0: 


elle admet une seule solution. Si Pon en fait abstraction, on peut rejeter les 
Valeurs de % supérieures à n — k + 1 (*). 


* 
I semble, d’après cela, que ce coefficient ne peut être évalué exactement. 
En effet, un, au moins, des termes ka, (k + 1)8, surpassera n — k + 1. 


ga 


46 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


L'énoncé précédent peut donc être ainsi modifié : 
Le nombre total des solutions entières (non négatives) de chacune des ; 
Rat 

ou ==- équations : 


a+ 2p =n, 2a + 3p =n -—1, 5x + 4b = n— 2, ... 


est n. 


, 


65. APPLICATIONS. l. n = 12. Les six équations à résoudre sont : 
a+ 2p=12, Dur 3p=11, Ga + 4p=10, ha + 56—9, Bas 60—8, 60 +761. 
La première est vérifiée par : 


a =12, 6f—0; «= 10, p=1; a= 8, p= 2; a=b, p= 5; 


a= 4, p= 4; a= 2, p= D, a= 0, p= 6. 
La deuxième, par : 
a=1, p= 5; a= 4, p=1. 


La troisième, par : 
a= 2, B—1, 


La quatrième et la cinquième sont impossibles. 
La sixième admet la solution : 


a—0, p=t. 
En tout, douze solutions. 


II. n = 13. Les sept équations à résoudre sont : 


a + 2B = 15, 2a -+ 5B = 12, 3a + 4b ==11, ha + 5B = 10, Da + 66 = 9, 
! Gu+ T= 8, Ta+88—1. 


La première admet sept solutions : 


a =13, p=0; «a =11, p =14; «=9, p=2; a=7, p= 5; 


a=}, p= 4; a= 5, p=; «=1, p= 6. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 47 


La deuxième en admet trois : 


La quatrième en admet une : 

a=0, p=?. 
La cinquième et la sixième sont impossibles. 
La septième est vérifiée par : 


«=l, p=2. 
En tout, treize solutions. 


Q s OT A . ta 
66. AUTRE THÉORÈME EN Si l’on considère les solutions entières (non 
négatives), de chacune des équations 


x + ly =n — 1, 2x + 3y =n — 5, 3x + ky =n — 5, …, 


le nombre total de ces solutions égale l'excès de n + 2 sur le nombre des 
diviseurs de n + 2, 


67. SÉRIE D'INTÉGRALES. L'égalité 


1 i X x z 


+ +1 . (© 


te > a 3 
a Aro Eara Aara aeaa 


donne, par intégration, 


1 
$ f° x”dax F7 R) 
S AE E ETNE N E T, S N SOU 
0 


Cette sommation parait assez remarquable, les intégrales qui y entrent 
ét FU 
ant de plus en plus compliquées, à mesure que n augmente. 


o 


Sénér 


ii résulte de la série (Q), combinée avec la série de Lambert. Ces propositions ont été 
alisées par M. Ernest Cesàro, dans le beau Mémoire intitulé : Sur diverses questions 


'Arithmétique. 


i8 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


68. Une IDENTITÉ. Si l’on essaie d'évaluer 


4 


S: x” dx 
J Ara o + A H a H a oe- ETA 


on est conduit à l'identité 


ERE E e a s a aAA aa A + x + a+ + ati), (S) 


dont la vérification est facile (*), et qui a de nombreuses conséquences. 
En voici quelques-unes : 
Ao L'équation 
A++ a+ + at) — at = 0 
se décompose en 
Ex ENS o erel, TETE a te Lau À. 
2 Le polynôme 
(em +. + x") — x, 
égal à 
(l+x+a +. + at Oo a a) (A + + + a partit se + a), 


est égal, aussi, à 


Mre tes + (A H + a+ + ai), 


3° Aucun nombre, de la forme 
(A+ x+ g +. + x") — x! 
ne peut être premier (excepté si k = 1). 


(*) Par exemple : 
S2? — qk = (S — w5) (8 ajs æ"+1); 


égalité d’où Pon tire ce résultat exact : 


i 
i 
l 
1 


| 
3 
1 
l 
, 
: 
] 
1 
; 
à 
! 
Ë 
; 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 


XII. Quelques séries elliptiques (*). 


69. Dans la relation 


0 q’ q” {| 
1 e 1 e ETE = ARE = — 
1+q + teg? A 
posons 
{ de g 
va dre: n 3 
q 
ou 


Pae q" + se, 
> 
Nous aurons 
Ur Vha Vni 


À cause de 


Va = Vi — 9, 


il est visible que si vı est un nombre entier, supérieur à 2, tous les termes | 


de la série récurrente 


Sont des nombres entiers. 
Soit, par exemple, v, = 3, valeur d’où résulte 


2 


5—1/5 M sn i 


q = 9 


L 


à série récurrente est 
5, 4 1 8, 47, 193, is 


D : . 
onc, par la formule (97): 


4 l 1 1! 1 21 
= +- t — + — + Ho 
5 


7 EST 125 4 


* 

C) Dans ce ch 
echerches sur ( 
E i 


apitre, nous complétons ce que l’on a vu ci 
: uelques produits indéfinis. 
Fundamenta nova... , p. 103. 


Tome XLV. 


-dessus (17, 18, … 


49 
| 
il 
| 
(97) 
(98) 
(99) 
| 
| 


(100) 


), et aussi les 


50 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


70. Remarque. On a trouvé (17) : 


4 A ko, = 

1 -+ =- +- — + — + == —V 5 (24) 
15 54 2r 

Donc, en éliminant $; : 

1 

EE AE TE Si 

p e ð aia 
A a OU 


45 54 1 1 


1 
+- $ + + + 
n 5 7 18 47 123 


ces ; à 3- y3 ; 
Ainsi le module k, répondant à q =*=” , est donné par le rapport de 


deux séries fort simples (*). 


71. GÉNÉRALISATION. Reprenons les égalités : 


À n= 
E qe = 
1+q 1+ q 1 + q"-! 

0 2 n 4 

E al 
1+ q 1+q 1 -+ q” 4 


Dans la première, posons, comme précédemment 
2 7 2 


gr: 4 


2n—1 


1+q (4 + go,” 


et dans la seconde, afin d'éviter toute ambiguïté : 


q” 1 
Lg 
Il est visible que 
4 
u=, =q] + -— 1, 
q 


Ur, = Vale — Vo. 


(*) On ne doit pas oublier que la formule classique est 


A+ + + q se 
1200 E A 


Vk = 92q" 


(Recherches..., p. 3). 


(102) 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 


On trouve aussi : 


1 
w =q + -=v + v; 


et, en général, 
W, = Vn T Vn E 


| Seconds vérifient la condition (103). 
| Cela posé, la formule (23) devient : 


4 1 1+ q ko 
— + ee I H e m —<— 
vı Va va Vq 2r 

et la formule (9m 
l 1 l (| w 
Aa L E A E Le 
4 w Wa w, 27 


i i 1 
— + — + + — + 
vi Va v; leq L 
l / 1 1 E 
— —— -+ — + a | q 
A vt v+ Vs Va + Ungt 
0u, plus simplement, 
mA l 
— + — t e HH 
a b =E 
1 1 i 1 
— + + Ho ———— Ho 
E E E bave VE U 


* 
C) Cette relation simple s'observe dans la formule (101). 
C") Soit 


Ie vg+ Le 
Vq q 
IL est clair que 
1 
q+-=4a =P — 2 


(105) 


, . s 3 5 
Par conséquent, si q += égale un nombre entier a, les nombres Vi, Va, ..., V 
ct les nombres Wi, Wa, ..., Wn, sont entiers. En outre, les premiers et les 


n3 


52 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


12. Exemwres. I. a= 4. On conclut de cette valeur, à cause de v = 1 : 


t0 V= 00e 07 D Ur 100% 


G 
puis 
A 1 1 
RES E où 
- { 186 = 
ot 
te i A 4 1 
-= + — + + LE + 
UET UE A ME EROE E E A, 
in ua 
Dit, 0 =A o=, 0 = 00 v == w 
1 4 l I 1 
1 +- ++ — + —— + 
lbs 00 -20)E 7100) A7 
E E A T E EE E 


aae dou 0e 


73. Remarques. I(*). Soita un nombre entier, égal ou supérieur à 3 (**),. 
Soit q une racine de l'équation 


P— at +1—0,. 
La quantité 
4 es YTF 


A+ g)g" 
est un nombre entier. 


U. La relation (T) subsiste pour loute valeur de a, supérieure à 3. 
En effet, dans les calculs précédents, rien n’exprime que 4a soit un nombre 
entier. 


74. Une ipenrrré. En opérant comme le fait Legendre (**), on trouve : 
| q° de 1 q“ GE 


spr a KE Ga ANE 
j 4" FLE Ge T jän ai E an + 


ils QU U 
fe q de ge Tek G ( ) 


identité dont un cas particulier a été donné précédemment (20, I). 


*) Analogue à celle qui constitue le théorème de la page 15. 
(‘*) Afin que vg ne soit pas inférieur à 2. 
Fonctions elliptiques, t. III, p. 132. 


ee 


le 
q 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 53 


Dans le développement de chacun des deux membres, le coefficient de q" 
est le nombre des solutions entières, non négatives, de l'équation 


ae pe Tee RE Ter. (PO) 


75. Remarque. Si l’on écrit ainsi cette équation : 


(ex + bj(cy + a)= ner db 14 4,7, 4%, (105) 
et que l’on pose 
nc + ab = dd’, 


d, d' étant des diviseurs conjugués, On aura 


d —b d'— a 
Ve TERN Hs 
c C 


Pt cé A (LU) 


Pourvu que ces valeurs soient entières (non négatives). 


76. Vériricarion. Soient 
DS PR NN N E 
32 m 5 
L’équation (105) est, dans le cas actuel, 
(Bx + 5) (5y + 2) = 596. 
Elle est vérifiée par : 
x=(l, y= 26; x=5, y=4; x= b, y =2; x= 59, y =0. 
Do ea A a 
ar conséquent, le coefficient de q’ doit être 4. 
En effet, le premier membre de (U) devient 


4 ož q? g? 12 q” q'8 21 
TE dis — as ! Tan í AGE ? a + ou -1 m À ! 57 
SR Re DE nuls E les 
24 27 q”? qg” 
zD 1 12 1 i 52 T ! 197 
l— yg 1 — q 1— q 1—q 
Les seules fractions qui, développées, produisent des termes contenant q", 
Ont : 
I q° qe q” 

I de Poe E i g i a 7 


et j 
ll yena quatre. 


54 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


77. Surre. Jacobi a donné hé cette identité : 


D q q? ( 
AE REE NPA RE OR E 7 à 
1—q 1— 9° À — q° 


dun. 
D D e 


En voici une autre, dont la vérification est également facile : 


2 3 2 5 
horse 0 Mo RARES IE RS En 4 te) (A0 
En à ANS | Eneel * 5 D À mp 1— q 1— 9 td 


La limite commune de chacune des deux séries est 


1 2 A DR o oE, (k) (n 


-+ üh 
24 dre 6 7° T? 
78. IDENTITÉ REMARQUABLE. La formule 


e a OU FO 
Paa- Sn lag] 


dans laquelle 
Sw = Sin am. , 


devient, pour £ =v: 
8 2’ 0)__ 8") 
== — 


(s (109) 


)) O (x) 


®© 
= 
= 


©) Fundamenta..…., p.135. — Recherches. .…., p. 93. La valeur commune des deux mem- 


bres est 
[0] 
TT [o — Ei(k)]. 


A 


** E APN N i \ i $ à à 
(**) I est clair (et connu) que, dans le développement de chacun des deux membres, le 


coefficient de q” est /n (Recherches..., p. M). 
(**) Recherches..., p. 92. La page 94 contient une grave faute typographique. Au lieu de 


la formule absurde : 


dg TUN 3 

T == RK (vdo — odo’), 
on doit lire : 

d 

z = — (wde — odo’) 


(“) BERTRAND, Calcul intégral, p. 652. 
() A cause de O’ (o) — 0. 


ET SUR CERTAINES SERIES. 55 

Or (*): 

O (0) = 1 — 2q + 2 — 29° + 2q" — +, 

2 
60) =2 é [g — 4q + 9q° — 160" +- :-], 
œ@ 
O (w) —1 + 2q + 2q + 20° + Qq" +, 
2 
O"(L)— — 2 E [q + 4qt + 99 + 16" 7]. 
(o 
La relation (109) devient donc 
1 i q — 4 + 9° — 16q + + q ké I + 
CAPE E 1 22 09 + 09 29 SE 1 + 2q + 2q* + 29° + FF. 
On sait que 
kw 2 s à « 3 
V =q (1 + + qe + g +) C. 
27 
Conséquemment, 
Ag e g +...) | 
q — Qt + 9qg — 16q" + eq + kg + 9g + 16q% + +? . a 
== -——— =- = +- 
1—9q + 2f —2q +. 1 + 2q + 29 + 2q° +... \ 


79. Surre. On a (**) 


1 — Qq + Q — 2q° +: = O (0) = 7, 


1 + Qq + 29 + 2 +. = O (o) = fa". 


De plus, par les propriétés des produits «, a!, 8, &'("): 


A egn Srn) 
= — = n)q" y(n)q” 
AH ax 2 7 )q “4 ( 1 ? 
T Dr 2 OE q}. A (— g)". 
Ga Ba 


) 0 


© Recherches... p. 2. 
C3 Loc. cit. 

KR 

0) Loc. cit. 


o Recherches. , DD 1018 di 


56 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


La relation (V) est donc remplacée par celle-ci : 


w 


2q (1 + gi + dé + g° hot | 
= (q — 4q + 99 — 160" +...) ` o(n)q". ` y (n)q” | 


(140) 


0 


kel 


5 4 (n} (— | 


+ (q + 4q + 99 + 16q + +.) > p(n)(— q)” 


0 0 


dans laquelle il n'entre pas de fractions. Mais on peut trouver un développe- 
ment beaucoup plus simple. 


80. Surre. A cet effet, cherchons les expressions de ©” (0), 0” (o), 
sous formes finies. 
La formule de définition : 


co 


O(x) = à’ Il. (1 nr Zyra cos z + ge) OE 


ou 
à E : TE 8 
LP. O(x)= Pa + ` L ( — 2q” + cos — + q+] 
0 o) 
donne 
TX 
(rfi sin PE 
D'(x 7 
9'(x) ie S i; 


; T y dd 
(3) (x) GE, f TX f 
1 — QY cos — + q” 

(2) 


7 (4 2 GE) k HE DU 
L22 que xi E (HE 
í FA! 2q°"+! PR ia | 
(3 


Donc, à cause de ©' (0) = 0, 6'(u)= 0 : 


Us 


co CR (1 iA Gank 
06} a 2, A gr#y ? 


O” (o) à T° Sr je Gate) 
TOO RER 


(*) Recherches..., p. 2. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 


ou, plus simplement : 


(©) ! (0) 7° co GARE, 

= ge $ 
(8) (œ) F. o > (1 — q” "Y 
O” (o) ÿ T° co tee 
EE e E 


Oak’ 2% 
© (0) — y= , O()— V= QE 


D'un autre côté, Jacobi a donné (**) les formules : 


co qe A uns 
Lac pp Ta AU 


ga © 


3 — = z LE (&) — vk], 


à (1 FE EP 


Donc, par les égalités (149), (443): 


2k' 


8" 0)= [a — EH] —; 
9 
O” (o) = [ok — eol% i 


84. Surre. Reprenons l'identité 


2q(1+ + qq e) 


E q— 4g 9g -160+ + K q+4q+9q+16q"+.. 


TS 2q + 2q — l+ 2q" — 


La première fraction (18) égale 


©) Recherches... p.2 


de 


F5) Fundamenta…., petit, 
Tome XLV. 


1+ 2q + 2f +90 + o 


57 


(117) 


(118) 


(V) 


58 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Or, le second membre, limite de la série 
q vi q 
—— t na ta + 
M—gÿ (—gY Aa 


(115), est aussi la limite de chacune des séries : 


2 


re 3 
sg q q 


q + Q Ag + Ag b + e +g fit. EN: 
Re 


Par conséquent, 


q — 4q + 9q° — 16 + -.- MAE 
A — 9q + 2q + ae = 2-0 JS? 


1 


(149) 


Dans le second membre, i est le plus grand nombre impuir qui divise n. 
Si l’on change q en — q, on a le développement de la seconde fraction, 


savoir : 


q + 4g + 9q + 169" + +. S nfi 
1+ 2q +929 +29 +. T. ii p r 


En outre, par la suppression du facteur 2 : 
qli + +++ Ve fi; 
7 
ou, ce qui est équivalent, 
[g + qg + q” + q? + | — à i 
1 


Nous retrouvons donc le beau théorème de Jacobi. 


82. Remarques. I. Dans légalité (119), posons : 


ps 
Ji, 


Č) Recherches, p. 92. Ci-dessus (11) nous avons parlé des deux premières. 


(120) 


(121) 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 59 


U est clair que si l’on chasse le dénominateur, on a ce théorème d’arith- 
Mmétique : 


La fonction | 
P, — 2Pp + 2Pp-; —92P, 9 t tie | 
| 


égale (— 1) !n ou zéro, selon que n est ou west pas carré. 
Soit, par exemple, n = 13. Le calcul direct donne 


Pis en 14, Pie 46, Pi 49, D, = 4; 
et, conformément à l'énoncé, 


14 — 2.16 + 2.15— 2.4 = 0. 


Soit encore n = 16. On a 


| 
Pe 16, Piy = 24, Pos = 16, P;—8, P,=0. | 

|| 
Donc 


16 — 2.24 + 2.16 — 2.8 = — 16; | 


ce qui est exact. 


L. Sauf le cas où n est un carré impair, P, est pair. | 


I. Si 
E n— 2%, P,—2%P, | 
n effet, | 
re 0. | 
P= / t3 et 2 ; E) 
: IV. 


se Groupons les termes dans lesquels ¿ est constant : la formule (119) 
éVient 


q — 4g + 99 — 160" + a RRE à ; i 
Terma a ee Us EL E) 


©) Recherches.. 5 


p. 85. 


60 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Et la formule (120) : 


q + Ag + 99° + 16q° +». 


= — i 9q” RO ea ). 
A= 2q + 29 + 29 + 2 EAE EE Ter PES BA 


Donc, par soustraction , 
METETE EDDAN E EE e a) 
1 


83. Une formule de Cauchy. Dans les Comptes rendus (t. XVII, p. 530), 
l'illustre Géomètre a donné l'identité suivante : 


A+ox 1+alx À + ax Henbn à 
1 æ px 1x 1+ Br ne Aer 
«x — B a— ft ta’ 

1 — t 14 — P (1 + pæ) (1 + Pix) (1 + Bta) 

CR De E y Fa 


At AP 1 EF (A+ Br)( + ftx) (A + Pix) 
trop peu remarquée. 
Si l’on suppose 
elle se réduit à 


’ = 1 + 1 + 1 =z a 
a= a= PA g) TE sq E EAEE Ti 


Euler a trouvé, comme transformée du premier membre, 


q q CH 


AE + EE - e 
eg, ME EEE) 

Par conséquent : 
Les séries 


1 


1 + 7 + À — + Lu Ho, 
1—q aqaa Aq a A M 4) 
n 9 
PA q q nn. 


Ho [Up [= una 


ont méme limite. 


(*) Celle-ci est due à Jacobi (Fundamenta..., p. 180). 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 6i 


Cette limite commune est 


, j! 2 . : 
En outre, le développement de <z» Ordonné suivant les puissances de q, est, 
comme on sait (*), 


5 y(n) q”. 


{ 


S4. Remarques. I. Dans la seconde série, les exposants de q, en numé- 
raleur, sont les carrés des exposants correspondants; les dénominateurs 
Sont les carrés des dénominateurs correspondants. 


U. La seconde série est beaucoup plus convergente que la première. 


85. Surre. On trouve, de la même manière, 


4 9 


Í q q q 

ae eea peu s a i : Piene sadok 
TETE PT N E A E E 
Le premier membre égale 

l = = 5 k 

e h E EE UE aE 

86" 
Telle est donc la limite de la série 

4 q? 
FRE SUR 2 k" q ORALE 1 Gas) 


* 
©) Recherches..., p. 44. 
[kk 
J Recherches, p. 1. 
[kkk j à i 
(SA A a page 52 des Recherches, j'ai indiqué cette autre sommation : 


q q? q? 
1+ -+ z + : Tene 
D pe e g HE 


, 


=1 +0;(1)q+ wi(2) q + pi (5) Q +. 


A 
TE — Fri 


Elle redonne les forrnules (W). 


62 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


86. Remarques. I. En appelant 4,(n) le nombre des décompositions de n 
en parties impaires, inégales, on a (*) aussi 


a = A — Q; (1) q + Q: (2) q? — q: (5) q + pi (4) gf — +. . . . . (125) 


I. Désignons, comme dans le Mémoire cité *), par F (g, p) le nombre 
des décompositions de g, en parties égales ou inégales, non supérieures à p. 
Alors : 


4 % g=% 


P er ver a ELLE 


Teq g=0 g)(4— q) g=0 
1 
F (g, 3)q”,. 
CE ae (5 
puis 
co 4 w 
A, = X Fig, 1)", 1 = D P D o. 
0 0 


U—g)(— q) 
Donc, dans le premier développement de « (124), le coefficient de q” sera 
Y es H aa t ET 
-r |? La)er( ajap 1e he 
2 2 5 2 


Et comme, dans le second développement (125), ce coefficient est (— 1)"9,(n), 
on a la relation suivante, entre les nombres 4;(n) et F : 


Æ (A) = nine me (# aa 


— 1 —4 n—9 . À . A 
IHI. Les arguments “> “> “>... doivent être entiers. Par consé- 


quent, cette égalité se décompose en ces deux-ci : 


Ce 


selon que n est impair ou pair. 


Č) Recherches..., pp. 4 et 5. 
(*) Page 47. 
(* Le signe +, si n est impair. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 63 


87. VériricaTions. I. n = 35. On doit trouver : 


q; (55) = F (17, 4) + F (15, 5) + F(5, 5). 
Or: 
p (55)=29, F(17,4)=14, F(15,5)=21, F(5,5)—7 (‘); 


et lon a bien 
29 — 1 + 21 + 7. 


IL n= 34. La seconde des relations (W) se réduit à 


Q; (54) = F (15, 2) + F(9, 4); 
savoir : 
26 = 8 +18. 


II. Ces relations (W) peuvent étre énoncées ainsi : 


1° Soit n un nombre impair. Le nombre des décompositions de n, en 


Partes impaires, inégales, se compose du nombre des décompositions de 
n—] 


2 » Cn parties qui ne surpassent pas À, augmenté du nombre des décom- 
Positions de 2? , en parties qui ne surpassent pas 3, augmenté du nombre 
des décompositions de rs , en parties qui ne surpassent pas 5, etc.; 

2° Soit n un nombre pair. Le nombre des décompositions de n, en parties 
impaires, inégales, se compose du nombre des décompositions de "or , en 
Parties qui ne surpassent pas 2, augmenté du nombre des décompositions de 


n—16 | 
2 o CN parties qui ne surpassent pas 4, augmenté du nombre des décom- 


/ TA n— 56 : a à ýk 
Positions de —— , en parties qui ne surpassent pas 6, etc. (*). 
88. Lerrre a M. Herme. « ... Jai vu, ce matin, à la Bibliothèque 


» 1] BENQ CPE TT 
de l’Université , le n° 4 des Comptes rendus, contenant une nouvelle série, 


©) Recherches. pp. 59 et 61. 


lakai 
a ) va les Recherches ... (pp. 49 et suiv.), on trouve divers théorèmes analogues à 
ui-là. 


64 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


=x 


=x 


=x 


) 


) 


) 


par M. Faa de Bruno. Que la formule proposée soit commode , soit; mais, 
à coup súr, elle n’est pas nouvelle. En effet, elle résulte, immédiatement, 
de la relation si connue : 


2% 
» V2 =1+9(qg+g +qg gee 


T 


» L'auteur a eu la peine de changer g en 4°, en q4, en qf, en qf; et c'est 
tout. Si lon faisait le même changement dans la formule approchée (p. 23), 
on aurait une formule encore plus approchée. Serait-elle nouvelle? Évi- 
demment non : là où il ny a aucune invention, il n’y a rien de nouveau. 
» On pourrait peut-être, en partant d’une autre formule de Jacobi, arriver 
à quelque chose d’un peu plus neuf : et encore! 

» Soit, pour abréger, 


» S= + +qgé+... 


On a 
care Ps Je | EFR 
» ye (+ k')=1 + 2S, yrei + k)=1 + 2S; yy ek EN E IS s 
T T T 
donc ` i 
» lim[o, (i + k,)] = 7. 
D'ailleurs, 


1 
» w (1 ki) FAN ne PACE 


etc., ele. Je n’insiste point, parce que la question a été traitée par Jacobi, 
Gauss, Bertrand et moi (*). 

» Parmi les innombrables formules que j'ai données dans le Mémoire 
intitulé : Recherches sur quelques produits indéfinis, en voici deux ou 
trois, applicables au problème actuel : 


— } [A] pr œ q“ g S 
- V 2 l — SA = 


Ciee À ne q 


0 
sud n co 2a 6a-+4 
3 ak q q 
r REA > Sr a OTT I | 
27 1— 9% 1 — Q 


{) Ce mot, généralement haïssable, est là comme simple renseignement bibliographique: 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 65 


» En les combinant, on a | 


q“ (res 2 
| — qg TR EN | 


0 
Ho co q” pe gas 
Da 


Sa-+2 8a+-6 
ed pen 


» On peut d’ailleurs écrire ainsi le second membre : 


[1 + sg + eg? + eg? +.) 


A + g? + 609 + 859 + ce 


» (Recherches ..., p. 116.) 


» Liége, 20 juillet 1882. » 


59. Anprrions. 4° Comme | 


2w 


= [1 + 2q + 2q + 2q =+ F], 
A ; 
il Sensuit que 


[i E Esg + 69° + eg? + eq + -f= [1+ 2g + 29 + 29° + -F [1 + 69° + eg" + | (127) 


2 D'après Cauchy, 


Lt ag + agt grep E 1 =o (*) - (128) 


Soit 


eoa o i 
1— 9 1— & 1— 9 


Il $ Q , 3 ` ne | 
est facile de voir que À, égale l'excès du nombre des diviseurs de n, ayant | 


©) 


Lire, dans les Nowvelles Annales (1854), un beau Mémoire de M. Genocchi. 


Tome XLV. 1 


66 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


la forme 4u + 1, sur le nombre de ceux qui ont la forme ku — 1. Autre- 
ment dit, A, =e, Par suite, l'égalité (127) se réduit à 


(+ eg + eoq? + eg? + engi el 


i 2 3 y 129 
E [1 + eq? + eg + eq + | [1 + A (eq + eq? + eg + J|; a 


relation qui a de lanalogie avec celle-ci : 


[+ Q + og + g += + of + g + G + [1 + 2g + 2q + 29° + A O 
Au fond, légalité (129) ne diffère pas de la formule (399) des Recherches. 


Liége, 20 mai 1883. 


90. P. S. (26 janvier 1884). Si l'on combine la relation (128) avec 
celle-ci : 


(1 —2q + 24 — 20° +) + 2q + 24 +29 +) = (1 — 29 + 298 — 2q" + 2” — ee) (7), 
on trouve : 
(A — 2q + 2q — 2q° He) (A + 2q A 2q“ D. 2q° += 1 +4 > (— 1)”e„q”. 
1 


L'exposant 2n est une somme de deux carrés. Cette formule démontre 
un théorème de Gauss (**). 


() LEGENDRE, t. II, p. 4114. 
C Recherches o., p. 29. 


ap 


Voir le Mémoire de M. Genocchi. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 67 


ADDITION ©. | 


Sur le développement de VA. 


| 

| 

| 

1. Lenne I. Soient x, x! deux fractions continues inverses, supérieures | 

à l'unité. Si | 

e | 
KP" l 


ETF 


AJ r . 
En outre, si chacune des fractions données est symétrique, 


E=F s). 
2. Lemme Il.. Soient, comme dans le premier Lemme, | 


les 
EUX nier e TES À 3 : | 
deux des nieres réduites d’une fraction continue 


w = b; 0, d, e, f. 


| 

(HA l 
ma sserée par un intéressant travail de M. DE JoNQuiËRES (Comptes rendus, février et | 
rs 1883), ) | 
(5) | 


Nouvelles Annales, t. VII, p. 281. | 


68 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Soient —, — 


les deux dernières réduites de la fraction continue symétrique 
y = b,c,d,...,e,f,f,e,..., d,c,b, 
composée d'un nombre pair de termes. On a : 
P= Q = ER +FF, Q—E#E+F, P =E’ R”. 
4° æ étant la fraction continue inverse de +, il est clair que 
UE 00 a Et 


et, par le premier Lemme : 


p 
PSE E 

Q Q E E + F 

EER E HOT: 
mi E 


Si donc ( comme nous allons démontrer ) la dernière fraction est ¿rré- 


ductible : 
Q= + P, Q = P = EE + FF. 


. E . à 
w Soit z — zla fraction continue 


Pert 
Le même raisonnement (bien connu) donne 
Ep 
— +E 
P ; E BE + FF. 
re Re ES K == een. 
Piy + E’ 


3° Soit, s’il est possible, 


E? + F= ma, EE + FE = mp. 
Posons 


E + F'—= 7. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 69 


On tire, de ces égalités, 


(E? + F°) (E'? + F”) — (BE + FF) = may — m°g?, 
ou 
(EF' — FEY = OÙ . m, 
ou 
1— JNC."; 
Ce qui est absurde si, comme on l’a supposé, le nombre entier m surpasse 
l'unité Lx 


3. Remarques. I. Par les formules (1) : 
P' + Q = E + P + E? + F°— somme de quatre carrés, 
P+P'+Q+Q—(E+E) + (F + F? = somme de deux carrés. 
IL. Si, après avoir pris la fraction symétrique 
b eede Ce restes 0; 
ayant un nombre pair de termes, on écrit deux fois, trois fois, ... cette 
Période, le numérateur de chaque dernière réduite sera la somme de deux 
Carrés. Semblablement, le dénominateur de chaque avant-dernière réduite 
on la somme de deux carrés. Enfin, chaque avant-dernier numérateur 
‘galera chaque dernier dénominateur. 


EXEMPLE. 
Première période . . 9, 3, 5, 2 
2 1 25 53 
ooo Var o 
deuxième période : 4 2, 5, D D 
129 440 1 449 5 358 
56 ? 11° “629” 144” 
troisième penade 0.0 5, 5, 25 


8125 27715 94 264 210 241 
3527’ 12050’ 59617” 91 264 ` 


x 
n o importante proposition, signalée par M. Serret (Cours d Algèbre supérieure), 
ulte des formules 


=E DY MEEO A KAREE OA DA E l RIT 
°uvelles Annales, t. VII, p. 171.) 


(Ni 


70 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


On trouve : 


83— 247, 10=1°+ 3, 3358— 95 +53, 629 — 10° + 235, 
240241 = 199° + 4407, 39 617 = 56? + 191°; ete. 


À. Lemme HE. La valeur de la fraction continue périodique simple, 


PU UE G Sifr Oe C U 
est donnée par chacune des formules : 


Q—P+VQ—PY +4 


ge T 
Q — P' + V/(Q PPA 
Dre cp , 
Re Et + F — E? — F2 aV (E + F E FOY + A (EE + FEY 
4 2(EE' + FF’) ; 
E? a F°— EF? V (E? E E + R’ — 4 
y as 
. 2(EE + FF) s 
E+ EE EV [EAr TEESE T EN] 
y = 


2 (BE + na 


La première expression est la racine positive de l'équation 


Qy +P 
PP 
ou 
Py’ + (P—Q)y — P =0. 


D'ailleurs, y est de rang pair; donc 


Q P 4 
Te Po 
ou 
P= QP’ — 1: 


étc. 


(2) 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 71 


En outre, 


(E + E? + F? + F° -4 = (EF + E° + F” + F°} — 4 (EF' — FE’) 
== (E + E”? + F? + F° + 2EF' — 2FE') (E? + E? + F? + F? — 2EF' + 2FE') 
= [(E + FY + (F — E}] [CE — FY + (F + E'}| (he 


Ə. VÉRIFICATION. Soient, comme ci-dessus : 


E=9, Ed, EAN F3; 
P=93, P'=1410,. 0—53, Q'= 93. 


La quantité soumise au radical prend ces diverses formes : 


+461, 634, (4 +49 — 1 — 9j (2.4 DAY, 


(4 +49 +149) —4, [(2 + F + (7—1) T2 — 5) + (7 + 1]; 


OU, Simplement : 


45 + 467, 65—4, (5? + 6!}(° +8!) 


Or 


2 


45° + 46° = 1 849 + 2 116 = 5 965 = 65.61. 


6. Lemme IV. Une réduite & peut, indifféremment, élre considérée comme 
Q d 


étant de rang pair ou de rang impair (**). 
Soit : 

en D RS DiEQs 

ny 

Le quotient incomplet g surpasse l'unité, sans quoi l’on pourrait remplacer p 

Par p + 1. Cela étant, on a 


4 
p+-=p+ ; 
q 4 
Da 


é MA AA a 3 > 
galité d’où résulte le Lemme énoncé. 


(3 Application de l'identité : 


(ab + ba’)? + (aa! — bb'} = (a? + b?) (a? + b'?). 
Proposition connue. 


Ea 


72 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


ME pa D nt puede os 
7. THÉORÈME l. Soient p’ 5 deux fractions irréductibles satisfaisant 
aux conditions 
QPPPE A E n O EEO E E O O EE 


Moyennant la restriction indiquée dans le Lemme IV, 5 est avant-dernière 


ee AR 74 
réduite de 5; (”). 
Pour fixer les idées, supposons 
MERE RASE RSR S a o a a O) 
x PADE, ? i P 3 : À tait 
Si lon réduit ĝ, en fraction continue, et que 5 soit lavant- dernière réduite, 


Q 


gesl de rang pair : 


on aura, si 


Me En à E 


D’après le Lemme IV, la seconde hypothèse est admissible. Cela posé, 
à cause de légalité (8), les valeurs de 4 et de « sont, comme on sait, 
comprises dans les formules : 


a e A 0 PT E O ST a a (10) 
6 étant un entier quelconque, 


1° On ne peut le supposer positif ; car on aurait 
e >Y, a>Q. 


2° On ne peut, davantage, le supposer négatif : cette hypothèse donnerait 


E A a EA 
3° Reste donc 
i = 0; 
puis : 
P 
Ga lue, CPS RTS 
Dr rx 


(*) Cette proposition résulte d’un problème résolu par Legendre (Théorie des Nombres, 
t. I, pp. 23, 24), au moyen de calculs et de raisonnements un peu longs. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 73 


re pi és ne R 
8. Tuéorème H. Soient’ È les deux dernières réduites de la fraction 


Continue symétrique : 
RD VOB NU CU (0) 


Soient a, a deux nombres entiers satisfaisant aux conditions : 


Qa —- 2Pa = P', a Z 24. 
Si l’on fait 


les racines carrées de tous les nombres A (=) sont données par la formule 
à VA == a (b; c, d 6i. 6 d, c, b, 20) 
Soient 
Y O d, e. deb) 3%), 
X =a (bpc, d,e, «3:8, d, c, b, 2a). 


On a, par le raisonnement habituel, 


1 
jedli 
: Q(eu+—) + (2aQ + P)Y + Q 


1 (Gal + PAY FP? 
P (a+ + P’ 


ou 


a CaP + Piye oat — Os br a 0 
uis 


1 — aQ +V eR + (2aP + PQ 


me] , 


Ÿ Q 


3 2aP + P’ 
X = M ao aa aaea 


ette valeur se réduit à VA, si les nombres entiers a, a satisfont à l'équation 


et, par conséquent, 


D Qu Pas Pi seras a Ve Cl 
et si l'on suppose 
A = à a 


C I n° i , ; 7 à 
) T n’est pas necessaire qwelle soit composée dun nombre pair de termes. 


[ y en a une infinité. 


Tour XLV. K 


(ee) 


74 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


D'ailleurs, pour que a° soit le plus grand carré contenu dans A, on doit 
avoir, conformément à l'énoncé, 


HN du ds NU ee US 


9. Remarques. I. Si les nombres P, Q sont impairs, comme ils sont 


premiers entre eux, l'équation (13) admet une infinité de solutions entières 
el positives. 


IL SiQ est pair, P est impair. Alors P' doit être pair, sans quoi l’équa- 
tion (13) serait impossible. 
II. VA ne peut se développer en une fraction continue 
a (b, c, d, ..., P, q, 2a) 
dans laquelle, = : élant les deux dernières réduites de 
Os 0 yee ER 


P' soit impair, et Q, pair. 


40. APPLICATIONS. l. 


Les réduites sont : = 


Donc 
P=14, P'—5, Q— 39. 
L’équation (13) devient 
59a — 28a = 5. 
Il en résulte 
a= 5 + 280, a= 4 + 390; 
puis 
A= 4+ 3 =19, A= 43? + 51 = 1880, A= 82 + 59 — 6 783, ete; 


et enfin : 


VT9=4(2, 1,5,1, 2,8), V 1880 =45 (2, 1,3,12,86), V/6783—82(2,1, 5, 1, 2,1464) - 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 75 


I. 
y=%, 4, (8 mt © 
i g 110-250 A "150 
Réduites : A A E o 
utes : 1 e à 
130x -- 94a — 17 (impossible). 
m 
HI. 
Jeo D laa de 
A 5 7 10 17 N 149 
Réduites Ri Ce NE I ne RES 
1 2 5 5 13 44 


= 44, P'=13, Q—149, 
149a — 88a = 15. 


La solution la plus simple (”) est 
a = — 7, a= — 19, 


Donc, en général, par l'addition de 88 et de 149 : 


a — 84 + 880, a — 137 + 1496; 


Puis 
A = 157° + 81 —18850, A — 286? + 169 — 81 965, etc. 
Finalement 
W18 850 = 137 (5, 2, 4, 4, 2, 5, 274), 
V/81 965 = 286 (5, 2, 1, 1, 2, 3, 572), 
etc. 


11. COROLLAIRE. Lorsque, dans 


Ad + a, 


4 divise Da, le développement de A est 


a (=, 2a) EJ 


œ 


( 


X 
) Pour P ee ; x : ; : $ 
di our Pobtenir, J'emploie, non les fractions continues, mais l'algorithme au sujet 


Uel j'ai publié diverses Notes. 


(as) T 


héorème I de M. de Jonquières (Comptes rendus, février 1883, p. 569). 


76 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


Soit 
X — a (b, 2a) 
On trouve 
X = @ + = ; 
b 
Ainsi 
2a 
ms 
ou 
pa, 


12. ProsLème I. Dans quel cas peut-on avoir 
V/A = a(b, b, 24)? 


Les réduites de la fraction symétrique 


y = 0, 0 
sont 
b bal 
1° b 
Conséquemment, 


Pub, Peut, Ombttl. 


L’équation (13) se réduit à 


(b® + 1)a — ba = 1, . 
ou 
ab — 2ab + a — 1 = 0. 
On tire, de celle-ci : 


Vetta 


b= (J 


ou 


(15) 


(16) 


(*) La seconde valeur de b est inadmissible, parce que le produit des deux égale 1 — 5% 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 77 


b est un nombre entier; donc À — & doit étre un carré parfait : 


A= p. ART AaS PESE EE Ah OL RES De . (17) 


D’après l'équation (15), b doit être pair : b = 2}. 
On satisfait à cette équation en prenant « = 1, a = y. 
Les valeurs générales sont done : 


a =Å + 4y6, a =y + (49° + 1)6. Mr AS D PR ne (18) 
En outre | 
9 
By + (4y? — 1)9. E EE ROS A EE E a EE ur (19) 


x . . 
Ces valeurs remplissent la condition 
Arsama e ee anoen. nn reu00) 


Soient, par exemple, 


De Jà résultent : 


«=9, a=11, 6—7, A=1350=9% + 7; 
puis 
V/150 = 11 (2, 2, 22). 


13. CAS PARTICULIER REMARQUABLE. Dans les formules (18), (19), (20), 
Supposons 6 = y, Alors : 
a =1 + 4y’, a= 2y (2y? +1), B= 4y; 


A = 4y? (29° + 1) + 4y? + 1 = (47°? + 1)? (47°), 
ou 


A= [2y (27° +1) F + (27) + 1 = (47° A) A (4. (2) 
Ainsi, chacun des nombres A, A — 1 est la somme de deux carrés. 
Les premières valeurs de A sont : 


5 + W= 4l, AT + 352—1513, 57° + 108° = 13 055, ...; 


et lon a 


40 = 6? +2, 15312 = 536 + 4, 415032 — 114? + 6°, ... 


78 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 


14. Remarque. Soit l'équation 


g + Yu + v +1. 


On en trouve une infinité de solutions au moyen des formules : 


x = 4P +å, y—=AÛ, u— AP +1), v= Rt 


(25) 


45. Surre. Il est facile de former d’autres systèmes de formules donnant, 
chacun, une infinité de solutions de cette équation (22) (*). Par exemple, 


écrivons-la ainsi : 


D — uw = +A— y. 


(24) 


Prenons, arbitrairement, v et y; décomposons v + 1 — 7° en deux fac- 


teurs p, q, de même parité. Alors 


46. APPLICATION. 


On peut prendre 


Par suite, 
T0 ue 0s w=, ueg, 


En effet : 
29? + B? — 28? + 9? + 1 = 841 + 25 — 784 + 81 + 1 = 866, 
11? + 5? 8 + 9° + 1 — 191 + 25 — 64 + 81 + 1 = 146. 


17. PROBLÈME IL Dans quel cas peut-on avoir 


VA = a (b, g, b, 2a)? 


*) Pignore s'il existe des formules contenant toutes les solutions. Des valeurs (23), 0n 


conclut u =y + V. 


ET SUR CERTAINES SÉRIES. 79 


Les réduites de la fraction b, g, b étant 


b  bg+A  b’g+ 2% 
; 1° d Wet 
il s'ensuit que 

P—bhg+1, P'=g Q=bg + 2b. 


L’équation (13) devient donc 


b(bg + Bam 2 (bg + 1Ja=g €). + à i o a B) 


Aprés quelques tâtonnements, on trouve qu'elle est vérifiée par 


2 


2a——g(bg +1), a= — gy 


En conséquence, les formules générales sont 
2a = — g (bg + 1) + b (bg + 2)8 (*), : à : a... . (26) 
a = — g opein keh yuob. sb srao) 


Soient, par exemple : 


On à : 


2a = — 6 + 5.7.2 — 64, a = 532, a——1+62—11, AÀ— 32 + 11= 1 035; 


Puis 
V/1 035 = 52 (5, 1, 5, 64). 


18. Remarque. L'équation (25), ou 


aa — a)b — (2a =0 
donne gab 2 (ga — à) (2a + g) 


ga— a+ V g (a + à) + & 


b = 
ga 


est un nombre entier; donc g°A + & doit être un carré À (**). 


Č) Celle-ci est impossible si, b étant pair, g est impair. 


kk . 
Si b et g sont impairs, l’entier 0 doit être pair. 
) En particulier, lorsque g = 1, A + à = @ +a + x? est un carré 


80 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES 
En effet, des formules (26), (27), on déduit : 
A [- gg + 1) + b(bg + 2)9Ÿ — g? + (bg + 1)9, 


0 + b (bg + 20) 


w 


a de S A 
4 


4 | — 49 + 4 (bg + 1) 


s p 
Ar dl Mai 89° (bg + 1)9 + 4(bg + 176], 


4 (PA = 2) = g' (bg + 1Ÿ — 2bg° (bg + 1) (bg + 2) 
— 49° (bg +1) 


6 + b9’ (bg + 2Ÿ | © 
+ 4 (bg + 1} 


= g‘ (bg + 1) — 29° (bg + 1) (bg? + 2bg + 2)0 + (big + AD + 8b°g + 8bg + HD 
= [9 (bg + 1) — (b°g° + 2bg + 2) d}, 


1 
keg g’ (bg + 1) + (b°g? + 2bg + 2)6], 
1 
ga — a = AL "(bg — 1) + (bg? — 2)6]. 
La somme des deux dernières quantités est 
— bg? + bg (bg + 1)9, 


ou bga; ce qui devait arriver. 
49. Cas PARTICULIER. Soient, dans les formules (26), (27): 


On trouve 
a = 2g + 5, a = 4g + 5, A = (a + 1) — 4, À = 29° + 4g + 5. 


Par conséquent : 


a étant un nombre impair, supérieur à 3, le développement de 


est 


(*) Théorème IV de M. de Jonquières. 


| 

| 

| 

ET SUR CERTAINES SERIES. 81 | 

| 

20. ProsLème II. Dans quels cas peut-on avoir l 
VA—a(b, c, .….,e, r ee C b, 2a)? | 

i Pos i | 

Nous avons trouvé, ci-dessus (2) : | 

PQ —EHE + FF, PE 4 Ft O4 l 

2 . j 

L’équation | 

DRE | 

est donc | 

| (E + Fje = 2(EE + FFho=E" ft. . . . . . . (20) | 
À cause de | 

(EF' — FEŸ = + 1, | 

je l 

elle est vérifiée par | 

= (E? + F°}, a= ! (EE' + FF’) (E° + F°) (* l 
| œ = (E Je REP ETADI | 
| Les valeurs générales des inconnues sont, par conséquent : l 
| 
| 2 (ET + F?) + (EE + FF)0, a [(EE + FF’) (E? + F'°) + (E? + F°)6] (°). (29) | 
| Donc, si l'on applique les formules (29), le développement de | 
| Prat | 
| sera 
| 

tbt ens t fa fa no A 2a), | 

| 

| 

| Le Aio Pr 4 l 
| * APPLICATION. Soient, comme ci-dessus (3) : 
| E—9, K—1, F—7, F5, | 
| | 
| o l 
| } (E2 + F?)(E + F2) — (EE + FF’)? = (ER — FE’); etc. | 
[Rx SAA $ à 

| us d'après les valeurs de E, E', F, F’, le nombre entre parenthèses est impair, le | 
| 2 nd Proposé sera impossible. 
loue XLV. E 

| | 
| | 
| 
; | 
| 


J 
l 


82 NOTES SUR LA THÉORIE DES FRACTIONS CONTINUES, erc. 


Les formules (29) deviennent : 
1 à 
a= 25 + 250, a=7 [25.10 + 530]; 
ou, si l’on fait 0 = 21 : 
a = 25 + 46t, a —= 115 + 551. 


Il en résulte les systèmes suivants : 


DD =D a = 01080047 QI ee 
puis 


A = 115? + 25 = 15950; A= 168 + 71— 98995; A —991" + 117 = 48 958; … 
Ainsi : 
V/45 250 = 1145 (2, 5, 5, 2, 230); V/98 295 — 168 (9, 5, 5, 2, 536); 
: V/48 958 = 221 (2, 5, 5, 2, 449). 
Liége, 18 avril 1883. 


P. S. (27 janvier 1884). Au Congrès de Rouen (août 1883), j'ai donné 
la résolution complète de l'équation 


M +Y += u + w, 


dont un cas particulier a été considéré ci-dessus (p. 78). Cette communi- 
cation va paraître dans les Atti de l'Académie des Nuovi Lincei. 


THÉORIE 
à HOUVEMENTS DIURNE, ANNUBL ET SÉCUIAIRE 


D LE E SEE ui) 


LAXE DU MONDE 


PAR 


F. FOLE, | 


2 | 
MEMBRE DE L'ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE. | 


Dr OSNES: 


{Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 4 août 1883.) 


Tome XLV. 1 


PRÉFACE. 


l. Le présent travail a son origine dans quelques circonstances d’un 
caractère intime, que je compte révéler un jour en quelques pages portant 
la même épigraphe que celles-ci. 

Ces circonstances m’avaient amené tout d’abord à rechercher si la fluidité 
intérieure du globe pouvait occasionner une nutation diurne. 

Hopkins, le seul auteur qui, à ma connaissance, se soit occupé de cette 
question, lavait résolue négativement. ; 

En la reprenant ab ovo, je suis arrivé à la conclusion que la nutation 
diurne pouvait être sensible, dans cette hypothèse, et je me suis empressé 
de soumettre cette conclusion à une première vérification expérimentale. 

ll résulte de mes formules que la nutation diurne est la plus forte en 
déclinaison, pour les étoiles dont l'ascension droite est 6" ou 185; 

En ascension droite, pour les étoiles qui sont situées vers 0" ou 12", 

J'ai donc fait relever, dans les meilleurs catalogues, les positions de plu- 
sieurs centaines d'étoiles, et les ai fait réduire à la même époque ; j'ai pris 
ensuite les plus grands écarts entre les positions assignées à une même étoile 
Par ces différents catalogues, et j'ai constaté que ces écarts étaient, de tout 
Point, conformes au résultat théorique que je viens d'exposer. 

Je crois avoir de même élucidé les écarts signalés par Auwers (Berl. 
Jahrb. [. 1884) entre les quatre éphémérides astronomiques (Berlin, Green- 
Wich, Paris, Washington), et interprété ce quelque chose de systématique 
que l'astronome de Berlin avait trouvé dans ces écarts Co 
L'existence de la nutation diurne était dès lors, pour moi, chose certaine ; 

©) 
fait p 
le 94 


La théorie de la nutation diurne, suivie des discussions dont je viens de parler, 
Objet d’un travail qui a été présenté à l’Institut (Académie des sciences dé Paris) 
juillet 1889. 


1 PRÉFACE. 


et je pouvais essayer d'appliquer mes formules à des séries d'observations 
très précises, en vue de déterminer la constante de cette nutation. 

Jai choisi dans ce but les observations que W. Struve a faites dans le 
premier vertical, et dont il a déduit la constante de l'aberration. 

Les premiers résultats auxquels est arrivé le D" de Ball. qui a bien voulu 
se charger, à ma prière, du laborieux calcul de mes formules, sont assez 
concordants pour me permettre de considérer comme certain que la nutation 
diurne existe, et comme probable que sa constante approche de 0.4 (*). 

Or, si l’on remarque que la nutation diurne en déclinaison peut, dans 
des circonstances favorables, être égale à dix ou douze fois la valeur de cette 
constante, on voit que cette nutation ne doit pas être négligée, et que son 
influence sera très considérable en ascension droite pour les circompolaires. 

Lorsque la constante en sera bien déterminée, je chercherai à déduire de 
ma théorie la limite de l'épaisseur de la croûte solide du globe. 


I. On m'eût, avec raison, accusé d’incurie, si je navais appliqué, à la 
recherche de la précession et de la nutation annuelle, le procédé d’inté- 
gration fort simple dont étaient issues mes formules relatives à la nutation 
diurne. 

Les résultats assez neufs auxquels j'ai été conduit m'ont engagé à exposer 
cette théorie, en ne la fondant que sur les premières notions de la dyna- 
mique et de l’astronomie, et en ne me servant d'aucune formule que je n’eusse 
démontrée au préalable. 

Un jeune homme, quelque peu initié à ces deux sciences, peut donc suivre 
ma théorie, sans recourir à aucune autre source. 

Est-il besoin d’ajouter que mes formules, relatives à la longitude et au 
rayon vecteur de la Lune, sur lesquelles repose tout le développement du 
calcul, concordent avec celles de Delaunay, plus exactes que celles de Poisson? 

Une indication, qui sera plus utile, est la suivante. 

J'ai dû, pour rester conséquent, laisser de côté les termes provenant des 


(*) Voici les valeurs, toutes positives, déduites, pour cette constante, des observations 
de W. Struve : 
de p Cass. 0”.068; Cass. 0”.099; v U. maj. 0.047; 2 Drac. 0”.0314; 
b Drac. 07.028; c Drac. 0”.05; Pi. XIX?314.0”.4113. (A. N., n° 2542.) 


PRÉFACE. u 


inégalités de la Lune, et ceux qui ont leur source dans les inégalités du 
Sphéroïde terrestre, parce que j'aurais dù les emprunter à des théories 
étrangères à mon travail. 

Mais je me propose de publier ultérieurement les formules de la nutation, 
augmentées de ces différents termes, doni ma méthode permet de tenir très 
aisément compte. 

Les astronomes seront surpris, sans doute, des différences assez sen- 
sibles qui existent entre mes formules et celles de mes prédécesseurs (o): 
Aussi ne sera-t-il pas hors de propos d'en signaler ici les principales. 

Celles-ci sont au nombre de deux. 

m En premier lieu, je n'ai pas, comme ces géomètres, le coeflicient unique 
~~~ dans tous les termes de la précession et de la nutation, mais, au 
Contraire, des coefficients différents (**), qui permettraient, si les constantes 
de ces deux mouvements étaient très exactement connues, de déterminer 
Séparément les rapports > et i et qui permettent, dans tous les cas, de 
vérifier si ces deux constantes concordent entre elles. H résulte, entre autres 
conclusions, de la comparaison à laquelle je me suis livré, que la constante 
de la nutation de Peters concorde avec la constante de la précession de 
Bessel, mieux que celle de Struve E 

En second lieu, j'ai démontré qu’en se servant des formules de Peters, et 
des longitudes vraies de la Lune, les astronomes commettent des erreurs ; 
et qu'il est bien préférable de faire usage des formules qui renferment les 
longitudes moyennes des deux astres : d’abord, le nombre des termes en est 
beauconp moins grand que dans les formules en longitudes vraies; ensuite 


C) Quelques différences proviennent évidemment de ce que Jai négligé les inégalités 
de la Lune et celles du sphéroïde terrestre. Mais tel n'est pas le cas pour les différences 
+ je signale ci-dessous. 

ii *) La méthode d'intégration de Laplace, dont la nôtre west qu’un pâle reflet, lui 
eut donné également des coefficients différents, s’il n'avait négligé, dans le résultat, les 
termes très petits qui sont renfermés dans les expressions primitives de ces coeflicients. 
Dans ce cas, dit-il, on peut négliger i relativement à n, et l'on a, à fort peu près : 


a = 2EB : 


p DT k' sin (it ++). » (Mée. cél., liv. V, art. 4.) A cause de la grande rigueur que la 
Précision des observations et la perfection des théories imposent aujourd’hui, nous avons 
n S pas devoir suivre, en ce point, exemple de l’incomparable géomètre. 

(™) I n’en résulte pas que cette dernière soit inexacte, mais bien plutôt que la constante 
rs est trop faible. 


de Pete 


iv PRÉFACE. 


les premières ne renferment absolument aucun terme dépendant des péri- 
gées du Soleil et de la Lune (*), tandis que la conversion des longitudes 
moyennes ‘en longitudes vraies introduit de ces termes. La présence n’en a 
pas encore été signalée; ils sont, à la vérité, très faibles, quoique très impor- 
tants au point de vue théorique; et leur ensemble peut n'être pas sans 
influence sur le résultat final. 

Poisson avait jugé qu'on pouvait substituer, sans erreur, les longitudes 
vraies aux longitudes moyennes. 

Le premier astronome qui ait songé à effectuer la transformation des unes 
dans les autres est Peters; mais il n’a opéré la transformation que dans 
les termes relatifs au Soleil seulement, et il a omis les termes dépendants 
du périgée. 

De là les erreurs commises en faisant usage de ces formules, lorsqu'on y 
substitue, ce que font beaucoup d’astronomes, les longitudes vraies de la Lune 
à ses longitudes moyennes. C’est ainsi que les termes en C -- T’ ont des 
coefficients à peu près égaux, mais de signes contraires, suivant qu’on fait 
usage des formules en longitudes moyennes ou en longitudes vraies, et que 
la signification de la constante de la nutation n’est pas la même dans l’un 
ou l’autre cas. 

Ces erreurs peuvent être évitées, il est vrai, par l'emploi du Berl. Jahrb., 
des Tub. Pulc., ou de la Connaissance des Temps (à partir de 1884 pour 
cette dernière); ces ouvrages permettent d'effectuer, en longitudes moyennes, 
le calcul des termes qui dépendent de la Lune. I nous paratt utile qu'on 
calcule de même ceux qui dépendent du Soleil. 

Nous proposons donc aux astronomes de faire usage, à l'avenir, des for- 
mules qui renferment les longitudes moyennes du Soleil et de la Lune, et 
nous espérons que les différents annuaires astronomiques consacreront quel- 
ques pages au calcul de ces quantités, pour tous les jours de l’année, 

Le présent fascicule contient la théorie du mouvement diurne et du mou- 
vement annuel de laxe du monde. 

Les mouvements séculaires de cet axe feront l’objet d’un prochain travail. 


(t) Abstraction faite de ceux qui peuvent provenir des inégalités du sphéroïde terrestre. 


THÉORIE 


DES 


MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL ET SÉCULAIRE 


DE 


LAXE DU MONDE. 


LIVRE I. 
DE LA NUTATION DIURNE. 


CHAPITRE I. 
Formules de la nutation diurne rapportée à l'équateur. 


1. Le problème de la nutation diurne peut étre abordé d’une manière 
beaucoup plus aisée que celui de la précession et de la nutation annuelle. 
Tandis que dans ce dernier, en effet, il n’est permis de considérer comme 
fixes ni le plan de lécliptique, ni, bien moins encore, celui de l'équateur, 
On peut, dans le premier, rapporter les coordonnées des astres à Pun ou 
l'autre de ces plans considéré comme fixe. La position de chacun d’eux sera 


alors celle qu'il occupe, au jour donné et à l'instant pris pour l’origine, en 
vertų de la précession et de la nutation annuelle; et, la période de la nuta- 
ton diurne étant de six heures seulement, il sera permis de considérer les 
Mouvements des astres, soit en longitude et latitude, soit en ascension droite 
et déclinaison, comme uniformes pendant cette durée. 

L'idée de considérer comme fixe le plan de l'équateur, quoique la plus 
> De nous est cependant pas venue la première. Ce n’est qu'après avoir 


Simple 


4 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


traité d’une manière générale le problème de la nutation, comme nous le 
ferons dans un autre chapitre, que nous avons été amené, pour éviter les 
complications des formules que nous avions obtenues, à rapporter les mouve- 
ments diurnes de l’équateur à la position initiale de ce plan lui-même. Les 
formules qui expriment ces mouvements arrivent ainsi, pensons-nous, au 
plus grand degré de simplicité qu’elles puissent atteindre. Elles sont toutefois 
beaucoup plus laborieuses à calculer que toutes les autres formules relatives 
à la position apparente des étoiles. 

Afin d'éviter de plus grandes complications, tout à fait superflues du reste, 
nous y regarderons les distances du Soleil et de la Lune à la Terre comme 
constantes. 


2. Considérons la Terre à un instant quelconque £; rapportons ses points 
à ses trois axes principaux æ, y, z; nommons À, B, C ses moments 
d'inertie autour de ces axes, rangés par ordre de grandeur ; D, la distance 
de son centre au centre du Soleil ; &, Yo, Zo les coordonnées de ce dernier 
point rapporté aux mêmes axes. 

Tout en considérant les moments A, B, G comme inégaux, nous pouvons 
admettre, quant à l’action des astres attirants, que la Terre est un ellipsoïde 
de révolution autour de l'axe des z. 


Ses méridiens auront alors pour équation : 
r = a (4 — x) (4 + x sin? x), 


x désignant l’aplatissement, et y langle du rayon r avec l'axe de révolution; 
et l’on trouvera aisément que les couples provenant de l'attraction du Soleil, 


dont nous nous occuperons en premier lieu, seront, dans les trois plans 
principaux 


Yoz i j í > Lo fer 
Q= 3M 1 = fo — z’) dm; P—5M is — x’ dm; R—5M = fe ian y”) dm, 
| aA : LE 7 


M désignant la masse du Soleil ; ou bien 


Yo%o n 
D? 


Lozo Koto 


3M Loo 
i DË 


(CE N (CAN M 
D: 


(BA). 


ET SÉCULAIRE DE L’AXE DU MONDE. 5 


Si nous représentons par m, le moyen mouvement de la Terre autour du 
Soleil, nous pourrons écrire m? au lieu de 
dentes; et, si l’on pose 


M ; ui 
5 dans les expressions précé- 


C—B—Db, C—A=a, B—A—d, 


les trois couples auront pour expression 


YoZo 9 Lo%o XoYo 
Q= 35m°b J s = — mja —, R= 3míd — > 
p2 D? 2 
0 0 0 


que nous écrirons, en vue d'obtenir une plus grande uniformité de signes 
dans les équations (4), 


Q= — bng, P—anp, R—— dur, 
en faisant 
MÈ Lozo mi YoZo 


-Mi LoYo 
ee) te T9 s 
n D; noD 


n Dê 


p= — 5 enm = Á— 


Or, {,.m, n étant les vitesses angulaires de la Terre autour de ses axes 
Principaux, on sait que les équations qui les donnent sont : 


Adl + bmndt = Qdt 
Bdm — alndt = Pdt 
Cdn + dmldt = Rdt; 
ou 


| il l lm d d 
Ho. . q= nn + q); S= Gall + p); one 


F 7 t (lm + nr). 


3. Avant de procéder à leur intégration, nous avons à présenter une 
Observation très importante. 

La nutation diurne, comme on le verra, et comme Laplace l’a, du reste, 
affirmé, ne peut exister qu’à la condition que les moments A et B diffèrent 
entre eux d’une quantité appréciable. 

Or il semble résulter des données actuelles de la géodésie et de la 


Seographie physique, que cette différence est réellement insensible, si les 


6 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


moments À et B sont relatifs au sphéroïde terrestre tout entier. Elle peut 
ne pas létre, au contraire, si ces moments se rapportent à l'écorce solide 
seule, et si celle-ci est assez mince. 

Mais les équations (1) sont tout aussi bien applicables au mouvement de 
cette écorce qu'à celui du globe entier. 

Considérons à part le mouvement de l’écorce solide et celui du noyau 
fluide. 

L’axe de la première pourra être soumis à une nutation diurne, qui le 
fera osciller autour de laxe du second, dont la nutation diurne pourra être 
considérée comme insensible. 

Comme les oscillations du premier de ces axes seront excessivement petites, 
et comme de plus, le moment d'inertie de l'écorce, supposée assez mince, 
sera notablement plus faible que celui du noyau fluide, l'axe du mouvement 
de rotation résultant de celui de l'écorce et de celui du noyau, ou l'axe de 
rotation du globe tout entier, pourra être regardé comme soustrait à 
l'influence de la nutation diurne. 

En d’autres termes, la vitesse n autour de laxe de rotation sera la même 
pour l'écorce que pour la Terre tout entière. 

Or pour celle-ci, les équations (1) donnent dn = 0, à cause de l'excessive 
petitesse du rapport $ (*). 

Nous pouvons donc admettre que n est une constante dans ces mêmes 
équations, appliquées au mouvement de l'écorce solide. 


À. Nous aurons d’abord à substituer, dans ces équations, aux quantités 


MS Xozi _ M? Yo%o 
ere. et q= — 5 — —, 
n D3 n D 


“een 


leurs expressions en coordonnées sphériques. 


(*) Si la vitesse de rotation de la Terre n’est pas absolument constante, il résulte du 
moins des recherches de Laplace et de Poisson, que ses variations sont absolument insen- 
sibles. [Méc. cél., livre V, n° 8, et Mém. sur le mouvement de la Terre autour de son centre 
de gravité (Mém. be L'Institut, t. VIL, pp. 289-240.) 


ET SÉCULAIRE DE PAXE DU MONDE. 1 


Désignons par ọ langle que l'axe des æ fait avec la ligne des équinoxes, 
compté dans le sens du mouvement de rotation de la Terre. 
Le plan des æy étant celui de l'équateur, langle formé par la droite D, avec 
Fig. 1. ce plan sera la déclinaison 9 du Soleil, et celui que 
fait sa projection D, avec la ligne des équinoxes sera 
l'ascension droite + de cet astre. 
Comme les angles « et ọ se comptent dans le même 
sens, la différence de ces deux angles, ou l'angle de 
D, avec æ, sera égal à 4 — +. Cela posé, nous aurons 


z Y x 
(2) — = sind; 7 _cosdsin(z— +); — = cos d cos (x — p); 
Do 0 0 
et par suite 
w 0 2 

(3) . eau no di do: 

) p= EC 29 cos(«—#); q= Da sin 20 sin (« — +); 
ou bien, en faisant 
(4) eu de —h 

4n 

(5) P=h[sin («+ 20 — )— sin (x —28— p) |; =h [cos (x —23— p) — cos (x + 20 — 2). 


p 7 Fe a KES 
9. La méthode de la variation des constantes arbitraires, appliquée aux 
deux premières des équations (1), donnera pour / une expression de la forme, 


(6) 


l = a sin (nt + bi) + © + H; sin (x + 29 — +) + H sin (a — 29 — +), 


dans laquelle +, et 8, sont les deux constantes arbitraires; n, une quantité 
Céterminée par n? = S n? = ên”, en faisant $ T en en e r 
$ ntes à déterminer ; © une fonction de + également à déterminer, et dont 
et D"! désignent les deux premières dérivées prises par rapport au temps. 
Pour trouver ces quantités, substituons l'expression précédente de ¿ dans 
a deuxième équation (1) 


dm a 
rs n(l+p); 


8 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


intégrons ensuite cette équation, et portons, dans la première, la valeur 
trouvée pour m; il viendra d’abord : 


lm : 
e Sn a sin (mt + pi) +% + (H, + h) sin (x + 28 — +) + (H; — h) sin (x — 29 — +) | ' 


Intégrons sans ajouter de constante, puisque nous avons les deux arbi- 
traires voulues; et désignons par a, et d, les mouvements du Soleil en 
ascension droite et en déclinaison pendant l'unité de temps, nous aurons : 

a Cr H,+h H—h 


(7) m==n)—— cos(mt +p) +2— cos(a + 20 — 5) — 


— COS(a—20— y 
B Ni a +2di-—n a 


a—2d;—n 
; Ea di pie 
Portons cette expression, ainsi que celle de +, dans l'équation 


dl bre 
aA n(m + q), 


celle-ci deviendra : 


on, cos (mit + bi) + D +H, (a, + 2d, — n) cos («+ 28 — 4) + Ho(ay— 2d, — n) cos (a — 29 — p) = 


ab 7 Hh H, —/ 
PEA — cos (mt+ B) + t re cos (a +28 —p)— La 
AB Ny : 


cos te—20—s)| 


u+2d—n a—24d—n 


b 
ma nh [cos (x —29— p) — cos (x + 28 — ?)]: 


L'identification des deux membres donne 


o ` : ` . 
1° o+ n6—0, doù è= sin 1, sans constante, par la même raison que plus haut; 


b H +l l 

Jo H, (a, + 2d, — n) = ben eT oio nh; 
AB a + 2d —n . A 
b H — h l 

3° IL (a; — 2d, — n) = AMP FAO rue ES 


AB a—2d,—n 


Ces dernières égalités s’écriront plus simplement, si l’on fait 


dı d; 
(8) E m e Ao U as + 2da — 1 = 8, @ — 2d; — À = Vo: 
1 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 9 
A a; 
Men (er 2) it (> + A (Let (rt =] TA (r x d : 


Comme « diffère, dans tous les cas, fort peu de b, nous ne commettrons 
pas d'erreur sensible, et nous simplifierons considérablement nos coeffi- 
cients, en remplaçant, dans les premiers membres des égalités précédentes, 


ab L2 E 
ag Par 155 nous trouverons ainsi : 


Hih b Ha— h \ l b b b b 
CRETE 


2 


Les expressions (6) et (7) de / et de m deviennent par là, si nous laissons 
de côté les termes à longue période, puisque nous ne nous occupons ici que 
de la nutation diurne : 


| À AAC ra b à b 
AÀ Sa — — Ta — — 


sin (x + 20 — +)  sin(a — 20 — ọ | 
A A 


cos(a + 29 — o) cos (a — 20 — +) 
a — 
tor: ©. m=— >h b b ; 
B Sa — — To — — 
A A 


n r o è lo d4 vaft . FF 
6. Désignons maintenant par et les variations de l’obliquité de 
iique et de la ligne équinoxiale qui sont dues au déplacement diurne 

u plan de l'équateur ; il ne nous restera, pour obtenir ces quantités, qu’à 


substi e res 
Ubstituer les expressions précédentes dans les équations connues (*) 


l 


CEN à do 


dy 
— = — l cosọ + msing; — sin v — = l sin y + m cos» 
dt i m dt d 


Ü Ie si À : 
a l est bon de remarquer ici que nous avons compté tous les angles dans le sens direct, 
IS que Lan. ; SE à 5 
7 que Laplace et Poisson ont pris l'angle y en sens inverse. C’est de 1à que provient 
ne — d; iai T dy 
Sue — dans le premier membre de l'équation en 7. 


Tome XLV. 2 


10 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


en négligeant, dans le résultat, les termes indépendants de 9, puisqu'ils ne se 
rapportent pas à la nutation diurne. 
Il viendra ainsi, après avoir posé 


a  b+c 
12 u ; 
(12) 5 7 
sin (z + 2ð— 2%) sin(a — 2d— 2p) 
do ch — | 
Vend à E D 
i AA PRR ) 
(13) / 
| cos (æ + 23 — 2p) cos(a — 20 — 2ọ) 
0 ch —— 
siie r Ra b b 
2 Sa — — TERRE 
| Re. FA 


7. La petitesse de la variation de œ permet de considérer cette quantité 
comme constante dans sin ati c’est ce que nous ferons dans l'intégration. 
Nous appellerons Ao et Ay les variations qui se sont produites depuis £= 0 
jusque ¿= í; æ, à, %o les valeurs initiales de &, ò p; ams Ons Pm leurs valeurs 


moyennes entre 0 et £. L'intégration entre ces limites donnera, si l’on pose 
Ha Le vu en. = sk, 


et si l'on écrit simplement ź au lieu de ọ — 9, = ni, ce qui revient à 
estimer { en arc : 


ao À A cos(ay+200—295)—Ccos(æ+20—2y) 4 1 cos(x— 20, 2)— cos(a—28—29) 


RS 4 5 —1 Pi dE er 
Sg— — lice 
So 2 A 
| sin + (4 —s,)t 4 sin 4 (1— rə)t 
== sin 29 — 2e an ük sin En 10 2: m a e 
5° (ant 2n — 2pm) PE 5 (a 2m) rer 
A Ti R 
(15) i ; : : 2v0) 
. Ay 4 À sin(x+28—2p)—sin(aot2ð—2p0) 4 1 sin(x- 28—2o)—sin(ay;— 20—20 
sino— = — ——— ie = 
2 b Se-—1 2 b To—1 
(5 login Va—— 
A A 
1 sin +(4—s)t À sin !(1—r2)l 
sa cos(x EA A 7 ca z COS Amnon 2 m RE 
g SU P rare g SC rer 
Creer (Eur Eze 


A A 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 41 
Si l’on fait 
D a a DNS 


ces formules s’écrivent : 


| E sin (S,— %,)- RE Ve 
| K b sin ( m Pm) r b Sir ( m ?m) 7 


1 
EE cos R PSS 2; m 
A SE à 


Some ces To — — 


| A A 


©. Pour connaitre les variations apparentes du lieu d’un astre, produites 
Par le mouvement diurne de laxe du monde, que nous venons de calculer, 
NOus aurons à substituer les valeurs de A» et Ay dans les formules : 1 


(18) Að = sin gAw + COS & Sin Ay; Ax = COS Ay + tg d (sin æ sin wAy — cos A0), 


OU «et 9 sont l'ascension droite et la déclinaison de l’astre, Az et A9 les 
Variations apparentes de ces coordonnées dues au mouvement de l'axe du | 
Monde. | 
[i 
On trouvera ainsi : | 
AD 1 sin $ (1— sə) 1 sin + (1—r)t 
q = — cos (Sp — 29n — z — — COS (Rn 29 — a) ——— 
K b ( m Pm a) AR b s ? ) 1—r, 
S2— — Ta —— 
A A 


Ax o coso 1 sin + (1— so) t | sin £ (1— r,)t 


iR 


iaei iias q e Ee k en. 
(19) { K cos (S,— 2pm) 7 5 cos (Ra — 2pm) 


Sin w 1— r, | 


| 4 : sin Ż( 1 —-Sə)t 4 $ sin +(1—rə)t 
sS — 2», — je SER 20 2 PAM re 
= b sin( m Pm æ) 4 h b ( m fm a) pe To | 
| 


Cire Pa— — 


A SRA 


{ i á s b ~ è fi 
9. Ces formules sont relatives à l’action du Soleil. | 


Mais il est évident que les mêmes calculs peuvent s'appliquer à l'action 
Lune, et que celle-ci donnera lieu à des formules absolument identiquës 


de la 


12 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


aux précédentes, à cette seule différence près, que tous les termes devront 
être multipliés par le rapport f des actions de la Lune et du Soleil. 

Si done nous accentuons les quantités qui se rapportent au premier de ces 
corps, les variations diurnes apparentes d’un astre, en ascension droite et en 
déclinaison, produites par les actions combinées du Soleil et de la Lune, 
auront pour expression complète : 


Ac 4 sin? (1—5;)t f sint (1— 52) 
— = — COS(S,,-— 2p „— a 2 + COS (Sy — Do, — a) — 
K pp a) Fi j ( UEIT EN, 
83 — — Sa —— 
A A 
ex sin (1— r,) in4(4— r)l 
SIN z (1 — SIN z| 1— Fo 
a COS(R,,— 29 „,— a) — hp Cost 0 J 
b ( m Pr a) Tss To i : b s( Pm &) re r, 
se fe 
Ta A TA 
[ax cosay 1 sin{{{4— 5.) 1 sint(1--s;){ 
— = cos(S„— 2; ee e ] ——— cos(S,, —29,, = = 
K sino b (Su—2pn) 1 —5 fi 0 à Pm) 1 — S 
Sa—— pe 
A A 
1 sin4(1—r)l 1 sin $ (1— r)i 
= cos(R,,—2: = +f cos(Rpy—2o„) — 7 
pos, Pm) mR 1 Em ( Pm) DR 
Vo ry —— 
(20 bis) me + 
is 
r sin4(1— so)t EM sin4{{—5s2)l 
— tgd sin(S,,— 2p„—- + f- sin (Sy —2p,— e) — = 
8 A e 2 aa Der j er ( Pn — a) ER 
ATA aT 
sin {{1— r)t ; sinį(1— r)! 
— sin(R„—2p„,—- 2 hiak i SR, — Lo, — a) — =], 
b (R, Pma) 1 — r / b ne 4) 1—r 
Ta—— Tan — 
| U ZA j 


L'action des planètes sur les mouvements diurnes apparents des astres 
se déterminerait absolument de la même manière que celle de la Lune. Mais 
la constante K dé la nutation diurne est tellement faible, et surtout la valeur 
de f l'est tellement aussi pour toutes les planètes, que les actions de celles-ci 
peuvent être négligées sans aucune erreur. 

Nous pouvons donc considérer les deux formules qui précèdent comme 
donnant les expressions complètes des mouvements diurnes apparents des 


astres en ascension droite et en déclinaison. 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 15 


10. Les formules (20), recherchées en vue de faciliter le caleul numé- 
rique de la nutation diurne, sont peu propres à montrer quelles sont les 
Positions des astres attirants dans lesquelles cette nutation est la plus grande 
ou la plus petite. Nous en développerons d’autres mieux appropriées à ce but. 

Elles donnent lieu, toutefois, à une remarque importante : c'est que la 
Nutation diurne en déclinaison sera la plus grande pour les étoiles dont 
l'ascension droite est de 6" ou 18", ou qu'elle sera plus grande pour les 
étoiles comprises entre 3" et 9" ou entre 45" et 21" que pour les autres 
étoiles; tandis que l'inverse aura lieu pour Ja variation diurne en ascension 
droite, au moins quant aux étoiles dont la déclinaison est assez forte, et 
Pour lesquelles le terme en tg 2 est prédominant. 

A9 en effet se compose de termes de la forme a cos (x4-—1—4) sin £, dans 
lesquels a et z sont des quantités à fort peu près constantes pour une même 
étoile observée au méridien, tandis que æ est une variable dépendant de 
l'heure de l'observation et de la position des astres altirants. 

Si l’on prend un grand nombre d'observations, cette variable passera par 
toutes les valeurs, et la moyenne des résultats donnera pour le maximum 
de A) correspondant à ¿= 7, des couples de termes de la forme 


a [sin (x — a) + sin (— x — a)| = — 2a sin « cos x. 


Cest done pour les étoiles dont l'ascension droite est de 6" ou 18" que les 
Variations en déclinaison seront les plus grandes. 

a au contraire, pour les étoiles dont la déclinaison est assez forte, 
dépendra surtout des termes multipliés par tg ð lesquels, pris deux à deux, 
Sont, pour Z — Z, de la forme 


9 2 
á 


a [cos (x — x) + cos(— x — a) = 24 COS « COS x. 


Les plus grandes variations en ascension droite auront donc lieu pour les 
etoiles dont la déclinaison est très forte, et dont l'ascension droite est égale 
4 O" ou à 42h, 

0 


t, Si l’on admet un assez grand degré de précision dans les observations 


es différents astronomes, il est clair que les discordances entre leurs déter- 


14 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


minations devront affecter surtout les positions des étoiles dont la nutation 
diurne est la plus grande. 

Si celle-ci existe, les discordances devront donc se présenter surtout : 

En déclinaison, pour les étoiles dont l'ascension droite est voisine de 6" 
ou de 18"; 

En ascension droite, pour celles qui sont voisines de 0" ou de 12", pour 
autant que leur déclinaison ne soit pas trop faible. 

Nous avons trouvé ces résultats confirmés par les valeurs que les 
différents astronomes ont attribuées aux coordonnées d’un très grand nombre 
d'étoiles. 

Cette circonstance, et les écarts énormes qui existent entre les ascen- 
sions droites trouvées, pour une même étoile, à des dates différentes, par 
les observateurs les plus éminents, écarts qui, pour certaines cireompolaires, 
ne s'élèvent pas à moins de trois ou quatre secondes de temps, nous ont 
confirmé tout d’abord dans notre foi à l'existence de la nutation diurne. 


14. Cherchons léquation du cône décrit pendant un jour par l'axe de 
la Terre autour de sa position moyenne. 

Celle-ci est naturellement celle de laxe de l'équateur moyen au jour donné, 
c’est-à-dire de l’axe soumis à la nutation annuelle, mais supposé soustrait à 
la nutation diurne. 

Or, en rapportant les points de la Terre à ses trois axes principaux, l'axe 
de l'équateur moyen étant pris pour axe des z, nous avons trouvé, pour les 
composantes de la vitesse angulaire de la Terre, autour des axes des x el 
des y, les expressions (9) et(10) de ¿ et de m, qui peuvent s'écrire, en posant 


“hab AT : = $3; RU re x + 2 —S; x—920—R: 
À B b b 
aa os 
l= b [ss sin (S —+) — rs sin (R — ?)| 
m = — a |s; cos (S 0) — r; COS (R — ə) 


ou bien ; 
l= b, [ (s; sin S — r; sin R) cosy — (s; cos S — r; cos R) sin o 


is 
PF 


m = — a; | (s; cosS — rs cos R) cos p + (s; sin S — r; sin R) sin ? 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 15 


ou, en faisant 
S sin S — r; sin R = c; s; cos S— r; cos R = x : 


l = b, (c cosg — # sin ẹ); m = — a (x cosp + csin ọ). 


Ces formules se rapportent à l’action du Soleil seulement. 

La Lune donnera lieu à des formules analogues, qui se déduiront des précé- 
dentes en y accentuant simplement toutes les quantités à l'exception de CA 
bi et a; représentant respectivement ` h et © h, et h' étant égal à Af. 
Si nous faisons alors 


, 


ofo esok e AT A E 


les expressions complètes de ¿ et m deviendront 


l m : 

— = g" 0S — 2" sin p; — = — (x cos ọ + g”'sin p) 

bi di 

d’où l’on ti 
l lon Ure : 

PASS Me A 
LA pieces ere 
Dit 


On a, de plus, n = constante. 
Or, si æ, y, z désignent les coordonnées d'un point quelconque de l'axe 
MSlantané de rotation, on a 


DUR NM 


Par où l'équation précédente devient 


equation du cône du second degré qui serait décrit, pendant un jour, par 


l'axe de rotation de la Terre, autdur de sa position moyenne, si la position 
du Soleil et de la Lune restait invariable pendant la durée du jour. 

Comme il n’en est pas ainsi, ce n’est donc pas un cône du second degré 
que décrit pendant un jour laxe de la terre, mais un cône dont l'équation 


16 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


serait tout à fait inabordable, vu l'impossibilité matérielle d'éliminer £ entre 
les expressions de / et m, si l’on admettait même que les coordonnées du 
Soleil et de la Lune varient pendant un jour proportionnellement au temps. 

Nous bornerons donc nos recherches sur ce sujet au résultat que nous 
venons de signaler, à savoir que, si le Soleil et la Lune restaient fixes pendant 
un jour, le cône décrit par laxe de la Terre, en vertu de la nutation diurne, 
serait un cône du second degré. 

Les expressions précédentes de i À montrent également que la période 
entière de la nutation diurne serait, dans cette même hypothèse, d’un jour 
sidéral exactement; mais, à cause des variations du Soleil et de la Lune en 
ascension droite et en déclinaison, la durée de cette période est elle-même 
variable. Elle ne s’écartera toutefois que très peu de celle du jour sidéral, 
comme on peut le voir par les formules (20), dont chacun des termes 
renferme comme facteurs des quantités de la forme sin 4 (1 — sa) etc., qui 
ne différeront jamais bien sensiblement de sin £. 


12. Il est aisé également de trouver les variations diurnes apparentes 
des étoiles en ascension droite et en déclinaison par rapport à leur lieu 
moyen apparent non corrigé de la nutation annuelle. 

Si l’on désigne, à un instant quelconque #, par æ, y, z et X, Y, Z, les 
coordonnées d’un astre rapportées à l'équateur vrai et à l'équateur moyen, 
laxe X passant par l'équinoxe moyen du jour donné; par As l'angle de ces 
deux plans, par y langle de leur intersection avec laxe des X, et par ọ celui 
de laxe des æ avec cette intersection, on aura d’abord, par les formules de 
transformation des coordonnées : 

x = cos Ao sin ọ (Y cos y — X sin x) + cos p (X cos y + Y sin y) — Z sin Aw sin ọ 


y = cos Aw cos ọ (Y cos y — X sin y) — sin ọ (X cos y + Y sin x) — Z sin 4w cos ọ 


z = sin Av (Y cos y — X sin y) + Z cos 4o. 


Or 


X = D cos d cos x, Y—Doecosdsinæ, Z—Dsind; 


æ, y, Z se trouvent par des formules analogues dans lesquelles 9 et à sont 
remplacées respectivement par ò + A9 et a + Aa — y. 


ET SÉCULAIRE DE LAXE DU MONDE. 17 


Si l'on néglige la deuxième puissance de Ao, Aa, Aò, on aura simplement 


x =9 + x, et les formules précédentes s'écriront en posant pour abréger 


FX = a: 


cos (3 + Ad) cos (a; — ẹ + Aa) = cos ð cos (o — y) — Aw sin d'sin p 
cos (9 + Að) sin (x, — + + Aa) = cos d sin (ay — p) — Aw sin d cos & 


sin (9 + Ad) = sin d + Aw cos d sin o; 


Jaa è E 
d'où l’on tire aisément : 
Að = Ao sin (a — y), 


Au = — Av ig d COS (« — y). 


Ces formules montrent, beaucoup plus simplement encore que la discus- 
sion de l’article 10, que les variations diurnes sont les plus fortes en ascen- 
Sion droite pour les étoiles situées par 0" ou par 12", et en déclinaison pour 
celles qui sont situées par 6" ou par 418". 

Elles ne peuvent servir, malgré leur simplicité, à détermineï’ les mouve- 
Ments diurnes apparents des astres, à cause de l'ignorance dans laquelle 
Nous sommes quant à la valeur de l'angle y que l'intersection de l'équateur 
Vrai et de l'équateur moyen fait, à un instant donné, avec la ligne des équi- 
Noxes, 

À Cet angle ne pourra être connu que quand Ja constante de la nutation 
“urne aura été très exactement déterminée par l’observation. 


1. Voyons maintenant quel sera le procédé le plus propre à la déter- 
“ation de cette constante, å 
Comme nous venons de l’observer, les coefficients 4 (1 — sa), etc., des 
ormules (20) sont assez peu différents de lunité, et, par conséquent, les 
P de la forme paa sont a peu différents de . i. On pan 
„we, sans commettre d'erreur sensible, que cette dernière quantité 
multiplie tous les termes de la nutation diurne. Celle-ci aura donc une 


Pério + j l 
ré de de 24% environ, et c’est après des intervalles de 6" qu’elle passera 
r Son Maximum. 


aS Comme la courbe de ces variations est une sinussoïde, il n’est pas 
lome XLV, 5 


18 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


possible d’assigner, d’après ces formules, au lieu de lastre, une position 
moyenne autour de laquelle il oscille dans son mouvement diurne apparent. 

Force sera donc de prendre comme position moyenne celle qui correspond 
à un instant du jour qui soit fixe, et qui soit le même pour toute la Terre. 

Le choix le plus rationnel est évidemment celui qui donne ọ = 0 en 
même temps que { = 0, c’est-à-dire à l'instant où l'astre arrive à celte posi- 
tion moyenne conventionnelle. 

Appelons premier méridien celui qui passe par l'axe des x. 

Comme ọ est langle que cet axe fait, dans le sens du mouvement de 
rotation de la Terre, avec la ligne équinoxiale, +, réduit en temps, sera l'heure 
sidérale du premier méridien. 

A cette heure + correspond l'heure sidérale + + L = T, pour un lieu 
d'observation dont la longitude orientale est L par rapport au premier méri- 
dien. Cette heure, étant celle de l'observation, est celle pour laquelle sont 
valables les expressions de Ad et de Aa données ci-dessus; et comme, dans 
l'hypothèse où la position moyenne des astres est celle qu’ils occupent à 0" 
(temps du premier méridien), 29, est égale à p, on aura 24, = T—L. 
Quant à Z ou p — p, il sera aussi égal à T — L. 

Ce procédé rationnel ne peut toutefois être utilement employé que si lon 
connait la longitude L du lieu d'observation par rapport au premier méri- 
dien. Il serait incommode dans le cas où lon voudrait la calculer, à cause 
des produits de sinus dans lesquels entrerait L. 

Pour ce cas, lon devra déterminer d'une autre manière Pheure 4, du pre- 
mier méridien, pour laquelle Pastre a sa position moyenne conventionnelle, 
ọ étant Pheure de l'observation à laquelle correspondent Adet Aa, 

Or, en général, on a 

p=T—L, p=T— L, 
d’où 
t=g—%=T— Tr, 


et 
29, =p + p= T + T, — 2L. 


Jl suffit done de se donner arbitrairement heure T, du lieu d’observa- 
tion, à partir de laquelle on veut calculer l'effet de la nutation diurne, pouf 
que l’inconnue L mentre plus à la fois dans les deux facteurs du produit. . 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 19 


On peut même profiter de cette arbitraire pour faire en sorte que cet effet 
soit un maximum; on n’aura, pour cela, qu’à prendre T — T, = 6"; et c'est 
ce moyen qui sera le plus propre à assurer une détermination précise de L, 
C'est-à-dire de la position du premier méridien, en même temps que de la 
Constante K de la nutation diurne. 

Quel que soit, du reste, de ces deux procédés, celui que l’on voudra 
employer, il est clair que, vu la petitesse à laquelle on doit s'attendre pour 
celte constante, et malgré le soin que l’on prendra de ne faire usage que des 
observations les plus précises, on devra, pour éliminer de celles-ci les erreurs 
accidentelles, recourir à un nombre d'observations assez considérable, et les 
traiter par la méthode des moindres carrés. 


14. Mais le problème présente beaucoup plus de complication encore que 
ne le font supposer les formules (20). 

Il est évident, en effet, que l'ignorance de la nutation diurne peut avoir 
été la cause de certaines erreurs dans la détermination des constantes de la 
Précession, de la nutation et de l’aberration (*); dans cette dernière surtout, 
à cause du nombre assez petit d'étoiles dont W. Struve s’est servi pour la 
déterminer, et peut-être aussi dans la détermination du mouvement propre 
des étoiles. 

Il faudrait donc, à la rigueur, introduire dans les formules les corrections 
à appliquer à chacune de ces constantes, et, en outre, la parallaxe annuelle 
de l'étoile et sa nutation diurne, pour traiter le problème d’une manière 
complète. 

Comme nous ne nous occuperons, toutefois, dans ce travail, que d’obser- 
Vations portant sur un assez petit nombre d'années, et que, dans ce cas, la 
Correction de la constante de la précession et du mouvement propre sera 
Probablement tout à fait insignifiante, nous ne tiendrons compte que des 
Corrections des autres constantes, ainsi que de la parallaxe annuelle. 


i 
2 Des considérations théoriques, exposées dans la suite de ce travail, démontrent que 

valeur de cette constante, déterminée par Bessel, concorde mieux que celle de Struve 
à constante de la nutation de Peters. 


avec l 


20 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Si nous représentons par €, et e, les écarts qui existent entre la position 
apparente observée et la position apparente, calculée à l’aide de la position 
moyenne assignée à l'étoile et des constantes de Struve et Peters pour l'aber- 
ration et la nutation annuelle ; par A9 et Ax les écarts entre cette position 
moyenne et la position moyenne conventionnelle définie ci-dessus; par Av 
et Aa les corrections à appliquer aux constantes de la nutation annuelle et 
de l’aberration, nous aurons à écrire : 


(21) f e5 = Ad + Av- Ng + aa Ag K.J oI, 


E EEN a A, O R G 48.10; 
formules dans lesquelles nous représentons pour abréger par N, A, J, T avec 
les indices « ou ð, l'ensemble des termes de la nutation annuelle, de l'aber- 
ration, de la nutation diurne et de la parallaxe annuelle, en ascension 
droite ou en déclinaison. 

Vu la petitesse probable de la correction 4, on pourra se borner à la 
multiplier par les premiers termes seulement de la nutation annuelle. Quant 
aux termes qui multiplient les autres constantes, aucun ne peut, en général, 
être négligé. 

Ceux de la nutation annuelle, par lesquels il faudra multiplier Av, seront, 
comme on sait : 

Ns = sin x Aw + sin o cos aA 
(22) | : as 


Ng = (coso + sin o sina tgd)aY — cos & tg JA, 


et l’on pourra se borner, pour As et Ay, au premier, ou, tout au plus, au 
deux premiers termes, savoir : 


Ao = cos Q + [8.77600] cos 20, 


(22 bis) Gén i, : 
Ay = — 2cot 2o sin Q — [9.15887] sin 20. 


Les termes de laberration, auxquels il est permis de s'arrêter, peuvent 
s'écrire 
4 W f: SEO (0) wae Aa 
As = — sin ô sin (O — 4) — 2 sing f eos (e =F # sin z sin a cos ©, 


(25) 


: (9) 
Ag = — sec ô | cos (O — «) — 2 re COS «COS © | 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 21 


Dans la première de ces expressions on a fait sin «= +(1—7x), de sorte 
que les signes supérieurs conviennent aux étoiles comprises entre 0" et 12", 
les signes inférieurs aux étoiles comprises entre 42" et 24, 

Les termes de la parallaxe annuelle se déduisent simplement de ceux de 
l'aberration en changeant, dans ces derniers, © en © + Z. Il vient ainsi 


ns = — sin ô COS(O — x) + 2 sine | cos (o m z) ZE # sin : sin ð [sin O, 
(24) p 


[A] 
IL, = see 04 sin (O — a) — 2 sin cos «sin © l 


Nous avons enfin à nous occuper des termes J de la nutation diurne, qui 
Sont donnés par les seconds membres des formules (20). 

Comme ces seconds membres renferment encore une inconnue, la longi- 
tude du lieu d'observation par rapport au premier méridien, nous avons 
une dernière transformation à leur faire subir. 


15. Nous admettrons, dans ce qui suit, que cette longitude a été déter- 
minée approximativement par le second procédé indiqué à Particle 10, et 
qu'il ne s’agit plus ici que de calculer la correction AL qu'il y aura lieu 
d'apporter à cette détermination. 

Tous les termes des formules (20) sont de la forme du premier d’entre 
eux, c’est-à-dire, en laissant de côté les coefficients : 


sin£(l — sa)t 


cos (Sm — 29, — à) 


1 — 5 


Si l’on y remplace 2%, ainsi que £, par T — L -— AL (art. 13), puis 
Si TH Le par S, T — L par T,, et 4 (1 —s,) par 4 — o, ce terme 
deviendra, abstraction faite du facteur 4 : 


En sin (1 — c) (T, — Pea 


1 — c 


22 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


et se réduira, si AL est assez petit, à 


. sin(f — 5)T, j sin (4 — cu ’ 
cosS; — —AL} sin S —— + cos S, cos (1 — o)T, = 
deaig 1— 6 
sin (1 — 5)T AL A 
cos, sp, ak cos [Si — (1 — a) T1] — o cos S, cos (1 — am |. 
r Wrath À mp igr 


Le dernier terme de la parenthèse pourra très généralement être négligé, 
dans les expressions relatives au Soleil surtout. Nous le conserverons toute- 
fois dans les formules ; on jugera immédiatement, dans l'application, s'il est 
négligeable. 

En traitant de la même manière chacune des expressions des formules (20), 
on obtient, pour les termes de la nutation diurne : 


A sin (1 — so) T, 4 sin (4 co )T, 
Ja = — cosS — — e 
à z f T ls cos S, E 
C: 1 sin (1— p) T, 1 „sin (4 — oT 
— — cos R —"— — f —, cos R — 
2r 1 — p DT 1 — p 
: f cos [S, — (1—0 ) Ti] — o cos S, cos (1 — c) T;?} 
2s (1 — 5) 5 
de f Í cos [Si —({—5)T ] — 9! cos S; cos (1 — 5’) T,} 
as (1 pN 4 1. D e 1 
— AL 
- f cos [R, — (1 PE cos R; cos (1 — p) T 
NE EASY me (fi kaas Rire ` OEN dia 
ar (1 — a) t 1 prti K 1 P 1} 
—. — j Í cos [Ri—(1— e’) T]— cos R; cos (1 —p') Ti} 
| I a à 
| cos a 1 sin (1— o) T, 1 sin (1 — v’) Tı 
J = — ( N end AE $; _ tm anaana 
Fe sin © Zg A 1 — c Í ag PA, 1— 5° 
sin (4 — p) T — o! 
a ao a ee A AT Le ea PT 
b 1 — p 2r' 1 — p 
25 bis 
À sin (1 — o) T; À sin (1 — c’) T 
— tgs} —sins lee sin Si z 
saf : 1 — 56 rois. À — 5° 
1 sin (1 T = ;\T 
2 iR rent res fe inf, A en 
2r =y / mr 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 23 


COS & 
cos TS, — (1 — c) T, +a | — c cos (S, + a) cos (4 — 5)T, ! 
es | pre [S ( o) ] (Si a) ( o) 14 | 


de m 7 {cos [Si — (4— 0") Ti + a] — o' cos (S; + æ) cos (1— o') Ti} 
1 
3 FT br (Fp f cos [R— (1 — p) T, + a] — p cos (R; + «) cos (1 — DEN 
et fi m | cos [Ri —(1— p') Ti + «]— p' cos (R; + a) eos(i— e) | 
— aL 2 (1— p') 
4 
| ET {sin [S, — (1 — 5) ri] — 0 sin S, cos (1 — c)t| 
JE is {sin [Si — (1 — ai) t1] — a'sin S; cos (1— 5’) ri} 
1 i $ 
mea Er [R — (1 — p) 71] — p sin R, cos (1 — ¢) 7i} | 
dan if {sin [Ri — (1 — e LS 'sin R; cos (1 — ri | 
TETA 1 P il P 1 COS P )Ti\ | 


On a fait, pour abréger, dans ces formules (25) : 


| AE A A S E E D pe ons 
(26) ) E a Eure en NE A AT (nu Din. 9 — mr Paire 
| Ti =T—L; S=S8S, —T + L +0 =ap + 29 —T+L+u; Rio, —90,—T+L+ 0. 


On a vu que «„ et à, représentent lascension droite et la déclinaison 
Moyenne du Soleil entre l'instant où il est 0" au premier méridien et l'instant 
de l'observation; a, et d, les mouvements du Soleil, en ascension droite et 
en déclinaison, à ce même instant moyen, rapportés au mouvement diurne 
Pris pour unité. 

Pour la Lune, il suffit d’accentuer toutes les lettres qui sont relatives au 
Soleil, 

L est la longitude orientale du lieu d'observation par rapport au premier 
méridien, AL la correction à y apporter, T l'heure sidérale de lobservation ; 
SI celle-ci est faite dans le méridien, ou bien, pour une étoile zénithale, dans 
le premier vertical, tant à l'Est qu'à l'Ouest, on pourra prendre T = «x, et 
dans ces deux cas les expressions de S, ct de T, se réduisent à 


(26 bis) LAS E ES ME S, A A 20 


het L, R, a. PER 20, +L. 


24 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


16. Pour résumer enfin les formules qui permettront de caleuler les 
constantes K et + de la nutation diurne et de la parallaxe annuelle, ainsi que 
les corrections Av, Aa, AL à apporter aux constantes de la nutation annuelle 
ou de laberration et à la longitude approximative du lieu de l'observation, 
nous séparerons en deux groupes les termes précédents en J; le premier 
groupe J’ se composera des termes indépendants de AL, le second des termes 


qui ont AL pour facteur; en sorte que 


à + Tu 


qu’il s'agisse de l'ascension droite ou de la déclinaison. 
Si nous faisons, de. plus, 


O a ON a a K S 


les formules (24) deviennent 


ODEs | e5 = Af + Av: Na + aa. As + KoJi ++ ses. 


Ca = Au + Av: N, + Aa e Ag K. Jy ly I oge 


Chacune de ces formules renferme six inconnues, qui peuvent toutes, à 
l'exception peut-être de Adet Aa, être considérées comme étant certainement 
inférieures à 0//.1; elles se prêtent donc l’une et l’autre, de la manière 
la plus simple, à l'emploi de la méthode des moindres carrés. 

Les expressions de N, A, IL, J’, et J!’ sont données dans les formules (22) 
à (26). 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 25 


CHAPITRE IL. 
Formules de la nutation diurne rapportée à l'écliptique. 


17. De même que nous avons rapporté la nutation diurne à la position 
actuelle du plan de l'équateur, considérée comme fixe, de même nous allons 
la rapporter à celle de l'écliptique. 

Nous négligerons, pendant la durée du jour, la précession des équinoxes, 
et, à plus forte raison, la variation d’obliquité de l’écliptique. De plus, 
Nous pourrons, à cause de la faiblesse de la nutation diurne, considérer les 
orbites du Soleil et de la Lune comme circulaires, celle du premier de ces 
astres comme coïncidant avec l'écliptique, celle du second comme faisant 
avec ce plan un angle constant. 

Pour le Soleil nous aurons donc : 


sin ð = sinwsinO; cosdcosa = cos ©; cosd sin « = cos w'sin ©. 
Si nous faisons 


z m2 
Smi . 3 

GO a . ——— sino = 2h sin w = h, 
2n 


les formules (3) deviendront par là : 


p=h 


[0] [0] 
0S o SIN o 0 in lOO sin? sin (2 à | 
COS © SINE + COS SiIn(Z + SIN sin 
(31) ? 55 (20 — +) 3 (20 + +) 


| 

| 

|| 

2® \ ` 2° ç ) | 

q = hi} cos œ cosp — cos ue — +?) +sin cos (20 + + | | 
2 | | 

| 


18. Nous poserons, comme à l’article 5, mais en laissant immédiatement | 
© côté les termes qui ne renferment pas 6: 


l = v + H, sin (20 — +) + H: sin (20 + ọ), | 


et Rae | 
nous substituerons cette expression dans l'équation || 


dm a l 
a pe + p), 


Tome XLV. 4 


26 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


il viendra : 


dm qa i oN ON, 
PA D’ + h COS © sin o + (r, + h eos”) sin(20 — ») + (n. + h; sin) sin (20 ++) 
0 i 2 
Ww A (0) 
| j H, + M cos’ H, + usin — 
a t 2 2 
m = -n | D — — cos w COS p — — eos (20 — p) — —— ceos (20 + »)\. 
B n i 2m —n l ?) 2m, + n D Te 


Portant cette valeur et celle de q dans l'équation 


di b 
ol S: miga ha 1 
on aura : 


D + (2m, — n) cos (20 — +) + H: (2m, + n) cos(2O + +) — 


f (A) [©] 
H, + h; cos? — H, + h, sin? — 
ab : h 3 Lo 2 9 ) 
— — n“ i p — — c0sw COS9 — — COS (20 — o) — — cos +g 
AB n $ 2m, — n ? 2m + n (RO Eep 


b o co 
— ah CO & COS p — COS? F cos (2O — p) + ue cos(20 +. p) ¢. 


L'identification des deux membres donne, en premier lieu : 


h h 
D” + Pn Lo — — cos à cos o) tn nh, cos o cos ¢ = 0, 
n 1 
d'où l’on tire, en intégrant : 
a 
lb B ’ ; 
Dm — N, COS » w : i 
a y M COS © cos p + sin w, 
Fin 
AB 
a 
E aiet 
b B : 
v = — ~ — h coso sine + m cosi; 
A ab 
i AB 
en second lieu : 
i i H+ h, cos? = 
) o ab 2 
H, 2m, — n) = —nh, cos = + — n°? ”, 
e Cm PRO E mer 
H, + h, sin? à 
b de ab Z 
H, (2m, + n)= — ~ nh, sin? = + 


N aa 
A 2. ‘AB Imena - 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 27 


ou bien, si l'on fait = = m, : 
ab b v a 
H | (1 — 2m) — — | = — — h, cos? — (i E ne = z), 
AB A 2 B 
Hi [4 + 2m) ab 2 ; A > à 
à + 2m) — — | =— - h sin? = (1 + 2m, — = |; 
H ru An o F 
ce qui donnera, comme à l’article 5, en remplaçant £ par Le 
,® no 
cosg i sin 
D) 
H, = — -h — © ksh m i; 
i OR ; a + A ? o 
1— 2m, + — 1 + 2M +- 
B B 
å [A] z Q] š 9 © ý @) 
H, + h cos? z cost H, + hisin? — sina — 
= ; =h 
1 — 2m, a À + 2m, a 
sie. 1 Bon FETE 


On aura ainsi, en laissant de côté les termes en (p, qui sont à longue 
Période : 


| a ,® re 
1 — — cos“ — sin“ — 
1 A 2 R 2 EN 
a e cosas p + ———— sin (20 — ç)+ —— sin (20 + +) 
h, b ab u ; a 
1— — 1— Dino + — À + 2m + Š 
l b O O 
S DS sin?— 
1B A Dir 2 
=o m= cos COS g — — ceos(20—p) + -—— cos (20 + p). 
ha ab a F a 
1— — 1— 2m, + — 1+ 2m, + — 
AB B B 


19. Ces expressions, substituées dans les équations (11), donnent d’abord 


@ 
1 > cos? — sin? — 
A do l cos œ sin 2» 2 n2(©—+) » a 
aR — = sin 2 (O—ọ)+ sin 2 (O+; 
h e di 9 ab / a LÉ HA (O+p), 
el 1 — — 2 1—2m + — 2| 1+2m,+ =] 
(55) AB B 
\ 
2 © HT) 
cos? — sin? — 
E EN dy 1 coswcos29 2 ; ; 2 HO) 
| T = SIN Go— = + COS O —- D) — c C0 Oe). 
| h, c dt 2 ab ?) a j 
| — — 211 -2m + — 2| 1+2mM, +- — 
| AB 


28 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Intégrons comme au n° 27, en posant 


oi 1. Res, 


voir (4), (44) et (30), il viendra : 


ji @ 
| cos? — 
9 


AG COS © Sin 2», . 2 j sin (1 — M) t 
— = — — sini — sin 2 (On — Pn) — 
K, ab a 1 — m, 
— — 1 — 2m, + — 
B 
Site ï 
2 i sin (1 + m,)t 
e O lomremerege 
a 1 + m 
4 + 2m + — 
(55) 
2 (>) 
cos’ — ; 
PEAY COS © COS Rpp . 9 sin (1 — mə) t 
— SN @ a LL + aaa D O 9) -—— 
1 ab: 9 a 1 — m 
— — — 2m, + — 
AB « 
5 D 
sin? = in (4 jr 
: sin (1 + m, 
| — —— — ont pn) — 2 ; 
a 1+ m 
1 + 2m, += 
B 
ou, si nous faisons, pour simplifier, 
9 a . 9 œ 
cos? — sin*— 
2 2 
56) ————© 0,  ——————— — 5; ;: 
a a 
1 — Im + — 1 + Im, +- 
B B 
| AG coswsin2?,, , ; sin(14—m,)t i sin(4 + ma)t 
| = — "sin {0 SINUO npm) ——"— Sin (Onton) meee 
K, ab 1—m À + m 
ai AB 
5 ; : 
(57) .. Aÿ COSCOS2», , : o sin(1—m,)t NO e mo)l 
— SIN e — — —————— 5sIn {+ CcoO mM Op) #5) COSO o m) aa 
K, ab ; (On) 1 — ma Sn A JT 
AB 


20. Quant à la Lune, nous regarderons comme constante l’inclinaison de 
son orbite sur l'écliptique, et nous nous arrêterons à la première puissance 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 29 


de cette inclinaison. S'il était nécessaire, dans le calcul de la nutation diurne, 
de tenir compte de la seconde puissance pour des étoiles très voisines du 
pôle, on pourrait recourir aux formules complètes que nous donnerons dans 
la théorie de la nutation annuelle; mais, en pratique, c’est toujours de 
l'expression de la nutation diurne en fonction des ascensions droites et 
déclinaisons du Soleil et de la Lune que l’on fera usage. 

Or, on a, en appelant £ la latitude de la Lune, C sa longitude, @ celle du 
nœud, + la tangente de l’inclinaison de l'orbite sur l'écliptique : 


sin d = coso sinf + sin cos B sin Ç 
cos d sina = — sin w sin $ + cos w cos B sin C 


cos ô cosg = cos p cos C; tgp = isin(C— Q). 


Nous prendrons cette dernière expression comme étant celle de sin £, et 
nous ferons cos 8 — À. 

Cela étant, on tirera des formules (3) en accentuant le coefficient À pour 
le rapporter à la Lune : 


E = cos p cos Ç Ẹ coso sin (C — Q) + sin w sin C| 
fé 


+ sin |4 sin 2w sin? Ç + à cos 2 sin Ç sin (Ç — 62]. 


Et, si l’on développe ces expressions, on trouvera aisément 


(58) > 2 = K,coss — Kasino + Kz cos(2C— p) +K ,cos(2C +p) + Kisin(2C—?)+Kisin(2C+?); 
OS w 


w N 
en 


DRE 
d'où l'on déduira, en changeant + en ® + 


(58 bis) el 


ja =—K,sinp—Kacosp+K;sin(2C—p)— Kusin (2C ++) —Kicos(2C—;)+Kicos(2C++), 
COS% 


formules dans lesquelles 


K, = — 2i sinQ; K, = — 2 sino(1 + 2i cos Q cot 2); 
z y cos 2w se cos 2w 
( 39) K; = — ising |4 + ; K——isin( |1 — ; 
COS & COS 


cos 2o 


cos =) 


K, = sino (seco + 4) + icos [1 + 


|; K= sino(sec w — 1) + à cos Q (1 — 


COS w COS w 


30 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


21. La forme des expressions de p et de q nous conduit naturellement 
à poser : 


(40) l=% + H, sin(2C — +) + I sin(2C + p) + H; cos (2C — +) + H; cos (2C + p); 
d’où nous tirerons, en écrivant h, au lieu de 4! cos o : 


dm a a 
an PTS Be + p) == |% + h (K, cosp — Ko sine) + (H; + 4K) sin (2C — ») 
M l 42 3 i5 


+ (He + AK) sin (2C + p) + (H; + hK) cos (2C — p) + (H; + hK;) cos (2C + »)}; 


et, en intégrant : 


4 : H, + AK; | 
m ==>; nd + h (K, sing + K; cosp) + at z — cos (2C — p) 
; — 2mo 
(42) 
H, s hK; H; + hK; H, Sai hK, 
Tr 08 (2C + p) — ——— sin(2C — - sin(2C + p)t. 
1 + 2m, (2C 9) i — 2m, sec Fan i + 2m, n ?) 
insi dl , i 
Portons cette valeur, ainsi que celle de q et de q» dans l'équation : 

dl b ) 
— = — -n(n 
dt Fa ie 


et identifions les deux membres, il viendra d’abord : 
p” mor de ph aux ) 
D = — Pro + — [1 — = nh, - K, cos»), 
L à (K; sing + K cos» 


d’où lon tire, en laissant de côté les termes en 1 : 


a 
je 
b B h, : 
D=—— ————1(K, sins + K cosy) 
A i ab 
AB 
a 
Lac 
b B i 
Gaa à SL h (Ki cosp — K, sin»), 


ET SÉCULAIRE DE LAXE DU MONDE. 51 


Ensuite : 


E i ab] 
m |0 — 2m — | = - ik, (i o nl 
E ab] a 
H, | (4 + 2m)? — — =É hk, l + 2m, — 
à K + 2na) 8 | à (1+ Im; — 5) 
7 Ha ab | a 
H; Lt — 2m) — KE Shk Im; — 5) 
p RSN ab } a 
H; à + 2m) — AB = — Lx, + - 2m, — B à 
On déduit de là, comme plus haut (art. 5) : 
l K; H, + AK K; 
EEE > 2 es le 
A a I! — 2m, 5 a 
1— 2m, + — 1 — 2m, + — 
B B 
l K H, + hK; K; 
mah 6 2 + ho a EE E eutee à 
A SSA 1 + 2m, a 
1+ 2m, + — 1 + 2m + — 
B I 
b K EH; + hK; K; 
l; = — -h 5 dr EE se 
A a 1 — 2m, BRER 
À — 2m, + — i — 2m, + — 
B B 
b K, H, + hK, K 
H, = — - h; ; = À me fe ee, 
; a 1 + 2m, ours 
1 + 2m, + — l + 2M, + — 
B B 


Les expressions de } et de m deviennent ainsi : 


Tr 
1A I K; HENA K T 
=>- l= (Kicosg—Kasing) + ———— sin(2C—p)+ Leey sin(2C+ +) 
| ha b ab R dur 
| 1 — — i —2m, + — 1+ 2m, + — 
| AB B B 
j K; K 
+ COS(2C—;) + — cos (2C ++). 
x a 
| 1—2m,+ — i+ 2m, 
(45) + E + 2m, + 
| b 
À i A UE i K, z K, a 
y- m= sing + K,cos: —— ——— C0 2 — 0) — — —— cos(2C + > 
Us TT (Kising + Kocose)+ Ta cos(2C—ọ) cos( i 
1— — 1—2m,+ — l -+ 2m, + 
AB B 
K; £; re 
— ———— sin(20—+)+ ca sin(2C + +). 


a 
Mat 1+2mMm + = 
l Mg + B 2+ 


32 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


22. Leur substitution dans les formules (11) donne, si l’on ne conserve 
que les termes de la nutation diurne : 


1 Ad K;sino+K,cos: K, K 

an D si ? SE de OE oùs hi nt cos(2C +- +) 

h c di ab Siia A 

— — 1—2m, + — 1+-2m, + — 

AB B B 

K; 

— -— sin(20—+)+ - sin(2C +») 

U a 

1—2m,+ 5 + 2m3+ 5 


1 Ksin29- Kicos2z Ksin2(C—?) + K; 30052(C — al Kesin2(C=+ p) —K;cos2(C P). 


z TY i ab a(i ae à ; af ; na 
— — i L—2m, + — rA aE -= 
AB A AD 
1A d K,sins+K,cos s K; K 
a P —c0s; | es EE # E cos(2C 4 9) 
ti C edt i ab Lao u aion u 
— — 1 —2m, + — + 2Mo+ — 
AB ER SB 
K; K 
(2) S sin(2Ç 4 +) 
a 
1—2m,+ — A+2m+ z 
B B 


1 Kocos2p+K,sin2p  K,cos2(C—p)-— K; aae Kcos2(C +e)—K,;sin2(C ++) 
P A = ee LA A 


12 ab et 
Ft —Qni+ à 2[1+9m;+ 5) 


23. Intégrant entre les limites O et £, comme à l’article 7, nous trouve- 
rons, en écrivant simplement Z au lieu de nt, ce qui revient à supposer le 
temps converti en arc : 


2n À K;sin2,—K;cos2+, . ci Kysin (Cnr — pn) + Kscos2(C,,—0,) sin (1—ma)t 
+ Ag sint EEI 
ħa c ab a 1—m 
< ANSE 1—9m;+ — ; 
AB B 
Kisin (Cn + pn) — Ki cos 2 (Cp pm) sin (1+ m,)t 
+ ne 
Q 1+ M 
1+2mMm, -+ — ; 
IMAS K; cos 2,+ K; sin 29, K; cos ZC p — pm) — K;si sin2 2 HCrn— Pm) sin(1—m2)t 
— — -sin osy = + T T SE 
se ab À — m 


a 
— — 1—2m,;,+ — 
B 


Ke cos (Cn + pn)— Kisin ACn + pn) sin (4 ALL 


+ m 


a 
1+2m, + — 
B 


ET SÉCULAIRE DE LAXE DU MONDE. 33 


24. Il s'agit enfin de remplacer les coefficients k par leurs valeurs (38). 
Dans cette opération, nous rangerons en dernière ligne tous les termes 
Qui ont ¿ pour facteur, et, en posant : 


. 3 @ 
cos? sin? — 
2 2 
— — =, — EES 
A be HT) 
1 — 2m, + B 1 + 2m + 5 
(44) 
cos 2o cos 2w 
-+ me = 
cos œ f 4 COS w 3 
— cot w —— =la — Ot o c = S 
AR E, 2 FAQ 
1 — 2m, + — 1 + 2m, +— 
B B 
Nous trouverons : 
À Ac Coswsin2, , sin (1—mn,\é sin (1 + mą)t 
EE ELLES D . sint — CG SIN AC,,— Pm) orne sisin2{(C,,+9,) HET ma E 
fK ab 1—m, 1m 
AB 
| COswsin(Dcos 2p — COS 2wc0sQsin2»,, i bi 
à —@sin(2C,—2,—Q)+ssin(2C,, +29, + OV. 
+ à ab\ . 
1— — }sin o 
(45) 

1 AY COSCOS2», , ; sin(4—m,)t sin({ +- m,)t 
—= Sin — =— bn sint+acos2C,,—»,) pan — — 810082, + pn) —— 
É K, ab 1—-m; i +m, 

AB 
cososin Qsin2g + cos2ocosQcos2on  , ; 
a. y +02005(2C,—29,— Ç2)—s:c08(2C +29, — Q) . 
+i (1 “A $ 
— — | sino 
AB 


25. Réunissant les actions du Soleil et de la Lune (37) et (45), 7. 
obtiendra enfin : 


Ag coso sin2 i indem Ea sin(4 —m;)t 
K =—(1 E ia Pe sint— SX Om Pm) Aer Pt —fcsina(C, — pm) PRE AO a 
1 ab 1—m, rs 
: 5 
? sin({-mMalt .,. sin(l +) 
| +sisin2{©,,+#,) AEEA Ji +/fsisin2(C,, gn) ue 


1 -Mg 


Tome XLV. 5 


1+ m 


34 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


| cos sin Q cos 2», — cos 2w cos Ça sin 2; sin (4 —me)t 
+ fi w Pm Pm 24 csin (2C,,— de, — (2) ( su 
ab ) ; 1—m 
A— — | sin © 
AB 
sin(4 + m;)t 
+s;sin(2C,, +2, — 83) ra) 
4 +M 
ct RAD COS « COS 2% sin (1 — mt 
= sin o = A f) = int + ecos 2 =g = 
K, ( f) l ab 4 (Onm Pm) 14 Mo 
(46) AB 
T sin(1—m,)t sin(1+m)i sin(4 -m)t 
+ feicos2(Cn— pm) a reed — 510080 O,, Hgm) majt —fsicos2(C,, +v,) 2 
1—m, 1 +m 1+ M 
— coso sin Q sin 2, + cos 2wcos K cos 2gm ; sin(4—m,)t 
+fi )— 2 a os OC 27, — 6) ‘ a 
(1 ab ) } 1— m, 
| sin 
R 


sin(4 + m,)t 
| —scos(2C EE pren : 
| 2 


26. Il peut être intéressant, au point de vue des observations destinées 
à vérifier l'existence et à déterminer le coefficient de la nutation diurne, 
de rechercher quelles sont les positions des deux astres pour lesquelles 
celle-ci est la plus grande ou la plus petite, en ascension droite ou en 
déclinaison. 

Nous n’aurons pour cela qu’à substituer les expressions précédentes dans 
les équations (18), ce qui donnera : 


Ag JET ; sin (À — m:)t 

— = — f cos w cos (2pm + a) sin t — c; cos (2 Onm —- 2pm— à) nes 2 

K, ab 1 — m 
AB 


; sin (4 — m,)t 
— fe, cos(2Cn — 2pm— à) aii a} 


1 — m, 
í sin(1 + Maj sin (1 + m)t 
(47) + 81008 (20 + 2pm — a) ARR fsi cos (2Cn + 2gm— à) si 
1+ m . 1 + m 
.(coswsinQsin(2o,, +x)-+ cos 2wcosÇ2c0s(2o,, +a sin(1—m)t 
7 i) Ta re M A ETE 
ab\ . fn 
| £ = =] sin o i 
\ AB 


+ 82 008 (2C,, + 2pm — Q — x) res 
j 2 


sin (4 + ma) ! 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 55 


sin (À — mə)t 


Aœ A fi i i : 
T = tg ò\ —— cos osin (29, + æ) sin t + 6 sin (Om — 2pm — a) 
| i ab 1 — m, 
| | AB sin (1 — m;)t 
| + fei sin (2C, — 25, — x) RE 
1 — m 
sin (1 + m)t ak à sin (1 + mt 
| — s sin (2O, + 2pm — à) anil iaaah — fs sin (2C, + Dgn — a) A s 
u8 1 +m '” 1+ 
) fi | cos w sin 62 cos (29, + æ) — cos 2w cos G sin (2p, + «) 
Ca md 16 | yapm F 
; ab\ . 
1 — — | sino 
AB 
; ; sin (1— m;)t BER sin (1 +m;)t 
sh Co sin (2C, Et 29m was Q dE x) ( a == S SIN (20, + Ion —62— 4) r ») 
| i — m, 1 + m 
| iý 
+ COS à — 
Kı 


. . A E, 
Dans ce dernier terme, il faudra remplacer at par sa valeur précédente. 
1 


27. La périodicité que nous avons constatée précédemment dans la 
Nutation diurne, article 13, se retrouve dans ces dernières formules. On en 
déduirait également avec facilité les conséquences trouvées à l’article 10, 
quant à l'influence de l'ascension droite sur les variations diurnes des coor- 
données des astres; nous ne reviendrons donc pas sur ces points. 

Afin de pouvoir discuter plus aisément les formules (47) et (48), au point 
de vue de l'influence exercée par la position du Soleil et de la Lune sur la 
Mutation diurne, il sera nécessaire d'y introduire quelques simplifications, 
qui en altéreront un peu, il est vrai, l'exactitude, mais offriront le grand 
àVantage de donner à ces formules une expression excessivement simple, et 
três propre, par cela même, à une vérification expérimentale. 

Dans ce but, nous négligerons A m, et m, vis-à-vis de l'unité; nous ne 
considérerons que l'effet maximum, répondant à { = 3; et comme, en prenant 
l'origine du temps à 0" sidérale du premier méridien, nous avons 2, = 4, 
x viendra, pour le maximum, en faisant abstraction, pour le moment, de 
linclinaison de l'orbite lunaire à l'écliptique : 


E a oean i p aa a 
ET (1 + f) coso sin x — (c, + sı) sin (2O — x) — f(c; + 81) sin (2C — x). 


| 


| 
i 
| 


| 
| 
| 


| 
| 


56 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Aa 
= == tg ô f (1 + f) cos o cos a — (6; + 8,) cos (2O — a) :— f (c; +- s1) cos (2C — a) } 
(50) à goka 


f (ci + sı) sin 20 + f(c; + si) sin 2C }. 


Sin w 


On voit, par ces formules, que la plus grande nutation diurne se pré- 
sentera : À 
1° En déclinaison : lorsque les longitudes du Soleil et de la Lune seront 
de 45° (ou 225°) ou bien de 135° (ou 245°) supérieures à l'ascension droite 
de l'étoile, et surtout, dans le premier cas, pour les étoiles dont l'ascension 
droite approche de 6", dans le second, pour celles qui sont situées vers 18". 
2° En ascension droite, au contraire : 

a) Si la déclinaison de l'étoile est assez forte, lorsque les longitudes du 
Soleil et de la Lune seront égales à l'ascension droite de l'étoile (+- 0° ou 
+ 180°), ou lorsqu'elles en différeront de 90°, et surtout, dans le premier 
cas, pour les étoiles dont l'ascension droite approche de 12", dans le second, 
pour celles qui sont situées vers 0"; 

b) Si la déclinaison de l'étoile est très faible, lorsque les longitudes du 
Soleil et de la Lune seront de 45°, et surtout encore pour les étoiles situées 
vers 0" ou vers 12"; 

c) Si la déclinaison de l'étoile est moyenne, la discussion de la formule 
ne pourra pas conduire à un résultat assez général et assez simple. Le 
lecteur trouvera aisément ce résultat pour une étoile donnée. 


28. L'influence du nœud de la Lune, que nous avons négligée dans cette 
discussion, ne modifiera qu'assez faiblement les conclusions qui précèdent. 

Dans la nulation diurne en déclinaison, cette influence sera exprimée, 
pour {—+, par 


cos © sin Ç} cos « — cos 2o cos Q sin « 


— (di + 8) Sin (2C — (0 — 0), 


SIno 


(4) . fil 


dont le dernier terme a le même signe que le terme correspondant, indépen- 
dant de č, en sin (2C — a). 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 37 


Comme il est égal à (1 + 3 cos Q) sin (2C — «) — i sin Q cos (2C— a), 
il s'ensuit qu'aux époques où la Lune exercera sa plus grande influence 
en déclinaison, celle-ci sera la plus forte lorsque la longitude du nœud sera 
nulle, 


L'expression complète de A9 sera alors, pour ¿ = Z (49) et (51): 
(59) So — Í (1 + f) cos œ + if cos 2w } sin æ — (c, + sı) sin (20 — a) 
a x 


— fai + si + i (c3 + 55) | sin (2C — a), 


EXpression dont tous les termes s'ajoutent pour les époques qui ne s’éloignent 
J S 


pas fort du maximum, auquel correspondent, nous venons de le voir, 
OM, a Ca ae 


5 


En ascension droite, l'influence du nœud est exprimée, pour t =>}, par : 


fifi JE sin æ + cos 2w cos Q cos æ 
iltso|? 


$ + (c + 82) cos (2C — Q — | 
(55) Sin o i 

COS & 
ee 


[cot w sin Ç2 — (cz + s) sin (2C — 62)] , 


Sin w 


et l’on voit qu'à l’époque où la Lune exerce sa plus grande action en 
ascension droite, c’est encore quand la longitude du nœud sera nulle que 
cette influence sera le plus sensible. 

L'expression complète de A« sera alors, pour t= Z, (80) et (53) : 


Aœ 
ETA 


La + f)coso+ if E ] cosa+(c,+8,)c08(20—x)+-f [arts eo Cf 
(©) 


(54) 
COS & 


+—— | (a s)sin 20 + fe + si + i (c, + &) | sin 2C}. 
SIn w $ 


29. La discussion précédente suffit pour mettre en lumière deux points 
res importants relativement à la détermination de la position absolue des 


38 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ETC. 


étoiles, et à la vérification de l'existence de la nutation diurne : c’est que 
celle-ci est, en déclinaison, la plus grande pour sin (20 —a4)= sin (2C—a)=1, 
nulle pour « = 0, © = C = 0 ou x; en ascension droite, au contraire, la plus 
grande pour cos (20 — «) = cos (2C — «) — 1, au moins pour les étoiles 
d'assez forte déclinaison ; nulle pour « = 5, et O= C= 0 ou r. 


LIVRE IT. 


DE LA PRÉCESSION ET DE LA NUTATION ANNUELLES. 


CHAPITRE I. 
Procédé d'intégration. 


30. Le procédé d'intégration qui vient de nous donner l'expression de 
la nutation diurne peut être appliqué, sans modification essentielle, au calcul 
de la précession et de la nutation annuelles, si l’on admet, comme nous le 
ferons, que la vitesse angulaire de la Terre, autour de son axe, est con- 
Stante. Toutefois, à raison du grand nombre de termes dont nous aurons 
à tenir compte, il conviendra d'introduire, dans ce procédé, une simplification 
assez importante, 

Nous commencerons par le développer d’une manière générale. 

Après que les coordonnées de l'astre attirant auront été rapportées à un 
Système d’axes absolument fixes, nous verrons que la quantité p (art. 2) 
Se mettra sous la forme : 

p = Zu sin (vt + ?), 


et v désignant des constantes connues dans le cas, considéré ici, où l’on 
fait abstraction des variations séculaires ; et que la quantité q se déduira de 
la précédente par le simple changement de ọ en 9 +3. Cette circonstance, 
au surplus, peut être prévue; car laxe des y étant à 90° de distance de 
axe des æ, dans le sens direct, et celui-ci faisant, dans le mème sens, 
l'angle 9 avec l'intersection des plans xy et XY, l'angle que l'axe des y fait 
avec cette ligne sera 9+ 5. Et comme q se tire de p par le changement 
de x en Y, on len tirera de même en changeant p en ọ + 3: 


40 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Après la substitution des expressions de p et q dans les équations 
MH... 4 ==—--nm+g) ——= 


nous aurons à intégrer celles-ci. 

Or, Pis Pas ve) Qas es -+ désignant chacun des termes dont les sommes 
composent les expressions de p et q; l, la, …, Mi, Ma, … les valeurs de 
l, m qui leur correspondent séparément, il est évident que, si l’on satisfait 
à chacune des équations 


dl b dm a 
a a du A qi), — =- n(l + pı), 


on trouvera, en en faisant la somme, 


dl b Al a. 
2 rame n[2(m,) + q) 2 8 n[ 3h) +p]; 


et, en comparant aux équations CD 
l= 5L, m= 5m. 
31. Envisageons donc séparément chacun des termes 
G Di = no E 1 e Ea os (VIT E g) 


et supprimons les indices 4. 
Nous commencerons par le cas particulier où v = 0, et où le terme cor- 
respondant de p et de q se réduit à 


(OO) ea e a E A e p In ECOS 


Nous poserons, dans ce cas, comme à Particle 5 : 


(BI) e ee .,.... o bm a sin (h t file O Ho sin p; 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 4i 


, : ; ` EER 
n, étant comme ci-dessus égal à :n, et © à E et nous aurons : 


an ; 
_ == n n f a sin (nt + 8) + $ + (Ho + t) sin ph 
adt 


AE Q , 
d'où, en intégrant : 


i a uo + H 
OSR RE E os Lt 6) e Oe e E COSS . 
n n 


. “4 ll ea , 
Portant cette expression, ainsi que celle de —, dans la première équa- 
ton (1), et identifiant les deux membres, on trouve d’abord : 


l l a 
D+ no + n cos o | Ho (1 — = + Li (= 4 Ur 
AB A B 


PA pus 
d ou, en intégrant, 


ab b 1 a | 
Ho | 1— — + eu (1—7 | 
1 AB/ A B | 


ð = COS ıp + — cos | 
ao ab A 
AB | 
et | 
l ab b a | 
Hs + -w [1— = 

à AB A B | 
D = — ın sin pp SIN g | 

ab 

AB 

Les expressions de } et de m deviennent par là 

a | 
; - b B | 
l = a sin (mt + Bi) — in sin 1p — — uo sin ọ | 
RE a | 
C AB | 
| b | 
1! | 
a a À % | 
m = — ~ n4 — cos (nt + B,)— cos 1» + — COS p)? | 
nı ab n | 
AB | 
| 


Towe XLV., 6 


42 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


ou, si nous laissons de côté les termes relatifs aux variations séculaires : 


a b 
p ao “4 
h ; a 
C o aa Ta Tee None sn ag h 
AB AB 


Au moyen des formules (11), on obtient alors, en appelant 6 l’inclinaison 
du plan de l'équateur xy sur le plan fixe XY, et en faisant abstraction de 
la nutation diurne : 


1 É à ab 
dé dir 3AB 4 AB 
ei dt k dt ab z 
7 AB 


La première équation donne 


8 = constante = bo; 
et la seconde 


$ 


Di a ue ent 
pue 


en faisant 


A {a b ab 
(GANT RER SERA =; (+) = — 
ss Fe ATE AT 


et en appelant Ay la variation de langle y depuis l'instant initial jusqu'à 
l'instant 4. 


32. Dans le cas général, dont nous allons nous occuper maintenant, 
nous ne reviendrons plus sur les termes à, sin (nt + B et D. 
La forme des expressions (55) de p et q, que nous écrirons 


(64) + . … . , a p—usm(u Hi), q = E u cos (v£ 1)y, 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 45 
en faisant v = nv,, nous conduira donc à poser simplement : 


[=H sin (v +1}; 


d'où : 
dm a : 
nn n(H + w) sin (v = 1), 
el, en intégrant, 
a H+u 
m = — E + es COS (Vo £ 1)p. 


Substituant dans la première des équations (1), on trouve, en laissant 
de côté le facteur cos (u+l)o: 


ab H+u b 


Pamm Ea RS La | 
- Ab-Wek li A | 
d’où : | 
a | 
(42 
CELERE =] +Q | 
et | 
40 | 
a-H+u B | 
— u , | 
De Vase a | 
vien 1#5 +Q | 


| 
Q représentant, suivant le cas, l’un ou l’autre des produits | 


C ca ca 1 


i Nous trouverons ainsi, pour les valeurs de l, m, correspondantes à chacune | 
eS expressions (55) ou (64) de p et q : | 


G b u 1 ; 
À’ AGN “ ——sin(ut#+e); m=— ($ +0) 2 cos(vt ++). 


{ 


af “(pe 


44 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


33. Au moyen des formules (11) on obtient alors, en faisant abstraction 
de la nutation diurne, et remplaçant Q par sa valeur (65) : 


b ic a | 
À IA 1+- 
: 1+u—- 
(67) do ” ET uAEw)—s . i 
se ES — sin vt = u ————— — sin vl. 
g Æw safai a (1 E v) — o t 
T] Fi a 
À Ve B/ 
th 


Quant à la valeur de sin 9, on la trouvera en changeant simplement 
dans l'expression précédente sin v{ en cos ví. 
. . y * , . 
34. Si Ton intègre l'équation (67), on trouve : 


u (l Æ Ve) — © 
PQ re e LULU 


(68) . . . . . . . { et de méme : 


| sin GAY = — —— sin vt 
| y v (1 Æ vy — 5 i 


en admettant que les variations de 9 sont assez faibles pour que 9 puisse 
être considéré comme une constante dans sin +, fait que nous trouverons 
vérifié, en effet, dans l'expression numérique de ces variations. 

Nous verrons également, par ces expressions numériques, que la diffé- 
rence entre © et >, pour la Terre entière, est une quantité excessivement 
faible; et, dans la plupart des termes de A9 et de Ay, nous pourrons, en 
conséquence, considérer ces quantités comme égales ; alors 5 =} — p, et les 
formules (68) deviennent : 


(69) 


ET SÉCULAIRE DE L’AXE DU MONDE. 45 


CHAPITRE II. 
Établissement des formules auxiliaires. 


39. Afin de ne pas entraver plus tard la marche des développements, 
nous indiquerons maintenant quelles sont les formules auxiliaires dont il 
Sera fait usage. 

Toutes ces formules, au surplus, sont données dans la plupart des ouvrages 
qui traitent la question du mouvement de rotation de la Terre. 

Nous les rechercherons néanmoins, afin que le lecteur soit à même de 
Suivre notre théorie sans recourir à aucune source étrangère. 

L'expression de p est, comme nous l'avons vu (art. 2) : 

MUR 


PER ATALE D? 


„Mzz By mèaz Hi 
— 53 — — |-] ou — 5 —— ļ|-l> 
a D? \D n D? \D 


aeoe s ; 
Sil s’agit du Soleil , et 
aM (E: T mi £z Fe) 
TN pp EP pe 


sil Sagit de la Lune; M, D, a et M', D’, a' désignant respectivement, dans 

Un et l’autre cas : la masse de l'astre attirant, sa distance à la Terre et le 
demi-grand axe de son orbite, f le rapport des actions de la Lune et du 
Soleil, m, le moyen mouvement de celui-ci; ou enfin : 


Nous l’écrirons : 


y xz /a\3 2 
(70) en, pre) PRE De 
D? 


D n 


ex ; : i ; 
pression relative au Soleil, et dans laquelle nous n’aurons qu’à accentuer 
es 114 ` r , , ` y 
Aantités %, a, D pour les rapporter à la Lune, L' étant égal à fh. 


46 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


36. Nous ne nous occuperons, dans le développement des calculs, que 
de ce dernier astre, duquel il sera facile de passer au premier, en rendant 
simplement nulle linclinaison de son orbite sur l'écliptique; et nous sup- 
primerons les accents dans ce développement, en prévenant le lecteur qu'il 
veuille bien les supposer implicitement compris dans k, a, D, et dans les 
différentes coordonnées de la Lune. 

Les coordonnées x, y, z étant relatives aux axes principaux de la Terre, 
il faudra commencer par les rapporter à des axes absolument fixes X, Y, Z. 

On fera passer laxe des X par l'équinoxe d’une époque déterminée, et 
l’on prendra pour plan des XY l’écliptique de cette même époque, laxe Z 
étant dirigé au nord de ce plan. 

Désignons par 9 l'angle de l'équateur xy avec l'écliptique fixe XY; par 4 
l'angle que fait l'intersection de ces deux plans avec l'axe des X, compté 
dans le sens direct; et par ọ l'angle que l'axe principal æ fait avec cette 
intersection, compté dans le même sens, c’est-à-dire dans le sens du mouve- 
ment de rotation de la Terre. 

Les formules connues de la transformation des coordonnées donnent les 
expressions suivantes (*) : 


mi) x = cos 0 sin ọ (Y cos y — X sin y) + cos ọ (X cos y + Y sin y) — Z sin 9 sin o. 
z = sin 0 (Y cos y — X sin y) + Z cos 9, 

Les coordonnées X, Y, Z s'exprimeront simplement en coordonnées sphé- 
riques, rapportées à l'écliptique et à léquinoxe fixes, au moyen des formules 
connues : 

z 


: Y + > z 
= — sin ĝ; He 8 sin À; pamos B cos À 


D 


dans lesquelles £ et ? désignent la latitude et la longitude de l'astre, rappor- 
tées à ce plan et à ce point. 


() Ces formules diffèrent de celles de Laplace et de Poisson, par le signe de langle v» 
que nous avons compté comme langle p dans le sens direct, tandis que ces géomètres 
Pont compté en sens contraire. 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 47 


37. Ces coordonnées doivent être exprimées ensuite en fonction de la 
longitude vraie de Pastre. 

La latitude 2 s'exprimera d’abord en fonction de la longitude à de lastre, 
de celle & de son nœud sur l'écliptique fixe, et de l’inclinaison ¿ de son orbite 
sur ce plan, par la formule : 


MD à du sn ado tue mn A 0) 


De même on aurait, en désignant par de petites lettres les mêmes quan- 
ütés rapportées à l’écliptique et à l'équinoxe vrais : 


(73 bis) Mur ape lee IDD 78-60) 


Soient maintenant I et z les pôles de l’écliptique fixe et de l'écliptique 
vraie, e leur inclinaison mutuelle, À la longitude du 
nœud de lécliptique vraie sur l'écliptique fixe, 8, la 
partie de 5 comprise entre ces deux plans. Vu lex- 
trême petitesse de e nous pourrons poser : 


Fig. 2. 


p= p Bos 
et même : 


On tirera de là, en négligeant la quatrième puis- 
sance de #, le carré de e et le produit e? : 


tg P = isin (à — Q) + e sin (à — A) 
ir #3 
(74) | sin Q =iļi ae sin (à — (à) + sin 5 (à — Q) + e sin (A — A) 


ere 1 ; 
cos B — 1 LEa iosal 0) + Sie] cos (21 — 63 — À) - : cos (I — A)}. 


38. Pour exprimer à en fonction de 2}, nous considérerons dans la figure 
CI-joi ; x A : . 
l-Jointe LP comme égal à Lp', vu l'extrême petitesse de e. Par suite : 


Lp — LP = pp' = 188 cot p’ 


48 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


en prenant pp! égal à son sinus. Mais 
cot p’ = sin fo cot (À — A), 
ou, sans erreur sensible, 
= tg B cot (à — A) = e cos (À — À); 


d’où enfin, puisque nous avons représenté par y langle compris entre l’équi- 
noxe vrai et l’équinoxe fixe, angle qui n’est autre que le mouvement de 
l’équinoxe depuis l'instant initial jusqu’à l'instant actuel : 


A -- a= OP — yp = OL + LP — (O'L — O'y + Lp) = LP + O'y — Lp 
= ÿ — € tg b cos (à — A), 


où lon peut écrire a — A au lieu de 2 —A. 
On déduit de là, à l’aide de la formule (73°*) : 


sin (À — y Æ ẹ) = sin (1 Æ ?) — e tg B cos (A — A) cos (1 Æ +) 

sin (51 — Q — A + p) — sin (A + Q —AX;) 
+ sin ( nd 
cos (À — y Æ ẹ) = cos (a Æ &) + e tg pcos D. — A) sin (1 + +) 

cos (51 — Q — A Æ p) — cos (+ Q— A + p) 
+ cos ( a S 


1 
— sin (a+ 9) — qui 


1 
= COS giit 
cos (à Æ ọ) je | 


Afin d’abréger l'écriture, nous mettrons ces deux expressions sous la 
forme : 


sin (À — y Æ #) = sin (à Æ ») — + ei X sin («à + w’) 


75 
P cos {À — y Æ +) = cos (A Æ p) — + ei È cos (p) + p') 


dans laquelle u) + y’ est l’expression symbolique de chacun des angles : 


+(Gi—Q—ALH3), —(h+Q AL), +Ü—-Q+HALE), —(—i+Q+A*r) 


les sinus et cosinus de ces angles ayant, dans les sommes Z, les signes mêmes 
dont nous avons fait précéder les angles. 


dei | 


P dax 


7 OT 


\ Wie 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 49 


39. Tl restera enfin à exprimer la longitude vraie à en fonction du temps. 

Comme nous négligerons, avec la plupart des géomètres, les inégalités de 
la Lune autres que l'équation du centre, inégalités dont il sera du reste aisé 
de tenir compte, nous pourrons lui appliquer les formules du mouvement 
elliptique dans son plan. 

En appelant v son anomalie vraie, ainsi comptée, m, son moyen mouve- 
ment, l'équation de l'orbite donne : 

D 1— e 


a 1+ecosv” 
et le principe des aires : 
D? dv 


ee pile 
a? dl : 


d’où lon tire, en s’arrétant à la troisième puissance de l’excentricité (”) : 


5 i 
mdt = (1 — è) [1 + e cos v]? dv = (1 — 2e cos v + € cos 2v — e cos 5e) dv. 


Intégrant, et désignant par y, la constante, on a : 


kd 5 


€ s Cr 
mt + u = v — 2e sin v + ze sin 2v — — sin 5v. 
ə 
Le premier membre peut se remplacer par C—T, la longitude moyenne 
de la Lune étant représentée par C, et celle du périgée par T. 
On déduit alors de là, au moyen de la formule de Lagrange : 


ra p % 


a i 1 
(76) v= (—r + (2—5) sin (C —T) +2 sin 2(Ç — r) + sin 5 (C— T). 


40. Il nous faut encore trouver la relation entre v et la longitude vraie >, 
afin de pouvoir exprimer celle-ci en fonction de C ou du temps. 


(*) Voir la note de l’article 48. 


Tome XLV. 7 


50 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Or, si g désigne la distance du périgée de la Lune au nœud, dans son 


Fig. 5. orbite, : l'angle de celle-ci avec l’écliptique 
Ô =< vraie, angle dont la tangente est à, Q la 
PU longitude du nœud, on a : 


€ ee ben 
Le a 5: E SSE S 
mb O tg (àa — Q) = cos ı tg (v + 9), 


d’où l’on tire 
àa — Q=v + g — i’ sin 2(v +g) +e 
=v + g — iP sin2 0 — Q) 


ou 


(AIN RER e e E A = TE Sa Qt ©), 


aux quantités du quatrième ordre près. 
De même, si T” désigne la longitude du périgée lunaire : 


tg (T — Q) = cos: tg g, 


d’où 
"2 
g= —Q + Esin 2('— Q) + 
et 
‘2 
waa Ve r=r + sin 2 ( — Q). 


Si l’on porte la valeur (76) dans l'expression précédente de 2, il vient 


1=( + (2—5) sin (C — 1) + = — Li sin 2 (à — Q); 


41 
et enfin : 


Ce (2e ©) sin (C— 1).+ Ž sin 2(C — 1) + E ë sin 31C — 1) 

4 
(78) Fe 
— Ssin 2 (C— Q) + L e {sin (C+ T — 29) — sin (3C —T — 29). 


On tire de là, en retournant la série : 


3 E. i 
C= à — 2e sin (à —T) + Pe sin 2 (à — T) + peon 30 —T) + -sin 2 (1 — Q) 
7 
(78bis) 


4 ; 
— 7 e [sin (5) —T — 262) + sin () + r—2Q)|. 
4 


nn 


rm 


ET SÉCULAIRE DE LAXE DU MONDE. 5l 


41. De l'expression de 2 nous allons tirer celle de sin (/ + L), qui nous 
sera fort utile. 

En nous bornant aux cubes de l’excentricité et de l’inclinaison de l'orbite, 
nous trouverons : 


sin (la + L) = (1 — Pe’) sin (LC + L) 
+ je(gu+ zeje] fsin[(l + TG SUE] —sin|0—1)C+L+r]i 


Ras X TEE N ; 
+ Gr L pesin [0+ AC Lg) [ki e)s) +L 2r] 


— = sin C2) C + L— 262] + Lisin [0 — 2) C+ L+ 29] 


(79) 

4 1 

|. z (L + 91) ef sin [(i + 1)C + L + rT —9262]+ 3 (—21) e? sin[(—1)C+ LT +96] 
1 

ne (P + 21) esin[({+3)C+ L — r — 28] — ; (P — 91) e sin | (1—3) C-+-L +r + 262] 
do re Bu D 
Ar i 2 15155 | C Lise PRIE a à 1 aP 158 De = 

| + ru +z) sin ((+3)C +I 3r] TI en 5! ésin| (4 3)C+L-+3r |. 


On obtiendrait un résultat absolument analogue pour le développement 


de cos (1 + L); il suffirait de remplacer partout les sin. par des cos. dans 
la formule précédente. 


42. Nous aurons besoin également de l'expression de 


a\s 1 + ecos v\5 9 one 13 y 5 6 & E 
=] =| —— ] =1 + -ë + e| 1 + — e |) cosv + — e cos2v + — cos 5v, 
de: 2 4 2 4 


ce qui donne, à l’aide de la formule (77) : 


= 


e+ sefi Ta e cos (a— T) 


AE 
Jle 
|l 
+ 


Re 
EO + ecos 2(A—T) + 7e cos(a —T) 


ei? [cos(5) — T— 2) — cos(a A 


GOT YIA Nj 


52 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


43. Nous sommes en possession maintenant de toutes les formules néces- 
saires pour exprimer p en fonction du temps, et, par suite, pour intégrer 
les formules du mouvement de l'axe du monde. 

Comme on l'a vu, nous avons conservé les termes dépendants du cube 
de l’excentricité ; à la rigueur même, devrait-on tenir compte de la quatrième 
puissance de cette quantité, si elle multipliait des termes dépendants du 
périgée solaire exclusivement; mais ces termes se détruisent complète- 
ment (*). Dans les autres, on peut naturellement en faire abstraction. 

De même ferons-nous abstraction des termes qui dépendent des multiples, 
supérieurs à 4, des longitudes des astres, comme étant tout à fait insensibles, 
vis-à-vis du moins des termes nouveaux que notre théorie introduira dans 
les formules de la nutation annuelle. 

Il sera aisé au lecteur de restituer, non seulement tous les termes que nous 
omettrons, mais également, comme nous l'avons dit, ceux qui dépendent de 
l’évection, de la variation et des autres inégalités de la Lune. Il lui suffirait, 
pour celles-ci, de recourir aux formules complètes qui expriment la longi- 
tude de cet astre, son rayon vecteur et l’inclinaison de son orbite, en fonc- 
tion du temps. 


Ċ) L'importance de ce point affirmé par Laplace (Méc. cél., livre V, art. 5) et par Serret 
(Ann. Observ. de Paris, t. V, p. 309) nous a engagé à le vérifier en détail. Or nous nous 
sommes assuré que les termes en e4 sin (2 + ç) se détruisent en effet entièrement. Il en 
est de même des termes en e212 sin (2[" Æ y). 


| 
į 


ET SÉCULAIRE DE PAXE DU MONDE. 53 


CHAPITRE HI. 
Formules différentielles de la précession et de la nutation annuelles. 


44. Nous avons trouvé, article 2, en laissant de côté les accents qui 
indiquent qu’on a affaire à la Lune, 


IZA 
=r Z(Y. 
ST 


Commencons par calculer =. Les formules (71) et (72) donnent 
Ê Į D 


2: 
= = cos B [(1 + ci) eos a — # — p) + (1 — e) cos (à — p + ¿)]|— 2 sı sin £ sin y. 


Z 

5 == 8, cos B sin (à — 4) + c sin ĝ; 
ou, par la formule (75), en laissant de côté les termes en <, qui sont relatifs 
aux variations séculaires : 


/ 3 
qi |= Plase) \cos(Aa—p)+(1—c,)cos(à-+ọ) jt = = a )[eosi 2e) eos(a -R—+)] 
+ (Læ+clcos(52—26—?)-+cos(1—262+2) (1 — e)[cos (32—262+-9)+c0s(2—26— || 
(81) 
+ Č s [eos51—5Q )—cos(5a 50) 


z v 
Da = s(i — zjin 


1— o Jin > slsin(5a—9262)—sin(> -20-4 &sin3(1—(2). 


45. Le produit de ces deux expressions donnera 


Az 5 1 ; ; 
sài — 5i t Jin p +si(1 + | K + G )sin(2) — p) + (1 — c) sin (2A + )] 
(15e) | (c1 ca)| sin (21 —62—$)—sin ( (I-e + (ci—c)| sin(2a—62+ )—sin (+p) |} 
; h ; 
— Ž s| sin(22 20 -5)-5in (222 624) jjs ENEN o 8) (1—c)sin(262++) | 
(82) A 
-+ La [0 +e)sin (41— 2N —p)+(1— cı) sin (4a — 262 + )] 


4 
SET B[ (+0) sin (24 — 362 + p)+ (cı — c2)sin(21— 582 — a] 


| + - ë [(a+e)sin (41—38 — p)+ (c1 ce)sin (4a— 362 + 8). 
t 


54 


THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


A6. Multipliant enfin cette expression par celle Où donnée ci-dessus, 
on trouve, en écrivant en premier lieu les termes indépendants de la longi- 


tude de 


l'astre, à l’exception de ceux qui sont affectés des facteurs #e° ou 6”, 


puisqu'ils se détruiront dans la formule (84) É) : 


4p 
h 


(83) 


4xz | a\5 Re BRIE ATEN ARE 
ms, (14e + — et 2ÿ — — 0%) sine 
D? \D 2 2 2 4% 
9 21 5 51 c + C) sin (Q — 
E RO des nep] (cs a) si (S2— +) 
2 2 4 16 l+ (a — c) sin (Q + p) 
1 afi fo » (1 + c) sin (252 - +) 
-si . — e —- i 
EA E QUE à E 


g Re à (ci + C2) sin (2 — Q — p 
nent e5e 2} | ee 
2 + (c, — Ce) sin (27 — + + 


LA (i re alf (1+ c)sin(2r — 5 af (A+c)sin(r— 262— +) | 
rai CAE PES UNE — sei 
W ri Le : {+ ({—c)sin(2r EA ih 16” a (1—c)sin(4r —2N +:)) 


sin (21r — 962 + +) 
— sin (2r —2Q — v) 
) 

| 


(i ve eu P) (1 +c;)sin(22 —ọ 
s — e— -i 
T so l + (4—c\sin(2 + ọ 


e WI 


( 
( 
5 ,.( (+ c) sin (47 —362—+) 
a , (eR D A Sie 


5 19 D sin(1—T+ 4) 
+568 1+ — e-i 


4 2 —sin(à—T—}) 


) 
) 

ro Di it 
n ( 


3 
sjale es + (A1 — c) sin (à +T + ẹọ) 
ES p Io sin (21 — 2r ++) 
A E 2% | —sin(21 97 — +) 
sin (5A — 51 ++ 5 Ta n 1+c 31 —1— 
sd -i A EPa es (1 2 20) en sd f 
8 —sin(5a—5r— ¢)) 2 4 2 + (4 — c) sin (5) —T + ọ) 
5 (1c) sin on mA A E (c1 +c) sin (2a—$2—+) 
+— es, ; i Le geh 26 
4 | +(4— c) sin (42—27 +4) 2 4 +(c—c2) sin (2a—Q ++) 


5 à sin (2a — 263 — +) 
7 ane à 


Sat 
4 
1 à e n 1 de ef Al Pat 


mi +(1-csin(h)—20+e)) 4 l +(c—c){sin(21—-3Q -p)+sin(4a—3 Q9) ] 
3 an mre 9 n (1 + 6) sin (1—T—9Q + ọ) 

+ — 590 ; i — — sei : 
Te A aa 16 + (1 —c,) sin a à 


3 .( (4+6) [sin ( (a+r —Q— +) — sin (à —T + Q — o) + sin aa 
a c)[sin( Tr — Q ++) — sin (a —T + Q ++) + sin (à ore) 


(*} Voir la note précédente. 


ii 
{ 
| 
i 
i 
| 
| 
į 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 55 


5 ui. (f#0) SR M oE r ARE dé 5 a) sin (x — 37 + 2Q ++) 
rer OTEN ; sn 
16 sin (à +37 —9Q ++) I 
5 à (a+c)sin ie 

e 

D a a 
PIRE \ sin (32 pre n 3 a (1 + c) sin (51 — 57 + IQ —+) 

Sot € 2 
a ori on +(1— c) sin (5A — 37 + yoi 


[sin (2a— 97 —Q + ?)— sin (22 —2r + Q—#)] 
| se (c ii Co) į à 
Dur R + sin AAIR y) 
E ) E he Dee 
+ (C — 6 
(6 éd + sin (4) — W — Q + ọ) | 


47. Il reste erfin à remplacer la longitude vraie 2 en fonction de la lon- 
gitude moyenne C à l’aide de la formule (79); toutes réductions faites, on 


trouvera, en négligeant les termes qui dépendent de la longitude, lorsqu'ils 
ont de, ©, etc., comme facteur : 

4p 5 15 Je 3 ; 

—— $ Le + — et 7 — — ro sin ọ 


h 9 k 


—ifisse-r)| (ci + ca) ou 


+ (C1 — C2) sin (Q + +) 


Pte 


Eea 
2 


) ) 

9 + (1— c) sin (2Q + +) 
5 e) | (4 + c1) sin (2C— +) 
J + (1— c)sin(2C + +) 


5 9 ce sin (C—T + +) 
+ — 590 [A+ — © ——i ED f 
2 8 2 — sin (C — rT — p) 


T 


2 


+ Si (1— 


(84) 
(1+c,)sin (3C—r—ọ) 
+(1—c,)sin (5C—r+9) 


| 
silita 2a s) | nes }sin (2C— ne (Sen) sin(2(—26— ae 
| 
j 


1 ne a se (A+ c)sin p 4 
20 2 |(+(4— c)sin(C+r+ọ) 


e 
D Sea VE 


Cy—Ce)sin va —Q+p)) 4 


2 —sin(2(—92Q ++) 
1 à (ere)[—sin(Cr-Q-9)-5sin(C-r+Q-#)+3sin(C-r-Q+5)+7sin(5C-7-Q-+)] 
+ 2° toc )—sin( Ce 5sin(C—r+ç2+#)+5sin(C—7-Q—+)+7sin( 3C—T-62++)| 


+ Tse [sin (2C — 2r + p) — sin (2C — 2r — +)] 
go 


(1 = c) [sin (4C— 5r — ẹ)] 


z ssil + (1 — c) [sin (4C— 3T + Dli 


56 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Afin d’abréger l'écriture nous ferons : 


5 15 Dih 15 8, CARE Fi 
te etes À + et H gt QU + = A — a; 
2 8 2 8 2 4 2 


(85) 


1 a — u", 


et nous négligerons, vis-à-vis de lunité, les quantités e°, e'°, # dans tous 
les termes qui renferment la longitude des astres. 


48. On a vu (art. 30-32) comment l'expression de q se déduit de celle 
dð dy 


de p, et comment de l’une et de l’autre se déduisent celles de 3 et sin 6 zr’ 

Mais, puisque les formules données dans les articles 33 et 34 nous per- 
mettent de passer directement à l'intégration, nous pourrons procéder à 
celle-ci, en ne faisant usage que de l'expression (84). 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 57 


CHAPITRE IV. 


Intégrations des équations du mouvement annuel de l'axe du monde. 


A9 Avant d'appliquer le procédé et les formules (62), (68), (69), 
exposés dans les articles 32-34, nous remarquerons, tout d'abord, que les 
deux termes de l'intégrale A5, qui proviennent respectivement des termes 
en sin (ui ++) et sin (vi —ọ), sont de signes contraires, et à très peu de 
chose près égaux, si ces deux sinus ont le même coefficient. 


4 


Dans ce cas, nous pourrons done négliger ces termes, puisque, du reste, 


Le 


le facteur qui multiplie sin (ot + p) est lui-même déjà très faible dans 
chacun d’eux. 

Il n’en est pas de même pour l'intégrale sin 8,A4. 

Alors, si w, et y; désignent les vitesses du nœud et du périgée lunaires, 
l'année julienne étant prise pour unité, y, celle du périgée solaire, w, y}, yə 
leurs rapports au mouvement diurne, et si lon rétablit les accents dans 
toutes les quantités relatives à la Lune, on obtiendra les formules suivantes, 


dans lesquelles nous avons omis les termes dont le coefficient est inférieur 
à 0//,0001 : 


| i (1 — x” 1— 0) — 5 1 o) — o \ 
| E A ERA 2) EA wh 
5 m @i (1 — o) — o (1 + œ — 
m 
A8 = — — 4e? 
4n i apus 3 j’ R TETE 
\ 2 PAE a o eI ++20)— o 
+ — 1+c —— + (l— 4) — ee CUS 
4 o [ 1 (1—20) o Same. (1 ne z 
(86) 15, 1+c, I— c 
PAT i cos 20 
2m | 1— 2m + p 1+ 2m, + p l 
5 m? ASe Oa 1 i1—c | 
-p -izl a + — “eos (On ) 
4n 2 m, +y |1 — mMm — y: + p 1 mMm y+ u | 
7 $ EP 
Éd 420 z 1o | cos (30 —r) 
| 2 Sin =y 1 — 5M + Yo + p 1 + 5M — Y: + p 


Tome XLV. 8 


58 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


| 4 S; 1+c 1— c 
-— - + - cos 2€ 
2m, |1 — 2m +p 1+2m +u 
eS A+c 1—c 
nos -im or t eai | cos (Cr) 
5 mi f 2m + yi l1— m—y+yu 1+mty tyu 
"EAA TEE E 1+ c, 110) ; 
+ — — - z5; - +, — | cos(3C—r') 
2 5m, — Yı |1 — 3M, + yg + p 1 + 5M, — Yg + v 
i i Uti O 
l a 2 ci - a z cos (2C — Q) 
2m; — o, | 1— 2m + o+ p 1 2m — o + p 
ter 5 CC Ci —c: (EHESS 
(86) + ed a ae Le + ns 3 (C - £2) 
2 [1 — Mm, — Y, + o + u l Me + Vo — o + p Mi + Yy — o 
saly G + Co & — Co cos (C — + Q) | 
0 + 
[1— m +y, — o typ 1+m — y, +o tyu] Mm—yi+a | 
jh p | a E Co b | GS C2 cos (C ds Mes Q) \ 
[1 + mMm, — Ya —o +p 1A— mMm, + yt o +p mi — Yi — ©, 
g ate a — c COS (3C — T 
eny : 1 2 a ; 1 2 ( ; e E) 
A—3m+y, to +y 1+ 3m —y;— 00 + p SM, — Yi — o 
1+c 10 | cos CO 
+ 4e”s, - + ) s ; ue - ) 
LA — 4m, + 2y, + p 1+ 4M, — ya + p km, — 27, | 
et 
3 mi B— o 
— sin bây = — — sz | (4 + 4) + fA — x! t 
4 TA 2 [( ye f 17 RUES 
3 (A p (1 — à) -- 5 & (1 + o) 
+ -m — — (1 — #") | la e) =" — (a — e) —— | sin Q 
ra mi, IC DAT Re ans (a d'a 
| as nc uli — 2o — © 17 1+20 — 3 
bras (i — j (d+c) AEEA Ee ER sin 263 
4 o (1— 20) — © (14209) — o 
3 m° As 4A+c A — 0 FE 
RS | Ra k a : sin 20 
(87) An 2m, |1 — 2m+yu 1+2m+g 
ENA 1 1 ; 
ani 5 nn fn nn sin (O — T) 
2 m — y, | 1+ Mm — y+ u 1— mMm + y+ y 
4 es, A+c 1— c 
— — — sin (© + r) 
2 m +y |1 — mMm — y+ p 1 + M, +- Ya + p 


y/ es; 1+ 1 — c; à 

me — = sin(3© —T) 
2 53m, — yı | 1 — 3 + Yı + u 1 + 5m — y+ p 
9 es 1 1 

-= a | F as) sin 2© —T) 


1 + 2m, — 2y +u  1—9m+ 2y, + u 


| 8 Mi — Yı 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 59 


| tr 2 A 
| Diane LES A+ i— c 7 
| +- — quf -— : — —— | sin 2C 
| 4n 2m, | 1 — 2m, + u 1 + 2m +p 
| D be 1 4 3 . 
| =- TE + Ta sin (C— 1") 
| am — y, [A+ m — yty 1 m+y+ 
4 e's 1+c 1— c | 
EN = Pe sin (C+ T’) ) 
2m, + yı |1 — mMm — ys +p Å+ mMm y+ yu ! 
ERAS 1+ c 1— c ; GC m) 
FETE - a - — - - sin (3C — 
2 öm — y, | 1— 5m y+ p 1+ 5M — Ya+ u 
ho ju ne. 
| i ; : ; + - - sin 2(C—r) 
| 8 m—ry |1 + 2m — 2y, +p 1A—2m;+ 2y, + p 
Imoo S DA TO Ci+ Co Ci—C ; 
Fo 1—= -= e°—- i’ ; — er sin (2C— Q) 
4n 2m; — o; 9 4 À —Ime+ + p A + 2me—0 + 
(87) à 
= 2 Ca 
GHANA 0 HS 4 4 Tir 
omare - - -= - sin 2 (C— Q) 
4n 8m, — o [1 — 2m +20 pu 1+ 2m, — 20+ u 
5 mi | 4 1 p Cie Cy—C 7 
og 2 1 2 ; 
| R sin (CT'—Q) | 
n My o | 1— Myr ore 14M yot H | | 
5 4 F Ci + Co Ci—Co ele: 
ER : Ur — ———————— | sin((—r'+ 
2 m — yio | 1 — Moy ootu A+ my — yy totu C 62) 
5 1 p Ci+ Ca Ci—Ca Jan CR 
PEN 7 ; š Fei DA Re da BONE a 
2 myi — o | À —Matyatotu A+ Ne—yo— v u 
7 1 [ Ci Co Ci — C ] 
fs 


= sin(C=r'-Q) | 


2 5mi—y io —5m yy Hetu 1+5M;— ya — vtm | 


| Mais UC S, A+ A — 6, 
| kM 5 pr 
| n 4m, — 5%: | 1 


| sin (4C — 2r') 


1 t a r , 
— 4m + 2yo u À + 4m, — Iy + u 


90. Les deux formules précédentes se distinguent de celles des Géo- 
mètres (Laplace, Bessel, Poisson, suivi par Peters, Serret) en quelques 
points qui ne sont pas sans importance. 

Occupons-nous d’abord de la comparaison des coefficients fondamentaux. 

RER Ho PUA B ; E ui 

Celui des Géomètres, ~—p—, qui est symétrique en A et B, est commun 
à tous les termes de la précession et de la nutation. 

Nos coefficients, à l'exception d’un seul, ne sont pas symétriques; ils ne 


Sont pas non plus communs à tous les termes, à moins que l’on n’y néglige 
de petites quantités, dont il est indispensable de tenir compte en présence 
de la précision toujours croissante des observations astronomiques. 


60 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Le plus simple d’entre eux, seul, a la méme forme que le précédent; 
c'est celui de la précession : 


“w—®m 1412C—A—B 
1—5 2 C 


Celui de la nutation, au contraire, renfermant, avec des coefficients diffé- 


rents, les deux fractions 
&(A E ©) — = 
(AL) — © 


° 


ne présente pas cette symétrie en À et B. 

De là résulte une conséquence très importante. 

La comparaison des valeurs numériques des coefficients de la précession 
et de la nutation, avec les expressions que leur donnent nos formules, 
permettrait, en effet, si ces valeurs numériques étaient connues avec une 
très grande précision, de déterminer les deux inconnues u et œ, et, par 
suite, - et E 

A la rigueur, une troisième valeur numérique serait nécessaire pour 
déterminer celle du coefficient f de l’action lunaire; mais le calcul que 
nous en avons fait, à l’aide de la comparaison précédente, et en nous ser- 
vant successivement des valeurs de Bessel et de Struve pour la constante 
de la précession, nous a conduit à des quantités si peu différentes (2.18055, 
2.17945) que la légère incertitude de ces déterminations ne pourra guère 
exercer d'influence sur celle de p. 

Or, il découlera à l'évidence, pensons-nous, des résultats auxquels nous 
serons conduit dans l’une et l’autre hypothèse, en partant de la constante 
de Peters, que, si la valeur de Bessel n'offre pas une précision tout à fait 

ab (Ü—A)(C—B) 


suffisante pour déterminer le produit à —< =~~; > celle de Struve, 


par contre, fait trouver pour ce produit une valeur trop considérable. 

Si done la constante adoptée pour la nutation annuelle était exacte, 
comme les astronomes semblent ladmettre, nous serions obligé de conclure 
de notre comparaison, que la constante de la précession de Bessel est préfé- 
rable à celle de Struve. 


ET SÉCULAIRE DE L’AXE DU MONDE. 61 


C’est de cette première que nous ferons usage dans le calcul de nos coeffi- 
cients (*). 


91. Démontrons d’abord le point capital que nous venons d’affirmer. 
Les valeurs numériques que nous avons adoptées sont les suivantes, rap- 
portées à 1800.0 : 


65 —= 23°27 54.29 


lg s, = 9.6000901. lg c, = 9.96251 284. lg ca = 9.85455063. 
e = 0.0167712. e' — 0.054857. 
lg e = 83.2245642. lg e = 8.7594971. lg i = 8.95438511 4. 
14 œ x = 1.00042206. ` 4 — x = 0.9925410. 1 — x" = 0.9964527. 
log:  0.000185956. 9.996660955. 9.998447971. 
lg n = 3.5619576. lg m, = 0.7981725. lg mi = 141.9242642. 
Ig — o, = 9.528366607 lg 7, — 5.7475. Ig yi = 9.8513704. 


92. Désignons par P, N, œ, œ les valeurs absolues des constantes de la 
précession et de la nutation, de la vitesse du nœud et de son rapport au 
mouvement diurne. 

Les formules (86) et (87) donnent alors : 


Nes 
Ij 
l 
TR 
+ 
3 
L 
j] 
| 
RE 
ne 
= 


2 1 —5 l — 5 ne 


N 

5 mè if o r — % 25 f l © 
e SE RE 
2n à 7 ? | 


Comme w, est égal à 0.0001467 et = à 0.00001 approximativement, 
nous pourrons, dans le calcul de f, négliger le terme en ow. 


(*) Ce n’est qu’à défaut d’une base plus sûre que nous avons adopté la constante de 
Peters et, par suite, celle de Bessel, qui concorde le mieux avec elle. 

Nous partageons, sur l'exactitude de cette dernière, les doutes exprimés par des astro- 
nomes éminents. Quant à celle de Peters, il nous paraît certain qu’elle doit être aug- 
mentée peut-être de 0”.01 environ (voir p. 68). 

Déjà M. le Prof. Nyrén a déduit des observations au premier vertical de Poulkowa une 
valeur supérieure à celle de Peters. 

M. le Dr L. de Ball, en recherchant, d’après nos formules, la constante de la nutation 


62 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Alors la Ion des deux équations lune par l’autre fait disparaitre le 
facteur ©, et permet de déterminer f. 
On done ainsi, en se servant successivement des constantes de Bessel 
et de Struve : 
le 53856240 . 218055 Bessel. 
~ 0.55828457 247914 Struve. 
#3. Cela étant, les équations (88) deviennent, [log] désignant le nombre 
qui a pour logarithme log : 


2 ni m? { [0,50029502]; le p— a 
189) 3 “n 1[0.50010811],) "1 — > 
2 N du [9.763002661, | u — © må 1[5.7637], = 
a ue SEP 
\ 5 nr .76 Rap 1 — n ai 1—7 
L’élimination du terme en c, — = conduit à l'équation : 
wo) 2( — [1.46547442] + [1 PR må | [6.2640]} 5 
7 7 7 7 3 — [41.46498127] + [1.46498205]s [6 2635], }1 — x? 


dans laquelle les nombres P et N ont été exprimés en secondes. 
On trouve ainsi, pour la valeur de -—, selon que l’on adopte la con- 
stante de Bessel ou celle de Struve : 


17.596 — 0.0000359 B. 
40”.080 = 0.0000525 S. 


La première est probablement trois fois trop forte, mais la seconde l'est 
cinq fois environ. 


I] ne semble donc pas douteux que la constante de Bessel ne soit, quoique 


diurne, ainsi que la correction à apporter à la constante de Peters, est même arrivé à une 
valeur encore plus forte (voir Astr. Nachr., n°5 2549-2544). 

Mais il faudrait des observations plus nombreuses que celles dont il a pu faire usage 
jusqu’à présent, pour établir, sur une base tout à fait solide, le calcul des constantes 
de la nutation annuelle et de la nutation diurne. (20 août 1883.) 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 63 


un peu faible, préférable à celle de Struve, si l’on admet comme exacte la 
constante de la nutation de Peters {*). 


94. Pour déterminer +, mieux vaudrait, en présence de cette incer- 
titude, ne se servir que de la seconde formule (89). 

On pourrait commencer par y négliger le second terme, pour trouver une 
première valeur approchée de —, et en déduire celle de «u, en admettant 


9 AE 1+ . Da ERE 
que s = p’; d'où "= >, Nous supposerons qu'on soit arrivé ainsi 


1—77 
à x — 0.00001 = 2”. 
La seconde équation (89) donnera alors, en partant de la constante 


de Bessel : 


OI NX 


[0.9648769] = [7.9599095] ap + [5.7602] v. 


aa 


On voit que le dernier terme est tellement faible qu’il est impossible d'en 
tenir compte. 
Il restera donc T, ou, comme nous venons de l’admettre, 


OD o = 2 [53.0049744] = 674”.5 — 0.0052693; p — 0.003280 (**). 
+ ð 


59. Comme contrôle, nous pouvons déterminer théoriquement, au moyen 


de la valeur (91), que nous venons de trouver, en partant de la constante de 
ii 


sa GS Z S 
-—%, la constante de la précession. La pre- 


la nutation annuelle, pour 3 


(©) Pai calculé, d’après les formules (88), ce que devrait être la constante de la précession, 
pour la valeur suivante de la constante de la nutation annuelle : 9.23; et j’ai trouvé 50.39, 
valeur notablement plus forte que celle même de Struve. 

La détermination de ces constantes et de celle de l’aberration devra, dans tous les cas, 
être soumise à une nouvelle investigation, dans laquelle il faudra tenir compte de la nuta- 
tion diurne; mais on ne pourra utilement le faire que quand celle-ci sera connue avec une 
précision suffisante. (20 aoùt 1883.) i 

(*) I semble résulter des données actuelles sur la physique du globe que cette valeur 
est trop faible. I en serait de même, par conséquent, des constantes de Bessel et de 
Peters. 


= see n° pr np te 


64 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


mière formule (89) donnera, si l’on y remplace 4—7 par 2 [3.0049744]: 


Ig P = 14.7021692. 


On voit combien cette valeur diffère peu de celle 41.7021688 que nous 
avons prise pour le logarithme de la constante de Bessel, en 4800. En 
nombres, la différence est seulement de 0.00005. 


56. Afin de pouvoir comparer les coefficients des autres termes de nos 
formules, aux termes analogues de Peters, il sera utile que nous com- 
mencions par les réduire en nombres, comme la fait cet astronome pour 
les siens. 

Dans cette réduction, outre les valeurs numériques données à Particle 54, 
nous emploierons celle que nous venons de trouver : # = 0.003280. 

Les formules (86) et (87) s’écriront alors, pour 1800.0, tous les coeffi- 
cients étant exprimés en secondes : 

| A9 = 9.2251 cos E3 — 0.0863 cos 262 + 0.0891 cos 2C, + 0.0194% cos (2Cn — Q) 


| 


| + 0.0127 cos (3C,, — T”) — 0.0050 cos (Cn + T) — 0.0052 cos (Cn — T'+ Q) 


nr 


(92) + 0.0030 cos (Cn — T" — Q) — 0.0010 cos (Cn + P'— Q) 

| + 0.0026 cos (3C,, — T" — Q) + 0.0012 cos (4C,, — 2r") 

| + 0.5521 cos 20,, — 0.0092 cos (On + T) + 0.0217 cos (5©,, — I). 

' Ay = — 17.249214 sin 2 + 0.2085 sin 2Q — 0.22417 sin 2€,, — 0.0583 sin (2C,, — Q) 

+ 0.0687 sin (C,, — T’) + 0.0027 sin 2 (Ga — T) + 0.0025 sin 2(C,, — 62) 

| — 0.0300 sin (3€,, — T’) + 0.0107 sin (Cn + T") + 0.0061 sin (C,, — r’ + Ça) 
(93){ — 0.0060 sin (C, — T” — S3) + 0.0020 sin (Cn + T — Q) 

| — 0.0052 sin (3C, — T” — Q) — 0.0028 sin (4€, — 27’) 


| — 1.2726 sin 20, + 0.0215 sin (©,, + T) — 0.0520 sin (3O,, — T) 
+ 0.1275 sin (©,, — T) + 0.0016 sin 2 (On —T). 


Les coefficients de Peters, écrits dans le même ordre, sont, pour A6 : 


1) + 9.295! 2) — 0.0897 3) + 0.0886 4) + 0.0181 
5) + 0.0143 > 6) — 0.0050 7) — 0.0034 
8) + 0.0050 9) — 0.0010 


43) + 0.5540 14) + 0.0093 45) + 0.0027 


ET SÉCULAIRE DE L’AXE DU MONDE. 65 
el pour AY : 


11) — 147.2405 2') + 0.2075 3 


) — 0.2041 4") — 0.0339 
5') + 0.0677 6’) + 0.0028 
) 
) 


) 

7') + 0.0024 
8) — 0.0261 9) +0.0115 10’) + 0.0058 
) + 0.0057 12) + 0.0020 15) 
14) — 4.2694 15°) —0.0213 16°) — 0.0058 
) + 01279 48) — 0.0005. 


Nous n'avons eu ni le loisir, ni le goût de rechercher à fond les causes 
des quelques divergences qui existent entre certains de nos coefficients et 
ceux de Peters (*). 

Les observations suivantes pourront n'être pas dépourvues d'intérêt. 

Nous ne comprenons pas lomission, dans les formules de Peters, de 
nos termes 10 et 13, qui ne sont pas du tout insignifiants, non plus 
que le signe attribué dans ces formules, par inadvertance sans doute, au 
terme 11! (*). 

Quant à la différence qui existe entre nos coefficients 14 et 15, 15/ et 16! 
et ceux de Peters, elle n’est qu'apparente, comme nous allons le voir. 


57. Nos formules (92) et (93) renferment les longitudes moyennes du 
Soleil et de la Lune, expressément indiquées par l'indice m. 

Mais Peters a introduit dans les siennes la longitude vraie du Soleil. 

Modifions en conséquence nos formules (86) et (87), dans lesquelles 
nous remplacerons les longitudes moyennes de la Lune et du Soleil, qui y 
sont représentées par C et ©, en fonction de leurs longitudes vraies, au 


moyen de la formule (78**). 


( Voir la préface. 

(*) Le professeur Nyrén, qui a refait, sur des données nouvelles, les calculs de Peters, 
a réparé l’omission signalée ci-dessus. Mais l'erreur de signe, que nous avons relevée dans 
le terme 41’, subsiste dans ses formules (voir Mém. de l'Acad. des sciences de Saint-Péters- 
bourg, t. XIX, 1872). 


Tome XLV. J 


66 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


Après avoir réduit en nombres, nous obtiendrons ainsi, C et © désignant 
maintenant les longitudes vrAtEs de la Lune et du Soleil : 


A0 = 9.2251 cos Q — 0.0865 cos 26 + 0.0895 cos 2C + 0.0196 cos (2C — Q) 
II = 0.0028 cos (5C — T’) + 0.0048 cos (C =+ T”) — 0.0052 cos (C— T’ =+ 62) 
II = 0.0050 cos (C— T — 9) + 0.00114 cos (C+ T — Q) 
(94) À + 0.0004 cos (5C — T’ — Q) + 0,0012 cos (4C — 27") 
IV = 0.00003 cos (2T — () + 0.00005 cos 2 
V + 0.5527 cos 20 + 0.0095 cos (© + T) + 0.0051 cos (50 —T) 
VI = 0.00004 cos 2T. 


! ay = — 17.2421 sin Q + 0.2087 sin 262 — 0.2246 sin ¿C — 0.05388 sin (2C — $2) 
1’ = 0.0689 sin (C — 1") + 0.0027 sin 2 (C — T’) + 0.0025 sin 2 (C— 9) 
II — 0.0055 sin (5C — T”) — 0.0140 sin (C + T’) + 0.0060 sin (C— r + 62) 
IV’ — 0.0059 sin (C —T' — S3) — 0.0022 sin (C + T'— $2) 
( 


(95) — 0.0008 sin (35C — T” — Q) — 0.0028 sin (4C — 2r") 
| = v — 0.00005 sin (2r" — Q) — 0.00024 sin 2r” 
VI  — 1.2742 sin 20 — 0.026 sin (© + T) — 0.00953 sin (5O — r) 
VI = 0.41275 sin (© — T) + 0.0015 sin 2 (© — T) 
| VII’ — 0.00009 sin 2T. 


Ces formules se distinguent des précédentes par les valeurs numériques 
et même par les signes de certains coefficients, mais surtout par l'intro- 
duction de termes nouveaux qui, vu leur signification théorique, ne sont 
nullement négligeables. Ces termes sont ceux des lignes IV et V', et surtout 
VI et VII. 

Le terme VIII’, variant avec une excessive lenteur, devrait rentrer dans 
la constante de la précession, qui deviendrait, dès lors, une variable, dans 
lexpression même de la précession lunisolaire annuelle! 

C'est done par un véritable abus, provenant de la négligence des Géo- 
mètres, que l’on continue en général à calculer les formules de la nutation 


au moyen des longitudes vraies des astres, formule (89), tandis que la 
formule (88), qui renferme les longitudes moyennes, est beaucoup plus 
simple à calculer, et ne contient surtout aucun terme dépendant du périgée 


ET SÉCULAIRE DE LAXE DU MONDE. 67 


solaire, et qui ferait varier la constante de la précession, ni même du périgée 
lunaire. 

On nous pardonnera de nous exprimer, avec un peu trop de chaleur peut- 
être, sur ce point, dont nous ne croyons pas nous exagérer l'importance. 

Notre excuse est d’abord : Amicus Plato, magis amica veritas ; ensuite 
l'autorité de Gauss lui-même, sur la proposition de qui Encke avait intro- 
duit dans le Berl. Jahrb. les longitudes moyennes de la Lune (*). 

Qu'on nous permette donc de formuler, en faveur des jeunes astronomes 
qui ont des réductions de circompolaires à calculer, le vœu qu’à l'avenir les 
formules de réduction soient exprimées en longitudes moyennes, et que 
celles-ci soient insérées, tant pour le Soleil que pour la Lune, en quelques 
pages des annuaires astronomiques! 


58. Afin que le lecteur puisse vérifier plus aisément la formule (89) et 
s'assurer mieux encore de l'inconvénient de l'introduction des longitudes 
vraies, nous donnerons au complet la formule (86), y compris quelques 
termes qui, quoique négligeables, pourront se réduire avec des termes sem- 
blables lors de la conversion des longitudes moyennes en longitudes vraies, 
ainsi que la formule (86%), dans laquelle cette conversion est effectuée. 

Les chiffres romains qui figurent dans cette dernière formule sont les 
coefficients complets des termes de la formule (86) vis-à-vis desquels ils 
sont placés. 


*) « Nach dem Wunsche des Herrn Gauss ist der Zusatz für die mittlere Länge des 
Mondes und ihre Bewegung gemacht worden. » (Berl. Jahrb. für 1841.) 

Si Pon fait usage de PAnnuaire de Berlin, ou des Tab. Pule., ou bien encore de la Conn. 
des Temps à partir de 1884, on pourra calculer exactement, d’après les formules de Peters, 
les termes qui dépendent de la longitude de la Lune. 

Ce que nous proposons donc, Cest que Pon calcule tous les termes de la nutation en 
longitudes moyennes, pour le Soleil comme pour la Lune, afin de wêtre pas obligé de 
négliger certaines quantités qu'introduit la conversion en longitudes vraies, et dont il est 
impossible de tenir compte. 


68 


(86) 


THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ANNUEL 


3 m? 1 —ax" 1— o) — 
VN i 2 erasia n 


(1 — o — o 


y 


(c, — Co) ratar] cos 62 | I 


A + o) — 5 


2 myi =o —M;—Yy yH wg + M 


CC 


+ — 


mit — o+ u 


posar- 


Ci— Co 


3 e'i 
2m — yio] 1L—m +y, — 0 +u 


5 e'i 
E P EAN, nt N 
2m —yi— e| move — 0u 


he 


| cos(C,—T'+ç2 ) 


1m, —y y totu 


C—C 


1—=mMm; y; Hou 


fee.-r0) 


y GUE Ci+ c = Ce 
ess RRS TPE Te — ros(5C 16) 
23nu—71—c1 1 —5Mat+yototu A+5M — Yyy — otu 
1 t 1+c 
Fe, 01 r r Sary ' 
4 2m, —2yi +20 | 1 — 2m, + 2y, — 2+ u 
A—c 


A+ c, 


1 + 2m — 2y + 20+ p 


| cos (2C,,—21" +262) 


2 
G Brea 3 - + 
4m — 2y, i; —4mMm, + 2y +u 


1 — c p in) 


1+4m— 2y, + p 


4m —2y, 


| 


| 
| 


V 


VI 


| VIN 


IX 


APA —sc"")s, |" u (1— Do) — e uA + Do) —5 i 
+ AER E] (4 be ET SAS +(1—c;) EUX = —— |cos2$2 Il 
%4 “, (—2o0)—0 ` (1 +20) -—5 
3 m is 4 + he 
el de kilu + i Š cos 20, 
4n 2 m, |1 — 2m + u 1 + 2m, + u 
| es, A+ c 1— c 
—— re cos (On + L) 
2 m + y, | 1— M — y+ u 1+ mAy u 
7 es, 1 +c À — c 
Mens + 3 cos(3O,, —T) 
2 5m, — y| 1 — 5M +y + py 1 +-35m— y+ u. 
3m? 45, Te t =e ] 
—— tf pA ER 5 > l be ag E cos HE 
4 2m |i — 2m +p 1+2m+p 
4 e's; A+c À — Cg 
M de don + ps cos (Ca + T) \ VII 
| 2 m — yi | 1— m— ystu A+mM ty, + u] ( 
7 e's, +e 1 —c ] 
(t-n Ai ath Loue De sh aeaa eoan T) 
| 23m — y; |1—5m +y +e 1+3m—y, +u 
3 m? i Ci + Co Ci Co j 
Sartor fe f r ' aee a PE a: cos (2C, Fe i Q) 
4n 2m; — o | L — 2m, + o + p À + 2m, — 2 + p 
4 AE [ CC: C—C 


XII 


XI 


XIV 


XV 


(86 bis) 


ET SÉCULAIRE DE L'AXE DU MONDE. 69 


4 


4 
7 SP IKR el XIe cosh? 


Magi Vif eos 262 


+ f (1—4e'?). VE + e'. VI — 5e". VIN — 5e'. XII f cos 2C 


+ Í (1— 4e"). IX + e'. X } cos (2C — £) 
POE NE E | 
(1—9e). VII 4-96 VI + 7 e>. VH peos(5Cr jeje 2 VI—4e'.XIV}cos(5C-—2r') 
t 


15 
(1— e°). VH — 2e. VI + — 7 2 VIH 


F 


14 
+0 
-|e va enwi leos(C— 3r) + e 


+ XL. cos(C— E+ Q) XIL. cos(C ~ T'— 8) 
XUL 2i. IX! cos (SCTE m C2) + į X — 2e'. IX } cos (Cr) 


| 
Tip VII cos (C—T'— 20) + ZVI cos (C LRR) 


+ (XIII + 2e'. IX) cos (3C— T'— 62) 


Ca 


45 
+ lei nie . VIIL} cos (35C + T'— 262)+ y e”. IX cos (5C — 20" — 62) 
+ 


+ e'. XII cos (2C — 2T" + Q) + e'. XI cos (2C — 2r'— 62) 
+ XV cos (4C — 21") + 5¢' | VIII + XIT t cos (4C — 2r) 


4 4 
a È. VII cos (4C — 252) — z È, IX cos (4C — 36) 
+ (1 


sje e. IX —e'.X t cos (2r'— Q) 


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+ | (1— 4e?) . II + e. IV —5e . V | cos 20 


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$ 15 
+ Le. 1V — 2. IT + TV cos (0 + r) 


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+ ya — 9e). V + 7 e.IV + 2e. 11 beos (50 —T) 


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1 
GET e°. IVY . cos (© — 5T) 


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car 
+ |- e. II —e.IV cos 2r. 
le 


Tome XLV. 10 


70 THÉORIE DES MOUVEMENTS DIURNE, ETC. 


Cette dernière formule renferme deux fois plus de termes que la précé- 
dente; nous n’y avons toutefois pas réduit la longitude moyenne T’ du 
périgée lunaire en longitude vraie (77); c'est une peine que nous pouvons 
nous épargner, puisque les astronomes, qui caleulent avec exactitude les 
lieux apparents, ne font usage que des longitudes moyennes dans les termes 
relatifs à la Lune. 

Mais il ressort deux conclusions importantes de la comparaison des deux 
dernières formules. La première, c’est que la constante de la nutation ne 
conserve pas la même valeur, si l’on substitue simplement, comme beaucoup 
d’astronomes le croient permis, les longitudes vraies de la Lune aux lon- 
gitudes moyennes. La seconde, Cest quen convertissant les longitudes 

, moyennes du Soleil en longitudes vraies, comme la fait Peters, on néglige, 


dans les formules (94) et (95), les termes qui dépendent du périgée solaire. 


RECHERCHES EXPÉRIMENTA LES | | 


MOUVEMENTS RESPIRATOIRES | 


DES INSECTES, 


PAR 


FéLIX PLATEAU, 


MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, PROFESSEUR À L'UNIVERSITÉ DE GAND, ETC. 


‘à 
Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 3 mars 4883. 


Tome LXV. a 


TABLE DES MATIÈRES. 


CHAPITRE PREMIER. — INTRODUCTION. 


Pages. 
e DIMILES durava à PEN RSS URSS RS SR Re Re 4 
SER ETa a E E E ee ee ta eur 3 
§ HI. Méthodes de Hausmann et de Maurice Girard a e o a a a 8 
CHAPITRE I. — MÉTHODES EMPLOYÉES DANS CES RECHERCHES. 
ELV: Methode graphique : 5 summer E Ne a A ou L 1 
8: Va Methodedeprojections a ul ann REN EUR 5 7 29 
8 VI. Dissection des muscles respiratoires . . . . . . . . . . . % | 
; 4 
$ VII. Procédés employés dans les expériences sur le système nerveux . . 24 
T CHAPITRE III. — TYPES RESPIRATOIRES. 
$ VIII. Considerations préliminaires à ora 4 a a + D 
§ IX. Les trois types respiratoires principaux et leurs subdivisions . . . 27 
CHAPITRE IV. — ÉTUDE DU PREMIER TYPE. 
NEO 0 RME RE Er Re CAE ER ER RER 34 
S KO HO OUS PCUS EE a E ne 34 
§ XI. Étude des mouvements respiratoires de PHydrophile par la méthode 
SAR ET SEE EL RPC AT 35 


§ XII. Étude des mouvements respiratoires de PHydrophile par la méthode 
des Proje MONS a re hs a a E A F 40 
$ XII. Muscles respiratoires de l’'Hydrophile. 4 


IV 


$ XIV. 
$ XV. 


$ XVI. 
$ XVII. 


$ XVIII. 


$ XXVII. 


$ XXVIII. 
$ XXIX. 
M4 
$ XXXI 

$ XXXII. 

$ XXXIII. 


§ XXXIV. 
$ XXXV. 

$ XXXVI. 
$ XXXVII. 
$ XXXVII. 
$ XXXIX. 


S XE 
SAL 


$ XLII. 


TABLE DES MATIÈRES. 


Expériences sur le système nerveux de PHydrophile . 

Hydrochares (Hydrous) caraboides . 

Dytiscus . E tro 

Étude des mouvements respiratoires des Dytiques par la méthode 
graphique pan 

Étude des mouvements respiratoires des Dytiques par la méthode des 
projections 


. Muscles respiratoires des Dytiques. 

. Expériences sur le système nerveux des Dytiques . 

. Colymbetes fuscus. (Étude par la méthode des projections.) . 

. Carabus auratus et Abaz striola. (Étude par la méthode des projections ). 
. Tenebrio molitor. (Étude par la méthode des projections.) 

V. Cicindela hybrida. (Étude par la méthode des projections.) . 

. Scarabéiens. Historique . 


. Oryctes nasicornis. (Etude par la méthode graphique.) 


Étude des mouvements respiratoires de POryctes par la méthode des 
projections 

Muscles respiratoires de Oryctes . | 

Expériences sur le système nerveux de POryctes Ù 

Onthophagus nuchicornis. (Étude par la méthode des projections.). 

Geotrupes sylvaticus. (Étude par la méthode des projections.) 

Hanneton (Melolontha vulgaris). (Étude par la méthode graphique.) 

Étude des mouvements respiratoires du Hanneton par la méthode 
des projections . 

Muscles respiratoires du Hanneton AR RE í 

Phyllopertha horticola. (Étude par la méthode des projections.) 

Trichius abdominalis. (Étude par la méthode des projections.) . 

Staphyliniens. (Étude par la méthode des projections.) . 

Muscles respiratoires du Staphylinus olens . TENET 

Cureulioniens (Chlorophanus viridis. (Étude par la méthode des pro- 
jections.) . ‘ 

Élatérides (Corymbites latus.) (Étude par la méthode des projections.). 


Donacia simplex, Crioceris merdigera et Chrysomela  staphylæa. 
(Etude par la méthode des projections). 


Coléoptères chez lesquels les régions latérales des arceaux tergaux se 
creusent en expiration, tandis que la partie médiane se soulève ou 
présente un sillon longitudinal : Telephorus, Clytus, Coccinella. 


67 


76 


85 


92 


92 


96 


100 


TABLE DES MATIÈRES. 


CHAPITRE V. — SUITE DE L'ÉTUDE DU PREMIER TYPE. 


B. Hémiptères hétéroptères . DR a CN PA een 

$ XLII. Nepa cinerea. (Étude par la méthode des projections.) 

$ XLIV. Pyrrhocoris apterus. (Étude par la méthode des projections.) 
C. Orthoptères blattiens . . . . . . 


$ XLV. Periplaneta orientalis. (Étude par la méthode des projections). 


§ XLVI. 


A. Odonates . 
$ XLVII. 
$ XLVIII. 


$ XLIX. 


$ L. 
§ LI. 


B. Diptères . 


$ LI. 


Muscles respiratoires de la Periplaneta orientalis 


CHAPITRE VI. — ÉTUDE DU DEUXIÈME TYPE. 


Libellula quadrimaculata. (Étude par la méthode graphique.) 

Étude des mouvements respiratoires de la Libellule par la méthode 
des projections . 

Expériences sur le système nerveux des Libellules 

Aeschna grandis. (Étude par la méthode graphique.) . 

Muscles respiratoires de l’Agrion sanguineum 


Tipula gigantea. (Etude par la méthode des projections.) 


$ LII. Calliphora vomitoria CI ER DER ME Tee 
§ LIV. Étude des mouvements respiratoires de la Calliphora vomitoria par la 
méthode des projections . 
$ LV. Muscles respiratoires de la Calliphora vomitoria 
$ LVI. Scatophaga stercoraria. (Étude par la méthode des projections.) 
$ LVI. Syrphides : Eristalis tenax et Syrphus ribesii. (Étude par la méthode 
des projections.) CAT BE 
$ LVI. Muscles respiratoires de P Eristalis tenax. 
$ LIX. Asilus (s.p. ?) (Étude par la méthode des projections.) 
$ LX. Tabanus bovinus. (Étude par la méthode des projections.) 
$ LXI. Muscles respiratoires du Tabanus bovinus : 
$ LXII. Appendice aux Diptères : Hyménoptères chrysidiens. Chrysis ignita. 


(Etude par la méthode des projections.) . 


C. Hyménoptères porte-aiguillon 


$ LXII. 
$ LXIV. 


Historique 


Vespa germanica. (Etude par la méthode des projections.) 


Pages. 


104 
105 
107 
107 
107 
110 


s 


RRS 


VI 


$ LXV. 
$ LXVI. 


$ LXVII. 
$ LXVII. 
S 'ÉXEX. 
I DXX. 
y LXXI- 


TABLE DES MATIÈRES. 


Muscles respiratoires de la Vespa germanica. EEEE PE O 

Bombus muscorum et Bombus terrestris. (Étude par la méthode des 
projections.) . 

Muscles respiratoires du Bombus terrestris . 

Apis mellifica. (Étude par la méthode des projections.) 

Anthophora retusa. (Étude par la méthode des projections.). 

Hypothèse de Wolff ; RATE RRA ; 

Appendice aux Hyménoptères porte-aiguillon. — Névroptères phry- 
ganiens. — Phryganea striata. (Etude des mouvements respiratoires 
et des muscles de la respiration.) 


D. Orthoptères Forficuliens et Acridiens . 


$ LXXII. 


$ LXXII. 
$ LXXIV. 

$ LXXV. 
$ LXXVI. 
$ LXXVII. 


Forficula auricularia. (Etude des mouvements respiratoires et des 
muscles de la respiration.) 


Acridiens ; AR DEEE R re 
Stethophyma grossum. (Étude par la méthode des projections.). 
Muscles respiratoires du Stethophyma grossum . 
Expériences sur le système nerveux du Stethophyma grossum . 


Stenobothrus variabilis. (Etude des mouvements respiratoires et expé- 
rience sur le système nerveux.) . 


CHAPITRE VII. — ÉTUDE DU TROISIÈME TYPE. 


A. Orthoptères locustiens. 


$ LXXVII. 
§ LXXIX. 
$ LXXX. 


$ LXXXI. 


B. Lépidoptères. 
§ LXXXII. 
$ LXXXIII. 
$ LXXXIV. 
§ LXXXV. 


$ LXXXVI. 


Historique Aa EN ADS 

Decticus verrucivorus. (Étude par la méthode graphique.) 

Étude des mouvements respiratoires du Dectique par la méthode des 
projections 


Muscles respiratoires du Dectique. 


Historique. — Constitution de l'abdomen. — Méthodes d'observation. 
Pieris napi. (Étude par la méthode des projections.) . 

Euchelia Jacobaeae 

Résumé des observations sur les mouvements respiratoires des Lépi- 
doptères . 


Muscles respiratoires des Lépidoptères 


477 
41T 
178 


182 
184 


185 
185 
188 
189 


189 
190 


TABLE DES MATIÈRES. 


Ci Névroptères propres NP Lu PARA O le 
$ LXXXVII. Panorpa communis. (Étude par la méthode des projections.) 
$ LXXXVIIL Chrysopa vulgaris. (Étude par la méthode des projections.) . 
$ LXXXIX. Sialis lutaria. (Étude par la méthode des projections.) 
$ XC. Muscles respiratoires de la Sialis lutaria . 


CHAPITRE VIII. — RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. 


$ XCI. Relation entre la structure anatomique et la forme des mouvements 
respiratoires. — Mouvements abdominaux et mouvements thora- 
ciques. — Tableau I 


$ XCII. Diminution du diamètre vertical de l'abdomen en expiration. — 
Tableau IT 


$ XCI. Types respiratoires. — Changements de longueur de l'abdomen. — 
Tableau II i i : 
$ XCIV. Mouvements respiratoires progressifs. — Tableau IV. 
$ XCV. Pauses et arrêts. — Tableau V . SET ? 
$ XCVI. Vitesses de expiration et de l'inspiration. — Phase active et phase 
passive. 
$ XCVII. Muscles respiratoires . a 
$ XCVIII. Mouvements généraux de labdomen . 
$ XCIX. Influence du système nerveux. — Tableau VI 


EXPLICATION DES PLANCHES 


—— LLC CCD ———— 


VII 


Pages. 


192 
192 
194 
195 
196 


RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


SUR LES 


MOUVEMENTS RESPIRATOIRES 


INSECTES. 


CHAPITRE PREMIER. 


INTRODUCTION. 


$L 


LIMITES DU TRAVAIL. 


Fidèle au plan que je me suis tracé, il y a longtemps, et qui consiste à 
étudier successivement les différents phénomènes physiologiques chez les 
animaux articulés, j'ai consacré les recherches actuelles à l'examen des 
mouvements respiratoires des insectes. 

Le sujet étant trop étendu pour en aborder simultanément toutes les 
Parties, j’ai laissé momentanément de côté les larves et les nymphes et, me 
bornant aux insectes à l'état parfait, je me suis attaché à élucider les points 
Suivants : 

1° Forme de l'inspiration et de l'expiration ; 

2° Parties du corps participant aux mouvements respiratoires ; 
9° Détermination exacte des muscles expirateurs et inspirateurs ; 
Influence de quelques parties du système nerveux sur les mouvements 
de la respiration. 

Tome XLV. 1 


2 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Une notice préliminaire que j'ai présentée à l’Académie royale de Belgique 
le 3 juin 1882 ! renferme l'énoncé rapide des principaux résultats que 
j'avais obtenus alors. Le présent Mémoire modifie peu les conclusions de la 
notice qui l’a précédé, mais il contient l'exposé complet des méthodes dont 
j'ai fait usage, la description détaillée des mouvements respiratoires des types 
principaux et une foule de faits plus ou moins importants que j'avais dù 
passer sous silence dans un simple résumé. 

Postérieurement à la publication de ma Communication préliminaire, el 
alors que le Mémoire actuel était entièrement terminé, le D" O. Langendorff 
a fait paraître dans le volume de 1883 des Archiv für Anatomie und Phy- 
siologie de His, Braune et Du Bois-Reymond, une note fort intéressante, 
intitulée Das Athmungscentrum der Insecten. 

Ainsi qu'il arrive si souvent aujourd'hui, l’auteur, ignorant l'existence de 
mes recherches, a étudié, par des procédés analogues, quelques-unes des 
questions que j'ai cherché à résoudre. Ses résultats concordent sensiblement 
avec les miens. Je suis heureux de pouvoir citer Langendorff, et je ferai 
ressortir plus loin la part qui lui revient dans nos connaissances sur les 
mouvements respiratoires des insectes. 

J'ai soumis à l'observation et souvent à des expériences variées 63 formes 
différentes; nombre considérable, si l’on tient compte des difficultés pra- 
tiques, du temps qu'ont demandé certaines études, telles que celles qui 
concernent l’Hydrophile, le Dytique, l'Oryctes, les Libellules, ete., et enfin 
de la nécessité où je me trouvais de ne m'adresser qu’à des insectes assez 
communs pour pouvoir répéter les essais d’une façon suffisante. 

Obligé d'observer les animaux vivants et aussi vigoureux que possible, 
j'ai nécessairement limité mon examen aux formes indigènes. Je laisse aux 
naturalistes habitant l'Europe méridionale ou d’autres contrées plus riches 
que la nôtre en insectes de grande taille, le soin d'étudier les mouvements 
respiratoires. de toute une série d'animaux intéressants dont je n'ai pu 
m'occuper. 


1 Recherches expérimentales sur les mouvements respiratoires des insectes. (Communication 
préliminaire.) Bull. de Acad. royale de Belgique, 3° série, t. IHI, p. 727, 1882. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 5 


$ IL 


HISTORIQUE. 


Les mouvements d'inspiration et d'expiration de plusieurs insectes de 
grande dimension appartenant aux groupes des Coléoptères, des Orthoptères, 
des Odonates, etc., sont si apparents qu’ils ont attiré de bonne heure latten- 
tion des observateurs; aussi de nombreux physiologistes ont-ils cherché à 
étudier le mécanisme respiratoire de ces animaux ; les uns lont fait à l'œil 
nu, d’autres se sont servis de la loupe; tous, sauf Hausmann dont je parlerai 
au $ Il et Langendorff dont la notice est postérieure à la publication de mes 
méthodes personnelles, se sont bornés à lobservation simple. 

Comme l'exposé détaillé des résultats auxquels ces auteurs ont cru arriver 
a sa place marquée en tête des paragraphes qui traitent spécialement de 
chaque forme caractéristique, je me bornerai ici à donner, à titre de rensei- 
gnement, la liste des observateurs, par ordre de dates, avec l'indication des 
insectes ou des groupes d'insectes qu’ils ont examinés. 

Le lecteur voudra bien remarquer : 4° que cette liste ne concerne que les 
observations sur les mouvements respiratoires et ne se rapporte à aucun des 
autres faits rentrant dans la série des phénomènes physiques ou chimiques 
de la respiration; 2 qu'il a fallu conserver certains noms d'insectes d’une 
valeur très indécise, lorsqu'il a été impossible de savoir exactement de quelle 
forme il s'agissait en réalité. 


1645. M. Avr. Severinus !. . Gryllus. 

1663. D. Scurvex 2. . . . Coléoptères. 

1669. M. Marrionmi5 . . . Verà soie, Locusta. 
RTL Frans 20% Hydrophilus. 


! Severinus. Zootomia Democrilæa, ete. Norimbergae, 1645, p. 344. (Cité d'après 
Hausman et Treviranus.) 
2 SCHENCK. Epistola ad autorem Gammarologiae, dans Sacus, Gammarologia, p. 935. 
Francofurti et Lipsiae, 1665. 
MaLicui. Dissertatio epistolica de Bombice, page 20 dans Pédition de ses œuvres, 
publiée à Leyde en 1687. (D'après Hagen la première édition est de 1669.) 
4 Friscu. Beschreibung van allerley Insecten in Teutschland, Th. I, p. 30. Berlin, 1721. 
(Cité par Nitzsch.) 


| 
o 


4 RECHERCHES EXPERIMENTALES 


1749. Auc.-Jon. Rôsez 5 . . Grandes libellules. 

1799. N.-L. Vauaqueuin 6 . . Locusta viridissima. 

1803. J.-F.-L. Hausmann”. . Locusta viridissima, Libellules, Géotrupes. 

1805. W. Sonc8 . . . . Lucanus cervus, Locusta viridissima, Sphinx euphor- 
biae. 

1807. L. SpazLANZanI ?. . . Libellula. 

1808. Cur.-L. Nrrzsou 19 . . Diptères, Hyménoptères, Lépidoptères et Coléoptères. 

1811. Cur.-L. Nrrzsou +! . . Hydrophilus. 

1814. G.-R. Treviranus 12 . Libellula, Cicada, Acridium, Colėoptères, Lépidoptères. 

1817. J.-R. Renccer !5. . . Locusta. 

1832. H. Burmeister +4. . . Melolontha, Libellula. 

1833. L. Durour 5. . . . Nepa cinerea. 


1836. G. Newport 16 . . . Bombus, Apis mellifica, Anthophora retusa, Locusta 
viridissima, Sphinx ligustri. 
' 1836. Goapry 17. . . . . Insectes non spécifiés. 


1838. Anr. Ducis 8 . . . (Coléoptères, Hyménoptères, Locusta, Musca, Helophilus. 


5 Rôsez. L'édition que j'ai consultée est l'édition hollandaise : Natuurlyke historie der 
Insecten. Haarlem en Amsterdam, 1764-1768. — Tweede deel, p. 191, $ 9. 

VAUQUELIN. Observations chimiques et physiologiques sur la respiration des insectes et des 
vers. (Ann. de Chimie, t. XII, p. 273, 1792.) 

Hausmann. De Animalium exsanguium respiratione, Commentatio. Hannoverae, 1803. 

Sorc. Disquisitiones physiologicae circa respirationem insectorum, etc. Rudolstadt, 1805. 

SPALLANZANI. Dans SENNEBIER. Rapports de l'air avec les êtres organisés et tirés des 
journaux d'observation et d'expériences de L. Spallanzani, p. 66. Genève, 1807. 

Nurzscu. Commentatio de respiratione animalium. Vitebergae, 1808, p. 39. 

Voyez aussi Archiv für die Physiologie de Reil et Autenrieth, Bd. VI, Halle, 

1807-1808. 

Nirzscu. Ueber das Athmen der Hydrophilen. (Archiv für die Physiologie de Reil et 
Autenrieth, Bd. X, p. 454.) Halle, 1811. 

TreviRANUS. Biologie oder Philosophie der lebenden Natur, Bd. IV, pp. 157-158. Göt- 
tingen, 1814. 

Renccer. Physiologische Untersuchungen über die Thierische Haushaltung der Insecten, 
p. 38. Tubingen, 1817. 

. Burueisrer. Handbuch der Entomologie, Bd. I, p. 419. Berlin, 1832. 

; Durour. Recherches anatomiques et physiologiques sur les Hémiptères. (Acad. des sciences 

de Paris, savants étrangers, t. IV, p. 384, 1833.) 

ÿ Newport, On the respiration of Insects. (Philosophical Transactions of the royal Soc. of 
London, part. Il, 1836.) 

Goapey. Medical Gazette, 2 avril 1836. (Cité par Newport dans l’ouvrage précédent, en 
note, p. 549.) 

48 Ducis. Traité de physiologie comparée, t. IL, p. 555. Montpellier, 1838. 


o @ u 


> 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 


gz 


1859 et 1848. C.-G. Carus t°. Decticus verrucivorus. 

1854. Tu. Wicziams 20. . . Insectes non spécifiés. 

1855. Fr. Barrow 2 . . . Libellula, Gryllus. 

1860. E. Favre? . . . . Dytiscus. 

1861. H. Rarake 5. . . . Carabus, Dytiscus, Staphylinus, Scarabœus, Cetonia , 
Hister, Cerambyx, Tenebrio, Bruchus, Attelabus , 
Chrysomela, Hymėnoptères, Tipula, Musca, Empis, 
Panorpa, Libellula, Lépidoptères, Blatta, Gryllus, 
Gryllotalpa, Acridium, Truxalis, Mantis, larves et 


nymphes. 
1864. E. BaupeLoT ?* . . . Libellules et larves de libellules. 
1872. O. Liese  . . . . Insectes non spécifiés (cite surtout les observations des 


auteurs précédents). 
1875-1876. M. Gard 26. . Libellules. 
4875. J. Künkez D'Hercuzas?7. Volucelles. 
1875. O.-J.-B. Worrr % . . Apis mellifica. 


19 Carus. Traité élémentaire d'anatomie comparée. (Traduction française, pp. 338 et suiv.) 
Bruxelles, 1839. 

— Tabulae analomiam comparativam illustrantes, pars VIL, tab. TII, fig. 9 et 10. Lip- 
siae, 1848. 

WiLLians. On the Mechanism of Aquatic respiration and on the structure of the Organs 
of breathing in the invertebrate animals. (Ann. and Mag. of natural history, second 
series, vol. XII, p. 135, 1854.) 

BarLow. Observations on the respiratory movements of Insects. (Philosophical Trans., 
vol. CXLV, part. I, p. 139.) London, 1855. 

? Favre. De l'influence du système nerveux sur la respiration des Dytiques. (Ann. des se. 
nat., Zoologie, 4° série, t. XII, p. 321, 1860.) 

Raruke. Anatomisch- physiologische Untersuchungen über den Athmung prozess der 
Insekten. (Schriften der physik.-ök. Gesellsch. zu Königsberg, Jahrg. 1, Heft H, 
p. 99, 41861.) 

BaupgLor. De l'influence du système nerveux sur la respiration des insectes. (Ann. des 
sc. nat., Zoologie, 5° série, t. II, p. 45.) Paris, 1864. 

Liege, Ueber die Respiration der Tracheaten, besonders über den Mechanismus derselben 
und über die Menge der ausgeathmeten Kohlensaüre. Thèse d’Iena. Chemnitz, 1872. 

GIRARD. Traité élémentaire d'entomologie, t. I, p. 31, et t. IL, 4x fasciculé, p. 330. 
Paris, 1873-1876. 

KüNkEL »’'HercuLas. Recherches sur l'organisation et le développement des Volucelles, 
1" partie. Paris, 1875. 

(La 2e partie, non publiée actuellement, sauf les planches, renfermera les obser- 
vations sur le mécanisme respiratoire que l’auteur se borne à effleurer dans la 
1e partie.) 

Wozrr. Das Riechorgan der Biene. (Nova acta der K. Leop. Carol. Deutschen Akademie 
der Naturforscher, Bd. XXXVII, n" 1, pp. 11 et suiv.) Dresde, 1875. 


6 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


1876. M. Ginpwoyn 2. . . Apis mellifica. 

4877. V. Graser 50. . . . Melolontha, Acridiens, Libellula. 

1878-1880. A.-S. Packard 5!. Acridiens, Géotrupes. 

1880. B. Lucusincer 52. . . Larves de libellules. 

1880. Cu. Sepewicx Minor 5. Acridiens. 

1882. E. Dônuorr 5 . . . Apis mellifica. 

1883. O. Lancenporrr 55 . . Vespa, Bombus, Apis, Melolontha, Libellula, Æschna. 


L'aspect de cette longue liste comprenant des noms d'observateurs très 
sérieux ferait supposer, au premier abord, que le sujet est épuisé et que les 
mouyements respiratoires des insectes sont parfaitement connus dans tous 
leurs détails. Il en serait ainsi, en effet, et mon travail maurait aucune 
raison d’être si la méthode de l'observation simple était exempte de causes 


d'erreurs. 
Les causes d'erreurs sont malheureusement nombreuses ; en effet, pendant 


la respiration, ce n'est pas dans un seul des anneaux du corps que les 
arceaux tergal et sternal se déplacent l'un par rapport à l’autre; ce ne sont 
pas non plus deux somites seulement qui s'éloignent où se rapprochent ; les 
mouvements ont lieu, en général, dans la plupart des anneaux de l'abdomen. 

On comprend, dès lors, combien il est difficile de suivre de l'œil ce qui 
se passe à peu près en même temps dans une série de somites dont les 
pièces ne se meuvent pas exactement de la même manière; l'attention se 


29 GirpwWoyn. Anatomie et physiologie de l Abeille, p. 24. Paris, 1876. 

0 Grager. Die Insekten, 4° Theil, pp. 106 à 414 et 364 à 365. München, 1877. 

34 Packard. Anatomy and Embryology of the Locust. (First annual Report of the United 
States Entomological commission. Rocky Mountain Locust, pp. 269 et suiv.) Was- 
hington, 1878. 

— Second Report, etc., p. 181, en note. Washington, 1880. 

32 Lucusincer. Weitere Versuche und Betrachtungen zur Lehre von den Rückenmarkcentren. 
Anhang : Ueber das Respirationscentrum der Libellenltarven. (Archiv für die 
gesammte Physiologie de Pflüger, Bd. XXI.) Bonn, 1880. 

33 Sepewick Minor. Histology of the Locust and the Cricket, dans le Report ci-dessus, p. 196. 

34 Dônuorr. Beiträge zur Physiologie, $ I, Das Athmungscentrum der Honigbiene. (Archiv 
für Anatomie und Physiologie de His, Braune et Du Bois-Reymond. Physiolo- 
gische Abtheilung, p. 162.) Leipzig, 1882. 

35 LANGENDORFF. Studien über die Innervation der Athembewegungen. Sechste Mittheilung. 
Das Athmungscentrum der Insecten. (Archiv für Anatomie und Physiologie. Phy- 
siologische Abtheilung, p. 80.) Leipzig, 1883. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. ri 


fatigue, on voudrait immobiliser l'animal dans chaque phase, l'observateur 
consciencieux doute et finit par formuler des conclusions vagues. 

L’appréciation ci-dessus est si vraie qu’il est à peu près impossible, après 
avoir lu les travaux de presque tous les naturalistes que je viens de citer, 
de se former une idée nette des mouvements respiratoires des trachéates. 

Les uns, comme Schenck, Sorg, Nitzsch, Treviranus, Rengger, Burmeister, 
Liebe, emploient des termes sans précision ou indiquent une comparaison 
plus ou moins satisfaisante entre le mécanisme respiratoire des insectes et 
celui des vertébrés; d’autres, tels que Malpighi, Spallanzani, Newport, Dugés, 
Carus, Williams, Barlow, Faivre, Wolff, Girdwoyn, Packard, etc., wont 
observé qu'une forme ou un petit nombre de formes et, à supposer qu'ils 
aient toujours bien vu, ne possèdent point les matériaux nécessaires pour 
énoncer des conclusions générales. 

Deux naturalistes seulement ont dominé la question de haut et ont obtenu 
de la méthode d'observation directe tout ce qu’elle pouvait donner : ce sont 
V. Graber et surtout H. Rathke, auteur d’un mémoire extrêmement remar- 
quable, auquel je renverrai souvent. Si des détails leur ont échappé, s'ils ont 
été victimes de certaines illusions, c’est, encore une fois, qu'ils ne se sont 
servis que d’une méthode unique et imparfaite. 

Je viens de signaler l’indécision dans laquelle nous laissent les publications 
du plus grand nombre des spécialistes. Cette indécision se traduit d’une 
façon caractéristique dans les traités d’entomologie et dans les ouvrages 
généraux qui parlent de lorganisation des Arthropodes. Leurs auteurs 
insistent sur la structure des trachées, sur celle des stigmates et puis glissent 
rapidement sur la question cependant si importante des mouvements respira- 
toires, comme s’il s'agissait d’une chose très simple à laquelle il est à peu près 
inutile de s'arrêter. 

On peut cependant citer une honorable exception : grâce à une bonne 
analyse du mémoire de Rathke, A. Gerstaecker a donné dans ses Arthropoda 
des Bronn’s Klassen und Ordnungen des Thier Reichs * un développement 
suffisant à la description des mouvements d'inspiration et d'expiration des 
insectes. 


1 Band V, Lieferung 3. Leipzig und Heidelberg, 1867, p. 131. 


8 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


$ HL 


MÉTHODES DE Hausmann ET DE MAURICE GIRARD. 


L’insuffisance de l'observation simple dans l'étude des mouvements respi- 
ratoires des insectes, comme dans celle de presque tous les phénomènes 
physiologiques consistant en mouvements combinés et, par suite, la nécessité 
de faire usage, parallèlement, d’une deuxième méthode plus sùre, la méthode 
graphique ou toute autre permettant de suivre les diverses phases sans com- 
mettre d'erreurs, ont suggéré autrefois à Hausmann et récemment à Maurice 
Girard l'emploi de dispositifs plus ou moins heureux que je vais décrire 
avec quelques détails. 

Hausmann ! remplit partiellement d’eau un tube de verre gradué, ver- 
tical, long de 30 centimètres, large de 15 millimètres, fermé à son extrémité 
supérieure et plongeant dans l’eau par son extrémité inférieure ouverte. 

IL introduisit une sauterelle verte (Locusta viridissima) dans la portion 
supérieure contenant de l'air et dont la capacité était d'environ 40 à 12 cen- 
timètres cubes; puis il abaissa le tube jusqu'à ce que les niveaux du liquide 
à l’intérieur et à l'extérieur fussent les mêmes. 

Dans ces conditions, Hausmann vit les mouvements respiratoires de 
l'insecte déterminer des oscillations dans la colonne d’eau renfermée dans le 
tube ; cette colonne montant et descendant d’une façon rhythmique. 

Hausmann voulut répéter la même expérience en se servant tantôt de 
Libellules, tantôt du Geotrupes stercorarius, mais les déplacements de la 
colonne liquide furent si faibles qu'il devenait très difficile den apprécier la 
valeur. 

Bien que cette méthode ne puisse donner aucune solution quant au méca- 
nisme des dilatations et des contractions respiratoires de l'abdomen des 
insectes, elle semble cependant, à première vue, susceptible de fournir quel- 
ques indications précises sur les changements de capacité du corps, ainsi 


1 De animalium exsanguium respiratione Commentatio, p. 8. Hannoverae , 1803. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 9 


que sur les volumes d'air inspirés et expirés. Aussi ai-je voulu l'essayer, en 
modifiant toutefois l'appareil de façon à le rendre beaucoup plus sensible. 

J'ai pris d’abord comme sujet d'expérience l'Hydrophile brun (Æydro- 
philus piceus), dont les mouvements respiratoires ont une grande amplitude 
(voy. $ XI et XCII). L'instrument dont je me suis servi était 
construit de la manière suivante (fig. 4): une petite éprouvette 
de verre À, de 48 millimètres de diamètre intérieur, est fixée 
verticalement à un support, l’orifice en bas. Cet orifice est 
muni d'un bouchon de caoutchouc B, traversé par Pune des 
branches d’un tube de verre €, courbé en U et renfermant de 
l’eau dans ses deux branches jusqu'à une certaine hauteur. 

La branche extérieure et libre est appliquée contre une 
échelle graduée en demi-millimêtres, tandis que la branche 
qui traverse le bouchon pénètre de plusieurs centimètres dans 
l’intérieur de l’éprouvette. Cette branche intérieure est garnie 
Ko) près de son ouverture supérieure d’un collier de liège D 
destiné à empécher l'insecte de tomber dans le bas de l'appareil. 

Enfin de l’eau remplit, autour de la branche interne, l’espace cylindrique 
compris entre le collier de liège et le bouchon de caoutchouc. La couche 
liquide en question m'a permis de réduire à un minimum la chambre à air 
occupée par l'animal et assure de plus à l'instrument une fermeture parfaite. 

Le diamètre intérieur du tube en U a varié suivant les expériences; ainsi 
j'ai successivement employé, avec des Hydrophiles différents, des tubes de 
4 millimètres et de 2 millimètres de diamètre. 

On voit, par la figure et par la description, que l’éprouvette À offre à sa 
Partie supérieure un espace plein d'air communiquant librement avec le tube 
en U. C’est dans cet espace que j'introduis un Hydrophile vigoureux privé 
de ses élytres, de ses ailes et de ses pattes et fixé le long d’une bandelette 
de liège par le prothorax et l'extrémité de l'abdomen +. 


D EE DE LE DE 


ET. ppp 


1 U est indispensable de fixer l'animal comme il est dit dans le texte. Sans cette précau- 
tion, il exécute de violents mouvements de l'abdomen tout à fait étrangers à lacte respira- 
toire et qui se traduisent du côté de la colonne liquide par des oscillations nuisibles 
Masquant complètement les oscillations respiratoires qu’on s'était proposé d'étudier. 


Tome XLV. 2 


10 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


En déduisant de la capacité de la chambre à air le volume de l'insecte et 
de la bandelette de liège qui le porte et en y ajoutant d'autre part la capacité 
de la partie vide de la branche interne du tube en U, on trouve que le volume 
d'air dans lequel l'Hydrophile se meut est de 10 à 11 centimètres cubes. 

Les choses étant disposées comme il vient d’être indiqué, si l’on observe, 
à l’aide d’une loupe montée sur pied, la colonne liquide de la branche 
externe de l'instrument, on voit cette colonne baisser d’une façon brusque à 
chaque mouvement expiratoire du coléoptère , pour remonter d’une égale 
quantité, mais d’une façon plus lente, pendant l'inspiration. 

Les déplacements sont toujours fort petits; ainsi, dans le cas d’un tube 
en U de 4 millimètres de diamètre intérieur, la course de la colonne liquide 
n’a que ‘/, de millimètre de hauteur; elle atteint '/, millimètre pour un tube 
dont le diamètre intérieur est de 2 millimètres seulement. 

Afin de m'écarter le moins possible de lexpérience de Hausmann, j'ai 
répété plus tard les mêmes essais sur un grand Locustien, le Decticus verruci- 
vorus. Le tube en U avait 2 millimètres de diamètre intérieur. Les dépla- 
cements de la colonne liquide ne dépassèrent guère '/, millimètre !. 

Il me reste à faire ressortir les défauts du procédé de Hausmann, défauts 
qui rendent sa méthode inapplicable dans la plupart des cas. 

1° Cette méthode exige l'emploi exclusif d'insectes de grande taille, puis- 
que l’un de nos plus gros coléoptères indigènes à mouvements respiratoires 
très amples ne fait osciller que de ‘/}, millimètre une colonne d’eau de 2 milli- 
mètres de diamètre; 

20 L'observation de si petits déplacements est difficile et demanderait, pour 
se faire avec exactitude, emploi d'instruments accessoires spéciaux ; 

3° Les oscillations de la colonne liquide indiquent seulement que l'insecte 
se gonfle et se dégonfle et ne peuvent faire connaître la valeur des change- 
ments réels du volume, puisqu’en expiration, pendant que l’abdomen diminue 
de diamètre, une certaine quantité d’air est expulsée du système trachéen, 


4 Pour une cause que je ne m'explique pas bien, ce furent, cette fois, les ascensions et 
non les descentes qui coïncidèrent avec les mouvements expiratoires. Ce détail n’a, du 
reste, qu'une valeur minimé; il importe surtout de remarquer le peu d'amplitude des 
oscillations de la colonne d’eau. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 4l 


tandis qu’en inspiration, lorsque le diamètre de l'abdomen augmente, de l'air 
de la chambre occupée par l'insecte se précipite dans ses trachées. En résumé, 
il ne faut jamais oublier que c’est une espèce d’éponge qui change ici de 
volume apparent et non un corps plein, compacte, qui s'étend ou se resserre ; 

4° Enfin, la méthode n’apprend rien quant au mécanisme respiratoire, 
quant à la nature des pièces squelettiques qui se déplacent et quant aux 
mouvements particuliers de chacune d'elles. 

Le procédé de Hausmann n’a donc qu'un intérêt historique et les quelques 
pages que je lui ai consacrées ont eu pour but de faire bien comprendre 
Pourquoi je n’en ai pas fait usage dans mes recherches personnelles. 

J'arrive au moyen préconisé par Maurice Girard. Voici en quels termes il 
l'indique dans son Traité d’entomologie : « Il sera possible de rechercher 
sur de gros insectes, comme des Sphinx, en emboitant leur abdomen dans 
une flexible enveloppe de caoutchouc reliée à un style, d'obtenir un tracé 
graphique de ces mouvements et d'étudier leur rhythme dans ses deux 
périodes, corame M. Bert l’a fait avec tant d'habileté pour les vertébrés des 
diverses classes. » !. 

Mon savant confrère et ami ne se fait probablement pas une idée exacte 
de la valeur des forces que les insectes mettent en jeu dans les mouvements 
respiratoires. Ces forces sont toujours minimes. Une enveloppe de caoutchouc, 
quelque mince qu'elle soit, effacerait tous les détails et, à supposer qu’elle 
permit encore des mouvements respiratoires vrais, elle rendrait ceux-ci peu 
nets et d’une interprétation pénible ?. 

Il oublie aussi qu’en même temps qu’ils exécutent les mouvements respi- 
raloires proprement dits, les insectes captifs impriment à leur abdomen des 
Mouvements d’oscillation ou de torsion d’une amplitude bien plus grande et 
qui font le désespoir des observateurs. Son exemple méme est peu heureux ; 
les Sphinx contournent leur abdomen dans tous les sens et j'ai dû renoncer 
à les soumettre à la méthode graphique 5. 

Une longue expérience me fait considérer le procédé de Maurice Girard 


1 Les Insectes. Traité élémentaire d'entomologie, t. 1, p. 31. Paris, 1873. 
2 Voyez § IV. 
3 Voyez $ LXXXII. 


12 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


comme impraticable ; mais je tiens à dire que c’est la lecture du passage cité 
de son ouvrage qui m'a donné la première idée d'appliquer à Pétude du 
mécanisme respiratoire des trachéates une méthode permettant d'obtenir des 
tracés ou des dessins qui représentent les diverses phases des mouvements 
respiratoires. 


CHAPITRE II. 


MÉTHODES EMPLOYÉES DANS CES RECHERCHES. 


Sans négliger l'observation directe, qui, insuffisante seule, devient fort 
utile lorsqu'on en fait usage parallèlement à d’autres procédés plus rigou- 
reux, je me suis servi concurremment de deux méthodes : de la méthode 
graphique proprement dite, avec leviers inscripteurs, cylindre tournant 
enfumé, etc., et de la méthode des projechons, qui, pour le but spécial que 
je m'étais proposé, est certainement la meilleure. 


$ IV. 


MÉTHODE GRAPHIQUE. 


Je rappellerai que la méthode graphique a été employée avec le plus 
grandřsuccès par Paul Bert ! pour l'étude des mouvements respiratoires des 
Poissons, des Amphibiens, des Reptiles et des Oiseaux et qu'une série de 
physiologistes lont appliquée à l'analyse des mêmes mouvements chez les 
Mammifères. 


1 Leçons sur la physiologie comparée de la respiration, pp. 225 à 332 et suiv. Paris, 1870. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 15 


Chez les Insectes, la méthode est d’un emploi assez difficile, et, par suite 
de causes matérielles que j'indiquerai plus bas, elle est loin de donner tous 
les résultats qu’on croirait pouvoir en attendre. 

Le paragraphe actuel sera donc consacré, non seulement à la description 
des petits instruments que j'ai imaginés, mais aussi à l'indication des 
causes d’insuccès dans des cas déterminés. Il importe, en effet, que le lecteur 
sache que j'ai épuisé tous les moyens et qu’il ne conserve aucun doute sur 
la valeur relative de la méthode des projections qui sera décrite dans le 
paragraphe suivant. 

Lorsqu'on voit respirer un insecte, un Coléoptère, par exemple, l'idée qui 
vient immédiatement à l’esprit est de faire reposer sur la région de l'abdomen 
qui se déplace pendant les mouvements respiratoires, un petit levier très léger 
en contact par une de ses extrémités avec un cylindre tournant enfumé. 

Dans mes recherches sur les mouvements du cœur des Crustacés déca- 
podes !, j'avais employé, comme leviers, des fils de verre étirés à la lampe ; 
ces leviers sont encore trop lourds pour les Insectes. Je me suis fort bien 
troavé de fines bandes de 3 à 4 millimètres de large coupées au canif et à 
la règle dans du papier bristol ordinaire. Si on ne dépasse pas une certaine 
longueur, ces bandes sont suffisamment raides. Elles offrent, de plus, cet 
avantage qu'on leur donne aisément les dimensions et les formes qu’exige 
n'importe quelle circonstance particulière. 

La relation entre le style inscrivant et le corps de l'animal peut affecter 
deux formes : ou bien le style, véritable levier du troisième genre, tourne 
librement autour d’un axe horizontal placé à une de ses extrémités et repose 
librement, par son poids, sur une des pièces squelettiques mobiles de l'in- 
secte; ou bien, le style, indépendant de tout support autre que le corps de 
l’articulé, est fixé sur l'animal même. 


A cas : Levier du troisième genre. — La bande de papier bristol, 
dont le poids ne doit pas dépasser 4 ‘}, décigramme pour nos plus grands 
insectes indigènes, et dont la longueur est de 12 centimètres, est placée 


4 Recherches physiologiques sur le cœur des Crustacés décapodes (ARCHIVES DE BIOLOGIE, 
t. L, fascicule IV, p. 595). Bruxelles, 1880. 


14 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


de champ. Celle de ses extrémités qui frotte sur le cylindre enfumé est 
taillée en pointe; l’autre est percée d’un petit trou pour le passage de 
laxe (fig. 2). 

L’axe est constitué, soit par une aiguille, soit par une fine épingle à 
insectes. Deux perles de 
verre enfilées sur cet axe 
et calées à l’aide de petits 
fragments de liège per- 
mettent au levier de tourner 
presque sans frottement, 


tout en s'opposant à des déplacements latéraux. 

L’axe est piqué dans un support de liège que l'opérateur taille au moment 
de l'expérience, de sorte qu'il est très aisé de placer l'axe et le levier dans 
les positions les plus favorables. 

Il convient, en général, de ne pas faire reposer le levier directement, 
par son bord inférieur, sur les téguments de linsecte, mais bien, par un 
petit talon saillant de 5 millimètres de longueur qu’on laisse adhérent en 
un point convenable du levier lorsqu'on découpe celui-ci. 

Le but de ce talon est bien simple : le corps des insectes est rarement 
cylindrique; il arrive, chez les Coléoptères, par exemple, chez lesquels le 
levier doit être, la plupart du temps, en rapport avec un arceau tergal de 
l'abdomen, que, lors de l'expiration, cet arceau s'abaisse plus bas que d’autres 
parties voisines (bords épimériens, bords des élytres dans certains cas, ete. ); 
sans talon, le levier viendrait reposer sur ces parties saillantes, ce qui alté- 
rerait profondément le tracé. Grâce à la précaution que je viens de signaler, 
le levier n’est donc jamais en contact avec des portions du corps pouvant 
arrêter son mouvement oscillatoire. 

Il est presque toujours utile de mettre un peu de baume du Canada 
épaissi à l'extrémité du talon. Le levier adhère ainsi d’une façon suffisante 
et ne glisse pas latéralement, quelle que soit l'obliquité que prenne, par 
moments, la région du corps dont on étudie les mouvements. 


J'ajouterai, enfin, que le talon du levier est un point de repère invariable 
qui ne permet aueun changement dans les longueurs relatives des bras de 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 15 


levier de la puissance et de la résistance; condition indispensable lorsqu'il 
s’agit de déterminer les modifications que subit, suivant les circonstances, 
lľamplitude”de la courbe respiratoire d’un insecte donné. 

Dans la plupart de mes expériences le levier avait, comme je l'ai indiqué 
plus haut, 12 centimètres de longueur, le talon était placé à 2 centimètres 
de laxe. 


2e cas : Style inscrivant porté par le corps de l'animal. — Le style est 
constitué par une bande de papier bristol munie, cette fois, d’un talon sail- 
lant de 4 centimètre placé vers le milieu de la longueur. Les deux moitiés 
du style sont modifiées par tâtonnement jusqu’à ce que leurs poids soient 

égaux et qu'elles se fassent équi- 

libre. Le talon, dont on reploie 
une portion à angle droit, offre 
ainsi une pelite surface plane 
7 horizontale que l’on colle au point 

voulu du squelette de linsecte à 
l’aide de baume du Canada très visqueux (fig. 3). 

Cette disposition permet d'obtenir des graphiques assez intéressants, 
indiquant, outre la valeur des déplacements verticaux, toutes les inclinai- 
sons qu’affecte, dans le plan oscillation du style, la pièce tégumentaire sur 
laquelle ce style est fixé. 


Je n'insisterai pas sur la structure de l'appareil enregistreur que j'ai 
employé ; il suffira de dire que le cylindre tournant est vertical, qu'il effectue 
une rotation en X5 secondes et qu'un compteur battant la seconde donne, 
lorsque cela est nécessaire, la durée exacte des divers phénomènes. 

Une première difficulté que lon rencontre dans ce genre d'expériences 
réside dans la multiplicité des petits moyens à mettre en œuvre pour fixer 
les insectes sans troubler leurs mouvements respiratoires. Il faut, pour ainsi 


dire, imaginer une disposition spéciale pour chaque forme animale. Je ne 
m'appesantirai pas sur ces détails, qui rempliraient plusieurs pages; j'indi- 
querai brièvement quelques précautions indispensables. 

La meilleure manière de fixer les Libellules, les Acridiens et d’autres 


16 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


insectes dont les organes du vol peuvent être relevés sans inconvénient du 
côté du dos, consiste à rassembler leurs ailes dans un plan vertical et à les 
serrer entre deux lames de liège ou entre une lame de liège et une lame 
de carton attachées elles-mêmes, d’une façon quelconque, à un support 
fixe. 

Quant aux Coléoptères, l'opération est plus complexe. Avec des ciseaux 


' fins, on pratique dans leurs élytres une fenêtre rectangulaire, plus ou moins 


grande suivant les cas, puis, par celte ouverture, on enlève, en les coupant, 
la plus grande partie des ailes. 

On met ainsi à nu une portion de la face dorsale de l’abdomen. On fixe 
ensuite l'insecte en implantant de fines épingles dans les rebords latéraux du 
prothorax et dans les rebords latéraux aussi des élytres. Ces épingles ne 
peuvent ni léser ni serrer l'abdomen, et l'animal doit être enfilé assez haut 
pour qu'aucune partie de son corps ne touche le support ! (fig. 2). 

Les Coléoptères possèdent une force relative considérable et peuvent 
effectuer à l’aide de leurs pattes des efforts extraordinaires ?. Lorsqu'ils 
sont fixés de la manière que je viens de décrire, ils exécutent constamment, 
pour se dégager, des mouvements violents qui déterminent dans les tracés 
des irrégularités déplorables. Jai donc pris le parti de couper, à ras des 
trochanters, les pattes de tous les Coléoptères sur lesquels j'ai expérimenté. 
Sans cette précaution que j'ai dù employer aussi dans la plupart de mes 
essais sur d’autres insectes et dans mes recherches à l’aide de la méthode 
des projections, il m’eût été souvent impossible d'obtenir un graphique ou 
un dessin satisfaisant. 

Une autre difficulté qui compromet souvent les résultats consiste dans ce 
fait que beaucoup d'insectes, surtout lorsqu'ils sentent le contact du levier 
qu'ils doivent déplacer par leurs mouvements respiratoires, font exécuter à 
leur abdomen soit des mouvements de torsion, soit des mouvements alterna- 


1 Il est presque inutile d'ajouter que l’insecte en expérience, le levier, ete., sont fixés 
sur une tablette susceptible d’être haussée ou baissée à volonté ct que l’on peut approcher 
ou éloigner du cylindre enregistreur suivant les circonstances. 

2 Voyez à ce sujet mes Première et Deuxième notes sur la force musculaire des insectes 
( BULLET. DE L'ACAD. ROY. DE BELGIQUE, 2° série, t. XX , n° 11, 1865, et t. XXII, n° 11, 1866). 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 17 


tifs et presque incessants d'élévation et d’abaissement, dans lesquels il faut 
déméler ce qui revient, d’une part, aux déplacements généraux du corps et, 
d'autre part, aux mouvements respiratoires proprement dits. 

Ce fait regrettable arrive toujours pour les Coléoptères dont on supprime 
les élytres en totalité, au lieu de pratiquer dans celles-ci une fenêtre plus ou 
moins restreinte, comme je l'ai indiqué plus haut t. 

L’ablation d’une portion médiane des élytres permet, au contraire, d'ob- 
server l’animal sous ses allures normales. N’éprouvant pas l'excitation spéciale 
provoquée par la mise à nu de la totalité de l’abdomen, il est bientôt calmé 
et respire alors d’une facon régulière, Si son abdomen exécute parfois des 
mouvements généraux un peu considérables, ceux-ci sont si espacés qu'il 
devient très aisé de choisir une période convenable et d'obtenir un bon 
tracé. 

Il est malheureusement des insectes pour lesquels aucun moyen de con- 
tention ne réussit. Je citerai, à cet égard, les Sphingides et spécialement le 
Smerinthus tiliæ qu'il wa été impossible d'utiliser, ces Lépidoptères tordant 
leur abdomen dans tous les sens et faisant d'autant plus de mouvements non 
respiratoires que l’on cherche davantage à les immobiliser. 

Enfin, une cause toute physiologique qui restreint considérablement 
l'emploi de la méthode graphique est la faiblesse des forces développées par 
les insectes dans leurs mouvements de respiration, surtout pendant la phase 
inspiratoire. 

Je montrerai, en effet, confirmant, en cela, quelques observations faites 
Par mes prédécesseurs, que fort peu d'insectes possèdent de véritables 
muscles inspirateurs, que par conséquent l'inspiration et, par suite, l’éléva- 
tion d’un levier dans des expériences graphiques, s'effectuent exclusivement 
par l’élasticité des téguments et des parois du système trachéen. 

Beaucoup d'insectes de taille moyenne peuvent, il est vrai, mettre en mou- 
vement un levier léger tel que ceux dont j'ai fait usage ; mais la force qu'ils 
Ont à leur disposition est si minime qu'ils ne parviennent pas à vaincre le 


| t Voyez, pour un graphique fourni par un Coléoptère privé complètement de ses élytres, 
e $ XXVI. 


Tome XLV. 5 


18 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


frottement dès que la pointe du levier est mise en rapport avec le cylindre 
tournant enfumé +. 

Il en résulte qu'il faut renoncer à la méthode graphique pour la plupart 
de nos insectes indigènes et que celle-ci ne peut donner de résultats qu'à la 
condition de s'adresser à de gros Coléoptères, à de grandes Libellules ou à 
quelques Orthoptères de forte taille. 

Je ferai encore remarquer que la méthode en question ne permet d'appré- 
cier que la nature et l'amplitude des mouvements des parties déterminées du 
squelette tégumentaire avec lesquelles les leviers se trouvent en contaci et 
que lon reste réduit, pour l'étude des mouvements d'ensemble, à l’observa- 
tion simple avec toutes ses causes d'erreurs °. 

En terminant cet exposé, je crois devoir indiquer brièvement comment a 
opéré ©. Langendorff 5, qui peu de temps après moi eut l’idée d'appliquer la 
méthode graphique à étude des mouvements de respiration des insectes. 
Ce physiologiste fixe l'animal sur une plaque de liège à l'aide de vernis à 
la colophane ; le levier inscripteur n’a qu'un bras et est attaché au corps de 
l'articulé par une petite tige d'aluminium et une gouttelette de cire fondue. 

En comparant les graphiques obtenus par Langendorff aux miens, je 
constate dans les résultats de l’auteur cité des irrégularités provenant cer- 
tainement d’un défaut de l'instrument. Le peu d'amplitude des courbes 
montre, en outre, que le levier employé était très court. 


Je me suis toujours servi, pour garnir le cylindre enregistreur, de papier à la céruse 
AN Les tentatives que jai tes pour diminuer le frottement en munissant l'extrémité 
inscrivante du levier d’un fragment de soie de porc ou de poils de blaireau sont restées 
sans résultat. 

2 On m'objectera peut-être qu'il fallait employer autant de leviers ou de styles inscrip- 
teurs qu'il y a de mouvements à analyser. La réponse est fort simple : un grand Coléoptère 
robuste, tel que l'Hydrophile, déplace déjà péniblement deux leviers; surchargé d’une série 
de petits instruments de ce genre, il rester ait immobile ou ne produirait que des tracés 
incomplets et irréguliers. 

3 Das Athmungscentrum der Insecten, op. cit., p. 82. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 19 


Un 
— 


MÉTHODE DES PROJECTIONS. 


Je viens de montrer, dans le paragraphe précédent, pourquoi la méthode 
graphique employée à lanalyse des mouvements respiratoires des insectes 
n'est applicable qu'à un nombre de formes assez restreint. 

La méthode des projections offre, au contraire, l'immense avantage de 
permettre l'étude presque complète des mouvements respiratoires chez des 
insectes quelconques, depuis les plus volumineux de nos Coléoptères Jusqu'à 
des Diptères inférieurs en taille à la mouche domestique. 

L'idée première de la méthode ne m'appartenant pas, je dirai, plus loin, 
comment et dans quels buts le procédé a été mis en usage antérieurement. 

Voici, d'abord, ma façon personnelle d'opérer : l'insecte fixé sur une 
petite lame de liège, de manière à ne gêner en rien ses mouvements respi- 
ratoires, et à l’aide de moyens semblables à ceux que j'ai décrits à propos 
de la méthode graphique ', est introduit dans une grande lanterne magique 
éclairée par une bonne lampe à pétrole. 

Dans l'instrument que j'ai à ma disposition, l'animal est placé entre la 
Source lumineuse et le jeu des lentilles, de sorte qu’il n’est soumis qu’à une 
température peu élevée. 

On obtient naturellement, sur un écran vertical, une silhouette renversée 
et si l’on ne dépasse pas un certain grossissement (12 diamètres, par exemple) 
On a sous les yeux une image très nette sur laquelle on peut suivre les 
Mouvements respiratoires suffisamment amplifiés pour constater des dépla- 
cements réels d’une fraction de millimètre. 

Ceci étant, on attache sur l'écran une feuille de papier blanc un peu fort 


1 Lorsque l’insecte effectue d’une façon incessante des mouvements non respiratoires 
qui masquent absolument le phénomène à étudier, on peut l’amener à ne plus exécuter 
que des mouvements respiratoires proprement dits en le décapitant. Les mouvements res- 
Piratoires étant purement réflexes continuent, quoique un peu affaiblis et un peu plus lents, 
Chez l'animal privé de ses centres nerveux antérieurs. On verra par la suite de ce travail 
Que je wai employé ce moyen que dans des cas assez rares. 


P AASER EURENA es 


rs 


20 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


et, à l’aide d’un crayon, on trace soigneusement les contours de la silhouette, 
en cherchant, ce qui n’exige que de la patience et de lattention, à faire 
deux dessins superposés, l’un répondant à la phase d'expiration et l'autre à 
la phase d'inspiration. (Voyez les figures 57 à 76, planches T à VII.) 

En changeant la position de l'insecte de manière à produire des silhouettes 
se rapportant à la coupe transverse de telle ou telle partie du corps, et 
même, en collant, avec un peu de baume du Canada, sur certaines pièces à 
mouvements douteux, de petits styles de papier très légers, dont on dessine 
les positions, on arrive à la connaissance complète de tous détails qui carac- 
térisent les mouvements respiratoires d’un insecte donné. 

Les contours au crayon terminés, on les repasse à l'encre de Chine ; on 
peut même, comme je l'ai fait généralement (voyez les figures), mettre une 
teinte uniforme noire sur le dessin d’une des phases, la phase expiratoire, 
par exemple, et, pour éviter toute confusion ultérieure, laisser en blanc ce 
qui dépasse des surfaces appartenant à la phase opposée. 

Prenant, enfin, directement l'insecte comme modèle et l’examinant à la 
loupe, on marque sur les dessins des silhouettes tous les points de repère 
utiles, tels que les limites du thorax, les limites des divers somites abdomi- 
naux, les numéros d'ordre de ces somites, etc. 

Avec de l'habitude l'observateur parvient, à laide de la méthode des 
projections, non seulement à étudier facilement les mouvements respira- 
toires de petits insectes, tels que des Mouches, des Coccinelles, de petits 
Hyménoptères, etc., mais il tranche sans discussion possible, une foule de 
questions que l'observation simple ne permet guère de résoudre avec cer- 
titude. 

Ainsi, il arrive souvent que, trompé par des mouvements d’incurvation, 
on croit voir à l'œil nu ou à la loupe, des allongements et des raccourcis- 
sements alternatifs de l'abdomen, alors que les dessins superposés des 
silhouettes démontrent irréfutablement que la longueur de labdomen ne 
change pas. 

Plusieurs des physiologistes qui mont précédé 1, victimes d’une illusion 


1 Rathke et Graber, entre autres. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 21 


très naturelle, ont dit que les mouvements respiratoires se propageaient, 
chez les insectes, d’anneau en anneau, sous forme d'onde, tandis que le 
procédé permet d'assurer qu'un mouvement progressif de ce genre est rare 
et que, dans la plupart des cas, l'inspiration ou l'expiration sont simultanées 
dans tous les anneaux actifs. 

En outre, le grossissement employé étant déterminé, on peut utiliser les 
dessins pour mesurer, à une petite erreur près, les valeurs relatives ou 
absolues des changements de diamètre et des déplacements des différentes 
parties mobiles du corps des insectes mis en expérience; chose absolument 
impossible par l'observation directe. 

J'ai dit que le principe de la méthode était connu ; en effet, il y a une 
trentaine d'années, le physiologiste anglais J. Hutchinson ', se souvenant 
probablement d’un moyen usité dès l'antiquité pour dessiner des portraits 
en traçant sur une surface verticale les contours de l'ombre produite par la 
tête d’une personne ?, eut l’idée d'appliquer ce procédé très simple à l'analyse 
des mouvements respiratoires de l’homme. 

Il plaçait le sujet nu entre un écran blanc et une source lumineuse très 
éclairante; puis, suivant les bords de la silhouette, il dessinait les contours 
des surfaces thoracique et abdominale dans les deux phases d'inspiration et 
d'expiration. Les figures démonstratives qu'il obtint ainsi ont été publiées 
dans la Cyclopædia of Anatomy, ete., de Todd, puis reproduites dans plusieurs 
traités de physiologie. 

Hutchinson ne pouvait apprécier que des mouvements d’une amplitude 
absolue déjà considérable. L'emploi d’un appareil à projection pour grandir 
notablement l'ombre de petits objets mobiles et pour arriver à dessiner avec 
netteté les diverses phases de mouvements très peu étendus fut un progrès 
considérable. On le doit à mon savant collègue H. Valerius, professeur de 


1 Hurcminson. Article Thorax dans CYCLOPAEPIA OF ANATOMY AND PHYSIOLOGY de Todd. 
Vol. IV. Londres, 1852. 

? Suivant une tradition grecque rapportée par Pline, la fille de Dibutade de Sicyone 
traça sur un mur le contour de l'ombre projetée par la tête de son amant. Une tradition 
analogue attribue la découverte du dessin à Saurias de Samos, qui l'aurait faite en traçant 
sur une muraille ombre d’un cheval. 


su 


care 


22 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


physique à l’Université de Gand, qui, en 1865, a appliqué cette méthode ingé- 
nieuse à l'étude des vibrations de fils de verre attachés par une de leurs 
extrémités à un corps vibrant !. 

Postérieurement à la lecture de ma notice préliminaire à l’Académie 
royale de Belgique ?, E.-J. Marey, poursuivant le cours de ses belles 
recherches sur les mouvements de Phomme et des animaux, a lu, à l'Aca- 
démie des sciences de Paris plusieurs travaux concernant l'analyse du 
mécanisme de la locomotion au moyen de séries d'images photographiques 
recueillies sur une même plaque et représentant les phases successives du 
mouvement. 

Dans la première communication 5 de l'ingénieux physiologiste il ne 
s'agissait que d'épreuves photographiques juxtaposées en série linéaire, les 
unes à côté des autres 4; mais, dans les communications suivantes *, on voil 
figurer des photographies nombreuses empiétant plus ou moins les unes 
sur les autres et qui, dans les endroits où elles se combinent ainsi, rap- 
pellent, jusqu’à un certain point, les dessins imaginés par les frères Weber 
pour représenter la marche de l’homme, les dessins analogues concernant 
le cheval publiés par Colin, les silhouettes superposées de Hutchinson et 
mes silhouettes d’insectes. 

Le lecteur se demandera probablement pourquoi je mai pas eu recours 
aussi à des photographies instantanées dont les résultats doivent être cer- 
tainement plus parfaits que de simples dessins. Je crois qu'un procédé 
photographique m'aurait difficilement permis d'arriver à une analyse aussi 
complète que celle que j'ai obtenue par un moyen plus naïf. 

En effet, les mouvements respiratoires des insectes sont, en général, assez 


4 H. Vauerius. Mémoire sur les vibrations de fils de verre attachés par une de leurs extré- 
milés à un corps vibrant et libres à l’autre. (Mim. pe L'AGAD. ROY. DE BELGIQUE. Collection in-8°, 
t. XVII, 1865.) 

2 Séance de la Classe des sciences du 3 juin. 

3 Comptes rendus de l'Acad. des Sc. de Paris, t. XCV, n° 1, 3 juillet 1882, p. 14. 

4 Voir un facsimile d’une série des épreuves obtenues par M. Marey dans La Nature, 
numéro du 22 juillet 1882, p. 116. 

5 Voir, par exemple : Comptes rendus de l'Acad. des Se. de Paris, t. XCVI, n° 16, 
15 octobre 1883. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 23 


lents pour que l'observateur qui marque, par fractions, les limites des mou- 
vements inspiratoires et expiratoires et qui assiste à la répétition rhythmique 
de ces mouvements, ait tout le temps voulu pour analyser minutieusement ce 
qui se passe. Les feuilles qui portent mes dessins originaux se couvraient 
rapidement de signes, de flèches et de notes qui m'ont toujours permis de 
rédiger immédiatement les résultats de chaque expérience. Au moindre 
doute, je replaçais dans l'appareil à projection l'animal essayé une pre- 
mière fois et celui-ci se chargeait de me fournir, en quelques instants, la 
confirmation ou la correction demandée. 

L'analyse de photographies superposées devant se faire après coup, je 
n’oserais assurer que leur étude fournisse, dans tous les cas, des résultats 
exempts d’indécision '. 


S Vi 


DISSECTION DES MUSCLES RESPIRATOIRES. 


La technique est ici tellement simple qu'il suffira de quelques mots d’indi- 
cation. L’insecte est plongé dans lalcool pur du commerce et y séjourne 
vingt-quatre heures, trois ou quatre jours, ou plus, suivant la taille. A 
l’aide de ciseaux on fend ensuite les tégaments de l'abdomen suivant les 
lignes médianes tergale et sternale, puis d’un coup de scalpel on divise aussi 
le thorax et la tête suivant an plan longitudinal-vertical. 

L'animal est ainsi partagé en deux moitiés symétriques que l’on fixe 
sous leau et que l’on dissèque à la manière ordinaire, sous la loupe de 
Brücke. 

La dissection de la moitié droite, par exemple, permet de rectifier les 
erreurs commises en disséquant la moitié gauche. ; 


1 Dans le cours de mes recherches, J'ai dessiné cent trente-sept silhouettes de mouve- 
ments respiratoires; je wen publie que vingt afin d'éviter la multiplicité des planches. 


24 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ VII. 


PROCÉDÉS EMPLOYÉS DANS LES EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÈME NERVEUX. 


E. Faivre, dans ses recherches sur l'influence du système nerveux sur la 
respiration des Dytiques, a eu recours, dans certains cas, à de véritables 
dissections chez l'animal vivant. C’est ainsi que pour atteindre les ganglions 
abdominaux, il fixait l'insecte sur une plaque de liège, lui enlevait le tergum 
du méso- et du métathorax , écartant et coupant Pæsophage, et qu’il finissait 
par mettre à nu la masse allongée des ganglions de l'abdomen '. 

On comprend combien il est nécessaire d'éviter ces mutilations graves. 
On y arrive en imitant le procédé que V. Lemoine a imaginé jadis pour 
l'excitation des diverses parties du système nerveux de l'Écrevisse, et qui 
consiste à déterminer, une fois pour toutes, les rapports de position exis- 
tant entre les ganglions ou les groupes ganglionnaires et des points de repère 
invariables situés à la surface du squelette tégumentaire ?. 

Il est naturellement indispensable de sacrifier un des individus sur les- 
quels porteront les recherches. Celui-ci est plongé dans l'alcool pur plu- 
sieurs fois renouvelé, ou même dans lalcoo! absolu, jusqu'à ce qu’il soit 
convenablement durci. On le divise ensuite, au rasoir, en deux moitiés 
longitudinales, mais en prenant la précaution de faire passer la section en 
dehors du plan exactement médian, à 4 ou 2 millimètres, par exemple, à 
droite ou à gauche de ce plan. 

L'une des moitiés renferme ainsi la chaine nerveuse ganglionnaire en 
place et rien n’est alors plus aisé que de déterminer quels sont les points 
exacts de la face ventrale et de la face dorsale du corps par lesquels il 
faudra faire passer soit une aiguille, pour rencontrer à coup sûr un ganglion 
ou un groupe de ganglions donnés, soit la pointe d’un petit scalpel ou les 
branches d’une paire de ciseaux fins pour couper la chaine en un endroit 
voulu. 


1 Favre. De l'influence du système nerveux sur la respiration des Dyliques (ANN. DES SC: 
NAT. 200106., 4° sér., t. KIH, p. 326, 1860). 

2 Lemoine. Recherches pour servir à l’histoire des systèmes nerveux, musculaire et glandu- 
laire de lécrevisse; thèse. Paris, 1868. (Reproduit dans les ANN. DES sc. NAT., 5° sér., 
t. IX, 1868.) 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 25 


CHAPITRE I, 


TYPES RESPIRATOIRES. 


$ VI. 


CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. 

Sauf dans des cas rares, le mécanisme respiratoire des insectes est loca- 
lisé exclusivement dans l'abdomen; ce qui a fait dire à V. Graber, par 
exemple, que ces arthropodes avaient la poitrine à la partie postérieure du 
corps 1. On peut ajouter que chez les quelques formes où les segments tho- 
raciques offrent des mouvements rhythmiques, ceux-ci ne sont qu'une consé- 
quence des mouvements abdominaux et ont lieu, en somme, par entrainement, 
sous l'influence d'actions musculaires ou autres abdominales. 

Il est donc utile, dans le but de faire bien saisir la nature des mouve- 
ments respiratoires qui seront décrits plus loin, de rappeler brièvement la 
Constitution des anneaux ou somites de l’abdomen. Comme il règne de plus 
une certaine confusion dans les termes; comme certains entomologistes, 
Méconnaissant ce que nous enseignent l’embryologie et l'étude comparative 
des Crustacés et des Myriapodes, oublient qu’il nexiste, entre les somites 
abdominaux et les somites thoraciques, d’autres différences que celles qui 
résultent des dimensions exagérées de certaines parties et s’obstinent à nap- 
pliquer quau thorax seul des dénominations qui conviennent à tous les 
Segments du corps; on me permettra d'indiquer, en même temps, la valeur 
exacte des noms dont je me servirai dans le cours du travail actuel. 

La face dorsale du corps entier est la face tergale ; la face inférieure est 
la face sternale. 


| V. GRABER. Die Insekten, 4. Th., p. 107, München, 1867. 
Tome XLV. 


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AREE En 


pese 


26 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


L’abdomen est divisé en segments annulaires ou somites, caractérisés par 
un dépôt de chitine considérable et reliés entre eux par des zones annulaires 
aussi à dépôt chitineux faible. On peut désigner ces zones où la peau est 
naturellement flexible sous le nom de zones membraneuses annulaires. 

Dans un grand nombre de cas, le bord postérieur de chaque somite 
recouvre quelque peu le somite suivant; la zone membraneuse annulaire est 
alors repliée de façon à former un pli rentrant analogue aux plis du cuir 
d’un soufflet. Grâce à cette disposition, les somites peuvent se déplacer les 
uns par rapport aux autres dans le sens de l’axe da corps, rentrant et sortant 
comme les tubes d’une lunette, Il n’est pas un naturaliste qui m'ait observé 
des déplacements de ce genre dans l'abdomen des Hyménoptères. 

Tout somite se décompose, à son tour, en deux arceaux, un supérieur, 
arceau tergal (ou tergite), un inférieur, arceau sternal (ou sternite), réunis 
Pan à l’autre par une zone membraneuse latérale, dans laquelle se trouvent 
en général, mais non toujours, percés les stigmates 1. 

La zone membraneuse latérale est tantôt à découvert, comme chez les 
Névroptères vrais, les Lépidoptères, les Coléoptères (privés de leurs élytres), 
tantôt cachée sous les bords des arceaux tergaux. 

Chez beaucoup de formes, les bords latéraux de lun des deux arceaux, 
le tergal ou le sternal, dépassent ceux de Pautre. Ainsi, chez les Acridiens, 
les Hyménoptères porte-aiguillon, les arceaux tergaux de labdomen 
recouvrent en partie les arceaux sternaux correspondants ?. Une disposition 
inverse s'observe en général chez les Coléoptères, les bords des arceaux 
sternaux s'élevant plus haut que ceux des arceaux supérieurs. Lorsque Pune 
ou l’autre de ces dispositions existe, la zone membraneuse latérale unissant 
arceau tergal au sternal, forme un pli rentrant. 

L’arceau tergal et l’arceau sternal sont donc susceptibles de s'éloigner ou 


! On sait que chacun des arceaux d’un même somite est constitué, en réalité, par quatre 
pièces tégumentaires : deux sternales proprement dites et deux épisternales pour larceau 
inférieur; deux tergales proprement dites et deux épimériennes pour l’arceau supérieur. 

2 Les parties latérales des arceaux sternaux offrent, dans ce cas, des prolongements assez 
considérables auxquels s’insèrent des muscles. Donnant une signification plus générale à 
un terme introduit par Audonin, j'appelle apodème toute saillie quelconque du squelette 
servant à des insertions musculaires. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 27 


de se rapprocher verticalement; soit que tous deux effectuent ces mouve- 
ments, soit que l’un d’entre eux reste fixe et que l’autre seul se déplace. 

Il est à remarquer que la présence de la zone membraneuse latérale a 
généralement pour effet, lors du rapprochement vertical des arceaux tergaux 
et sternaux, de déterminer une légère incurvation en dedans des bords des 
arceaux de lune des deux catégories au moins, d’où une diminution du 
diamètre transversal de l'abdomen. 

Il résulte des dispositions anatomiques bien connues que je viens de rap- 
peler que les mouvements respiratoires possibles, chez les insectes, consistent 
ou bien en rapprochements et éloignements alternatifs des somites, c’est-à- 
dire en raccourcissements et allongements de l'axe longitudinal du corps; 
ou bien en rapprochements et éloignements alternatifs aussi des arceaux 
tergaux et sternaux, ce qui revient à des diminutions et à des accroissements 
des diamètres vertical et transversal; ou bien enfin, en des combinaisons de 
ces deux genres de mouvements '. 


$ IX. 


LES TROIS TYPES RESPIRATOIRES PRINCIPAUX ET LEURS SUBDIVISIONS. 


La plupart des physiologistes qui se sont occupés de la respiration des 
insectes ont étudié trop peu de formes pour concevoir nettement l'existence 


1 Les stigmates présentent des dispositions anatomiques permettant aux insectes de les 
fermer ou de les maintenir ouverts. Le travail intéressant de 0. Krancher ( Bau der Stigmen 
bei der Insekten , ZEITSCHR. F. WISS. z00L., Bd. XXXV, 1881) est, je pense, le dernier qui ait 
été publié sur ce sujet; on y trouve une bibliographie assez complète de la question. 

La connaissance du mécanisme respiratoire des insectes ne sera complète que lorsque 
nous saurons exactement comment les stigmates se comportent pendant la respiration nor- 
male. Huxley (Anatomy of invertebrated animals, p. 437) résume bien, à cet égard, lopinion 
généralement admise. « Lorsque, dit-il, la cavité abdominale se dilate, l'air y pénètre par 
» les stigmates et lorsque les parois de l'abdomen se contractent, les stigmates étant ouverts, 
» l'expiration a lieu; mais si les orifices stigmatiques sont fermés, la contraction abdomi- 
» nale détermine la pénétration du gaz dans les parties profondes du système trachéen. » 
Il n'y a là qu'une hypothèse très plausible, les observations ou les expériences qui ont 
eté faites jusqu’à présent étant insuffisantes. 

Comme je pai point trouvé de procédé d'investigation convenable, j'ai laissé de côté 
l'étude des phénomènes, rhythmiques ou non, que peuvent nous offrir les orifices respira- 
toires; jen ferai peut-être plus tard l'objet de recherches spéciales. 


28 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


de types respiratoires différents et, à plus forte raison, pour tenter de grouper 
les insectes suivant ces types. 

Rathke !, qui, après l'examen minutieux auquel il s'était livré, avait entre 
les mains les matériaux nécessaires, a cependant négligé d'établir un classe- 
ment satisfaisant dans ses résultats. Plus tard, Gerstaecker ?, utilisant les 
données fournies par Rathke, est arrivé à admettre les quatre types respira- 
toires suivants : 


1° Hyménoptères. 


L'abdomen se raccourcit et s'allonge alternativement. 


2° Coléoptères. 


Les arceaux stervaux restent à peu près immobiles; les arceaux tergaux 
s'abaissent et s'élèvent. 


3° Odonates et Acridiens. 


Les arceaux tergaux bougent peu, les arceaux sternaux montent et des- 
cendent. 


4° Lépidoptères. 


Les arceaux tergaux et sternaux se déplacent, s'éloignant et se rappro- 
chant alternativement. 


Cette classification tend à consacrer une erreur en ce sens qu'elle suppose 
les Hyménoptères des insectes trop exceptionnels. Non seulement les Hymé- 
noptères ne sont point les seuls dont l'abdomen change de longueur d’une 
manière rhythmique, mais de plus, comme tous les insectes, ils offrent des 
mouvements respiratoires consistant en éloignements et rapprochements 
alternatifs des arceaux tergaux et sternaux. 


1 Anatomisch-physiologische Untersuchungen über den Athmungs prozess der Mmsekten. 
Op. cit. 

2 Arthropoda, dans Brons’s KLASSEN UND ORDNUNGEN DES Tmer-Rercas. 5t Bd., 3 lief,, 
p. 131. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 29 


Mes recherches mayant montré, en effet, que chez tous les insectes la 
phase expiratoire est caractérisée par un rapprochement des éléments infé- 
rieurs et supérieurs de l’abdomen, sous l'influence de muscles à direction 
plus ou moins verticale, il west impossible d'accepter le groupement proposé 
par Gerstaecker. 

Une étude comparative des détails me fait admettre (rois types respira- 
toires seulement, chaque type comportant des subdivisions d’une valeur 
secondaire. 

L'ordre dans lequel ces types sont décrits n’est pas celui qu'indique une 
méthode rigoureusement scientifique. Au lieu de débuter par le type le plus 
simple, je mets, au contraire, en tête, un type assez complexe, celui auquel 
appartiennent les Coléoptères. 

Jai été conduit à en agir ainsi par la nécessité d'exposer d'abord les 
observations que j'ai faites sur le groupe d'insectes le plus favorable à 
l’expérimentation. Le lecteur restera libre d’intervertir l’ordre des types 
respiratoires comme il l’entendra. 

Des figures représentant des coupes transversales d’abdomens, dans les 
deux phases inspiratoire et expiratoire, rendront, je l'espère, le résumé 
ci-dessous parfaitement clair. La position des pièces tégumentaires en inspi- 
ration est indiquée par un trait plein, la position des mêmes pièces en 
expiration est figurée par un trait pointillé, des flèches montrent le sens du 
mouvement expiratoire. 


Premier type. — Les arceaux sternaux, ordinairement solides et fort 
convexes, bougent peu. Les arceaux ter- 
gaux sont très mobiles; ils s'élèvent et 
s'abaissent alternativement d’une quantité 
notable. 

A. Tous les Coléoptères. 


B. Les Hémiptères hétéroptères. 
C. Les Orthoptères blattiens. 


Fig.4 — Coupe de l'abdomen d'un Coléoptère 


scarabéien. 


See or 


30 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Deuxième type. — Les arceaux tergaux très développés chevauchent laté- 
ralement sur les arceaux sternaux et cachent 
généralement la zone membraneuse latérale, 
qui fait un pli rentrant. 
Les arceaux tergaux et sternaux se rap- 
prochent et s'éloignent alternativement. Les 
arceaux slernaux sont presque toujours les 
Fig, 5. — Coupe de l'abdomen d'une Hyménoptère RS 
Eee plus mobiles. 


A, Les Odonates. 

B. Les Diptères. 

C. Les Hyménoptères porte-aiguiilon. 

D. Les Orthoptères (Forficuliens?) et Acridiens. 


Troisième type. La zone membraneuse latérale unissant les arceaux 
tergaux et sternaux est à nu sur les flancs et très 
développée. 

Les arceaux tergaux et sternaux se rapprochent et 
s'éloignent alternativement tandis que la zone molle 


latérale est déprimée ou reprend sa forme première. 


A. Orthoptères locustiens. 
B. Lépidoptères. 


ri A i RARE: C. Névroptères propres (moins les Phryganiens). 
SUD VERSIONS DU PREMER TIPE. 
A. Coléoptères. 
a. En expiration, l’arceau tergal devient plus plat; sa région médiane 
oon Fins s’abaissant généralement plus que ses bords. 
Hydrophilus, Hydrochares, Dytiscus, Colymbetes, 


Cicindela, Oryctes, Melolontha, Trichius, Dona- 
cia, Corymbites, Chlorophanus, ete. (fig. 4). 


Fig, 4. — Répétition de la figure 4 (forme-type 
chez les Coléoptères). 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 5i 


b. En expiration, les régions latérales de larceau tergal se creusent; la 


+. partie médiane, formant un pli saillant, 
3o M 7 s'élève et amène une augmentation du 
KOOSA “SX diamètre vertical de l'abdomen. 


Telephorus (fig. 7). 


Fig. 7. — Coupe de l'abdomen d'un Coléoptère 
du genre Telephorus. 


c. En expiration, les régions latérales de l'arceau tergal se creusent; la 


a 9 partie médiane se soulève et il y apparait un 
4 

EREN si ] i ing P O] 

n eae, sillon longitudinal (fig. 8). 


Clytus, Coccinella. 


Fig. 8. — Coupe de l'abdomen 
de la Coccinella septem punctata. 


B. Hémiptères hétéroptères. 
En expiration, l'arceau tergal devient plus plat en s’abaissant; l’arceau 
| sternal s'élève ordinairement d’une petite 
quantité (excepté chez les Nèpes) (fig. 9). 


Nepa, Pyrrhocoris. 


Fig. 9, — Coupe de l'abdomen 
de la Nepa cinerea. 


C. Orthoptères blattiens. 
Les mouvements respiratoires sont à peu près identiques à ceux qui 
| s’observent chez les Hémiptères hétéroptères 
(fig. 10). 


Periplaneta. 


Fig. 40. — Coupe de l'abdomen 
de la Blatte (Periplaneta orientalis). 


men E 


52 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


SUBDIVISIONS DU DEUXIÈME TYPE. 
A. Odonates. 
En expiration, les plaques sternales proprement dites, très étroites, 
s'élèvent notablement, les flancs ren- 
trent et la crête dorsale s’accuse. 


La longueur de l'abdomen reste 
— invariable. 


Libellula (fig. 11), Æschna, Agrion. 
Fig, 44, — Coupe de l'abdomen de la Libellula 
quadrimaculata. 
B. Diptères. 

En expiration, les plaques sternales proprement dites, de largeur variable, 
s'élèvent; les flancs rentrent. 

La longueur de l'abdomen change 
chez quelques formes. 


Calliphora, Lucilia (fig. 15), Eristalis (fig. 42), 


5 À : Tabanus, A silus, Tipula, etc. 
Fig. 42, — Coupe de l'abdomen de l Eristalis tenax. 


ÅPPENDICE AUX DIPTÈRES. 


Hyménoptères chrysidiens, Chrysis ignita. 


Fig, 43. — Coupe de l'abdomen de la Lucilia cæsar. 


C. Hyménoptères porte-aiguillon. 


Les arceaux sternaux sont prolongés vers le haut par des apodèmes très 

D 
développés. En expiration, les arceaux sternaux s'élèvent; les arceaux ter- 
gaux s'abaissent et l'abdomen se raccourcit d’une façon notable et constante 


(voyez fig. 5). 
Vespa, Apis, Bombus, Anthophora, ete. 


APPENDICE AUX HYMÉNOPTÈRES PORTE-AIGUILLON. 


Névroptères phryganiens (Phryganea). 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 33 


D. Orthoptères (forficuliens?) et acridiens. 


Les arceaux sternaux se prolongent vers le haut, sous les parties latérales 
des arceaux tergaux, par de grands apodèmes 
ascendants. En expiration, les arceaux sternaux 
s'élèvent; les arceaux tergaux descendent un 
peu et les flancs rentrent faiblement (fig. 14). 

La longueur de l'abdomen ne change guère. 


(Forficula?), Stetheophyma, Stenobothrus. 


Fig. 44. — Coupe de l'abdomen 
du Stetheophyma grossum. 


SUBDIVISIONS DU TROISIÈME TYPE. 


ll n’y a pas lieu d'établir ici de subdivisions d’après les formes des mou- 
vements respiratoires, qui sont sensiblement les mêmes pour tous les insectes 
appartenant à ce groupe. Je me bornerai donc à mettre les animaux que j'ai 
étudiés dans l’ordre artificiel suivant : 


> 


. Orthoptères locustiens. 
B. Lépidoptères. 
C. Névroptères propres (moins les Phryganiens). 


La classification ci-dessus n’est qu’un moyen de grouper les faits que j'ai 
observés moi-même ; il est évident que l'étude des mouvements respiratoires 
d'une foule d'insectes exotiques que je n'ai pu manier à l'état vivant y 
amènerait des modifications profondes. Le lecteur voudra bien ne voir dans 


ce groupement qu'un premier essai dont l’auteur comprend toute limper- 
fection. 


or 


Tome XLV. 


34 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


CHAPITRE IV. 


ÉTUDE DU PREMIER TYPE. 


A. Coléoptères. 
& X. 


HYDROPHILUS PICEUS. 


L’Hydrophile brun, l’un de nos grands Coléoptères indigènes, était tout 
naturellement désigné, par sa taille, pour des études sur les mouvements 
respiratoires. 

Depuis Nitzsch ^ qui découvrit la façon curieuse dont cet insecte vient 
puiser de lair à la surface de l’eau, on a fréquemment répété et décrit la 
même observation, mais bien peu de physiologistes se sont occupés du 
mécanisme à l’aide duquel PHydrophile expulse l'air chargé d'acide carbo- 
nique, ou fait pénétrer dans son système trachéen. une partie de l'air. pur 
qu'il emporte avec lui. 

Un ancien auteur, Frisch ?, a vu les mouvements respiratoires abdominaux 
chez un Hydrophile dont il avait enlevé les élytres, et Nitzsch 5, déjà cité, a 
cru constater des mouvements d’allongement et de raccourcissement alterna- 
tifs dans l’abdomen du même insecte lorsqu'il renouvelle sa provision d'air; 
mais l’un et l’autre se servent de termes si vagues que la question reste 
entière. 

J'ai fait sur cette forme un grand nombre d'expériences et d'observations 
variées dont je grouperai les résultats suivant les méthodes employées. 


4 Nrrzscu. Ueber das Athmen der Hydrophilen (Arcay. rür pie Paystococie de Reil et 
Autenrieth, Bd. 10. Halle, 1811). 

2 Friscu. Beschreibung von allerley Insekten in Teutschland, Th. 2, p. 30. Berlin, 1721. 
(Cité par Nitzsch.) 

3 Nirzscn. Op. cit., p. 454. 


LES 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 35 


$ XI. 


ETUDE DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DE L'HYDROPHILE PAR LA MÉTHODE GRAPHIQUE. oii 


L’insecte est fixé sur le support qui porte laxe du levier, par quatre 
épingles fines, deux d’entre elles traversent les rebords latéraux du pro- 
thorax, les deux autres sont implantées dans les bords du tiers antérieur des | 
élytres et ne touchent, par conséquent, pas l'abdomen. 

Vu les puissants efforts que l'animal peut faire à l’aide de ses pattes, on 
coupe celles-ci à ras des trochanters (voir plus haut § IV, page 16). | 

La première catégorie de mouvements à analyser est évidemment celle 
des déplacements de haut en bas de la face tergale de l'abdomen; il résulte, 
en cffet, des observations directes de Faivre, de Rathke, de Graber et de 
plusieurs autres, que, chez les Coléoptères considérés d’une façon générale, 
les mouvements respiratoires peuvent se résumer comme suit : les somites 


abdominaux bougent peu les uns par rapport aux autres, c’est-à-dire suivant 
laxe du corps, mais, dans chaque somite, l’arceau sternal restant relative- 
ment immobile, l’arceau tergal s'élève et s'abaisse alternativement, l'éléva- 
tion répondant à l'inspiration, l’abaissement à l'expiration. | 

J'ai étudié graphiquement ce genre de mouvements respiratoires chez | 
l'Hydrophile, en employant successivement les deux procédés du levier 
transversal et du style inscrivant porté par l’insecte lui-même, décrits au 
S IV, pages 13 et 15. 


| Levier transversal. — Une fenêtre est pratiquée dans les élytres de façon 
à mettre à nu la région médiane du premier et du second arceau tergal; le | 


talon du levier repose sur la limite entre ces deux arceaux. 

Le premier tracé À indique des mouvements respiratoires rapides, 
environ trente par minute. 

L'animal est, en effet, sous l'influence 
de Pexcitation produite par les manipu- 
lations qui ont précédé l'expérience. 


j Da 
<—— Sens de la rotation du cylindre. 


La portion ascensionnelle de la 1 
Courbe représente l'inspiration: sa forme montre une diminution assez 
p p ; 


36 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


grande de vitesse à la fin de la dilatation abdominale ; la portion descen- 
dante de la courbe, répondant à l'expiration, débute d’une façon brusque. 

On remarquera que chez l'insecte excité, il n’y a de pause ni en inspira- 
tion, ni en expiration. 

Quelques minutes plus tard, l’'Hydrophile, beaucoup plus calme, respire 
plus lentement, vingt-trois fois par 
minute, et fournit le graphique B où 
nous retrouvons encore une fois la 
chute brusque, presque verticale, du 
levier durant lexpiration, mais où 
nous constatons une pause bien nette en inspiration. Il suffit, du reste, de 
regarder la face dorsale du Coléoptère pour constater directement cette 
pause inspiratoire qui ne fera que s’accentuer, jusqu’à une certaine limite, 
lorsque l'animal fatigué respirera avec une lenteur encore plus grande. 

Le graphique C, pris une demi-heure après le précédent, montre, en effet, 
outre un grand ralentissement, 
l'Hydrophile ne respirant plus 


<— Sens de la rotation du cylindre. 


que dix fois par minute, un 
allongement considérable de la 
pause en inspiration. 

Mes observations sur d’autres individus tendent à prouver que si l'insecte 
s’épuise encore davantage, la pause inspiratoire ne s'allonge plus guère. La 
modification intéresse alors l’amplitude de la courbe, qui devient très peu 
élevée au-dessus de l’horizontale. 


. 4— Sens de la rotation du cylindre. 


Style longitudinal porté par l'animal méme (voyez figure 3). — Le pre- 
mier arceau tergal abdominal de notre Coléoptère, étant articulé avec le 
bord postérieur du métathorax à peu près immobile, ne peut participer que 
partiellement aux mouvements d'élévation et d’abaissement de l’ensemble de 
la face dorsale de l'abdomen; il en résulte qu’il exécute des mouvements de 
baseule; s'inclinant en arrière en expiration, reprenant une position hori- 
zontale ou s'inclinant même un peu en avant en inspiration. 

Ces mouvements spéciaux, que la méthode des projections permet d'ana- 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 37 


lyser beaucoup mieux et dans tous leurs détails (fig. 57, pl. I), peuvent 
être mis en évidence par l’emploi d’un style longitudinal équilibré dont Ja 
petite plaque inférieure est collée au baume du Canada sur le premier 
arceau tergal et empiète un peu sur le deuxième. 

La pointe du style inscrivant s'étend en avant de la tête de l'insecte, 
comme le montre la figure 3. La plaque inférieure suivant les mouvements 
du premier arceau tergal, la pointe du style se relève lorsque cet arceau 
s'incline en arrière. La portion ascendante de la courbe tracée répond donc 
celte fois à l'expiration. 

Le graphique D, ainsi obtenu, n'offre pas grand intérêt; mais il montre 

une fois de plus la brusquerie 

avec laquelle débute le mou- 

vement expiratoire. Quant aux 

pauses qu'il semble indiquer, 
Je n’oserais rien en déduire, le style étant un peu lourd pour l'animal. 


—<— Sens de la rotation du cylindre. 


Les résultats des diverses expériences qui précèdent tendent donc à nous 
faire admettre que, chez l'Hydrophile, l'inspiration se fait plus lentement 
que l'expiration; qu'il existe, chez cet insecte, une pause inspiratoire mar- 
quée; enfin, que l'expiration est un mouvement relativement brusque. L’étude 
des autres Coléoptères nous permettra de constater si ces faits offrent un 
Caractère général. 

Les expériences ci-dessus ont un résultat d’une autre nature; elles nous 
montrent combien le rhythme respiratoire d’un même individu varie d’un 
instant à l’autre et nous prouvent qu'il est parfaitement inutile de vouloir 
appliquer la méthode graphique à des recherches sur le nombre des mouve- 
ments respiratoires des insectes en un temps donné. D’autres essais, et spécia- 
lement ceux que j'ai faits sur le Dytique, convaineront le lecteur à cet égard. 


Je viens d'exposer comment j'ai étudié graphiquement les mouvements 
de la face tergale d’un des somites de l'abdomen de l'Hydrophile. On com- 
prend que cette façon de procéder est insuffisante. Tous les somites offrent- 
ils le même phénomène? et, s'il en èst ainsi, l'inspiration ou l'expiration 
ont-elles lieu pour tous en même temps? 

La question offre un certain intérêt, car Rathke et Graber admettent que 


arr 


ne 


38 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


les mouvements respiratoires des insectes se propagent souvent de somite 
à somite à la façon d’une onde : « À chaque respiration, dit Rathke, à propos 
» des Coléoptères, la face dorsale des premiers anneaux s'élève ou s’abaisse 
» d’abord, puis le mouvement se répète ensuite dans les derniers anneaux 
» de labdomen. Il est plus rare que le mouvement débute au milieu et 
» progresse de là en avant et en arrière !, » 

Si l’on enlève complètement les élytres et les ailes de l’'Hydrophile et si 
l’on examine directement la face dorsale de l'abdomen, on voit, pendant 
l'inspiration, le profil général et longitudinal de cette face devenir convexe, 
le point culminant étant à la limite des arceaux supérieurs 1 et et 2. En ce 
moment, les somites 1, 2, 3 sont éloignés les uns des autres autant que pos- 
sible, les zones membraneuses qui les unissent sont à nu, l'extrémité posté- 
rieure de l'abdomen est un peu abaissée. 

Survient l'expiration ; le profil général de la face dorsale de l'abdomen 
devient concave, l’ensemble des somites 4 et 2 forme un plan oblique 
descendant en arrière, ces somites et le troisième chevauchent actuellement 
les uns sur les autres, enfin, la pointe de l’abdomen se relève vers le haut 
d’une façon manifeste. 

L'impression première est celle d’un mouvement vermiculaire, surtout 
en expiration, et l’on comprend fort bien comment Rathke et Graber ont 
pu voir, chez les insectes, une onde se propageant de la base de l'abdomen 
vers son extrémité. Je ne détaillerai pas les expériences que j'ai faites 
à l’aide de leviers multiples reposant en différents points du corps de 
’Hydrophile, dans le but de m'assurer s’il existe, oui ou non, une onde 
véritable, parce qu’elles ne mont donné que des résultats de beaucoup infé- 
rieurs à ceux que j'ai obtenus à l’aide de la méthode des projections. Il 
suffira de dire, pour éviter à ceux qui voudraient répéter des essais analo- 
gues, les erreurs d'interprétation commises à mes débuts, que si l’on fait 
reposer à la fois deux leviers, l’un sur la limite entre les arceaux dorsaux 
À et 2, comptés à partir du thorax, l’autre sur la limite entre les arceaux 


1 Anatomisch-physiologische Untersuchungen über den Athmungsprozess der Insekten. 
Or. cir., p. 102. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 39 


3 et 4, ces deux leviers marchent en sens contraire et tracent deux courbes 
inverses; le premier levier s’abaissant lorsque l’autre s'élève, etc. D'où 
j'avais déduit, un peu naïvement, que la base de l’abdomen est, effectivement, 
en expiration lorsque la seconde moitié est en inspiration et vice versä. 

À cette époque londe abdominale me paraissait démontrée. 

Mais tout s'explique si l’on remarque qu’il n’y a pas seulement des mou- 
vements dans la face tergale des anneaux, que la totalité de la seconde moitié 
de l'abdomen (sa face sternale comme sa face tergale) se relève en bloc 
à chaque expiration et s'abaisse dans chaque mouvement inspiratoire. Le 
levier antérieur n’obéit qu'aux déplacements réels de la face tergale des 
somites de la base de l’abdomen, tandis que le levier postérieur est au con- 
traire mis en mouvement par les oscillations de l'extrémité du corps. 

Veut-on une preuve directe de ce fait ? il suffit de mettre sous les anneaux 
| abdominaux 3 et 4 un 
-a A levier B (fig. 15) à bras 
, inégaux dont le bras le 
plus long soit maintenu 
en contact avec la face 
Fig. 48. siernale de l'abdomen par 


| < 
f 
+ 


l’action d’un léger contre- 

poids C! fixé au bras le plus court. Le levier ordinaire A repose, comme dans 

l'expérience précédente, sur la limite entre les faces tergales des somites 1 et 2. 

: Dans ces circonstances, on voit les deux leviers marcher en sens inverse 

et présenter exactement le même antagonisme dans leurs mouvements que 

si le levier B ou postérieur reposait sur les somites 3 et 4 au lieu d’être en 
rapport avec leur face inférieure. 

J'ai fait cette expérience dans les meilleures conditions pour que l'insecte 
Présentät des mouvements respiratoires normaux, c’est-à-dire que l'abdomen 
était resté recouvert par les élytres et que le contact du levier dorsal À 
N'avait lieu qu'au travers d’une fenêtre percée dans ces étuis. Elle nous 
montre que, chez l'Hydrophile au moins, l'onde que lon croit voir, par 


1 Une boulette de cire. 


40 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


l'observation directe, à la surface de l'abdomen, n’est qu’une illusion résul- 
tant de ce que l'œil ne peut suivre convenablement deux mouvements 
combinés, celui de l’affaissement, par exemple, de la face tergale des somites 
et le mouvement oscillatoire de la deuxième portion de l'abdomen. Je revien- 
drai, du reste, sur ce sujet, à propos des expériences par projection. 
Enfin, j'ai cherché, à l’aide de différents systèmes de leviers, à constater 
si, pendant les mouvements respiratoires de l’Hydrophile, l'abdomen de 
l’animal s’allonge et se raccourcit successivement d'une manière appréciable. 
Question intéressante dont la solution permet de classer définitivement le type 
respiratoire des Coléoptères. L'observation directe et des procédés dont j'ai 
reconnu les défauts depuis m'ont encore une fois induit en erreur. J'ai cru 
un instant et ceux qui observent superficiellement s’imagineront aussi que 
l'abdomen de notre insecte s’allonge en inspiration et se raccourcit nota- 
blement en expiration. C'est là une nouvelle illusion contre laquelle je 
prémunis le lecteur et que la méthode des projections fait disparaître. 


$ XII 


ÉTUDE DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DE L'HYDROPHILE PAR LA MÉTHODE DES PROJECTIONS. 


L'Hydrophile privé de ses élytres, de ses ailes et de ses pattes est fixé, 
sur la lamelle de liège à glisser dans l'instrument, par deux épingles fines 
traversant les bords latéraux du prothorax. De petits styles de papier sont 
collés au baume sur les faces tergales des somites abdominaux 1, 2, 3, 4, 5 
et sur la face tergale de la pointe de l’abdomen. L'image est nette avec un 
grossissement d'environ six diamètres; de sorte qu'il est facile de constater 
de petits mouvements qui, chez l'animal, n'auraient que ‘}; de millimètre 
d'amplitude, 


Are Expérience. — Afin de me mettre d’abord à l'abri des erreurs d'inter- 
prétation amenées par les mouvements généraux de l'abdomen et pour pou- 
voir analyser les mouvements respiratoires verticaux seuls, je fixe, par une 
épingle fine Æ, l'extrémité de l'abdomen (fig. 57, pl. 1), On verra, plus 
bas, que cette disposition n’altère en rien les résultats. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. A 


Dans la description, je supposerai que l'insecte était en inspiration. Le 
contour de la silhouette de la face dorsale de l'abdomen offre alors l'aspect 
d’une ligne convexe vers le haut dont le point culminant répond à la limite 
des somites À et 2. 

Pendant l’expiration, toutes les pièces en mouvement se déplacent à la 
fois. Il n’y a pas de mouvement progressif d’un somite à l’autre, pas d'onde. 
J’insiste sur ce fait en raison de son importance propre et aussi parce que 
les descriptions m'obligeant à citer successivement les phénomènes spéciaux 
à chacun des somites principaux, je désire que le lecteur ne déduise pas, 
de la forme de la rédaction, une progression qui fait absolument défaut. 

Durant l'expiration, le métathorax ne reste pas tout à fait immobile; il 
s'abaisse un peu, entraînant légèrement le mésothorax dans ce mouvement; 
la face tergale du somite 4 s'incline fortement en arrière ; celle des somites 2, 
3, 4, 5 s'abaisse à peu près verticalement, le maximum d'effet ayant lieu 
à la hauteur du deuxième anneau. Le contour de la silhouette de la face 
tergale de l'abdomen est alors une courbe concave; un léger déplacement 
de la base des styles indique que les somites chevauchent actuellement les 
uns sur les autres. 

Pendant ce temps, l’épine inférieure du métathorax est un peu déplacée 
vers le haut; il en est de même des faces sternales des somites 3, 4, 5, qui 
offrent, en outre, un léger mouvement d’arrière en avant. 

La diminution du diamètre vertical de l'abdomen mesurée à la hauteur 
du deuxième somite varie, suivant les individus, de '/; à '/» Les mouvements 
expiratoires sont donc très profonds. (Voyez le tableau I du § XCIT.) 


2 Expérience. — L'insecte porte les mêmes styles, mais l’extrémité pos- 
térieure de l'abdomen est libre +. 

Les mouvements respiratoires affectent exactement les mêmes allures. 
Cependant, la seconde moitié de l'abdomen oscille maintenant dans le sens 
vertical, sa pointe se relevant en expiration, tandis que la face tergale se 
creuse, Ces déplacements rendent l’exécution des dessins très laborieuse; la 


1 Afin de ne point surcharger les planches, je wai pas reproduit la silhouette répondant 
à cette expérience. Il en est malheureusement de même dans un grand nombre d’autres cas. 


Tome XLV. ; 6 


42 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


précaution que j'avais prise de faire des expériences préalables sur des indi- 
vidus dont l'extrémité de l'abdomen était fixée, ma seule permis d'inter- 
préter nettement ce qui se passait sur l'écran. 

En suivant de la pointe du crayon ombre de l'extrémité de l'abdomen, 
on constate que cette extrémité décrit un petit arc d’un grand cercle dont le 
centre serait au milieu de lorifice postérieur du métathorax. Il en résulte 
que l'abdomen de l'Hydrophile n'offre ni allongements ni raccourcissements 
pendant les mouvements respiratoires. L'illusion de l'observateur qui, regar- 
dant directement le Coléoptère, croit voir le corps de celui-ci s’allonger en 
inspiration, est évidemment due à l'arc de cercle que l'extrémité de l'abdomen 
décrit dans l’espace. 


3° Expérience. — Les images décrites ci-dessus ne nous ont appris que 
ce que l’on peut observer dans une section verticale longitudinale de l’'Hydro- 
phile; il restait à étudier les détails que présente une coupe transversale. 

A cet effet, l'insecte est placé dans l'instrument de facon que sa téte 
regarde la flamme de la lampe et que l'extrémité de son abdomen soit 
tournée vers les lentilles. 

Le deuxième somite abdominal, celui de tous, comme nous l’ont appris 
les essais précédents, qui offre les mouvements les plus accentués, a été 
garni d'avance d’une série de petits styles collés au baume et disposés de la 
manière suivante : un style sur le milieu de la face tergale, un style sur la 
moitié gauche de cette face, un style sur la zone molle membraneuse por- 
tant les stigmates et, enfin, deux styles sur les régions épimériennes. 

En déplaçant l’insecte dans l'instrument et en modifiant la position des len- 
tilles, on obtient aisément une silhouette nette de l'anneau abdominal en ques- 
tion, qui se présente par conséquent sur l'écran comme s’il était vu en coupe t. 

Voici ce que l’on constate dans ce cas : à chaque expiration, toute la face 
tergale du somite s’abaisse à la fois; les déplacements latéraux des styles qui 
peuvent nous renseigner à cet égard étant insignifiants, il n’y a évidemment 
point de changements de courbure un peu notables. 


1 La figure 59, planche Il, concernant l’Oryctes nasicornis donne une bonne idée des 
silhouettes de ce genre. Les faits observés chez l'Hydrophile sont un peu différents; il 
importe de ne pas l'oublier. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 


45 


La zone molle latérale qui porte les stigmates se déprime aussi directe- 
ment et verticalement; lobliquité de son style ne change pas. 

Les épimères, entrainés par les mouvements de la membrane qui les relie 
aux pièces tergales, s’inclinent manifestement en dedans, pour se relever plus 
tard en inspiration. Tous ces mouvements sont simultanés. 

Les parties latérales inférieures des somites restent immobiles. Elles ne 
peuvent bouger, vu leur union intime avec le métathorax. 


Résumé. — Les résultats obtenus permettent de résumer nettement la 
série de mouvements que présente un Hydrophile qui respire. 


FAITS GÉNÉRAUX. 


1° La face tergale du métathorax participe légèrement aux mouvements respiratoires de 
l'abdomen (détail que nous retrouverons chez d’autres Coléoptères et que Rathke avait 
signalé antérieurement chez les Carabes et les Staphylins). 

2° Les mouvements respiratoires ont lieu dans tous les somites abdominaux à la fois: il 


n’y a pas d'onde appréciable, 


3° La dilatation de l'abdomen en inspiration est plus lente que la contraction expiratoire, 
Caractère déjà observé en 1805 par Sorg chez le Lucanus cervus. 
4 Pendant les mouvements respiratoires, l'abdomen oscille verticalement, mais ne 


change pas de longueur. 


Particularités propres à chacune des deux phases. 


Expiration, 


Le mouvement débute d’une façon brusque, 
L'arceau tergal du premier somite s’incline en arrière. 


Les arceaux dorsaux des autres somites s’abaissent sans 


Changer notablement de courbure dans le sens trans- 
versal. 


Le maximum d'effet s'observe pour le somite 2. 


5 Surface dorsale de l'abdomen devient concave dans 
€ sens longitudinal. 


Les arceaux dorsaux chevauchent les uns sur les autres. 


, r 4 CP] 
L'extrémité de l'abdomen se relève. 


La : j : i 
aE molle latérale qui porte les stigmates forme un 
pli plus accusé et se déprime £. 


Sa poris latéraux ou épimériens de l'abdomen s’in- 
ciment en dedans. 


Inspiration. 


Il existe une pause plus ou moins longue en inspiration. 

L'arceau tergal du premier somite devient horizontal 
ou s'incline un peu en avant. 

Les arceaux dorsaux des autres somites s'élèvent. 


Le maximum d'effet s'observe à la limite des somites 
tetz: 

La surface dorsale de l'abdomen devient convexe dans 
le sens longitudinal, 

Les arceaux dorsaux s'éloignent les uns des autres, sur- 
tout 1,2 el 5, et les zones molles qui les unissent 
deviennent visibles, 

L'extrémité de l'abdomen s'abaisse. 

Le pli de la zone molle latérale s'ouvre et cette zone 
s'élève un peu. 

Les rebords épimériens se redressent. 


1 L'observation directe montre, en outre, que cette zone se plisse. 


44 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ XII. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE L'HYDROPHILE. 


Les mouvements d'expiration et d'inspiration de l’'Hydrophile ayant lieu 
presque exclusivement dans le sens vertical, on peut supposer a priori que 
ce ne sont ni des muscles longitudinaux, ni des muscles obliques qui les 
déterminent et que les faisceaux musculaires spécialement destinés aux 
mouvements respiratoires doivent être dirigés à peu près de haut en bas. 

La dissection vieni pleinement confirmer cette hypothèse. Rathke * a 
décrit, le premier, chez les Coléoptères, les véritables muscles respiratoires 
qui avaient complètement échappé à Straus-Durckheim. Ces muscles, dit 
Rathke, sont disposés par paires dans chaque anneau abdominal, lun à 
droite, l’autre à gauche, dans le voisinage de la zone molle portant les stig- 
mates. Ils sont dirigés verticalement et s’insérent par leur extrémité supé- 
rieure sur l’arceau tergal, par leur extrémité inférieure sur les parties 
latérales de l’arceau sternal. 

La contraction de ces muscles, vu la structure même des somites abdo- 
minaux des Coléoptères, doit avoir pour effet lPabaissement des arceaux 
tergaux, l'augmentation du pli formé par la zone molle latérale, enfin, par 
entrainement mécanique, linclinaison des rebords épimériens. Ce sont donc 
évidemment des muscles expirateurs. 

Rathke n'ayant point représenté ces muscles, aucun auteur, à ma connais- 
sance, ne décrivant les muscles abdominaux de l’Hydrophile et, enfin, une 
question importante, celle de l’existence possible de muscles inspirateurs se 
présentant naturellement à l'esprit, je crois faire chose utile en publiant un 
dessin et une description de la musculature de l'insecte qui fait le sujet de 
mon travail. 

J'ai indiqué, chapitre II, § VI, le procédé que j'ai mis en usage d’une 
façon à peu près constante pour l'étude des muscles; je me bornerai donc à 
rappeler ici que l'animal est divisé en deux moitiés, droite et gauche, suivant 
un plan longitudinal. 

L'abdomen de l'Hydrophile étant assez déprimé, on est obligé d’écarter 
fortement les arceaux tergaux des arceaux sternaux pour voir ce qui existe 


1 Raruxe. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., p. 102. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 45 


à la hauteur du repli des flancs. La figure 16 a été dessinée d’après un demi- 
abdomen gauche ouvert ainsi d’une façon presque complète. 


Fig. 16 X 4. — Hydrophile, — Muscies de la moitié gauche de l'abdomen. 


On y distingue les muscles longitudinaux dorsaux À et B et les muscles 
longitudinaux sternaux a et b signalés chez les insectes par tous les auteurs. 
Ce sont les homologues des grands droits décrits par Newport chez la che- 
nille du Sphinx ligustri, des prétracteurs figurés par Straus-Durckheim chez 
le Hanneton, etc. 

Mais ce qui attire surtout l'attention, c'est une série de petits muscles «, B, 
assez larges et courts, au nombre 
de deux pour chacun des demi- 
somites 1, 2, 3, 4 !, croisant pres- 
que verticalement le pli formé par 
la zone molle latérale et s’insérant, 


Fig. 17 X 4. — Hydrophile. par leur extrémité supérieure, au 
Coupe transverse du 3° somite abdominal. b d 7s fé a d 7 

S Sub ord inférieur des arceaux tergaux, 

pia Be AE pirataut par leur extrémité inférieure à la 


région la plus élevée des arceaux sternaux, 
Une coupe transversale de labdomen fait encore mieux comprendre la 
valeur de cette disposition (fig. 17). 


1 Au nombre de quatre par conséquent par somite. 


46 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Je ferai remarquer, en outre, un petit détail qui n’est pas sans valeur. 
Rathke, dans sa description des muscles expirateurs verticaux des Coléoptères, 
indique une seule paire par somile, c’est-à-dire un muscle à droite et un 
muscle à gauche, tandis que chez l’Hydrophile il en existe manifestement 
deux de chaque côté, soit quatre par somite. Cette divergence provient de 
ce que Rathke n’a probablement examiné les muscles en question que chez 
les Scarabéiens. 

Les muscles longitudinaux de l'abdomen des Coléoptères fléchissent 
celui-ci dans divers sens, mais n’ont certainement qu’un rôle fort accessoire 
dans lacte respiratoire. Mes expériences prouvent en effet que le corps 
conserve sensiblement la même longueur pendant l'inspiration et l'expiration, 

Les petits muscles expiraleurs verticaux a, B offrent, au contraire, une 
importance capitale. Ce sont eux qui, ainsi que je l'ai dit plus haut, abaissent 
la face tergale de l'abdomen et déterminent évidemment l'expulsion de l'air 
contenu dans le système trachéen de la région la plus considérable du corps. 

Quant à des muscles inspirateurs, on les cherche vainement; ils manquent 
totalement chez l'Hydrophile, comme chez un très grand nombre d’autres 
trachéates. 

L'absence de muscles inspirateurs conduit à une conclusion intéressante : 
une série d'auteurs, Straus-Durckheim, Treviranus, Newport, Liebe, Graber 
pour les insectes, E. Blanchard pour les Scorpions, Kutorga pour les Scolo- 
pendres, se basant sur ce fait anatomique, ont admis, avec raison, que, chez 
la plupart des articulés à respiration trachéenne, l'expiration seule est active, a 
seule lieu sous l'influence de contractions musculaires, tandis que l'inspiration 
est un phénomène purement passif, l'abdomen reprenant son volume primitif 
sous l'influence de l’élasticité des téguments et de celle du système trachéen. 

En d’autres termes, le mécanisme de la respiration de l'Hydrophile et de 
nombreux insectes dont j'aurai encore l’occasion de parler * est exactement 
l'inverse de ce qui existe chez les mammifères chez lesquels c’est l'inspiration 
qui est musculaire et active, l’expiration calme étant simplement passive et 


1 Voir pour les exceptions : Hyménoptères, Phryganiens, Acridiens, §§ LXV, LXVII, 
LXXI, LXXV. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 47 


résultant de l’élasticité des poumons et du relächement des muscles inspira- 
teurs. 

Ces considérations augmentent beaucoup l'intérêt que présente le gra- 
phique À (page 35) dans lequel la passivité de l'inspiration se traduit par 
une courbe ascendante à vitesse décroissante et l’activité de l'expiration par 
une ligne descendant presque verticalement d’une façon brusque. 

Si le lecteur désire une preuve supplémentaire de l'état passif en inspira- 
tion, il la trouvera dans les expériences suivantes sur le système nerveux. 


S XIV. 


EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÈME NERVEUX DE L'HYDROPHILE. 


Faivre, dans un travail que j'ai déjà cité et qui porte, comme titre, De 
l'influence du système nerveux sur la respiration des Dytiques ', a avancé que, 
Chez les Coléoptères qui ont fait le sujet de ses recherches, « le ganglion 
» mélathoracique préside aux mouvements respiratoires... les excite, les 
» coordonne et les entretient... », que l’ablation de ce ganglion abolit les 
mouvements d'inspiration et d'expiration, etc. 

Il y a des raisons sérieuses pour considérer les expériences de Faivre 
comme très soignées ; malheureusement les conclusions que l’auteur déduit 
de ses résultats sont absolument fausses. 

Je reviendrai sur ces idées théoriques, à propos d’autres Coléoptères, des 
Libellules et des Acridiens; il me suffira de dire ici que Faivre a perdu de 
vue que le système nerveux des Coléoptères est un système nerveux condensé 
dans lequel certainement plusieurs ganglions abdominaux sont fusionnés 
avec celui du métathorax; de sorte qu’en détruisant la masse métatho- 
racique, on détruit, en même temps, les centres respiratoires d’un nombre 
plus où moins grand d’anneaux de l'abdomen. 

Chez l'Hydrophile l'abdomen comprend six somites apparents et il existe 
cinq ganglions abdominaux distincts °. 


1 ANN. DES SC. NAT., Zoologie, 4 série, t. XIII, p. 385. 1860. 
2 E. Brancard. Recherches anatomiques et zoologiques sur le système nerveux des animaux 
sans vertèbres (ANN. DES sc. NAT., 3° série, Zoologie, t. V, pl. XI, fig. 1, 1846). 


48 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Le premier ganglion abdominal visible est tellement rapproché du gan- 
glion métathoracique qu'il est presque impossible de supprimer lun sans 
l’autre. 

En opérant cette double suppression, ou, ce qui est plus facile, en sec- 
tionnant simplement la chaine nerveuse en arrière du premier ganglion 
abdominal distinct, on aura évidemment privé l’abdomen, en fait de centres 
respiratoires, non seulement de ce premier ganglion abdominal apparent, 
mais, de plus, du ou des ganglions abdominaux fusionnés avec le métatho- 
racique. 

Théoriquement, en laissant de côté l'opinion erronée de Faivre, et en se 
basant sur le fait physiologique bien connu que chaque somite d’un articulé 
possède un centre moteur propre, on devra, après la suppression des gan- 
glions indiqués, observer, chez l'Hydrophile, un arrêt des mouvements 
respiratoires dans les premiers anneaux de l'abdomen et la persistance de 
ces mouvements dans les anneaux postérieurs. 

Les expériences ci-dessous montrent que l'hypothèse se vérifie en grande 
partie, 

Un Hydrophile dont le système nerveux est intact, mais qui est privé 
de ses élytres et de ses ailes, fait environ 
dix-huit mouvements respiratoires par 
minute, Je sectionne la chaîne en arrière 
du premier ganglion abdominal distinct '. 
Les mouvements respiratoires cessent dans 
les somites 41, 2, 3, et l'abdomen prend la forme singulière représentée 
dans la figure 48 qui nous montre les trois premiers somites en inspiration 


et les trois derniers en expiration. 

Cet aspect étrange s'explique très bien; la destruction des centres nerveux 
répondant aux somites 4, 2, 3 leur a permis de prendre la forme que tout 
somite abdominal de Coléoptère prend à l’état passif, par simple élasticité, 
lorsque les muscles expirateurs se relâchent; mais la section de la chaine 


1 J'ai décrit, chapitre II, § VIT, page 24, les procédés dont je faïs usage pour exciter où 
détruire presque à coup sûr une partie déterminée du système nerveux, sans léser grave- 


ment la surface du corps des insectes. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 49 


a déterminé une certaine excitation dans les autres centres demeurés intacts ; 
ce qui amène momentanément une contraction dans les muscles expirateurs 
des somites postérieurs. 

Comme on pouvait le prévoir, les mouvements respiratoires persistent 
dans les anneaux 4, 5, 6; ils sont faibles, assez lents (dix environ par 
minute), mais incontestables. 

Au bout d’un quart d'heure, on constate que les mouvements d'expiration 
et d'inspiration ne sont pas absolument abolis dans les anneaux antérieurs. 
À la loupe, on observe, cinq ou six fois par minute, une dépression très 
légère dans la zone molle qui porte les stigmates et l’inclinaison en dedans 
des bords épimériens. 

Voyant cela, je sépare complètement l'abdomen du thorax; les petits 
mouvements lents des anneaux antérieurs cessent tout à fait; mais les mou- 
vements respiratoires des anneaux 4, 5, 6 persistent durant un certain 
temps. ; 

Une deuxième expérience, effectuée à peu près de la même manière, 
a donné des résultats analogues. La section de la chaine nerveuse en arrière 
du premier ganglion abdominal distinct a été suivie de l’arrét en inspi- 
ration des somites 1, 2, 3 et de l’affaissement en expiration des somites 
postérieurs 4, 5, 6, ceux-ci continuant à montrer des mouvements respira- 
toires faibles avec inclinaison en dedans des bords épimériens. 

Ces expériences me semblent suffire pour démontrer que le ganglion 
métathoracique vrai de l’Hydrophile n’est ni le centre modérateur, ni le 
centre excitateur des mouvements respiratoires abdominaux. (Voyez $ XX, 
les expériences sur le Dytique.) 

J'ai fait, sur l'Hydrophile, un autre essai intéressant, afin de constater 
l'influence des ganglions cérébroïdes sur les mouvements de respiration. 

Les recherches de plusieurs de mes prédécesseurs et celles que j'ai répé- 
tées moi-même sur les Orthoptères, les Libellules, le Dytique, etc., prouvent 
que si l’ablation des ganglions cérébroïdes n’abolit jamais les mouvements 
respiratoires, cette suppression n’est pas absolument sans influence, qu’elle 
est suivie soit d’un ralentissement dans les mouvements en question, soit 
d’une diminution d'amplitude seulement, Afin de me mettre à l'abri des 

Tome XLV. 7 


50 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


illusions, j'ai employé la méthode des projections qui me permettait de juger 
fort bien des changements d'amplitude. 

Un Hydrophile vigoureux, privé de ses pattes, de ses ailes et de ses 
élytres, est introduit dans l'appareil. Des styles sont collés sur les arceaux 
tergaux 1, 3 et 5. On dessine les phases inspiratoire et expiratoire (de la 
même manière que pour la figure 57), et on note, comme moyenne de 
plusieurs observations faites à laide d’une montre à secondes, vingt-cinq 
mouvements respiratoires par minute. 

Il est à remarquer que l'insecte exécute : 1° des mouvements respira- 
toires d’une amplitude normale; 2°, de temps en temps, des mouvements 
d’une amplitude à peu près double. 

Ceci constaté, on détruit les ganglions cérébroïdes en faisant une fente 
à la paroi de la tête, entre les yeux, et en déchirant la masse nerveuse à 
l’aide d’une aiguille. Comme preuve de l'opération, les antennes deviennent 
immobiles. 

L’Hydrophile est ensuite replacé dans l'appareil à projections. Le rhythme 
respiratoire est un peu ralenti. On compte vingt-deux mouvements par 
minute. Les dessins des phases respiratoires, comparés à ceux qui ont été 
obtenus avec l’insecte dont le système nerveux était intact, montrent que 
l'amplitude a diminué de ‘}, environ pour les mouvements réguliers et de ‘|; 
pour les mouvements plus violents. 

La destruction des ganglions cérébroïdes a done amené un faible ralen- 
tissement et une diminution dans l'amplitude des mouvements respiratoires. 


§ XV. 


HYDROCHARES (HYDROUS) GARABOIDES. 


Cette forme, très voisine de l’'Hydrophile, ne pouvait fournir que des 
résultats presque identiques; aussi ne lui ai-je appliqué que la méthode des 
projections. 

Comme l’'Hydrophile, l'Hydrochares relève l'extrémité de l'abdomen en 
expiration. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 5i 


En employant un premier individu privé de ses élytres et chez lequel les 
mouvements étaient probablement exagérés, j'ai constaté, sur la silhouette, 
un léger raccoureissement expiratoire de l’abdomen qui, réduit à la taille 
de l’insecte, devait être environ de ‘/, de millimètre. 

Un nouvel essai sur un autre Hydrochares auquel j'avais laissé les bords 
latéraux des élytres, de façon à limiter les déplacements de l'abdomen, 
comme ils le sont à l’état de nature, m'a prouvé que le corps de l'insecte 
conserve toujours la même longueur pendant les mouvements respiratoires, 


§ XVI. 


Dyriscus. 


Les mouvements respiratoires des Dytiques ont été étudiés à l’aide de 
l'observation directe par Faivre et par Rathke. Faivre en a donné une des- 
cription assez détaillée, mais peu exacte, que je reproduirai plus loin. Quant 
à Rathke, il s’est borné à mentionner les Dytiques, sans autre indication, 
dans la liste des Coléoptères qu’il a examinés. 

J'ai surtout employé le Dytiscus marginalis, mais j'ai fait en outre quel- 
ques essais à l’aide des D. dimidiatus et D. punctulatus. 


$ XVIL 


ETUDE DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES DYTIQUES PAR LA MÉTHODE GRAPHIQUE. 


Les mouvements respiratoires des Dytiques consistent, comme ceux de la 
Plupart des Coléoptères, en élévations et abaissements alternatifs des arceaux 
dorsaux de l'abdomen; seulement ces déplacements n'ont jamais qu’une 
faible amplitude. Il existe, à cet égard, une différence notable entre les 
Dytiques et d'autres Coléoptères d’une taille au-dessus de la moyenne, tels 
que l’Hydrophile, Oryctes nasicornis, ete. !. 


1 La méthode par projection montre qu’en expiration la diminution du diamètre vertical 
| l'abdomen du Dytique n’est que de 1/29, tandis qu’elle atteint 1/9 et même 1/; chez 
l'Hydrophile. 


52 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Le peu d'amplitude des mouvements respiratoires chez des insectes aux 
allures aussi vives et susceptibles, on le sait, d'effectuer des efforts muscu- 
laires assez considérables, a lieu de surprendre; cependant, le fait est 
incontestable. J'ai observé, au point de vue des mouvements respiratoires, 
plus de vingt individus pris à des époques différentes; je leur ai appliqué 
des méthodes variées; tous ont été étudiés peu de temps après leur capture ; 
ceux que je ne pouvais employer immédiatement étaient abondamment 
pourvus de nourriture et, malgré ces précautions, je n'ai jamais vu un 
Dytique effectuer les expirations énergiques et profondes qui caractérisent 
l’'Hydrophile et les Scarabéiens. 

Il résulte du fait que je viens de signaler que le procédé ordinaire du 
levier transversal reposant sur un des arceaux dorsaux ne donne jamais que 
d’assez tristes résultats. Pour obtenir de bons tracés démonstratifs il faut 
supprimer tous les frottements, excepté celui de la pointe inscrivante sur la 
surface enfumée du cylindre, et utiliser les changements de courbure que 
présente la ligne médiane dorsale de l’insecte. J'ai fait usage, à cet effet, 
d'un style longitudinal à branches équilibrées semblable à celui que j'ai 
employé dans quelques expériences effectuées sur l’'Hydrophile (voyez 
figure 3, page 15). 

Le graphique Æ, ci-joint, a été obtenu de cette manière. 


<--#8 Sens de la rotation du cylindre. 


L’insecte était un mâle robuste. Le style, aussi léger que possible, avait 
été découpé dans du carton fort mince; sa branche antérieure inscrivante 
avait 85 millimètres de longueur et sa plaque inférieure était collée au 
baume sur les arceaux tergaux 3 et 4. 

Ces arceaux effectuant non seulement des mouvements de haut en bas, 
mais, en outre, s'inclinant en arrière en inspiration, pour se rapprocher du 
plan horizontal dans la phase expiratoire (voir § XVII), les déplacements 
de la pointe inscrivante du style étaient relativement grands. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 53 


La portion ascendante de la courbe répond ici à l'inspiration et la partie 
descendante à l'expiration. 

On voit très nettement que l'inspiration est un mouvement lent à vitesse 
décroissante, sans devenir jamais nulle, c’est-à-dire qu'aucune partie du 
tracé inspiratoire n’est une droite horizontale et qu’il n’y a par conséquent 
pas de pause d’une durée appréciable en inspiration. 

On constate aussi que l'expiration est marquée par une descente très 
brusque à ses débuts et ne se terminant pas non plus par une pause réelle. 

Un caractère assez remarquable qui s’est répété dans une série de gra- 
phiques fournis par des individus différents consiste dans la forme tremblée 
du tracé expiratoire. L’inspiration se présente sous l'aspect d’un mouve- 
ment régulier, tandis que l'expiration semble s'effectuer, surtout à l’origine, 
Par petites secousses successives. 

La lenteur de l'inspiration et la brusquerie de l’expiration s'expliquent 
très bien en admettant, ce que l'étude du système musculaire démontre, du 
reste, que l'inspiration est passive et a lieu sous l’action de l’élasticité des 
téguments et du système trachéen, tandis que l'expiration est active et est 
déterminée par la contraction de muscles expirateurs spéciaux. Quant à 
l'aspect tremblé du tracé expiratoire, il tient peut-être à un petit défaut 
de l'instrument, peut-être aussi à ce que les muscles expirateurs se raccour- 
cissent par petites secousses rapprochées. 

J'ajouterai enfin, en terminant ce qui concerne la méthode graphique 
appliquée aux Dytiques, que chez ceux de ces insectes que l’on a placés 
ainsi dans des conditions en somme très anormales, en les fixant à l’aide 
d'épingles, en leur enlevant les pattes et une partie notable des élytres, les 
inspirations et les expirations se succèdent sans temps d'arrêt. On verra 
plus loin que les choses ne se passent pas ainsi chez le Coléoptère intact 
ou à peu prés et libre. 


54 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


$ XVII. 


ETUDE DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES DYTIQUES PAR LA MÉTHODE DES PROJECTIONS. 


Plusieurs Dytiques privés de leurs pattes, de leurs ailes et de leurs 
élytres et munis de petits styles verticaux collés au baume, soit sur le 
milieu de la face tergale des somites abdominaux, du premier au septième, 
soit sur les régions latérales de la face tergale du troisième somite seule- 
ment, ont été placés dans l'instrument à projection, tantôt transversalement 
à l'axe du faisceau lumineux, tantôt parallèlement à cet axe. 

Jai pu ainsi, avec un grossissement de 7 diamètres environ, obtenir des 
dessins très concordants des deux phases respiratoires. 

Dans tous ces essais, l’insecte n’était fixé que par deux épingles traver- 
sant les bords latéraux du prothorax. L’abdomen était entièrement libre. 

En combinant les résultats auxquels je suis arrivé ainsi, avec ceux que 
m'a donnés la méthode graphique, j'arrive à pouvoir décrire comme suit les 
mouvements respiratoires des Dytiques : 


M'AITS GÉNÉRAUX. 


4° Le métathorax est immobile, ne participe pas aux mouvements des somites abdo- 
minaux. 

2 Même chez les individus vifs, l'amplitude des mouvements respiratoires est faible. La 
diminution du diamètre vertical en expiration, à la hauteur du troisième somite, n’est que 
de 1/99. 

3° La face tergale des somites de labdomen est seule en mouvement; la face sternale ne 
bouge point. 

4° Les faces tergales de tous les somites abdominaux actifs (du 1°% au 7°) se déplacent à la 
fois ; il n’existe pas de mouvement progressif, pas d'onde. 

5° La longueur de l'abdomen ne varie pas. Suivant les individus, l’extrémité de l'abdomen 
reste immobile ou offre de légers mouvements d’oscillation de bas en haut. 

6° Il n'existe de pause réelle, ni à la fin de linspiration, ni à la fin de l'expiration. 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration. inspiration, 


Le mouvement débute d’une façon brusque. La con- | L'inspiration est un mouvement lent, régulier à vitesse 
traction des muscles expirateurs semble s’opérer par décroissante, 
petites secousses successives ? 

L'arceau tergal du somite 1 s'incline légèrement en | Les arceaux tergaux 1 et 7 prennent des positions moins 
arrière. obliques. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 83 


L’arceau terga] du somite 7 s'incline légèrement en 

`~ avant. 

Les faces tergales des somites 9, 3, 4, Set 6 s'abaissent 
en glissant un peu en arrière, de sorte que tous ces 
somites chevauchent davantage les uns sur les au- 
tres. 

L’abaissement maximum a lieu pour les somites 9, 3, 4. 
Dans le sens longitudinal les faces tergales 3 et 4 sont 
presque horizontales. 

Le profil longitudinal de la face dorsale de l'abdomen 
devient plus concave. Cet effet est augmenté chez 
certains individus dont la pointe de l’abdomen se 
relève un peu pendant l'expiration. 


La courbure transversale des arceaux tergaux se mo- 
difie, leur partie centrale s’abaissant un tant soit 
peu plus que leurs extrémités latérales; ils devien- 
nent plus plats. 

La zone molle qui porte les stigmates des somites anté- 
rieurs s'enfonce et les bords épimériens s’inclinent 
fortement en dedans. 


Les faces tergales des somites 2, 3, 4, 5 et 6 s'élèvent 
et se déplacent un peu d'arrière en avant. 


Le maximum d'effet paraît avoir lieu pour les somites 
2,5, 4. Dans le sens longitudinal, les faces tergales 
5 et 4 sont inclinées en arrière. 

Le profil longitudinal de la face dorsale de l'abdomen 
devient moins concave d'une façon générale et est 
même légèrement convexe dans la région des anneaux 
HO 

Chez certains individus l’extrémité de l’abdomen des- 
cend un peu. 

Les arceaux tergaux deviennent légèrement plus con- 
vexes dans le sens transversal. 


La zone molle qui porte les stigmates antérieurs se 
relève et les bords épimériens des arceaux sternaux 
correspondants se redressent. 


Les mouvements respiratoires des Dytiques étant ainsi élucidés à laide 
de procédés qui laissent peu de prise aux erreurs, je me permettrai d'op- 
poser à la description que je viens d'en donner, celle qu'a publiée Faivre 
qui, jusqu’à présent, a fait autorité à cet égard. Je mets en italique, dans le 
texte de l’auteur, ce qui est en désaccord avec ce que j'ai observé. 

« Sur un Dytique auquel on a enlevé les ailes, on observe, à la région 
» abdominale, deux mouvements bien distinets. Le premier consiste : 
» 4° dans abaissement des lames latérales de chaque côté; 2° dans lélé- 
» vation des segments dorsaux de l'abdomen ; 3° dans la direction d’arrière 
» en avant et de bas en haut de ces segments; 4° dans lallongement et 
» inflexion légère de haut en bas et de bas en haut des trois derniers 
» anneaux. Ce temps est l’analogue de l'inspiration; il a pour résultat 
» l'agrandissement de la cavité abdominale. Le second mouvement suc- 
» cède presque immédiatement au premier; il s’accomplit par un méca- 


» nisme tout à fait inverse !. » 


Le mémoire de Faivre-est un travail consciencieux; je ne cite donc pas 


“ . A 3 s : Q 
1 Farre. De l'influence du système nerveux sur la respiration des Dytiques, op. cit., p. 324. 


56 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


le passage précédent pour la futile satisfaction de formuler une critique, 
mais pour montrer que l'observation directe des mouvements respiratoires 
fait commettre de petites erreurs et laisse passer inaperçus la plupart des 
détails. 

Faivre ajoute encore, un peu plus loin * : « Ainsi, soit que l’insecte 
» marche, soit qu’il nage, deux ordres de mouvements interviennent dans 
» la respiration : les mouvements respiratoires proprement dits qui s’exé- 
» cutent à l’aide des lames latérales et des anneaux et les mouvements 
» secondaires qui ont lieu pendant la marche et la nage à l’aide de l’abais- 
» sement et de l'extension des trois derniers anneaux de l'abdomen. » 

On remarquera que Faivre insiste sur les mouvements des régions épi- 
mériennes et sur le prétendu allongement de l'abdomen. 

Comme chez l’'Hydrophile, l’inclinaison en dedans des épimères n’est 
qu’une conséquence de lPabaissement des arceaux dorsaux; de plus, cette 
inclinaison a lieu en expiration et non en inspiration, bien que les termes 
dont se sert l’auteur cité semblent indiquer le contraire. 

Quant à l'allongement apparent de l’abdomen, on sait que c’est une 
illusion, les expériences par projection démontrant que la longueur du 
corps ne varie pas pendant la respiration calme. 

En parlant de l’'Hydrophile, j'ai fait observer qu’il était parfaitement 
inutile de vouloir utiliser la méthode graphique à des recherches sur le 
rhythme respiratoire des insectes. Les Dytiques nous fournissent une preuve 
indiscutable à cet égard, le rhythme respiratoire des individus privés de 
leurs élytres et de leurs ailes n'étant pas du tout le même que celui des 
individus intacts. | 

Jai dit, en effet, à propos des diverses expériences qui précédent que, 
dans ces essais, les mouvements respiratoires se succédaient régulièrement 
et sans interruptions. Or, il en est tout autrement chez le Dytique en liberté 
et muni du revêtement normal de son abdomen. 

Pour constater ce qui se passe dans ces conditions, je n’enlève au Coléop- 
tère que la moitié postérieure de lélytre droit ainsi que la partie sous-jacente 


1 Favre. Loc. cit., p. 325. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 57 


de l’aile du même côté. Cette ouverture relativement minime suffit pour 
observer les mouvements respiratoires lorsqu'on s’est familiarisé avec leur 
mécanisme par d’autres études préalables. 

L’insecte étant lâché dans l’eau, on voit une couche d'air argentée 
adhérer aux zones foncées et velues de la face dorsale des anneaux décou- 
verts. Une bulle d'air elliptique et peu saillante se montre à chacun des 
orifices stigmatiques visibles; enfin une grosse masse d'air convexe vers 
son bord libre est comprise entre la face supérieure de l'abdomen et les 
ailes, (Il ne parait pas y avoir d'air entre les ailes et les élytres.) 

La succession des mouvements respiratoires se présente comme suit 
1° Sous l’eau, longs arrêts ! en inspiration; toutes les 20 secondes environ 
(parfois après 40 secondes), un ou deux mouvements expiratoires pressés. 
De temps à autre, ces mouvements d'expiration si distants amènent (même 
Chez les individus absolument intacts) l'expulsion d’une grosse bulle 
gazeuse. En général l’animal monte immédiatement après à la surface de 
l'eau pour renouveler sa provision d'air ?; 

2° A la surface, long arrêt en inspiration, de durée assez variable, ter- 
miné par un ou deux mouvements d'expiration faibles, mais rapprochés, 
après quoi l’insecte plonge. 

Ainsi que je l’annonçais plus haut, il n’y a done aucune analogie entre le 
rhythme respiratoire régulier de l’insecte privé de ses élytres et de ses ailes 
et celui de l'individu dont l’abdomen est resté protégé par ses couvertures. 
Je ne crois pas que l’on puisse, avec certitude, donner le motif de cette 
grande différence. Les mouvements respiratoires des insectes étant essen- 


1 I ne faut pas confondre arrêt et pause ; la pause est le repos qui, chez certains animaux, 
termine chaque inspiration ou chaque expiration; Cest un phénomène qui se répète régu- 
lièrement et à intervalles égaux. L’arrêt est une interruption plus ou moins importante dans 
la série des mouvements. L'animal restant en inspiration ou en expiration pendant un temps 
beaucoup plus long que celui qui répond à chacune des phases respiratoires lorsque celles-ci 
še succèdent d’une façon rhythmique. 

2 Je suis encore ici en désaccord avec Faivre qui dit : « Chaque fois qu’il descend, il se 
* Contracte et laisse échapper quelques bulles d'air. » On voit que j'ai cru constater abso- 
lument l'inverse, l’insecte n’expulsant l'air vicié qu'après un certain temps de respiration 
Sous l’eau, puis remontant ensuite. 


Tome XLV. 8 


58 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


tiellement des mouvements réflexes, il est possible que la dénudation com- 
plète de l'abdomen amène une excitation suffisante pour déterminer une 
succession régulière de mouvements que l’animal ne présente pas dans les 
conditions normales; il est possible aussi que l'excitation émane des centres 
nerveux cérébroïdes et que l'absence d’arrêts ne soit qu'une des manifes- 
tations de l’état d'inquiétude de l'insecte mutilé et fixé. 

L'expérience qui précède m'a permis de constater un détail qui a sa 
valeu#&: Faivre a accordé une grande importance, dans lacte respiratoire, 
aux mouvements des derniers anneaux abdominaux. Parlant du Dytique 
arrivé à la surface, il s'exprime en ces termes : « Il élève hors de l’eau 
» l'extrémité abdominale, abaisse les trois derniers anneaux pour prendre 
» de l'air, puis il les applique de nouveau contre les élytres et descend avec 
» rapidité... on peut produire à volonté ces mouvements abdominaux posté- 
» rieurs. Dès qu'on sort un Dytique de l’eau, les derniers anneaux s'abais- 
» sent et s’allongent; mais quand on l'y replonge, les anneaux s'appliquent 
» contre les élytres. » 

Faivre a été trompé par le changement de courbure de la face dorsale de 
l'abdomen en inspiration. J'ai pu m'assurer, chez l'individu dont je n'avais 
enlevé que le quart de la surface des élytres, que c’est toujours dans la partie 
visible de la région moyenne de la face dorsale de l’abdomen que les mou- 
vements respiratoires s'effectuent. Les déplacements et surtout les allonge- 
ments de l'extrémité abdominale sur lesquels Faivre insiste font défaut ou 
sont si peu marqués qu’ils passent absolument inaperçus. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 59 


$ XIX. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DES DYTIQUES. 


La disposition des muscles de l'abdomen est, à très peu près, la même 
que chez l’'Hydrophile. 


Fig. 49 X 4. — Muscles de la moitié gauche de l'abdomen du Dytiscus marginalis Q. 


A, B Muscles longitudinaux dorsaux. 
a = = sternaux. 
a, 8 ro expirateurs verticaux. 


-Les muscles expirateurs (x, 8, fig. 19) sont encore une fois ici au nombre 
de quatre, par somite (deux à droite, deux à gauche); ils sont plus longs 
que ceux de l’'Hydrophile et les muscles d’une même paire s’entre-croisent 
comme les branches de la lettre X. 

Ainsi que le montre la coupe transversale (fig. 20, +), ils s’insérent, en 

Bt nn haut, au bord latéral de l’arceau ter- 
gal, en dedans du pli formé par la 
zone stigmatique, en bas, sur la région 
latérale de l’arceau sternal. 

L'absence totale de muscles inspira- 


RMS Duitets Shholitans, teurs conduit à la conclusion que j'ai 

C transvers 3e ite abdominal. rey ; ` . 
HeLa SERT E ae déjà formulée au § XIII, à savoir que 
z Muscles expirateurs verticaux. chez le Dytique, comme chez Hydro- 


phile, l'expiration est seule active, l'inspiration, passive, s'effectuant sous 
l'influence de l’élasticité des parois du corps et des parois des trachées. 

La forme du graphique Æ (page 52) vient, du reste, confirmer cette 
déduction basée sur un fait anatomique. 


60 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


S XX. 


EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÈME NERVEUX DES DYTIQUES. 


J'ai rappelé $ XIV (page 47) les expériences effectuées par Faivre dans 
le but de déterminer le rôle des différents centres nerveux des Dytiques et 
leur influence spéciale sur les mouvements respiratoires de ces insectes. 

Faivre ayant constaté 1° que l’ablation des ganglions cérébroïdes, la sec- 
tion des connectifs qui unissent les ganglions sous-Ͼsophagiens aux suivants, 
la section de tous les connectifs qui précèdent le ganglion mésothoracique, 
enfin la division des connectifs qui relient le ganglion mésothoracique au 
mélathoracique, n’abolissent pas les mouvements respiratoires; 

2° Que l’irritation du ganglion métathoracique active ces mouvements ; 

3° Que la suppression du ganglion métathoracique ou la section de la 
chaîne en arrière de ce ganglion amènent la cessation totale des mouvements 
d'inspiration et d'expiration, conclut de ses résultats que le ganglion méta- 
thoracique préside aux mouvements respiratoires et que les ganglions abdo- 
minaux ne jouent que le rôle de conducteurs par rapport au centre. respira- 
toire unique du métathorax. 

Je ne pourrais que répéter ici les objections que j'ai formulées ($ XIV) à 
propos de l’Hydrophile. Le système nerveux du Dytique est, du reste, encore 
plus condensé; en effet, l'abdomen comprend huit somites apparents et il n’y 
a que six ganglions abdominaux visibles, dont le premier est très rapproché 
du ganglion métathoracique. 

En détruisant la masse nerveuse du métathorax, on supprime, en fait, les 
ganglions abdominaux qui sont fusionnés avec lui et on lèse, très probable- 
ment, le premier ganglion abdominal libre qui vient immédiatement après. 

On détruit donc précisément les centres qui animent les muscles des 
somites abdominaux antérieurs, 4, 2, 3 et peut-être 4, précisément ceux où 
les mouvements respiratoires consistant en déplacements de haut en bas de 
la force tergale sont réellement actifs (voyez § XVIII, page 55). Les cinq 
ganglions restants ne peuvent évidemment plus exciter de mouvements que 
dans les anneaux abdominaux postérieurs. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 61 


<- Faivre. fournit, sans le savoir, une preuve expérimentale de. ce’ que 
j'avance. En irritant les trois ganglions abdominaux de la partie antérieure 
‚visible de la chaîne abdominale, il n'arrive qu’à faire se recourber légèrement 
labdomen vers le haut, mais il n’obtient pas de mouvements respiratoires 
proprement dits. 

:. L'expérience suivante que j'ai effectuée sur un Dytique mâle confirme 
en majeure partie les observations que je viens d'exposer. 

L'insecte intact et calme fait neuf à dix mouvements respiratoires. par 
minute. On cherche à détruire le ganglion métathoracique à l’aide d’une 
forte aiguille enfoncée par l'intervalle entre les trochanters de la deuxième 
paire et ressortant par la pointe de l’écusson. 

Le Dytique exécute des mouvements de l'abdomen très violents. Lorsque 
l'animal est calmé, on observe encore dix mouvements respiratoires très 
faibles, par minute, méme dans les anneaux antérieurs; puis, au bout de 
fort peu de temps, ces mouvements disparaissent d’une façon totale, la lésion 
subie par la masse nerveuse métathoracique paraissant avoir déterminé 
Pabolition progressive rapide des propriétés des autres ganglions soudés à 
Sa partie postérieure. i 

Comme lanimal présentait cependant encore des mouvements abdomi- 
naux généraux (non respiratoires), on sectionne la chaîne, par le dos, en 
arrière du métathorax. On supprime donc, pour l'abdomen, les centres 
fusionnés avec la masse métathoracique, plus le premier ganglion suivant 
distinct. 

Ainsi qu’on pouvait le prévoir, tous les somites abdominaux antérieurs 
Sont paralysés. Le dernier somite et les pièces de l’armure génitale (qui 
répondent à des somites modifiés) continuent, au contraire, à- offrir des 
Mouvements très prononcés. 

Jai cru inutile de multiplier davantage les essais de ce genre sur le 
Dytique; l'erreur physiologique de Faivre est trop évidente et, si la des- 
truction du ganglion métathoracique donne, en apparence, des résultats con- 
formes aux vues de cet auteur, c’est, on ne saurait trop le répéter, que, chez 
la plupart des Coléoptères, il est matériellement impossible d'abolir l’action 
de ce centre seul. 


62 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


On a vu plus haut (§ XIV, page 49) que j'avais cherché à déterminer 


chez l’Hydrophile si les centres nerveux céphaliques ont une certaine action 


sur les mouvements respiratoires. Faivre ayant observé chez le Dytique 
que la destruction des ganglions cérébroïdes ne paraît pas modifier les 
mouvements de respiration et que l’ablation des ganglions sous-æsopha- 
giens ne produit une perturbation que dans les moments qui suivent lopé- 
ration, je ne pouvais me dispenser de faire des essais analogues, mais en 
m'entourant de précautions destinées à me mettre à labri des illusions. 
Je m'étais servi, pour l’'Hydrophile, de la méthode des projections; cette 


fois, j'ai utilisé la méthode graphique. 


Après avoir obtenu, en employant le style longitudinal dont il est parlé 
au § XVII (page 52), un tracé très net des mouvements respiratoires d’un 
Dytique mâle vigoureux, on décapite l’insecte, supprimant ainsi à la fois les 
ganglions cérébroïdes et les ganglions sous-æsophagiens; puis on prend un 
graphique nouveau. 
© Celui-ci montre qu'il n’y a pas de ralentissement; qu'il existe, plutôt, 
une certaine accélération (neuf mouvements par minute au lieu de sept 
observés chez l'animal encore entier); mais que lamplitude a diminué 
des deux tiers environ. 

Le résultat suivant est beaucoup plus net. Chez un Dytique femelle qui 
vient de fournir, à l’aide du 
style longitudinal, le gra- 
phique F ci-contre, sur 
lequel on a compté cinq 
mouvements respiratoires par 
minute, on détruit rapidement les ganglions cérébroïdes seuls, puis on 
prend le second tracé G sur lequel on retrouve les caractères distinctifs 
de l'inspiration et de l’expi- 


— Sens de la rotation du cylindre. 


ration; Ce qui prouve que 
la forme générale des mouve- 
ments respiratoires est restée 
la même, mais qui montre : 
4° un accroissement de vitesse, le nombre des mouvements respiratoires 


<—— Sens de la rotation du cylindre. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 63 


étant de sept par minute; 2° une diminution d'amplitude et une faiblesse 
remarquables. 

Ainsi, chez les Dytiques, la destruction des centres volontaires n’amène 
pas la suppression des mouvements respiratoires, fait que Faivre avait déjà 
constaté, mais elle rend ces mouvements un peu plus rapides et notable- 
ment plus faibles. 


§ XXL. 


COLYMBETES FUSCUS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'insecte privé de ses élytres, de ses ailes et de ses pattes est fixé par 
deux épingles traversant les rebords latéraux du prothorax. Le grossisse- 
ment employé est de 13 diamètres. 

Ce petit Dytiscide, placé dans les conditions que je viens d'indiquer, 
imprime à son abdomen des mouvements oscillatoires très étendus, dans le 
sens vertical, l'extrémité de l'abdomen s'élevant notablement en expiration. 
Malgré cette particularité très défavorable à l’observation, on constate les 
trois points suivants : 

1° Le méso et le métathorax ne bougent pas; 

2° La longueur de l'abdomen reste invariable; 

3° Il existe régulièrement une pause en inspiration. | 

Afin de paralyser les déplacements de bas en haut de l’abdomen, on 
engage son extrémité sous la portion horizontale d’une épingle coudée à 
angle droit. 

Dans ces nouvelles conditions, et de petits styles verticaux ayant été 


collés sur les arceaux tergaux 2 et 4, on assiste aux phénomènes ci-des- 
SOUS : 


Les arceaux tergaux s'abaissent en expiration, le maximum d'effet ayant 
lieu, comme chez les Dytiques, pour les somites 2, 3, 4. 

L'inclinaison des styles montre que les arceaux tergaux de la base de 
l'abdomen s'inclinent en arrière, tandis que les arceaux postérieurs s'in- 
clinent en avant. 


64 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Le profil longitudinal de la face tergale de l'abdomen devient donc plus 
concave et il existe, en même temps, pendant l'expiration, un léger chevau- 
chement des arceaux tergaux. 

De même que chez les Dytiques proprement dits, les mouvements respi- 
ratoires ont très peu d'amplitude, la diminution du diamètre vertical de 
l'abdomen variant entre ‘|æ et !/,4 (Dytique fa). 

On s'assure aussi, comme chez l'animal dont l'abdomen était libre, que 
les segments thoraciques postérieurs restent immobiles, que l'abdomen ne 
change pas de longueur et qu’il existe une pause en inspiration. 

Enfin, dans une dernière expérience, trois styles sont collés sur le 
deuxième arceau tergal, l’un au milieu, les deux autres sur les portions 
latérales; l’insecte est placé dans l'appareil à projection de façon à obtenir 
une silhouette de la coupe transversale du corps à la hauteur du second 
somite abdominal. 

La quantité dont les différents styles descendent, en expiration, permet 
de constater que lors de la dépression expiratoire, les arceaux tergaux 
s'abaissent un peu plus au milieu que sur les côtés; qu’ils deviennent, en 
un mot, plus plats, absolument comme chez les Dytiques proprement dits. 

En résumé, les mouvements respiratoires des Colymbetes sont à fort peu 
près ceux des Dytiscus, fait que lon pouvait prévoir, mais qui, dûment con- 
staté, autorise à généraliser et permet de supposer que tous les Coléoptères 
du groupe des Dytiscides respirent de la même manière. 

$ XXL. 
Sio MIETE oey oo CARABUS AURATUS ; ABAX STRIOLA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projécttons.) 


Rathke a observé les mouvements respiratoires du Carabus granulatus; 
il ne les décrit pas spécialement et se borne à signaler cette particularité 
que l’arceau tergal du, métathorax s'élève et s'abaisse, mais moins. que les 
arceaux supérieurs des somites abdominaux 1. 


4 Raruke. Anatomisch-physiologische Untersuchungen , etc., op. cit., p. 104. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 65 


Les Carabiques que j'avais à ma disposition étant des insectes trop faibles 
pour vaincre utilement les petits frottements d’un appareil enregistreur, je 


me suis borné à étudier leurs mouvements respiratoires à l’aide de la 
méthode des projections. 


Carabus auratus. — L'insecte privé de ses élytres et de ses pattes est 
Placé transversalement dans l'appareil. La silhouctte reproduit le profil de 
l'animal grossi environ sept fois. De petits styles verticaux sont fixés sur 
le milieu des faces tergales des somites 4, 2, 3, 4, 5, 6 et 7. 

J'ai noté les phénomènes suivants : 


FAITS GÉNÉRAUX. 


1° La face tergale du métathorax participe légèrement, comme lavait observé Rathke, 
aux mouvements d'élévation et d’abaissement des faces tergales des somites abdominaux. 

2 Les mouvements respiratoires ont lieu à la fois dans tous les somites de l'abdomen; 
il wy a pas d'onde. 

3° Même chez les individus très vifs, ces mouvements, quoique rapides, ont une très 
faible amplitude (1/96 au niveau du 4° somite). 


4 La longueur de l'abdomen reste sensiblement constante. 
Faits spéciaux à chaque phase. 
Expiration. inspiration. 
L'expiration a lieu d’une façon brusque. L'inspiration a lieu d’une façon presque aussi rapide. 
L'arceau tergal du métathorax s'incline en arrière. L’arceau tergal du métathorax reprend sa position pre- 
mière. 

Les arceaux tergaux des somites abdominaux, jusqu’au | Les arceaux tergaux des somites { à 7 s'élèvent en glis- 

septième, s’abaissent en se déplaçant très légèrement sant légèrement en avant. 

en arrière. 
La face tergale de l'abdomen se creuse faiblement. Le profil de la face tergale, depuis le premier somite 
Les arceaux tergaux chevauchent un peu l’un sur jusqu’au sixième, devient à peu près rectiligne. 

Pautre. 
L'extrémité de l'abdomen s'abaisse d'une petite quantité. | L'extrémité de l'abdomen se relève faiblement. 


Le lecteur a vu plus haut, §§ XIV et XX, que la suppression des ganglions 
cérébroïdes et sous- œsophagiens chez l'Hydrophile et le Dytique n’abolit 
point les mouvements respiratoires, mais que cette destruction diminue 
l'amplitude des mouvements. 


= 


Tour XLV. 


66 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


J'ai répété l'expérience sur le Carabus auratus avec des précautions spé- 
ciales : insecte est muni de styles fixés sur les faces tergales des somites 
abdominaux, du premier au septième. Après avoir dessiné sur l'écran de 
l'appareil à projection, les contours des deux phases respiratoires, ainsi que 
les diverses positions successives des styles, on décapite le Carabe, on le 
replace dans l'instrument et l’on effectue de nouveaux dessins. 

Or, sauf une très légère diminution dans l'amplitude, les deux contours 
obtenus sont à peu près identiques. La décapitation n’a donc déterminé 
qu’une modification fort peu importante dans la manière dont s'effectuent 
les mouvements respiratoires. 


Abax striola. — Lorsque le Carabique examiné est une femelle dont 
l'abdomen est distendu par des œufs, la région abdominale offre, on le sait, 
un aspect tout particulier; les arceaux tergaux très élevés sont reliés aux 
arceaux sternaux par une zone molle et påle portant les stigmates et affec- 
tant une position exceptionnelle verticale. 

Dans ces conditions, les mouvements respiratoires ne ressemblent plus 
à ce qu'ils sont chez les måles ou chez les femelles dont les ovaires sont 
peu développés. Non seulement le métathorax reste parfaitement immobile, 
mais les contractions expiratoires devenues difficiles, au lieu de s’opérer 
simultanément dans les différents somites, ne s'effectuent plus que locale- 
ment dans un petit nombre de somites à la fois et souvent d’une manière 
progressive. 

Cette observation assez importante, au point de vue pratique, et que j'ai 
pu faire sur des femelles pleines de Carabus auratus et d'Abax striola, 
montre que, sous peine de commettre de véritables erreurs, il faut rejeter, 
pour les expériences sur la forme des mouvements respiratoires, tous les 
individus qui se trouvent dans l’état défavorable signalé ci-dessus. 

Ainsi, dans le cas de l’Abax striola femelle prête à pondre, j'aurais pu 
déduire faussement des silhouettes Texistence d’une onde et l’immobilité du 
métathorax, alors qu’en réalité, chez les Carabiques, londe fait défaut et que 
le métathorax participe légèrement aux déplacements des arceaux tergau* 


de l'abdomen. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 67 


§ XXI. 
TENEBRIO MOLITOR 4. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections ) 


Rathke cite le Tenebrio molitor parmi les Coléoptères dont il a examiné 
les mouvements respiratoires; il signale aussi ce détail que les arceaux ter- 
gaux de l'insecte en question sont assez transparents pour permettre à l’obser- 
vateur de distinguer les déplacements de quelques organes internes, tels que 
cerlains troncs trachéens. Rathke a, du reste, parfaitement compris que les 
petits mouvements des trachées ne sont point liés à lacte respiratoire et 
dépendent, par exemple, des changements de diamètre du vaisseau dorsal *. 
À part cette remarque, l'auteur cité ne donne aucune indication spéciale 
concernant les Ténébrionides. 

Les mouvements respiratoires du Tenebrio sont assez normaux et per- 
mettent de ranger cet insecte dans le voisinage des Carabus. 

Si l’on prend la précaution de paralyser, par un petit support, les grands 
mouvements oscillatoires 5 que le Coléoptère imprime à l’ensemble de l'ab- 
domen, on constate ce qui suit : la face tergale du métathorax participe, par 
entrainement, aux mouvements des premiers somites abdominaux. 

Ces derniers mouvements se font en trois temps, c'est-à-dire qu’il existe, 
en expiration, une onde assez bien caractérisée : 

1° Abaissement des faces tergales des somites 1, 2, 3, avec maximum 
en 2; 3; 

2° Abaissement des faces tergales 4 et 5; 


1 Le lecteur trouve ici le Tenebrio molitor après les Carabes et avant les Cicindèles, au 
Mépris de toute classification entomologique. 

Pai déjà dit, dans ma communication préliminaire, qu’il n'existe aucune relation étroite 
entre la forme des mouvements respiratoires d’un insecte et la place occupée par celui-ci 
dans les classifications. La suite du travail actuel le prouvera suffisamment. 

Le Tenebrio figure en ce point de mon Mémoire parce que ses mouvements respiratoires 
ont beaucoup d’analogie avec ceux des Carabiques. 

2 Raruxe. Anatomisch-physiologische Untersuchungen , ete., op. cit., p. 104, 

3 Non respiratoires. 


68 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


3° Incurvation de l'extrémité de l'abdomen vers le bas. 

La diminution du diamètre vertical de l’abdomen, dans la phase expira- 
toire et au niveau des somites 2, 3, est d'environ ‘};;. 

La longueur de l'abdomen ne varie pas d’une façon sensible. 

Il faut noter, enfin, des arrêts en inspiration, courts mais évidents. 


§ XXIV. 


CICINDELA HYBRIDA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Les Cicindèles, qui sont des insectes extrêmement vifs et agiles, offrent des 
mouvements respiratoires d’une amplitude assez considérable, beaucoup plus 
grande, par exemple, que celle de ces mêmes mouvements chez les Carabes. 
Chez la Cicindela hybrida la diminution du diamètre vertical de l’abdomen, 
en expiration, varie entre ‘/;, et ‘/;, tandis qu’elle n’est que de ‘/, chez le 
Carabus auratus. 

Le mécanisme respiratoire est, du reste, celui que l’on observe chez le 
plus grand nombre des Coléoptères. 

L'abdomen exécute deux espèces de mouvements : 1° des mouvements 
d’oscillation de haut en bas dont nous n'avons pas à nous préoccuper et 
qu'on annule à peu près complètement en faisant reposer l’un des derniers 
segments sur une épingle coudée à angle droit; 2° des mouvements respira- 
toires vrais. 

Jai observé ceux-ci au grossissement de 14, tantôt chez la Cicindèle 
dont la face tergale de l'abdomen était absolument nue, tantôt chez la 
Cicindèle dont quelques-uns des arceaux tergaux étaient garnis de petits 
styles collés au baume du Canada. 

Les arceaux tergaux s'abaissent, en expiration, et, dans ce mouvement, 
leur portion médiane descend un peu plus que leurs parties latérales; ils 
deviennent plus plats. 

Le maximum d'effet a lieu pour les somites 2 et 3. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 69 


Les arceaux tergaux 1, 2, 3 glissent un peu en arrière ; les arceaux 5 
et 6 s’inclinent en avant; le profil longitudinal de la face tergale devient 
ainsi concave et l’extrémité de l'abdomen se relève faiblement. 

Les régions épimériennes paraissent immobiles. Tous les mouvements 
sont simultanés; il n’y a pas d'onde. Les segments thoraciques postérieurs 
ne bougent pas. Enfin, en expiration, l'abdomen se raccourcit d’une petite 
quantité; environ */; de la longueur abdominale totale. 


§ XXV. 
SCARABÉIENS. 


(Historique.) 


Les Scarabéiens et les Lucaniens sont les Coléoptères dont la respiration 
a fait, à des titres divers, l’objet du plus grand nombre d'observations. Cette 
préférence s'explique aisément par les dimensions qu'atteignent plusieurs de 
ces insectes et par la facilité avec laquelle on se procure quelques formes très 
communes. 

Avant d'aborder l'exposé de mes études personnelles, je rappellerai briè- 
vement les résultats que mes prédécesseurs ont obtenus ou ont cru obtenir. 

Sorg ! a examiné les mouvements respiratoires du Lucanus cervus; il a 
constaté que ces mouvements étaient rhythmiques et que l'expiration s’effec- 
tuait d’une façon rapide tandis que l'inspiration avait lieu avec plus de len- 
teur, 

Treviranus ?, guidé par une théorie évidemment fausse de Comparetti 5, a 
cherché vainement à voir des contractions spontanées dans les trachées de 
l'Oryctes nasicornis. 


1 Sorc. Disquisitiones physiologicae circa respirationem insectorum, etc., p. 27. Rudolf- 
stadt, 1805. 
a TREVIRANUS. Biologie oder Philosophie der Lebenden Natur, 4e" Bd., p. 161. Göttingen, 

14. 

3 Comparerri. Dinamica animale degli Insetti, part. II, p. 505, 506 et 508. Padova, 1800. 
(Treviranus cite un autre travail de Comparetti : Obs. anat. de aure interna, p. 290, qui a 
échappé jusqu’à présent à mes recherches.) 


ns ie a 


70 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Les Geotrupes ont occupé Schenck +, Hausmann ?, Rathke ° et Packard *. 
Hausmann a voulu répéter sur ces Coléoptères lexpérience qui consiste à 
mettre en évidence les contractions et les dilatations de l'abdomen par les 
oscillations d’une colonne liquide *; Rathke a étudié les mouvements respi- 
ratoires du Geotrupes stercorarius et Packard a fait quelques observations 
sur les allures du même insecte lorsqu'il se prépare à voler. 

Marcel de Serres ê a examiné la structure des somites abdominaux des 
Cetonia et Rathke a étendu à ce genre les études auxquelles il s'était livré 
sur les Geotrupes. 

Le Hanneton (Melolontha vulgaris) a été observé plusieurs fois, au point 
de vue du mécanisme respiratoire, mais presque toujours d’une façon super- 
ficielle et incomplète. Straus-Durckheim 7 parle en termes fort vagues des 
mouvements abdominaux; Burmeister 8 prétend avoir constaté que linsecte 
est en expiration complète durant le vol; Dugès ° signale les mouvements 
de rentrée et de sortie de la tête et du thorax ; Graber !° prend le Hanneton 
comme exemple pour faire comprendre que, chez les Coléoptères, les arceaux 
sternaux de l'abdomen restent à peu près immobiles, alors que les arceaux 
tergaux s'élèvent et s'abaissent. Enfin Langendorff, dans le travail qu'il a 
publié postérieurement à ma notice préliminaire !!, expose comment il à 
appliqué la méthode graphique à l'étude des mouvements respiratoires du 


1 Scnencx. Epistola ad auctorem Gammarologiae (dans Sacus. Gammarologia, p. 935. 
Francoforti et Lipsiae, 1665). Schenck se sert du terme vague de Scarabaeus. 

2 Hausmann. De animalium exsanguium respüratione commentatio, p. 8. Hannoverae, 1803. 

3 Anatomisch-physiologische Untersuchungen über den Athmungs- Prozess der Insekten, 
pp. 101 à 103. 

4 Packard. Second Report of the United States Entomological commission, etc., p. 181 (en 
note). Washington , 1880. 

5 Voyez $ I du présent mémoire. 

6 MARCEL DE SERRES. Observations sur les usages du vaisseau dorsal (Méiw. pu Muséum 
DHIST. NAT. DE PARIS, t. IV et t. V. Paris, 1818-1819), p. 85 du tiré à part publié en 1818. 

7 Srraus-DURCKHEIM. Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux arti- 
culés, p. 322. Paris, 1828. 

8 Burmeisrer. Handbuch der Entomologie, 1 Bd., p. 420. Berlin, 1832. 

9 Ducks. Traité de physiologie comparée, ete., t. I, p. 556. Montpellier, 1838. 

10 GRABER. Die Insekten , 4'e Theil, p. 108. München, 1877. 

41 Das Athmungscentrum der Insecten, Opr. cir., pp. 82, 83 et 84. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 71 


4 


Hanneton et reproduit plusieurs tracés destinés à montrer l'influence irri- 
tante de la fumée de tabac et la persistance des mouvements de respiration 
après la décapitation. Je passe nécessairement les auteurs qui se sont bornés 
à rappeler un fait connu de tout le monde : les mouvements respiratoires 
amples et rhythmés par lesquels le Hanneton remplit d'air son système tra- 
chéen avant de s'envoler. 

La série d'observations que je viens de citer est assez longue et cepen- 
dant, si l’on excepte les recherches consciencieuses et méthodiques de 
Rathke, il serait impossible à l’aide des autres de tracer, avec exactitude, 
le tableau des mouvements respiratoires d’un seul Scarabéien. Rathke lui- 
même généralise trop. J'estime donc qu'une étude nouvelle et aussi complète 
que possible du mécanisme respiratoire de quelques-uns des Coléoptères du 
groupe en question peut offrir un intérêt réel. 

Je me suis servi de l'Oryctes nasicornis et du Hanneton pour effectuer 
le plus grand nombre de mes expériences; j'ai soumis, en outre, à un 
examen assez détaillé les quatre formes suivantes : Phyllopertha horticola, 
Geotrupes sylvaticus, Onthophagus nuchicornis et Trichius abdominalis. 


$ AXL. 
ORYCTES NASICORNIS. 


(Étude des mouvements respiratoires de l'Oryctes par la méthode graphique.) 


L'Oryctes nasicornis, très robuste, déplace aisément un levier en contact 
avec les parties mobiles de ses téguments. Ce serait, à cet égard, un Coléop- 
tère à choisir de préférence à tout autre, pour les expériences graphiques, 
S'il ne faisait constamment effectuer à son abdomen des mouvements vio- 
lents d'élévation et d’abaissement, absolument distincts des mouvements 
respiratoires et qui apportent toujours un trouble plus ou moins considé- 
rable en masquant partiellement les déplacements inspiratoires et expira- 
toires vrais. 


sis à 


| 


72 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Le graphique H que je reproduis à titre dexemple a été fourni par un 
individu privé complètement de ses élytres et dont l'abdomen était, par 


<— Sens de la rotation du cylindre. 


conséquent, absolument libre. Le levier transversal reposait sur le milieu 
de la face tergale du 4° somite. 

Les grandes ondulations du tracé répondent aux mouvements généraux 
de l'abdomen qui se présentent de trois à cinq fois par minute; les petites 
répondent aux mouvements respiratoires qui se répètent environ trente- 
cinq fois dans le même laps de temps. 

On arrive à diminuer beaucoup les mouvements abdominaux en conser- 
vant les élytres et en se bornant à y pratiquer une fenêtre située au-dessus 
de la portion du corps avec laquelle on veut mettre le levier en rapport. I 
est cependant impossible d'annuler les mouvements de l'abdomen d’une 
façon complète. 

Le graphique l a été tracé par un individu placé dans les conditions 


VV se — a 


e ollo Lod 


<—— Sens de la rotation du cylindre, 


favorables que je viens d'indiquer, le talon du levier transversal reposant, 
encore une fois, sur la face tergale du 4° somite. 
Les mouvements généraux de labdomen, notablement moins accusés 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 73 


que dans le cas précédent, ont lieu quatre fois par minute. Quant aux 
mouvements respiratoires proprement dits, ils sont très rapides; on en 
compte quarante-neuf par minute 1. Cette rapidité n’est pas un fait isolé; 
presque tous les nombreux Oryctes soumis à mes expériences offraient la 
même particularité; les quelques individus dont la respiration s’effectuait 
lentement étaient manifestement malades. 

Comme chez l’'Hydrophile excité et qui, dans ce cas exceptionnel seule- 
ment, présente un rhythme respiratoire presque aussi pressé, il n’y a chez 
l’'Oryctes ni pause inspiratoire ni pause expiratoire (voyez $ XI). 

Le tracé fourni par l'Oryctes montre en outre, comme ceux produits par 
les autres Coléoptères, que l'inspiration offre une vitesse décroissante et 
que l'expiration détermine une chute brusque du levier. 

Dès à présent, et en nous basant sur ce que nous ont appris les insectes 
étudiés dans. les paragraphes précédents, nous sommes en droit de sup- 
poser : 4° qu’il n’existe pas de muscles inspirateurs et 2° que les muscles 
expirateurs de l’Oryctes sont puissants. On verra plus loin que ces suppo- 
sitions sont parfaitement exactes. 


1 Ce rhythme rapide se maintient dans une série de graphiques successifs obtenus à 
l'aide du même individu. 


Tome XLV. 10 


74 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


& XXVII. 


Étude des mouvements respiratoires de l’'Oryctes par la méthode des projections. 


L'abdomen de l'insecte comprend huit somites apparents; les faces 
tergales des six premiers sont seules mobiles; les deux derniers somites 
forment, on le sait, le grand bouclier convexe et lisse qui dépasse le bord 
postérieur des élytres. 


Are Expérience. — Un mâle vif, privé de ses élytres, de ses ailes et de 
ses pattes, est placé dans l'instrument transversalement au faisceau lumi- 
neux, de façon à obtenir la silhouette du profil du Coléoptère. Des styles 
verticaux ont été collés sur le milieu des faces tergales des somites abdo- 
minaux 2, 4 et 6. 

La même combinaison fâcheuse, déjà signalée, des mouvements généraux 
de l'abdomen et des mouvements respiratoires vrais se présente. Cependant, 
avec de la patience et en y mettant le temps nécessaire, je suis parvenu à 
ne dessiner que les phases respiratoires proprement dites (fig. 58, pl. I). 

Les expirations sont assez profondes, la diminution du diamètre vertical 
de l’abdomen atteignant !/,, à la hauteur du 3° somite. 


2e Expérience. — L'insecte est placé longitudinalement dans l'axe du 
rayon lumineux, de manière à fournir une silhouette qui représente la 
coupe de l'abdomen. Pour des raisons inutiles à détailler et qui tiennent à 
la forme de l'Oryctes, je suis obligé de mettre au point pour le 4° somite 
abdominal. Des styles ont été fixés au milieu de la face tergale du somite, sur 
les bords latéraux de cette face et sur les bords épimériens (fig. 59, pl. Il). 

L'expérience réussit parfaitement et permet d'analyser tous les détails 
que présentent les mouvements respiratoires dans un somite abdominal 


déterminé. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 78 


Je résume ci-dessous l’ensemble des résultats auxquels je suis arrivé par 
l'emploi successif de la méthode graphique et de la méthode des projections : 


FAITS GÉNÉRAUX. 


1° Les faces tergales du mésothorax et du métathorax restent immobiles. 

2 Les mouvements respiratoires ont lieu à la fois pour tous les somites dont les arceaux 
tergaux peuvent se mouvoir; il n’y a pas d'onde. 

3° De même que chez le Lucanus cervus observé par Sorg, la dilatation en inspiration est 


plus lente que la contraction expiratoire. 


4° L’abdomen offre des changements de longueur très faibles (1/80 de la longueur abdo- 
S S 80 S 


minale totale). 


5° La face sternale des somites ne participe point aux mouvements de respiration. 
6° Les oscillations amples de labdomen sont beaucoup plus espacées que les mouve- 
ments d'inspiration et d'expiration et constituent un phénomène étranger à Pacte respi- 


ratoire. 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration, 


Les faces tergales des somites 1 et 2 basculent en 
arrière. 

La face tergale du somite 1 se dégage de dessous le 
métathorax. 

La face tergale du somite 3 s’abaisse à peu près verti- 
Calement et descend le plus bas. Celles des somites 
4, 5, 6 s’inclinent un peu en avant pendant leur des- 
cente. 

Les arceaux tergaux chevauchent légèrement les uns 
sur les autres et le profil longitudinal de la face dor- 
Sale de l'abdomen devient concave. 

La courbure des arceaux tergaux se modifie, leur partie 
centrale s’abaissant un peu plus que leurs extrémités 
latérales; ils deviennent un peu plus plats. 

Les Stigmates portés par la zone molle latérale 1 s’incli- 
nent légèrement en dedans. 

Les épimères cèdent un peu dans le même sens. 

L’abdomen se raccourcit très légèrement (1/3, de la lon- 
sueur abdominale). 


Inspiration. 


Les faces tergales des somites 1 et 2 deviennent à peu 
près horizontales. 

La face tergale du somite 1 pénètre un peu sous le méta- 
thorax. 

Les faces tergales des autres somites mobiles s'élèvent. 


Le profil longitudinal de la face dorsale de l'abdomen 
devient à peu près rectiligne. 


En s'élevant, les arceaux tergaux deviennent plus con- 
vexes dans le sens transversal. 


Les stigmates mobiles redeviennent à peu près horizon- 
taux. 

Les épimères retournent à leur position première. 

L’abdomen reprend sa longueur primitive. 


1 Il ya chez l'Oryctes trois stigmates postérieurs percés dans des portions fixes de tégu- 
ments, 


76 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ XXVII. 
MUSCLES RESPIRATOIRES DE L'ORYCTES. 
En comparant les figures ci-jointes (21, 22 et 23 ) du système muscu- 


laire abdominal de l’Oryctes à celles qui représentent le même système 


d 


Fig. A X 4. — Muscles de la moitié droite de l'abdomen de l'Oryctes nasicornis Q, 


A et a. Muscles longitudinaux, 
æ Muscles expirateurs verticaux. 


a 


Fig. 22 X 3. — Oryctes. Fig. 28 X 6. — Oryctes. 
f 7 A 
Coupe transversale du 4° somite abdominal. Muscles expirateurs verticaux des somites abdomi- 
S Position spéciale du stigmate dans ce somite. naux 2, 3 et 4. Les arceaux tergaux ont été 
a Muscle expirateur. renversés en dehors. 


chez l’'Hydrophile, le Dytique et le Hanneton, on voit que les muscles expi- 
rateurs verticaux « « sont ici proportionnellement plus robustes et surtout 
plus longs. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 77 


Rathke ! a cru remarquer que chez les Coléoptères dont les mouvements 
respiratoires sont énergiques, les muscles expirateurs sont plus forts que 
chez les autres formes à mouvements respiratoires moins profonds. 

Je ne sais si cette observation est sérieuse, car Rathke n'avait à sa dis- 
position aucun moyen de mesurer l’amplitude des mouvements respiratoires 
des animaux qu’il étudiait. 

Si l’on consulte le tableau II du $ XCIT, tableau que la méthode des 
projections m'a permis de dresser, on constate que l'Oryctes nasicornis ne 
figure pas parmi les Coléoptères dont la diminution relative du diamètre 
vertical de l’abdomen en expiration est considérable; j'ai dû le ranger dans 
le groupe chez lequel cette diminution n’a qu’une valeur moyenne, tandis 
que l’Hydrophile et le Hanneton, à muscles expirateurs moins développés 
et plus courts, appartiennent, au contraire, à la catégorie des insectes à 
mouvements expiratoires très amples. 

Les muscles expirateurs de l'Orycites ne sont point décomposés en deux 
faisceaux, comme ceux de l’'Hydrophile ou du Dytique; ils sont simples; 
disposition qui paraît très répandue et que Rathke considérait, à tort, comme 
générale chez les Coléoptères. 

Les muscles inspirateurs manquent; l'inspiration est donc passive. 


§ XXIX. 


EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÈME NERVEUX DE L'ORYCTES NASICORNIS. 


Jai analysé partiellement ($$ XIV et XX) les recherches de Faivre con- 
cernant l'influence des diverses régions du système nerveux du Dytique sur 
les mouvements respiratoires de ce Coléoptère et j'ai cherché à montrer, à 
l'aide d'expériences personnelles effectuées sur l'Hydrophile et sur le Dytique, 
que les conclusions de l’auteur étaient fausses; les effets obtenus provenant 
de la forme condensée du système nerveux. 

La chaîne nerveuse de l'Oryctes offrant, comme celle de la plupart des 


£ Anatomisch-physiologische Untersuchungen, Op. cir., p. 102. 


78 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Scarabéiens, une condensation poussée à l'extrême, il ma semblé qu'il 
serait très intéressant de répéter sur cet insecte une partie des expériences 
de Faivre, afin de pouvoir mettre, plus tard, les résultats en parallèle avec 
ceux que fournissent les Acridiens et les Odonates, animaux dont presque 
tous les centres nerveux sont restés bien séparés. 

Je rappellerai que les masses ganglionnaires distinctes les unes des autres 
à l'œil nu, les seules, par conséquent, sur lesquelles on puisse agir expéri- 
mentalement, sont, chez l’'Oryctes : une masse cérébroïde, une masse sous- 
œsophagienne, une masse prothoracique, enfin, une masse mésothoracique 
résultant de la soudure complète des ganglions du mésothorax, du méta- 
thorax et de tous les ganglions abdominaux. 

Ce dernier groupe complexe est situé dans l’intérieur du thorax, juste 
au-dessus de l’espace qui sépare les hanches de la première et de la deuxième 
paire. 

L’abdomen ne contient aucun centre nerveux de la vie animale; il n’est 
traversé que par des nerfs t. 

Il résulte théoriquement de la disposition du système nerveux de l'Oryctes 
qu'aucune lésion des connectifs ou des ganglions antérieurs à la masse méso- 
thoracique n’abolira les mouvements respiratoires abdominaux; mais que 


4 Pour le système nerveux des Scarabéiens, on consultera utilement les ouvrages suivants : 


Srraus-DurckHEIM. Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux articulés, 
pl. IX (Melolontha). Paris, 1828. 


Ém. BLANCHARD. . Règne animal de Cuvier, édition Masson. Insectes, atlas, pl. II (Melolon- 
tha). Paris, 1849. 
Ep. Branpr. . . Vergleichend- Anatomische Skizze des Nervensystems der Insekten (HORAE 


SOCIETATIS ENTOMOLOGICAE ROSSICAE, Bd. XV, 1879). (Geotrupes, Apho- 
dius, Ateuchus, Melolontha, Cetonia.) 


Ib. . . . Ueber die Metamorphosen des Nervensystems der Insekten (Isin., Bd. XV, 
1879). ( Melolontha.) 
Ip. . . . Vergleichend Anatomische Untersuchungen über das Nervensystem der 
Käfer (Isıv., Bd. XV, 1879). (Aphodius, Rhizotrogus, etc.) 
In. . . . Ueber das Nervensystem der Blatthörner ( Lamellicornia) (Isw., Bd. XIV, 
41879). (Cetonia, Geotrupes, Ateuchus.) 
MicueLs. . . . Beschreibung des Nervensystems von Oryctes nasicornis im Làrven, 


Puppen und Käferzustande (Zerrscar. r. Wiss. Zook., Bd. XXXIV, 1880). 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 79 


toute excitation ou toute lésion de la masse nerveuse complexe du méso- 
thorax pourra avoir un effet simultané immédiat sur la motilité des mem- 
bres mésothoraciques, des membres métathoraciques et des anneaux de 
l'abdomen. 

Les expériences qui suivent confirment cette hypothèse. Je les ai rangées 
de telle façon que le lecteur peut constater successivement les résultats de 
l'excitation ou de la destruction des différents centres nerveux, lorsque l’on 
procède d'avant en arrière, de la tête vers l'abdomen. 


1 Expérience. — Après avoir observé, chez un Oryctes, les mouvements 
respiratoires et les mouvements généraux de l'abdomen, on lui enlève la tête. 

Les centres cérébroïdes et sous-œæsophagiens sont ainsi supprimés; cepen- 
dant l'insecte continue à effectuer les deux espèces de mouvements : oscil- 
lations prononcées de l'abdomen et abaissements rhythmiques des arceaux 
dorsaux. Les déplacements en question sont à peu près exactement les mêmes 
que chez l'animal intact et Ton ne constate d’affaiblissement manifeste 
qu'après 15 minutes environ. 

Cette expérience n’est que la centième répétition, peut-être, d’une opéra- 
tion effectuée dans des buts divers par Boyle, Lyonet, Walckenaer, Trevi- 
ranus, Straus-Durckheim, Burmeister, Dugès, Newport, Dujardin, Blanchard, 
Yersin, Rathke, Faivre, Baudelot, Yung et tous ceux qui ont étudié les pro- 
priétés des centres nerveux des articulés. Toujours ces nombreux observa- 
leurs ont vu persister, chez les Arthropodes décapités ou privés de leurs 
ganglions cérébroïdes, des mouvements variés qui, si l’on analyse les des- 
criptions, ne sont autre chose que des mouvements réflexes. 

L'expérience sur l’Oryctes devait être faite pour compléter la série. Elle 
prouve, comme, du reste, des faits déjà cités dans ce mémoire et d’autres 
à exposer plus loin, que les mouvements respiratoires des insectes apparte- 
nant à la méme catégorie, sont des mouvements réflexes. 

Les mouvements de ce genre, tout en ayant lieu habituellement sans 
l'intervention des centres nerveux volontaires (représentés ici par les gan- 
glions cérébroïdes), peuvent, de même que chez les vertébrés, être modifiés 
Par des excitations ayant ces centres pour origine. 


80 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Ce fait incontestable, et dont je citerai encore des exemples dans la suite 
du mémoire, conduit à une explication assez plausible des résultats obtenus 
par la destruction des ganglions cérébroïdes seuls, ou par la décapitation 
chez l'Hydrophile, le Dytique et le Carabe ($$ XIV, XX et XXII) : la dimi- 
nution d'amplitude constatée après l’opération tiendrait à ce que chez 
l'insecte fixé, et évidemment inquiet, l'amplitude des mouvements respira- 
toires est un peu plus forte qu’à l'état parfaitement normal. Si l’on détruit 
les centres nerveux d'où émane cette excitation momentanée, les mouve- 
ments de respiration redeviennent à peu près ce qu’ils eussent été chez 
l'animal en liberté et au repos. 

Il suit de là qu’en excitant les ganglions cérébroïdes on doit obtenir soit 
une augmentation d'amplitude, soit une accélération. L'expérience suivante 
semble répondre à une partie de ce programme. 


2e Expérience. — On pique la masse cérébroïde à l’aide d’une aiguille. 
L’Oryctes exécute le mouvement de manège qui indique que l’on a bien 
atteint les centres voulus. Le nombre des mouvements respiratoires, par 
minute, s'élève un peu; il monte de trente-huit par minute à cinquante-huit. 

Le résultat ci-dessus peut, cependant, être dû à une cause plus générale 
que celle qu’il parait prouver au premier abord. Comme l'accélération notée 
chez le Dytique après la destruction des ganglions cérébroïdes et comme 
l'accélération observée chez Oryctes, dans l'expérience qui suit (après la 
suppression des ganglions prothoraciques), l'augmentation du nombre des 
mouvements respiratoires par minute consécutive à la piqûre de la masse 
sus-æsophagienne pourrait provenir de ce fait que, dans une certaine limite, 
toute lésion des régions antérieures de la chaîne nerveuse retentit sous forme 
d’excitation temporaire sur les régions postérieures de cette chaîne de façon 
à déterminer un rhythme respiratoire plus pressé. 


3e Expérience. — Un Oryctes respire soixante fois par minute ; on détruit 
la masse ganglionnaire prothoracique ; on constate, comme preuve de l'opéra- 
tion, la paralysie des pattes de la première paire. La respiration s'accélère 
notablement, le nombre des mouvements respiratoires par minute étant 


successivement soixante-treize, soixante-quinze, soixante-dix-huit. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 81 


4° Expérience. — On sectionne les connectifs reliant les ganglions pro- 
thoraciques à la masse complexe du mésothorax. Les pattes conservent leur 
motilité, mais la coordination de leurs mouvements a disparu. L'Oryctes se 
renverse constamment sur le dos. Les mouvements respiratoires, devenus 
très faibles, sont douteux. 


5° Expérience. — Le résultat précédent n'étant pas satisfaisant, on opère, 
de Ja même façon, sur un nouvel individu. Phénomènes identiques du côté 
des pattes. Cette fois on constate nettement la persistance des mouvements 
respiratoires. Ils sont faibles et, lors de l'observation directe, sont masqués 
par les déplacements généraux de l'abdomen. 

On immobilise la région abdominale et, dès ce moment, les mouvements 
respiratoires vrais deviennent incontestables. 

Toutes les expériences qui précèdent ont fourni sensiblement les mêmes 
résultats que les essais analogues auxquels Faivre a soumis le Dytique; la 
Conclusion de cet auteur : « persistance des mouvements respiratoires après 
la section des connectifs en avant du ganglion mésothoracique », est entiè- 
rement applicable à l'Oryctes. 


6° Expérience. — On pique, à l’aide d’une aiguille, la masse mésotho- 
racique qui comprend, ne l’oublions pas, des ganglions thoraciques propre- 
ment dits et {ous les ganglions abdominaux. 

A l’état très calme, l’Oryctes respirait environ vingt-cinq fois par minute; 
excité par les manipulations préparatoires à l'expérience, il respire trente- 
neuf fois dans le même temps. 

Après la piqûre, le rhythme s’accélère encore, le nombre de mouvements 
respiratoires monte brusquement à quarante-six par minute, mais retombe 
bientôt à vingt-cinq, chiffre initial. 


T° Expérience. — On excite de nouveau par une piqûre d’aiguille la 
même masse mésothoracique et par suite, comme on va le voir, les gan- 
glions abdominaux qui en font partie. 

L'insecte, à peu près calme, respirait quarante-trois fois par minute. 

Tome XLV. 11 


82 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Au moment de la piqüre les mouvements respiratoires cessent; seule- 
ment l'abdomen est à l’état d'expiration forcée, preuve évidente de lexci- 
tation des centres nerveux régissant les muscles expirateurs verticaux. 

Au bout de quelques minutes apparaissent de faibles pulsations respira- 
toires (quarante-quatre par minute), sans que l’état général en expiration ait 
cessé, Quinze minutes plus tard, les mouvements respiratoires normaux, 
réguliers et profonds se rétablissent. On en compte successivement vingt- 
quatre, trente-cinq, vingt-huit, par minute. 


8° Expérience. — Un Oryctes fait soixante mouvements respiratoires par 
minute, On divise en deux, transversalement, la masse mésothoracique, 
opération qui semblerait, au premier abord, devoir amener la séparation, à 
létat intact, de quelques-uns des centres postérieurs abdominaux; mais il 
wen est rien, les ganglions abdominaux sont tous lésés en même temps. Les 
trois paires de pattes sont immédiatement paralysées et les mouvements 
respiratoires cessent. L'arrêt de l'abdomen a lieu cette fois en inspiration. 

Cet arrêt en inspiration et non dans une position mixte, après la destruc- 
tion des centres excitateurs de mouvement des muscles abdominaux, est 
une preuve nouvelle s'ajoutant à toutes les autres de la passivité du mou- 
vement inspiratoire chez les Coléoptères. 

La série des expériences 6, 7, 8 démontre que lorsqu'on excite ou qu’on 
détruit partiellement, chez un articulé, une masse nerveuse complexe résul- 
tant de la soudure de centres ganglionnaires successifs, les excitations ou 
les lésions retentissent fatalement dans tous les centres nerveux consti- 
tuants. 

Un fait curieux signalé par Paul Bert en 1878 ! rentre dans le même 
ordre de phénomènes. Le savant physiologiste a observé que si l’on pique, à 
l’aide d’une aiguille fine, la masse ganglionnaire thoracique d’une araignée, 
on abolit immédiatement tous les mouvements spontanés et réflexes et non 


ceux de telle ou telle paire de pattes dont les centres spéciaux répondraient 
à l'endroit précis de la piqüre. 


1 Société de Biologie, 1878. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 83 


Mes expériences prouvent donc qu’il est impossible de déterminer expé- 
rimentalement, chez les Coléoptères à système nerveux condensé, des pro- 
priétés distinctes, spéciales, dans les ganglions thoraciques postérieurs et 
abdominaux antérieurs soudés entre eux. 


9e Expérience. — J'ai dit, plus haut, que l'abdomen de l’Oryctes ne ren- 
ferme pas de ganglions, qu’il ne contient que des nerfs conducteurs. Ceux-ci 
passent du thorax dans la cavité abdominale sous la forme d’un faisceau 
dont les éléments ne s’écartent qu’au bout d’un certain trajet. 

On sectionne ce faisceau; les pattes pro- et mésothoraciques conservent 
leur motilité ; les pattes métathoraciques sont paralysées !; l'abdomen offre 
encore des mouvements généraux autour de son articulation sur le méta- 
thorax; mais les mouvements respiratoires vrais sont abolis. Tous les 
somites sont immobilisés en inspiration. 


10° Expérience. — Section du même faisceau nerveux indiqué dans 
l'expérience précédente. Nouvel arrêt des mouvements respiratoires en 
inspiration. 


§ XXX. 
ONTHOPHAGUS NUCHICORNIS. 


(Étude des mouvements respiratoires par ia méthode des projections.) 


Comme les autres Scarabéiens, l'Onthophage offre deux espèces de mou- 
vements abdominaux : des mouvements oscillatoires dans le sens vertical et 
des mouvements respiratoires proprement dits. Les difficultés de l'analyse 
sont assez grandes parce que le rhythme, si je puis m’exprimer ainsi, des 
Mouvements de balancement de l’abdomen concorde à peu près avec celui 
des mouvements respiratoires vrais. Jamais je ne serais parvenu à observer 
les faits d’une manière claire sans la méthode des projections. 


1 Fait complètement d'accord avec les descriptions et les figures de Michels qui représen- 
tent les cordons nerveux des pattes de la troisième paire comme associés au faisceau com- 
mun des nerfs destinés à l'abdomen. En coupant ce faisceau, on doit donc, nécessairement, 
abolir la motilité dans les pattes postérieures. 


84 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Cette méthode permet de voir que les arceaux dorsaux se déplacent de la 
même manière que chez l’Oryctes ; ils descendent à peu près verticalement 
en expiration, le maximum d'effet ayant lieu pour le quatrième. Les expi- 
rations sont assez profondes; la diminution du diamètre vertical de l'abdomen 
atteint ‘/,, au niveau du 4° somite. 

Les rebords épimériens très rigides ne s’inclinent pas en dedans; le méta- 
thorax reste immobile et la longueur de l’abdomen ne varie point d’une 
facon appréciable. 

L'observation directe à la loupe ferait croire à l'existence d’une onde; 
des contractions expiratoires successives ayant fréquemment lieu, tantôt 
d’arriére en avant, tantôt d’avant en arrière. Mais avec un peu d'attention 
et surtout à l’aide des silhouettes, on peut s'assurer qu'entre deux mouve- 
ments de ce genre se placent, la plupart du temps, plusieurs expirations 
régulières ayant lieu simultanément dans tous les arceaux dorsaux mobiles. 

Je suis persuadé que les contractions ondulatoires sont en relation avec 
les efforts que l'insecte fait pour se dégager et qu’elles n'existent très proba- 
blement pas chez les individus intacts et libres. 


$ XXXI. 


GEOTRUPES SYLVATICUS. 


Placé dans l’appareil à projection, l'insecte imprime à l’ensemble de son 
abdomen des mouvements oscillatoires si violents et si étendus qu'il est 
impossible de dessiner une silhouette satisfaisante. 

Jai pu constater, par l'observation directe, sur des individus chez les- 
quels une fenêtre avait été pratiquée dans les élytres, que les mouvements 
respiratoires sont, d’une facon générale, ceux des autres Scarabéiens et que 
les arrêts qui se présentent de temps à autre ont toujours lieu en inspiration. 

Chez l'animal décapité, la forme des mouvements respiratoires reste la 
même. Le rhythme, d'abord accéléré pendant les instants qui suivent l’opé- 
ration, ne tarde pas, au bout de quelques minutes, à redevenir à peu près ce 
qu'il était chez l'individu intact. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 88 


§ XXXII. 


HANNETON (MELOLONTHA VULGARIS). 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode graphique.) 


Al 


Le Hanneton n’est pas à recommander comme sujet d'expériences en 
raison de l’irrégularité de ses mouvements respiratoires. Tel individu fait 
mouvoir le levier avec une rapidité gênante et en lui imprimant des mou- 
vements d'une grande amplitude, alors que d'autres, tout aussi vivaces en 
apparence et placés dans des conditions expérimentales identiques, ne pro- 
duisent que des ondulations peu régulières ou tremblées. Je ne suis parvenu 
à obtenir quelques graphiques convenables qu’en répétant mes essais un 
grand nombre de fois. 

Comme l'Oryctes, l'Onthophage et le Géotrupe, le Hanneton fait exécuter 
à son abdomen des mouvements de haut en bas et de bas en haut qu'il 
faut distinguer des mouvements respiratoires proprement dits. 

Une femelle très vigoureuse, munie d'une fenêtre aux élytres et suppor- 
tant un levier transversal reposant sur la face tergale de l’abdomen, à la 
limite des somites 3 et 4, a donné le graphique K ci-dessous, dans lequel 


<—em Sens de la rotation du cylindre. 


on voit l'influence des mouvements généraux de l'abdomen. On observait 
de cinq à douze mouvements respiratoires entre deux mouvements abdomi- 
naux et, pendant chacun de ces derniers, deux à trois mouvements respira- 
toires vrais. 

J'ai facilement annulé les oscillations de l'abdomen en fixant l'extrémité 
de celui-ci à l’aide d’une épingle. Il arrive, dans ce cas, que le tracé respi- 


86 7 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


ratoire n’est nullement altéré dans sa forme; cependant, dans plusieurs expé- 
riences, j'ai pu constater que la précaution était plutôt nuisible qu’utile. 

En comparant le graphique des mouvements respiratoires du Hanneton à 
celui des mouvements respiratoires de l’Oryctes, le lecteur sera frappé de la 
presque identité existant entre les façons de respirer de ces deux insectes : 
vitesse très grande (trente-neuf mouvements par minute), pas de pauses ni 
en inspiration ni en expiration; inspiration à vitesse décroissante, expiration 
représentée par une chute brusque du levier. La courbe respiratoire du 
Hanneton ne diffère de celle de Oryctes que par un détail : inspiration 
et l'expiration paraissent être à peu près aussi rapides l’une que l’autre et 
semblent s'effectuer dans des temps sensiblement égaux. 

Pour m'assurer s’il n’existait réellement pas de pause, soit en inspiration, 
soit en expiration, j'ai laissé un individu se fatiguer, pendant 15 à 20 minutes, 
à déplacer un levier, puis j'ai pris un graphique. Ce dernier accuse un grand 
ralentissement (vingt mouvements par minute); mais on n’y observe aucune 
pause véritable. 

Ce n’est que chez les Hannetons épuisés qu’on obtient une sorte de pla- 
teau arrondi au sommet de la partie inspiratoire de la courbe; indiquant 
donc un repos relatif en inspiration. 

Enfin, certains individus, après avoir respiré activement pendant quelque 
temps et d’une façon régulière, présentent de longues phases de repos durant 
lesquelles les somites abdominaux cessent absolument de bouger. 

Dans ces périodes d’immobilité, l'abdomen est toujours en inspiration, 
fait qui permet de supposer que l'inspiration est passive comme chez les 
autres Coléoptères. L'étude des muscles nous en fournira, du reste, une 
preuve suffisante. 


$ XXXII. 


‘(Étude des mouvements respiratoires du Hanneton par la méthode des projections.) 


Quelques-uns des Hannetons essayés ont été capturés au vol dans mon 
jardin et ont été introduits presque immédiatement dans l'appareil; on ne 
peut done soupçonner leurs mouvements respiratoires d’être alanguis par la 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 87 


captivité. Les autres individus nourris pendant quelques jours s'étant com- 
portés exactement de la même manière, l’ensemble des résultats obtenus me 
parait mériter toute confiance. 

Dans une première série d'expériences, les insectes étaient placés dans 
l'instrument de façon à donner une silhouette de leur profil longitudinal. 
De petits styles de papier étaient collés sur les arceaux dorsaux abdominaux 
0 

Le Hanneton exécutant, comme je l'ai dit plus haut, des mouvements 
élévation et d’abaissement de la pointe de l'abdomen, mouvements qui ne 
concordent point avec les mouvements respiratoires vrais, j'ai dessiné des 
silhouettes dans deux cas différents, dans le cas de l'abdomen libre et dans 
le cas de l'abdomen immobilisé par une épingle. 

Une deuxième série d'expériences a eu pour but l'étude des mouvements 
présentés par les parties latérales des somites. Il s'agissait surtout de déter- 
miner la valeur du déplacement des régions épimériennes. En effet, lors- 
qu'on observe directement, à la loupe, un Hanneton privé de ses élytres et 
de ses ailes, on voit, à chaque expiration, la zone molle qui porte les stig- 
mates et qui unit, sur les bords, les arceaux dorsaux aux arceaux sternaux 
se déprimer fortement en formant un pli profond. 

ll résulte de ce mouvement : 1° que les stigmates abdominaux 1 et 2, 
horizontaux en inspiration, deviennent presque verticaux et que le stigmate 3 
devient très oblique; 2° que les régions épimériennes, entrainées, s’inclinent 
en dedans. 

Je n'étais parvenu ni par la méthode graphique qui ne m'a fourni à cet 
égard que des résultats indécis, ni par l'observation directe, à discerner si 
inclinaison des épimères en dedans, lors de l'expiration, est assez notable 
Pour faire supposer un rétrécissement transversal de l'abdomen. C’est alors 
que j'ai eu recours à la méthode actuelle. 

L'insecte privé de ses ailes et de ses élytres est placé longitudinalement 
dans laxe du cône lumineux, de façon à donner, comme silhouette, la coupe 
répondant à peu près au 3° somite abdominal (voyez fig. 60, pl. Il). 

Dans un premier cas, des styles sont collés sur le milieu du 3° arceau 
tergal et sur les stigmates 3 (moitié gauche de la figure 60, à). 


88 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Dans un second cas (même individu) les styles sont portés par le milieu 
du troisième arceau tergal et par les régions épimériennes du même somite 
(moitié droite de la figure 60, à’). 

Or il est aisé de voir, en comparant les silhouettes obtenues, que tandis 
que l’inclinaison des stigmates et de la zone molle qui les porte est considé- 
rable, les déplacements des régions épimériennes sont absolument insigni- 
fiants. 

Voici le résumé des résultats fournis par la méthode graphique et par la 
méthode des projections : 


FAITS GÉNÉRAUX. 


4e L’inspiration et l'expiration s'effectuent à peu près avec la même vitesse et la même 
énergie; il n’y a point de pauses. 

% L'ensemble du méso- et du métathorax participe un peu aux mouvements respiratoires 
abdominaux. 

3° Les mouvements de rentrée et de sortie de la tête et les déplacements du prothorax 
ne sont pas rhythmiques et paraissent indépendants des mouvements respiratoires ordi- 
naires, 

4 Même lorsque la pointe de Pabdomen est fixée, les faces sternales du mésothorax, du 
métathorax et de Pabdomen ne restent pas absolument immobiles ; elles effectuent de petits 
mouvements d’élévation et d’abaissement. 

Be Les mouvements respiratoires sont très profonds; la diminution du diamètre vertical 
de l'abdomen, en expiration, variant, suivant les individus, de 1/9 à 4/4. 

G Chez les Hannetons dont la pointe de l'abdomen est libre, celle-ci exécute des mou- 
vements de haut en bas assez considérables, mais séparés par des intervalles de temps 
beaucoup plus longs que ceux qui séparent les mouvements respiratoires vrais, La pointe 
de l'abdomen décrivant un are de cercle, dans un plan vertical, il wy a ni allongement ni 
raccourcissement réel du corps. 

T° Les déplacements ont lieu à la fois dans fous les somites offrant des mouvements 
respiratoires vrais ; il wy a, par conséquent, pas d'onde. 


Remarque. — Il arrive fréquemment, lors du séjour du Hanneton dans l'appareil à pro- 
jection, que linsecte cherche à s'envoler. Il étend alors les moignons de ses élytres et fait 
entendre son bourdonnement caractéristique. Or on peut constater, sans exception, par les 
silhouettes, que l'abdomen du Coléoptère est alors à l’état d'inspiration forcée. L'inspira- 
tion dure aussi longtemps que le bourdonnement et cesse lorsque le Hanneton rabat les 
bases de ses élytres. 

Burmeister que je citais au § XXV s’est donc complètement trompé et, comme il était 
facile de le prévoir théoriquement, le Hanneton est bien en inspiration pendant le vol. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 89 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration, Inspiration. 


Les faces tergales du méso- et du métathorax s'inclinent | Les faces tergales du méso- et du métathorax s'inclinent 
en avant t; en même temps les faces sternales des en arrière; les faces sternales des mêmes régions 
mêmes régions s'élèvent un peu. s'abaissent. 

l en résulte que tout l'ensemble du méso- et du méta- 
thorax bascule sur l'articulation pro-mésothoracique. 

Les arceaux dorsaux des six premiers somites abdomi- | Les arceaux dorsaux des six premiers somites s'élèvent. 
naux se déplacent comme suit : tous descendent ; le 
maximum d'effet a lieu pour les somites 3 et 4; 
simultanément, 1 et 2 s’inclinent en arrière, 6 et 
même 7 s’inclinent en avant. 

Les stigmates des trois paires abdominales antérieures | Les stigmates des trois premières paires abdominales 
s’inclinent fortement en dedans. reprennent une position horizontale. 

Les rebords épimériens de l'abdomen rentrent d’une | Les rebords épimériens se portent faiblement en dehors. 
petite quantité. 

Le profil longitudinal de la face tergale de l'abdomen | Le profil longitudinal de la face tergale de l'abdomen 
devient concave. devient légèrement convexe. 

La face sternale de l'abdomen s'élève un peu, même | La face sternale de l'abdomen s'abaisse. 
chez les individus dont la pointe de l’abdomen est 
fixée. 


D'après l'énumération qui précède, le Hanneton exécute non seulement 
des mouvements respiratoires abdominaux, mais présente, de plus, en même 
temps, des déplacements assez accusés des segments méso- et métathora- 
ciques. 

On serait tenté de relier ce fait physiologique à une disposition anato- 
mique signalée par Straus-Durckheim ? : au bord postérieur et inférieur du 
Prothorax, dans la région tégumentaire molle qui unit le segment prothora- 
cique au segment mésothoracique, il existe, chez le Hanneton, une paire de 
grands stigmates d’où partent des troncs trachéens importants. 

Les mouvements du méso- et du métathorax pourraient donc étre consi- 
dérés comme produisant des appels et des expulsions d'air locaux dans la 
Partie thoracique du corps des Coléoptères. 

Je ne crois pas cependant qu’il faille attacher cette signification particu- 
lière aux mouvements en question; en effet : 1° les systèmes trachéens 


1 Tl n’y a pas ici erreur : Cest bien en avant que j'ai voulu dire. 
9 1 $77 . E . 
* Considérations générales, etc., op. cit., p. 79. 


Tome XLV. 12 


90 RECHERCHES EXPERIMENTALES 


abdominaux et thoraciques communiquent largement entre eux; 2° les stig- 
mates du thorax se retrouvent, par exemple, chez l'Hydrophile dont les 
mouvements thoraciques sont faibles et chez l’Oryctes dont le thorax est 
immobile. 

Il est bien plus probable que les stigmates thoraciques fonctionnent avec 
les stigmates abdominaux sous l’action puissante des mouvements respira- 
toires de l'abdomen +. 


$ XXXIV: 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU HANNETON. 


L’exactitude scrupuleuse avec laquelle Straus-Durckheim s’est attaché à 
décrire la structure anatomique du Hanneton rend à peu près inexplicables 
certaines lacunes importantes qui déparent cette belle monographie. Pour ne 
citer que ce qui touche à mes recherches, Straus-Durckheim n’a point 
observé les muscles respiratoires du Coléoptère qu'il avait choisi comme type. 

Fort étonné de ne point voir ces muscles représentés dans l'atlas des 
Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux articulés, j'ai 
relu avec soin toutes les parties de l’ouvrage dans lesquelles on pouvait sup- 
poser que l’auteur avait fait mention des muscles respiratoires, mais inuti- 
lement. 


1 Après mes expériences sur lOryctes, je wai pas cru devoir faire de recherches quant à 
l'influence des diverses parties du système nerveux sur les mouvements respiratoires du 
Hanneton. Les résultats eussent été évidemment les mêmes. 

Langendorff, dont j'ai déjà cité plusieurs fois le travail (Das Athmungscentrum der Inset- 
ten), faisant usage de la méthode graphique, a constaté qu’un Hanneton décapité continue 
à respirer régulièrement et fournit un tracé très satisfaisant. Je remarque, en comparant 
les diverses figures publiées par l’auteur, que la suppression des centres nerveux antérieurs 
wa point modifié l'amplitude, mais a déterminé un ralentissement manifeste. 

Langendorff a observé aussi que chez l'animal décapité l'élévation de la température 
produit une accélération comme chez l’animal intact. Enfin, il s’est assuré que l’on peut 
enlever le prothorax sans supprimer les mouvements respiratoires, mais qu'il n’est pas 
possible de détruire impunément une plus grande partie de la région antérieure du corps: 
Tout cela, on le voit, vient confirmer parfaitement l’ensemble de mes recherches per- 
sonnelles. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 91 


Cet oubli ou cette erreur de dissection a eu pour résultat inévitable une 
théorie absolument fausse des actions musculaires dans l'acte de la respira- 
tion. Straus-Durckheim ! attribue, en effet, la diminution de capacité de 
l'abdomen, en expiration, au rapprochement des arceaux dorsaux les uns 
des autres, sous l'influence de la contraction des muscles longitudinaux 
(prétracteurs supérieurs, Straus) ?. 

Le lecteur peut voir par les figures 24 et 25 qui, sans avoir l’élégance 
de celles de Straus-Durckheim, ont, au moins, le mérite de l'exactitude, 
que les véritables muscles expirateurs («) du Hanneton présentent la même 
disposition générale que ceux de l’Oryctes nasicornis. 


Fig, 24 X 4. — Muscles de la moitié droite de l'abdomen du Hanneton 9. 


A B Muscles longitudinaux (prétracteurs, Straus). 
œ Muscles respiratoires vrais (expirateurs). 


Situés dans les parties latérales des segments abdominaux, ils croisent, 
comme chez les autres Coléoptères, le repli constitué par la membrane 
molle unissant les arceaux dorsaux aux arceaux sternaux. S'insérant en 


1 Considérations générales, etc., op. cit., p. 324. 

2 Par suite de l'erreur de Straus-Durckheim, toutes les figures de la musculature du 
Hanneton reproduites dans les ouvrages généraux sont fautives. Je citerai, par exemple, 
là figure 18, planche IX, de lIntroduction à l'entomologie de Lacordaire, la figure 5, 
planche II, de P Anatomia degli insetti de Lorenzo Camerano, etc. 

J’ajouterai que le modèle anatomique en carton préparé par le D" Auzoux et qui se trouve 
dans tous les musées présente la même lacune. 


92 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


haut sur le bord latéral d’un arceau tergal, chacun de ces muscles se ter- 
mine, en bas, sur la région supérieure de l’arceau sternal correspondant. 

En les comparant à leurs homologues chez lOryctes, on voit qu’ils sont 
proportionnellement plus courts, plus étalés, 
et que leur direction, surtout appréciable 
sur une coupe (fig. 25, «), est notablement 
plus oblique. 

L’obliquité des muscles expirateurs du 
Hanneton et la situation de leur insertion 
inférieure m'autorisent à supposer que le 
petit mouvement en dedans que présentent 


Fig. 25 X 4. — Coupe transversale du 5° somite 


abdominal. les régions épimériennes durant l'expiration 
œ Muscle respiratoire (expirateur. est dû à une traction directe effectuée par 


S Position spéciale du stigmate dans ce somite, 


les muscles sur les parties latérales des 
somites, au lieu d’être simplement, comme chez l’Oryctes, une conséquence 
de la formation d’un pli dans la zone qui porte les stigmates. 

Pas plus que les autres Coléoptères, le Hanneton n’a de muscles inspira- 
teurs. Le retour de l'abdomen à sa capacité première est purement passif. 


§ XXXV. 
PHYLLOPERTHA HORTICOLA, 


Les Phyllopertha présentent naturellement les allures respiratoires géné- 
rales des autres Scarabéiens. 


Jai parfaitement constaté, comme chez le Hanneton, que l'abdomen est 
en inspiration pendant le vol. 


$ XXXVI. 


TRICHIUS ABDOMINALIS. 


Rathke ayant fait la plupart de ses observations sur le Geotrupes stercora- 
rius et la Cetonia aurata, il ma semblé utile de compléter mes recherches 
personnelles par l'examen des mouvements respiratoires d’un Coléoptère du 
groupe des Cétoines. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 93 


A défaut de Cetonia proprement dite, je me suis adressé au Trichius 
abdominalis, dont l’organisation est très voisine. 

Les mouvements respiratoires des trichies ne différant guère de ceux 
dont je viens de donner une description détaillée, je me bornerai aux quel- 
ques indications suivantes : en expiration, tous les arceaux tergaux mobiles, 
du premier au sixième, descendent et l'effet maximum a lieu à la limite des 
somites 2 et 3. Ce mouvement est simultané ; il n’y a pas d'onde. Contrai- 
rement à ce qui se passe chez les autres Scarabéiens, les expirations ont 
peu d'amplitude; la diminution du diamètre vertical de l’abdomen au niveau 
du troisième somite n’est que de '/x (observation faite sur un individu 
vigoureux au moment de la capture). La zone molle portant les stigmates 
forme un pli accusé. Les régions épimériennes paraissent immobiles; il est 
vrai que les longs poils qui garnissent cette partie du corps masquent peut- 
être le mouvement. 

L'extrémité de l'abdomen se relève, en expiration, d'une petite quantité ; 
mais la longueur totale ne change point. Enfin, le métathorax reste positive- 
ment immobile, comme chez l’Oryctes et l’Onthophage. 


$ XXXVII. 


STAPHYLINIENS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Rathke ! signale les Staphyliniens comme des Coléoptères tout à fait 
exceptionnels au point de vue du mécanisme respiratoire. 

Bien que la composition des somites abdominaux et la disposition des 
muscles qui les meuvent lui aient paru semblables à ce qui existe chez les 
autres insectes de l’ordre, l’auteur cité n’a pas pu constater de mouvements 
respiratoires nets de la part des arceaux tergaux de l'abdomen; seule la face 
dorsale du métathorax s'élevait et s’abaissait d’une façon active. 


1 Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., pp. 103 et 104. 


94 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


L'observation est à très peu près exacte; mais, comme on le verra ci-des- 
sous, l'ignorance de certains détails et le petit nombre de termes de compa- 
raison ont fait formuler à Rathke des conclusions trop absolues. 

Mes expériences personnelles ont été répétées, à l’aide de la méthode des 
projections, sur trois formes : Staphylinus cæsareus, St. pubescens et 
St. olens. 


Staphylinus cesareus (grossissement employé 12). — L'insecte, privé de 
ses élytres, de ses ailes et de ses pattes, est fixé par deux épingles traversant 
les bords latéraux du prothorax ; il est de plus placé assez haut pour que 
l'extrémité de son long abdomen ne puisse venir rencontrer le support 
(fig. 64, pl. HI). 

Dans ces conditions, je constate, à chaque expiration, une dépression assez 
forte des faces tergales du mésothorax (Ms. th.) et du métathorax (Mt. th.) et 
une dépression plus faible mais réelle des faces tergales des trois premiers 
somites abdominaux (1, 2, 3). En même temps, toute la seconde moitié de 
l'abdomen est légèrement projetée vers le haut, sans changer cependant de 
longueur. 

Les mouvements inspiratoires sont nécessairement inverses des précédents. 


Staphylinus pubescens (grossissement employé 14). — Les résultats que 
cette forme m'a fournis différent légèrement de ceux que m'avait donnés la 
précédente; les mouvements respiratoires apparents sont plus localisés et ne 
s’observent que dans le long métathorax de l'insecte et le premier somite 
abdominal. 

Comme chez le Staphylinus cæsareus, l'abdomen est projeté vers le haut 
en expiration sans que sa longueur soit modifiée. 


Staphylinus olens (grossissement employé 11). — Malgré sa taille nota- 
blement plus considérable, le grand Staphylin noir ne m’a offert aucune 
particularité nouvelle. Ses mouvements respiratoires apparents sont res- 
treints au méso-, au métathorax et au premier somite de l'abdomen, la face 
tergale de ces segments se déprimant en expiration. La diminution du dia- 
mètre vertical est, du reste, faible, environ hag. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 95 


Les mouvements de torsion de l'abdomen ne permettent pas d'affirmer, 
comme pour les deux autres Staphylins essayés, que la longueur de cette 
région du corps ne change pas. 


Ces expériences nous prouvent d’abord que les mouvements respiratoires 
des Staphyliniens ne se montrent pas seulement dans le métathorax, comme 
Rathke croyait l'avoir vu, mais que le mésothorax se déprime aussi généra- 
lement en expiration et, fait bien plus important, elles nous prouvent, en 
outre, qu’il existe des mouvements respiratoires abdominaux visibles dans 
les trois premiers somites ou dans le premier seul. 

Si l’on compare les Staphyliniens aux autres Coléoptères et même à Pen- 
semble des autres insectes, on arrive à cette conclusion que ces animaux 
sont beaucoup moins exceptionnels qu’on le supposerait à première vue et 
qu'ils présentent simplement, avec exagération, des phénomènes qui existent, 
moins accusés, chez un grand nombre de formes diverses. 

Ainsi, il suffit de parcourir le Mémoire actuel ou, plus simplement, de 
consulter le tableau I du § XCII pour s'assurer que, chez la plupart des 
insectes, les mouvements respiratoires abdominaux offrent leur plus grande 
amplitude dans les somites qui avoisinent la base de l'abdomen ; soit le 
deuxième somite, soit le troisième, soit, moins souvent, le troisième et le 
quatrième. 

D'un autre côté, il n’est pas rare de voir, chez les Coléoptères, un ou deux 
segments thoraciques postérieurs participer aux mouvements de respiration. 
La méthode des projections m’a permis, en effet, d'observer des mouvements 
de ce genre, faibles, il est vrai, mais généralement bien nets, dans le thorax 
des Hydrophilus piceus, Carabus auratus *, Melolontha vulgaris, Chloro- 
phanus viridis, Corymbites latus, Chrysomela staphylæa et Tenebrio 
molitor. (Tableau I, § XCI.) 

Chez aucun des Coléoptères que je viens de citer, les déplacements res- 
piratoires des faces tergales, soit du méso- et du métathorax réunis, soit du 


t Ainsi que je Pai dit ailleurs, à propos de l’Hydrophile et du Carabe doré, §§ XII et XXII, 
Rathke lui-même a constaté des mouvements d'élévation et d’abaissement dans la face 
tergale du métathorax du Carabus granulatus. 


96 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


métathorax seul, n’ont lieu sous l'influence de la contraction de muscles 
thoraciques spéciaux. Les segments du thorax se trouvent entrainés par les 
segments abdominaux et leurs mouvements ne sont qu'une conséquence des 
mouvements respiratoires de l'abdomen. L'étude du système musculaire 
prouve que les choses doivent se passer de la même manière pour les 
Staphyliniens. 

J'ajouterai enfin, comme remarque, que les Staphyliniens sont, de tous les 
Coléoptères, ceux chez lesquels on s’attendrait le plus à voir les mouvements 
respiratoires se propager le long de l'abdomen à l’état d'onde; mais ces 
insectes ne nous offrent rien de pareil. 


§ XXXVII. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU STAPHYLINUS OLENS. 


Je mai pas été plus heureux que Rathke dans la recherche de muscles 
thoraciques spéciaux. Ni le mésothorax, ni le métathorax ne présentent de 
muscles qu’on ne puisse retrouver chez les autres Coléoptères. 

La figure 26 ci-jointe représente la disposition des muscles abdominaux. 
On peut y constater que 
les muscles expirateurs « 
affectent la forme ordi- 
naire. Les inspirateurs 
manquent complètement, 


comme chez la plupart 


des insectes. 
Fig. 26 X 4. — Muscles de la moitié gauche de l'abdomen du Staphylinus olens, Les muscles dorsaux 


A B Muscles longitudinaux dorsaux. à je 
D E Faisceaux obliques. pis + grande pal í 
a Muscles longitudinaux sternaux. disposés en deux couches 


» Muscles respiratoires (expirateurs verticaux). 


dont les fibres se croisent 
obliquement; ils différent ainsi de ceux du plus grand nombre des Coléop- 
tères et offrent, au contraire, beaucoup d’analogie avec les muscles croisés de 
l'abdomen mobile des Forficules parmi les Orthoptères. (Voy. fig. 45, D, E.) 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. | 97 


S XXXIX. 
CURCULIONIENS (CHLOROPHANUS VIRIDIS). 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Les mouvements respiratoires des Curculioniens ont été examinés par 
Rathke chez un Attelabus ; mais l’auteur se borne à citer ce nom générique 
dans une liste des formes qui ont passé sous ses yeux; il n’a probablement 
rien observé de spécial. Le mécanisme respiratoire des Curculioniens que 
j'ai étudié chez le Chlorophanus viridis est, en effet, celui de presque tous 
les Coléoptères. 

Je résume mes résultats comme suit : insecte privé de ses pattes, de ses 
ailes et de ses élytres, fixé par une seule épingle traversant le prothorax ; 
troisième somite abdominal reposant librement sur une épingle coudée à angle 
droit ; grossissement 12 diamètres. 

Mouvements respiratoires très normaux et d’une assez grande amplitude. 
La diminution du diamètre vertical de l'abdomen, en expiration, atteint}. 

Le métathorax participe aux mouvements des arceaux dorsaux de 
l'abdomen. 

En expiration, les arceaux dorsaux s'abaissent de la facon ordinaire. Le 
Maximum d'effet a lieu au niveau des somites 3, 4, 5. 

En expiration, les faces sternales des anneaux 5, 6, 7 s'élèvent un peu 
et toute l'extrémité postérieure de l'abdomen se soulève d’une petite quan- 
tité. La longueur de l'abdomen ne varie pas. 

On observe de longs arrêts en inspiration suivis de deux ou trois mouve- 
Ments respiratoires assez brusques. 


$ LX. 
ELATÉRIDES (CORYMBITES LATUS). 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


| Aucun naturaliste ne parait avoir étudié les mouvements respiratoires des 
Elatérides. Ces insectes respirent, du reste, suivant le mode le plus ordinaire 
Chez les Coléoptères. 

Tome XLV. 15 


| 
| 
| 
A 


98 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Voici le résumé de mes observations : linsecte est supporté par une 
épingle traversant le prothorax; le 4° somite abdominal repose librement 
sur une épingle coudée à angle droit (grossissement employé, 13). 

L'animal ne fait point d'efforts pour sauter; il exécute deux espèces de 
mouvements : 4° des mouvements d’oscillation et d’incurvation de l'abdomen 
étrangers à lacte de la respiration; 2° des mouvements respiratoires pro- 
prement dits offrant les caractères suivants : 

Le méso- et le métathorax participent aux déplacements des arceaux 
tergaux de l'abdomen. En expiration, les deux segments thoraciques posté- 
rieurs s'abaissent. 

Le maximum d'effet a lieu pour les arceaux tergaux des somites abdo- 
minaux 2, 3, 4. La diminution du diamètre vertical de labdomen à la 
hauteur du 3° segment est d'environ ‘fio 

En expiration l'extrémité de l'abdomen se relève; de sorte que le profil 
longitudinal de la face dorsale devient un peu concave. 

Il n’y a point de modification dans la longueur. 

On observe de longs arrêts inspiratoires séparés par un ou deux mouve- 
ments respiratoires assez rapides. 


§ XLI. 
DONACIA SIMPLEX, CRIOCERIS MERDIGERA, CHRYSOMELA STAPHYLOEA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Il me reste à dire quelques mots des mouvements respiratoires des 
Donacies, des Criocères et des Chrysomèles pour terminer ce qui concerne 
la série des Coléoptères dont les arceaux tergaux des somites abdominaux 
s'abaissent simplement pendant la phase expiratoire (voir § IX, page 30, a). 
On trouvera dans le paragraphe suivant l'exposé de ce qui se passe chez 
quelques formes où le phénomène se complique d’une augmentation appa- 
rente du diamètre vertical. 


Donacia simplex. — Les mouvements respiratoires de ce petit Coléoptére 
ont une forme très normale, mais sont faibles et lents. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 99 


La face supérieure de l'abdomen est limitée à droite et à gauche par une 
gouttière profonde bordée par un rebord épimérien élevé. Il existe là sept 
arceaux plus ou moins mobiles; mais, du côté sternal, les trois premiers 
somites sont intimement soudés sous la forme d’une grande plaque; les 
quatre arceaux sternaux postérieurs peuvent seuls se déplacer, 

Pendant l'expiration, les faces tergales se dépriment ; ce mouvement est 
Surtout accusé à la hauteur des somites 4 et 2 ; en même temps, les arceaux 
dorsaux rentrent un peu les uns sous les autres, tandis que les arceaux ster- 
naux postérieurs 4, 5, 6, 7 s’écartent légèrement; il en résulte que la pointe 
de l'abdomen se relève d’une petite quantité. 

La diminution du diamètre vertical de l'abdomen en expiration, au niveau 
du 2° somite, n’est guère que de ‘js. 

La longueur absolue de l'abdomen n’est pas modifiée et les segments 
thoraciques postérieurs paraissent immobiles. 


Crioceris merdigera. — La composition de l'abdomen étant à pea près iden- 
tique à celle qui s'observe chez les Donacies, les mouvements respiratoires des 
Criocères sont sensiblement calqués sur ceux du Coléoptère précédent. 

La dépression des faces tergales 1 et 2, la rentrée des arceaux du côté 
de la face dorsale, le léger écartement des arceaux sternaux 4, 5, 6, 7, 
incurvent de la même façon l'abdomen vers le haut à chaque expiration. 
Seulement, les mouvements respiratoires des Criocères s'opérent avec une 
assez grande rapidité et offrent beaucoup plus d'amplitude que ceux des 
Donacies. La diminution du diamètre vertical de l'abdomen, au niveau du 
3° somite, atteint ‘/,.. 

L’expiration est excessivement brusque et dure très peu ; l'inspiration est 
marquée par une pause courte, mais incontestable. La longueur de l'abdomen 
ne change pas et le métathorax reste immobile. 


Chrysomela staphylæa. — Rathke indique le genre chrysomèle parmi les 
insectes dont il a étudié les mouvements respiratoires; mais il ne donne 
aucune indication spéciale. Ces mouvements ont, du reste, lieu suivant le 
type le plus général. 


100 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


En expiration, les faces tergales des somites abdominaux s'abaissent; le 
maximum d’effet ayant lieu à la hauteur des segments 1 et 2. En même 
temps, l'extrémité de l'abdomen descend d’une quantité très minime, sans 
qu’il y ait de modification dans la longueur. 

Les mouvements d'élévation et d’abaissement des arceaux tergaux sont 
accompagnés de mouvements de même sens du métathorax, qui paraît 
simplement entrainé. 

Les déplacements respiratoires ont une très faible amplitude; la dimi- 
nution du diamètre vertical de l'abdomen, au niveau du 2° somite, n’est que 
de ‘/zx environ. 


$ XLII. 


COLÉOPTÈRES CHEZ LESQUELS LES RÉGIONS LATÉRALES DES ARCEAUX TERGAUX SE CREUSENT EN 
EXPIRATION, TANDIS QUE LA PARTIE MÉDIANE SE SOULÈVE OU PRÉSENTE UN SILLON LONGITUDINAL. 
TELEPHORUS, CLYTUS, COCCINELLA. 


Le lecteur a vu par le § IX (Les trois types respiratoires et leurs subdi- 
visions) qu’il existe un certain nombre de Coléoptères dont les arceaux tergaux 
de l'abdomen se modifient, en expiration, d’une façon très différente de ce 
qui se passe généralement dans le groupe zoolagique auquel appartiennent 
ces insectes. 

Chez ces formes exceptionnelles, les arceaux tergaux, au lieu de devenir 
plus plats, en d’autres termes au lieu de se déprimer un peu plus dans la 
partie médiane que vers les bords, se creusent, au contraire, fortement sur 
les côtés pour se relever au milieu. 

Tantôt ce phénomène détermine simplement une augmentation du dia- 
mètre vertical de l'abdomen, tantot il amène et parfois en même temps que 
cette augmentation, la formation d’un sillon longitudinal occupant la ligne 
médiane de la face tergale de l'abdomen. 


Telephorus fuscus. — Lors de l'expiration, les parties déclives latérales 
des arceaux tergaux, du 4° au 7°, se dépriment ; les régions épimériennes 
se portent en dedans et la convexité de la ligne médiane des arceaux tergaux 


et sternaux augmente. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 4101 


De là deux faits faciles à observer à l’aide de silhouettes : 1° le rétrécis- 
à sement transversal de l'abdomen et 2 en 
l même temps, laugmentation du diamètre 
vertical de celui-ci pendant la phase expira- 
toire. Cette augmentation mesurée à Ja hau- 
teur du 4° segment est d'environ t/y. 

La pointe de l'abdomen s'élève un peu, 
Répétition de la figure 7. — Telephorus fuscus. en expiration; mais la longueur reste à très 


Coupe transversale de l'abdomen, 


peu près invariable. Les mouvements respi- 
ratoires sont simultanés dans tous les somites abdominaux et le métathorax 
reste immobile. 


Clytus arietis: — Quelque singulier que cela paraisse, il existe beau- 
coup d’analogie entre la structure des arceaux tergaux du Coléoptère qui 
nous occupe et celle de ces mêmes arceaux chez les Coccinelles ; aussi les 
mouvements respiratoires appartiennent-ils à la mème variété. 

Comme chez les Coccinelles, la zone molle latérale qui porte les stig- 
Mates est plus ou moins convexe et les arceaux tergaux offrent, sur la ligne 
médiane, une articulation plus marquée et plus mobile que chez beaucoup 
d’autres Coléoptères. 

Les mouvements respiratoires ont très peu d'amplitude et n’ont lieu que 
dans les cinq premiers arceaux dorsaux ; ceux-ci changent de forme de la 
manière suivante : leurs parties latérales se dépriment et un sillon accusé 
se produit sur la ligne médiane des arceaux 1, 2, 3 et 4; le sillon est à 
peine indiqué sur l’arceau 5. 

Les silhouettes permettent de constater, en expiration, une certaine dimi- 
nution du diamètre vertical (‘he environ); elles montrent, en outre, que 
l'extrémité de l'abdomen se relève un peu dans la phase expiratoire, qu'il n°y 
à pas d'onde, que les segments thoraciques sont immobiles et enfin que la 
longueur du corps reste invariable. 

On peut noter, comme mouvements étrangers à la respiration, de fortes 
oscillations verticales que l'insecte imprime de temps en temps à la région 
abdominale et qui sont invariablement accompagnées du petit cri caracté- 
ristique du Clytus. 


102 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Les muscles expirateurs du Clytus arietis (fig. 27, a), larges et très 


4 


AB puissants, comparativement à la 


taille de l’animal, offrent la dispo- 
sition ordinaire propre aux Coléop- 
tères; aussi la forme spéciale que 
prennent les arceaux dorsaux, en 
expiration, ne provient-elle, très 
Fig. 27 X T. — Moitié gauche de l'abdomen du Clytus arietis Q. probablement, que de l'existence, 
R io au milieu de chacun de ceux-ci, 
Age SRE yenicaps, d’une articulation plus mobile que 

celle qu’on y rencontre généralement '. 


Coccinella septempunctata. — La petite taille des Coccinelles, leur forme 
particulière, enfin, surtout, l'impossibilité dans laquelle s’est trouvé Rathke 
de constater, par l'observation directe, des mouvements respiratoires abdo- 
minaux chez ces Coléopiéres ?, sont les motifs qui m'ont fait étudier 
avec grand soin le mécanisme de la respiration de la Coccinelle commune. 

Voici les résultats assez intéressants que j'ai obtenus par la méthode des 
projections : 

L’insecte, privé de ses élytres, de ses ailes et de ses pattes, est placé dans 
l'appareil de façon à donner une silhouette du profil longitudinal; l’abdomen 
repose par son extrémité sur une épingle pliée à angle droit (grossisse- 
ment 14) (fig. 62, pl. HI). 

Les mouvements respiratoires que Rathke n’avait pu observer sont cepen- 
dant très évidents et très énergiques. On constate des augmentations et des 
diminutions alternatives du diamètre abdominal accompagnées de petites 
modifications dans la longueur et de balancements de l’ensemble du thorax. 

L'observation directe à la loupe révèle quelques détails dont la connais- 
sance permet d'interpréter nettement les images obtenues par projection. 


41 Rathke cite le genre Cerambyx dans sa liste générale; mais comme pour beaucoup 
d’autres, il se borne à cette mention laconique. 
2 Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete., p. 104. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 103 


Les divers phénomènes peuvent se résumer comme suit : 

1° L'ensemble du thorax oscille légèrement pendant les mouvements res- 
piratoires abdominaux; mais il n'existe pas de déplacements spéciaux des 
segments méso- et métathoraciques ; 

2° La zone molle qui porte les stigmates est toujours saillante; elle offre 
des obliquités différentes suivant les phases 
respiratoires, mais elle ne forme jamais de 
pli rentrant, comme chez les Scarabéiens, par 
exemple ; 

3° Ainsi que l'indique la figure 8, l’expi- 
ration est caractérisée non par la descente 


Répétition de la figure 8. 
Coupe transversale de l'abdomen de la Cocci- générale des arceaux tergaux , Mals par la 
nella septempunctata. 


dépression de leurs bords latéraux et par la 
formation d’une gouttière médiane ; 

4° Cette gouttière médiane s'observe aux arceaux tergaux des somites 
compris entre le 2° et le 6° inclusivement ; 

5° Lorsque la gouttière médiane se produit, elle est limitée latéralement 
par deux crêtes qui, sur les silhouettes, font paraître la face dorsale de 
l'abdomen plus élevée. Les augmentations du diamètre vertical de l'abdomen, 
dans les images de l’appareil à projection, répondent donc à l'expiration ; 
elles sont à peu près de ‘},; 

6° En expiration, l’abdomen s'allonge d’une petite quantité (ja, de la 
longueur abdominale totale); 

7° Durant l'expiration, la totalité de la face tergale du thorax s'incline 
légèrement en arrière; 

8° L’expiration est brusque et simultanée dans tous les somites abdomi- 
naux offrant des mouvements de respiration. L'inspiration affecte, au con- 
traire, plus ou moins l'aspect d’une onde; différence qui s’expliquerait en 
admettant que l’élasticité des divers segments, seule en jeu dans la phase 
inspiratoire, varie un peu suivant les diamètres des somites. 

L'étude du système musculaire des Coccinelles est naturellement accom- 
pagnée de grandes difficultés pratiques. Cependant, en isolant un somite 
abdominal et en le disséquant à l’aide d'aiguilles sous le microscope à 


104 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


dissection de Zeiss, je suis parvenu à constater, ce qu’on pouvait prévoir, 
du reste, que les muscles expirateurs offrent la même 
disposition générale que chez les autres Coléoptères 
(fig. 28). 

Je suis persuadé que la forme singulière que pren- 
nent les arceaux tergaux pendant l'expiration est due 
simplement à lobliquité des muscles respiratoires qui 
s’insèrent sur les faces tergales un peu plus haut que 


Fig. 98. — Coccinella sepem- Chez les Coléoptères des autres groupes et à lexis- 
ae tence, le long de la ligne dorsale médiane, q’ ti 
a Muscle expirateur vertical tENCe, le long de la ligne dorsale médiane, d’une arti- 
Sra culation longitudinale très mobile semblable à celle 
de l'abdomen du Clytus arietis. 


CHAPITRE V. 


SUITE DE L'ÉTUDE DU PREMIER TYPE. 


B. Hémiptères hétéroptères. 


On a fait, jusqu’à présent, peu d'observations sur les mouvements respira- 
toires des Hémiptères; aussi la bibliographie se réduit-elle aux quelques 
indications ci-dessous. 

D’après Hausmann !, on aurait remarqué que les mouvements respiratoires 
des Cigales ° ont quelque analogie avec ceux des Vertébrés; Treviranus * 
s'exprime, à propos des mêmes insectes, dans des termes qui font supposer 


1 Hausmanx. De animalium exsanguium respiratione, etc. Op. cit., p. 8. 

2 Les Cigales sont, on le sait, le type des Hémiptères homoptères; jai dû citer ici les 
quelques observations qui les concernent, bien que je n’aie pu étendre mes recherches à ce 
genre intéressant. 

3 TREvIRANUS. Biologie, etc. Op. cit., Vierter Band, p. 157. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 105 


qu'il s’est contenté de copier l’auteur précédent; enfin, Léon Dufour ! dit 
avoir observé à la loupe « le mouvement presque insensible de l'inhalation 
de l'air » chez la Nepa cinerea. 

Jai examiné la structure de l'abdomen d’un certain nombre de genres 
d'Hémiptères hétéroptères (Pentatoma, Pyrrhocoris, Corixa, Notonecta, 
Ranatra, Nepa, ete.) et j'ai partout rencontré une disposition à peu près 
identique dont les figures 9 et 29 donnent une idée nette. 

Les arceaux tergaux et sternaux, en s’unissant par leurs extrémités, 
forment à l’abdomen un bord latéral presque tranchant, horizontal ou plus 
ou moins relevé en crête. La convexité des arceaux tergaux est variable, 
mais généralement faible ; les arceaux sternaux sont ordinairement fort con- 
vexes au milieu et s’aplatissent vers les extrémités latérales. 

Cette similitude de structure me permet de supposer que les mouvements 
respiratoires des Hétéroptères ont toujours lieu suivant le mode que j'ai 
observé chez les deux formes soumises à mes expériences, la Nepa cinerea 
et le Pyrrhocoris apterus. 

$ XLII. 
NEPA CINEREA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'abdomen de la Nèpe comprend six somites apparents dont les arceaux 

| dorsaux sont représentés par des lames presque 

planes, tandis que les arceaux sternaux beau- 

coup plus convexes forment, par leur ensem- 
ble, une sorte de carène (fig. 9). 

Léon Dufour ° compare, dans un de ses 

premiers travaux, la face sternale de l’abdo- 


Répétition de la figure 9. 


Coupe transversale de l'abdomen de la Nepa men de la Nèpe à un plastron de tortue. Cette 
Lee comparaison est évidemment peu heureuse. 
Pour les observations par projection, l'insecte est fixé par deux épingles 


! Léox Durour. Rech. anat. et physiolog. sur les Hémiptères, p. 384. 

pA MESIS rx ; NÉ ` | SCIENC RS 

* Iben. Rech. anat. sur la Ranatre linéaire et la Nèpe cendrée. (ANN. GÉNÉRALES DES SCIENCES 
PHYSIQUES, par Bory de St-Vincent, Drapiez et Van Mons, t. VII, p. 195. Bruxelles, 1820.) 


Tome XLV. d4 


106 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


traversant les parties latérales du prothorax; on lui a enlevé les ailes et 
les pattes; le 6° somite abdominal est soutenu par une épingle coudée ; 
enfin des styles de papier sont collés sous la région latérale droite des 
arceaux sternaux 3 et 5, ainsi que sur la région médiane et les régions 
latérales du 3° arceau tergal (fig. 63, pl. IV) *. 

Les mouvements respiratoires, fort curieux, ont lieu de la façon sui- 
vante : 

1° En expiration, les arceaux dorsaux s'abaissent exactement comme 
chez la plupart des Coléoptères; en descendant ces arceaux deviennent plus 
plats; leur région médiane s’affaissant plus que leurs régions latérales. Le 
maximum d'effet a lieu au niveau des somites À et 2; 

2 Le sillon latéral situé sur la limite entre les arceaux tergaux et les 
régions épimériennes s’approfondit ; 

3° Fait assez singulier, on n’observe point, comme chez le plus grand 
nombre des insectes, un antagonisme entre les déplacements des arceaux 
tergaux et ceux des arceaux sternaux; ces pièces marchent dans le même 
sens; les arceaux slernaux descendent lors de l’abaissement des arceaux 
supérieurs. Cependant la descente des pièces sternales étant plus faible 
que celle des pièces dorsales, lexpiration se trouve marquée par une 
diminution du diamètre vertical de l'abdomen d'environ ‘};, (mesurée au 
niveau du 2° somite); 

4° Les mouvements ne sont pas simultanés dans tous les somites, mais 
successifs; il existe une onde incontestable marchant d'avant en arrière. 
Ainsi, pour les arceaux tergaux, l'expiration a lieu d’abord dans les 
somites 1, 2, 3, puis, peu après, dans les somites 4, 5 et 6; 

5° La longueur de l'abdomen reste invariable et les segments thoraciques 
sont immobiles. 

En terminant, j’ajouterai que les mouvements respiratoires des Nèpes sont 
faciles à voir à la loupe, même à la face inférieure du corps. L'observation 
de Léon Dufour que je citais plus haut et d’après laquelle ces mouvements 
sont presque insensibles, a donc été mal faite. 


4 Dans la fig. 63, pl. IV, on n’a représenté que les styles fixés aux arceaux sternaux. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 107 


$ XLV. 
PYRRHOCORIS APTERUS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Bien que la longueur de l'abdomen soit beaucoup moindre, sa structure 
est sensiblement celle que l’on observe chez la Nèpe. Cependant, les rebords 
formés par les pièces épisternales et epimériennes sont tellement élevés que 
leur ombre masque absolument, sur les silhouettes, ce qui se passe du côté 
de la face dorsale de l'abdomen (fig. 29). 

Deux styles verticaux collés sur les arceaux tergaux, à la limite entre le 
3° et le 4° et sur le 7° ou dernier, permettent, par 
leurs changements de position, de concevoir assez net- 
tement ce qui a lieu. 

Les mouvements expiratoires qui ont une amplitude 

a GSMS y ona, absolue et relative très faible ressemblent beaucoup à 

abdominal du Pyrrhocoris Ceux des Coléoptères et consistent, surtout, comme chez 

aio la Nèpe, en abaissements des arceaux tergaux. Le 

maximum a lieu vers le 4° somite et, de même que chez plusieurs Coléop- 

tères, la pointe de l'abdomen se relève légèrement; de sorte que le profil 
longitudinal de la face dorsale devient concave. 

Il n’y a ni onde, ni mouvements thoraciques, ni changements de longueur. 


C. OGrthoptères blattiens. 


§ XLY. 
PERIPLANETA ORIENTALIS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Rathke à consacré quelques lignes aux mouvements respiratoires de la 
Blatte !, II dit que les arceaux tergaux et sternaux se rapprochent et s’éloignent 
alternativement l'un de l’autre et que leurs déplacements s'effectuent avec 
une certaine lenteur. J'aurai à ajouter de nombreux détails à cette description. 


1 Analomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., p. 108, N 9. 


108 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


La structure de l'abdomen de la Blatte s'éloigne complétement de celles 
des abdomens des Forficuliens, des Acridiens ou des Locustiens pour se 
rapprocher, au contraire, d’une façon frappante de la disposition offerte par 
les Hémiptères hétéroptères. 

Comme chez ces derniers insectes, les arceaux tergaux et siernaux 
s'unissent à leurs extrémités en formant à 
l’abdomen un bord latéral tranchant, et, comme 
chez la Nèpe, par exemple, les arceaux tergaux 
sont assez plats, tandis que les arceaux ster- 
naux convexés en leur milieu et aplatis vers 
les bords constituent, sous l'abdomen, une 
carène plus ou moins prononcée (comparez 
fig. 9, page 405). 

Les arceaux térgaux offrent, sur leurs parties déclives, des empreintes 


Répétition de la figure 40, 


Coupe transversale de l'abdomen de la Blatte. 


indiquant les points d'insertion des muscles expirateurs verticaux. 

Cette grande ressemblance entre la composition des somites des Blattes 
et des Hémiptères hétéroptères permettait de supposer que les mouvements 
respiratoires n’appartiendraient à aucune des formes que lon peut observer 
chez les autres Orthoptères, mais se rapprocheraient de ceux de la Nèpe et 
se rangeraient, par conséquent, dans notre premier type. L'hypothèse est 
exacte et, ainsi qu'on va le voir, le mécanisme respiratoire de la Periplaneta 
orientalis est, à peu près, celui des Coléoptères et des Hémiptères. 

Mes expériences ont été effectuées sur des mâles ; ceux-ci sont plus favo- 
rables à l'observation que les femelles. 

L'animal, privé de ses élytres, de ses ailes et de ses pattes, n’est fixé que 
par deux épingles fines traversant les parties latérales du prothorax. Dans 
la position horizontale, l'abdomen repose, par le 5° arceau sternal, sur une 
épingle coudée à angle droit (fig. 64, pl. IV). 

Les changements de courbure des arceaux sternaux et tergaux ont été 
constatés en collant des styles sur plusieurs points du 3° somite et en plaçant 
l’insecte de façon à obtenir la silhouette transverse de ce segment dont les 


mouvements sont très accusés. 
Voici le résumé des résultats obtenus : 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 


109 


FAITS GÉNÉRAUX: 


1° Le méso- et le métathorax participent aux mouvements respiratoires; mais les dépla- 
cements ont lieu en sens inverse de ceux des arceaux abdominaux, au lieu d’être de même 
sens, comme chez les Coléoptères staphyliniens. 

2 Les régions médianes des arceaux tergaux et sternaux se rapprochent et s’éloignent 


alternativement; les bords restant en contact. 


3° Ces mouvements sont surtout accusés vers la base de l'abdomen. 
4 L’abdomen oscille légèrement dans un plan vertical et offre de très faibles change- 


ments de longueur. 


5° Les mouvements respiratoires paraissent simultanés ; il n’y a point d'onde. 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration. 


La face supérieure du méso- et du métathorax s'élève; 
les bases des pattes de deuxième et de troisième 
paire, et, par conséquent, les faces sternales des deux 
segments thoraciques postérieurs se rapprochent l’une 
de l’autre. 

Les arceaux tergaux de l'abdomen s’abaissent dans leur 
région moyenne, deviennent plus plats, surtout à la 
hauteur des somites 2 et 3. Ce mouvement l'emporte 
de beaucoup sur celui des arceaux sternaux qui est 
faible (dans la proportion de 5 : 2). 

Le profil longitudinal de la face dorsale de l'abdomen 
devient un peu concave. 

Les arceaux sternaux s'élèvent d’une petite quantité. 
Ce déplacement n'est nettement visible, sur les sil- 
houettes, que pour les somites 2 et 5; il est masqué 
ailleurs par les mouvements généraux de l'abdomen. 

La diminution du diamètre vertical, en expiralion, est 
de /, (au niveau des somites 2-5), elle est, par con- 
Séquent, considérable et comparable à celle que l’on 
observe chez l'Hydrophile et le Hanneton, parmi les 
Coléoptères. 

Les bords tranchants latéraux de l'abdomen se relèvent, 
ce qui amène une très légère diminution du diamètre 
transversal (1/,, au plus). 

> 

L'extrémité de l'abdomen est faiblement projetée vers 
le bas. 

L’abdomen s'allonge de 1}... 

Les mouvements respiratoires ont lieu par petites séries 
de trois ou quatre séparées par des arrêts. 

n'y a pas de pause expiraloire appréciable, 


Inspiration, 


La face supérieure du méso- et du métathorax se déprime 
légèrement. 


La région moyenne des arceaux tergaux devient plus 
convexe. 


Le profil longitudinal de la face dorsale de l'abdomen 
redevient légèrement convexe. 
Les arceaux sternaux descendent faiblement. 


Les bords latéraux de l'abdomen s'abaissent. 


L'extrémité de l'abdomen est projetée vers le haut. 


L'abdomen reprend sa longueur primitive. 
Il y a des arrêts plus ou moins longs en inspiration. 


L’inspiration est marquée par une pause f 


Taa COR . Le s: ` Y Atg : GAS 
t Pai déjà dit, page 57, en note, qu'il ne faut pas confondre les arrêts et les pauses. 


110 RECHERCHES EXPÉRIMENT ALES 


$ XLVI. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE LA PERIPLANETA ORIENTALIS. 


Rathke ne parle point des muscles respiratoires de la Blatte et les des- 
criptions anatomiques assez détaillées du même insecte publiées par G. Rol- 
leston * et par Huxley ? sont mueltes sur ce sujet. 

Le système musculaire abdominal de la Periplaneta est des plus simples 
et ressemble entièrement 
à celui des Coléoptères 
(fig. 30). 

Les muscles longitudi- 
naux dorsaux À et ster- 


naux a constituent des 


Fig. 30 X 3. 
Muscles de la moitié gauche de l'abdomen de la Periplaneta orientalis, couches peu développées 


æ Muscles expirateurs verticaux. 


dont les faisceaux sont 
parallèles à l'axe du corps. Les muscles respiratoires vrais « sont représentés, 
absolument comme chez les Coléoptères, par une série de muscles verticaux 
assez courts croisant à angle droit la ligne des articulations entre les arceaux 
dorsaux et sternaux. Chacun d'eux naît du milieu de la partie déclive d'un 
arceau tergal et se termine verticalement en dessous sur la région latérale 
de larceau sternal correspondant. 

Les insertions supérieures sont indiquées, à la surface tergale de l’abdo- 
men, par des impressions latérales que j'ai signalées (p. 108). 

La contraction de ces muscles a évidemment pour effet l’abaissement des 
plaques tergales et l'ascension des pièces sternales ; ce sont donc, comme 
chez tous les insectes où lon retrouve pareille disposition, de véritables 
muscles expiraleurs. Le volume un peu plus considérable de ceux qui occu- 


1 RozLeston. Forms of animal life, p. 199. Oxford, 1870. 
2 Huxcey. A manual of the anatomy of invertebrated animals, pp. 398 et suiv. London, 
1877. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 1441 


pent les somites 2, 3 et 4 fait comprendre pourquoi l'expiration offre sa plus 
grande amplitude vers la base de l’abdomen !. 

Il n'existe pas de traces de muscles inspirateurs; la Blatte fait donc partie 
du grand nombre de formes dont l'inspiration est passive. 


CHAPITRE VI. 


ÉTUDE DU DEUXIÈME TYPE. 


A. Odonates. 


Les mouvements respiratoires très caractéristiques des Odonates, exces- 
sivement apparents chez les grandes Aeschna, Cordulia, Libellula, etc., ont 
dû attirer l'attention de tous les observateurs qui ont eu l’occasion de tenir, 
pendant quelques instants, entre les doigts Pun de ces animaux à létat 
vivant. Aussi trouve-t-on déjà quelques indications à ce sujet dans l'ouvrage 
de Rüsel (1749) 2. 

Parmi les auteurs plus récents, les uns, comme Spallanzani 5, Trevi- 
ranus #, Maurice Girard *, Graber ‘, se sont bornés à signaler les déplace- 
ments de bas en haut et de haut en bas des lames sternales et parfois les 


t Mes dissections mont permis de constater la présence de six muscles expirateurs de 
Chaque côté du corps; mais vu la difficulté avec laquelle on enlève le tissu adipeux de la 
Blatte, je n’oserais affirmer qu’il n'existe pas une septième paire. Ce détail a, du reste, 
fort peu d'importance. 

2? RôseL. (Je wai pu consulter que l'édition hollandaise.) Natuurlijke historie der Insekten, 
tweede deel, bdz. 191, § 9. Haarlem en Amsterdam, 1764-1768. 

3 SPALLANZANI. Dans SENNEBIER, Rapport de l'air avec les êtres organisés, ete. Op. cit., p. 66. 

4 Treviranus. Biologie, etc. Op. cit., Vierter Band, p. 157. 

5 Garn. Traité élémentaire entomologie. Op. cit., p. 31. 

6 Grager. Die Insekten, 1° Theil. Op. cit., p. 108. 


a 


112 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


contractions et les dilatations transversales qui les accompagnent; mais 
d’autres ont poussé l'étude des phénomènes plus loin : Hausmann ! a essayé, 
sans succès, de rendre les mouvements respiratoires des Libellules plus 
visibles, en utilisant, comme dans son expérience sur la Sauterelle, les oscil- 
lations d’une colonne d’eau ; Burmeister ? s’est assuré que les segments tho- 
raciques ne participent pas aux mouvements de respiration; Barlow 5 a fait 
une remarquable série d’expériences sur le rythme respiratoire, sur les 
causes extérieures qui modifient celui-ci et sur l'influence du système ner- 
veux chez les Libellula depressa et vulgata; Rathke * a complété les obser- 
vations sur les mouvements respiratoires des Odonates par une description 
des muscles qui les déterminent; Baudelot 5 a publié les résultats de 
recherches intéressantes effectuées sur les Libellules et leurs larves, en vue 
de démontrer que les différents ganglions abdominaux jouent, chacun indi- 
viduellement, le rôle de centres respiratoires pour les somites auxquels ils 
appartiennent et de prouver la fausseté de l'hypothèse de Faivre qui place le 
centre des mouvements de respiration des insectes dans le ganglion méta- 
thoracique. Plus récemment, Luchsinger ê a démontré expérimentalement 
que le centre des mouvements de l'appareil respiratoire anal des larves 
réside dans la partie terminale de la chaine ventrale. Enfin, Langendorff 7, 
qui parait ne pas avoir eu connaissance des travaux de Barlow et de Bau- 
delot, a répété sur la Libellula depressa et sur une forme d’Aeschna, la 
plupart des expériences effectuées par les auteurs précités 8. 


1 Hausmanx. De animalium exsanguium respüralione. Op. cit., p. 8. 

2 Bormeister. Handbuch der Entomologie, Erster Band, p. 419. 

? Barkow. Observations on the respiratory movements of Insects. Op. cit. 

4 Raruke. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., pp. 108 et 109, § 10. 

5 Bauvecor. De l'influence du système nerveux sur la respiration des insectes, ete. Op. cit. 

6 LucusiNGER. Ueber das respirationscentrum der Libellenltarven (Arcu. r. n. GES. Pays10- 
LOGIE DE PFLÜGER, 1880, p. 158). 

T LANGENDORFF. Das Athmungscentrum der Insecten. Op. cit., p. 85. 

8 D’après Langendorff, Marshall Hall aurait fait, avant 1842 (par conséquent avant 
Barlow et Baudelot), des expériences très curieuses sur la persistance des mouvements 
respiratoires dans des tronçons isolés de l'abdomen des libellules; malheureusement, ni 
Langendorff ni moi n'avons réussi à retrouver le Mémoire original dans lequel Marshall 
Hall a consigné ses observations, 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 415 


Les connaissances acquises sur le mécanisme respiratoire des Odonates 
étaient donc assez étendues lorsque j'ai entrepris mes études personnelles; 
mais il restait à vérifier les résultats de lobservation directe par des 
méthodes plus rigoureuses et à élucider un certain nombre de points 
douteux. 


$ XEVII. 
LIBELLULA QUADRIMACULATA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode graphique.) 


Afin de permettre au lecteur de bien comprendre ce qui va suivre, je 
crois utile de rappeler d’abord, en quelques mots, quelle est la structure de 
l'abdomen des Libellules. 

Les anneaux abdominaux actifs comprennent chacun, comme le montrent 

X 


} x x les figures 31 et 44 (p. 114), un arceau 
Ma A | a tergal très grand constituant presque toute 
7 EVA À la surface visible et un arceau sternal réduit 
A à une petite lamelle étroite située au fond 
f- d’une gouttière qui règne le long de la face 
RE inférieure de l'abdomen. L’arceau tergal 
i est divisé par trois articulations mobiles æ 
à Fig. 34 X 4. — Libellula quadrimaculata. et x! as figure Pt, en quatre pièces, deux 
bdomen fendu longitudinalement suivant la ligne . 5 
médiane dorsale; les parois sont déroulées et AOrsales proprement dites et deux latérales. 
oeh Quant à la lamelle sternale, elle est relié 
S Les Stigmates à droite et à gauche des plaques 7 erna e, elle es re ICE, 
sternales. de chaque côté, aux bords inférieurs des 
Pièces latérales par une zone plus molle formant à droite et à gauche un 


pli rentrant au fond duquel se trouvent les vrais stigmates abdominaux 
(S fig. 31) 1. 


x 


4 N a $ . \ } 5 : T7 
A Léon Durour, Réch. anat. et physiol. sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névrop- 
teres (MiM. ACAD. SC. DE PARIS, savanrs ÉTRANGERS, t. VII, p. 559, 1841), croyait avec Sprengel 
¿Commentarius de partibus quibus Insecta spiritus ducunt, p. 3, Lipsiae, 1815) que abdomen 


Tome XLV. 15 


144 > RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


La plupart des observateurs qui m'ont précédé ont constaté que la lamelle 
sternale s'élève en expiration et Rathke a ajouté que, dans la respiration 
active, il y avait, en même temps, rétrécissement transversal de l'abdomen. 
Je montrerai plus loin que ce rétrécissement a toujours lieu. 

L’'inspection de la figure 11 représentant l’abdomen en coupe montre, en 
outre, que le phénomène est plus com- 
rt plexe encore : quand la lamelle ster- 
S nale s'élève en expiration, les parties 
” latérales rentrent et l'articulation x 

séparant les deux pièces tergales qui 
forment toit, s'élève d’une petite 


Répétition de la figure 44. LE 
Coupe transversale de l'abdomen de la Libellula quadri- quantité. 


eue Ce n'est là qu'un détail; mais il 
importe de ne pas le perdre de vue lorsqu'on étudie graphiquement les mou- 
vements respiratoires des Libellules; autrement, se laissant induire en erreur 
par ce qui se passe chez la majorité des Coléoptères, par exemple, on prendra 
pour inspiration la phase dans laquelle la crête dorsale s'élève, alors que 
cette phase répond, au contraire, à l'expiration. 

Ceci posé, j’aborde les expériences faites à l’aide de la méthode graphique. 

La Libellule est fixée par les ailes, comme il est dit page 15 ; mode de 
contention qui a pour avantage de n’altérer en rien la forme des mouvements 
respiratoires. 

Pendant la plupart des expériences, un petit support est glissé sous 
l'extrémité de l'abdomen afin d'éviter l'action des oscillations de celui-ci et 


des Odonates est absolument dépourvu de stigmates et que les orifices respiratoires de ces 
insectes occupent exclusivement le thorax. 
Voyez, du reste, au sujet de l'existence et de l'emplacement des vrais stigmates abdomi- 


naux des Libellules : 


Hausmanx. De animalium exsanguium respiratione commentatio, 1803. Op. cit., p. 35. . 
Bunueisrer. Handbuch der Entomologie, t. 1, p.175. Berlin, 1832. 
Pazmen. Zur Morphologie des Tracheensystems, p.36. Leipzig, 1877. 


Oskar Krancuer. Der Bau der Stigmen bei den Insekten (Zerrscur. r. Wiss. ZooL., Bd. XXXV, 
p. 51, 1880). 


+ 


ST mamans. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 115 


de n’enregistrer que les mouvements réels des pièces tégumentaires avec 
lesquelles on met le levier en contact. 


Mouvements des lames sternales. — L'animal est tourné les ailes en bas, 
les pattes en haut; l'abdomen est horizontal. Un levier semblable à ceux qui 
ont été utilisés pour les Coléoptères croise. transversalement le 4° somite- 
abdominal. 

Le contact est établi de la manière suivante : le levier porte un petit 
talon descendant qui pénètre dans le sillon de l’abdomen et qui adhère, à 
l’aide d’un peu de baume du Canada, à la 4° lame sternale dont il suit, par 
conséquent, tous les mouvements. 

La lame sternale s’enfonçant à chaque expiration, la descente du levier 
répond au mouvement expiratoire. 

Le graphique L, fourni dans ces conditions, montre un mouvement rapide. 


<—— Sens de la rotation du cylindre. 


On y lit assez nettement que l'inspiration dont la vitesse décroit de plus en 
plus se termine par une pause inspiratoire indiquée par un trait presque 
horizontal, tandis que l'expiration est beaucoup plus courte et plus brusque. 


Mouvements des flancs. — La Libellule est couchée sur le côté; le levier 
repose transversalement sur larête latérale du 3° somite. La descente du 
levier répond, encore une fois, à l'expiration. 

La courbe M obtenue offre à très peu près les mémes caractères que ceux 


%— Sens de la rotation du cylindre. 


qui caractérisent le tracé L des mouvements des lames sternales. - 


116 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Mouvements de la créte dorsale. — La Libellule est placée dans le ‘sens 
d’un insecte posé, les ailes au-dessus, les pattes tournées vers le sol. Le 
levier transversal repose sur la crête dorsale médiane du 3° somite. 

Le lecteur voudra bien remarquer, en se reportant à la figure 11 
(page 11%), que, dans le cas actuel, c’est la portion ascendante de la courbe 
tracée qui représente l'expiration. 

Le graphique N est moins démonstratif que les deux précédents, 


—— Sens de la rotation du cylindre. 


La rapidité de l'expiration, la lenteur relative de l'inspiration, la pause 
inspiratoire y sont cependant exprimées. 


Oscillations rhythmiques de l'abdomen. — Il est possible d'obtenir des 
graphiques où les caractères des deux phases soient beaucoup plus accusés. 
Il suffit, dans ce but, d'enlever le petit support qui soutient l'extrémité de 
l'abdomen. Les expériences par la méthode des projections ($ XLVII) 
montrent, en effet, qu'à chaque expiration l'abdomen se relève légèrement. 
Ce mouvement est parfaitement rhythmique et concorde exactement avec le 
mouvement expiratoire. En supprimant le support et en faisant reposer le 
levier sur la crête dorsale du 5° somite, on obtient le tracé O ci-dessous, 


<—— Sens de la rotation du cylindre. 


dans lequel les mouvements de la crête et les mouvements généraux de 
l'abdomen qui ont lieu en même temps et dans le même sens s'ajoutent. 
Il est facile d'y retrouver, d’une façon très accentuée, la différence de vitesse 
entre l'expiration rapide et linspiration plus lente, ainsi que la pause en 
inspiration. : 

Les expériences qui précèdent conduisent évidemment à cette conclusion 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 117 


que chez les Odonates, comme chez les Coléoptères et chez beaucoup 
d'autres insectes, l'inspiration est très probablement passive, tandis que 
l'expiration seule active a lieu sous l'influence d’une action musculaire. 
L'étude des muscles ($ LI) montrera à quel point notre déduction est exacte. 


$ XLVII. 


Étude des mouvements respiratoires de la Libellula quadrimaculata par la méthode 
des projections. 


Après ce que je viens d'exposer, l'emploi de la méthode des projections 


n'avait d'autre but que celui de constater quelques détails de valeur : 


secondaire. 

L'animal fixé par les ailes est placé dans l'instrument de façon à donner 
successivement la silhouette du profil longitudinal et celle de toute la face 
inférieure de l'abdomen (fig. 65 et 66, pl. IV). 

Dans la premiére position (fig. 66) on constate surtout le déplacement 
de l'ensemble de l'abdomen vers le haut, en expiration. Dans la seconde, 
(fig. 65) on voit parfaitement les somites se rétrécir transversalement durant 
la phase expiratoire et se dilater en inspiration. 

Malgré le développement de l'abdomen, les mouvements sont simultanés 
dans tous les somites; ceux-ci ne rentrent pas les uns dans les autres; la 
longueur de la région abdominale ne change guère. J'ai cru voir un très 
léger allongement expiratoire, mais ne dépassant pas '/iso de la longueur 
totale, valeur que l’on peut évidemment négliger. 

En réunissant les différents résultats fournis par les deux méthodes, on 
décrira de la façon suivante les mouvements respiratoires de la Libellula 
quadrimaculata. 


FAITS GÉNÉRAUX. 


1° Pendant les mouvements respiratoires les faces sternales s'élèvent et s'abaissent (fait 
signalé par les anciens observateurs); les régions latérales des somites rentrent et sortent 
(fait indiqué par Rathke et Graber); de plus, l’arête dorsale monte et descend. 

2 Les mouvements d'inspiration ou d'expiration sont simultanés dans tous les somites; 
il n’y a pas d’onde. 

3° La longueur de l'abdomen ne change pas. 


118 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration, Inspiration. 
Rapide et courte. Plus lente et à vitesse décroissante. 


Il existe une pause inspiratoire. 


Les lames sternales s'élèvent. Les lames sternales s’abaissent. 
Les flancs rentrent. Les flancs sortent. 
L’arête médiane dorsale s'élève. L’arête médiane dorsale s'abaisse. 
L'abdomen se relève d’une petite quantité, L’abdomen descend, 

§ XLIX: 


EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÉME NERVEUX DES LIBELLULES. 


Ainsi que je le disais à la page 112, Barlow, Baudelot, Luchsinger et 
Langendorff ont effectué un grand nombre d'expériences sur le système 
nerveux des Libellules ou de leurs larves. 

Barlow opérant sur les Libellula depressa et vulgata a constaté : 1° que 
les mouvements respiratoires abdominaux continuent pendant longtemps, 
mais ralentis et affaiblis, soit chez la Libellule décapitée, soit chez l'individu 
dont la tête a été écrasée brusquement; 

2 Que diverses causes, telles que les excitations mécaniques, l'élévation 
de température, un courant électrique traversant l'abdomen longitudina- 
lement, amènent une accélération notable du rhythme respiratoire, comme 
elles le font chez la Libellule intacte; 

3° Que l’on peut diviser l'abdomen d’une Libellule en deux ou trois tron- 
çons qui, bien qu’isolés, continuent à présenter des mouvements respiratoires, 
mouvements qu'une élévation de température accélère d’une manière 
marquée ‘. 


+ 


4 D'après la belle figure du système nerveux du Gomphus forcipatus, publiée par E. Blan- 
chard dans le Règne animal illustré (édition Masson), Insectes, Atlas, pl. 100, Paris, 1849, les 
centres nerveux des Libelluliens seraient disposés comme suit : outre les ganglions céré- 
broïdes et sous-æsophagiens, il existe une masse ganglionnaire prothoracique d’où émanent 
les nerfs de la première paire de pattes, une deuxième masse thoracique très volumineuse 
résultant de la fusion des ganglions méso- et métathoraciques et distribuant des nerfs nom- 
breux aux muscles des ailes et aux deux paires de pattes postérieures; enfin sept ganglions 
abdominaux d’un faible volume et fort distants les uns des autres, 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 149 


Ces recherches intéressantes, que je n'ai pu que résumer très brièvement, 
démontrent deux points importants. Elles prouvent, en effet, que les mouve- 
ments respiratoires des Insectes sont, avant tout, comme ceux des Vertébrés, 
des mouvements réflexes et que les paires ganglionnaires abdominales sont 
autant de centres nerveux respiratoires animant les segments auxquels ils 
appartiennent. 

Baudelot, qui semble avoir ignoré l'existence du travail de son prédé- 
-cesseur, a naturellement refait, en partie, les mêmes expériences; il s’est 
adressé à la Libellule et à sa larve ! et a eu pour but particulier de démontrer 
la fausseté de l'hypothèse de Faivre dont j'ai analysé le mémoire à propos 
des Coléoptères. 

Baudelot a vu, comme Barlow, les mouvements respiratoires persister 
pendant longtemps chez l'insecte décapité, dans l'abdomen séparé du thorax 
et dans des tronçons ne comprenant qu'un petit nombre de somites. 

Luchsinger, ayant isolé chez une larve un tronçon ne comprenant que les 
quatre derniers somites, y a constaté, après un arrêt de quelques minutes, la 

-réapparition des mouvements respiratoires actifs et Langendorff, qui a repro- 
duit plusieurs des expériences de Barlow, est arrivé aux mêmes résultats que 
le physiologiste anglais. 

Les recherches de ces divers auteurs se confirmant mutuellement et 
conduisant à des conclusions identiques ont, en quelque sorte, épuisé le sujet 
et ne permettaient point d'espérer des découvertes nouvelles. 

J'ai effectué cependant, à l’aide de la Libellula quadrimaculata, un certain 
nombre d'expériences qui m'ont fourni l’occasion de constater l'exactitude 
des fails principaux et même des détails observés par Barlow, Baudelot et 
Langendorff °, 

Laissant de côté l'exposé de mes essais personnels qui serait superflu, 
j'insisterai sur un point intéressant. 

Ces quatre séries d'expériences, faites par des expérimentateurs diffé- 


1 Baudelot n'indique nulle part la forme spécifique qui a servi à ses expériences. Ce 
détail importe, du reste, fort peu. 

2 Voir le paragraphe L suivant pour une expérience sur le système nerveux de l’Aeschna 
grandis. 


120 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


rents, montrent que les mouvements respiratoires abdominaux des Libellules 
persistent lorsque l'abdomen est soustrait à l'influence des centres nerveux 
cérébroïdes ou centres des excitations volontaires et même lorsqu'il n’est 
plus soumis à l'influence des ganglions thoraciques; mais elles prouvent 
aussi, surtout les séries de Barlow, de Langendorff et la mienne, que les 
ganglions cérébroïdes ne sont pas absolument sans action sur l’amplitude et 
le nombre des mouvements de respiration. 

Barlow a vu, chez la Libellule décapitée, les mouvements affaiblis, et moi- 
même j'ai pu, bien plus nettement, constater une diminution d'amplitude 
par la méthode des projections. 

Après la suppression de la tête de linsecte, Barlow et Langendorff ont 
toujours constaté un ralentissement manifeste, le nombre des mouvements 
respiratoires par minute tombant, d’après le premier de ces auteurs, de 
64 à 50, de 108 à 40, de 60 à 25, et d’après le second, de 84 à 68, 64 et, 
enfin, 48. 

J'ai observé personnellement un léger ralentissement chez la Libellula 
quadrimaculata qui, intacte, respirait trente-huit fois par minute et, déca- 
pitée, trente-quatre fois seulement. 

La comparaison de ces résultats avec ceux qu'ont fournis des insectes 
d’autres groupes, me permettra de formuler des conclusions générales à la 
fin de ce travail. 


§ L. 
AESCHNA GRANDIS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode graphique.) 


Malgré sa taille plus considérable, l'Aeschna grandis ne ma pas donné 
d'aussi bons résultats que la Libellula quadrimaculata. 

Les expériences ont été faites sur un individu très vif venant de manger 
et, cependant, l'amplitude des divers mouvements a toujours été faible, fait 
que j’attribue à la forme de l'abdomen de l'insecte. | 

Les mouvements respiratoires s'effectuent de la même facon que chez la 
Libellule ; aussi ne citerai-je qu'une seule expérience. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 421 


Après avoir pris plusieurs tracés des mouvements de rentrée et de sortie 
des flancs chez l'individu intact, j'ai coupé la chaîne nerveuse à la base de 
l'abdomen, puis j'ai pris un nouveau tracé des mouvements des flancs fourni, 
par conséquent, par labdomen soustrait à l'influence des ganglions cépha- 
liques et thoraciques. 

Le graphique, parfaitement régulier, indique que la forme des mouve- 
ments respiratoires est restée absolument la même; le rhythme et l'amplitude 
sont seuls un peu modifiés. L’'amplitude a très légèrement diminué et le 
nombre des mouvements par minute est descendu de 41 à 38. 

Ce résultat intéressant confirme parfaitement ce que j'ai exposé, dans le 
paragraphe précédent, concernant l'indépendance des mouvements respi- 
atoires abdominaux et l'influence des centres nerveux antérieurs des Libel- 
lula proprement dites. 


$ LI. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE L'AGRION SANGUINEUM. 


Les muscles respiratoires des Libelluliens ont été décrits par Rathke !; 
mais comme celte description n’est accompagnée d'aucun dessin, le lecteur 
éprouve une certaine peine à se faire une idée exacte de la disposition 
réelle. Les figures ci-jointes comblent, je l'espère, cette lacune. 

La dissection des muscles abdominaux des Odonates est assez difficile et 
ne m'a bien réussi que pour l’Agrion sanguineum. 

L’abdomen des Agrion n'offre pas les arêtes longitudinales de celui des 
Libellules, mais l'organisation est, au fond, absolument la même. Chaque 
somite se compose d'un grand arceau tergal dont les bords qui descendent 
fort bas limitent, sous le ventre, une gouttière profonde occupée par une 
lame sternale étroite. Celle-ci est reliée à larceau tergal par une zone 
flexible très élastique, formant de chaque côté un pli accusé (fig. 33). 

Si l’on ouvre l'abdomen dans sa longueur, on voit le pli produit par la 
zone élastique faire, à l’intérieur du corps, une saillie notable. Les muscles 


! Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., p. 109. 


Tome XLV. 16 


122 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


longitudinaux ordinaires déterminant les incurvations de l'abdomen sont 
représentés comme suit (fig. 32.) : 


Fig. 32 X 13. — Portion de la moitié droite de l'abdomen de l’Agrion sanguineum, 


A, B Muscles longitudinaux dorsaux. 
a as sas sternaux. 
æ — expirateurs verticaux. 


La largeur de l'abdomen a été exagérée à dessein pour rendre l'interprétation des muscles plus facile, 


4° Dans larceau tergal par deux groupes de fibres étalés en couches 
plus ou moins larges, lun dorsal 4, lautre presque 
ventral B !. Celui-ci nait de la partie inférieure 
du bord antérieur de larceau tergal qui suit 
immédiatement; 

20 Dans lľarceau sternal par un petit faisceau 
musculaire partant du bord antérieur de la plaque 

sternale suivante 4. 
On remarquera le peu de longueur de ces 
Fig. 33 X 18, — Agrion sanguineum. muscles et les distances considérables qui sépa- 

Coupe transversale de l'abdomen. .e 

S Stigmate. rent les groupes successifs. 

dm MT Les muscles respiratoires vrais +, fort courts 
et situés aussi très loin les uns des autres, ont une direction verticale et 
unissent, de chaque côté, la lame sternale à l’arceau tergal correspondant, 
en croisant la zone élastique. 

Ce sont, comme on peut le voir, de petits muscles légèrement étalés en 


1 Son insertion inférieure est cachée sur la figure par le pli saillant de la zone élastique. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 195 


éventail et naissant de saillies latérales que présentent les lames sternales 
dans le voisinage de leur extrémité antérieure '. 

Il est aisé de comprendre comment ces muscles verticaux soulèvent les 
lames sternales et comment celles-ci, à leur tour, tendant la zone membra- 
neuse, obligent les bords inférieurs des arceaux tergaux à se courber en 
dedans. 

Les muscles en question sont donc expirateurs; les muscles inspirateurs 
font défaut, ainsi que Rathke le fait remarquer, et l'inspiration, chez les 
Odonates, s'opère par l'élasticité, du reste très grande, des téguments. 


B. DBiptères. 


Les observations sur le mécanisme respiratoire des Diptères ont été peu 
nombreuses; Kirby et Spence, Straus-Durckheim, Dugès, Rathke et Künkel 
d'Herculais sont les seuls auteurs que je puisse citer à des titres divers ?. 

Les trois premiers se bornent à indiquer incidemment de petits faits sans 
importance. Ainsi Kirby et Spence, parlant des vibrations des ailes de 
l'Ortalis vibrans posé, émettent l'opinion que ces vibrations sont liées aux 
mouvements respiratoires de l'insecte 5. Straus-Durckheim signale la persis- 
tance des mouvements de respiration chez une mouche décapitée #, et 
Dugès *, qui a observé des mouches et des hélophiles, se contente de résultats 
incomplets. 

Il faut lire le mémoire de Rathke ê pour trouver une description suffisam- 
ment détaillée et à peu près exacte des mouvements respiratoires de quelques 
Diptères : Tipula, Tabanus, Empis et Musca. D'après ce travail, les mouve- 


1 Chez quelques Odonates (les Aeschna, si ma mémoire est fidèle), ces saillies, beaucoup 
plus développées, sont de véritables apodèmes arqués. 

2 Les deux mémoires de Léon Dufour sur les Diptères (1851) et sur la Sarcophaga hemor- 
rhoidalis ne renferment rien sur la respiration. 

3 Key et Spexce, An introduction to entomology, People’s edition, p. #47. London, 1867. 

4 Srraus-Durckueim. Considérations, ete. Op. cit., p. 877. 

8 Ducks. Traité de physiologie comparée, p. 555. Montpellier, 1858. 
6 RATHKE. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., pp. 105 à 107. 


124 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


ments les plus nettement visibles, chez les insectes en question, consistent 
ordinairement en élévations et abaissements alternatifs des plaques sternales. 

Enfin, Künkel d'Hereulais a publié en 1875 la première partie et en 1881 
l'atlas seul de la deuxième partie d’un ouvrage étendu sur l’organisation des 
Volucelles *. Le chapitre concernant la respiration n’a pas encore paru, mais 
l'auteur décrit le système musculaire abdominal et appelle l'attention sur des 
muscles qu'il considère comme déterminant les mouvements respiratoires. 
Je discuterai son interprétation plus loin, § LYTT. 


§ LI. 
TIPULA GIGANTEA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'organisation de l'abdomen des Tipules n’est pas sans analogie avec ce 
que nous présentent les Odonates et les Orthoptères acridiens. Cet abdomen 
allongé se compose, en effet, de longs segments bien distincts constitués 
chacun par un grand arceau tergal entrant dans la composition des flancs 
et par un arceau sternal plus petit relié au premier au moyen d’une zone 
membraneuse fortement repliée en dedans. Structure caractéristique qui fait 
supposer immédiatement que les mouvements respiratoires doivent consister, 
comme chez les Libellules et les Acridiens, en ascensions et en descentes des 
pièces sternales de tous les somites ou, au moins, de la plupart d'entre eux. 

Rathke dit cependant que les mouvements des pièces sternales sont très 
faibles, qu'ils wont lieu que pour les trois ou quatre premiers somites abdo- 
minaux et qu'il lui a été impossible de distinguer le moindre déplacement 
ayant un caractère respiratoire dans les segments situés au delà. 

Mais Rathke, qui ne disposait que de l'observation directe, a mal vu, comme 
on en jugera par la description suivante : 

L’insecte, qui est une femelle, est fixé par les ailes; l'abdomen est abso- 
lument libre. 


4 Küxkez D'Hercuzas. Recherches sur l'organisation et le développement des Volucelles, 
Are partie, pp. 184 et 185, Paris, 1875; et Atlas de la 2% partie, pl. XII, fig. 4. Paris, 1881. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 125 


Les mouvements respiratoires, quoique de faible amplitude, sont très nets 
et ont lieu dans la presque totalité de l'abdomen. L’expiration est marquée 
par la descente des arceaux dorsaux et par l'ascension des pièces sternales 
qui rentrent sous les précédentes. La diminution du diamètre vertical, 
mesurée au 3° somite, est à peu près de ‘}. | 

Le fait le plus intéressant à noter est l'existence d’une onde véritable, le 
mouvement n'étant pas simultané dans tous les somites, mais progressif; les 
somites 1, 2, 3, 4 sont en expiration lorsque les segments 5, 6, 7, 8, 9 
sont en inspiration et vice vers. 

Les mouvements respiratoires sont accompagnés de légères oscillations 
de l'abdomen; mais il ma paru, sans pouvoir le certifier, qu'il n’y avait pas 
toujours coïncidence ; de sorte que ces oscillations sont peut-être étrangères 
à l'acte de la respiration. | 

La longueur de l'abdomen ne change pas; ce qui montre que les somites 
ne se déplacent pas dans le sens longitudinal. Le métathorax semble 
immobile. 


$ LIL 


CALLIPHORA VOMITORIA. 


L'abdomen des Muscides se fait remarquer par le grand développement 
des arceaux tergaux qui, chez 
les Calliphores, par exemple, 
forment entièrement les flancs 
et se recourbent même à la 
face inférieure. Il en résulte 
que les arceaux sternaux, en 


Répétition de la figure 43. Fig, 34 X 5. général fort peuls, ne sont 
Coupe transversale de l'abdomen Face inférieure de l'abdomen représentés que par une série 
de la Lucilia cæsar, de la Calliphora vomitoria Q. 


de plaques à peu près qua- 
drangulaires occupant la ligne médiane ventrale. Ces plaques sont natu- 
rellement reliées aux bords des arceaux tergaux par une zone cutanée 
molle (fig. 34 et fig. 13). 


126 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Ceci rappelé, je crois bien faire en reproduisant d’abord, en substance, 
les résultats des études de Rathke. Dans la respiration calme, dit cet émi- 
nent observateur, les plaques sternales des Muscides s'élèvent et s'abaissent 
d’une petite quantité. Si la respiration devient précipitée, comme chez la 
mouche maintenue par les ailes, il y a non seulement des mouvements de 
la part des plaques sternales, mais on observe, en même temps, des dépla- 
cements des flancs en dedans et en dehors, c’est-à-dire des déplacements 
des parties latérales des arceaux lergaux. Pendant ces phases, l'abdomen 
s'allonge et se raccourcit alternativement, l'allongement coïneidant avec 
l'élévation des pièces sternales (expiration), le raccourcissement accompagné 
d’incurvation vers le bas répondant à l’abaissement de ces mêmes pièces 
(inspiration). 

Le tableau qui précède est à peu près exact; le lecteur pourra apprécier 
les petites erreurs commises par Rathke, en lisant l’exposé suivant de mes 
expériences personnelles. 


$ LIV. 


ÉTUDE DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DE LA CALLIPHORA VOMITORIA PAR LA MÉTHODE 
DES PROJECTIONS. 


La Calliphore, privée de ses pattes et de ses ailes, est supportée par deux 
épingles fines traversant les parties latérales du mésothorax. On place 
l'animal dans l'appareil de façon à obtenir successivement des silhouettes du 
profil longitudinal entier (fig. 67, pl. V), puis de l'abdomen seul vu dans 
sa largeur et par la face inférieure (fig. 68, pl. V). Le grossissement est 
de 10 diamètres. 

L’insecte exécute deux espèces de mouvements qu'il importe de distin- 
guer l’un de l’autre : 4° un mouvement sans caractère respiratoire. Chaque 
fois que la Calliphore agite rapidement ses tronçons de pattes et ses 
moignons d'ailes, elle étend et relève vivement l'abdomen ; 

2° Des mouvements respiratoires vrais, ayant lieu comme suit : 


Le métathorax reste immobile. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 127 


Les inspirations sont lentes, mais assez profondes et séparées par des 
pauses inspiratoires. 

Les plaques sternales s'élèvent en expiration et s'abaissent en inspiration ; 
la diminution du diamètre vertical de l'abdomen en expiration est de ‘};;, 
par conséquent de valeur moyenne. 

Même dans la respiration calme, le diamètre transversal de l'abdomen 
diminue et augmente un peu alternativement; les bords inférieurs des 
arceaux tergaux se portent en dedans et en dehors. 

Pendant l'expiration, l'extrémité de l'abdomen se relève légèrement et des 
styles collés sur la face dorsale du corps montrent que les arceaux tergaux 
rentrent un peu les uns dans les autres. Lors de l'inspiration, ces mêmes 
arceaux s'écartent faiblement et la pointe de l'abdomen s'abaisse. 

Les silhouettes montrent clairement que lorsque l’oviseapte ou pondoir 
des femelles est à l'état de rétraction, l’abdomen ne subit aucun changement 
appréciable de longueur, son extrémité décrivant seulement un petit arc de 
cercle. Il en est autrement lorsque l'insecte étend l’oviscapte ; dans ce cas, 
cet organe subit un allongement manifeste et très facile à s'expliquer, pen- 
dant chaque mouvement expiratoire. 

Mes résultats diffèrent done de ceux de Rathke par deux points : les parties 
latérales des arceaux tergaux se portent en dedans et en dehors pendant la 
respiration calme et normale; l’abdomen ne change pas de longueur. L’au- 
teur cité a été, quant à ce dernier point, victime de lillusion qui trompe 
presque tous ceux qui se bornent à observer les mouvements respiratoires 
des insectes, à l'œil nu ou à la loupe. 


Lucilia cæsar. — Les mouvements de respiration sont les mêmes que 
ceux de la Calliphore et n’exigent, par conséquent, pas de description 
Spéciale, 


128 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


$ LV. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE LA CALLIPHORA VOMITORIA., 


La musculature de l’abdomen offre la disposition la plus simple que j'aie 
rencontrée, jusqu'à présent, chez un insecte parfait. 

Les muscles longitudinaux dorsaux À et sternaux 4 ainsi que les muscles 
expirateurs +, au lieu d’être condensés sous forme de faisceaux isolés et 
distincts, sont représentés ici par des nappes musculaires larges et minces. 


ILE. 


MA 


Fig, 35 X 10, — Muscles de la moitié droite de l'abdomen de la Calliphora vomitoria Q. 


A Muscles longitudinaux dorsaux. 
a — pi sternaux, 
æ — expirateurs verticaux. 


Sous la figure on a représenté, à part, une plaque sternale et ses muscles, 


Celle de ces nappes qui joue le rôle des muscles expirateurs verticaux 
des Coléoptères est composée de fibres à direction ascendante et relie les 
plaques sternales à la région inférieure des arceaux tergaux. Ses insertions 
expliquent parfaitement l'ascension des plaques sternales et la rentrée des 
parties latérales des arceaux supérieurs pendant l'expiration. 

Je wai pas trouvé de muscles que lon puisse considérer comme inspi- 


’aleurs, 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 199 


$ IVI. 
SCATOPHAGA STERCORARIA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


La structure de l'abdomen diffère quelque peu de celle que j'ai décrite 
plus haut chez les Calliphores ; les plaques sternales sont proportionnelle- 
ment plus larges et la zone molle qui les unit aux bords inférieurs des 
arceaux tergaux est légèrement convexe en dehors à l’état de repos. 

Les longs poils qui couvrent l'insecte rendent les observations assez diffi- 
ciles; néanmoins je crois avoir constaté ce qui suit : dans la respiration 
calme, les plaques sternales des somites 2, 3, 4, 5 s'élèvent vers le haut, en 
expiration, le maximum d’effet ayant lieu pour la 4° et la 5° plaque. Les 
poils qu’elles portent font l'office de styles; ils s’inelinent en arrière et indi- 
quent ainsi que les lames sternales deviennent légèrement obliques. 

Le grossissement, assez fort, me permet d'assurer que la longueur de 
l'abdomen ne varie pas et que les somites thoraciques restent immobiles. 


§ LVII. 
(SYRPHIDES.) ERISTALIS TENAX ET SYRPHUS RIBESIL. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'Eristalis tenax me servira à exposer le mécanisme respiratoire des 
Syrphides, qui diffère légèrement de celui des autres Diptères. 
L’abdomen, très large, ne comprend, du côté tergal, que quatre arceaux 
bien développés, tandis qu’à la face infé- 
rieure existent cinq grandes plaques ster- 
nales mobiles (fig. 12). 
GE L'insecte privé de ses pattes, de ses ailes 
et fixé par deux épingles traversant les 


Répétition de la figure 42. parties latérales du mésothorax, est placé 
Coupe transversale de l'abdomen de l'Eristalis tenax. successivement dans l'appareil ; suivant 


différentes positions. Le grossissement employé est de 10 diamètres (fig. 69, 
pl. V). 
Tome XLV. 17 


150 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


En expiration, les plaques sternales s'élèvent; le maximum d'effet a 
toujours lieu pour la 2°. En même temps, les arceaux tergaux 2, 9, 4 
s’abaissent et les flancs rentrent, la plus grande dépression de ceux-ci ayant 
encore une fois lieu pour le 2° somite. L'abdomen diminue donc de dia- 
mètre dans deux sens. Dans le sens vertical, cette diminution, mesurée au 
niveau du 2° segment, est de ‘fọ; dans le sens transversal, elle est de t/s 
seulement. 

Fait assez curieux, vu sa rareté chez les Diptères, l'abdomen s'allonge 
de ‘y durant chaque expiration; son extrémité se courbe en outre vers 
le bas. 

Il existe très nettement une courte pause à la fin de chaque mouvement 
inspiratoire £. 

Pendant les arrêts qui ont toujours lieu en inspiration, l'insecte imprime 
souvent à son abdomen des mouvements d’oscillation considérables, dans le 
sens vertical. Je reviendrai sur ce détail à propos du système musculaire. 

J'ajoute, enfin, qu’il n’y a ni mouvements thoraciques, ni onde. 


Syrphus Ribesii. — Les mouvements respiratoires sont naturellement à 
peu près les mêmes que chez l'Éristalis tenax. On voit, en expiration, les 
plaques sternales s'élever, les arceaux tergaux s'abaisser et, quand la respi- 
ration est très active, l'abdomen augmenter légérement de longueur ?. 

La diminution de diamètre, dans le sens vertical, mesurée à la hauteur 
des somites apparents 2 et 3, est au plus de '/,s ; l'allongement atteint ‘/;, de 
la longueur totale de la région abdominale. J'ai observé une pause à la 
fin de l'inspiration. I n'existe ni onde, ni mouvement thoracique. 


1 Il semble aussi y avoir une trace de pause expiratoire; mais le fait, s'il était bien 
constaté, serait unique chez les insectes (voyez § XCV). 

2 L’allongement n'existe que lorsque la respiration est très active; lorsque la respiration 
est calme, la longueur de cette partie du corps ne varie pas d’une manière appréciable. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 151 


$ LVII. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE L'ERISTALIS TENAX. 


Le système musculaire des Syrphides a été étudié, chez les Volucelles, par 
Künckel d'Herculais *. Si, 


figures publiées par ce sa- 
zant sont exactes, il n'existe, 
quant aux muscles, entre les 
Volucelles et les Eristales, 
que des différences très peu 


Fig. 36 X 8. — Moitié gauche de l'abdomen de l'Eristalis tenax. im portantes. 
A Muscles longitudinaux dorsaux. AU 
he 7 sternaux. D'un autre côté, le lecteur 
(2 — expirateurs verticaux. Fe di 
m et m’ — élévateurs et abaisseurs de l'abdomen déterminant peut constater ımmeè late- 


mes movements generau d osoiindon cans e cons verici. ment, par la -comparaison 
des figures 35 et 36, que les muscles respiratoires « de l’ Eristalis tenax sont 
exactement disposés comme ceux des Muscides et en particulier de la Calli- 
phora vomitoria. Comme chez les Calliphores, # n'existe ici que des muscles 
expirateurs offrant la disposition générale ordinaire, c’est-à-dire unissant 
les arceaux tergaux aux arceaux sternaux en croisant la zone molle latérale. 
Ils sont étalés sous forme d’une nappe mince que le microscope montre com- 
posée d’une seule couche de fibres musculaires à peu près parallèles. C'est 
celte couche musculaire continue des Muscides et des Syrphides qui se 
différencie en faisceaux musculaires distincts chez les Tabanides (fig. 39), 
chez les Coléoptères et chez tant d’autres insectes. 

Künckel d'Herculais, qui n’était pas préparé par des études spéciales sur 
le mécanisme respiratoire des articulés, a donné aux muscles abdominaux des 
Volucelles des significations que je ne saurais accepter. Les deux muscles 
m et m’ qui, naissant, m de la face tergale du premier somite et m’ de la face 
Sternale du métathorax, vont se terminer aux bords antérieurs du 2° somite 
abdominal, muscles qu’il nomme élévateur et abaisseur de l'abdomen, sont 


1 Künckez n'HercuLais. Rech. sur l'organisation el le développement des Volucelles. Op. cit., 
1" partie, pp. 184 et 185, pl. IX, fig. 5, pl. X, fig. 6, et Atlas de la 2% partie, pl. XI, fig. 1. 


132 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


pour lui des muscles inspirateurs. Quant à la couche musculaire mince « 
que j'ai décrite plus haut comme représentant les muscles expirateurs des 
autres insectes, elle concourrait, suivant Künekel d'Herculais, à l'acte respi- 
ratoire, en comprimant le canal trachéen dans lequel s'ouvrent les stigmates 
et en obligeant ainsi l'air qui remplit ce canal à s'emmagasiner dans les 
vésicules aériennes du Diptère. 

Tout ce que j'ai exposé dans les chapitres précédents me semble cepen- 
dant démontrer que la couche de fibres musculaires « qui croise la zone 
molle latérale est exactement l’homologue des muscles expirateurs verti- 
caux des insectes des autres groupes et que c’est cette couche dont la con- 
traction fait remonter les plaques sternales et descendre les arceaux lergaux 
en les incurvant un peu en dedans à leur partie inférieure, en un mot, qui 
détermine une diminution dans la capacité de l'abdomen et amène, par con- 
séquent, l'expiration. 

Enfin la signification d’inspirateurs donnée par Künckel d'Herculais aux 
muscles m et m’, élévateurs et abaisseurs de l'abdomen, ne me parait pas 
plus heureuse. Les expériences par projection nous ont montré, en effet 
(p. 130), que ces muscles n’entrent en jeu que par moments et que c’est 
précisément pendant les arrêts respiratoires que l'insecte fait souvent exé- 
cuter à son abdomen des mouvements oscillatoires dans le sens vertical. 


§ LX. 
ASILUS (sp ?) 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L’abdomen allongé et étroit offre la structure ordinaire de celui des 
Diptères; c’est-à-dire que les arceaux tergaux sont très 
développés et que les arceaux sternaux ont pris la forme de 
grandes plaques convexes (fig. 37). 

L’insecte intact, muni de ses ailes et de ses pattes, n’est 
que par une seule épingle traversant le mésothorax. Les 


Fig. 87 X 10.— Asilus. fixé 


Coupe transversale 


de l'abdomen mouvements respiratoires très nets et très faciles à dessiner 
sont les suivants : les plaques sternales s'élèvent et s'abaissent d'un mouve- 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 133 


ment rapide, sans que l’on puisse discerner de déplacements du côté des 
arceaux dorsaux. Ces mouvements sont surtout accusés pour les plaques 4 
et 2; la diminution du diamètre vertical en expiration est de ‘/,,. De temps 
à autre, mais pas d’une façon constante, il y a apparition d’une onde. Dans 
ce cas, les mouvements sont plus lents et l’on voit les plaques sternales 4 et 2 
s'élever, tandis que 3 et 4 s'abaissent, et vice versä. 

Enfin, pendant la respiration calme, l'extrémité de l'abdomen oscille ver- 
ticalement d’une manière lente et régulière, sans qu'il y ait aucune concor- 
dance entre ce genre de déplacement et les mouvements respiratoires vrais. 

On n’observe ni changements de longueur de l'abdomen, ni mouvements 
thoraciques. Quant aux arrêts qui ont lieu de temps en temps, ils répondent 
toujours à l'inspiration. 


$ LX. 
TABANUS BOVINUS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


En fait de Tabanides, Rathke a examiné le Tabanus autumnalis ; il en a 
décrit les mouvements respiratoires, ainsi que le système musculaire abdo- 
minal. Mes observations personnelles, faites à l’aide d’un meilleur procédé et 
sur une forme plus grande, me permettent, tout en confirmant les résultats 
obtenus par Rathke, de signaler un certain nombre de détails intéressants. 

L’abdomen des Tabanides diffère surtout de celui des Muscides par les 

se dimensions relatives des arceaux tergaux et 

dé sternaux. Chez les Muscides, les arceaux supé- 
ri rieurs sont énormes et les arceaux sternaux 
sont réduits à de simples plaques; ici, au con- 


ARE n : : l 
EE SAD BEL Tuba Doinua traire, les tergites et les sternites sont presque 
Coupe transversale du 2e somite abdominal. égaux. A la hauteur des flancs, les arceaux 


tergaux chevauchent un peu sur les inférieurs et cachent la bande flexible 
qui les y relie (fig. 38). 
D’après Rathke les mouvements respiratoires des Tabanides sont les sui- 


134 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


vants : les arceaux sternaux s'élèvent et s'abaissent, principalement près de 
la base de l'abdomen; si la respiration devient un peu plus active, les bords 
latéraux des arceaux tergaux antérieurs sont alternativement inclinés en 
dedans ou repoussés au dehors; enfin, si les mouvements deviennent encore 
plus énergiques, les arceaux sternaux se déplacent dans le sens longitudinal, 
s’'engageant un peu les uns sous les autres en expiration. 

Tout cela est à peu près exact; ce qui a surtout échappé à l’auteur cité, 
c’est que les déplacements qui, selon lui, n’ont lieu que lorsque les mouve- 
ments respiratoires s’accélèrent chez l'insecte excité, ont lieu aussi dans la 
respiration calme. 

Voici, du reste, ce que mont donné les observations faites à l’aide de la 
méthode des projections : 

Le Taon, privé de ses ailes et de ses pattes, était fixé par deux épingles 
fines traversant les parties latérales de la région la plus large du thorax; 
l'abdomen était libre. L'insecte fut placé dans l'appareil, tantôt de façon à 
donner la silhouette du profil longitudinal et portait alors des styles de papier 
sur les arceaux tergaux 2 et 4, tantôt de façon à fournir l’image de la face 
dorsale dans toute sa largeur, tantôt, enfin, muni de trois styles collés sur 
l'arceau sternal du 3° somite et posé suivant laxe du faisceau lumineux, de 
manière à projeter la coupe de l'abdomen et à permettre l'examen des chan- 
gements de courbure de l’arceau sternal en question (le grossissement a 
varié de 9 à 8 diamètres). 

Respiration calme ; ni pauses inspiratoires, ni pauses expiratoires; mais, 
de temps en temps, des arrêts en inspiration. Aucun mouvement du côté 
du thorax. 

En expiration, les arceaux sternaux s'élèvent, l'effet maximum ayant lieu 
à la hauteur de l'articulation entre le 2° et le 3° arceau. On voit très claire- 
ment sur les silhouettes, ou en regardant directement l'insecte à la loupe, 
que le plus grand effort mécanique a lieu au point que je viens d'indiquer. La 
disposition des muscles nous en donnera la raison. 

En même temps, les arceaux sternaux 3, 4, 5 se portent légèrement en 
avant et l'extrémité de l'abdomen se relève ; les styles fixés sur les arceaux 
dorsaux 2 et 4 montrent par leurs déplacements que les arceaux dorsaux 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 135 


rentrent un peu les uns sous les autres et que ce mouvement n’a une cer- 
certaine importance que pour les somites postérieurs. 

Pendant la phase expiratoire, les arceaux sternaux changent de cour- 
bure; leurs régions latérales se dépriment un peu plus que leur région 
médiane et les rebords inférieurs de la plupart des arceaux tergaux s'in- 
clinent légèrement en dedans, ce qui amène une diminution du diamètre 
transversal de l’abdomen. 

Tous ces déplacements sont simultanés; il n’y a pas de trace d'onde. 

La longueur de l'abdomen reste très sensiblement invariable lorsque la 
respiration est normale. Je n’ai constaté d’allongements et de raccourcisse- 
ments réels que chez l'insecte momentanément excité par les manipulations 
et les mutilations que nécessitent les apprêts d’une expérience. 

La diminution expiratoire du diamètre vertical de l'abdomen, là où elle 
est le plus accusée, c’est-à-dire sur la limite des somites 2 et 3, est environ 
de ‘|as; le rétrécisssement transversal à la hauteur du 2° somite n’est que 
de ‘h Les mouvements respiratoires ont donc moins d'amplitude encore 
que ceux de la Calliphore. 


à LXI 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU TABANUS BOVINUS. 


Rathke a comparé les muscles respiratoires des Tabanides à ceux des 

cree Coléoptères. Ce rapproche- 
ment est, en effet, assez 
juste. En examinant simul- 
2  tanément les figures 35 et 
N 39, le lecteur voit immé- 
à + diatement que le système 
Se ` musculaire du Taon dérive 


LS de celui de la Calliphore 


SNS SS = SSSR 
Fig, 39 X 5. — Muscles de la moitié droite de l'abdomen du Tabanus bovin 


SS 


A, B Muscles longitudinaux dorsaux. par une différenciation plus 
a — — sternaux. 
æ  —  expirateurs verticaux. accusée. Les fibres mus- 


Culaires, au lieu d’être étalées en larges nappes minces, sont groupées en 


156 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


petits muscles distincts plus épais, mais affectant les mêmes directions et les 
mêmes rapports. 

Laissant de côté les muscles longitudinaux dorsaux À et B et sternaux 4, 
on constate que les muscles expirateurs + naissent, comme chez la Calli- 
phore, des bords des arceaux sternaux, croisent la membrane molle des 
flancs et s’insérent, à la façon des mêmes muscles chez les Coléoptéres, dans 
les arceaux tergaux correspondants. 

Le volume plus considérable des muscles expirateurs occupant les 2° et 
3° somites, nous explique immédiatement pourquoi la dépression des 
arceaux sternaux offre son maximum à la limite des arceaux sternaux 2 et 3, 
comme la légère obliquité de ces muscles et des suivants fait comprendre 
le petit déplacement en avant des arceaux inférieurs, sans qu’il soit néces- 
saire d'attribuer ici un rôle spécial aux muscles longitudinaux ordinaires. 

Les muscles inspirateurs sont complètement absents, l'inspiration est donc 
passive, ainsi que chez la plupart des insectes. 


§ LXII. 
Appendice aux Diptères. 
HYMÉNOPTÈRES CHRYSIDIENS. CHRYSIS IGNITA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Je wai eu l’occasion d'étudier convenablement qu'un seul Hyménoptère 
térébrant, le Chrysis ignita. Ainsi qu’on va le voir, il se rapproche évidem- 
ment des Diptères muscides par ses mouvements respiratoires. 

Les Chrysis ont l'abdomen composé de trois segments apparents; la 
face inférieure, à peu près plane, est constituée par trois plaques sternales 
dont les parties latérales sont engagées sous les bords des arceaux tergaux 
réfléchis en dessous. 

En fixant l'animal, privé de ses pattes et de ses ailes, à l’aide d’une seule 
épingle traversant le mésothorax et en soutenant l'abdomen par une épingle 
coudée, pour éviter les grandes incurvations vers le bas, on constate, au 


Qt 
“1 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 1 


grossissement de 12 diamètres, que le Chrysis ignita effectue deux espèces 
de mouvements : 

1° Des mouvements oscillatoires de l'abdomen dans le sens vertical, 
accompagnés d’allongements et de raccourcissements ; 

2° Des mouvements respiratoires vrais. Ceux-ci consistent en élévations 
et abaissements excessivement rapides des lames sternales, sans pauses et 
sans arrêts. La diminution du diamètre vertical de l'abdomen, en expiration, 
atteint ‘Jio 

Quand l'insecte est tranquille, on s'assure facilement que les anneaux 
thoraciques ne bougent point et que la longueur de l'abdomen reste inva- 
riable, malgré les mouvements respiratoires incessants des plaques sternales. 

Ainsi, quoique les Chrysis soient si voisins, par leur aspect général, des 
Hyÿménoptères porte-aiguillon, leurs mouvements de respiration diffèrent 
profondément de ceux de ces derniers insectes, puisqu'il y manque le carac- 
tère très spécial des raccourcissements et des allongements alternatifs de la 


région abdominale. 


C. Hyménoptères portc-niguillon. 


$ LXIII 


HISTORIQUE. 


Bien que le groupe ait été beaucoup travaillé et que des centaines d'obser- 
vateurs aient fait une étude particulière des mœurs de l’Abeille domestique, 
on ne peut citer qu'un petit nombre de naturalistes qui se soient occupés 
des mouvements respiratoires des Hyménoptères : Newport ! a surtout fixé 
son attention sur le rhythme respiratoire du Bourdon terrestre, de l’Abeille 
el de l’Anthophore ; Dugès ? parle des mouvements de respiration des insectes 
en question, mais sans mentionner de forme spécifique; Wolff 5, auteur d’un 


1 Newport. On the respiration of Insects (PuiLosopn. Transacrions, part. I, pp. 548, 549 
et 550, 1836). 


ur 


? Ducts. Traité de physiologie comparée, ete. Op. cit., t. I, p. 550. 
3 Wozrr. Das Riechorgan der Biene (Nova acta DER Kst. Leor. CAROL. DEUTSCHEN AKADEMIE 
DER NaturrorscHeR, Bd. XXXVIII, n° 1. Dresde, 1875. 
Tome XLV. 18 


138 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


travail très remarquable sur lorgane de Polfaction de lAbeille, explique 
l'entrée et la sortie de lair de l'appareil trachéen par une disposition anato- 
mique dont je dirai quelques mots après avoir exposé complètement mes 
propres recherches; Girdwoyn ! se borne à indiquer l’aspect général des 
mouvements d'inspiration et d'expiration ; Dönhoff ?, à la suite d'essais faits 
dans de mauvaises conditions, a cru pouvoir avancer que le centre des 
mouvements respiratoires de l’Abeille a son siège dans les ganglions cépha- 
liques; Langendorff 5 a rectifié cette erreur et a constaté par l'expérience 
que les mouvements de respiration persistent chez les Guëêpes, les Bourdons 
et les Abeilles décapités; enfin, Rathke +, que je cite intentionnellement le 
dernier, a seul réuni un nombre de faits suffisant pour donner une descrip- 
tion à peu près complète et presque exacte du mécanisme respiratoire #. 

Les auteurs cités sont d'accord sur un fait : tous décrivent les mouve- 
ments de respiration des Hyménoptères porte-aiguillon comme consistant en 
raccoureissements et allongements alternatifs de l'abdomen; plusieurs d’entre 
eux comparent même ces déplacements à ceux des tubes d’une lunette. 

D'autres zoologues ont dú faire la même observation, mais n'ont rien 
publié, n’en comprenant pas l'importance et acceptant, sans examen com- 
paratif, l'opinion enracinée et constamment reproduite d’après laquelle lexpi- 
ration et l'inspiration de la plupart des Trachéates se font principalement 
par le raccourcissement et l'allongement de la portion abdominale du corps. 

Préparé par mes études sur différents groupes, je savais combien, au 
contraire, les changements un peu notables dans la longueur de l'abdomen 
sont rares pendant les mouvements respiratoires normaux des insectes; aussi, 
en abordant les Hyménoptères, ai-je voulu constater jusqu’à quel point 


1 GiRDWOYN. Anatomie el physiologie de l Abeille, p. 21. Paris, 1876. 

2 Dôxnorr. Beiträge zur Physiologie, $ UL Das Athmungscentrum der Honigbiene (Arcu. 
r. ANAT. UND Puys., Phys. Abthlg., p. 162. Leipzig, 1882). 

3 LANGENDORFF. Das Athmungscentrum der Insecten (Arcu. r. Anar. unb. Puys., Phys. 
Abthlg., p. 81. Leipzig, 1883). 

4 Raruke. Anatomisch physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., pp. 115 et suiv. 

5 Je ne puis rappeler ici, même incidemment, les travaux concernant le mode d’ocelu- 
sion des stigmates, les causes du bourdonnement, ete. Ces questions s'éloignent trop de 
mon sujet. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 139 


leur mode: de respiration était exceptionnel. Profitant des avantages d’une 
méthode qui permet de distinguer des détails que l'observation ordinaire ne 
peut révéler, je me suis assuré, comme le lecteur le verra par les pages 
suivantes, que si les mouvements les plus marqués sont bien effectivement 
des déplacements des somites dans le sens longitudinal, ces mouvements sont 
aussi accompagnés de modifications dans le diamètre vertical; les pièces 
lergales el sternales se rapprochant et S'écartant d'une façon rhythnique. 

Les Hÿyménoptères porte-aiguillon se trouvent ainsi rattachés, quant à 
leurs mouvements respiratoires, à d’autres insectes tels que les Cicindèles, 
les Coccinelles, les Éristales, les Blattes, certains Acridiens, des Lépidop- 
tères, etc., chez lesquels les changements dans le diamètre vertical sont 
prédominants, mais qui offrent, en même temps, de petites modifications 
dans la longueur de l'abdomen. 

J'ai étudié les mouvements respiratoires abdominaux chez deux Bombus, 
chez l’Apis mellifica , chez l'Anthophora retusa et chez la Vespa germanica. 
J'exposerai d’abord ce que j'ai vu chez la Guépe, dont l'abdomen à peu près 
nu se prête mieux aux observations que celui des Hyménoptères couverts 
de poils. 


$ LXIV. 
VESPA GERMANICA. 


(Étade des mouvements respiratoires par Ia méthode des projections.) 


Si l’on fait abstraction des éléments qui entrent dans la composition du 
pédicule, l'abdomen dé la Guëpe comprend six somites apparents; ceux-ci 
se recouvrent largement les uns les autres (voy. fig. 40) et sont reliés par 
des zones membraneuses annulaires étendues, minces et très flexibles 
cachées par les bords des somites successifs. Comme chez tous les Hymé- 


noptères porte-aiguillon, les arceaux tergaux chevauchent fortement sur les 
arceaux sternaux et là aussi, sur les flancs, existe une zone membraneuse 
repliée en dedans et d’une grande flexibilité. Il résulte de cette disposition 
anatomique deux genres de mouvements possibles, Pun dans le sens longi- 
tudinal, l’autre dans le sens vertical. 


140 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Dans le sens longitudinal, les somites peuvent rentrer profondément les 
uns dans les autres, plas profondément même que chez aucun autre groupe 
d'insectes. 

Dans le sens vertical, les arceaux dorsaux et sternaux sont susceptibles 
de se rapprocher ou de s'éloigner, de façon à diminuer ou à augmenter 
ainsi le diamètre vertical de l'abdomen. L'observation de ce qui se passe 
chez la Guëpe vivante montre, cependant, que les mouvements de cette 
nature n’ont qu’une faible amplitude. 

Quelques autres détails sont nécessaires pour comprendre convenable- 
ment de quelle manière ont lieu les déplacements pendant la respiration : 
l'arceau sternal du 1° somite apparent est atrophié et presque fixe; la 
mobilité du 2° somite par rapport au premier est faible; ces segments né 
peuvent jamais se déplacer que d’une petite quantité lun par rapport à 
l'autre. Les segments suivants offrent, au contraire, une mobilité remar- 
quable; enfin, le glissement horizontal des arceaux sternaux est plus facile 
et plus étendu que celui des arceaux dorsaux. 

Ces préliminaires exposés, voici quels ont été les expériences effectuées 
et les résultats obtenus : 

La Guépe, privée de ses pattes et de ses ailes, est supportée par deux 
épingles traversant les parties latérales du mésothorax. Dans ces conditions, 
l'insecte, naturellement excité, fait exécuter à son abdomen des mouvements 
continuels de flexion, surtout vers le bas, l'allongeant outre mesure et cher- 
chant à piquer. Ces déplacements auraient rendu le dessin des premières 
silhouettes impossible ; il était done important de lés faire cesser sans nuire 
aux mouvements respiratoires vrais. J'y suis heureusement parvenu d'une 
facon très simple en faisant reposer la face inférieure du 2° somite apparent 
sur une petite tige horizontale. l 

On remarquera que l'abdomen n'était pas fixé, mais seulement soutenu. 


Ar Expérience. — La Guêpe est parfaitement calmée et respire assez 
régulièrement; le grossissement est de 11 diamètres, ce qui permet de 
constater des déplacements fort petits. 

Aucun mouvement du côté du thorax ; les mouvements abdominaux ont 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 141 


peu d'amplitude; les somites 4 et 2 restent immobiles; les quatre derniers 


somites bougent seuls, l'abdomen se raccourcit d’une petite quantité, en 


expiration, et reprend sa longueur primitive en inspiration. Le mouvement 
expiratoire très faible de la part du 3° somite et plus accusé pour les 
somites 4, 5, 6 consiste dans la rentrée des arceaux sternaux les uns sous 
les autres et dans l’abaissement simultané des pièces tergales correspon- 
dantes. L'expiration est donc accompagnée d’une légère diminution du 
diamètre vertical. 


2e Expérience. — Abdomen soutenu, comme précédemment. On amène 
facilement une grande excitation chez l'Hyménoptère et par conséquent une 
augmentation dans la fréquence et l'amplitude de ses mouvements respira- 
toires, en plaçant sur le support une épingle verticale située à quelques 
millimètres en avant des ocelles. L’insecte inquiet palpe l’épingle à l’aide 
de ses antennes, s'efforce inutilement de l’atteindre pour la saisir entre ses 
mandibules, etc. 

Les mouvements respiratoires deviennent très difficiles à suivre; mais 
l'expérience précédente a fourni des bases qui servent de guide. Les mou- 
vements sont de deux ordres différents : 1° des mouvements d’allongement 
et de raccourcissement, cette fois notables; ce sont les vrais mouvements 
respiratoires ; 2 des mouvements d’incurvation vers le bas de l'extrémité de 
l'abdomen. Ces deux séries de mouvements alternent, en général; la Guêpe 
exécute un ou plusieurs mouvements respiratoires, puis courbe son abdomen; 
elle le remet ensuite horizontalement pour respirer encore, et ainsi de suite. 

Ceux qui conserveraient quelques doutes et croiraient que les mouvements 
d’ineurvation vers le bas jouent un rôle déterminé dans l'acte de la respira- 
tion, n’ont qu’à observer une Guépe vivante renfermée dans un bocal un peu 
spacieux. Ils verront, même lorsque l'animal excité s'élève en voletant le long 
des parois verticales de sa prison, l'abdomen rectiligne n’effectuant que des 
mouvements d’allongement et de raccourcissement alternatifs et rapides. 

„ Rathke ' a, du reste, relevé le fait pour les Vespides, en ajoutant qu'il en 


4 Anatomisch physiologische Untersuéhungen, ete. Op: cit., p. 116. 


142 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


était autrement chez les Apides dont l'abdomen normalement courbe s’incur- 
vait encore davantage en expiration. 

Revenons à la deuxième expérience : cette fois, tous les somites ahdomi- 
naux sont en action, tous rentrent les uns dans les autres en expiration, 
sortent et s'étendent en inspiration. Les déplacements en avant et en arrière 
sont faibles pour les somites À et 2, plus prononcés pour les autres et 
d'autant plus grands qu’il s’agit de somites plus voisins de l'extrémité 
abdominale. Le raccourcissement de l'abdomen, en expiration, atteint ‘/, de 
la longueur totale de cette partie du corps. Quant aux changements de 
diamètre, la rapidité et la complexité des mouvements ne m'ont pas permis 
de les discerner. 


3° Expérience (fig. 70 pl. V). — Abdomen non soutenu, complétement 

p 5 p J p 
libre. La Guêpe le recourbe fortement vers le bas et le maintient dans cette 
position. L’animal est très calme. 

Le métathorax ne bouge pas; comme dans la première expérience, les 
somites 4 et 2 sont immobiles. On constate très nettement que ce sont bien 
les faces sternales seules des somites 3, 4, 5, 6 qui rentrent les unes sous 
les autres en expiration; les arceaux tergaux ne rentrent pas ou rentrent 
peu; mais, ainsi que le montrait la première expérience, elles se portent 
légèrement vers la face inférieure de l'abdomen, diminuant ainsi quelque 
peu son diamètre vertical. Les changements de longueur ne dépassent 
pas ‘jı, de l'abdomen entier. 

Les conclusions qui me paraissent découler de ce qui précède sont les 
suivantes : 

1° Chez les Vespides, le métathorax ne participe pas aux mouvements respiratoires. 

2 Les mouvements respiratoires les plus caractéristiques consistent en raccourcissements 
et allongements alternatifs de l'abdomen. 

3° Ceux-ci ne sont pas les seuls : il existe, en même temps, dans le sens vertical, de 
légers mouvements de rapprochement et d’écartement des arceaux tergaux et sternaux. 

4 Dans la respiration calme, les premiers segments sont immobiles : les déplacements 
wont lieu que pour les quatre somites postérieurs. 

ÿ° Dans la respiration très active, tous les somites se meuvent; mais les déplacements 
des segments les uns par rapport aux autres sont d'autant plus considérables que ces seg- 
ments sont plus voisins de l'extrémité de l'abdomen. 

6° Les incurvations de l'abdomen ne sont point des mouvements respiratoires. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 145 


§ LXY. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE LA VESPA GERMANICA. 


Rathke a décrit, sans le représenter, le système musculaire abdominal 
des Hyménoptères porte- 
aiguillon. Bien que sa des- 
cription soit incomplète, 
l'existence de certains mus- 
cles lui ayant échappé, et 
bien que ses interprétations 
soient, par conséquent, en 
partie erronées,  l'habile 
observateur a parfaitement 
saisi le caractère général de 
la musculature des articulés 


Fig. 40 X 10. du groupe qui nous occupe. 
Muscles de la moitié droite de l'abdomen de la Vespa germanica, Rathke admet ici non 
Vers la droite de la figure, le 5e somite a été intentionnellement détaché a 
en partie du 4, Les muscles sont rompus en cet endroit. seulement des muscles expl- 
A Muscles longitudinaux dorsaux. re 
a Muscles longitudinaux sternaux. rateurs, mals, de plus, des 


D et d Muscles obliques provenant d'une différenciation des museles lon- 


gitudinaux ordinaires des autres insectes. muscles Inspirateurs, venant 


i Ta Muscles inspirateurs éminent l'allongement l'abdomen, ajouter leur action à celle 
3 Muscle inspirateur écartant l'arceau sternal de l'arceau tergal et 


ei a ré es. de Vélasticité des téguments 
et du système viscéral. 

Mes dissections personnelles mont donné les résultats suivants, quant 

à la disposition des muscles et à la configuration des pièces squelettiques 
sur lesquelles ils s'insèrent : ainsi que le montre la figure 40, chacun des 
somites pénètre profondément dans celui qui le précède et s’y termine par 
un bord libre antérieur donnant attache à des muscles. De plus, chacun 
des somites complets comprend deux moitiés mobiles l’une par rapport 
à l’autre: un arceau tergal dont les angles inférieurs et antérieurs sont 


A4 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


transformés en apodèmes * saillants servant à des insertions musculaires ; 
un arceau sternal, dont les bords supérieurs glissent à la face interne de 
l’arceau tergal (voyez Bombus, fig. 5, 42, 43) et offrent aussi des angles 
antérieurs développés en larges apodèmes sur lesquels se fixent des muscles 
importants. 

L'examen de la musculature montre qu’il existe ici des muscles homo- 
logues, des muscles longitudinaux ordinaires des autres insectes et, en outre, 
des muscles spéciaux aux Hyménoptères. 

Rathke a clairement indiqué les attaches des premiers, qu'il distingue en 
dorsaux, ventraux (sternaux) et latéraux. 

Les muscles dorsaux À, situés de chaque côté de la ligne médiane dor- 
sale, naissent chacun du bord libre antérieur d’un somite, pour se terminer 
à l’intérieur de la région antérieure du somite immédiatement précédent. 

Les muscles sternaux a offrent une disposition semblable de chaque côté 
de la ligne médiane sternale. 

Quant aux muscles latéraux , que je ne puis m'empêcher de considérer 
comme résultant d’une différenciation un peu plus accusée des muscles longi- 
tudinaux ordinaires des Coléoptères et des Orthoptères, par exemple, surtout 
en présence de la disposition qui s'observe chez les Staphyliniens (fig. 26) et 
chez les Forficulés (fig. 45), ils offrent des directions très obliques. Il y en 
a deux de chaque côté; le supérieur D nait de l’apodème antérieur de 
l’arceau tergal pour se porter vers le haut à la région antérieure de l’arceau 
tergal immédiatement précédent; linférieur d qui présente une direction 
oblique descendante naît de l’apodème antérieur de larceau sternal. La 
résultante des actions combinées de ces deux muscles doit être une traction 
horizontale s'ajoutant à l'effet des muscles dorsaux et sternaux déjà décrits 
(fig. 40). 

Tous les muscles dont nous venons de parler, dorsaux, sternaux et laté- 
raux (A, a, D, d), ne pouvant produire d'autre effet que la pénétration des 
anneaux les uns dans les autres, et, par suite, une diminution de la longueur 
de l'abdomen, sont des muscles expirateurs. 


1' Voyez la note 2 de la page 26. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 445 


Ceux dont il me reste à entretenir le lecteur sont, au contraire, énspirateurs. 
Rathke en a signalé deux, mais je vais montrer qu'il y en a en réalité trois. 

Les deux muscles inspirateurs décrits par Rathke s’insérent l'un 7 à 
l’apodème antérieur de l’arceau tergal, l’autre 2 à l’apodème antérieur de 
l’arceau sternal; tous deux ont une direction à peu près verticale et vont, en 
s'inclinant légèrement en arrière, se terminer sur la région postérieure des 
arceaux lergaux et sternaux immédiatement précédents !. On voit que la 
résultante de leurs actions combinées est évidemment dirigée horizontale- 
ment en arrière et doit avoir pour effet de faire reculer chaque somite par 
rapport à celui qui le précède; seulement, ces muscles étant presque dans 
le prolongement l’un de l’autre, ne faisant entre eux qu'un petit angle, leur 
effet doit être faible (fig. 40). 

On commettrait une erreur grave en regardant les muscles 4 et 2 
comme destinés à déterminer l’écartement des arceaux tergaux et sternaux 
dans le sens vertical, puisque chacun d'eux, considéré isolément, s'insère 
par ses deux extrémités soit exclusivement sur des pièces tergales, soit 
exclusivement sur des pièces sternales. 

Ce rôle tout spécial est dévolu à un troisième muscle 3 inconnu à Rathke 
et dont j'ai constaté l'existence chez la Guépe et les Bourdons. C'est encore 
un muscle presque vertical, mais reliant, cette fois, les arceaux supérieur et 
inférieur d’un même segment abdominal. Il naît de l’apodème antérieur de 
l’arceau sternal et, se dirigeant un peu obliquement en arrière, va se ter- 
miner sur le bord inférieur de l’arceau tergal correspondant. La contraction 
de ce muscle, qui est, du reste, assez court, doit évidemment avoir pour 
résultats d’écarter un peu les deux moitiés de chacun des anneaux abdomi- 
naux, d'augmenter, par conséquent, le diamètre vertical de l'abdomen. Or, 
J'ai précisément signalé, dans les mouvements respiratoires de la Guëpe, le 
fait impossible à discerner par la vue seule, d’une diminution légère du dia- 
mêtre abdominal en expiration, suivi naturellement d’une augmentation en 
inspiration. 


1 Ne pas les confondre avec les expirateurs verticaux des Coléoptères et d’autres insectes. 
Les muscles que nous décrivons ici sont chacun entièrement tergal ou entièrement sternal ; 
ils n’unissent pas un élément squelettique supérieur à un élément inférieur. 


Tome XLV. 19 


146 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


L'existence du muscle que je viens de décrire prouve que ce genre de 
mouvements existe bien réellement chez les Hyménoptères porte-aiguillon 
et que le retour des anneaux abdominaux à leur diamètre primitif en 
inspiration est, chez ces insectes, une phase active. 


$ LXVI. 
BOMBUS MUSCORUM ET BOMBUS TERRESTRIS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Les Bombus, entièrement couverts de longs poils, se prêtent assez mal à 
l’observation des mouvements respiratoires. Cependant, leur taille, la grande 
facilité avec laquelle on se les procure, la possibilité de disséquer leur sys- 
tème musculaire constituaient autant de motifs pour me faire tenter quelques 
expériences sur celte forme d’'Hyménoptères. 


Bombus muscorum $. — L'animal, auquel on a enlevé les ailes et les 
pattes, est fixé par deux épingles traversant les parties latérales du méso- 
thorax. L’abdomen est absolument libre. Le grossissement employé est de 
44 diamètres (fig. 74 pl. VI). 

Comme les autres Hyménoptères porte-aiguillon, le Bourdon des mousses 
excité fait exécuter à son abdomen de violents mouvements d’oscillation qui 
n’ont rien de commun avec les mouvements respiratoires. En profitant des 
instants où l'insecte, momentanément calmé, cesse de courber et de 
décourber la région abdominale du corps, on parvient, sans trop de peine, 
à dessiner les phases d'inspiration et d'expiration. Voici ce qui résulte de 
ces dessins : 


1° Le métathorax ne bouge pas; 


9 L’abdomen se raccourcit en expiration et reprend ses dimensions primitives en inspi- 
ration. Le raccourcissement expiratoire est environ 1/47 de la longueur de cette partie du 
corps; 

3° Les changements dans la longueur de l'abdomen sont accompagnés de modifications 
dans le diamètre. Le diamètre vertical de l'abdomen diminue en expiration d’une façon 
évidente, quoique la valeur de cette diminution soit difficile à mesurer ; les mesures prises 
sur les dessins indiquent 1/39 environ ; 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 147 


4 Pendant la respiration normale, les somites 4 et 2 semblent immobiles : 
? 
5° Les somites 3, 4, 5, 6 se déplacent rapidement par rapport aux deux premiers ; 


6° La méthode des projections ne permet pas de discerner si les quatre somites postérieurs 
se déplacent en bloc relativement au somite 2, ou s'ils rentrent individuellement les uns 


` 


dans les autres. Des observations directes, à la loupe, me font supposer que la dernière 
hypothèse est exacte. 


Il suffit de comparer ces résultats avec ceux fournis par la Vespa germa- 
nica pour constater que les mouvements respiratoires des Bourdons et des 
Guêpes s’exécutent presque exactement de la même manière. On verra, 
du reste, plus loin, que la disposition anatomique est aussi à peu près 
identique. 

J'ajouterai qu'il faut réduire l'importance d’une différence signalée par 
Rathke. Parlant des mouvements abdominaux, cet auteur dit que si chez 
les Vespides, dont l'abdomen est à peu près rectiligne, les mouvements res- 
piratoires ont lieu suivant l'axe du corps, il n’en est plus de même chez les 
Hyménoptères Apides, tels que les Bourdons et les Abeilles, dont l’abdomen 
est plus ou moins courbé vers le bas. Chez ces derniers insectes, l’incurva- 
tion de l'abdomen augmenterait dans chaque phase inspiratoire. 

ll y a effectivement une augmentation dans la courbure de l'abdomen 
en état d'extension ou d'inspiration, mais elle est très faible et ne parait être 
qu'une conséquence de la forme même des Hyménoptères de ce groupe. 


Bombus terrestris ọ. — Les mouvements sont calqués sur ceux du Bour- 
don précédent et leur description n’apprendrait rien de nouveau; mais j'ai 
fait sur cet insecte une observation que je crois intéressante parce qu’elle 
montre bien que chez les Hyménoptères, comme chez les autres trachéates, 
les mouvements respiratoires sont des mouvements réflexes ayant lieu sans 
l'intervention des centres céphaliques ou thoraciques : on sépare complète- 
ment l'abdomen du thorax et on Pintroduit dans un tube de verre contenant 
un peu de papier à filtrer mouillé, afin d'éviter l’action nuisible de l'évapo- 
ration. Cing heures et demie après l'installation de l'expérience, les trois 
derniers somites abdominaux exécutent encore des mouvements respira- 


toires rapides, à raison de 79 par minute. 


148 RECHERCHES EXPÉRIMENT ALES 


$ LXVII. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU BOMBUS TERRESTRIS. 


L'étude du système musculaire abdominal des Bombus présente une 
importance réelle parce qu'elle comble une lacune dans la série des nom- 
breuses recherches anatomiques faites sur les Apides. Personne, à ma 
connaissance, n’a figuré ou décrit les muscles qui meuvent les anneaux 


abdominaux des Abeilles et des Bourdons. 


Si Pon met en regard les dessins des muscles de l'abdomen de la 


pp > 
LL 


$ 


Fig. M X T. 


Muscles de la moitié droite de l'abdomen du Bombus terrestris Q. 


Vers la droite de la figure, un somite a été intentionnellement détaché en partie. Les muscles sont rompus en cet 


endroit. 


A Muscles longitudinaux dorsaux. 
a Muscles longitudinaux sternaux. 


D et d Muscles obliques provenant d'une différenciation des muscles longitudinaux ordinaires des autres insectes. 


4 et 2 Muscles inspirateurs déterminant l'allongement de l'abdomen, 


3 Muscle inspirateur écartant l'arceau sternal de l'arceau tergal et amenant l'augmentation du diamètre ver- 


tical de l'abdomen. 


Sous la figure, on a représenté l'action probable des muscles D, d ct 4, 2, 


Guépe (fig. 40) et du Bourdon (fig. 44 et 42), on voit que, sauf quelques 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 149 


différences dans les proportions, le plan est absolument le même de part et 
d'autre. 

Comme chez la Guépe, les muscles expirateurs sont constitués par des 
faisceaux dorsaux À, sternaux 4 et latéraux D et d, ces derniers à directions 
obliques. 


Fig. 42 X 30. 


Portion d'une coupe transversale de l'abdomen du Bombus terrestris Q : côté droit. 
On y voit l'arceau sternal du 4e somite engagé dans le 3e (comparer avec la fig. à). 


D L'un des muscles obliques. 
2 Muscle inspirateur inférieur faisant reculer le 4° somite. 
3 Muscle inspirateur abaissant l’arceau sternal par rapport à l'arceau tergal correspondant, 


La surface pointillée est membraneuse et flexible. 


Les muscles inspirateurs sont pareillement au nombre de trois de chaque 
côté, par somite, savoir : deux muscles, À et 2, à direction presque verticale, 
reliant les apodèmes antérieurs de l’arceau tergal et de l’arceau sternal au 
bord postérieur des arceaux qui précèdent immédiatement et un troisième, 3, 
plus court, naissant de l’apodème antérieur de l’arceau sternal et qui, des- 
cendant verticalement, va s'insérer sur le bord inférieur de l’arceau tergal 
appartenant au même segment. 

Comme chez la Guépe, les deux muscles 4 et 2, faisant entre eux un angle 
ouvert en arrière, déterminent le recul ou la sortie des anneaux successifs, 
tandis que le muscle 3 amène l’écartement des arceaux tergaux et sternaux 


et, par suite, un accroissement de diamètre. 


150 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ LXVIII. 
APIS MELLIFICA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'Abeille présente naturellement des mouvements respiratoires d’une 
forme à peu près identique à celle que je viens de décrire chez les Bour- 
dons. Il existe chez cet insecte, comme chez les autres Hyménoptères porte- 
aiguillon, des modifications dans la capacité de l'abdomen s’opérant à la fois 
suivant laxe longitudinal et suivant le diamètre vertical. 

En employant lAbeille récemment capturée et munie de ses ailes, il 
serait impossible de suivre sur une silhouette les mouvements extrêmement 
rapides des somites abdominaux ; mais on peut, assez facilement, marquer 
les positions extrêmes du bout de l'abdomen et déterminer l'allongement 
maximum de cette partie du corps. On trouve ainsi que, dans les grands 
mouvements respiratoires de l'animal excité, l'allongement inspiratoire 
atteint ‘|, de la longueur totale de la partie abdominale. On constate, tout 
aussi aisément, que les segments thoraciques postérieurs et principalement 
le métathorax ne participent en rien aux mouvements de respiration. 

Pour étudier les mouvements de plus près, il convient de les ralentir sans 
en altérer la nature, ce que Ton obtient en enfermant d’abord l'insecte, avec 
quelques tiges de graminées ou d’autres végétaux, dans un petit bocal fermé 
par une toile métallique. L’Abeille, qui s'agite beaucoup pour s'échapper, se 
fatigue vite et, au bout de 30 minutes environ, ses mouvements respi- 
ratoires sont assez ralentis pour qu'on puisse parvenir à en dessiner les 
diverses phases. 


Dans l'appareil à projection, l'insecte, privé de ses ailes et de ses pattes, 
était fixé par deux épingles traversant les parties latérales du mésothorax. 
Des expériences comparatives ont été faites sur des individus à abdomen 
libre et sur d’autres dont l'abdomen soutenu reposait simplement par la face 
inférieure du 2° somite sur une épingle courbée à angle droit. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 151 
Les résultats peuvent être résumés comme suit : 


1° Le métathorax ne bouge pas; 

2° L’abdomen se raccourcit en expiration et reprend ses dimensions primitives en inspi- 
ration ; 

3° Ce genre de mouvements n’a pas lieu uniformément dans toute la longueur de la 
partie abdominale du corps. Ainsi, parmi les six somites apparents, les segments 1, 2a 
woffrent que des déplacements excessivement minimes donnant, en silhouette, l'impression 
dun frémissement léger. Le somite 4 rentre et sort, mais encore faiblement, par rapport 
à 3; enfin 5et 6 se déplacent d’une façon active. Le même fait que j'ai constaté chez d’autres 
Hyménoptères se retrouve donc chez lAbeille, à savoir que, dans la respiration calme, les 
mouvements respiratoires n’ont guère lieu que dans les quatre somites postérieurs ; 

4 Pendant les mouvements dans le sens longitudinal ont lieu des changements dans 
le diamètre vertical. En expiration, lorsque l'abdomen est soutenu , la face tergale s’abaisse 
pour les somites postérieurs, surtout pour le 4°; lorsque l'abdomen n’est pas soutenu, ce 
sont les faces sternales qui paraissent s'élever, Au reste, en examinant directement l’Abeille 
à la loupe, on voit très bien les arceaux sternaux rentrer en expiration et sortir en inspira- 
tion de dessous les bords latéraux réfléchis des arceaux tergaux ; 

5° Enfin, comme chez les Bourdons, l'abdomen, lorsqu'il est libre, augmente de cour- 
bure dans la phase inspiratoire. 


Ce dernier fait ne s'observe cependant que chez l'Hyménoptère calme et 
posé. Jai parfaitement constaté chez des Abeilles et des Bourdons, butinant 
sur des fleurs et volant de temps à autre, ou chez les mêmes insectes volant 
le long des vitres d’une fenêtre, que, pendant le vol proprement dit, l'abdomen 
est rectiligne et foujours à létat d'inspiration complète !. 


! J'ai montré, page 88, que les Coléoptères, le Hanneton, par exemple, sont en inspi- 
ration durant le vol. 


Mon Mémoire, dont la publication par l'Académie avait été décidée dans la séance de la 
Classe des sciences du T avril 1883, était à l'impression, toutes les figures étaient gravées et 
le bon à tirer de la onzième feuille était donné, lorsque parut dans les Comptes rendus de 
l'Académie des sciences de Paris (séance du 24 mars 1884) un travail de M. G. Carlet inti- 
tulé : Sur les muscles de l'abdomen de Abeille. La description de l’auteur, qui n’est mal- 
heureusement pas accompagnée de figures, ne concorde qu’incomplètement avec ce que 
J'ai observé chez la Guêpe et chez le Bourdon. M. Carlet n’admet que deux catégories de 
muscles inspirateurs, les transverses et les interventraux, répondant, je pense, aux mus- 
cles 2 et 3 de mes figures 40 et 41. 

Quoi qu'il en soit, M. Carlet déduit de ses dissections la conclusion theorique suivante, 
que mes expériences confirment parfaitement : « On voit aussi que le mécanisme de la 
» respiration est plus compliqué qu'on ne le croyait, car, en même temps qu’il y a raccour- 
» eissement ou allongement de l'abdomen, il y a rapprochement ou écartement des faces 
» dorsales et ventrales de cette région; autrement dit, Pabdomen se dilate ou se resserre 
» suivant ses trois diamètres, pour l'entrée ou la sortie de lair par les stigmates. » 


152 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ LXIX. 
ANTHOPHORA RETUSA. 


(Étude des mouvements respiratoires par In méthode iles projections ) 


Après les Bourdons et l’Abcille, l'Anthophore ne pouvait rien nous 
apprendre de nouveau. J'ai tenu, cependant, à étudier la forme des mouve- 
ments respiratoires d’un insecte dont Newport avait fait, à un point de vue 
un peu différent, le sujet d’un grand nombre d'observations curieuses. 


Voici ce que j'ai pu déduire de mes expériences : 


1o Le métathorax reste immobile ; 

90 L’abdomen se raccourcit en expiration et revient à sa longueur primitive en inspira- 
tion. Comme chez les Hyménoptères précédents, ces mouvements n’ont guère lieu, pendant 
la respiration calme, que pour les trois derniers somites apparents. La différence, à ce sujet, 
entre les somites 1 et 2, d’une part, et le groupe 3, 4, 5, autre part, est telle encore une 
fois que le groupe 3, 4, 5 semble rentrer et sortir alternativement, en bloc, de l'anneau 2. 
En outre, sous l'influence de la traction longitudinale des muscles expirateurs, les deux 
premiers somites se déplacent légèrement en sens inverse du groupe postérieur ; 

3° Pendant que s'effectuent les mouvements dans le sens longitudinal, le diamètre ver- 
tical de l'abdomen est modifié d’une façon rhythmique. Ce sont surtout les lames sternales 
qui, en expiration, paraissent s'élever en s’enfonçant sous les rebords latéraux des arceaux 
tergaux. 


$ LXX. 


HypoTHÈsE DE WoLrr. 


Wolff, dans son beau mémoire intitulé Das Riechorgan der Biene, a 
décrit, chez l’Abeille, une disposition anatomique qui se retrouve avec plus 
ou moins de développement chez les insectes des autres groupes. Comme 
l’auteur attribue aux organes qu'il a observés un rôle assez important dans 
le mécanisme respiratoire, je vais essayer de résumer brièvement sa descrip- 
tion et sa théorie. 

Il existe dans l'abdomen des Apides, entre les téguments et la masse 


viscérale, deux diaphragmes musculaires horizontaux, l'un supérieur, l’autre 


Mob ds 


1 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 153 


inférieur. Le diaphragme supérieur, en forme de toit (fig. 43, ds), s'éten- 
dant de la face inférieure du vaisseau dorsal vers les parties latérales des 
arceaux tergaux, est connu depuis longtemps sous le nom fautif d'ailes 
du cœur. 

Le diaphragme inférieur (fig. 43, di) a été décrit et représenté par 
Leydig t, Cattie ? et Nusbaum * chez les Lépidoptères; Wolff Pa signalé 
chez les Diptères, Nusbaum déjà cité y fait allusion chez les Libellules, les 
Taupes-grillons et les Tipules, et Graber { la figuré chez le Pachytylus 
migratorius. Il répète, dans la moitié inférieure de l'abdomen, le diaphragme 
supérieur; sa partie médiane règne longitudinalement au-dessus de la chaine 
ganglionnaire ventrale et ses nappes latérales vont s'insérer à droite et à 
gauche sur les arceaux sternaux. 

Chez les Apides, un assez grand nombre de troncs trachéens sont compris 
entre ces diaphragmes et les parois tégumentaires ; les uns, situés au-dessus 
du diaphragme supérieur (fig. 43, tr), remontent jusqu'au vaisseau dorsal; 
les autres, rampant sous le diaphragme inférieur, descendent jusqu’à la chaine 
nerveuse. 

Ces troncs sus- et sous-diaphragmatiques, que Wolff nomme Saugrühren, 
ce que je traduirai par troncs aspirateurs, adhèrent, d’une part, aux arceaux 
tergaux ou sternaux avec lesquels ils sont en rapport et, d'autre part, à l’un 
des deux diaphragmes; disposition qui peut faire supposer que les contrac- 


1 Levnic. Das Sog. Bauchgefäss des Schmetterlinge (Arcnives de Müller, p. 565; 18692). 
— Von Bau des Thierischen Körpers , erster Band, erste Hälfte, pp. 211-943. 
Tübingen, 1864. 
— Tafeln zur Vergleichenden Anatomie, pl. V, fig. 1, et pl. VI, fig. 1. Tübingen, 1864. 
2 Carrie. Beiträge zur Kenntnis der Chorda supra-spinalis der Lepidoptera und des cen- 
tralen, perypherischen und sympathischen Nervensystems der Raupen (Zerrscur. r. Wiss. 
Zoorocie , XXXV Band, p. 304. 1881). 
Cattie et Nusbaum citent D. Burcer. Über das Sogen. Bauchgefäss der Lepidoptera, ete. 
(Nienert. ArcHiv. F. ZooLocie, II Band, 1876-77), travail que je wai pas eu à ma disposition. 
3 J. Nussaun. Vorläufige Mittheilung über die Chorda der Arthropoden (Zoorociscner 
ANZEIGER, VI Jahrg., n° 140, p. 291, 1883). 
— Bau, Entwicklung und morphologischen Bedeutung der Leydig'schen Chorda 
der Lepidopteren (Imn., VII Jahrg., n° 157, p. 17, 1884). 
4 GRABER. Die Insekten, op. cit., fig. 68, e, n, p. 109. Voir aussi : Ueber den pulsirenden 
Bauchsinus der Insekten (M. Scnurze’s Arcniv. r. mic. Axar., XII Band, 1876). 


Tome XLV. 20 


154 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


tions des diaphragmes musculaires exercent une certaine action sur les parois 
des troncs trachéens en question. 

Tous les troncs aspirateurs naissent à la hauteur des flancs de deux longs 
tubes longitudinaux qui reçoivent l'air des stigmates abdominaux et qui 
forment, comme on sait !, en se renflant, les deux énormes réservoirs occu- 
pant la base de l’abdomen des Hyménoptères (fig. 43, ra). 

Wolff accorde aux diaphragmes une action presque prépondérante dans 
les mouvements d'inspiration et d'expiration. Par des vivisections, il a vu 
directement les contractions des diaphragmes de PAbeille se propager sous 
forme d'ondes d'avant en arrière et d'arrière en avant; il aurait constaté, de 
plus, que les mouvements des segments abdominaux et les contractions des 
diaphragmes sont simultanés. 

Pour Wolff, la contraction des deux diaphragmes de l’Abeille (le supérieur 
s’abaissant et l’inférieur s'élevant) aurait pour effet de dilater les troncs 
trachéens aspirateurs situés, comme je l'ai dit, entre les diaphragmes et les 
téguments; une certaine quantité de l'air renfermé dans les grands réservoirs 
abdominaux passerait alors dans ces troncs aspirateurs et, comme consé- 
quence, une nouvelle dose d'air extérieur serait appelée dans les grands 
réservoirs par les orifices stigmatiques. La contraction des diaphragmes 
déterminerait donc l'inspiration et leur relâchement répondrait à l'expiration. 

Wolff, je le répète, semble attacher une grande importance au rôle de ces 
minces cloisons musculaires, car il a soin de nous dire que, de même que 
chez l’homme, l'inspiration ne se fait pas seulement par le jeu du diaphragme, 
mais aussi par le mouvement des côtes, chez les Hyménoptères, les dépla- 
cements des anneaux abdominaux dans le sens longitudinal s'ajoutent aux 
effets des diaphragmes supérieur et inférieur. 

Malgré la valeur incontestable de la partie anatomique du travail, il m'est 
impossible d'accepter la théorie de l’auteur et, si j’ai bien compris V. Graber, 
celui-ci fait aussi des objections sérieuses qu’il importe de rappeler. 


4 Wozrr. Das Riechorgan, ete., op. cit., pl. L, fig. 5. Voyez aussi Léon Durour. Recherches 
anatomiques et physiologiques sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névropières (Mém. 
ACAD. SC. DE Paris, SAVANTS ÉTRANGERS, t. VIT, p. 375 (Bombus terrestris), 1841); puis la 
plupart des monographies de PAbeille domestique. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 45 


CA 
oz 


Graber !, après avoir admis que la contraction des diaphragmes doit com- 
primer la masse viscérale située entre eux, dit, avec raison, qu’il ne peut se 
présenter que les deux cas suivants : ou bien la compression intérieure pro- 
duite par les diaphragmes a lieu en même temps que la compression 
extérieure déterminée par la position que prennent les pièces squelettiques 
en expiration, sous l'influence des muscles expirateurs proprement dits ; ou 
bien, les compressions intérieure et extérieure ont lieu en des moments 
différents. 

Dans le premier cas, celui des compressions simultanées et de même sens, 
l’action produite par le rapprochement des pièces tégumentaires est évidem- 
ment de beaucoup la plus énergique; l'effet utile des diaphragmes doit être 
nul et le résultat définitif ne peut consister qu'en une expulsion d'air. 

Dans le second cas, celui où la contraction des diaphragmes aurait 
lieu pendant la dilatation abdominale, ce qui parait être le fait admis par 
Wolff, les deux actions ne peuvent s'ajouter pour déterminer toutes deux 
l'inspiration comme Wolff le suppose, mais sont, suivant Graber, certaine- 
ment antagonistes. Pour ce dernier, les contractions des diaphragmes abdo- 
minaux ne produiraient, en aucune façon, les mouvements d'inspiration et 
d'expiration, et si elles jouent quelque rôle dans le mécanisme respiratoire, 
ce ne peut être qu’en régularisant la circulation de l’air dans le réseau tra- 
chéen périphérique. 

Graber a, du reste, montré, dans un travail spécial, que la véritable fonc- 
tion du diaphragme supérieur des insectes est de chasser le sang des lacunes 
interorganiques vers le vaisseau dorsal *. 

J'ajouterai, enfin, comme observation personnelle, que la différence entre 
les diaphragmes délicats composés d’une seule couche de fibres musculaires 
striées et les robustes faisceaux musculaires respiratoires qui meuvent les 
somites abdominaux est telle qu'il serait bien difficile de ne pas voir, dans 
ces derniers, les seuls agents réellement actifs dans les mouvements respira- 
toires proprement dits. 


1 Die Insekten, op. cit., p. 112. 
2 Grager. Vorlaüfiger Bericht über den Propulsatorischen Apparat der Insekten (SITZB. DER 
K. Akap. Wien, Band LXV, {te Abth. 1872). 


= 


156 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


La figure inédite ci-jointe (fig. 43) représentant la coupe transversale de 
l'abdomen du Bombus muscorum à l'endroit où le 4° somite abdominal 
s'engage dans le 3°, figure dessinée d’après nature avec tout le soin que j'ai 
pu y mettre, est destinée à faire saisir ce qui précède. 


Ge ee 
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i ín) fhn, Ihn f sg 3 


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CA 


Fig, 43 X 40. — Coupe transversale de l'abdomen du Bombus muscorum , là où le 4 somite est engagé dans le 3e, 


Les muscles 4, D, 2 et 3 comme dans les figures précédentes. 
vd Vaisseau dorsal. 

cn Chaîne nerveuse. 

ra,ra Grands réservoirs abdominaux ouverts par la coupe. 


! tr Coupe d'un tronc trachéen sus-diaphragmatique. 
mi ds Diaphragme supérieur, 
di Diaphragme inférieur. 


Si le diaphragme supérieur paraît ici beaucoup plus épais que le dia- 
phragme inférieur, cela tient simplement, ainsi qu’on peut aisément s'en 
assurer, à ce que la toile conjonctivo-musculaire du diaphragme supérieur 
est doublée d'une couche de ces cellules caractéristiques que Graber a fait 
connaitre sous le nom de Pericardialzellen 1. En réalité, mis côte à côte sur 
la même plaque du microscope, les deux diaphragmes sont à fort peu près 
aussi minces et, par suite, aussi peu puissants l’un que l’autre. 


4 Vorlaüfiger Bericht über den propulsatorischen Apparat, etc., p. 8, pl. I, fig. 1 c et À. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 157 


$ LXXI. 
Appendice aux Hyménoptères porte-aiguillon. 


NÉVROPTÈRES PHRYGANIENS. 


La forme des mouvements respiratoires des Phryganes et la disposition 
des muscles abdominaux de ces insectes ne me permettent pas de les éloigner 
des Hyménoptères porte-aiguillon. 

Dans ma Communication préliminaire, j'ai cité les Phryganes comme un 
exemple frappant de ce fait qu'il n'existe aucune relation étroite entre les 
mouvements respiratoires d’un insecte et la place qu'il occupe dans les clas- 
sifications zoologiques. Mais les Phryganes ne sont pas le seul exemple à 
citer; on a déjà vu que j'ai été obligé de rapprocher les Blattiens des 
Hémiptères et des Coléoptères, les Chrysidiens des Diptères, et le lecteur 
trouvera plus loin un Locustien séparé des Orthoptères sauteurs et placé à 
côté des Lépidoptères et des Névroptères propres. 


PHRYGANEA STRIATA. 


(Étude des mouvements respiratoires par Ia méthode des projections.) 


Si l’on fait abstraction de l'armure génitale qui ne doit pas nous occuper 
ici, la structure extérieure de l'abdomen des Phryganes est sensiblement 
celle qui existe chez les Sialis. Les arceaux tergaux et sternaux qui ne se 
recouvrent pas sont unis, sur les parties latérales du corps, par une large 


bande membraneuse à découvert plissée longitudinalement. 

Cette similitude d'organisation ferait supposer la similitude dans la forme 
des mouvements respiratoires et, cependant, les Phryganes s’écartent, à cet 
égard, des Sialis pour se rapprocher des Hyménoptères. Elles offrent, comme 


158 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


on va le voir, une combinaison de deux mouvements, l’un dans le sens ver- 
tical, l’autre dans le sens longitudinal. 

Je me suis adressé de préférence aux femelles, dont l'abdomen est plus 
développé que celui des mâles. 

L’insecte, privé de ses pattes, était suspendu par les ailes. Afin d’empé- 
cher les incurvations exagérées de l’abdomen vers le bas, celui-ci reposait 
librement, par sa région moyenne, sur une épingle coudée à angle droit 
(fig. 72, pl. VI). 

Les mouvements sont excessivement difficiles à suivre; car il existe ici 
trois espèces de déplacements différents : 

1° Par périodes, des oscillations de l'abdomen étrangères à lacte de la 
respiration ; 

2° Des mouvements respiratoires faibles, consistant, en expiration, dans 
un léger abaissement des arceaux dorsaux, surtout à la hauteur des somites 
4 et 5, accompagné d’un petit allongement de l'abdomen; 

3° De temps en temps, par exemple, après deux ou trois mouvements 
respiratoires faibles, des mouvements expiratoires puissants, se composant 
d'un abaissement notable des arceaux tergaux (encore une fois plus marqué 
dans les somites 4 et 5), d’une légère projection vers le bas des arceaux 
sternaux 2 et 3 et d’un raccourcissement brusque de l'abdomen déterminé 
par la rentrée les uns dans les autres des trois anneaux terminaux. Le rac- 
courcissement est environ de ‘/; de la longueur abdominale totale. 

A la loupe, on voit, pendant l'expiration, la membrane molle qui unit les 
arceaux tergaux et sternaux se plisser longitudinalement. Les plis s’effacent 
en inspiration. 

Dans chaque phase, les déplacements des diverses parties paraissent 
simultanés. Il n’y pas d'onde. 

En résumé, lorsque les Phryganes respirent d’une façon active, elles 
présentent des mouvements très voisins de ceux des Hyménoptères porte- 
aiguillon dont l'abdomen se raccoureit en expiration, tandis que les arceaux 
tergaux et sternaux se rapprochent. Ce fait intéressant m’a naturellement 
conduit à rechercher si le système musculaire était quelque peu analogue à 
celui des Hyménoptères. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 159 


MUSCLES RESPIRATOIRES DES PHRYGANES. 


Le système musculaire abdominal des Phryganes ressemble à celui des 
Guëpes et des Bourdons et mérite un examen spécial. 

La plupart des muscles qui déplacent les somites ne sont bien développés 
que dans la région moyenne de l’abdomen. Plusieurs d’entre eux s’atténuent 
ou disparaissent dans les anneaux de la base et dans ceux de l'extrémité. 
Je limiterai la description à ce qui existe dans les somites 4, 5 et 6 (fig. 44). 


Fig. 44 X 6. — Muscles de la moitié droite de l'abdomen de la Phryganea striata 9, 
A4, B Muscles longitudinaux dorsaux. 
a, b Muscles longitudinaux sternaux. 
D, e Muscles obliques. 
1, 2, Muscles inspirateurs homologues de ceux des Hyménoptères. 


Les bords antérieurs des somites se développent, comme chez les Hymé- 
noptères porte-aiguillon, en apodèmes saillants donnant insertion à des 
muscles importants. Ces apodèmes sont portés par langle inférieur pour les 
arceaux lergaux, par l’angle supérieur pour les arceaux sternaux. 


Muscles expirateurs. — De même que chez les Hyménoptères, les muscles 
longitudinaux dorsaux et sternaux (prétracteurs de Straus-Durckheim) se 
sont décomposés en faisceaux très distincts, offrant, les uns la direction 
longitudinale vraie (A, B, a, b) et les autres une direction très oblique (D, e). 


160 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Dans l’arceau tergal, le muscle oblique D qui nait de l’apodème inférieur 
et antérieur pour remonter vers langle antérieur et supérieur du somite 
précédent, est évidemment identique chez les Phryganes et chez les Hymé- 
noptères porte-aiguillon (voy. fig. 40 et 41, D). 

Dans l’arceau sternal, au contraire, le muscle oblique e reliant le bord 
antérieur et inférieur d’un arceau à l’apodème antérieur et supérieur de 
l’arceau précédent, offre une direction inverse de celle que présente le muscle 
analogue des Guëpes et des Bourdons. Il n'existe pas de muscles transversaux 
croisant la zone molle des flancs. Cependant l’abaissement des pièces tergales 
pourrait assez bien s'expliquer, me semble-t-il, par Paction des puissants 
muscles obliques D, qui sont précisément situés dans les somites où nous 
avons vu que ce mouvement s’observait (voy. fig. 72, pl. VI). 

Tous les muscles précédents sont évidemment expirateurs. Existe-t-il, 
comme chez les Hyménoptères, des muscles inspirateurs ? 


Muscles inspirateurs.— On trouve, dans les segments de la région moyenne 
de l'abdomen de la Phrygane, des muscles verticaux 7 et 2 absolument homo- 
logues des muscles inspirateurs 1, 2 des Hyménoptères. Comme chez la 
Guêpe, ils s'insèrent chacun à l’un des apodèmes pour se porter (en mon- 
tant, dans les arceaux tergaux, en descendant, dans les arceaux sternaux) 
sur le bord postérieur du somite qui précède. 

Pas plus que pour les Hyménoptères, je n’oserais les regarder comme 
déterminant l’écartement des arceaux supérieur et inférieur l’un de l’autre, 
cette facon d'interpréter me semblant absurde. Mais si l’on veut bien consi- 
dérer que, pendant l'expiration, les somites sont beaucoup plus engagés les 
uns dans les autres que sur notre figure 44 ', on comprendra que la direc- 
tion de ces muscles 4 et 2 est alors un peu oblique, qu’ils forment deux à 
deux, comme chez les Hyménoptères, un angle obtus ouvert en arrière el 
que, par suite, la résultante de leurs actions combinées doit venir en aide à 
l’élasticité des téguments pour allonger l'abdomen et le ramener à ses dimen- 
sions primitives en inspiration. 


! La dissection a relâché le tout et a amené l'abdomen en inspiration. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 161 


Le seul muscle caractéristique des Hyménoptères porte-aiguillon que je 
n'ai pas rencontré chez les Phryganes, est le petit muscle vertical (fig. 40 
et 41, 3) qui unit l’apodème de l’'arceau sternal au bord inférieur de l’arceau 
tergal correspondant. Sa présence se serait, du reste, fort mal expliquée, 
l’arceau dorsal ne chevauchant pas ici sur l’arceau inférieur. 

En résumé, les muscles respiratoires des Phryganes offrent avec ceux des 
Hyménoptères porte-aiguillon une similitude curieuse, et nous pouvons pro- 
bablement enregistrer un nouvel exemple d'insectes chez lesquels il existe 
des muscles énspirateurs. Cette dernière remarque a son importance, car on 
a considéré les Hyménoptères comme les seuls insectes possédant des mus- 
cles aidant à l'inspiration. 


D. Grthoptères Forficuliens et Acridiens. 


Les pages qui précèdent et les observations que j'aurai encore à rapporter 
montrent les désaccords fréquents qui existent entre le groupement des 
insectes d’après leurs mouvements respiratoires et les classifications zoolo- 
giques. Les mouvements respiratoires de deux insectes ne sont analogues, 
en effet, que lorsque la structure des arceaux abdominaux et la disposition 
des muscles qui les meuvent sont à peu près les mêmes !. 

Les Orthoptères constituent, à cet égard, un exemple instructif. L'étude 
des mouvements de respiration de quelques insectes de l’ordre ? m'a obligé à 
pratiquer, dans ce groupe, un démembrement que d’autres pousseront peut- 
être plus loin encore après l'examen de nouvelles formes. Comme je lai dit 
page 137, j'ai dû placer les Blattiens dans le premier type avec les Hémip- 
tères hétéroptères et les Coléoptères; les Locustiens, représentés par le 
Dectique verrucivore, dans le troisième, avec les Lépidoptéres et les Névrop- 


1 Lorsque ces deux conditions existent, on peut déterminer nettement d'avance la forme 
des mouvements respiratoires. Quand il n’en existe qu’une, c'est tantôt la musculature qui 
amène un mode de respiration spécial : tel est le cas pour les Phryganes; tantôt c’est, au 
contraire, la structure squelettique de l'abdomen qui cause le genre de mouvement : tel 
est peut être le cas chez les Forficules. 

2 Ordre, du reste, très peu homogène. (Voyez Huxzey, An introduction to the classification 
of animals, p.121. Londres, 1869.) 


Tome XLV. 21 


162 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


tères vrais. Enfin, les Acridiens appartiennent au deuxième type respiratoire 
et se rangent immédiatement après les Hyménoptères porte-aiguillon. 

Dans toute classification soit zoologique, soit physiologique, on rencontre 
des êtres de transition, intermédiaires entre deux ou plusieurs groupes définis. 

Les Forficuliens me paraissent étre dans ce cas ; aussi la place que je leur 
assigne ici, faute de mieux, est-elle douteuse. Leurs mouvements respira- 
toires sont, je le pense, ceux d’un insecte du deuxième type; leurs segments 
abdominaux ressemblent à ceux des Hyÿménoptères et leurs muscles ont plutôt 
de l'analogie avec ceux des Coléoptères. 


§ LXXII. 


FORFICULA AURICULARIA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections 
et description des muscles de la respiration.) 


Les Forficuliens ont été complètement négligés par les auteurs qui m'ont 
précédé ; personne n’a étudié leur mécanisme respiratoire. 

Quelques essais que j'avais faits sur des Nymphes, au commencement de 
l'été de 1882, ne m'avaient donné que des résultats peu satisfaisants; les 
mouvements respiratoires étaient obscurs et d’une interprétation difficile. 

Je mwai guère été plus heureux en opérant, plus tard, sur des individus 
parfaits. Voici, cependant, ce que je crois pouvoir déduire de mes observations: 
la structure de l'abdomen des Forficules s'éloigne, d’une façon générale, de 
la disposition la plus commune chez les Orthoptères; comme les entomo- 
logistes l'ont signalé depuis longtemps, la forme des parties latérales des 
arceaux lergaux chevauchant sur des arceaux sternaux et les contours de 
ces pièces rappellent, d’une façon étonnante, ce qui existe chez les Hymé- 
nopières apides. 

L’insecte, cherchant à se défendre et à se dégager, exécute fréquemment 
des mouvements violents; il ouvre largement ses pinces et recourbe l'abdomen 
vers le haut; aussi n'est-ce que pendant les périodes de calme relatif, ou chez 
un individu décapité, qu’on peut espérer surprendre des mouvements respi- 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 165 


ratoires vrais. Ceux-ci, séparés par de longs arrêts inspiratoires, m'ont paru 
consister en élévations et abaissements des arceaux sternaux des somites 
1 et 2, la face inférieure du métathorax étant entrainée dans le même sens. 

En expiration, on voit les faces sternales du métathorax et des deux 
premiers somites abdominaux s'élever d’une petite quantité, tandis que tout 
le reste de l’abdomen s'abaisse, masquant ainsi, sur les silhouettes, les dépla- 
cements qui pourraient avoir lieu pour les faces sternales des somites qui 
suivent le second. 

J'évalue, mais avec doute, la diminution du diamètre vertical, en expira- 
tion, au niveau du premier somite, à ‘9. On ne distingue pas d'onde et 
l'abdomen ne semble pas changer de longueur. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE LA FORFICULA AURICULARIA. 


La faiblesse des mouvements respiratoires et le peu d'étendue de la région 
du corps dans laquelle on parvient à les constater ne permettent de se faire, 
à priori, aucune idée de la disposition des muscles. En partant de la notion 


E D 


Fig, 45 X 10. — Muscles de la moitié droite de l'abdomen de la Forficula auricularia. 
A, a Muscles longitudinaux tergaux et sternaux. 
D,E Muscles obliques. 
æ Muscles expirateurs verticaux. 
que les Forficuliens sont des Orthoptères et de ce fait que les arceaux tergaux 
chevauchent sur les arceaux sternaux en cachant la zone élastique des flancs, 


464 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


on pouvait supposer que les muscles abdominaux sont construits suivant 
le type propre aux Acridiens. L'hypothèse est cependant erronée et la 
dissection démontre que la musculature de l'abdomen , fort peu différente du 
cas le plus ordinaire, se rapproche de ce qui existe chez les Goléoptères 
(fig. 45). 

Comme chez les Staphyliniens (fig. 26, p. 96), les muscles dorsaux sont, 
en grande partie, décomposés en faisceaux D, E qui se croisent à angle aigu ; 
modification probablement en rapport avec la grande mobilité de la région 
abdominale. Quant aux muscles expirateurs +, ils naissent, il est vrai, 
d’apodèmes que présentent les arceaux sternaux à leurs angles antérieurs et 
supérieurs; mais ils sont peu développés, se dirigent obliquement vers le 
haut, pour s'insérer sur les arceaux dorsaux, et me semblent avoir beaucoup 
plus d’analogie avec les muscles expirateurs des Coléoptères, des Blattes et des 
Odonates qu'avec ceux des Acridiens ou des Hyménoptères porte-aiguillon. 
Il n'existe aucune trace de muscles aidant à l'inspiration. 

J'ajouterai que la dissection des muscles des Forficules étant très difficile, 
je wose affirmer avoir tout vu. L'étude anatomique de grandes formes exoti- 
ques conduirait probablement à des résultats plus précis. 

Je ne puis, en terminant ce sujet, que répéter ce que je disais à la 
page 162. Les Forficuliens sont probablement, quant au mécanisme respira- 
toire, des insectes intermédiaires entre les Hyménoptères dont ils ont presque 
la structure abdominale et les Coléoptères dont ils possèdent à peu près la 
musculature. 


$ LXXII. 


ACRIDIENS. 


La tribu des Acridiens dont lhistoire anatomique et physiologique se 
confond malheureusement souvent avec celle des Locustiens a été, au point de 
vue du mécanisme de la respiration, non seulement l’objet de quelques obser- 
vations isolées, telles que celles de Treviranus * sur les déplacements des 


1 TrevinAnus. Biologie, ete. Op. cit., p. 157. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 165 


pièces du squelette abdominal et celles de Marcel de Serres ! sur les apodèmes 
internes et leurs muscles, mais elle a fait, en outre, le sujet d’études plus 
approfondies. Ainsi Rathke ? a décrit avec soin les muscles respiratoires des 
Acridiens; Graber 5 a pris, dans son remarquable petit ouvrage sur les Insectes, 
le Pachytylus migratorius comme type, pour faire comprendre nettement la 
nature des mouvements respiratoires et faire saisir les différences entre les 
muscles inspirateurs et expirateurs ; Packard * a donné une description des 
mouvements de respiration du Caloptenus femur-rubrum et, enfin, Sedgwick 
Minot 5 a figuré l’un des muscles respiratoires principaux du même animal, 
en accompagnant ses indications anatomiques de quelques mots sur les dépla- 
cements des somites tergaux et sternaux . 

J'aurai surtout à établir en quoi mes résultats personnels se rapprochent 
ou s’écartent de ceux de Rathke, de Graber et de Packard. Les formes que 


j'ai spécialement étudiées sont le Stethophyma grossum et le Stenobothrus 


variabilis. 


1 MarceL DE SERRES. Observations sur les usages du vaisseau dorsal, ete. Op. cit., pp. 74 et 15. 

2 Raruke. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., p. 110. 

3 GRABER. Die Insekten. Op. cit., pp. 108 et suivantes. 

4 Packard. Anatomy and Physiology of the Locust (First ANNUAL REPORT oF THE UNITED 
STATES ENTOMOLOGICAL COMMISSION. Washington, 1878), p. 269. 

5 Sencwick Minor. Histology of the Locust (Caloptenus) and the Cricket (Anabrus) (SECOND 
REPORT or THE UNITED STATES ENTOMOLOGICAL COMMISSION. Washington, 1880), p. 196, pl. I, 
fig. 2 et 6. 

6 On trouvera aux §§ LXV (Periplaneta) et LXXVIII (Decticus) les indications bibliogra- 
phiques concernant les Blattiens et les Locustiens. Afin de compléter l’ensemble des rensei- 
gnements au sujet des observations sur le mécanisme respiratoire des Orthoptères, j'ajoute 
ici, en note, ce qui a trait aux insectes de cet ordre que je wai pas étudiés moi-même. 

Rathke a donné uue description du système musculaire abdominal des Mantis et des 
Gryllotalpa. Le genre Gryllus a fait l'objet de diverses recherches; mais il convient de 
remarquer que sous le nom de Gryllus les naturalistes anciens confondaient une foule de 
petits groupes nettement séparés aujourd’hui et que j'ai dû considérer, comme se rappor- 
tant aux Grillons, les travaux dans lesquels les auteurs, en employant ce terme, wont pas 
été assez explicites pour faire entrevoir qu'il s’agit d’autres insectes. Marcel de Serres a 
fourni quelques indications sur la structure des pièces squelettiques et sur les muscles qui 
les meuvent ; Barlow a constaté la persistance des mouvements respiratoires chez le Grillon 
décapité; enfin Rathke a figuré et décrit, en détail, les muscles abdominaux du Grillon des 
champs; 


166 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


§ LXXIV, 
STETHOPHYMA GROSSUM 4. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Chez les Srethophyma, comme chez les autres Acridiens, les somites de 
l'abdomen se composent chacun : 4° d’un grand arceau tergal résultant de 
la fusion des pièces tergales proprement dites et épimériennes et concourant, 
par suite, largement à la formation des flancs; 2° d’un arceau sternal plus 
étroit dont les prolongements latéraux ascendants ou apodèmes pénètrent 
profondément sous les parties latérales descendantes de l’arceau supérieur ?. 

Ainsi que le montrent les figures 14 et 46, l’arceau sternal est emboîté dans 
l’arceau tergal; une zone molle, très peu élevée, unit le bord inférieur de 
l’arceau tergal et la région voisine de l’arceau sternal correspondant. 

Rathke, Graber et Sedgwick Minot ont indiqué brièvement que les mou- 
vements respiratoires des Acridiens consistaient surtout en rapprochements 
et éloignements des pièces sternales et tergales, accompagnés de dépressions 
et de saillies alternatives des flancs; la contraction de l'abdomen répondant 
naturellement à l'expiration et son retour aux dimensions primitives repré- 
sentant l'inspiration. Mais Packard, dans une description assez détaillée des 
mouvements respiratoires du Culoptenus femur-rubrum, semble, si je saisis 
bien la valeur de ses expressions, interpréter les faits d’une tout autre 
manière. 

Après avoir expliqué comment, dans la contraction, les pièces sternales 
s'élèvent et les flancs ou pleurites se dépriment, et après avoir signalé entre 
autres particularités que, lors du mouvement inverse, c'est-à-dire lorsque les 
pleurites font saillie, la membrane tympanique s'enfonce, Packard ajoute 


1 Mecostethus grossus, Fieber. 

2 Pour des figures d'ensemble de l'aspect extérieur de l'abdomen des Acridiens, consultez: 
Léon Durour. Recherches anatomiques et physiologiques sur les Orthopières, les Hyménoptères 
et les Névroptères, ete. Op. cit., pl. I, fig. 8. — Packarp. First annual Report, etc. Op. cit., 
p. 259, fig. 13. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 167 


que louverture des stigmates coïncide à peu près avec les dépressions des 
pleurites et que les réservoirs aériens du premier somite s’affaissent lorsque 
l'abdomen se dilate. Ce qui indiquerait, dit le savant entomologiste, que l'air 
se précipite dans les stigmates durant la contraction de l'abdomen : « that the 
» air rushes into the spiracles during the contraction of the abdomen ». 

Comme il est possible que le sens exact du texte anglais m'échappe, je 
me bornerai à citer un fait qui prouve, d’une façon évidente, que la pression 
à laquelle est soumis l'air renfermé dans le système trachéen de lOrthoptère 
est supérieure à la pression extérieure au moment de la contraction abdomi- 
nale, ce qui oblige cet air à s'échapper en partie par les orifices stigmatiques. 

V. Graber t et Packard ? lui-même ont dit que la tension de la mem- 
brane tympanique des Acridiens se trouve constamment modifiée par les 
mouvements respiratoires de ces insectes. 

Chez le Stethophyma grossum la membrane en question est insérée obli- 
quement à la surface du corps, son bord postérieur étant situé beaucoup 
plus profondément que son bord antérieur. Or, si on observe le tympan à 
la loupe chez un Stethophyma vivant maintenu par les ailes, on constate, 
lors de chaque contraction de l'abdomen, non seulement que la membrane 
se porte en dehors, mais, de plus, qu’elle devient moins oblique et qu’elle 
tend à se placer parallèlement à la surface du corps. 

J'ai rendu ces mouvements très visibles en collant perpendiculairement 
sur la membrane tympanique, à l’aide de baume du Canada, un petit style 
de papier de 8 millimètres de longueur. Chaque fois que l'abdomen de 
l'insecte se contracte, le style de papier se porte en avant de 0®",5 environ. 

Je wai pas à discuter, dans le Mémoire actuel, la portée que peut avoir, 
au point de vue de la signification auditive ë, le fait des changements d’incli- 
naison et de tension de la membrane tympanique pendant les mouvements 


1 GRABER. Die Tympanalen Sinnesapparate der Orthopteren (DENKSCHRIFTEN DER K. AKADEMIE 
DER WissENscHArTEN. Wien, Bd. 36, 1876), p. 123. 

2 Op. cit. 

3 GraBer dans l'ouvrage cité (Die Tympanalen Sinnesapparate, etc.) a fait un grand nombre 
d'expériences et d'observations qui font douter sérieusement de la nature auditive des 
Organes tympaniques des Orthoptères (voyez ses conclusions à la page 127 de son Mémoire). 


eeno 


168 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


respiratoires; ce qu’il est important de remarquer ici, c’est que, durant la 
contraction de la région abdominale du corps, la membrane est repoussée 
au dehors, preuve incontestable que la pression intérieure est, en ce moment, 
supérieure à la pression extérieure et que la contraction détermine l’expira- 
tion, comme chez tous les insectes ". 

Ces premiers points étant élucidés, j’aborde l’exposé des quelques faits que 
j'ai observés à l'aide de la méthode des projections. 

L'animal est intact, suspendu par les ailes et les élytres serrés entre une 
lame de liège et une lame de carton; les grandes pattes de la dernière paire 
sont ramenées au-dessus du dos et liées ensemble par un bout de fil. Le gros- 
sissement est de 9 diamètres environ. 

En expiration, les arceaux tergaux s'abaissent et les arceaux sternaux 
s'élèvent, le maximum d'effet ayant lieu au niveau des somites 3 et 4. 

Les observateurs qui m'ont précédé et qui n’ont utilisé, du reste, que 
l'observation directe, signalent généralement cette particularité que le mou- 
vement vers le haut des arceaux sternaux surpasse de beaucoup le mouve- 
ment vers le bas des arceaux tergaux. Cette observation est vraie d’une façon 
absolue; mais il ne faut pas oublier qu'à chaque expiration l'extrémité de 
l'abdomen se relève d'une façon notable; ce mouvement d’ascension général 
s'ajoute à celui de même sens des pièces de la face sternale et annule, pour 
l'œil, le mouvement de descente des pièces de la face tergale qui se meuvent 
en sens opposé. 

En se reportant aux figures 46 et 47 qui représentent les anneaux en 
coupe et les muscles expirateurs, on voit très bien que les deux arceaux 
supérieur et inférieur doivent simplement marcher à la rencontre lun de 
lautre. Mes expériences sur le Stenobothrus variabilis, $ LXXVII, prouvent 
que les choses se passent bien ainsi. 


1 Raruxe. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete. Op. cit., p. 120) nous fournit 
encore un argument assez important, Il a observé, chez le Psophus stridulus, que chaque 
fois que l'abdomen de cet Orthoptère se contractait, les stigmates situés au-dessus des pattes 
de la deuxième paire s’ouvraient d’une façon évidente, Ce qui démontre, dit cet éminent 
observateur, qu’une certaine quantité de Pair logé dans la portion antérieure du corps est 
expulsée en ce moment par les stigmates. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 169 


Des mesures prises sur les silhouettes montrent qu’à la hauteur du troisième 
somite, le diamètre vertical diminue, en expiration, de !/». 

Les arrêts qui se présentent de temps en temps ont toujours lieu en inspi- 
ration; les mouvements respiratoires paraissent simultanés dans tous les 
somites; la longueur de l'abdomen ne change pas. 

Le prothorax et la tête exécutent de petits mouvements de bascule à peine 
perceptibles, se relevant un peu en expiration pour s'abaisser ensuite en 
inspiration. Je n'ai pas utilisé la méthode des projections pour l'étude des 
mouvements des flancs; tout ce que je puis dire, c’est que la dépression des 
pleurites en expiration paraît faible. 


$ LXXV. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU STETHOPHYMA GROSSUM. 


Le système musculaire abdominal des Acridiens a été esquissé par Marcel 
de Serres et décrit par Rathke et par Graber. Sedgwick Minot s’est borné à 
attirer l'attention sur la forme du muscle expirateur principal. 

Marcel de Serres a signalé, le premier, à propos des Truxales, les grands 
apodèmes saillants dilatés en palette à leur extrémité libre supérieure qui 
prolongent les angles antérieurs des arceaux sternaux des Acridiens; il les 
désigne sous le nom de côtes et indique, en quelques mots, qu’ils donnent 
chacun insertion à deux muscles : « un releveur ou extenseur et un abaisseur 
» ou fléchisseur ; la direction de ce dernier est assez oblique ». 

Ni Marcel de Serres, ni Rathke n’ont publié de figures de ces apodèmes et 
de leurs muscles. Graber seu], à ma connaissance, les a représentés dans des 
dessins réellement démonstratifs !. 

Comme mes dissections personnelles m'ont fait découvrir quelques petits 
muscles supplémentaires et qu'il est nécessaire de pouvoir établir rapidement 
et facilement des comparaisons entre les muscles abdominaux des Acridiens et 
ceux des autres insectes dont je parle dans ce travail, j'ai cru utile d'insérer ici 


1 Graser. Die Insekten, pp. 108, 109, 110, fig. 67, 68'et 69. 
Tome XLV. 22 


170 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


des figures dessinées d’après le Stethophyma et sans lesquelles la description 
et les comparaisons eussent été difficiles et peu claires (fig. 46, 47 et 48). 

Un simple coup d'œil sur ces figures et sur celles qui représentent le 
squelette abdominal et les muscles de la Guêépe et des Bourdons montre 
immédiatement que les apodèmes * ( prolongements costiformes de Graber) 
sont absolument les homologues des apodèmes que présentent les arceaux 
sternaux des Hyménoptères porte-aiguillon. La différence capitale qui existe 
entre le squelette des Acridiens et celui des Hyménoptères en question, c’est 
que chez les Acridiens l’arceau tergal est privé d’appendices semblables. Les 
apodèmes n'existent donc, ici, que pour les pièces de la face sternale. 

Les muscles appartiennent, comme chez les autres insectes, à deux caté- 
gories principales : il y a les muscles fléchisseurs généraux et les muscles 
respiratoires proprement dits. 

Les fléchisseurs généraux destinés à courber l'abdomen dans divers sens 
sont, comme toujours, des muscles lon- 
gitudinaux dorsaux À et sternaux a qui 
ne nous offrent, pour le moment, aucun 
intérêt. 

Quant aux muscles respiratoires, 
Marcel de Serres, puis Rathke et enfin 
Graber en indiquent deux de chaque 
côté par anneau. J'en ai observé per- 
sonnellement quatre, deux principaux 
et deux accessoires. 


Fig. 46 X 9. — Stethophyma grossum. Fait extrêmement important, déjà 

Coupe transversale de l'abdomen vers le dernier tiers. mis en lumière par les auteurs précités, 
Deux somites sont engagés l’un dans l'autre. "re : 

& Muscle expirateur vertical, ou principal. les Acridiens possèdent 2 comme les 

3 Muscle inspirateur principal, Hyménoptères porte-aiguillon etcomme 

les Névroptères Phryganides, de véritables muscles inspérateurs, ajoutant 


leur action à celle de lélasticité des tissus pour amener la dilatation de 
l'abdomen. 


1 Voyez la note 2 de la page 26. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 174 


Les expirateurs, au nombre de deux de chaque côté et par somite, ont 
une direction presque verticale; ce sont : 

4° L'expiraleur principal « (dorso-ventral de Graber), sans homologue 
chez les Hyménoptères, mais homologue évident de l'expirateur ordinaire 
des Coléoptères et d’un grand nombre d'insectes, est un muscle puissant, 
naissant en dedans du bord supérieur de larceau sternal, en arrière de 
l’'apodème et allant s'insérer vers le milieu de la hauteur de l'arceau tergal 
correspondant (c’est le seul figuré par Sedgwick Minot); 

2° L'expirateur accessoire B, que je crois avoir observé le premier, est 
plus grêle et moins long; ses insertions sont analogues; il est situé entre 
l'apodème et l'expirateur principal. 

Ces deux muscles rapprochent les arceaux tergaux et sternaux et, comme 
l'indique la figure 47, déterminent la formation d’un pli rentrant dans la 
zone membraneuse latérale qui unit ces arceaux. 


Fig. 41 X 7. Fig. 48 X 1. 
Portion de la moitié droite de l'abdomen du Stethophyma. Apodème et ses muscles vu par sa face 
A, a Muscles-longitudinaux dorsaux et sternaux. externe, 
æ, B Muscles expirateurs verticaux, principal et accessoire. 3 Muscle inspirateur principal. 
3 Muscle inspirateur vertical ou principal. 4 Muscle inspirateur accessoire. 


4 Muscle inspirateur accessoire. 


Les inspirateurs, au nombre de deux aussi, de chaque côté et par somite, 
sont : 

1° L'inspirateur principal 3, à direction presque verticale, antagoniste de 
l'expirateur principal, est évidemment l’homologue de l’inspirateur 3 que j'ai 


172: RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


découvert chez les Guêpes et les Bourdons (fig. 40, 41 et 42). Comme lui, 
il occupe la face externe de l’apodème; comme lui, il nait de cet apodème, se 
porte en bas et un peu en arrière pour se terminer sur le bord inférieur de 
l’arceau tergal correspondant. Son action éloigne arceau sternal de l’arceau 
tergal et augmente le diamètre vertical de l'abdomen. Il offre cette particu- 
larité d’être notablement plus faible que Pexpirateur principal ; ce qui prouve 
que l'inspiration s'opère encore en grande partie par l’élasticité des téguments 
et du système trachéen; 

2° L'inspirateur accessoire 4, qui avait, comme l’expirateur accessoire, 
échappé à mes devanciers, ne mérite peut-être pas la dénomination d’inspi- 
rateur, I] est situé, comme le précédent, à la face externe de l’apodème; il 
naît du bord antérieur de la base de cette saillie, descend obliquement en 
arrière et va s'insérer sur le bord antérieur de l’arceau sternal qui suit 
immédiatement. Ce muscle paraît devoir faire basculer l’apodème. Dans tous 
les cas, sa situation externe ne permet pas de le considérer comme une sub- 
division des muscles longitudinaux ?, 


§ LXXVI. 


EXPÉRIENCES SUR LE SYSTÈME NERVEUX DU STETHOPHYMA. 


Les expériences sur les fonctions du système nerveux sont assez faciles 
à exécuter; en effet la chaîne nerveuse est située très bas, de sorte qu'il est 
aisé de la couper ou de lexciter en divers points, en ne faisant aux tégu- 
ments que de petits orifices. De plus, les masses ganglionnaires sont généra- 
lement éloignées les unes des autres et reliées par de longs connectifs. 

Afin d'interpréter exactement les résultats des opérations, il importe de 
remarquer que, comme chez les Coléoptères, les premiers ganglions abdo- 
minaux sont évidemment fusionnés avec la partie postérieure des ganglions 
métathoraciques. Les preuves de cette fusion sont le nombre des ganglions 
abdominaux toujours inférieur à celui des somites de l'abdomen, le grand 


1 La dissection de grands Acridiens exotiques provenant de Java m’a permis de retrouver 
exactement tous les muscles que je viens de décrire chez le Stethophyma. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 173 


volume de la masse métathoracique, enfin la distribution des nerfs qui nais- 
sent de cette masse et dont les uns se rendent dans le métathorax propre- 
ment dit et dans les grandes pattes postérieures, tandis que d’autres se portent 
en arrière dans la base de l'abdomen, animant, ainsi que le démontrent les 
sections, les trois premiers segments de cette portion du corps. 

Mes expériences ont eu le même but que celles que j'ai effectuées sur les 
insectes des autres groupes; prouver 1° que les ganglions abdominaux sont 
les centres respiratoires pour les somites auxquels ils distribuent leurs nerfs 
moteurs et 2° que la masse métathoracique n’est point le centre excitateur 
des mouvements de respiration. 


Are Expérience. — On sectionne la chaine nerveuse entre la masse 
mélathoracique et la première masse abdominale distincte. Les ganglions 
métathoraciques n'ayant pas été touchés, l’insecte conserve la faculté de 
sauter. 

Comme en faisant l'opération on a inévitablement coupé les nerfs qui du 
centre métathoracique se portent en arrière dans l'abdomen, les anneaux 
que ces nerfs animent sont paralysés. Ce sont évidemment les trois pre- 
miers, car les mouvements respiratoires cessent dans les arceaux sternaux 
2 et 3 (c'est-à-dire dans les deux premiers arceaux sternaux apparents, 
larceau sternal du premier somite étant rudimentaire ou mieux absent). 
Mais les mouvements respiratoires parfaitement réguliers persistent dans 
toute la partie de abdomen située au delà. Le rhythme est ralenti; l'animal 
intact respirait 38 fois par minute ; après l'opération, on observe, en moyenne, 
19 mouvements respiratoires dans le même espace de temps. 


2e Expérience. — On détruit, chez un autre individu, la masse nerveuse 
complexe du métathorax. L'animal est devenu incapable de sauter. Les mou- 
vements respiratoires continuent avec régularité dans les anneaux abdominaux 
qui suivent les trois premiers. Comme dans l'expérience précédente, ils sont 
notablement ralentis. On en compte, en moyenne, 16 par minute, alors que 
l'animal intact et un peu excité en offrait 76. 


174 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


3° Expérience. — Chez le même individu dont le centre métathoracique 
est détruit, on sectionne la chaîne nerveuse au bord postérieur du 4° arceau 
sternal apparent. Les somites situés en deçà de la section, c’est-à-dire entre 
celle-ci et la base de l'abdomen, deviennent immobiles; les somites qui sui- 
vent continuent, au contraire, à présenter des mouvements respiratoires 
réguliers, à raison de 16, en moyenne, par minute, comme précédemment !. 


4e Expérience. — Chez un nouveau Stethophyma, on sépare complète- 
ment l'abdomen du thorax et on lintroduit dans un tube de verre à atmo- 
sphère humide, afin d'éviter l'influence de la dessiccation. La section des 
nerfs émanant des ganglions abdominaux soudés aux ganglions métathoraci- 
ques a amené l’immobilité des arceaux sternaux 2 et 3, absolument comme 
dans la 4" expérience. Le reste de l'abdomen continue à respirer pendant 
longtemps ?; les mouvements respiratoires, un peu moins réguliers et plus 
lents que chez l'insecte intact, sont profonds et très nets. On en comptait 
avant l'opération environ 50 par minute; l'abdomen isolé en présente 16 à 17 
dans le même temps. 

Bien que ces expériences eussent pu être multipliées davantage, je crois 
qu'elles sont suffisantes et qu'elles fournissent la solution des questions que 
je m'étais proposé de résoudre. Leurs résultats prouvent, en effet : 4° que la 
masse métathoracique n’est point le centre respiratoire de l'abdomen; 2° que 
les ganglions abdominaux sont les centres respiratoires vrais d’où émanent 
les excitations qui font contracter rhythmiquement les muscles inspirateurs 
et expirateurs. 

On remarquera, en outre, que toutes les fois que l'abdomen est soustrait à 
l'influence indirecte des centres cérébroïdes ou volontaires, par une section 
de la chaine nerveuse, les mouvements respiratoires sont ralentis. 

Les résultats ci-dessus sont, du reste, en parfait accord avec ce que les 
insectes des autres groupes nous ont donné à mes prédécesseurs et à mol. 


4 On ne comprend pas bien l'arrêt du somite 4 qui est animé par un centre ganglion- 
naire abdominal intact. 

2 Je wai pu suivre l'expérience jusqu'au bout. Les mouvements existaient encore deux 
heures après l'opération. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 175 


$ EXXVIL 


STENOBOTHRUS VARIABILIS, FIEB. (BIGUTTULUS, L.). 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections et expériences 
sur le système nerveux.) 


Mouvements respiratoires. — Les diverses observations faites sur cette 
forme, beaucoup plus petite, confirment parfaitement les données fournies 
par le Stethophyma. 

La manière de fixer l'insecte dans l'appareil est un peu différente; il est 
porté par deux épingles traversant les parties latérales du prothorax; les 
ailes et les grosses pattes postérieures sont supprimées; l'abdomen est libre 
et le grossissement employé est de 5 diamètres environ (fig. 73, pl. VI). 

Pendant l'expiration, les pièces sternales s'élèvent et les-arceaux tergaux 
s'abaissent d’une quantité à peu près égale, l'effet maximum paraissant avoir 
lieu pour le somite 4. En même temps, l'extrémité de labdomen s'abaisse 
légèrement et sa longueur augmente de ‘/;, environ. 

Les mouvements respiratoires sont simultanés dans tous les anneaux et 
les segments thoraciques semblent rester immobiles. L'observation directe 
à la loupe montre, en outre, que pendant la phase expiratoire, les flancs se 
dépriment et que, comme chez le Stethophyma, la membrane tympanique 
fait saillie pour s'enfoncer ensuite pendant l'inspiration. 


Expérience sur le système nerveux. — Chez un individu fixé par les ailes 
et dont on a seulement supprimé les grandes pattes postérieures, les mou- 
vements respiratoires ont lieu par petites séries de quatre ou cinq, séparées 
par des arrêts en inspiration. On note successivement 21, 20, 26 (moyenne 
22 expirations) par minute. 

On sectionne la chaine nerveuse à la base de l'abdomen ; les mouvements 
respiratoires persistent et sont encore groupés en petites séries, comme chez 
l'animal dont le système nerveux est entier; la seule différence réside dans 
un ralentissement marqué. On note, en effet, 16, 12, 11 (moyenne 13) 
expirations par minute. 


176 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


On sépare ensuite complètement l'abdomen du thorax; les mouvements 
respiratoires semblent un peu plus régulièrement espacés; cependant la 
moyenne par minute est restée la même, ainsi que l’indiquent les chiffres 
suivants : 13, 14, 15, 15, 12, 10 (moyenne 13). Ces pulsations rhythmi- 
ques continuent pendant plus d’une heure dans l'abdomen isolé. 

Les résultats sont, on le voit, à fort peu près les mêmes que ceux des 
expériences faites sur le Stethophyma et conduisent à des conclusions 
identiques. 


Afin de compléter ces données concernant l’influence du système nerveux sur les mouve- 
ments respiratoires des Orthoptères, je résumerai les observations de Barlow sur le Grillon 
(Observations on the respiratory movements of insects. PuiLos. TRANS., vol. 145, Part. 1, 
pages 141 et 142. Londres, 1855). Barlow a décapité successivement divers individus après 
avoir compté le nombre de leurs mouvements respiratoires à l’état normal; il a constam- 
ment constaté : 1° la persistance des mouvements respiratoires abdominaux; 2 l’affaiblisse- 
ment de ces mouvéments et un ralentissement manifeste. « Ces expériences, dit l’auteur, 
» prouvent à l'évidence la diminution dans la fréquence et la force des mouvements respi- 
» ratoires après la suppression des ganglions sus- et sous-œæsophagiens ; mais le fait que ces 
» mouvements ne sont pas abolis démontre, d’un autre côté, qu'il existe chez l’insecte une 
» multiplication des centres nerveux répondant à la distribution et à la répétition des 
» organes respiratoires. » 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 177 


CHAPITRE VII. 


ÉTUDE DU TROISIÈME TYPE. 


A. Orthoptères locustiens. 


$ LXXVIII. 


HISTORIQUE. 


Les Locusta, en comprenant sous cette dénomination la Sauterelle verte, 
les Dectiques et quelques autres formes que les naturalistes d’une époque 
déjà éloignée confondaient sous une appellation commune, ont été fréquem- 
ment examinés au point de vue des mouvements d'inspiration et d’expi- 
ration. 

Malpighi ! a vu les déplacements de leurs arceaux sternaux ; Hausmann ? 
a cherché, comme je lai dit page 8, à rendre plus sensibles, par les oscilla- 
tions d’une colonne d’eau, les diminutions et les augmentations de volume 


de l’abdomen de la Locusta viridissima; Sorg 5, Vauquelin +, Treviranus 5 


Önt déterminé le nombre de mouvements respiratoires par minute pour la 

même espèce, et Rengger 5, après avoir observé ces mouvements, a comparé 

le système des anneaux abdominaux au système costal des mammifères. 
Burmeister 7 a indiqué, le premier, dans l'abdomen des Locusta, lexis- 


1 Marricni. Dissertatio epistolica de Bombyce, etc., op. cit., p. 20. 
2 Hausmann. De animalium exsanguium respiratione Commentatio, ete., op. cit., p. 8. 
? Sorc. Disquisitiones physiologicae circa respirationem Insectorum, ete., op. cit., p. 46. 
VAUQUELIN. Annales de Chimie, t. XII, p. 273. 
TReviranus. Biologie, etc., op. cit., t. IV, p. 158. 
Rexccer. Physiologische Untersuchungen über die thierische Haushaltung der Insecten, 
P. 38. Tübingen , 1817. 

T Burmeister. Handbuch der Entomologie, etc., op. cit., p. 284. 


Tour XLV. 25 


4 
ə 


6 


178 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


tence de muscles transversaux qui ont été, plus tard, figurés, sans inter- 
prétation, par E. Blanchard !, puis considérés comme faisant peut-être partie 
d’un diaphragme inférieur, par Leydig ?. C.-G. Carus a décrit en quelques 
mots 5 et a tenté de représenter par deux figures juxtaposées # l'aspect 
général des mouvements de l’abdomen du Dectique verrucivore; Dugès * 
s’est borné à signaler l'énergie des mouvements respiratoires de la Sauterelle; 
Newport 6 a étudié le rhythme de ces mouvements et, enfin, Rathke 7, 
prenant le Dectique comme type, a décrit, avec figures à l'appui, la dispo- 
sition des muscles abdominaux. 

Cette longue énumération bibliographique renferme surtout l'indication 
d'observations isolées ou incomplètes et aucun des travaux mentionnés, 
même la description anatomique de Rathke, ne me dispensait de recom- 
mencer l'étude détaillée des mouvements respiratoires d’un Locustien. 


$ LXXIX. 
DecTICUS VERRUCIVORUS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode graphique.) 


La taille de ce bel Orthoptère et l'énergie de ses mouvements respiratoires 
le désignaient comme un sujet d'étude intéressant; aussi, comme je le dis 
plus haut, le mécanisme de la respiration du Dectique a-t-il été déjà Pobjet 
d’un examen de la part de C.-G. Carus et de Rathke. 


1 E. Brancuarp. Dans Cuvier, Règne animal distribué d'après son organisation. Insectes. 
Atlas, 4"° partie, pl. 76, fig. 2. Paris (édition Masson), 1849. 

2 Levnic. Vom Bau des Thierischen Körpers, Erster Band, Erste Hälfte, p. 210. Tübin- 
gen , 1864. 

3 Carus. Traité élémentaire d'anatomie comparée, p. 335. 

4 — Tabulae anatomiam comparativam illustrantes, pars VII, tab. II, fig. 40. Lip- 
siae, 1848. 

5 Ducis. Traité de physiologie comparée, ete., op. cit., t. IL, p. 555. 

6 Newport. On the respiration of Insects, etc., op. cit., p. 548. 

1 Raruke. Anatomisch-physiologische Untersuchungen, ete., op. cit., p. 444, pl. VIE, 
fig, À et 2, 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 179 


C.-G. Carus a publié deux figures assez exactes de la face inférieure de 
l'abdomen de la femelle; la première représente la position des pièces en 
inspiration, et la seconde, les rapports des mêmes pièces en expiration. Ces 
figures, le texte qui les accompagne et les quelques mots que l'auteur con- 
sacre au même sujet dans son Anatomie comparée sont, cependant, tout à fait 
insuffisants pour donner une idée complète des faits. 

Dans l'abdomen du Dectique, les pièces sternales apparentes (7 chez la 
femelle, 8 chez le mâle), assez réduites, sont de petites plaques à peu près 
quadrangulaires, reliées aux arceaux 
tergaux par de larges zones membra- 
neuses portant les stigmates et divi- 
sées chacune en deux, dans toute leur 


longueur, par un sillon très accusé. 
Fig. 49 X 2. — Decticus verrucivorus Q. Les figures 49 et 50 sont destinées à 
Surface extérieure de l'abdomen montrant la zone molle des faire comprendre cette disposition qui 

flanes, son sillon indiqué par une ligne pointillée, les 
dépressions qui répondent à l'implantation des muscles diffère notablement de celle que nous 
SIPI SO END N AARP offrent les Acridiens. On voit que 
chaque somite est nettement divisé, d’une façon classique, si je puis mex- 
primer ainsi, en pièces sternales, épisternales, épimériennes et tergales, 
que les pièces sternales et tergales sont seules résistantes, 
que les pièces épisternales et épimériennes sont molles et 
séparées par le sillon cité plus haut, sillon qui marque 
exactement la limite entre les arceaux supérieurs et infé- 

rieurs ' 

yl En examinant le sillon avec attention, il est facile d'y 
constater une série de dépressions profondes que lon 
ERE jee pourrait confondre, à première vue, avec des stigmates 
Coupe transversale du tes. Vrais. Ces dépressions, au nombre de 6 chez la femelle 
mito abdomina. ot de 7 chez le mâle, répondent à des insertions muscu- 


laires importantes dont je reparlerai au § LXXXI. 


1 Voyez, pour une figure analogue (Anabrus), Second Report of the United States entomo- 
logical Commission for the years 1878 and 1879, p. 172, fig. 4. Washington , 1880. 


180 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Les mouvements respiratoires les plus intenses et les plus apparents 
consistant en élévations expiratoires et en abaissements inspiratoires alter- 
natifs des plaques sternales, j’ai naturellement cherché à obtenir d’abord des 
graphiques des déplacements de ces plaques. 

Toutes mes expériences ont porté sur des femelles. L’insecte est fixé, la 
face ventrale en haut, les élytres et les ailes serrés entre une lame de liège 
et une lame de carton. Les tarses des grandes pattes postérieures sont liés 
Pun à lautre. J'ai été obligé de couper les pattes des deux premières paires. 

Un levier inseripteur ordinaire, transversal (fig. 2), repose, par un petit 
talon, sur la limite entre les plaques sternales 2 et 3. La pointe du levier 
s'abaisse done en expiration. Le tracé P obtenu dans ces conditions et lorsque 


<— Sens de la rotation du cylindre. 


l'animal est encore plus ou moins sous l'influence de l'excitation produite 
par les apprêts de l'expérience, montre des mouvements respiratoires rapides 
(50 expirations par minute), sans pauses, ni arrêts. La courbe ressemble 
beaucoup à celle que fournissent les pièces tergales des Coléoptères ; on y 
constate une partie ascendante inspiratoire à vitesse décroissante et une 
partie descendante expiratoire caractérisée par une chute brusque du levier. 

Si Pon attend 20 à 25 minutes avant de prendre un nouveau tracé, on 
voit apparaitre, soit sous l'influence de la fatigue, soit parce que l’animal 
rentre à l’état normal, et cela, comme chez PHydrophile parmi les Coléop- 
tères, un plateau horizontal à la partie supérieure de la courbe, indiquant 
une pause en inspiration (tracé Q). De plus, de temps en temps se présente 


à > Tny o 


—<— Sens de la rotation du cylindre. 


un arrêt complet, aussi en inspiration. I] n’y a ni pauses, ni arrêts expira- 
toires, ce qui concorde parfaitement avec ce que nous donnent les insectes 
des autres groupes. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 181 


Théoriquement, en expiration, les mouvements d’élévation des pièces 
sternales doivent être accompagnés de mouvements d'abaissement des 
arceaux lergaux et d’une légère dépression des flancs. Les projections per- 
mettent, comme on le verra plus loin, de s'assurer de l'existence réelle de 
ces déplacements, tandis que la méthode graphique employée seule condui- 
rait à des conclusions erronées. Voici, du reste, les résultats qu’elle donne et 
la façon dont il faut les interpréter. 

Lorsque le Dectique est dans la situation normale d’un insecte posé, on 
voit que l’ensemble de l'abdomen est nettement projeté vers le haut à chaque 
expiration, Ce mouvement, qui masque l’abaissement des arceaux dorsaux, 
peut être reproduit graphiquement, soit en faisant reposer un levier ordinaire 
transversal sur la face dorsale du troisième tergite apparent, soit en faisant 
inscrire directement le mouvement par la pointe de l’oviscapte de la femelle, 
soit encore en amplifiant les déplacements du pondoir en y fixant un style 
d’une longueur triple, par exemple. 

J'ai fait usage de ces divers procédés. Les tracés obtenus, et que je crois 
inutile de reproduire, montrent tous, ce qui était à prévoir, une partie de la 
courbe montant brusquement, répondant à l'expiration, et une partie des- 
cendante à vitesse décroissante, répondant à l'inspiration. 

Si, enfin, plaçant l'insecte sur le flanc, en prenant d’ailleurs toutes les 
précautions nécessaires, on fait reposer un levier transversal sur les pleu- 
rites, on observe immédiatement que ce levier s'élève en expiration au lieu 
de s'abaisser. Ce fait, qui est l'inverse de ce que l’on supposerait à priori, 
tient à cette particularité que, lors de l'ascension expiratoire des pièces ster- 
nales, le sillon entre les éléments épisternaux et épimériens s’accusant davan- 
tage, les bords de ce sillon forment des bourrelets plus accusés. 

Dans les tracés ainsi obtenus, comme dans les précédents, les pauses sont 
toujours exclusivement inspiratoires. 


182 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


S LXXX. 


Étude des mouvements respiratoires du Dectique par In méthode des projections. 


L'insecte, privé de ses pattes, est fixé par les organes du vol serrés entre 
une plaque de liège et une lame de carton. Les mouvements respiratoires 
ne sont donc gênés en rien. Le grossissement employé est de 7 diamètres. 
Les observations ont été faites sur un mâle vigoureux. 

Lorsque le Dectique est placé le ventre en bas et de façon à fournir une 
silhouette du profil longitudinal, on voit naturellement les plaques sternales 
s'élever en expiration et s'abaisser en inspiration d’une façon rhythmique; 
mais l’abdomen étant projeté vers le haut d’une petite quantité, dans 
chaque mouvement expiratoire , les déplacements des arceaux tergaux sont 
masqués. 

On peut néanmoins s'assurer qu’il existe une véritable pause inspiratoire 
courte, que les segments thoraciques ne participent pas aux mouvements 
respiratoires et, enfin, que la longueur de l'abdomen ne change guère. Les 
dessins indiquent seulement un allongement en expiration de ‘;,, de cette 
partie du corps; valeur absolument négligeable, mais que je cite pour mon- 
trer jusqu'où peuvent aller les résultats de la méthode. 

Afin de résoudre les questions restées en souffrance, il convient de placer 
le Dectique dans la position inverse, les organes du vol en bas, la face 
sternale en haut et le dos reposant par un seul point, le bord postérieur du 
sixième arceau tergal, sur un petit support saillant (fig. 74, pl. VII). 

Les mouvements respiratoires restent aussi libres que dans le cas précé- 
dent, mais la projection de l'abdomen du côté dorsal, en expiration, est 
supprimée. 

Dans ces conditions, on observe, pendant l'expiration, non seulement la 
dépression des pièces sternales avec maximum d'effet vers la troisième, mais, 
en outre, le déplacement en sens inverse des arceaux tergaux !. Ainsi se 
trouve démontré ce fait que chez les Locustiens, comme chez nombre 


1 La descente des arceaux tergaux pour un animal dans sa position normale. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 183 


d’autres insectes, les arceaux sternaux et tergaux marchent à la rencontre 
l’un de l’autre durant la phase expiratoire. 

L’amplitude du mouvement des arceaux tergaux n’est que le quart de 
celle du déplacement des plaques sternales. La diminution totale du diamètre 
vertical de l'abdomen à la hauteur du troisième somite est de ‘/;;, par con- 
séquent moyenne (voyez § XCII). 

Un autre phénomène intéressant que présente le Dectique placé sur le 
dos, c’est l'existence incontestable d’une onde progressant d’arrière en avant; 
la dépression des plaques sternales 5, 6, 7 commençant un instant très 
court avant celle des plaques 2, 3, 4. 

J'ajouterai, comme détail de moindre importance, que chez l'insecte posé 
ainsi la face sternale en haut et un point du dos en contact avec la surface 
résistante, l’extrémité de l'abdomen se porte un peu, en expiration, du côté 
sternal, au lieu d’être projetée du côté dorsal, comme dans le cas d’un 
individu en situation normale. 

Enfin, en suspendant le Dectique verticalement, la face dorsale tournée 
vers la lampe, on obtient une silhouette sur laquelle on pent constater et 
mesurer la dépression des flancs en expiration. Celle-ci, qui offre son 
maximum vers le quatrième somite, soit dans la partie la plus large du 
corps, amène, en moyenne, une diminution du diamètre transfersal de 
l'abdomen de ‘},;. 

Cette étude, assez complète, permet de résumer avec netteté la série des 
mouvements respiratoires du Dectique. 


FAITS GÉNÉRAUX. 


1° Les segments thoraciques ne participent pas aux mouvements respiratoires ; ceux-ci 
sont localisés dans l'abdomen; 

% Les somites abdominaux changent de diamètre dans les deux sens , vertical et trans- 
versal, mais ne se déplacent pas les uns par rapport aux autres ; 

3e Là dilatation de l'abdomen en inspiration est plus lente que. la contraction expi- 
ratoire ; 3 

4°. Dans certaines positions de l'animal (peut-être dans tous les cas) les mouvements 
respiratoires progressent sous forme onde d'arrière en avant; 

5° Pendant les mouvements respiratoires l'abdomen oscille verticalement, mais ne change 
guère de longueur., 


184 


RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Faits spéciaux à chaque phase. 


Expiration. 


Le mouvement débute d’une façon brusque. . 
Il n’y a jamais de pause expiratoire. 


Les plaques sternales s'élèvent avec maximum d'effet 
vers la troisième. 

Le sillon compris entre les éléments épisternaux et 
épimériens s’approfondil. 

Les arceaux tergaux descendent d’une quantité quatre 
fois plus petite que le déplacement vers le haut des 
plaques sternales. 

Les flancs se dépriment légèrement. 


inspiration, 


L’inspiration est plus graduelle et à vitesse décroissante. 

Il existe une pause inspiratoire et même des arrêts en 
inspiration. 

Les plaques sternales’ s'abaissent. 


Le sillon s’efface en partie. 


Les arceaux tergaux s'élèvent. 


Les flancs reprennent leur position première, 


§ LXXXI. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DU DECTICUS VERRUCIVORUS. 


Mes dissections ont confirmé la description que donne Rathke du système 


CAA ANAN P 
AN PAN 7 


Fig. 54 X 2. — Moitié droite de l'abdomen du Dectique verrucivore ©, 


A, a Muscles longitudinaux dorsaux et sternaux. 


æ, B — expirateurs verticaux ascendants, 
g — — descendants. 
y — — transversaux. 


musculaire abdominal du Dec- 
tique etje pourrais, à la rigueur, 
renvoyer le lecteur au mémoire 
que j'ai déjà cité tant de fois; 
mais Rathke ayant représenté 
l'insecte ouvert par le dos, la 
comparaison des muscles du 
Dectique avec ceux des autres 
insectes figurés dans mon pro- 
pre travail, demande une cer- 
taine étude que j'ai voulu éviter 


à mes successeurs en publiant un dessin d’après un individu sectionné sui- 


vant un plan vertical. 


Laissant de côté les muscles longitudinaux dorsaux A et sternaux 4, dont 
la disposition est fort simple, on voit que tous les muscles respiratoires vrais 
naissent dans le sillon qui divise longitudinalement en deux la zone molle 
latérale et qu'ils partent tous des dépressions que ce sillon offre de distance 


en distance. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 185 


Trois catégories de petits muscles naissent de chacune des dépressions 
en question : 

1° Des muscles «, £, à direction verticale ascendante, se portant du fond 
du sillon à la partie inférieure des arceaux tergaux ; 

2° Des muscles plus faibles d à direction verticale descendante, se portant 
du fond du sillon sur les plaques sternales ; 

3°. Des muscles transversaux y, signalés pour la première fois par Bur- 
meister !, disposés au-dessus de la chaine nerveuse ventrale comme les 
barreaux d’une échelle et reliant le sillon droit au sillon gauche. 

Tous ces muscles sont expirateurs; leur contraction rend le sillon latéral 
plus profond et élève les plaques sternales. On remarquera que les muscles 
verticaux ascendants sont plus forts dans la région antérieure de l'abdomen, 
ce qui explique, en partie, pourquoi l’amplitude des mouvements respira- 
toires offre son maximum vers la deuxième et la troisième plaque sternale. 

Je wai trouvé aucune trace de muscles inspirateurs. Leur absence a une 
grande importance si l’on considère que les Acridiens possèdent des muscles 
inspirateurs développés et très nets. L'inspiration, chez les Locustiens, est, 
par conséquent, absolument passive. 


B. Lépidoptères. 


$ LXXXII. 


HISTORIQUE. — CONSTITUTION DE L’ABDOMEN. — MÉTHODES D'OBSERYATION. 


Les mouvements respiratoires des Lépidoptères, qu'il ne faut point con- 
fondre avec les vibrations ou les ondulations de l'abdomen de ces insectes 
lorsqu'on les enfile sur une épingle ou lorsqu'on les tient par les ailes, watti- 
rent pas immédiatement l'attention du naturaliste, comme ceux des Orthop- 
tères ou des Libellules; ils sont peu accusés et le plus souvent masqués 


1 Burmeister. Handbuch der Entomologie, op. cit., t. [, p. 284. Représentés plus tard par 
E. Blanchard chez la Sauterelle (voir p. 178). 


Tome XLV. 24 


186 RECHECHRES EXPÉRIMENTALES 


en partie par un revêtement épais d'écailles et de poils. Aussi les observa- 
tions ont-elles été rares. 

Sorg ! a compté les mouvements respiratoires chez le Deilephila euphor- 
biae; Newport ? a fait quelques remarques sur la façon dont l'exercice 
modifie le rhythme respiratoire du Sphinæ ligustri et a cherché à déter- 
miner, chez de grands Lépidoptères plongés dans l’eau, si lexpulsion de 
lair par les orifices stigmatiques avait lieu avec la même force par tous les 
stigmates ou bien si elle était plus abondante pour certains stigmates déter- 
minés 5, Nitzsch + et Carus * paraissent avoir vu les mouvements respira- 
toires de quelques Papillons, mais ne donnent aucune description. Enfin, 
Rathke 5, qui est en général si explicite, ne consacre que six à sept lignes 
de son mémoire aux mouvements de respiration des Lépidoptères qu'il com- 
pare à ceux des Panorpes. Il dit avoir constaté que ces mouvements sont 
tantôt plus apparents vers la base de l'abdomen, tantôt plus visibles vers 
son extrémité; mais il ne cite pas de forme spécifique et ne fournit aucune 
indication quant aux muscles. 

Pour se faire une idée claire de la structure de l'abdomen des Lépidop- 
tères et pour voir nettement 
les relations qui existent entre 
les arceaux dorsaux et ster- 
naux, il faut évidemment en- 
lever, par le frottement, la 
presque totalité du revête- 
ment écailleux (fig. 52). On 
constate alors, comme Rathke l’a fort bien indiqué en quelques mots, que, 
dans la plupart des segments, les arceaux tergaux et sternaux sont séparés, 
à la hauteur des flancs, par une zone latérale molle, très large, portant les 


Fig, 52 X 3. — Structure de l'abdomen d’un lépidoptère (Smerinthus). 


4 Sorc. Disquisitiones physiologicae circa respirationem Insectorum, ete., op. cit., p. 66. 

2 Newport. On the temperature of Insects, etc. (Pnicos. Trays. oF THE ROYAL SOCIETY, 
part. II, p. 292, tableau V. 1837.) 

3 Newport. On the respiration of Insects, op. cit., p. 548. 

4 Nirzsou. Commentatio de respiratione animalium. Vitebergae, 1808. 

5 Carus. Traité élémentaire d'anatomie comparée, op. cit., p. 336. 

6 Raruke. Anatomisch-physiologische Untersuchungen , etc., op. cit., p. 107. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 187 


stigmates '. Les arceaux supérieurs ne chevauchent done point sur les infé- 
rieurs et il existe, par conséquent, une certaine ressemblance générale entre 
la structure de l'abdomen des Lépidoptères et celle de l'abdomen des Panorpes 
et des Sialis. 

Cette ressemblance ne concerne pas seulement l'aspect extérieur; je 
montrerai plus loin que la disposition des muscles s'éloigne peu de celle que 
J'ai observée chez les Névroptères propres. | 

J'ai déjà dit ailleurs, $ IV, pages 11 et 47, pourquoi je n'avais pu appliquer 
la méthode graphique aux grands Lépidoptères. L'emploi de ce procédé serait, 
du reste, tout aussi impossible avec les Hyménoptères porte-aiguillon et avec 
beaucoup d’autres insectes à mouvements vifs et à abdomen très mobile. 

Restait la méthode des projections pour les Lépidoptères de taille moyenne. 
Par suite de circonstances indépendantes de ma volonté, je nai pu soumettre 
à l'expérimentation qu’un petit nombre de ces animaux. Les résultats que 
j'ai obtenus suffisent cependant, me semble-t-il, pour montrer 1° que la 
forme des mouvements respiratoires des Lépidoptères doit les faire ranger 
dans le troisième type et 2° que ces mouvements sont, en général, si faibles, 
si obscurs, qu'il faut considérer les Papillons, et surtout les formes nocturnes, 
comme les plus mauvais sujets d'observation que l’on puisse choisir. 

Avant d'aborder l'exposé des faits constatés, je crois devoir revenir sur 
une cause d'erreur que je signalais au début de ce paragraphe. Lorsque l'on 
fixe à l’aide d'épingles traversant les parties latérales du thorax, ou de toute 
autre facon, un Lépidoptère dont on a coupé les ailes, l'animal imprime, 
soit continuellement, soit par phases, à son abdomen et même à son corps 
entier, des mouvements oscillatoires d’une si grande rapidité que le terme 
de vibrations leur est applicable. L’observateur non prévenu pourrait prendre 
ces mouvements pour des mouvements respiratoires rapides. Ce serait là une 


1 On trouve des figures représentant l’abdomen des Lépidoptères dénudé dans : 
Lvoner. Recherches sur l'anatomie et les métamorphoses de différentes espèces d Insectes. | 
(OEuvre posthume publiée par W. de Haan, pl. XLVI, fig. 4. Paris, 1832.) i 
Burcess. Contributions to the anatomy of the Milk-Weed Butterfly (Danais archippus). | 
(ANNIVERSARY MEMOIRS OF THE Boston SOCIETY or NATURAL HISTORY, pl. 1, fig. 1. Boston, i 
1880.) |} 


188 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


faute grave; les mouvements respiratoirés vrais des Lépidoptères sont géné- 
ralement lents. Les vibrations, probablement entièrement étrangères à l'acte 
respiratoire, sont dues aux contractions rapides des muscles thoraciques, 
moteurs des organes du vol. 

J'ai étudié, ou plus exactement, essayé d'étudier le mécanisme respiratoire 
des formes suivantes : Smerinthus tiliae, Sesia apiformis, Arctia men- 
thastri, Euchelia jacobaeae, Pygaera (Phalera) bucephala, Triphaena pro- 
nuba, Triphaena fimbria et Pieris napi. Afin d'abréger, je me bornerai à 
la description des expériences concernant Pieris napi el Euchelin jacobacae. 


$ LXXXII. 
PIERIS NAPI 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'insecte est fixé par une seule épingle traversant le mésothorax ; les ailes 
ont été enlevées, ainsi que les pattes de la paire postérieure (fig. 75, pl. VID). 

Les mouvements respiratoires sont lents (quatre par minute, en général) 
et ont lieu de la façon suivante : en expiration, les arceaux tergaux de 
l'abdomen semblent immobiles, mais les arceaux sternaux s'élèvent d’une 
manière marquée. On observe, le plus souvent : 1° l'ascension des quatre 
premiers arceaux sternaux apparents, puis, immédiatement après, lorsqu'ils 
ont repris leur position inspiratoire; 2° l'ascension des trois arceaux ster- 
naux postérieurs; 3° enfin un arrêt en inspiration. 

L'onde n’est cependant pas constante; par moments, la face sternale de 
l'abdomen se déprime en entier, dans toute sa longueur. 

La diminution du diamètre vertical de l'abdomen en expiration est d’un 
peu plus de ‘/,,. Les segments thoraciques paraissent immobiles et la longueur 


de l'abdomen reste invariable. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 1489 


$ LXXXIV. 


EUCHELIA JACOBAEAE. 


Les observations sur les mouvements respiratoires abdominaux ont été 
faites à l’aide d’un individu fixé par les ailes; celles qui concernent les seg- 
ments thoraciques ont été effectuées en se servant d’une Euchelie privée des 
organes du vol et fixée par une épingle traversant le mésothorax. Dans tous les 
cas l'abdomen était libre (le grossissement employé était de 11 diamètres). 

Les mouvements respiratoires, assez nets pour un Lépidoptère, consistent 
en rapprochements et éloignements alternatifs des arceaux tergaux et ster- 
naux de l'abdomen. Ces mouvements sont surtout accusés pour les segments 
4 et 5 de la région moyenne. En expiration, les arceaux sternaux s'élèvent 
et glissent un peu d'arrière en avant; en même temps, l’abdomen s’incurve 
vers le bas et s'allonge de '/z; environ. 

L'association des deux genres de mouvements que je viens d'indiquer, 
mouvements d’incurvation de l'abdomen et mouvements des arceaux dans le 
sens vertical, produit l'illusion d’une onde; mais il est aisé de s'assurer que 
les mouvements respiratoires vrais sont simultanés dans tous les somites et 
non progressifs. 

La diminution du diamètre vertical de labdomen, en expiration, est 
de ‘hi. 

$ LXXXY. 


RÉSUMÉ DES OBSERVATIONS SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES LÉPIDOPTÈRES. 


Je crois pouvoir résumer de la façon suivante les observations que j'ai 
faites sur les huit formes énumérées à la fin du § LXXXII. 


1° Les segments thoraciques des Lépidoptères au repos ne semblent pas participer aux 
mouvements respiratoires ; 

2° En expiration, les arceaux tergaux et sternaux se rapprochent et les flancs se dépriment. 
Le déplacement des arceaux sternaux vers le haut l'emporte, en général; 

30 Comme l’a fort bien remarqué Rathke, ces mouvements respiratoires sont tantôt plus 
apparents vers la base de l’abdomen, tantôt vers son extrémité; 

4 Chez plusieurs Lépidoptères, mais non chez tous, les mouvements respiratoires sont 
successifs, progressent sous la forme d'onde; 

5° La longueur de l'abdomen reste invariable ou change peu ; 

6° Les arrêts ont toujours lieu en inspiration. 


190 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 
$ LXXXVI. 


MUSCLES RESPIRATOIRES DES LÉPIDOPTÈRES. 


Je wai trouvé nulle part de description ou de figure concernant le système 
musculaire abdominal des Lépidoptères à l'état parfait. Les travaux mono- 
graphiques de Lyonet !, de Newport ?, de Cornalia 5 et de Burgess + pré- 
sentent tous la même lacune. Ce sujet d'étude, cependant, assez intéressant, 
parait avoir été complètement négligé. 

J'ai examiné les muscles de l'abdomen du Smerinthus tiliae, de lArctia 
menthastri et de la Pygaera bucephala. 
J’exposerai d'abord ce que j'ai observé 
4 chez la troisième de ces formes, parce 

que la disposition y est plus simple 

(fig. 53). 

Chez la Pygaera, les muscles lon- 
gitudinaux tergaux et sternaux À, 4 
sont très développés et, comme lin- 
dique la figure, cachent, en partie, les 


NL 


À 


Saa Duff 


Fig. 53 X T. — Pygaera bucephala Q. 


Muscles des somites 3 et 4 de la moitié droite de l'abdomen. 


A et a Muscles longitudinaux dorsaux et sternaux. 
œ Muscles expirateurs verticaux. 

Sur la gauche de la figure, le somite 3 a élé figuré une 
deuxième fois, mais privé de la plupart des muscles lon- 
gitudinaux, de façon à mettre à nu le muscle expirateur æ 
dans toute son étendue. 


insertions des muscles respiratoires 
vrais «. Ceux-ci, de même que chez les 
Muscides, ne consistent qu’en une cou- 
che de fibres musculaires verticales, 
croisant la zone molle latérale qui 


porte les stigmates et se rendant des arceaux inférieurs aux arceaux supé- 
rieurs. L'ensemble s'éloigne peu de ce qui existe chez les Névroptères du 
genre Sialis (fig. 56), bien que, chez les Sialis, les muscles expirateurs 


soient différenciés en faisceaux distincts. 


4 Lyoner. Recherches sur Vanat. et les métamorph. de différentes espèces d'insectes, op. cit. 
2 Newport. On the nervous system of the Sphinx Ligustri, part. I. (Paizos. trans., part. H, 
p. 289, 1834.) 
3 CorxaLiA. Monografia del Bombice del Gelso. (Memorie DELL’ R. ISTITUTO LOMBARDO, 
vol. VI.) Tiré à part. Milan, 1856. 
t Burcess. Contribution to the anatomy of the Milk- Weed Butterfly, op. cit. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 191 


En consultant les figures publiées par Lyonet !, Newport ? et Cornalia * du 
système musculaire des chenilles de Cossus, de Sphinx et de Sericaria, on 
retrouvera immédiatement les mêmes expirateurs verticaux croisant la zone 
stigmatifère. Ce sont les muscles latéraux de Lyonet, les muscles transverses 
latéraux de Newport et les muscles communs à et 8 de Cornalia. Ces muscles 
persistent donc, sans grande modification, chez le Lépidoptère adulte, et il 
est à remarquer que Newport, en les décrivant chez la chenille du Sphinx 
ligustri, dit, en propres termes, que « ces faisceaux musculaires paraissent 
» avoir pour fonction de contracter les segments en expiration 4. » 

Si nous passons actuellement au Smerinthus tiliae (fig. 54) et à l'Arcria 
menthastri, nous trouvons une 
structure anatomique un peu 
plus complexe. 

La couche musculaire a, ob- 
servée chez la Pygaera, existe 
ici aussi et joue évidemment le 
même rôle expirateur, mais le 
bord antérieur de chaque somite 
présente, au-dessus de la zone 
molle portant les stigmates, un 
apodème saillant donnant inser- 


Fig. 4, X 34. — Smerinthus tiliae g. 


Muscles de lä moitié gauche de l'abdomen. La préparation étant étalée 


à plat, la largeur de l'abdomen paraît exagérée. tion à un muscle assez fort D, 
A Muscles longitudinaux dorsaux. dirige ] i RUZ l l : 
D Faisceaux obliques résultant d'une différenciation des muscles dirigé obliquement vers le haut 


précédents. 
a,b Muscles longitudinaux sternaux. 


æ Muscles expirateurs verticaux. la région antérieure de l'arceau 


et en avant et se terminant sur 


tergal qui précède immédiatement. 
Les muscles D en question, naissant au-dessus de la zone molle, appar- 
tiennent exclusivement aux arceaux tergaux et me semblent constituer des 


1 Lyoner. Traité anatomique de la Chenille qui ronge le bois de saute, pl. VIL, fig. 5 et 6: 
8, y, à. La Haye, 1842. 

2? Newporr. On the respiration of Insects, op. cit., p. 539, pl. XXXVI, fig. 1. 

3 CoRNALIA. Monografia del Bombice, etc., op. cit., p. 152, pl. VII, fig. 108. 

4 Newport, On the respiration of Insects, op. cit., p. 40. 


192 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


subdivisions obliques des muscles longitudinaux dorsaux analogues à celles 
que nous offrent d’autres insectes. Leur direction permet peut-être de les 
regarder comme aidant à l'expiration. 

Je wai rencontré aucun muscle inspirateur; l'inspiration dés Lépidop- 
tères est donc passive. 


C. Névroptères propres. 


La forme des mouvements respiratoires des Phryganes et la disposition de 
leurs muscles m’ayant conduit à placer ces insectes dans le deuxième type, 
à la suite des Hyménopitères porte-aiguillon, il ne saurait être question des 
Phryganides, dans le chapitre actuel, qu’à un point de vue comparatif. 

Les autres Névroptères propres dont j'ai pu étudier le mécanisme respi- 
ratoire appartiennent aux genres Panorpa, Chrysopa et Sialis; ils consti- 
tuent un petit groupe homogène qui se range très naturellement dans le 
troisième type, à côté des Lépidoptères. 

On trouvera ci-dessous le résumé des observations parfaitement exactes 
de Rathke sur les Panorpes, seuls Névroptères vrais dont les mouvements de 
respiration aient fait, jusqu'à présent, l’objet d’un examen. 


$ LXXXVII. 


PANORPA COMMUNIS. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


L'abdomen des Panorpes femelles se compose, on le sait, de six segments 
cylindriques assez larges, suivis de trois segments plus 
= étroits, formant une sorte de queue ou de pondoir très 
mobile. Les mouvements respiratoires vrais ayant lieu 


Fig. 38 X 1. seulement dans la partie élargie, je n'insisterai que sur 
Panorpa communis 9. Ja structure de cette portion. Les arceaux tergaux et ster- 
Surfaces extérieures i ES, j 
des somites 2, 3, 4 et 5, de DAUX sont ici séparés, le long des flancs, par une zone 
EAN molle d'une grande hauteur, offrant quelques plis irré- 


guliers, mais sensiblement plane durant la phase inspiratoire ou de repos. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 193 


Rathke”, qui a étudié les mouvements respiratoires des Panorpes, les carac- 
térise très nettement en quelques mots, en disant que la membrane unissante 
se déprime un peu en expiration pour les premiers anneaux de l'abdomen et 
qu’en même temps le diamêtre vertical de cette région du corps diminue. 

Pour ma part, j'ai cru un moment à l'impossibilité d'employer les Panorpes 
dans l’appareil à projection, ces animaux fixés, imprimant à leur long abdomen 
flexible des mouvements continuels d’une grande énergie; mais, me rappelant 
que les mouvements respiratoires continuent avec assez de régularité chez 
les insectes décapités, j'ai enlevé la tête aux Panorpes en expérience et j’ai 
pu alors suivre très facilement les déplacements expiratoires et inspiratoires. 

Les conditions expérimentales sont donc : insecte décapité, fixé par les 
ailes; abdomen libre; grossissement 12. 

Les mouvements respiratoires ont lieu comme Rathke les a décrits et je 
n'ai à y ajouter que quelques détails. 

La zone molle des flancs se déprime, en expiration, pour les somites 
2, 3, 4 et faiblement pour le somite 5. La silhouette de la face sternale de 
l'abdomen indique nettement des diminutions dans le diamètre transversal 
des anneaux que je viens de citer et montre, de plus, que le mouvement est 
simultané pour tous, qu'il n’y a pas d'onde. Pendant ce temps, les plaques 
sternales se soulèvent; comme ce mouvement a surtout lieu pour les pre- 
miers anneaux abdominaux, il en résulte que le profil longitudinal de la 
face inférieure de l'abdomen devient concave et que toute la partie abdo- 
minale du corps s’incurve un peu vers le bas. 

L’abdomen se relève naturellement de la même quantité en inspiration ; 
de là de petites oscillations rhythmiques avec lesquelles il ne faut pas con- 
fondre les mouvements dont je parlais plus haut. 

De temps en temps la Panorpe contracte brusquement le premier somite 
de la partie caudale rétrécie; ce qui détermine un allongement brusque de 
cette région. Mais ce mouvement spécial est absolument étranger à lacte 
respiratoire et, dans la respiration calme et régulière, la longueur de l’abdo- 


men reste sensiblement la même. 


1 Rarure, Analtomisch-physiologische Untersuchungen , ete., op. cit., p. 107. 


Tome XLV. 


O 
o 


194 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


S$ LXXXVII. 


CHRYSOPA VULGARIS. 


(Útude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Les anneaux abdominaux se composent d’arceaux tergaux et sternaux à 
peu près égaux, unis le long des flancs par une bandeletie cutanée molle, 
fort étroite, ne faisant pas saillie au dehors et susceptible de se déprimer en 
dedans dans la phase expiratoire. 

Les deux premiers somites de l'abdomen ont un diamètre notablement 
plus faible que ceux qui suivent et présentent des parois tégumentaires plus 
molles. On verra qu'il existe peut-être une relation entre ce détail anato- 
mique et certains mouvements exécutés par les Chrysopes. 

L’insecte est suspendu par les ailes qui sont rassemblées au-dessus du 
thorax et serrées entre une petite plaque de liège et une lamelle de carton. 
Le grossissement employé est de 11 diamètres environ. Il faut naturellement 
faire abstraction des oscillations violentes que la Chrysope imprime parfois à 
son abdomen lorsqu'elle fait des efforts pour se détacher. 

Dans une première expérience, l’abdomen est libre et pend presque 
verticalement; il présente de petits balancements rhythmiques d’une faible 
amplitude, mais assez accusés cependant pour masquer les changements de 
diamètre s'il en existe. Les deux seuls faits à noter sont : 4° l'absence 
d’allongements et de raccourcissements; 2° des mouvements d’abaissement 
prononcés des faces tergales des somites 4 et 2, séparés par des intervalles 
de temps beaucoup plus longs que ceux qui séparent les petites oscillations 
de l'abdomen, J'ai compté de quatre à huit oscillations abdominales entre 
deux rétrécissements des somites de la base. 

Ce premier essai montre la nécessité de soutenir l'extrémité de l'abdomen 
si l’on veut obtenir des résultats quelque peu nets. On recommence done en 
faisant reposer, cette fois, le septième segment sur une épingle pliée à angle 
droit. Il est aisé de constater, dans ces nouvelles conditions, qu'il existe des 


augmentations et des diminutions alternatives et rhythmiques du diamètre 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 195 


vertical de la plupart des somites. L’abdomen s'abaisse légèrement lors de 
chaque contraction. 

L'examen de l'animal à la loupe montre aussi des mouvements rhythmi- 
ques de rentrée et de sortie des flancs et je suis disposé à croire, sans pouvoir 
l'affirmer cependant d’une façon absolue, que les augmentations du diamètre 
vertical sur les silhouettes répondent aux dépressions des flancs et, par 
conséquent, à l'expiration. Ce fait permettrait, malgré des différences assez 
importantes, de rapprocher les mouvements respiratoires des Chrysopes de 
ceux des Libellules. 

J'ajouterai que les segments thoraciques semblent immobiles, que la 
longueur de l'abdomen ne varie pas et enfin que les mouvements de respi-* 
ration paraissent progressifs. Il existerait donc une onde. 

Quant aux mouvements amples et espacés des arceaux tergaux des deux 
premiers somites abdominaux, je les ai réobservés lorsque l'abdomen était 
soutenu, et je les ai même étudiés directement à la loupe, mais cet examen 
ne m'a rien appris quant à leur rôle. 


S$ LXXXIX. 
SIALIS LUTARIA. 


(Étude des mouvements respiratoires par la méthode des projections.) 


Les anneaux abdominaux des Sialis ont une structure typique : les arceaux 
tergaux et sternaux, de dimensions à peu près égales, ne chevauchent point 
lun sur l’autre et sont réunis, à la hauteur des flancs, par une zone mem- 
braneuse à découvert, portant les stigmates et marquée de plis longitu- 
dinaux. 


La forme et le mode d'implantation des ailes ne m'ont pas permis de fixer 
l'insecte par les organes du vol; j'ai donc été obligé d'enlever les ailes et les 
pattes et d’enfiler l'animal sur une épingle traversant la région antérieure du 
thorax. L'abdomen a été laissé libre; le grossissement employé était de 
12 diamètres (fig. 76, pl. VID). 


196 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Comme beaucoup d'insectes placés dans ces conditions, la Sialis lutaria 
exécute deux espèces de mouvements : 1° de fortes incurvations de l'abdomen 
n'ayant rien de commun avec les mouvements respiratoires; 2° des mouve- 
ments respiratoires vrais. Ces derniers consistent essentiellement en rappro- 
chements et écartements des arceaux tergaux et sternaux, déterminant des 
diminutions et des augmentations alternatives du diamètre vertical. 

Quelques détails sont à noter : 

1° Les segments thoraciques postérieurs restent immobiles ; 

2 Les plus grands déplacements verticaux des arceaux dorsaux et ster- 
naux ont lieu vers le milieu de la longueur de l'abdomen, au niveau des 
somites 4, 5; la diminution du diamètre vertical en expiration est de fio. 
Les deux derniers somites abdominaux ne participent pas à ces modifi- 
cations; 

3° Pendant la phase expiratoire, l'extrémité de l'abdomen se relève 
un peu; 

4° Les mouvements respiratoires sont progressifs. Ainsi, par exemple, 
l'expiration est presque terminée dans les somites 4, 5, alors qu'elle com- 
mence dans le somite 6; 

5° Malgré la forme allongée de l'abdomen, il n'existe aucun déplacement 
dans le sens longitudinal; la longueur ne varie pas. 


S KU 


MUSCLES RESPIRATOIRES DE LA SIALIS LUTARIA. 


Les mouvements respiratoires des Phryganes (page 157) diffèrent pro- 
fondément de ceux que nous venons d'étudier chez les Sialis. 


De pareilles dissemblances dans le mécanisme respiratoire, alors qu'il 
existe incontestablement beaucoup d’analogie dans la structure des somites 
abdominaux, ne peuvent s'expliquer que par des différences notables dans 
la disposition des muscles; aussi, malgré les difficultés pratiques de la dissec- 
tion, ai-je tenu à mettre sous les yeux du lecteur des figures exactes des 
muscles respiratoires des deux types à comparer (fig. 44 et fig. 56). 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 197 


Comme il est facile de le constater, le système musculaire des Sialis res- 
semble à celui des Coléoptères, des Blattes 
et des Lépidoptères à disposition simple. 
Outre des muscles longitudinaux dorsaux 


AT a sternaux, il existe des muscles expira- 
teurs « à peu près verticaux, croisant la 
3 Zone molle des flancs et reliant chaque 


>. arceau tergal à l’arceau sternal correspon- 
= æ dant. Ces muscles caractéristiques, que 


Y je mai pas trouvés chez les Phryganes, 

Fig. 56 X 20. — Sialis lutaria. sont évidemment les seuls agents actifs 
veat slat goto pode ak Taatou dans le rapprochement des arceaux de 
5 de Den à Fire l'abdomen et dans la diminution du dia- 


œ Muscles expirateurs verticaux. 


mètre vertical de celui-ci. J'ai inutilement 
cherché des traces de muscles inspirateurs; l'inspiration est donc, encore 
une fois, passive. 


oh 


198 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


CHAPITRE VII. 


RÉSUMÉS ET CONCLUSIONS. 


Je résume ci-dessous l’ensemble des résultats de mes recherches. Les 
uns sont des faits nouveaux; les autres sont la confirmation de faits déjà 


connus, mais qui demandaient à être vérifiés à l’aide de méthodes rigou- 
reuses. 


$ X0. 


RELATION ENTRE LA STRUCTURE ANATOMIQUE ET LA FORME DES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES. 
MOUVEMENTS ABDOMINAUX ET MOUVEMENTS THORACIQUES. 


1° Il wexiste point de relation étroite entre la forme des mouvements 
respiratoires d’un insecte et la place occupée par celui-ci dans les classifi- 
cations zoologiques. Les mouvements respiratoires ne sont analogues que 
lorsque la structure des anneaux abdominaux et surtout la disposition des 
muscles qui les meuvent sont à peu près les mêmes. 

L'importance de la disposition musculaire est prépondérante et la simili- 
tude dans la direction et l'insertion des muscles parait suffire pour déter- 
miner une ressemblance dans les mouvements de respiration. 

Comme exemples de la proposition ci-dessus, on peut citer les Blattes 
que leurs mouvements respiratoires font mettre à côté des Hémiptères hété- 
roptères, les Phryganes qu'il faut distraire des Névroptères propres pour 
les ranger à la suite des Hyménoptères porte-aiguillon, les Locustiens que 
j'ai dù détacher des Orthoptères pour les rapprocher des Lépidoptéres et des 
Névroptères ; 

2 Les mouvements respiratoires des insectes (au repos) sont localisés 
dans l'abdomen de ces animaux (confirmation d’une observation déjà ancienne 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 4199 


que V. Graber ! a pittoresquement rappelée, en disant que les insectes ont 
la poitrine placée à la partie postérieure du corps). S'il existe des mouvements 
respiratoires thoraciques, ceux-ci ne proviennent point de l’action de muscles 
particuliers; ils n’ont lieu que par entrainement ou comme conséquence des 
mouvements de certaines parties des somites abdominaux ; 
3° Dans le plus grand nombre des cas, les segments thoraciques ne par- 
ticipent pas aux mouvements respiratoires chez l'insecte posé. Les déplace- 
ments respiratoires des segments postérieurs du thorax sont, cependant, 
moins rares que ne le croyait Rathke. Je les ai observés chez les formes 
suivantes : 
TABLEAU I. 
A. Faces tergales des anneaux thoraciques se déplaçant dans le même sens que les arceaux 
tergaux de l'abdomen (abaissement en expiration). 


Mouvements très nets. 


Méso- Méta- 
à thorax. thorax. 
Staphylinus pubescens , . . . , . g + 
— caesareus + + 
— US NE MN RES oi + + 
ChIGTOPHANUS HITS EEE ER, “+ + 
COLYMPNOSIAUS RES MORE. | + + | 
Mouvements plus faibles. . 
Hydrophilus piceus + + 
Carabus auratus. + 
Tenebrio molitor . . + 


“fs | 
B. Faces tergales des anneaux thoraciques se déplaçant en sens inverse des arceaux tergaux 
de l'abdomen (ascension en expiration). 


+ | Mouvement de bascule en avant. 
1) 


Melolontha vulgaris . + 


+ 


Periplaneta orientalis, 
i 


C. Faces sternales des anneaux thoraciques participant aux mouvements respiratoires. 


Forficula auricularia . 


Periplaneta- orientalis. < . 4. 1 + 


Plas de quarante autres formes appartenant à des groupes très divers, 
examinées à ce point de vue spécial, ne m'ont offert aucun mouvement 
respiratoire thoracique méritant la peine d’être signalé. 


1 GRABER., Die Insekten, op. cit., 4 Theil, p. 407. 


200 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


$ XCIL 


DIMINUTION DU DIAMÈTRE VERTICAL DE L'ABDOMEN EN EXPIRATION. 


4° Si l'on néglige tous les détails et toutes les exceptions, les mouvements 
respiratoires des insectes consistent en diminutions et rétablissements alter- 
natifs de l’ensemble des deux diamètres vertical et transversal de l'abdomen ?. 

La diminution des diamètres en question répond à l'expiration; le retour 
de ces diamètres à leurs dimensions premières répond à l'inspiration. 

La diminution expiratoire du diamètre transversal (vulgairement rentrée 
des flancs), souvent faible, peut être tellement minime qu'elle passe inaperçue. 
D'un autre côté, la diminution, en expiration, du diamètre vertical, généra- 
lement très nette, existe toujours ?. 

Le tableau suivant renferme les valeurs relatives de la diminution expi- 
ratoire du diamètre vertical, mesurées sur les silhouettes. 


TABLEAU IIE 


` 


DIMINUTION DU DIAMÈTRE VERTICAL DE L'ABDOMEN EN EXPIRATION. 


A. Diminution très marquée comprise entre 1/5 et 4/10. 


Valeur 

T, Région du corps où la mesure a élé prise. 
Stenobothrus variabilis . , . , . . LA 4e somite abdominal. 
Libellula quadrimaculata, . . . . ta Région moyenne de l'abdomen, 
Melolontha vulgaris aira siie tiraa 1/4 à iy 3e somite abdominal. 
Hydrop MUS piceus e a E a 1/3 à 1/9 | 2e somite = 
Cicindela hybrida . M a . , . . . | 1}; à Mo | 2e somite -- 
Periplaneta orientalis, . . . . . . 18 Entre les somites 2 et 5. 
Étistalis tenak Re on 1/9 2e somite. 


1 Paye du corps étant horizontal, comme chez l'insecte posé. 
2 Elle peut être, mais très rarement, masquée sur les silhouettes par la formation de 
plis saillants, etc. 


in 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 201 


B. Diminution de valeur moyenne comprise entre 4/10 et oo 


Chlorophanus viridis . 
Corymbites latus 
Oryctes nasicornis . 
Chrysis ignita. - 
ASUS amea . 
Phryganea striata . 
Sialis lutaria . . 
Onthophagus nuchicornis 
Crioceris merdigera 
Stethophyma grossum. 
Pieris napi 

Decticus verrucivorus. 
Staphylinus pubescens 
Tipula gigantea . 
Syrphus ribesii . 
Arctia menthastri . 
Tenebrio molitor 
Euchelia jacobaeae. 
Calliphora vomitoria . 
Clytus arietis. . . 
Colymbetes fuscus. . 
Trichius abdominalis . 
Forficula auricularia . 


Valeur 
de la 
diminution. 


1/ 
"10 

1! 
‘10 

1/40 


140 


Région du corps où la mesure à été prise. 


3e et 4€ somites abdominaux, 
3e somite abdominal. 

3° somite — 

4er somite apparent. 

2e somite abdominal. 

4e et 5e somites abdominaux. 
e somite abdominal, 


S 


e somite — 
e somite — 


3e et 4e somites abdominaux. 

2e somite abdominal. 

3e somite — 

Limite entre le méso- et le métathorax. 
3e somite abdominal, 

2e et 3e somites (en expiration active). 
8e somite abdominal. 

2e et 3e somites abdominaux. 

4e et je somites — 

2e somite abdominal, 

3e somite — 

2e et 4e somites abdominaux. 

3e somite abdominal. 


4er somite — (avec doute). 


C. Diminution très faible en dessous de 1/90. 


Staphylinus caesareus. 
Dytiscus marginalis 
Staphylinus olens . 
Donacia simplex 
Tabanus bovinus 
arabus auratus. 
Chrysomela staphylea. 
Nepa cinerea . 
Anthophora retusa . 
Apis mellifica. 

Vespa germanica. 
Bombus muscorum, 
Triphaena pronuba, 
Sesia apiformis . 


9e somite abdominal. 

3e somite es 

Métathorax. 

2e somite abdominal, 

2e et 3e somites abdominaux. 
4e somite abdominal. 

2e somite — 

2e somite — 

8e somite x 

Vers le 4e somite abdominal, 
Avec doute, 

Difficile à mesurer exactement. 
3e et 4e somites abdominaux. 
5e somite abdominal (avec doute). 


La valeur de la diminution du diamètre vertical en expiration n’a pu être 
déterminée, pour des motifs divers, chez Scatophaga stercoraria, Panorpa 
communis, Triphaena fimbria et Pygaera bucephala. D'un autre côté, par 

Tome LXV: 


26 


EET 


#3 | 


202 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


suite de causes qui ont été exposées dans les chapitres précédents, le dia- 
mètre vertical semble exceptionnellement augmenter chez Chrysopa vulgaris 
de le, Coccinella septempunctata de ‘}, et Telephorus fuscus de ‘|. 


$ XCII. 


TYPES RESPIRATOIRES ; CHANGEMENTS DE LONGUEUR DE L'ABDOMEN. 


5° Bien que la diminution expiratoire du diamètre vertical s'effectue 
constamment par le rapprochement des arceaux tergaux et sternaux des 
somites de l'abdomen, on a constaté, depuis longtemps, entre les formes des 
mouvements respiratoires des insectes, des différences déterminées par la 
structure des somites et par la disposition des muscles qui en meuvent les 
diverses parties. J'ai admis /rois types respiratoires principaux reliés les uns 
aux autres par quelques transitions (voir pour la description de ces types et 
les subdivisions qu'ils comportent, le chapitre II, $ IX, pages 27 à 33). 

6° Contrairement à une opinion ancienne, les changements de longueur 
de l'abdomen, dans la respiration normale, par suite de la sortie et de la 
rentrée des somites les uns dans les autres, sont rares chez les insectes. Ces 
mouvements longitudinaux ne s’observent, dans tout l’ensemble d’un groupe, 
que chez les Hyménoptères porte-aiguillon. Dans les autres subdivisions 
zoologiques, on peut en rencontrer quelques exemples isolés. 

J'ai réuni, sous forme de tableau, les noms des insectes chez lesquels 


j'ai observé des changements respiratoires dans la longueur de la région 


abdominale, ainsi que la valeur de ces changements. Cette valeur est indiquée 
en fractions de la longueur de Pabdomen. 
TABLEAU TII. 
A. Raccourcissement de l'abdomen en expiration, 


1° Hyménoptères porte-aiguillon, 


Apis mellifica (excitée), 2, , © | 1%, de la longueur de l'abdomen. 
— (CAMES a o 1/6 — -— 
Vespa germanica + + + u : … Tia — — 
Bombus: muscorum. . . r . . ai is ae 1 
A E ur  c 4  + Lo — V2. 


Anthophora retusa. . s , , . . . 139 ee — 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 205 


2° Autres insectes. 


Phryganea striata : 0. . +... . 1/30 de la longueur de l'abdomen. 
CICIMUÈIA YEAR RES RTS ‘40 Er r 
Sesia ADHOT MIS a ARa RL SE Agg ~ S 
Oryotos nasiconmis eare ea e A = = 


B. Allongement de l'abdomen en expiration. 


10 de la longueur de l'abdomen. 


ELISTAS TONER ERNEST EN ET | 9 

Coccinella septempunctata . RS — N 

Stenobothrus variabilis . . . . ... | 50 — es 

Periplaneta orientalis , 4/50 — pas 

Euchelia jacobaeae . | 1/6 pa S 

Syrphus ribesii . (Less = — (en respiration très active). 
Arctia menthastri . | 160 a4 FE 

Decticus verrucivorus. Vis — — (avec doute; valeur négligeable). 


L'abdomen conserve une longueur invariable chez plus de quarante autres 
formes que j'ai étudiées à ce point de vue. 


$ XCIV. 


MOUVEMENTS RESPIRATOIRES PROGRESSIFS. 


7° Les naturalistes qui se sont occupés des mouvements respiratoires des | 
Arthropodes, ont cru constater que, chez beaucoup d'insectes, ces mouve- | 
ments étaient progressifs et se propageaient comme une onde, soit de la base 
de l'abdomen vers la pointe, soit du milieu vers les deux extrémités. 
Cette onde est, au contraire, un phénomène exceptionnel. Elle parait faire 
défaut dans des groupes entiers et n'apparait dans d’autres que pour des 
formes isolées. | 
TABLEAU LV. 


Sur 63 insectes appartenant à tous les ordres principaux, je n’en ai rencontré que 9 dont 
. i . 2 
les mouvements expiratoires aient lieu d’une manière progressive. Ce sont : 


Tenebrio molitor +. Sialis lutaria. 
Decticus verrucivorus. Chrysopa vulgaris. 
Nepa cinerea. . Pieris napi. 
Tipula gigantea. Sesia apiformis. 
Asilus. 
# 


1 Dans ma communication préliminaire, j'ai dit à tort, page 11 (6°), que l'onde manquait 


1 chez {ous les Coléoptères. 


204 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Quelques faits me paraissent devoir diminuer encore l'importance qu'on a 
voulu donner au phénomène de londe : ainsi, chez certains insectes, l'onde 
n’est pas constante; on observe, à de courts intervalles, tantôt des mou- 
vements expiratoires progressifs, tantôt des mouvements expiratoires 
simultanés. 

Je crois aussi, mais sans oser l’affirmer, le nombre de mes observations 
étant insuffisant, que londe existe parfois chez les femelles chargées d'œufs, 
alors qu’elle est absente chez les mâles, ce qui semblerait indiquer qu’elle 
peut, dans certains cas, être déterminée par une gêne dans le jeu des arceaux 
de quelques somites abdominaux (voyez $ XXII, page 66, Abax striola). 


$ XCV. 


PAUSES ET ARRÈTS. 


8° La conclusion suivante demande quelques explications quant aux 
termes. 

Avec tous les physiologistes, j'appelle pause le repos de courte durée qui, 
chez certains animaux, marque réguliérement la fin soit des inspirations, 
soit des expirations. La pause inspiratoire ou expiratoire se répète done 
d’une façon régulière et avec des durées sensiblement égales. Mais il existe 
des animaux chez lesquels, à l'état normal, la série des mouvements respi- 
ratoires réguliers est complètement interrompue, à des intervalles égaux ou 
variables, par de longs repos en inspiration ou en expiration. Ce phénomène, 
assez différent du précédent, doit évidemment porter un autre nom. J'appelle 
arrêt ! l'interruption qui peut ainsi se présenter normalement dans les mou- 
vements respiratoires. 


1 Terme employé, mais d’une façon passagère, par Paur Berr. Leçons sur la physiologie 
comparée de la respiration, p. 308. Paris, 1870. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 205 
Ceci dit, voici ce que j'ai observé chez les insectes : 


TABLEAU V. 


A. Les pauses ou les arrêts ont toujours lieu en inspiration , jamais en expiration. 
B. Une pause termine chaque mouvement inspiratoire chez les formes suivantes : 


Hydrophilus piceus (calme). Periplaneta orientalis. 

Melolontha vulgaris (épuisé et seule- Libellula quadrimaculata, 
ment dans ce cas). Aeschna grandis. 

Colymbetes fuscus. Calliphora vomitoria, 

Crioceris merdigera. Syrphus ribesii. 

Decticus verrucivorus, Eristalis tenax, 


C. Des arrêts plus ou moins longs, en inspiration, interrompent la série des mouve- 
ments respiratoires chez les insectes ci-dessous : 


Dytiscus marginalis (en liberté). Forficula auricularia. 

Melolontha vulgaris. Pieris napi. 

Geotrupes sylvaticus. Sesia apiformis. 

Tenebrio molitor. Triphaena pronuba, 

Corymbites latus. Arctia menthastri (au début des obser- 
Chlorophanus viridis. vations seulement). 

Stethophyma grossum. Tabanus bovinus. 

Stenobothrus variabilis. Eristalis tenax. 

Decticus verrucivorus. Asilus. 


Ces listes, qu’il serait facile d'allonger encore, montrent que des pauses 
ou des arrêts en inspiration caractérisent la respiration d’un grand nombre 
d'insectes. 

Il peut être intéressant de rapprocher de ces faits ce qui a été observé 
chez les Vertébrés. D'après les expériences de Paul Bert !, il n'existe à l’état 
normal ?, ni pauses ni arrêts chez les Oiseaux et les Mammifères 5; mais la 
respiration des Reptiles vrais est marquée tantôt par de longs arrêts en 
inspiration (Caïman) ou en demi-expiration (Tortues), tantôt par des pauses 
inspiratoires régulières et longues (Serpents). 


1 PauL Berr. Leçons sur la physiologie comparée de la respiration, op. cit., pp. 286 et 
suiv. et p. 335. 

2 II faut nécessairement faire abstraction des cas spéciaux, tels que la respiration très 
lente et très profonde qui, chez l'homme, présente toujours une pause, etc. 

3 Marey a démontré le fait pour l’homme. Du mouvement dans les fonctions de la vie, 
p. 164. Paris, 1868. Pneumographie (JOURNAL PANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE de Ch. Robin, 
t. IL, p. 431, 1865). 


206 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


$ XCVI. 


VITESSE DE L'EXPIRATION ET DE L'INSPIRATION. — PHASE ACTIVE ET PHASE PASSIVE. 


9° Chez les insectes assez vigoureux pour fournir des graphiques conve- 
nables, tels que de grands Coléoptères, des Libellules, des Locustiens, etc., 
on constate que l'inspiration est ordinairement plus lente que lexpiration 
et que ce dernier mouvement est souvent brusque (confirmation, par la 
méthode graphique, d’une ancienne observation directe faite par W. Sorg sur 
le Lucanus cervus (1805). 

Les insectes nous offrent donc, à cet égard, un phénomène inverse de 
celui qui existe chez les Vertébrés à respiration aérienne. Chez ces derniers, 
en effet, c’est l'expiration qui se trouve être, en général, plus lente que 
l'inspiration. Paul Bert a constaté, pour le Canard, que les rapports de temps 
entre les durées de l'expiration et de l’inspiration sont environ comme 12 
est à 91. 

Cette différence curieuse entre les mouvements respiratoires des insectes 
et ceux des Vertébrés pulmonés s'explique parfaitement par les conclusions 
suivantes, 10° et 14°. 

40° Chez la plupart des insectes l'expiration est seule active; l'inspiration 
est passive et a lieu sous l'influence de l’élasticité des téguments et des parois 
trachéennes (confirmation de plusieurs observations antérieures °). 


$ XCVII 
MUSCLES RESPIRATOIRES. 
14° Le plus grand nombre des insectes ne possède que des muscles expi- 


rateurs. J'ai trouvé des muscles aidant à l'inspiration, non seulement chez les 
Hyménoptères porte-aiguillon et les Acridiens, chez lesquels ils avaient été 


1 Voyez, à ce sujet, les graphiques publiés par Paul Bert dans l'ouvrage cité plus haut : 
p- 283, Grenouille; p. 304, Lézard; p. 305, Caïman ; p. 319, Canard. 

2 C’est absolument le contraire de ce qui se passe chez les Vertébrés supérieurs; ainsi, chez 
Phomme « l'inspiration est essentiellement active, musculaire... l'expiration ordinaire est 
» produite uniquement par l’élasticité pulmonaire (et thoracique) et sans intervention mus- 
» culaire ». H. Beauxis. Nouveaux éléments de physiologie humaine, t. I, p. 921. Paris, 1881. 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 207 


indiqués par Rathke et Graber, mais, de plus, chez les Phryganes parmi 
les Névroptères. 

Les muscles respiratoires des Articulés trachéates ont été peu étudiés et 
n’ont, du reste, jamais été examinés sérieusement d’une façon comparative. 
Il y aurait donc un grand intérêt à traiter spécialement ce point d'anatomie 
comparée. | 

Malheureusement, mes dissections, suffisantes pour compléter le présent 
Mémoire, ne sont pas assez nombreuses pour les faire servir de bases à un 
travail morphologique. J’utiliserai done mes matériaux tels quels, en me 
bornant, pour le moment, à faire ressortir les passages graduels existant 
entre les types que j'ai pu analyser et en négligeant, à dessein, toute com- 
paraison avec ce qui existe chez les Trachéates inférieurs et chez les larves t. 


ire CATÉGORIE 2, 


Des muscles expirateurs seulement. 


I Cas. — La disposition la plus simple est celle que nous offrent 
quelques Diptères, la Calliphora vomitoria (fig. 35) et l'Eristaris tenax 
(fig. 36). 

Les muscles dorsaux et sternaux déterminant les mouvements généraux 
de l'abdomen sont représentés par des nappes musculaires continues, ou à 
peu prés A, a à fibres longitudinales. Les muscles expirateurs sont, de 


1 Pai, il est vrai, étudié très soigneusement les Mémoires de Lyonet, Newport, Cornalia, 
Rathke, Künekel d'Herculais et Scudder dans les passages qui traitent des muscles des 
Chenilles ou des Larves, ceux de Kutorga et de Voges sur les muscles des Scolopendres et 
des Jules, enfin les recherches de Wasmann et d'Emile Blanchard sur les muscles des 
Scorpions, des Télyphones, des Phrynes, des Phalangides et des Mygales, mais, pour 
des travaux comparatifs sérieux, chacun sait qu’il ne faut jamais se contenter des figures 
et des descriptions, qu’il est indispensable de refaire les dissections soi-même; c’est ce 
que je me propose d'effectuer un jour, afin d'arriver à établir les premiers jalons d’une 
myologie comparée des Arthropodes. 

2 Il est absolument impossible, dans un résumé, de revenir de nouveau sur les travaux 
de mes prédécesseurs. On trouvera dans le corps même du Mémoire, l'indication exacte de 
ce qui revient à chacun en fait de descriptions de muscles. 


208 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


méme, constitués par une nappe musculaire « à fibres verticales, reliant 
les plaques sternales aux arceaux tergaux, en passant sur la zone molle élas- 
tique qui unit les éléments squelettiques des somites. 


IIe Cas. Quelques Lépidoptères, Pygaera bucephala, par exemple (fig. 53). — 
Les muscles dorsaux et sternaux qui amènent les mouvements généraux de 
l'abdomen ne sont plus de simples nappes; ils sont différenciés en faisceaux 
longitudinaux distincts À, a. Les muscles expirateurs sont encore repré- 
sentés par une nappe musculaire à fibres verticales, recouvrant la zone molle 
élastique des flancs. 


Légère déviation du cas précédent. Smerinthus tilie (fig. 54), autres 
Sphingides et Arctia menthastri. — Disposition voisine ; seulement le sys- 
tème des muscles dorsaux présente une petite complication : des faisceaux D 
à direction très oblique s'ajoutent aux faisceaux longitudinaux et naissent 
d'espèces d’apodèmes que présente le bord antérieur de la zone molle de 
chaque somite. Ces faisceaux obliques jouent, peut-être, un certain rôle dans 
l'expiration. 


Ile Cas. (Disposition très fréquente.) — Les muscles expirateurs a, à fibres 
verticales, cessent d’être constitués par de simples nappes de fibres; ce sont, 
actuellement, des faisceaux distincts, plus ou moins étroits, se répétant de 
somite en somite et d'autant plus distants les uns des autres que les arceaux 
sternaux sont plus longs ‘. Tabanus bovinus (fig. 39), Sialis lutaria (fig. 56), 


4 Le passage suivant, extrait d’un des ouvrages Émile Blanchard, est ici entièrement 
applicable, L'auteur, qui n’a en vue que la musculature générale et non les muscles respi- 
ratoires en particulier, s'exprime ainsi : « En examinant les muscles d’une manière compa- 
rative chez des espèces appartenant aux principaux groupes de la classe des insectes, des 
dissemblances très grandes en apparence s'offrent aux yeux de Pobservateur; mais bientôt à 
son attention se révèle lexistence d’un fonds commun dont les éléments tantôt se séparent 
ou se confondent, tantôt prennent un développement considérable ou s’amoindrissent à 
l'extrême. Les muscles deviennent plus nombreux si les mouvements doivent étre très variés ; 
seulement on arrive à reconnaître que l'accroissement du nombre des muscles est dù à de simples 
divisions. Les fibres se parlagent en deux ou trois faisceaux ou même davantage, au lieu d'être 
réunies en une seule masse. » (METAMORPHOSES, MOEURS ET INSTINCTS DES INSECTES, p. 78. Paris, 
1868.) 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 209 


Agrion sanguineum (fig. 32), Periplaneta orientalis (fig. 30) et un grand 
nombre de Coléoptères : Melolontha vulgaris (fig. 24), Oryctes nasicornis 
(fig. 21), Clytus arietis (fig. 27), etc. 


Légère déviation du cas précédent. — La disposition générale est la méme; 
la seule différence consiste dans ce fait que les muscles expirateurs verticaux, 
au lieu d’être composés chacun d’un seul faisceau, sont constitués soit par 
deux faisceaux divergents, soit par deux faisceaux croisés æ, B. On peut citer, 
comme exemples, le Dytiscus marginalis (fig. 19) et l Hydrophilus piceus 


(fig. 16). 


IVe Cas. — Disposition analogue à celle du Ie; mais les muscles dorsaux 
sont, en grande partie, décomposés en faisceaux obliques D, E, qui se croi- 
sent sous des angles plus ou moins aigus. (Forficula auricularia, fig. 45; 
Staphylinus olens, fig. 26.) 


Ve Cas. — Les muscles longitudinaux et les muscles expirateurs verti- 
caux sont encore disposés comme dans le IIIe cas. De petits muscles expira- 
teurs transversaux y sont venus s’y ajouter. Placés en échelons au-dessus de 
la chaine nerveuse, ils relient, de droite à gauche, les zones élastiques des 
flancs. (Decticus verrucivorus, fig. 51.) 


2e CATÉGORIE. 


Des muscles expirateurs et des muscles inspirateurs, 


Les muscles inspirateurs ont, en général, une direction verticale et leur 
présence complique ordinairement beaucoup la musculature de l'abdomen. 


VIe Cas. Acridiens. — Les muscles dorsaux et sternaux qui déterminent 
les mouvements généraux sont très simples et se composent de faisceaux 


longitudinaux. 
Les muscles expirateurs a, 6 (fig. 4T), encore verticaux, sont évidem- 


Tome XLV. 27 


210 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


ment, malgré la dimension de l’un d’entre eux +, les homologues des expira- 
teurs simples ou doubles, parallèles ou croisés, des Coléoptères, des Odonates, 
des Blattes, ete. (voyez Ie cas). 

Les inspirateurs apparaissent comme muscles nouveaux. D'inspirateur 
principal 3 est exactement antagoniste de l’expirateur principal, mais moins 
développé. L'inspirateur accessoire 4, dont l’action est plus douteuse, semble, 
par suite de sa direction oblique, devoir faire basculer, en arrière, lapo- 
dème saillant du bord antérieur de l’arceau sternal. (Stethophyma grossum, 
fig. 47.) 


VIIe Cas. Hyménoptères porte-aiquillon. — On sait que chez ces animaux 
l'expiration est toujours accompagnée d’un raccourcissement de l'abdomen. 
Une portion ou la totalité des muscles dorsaux et sternaux ordinaires est 
détournée de sa destination primitive. Ces muscles jouent le rôle d’exprra- 
teurs. Dun autre côté, les expirateurs verticaux «, 8, si constants chez les 
autres insectes (Acridiens, Coléoptères, Blattes, Odonates, Lépidoptères, etc. ), 
ont disparu. 

Les muscles aspirateurs servent, les uns à écarter les arceaux sternaux 
des arceaux dorsaux, les autres à rendre à l’abdomen sa longueur primitive. 
L'inspirateur 5, qui écarte les arceaux et augmente, par suite, le diamètre 
vertical, est homologue de l’inspirateur principal des Acridiens. Les inspi- 
rateurs déterminant l’allongement de l'abdomen manquent chez les Acridiens 
et sont, par suite, ici des muscles nouveaux /, 2. Leur disposition et leur 
action, que j'ai décrites (page 145), sont fort caractéristiques. Situés par 
paires formées d’un faisceau dorsal et d’un faisceau sternal, très légèrement 
obliques et reliant chacun le bord postérieur d’un arceau à l'angle antérieur 
saillant de l’arceau suivant, ils produisent, par leur action simultanée, un 
léger recul des somites, les uns par rapport aux autres. (Vespa germanica, 
fig. 40; Bombus terrestris, fig. 41.) 


VIlle Cas (Phryganiens). — Plus ou moins analogue au précédent. On 
retrouve encore une partie des muscles généraux dorsaux et sternaux D, €; 


à l’état de faisceaux obliques expirateurs et on constate la présence de mus- 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 211 


cles inspirateurs 4 et 2 homologues de ceux qui, -chez les Hyménoptères, 
amènent l'allongement de l'abdomen. (Phryganea striata, fig. 44.) 


12° Les diaphragmes supérieur (anciennement ailes da cœur) et inférieur 
des Hyménoptères porte-aiguillon n’ont pas, dans le mécanisme respiraloire, 
le rôle que Wolff leur attribue (fig. 43). 


$ XCVII. 


MOUVEMENTS GÉNÉRAUX DE L'ABDOMEN. 


13° Un grand nombre d'insectes, peut-être tous, impriment à leur abdomen 
des mouvements généraux, tantôt faibles, tantôt très amples, qui ne coïnci- 
dent pas avec les mouvements respiratoires proprement dits et qu'il importe 
d'en distinguer. 


$ XCIX. 


INFLUENCE DU SYSTÈME NERVEUX. 


14° Les mouvements respiratoires abdominaux des insectes sont des mou- 
vements purement réflexes !. Il résulte, en effet : 

A. Des expériences de Straus-Durckheim sur la Mouche commune, de 
Faivre sur le Dytique, de Barlow sur les Libellula vulgata, L. depressa et sur 
le Grillon, de Baudelot sur des Libellules, de Langendorff sur des Libellules, 
sur des Hyménoptères et sur le Hanneton; enfin, de mes expériences per- 
sonnelles sur les Hydrophilus piceus, Dytiscus marginalis, Carabus auratus, 
Oryctes nasicornis, Geotrupes sylvaticus, Libellula quadrimaculata, F or fi- 
cula auricularia et Panorpa vuigaris, que les mouvements respiratoires 
persistent chez l'insecte décapité, ou, ce qui revient au même, chez l'insecte 
dont on a détruit soit les ganglions cérébroïdes, soit les connectifs reliant les 
ganglions céphaliques au reste de la chaîne; 


1 Des physiologistes préféreraient peut-être me voir employer l'expression de mouvements 
dulomatiques. Je wai point la compétence nécessaire pour entamer une discussion à cet 
égard. Si j'en juge par ce que disent les traités récents, la plupart des prétendus mouve- 
ments automatiques des Vertébrés, tels, par exemple, que les mouvements respiratoires, 
Sont en réalité des mouvements réflexes. 


212 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


B. Des expériences de Barlow, de Baudelot et de Langendorff sur les 
Libellules et des miennes sur les Bombus terrestris, Stethophyma grossum, 
Stenobothrus variabilis, Libellula quadrimaculata , Aeschna grandis que, 
chez les insectes dont le système nerveux est peu condensé, les mouvements 
de respiration continuent dans l'abdomen entièrement isolé, ou dans abdo- 
men dont la chaine nerveuse a été sectionnée au niveau de lun des premiers 
somites; 

C. Des expériences de Barlow, de celles de Langendorff et de celles effec- 
tuées par moi-même sur les Libellules que toutes les causes extérieures qui 
augmentent l’activité respiratoire chez linsecte intact ont exactement la 
même influence, soit sur l'animal privé de ses centres nerveux antérieurs, 
soit sur l'abdomen isolé, soit même sur des tronçons de l'abdomen. 

L'action de la chaleur est particulièrement facile à constater et je citerai, 
à cet égard, une de mes observations. La température de la portion de lappa- 
reil à projection dans laquelle j’introduis les insectes est supérieure de 6° à 
la température de l'air de l'appartement. Je décapile une Libellule et je 
compte 34 mouvements respiratoires par minute (en moyenne); j'introduis 
l'animal dans l'appareil et le rhythme respiratoire s'accélère aussitôt; l’abdo- 
men offre 55 mouvements par minute (en moyenne). 

On me permettra d'extraire d’un travail récent de A. Guillebeau et 
L. Luchsinger * un passage qui confirme ce qui précède : Arnold a observé 
que si, après avoir engourdi complètement un insecte en élevant considéra- 
blement la température de Pair contenu dans le vase où il est renfermé, on 
cherche à ranimer l'animal par le refroidissement, on voit réapparailre suc- 
cessivement les réflexes des membres, les mouvements respiratoires, puis 
la possibilité de se retourner après une chute sur le dos, et enfin, tardive- 
ment, les manifestations plus élevées d’une volonté consciente. 

13° Les ganglions métathoraciques ne sont point, comme le croyait Faivre, 
des centres respiratoires spéciaux. 


4 Guiccenrau und LucusiNeer. Fortgesetzte Studien zu einer allgemeinen Physiologie der 
irritabeln Substanzen. Ein Beitrag zur Kenntniss des Centralmarkes der Annulata Cuviert. 
(ARCHIV FÜR DIE GESAMMTE PHYSIOLOGIE VON PrLÜGER, Bd. XXVIII, dre et 2 partie, p. 1. Bonn, 
1882.) 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 215 


On peut avancer comme preuves : 

A. Toutes les expériences que je viens de rappeler sous le numéro pré- 
cédent, expériences qui montrent que les mouvements respiratoires abdomi- 
naux des insectes à système nerveux, peu condensé, ont lieu sans l'intervention 
des ganglions thoraciques; 

B. La série des expériences que j'ai effectuées sur les Coléoptères à chaine 
demi-condensée, Hydrophilus piceus, Dytiscus marginalis, chez lesquels la 
destruction ou la séparation de la masse métathoracique amène la suppres- 
sion de quelques ganglions abdominaux antérieurs. Chez ces animaux, on 
observe alors l'abolition des mouvements respiratoires dans les somites anté- 
rieurs de l'abdomen et leur persistance dans les somites postérieurs. 

L'arrêt partiel ou total des mouvements respiratoires à la suite de la 
destruction des centres métathoraciques des Coléoptères résulte simplement 
de la condensation du système nerveux de ces insectes. Mes expériences sur 
le Dytique, l'Hydrophile et, surtout, sur l’Oryctes nasicornis, tendent, de 
plus, à prouver que chez les Trachéates à système nerveux condensé, l'exci- 
lation d’un point ou la destruction partielle d'une masse nerveuse complexe 
provenant de la soudure de centres ganglionnaires successifs, produit ses 
effets sur tous les centres entrant dans la constitution de cette masse !. 

16° Il est presque inutile de rappeler que toutes les expériences sur le 
Système nerveux des Arthropodes ont démontré que chaque ganglion ner- 
veux de la chaine ventrale est le centre moteur du somite auquel il appar- 
lient. C’est ce que Barlow appelle la Sel/-sufficiency des ganglions. 

Les Myriapodes constituent, à cet égard, les sujets de recherches les plus 
intéressants et les plus démonstratifs. Les nombreuses expériences de New- 
port ° sur les Jules et sur les Lithobies ont presque épuisé la question. Néan- 
moins, j'ai soumis moi-même le Lithobius forficatus à des essais variés dont 


1 Ce résultat demanderait à être confirmé par des expériences nouvelles sur des Articulés 
de grande taille, des crustacés, par exemple. 

2 Newport. On the structure, relations and developpement of the nervous and circulatory 
Systems and on the existence of a complete circulation of the Blood in Vessels, in Myriapoda 
and Macrourous Arachnida (Puizos. Transactions, part. H, p. 243, 1843). 

Aristote et Dugès ont fait aussi quelques expériences incomplètes sur les Myriapodes. 


914 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


les résultats, encore inédits, sont forts curieux. Je n’en citerai qu'un seul. 
Une Lithobie est divisée en trois tronçons, comprenant respectivement : le 
premier, la tête et trois paires de pattes vraies; le deuxième, six paires de 
pattes ; le troisième, six paires également. Ces tronçons sont introduits dans 
un tube de verre à atmosphère humide. Cinquante-deux heures après l’instal- 
lation de. l'expérience, les pattes des trois tronçons présentent encore des 
mouvements réflexes parfaitement constatés. 

47° Bien que les mouvements respiratoires des insectes soient des mou- 
vements réflexes se produisant sans l'intervention des centres nerveux 
volontaires ou cérébroïdes, ils peuvent évidemment, chez les Articulés 
intacts, être constamment modifiés par des influences émanant des centres 
en question. En effet : i 

A. Toute excitation directe ou indirecte des ganglions cérébroïdes amène 
une accélération dans les mouvements respiratoires. On a vu que, chez 
l'Oryctes, j'ai obtenu l'excitation directe en piquant les ganglions. Jè signa- 
lerai, en outre, un cas d’excitation indirecte observé chez un Hydrophile 
intact : l’insecte exécute 26 mouvements respiratoires par minute; on lui 
chatouille les antennes avec une aiguille ; le nombre des mouvements respi- 
raloires par minute augmente aussitôt; il s'élève à 29; 

B. Chaque fois que l’on supprime l’action des ganglions cérébroïdes, soit 
par la destruction de ces centres seuls, soit par la décapitation , soit en sec- 
tionnant la chaine nerveuse ventrale dans sa région antérieure, on observe 
une modification plus ou moins profonde , tantôt dans le rhythme des mou- 
vements de respiration, tantôt dans leur amplitude, tantôt quant à ces deux 
caractères à la fois. 

L'influence des ganglions cérébroïdes est done incontestable ; malheureu- 
sement il est impossible, avec les éléments réunis jusqu’à présent, de décider 
posivement quelle est sa nature. 

Le tableau suivant, sans résoudre la question, permet cependant de sup- 
poser que cette action est probablement accélératrice, qu'elle détermine un 
accroissement de vitesse et un accroissement d'amplitude. (Elle n’est certai- 


nement pas coordonnatrice, la suppression des ganglions céphaliques ne 
produisant pas d’irrégularités ; la méthode graphique le prouve.) 


SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES DES INSECTES. 


TABLEAU VI. 


215 


Plateau 1, 


Langendorff, 


Hydrophile . . 


DYA 206 


Orÿetes « a 
OFFRE 
Géotrupe. . .. 
Libelule iei 
Aeschna. ... 
Stethophyma . 
Stethophyma . 
Stenobothrus . 


Hanneton . . 


Libellule, . .. 


OBSERVATEUR. INSECTES. OPÉRATION EFFECTUÉE. EFTET SUR LES MOUVEMENTS RESPIRATOIRES. 
Faivre. . .. | Dytique . . . . | Section des connectifs entrelesganglions | Affaiblissement momentané. 
| sous- œsophagiens et prothoraciques. 
Barlow .., | Grillon, . ... DÉCOULE RAT een Affaiblissement et ralentissement, 
— DOUÉ Re e e ECAD A NON RE at As A Affaiblissement et ralentissement. 


Destruction des ganglions cérébroïdes. . 
DÉCPIATION RE RER ARE RES 
Destruction des ganglions cérébroïdes. . 
Décapitation RTL RE TOP ST ARE à" 
DOCADIATON ANT k n EE EA ; 

Section de la chaìne entre les ganglions 


méso- et métathoraciques. 


Décapitation, . ..... 


DÉCADITA NOTE Rent RE ES 
Section de la chaîne à la base de l'abdo- 
men. 


Section de la chaîne à la base de l’abdo- 
men. 


Destruction des ganglions métathoraci- 
ques. 


Section de la chaine à la base de l’abdo- 
men, 


Décapitation. . 


Décapitation. . . . .. 


Diminution d'amplitude et ralentissement 
faible. 

Diminution d'amplitude, accélération. 

Diminution d'amplitude, accélération, 


Légère diminution d'amplitude. 


Diminution d'amplitude après 15 minutes 
seulement. 


Affaiblissement général. 

Accélération momentanée. 

Léger ralentissement. 

Diminution d'amplitude et ralentissement 
léger. 

Ralentissement. 

Ralentissement. 


Ralentissement, 


Ralentissement, 


Ralentissement, 


En terminant ces conclusions, je ferai remarquer que toute section de 
la chaine ventrale ganglionnaire porte fatalement à la fois sur cette chaine 
et sur les cordons nerveux qui, situés à sa face supérieure, constituent les 


216 RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


troncs d’origine du système auquel Émile Blanchard, Leydig, Cattie et bien 
d’autres donnent le nom de sympathique. 

Ce fait serait très grave si, comme le supposaient Newport et ses succes” 
seurs, le soi-disant sympathique offrait réellement des ganglions de distance 
en distance et si, suivant une opinion ancienne aussi, les nerfs qui en 
émanent (nerfs transverses) animaient exclusivement des trachées et les 
muscles des orifices stigmatiques. Mais il résulte des observations intéres- 
santes de Cattie ! sur les Chenilles : 4° que le sympathique ne présente 
aucun ganglion; 2° que ses nerfs naissent en réalité des ganglions de la 
chaine ventrale; 3° que les uns, parmi ces nerfs transverses, se rendent au 
système trachéen ou aux stigmates et d’autres aux muscles longitudinaux 
de l'abdomen; enfin 4° que certains stigmates sont animés par les nerfs en 
question, tandis que d’autres le sont par les nerfs ordinaires du système 
moteur. 


1 Carrie. Beiträge zur Kenntniss der Chorda supraspinalis, etc., op. cit., pp. 308 et suiv. 


EXPLICATION DES PLANCHES. 


PLANCHE I. 


Les figures de cette planche et celles des planches H, IE, IV, V, VI et VII sont la repro- 
duction exacte de quelques-unes des nombreuses silhouettes obtenues par la méthode des 
projections. Afin de réduire l’espace occupé par les figures, j'ai supprimé généralement 
les silhouettes des têtes. 

Dans tous ces dessins, la phase expiratoire est noire, la phase inspiratoire blanche. Les 
chiffres indiquent les numéros des somites abdominaux apparents; les flèches donnent des 
indications quant au sens des mouvements expiratoires. 


Fic. 57. Silhouette du profil de l'Hydrophilus piceus (grossissement 6). 
Des styles de papier sont fixés sur les arceaux tergaux 1, 2, 3, 4, 5 et sur l’extré- 
mité de l'abdomen. 


La pointe de l'abdomen est à peu près immobilisée par une épingle EE. 


Fic. 58. Silhouette du profil de l’Oryctes nasicornis © (grossissement 5). 
Des styles de papier sont portés par les arceaux tergaux 2, 4, 6; l’abdomen est 
libre. 


PLANCHE IL 


Fic. 59. Silhouette fournie par un Oryctes nasicornis ~ placé longitudinalement dans 
appareil. La silhouette répond à la coupe du somite 4 (grossissement 5). 
Des styles de papier sont fixés sur le milieu et sur les parties déclives de larceau 
tergal, ainsi que sur le bord des régions épimériennes. 


Fic. 60. Combinaison de deux silhouettes obtenues en plaçant un Hanneton longitudina- 
lement dans l'appareil. Chacune des silhouettes répond à la coupe du troisième 
somite abdominal (grossissement 6). 
Dans la moitié gauche de la figure un style de papier à est fixé sur emplacement 
même du stigmate ; dans la moitié droite un style analogue ? est collé sur la 
région épimérienne. 


Tome XLV. 28 


248 


Fig 


Fic 


Fig. 


Fig 


FIG. 


Fic. 


FIG. 


. 61. 


. 62. 


. 65. 


66. 


OE 


70. 


EXPLICATION DES PLANCHES. 


PLANCHE III. 


Silhouette du profil du Staphylinus caesareus ; l'abdomen est libre (grossisse- 
ment 12). 

Mth. Prothorax immobile; 

Msth et Mtth. Méso- et métathorax participant aux mouvements respiratoires. 


Silhouette du profil de la Coccinella septempunctata. L'extrémité de Pabdomen 
repose librement sur une épingle coudée (grossissement 14). 

La phase expiratoire est accompagnée ici d’une augmentation du diamètre vertical 
de l'abdomen (voyez fig. 8 page 103). 


PLANCHE IV. 


. Silhouette du profil de la Nepa cinerea. L'extrémité de Pabdomen repose librement 


sur une épingle coudée. Des styles de papier sont collés sur les parties latérales 
de deux arceaux sternaux (grossissement 11). 


. Silhouette du profil de la Blatte (Periplaneta orientalis) (grossissement 11). 


Msth, Mtth. Méso- et métathorax. 


Silhouette de la face sternale de l'abdomen de la Libellula quadrimaculata (gros- 
sissement 5). 

L’allongement apparent en expiration résulte du mouvement oscillatoire de Pab- 
domen démontré par la figure suivante. 


Silhouette du profil de Pabdomen de la Libellula quadrimaculata (grossissement à). 


PLANCHE V. 


Silhouette du profil de la Calliphora vomitoria (grossissement 10). La ligne poin- 
tillée montre l'étendue des mouvements d’oscillation non respiratoires. © 


. Silhouette de la face inférieure de l’abdomen de la Calliphora vomitoria © (grossis- 


sement 10). 
L'oviscapte s’allonge en expiration. 


. Silhouette du profil de l'abdomen de l’Eristalis tenax (grossissement 10). 


Silhouette du profil de Pabdomen de la Vespa germanica. Mouvements respira- 
toires chez un individu calme (grossissement 11). 

Toute la partie de l'abdomen située au-dessus de la ligne pointillée IM reste 
immobile. 


Fig. 


Fig. 


Fig. 


Fig. 


Fig. 


Fig. 


IN: 


13. 


76. 


EXPLICATION DES PLANCHES. 219 


PLANCHE VI. 


Silhouette du profil de l'abdomen du Bombus muscorum $ (grossissement 11). 
Toute la partie de l'abdomen située au-dessus de la ligne pointillée IM reste 
immobile. 


. Silhouette du profil longitudinal de la Phryganea striata Q. 


L'abdomen repose, par le cinquième somite, sur une épingle coudée (grossisse- 
ment 10). 


Du côté dorsal de la figure, la ligne noire pointillée représente labaissement 
expiratoire dans les moments où celui-ci est faible. 


Silhouette du profil de l'abdomen du Stenobothrus variabilis (grossissement 5). 
P S 


PLANCHE VII. 


- Silhouette du profil longitudinal de abdomen du Decticus verrucivorus (grossis- 


sement 7). 
L'animal est sur le dos, fixé par lès organes du vol serrés entre les lames d’un 


support S. Le sixième somite abdominal repose librement, par sa face tergale, 
sur ce support. 


. Silhouette du profil longitudinal de la Pieris napi. Les deux images sont destinées 


à faire comprendre l'onde respiratoire (grossissement 5) 


Silhouette du profil longitudinal de l'abdomen de la Sialis lutaria (grossisse- 
ment 19). 


| 
| 
| 
| 
| 


Mém. de 1 ‘Acad. Royale. 
Pi L 


Mèm. de l'Acad. Royale. PEH. 


Mém. de l'Acad. Royale. PE M 


Fig. 61 x 12. 


Fig. 62 x 14 


Mem. de l'Acad. Royale. PEN. 


Fig.63 x 11. 
Fig.65 x5. 


Fig.64 x 1. 


ge eam 


ee de N 


; 


Fig. 66 xo, 


PEN. 


Mém. de l’Acad. Royale. 


Fig.68 x 10. 


ON 
g 
AL 


Fig. 69 x 10. An Fig.70 x 1l. 


Mém. de l'Acad. Royale. PL. VE 


PS: 
i E * PART), A 
HN IN N VO 


Fig. 13 xD. 


Mém. de l'Acad. Royale. PL VIL 


d Fig. “à Fig.76 x 12 


| LE RÉALISME 


SON INFLUENCE SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE l 


W 


Henri HYMANS [i 


CORRESPONDANT DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. 


Comme un bel arbre, aimons la colonne élancée ; 


L'Art vrai n'a-t-il donc pas la nature pour sœur ? 


BRIZEUX. 


{Mémoire présenté à la Classe des heaux-arts dans la séance du 7 juin 1883. 


Tome XLV. d 


AVANT-PROPOS ‘ 


Au mois de mai 1882 s'ouvrait, à l'École des Beaux-Arts à Paris, une 
exposition générale de l’œuvre de Courbet. Elle s'était organisée sous le 
patronage officiel et, à peine close, plusieurs d’entre les toiles qu'on y avait 
fait figurer allèrent prendre place dans les musées français. 

Il est difficile de ne pas envisager comme un revirement ce double et 
solennel hommage rendu à la mémoire de l'artiste en qui le réalisme trouvait 
naguère sa personnification la plus discutée. 

N'en peut-on conclure que la théorie nouvelle a sorti ses effets, que dès 
maintenant elle appartient à l’histoire? On est sans peine généreux envers 
les morts. 

« Les haines s'en vont, les rivalités s’effacent et la justice qui se laisail 


1 Ce mémoire portant la devise : 


Comme un bel arbre, aimons la colonne élancée ; 
L Art vrai n’a-t-il donc pas la nature pour sœur ? 


Brizeux. 


a été soumis au concours de la Classe des beaux-arts pour 1885, et renvoyé dans la séance du 
7 juin à l'examen de MM. Slingeneyer, Stallaert et Fétis. 

« La Classe, adoptant les conclusions des rapports de ses commissaires, lus dans la séance 
du 25 octobre (Bulletin, 5° série, t. VI, pp. 544, 546, 557), a jugé ce travail digne de la 
médaille d'or. 

» L’enveloppe qui, d’après le règlement, devait contenir le nom de l’auteur, ayant été 
décachetée par M. le Directeur de la Classe, il a été constaté qu’elle ne renfermait qu'un billet 
blanc. Or le programme du concours porte la prescription suivante : 

« Les auteurs ne mettront point leur nom à leur ouvrage; ils n’y inscriront qu’une devise 
qu'ils reproduiront dans un billet cacheté, renfermant leur nom et leur adresse. Faute par eux 
de satisfaire à cette formalité, le prix ne pourra leur être accordé. » 

» En présence de cette prescription formelle, la Classe, consultée par le Directeur, regrette 
de ne pouvoir accorder le prix. » 


4 AVANT-PROPOS. 


se lève pour formuler l'inéluctable jugement. » Ainsi s'exprime le plus con- 
stamment fidèle des partisans du novateur +. 

Peut-être, dans le cas présent, est-il permis de se demander, comme le 
faisait un éminent critique, si une justice de l'espèce ne marque pas autant 
de scepticisme et de lassitude que d’impartialité réelle ?. S'il en était ainsi, 
nous n’en serions que mieux fondés, dans ce tourbillon rapide qui emporte 
les idées du jour, à arrêter un moment au passage, pour l'interroger sur 
son origine et ses œuvres, une théorie qui s’est affirmée avec tant d'éclat 
et dont les effets n’ont pas cessé d’être sensibles. 

L'accord est loin d’être établi sur la signification du mouvement réaliste. 
De ce que la controverse a pu perdre de son ardeur en perdant de son 
actualité, ne résulte pas que de profondes divergences ne subsistent sur 
la légitimité d’une forme d'interprétation de la nature envisagée par les uns 
comme pouvant seule permettre à l'artiste d'accomplir sa tâche en pleine 
conscience, par d’autres, au contraire, comme une négation absolue des 
principes qui doivent présider à l'enfantement de son travail, 

Entre ces opinions extrêmes il fallait prononcer. Si nous n'avons pas 
hésité à le faire, c’est moins, qu'on veuille le croire, en invoquant l'autorité 
de nos impressions personnelles que l'évidence des faits toujours utiles à 
remettre en mémoire, et trop facilement tombés dans Poubli. 


1 CASTAGNARY, Préface au catalogue de l’œuvre de Courbet. Paris, 1882, p. 28. 
2 Henri Deasonpe, Études sur les beaux-arts Paris, 4864,1. I, p. 177. 


C'est, de nos jours, une opinion courante que la splendeur des beaux-arts 
sera l'inévitable conséquence de la prospérité matérielle des nations. Il 
semble qu'à beaux écus sonnants, le particulier, l'État auront pouvoir de faire 


éclore les œuvres les plus parfaites, qu’en un mot, la perfection résulte à un. 


degré moindre de la valeur de l'artiste qui crée, que de l'importance des 
sommes affectées à sa rémunération. Il n’est pas de théorie plus fausse, 
mieux faite pour égarer, non seulement la foule, mais l'artiste lui-même, sur 
la véritable signification d’une œuvre d’art. 

« Celui, dit Quatremère de Quincy !, qui veut, en payant le temps et 
les soins de l’ouvrier, lui commander un chef-d'œuvre, est presque toujours 
sûr de l'obtenir. C’est pourquoi les encouragements pécuniaires sont à peu près 
infaillibles pour obtenir la plus haute perfection des produits industriels, mais 
ils sont à peu près inutiles pour obtenir des arts du génie cette valeur 
morale dont on voudrait que résultât la valeur mercantile. Tel chef-d'œuvre 
a-quelquelois coûté dix fois moins de temps et de peine que le plus mauvais 
ouvrage. » 

Quelles que soient l’adresse et l'expérience de l'artiste, la partie matérielle 
de son travail est, en somme, chose accessoire, car le lien qui doit s'établir 
entre lui et nous est avant tout intellectuel. Chaque effort nouveau vers la 
perfection doit resserrer ce lien, sans en altérer la nature; plus l'œuvre d'art 


! Considérations morales sur la destination «des ouvrages de l'art. Paris, 1815, p. 10. 


6 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


sera digne de ce nom, moins elle viendra répondre à un besoin matériel ; 
elle pourra, si parfaite qu’elle soit, ne procurer qu’une satisfaction relative 
et, dans tous les cas, n’aura qu’une valeur de pure convention. 

De là ces divergences profondes d'appréciation que lon a vues de tout 
temps se produire en matière d'art. L'œuvre en sera-t-elle rabaissée? Nulle- 
ment. Si Platon exclut les artistes de sa République, ce n’est point qu'il les 
frappe d’indignité ; il constate simplement que leur travail ne pourvoit à 
aucune des nécessilés matérielles de son gouvernement idéal. 

En dehors des satisfactions morales ou intellectuelles il n’est réellement 
possible à personne d’assigner à l’art une direction immuable, et l'artiste, 
comme l'écrivain ou le poète, dispose en toute liberté du droit de nous trans- 
porter à sa suite dans le monde réel ou dans le monde idéal ; comme nous 
tous, il subit l'influence d’un courant d'idées qui appartiennent à son temps et 
serviront, sans doute, à le caractériser dans l'histoire : le christianisme suc- 
cédant au paganisme, la renaissance au moyen âge, elc.; mais l'artiste peut 
aspirer même à influer sur ce courant. 

La religion a été non moins puissamment servie par les arts qu’elle ne les 
a inspirés; les slatuaires de la Grèce créèrent l'image des dieux et ajoutérent 
à leur majesté. 

Les temps modernes n'ont rien enlevé de son importance au rôle de 
l'artiste; on peut dire que cette importance a grandi, par cela même que notre 
temps a donné plus largement satisfaction aux besoins matériels. 

Winkelmann disait que l’art naît du besoin ; un contemporain répond avec 
vérité qu’il ne commence, au contraire, qu’où cesse le besoin +, 

Moins que jamais il serait possible de proclamer que le beau c’est lutile ; 
car en adoplant celte définition, bien loin de pouvoir supposer, comme 
Proudhon, que l’art ne pouvant mourir, ne rétrograde jamais, nous verrions 
précisément se réduire à des proportions infimes sa place dans la société 
moderne. 

On a pu croire, au premier examen, que chacune des conquêtes de la 
science, que tout nouveau progrès de l'industrie, que les multiples et merveil- 


1 Féns, L'Art dans la Société et dans l'Etat. Bruxelles, 1870, p. 4. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 1 


leuses applications de la vapeur et de l'électricité doivent agir dans un sens 
défavorable à la création artistique, paralyser l'imagination de lartiste, 
enchaîner davantage le monde moderne à la régularité méthodique des 
choses. On a pu dire que les différences autrefois caractéristiques de race et 
de physionomie des nations, le pittoresque des costumes, la ferveur des sen- 
timents religieux, l'autorité des traditions locales et jusqu’à la libre expression 
des mouvements de l’âme, vont peu à peu s’atténuant, s'allanguissant pour 
ne laisser à l’artiste d’autres éléments possibles d'intérêt ou d’autre forme de 
supériorité qu'une technique plus ou moins adroite. Mais il n’y a là qu’une 
apparence. À mesure que l’homme entre en possession d'éléments nouveaux 
de bien-être matériel, il en aspire davantage à s'élever au-dessus de la 
réalité pure et simple et réclame précisément des arts la forme exquise de 
jouissance qu'eux seuls peuvent lui procurer. 

Beaucoup d'œuvres contemporaines — on ne peut le nier — portent la 
marque évidente des influences que nous venons d’énumérer ; mais pour qui 
ne s'arrête point à la surface des choses, il est impossible de ne pas constater 
que l'artiste, alors même qu’il cède à des tendances contraires à ses progrès, 
s'efforce de donner plus d'énergie à l’expression de son individualité. On 
dirait que, dominé par cette préoccupation de chercher une formule appro- 
priée à son temps, il se croit à même de la trouver dans la poursuite d’un 
ensemble de procédés et d'effets aussi dissemblables que possible de la 
pratique de ses devanciers. 

Le passé lui est devenu sans valeur; à quelque prix que ce soit, il s'efforce 
de faire montre d'originalité, et ce souci l'emporte sur toute autre considéra- 
tion, au point qu’il semble devoir être — les exceptions toujours réservées — 
la caractéristique de l’art de notre temps. 

A nos yeux, la tendance n’a rien qui doive réjouir. 

« Cest un des accidents qui ramènent à la barbarie, dit un écrivain, que 
cette confiance en elle-même d’une génération qui s'imagine que les produc- 
tions des arts qu’elle voit éclore sont les plus fortes et les plus belles, par cela 
seul qu’elles sont venues les dernières !. » 


! DecécLuze, De la barbarie de ce temps (Livre pes Cent er un, t. V, p. 65). 


8 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


En comparant l’art d'aujourd'hui à celui d'autrefois, il serait insensé de 
croire que les qualités natives et l’habileté qui nous frappent dans les œuvres 
anciennes n’ont pas passé en très légitime héritage à nos contemporains ; il y a 
cependant un point incontestable, c’est que les conditions dans lesquelles se 
produit le talent ont varié d’une manière trop absolue pour ne pas laisser à 
ses manifestations une profonde empreinte. 

Quiconque étudie l’histoire des maîtres d'autrefois, est d’abord frappé de 
cette circonstance que leur faculté de créer trouvait presque toujours son 
emploi dans une direction précise. Libre, sans doute, de ses inspirations, 
l'artiste n’en était pas moins appelé d'ordinaire à répondre à des commandes 
qui sont devenues la source des œuvres les plus grandioses. 

Michel-Ange pouvait dédaigner l'emploi de la peinture à l'huile et choisir 
le procédé qui s’adaptait le mieux aux nécessités des grandes pages qu’il avait 
non seulement le désir, mais l'obligation de créer; Titien, Paul Véronèse, 
Rubens, Albert Dürer lui-même, ont conçu peu d'œuvres dont ils ne pré- 
voyaient au moins la destination. 

Nous ne citons que les maîtres de premier ordre, mais ceux-là ne font pas 
exception à une règle presque générale, et, à défaut d’autres preuves, les 
œuvres elles-mêmes diraient les conditions particulières de leur enfantement, 
tant il est vrai que l'application spéciale de l'ouvrage d'art à un.emploi 
déterminé est pour l'artiste, ce qu'est la représentation scénique pour le poète 
dramatique '. 

L'organisation du travail, pour sa part, exerçait une grande influence sur 
la nature des productions artistiques. 

Quantité de peintres mettaient leurs aptitudes spéciales au service de 
maitres en vogue. Les historiens de la peinture nous font connaitre des artistes 
qui, pour plusieurs années, engagent leur pinceau à tant par an, pour com- 
pléter, soit par des architectures, soit par des paysages, les œuvres d’un 
confrère plus favorisé; au cours même de leurs pérégrinations, on voit des 
Flamands gagner par étapes la Péninsule italique, terre de promission des 


1 Quarremère pe Quincy. Tout en ne partageant pas sur plusieurs points l'opinion de ce 
savant illustre, il nous est impossible de ne pas tenir compte dé l'exposé si clair qu’il fait de la 
question de la destination de l'art, question très proche de celle que nous abordons ici. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 9 


Néerlandais, en s'associant au travail de quelque peintre étranger, puis, 
enfin, se produire, à leur tour, quand l’occasion leur en est fournie. 

En Hollande, au XVIIe siècle, le droit de signer son œuvre n'appartient 
qu’à l’artiste complètement affranchi de son stage auprès du maître qu'il s’est 
engagé à servir et, portant nos regards sur l’école flamande, nous voyons 
Rubens, un des peintres qui comptent les collaborateurs les plus nombreux et 
les plus habiles, tenir à peine compte de la personnalité de ces auxiliaires, 
tant il était, à ces époques, chose admise, que le véritable, l'unique auteur 
d’une œuvre était celui qui lavait conçue et que l’exécution pouvait être, 
sans rien perdre de son importance, un travail collectif. 

Et les règlements des corporations d'artistes le voulaient ainsi. Nul ne 
passait maître qu'après une certaine période de servage ; nombre de fois le 
contrat d'engagement stipule que l'élève sera logé, nourri, vêtu et plus tard 
payé par le maître, auquel, en échange, reviendra tout le travail de l'élève. 
Personne n'ignore le singulier abus que Frans Hals est accusé d’avoir fait 
vis-à-vis d'Adrien Brauwer d’une pareille convention. 

La Révolution française mit fin à ce qui restait debout de cette organisa- 
tion ancienne. Depuis longtemps l’enseignement des beaux-arts avait pris, 
sous l'influence de l’Académie, une direction uniforme ; les artistes, bien qu’ils 
fussent affranchis de toutes les autres entraves, restaient soumis à sa juridic- 
tion. L'Académie tenait à ses privilèges; nul ne participait aux expositions 
sans avoir obtenu d'elle sa licence. Devenue, selon David, « le refuge de 
toutes les tyrannies », elle se vit condamnée à disparaitre. À sa place, on 
érigea la « commune de l’art », et le régime des expositions absolument 
libres fut inauguré. 

Le décret de l’Assemblée nationale du 21 août 1791 était ainsi conçu : 

« Considérant que, par la Constitution décrétée, il n’y a plus pour aucune 
partie de la nation ni pour aucun individu, aucun privilège ni exception aux 
droits communs des Français; qu’il n’y a plus ni jurandes, ni corporations de 
professions, arts et métiers ; et se conformant aux dispositions du décret du 
vingt-six du mois dernier, qui consacre le Louvre à la réunion des Monu- 


ments des sciences et des arts, 
« Décrète provisoirement, et en attendant qu’il soit statué sur les divers 
Tome XLV. : 


10 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


établissements de l'instruction et de l’éducation publique, ce qui suit 

» ARTICLE PREMIER. — Tous les artistes français et étrangers, mem- 
bres ou non de l’Académie de peinture et de sculpture, seront également 
admis à exposer leurs ouvrages dans la partie du Louvre destinée à cet 
objet. » 

Le changement était plus radical qu’on ne pense. Les artistes, proclamés 
libres, étaient conviés à se produire. « L'empire de la liberté s'étend enfin 
sur les arts; elle brise leurs chaînes; le génie n’est plus condamné à l’obscu- 
rité, » disait le préambule du décret : bientôt les jurys d'artistes allaient 
faire place à ces jurys recrutés pari les hommes étrangers à Part, mais 
réputés plus proches de la nature. 

Puis les pouvoirs publics s’imposaient des obligations d’une nature nou- 
velle. L'État entrait en scène, et avec lui un genre de protection et d’encou- 
ragement qui ne pouvait être qu'une barrière illusoire contre le flot des 
médiocrités qui se crurent appelées à s’illustrer par le pinceau : « hommes 
de génie trop longtemps condamnés à l'obscurité! » 

Les œuvres affluèrent aux salons; leur nombre doubla dès la première 
exposition libre; au salon suivant il avait triplé ?. 

Des voies imprévues s'étaient ouvertes, du même coup, à la compétition à 
outrance. Nous ne disons point que les œuvres importantes cessèrent de se 
produire, mais on peut affirmer que si les musées et les cabinets ont recueilli 
des travaux de mérite, nés sous l'empire du régime nouveau, le nombre de 
toiles tombées dans l'oubli avec ceux qui les ont signées a été infiniment 
plus considérable depuis le commencement du siècle actuel que pendant tout 
le cours des deux siècles qui lont précédé. 

L'ordre des choses que nous venons d'exposer nous régit depuis cent ans. 
Les méthodes d'enseignement ont quelque peu varié par-ci par-là; mais, en 
dernière analyse, la production picturale, stimulée fort au delà du nécessaire, 
a pris des proportions telles que lon en est venu à se demander, avec 
quelque raison, si l'intervention et les efforts officiels ne pourraient être légi- 


1 Au salon de 4789 il y avait eu 550 numéros dont 206 peintures; le salon de 1794 compta 
794 numéros; le suivant 1050 œuvres dont 857 peintures. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. li 


timement employés à rétablir léquilibre. Ce côté de la question est digne 
d'examen ; nous l’abordons plus loin. 

La direction nouvelle donnée aux beaux-arts par la Révolution n’intéressa 
que très accessoirement les bases de l’enseignement. L'introduction des prin- 
cipes académiques, qu'il est convenu d'attribuer d'une manière exclusive à 
David, n'était pas nouvelle. L'action du maitre se borna à donner plus de 
force au courant; il y apporta toute l’opiniâtreté de sa nature. 

Pour être l’objet d’une admiration devenue presque un culte, David ne vit 
pas pour cela ses principes si universellement acceptés que, même dans son 
entourage, il n’y eùt des dissidents. Lui-même n’avait pas une foi inébranlable 
dans la durée de son école. Dans une promenade au salon de 1808, il disait 
à sa fille : « Dans dix ans, l'étude de l'antique sera délaissée. Tous ces dieux, 
ces héros seront remplacés par des chevaliers, des troubadours chantant 
sous les fenêtres de leurs dames, au pied d’un antique donjon, La direction 
que j'ai imprimée aux beaux-arts est trop sévère pour plaire longtemps en 
France... Quand je disparaitrai, l’école disparaîtra avec moi !. » 

Mais l'école de David ne devait pas périr par excès de sévérité; elle devait 
disparaitre par infaillible et légitime accession d'idées nouvelles. Fort heu- 
reux déjà l'artiste à qui il est donné de laisser, par ses enseignements et son 
exemple, la profonde empreinte que le chef de l’école française devait laisser 
des siens. De telles influences n'appartiennent qu'aux hommes d’une trempe 
supérieure. 

David, nous le répétons, ne fut pas le premier à tourner les regards du 
monde artiste vers l'antiquité. La France possédait en originaux et en copies 
les plus belles œuvres de la statuaire antique, et l'étude de ces modèles for- 
mait la base de l’enseignement des arts. 

Diderot, lorsqu'il adresse à Grimm son analyse du salon de 1765, 
rappelle une conversation avec Chardin, laquelle donne une idée de la 
méthode adoptée dans les ateliers d'alors. « On nous met, disait Chardin, à 
l’âge de sept ou huit ans, le porte-crayon à la main. Nous commençons 
à dessiner d’après l'exemple, des yeux, des bouches, des nez, des oreilles, 


1! Jules Davin, Le peintre Louis David. Paris, 1880, p. 504. 


12 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


ensuite des pieds, des mains. Nous avons eu longtemps le dos courbé sur le 
portefeuille lorsqu'on nous place devant le Torse ou l’Hercule, et vous n'avez 
pas été témoins des larmes que ce Satyre, ce Gladiateur, cette Vénus de 
Médicis, cet Antinoïüs ont fait couler. » 

En 1769, le jeune Carle Vernet écrit à son père : « Nous dessinons une 
semaine d’après nature et une semaine d’après la bosse ». On voit que tout 
cela ne diffère pas très sensiblement de lenseignement d'aujourd'hui. 

La véritable introduction de l’étude de l'antique dans les ateliers français 
remontait au Bernin, qui avait fait en France un assez long séjour sous 
Louis XIV. 1} s’étonna beaucoup de voir négliger pour l’enseignement les 
belles copies des antiques que possédaient les galeries royales et qui sont 
encore exposées au Louvre, et conseilla les moulages des meilleurs morceaux 
des galeries italiennes 1. 

David, quoi qu’on en dise, ne méconnaissait pas les droits de la nature à 
guider l'artiste  ; nous l'avons appris de plus d’un de ses anciens élèves, et ses 
portraits fourniraient au besoin la preuve du fait. Mais, dans son enthou- 
siasme pour l'antiquité, le chef de l’école française versait dans l'erreur de 
croire que ses personnages devaient avoir l'aspect de statues animées. 
« Raphaël, homme divin, c’est toi qui par degrés m'élèves jusqu’à l'antique ! 
s’écriait-il..… C’est toi-même qui m'as fait apercevoir que l'antique est encore 
au-dessus de toi! Quel grand maître tu m'as donné, aussi je ne le quitterai 
de ma vie 5!» 

Si la prédiction du maître sur la durée de son école devait se réaliser 
avant même que la mort eùt glacé sa main, il lui était réservé ce titre 
d'honneur d'arriver, par des voies bien imprévues, à donner à lart de son 
pays ce qu'aucun peintre m'avait réussi à lui donner : une école et une 
direction. 


1 « Cela gåte les jeunes gens, disait-il, de les faire dessiner trop tôt d'après nature, n'étant 
pas encore capables de choisir le beau dans le naturel et de laisser le laid. » (Journal de voyage 
du cavalier Bernin en France, publié par M. Ludovie LALANNE, Gazelle des Beaux - Arts, 
t. XXIX, 2° période, p 265.) 

2 « David a ramené son siècle à la nature. » 


(Casimir Decavianx, Seconde Messénienne.) 


5 Jules Davip, Le peintre Louis David, p. 10. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 15 


La période révolutionnaire a été jugée non moins sévèrement dans le 
domaine des arts que dans celui de la politique ; mais, à tout considérer, 
et fixant nos regards sur les productions de la fin du XVIII: siècle, nous 
souscrivons de la manière la plus complète au jugement d’un des historiens 
d'art les plus éclairés de notre temps : Que dans cette crise « l’art se renou- 
velle, acquiert un idéal inconnu, des types de beauté rajeunis, des réalités 
plus saisissantes et des conceptions plus vastes ! ». A David revient une 
part considérable de cet honneur. 

Que de chemin parcouru ensuite, à grands pas, des Sabines à la Bataille 
d Aboukir et au Radeau de la Méduse! Delacroix créera des scènes plus 
animées encore en ne s'inspirant que des maitres de la couleur, et lui- 
même, pourtant, subira l'influence de David, comme Ingres, Vernet et 
Delaroche. 

Tout cela s’accomplit, notons-le, moins d’un quart de siècle après la mort 
du chef d'École. 

La faveur acquise, de nos jours, par les œuvres du XVIIe siècle, faveur 
à bien des égards justifiée, ne doit se fonder que très accessoirement sur les 
principes qu’elles représentent. 

On a pu dire que « tout ce qui exige du goût, jusqu’au mobilier, jusqu’à 
la mode, devint pétrifiant d’ennui sous l'influence de David ? », il wen est 
pas moins évident que l’époque des prédécesseurs du maitre est précisé- 
ment celle où, selon l'expression d'Eugène Delacroix, « la pauvre peinture 
se trainait énervée sur les traces de Van Loo et de quelques génies de 
méme force 5 ». 

Qu’à un certain moment la queue des fanatiques de David ait été jugée 
avec une sévérité très légitime, nous n’y contredisons pas; ce qu'il faut avant 
tout, c’est rendre hommage à des principes de dignité et de grandeur dont 
l'influence ne pouvait être que salutaire et qui, certainement, ont excité 
l'admiration des hommes sérieux en présence de plus d’un travail du chef 
de l’École et de ses élèves. 


1 Jules Renouvier, Histoire de l’art pendant la Révolution. Paris, 1865, p. 5. 
2 E. Cuesneau, L'Art, t. XXIX, p. 68. 
5 Revue de Paris, 1829. 


14 _ LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Dans un livre où Proudhon condamne, sans autre réserve que le Marar, 
l’œuvre de David, il avoue que la contemplation du ZLéonidas faisait couler 
ses larmes, chaque fois que, dans sa jeunesse, il allait au Louvre. « Je regar- 
dais avec une émotion religieuse ces guerriers si beaux, si pleins d'un 
enthousiasme sacré, gravant de la pointe de leurs épées, sur le rocher au 
pied duquel ils allaient faire le sacrifice de leur vie, cette simple et sublime 
épitaphe : Passant, va dire à Lacédémone que nous sommes morts ici pour 
obéir à ses lois !. » 

Peu d'artistes, sans doute, pourraient se vanter d’avoir vu leurs œuvres 
produire une impression plus profonde, et, à choisir, aucun d'eux n'hésiterait 
à préférer le suffrage d’un homme intelligent et lettré à celui de l'artisan 
inculte, jugeant tout au plus, comme le cordonnier d’Apelle, de limitation 
plus ou moins correcte de certains détails de sa profession. 

De nos jours lopinion prend une direction nouvelle. IT n’est point 
d'époque où l’on ait donné plus d'importance à la question si grave, el 
d’ailleurs si digne d'examen, de limitation matérielle par la peinture et peut- 
être au grand détriment de celle-ci. 

Quen dernière analyse la peinture demeure le moyen d'imiter d'une 
manière aussi exacte que possible tout ce qui frappe le regard humain, 
personne, sans doute, ne songe à le nier; quel désaccord, pourtant, sur 
la forme à donner à cette imitation, sur le point où elle peut s'arrêter, et la 
nécessité de sa poursuite elle-même, preuve évidente que la tâche du peintre 
ne se borne pas aux trompe-l'œil, si grande que soit, d’ailleurs, l'habileté de 
ceux qui les produisent. 

« Si l'art est un écolier servile, il est condamné à n'être jamais qu'un 
écolier impuissant », dit Victor Cousin ?. Parole profonde et bien lointaine 
déjà. Que de courants ont entrainé l'opinion des foules depuis le jour où 
l'illustre philosophe exposait en des pages d’une simplicité si noble, la haute 
et civilisatrice mission de Part! 

La lutte des classiques et des romantiques appartient à l’histoire ; la con- 


1 Du principe de l’art et de sa destination sociale, p. 109. 
? Du Vrai, du Bien et du Beau, édition de 1854, p. 476. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 15 


troverse s’est portée sur d’autres champs plus ardente encore. On n'avait 
discuté jusqu'alors que l'interprétation des données ; ce fut la pensée elle- 
même qui, maintenant, allait être mise en question. 

Le romantisme avait triomphé; il avait pour lui d'incontestables séduc- 
tions. Au théâtre, comme dans les arts plastiques, ses représentants avaient 
mérité de légitimes succès et vengé les dédains de la génération précédente 
pour les nobles créations du moyen âge et de la renaissance. Ingres, lui- 
même, n'avait pas dédaigné de puiser aux sources de la poésie italienne; il 
avait emprunté à Dante !, à l'Arioste ?, des sujets de composition. Delaroche, 
élève de Gros, Scheffer, Géricault et d’autres, plus contenus que Delacroix, 
mais sortis comme lui de l'atelier de Guérin, avaient entrepris d'allier les 
droits de la couleur à ceux de la forme dans des pages historiques longue- 
ment méditées. 

L'influence de Walter Scott dans le roman était égalée par celle des por- 
trailistes anglais dans le domaine pictural, et Delacroix s’inclinait respec- 
tueusement devant les travaux de Reynolds qu’il proclamait « un vrai génie 
et le continuateur le plus sérieux des anciens maitres. » 

Sans nous occuper ici du mérite relatif ou intrinsèque des diverses ten- 
dances, il importe de faire remarquer que, dans presque toutes les direc- 
tions, la théorie préoccupait alors les artistes à un degré bien moindre que 
le droit pour chacun de revêtir sa pensée de la forme la mieux faite pour 
lui donner sa pleine expression ; s’il ne manquait pas d'artistes fidèles aux 
traditions classiques, on ne voit pas qu'il ait été en leur pouvoir d'empêcher 
des confrères plus jeunes de rencontrer le succès en s'appliquant à l'étude 
des mœurs et de la physionomie populaires, à la représentation du pitto- 
resque dans le costume, à la reproduction des monuments, ou simplement à 
la traduction des aspects de la nature. Ne suffit-il pas de citer Decamps, 
Isabey, Meissonier, Diaz, pour prouver que l’époque était féconde en indi- 
vidualités d’un rare mérite, pouvant ranger leurs œuvres à côté des grandes 
pages de ceux auxquels appartenait, sinon le droit, toujours discutable, de 


1 Françoise de Rimini. 
2 Roger el Angélique. 


16 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


diriger une école, tout au moins la prétention légitime de la caractériser dans 
les plus vastes conceptions ? 

La peinture française put arriver ainsi en moins d’un demi-siècle, et par 
des étapes assez régulières, à la pleine possession des ressources les plus 
puissantes !, 

Mieux protégée qu'on n’a voulu l’admettre, par la dignité des traditions 
classiques, contre les extrêmes du romantisme, elle avait vu renaître peu à 
peu, au contact des maitres de la vie et de la couleur, la grâce native de son 
tempérament, dégagé de toute contrainte. Les tendances les plus diverses 
avaient pu se produire, à des titres égaux, sous l'égide d’une tolérance 
féconde, et l'Exposition Universelle de 1855 vint donner au monde ébloui 
le spectacle d'une école tout à la fois originale, variée et une. 

Qui veut reprendre le catalogue de la section française des beaux-arts y 
verra en présence, dans la grande peinture : Benouville, Bouguereau, Louis 
Boulanger, Cabanel, Chenavard, L. Cogniet, Gouder, Couture, E. Delacroix, 
Flandrin, Gérôme, Hébert, Ingres, Jacquand, Jalabert, Landelle, Lehmann, 
Muller, Philippoteaux , Pils, Ricard, Robert-Fleury, Horace Vernet, Yvon, 
auxquels il faut ajouter Delaroche, E. Deveria et Scheffer qui s'étaient 
abstenus d'exposer, mais dont le talent était encore dans toute sa vigueur. 

Dans les genres secondaires on rencontre Bellangé, Belly, Bida, Rosa 
Bonheur, Brascassat, Jules Breton, Cabat, Court, Corot, Courbet, Daubigny, 
Decamps, Diaz, Français, Gudin, Hamon, Paul Huet, Isabey, Lami, Meisso- 
nier, Millet, Morel Fatio, Justin Ouvrié, Th. et Ph. Rousseau, Roqueplan, 
Saint-Jean, Troyon et Ziem. i 

On remarquera que nous ne relevons ici que les noms des artistes dans 
toute l’activité de leur puissance créatrice, ceux dont l'opinion publique 
avait sanctionné les succès. Courbet et Daubigny, par exemple, étaient déjà 
médaillés. Voilà ce qu'avait produit l’école. 

« La France a grandi, écrivait Gautier, dans un de ses élans d’enthou- 
siasme. Sans doute, dans son passé, elle compte Poussin, Eustache Lesueur, 


1 On ne s'étonnera pas de voir cette étude tenir compte dans la mesure la plus large, du 
mouvement des arts en France, les peintres comme les écrivains de ce pays occupant la première 


place parmi les représentants du réalisme. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 17 


Lebrun, Watteau, et, plus tard, quelques peintres aimables; mais ce n’est 
guère que depuis un demi-siècle, et surtout dans ces dernières années , 
qu'elle est devenue une école où tout le monde peut apprendre. On va 
maintenant à Paris comme autrefois on allait à Rome; c’est, personne ne le 
conteste , la métropole de lart... 

« A l'esprit qui l’a toujours caractérisée la France a su joindre la cou- 
leur qui lui manquait; sans perdre son originalité, elle s’est approprié les 
procédés des écoles de Venise et d’Anvers.. Nul crayon ne dessine mieux que 
le sien, nulle brosse ne peint mieux que sa brosse. Elle peut opposer 
lugres à Delacroix, Decamps à Meissonnier, Flandrin à Couture, Aligny à 
Rousseau, réunissant tous les contrastes, conciliant les originalités les plus 
diverses !. » 

Et cela était absolument vrai. Si d’autres écoles, comme celles de la 
Belgique et de l'Angleterre, furent appréciées avec faveur, elles se présen- 
taient, dans leur ensemble, avec une supériorité moindre, et beaucoup de 
peintres belges trahissaient une influence évidente de la France. Celle-ci, 
on peut le dire, était devenue l'expression éloquente, la représentation de 
l'art contemporain dans ce qu’il avait de plus complet, de plus élevé, de plus 
vigoureux. 

On se doutait à peine, en face d’un spectacle si propre à donner aux con- 
naisseurs les joies les plus vives, que, pareille à ces tourmentes dont l'œil du 
marin le plus expérimenté est impuissant à discerner les avant-coureurs, déjà 
se préparait une réaction dont il serait difficile de trouver l’analogue dans 
les annales artistiques d'aucun peuple ou d'aucun temps. 

En réalité, l'Exposition universelle de 1855 clôt d'une manière très pré- 
cise une des périodes les plus importantes de l’histoire de la peinture 
moderne. 


1 Les beaux-arts en Europe. Paris , 1855, 1" période, p. 5. 


Tome XLV. 3 


18 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


TI 


Le mouvement que nous voulons étudier dans ces pages est si proche de 
nous, ses influences nous environnent d’une manière si complète, qu'il ne 
faut rien moins que ses frappants effets pour permettre d'en saisir la 
portée. 

Les critiques de l'avenir ne verront peut-être pas sans surprise combien 
faibles, pour ne pas dire artificielles, furent les sources du courant qui a 
influé sur l’art de notre époque — on ne peut le nier, — avec une puissance 
suffisante pour opérer des merveilles dans une direction plus vraiment 
conforme à ses progrès. 

Mais il s’agit moins, à la vérité, d’une direction précise, de l’expression 
motivée et pour ainsi dire prévue d’un état de l'opinion se faisant jour à la 
faveur d’une circonstance favorable et s'imposant par sa logique même, que 
d’un oubli complaisant du passé, d'une négation systématique de l’ensemble 
des théories formant la base même des arts plastiques, en faveur d’une 
esthétique nouvelle ne tendant à rien moins qu’à libérer l'artiste de toute 
recherche d’intérét en dehors de ce qui l’environne, comme de tout effort 
vers la perfection, par l'élévation de la pensée ou simplement le choix 
raisonné du type ou de la forme. 

Le nom même que l’on adopta pour caractériser la tendance nouvelle 
resta vide de sens pour ceux qui l’inscrivirent sur leur drapeau. « Inventée 
par les critiques comme une machine de guerre pour exciter à la haine contre 
une génération nouvelle, disait Champfleury, larme est de celles qui blessent 
ceux qui lemploient. Le mot réalisme, un mot de transition qui ne durera 
guère plus de trente ans, est un de ces termes équivoques qui se prêtent 
à toutes sortes d'emplois et peuvent servir à la fois de couronne de lauriers 
et de couronne de choux t. » 


1 Le réalisme, 1857, p. 5. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 19 


A l'époque où paraissaient ces lignes, l'ardeur de beaucoup de néophytes 
commençait à se refroidir, et nous devons remonter de quelques années dans 
Phistoire de l’art pour rencontrer les premières manifestations du système. 
On les vit se produire au Salon de Paris de 1850-1851. 

En même temps que l’on apprenait à connaître la Jane Shore de Robert 
Fleury, le Tintoret peignant sa fille morte de Léon Cogniet, l'Appel des 
condamnés de C. Muller, le Souvenir de la guerre civile (la Barricade), de 
Meissonier, vinrent se produire également, sous le nom d'artistes alors à 
leurs débuts, des pages rustiques créées, certainement, sous l'impression des 
nouvelles pastorales de George Sand et des études de mœurs bourgeoises de 
Champfleury. 

Les noms des auteurs n’évoquent pas le souvenir d'œuvres assez mar- 
quantes de l’époque, pour qu'il faille s'arrêter à l'analyse des créations aux- 
quelles ils se rattachent. Un seul, parmi les novateurs, absorbait du reste 
l'attention unanime, et la grandeur de ses toiles mettait en relief, dès 
labord, une hardiesse d'affirmation qui devait conduire rapidement à la 
notoriété. 

Le peintre Gustave Courbet, né à Ornans (département du Doubs), 
en 1819, n'était pas un inconnu. Au Salon de 1849 il avait figuré avec un 
grand tableau auquel le Jury accorda une médaille d’or et que le Gouverne- 
ment français envoya bientôt au Musée de Lille. Ce tableau, qui portait pour 
titre Une après-dinée à Ornans 1, se signalait par une vigueur peu commune 
d'exécution. D’une conception totalement nulle, car il s'agissait d’un intérieur 
de cabaret où les personnages rassemblés autour d’une table, fument, 
boivent et s’assoupissent près d’un joueur de violon, l’œuvre révélait un 
robuste tempérament de peintre et s’écartait, non moins par son exécution 
que par sa conception, des divers courants de l’époque. 

Le fait de choisir pour l’exhibition d’un sujet d’une telle insignifiance 
la grandeur naturelle des figures, disait assez que le peintre visait 
à rompre en visière aux théories académiques; mais il avait fallu une 
incontestable virtuosité de pinceau pour triompher des difficultés de l'entre- 


1 Musée de Lille, n° 159. Le tableau de Courbet a perdu aujourd’hui tout son éclat. 


20 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


4 


prise; on envisagea surtout l’œuvre à ce point de vue, et l'artiste fit une 
moisson d'éloges nullement imméritée. 

D’autres créations suivirent : le Violoncelliste, le Retour de la foire de 
Flagey, les Casseurs de pierres, et surtout l’Enterrement à Ornans, dessi- 
nérent plus nettement, au Salon de 1850-1851, l'intention du peintre de 
persévérer dans sa voie novatrice. L’Enterrement mesurait jusqu’à 7 mètres 
de long, presque la longueur de la Cène de Léonard de Vinci, et les 
Casseurs de pierres, deux simples personnages cassant des cailloux au bord 
d’une route, occupaient une toile large de 3 mètres. 

Ces œuvres appelaient trop naturellement la discussion, pour qu'il faille 
s'étonner des orages qu’elles provoquèrent. Leur auteur, dont on ne calomnie 
pas la mémoire en disant que rien ne répondait mieux à ses aspirations, « fit 
bientôt plus de bruit par la ville que vingt célébrités et leurs coteries ! ». 

Pour rester dans la vérité des choses, il nous faut dire que les fervents du 
novateur ne formaient point légion, et si l’on a beaucoup exalté la peinture 
de Courbet dans le cours des dernières années, il est certain que les Casseurs 
de pierres et Enterrement à Ornans, pas plus que les Paysans de Flagey, 
ne provoquèrent un bien vif enthousiasme au temps de leur apparition. 
La grande faveur devait leur venir un peu plus tard, grâce surtout à l'appui 
de Proudhon. 

Ce publiciste célèbre, qui fut lami de Courbet et l’inspirateur probable 
de plus d’une de ses toiles, n’hésitait pas lui-même à proclamer que quoi 
qu’en pussent dire les hérauts et les vulgarisateurs de l’idée nouvelle, de 
longtemps le public ne pourrait comprendre et supporter une leçon pareille 
à l'Enterrement, ni l'artiste, compter pour de telles œuvres sur le suffrage 
des masses ?. 

Mais le philosophe, tout en s’avouant médiocre juge en matière d'art, 
voyait, pour son propre compte, des beautés jusque dans les choses les plus 
malencontreuses de son artiste de prédilection. Il s’exaltait devant les Cas- 
seurs de pierres, au point de transformer en qualités des défauts manifestes. 


1 Th. Suvasrre, Les artistes français. Bruxelles, 18614, p. 59. 
2 P.-J Proupnon, Du principe de l’art et de sa destination sociale, p. 205. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 21 


Le garçon qui porte les pierres à l’ouvrier, est d’un dessin médiocre. C’est 
que, « enchaîné avant le temps à la corvée, il se découd; son épaule se 
déjette, sa démarche est affaissée, son pantalon tombe; l’insoucieuse misère 
lui a fait perdre le soin de sa personne et la prestesse de ses dix-huit ans; 
broyé dans sa puberté, il ne vivra pas ». Bref, Proudhon l'assure, les 
Casseurs de pierres valent une parabole de l'Évangile! TI ne semble pas que 
cet avis ait prévalu. Qualifiés de « laids mannequins porteurs d’affreuses 
loques ! », à leur première apparition, les Casseurs de pierres, dont on a pu 
apprécier depuis les incontestables qualités picturales, ont désarmé la sévérité 
de bien des connaisseurs. En 1882, pourtant, nous les trouvons toujours 
qualifiés de « mannequins », par un grand organe artistique ? et, peu 
avant, M. Paul Mantz, avec l'autorité qui s'attache aux appréciations d’un 
juge si compétent, déclarait encore préférer de beaucoup le paysage aux 
figures 5. 

Pour l’Enterrement, de l'avis même de Théophile Silvestre, l'ami, et de 
plus le biographe de Courbet, « la composition violait toutes les règles 4 » 
et le mépris des convenances esthétiques était ici d'autant plus regrettable 
qu'aucun sujet n’eût été plus propre à émouvoir le spectateur. 

Si le peintre ne recule pas devant la tâche de représenter cinquante per- 
sonnages de grandeur naturelle, pour les réunir autour d’une tombe, on peut 
être assuré que sans se mettre en frais excessifs d'imagination, il pourra 
faire jaillir de là une émotion suffisante pour atténuer des détails parfois 
choquants, et qui se mélent inévitablement à toute scène prise sur le vif. 
Le plus grand artiste sera alors celui qui rendra le mieux le côté poignant 
de la funèbre cérémonie. 

« Le même sentiment, disait Proudhon, a de tout temps inspiré les artistes 
qui, dans ce cas, peut-être le seul, ont su tout à la fois obéir à l'idéal de leur 
époque, et rester dans la vérité éternelle de leur mission. Il semble qu’en 
effet aucune aberration de l’art ne soit possible dans cette solennité déchi- 


! Correspondance parisienne de l'Indépendance belge; 22 janvier 1851. 
2 L'Art, article de M. Véron, t. XXIX, p. 295. 

5 Gazette des beaux-arts, t. XVII, 2° série (1878), p. 544. 

+ Les artistes français. Bruxelles, 1861, p. 56. 


22 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


rante, où une famille, entourée des amis et des proches, assistée du clergé, va 
meltre le sceau à la grande séparation, en rendant à la terre le cadavre 
d’un époux, d’un père. Comment done Courbet s'est-il complu à envelopper 
une pareille scène de ridicule, à en rendre grotesques les acteurs? » Inutile 
de dire que c’est par une transfiguration du peintre que l’auteur répond 
à cette question, et sa pensée se traduirait assez bien par ce vers du poëte 


de 1830 : 


« Le cynisme des mœurs doit salir la parole... » 


Toutefois, l’opinion contraire s'était fait jour avec une énergie non équi- 
voque, au Salon de 18514. 

On eut beau expliquer que Courbet n'avait fait que copier servilement 
une scène fréquente; désigner par leurs noms les principaux acteurs : la 
mère du peintre, un parent de Proudhon, une sacristine, mademoiselle 
Brüleport, etc., « si ce sont des portraits de famille, laissez-les à Ornans, 
s’écrie le critique de la Revue des Deux Mondes. Pour nous, qui ne sommes 
pas d’Ornans, nous avons besoin de quelque chose de plus qui nous attache. 
Ce qu’il fallait éveiller chez le spectateur, c'était le sentiment naturel qui 
accompagne une pareille scène; or, ce n’est pas précisément effet obtenu 
par vos grotesques caricatures. On ne pleure guère devant cet enterrement, 
et cela prouve bien que la vérité n’est pas toujours vraie t. » 

L'Enterrement, d'après son auteur, devait être l’enfouissement du roman- 
tisme. Ne fallait-il pas, dès lors, lui être supérieur en simplicité, en correction, 
en émotion véritable, se garder surtout de la charge et ne pas rendre cho- 
quante, jusque par les dimensions de l’œuvre, lindifférence du peintre devant 
une pareille scène? 

Théophile Silvestre a laissé de ce tableau une description singulièrement 
expressive et peu propre, quoique tracée par une plume bienveillante, à 
faire admettre les écarts de l'artiste ?. Pour quiconque a présentes à la 
mémoire les toiles où Knaus et Vautier ont voulu représenter, eux aussi, 


1 De Grorrroy, Revue des Deux Mondes, 1851, t. I, p. 881. 
2 Théophile Sizvesrre, Les artistes français, pp. 53 et suiv. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 23 


l'enterrement à la campagne, sous l'empire de l'émotion discrète d’une scène 
de deuil, l’œuvre de Courbet sera plus brutale encore. 

N'est-il pas permis de qualifier de non-sens l’idée d’un peintre de 
choisir pour sujet d’un vaste tableau, un épisode lugubre, précisément 
pour écarter de sa représentation ce qui peut légitimer un tel choix : une 
émotion perçue el transmise P Tout n'est pas nécessairement grotesque dans 
une assemblée aussi nombreuse que celle reproduite par Courbet, et dont 
le but n'est pas sans doute l’amusement, à l'instar des Scènes populaires 
de Monnier. 

L'Enterrement appartient aujourd’hui au gouvernement français, avec 
d’autres toiles de son auteur. Le temps, et peut-être même la majesté du 
lieu où elle figure, atténueront petit à petit, aux yeux de la foule, ce que la 
peinture avait de répulsif à sa première apparition. On y cherche aujour- 
dhui des qualités propres à justifier l'honneur d’avoir pénétré dans les 
musées de l'État, et déjà M. Jules Claretie voyait en imagination Courbet et 
Vélasquez converser nuitamment dans les galeries du Louvre t. N'est-ce pas 
beaucoup se hâter ? 

Si peu constante que soit, de nos jours, l'opinion, il nous paraît difficile 
de croire qu'on en arrive bientôt à faire de Courbet, surtout en faveur de 
sa vaste page du Louvre, un émule du plus grand des peintres espagnols, 
d’un des maitres les plus illustres de tous les temps. 

Dans ce milieu de bonne compagnie, l'Enterrement apparait comme une 
gageure. Sans composition, sans relief, dune gaucherie enfantine de dessin 
et d’une vulgarité de type allant jusqu’à la charge, on ne peut que s'étonner 
du bruit qui s’est fait autour d’une œuvre si incomplète, et tout homme de 
goût souscrira à cette appréciation de M. Alfred de Lostalot sur le peintre 
franc-comiois : « Il ne saurait frayer avec les gros bonnets de l'Olympe ; 
c’est une nature par trop rustique. S'il est vrai qu'il pourrait donner à 
certains une leçon de peinture — on sait avec quelle bonne grâce il s’offrait 
à rendre ce service, — il s’exposerait, de son côté, à recevoir de l’interpellé 
de précieux enseignements, accompagnés peut-être d'observations peu flat- 


1 Le Temps, décembre 1881. 


24 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


teuses, comme celle-ci : Ce n’est décidément pas pour vous qu'a été inventé 
le dicton : Mens agitat molem 1. » 


L'année 1855 est une date importante dans l’histoire du réalisme. Le 
jury de l'Exposition universelle n'ayant consenti à exposer que onze toiles 
du « maitre peintre d'Ornans » — tel était le titre que s'était attribué 
Courbet, — le novateur entreprit de réunir le surplus de son œuvre dans 
un local indépendant, qu'il décora d'une enseigne portant le mot réalisme. 
Ce fut alors que parut la profession de foi que tout le monde a lue : « Le 
titre de réaliste ma élé imposé ? comme on a imposé aux hommes 
de 4830 celui de romantique. Les titres n’ont donné en aucun temps une 
idée juste des choses; s’il en était autrement, les œuvres seraient superflues. 

» Sans m'expliquer sur la justesse plus ou moins grande d’une qualifica- 
tion que nul, il faut l’espérer, n’est tenu de bien comprendre 5, je me 
bornerai à quelques mots de développements pour couper court aux malen- 
tendus. 

» J'ai étudié, en dehors de tout système, et sans parti pris, l’art des 
anciens et lart des modernes. Je nai pas plus voulu imiter les uns que 
copier les autres ; ma pensée n’a pas été davantage d'arriver au but oiseux 
de lart pour l’art. Non! j'ai voulu tout simplement puiser dans l'entière 
connaissance de la tradition le sentiment raisonné et indépendant de ma 
propre individualité. 

» Savoir pour pouvoir, telle fut ma pensée. Être à même de traduire les 
mœurs, les idées, l'aspect de mon époque, selon mon appréciation, être non 
seulement un peintre, mais encore un homme, en un mot, faire de l’art 
vivant, tel est mon but. » 

Cette expression de principes dans laquelle il est difficile de ne pas trouver, 
une fois de plus, l'intervention de quelqu'un de ces enthousiastes, peu com- 
pétents en matière d’art, et qui prennent volontiers pour des traits de génie 


1 Gazette des beaux-arts, t. XXV (1882), p. 582. 

2 Courbet s'était proclamé réaliste dès l’année 1851. Voir à ce sujet : Paul Mantz, Gazette 
des beaux-arts, 1878. 

3 On verra plus loin la définition du réalisme, donnée par Courbet lui-même. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 25 


jusqu'aux imperfections de l'artiste préféré, cette expression de principes 
n'aboulissait pas nécessairement au triomphe du disgracieux et du vulgaire. 
Malheureusement, entendue à la façon de son auteur, elle venait légitimer 
toutes les appréhensions qu’avaient données ses premières œuvres aux esprits 
soucieux de l'avenir de la peinture. 

« Depuis Jean Cousin jusqu’à Proudhon, disait M. H. Delaborde, depuis 
Watteau jusqu’à Granet, tous, selon la mesure de leurs forces et le genre de 
leur talent, se proposaient avant tout de traduire avec le pinceau, soit une 
pensée profonde, soit une idée ingénieuse. L'esprit, sinon la poésie, était lélé- 
ment principal de leurs travaux, et les tableaux produits pendant plus de trois 
siècles attestent, sauf la dissemblance des moyens employés, ce caractère 
essentiel de la peinture dans notre pays. Jamais, avant le temps où nous 
sommes, on n'aurait consenti à montrer ou à voir dans une œuvre d'art la vérité 
sans l'idéal; jamais on ne se serait avisé de substituer à cette « haute délec- 
tation de l'intelligence », dont parle Poussin, je ne sais quelle sensation 
superficielle et fugitive résultant de limitation brute de la réalité ou des arti- 
fices de la brosse. Un si mince plaisir nous suffit aujourd’hui, et lorsqu'un 
tableau, quel qu’il soit, a éveillé en nous celte sensation, nous faisons bon 
marché du reste ?, » 

Les partisans de Courbet, eux-mêmes, ne se sentaient pas absolument ras- 
surés sur lavenir d’une théorie qui n'allait à rien moins qu’à nier l'idéal. 
Passe encore pour quelques peintres en quête de notoriété; mais évidemment, 
aucun écrivain sérieux n’était disposé à transférer du domaine artistique 
au domaine littéraire, un système où l'imagination perdait tous ses droits. 
« Je n'aime pas les écoles, je n'aime pas les drapeaux, je n'aime pas les sys- 
tèmes, je n'aime pas les dogmes, s'écriait Champfleury. Il m'est impossible 
de me parquer dans la petite église du réalisme, dussé-je en être le dieu... 
J'ai peut-être prononcé quelquefois le mot de réalisme, et j'en ai menacé 
mes adversaires comme d’une machine de guerre formidable, māis je l'ai 
fait dans un moment d’emportement, abasourdi par les cris de la critique 
qui s’obstinait à voir en moi un être systématique, une sorte de mathéma- 


‘ Henri DELABORDE, Mélanges sur l’art contemporain : Le Salon de 1853, p. 69 


Tome XLV. 4 


26 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


ticien calculant des effets de réalité, et s'entétant à restreindre ses facultés. » 

Puis, en allant, il s’exalte, et trouve des accents d’une véritable éloquence 
à opposer aux théories les plus vantées des fanatiques de la nouvelle école. 

« Comment se fait-il qu'Aristophane, Cervantès, Shakespeare, lArioste, 
Gœthe, Byron aient pu être admirés en France et nous aient paru de grands 
génies forts et vivaces, quoique garrottés par les traducteurs et dépouillés de 
leurs riches vêtements nationaux ? 

» Un tel exemple ne prouve-t-il pas l’infériorité de la forme et la puis- 
sance de l’idée? De l’idée il restera toujours quelque chose 1. » 

Et de la même plume tombe cette phrase superbe : « Va, esprit rapetissé, 
étroit, tu es incapable de sentir et de comprendre les belles imaginations 
sorties de l’idéalisation ! Il te faut une plate réalité mesquine, qui se voie, qui 
se touche, et tu nies les efforts de ces plongeurs qui se jettent résoläment 
au fond de la mer pour y chercher des perles précieuses afin d'en parer 
leurs créations. » 

L’apostrophe pouvait ne pas viser directement Courbet, mais il faut recon- 
naitre qu’elle trahissait peu d'enthousiasme pour sa méthode, car le jour, 
hélas! n’était pas éloigné où le peintre lui-même allait proclamer, urbi et 
orbi, que la base du réalisme est la négation de lidéal, « ce qu'aucun 
artiste (on se l'explique sans peine) n'avait osé affirmer avant lui ? ». 

Nous avons cité lavis de Proudhon. Le livre Du principe de l'art et de sa 
destination sociale est conçu presque entièrement pour exalter la tendance 
du peintre franc-comtois. D'une forme entrafnante, cette étude, pour qui la 
considère au point de vue de l’art, est un mélange de sophismes et de con- 
tradictions. Pour être un joüteur d’une rare souplesse, Proudhon érige sur 
un fond d'idées nullement vulgaires, les aperçus d’un esprit impénétrable 
au charme de la peinture, toute acception de système élant mise à part. 
Lorsque son examen porte sur une création artistique, il l'envisage à la 
façon de l’anatomiste que la composition, l'expression, le coloris, le modelé, 


1 Le réalisme, p. 16. 
2 Eugène Gressis-Dumouuin, Compte rendu des travaux du Congrès artistique d’Anvers. 
Anvers, 1862, p. 175. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 27 


la perspective d’une œuvre laisseraient indifférent, et qui s'arréterait à 
démontrer le côté défectueux d’une attache ou le vice d'insertion d’un muscle. 

Et, cependant, Proudhon non plus ne se montre à l'aise devant le réa- 
lisme envisagé comme théorie esthétique. Il peut juger sévèrement les 
anciens et les modernes, trouver David, Delacroix, Ingres, Rude ou Vernet 
également absurdes, cela ne l’empêche pas de poser cette question : « Le 
but de l'artiste est-il de reproduire simplement les objets sans s'occuper 
d'autre chose, de ne songer qu’à la réalité visible et de laisser l'idéal à la 
volonté du spectateur? En d’autres termes, la tendance de l’art est-elle au 
développement de l’idéal, ou bien à limitation purement matérielle dont la 
photographie serait le dernier effort? » Et voici la réponse de ce promoteur 
du réalisme : « Il suffit de poser la question ainsi pour que tout le monde la 
résolve : l'art n’est rien que par l'idéal, ne vaut que par l'idéal; s'il se borne 
à une simple imitation, copie ou contrefaçon de la nature, il fera mieux de 
s'abstenir; il ne ferait qu'étaler sa propre insignifiance en déshonorant les 
objets mêmes qu’il aurait imités. Le plus grand artiste sera donc le plus grand 
idéalisateur ; soutenir le contraire serait renverser toutes les notions, 
mentir à notre nature, nier la beauté et ramener la civilisation à la 
sauvagerie. » 

Cependant, contradiction étrange! ce fut en Proudhon et Champfleury 
que Courbet trouva ses plus énergiques champions. Du reste, ils avaient les 
plus généreuses illusions sur ce qu’ils croyaient être les débuts d’une réforme 
féconde. A leurs yeux, et peut-être ne se trompaient-ils pas complètement, 
la direction nouvelle n'était qu’une conséquence de la révolution de 1848 1, 
quelque chose comme une libération : lart démocratique et égalitaire 
triomphant de l'art aristocratique ou bourgeois. « Logiquement (le hasard 
est souvent logique), dit Champfleury, mieux valait peindre d’abord les basses 
classes où la sincérité des sentiments, des actions, des paroles est plus en 
évidence que dans la haute société. » 


! Dans une notice sur de Reiffenberg, insérée dans l'Zndépendance belge du 11 mai 1850, 
M. É. Fétis nous apprend que ce savant était persuadé que la décadence des lettres et des arts 
serait la conséquence inévitable de la révolution de 1848. Le chagrin que lui causait cette 
pensée contribua beaucoup à hâter sa mort. 


28 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Proudhon voulait que la nouvelle tendance prit le nom de peinture 
critique, et il frappait le romantisme d'estoc et de taille, comme un agent de 
corruption. « À quoi, bon Dieu! tout ce barbouillage peut-il servir, s'écriait- 
il, passant en revue l’œuvre de Delacroix : suis-je même sûr qu'un artiste 
qui passe sa vie à regarder dans son imagination les figures de Jacob, de 
Sardanapale, de Marc-Aurèle, celles de Lazare et de Méphistophélès, aura 
bien vu les personnes vivantes qu'il aura observées dans les circonstances 
les plus intéressantes de leur vie? Mais, encore une fois, cet homme qui 
voit au delà des siècles, qui fréquente le monde invisible, qui habite le 
surnaturel, qui fait poser devant lui les héros de Shakespeare, est-il capable 
de bien observer et de comprendre ce qui se passe autour de lui? Les quatre 
cinquièmes de l’œuvre de Delacroix sont niaiserie pure, l’autre cinquième 
reste douteux et suspect! » Et si, enfin, l’on veut connaitre à quoi aboutissait 
cette esthétique nouvelle, voici le dernier échantillon des erreurs où peut 
conduire lesprit de système : 

« Les tableaux du peintre d'Ornans sont des miroirs de vérité, dont le 
mérite, jusqu’à présent hors ligne, abstraction faite des qualités et des 
défauts de l'exécution, est dans la profondeur de l’idée, la fidélité des types, 
la pureté de la glace et la puissance du réfléchissement. 

» Cette peinture-là vise plus haut que l’art lui-même ; sa devise est l’inscrip- 
tion du temple de Delphes : Homme, connaissez-vous vous-même, concluant 
sous forme de sous-entendu, avec Jean le Baptiseur, et amendez-vous si vous 
tenez à la vie et à l'honneur !. » 


! Du principe de Part, etc., p. 228. 


cn momie 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 29 


III 


Le réalisme, selon quelques critiques, n’aurait fait que poursuivre, à 
vingt-cinq années d'intervalle, un mouvement commencé par le romantisme. 
Il fallait réagir contre l'esprit de système, le faux goût et tout l’ensemble de 
solennelles doctrines tenues en honneur par l’école académique. Les Casseurs 
de pierres et le Dante et Virgile ne seraient, dès lors, que des formes diffé- 
rentes dune même réaction. 

Nous avons montré déjà que c'était particulièrement au romantisme qu’en 
voulaient Proudhon ! et ceux dont il personnifiait les tendances. 

En effet, le mouvement réaliste, par son dogmatisme même, n'était pas 
sans avoir des points de contact avec l’esprit qui animait les partisans de 
David. La très grande différence résultait beaucoup moins des principes que 
des hommes qui se prétendaient appelés à les personnifier. 

David autoritaire et Courbet sans gêne et bon enfant, expliquent toute la 
distance qui sépare les travaux des deux artistes. 

Il y avait sans doute aussi, dans les premiers succès remportés par les 
œuvres de Courbet, une part importante à faire à certaines préoccupations 
politiques. L’artisan, représenté de grandeur naturelle, dans ses habits de 
travail, aspirait à prendre la place du grand seigneur ou du bourgeois en 
gilet de satin, comme la veille on avait vu des hommes du peuple se prélasser 
sur le trône du roi des Français et se griser de ses vins. 

Assurément, ce n’était pas donner une plus grande somme d'intérêt à 
l’ouvrier, de le transporter sur la toile que de lui donner les grands rôles 
dans des drames à sensation ?, des romans à tendances humanitaires, comme 
ceux de Gastineau 5, ou des vaudevilles aux visées démocratiques #, alors 


! Du principe de l’art, etc., p. 228. 

2 Le chiffonnier de Paris; Marie-Jeanne, ou la femme du peuple, ete. 

5 Le règne de Satan, ou les riches et les pauvres ; Comment finissent les pauvres, etc. 
t Le gamin de Paris. 


30 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


qu’il occupait sa place dans le gouvernement et que des voix éloquentes récla- 
maient pour lui l’organisation des ateliers nationaux. 

Envisagé de la sorte, le réalisme, devenu peinture à tendance, ne serait, 
en somme, qu’un mouvement transitoire, valant ce qu’il pouvait valoir au 
point de vue esthétique. Une certaine rudesse de forme, jointe à l’assourdis- 
sement des couleurs, était, en quelque sorte, une profession de foi, au même 
titre que les solennelles images de David avaient prétendu traduire l’austé- 
rité républicaine. 

Mais que devait avoir de commun avec le progrès indéfini de l’art un 
mouvement de l'espèce? Est-ce que toutes les conditions exigées précédem- 
ment, non pas depuis vingt ans mais depuis des siècles, pour constiluer une 
création vraiment belle, cessaient de prévaloir, parce qu’il avait plu à certain 
peintre parisien de représenter des Paysans de Flagey et des Casseurs de 
pierres au bord d’une route ? 

Comment se persuader qu’il ny eût pas au fond de cette peinture, d’un 
genre nouveau, une certaine recherche de popularité? Car le peuple aussi 
a ses courtisans, ceux que Barbier flétrissait dans sa vigoureuse langue 
poétique : 

Oui, c’est pitié à voir, avec sa tête rase, 
Son corps sans pourpre et sans atour, 
Ce peuple demi-nu, comme ceux qu'il écrase, 


Comme les rois avoir sa cour! 


Champfleury avait déclaré le réalisme un mot vide de sens; Courbet n’était 
pas du tout de cet avis. Pour lui, la définition était des plus faciles; voici 
comment il s'exprimait, à cet égard, au Congrès artistique d'Anvers : 
« Le réalisme n’est bien connu d'aucun de ses adversaires; il n’est pas aussi 
ancien qu'on veut bien le dire et n’a rien de commun avec les querelles des 
réaux et des nominaux ; le fond du réalisme, c’est la négation de l'idéal, à 
laquelle j'ai été amené depuis quinze ans par mes études et qu'aucun artiste 
n'avait jamais jusqu’à ce jour osé affirmer catégoriquement... En concluant 
à la négation de l'idéal et de tout ce qui s'ensuit, j'arrive en plein à l’éman- 
cipation de la raison, à l'émancipation de l'individu et finalement à la 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 51 


démocratie !!... » On voit que nous n’étions pas si loin de la vérité. 

Les incartades de Courbet n'étaient pas faites pour plaire à ses amis. 
Proudhon, qui voulait bien que la Baigneuse et le Retour de la conférence 
fussent « des œuvres de grand style, les seules dignes de notre temps », 
partait précisément de ce principe que le peintre devait étre un idéaliste. 
Aussi s'empressait-il de le déclarer : « Courbet n’a inventé ni réalisme, ni 
idéalisme, pas plus que la nature. Ce qu’il fait a été fait avant lui; il l’est 
aujourd'hui par d’autres que lui, souvent ses rivaux, quelquefois ses vain- 
queurs. Tout ce qu'on a dit à son occasion et qu’il a débité lui-même est 
dépourvu de bon sens ?. » 

Le rapprochement de ces diverses opinions ne démontre-t-il pas à toute 
évidence, et abstraction faite des œuvres elles-mêmes, que le mouvement 
réaliste ne se fondait nullement sur la préoccupation d’un progrès indéfini, 
précisément parce que l’on entendait qu’il fût en harmonie avec un état de 
l'opinion essentiellement éphémère? Nous montrerons plus loin à quel concours 
de circonstances, assez peu prévu, il fut redevable de s'étendre au delà des 
limites rationnelles. 

Il est des hommes que l’on n’aborde qu'avec réserve; leur haine du bruit 
donne presque la portée de l’indiscrétion à tout détail sur une existence 
volontairement dérobée à l’avide curiosité des foules. Si d’autres n’ont été 
que trop bien servis dans leur désir de notoriété par leur propre amour de 
la mise en scène et l’empressement des biographes, on ne peut méconnaitre 
que l’histoire de l’art n'ait dérivé un intérêt considérable de l’étude des par- 
ticularités de la vie des artistes. Une œuvre s’est présentée sous un aspect 
nouveau le jour où les circonstances de son enfantement se sont révélées. 

Le désir de s’éclairer sur la pensée intime d’un auteur se légitime complè- 
tement lorsque, dans ses travaux, il s'éloigne avec éclat de la voie commune. 
Courbet fut de ceux-là. 

Delacroix, très jeune encore, écrivait à son camarade Pierret : « Apprends- 


1 Eugène Gnessin-Dumouuin, Compte rendu des travaux du Congrès artistique d’Anvers. 
Anvers, 4862, p.173. — « La démocratie ne prend conseil que de la nature à laquelle sans 
cesse elle ramène les hommes », disait David à la Convention nationale. 

2 Du principe de l’art, p. 284. 


32 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


moi à étouffer les élans ambitieux, et quand j'aurai le bonheur de te revoir, 
retiens-moi dans la route ferme et humble que je me suis tracée !. » 

J.-F. Millet, le paysagiste, que Gautier disait « bien différent des manié- 
ristes en laid qui, sous prétexte de réalisme, substituent le hideux au vrai », 
écrivait ceci : « Mes critiques sont gens instruits et de goût j'imagine, mais 
je ne peux me mettre dans leur peau, et comme je nai jamais de ma vie vu 
autre chose que les champs, je tâche de dire comme je peux ce que j'ai vu 
et éprouvé quand j'y travaillais. Ceux qui veulent faire mieux ont certes la 
part belle ?, » 

Beaucoup plus sûr de lui, Courbet ne connut pas les hésitations si fréquentes 
dans la carrière des initiateurs. 

« Il se fait lPapologiste de l'orgueil, dit Proudhon; en cela il se montre 
tout à fait artiste, mais artiste de second ordre; car s’il avait la sensibilité 
supérieure, il sentirait esthétiquement que la modestie a son prix ; que si elle 
est quelquefois une hypocrisie, elle ne l’est pas toujours. La modestie est une 
des choses les plus délicates qu’il soit donné à l’homme de goûter; celui en 
qui le sophisme a étouffé ce sentiment n’est plus un homme : c’est une 
brute 5... » 

Paroles sévères dans la bouche d’un ami! 

Sans doute, la confiance en soi a engendré bien des œuvres glorieuses, 
mais elle ne tolère point de relâche dans la poursuite du mieux. Se proclamer 
satisfait, dire que l’on a « achevé ses études », n’est pas seulement un non 
sens dans la bouche d’un artiste, mais le présage d’une immutabilité d'ail- 
leurs très frappante chez Courbet. 

Silvestre est plus affirmatif encore que Proudhon en ce qui concerne le 
jugement de l'artiste sur son œuvre. « Personne, dit-il, n’est capable de lui 
faire le dixième des compliments qu'il s'adresse à lui-même, du matin au soir, 
d'un cœur naïf, et il vous répondra, si vous lui demandez son opinion : 
« Je suis courbetiste, voilà tout; ma peinture est la seule vraie ; je suis le 


{ Philippe Burry, Lettres d’ Eugène Delacroix, p. 18. 
2 Pigpacniez, J.-F. Millet. 
3 Loc. cit., p. 282. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 33 


premier et l’unique artiste de ce siècle; les autres sont des étudiants ou des 
radoteurs. » 

On voit qu'ayant à rechercher les origines du réalisme, à apprécier ses 
tendances, il n’était pas superflu de nous détourner un moment des œuvres 
pour nous enquérir des vues du représentant le plus notoire de la nouvelle 
école. Nous n'avons pas à pousser plus loin cet examen. 

Une chose demeure acquise : la préoccupation de beaucoup sacrifier à la 
notoriété obtenue à tout prix. Point de laborieuse recherche de l'expression 
manifestée par le contraste des types; plus d’indifférence encore pour la dis- 
position plus ou moins favorable du groupe, la justesse ou la grâce du mou- 
vement, pour la véritable donnée pittoresque, enfin. L'Enterrement et le 
Retour de la conférence, les deux seules « conceptions » dans tout l'œuvre 
de Courbet, dissipent la dernière illusion que l’on pourrait conserver sur 
l'impuissance du chef de l’école réaliste à rencontrer le succès autrement que 
par l'abandon des règles consacrées du bon goût et des convenances esthéti- 
ques, que tant de personnes en sont venues à envisager comme une des 
nécessités d’un art nouveau. 

Des journaux parisiens rapportaient naguère que M. Robert-Fleury, le 
doyen de l’Académie des beaux-arts, avait désigné à l'exposition de l’œuvre de 
Courbet un portrait de lartiste, en le proclamant une œuvre digne du pinceau 
de Rembrandt. Les portraits qu'il fit de lui-même furent, effectivement, les 
études les plus châtiées du peintre. Gautier l'avait depuis longtemps con- 
staté. « M. Courbet, disait-il, a une fort belle tête qu’il aime à reproduire 
en ayant soin de ne pas s'appliquer les procédés du réalisme; il réserve pour 
lui seul les tons frais et purs, et caresse sa barbe d'un pinceau délicat. » 

Que l'on ne s’y trompe pas, d’ailleurs : nous ne voulons pas contester à 
Courbet un ordre de qualités picturales très méritantes et que nul homme 
familiarisé avec la technique de l’art ne peut méconnaitre sans injustice. Aux 
critiques les plus acerbes se mêle presque toujours l'hommage d'une admira- 
lion, excessive aux yeux de bien des gens, rendu aux facultés peu communes 
du peintre : mais le temps n’a pas donné tort à ceux qui pensaient que 
l'avenir de l’art n’était pas, il y a trente ans, dans la voie où s'engageait le 


novateur et où prétendaient le pousser quelques enthousiastes. 
Tous XLV. 


QC 


34 LE RÉALISME:; SON INFLUENCE 


I ny a pas longtemps, appréciant dans l’Art les œuvres du chef d'école, 
M. Eugène Véron n'’hésitait pas à exprimer ce jugement : « En somme, 
Courbet a été un « maître peintre », mais en dehors du paysage il ne faut 
pas chercher en lui un artiste. Pour composer des scènes humaines, il lui 
manquait l'imagination, et ce tour particulier et supérieur de l'intelligence qui 
est nécessaire pour comprendre la poésie et le sens intime de la vie +. » 

Quoi de plus juste? La peinture, si vigoureuse qu'elle soit, n’importe-t-elle 
que comme expression d’une virtuosité qui devra nous faire tenir pour suffi- 
sante celte qualité à l’exclusion de toute autre? Acceptons, si l’on veut, comme 
un progrès acquis, toute manifestation de talent se faisant jour avec la vigueur 
déployée quelquefois par un Courbet, mais gardons-nous de l’envisager comme 
autre chose qu’un moyen purement matériel. I] y a tant d’autres exigences à 
satisfaire, que le grand art doit pousser très au delà pour répondre à sa des- 
tination sociale. 


IV 


Il nous presse de faire abstraction des personnalités. Allons aux œuvres, 
et demandons-nous si les défauts et les côtés faibles du réalisme étant établis, 
il est permis d'attribuer au système une conception nouvelle de la nature, 
appelant les regards de nos contemporains et de nos successeurs vers une. 
forme d'expression inaperçue ou jusqu'alors incomprise. En toute conscience 
nous hésitons à répondre affirmativement. 

On nous citera telle page admirée, à juste titre, pour sa sincérité; mais 
aussitôt se présenteront en foule à notre souvenir des maîtres de premier 
ordre, qui en Espagne, en Flandre, en France, en Angleterre, en Hollande, 
surtout, ont laissé des chefs-d’œuvre exclusivement inspirés des scènes les 
plus insignifiantes de la vie journalière. 


1 L’Art,t XXVII, p. 234. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 35 


Frans Hals, Rembrandt, Jean Steen, Ostade, Pierre de Hooghe, Teniers, 
Velasquez, Le Nain, Chardin, Gainsborough, Wilkie, ne sont évidemment 
pas moins sincères que les représentants de l’école réaliste, ni moins poéti- 
ques dans leur interprétation de la nature; nous disons même qu'ils le sont 
davantage. 

En Hollande, une nombreuse école d'écrivains épanche en des poèmes 
naturalistes ce puissant amour du simple et du vrai qui se révèle dans les 
œuvres des peintres du XVIIe siècle, et contribue à nous les faire com- 
prendre. 

Le réalisme hollandais, si réalisme il y a, avait sa raison d’être. Sous 
peine de n’exister pas, quelle autre forme pouvait revêtir l’art, chez un peuple 
libéré par la plus héroïque des résistances du joug de l'Espagne et, du même 
coup, des traditions espagnoles, et dont les artistes voyaient tarie pour eux 
une source deux fois séculaire d’inspirations : la peinture religieuse ? 
« Un peuple nouveau et qui a su s'affranchir du pape, du roi et de la tra- 
dition, naît à la vie. Un tel milieu est seul capable de faire éclore un tel 
art, un art radicalement indépendant, naturel, humain, et tiré des entrailles 
mêmes de la nation. 

» Vous cherchez le fauteur premier, le principe ; il est là. Le peuple s’est 
élevé au rang de nation, l’homme a conquis son individualité. La conscience 
d’un bien si précieux et si chèrement acheté imprime à ses actes, comme à 
sa pensée, un caractère inouï d’audace et de virilité. Voulez-vous un écho des 
sentiments qui dominent à cette époque? Lisez l'hymne par lequel Daniel 
Heinsius salue la victoire de Gibraltar; lisez cette strophe où le poète, 
s'adressant aux Espagnols, s'écrie : « Enlevez-nous les champs où nous 
vivons — nous nous conferons sans crainte à l'océan. — Partout où vous 
n'êtes pas, là pour nous est la patrie. — L'oiseau est né pour fendre lair — 
d’une aile rapide ; le cheval pour obéir au frein; — le mulet pour porter de 
lourds fardeaux — ou haler nos barques sur les canaux ; nous, nous nais- 
sons pour être libres! » Fières et nobles paroles où éclate dans toute sa force 
la haine de l'oppression, le culte de la liberté, passionné, exclusif et préparé 
à tous les sacrifices! « Partout où vous n'êtes pas, là est notre patrie! » 
Quelle protestation vaut ce cri sorti du cœur, et quel peuple que celui qui 


36 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


applaudissait à de tels accents et qui s’inspirait d’un patriotisme si ardent 1! » 

Exalter la patrie, ses hommes illustres par la valeur guerrière et la science; 
faire revivre sur la toile les traditions locales; retracer jusqu'aux habitudes 
du peuple, ses fêtes, ses joies; rendre les lointains horizons, l’aspect des 
campagnes verdoyantes peuplées d'innombrables troupeaux —- cette richesse 
de la Hollande, — les villes pittoresques; rappeler en des marines, sans 
rivales, les aspects changeants de la mer, et jusqu’à la puissance des flottes 
néerlandaises, quoi de plus conforme, en vérité, au rôle de lartiste, et quoi 
de plus patriotique à ce moment de l’histoire? 

Et combien merveilleusement s’accomplit la tâche? Frans Hals, Rembrandt, 
Ostade, Jean Steen ne sont pas des raffinés, bien moins, sans doute, des 
théoriciens. Que de charme pourtant, de profondeur, de pénétrante émotion 
dans les scènes inspirées de ce qui les environne, et combien ici l'exécution 
rehausse, par sa conscience et sa simplicité, l'amour fervent du vrai! 

Mais les peintres de la Hollande procèdent avec un tact exquis de conve- 
nances esthétiques. Ostade ne s’avise point de nous donner ses tabagies dans 
le format pompeux des toiles religieuses, et sil prend fantaisie à Rembrandt 
de nous montrer un échaudoir, il saura dire à merveille sa pensée sans faire 
de la carcasse d’un bœuf ou d’un porc, le pendant de la Ronde de nuit. 

Que l’on ne s’y trompe pas cependant : ce mouvement si plein d'intérêt fut 
de courte durée, et le grand Rembrandt lui-même mourut pauvre et obscur, 
délaissé en faveur d’une école dont les chefs, tant considérés, attirent à peine 
aujourd'hui l'attention. Certains de ses élèves eux-mêmes en vinrent à se 
travestir au point d'être méconnaissables dans leur nouvelle manière. 


Si nous avons montré à quelles causes l’école hollandaise dut sa plus vive 
splendeur, nous aurons fait comprendre aussi qu’un mouvement analogue ne 
s’improvise pas. — On l’a dit avec raison : « L'action de faire fleurir les arts 
dans un pays se combine de deux éléments : des bons ouvrages que l’on fait 
et de l'intérêt que la nation y porte ? » ; ils sont inséparables. 


C. Vosmaer, Frans Hals. Leyde, 1875. 
DeLéczuze, loc. cit., p. 56. 


1 
2 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 37 


Analysant le mouvement artistique contemporain, un critique allemand dit, 1] 
avec infiniment de raison, que si la peinture n’a pas pour objet unique de A 
traduire la beauté régulière, que lordinaire et méme le laid peuvent ajouter 
à la force expressive dune œuvre, il faut pourtant se garder de croire que 
le bourbier possède seul des charmes et que le pur cristal de la source offense 
le regard. 

« Au point de vue matériel, ajoute ce critique, la nouvelle théorie ne 
constituait pas un progrès bien marquant, car le fait de peindre une trogne 
de buveur avec une vérité telle que l’on croit percevoir jusqu’à l'odeur 
absinthe qu’elle exhale, ne fournit pas la preuve d’un talent supérieur à 
celui qu’il faut pour rendre d’une manière parfaite un profil régulier t. » 

En effet, talent pour talent, le connaisseur préférera toujours une concep- 
tion élevée à une conception vulgaire, et la véritable supériorité de l'artiste 
ne peut se manifester que par le choix heureux des types et des situations 
que son pinceau doit exposer à nos regards. Quant à bien peindre, à notre | 
sens c’est son premier devoir, comme le premier devoir d'un écrivain est de | 
connaitre sa langue. Que dirait-on d’une école qui trouverait que tout écrivain, fl 
digne du nom, doit puiser dans les jargons populaires pour être de son temps 
et être compris de ses lecteurs? 


Le réalisme se fit toutefois accepter comme théorie ; il avait, selon l’expres- 

sion de Champfleury, « fait son trou dans le dictionnaire » , il eut ses partisans 

énergiques et d’une entière bonne foi, mais que la somme de leurs connais- 

sances artistiques n’appelait pas à faire autorité; il devait avoir aussi ses 1 

flatteurs, comme les a toute puissance. | 
A les entendre, cette condition essentielle de toute œuvre peinte : la sincé- 

rité, ne pouvait résider que dans les motifs de la plus franche insignifiance, 

aisément saisissables pour la foule, au même titre que l'imagerie populaire. 

La rudesse , souvent ainsi, se confond avec la franchise. « Ils ont cru, les 


malheureux, faisant injure à ce peuple auquel ils prétendaient s'adresser, 
que lart vulgaire pouvait être l’art populaire ?! » s'écrie Ghesneau. 


1 Seemann , Geschichte der Kunst im XIX. Jahrhundert. Leipzig. 1881, p. 127. 
2 L'Édücation de l'artiste, p. 19 


38 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


; Non moins altérés de notoriété que les critiques l'étaient d'influence, de 
jeunes artistes crurent voir s'ouvrir pour eux les voies du succès par un 
ordre de travaux certainement très abrégés, puisqu'il allait être permis — 
mieux encore, exigé, — de ranger parmi les choses secondaires, la concep- 
tion, le choix raisonné du type et, comme conséquence inévitable, l'étude de 
la forme elle-même. 

L’imprévu, en toutes choses, a cet avantage indéniable de frapper latten- 
tion des foules. Toute forme nouvelle d'expression, sans constituer nécessai- 
rement un progrès, implique pourtant l'initiative et suppose un effort. Étre 
discuté n'est pas le lot du premier venu et, d’ailleurs, la confiance qu’on 
possède en ses propres jugements est rarement si robuste qu’une voix secrète 
ne vienne, à certaines heures, rappeler à l’homme sa faillibilité. L'artiste, le 
jeune artiste surtout, est sujet à ces moments de doute qui donneront à la for- 
mule nouvelle l’apparence d’un progrès, et plus d’un a payé cher l'illusion. 

D’autres causes allaient contribuer à la diffusion rapide des théories du 
réalisme. En premier lieu vint la fréquence des expositions. 

Appelés à choisir entre l’exhibition d’une œuvre hâtive et l’abstention, peu 
d'artistes croient devoir préférer celle-ci. Le besoin de notoriété, l'espoir des 
récompenses, les chances de la: vente, la crainte de Poubli : autant de motifs 
qui les poussent. 


«.… Le temps ne fait rien à l'affaire », 


dit Alceste, et c’est aussi notre opinion ; mais par cela même on doit déplorer 
de voir le peintre travailler sous l'empire de la crainte d’être surpris par 
le temps, travailler, enfin, en vue d’un délai fatal et rapproché. C’est, au 
regard de certains articles de revues, longuement médités et soigneusement 
écrits, la chronique hebdomadaire, paraissant à l'heure dite. Pour émaner 
d’un écrivain de valeur, cette dernière ne cessera pas de se ressentir des 
circonstances de sa production. 

Les effets fâcheux de la fréquence des expositions ont été maintes fois 
établis; ils étaient appréciés, dès l’année 18592, lorsque les salons devinrent 
annuels, par Gustave Planche, avec une incontestable hauteur de vues. « Je 
pense, écrivait ce critique, que les expositions annuelles sont très loin de 
servir au développement de l’art; envisagée comme industrie, assimilée 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 39 


aux toiles peintes de Mulhouse, aux indiennes de Rouen, la peinture peut s’en 
réjouir, en tirer parti. Considérée comme l’une des formes de l'imagination 
humaine, elle ne peut que s’en attrister. 

» Quand les salons se succédaient à des époques irrégulières, les peintres, 
les statuaires travaillaient pour lutter; l’exposition devenait un champ de 
bataille. Aujourd’hui que les salons sont loin d’avoir la même importance, la 
lutte s'engage à peine entre quelques sujets d'élite, la plupart des artistes ne 
voient dans les exposilions annuelles qu’une occasion de placer les produits 
de leur industrie : l’activité mercantile a remplacé l’émulation. 

» Assurément le travail de la pensée ne saurait se contenter des applau- 
dissements, il est juste que la renommée se traduise en bien-être; malheu- 
reusement , les expositions annuelles suppriment la renommée et ne laissent 
debout que la soif du gain : le plus grand nombre se hâte de produire et 
prend en pitié les âmes assez ingénues pour rêver la gloire; le désir de bien 
faire s’attiédit de jour en jour, les ateliers se transforment en usines, et pour 
peu que cette fièvre continue, il sera bientôt impossible de distinguer l’art de 
l'industrie. » 

On soupçonnait à peine, à l’époque où paraissaient ces lignes, à quel point 
la prédiction devait se réaliser, et quiconque a suivi d’un œil attentif la marche 
des beaux-arts depuis vingt-cinq ans a dû être frappé de l'influence fâcheuse 
exercée par la succession rapide des expositions. 

C’est la poursuite du neuf à tout prix, la préférence donnée à des sujets 
d'une mise en scène facile, la multiplication des tableaux d'accessoires, des 
paysages, des portraits; le triomphe, en un mot, de toutes les adresses sur 
la méditation. 

Non moins en Belgique qu’en France on a ressenti les effets regrettables 
des expositions trop rapprochées. 

M. É. Fétis n'hésite pas à voir dans leur fréquence « une des causes de 
l’infériorité de l’art moderne, une de celles dont l'influence est la plus directe 
et la plus dangereuse ! ». 


1 D'Art dans la Société et dans l’État, p. 135. — Plus récemment, M. Fétis a eu l'occasion 
de revenir sur cette question dans le discours qu’il a prononcé, comme président de l’Aca- 
démie, à la séance publique de la Classe des beaux-arts, le 28 octobre 1885. 


40 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Grâce aux salons annuels de peinture, les théories mises en honneur par 
Courbet purent arriver assez tôt à se faire accepter. 

Le public, à force d'entendre prononcer un nom et souvent proclamer un 
mérile, peut croire que notoriété et valeur sont synonymes : il ne discute plus 
et cesse d’être choqué de -certaines choses contre lesquelles il protesterait, 
laissé à la libre manifestation de ses préférences. 


A cette phase de l’histoire de l'art contemporain , une circonstance des 
moins prévues vint donner tout à coup au réalisme une apparence nouvelle 
de légitimité : ce fut l'invention de la photographie. 

La chose était, vraiment, trop merveilleuse pour ne pas justifier tous les 
enthousiasmes. 

Comment croire que désormais l'imitation ne serait pas le but exclusif de 
lart, quand la simple action chimique des rayons solaires arrivait à rendre 
l’image exacte de tout ce qui nous environne, avec une perfection à désespérer 
l'artiste le plus patient? La meilleure preuve que cette croyance existait, c'est 
qu’on alla jusqu’à insinuer que des œuvres comme celles de Meissonier, par 
exemple, devaient leur supériorité au concours de la photographie, et des 
critiques prouvérent toute l'étendue de leur incompétence en se faisant ies 
échos de pareilles absurdités. 

Mais, incontestablement, la peinture devait se ressentir d’une manière très 
directe de l'influence de la photographie. 

Tout d’abord , il faut le constater, la faculté de perception des peintres 
était sortie victorieuse d’une épreuve qu'on pouvait voir tourner à la confu- 
sion complète de quiconque tenait le pinceau. L'effet de la lumière et des 
ombres, la projection des objets dans l’espace se montraient tels que nos 
regards étaient accoutumés à les percevoir; la photographie les rendait sans 
en retrancher aucune chose aperçue jusqu'alors, et donnait, en outre, à ses 
images, une précision de détail propre à contenter l'œil le plus scrupuleux. 
Pour beaucoup d'artistes et pour le public lui-même, la nature allait se pré- 
senter sous un aspect nouveau. Jusqu'alors on était allé vers elle, pénétré d’un 
respect religieux, d’une curiosité jamais satisfaite, certain de rester toujours 
bien loin d’une réalité que nul n’était sûr d’avoir bien aperçue et toujours 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 44 


dans lespoir de lui dérober quelque secret; voici l'épreuve photographique se 
présentant comme un moyen de contrôle à la portée de tous et, précisément, 
ce qui plaidait en faveur de la supériorité du peintre sur l’inerte machine 
allait, pour un nombre infini de personnes, être interprété comme un élément 
d'infériorité. 

Chose digne de remarque et bien faite pour démontrer cette influence de 
la photographie sur la peinture, il est impossible de n’être pas frappé de la 
manière dont chaque étape nouvelle du procédé trouva son équivalent dans 
l'effet des tableaux à cette époque d'investigation. 

La réalité avait triomphé de limage; limage allait vouloir, à son tour, 
triompher de la réalité. 

Imparfaite d’abord en ses tentatives, la photographie warriva pas d’un jet 
à sa netteté présente, Les demi-teintes ne furent rendues qu'après une longue 
période d'essai, et la grande puissance des lumières ne se produisit que sous 
l'influence du perfectionnement des lentilles joint à l’expérimentation de 
certaines matières nouvelles. Les premières images apparaissent comme 
environnées de vapeurs. 

On vit des artistes se passionner pour celte indécision des contours, et si 
ce ne fut là qu'une époque transitoire, on ne peut nier que la science des 
effets ne souffrit de l'innovation. 

On crut un instant devoir prêter à la nature des apparences de grisaille, 
et le résultat fut plus grave encore en ce qui touchait l'étude de la forme. 

Dire que la poursuite de l'idéal, que l'étude des effets eût cessé d’être 
tenue en honneur serait inexact; comment nier, pourtant, l'influence toute- 
puissante et presque lyrannique de l'habitude en toute matière régie par le 
goût? L'artiste put croire que, réellement, une ère nouvelle s'ouvrait pour lui 
et que certains droits nouveaux, non dissemblables de ceux que la Révolution 
avait conférés au citoyen, lui étaient échus. Fallait-il s'appliquer encore avec 
la même ardeur à l'analyse de la forme, à l'étude des proportions si laborieu- 


sement poursuivie à travers les âges depuis Polyetète jusqu'au Poussin ? 

La beauté gardait ses droits, mais à la condition de résider, non pas dans 
l'imagination de l'artiste, mais de se renfermer dans l'ordre des réalités 
banales issues de la photographie, à la condition, enfin, de se plier à ce 


Tome XLV. 6 


42 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


niveau bourgeois qui nous rend tous égaux devant l'appareil !. La distinction 
des mouvements, la noblesse des attitudes cessaient dès lors de prévaloir sur 
la réalité pure et simple; tant mieux où elles résidaient, tant pis où elles 
faisaient défaut, et, à force de se le persuader, lon se crut admis à rejeter, 
sans autre examen, parmi les conventions, toute recherche entreprise dans 
le domaine de l'idéal. 

Une cause d'autre nalure et non moins puissante, devait exercer son 
influence sur la marche des beaux-arts : l'accroissement rapide des fortunes. 

La somptuosité des intérieurs en vint à exiger comme complément naturel 
et obligé la présence des tableaux, des sculptures. On voulut des œuvres 
appropriées à la décoration des appartements, et s’il était loisible à la richesse 
de s'entourer de productions de première valeur, les fortunes plus modestes 
crurent pouvoir, à un moindre prix, se contenter de la perfection relative, de 
l'apparence des toiles signées des plus grands noms. On eut ainsi des œuvres 
de reflet, chacun trouvant à s'accommoder à sa guise, et si l’œuvre de réelle 
valeur devait hausser de prix par le voisinage de la médiocrité, celle-ci n’en 
restait pas moins tolérable, tout au moins tolérée, étant donné qu'on la jugeait 
conforme aux ressources de son acquéreur. Au lieu de se contenter de repro- 
ductions bien faites, d’estampes de mérite, on préféra des originaux de bas 
aloi. La conception nulle et l'exécution lâchée purent avoir leurs prôneurs. 

Préoccupés du placement de leurs produits, nombre d'artistes en vinrent 
à tout sacrifier au goût d'acheteurs peu éclairés, et l'esprit de spéculation des 
marchands tira grandement parti de ce courant. L'œuvre d'art tendait à se 
dénaturer, elle cessait d’être une création de l'esprit pour se rapprocher du 


1 « La photographie, ne procédant que du fait, commence et finit avec lui; elle l'accepte tel 
qu’il se présente, se l'approprie sans contrôle, sans développement, sans restriction d'aucune 
sorte; elle ne peut rien au delà de cette fidélité aveugle. En dehors de cette assimilation 
à outrance elle n'existe pas. De là l'expression négative, l’aspect inerte de ses produits d’après 
les objets que la vie anime, de Jà ces portraits sans physionomie et ces tristes effigies du corps 
humain qui suffiraient pour dégoûter dn réalisme, si tant est que le réalisme et ses œuvres 
puissent séduire sérieusement personne : images ressemblantes si l’on veut, mais d’une res- 
semblance figéc; images vulgaires et mortes, bonnes tout au plus à être consultées à titre de 
renseignements sur la lettre de la nature. » H. DeLarorne, La photographie et la gravure. 
(Revue pes Deux Monpes, 1856, p. 619.) 


Î 
À 
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f 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 45 


produit mercantile, régulièrement « coté sur la place », et des talents de 
premier ordre n’échappêrent pas à la contagion. 

Lancé dans la voie de produire vite et beaucoup, on s'autorisa de toutes les 
méprises et de tous les sophismes, et l’a peu près, « l'impression », en plus 
d’une circonstance, fut érigé en système. 

Nous parlons de choses du passé; le bon goùt et l'expérience ont fait Justice 
dans une large mesure de ces erreurs, « Où manque l'âme, la sensibilité, il 
n'y a point d'art, il wy a que du métier », disait Proudhon lui-même !; l’on se 
persuade de plus en plus de la vérité de cette parole. 

Affirmer, d'autre part, que l'équilibre rompu soit rétabli complètement 
serait chose hasardeuse, autant que de prédire qu'il doive l'être de si tôt. 

En effet, aujourd'hui même, la peinture ne s'est pas libérée des influences 
qui semblent plutôt devoir l'éloigner que la rapprocher du rôle que lui marque 
logiquement une succession de forces acquises depuis des siècles. 

« Nous visions haut, jadis, écrivait Delacroix en 1859; heureux qui y 
pouvait atteindre! Je crains que la taille des lutteurs d'aujourd'hui ne leur 
permette pas même den avoir la pensée; leur petite vérité étroite n’est pas 
celle des maitres : ils la cherchent terre à terre avec un microscope! » 

Le grand artiste n'eut pas la joie de voir les choses beaucoup se modifier, 
et lui, tant calomnié et jamais satisfait de son œuvre, parlait encore avec une 
amertume profonde, dans un des derniers écrits que l’on ait de sa main, « de 
cette génération qui supprime les principales difficultés de la peinture ». 
Nous craignons qu’elle wait encore ses représentants. 


! Du principe de Part, ete., p. 24. 


44 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


y 


Si le réalisme ne peut être admis comme expression logique et légitime 
des préoccupations de notre temps, Cest moins encore par sa tendance à 
vouloir substituer certaines qualités purement matérielles à l'expression puis- 
sante des mouvements de l’âme, que par l'influence, extrêmement fâcheuse, 
que l’acceptation de ses théories menacerait d'exercer sur le grand art. 

Le grand art! déjà le mot provoquera plus d’un sourire. Que de fois, 
en effet, les critiques lont dit, et que de fois la foule l’a répété après eux, 
« la grande peinture est morte », et gaiement on porte le deuil de la 
défunte. 

Si vraiment la grande peinture est morte, et le ciel nous garde de le 
croire, — il est une chose certaine, c’est qu’elle n’est pas morte de mort 
naturelle et que tout ce que l’on a pu faire pour hâter sa fin on Pa fait. 

« En peinture, disait l’autre jour un critique écouté, le sujet est chose 
secondaire : la vie, le mouvement, la ligne, la magie de la couleur, le dessin, 
la touche caractéristique, voilà Part véritable! » 

« En art, comme en littérature, dit un autre, tout consiste dans le tour de 
main, l’exécution ou le style !. » 

Faut-il s'étonner, après cela, de ce que le grand art soit supposé n’exister 
pas, par ceux, du moins, qui se laissent persuader que le sujet n’est pour rien 
dans la splendeur des conceptions de Michel-Ange à la Sixtine, de Raphaël 
au Vatican, de Véronèse à Saint-Marc, de Rubens un peu partout? 

S'arrêter à démontrer l'importance des qualités techniques dans les arts 


serait en réalité, selon l'expression vulgaire, enfoncer une porte ouverte; mais 
l'erreur serait plus considérable encore de supposer que la forme, si parfaite 
qu’elle soit, puisse servir à autre chose qu’à habiller une idée ?, 


1 Casracwary, L'œuvre de Courbet, p. 8. 
2 « Une œuvre d'art ne saurait être autre chose qu’une pensée rendue sensible par une 
image, » (H. DeLasonoe, Études sur l’art, ete., p. 85.) 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 45 | 


Il y a eu de tout temps des écrivains, et même des orateurs, soucieux de la 
forme au point de se préoccuper moins de l’idée que d’une manière frappante 
de s'adresser au public. 

Le principe réaliste nous semble done inconciliable avec l’art envisagé au | 
point de vue des préoccupations de notre temps qui, sans doute, a plus qu’un 
autre remué des idées. 

Que l'artiste puise dans la réalité, ou simplement dans son imagination, 
toute scène représentée est susceptible de se revêtir, sous son pinceau, d’une 
forme saisissante et complète, d’un effet puissant, et lon est en droit de se 
demander ce que seraient les œuvres dun Rembrandt, si le maitre n'avait 
trouvé dans sa féconde imagination les effets si admirablement adaptés aux 
scènes qu’il tire de l'Évangile, comme le Christ quérissant les malades, 

Annonciation aux bergers, les Disciples d Emmaüs. « L'âme se propor- 
tionne insensiblement aux objets qui l’occupent et ce sont les grandes occa- 
sions qui font les grands hommes », dit Jean-Jacques Rousseau. 

Voilà la vraie définition. 

Le grand art ne sera done pas celui qui aura le plus profondément exercé 
en l'artiste la faculté de rendre, avec la somme d'adresse, même la plus 
grande, les objets qui l’environnent, mais avant tout, celui qui exercera sa 
faculté de concevoir, faculté de médiocre avantage, nous nous plaisons à le 
reconnaître, s’il ne possède encore celle de revêtir sa pensée d'une forme qui 


soit pleinement en rapport avec elle. « Le but de Part, on l’a trop oublié de 
nos jours, dit Théophile Gautier, n’est pas la reproduction exacte de la nature, 
mais bien la création, au moyen des formes et des couleurs qu’elle nous livre, 


| d’un microcosme où puissent habiter et se produire les rêves, les sensations 
| et les idées que nous inspire l’aspeet du monde. » 

| Le réalisme ne l’admet point ainsi. Aucune œuvre ne vaut, à en croire ses 
apôtres, qu'autant qu’elle se renferme dans le cercle des choses vues et effec- 


tivement perçues par l'œil du peintre, comme par celui du spectateur. 

« Quand le divin Raphaël conçut la représentation de la science, dit 
Burger, au lieu de prendre ses contemporains — l'Italie et le monde ne 
manquaient pas alors de savants et de philosophes, — il alla chercher à 
dix-huit siècles en arrière et chez un autre peuple l’École d'Athènes. Il en 


46 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


fait de même pour représenter toutes les qualités humaines et toutes les 
manifestations sociales. 

« Cet art symbolique n’est pas très difficile, sous réserve du génie qui a 
créé l’École d'Athènes ; on apprend tout de suite que pour faire Astronomie, 
on pose une femme le nez en lair et on sème d’étoiles sa robe : c’est tout 
simplement la substitution d’hiéroglyphes, de logogriphes et d’énigmes, à 
l’homme même. C'est le sacrifice de l'humanité rayonnante et expressive, 
à des signes extérieurs, matériels et conventionnels 1. » 

Combien est plus élevée la parole de Cicéron sur l’état de l'âme de Phidias 
créant le Jupiter olympien, l'artiste devant toujours trouver au fond de son 
cœur un idéal d'expression qu'aucun modèle existant ne peut lui fournir. 

« Phidias, quand il faisait une statue de Jupiter ou de Minerve, n'avait 
pas sous les yeux un modèle particulier dont il s'appliquait à exprimer la 
ressemblance ; mais au fond de son âme résidait un certain type accompli de 
beauté sur lequel il tenait ses regards attachés et qui conduisait són art et sa 
main ?, » 

La forme, du reste, et ceci s'applique non moins à la forme littéraire qu’à 
la forme plastique, la forme ne saurait demeurer toujours la même. Il appar- 
tient à Partiste de l'adapter à la nature de sa conception, et nous mettons au 
défi aucun maître de se procurer un modèle dont il soit pleinement satisfait. 

S'imagine-t-on les figures de Aurore et de la Nuit de Michel-Ange, copiées 
sur nature? « Ni dans un village, ni dans une fête, ni dans les ateliers, en 
ltalie ou ailleurs, aujourd’hui ou au XVI" siècle, dit M. Taine 5, aucun homme 
et aucune femme réelle n’ont ressemblé aux héros indignés, aux vierges colos- 
sales et désespérées, que le grand homme a étalés dans la chapelle funéraire. 
C'est dans son propre génie que Michel-Ange a trouvé ces types. » 

Se figure-t-on, d'autre part, Rubens créant les bourreaux de son Martyre 
de saint Liévin ou de saint Thomas, par la simple copie d’un modèle fourni 
par le hasard ? 

Quatremère de Quincy démontre avec une singulière puissance de per- 


! Les musées de la Hollande, 1858, t. I, p. 203. 
? QUATREMÈRE DE Quincy, Essai sur l'idéal dans ses applications pratiques. 
5 Philosophie de l’art, p. 47. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 47 


suasion l'erreur de ceux qui oublient l'influence exercée par son sujet sur 
l'inspiration de l’homme qui crée. « Je demande, dit-il, si le genre du sujet 
ne détermine pas les qualités de l'éloquence. Je demande si le discours de 
l'orateur, qui n’est autre chose que l'expression des sensations qu'il éprouve, 
ne reçoit pas des circonstances des modifications variées; et je le demande 
encore, y a-t-il pour l'orateur quelque moyen de supposer, de suppléer ou de 
feindre une disposition dont l'influence détermine et l'ordre de ses pensées, 
et la forme de son style, et le caractère de ses mouvements? » 

Ainsi de l'artiste. Croira-t-on à l'existence du bas-relief du Départ de 
Rude, sans cet état de l'âme de l'illustre statuaire qui le créa ? 

Sans doute, lorsque nous parlons du grand art et de sa féconde influence, 
nous ne saurions un seul instant nous arrêter à l’idée d'imposer à la peinture 
des formes préarrêtées, ni même un rôle que la nature de ses moyens rend 
impossible. Et pourtant, il faut le reconnaitre, l'artiste ne jouit pas d’une 
liberté entière. Il n'entre certainement à l'esprit de personne de prétendre 
que le seul fait de représenter, sur une grande toile, le premier objet venu, 
constitue le grand art. L’Enterrement d'Ornans ne gagnait en aucune sorte 
à revêtir les proportions héroïques d’une page d'histoire, et Rubens, qui s’y 
entendait et avouait, d’ailleurs, que les grandes toiles allaient le mieux à son 
tempérament, Rubens s’est bien gardé de donner à sa Kermesse ou à son 
Jardin d'amour les proportions solennelles de sa Descente de croix ou du 
Triomphe d'Henri IV. 

Rien ne prouve, du reste, que l'impression ressentie par le spectateur doive 
être moins profonde devant une œuvre de petites dimensions que devant une 
toile de plusieurs mètres; seulement, l'impression que l'artiste a voulu pro- 
duire est d'autre nature dans les deux cas, et il est done évident que nombre 
de sujets s’accommodent mieux des proportions réduites que de la grandeur 
naturelle. L'avantage de cette dernière réside beaucoup moins dans le moyen 
qu’elle fournit à l'artiste de mieux produire l'illusion que d'augmenter, aux 
yeux du spectateur, l'intensité de l'expression, encore un des côtés de l'art 


que le réaliste envisage comme secondaires. 
Nous sommes donc en droit de dire que la grande peinture est en majeure 
partie redevable de son abandon à la doctrine nouvelle. 


48 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Est-ce un bien ? Est-ce un mal? 

Les plus récents critiques français et belges envisagent comme un progrès 
réel lapplication des efforts de l'artiste à la traduction des épisodes de la 
plus extrême simplicité, sans autre préoccupation que de « faire vrai » £. 
Ils nous rappellent combien la Hollande a su, dans la sphère des plus hum- 
bles données, trouver matière à des chefs-d’œuvre et toucher juste, en tra- 
duisant ce qu'elle sentait le plus profondément, ce qu’elle aimait le mieux. 

Nous souscrivons de la manière la plus absolue aux éloges attribués à ces 
maitres consciencieux d’une des plus délicieuses écoles qui fût jamais; mais 
cela même nous donne le droit de croire que notre époque demeurera dans 
son esprit véritable, tout en obéissant à d’autres préoccupations. 

Être « vrai » n’est point un but; c’est un moyen, un moyen même entre 
plusieurs; lon ne saurait, par exemple, faire à un peintre de plus cruelle 
injure que de supposer qu'il vise à placer ses œuvres au niveau de la photo- 
graphie. 

Sans doute il n’y a aucune espèce de rapport entre un portrait du Titien, 
de Rembrandt, de Frans Hals ou de Van Dyck, et le genre de vérité d’un 
portrait issu de la presse photographique ? 

Tou! homme doué du plus léger sentiment de l’art se révolte à l’idée de 
voir meltre en parallèle un portrait gravé à l'eau-forte par Rembrandt ou 
par Van Dyck, avec une photographie d’une vérité matérielle assurément 
supérieure, 

La théorie du « faire vrai » ne peut donc être absolue, car notre raison- 
nement est applicable à toute création artistique, au même titre qu’au portrait, 
dans lequel, incontestablement, il y a un degré de ressemblance matérielle 
à poursuivre. 

On peut être plus vrai dans un sujet de pure imagination que dans une 
scène copiée sur nature. 

On a cru, de bonne foi, que l'importance donnée au paysage, comme 
d’ailleurs à tous les genres accessoires : marine, nature morte, etc., et la 
forme particulière d'interprétation revêtue par ces sujets, sous le pinceau des 


1 Lucien Sozvay, L'art et la liberté, Bruxelles, 1881, p. 58. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 49 


peintres de nos jours, méritait d’être envisagée comme un progrès. Ici 
encore, nous regrettons de différer d'avis avec plusieurs représentants con- 
sidérés de la critique contemporaine. 

Loin de nous la pensée de méconnaitre le talent de nombre de paysagistes 
de l’école moderne. Il est incontestable que le paysage comme on l’entendait 
il y a quelque cinquante ans, tout au moins en Belgique ou en France, ne 
possédait pas la saveur de beaucoup d'œuvres contemporaines. N'oublions 
pas, cependant, que c’est aux Gainsborough, aux Wilson, aux Creswick, à 
Constable, surtout, que revient le mérite d’avoir ouvert les yeux de l’école 
française sur la possibilité d’être un vrai paysagiste en transportant sur la 
toile l'aspect des champs, des bois aux diverses saisons, de la mer calme ou 
agilée. 

On l’a constaté avant nous, la France ne possédait même pas la tradition 
du paysage, malgré les chefs-d'œuvre de Claude, du Poussin et du Guaspre, 
lui, aussi, dans son genre, un maitre de premier ordre. 

C'était chose neuve de voir des peintres comme Huet, Michel et après eux 
Cabat, Rousseau, Français, Troyon et quelques autres entrer dans cette voie 
frayée par les Hollandais, d’abord, et poursuivie en Angleterre avec tant de 
succès. 

Delacroix qui, tout jeune, avait visité ce pays, sous les auspices de Fiel- 
ding, avait été profondément remué de ce qu'il y avait vu. On connait les 
pages émues qu'il écrivait à Bürger sur ses souvenirs d'outre-Manche et 
l'impression qu’il avait ressentie en voyant les premières aquarelles de Bon- 
nington, car la France ne connaissait non plus l'aquarelle. 

Mais si aucun éloge n’est trop élevé pour certains maîtres français, il n’en 
résulte pas que la compréhension plus juste, ou le rendu plus séduisant 
des sites champêtres, réalise pour l’art un progrès absolu ni même définitif; 
c’est plutôt le contraire qui est vrai. 

A proprement parler, ni le paysage, ni la peinture d'animaux, ni la marine 
ne constituent des genres spéciaux. 

Se figure-t-on vraiment un artiste se délournant absolument de la figure 
humaine — source éternelle d'observations psychiques et d’études maté- 
rielles, — pour ne voir dans la nature que les bœufs, les moutons, les chiens 

Tome XLV. 7 


50 LE RÉALISME: SON INFLUENCE 


et les volatiles ; tel autre, dédaignant la végétation pour ne voir que la mer; 
un troisième, au contraire, indifférent en apparence au spectacle grandiose 
de l'océan et ne comprenant le beau que sous la forme d’un chêne majes- 
tueux ? Évidemment cela serait absurde. 

Et le paysagiste lui-même s'en tiendra-t-il à un seul genre de sites? 
Devra-t-il perpétuellement reproduire les vastes horizons et délaisser l'inté- 
rieur des bois, ou l'inverse ? Chaque saison n'a-t-elle pas son charme? Et 
de quel droit en arrivera-t-on à proclamer que les sites grandioses des pays 
accidentés ne sont pas de ceux qui puissent être rendus par le pinceau ? 

Disons qu'ils charment moins certains hommes et que, d'ordinaire, l'artiste 
préfère rendre ce qui le touche plus vivement. 

Il a été suffisamment prouvé que, de même que les poètes qui ont célébré 
la vie champêtre avec le plus d'émotion étaient des citadins, les meilleurs 
paysagistes ne sont pas ceux qui ont fixé leur demeure au milieu des champs. 
Tant il est vrai qu'ici même l'imagination conserve ses droits, et que le 
charme du souvenir, le voile d'idéal qui enveloppe les choses lointaines sont 
des facteurs d’une puissance infinie dans toute création artistique. 

Quoi qu’on veuille, ce n’est pas un progrès que le nombre grandissant 
des paysagistes, fussent-ils tous excellents. L'art est un, et il ne s’agit nulle- 
ment en peinture, comme en musique, de s'adonner à l'étude exclusive d’un 
seul instrument, le même homme pouvant difficilement aspirer à une supé- 
riorité égale sur un instrument à cordes et un instrument à vent. On a vu 
des maitres dont, certainement, personne ne songe à contester la supériorité 
comme peintres : Orcagna, Verrocchio, Léonard de Vinci, Michel-Ange, étre 
à la fois des peintres, des statuaires et des architectes de premier ordre. 
D’autres, plus rapprochés de nous, ont été non moins bons graveurs que 
peintres éminents, Rembrandt, par exemple. Et tandis que ce nom respecté 
repasse sous notre plume, nous citons ici encore un paysagiste incomparable 
et un portraitiste qui fera l’étonnement des siècles. 

Est-ce que le Titien n’a pas été un des peintres de paysage les plus admi- 
rables de tous les temps? Est-ce que les chevaux et les chiens de Van Dyck 
ne sont pas des modèles du genre? Est-ce que Rubens n’a pas laissé des 
paysages tour à tour de la plus extrême simplicité et de la plus sauvage 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 51 


grandeur? C'est en haut qu'il faut viser, en somme, et nous osons croire que 
beaucoup de critiques auraient applaudi avec plus de réserve à des tentatives 
à peine couronnées de succès, s'ils avaient mieux tenu compte du passé de 
l’art. Beaucoup le renient, il est vrai, au grand dommage de ses progrès 
bien entendus. 

Rien, sans doute, mest plus haïssable que le pédantisme, mais rien, non 
plus, n’est grotesque comme ces pygmées que l’on hausse à la taille des 
géants. 


Soyez plutôt maçon si c’est votre taient, 


dit le poète, et, précisément, l'impuissance du plus grand nombre devrait ici 
nous ramener à la notion juste des proportions. 

Malheureux serait le jeune homme, au début d’une carrière quelconque, 
s’il devait croire son avenir fatalement borné; celui qui, se sentant artiste, se 
consumerait de rage impuissante de ne pouvoir traduire toute sa pensée. 

Au nom même de cette liberté de lart, un mot dont il a été fait de si 
étranges emplois, ne faut-il pas qu'il puisse suivre jusqu’au bout son inspi- 
ration, ne relever que d'elle seule et de son talent, peu importe la forme 
qu’il adopte pour en faire montre? Aspirons donc à voir l'artiste capable 
d'aborder tous les genres avec supériorité. 

« La grande peinture est morte », dit-on à chaque tentative avortée; ne 
serait-il pas plus juste de dire que les grands peintres sont rares? Qu'il s’en 
montre un seul, qu’il surgisse un homme d’un vrai génie, et l’on verra si le 
grand art est mort, l’on verra si, de nos jours, comme dans l'antiquité, comme 
au temps de la Renaissance, les villes ne se disputeront pas à l’envi les œuvres 
de son pinceau ? 

Prétendra-t-on que tout ce que les siècles ont vu s'accomplir de grand, 
de généreux, parfois de surhumain, ne puisse trouver sa traduction par la 
peinture ? 

L'art religieux est mort avec la foi, c'est chose admise; et l'amour de la 
liberté, le culte de la science, le respect de la foi jurée, le saint dévoue- 
ment à une noble cause, a-t-on cessé d'y croire? Et si quelque artiste s'avise 
de vouloir exalter par un épisode une de ces vertus, il devra passer pour 


52 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


absurde, dès l'instant où la scène elle-même ne se sera pas déroulée sous 
ses yeux ? 

Nous croyons, pour notre part, que, loin d’avoir à repousser comme un 
élément de faiblesse le souvenir du passé, notre époque a le privilège de 
trouver devant elle une source d'inspirations plus vaste que ses devancières, 
en même temps qu'elle s'adresse à un publie plus éclairé. Un jour nos suc- 
cesseurs trouveront dans les journaux l’histoire de notre temps par le menu; 
n'y aura-t-il plus de place alors pour l'historien ? A ce titre, comme le dit 
três bien Taine, la meilleure tragédie, la meilleure comédie, le meilleur drame 
devraient être la sténographie des procès en cour d'assises. Et, ajoute l’auteur, 
si l’on y trouve parfois un trait naturel, une explosion de sentiment, c’est un 
grain de bon métal dans une gangue pâteuse et grossière. Elle peut fournir 
des matériaux à l'écrivain, mais elle n’est pas une œuvre d'art. 

« Le but de lart, dit Chesneau, de son côté, est de manifester l'âme 
humaine, toutes ses émotions, tous ses sentiments, ses troubles, ses joies, ses 
passions et ses adorations, ses amours et ses haines, ses défaillances et ses 
espérances, sa connaissance du réel et ses aspirations vers lau delà; l’âme 
tout entière, aussi complètement que le permettent les possibilités d'expression 
propres à chacun des arts particuliers et sans autres limites que celles de ces 
propriétés 1, » 

En vérité, c’est, par soi-même, une caractéristique de notre temps qu’il 
faille s'arrêter à le dire! 

Volontiers on exalte les conquêtes modernes; ont-elles trouvé, jusqu’à ce 
jour, leur expression légitime dans les arts? Notre interprétation du passé, 
cesse-t-elle de traduire les hommes du présent, l’état de leur âme, leurs 
convictions ? Et, tandis que l'horizon de la pensée humaine va s’élargissant, 
que l’investigation historique et scientifique unies viennent refaire à nos yeux 
les sociétés éteintes, nous dirons à l’artiste : « Côtoie le rivage, aux autres la 
pleine mer. 

» Paix aux sentiments impétueux de ton âme; dérobe-toi aux émotions de 
tes contemporains; le mouvement, la vie, la lutte ne sont pas faits pour toi; 


! L'éducation de l’artiste, p. 29. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 59 


ne lis point. Cours les champs; absorbe-toi dans la contemplation de la mer 
et du ciel; écoute le murmure du vent dans les arbres, le bouillonnement de 
la source; suis le laboureur dans le sillon, le pécheur sur la plage; voilà ton 
domaine, il est assez vaste. — Les héros ne sont plus de ton temps, et les 
historiens d’ailleurs ont tant exagéré! Assez de toges, de chlamydes, de cui- 
rasses, de panaches, de pourpoints ; assez de ces défroques, bonnes tout au 
plus au théâtre, et encore!... Si tu veux qu’on te comprenne, de grâce, parle- 
nous la langue de tous les jours; que tous puissent te comprendre. » 

« Ce qui caractérise les animaux, dit Delécluze !, c'est que le moment pré- 
sent et tous les besoins grossiers qui s’y rattachent les occupent sans cesse. 
L'homme, au contraire, a cela qui le distingue, que, du présent où il est placé, 
comme sur un point élevé, il jelte sans cesse ses regards sur le passé et vers 
l'avenir. La vie véritable de l’intelligence humaine réside dans les souvenirs 
et dans l'espoir; entre ces deux infinis, le présent n’est qu’un point pour une 
àme élevée. Tout homme donc qui, dédaigneux de ce qui a été et de ce qui 
sera, n’est constamment préoccupé que de ce qui est et de ce dont il a besoin, 
se rapproche de la nature de lanimal. Il devient barbare; il n’a d’autres 
pensées, il n’a d’autres goûts que ceux qui le ramènent à ce qui est matériel- 
lement utile. » 

Et, pour parler ainsi, se range-t-on parmi ceux que le présent attriste ou 
effraye : laudator temporis acti? Non, sans doute. 

« L'abandon de l’art historique, dit Chesneau, même par ceux qui sont 
pleinement libres, qui ne sont retenus ni par les attaches de l’école de Rome 
ni par la vénalité commerciale, a deux causes : — Chez les uns, l'ignorance, 
l'horreur du livre, l’inexpérience de la pensée : ceux-là sont des gens de 
métier; — chez les autres, lettrés, eux, l'influence désolante d’un courant 
récent qui les porte à ériger en système une des infirmités intellectuelles 


de ce temps, l'absence d'imagination. Leur théorie, d'un rationalisme aride 
et see, est celle-ci :« On ne peut, on ne doit peindre que ce qu'on peut voir ». 
Et ceci encore : « Nous sommes les témoins de notre temps, nous ne devons 
témoignage que sur notre temps ». 


| Ouvrage cité. 


54 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


» Quelle hérésie! — Sans doute, c’est une noble ambition, chez l'artiste, 
que de penser aux générations qui viendront après nous et qui seront 
curieuses de nous, comme nous le sommes de celles qui nous ont précédés. 
Mais ne devez-vous donc à l'avenir d'autre témoignage sur nous que celui 
de la façon dont nous portons la barbe et le chignon et de la coupe de 
nos habits? Ne devez-vous pas lui dire aussi nos interprétations du passé, 
comment les actes antérieurs de l'humanité ont su nous affecter? Et ne 
devez-vous rien à votre temps lui-même? Ne vous êtes-vous donc pas rendu 
compte de ce fait si grand que vous, moi, l’homme que vous coudoyez dans 
la rue, que toute vie intellectuelle est un abrégé de l’humanité tout entière ; 
qu’en tout homme siègent, à l’état latent, toutes les passions, toutes les gran- 
deurs et toutes les abjections de la nature humaine; que l’histoire est le 
miroir où toutes ces passions sont écriles en actions éclatantes, et que vous 
avez le devoir de mettre, par votre art, les formes sensibles de ces actions 
sous les yeux de chacun, de façon qu’en ce miroir sa propre conscience se 
réfléchisse, qu'il voie et apprenne à se connaître ? » 

N'est-ce point là le langage d’un homme de progrès ? 

Remarque importante, au surplus, et bien digne qu’on s’y arrête, en pros- 
crivant toute représentation des choses non actuelles, comment attendre de 
l'artiste ces études d’un ordre élevé qui pourront seules donner à ses œuvres 
une valeur certaine et durable, lui permettre, enfin, d’être à la fois de son 
temps et de tous les temps? 

Il plaisait à nos ancêtres d’orner leurs églises, leurs hôtels de ville, leurs 
lieux de réunion, de pages où se déroulaient les grands exemples de charité 
ou de justice, les grandes leçons de l’histoire, en un mot; lorsqu'une de ces 
peintures passe sous nos yeux, ne nous intéresse-t-elle qu’au seul- point de 
vue archéologique ? Et si demain tâche pareille devait être remplie encore, 
pourrait-elle être dignement accomplie par des hommes habitués à ne peindre 
que leur temps ? 

Nous persistons à croire que l'artiste ne cessera de considérer comme un 


de ses plus précieux privilèges de pouvoir trouver dans sa puissance imagi- 
native la source véritable de l'expression sans acception de temps ou de 
milieu. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 55 


Cette idée n’a pas, que nous sachions, été exprimée avec plus d'éloquence i 
que par un écrivain franchement réaliste, M. Théophile Silvestre. l l 

« La peinture n’est pas seulement un portrait isolé ou collectif, dit cet 
auteur !, mais encore un rêve de l'imagination. Le peintre agrandit la vie, 
sans en altérer la forme, l'essence premières; l'historien n’a pas le droit 
d'inventer un caractère, de créer un tempérament; mais en méprisant les 
traditions infidèles, en choisissant avec méfiance et lucidité les points incon- 
testables pris d’après nature par des écrivains antérieurs, et en s’armant de 
ses propres intuitions, il réveille et ramène sous nos yeux les générations 
endormies. 

» ll n’est donc pas indispensable, sous peine de lèse-vérité, de se parquer 
dans le présent et de regarder le monde par un trou de taupe, que l'on 
appelle le réalisme ou la réalité. Un homme d'esprit aimera mieux s'entre- 
tenir en esprit avec les supériorités éteintes que de passer sa vie dans un 
champ avec le laboureur, dans une échoppe avec le savetier, dans un poêle 
i avec le fumiste, ou même dans un salon avec un noble, un prêtre ou un 
bourgeois qui disent des sottises. 

» Pourquoi fermer aux artistes l’histoire qui a versé dans l'intelligence 
des grands maîtres les plus généreuses inspirations? Véronèse, Rembrandt, 
Velazquez, dont notre ami Courbet reconnait la valeur et l’autorité, ne se sont 
pas bornés à peindre des scènes de leur temps ; ils ont fouillé dans la Bible, 
les annales et les épopées. Jésus-Christ, César, Charlemagne, Napoléon ne 
sont pas des portraits de famille bourgeoise d’une ressemblance à garantir, 
mais des figures imposantes que l'artiste évoquera de siècle en siècle et que 


les générations jugeront tour à tour selon leur génie et leurs passions. 

» Quel spectateur ira s'informer des modèles qui ont posé devant Michel- 
Ange et rechercher dans le Jugement dernier l'exactitude matérielle, le 
réalisme ? Pourtant Michel-Ange était un réaliste, et un fameux réaliste, qui 
avait étudié quatorze ans l'anatomie, le scalpel à la main ! Allons, pas de ruses, 
pas de logomachies ! Ce n’est point la critique qui impose à Courbet le titre 
de RÉALISTE, C'est lui-même qui l’inscrit sur son drapeau, pour avoir un dra- 


| Les artistes /runçais. Bruxelles, 1861, p. 71. 


56 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


peau à lui seul et qui vient rallumer une querelle esthétique éteinte. Les 
Caravagesques et les Raphaélesques, les disciples de Rubens et du Poussin, 
se disaient aussi réalistes et idéalistes. De nos jours les classiques et les 
romantiques ont tiré trente ans leurs arguments opposés de la réalité et de 
l'invention, Est-il possible pour faire de l’art vivant, de l’art nouveau, de l’art 
libre, de revenir à ces vieilleries ? Dites : « Je suis le plus grand peintre de 
tous les temps » , et prouvez-le! 

» La profession de foi de Courbet, rédigée par une main amie, ne tient 
pas : si le mot réalisme avait un sens (et Courbet lui-même reconnait qu'il 
wen a pas) t, il voudrait dire : négation de l'imagination. Alors l’homme, 
dépouillé de la plus haute de ses facultés, devient un être inférieur ; ou bien : 
prééminence de la vérité palpable sur la fiction poétique. Dans ce second 
cas l'artiste, réduit à l’état de scribe sans idée, n’a plus qu’à dresser le procès- 
verbal de tout ce qu’il voit et de tout ce qu'il touche. 

» L'Imagination, maître peintre d'Ornans, est le principe des chefs- 
d'œuvre qui ont illuminé le monde. Elle traverse la vérité brutale pour saisir 
les derniers secrets de la création, fouille les replis du cœur humain, allume 
les passions qui se trahissent au dehors par la noblesse, la force, la majesté, 
la tendresse, la douceur ou la folie du geste, ce télégraphe rapide qui tra- 
duit avec tant d'énergie nos sentiments et nos pensées. C’est elle qui donne 
l'audace à l'écrivain, l'enthousiasme à l'artiste et la grandeur d'âme au 
héros. Sans imagination, tout est, dans celte vie, étroit, plat et morne; il 
faut mourir! Si quelquefois elle produit en nous des ravages, ces ravages 
ont toujours quelque chose de grand et de sacré. L'amour exclusif de 
l'exactitude est le fond du caractère des paysans et des bourgeois boursi- 
cotiers, réalistes, dans la force du mot, qui comptent juste, ne regardant pas 
les nuages, et ramassent dans la boue les sols tombés de la poche percée 
des rêveurs. » 

Cen est assez, sans doute, pour prouver l'erreur des critiques qui ont 
cru de bonne foi pouvoir attribuer aux vues obstinées de quelques hommes 


1 On doit remarquer que Silvestre écrivait avant la profession de foi de Courbet au congrès 
artistique d'Anvers : « Le fond du réalisme, c’est la négation de l'idéal, etc. » 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 57 


impénétrables au charme de ce qu'ils appellent « l'art rajeuni », la diffusion, 
trop lente à leur gré, des principes qu’ils proclament. 

Plus on y regarde, et plus on se convainet que l'artiste ne peul, sans 
amoindrir l'importance de son rôle, se borner aux exigences de la forme, 
et que l’art vivant, lart actuel qu’on lui demande, n'aura de représentants 
que parmi ceux qui, formés par les études les plus sérieuses, se sentiront le 
courage d'engager la lutte avec leurs devanciers sur le terrain des concep- 
tions élevées. 

Thiers disait de Delacroix à ses débuts : « Je ne sais quel souvenir des 
grands artistes me saisit à l'aspect de ce tableau » !; nous voudrions qu'on 
en püt dire autant de toute œuvre moderne. 

Restreindre l'horizon de la pensée humaine ne saurait étre, en aucun cas, 
le point de départ d’un progrès quelconque. 


VI 


L'influence du réalisme ne devait pas se traduire seulement dans la con- 
ception des œuvres d'art; elle allait, avec non moins d'évidence, se manifester 
dans la technique. Fatalement il en devait être ainsi, la forme et la couleur 
restant, nous l'avons dit, sous la dépendance perpétuelle de l'idée, étant 
soumises, par conséquent, elles-mêmes à l'empire de l'idéal, Nier celui-ci, 
c'est exiger du même coup la transcription des choses vues, avec toute 
l'exactitude matérielle dont l'artiste sera capable, et donner une importance 
excessive à des accessoires dont la reproduction, même la plus parfaite, ne 
saurait rien ajouter à l'intérêt d’une œuvre. 

Ce principe, non moins radical que le rejet de toute représentation d’un 
fait qui n’a pas eu le peintre pour témoin, contribuait trop à abréger la tâche 


1 Salon de 4822. Collection d'articles insérés au Constitutionnel sur l'exposition. Paris, 
Maradan, 4899, p. 57. 


Tome XLV. 8 


58 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


de l'artiste pour ne pas trouver une complaisante acceptation. Ce qui n'avait 
été jusqu'alors qu’un moyen sembla pouvoir devenir un but, et l’on put voir 
ainsi des travaux que, de tout temps, l'artiste avait envisagés comme secon- 
daires, admis à se produire comme définitifs. On versa dans cette étrange et 
déplorable erreur d'établir les droits du peintre sur la négation des exigences 
les plus légitimes, en absolvant d'avance tous les manquements aux règles du 
bon goût, et cela au nom d’une prétendue originalité. 

Le passé de l’art tout entier se levait pour protester contre cette libération 
apparente de l'artiste, aboutissant, en réalité, au pire des esclavages ; car si 
le peintre a pour devoir essentiel de s'inspirer de la nature, c’est surtout à 
condition de procéder avec raisonnement et avec choix, à condition de 
pouvoir repousser toute forme qui ne s'adapte point à sa conception. 

Ce qui fera le charme éternel de certaines œuvres admises par tous les 
connaisseurs comme dignes d’admiration, c’est l'accord intelligent du naturel 
et de l'idéal. 

L'œuvre des plus grands maitres contient des pages où se trahit le souvenir 
de quelque impression rapidement notée et plus tard développée. La théorie 
contemporaine proclame de telles notes comme donnant, à elles seules, une 
satisfaction complète à nos exigences, et dénie à l'artiste le droit d’en faire 
l'application où bon lui semble. 

Velazquez et Van Dyck nous donnent l'exemple d'une compréhension plus 
saine des convenances esthétiques. Quoique surtout portraitistes, ils ne lais- 
seront pas croire que la ressemblance résulte d’abord de la transcription des 
irrégularités physiques d’un modèle; ils sauront la trouver, au contraire, dans 
un ensemble de conditions qui mettent en relief une personnalité avec infi- 
niment plus de puissance que la plus minutieuse copie des traits d’un visage 
par le pinceau d'un Denner. « En un temps comme le nôtre, où les préoc- 
cupations de métier ont pris dans l’art tant de place, au grand détriment des 
recherches et des opérations de l'esprit, il ne paraîtra peut-être pas inutile de 
remarquer que, même dans ses improvisations les plus hâtives, Velazquez ne 
se borne pas seulement à se montrer beau peintre, un praticien incompa- 
rable, mais encore qu’il ne croit pas avoir tout dit parce qu’il aura obtenu 
l'illusion parfaite dans le rendu de la forme, dans l'expression de la vie. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 59 


Il veut mieux et davantage. Doué de cette puissance de pénétration qui lui 
permet d'amener à l'extérieur l'âme de ses modèles, il peint aussi l'être 
intime, et nous livre, avec leurs traits physionomiques et leurs habitudes de 
corps, toute leur ressemblance morale !, » 

L'application des préceptes du réalisme peut, sans doute, fournir à l'artiste 
l'occasion de faire montre d'habileté, mais nul ne soutiendra, croyons-nous, 
que telle doive être l'aspiration d’un peintre. L'art est essentiellement sub- 
jectif; l'habileté plus ou moins grande en peinture entre en ligne de compte 
au même titre que la mémoire, l’érudition, si l’on préfère, dans le domaine 
de l'histoire ou de la jurisprudence. Le fait qu'un homme sera le réper- 
loire vivant des connaissances historiques ou juridiques les plus vastes ne 
prouve en aucune sorte qu'il doive rien produire, à son tour, qui ait quelque 
valeur ?, [Test admis, et comme sous-entendu, quelle que soit la carrière 
que l’on embrasse, qu'il faut savoir son métier; celte exigence s'impose au 
peintre comme à tout autre individu. 

L'apprentissage peut être plus ou moins long, plus ou moins ingénieuse- 
ment dirigé, l'élève plus ou moins bien doué; mais il importe de ne pas 
perdre de vue que lacquisition d’un certain ordre de qualités matérielles 
constitue l'apprentissage même; une des plus fâcheuses erreurs consisterait 
à en faire le but unique des efforts d'une carrière. C’est à la faveur de cette 
méprise que l’on voit aujourd’hui tant d'amateurs venir se mesurer avec les 
artistes et ne pas leur rester toujours inférieurs. Rien de plus naturel ni de 
plus légitime, si la conception est envisagée comme chose accessoire. 

Etre artiste implique toute autre chose qu'une somme d'adresse plus ou 
moins grande. 

Il est à peine possible de se figarer un ingénieur arrivé au terme de ses 
études et incapable de calculer la force de résistance des matériaux dont il 
fait emploi; un médecin dans l'ignorance de la valeur des formules qu'il 
prescrit; pourtant la capacité de Pun et de l’autre ne s'établit que par l'usage 
qu'ils font de leurs connaissances premières. 


i Paul LeronT, Velazquez (GAZETTE DES BEAUX-ARTS, t. XXVI, p. 165). 
2 « Le magasin de la mémoire est volontiers plus fourny de matière que n’est celui de l'in- 
vention. » (Montaicne, Essais, liv. 1, chap. 1x.) 


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60 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Ainsi du peintre. Les plus grands succès remportés dans les écoles n’ont 
jamais suffi à faire un artiste accompli. 

Or, si tout cela est vrai, et d’ailleurs incontesté, l'éducation artistique a 
pour obligation de diriger les regards du jeune homme vers un but bien supé- 
rieur aux simples connaissances techniques, éléments nécessaires, mais très 
insuffisants de son rôle à venir. « En sortant des écoles, l'artiste n’est encore 
qu’un élève. Il connaît les règles, il a la notion des procédés techniques, mais 
l’art est encore pour lui plein de mystère !. » À ce point de vue, les réflexions 
que l’on est amené à faire sur la situation contemporaine de l’art ne sont pas 
d’une nature bien rassurante. 

Doit-on vraiment s'étonner de la proclamation dégagée et de l'acceptation 
facile des théories esthétiques les plus fausses, alors que ceux-là mêmes qui 
devraient être les plus jaloux de défendre leur domaine contre les influences 
dissolvantes, n’opposent aucune résistance ? Les artistes accusent volontiers 
le public d'exiger d'eux des capitulations de conscience, comme si, précisé- 
ment, il ne leur appartenait pas de donner aux vues de la foule une direction 
élevée en pareille matière. 

Ce sont les mœurs, a-t-on dit, qui dictent les lois; mais songe-t-on à con- 
tester l'influence salutaire que l'application des lois exerce sur les mœurs ? 
Si l’art a sa place marquée dans la société moderne, — et qui le niera? — 
nous disons que c’est aux artistes de veiller à ce qu’il conserve aussi sa véri- 
table destination. 

Émeric David, dont il est permis de ne pas accepter les idées sur Part 
envisagé comme élément de richesse, et qui, d’ailleurs, écrivait en un temps 
où il pouvait être nécessaire d'insister sur ce point de vue, Émerie David 
opérait une distinction radicale entre l'effet que les arts doivent exercer. Ils 
corrompent et dégradent le peuple qui en recoit les produits du dehors, dit-il, 
et développent puissamment, au contraire, les facultés intellectuelles de celui 
qui les cultive. 

Idée funeste, en effet, que l'assimilation de l'œuvre d'art à l’objet de luxe. 
L'auteur que nous venons de citer constate lui-même que les peuples aux- 


1 Édouard Féris, L'Art dans la Société et dans l’État, p. 152. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 61 


quels leurs prédécesseurs n’ont laissé acquérir, dans les arts, d'autres connais- 
sances que celles qui étaient nécessaires pour produire des objets de luxe, 
n’ont jamais pu progresser, et il cite un passage de Sonnerat, duquel résulte 
que les merveilleux filigranes de l'Inde, par exemple, ne sont que des ouvrages 
de pure routine et de patience ! 

Dans la société moderne arrivée à un summum de jouissances et de luxe, 
le rôle de l’art est clairement indiqué : il doit répondre à un besoin intellec- 
tuel et établir une démarcation franche entre ses créations et les travaux, 
même parfaits, d’un ordre purement matériel 1. Nous n’hésitons pas à croire 
que les subtilités de l'exécution, que lhabile maniement du pinceau, sans 
autre but que l’étalage de cette adresse même, contribuent davantage à éloi- 
gner qu’à rapprocher lartiste du rang qu'il est en droit d’ambitionner. C’est 
ce que démontre avec la plus complète évidence M. E. Chesneau, dans ce 
passage de l'étude que nous avons fréquemment rappelée et qu’on ne saurait 
trop faire connaître : 

« Dès que l'artiste expose une œuvre aux regards du publie, j'estime que 
le public a le droit d'exiger de lui le talent comme une chose due. Est-ce 
qu'on ne demande pas de même à l'écrivain de savoir la langue qu’il parle? 
Avoir du talent, celte pensée occupera done le premier rang dans les préoc- 
cupations de l'élève, qui ne doit pas avoir d'autre ambition. Au contraire, 
dès que l'artiste est formé, aussitôt qu'il a conquis, avec la certitude de tra- 
duire exactement sa pensée en exécution, le droit de communiquer aux foules 
celte pensée, son effort doit être réservé tout entier pour quelque chose de 
plus que le talent, cette science et cette patience de manouvrier. L'œuvre ne 
vaut plus alors par la façon dont elle dit les choses, mais par les choses qu’elle 
dit. Devenu secondaire, le talent n’est plus qu'un instrument. La valeur de 
l’œuvre est soumise à la condition sine quå non de témoigner à la fois la 
valeur de l'instrument et la valeur de l’homme qui l'emploie, une force diri- 
geante et une force agissante dont l'accord produit cette force supérieure, 
l'artiste. Le beau, ai-je dit, n’est qu’une forme d'expression ; je dirai de même 
du talent qu’il n’est qu’une forme d’expression. » 


1 On peut, en faveur de cette conviction, excuser l'enthousiasme de Proudhon pour les 
œuvres de Courbet. 


62 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


Cest donc aux artistes qu'il appartient d'agir sur le goût du public en 
malière d’art. Et comment, en effet, pourraient-ils abandonner au public la 
direction, sans s'exposer à voir les produits de-leur pinceau tomber au rang 
de tout autre objet de frivole fantaisie — objet fort bien payé, cela se 
peut, — mais ne pouvant prétendre à une autre durée que celle de la mode, 
dont il relèvera expressément et à laquelle il devra sa valeur? Nous ne 
voyons vraiment, pour ce genre d'œuvres, aucun autre criterium. 

Mais le public, de son côté, n’est nullement exclu du droit de juger l’œuvre, 
laquelle, en dernière analyse, est créée pour lui. Il s'établit donc ici une 
corrélation élroite, et, très certainement, si l’autorité de l'artiste peut être 
insuffisante, la compétence du public doit étre également mise en question. 
Nous avons vu dans quelles erreurs a pu verser un homme aussi lettré que 
Proudhon mis en présence des toiles de Courbet, et nous avons vu ce peintre 
croire, de bonne foi, qu'il s'élevait en disant : « Pourquoi chercherais-je à 
voir dans le monde ce qui n’y est pas et irais-je défigurer, par des efforts 
d'imagination, ce qui s’y trouve !? » De part et d'autre pareille méprise. 

Il y a parmi les lettrés et les artistes, nous le savons, des hommes ayant 
sur l’art des idées plus conformes à sa vraie destination que Proudhon et 
Courbet; mais, sans doute, un peu moins de disproportion, sur le terrain 
intellectuel, entre le peintre et son juge, et le premier eût discuté avec l'autre, 
et leùt peut-être converti à ses idées, au lieu d'accepter en aveugle des théo- 
ries toutes faites. 

A quelle conclusion aboutir, enfin, si ce n’est celle-ci? Instruire l'artiste 
el lui montrer le triomphe de ses efforts par d’autres voies que la simple 
habileté pratique dans son métier : lui répéter sans cesse que « l'expression 
est la loi suprême de l'art; que l'expression s'adresse à l'âme, comme la 
forme s'adresse aux sens » ?. 


Tout ce qui précède proteste contre la pensée de mettre obstacle à la 
manifestation la plus indépendante des facultés que la nature a départies à 


1 Casracnary, Exposition des œuvres de Courbet, p. 22. 
? Victor Cousin, Du Vrai, du Bien el du Beau, p, 189. 


l 
ii 
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f 
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SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 63 


certains individus. Comment le pourrait-on, du reste? Et ceci nous amène 
à rechercher si la direction imprimée à l’enseignement des beaux-arts offre 
pour l'avenir des garanties suffisantes. 

L'examen de cette question s'impose; on ne peut l'éluder. 

Le sujet est de ceux que l’on n’aborde pas sans quelque répugnance. 
Personnalité très sympathique, doué d’une sensibilité extrême, d’une dose 
de pénétration peu commune, l'artiste a des côtés incontestablement séduc- 
teurs. Le rang qu’il occupe dans la société, et qu'il doit légitimement à ses 
travaux, est des plus honorables ; on ne conteste pas la justice des honneurs 
qu'il moissonne. | 

Pourtant, il faut le reconnaître, le monde des artistes est un monde clos, 
et la fusion n’est jamais complète entre les éléments qui le composent et les 
classes de la société au milieu desquelles un peintre, un statuaire sont appelés 
à se mouvoir. « Vous pouvez, disait Proudhon, vous entendre avec un philo- 
sophe, un savant, un entrepreneur d'industrie, un militaire, un légiste, un 
économiste, avec tout ce qui calcule, raisonne, combine, suppule, avec un 
artiste c’est impossible. » Si tel est le cas, la cause n’en est assurément pas à 
la profession mais à l’homme qui l'exerce, surtout à la façon dont il l'exerce. 

L'artiste a lui-même pris l'habitude de dire que sa profession n’a rien de 
commun avec les autres et s’en autorise pour faire bon marché des exigences 
qui s'imposent aux hommes voués à l'étude des autres branches des connais- 
sances humaines, comme à la société dont il fait lui-même partie. 

Dès lors, point de fixité dans les vues; la conception se fait au hasard, 
sans suite, sans conviction, sans forme prévue. Captiver l'attention devient 
une préoccupation constante et exclusive, et le confrère ayant l'analogue, il 
en résulte des esprits d'antagonisme touchant à la férocité. Courbet disait : 
« Je suis le premier et l'unique artiste de ce siècle », d’autres moins francs, 
ou plus avisés, ont pensé et pensent de même sans le dire, seule différence 
entre lui et eux t. 


1 « Vous visez à l'effet, comme on vise à l'esprit. Ce n’est pas votre art qui vous possède, 
Cest votre mot : vous vous souciez bien moins d'étre que de paraître : vous pensez à vous, et 
vous cherchez avec passion ce qui n'est que le cauchemar de votre propre succès. » Gouxop, 
Lecture à l’Académie des beaux-arts (25 octobre 1882). 


64 LE RÉALISME:; SON INFLUENCE 


Or, cette confiance, non moins légitime que nécessaire quand elle se fonde 
sur le savoir, la méditation, l'expérience, sur un ensemble de connaissances 
primordiales, enfin, dégénère, si l’on n’y prend garde, en un système boiteux 
pour devenir, par degrés, celte présomption dont parle le poète : 


L'ignorance toujours est prête à s’admirer. 


Rivalisant d’efforts et de sacrifices, les villes et l'État contribuent de tous 
leurs moyens à la multiplication des artistes. Partout des académies, aux visées 
plus ambitieuses les unes que les autres, ouvrent leurs portes en des lieux 
où jamais artiste ne pourra vivre, où il semblerait devoir suffire de travailler 
à la diffusion du dessin comme d’une connaissance indispensable à tout le 
monde. 

Et pourtant, gratuit à tous les degrés, l’enseignement des arts graphiques 
est dirigé de telle sorte que l'aspiration de quiconque entre à l'académie sera 
d'en sortir artiste. Subsides, médailles, prix de Rome, décorations, com- 
mandes officielles, musées toujours prêts à recueillir les œuvres : à quelle 
autre carrière offre-t-on de pareilles faveurs ? 

M. Charles Blanc, lors de son passage à la direction des beaux-arts en 
France, provoqua bien des colères pour avoir dit, dans un rapport au ministre, 
que la mission de l'État, en matière d'art, n’est pas plus de faire connaître 
au public tout ce qu'il plait aux artistes de créer, qu'il ne lui incombe 
d'instituer des concerts où seront exécutées, aux frais de l'État, les romances, 
les valses et les polkas écrites par les musiciens. Et cela est de la plus 
absolue vérité. 

On peut se demander sérieusement si l'État ne s'est pas exagéré limpor- 
tance de sa mission en ce qui concerne la formation artistes, et si la 
gratuité absolue de l’enseignement des beaux-arts, par exemple, a donné 
les résultats espérés. 

L'étude du droit, de la médecine, de la philosophie, de « l’art » vétéri- 
naire, de l’agriculture, exige non seulement une longue et persévérante 
application, des ouvrages d’un prix généralement élevé, des instruments, des 
répétitions ; nul cependant n’est admis à professer sans un stage préalable de 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 65 


plusieurs années. Si le jeune homme aspire à servir son pays par les armes, 
aliène sa liberté et, en dernière analyse, doit livrer sa vie aux hasards d’un 
champ de bataille, il est tenu de payer l'instruction nécessaire au métier 
de son choix pour pouvoir prétendre à un avancement indéfini; et la carrière 
artistique qui, même pour l’homme le mieux doué, exigera des loisirs, en 
d'autres termes, des ressources de tout genre, des voyages d'étude, mille 
accessoires coûteux, demeure ouverte à tout venant aux frais du Trésor et 
sans aucune garantie de la part de ceux qui l’embrassent, car en Belgique 
la somme requise d'instruction se borne à savoir lire et écrire l’une des 
langues parlées dans le pays, condition jugée insuffisante par les esprits les 
plus sérieux pour conférer le droit électoral dans ce même pays. 

L'État serait done moins intéressé à avoir des légistes, des ingénieurs, des 
militaires ou des agronomes instruits, que des peintres, des sculpteurs et 
des architectes médiocres? Erreur profonde, sans doute, et pourtant il est 
permis de se demander par quelle puissance de logique l'État devrait davan- 
tage à ceux qui veulent être artistes qu’à ceux qui veulent embrasser toute 
autre carrière. Il sera dès lors permis d'exiger de lui d'autant plus qu'il aura 
été plus loin dans la voie des largesses. 

« O vous qui attendez que j'entreprenne de grands travaux, disait Périclès 
aux artistes, préparez-vous avec ardeur et n'ayez point une confiance inac- 
tive. Ceux d’entre vous qui seront jugés capables de bâtir, de sculpter 
ou de peindre des œuvres dignes d'admiration, auront une vie assurée et 
même des gains considérables; mais ceux dont la main est peu expéri- 
mentée et à qui Minerve n’a point souri, en vérité ils feraient mieux, dès 
aujourd’hui, de cultiver la terre ou de s'établir fabricants de poteries dans 
le Céramique. 

» Jamais ils n'auront part aux travaux; jamais, par Jupiter! je ne leur 
livrerai, pour qu’ils les gâtent, les marbres du Pentélique et les matières pré- 
cieuses que je fais venir de tous les pays pour orner la ville : non, quand 
même ils me seraient proches par le sang, quand le grand-prêtre de Neptune 
Erechtée les protégerait, quand Aspasie suppliante tendrait vers moi ses 
beaux bras. Un général ne place point au poste périlleux un soldat lâche 
et débile; je serais non moins blämable si je confiais les richesses et la 

Tome XLV. 9 


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66 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


renommée de notre patrie à des artistes sans habileté; les Lacédémoniens 
précipitent dans un gouffre les enfants difformes afin de ne point nourrir 
des citoyens inutiles. Ainsi je veux ôter l'espérance aux sculpteurs et aux 
peintres qui n’ont pas le sens de ce qui est beau, car si l'État les employait, 
ils n’apporteraient que du dommage !. » 

Les Grecs, on le voit, se seraient montrés moins prompls que nous à 
« encourager » la médiocrité. 

À moins qu'en matière d'art l'expérience soit sans valeur el sans autorité, 
il est impossible d'envisager autrement que comme une méprise le fait 
d’avoir rendu l’enseignement supérieur des beaux-arts inséparable de celui 
des éléments du dessin. Un point existe où cet enseignement premier s'arrête : 
ce point est à déterminer, mais, cerlainement, le dessin d’après le modèle 
vivant et la peinture exigent une application, une constance inconciliables 
avec l'exercice d’une profession étrangère à l’art. 

N'est-il pas imprudent de convier à ces hautes études des jeunes gens que 
l'on détourne d’autres carrières, trop souvent pour leur malheur ? 

Qu’à l’origine de leur constitution, créées pour stimuler les beaux-arts 
et pour suppléer aux ateliers des maîtres, les académies dussent ouvrir 
leurs portes au plus grand nombre possible d'élèves, on se l'explique. Mais 
les choses ont bien marché depuis, et nul ne croira que la Belgique soit 
exposée à manquer d'artistes. Quantité de gens estiment, au contraire, que 
leur valeur plus que leur nombre intéresse la chose publique. « Le beau ser- 
vice à rendre aux gens que de les aider à s'engager dans le chemin qui 
conduit à la misère! Les mauvais artistes déconsidérent l’art et ne font que 
végéter. Il vaudrait cent fois mieux qu'ils fussent de bons ouvriers. 

» Voilà ce qu’il faut leur faire comprendre, en leur refusant nettement 
des secours qui contribuent à les affermir dans les illusions dangereuses ?. » 

Mais ne vaut-il pas mieux prévenir le mal qu’avoir à le combattre ? 

Nous ne serons sans doute pas seul à penser qu'il est aussi légitime de 
procéder avec sévérité au choix des aspirants à la carrière artistique qu’à 


1 Passage d’un ms, grec (?) cité par Beulé. Ouverture du cours d'archéologie, 1860. 
2 E, Fénis, L'Art dans la Société et dans l’État, Bruxelles, 1870 , p. 89. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 67 


celui des jeunes gens qui se deéstinent à toute autre profession libérale. 

N'abordent les hautes études scientifiques que les élèves possédant une 
somme de connaissances générales, destinée à leur permettre de profiter de 
l'enseignement supérieur; ne va pas à l’Université qui veut. Pareilles condi- 
tions pourraient être fort bien imposées à tout aspirant aux cours supérieurs 
d'art, apte, dès lors, à profiter d'un enseignement complet, non seulement 
technique mais littéraire et scientifique, dans ses applications variées. 

Des cours approfondis d'histoire et d'antiquités pourraient étre confiés 
à des professeurs spéciaux et rendus communs aux diverses branches des 
arts plastiques; d’autres cours viendraient s'y joindre : tel serait, par 
exemple, un cours supérieur d'histoire de l’art ornemental, embrassant la 
céramique, l'orfêvrerie et l'iconographie, — car on oublie trop volontiers 
que ce sont les grands artistes qui, de tout temps, ont imprimé une direction 
aux branches accessoires et influé sur la forme de produits aujourd'hui livrés 
à l'initiative des fabricants. 

Des examens de sortie, portant sur l'ensemble des matières, permettraient 
aux élèves diplômés d’aspirer, à leur tour, au professorat, chose laissée elle- 
même au hasard. La carrière artistique, en un mot, serait mise au rang de 
toutes les carrières libérales et les sacrifices mêmes qu’elle exigerait seraient 
une garantie d'application de la part de quiconque aspirerail à se distinguer 
comme peintre, statuaire ou architecte, donnant enfin à tous des notions 
générales, indispensables à l'exercice d’une profession qui offre des faces 
infiniment variées. | 

Est-ce trop pour le rôle dévolu à l'artiste? Suflit-il vraiment, comme 
point de départ, pour être un jour en état de nous instruire ou de nous 
charmer, d'un savoir se limitant parfois à quelques vagues connaissances 
recueillies au hasard d’une conversation ou d’une lecture distraite 1? 

Possible, mais il serait permis de préférer alors un moindre optimisme, 


£ On ignore, en général, que lorsqu'un jeune homme se destine à étre artiste, il est d'usage 
de négliger complètement son instruction. Courbet prétendait avoir connu Hogarth; il pouvait 
être de très bonne foi. Il n’y a pas longtemps, dans un examen pour l'obtention d’une place 
de professeur, un architecte faisait dater la Renaissance de la Révolution française, et un peintre 
rangeait Périclès parmi les statuaires! 


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68 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


dans les rapports officiels et dans la presse, sur le but de lart, sur sa 
mission sociale, sur ses progrès, toutes choses qu'un nombre infiniment 
restreint des particuliers que la matière intéresse est en mesure de com- 
prendre. 

On nous objectera que de tout temps il fut possible d'étre artiste par le seul 
maniement des outils du mélier; qu'il est contraire même aux traditions 
d'exiger davantage, et que le fait d’entourer d'obstacles l'accession aux hautes 
études expose à paralyser des dispositions géniales allant parfois très au delà 
de tous les calculs; qu'enfin il y a des genres que l'étude préalable des 
sciences et de l’histoire servirait peu. 

Nous ne le contestons en aucune façon; libre à chacun de devenir artiste 
comme il l'entend; il n’est question, dans notre pensée, que des formes de 
l'intervention officielle. 

Au temps où l'élève allait de son plein gré choisir son maitre, c'était à 
celui-ci qu’il appartenait de fixer les conditions de l'apprentissage. Et encore 
les corporations s’arrogeaient-elles le droit de contrôle. 

Aujourd’hui que l’enseignement des académies s’est substitué à celui des 
ateliers, aujourd’hui que l’État assume une responsabilité totalement incon- 
nue avant notre siècle; que par des subsides, des expositions, des musées, 
des commandes, il imprime la direction, des droits d'une nature spéciale lui 
sont acquis et des devoirs nouveaux lui incombent; il n’y peut renoncer qu’à 
la condition de s'abstenir '. 

La discussion est oiseuse, peut-être, pour qui se place au point de vue 
des doctrines réalistes; mais, à part que ces doctrines n’ont point encore 
prévalu dans l’enseignement, aucune raison plausible ne nous parait exister 
à l’appui du fait que la société moderne doive trouver indignes de son atten- 
tion, dès l'instant où elles se présentent en peinture, des choses avec lesquelles 
le public s'identifie sans peine au théâtre et dans le roman, car ce n’est 
jamais le côté technique seul qui l’intéresse ici, mais la peinture des carac- 
téres et la puissance dramatique des situations. 

1 Des idées fort proches des nôtres ont été exprimées, sur cette question, par un écrivain 


belge occupant une position officielle, M. É. Leclereq, dans une Étude sur l’École française 
moderne, 1882. 


SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 69 


Nous avons vu des pièces du répertoire classique faire couler autant de 
larmes ou provoquer autant de rires que n'importe quel drame ou quelle 
comédie du répertoire moderne. 

Il est doux de se reposer, dans le calme des choses agrestes, des excita- 
tions de la vie fébrile des grands centres : de là le puissant attrait de certains 
paysages, de certains épisodes rustiques; mais gardons-nous de croire que 
le sentiment de l’art ne trouve que cette seule forme d'expression. 

Ne proscrivons aucun genre, disons que tous ont des droits égaux à se 
produire, s'ils font vibrer les cordes de notre sensibilité. 

Dans l'antiquité même il y eut des peintres de sujets secondaires, notam- 
ment un Pyréicus dont parle Pline !; on payait les œuvres fort cher, mais 
on n'éleva jamais les auteurs au rang des maitres. 

Au surplus, nous pensons avoir établi que, quoi qu’on dise, tous les genres 
n'ont pas et ne peuvent avoir une importance égale. 


Il nous est agréable, en arrivant au terme de cette étude, de constater que 
les erreurs du réalisme, que les radicales conséquences de ses théories ont 
perdu beaucoup de leur empire. Que la cause en soit à l'invincible autorité 
de la logique ou à l'indifférence de la foule, abstenons-nous de le rechercher; 
mieux vaut accepter de confiance la première hypothèse. 

Le mouvement, aussi, ne s’est fait sentir que dans une zone peu étendue. 
Hors de France, la Belgique a seule montré, chez ses artistes, un grand 
empressement à s’enrôler sous la bannière du naturalisme; mais les influences 
de l’espèce ne sont pas isolées dans notre histoire artistique. 

Le romantisme, qui eut parmi les peintres flamands des adeptes fort nom- 
breux, ne fut de même qu'une importation française. Nous ne sachions point 
que le réalisme ait fait sentir son action en Angleterre, car le préraphaé- 
lisme n’a rien de commun avec lui; l'Allemagne n’en a, de même, éprouvé 
qu'un reflet relativement très affaibli. 

Chose digne de remarque aussi, la presse, si activement mélée au mouve- 
ment que nous avons étudié dans ces pages, s'est trouvée encourir des cri- 


1 Liv. XXXV, chap. xxxvi, 1. 


1 


70 LE RÉALISME; SON INFLUENCE 


tiques en tout point semblables à celles que l’on adresse à l’école qu’elle a 
si complaisamment contribué à glorifier. 

Un des écrivains qui honorent le plus le journalisme français a pu, tout 
en rendant hommage à l’action souvent salutaire de la presse, se montrer 
pour elle d’une extrême sévérilé, et faire porter à ses représentants une 
part de responsabilité considérable en ce qui concerne le jugement frivole 
des masses et les suffrages de la foule, trop facilement accordés à des indi- 
gnes. Nous ne citons que celte seule phrase qui se rattache directement à 
notre sujet : « Un homme qui ne sait l’a be ni de l’art, ni de la peinture, 
ni de la musique, ni de la langue française, s’institue critique dramatique, 
critique musical, critique artistique; il dogmatise, il rend des jugements, il 
lance des oracles ; il distribue l'éloge ou le blâme, il sabre en cinq minutes 
une œuvre qui a coûté des années de travail à un auteur laborieux, et il 
trouve aussitôt des sots pour le croire sur parole !, » | 

La constatation même d’un tel état de choses nous parait révéler à elle 
seule un progrès, car c’est dans l'opinion de la presse que l'art contemporain 
puise ses encouragements les plus recherchés. 

Gardons-nous de généraliser, mais ne faisons pas plus de cas qu'il ne faut 
de l'autorité de la critique. Que de fois, en effet, une appréciation émise 
sous l'empire des mille influences qui guident une plume, a pu donner le 
change sur la signification d’une œuvre, faire illusion à un auteur encore 
hésitant, l’encourager dans une voie pernicieuse ! 

Pour le public c’est chose fort grave. Dispensatrice de l'éloge et du blâme, 
la critique le laisse indécis, frappe de ridicule des suffrages souvent légitimés 
par l'expression d’un sentiment habilement traduit, et sollicite ses éloges pour 
des à peu près d’un goût douteux. On a pu voir ainsi des maladresses indé- 
niables élevées presque au rang de qualités et, trop souvent, un savoir réel, 
ou, dans tous les cas, supérieur, déprécié jusqu’au jour, plus ou moins lointain, 
où l'œuvre de valeur reprenait ses droits par la force d’une indiscutable évi- 
dence. Scripla manent, les écrits restent, dit un vieil adage; n'y croyons 
pas trop en matière de critique d'art et, tout considéré, l’on serait porté à 


1 Charles Bicor, Les classes dirigeantes. Paris, 1875, p. 94. 


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SUR LA PEINTURE CONTEMPORAINE. 74 


se féliciter bien souvent que le contraire fùt vrai, autant pour l’auteur que 
pour qui le lit. 


« Ainsi donc, pourra-t-on nous dire, le réalisme n’a point lui-même mis 
en relief des qualités brillantes, des œuvres de grand style? » Qu'on veuille 
remarquer que nous n'avons exposé dans ces pages que les tendances du 
réalisme, ses prétentions si lon préfère. Nous n'avions pas à citer des noms. 

Autant que quiconque nous avons été charmé, sans nous préoccuper de 
l’école dont elles se réclamaient, par des œuvres dont la simplicité rehaussait 
la force d'expression, le véritable sentiment artistique; mais nous disons 
qu'à toutes les grandes époques de l’art des qualités du même ordre nous 
sont apparues, et que, tout envisagé, c’est sans droit ni pouvoir que l’école 
réaliste prétendrait altérer les conditions requises pour créer une œuvre 
d'art digne de ce nom, moins encore porter atteinte à l'admiration que les 
siècles ont justement vouée aux plus nobles créations de l'esprit humain.