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Full text of "Notice historique sur la fabrication des draps à Montauban, du XIVe siècle à nos jours"

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NOTICE HISTORIQUE 



* FABRICMION DES ORIPS 

A MONTAUBAN, 

DU XIV hiëcle: a nos jours, 



Edouard FORESTIÉ, 
Secretairt de la Société archéologi^ite de Tarn et-OnronU' 



MONTAUBAN, 

IMP. ET LITH. KORESTIÉ, RLE DU VIEUX-PALAIS, 23. 



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AVANT-PBOPOS. 



Dans son voyage en France, Arthur Young parle avec 
admiration de Montauban et de l'animation qu'on y remar- 
que. Le touriste anglais a pu parler ainsi, car il * avait 
vu notre ville dans sa période commerciale la plus bril- 
lante. C'était en effet vers 1787, qu'il accomplit son voyage. 
Nous avons nous-mêmes entendu, à plusieurs reprises, 
nos grands njères raconter quelle activité régnait dans 
nos quartiers populeux alors que « la fabrique marchait », 
et il nous souvient comme d'un rêve, hélas t d'avoir con- 
templé d'innombrables pièces de drap aux couleurs variées, 
le rouge écarlate à côté du bleu de roi, étendues au soleil 
sur les berges du Cours, le long des quais, sur le Pont, 
au faîte des maisons de Villebourbon, et flottant au gré du 
vent comme des oriflammes. 

De tout ce passé que reste-t-il ? le souvenir, et comme 
le dit avec raison le poète : 

Montauban. paresseuse Andalouse, 
Voilà déjà longtemps que tu dors au soleil. 

Pourquoi donc, nous dira-t-on, avoir réveillé ce passé, 
ravivé ces regrets, ranimé ces tristesses? Parce qu'en dehors 



Il AVANT-PROPOS. 

de l'intérêt qui s'attache ;'i l'histoire de notre pays, nous 
devons, dans ce spectacle d'une prospérité éclipsée, puiser 
un enseignement pour l'avenir. 

Des nott!S prises un peu partout, dans les livres, dans 
tes archives, dans les journaux, et qui s'amassaient peu 
à peu depuis déjà longtemps, ont formé la chaîne de 
celte monographie. En la mettant sur le métier nous n'y 
avons ajouté que la trame nécessaire pour former l'étoffe. 

Nous serions heureux d'avoir réussi à faire un tissu 
aussi solide et d'aussi bonne qualité que le vieux cadis de 
Hontauban . 




NOTICE HISTORIQUE 



SUR LA 



FABRICATION DES DRAPS 



A MONTAUBAN. 



S'il est une industrie qui puisse revendiquer une antique 
origine, c'est à coup sûr celle qui consiste à tisser les étoffes. 

L'homme, dès son apparition sur la terre, dut s'industrier 
pour trouver les moyens de combattre la fraîcheur des nuits, la 
rigueur des saisons, fJans les temps primitifs, la dépouille dos 
bêtes sauvages suffisait ; mais comme, par sa nature, elle se prêtait 
difficilement aux mouvements du corps, les hommes cherchèrent 
à la remplacer par une matière plus souple et en même temps 
plus appropriée à leurs besoins. 

Dès la plus haute antiquité les livres saints, les historiens, les 
poètes, font mention des étoffes de laine servant de vêtements 
aux peuples de l'Asie. Ces étoffes furent employées les pre- 
mières à cause de leur souplesse, de leur solidité et de la chaleur 
qu'elles développent, mais surtout à cause de la facilité qu'avaient 
les peuples pasteurs de se procurer les matières premières. 

Les anciens ont attribué à différents pays l'invention de l'art du 



A MONTAUBAN. 5 

était tributaire des grandes manufactures de Flandre et de 
Normandie. 

Rouen possédait, en effets en 1190 des cuves à fouler et des 
chaudières pour la teinture des draps, et l'Italie était renommée 
pour l'apprêt que les Florentins savaient donner aux marchandi- 
ses venues de France. 

Au XI Vo siècle, alors que le luxe avait envahi toutes les classes 
de la société française, et que la bourgeoisie et le peuple luttaient 
d'élégance avec la noblesse, on constate une profusion d'étoffes de 
laine venant de tous les points de l'Europe. 

La nomenclature en serait longue, si l'on citait seulement celles 
qui étaient vendues à Montauban, concurremment avec les étoffes 
de soie et de lin. La Normandie était toujours le centre principal 
d'approvisionnement de nos marchands, qui débitaient eu outre des 
draps marbrés de Halines, tannés de Courtray, môIés d'Ipres et de 
Bruxelles, enfin les draps rosets et blancs de Montoulieu, de Rodez, 
de Saint-Antonin et de Montauban, desta vila. 

Il est reconnu, en effet, que la fabrication des draps était 
en pleine activité dès le milieu du XIV^ siècle. Les livres de comp- 
tes des frères Bonis, — cette mine féconde, à laquelle on peut 
sûrement recourir lorsqu'on veut avoir un renseignement sur notre 
cité ou sur ses habitants au début de la guerre de Cent ans, — font 
mention très souvent de tisserands, theisendùrs, qui fabriquaient 
ces draps blancs et rosets, dont il vient d*ètre question. Il y avait 
aussi les tondeurs, tondeires, qui enlevaient le poil des étoffes au 
moyen d'énormes ciseaux ou forces, forsas^ en usage depuis les 
Romains ; les apprèteurs ou foulonneurs, dits baisaireSy qui don- 
naient la dernière façon, après que les tenchuriersj établis sur les 
rives du Tarn et du Tescou avaient fait leurs opérations de tein- 
ture. 

Tout le cycle nécessaire des travailleurs de la laine était donc 
représenté à cette époque dans notre population ouvrière, et nous 
ajouterons, comme détail précieux, que le drap de Montauban était 
employé de préférence pour les cottes hardies (cotardias), vêtement 
extérieur des femmes, ce qui prouverait une certaine perfection 
dans la fabrication. 



D LA FABRICATION DES DRAPS 

Voilà donc un premier jalon qui nous indique l'époque 
approximative de la création ie nos premières manufactures mon- 
talbanaises. Nous allons bientôt les voir prospères et entourées de 
privilèges et d'immunités qui en favorisèrent rapidement le déve- 
loppement. ^ 

Les jours de tristesse et de ruines qui furent le cortège de la 
guerre dn Cent ans dans nos contrées^ commencèrent au milieu 
du XIV« siècle pour ne finir que bien des années après. Mootau- 
ban, convoité par les deux partis, se trouva dans une situation 
particulière. Lorsque cette ville dut se rendre aux Anglais après la 
paix de Brétigny et sur Tordre formel du roi Jean, elle fit payer 
sa soumission forcée par la ratification de ses coutumes et de ses 
privilèges; mais elle eut bientôt secoué le joug britannique. 

Pendant les troubles Findustrie se trouva nécessairement dans 
un état précaire au point Je vue de l'exportation dans les provinces 
éloignées; mais il est certain, d'un autre côté que ces troubles 
mêmes ne nuisirent pas à la prospérité des fabriques naissantes, 
qui restèrent seules à suffire aux besoins du pays. 

L'année 1369, qui marqua le glorieux retour de la cité Montal- 
banaîse dans l'hégémonie nationale, fut en même temps le signal de 
faveurs sans nombre de la part du roi de France, lequel ne pou« 
vait qu'accroître encore les privilèges accordés par les Anglais. 
Les archives de Montauban contiennent des lettres patentes de Louis 
d'Anjou, du roi lui-même, donnant à notre ville une importance 
exceptionnelle et une liberté politique toute spéciale. La trêve avec 
l'Anglais ne pouvait être faite sans l'assentiment de nos consuls, un 
subside serait levé pendant 20 ans sur toutes les denrées et mar- 
chandises importées; les habitants étaient exemptés de la juridiction 
du maître des eaux et forêts. Enfin, les Montalbanais obtenaient le 
privilège exhorbitant de pouvoir transporter dans tout le royaume 
leurs marchandises sans payer de péage, ce qui fait dire à un his- 
torien que nos marchandises voyageaient librement sur le Rhône et 
la Saône, « au grand scandale des gens du fisc. » 

Une autre création utile eut lieu cette année et accrut l'impor- 
tance commerciale de notre ville ; c'est l'établissement de deux 



A MONTAUBAN / 

foires : Saint-Jacqoes (S5 juillet). Saint Géraud (13 octobre). Ces 
foires étaient le grand rendez-vous des marchands des provinces 
voisines, et, pendant les trois jours de leur durée, il se traitait de 
nombreuses affaires sur les laines et les étoffes^ ainsi que sur les 
animaux d'élevage. 

Au commencement du XV« siècle nous voyons nos marchands, 
jaloux de leurs droits, chercher à rendre impossible la concurrence 
des étrangers. Libres échangistes par tempérament, ils réclament la 
protection pour eux contre les étrangers^ mais n'oublient pas de se 
prévaloir de leurs franchises vis-à-vis des droits de transit. 

Leurs doléances sont basées sur « la stérilité des fruits, mortali- 
« tés et autres charges qu'il leur a convenu supporter. » Ils se 
prétendent « moult grevés » et lésés par la présence de marchands 
étrangers qui « apportent hors des foires » les denrées et autres 
objets, « au très grand préjudice de la chose publique. » Le roi 
Charles VI, faisant droit à ces réclamations, défendit l'introduction 
des marchandises en dehors des foires, et encore ces jours-là les 
étrangers devaient-ils acquitter des droits sans nombre. 

On comprend combien ces édits favorisaient le commerce local et 
par suite quelle extension durent prendre nos fabriques, surtout 
si l'on songe qu'à cette époque notre ville était le centre le plus 
important où venaient s'approvisionner le Quercy et une partie du 
Rouergue. 

Cet épanouissement de notre industrie devint si considérable, 
qu'à la Gn du XV® siècle, en 4499, les marchands montalbanais 
fondèrent un établissement qui montre combien les relations com* 
merciales s étaient élargies « et qui fut la principale cause des dé- 
veloppements qu'elles reçurent dans la suite. » La Bourse commune 
des marchands de la Garonne avait pour but c d'améliorerla na- 
« vigation de la rivière et de maintenir l'indépendance du com- 
« tnerce en brisant les entraves que lui suscitaient les seigneurs 
« féodaux. » 

Il faut, pour rintelligence de ces derniers mots, rappeler que les 
seigneurs riverains des cours d'eau percevaient des péages sur les 
bateaux chargés de marchandises. On verra plus loin que la 
navigation de la Garonne était fort onéreuse, même au siècle 



8 LA FABRICATION DES DRAPS 

dernier. Louis XVI, pour favoriser le commerce, racheta le plus 
grand nombre de ces péages. 

L'antagonisme éternel entre le Nord libre échangiste et le Midi 
protectionniste n'avait pas perdu de son intensité : tandis qu'à Rouen 
les manufacturiers demandaient et obtenaient la libre introduction 
des laines et même des draps étrangers, nos consuls gardaient leurs 
droits de barres, et conservaient l'exemption de ces mêmes droits 
dans tous les marchés des sénéchaussées de Toulouse et de Garcas- 
sonne. Ce traitement exceptionnel pour notre cité indiqua quel 
prix les rois de France attachaient à sa possession. 

(c Une nouvelle cause, dit l'annotateur de V Histoire de Montau» 
barif vint agrandir le cercle des spéculations auxquelles se livraient 
les Montalbanais. François I«i; par les sages traités qu'il fit avec la 
Turquie, ouvrit les trésors immenses de l'Orient aux négociants 
français, qui dès 4 530 étaient seuls maîtres de tous les marchés sur 
les c6tes de l'Archipel et de la mer Noire, (le commerce jeta de 
grandes richesses dans le Midi de la France et excita cette ar- 
deur industrielle qui se fît sentir (à Montauban) à cette époque, 

(au point que] les consuls autorisèrent à travailler sur la place 
publique, les ouvriers qui étaient trop nombreux pour trouver 
place dans les ateliers. » 

Cette prospérité fut bientôt troublée. Les horreurs de la guerre 
civile qui ensanglanta nos contrées pendant de si longues années, 
étaient de nature à la compromettre. La plus grande majorité des 
habitants de Montauban avait embrassé la religion nouvelle, et 
presque tous les fabricants se jetèrent avec ardeur dans la Réforme, 
apportant au service de cette oause leur intelligence, leur influence, 
leur fortune. On ne peut douter que ce fut là un puissant appui pour 
le parti calviniste. 

La prise de la Rochelle mit fin à la guerre religieuse, qui fut 
suivie d'une période de calme relatif, pendant laquelle on vit se dé- 
velopper d'une façon régulière l'organisation des corporations 
ouvrières, dont quelques-unes étaient déjà établies depuis le 
XIV' siècle. 

Ces corporations avaient pour but de réglementer l'exercice des 
professions, et pour résultat précieux d'offrir aux patrons un 



A MONTâUBAN. \3 

recrutement excellent d'ouvriers exercés. Elles avaient^ en outre, 
l'avantage de donner un nouvel essor à ces traditions de solidarité, 
de confraternité^ que les anciennes confréries déjà existantes dans 
notre ville avaient implantées dans la population laborieuse. 

Par l'établissement des maîtrises on empêchait la concurrence 
déloyale, et ces institutions combinées rendaient de grands servi- 
ces en écartant, dans la mesure du possible, les difficultés inévita- 
bles de l'antagonisme des patrons et des ouvriers. 

A ce moment on fabriquait encore à Montauban des draps com- 
muns, dont la consommation diminuait chaque jour par suite de 
leur peu de bonté et de leur peu de durée. 

« Cest alors que plusieurs fabricants imaginèrent^ pour rétablir 
leurs affaires, de changer entièrement leur fabrication en imitant 
les serges drapées qui se faisaient dans plusieurs endroits du Lan - 
guedoc, et appelées cadis; et en augmentant d'une part le nombre 
de fils en chaîne pour leur donner plus de force, et d'autre part en 
employant les laines les plus fines, ils parvinrent à faire une 
étoffe aussi épaisse que les draps, et d'un meilleur usage par sa 
croisée. » (Mémoire inédit sur les manufactures.) 

La principale manufacture qui fabriqua des cadis et des rases 
drapées, avait été établie vers l'an 4626. Elle était dirigée par David 
d'Âignan et Jean, son fils, dont les produits étaient fort goûtés des 
marchands, et reçurent le nom de Cadis d'Aignan. Un apprêt spé* 
cial, semblable â celui que l'on donnait aux draps les plus fins, con- 
tribua à faire préférer les cadis d'Aignan aux anciens draps de 
Montauban. Aussi, l'exemple fut suivi par un autre fabricant, gen- 
dre de d'Aignan, nommé de Serres. Celui-ci, à son tour, fit des 
cadis qui reçurent son nom. 

Vers l'année 1673, David d'Aignan, voyant que son fils Jean, 
par suite de son état de santé, ne pouvait continuer son industrie, 
s^associa David Vialôtes, et lui donna une de ses filles en mariage. 
A sa mort, survenue en 1674, il laissa son cachet à sa veuve et â 
son gendre, qui ajouta à son nom celui de son beau-père. Nous 
verrons plus tard que le succès de cette maison se perpétua pen- 
dant près d*un siècle et demi. 

D'après les lettres patentes de 1776, David Vialètes appartenait 

B 



lO LA FABRICATION DBS DRAPS 

é une famille noble, venue du Rouergue, où elle possédait un 
fief de ce nom. Plusieurs de ses membres s'étaient distinguas 
dans les guerres de Religion. 

Colbart, par ses lieutenants les intendants de prorince, favorisait 
alors d'une manidre tris efficace notre industrie nationale. 

Les Mémoires de ces intendants et la correspondance du miniitre 
montrait à chaque page quelle fut la sollicitude du successeur Je 
Hazarin pour tout ce qui touchait aux maaufaetures locales. 

LeS8 avril 1679, entre autres instructions, Colfaerl disait : ■ Sa 
Hajesiéveut que voos examîuiei l'état auquel sont le commerce et 
les mmufactures de la Généralité ; » et en 1680 : a II est bon que 
vous exercieE le peuple et à la culture des terres et aux manufac- 
tures. K La mâme année, en leur recommandant de visiter la Géné- 
ralité, il insiste sur les manufactures, les moyens de les augmen- 
ter et la possibilité d'en établir de nouvelles. 

Le ministre descend mËme jusqu'au détail : à propos des commis 
des maoafaciures, il déride qu'ils seront payés sur le sol exigé pour 
le métrage de chaque pièce d'étoffe, et demande avec instance de 
veiller à l'observalion des règlements sur les manufactures. En 
1683 il demande a Foucault son avis sur la suppression des offices 
d'auneurs, marqueurs et visiteurs de draps et étoffes de laine et de 
fil. Ces offices fureot maintenus. 

Son édit 'célèbre de 166i sur les douanes fut un pas immense 
dans la voie des réformes en matière de transit, et supprima bien 
(les barrières intérieures, funestes au commerce; mais Montauban 
et ses environs faisaient partie d'une province étrangère, c'esl-i- 
dire n'acceptant pas les bienfaits de cette mesure, et réfractaire 
aux idées libérales du ministre. 

Néanmoins, celui-ci étendait sa sollicitude â tous les travaux 
publics qui avaient pour but de faciliter les communications : routes, 
canaux, amélioration des rivières navigables; tel est le programme 
qu'il trace à ses auxiliaires. Près de nous, le canal de Languedoc 
promet une voie sAre et économique vers l'Océan et la Méditerra- 
née; U navigation du Tant, du Lot et de la Garonne, est rendue 
facile par des travaux importants. 

I.es plus grandes faveurs étaient accordées aux fabricants : sub- 



A MONTÀUBAN 14 

ventions, honneurs, exemptions, tout était mis en œuvre pour ex- 
citer leur émulation; ce système réussit, et Tintendant Sanson^dans 
un mémoire sur la Généralité do Montauban, écrivait à propos de 
nos manufactures en 1 698 : 

« On fabrique à Montauban et dans les bourgs des environs, des * 
étoffes appelées cordelats, cadis et raquères, qui sont assez belles et 
de. bon usé. Les ouvriers des environs portent ce qu'ils travaillent. 
Il y vient aussi du Nébouzan et du voisinage des Pyrénées quan- 
tités de cadis qui s'y perfectionnent par l'apprêt que l'on y donne... 
La plus grande partie de ces étoffes descendent à Bordeaux par 
Tarn et la Garonne, et se débitent aux foires qui s'y tiennent deux 
fois l'année. Partie se porte à Bayonne, et presque tout se débite 
aux étrangers. » 

La révocation de l'Edit de Nantes passe pour avoir causé un 
grand dommage a a commerce de Montauban, parce que l'im- 
mense majorité des fabricants, des cardeurs, tondeurs et autres 
ouvriers étaient calvinistes. Cependant, il est aujourd'hui certain 
que les émigrations pour cause de religion furent peu nombreuses 
parmi nos industriels, dont la plupart se résignèrent pour la forme 
à renoncer à la pratique de leur religion, sauf à se dédommager 
de cette contrainte dans les assemblées du Désert, et les autres 
laissèrent quelques parents à la tête de leur industrie et de leurs 
propriétés. 

Ce fait est en outre constaté par l'historien Capefigue, qui, dans 
son histoire de Louis XIV, parlant des suites de la Révocation, 
déclare, avec preuves à l'appui, que peu de marchands ou de 
manufacturiers s'exilèrent: « c'est une erreur de l'avoir écrit. » 

D'ailleurs un procès-verbal d'abjuration daté du 23 août 4 685, que 
nous possédons, montre que presque tous nos grands fabricants 
déclarèrent officiellement «< qu'il n'y avait point de cause légi- 
time pour demeurer séparés et qu*ils peuvent faire leur salut dans 
la communion romaine; et parmi les signataires nous remar- 
quons les protestants les plus connus. En compulsant la nomencla- 
ture des fabricants, dressée quelques années après, on retrouve 
absolument les mêmes noms. 

Au commencementdu XyiII« siècle, d'après VHistoire du 



^i LA FABRICATION DES DRAPS 

Querdj les manafactares montalbanaises s'étant perfectionnées , 
a nécessitèrent aussi de perfectionner i'art d*apprôter et de teindre 
les étoffes. Montauban devint bientôt, pour cet objet, l'entrepôt 
général de tout le Languedoc. Trop resserrés dans Tenceinte de 
'la ville, la plupart des commerçants fixèrent leur séjour dans 
le faubourg Villebourbon^ dont Theureuse situation sur les bords 
de la rivière farorisait les différentes opérations de leur négoce. » 

Nous trouvons dans le Mémoire historique iur la généralité de 
Montaubariy par Cathala-Coture, à Tarticle manufactures, des 
renseignements intéressants sur notre industrie locale vers 1710. 

Après avoir constaté que par suite des guerres, des mauvaises 
récoltes et de la gelée de 4709, le commerce subit une crise, 
l'auteur examine aussi la question des droits et péages successifs, 
fort préjudiciables aux fabricants : 

« Les habitants du Quercy, dit-il, avaient autrefois un privi- 
lège particulier de négocier dans toutes les terres et pays de l'obéis- 
sance de Sa Majesté, sans être assujettis à payer aucuns droits 
forains que lorsqu'ils enverraient leurs marchandises dans les 
pays étrangers, et ces droits mêmes ne se levaient que sur la fron- 
tière. 

« Cependant, ajoute notre auteur, on a créé a Âuvillars, et en 
d'autres endroits, des bureaux où on exige les droits sur toutes les 
marchandises à destination do Rayonne, tandis qu'on ne devrait 
les percevoir que sur celles à destination de l'Espagne. 

« Chose bixarre : ces droits, qui étaient ninrefois de 7 1. 16 s. 
3 d. par quintal de draperie et 5 I. 44 s. 7 d. pour les petites 
étoffes, ont été diminués de moitié pour les marchandises qui 
passent en Espagne, tandis qu'ils sont maintenus pour celles 
consommées dans le pays. » 

Les marchandises du Quercy passant dans l'Agenais payaient 
également les droits forains, parce que l'Agenais était pays étranger 
par rapport au Quercy. 

Pour donner une idée des entraves que les péages apportaient 
au commerce, nous dirons que de Bordeaux à Toulouse on en 
levait 44 : 46 de Toulouse é Âuvillars, 28 d'Àuvillars à Bordeaux. 
Ceux qui appartenaient au roi étaient perçus à Auvillars, les 



A MONTÀUBAN 43 

autres dans diverses seigneuries. Les marchands ne réeriminaient 
pas contre ceux du roi^ qu'ils considéraient comme un impôt, mais 
seulement contre ceux des seigneurs. 

I Un exemple montrera l'exagération de ces péages : une balle de 

draps pesant 3 quintaux, allant de Montauban à Bayonne, était 
grevée de 36 1. 7 s. 3 d. de droits. 

Cet état de choses amena la concurrence des Anglais, qui^ ne 
payant pas choz eux le droit de sortie, luttèrent avec avantage par 
leur bon marché contre nos industriels, écrasés par ces lourdes 
charges. Aussi, sur les justes doléances de nos compatriotes, le 
gouvernement diminua en 1716 les droits de sortie de France, 
sur les petites étoffes de laine fabriquées dans la Généralité de 
Montauban. 

Les archives communales possèdent plusieurs registres qui nous 
donnent des détails précis sur la phase la plus brillante de l'indus- 
trie des tissus de laine à Montauban ; cVst le livre des marchands, 
renfermant les diverses opérations de la chambre syndicale, dont 
le fonctionnement fut un grand bienfait. 

Le premier de ces registres commence vers 1709; on remar- 
que tout d'abord les noms des inspecteurs généraux chargés de 
la surveillance des manufactures de la Généralité, et celui des 
gardes jurés nommés par l'assemblée des commerçants. 

En même temps on y relève une liste de facturiers ou fabricants 
exerçant leur industrie en 1709. Ils sont au nombre de 835, 
chiffre qui pourrait être exagéré si nous ne l'avions vérifié avec le 
plus grand soin en copiant les noms de tous ceux qui figurent 
dans cette nomenclature. 

L'établissement des inspecteurs généraux par Colbert fut une 
mesure excellente, qui préserva pendant un siècle nos fabriques 
de la décadence, en s'opposant^ dans la mesure du possible, à la 
fraude des petits facturiers. Le premier, nommé le Poupet, s'était 
signalé par diverses mesures intelligentes. Il eut pour successeur, 
vers 1702, Lepage du Valle, qui s'acquitta de ses fonctions pen- 
dant 16 ans avec tant de dévouement, que l'intendant demanda 
pour lui en 1718 une gratification, et qu'en 1 7S0 la survivance 



14 LA FABRICATION DBS DRAPS 

de sa charge fut donnée à son fils par le duc de Villeroy^ alors 
ministre du commerce. 

Sur la réquisition de Lepage, en 17H, et en vertu de l'ordon- 
nance de.Colbert, « chaque manufacturier dut faire inscrire au livre 
des marchands ses noms et qualités de maîtres, faute de quoi ils 
ne pouvaient exercer la maîtrise sans la permission des juges du 
lieu ou sans faire apprentissage^ et afin que tous autres ne puissent 
s'immiscer dans ladite profession, sous peine de confiscation des 
étoffes et de 150 livres 9*âmende. » 

A la même époque, on constate des condamnations prononcées 
contre divers marchands qui avaient fabriqué des pièces trop 
étroites. Une amende de 3 livres fut appliquée à Jean Nègre, 
Antoine Boussarot et Michel Albrespy. Nous citons ce fait pour 
montrer combien la surveillance devait être sévère. 

En 1714, d'après le livre des marchands, la fabrication des cor- 
delats, cadis et rases était si importante que les foulons de la ville 
ne pouvaient suffire, et les fabricants étaient obligés de porter 
leurs étoffes aux foulons de la campagne. 

D'un autre coté les tondeurs et les presseurs, s'étant syndiqués 
ets'étant donné des statuts, les négociants se plaignirent à Tinten- 
dant et l'affaire fut portée au parlement de Toulouse. Dans leurs 
doléances ils disaient: « L'intelligence des tondeurs tend à la 
destruction de la manufacture, en ce que s'il y avait maîtrise 
desdits tondeurs et presseurs, il n'y aurait pas une si grande 
quantité d'ouvriers par la difficulté qu'il y a de parvenir à ladite 
maîtrise et que même ils augmenteraient le prix de l'apprêt des 
marchandises. » 

Un arrêt du Conseil d'État, en date de 1714, termina l'affaire 
des' tondeurs en les déboutant de leurs prétentions. 

Les produits de Montauban continuant à jouir « d'une grande 
réputation, non-seulement dans la province et dans le royaume, 
mais encore dans les Ëtats les plus reculés, » le corps des mar- 
chands décida d'obliger les facturiers « à faire plomber et enre- 
gistrer les chaînes couleur de la bête avant de les teindre. » On 
voit quelle était la préoccupation constante de nos marchands : 
éviter la fraude par tous les moyens possibles. 



A MONTAUIAN 45 

On n*y parvenait pas toujours, mais il ne se passait pas de 
saison où Ton n'opérât de saisies ; ta correspondance des inten- 
dants avec les ministres est remplie de ces exemples de sévérité. 

■ 

Les visites des gardes-jurés accompagnés de l'inspecteur étaient 
f presque toujours suivies de saisie et provoquaient souvent des scènes 

de désordre ; en 1743 un marchand pris en contravention fut puni 
de 8 jours de prison pour avoir menacé l'inspecteur du poing, et 
lui avoir porté son pied dans l'estomac, sans l'atteindre heureuse- 
ment, et de plus avoir voulu « lui crever le ventre avec une barre, 
ce qui ameuta 800 personnes. » Ledit marchand était accusé 
d'avoir tissé une pièce sur chaîne teinte; « tous les autres le 
faisant, il avait cru pouvoir le faire. » 

11 était donc défendu de faire travailler aucune étoffe sur chaînes 
teintes eu fil, sous peine de 400 livres d'amende; pareille peine 
était édictée contre les teinturiers. Le nombre des portées et fils 
nécessaires aux diverses qualités fut l'objet d'une réglementation 
en 4728: « Les cadis auront 34 ou 33 portées pourvu qu'elles 
pèsent plus de 46 livres, ou 34 pourvu, qu'elles pèsent plus de 
45 livres, le tout de 18 $inial8, pour en avoir en tout 86 cannes; 
les cordelats blancs auront 44 portées parce qu'ils doivent être 
de meilleure laine et filés plus uns, etc., etc. » 

Depuis cette époque, toutes les pièces devaient être apportées à 
l'hôtel de ville pour être marquées du sceau du contrôle et du 
contre-sceau des gardes jurés de l'année. Les empreintes de ces 
sceaux sont reproduites encore dans le registre, à chaque renou- 
vellement des dits gardes. 

Le 48 mars 4787 un arrêt du (Conseil d'Etat ordonna une 
assemblée à Montauban de tous les fabricants de la Généralité, 
dans laquelle seraient discutées les mesures propres à maintenir 
la prospérité du commerce et l'exécution rigoureuse des règle- 
ments. 

En même temps une excellente mesurç fut prise : l'enregistre- 
ment de tous les tisserands ou sergeurs de la ville : cette inscrip- 
tion faite avec beaucoup de régularité donne la mesure de l'impor- 
tance que la fabrication des draps avait acquise dans notre ville, 
puisqu'elle constate qu'il y avait 54 sergers à Villenouvelle» 29 à 



46 LA FAniGATlOll DIS DIAPS 

Sapiae, 64 à Lteapelle et aa Moaitîer, el 54 â VillebonrboD, ce 
qoi doDoe un total de 495 métie», auxquels il faut ajouter ceux 
des localités voisines du chef-lieu. 

L'assemblée géoérale des ourchaads eut lien eu 4728; il y vint 
des fabricants de Béalville, de Ncgrepeltsse et autres lieux. L'in- 
tendant Pajoty qoi y était représenté par Lepage, constata que les 
manubctorien se relâchaient quelque peu et n'observaient pas 
strictement les r^lements. Aussi quelques modifications y furent 
apportées, et un arrêt du Conseil édicta le 48 janvier 47S9 l'obli- 
gation pour tous les fabricants de tisser leur nom au bout de chaque 
pièce avec le lieu de fabrication. 

Quelques jours avant, un autre arrêt avait ordonné « que les 
draps, serges et autres étoffes devront être marqués dans les 
bureaux des villes où ils passeront, sll n'y a pas de contrôle dans 
les lieux où ils sont envoyés. » 

Toutes ces prescriptions, tous ces règlements prouvent combien 
le gouvernement avait à cœur la prospérité de nos fabriques, qui 
ne pouvaient faire concurrence aux produits étrangers que par 
la bonté de la marchandise et la garantie offerte à l'acheteur. 

Tout est prévu par la sagesse des intendants et des inspecteurs, 
dont l'activité et la compétence sont vraiment admirables : rien ne 
leur échappe, ils veillent à tout ; il n'est pas de sage mesure qu'ils 
n'adoptent; et s'ils ne peuvent arrêter la fraude, il est certain — 
les registres des marchands en font foi — que leur surveillance 
ne se ralentit pas. Les saisies se continuent journellement et les 
amendes pieu vent sur les délinquants. 

Celte sollicitude descend aux plus petits détails: le 48 janvier 
1729 un arrêt ordonne que les foulonneurs et tondeurs ne pour- 
ront se servir que de chardons, à l'exclusion de toutes cardes en 
fer ou autres machines. Dans une nouvelle assemblée tenue le 
SI janvier 1730, Lepage fait décider qu'il sera ordonné aux gardes 
jurés de faire exactement la visite des laines tous les jours de 
marché, et journellement dans les magasins où elles se trouvent 
exposées. Défense de les vendre sans qu'elles aient été visitées. 

Une nouvelle fraude, qui devait prendre plus tard l'importance 
d'une industrie et décrier les fabriques du Midi, commençait à 



y 



A MONTAUBAN 47 

être pratiquée assez communément à Montauban. Elle consistait à 
faire servir les bouts de piôce, bâchés et filés de nouveau pour faire 
la trame : en somme un peu comme l'effilochage d'aujourd'hui. 
Grande émotion à cette découverte, saisie de pièces trouvées sé- 
chant sur le Pont, amendes de 50 livres afin d'arrêter cette fraude 
qui pouvait ruiner le commerce. 

En 4684y les sergers ou tisserands avaient dressé des statuts 
qui avaient été approuvés par le juge de police, mais qui furent 
cassés, sur l'opposition des fabricants ; revenant à la charge en 
\ 727, les tisserands demandèrent de nouveau des statuts, mais un 
arrêt du 6 juillet de 4728 leur défendit de présenter de nouveau 
a pareille requête, parce qu'ils ont négligé leur profession et qu'ils 
se jouent de la surveillance, amenant ainsi des amendes et des 
saisies, etc. » 

Une grande émotion fut causée par la demande faite par les 
consuls aux fabricants, de donner la liste de tous ceux de 1 6 à 40 
ans de leur profession^ pour tirer au sort ; plusieurs assemblées 
eurent lieu à ce sujet, et cette affaire se termina par une tran- 
saction. La Chambre obtint de fournir quatre miliciens voloQtaires 
qui seraient équipés aux frais de tous. 

Dans l'assemblée générale du 14 avril 1734, Lepage fit observer 
que depuis plusieurs années un grand nombre de sergers fabri- 
quaient des mignonettes, grisottes, étamines, burats, férandines et 
autres étoffes, sans être astreints à la marque ; à l'unanimité 
l'assemblée demanda que cette industrie fût, comme celle des draps, 
régie par des règlements. 

L'intendant Lescalopier soumit en 4744 à l'appréciation de 
l'assemblée des marchands de notre ville, un projet « de règlement 
des cordelats, cadis et rases qui se fabriquent à Montauban et 
dans la Généralité. » Les marchands présentèrent leurs observations 
sur chacun des 40 articles de ce règlement. Il nous parait curieux 
d'en indiquer les principales prescriptions : Réglementation de la 
largeur des pièces et de la longueur de la chaîne (art. 1 à 8.) Les 
laines devront venir d'Espagne, de la plaine de Grenade ou de 
Verdun sur Garonne ; défense d'employer des laines du Levant, 
pelades ou de boucherie, agnelaises ou autres du même genre 

G 



18 LA FAHICtTIOII DIS PRATS 

(art. 9). Leê cidis mtodI bbriquës avec les eseots et le gros- 
ncr provHunt du triage des boones laiaes (art. 10). Prohibilioa, 
et eooStcation et brûlemeni proooacés contre les laîne* do Levaat 
(art. 11). Défense da teindre les dûmes en 61 (art. 12). Les 
fileuses sont tenues de venir ehercbra* et rapporter lenr travail 
(art. 13). Prescriptinu sur les décUratioss d'envoi des laines 
(art. 1i-15-16}. Ponetiont des gardes jurés chargés de recevoir 
des ballots de laine (arL 17-18). Les tisserands et les fabricanti de 
peignes sont tenus de se cMiformer aux ordonnances ponr le nom- 
bre des Bis, etc. (art. 19-20). Distinctiwis entre les diverses 
étoffes au moyen descbeb de pièce de diffâ^ntes conlenrs (art: SI). 
Le nom el le lieu de fabrication doivent Mre brodés an bout de 
ebaque pièce [art. 33) . Pénalités contre les contrevenants (art. 23) . 
Règlement pour les foulonneurs (art. 24 28), les tondeurs (an. S8- 
29-31-33), le droit de visite (art. 30-35). Paiement comptant des 
salaires des ouvriers (art. 3(). Inscription des fabricants (art. 37). 
Tenue du registre des gardes (art. 38). Sureau des marchands 
(art. tO). Election des gardes-jurés (art. i2). Proc&i- verbaux 
(art. 13). Compétence des juges des manufaclnres (art. iS). 

Le règlement ci-dessus analysé fui discuté dans l'assemblée da 
10 novembre 174i, eo présence des consuls Mène, Bozières, Rigal, 
Marqneyret, des juges de police, et du sieur Lepage, inspecteur; 
des marchands en gros el en détail, fabricaats, servers, tisserands, 
tondeurs, apprêleurs, foulonniers, teinturiers et savonniers, tant 
de la ville que des environs, pour être envoyé au Coatrdlour géné- 
ral et homologué par le Conseil d'Ëtat. Quelques modifications de 
délai! furent adoptées. 

Dans une autre assemblée générale, tenue le 2i janvier de l'an • 
née 1745, Lepage fil observer que l'on ne saurait trop surveiller 
le foulage des éloffes; que des plaintes lui parvenant, il proposait 
de prendre des mesures très sévères loucbanl cette opération. Il est 
dît que les foulonniers ne devront en aucun cas s'éloigner ni jour 
ni nuit de l'auge conienanl les pièces. 

H février, les rëglemenls commencèrent à ilre tnis à exécu- 
it une coodamaalion à SO livres d'amende fut prononce 
un délinquanl. 



A MONTAUBAN 19 

Lepage mourut à cette époque ; il eut pour remplaçant Barbot, 
qui fut installé le 35 mai 1745. 

Le règlement général fut promulgué le M mars par ordonnance 
de Lescalopier, après arrêt du Conseil d'Ëtat. Il y eut peu de chan- 
gements apportés au projet élaboré par les marchands. 

Conformément au règlement général, le 1^'avril 1745, un registre 
fut ouvert pour l'inscription des manufacturiers en drap de la ville 
deMontauban. Nous avons copié en entier cette liste, qui comprend 
les inscriptions jusqu'en 4776. En 4745 il y a 470 noms de fabri- 
cants qui déclarent entretenir un grand nombre de métiers dans 
la viHe et 90 dans les communautés voisines. Les inscriptions 
faites dans les années suivantes se répartissent ainsi : 5 en 4746 ; 
3en 4147; 2 en 4748; 44 en 4749; 35 en 4750; 43 en 4754; 
Sen 4753; 5 en 4753; 49 en 4754 ; 5 en 4755; 17 en 4756; 
40 en 4757 ; 45 en 4758 ; 5 en 4759 ; 8 en 1760 ; 7 en 4763 ; 
8 en 4763 ; 4 en 4764 ; 6 en 4766 ; 3 en 4769 ; 6 en 4770 ; 3 
en 4774 ; 4 en 4773 ; 3 en 4774 ; 6 en 4775 ; 4 en 4776 ; au 
total, 370 fabricants inscrits durant une période de 30 ans. 

Il serait trop long de reproduire cette liste, mais nous pouvons 
dire qu'on y retrouve les noms des principales familles de notre 
ville, dont les honorables traditions de loyauté et de probité sont 
restées légendaires dans la population montalbanaise. 

Vers la Sn de 4745, le corps des fabricants dut se cotiser 
de nouveau pour pourvoir au paiement et à l'entretien de 
trois miliciens remplaçant les fils des industriels désignés pour 
ne faire partie 

Comme on le voit» l'activité des intendants et de leurs auxiliaires 
ne se démentait pas ; chaque page des registres fait mention de 
quelque nouvelle mesure prise dans l'intérêt des manufactures, et 
nous arrivons ainsi jusqu'à l'année 4746, époque à laquelle de 
grandes faveurs furent accordées â nos fabricants les plus impor- 
tants. 

Dans la séance du 29 mars 4746, François Dubu-Saplonière, 
chargé de remplacer momentanément Barbot, se présenta au corps 
des marchands et leur annonça que Sa Majesté venait d'ociroyer 
aux frères Jacques et Etienne Yialètes d'Aignan, des lettres paten- 



20 LA FABRICATION DES DRAPS 

tes d'érection de leur maison en manufacture royale, et requit 
Tenregistrement des dites lettres, dont voici les principales dispo- 
sitions : 

Dans la requête il est dit : que les sieurs Vialôtes d'Aignan et 
leurs ancôtres se sont successivement occupés du commerce et de 
la fabrique; dès 1627, David Vialètes (1) imagina les Ctidis^ 
espèce d'étoffe dont la consommation est si considérable, que sa 
fabrication et celle des bas au tricot donne de l'occupation â plus 
de vingt mille personnes de l'un et de l'autre sexe; que, de tous 
temps, ces fabricants se sont toujours distingués par leur perfec- 
tion dans la fabrique, et que leurs cadis ont toujours été rechefchés 
par préférence .â ceux des autres; qu'ils se sont constamment 
opposés aux fraudes et aux abus; que Jacques Vialètes l'aîné, 
après avoir été garde-juré, est resté six ans juge des manufactures ; 
qu'il a fait à ses frais, avec l'inspecteur Chrétien, des tournées dans 
la Généralité pour préparer la confection des nouveaux règle- 
ments ; qu'en considération de ces services, la noblesse doit leur 
être accordée pour eux et leurs descendants, etc., etc. 

« Â ces causes, le roi, après avis du Conseil d'Etat confère le titre 
de manufacture royale à la fabrique des frères Vialètes d'Aignan, 
avec prérogatives et exemptions, remise de moitié sur les droits 
d'entrée de leurs laines ; exemption des charges publiques pour 
eux, leurs successeurs, leurs trois contre-maitres, deux de leurs 
commis, leur teinturier, leur foulonneur, et deux de leurs prin- 
cipaux tisserands ; enfin, ils sont autorises ù marquer leurs pièces 
d'un plomb portant d'un côté leur nom, de l'autre les armes du 
roi avec les mots : Manufacture royale de cadis ; à mettre la 
même inscription sur un tableau placé à la porte de leur manu- 
facture et à y établir un portier à la livrée de Sa Majesté. » 

Ces faveurs extraordinaires étaient amplement justifiées, non- 
seulement par la grande renommée de la fabrique Vialètes, mais 
surtout par l'infatigable activité de son chef, qui, dans le registre 



(1) On a vu précédemment que c'était David d'Aignan qui avait inventé les 
cadis qui portaient son nom, el non David Vialètes, qui n'était pas encore en 
1627 l'associé de d'Aignan, et était d'ailleurs fort jeune à cette époque. 



À montàuban. 24 

des marchands, se montre constamment à l'œuvre dans l'intérêt 
du commerce. 

Pendant les années 1746 à 1749 les saisies les amendes pleu- 
yent sur les délinquants, auxquels l'inspecteur Barbet faisait une 
chasse acharnée. 

Le 4 4 mars 4748^ dans l'assemblée générale. Barbet constate 
l'introduction clandestine, chez les tondeurs et apprêteurà, « de 
cardes de fer qui décordent et dégradent entièrement les étoffes, 
et les rendent trôs-minces et d'un mauvais usage, et cela malgré 
les réglementa. » 11 propose de prendre en location un magasin où 
les apprêteurs seront tenus de venir faire leur travail sous la 
surveillance d'un commis. 

Les marchands s'opposèrent à cette mesure, vu leur peu de 
ressources, mais ils proposèrent un autre expédient, consistant à 
faire prêter serment à tous les tondeurs, apprêteurs et garnisseurs 
de ne jamais se servir de cardes en fer. 

La confiscation de deux pièces do cordelat, appartenant à Serres 
cadet, souleva une tempête et une discussion des plus serrées sur 
l'observation du nombre des fils, et il ne fallut rien moins qu'un 
arrêt du Conseil d'Etat pour donner raison à l'Intendant contre les 
juges des manufactures, qui avaient conclu en faveur de Serres. 

Barbet fut remplacé momentanément en 4 748 par Nicolas Bar- 
bot du Vieux-Moulin, inspecteur des manufactures de la ville, et 
plusieurs fois par Etienne Vialôtes dans.ses importantes fonctions. 

Le S janvier 4749, le roi ordonna par lettres patentes que les 
ouvriers obtinssent un congé écrit de leurs maîtres avant de les 
quitter, et défendit aux fabricants d'en prendre qui n'aient pas 
ledit congé. C'était là une mesure excellente, qui paraît à des abus 
sérieux, dont les marchands se plaignaient depuis longtemps. 

Du reste, pendant les cinq années qui suivirent, c'est-à-dire 
jusqu'en 4754, le registre e^i rempli de contestations, procès, 
saisies, plaintes portées devant la Chambre, qui jugeait les délin- 
quants et réglait ces diverses affaires avec la plus grande équité. 
On y remarque en outre l'apposition régulière des empreintes 
du cachet des nouveaux gardes jurés à leur entrée en exercice. 

Un nouveau registre comprend les années 4754 à 4785. C'est 



22 Lk fàJÊUCknom ms mlips 

looîoan BarfaoUpii t le titre dfiBspedeor delà Génénlité. L'ena- 
lyse de ce docosent eootmoe à nous donner la phjsioiioiDÎe eiacte 
de le vie menwlaeinriére de noire cîié. 

Le tnitement des inspeeteon el eontrMeon des ■uttubetores 
était à b ehaige des eommercants; en 1759 le eorporation, poor 
faire {aee àees dépenses, datempranter me somme de 1,600 livras, 
ec ce Ait le reoerenr des taxas de la eommnnauté, HeqiaiUer 
Dnchesneao, qoi en fit Pavanée. 

Le S4 août 4759, le naaire et les eonsob eonv«inent extnor- 
dinaireoMnt le eonseîl des bhrieants ponr leor iaire part de rani- 
Tée da maréchal doc de Richelieo, nommé gonvernenr de la Pro- 
vince, qoi devait bire prochainement son entrée dans b vilb de 
Montanban. Le consôl dâibéra aossitôt qne le corps des mana- 
bctorios se rendrait ao-devant da duc et eontriboerait anx dépen- 
ses (fhabits d'unibrmesqiii seraient bits à cette occasion. En effet 
le 4 septembre, le maréchal arriva à Montaohan, el parmi les corps 
consthnés qoi allèrent le recevoir, on remarqua un groupe de 
bhrieants. La dépeuse occasionnée par cène i%te s'éleva à 800 
livres, qui fùrait l'objet d'un emprunt. 

Le 27 septembre de la même année, le manubcturier Jeanbon, 
père du célèbre convenûonnel, fut accusé d'un acte c unique et 
sans exemple, dont la singularité mérite la réprobation. > Son 
crime consistait dans l'achat de laines toutes filées, venant du côté 
de^Saint-Affirique et autres lieux du Rouergue. Cette affaire causa 
un émoi oonâdérable dans le corps des marchands, à tel point 
qu'une assemblée générale à laquelle sa conduite fut dénoncée, 
vola par 65 voix contre 2, un blâme et une condamnation à une 
amende de 600 livras avec saisie. 

Jeanbon se défendit vivement, mais il dut enfin s'en remettre à 
rintendant pour trancher le différend. 

A la suite de cette affaire, l'absence peut-être calculée de cer- 
tains marchands aux assemblées du commerce ayant été signa- 
lée, le conseil obtint de l'intendant Lacoré une ordonnance 
d'après laquelle tous les bhrieants inscrits au registre étaient 
tttius d'être exacts aux réunions sous peine de 50 livres d'amende, 
et autorisant b moitié des membres à prendre toutes délibérations 



 MONTÀUBAN 23 

aux périls et risques des absents. Cette ordonnance est datée du 
23 août 1760. 

Le 84 septembre suivant, notification fut faite aux intéressés 
de la délibération du 29 juillet de la même année, portant que nul 
ne pourra faire venir et employer à aucun usage des fils étrangers 
pour la trame des étoffes, sous peine de 500 livres d'amende et de 
la confiscation des pièces saisies. La récidive était également punie 
de 500 livres d'amende. 

Nous trouvons dans un mémoire manuscrit, qui date de 4764, 
de curieux renseignements statistiques sur les manufactures et le 
commerce des étoffes dans la Généralité de Montauban à cette 
époque. 

Ce document, destiné sans aucun doute à l'Intendant, mérite 
d'être analysé. Après avoir rappelé d'une façon assez exacte la 
fondation de la manufacture royale des frères Vialètes, il signale 
aussi celle de Joseph Serres, « qui a fait les mêmes efforts que 
Vialètes pour conserver et augmenter la réputation des cadis de 
son nom et pour obtenir les mêmes faveurs » que son parent. 

Nous voyons, en effet, dans l'il/manacA pour la Généralité que la 
fabrique de Serres de Prat jouissait du titre de manufacture royale 
et du grand plomb aux armes de France. Nous n'avons trouvé 
aucune trace de lettres patentes concédant ce privilège. 

Revenant au Mémoire signalé tout à l'heure, nous y relevons 
le nombre des fabricants et ouvriers : « Indépendamment de ces 
deux principales- fabriques, Ton compte à Montauban 160 maîtres 
fabricants qui occupent, tant dans la ville que dans les environs 
pour toutes les opérations de la fabrication des cadis 5,500 à 6,000 
ouvriers. La largeur de cette étoffe^ est de demi aune et le prix 
de l'aune de 3 1. 10 s. à 4 1. 10 s. En blanc la longueur des 
pièces est de 35 aunes. 

« Il se fait, années communes, 8 à 9^000 pièces de cadis, dont 
la valeur totale est de 1,190,000 livres. 

« Les laines qui s*emploient dans les cadis sont en partie tirées 
de la province et des environs de Montauban, partie de la Navarre, 
de l'Âragon et autres provinces de l'Espagne. 

« La proportion des laines du pays ou de Navarre et des laines 



24 LA FABRICATION DES DRAPS 

d'Espagne employées, est de 367,500 livres pour les premières et 
de 487,500 livres pour les autres. 

« Le prix de la main-d'œuvre et de la matière première s*élève à 
920,000 livres : parUnt, le bénéfice est J'environ de 270,000 livres. 
Ces étoffes sont employées surtout par les artisans et les commu- 
nautés religieuses. 

« Fabrique de droguets en laine et urges façon de Rome. — Il 
s'est établi, depuis 2 ou 3 ans, une fabrique de droguets à l'imi - 
tation de ceux d'Angleterre, ainsi que des étoffes croisées tirées à 
long poil appelées bergobssums(l) et serges façon de Rome; les dr o> 
guets sont de petits draps communs d'une demi-aune moins 4|24 
de large faits avec des laines du pays, du prix de 2 1. 6 s. 8 d. à 2 L 
40 s. Les bergobssums sont des étoffes drapées, faites avec les 
laines les plus communes du pays, et filées très gros, tant en chaîne 
qu'en trame, bien foulées et tirées à poil des deux côtés. La lar- 
geur est d'une demi aune, et le prix de 50 à 55 fr. l'aune. Les 
serges façon de Rome sont une imitation des calemandres non 
calandrées, de la largeur d'une demi-aune, de 3 1. 5 s. 3 1. 6 s. 

a La consommation de ces différentes étoffes se fait dans le 
Languedoc, la Provence, le Lyonnais, l'Auvergne, le Limousin et 
oute la Guyenne. 

« La fabrique de ces trois espèces d'étoffes se porte annuellement 
à 300 pièces, estimées en total à 33,000 livres. 

< Palrique de bayettes, — En 1762, il s'est fait un nouvel 
établissement de bayettes façon d'Angleterre pour la consomma- 
tion d'Espagne. Les bayettes sont des étoffes non croisées fabri- 
quées avec des laines de Navarre pour les chaînes et des laines du 
pays ou du Levant pour les trames. Ces étoffes sont de la largeur 
d'une aune 1 [4 et d'une aune 4 [2^; il s'en fait de trois qualités : 
des communes, des fortes et larges et des superfines. Cette fabrique 
occupait, en 1764, tant à la filature qu'aux autres opérations, 4 20 
ouvriers. 11 a été fabriqué, dans le cours de la présente année 
1764, 75 pièces de la longueur de 30 à 34 aunes et du prix de 

(1) De Berg-op-Zoom, ville de Brabant, célèbre par les sièges qa^elle soatin 
et que les Français venaient de prendre en 1747. 



▲ MONTAUBAN. 25 

4S0 à 140 I. la pièce, ce qui forme un total de ci.. . . 9,750 1. 

« Petites étoffes, — Les burats qui se fabriqucDl à Montauban 
sont une espèce d'étamine commune de laine du pays, de \\% aune 
moins 1[â4e de large, sur 40 aunes de long, du prix commun de 
2 1. 10 s. à 1 1. 15 s. Cette fabrique occupe 25 à 30 métiers et 
environ 200 ouvriers. Il s'en fait, années communes, 350 pièces 
estimées en total, ci. 22,400 1. 

« Cette étoffe est uniquement destinée pour Tusage des parti- 
culiers de la ville et des environs, et sert à l'habillement des enfants 
et des artisans. D 

Dans la récapitulation du produit des fabriques d'étoffes de 
laine de Montauban qui termine ce Mémoire, nous relevons les 
chiffres suivants : 

Etoffes de laine 1,321,930 livres. 

Serges et petites étoffes 540,000 livres. 

Draps ordinaires et fins 155,600 livres. 



Total 2,017,530 livres. 

On voit combien cette industrie était prospère, et quelles res- 
sources elle procurait à notre population ouvrière. 

Reprenons maintenant l'analyse du registre des marchands, 
qui continue à nous tenir jour par jour au courant des vicissi- 
tudes traversées par cette industrie. 

Le 5 juin 1765, le corps des marchands adresse à l'Intendand 
une supplique tendant à forcer les propriétaires des foulons et 
moulins d'Albarèdes, Sapiac et Sapiacou à réparer et à mettre en 
bon état les moulins à foulon et à les entretenir, sous peine et 
demeurer responsables des dommages et intérêts en faveur des 
fabricants. 

Si cependant, ajoutent les pétitionnaires, les propriétaires trou- 
vaient que ces réparations étaient trop onéreuses, le corps des 
fabricants les prendrait à son compte avec l'autorisation du con- 
trôleur général. 

Cette requête, si juste, n'obtient cependant pas de solution: on 
verra plus tard la question posée de nouveau d'une EarçoB plus 
iœpérative encore. 

D 



26 UL FABUCàTIOH lOS DIÀPS 

Noos troavoDS en 4769 une rdqaêie adressée à FînteDdant par 
Vialètes et Serres, qu'il nous paraît carieox de reprodaiie dans sa 
forme originale. 

Monseigneur, » 
« Supplient humblement les sieurs Vialèles d'Aignan et com- 
pagnie et le sieur Joseph Serres de Prat, disant que comme ils 
scmt à la tète de deux premières fabriques de cette ville, ils fabri- 
quent ordinairement une seconde qualité de cadis, des débris de 
leur manufacture» qui équivaut é ce qui se fabrique de mieux ici; 
que jusques à présent ils l'ont fait sous le nom de leurs contre- 
maîtres^ qui sont toujours fabriquants mais que les inconvénients 
qui en résultent étant de conséquence pour eux, tels que de se 
voir exposés à changer de nom ces étoffes toutes les fois qu'un 
commis les quitte, comme aussi de se voir enlever par leur contre- 
maître cette branche de commerce pour profiter de la réputation 
qu'ils lui ont acquise. Les suppliants, Monseigneur, osent espérer 
que pour obvier à ces inconvénients, vous leur accorderez la per- 
mission de se servir, pour cette qualité d'étofTes. d'un nom choisi 
par eux^ qu'ils feraient enregistrer et dont ils répondraient; ils ne 
cesseront les uns et les autres leurs vœux pour la prospérité de 
votre Grandeur. » 

Une requête semblable fut adressée à l'intendant par d'autres 
commerçants. Tous obtinrent satinfaction. Le moyen employé fut 
bien simple : il consista à prendre, comme désignation de la 
seconde qualité, l'anagramme du nom des fabricants. 
Ainsi Vialètes, prit Tesavile ; 
Serres-Prat, Pressartre ; 
Debia frères, Faberderies ; 
Godoffre frères, Erfodog-Sererf, etc., etc. 
L'inondation terrible de 4766 avait causé des dégâts considéra- 
bles aux moulins de Montauban. Les foulons, qui n'avaient pas été 
réparés, furent détruits, aussi en 4770, le 44 avril, les doléances 
du corps des marchands à ce sujet deviennent de plus en plus 
press an tes. 

« Les gardes'jurés n'ayant rien pu obtenir jusqu'à ce jour, les 
requérants représentent à l'assemblée que lors de l'inondation du 



A MONTAUBAN. 27 

S6 novembre 4766, ledit moulin de Sapiac avait été en partie 
détruit par les eaux, et que les propriétaires avaient loué ledit 
foulon à un fermier pour le prii de 24 livres par mois^ à la charge 
par ledit fermier de s'en servir comme bon lui semblerait, en fai- 
sant les petites réparations qu'ils jugeraient à propos. L'abandon de 
ce foulon était la vraie cause de sa perte totale et qui d'ailleurs 
vient d'être emporté par l'inondation du 5 avril courant. 

(f Que dans cette circonstance, cette perte leur avait paru exiger 
une attention particulière du corps des fabricants, soit pour préve- 
nir l'interruption d'une partie de leurs opérations, dont le foulage 
fait un des principaux objets, soit pour prendre tous les moyens 
de faire rétablir ce foulon; que les fabricants étaient d'autant 
plus intéressés à demander de nouveau le rétablissement dudit 
foulon, aux frais et dépens desdits propriétaires, ou la concession 
du local en faveur de la fabrique, qui pourrait se charger de la 
construction à son profit. 

c Que le nombre des auges des trois moulins qui subsistent ne 
suffisaient pas pour les travaux annuels ; qu'ils observent à l'assem- 
blée que depuis la destruction des autres foulons^ qui étaient dans 
les environs et hors de cette juridiction, savoir : à Ardus, Saint- 
Pierre et au Clos, tous les fabricants qui faisaient fouler leurs 
étoffes dans ces moulins à foulon avaient été forcés d'occuper plu- 
sieurs auges de ceux de Montauban, ce qui avait occasionné des 
retards très-considérables et préjudiciables aux fabricants en par- 
ticulier et à la fabrique en général. » 

Après ces considérants, l'assemblée conclut au besoin indispen- 
sable de ce foulon, donna plein pouvoir aux gardes-jurés, et déclara 
qu'elle acceptait les réparations à faire si les propriétaires leur 
laissaient le local. 

Malgré ces concessions, l'affaire fut encore longtemps pendante. 
Les moulins étaient comme aujourd'hui encore la propriété d'une 
association de parsonniers ou actionnaires ; les administrateurs de 
cette société se refusaient à toutes les améliorations dispendieuses 
qui pouvaient réduire leur revenu. Aussi voyons-nous, le 44 août 
4770, une nouvellle délibération du corps de fabrique qui décide 



88 Lk FAmcAnoir hbs deaps 

de forcer les propriéUires des moolins à réparer le foulon de bois 
sitaé an moalio de Sapiae. 

Le 26 novembre 4776, Vialèies d*Aignan et C^ obtinrent de 
neoTelles lettres patentes confirmant et prorogeant lenr privilège 
de mannfactnre royale. Ce document inséré dans le livre des 
mardiands, reproduit, à peu de choses prés, la teneur de celui de 
4746. 

Dans leur supplique, ces négociants font ressortir le pr^udice 
que leur causait l'application d'une ordonnance du U décembre 
4762, portant que tous les privilèges en fait de commerce ne 
peuvent avoir qu'une durée de 45 années; ils se prévalent de leur 
dévouement à la prospérité des manufactures locales, de l'établis- 
sement du Tirage royal de la saie, qu'ils ont fondé, et dont le 
produit s'élève à plus de 800,000 livres : qu'au plus fort de la 
guerre ils ont fait construire un bâtiment considérable, voûté en 
grande partie, qui leur a coûté plus de 4 95,000 livres, pour y loger 
tous leurs ouvriers, aGn d'avoir sons les yeux toutes les différentes 
opérations de leur fabrication ; qu'au milieu de la détresse causée 
pr les guerres et de la diseUe, ils ont redoublé les travaux de 
leur manufacture ; qulls ont fait des pertes considérables dans la 
guerre du Canada. 

Ils ajouteot qu'ils descendent d'une famille du Rouerguc où existe 
«mcore un château auquel ils donnent leur nom, et où les armes 
de leur cachet sont sur la porte d'entrée, leur branche s'éiant reti- 
rée à Montauban vers Pan \ 550 ; ils y servaient leur roi comme 
ravalent fait ci-devant leurs ancêtres jusqu'en 46Î7, que la perte 
de leur fortune les obligea d'entrer dans le commerce où leur amour 
pour la pauîe leur fournit bientôt l'occa^on de se distinguer. 

Le privilège fut confirmé, et la fobrique Vialètes continua à jouir 
des foveors accordées par Tarrét de 1746. 

Malheureusement la fraude se continuait sur une large échelle 
en dépit des ordonnances et malgré Usurvoilbnce des gardes-jurés; 
d'après les considérants d'cne ordonnance de fint^odant «b date du 
20 novembre 4778, il est constante que \es peù^ fabricants met- 
taient sans scrupule sur leurs étoffes Unom des fabricants en répu- 
Ution ou celui de leurs femmes, qxii se trowa^t souvent être le même 






A IIONTÀUBÀN. 29 

que celui de ees derniers ; d'autres se servaient d*anagrammes, 
ou de noms supposés. 

L'année suivante, leâ3 mars 4779^ unenouvelle ordonnance fut 
encore rendue à ce sujet : toutes les étoffes de la première et de 
la seconde qualité devaient être marquées du nom propre du véri- 
table fabricant, sans qu'il fût permis d'ajouter d'autres mots à la 
suite de leur nom, que celui du père ou fîls, frère, etc., et un 
délais de trois mois fut accordé pour écouler les étoffes non régle- 
mentaires. 

A ce moment, il se produisit un fait considérable qui apporta 
un grand changement dans l'industrie montalbanaise. Le 5 
mai 1779 parurent les lettres patentes du roi concernant 
les manufactures, et inaugurant un régime de liberté dont nous 
allons bientôt constater les effets. Le \^^ article de ces lettres 
patentes porte que désormais il sera loisible a tous les fabricants et 
manufacturiers ou de suivre dans la fabrication de leurs étoffes 
telles dimensions ou combinaisons (|u'lls jugeront à propos d'adop- 
ter, ou de s'assujettir à l'exécution des règlements. 

Cet édit fut unanimement approuvé par les fabricants, désireux 
de s'affranchir des règles imposées par les différents règlements. 
En appréciant ainsi cette mesure, ils no considéraient, à notre avis, 
qu'un côté de la question. En effet le nouveau régime avait l'avan- 
tage de laisser toute liberté à Tinitiative des fabricants et à leur 
désir de suivre le progrès. Do plus, il affranchissait les fabricants 
du droit de visite, qui leur avait toujours été désagréable. 

Mais en revanche cette liberté, qui eût été peut-être avanta- 
geuse s'il n'y avait eu que de grands établissements, devint la 
cause première de la décadence de nos fabriques de draperie, car 
l'étranger, en achetant nos produits avec la marque de Tadminis- 
tration, était certain de la qualité de la marchandise et de son uni- 
formité. C'est du reste celte garantie qui avait fait le succès de nos 
draps du Languedoc dans le Levant. 

Cédant à ces considérations, l'administration, craignant que 
les négociants, habitués aux prix des draps fabriqués d'après les 
règlements, retirassent leur confiance â nos fabriques françaises et 
se fournissent à l'étranger, prit le moyen terme de maintenir la 



30 LA FABRICATION DES DRAPS 

marque facultative pour tous ceux qui prétendraient avoir suivi 
les règlements dans leur fabrication, et qui voudraient s'assujettir 
aux visites et à la marque. 

Les résultats de l'édit de mai 4779 ont été diversement appré- 
ciés : les uns^ se plaçant au point de vue de la liberté absolue du 
commerce, ont loué sans réserve la mesure prise par le roi 
Louis XVI, mais les économistes qui approuvent la mesure au 
point de vue des principes, ne sont pas très- convaincus de son 
efficacité. Necker, dans son célèbre compte rendu de 1781 , effleure 
la question. Nous citons le passage dans lequel il essaie de justifier 
cette mesure ; on verra que nos appréciations personnolles, basées 
sur le résultat constaté plus tard, présentent une grande analogie 
avec l'opinion du grand ministre, obligé de reconnaître que la 
nouvelle législation des manufactures n'est qu*un pis aller et non 
un remède. 

Après avoir signalé les entraves que les règlements apportaient 
à la liberté de l'industrie, il dit : 

« D'un autre côté, pour aplanir tous ces obstacles, anéantir abso- 
lument et par une loi positive toute espèce do règlements, de 
marques ou d'examen, c'était ôter aux consommateurs étrangers 
et nationaux ia base de leur confiance ; enfin c'tUait aller contre 
les idées des vieux fabricant!^, qui avaient vu leurs fabriques et 
celles de leurs pères prospérer à l'ombre de ces lois d'ordre. 

« C'est au milieu d'une pareille confusion, et de ce combat de 
principes, que je me suis occupé avec les Intendants du commerce 
d'un moyen d'aplanir ces difficultés et de concilier cas différentes 
vues d'administration. On croit y être parvenu par les lettres 
patentes do mai 1779, dont toutes les dispositions tendent a ménager 
l'esprit inventif des manufactures, son essor et sa liberté, sans 
priver les étoffes qui seraient fabriquées d'après les anciennes 
règles du sceau qui l'atteste. » 

Necker parlait ainsi en 1781, un an après l'inauguration du 
système de liberté. Et dans cette même année, nous consta- 
tons qu'un grand nombre de mesures furent prises par Tantorité 
à l'égard de la fabrication des étoffes : rétablissement du bureau 
de visite; nouveaux règlements pour la fabrication des étoffes 



À montàuban. 34 

(lettres patentes du 25 février 4781) ; dëtermioation des fonctions 
et du droit des juges des manufactures (arrêt du 28 juin 1781) ; 
détermination des fonctions et du droit des juges des manufac- 
furei (arrêt du 28 juin 1781); comptabilité des gardes-jurés 
(arrêt du 27 septembre 1781;; arrêt ordonnant Texécution des 
règlements relatifs à la circulation des étoffes (4 novembre 1781); 
arrêt ordonnant la contre-marque des plombs de teinture, etc., etc. 

Celte multiplicité de prescriptions, qui n'atteignaient que ceux 
des fabricants qui voulaient s*y assujettir, tandis que les autres 
agissaient à leur guise^ devait produire le désordre et amener la 
déconsidération de la marque. En effet du moment où le marchand 
pouvait trouver à un prix moins élevé des marchandises ne por- 
tant pas la marque ofQcielle du bureau de Montàuban, mais celle 
d'un fabricant de cette ville, il s'empressait d'y courir, comptant 
bien tromper â son tour ses clients au moyen d'une équivoque. 

Dès cet instant, la confusion et la discorde se mettent dans le 
corps des marchands ; les vieux fabricants essaient de réagir ; les 
gardes-jurés relèvent de nombreuses contraventions; mais l'élan 
est donné, c'est un courant irrésistible qui a besoin de s'affranchir 
de toute entrave. Aussi en 1785 toute réglementation semble avoir 
disparu, et nous entrons dans une nouvelle phase, qui, il faut 
bien le dire, est le commencement de la décadence de nos belles 
fabriques. Pour cette période, nous laisserons autant que possible 
la parole aux contemporains, dont le témoignage autorisé ne pourra 
être taxé de partialité ou do parti pris. 

Les premières années de la Révolution précipitèrent la déca- 
dence. Dans un prospectus, daté do 1790, ayant pour but l'émis- 
sion d'une « souscription pour rétablissement d'une manufacture 
de draperie destinée au soulagement des pauvres valides dans la 
Tille de Montàuban, » on trouve les lignes suivantes, qui présen- 
tent un tableau exact de la situation industrielle de notre ville à 
ce moment. 

« Jamais le besoin d'un établissemeftt public, destiné au soula- 
gement des pauvres, ne s'est fait plus impérieusement sentir que 
dans ces temps désastreux, où la destruction entière de l'ancien 
gouvernement, et la reconstruction pénible et lente d'un nouvel 



32 U fABftlCATfOM DI« DRAPS 

édifice politique oot livré le commerce à la stagnalion et â l'iaertie, 
rlépouilié MD grand nombre de citoyens de leur état et de leur 
fortune, et rép;indii d.ins toutes les âmes le poison de la défiance 
et de la terreur. Par une suite de ces fléaux qu'aigrit et envenime 
le prix excessif des denrées de première nécessité, occasionné par 
la stérilité de la terrei qui depuis plusieurs années semble resser- 
rer son sein, Tactlvité des ateliers est suspendue, les artisans de 
toute espèce sont sons travail, et la classe nombreuse des manœu- 
vriers est oppressée par toutes les angoisses de la misère et du 
désespoir. 

tt Leurs orU et leurs gémissements sont bien faits pour ôtre enten- 
dus par tous les hommes sensiblos et diarilables. Il en est tant 
dans cette ville qui joignent une fortune considérable, ou du 
moins aisée, «u respect et à Tamour de Thumanité, qu'on ne 
souralt désespérer d*y voir accueillir un projet dont le but est de 
procurer oux pauvres valides des.sâlairos conslans, et une subsis- 
tance ossurée* 

V L^étebllssement le plus propre à remplir cet objet de bîenEai- 
«ance est c<^lui d'une Manufacture de Draperie analogue à celles 
qui existent déjà dans cette ville depuis plus d'un siècle, et doiii 
les succès et U prospérité n'ont fait que s*accroitre. 

« Cet établissement aura une proportion intéressante avec la des- 
tination pour laquelle il a été conçu. Il occupera un très-grand 
nombre de bres^ et les appliquera à des travaux auxquels k 
plupart sont déjè familiarisés* 

« Cne sage prévoyance doit en écarter ramhition de rivaliser pcnir 
U finesse et U beauté des étoffes avec les Manufactures d'Angle- 
lerte, de Sédan^ de l^uviers^ %ic. Ce fui une amhiâoA parmite 
qui causa U chuie de celle de Gahors. On avait voulu y réunir ia 
fabrication de louies les espèces d'étofles en laine, connuiâ en 
Europe, Il tallut pour Pexécunca d'un proj^si peu sensé empbyer 
des euvri«rs inconnus, se confia- à des commis étrangers^ Um 
des dépenses énormes pour des outils qu'<»i n^avait poùo^ et dom 
on ignorait l^asage, ainsi que pour les essais nécessaires à loi;^ 
les nouveaux procédés, Doii-on s'étonner qn'une madiine si v»sce 
el si compliquée n'ait pu obtenir de succès, et qu'elle ^ :suk 



A montaubân. 33 

brisée par la multiplicité et le défaut d'analogie et d'ensemble de 
ses divers ressorts? Profitons des fautes de nos voisins, et il nous 
sera facile de nous garantir de leurs revers. 

« La Manufacture projetée se bornera donc aux seuls objets d'une 
consommation facile, tels que ceux qui se fabriquent déjà dan« 
cette ville; et comme le débit des marchandises qui sortiront de 
ses ateliers nécessitera des voyages dispendieux dans l'intérieur - 
du Royaume et dans l'étranger, on se propose, pour en couvrir les 
frais, d'y joindre le commerce en gros des étoffes du Languedoc, 
du Rouergue, du Gévaudan, etc., commerce nécessairement lié à 
celui des Cadis de MontaubaOy et très propre à procurer aux 
attionnaires &es bénéfices considérables. 

« Un tel établissement demande cent actions de trois mille livres 
chacune. Mais la somme totale ne serait point nécessaire de plu^ 
sieurs mois. On invite surtout à y souscrire cette classe nombreuse 
de citoyens qu'on désignait autrefois sous le nom de privilégiés. 
Les progrés que la raison a faits depuis une année, doivent les 
avoir détachés de ces distinctions vaines, qui semblaient destinées à 
circonscrire pour eux les moyens de contribuer au bonheur de la 
société, en leur faisant regarder comme une dérogeance, les pro- 
fessions les plus propres à augmenter la richesse publique. Toutes 
les personnes qui voudront acquérir des actions y seront admises; 
plusieurs même pourront concourir pour une seule, et se la par- 
tager. On se bornera, pour le moment, à leur proposer de faire 
inscrire leurs noms chez le sieur Martin, notaire, qui s'est chargé 
d'ouvrir un catalogue à cet effet. Cette inscription ne sera point 
un engagement. Mais dès que le nombre de cent actionnaires 
sera complet, on les convoquera et on leur soumettra un projet 
de transaction, et un plan d'administration et de régime qui seront 
délibérés et acceptés librement. On peut compter qu'il ne sera 
pas difficile de trouver un nombre suffisant d'hommes habiles et 
intègres, capables de diriger une grande Société de commerce, 
et dignes de la confiance publique. Et il y a lieu d'espérer que 
les succès de cette entreprise seront proportionnés à la noblesse 
des motifs et des vues qui en ont fait concevoir la pensée, et qui 
doivent présider à sa formation . » 



34 LA FABRICATION DES DRAPS 

Nous avons cité en entier celle curieuse pièce afin de montrer 
quelle détresse pesait sur notre population et dans quel désarroi se 
trouvaient les esprits à ce moment. Il semble peu naturel en effet 
que la {création d'une nouvelle manufacture au moment où Tac- 
Hvitides ateliers est suspendtUj paraisse s'imposer comme un 
remède efficace, et l'auteur a eu beau, pour allécher les sous- 
cripteurs, leur parler de la prospérité croissante ie ces mômes 
fabriques, il en a été pour ses frais de réclame. Le projet fut 
abandonné. 

Si l'on veut avoir une idée exacte et surtout impartiale de la 

situation faite au commerce par la Révolution, il faut recourir à 

un Mémoire très étendu, très complet, et surtout très conscien* 

cieusement élaboré, qui fut envoyé à l'administration centrale du 

département du Lot, le S9 fructidor an VI, par la Société des 

sciences et arts; ce rapport important, qui est transcrit au Livre 

jaune, dans les archives de l'hotel-de-ville, fut sans doute confié 

à Duc*Ldchapelle, le savant émule de Lalande, qui était alors 

l'une des lumières de la Société académique de Montauban. 

Nous citons les passages les plus intéressants de ce Mémoire : 

c Commerce. — Le commerce de Montauban était dans un étal 

très florissant avant la Révolution, il s'accroissait même tous les 

jours... 

c Les habitants de cette commune sont naturellement industrieux 
et depuis longtemps ne s'en sont pas tenus à une seule partie. Nous 
allons les examiner toutes successivement, nous verrons ce qu'elles . 
étaient avant la Révolution et ce qu'elles sont devenues depuis, et 
après avoir proposé quelques moyens capables de faire prospérer 
le commerce et l'industrie en général, nous indiquerons les causes 
particulières de leur dépérissement à Montauban, et les moyens 
que nous croyons propres à les y faire prospérer de nouveau. 

« La plus ancienne et la plus importante industrie de Montauban 
est la fabrication des étoffes de laine : envifon soixante manu-- 
lactures de draperie croisée fabriquaient annuellement, avant la 
Révolution, douze ou quatorze mille pièces d'étoffes, réglées et assujet- 
ties, pour les dimensions, le tissu et la qualité des laines, aux règle- 
ments qui existaient alors. Un inspecteur, deux commis et quatre 



r* 



À MONTÀUBAN. 35 

gardes-jurés (ces derniers pris parmi les fabricants) veillaient à 
rexécutioQ de ces règlements. 

La valeur de ces douze ou quatorze mille pièces d'étoffe était 

^ I d'environ deux millions trois ou quatre cent mille francs. Leur 
fabrication (teinture et apprêt) jetait tous les ans entre les mains 

E- 1 du peuple indigent sept ou huit cent mille francs pour la main- 
d'œuvre seulement. Cette étoffe est connue dans toute la France et 
à TEtranger sous le nom de cadis; elle est d'un usage excellent^ 
fort souple et tenante en même temps, qualités qui l'ont rendue 

1 1 très propre à l'habillement des troupes. Aussi fut-elle assujettie 
rigoureusement au Maximum et aux réquisitions, ce qui entraîna 
la ruine de tous les fabricants. Les laines qui entrent dans la 

ml composition des cadis viennent des ci-devant Gascogne et Langue- 

ft\ doc, du Roussillon, et de l'Espagne ; les huiles des départements 

j*r méridionaux et d'Italie. 

« Cette branche d'industrie occupait au moins six mille ouvriers 
de tous sexes et de tous âges ; ressource inappréciable, surtout 
dans la saison rigoureuse où on ne peut travailler aux champs. 

ff « Commerce de draperie, — La plupart des maisons de commerce 

# de cette ville, outre les manufactures qu'elles avaient, faisaient un 

commerce de draperie considérable qu'elles tiraient toutes dégrais- 
sées des fabriques de Marans, de Castres, de Labruyère , de 
Dourgne, de la vallée d'Aure, de Sommières, de Mende, de Saint- 
Geniès et d'autres lieux, et après avoir donné à ces étoffes les 
apprêts nécessaires pour les perfectionner , elles les faisaient 
.1 tondre et presser ou ratiner. Il existe encore de très beaux ateliers 
pour ces trois divers objets. On peut au moins porter à cinquante 
ou soixante mille le nombre des pièces que les négociants de 

^ draperie tiraient dea diverses manufactures du ci-devant Lan- 

guedoc ou d'ailleurs, pour les mettre en état d'être employées aux 

^ vêtements. 

^. « Cette branche d'industrie, qui donnait le complément de la 

fabrication à ces diverses étoffes étrangères à la ville^ était un objet 

^. de commerce de cinq ou six millions. Elle fournissait à l'ouvrier une 
ressource annuelle de deux cent cinquante mille francs au moins. 

^ « Que reste -t-il aujourd'hui dé celte modeste industrie, tant en 



kr« 



i 



36 LA FABRICATION DIS DRAPS 

£ibrif-.atioo, qu'en draperie étrangôre à la eommune? Tout au 
plus le tiers; et ce reste diminue tous les jours à cause de la disette 
des fonds et du taux usuraire de l'intérêt. L'un laisse la marchan- 
dise du fabricant et au négociant (sic) et l'autre le met dans l'im- 
possibilité d'emprunter. 

« Améliorations, — Après avoir fait le tableau du commerce de 
Montauban avant la Révolution et au moment actuel, il nous reste 
â indiquer les causes qui Font si fort réduit et à proposer des 
moyens propres à lui redonner son ancienne splendeur. 

(( Nous nous occuperons d'abord des causes générales et qui sont 
communes à toute espèce de commerce et d'industrie; nous parle- 
rons ensuite de celles qui ne s'appliquent qu'à chaque branche en 
particulier. 

« Le commerce et l'industrie sont à la prospérité d'un Etat ce 
que la sève est aux végétaux ; si des froids trop rigoureux, des 
chaleurs brûlantes, des sécheresses trop longues, des pluies trop 
abondantes, des inondations dévastatrices détruisent^ dénaturent, 
altèrent, suspendent et arrêtent le cours de cette liqueur vivifiante, 
les végétaux languissent et périssent même. Le laboureur a 
beau prodiguer ses soins ses labours, ses engrais, ses espérances 
s'évanouissent ; et si ces fléaux destructeurs se prolongent trop 
longtemps, ou s'ils se répèlent plusieurs fois, le découragement 
s'empare de lui, et il finit par refuser ses soins et ses travaux à une 
terre qu'il accuse, quoique à tort, d'ingratitude. 

« Les Français, obligés de faire des efforts surnaturels pour 
établir et défendre leur liberté, n'ont eu pendant plusieurs années 
que cet objet en vue. 11 a fallu arracher le laboureur à sa charrue, 
l'ouvrier à son atelier, le négociant à ses spéculations, le savant 
a son étude, les artistes aux beaux arts. La main-d'œuvre est 
devenue rare, et par conséquent chère et mauvaise. Le manufac- 
turier et le négociant honnêtes, déjà découragés par cette diffi- 
culté, ont vu ensuite leurs moyens enlevés par le Maximum et les 
réquisitions. 

c Le papier-monnaie a sans aucun doute rendu les plus grands 
services à la Révolution, mais comme le mal est presque toujours 
à côté du bien, son désordre et sa chute ont amené une méfiance 



À MONTÀUiAN 37 

si prodigieuse que le numéraire ne sort plus que pour être échangé 
contre une valeur réelle, ou par l'appât d'un intérêt si excessive- 
ment usuraire que le négociant honnête et prudent n'a plus voulu 
entreprendre aucune spéculation avec les fonds d'autrui. Il est sans 
doute des capitalistes délicats à qui il répugne d'exiger un 
intérêt si excessif, mais les chances qu'ils ont courues et celles 
qu'ils calculent ou qu'ils craignent ne leur permettent point 
encore de confier leurs fonds avec intérêt légal, et peut-être, à ce 
égard, il serait à désirer qu'une loi Gxftt plus haut momentanément 
le taux de l'intérêt, car celui qui existe n'est point en proportion 
avec le prix excessif de tous les objets de première nécessité et 
surtout avec le degré de confiance. Cette mesure, sagement com- 
binée, produirait peut-être le double avantage de jeter plus de 
numéraire dans la circulation et de faire baisser le taux de l'intérêt 
usuraire. 

« Mais èe ne sera que lorsque la paix générale permettra aux 
Français de reprendre leurs relations conmiercialesavec l'étranger et 
surtout avec les colonies, que le commerce sortira de l'engourdisse- 
ment où il est plongé; alors presque tous les citoyens tourneront 
nécessairement leurs vues du côté du commerce ou de l'agricul- 
ture, parce qu'ils n'auront plus la perspective de ces professions 
plus brillantes qu'honorables mais qui flattaient l'ambition et la 
vanité et dont le souvenir occasionna tant de mouvements convul- 
sifs, qui nuiraient beaucoup au commerce, si ceux qui gouvernent 
ne parvenaient à les calmer par la sagesse de leurs lois et la 
bonté de leur administration. 

« Peut-être sera-ce alors lemomentd'établir une banque, pourvu 
que le gouvernement ne s'en mêlât que pour la protéger et la 
surveiller. En attendant il serait peut-être convenable de faire 
tenir tous les trois ou six mois une assemblée de quelques négo- 
ciants ou fabricants dans chaque ville commerciale ou manufactu- 
rière, qui seraient chargés de présenter leurs vues sur les moyens 
d'activer, de perfectionner et d'étendre le commerce et l'industrie 
de leurs communes et des environs. 

« Le Gouvernement encouragerait encore puissamment l'industrie 
s'il s'attachait par tous les moyens possibles à faire donner la pré- 



38 LA FABRICATION D8S DRAPS 

férence aux étoffes nationales sur celles qui viennent de l'Etranger, 

« La main-d'œuvre étant très rare et chère, il serait bien impor- 
tant de provoquer et de favoriser l'invention de toutes les machines 
qui tendraient à suppléer l'homme. 

« Enfin l'entretien des grandes routes , l'ouverture de nouvelles 
conventions^ les nouvelles réparations des chemins vicinaux et 
surtout l'ouverture des chemins d'eau, soit par des canaux, soit 
en rendant navigables les sources qui en sont susceptibles serait 
un moyen puissant de donner au commerce toute la splendeur 
possible. 

« Outre les causes générales de dépérissement déjà indiquées, il 
en est plusieurs autres qui sont particulières à ce genre d'industrie. 
La première, c'est l'altération dans le tissu et dans la qualité, que 
plusieurs fabricants se sont permise. Cette altération date de l'épo- 
que du Maximum et des réquisitions. Les fabricants, se voyant 
menacés d'une ruine totale à cette époque, crurent s'en préserver 
en partie en allégeant leurs étoffes. Les grands besoins du gouver- 
nement et le discrédit des assignats rendant moins difficile, tout 
passait alors. Qu'en est-il arrivé? Le fabricant s'est accoutumé à 
mal fabriquer. La main-d'œuvre s'est altérée» et il faudra du temps 
pour rattraper l'ancienne. 

(( J'ai déjà dit que les étoffes de Montauban étaient assujetties â 
des règlements qui en déterminaient le tissu et prescrivaient 
même la qualité de la matière première ; ces étoffes entraient dans 
le commerce revêtues de signes qui attestaient les vérifications. 
Le consommateur pouvait compter sur la qualité de l'étoffe qu'il 
achetait; il n'avait nul besoin d'être connaisseur; ces règlements 
sont tombés en désuétude parce que personne n'est chargé d'y 
tenir la main. Qu'en résulte-t-il ? Que chacun tend, non à perfec- 
tionner et à améliorer, mais à satisfaire sa cupidité et le public 
séduit par des signes extérieurs est impudemment trompé, et 
c'est au point que des fabricants de 20, 30 et 40 lieues mettent 
sur le chef de leurs étoffes le nom de Montauban , avec leur nom 
propre, et cela arrive de même pour Sedan, Ëlbeuf, Louvicrs, 
etc. Cette friponnerie, dont le public est la dupe» devrait être répri- 
mée par le gouvernement ; car il est évident que ce n'est pas pour 



À UONTÀUBAN. 39 

faire mieux qu'on emprunte le nom d'une autre ville ni qu'on 
décore une étoffe différente des signes extérieurs qui ont servi 
depuis longtemps à désigner une autre étoffe connue. 

a Le soin des troupeaux^ Tattention d'en perfectionner l'espèce» 
en procurant aux propriétaires des bêtes de bonne race, les encou- 
ragements qu'il conviendrait de leur donner, seraient encore un 
moyen très propre à encourager cette précieuse branche d'indus- 
trie parce qu'elle trouverait sur les lieux une partie des laines 
qu'il faut indispensablement faire venir d*Ëspagne. 

« Les cadis de Montauban ayant été renommés pour être très 
propres à l'habillement des troupes, surtout pour les vestes et culot- 
tes, il serait à désirer que le gouvernement vint au secours de nos 
manufactures en s'y pourvoyant habituellement d'une partie de ce 
qui lui est nécessaire. » 

Le Mémoire qui précède nous a montré les causes générales 
qui ont eu une influence désastreuse sur l'industrie des draps dans 
les premières années de la Révolution. Du reste, l'auteur ne s'est 
pas borné à étudier cette seule branche de notre commerce mon - 
talbanais ; la fin de son mémoire envisage aussi le commerce de 
minot, le tirage de la soie, etc., etc. 

Les vœux si pratiques émis par l'organe de la Société des Scien- 
ces et Arts de Montauban, ne pouvaient être écoutés dans un 
moment de crise comme celui qui suivit la période révolutionnaire. 
Longtemps encore l'industrie resta paralysée par l'état général des 
affaires publiques. 

La Société des sciences n'en persista pas moins à se préoccuper 
de cette question si intéressante pour notre population industrielle. 
Quelques années après, elle chargea de nouveau l'un de ses 
membres les plus distingués, Constans-Tournier, de rédiger un 
mémoire sur les manufactures de draperie de Montauban. 

Ce document, qui a été retrouvé par hasard il y a quelques 
années, et que nous avons replacé dans les archives de la Société, 
dispersées pendant de longues années, est très important par suite 
des détails précieux qu'il nous donne sur la fabrication. 

L'auteur, avec une compétence qui se trahit à chaque ligne, 
s'attache à étudier au point de vue industriel le fonctionnement 



40 LA FABRICATION DBS DRAPS 

des manufaetures montalbanaisos. U nous fournit un tableau 
exact des diverses opérations qui ont pour but le travail de la laine ; 
à ce titre il nous a paru digne d'être reproduit dans ses parties 
principales. 

Âpres avoir rappelé la sollicitude de la Société pour tout ce qui 
touche à la prospérité et au bon fonctionnement des industries 
montalbanaiseSf l'auteur entre ainsi dans le vif de la question des 
cadis et autres étoffes fabriquées dans notre ville : 

u Ce n'était pas au fond une invention bien merveilleuse que la 
contexture du eaéîs, mais l'invention des draps ne présente 
rien de plus remarquable; au contraire le tissu de cette dernière 
étoffe est plus simple que celui de la première. 

< Ce n'est pas ordinairement la complication d'une machine et 
les efforts de l'imagination de son inventeur^ qui décident de 
l'utilité dont elle pourra être, et des succès qu'elle obtiendra; elle 
doit beaucoup plus à la perfectibilité dont elle est susceptible et 
au grand usage qu'elle pourra avoir dans la société. De là vient ce 
principe que les machines les plus simples sont toujours les meil- 
leures. 

« Ce qui constitue principalement la bonté d'une étoffe, c'est 
de bien remplir l'objet pour lequel elle est destinée. Pour cela il 
faut : 1o que le prix n'en soit pas au-dessus des facultés de ceux 
qui l'emploient; S"" qu'elle soit bien appropriée à leurs besoins ; 
3° que l'usage en soit bon. Les étoffes de laine qui se fabriquent à 
Montauban remplissent fort bien ces trois conditions. 

c Les cadis de Montauban eurent le sort de la plupart des 
inventions, ils restèrent longtemps à se perfectionner ; ce ne fut 
que lorsqu'ils furent connus au loin, qu'on pensa qu'il était utile 
de leur donner un plus grand degré de perfection, et d'en f^ri- 
quer de différentes qualités et largeurs ; cette première fabrication 
grossière et commune fut longtemps confiée à de petits ateliers, 
et resta entre les mains de personnes qui ne songeaient qu'à 
suivre la routine ordinaire» et à faire ce métier avec économie et 
seulement pour donner à vivre à leur famille ; ce ne fut que lors- 
que cette fabrication passa entre les mains des négociants qui y 
réunirent le commerce de draperie en gros, qu'elle acquit quelque 



À MONTAUBAN. 41 

perfection ; les voyages que leur commerce les obligeait de faire, 
les mirent à portée de connaître d'autres ateliers, et d'y puiser des 
méthodes et des principes de fabrication plus perfectionnés, dont 
ils firent l'application aux manufactures qu'ils établirent ; le cadis 
qu'on fabriquait jusqu'alors n'avait que 18 ou 49 pouces de large, 
mais la faveur dont jouit cette étoffe porta les gros fabricants à en 
faire qui avait de 22 à 23 pouces de largeur et à employer des 
laines de plus belle qualité; on en vint ensuite' à des cadis plus 
connus sous le nom de ratines, de la largeur d'une^aune et de 5|4; 
ces dernières étoffes commençaient à être fort en vogue il y a 
sept à huit ans, et]'ai lieu de penser qu'on n'aurait pas tardé de 
fabriquer des draps, si les circonstances n'avaient causé une grande 
altération dans les qualités et paralysé l'industrie. 

« Les premiers établissements n'employèrent que des laines du 
pays, et particulièrement des laines de Gascogne, mais la consom- 
mation des cadis augmentant considérablement, ces laines devin- 
rent insuffisantes, il fallut s'étendre plus loin : on se procura d'abord 
des laines de Navarre, dont le mélange avec celles de Gascogne 
réussit parfaitement ; la perfection qu'on donna peu-à-peu à la 
fabrication fit naître l'idée d'employer des laines plus fines, et bien- 
tôt les laines de Roussillon, d'Aragon, de Castille, de Moline et de 
Noria entrèrent dans une partie des étoffes de Montauban, et ces 
qualités de cadis, bien supérieures aux qualités ordinaires, furent 
recherchées surtout dans les pays froids, par les gens aisés et 
notamment par les ecclésiastiques. 

« Le nombre des pièces qui se fabriquaient à Montauban se por- 
tait à douze ou quatorze mille par an; on comptait pour chaque 
pièce une dépense de main-d'œuvre d'environ quarante-cinq 
francs: c'était donc environ six cents mille francs qui entraient 
annuellement dans la main de l'ouvrier ; cette main-d'œuvre 
pouvait donc nourrir environ trois mille personnes; avantage 
d'autant plus précieux, que tout le travail des manufactures se 
faisant dans des ateliers, c'était surtout dans la mauvaise saison 
que cette industrie fournissait ses ressources à la classe indigente 
qui ne pouvait travailler au dehors. 

tt Je n'entrerai pas dans tous les détails des manipulations de 

F 



4à LA FABRICATION DES DRAPS 

cette manufacture : on trouve dans la superbe coliêctton des urts el 
métiers de TAcadémie française, tout ce qu'on peut désirer pour 
connaître en détail la fabrication des étoffes de laine : je me borne- 
rai seulement à vous exposer en raccourci les^ principales opéra- 
tions des manufactures de cette ville. 

c Ce qui était surtout le mérite des étoffes de laine qui se fabri- 
quent â Montauban c'est leur solidité et leur souplesse : elles le 
doivent, comme je Tai dit plus baut, à la contexture de leur tissu; 
la cbaîne est composée de laine peignée, qui est par conséquent 
susceptible de conserver sa force quoiqu'elle soit filée fin; la trame 
au contraire est faite avec de la laine cardée qui, en donnant du 
corps à l'étoffe^ la rend propre à être drapée et à obtenir un foulage 
plus avantageux; le métier battant à quatre marcbes forme un 
tissu croisé, qui permet aux fils de la trame de se presser les uns 
sur les autres quoique la chaîne ait un grand nombre de fils. 

« Rien n'est indifférent pour la perfection des arts, et celui 
qui veut s'en occuper trouve à tout instant l'occasion de faire des 
découvertes utiles, qui souvent ont même une application avan- 
tageuse à d'autres arts bien différents ; le manufacturier intelligent 
et soigneux ne doit négliger aucune opération, mais il doit être en 
garde contre les illusions et les fausses apparences : il a besoin 
d'avoir de bons yeux, beaucoup d'expérience et un jugement sûr. 

c L'époque où la toison a été faite n'est point indifférente pour 
la qualité des laines : si on la fait trop tôt, elles sont molles, sans 
élasticité et font une étoffe lâche; si on attend trop tard, elles se 
chargent avec abondance de la transpiration que la chaleur fait 
sortir du corps de l'anipial; la poussière, qui abonde dans cette 
saison, s'attache à la laine à la faveur du suin dont elle est imbi- 
bée, la rend pesante et elle trompe le fabricant quand il l'a lavée. 

« Après que la laine est bien lavée, c'est-é-dire bien dépouillée 
de tout le suin qu'elle pouvait contenir, on la fait trier avec atten- 
tion pour enlever toutes les pailles, crottins et antres immondices 
qu'elle peut contenir, on la passe souvent dans un grand panier 
pour faire tomber la poussière et surtout le poil jarre, qui la 
déprécie infiniment, d'abord parce qu'il est très-gros et rudit 
beaucoup l'étoffe, et ensuite parce qu'il ne prend presque tocone 



À MONTAUBAN. 43 

couleur, ou du moins trôs-mal, et laisse bientôt échapper les 
parties colorantes. 

« Quand la laine est ainsi préparée, on la bat sur une claie 
avec des verges ou baguettes de houx bien effilées et ensuite on 
livre au peigneur celle qui est grande et longue^ et on môle les 
différentes qualités de celle qui est mince et courte pour la 
livrer au cardeur; c'est dans le mélange des laines qu'on recon- 
naît l'intelligence du fabricant, et c'est peut-être le point le plus 
difficile de son art ; c'est dans cette partie qu'il a le plus grand 
besoin de tout son savoir-faire et de beaucoup d'expérience. 

« On est dans l'usage ici d'employer l'huile d'olive pour faciliter 
la préparation de la laine ; dans d'autres pays on emploie celle de 
navette, et dans les lieux où l'huile est rare on emploie le lait, 
dans d'autres on travaille la laine à sec; l'expérience prouve 
cependant que l'huile, et surtout l'huile d'olive, contribue beaucoup 
à faciliter et à perfectionner le travail de la laine; elle se peigne et 
se carde mieux et se file surtout d'une manière bien plus parfaite. 

(( Autrefois on négligeait en général beaucoup l'assortiment de 
la filature; mais depuis qu'on y a appliqué le rouet à compte, cette 
partie s'est beaucoup perfectionnée et on ne peut plus s'y mé- 
prendre, puisqu'on sait toujours combien de tours de rouet a rendu 
chaque livre de laine, et en employant dans la môme pièce des 
filatures égales, on est sûr d'avoir une étoffe parfaitement unie. En 
sortant des mains de la fiieuse, la laine passe dans celles du tisse- 
rand ; l'opération de ce dernier est aussi très-importante : il faut 
qu'il travaille avec soin, avec attention, avec propreté et surtout 
d'une manière uniforme, et que son tissu soit bien serré; ce n'est 
pas dans cette opération où l'huile dont on a imbibé la laine fait le 
moins sentir ses bons effets ; d'abord elle a facilité le tirage de la 
laino au peigne, sous la carde et à la quenouille ou au rouet, et 
ici, en diminuant le ressort de la laine, elle donne la facilité aux 
fils de s'appliquer plus immédiatement l'un sur l'autre. Pour affai- 
blir davantage le ressort de la laine, on a soin encore de plonger 
la trame dans l'eau à mesure qu'on veut remployer, et c'est très- 
essentiel; c'est pour concourir au môme but qu'on plonge dans de 
l'eau collée la chaîne avant de la mettre sur le métier. 



44 LA rABllCATlON 1>MS DftAPS 

« Les différeDlM opérations do ttsterand, do cardaor, do pei- 
goaor leodeot toolei , eomme cm le voit, â dionDoery peodaot la 
fabrieatiûOy le reffoit des poils delà laioe, afinqa'ils poisseot mieox 
s'appliquer les ans sor les autres, en sortant des mains dn tissè- 
rent. L'étoffe ?a pisser par une autre opération importante, qui, 
en faisant sortir toutes les substances bntleuses et graisseuses, va 
redonner é la laine son premier ressort; cette opération est celle 
do tèttlage : elle est infiniment importante et mériterait peut-être 
d'être l'objet de plusieurs expériences qui procnreraientdes moyens 
de la perfectionner; le foulage consiste donc, non -seulement à 
dégraisser l'étoffe, mais encore é lui donner la force et la consis- 
taâce qu'elle doit avoir; le foulage produit cet effet en débarrassant 
l'étoffe, au moyen du savon et de la terre glaise, des parties 
huileuses et graisseuses qu'on y a introduites pour en faciliter les 
diverses manipulations. La laine, reprenant son ressort, fait gonfler 
les fils du tissu, et les maillets du foulon frappant continuellement 
sur l'étoffe tant que dure l'opération, font pénétrer le savon dans 
l'intérieur et font en quelque sorte feutrer la laine, qui rentre pour 
ainsi dire en elle-même: aussi Tétoffe perd environ le sixième de 
sa longueur et le tiers de sa largeur dans cette opération impor- 
tante ; cette différence dont la perte prouve que la laine cardée 
foule davantage que la laine peignée, et cela doit être, car, dans la 
dernière, les poils s'appliquent les uns sur les autres, dans leur 
longueur, comme les brins du lin ou du chanvre, et dans la pre- 
mière, au contraire, les poils s'accrochctit et s'entortillent ensemble 
â la filature, comme dans celle du coton, ce qui les met dans une 
situation beaucoup plus favorable pour déployer leur ressort. 

u Le foulage s'opère en deux fois dans les fabriques de Mon- 
tauban. Dans la première on emploie la terre glaise, qui dégraisse 
Tétorfe en partie, et elle est ainsi remise au tondeur, qui au moyen 
du chardon lui donne une première garniture sur le côté qui 
doitétre l'envers de Tétoffe; elle est ensuite rapportée au foulon, où 
elle finit d'être dégraissée avec du savon, et ensuite le tondeur la 
garnit encore deux fois avec du chardon, sur le droit de l'étoffe, et 
la tond aussi deux fois ; après ces opérations, l'étoffe est prête à 
être mise à la teinture, si on la destine pour être pressée, mais il 



À MONTAUBÀN. 43 

faut la faire garnir et tondre une autre fois si on veut la faire 
ratiner, car les étoffes de Montanban réussissent également bien 
dans Tun et l'autre apprêt^ pourvu qu'on ait soin de destiner les 
meilleures pour la frise. 

« Quand le tondeur a terminé ses opérations , l'étoffe est portée 
à la teinture : on emploie ici le grand et le petit teint : les bleus, 
les écarlates, les mordorés, les rouges se font bon teint; les autres 
couleurs se font au petit teint ; il faut cependant distinguer les 
noirs connus sous la dénomination de noir à froid : ce noir n'est 
pas bon teint, puisqu'il n'est point guesdé, mais la forte décoction 
de noix de galle qu'on emploie pour cette couleur lui donne une 
intensité telle, qu'elle conserve son corps et ne roussit point comme 
font les noirs du petit teint ordinaire. 

« Quand l'étoffe est teinte, il ne reste plus qu'à la mettre à la 
presse^ ou à la passer au ratinoir ; les négociants de Montauban 
se sont donné beaucoup de soin pour perfectionner ces deux 
opérations, qui favorisent beaucoup le débit de la marchandise^ et 
soit en appelant des ouvriers étrangers, soit en faisant construire 
de nouvelles presses et de nouveaux ratinoirs, on est parvenu à 
exécuter ces deux opérations d'une manière aussi parfaite qu'on 
puisse le faire ailleurs, surtout le ratinage. 

« J'ai dit un mot de l'origine des manufactures de Montauban, 
de leurs progrès et de leur perfectionnement; je suis entré dans 
quelques détails, très-succincts à la vérité, sur leur fabrication : je 
vais ajouter un mot sur les moyens de revivifier et de perfectionner 
cette branche d'industrie si utile à cette commune. 

c Chaque chose parait comporter un degré de perfection qui 
lui est particulier ; quand on passe au-delà, on dénature, on ne 
fait plus, ce qu'on veut faire: j'ai déjà dit que les étoffes de Montau- 
ban ne pouvaient pas être des objets de luxe ; cette étoffe est 
bonne pour tenir chaudement et pour résister à l'usage; elle doit 
avoir en outre beaucoup de souplesse pour se prêter à tous les 
mouvements du corps : ce sont ces trois qualités qui ont fait sa 
réputation. Il y a quelques années que cette fabrication paraissait 
avoir un assez bon degré de perfection ; cependant la grande con- 
currence qui s'était établie, forçant les fabricants à donner à bon 



46 LA FABUCATION DBS DKAPS 

marehé, on poa? ait lear reprocher de laissa à celte étoffe on peu 
trop de légèreté ; depuis la RéfolutioD, noos FavoQS vae altérée an 
point de la rendre méconnaissable : elle commence néanmoins à se 
rapprocher de la perfection depuis quelque temps. Autrefois les 
fabricants avaient bien la liberté de fabriquer toute espèce d'étoHé ; 
mais ils étaient assojeitis à des r^ements, même sévères, pour 
toutes celles qui portaient les signes distinctife des cadis de Mon- 
taoban ; ce moyen avait deux grands avantages, ce me semble: 
celui de réprimer la cupidité du fabricant, et celui d'assurer au 
consommateur la certitude de n'être point trompé ; je siis bien que 
celui qui trompe finit ordinairement par être dupe de sa mauvaise 
foi, mais, en attendant, il enlève la confiance et la réputation, en 
couvrant d'une apparence trompeuse un objet qui n'est point celui 
auquel il ressemble; ^ il est d'autant plus aisé de tromper le 
public à cet égard, qu'il en est souvent des étoffes comme des cou- 
leurs: les fausses sont en général plus brillantes que celles qui sont 
solides, et les étoffes de Montaubao, comme beaucoup d'autres, 
pourraient acquérir une partie de leur éclat par un mauvais tissu ; 
il y a donc des raisons qui militent en faveur des règlements qui 
assujettissaient les fabricants à des vérifications pour les marchan<> 
dises qu'ils voulaient revêtir des caractères qui distinguaient des 
étoffés connues généralement, et dans lesquelles le consommateur 
devrait retrouver les qualités qu'une longue réputation leur avait 
acquise. 

« 11 est un second moyen très-propre à perfectionner les manu- 
factures : il consiste à procurer aux propriétaires les moyens de 
croiser les races des troupeaux, en observant de ne point allier ce 
qui est en quelque sorte incompatible ; il faudrait beaucoup d'ex- 
périences pour découvrir quelles sont les espèces qu'il est plus 
convenable de mêler, et renouveler couvent et de diverses manières 
cette opération. 

« Mais le plus grand moyen d'encouragement qu'on puisse ima - 
giner, serait de rétablir la confiance, qui ferait rouvrir le crédit ; 
alors seulement l'industrie se réveillera, et la concurrence uno fois 
rétablie, chacun sera obligé de s'efforcer à bien faire, s'il veut 
travailler avec succès; il faut donc que le gouvernement s'occupe 



À MONTAUlÀN. 47 

à trouver des moyens pour faire baisser te taux de l'iatérét. Quel-* 
ques encouragements particuliers peuvent bien aussi influer sur la 
restauration des manufactures, et exciter l'émulation; mais quand 
Findnstrie se trouve naturalisée quelque part, ee qui la fait surtout 
prospérer, c'est la paix, la tranquillité, la confiance, la liberté et la 
garantie des transactions : sans ces grands moyens, les' seuls vrai- 
ment efBcaces, le commerce n'est qu'on agiotage et un monopole 
dangereux ; la véritable industrie se change en une agitation qui 
se termine par un brigandage détestable; chacun cherche, non à 
gagner, mais à surprendre; la méfiance devient générale, et l'homme 
honnête, ne pouvant plus y tenir sans compromettre son hon- 
neur, se retire paisiblement, et laisse le champ libre aux monopo^ 
leurs, aux agioteurs et à tous les vampires qui désolent la 
société. » 

Nous entrons maintenant dans une période bien différente de 
la précédente. L'Empire, après avoir rétabli la paix au dedans^ 
jette DOS armées de tous côtés sur l'Europe, TÂsie et l'Afrique. 
Ces soldats, toujours en campagne, couchant sur la neige ou 
sur les sables brûlants, courant sur les grandes routes à l'as- 
saut des capitales., devaient être velus d'étoffes à toute épreuve. 
Montauban en fournissait une partie fort importante ; on assure 
même que ses draps garance et bleu de roi étaient particuliè- 
rement estimés. 

Mais ce débouché n'était point suffisant pour compenser la 
misère qui régnait dans les campagnes; les ordres ecclésiasti- 
ques n'osaient pas reparaître avec leurs costumes, dont la majorité 
était spécialement tirée de nos fabriques. 

Cependant l'Empereur, qui voyait avec peine les Anglais inon- 
der nos marchés de leurs produits, tourna ses efforts vers le 
rétablissement des anciennes industries nationales et les enoou* 
ragea par d'utiles mesures de protection, et la création de nou- 
velles chambres de commerce destinées à remplacer celles que la 
Révolution avait fait disparaître. 

A filontâuban, la chambre consultative des arts et manufac- 
tures, recrutée parmi les commerçants notables de la villoi fut 



48 LA FABRICATION DES DRAPS 

créée par arrêté du 2 avril 1804, et fonctionna régulièrement 
depuis cette époque. Ses registres sont utiles à consulter, car ils 
nous permettent de suivre les nouvelles vicissitudes que le com- 
merce de draperies a essuyées pendant le courant de ce siècle jus- 
qu'à nos jours. 

M. Vialétes d'Âignan, un membre de cette famille que l'on 
retrouve toujours à la tête de notre commerce, présenta dans la 
séance du 7 avril 1806 un projet de notice générale sur Fétat 
des manufactures et ateliers de cette ville. 

a Montauban, dit-il, est une des grandes villes de second ordre, 
et du rang qu'elle occupait comme chef lieu de la Généralité, 
siège de cour souveraine, d'évêché, et centre de tous les établis- 
sement$ dans l'ancien régime, elle est tombée dans la dernière 
des classes, ayant perdu tous les établissements qui en faisaient en 
partie l'ornement et la richesse, et n'ayant pour tout apanage 
qu'un tribunal de première instance, composé de quatre juges et une 
sous-préfecture, comme on en voit dans les plus petites villes, 
avec une population industrieuse d'environ 25,000 aines, un goût 
dominant pour les fabriquei et manufactures et la plus heureuse 
position. Commerçant facilement et à peu de frais avec la Médi- 
terranée et l'Océan, son commerce eût pu lui offrir quelques 
dédommagements s'il eût accru ou seulement conservé son 
ancienne activité; mais bien loin de là, il se trouve presque anéanti, 
les principales branches de son industrie, ses fabriques de dra- 
perie et de minot ayant bien décliné de leur situation passée. 

« Celle de draperie, connue dans presque tout l'Empire sous 
le nom de cadis d'Aignan, dont l'établissement dans notre ville 
peut être regardée comme la première cause de sa prospérité, de 
l'accroissement progressif de sa population, et qui, fabriquant 
avant la Révolution jusques à 1 4,000 pièces, donnait à vivre à 
1 5,000 ouvriers des deux sexes et de tout âge, a vu sa consom- 
mation diminuer. 

Les principales causes de cette diminution, qu'on pourrait 
arrêter, sont: 4** la suppression des moines et la réduction des 
membres du clergé, qui consommaient en blanc et en noir la plus 
grande partie de ce qui se fabriquait dans les premières qualités ; 



▲ MONTAUBAN. 49 

2o la cherté el la rareté des marchandises ; 3» les contremar- 
ques d'étoffes fabriquées dans les environs et en qualités inférieu- 
res, qui, vendues comme cadis de Montauban, nuisent beaucoup 
à sa fabrique et finiront par la perdre entièrement en la discré- 
ditant. 

« Les moyens que nous indiquerons pour obvier â ces incon- 
vénients et redonner la vie au commerce de Hontauban, seraient 
de faire participer les étoffes à rhabillement des troupes, à quoi 
elles seraient infiniment propres (l'augmentation de prix, compa- 
rativement à celles qu'on emploie, étant compensée bien au-delà 
par l'augmentation de la durée, d'après Fessai qu'en ont fait déjà 
plusieurs corps^ qui continuent à les employer). 

o Quant à la rareté du numéraire, le gouvernement peut tout 
rétablir en ordonnant que les administrations supérieures et 
les caisses du département du Lot soient établies à Hontauban, 
où l'argent provenant des recettes serait échangé très-facilement 
contre des papiers sur Paris que les négociants fourniraient, ce 
qui ferait en même temps Favantage du négociant et du commerce. 
Pour le 3^ article, une loi sévère pour défendre et prévenir ces 
fraudes remplirait parfaitement ce but, ainsi que l'établissement 
d'un conseil de prud'hommes à l'instar de Lyon, chargés spéciale- 
ment de poursuivre ces abus. » 

L'auteur du Mémoire examine ensuite l'utilité qu'il y aurait à 
perfectionner les croisements de troupeaux à laine. Il signale les 
essais tentés avec des béliers mérinos par H. Yialètes de Mortarieu, 
c dont l'exemple, s'il était suivi par nos cultivateurs, pourrait 
dégager nos fabriques du besoin qu'elles éprouvent d'employer 
les laines d'Espagne dans la fabrication des cadis fins. » 

En 1806, au mois de mai, l'empereur décida qu'une exposi- 
tion des produits de l'industrie aurait lieu à Paris « pour donner 
aux braves de la grande armée une fête, et pour faire tourner à 
l'avantage des manufactures françaises le concours que cette 
solennité doit attirer dans la capitale. » 

Plusieurs fabricants de Montauban prirent part à cette expQsition 
et envoyèrent des échantillons. La fabrique Yialètes d'Âignan 
et C* présenta des cadis d'Âignan et des cadis étroits ; Albrespy et 



50 LÀ FABRICATION DÎS DKAP» 

Favenc, des cadis blancs el des draps croisés ; Joseph ^'^^^''^^^^^ 
eadis >!ontaubaii bleu nalional et des cadis vert foncé ; a 
et C«, des cadis blancs pressés, des draps croisés ei 
frisées. Ces produits furent très-remarques. ^ ^^ 

Dne commission de fabricants et d'ouvriers fut désignée po 

-asàstèr à rexpoàtion. 

Voici en quels termes le ministre de llntérieur Champagny 
féliciu, par sa lettre du «3 mai 4806, la chambre de commerce 
de l'initiaUve qu'elle avait prise. • a a sas 

« D'après le compte qui m'en a é^é rendu, je dois ^«« T*' 
au zèle avec lequel vous avei rempli les intentions de Sa Maj^ ^ 
pour l'exposition générale et solennelle des produits de no r^ 
industrie. La Chambre consultative des manufactures de Mon- 
tauban ayant secondé vos efforts, mérite de recevoir des ^^^7^ 
de ma satisfaction, et je me charge de lui en donner un témoi- 
gnage. Je suis .paiement satisfait de l'empressement des m^- 
nubctures du département du Lot i prendre part au "^"^^^^ 
Je désire qu'ils en soient récompensés, comnui M. ««^^^ 
d'Atgnanfva en Ton 40, par quelques-unes de ces hono 
distinctions que le jury national doit décerner. » ^^ 

A la même époque parut un nouveau métier, «f^*" ^ ^ 
sieur Despiau, qui tissait K m. 70 par heure. La un-u. 
essai, adressa des éloges à l'inventeur. fabricants, 

L'babillement des troupes préoccupait W'^^^ ^^^^^^ ^^ 
des propositions furent faites an gouvemeœem v« 
fourniture. , les cadis 

Sur l'invitttion du Préfet, la Cbambre '*P°^^^^^^. ^^ ^^e les 

et draps de Montauban sont plus b**^* "^e Vawg'»*'»***^'*'' *® 
échantillons destinés à la trouçe, »»»* ^^ supériorité, - 

4 fr. 80 au lieu de 4 fr. 40 est compensée car ^^ habitudes 

que d'ailleurs il faudrait faire un cbange®*"* _pio\enl le à»P 
de la fabrication; — que plusieurs régio»*")* T^ ^agravère frètes, 
de Monuuban s'en trouvent l>l«n. Néanmoins • ^ j^jots les p'o» 
qui par la nature de leur établissement sont ^ . . ^ je 
i même de faire des essais s'occupent de lai 
Lodéve et des tricots. » 



k. 



À MONTÀUBÀN. 51 

La chambre discuta aussi la question de savoir si le Gouver- 
nement devait réglementer les manufactures ou laisser à chaque 
fabricant la liberté de travailler à son gré. Elle demandait la liberté, 
afin de permettre au fabricant de changer sa fabrication suivant 
les besoins ou la mode, mais elle signalait les inconvénients 
résultant^ en ce cas, de la mauvaise foi du fabricant malhonnête. 

« On peut répondre aux objections^ disaient nos prud*hommes, 
que depuis l'époque du maximum, des réquisitions et des assignats, 
qui avaient opéré un bouleversement général, tout est réorganisé, 
le commerce étant entre les mains d'hommes honnêtes et respec- 
tables, le public ne sera plus exposé à des fraudes. 

« Pour le commerce de Montauban, peut-être serait-il avanta- 
geux de laisser les choses dans l'état où elles sont, car on ne peut 
se dissimuler que la fabrique de cadis, qui en était une des prin- 
cipales branches^ voit tous les jours diminuer sa consommation, 
non pas, comme le disent les pétitionnaires, par la seule raison de 
la contrefaçon des étoffes, mais par des causes plus éloignées, dont 
les principales sont la suppression des moines et d'une partie du 
clergé, qui consommaient nos articles en noir, et le luxe qui s'est 
répandu dans toutes les classes de la société et en a deshabitué 
une portion nombreuse de consommateurs parmi les artisans, qui 
les remplacent par des draps. Le commerce des marchandises des 
fabriques environnantes, soit du département du Tarn, soit de 
celui de la Haute-Garonne, qui se dénaturaient ici, en y recevant 
les apprêts et la teinture, diminue aussi journellement parce qu'il 
s*est établi des teinturiers et des apprêteurs dans plusieurs villes 
des départements qui n'en avaient pas, qui attirent chez eux une 
partie des marchandises qui n'étaient adressées à Montauban qu'à 
la commission pour y recevoir la teinture et apprêts. Cependant 
cette partie étant encore le principal aliment du commerce de 
draperie, nous devons avoir constamment pour but et faire en 
sorte que la ville de Montauban attire dans son sein le plus qu'elle 
pourra de ces étoffes, et sous ce rapport, est-ce peut-être un bien 
que les lieux de fabrication ne soient point désignés sur les pièces, 
pour laisser croire à de nombreux consommateurs, accoutumés à 
les acheter ici, qu'elles s'y fabriquent. » 



52 U FiniUTlON DU DRAPS 

Ce dernier vœu parait au moins nngulier dans la iwucfae 
d'hommes qui ont tenu constamment un langage où les questioDS 
de loyauté et de droiture commercisies étaient toujours mises 
en avant. Et cependant il éuit presque imposé par la situation 
foite i notre industrie par la concurrence voisine. Il ne faut pas 
se le dissimuler : la rie facile , la sobriété de notre population 
ouvrière, l'esprit routinier rendaient à nos fabricants bien diffi- 
ciles les tentatives de perfectionnement, et dans ces conditions leur 
infériorité devait s'accentuer fatalement de jour en jour. 

En 1810, on ne compte plus à Montauban que 3( fabricants 
d'étoffes, )a fabrication des cadis était réduite i 7,000 pièces 
et n'occupait plus qoe S,500 ouvriers. 

Aus« les vieux fabricants , ae souvenant de la prospérité des 
fabriques sous l'ancien régime, réclamèrent l'établissement d'un 
bureau de vérification et de marque pour les cadis de MontaubaD, 
r afin d'arrêter le préjudice notable qui est occasionné par l'in- 
troduction dans la consommation dos marchandises, quoique très 
inférieures, qui se fabriquent à Saint-Afrique, Sainl-Martory, 
AIbi, Verdun, Mazamet, Hodei et autres endroits circonvoisins et 
qui portent l'estampille : 

Fabrication française de Montauban 
ou bien simplement : 

Cadis Montauban. » 
La Chambre consulutivc n'accueillit pas entièrement cetto 
requête, mais s'appuyant sur un mémoire présenté )e S6 août 
1809, elle demanda qu'il fût interdit de mettre sur les draps te nom 
d'une ville antre que celle où ils ont été fabriqués. 

Néanmoins la Chambre persiste è réclamer la plus grande liberld 
pour le commerce, tout en émettant le vœu que la fraude soit 
née sévèrement. 

B commission, composée de H. Vialètes, Lagravère aîné ec 
erl, avait été nommée pour examiner cette question ; elle 
ita, au cours de ses travaux, que la décadence de nos-fabri - 
tenait à des causes générales et inévitables, qui paralysaient 
mtanément toutes les branches d'industrie et parmi lesquelles 



▲ MONTÀUBAN. 53 

le manque de capitaux tenait la première place; du reste les 
fabriques voisines étaient dans le môme état. 

Les doléances du commerce montalbanais finirent par aboutir à 
un résultat, minime il est vrai, mais qui aurait pu être trôs- 
avantageux si on y avait tenu la main : le ministre du commerce 
décida en 4842 que tous ceux quijmettraient sur leurs pièces : 

Façon de seraient considérés comme faussaires en écriture 

privée. 

En 4818, sur la proposition du mairci la Chambre consultative 
réclama rétablissement de trois foires générales de marchandises, 
qui devaient durer 8 jours, et dont les dates furent ainsi fixées 
par ordonnance royale du SB juillet même année: 20 mai, 26 
juillet, 20 novembre. 

Ces foires eurent pendant quelques années un grand suc- 
cès. La première commença seulement le 24 mai et finit le 
28 du même mois. Le Journal de Tam-et-Garonne dit à cette 
occasion : u Cette foire a obtenu des résultats qu'on ne pouvait 
pas attendre d'une institution nouvelle, qui n'est pas encore bien 
connue dans les autres départements^ et^ qui se trouve avoir à 
lutter contre des intérêts de localité contraires à l'intérêt général 
du commerce, aux spéculations duquel cet établissement offre des 
avantages incontestables. 

« Plus des deux tiers des marchandises qu'on y avait apportées 
ont été vendues, quoiqu'elles fussent en grande quantité, et les 
fabricants ou négociants à qui elles appartenaient n'ont pas été 
moins satisfaits des prix qu'ils ont obtenus, que de la facilité qu'ils 
ont eue à les placer. » 

Il en fut de même à la seconde, celle du 26 juillet, et le journal 
ajoute : te II n'y aurait pas eu assez de marchandises pour les 
acheteurs, si Is), baisse des prix des laines n'avait porté ceux-ci â 
demander sur le prix des étoffes une diminution analogue, à 
laquelle les fabricants n'ont pas voulu consentir. > 

« Le succès de ces foires, qui ne se^ démentit pas pendant quel- 
ques années, porta les fabricants à en demander une quatrième, 
mais cette requête ne fut pas accueillie. Peu à;^ peuple mouvement 
des affaires dans ces réunions se ralentit; le voisinage de Tou- 



54 LÀ rUUCiTIOH DBS DKÂPS 

louse, centre importaDt U&ml da?aiiugfl les n^ociaDls ; ei la 
diminulion progressive de la fabrication moDtalbanaise s'aecantna 
chaque jour davsDtage. 

En 1806, HH. Lagravèreet 0>ïaieal établi i Tillebourbon la 
première filature de laine i la mécanique. Cette fonda^a fut 
accoeillie par les fabricants avec défiance et par les ouvriers avec 
jalousie. 

En effet, les chefs de nos maisons de commerce n'avaient pas 
en général le caractère aventureux ; leur aisance était fondée sur 
une sage économie plutôt que sur le résultat ordinaire de leurs 
opérations, dont le cercle était fort rétréci, et ils craignaient de 
sortir de leurs habitudes en adoptant les nouveaux procédés. Pour 
eux la fileuse'semblait ne pouvoir jamais être remplacée par une 
machine. 

Quant à l'ouvrier, il obéissait, dans son aveuglement, à des con- 
sidérations d'un autre ordre. L'établissement des filatures mécani- 
ques ruinait du coup toute une classe de la population. En effet 
le faubourg Sapiacou, notamment, offrait an curieux spectacle 
avec cette multitude de rouets, tournés par des fileuses, qui 
gagnaient leur vie, tout en ganlanl leurs marmots ou en surveil- 
lant leur ménage. 

Nous retrouvons l'expression de ces spnliments dans un rap- 
port présenté à la Chambre consultative eu 1832. 

CI La fabrication d'étoRes de laine à Monlauban date d'une 
époque très-reculée. Nos aacèlies, en perfectionnant graduelle- 
ment le genre de fabrication qu'ils avaient adopté, attirèrent dans 
notre ville un grand nombre d'ouvriers étrangers, dont les familles 
s'étant augmentées, ont formé avec celtes qui y étaient déjà plus 
-'" ''?rs de sa population, portée è, plus de 24,000 âmes. Les indi- 
comprenant cette classe nombreuse n'avaient eu jusqu'ici 
moyens d'existence que dans le travail que leur procurait 
iïérentes opéralions^^dcmanJées par la fabrication des étoffes 
ine, et qui seules suffisaient à leurs besoins. 
L'établissement des^machioes mécaniques est survenu. Lors- 
les parurent, pas un seul de nos fabricants ne se méprit sur 
reuse importance qu'elles devaient avoir, tant sous le rapport 



▲ MONTAUBAN. 5S 

du perfectionnement que sous celui de la baisse qu'ils devaient 
faire éprouver à la main-d'œuvre, baisse, naturellement toute à 
leur avantage. Cependant, justement alarmés pour la^ population 
qui les entourait, ils virent aussi avec douleur que ce qui serait 
d'un immense résultat pour le bien général produirait en sens 
inverse la chute de leur industrie . 

< Malheureusement leur prévision ne tarda pas à se réaliser, et 
malgré le vif désir qu'ont tous nos chefs de manufactures de con- 
courir de tous leurs moyens de maintenir leurs ateliers en activité, 
et qu'ils aient fait de très-grands sacrifices pour cela, ils se voient, 
nous osons dire à peu près tous obligés à les abandonner pour 
éviter une ruine totale. 

c Rendant justice aux bonnes intentions du gouvernement 

et quoique nous ne puissions disconvenir que l'établissement des 
mécaniques que nous avons depuis 4806 n'ait puissamment con- 
tribué à soutenir le peu de fabrication qui existe encore dans notre 
ville, nous ne pouvons admettre, comme on veut bien le^prétendre, 
que la décroissance de notre commerce en draperie vienne du 
défaut d'établissement d'un plus grand nombre de mécaniques que 
ceux que nous avons déjà. 

« Il nous serait facile de prouver au contraire que 
le mal qui nous mine vient absolument de la trop grande facilité 
qu'on a partout de produire, ce qui nous prive du débouché de 
nos articles. Le commerce est tout positif de sa nature dans ses 
applications. Un négociant habitué aux affaires tient peu de 
compte des théories, il préfère l'expérience admettant comme un 
fait constant que la consommation, de tout genre augmente en 
proportion de la population qui grandit. 

« On ne peut se refuser à reconnaître que, dans les localités 
en si grand nombre où il n'existait pas de manufactures, l'éta- 
blissement des mécaniques a dû produire un développement d'in- 
dustrie qui est tout à l'avantage des populations de ces localités, 
et nous ajoutons môme de l'intérêt général, mais nous qui avons 
à exposer au gouvernement la position particulière de notre ville, 
nous affirmons que c'est la grande facilité qu'on a de produire qui 
anéantit un branche d'industrie existante depuis des siècles ; 



56 LÀ FABRICATION DIS DRAPS 

parce que^ habitués, ainsi que nous l'étions, à approvisionner de 
nos marchandises un grand nombre de départements, nous ne le 
pouvons plus maintenant à cause de la concurrence que nous 
offrent une infinité de fabriques, qui sont comme nous rongées 
par une surabondance de fabrication dont elles ne peuvent se pro- 
curer l'écoulement, et d'où résulte une dépréciation forcée sur les 
articles fabriqués, dépréciation telle qu'il est impossible que les 
fabricants, puissent continuer à la supporter. 

tf Voilà notre opinion sur la fabrique d'étoffes de laine de 
notre ville. Loin de nous de vouloir adresser à cet égard des 
plaintes au gouvernement. Il doit la liberté et la sécurité au 
commerce ; lui ayant assuré l'une et l'autre, ses devoirs sont 
remplis, mais il doit nous être permis de ne pas lui laisser ignorer 
aussi la position où vont se trouver un grand nombre d'ouvriers 
privés de travail, dans l'espoir que sa bienveillante sollicitude 
pourra détourner la misère qui nous menace. » 

La chambre se plaît à signaler au gouvernement l'exécution du 
projet déroute de fer de Montauban à Toulouse dont l'adjudication 
a eu lieu il y a un an. 

L'exposé des théories qui précèdent est assez singulier, mais il 
indique un mal qui n'a pas encore cessé à l'heure où nous 
sommes, mal nécessaire, ou plutôt inévitable,car il est la consé- 
quence de la marche en avant dans Ja voie des progrès 
matériels. 

En effet la création des machines, l'établissement des voies 
ferrées, la suppression des barrières et des douanes, toutes les 
conquêtes de la science mises au service de Tindustrie ont abso- 
lument changé les conditions économiques de la société. 

Autrefois il s'agissait seulement de faire bien ; aujourd'hui il 
faut faire vite. C'est la première condition du succès^car on doit 
devancer la concurrence. Autrefois le prix était une question secon- 
daire, aujourd'hui c'est le bon marché qui prime tout. 

Comme on le voit, la question économique, qui préoccupe actuel- 
lement les esprits les plus sérieux, n'est pas née d*hier et sa solu- 
tion parait fort éloignée. 
Mais revenons à nos fabricants montalbanais : la révolution de 



à MONTAU?AN. 57 

juilUt ne {i^oduisit pas trop de catastrophes sur notre pl✠; il y 
eut c^peDdaQt aa notable ralentissement dans les transai^tions et 
un certain nombre d*ouvriers restèrent sans travail \ U liquida- 
tion se fit dans de très-mauvaises conditions, d'autant plus que les 
prûvinces de Bretagoâ qui servaient de di^bouché à nos plus belles, 
qualités, avaient suspendu leurs commandes par suite des événe- 
ments politiques qui agitèrent cette partie de la France au début 
du règne de Louis-Philippe. 



Nous voici arrivés à la limite de cette étude, car nous touchons 
à la période contemporaine, et nous ne saurions aller plus loin sans 
sortir de notre rôle d'historien. Aussi bien aurions-nous à conti- 
nuer cette longue série de doléances et de regrets qui commencèrent 
à se manifester à la fin du siècle dernier et qui malheureusement 
seraient plus justifiés que jamais aujourd'hui. 

Nos cadis de si bon usé^ ne sont plus de mode ; après avoir 
pendant plusieurs siècles joui d'une réputation bien méritée, on 
ne les emploie plus que dans quelques cantons de la Bretagne, où 
nos maisons de commerce montalbanaises ont encore conservé de 
bonnes relations. Mais ce débouché lui-même, par suite de l'unifi- 
cation du costume, finira par leur être fermé dans un avenir plus 
ou moins prochain, et alors il ne restera plus de cette branche 
autrefois si florissante de notre industrie^ qu'un souvenir de fierté 
mêlé d'amertume; de fierté pour le passé qui fut glorieux, 
d'amertume pour le présent qui nous montre, comme une dure 
leçon, comment les institutions les mieux assises et les mieux 
ordonnées périssent lorsqu'elles ne sont pas en harmonie avec les 
progrès et les conquêtes de la science. 

Le commerce de draperie s'est perdu dans notre ville — l'aveu 
est douloureux, mais il est nécessaire comme conclusion de cette 
étude, — parce que nos voisins ont fait mieux que nous. Plutôt 

H 



58 Ll VIBRICATION DBS DRAPS 

que de lutter à armes égales contre nos rivaux, doui nous sommes 
opinifltremeni alléchés à conserver les vieux procédés, tandis que 
les manufacturiers de Castres et de Hazamet se sont constamment 
préoccupés de perfeclionuer leur outillage, et ont pu ainsi soutenir 
la concurrence avec les autres fabriques de France el de l'étranger. 



^ FI'E IT DIO E . 



^^^^^^^^^Ife^^^î^^^^^^ 



APPENDICE. 



Liste des noms des facturiers inscrite sur le registre 

des marchands en 1712. 



Jean Gaussât. 
Jacques Lapeyre. 
Fojssac. 
Pierre Gaasse. 
Pierre Noaillac. 
Jean Marisoûet. 
Jean Londios. 
Jean Boussarot. 
Jean Bayle. 
Joseph Glayrac. 
Jean Py. 
Jacques Verdet. 
Raymond Astorg. 
Jacques Fournie. 
Alexandre Dul'ré. 
Henry Vialètes. 
Jacob Brousse. 
Marn Géré. 
Pierre Tissendié. 
Antoine Petit. 
Samuel Gaussât. 
Léonard Maurannes. 
Jean Rieu. 
Sidrac Soi. 
Méric Artus. 
Jean Nègre. 
Pierre Cadrés. 
Antoine Bia. 
La veuve de Malemous- 

que. 
Pierre Pradines. 
Antoine Noailhac. 
isaac Noalhac, atné.' 
Pierre Barthe. 



Antoine Molle. 

Mlcbel Albrespiy. 

Pierre Salingar ies. 

Nicolas Petit. 

Guillaume Andral. 

Jean Ginfraix. 

Les sieurs Pierre et 
Estienne Vialètes - 
d^Aignan , frères et 
Bernard Vialètes, as- 
sociés négociants , 
outre le commerce 
de draperie en gros 
qu'ils font, qui est 
leur principal com- 
merce, font travatUer 
k une manufacture. 

Antoinette Jambon, v<^. 

Micbel Bergis. 

Alexandre Labry. 

Pierre Soulié. 

Pierre Gastel. 

Jeanne Londles, veuve 
Isaac Laporte. 

Jean Fraisse. 

Guillaume Ferrieu. 

Jean Lacombe. 

Jean Borredon. 

Abouly. 

Raymond Baussil. 

Jean Pécontal. 

Isaac Milbau. 

Pierre Bouillenc. 

Jacob Langla'le. 



Jean-Bernard Rousset. 
Antoine Senoua. 
Marie G<aiTic. 
Guillaume Terrancle. 
Thobie Hatnudel. 
Jacques Biriat. 
Jean Monlis. 
Jean G^rbonel 
Jean Conques. 
Joseph Baîrrère. 
Jacques Gamot. 
André Gasemajor. 
Pierre Gharles. 
Pierre Terrède. 
Abel Miquel. 
Pierre Lasvignes. 
RaymouA Ouimbal. 
Antoine Boussarot. 
Jacques Lascombes. 
Pierre Lacam. 
Jean Alram jeune. 
Jean Larroqne. 
Jean Boissières. 
Garrère. 
Paul Molles. 
Arlam atné. 
Pierre Borredon. 
Jeanne de Gaussât. 
G. Lamothe. 
Jean Molles. 
Isaac Bagel. atoé. 
Jean Gagé. 
Jean Gastelnau. 
G util. Malemousque. 



63 



LÀ FABRICATION DXS DRAPS 



Pierre Delannés. 
Jean Albrespy. 
Racbel Montégu, yeuve 

Jean Albrespy. 
Serres de Prat. 
Jean Brousse. 
Jean Rebeille. 
Armand Salvetat. 
Pierre Beneeh. 
Goillalme de Bordes, 

veuve André. 
Beauté. 

Nicolas Cadrés. 
Marie Meremende et 

Antoine Maraval. 
Anne Pousergues, v* 

Bernard Mariette. 
Daniel Salingardes. 
Moïse Gastel. 
Daniel Salbion. 
Pierre Tacbard. 
François Palafré. 
Pierre Barrié. 
Pierre Delpey. 
Jean Bayle. 
Jacques Bergounio. 
Jean Séguéla. 
Matbieu Pradines. 
Josepb Delpech. 
Antoine Presseq. 
Jacques Conté. 
Jean Massip. 
Jean Rivière. 
André Redon. 
Raymond Montpezat. 
Jacques Vaissette. 
Pierre Preissac. 
Duraude. 
Jean Terrède. 
Jacques Beneeh. 
Jean Cbaudun. 
Jean Garrigues. 
Henri Vaissières. 
Etienne Legrand. 
Claude Louée . 
Jean Pécontal. 
Jean Vinsac. 
Rémi Barri. 
Antoine Saint-Jean. 
Jean Ange. 
Pierre Moulis. 
Jean Delpon. 
Antoine Tesseyre. 



Jean Yaissière. 

Racbel Roudié. 

G. Vernhe. 

Jean Gaussât. 

Hugues Tournés. 

Jean Aoquié. 

Josepb Dumas. 

Jean Mourgues. 

Jacques Dusab. 

Jacob Gasenat. 

IsaacAlquié. 

Louis Delbosc. 

Jean-Adam Hucafol. 

Antoine Lantelme. 

Jacques Beyredes. 

Jeanne Craî, veuve. 

Jeanne de Redon et 
Françoise Dagra. 

David Vidallet. 

Pierre Dardayrol. 

Jean Moncuquet. 

Jean Priou. 

Jean Pradines. 

Jean Moisset. 

Pierre Retournât. 

David Garrigues. 

Jean Soulié. 

Jean Franceries 

David Mariette 

Philippe Cabirol. 

Jean Raynal. 

Jean Vautrin. 

Jean Belan. 

Géraud Romagnac. 

Pierre Boue. 

Pierre Boussarot aine. 

Jean Cathala. 

Jean Delmas, aîné. 

Pierre Bonnet. 

Albouy. 

Antoine Gond y. 

Jean Delannés. 

François Castel 

Antoine Bouafous. 

Jacques Redon. 

Françoise Brel,v« Laver- 
dure. 

Pierre Mouzet. 

Marie Meynard, veuve 
Carrère. 

G. Bessié. 

Vidal Prunet. 

Isaac Baron. 



Abel Beray. 
Boyé. 
P. Bol. 

Bermont Gardes. 
Pierre Fenouillet. 
Abel Vautrin. 
Jean Massip. 
D. Racbel Delanes. 
Gaspard Dnminy. 
Jean Bongrat. 
Pierre Massip. 
Rau. 

Jacques Olier. 
Leygue. 
Jean Rivairol. 
Jean Galoupin, dit La- 
roche . 
Bernard Albrespy. 
Pierre Sidrac. 
Jean Garrié. 
Presseq , veuve Vidal. 
Jean Barrié. 
Sidrac Noualbac. 
François Durand. 
Jean Rieu . 
Jean Dupin. 
Jean Ghaubard. 
Jean Doumerc. 
Pierre Cabirol. 
David Rivière. 
Jean Tournier. 
Jean Poslin. 
Antoine GedofTre. 
Raymond Gonstans. 
Jean Moulis- 
Antoine Picassou. 
Jean Pécourt. 
Pierre Gabé. 
Jean Galays. 
Raymond (]orel. 
Pierre Lauzet. 
Dite Suzon Dussaut. 
Pierre Delmas. 
Gaillard Nègre. 
Isaac Tonnelles. 
Jean Viguié. 
Antoine Nègre. 
Pierre D'Aignan. 
Jean Ferai. 
Jean Abouly. 
Antoine Galvet. 



A MONTÀUBAN. 



63 



Livre des marchands oommanoé la !•' avril 1745. 



1745. 

Jean Barrié, atné. 

Jean Lepifle. 

Jean Saînt-Geniès, père 

et fils. 
Jean Momm^a. 
Dayid Nègre. 
Elle Donadieu. 
Jean Lamarlnée. 
Géraud Romagnac. 
Jean Arnac. 
François Gastel. 
Jacques Beyrèdes. 
André Molles. 
Pierre Foissac. 
Catherine Pradines , 

épouse de Henri 

Matio. 
François Arbus. 
Moyse Castel. 
Jean-Pierre Vidallet. 
Marc Albrespy. 
Jean Fargues. 
Paul Gausse . 
Jean Delpy. 
Jean Gausseran. 
Jean et Paul AIran , j 

firères ' 

Estienne' Vialètes d'Ai- 

gnan. 
Jean et André Albrespy. 
Paul Saul. 
Louis Bouillerie. 
Marguerite Deymié, v* 

Jean Mariette. 
Jean Délaye. 
Antoine Terrèdes. 
Jeanne Lamothe, veuve 

Bongrat. 
Jean Menescal. 
Armand Salvetat. 
Jacob Brousse. 
Suzanne Dussaud. 
Pierre Vidallet. 
Joseph Serres. 
Jacques Viguié. 
Jean Senoé. 
Jean Sinfjraix. 
Antoine Fargueil. 
Pierre Ligounhe. 
J'ean Pourtié. 
Gaillard Nègre. 
Jean Mourgues. 
Sidrac Noalhac. 



Isaac Tirevieilles. 
Simon Fourgès. 
Pierre Gadrès. 
Pierre Boussarrot. 
Pierre et Jean Pierre 

Lauzets. 
Jacob Gaussât. 
Francou Raynal. 
Maille Besson. 
Jean Garrié. 
Jean Lavit. 
Jacques Conte. 
Jean Ghaudruc. 
Pierre Gastel. 
Jean Cogoreux. 
Jean Brousse. 
Isaac Acquié. 
François Durand. 
Antoine Presseq. 
Jean Goussac. 
Antoine Jambon. 
Pierre Deymié. 
Pierre Carrendou. 
Jean Soulié. 
Marc Deymié. 
Méric Arbus. 
Jean Boyé. 
Jeanne Gilis, veuve 

Milhau, 
Jeanne Fezendié. 
Rachel Roudié, veuve 

Boyé. 
Judith Boyé , veuve 

Noalhac. 
Pierre Retournât. 
Nicolas Cadrés. 
Jean Boussarut. 
Jean Tournier. 
Mi quel Albrespy. 
Pierre Tachard. 
Jean Delpon. 
Jean Fraïsse. 
Jean Seguela. 
Gaspard Dumeny. 
Cécille Depuntis. 
Pierre Booillenc. 
Joseph Vidal. 
Alexandre Laborie. 
François Labrie. 
Jean Lacaze. 
Marthe Gbelié. 
Isaac Vidal. 
GabrielleBebian, épouse 

Malemousque 
J. P. Lacroix. 



Jeanne Ghaubard, ▼• 

Albrespy. 
Claude Lanié. 
Michel Saurou. 
Jean Roques. 
Jeanne Gaussât, yeuve 

Rauly. 
Jacques Gassion. 
Pierre Saint-Alary. 
Raymond Gimbal. 
Guillaume et V. Del- 

breil. 
Victor Pouzergues. 
Méric Tachard. 
Pierre Massip. 
Jean Rivière. 
Pierre Gabiron. 
Pierre Delprat. 
Etienne Acquié. 
Glande Garrigues. 
Raymond Borel. 
Pierre Carrière. 
Jean Foissac. 
Veuve de Foissac. 
Jérôme Legrand. 
Jean Massip. 
Louis Bagel. 
Jean Baille. 
Marie Doumerc, veuve 

Delanes. 
Pierre Vidallet. 
Marcel Laroque, 
Pierre Gabé. 
Raymond Guimbal, 
Eymeric Preyssac, 
Jacob Douzals. 
Antoine Debia. 
Jean Gaussât. 
Jean Pris. 
Jean Coyne. 
Jean Moulis. 
Antoine Duran. 
Pierre Crouzailles. 
Jean Gathala. 
Jean Galais. 
Pierre Borios. 
Jean René, 
Marie Boussarot , sa 

femme. 
Bernard Alran. 
Antoine Dufis. 
Raymond Serres. 
Antoine Calvet. 
François Lacombe. 



64 



LA FAB&ICiiTION DIS DRAPS 



François et Ja<4mss 
Lecuyer, père et fils. 

Méric Dois. 

François Coyne. 

Pierre Rivière. 

Jeanne Faget, veuve 
Petit. 

Jacques Lacombe. 

Gabriel Albouy. 

Jean Péeontal. 

Antoine Picassou. 

Thomas Castfd. 

Jean Beausel. 

Barthélémy Espioasse. 

Marc Céri. 

Marguerite Fonrnter. 

Jeanne Bergonsal. 

Antoine Rayoal. 

Samuel Vi^faiet. 

Jeanne Vidallet, vquvc 
Gailbavâ, 

Pierre F^ffgveiU 

Louis Coffinbal. 

Jean Dubernat. 

Geraud Garrigues. 

Jean Baille. 

1746. 

Jean Tremolières. 
Jean Albrespy. 
Jacob Géré. 
Jean Lacaze. 
Pierre Petit cadet. 

1747. 

Jean Cadrés. 
Geraud Dulhes. 

1748. 

Jean Alran. 
Jérôme Débat. 

1749. 

Isaac Marty. 
Pierre Barrié. 
Daniel Bou&sarot. 
Antoinette Serre, veuve 

Chaudruc. 
Jean Doumerc. 
Antoine Delpon. 
(Guillaume Retournât. 
Louis Sigal. 
Jacques Latreille. 
Jacques Oilier. 
Pierre Ferrie. 



1750. 

Pierre Romagnac. 
Michel Abeille. 
Jacques Brial. 
Jean Gramboulao. 
Jean Grenier. 
Etienne F&itehé. 
J.-P. Rivière. 
Gnillaome Lameth^'. 
Antoine Borel. 
Jean-Pierre Fauché. 
Jean Moulis. 
Jean Durande. 
Dlle Marie Gardes, et 

Tochelle Conte. 
Antoine Cousteil. 
Jean Presseq. 
Samuel Bouillenc. 
Jean Bangrat. 
Antoine Carbooel. 
Jean Delpech. 
Simon Saintfaust. 
Jean fiesson. 
Joseph Fontas. 
Pierre Petit. 
Etienne Garric, Mont- 

murât. 
Pierre Laresseguerie. 
Jean-Pierre Lacaze. 
André Delpey. 
Anitoine Lacaze. 
Claude Simonin. 
Claude Franceries. 
Guillaume Àlran. 
Jean Bonnet. 
Jean Lacaze. 
Etienne Lacraux. 
Jean Barriè. 

4731. 

Jean Unal. 
Antoine GodofTre. 
Etienne Sarrus. 
Jacques tamothe. 
Pierre t^ieris. 
Jean Sicard. 
François Maurel. 
Bertrand Cabirol. 
Nicolas Malé. 
MarcCeré. 
Dominique Malbosc. 
Bernard Paisseran. 
Isaac Bouigues. 



4753. 



Jean Cathala. 
Jean Menescal. 

17o5. 

Baptiste Aliès. 
François Grezel. 
Dlle Marie Papon. 
Pierre Gaacou. 
Claude Signes. 

4754. 

Bayle fils. 
Jean Boys. 
Paul Rigal. 
Abraham Acquié. 
Guilbaume Gastié. 
François Labro. 
Jean et André Bes.s ou 
Antoine Urandala 
Vital Prunetis. 
Jacques Boussarot. 
Jean Boussarot. 
Marcel Menescal. 
Antoine Caignac 
Isaac Cinfraii. 
Antoine Rebellât, 
fltieune Legrand. 
Francou Delcan. 
Guillaume Aché. 
Georges Miquel. 

1755. 

David Delbreil. 
Duminy frères. 
Jean Gardeile. 
Isaac Bagel. 
Guillaume Malet. 

1756. 

Pierre Serres. 
Pierre Tirebielles . 
Barthélémy Retournât. 
Geraud Cathala. 
Méric Tachard. 
Jean Lacoae. 
Antoine Alran. 
François Mathieu. 
André Albrespy 
Pierre Lacoste. 
Paul Cayla. 
Marie Maurel. 
Francou Barrié. 
Antoine Menescal. 



Jacques Menescal. 
Fierre PéconUn. 
Etienne Becardy. 

1757. 

Jean Langlade. 
Francou Vjdalet. 
Francou Arbus. 
Pierre Maftsip, fils. 
Etienne Acquié. 
Jean Toumou. 
Jean Seguela. 
Jean Lantier. 
Izaac Vidalet. 
Jean Carrîè, -fils aîné. 

1758. 

Paul Maillé. 
Jean-Pierre Seguela. 
Pierre Dnfis. 
Pierre Couderc. 
Pierre Bonvila ou Bo»- 

billa. 
Pierre Douzais. 
Francou Castel. 
Pierre Tachard. 
Antoine Ynard. 
Marc SottUé. 
Matbieu Seguela. 
Abraham Moulis. 
Jean -Baptiste -Rovloi 

Fraunié. 
iean Sirac. 
Pierre Pécontal. 

1759. 

Jean Rispe. 

Jean-Raymond Rival. 
Samuel Gaussât. 
Jean Rebellât. 
Antoine Brunet 



A MONTAUBAN. 
1761. 

Jean Belluc. 
Jean Cbaubard. 
Pierre Racbou. 
Pierre Debia. 
Jean René. 
Jean Fesendié. 
David Mariette. 
Pierre Feyt, cadet. 

1762. 

Jean Lalevie, aîné. 
Geraud Ferrie, cadet. 
Jean Cruzel. 
Jean Lombrail. 
Louis Besse. 
Joseph t^'abel. 
Jean Benê, eail^t. 

i7«3. 

Jean*Pierre Depuntis. 
Juhen Ferrien. 
Etienne Marconis. 
Pierre Lafon. 
Jean Sarrus, atné. 

176i. 

Jacques Dobfa. 
Deymié fils afnè. 
Jean Vidalet. 
Isaac Fourgez. 

1768. 

Jean Rivière. 
André Gardelle. 
Pierre Seguela. 
Jean Blanc. 
Isaac Sol. 
Géraud Larroque. 



65 



1769. 



Barthélémy Espinasse. 
Mathieu Langlade. 
André Albrespy. 

1770. 

Jean-Baptiste Gerlié. 
Pierre Lacaze. 
Bernard Alran. 
Jacques Foissac. 
Jean Ginfraix. 
Jean Beirèdes. 

1771. 

Jean Samuel Vidalet. 
Thomas Massip. 
Pien'e Samuel Car- 
rière. 

1773. 

Pierre Gastel. 
Jean Larroque. 
Jean Lespinasse. 
BaithélemyRachou. 

177i. 

Jacques Fabré. 
Jean Beray. 
Pierre Massip. 

1775. 

Guillaume Mouli». 
Pierre Salamon. 
Jean Serres, fils. 
Pierre Castel. 
Francon Dubeniat. 
Larroque aîné. 

1776. 

Pierre Lauta. 



TABLEAU DES MESSI"' 

Montauban, Gardes. 




LES FABRIQUANTS DE 

Jurés en l'an'- 1782 



Messieurs 



P^e Tirevielles, J» Sam»» Vidallet, P« Dufis, J» Boussarrot. 



Vialètes-d'Aignan. 
Joseph Serres. 
Jacques Foissac. 
André Albrespy. ' 
Jean Vidallet. 
Isaac Bagel . 
Pierre Ligounhe. 
Pierre-Marc Gastel. 
Jean Langlade. 
Isaac Sol. 
Jean Prix aîné. 
Pierre Séguéla. 
Jeanne, fille de Gastel. 
Jean-!Herre Duminy. 
Jean Cinfraix. 
Pierre Lacaze. 
Veuve Jean Langlade. 
Meric Dufis. 
Pierre Gastel. 
Simon Fouges. 
Antoine Jeanbon. 
Jean René cadet. 



Jean Saint-Génies. 
Jean Retournât. 
Veuve Antoine Dufis. 
Veuve TrémoUières. 
Veuve Moyse Gastel. 
Georges Miquel. 
Antoine Revellat aîné. 
Bernard Albrespy. 
Marc Tacbard. 
Guillaume Gauthier. 
Pierre Périès. 
Pierre Débia. 
Pierre Barlhe. 
Jean Sennoé. 
Jean Révéllat jeune. 
Joseph Fontas. 
Pierre Godoffre. 
Pierre Racbou. 
Veuve Julien Ferieu. 
JeanPécontal. 
Marie Gailhard. 
Jean Goyne. 



Guilhaume Barrié. 
Veuve Belluc. 
Jean Larroque neveu 
Jean Larroque aîné. 
Gerlié. 

Louis Langlade. 
Jacques Fabre. 
Antoine Sylvain. 
Jacques Mestre. 
Jacques Dubia. 
Jean Baillio. 
Etienne St-Blanquart. 
Jean Paris. 
Jean Frezière. 
Pierre Salamon. 
Jean Rivière. 
Pierre Larroque. 
Jean Garrisson aîné. 
Jean Garrisson cadet. 
Jacques Ligounhe. 
Jean Miquel. 



Ge tableau, que nous reproduisons en fac^timUey nous a été obligeamment 
communiqué par M. Isidore Verges, négociant en draperies de Moutauban. 



TA-BIjEA-XT 



Vialèles-dAignan ei C" 


Lanié. 


Pécontal et y Couder 


RachoD et Cv 


Ctrenou jeune. 


Sonlié. 


Garrisson oncle et oeveu 


Calhalx. 


Borredon. 


Ligounfae cl Bonssarrot. 


Delpech. 


Sudrt. 


Furbeyre. 


SaloBion. 


Cadré! m. 


1. Vidallet. 


Albnipj, Favenc et C*. 
Debi8 tlls et Ilol[vier. 


Seno*. 


Ferdinand MalJei. 


Besson. 


Dcpantjg ataé. 


Pierre Ijcaz*. 


Veuve Borredoi. 


Prunetiï. 


Lagrtïère frères. 


Vidiillet. 




HolK Caslel neveu. 


CalYei. 


Coadere père. 


AI|)h0RBe Halltl. 


Philippe Lafargiit. 


La motte. 







Ces Tabrlcanti font une élofT* rroiiée 1res ulide, a 
Ils en font de Irai) quaiilés difTérentes pour la dwsui 
dilTÉrenlei dam chaque qualité. 

Les cadjs étroit» oni 54 centimètrea de lai^e. 

— targn, 64 â 65 centimètres. 

— 5|4, 1 mètre bO cenli mètres. 

— î|4, 1 mèlre 1(\ centimètres. 



.'( 



m 



DU MÊME AUTEUR: 

Les anoiennes Faïenceries de Kontaoban, Ardus. Nègrepe- 
iiss<*, Aiivillar, Bressols, Beaumont. etc. (Ïarn^et-Garonne). — 
Ouvrage rouronné i>ar rAcadémie de Montauban. — Moniauban, 
187(j, l vol. in-S* avec planches couleurs et noir. — Prix : 10 fr. 

Note sur des monnaies d'or et d'argent déGonvertes dans 
le Tam-et-Garonne. — Moniauban, 187'2, brochure in-8', 
— Prix : l fr. 

L'ESxposition des Beaux-Arts à Montauban (1877). — Mon- 
tauban, i877, brochure in-8* (Epuisé). 

Ii'art ancien à l'exposition uniTorselle de 1878. — Montau- 
ban, 1878, brochure in-8'. — Prix : 3 fr. 

Coup d'œil sur l'art céramique dans le Tam-et-Gfraronne 

depuis les temps primitifs jusqu'à nos jours. Lecture faite à la 
Sorbonne en 1880. — Paris, Pion. 1881. brochure in-8'. — 
Prix : 2 fr. 

Les livres de comptes d'un marchand montalbanais an 
. XIV« siècle. Ouvrage couronné par la Société archéologique du 
Midi de la France. Le plan de cet ouvrage, lecture faite à la 
Sorbonne en 1881, forme une brocliure in-8^ — Prix :^ fr. 

Les variations des monnaies au début de la ^erre de 
Cent ans. — Montauban au XIV'' siècle. — Lecture faite à la 
Sorbonne en 188Î. — Brochure, in-8'. — Prix : 2 fr. 

Les Tapisseries de Jeanne d'Arc et la Piuelle iU Chapelain, — 
Montauban, 1879, brochure in-8° avec planches chromo-litho- 
graphiées et en noir. — Priv : 3 fr. 

Excursions à Villeirancbe et à Najao. — Montauban. 1881, 
brochure avec eau forte. — Prix : 1 fr. 50 c. 



Une journée à Moissac. Excursion archéologique. — Montau- 
ban, 1882. brochure in-8'. — Prix : 50. 

Découverte d'un vase antique en bronze, incrusté d'argent, 
aux environs de Moniauban. — 1882, brochure in-8% avec plan- 
che. — Prix : l fr. 

La Veuffuda de Mo Jehan de Fransa, duc de Norman^ia, 
a Montalba, en l'an M. CGC. ZLV, chronique imitée du 
roman du XI V' siècle. — .Montauban. 1882^ brochure in- 16. — 
Prix : 3 fr. 

Trois Prélats de la Maison de Belfort (Quercy) au 
XIV' siècle. — Montauban, 1883, broohui-e in-8% -r Prix: 2 f- 



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