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Full text of "Le Semeur"

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s  i-j         lire  année.  N"  3  Novembre  1904 


Le  Semeur  ^s&s    )) 


A   L'ŒUVRE 

L'Association  catholique  de  la  Jeunesse  canadienne-fran- 
çaise entre  dans  une  phase  nouvelle. 

Aux  tracas  du  début,  aux  enthousiastes  élans  de  la  pre- 
mière heure  de  vie,  succède  la  période  difficile  où  il  faut  faire 
produire  à  l'œuvre  ce  pour  quoi  elle  est  née. 

Du  printemps  1902  à  ces  deraiers  mois,  ses  directeurs  se 
préoccupèrent  surtout  de  l'organisation  générale  et,  eu  parti- 
culier, de  la  rédaction  de  leur  programme.  Ils  y  firent  adhérer 
bon  nombre  déjeunes  hommes  qui  étudient  en  cette  province. 

Au  mois  de  juin  1904-,  ils  invitèrent  tous  les  membres  de 
l'Association  à  se  réunir  en  congrès  à  Montréal,  à  venir  mieux 
connaître  le  drapeau  sous  les  plis  duquel  on  les  voulait  faire 
marcher,  l'nanime  et  empressée  fut  la  réponse.  Éclatante  a 
été  la  manifestation. 

En  nos  jours,  où  ces  sortes  de  réunions  sont  si  fréquentes, 
on  ne  croit  plus  guère  à  leur  efficacité.  Aux  yeux  de  certaines 
gens,  les  congrès  font  l'effet  de  ces  cinquièmes  roues  aux(iuelles 
se  refusaient  si  énergiquement  les  vieux  carrosses,  prétendant 
qu'ils  en  avaient  bien  assez  de  quatre  pour  verser.  Si  les  congrès 
ne  sont  pas  inutiles,  ils  peuvent  devenir  dangereux,  en  ce  sens 
qu'ils  sont  souvent  les  causes  de  soubresauts  d'enthousiasme 
suivis  presque  toujours,  hélas  !   d'indifférence  et  de  sommeil. 


—  SS- 
II n'en  saurait  être  ainsi  de  notre  congrès  de  1904.  Incident 
heureux  et  parfaitement  réussi  de  l'existence  de  l'Association,  il 
n'aura  point  pour  conséquence  de  tuer  notre  ardeur.  Je  vous 
le  promets,  moi  cjui  ai  eu  la  bonne  fortune  de  constater  avec 
quel  ferme  et  généreux  vouloir  les  congressistes  du  mois  de 
juin  résolurent  de  maintenir  le  groupement  de  notre  jeunesse 
en  un  bataillon  unique. 

Sans  faiblesse  et  sans  relâche,  ils  vont  continuer  à  ouvrir  le 
sillon  d'où  notre  pays  verra  plus  tard  s'élever  des  tiges  aux 
éj)is  pleins  et  dorés. 

Le  motif  créateur  de  l'Association  et  les  moyens  de  la  rendre 
])rati(|uc  ne  sont  pas  conijjlexes. 

Prci)arer  les  jeunes  gens  en  vue  des  grands  devoirs  de  leur 
vie,  les  unir  afin  que  plus  sûrement  ils  acquièrent  une  complète 
formation  morale  et  intellectuelle,  voilà  le  but.  Ixs  membres 
de  l'Association  sont  des  catholiques  et  des  canadiens  français. 
Elle  recevra  uni(|uement  ceux  qui  se  déclarent  les  fervents  du 
catholicisme  et(|ui,  ])oiir  le  publiquement  prati(pier,  enré])andre 
les  merveilleuses  influences,  sont  prêts  à  ciuckpies  sacrifices.  Elle 
fait  aj)pel  aux  seuls  fils  de  notre  race,  aux  cœurs  profondément 
épris  de  son  histoire,  confiants  en  ses  destinées,  soucieux  de  lui 
assurer,  sur  cette  terre  canadienne,  r.'iccom])lissement  d'œuvres 
utiles  et  fortes. 

Les  membresde  l'.Association  se  recrutent  sur  tous  lesj)oints 
de  cette  province.  Lnrs(|ue,  dans  une  ville  ou  un  village,  ils 
sont  en  nombre  sulîisant  pour  former  lui  ]îetit  novau,  ils  se 
constituent  en  grou])e.  A  l'heure  actuelle  plusieurs  groujjcssont 
déjà  établis.  Chacun  de  ces  derniers  peut  avoir  ses  statuts  par- 
ticuliers et,  cpiant  à  ce  tiui  regarde  sa  vie  intérieure,  il  a  la  liberté 


—  59  — 

entière.  Il  va  sans  dire  que  le  Comité  central  de  l'Association 
les  domine  tous  et  qu'il  a  pour  devoir  principal  de  s'intéresser  à 
leurs  efforts,  à  leurs  épreuves,  à  leurs  succès. 

Chaque  groupe  comprend  un  cercle  d'études.  Voici  la  partie 
de  l'organisation  la  plus  intéressante  et  celle  qui  promet  les  plus 
féconds  résultats.  Ceux  qui  font  partie  de  ces  cercles  se  donnent 
pour  tâche  d'étudier  toutes  les  questions  relatives  à  notre  rou- 
age religieux,  politique  et  social. 

De  ces  considérations  apparaît  clairement  le  travail  à  faire  : 
consolider  les  groupes  établis,  faire  fonctionner  les  cercles  d'é- 
tudes, en  créer  de  nouveaux  à  mesure  que  nous  enrôlerons 
d'autres  jeunes  gens. 

Pour  que  tout  cela  ne  marche  pas  trop  mal,  il  faudra  en  pre- 
mier lieu  secouer  l'apathie  des  membres,  les  amener  à  porter  un 
intérêt  réel  et  persévérant  aux  travaux  des  cercles.  Notre  race 
n'étudie  pas.  Nous  souftVons  d'une  grande  passivité  intellec- 
tuelle. Sans  vouloir  calomnier  nos  camarades,  nous  osons 
croire  que  les  membres  de  l'Association  ne  sont  pas  tous  exempts 
de  ce  mal.  A  ceux  qui  dirigent  ces  cercles  incombe  le  devoir 
de  choisir  des  sujets  capables  d'intéresser  les  esprits  appelés  à 
les  approfondir.  A  ces  derniers  il  importe  de  poursuivre  ces 
études  avec  la  hauteur  d'intelligence,  la  largeur  de  vue  dont  ne 
se  doivent  jamais  départir  des  croyants  et  des  citoj-ens  qui 
peinent  pour  leur  pays  et  leur  foi. 

Nous  disons  plus  haut  que  les  membres  de  l'Association  sont 
disséminés  un  peu  partout  en  cette  province.  Les  directeurs  ont 
donc  été  contraint  d'avoir  un  mcssag-er  qui  fut  ca])able  de  cir- 
culer entre  les  groupes,  de  soutenir  les  courages,  de  susciter  de 
nouveaux  dévouements,  d'être,  auprès  du  public,  l'interprète  de 
tous.  Le  Semeur  aura  cette  importante  misson.  Du  môme 
coup,  il  répondra  à  l'un  de  nos  devoirs,  celui  de  propager  nos 


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idées  et  communiquer  à  nos  compatriotes  ce  que  nous  croyons 
la  vraie  vie  du  peuple  canadien-français.  Pour  les  membres 
de  l'Association,  la  nécessité  du  moment  est  donc  de  soutenir 
cette  petite  revue.  Qui  d'entre  nous  ne  peut  contril)uer  de 
quelque  manière  à  son  entretien  ?  Qui  refusera  de  nourrir  ce 
5e/newr  dont  la  «gloire  sera  de  jeter  dans  les  âmes  neuves  de  ce 
pays  la  semence  des  initiatives  fécondes  et  des  virils  desseins  ? 

Mais,  l'Association  étant  un  foyer  de  propagande,  ce  Bulle- 
tin de  ses  faits  et  gestes  ne  suffit  pas.  11  faut  encore  que  chaque 
membre  paie  de  sa  personne  dans  ce  travail  qui  consiste  à  faire 
adhérer  les  autres  à  nos  idées,  à  nos  aspirations.  Que  l'on  nous 
permette  de  rappeler  que  pour  y  atteindre,  les  actes  vaudront 
mieux  que  les  paroles.  Que  le  public  sache  qui  nous  sommes,  à 
regarder  seulement  notre  manière  d'êtreet  d'agir,  nos  habitudes 
de  catholiques  toujours  correctes,  notre  fidélité  à  faire  le  labeur 
quotidien  sans  mise  en  scène,  mais  sans  veulerie. 

Ce  dernier  devoir  prouve  que  les  membres  de  l'Association 
ont  sagement  fait  de  mettre  en  tête  de  leur  programme  la  for- 
mation personnelle. 

Au  jugement  de  Berryer,  trois  conditions  manquèrent  à 
son  ami  Alfred  de  Musset  pour  c|u'il  fut  un  grand  poète  :  un 
saint  amour,  la  foi,  du  caractère. 

N'cst-il  pas  vrai  de  dire  (pie  ces  armes  sont  indispensables 
non  seulement  aux  maîtres  de  la  poésie,  mais  encore  à  (piieon- 
(pieveut  sur  terre  eflicacement  lutter?  Nos  camarades  le  croient. 
Aussi  vont-ils  travailler  sans  défaillance  à  aimer  de  toute  l'âme 
les  ])rinci])es  (|ui  les  rattachent  à  l'Ivglise  catholique  et  les  sou- 
venirs qui  les  lient  à  la  race  dont  ils  sont  les  fils.  Ils  étudieront 
pour  rendre  |)lus  fermes  leurs  croyances,  non  jîour  faire  des- 
cendre des  brumes  sur  les  vérités  qui  leur  furent  jadis  enseignées. 
Ils  s'applifiueront  surtout  à  se  façonner  un  caractère,  c'est-à- 


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dire  à  faire  d'eux  des  hommes  qui  n'ont  point  peur,  des  hommes 
capables  de  demeurer  fidèles  à  ce  qu'ils  croient  être  le  vrai  et  le 
juste. 

A  l'œuvre  donc,  mes  amis.  Que  Jésus-Christ  bénisse  nos  ef- 
forts et  donne  à  chacun  de  nous  la  passion  des  choses  élevées. 

Prouvons  à  tous  par  des  actes  que  nous  voulons  être  et  que 
nous  travaillons  à  devenir  la  collectivité  la  moins  oublieuse  de 
sa  foi  et  de  ses  traditions  nationales,  la  plus  instruite,  la  plus 
noble  qui  fut  et  qui  soit  en  ce  pays. 

Antonio  Perrault 


LES  CERCLES  D'ETUDES 

Qu'est-ce  qu'un  cercle  d'études?  C'est  un  groupement  de 
jeunes  gens  qui  se  livrent  à  des  études  faites  en  commun  et  ])ro- 
pres  à  les  préparer  aux  luttes  que  l'avenir  leur  réserve.  Plus 
spécialement,  dans  l'Association,  c'est  une  réunion  de  mem- 
bres s'ap])liquant  de  concert  à  l'étude  des  questions  marquées 
dans  le  programme  de  l'Association.  Ce  qui  fait  le  fond  de  sa 
méthode,  c'est  une  note  d'intimité  qui  bannit  toute  gêne  et  tout 
formalisme  encombrant,  et  un  caractère  de  franchise  et  de  sin- 
cérité qui  anime  à  la  recherche  de  la  seule  et  unique  vérité,  sans 
souci  des  conventions  et  des  préjugés  à  la  mode,  "ces  haillons" 
dans  lesquels  gît  la  vérité  misérablement  enfouie  et  méconnue. 

Voici  le  procédé  ordinaire  du  cercle  d'études.  Un  membre, 
choisi  d'avance,  donne  une  étude  ou  conférence  sur  un  sujet  pro- 
posé; il  cherche  plutôt  à  exposer  clairement  son  sujet  qu'à  dé- 
ployer une  vaine  érudition  ou  à  éblouir  par  son  élocpience.  Sa 
conférence  a  presque  toujours  le  caractère  d'une  causerie,  dont 


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le  résultat  doit  être  la  possession  de  la  vérité  :  il  s'ag^it  de  dé- 
terminer le  point  précis  où  se  trouve  la  vérité  vraie  sur  le  point 
proposé.  La  vérité,  aussi  bien  que  la  vertu,  n'est-elle  ])as  sou- 
vent dans  un  milieu  ?  Les  extrémistes  n'ont  pas  toujous  le  mo- 
nopole du  vrai!  Une  discussion  suit  cette  causerie.  Tous  les 
membres  y  j)rennent  part,  sans  éclat  d'élocjuence,  sans  passion 
oratoii-e.  Ils  échangent  des  avis,  présentent  des  difficultés,  com- 
plètent ou  rectifient  des  assertions  moins  sûres.  C'est  alors  que 
les  nouvelles  idées  surgissent,  que  celles  qu'a  développées  le  con- 
férencier font  leur  chemin,  après  l'épreuve  d'un  examen  auquel 
toutes  ne  résistent  pas. 

Vn  moyen  de  faciliter  la  discussion,  c'est  de  faire  faire  par 
tous  une  étude  préliminaire  sur  le  sujet  de  la  causerie.  Certains 
cercles  arrivent  à  ce  résultat  en  faisant  apporter  par  leurs  mem- 
bres à  chaque  séance  des  notes,  des  renseignements,  des  sugges- 
tions sur  un  sujet  proposé  à  l'avance.  Ces  notes  sont  remises 
au  conférencier  que  le  sort  désigne  pour  traiter  la  matière.  La 
question  se  trouve  ainsi  connue  de  tous  les  menbres  avant  d'être 
exposée  en  séance. 

COLLA TiORATloX    DH    TOl/S 

On  devine  les  avantages  d'une  telle  méthode.  D'abord  à 
chacjue  meml)re  est  ménagé  une  part  active  :  chacun  contribue 
à  l'organisation,  à  la  discussion,  à  tous  les  travaux.  Vovant 
f|u'ils  doivent  prendre  la  parole,  qu'on  attend  d'eux  une  réponse 
à  une  objection,  (|u'on  compte  toujours  sur  eux  pour  nourrir  et 
animer  la  discussion,  les  membres  se  résignent  moins  facilement 
à  manquer  aux  réunions.  N'a-t-on  pas  ])lusde  plaisir  de  chercher 
soi-même  une  solution,  à  concourir  à  la  vie  d'une  séance,  qu'à 
être  un  simple  auditeur?  Dans  la  séance  du  cercle,  tous  sont  ac- 
teurs, tous  sont  actifs  :  la  méthode  assure  ce  résultat,  la  séance 
devenant  une  collaboration  de  tous  les  membres. 


—  63  — 

Ajoutez  à  cela  les  avantages  immenses  de  la  discussion.  La 
discussion  est  le  meilleur  moyen  de  fouiller  une  question  dans 
tous  ses  détails.  Elle  provoque  les  heurts  d'idées  d'où  jaillira  ht 
lumière  ;  non  contente  de  graver  les  idées  dans  les  esprits,  elle 
ouvre  des  vues  nouvelles,  éveille  les  initiatives  des  esprits  trop 
craintifs  et  trop  défiants,  et  comminiique  aux  esprits,  même  les 
plus  arides,  l'âme  et  la  vie. 

Elle  seule  pourra  retenir  longtemps  les  jeunes  à  l'étude.  Le 
travail  fait  en  commun  les  intéressant  davantage,  il  sera  plus 
persévérant,  plus  continu  que  tout  autre.  Au  reste  remar- 
quons bien  que  l'aspect  sérieux  des  travaux  n'est  pas  pour  éloi- 
gner; il  attire  peu  à  peu  les  jeunes,  contents  de  rencontrer  les 
idées  ou  de  les  pressentir  et  de  suivre  le  raisonnement  qui  les 
amène. 

MOYENS  DE  FONDER  UN  CERCLE 

Venons-en  tout  de  suite  à  l'organisation.  D'abord  retenons 
bien  qu'un  cercle  d'études  ne  s'improvise  pas.  Il  est  la  conclu- 
sion naturelle  d'un  travail  quelquefois  assez  long. 

Une  personne  seule  suffit  pour  commencer  le  travail  de  fon- 
dation. Si  c'est  un  prêtre,  tant  mieux.  Si  c'est  un  laïque,  son 
premier  soin  sera  d'v  intéresser  un  prêtre,  celui  qui  paraîtra  de- 
voir le  mieux  conduire  une  entreprise  de  ce  genre.  Quoi  qu'il  en 
soit  il  s'agira  d'abord  de  trouver  des  membres.  C'est  là  que  la 
marche  devra  être  plutôt  lente.  Tous  ne  sont  pas  préparés  à 
faire  partie  d'un  cercle  d'études,  tous  ne  sont  pas  du  premier 
coup  pénétrés  de  sa  nécessité. 

Ces  premières  recrues  destinées  à  former  le  premier  noyau 
du  cercle  doivent  être  choisies  et  préparées  avec  le  plus  grand 
soin.  A  cause  de  sa  position,  c'est  le  plus  souvent  au  directeur 
qu'il  appartient  de  les  éclairer  et  de  faire  leur  "éducation ",  car 
il  V  faut  une  véritable  éducation. 


—  64  — 

Un  tel,  par  exemple,  a  tout  ce  qu'il  faut  pour  être  un  bon 
membre,  il  est  travailleur,  instruit,  pieux,  mais  il  ne  S£iit  rien  du 
mouvement  des  jeunes,  leurs  efforts  lui  sont  inconnus  ou  à  peu 
])rès.  Alors  renseignons-le.  On  lui  procure  les  comjDtes  rendus 
de  nos  congrès,  les  statuts  de  l'Association  ;  on  lui  fera  connaî- 
tre les  travaux  des  jeunes  à  l'étranger,  etc. 

Tel  autre  est  un  bon  enfant,  rempli  de  bonne  volonté,  mais 
dont  tout  le  catholicisme  consiste  à  bien  remplir  ses  devoirs  de 
piété.  A  celui-là  le  directeur  redressera  les  idées,  en  l'entretenant 
souvent,  en  lui  faisant  lire  des  choses  propres  à  élargir  ses  vues. 

A  un  autre,  c'est  le  goût  du  travail  qu'il  faut  donner,  et 
ainsi  de  suite.  Au  bout  d'un  certain  temjis,  le  terrain  est  bon  et 
les  esprits  préparés  à  recevoir  lacommunication  qu'on  veut  leur 
faire.  Souvent  ce  sera  inutile,  et  la  nécessité  d'un  cercle  appa- 
mîtra  si  bien  à  ces  jeunes  (|u'eux-mêmes  le  proposeront.  En 
tout  cas  la  proposition  recevra  toujours  leur  assentiment,  parce 
que  toujours  elle  sera  l'expression  de  leurs  idées.  Ainsi  le  cercle 
aura  répondu  à  un  vrai  besoin,  il  sera  la  conséquence  logique 
des  travaux  antérieurs. 

l'AS  d'k.mhalle.ment 

Au  contraire,  lorscpie  le  cercle  est  fondé  du  jour  au  lende- 
main, sous  remj)ire  d'une  belle  ardeur  et  d'un  zèle  irréfléchi,  il 
n'em])runte  ])as  à  la  conviction  j)lus  calme  mais  plus  solide  de 
ses  membres  la  force  (pii  assure  son  succès.  Dans  les  premiers 
temi)S  le  cercle  vivra,  puis  il  végétera  et  finalement  s'éteindra 
faute  d'aliments.  Un  emballement  imprudent  aura  compromis 
l'œuvre  pour  bien  longtem])s  ])eut-êtrc,  et  découragé  ]ilusieurs 
bonnes  volontés. 

l)oiic,  dès  (pie  I'.'  diiveleur  aura  trouvé  cin(|  ou  six  membres 
ainsi  préparés,  le  cercle  peut  être  fondé,  sa  base  est  solide  et  il 
vivra  si  d'autres  obstacles  ne  l'arrête  pas. 


—  65  — 

Et  d'abord  on  l'organisera,  mais  le  plus  simplement  possible, 
en  laissant  aux  circonstances  le  soin  de  faire  sa  constitution. 
Les  statuts  des  cercles  similaires  pourront  le  guider  non  pas  le 
régir.  Car  la  constitution  d'un  cercle  d'études  doit  être  pour 
lui  et  de  lui,  répondant  à  ses  vrais  besoins  et  à  sa  propre 
position. 

PRÉCAUTIONS  À   PRENDRE 

Je  terminerai  par  quelques  conseils  pratiques...  Ils  sont  le 
fruit  d'une  étude  spéciale  des  cercles  d'études  et  de  la  pauvre 
expérience  qui  m'a  été  donné  d'acquérir  sur  ce  sujet... 

Le  premier  a  trait  à  la  fondation.  Lorsqu'il  y  a  déjà,  dans 
le  lieu  où  l'on  veut  former  un  cercle,  quelque  organisme  existant, 
on  doit  savoir  en  profiter.  Souvent  un  léger  changement  suffira 
à  transformer  ces  organismes  en  véritables  cercles  d'études. 
Cela  peut  arriver  surtout  dans  les  collèges,  dans  lesquels  on 
n'agira  jamais  d'ailleurs  sans  l'approbation  préalable  des 
autorités. 

Le  nombre  des  membres  dépend  surtout  de  la  méthode  de 
travail  :  il  serait  difficile  d'établir  une  règle  fixe.  Mais  il  devra 
être  tel  qu'il  puisse  permettre  à  chaque  membre  d'avoir  une  part 
active  dans  chaque  séance.  Avec  un  nombre  trop  restreint,  on 
court  risque  de  n'avoir  pas  de  vie  ,avec  un  nombre  trop  grand, 
de  membres,  l'intérêt  diminuera.  En  général  une  quinzaine 
de  membres  suffisent  toujours  ;  vo^'ons  ce  qui  est  le  mieux,  étant 
donné  les  circonstances. 

De  la  sorte  on  évitera  bien  des  obstacles  et  des  difficultés. 

LE  RÔLE   DU   DIRECTEUR 

Tout  cercle  aura  pour  l'aider  dans  tous  ses  travaux  im  di- 
recteur. 


—  66  — 

Le  directeur  est  la  première  autorité,  c'est  un  prêtre  et  ce 
caractère  lui  donne  dans  le  cercle  une  autorité  nouvelle,  celle  de 
la  vertu,  de  la  science  et  de  l'expérience.  Le  plus  souvent  le  di- 
recteur sera  l'âme  du  cercle.  Dans  les  séances  c'est  lui  qui  dirige 
la  discussion,  la  ramène  au  point  d'où  elle  est  partie,  quand  elle 
s'en  éloigne,  et  doit  quelquefois  calmer  l'ardeur  trop  grande  des 
jeunes  discutants.  Souvent  il  interviendra  pour  juger  un  point 
sur  lequel  on  ne  parvient  pas  à  s'entendre.  Il  fournit  les  expli- 
cations et  les  développements  dont  on  a  besoin.  Il  aidera  ceux 
qui  ont  des  travaux  à  faire,  soit  en  leur  indiquant  les  princi- 
pales idées,  soit  en  leur  fournissant  même  les  matériaux  néces- 
saires. 

Le  directeur,  on  le  voit,  a  une  tâche  bien  lourde  et  pas  du 
tout  facile.  Il  doit  pouvoir  consacrer  du  temps  au  cercle,  et  être 
muni  de  connaissances  étendues. 

Il  devra  connaître  bien  les  jeunes  et  savoir  s'attirer  leurs 
sympathies.  La  direction  qu'il  donne,  pour  produire  tous  les 
fruits  qu'on  doit  en  attendre,  doit  être  habilement  ménagée. 

Je  le  répète,  la  tâche  est  difficile.  Espérons  que  de  nombreux 
directeurs  vont  surgir;  nous  sommes  d'ailleurs  certains  que  le 
clergé  canadien  est  capable  de  faire  réussir  cette  nouvelle  œuvre 
comme  toutes  les  autres  auxquelles  il  s'est  intéressé.  D'ailleurs 
cet  espoir  est  déjà  réalisé,  car  nos  seize  groupes  n'ont  pas  été 
embarrassés  à  se  trouver  des  directeurs  ])rudents  et  zélés. 

LES    ÉTUDES   À    FAIRE 

Une  dernière  rcmarf|ue  sur  le  choix  des  études  à  faire.  Il 
faut  les  choisir  assez  intéressantes  pour  attirer  les  membres  et 
rendre  possible  le  sacrifice  d'une  autre  distraction.  D'ordinaire 
elles  seront  intéressantes  si  elles  sont  pratiques.    Des  études 


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pratiques,  c'est-à-dire  des  études  pouvant  s*appliquer  immédia- 
tement aux  faits. 

Les  études  que  recommandent  l'Association  sont  pratiques, 
car  elles  répondent  à  des  réalités  auxquelles  nous  nous  heurtons 
chaque  jour.  Ces  sujets,  sans  doute,  exigent,  quand  on  les  étu- 
die, que  l'on  fasse  de  la  théorie  bien  entendue. 

Renseignés  soigneusement  sur  les  idées  générales,  les  mem- 
bres de  nos  cercles  apprendront  vite  à  employer  les  connais- 
sances acquises  et  à  préciser  leurs  idées  au  contact  de  la  réalité. 

Veillons  aussi  à  ne  rien  présenter  qui  ne  soit  trop  aride,  sur- 
tout dans  les  déliuts.  Il  faut  une  sage  gradation  des  sujets  qui 
habitue  aux  études  sérieuses  et  qui  ne  prenne  personne  au  dé- 
pourv^u.  Le  cercle  choisira  lui-même  le  programme  d'étude  qui 
répond  le  mieux  à  sa  situation  propre  et  à  ses  besoins  particu- 
liers. 

Comme  conclusion  à  ce  modeste  travail  sur  un  sujet  qui 
appellerait  bien  d'autres  considérations,  je  propose  l'adoption 
de  la  résolution  suivante. 

Le  congrès  émet  le  vœu  :  1°  que  chaque  groupe  de  l'Asso- 
ciation organise  le  plus  tôt  possible  un  cercle  d'études  ;  2°  que 
Messieurs  les  directeurs  des  collèges  soient  respectueusement 
priés  d'encourager  la  formation  de  cercles  d'études  dans  leurs 
institutions. 

Ernest  Roby 

[Congrès  du  26  juin  1904.) 


->—»— 


Association  des  Jeunes  de  France 
ET   LE  PAPE 


Naguère  deux  associations  françaises  envoyèrent  des  délé- 
gués à  Rome  :  "  Les  jeunes  gens  du  Sillon"  et  "l'Association 
catholique  de  la  Jeunesse  française." 

Les  premiers  furent  d'abord  reçus  en  audience  par  le  Pape 
le  14-  septembre  dernier.  Marc  Sangnier,  président,  lut  une 
adresse  à  laquelle  le  Saint-Père  répondit  en  ces  termes  : 

"  Chaque  fois  (jue  les  auteurs  des  Livres  inspirés  viennent  à 
parler  des  jeunes  gens,  leurs  j)aroles  sont  remplies  d'affection  et 
d'enthousiasme.  Sans  Nous  arrêter,  à  tant  d'autres  passages 
des  Saintes  Ecritures  que  Nous  pourrions  indiquer,  surtout  dans 
les  livres  des  Machaljces,  Nous  en  avons  un  exemjile  frappant 
dans  les  paroles  (pie  le  disciple  de  l'amour  adressait  jadis  à  une 
société  de  jeunes  gens:  "  Je  vous  écris,  jeunes  gens,  parce  que 
vous  êtes  forts,  que  la  parole  de  Dieu  demeure  en  vous,  et  que 
vous  avez  vaincu  l'esprit  mauvais."  (  L  Jean  ii,  14.  )  Et  l'Évan- 
gile nous  raconte  rpie  Jésus-Christ,  après  un  entretien  avec  un 
jeune  homme,  le  regardant,  l'aima.  (Marc  x,  21.  ) 

"  Eh  l)ien,  chers  jeunes  gens,  ces  mêmes  sentiments  du  divin 
Kédem})teur,  remplissent  aujourd'hui  notre  cœur  après  avoir 
écouté  l'adresse  si  pleine  d'affection  que  vous  Nous  avez  présen- 
tée ;  et  jniisfpie  vous  avez  su  concevoir  des  pensées  aussi  nobles 
et  que  vous  vous  montrez  capables  d'actions  aussi  généreuses, 
laissez-Nous  vous  dire  que  Nous  vous  aimons,  et  que  désormais 
chacun  de  vous  pourra  Nous  considérer  non  ])as  seulement 
comme  un  père  mais  comme  xm  ami. 

"  Nous  nous  réjouissons  du  bien  cjue  vous  faites  et  de  celui 
que  vous  ferez  encore,  avec  la  grâce  de  Dieu,  en  étendant  vos 
rangs  et  en  exerçant  parmi  vos  compagnons  d'âge,  d'étude,  de 

os 


—  69  — 

profession,  qui  ne  sont  pas  encore  des  vôtres,  un  apostolat 
vraiment  fécond. 

"  Nous  nous  abstiendrons  de  vous  recommander  d'une 
façon  spéciale  de  pratiquer  la  vertu  et  la  piété,  et  de  craindre  le 
Seigneur,  car  Nous  savons  que  ces  avis  ne  vous  sont  pas  néces- 
saires, persuadés,  comme  vous  l'êtes,  que  la  base  de  toute  bonne 
œuvre  est  la  sainte  crainte  de  Dieu.  Mais  plutôt,  avec  les 
paroles  mêmes  de  saint  Jean,  le  plus  jeune  des  apôtres.  Nous 
vous  renouvelons  l'expression  de  Notre  joie  parce  que  "  vous 
êtes  forts  "  :  quia  fortes  estis. — Oui,  il  faut  de  la  force  et  du 
courage  pour  conserver  la  foi  quand  tant  d'autres  la  perdent, 
pour  rester  fils  dévoués  de  l'Eglise  quand  beaucoup  d'autres  la 
combattent,  pour  garder  le  trésor  précieux  de  la  parole  de  Dieu 
quand  tant  d'autres  l'ont  banni  de  leurs  âmes. 

"  Il  faut  de  la  forée  et  du  courage  pour  se  vaincre  soi-même, 
pour  dompter  ses  propres  passions,  pour  rester  fidèle  à  la  vérité 
et  à  la  vertu  et  pour  dominer  l'esprit  du  mal  qui  trompe  le 
monde  par  le  mensonge. — Tout  en  Nous  réjouissant  donc  de 
votre  force.  Nous  vous  exhortons,  dans  vos  œuvres  et  dans 
vos  luttes,  à  placer  votre  confiance  non  pas  en  vos  propres 
efforts,  mais  en  la  toute-puissance  de  Dieu. 

"  Ne  craignez  pas,  si  vous  êtes  encore  peu  nombreux.  Kestez 
fidèles  à  votre  bannière,  et  la  promesse  de  l'Évangile  s'accom- 
plira en  vous  et  vous  régnerez:  "  Nolite  timere, pusillus  grex, 
quia  complacuit  Patri  vestro  dare  vobis  regnum. — Ne  craignez 
pas,  petit  troupeau,  car  il  a  plu  à  votre  père  de  vous  donner 
son  royaume." 

"Ne  vous  laissez  pas  décourager  si  tous  ceux  qui  professent 
les  mêmes  principes  catholiques  ne  s'unissent  pas  toujours  avec 
A^ous  dans  l'emploi  des  méthodes  qui  visent  un  but  commun  à 
tous  et  que  tous  désirent  atteindre.  Les  soldats  d'une  puissante 
armée  n'emploient  pas  tous  les  mêmes  armes  ni  la  même  tac- 
tique ;  tous,  cependant,  doivent  être  unis  dans  la  même  entre- 
prise, maintenir  un  esprit  de  cordialité  fraternelle  et  obéir 
promptement  à  l'autorité  qui  les  dirige.  Que  la  charité  du 
Christ  règne  donc  entre  vous  et  les  autres  jeunes  gens  catho- 


—  70  — 

liques  de  la  France.  Ils  sont  vos  frères  ;  ils  ne  sont  pas  contre 
vous,  mais  avec  vous.  Quand  vos  torces  se  rencontrent  sur  le 
même  terrain,  soutenez-vous  les  uns  les  autres,  et  ne  permettez 
jamais  r|u'unc  sainte  rivalité  dégénère  en  une  opposition  inspi- 
rée par  les  passi(jns  humaines  ou  par  des  vues  personnelles  et 
peu  élevées.  Il  suffit  que  vous  ayez  tous  une  même  foi,  une 
même  pensée,  une  même  volonté  et  la  victoire  vous  sera  donnée. 
Recevez-en  comme  gage  la  bénédiction  apostolique. 

Une  autre  association  déjeunes  "L'Association  catholique 
de  la  Jeunesse  française"  voulut  rendre  hommage  au  Saint- 
Père  et  fut  reçue  avec  de  grandes  marques  d'affection.  M.  Jean 
Lerolle,  président,  lut  une  protestation  de  fidélité  à  la  foi 
catholique  et  de  dévouement  au  Saint-Siège.  Voici  le  texte 
même  de  la  réponse  du  Souverain  Pontife. 

LivSez,  camarades,  avec  attention,  le  Pape  n'eût  pas  parlé 
autrement  s'il  se  fût  adressé  à  déjeunes  Canadiens. 

'  '  Réconforté  par  les  nobles  sentiments  exprimés  dans  l'adresse 
cjui  vient  de  Nous  être  lue  en  votre  nom.  Nous  remercions  le  Sei- 
gneur qui  de  temps  à  autre  Nous  procure  de  telles  c^msolations 
et  apporte  à  Notre  faiblesse  le  courage  nécessaire  dans  les  com- 
l)ats  (|ue  Nous  avons  à  soutenir. 

"  Car  votre  protestation  est  vraiment  consolante  pour  Nous. 
Elle  Nous  donne  l'assurance  c|u'au  milieu  des  difficultés  dontest 
tourmentée  l'heure  présente.  Nous  aurons  à  Nos  côtés,  dans  la 
lutte  j)our  le  bien,  de  très  chers  jeunes  gens  qui,  iniis  d'esprit  et 
decœur  à  l'ombre  de  leur  bannière  oij  se  lit  la  belle  devise, /j/été, 
étude,  action,  Nous  conduiront  à  la  victoire. 

"  Vos  protestations  ne  se  traduisent  pas  seulement  ])ar  des 
paroles  mais  jiar  des  faits:  vous  Nous  en  avezdonné  une  preuve 
élocjuente  en  venant  à  Rome,  même  au  jn'ix  de  sacrifices.  Vous 
êtes  venus  dans  la  \'ille  liternelle  pour  célébrer  le  cinquantième 
anniversaire  de  la  définition  du  dogme  de  l'Immaculée  Concep- 
tion, et  jîour  mettre  sous  la  ])rotecti()n  de  la  Reine  des  cieux 
votre  foi,  la  pureté  de  votre  vie,  vos  généreux  projets  d'action 


pour  la  cause  de  l'Eglise  et  de  la  patrie.  Vous  êtes  venu  vénérer 
le  tombeau  des  princes  des  A])ôtres  et  ceux  de  tant  d'autres 
martyrs,  afin  d'y  puiser  l'héroïsme  qu'exigent  de  si  nobles  com- 
bats. Vous  êtes  venus  offrir  au  Vicaire  de  Jésus-Christ  l'hom- 
mage de  votre  amour  filial  et  de  votre  obéissance  absolue,  et  en 
recevoir  des  directions  opportunes  dans  l'incertitude  des  choses 
humaines  et  les  bouleversements  incessants  dans  les  idées  et  dans 
les  faits. 

"Nous  vous  remercions  donc,  bien  chers  jeunes  gens,  du 
réconfort  que  vous  Nous  apportez  par  vos  déclarations  et,  en 
particulier,  par  votre  promesse  de  garder  comme  un  trésor  les 
enseignements  que  nous  avons  donnés  dans  notre  première  encv- 
clique.  Ils  se  l'ésumcnt  dans  le  programme  de  cette  associatif )n 
catholiciue:  piété,  étude,  action. 

"Oh  oui!  faites-vous  un  trésor  de  la  piété,  mais  que  votre 
piété  soit  entière,  publique,  et  active  !  11  y  a  des  choses  qui  ne 
peuvent  pas  être  divisées  et  faites  seulement  en  partie.  La  piété 
est  de  celles-là.  Il  en  est  d'elle  comme  de  Dieu  à  qui  s'adressent 
les  sentiments  d'amour  et  de  respect  qui  la  constituent.  Dieu 
ne  peut  être  partagé  ni  diminué  :  la  piété  ne  se  conçoit  pas  si 
elle  n'est  complète  et  entière.     Ou  tout  ou  rien  ! 

"Que  la  vôtre  soit  aussi  une  piété  publicpie!  Que  votre  foi 
ait  pour  témoins  non  seulement  les  murs  du  foyer  domestique 
ou  des  réunions  privées,  mais  les  églises,  les  places  publiques,  les 
grandes  foules,  les  assemblées  populaires  !  Avec  cette  noble 
franchise  que  nous  donne  l'inviolable  liberté  de  l'Évangile, 
rendez  hommage  à  Dieu  en  quelque  lieu  et  devant  quelque  per- 
sonne que  ce  soit.  N'ayez  jamais  la  lâcheté  de  craindre  les 
railleries  de  ceux  qui  voudraient  fermer  les  lèvres  ouvertes  à  sa 
louange,  enchaîner  les  pieds  en  marf^he  vers  ses  temples,  retenir 
les  mains  prêtes  à  déposer  sur  ses  autels  leurs  offrandes  et  leurs 
voeux. 

"La  vraie  piété  doit  être  éclairée:  vous  faites  donc  sage- 
ment de  lui  joiiidre  l'étude.  Le  bien  ne  peut  se  trouver  là  oii 
manque  la  connaissance  de  ce  qui  est  utile  au  salut  des  âmes,  à 
la  réforme  des  mœurs,  à  l'acquisition  de  la  vertu.     Lhi  non  est 


—  72  — 

scientia  animœ,  ibi  non  est  bonum.  (Prov.,19,  2.)  Votre  étude, 
vous  n'en  doutez  pas,  doit  s'appliquer  surtout  à  la  doctrine 
révélée  de  Dieu  qui  renferme  tant  de  trésors  de  sagesse  surhu- 
maine, des  ])réceptes  d'une  si  haute  morale,  des  ensei<j:nements 
propres  à  former  une  vie  vertueuse.  Ils  n'ont  jamais  découvert 
rien  de  semblable  les  plus  acclamés  des  savants  de  ce  monde  qui, 
dans  la  confusion  d'une  nouvelle  tour  de  Babel,  enseifjnent  non 
la  vérité  mais  l'erreur,  non  la  vertu  mais  le  vice,  non  l'ordre 
mais  l'imarchie,  non  la  reli<^ion  mais  l'athéisme. 

"Et  c'est  précisément  à  ce  manque  d'études  reliii^ieuses,  à 
cette  ignorance  de  la  science  de  Dieu,  que  la  société  doit  d'être 
envahie  par  cette  corruption  dont  gémissait  déjà  le  ])rophète: 
"  IvC  blasi^hème,  le  mensonge,  l'homicide,  le  vol,  l'adultère  inon- 
dent le  monde  parce  que  la  connaissance  de  Dieu  n'y  est  plus.  " 
(Osée,  iv,  i,  2.  )  Pour  avoir  négligé  ou  méprisé  cette  étude,  des 
hommes  cependant  instruits  dans  les  choses  profanes  blasphè- 
ment ce  Cju'ils  ignorent  et  deviennent  le  fléau  corrupteur  de  la 
société. 

"Mais  vous,  chers  jeunes  gens,  vous  regardez  comme  vous 
étant  adressées  à  vous-mêmes  les  exhortations  du  Saint- 
Es]Drit:  "Applique-toi  à  l'étude,  ô  mon  fils,  pour  réjouir  mon 
cœur,  pour  quetujniisses  répondre  àcpii  voudrait  te  méjjriser", 
pour  que  tu  sois  capable  de  défendre  les  vérités  de  la  foi  de- 
vant qui  oserait  les  combattre:  Stude  sapientiœ,  £li mi,  et  laeti- 
fica  cor  mciim  ut  possis  cxprohranti  rcspondcrc  scrmonem. 
(Pkov.,  27,11. 1 

"  Soutenus  i>ar  votre  piété  et  votre  science,  jjratiquant  le 
précepte  divin  :  iiniculquc  mandavit  Deus  de  proximo  suo, 
vous  vous  livrerez  à  un  apostolat  fructueux.  En  remi)lissant 
fidèlement  vos  devoirs  envers  Dieu,  en  vous  enrichissant  de 
toutes  les  vertus,  en  défendant  la  vérité  avec  courage,  vous 
inviterez  tous  les  hommes  à  suivre  votre  exemj)le,  vous  vous 
imposerez  au  resjx'ct  et  à  l'admiration  de  vos  adversaires  eux- 
mêmes.  Et  après  avoir  donné  à  vos  frères  ce  pain  s])irituel, 
vous  achèverez  d'accompHr  le  jjrécepte  de  la  charité  en  ofTrant 
A  tous  ceux  (pli  sont  dans  le  besoin  leur  pain  matériel,  par  les 


—  73  — 

institutions  économiques  et  les  œuvres  de  bienfaisance.  Alors 
vous  pourrez  courageusement  repondre  à  qui  vous  méj^rise  : 
exprobranti  respondere  sermonem. 

"  Ces  fruits  de  bénédiction  Nous  sont  assurés  par  la  protes- 
tation loyale  que  vous  faites  de  soumettre  à  l'autorité  é])is- 
copale  la  direction  de  tous  vos  actes.  L'expérience  Nous  a 
montré  que  cette  direction  est  pour  une  œuvre  de  jeunesse  la 
condition  de  sa  vitalité  chrétienne.  Puissent-ils  entendre  cette 
vérité,  tant  d'aveugles  qui  se  professent  catholiques  et  cepen- 
dant réclament  une  indépendance  absolue  envers  toute  autorité, 
et  veulent  une  liberté  qui  ne  serait  plus  celle  des  fils  de  Dieu 
mais  des  rebelles  de  Lucifer  !  Si  l'obéissance  est  nécessaire  en 
tout  ordre  de  choses,  ceux-là  pourraient-ils  s'en  affranchir  qui 
se  consacrent  à  des  œuvres  dont  la  dépendance  est  si  intime 
avec  la  charité  et  la  religion  ?  Fasse  le  Seigneur  que  votre 
exemple  amène  à  résipiscence  tous  ces  jeunes  gens  et  que  Nous 
puissions,  avec  eux  comme  avec  vous.  Nous  réjouir  du  bien 
accompli,  de  la  victoire  remportée  et  des  mérites  obtenus  ! 

"  En  attendant,  Nous  vous  remercions  de  nouveau  des  con- 
solations que  vous  Nous  avez  apportées  et  Nous  exprimons  le 
souhait  que  de  chacun  de  vous  puisse  se  répéter  l'éloge  que  le 
Saint-Esprit  faisait  de  Tobie.  L'un  des  plus  jeunes  de  la  tribu 
de  Nephtali,  Tobie  n'eut  jamais  dans  ses  actions  rien  de  puéril. 
Quand  tous  couraient  aux  veaux  d'or  faits  par  Jéroboam,  lui 
se  rendait  seul  au  temple  et  y  adorait  le  Seigneur  Dieu  d'Israël. 
Emmené  en  esclavage,  il  visitait  ses  frères  de  captivité  pour 
leur  porter  des  paroles  de  salut.  Autant  que  le  lui  permettaient 
ses  forces,  il  donnait  à  manger  à  ceux  qui  avaient  faim,  il 
habillait  ceux  qui  manquaient  de  vêtements,  il  ensevelissait  les 
morts.  Bien  qu'esclave,  il  i)assa  sa  vie  dans  l'allégresse  du 
cœur,  grandissant  toujours  dans  la  crainte  et  l'amour  de  Dieu 
jusqu'à  l'âge  avancé  où  il  mourut. 

"  Que  la  bénédiction  apostolique  réalise  ce  souhait  !  Nous 
vous  la  donnons  degrand  cœur  et  en  priant  le  Seigneur  d'exau- 
cer Notre  vœu,  pour  vous,  pour  vos  parents,  pour  vos  œuvres, 
pour  tous  ceux  qui  vous  aident  à  les  diriger  de  leur  appui 
matériel,  ou  de  leurs  conseils." 


—  74  — 

Il  est  une  troisième  association  ;  celle-ci,  très  jeune,  ne 
peut  enY03'er  une  délégation  auprès  de  Sa  Sainteté  Pie  X,  mais 
Mgr  Bruchési,  ce  père,  cet  ami  des  jeunes,  qui  assistera  au 
cinquantenaire  de  la  proclamation  du  dogme  de  l'Immaculée 
Conception,  a  promis  dans  une  circulaire  à  ses  diocésains  de 
parler  de  l'Association  catholique  de  la  Jeunesse  canadienne- 
française  au  Saint-Père  et  de  le  prier  de  la  bénir  : 

"  Vous  savez  tout  le  bien  que  je  pense  de  cette  association 
qui  s'est  formée  il  n'y  a  pas  longtemps  parmi  nous.  Je  serai 
heureux  d'en  parler  au  Saint-Père  et  de  le  prier  de  la  bénir.  Je 
la  recommande  à  votre  plus  vive  sympathie.  Ce  sera  l'encou- 
rager et  faire  une  œuvre  excellente  de  vous  abonner  au  Bulletin 
qu'elle  vient  de  fonder  et  qui  a  nom  Le  Semeur.  L'abonnement 
n'est  que  de  50  cents  par  an.  " 

Le  Semeur  remercie  sa  Grandeur  de  tant  de  sollicitude  et 
lui  souhaite  un  bon  voyage. 


N0TE5 


Dans  notre  précédent  numéro,  nous  avons  annoncé  la 
publication  probable  des  comptes  rendus  faits  par  les 
journaux  à  l'occasion  dit  congrès  de  juin.  11  nous  est 
impossible  de  donner  ce  plaisir  à  nos  lecteurs  et  à  nous- 
mêmes L'espace  manque  pour  citer  même  des  extraits 

de  ces  flatteuses  appréciations.  Notons  seulement  pour 
les  remercier  ceux  qui  les  ont  publiées,  la  Vérité,  V  Union 
des  Cantons  de  l'Est,  la  Patrie,  le  Journal,  la  Presse,  la 
Croix.  Alerci  encore  à  ces  mêmes  confrères  qui  ont  bien 
voulu  envoyer  leurs  souhaits  au  Semeur.  Que  particu- 
lièrement leur  vœu  de  «longue  vie»  soit  exaucé  ! 


Remercîments  aux 
journaux 


L'apparition  de  notre  Bulletin  a  été  l'objet  de  témoi- 
gnages tout  à  fait  bienveillants  de  la  part  de  NN.  SS. 
les  évêques.  En  retour,  nous  les  prions  de  recevoir 
l'hommage  de  notre  reconnaissance  et  de  notre  dévoue- 
ment. 


Reconnaissance 

àNN.  SS. 
les  évêques. 


Il  ne  suffît  pas  de  naître  :  il  faut  vivre.  Voilà  une 
vérité  dont  se  doivent  convaincre  les  membres  de  l'Asso- 
ciation. De  cette  manière,  ils  comprendront  la  nécessité 
d'aider  au  soutien  du  Semeur.  Tous  sont  invités  à  col- 
laborer à  sa  rédaction.  Tous  encore  doivent  s'intéresser 
à  la  partie  administrative  puisqu'il  est  dit  dans  nos 
statuts  «  que  la  troisième  obligation  contractée  par  les 
membres  de  l'Association  est  de  s'abonner  au  Bulletin  ». 


Obligation 
de  s'abonner 
au  Bulletin  de 
l'Association. 


Quelques  changements  ont  été  récemment  faits  dans 
le  comité  central  de  l'Association. 

75 


Le  Comité  de 
l'A.  C.J. 


—  76  — 

L'un  des  vice-présidents,  le  camarade  Orner  Héroux,  &. 
été  appelé  à  la  rédaction  de  la  Vérité  à  Québec.  Laissant 
la  position  de  sous-directeur  politique  à  la  Patrie, 
M.  Héroux  est  allé  s'associer  à  l'œuvre  poursuivie  par 
M.  J.-P.  Tardivel.  11  était  digne  de  ce  choix  et,  de  tout 
cœur,  nous  l'en  félicitons. 

Il  a  été  remplacé  à  la  vice-présidence  par  le  camarade 
Antonio  Perrault. 

Au  secrétariat,  AL  Eugène  Angers  a  remplacé  AL  Ernest 
Roby  parti  pour  un  monde  meilleur...  L'excellent  Roby 
est  entré,  au  mois  d'août,  au  noviciat  des  Pères  de  la. 
Compagnie  de  Jésus.