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Full text of "Nouveau dictionnaire de médecine et de chirurgie pratiques ... v. 40, 1886"

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Médical  Collège 

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NOUVEAU  DICTIONNAIRE 

DE  MÉDECINE  ET  DE  CHIRURGIE 

PRATIQUES 


XXVIII 


21236.  —  PARIS,    TYPOGRAPHIE   A.    LAHURE 

9,  Rue  de  Fleurus,  9 


NOUVEAU  DICTIONNAIRE 

DE  MÉDECINE  ET  DE  CHIRURGIE 


PRATIQUES 


ILLUSTRÉ  DE  FIGUUES  INTERCALÉES  DANS  LE  TEXTE 


REOIGK    PAR 

Bext.  ANCEPs  a.  m.  BAURAUER,  BERNITZ.  P.  BERT,  J.  CIIATIN,  GUSCO,  DELORME,  DÉ.NUCÊ, 

IIS>OS,  DESORMEAUX,  A.DESPRÈS.  D'HKILLY,  G.  DIEULAFOY,  Mathias  DUVAL,  FERNEf.  Alk.  FOURNIER,  A.  FOyiLLE 

T.  GALLARD,  GAUCUET,  GOSSELLN,  Alpo.  GU.':RIN,  HALLOPEAU,  A.  HARDY,   HERALD, 

HERRGOTT,  HEURTAUX,  JACœUD,  JACQUEMET,  KŒBERLÉ,  LABADIE-LAGRAVE,  LANMELO.NGUE 

LEDENTU,  R.  LÉPINE,  J.  LUCAS-CHAMPIO.NMÈRE,  LUiMER,  LUTON,  P.  MARDUEL, 

L.  MAKTINEAC.  Ca.  MAURIAC,  MERUiN.  Hujcbeut  MOÎ.LIÈRE,  ORÉ,  PANAS,  PROUST,  L.  PRU.NIEU,  M.  RAY.NAUD 

RICHET,   lUGAL,  Jules  ROCHaRD.SAINT-GERMAIN, 
r.EP.«^M>  SÉE,  SUŒDEV,  STOLTZ,  Is.  STRAUS,  A.  TARDIEU,  S.  TAR.MER,  VILl.EJEAN,  Aco.  VOISIN. 

Dlr««iear    de  1«  réd«etioB  ■  le   doaiear  J^IlCCOIJD 


TOME  VINGT-HUITIÈME 

PIL   —  POI 

AVEC  120    FIGURES   INTEnCALÉES    DANS   LE  TEXTE 


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PARIS 

LIBRAIRIE   J.-B.    BAILLIÈRE    et   FILS 

Rue  naulpfcuillp,  19,    pré»  le  boulevard  Sainl-Gormaiu 
Londres  I  Madrid 

BAILLiiRE,  F.   TI.1DALL  AlfD  COX  I  CARLOS  BAILLT-DAILLIÈRE 

1880 

Tous  droits  réservé:». 


NOUVEAU  DICTIONNAIRE 


DB 


MÉDECINE  ET  DE  CHIRURGIE 


PRATIQUES 


PILEUX  (Système).  —  Sous  le  nom  de  système  Pileux,  on  com- 
prend les  diTerses  modifications  d*un/i>«u/?roc{tnï,  constitué  par  Icspoik. 
Très- développé  chez  la  plupart  des  mammifères,  ce  système  l'est  beaucoup 
moins  chez  Thomme  ;  néanmoins,  chez  lui,  il  présente  encore  d'impor- 
tantes particularités,  dont  la  connaissance  peut  avoir  pour  le  médecin 
un  réel  intérêt.  C'est  à  la  tête  que  le  système  pileux  est  prédominant. 
les  cheveux  y  qui  recouvrent  et  abritent  le  crâne  ;  les  sourcils  et  les  cils 
annexés  à  Tappareil  de  la  vision;  les  vibrisses  protecteurs  placés  à  ren- 
trée des  narines  et  du  conduit  auditif  externe ,  puis  enfin  la  barbe^ 
attribut  de  la  virilité  ;  tous  ces  poils  se  rencontrent  sur  la  tête.  Sur  le 
tronc,  au  contraire,  à  part  les  creux  axillaires,  la  région  pubienne  et  le 
pourtour  des  organes  génitaux,  chrz  TaJulte,  ce  système  ne  présente 
qu'un  développement  très-atténué.  On  observe  cependant  encore,  surtout 
dans  le  sexe  masculin,  des  poils  longs  et  forts  en  assez  grand  nombre 
sur  la  poitrine  et  au  niveau  de  la  ligne  b!anche  ;  mais  c'est  principa- 
lement à  rétat  de  léger  duvet  que  Ton  rencontre  les  poils,  dissémi- 
nés sur  la  surface  du  corps  de  Thommc,  car  si  ces  poils  font  entièrement 
défaut  à  la  face  palmaire  des  mains,  à  la  face  plantaire  des  pieds,  on  peut 
reconnaître,  au  moyen  de  la  loupe ,  qu'aux  endroits  où  la  penu  est  la 
plus  mince  et  douce  au  toucher,  il  existe  néanmoins  un  grand  nombre  de 
poils  nidimentaires  ou  duvet.  Le  sein  le  plus  blanc,  dit  Sappey,  en 
est  ombragé  et  hérissé  sur  toute  sa  surface;  de  même  la  peau  si  transpa- . 
rente  des  paupières.  Le  nombre  total  des  poils,  qui  végètent  à  la  surface 
du  corps,  dit  le  même  auteur,  esta  peu  près  le  même,  aux  divers  âges, 
dans  les  deux  sexes,  che^  tous  les  individus ,  et  probablement  aussi  dans 
toutes  les  races  humaines  ;  mais  le  nombre  de  ceux  qui  passent  de  la 
période  rudimentaire,  à  la  seconde  période  de  leur  développement,  ou 
poils  proprement  dit,  est  très-variable.  Par  suite  de  cet  état  rudimen- 

■ovv.  MCT.  mId.  bt  cm.  XXYIII  —  I 


3  PILEUX  (Ststèhe). 

tairo  de  la  plus  grande  partie  des  poils,  la  sensibilité  des  téguments 
est  conservée  plus  exquise  que  chez  les  mammifères,  avec  leur  manteau 
protecteur  ;  c'est  par  son  industrie  que  Thomme  doit  lutter  contre  les 
variations  de  température  auxquelles  son  corps  est  exposé,  suivant  les 
climals  et  suivant  les  saisons. 

Les  poils  présentent  de  grandes  variétés  dans  leur  coloration  ;  ces 
tariétés  sont  généralement  en  harmonie  avec  celles  de  la  peau  ,  ainsi 
qu'il  nous  était  encore  récemment  permis  de  le  constater  pour  un  cas 
de  vitiligo. 

Le  professeur  Broca,  dans  un  curieux  tableau  chromatique,  en  forme 
de  cercle,  a  rassemblé  des  poils  de  toutes  les  nuances  ;  il  montre  ainsi 
que  Tâge,  le  lieu  d'implantation,  la  race  à  laquelle  appartiennent  les 
sujets  observés,  entraînent  de  nombreuses  variations  de  couleur,  sans 
parler  des  colorations  artificiellement  produites ,  professionnelles  ou 
autres. 

La  couleur  des  poils  varie  singulièrement  suivant  les  pays,  les  lati- 
tudes, les  climats,  les  températures,  le  milieu.  On  a  même  prétendu  que 
cette  couleur  dÊ  poils,  comme  celle  de  la  peau,  serait  un  attribut  carac- 
téristique des  races  humaines;  mais,  d'après  Pruney-Bey,  il  ne  faudrait 
pas  attacher  trop  d'importance  à  ce  caractère.  Et,  d'ailleurs,  ainsi  que  le 
remarque  M.  Bonté,  ne  sait-on  pas  que  les  cheveux  se  colorent  de  plus 
en  plus  chez  les  enfants,  à  mesure  qu'ils  grandissent,  parce  qu'alors  les 
'  sécrétions  se  complètent  et  se  régularisent.  Dans  nos  climats ,  outre  les 
cheveux  blancs  (presque  toujours  chez  nous  l'indice  d'un  commence- 
ment de  décrépitude  ou  de  maladies  locales  ou  générales),  on  retrouve 
les  colorations  les  plus  diverses  ;  le  noir  d'où  dérivent  le  brun  et  le  châ- 
tain, et  le  rouge  qui  va  du  blond  hardi  au  châtain  clair. 

On  a  constaté  que  si  les  couples  bruns  ou  blonds,  s'unissant  entre  eux, 
ont  produit  presque  constamment  des  bruns  ou  des  blonds  ;  les  unions 
des  bruns  avec  des  blondes  ou  réciproquement,  paraissent  avoir  donné 
lieu  à  des  rejetons  semblables  à  l'un  ou  l'autre  des  père  et  mère,  bien 
plutôt  qu'à  la  formation  d'un  type  intermédiaire  (Soc.  d'Anth.,  1860). 
A  propos  des  rapports  entre  la  coloration  des  cheveux  et  la  fécondité,  il 
semble  prouvé  que,  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  les  races  blondes  sont 
douées  de  plus  de  fécondité  que  les  brunes.  Ajoutons  que,  d'après  les 
cartes  statistiques,  là  où  les  Français  sont  grands,  ils  sont  blonds,  que  là 
où  ils  sont  petits,  ils  sont  bruns  ;  et  que  la  carie  dentaire  est  plus  fré- 
quente chez  les  individus  blonds  que  chez  ceux  de  race  brune  (Magitot). 

Les  poils  rouges  se  retrouvant  éventuellement  dans  la  plupart  des  races, 
ne  sont  pas  un  caractère  de  race.  On  sait  qu'Eusèbe  de  Salles  considérait 
l'homme  aux  cheveux  rouges  comme  l'homme  primitif.  Sans  reconnaître, 
avec  Bichat  une  certaine  connexion,  entre  la  coloration  des  cheveux  et  le 
caractère,  on  peut  expliquer  la  défaveur  qui  s'attache  assez  communé- 
ment aux  cheveux  rouges,  par  ce  fait  que  les  individus  qui  les  portent, 
exhalent  le  plus  souvent  une  odeur  forte  et  fétide  parfois  très-incom- 
mode. Toutefois,  cette  défaveur  n'a  pas  toujoui*s  existé,  car  du  temps  des 


PILEUX  (Système).  5 

Romains,  il  était  de  mode  de  teindre  les  cheveux  en  rouge,  et  cet  usage 
persiste  encore,  paraît-il,  de  nos  jours,  en  Grèce.  Les  femmes  de  ce  pays 
se  teignent  les  cheveux  en  rouge,  avec  des  décoctions  végétales. 

Nous  n'admettrons  qu'avec  de  grandes  réserves  la  couleur  des  poils  et 
spécialement  des  cheveux  parmi  les  attributs  des  tempéraments.  Cepen- 
dant la  fréquence  de  la  coloration  blonde  chez  les  scrofuleux  et  les  indi- 
vidus  lymphatiques  est  un  fait  notoire. 

Le*  variétés  dans  la  coloration  des  poils  fournissent  au  médecin  légiste 
et  au  savant,  un  des  plus  précieux  caractère  d'identité,  car  ces  tissus  résis- 
tent longtemps  à  la  putréfaction,  ainsi  qu'à  un  grand  nombre  de  causes 
Je  destructions  naturelles. 

Un  autre  caractère,  non  moins  précieux,  se  tire  de  la  forme  :  tantôt 
rigides  et  durs,  tantôt  souples,  tantôt  ondulés  et  frisés,  l'aspect  des  poils 
^t  donc  également  très-variable.  Bien  que  subissant  incontestablement 
^influence  de  la  race,  il  ne  faut  pas  méconnaître  que  ces  différentes 
formes  se  rencontrent  parfois  réunies  sur  un  même  sujet,  suivant  le  lieu 
d'implantation. 

Voici  la  classiOcation  des  races,  d'après  l'aspect  des  cheveux,  suivant 
Is.  Geoffroy  Saint-IIilaire  : 


1*  Cheveui  Ibscs. 


R.  Caucatique, 
Alt(!'ganiciiiie. 
IIyporix)réeane. 
Malaise. 
Américaine. 
Mongolique. 
Paraboréenne. 
Auslralienuc. 


o-r-i  '        .      i  R.  Elhwpique. 

z*  Cheveux  crépus  m-  1  r  r 

,  .  "^       .    \  taire, 

seresaiigulaircmeat.  i  .t., 

3"  Cheveux  crépus  in-  i  „  „  .^     ,  , 

sérés  circulaircmenl.  \  ^'  ^^^'^"'«^^• 


On  peut  classer  les  poils  en  trois  groupes  :  les  poils  longs,  les  poils 
courts,  les  poils  rudimentaires  ou  duvet.  Parmi  les  poils  longs,  les  che- 
veux par  leur  rôle,  leur  nombre,  etc.,  présentent  un  intérêt  de  premier 
ordre  ;  nous  les  étudierons  tout  d'abord.  Les  cheveux  sont  implantés  sur  le 
cuir  chevelu  ;  les  limites  de  cette  implantation  sont  variables  avec  les 
races.  Cazcnave  en  effet  a  signalé  cinq  prolongements  (sur  la  partie 
médiane  du  front,  au-dessus  de  la  partie  externe  de  l'orbite,  et  sur  les 
tempes).  Ils  limitent  en  avant  l'implantation  des  cheveux  dans  la  race 
caucasique.  Geoffroy  Saint-IIilaire  a  constaté  de  son  côté  que  dans  la  race 
hottentote  ces  cinq  pointes  font  absolument  défaut,  le  contour  antérieur 
de  la  chevelure  est  circulaire  ;  en  arrière  les  cheveux  descendent  plus  ou 
moins  bis  sur  le  cou  au-dessous  de  la  nuque.  Dans  la  race  hottentote 
(Prichard)  les  cheveux  au  lieu  d'être  régulièrement  disséminés  surlecuir 
chevelu,  sont  groupés  en  faisceaux  de  telle  sorte  que  s'ils  sont  coupés 
ras,  la  télé  prend  l'aspect  d'une  brosse  dure  de  souliers  [of  a  hard  shoe 
bru^h).  Les  cheveux  peuvent  dépasser  un  mètre  de  longueur  ;  c'est  chez  la 
femme  qu'ib  atteignent  les  plus  grandes  dimensions;  dans  certains  cas  ils 
peuvent,  comme  nous  en  avons  été  témoin,  descendre  jusqu'au  dessous  des 
genoux,  atteindre  le  milieu  du  mollet.  Bicliat  et  d'autres  auteurs  prér 


i  PILKDX  (SmÈMB). 

sentent  la  longueur  de  nos  cheveux  comme  une  preuve  à  invoquer  en 
faveur  (le  la  destination  de  Thomme   à  Tattitude  bipède;    ces  longs 
poils  généraient  prodigieusement  en  effet  pour   la  progression  dans 
l'altitude  ((uadrupcde.  Aussi  l'usage  de  couper  les  cheveux  se  rencontre 
même  chez  les  peuples  les  moins  civilisés,  dans  les  races  alléganicnnes 
(Peaux  rouges,  hyperboréennes  Esquimaux,  australiennes  Taïticns).  L'ex- 
trémité de  ces  poils  avant  toute  section  est  conique  et  plus  ou  moins  fine. 
Mais  Tusage  de  couper  les  cheveux  donne  à  cette  extrémité  une  surface 
nette,  transversale  ou  oblique,  puis  plus  tard  les  inégalités  de  lasurface  de 
section  disparaissent  l'extrémité,  s'amincit  peu  à  peu  par  l'action  du  frot- 
tement de  la  brosse  et  du  peigne.  Les  cheveux  sont  tantôt  cylindriques 
et  leur  juxtaposition  produit  l'aspect  des  cheveux  plats;  d'autrefois  aplatis 
dans  un  sens,  élargis  dans  le  sens  contraire  ils  se  contournent,  ils  frisent 
alors,  ainsi  que  cela  se  voit  pour  les  cheveux  crépus  de  la  race  nègre 
(Pruner-Bey).  De  grandes  variations  existent  dans  le  diamètre  des  che^ 
veux.  Aux  diamètres  les  plus  petits  correspondent  les  cheveux  les  plus 
ondulés.  D'ailleurs,  flexibles  et  élastiques,  ils  supportent  sans  se  rompre 
des  tiactions  considérables,   et  l'arrachement  du  cuir  chevelu  chez  les 
ouvriers,  saisis  par  leur  chevelure  dans  le  mouvement  d'une  machine, 
fait  malheureusement  bien  connu,  en  est  la  conséquence  et  la  démonstra- 
tion. Oesterlen,  cité  par  Joannet,  insiste  sur  Timporlance  qu'il  y  a  pour  le 
médecin  légiste  à  connaître  cette  solidité  du  cheveu  :  «  Que  l'on  trouve 
des  cheveux  brisés  sur  un  marteau,  sur  une  pierre,  cet  état  fragmenté  des 
cheveux  devra  faire  supposer    l'emploi  d'une  telle  force  qu'un  plan 
résisl:^nt  d'appui,  comme  un  os,  aurait  été  du  même  coup  infailliblement 
brisé.  En  outre  cette  solidité  démontre  que  les  cheveux  ou  poils  sont 
plutôt  déracinés  que  brisés  dans  leur  tige,  d'où  cette  conséquence,  quand 
la  racine  fuit  défaut,  il  est  difficile  à  priori  de  croire  à  un  arrachement.  x> 
Le  pouvoir  hygrométrique  des  cheveux  est  de  notoriété  vulgaire  depuis 
l'usage  de  l'hygromètre  à  cheveux  de  Saussure.  Quant  au  pouvoir  électrique 
il  existe  des  ditîérences  individuelles  notables.  Il  n'est  pas  rare  de  rencon- 
trer des  individus  ayant  des  cheveux  secs  et  non  frisés  chez  lesquels  on  peut 
éleclriscr  la.chevcluro  par  le  frottement  du  peigne.  Nous  avons  pu,  dans 
tes  (  onditions,  entendre  alors  do  nombreuses  crépitations,  faibles  mais 
très -distinctes  chez  un  jeune    homme  bien   portant  d'ailleurs.  Eble, 
Sappcy  ont  observé  des  faits  analogues.  Ce  dernier  auteur  ajoute  que  ce 
dégagement  dans  un  cas  dont  il  a  été  témoin  bien  que  nes'accompagnant 
d'aucime  modification  dans  l'exercice  des  fonctions  cérébrales,  était  sur- 
tout remarquable  après  un  travail  intellectuel  un  peu  prolongé. 

Les  poils  de  la  barbCy  presque  toujours  plus  ou  moins  frisés,  d'une 
teinte  généralement  plus  claire  que  les  cheveux,  présentent  comme  eux 
de  grandes  différences  individuelles,  quant  à  la  flexibilité,  la  longueur,  etc. 
On  cite  des  cas  remarquables  d'individus  ayant  des  barbes  d*une 
longueur  véritablement  extraordinaire.  Bartholin,  entre  autres,  rapporte 
qu*un  moine  avait  une  barbe  descendant  jusqu'au  sol.  La  barbe  dans 
notre  race  se  développe  au  moment  de  la  puberté  dans  le  sexe  masculin. 


PILEUX  (Système).  5 

mais  il  n'est  pas  tfès-rarc  de  constater  chez  la  femme  un  développement 
anormal  surtout  à  la  suite  de  Tépoque  de  la  ménopause.  Une  dame  de 
New-Y'ork  présenta  à  chacune  de  ses  trois  grossesses,  d*après  Slocum  un 
déTcloppement  de  barbe  sur  les  joues  et  le  menton.  L'apparition  coïnci- 
dait avec  la  cessation  des  règles,  la  croissance  atteignait  1  pouce  1/2  jus- 
qu^à  raccouchement,  puis  la  disparition  s'effectuait  au  moment  de  (a 
reprise  des  fonctions  menstruelles. 

Les  mutilations  des  organes  génitaux  avant  la  puberté  ont  un  reten- 
tissement sur  le  développement  des  poils,  qu'elles  entravent.  Mais  s'il  est 
▼rai  que  les  eunuques  n'ont  que  peu  ou  pas  de  barbe,  ce  serait  à  tort  qu'en 
généralisant  on  rattacherait  à  l'absence  de  barbe,  chez  l'homme,  l'idée  de 
faiblesse  génitale.  Il  existe  des  variétés  de  l'espèce  humaine  qui  sont 
privées  de  barbe  en  grande  partie  comme  dans  certains  rameaux  mongo- 
liqucs,  ou  même  entièrement  comme  dans  la  race  alléganienne  (Vail- 
lant). Dans  certains  cas  de  vices  de  conformation  des  organes  sexuels,  con- 
fondus à  tort  sous  la  dénomination  d'hermaphrodisme;  c'est  parfois  le 
développement  des  poils  du  visage  qui  éveille  l'altention,  et  contribue  à 
faire  reconnaître  Tidentité.  Toulei'ois  ces  individus  mal  conformés  ont  gé- 
néralement beaucoup  moins  de  barbe  et  de  moustache  que  n'en  pré- 
sentent normalement  les  hommes  bien  constitués  à  l'âge  de  puberté. 

Les  poils  du  pubis,  des  aisselles,  de  l'anus  présentent  entre  eux  une 
grande  analogie  de  forme,  de  structure,  de  longueur;  ils  apparaissent  dans 
les  deux  sexes  à  l'époque  de  la  puberté.  Chez  l'homme  les  poils  du 
pubis  entourent  la  base  de  la  verge,  contournent  les  bourses  sur  lesquelles 
on  en  rencontre    bien  encore,  mais  trcs-espacés  ;  puis  recouvrant  le 
périnée  ils  se  confondent  avec  ceux  de  l'anus.  De  même,  chez  la  femme  les 
poils  du  mont  de  venus  se  continuent  avec  ceux  qui  revêtent  la  face 
externe  des    grandes   lèvres,  mais  rarement  ils  se  prolongent  sur  le 
périnée.  Ces  poils  ont  généralement   des  teintes  plus  sombres  que  les 
cheveux;  cependant  les  poils  roux  sont  loin  d*être  rares  en  cette  région. 
Ils  sont  frisés  et  restent  assez  courts;  toutefois,  Siebold,  Yoigtel  cités  par 
L.  Vaillant,  ont  rencontré  des  faits  très-exceptionnels,  d'une  croissance 
exagérée  des  poils  du  pubis,  ceux-ci  atteignaient  le  genou.  Les  poils  des 
aisselles   comme  les  précédents   sont  généralement  frisés,  aplatis*  peu 
longs.  Presque  toujours  en  contact  avec  la  sueur  qui  est  acide  ils  sont  par 
suite  moins  colorés,  puis  cet'e  espèce  de  macération  prolongée,  le  frotte- 
ment des  vêtements  contribuent  à  les  altérer;  aussi,  souvent  la  pointe  est 
divisée  en  pinceau  de  fibres.  Les  poils  courts  qui  recouvrent  l'abdomen, 
la  poitrine,  les  membres,  sont  d'autant  moins  colorés  qu'ils  sont  plus 
courts;  leur  développement  est  surtout  marqué  à  l'âge  adulte,  dans  le 
sexe  masculin,  par  l'exagération  en  ces  points  du  duvet  ou  lanugo  que 
nous  avons  dit  recouvrir  le  corps  humain,  poils  fins  décolorés  qui  très- 
souvent  ne  sont  visibles  qu'à  l'aide  de  la  loupe.  Si  ce  développement  se 
généralise,  le  corps  prend  un  aspect  plus  ou  moins  velu  d'où  la  dénomi- 
nation d'hommes-chiens  que  reçoivent  ces  individus.  Dans  certain  cas^  le 
développement  est  limité  à  une  région  du  corps. 


6  PILEUX  (StstIme). 

Nous  insisterons  peu  sur  les  poils  annexés  aux  appareils  des  sens, 
dont  ils  sont,  par  leur  rigidité  et  leur  situalion,  les  organes  protecteurs. 
Les  sourcils,  dont  les  deux  arcades  mobiles  plus  ou  moins  fournies 
jouent  un  rôle  considérable  dans  l'expression  de  la  physionomie,  sont 
encore  utiles  en  détournant  des  paupières  la  sueur  venant  du  front,  de 
plus  ils  arrêtent  les  rayons  lumineux  supérieurs  qui  pourraient  gêner  la 
vision.   . 

Les  cils  implantés  sur  la  lèwe  antérieure  du  bord  des  paupières,  ont 
souvent  une  coloration  plus  foncée  que  celle  des  cheveux.  Ces  poils  sont 
semés  sans  ordre,  sur  une  surface  de  un  millimètre  de  hauteur  sur  trois 
centimètres  de  largeur  (Sappey).  On  en  compte  cent  à  cent  vingt  sur  cha- 
que paupière.  Ceux  de  la  paupière  supérieure  décrivent  une  courbe  à  con- 
cavité supérieure,  ceux  de  la  paupière  inférieure  ont  une  courbure  à  con- 
cavité inférieure,  d'oii  la  possibilité  du  rapprochement  des  paupières,  sans 
qu'il  y  ait  entrecroisement  des  cils.  Les  altérations  dans  la  direction  de 
ces  poils  déterminent  des  accidents,  qui  constituent  la  maladie  désignée 
sous  le  nom  de  thriciasis.  L'inflammation  réitérée  des  paupières  peut 
entraîner  la  chute  des  cils,  ce  qui  porte  un  trouble  profond  à  l'expression 
du  regard. 

On  trouve  aussi  quelques  poils  très-fins,  rudimentaires  sur  la  caron- 
cule lacrymale,  leur  fonction  est  encore  inconnue. 

Quant  aux  vibrisses  rigides  et  courtes  placées  à  la  face  interne  des  nari- 
nes, leur  direction  de  haut  en  bas,  et  leur  entrecroisement  en  forme  d'en- 
tonnoir, permet  de  se  rendre  facilement  compte  de  leur  r61c  protecteur  de 
la  muqueuse  nasale;  elles  retiennent  les  corps  étrangers,  qui  sans  cela 
viendraient  irriter  l'intérieure  des  narines.  De  même  les  poils  insérés  sur 
le  tragus  de  l'oreille  externe,  protègent  le  conduit  auditif.  Nous  n'avons 
rien  de  spécial  à  noter  au  sujet  des  poils  courts  qui  se  rencontrent  surtout 
chez  l'homme  plus  ou  moins  nombreux  et  développés,  sur  la  poitrine  et 
le  ventre,  au  niveau  de  la  ligne  blanche,  ce  qui  fait  que  l'homme,  à  ren- 
contre des  animaux,  est  plus  velu  sur  le  ventre  que  sur  le  dos.  Nous  rap- 
pèlerons  seulement  à  ce  propos  cette  remarque  d'Aristotc  que  le  singe, 
intermédiaire  à  l'homme  et  aux  quadrupèdes  est  également  velu  sur  le  dos 
et  sur  le  ventre.  Du  reste  il  est  également  à  noter  au  sujet  de  la  direc- 
tion des  poils  situés  sur  les  membres,  que  sur  les  avant-bras,  ceux-ci 
remontent  du  poignet  vers  le  coude,  disposition  qu'on  ne  retrouve  que 
chez  les  singes  les  plus  élevés  de  la  série  animale  :  gorille,  chimpanzé, 
orang-outang,  dits  singes  anthropomorphes  (Vaillant). 

Le  développement  e;[agéré  des  poils  peut  se  rencontrer  soit  généralisé 
k  tout  le  corps,  soit  limité  à  une  région  plus  ou  moins  étendue.  Dans  ce 
dernier  cas,  ils  constituent  une  variété  de  ce  qu'on  désigne  sous  le  nom  de 
signes,  s'ils  sont  très-eonfluents  dans  un  point  circonscrit.  D'autres  fois,  il 
s'agit  d'une  hypertrophie  localisée  du  système  piletix,  sur  un  membre 
par  exemple  :  A  la  suite  de  trouble  d'innervation  ayant  entraîné  un  ra- 
lentissement de  la  circulation,  ou  bien  consécutivement  à  des  lésions  du 
système  circulatoire  amenant  la  stagnation  du  sang  dans  les  capillaires, 


PILEUX  (Système).  —  anatomie.  7 

dans  la  phlébartérie  (Broca)  ;  et  les  inflammations  chroniques  locales,  i^ieux 
ulcères,  abcès  scrofuleux,  ou  même  certains  cas  de  lésions  du  squelette^ 
ostéite,  carie,  tumeur  blanche  et  fracture. 

On  rencontre  également  la  présence  de  poils  en  des  points  de  l'économie 
qui  en  sont  normalement  privés.  Ces  cas  d'hétérotopie  sont  loin  d'être 
rares.  Sédillot,  Martin,  ont  publié  des  cas  de  développement  de  poils 
dans  la  vessie;  on  en  a  signalé  également  dans  le  rectum,  dans  la  bou- 
che, etc.  Enfin  on  constate  fréquemment  la  présence  de  poils  dans  les 
kystes  dermoides  (t.  XII,  p.  748,  fig.  95),  dans  les  inclusions  fœtales. 

AiiAtomle.  —  Nous  allons  étudier  actuellement  Tanatomie  des  organes 
constituant  l'appareil  pileux  :  le  poil  proprement  dit,  et  l'appareil  produc- 
teur du  poil,  le  follicule  pileux. 

Le  poil  se  compose  d'une  partie  libre  ou  tige^  et  d'une  radnc  ;  celle-ci, 
contenue  dans  le  follicule,  renflée  à  sa  partie  inférieure,  est  molle  et 
constitue  la  bulbe  pileux,  on  y  rencontre  une  dépression  qui  a  été  com- 
parée a  un  fond  de  bouteille,  dans  laquelle  pénètre  la  papille  du  poil.  La 
ti^e  qui  se  termine  par  une  extrémité  fine,  offre  des  différences  de  lon- 
gueur que  nous  avons  précédemment  signalées.  Daprès  l'opinion  de  Brovme 
et  Pniney-Bey  les  variétés  d'aspect  qu'elles  présentent,  tiges  lisses,  bou- 
clées, frisées,  crépues,  tiennent  à  des  différences  de  forme.  C'est  ainsi  que 
les  poils  lisses  sont  cylindriques,  les  bouclés  et  frisés  sont  légère- 
ment comprimés  dans  le  sons  de  l'ondulation,  les  poils  crépus  du  nègre, 
ont  une  tige  aplatie.  Mais  les  recherches  de  Pruney-Bey  ont  été  contestées 
par  divers  micrographes,  entre  autres  par  Nathusius.  La  difficulté  de  pra- 
tiquer des  coupes  parfaitement  transversales  serait  une  cause  d'erreur  dans 
les  recherches  de  cette  nature.  Nathusius  ne  retrouve  aucune  connexion 
entre  l'ondulation  et  la  forme  des  poils;  c'est  une  question  controversée. 
Latteux  pour  pratiquer  les  sections  de  poils  rigoureusement  transversales 
a  proposé  la  méthode  suivante  :  sur  une  planchette  en  bois  de  un  centimè- 
tre carré  bien  polie,  on  tend  les  cheveux,  en  fixant  une  de  leur  extrémité 
sur  la  face  postérieure  au  moyen  de  la  cire  à  cacheter.  On  pratique  une 
petite  encoche  exactement  au  centre  de  la  planchette  et  l'on  y  fait  pénétrer 
un  à  un  les  poils  en  les  tendant  bien  parallèlement.  On  les  fera  ensuite 
pénétrer  dans  une  seconde  encoche  pratiquée  à  l'autre  extrémité  et  rabat- 
tant la  mèche  sur  la  face  postérieure,  on  la  fixera  avec  de  la  cire,  comme 
pour  le  bout  supérieur.  On  agglutine  ce  faisceau  avec  des  couches  de  col- 
lodion,  ce  qui  forme  un  cylindre  solide,  appliqué  sur  la  planchette.  Pour 
faire  la  section,  on  fixe  cette  planchette  bien  verticalement  et  bien  solide- 
ment dans  le  microtome,  et  Ton  sectionne.  Ce  procédé  aurait  permis  de 
relever  dans  l'important  mémoire  de  Pruney-Bey  de  graves  erreurs. 

On  décrit  trois  parties  constituantes  dans  la  tige  du  poil  :  l'cpiderme 
du  poil,  la  substance  corticale,  puis  au  centre  une  substance  médullaire  : 
1"*  L'épiderme,  formé  par  une  couche  très-mince,  unique  de  lamelles 
épithéliales  sans  noyau,  constitue  une  membrane  parcourue  par  des 
lignes  transversales,  irrégulières,  foncées  ;  les  lignes  sont  dues  aux  con- 
tours de  ces  lamelles,  imbriquées  de  telle  sorte,  que  les  inférieures 


8  PILEUX  (Système).  —  anatoiiie. 

recouvrent  les  supérieures.  Ces  lamelles  manquent  au  niveau  du  bulbe  ; 
elles  sont  remplacées  en  ce  point  par  des  cellules  à  noyau.  2^  La  substance 
corticale,  plus  ou  moins  colorée  dans  les  poils  de  couleur,  est  au  contraire 
transparente  dans  les  poils  blancs.  Cette  substance  fondamentale  du  poil 
est  striée  dans  toute  sa  longueur;  elle  forme  dans  son  ensemble  un 
cylindre  creux,  adhérent  par  sa  face  externe  à  la  couche  lamclleuse  pré- 
cédemment décrite;  dans  sa  cavité,  se  trouve  la  substance  médullaire.  Les 
fibres  qui  constituent  la  substance  corticale  se  composent  de  lamelles  allon- 
gées, pourvues  d'un  noyau  et  contiennent  du  pigment  disséminé  par 
taches  et  de  Tair.  Ces  lamelles,  par  transition  insensible,  prennent,  au 
niveau  de  la  racine,  la  forme  de  cellules  molles  polygonales  à  noyau  avec 
granulations  incolores  ou  pif^mcntaires.  3^  La  substance  médullaire,  for- 
mée de  cellules  irrégulièrement  cubiques,  à  noyau  pâle,  se  termine 
au-dessus  du  bulbe,  elle  fait  défaut  dans  les  poils  follets  ou  rudimentaires. 
Yuc  à  la  lumière  réfléchie,  la  substance  médullaire  est  blanche  ;  elle  est 
noire  à  la  lumière  transmise,  coloration  qui  est  due  à  la  présence  de 
bulles  d'air. 

Le  follicule  pileux  est  une  cavité  cylindroïde  qui  reçoit  la  racine  du 
poil,  c'est  une  dépression  de  la  peau;  le  follicule  proprement  dit  corres- 
pond au  derme,  la  gaine  de  la  racine  correspond  à  l'épiderme.  Dans  le 
follicule  proprement  dit  on  décrit  trois  couches  :  l'interne  hyaline,  homo- 
gène, transparente;  la  couche  moyenne,  dont  la  direction  des  fibres  est 
transversale;  enfin  une  couche  externe  vasculaire  à  fibres  longitudinales. 
Les  parois  du  follicule  se  continuent  avec  les  faisceaux  fibreux  du  derme; 
elles  avoisinent:  les  glandes  sébacées,  situées  superficiellement,  qui  s'ou- 
vrent dans  leur  cavité  et  dont  le  volume  est  généralement  en  raison 
inverse  du  volume  du  follicule  pileux  correspondant  ;  les  muscles  lisses 
de  Thorripilation  qui  s'y  attachent  et  peuvent  redresser  les  poils  ;  les 
glandes  sudorifères  et  les  vaisseaux  placés  auprès.  Au  fond  du  follicule, 
la  papille  du  poil^  analogue  aux  papilles  du  derme,  forme  un  renflement 
conique  constitué  par  des  cellules  à  noyau,  contenant  un  réseau  capillaire 
et  probablement  aussi  les  derniers  filets  nerveux  provenant  du  plexus  à 
grandes  mailles  irrégulières  disposé  autour  de  la  moitié  inférieure  ou 
profonde  des  follicules  pileux.  —  La  gaine  de  la  racine,  simple  dépression 
de  l'épiderme,  est  comme  lui  réductible  en  deux  lames  secondaires. 
L'exteiTic  ou  muqueuse  a  la  même  structure  que  la  couche  de  Malpighi, 
elle  est  beaucoup  plus  épaisse  que  l'interne  ou  cornée.  Celte  dernière 
lame  se  compose  de  cellules  allongées  sans  noyau.  —  D'après  les  recherches 
de  Kôlliker,  le  germe  constituant  le  premier  indice  de  l'appareil  pileux 
chez  l'homme  apparaît  vers  la  fin  du  troisième  mois  de  la  gestation. 

La  composition  chimique  des  poils  est  intéressante  à  connaître  :  chacun 
sait  qu'exposés  à  la  flamme  ils  se  consument  et  brûlent  avec  une  odeur  de 
corne.  Leur  tissu  est  soluble  dans  les  acides  et  les  alcalis  concentrés.  On 
y  retrouve  la  graisse  sécrétée  par  les  glandes  sébacées,  puis  du  phosphate, 
du  carbonate  de  chaux,  de  la  silice,  puis  enfin  du  soufre  et  du  fer  à  l'état 
d'oxyde  de  fer.  D'après  Mialhe,  l'ingestion  des  ferrugineux  aurait  pour 


PILEUX  (Système).  —  anatouie.  0 

efTet  de  foncer  la  coloration  des  cheveux.  Cazin  a  publié  le  fait  curieux 
d*une  jeune  fille  chez  laquelle  la  chlorose  apparaissait  quand  on  laissait 
pousser  les  cheveux,  et  disparaissait  quand  on  les  coupait.  Les  poils  sem- 
bleraient donc  une  des  voies  d^élimination  du  fer  introduit  dans  l'écono- 
mie. Vaillant,  d'après  Heusinger,  cite  le  cas  très-rare  d'une  sécrétion 
pigmcnlaire  fort  abondante,  au  point  de  noircir  des  vêtements. 

Maladies  du  système  pileux.  —  Les  modifications  pathologiques  du 
poil  humain  peuvent  être  divisées  de  la  manière  suivante  :  augmentation 
ou  diminution  de  nombre,  hypertrophie  ou  atrophie,  altération  de  cou- 
leur, de  direction,  altération  de  structure  et  maladies  parasitaires.  Nous 
nous  bornerons  à  rappeler  ici  les  noms  sous  lesquels  sont  connues  ces 
différentes  lésions  de  l'appareil  pileux,  en  renvoyant  le  lecteur  aux  articles 
spéciaux  :  la  Canilie  et  les  colorations  accidentelles  par  diverses  matières 
colorantes  dont  les  poils  sont  susceptibles  de  s'imprégner  ;  YAlopécie,  avec 
ses  nombreuses  yariétés  d'origine  :  absence  congénitale,  chute  sénile,  Talo- 
pécie  partielle  souvent  due  à  des  altérations  des  follicules  pileux  :  alopécie 
des  convalescents,  celle  d'origine  syphilitique  (Voy,  1. 1);  le  Porrigo  dé- 
calvanSy  les  Teignes  (Favus  [t.  XIV]  et  Tricophylie),  puis  les  diverses 
lésions  de  la  peau  d'origine  diatiiésique  localisées  au  follicule  pileux  : 
acné  (Voy.  1. 1),  eczéma  (Voy:  t.  XII),  lichen  pilaris,  etc. 

ÉpilAtoiF€«i.  —  Nous  donnerons  sur  les  épilatoircs  quelques  détails 
que  nous  emprunterons  au  livre  de  Piesse  sur  les  cosmétiques  : 

Sous  ce  nom,  on  comprend  les  préparations  usitées  pour  dépiler,  c'est- 
à-dire  détruire  les  poils  de  quelques  parties  du  corps.  Un  grand  nombre 
de  ces  substances  ont  une  composition  dangereuse.  Les  Turcs  et  les  Persans 
se  servent  du  Rusma,  qui  est  un  mélange  de  chaux  vive  8,  pour  orpi- 
ment 1,  que  l'on  délaye  avec  un  peu  de  blanc  d'œuf  et  de  lessive  de 
savonnier.  La  crème  [parisienne  a  une  composition  analogue  :  chaux  vive 
60  grammes,  sulfure  d'arsenic  15  grammes,  orcanelte  8  grammes.  De 
même  la  poudre  Laforest,  dont  il  a  été  donné  la  formule  tome  IX,  p.  541 . 
Les  poudres  Delcroix,  celle  de  Colley  contiennent  également  de  Tai^scnic. 
On  s'explique  aisément  les  accidents  d'intoxication  qui  ont  été  signalés  à 
la  suite  de  l'emploi  fait  sans  précaution  et  longtemps  prolongé  de  prépa- 
rations aussi  dangereuses,  dont  l'elfct  épilatoire  est  d'ailleurs  assez 
infidèle.  Les  plus  usitées  sont  :  1^  le  mélange  épilatoire  de  Marlins  et 
Boettger  :  sulfure  sulfuré  de  calcum,  hydrosulphatc  ou  sulfydrate  de  chaux  ; 
^  la  poudre  -de  Boudet  qui,  elle  aussi,  ne  contient  pas  de  substance 
toxique  mais  peut  devenir  en  des  mains  inhabiles  la  cause  de  lésions 
assez  sérieuses  au  point  d'application.  On  a  vu  en  effet  survenir,  après 
une  application  mal  faite  ou  trop  prolongée,  une  irritation  de  la  peau 
pouvant  entraîner  la  formation  de  pustules  et  même  de  cicatrices.  En 
voici  d'ailleurs  la  composition  : 


Sulfure  de  sodiam  cristaUisé 3  grammes. 

Chaux  YÎTe  en  poudrf^ .  .    10         — 

AnûdoM 10         — 


<0  PILOCARPINE. 

On  délaye  celle  poudre  dans  un  peu  d'eau,  et  on  laisse  la  pâte  appliquée 
sur  la  peau  pendant  1  ou  2  minutes. 

Réveil,  dans  une  addition  au  livre  de  Piesse  (p.  224),  a  indiqué  un 
dépilatoire  ainsi  formulé  : 

Sulfbydmtc  de  chaax  en  pAte  bien  égoatté 20  grammes 

Eitsence  de  cilron 10  goultes. 

Glycéro!é  d'amidon      10   grammes. 

Amidon 10  — 

Suivant  Burnelt,  le  suc  des  feuilles  de  ïhemandia  sonora  est  un  épi- 
latoire  précieux  el.  puissant  qui  détruit  le  poil  sans  nuire  à  la  peau. 

Nous  rappelerons  enfin  que  pendant  longtemps  on  a  fait  usage,  spéciale- 
ment pour  arracher  les  cheveux  dans  le  traitement  de  la  teigne,  d'une 
calotte  en  poix.  Par  ce  moyen  très-douloureux  on  obtenait,  Tarracheraent 
des  cheveux,  mais  ce  procédé  barbare  est  aujourd'hui  abandonné;  Tépila- 
tion  par  la  pince  plate,  journellement  employée  à  l'hôpital  Saint-Louis 
donne,  lorsqu'elle  est  faite  avec  patience  et  par  des  mains  exercées,  d'ex- 
cellents résultats  (Vog.  art.  Favls,  t.  XIV,  p.  551);  cette  méthode  e^t, 
il  est  vrai,  un  peu  longue,  mais  elle  est  facilement  tolérée  même  par 
des  enfants,  sans  qu'il  soit  besoin  d'employer  préalablement  à  l'épila- 
tion  l'anesthésie  locale. 

« 

BEAUKiset  BoccHABo.  Anatomîe  descriptive.  3*  ^dit.,  Paris,  1879. 

BicBAT.  Anatomîe  générale.  Paris,  1830,  t.  IV. 

Cazenave  (A).  Traité  des  maladies  du  cuir  chevelu.  Paris,  1850. 

Brocâ.  Traité  des  aiiérrysmcs. 

Hateh.  Revue  des  Science»  médicales, 

JoANRET.  Le  poil  humain,  ses  variétés  d'aspect,  leur  signification  en  médecme  judiciaire,  thèse  de 

Paris.  1878,  n«  179. 
KoLLiiBR.  Traité  d*histologie. 

Sappet.  Analomie  descriplïTe.  3*  édit.,  1877^  t.  HI,  p.  640. 
Société  d* anthropologie^  Bulletins  et  mémoires.  1860. 

Vailunt.  Essai  sur  le  système  pileux  dans  l'espèce  humaine.  Thèse  de  Paris.  1861,  n*  144. 
Piesse  (S).  Des  odeurs,  des  parfums  et  des  cosmétiques,  2*  édition.  Paris,- 1877. 

E.  Ort. 

PILiOCARPIl!V£  (^aborandi).  —  La  pilocarpine  est  Talcaloîde 
extrait  du  Pilocarpus  pinnatus,  de  la  famille  des  Rutacées.  C'est  sous  le 
nom  de  jaborandi ,  que  le  docteur  Coutinho  de  Pernambuco  présenta, 
en  1873,  et  remit  à  Gubler  des  échantillons  d'une  plante  douée,  disait- 
on,  de  propriétés  sialagogues  et  diaphorétiques  remarquables.  Les  expé- 
riences entreprises  ne  donnèrent  pas  des  résultats  identiques ,  ce  qu'on 
s'explique,  maintenant  que  Ton  sait  qu'un  grand  nombre  de  plantes  de 
natures  très-diverses,  portent  au  Brésil  le  nom  de  jaborandi.  En  efTet, 
l'échantillon  importé  par  le  docteur  Coutinho,  expérimenté  par  Gubler, 
appartient,  suivant  Bâillon,  à  la  famille  des  Rutacées.  C'est  le  Pilocarpus 
pinnaius;  tandis  que  d'autres  plantes  vendues  au  Brésil,  également  sous 
le  nom  de  jaborandi,  et  expédiées  ultérieurement  en  France,  sont  des 
produits  de  la  famille  des  Pipers. 

Au  dix-septième  siècle,  Pison  et  Marggraff  (Materia  medica)  ont  décrit 
trois  jaborandi  ligneux,  frutescents,  qui  appartiennent  au  genre  piper;  l'un 
d'eux  est  le  Serronia  jaborandi,  très-répandu  au  Bréisil.  D'autres  jabo- 


• 


PILOCARPINE.  —  HISTOIRE  naturelle.  il 

randi  appartiennent  à  la  famille  des  Scrofulariécs,  ce  sont  les  Hespestes; 
enfin  le  Monniela  trifoliala  est  de  la  Tamille  des  Rutacées.  C'est  cette 
dernière  plante  que  Lemaire,  en  1852,  avait  nommée  le  PUocarpus pen- 
natifolius.  Ce  genre  pilocarpus  de  famille  des  Rutacées,  est  très-voisin 
du  genre  Citrus.  Parmi  les  plantes  vendues  au  Brésil,  communément  sous 
le  nom  de  jaborandi ,  il  faut  citer  VOttoma  anisum,  le  Serroconia  jabo- 
randi,  le  Piper  nodosum^  \e  Piper  reticulatum  et  le  Piper  citrifolium; 
quelques  espèces  du  genre  Esenbeckia  et  certaines  Rutacées.  Il  existe  au 
Jardin  des  Plantes  de  Paris,  un  Pilocarpus  simplex. 

Les  premières  recherches  sur  la  valeur  thérapeutique  du  jaborandi, 
ayant  été  entreprises  par  Gubler  en  France  (1874),  avec  le  Pilocarpus 
pinnaiifbliuSj  nous  donnerons  ici,  d*après  Planchon,  les  caractères 
botaniques  de  cette  Rutacée,  tels  qu'il  les  a  indiqués  dans  le  Journal  de 
pharmacie  et  de  chimie,  en  mars  1875. 

HisToiBB  RATUBELLE.  —  Lcs  racincSy  cylindroïdes,  d'une  couleur  jaune* 
orange  pâle,  présentent  une  écorce  de  deux  à  trois  millimètres,  une  cas- 
sure grenue  qui  laisse  voir  à  la  loupe  de  nombreuses  larmes  d'une  matière 
résinoïde  ;  il  y  a,  au  centre,  un  cylindre  ligneux  d'un  blanc  satiné.  Sa  sa* 
veur,  d'abord  un  peu  nauséeuse,  devient  promptcment  piquante  et  fraîche. 

Les  tiges  sont  recouvertes  d'une  écorce  d'un  gris  noirâtre  tacheté  de 
blanc.  Au-dessous  de  la  couche  subéreuse,  on  trouve,  par  la  cassure,  un 
tissu  blanc  jaunâtre  parsemé  de  larmes  résinoïdes.  Au  microscope , 
l'écorce  présente,  au-dessous  de  plusieurs  rangées  de  couches  subéreuses, 
de  nombreuses  cellules  parenchymateuses,  dont  quelques-unes  renfer- 
ment des  cristaux  en  rosette.  De  grosses  glandes  apparaissent  â  la  loupe, 
dans  les  couches  externes  ;  elles  sont  oblongues,  à  grand  diamètre  dirigé 
dans  le  sens  tangentiel ,  sans  paroi  propre  ;  des  cellules  résinifères  se 
trouvent  dans  le  tissu  du  liber.  Les  feuilles  sont  composées  imparipennées 
à  neuf  folioles  le  plus  souvent,  rarement  sept  ou  neuf;  elles  ont  un 
pétiole  épaissi  à  la  base,  creusé  en  gouttière  supérieurement.  Ces  fo- 
lioles sont  fermes,  coriaces,  elliptiques,  obtuses  au  sommet;  elles  ont 
une  nervure  médiane  saillante.  Sur  leur  face  inférieure,  on  ren- 
contre de  nombreuses  glandes  translucides,  sous  forme  de  taches 
brunes  punctifonnes,  présentant  â  la  loupe  l'aspect  de  petites  dépressions 
remplies  d'un  exsudât  résinoïde.  Les  feuilles  adultes  sont  glabres,  leur 
saveur  est  nauséeuse,  aromatique,  leur  odeur  rappelle  l'odeur  des  feuilles 
d'oranger. 

La  structure  de  ces  feuilles  est  la  suivante  :  un  cuticule,  amorphe  â  la 
surface,  recouvre  les  cellules  longues  et  étroites,  où  Ton  rencontre  la 
chlorophylle  ;  un  parenchyme  lâche  de  cellules ,  renfermant  de  la  ma- 
tière granuleuse  verte  contient,  dans  son  épaisseur,  des  glandes  oléifères. 
•C'est  à  la  partie  inférieure  que  sont  placées  les  stomates. 

Les  fleurs,  portées  par  un  pédoncule  de  cinq  à  six  millimètres,  ont  un 
calice  à  cinq  dents,  les  pétales  épais,  d'un  gris  fauve,  et  possèdent  des 
glandes  oléifères.  11  y  a  cinq  étamines  au-dessous  d'un  disque  annulaire 
très-développé.  Les  fleurs  ont  une  odeur  de  citron. 


12  PILOCARPINE.  —  prophètes  orgaroleptiques. 

Les  fruité,  de  quinze  millimètres  de  long,  sur  dix  de  large,  sont  ainsi 
conslitués  :  des  carpelles  réniformes  à  Taces,  latérales,  bombées,  brunes, 
marquées  de  taches  lenticulaires  noires  ;  une  enveloppe  extérieure  repré- 
sente le  mcsocarpe  et  Tépicarpe;  Tendocarpe  est  ligneux,  il  renferme  une 
graine  unique. 

Tels  sont,  d*après  Planchon,  les  principaux  caractères  du  pilocarpus 
pennatifolius. 

Dans  une  note  publiée  par  Gubler,  dans  le  Journal  de  thérapeuti- 
que (1875),  on  trouve,  par  contre,  décrit  le  piper  reticulatum,  qui  |K)s- 
sède ,  dit-il  :  «  le  double  caractère  d'avoir  des  feuilles  dont  la  forme  rap- 
pelle assez  exactement  celles  du  citronnier,  et  dont  les  nervures 
nombreuses  et  saillantes,  fréquemment  anastomosées ,  lui  ont  valu  son 
nom.  Cet  arbrisseau,  d'un  mètre  environ,  a  des  tiges  fasciculées  à  la 
base,  simples  et  dénudées  dans  la  moitié  de  leur  longueur,  cylindriques, 
très-étroites  et  articulées  à  la  manière  de  celles  des  bamboux  ;  elles  sont 
chargées  en  haut  de  feuilles  altemes,  brièvement  pétiolées,  lancéolés» 
obtuses,  d'un  vert  foncé,  entremêlées  parfois  de  chutons  mâles.  »  Cette 
variété  de  jaborandi  a  été  expérimentée  comparativement  avec  le  pilocar- 
pus pennatifolius.  C'est  pour  cela  que  nous  avons  rapporté  ici  quelques- 
uns  des  caractères  de  cette  plante. 

Le  pilocarpus  pennatifolius  apporté  en  Europe  par  Libon,  en  1847, 
avait  été  recueilli  dans  la  province  de  Saint-Paul  du  Brésil;  il  est  cultivé 
au  Jardin  des  Plantes  de  Paris,  sous  le  nom  de  pilocarpus  simplex,  mais 
Bonpland,  antérieurement,  l'avait  récolté  dans  la  province  de  Corrientes 
et  étiqueté  :  Picada  di  Trinidad.  «  La  connaissance  de  cette  localité, 
dit  le  professeur  Bâillon ,  est  précieuse,  parce  que,  si  contrairement  à 
tapt  de  médicaments  dont  la  réputation  n'a  guère  survécu,  ce  jaborandi 
continuait  d'être  recherché  en  thérapeutique ,  la  plante  pourrait ,  sans 
doute,  être  cultivée  avec  succès  dans  le  midi  de  l'Europe  et  dans  notre 
colonie  algérienne.  x> 

PnopRiÈTÉs  ORGANOLEPTiQUEs  ET  CHIMIQUES.  —  Lcs  feuillcs  ct  la  plante 
entière   exalent   une  odeur  légèrement  aromatique,  qui   se  prononce 
davantage,  si  on  les  froisse  entre  les  doigts.  Elles  sont  d'une  saveur  acidulé 
au  début,  puis  chaude  et  piquante  ;  cette  saveur  se  retrouve  dans  la  tige,    , 
mais  surtout  dans  la  racine  et  principalement  dans  les  divisions  un  peu    j 
'  volumineuses   de   la   grandeur    d'une  plume  de    corbeau.  La  saveur    ; 
piquante  devient  cuisante  et  détermine  des  scintillations  douloureuses,    \ 
des  frémissements  vibratoires  de  la  langue  et  des  lèvres,  avec  une  sccré-    . 
tion  trcs-active  de  la  salive.  Lorsqu'on  a  rejeté  la  pulpe  sapide,  les  effets   \ 
persistent  encore  un  certain  temps,  puis  disparaissent  progressivement,    ] 
laissant  une  grande  fraîcheur  dans  la  bouche,  avec  une  anesthcsie  gusta-   i 
tive  incomplète.  •; 

Quand  on  distille  de  l'eau  sur  des  feuilles  de  jaborandi,  le  produit  de 
la  distillation  a  une  odeur  aromatique  et  une  saveur  poivrée.  ^ 

On  émit  tout  d^abord  l'hypothèse,  que  le  pilocarpus  pinnatus  devait  i 
son  action  sur  l'économie  à. son  huile  essentielle,  le  Pilocarpène  C^*  11^*,  ^ 


PILOCARPINE.  —  DOSES,  pbepabatioiis.  13 

liquide  incolore  mobile  (densité  à  18*  0,852)  qui  dévie  à  droite  la 
lumière  polarisée;  on  a  reconnu,  depuis,  que  ces  elTets  sont  dus  à  un 
alcaloïde,  la  pilocarpine.  En  effet,  c'est  en  mai*s  1875  que  E.  Hardy 
obtint  la  pilocarpine. 

Le  procédé  d'extraction  de  cet  alcaloïde  fut  le  suivant.  On  fait 
successivement  un  extrait  aqueux  et  alcoolique  de  jaborandi,  puis 
on  traite  par  Tacétate  de  plomb  ammoniacal,  on  élimine  le  plomb 
en  excès  par  Thydrogène  sulfuré,  on  ajoute  à  la  liqueur  du  bichlo- 
rure  de  mercure.  Le  précipité  formé  est  séparé  des  eaux  mères,  puis  traité 
par  rhydrogène  sulfuré;  on  obtient  ainsi  du  chlorhydrate  de  pilocarpine. 
Ce  sel,  soluble  dans  l'eau,  insoluble  dans  l'alcool  absolu  et  l'étber,  forme, 
avec  le  chlorure  d'or,  un  sel  double  parfaitement  cristallisé.  Pour  en 
retirer  la  pilocarpine,  il  sufGt  de  la  décomposer  par  l'ammoniaque,  en 
présence  du  chlorororme.  Cet  alcaloïde)  bien  distinct  de  l'huile  essen- 
tielle, du  carbure  d'hydrogène  que  contient  la  plante,  possède  les  pro- 
priétés physiologiques  du  jaborandi. 

M.  Gerrard,  qui  a  poursuivi  de  son  côté  des  recherches  sur  ce  sujet, 
obtint,  peu  après,  cet  alcaloïde.  Voici  le  résumé  de  son  procédé  :  il  pré- 
pare l'extrait  mou  en  épuisant  les  feuilles  ou  Técorce  par  Talcool  à  50*  ; 
reprend  par  Teau  cet  extrait,  filtre,  évapore,  ajoute  de  l'ammoniaque,  puis 
agite  fortement  avec  du  chloroforme.  Le  chloroforme  en  s'évaporant 
laisse  déposer  la  pilocarpine,  et  cet  alcaloïde  peut  se  combiner  avec 
l'acide  nitrique  et  l'acide  chlorhydrique  pour  former  des  sels  cristalli- 
sables.  Cet  auteur  indique,  comme  entrant  aussi  dans  la  composition  du 
jaborandi,  une  résine  acre,  une  huile  volatile,  du  tannin,  de  la  chloro- 
phylle (J.  de  pharm.  et  chimie,  février  1876).  Duqucsnel,  Petit,  ont  légè- 
rement modifié  et  simplifié  ces  procédés  d'extraction.  Enfin  Kingzett, 
pour  obtenir  la  pilocarpine,  opère  ainsi.  Il  épuise  les  feuilles  de  jabo- 
randi, avec  de  I  eau  à  70'',  acidulé  le  liquide  obtenu,  chauffe  pour 
coaguler  les  substances  albumineuscs,  filtre,  précipite  l'alcaloïde  par 
Tacide  phosphomolybdique,  traite  le  précipité  par  une  solution  chaude  de 
baryte  et  enlève  l'excès  de  baryte  par  un  courant  d'acide  carbonique. 
D'après  lui,  la  formule  de  la  pilocarpine  amorphe  serait  C".  IP*.  Az*.  0*. 

La  pilocarpine  a  été  combinée  avec  divers  acides  :  avec  Tacide  nitrique 
et  chlorhydrique.  Il  se  forme  des  sels  bien  cristallisés;  on  a  éga- 
lement obtenu  du  phosphate  et  de  l'acétate  de  pilocarpine. 

Doses,  PRÉPAUAHoris,  mode  d'administration.  —  Les  premières  expé- 
riences, faites  à  l'hôpital  Beaujon  dans  le  service  de  Gubicr,  ont  été  pra- 
tiquées en  employant  le  jaborandi  sous  forme  d'infusion  de  feuilles,  de 
petits  rameaux  concassés,  ou  d^écorccs  ;  ou  bien  en  extrait  aqueux,  puis 
en  élixir  et  en  sirop.  Après  la  découverte  de  la  pilocarpine,  le  mode  d'ad- 
ministration fut  simplifié,  et  l'on  put  prescrire  Talcalôïde,  ou  bien 
les  sels  :  azotate,  chlorhydrate,  acétate  de  pilocarpine,  en  solution,  et 
par  suite,  soit  en  injection  hypodermique,  soit  en  collyre. 

L'infusion  de  jaborandi  se  peut  prescrire  à  la  dose  de  4  grammes  de 
Ceuilles  infusées  pendant  15  minutes  dans  125  grammes  d'eau  bouillante 


14  PILOGARPINE.  —  propriétés  et  effets  physiologiques. 

On  peut  atteiadre  6  grammes  chez  Thomme  adulte.  Souvent  2  grammes 
suffisent  chez  la  femme  ;  il  serait  imprudent  de  dépasser  cette  dose  pour 
un  enfant. 

La  dose  d'extrait  aqueux  employée  par  A.  Robin  ^arie  entre  0,90  cen- 
tigrammes et  1  gr.  50  centigrammes,  suivant  Tâge  et  le  sexe.  D'après 
Constantin  Paul,  1  gramme  d'extrait  correspond  à  5  grammes  de  feuilles. 
Pour  Telixir  de  jaborandi  préparé  par  Colliguon,  0,20  centigrammes  cor- 
respondent à  4  grammes  de  feuilles. 

On  emploie  maintenant  l'alcaloïde  du  jaborandi  en  solution.  Les  injec- 
tions hypodermiques  ont  été  trè&-souvent  |)ratiquces  chez  l'homme,  soit 
avec  une  solution  titrée  de  pilocarpine,  soit  avec  une  solution  de  nitrate 
ou  de  chlorhydrate  de  pilocarpine,  sans  qu'on  ait  noté  d'accidents  par 
irritation  locale. 

Pour  le  nitrate  de  pilocarpine,  la  dose  est  de  1  à  4  centigrammes;  pQur 
le  chlorhydrate,  les  doses  doivent  être  plus  faibles  encore.  On  peut  dis- 
soudre ces  sels  dans  l'eau  distillée,  ou  bien,  comme  l'a  fait  Courserant 
dans  l'eau  de  laurier  cerise.  Quand  on  se  sert  de  cetle  substance  sous 
forme  de  collyre,  on  constate  des  effets  locaux  (myosis  et  légère  contrac- 
ture) avec  une  seule  goutte  d'une  solution  à  2,5  pour  100  déposée  sur  la 
cornée. 

Propriétés  et  effets  physiologiques.  —  Dans  uu  important  mémoii^ 
qui  a  pour  titre  :  Études  physiologiques  et  thérapeutiques  sur  le  Jabo- 
randi (pilocarpus  pinnalus),  l'auteur,  A.  Robin,  a  publié  les  premières 
expériences  dont  il  a  été  témoin  à  l'hôpital  Beaujon  dans  le  service  de 
Gubler.  Les  faits  nombreux  qui  s'y  trouvent  consignés  ont  été,  depuis, 
presque  tous  entièrement  vérifiés,  il  convient  de  ne  pas  l'oublier  ;  car 
les  résultats  obtenus  par  le  jaborandi  (infusion  et  extrait  aqueux)  sont  les 
mêmes,  à  peu  de  chose  près,  que  ceux  constatés  par  l'emploi  de  la  pilo- 
carpine et  ses  sels. 

Les  effets  physiologiques  produits  par  l'ingestion  d'une  dose  suffisante 
sont  les  suivants  :  sudation,  salivation,  larmoiement,  augmentation  des 
sécrétions  bronchiques,  hypcrcrinie  nasale.  Mais  ces  phénomènes  qui 
sont  assez  constants,  sinon  dans  leur  intensité,  du  moins  dans  leur  appa- 
rition, sont  susceptibles  d'un  grand  nombre  de  variations. 

L'infusion  de  jaborandi  est  un  excellent  sudorifique;  la  sudation  est 
annoncée  par  quelques  symptômes  précurseurs  ;  rougeur  de  la  face, 
battements  des  artères  temporales,  sentiment  de  plénitude  des  régions 
les  plus  vasculaircs,  parfois,  mais  rarement,  un  peu  de  vertige.  La  durée 
moyenne  de  la  sueur,  depuis  son  début  jusqu'à  sa  terminaison  complète 
varie  de  2  à  3  heures.  D'après  Strumpf,  la  sudation  qui  s'établit  sous 
l'influence  du  jaborandi,  a  varié  dans  48  cas  de  diaphorèsc,  entre  98  et 
895  grammes,  soit  en  moyenne  474  grammes  ;  environ  cinq  fois  plus 
qu'à  l'état  normal.  La  sécrétion  sudorale  Unit  presque  toujours  par  les 
parties  qu'elle  a  envahies  les  premières,  c'est-à-dire  la  face,  le  sommet  de 
la  poitrine,  les  mains  (Albert  Robin). 

Les  qualités  de  la  sueui*  se  modifient,  d'acide  qu'elle  était  au  début, 


PDXKIARPINE.  —  PROPRIÉTÉS  et  effets  physiologiques.  15 

celle-ci.  (end  à  avoir  une  réaction  plus  ou  moins  franchement  alcaline  ; 
ses  caractères  chimiques  sont  également  modifiés,  Turéc,  les  chlorures, 
sont  éliminées  en  plus  grande  abondance.  Gillet  de  Grandmont,  dans  ses 
eipériences  faites  avec  des  injections  de  pilocarpine,  a  retrouvé  dans  la 
sueur  une  certaine  proportion  de  Talcaloïde. 

La  sécrélion  scUivaire  est  sensiblement  influencée  :  on  perçoit,  tout 
d^abord,  un  sentiment  de  chaleur  dans  la  «bouche,  parfois  un  peu  de  sensi- 
bilité dans  la  région  sous-maxillaire.  La  salivation,  qui  débute  d'ordinaire 
plustôtquc  la  sudationdure  moins  longtemps  qu'elle.  Limousin  1878,  avec 
le  réactif  de  Winkler,  a  reconnu  dans  la  salive  la  pilocarpine,  après  une 
injection  sous-cutanée  de  cette  substance.  L'effet  sialagogue  du  jaborandi 
ou  de  la  pilocarpine  se  manifeste  également  chez  les  animaux  (Hardy, 
Bochefontaine)  :  le  chien,  le  cheval,  la  souris.  Pour  Dumas,  qui  entreprît 
des  expériences  dans  le  service  de  Siredey,  avec  de  la  pilocarpine  préparée 
par  Duquesncl,  la  principale  action  de  cette  substance  est,  avant  tout, 
d'augmenter  la  sécrétion  salivaire  ;  il  pense  même  que  ses  propriétés 
sudonfiqucssoni secondaires.  Chez  les  individus  qui  ne  salivent  point,  on 
constate  souvent  des  vomissements,  du  malaise,  des  nausées,  une  ten- 
dance à  la  syncope,  ou  seulement  de  la  défaillance.  Gillet  de  Grandmont 
en  tire  cette  conclusion,  que  les  glandes  salivaires  sont  Tune  des  princi- 
pales voies  d'élimination  du  jaborandi,  car  ces  accidents  sont  probable- 
ment dus  à  l'action  de  la  pilocarpine  sur  la  muqueuse  de  l'estomac. 

Sehvrahr  confirmant  les  expériences  de  Garville,  a  constaté  que  le  flux 
salivaire  ne  s'arrête  pas  chez  un  chien  soumis  à  l'action  du  jaborandi, 
ni  par  la  section  de  la  corde  du  tympan,  ni  par  l'arrachement  du  ganglion 
cervical  supérieur.  11  vit  que,  sous  l'influence  de  ce  produit,  le  sang  qui 
s'écoule  par  une  ouverture  pratiquée  sur  la  glande  sous-maxillaire,  est 
d'un  rouge  plus  clair  et  d'une  abondance  plus  grande  ;  que  coi  effet  per- 
siste encore  après  la  section  de  la  corde  du  tympan. 

Il  faut  admettre  l'hypersécrétion  du  mucus  dans  toute  l'étendue  du 
tube  digestif.  Les  vomiturilions,  les  rejets  glaireux  filants  semblent  le 
démontrer;  parfois  des  selles  diarrhéiques  ont  été  constatées  et  cela  prin- 
cipalement lorsque  la  diaphorèse  est  entravée  ou  supprimée.  Quand  il  y 
a  déviation  de  l'action  du  pilocarpus,  dit  A.  Robin,  au  vomissement  vient 
toujours  se  joindre  une  diarrhée  d'abondance  variable,  précédée  souvent 
de  coliques.  Celte  diarrhée  cesse  comme  les  vomissements,  quand  la  plus 
grande  partie  du  principe  actif  du  jaborandi  a  été  rejetce.  —  Chez  les 
animaux,  on  a  pu  vérifier  que  toutes  les  glandes  du  tube  digestif  sont  ex- 
citées, et  que  le  foie  et  le  pancréas  participent  à  l'hypercrinie  générale. 

Les  effets  sur  les  sécrétions  lacnjmales,  nasales  et  trachéobronchiques 
sont  moins  constants.  L'hypercrinie  nasale  manque  souvent,  de  même 
aussi  l'augmentation  de  sécrétion  de  la  muqueuse  trachéohronchique. 
Toutefois,  généralement,  sous  l'influence  du  jaborandi  les  crachats  sont 
rendus  plus  fluides,  ils  sont  plus  faciles  à  détacher,  et  sont  expulsés 
bientôt  après  sans  effort.  Mais,  quand  l'action  du  jaborandi  cesse,  à 
l'hypercrinie  passagère,  succède  un  sentiment  de  sécheresse  de  la  gorge. 


16  PILOGARPINE.  —  propriétés  et  effets  physiologiques. 

et  dans  certains  cas  de  bronchorrhée  (Giibler,  A.  Robin),  la  quantité  des 
crachats  rendus  ultérieurement  fut  diminuée  ;  cet  état  persiste  parfois 
environ  24  heures  après  l'administration  du  jnborandi. 

L'action  sur  les  urines  est  variable,  semble-t-il,  suivant  les  doses  absor- 
bées. La  quantité  d'urines  rendues  parait  être  tout  d^abord  en  raison 
inverse  de  l'abondance  de  la  transpiration.  Mais  si  le  jaborandî  est  admi- 
nistré à  doses  fractionnées,  l'augmentation  possible  des  urines  a  été  notée. 
Le  fait  a  été  vérifié  par  Rendu,  et  par  Langlet  [(de  Reims).  Ce  dernier 
auteur  a  constaté  une  véritable  hématurie,  dans  un  cas  où  l'on  avait  dû 
prolonger  longtemps  l'usage  du  médicament.  Cette  hématurie  se  déclara 
alors,  sans  doute,  par  suite  de  Texcès  du, travail  imposé  aux  reins. 

«  La  diminution  de  la  quantité  d'urine  sécrétée,  dit  A.  Robin,  n'est  pas 
assez  considérable  pour  compenser  les  pertes  liquides  effectuées  par  la 
peau  et  les  glandes  salivaires,  de  telle  sorte  que  l'élimination  y  gagne 
quoique  les  reins  soient  déchargés  d'une  partie  de  leur  travail  fonction- 
nel. »  La  diminution  de  Purée,  de  l'acide  urique,  prouve  l'abaissement 
des  combustions  désassimilatrices;  il  y  a  aussi  diminution  des  chlorures. 

L'hypercrinie  lacrymale  n'est  pas  le  plus  important  des  effets  du  jabo- 
randi  et  de  son  alcaloïde  sur  V appareil  oculaire.  On  a  noté  aussi  une 
contraction  pu  pilla  ire  qui  débute  vers  le  moment  où  la  sueur  se  géné- 
ralise. —  Galezowski,  dans  ses  recherches,  n'avait  trouvé  que  l'action 
myotiquede  la  solution  de  pilocarpine  déposée  sur  l'œil;  Alexaudroff,  de 
la  clinique  du  docteur  Metaxas  (de  Marseille),  observa  également  le  fait 
de  la  contraction  pupillaire  ;  mais,  depuis,  Pietro  Albertoni  ayant  instillé 
cette  solution  dans  l'œil  de  l'homme  et  des  animaux,  a  noté  du  myosis 
et  en  même  temps  un  spasme  accommodatif  de  la  vision  ;  puis,  dans  une 
seconde  période,  plus  durable,  de  la  mydriase  sans  altération  de  l'accom- 
modation. Si  Ton  fait  une  injection  hypodermique  à  distance,  l'action  sur 
l'iris  est  nécessairement  beaucoup  moins  marquée,  puisque  les  sécrétions 
rejettent  immédiatement  la  plus  grande  quantité  du  médicament  (Gillet 
de  Grandmont).  Apres  l'ablation  du  ganglion  cervical  supérieur  du  grand 
sympathique  chez  le  chien,  l'instillation  de  la  pilocarpine  ne  peut  plus 
produire  la  dilatation  de  la  pupille;  d'où  cette  conclusion  formulée  par 
P.  Albertoni  :  que  la  pilocarpine  agit  en  excitant  autant  le  nerf  moto- 
oculaire  commun  (myosis  passager),  que  le  grand  sympathique  (mydriase 
intense  et  de  longue  durée)  :  cette  dernière  action,  selon  lui,  étant  plus 
durable  et  plus  intense,  mais  plus  lente  à  se  produire. 

Faut-il  expliquer  la  dilatation  pupillaire,  simplement  par  Tétat  nauséeux 
déterminé  par  le  jaborandi  ? 

Pour  compléter  l'étude  des  effets  de  la  pilocarpine  sur  les  organes 
sécréteurs,  ajoutons  que  sous  son  influence ,  la  sécrétion  lactée  en  partie 
tarie  chez  une  nourrice  atteinte  d'érysipèle,  a  été  heureusement  excitée, 
et  que  le  lait  reparut  et  les  mamelles  reprirent  leur  fonction  avec  plus 
d'abondance  (A.  Robin,  Soc.  de  Biologie,  1875). 

L'influence  du  jaborandi  sur  les  modifications  de  la  température  a  fait 
l'objet  de  nombreuses  recherches.  <x  La  température  axillaire  s'élève  gra- 


PILOCARPINE.    PROPRIÉTÉS   et   effets   PHYSrOLOGIQOES.  il 

duellemcnt  jusqu'au  moment  où  la  salivation  est  bien  établie  et  où  la 
sudation  commence  à  devenir  générale.  Cette  élévation  de  température 
est  d'environ  4/10  do  degré  chez  les  individus  bien  portants.  Quand  la 
sudation  est  arrivée  à  son  maximum,  la  température  baisse  un  peu,  mais 
sans  cependant  revenir  encore  à  son  degré  primitif  qu'elle  atteint  seule- 
ment vers  la  Gn  du  maximum,  quand  les  hypercrinies  tendent  à  s'apaiser. 
A  leur  déclin,  la  température  tombe  de  quelques  dixièmes  de  dt^grés, 
au-dessous  de  son  point  initial  (A.  Robin).  Suivant  Gillet  de  Grandmont 
les  injections  hypodermiques  de  pilocarpine  ont  pour  résultat  d*abaisser 
la  température  de  près  de  1  degré,  cela  dans  un  espace  de  temps  très 
limité,  et  persisterait  plusieurs  heures.  Bardenhéwer  prit  la  température 
rectale,  il  a  constamment  noté  un  abaissement  de  la  température  du  corps 
de  5  à  6  degrés  pendant  la  durée  de  la  sueur. 

Labaissement  de  la  lenêion  artérielle  a  été  constaté  dès  les  premiè- 
res expériences.  On  vit  le  pouls  plus  accéléré,  les  battements  du  cœur 
un  peu  irréguliers,  et  Tinfluence  des  mouvements  respiratoires  sur  la 
circulation,  se  faire  sentir  plus  manifestement  qu*à  l'état  normal.  Curs- 
chmann,  Bardenhéwer,  dans  un  cas  de  colique  de  plomb,  ont  conGrmé  ce 
fait,  déjà  signalé  par  Gubler  et  A.  Robin,  que  le  pouls  perd  sa  tension  et  sa 
dureté.  0.  Kayleret  J.  Soyka,  comme  Bochefontaine  et  Galippe  ont  re- 
connu qu'une  petite  dose  d'infusion  de  Jaborandi,  injectée  dans  les 
veines,  provoque  une  chute  immédiate  et  passagcre*de  la  tension  artérielle 
a?ec  accélération  momentanée  du  pouls  ;  que  des  doses  plus  fortes  ont 
une  action  semblable  mais  plus  persistante,  qu*euGn,  par  des  doses  plus 
[ories  encore,  la  chute  de  la  tension  arlérielle  est  plus  considérable 
mais  qu'en  même  temps,  il  se  produit  un  ralentissement  marqué  du  pouls. 

Vulpian,  dans  une  intéressante  communication  faite  à  la  Société  de 
Biologie,  rapporte,  qu'ayant  fait  dans  la  veine  cave  d'un  chien,  une  injec- 
tion d*extrait  de  Jaborandi,  il  constata  des  troubles  intenses  du  côté  du 
cœur,  le  ralentissement  des  battements  du  pouls,  avec  menace  de  mort  ; 
dans  quelques  expériences  il  y  eut  un  arrêt  brusque  du  cœur.  Ces  effets 
furent  surtout  sensibles  chez  la  grenouille  ;  l'arrêt  du  cœur  se  fait  en 
diastole.  Langley  a,  sur  des  crapauds,  des  grenouilles,  des  chiens,  des 
lapins,  vcriGé  ce  fait  que  le  Jaborandi  ralentit  les  battements  du  cœur; 
le  même  auteur  établit  que  c'est  toujours  le  ventricule  qui  s'arrête  le 
premier,  quoique  les  oreillettes  puissent  être  troublées  dans  leur  rhythme 
avant  le  ventricule,  et  que  l'abaissement  de  la  tension  artérielle  soit  le 
premier  symptôme  de  l'action  du  Jaborandi  sur  la  circulation.  Fracnkel 
a  noté  (1878)  que  le  nitrate  de  pilocarpine  à  la  dose  de  0,02  c.  à  0.04  c. 
n'a  guère  d'action  sur  la  circulation,  mais  que  les  doses  fortes  produisent 
un  ralentissement  notable  du  pouls.  Cet  effet  a  été  obtenu  par  lui,  alors 
même  que  les  nerfs  vagues  étaient  coupés. 

En  résumé  :  le  Jaborandi  ou  la  pilocarpine  possède  des  propriétés  su- 
dorifiques  et  sialagogucs  incomparablement  plus  marquées  que  celles  des 
agents  thérapeutiques  employés  jusqu'ici  ;  c'est  un  hypercrinique  puis- 
sant.  Si  sou  action  sur  la  température  est  encore  discutée,  tous  les  cxpéri- 

iocf.  MCT.  h£o.  et  CMin.  XXYIL  -*  - 


18  PILOCARPINE.  —  propriétés  et  effets  physiologiques. 

mentateurs  admettent  que  cette  substance  peut  abaisser  notablement  la 
tension  artérielle.  EnGn,  son  pouvoir  myosique  lui  donne  rang  dans  la 
thérapeutique  oculaire,  au  même  titre  que  Téserine. 

Il  nous  reste  à  signaler  encore  un  point  fort  intéressant  de  Phistoire  de 
ce  médicament,  à  savoir  Pantagonisme  qui  parait  exister  entre  son  action 
et  Paction  de  Patropinc  sur  notre  organisme,  fait  signalé  par  le  profes- 
seur Yulpian.  Depuis,  Auber,  en  injectant  0,025  d*alropine  sous  la  peau 
d'un  chien,  vit  apparaître  des  phénomènes  d^intoxication  qu'il  fit  dispa- 
raître avec  une  infusion  de  2  grammes  de  Jaborandi  ;  toutefois,  la  dilata- 
tion de  la  pupille  persista.  L'antagonisme  de  l'atropine  et  du  Jaborandi 
n'est  pas  admis  par  Langtey,  car  cet  auteur  dit  avoir  constaté  que  l'atro- 
pine ne  peut  ramener  la  tension  artérielle  à  son  niveau  primitif  lorsque 
cette  tension  est  abaissée  par  le  Jaborandi. 

Enfin,  nous  devons  une  mention  toute  spéciale  aux  récentes  recherches 
expérimentales  de  Straus  ;  elles  ont  mis  en  lumière  un  point  nouveau 
relatif  à  Paction  locale  des  injections  hypodermiques  de  pilocarpiiie.  Les 
résultats  sont  intéressants,  non-seulement  au  point  de  vue  physiologique 
de  la  pilocarpine,  mais  au  point  de  vue  plus  général  de  la  physiologie  des 
sueurs  locales,  et  des  sécrétions  en  général. 

Les  expériences  de  Straus  nous  ont  appris  que,  si  l'on  pratique,  chez 
Phomme,  une  injection  hypodermique  de  0'',01  à  0*%U2  de  nitrate  de  pi- 
locarpine (dose  physiologique)  ensolution  dans  1  gramme  d'eau,  on  voit  au 
bout  de  deux  à  cinq  minutes,  la  peau  recouvrant  l'ampoule  formée  par  le 
liquide  injecté  rougir,  puis  se  couvrir  de  gouttelettes  très-fines  de  sueur. 
Ces  gouttelettes  apparaissent  d'abord  à  la  circonférence  de  Pampoule,  sous 
forme  d*une  collerette;  peu  à  peu,  la  sueur  s'étend  concentriquement 
vers  le  centre  de  l'ampoule  qu'elle  finit  par  envahir  totalement.  Cette 
sueur  loaile  se  produit  deux  à  trois  minutes  avant  la  salivation,  cinq  à 
huit  minutes  avant  la  sueur  générale.  Cet  effet  local  est  d'autant  plus 
rapide  et  plus  accusé  que  la  peau  où  a  lieu  l'injection  est  plus  riche 
en  glandes  sudoriparcs  ;  les  meilleurs  endroits  sont  le  devant  du  sternum, 
le  front  et  le  pli  du  coude. 

Straus  a  trouvé  en  outre  le  fait  curieux  suivant  :  c'est  que,  en  rédui- 
sant la  dose  de  pilocarpine,  tout  peut  se  borner  à  une  action  sudorifique 
locale  :  en  injectant  une  ou  deux  gouttes  d'eau  tenant  en  dissolution  de 
0*%00i  à  0*^004  de  nitrate  de  pilocarpine,  on  provoque  une  sueur  pure- 
ment locale,  sans  le  moindre  phénomène  général.  On  peut  ainsi,  à  vo- 
lonté, faire  suer  telle  ou  telle  région  du  corps  et  dessiner  des  lignes 
humides  sur  le  reste  do  la  peau  demeurée  sèche. 

L'action  antagoniste  de  l'atropine  a  permis  à  Straus  de  réaliser,  d'une 
façon  élégante,  l'expérience  inverse.  Si,  chez  un  sujet  en  pleine  sueur 
sous  Pinflucncc  de  la  pilocarpine,  on  injecte  sous  la  peau  de  très-faibles 
doses  de  sulfate  d'atropine,  on  voit,  à  ce  niveau,  la  sueur  diminuer 
presque  immédiatement;  au  bout  de  quelques  minutes,  elle  est  totale- 
ment supprimée.  On  peut  ainsi,  dit  Straus,  réserver  à  volonté  des  lignes 
sèches  sur  la  peau  humide. 


PILOCARPINE.  —  PROPRIÉTÉS  et  effets  physiologiques.  i9 

Pour  assurer  que  rarrêt  de  la  sueur  est  bien  l'effet  de  l'atropine  et  non 
celui  du  seul  fait  de  l'injection  d'un  liquide,  Straus  a  eu  soin  d'injecter, 
à  diverses  reprises,  simultanément  un  volume  équivalent  d'eau  pure; 
reflet  d'arrêt  a  toujours  fait  défaut.  Cet  action  d'arrêt  local  de  la  sueur 
s'obtient  à  l'aide  de  doses  infiniment  petites  d'atropine;  il  n*a  jamais 
manqué,  même  avec  un  millième  de  milligramme  de  substance  active, 
chez  l'homme.  Chez  le  chat,  une  injection  de  moins  d'un  centième  de 
milligramme  dans  la  pulpe  d'une  des  pattes  a  produit  le  même  effet  d'arrêt. 
La  peau  en  sueur  d'un  chat  ou  d'uu  homme  peut  donc,  d'après  Texpé- 
rience  de  Straus,  être  considérée  comme  un  réactif  extrêmement  délicat 
de  l'atropine,  puisqu'il  suHit  de  l'injection  d'un  mUlionigramme  de  cette 
substance  pour  produire  l'arrêt  local  de  la  sueur. 

Les  expériences  de  Luchsinger,  confirmées  par  celles  de  Yulpian,  ont 
montré  que,  chez  le  chat,  une  injection  de  0'%001  à  0*',003  de  sulfate 
d'atropine  arrête  la  sueur  provoquée  par  l'injection  de  0*^,01  de  pilocar- 
pine,  mais  que,  si  l'on  injecte  ensuite  sous  la  peau  de  la  pulpe  d'une  des 
pattes  0*%01  de  pilocarpine,  la  sueur  reparaît  sur  cette  patte,  mais  nulle 
part  ailleurs. 

Chez  l'homme,  Straus  a  constaté  le  même  fait.  En  injectant  0^,002  de 
sulfate  d'atropine,  puis,  une  demi-heure  après  en  une  autre  région  de  la 
peau,  0*',02  de  pilocarpine,  il  n'y  a  ni  salivation,  ni  sueur  générale, 
mais  simplement  une  sueur  locale^  très-persistante  parfois,  au  voisinage 
du  point  où  a  eu  lieu  l'injection  de  pilocarpine. 

Straus  s*est  appliqué  à  déterminer  approximativement  la  quantité  de 
sulfate  d'atropine  dont  l'injection  rend  même  ces  doses  massives  locale-- 
ment  inefQcaces.  Chsz  un  homme  vigoureux,  à  la  jambe,  il  a  pu  injecter 
graduellement  et  avec  prudence  0*%006  de  sulfate  d'atropine  (0^,001 
toutes  les  dix  minutes).  Puisi  il  a  injecté  ensuite  en  une  seule  fois  jusqu'à 
O^'yOI  de  nitrate  de  pilocarpine  sur  le  devant  du  slermum;  malgré  cette 
forte  dose,  il  n'y  eut  non-seulement  aucune  sueur  générale,  mais  même 
aucune  sueur  locale.  Il  en  conclut  que  chez  l'homme,  Tinjcetiou  de 
0^,006  d'atropine  rend  impossible  tout  effet  sudorifique,  tant  local  que 
général  de  la  pilocarpine, 

Sur  le  chat,  il  a  obtenu  le  même  résultat  à  la  suite  de  Tinjection  sous 
la  peau  du  ventre  de  0'^003  de  sulfate  d'atropine  (0^%001  toutes  les  dix 
minutes).  Après  cela,  l'injection  dans  la  pulpe  d'une  patte  postérieure  de 
0*%  015  de  pilocarpine  et  l'électrisation  du  bout  périphérique  du  scia- 
tique  (expérience  de  Luchsinger)  ne  déterminent  plus  l'apparilion  d'au- 
cune sueur  sur  celle  patte.  (Comptes  rendus  de  llnstitut,  7  juillet  1879.) 
Ces  faits,  nous  le  répétons,  sont  singulièrement  instructifs  au  point  de 
vue  de  la  physiologie  des  actions  sécréto-glandulaires  et  de  Tantagonismc 
physiologique  des  poisons  et  des  substances  médicamenteuses.  Quoique 
les  applications  thérapeutiques  fassent  encore  défaut,  il  faut  savoir  gré  à 
Straus  d'avoir  montré  que  l'on  peut,  à  volonté,  faire  suer  une  région 
quelconque  de  la  peau  et  inversement,  suspendre  à  volonté  la  sueur  dans 
n'importe  quelle  région. 


20  PILOCARPINE.  —  APPLicATioiis  thérapeutiques.    - 

Applications  thérapeutiques.  —  D'après  Tcxposé  des  propriétés  phy- 
siologiques de  Jaboraiidi  que  nous  venons  de  tracer,  on  s'explique  les 
nombreuses  tentatives  qui  ont  été  faites,  dans  ces  dernières  années,  pour 
l'emploi  de  ce  médicament  dans  le  traitement  des  maladies,  ou  pour  com- 
battre cerlains  symptômes  alarmants. 

En  qualité  de  sialalogue,  le  Jaborandi,  suivant  Gubler,  sera  indiqué 
dans  les  états  de  sécheresse  de  la  bouche  avec  soif  vive  :  «  Atropisme, 
intoxications  diverses,  paralysie  faciale,  embarras  gastrique  et  Ûèvres, 
diarrhée,  lésions  gastro-intestinales,  phlegmasies  de  la  bouche  et  de  la 
partie  supérieure  des  voies  digestives,  le  diabète  sucré  et  la  polyurie.  »  Le 
D'  Leyden,  dans  un  rapport  à  la  Société  médicale  de  Berlin,  déclare  qu'il 
a  utilement  fait  usage  du  Jaborandi,  dans  les  maladies  fébriles:  la  flèvre 
typhoïde,  l'angine  calarrhale,  le  rhumatisme  articulaire  fébrile,  la  dou- 
leur sciatique,  et  conGrme,  par  conséquent,  les  indications  formulées  par 
Gubler.  Le  D'  Testa  l'a  conseillé  contre  les  oreillons.  C'est  surtout  dans  le 
traitement  des  bydropisies  que  le  D'  Leyden  trouve  une  indication  des 
plus  importantes  comme  sudorifique.  Cet  auteur  ne  pense  même  pas  que 
la  pilocarpine  soit  coritre-indiquée  dans  le  cas  d'hydropisie  liée  à  une 
affection  organique  du  cœur! 

La  sudation  abondante  supplée  à  l'insufGsance  de  la  sécrétion  urinaire 
dans  la  phlegmasie  rénale;  elle  diminue  Tépanchement  séreux  et  Tœ- 
dème  des  membres  inférieurs  dans  les  affections  chroniques  des  reins. 
Sous  l'influence  de  ce  médicament,  l'hydropisie  et  les  troubles  graves  de 
la  respiration  diminuèrent  chez  des  malades  traités  par  Leyden,  pour  des 
néphrites  épithéliales.  Dans  une  récente  communication  à  l'Académie  des 
sciences,  Yulpian  signale  l'augmentation  des  matières  albuminoïdes  dans 
la  salive  des  all)uminuriques,à  la  suite  d'une  injection  de  chlorhydrate  de 
pilocarpine;  ce  fait  a  été  confirmé  par  Straus,  agrégé  de  la  Faculté.  Langlet 
de  Reims  a  traité  avec  succès  un  cas  d'albuminerie  de  la  grossesse,  par 
le  Jaborandi  ;  mais,  dans  ce  cas,  la  sudation  fut  faible,  et  le  Jaborandi, 
ayant  agi  comme  diurétique,  détermina  de  l'hématurie.  Le  D'  Alessandro 
Cantieri  a  obtenu  de  bons  effets  de  ce  médicament  dans  la  néphrite  pa* 
renchymateuse  et  la  néphrite  interstitielle. 

Les  propriétés  alexitères  du  Jaborandi  l'ont  fait  expérimenter  contre 
les  intoxications  par  les  virus  et  les  venins,  dans  la  rage,  par  exemple 
(Gubler,  A.  Robin,  Brouardei).  Au  Brésil,  il  est  employé  contre  la 
morsure  des  serpents  les  plus  venimeux  et  les  empoisonnements  végétaux. 

C'est  en  qualité  de  sudorifique  que  le  Jaborandi  o\x  son  alcaloïde,  pa- 
rait utile  dans  l'cpanchement  pleurétique;  Grasset,  Yulpian,  Crequy,  ont 
vu  disparaître  le  liquide. 

La  pneumonie,  diverses  formes  de  bronchites,  la  bronchorrhée,  Tin- 
foxication  saturnine,  ont  été  traitées  avec  succès  par  ce  médicament. 
Rokitansky  a  cité  des  observations  favorables  et  montre  son  heureuse 
influence  pour  la  Qèvre  intermittente.  Nous  ne  citerons  que  pour  mé- 
moire les  tentatives  faites  par  llyernaux  en  Belgique,  Massmann  do 
St-Pétei*sbourg,  Spaeth  et  Welpower  de  Vienne,  Kleinnachter,  qui  vou- 


PILULES.  21 

lurent  provoquer  raccouchement  prématuré,  par  le  chlorhydrate  de  pilo- 
carpine.  Mais  les  contractions  utérines  pour  Tcxpulsion  du  produit,  n*ap- 
parurent  guère  qu'après  Tadministration  de  doses  toxiques  pour  Técono- 
mie;  il  n'y  a  donc,  là,  aucun  avantage  sur  les  substances  analogues. 

C'est  surtout  en  thérapeutique  des  affections  oculaires,  qu*ont  été 
entreprises  les  plus  xnombreuses  recherches  sur  la  pilocarpine  et  ses  sels. 
D'après  Gillet  de  Grammont,  le  Jaborandi  serait  utile,  contre  les  maladies 
du  corps  vitré,  Tatrophie  pnpillaire,  les  iritis,  que  celles-ci  soient  spéci- 
fiques ou  rhumatismales,  l'amblyopie  nicotinique  et  Tophthalmie  sympa- 
thique. Alexaudroff  et  Metaxas,  de  Marseille,  ont  noté  que,  sous  Tinfluence 
de  la  diaphorèsc,  les  milieux  de  l'œil  troubles  se  sont  éclaircis,  la  ten- 
dance glaucomateuse  a  disparu;  enfin  les  exsudats  ont  présenté  une 
rapide  tendance  à  la  résorption.  D'après  Kônigshofer,  assistant  de  clini- 
que à  Erlangen,  la  paralysie  de  l'accommodation  peut  guérir  rapidement 
par  un  Iraitement  de  quelques  jours  au  Jaborandi.  Suivant  Dor  de  Lyon, 
l'irido-choroïdite  séreuse  avec  troubles  diffus  du  corps  vitré,  l'irido-cyclite 
sympathique,  sont  les  principales  maliidies  à  traiter  par  cet  agent.  Il 
nous  a  paru  intéressant  de  signaler  ces  nombreuses  tentatives  de  l'emploi 
de  la  pilocarpine  pour  le  traitement  des  maladies  oculaires.  Mais  si  quel- 
ques-uns de  ces  résultats  sont  contestés,  il  n'en  reste  pas  moins  ce  fait, 
que  la  pilocarpine  est  mieux  supportée  que  l'ésérine,  qui  paraît  avoir 
les  mêmes  indications,  et  qu'elle  présente  de  plus  cet  avantage,  dit 
Galezowski,  d*étre  moins  irritante  pour  l'œil. 

En  présence  de  ces  faits  publiés  récemment,  tout  en  reconnaissant  que 
les  propriétés  chimiques  et  physiologiques  sont  encore  incomplètement 
<»nnues,  nous  sommes  portés  à  regarder  le  Jaborandi  et  les  sels  de  pilo- 
carpine comme  étant  d'une  ulilité  incontestable  ;  mais  si,  en  thérapeuti- 
que, l'emploi  de  ce  médicament  présente  d'assez  fréquentes  indications, 
nous  rappellerons  une  importante  contre-indication  :  l'asthénie  cardia- 
que. On  s'abstiendra  de  prescrire  la  pilucarpine  dans  tous  les  cas  où  la 
tension  artérielle  est  déjà  abaissée,  et  lorsque  les  contractions  cardiaques 
sont  insuffisantes. 

AoHTi  (A.),  Éludes  physiologiques  et  IhcrapcuUques  sur  le  Jaborandi  {Journ.  de  thérap.  1874, 

et  tirage  à  |iar(.).  Indicat.  bibl. 
BoŒFo^TAixE,  Revue  bibliographique  générale  sur  le  Jaliorandi  {Revue  des  sciences  médicaleê 

dUayem,  1h75,  I.  VI). 
Habdt  (E.)t  Hevue  bibliographique,  Uevue  des  sciences  médicales,  Paris,  1878.  t«  XI. 
CiLtxT  PB  Gbaccmoxt,  AcUon  physiologique  du  nilrale  de  piloearpii.e  et  cffcls  Ihérapeuliqucs, 

Paris,  1879. 
4<numal  de  t/iernpeulique  de  Gubler;   Journal  de  médecine  et  chirurgie  pratiques  ;  Bulletin 

de  thérapeutique.  Progrès  médical.  Journal   de  pharmacie  et   de  chimie  depuis   1875, 

bulletin  de  lÀcad.  royale  de  méd.  de  Belgique,  1»78.  llyernaux. 
Association  française  pour   Vavanc.  des   sciences,  Monlpelher,   1879.  —  Congrès  dWms- 

-Icrdam,  1679. 

E.  OllY. 

PILiULiES.  —  Toutes  les  matières  médicamenteuses  molles,  pulvéru- 
lentes ou  liquides  peuvent  être  administrées  sous  forme  de  pilules;  mot 
qu'il  est  inutile  de  définir,  car  il  dérive  du  latin  pilula^  c'est-à-dii  e  petite 


22  PILULES. 

boule.  Les  substances  molles  peuvent  toujours  être  amenées  eu  consistance 
telle  qu'on  puisse  leur  conserver  la  forme  sphérique  ;  les  poudres  peuvent 
être  agglomérées  au  moyen  d'un  excipient  liquide  ou  mou  ;  les  liquides^ 
au  contraire,  à  l'aide  d'une  matière  solide  qui  les  absorbe. 

Celte  forme  pharmaceutique  est  donc  d'un  emploi  général,  et  elle  per- 
met au  médecin  de  faire  facilement  ingérer  des  médicaments  de  saveur 
désagréable  ou  dont  le  séjour  dans  la  bouche  pourrait  offrir  quelque  in- 
convénient. La  confection  des  pilules  comprend  presque  toujours  deux 
opérations  distinctes  :  1*  la  préparation  de  la  masse  piïulaire;  2*  la  divi- 
sion de  cette  masse  en  un  certain  nombre  de  parties  égales  auxquelles  on 
donne  la  forme  sphérique.  Dans  quelques  cas  déterminés,  ces  deux  opéra- 
tions sont  suivies  de  l'enrobage,  qui  consiste  à  recouvrir  chaque  pilule 
d'une  légère  couche  d'argent,  d'or,  de  sucre,  de  gélatine  ou  d'un  enduit 
résineux,  afin  de  les  soustraire  à  l'influence  hygrométrique  de  l'air,  ou  sim- 
plement dans  le  but  de  leur  enlever  toute  saveur  repoussante. 

La  principale  difficulté  de  la  préparation  des  pilules  consiste  dans  la 
confection  de  la  masse  piïulaire,  c'esl-à-dire  de  la  pâte  un  peu  ferme  qui 
sera  plus  tard  divisée  en  pilules.  On  comprend  qu'il  nous  est  impossible 
de  passer  en  revue  tous  les  cas  particuliers  qui  peuvent  se  présenter  dans 
cette  opération,  qui  parait  fort  simple  au  premier  abord,  puisqu'elle  ne 
consiste  qu'à  épister  fortement  dans  un  mortier  la  substance  prescrile, 
soit  avec  du  sirop,  du  miel,  de  la  gomme,  du  savon,  une  poudre  absor- 
bante, etc.  Mais  si  l'on  songe  à  la  diversité  même  des  substances  qu'on 
peut  associer  pour  les  transformer  en  pilules,  aux  réactions  qui  peuvent 
résulter  de  ces  mélanges  et  qu'il  est  indispensable  de  prévoir,  on  voit 
immédiatement  qu'il  est  impossible  de  r«^unir,  sous  forme  de  principes, 
toutes  les  précautions  que  comportent  le  choix,  la  consistance,  la  quan- 
tité de  l'excipient. 

Toutes  les  substances  solides  qui  entrent  dans  une  masse  piïulaire  doi- 
vent être  préalablement  réduites  en  poudre  impalpable  et  parfaitement 
mélangées  avant  l'addition  de  l'excipient.  Celui-ci  peut  être  un  extrait, 
un  électuaire,  un  sirop,  du  miel  ajouté  en  quantité  strictement  suffisante 
pour  donner  au  mélange  la  consislance  piïulaire.  Le  sirop  de  sucre 
réunit  très-bien  les  poudres  mucilagineuses  ;  celles  qui  ne  le  sont  pas  doi- 
vent être  additionnées  d'une  faible  quantité  de  gomme  adragante  ou 
de  gomme  arabique  ;  mais  il  faut  éviter  un  excès  de  ces  gommes  :  car  la 
masse  en  se  desséchant  peut  acquérir  un  tel  état  de  dureté  qu'elle  tra- 
verse les  voies  digestives  sans  se  dissoudre.  En  règle  générale  on  préférera 
donc  un  excipient  qui  se  délaye  facilement. 

Les  substances  trop  molles  pour  être  immédiatement  roulées  en  pi- 
lules, seront  additionnées  de  poudre  de  réglisse,  de  guimauve  ou  d'ami- 
don. Parfois  on  aura  avantage  à  employer  delà  magnésie,  comme  il  amve 
pour  les  térébenthines,  ou  du  phosphate  de  chaux  qui  solidifie  très-bien, 
par  exemple,  l'onguent  mercuriel.  Les  matières  grasses  sont  facilement 
mcorporées  dans  le  savon  médicinal.  Les  extraits  employés  ne  doivent  ja- 
mais être  liquides,  et  il  vaut  mieux  les  concentrer  que  d'ajouter  à  la  masse 


PIMENT.  25 

une  grande  quantité  de  poudre  inerte.  Enfin,  les  masses  pilulaires  doi- 
vent toujours  être  plutôt  molles  que  dures,  à  moins  qu'elles  ne  soient 
ifgromctriques  et  on  doit  les  épister  de  telle  façon  qu'elles  soient  parfai- 
tement homogènes.  Pour  les  transformer  en  pilules,  on  les  divise  au 
moyen  de  la  balance  en  plusieurs  parties  du  môme  poids,  que  Ton  roule 
en  long  cylindre,  et  celui-ci  est  à  son  tour  séparé  en  un  certain  nombre 
de  parties  égales  au  moyen  d'un  instrument  spécial.  On  leur  fait  acqué- 
rir exactement  la  forme  sphérique  en  les  disquant  entre  deux  planchettes 
parfaitement  planes  ;  on  les  empêche  ensuite  d'adhérer  entre  elles  en  les 
roulant  dans  de  la  poudre  d'amidon,  d'iris  ou  mieux  de  lycopode.  On  les 
argenté  ou  on  les  dore  en  les  agitant  fortement  dans  une  boite  avec  des 
feuilles  minces  d'or  ou  d'argent.  Il  va  sans  dire  qu'on  ne  doit  pas  appli- 
quer cette  opération  aux  pilules  qui  renferment  une  matière  susceptible 
de  se  combiner  au  métal. 

Mentionnons  seulement,  sans  nous  y  arrêter,  les  méthodes  d'enrobage  : 
à  la  gélatine  proposée  par  Garot  ;  au  baume  de  tolu  employée  par  Blan- 
card  pour  préserver  Tiodure  ferreux  du  contact  de  l'air;  à  la  caséine, 
au  gluten,  etc.,  en  faisant  observer  que  ces  enveloppes  doivent  élre  fort 
minces,  si  l'on  veut  que  les  pilules  se  dissolvent  dans  le  tube  digestif.  A 
ce  point  de  vue,  l'enrobage  au  collodion,  proposé  par  Durden,  doit  être 
absolument  rejeté. 

Le  dosage  dns  pilules  est  très-simple,  et  il  ne  présente  véritablement 
aucune  difficulté,  lorsqu'on  se  contente  d'énumérer  le  poids  des  substances 
actives  qui  doivent  entrer  dans  la  confection  d'un^  pilule,  puis  d'indiquer 
au  bas  de  la  formule  le  nombre  de  pilules  que  l'on  désire  prescrire.  Nous 
pensons  que  cette  manière  de  formuler,  qui  laisse  au  pharmacien  la  lati- 
tadede  choisir  l'excipient  le  plus  convenable,  d'en  employer  seulement  la 
quantité  nécessaire  et  de  choisir  lui-même  le  modus  faciendi^  est  de 
beaucoup  la  plus  avantageuse  ;  elle  permet  d'éviter  facilement  l'obtention 
de  pilules  d'une  grosseur  démesurée. 

Les  bols  ne  diffèrent  des  pilules  que  par  leur  poids,  qui  est  plus  considé- 
rable, celui  de  ces  dernières  ne  dépassant  jamais  35  centigrammes.  Leur 
préparation  ne  présente  rien  de  particulier  :  on  leur  donne  seulement 
ooe  forme  ovoïde,  afin  que  les  malades  puissent  plus  aisément  les  avaler  ; 
cette  forme  médicamenteuse  est  tellement  incommode  qu'on  n'emploie 
plus  guère  aujourd'hui  que  les  bois  d'opiat  balsamique. 

E.  YaLEJEÂN. 

PIMEIWT.  —  On  connaît  en  matière  médicale  plusieurs  espèces  de 
piments,  dont  les  uns  sont  fournis  par  des  arbres  de  la  famille  des  Myr- 
tacées  et  les  autres  par  des  plantes  de  la  famille  des  Solanacées. 

Le  piment  de  la  Jamaïque,  le  piment  couronné  et  le  piment  Tabago 
appartiennent  au  premier  de  ces  groupes  ; 

Le  piment  des  jardins,  celui  de  Cayenne  et  celui  de  l'ile  Maurice,  au 
second. 

PuiEKT  DE  LA  Jamaïque  :  Il  cst  coustitué  par  le  fruit  du  Mj/r/M«  Pimenta 


24  PIMENT. 

(Linné),  appelé  par  0.  Berg  Pimenta  officinalis.  C'est  une  baie  de  la 
grosseur  d*un  pois,  d*unc  couleur  gris  rougeâtre,  rugueuse,  surmontée 
d'un  bourrelet  blanchâtre,  qui  représente  les  restes  des  lobes  calicinaux. 
Ce  fruit  renferme  toujours  deux  semences  noires  à  peu  près  hémisphé- 
riques. 

Le  piment  de  la  Jamaïque  possède  une  odeur  qui  tient  le  milieu  entre 
celle  de  la  cannelle  et  celle  du  girofle.  11  la  doit  à  une  huile  essentielle 
contenue  surtout  dans  le  péricarpe. 

Le  piment  Tabago  ou  de  Tabasco,  qui  lui  ressemble  beaucoup,  est 
attribué  au  Myrlus  acris.  • 

Le  PuiEMT  couROKKÉ,  qu'on  nomme  encore  Poivre  deThevel,  n'existe  pas 
dans  le  commerce  de  la  droguerie;  il  vient  des  Antilles,  où  il  est  produit 
par  le  Myrlus  pimentoïdes  (Nées).  11  est  plus  allongé  que  le  piment  de 
la  Jamaï(|ue,  et  surmonté  par  une  large  couronne  évasée  en  entonnoir. 
Tous  ces  piments  aromatiques  ne  sont  employés  aujourd'hui  que  comme 
condiments. 

Piment  des  Jardins  :  On  doit  le  considérer  comme  le  véritable  pi- 
ment officinal,  il  est  aussi  connu  sous  les  noms  de  Corail  des  jardins, 
poivre  d'Inde  et  poivre  de  Caycnne.  La  plante  qui  le  fournit  est  originaire 
de  l'Inde,  mais  elle  est  maintenant  répandue  en  Afrique,  en  Amérique  et 
dans  presque  tout  le  midi  de  l'Europe.  C'est  le  Capsicum  annuum^  de  la 
famille  des  Solanacées,  plante  annuelle  donnant  des  baies  coniques,  sè- 
ches, rouges  et  luisantes  de  la  longueur  du  pouce,  d'une  saveur  très- 
acre  et  même  caustique.  L'intérieur  de  ce  fruit  renferme  un  très-grand 
nombre  de  semences  plates  et  blanchâtres,  qui  ont  une  saveur  encore  plus 
prononcée  que  celle  du  péricarpe. 

Celte  âcrcté  est  due  à  une  base  organique  entrevue  par  Braconnot,  mais 
qui  n'a  été  bien  obtenueque  par  W'itling,  qui  la  nommée  Capsicine.  Cette 
substance  forme  avec  les  acides  azotique,  sulfurique  et  acétique  des  sels 
parfaitement  cristallisables.  Elle  existe  en  plus  grande  abondance  dans  le 
piment  de  Cayenne  fourni  par  le  Capsicum  frutescens,  et  dans  le  pi- 
ment de  nie  Maurice,  qui  est  le  plus  acre  de  tous  ;  ces  deux  dernières 
sortes  sont  désignées  dans  le  commerce  sous  le  nom  de  piment  enragé. 

On  n'emploie  en  pharmacie  que  le  piment  des  jardins,  avec  lequel 
on  fait  :  1°  un  extrait  aqueux  qu'on  prescrit  à  la  dose  de  50  à  80 
centigrammes  sous  forme  de  pilules  ;  2°  une  poudre  dont  la  dose  va- 
rie entre  50  centigrammes  et  1  gramme;  3**  une  teinture  au  cinquième, 
qu'on  administre  en  potion  à  la  dose  de  1  à  4  grammes. 

Les  Arabes  emploient  le  piment  comme  antidysentérique  et  comme 
aphrodisiaque.  Le  docteur  Alègre  parait  avoir  obtenu  de  bons  résultats  de 
son  emploi  dans  le  traitement  des  tumeurs  hémorrho'tdales. 

Signalons  en  dernier  lieu,  pour  terminer,  le  Piment  royal,  dont  les 
fruits  analogues  au  poivre  sont  recouverts  d'une  couche  de  cire  végétale, 
appelée  cire  de  Gale.  Il  est  produit  parle  Myrica  gale  de  la  famille  des 
Myricées  (groupe  des  Amentacées). 

Ë.    VlLLEJEAIf. 


PINCES.  25 

PHVCES.  —  Lar  Pince  (du  hollandais  Pitsen,  pincer;  forceps  ou  vol- 
seUa,  lat.;  Xa5t;;,  grec),  est  un  inslrumenl  destiné  à  remplacer  Tac- 
tion  du  pouce  et  de  Findex  dans  tous  les  cas  où  les  parties  à  saisir  sont 
d'un  trop  petit  volume,  ou  sont  situées  dans  des  points  inaccessibles  aux 
doigts.  La  chirurgie  a  commencé  avec  une  pince  et  un  couteau,  et  aujour- 
d'hui encore  la  pince  est  un  des  instruments  les  plus  précieux  à  l'art 
chirurgical. 

Les  pines  que  Ton  emploie  aujourd'hui  sont  de  trois  espèces  :  1^  les 
pinces  simples,  applicables  à  la  généralité  des  opérations;  2''  les  pinces  ap- 
propriées à  quelques  opérations  en  particulier  ;  ^  la  pince  à  pression 
continue,  dont  le  mécanisme  dilfcre  des  autres  pinces  ;  enHn  le  clamp 
anglais  et  ses  dérivés,  qui  ne  sont  autre  chose  eux-mêmes  que  des  dérivés 
de  Tenlérotome  de  Dupuytren,  sont  des  pinces  à  pression  continue. 

1*  Les  pinces  de  la  première  espèce  sont  : 

La  pince  à  dissection  (fig.  1),  formée  de  deux  lame^  d'acior  trempé, 
soudées  à  une  de  leurs  extrémités,  au  lalon,  et  dont  les  extrémités,  pre- 
nantes ou  mors,  sont  effilées,  pourvue  de  traits  de  lime  sur  la  face  interne 
du  mors.  Une  bonne  pince  a  dissection  ne  doit  serrer  que  par  la  pointe 
terminale  de  ses  mors;  ses  branches  doivent  être  suIGsamment  larges 
pour  que  les  doigts  puissent  la  bien  tenir,  et  être  suffisamment  flexibles 
pour  que  l'on  puisse  serrer  facilement  les  deux  mors  l'un  contre  l'autre. 

La  pince  à  artères  est  une  pince  dont  les  mors  doivent  s'adapter  par  une 
large  surface,  elle  est  munie  d*un  verrou  (flg.  2)  de  diverses  formes. 

Cette  pince  n'a  pas  besoin  de  l'élasticité  de  la  pince  à  dissection.  La 
pince  de  nos  trousses  a  une  rainure  verticale  à  la  face  interne  de  ses  mors, 
pour  loger  au  besoin  la  partie  supérieure  d'une  épingle.  La  pince  à  artères 
est  en  même  temps  une  pince  à  suture.  Si  Ion  voulait  avoir  une  excellente 
pince  à  ligature  d*artères,  il  faudrait  avoir  une  pince  dépourvue  de  cette 
rainure,  et  une  autre  pince  qui  la  porterait  :  cette  dernière  serait  une 
pince  exclusivement  réservée  pour  placer  les  épingles  des  sutures. 

Tillaux  a  fait  construire  des  pinces  à  torsion  des  artères  :  ce  sont  des 
3inces  à  artères  à  mors  garnis  d*une  barre  transversale  qui  donne  au 
mors  la  forme  d'un  T;  c'est  une  modiGcalion  de  Tancienne  pince  à  tor^ 
non  de  Thierry. 

11  y  a  une  pince  en  forme  de  ciseaux  ;  les  lames  sont  remplacées  par  des 
mors  olivaires  :  c'est  la  pince  à  pansement.  Dans  nos  trousses  modernes, 
cette  pince  est  pourvue  d'un  point  d'arrêt  près  des  anneaux,  de  sorte  que 
cette  pince  à  pansement  peut  servir  à  lier  des  artères,  à  les  comprimer 
et  à  faire  une  hémostase  préventive  ou  temporaire. 

2*  Les  pinces  appropriées  à  des  opérations  spéciales  sont  : 

Les  pinces  à  griffes  droites  et  courbes,  dont  les  mors  sont  pourvus  de 
griffes  engainantes  (Gg.  5). 

Les  pinces  à  mors  larges  pour  faire  la  ligature  des  artères  au  fond 
d'une  cavité. 

La  pince  à  suture  de  BonneGn  (Gg.  6). 

Les  pinces  porte-aiguiliesy  constituées  par  deux  tiges  pourvues  de  mors 


ht.  16.  —  AD,  Ugei  de  li  pioce-ciusliqus,  fcirtéM,  Uiuuit  nir  Ui  caonelorM  deiiinju  1  rNenir  U 

Fb.  1T.  —  t,  m  pnmiïT  ena  pnnr  la  comprBi'iDii  an  mine,  pont  h  camprMsion  prdiliblc  on  pri. 
iraliK  dri  TJUMi  lu  iriDtde  diiiserUi  Ufiiu,  elc.:  B,  au  deuiiime  criia;C.  in  Iroiiièma  crin  pour 
la  cMipiousa  cicsHiia  nii  pïor  l'IidiniiiUM  lempariire,  Mil  pior  rhfiiii>i;iJ8  lUSailin. 


28  PINCES. 

engainés  dans  une  canule  ci  qu*on  serre  en  faisant  glisser  la  canule  sur 
les  mors,  sont  une  variélé  de  pince  qui  a  été  remplacée  par  la  pince- 
tenelte  des  Américains  (fig.  8),  pince  dite  américaine  pour  fistule  vésico- 
vaginales. 

Les  pinces  à  griffes^  à  fixation  de  l'œil,  sont  décrites  à  Tarticle  Cata- 
racte, t.  VI,  p.  498,  Iris,  t.  XIX,  p.  418,  etc.  Ce  sont  des  pinces  a  griffe 
modifiées.  La  pince  de  Yerduin,  pour  Tentropion;  la  pince  à  mors  plats 
de  Desmarres,  sont  des  pinces  appropriées  à  une  seule  opération  et  qui  dé- 
rivent des  pinces  ordinaires.  La  pince  à  chalazion  de  Desmarres  (fig.  9) 
est  dans  le  même  cas  ;  c'est  un  instrument  spécial. 

3*  Les  pinces  à  pression  continue  sont  : 

Les  serres-fines  de  Vidal  (de  Cassis),  les  serres-fortes  de  Charrière 
(fig.  10  et  11)  ;  les  petites  pinces  à  anneaux  à  point  d'arrêt,  les  pinces  k 
disséquer  à  mors  croisés  et  à  pi*ession  continue  (fig.  12, 13,  14):  toutes 
ces  pinces  ont  été  arrangées  et  appropriées  à  des  opérations  spéciales.  Tel 
est  la  grosse  serre-fine  dont  se  servait  Guersant  pour  rapprocher  les  ailes 
du  nez  après  l'opération  du  bec-de-licvre  ;  la  pince  à  pression  continue  ap- 
pliquée par  Ricord  et  Yerneuil  pour  arrêter  les  hémorrhagics  de  l'amydale. 

Les  clamps  ou  pinces  articulées  à  charnière  serrée  à  l'aide  d'une  vis  on  à 
l'aide  de  longs  manches  sont  en  certain  nombre  :  telles  sont  une  pince  ima- 
ginée par  Thierry  (fig.  15)  et  Logouest,  pour  étrangler  la  base  d'un  polype 
nasopharyngien  ;  la  cuvette  articulée  imaginée  par  Jobert  pour  serrer  les 
hémorrhoïdes  avant  d'y  appliquer  le  caustique  (Foy.  IlÉyoRRHOÏDES,  t.  XVII, 
p.  429),  enfin,  les  nombreuses  pinces />or/e-cat/«(i^e  ou  ^o/vano-cau^- 
lique;  imaginées  par  Follin,  Desgranges,  Valette  (fig.  16)  et  Amussat  fils. 
Je  signalerais  enfin  le  clamp  appliqué  par  AUingham  aux  hémorrhoïdes» 
qui  .«emble  être  une  concurrence  regrettable  à  Técraseur  linéaire  de  Chas— 
saignac. 

Enfin,  cet  article  ne  serait  pas  complet,  si  nous  ne  mentionnons  les 
pinces  des  accoucheurs  :  le  forceps  (Voy,  Forceps,  t.  XV,  p.  351),  et 
le  céphalo!ribe.  (Voy,  Eudrtotosiie,  t.  XII,  p.  657.) 

De  l'applicalion  des  pinces  comme  moyen  d'hémostase,  Forcipres- 
sure.  —  11  y  a  eu  de  tout  temps  des  chirurgiens  qui,  dans  le  cours  d'une 
opération,  se  trouvant  gênés  par  l'écoulement  du  sangartéricl  ou  veineux, 
ont  eu  l'idée  de  pincer  avec  diverses  pinces  les  vaisseaux  divisés;  ils 
tel  minaient  ensuite  Topcration,  ils  levaient  les  pinces,  liaient  les  vaisseaux 
qui  donnaient  encore,  les  tordaient  ou  les  cautérisaient.  Personne 
n'avait  songé  a  tirer  gloire  de  cette  manière  d*agir,  jusqu'à  nos  jours. 
Cependant  les  ligatures  médiates,  la  compression  médiate  pour  arrêter 
les  hémorrhagics  comprenaient  Inapplication  de  pinces  a  demeure  liii>sées 
plus  ou  moins  longtemps.  Les  livres  classiques  du  commencement  de  ce 
siècle  renferment  çà  et  la  des  mentions  de  ce  fait  ;  témoin  la  Nosographie 
chirurgicale  de  Richerand  (1815  et  1821),  t.  III. 

Le  mémoire  publié  par  Verneuil  dans  le  Bulletin  de  la  Société  de  chi- 
rurgie ccintient  à  cet  égard  un  historique  qui  ne  laisse  rien  à  désirer. 

Tout  le  monde  s*est  servi  des  serres-fines  de  Vidal  de  Cassis,  pour  ar- 


PINCES.  29 

réter  des  hémorrhagies,  et  cela  est  mentionné  dans  notre  article  (IIémos- 
TASB,  t.  XVII  p.  434).  L'ovariotomie  et  Inapplication  des  pinces  à  point  d'ar- 
rêt, à  anneaux  de  Charrière,  à  rtiémostase  dans  rovariotoraie,  ont  donné 
naissance  à  un  nouvel  emploi  des  pinces  contre  Técoulement  du  san*;;.  C'est 
Kœberlé  qui  le  premier  a  fait  cet  usage  des  pinces,  et  qui  en  a  décrit  rem- 
ploi à  Tarticle  Ovariotomie  de  ce  Dictionnaire,  t.  XXV,  p.  570  et  suiv.  Péan 
a  fait  un  livre  sur  la  forcipressure,  où  il  parle  de  sa  pratique  cl  revendique 
l 'uivention  de  la  forcipressure,  qui  en  réalité  appartient  à  tout  le  monde, 
mais  on  doit  reconnaître  que  le  chirurgien  en  a  généralisé  l'emploi 
comme  moyen  d'hémostase  dérinitivc. 

Des  instruments  compresseurs  ont  été  d^abord  utilisés,  avant  que  les 
âbricants    eussent   confectionné  de    bonnes  pinces  à  verrou  ou   des 
pinces  à  point  d'arrêt  :  ce  sont  les  compresseurs  de  Grxfe  pour  les 
Aémorrhagies  des  artères  méningées,  le  compresseur  de  Marcellin  Du- 
val.  La  serre-flne  de  Vidal  de  Cassis,  qui  a  vu  le  jour  en  1849,  est  le 
J930(ièie  le  plus  parfait  de  ces  compresseurs  à  ressort;  elle  a  été  immé- 
diatement utilisée  contre  les  hémorrhagies.  Delioux  même  transforma  les 
Knorsde  ces  instruments  pour  les  employer  comme  hémostatiques  en  1 854. 
Mais  depuis  longtemps  déjà,  et  dans  la  trachéotomie  en  particulier,  on  avait 
uitilisé  comme  moyen  d'hémostase  temporaire  les  pinces  à  verrou,  et 
nème  des  pinces  à  pression  continue  imaginées  par  Charrière  pour  presser 
les  vaisseaux  lymphatiques  injectés  au  mercure,  après  l'injection.  Jetions 
du  professeur  Richet  qui  l'a  vu  faire  à  D.  Desprès,  mon  père,  que  pour 
arrêter  le  sang  qui  gênait  pendant  la  trachéotomie,  l'emploi  de  ces  pinces 
avait  donné  tout  le  succès  désirable.  C'était  en  1846,  et  l'on  voit  qu'à  ce 
moment  la  forcipressure  était  un  peu  l'œuvre  de  tout  le  monde.  Cette 
pratique  a  été  justement  appelée  par  Verncuil  la  forcipressure  de  nécessité. 
Les  li^^atures  des  artères  resteront  toujours  le  moyen  le  plus  sûr  de 
prévenir  les  hémorrhagies.  On  a  essayé  de  substituer  aux  ligatures  la 
torsion,  l'acupressure  (Voy.  ce  mot,  t.  1.  p.  588),  l'uncipressure,  c'est-à- 
dire  la  compression  dans  la  plaie  avec  des  crochets  (Vanzctti).  La  forci- 
pressure est  un  nouvel  essai  d'un  ordre  voisin  ;  c'est  encore  et  toujours 
l'ancienne  compression  médiate,  et  elle  ne  doit  être  employée  que  faute 
de  mieux.  Pour  les  petites  artères  ce  peut  être  une  hémostase  suffisante, 
mais  la  généralisation  de  ces  moyens  ne  prévaudra  pas  contre  la  ligature. 
Chacun  de  nous  a  sa  pratique,  et  si  nous  voulions  formuler  les  cas 
d'application  de  forcipressure,  voici  ce  que  nous  dirions  :  toutes  les  fois 
que  la  ligature  d'une  artère  qui  donne  du  sang  n'est  pas  possible,  quand 
la  torsion  est  impraticable,  on  est  autorisé  à  appliquer  une  pince  à  de- 
meure qu*on  laisse  jusqu'à  ce  qu'elle  tombe,  quitte  à  la  replacer  si  l'hé- 
morrliagie  se  renouvelle;  et  l'on  continuera  jusqu'à  Ihcmostase  définitive. 
Lor^ue  des  artérioles  situées  dans  des  tissus  résistants,  tels  que  le  .cuir 
chevelu,  la  peau  de  la  face,  donnent,  il  faut  d'emblée  appliquer  des  pinces 
comprcssives,  et  les  serre-fines  de  Vidal  (de  Cassis)  du  plus  petit  modèle 
sont  ce  qu'il  y  a  de  mieux  à  employer.  Lorsqu'on  enlève  un  cancroïde  du 
nez  ou  une  loupe  du  cuir  chevelu  avec  le  bistouri,  il  n'y  a  pas  de  meil- 


50  PITYRIASIS. 

leur  moyen  d'arrêter  rhémorrhagic.  Je  ne  lie  jamais  les  artères  à  la  suite 
de  ces  opérations  :  je  place  une  serre-fine  sur  le  point  d'où  sortie  sang, 
et  je  la  laisse  24  ou  48  heures  ;  quand  elle  a  coupé  les  tissus  et  qu'elle 
tombe  tout  est  pour  le  mieux  :  elle  a  fait  ce  que  ferait  l'écrasement  linéaire, 
elle  assure  suffisamment  Thémostase. 

La  serre-fine  droite  ou  courbe  est  la  meilleure  pince  hémostatique,  la 
pince  à  verrou  et  les  pinces  à  point  d'arrêt,  même  les  plus  petites,  telles 
que  celles  de  Collin  et  de  Mathieu,  sont  beaucoup  plus  encombrantes  et 
susceptibles  de  se  déranger  au  moindre  effort  des  malades. 

Adahuewici.    Mcchanischen   BlutstillumgsmiUel    bei    verleUten   Arterien   von    Paré  bii    aur 

die  neaesfe  Zeit  (Arch.  f,  Ktin.  Chirurgie  de  Langenbeck.  1872,  Band  XIY,  p.  05.) 
Vebiceiiil.  De  la  forcipresaure  (Bull,  et  Mém.  de  la  Société  de  chirurgie,  t  I,  1875,  p.  17 

et  suW.) 
PÉAif  et  ExcHAQUET.  De  la  forcipressure.  Paris,  1874. 
Vidal  (deCaasû)  Bulletin  de  la  Société  de  chirurgie;  8  août,  24  octobre  et  S5  décembre  1849, 

et  Bull,  de  thérapeutique,  mai  1849, 1854,  t.  ILVI,  p.  301.  —  Traité  de  pathologie  externe. 

Paris,  1851, t.  I;  5*  édit..  Paria,  1861. 
Gadjot  et  Spillha5R.  Arsenal  de  la  chirurgie  contemporaine,  description,   mode  d'emploi  des 

appareils  et  instrumonls.  Paris,  1867. 
K(SBeBLi.  Bull,  et  Mém.  de  la  Société  de  chirurgie,  nouveUe  série,  t.  II,  p.  768.  —  De 

rhemostasc  définitive  par  compression  excessive.  Paris,  1877.  —  Epilogue,  1878. 
Valette.  Clinique  chirurgicale.  Paris,  1875,  Xll*  Leçon. 
Calaloguc  de  Charriùre.  Paris  1862.  Armand  DeSPRÈS. 

PITYRIASIS.  —  Le  sens  étymologique  du  mot  pityriasis  équivaut 
à  une  définition;  il  vient  en  effet  du  mot  grec  ^lupov  qui  veut  dire  son, 
et  il  s'applique  à  une  maladie  cutanée  caractérisée  principalement  par 
de  petites  squames  se  détachant  de  la  peau  sous  forme  de  lamelles  ou  de 
poussières  assez  semblables  à  celles  du  son  ou  de  la  farine. 

Le  pityriasis  entendu  dans  le  sens  d*une  affection  cutanée  squameuse 
superficielle,  a  été  décrit  par  les  auteurs  anciens  et  modernes;  il  a  été 
accepté  par  Willan,  et  il  figure  comme  troisième  genre  de  Tordre  des 
squames  dans  la  classification  de  Bateman;  il  a  été  désigné  par  Alibert 
sous  le  nom  d*herpès  furfureux  volatile,  c'est  pour  cet  auteur  une  espèce 
du  genre  herpès,  dans  la  classe  des  dermatoses  dartreuses.  Tous  les 
dermatologistes  contemporains  ont  conservé  ce  mot  de  pityriasis  avec  sa 
désignation  traditionnelle;  seulement  quelques-uns  d'entre  eux  parmi 
lesquels  je  citerai  Erasraus  Wilson,  Anderson,  Hcbra  et  moi-même,  frap- 
pés de  la  ressemblance  parfaite  de  certaines  formes  de  pityriasis  avec 
l'eczéma,  de  la  transformation  fréquente  de  ces  deux  maladies  entre  elles, 
et  de  la  difficulté  pratique  de  di.stinguer  nettement  le  pityriasis  de 
l'eczéma  sec,  ont  pensé  que,  le  plus  souvent,  le  pityriasis  pouvait  ôtre 
rattaché  à  l'eczéma  dont  il  constitue  Texpression  la  plus  affaiblie.  Aussi, 
répétant  ici  ce  que  nous  avons  déjà  dit  à  propos  de  l'impétigo  et  du 
lichen,  et  affirmant  que,  dans  la  plupart  des  cas,  il  est  impossible  de 
dire  où  finit  le  pityriasis  et  où  commence  Feczéma ,  je  vais  néanmoins 
décrire  ici  le  pityriasis,  envisagé  comme  forme  morbide  nosologique  et 
en  dehors  de  toute  question  de  doctrine. 

Comme  je  le  disais  tout  à  Theure,  le  pityriasis  est  une  affection  cuta- 


[PITYRIASIS.  —  VARIÉTÉS.  31 

née  caractérisée  par  des  plaques  plus  ou  moins  étendues,  bien  ou  mal 
circonscrites,  recouvertes  de  squames  minces  et  non  imbriquées,  susceptibles 
de  se  détacher  sous  forme  de  lamelles  et  de  se  reproduire  incessamment. 
Cette  définition  générale  s'applique  à  toutes  les  variétés  de  pityriasis;  mais 
avant  d'aller  plus  loin,  je  dois  prévenir  que,  sous  le  nom  commun  de  pity- 
riasisy  on  a  confondu  et  on  comprend  aujourd'hui  encore  deuxa  ffcctions  bien 
diflerenles,  l'une  se  rapportant  aux  maladies  dites  herpétiques,  et  pre- 
nant place  à  côté  de  l'eczéma,  l'autre  de  nature  toute  spéciale,  caracté- 
risée par  la  présence  d'un  végétal  parasite  et  rentrant  dans  la  classe  des 
maladies  parasitaires  ;  cette  dernière  espèce  est  connue  sous  le  nom  de 
fityrioiis  versicolor  ;  je  m'en  occuperai  après  la  description  du  pityriasis 
ordinaire. 

Pityriasis  herpétique.  —  Considéré  d*unc  manière  générale,  le  pity- 
riasis herpétique  débute  habiluellement  par  une  sécheresse  particulière 
de  la  peau;  celte  membrane  perd  sa  souplesse  et  son  onctuosité  nor- 
jmaies,   puis  sur  la  partie  ainsi  desséchée   apparaissent  des    squames 
fines,  blanches  ou  grises,  se  détachant  spontanément  ou  sous  Tinfluence 
d'un  frottement  et  se  reproduisant  d'une  manière  incessante.  Sur  ces 
parties  malades,  la  peau  est  sèche  ;  il  n'y  a  pas  de  suintement.  Les  écailles 
épidermiques  sont  ordinairement  fines  et  farineuses  ;  quelquefois  elles 
ont  une  dimension  un  peu  plus  grande,  elles  sont  lameilcuses,  mais 
jamais  leur  étendue  ne  dépasse  quatre  à  dix  millimètres.  Le  plus  sou- 
vent, la  peau  ne  présente  aucun  changement  de  coloration  ;  quelquefois 
cependant  la  partie  malade  est  rose  ou  rouge  à  côlé  et  au-dessous  des 
squames  blanches  ou  grises.  II  n'y  a  d'ailleurs  aucune  tuméfaction,  ou 
elle  est  si  peu  prononcée,  qu'il  faut  une  grande  attention  pour  la  constater. 
Quant  aux  symptômes  éprouvés  par  le  malade,  ils  consistent  surtout 
dans  des  démangeaisons  souvent  assez  vives  pour  provoquer  du  grattage, 
et  c'est  surtout  sous  l'influence  du  frottement  consécutif  au  prurit  que 
se  détachent  les  squames  épidermiques  ;  la  partie  malade  est  également 
le  siège  d'un  sentiment  de  chaleur  plus  ou  moins  vive.  Bien  rarement, 
on  constate  l'existence  de  phénomènes  généraux;  il  n'y  pas  de  fièvre  ou 
s'il  survient  un  mouvement  fébrile,  il  n'est  pas  de  longue  durée  et  habi- 
tuellement la  santé   générale  n'est    pas  altérée  ;    on   peut  cependant 
rencontrer  quelquefois  avec  le  pityriasis  quelques  troubles  digestifs,  soit 
de  rembarras  gastrique,,  soit  de  la  gastralgie   ou   quelques-unes  des 
tonnes  de  la  dyspepsie.. 

VAiaÊTÉs.  -^i  Les  dermatologistes  ont  admis  plusieurs  variétés,  les- 
quelles diffèrent  de  nombre,  de  dénomination  et  de  même  de  descrip- 
tion suivant  chaque  auteur  ;  je  crois  inutile  de  les  rappeler  et  de  discuter 
leur  légitimité.  Je  pense  être  dans  l'exacte  observation  des  faits  en  ran- 
geant les  variétés  de  pityriasis  sous  quatre  espèces  différentes  qui  sont  : 
l""  le  pityriasis  blanc  ou  simple^  2°  le  pityriasis  rouge,  3°  le  pityriasis 
disiéminé,  4'  le  pityriasis  pilaire.  Je  vais  indiquer  rapidement  les  parti- 
cularités propres  à  chacune  de  ces  formes. 
1*  Pityriasis  blanc  ou  simple,  — Cette  forme  est  la  plus  commune 


52  PITYRIASIS.  —  variétés. 

et  constitue  le  vrai  type  du  genre;  Willan,  Bateman  et  même  Cazenave 
Font  décrite  sous  le  nom  de  pityriasis  capitis  et  à  tort,  car  si  cette 
maladie  est  commune  au  cuir  chevelu,  elle  peut  se  développer  sur 
d'autres  régions.  Dans  son  degré  le  plus  léger,  celte  éruption  apparaît 
sous  forme  de  taches  peu  étendues,  irrégulièrement  arrondies,  de  cou- 
leur blanche  ou  grise,  très-légercment  saillantes  et  recouvertes  de  ces 
petites  écailles  épidermiqucs  qui  se  détachent  sous  foimo  de  lamelles, 
soit  spontanément,  soit  par  rcffet  du  grattage.  Chez  les  enfants,  le 
pityriasis  blanc  se  manifeste  souvent  au  visage  sous  cette  forme  de 
petites  plaques  farineuses  qu'on  désigne  vulgairement  sous  le  nom  de 
dartres  farineuses;  il  coïncide  souvent  avec  le  travail  de  la  dentition. 
La  chaleur  et  la  démangeaison  n* existent  qu'à  un  degré  très-modéré  ;  sou- 
vent même  on  ne  constate  aucun  phénomène  subjectif. 

Le  pityriasis  blanc  peut  avoir  une  étendue  et  une  intensité  plus  consi- 
dérables, il  peut  se  développer  sur  toutes  les  régions,  mais  il  est  plus 
commun  au  visage  et  surtout  au  cuir  chevelu,  d'où  le  nom  de  pityriasis 
de  la  tète  que  j'indiquais  tout  à  l'heure;  chez  les  hommes  on  le  rencontre 
assez  souvent  sur  les  parties  du  visage  recouvertes  par  la  barbe.  Sur  les 
endroits  où  il  existe,  on  voit  des  lamelles  épidermiqucs  de  petite  dimen- 
sion, blanches  ou  grises,  à  moitié  détachées  et  qui  tombent  facilement 
sous  forme  d^une  poussière  mélangée  aux  cheveux  et  recouvrant  les 
habits  comme  le  ferait  la  farine,  ou  la  poudre  dont  on  se  sert  pour  les 
coiffures.  La  présence  de  ces  squames  est  souvent  accompagnée  de  déman- 
geaisons et  c'est  en  se  grattant  que  les  malades  détachent  surtout  les 
squames  et  les  font  tomber  sur  les  vêtements  et  sur  les  meubles.  J'ajoute 
que  sous  l'inQuence  de  cette  affeclion  squameuse,  il  n'est  pas  rare  de 
yoit  tomber  les  cheveux;  si  la  maladie  n'est  pas  de  longue  durée,  les 
cheveux  repoussent;  mais  lorsqu'elle  s'établit  d'une  manière  chronique 
l'alopécie  peut  être  définitive,  et  on  doit  considérer  le  pityriasis  de  la  léte 
comme  une  des  causes  de  la  calvitie  précoce. 

Quelquefois  les  squames  du  pityriasis  de  la  tète  ont  des  dimensions  plus 
considérables  que  celles  que  je  viens  d'indiquer  :  elles  sont  lamelleuses 
et  ont  rétendue  d'une  pièce  de  cinquante  centimes.  Cette  forme,  qu*on  a 
voulu  désigner  sous  le  nom  de  pityriasis  lamelleux^  débute  souvent  par 
une  rongeur  de  la  peau,  puis  réjûJerme  se  fendille  et  se  divise  en  lamel- 
les à  moitié  détachées  et  enroulées  sur  leurs  b3rJs.  Ordinairement  il  y  a 
de  la  douleur,  de  la  chaleur;  les  cheveux  deviennent  secs,  minces,  cas- 
sants, et  tombent  facilement.  C*est  là  une  transition  entre  le  pityriasis 
blancet  le  pityriasis  rouge  ;  et  comme  cette  desquamation  est  souvent  pré- 
cédée par  une  éruption  vésiculo-purulente  et  par  une  sécrétion  humide, 
il  est  impossible  dans  ces  cas  de  séparer  nettement  le  pityriasis  de  l'eczéma. 

2**  Pityriasis  rouge.  —  Cette  variété  est  constituée  par  l'existence  sur 
la  peau  de  taches  ronges,  roses  ou  brunes,  bien  délimitées,  de  forme 
arrondie  ou  irrégulière,  séparées  les  unes  des  autres  par  des  intervalles  de 
peau  saine  ou  réunies  en  groupes  par  la  fusion  d*un  des  points  de  leur 
circonférence  et  figurant  assez  bien  des  dessins  semblables  à  ceux  qu'on 


PITYRIASIS.  —  VARIÉTÉS.  35 

trouve  sur  les  caries  de  géographie.  Ces  taches,  légèrement  saillantes, 
sans  aucune  humidité,  sont  recouvertes  de  squames  épidermiques  grisâ- 
tres, ordinairement  adhérentes,  et  qu'on  n'enlève  sous  forme  de  lamelles 
qu*au  moyen  d'un  frottement  assez  fort.  Ces  squames  sont  minces,  sont 
foh'acées  et  ne  présentent  jamais  la  disposition  imbriquée  et  superposée 
qu'on  rencontre  dans  le  psoriasis. 

Le  pityriasis  rouge  se  développe  particulièrement  à  la  face^  au  cou,  à 
la  région  préstemale,  dans  le  dos,  aux  mains  et  aux  pieds;  il  s'accompagne 
de  chaleur  et  de  prurit  ;  chez  les  sujets  impressionnables,  il  peut  exister 
au  début  un  léger  mouvement  fébrile  qui  disparait  facilement.  Comme 
coïncidence  assez  fréquente,  on  constate  des  douleurs  d'estomac,  de  la 
flatulence,  de  la  dyspepsie. 

Le  pityriasis  rouge  revêt  souvent  la  forme  aiguë  et  se  termine  dans  l'es- 
pace de  quatre  à  huit  semaines  ;  mais,  d'autres  fois,  la  maladie  persiste 
ou  se  renouvelle  par  éruptions  successives,  et  la  disparition  complète  n'a 
lieu  qu'au  bout  de  plusieurs  mois, 

Celle  én/plion,  que  je  viens  de  décrire  sous  le  nom  de  pityriasis  rouge, 
se  confond  complètement  avec  l'eczéma  sec;  il  m'est  impossible  de  saisir 
aucune  différence  entre  les  deux  états  morbides  désignés  sous  ces  deux 
dénominations  :  pour  moi  c'est  une  seule  et  même  affection,  à  laquelle 
on  peut  appliquer  indifféremment  l'un  ou  l'autre  nom.  Mais  ce  que  je  dis 
ici  ne  s'applique  pas  à  la  maladie  décrite  par  Devergie  sous  le  titre  de 
pityriasis  rubra,  et  caractérisée  par  des  plaques  rouges,  d'une  étendue 
assez  considérable,  sur  lesquelles  suinte  un  liquide  peu  abondant,  qui 
empèse  légèrement  le  linge,  et  qui  se  recouvrent  plus  tard  de  squasmes 
s' enroulant  sur  leurs  bords  et  tombant  en  se  renouvelant  incessamment; 
dans  ces  cas  on  voit  la  peau  s'épaissir,  Tépiderme  se  rider  et  le  tissu  cel- 
lulaire sous-cutané  se  tuméfier  légèrement.  Dans  d'autres  circonstances 
la  rougeur  s'étend  avec  une  telle  rapidité,  qu'en  peu  de  jours  elle  peut 
envahir  la  totalité  de  l'enveloppe  cutanée  ;  alors  les  squames  sont  larges, 
foliacées;  et,  dans  les  deux  observations  qu'il  rapporte,  Devergie  a  cons- 
taté l'apparition  de  bulles  pemphigoïdes.  Il  est  évident  que  dans  cette 
description,  il  ne  s'agit  pas  d'un  véritable  pityriasis,  mais  bien,  soit  d'un 
eczéma,  lorsqu'on  renconire  des  plaques  rouges,  résistantes,  avec  épaissîs- 
sement  de  la  peau  et  infiltration  du  tissu  cellulaire  sous-cutané,  soit 
même  d'un  pemphigus,  lorsqu'à  la  rougeur  et  aux  squasmes  foliacés 
viennent  se  joindre  des  bulles. 

Hebra,  qui  confond  complètement  le  pityriasis  avec  l'eczéma,  décrit 
cependant,  sous  le  nom  de  pityridsis  rubra  univer salis,  une  affection 
cutanée  caractérisée  par  une  rougeur  vive  de  la  peau  et  par  une  desqua- 
mation lamelleuse  incessante.  Il  est  facile  de  reconnaître  dans  cette  ma- 
ladie grave,  qui  se  termine  habituellement  par  la  mort,  la  dermite  exfo- 
liatrice  de  Bazin,  laquelle  n'est  pour  moi  qu'un  pemphique  foliacé. 

5*  Pityriasis  disséminé.  Cette  affection,  désignée  par  certains  auteurs 
sous  le  nom  de  pityriasis  rubra  généralisé,  a  été  décrite  par  Bazin  sous 
le  nom  de  pityriasis  pseudo-^xanthématique,  avec  l'indication  de  deux 

5oOT.  MCT.   MfD.   ET  CHIR.  XXYIII  —  3 


34  PITYRIASIS.  —  vabictés. 

variétés:  Tune,  pityriasis maculeux,  l'autre,  pityriasis  circiné;  moi- 
même  je  Tai  mentionnée,  dans  mes  leçons  sur  les  maladies  de  la  peau^ 
sous  la  dénomination  de  pityriasis  circiné,  à  cause  de  la  forme  habi« 
tuellement  arrondie  des  taches  ;  je  crois  préférable  de  lui  donner  le  nom 
de  pityriasis  disséminé,  en  considérant  Tétendue  de  Taflection  distribuée 
dans  plusieurs  régions,  alors  que  dans  les  autres  formes  du  pityriasis 
Téruption  est  circonscrite  et  bien  délimitée.  Le  pityriasis  disséminé  est 
caractérisé  par  le  développement  d'une  quantité  considérable  de  petits 
disques  irrégulièrement  arrondis  ou  ovalaires,  d'une  couleur  rose  ou 
grise,  et  recouverts  par  de  petites  squames  épidermiques.  Ces  disques 
sont  ordinairement  assez  rapprochés,  quelques-uns  même  se  touchent  par 
leurs  bords  très-légèrement  saillants.  L'éruption  est  sèche  et  éminem- 
ment squameuse;  j'ai  rencontré  cependant  quelquefois  quelques  vésiculea 
mêlées  aux  écailles  épidermiques,  et  j'ai  constaté  sur  quelques  plaques 
une  légère  sécrétion  séreuse  se  convertissant  en  croûtes  très  superfi- 
cielles. Au  début  de  la  maladie,  la  couleur  rosée  est  assez  accentuée, 
mais  elle  s'affaiblit  graduellement  de  manière  à  passer  au  gris,  et,  après 
quelques  semaines,  la  maladie  n'est  plus  caractérisée  que  par  des  taches 
formées  par  les  squames  épidermiques  grisâtres,  toujours  groupées  de 
manière  à  figurer  des  dessins  arrondis  ou  irréguliers,  mais  bien  délimi- 
tés. Ces  squames,  minces,  foliacées,  d'une  petite  étendue,  sont  assez 
adhérentes  ;  au  début,  elles  sont  assez  nombreuses  ;  plus  tard,  les  lamel- 
les épidermiques  deviennent  plus  rares,  et  à  la  fin  la  maladie  n'est  plus 
caractérisée  que  par  des  taches  grises  à  peine  squameuses.  Dans  le  com- 
mencement de  la  maladie,  il  y  a  quelquefois  quelques  douleurs  erratiques 
dans  les  membres,  un  sentiment  de  courbature  générale,  une  diminution 
de  l'appétit  et  un  léger  mouvement  de  fièvre.  Les  malades  ressentent  éga- 
lement des  démangeaisons,  des  cuissons,  de  la  chaleur  et  même  quelque- 
fois des  élancements  dans  les  parties  du  corps  recouvertes  par  l'éruption. 

Le  pityriasis  circiné  se  développe  principalement  au  tronc  et  à  la 
partie  supérieure  des  membres  ;  il  est  bien  rare  qu'on  en  rencontre  au 
visage,  aux  pieds  et  aux  mains.  La  maladie  se  comporte  ordinaire- 
ment comme  une  affection  aiguë  ;  sa  durée  est  de  trois  à  huit  semaines  ; 
il  n'est  pas  très  rare  cependant  de  voir  des  pityriasis  disséminés  se  pro- 
longer pendant  trois  mois,  six  mois  et  même  davantage. 

4**  Pityriasis  pilaire.  —  On  désigne  sous  ce  nom  une  affection  de  la 
peau  caractérisée  par  l'existence  d  une  multitude  de  petites  aspérités 
donnant  à  la  région  atteinte  l'aspect  exagéré  de  ce  qu'on  appelle  vul- 
gairement chair  de  poule.  Dans  cette  maladie  qui  siège  principalement 
au  dos  des  mains,  à  la  face  dorsale  des  pieds,  quelquefois  même  sur  les 
'  membres,  rarement  sur  le  tronc ,  la  peau  est  dure ,  rugueuse,  hérissée 
de  petites,  saillies  dues  à  l'existence  de  squames  qui  coiffent  l'orifice 
des  follicules  pileux  et  qui  entourent  le  collet  du  poil;  dans  les  endroits 
où  existent  ces  squames,  la  peau  est  souvent  rouge  ou  brune. 

Le  pityriasis  pilaire  est  rare,  Devergie  en  cite  trois  observations  ;  pour 
ma  part  j'en  ai  rencontré  cinq  ou  six  exemples.   C'est  du  reste   une 


PITYRIASIS.    —  MARCHE.   —   DIAGNOSTIC.  33 

maladie  de  longue  durée  et  souYent  incurable.  Cette  résistance  aux 
moyens  thérapeutiques ,  l'association  de  cette  forme  de  pityriasis  avec 
une  sécheresse  particulière  de  la  peau  à  la  paume  des  mains  et  à  la 
plante  des  pieds,  m'ont  engagé  à  la  séparer  du  genre  pityriasis  et  à  la 
rattacher  à  Tictbyose  et  principalement  à  Ticthyose  cornée,  en  la  consi- 
dérant conmie  une  véritable  difformité  de  la  peau. 

Marche.  —  11  faut  bien  savoir  que  le  pityriasis  tel  que  nous  l'avons 
décrit,  principalement  dans  les  variétés  de  pityriasis  blanc  ou  rouge  débute 
souvent  par  une  éruption  eczémateuse,  les  caractères  de  l'affection  squa- 
meuse n'apparaissent  que  plus  tard;  de  même  qu'il  n'est  pas  rare  de  voir 
un  suintement  eczémateux  susceptible  de  se  convertir  en  croûtes  venir 
remplacer  la  sécrétion  sèche  du  pityriasis.  Quelquefois  cependant  la  sé- 
cheresse de  la  peau  est  permanente  et  le  pityriasis  existe  seul  sans  mélange  ; 
c'est  ce  qu'on  voit  surtout  dans  les  cas  de  pityriasis  disséminé  qui  semble 
bien  former  un  type  morbide  distinct.  De  même  pour  le  pityriasis  pilaire 
dont  J'aspect  ne  varie  pas  et  persiste  indéfiniment. 

Une  fois  développé  le  pityriasis  a  une  durée  variable,  mais  souvent 
assez  longue;  le  pityriasis  de  la  barbe  et  du  cuir  chevelu  se  prolonge 
souvent  pendant  des  mois  et  des  années,  et  s'il  cède  à  un  traitement  appro- 
prié, les  récidives  sont  faciles  et  habituelles.  Le  pityriasis  rouge  est  sou- 
vent également  tenace,  il  récidive  également  sous  l'inQuence  de  la  moin- 
dre cause  et  principalement  à  la  suite  d'écarts  de  régime. 

DiAG5osTic.  —  La  sécheresse  de  la  peau  avec  ou  sans  coloration  rouge, 
la  présence  des  squames  épidermiques,  minces,  foliacées  ou  pulvérulentes, 
l'existence  habituelle  de  chaleur  et  de  prurit,  l'absence  ou  le  peu  d'inten- 
sité des  phénomènes  généraux  caractérisent  suffisamment  le  pityriasis 
pour  que  cette  maladie  puisse  être  reconnue  facilement  et  être  distin- 
guée des  autres  affections  de  la  peau  dans  lesquelles  on  rencontre  des 
squames.  C'est  ainsi  qu'on  établira  facilement  la  différence  entre  la  ma- 
ladie qui  nous  occupe  et  le  psoriasis,  cette  dernière  affection  présentant 
des  plaques  squameuses,  argentines,  saillantes,  imbriquées  et  reposant 
sur  des  taches  d'une  coloration   brune  foncée;   dans  les  cas  douteux, 
l'adhérence  des  squames,  la  saillie  plus  marquée  des  plaques,  leur  déli- 
mitation bien  plus  précise,  leur  siège  d'élection  aux  membres  et  parti- 
culièrement aux  coudes  et  au-dessous  de  la  saillie  rotulienne,  la  récidive 
de  1  éruption  squameuse,  l'existence  d'autres  taches  éruptives  mieux  carac- 
térisées sont  des  caractères  qui  serviront  à  faire  reconnaître  le  psoriasis. 
L'ichtyose  se  reconnaît  ordinairement  très-facilement  à  la  sécheresse  de  la 
peaa  et  à  Texistence  d'écaillés  épidermiques  adhérentes,  à  l'étendue  et  à 
la  pennanence  de  l'altération  cutanée,  aussi  bien  qu'à  l'absence  de  tout 
symptôme  local  ou  général.  Toutefois,  dans  l'icthyosc  locale,  la  diffor- 
mité de  la  peau  ressemble  tellement  au  pityriasis  par  la  couleur,  par  la 
sécheresse  et  la  desquamation  de  la  peau  que  le  plus  ordinairement  on 
croit  à  l'existence  du  pityriasis  et  que  l'erreur  dans  le   diagnostic  entraîne 
une  erreur  dans  le  pronostic  et  dans  le  traitement ,    l'icthyose  même 
localisée  étant  incurable  et  ne  devant  indiquer  qu'un  traitement  local 


36  PITYRIASIS.  —  diagmostic. 

palliatif.  Cette  confusion  est  d'autant  plus  commune  et  plus  facile  que 
richthyose  localisée  se  rencontre  fréquemment  aux  régions  où  se  déve- 
loppe souvent  le  pityriasis,  savoir ,  au  cuir  chevelu ,  aux  sourcils,  au 
visage  et  principalement  aux  joues.  Dans  ces  circonstances  on  reconnaî- 
tra richtyose  à  l'ancienneté  et  à  la  ténacité  des  taches  squameuses,  à  la 
rougeur  plus  prononcée,  à  la  délimitation  bien  marquée  de  la  lésion  et 
surtout  à  la  disposition  symétrique  absolue  qui  existe  des  deux  côtés  du 
corps,  relativement  au  siège  et  à  retendue  des  taches.  J'ai  déjà  dit  que 
la  maladie  décrite  sous  le  nom  de  pityriasis  pilaire  n'était  qu'une  variété 
d'ichtyose  cornée,  je  n'y  reviendrai  pas. 

Il  est  plus  difficile  d'établir  la  distinction,  entre  le  pityriasis  et  l'ec- 
zéma ;  pour  ma  part,  je  l'ai  répété  plusieurs  fois,  je  ne  connais  pas  les 
limites  précises  qui  existent  entre  ces  deux  maladies  ;  quoique  dénom- 
mées différemment,  elles  ne  sont  que  des  degrés  d  une  seule  et  même 
affection  et  je  ne  vois  aucune  différence  entre  l'eczéma  sec  et  le 
pityriasis;  aussi  sans  entreprendre  un  diagnostic  différentiel  impossible 
à  établir  d*une  manière  absolue,  je  dirai  que  l'eczéma  est  carac- 
térisé par  une  sécrétion  séro-purulente  et  par  des  croûtes,  tandis  qu'on 
réserve  le  nom  de  pityriasis  à  la  même  affection  dans  laquelle  la  peau  est 
toujours  sèche  et  couverte  de  squames  fines  et  non  superposées. 

Le  pityriasis  a  été  souvent  confondu  avec  le  pemphigus  foliacé  ;  j'ai  eu 
occasion  de  signaler  l'opinion  de  Devergie  et  d'Hébra,  qui  ont  décrit  sous 
le  nom  de  pityriasis  rubra ,  une  affection  grave  et  étendue  qui  appar- 
tient véritablement  au  pemphigus  foliacé;  l'étendue,  souvent  même 
l'universalité  de  l'affection,  sa  gravité,  la  largeur  des  squames,  la  rougeur 
vive  de  la  peau  sont  des  signes  à  l'aide  desquels  on  devra  distinguer  le 
pemphigus  foliacé  du  pityriasis;  l'apparition  de  quelques  bulles,  qui  a 
lieu  quelquefois,  vient  beaucoup  aider  au  diagnostic. 

Dans  les  cas  de  pityriasis  disséminé  alors  que  la  maladie  est  caractérisée 
par  des  plaques  en  cercles  dont  les  bords  sont  bien  délimités,  il  est  impor- 
tant de  distinguer  l'affection  pityriasique  de  la  tricophytie  circinée 
(herpès  circiné),  maladie  parasitaire  causée  par  la  présence  du  tricophy- 
ton  dans  les  lames  de  l'épiderme.  Ce  diagnostic  est  ordinairement  facile 
en  raison  du  siège,  du  nombre  et  du  peu  d'étendue  des  plaques  de  pity- 
riasis qu'on  rencontre  surtout  sur  le  tronc  et  sur  la  partie  supérieure  des 
membres,  et  qui  sont  groupées  sous  forme  de  petites  taches  nombreuses, 
d'une  forme  arrondie  un  peu  irrégulière  et  d'une  médiocre  étendue,  tandis 
que  les  plaques  de  tricophytie  se  rencontrent  principalement  sur  les  parties 
découvertes,  au  visage,  au  cou,  aux  avant-bras  ou  au  dos  des  mains  ;  ces 
plaques,  peu  nombreuses,  isolées,  sont  constituées  par  des  cercles  régu- 
liers, qui  s'agrandissent  rapidement,  le  centre  se  guérissant  et  la  circonfé- 
rence squameuse  envahissant  les  surfactss  voisines,  dételle  sorte  qu'en 
quelques  jours  les  plaques  ont  acquis  des  dimensions  doubles  et  triples 
de  leur  étendue  première.  J'ajouterai  encore  que,  sur  le  liséré  saillant  et 
squameux  qui  iorme  la  circonférence  des  plaques  parasitaires,  on  peut 
quelquefois  reconnaître  Texistence  de  quelques  vésicules  ou  de  quelques 


PITYRIASIS.  —  PRONOSTIC.  —  etiologie.  —  amatomie  pathologique.    37 

pustules,  qu'on  retrouve  bien  plus  rarement  dans  le  pityriasis.  Enfin,  au 
milieu  des  squames,  ou  mieux,  sur  quelques  poils  follets,  un  examen  mi- 
croscopique pourrait  faire  reconnaître  la  présence  des  pores  de  tricophyton. 
Il  est  encore  une  affection  qu'on  peut  confondre  avec  le  pityriasis  cir- 
conscrit, c'est  la  scrofulide  érythémato-squameuse,  caractérisée  par  des 
taches  rouges,  squameuses  d'une  bénignité  apparente.  La  saillie  de  la 
plaque,  sa  couleur  violacée,  l'adhérence  des  squames,  la  longue  durée  de 
la  maladie  qui  se  prolonge  sans  changement  pendant  des  années,  la  gué- 
rison  avec  une  cicatrice  indélébile ,  la  concomitance  de  quelque  autre  mani- 
festation actuelle  ou  ancienne  de  scrofule  sont  les  caractères  principaux 
qui  appartiennent  à  la  scrofulide  et  qui  la  distinguent  du  pityriasis. 

Pronostic.  —  Les  diverses  variétés  du  pityriasis  sont  des  affections  dé- 
nuées de  gravité,  et  qui  constituent  seulement  des  lésions  incommodes 
pour  les  malades,  à  cause  des  démangeaisons  qu'elles  entraînent  souvent 
à  un  degré  assez  prononcé,  ou  parce  qu'elles  se  développent  quelquefois 
sur  des  parties  découvertes,  et  que  les  taches  sont  apparentes.  J'ajouterai 
que  le  pityriasis  du  cuir  chevelu  est  souvent  très  tenace,  et  que,  lorsqu'il 
se  prolonge  longtemps  ou  qu'il  se  reproduit  fréquemment,  il  peut  être 
une  cause  de  calvitie  précoce,  principalement  chez  les  sujets  goutteux. 
Etiologie.  —  Le  pitysiaris  se  développe  à  tous  les  âges;  les  plaques 
du  pityriasis  blanc  simple  sont  communes  chez  les  enfants,  principale* 
ment  au  moment  de  la  première  et  de  la  seconde  dentition  ;  le  pityriasis 
disséminé  est  observé  principalement  chez  les  jeunes  gens  et  dans  l'âge 
adulte;  il  paraît  plus  commun  au  printemps  et  pendant  l'été  que  pendant 
les  saisons  froides.  Le  pityriasis  rouge  circonscrit  se  rencontre  plus  fré- 
quemment chez  les  adultes  et  chez  les  gens  d'un  certain  âge  ;  il  est  quel- 
quefois associé  à  des  névralgies,  à  des  troubles  gastriques  ou  à  des  mani- 
festations goutteuses  ;  ce  qui  a  fait  dire  à  Bazin  que  cette  affection  était 
ordinairement  de  nature  arthritique. 

Comme  Teczéma,  le  pityriasis  peut  se  développer  sous  TinQuence  de 
l'hérédité;  il  est  quelquefois  le  résultat  d'une  alimentation  trop  stimulante, 
de  fatigues,  et  particulièrement  de  veilles,  quelquefois  d'émotions  vives. 
Plus  rarement  il  survient  à  la  suite  d'une  inQammation  accidentelle  de  la 
peau  par  des  frictions  rudes  ou  par  l'application  de  quelques  substances 
irritantes. 

.\ratomie  pathologique.  —  Il  n'y  a  pas  à  faire  d'anatomie  pathologique 
ni  d'histologie  à  propos  du  pityriasis,  c'est  une  lésion  très-supiï)  ficielle  de 
la  peau  caractérisée  par  une  production  surabondante  d'épiderme  et  par 
une  évolution  trop  rapide  des  cellules  du  corps  muqueux,  lesquelles 
s'atrophient,  meurent  avant  que  l'épiderme  ait  acquis  toute  sa  solidité  et 
entraînent  sa  chute  sous  forme  de  squames.  Dans  le  pityriasis  pilaire,  des 
couches  d'épideime  corné  sont  sécrétées  dans  la  gaîne  du  poil  et  s'accu- 
mulent autour  de  sa  tige.  Plus  tard  le  poil  est  rompu  par  cette  production 
cornée,  et  il  ne  resteplus  que  la  saillie  rugueuse,  formée  par  l'épiderme. 
En  1874,  Malassez  a  trouvé,  dans  les  squames  épidermiques  provenant 
du  pityriasis  de  la  tète,  un  parasite  siégeant  dans  la  couche  cornée  de 


I 


58  PITYRIASIS.  —  mature.  —  traitemeut. 

l'épideime  et  constitué  uniquement  par  des  spores,  allongées  et  bourgeon- 
nautes,  d'un  très  petit  diamètre  (de  5  à  2  (a.)  ;  Tauteur  de  cette  décou- 
yerte  fait  jouer  à  ce  parasite  un  rôle  important  dans  la  production  de 
l'alopécie  qui  accompagne  et  suit  certains  pityriasis  rebelles.  Sans  Youloir 
contester  les  résultats  des  recherches  de  Malassez,  je  n'attribue  au  para- 
site du  pityriasis  qu'une  importance  secondaire  ;  il  me  parait  plutôt  une 
conséquence  accidentelle  que  la  cause  de  la  maladie»  et  sa  fréquence  ne 
me  suffit  pas  pour  faire  ranger  le  pityriasis  de  la  tête,  maladie  non  con- 
tagieuse, parmi  les  affections  primitivement  parasitaires. 

Nature.  —  L'étiologie  du  pityriasis  qui  est  la  même  que  celle  de  l'ec- 
zéma, la  ressemblance  avec  cette  dernière  maladie,  le  siège  superficiel  de 
l'éruption,  la  facilité  des  récidives,  la  guérison  obtenue  à  l'aide  des  moyens 
de  traitement  qui  réussissent  habituellement  dans  l'eczéma,  portent  à 
penser  quelle  pityriasis  est  une  maladie  de  même  nature  que  l'eczéma  et 
qu'il  est  la  manifestation  d'une  même  disposition  constitutionnelle.  Aussi 
je  ne  fais  pas  difficulté  de  ranger  le  pityriasis  parmi  les  éruptions  dites 
dartreuses  ou  herpétiques  (Voy.  art.  Dartre,  t.  X,  p.  693  et  Eczéma, 
t.  Xll,  p.  375)  dont  il  me  parait  être  l'expression  la  plus  affaiblie. 

Traitement.  —  La  thérapeutique  du  pityriasis  comprend  l'emploi  des 
modificateurs  généraux  et  celui  des  moyens  locaux  appliqués  topiquement 
pour  combattre  le  pityriasis;  ces  derniers  suffisent  quelquefois  pour  rendre 
à  la  peau  son  aspect  normal  ;  leur  utilité  est  incontestable,  mais  je  crois  à 
l'efficacité  et  même  à  la  nécessité  habituelle  d'un  traitement  général  pour 
accélérer  la  guérison  et  surtout  pour  prévenir  les  récidives  trop  promptes. 

Au  premier  rang  des  médicaments  internes  indiqués  dans  le  traitement 
du  pityriasis,  je  placerai  les  préparations  alcalines  et  principalement  le  bi- 
carbonate de  soude.  Dans  le  pityriasis  rouge  qui  est  observé  souvent  chez 
les  sujets  goutteux ,  dans  le  pityriasis  disséminé,  les  alcalins  sont  très 
utiles  ;  ils  donnent  également  de  bons  résultats,  mais  à  un  moindre  degré, 
dans  le  pityriasis  simple  et  pai^ticulièrement  dans  le  pityriasis  de  la  barbe 
et  du  cuir  chevelu.  On  a  conseillé  également  avec  raison  l'emploi  des  sels 
arsenicaux  :  l'arséniate  de  soude  est  administré  avec  avantage,  mais  je  le 
prescris  souvent  après  les  alcalins,  lorsque  la  maladie  a  résisté  ;  .et  dans 
ces  cas  j'associe  le  bi-carbonate  de  soude  à  l'arséniate  de  soude,  en  don- 
nant chaque  jour,  avant  le  déjeuner  et  le  dîner,  une  cuillerée  à  bouche  de  la 
solution  suivante  : 

Eau  distillée 300  «^ 

Bi-carbontte  de  soude 20  >' 

Arséniate  de  soude OfflO" 

Chez  les  sujets  lymphatiques,  dans  les  cas  de  pityriasis  rouges  tenaces, 
fixés  aux  aisselles,  aux  aines,  au  cou,  je  me  suis  trouvé  assez  bien  de 
l'emploi  de  l'arséniate  de  fer,  en  pilules,  à  la  dose  de  2  à  3  centigrammes 
par  jour.  Le  soufre  et  les  préparations  sulfureuses  sont  indiqués  dans  le 
traitement  du  pityriasis,  principalement  lorsqu'il  s'agit  du  pityriasis  de 
la  barbe  ou  du  cuir  chevelu  ;  j'ai  obtenu  des  succès,  dans  ces  cas,  de 
l'administration  des  fleurs  de  soufre  à  la  dose    quotidienne  de  1  à 


PITYRIASIS.    —  TEAITEMEHT.  39 

i  grammes  ou  du  sirop  sulfureux  de  Crosnier.  C'est  un  bon  moyen  à 
employer  contre  les  pityriasis  succédant  à  l'eczéma.  On  a  encore  conseillé 
les  amers  et  les  reconstituants;  leur  emploi  peut  être  utile  chez  les  indi- 
Tidns  lymphatiques  ou  scrofuleux.  Lorsque  le  pityriasis  survient  chez  les 
enfants,  sous  la  forme  désignée  par  le  nom  de  dartre  farineuse,  on  peut 
employer  avec  avantage  le  sirop  antiscorbutique,  le  phosphate  de  chaux 
ou  rbuile  de  fo'e  de  morue. 

Je  dois  à  peine  mentionner  l'usage  des  purgatifs  qui  n'ont  qu'une 
action  bien  faible  sur  la  guérison  du  pityriasis.  Ils  peuvent  être  indiqués 
au  début  du  la  maladie  lorsqu'existent  quelques  phénomènes  généraux, 
quelques  signes  d'embarras  gastriques,  ou  pour  remplir  quelqu'indica- 
tion  spéciale. 

Au  traitement  général  que  je  viens  d'indiquer,  on  doit,  d'ailleurs, 
ajouter  des  moyens  topiques  dont  l'utilité  est  évidente;  au  début, 
principalement  dans  le  pityriaris  rouge,  lorsqu'on  constate  quelques 
phénomènes  d'inflammation  cutanée,  on  doit  avoir  recours  aux  lotions 
ëmollicntes,  avec  des  décoctions  de  laitue  ou  de  guimauve ,  avec  des 
infusions  légèrement  astringentes  de  tiges  de  mélilot  ou  de  fleurs  de 
sureau,  aux  grands  bains  tièdes  rendus  éraoliients  par  l'addition  de  son 
ou  d'amidon  ;  mais  plus  tard  ou  même  dès  le  commencement  de  la  mala- 
die, lorsqu'il  n'y  a  pas  de  signes  d'inflammation,  on  aura  recours  à  l'ap- 
plication de  topiques  résolutifs  ou  astringents  et  aux  bains  alcalins  et 
sulfureux.  Les  lotions  qui  réussissent  le  mieux,  sont  celles  faites  avec  de 
l'eau  blanche  très  peu  chargée  d'acétate  de  plomb,  avec  une  solution  très 
légère  de  sulfure  de  potassium,  avec  de  l'eau  phagédénique  coupée  avec 
beaucoup  d'eau  tiède,  avec  une  solution  très-faible  de  sublimé,  au  mil- 
lième au  plus.  Les  pommades  qui  restent  plus  longtemps  en  contact  avec 
la  peau,  sont  plus  utiles  encore  que  les  liquides  et  sont  très  souvent  em- 
ployées dans  le  traitement  du  pityriasis  simple  et  du  pityriasis  rouge,  et 
même  à  la  fin  du  pityriasis  disséminé,  alors  que  les  taches  tardent  trop  à 
disparaître  sous  l'influence  de  la  médication  alcaline  et  arsenicale.  Les 
pommades  qu'on  devra  employer  sont,  au  début,  celles  à  base  d'oxyde  de 
zinc,  au  trentième  ou  au  quinzième  ;  plus  tard,  les  pommades  au  goudron, 
à  l'huile  de  cade  au  vingtième  ou  au  dixième,  au  calomel  au  centième 
ou  au  cinquantième,  à  l'onguent  citrin  mélangé  avec  dix  parties  d'axonge 
ou  de  cold-cream.  Dans  le  pityriasis  du  cuir  chevelu  et  de  la  barbe,  jo  me 
suis  souvent  bien  trouvé  de  l'emploi  d'une  pommade  sulfureuse  préparée 
en  ajoutant  à  un  corps  gras  inerte,  un  trentième  ou  même  un  soixantième 
de  fleurs  de  soufre.  Dans  le  pityriasis  pilaire,  que  je  considère  comme 
une  icthyose  locale,  le  traitement  général  n'a  aucune  action  ;  il  ne  faut 
employer  que  des  bains  savonneux,  alcalins  ou  sulfureux  et  que  des  pom- 
mades contenant  une  dose  assez  forte  de  substances  actives  et  particuliè- 
rement l'huile  de  cade  mêlée  à  trois  ou  quatre  parties  d'huile  ou  d'axonge. 
Comme  on  l'a  déjà  dit ,  le  traitement  est  alors  seulement  palliatif.  Aux  lo- 
tions et  aux  pommades,  on  doit  ajouter  l'emploi  des  bains  qui  seront  émol- 
lients,  alcalins  ou  sulfureux,  suivant  le  degré  d'inflammation  cutanée. 


40  PITYRIASIS. 5[ —   I*.   PARASÏTAIBE   00   VERSIGOLOR. 

Je  ne  dois  pas  négliger  de  dire  que  dans  le  traitement  du  pityriasis, 
comme  dans  celui  de  Teczéma,  les  moyens  hygiéniques  sont  indispensa- 
bles pour  aider  l'action  des  remèdes  internes  et  externes.  Les  malades 
devront  s'abstenir  de  tous  les  aliments  stimulants,  tels  que  les  poissons, 
les  coquillages,  les  préparations  de  porc,  le  gibier,  les  salaisons,  les  mets 
épicés,  le  vin  pur,  le  café,  les  liqueurs  alcooliques.  Ils  devront  éviter 
toute  cause  de  fatigue,  tout  excès  et  particulièrement  les  veilles. 

Enfin,  dans  les  cas  de  pityriasis  rebelles  ou  récidivants,  on  pourra 
avoir  recours ,  avec  avantage,  aux  eaux  minérales  prises  en  boisson,  en 
bains  et  même  en  douches  d'eau  pulvérisée  projetées  sur  les  régions 
malades.  Les  eaux  les  mieux  indiquées  sont  les  eaux  alcalines  et  les  eaux 
sulfureuses  :  les  eaux  de  Plombières,  de  Royat  sont  souvent  très  efficaces 
contre  les  pityriasis  développés  chez  des  individus  soupçonnés  de  goutte  ; 
les  eaux  sulfureuses  de  Schinznach,  de  Ragnères-de-Luchon,  d'Aix>la-Cha- 
pelle,  d'Ax,  de  Saint-Honoré ,  sont  mieux  indiquées  chez  les  individus 
lymphatiques  et  scrofuleux  ;  celles  de  Saint-Gervais  réussissent  très  bien 
dans  le  pityriasis  simple,  dans  le  pityriasis  rouge  et  dans  les  cas  où 
l'affection  squameuse  a  été  précédée  d'eczéma,  ou  bien  encore  chez  les 
malades  dont  la  peau  est  irritée  facilement  par  l'action  des  topiques,  même 
peu  énergiques.  Comme  pour  les  eczémateux,  l'air  de  la  mer  est  mauvais 
aux  personnes  atteintes  de  pityriasis  ;  il  détermine  souvent  chez  elles  des 
phénomènes  d'inflammation  cutanée,  et  je  l'ai  vu  plusieurs  fois  transfor- 
mer le  pityriasis  en  eczéma. 

Pityriasis  parasitaire  ou  versicîolor.  —  Cette  maladie  est  due 
à  la  présence  dans  les  lamelles  épidermiques  d'un  parasite  végétal  auquel 
on  a  donné  le  nom  de  microsporon  furfur  ;  ce  parasite  a  été  découvert 
en  1846  par  Eichstedt  ;  et  en  1864  Kobner  réussit  à  Tinoculer  sur  la 
peau  de  Thomme. 

Les  squames  du  pityriasis  versicolor  sont  jaunâtres,  assez  épaisses,  ha- 
bituellement imbibées  d'une  matière  grasse  sébacée  ;  à  l'aide  du  micros- 
cope on  reconnaît  facilement  entre  les  lames  de  l'épithélium  corné  le  para- 
site caractérisé  par  des  spores  arrondis  rassemblés  en  groupes  de  forme 
également  ronde  et  par  des  tubes  de  mycélium  dont  les  articles  sont  très 
allongés. 

Le  pityriasis  parasitaire  se  présente  sous  la  forme  de  taches  colorées  en 
brun  ou  en  jaune,  légèrement  saillantes  au-dessus  de  la  surface  de  la 
peau.  Les  squames  qui  forment  ces  taches  sont  assez  adhérentes;  elles  se 
détachent  quelquefois  spontanément,  mais  c'est  ordinairement  par  le 
grattage  qu'on  les  fait  tomber  en  lamelles  fines  et  minces.  Ces  plaques 
sont  jaunes  ou  brunes  ordinairement  légèrement  nuancées  et  j'avais  pro- 
posé de  donner  à  la  maladie  le  nom  plus  exact  de  pityriasis  luiea  ;  dans 
quelques  cas  rares,  elles  ont  une  coloration  plus  foncée,  presque  noire,  et 
cette  variété,  que  je  n'ai  rencontrée  qu'une  seule  fois,  constitue  le  pityria- 
sis nigra  de  Willan  et  Rateman.  Ces  plaques  squameuses,  de  forme  ar- 
rondie ou  irrégulière,  ont  une  étendue  variable  depuis  celle  d'une  pièce 
de  un  à  deux  francs  jusqu'à  quinze  ou  vingt  centimètres  carrés.  Elles  sont 


PITYRIASIS.    —  p.    PARASITAIRE   OU   VERSICOLOR.  41 

ordinairement  en  assez  grand  nombre  et  disposées  dans  la  même  région  ; 
comme  elles  sont  entremêlées  de  portions  de  peau  saine,  elles  donnent  à 
la  surface  cutanée  où  elles  se  rencontrent  un  aspect  bigarré  d'où  le  nom 
de  pityriasis  versicolor.  Quelquefois,  les  taches  séparées  les  unes  des 
autres  primitivement,  se  réunissent  en  augmentant  d'étendue  et  ne  for- 
ment plus  qu'une  seule  plaque  café  auMait  qui  recouvre  une  partie  du 
tronc  ou  même  le  tronc  tout  entier.  Le  siège  d'élection  du  pityriasis 
est  le  tronCy  le  cou  et  la  partie  supérieure  des  membres,  mais  ce  siège  n'a 
rien  d'exclusif:  on  peut  rencontrer  des  plaques  du  pityriasis  sur  la  figure, 
sur  les  membres  et  particulièrement  sur  les  membres  supérieurs.  C'est 
à  peine  si  le  pityriasis  parasitaire  donne  lieu  à  quelques  démangeaisons  ; 
le  plus  ordinairement,  cette  maladie  se  présente  avec  une  absence  com- 
plète de  symptômes  locaux  et  généraux;  la  présence  seule  des  taches  révèle 
son  existence. 

Une  fois  développé  le  pityriasis  versicolor  a  une  grande  tendance  à 
envabir  les  parties  voisines,  et,  s'il  vient  à  disparaître,  il  récidive  avec 
une  grande  facilité;  c'est  ainsi  que,  chez  certaines  personnes,  cette  affec- 
tion apparaît  tous  les  ans  au  printemps  ou  au  commencement  de  l'été  ;  elle 
disparait  au  bout  de  quelque  temps  soit  à  la  suite  d'un  traitement  con- 
Tenable,  soit  spontanément  ;  mais  l'année  suivante,  à  la  même  époque, 
sous  l'influence  des  conditions  favorables  à  son  développement,  le  cham- 
pignon, qui  n'était  pas  détruit,  repullule,  et  la  maladie  se  reproduit  avec 
les  mêmes  caractères. 

Le  diagnostic  du  pityriasis  parasitaire  est  facile  ;  la  maladie  est  suffi- 
samment caractérisée  par  les  plaques  squameuses,  colorées  qui  donnent 
à  la  peau  cet  aspect  versicolore  particulier  que  je  viens  de  signaler;  dans 
les  cas  douteux,  le  microscope,  en  relevant  la  présence  des  spores  et  des 
tubes  appliqués  sur  des  parcelles  d'épiderme  coloré,  enlève  toute  incerti- 
tude. Ces  caractères  de  squames  colorées  et  de  nature  parasitaire  démon- 
trés au   microscope,    permettent  facilement  de  distinguer  le  pityriasis 
versicolor  des  autres  pityriasis  non  parasitaires,  pour  que  je  n'aie  pas  besoin 
d'insister  sur  ce  diagnostic  différentiel.  Il  est  quelquefois  plus  difficile  de 
distinguer  le  pityriasis  versicolor  des  éphélides,  surtout  lorsque  les  taches 
du  pityriasis  sont  brunes  et  que  leur  nature  squameuse  est  peu  accusée  ; 
on  devra  savoir  dans  ces  cas  que  les  éphélides,  constituées  par  une  seule 
modification  du  pigment,  ne  présentent  jamais  de  squames,  et  que  ces 
dernières,  même  lorsqu'elles  ne  sont  pas  apparentes  au  premier  aspect, 
se  manifestent  toujours  dans  le  pityriasis  versicolor  sous  l'influence  du 
gnttage.  On  pourrait  encore  confondre  le  pityriasis  dont  il  s'agit  avec  le 
vililigo,  en  prenant  la  partie  saine  pour  la  partie  malade  ;  un  examen  un 
|)euplus  attentif,  l'absence  de  toute  squame,  la  comparaison  de  la  région 
atteinte  avec  les  autres  parties  du  corps  permettront  bien  vite  de  recon- 
naître Terreur  du  premier  moment, 

La  pronostic  du  pityriasis  versicolor  est  peu  grave  en  ce  sens  que 
cette  maladie  n'entraîne  aucun  inconvénient  dans  la  santé,  qu'elle  se 
développe  sur  des  parties  couvertes  par  les  vêlements  et  qu'elle  cède  or- 


42  PITYRIASIS.  —  p.  parasitaire  ou  vbrsicolor. 

dinairement  assez  facilement  aux  moyens  de  traitement  ;  il  faut  savoir 
cependant  qu'elle  est  sujette  à  récidiyer,  que,  chez  quelques  personnes, 
«lie  présente  une  résistance  opiniâtre,  et  qu'elle  peut  persister  pendant 
plusieurs  années,  quelquefois  même  indéfiniment. 

L'étiologie  du  pityriasis  parasitaire  est  assez  peu  connue  ;  cette  mala- 
die se  développe  souvent  au  printemps  et  pendant  l'été  ;  sa  fréquence  pa- 
raît plus  grande  dans  les  pays  chauds  ;  il  est  assez  commun  de  la  rencon- 
trer chez  les  individus  débilités  et  cachectiques  :  c'est  ainsi  qu'on  en 
rencontre  de  fréquents  exemples  chez  les  phthisiques,  dans  la  dernière 
période  de  l'affection  tuberculeuse.  Le  pityriasis  versicolor  est-il  conta- 
gieux comme  les  autres  maladies  parasitaires?  C'est  une  question  qui  n'est 
pas  encore  résolue  ;  en  tous  cas  la  faculté  contagieuse  doit  être  faible  et 
demander  des  conditions  spéciales  pour  se  manisfester,  car  il  n'est  pas 
rare  de  voir  des  individus  atteints  de  ce  pityriasis,  vivre  dans  une  cohabi- 
tation habituelle  avec  d'autres  personnes  qui  demeurent  complètement 
indemnes  de  toute  lésion  cutanée. 

Traitement.  —  La  thérapeutique  du  pityriasis  parasitaire  réclame 
surtout  des  moyens  locaux  et  cette  maladie  cède  bien  souvent  au  seul  em- 
ploi de  bains  sulfureux  répétés  journellement  pendant  trois  ou  quatre 
semaines;  on  peut  y  ajouter  des  onctions  faites  matin  et  soir  avec  une 
pommade  sulfureuse  contenant  un  quinzième  de  soufre  sublimé  pour  une 
partie  d'axonge  ;  j'ai  employé  souvent  avec  avantage  les  frictions  avec  la 
pommade  oxygénée  du  Codex  ou  mieux  avec  une  pommade  contenant 
vingt  gouttes  d'acide  nitrique  pour  cinquante  grammes  d'axonge.  On  a 
conseillé  encore  les  lotions  avec  une  solution  de  sublimé  au  millième  et 
même  les  bains  de  sublimé  préparés  par  l'addition  de  dix  grammes  de 
sublimé  dissous  dans  de  l'alcool  et  ajoutés  à  un  bain  ordinaire.  Chez  les 
individus  débilités,  on  assurera  la  guérison  et  non  la  réapparition  de  la 
maladie  parasitaire  à  l'aide  d'une,  médication  tonique  et  d'une  bonne 
hygiène.  J'ai  vu  dans  plusieurs  cas  rebelles,  la  guérison  s'effectuer  ou 
se  consolider  par  l'usage  des  eaux  minérales  sulfureuses  et  particulière- 
ment par  celles  deBagnères-de-Luchon,  d'Ax  ou  d'Aix-la-Chapelle. 

ÂUBERT.  Description  des  mal.  de  la  peau,  Paris,  1814.  pi.  XXVI. 

€aze5avb.  Dict.  de  méd.  en  50  ?ol.  Paris,  1841,  t.  XXIV.  —  Traité  des  maladies  du  cuir  che- 

▼elu,  Paris,  1850,  p.  167. 
EiCHSTEDT.  Froriep*8  NoHten  aut  derNatur  und  Heilkunde,  1846,  Band  XXXIX. 
¥riLS05  (Er.).  On  Skin  Diseases,  1863.  On  the  Phytopathology,  1864. 
Babbetcspruro.  Annalen  der  Charité,  Beriin,  1855,  Tasc.  2,  p.  124. 
ÂUDiGuiER  (Ed.).  Pityriasis  Tersicolor,  th.  de  doct.,  Paris,  1866. 

Baiin  (E.).  Leçons  th.  et  clin,  sur  les  afT.  cutani^es  de  nat.  arthritique  et  dartreuse,  Paris,  1868, 
Harot  (A.).  Leçons  sur  les  mal.  dartreuses  prof,  à  l'hôpital  Saint-Louis,  réd.  et  publ.  par  L.  Moy- 

sanl,  3«éd.,  Paris,  1868. 
€h»crole  (F.).  Nature  parasitaire  du  pityriasis  capitis  et  de  l'alopécie  consécuti?e,  th.  de  docLt 

Paris,  1874. 
Malassez  (L.)  Note  sur  le  champignon  du  pityriasis  simple  (Arch.  de  physioL,   Paris,   1874, 

p.  451-464.)  —  Anat.  path.  de  l'alopécie  pityriasique  (id.  p.  465). 
HiiRA  et  Kaposi.  Maladies  de  la  peau,  Irad.  par  Doyon,  Paris,  1878,  t.  II,  p.  869. 

Alfred  Hardt. 


PLACENTA.  —  »TATOitrE.  45  ' 

PIACEMTA.  — On  donne  le  nom  de  placenla  (ra»?.  Placenta: 
erkuchcn)  à  la  partie  dos  annexes  l'œUles  dans  laquelle  les  ramifica- 
tions des  vaisseaui  ombilicaux  viennent  se  distribuer  pour  se  mettre  en 
rapport  avec  la  circulation  maternelle. 

iVsATOMiE  soRMALE,  —  Le  placenta  est  constitué  par  une  sorte  de  disque 
d'upparence  cliamue,  ayant  un  diamètre  de  16  à  21  centimètres  lore- 
qu'il  a  acquis  son  entier  développement,  et  dont  la  plus  grande  épaisseur 
correspond  au  point  d'insertion  du  cordon,  pour  diminuer  insensiblement 
\ers  la  circonFérenee  qui  n'olTre  souvent  qu'une  épaisseur  de  5  à  G  mil. 
Il  présente,  deui  faces,  l'une  appelée  esterue  ou  utérine,  l'autre  îalerne 
l  fœt^e  ;    c'est  cctl-  di^ni'""  "iii  r-^l  le  plus  ordinairement  externe 


rplacenta  est  expulsé  ou  extrait  des  parlies  génitales,  âpres 
l'accouchement.  Lorsque  l'on  veut  se  rendre  compte  de  sa  véritable  dîs- 
|<o$i(iori  dans  t'ulérus  gravide.  îl  est  nécessaire  de  le  placer  de  manière 
ipe  la  face  utérine,  au  lieu  de  regarder  l'intérieur  du  sac  formé  par  les 
membranes,  soit  au  contraire  dirigée  en  dehors  (fig.  18).  On  consbte 
lAnn  que  celle  face,  dont  in  coloralion  varie  du  rouge  brun  au  blanc 
griiàlie,  est  convexe,  à  surface  lisse,  divisée  en  lobes  (appelés  impropre- 
ment cotylédons),  irrégulièrement  polygonaux,  séparés  par  des  scissures 
plus  ou  moins  profondes.  On  trouve  le  plus  souvent  sur  elle  des  lambeaux 
de  la  caduque  utérine  qui  sont  restes  adhérents  au  tissu  placentaire.  La  face 
iDlerae  ou  fœtale  est  concave  ;  elle  est  recouverte  par  l'amnios  dont  elle  n'est 


44  PLACENTA.  —  akatomie. 

séparée  que  par  les  premières  divisions  des  vaisseaux  ombilicaux.  C'est 
vers  le  milieu  de  cette  face  que  le  cordon  se  termine  le  plus  fréquem- 
ment (fig.  19);  mais  son  insertion,  au  lieu  d'être  centrale,  peut  se  faire 
aussi  sur  les  membranes  ou  vers  le  bord  du  placenta.  On  a  désigné  cette 
dernière  disposition  sous  le  nom  de  placenta  en  raquette. 

Quel  que  soit  le  point  d'insertion  du  cordon  ombilical,  les  vaisseaux 
qu'il  contient  s'écartent  généralement  les  uns  des  autres  avant  d'arriver 
au  niveau  du  gâteau  placentaire  et  se  divisent  en  branches  d'inégal 
volume  qui  s'appliquent  sur  la  surface  interne  du  chorion;  les  artères 
se  dirigent  vers  la  circonférence  en  devenant  de  moins  en  moins  volumi- 
neuses à  mesure  qu'elles  abandonnent  des  ramifications  qui  pénètrent 
dans  les  villosilés  choriales.  Les  veines  situées  sur  un  plan  plus  profond 
augmentent  de  volume  en  se  rapprochant  du  centre  ou,  à  parler  plus  net- 
tement, du  point  d'insertion  du  cordon,  où  elles  se  réunissent  pour  for- 
mer la  veine  ombilicale. 

Le  bord  du  placenta  est,  comme  il  a  été  dit  plus  haut,  beaucoup 
moins  épais  que  la  partie  centrale  ;  il  se  continue  avec  le  chorion  lœve, 
recouvert  lui-même  par  la  caduque  réfléchie  et  la  caduque  utérine.  On 
rencontre  le  plus  souvent  au  niveau  du  bord  placentaire  une  veine  consi- 
dérable, qu'on  a  désignée  sous  le  nom  de  sinus  circulaire,  et  qui,  pour 
quelques  auteurs,  joue  un  grand  rôle  dans  la  circulation  placentaire. 

Le  placenta  présente  des  variétés  assez  grandes  sous  le  rapport  de  la 
configuration.  Habituellement  ovale  ou  presque  rond,  il  affecte  rarement 
d'autres  formes,  surtout  quand  l'insertion  du  cordon  ou  la  division  de  ses 
vaisseaux  se  fait  d'une  façon  normale.  Les  variétés  les  plus  ordinaires  sont 
les  suivantes  :  le  placenta  peut  être  séparé  en  deux  parties  {placenta 
duplex,  dimidiatay  bipartita),  qui  n'ont  entre  elles  d'union  que  par  l'in- 
termédiaire du  cordon  et  des  membranes.  Dans  un  cas  rapporté  par  Ébert, 
les  deux  moitiés  du  placenta  étaient  égales,  arrondies,  entièrement 
distinctes;  la  veine  ombilicale  se  bifurquait  à  10  centimètres  du  gâteau 
placentaire  et  une  artère  accompagnait  chacune  de  ses  divisions,  llyrtl, 
au  contraire,  a  vu  un  placenta  bipartita  dans  lequel  le  cordon  ombili- 
cal s'insérait  sur  une  des  moitiés.  La  plupart  du  temps  les  deux  moitiés 
sont  inégales  ;  l'une  peut  être  très  petite  et  ne  représenter  qu'un  lobe 
{placenta  succenturiata)  ou  bien  il  peut  exister  à  la  circonférence  d'un 
placenta  normalement  développé  une  série  de  lobes  complètement  isolés 
du  gâteau  principal,  auquel  ils  ne  sont  alors  unis  que  par  les  vaisseaux 
qui  se  continuent  avec  ceux  du  cordon  ombilical.  Le  placenta  formé  de 
trois  parties  à  peu  près  igalcs,  placenta  tripartita  est  extrêmement  rare. 
On  rencontre  plus  souvent  une  forme  décrite  par  Hyrtl  sous  le  nom  de 
placenta  rnultiloba  dans  laquelle  un  grand  nombre  de  lobes  sont  tout  à 
fait  séparés  mais  assez  rapprochés  les  uns  des  autres  pour  qu'il  n'existe 
aucune  analogie  avec  le  placenta  des  ruminants. 

Les  dimensions  du  placenta  sont  différentes  aux  diverses  époques  de  la 
grossesse  ;  il  est  généralement  arrivé  à  son  entier  développement  dans 
le  courant  du  septième  mois.  On  a  cru  remarquer  qu'il  recouvre  à  la 


PLACENTA.  —  AHAToirrB.  45 

périphérie  de  l'œuf  une  surface  d'auLmt  plus  grande  tju'il  a  moins  dé- 
paisseiir.  Dans  les  conditions  normales  il  occupe  environ  le  quart  du 
cborion. 

Le  placenUi  nugmente  également  de  poids  à  mesure  que  la  grossesse 
avance  jusqu'au  septième  mois  enviran.  Lorsque  aucune  altération patho- 
lo^que  n'est  venue  entraver  son  dévelcppentctit,  il  pèse  au  terme  de  la 
grussesse  de  400  à  500  grammes,  déduction  faite  du  poids  du  cordon  et 
des  memliraues  lequel  est  d'environ  60  à  Hii  grammes. 

Développement  H  structure.  —  Si  l'on  veut  se  l'aire  une  idée  exacte 
du  mode  de  développement  et  de  la  structure  du  placenta,  il  est  néces- 
saire de  se  rappeler  comment  se  comportent  les  enveloppes  de  l'ii'uf  vers 
le  vingtième  jour  après  la  conception,  c'est-à-dire  au  moment  où  l'allan- 


luiJe  part  de  la  partie  poslcricurc  de  l'embryon  pour  se  placer  entre  l'am- 
nine  el  le  "liorion,  dont  elle  va  tapisser  la  face  interne.  Le  chorion,  formé 
ptflettaîllet  externe  du  blastoderme  et  la  membrane  vilellîne,  présente 
■me  surface  externe  hérissée  de  villosités  qui  sont  elles-mêmes  en  rapport 
ane  la  muqueuse  utérine  {caduque  utéro-placenl<iire  et  caduque  réElé- 
dùe).  C'est  dans  ces  villosités  que  pénètrent  les  nombreux  vaisseaux  ap- 
pâtés par  l'allantoide  h  la  pérîpliérie  de  l'œuf.  Chaque  villosité  reçoit 
une  artère  et  une  veine  recouvertes  d'une  couche  mince  de  tissu  allan- 
toidieo  (magma  réticulé  de  Joulin.)  Au  bout  de  très  peu  de  temps  deux 
phénomènes  tout  à  fait  différents  se  passent  dans  les  villosités  choriales, 
selon  qu'elles  se  trouvent  directement  en  contact  avec  la  muqueuse  uté- 
rine (caduque  utéro-placentaire)  ou  qu'elles  ne  sont  en  .apport  qu'avec 


46  PLACENTA.  —  akatomik. 

la  caduque  réfléchie.  Dans  ce  dernier  cas,  les  villosités  cessent  de 
croitrCf  leur  cavité  s'oblitère  et  leurs  vaisseaux  disparaissent.  D'après 
Charles  Robin,  le  mécanisme  de  cette  oblitération  serait  le  suivant  : 
le  tissu  allantoïdien  (magma  réticulé),  qui  sert  dégaine  aux  vaisseaux 
lorsqu'ils  pénètrent  dans  les  villosités,  envahirait  jusqu'à  leurs  dernières 
ramifications,  tandis  que  les  vaisseaux  disparaîtraient  sans  laisser  de 
trace.  11  parait  plus  simple  et  plus  logique  de  penser  que  ces  villosités, 
devenues  inutiles  après  le  développement  du  placenta,  subissent  vers  le 
quatrième  ou  le  cinquième  mois  un  véritable  travail  de  régression  ou 
plutôt  d'atrophie,  comme  tous  les  organes  qui  n'ont  plus  de  raison 
d'être.  Par  contre,  les  villosités  qui  plongent  directement  dans  la  mu- 
queuse utérine,  croissent,  augmentent  de  volume,  se  ramifient  et  consti- 
tuent le  chorion  frondosum^  qui  sera  le  placenta. 

Ces  premières  données  étant  admises,  il  devient  plus  facile  d'étudier  le  pla- 
centa en  décomposant  les  différents  éléments  qui  le  constituent.  Lorsqu'on 
enlève  l'amnios,  on  rencontre  les  premières  divisions  des  vaisseaux  ombi- 
licaux appliqués  contre  la  face  interne  du  chorion  par  un  tissu  conjonctif 
lâche,  sur  la  nature  duquel  il  existe  des  opinions  très  diverses  (fig.  20). 
Considéré  par  les  uns  comme  faisant  partie  du  chorion  dont  il  serait  la 
couche  la  plus  interne,  il  a  été  très  minutieusement  décrit  par  Joulin  sous 
le  nom  de  tissu  lamineux^  et  regardé  par  lui  comme  étant  constitué  par 
le  tissu  allantoïdien  dont  la  gélatine  de  Wharton  serait  elle-même  une 
variété.  Ce  tissu  est  divisé  en  deux  lames,  l'une  superficielle  située  au- 
dessus  des  vaisseaux  qu'elle  sépare  de  l'amnios,  Tautre  profonde  pla- 
cée immédiatement  au-dessous  du  chorion,  accompagnant  dans  les  vil- 
losités choriales  les  ramifications  vasculaires.  Il  se  rapproche  beaucoup 
par  sa  structure  du  tissu  sous-cutané  (Renault),  et  n'est  en  somme  que 
du  tissu  conjonctif  embryonnaire. 

Le  chorion,  situé  immédiatement  au-dessus,  est  une  membrane  trans- 
parente, lisse;  sa  surface  externe  est  couverte  par  les  troncs  villeux,  qui  se 
subdivisent  eux-mêmes  en  un  très  grand  nombre  de  rameaux  formant 
une  masse  compacte  d'un  rouge  vif,  qui  constitue  le  véritable  organe 
placentaire.  Il  est  extrêmement  difficile  d'apprécier  le  nombre  et  la  forme 
de  ces  divisions,  qui  varient  dans  les  différents  placentas.  Elles  commen- 
cent généralement  dans  le  voisinage  du  chorion,  et  se  dirigent  dans  tous 
les  sens.  Chaque  tige  principale  donne  naissance  soit  à  deux  rameaux 
partant  d'un  même  point,  soit  à  un  seul  rameau  se  détachant  à  angle  droit 
du  tronc  lui-même  ou  d'une  de  ses  premières  divisions.  11  en  est  de  même 
pour  les  subdivisions  successives  de  chacun  des  rameaux,  qui  deviennent 
de  plus  en  plus  fines.  Cependant,  dans  quelques  cas,  il  ne  se  détache,  sur 
toute  la  hauteur  du  tronc  principal,  que  des  rejetons  simples,  ne  se  sub- 
divisant pas  eux-mêmes.  Quel  que  soit  le  mode  de  division  des  villosités, 
leurs  extrémités  se  comportent  de  deux  façons  différentes  ;  les  unes  plon- 
gent dans  la  caduque  utérine  qui  constitue  le  placenta  maternel;  les  autres 
restent  libres  et  s'entre-croisent  entre  elles  de  façon  à  former  la  trame 
du  tissu  placentaire;  leur  diamètre   est   de  57  à  114  m.  Langhans   a 


PLACENTA.  —  iHATomB.  47 

décrit  une  aatre  Tariété  de  rameaux  Tilleux  consistant  en  divisions  pri- 
maires et  secondaires  du  tronc  principal.  Ils  sont  de  volume  variable, 
pouvant  atteindre  jusqu'à  un  millimètre  de  diamètre  et  se  rendent  au  pla* 
cents  utérin,  auquel  ils  adhèrent  si  intimement  qu'on  ne  peut  les  en  déta- 
cher, même  par  une  forte  traction .  On  rencontre  ces  rameaux  villeux  en 
grand  nombre  dans  le  tissu  maternel  qui  s'enfonce  protondément  entre  les 
lobes.  On  les  trouve  cependant  aussi  à  l'intérieur  même  des  cotylédons  ; 
leurs  divisions  se  terminent,  comme  les  villosités  ordinaires  ,pur  des  extré- 
mités libres,  ou  s'entre-croisant  entre  elles.  Ces  diiTérents  moyens  d'union 
Tont  de  la  masse  placentaire  un  tout  dense  et  compacte,  qui  adhère 
fortement  à  la  muqueuse  utérine,  surtout  à  partir  du  troisième  mois 
de  la  grossesse.  Les  villosités  placentaires  et  le  chorion  qui  leur  donne 
naissance  sont  constitués  exactement  comme  le  chorion  lui-même.  On  y 
rencontre  une  couche  interne  ou  fœtale  composée  de  tissu  conjonctif, 
et  une  couche  extome  constituée  par  un  épithéUum  pavinienteui  ayant  de 
7  à  iO  m.  d'épaisseur.  Cet  épittiélium,  très-apparent  sur  les  premières 
divisions  des  villosités  anciennes,  l'est  beaucoup  moins  sur  leurs  eitré- 
milés  ou  sur  les  rameaux  qui  sont  en  voie  de  développement. 

Les  villosités  [Gg.  20)  n'ayant  d'autre  destination  que  de  mettre  les  vais- 
seaux du  foetus  en  communication  avec  la  circulation 
maternelle,  chacune  d'elles  est  pourvue  d'une  artériole 
venant  de  l'une  ou  l'autre  artère  ombilicale  et  d'un 
rameau  veineux  allant  se  rendre  dans  la  veine  ombi- 
cale.  On  a  vu  plus  haut  que  les  premières  divisions 
des   vaisseaux   ombilicaux   étaient   comprises   entre 
deux  lames  de  tissu  conjonctif  séparant  le  chorion  de 
l*anioios.  Avant  de   se  diviser  en  ramuscules  qui  se  | 
distribuent  dans  les  villosités  churiales,  ces  vaisseaux  ( 
fonnent   de  véritables  bouquets,    dont   les  branche 
divergent  dans  tous  les  sens,  les  unes  passant  immé- 
diatement à  l'état  rapillaire  pour  pénétrer  dans  les 
villosités,  les  autres  formant  des  bouquets  secondaires 
qui  donnent  eux-mêmes  naissance  à  des  ramifications  p„  ^o. 

capillaires.  Ces  ramifications  pénètrent  jusque  dans  les  Enrimiié  d'une  tiiiotiw  dg 
divisions  les  plus  secondaires  des  villosités;  elles  se  ^«""dB  deux  unudit^ 
dirigent  vers  le  cul-de-sac  villeux,  soil  directement,  "*«*"■ 
wit  en  formant  des  spirales,  et  s'y  terminent  par  sang;a'a',>ais»eaiiyide; 
i»  anses  anostomotiques  qui  font  communiquer  J'b'''j'^5^' !"  ""''°"*' 
tatre  eux  les  deux  ordres  de  vaisseaux ,  de  telle 
sorte  que  le  système  vasculaire  de  l'embryon  est  un  système  entière- 
ment fermé,  dont  la  circulation  placentaire  n'est  elle-même  qu'une 
partie.  Il  n'existe  aucune  ansstamose  d'une  villosilé  à  une  autre,  pas 
plus  que  d'un  cotylédon  à  l'autre.  Les  vaisseaux  des  villosités  sont  dé- 
pourvus de  valvules.  Ceux  des  premières  divisions  villeuses  ont  la  même 
sliucture  que  les  vaisseaux  du  cordon,  et  sont  l'ichement  pourvus  de 
fibres  musculaires.  Dans  les  dernières  divisions,  au  contraire,  ils  ne  possè- 


48  PLACENTA.  —  akatomie. 

dent  que  leur  enveloppe  celluleuse  propre,  et  sont  placés  très-superficiel- 
lement, presque  immédiatement  au-dessous  de  l'épilhélium.  Leur  dia- 
mètre est  généralement  de  11  à  15  m. 

Le  développement  des  villosités  placentaires  et  de  leur  système  vascu- 
laire  débute  au  moment  où  Tallantoïde  vient  toucher  la  paroi  de  l'œuf;  il 
n*est  terminé  qu'à  une  époque  avancée  de  la  grossesse,  comme  le  prouve 
l'augmentation  progressive  (en  surface  et  en  poids)  du  placenta,  qui, 
mesurant  au  cinquième  mois  de  11  à  13  centimètres  de  diamètre,  en 
acquiert  de  16  à  20  au  terme  de  la  gestation.  Cet  accroissement  est  dû 
au  développement  sur  les  troncs  primitifs,  de  ramifications  reconnaissables 
à  la  nature  de  leur  enveloppe  dont  l'épilhélium  est  peu  apparent,  tandis 
qu'il  s'enlève  par  larges  plaques  sur  les  villosités  anciennes.^  Ainsi  le 
placenta  fœtal  est  composé  des  ramiGcations  des  artères  ombilicales  qui  se 
continuent  dans  les  villosités  par  l'intermédiaire  des  capillaires,  avec  les 
divisions  de  la  veine  ombilicale.  Ces  villosités  rappellent  presque  exacte- 
ment par  leur  structure  les  villosités  intestinales,  à  cette  différence  près 
que  dans  ces  dernières  on  rencontre  un  vaisseau  chylifère  qui  en  occupe 
le  centre.  Elles  s'enchevêtrent  les  unes  dans  les  autres  et  affectent  avec  la 
muqueuse  utérine  des  rapports  très  difficiles  à  définir  et  au  sujet  desquels 
la  lumière  n'est  pas  entièrement  faite. 

Si  la  plupart  des  auteurs  sont  d'accord  sur  la  structure  du  placenta 
fœtal,  il  n'en  est  pas  de  même  quand  il  s'agit  de  ce  qu'on  est  convenu 
d'appeler  le  placenta  matemeL  II  n'existe  peut-être  pas  de  sujet 
sur  lequel  l'imagination  des  anatomistes  se  soit  plus  exercée.  La  rareté 
des  investigations  faites  dans  des  conditions  tout  à  fait  favorables,  c'est- 
à-dire  lorsque  le  placenta  adhère  encore  à  l'utérus,  a  rendu  possibles  les 
hypothèses  les  plus  opposées.  Pendant  longtemps,  la  plupart  des  auteurs 
croyaient  à  une  communication  directe  entre  les  vaisseaux  maternels 
et  les  vaisseaux  fœtaux.  Yieussens,  Cooper,  Haller,  Chaussier  admet- 
taient ces  communications  utéro-fœtales.  Radford  partageait  la  même 
opinion,  tout  en  pensant  que  les  vaisseaux  trop  fins  ne  laissaient  passer  que 
la  partie  blanche  du  sang.  De  son  côté,  Flourens  prétendait  démontrer 
par  une  série  d'expériences  :  1"*  qu'une  liqueur  injectée  passe  du  fœtus  à 
la  mère  ;  2"*  qu'elle  passe  de  la  mère  à  l'enfant,  et  que  par  conséquent  il 
existe  une  communication  vasculaire  évidente,  constante  entre  la  mère 
et  le  fœtus,  comme  entre  le  fœtus  et  la  mère.  11  arrivait  ainsi  à  cette  singu- 
lière conclusion  que,  dans  la  classe  des  mammifères,  il  existe  deux 
modes  de  communication  entre  le  fœtus  et  la  mère  :  1°  communication 
vasculaire  directe  par  placenta  uniques  2**  communication  de  simple 
contact,  de  simple  adhésion,  en  cas  de  placentas  multiples  (ruminants). 
Les  expériences  de  Flourens  furent  reprises  par  Bonamy,  qui  se  convain- 
quit que  les  communications  directes  constatées  par  le  célèbre  physiolo- 
giste résultaient  d'un  procédé  d'injection  défectueux.  Il  serait  du  reste  fa- 
cile de  démontrer  qu'en  dehors  même  des  données  anatomiques,  il  existe 
des  raisons  physiologiques  très  péremptoires  pour  écarter  la  conununica- 
tion  directe  entre  les  deux  circulations. 


PLACENTA.  —  AKATOMiB.  49 

D* autres  auteurs  pensaient  et  pensent  encore  aujourd'hui  qu'il  se  déve- 
loppe dans  le  placenta  maternel  des  vaisseaux  nouveaux  qui  ont  reçu  le 
nom  de  vaisseaux  uléro-placentaires  (A.  Dubois),  et  qui,  tout  en  étant  indé 
pendants  des  vaisseaux  fœtaux,  s'enchevêtrent  avec  eux .  C'est  à  Jacquemier 
que  Ton  doit  les  recherches  les  j;)lus  exactes  à  l'appui  de  cette  opinion. 
Pour  lui^  il  existe  des  artères  et  des  veines  utéro-placentaires  de  nouvelle 
formation.  Les  artères  se  terminent  en  cul-de-sac,  et  n'ont  aucune  anasto- 
mose visible  avec  les  veines.  Les  veines,  ayant  jusqu'à  54  millimètres  de 
longueur,  se  distribuent  vers  les  scissures  interlobaires,  et  se  divisent  à 
la  surface  des  cotylédons.  Elles  sont  fréquemment  anastomosées  et  for- 
ment ainsi  le  sinus  coronaire.  Les  villosités  placentaires  sont  intriquées 
avec  les  veines  et  font  saillie  dans  leur  intérieur.  Cette  manière  de  voir 
fut  acceptée  par  Bonamy,  qui  admet  les  vaisseaux  utéro-placentaires  intri- 
qués  avec  les  villosités  fœtales,  et  crut  les  voir  pénétrer  jusqu'au  cborion. 
Joulin,  tout  en  ne  niant  pas  d'une  façon  absolue  l'existence  de  vaisseaux 
interplacentaires  à  titre  d'anomalie,  se  rallie  à  la  doctrine  du  développe- 
ment des  sinus  utérins  dans  lesquels  les  villosités  viendraient  plonger, 
et  se  mettraient  plus  ou  moins  directement  en  rapport  avec  le  sang  ma- 
ternel. Cette  théorie,  défendue  par  Hunter,  Weber,  Robert  Lee,  Coste, 
Kiwisch,  KôUiker,  Yirchow,  mérite  d'être  examinée  avec  la  plus  grande 
attention,  tant  à  cause  de  sa  grande  simplicité  que  parce  qu'elle  est 
conforme  aux  lois  de  Tanatomie  générale. 

La  muqueuse  utérine  qui  est  en  contact  avec  le  placenta  fœtal,  et  qui 
a  reçu  le  nom  de  placenta  maternel  {caduque  utéro-placentaire^  decidua 
plocen/o/ti),  subit  des  môdiCcations  très-importantes,  consistant  dans  un 
développement  de  plus  en  plus  considérable  de  ses  éléments  cellulaires 
et  de  ses  vaisseaux,  ainsi  que  dans  la  disparition  plus  ou  moins  rapide  de 
ses  glandes.  Elle  se  divise  elle-même  en  deux  couches,  dont  l'une  reste 
fixée  à  la   surface  externe  du  placenta,  et  pénètre  dans  sa  prolondeur, 
tandis  que  l'autre,  plus  épaisse  et  riche  en  vaisseaux,  reste  adhérente  à  la 
paroi  utérine;  son  relief  est  encore  facile  à  constater  quelques  jours 
après  l'accouchement.  A  mesure  que  ses  différents  éléments  se  dévelop- 
pent, la  caduque  pénètre  entra  les  villosités  placentaires,  puis  entre  les 
lobes,  qu^elle  sépare  à  l'aide  de  cloisonnements  nommés  par  Kôlliker 
fepta  placenUB.  Ces  prolongements  s'enfoncent  plus  ou  moins  profon- 
dément jusqu'au  voisinage  du  chorion.  Ils  sont  formés  de  deux  parois 
adossées  l'une  à  l'autre,  comprenant  entre  elles  des  vaisseaux.  Ils  ne  con- 
siiinent  du  reste  pas  les  seuls  prolongements  envoyés  par  la  muqueuse 
alérine  à  l'intérieur  du  placenta.  Winckler  a  constaté  qu'en  dehors  du 
sinus  circulaire  il  partait  du  point  de  réunion  des  deux  caduques  (utéro- 
plac^taire,  utérine  réfléchie)  une  expansion  de  tissu  maternel  s'insi- 
nuant  à  la  base  des  villosités,  immédiatement  au-dessus  du  chorion,  et 
s'avançant  vers  le  centre  du  placenta  jusqu'à  deux  ou  trois  centimètres  du 
bord.  Il  résulte  de  cette  disposition  que,  vers  la  circonférence  du  disque 
placentaire,  les  cotylédons  sont  presque  complètement  environnés  de  tissu 
luaternel,  tandis  que,  vers  le  contre,  leur  base  en  est  dépourvue.  Kôlli« 

KNnr.  DicT.  miù   bt  cub.  XXYIII*  —  4 


50  PLACENTA.  —  a^iatoiiie. 

ker  a  appelé  l'attention  sur  une  variété  de  placenta  dans  laquelle 
l'expansion  de  la  caduque  utérine  et  réfléchie,  signalée  par  Winckler,  se 
prolonge  à  5  ou  6  centimètres  du  bord  placentaire,  de  telle  sorte  que  les 
troncs  des  villosilés  choriales  et  des  vaisseaux  n'occupent  que  le  centre 
du  disque,  dont  la  plus  grande  partie  §e  trouve  ainsi  constituée  par  les 
ramifications  yilleuses  et  vasculaires.  Il  a  appelé  cette  anomalie  placenta 
marginata. 

En  examinant  tour  à  tour  les  deux  parties  de  la  caduque  utéro-placen- 
taire,  on  rencontre  dans  la  portion  restée  adhérente  à  l'utérus  de  nom- 
breuses artères  contournées  en  spirale  dont  on  retrouve  le  prolongement 
dans  la  caduque  qui  tapisse  la  surface  externe  du  placenta.  Elles  pénètrent 
avec  les  septa  dans  les  scissures  intercotylédonaires  et  forment  un  lacis 
très-serré  qui  se  trouve  placé  entre  les  dernières  ramifications  des  villo- 
sites  choriales  dans  toute  la  partie  superficielle  du  placenta  fœtal,  mais 
qu'on  ne  retrouve  plus  dans  la  profondeur  du  gâteau  placentaire  immé- 
diatement au-dessus  du  chorion.  Ces  artères  ne  sont  que  les  capillaires 
hypertrophiés  du  plan  superficiel  de  la  caduque;  elles  subissent  une 
modification  profonde  dans  leur  structure  et  ont  pour  unique  paroi  un 
endothelium  séparé  du  tissu  de  la  caduque  placentaire  par  un  tissu  con- 
jonctif  lâche  et  finement  strié.  L'absence  de  fibres  musculaires  lisses  et 
d'éléments  élastiques  rapproche  beaucoup  leur  structure  de  celle  des 
veines.  Elles  sont,  du  reste,  la  partie  la  moins  importante  du  système 
vasculaire  du  placenta  maternel,  plus  spécialement  composé  de  veines 
dans  la  partie  qui  se  trouve  en  contact  avec  les  villosilés. 

Les  vaisseaux  veineux  du  placenta  maternel,  soit  qu'on  les  suive  dans 
l'épaisseur  du  gâteau  placentaire,  soit  qu'on  les  recherche  dans  la  paroi 
utérine,  sont  constitués  par  les  veines  elles-mêmes,  et  les  capillaires  de  la 
muqueuse  utérine  ayant  subi  un  développement  tel,  qu'ils  forment  de  véri- 
tables sinus. 

Dans  les  conditions  où  on  les  étudie  habituellement,  c'est-à-dire  lorsque 
le  placenta  a  été  détaché,  on  peut  les  diviser  en  deux  couches  :  l'une 
fœtale,  située  à  la  surface  et  dans  la  profondeur  du  tissu  placentaire, 
l'autre  utérine,  pouvant  être  poursuivie  jusqu'à  la  couche  musculaire  de 
l'utérus  sur  laquelle  elle  s'applique.  Dans  les  deux  cas,  les  veines  naissent 
des  artères  utérines  par  Tintermédiaire  des  capillaires  et  vont  se  jeter  dans 
des  veines  volumineuses  qui  ramènent  le  sang  dans  la  circulation  mater- 
nelle. Les  sinus  qui  restent  fixés  dans  la  paroi  utérine  sont  faciles  à  re- 
connaître; une  incision  faite  sur  la  portion  de  la  caduque  qui  répond  à 
l'insertion  placentaire  permet  d'apercevoir  de  larges  vaisseaux  béants 
composés  d'artères  et  de  veines  formant  un  véritable  tissu  caverneux.  11 
n'est  pas  rare  de  rencontrer  sur  cette  surface  qui,  comme  on  l'a  dit  plus 
haut,  forme  un  léger  relief  dans  toute  la  partie  correspondant  au  pla- 
centa, des  ouvertures  à  travers  lesquelles  on  peut  introduire  un  stylet 
jusque  dans  Tintérieur  des  vaisseaux.  Ces  orifices  sont  probablement  dus 
à  un  arrachement  plus  profond  de  la  caduque  et  de  la  paroi  vasculaire,  et 
ils  doivent  leur  direction  légèrement  oblique  à  la  rétraction  de  l'uténis 


PLACENTA.  — 
t  a  chanfié  les  rnpports  de  la  couche 


nusculaire  avec  la  cuiiclie  mu- 


les veines  el  les  sinus  qui  sont  dircctemeut  en  rapport  avec  les  villo- 
silM  chorialcs  ont  été  décrits  bien  différemment  par  les  observateurs, 
D'après  VVeber,  les  artères  et  les  veines  pénètrent  dans  la  substance 
s()o»gieuse  du  placenta  el  communiquent  entre  elles  par  l'inlermédiaire 
d'un  réseau  de  canaux  très-volumineux  (lig.  21).  Ce  réseau  capillaire 
')ssal.  a  parois  très-minces,  s'insinue  entre  les  cotylédons  et  entre  les 
K-aliuns  k's  plus  ténues  des  vilKiKilèschorîales.  Robin  pense  égale- 


r 


I 


'  %tL  —  Coupe  ilo  II  lUuU'iiM  cl  ilu  pUcanu,  sur  la  l'iulavre  i'ua»  [aume  morta  p>r   «cttùtsul, 

i  la  Irenliiïina  MCDiine  de  b)  t:roi«aiu. 

i,  i^i4oD   anilulkili   b.   iranioij  t,  chnrlan;  dd,  lurlia   fuliln   du  placonri;  »4,  pirul  utirin*  ; 

If.nmiUratima  irboresctnlci  qui  oinitïlUïal  In  IriiDc  du  plicealii  gs,  laainbriae  cijitquo  (pailluii 

bcalr>  fa.  ailiKi  uUrina6  canluurD^i  en  apiHhn  du  llre-tiuudiaD  ;  tj>,  nueau  arlérial  pén^tmil 
Ma  la  i>U<euU;  !>':,  ti»u>  TciDaui  de  la  iDHIiii-'r:  [K.  Eck.r). 

ment  que  ce  sont  les  capillaires  qui  s'unissent  pour  former  autour  des 
tilliwilis  un  vr.ii  lac  sanguin.  Pour  Bustamanle,  la  muqueuse,  qui  a 
ptnMrt  entre  les  villosités,  devient  trés-vasculaire;  les  capillaires,  en 
lugnWDtant  de  volume,  s'adossent,  et  leurs  parois  s'atrophient  ;  il  se  Terme 
itaâ  de  gros  vaisseaux,  ou,  pour  mieux  dire,  des  sinus  qui  pénètrent 
ivee  b  caduque  hypertrophiée  jusqu'au  cliorton  et  embrassent  les  troncs 
dn  TiJlositès  placentaires.  A  une  période  plus  avancée,  la  caduque  ut 
les  parois  des  vaisseau^L  Unissant  pai'  disparaître,  les  villosîlés  baigneraient 
directement  dans  le  sang  maternel. 


52  PLACENTA.  —  anatomie. 

Delore  a  cherché  à  démontrer  que  le  système  vasculaire  du  placenta 
est  constitué  par  l'expansion  des  sinus  utérins  les  plus  superficiels,  à 
l'exclusion  d'artères  et  de  capillaires.  La  circulation  maternelle  s'y  ferait 
par  un  sinus  circulaire  et  des  sinus  lacunaires,  présentant  des  oriGces  en 
grillage,  à  travers  lesquels  on  aperçoit  les  villosités  plongeant  directe- 
ment dans  le  sang  contenu  dans  ces  vaisseaux.  Le  contact  ne  serait  point 
aussi  immédiat  d'après  Joulin,  qui  pense,  lui,  que  la  circulation  du  fœtus  est 
séparée  de  celle  de  la  mère  par  la  paroi  des  sinus,  par  l'épithelium  de  la 
caduque,  par  l'épithelium  de  la  villosité  et  la  couche  réticulée  sous- 
jacentc,  et  enfin  par  la  paroi  des  capillaires  villeux.  Quoi  qu'il  en  soit  de 
ces  différentes  manières  de  voir,  les  veines  en  pénétrant  dans  les  espaces 
intercotylédonaires  se  comportent  de  la  manière  suivante  :  les  unes 
entrent  en  contact  avec  les  villosités  choriales  et  se  réunissent  dans  les 
septa  pour  former  des  veines  plus  volumineuses  qui  vont  se  jeter  dans  le 
sinus  circulaire  ;  les  autres,  plus  profondément  placées,  forment  à  la  base 
des  troncs  villeux,  immédiatement  au-dessus  du  chorion,  un  réseau  com- 
muniquant largement  avec  les  premières.  Les  différents  troncs  qui  en  ré- 
sultent se  dirigent  vers  le  bord  du  placenta  et  constituent  par  leurs  anasto- 
moses un  sinus  circulaire,  rarement  complet,  situé  au  point  de  réunion  de 
la  caduque  placentaire  avec  la  caduque  utérine  et  surplombé  par  les- 
cotylédons  marginaux  qui  le  recouvrent.  Ce  vaisseau  prend  des  racines 
nombreuses  dans  le  placenta  et  communique  par  des  embranchements  non 
moins  nombreux  avec  les  veines  utérines  profondes.  La  quantité  considé- 
rable de  vaisseaux  qui  va  s'ouvrir  dans  le  sinus  donne  à  la  paroi  un  aspect 
criblé  qui  a  fait  supposer  que,  dans  le  placenta,  le  sang  entoure  directe- 
ment les  villosités  embryonnaires  et  n'est  séparé  des  vaisseaux  du  fœtus 
que  par  l'épithelium  villeux.  On  a  vu  précédemment  quelle  était  à  cet 
égard  Topinion  de  Joulin,  elle  paraît  être  la  plus  vraisemblable. 

En  résumé,  considéré  au  point  de  vue  de  sa  structure,  le  placenta  est 
constitué  par  les  villosités  choriales  pourvues  d'une  artère  et  d'une 
veine  dans  leurs  ramifications  les  plus  fines,  réunies  en  une  seule  masse, 
en  premier  lieu  par  leur  propre  entrecroisement,  en  second  lieu  par  les 
prolongements  de  la  caduque  qui,  sur  certains  points,  les  groupe  en  lobes 
complètement  indépendants  les  uns  des  autres  au  point  de  vue  de  la  cir- 
culation fœtale.  Ces  villosités  sont  entourées  de  toute  part  par  des  sinus 
résultant  du  développement  des  veines  superficielles  de  la  caduque  utéro- 
placentaire  dont  elles  restent  séparées  jusqu'à  la  fin  de  la  grossesse  par 
une  mince  couche  d'épithelium.  Cette  disposition  ou  tout  au  moins  les 
rapports  plus  ou  moins  immédiats  des  vaisseaux  maternels  avec  les  vais- 
seaux fœtaux  sont  aujourd'hui  admis  par  presque  tous  les  auteurs» 
Cependant  un  savant  d'un  grand  mérite,  Ercolani,  de  Bologne,  a  conçu 
une  tout  autre  idée  de  la  structure  du  placenta.  D'après  lui,  les  villo- 
sités choriales  seraient  séparées  des  lacs  sanguins  par  un  organe  glan- 
dulaire de  nouvelle  formation,  se  développant  dans  la  caduque  et  enve- 
loppant le  placenta  fœtal  d'une  sorte  de  gaine.  Ce  tissu  glandulaire^ 
constitué  par  une  *nembrane  amorphe  et  une  couche  épithéliale,  sécréterait 


PLACENTA.  —  AifATOMiE.  53 

"On  liquide  (lait  utérin)  dans  lequel  baignent  les  villosités  choriales  et  qui 
«crrirait  à  la  nutrition  du  fœtus.  Cette  théorie  nouvelle  ne  parait  reposer 
sur  aucune  base  sérieuse. 

Situation.  —  Le  placenta  est  habituellement  situé  au  fond  de  l'utérus, 
tantôt  sur  la  paroi  antérieure,  tantôt  sur  la  paroi  postérieure,  rarement 
«ur  les  parties  latérales.  D'après  les  recherches  de  Gusserow  et  de  SchroBder, 
rinsertion  sur  la  paroi   antérieure  serait  la  plus  commune;  Tinsertion 
latérale,  très-rare,  aurait  lieu  un  peu  plus  souvent  à  droite  qu'à  gauche. 
Ces  différences  dans  l'implantation  du  placenta  n'ont  aucune  importance 
^u  point  de  vue  de  son  développement  ;  elles  influent  tout  au  plus  sur  sa 
forme.  Parfois  le  placenta  est  (ixé  sur  le  segment  inférieur  de  l'utérus 
dans  un  point  rapproché  de  l'orifice  interne  (implantation  marginale),  ou 
.sur  cet  orifice  lui-même  (implantation  centrale).  Ce  vice  d'implantation 
placentaire  est  la  cause  d'accidents  formidables  au  moment  de  l'accou- 
chement, et  a  été  attribué  par  la  plupart  des  auteurs  à  la  multiparité. 
Le  ramollissement  et  le  relâchement  des  parois  de  la  matrice,  ainsi  que 
l'élargissement  de  la  cavité  utérine,  paraissent  être,  en  effet,  les  causes 
prédisposantes  les  plus  communes  de  cette  anomalie.  On  peut  aussi  sup- 
poser avec  Hiliais  qu'un  développement  inégal  de  la  caduque  favorise  la 
chute  de  l'œuf  sur  la  partie  inférieure  de  la  cavité  utérine.  Il  est  plus 
difficile  d'admettre  que  l'œuf  passe  par  une  éraillure  de  la  caduque  réQé- 
chie,  comme  le  pensait  Hohl,  ou  que  des  contractions  spasmodiqucs  de 
l'utérus  poussent  l'œuf  vers  le  col  avant  qu'il  ait  été  fixé  à  la  partie  supé- 
rieure de  l'organe  par  le  développement  de  la  caduque  réfléchie.  Per- 
sonne ne  s'imagine  plus  aujourd'hui,  comme  le  faisait  encore  Levret,  que 
le  placenta,  primitivement  fixé  au  fond  de  l'utérus,  retombe  sur  le  segment 
inférieur  à  la  fin  de  la  grossesse.  L'insertion  vicieuse  du  placenta  est 
assez  rare.    Il  résulte  d'un  ensemble  de   statistiques  qu'on   l'a  obser- 
vée 56  fois  sur  41,169  accouchements,  c'est-à-dire  dans  la  proportion  de 
1  sur  763. 

Dans  des  circonstances  heureusement  peu  communes,  l'œuf  fécondé  ne 
peut  parvenir  jusque  dans  la  cavité  utérine,  et  tombe  alors  dans  la  cavité 
abdominale  (grossesse  abdominale,  péritouéale)  ou  est  arrêté  dans  la 
trompe  (grossesse  tubaire) .  Comment  se  constitue  dans  ce  cas  la  partie  des 
annexes  qui  correspond  au  placenta  maternel?  La  muqueuse  de  la  trompe 
se  comporte  comme  l'aurait  fait  la  muqueuse  utérine  ;  cependant,  d'après 
Kôlliker,  il  ne  se  formerait  pas  de  decidua  reflexa.  On  sait,  du  reste, 
que  dans  cette  variété  de  grossesse  extra-utérine  la  gestation  est  d'ordi- 
naire interrompue  vers  le  quatrième  mois  par  la  rupture  de  la  trompe,  et 
que,  par  conséquent,  le  placenta  n'arrive  pas  à  son  entier  développement. 

Dans  la  grossesse  abdominale,  l'œuf  est  en  contact  avec  le  péritoine,  qui 
forme  les  ligaments  larges  ;  il  s'établit  aussitôt  après  sa  chute  une  con- 
gestion très-intense  des  parties  qui  l'avoisinent;  puis  de  proche  en  proche 
il  se  fait  une  telle  hypertrophie  du  péritoine  qu'il  devient  apte  à  jouer  le 
rtle  de  muqueuse  utérine;  il  se  forme  une  sorte  de  placenta  qui  ne 
diffère  pas  essentiellement  de  celui  que  l'on  rencontre  dans  les  gros- 


li\  PLACENTA.  —  ASATOïtr. 

scssDs  iitériiies;  repemiaiit  il  esl  phis  mince,  plus  Inrgo,  si]p[iléanl  par 
son  élendiie  à  tu  vasciilaritL'  inoinilrc  ijc  la  membrane  sur  Inquellc  il 
s'est  fixe. 

D'autres  Tai'ictés  de  placenta  non  moin»  imporluntes  sont  celles  que 
l'on  rencontre  en  cas  de  grossesses  multiples.  Dans  les  grossesses  gémel- 
l.iircs,  les  œufs  peuvent  être  entièrement  séparés  et  avoir  non-snuleraeni 
tlciix  pliicentas,  mnis  deus  caduques  réfléchies;  ou  bien  avoir  deux  pla- 
centas, mais  une  seule  caduque  {lig.  22).  Dans  ce  ciis,  qui  est  le  plus 
ordinaire,  les  placentas  sont  soudés;  les  vaisseaux  ombiliraux  sont  sépa- 
rés, puisque  chaque  œuf  a  un  chorion  qui  lui  est  propre.  Dans  une 
troieièmc  variété,  avec  un  seul  placenta  et  un  seul  chorion,  il  existe  deux 
amiiios;  les  vaisseaux  des  deux  cordons  s'anastomosent  alors  constamment 
»uv  le  placenta.  C'est  dans  ces  circonstance»  qu'une  hémorrhagie  par  le 


cordon  du  premier  enfant  pourrait  se  faire  aux  dépens  du  second.  Enfin, 
dans  des  cas  très-mres,  il  n'existe  qu'un  placenta,  el  toutes  les  mem> 
liranes,  y  compris  l'amnios.  sont  communes.  Dans  les  grossesses  Irigé- 
mellaires,  il  peut  exister  soit  trois  placentas  séparés  avec  trois  caduque* 
réfléchies,  soit  trois  placentas  soudés  ayant  une  seule  caduque  el  Iroô 
chorions.  soit  un  seul  placenta  et  un  seul  chorion.  Enfin,  un  œuf  peut  *lre 
isolé,  tandis  que  les  deux  autres  ont  un  placenta  et  un  chorion  communs. 
Il  est  inutile  de  pousser  celte  énumération  plus  loin,  chacune  de  ce» 
variétés  pouvant  se  reproduire  dans  les  grossesses  où  la  nmltiplicilé  de» 
fœtus  est  plus  gnindo  encore. 

Phtsiulogië.  —  C'est  dans  ces  derniers  temps  seulement,  lorsqu'on 
s'était  fait  une  juste  idée  du  rapport  anatomique  des  vaisseaux  maternels 
avec  les  vaisseaux  fœtaux,  que  l'on  a  commencé  à  se  rendre  un  compte 

îct   des  fonctions  du  placenta.  Aussi  longtemps  qu'on  a  supposé  que 


PLACENTA.  —  PHYSIOLOGIE.  55 

des  comrounicalions  directes  existaient  entre  les  vaisseaux  des  deux 
placentas  (fœtal et  utérin),  on  n'avait  aucune  raison  de  pousser  plus  loin 
les  recherches  et  on  considérait  la  circulation  de  l'embryon  comme  dépen- 
dant entièrement  de  celle  de  la  mère.  Il  eût  été  facile  cependant  de  trou- 
ver, en  dehors  des  constatations  anatomiqucs,  des  considérations  de 
nature  à  prouver  que  cette  communication  à  plein  canal  est  impossible. 
Les  plus  importantes  de  ces  raisons  sont  les  suivantes  :  1"^  La  circulation 
embryonnaire  existe  avant  que  les  vaisseaux  du  fœtus  aient  atteint  la 
}>ériphcriede  l'œuf;  2^  la  fréquence  de  la  circulation  maternelle  (70  à  80) 
diffère  de  celle  du  fœtus  (130  à  140);  S""  l'enfant  qui  naît  après  une 
hémorrhagie  survenue  pendant  le  travail  meurt  asphyxié,  et  non  exsangue; 
4*  le  sang  qui  s'écoule  par  le  cordon  d'un  placenta  encore  adhérent  appar- 
tient au  placenta  fœtal  et  non  à  la  mère  ;  5^  en  cas  de  grossesse  gémellaire 
avec  placenta  unique,  Thémorrhagie  se  produit  aux  dc'pcns  du  second 
enfant  et  la  mère  n'y  prend  aucune  part.  A  ces  raisons  on  pourrait  en 
ajouter  quelques  autres  tirées  de  la  forme  des  globules  et  de  la  composi- 
tion de  l'un  et  de  l'autre  sang,  mais  elles  sont  moins  évidentes  que  les 
précédentes  et  rentrent  du  reste  plus  particulièrement  dans  le  domaine 
de  Tanatomie. 

n  est  impossible  d'attribuer  une  importance  plus  grande  à  la  théorie 
d*Ercolani,  fondée  sur  l'existence  d*un  organe  glandulaire  interposé  entre 
les  villosités  et  les  sinus  utérins;  théorie  d'après  laquelle  les  sucs  nutri- 
tifs ou  le  lait  u'érin  sécrété  par  l'épithclium  de  cet  appareil  serait  absorbé 
par  les  villosités  choriales,  comme  le  chyle  est  absorbe  par  les  villosités 
intestinales.  Il  n'est  pas  nécessaire  de  discuter  une  hypothèse  qui  repose 
sur  des  laits  anatomiques  erronés,  ou  au  moins  supposés. 

Tout  le  monde  reconnaît  aujourd'hui  que  les  échanges  entre  le  sang  de 
la  mère  et  celui  du  fœtus  ne  sont  que  médiats  et  sont  le  résultat  de  phéno- 
mènes osmotiques,  qui  ont  donné  lieu  dans  ces  derniers  temps  à  de 
remarquables  travaux.  On  doit  se  rappeler  d'abord  que  les  échanges  sont 
singulièrement  facilités  par  la  stase  prolongée  du  sang  maternel  dans  les 
sinus.  On  pourrait  même  redouter  qu'en  raison  de  la  largeur  des  vais- 
seaux et  de  leurs  communications  nombreuses  la  circulation  subisse  des 
perturbations  consistant  particulièrement  en  stagnations,  si  elle  n'était 
régularisée  :  1^  par  la  turgescence  habituelle  des  villosités  choriales; 
2*  par  la  contractilité  de  l'utérus  et  des  vaisseaiLx. 

Ces  phénomènes  d'osmose  étant  admis,  quelle  est  la  nature  de  ces 
{changes  qui  se  font  entre  les  deux  organismes  ?  Deux  questions  impor- 
tantes se  posent  tout  d'abord  :  !<>  le  fœtus  respirc-t-il  ?  2^  quels  maté- 
riiox  emprunte^t-il  au  sang  maternel  pour  sa  nutrition  ? 

l*  Le  fœtus  respire-t-il,  c'esl-à-dire  y  a-t-il  dans  le  placenta  oxygéna- 
tion du  sang  apporté  par  les  artères  et  ramené  au  fœtus  par  la  veine 
ombilicale?  Presque  tous  les  physiologistes  semblent  l'admettre  aujour- 
d'hui. Longet  et  BischofT  ont  en  quelque  sorte  éludé  la  question  en  com- 
parant «  l'embryon  à  une  sorte  d'organe  maternel  qui  ne  respire  pas 
lui-même,  mais  a  besoin  du  sang  artériel  de  sa  mère,  de  sang  qui  a 


56  PLACENTA.  —  physiologie. 

respiré.  x>  Pourquoi  en  aurail-il  besoin,  si  ce  n'est  pour  lui  prendre  une 
partie  de  son  oxygène? 

Les  raisons  qui  démontrent  que  le  placenta  est  un  organe  dMiématose 
sont  les  unes  subjectives,  les  autres  objectives,  et  résultant  toutes  d'expé- 
riences des  plus  concluantes.  Les  premières  sont  les  suivantes  :  1^  le  fœtus 
succombe  rapidement  dès  qu'une  compression  interrompt  la  circulation 
dans  le  cordon  ombilical,  et  l'on  trouve  toujours  dans  ce  cas  à  l'autopsie 
des  signes  d'asphyxie;  2^  il  existe  entre  le  placenta  et  les  poumons  un 
antagonisme  très-évident  :  l'enfant  nouveau-né  peut,  en  effet,  se  passer 
de  respiration  pulmonaire  tant  que  la  communication  entre  lui  et  le  pla- 
centa n'est  pas  interrompue,  et  cette  communication  peut  être  interrom- 
pue sans  danger  dès  qu'il  respire  par  le  poumon  ;  de  plus,  toute  inter- 
ruption delà  respiration  dans  les  premières  heures  qui  suivent  la  naissance 
donne  lieu  à  un  retour  de  la  circulation  dans  les  artères  ombilicales,  qui 
se  traduit  par  une  hémorrhagie,  si  le  cordon  est  mal  lié,  et  de  même  toute 
interruption  de  la  circulation  du  cordon  avant  la  naissance  provoque 
chez  le  fœtus  des  mouvements  respiratoires;  3^  si  Ton  admet  que  le  sang 
maternel  contient  de  l'oxygène  en  dissolution,  que  les  globules  ont  une 
grande  affinité  pour  l'oxygène,  on  a  foute  raison  de  penser  que  le  sang 
noir  des  artères  villeuses  séparé  du  sang  des  sinus  par  une  paroi  très- 
mince,  s'empare  d'une  partie  de  Toxygène  qui  s'y  trouve  dissous.  Il  existe 
du  reste,  à  cet  égard,  une  telle  ressemblance  avec  ce  qui  se  passe  chez 
les  animaux  à  branchies,  qu'on  a  appelé  le  placenta  «  une  sorte  de  bran- 
chie  pédiculée  qui  est  en  même  temps  un  organe  d'absorption  nutritive  et 
de  respiration  »  (Nivet). 

Les  preuves  expérimentales  sont  encore  plus  concluantes.  Zwfeel  a 
constaté  à  l'aide  du  spectroscope  l'oxyhémoglobine  dans  le  sang  des  vais- 
seaux ombilicaux  d'un  fœtus  n'ayant  pas  encore  respiré.  En  outre,  dans 
des  expériences  faites  sur  des  lapines  vivantes,  il  a  observé  que  le  sang  se 
rendant  du  fœlus  au  placenta  par  les  artères  ombilicales  est  noir,  tandis 
que  le  sang  revenant  du  placenta  au  fœtus  par  la  veine  ombilicale  est 
rouge.  Il  semble  donc  incontestable  que  chez  le  fœtus  le  placenta  remplace 
le  poumon,  qu'il  s'y  débarrasse  de  son  acide  carbonique  et  qu'il  puise 
l'oxygène  dans  les  globules  rouges  du  sang  maternel. 

2^  Le  fœtus  puise-t-il  dans  le  placenta  les  matériaux  nécessaires  à  son 
développement  et  quels  sont  ces  matériaux  ?  A  partir  du  moment  où  le 
placenta  est  formé,  il  parait  être,  sinon  la  seule  voie  par  laquelle  les 
sucs  nutritifs  passent  de  la  mère  à  l'enfant,  du  moins  Tagent  le  plus  actif 
de  cette  absorption.  Il  n'est  plus  nécessaire  de  démontrer  que  certaines 
substances  injectées  dans  les  vaisseaux  de  la  mère  se  retrouvent  dans 
ceux  de  l'enfant.  Mngendie  avait  déjà  retrouvé  dans  le  sang  de  fœtus  de 
chien  l'odeur  du  camphre  un  quart  d'heure  après  avoir  injecté  une  solu- 
tion de  cette  substance  dans  le  système  veineux  des  mères.  Meyer  ayant 
injecté  du  cyanure  de  potassium  dans  la  trachée-artère  d'une  lapine,  avait 
découvert  ce  composé  dans  le  placenta  et  dans  les  différents  organes  de 
l'embryon.  Plus  récemment  des  recherches  ont  été  faites  par  Benicke,  qui 


PLACENTA.  —  PATHOLOGIE.  57 

reconnut  que  l'acide  salicylique  passait  dans  le  saiig  fœtal  40  minutes 
après  son  absorption.  Gusserow,   Fehling,  y  retrouvèrent  Tiodure  de 
potassium  et  le  chloroforme.  On  peut  donc  dire  avec  certitude  que  les 
substances  tenues  en  dissolution  dans  le  sang  maternel  passent  dans  la 
circalatîon  fœtale.  En'  est- il  de  même  des  substances  qui  ne  peuvent  être 
dissoutes,  et  en  particulier  des  éléments  figurés,  tels  que  les  globules 
sanguins?  Il  est  parfaitemerrt  établi  aujourd'hui  qu^aucun  élément  figuré 
ne  traverse  la  membrane  mince  intermédiare  qui  sépare  le  placenta  mater- 
nel du  placenta  fœtal  (Claude  Bernard) .  Les  expériences  de  Davaine  ont 
paiement  démontré  que  les  poisons  organiques,  tels  que  ceux  du  charbon, 
de  la  pustule  maligne,  ne  peuvent  pénétrer  dans  la  circulation  du  fœtus.  Le 
ferment  virulent  de  la  variole,  qui  est  unmicrococcuâ,  fait  seul  exception 
à  cette  règle;  l'embryon  peut  être  infecté  par  Pintermédiaire  de  la  mère 
lorsqu'elle  est  atteint  de  variole,  ou   quand  même,  sans  être  malade, 
elle  vit  simplement  dans  un  milieu  contaminé.  Les  villosités  choriales 
n'absorbent  que  des  substances  nutritives  ou  médicamenteuses  dissoutes; 
des  albuminoses  et  des  dissolutions  salines  en  constituent  la  majeure 
partie  ;  les  granulations  graisseuses  elles-mêmes  ne  traversent  pas  les 
parois  des  villosités,  ainsi  que  le  prouvent  les  expériences  d'Ahlfeld;  il  en 
est  de  même  des  corps  solides,  quelque  fractionnés  qu'ils  soient,  qui  sont 
en  suspension  dans  le  sangmat:mel.  L'absorption  des  sucs  nutritifs  desti- 
nés au  développement  du  fœtus  se  fait  par  osmose,  et  on  peut  se  deman- 
der si  ces  phénomènes  endosmotiques  ne  sont  pas  favorisés  par  la  pres- 
sion sanguine  qui  est  relativement  plus  considérable  dans  les  vaisseaux 
malemels  que  dans  ceux  de  l'embryon  ?  Les  phénomènes  d'exosmose  se 
produisentrils  également,  et  les  principes  contenus  dans  le  sang  fœtal 
peuvent-ils  être  repris  par  la  circulation  maternelle  ?  Magendie  a  souvent 
poussé  dans  les  vaisseaux  du  cordon  des  poisons  très-actifs,  et  il  n'a 
jamais  vu  les  mères  en  éprouver  les  effets.  D'autre  part,  on  voit  assez 
souvent  des  enfants  naître  syphilitiques  sans  que  la  mère  soit  infectée.  11 
est  vraisemblable,  par  conséquent,  que,  si  le  fœtus  puise  [dans  le  sang 
maternel  tous  les  principes  solubles  qu'il  contient,  la  mère  n'absorbe 
rien  des  principes  contenus  dans  le  sang  fœtal.  Enfin  il  est  une  dernière 
et  importante  propriété  du  placenta  qui  a  été  découverte  par  Claude  Ber- 
nard. Dans  une  communication  faite  à  l'Académie  des  Sciences,  le  savant 
physiologiste  a  établi,  qu'il  existe  dans  le  placenta  des  mammifères  une 
tonction  jusqu'à  présent  méconnue  qui  est  destinée  à  remplacer  la  fonction 
giTcogénique  du  foie  pendant  les  premiers  temps  delà  vie  embryonnaire. 
Cette  fonction  serait  localisée  dans  un  élément  anatomique  épithélial  du 
placenta  mélangé  avec  la  partie  vasculaire  de  cet  organe,  et  commence- 
rait dès  le  début  de  la  vie  fœtale,  avant  que  l'organe  dans  lequel  cette 
fonction  est  localisée  chez  l'adulte  soit  développé. 

Patholocie.  —  L'obscurité  qui  a  longtemps  régné  sur  la  constitution 
anatomique  du  placenta  n'avait  pas  permis  aux  anciens  observateurs 
d'étudier  ses  altérations  d'une  façon  tout  à  fait  scientifique.  Chacun 
d'eux,  se  faisant  une  opinion  différente  de  la  structure  et  du  fonctionne- 


58  PLACENTA.  —  pathologie. 

ment  de  cet  organe  caduque,  en  conccyait  la  pathologie  d'après  des  don- 
nées très-yariables  et  le  plus  souTcnt  erronées.  En  dehors  de  cette 
cause  fondamentale  d'erreur,  Tanalogie  tout  au  moins  apparente  qui 
existe  entre  certaines  lésions  placentaires  et  certaines  lésions  organiques 
que  Ton  rencontre  dans  d'autres  tissus  était  de  nature  à  donner  lieu  i  des 
assimilations  dont  Fexamen  microscopique  devait  faire  justice. 

Ce  n'est  qu'à  partir  du  moment  où  l'anatomie  du  placenta  a  été  mieux 
connue  que  la  plupart  des  points  de  sa  pathologie  ont  été  étudiés  avec 
fruit  ;  cependant,  malgré  les  travaux  des  modernes,  de  Ch.  Robin,  de  Yir> 
chow  en  particulier,  il  est  encore  un  nombre  considérable  de  questions 
dont  la  solution  est  restée  indécise.  Il  résulte  d*un  semblable  état  de 
choses  qu'une  classification  tout  à  fait  rationnelle  des  aOections  du  pla- 
centa est  encore  aujourd'hui  très-difficile  à  établir;  tous  ceux  qui  ont 
tenté  de  le  faire  se  sont  bornés  à  une  simple  énumération  des  difiérentes 
lésions  connues  et  étudiées  au  moment  où  se  publiaient  leurs  trayaux. 
Pour  ne  point  entrer  dans  de  longs  et  inutiles  détails  qui  n'auraient 
qu'un  intérêt  historique ,  il  suffira  de  mentionner  les  classifications  le» 
plus  récentes. 

Dans  une  thèse  inaugurale  (1845)  très-remarquable,  un  élève  du  pro- 
fesseur Stoltz,  Jseger,  a  fait  le  bilan  de  l'état  de  la  science  à  cette  épo- 
que ;  il  a  décrit,  tout  en  discutant  quelques-unes  d'entre  elles ,  chacune 
des  afTections  suivantes  : 

1^  Hypertrophie  du  placenta.  2^  Atrophie  (a)  simple,  ou  dépendant 
d'une  diminution  de  nutrition  ;  (b)  résultant  de  la  cessation  des  rap- 
ports physiologiques;  (c)  par  suite  de  maladie  du  placenta.  5^  Malacic. 
4"^  Congestion.  5*"  Apoplexie.  6"^  Inflammation  ou  placcntite.  7^  Dépôts  cal- 
caires. 8**  Dégénérescences  diverses. 

Cette  dissertation,  qu'on  pourrait  croire  écrite  d'aujourd'hui,  si  elle 
comprenait  les  recherches  de  Ch.  Robin  sur  la  dégénérescence  hydatoïde^ 
résoud  d'une  façon  qu'on  ne  peut  cependant  croire  définitive  la  plupart 
des  questions  qui  se  rapportent  aux  affections  du  placenta. 

Écrite  plus  récemment  et  par  conséquent  plus  complète  au  point  de  vue 
des  recherches  modernes,  la  thèse  de  Charpentier  (1869)  multiplie  les 
divisions  en  décrivant  séparément  des  lésions  qui  ne  sont  que  des  variétés 
d'un  même  état  morbide.  Sa  classification  comprend  dix  espèces  d'alté;>[ 
rations ,  qui  sont  :  , 

1®  Les  épanchements  sanguins  ;  hémorrhagie  utéro-placentaire.  2^  Leaj 
dégénérescences  fibro-graisseuses.  3**  Les  transformations  successives  da 
sang  épanché.  4"^  La  placentite  et  les  dépôts  pathologiques  divers  (pu^ 
concrétions  ossiformes,  lésions  syphilitiques).  5"^  Les  adhérences  aniVh 
maies  soit  à  l'utérus ,  soit  au  fœtus.  6"*  L'hypertrophie.  V  L'atrophîa^ 
8* L'œdème.  9^  Les  tumeurs  (kystes  et  autres).  10* La  sclérose  du  plaqentjiij 

La  môle  vésiculeuse  hydatoîde  est  rangée  par  Charpentier  parmi  les 
maladies  des  membranes.  4 

Ercolani  a  basé  sa  classification  sur  les  idées  qui  lui  sont  propres  .fll^ 
la  structure  du  placenta  ;  il  divise  ses  affections  en  douze  catégories  :     ;, 


PLACENTA.  —  ahomalies  de  développement.  5& 

1*  Ilyperlrophie  des  Tillosiiés  choriales,  oumyxome;  2"^  Placenta  hyda- 
igène  :  myxome  des  villosités  choriales  ;  myxome  des  villosités  placen- 
:aires;  3*  Myxome  de  la  sérotine  ou  de  Forgane  glandulaire  qui  enveloppe 
les  Tiilosità  placentaires;  4®  Hyperplasie  ou  hypertrophie  cellulaire  du 
pareochyme  des  yillosités  du  placenta  (dégénérescence  graisseuse)  ;  5"*  Fi- 
Mmes  des  yillosités  et  de  la  sérotine  ;  &  Mélanose  du  placenta  ;  T  Lésions 
ryphilitiques  ;  8*  Thromboses,  apoplexies  et  hémorrhagies  ;  9*  Transfor- 
mation des  caillots  sanguins  et  néoplasies  du  placenta  ;  10°  Concrétions^ 
calcaires  ;  IV  Kystes  ;  12*  Développement  anormal. 

PftmH  ces  différentes  classifications,  en  est^il  une  qui  soit  tout  à  fait 
ralioiuieUe  et  qui  satisfasse  entièrement  Tesprit?  Ne  serait-il  pas  possible 
de  mettre  un  peu  d'ordre  dans  cette  énumération  de  maladies  qui,  bien 
qu'ayant  pour  siège  un  organe  transitoire,  n'en  sont  pas  moins  soumises 
aux  lois  de  la  pathologie  générale?  Si  Ton  veut  bien  s*en  rendre  compte, 
le  placenta,  organe  en  réalité  peu  compliqué,  en  ce  sens  que  les  élé- 
ments anatomiques  qui  le  composent  sont  simples ,  ne  présente  pas^ 
ane  diversité  d'affections  très-considérable,  et  il  semble  que  l'on  peut 
ranger  toutes  ses  lésions  sous  un  très-petit  nombre  de  chefs.  Voici  la 
dassification  qui  nous  parait  la  plus  simple  et  qui  sera  suivie  pour  la 
description  de  toutes  les  altérations  du  placenta  connues  jusqu'ici  : 

1*  ÂDomalie  de  développement.  •  •  •  !    ♦      h 

S*  Inflammation placent  ite,  abcès,  adhi'Tcncc. 

i       3.  Trouble  de  circulation i  f°"^','"'^l"î:°?'l^^:,. 

)  transformation  des  caillots. 


4*  Dcgénérescence j  calcaire. 

d*  Altérations  syphilitiques. 


t  fibro -graisseuse 
calcaire, 
hydatoïde. 


I 


I.  Akomalœs  de  développebient.  —  1**  Hypertrophie  du  placenta. 

On  sait  qu*au  terme  de  la  grossesse  le  placenta  pèse  généralement  un 
pea  plus  ou  un  peu  moins  de  500  grammes.  Il  peut  cependant,  sans  qu'il 
y  ait  hypertrophie  véritable ,  dépasser  ce  poids  ,  lorsque  son  augmenta- 
tioD  de  volume  est  en  rapport  avec  le  développement  du  fœtus.  Sa  sur- 
bce  peut  également,  sans  devenir  anormale,  être  supérieure  aux  dimen» 
sîoQs  habituelles,  lorsque  cette  augmentation  d'étendue  vient  en  quelque 
rate  suppléer  à  un  défaut  d'épaisseur,  comme  cela  arrive  presque  tou- 
joQis  dans  les  grossesses  abdominales.  On  ne  doit  considérer  comme 
bypoirophique  que  le  placenta  dans  lequel  l'augmentation  de  volume 
n'est  pas  déterminée  par  une  des  deux  causes  qui  viennent  d'être  in- 
diquées. 

Sans  parler  des  cas  cités  par  Ruysch  (  Thèses  anatomiques) ,  pour  lesquels 
les  renseignements  sont  insuffisants,  Wrisberg  et  Lassus  assurent  avoir 
recoeilli  des  placentas  de  1500  grammes.  Schmidt  en  a  rencontré  dont  le 
poids  s'élevait  jusqu'à  2  kilogrammes  ;  Stoitz  en  a  vu  également  dont  le 
viJame  dépassait  de  beaucoup  les  dimensions  normales ,  sans  que  leur 
constitution  anatomique  fût  altérée  ;  mais  ces  cas  sont  probablement  les 


60  PLACENTA.  —  joiomalibs  de  DévBLOPPEMKirr. 

I 

moins  connus,  et  Ton  peut  s'assurer,  en  lisant  les  observations  des  au- 
teurs, de  l'erreur  qu'ils  ont  commise  en  prenant  pour  des  placentas  hype^ 
trophiés  des  placentas  malades.  L'altération  qui  en  impose  le  pins 
souvent  est  l'épanchement  sanguin,  parfois  très-considérable.  Le  sang 
peut  avoir  été  récemment  épanché  et  conserver  tous  ses  caractères^  oi 
bien  avoir  subi  en  partie  certaines  transformations  qui  seront  décrit» 
plus  loin.  C'est  à  des  cas  de  ce  genre  que  semblent  se  rapporter  certaini 
cas  d'hypertrophie  signalés  par  Meyer  (Siebold's  Journal^  1. 111,  p.  233), 
et  par  Stein  (Wahmehmungen.  Marbourg,  1808). 

Une  autre  cause  d'augmentation  de  volume  du  placenta,  qui  peut  faire 
croire  à  une  hypertrophie,  a  été  décrite  par  Cruveilhier  (Analomie paihih 
logique^  Maladies  du  placenta j  16^  livraison)  :  c'est  Finfiltratioa  séreuse, 
due  très«vraisemblablement  à  une  stase  sanguine.  Simpson  en  a,  en  eflel, 
observé  un  cas  dans  lequel  il  y  avait  obstacle  k  la  circulation  dans  le 
cordon.  Joulin  fait  remarquer  que  le  placenta  est  dans  ces  cas  volumi* 
neux,  de  consistance  molle,  et  plus  paie  qu'à  l'état  normal.  La  plupart 
du  temps  le  fœtus  est  mort,  tandis  que  le  contraire  a  habituellement  lien 
en  cas  d'hypertrophie  simple  (Stoltz). 

Charpentier  décrit  aussi,  sous  le  nom  d'hypertrophie,  le  dévelop-  < 
pement  anormal  de  certains  placentas  rencontrés  sur  des  œufs  abortÛi  \ 
dont  l'embryon  est  dissous  ou  le  fœtus  macéré.  La  partie  fœtale  du  pla«  ] 
centa  serait,  dans  ce  cas,  flétrie,  tandis  que  la  partie  maternelle  (cadu-  '\ 
que  utéro-placentaire)  aurait  conservé  sa  vitalité  et  même  augmenté  de  j 
volume.  Cette  partie  de  l'œuf  aurait  ainsi  continué  à  végéter  après  la 
mort  et  même  après  l'expulsion  du  fœtus,  et  constituerait  ce  qu'on  a  dési- 
gné sous  le  nom  de  môle  charnue.  Il  nous  semble  qu'à  aucun  titre  cette 
altération  ne  peut  être  rangée  parmi  les  hypertrophies  placentaires. 

2**  Atrophie.  —  La  distinction  qui  a  été  faite  entre  l'hypertrophie  sim- 
ple et  celle  qui  est  due  à  des  causes  morbides  est  à  plus  forte  raison  ' 
applicable  à  l'atrophie  du  placenta.  Cette  anomalie  de  développement  ^ 
peut  être  générale  ou  partielle  ;  elle  présente  trois  variétés  (Jseger)  : 

a.  Atrophie  pure  et  simple  dépendant  d'une  diminution  de  nutrition;  * 

b.  Atrophie  résultant  de  la  diminution  ou  même  de  la  cessation  im  ■_ 
rapports  physiologiques  ;  — 

c.  Atrophie  par  suite  de  maladies  du  placenta.  ^ 

a.  Atrophie  simple.  —  Le  placenta  atrophié  a  un  volume  sensible*  ■ 
ment  moindre  qu'à  l'état  normal  ;  il  est  moins  dense,  tantôt  plus  pâle, 
tantôt  plus  foncé  ;  c'est  une  véritable  diminution  de  nutrition,  qui  paraK  *^ 
^lépendre  le  plus  souvent  de  l'élit  de  santé  de  la  mère  (chagrins,  ci-  ■= 
chexie,  etc.).  Dans  certains  cas,  l'atrophie  peut  porter  uniquement  sv  "■ 
l'épaisseur  de  l'organe  (placenta  membraneux),  sans  que  sa  structure  ^ 
soit  modifiée.  Quand  cet  arrêt  de  développement  est  porté  à  un  très-haat  '- 
degré,  le  fœtus  peut  en  souffrir,  moins  cependant  que  dans  les  yariétai  ^ 
suivantes  :  li 

b.  Atrophie  due  à  une  modification  dans  les  rapports  physiologiques*  ^ 
—  Le  placenta  a  deux  sortes  de  rapports  physiologiques ,  les  uns  immé  V 


PLACENTA.  —  IIIFLA1IMÀTI02I.  61 

diats,  airec  la  circulation  fœtale  dont  sa  propre  circulation  fait  partie;  les 
autres  médiats,  avec  la  circulation  maternelle.  Toute  modification  dans 
ces  rapports  est  de  nature  à  déterminer  une  atrophie  placentaire.  (1  a  été 
dit  plus  haut  qu'un  obstacle  à  la  circulation  funiculaire  pouvait  proTO- 
quer  un  cedème  intervilleux  simulant  Thypertrophie  ;  il  n*en  est  plus  de 
même  quand,  par  suite  delà  mort  du  fœtus,  le  sang  cesse  de  circuler  dans 
les  vaisseaux  ombilicaux  et  dans  leurs  ramifications.  Le  placenta,  n'ayant 
plus  de  fonctions  à  remplir,  se  flétrit  le  plus  habituellement  ;  son  tissu 
devient  gris,  ratatiné,  résistant  au  doigt  :  il  subit,  selon  toute  apparence, 
une  véritable  régression  graisseuse,  non  point  primitive,  mais  secondaire. 
Le  même  résultat  se  produit  lorsque  les  rapports  entre  le  placenta  et  la 
circulation  maternelle  viennent  à  cesser  sur  une  étendue  tant  soit  peu 
considérable,  par  suite  d'un  décollement  le  plus  souvent  déterminé  par 
des  hémorrhagies  inter-utéro-placentaires  ; 

c.  Atrophie  due  à  des  maladies  du  placenta.  —  Cette  variété  sera 
décrite  plus  ^cialement  à  propos  des  différentes  affections  qui  la  déter- 
minent. Par  anticipation,  on  peut  dire  qu'elle  est  le  plus  souvent  la  con- 
séquence d'épanchements  sanguins  ou  de  dégénérescence  graisseuse 
primitive. 

II.  biFLAMsiATiON  du  plaœtita,  Placentite,  abcès,  adhérences,  —  Une 
des  questions  les  plus  controversées  de  la  pathologie  placentaire  est  celle 
de  savoir  si  le  placenta  est  susceptible  de  s'enflammer.  Un  nombre  impo- 
sant d'auteurs,  parmi  lesquels,  entre  autres,  Brachet,  Dance,  Simpson,  ad- 
iDcttent  la  possibilité  de  l'inflammation,  tandis  qu'elle  est  contestée  par 
des  observateurs  non  moins  autorisés,  tels  que  Bustamente,  Jacquemier, 
Millet  et  Charles  Robin. 

D'après  les  écrivains  qui  croient  à  la  possibilité  de  la  placentite,  cette 
afleciion présente  trois  périodes  :  1<» congestion  inflammatoire;  2<*  hépati- 
sation  et  induration;  3"*  suppuration. 

La  congestion  inflammatoire  se  traduirait  par  une  augmentation  de 
folume  du  placenta  résultant  de  l'accumulation  du  sang  dans  ses  vais- 
seaux. Le  parenchyme  placentaire  est  alors  plus  dense,  plus  foncé.  A  un 
degré  plus  avancé,  il  se  fait  un  épanchement  de  lymphe  coagulable  qui 
permetde  distinguer  la  congestion  inflammatoire  de  la  congestion  passive. 
En  outre,  dans  la  placentite,  la  congestion  est  limitée  à  une  partie  de  l'or- 
gme,  tandis  qu'elle  est  générale,  quand  elle  est  due  à  une  cause  méca- 
nique. 

Dans  la  seconde  période  la  placentite  se  présente  sous  forme  aiguë  ou 

dmoique;  dans  le  premier  cas,  qui  est  rarement  observé,  il  y  a  véritable 

hépatîsation  de  l'organe;  son  tissu,  gorgé  de  sérosité  rougeâtre  qui  s'écoule 

quand  on  le  comprime  entre  les  doigts,  est  facile  à  déchirer;  il  est  d'un 

rouge  plus  ou  moins  vif,  et  a  tout  à  fait  l'apparence  de  celui  du  poumon 

bépatîaé.  Dans  la  forme  chronique,  qui  peut  être  primitive  ou  secondaire, 

on  remarque  une  induration  du  placenta,  qui  est  gris,  rouge  ou  jaunâtre, 

criant  parfois  sous  le  scalpel  et  présentant  à  l'incision  un  aspect  lardacé. 

Cette  induration  est  tantôt  générale,  tantôt  bornée  à  quelques  lobes.  C'est 


62  PLACENTA.  —  inflammation 

dans  cette  péiiode  que  s'établissent  entre  la  matrice  et  le  placenta  des 
adhérences;  iaibles  quand  rinflammation  est  récente;  très-resisiantes 
quand  elle  est  ancienne. 

Ces  adhérences  résulteraient  d'un  véritable  travail  inûammatoire, 
se  produisant  à  la  fois  sur  la  surface  interne  de  la  muqueuse  utérine  et 
sur  la  surface  utérine  du  placenta,  dont  la  réunion  avec  la  première  se 
ferait  en  quelque  sorte  par  voie  de  cicatrisation.  D'après  Brachet,  il  y 
aurait  d'abord  épanchemcnt  de  lymphe  plastique,  puis  organisation  de 
fausses  membranes.  11  est  plus  vraisemblable  que  ces  adhérences,  lors- 
qu'elles existent,  résultent  de  la  coagulation  d'un  épanchcment  sanguin 
peu  épais  (Stoltz) ,  ou  d'une  modification  dans  la  structure  de  la  caduque 
utéro-placentaire,  ou  bien  encore  de  la  persistance  de  la  structure  primi- 
tive de  la  caduque  (Ch.  Robin).  Dans  la  même  période  d'induration, 
Désormeaux  et  Dubois  ont  signalé  l'épaississement  des  membranes  chorion 
et  amnios,  par  suite  de  dépôt  de  lymphe  plastique.  Cette  modification  de 
la  surface  fœtale  du  placenta  pourrait  même  être  assez  considérable  pour 
déterminer  des  adhérences  entre  les  membranes  de  Tœuf  et  le  corps 
du  fœtus  (Houel). 

La  troisième  période  de  la  placentite  serait  caractérisée  par  la  forma- 
tion de  pus,  qui  peut  se  trouver  infiltré  ou  réuni  en  foyers,  tantôt 
centraux,  tantôt  voisins  de  l'une  ou  de  l'autre  surface.  De  volume  variable, 
ils  présenteraient  cette  particularité  importante,  de  n'avoir  jamais  de 
membrane  granuleuse  sur  leur  paroi  (Geofù^oy  de  Montreuil), 

Quelque  précise  que  paraisse  cette  description  de  l'anatumie  patholo- 
gique de  la  placentite,  on  est  obligé  de  reconnaître  qu'elle  est  un  peu 
imaginaire.  Aussi  les  adversaires  de  l'inflammation  du  placenta  ont-ils 
recherché  si,  dans  les  observations  connues,  les  caractères  d'une  véritable 
inflammation  avec  son  cortège  habituel  de  modifications  dans  les  élé- 
ments anatomiques  se  rencontraient.  Ils  ont  fait  remarquer  que  les  lésions 
appartenant  à  la  première  période  se  voient  également  à  la  suite  de 
toute  congestion  des  vaisseaux  ombilicaux,  ou  de  toute  stase  sanguine 
dans  le  parenchyme  placentaire,  et  que  les  lésions  de  la  seconde  période 
(induration,  etc.)  étaient  produites  par  les  diverses  transformations  de 
sang  épanché.  Quant  à  la  présence  du  pus  dans  le  tissu  placentaire,  elle 
n'est  rien  moins  que  démontrée  dans  les  dix  observations  connues  et 
publiées  dans  les  recueils.  Et,  même  en  admettant  que  l'on  a  trouvé 
réellement  du  pus  dans  le  placenta,  il  se  serait  formé,  d'après  Jac- 
quemier,  dans  l'utérus  enflammé.  De  son  côté,  Ch.  Robin  a  cherché  à 
établir  que  le  liquide  contenu  dans  les  prétendus  abcès  n'était  quun 
pseudo-pus  fibrineux  tout  à  fait  différent  du  pus  véritable  (Ch.  Robin  et 
Verdeil).  En  résumé,  poui  Ch.  Rodin  et  la  plupart  des  modernes,  ce  que 
Ton  a  pris  pour  les  signes  d'une  placentite,  n'est  qu'une  série  d'états 
dépendant  de  la  congestion  placentaire  et  de  transformations  successives 
du  sang  épanché.  Ce  qui  a  été  regardé  comme  du  pus  n'est  que  de  la 
fibrine  en  voie  de  désorganisation.  Dans  les  cas  où  Ton  a  trouvé  du  pus 
véritable,  ce  pus   avait  été  déposé  accidentellement  dans  le  tissu  pla- 


PLACENTA.  — :  TROUBLES  de  ciRcniATioN.  63 

dentaire.  En  présence  d^opinions  si  diverses,  on  ne  peut  que  répeter  avec 
laeger  que  la  question  de  l'inflammation  du  placenta  est  environnée 
d*obscurités,  et  qu^il  faut  de  nouvelles  observations  bien  faites,  soumises 
à  tous  les  moyens  de  vérification  qui  sont  en  notre  pouvoir,  pour  être 
autorisé  à  tirer  des  conclusions  définitives. 

ni.  Troubles  DE  CIRCULATION.  —  V  Congestion,  apoplexie.  Les  troubles 
de  la  circulation  placentaire  ont  été  étudiés  principalement  au  point 
de  vue  des  épanchemcnts  sanguins  qui  se  produisent  fréquemment 
dans  le  placenta  et  sont  une  des  causes  les  plus  ordinaires  d*avortement. 
Âpres  les  avoir  considérées  comme  l'origine  des  altérations  diverses  des 
villosités  choriales,  on  s'est  demandé  si  ces  altérations,  et  en  particulier 
la  dégénérescence  graisseuse,  n'en  étaient  pas  plutôt  la  cause  déterminante 
que  le  résultat.  Ce  sont  là  des  questions  assez  difficiles  à  résoudre  avant 
que  des  recherches  plus  précises  ne  les  aient  plus  complètement  élucidées. 
Tout  ce  qu'on  peut  affirmer  aujourd'hui,  c'est  que  ces  deux  états,  apo- 
plexie  placentaire  et  dégénérescence  graisseuse  des  villosités, sa  trouvent 
fréquemment  réunis  sans  que  Ton  puisse  décider  quel  est  celui  qui  s'est 
produit  le  premier. 

La  plupart  des  auteurs  admettent  que  Tépanchcment  sanguin  est  pré- 
cédé et  accompagné  d'une  état  congeslif  qui  se  traduit  par  une  augmen- 
tation de  volume,  par  une  densité  plus  grande  et  par  une  coloration  plus 
foncée  du  tissu  placentaire.  La  congestion  aurait  pour  siège,  d'après 
Simpson,  les  vaisseaux  ombilicaux  et  les  vaisseaux  utero -placentaires. 
Jacquemier  pense  que  l'afflux  du  sang  se  fait  uniquement  par  les  vais- 
seaux utcro-placentaires  et  sous  l'influence  d'une  congestion  utérine.  Cette 
manière  de  voir  n'est  plus  admissible  depuis  qu'il  a  été  démontré  qu'il 
n'existe  pas  de  communication  vasculaire  directe  entre  les  vaisseaux 
fœtaux  et  utérins.  11  est  on  ne  peut  plus  vraisemblable  que  ce  sont  les 
vaisseaux  utérins  qui  se  congestionnent  presque  toujours.  Ce  ne  serait 
que  dans  des  cas  assez  rares  que  des  perturbations  dans  la  circulation 
fœtale  (compression,  anomalie  du  cordon)  amèneraient  une  stase  sanguine 
dans  les  vaisseaux  ombilicaux.  Les  causes  de  congestion  venant  du  côté 
de  la  mère  sont  beaucoup  plus  nombreuses  ;  Jœger  signale  en  particu- 
lier la  pléthore  générale,  une  menstruation  habituellement  abondante 
dont  le  molimen  persiste  pendant  la  gestation,  les  accidents  hystcralgiques, 
les  excitations  portées  sur  l'utérus  ou  ses  annexes,  les  phlegmasies  des 
organes  voisins,  etc. 

Quelle  que  soit  la  cause  qui  l'ait  déterminée,  la  congestion  peut  dis- 
paraître sous  l'influence  du  repos  et  d'un  régime  convenable,  ou  donner 
lieu  à  des  épanchements  sanguins.  Cruveilhicr  avait  déjà  appelé  l'attention 
des  accoucheurs  sur  cette  lésion  qui  «consiste,  dit-il,  dans  des  foyers  de 
sang  en  plus  ou  moins  grand  nombre  et  à  divers  degrés  dans  l'épaisseur 
du  placenta  déchiré,  lésion  bornée  quelquefois  à  un  petit  nombre  de  coty- 
lédons, mais  s*étendant  souvent  à  un  plus  grand  nombre  ».  JacquenicT, 
deson  côté,  publiait  en  1839  un  travail  très-remarquable  et  très-com- 
plet sur  les  épanchements  sanguins.  D'après  cet  auteur  les  hémorrhagies 


62  PLACENTA.  —  inflammation 

dans  cette  péiiode  que  s'établissent  entre  la  matrice  et  le  placenta  des 
adhérences;  iaibles  quand  rinflammation  est  récente;  très-resisiantes 
quand  elle  est  ancienne. 

Ces  adhérences  résulteraient  d'un  véritable  travail  infianunatoire. 
se  produisant  à  la  fois  sur  la  surface  interne  de  la  muqueuse  utérine  et 
sur  la  surface  utérine  du  placenta,  dont  la  réunion  avec  la  première  se 
ferait  en  quelque  sorte  par  voie  de  cicatrisation.  D'après  Brachet,  il  y 
aurait  d'abord  épanchement  de  lymphe  plastique,  puis  organisation  de 
fausses  membranes,  il  est  plus  vraisemblable  que  ces  adhérences,  lors^ 
qu'elles  existent,  résultent  de  la  coagulation  d'un  épanchement  sanguin 
peu  épais  (Stoltz) ,  ou  d'une  modification  dans  la  stinicture  de  la  caduque 
utéro-placentaire,  ou  bien  encore  de  la  persistance  de  la  structure  primi- 
tive de  la  caduque  (Ch.  Robin).  Dans  la  même  période  d'induration, 
Désormeaux  et  Dubois  ont  signalé  l'épaississement  des  membranes  chorion 
et  amnios,  par  suite  de  dépôt  de  lymphe  plastique.  Cette  modification  de 
la  surface  fœtale  du  placenta  pourrait  même  être  assez  considérable  pour 
déterminer  des  adhérences  entre  les  membranes  de  Tœuf  et  le  corps 
du  fœtus  (Houel). 

La  troisième  période  de  la  placentite  serait  caractérisée  par  la  forma- 
tion de  pus,  qui  peut  se  trouver  infiltré  ou  réuni  en  foyers,  tantôt 
centraux,  tantôt  voisins  de  l'une  ou  de  l'autre  surface.  De  volume  variable, 
ils  présenteraient  cette  particularité  importante,  de  n'avoir  jamais  de 
membrane  granuleuse  sur  leur  paroi  (Geofù'ôy  de  Montreuil), 

Quelque  précise  que  paraisse  cette  description  de  l'anatomie  patholo- 
gique de  la  placentite,  on  est  obligé  de  reconnaître  qu'elle  est  un  peu 
imaginaire.  Aussi  les  adversaires  de  l'inflammation  du  placenta  ont4l8 
recherché  si,  dans  les  observations  connues,  les  caractères  d*une  véritable 
inflammation  avec  son  cortège  habituel  de  modifications  dans  les  élé- 
ments anatomiques  se  rencontraient.  Ils  ont  fait  remarquer  que  les  lésions 
appartenant  à  la  première  période  se  voient  également  à  la  suite  de 
toute  congestion  des  vaisseaux  ombilicaux,  ou  de  toute  stase  sanguine 
dans  le  parenchyme  placentaire,  et  que  les  lésions  de  la  seconde  période 
(induration,  etc.)  étaient  produites  par  les  diverses  transformations  de 
sang  épanché.  Quant  à  la  présence  du  pus  dans  le  tissu  placentaire,  elle 
n'est  rien  moins  que  démontrée  dans  les  dix  observations  connues  et 
publiées  dans  les  recueils.  Et,  même  en  admettant  que  l'on  a  trouvé 
réellement  du  pus  dans  le  placenta,  il  se  serait  formé,  d'après  Jac- 
quemier,  dans  l'utérus  enflammé.  De  son  côté,  Ch.  Robin  a  cherchée 
établir  que  le  liquide  contenu  dans  les  prétendus  abcès  n'était  qu'un 
pseudo-pus  fibrineux  tout  à  fait  différent  du  pus  véritable  (Ch.  Robin  et 
Yerdeil).  En  résumé,  poui  Ch.  Rodin  et  la  plupart  des  modernes,  ce  que 
Ton  a  pris  pour  les  signes  d'une  placentite,  n'est  qu'une  série  d'états 
dépendant  de  la  congestion  placentaire  et  de  transformations  successives 
du  sang  épanché.  Ce  qui  a  été  regardé  comme  du  pus  n'est  que  de  la 
fibrine  en  voie  de  désorganisation.  Dans  les  cas  où  Ton  a  trouvé  du  pus 
véritable,  ce  pus   avait  été  déposé  accidentellement  dans  le  tissu  pla- 


PLACENTA.  — :  TROUBLES  de  ciRcniATioN.  63 

centaire.  En  présence  d^opinions  si  diverses,  on  ne  peut  que  répéter  avec 
Jaeger  que  la  question  de  l'inflammation  du  placenta  est  environnée 
d* obscurités,  et  qu^il  faut  de  nouvelles  observations  bien  faites,  soumises 
à  tons  les  moyens  de  vériGcation  qui  sont  en  notre  pouvoir,  pour  être 
autorisé  à  tirer  des  conclusions  déGnitives. 

m.  Trocbles  DE  cmcuLATioN.  —  l'*  Congestiou^  apoplexie.  Les  troubles 
de  la  circulation  placentaire  ont  été  étudiés  principalement  au  point 
de  vue  des  épanchemcnts  sanguins  qui  se  produisent  fréquemment 
dans  le  placenta  et  sont  une  des  causes  les  plus  ordinaires  d'avortcment. 
Après  les  avoir  considérées  comme  l'origine  des  altérations  diverses  des 
villosités  choriales,  on  s'est  demandé  si  ces  altérations,  et  en  particulier 
la  dégénérescence  graisseuse,  n'en  étaient  pas  plutôt  la  cause  déterminante 
que  le  résultat.  Ce  sont  là  des  questions  assez  diHicilcs  à  résoudre  avant 
que  des  recherches  plus  précises  ne  les  aient  plus  complètement  élucidées. 
Tout  ce  qu'on  peut  allGrmcr  aujourd'hui,  c'est  que  ces  deux  états,  apo' 
plexie  placentaire  et  dégénérescence  graisseuse  des  villosités, sa  trouvent 
fréquemment  réunis  sans  que  l'on  puisse  décider  quel  est  celui  qui  s'est 
produit  le  premier. 

La  plupart  des  auteurs  admettent  que  l'épanchemcnt  sanguin  est  pré- 
cédé et  accompagné  d'une  état  congcslif  qui  se  traduit  par  une  augmen- 
tation de  volume,  par  une  densité  plus  grande  et  par  une  coloration  plus 
foncée  du   tissu  placentaire.  La  congestion   aurait  pour  siège,   d'après 
Simpson,  les  vaisseaux  ombilicaux  et  les  vaisseaux  utero -placentaires. 
Jacqucmier  pense  que  l'afflux  du  sang   se  fait  uniquement  par  les  vais- 
seaux utcro-placentaires  et  sous  l'influence  d'une  congestion  utérine.  Cette 
manière  de  voir  n'est  plus  admissible  depuis  qu'il  a  été  démontré  qu'il 
n'existe  pas  de  communication  vasculaire  directe   entre  les  vaisseaux 
foetaux  et  utérins.  H  est  on  ne  peut  plus  vraisemblable  que  ce  sont  les 
vaisseaux  utérins  qui  se  congestionnent  presque  toujours.   Ce  ne  serait 
que  dans  des  cas  assez  rares  que  des  perturbations  dans  la  circulation 
fœtale  (compression,  anomalie  du  cordon)  amèneraient  une  stase  sanguine 
dans  les  Taisseaux  ombilicaux.  Les  causes  de  congestion  venant  du  côté 
de  la  mère  sont  beaucoup  plus  nombreuses  ;  Jaeger  signale  en  particu- 
lier la  pléthore  générale,  une  menstruation  habituellement  abondante 
dont  le  molimen  persiste  pendant  la  gestation,  les  accidents  hystéral^'iques, 
les  excitations  portées  sur  l'utérus  ou  ses  annexes,  les  phlegmasies  des 
organes  voisins,  etc. 

Quelle  que  soit  la  cause  qui  l'ait  déterminée,  la  congestion  peut  dis- 
paraître sous  l'influence  du  repos  et  d'un  régime  convenable,  ou  donner 
lieu  à  des  épanchcments  sanguins.  Cruveilhier  avait  déjà  appelé  l'attention 
des  accoucheurs  sur  cette  lésion  qui  «consiste,  dit-il,  dans  des  foyers  de 
sang  en  plus  ou  moins  grand  nombre  et  à  divers  degrés  dans  l'épaisseur 
du  placenta  déchiré,  léî^ion  bornée  quelquefois  à  un  petit  nombre  de  coty* 
lédons,  mais  s'étendant  souvent  à  un  plus  grand  nombre  ».  Jacquenâer, 
deson  côté,  publiait  en  1839  un  travail  très-remarquable  et  très-com- 
plet sur  les  épanchements  sanguins.  D'après  cet  auteur  les  hémorrhagies 


64  PLACENTA.  —  troubles  de  circulatiouc.' 

ont  pour  origine  constante  des  déchirures  Teineuses,  soit  dans  le  tissu 
placentaire,  soit  en  dehors  du  placenta,  dans  la  caduque. 

Le  siège  de  Tépanchement  varie  selon  l'âge  de  la  grossesse.  Dans  les 
trois  premiers  mois  une  des  veines  utéro-placentaires  se  rompt  ;  le  sang 
épanché  s'accumule  dans  un  espace  libre  qui  persiste  encore  à  cette 
époque  entre  le  chorion  et  la  caduque  et  il  enveloppe  l'œuf  tout  entier. 
Dans  une  seconde  période  le  sang  épanché,  rencontrant  moins  de  résistance 
dans  la  partie  profonde  du  placenta  que  du  côté  de  la  partie  superficielle» 
dont  la  densité  est  plus  grande,  s'accumule  vers  la  surface  externe  du 
chorion  sans  dépasser  les  limites  du  placenta.  A  une  époque  encore  plus 
avancée  de  la  gestation,  la  densité  de  plus  en  plus  grande  du  placenta 
ne  permet  plus  au  sang  de  s'épancher  sur  une  grande  surface,  et  il  se 
forme  des  foyers  isolés. 

L'épanchement  peut  donc  avoir  lieu  entre  la  caduque  et  le  chorion» 
ou  dans  le  placenta  lui-même.  Dans  ce  cas  il  se  présente  sous  trois  formes 
difTérentes,  selon  l'époque  à  laquelle  il  s'est  produit  :  (a)  Les  foyers  irré- 
guliers, volumineux,  sont  le  plus  souvent  placés,  soit  dans  les  enyirons 
de  la  veine  coronaire,  laquelle  communique  avec  eux,  soit  au  centre  du  gâ- 
teau placentaire;  ils  s'étendent  alors  jusqu'à  la  face  externe  du  chorion 
ou   jusqu'à  la  surface  utérine   du  placenta  déchiré  et  décollé  dans  la 
partie  correspondante,  (b)  On  ne  trouve  pas  de  foyer  proprement  dit, 
mais  une  infiltration  sanguine  dans  un  ou  plusieurs  lobes  dont  le  tissu 
parait  raréfié,  (c)  Enfin  les  foyers  peuvent  être   nombreux,   très -bien 
circonscrits  et  disséminés  dans  l'épaisseur  du  tissu  placentaire,  Désor- 
meaux  et  Paul  Dubois   avaient  également  insisté   sur  ce  que,  «  lors- 
que vers  la  fin  du  troisième  mois  le  chorion  est  immédiatement  appliqué 
contre  la  caduque  réfléchie  et  que  le  sang  ne  peut  plus  trouver,  entre  ces 
deux  membranes,  d'espace  pour  se  répandre,  c'est  dans  l'épaisseur  même 
du  placenta  qu'il  s'épanche,  forme  alors  des  foyers  qui  varient,  non- 
seulement  par  le  nombre,  la  forme  et  le  volume,  mais  encore  par  le  siège, 
foyers  qu'on  trouve  en  général  d'autant  plus  rapprochés  de  la  face  fœtale 
que  la  grossesse  est  moins  avancée,  et  au  contraire  d'autant  plus  voisins 
de  la  face  utérine  qu'on  s'éloigne  davantage  du  moment  de  la  concep- 
tion x>. 

Les  foyers  apoplectiques  ne  diffèrent  pas  moins  par  leur  nombre  et  par 
leur  volume  que  par  leur  siège.  Tantôt  du  volume  d'un  pois,  tantôt 
aussi  de  celui  d'une  noix  ou  d'un  œuf  de  pigeon,  ils  sont  parfois  uniques, 
parfois  très-nombreux.  Simpson  a  trouvé  un  placenta  sur  lequel  oo 
n'apercevait  en  le  coupant  qu'une  infmité  de  petit  caillots  arrondis,  dis- 
tincts, mais  serrés  les  uns  contre  les  autres.  On  conçoit  que  dans  des  cas 
analogues  l'aspect  du  tissu  placentaire  puisse  être  altéré  au  point  de 
simuler  une  véritable  dégénérescence  mélanique  ;  mais  les  choses  ne  se 
passent  pas  habituellement  ainsi  et  Ton  rencontre  le  plus  souvent  des  foyers 
à  contours  très-bien  limités.  Dans  quelques  cas  cependant,  le  sang  s'in- 
filtre  dans  le  tissu  placentaire  sans  s'y  créer  de  cavité  proprement  dite, 
et,  si  l'épanchement  a  lieu  dans  le  voisinage  du  chorion,  il  peut  cheminer 


PLACENTA.  —  TROUBLES  de  la  circulation.  65 

jusqu'à  l'insertion  du  cordon  qui  en  est  .quelquefois  lui-même  infiltré. 
On  peut  également  rencontrer  sur  un  même  placenta  des  foyers  bien  cir- 
conscrits et  une  infiltration  du  tissu  placentaire  voisin;  cet  état  peut  tenir 
à  deux  causes,  soit  à  Texistence  de  petits  foyers  apoplectiques  autour  d'un 
foyer  plus  Yolumineux,  soit  a  une  iniiltration  des  parties  colorantes  du 
sang. 

Quelle  est  Torigine  du  sang  épanché.  On  a  vu  plus  haut  que  Jacqucniier 
en  place  la  source  la  plus  commune  dans  les  vaisseaux  utéro-placentaires. 
Simpson  pense  que  si  Thémorrhagie  se  déclare  pendant  les  premiers 
mois,  elle  prend  naissance  dans  les  vaisseaux  de  la  caduque  et  dans  les 
vaisseaux  rudimentaires  du  placenta.  Diaprés   Cruveilhier,  le  sang  est 
fourni  le  plus  souvent  par  les  vaisseaux  ombilicaux.  Cette  dernière  opinion 
est  partagée  par  Millet,  qui  soutient  que  les  fojers  apoplectiques  du  cenlrc 
des  lobes  sont  le  résultat  d^une  rupture  des  vaisseaux  du  cordon,  et  par 
Charpentier  qui  dit  avoir  vu  souvent  une  dilatation  anévrysmale  de  ces 
vaisseaux  au  niveau  de  leur  insertion  placentaire.  La  possibilité  de  la  rup- 
ture des  vaisseaux  ombilicaux  a,  du  reste,  été  démontrée  par  une  obser- 
vation deDeneux  et  on  ne  saurait  contester  que  leurs  tuniques  très  minces 
ne  soient  dans  des  conditions  bien  propres  à  se  rompre  sous  Tinfluence  de 
causes  variables.  Joulin  place  Tongine  des  épanchemenls  sanguins  soit 
daus  la  muqueuse  utéro-placenlaii  e,  soit  dans  la  bubstance  même  du  pla- 
centa  et  les  attribue  à  la  destruction  des  parois  des  vaisseaux  et  à  leur  fusion. 
Toutes  ces  causes  peuvent  amener  des  hémonhagicsdans  des  circonstances 
spéciales,  mais  il  est  vraisemblable  que  dans  le  plus  grand  nombre  de  cas 
cest  par  les  sinus  veineux  que  le  sang  (ait  irruption.  Voici,  d'après  Jaeger, 
comment  les  choses  se  passeraient  :  par  suite  de  la  congestion  il  y  a 
décollement  du  placenta  au  niveau  de  la  caduque  et  Técoulement  san- 
guin  se  fait  par   les  sinus.  Le  sang  s^épanclie  dans  les  lobes  placen- 
taires ou  entre  eux,  les  infiltre  ou  se  réunit  en  foyer. 

Cette  iriiiption  du  sang  par  les  vaisseaux  utérins  a-t-elle  toujours  lieu 
sous  rinfluence  d'une  con<<estion  utérine  ou  bien  n'est-clle  pas  plutôt 
due  à  l'altération,  qui  sera  décrite   plus  loin,   sous  le  nom  de  dégéné- 
rescence graisseuse  ;  ou  bien  encore  ces  deux  causes  ne  contribuent-elles 
point  ensemble  à  déterminer  des  apoplexies  placentaires?  L'époque  peu 
avancée  de  la  grossesse  où  Ton  observe  le  plus  souvent  des  hémorrhagies 
placentaires  considérables  donnerait  à  penser  que  c'est  plutôt  sous  Tin- 
fluence  de  la  congestion  utérine  qu*elles  se  produisent;  on  verra,  en 
effet,  que  la  dégénérescence  graisseuse  des  villosités  est  un  fait  à  peu 
près  constant  dans  la  dernière  période  de  la  grossesse,  c'est-à-dire  à  une 
époque  où  les  hémorrhagies  deviennent  de  plus  en  plus  rares. 

Les  théories  qui  \iennent  d'être  exposées  reposent  toutes  sur  le  fait  de 
la  persistance  des  tuniques  des  sinus  utérins,  or,  on  sait  qu'un  certain 
nombre  d*auteurs  ont  cru  avoir  constaté  que  les  villosités  choiiales  plon- 
gent directement  dans  le  sang  maternel,  dans  de  véritables  lacs  san- 
guuis;  ausai  tous  ceux  qui  se  sont  ralliés  à  cette  manière  de  voir,  consi- 
dèrent-ils les  hémorrhagies  placentaii*es   comme  impossibles  dans  les 

lOOT.  MCT.  HéD.  IT  CBIR.  XXVni  —  5 


iê  PLACENTA.  —  TROUBLES  de  l\  circolatiok. 

:9»BBfBtux  et  furëtendent  que  le  sang  n'est  jamais  exlravasé,  mais  simple- 
ment coagulé  de  façon  à  former  de  véritables  throûiboses.  D'après  Busta- 
mentfc,  ces  thromboses  seraient  ducs  tout  à  la  fois  à  l'augmentation  du 
calibre  des  vaisseaux,  au  changement  de  direction  quils  affectent  et  aux 
oDodîficaiians  que  la  puerpéral ité  apporte  dans  la  composition  du  sang. 
Bailly  conteste  la  possibilité  des  foyers  apoplectiques  aussi  longtemps  que 
Jm  coBfititution  anatomique  du  placenta  n'a  point  été  altérée  par  la  dégé- 
wreacence  fibro-graisseuse.  Ces  théories  paraissent  un  peu  subtiles,  elles 
(Hidile  tort  de  reposer  sur  deux  hypothèses  égnlemcnt  erronées  :  en  pre- 
mier lîeUf  Teiistence  de  vrais  lacs  sanguins  dans  lesquels  les  villosités 
seraient  en  rapport  direct  avec  le  sang  maternel,  et  en  second  lieu,  la 
dégéûésescence  graisseuse  constante  des  villosités  choriales  en  cas  dapo- 
pleaûe  placeotairc;  or,  les  recherches  de  Depaul  ont  démontré,  qu'il 
.peut  y  avoir  épanchcment  sanguin  sans  altération  préalable  des  villosités. 
La  même  objection  s'applique  à  la  théorie  d'Ercolani  d*après  laquelle  la 
dégéoérescence  graisseuse  des  cellules  de  la  sérotine  serait  toujours  pré- 
eustante  ;  ees  cellules  une  fois  transformées  supporteraient  mal  la  pression 
du  sang  des  lacunes,  ce  qui  donnerait  lieu  à  de  véritables  hémorrhagics. 

2®  Transformalion  des  caillots  sanguins.  Lorsqu'un  épanchement 
fianguin  survient  dans  les  premiers  mois  de  la  grossesse,  il  se  fait  entre  le 
chorion  et  la  caduque  ce  qui  détruit  les  moyens  d'union  encore  très  faibles 
i|iki  exidtcnft  •entre  ces  deux  membranes.  L'avortement  en  est  le  plus  sou- 
veut  la  conséquence.  Cependant  dans  quelques  cas,  le  liquide  épanché 
s'origaiMJâe  et  détermine  des  adhérences  plus  ou  moins  intimes  de 
Vmut  avec  la  muqueuse  utérine.  Lorsque  la  grossesse  est  plus  avancée, 
rhémorrhagie  est  limitée  au  tissu  placentaire  et  peut  également  déter- 
inkier  l'expulsion  prématurée  du  produit  de  la  conception  ;  mais  il  n'eo 
est  «pas  toujours  ainsi,  et  Ton  rencontre  un  grand  nombre  de  placentas 
dans  lesquels  une  hémorrhagie  plus  ou  moins  considérable  s'est  produite, 
uns  que  souvent  rien  ne  scit  venu  en  révéler  l'existence  pendant  le  [ 
txmcs  de  la  gestation.  Les  transformations  subies  par  les  foyers  apoplec-  ; 
tÂfues  ont  été  étudiées  avec  soin.  Le  premier  changement  qui  survint  , 
diAS  le  caillot  est  sa  décoloration,  qui  marche  de  l'extérieur  à  l'intérieur. 
La  •couche  externe  prend  une  couleur  d'abori]  rougeâtre,  puis  jaune, 
puis  grise  ou  blanchâtre*  Les  couches  les  plus  internes  présentent,  à  me- 
sure qu'elles  deviennent  plus  profondes,  une  coloration  plus  foncée.  Ea 
général  la  partie  centrale  est  plus  molle  ou  même  tout  à  fait  liquide;  ce 
n'est  qu'au  bout  d'un  temps  assez  long  que  toute  la  masse  prend  use 
consistance  homogène  et  une  coloration  uniforme.  Lorsque  les  foyers 
sont  un  peu  considérables,  il  existe  presque  toujours  à  leur  centre  uoe  " 
carvilé  vide  ou  contenant  du  sérum,  qui  a  été  prise  parfois  pour  un  kyste 
séreux  ;  à  une  époque  plus  avancée  le  caillot  peut  devenir  tout  à  fait  dnr 
et  prendre  une  oonsisiaace  lardacée  ou  bien  se  transformer,  ainsi  que  l'a  . 
otifiervé  Jacquemier,  en  une  substance  jaune,  grisâtre,  stéatomateuse,  rei* 
.aMfifalant  à  de  la.  matière  tuberculeuse. 

Pendant  qu'il  subit  ces  transformations  successives,  le  foyer  revient  sur  '- 


PLVCENTÂ.   —  DÉGÉ.NÉRESCEMCES.  67 

lui-même  et  diminue  notablement  de  volume  i^t^n  même  temps  le  tissu 
ambiant  dans  lequel  il  s'est  produit,  s'infiltre  d^  sérosité  sanguine  plus  ou 
moins  considérable  et  subit  aussi  quelques  modifications.  Pour  peu  que 
riuGitration  ait  été  abondante,  la  résorption  ne  se  fait^as,  les  villosités 
choriales  et  leurs  vaisseaux  s'oblitèrent  et  subissent  une  véritable  régres- 
sion, le  plus  souvent  bornée  à  un  lobe,  mais  pouvant  s'étendre  à  une 
notable  portion  du  placenta  et  nuire  à  la  nutrition  du  fœtus. 

Les  épanchements  sanguins  ne  subissent  pas  toujours  les  transforma- 
lions  qui  viennent  d'être  décrites  ;  ils  peuvent  disparaître  entièrement. 
Verdier  a  indiqué  de  la  façon  suivante  le  processus  de  leur  disparition. 
La  fibrine  s'infiltre  dans  les  tissus,  son  apparence  fibrillaire  devient 
grenue,  la  masse  se  ramollit  et  on  a  sous  les  yeux  une  masse  semi-liquide, 
jaunâtre,  ayant  absolument  l'aspect  de  pus  et  qui  a  été  considéré  comme 
tel  par  les  anciens  observateurs.  On  trouve  dans  ces  masses  pyoïdes  : 
1*  des  granulations  fibreuses  et  graisseuses;  2''  du  liquide;  3"^  des  glo- 
bules blancs  restés  englobés  et  rais  à  nu  par  le  travail  de  ramollissement; 
ils  sont  toujours  altérés,  ordinairement  chargés  de  granulations  grais- 
seuses (Vulpian). 

Quelques  auteurs  pensent  aussi  que  les  caillots  sanguins  peuvent  s'or- 
ganiser plus  ou  moins  com|)lètement  (llunter,  Billroth).  On  a  même 
prétendu  que  lorsque  du  sang  s'est  épanché  entre  la  muqueuse  utérine  et 
le  placenta,  la  partie  décollée  peut  s'unir  à  Tutérus  par  l'intermédiaire 
des  caillots  organisés,  et  cette  union  devenir  assez  solide,  pour  rendre  la 
délivrance  difficile.  Mais  les  recherches  de  Ch.  Robin  ne  semblent  pas  con- 
firmer cette  opinion;  elles  tendent  au  contraire  à  démontrer  que  les 
épanchements  sanguins  ne  s'organisent  pas,  mais  se  décolorent  seule- 
ment  et  se  condensent.  Leur  apparence  d  organisation  serait  due  à  l'état 
fibrillaire  de  la  fibrine. 

On  rencontre  quelquefois  sur  la  face  ^fœtale  du  placenta  des  tumeurs 

volumineuses  dont  l'enveloppe  est  formée  par  un  tissu  analogue  au  tissu 

squirrheux,  et  dont  la  partie  centrale  est  constituée  par  des  caillots. 

Danyaa,qui  en  a  cité  deux  observations,  considère  avec  raison  ces  tumeurs 

comme  d'anciens  foyers  apoplectiques.   Un  doit   également  donner  une 

origine  hématique  à  des  kystes  occupant  le  même  siège  et  contenant  un 

hquide  lactescent  dans  lequel  nagent  des  globules  sangums.  Ces  kystes 

ne  doivent  pas  être  confondus  avec  une  autre  variété  décrite  par  Millet  et 

que  la  nature  du  liquide  qu'elle  contient  (gélatine  de  Wharton)   suffit  à 

faire  classer  parmi  les  dégénérescences-hydatoïdes  des  villosités. 

W.  Dégêréiœsgences.  —  1*  Dégénérescence  dite  graisseuse  du  pla- 
centa. Induration  du  placenta.  Encéphaloïdes.  Dégénérescence  squir- 
rheuse^  cancéreuse,  tuberculeuse.  On  doit  aux  travaux  de  Ch.  Robin,  de 
Barneset  de  Druitt  la  connaissance  de  deux  faits  qui  éclairent  d'un  jour 
oauveao  Thistoire  de  la  dégénérescence  graisseuse  du  placenta  et  toute  la 
pathologie  de  cet  organe.  11  résulte  en  effet  des  recherches  de  Robin  que 
les  villosités  choriales  qui  ne  concourent  pas  à  la  formation  du  placenta 
s'oblitèrent  dès  les  premiers  mois  de  la  grossesse  et  que  l'on  rencontre 


68  PLACENTA.  —  dégénérescekces. 

non  seulement  dans  leurs  parois,  mais  encore  dans  leur  épaisseur  un 
grand  nombre  de  granulations  graisseuses.  Cette  oblitération  fibreuse  et 
la  dégénérescence  graisseuse  qui  l'accompagne  n'est  ordinairement  pas 
bornée  aux  villo^tés  choriales,  mais  envahit  également  un  nombre  plus 
ou  moins  considérable  de  villosités  placentaires.  De  son  côté,  Bames 
avait  constaté  que  la  surface  utérine  d'un  grand  nombre  de  placentas  i 
terme  présentait  une  coloration  d'un  jaune  pâle  et  que  les  villosités  de 
cette  surface  avaient  subi  la  dégénérescence  graisseuse.  L'altération  était 
moins  avancée  dans  la  profondeur  du  gâteau  placentaire,  mais  aucnoe 
villosité  n'était  saine  et  tous  les  vaisseaux  étaient  rompus,  si  ce  n'est 
au  fond  des  sillons  interlobai^es  où  la  communication  vasculaire  avec  l'olé- 
rus  était  persistante.  Druitt  arrivait  également  aux  conclusions  suivantes: 
1"  La  dégénérescence  commençante  est  une  condition  normale  du  placenta 
à  la  fin  de  la  grossesse.  2*"  Elle  a  pour  cause  la  cessation  partielle  des 
fonctions  actives  de  cet  organe,  quand  le  développement  actif  du  fœtus 
est  presque  complet.  3^  Loi*squ'elle  se  présente  dans  les  premiers  mois, 
elle  a  probablement  pour  cause  un  défaut  de  forces  nutritives  du  fœtus 
ou  sa  mort.  La  conséquence  de  ces  recherches  dont  les  résultats  soot 
identiques  est,  que  l'oblitération  fibreuse  et  l'altération  graisseuse  sont 
des  phénomènes  normaux  dans  l'évolution  des  villosités  choriales  et  pla- 
centaires; qu'elles  envahissent  les  premières  dès  le  début  de  la  grossesse, 
tandis  que  les  secondes  ne  sont  atteintes  que  tardivement  et  seulement 
dans  leur  partie  superficielle.  Mais  si  les  choses  se  passent  ainsi  daosk 
plus  grand  nombre  des  cas,  il  n'est  pas  rare  de  voir  la  lésion  s'étendre 
à  un  ou  plusieurs  lobes  et  même  à  la  plus  grande  partie  du  placenta.  Le 
plus  souvent  c  est  à  la  circonférence  du  gâteau  placentaire  qu'elle  se  ren- 
contre. Un  nombre  plus  ou  moins  grand  de  lobes  présentent  l'aspect  soi- 
vaut  :  ils  ^^o^t  déprimés,  plus  fermes  qu'à  l'état  normal  et  forment  um 
masse  compacte  se  déchirant  en  fragments  dont  la  surface  est  filamenicuii  T 
et  irrégulière.  Les  villosités  offrent  un  degré  très  avancé  d'oblitératioa  L 
fibreuse  et  forment  des  cordons  pleins  et  résistants.  La  substance  cho-  L . 
riale  propre  est  devenue  très  granuleuse  sans  qu'il  existe  cependant  du 
granulations  graisseuses  dans  toutes  les  ramifications  villeuses.  Les  villott-- 
tés  adhèrent  entre  elles.  Dans  une  autre  variété,  les  granulations  graisseuses 
sont  plus  abondantes,  les  lobes  sont  séparés  par  des  sillons  profonde^, 
leur  tissu  est  plus  dur  qu'à  l'état  normal;  friable,  d'un  gris  jaunâtret^ll" 
il  reprend  dans  la  profondeur  son  aspect  normal  tant  comme  consistaiMt^* 
que  comme  coloration. 

Peut-être  est-ce  à  une  altération  de  même  nature  qu'il  faut  attribuer 
l'affection  décrite  sous  le  nom  de  sclérose  du  placenta.  Le  placenta  ae 
présente  sous  la  forme  d'une  masse  rougeàtre,  homogène,  compacte,  le  ^ 
séparant  en  petits  lobes  ;  le  tissu  morbide  est  constitué  par  des  élém 
fibro-plastiques,  régulièrement  disposés  et  formant  des  couches  co 
triques. 

Les  placentas  dont  un  ou  plusieurs  lobes  sont  atteints  de  dégén 
cence  fibro-graisseuse  ont  une  physionomie  particulière.  On  distingue 


ii 


PLACENTA.   —  DÉGÉWÉRESCESCES.  69 

milieu  de  lobes  fixais  et  rosés  des  masses  grisâtres  ou  blanchâtres  d'un 
aspect  squirrbeux  qu*on  a  longtemps  regardées  comme  dues  à  des  épan- 
chements  sanguins.  Selon  Robin,  Tinduration  jaunâtre  n*est  point  Teffet 
de  la  sufTusion  du  sang,  dont  on  ne  rencontre  jamais  les  éléments  carac- 
téristiques (globules  et  cristaux  d'hématoïdine)  ;  ce  qui  a  pu  induire  en 
erreur  à  cet  égard,  c'est  la  concomitance  des  bémorrhagies  placentaires 
et  de  la  dégénérescence  fibro-graisseuse,  ainsi  que  la  présence  simultanée 
des  lésions  consécutives  à  chacune  de  ces  deux  affections.  Il  est  probable 
que  des  recherches  poursuivies  dans  le  même  sens  que  celles  de  Robin 
achèveront  de  faire  connaîlre  les  causes  et  le  mécanisme  de  Taltération 
fibro-graisseuse.  On  doit  se  borner  aujourd'hui  à  la  considérer  comme 
résultant  d'une  oblitération  fibreuse  des  villosités  compliquée  d'infiltra- 
tion granulo-graisseuse. 

2*  Dépôts  calcaires.  Lithiase,  Concrétions  ossiformes.  —  Les  dépôts 
calcaires  du  placenta  ont  été  observes  et  décrits  par  les  plus  anciens  au- 
teurs. LobsleÎD  les  considérait  comme  des  ossifications  vasculaires;  on  sait 
aujourd'hui  qu'ils  sont  formés  de  carbonate  de  chaux  et  de  phosphate  de 
chaux  et  de  magnésie,  lis  ont  la  forme  de  grains  de  gravier,  d'aiguilles,  de 
stalactites,  ou  mieux  encore  de  coraux.  Leur  volume  varie  de  quelques 
centièmes  de  millimètres  à  quelques  millimètres.  Les  concrétions  les  plus 
petites  se  trouvent  généralement  sur  la  surface  utérine;  elles  donnent 
sous  le  doigt  la  sensation  de  grains  de  sable  et  se  sont  déposées  dans  la 
caduque.  Celles  qui  ont  la  forme  d'aiguilles  ou  de  coraux  se  rencontrent 
plus  habituellement  dans  l'épaisseur  du  gâteau  placentaire  et  ont,  d'après 
Cniveilhier,  leur  siège  dans  les  tuniques  artérielles.  Enfin  elles  peuvent 
également  être  rassemblées  en  une  seule  masse  irré^ulière  occupant  un 
point  quelconque  du  parenchyme  spongieux  et  particulièrement  les  espaces 
inferiobaîres.  I^eur  nombre  est  extrêmement  variable.  Millet  dit  avoir 
trouvé  dans  un  seul  placenta  plus  de  deux  cents  calculs  dont  le  plus 
volumineux  était  gros  comme  une  noix?  Ces  concrétions  se  développent 
dans  les  tissus  affectés  de  dégénérescence  graisseuse  et  spécialement  dans 
la  caduque,  ou  bien  dans  la  paroi  externe  des  villosités  atteintes  de  trans- 
formation fibreuse. 

3*  Dégénérescence  hydatoïde,  —  Celte  affection  est  sans  contredit  la 
maladie  de  Tœuf  humain  qui  a  été  le  plus  anciennement  décrite  et  celle 
dont  la  nature  a  été  le  plus  complètement  méconnue,  llippocratc,  qui  attri- 
buât sa  production  à  l'épaisseur  du  sperme  retenu,  lui  assignait  pour 
symptômes  le  développement  exagéré  du  ventre,  ainsi  que  Tabsence  de  tout 
mouvement  dans  le  ventre  et  de  lait  dans  les  mamelles.  De  Graaf  la  con- 
sidérait comme  formée  de  véritables  œufs,  tandis  que  Smellie  croyait  y 
voir  des  glandes.  Ce  fut  Lcvret  qui  entrevit  un  des  premiers  sa  véritable 
nature  en  lui  donnant  pour  siège  l'œuf,  et  pour  condition  essentielle  la 
{fondation.  Cette  opinion  avait  généralement  prévalu  quand  en  1782, 
jorze  prétendit  avoir  rencontré  dans  ce  qu'on  était  aloi*s  convenu  d'ap- 
ider  une  môle  ((jiuXT]),des  entozoaires,  des  vers  vésicu  la  ires,  et  lui  donna  le  ' 
MMQ  de  môle  hydatique.  Percy,  Hippolyte  Cloquet  et  Gluge  acceptèrent 


70  PLACENTA.   DÉcéNÉRESCENCES. 

cette  manière  de  voir  tout  invraisemblable  qu'elle  était,  mais  elle  ne  ré- 
sista pas  longtemps  aux  investigations  exactes  de  l^anatomie  microscopique. 
Tout  le  monde  reconnaît  aujourd'hui  que  les  villosités  choriales,  et  en  par- 
ticulier les  villosités  placentaires,  sont  le  siège  de  la  transformation  hyda- 
toïde.  Le  seul  point  qui  soit  encore  controversé  est  relatif  à  la  nature  de 
l'altération  qu'elles  ont  subie.  On  a  cherché  à  donner  à  cette  altération 
deux  explications  différentes  connues  sous  le  nom  d'opinion  française  et 
d'opinion  allemande.  Avant  de  les  exposer,  il  est  utile  de  rappeler  une  théo- 
rie déjà  ancienne  qui  a  été  récemment  reproduite  par  Ancelot  et  d'après  I»- 
quclle  «  les  môles  hydatoïdes  seraient  une  altération  particulière  de  la 
caduque  utérine  ou  de  la  caduque  réfléchie,  produite  sous  l'influence  de 
l'imprégnation  et  consistant  en  la  production  par  poussées  successives  par 
un  travail  exogène,  de  vésicules  indépendantes,  adhérentes  les  unes  aux 
autres,  revêtues  d'une  membrane  commune,  mais  tendant  à  s'isoler  les 
unes  des  autres.  » 

Opinion  allemande,  —  On  a  vu  dans  la  description  anatomique  des 
villosités  cfaoriales  que  leur  couche  interne  est  constituée  par  un  tissa 
désigné  par  Joulin  sous  le  nom  de  magma  réticulé,  sorte  de  tissu  muqueux 
analogue  à  la  gélatine  de  Wharton.  C'est  à  l'hyperplasie  de  ce  tissu  muqueux, 
et  non  à  celle  de  l'épithélium  comme  le  supposait  Heinrich  Muller,  que 
Virchov^  attribue  la  dégénérescence  des  villosités  choriales.  D'après  lui,  la 
môle  hydatoïde  doit  être  rangée  dans  la  classe  des  tumeurs  proliférantes 
avec  persistance  de  tissu  originaire  et  être  appelée  myxôme  des  villosUft 
choriales.  La  lésion  peut  être  étendue  à  toutes  les  villosités  et  envelopper 
l'œuf  entier  (myxôme  généralisé)  ou  être  limitée  à  une  partie  du  placenta 
(myxôme  partiel) .  Elle  débute  par  la  multiplication  des  noyaux  et  des  cellules 
qui  plus  tard  peuvent  se  réduire  en  mucus  et  subir  la  dégénérescence  grais- 
seuse, ou  bien  s'accumuler  sous  la  couche  épithéliale  des  villosités  et  les 
distendre  de  façon  à  augmenter  considérablement  leur  volume  en  formant 
de  yéritablcs  yésiculcs.  A  mesure  que  les  villosités  se  développent,  elles 
deviennent  de  plus  en  plus  gélatiniformes  ;  si  l'on  y  pratique  une  piqûre, 
'y\  s'en  écoule  un  liquide  transparent  donnant  la  réaction  de  la  mucine. 
En  général,  les  vésicules  ne  contiennent  pas  de  vaisseaux,  surtout  quand  h 
lésion  s'est  produite  au  début  de  la  grossesse.  Dans  des  cas  assez  rares, 
elles  sont  entourées  d'un  réseau  vasculaire  très  riche.  En  résumé,  pour 
Virchow,  la  dégénérescence  hydatoïde  ne  serait  que  le  développement  exa- 
géré du  tissu  normal  de  la  villosité.  Cette  manière  de  voir  est  partagée 
par  Cornil  et  Banvier.  Ercolani  pense  également  qne  le  placenta  hydati- 
gène  est  dû  à  une  hyperplasic;  mais  d'après  lui  cette  hyperplasie  aurait 
pour  siège  tantôt  la  couche  épithéliale  des  villosités,  tantôt  leur  enveloppe 
extérieure,  c'est-à-dire  la  portion  du  placenta  qu'il  a  décrite  sous  le  nom 
d'organe  glandulaire. 

Opinion  française,  —  Cette  théorie  consiste  à  considérer  la  dégéné- 
rescence hydatoïde  comme  une  hydropisie  des  extrémités  des  villosités 
choriales.  Soutenue  par  Stoitz  dans  un  mémoire  présenté  à  la  Société  dt 
musAun  d'histoire  naturelle  de  Strasbourg  en  1836  elle  a  été  conGnnée 


PLACENTA.   DÉGÉNÉRESCSHCES.  71 

par  les  trayaiix  de  Ch.  Robin  et  adoptée  par  Depaul.  La  structure  àts  Ven^ 
\eloppe  des  vésicules,  la  nature  du  liquide  qu'elles  contiennent,  Fobfité- 
ration  de  leur  pédicule,  rendent  cette  opinion  on  ne  peut  plus  vraisem- 
biable.  On  peut  admettre  avec  Dcsorineaux  et  Dubois  que  la  môle  hydktotâè 
se  présente  sous  trois  formes  diverses  :  1®  môle  hydatique  embryonnéer 
2*  môle  hydatique  creuse;  3'  môle  hydatique  en  masse.  C'est  la  troisième 
de  ces  variétés  qui  va  être  plus  spécialement  décrite.  Les  deux  premières 
n'en  diflerent  que  par  la  persistance,  au  milieu  de  la  masse  vésiculéuse,. 
de  la  cavité  amniotique  dans  laquelle  l'embryon  a  été  plus  ou  moih» 
complètement  dissous  ou  a  continué  à  se  développer.  Les  détails  refiatfTs 
a  chacune  de  cts  variétés  trouveront  leur  place  après  la  description  de  la 
môle  la  plus  commune,  c'est-à-dire  de  la  môle  en  masse. 

L'œuf  qui  a  été  frappé  de  dégénérescence  hydatoïde  se  présente  sous  Ilas- 
pcct  d'une  masse  plus  ou  moins  volumineuse  constituée  par  des  vésicules 
cristallines  de  forme  et  de  grandciir  variables.  Ces  vésicules  sont  re- 
liés entre  elles  par  des  filaments  très  fins  formant  un  réseau  inextricable 
de  grappes.  Tantôt  celte  masse  vésiculeuse  est  entièrement  entourée  d- une 
membrane  d'un  tissu  rouge  et  spongieux  qui  n'est  autre  chose  que  la*  ca- 
duque ;  d'autres  fois  on  ne  rencontre  à  sa  surface  que  des  fragments  plus 
ou  moins  larges  de  cette  membrane,  dont  une  partie  est  restée  adhé^ 
rente  aux  parois  utérines.  L'intégrité  de  la  caduque  est  d'autant  plus» 
gi-aude  que  Texpulsion  a  eu  lieu  à  une  époque  moins  avancée  de  la  gro8<- 
sesse,  et  il  est  extrêmement  rare  qu'après  le  quatrième  mois  l'enveloppe 
qu'elle  forme  autour  de  la  môle  soit  encore  com|)lète. 

Lorsqu'on  a  incisé  cette  membrane  on  remarque  que  la  masse  vésicu- 
leuse est  formée  de  deux  parties  bien  distinctes  :  l'une,  centrale,  moins 
considérable,  d'un  rouge  tendre,  d'un  tissu  filamenteux  très  friable,  rap- 
pelant le  tissu  placentaire;  elle  cat  constituée  selon  toute  vraisem»- 
blance  par  Se  chorion  et  les  premiers  troncs  villeux  non  dégénérés.  lia 
seconde  partie  beaucoup  plus  volumineuse  se  compose  des  vésicules  et  dé- 
leurs  pédicules.  Ces  vésicules  sont  réunies  en  forme  de  grappes  qui  sont: 
parfois  isolées  les  unes  des  autres,  mais  qui,  dans  d'autres  cas,  sont  utk*i«- 
quées  comme  les  villosités  placentaires  et  forment  un  vérit^Lle  gâteau* 
de  kystes  enchevêtrés  les  uns  dans  les  autres.  Les  vésicules  se  dévelopi»etft. 
habituellement  au  point  oii  le  pédicule  des  villosités  commence  à  se  và^ 
mîGer  et  offrent  une  disjonction  identique  à  celle  que  présentaient  les  di- 
visions et  les  subdivisions  des  villosités  elles-mêmes.  Parfois  le  pédicule' 
fait  défaut  et  l'on  voit  un  kyste  volumineux  sur  lequel  de  petits  kystes  se* 
sont  développés,  Ces  kystes  ont  une  enveloppe  externe  commune,  mais' 
chacun  deux  possède  une  tunique  interne  qui  lui  est  propre  et  s'adosse- 
plus  ou  moins  intimement  aux  parois  voisines.  Les  vésicules,  souvent  ausii 
petites  qu'un  grain  de  mil,  peuvent  atteindre  le  volume  d'une  noisette,  et 
dans  quelques  cas  exceptionnels  on  en  rencontre  d'aussi  grosses  qu'une 
œuf  de  pigeon.  Celles  qui  sont  situées  le  plus  profondément  sont  tiw 
petites,  nombreuses,  adhérentes,  mais  à  mesure  qu'elles  devienneiHl 
plus  superficielles,  elles  sont  da  plu&  en  plus  volumineuses.  Dans  quot- 


72  PLACENTA.    —  DKGRNéRESCERCES. 

qucs  cas  elles  prennent  un  développement  tellement  considérable  que  le 
pédicule  se  rompt;  le  kyste  devenu  libre  est  expulsé  avant  la  sortie  de  la 
masse.  Les  vésicules  sont  généralement  presque  transparentes  mais  elles 
prennent  parfois  une  couleur  rougeâtre  due  à  Timbibition  de  Thématine 
des  caillots  sanguins.  Leur  forme  varie;  celles  qui  sont  placées  sur  le 
trajet  des  pédicules  sont  fusiformes  ;  celles  qui  sont  terminales^  au  con- 
traire, sont  pyriformes;  leur  grosse  extrémité  est  libre,  tandis  que  la 
petite  se  continue  avec  le  pédicule.  Le  liquide  qu'elles  contiennent  ne 
peut  communiquer  d'un  kyste  à  l'autre  à  cause  de  l'oblitération  constante 
des  pédicules. 

On  n'est  pas  d'accord  sur  le  nombre  et  la  structure  des  enveloppes 
des  vésicules  ;  d'après  Cruveilhier,  il  n'existerait  qu'un  feuillet  unique  à 
disposition  réticulée  parfaitement  nette.  Madame  Boivin  et  Ancclot  décri- 
vent deux  membranes  tout  à  fait  distinctes.  Pour  Ch.  Robin  la  structure 
des  parois  des  vésicules  est  identique  à  celle  des  villosités  à  l'état  normal, 
c'est-à-dire  qu'il  existe  deux  tuniques ,  l'une  externe,  mince,  grisâtre, 
formée  de  noyaux  ovoïdes  et  de  granulations  graisseuses  ;  l'autre  interne, 
byaline  n'ayant  que  O^^jOl  d'épaisseur,  composée  de  libres  de  tissu  cellu- 
laire entre-croisées  à  noyaux  fibro-plastiques  assez  abondants.  Le  contenu 
des  vésicules  est  un  liquide  incolore,  quelquefois  rosé  bien  qu'on  n'y 
rencontre  jamais  de  globules  sanguins.  Il  donne  un  précipité  albumineux 
par  l'acide  nitrique  et  tient  en  suspension  deux  sortes  de  cellules;  les 
unes  appartiennent  à  Tépithélium  pavimenteux  ;  les  autres  n'ont  aucune 
analogie  avec  celles  des  autres  tissus,  sont  sphériqnes,  transparentes,  à 
bords  réguliers  et  contiennent  des  granulations  moléculaires  grisâtres 
d'égal  volume. 

Le  poids  des  môles  hydatoîdes  est  très  variable,  habituellement  de 
500  à  1000  grammes,  il  peut  s'élever  jusqu'à  cinq  ou  six  kilogrammes. 
Quel  que  soit  leur  volume  elles  pesivent  afl'ecter  les  trois  formes  dont  il  a 
été  question  plus  haut  ;  mais  la  mole  hvdatiquc  en  masse  est  celle  qui 
présente  habituellement  les  dimensions  les  plus  considérables.  Dans  la 
môle  embryonnée  on  rencontre  une  poche  plus  ou  moins  vaste  contenant  un 
fœtus  et  dont  la  surface  externe  donne  naissance  dans  une  plus  ou  moins 
grande  étendue  à  des  villosités  dégénérées.  Dans  le  cas  où  presque  toutes 
les  villosités  placentaires  ont  été  atteintes  par  la  dégénérescence,  on  trouva 
à  peine  quelques  tracer  de  l'embryon  ;  mais  si  en  dehors  des  villosités 
altérées  une  partie  notable  de  l'œuf  est  restée  intacte,  on  trouvera  au 
milieu  de  la  cavité  amniotique  un  fœtus  plus  ou  moins  volumineux.  Dans 
un  cas  oiî  la  moitié  du  placenta  avait  subi  la  transformation  hydati- 
forme,  Depaul  vit  la  grossesse  aller  à  terme  et  l'enfant  naître  vivant  bien 
que  malingre.  Dans  une  autre  circonstance  citée  par  Brachct,  le  placenta 
ne  présentait  que  trois  grappes  hydatoîdes  et  le  fœtus  était  vivant  et  bien 
développé.  La  môle  vésiculaire  creuse  ne  diffère  de  la  précédente  que 
parce  qu'on  ne  retrouve  plus  dans  la  cavité  amniotique  Fembryon  qui  a 
été  complètement  dissous,  alors  la  maladie  datait  du  début  de  la  gros- 
sesse et  avait  envahi  toutes  les  villosités  placentaires. 


PLACENTA.  —  LÉSIONS  syphilitiques.  7o 

Les  rapports  de  la  môle  hydatoîde  avec  les  parois  utérines  sont  très 
intéressantes  à  étudier;  nous  avons  dit  que  lorsque  son  expulsion  a  lieu 
dans  les  deux  premiers  mois  de  In  grossesse,  la  môle  est  enveloppée 
d*une  membrane  constituée  par  la  caduque,  disposition  qui  fit  supposer 
à  quelques  auteurs  que  c'était  la  muqueuse  utérine  qui  donnait  naissance 
aux  vésicules  hydatoïdes.  Mais  quand  l'œuf  dégénéré  a  séjourné  long- 
temps dms  l'utérus, la  muqueu^:e,  au  lieu  d'être  hypertrophiée,  est  consi- 
dérablement amincie,  et  le  muscle  utérin  est  mis  à  nu.  Les  vésicules  pénè- 
trent profondément  dans  les  parois  de  la  matrice  et  leurs  extrémités  se 
logrnt  dans  autant  de  petites  cavités.  Après  qu'elles  ont  été  détachées, 
la  surface  interne  de  l'utérus  prosente  des  lacunes  plus  ou  moins 
larges  selon  qu'elles  ont  servi  à  loger  un  ou  plusieurs  kystes.  Dans  cer- 
tains cas,  ces  Incunessont  assez  profondes  pour  que  les  fibres  musculaires 
soient  dissociées  et  que  le  péritoine  mis  à  découvert  constitue  à  lui  seul 
la  paroi.  Les  villosités  peuvent  même  pénétrer  dans  les  ouvertures  des 
sinus  ntérus  et  on  conçoit  que  le.ir  expulsion  soit  alors  longue  et  difficile 
et  qu'elle  détermine  des  hémorrhagies  très  abondantes. 

La  môle  hydatoîde  se  développe  habituellement  dans  la  cavité  utérine, 
cependant  on  lui  a  assigné  quelquefois  un  siège  tout  à  fait  anormal.  Volk- 
mann  et  Kricger  prétendent  avoir  vu  une  môle  vésicnlaire  dans  le  muscle 
utérin.  Otto  Heinrich  (thèse  de  Greiffswalder  sur  les  grossesses  extra- 
utérines)  cite  un  cas  de  grossesse  tubaire  dans  lequel  un  grand  nombre 
de  villosités  choriales  avaient  subi  la  dégénérescence  hydatiformo. 

V.  Lésiors  syphilitiques.  —  L'attention  n'a  et»  dirigée  que  fort  tird 
sur  les  altérations  que  la  syphilis  peut  provoquer  dans  le  placenta,  lors- 
que l'on  eut  reconnu  depuis  longtemps  rinfluencc  de  cette  diatlièse  sur  la 
marche  de  la  grossesse  ainsi  que  sur  la  santé  et  sur  la  vie  du  fœtus.  L'avor- 
tement  habituel,  la  mort  habituelle  du  fœtus  dans  les  derniers  mois  de  son 
développement,  avaient  déjà  été  signalés  par  Astruc:  mais  cet  auteur,  tout 
en  attribuant  à  la  syphilis  ces  différents  accidents,  n'en  avait  point 
cherché  la  cause  déterminante  dans  des  lésions  placentaires.  Murnt  avait 
bien,  il  est  vrai,  fait  observer  que  les  femmes  alfectôes  de  syphilis  sont 
prédisposées  à  des  maladies  du  placenta,  et  ajouté  que  cette  affection 
semble  favoriser  les  décollements.  Simpson  considérait  la  décoloration  et 
Tanémie  du  tissu  placentaire  alors  que  le  fœtus  était  mort  de  péritonite 
d'origine  syphilitique,  comme  une  conséquence  et  non  comme  la  cause 
de  la  mort  du  fœtus.  Lebert,  tout  en  signalant  des  granulations  jaunes 
d'apparence  tuberculeuse  et  une  tumeur  plus  volumineuse  fibrineuse 
qu'il  avait  rencontrées  sur  des  placentas  de  femmes  atteintes  de  syphilis 
constitutionnelle,  ajoutait  qu'il  ne  voyait  dans  cette  altération  rien  de 
spéciGque.  Une  lésion  analogue  consistant  dans  une  couche  fibrineuse 
d*apparencc  graisseuse  avait  déjà  été  observée  par  Mackcnsic  entre  les 
membranes.  Ce  fut  Virchow  qui  présenta  le  premier  ces  différentes  lésions 
comme  étant  de  nature  syphilitique.  Il  fit  remarquer  qu'il  faut  distinguer 
dans  les  enveloppes  de  l'œuf  la  partie  maternelle  et  la  partie  fœtale, 
ce  qui  au  point  de  vue  de  la  syphilis  n*est  point  indifférent  dans  la  déter- 


74  PLACENTA.  —  lésioks  syphilitiques. 

mination  de  la  part  qui  revient  à  la  mère  et  au  fœtus  dan.s  les  aflections 
de  ce  genre.  Cette  division  conduisit  Virchow  à  admettre  deux  formes 
d'endométrite  vénérienne  :  la  forme  placentaire  et  la  forme  déciduale. 
L*endométrite  peut  être  simple  et  diffuse  ;  elle  produit  alors  des  épais* 
sisscmenls  et  des  indurations  fibreuses  qui  déterminent  l'atrophie  des 
villosités;  lorsque  au  contraire  elle  est  circonscrite,  elle  donne  lieu  à 
des  proliférations  présentant  parfois  les  caractères  des  papules  et  des 
condylômes.  Ces  tumeurs  circonscrites  noueuses  partent  du  placenta 
maternel  et  pénètrent  profondément  dans  le  placenta  fœtal  ;  elles  sont  for^ 
mées  de  deux  couches,  une  périphérique,  dense,  grisâtre,  Tautrc  centrale, 
jaunâtre,  caséiforme.  D'après  Vcrdicr  (Paris,  1868),  le  caractère  distinctif 
de  la  syphilis  placentaire  est  l'inflammation  des  branches  des  artères  om- 
bilicales avec  épaississement  et  oblitération  consécutive.  Uennig  considère 
comme  des  gommes,  ces  nodosités  formées  par  les  artères  oblitérées.  Enfia 
Charpentier  a  vu  chez  une  femme  syphilitique  un  placenta  pâle  et  mou 
au  point  qu'en  le  lavant  à  Téther  les  capillaires  devenaient  apparents. 

On  voit  qu'il  n'est  presque  pas  d'altération  placentaire  qui  n'ait  été 
observée  dans  des  cas  de  syphilis  congénitale  et  qui  n*ait  été  considérée 
par  les  uns  ou  par  les  autres  comme  étant  de  nature  syphilitique.  Malgré 
les  doutes  qui  peuvent  encore  subsister  sur  la  signification  de  ces  diffé- 
rentes lésions,  Frânkel  (Ai^chiv  fur  Gynœcologie)  a  formulé  quelques 
conclusions  qui,  bien  que  trop  absolues,  méritent  d'être  citées  textuelle- 
ment. 1"  Le  placenta  peut  devenir  malade  par  syphilis,  et  ces  sortes  de 
maladies  sont  reconnaissables  à  des  signes  caractéristiques;  2^ la  syphilis 
placentaire  accompagne  exclusivement  la  syphilis  héréditaire  et  congé- 
nitale du  fœtus  ;  3^  le  siège  de  la  maladie  varie  selon  que  la  mère  reste 
bien  portante  et  que  le  virus  syphilitique  est  communiqué  directement 
au  fœtus  par  le  sperme  ou  que  la  mère  est  devenue  malade  elle-même. 
Dans  le  premier  cas  les  villosités  du  placenta  dégénèrent  dans  leur  partie 
fœtale  et  se  transforment  en  granulations  avec  oblitération  des  vaisseaux, 
souvent  compliquée  d'épaississement  de  la  membrane  épithéliale  des  vil- 
losités. Dans  le  second  cas,  quand  la  mère  est  syphilitique,  ou  elle  a  été 
infectée  en  même  temps  que  le  fruit,  ou  elle  était  syphilitique  antérieure- 
ment, ou  Test  devenue  peu  après  la  conception  ;  alors  le  placenta  peut  rester 
intact  ou  devenir  malade;  dans  ce  dernier  cas  la  forme  de  Taiïection  est 
l'endomélrite  placentaire  gommeuse.  Si  la  mère  n'est  devenue  malade  que 
dans  les  derniers  temps  de  la  grossesse  et  si  le  père  est  bien  portant  au  mo- 
ment de  la  fécondation,  le  fœtus  et  le  placenta  restent  habituellement  sains. 

11  est  inutile  d'insister  sur  les  difficultés  que  présente  encore  aujour- 
d'hui Thistoire  des  altérations  syphilitiques  du  placenta.  La  question  est 
à  l'étude  et  les  travaux  qui  viennent  d'être  signalés  n'auront  pas  peu 
contribué  à  en  rendre  la  solution  plus  facile.  On  peut  se  demander  quelle 
sera  l'utilité  pratique  de  ces  découvertes.  Sous  le  rapport  scientifique  il 
est  sans  doute  intéressant  de  savoir  quelles  sont  les  modifications  qui 
peuvent  survenir  dans  le  placenta  par  l'effet  supposé  du  virus  syphili* 
tique,  mais  l'art  ne  pourra  jpmaiii  intervenir  utilement.   Les   même» 


PLACENTA.    BIBLIOGRAPUIB.  75 

réflexions  s'appliquent  à  toutes  les  altérations  de  structure  du  placenta, 
attendu  que  leur  diagnostic  est  à  peu  près  impossible  et  que  d'ailleurs 
notre  thérapeutique  n'aurait  aucune  action  sur  elles. 

Oumges  généraux  :  Caziaox,  Chailly,  6«  édition,  1878,  Naegele  et  Grenser  traduit  par  Aubenas. 

Pksar»,  5*  édil.,  Ramsbotham,  Scaxzoxi,  Schrocder  tniduit  par  Charpenlier. 
LcE  (Robert],  On  the  structure   of  tiie  human  placenta   and  ils  connection  wit   the   Utérus 

{PkUat.  Traruact.  4852,  extr.  in  Gai.  méd.  de  Paris,  1832). 
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Jacqvkukb,    Recherches   d'anatomie  et  de  physiologie  sur  le   système  vasculaire  sanguin  de 
roléma  humain  pendant  la  gestation  et  plus  pti-ticulièrement  sur  les  vaisseaux  utérins  pla- 
centaires. {Arch.  gén.  de  méd.,  1838.) 
BoxAHT,  Recherches  sur  les  vaisseaux  utéro-placenUires  [Gaz.  méd.  de  Paru,  1840). 
TiuuKuvK,  Mémoire  sur  l'indépendcnce  absolue  de  la  cii*culation  fœtale  d*avec  celle  de  la  mère 

{Gaz.  méd.  de  Paris,  1842). 
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Eugène  Marchal. 


PLAIE.    —   p.    PAR   INSTRUMENTS   TRARCUAMTS.  7? 

PIiAI£.  —  Oq  désigne  sous  le  nom  de  plaie,  toute  solution  de  con- 
tinuité des  tisàus  vivants,  produite  par  une  cause  mécanique  et  ouverte 
à  rextérienr.  Ces  deux  conditions  sont  indispensables.  Pour  qu'il  y  ait 
plaie,  il  faut  que  la  peau  ou  les  muqueuses  exposées  à  Tair  aient  été  in- 
téressées par  la  cause  vulnérante.  Les  luxations,  les  fractures,  les  rup- 
tures des  ligaments  des  tendons  ou  des  muscles  qui  ne  s'accompagnent 
pas  de  lésion  de  U  peau,  sont  des  blessures  et  non  des  plaies.  D'un  autre 
côté,  on  ne  doit  pas  donner  ce  nom  aux  solutions  de  continuité  des  tégu- 
ments  et  des  parties  sous-jacentes,  lorsqu'elles  se  produisent  spontané- 
ment ;  on  les  désigne  sous  le  nom  d'ulcères. 

Ainsi  limité,  le  sujet  que  nous  allons  aborder  est  encore  assez  vaste 

pour  qu'il  soit  indispensable  d  y  établir  des  divisions.  Il  est  impossible 

d'étudier  en  bloc  des  lésions  aussi  complexes  et  aussi  variées.  Lorsqu'on 

veut  se  renfermer  quand  même  dans  un  cadre  de  généralités,  on   se 

résigne  à  tourner,  sans  aucun  profit  pour  le  lecteur,  dans  un  cercle  de 

luinalités  et  d'inexactitudes.  C'est  un  écucil  que  nous  tenons  d'autant 

plus  à  éviter,  que  les   questions  théoriques,  les  seules  qui  se  prêtent 

à  une  étude  d*cnsemble,  ont   déjà  été  traitées  dans  d'autres  articles 

de  ce  Dictionnaire,  ou  le  seront  dans  ceux  qui  n'ont  pas  encore  paru.  Il 

lie  nous  reste  plus  à  aborder  que  le  côté  purement  clinique. 

Les  différences  que  présentent  les  plaies  se  rapportent  à  trois  chefs 
principaux  :  l'étendue  qu'elles  présentent,  le  siège  qu'elles  affectent, 
la  cause  qui  les  a  produites.  De  ces  trois  caractères,  le  dernier  est  celui 
que  tous  les  auteurs  ont  pris  pour  base  de  leurs  classifications,  et  nous 
suivrons  leur  exemple,  en  étudiant  successivement  les  plaies  par  instru- 
ment$  tranchants^  celles  que  produisent  les  instruments  piquants^ 
celles  qui  reconnaissent  pour  cause  l'action  des  corps  contondants^  les 
plaies  par  armes  à  feu^  qui  ne  sont  qu'un  cas  particulier  de  ces  der- 
nières, les  plaies  par  arrachement  et  les  plaies  empoisonnées. 

Quant  aux  plaies  par  écrasement^  par  broiement,  elles  ne  sont 
qu'une  variété  des  plaies  contuses;  les  plaies  par  morsure  rentrent 
également  dans  l'une  des  catégories  précédentes,  selon  l'espèce  à 
laquelle  appartient  l'animal  qui  les  a  faites  et  la  forme  de  sa  denture. 
Dans  l'un  comme  dans  l'autre  cas,  elles  ne  présentent  pas  d'indications 
particulières. 

I.  Plaies  par  instkiimejsts  tranchants.  —  Ce  sont  les  plaies  par  excel- 
lence, celles  qui  ont  servi  de  type  pour  toutes  les  dt'scriptions  générales. 
Les  instruments  qui  les  produisent  sont  :  ou  des  armes  de  guerre,  comme 
les  sabres,  les  haches,  les  yata.^ans,  ou  des  objets  usités  dans  la  vie  domes- 
tique, dans  les  arts  ou  dans  l'industrie,  comme  les  couteaux,  les  rasoirs, 
les  faucilles,  comme  les  scies  à  mouvement  circulaire  ou  les  machines 
qui  servent  à  trancher  le  fer.  Tous  ces  instruments  agissent  de  la  même 
manière  que  les  bistouris  et  les  couteaux  des  chirurgiens,  en  pressant  et 
en  sciant,  et  les  plaies  qu'ils  produisent  sont  d'autant  plus  nettes  que  le 
l<'inchant  est  plus  affilé.  Elles  varient  pour  la  forme,  l'étendue  et  la  pro- 
fondeur, suivant  l'instrument  qui  les  a  faites,  la  force  avec  laquelle  il  a 


78  PLAIE.    —   p.  l'AR   INSTRUMENTS  TRANCHAKTS. 

été  mu,  la  direction  qui  lui  a  été  imprimée  et  la  région  sur  laquelle  il  a 
porté  son  action. 

Les  phénomènes  primitifs  des  plaies  qui  nous  occupent  sont  au  nom- 
bre de  trois  :  la  douleur,  Técoulemeut  du  sang  et  Técartement  des  bords 
de  la  solution  de  continuité.  La  douleur  est  due  à  la  section  des  nom- 
breux filets  nerveux  sensitifs  qui  se  répandent  dans  la  peau  et  dans  les 
tissus  sous-jacents.  Elle  est  d'autant  plus  vive  que  la  solution  de  conti- 
nuité est  plus  étendue  et  la  partie  plus  sensible.  Les  plaies  de  la  face  et 
surtout  des  lèvres,  celles  des  doigts,  de  la  paume  de  la  main,  de  la  plante 
du  pied,  du  pourtour  de  Tanus  sont,  à  dimensions  égales,  plus  doulou- 
reuses que  celles  qui  siègent  dans  d*aulrcs  parties  du  corps,  sur  les  tégu- 
ments du  dos,  ou  à  la  région  externe  des  membres ,  par  exemple.  L'idio- 
syncrasie  du  blessé,  les  conditions  dans  lesquelles  il  se  trouve  placé, 
influent  également  sur  la  somme  de  douleur  qu'il  ressent.  Il  est  des 
sujets  qui  supportent  sans  sourciller  les  blessures  les  plus  douloureuses; 
il  en  est  d'autres  pour  lesquels  l'appréhension  seule  de  la  souffrance  que 
doit  entraîner  une  opération,  devient  une  véritable  torture;  enfin  la  dou- 
leur est  d'autant  moins  vive  que  l'instrument  vulnérant  a  le  tranchant 
mieux  aifilé  et  qu'il  est  mu  avec  plus  de  vitesse.  Tous  les  chirurgiens 
savent  combien  l'ouverture  d'un  panaris,  par  exemple,  est  moins  doulou- 
reuse lorsqu'elle  est  faite  par  un  bistouri  qui  coupe  bien  et  par  une  main 
bien  exercée,  que  lorsqu'un  instrument  ébréché  passe  lentement  et  avec 
hésitation  à  travers  les  tissus.  En  général,  dans  les  plaies  par  coupure, 
la  douleur  est  vive,  mais  elle  s'éteint  promptement,  parce  que  les  filets 
nerveux  ont  été  nettement  et  complètement  tranchés. 

L  écoulement  du  sang  est  constant  à  la  suite  des  plaies  qui  nous  occu- 
pent. Ce  sont  celles  qui  saignent  le  plus  abondamment  et  Thémorrhagie  y 
est  en  rapport  avec  la  profondeur  et  l'étendue  de  la  blessure.  Toutefois, 
lorsqu'elle  provient  de  capillaires  ou  de  vaisseaux  artériels  et  veineux 
d'un  petit  calibre,  elle  s'arrête  d'elle-même,  sous  l'influence  de  l'air 
froid  ou  du  simple  rapprochement  des  parties.  Il  n'en  est  plus  ainsi,  lors- 
qu'une artère  d'un  certain  volume  a  été  intéressée,  lorsqu'un  gros  tronc 
veineux  a  été  ouvert.  Dans  ce  cas,  la  vie  du  blessé  peut  être  rapidement 
compromise  et,  dans  les  conditions  les  plus  favorables,  cette  hémorrhagie 
constitue  une  complication  sérieuse  qui  fait  surgir  des  indications  spéciales 
(Voy.  Artères,  Plaies,  t.  III,  p.  168). 

L  ccartement  des  bords  est  un  phénomène  particulier  aux  plaies  par 
instruments  tranchants.  Il  est  produit  par  l'élasticité  des  tissus  divisés  et 
par  la  contraction  des  muscles,  loraquo  ceii>xi  ont  été  intéressés.  L'élas- 
ticité de  tissu,  considérable  dans  la  peau,  assez  prononcée  dans  les 
artères,  est  moindre  dans  le  tissu  cellulaire,  nulle  dans  les  nerfs  et  à 
peine  appréciable  dans  les  tissus  fibreux.  La  contraction  musculaire,  au 
contraire,  est  extrêmement  énergique.  Irrésistiblement  provoquée  par 
l'excitation  que  produit  la  section  des  fibres  charnues,  elle  est  brusque, 
soudaine  et  cesse  avec  le  stimulant  qui  Ta  produite;  mais  la  contracti- 
lité  inhérente  au  tissu  musculaire  se  manifeste  alors,    agit  lentement, 


PLAIE.    —   p.  PAR   INSTRUMENTS  TRANCHANTS.  79 

maisd*ane  manière  incessante  et  maintient  Técarlementdes  bords  delà 
plaie  jusqu'à  ce  que  la  cicatrisation  ait  rétabli  la  conlinuité  des  fibres 
dmsées  et  que  la  rétractilité  du  tissu  inodulaire  en  ait  rapproché  les 
extrémités.  Lorsque  des  muscles  volnminenx  ont  ôté  divisés  dans  toute 
leur  épaisseur,  Técartement  des  lèvres  de  la  solution  de  continuité  est 
considérable.  Nous  nous  souvenons  d'avoir  donné  des  soins  à  une  jeune 
paysanne  qui  avait  eu  tous  les  muscles  du  mollet  coupes  en  travers  par 
une  faucille  ;  le  tranchant  de  l'instrument  n'avait  été  arrêté  que  par  les 
os  et  l*artère  tibiale  postérieure  était  ouverte  au  fond  de  cette  vaste 
plue,  dont  les  bords  étaient  écartés  par  une  intervalle  de  plus  de  douze 
centimètres.  Il  ne  nous  fut  pas  difficile  de  découvrir  et  de  lier  les  deux 
bouts  du  vaisseau;  mais,  pour  rapprocher  les  deux  surfaces  traumatiques, 
il  fallut  mettre  le  pied  dans  l'extension  et  fléchir  la  jambe  sur  la  cuisse. 
La  réunion  se  fit  alors  sans  trop  de  difficultés  et  la  malade  guérit  rapide- 
ment. Dans  certaines  régions ,  les  mouvements  viennent  encore  aug- 
menter cet  éearlement.  C'est  ainsi  que,  dans  les  plaies  transversales  de  la 
partie  antérieure  du  cou  qu'on  observe  à  la  suite  des  tentatives  de  sui- 
cide, la  mobilité  de  la  peau,  la  contraction  des  muscles  longs  et  grêles 
qu'elle  recouvre,  l'élasticité  de  la  tracliéc  produisent  déjà  un  écartement 
considérable,  mais  il  devient  c(fra\ant,  lorsqu'on  porte  la  tête  du  blessé 
en  arrière. 

Le  pronostic  des  plaies  par  instruments  tranchants  dépend  surtout  de 
leur  profondeur.  Lorsque  la  peau  ^eule  e^t  intéressée,  ce  sont  des  lésions 
iasignifiantes  ;  la  section  des  muscles  n'ajoute  pas  sensiblemont  à  leur 
gravité,  celle  des  tendons  ou  des  nerfs  peut  compromettre  plus  tard  les 
(onctions  de  la  région  blessée,  la  lésion  des  artères  expose  à  des  dangers 
que  nous  avons  indiqués  déjà,  mais  l'ouverture  des  articulations  et  celle 
des  cavités  splanchniques  e^t  bien  autrement  redoutable.  Les  plaies  péné- 
trantes de  ces  cavités  sont  plus  rarement  produites  par  les  instruments 
tranchants  que  par  les  armes  piquantes  et  par  les  projectiles,  cependant 
il  n'est  pas  rare  de  voir  l'articulation  du  genou  ouverte  par  un  coup  de 
'nache  ou  par  un  coup  de  faucille  ;  celle  du  coude-pieJ  est  souvent  blessée 
par  l'outil  de  charpentier  qui  porte  le  nom  à'hermineUey  et  le  coude  lui- 
même  Test  quelquefois  par  un  coup  de  sabre.  Les  plaies  nettes  et  large- 
ment béantes  qu'on  observe  en  pareil  cas,  sont  moins  graves  que  les 
blessures  sinueuses  faites  par  les  instruments  piquants,  que  les  plaies 
causées  par  les  projectiles  de  guerre  (Voy.  Articulations,  Plaies^  t.  III, 
p.  306).  Les  cavités  splanchniques  sont  rarement  atteintes  par  les  instru- 
mcDt^  tranchants.  Les  coups  de  sabre  assez  vigoureusement  assénés  pour 
fendre  le  crâne  et  atteindre  le  cerveau,  ne  s'observent  guère  aujourd'hui  ; 
la  poitrine  et  l'abdom^'n  sont  encore  moins  exposés  à  ce  genre  de  bles- 
sures; on  ne  les  rencontre  guère  que  dans  les  grands  ateliers  et  par  l'ef- 
fet des  machines  dont  nous  avons  parlé.  C'est  ainsi  que  nous  avons  eu 
l'occasion  de  voir,  à  l'hôpital  de  Brest,un  ouvrier  do  l'arsenal  qui,  en 
passant  le  bras  au-dessus  d'une  scie  circulaire,  avait  été  entraîné  par  son 
vêlement  et  était  tombé  en  travers  sur  la  lame  dentée,  pendant  qu'elle 


80  PLAIE.    p.    TAR    IMSTRUMËMS    flQUAIITS. 

faisait  cinq  cents  tours  à  la  minute.  Les  parois  abdominales  ayaient 
été  tranchées  d'un  hypochondre  à  l'autre,  les  cai'tilages  costaux  du  côté 
droit  avaient  été  coupés  et  le  foie  proloudément  labouré  par  les  dents 
de  l'appareil;  le  malheureux  ne  mourut  qu'onze  heures  après  son 
accident. 

Le  traitement  des  plaies  par  instrument  tranchant  consiste  à  les  net- 
toyer avec  soin,  à  mettre  la  partie  dans  le  relâchement  et  à  rapprocher  les 
bords  delà  solution  de  continuité.  Avant  de  les  réunir,  le  chirurgien  doit 
s'assurer  que  tout  écoulement  de  sang  a  cessé.  S'il  aperçoit,  sur  une  des 
surfaces  traumatiques,  un  endroit  qui  saigne  encore,  s'il  y  voit  se  pro- 
duire une  petite  pulsation,  ou  s'il  s'en  échappe  un  mince  filet  de  sang 
rouge,  il  doit  saisir  avec  des  pinces  à  artères  le  point  qui  donne,  le  sou- 
lever légèrement  et  l'entourer  d'une  ligature.  C'est  encore  le  plus  sûr  et 
le  meilleur  de  tous  les  moyens  hémostatiques. 

Les  plaies  par  instruments  tranchants  doivent  toujours  être  réunies  par 
première  intention.  Ce  sont  même  les  seules  qui  comportent  ce  mode  de 
traitement  et  il  leur  est  partout  applicable,  même  au  cuir  chevelu  pour 
lequel  on  a  voulu  faire  une  exception.  Il  est  bien  entendu  que  nous  ne 
parlons  pas  des  cas  où  Ton  se  trouve  obligé  d'agir  dans  l'atmosphère  viciée 
d'un  hôpital  insalubre  Ceux  qui  pratiquent  dans  de  semblables  milieux 
font  comme  ils  peuvent,  mais  il  ne  faut  pas  ériger  ces  pratiques  de  né- 
cessité en  règle  générale.  Nous  avons  réuni  et  vu  réunir  par  la  suture  un 
bien  grand  nombre  de  plaies  de  tète,  car  ce  sont  les  lésions  les  plus  com- 
munes à  bord  des  navires  et  dans  nos  hôpitaux,  jamais  nous  n'avons  eu  à 
nouseniepentir  et  lescas  dans  lesquels  nous  avons  vu  survenir  des  érysi- 
pèles  sont  tellement  rares  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'en  tenir  compte.  La  réu- 
nion s'opère  à  la  faveur  des  bandages  unissants,  des  aggiutinatil's  et  des  su- 
tures. C'est  à  ce  dernier  moyen  que  nous  donnons  la  préièrcnce  toutes  les 
fois  que  la  plaie  a  une  certaine  étendue.  Dans  le  cas  contraire,  une  ou 
deux  bandelettes  de  diachylum  peuvent  sufiire  pour  en  rapprocher  les 
bords  ;  parfois  même  dans  les  cas  les  plus  simples,  on  se  contente  de  re- 
couvrir la  petite  solution  de  continuité  avec  une  mouche  de  tafletas  d'An- 
gleterre. Nous  ne  nous  étendrons  pas  sur  ces  moyens  de  réunion,  ni  sur 
le  pansement  qui  les  complète,  parce  que  ces  sujets  ont  déjà  été  traites 
dans  d'autres  articles.  (Voy.  AGGLUTiKATiFs,t.  I,  p.  427.  Painsememts,  t.  XXV, 
p.  729.  SuTiREs.)  Nous  garderons  le  même  silence  et  pour  le  mcnic  motif, 
au  sujet  des  phénomènes  consécutifs  de  l'évolution  des  plaies  et  de  leur 
mode  de  cicatrisation,  {yoy.  Cicatrices,  Cicatrisatiom,  t.  VII,  p.  587.) 

II.  Plaies  par  instruments  piquants.  —  Les  corps  vulnérants  qui  dé- 
terminent ce  genre  de  plaies  sont  encore  plus  variés  que  ceux  dont  nous 
nous  sommes  occupé  précédemment.  Elles  peuvent,  en  efiet,  être  pro- 
duites par  tout  objet  muni  d'une  pointe  assez  résistante  pour  pénétrer 
dans  nos  tissus.  Dans  cette  catégorie  nombreuse,  on  trouve  des  armes 
comme  la  baïonnette,  la  lance,  l'épée,  le  fleuret,  le  stylet,  le  poignard, 
des  instruments  usuels  tels  que  les  couteaux,  les  canifs,  les  ciseaux,  les 
poinçons,  les  compas  de  menuisier,  des  corps  variés  connue  les  clous, 


PLAIE.    p.    PAR  INSTRUMENTS    PIQUA?STS.  81 

les  fragments  d'os,  de  verre,  de  bois,  etc.  Nous  ne  citons  que  pour  mé- 
moire les  instruments  de  chirurgie,  comme  les  aiguilles  à  acupuncture,  les 
trocarts^  les  aiguilles  tubulées. 

Les  instruments  piquants  n^agissent  pas  tous  de  la  même  manière, 
les  uns    ne  sont  ofTensifs  que  par  leur  pointe;  dans  les  autres,  cette 
pointe  fait  suite  à  une  lame  tranchante  qui  facilite  sa  pénétration.  Les 
premiers  entrent  dans  nos  tissus  en  écartant  les  fibres  qui  en  constituent 
la  trame,  et,  lorsqu'ils  sont  extrêmement  déliés,  ils  peuvent  arriver  à  des 
profondeurs  considérables  sans  causer  une  vive  douleur  et  presque  sans 
effusion  de  sang.  Les  aiguilles  à  acupuncture,  les  aiguilles  tubulées  dont 
on  se  sert  pour  les  ponctions  capillaires,  sont  le  type  de  ces  corps 'acérés 
qui  peuvent  traverser  des  couches  épaisses  de  parties,  pénétrer  même  dans 
les  grandes  cavités  de  Téconomie  sans  y  causer  de  désordres  sérieux,  lors- 
<qu*i\s  sont  conduits  par  une  main  prudente  et  exercée.  Les  corps  plus 
"%rolumineux,  tels  que  les  poinçons,  les  épées  triangulaires,  les  fleurets 
^guises,  agissent  de  la  même  façon;  mais  ils  ne  sont  pas  aussi  inoffensifs. 
Mis  écartent  violenunent  les  fibres  ;  le  trajet  qu'ils  se  creusent  est  accom- 
-pagné  d'un  certain  état  de  déchirure  et  de  contusion,  d'une  douleur  parfois 
Crès-vive  et  d'un  léger  écoulement  de  sang  qui  s'arrête,  il  est  vrai,  le  plus 
souyent  de  lui-même.  Nous  ne  parlons  pas  du  cas  où  un  gros  tronc  ner- 
veux, artériel  ou  veineux,  a  été  intéressé,  parce  que  nous  reviendrons  plus 
tard  sur  les  complications  de  cette  nature. 

Les  corps  vulnérants  qui  agissent  à  la  fois  par  la  pointe  et  par  la  lame, 
les  sabres,  les  couteaux,  les  canifs,  produisent  des  plaies  analogues  à 
celles  que  font  les  instruments  tranchants,  mais  qui  en  diffèrent  en  ce 
qu  elles  s'étendent  surtout  en  profondeur.  Ces  blessures  sont  souvent  dou- 
loureuses et  saignent  parfois  assez  abondamment.  Leur  forme  est  en  rap- 
port avec  celle  de  l'instrument  qui  les  a  faites.  Elle  diiîère  suivant  que 
sa  pointe  est  supportée  par  une  lame  à  un  ou  deux  tranchants  ;  mais  ce 
geare  de  considérations  n'intéresse  que  la  médecine  légale,  et  ce  sujet 
sera  traité  plus  loin.  Enfin,  il  est  des  corps  vulnérants  à  pointe  obtuse 
qui  ne  pénètrent  qu'à  la  condition  d'être  poussés  avec  force.  Tel  est  le 
cas  de  la  lance  et  de  la  baïonnette,  auxquelles  le  poids  de  la  hampe  ou  du 
fusil  permet  d'imprimer  une  impulsion  considérable.  Ces  blessures,  ainsi 
que  celles  qu'on  observe  à  la  suite  de  chutes  laites  sur  des  pieux,  dos 
échalas,  sur  des  grilles  de  fer,  sont  toujours  fortement  contuscs  et,  en 
{ènéral,  d'un  pronostic  sérieux. 

Les  plaies  par  piqûre,  étant  surtout  caractérisées  par  leur  éti^oitesse  et 
leur  profondeur,  ne  présentent  pas  cet  écartement  des  bords  qui  forme 
le  tnil  particulier  des  blessures  que  nous  avons  précédemment  étudiées. 
Saut  dans  quelques  cas  rares  oii  un  corps  d'un  volume  considérable, 
animé  d'une  grande  force  d'impulsion,  a  creusé,  en  quelque  sorte,  un 
puits  an  milieu  des  tissus,  les  bords  de  la  plaie  se  rapprochent  d'eux- 
mêmes  aussitôt  que  l'instrument  vulnérant  en  a  été  retiré. 

Les  plaies  par  instruments  piquants  sont,  en  général,  plus  graves  que 
celles  que  produisent  les  instruments  tranchants;  mais  cela  ne  tient  |ia8, 

5OTT.  IMCT.  HiD.  ET  CHIB.  XXVIII  —  6 


82  PLAIE.  —  p.    PAR   INSTRUMENTS   PIQUAITTS. 

comme  on  le  croyait  autrefois,  à  leurTormeet  à  leur  étroitesse.  Les  anciens 
chirurgiens  les  redoutaient  à  cause  delà  difficulté  que  leur  disposition  op- 
pose à  récoulement  des  liquides.  Ils  pensaient  que  l'afQux  des  humeurs- 
devait  fréquemment  amener  la  formation  d'abcès  profonds,  d'infiltrations 
et  de  fusées  purulentes,  que  leur  rétention  provoquait  l'étranglement  et^ 
par  suite,  des  douleurs  violentes,  parfois  même  le  tétanos  ou  la  gangrène. 
Ces  accidents  se  produisaient,  en  effet,  assez  sou  vent  sous  leurs  yeux,  mais 
ils  étaient  dus  aux  moyens  qu'ils  employaient  pour  les  prévenir.  Au  lien 
de  respecter,  comme  on  le  fait  aujourd'hui,  le  trajet  de  la  blessure,  ils  y 
introduisaient  des  sondes  pour  l'explorer,  des  mèches,  des  tentes  pour  le 
dilater  et  pour  empêcher  l'accumulation  des  humeurs  ;  ils  s'opposaient 
ainsi  à  la  réunion  par  première  intention  qu'on  voit  survenir  le  plus  sou- 
vent, quand  la  plaie  est  exempte  de  complications  et  qu'on  l'abandonne  i 
elle-même.  Depuis  Belloste,  on  a  renoncé  à  ces  pratiques  et,  peu  à  peu,  le 
préjugé  qu'elles  entretenaient  a  cessé  de  régner.  Malgaigne  avait  déjà  fiiit 
ressortir  l'innocuité  des  piqûres  faites  par  le  trocart  et  la  promptitude 
avec  laquelle  elles  se  cicatrisent  ;  les  opérations  sous-cutanées  ont  porté  le 
deniier  coup  à  l'opinion  que  nous  combattons.  On  a  vu  des  tçnotomislei^ 
diviser,   dans  la  même  séance,  une  foule  de  tendons  et  de  faisceaux 
musculaires,  pratiquer  sous  la  peau  des  incisions  de  plusieurs  décimè- 
tres, léser  inévitablement,  en  passant,  nombre  de  petits  vaisseaux  et  de 
filets  nerveux,  sans  que  le  moindre  accident  en  ait  été  la  suite.  Jul» 
Guérin  a  communiqué  à  l'Académie  des  sciences,  le  31  août  1840,  l'ob- 
servation d'un  malade  chez  lequel  il  avait  pratiqué,  le  mémo  jour,  b 
section  sous-cutanée  de  quarante-deux  muscles  y  tendons  ou  ligameniSy 
pour  remédier  à  une  difformité  articulaire.  Le  malade  n'avait  pas  pro- 
féré une  plainte  pendant  le  cours  de  cette  opération,  qui  n'avait  pas  duré 
moins  d'une  heure,  et  le  cinquième  jour  toutes  les  plaies  étaient  cicatri- 
sées. De  pareilles  hardiesses  prouvent  au  moins  l'innocuité  des  plaie» 
faites  par  les  instruments  piquants,  quelque  anfractueuses,  quelque  ét^i- 
ducs  qu'elles  soient  dans  leur  profondeur,  à  la  condition  que  fouver-    | 
ture  faite  à  la  peau  soit  petite  et  qu'on  la  ferme  sur-le-champ.  La  péné-    j 
tration  de  l'air  est,  en  effet,  le  seul  obstacle  à  ^a  réunion  et  à  la  cieatri-    j 
sation  immédiate  des  tissus  divisés  ;  c'est  sa  présence  qui  enflamme  leB^    | 
plaies,  et  nous  ne  comprenons  pas  que  ce  fait  si  simple  et  pour  nous  n    ; 
évident  ait  pu  donner  naissance  à  tant  de  contestations. 

Le  contact  de  l'air  atmosphérique  est  fatal  aux  tissus  vivants  ;  partout  | 
où  ce  conflit  doit  s'établir  la  nature  a  mis  une  barrière  :  l'épiderme  pour  , 
la  peau,  l'épithélium  pour  les  muqueuses;  quand  cette  enveloppe  est 
détruite,  une  douleur  cuisante,  une  inflammation  vive,  se  manifestent  i 
l'instant  sur  les  parties  dénudées.  C'est  ce  qui  se  produit  lorsqu'on 
enlève  l'épiderme  à  la  surface  d'un  vésicatoirc  ou  d'une  brûlure  au  second 
degré.  La  chimie  nous  enseigne  que  tous  les  liquides  organiques  restent 
immuables  dans  leur  composition  tant  qu'ils  sont  contenus  dans  dsi 
cavités  closes,  qu'ils  s'altèrent  et  se  décomposent  aussitôt  qu'ils  ont  le 
contact  de  l'air.  Les  fractures,  les  luxations,  s'accompagnent  de  délabra- 


»  PliAlË.   p.    PAR    IKSTRUMEKTS   PIQUANTS.  85 

ments  très-étendus,  et  cependant  lorsque  la  peau  est  intacte,  les  phéno- 
mènes de  réparation  s'accomplissent  sans  accident  sous  cet  abri  protec- 
teur, et  les  infiltrations  sanguines  se  résorbent  sans  que  l'inflammation 
intervienne,  sans  qu'il  se  forme  une  goutte  de  pus.  Les  plaies  faites  par 
les  instruments  piquants  ne  sont  donc  pas  dangereuses  par  le  fait  seul  de 
leur  étroitesse  et  de  leurs  sinuosités  ;  lorsqu'elles  sont  simples,  il  suffit 
de  les  respecter  et  d'en  fermer  l'ouverture,  pour  obtenir  une  prompte 
guérison  ;  mais  une  foule  de  causes  peuvent  en  changer  les  conditions  et 
aggrater  le  pronostic. 

Nous  n'avons  parlé  jusqu'ici  que  de  plaies  nettes,  franches,  exemptes 
de  corps  étrangers;  mais  les  instruments  vulnérants  sont  souvent  de 
forme  irrégulière;  ils  présentent  des  aspérités  qui  déchirent  les  tissus, 
au  lieu  de  les  écarter,  comme  les  aiguilles,  ou  de  les  diviser  nettement, 
comme  les  ténotomes  :  parfois  ils  sont  recouverts  de  matières  irritantes, 
qu'ils  introduisent  avec  eux  et  qu'ils  déposent  au  fond  des  plaies  ;  ils  peu- 
vent même  être  imprégnés  de  substances  toxiques  ou  virulentes,  vt  nous 
aurons  l'occasion  de  revenir,  plus  tard,  sur  ces  plaies  empoisonnées  : 
pour  le  moment,  nous  n'envisageons  que  le  cas  où  la  piqûre  a  été  faite 
par  un  corps  hérissé  d'aspérités  ou  malpropre,  et,  dans  ces  conditions, 
il  n*est  pas  rare  de  voir  la  plaie  s'enflammer.  Si  elle  est  superficielle,  si 
elle  siège  dans  des  parties  peu  sensibles,  il  n'en  résulte  qu'un  retard 
pour  la  guérison  ;  mais  il  n'en  est  plus  ainsi  lorsque  la  région  intéressée 
est  très-vivante,  très-vasculaire,  et  qu'elle  présente  des  plans  fibreux, 
résistants.  On  sait  combien  les  panaris  sont  fréquents  à  la  suite  des  piqûres 
aux  doigts,  et  chacun  connaît  les  dangers  que  présentent  les  phlegmons 
profonds  de  la  paume  de  la  main,  lorsqu'ils  surviennent  dans  les  mêmes 
circonstances  (Voy.  Main  (Phlegmon  de  la),  t.  XXI,  p.  336).  La  plante 
du  pied  est  souvent  le  siège  des  mêmes  lésions,  chez  les  gens  qui  mar- 
chent sans  chaussures.  C'est  habituellement  un  fragment  de  verre,  un 
clou  ou  une  écharde  qui  cause  la  blessure  ;  cet  accident  est  commun  à 
bord  des  navires,  et  il  a  parfois  des  conséquences  sérieuses,  sans  présen- 
ter cependant  la  même  gravité  qu'à  la  paume  de  la  main.  Nous  n'insis- 
terons pas  sur  la  marche  de  ces  complications,  qui  ont  été  décrites  dans 
d'autres  articles. 

Les  régions  dont  nous  venons  de  parler  sont  celles  qui  réalisent  au 
plus  haut  degré  les  conditions  anatomiques  propres  à  faire  éclater  l'in- 
flammation et  même  l'étranglement,  à  la  suite  des  piqûres  ;  mais  il  est 
d'autres  points  de  l'économie  où  le  pronostic  de  ces  lésions  emprunte 
également  un  certain  caractère  de  gravité  aux  tissus  qui  s'y  rencontrent: 
ainsi  la  blessure  des  gaines  tendineuses  peut  occasionner  des  inflamma- 
tions diffuses  d'un  caractère  sérieux  ;  celle  des  nerfs,  indépendamment 
de  la  douleur  vive  qui  en  est  la  suite,  cause  souvent  une  paralysie  par- 
tielle ;  lorsqu'elle  renferme  un  corps  étranger,  elle  expose  à  des  névi  al- 
gies persistantes  et  détermine  parfois  des  convulsions  épileptiforraes, 
précédées  d'une  aura  qui  part  de  la  cicatrice;  dans  des  cas  rares,  enfin, 
on  voit  survenir  le  tétanos  traumatique  lui-même.  La  lésion  des  vaisseaux 


84  PLAllii.   —    p.   PAR   LNSTRUUENTS   PIQUANTS. 

sanguins  peut  occasionner  la  mort  immédiate,  si  le  tronc  est  assez  vo- 
lumineux, la  formation  d*un  ancvrysme  faux  primitif,  circonscrit  ou 
artérioso-veineux,  suivant  le  calibre,  le  siège  et  les  rapports  des  vais- 
seaux intéressés  ;  enfin  l'ouverture  des  articulations,  celle  des  cavités 
splanchniques,  sont  suivies  d'accidents  très-graves  dont  la  description 
ne  saurait  trouver  place  dans  un  article  de  généralités. 

Les  corps  étrangers  qu'on  rencontre  dans  les  plaies  qui  nous  occupent 
sont  nécessairement  d'un  petit  volume.  Ce  sont  des  aiguilles,  de  petits 
éclats  de  bois,  des  hameçons,  des  épines,  etc.  Pour  qu'on  y  trouve  des 
pointes  d'épée,  de  poignard  ou  de  couteau ,  il  faut  que  ces  armes  aient 
rencontré  une  résistance  osseuse  contre  laquelle  elles  sont  venues  se  bri- 
ser. Dans  ce  cas,  le  fragment  détaché  est  solidement  enfoncé  dans  le  tissu 
osseux. 

Le  traitement  des  plaies  par  instruments  piquants  comporte  la  même 
indication  que  celui  des  plaies  par  instruments  tranchants.  Quels  quesoient 
la  profondeur  et  le  sioge  de  la  blessure,  il  faut  en  fermer  Torifice.  Cette 
règle  est  d'autant  plus  absolue  que  les  parties  intéressées  sont  plus  im- 
portantes et  le  pronostic  plus  sérieux.  Elie  ne  comporie  qu'une  seule 
exception,  c'est  le  cas  où  le  corps  vulnérant  est  rCdté  dans  la  plaie.  Il  faut 
alors  en  pratiquer  immédiatement  l'extraclion.  S'il  y  a  des  doutes,  le 
chirurgien  doit  s'enquérir  des  commémoratifs,  s'informer  près  du  blessé 
ou  des  personnes  présentes  de  la  direction  de  l'instrument  vulnérant  et 
de  la  profondeur  à  laquelle  il  a  pénétré.  Il  doit  se  le  faire  représenter, 
quand  la  chose  est  possible,  afin  de  s'assurer  si  la  pointe  est  intacte. 

Lorsque  cette  source  d'informations  vient  à  manquer,  il  devient  néces- 
saire de  sonder  la  plaie  avec  ménagement,  mais  avec  persistance,  jusqu'à 
ce  que  ce  point  de  diagnostic  soit  bien  établi.  Dans  la  grandi;  majorité 
des  cas,  les   corps  étrangers  abandonnés  dans  les  plaies  déterminent 
une  inflammation  suppurative;  c'est  la  règle  pour  les  petits  éclats  de 
bois  engagés  sous  les  ongles,  pour  les  épines  profondément  enfoncées 
dans  les  tiïisus.  Nous  avons  vu  survenir  un  phlegmon  sous-aponévrotique 
des  plus  graves  chez  un  jeune  homme  qui  s'était  enfoncé  une  épine  de 
prunier  sauvage  dans  le  mollet,  en  traversant  un  buisson.  Le  corps  étran- 
ger avait  été  méconnu  au  moment  de  l'accident,  et  ne  fut  expulsé  que 
quinze  jours  après,  avec  la  suppuration  abondante  à  laquelle  de  larges 
incisions  donnèrent  issue.  Les  fragments  de  verre,   les  pointes  de  cou- 
teau, de  poignard  ou  d'épée,  sont  plus  facilement  tolérés  que  les  petits 
corps  de  nature  végétale.   Les  exemples  en  sont  assez  communs  à  la 
suite  des  plaies  de  tcte.  On  en  trouve  un  des  plus  remarquables  dans 
le  Traité  des  blessures  par  armes  de  guerre  de  Hupuylren.  Il  y  est  ques- 
tion d'un  jeune  homme  qui  entra  dans  son  service,  à  l'IIôtel-Dieu,  pour 
des  douleurs  de  tcte  localisées  sous  une  ancienne  cicatrice  du  cuir  che- 
velu, résultant  d'un  coup  de  couteau  reçu  quelques  années  auparavant 
dans  une  rixe.  En  palpant  la  cicatrice,  Dupuytren  sentit  qu'elle  était 
voulevée  par  un  corps  étranger;  une  incision  mit  à  découvert  la  pointe 
du  couteau  enroncée  dans  le  crâne.  L'extraction  en  fut  pratiquée  à  l'aide 


PLAIE.    —   p.    PAR    IKSTnUMESTS   PIQUANTS.  85 

du  trépan,  mais  les  accidents  persistèrent  ;  il  s*y  joignit  une  hémiplégie 
du  côté  opposé.  Dupuytren  incisa  d'abord  la  dure-mè[*e  et  n'obtint  aucun 
résultat  ;  il  enfonça  doucement  alors  le  bistouri  dans  la  substance  céré- 
brale; un  flot  de  pus  s'en  échappa,  tous  les  accidents,  fièvre,  délire,  som- 
nolence, cessèrent  comme  par  enchantement,  et  le  malade  guérit.  En 
laissant  de  côté  ce  qu'il  peut  y  avoir  de  suspect  dans  le  résultat  merveil- 
leux de  cette  opération,  il  n'en  reste  pas  moins  le  fait  d'une  pointe  de 
couteau  enfoncée  dans  le  crâne  et  y  séjournant  pendant  de  longues 
années,  sans  produire  d'accidents  inflammatoires. 

Une  observation  plus  surprenante  encore  est  celle  qu'on  trouve  citée 
d'une  manière  inexacte  dans  tous  les  traités  classiques  de  pathologie 
externe,  et  que  Berchon  a  rétablie,  pièces  en  main  (1861).  C'est  le  fait 
d'un  forçai  du  bagne  de  Rochefort,  qui  a  porté  pendant  de  longues 
années,  dans  la  poitrine,  un  fragment  d*épée  de  83  millimètres  de  lon- 
gueur, enclavé  entre  la  première  et  la  quatrième  côte  gauche,  traver- 
sant de  part  en  part  la  tctc  de  celle-ci  et  Tapophyse  transverse  de  la  ver- 
tèbre correspondante.  Nous  avons  eu  souvent  l'occasion  d'examiner  la 
pièce  anatomique,  dans  le  musée  de  l'École  de  médecine  navale  de  Ro- 
chefort. Ce  sont  là,  il  faut  le  dire,  des  cas  exceptionnels. 

Lorsque  le  corps  étranger  n'a  pas  été  extrait,  il  détermine,  leplussou- 
Tent«  une  suppuration  de  longue  durée.  La  plaie  reste  Gstuleusc,  elle  se 
ferme  et  se  rouvre  tour  à  tour,  puis  le  trajet  finit  par  s'indurer  et  la 
guérison  ne  s'obtient  que  lorsque  l'expulsion  du  corps  étranger  a  été 
opérée  par  les  efforts  de  la  nature  ou  par  la  main  du  chirurgien.  Parfois, 
après  cire  resté  longtemps  inoffensif,  il  provoque  tout  à  coup  une  inflam- 
mation suivie  d'un  abcès  dans  le  foyer  duquel  on  le  trouve  en  liberté. 
Pour  éviter  ces  accidents,  il  faut  donc  procéder  à  l'extraction  toutes  les 
fois  qu'elle  est  possible.  Ce  n'est  pas  toujoui^  sans  difficultés  qu'on  y 
parvient,  et  les  corps  de  petite  dimension  ne  sont  pas  ceux  qui  en  pré- 
sentent le  moins.  Les  fragments  d'aiguilles  enfoncés  sous  les  téguments 
demandent  parfois  d'assez  longues  recherches  et  sont  difficiles  à  saisir, 
les  échardes  échappent  aux  pinces ,  se  brisent  ou  se  morcellent  sous  leur 
pression,  et  il  est  souvent  nécessaire  de  pratiquer  une  petite  incision 
pour  les  dégager  de  leur  trajet.  Les  hameçons  sont  d*une  extraction  plus 
laborieuse  encore.  Lorsqu'on  cherche  à  les  retirer  par  leur  ouverture 
fenfrée,  le  crochet  dont  ils  sont  munis ,  sur  leur  concavité ,  s'enfonce 
dans  les  tissus  et  oppose  un  obstacle  absolument  invincible.  Il  faut 
recourir  au  procédé  qu'on  employait  autrefois  pour  extraire  les  flèches 
barbelées  ;  il  faut  pousser  Thamc^^on  dans  la  direction  suivant  laquelle  il 
est  entré,  lui  faire  continuer  son  trajet  curviligne  et  en  faire  sortir  la 
pointe,  en  traversant  la  peau  de  dedans  en  dehors.  Lorsque  l'extrémité 
est  dégagée,  on  la  coupe  avec  des  tenailles  incisives  et  le  reste  de  la  tige 
se  retire  sans  difficulté  par  l'ouverture  d'entrée.  Quand  le  corps  étranger 
e«t  solidement  implanté  dans  le  tissu  osseux,  lorsque  la  pointe  d'un  cou- 
teau, par  exemple,  s'est  brisée  dans  l'épaisseur  du  crâne  et  ne  donne  pas 
de  prise  à  l'extérieur,  il  devient  nécessaire  d'appliquer  une  couronne  de 


86  PLAIE.  p.    PAR   INSTRUMENTS    PIQUANTS. 

trépan  pour  l'extraire.  C'est  ce  que  fit  Dupuytren,  dans  le  cas  que  nous 
avons  rapporté  plus  haut.  Yelpeau,  dans  sa  Médecine  opératoire,  cite  un 
fait  où  l'extraction  d'un  corps  étranger  fut  entourée  de  difficultés  insur- 
montables. Il  s'agissait  d^une  baguette  de  fusil  qu'un  officier  de  la  garde 
nationale  de  Paris  avait  reçue  dans  le  dos,  pendant  un  exercice  à  feu. 
Cette  tige  de  fer  était  si  solidement  fixée  dans  la  vertèbre  qu'elle  avait 
traversée,  qu^il  fut  impossible  de  l'arracher.  Velpeau  fit  construire,  par 
Charrière,  un  instrument  spécial  pour  la  retirer;  mais  le  blessé  succomba 
dans  l'intervalle  et  c'est  sur  le  cadavre  seulement  qu*on  put  en  faire 
l'application.  Les  observations  de  corps  étrangers  retenus  dans  les  tissus 
étaient  beaucoup  plus  fréquentes  autrefois,  alors  qu*on  combattait  surtout 
à  l'arme  blanche.  Ambroise  Paré  entre  dans  de  longs  détails  au  sujet  de 
leur  extraolion  et  cite,  à  cette  occasion ,  la  blessure  reçue  devant  Boulo- 
gne par  le  duc  de  Guise.  La  pointe  de  la  lance,  entrée  au-dessous  de 
l'œil  droit,  était  sortie  entre  la  nuque  et  l'oreille;  elle  s'était  rompue; 
le  fer  et  une  partie  du  bois  étaient  restés  dans  la  plaie  ;  il  fallut,  pour 
l'extraire,  employer  une  grande  force  et  recourir  à  des  tenailles  de  maré- 
chal, ce  qui  n'empêcha  pas  la  guérison  d'avoir  lieu. 

Lorsque  la  plaie  ne  renferme  pas  de  corps  étranger ,  il  suffit  d'appli- 
quer sur  son  ouverture  une  mouche  de  taffetas  d'Angleterre  ou  de  spara- 
drap, et  de  condamner  la  partie  au  repos.  Dans  la  majorité  des  cas,  lors- 
qu'aucun   organe  important  n'a   été  intéressé ,  la  cicatrisation  s* opère 
rapidement  et  sans  accident;  loi*sque,  par  suite  d'une  des  causes  que 
nous  avons  indiquées ,  le  trajet  de  la  blessure  vient  à  s'enflammer,  le 
chirurgien  en  est  averti  par  un  sentiment  de  douleur  et  de  tension  dans 
la  partie  ;  il  survient  du  gonflement  et  de  la  rougeur  autour  de  la  plaie, 
les  bords  de  celle-ci  se  décollent  et  la  suppuration  se  fait  jour  au  dehors. 
Il  faut,  en  ce  cas,  recourir  au  traitement  des  plaies  qui  suppurent.  Par- 
fois, lorsque  l'instrument  vulnérant  a  glissé  sous  la  peau ,  les  phéno- 
mènes inflammatoires  se  manifestent  sur  un  point  du  trajet  éloigné  d& 
l'ouverture,  il  y  survient  un  véritable  phlegmon  qui  se  termine  presque 
toujours  par  un  abcès  dont  l'ouverture  est  suivie  d'une  prompte  gué- 
rison. 

Les  choses  ne  se  passent  pas  d'une  manière  aussi  simple,  lorsque  la 
plaie  siège  dans  une  région  abondamment  pourvue  de  nerfs,  de  vaisseaux, 
et  bridée  par  des  aponévroses.  Nous  avons  cité,  pour  exemple  de  cette 
disposition,  les  doigts,  la  paume  de  la  main  et  la  plante  du  pied.  L'in- 
flammation alors  se  complique  d'un  véritable  étranglement,  et  la  suppu- 
ration qui  en  est  la  conséquence  presque  fatale,  au  lieu  de  tendre  i  se 
faire  jour  au  dehors,  fuse  dans  les  gaines  des  tendons  et  donne  lieu  i 
des  accidents  redoutables.  Dans  ce  cas,  il  ne  faut  pas  attendre,  pour 
agir,  que  la  suppuration  se  soit  formée.  Lorsque  les  douleurs  sont  conti- 
nues, tensives ,  accompagnées  de  battements  et  assez  intenses  pour 
empêcher  le  sommeil,  il  faut  recourir  au  débridcment  des  aponévroses 
qui  s'opposent  à  la  libre  expansion  des  tissus  enflammés.  L'incision  pré- 
maturée du  panaris  est  le  seul  moyen  de  sauver  la  phalange  qui  en  est 


PLAIE.   p.    PAR   INSTKDMEft'TS   COMTONDAKTS.  87 

atteinte.  La  même  pratique  est  indiquée  au  début  des  phlegmons  pro- 
fonds de  la  main  et  du  pied. 

Nous  ne  parlons  pas  des  complications  plus  graves  qui  peuvent  surve- 
nir à  la  suite  des  plaies  par  piqûre,  de  Térysipèle,  du  phelgmon  diffus, 
de  l'infection  purulente,  de  la  lésion  des  gros  vaisseaux,  des  articulations 
ou  des  cavités  splanchniques,  parce  que  la  conduite  à  tenir ,  en  pareil 
cas,  a  été  tracée  dans  d'autres  parties  de  ce  Dictionnaire. 

UI.  Plaies  par  ikstruments  contondants.  —  Les  plaies  de  cette  espèce 

s*obsenrent  plus  fréquemment,  dans  la  pratique ,  que  toutes  les  auti*es 

réunies.  Cela  se  conçoit ,  lorsqu'on  réfléchit  à  la  variété  presque  infinie 

<les  causes  qui  peuvent  les  produire.  Tout  corps,  quelle  que  soit  sa  forme, 

pourvu  qu'il  ait  un  certain  volume,  un  certain  poids,  et  qu'il  ait  reçu  une 

impulsion  suffisante,  peut  déterminer  des  plaies  contuses.  Les  chutes,  les 

chocs  contre  des  obstacles  imprévus,  les  produisent  également.  Toutes 

les  découvertes  de  l'industrie  moderne  ont  eu  pour  effet  d'augmenter  le 

nombre  de  ces  blessures  et  d'en  accroître  la  gravité.  L'emploi  des  ma* 

<:Junes  dans  l'industrie,  la  navigation  à  vapeur,  les  chemins  de  fer,  leur 

fournissent  un  formidable  contingent,  auquel  viennent  se  joindre  encore 

les  blessures  produites  par  la  poudre  à  canon  et  les  projectiles  qu'elle 

ixiet  en  mouvement,  ainsi  que  celles  qui  sont  causées  par  les  substances 

<explosives  d^invention   moderne ,  qu^utilisent  l'industrie  et  l'art  de  la 

guerre. 

Toutes  ces  lésions  ont  un  caractère  commun.  Elles  s'accompagnent  toutes 
'd'un  certain  degré  d'attrition,  de  lacération  des  tissus,  et  ces  désordres 
peuvent  aller  jusqu'au  broiement  le  plus  complet.  Elles  ne  se  réunissent 
4)ue  par  seconde  intention,  et  la  guérison,  plus  longue  à  obtenir  que  dans 
les  plaies  précédemment  étudiées,  laisse  après  elle  une  cicatrice  plus  visi- 
ble. A  part  cet  air  de  famille,  elles  diffèrent  aussi  essentiellement,  sous 
le  rapport  de  l'étendue,  de  la  gravité  et  des  conséquences,  que  les  causes 
qui  les  ont  produites.  Pour  en  faciliter  l'étude,  les  chirurgiens  les  ont 
divisées  en  deux  groupes  :  les  plaies  contuses  ordinaires  et  les  plaies  par 
armes  à  feu.  Nous  ne  nous  occuperons  que  de  ces  dernières,  les  plaies 
contuses  ordinaires  ayant  été  l'objet  de  développements  suffisants  à  l'ar- 
ticle Contusion  (t.  IX,  p.  522). 

Plaies  par  armes  à  feu.  —  On  doit  réserver  ce  nom  aux  blessures 
frodoites  par  les  projectiles.  Celles  qui  résultent  de  l'action  de  la 
poudre  en  liberté,  de  l'explosion  d'une  gargousse,  d'une  poudrière, 
(fuie  fabrique  de  dynamite;  celles  qui  sont  causées  par  Téclatemcnt  des 
todsou  des  canons,  par  les  mines,  par  les  torpilles,  peuvent  être  des 
blemires  de  guerre,  mais  ne  sont  pas  des  plaies  par  armes  à  feu.  Le 
candère  essentiel  de  ces  dernières  est  l'extrême  contusion  de  leurs 
bords  et  de  leur  trajet,  ainsi  que  l'ébranlement  qui  les  accompagne. 
L'aspect  de  h  plaie,  l'état  général  du  blessé,  sont  tellement  particuliers, 
4}ue  les  premiers  chirurgiens  témoins  de  ces  étranges  symptômes  les 
attribuèrent  à  un  empoisonnement ,  qu'ils  mirent  sur  le  compte  de  la 
oudre.  C'est  à  Ambroise  Paré  que  revient,  comme  on  le  sait,  le  mérite 


88  PLAIE.   p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

d'avoir  dissipé  cette  erreur  et  fait  renoncer  en  même  temps  aux  pratiques 
barbares  qui  en  étaient  la  conséquence. 

Les  plaies  d'armes  à  feu  diffèrent  suivant  la  forme  et  les  dimensions 
des  projectiles  qui  les  ont  produites.  Ces  derniers  sont,  dans  Tordre  de 
leurs  dimensions,  les  boulets,  les  éclats  de  bombe,  d'obus,  de  grenades, 
les  biscaïens,  les  grains  de  mitraille,  les  balles  de  différents  calibres,  le 
plomb  de  chasse.  Parfois  le  corps  vulnérant  n'a  pas  été  lancé  lui-même 
par  une  arme  à  feu,  mais  il  a  été  emporté  par  un  projectile  qui  lui  a 
communiqué  son  impulsion.  C'est  ainsi  que,  dans  les  batailles  navales» 
les  morceaux  de  bois  ou  de  fer  arrachés  à  la  muraille  du  bâtiment  cau- 
sent autant  de  ravages  que  les  projectiles  eux-mêmes,  et  dans  les  sièges, 
les  combats  d'artillerie,  les  hommes  qui  se  tiennent  près  des  pièces  sont 
souvent  atteints  par  des  fragments  de  pierre,  par  des  cailloux  que  les 
boulets  et  les  obus  font  voler  dans  toutes  les  directions. 

Les  blessures  qui  se  produisent  dans  de  pareilles  conditions  sont 
extrêmement  variées  ;  mais  les  différences  les  plus  essentielles  sont  celle» 
qu'on  observe  entre  les  lésions  faites  par  les  gros  projectiles  sortis  de» 
bouches  à  feu,  et  les  plaies  déterminées  par  les  balles  et  les  grains  de 
plomb  que  lancent  les  armes  portatives.  Elles  sont  assez  importantes 
pour  exiger  une  étude  à  part. 

A.  Blessures  faites  par  les  gros  projectiles.  —  Lorsqu'un  boulet 
atteint  en  plein  la  tête  au  le  tronc,  la  blessure  est  toujours  mortelle  et  le 
chirurgien  n*a  pas  à  intervenir  ;  mais  il  arrive  quelquefois  que  le  projec- 
tile ne  fait,  pour  ainsi  dire,  que  les  frôler,  et  l'on  a  vu  des  ble.ssés  sur- 
vivre, après  avoir  eu  une  partie  du  visage ,  la  mâchoire  inférieure  ou  le 
nez,  par  exemple,  emportés,  après  avoir  eu  la  hanche ,  les  parois  de 
l'abdomen  ou  du  thorax  profondément  labourées.  Ces  cas  sont  rares, 
et  les  blessures  faites  aux  membres  par  les  gros  projectiles  offrent  beau- 
coup plus  d'intérêt.  Quand  un  boulet  qui  n'a  encore  rien  perdu  de  sa 
force  initiale  rencontre  un  membre  sur  son  passage,  il  l'emporte,  s'il 
l'atteint  en  plein  ;  il  se  borne  à  y  produire  une  échancrure,  s'il  le  saisit 
par  un  de  ses  côtés.  Dans  le  premier  cas,  la  plaie  est  irrégulière  et 
comme  mâchée  ;  la  peau  et  les  muscles,  inégalement  déchirés,  présen- 
tent une  surface  anfractueuse,  noirâtre,  à  la  surface  de  laquelle  fout  saillie 
des  esquilles  à  demi  détachées  et  les  extrémités  fracturées  des  os  eux- 
mêmes,  d'où  pendent  des  lambeaux  de  tissu  fil^reux  et  des  bouts  de  nerfs 
arrachés.  Ce  cas  est  assez  rare ,  au  dire  de  Legouest.  La  plupart  du 
temps,  les  membres  sont  fracassés,  broyés,  dilacérés  sur  la  plus  grande 
partie  de  leur  circonférence,  mais  tiennent  encore  appendus  au  tronc  par 
quelques  débris  de  peau  ou  de  muscles  qui  n'ont  pas  été  complètement 
arrachés.  Lorsque  le  projectile  prend  un  membre  par  le  côté,  il  y  creuse 
une  gouttière  plus  ou  moins  profonde  et  dont  la  largeur  est  en  rapport 
avec  son  calibre.  Les  bords  de  ce  sillon  sont  renversés  en  dehors,  frangés, 
ecchymoses  dans  toute  leur  étendue  ;  sa  surface  est  d'un  gris  rougeâtre, 
irrégulière,  couverte  de  tractus  fibreux,  de  débris  de  muscles  et  d'aponé- 
vroses. 


PLAIE.   p.    PAR    INSTRUMENTS  COMTOXDANTS.  89 

Ces  hombles  blessures  donnent  rarement  lieu  à  une  hcmorihagic 
abondante  ;  souvent  même  elles  ne  saignent  pas  du  tout.  Elles  sont,  à  cet 
égard»  dans  le  même  cas  que  les  plaies  par  arrachement,  et  quand  nous 
parlerons  de  celles-ci»  nous  en  indiquerons  la  cause.  Toutefois,  cette  sus- 
pension n'est  pas  toujours  définitive;  il  n'est  pas  rare  de  voir  reparaître 
1  hémorrhagie,  lorsque  la  contraction  de  Torifice  cesse  el  que  Taffaiblisse- 
ment  de  la  circulation,  causé  par  la  stupeur ,  vient  à  disparaître  à  son 
tour. 

Lorsqu'un  membre  a  été  emporté  par  un  boulet  ou  assez  fortement 
échancré  pour  qu'il  ne  puisse  pas  continuer  à  vivre,  l'indication  est  for- 
melle :  il  faut  procéder  à  l'amputation  immédiate.  Faite  dans  ces  condi- 
tions, après  un  traumatisme  aussi  violent,  elle  a  beaucoup  de  chances 
pour  ne  pas  réussir;  mais  enfin  c'est  le  seul  espoir  qui  reste.  L'am- 
putation substitue  une  plaie  régulière  à  la  blessure  inégale  et  déchi- 
rée qu'a  produite  le  boulet,  elle  prévient  les  accidents  immédiats  les  plus 
sérieux;  elle  épargne  au  blessé  les  longues  suppurations  et  les  fusées  puru- 
lentes remontant  au  centre  du  moignon.  Elle  doit  être  pratiquée  sur  des 
tissus  parfaitement  sains,  à  une  hauteur  suffisante  pour  qu'on  n'ait  pas 
à  craindre  de  laisser  dans  le  moignon  des  parties  contuses  ou  déchirées, 
et,  avant  de  scier  les  os,  il  faut  s'assurer  qu'ils  ne  sont  pas  dépouillés  de 
leur  périoste  au  delà  du  point  où  va  porter  la  section,  et  qu'ils  ne  pré- 
^ntent  pas  quelques-unes  de  ces  fêlures  étendues  que  produisent  sou- 
vent les  gros  projectiles. 

Lorsque  le  membre  n'a  été  intéressé  que  dans  une  petite  partie  de  sa 
circonlérence,  que  les  os  et  les  vaisseaux  principaux  n'ont  pas  été  atteints, 
il  est  possible  d'en  tenter  la  conservation  ;  mais  la  guérison  ne  s'obtient 
dans  ces  cas  qu'au  prix  d'un  long  traitement,  et  le  résultat  n'est  jamais 
bien  satisfaisant.  Ces  blessures  s'accompagnent  de  pertes  de  substance  si 
étendues  qu'elles  ne  se  réparent  qu'avec  la  plus  grande  difficulté.  La 
cicatrice  qui  les  recouvre  adhère  aux  os  et  aux  tissus  sous-jacents  ;  elle 
est  mince,  inégale,  se  déchire  au  moindre  froissement,  ne  se  reproduit 
que  pour  se  rompre  de  nouveau,  et  la  plaie  finit  par  dégénérer  en  un 
ulcère  qui  persiste  indéfiniment.  Ces  alternatives  s'observent  surtout 
dans  les  régions  abondamment  pourvues  de  parties  molles,  comme  les 
lesses  et  les  mollets. 

Nous  ne  nous  sommes  occupé  jusqu'ici  que  des  blessures  causées  par 
des  projectiles  animés  de  toute  leur  vitesse  initiale  ;  mais  les  boulets 
sirrifés  à  la  fin  de  leur  course  causent  parfois  des  blessures  mortelles, 
sans  laisser  de  traces  extérieures.  La  peau  est  saine,  tandis  que  les  os,  les 
muscles,  les  vaisseaux  et  les  viscères  sont  broyés.  En  voyant  ces  cadavres 
intacts  en  apparence,  les  anciens  chirurgiens  attribuaient  la  moi*t  au  vent 
du  boulet,  mais  cette  erreur  est  depuis  trop  longtemps  dissipée  pour  qu'il 
^it  nécessaire  de  s'arrêter  à  la  combattre.  Lorsque  cette  attrition  n'inté- 
resse qu'un  membre,  l'amputation  reste  comme  dernière  ressourcé,  si 
b  d^rdres  ne  remontent  pas  jusqu'à  sa  racine  :  car  dans  ce  dernier 
casi  elle  est  le  plus  souvent  impraticable. 


^0  PLAIE.   —    p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

Les  boulets  de  très-petit  calibre,  ainsi  que  les  biscaiens,  traversent 
parfois  les  parties  d'outre  en  outre.  Dans  ce  cas,  l'ouverture  d'entrée  est 
•habituellement  plus  petite  et  plus  régulière  que  celle  de  sortie.  Ces  blessa- 
res,  à  la  gravité  et  aux  dimensions  près,  présentent  les  mêmes  caractères 
<{ue  celles  que  produisent  les  balles,  dont  nous  parlerons  plus  loin. 

Les  plaies  causées  par  les  projectiles  pleins  sont  rarement  compliquées 
de  la  présence  d'un  corps  étranger.  Vidal  (de  Cassis)  cite  pourtant  le  iaît 
d'un  boulet  de  quatre  livres  logé  à  la  racine  d*un  des  membres  inférieurs 
-et  dont  la  présence  aurait  été  méconnue  par  les  premiers  chirurgiens  qui 
examinèrent  le  blessé.  Un  fait  plus  surprenant  encore  est  celui  que  le 
•baron  Larrey  a  cité,  le  18  octobre  1871,  à  la  Société  de  Chirurgie.  11  est 
relatif  au  général  Auger,  qui  reçut  dans  l'aisselle,  à  la  bataille  de  Solferino, 
un  boulet  de  six  dont  on  ne  reconnut  la  présence  que  le  lendemain  matin, 
lorsqu'on  pratiqua  la  désarticulation  de  l'épaule.  Quant  aux  biscaiou 
restés  dans  la  plaie,  les  exemples  en  sont  nombreux.  Leur  diagnostic  est* 
•en  général,  facile  ;  leur  extraction  est  soumise  aux  mêmes  règles  que 
celle  des  balles,  et  le  traitement  de  la  blessure  présente  les  mêmes  indi- 
•cations. 

Les  projectiles  creux  font  aujourd'hui,  sur  les  champs  de  bataille,  beau-» 
-coup  plus  de  victimes  que  les  boulets  et  que  la  mitraille.  Lorsqu'ils 
éclatent,  ceux  qui  s'en  trouvent  très-rapprochés  sont  littéralement  m 
en  lambeaux.  C'est  ce  qu'on  a  trop  souvent  l'occasion  d'observer  danski 
ateliers  où  on  les  charge,  et  ce  qui  arrive  encore  de  temps  en  temps, 
lorsqu'on  découvre  quelque  obus  échappé  à  la  dernière  guerre  et  que  des 
imprudents  veulent  le  vider  sans  précaution.  Les  lésions  produites  à  dis- 
tance, par  des  éclats  isolés,  varient  suivant  la  dimension  des  fragments 
•et  la  force  d'impulsion  dont  ils  sont  animés.  Pour  peu  qu'ils  aient  un  eer* 
tain  volume,  on  peut  leur  reconnaître  deux  surfaces  unies,  l'une  oon* 
vexe,  l'autre  concave,  et  des  bords  extrêmement  irréguliers.  Lorsqu'ils 
frappent  par  leur  face  convexe,  ils  se  bornent  parfois  à  produire  de  fortes 
contusions  sans  plaie,  mais  accompagnées  de  tumeurs  sanguines  éno^ 
mes  et  qui  mettent  très-longtemps  à  se  résorber  ;  lorsqu'ils  atteignent  les 
tissus  par  un  des  angles  de  leurs  bords  irréguliers,  il  en  résulte  des 
plaies  contuses,  profondes,  anfractueuses,  déchirées,  des  fractures  sou- 
vent compliquées  d'issue  des  os  et  d'attrition  des  parties  molles.  Ces 
plaies  recèlent  souvent  des  fragments  de  projectile  ou  des  lambeaux  de 
vêtement  entraînés  par  eux.  Ces  fragments  se  dévient  comme  les  balleSi 
et  cela  avec  d'autant  plus  de  facilité  qu'ils  sont  animés  d'un  mouvcroeiit 
moins  rapide.  Les  exemples  d'éclats  de  bombe  et  d'obus  ayant  séjouné 
longtemps  au  milieu  des  tissus  sans  qu'on  en  ait  reconnu  la  présencs 
sont  tellement  nombreux,  qu'il  n'est  guère  de  chirurgien  de  nos  joufs 
qui  n'ait  eu  l'occasion  d'en  observer.  Les  blessures  faites  par  les  éclats 
d'obus  sont  plus  souvent  suivies  d'hémorrhagies  que  celles  qui  sont  pro- 
duites par  les  projectiles  pleins,  parce  que  les  vaisseaux  sont  plus  nettemeat 
coupés  par  leurs  bords  tranchants  que  par  les  contours  arrondis  des  bon* 
lets  et  des  biscaïens  ;  enfin,  Legouest  a  remarqué  que  les  enveloppes  des 


PLAIE.  p.    PAR    INSTRUMENTS   COKTONDARTS.  91 

boites  à  milraîlle  donnenl  lieu  à  des  blessures  en  tout  semblables  à  celles 
que  font  les  instruments  tranchants. 

Les  plaies  qui  nous  occupent  ont  un  caractère  de  gravité  sur  le  compte 
duquel  tout  le  monde  est  d'accord.  Lorsque  le  fragment  d'obus  est  resté 
dans  la  plaie,  il  faut  se  hâter  de  l'en  retirer.  Scrive  dit  qu'au  bout  de 
quelques  heures  il  se  développe  dans  la  cavité  qui  le  loge  de  l'hydrogène 
sulfuré,  dont  l'action  est  extrêmement  nuisible.  Après  l'extraction,  ajoute- 
t-il,  les  tissus  affaissés,  fortement  contus  et  privés  de  vie  dans  leurs  points 
de  contact  avec  les  corps  étrangers,  ne  reviennent  plus  sur  eux-mêmes, 
de  sorte  que  l'excavation  produite  par  le  projectile  persiste.  Panas  attri- 
bue, à  plus  juste  titre,  selon  nous,  la  gravite  de  ces  lésions  à  l'excessive 
contusion  dont  elles  s'accompagnent  et  dont  il  est  impossible,  à  priori^ 
de  mesurer  la  profondeur  et  l'étendue.  Il  cite  des  cas  dans  lesquels  des 
tentatives  de  conservation,  à  la  suite  de  fractures  de  la  jambe  par  des 
éclats  d'obus,  ont  amené  les  plus  déplorables  résultats,  et  il  a  adopté  pour 
règle  de  toujours  amputer  sans  retard  en  pareille  occurrence.  Nous  avons 
pu  constater  nous-méme,  sur  les  blessés  de  l'armée  de  la  Loire  (1870- 
1871),  le  peu  de  tendance  de  ces  plaies  à  la  gucrison  et  la  prédilection 
que  la  pourriture  d'hôpital  semble  affecter  pour  elles. 

Il  est  un  genre  de  blessures  qui  se  rapproche  des  précédentes,  et  qui  ne 
s'observe  guère  qu'à  bord  des  navires:  ce  sont  celles  qui  sont  faites  par  les 
boulets  de  gros  calibre,  lorsqu'ils  viennent  se  briser  sur  la  volée  des  pièces 
ou  sur  le  can  des  sabords  des  bâtiments  cuirassés.  A  l'attaque  de  Mogailor 
(15  août  4844),  un  aspirant  eut  la  moitié  de  la  face  emportée  par  un 
fragment  de  boulet  marocain  qui  venait  de  voler  en  éclats  en  frappant  le 
canon  dont  il  surveillait  le  tir.  A  Kinburn,  plusieurs  hommes  furent 
blessés  de  cette  manière,  et,  après  l'affaire,  la  batterie  de  la  TonnatUe 
était  p/eine  de  débris  de  toute  forme  et  de  toute  dimension,  provenant 
des  boulets  de  vingt-quatre  du  fort  russe,  qui  s'étaient  brisés  sur  l'arête 
rïve  de  ses  sabords. 

Les  blessures  produites  par  les  gros  projectiles  ou  par  leurs  éclats  pré- 
sentent une  complication  qui  ne  s'observe  que  beaucoup  plus  rarement  et 
à  un  degré  bien  plu3  faible,  à  la  suite  des  plaies  faites  par  les  balles.  C'est 
an  état  de  stupeur  bonié,  le  plus  souvent,  à  la  partie  sur  laquelle  le  pro- 
jectile a  porté,  mais  qui  se  généralise  quelquefois.  La  stupeur  locale  est 
caractérisée  par  l'engourdissement  du  membre  lésé,  qui  devient  froid, 
imensible,  pesant  et  inhabile  à  se  mouvoir.  La  circulation  s'y  ralentit,  s'y 
suspend  même  dans  quelques  cas.  A  son  degré  le  plus  faible,  cet  état  se 
dissipe  assez  rapidement;  mais,  lorsque  la  commotion  a  été  plus  forte,  la 
réaction  qui  survient  ensuite  est  signalée  par  une  congestion  active  et  des 
accidents  inflammatoires  suivis  de  suppurations  profondes  et  diffuses. 
Dans  les  cas  les  plus  graves,  la  réaction  ne  se  produit  pas,  et  le  membre, 
après  être  resté  comme  mort  pendant  plusieurs  jours,  finit  par  tomber  en 
gangrène. 

Lorsque  le  choc  a  été  très-violent,  la  stupeur  s'étend  à  l'organisme 
lout  entier.  Le  blessé,  plongé  dans  une  sorte  d'hébétude,  paraît  indifférent 


l  .. 


92  PLAIE.   p.    PAR   INSTRUMENTS   CO.NTONDAKTS. 

à  tout  ce  qui  l*cntoure.  Il  est  insensible  et  comme  somnolent.  La  face  est 
pâle,  l'œil  fixe,  la  respiration  profonde,  la  peau  froide,  le  pouls  faible, 
lent,  concentre,  souvent  irrégulier.  11  survient  parfois  des  mouvements 
convulsifs,  des  nausées  et  des  vomissements,  el  le  malade  succombe  sans 
que  la  réaction  se  soit  produite;  lorsqu'elle  intervient,  elle  est  souvent 
entravée  par  le  retour  de  la  stupeur  ;  sa  marche  est  irrégulière,  accompa- 
gnée de  frissons,  de  chaleurs  fugaces,  de  délire  et  parfois  d'une  teinte 
ictérique  générale.  En  même  temps  on  voit  se  produire  du  côté  du  mem- 
bre lésé  les  phénomènes  menaçants  que  nous  avons  indiqués  plus  haut. 

Le  sentiment  de  froid  qui  accompagne  les  grands  traumatisme^  n*est 
pas  seulement  une  sensation  perçue  par  le  malade,  il  consiste  dans  un 
abaissement  très-réel  de  la  température  générale,  et  le  thermomètre  Tac* 
cuse  de  la  façon  la  plus  nette.  Sur  trente-huit  sujets  blessés  par  des  éclats 
d^obus,  pendant  le  siège  de  Paris,  et  observés  par  Demarquay,  ce  chirur- 
gien a  constaté  un  abaissement  de  un  à  trois  degrés.  Chez  Ton  d*entre 
eux  le  thermomètre  est  descendu  jusqu'à  34^.  Dans  ces  observations,  la 
diminution  de  la  température  a  été  plus  marquée  à  la  suite  des  blessures 
causées  par  les  éclats  d'obus  que  dans  toute  autre  lésion,  et  plus  forte 
chez  les  hommes  de  quarante  ans  que  sur  ceux  de  vingt.  Elle  s'est  mon- 
trée à  son  plus  haut  degré  chez  les  fédérés  qui  faisaient,  un  usage  immo- 
déré de  Talcool  :  ce  qui  s'explique  par  l'action  dépressive  de  ce  liquide 
sur  la  température  animale.  Tous  les  blessés  chez  lesquels  le  thermomètre 
est  descendu  à  35^  sont  morts,  qu'ils  aient  été  opérés  ou  non,  et  dans  le 
premier  cas  la  réaction  a  toujours  été  nulle.  Tous  les  chirurgiens  pru- 
dents sont  d'accord  sur  la  nécessité  de  s'abstenir  lie  toute  opération 
grave,  tant  que  la  stupeur  n'est  pas  complètement  dissipée.  11  faut  atten- 
dre que  l'organisme  ait  pu  se  relever  de  l'ébranlement  causé  par  le  trau- 
matisme, pour  lui  en  imprimer  un  second;  mais  il  peut  rester  des  doutes 
sur  le  moment  opportun,  et  le  thermomètre  permet  de  les  lever  en  fournie 
saut  des  indications  précises.  Jusqu'à  ce  que  la  température  soit  revenue 
à  l'état  normal,  il  faut  se  borner  à  combattre  la  commotion,  à  réchauffer, 
à  ranimer  le  malade,  et  c'est  alors  seulement  qu'il  a  repris  complètement 
possession  de  lui-même  qu'il  est  permis  d'agir  activement,  de  pratiquer 
les  amputations  ou  les  résections  que  peut  nécessiter  la  blessure. 

Quand  les  plaies  par  les  éclats  d'obus  ne  sont  pas  de  nature  à  exiger 
des  opérations  aussi  graves,  le  traitement  qu'elles  réclament  est  celui  des 
plaies  contuses  au  plus  haut  degré  ;  cependant  elles  présentent  quelques 
indications  spéciales.  Il  faut  d'abord,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  les 
débarrasser  des  corps  étrangers.  Leur  recherche  est  en  général  facile  ; 
Touverture  d'entrée  est  toujours  assez  large  pour  qu'on  puisse  l'explorera 
l'aide  d'un  ou  de  plusieurs  doigts,  et  les  fra^^ments  de  métal  se  rencon- 
trent d'eux-mêmes.  Dans  quelques  cas  cependant  nous  avons  vu  qu'ik 
pouvaient  échapper  aux  recherches,  et  cela  arrive  surtout  pour  les  frag- 
ments de  très-petite  dimension  et  pour  les  lambeaux  d'étolfe  que  le  tact 
ne  distingue  pas  facilement  des  tissus  vivants  au  milieu  desquels  ils  sont 
engagés.  Il  faut  se  livrer  à  leur  recherche  avec  persévérance  et  ne  pas 


PLAIE.    p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTOZIDAIITS.  93 

craindre  de  multiplier  les  incisions,  soit  pour  les  découvrir,  soit  pour  les 
extraire  sans  déchirement.  Lorsqu'un  éclat  d'obus  a  parcouru,  sous  la 
peau,  un  Irajet  d'une  certaine  étendue,  celle-ci  est  amincie,  contuse  et 
dans  de  très-mauvaises  conditions  pour  se  réunir  aux  parties  sous-ja- 
contes.  Il  y  a  aloi*s  avantage  à  inciser  le  décollement  dans  toute  sa  lon- 
gueur et  à  retrancher  les  [lortions  de  tégument  trop  altérées  pour  pouvoir 
continuer  à  vivre.  Lorsque  la  plaie  a  été  ainsi  simplifiée,  on  la  lave  à 
plusieurs  reprises  avec  de  Teau  pure  ou  additionnée  d'alcool,  on  bien 
encore  avec  une  solution  très-étendue  d'aciJc  phénique  ;  puis  on  |)rocède 
au  pansement,  en  remettant  en  place  les  parties  qui  peuvent  encore  ser- 
vir à  combler  la  perte  de  substance,  mais  sans  faire  d'efforts  pour  les 
rapprocher,  sans  tenter  une  réunion  qui,  dans  ce  genre  de  blessures,  ne 
peut  s'obtenir  qu'à  la  suite  d'une  longue  suppuration.  En  raison  même 
de  leurs  fâcheux  caractères,  les  plaies  dont  nous  nous  occupons  récla- 
ment plus  souvent  que  les  autres  l'emploi  des  pansements  antiseptiques, 
dont  les  indications  ont  été  posées  dans  un  autre  article  (Voy.  Pansement, 
i.  XXV,  p.  729). 

B.  Blessures  faites  par  les  petits  projectiles.  —  On  donne  le  nom  de 
petits  projectiles  à  ceux  (|ui  sont  lancés  par  les  armes  portatives.  Ce  sont 
des  balles  de  fusil,  de  pistolet,  de  revolver,  des  clievrotines,  des  grains 
de  plomb  de  différent  calibre.  Autrefois,  tous  ces  projectiles  étaient  sphé- 
riqueset  lancée  par  des  armes  à  parois  intérieures  lisses.  C'est  en  1842 
qu'on  a  commencé  à  employer  les  fusils  rayés  et  les  balles  oblongues. 
Depuis  lors,  la  forme  de  ces  dernières  a  subi  bien  des  modifications  ; 
cependant,  aujourd'hui  que  toutes  les  armées  régulières  sont  pourvues 
d'armes  à  tir  rapide,  toutes  les  balles  se  ressemblent  et  ne  présentent 
entre  elles  que  de  légères  dilférences  de  forme  et  de  poids.  Toutes  sont 
oblongues,  se  forcent  par  le  Fait  de  l'explosion  contre  les  rayures  du  fusil 
et  acquièrent,  en  suivant  la  spire  décrite  par  celles-ci,  un  mouvement  de 
rotation  sur  leur  axe,  une  foice  d'impulsion  considérable  et  une  portée 
six  fois  plus  grande  que  celle  des  balles  sphériques.  Les  fusils  ancien 
modèle  ne  portaient  pas  régulièrement  au  delà  de  deux  cents  mètres,  les 
armes  nouvelles  atteignent  des  portées  de  mille  et  même  de  douze  cents 
mètres,  avec  une  justesse  suffisante.  11  en  résulte,  dans  leurs  effets  sur  le 
eorps  humain,  des  différences  dont  nous  aurons  à  tenir  compte. 

L'a.<pect  et  la  gravité  des  plaies  d'armes  à  feu  dépendent  de  la  forme  et 
du  \olume  du  projectile,  de  la  force  d'impulsion  dont  il  est  animé,  de  la 
diiection  dans  laquelle  il  atteint  la  partie  qu'il  frappe  et  de  la  nature  des 
tissas  qu*il  rencontre  sur  son  passage. 

Us  balles  mortes,  c'est-à-dire  arrivées  à  la  fin  de  leur  course,  n'ont 
plus  assez  de  force  pour  pénétrer,  et  déterminent  des  contusions  netle- 
menl  circonscrites,  peu  étendues  et  de  forme  circulaire.  Si  la  peau  qui 
recouvre  la  région  atteinte  est  voisine  d'un  os  et  que  celui-ci  résiste,  la 
membrane  tégumcntaire  est  frappée  de  mort  dans  le  point  qui  a  reçu  le 
choc  et  il  s  y  produit  une  eschare  arrondie,  sèche,  semblable  à  celle  d*un 
moxa.  Cette  eschare  est  lente  à  se  détacher;  elle  tombe  tout  d'un  bloc; 


94  PLAIE.   p.    PAR    INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

la  plaie  qui  en  résulte  suppure  un  certain  temps  et  fait  place  à  une 
cicatrice  blanche ,  légèrement  déprimée  et  tout  h  fait  caractéristique. 
Lorsque,  au  contraire,  la  couche  des  parties  molles  sous-jacentes  est 
épaisse,  la  peau  est  à  peine  altérée  et  les  désordres  siègent  dans  le  tissD 
cellulaire  qui  la  double.  Ces  effets  s'observaient  beaucoup  plus  80u?ent  à 
l'époque  où  on  se  servait  déballes  sphériques;  les  projectiles  oblongs 
qu'on  emploie  aujourd'hui  pénètrent  plus  facilement,  à  cause  de  leur 
forme  et  de  leur  force  d'impulsion. 

Quand  une  balle  animée  de  toute  sa  vitesse  frappe  très-obliquement 
sur  une  surface  large  et  plane,  ou  sur  le  sommet  d'une  partie  saillante, 
elle  se  borne  souvent  à  produire  une  érosion  qui  peut  parfois  présenter 
une  grande  longueur,  ainsi  que  cela  s'observe,  par  exemple,  à  la  partie 
postérieure  du  tronc.  Ce  n'est  parfois  qu'une  traînée  noirâtre  où  l'épi* 
derme  seul  a  été  détruit,  mais  le  plus  souvent  la  peau  est  entamée  dans  la 
plus  grande  partie  de  son  épaisseur.  Ces  ccorchures,  dit  Legouest,  sont 
en  général  très-douloureuses.  Si  la  balle  a  pénétré  plus  profondément,  il 
en  résulte  un  véritable  sillon,  dont  les  bords  s'écarlent,  en  laissant  à 
découvert  les  aponévroses  d'enveloppe  et  les  muscles  qui ,  parfois  même, 
sont  intéressés.  La  douleur  est  moins  vive  que  dans  le  cas  précédent. 
Lorsque  la  direction  du  projectile  est  moins  oblique,  il  perce  la  peau» 
glisse  dans  le  tissu  cellulaire  sous-cutané  et  va  sortir  à  quelque  distance, 
en  formant  ce  qu'on  nomme  une  plaie  en  séton.  Le  trajet  de  ces  blessures 
est  fortement  contus;  la  peau  qui  le  recouvre  est  amincie,  ecchymosée; 
elle  se  mortifie  le  plus  souvent  et,  lorsque  l'eschare  est  tombée ,  le  séUm 
se  trouve  transformé  en  un  large  sillon ,  à  bords  frangés  et  inégaux. 
Enfin,  quand  la  direction  du  coup  de  feu  se  rapproche  encore  daTantage 
de  la  perpendiculaii^e,  le  projectile  s'enfooce  profondément  dans  les  par- 
ties; s'il  n^a  pas  une  force  d'impulsion  suffisante,  il  s'y  arrête  el  forme 
ainsi  une  plaie  en  cul-dc-sac,  qui  n'a  qu'une  ouverture  et  au  fond  de 
laquelle  on  le  trouve  le  plus  souvent.  Dans  le  cas  contraire,  il  traTerse  la 
région  de  part  en  part  et  y  creuse  un  véritable  canal  qui  présente  deux 
ouvertures,  l'une  d'entrée,  l'autre  de  sortie. 

La  forme  et  la  dimension  respective  de  ces  deux  ouvertures  ont  donné 
lieu  à  de  longues  discussions,  et,  quoique  cette  question  n'ait  guère 
d'intérêt  qu'au  point  de  vue  de  la  médecine  légale,  nous  devons  en  dire 
quelques  mots.  Autrefois  il  était  admis  en  principe  que  l'ouverture  d'en» 
tréc  était  toujours  plus  petite  que  celle  de  sortie,  que  la  première  était 
ronde,  déprimée  et  comme  taillée  à  l'emporte-pièce,  tandis  que  la 
seconde  était  irrégulière ,  déchirée ,  à  bords  renversés  en  dehors  H 
frangés.  Dupuytren  avait  établi  cette  règle,  d*aprcs  des  expériences  faites 
sur  des  corps  inertes  ;  elle  avait  été  acceptée  sans  contestation  et  repro- 
duite dans  tous  les  livres  classiques,  jusqu'en  1848,  époque  à  laquelb 
les  combats  livrés  dans  les  rues  de  Paris  permirent  aux  chirurgiens  des 
hôpitaux  de  la  soumettre  au  contrôle  des  faits.  La  discussion  qui  eut  liei 
à  celte  époque  à  l'Académie  de  médecine,  et  à  laquelle  prirent  part 
toutes  Jes  illustrations  chirurgicales  du  temps,  laissa  la  question  indé- 


PLAIE.   —   p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS.  95- 

cise  :  cela  s'explique  par  ce  fait,  aujourd'hui  généralement  admis,  que  la 
dimeosion  respective  des  deux  orifices  dépend  de  la  forme  et  de  la  vitesse 
de  la  balle,  de  l'angle  sous  lequel  elle  frappe  les  parties  et  des  obstacles- 
qu'elle  rencontre  en  traversant  les  tissus.  Legoucst  nous  parait  avoir  tenu 
un  compte  bien  exact  de  ces  différentes  circonstances.  D'après  lui,  les 
deux  ouvertures  sont  de  dimensions  égales ,  lorsque  la  balle  frappe  la 
peau  80US  la  même  incidence  en  entrant  et  en  sortant,  quand  sa  vitesse 
ne  diminue  pas  sensiblement  dans  le  trajet  et  qu'elle  n'est  pas  déformée, 
quand  la  peau  présente  sur  les  deux  points  opposés  la  même  épaisseur  et 
\a  même  élasticité.  L'ouverture  d'entrée  est  plus  petite  que  l'autre,  quand 
le  projectile  traverse  des  tissus  de  plus  en  plus  denses,  lorsqu'il  s'est 
déformé  dans  son  trajet,  quand  il  entre  par  la  pointe  et  qu'il  sort  en  tra- 
vers, enGn  lorqu'il  frappe  les  parties  perpendiculairement  à  son  entrée  et 
quil  les  traverse  obliquement  à  sa  sortie.  L'ouverture  d'entrée  est  plus 
grande  dans  les  circonstances  opposées,  quand  le  coup  est  tiré  de  très- 
près,  quand  la   balle  entraîne   avec  elle  la  bourre    ou    des   lambeaux 
d'étoffe  détachés  des  vêtements,  quand  elle  traverse  des  tissus  de  moins 
en  moins  résistants,  lorsqu'elle  entre  obliquement  et  sort  dans  une  direc- 
tion perpendiculaire ,  enlin  lorsqu'elle  se  présente  par  son  plus  grand 
diamètre   à  l'entrée ,  et  par  son  plus  petit  à  la  sortie.  Les  observa- 
tions   qui    précèdent   s'appliquent  surtout  aux   balles    oblongues,  les 
seules  qui   soient  maintenant  en  usage  dans  les  armées  européennes. 
Leurs  eflets  ne  s'éloignent  pas  sensiblement,  du  reste,  de  ceux  que  pro- 
duisent les  balles  sphériqucs.  D'après  les  observations  de  Legouest  et  de 
ses  confrères  de  l'armée ,  les  dimensions  respectives  des  ouvertures  sont 
sounùses  aux  mêmes  règles  dans  les  deux  cas.  Si,  dans  des  circonstances 
très-rares,  on  a  vu  les  balles  oblongues  produire  des  plaies  linéaires,  ce 
fait  exceptionnel  a  été  également  observé  par  Guthrie  et  par  Legoucst  à 
la  suite  des  blessures  faites  par  les  balles  sphériqucs.  On  avait  également 
exagéré,  dans  le  principe,  la  gravité  des  lésions  causées  par  les  nouveaux 
proiectiles.  Après  la  campagne  de  Crimée,  Scrive  les  accusa  de  déchirer 
plus  largement  les  parties  molles,  d'exciter  une  inflammation  trauma- 
tîqnc  plus  considérable,  d'amener  fréquemment  l'étranglement,  la  gan- 
grène et  la  nécessité  de  l'amputation.  On  est  revenu  de  cette  prévention; 
maïs  il  faut  remarquer  que  les  balles  oblongues  dont  on  se  servait  pen- 
dant la  campagne  de  Crimée ,  étaient  d'un  plus  gros  calibre  que  celles 
qa'on  emploie  aujourd'hui.  Ainsi,  pour  ne  parler  que  de  l'armée  fran- 
çûae,  les  balles  des  carabines  à  tige,  les  balles  évidées ,  les  balles  de 
chmeurs,  pesaient  47  ou  48  grammes,  tandis  que  la  balle  du  chassepot 
n'en  pèse  que  ti!5.  On  comprend,  d'après  cela,  que  les  premières  aient 
causé  de  plus 'grands  désordres  que  les  secondes,   puisque  la  gravité 
des  blessures  est  en  raison  directe  du  poids  et  du  volume  du  projectile. 
Noos  verrons  plus  tard  que  les  balles  oblongues  sont  moins  sujettes  aux 
déviations  que  les  balles  sphériqucs   et  occasionnent  de  plus   grands 
tnas  dans  les  os. 
En  traversant  les  parties,  les  balles  rencontrent  sur  leur  passage  des 


96  PLAIE.   —  p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDAKTS. 

tissus  qui  résistent  d'une  façon  diiïérente  suivant  leur  densité,  leur  élas- 
ticité et  leur  texture.  Le  tissu  cellulaire  cède  facilement  et  se  creuse  en 
formant  un  canal  dont  le  centre  est  détruit  ou  mortifié.  Les  aponévroMS 
sont  déchirées  et  souvent  leurs  fibres  8*écartent  pour  laisser  passer  le  pro* 
jectile  à  travers  une  véritable  boutonnière,  dont  les  bords  se  rapprocheol 
ensuite  et  peuvent  dissimuler  son  trajet.  Les  tendons,  plus  mobiles,  échap- 
pent souvent  à  Taction  des  projectiles.  Les  muscles  se  laissent  traverser 
et  déchirer  fans  résistance,  qu'ils  soient  à  l'état  de  contraction  ou  de  re* 
lâchement.  Cependant  cette  circonstance  peut  modifier  la  forme  et  la  di- 
rection du  trajet.  Les  plexus  et  les  cordons  nerveux  sont  facilemenl 
divisés,  dilacérés  par  los  projectiles.  Les  vaisseaux  se  comportent  diffé- 
remment suivant  leur  calibre.  Les  capillaires  froissés  et  déchirés  ne  don- 
nent pas  de  sang  ;  il  en  est  de  même  des  artérioles  et  des  veinules,  dont 
les  tuniques  inégalement  divisées  se  contractent  et  s'opposent  à  Thémor- 
rhagie.  Les  gros  vaisseaux  peuvent  échapper  à  Faction  du  projectile  par 
suite  de  leur  mobilité  latérale,  mais  le  plus  souvent  ils  sont  coupés  et 
parfois  même  assez  nettement.  Yerneuil  a  fait  connaître,  en  1871,  à  la 
Société  de  Chirurgie,  un  certain  nombre  de  faits  qui  démontrent  que  les 
artères  ne  se  comportent  pas  sous  Taction  des  petits  projectiles  comme 
elles  le  font  dans  les  plaies  par  arrachement  et  dans  les  ablations  de 
membre  par  les  boulets.  Sur  les  pièces  qu'il  a  montrées  à  la  Société,  elles 
étaient  nettement  divisées  et  leurs  tuniques  étaient  sectionnées  au  même 
niveau.  L'hémorrhagie  avait  été  arrêtée  par  un  caillot  obturateur  dont 
l'extrémité  faisait  une  légère  saillie  en  dehors  et  dépassait  la  bouche  da 
vaisseau  ;  mais  il  n'en  est  pas  toujours  ainsi,  et  nous  verrons  plus  loin 
que  les  lésions  artérielles  causées  par  des  coups  de  feu  donnent  lieu  à  des 
pertes  de  sang  considérables  et  parfois  même  mortelles.  La  section  des 
vaisseaux  est  d'autant  plus  nette  que  la  vitesse  du  projectile  est  plus 
grande  ;  lorsqu'il  a  notablement  perdu  de  sa  force  d'impulsion,  il  dé- 
chire plutôt  les  tuniques  qu'il  ne  les  coupe;  lorsqu'il  est  arrivé  à  la  fin 
de  sa  course,  il  se  borne  à  les  frapper  de  mort  sans  les  diviser,  et  ce  n'est 
qu'à  la  chute  des  eschares  que  l'hémorrhagie  se  produit.  Les  cartilages 
échappent  parfois  par  leur  élasticité  à  l'action  des  projectiles,  maïs  le 
plus  souvent  i!s  sont  comme  fracturés  ou  détruits. 

Les  effets  produits  par  les  balles  sur  les  différentes  parties  du  squelette 
sont  ceux  (|ui  offrent  le  plus  d'intérêt  dans  la  pratique  et  qui  méritent 
d'être  étudiés  avec  le  plus  de  soin.  Ils  varient  suivant  la  forme  et  la 
structure  de  Tus  atteint,  la  direction  dans  laquelle  il  est  frappé  et  laforae 
d'impulsion  du  projectile.  Lorsqu'une  halle  animée  d'une  grande  vitesse 
frappe  un  os  plat  perpendiculairement  à  sa  surface,  elle  le  traverse,  es 
y  pratiquant  un  trou  à  bords  nets  et  comme  taillé  à  l'emporte-pièce.Dans 
ce  cas,  il  n'y  a  pas  d'éclats,  pas  de  fracture  rayonnante.  Lorsque  l'impul- 
sion est  moins  iortc,  au  contraire,  l'ouverture  osseuse  est  plus  irrégulière, 
et  il  en  part  des  fêlures  qui  se  dirigent  en  divers  sens  ;  souvent  alors  la 
table  interne  éclate  et  des  fragments  aigus  pénètrent  dans  les  partiel 
sous-jacentes.  C'est  ce  qui  s'observe  à  la  voûte  du  crâne.  Enfin  la  table 


'1 


PLAIE.   —  p.    PAR   IIISTRUMEIITS  C0IfT05DAlfTS.  97 

ime  peut  résister  et  la  table  interne  se  fracturer  par  contre-coup.  Lors- 
t  le  projectile  arrive  plus  obliquement,  il  creuse  dans  l'os  un  sillon  qui 
il  être  aussi  le  point  de  départ  de  fractures  rayonnantes  ;  parfois  il  ne 
ermioe  qu^une  simple  contusion  du  tissu  osseux.  Les  extrémités  spon- 
lues  des  os  longs  et  les  os  courts  se  comportent  à  peu  près  de  la  même 
dière;  ils  se  laissent  traverser  de  part  en  part  et  sans  qu*il  s'y  pro- 
se d^éclats,  lorsque  le  projectile  est  animé  d'une  impulsion  suf- 
nte.  Le  tissu  subit  alors  un  véritable  écrasement;  on  ne  trouve  dans 
canal  qu'une  sorte  de  poussière  d'os.  Quand  sa  vitesse  est  moin- 
1,  le  projectile  reste  enclavé  à  une  certaine  profondeur,  et,  lorsque  sa 
edion  est  oblique,  il  se  borne  à  creuser  un  sillon  dans  le  tissu  spon- 
ux.  Les  extrémités  des  os  longs  se  laissent  cependant  moins  facilement 
ferser  :  elles  éclatent  souvent  et  les  fractures  pénètrent  jusque  dans 
riîculation  voisine.  C'est  la  règle  pour  les  énarthroses,  tandis  qu'on  cite 
elques  exemples  de  balles  ayant  traverse  les  deux  condyles  du  fémur 
l'extrémité  supérieure  du  tibia  sans  y  produire  de  fêlure.  Lorsqu'une 
le  frappe  un  os  long  dans  un  point  de  sa  diaphyse,  elle  le  brise  ordi- 
rement  en  éclats;  souvent  même  elle  le  réduit  en  petits  fragments 
reniement  multiplies.  Ces  effets  sont  plus  souvent  produits  par  les 
les  oblongues  que  par  les  balles  sphériques,  à  cause  de  leur  force 
npûlsion  plus  grande.  Ces  graves  désordres  contrastent  avec  la  béni- 
te apparente  de  la  plaie  extérieure.  On  observe  rarement  des  fractures 
les  à  la  suite  des  coups  de  feu  ;  il  faut  pour  les  produire  que  le  projectile 
t  arrivé  à  la  fin  de  sa  course.  11  est  plus  rare  encore  que  la  diaphysc  se 
ise  traverser  sans  que  Tes  éclate  ;  il  existe  presque  toujours  des  fê- 
"es  dirigées  suivant  sa  longueur.  Dans  quelques  cas,  la  balle  pénètre 
as  la  cavité  médullaire  et  tombe  par  son  poids  jusqu'à  la  partie  in- 
ieure  de  ce  canal.  Dans  d'autres  circonstances,  elle  reste  enclavée 
»  le  tissu  osseux  ou  serrée  entre  deux  os  voisins. 
Les  petits  projectiles  s'écartent  souvent  de  leur  route  au  contact  des 
parfois  même  des  aponévroses  épaisses,  des  tendons  ou  des  ligaments 
islantSf  suffisent  pour  les  faire  dévier.  Tous  les  auteurs  en  citent  des 
amples  et  la  plupart  des  chirurgiens  ont  eu  l'occasion  d'en  observer. 
itAt  c'est  une  balle  entrée  par  la  région  frontale  qui  glisse  entre  les  os 
crâne  et  l'aponévrose  épicrânienne  pour  sortir  par  la  région  temporale 
occipitale;  tantôt  c'est  un  projectile  dont  l'ouverture  d'entrée  est  au- 
«ant  du  sternum,  celle  de  sortie  au  niveau  des  gouttières  vertébrales,  et 
li  a  parcouru  la  moitié  de  la  circonférence  de  la  poitrine  sans  y  pénétrer  ; 
i  en  cite  qui  ont  fait  le  tour  de  la  cuisse,  en  parcourant  la  moitié  de  sa 
rcontèrence  entre  l'aponévrose  d'enveloppe  et  la  peau,  d'autres  qui  ont 
mtoumé  le  cou  de  la  même  façon,  et  on  s'est  évertué  à  chercher  la  rai- 
nd'uo  pareil  phénomène.  Legoucst  nous  parait  en  avoir  donné  Texplica- 
on  la  plus  plausible.  Il  attribue  ces  trajets  circulaires  à  la  rotation  sur 
nrixcdont  les  projectiles  sont  animés.  Il  se  produit  là  quel(|ue  chose 
finalogue  à  ce  qui  se  passe  sur  le  tapis  d'un  billard,  lorsqu'une  bille 
ncontre  la  bande  avec  beaucoup  d'effet  contrarié  :  au  lieu  de  s'écarter 

ma,  BKT.  mÊb.  tr  our.  XXVIII.  — -  7 


98  PLAIE.   —  p.    PAR    INSTRUMENTS   CONTORDANTS. 

de  celle-ci  d'après  les  lois  de  la  réflexion,  elle  tend  à  s*en  rapprocher  sans 
cesse  en  vertu  de  sa  rotation  sur  elle-même  et  la  suit  jusqu'à  ce  que  ce 
mouvement  soit  éteint.  Les  balles  sphériques  peuvent  seules  se  comporter 
ainsi,  et  encore  à  la  condition  qu'elles  ne  soient  pas  déformées.  Les  balles 
oblongues,  animées  d'un  mouvement  hélicoide,  n'ont  encore,  dit  Legouest, 
offert  aucun  exemple  de  ces  déviations  circulaires.  Ce  n'est  pas  à  dire» 
pour  cela,  qu'elles  ne  s'écartent  jamais  de  leur  trajet,  ainsi  qu'on  l'avait 
cru  d'abord.  En  général,  elles  marchent  plus  droit  que  les  autres  parce 
qu'elles  ont  une  portée  plus  longue  et  qu'elles  atteignent  plus  souvent 
le  but,  avant  d'avoir  sensiblement  perdu  de  leur  force  d'impulsion,  mais, 
dans  le  cours  des  dernières  campagnes,  tous  les  chirurgiens  militaires 
ont  pu  constater  qu'elles  se  déviaient  parfois  de  leur  route.  Leur  forme 
allongée,  la  pointe  qu'elles  présentent  à  leur  partie  antérieure,  les  dispo> 
sent  même  à  s'écarter  de  la  ligne  droite,  quand  leur  vitesse  a  diminué 
et  qu'elles  frappent  des  parties  résistantes. 

Les  balles  de  plomb  ne  se  bornent  pas  toujours  à  se  dévier  au  contact 
des  os,  souvent  elles  se  déforment  à  la  suite  de  ce  choc.  Tantôt  elles 
s'aplatissent  et  deviennent  semblables  à  des  pièces  de  monnaie;  tantôt 
elles  se  creusent  de  sillons  profonds,  de  rainures  ou  de  stries  parallèles, 
au  fond  desquelles  on  trouve  de  petits  fragments  osseux  qui  s'y  sont  in- 
crustes; dans  d'autres  cas,  après  avoir  causé  la  fracture  de  l'os,  elles  se 
brisent  contre  ses  saillies  anguleuses  ou  tranchantes  et  se  divisent  en 
plusieurs  fragments  qui  poursuivent  isolément  leur  route  et  donnent  liea 
à  plusieurs  ouvertures  de  sortie,  tandis  qu'il  n'y  a  qu'une  ouverture 
d'entrée.  11  peut  arriver  aussi  que  l'un  des  fragments  sorte  seul  tandis 
que  les  autres  restent  dans  les  tissus  et  que  le  chirurgien,  induit  en  er- 
reur par  l'existence  de  deux  ouvertures  opposées,  méconnaisse  la  pré* 
sence  des  fragments  de  balle  restés  dans  la  plaie. 

Les  balles  oblongues  se  déforment  et  se  brisent  comme  les  antres.  Il  y 
a  même  lieu  de  penser  qu'en  raison  de  leur  vitesse  elles  se  partagent  sou- 
vent en  un  plus  grand  nombre  de  fragments  que  ne  le  feraient  les  balles 
sphériques  ;  toujours  est-il  que  pendant  la  dernière  guerre,  on  a  observé  des 
faits  de  ce  genre  qui  n'avaient  pas  été  signalés  auparavant.  On  a  trouvé . 
sur  les  champs  de  bataille  des  blessés  dont  les  plaies  étaient  littérale*^ 
ment  remplies  de  petits  morceaux  de  plomb  disséminés  au  milieu  des., 
tissus,  et  ce  fait  a  donné  lieu  à  différentes  interprétations.  On  s'est  d'abord  . 
accusé  réciproquement  d'avoir  fait  usage  de   balles  explosibles,  mais. 
cette  allégation  n'a  pas  tenu  devant  l'examen  consciencieux  des  faits.  Ci» 
a  supposé,  ensuite,  que  ce  morcellement  provenait  de  la  fusion  dis* 
balles  brusquement  arrêtées  dans  leur  course  et  de  la  transformation  m 
chaleur  du  mouvement  dont  elles  étaient  animées.  Cette  explication  a  élij 
proposée  par  Mulhaûser.  S'appuyant  sur  les  calculs  de  Tyndall  et  d'Hft^c] 
genbach,  d'après  lesquels  une  vitesse  de  quatre  cents  mètres  produit,  a 
moment  du  choc,  une  température  de  cinq  cent  quatre-vingt-deux  àk 
grés,  et  partant  de  ce  fait  que  le  plomb  fond  à  trois  cent  trente-quabn 
degrés,  Mulhaûser  en  conclut  que  toute  balle  qui  pénètre  dans  le  corp 


PLAIE.  —  p.    PAR   INSTRUMEMTS    CONTOKDAHTS.  99 

a  doit  s*y  fondi-e  instantanément  en  cautérisant  les  tissus.  Coze 
raabourg)  a  adopté  cette  manière  de  voir,  qui  est  trop  évidemment 
position  avec  les  faits  pour  qu'il  soit  nécessaire  de  la  discuter.  Nous 
58  encore  moins  disposé  à  mettre,  avec  Baudon,  la  friabilité  des 
sur  le  compte  des  insectes,  et  nous  pensons,  comme  Legouest,  que 
î  très-violent  des  projectiles  contre  les  coi^ps  durs  suffit  pour  rendre 
)  de  leur  fragmentation. 

balles  eiplosibles  produisent  des  effets  bien  autrement  sérieux, 
elles  éclatent  au  milieu  des  tissus  vivants.  Elles  ont  été,  comme  on 
,  inventées  par  Devisme,  pour  la  chasse  des  grands  animaux,  et  les 
cains  en  ont  fait  Tapplication  a  la  pêche  de  la  baleine.  Des  essais 
Paris  et  en  Angleterre  ont  prouvé  qu'elles  peuvent  être  adaptées 
mes  de  guerre  sans  nécessiter  aucun  changement  dans  celles-ci, 
es  résultats  de  ces  expériences  ont  été  tels,  qu'en  1868  l'empereur 
Bsie  provoqua  la  réunion  d'un  congrès  diplomatique  à  la  suite  du- 
es grandes  puissances  militaires  de  l'Europe  s'engagèrent  à  ne  pas 
)rrir.  Cette  convention  a  été  respectée.  Dans  aucun  pays,  il  n'a  été 
\  de  projectiles  de  cette  espèce  à  des  corps  d'armée.  Il  paraît  cer- 
l'îl  en  a  été  tiré  dans  le  cours  de  cette  dernière  guerre,  mais  ce 
k  des  faits  individuels  dont  on  he  saurait,  sans  injustice,  faire  re- 
r  la  responsabilité  jusqu'aux  gouvernements.  Ils  n'auraient  du  reste 
avantage  à  recourir  à  de  pareils  moyens.  La  fabrication  en  grand,  la 
vmtion,  le  transport  et  le  maniement  de  ces  engins  exposeraient  à 
e  périls.  Ils  s'altèrent  facilement  et  manquent  souvent  leur  effet. 
ont  extrêmement  sensibles,  comme  ceux  qui  ont  servi  aux  expé- 
ss  anglaises,  et  qui  éclataient  en  traversant  de  simples  membranes, 
ostituent  un  danger  de  tous  les  instants  pour  ceux  qui  s'en  servent; 
•ciatent  qu'au  contact  des  os,  comme  ceux  dont  nous  nous  sommes 
lans  les  expériences  que  nous  avons  faites  nous-même  à  Lorient, 
rO,  et  qui  sortaient  des  magasins  de  Devisme,  ils  manquent  com- 
wnt  leur  but,  car  sur  le  champ  de  bataille  il  ne  s'agit  pas  de  tuer 
vmmes,  mais  d'en  mettre  le  plus  possible  hors  de  combat,  et  toute 
re  compliquée  d'une  lésion  osseuse  sufBt,  quel  que  soit  le  projectile 
I  laite,  pour  entraîner  Tincapacité  de  servir  pendant  le  reste  de  la 
gne. 

balles  des  fusils  de  chasse,  des  pistolets,  des  revolvers,  produisent 
fets  semblables  à  ceux  des  armes  de  guerre,  à  la  gravité  près  ; 
i  est  d'autant  moindi*e  que  le  projectile  est  plus  petit  et  que  sa 
d'impulsion  est  plus  faible.  Les  plombs  de  chasse,  quoiqu'on  soit 
déro,  s'écartent  en  sortant  de  l'arme  et  couvrent  une  surface  d'au- 
lus  grande  que  le  but  est  plus  éloigné.  A  bout  portant,  le  coup  fait 

et  les  désordres  sont  considérables.  A  une  distance  plus  grande 

e  grain  de  plomb  pénètre  isolément,  mais,  s'ils  sont  de  gros  cali- 

.  très-rapprochés  les  uns  des  autres,  il  peut  en  résulter  des  acci- 

sérieux.  Nous  avons  vu  survenir  chez  un  blessé  qui  avait  reçu,  à 

nètres  environ,  un  coup  de  fusil  chargé  avep  du  plomb  n^  5,  une 


100  PLAIE.   —  p.    PAR   INSTRUMENTS  CONTONDANTS. 

gangrène  de  tout  l'avant-bras  qui  nous  força  à  pratiquer  rampulation 
au-dessus  du  coude.  Quand  le  coup  est  tiré  à  grande  distance,  les  grains 
de  plomb  se  bornent  le  plus  souvent  à  traverser  la  peau  sous  laquelle  ib 
restent  souvent  sans  occasionner  de  désordres.  Enfin  la  bourro  des  armes 
chargées  à  blanc  et  la  poudre  elle-même  peuvent  déterminer  des  bles* 
sures  sérieuses  quand  le  coup  est  tiré  de  très-près.  I>es  grains  de  poudre 
qui  ont  échappé  à  la  combustion  pénètrent  dans  le  tissu  de  la  peau  et  y 
produisent  un  véritable  tatouage.  Si  Texplosion  a  lieu  à  bout  portant,  le 
choc  des  gaz  qui  s'échappent  de  l'arme  peut  occasionner  des  plates  con* 
tuscs  d'une  extrême  gravité. 

Les  plaies  d'armes  à  feu  s'accompagnent  rarement  de  douleur  très- 
vive.  Le  blessé,  au  moment  où  il  est  atteint,  perçoit  la  sensation  d'un 
choc  qu'il  compare  à  un  coup  de  bâton  et  qui  est  suivi  d'un  engourdisse- 
ment, d'un  sentiment  de  pesanteur  dans  la  partie.  Souvent,  dans  Tar- 
deur  du  combat,  les  soldats  ne  ressentent  pas  le  coup,  et  ne  s'aper- 
çoivent qu'ils  sont  frappés  qu'en  tombant  à  terre,  ou  en  constatant 
l'impossibilité  de  mouvoir  un  de  leurs  membres.  Pour  que  la  douleur  soit 
intense,  il  faut  qu'un  ou  plusieurs  cordons  nerveux  aient  été  dilaccrésou 
incomplètement  divisés.  Dans  ce  cas,  le  blessé  ressent  des  élancements, 
des  frémissements  extrêmement  pénibles  qui  s'étendent  à  toute  la  Ion* 
gueur  du  membre.  L'ébranlement  nerveux  est  beaucoup  moins  consi- 
dérable qu'à  la  suite  des  blessures  faites  par  les  gros  projectiles.  La  stu- 
peur générale  fait  presque  toujours  défaut,  sauf,  bien  entendu,  dans  les  cas 
de  lésion  du  crâne,  et  la  stupeur  locale  ne  se  traduit  habituellement  que 
par  l'engourdissement  et  le  sentiment  de  pesanteur  dont  nous  avons 
parlé;  mais,  sur  le  champ  de  bataille,  les  blessés  surpris  au  milieu  de 
l'animation  du  combat  arrivent  souvent  à  Tambulance  en  proie  à  une 
excitation  des  plus  vives,  à  une  sorte  de  délire  qui  se  traduit  par  de  la 
loquacité,  des  mouvements  incohérents,  des  rires  ou  des  larmes,  et  qui  se 
termine  le  plus  souvent  par  le  sommeil  ou  par  le  retour  au  calme,  après 
que  la  blessure  a  été  pansée.  Lorsque  cet  état  se  prolonge,  on  en  triom- 
phe facilement  à  l'aide  des  antispasmodiques  ou  des  narcotiques. 

Les  plaies  par  armes  à  feu  ne  sont  pas  en  général  suivies  d'hémor- 
rhagics  abondantes,  et  nous  en  avons  déjà  donné  les  raisons.  Dans  la  majo- 
rité des  cas,  elles  laissent  s'écouler  quelques  gouttes  d'un  sang  noir  qui 
se  coagule  promptemcnt  et  dont  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'occuper,  mais  il 
n'en  est  plus  ainsi  lorsqu'un  vaisseau  artériel  de  quelque  importance  a 
été  ouvert.  Dans  ce  cas,  l'hémorrhagie  est  la  règle  et  elle  est  souvent 
suivie  de  mort.  Morard  a  sans  doute  été  trop  loin  en  disant  que  les  trois 
quarts  de  ceux  qui  perdent  la  vie  dans  une  bataille  périssent  par  suite 
de  la  perte  de  sang,  mais  il  résulte  des  recherches  faites  pendant  la  cam- 
pagne de  Crimée  que  ce  genre  de  mort  entre  pour  18/00  dans  la  totaliti 
des  décès  causés  par  le  feu  de  Tennemi  ;  encore  ne  fait-on  pas  figurer  dans 
cette  évaluation  les  hémorrhagies  consécutives,  à  la  suite  desquelles  tasl 
de  blessés  succombent.  Nous  reviendrons  sur  cette  complication  à  l'occa- 
sion du  traitement. 


PLAIE.    p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS.  101 

La  marche  et  le  pronostic  des  plaies  d'armes  à  feu  diflereut  suivant 
qu'elles  sont  simples  ou  compliquées.  On  considère  comme  simples  celles 
qui  n'intéressent  que  la  peau  et  les  masses  musculaires  ;  comme  compli- 
qua celles  qui  s'accompagnent  de  la  présence  de  corps  étrangers,  de 
û  lésion  de  nerfs,  de  vaisseaux  ou  d*organes  importants,  de  la  fracture 
d'un  ou  de  plusieurs  os,  et  celles  qui  pénètrent  dans  les  articulations  ou 
dans  les  cavités  splanchniques.  On  peut  voir  survenir  enfin,  pendant 
le  cours  du  traitement,  les  accidents  qu'il  y  a  lieu  de  redouter  à  la  suite 
de  tontes  les  blessures  et  qui  constituent  des  complications  nouvelles. 
Les  plaies  simples  marchent  régulièrement  vers  la  guérison,  lorsque 
leurs  cours  n'est  entravé  par  aucun  des  accidents  consécutifs  dont  nous 
Tenons  de  parler.  Dans  les  vingt-quatre  heures  qui  suivent  la  blessure, 
il  surrient  un  peu  de  gonflement  et  de  chaleur  dans  là  région  que  le 
projectile  a  traversée  ;  le  trajet  de  la  plaie  devient  plus  sensible,  les  mou- 
▼ements  du  membre  plus  pénibles  et  plus  douloureux.  Les  deux  ouver- 
tures laissent  suinter  un  peu  de  liquide  séreux  et  roussâtre.  Ces  phéno- 
mènes augmentent  d'intensité  pendant  trois  ou  quatre  jours,  puis  il  se 
produit  une  détente,  la  suppuration  apparaît,  un  sillon  éliminateur  s'éta- 
blit autour  des  eschares,  qui  se  détachent  du  huitième  au  douzième  jour, 
en  laissant  à  leur  place  une  surface  vermeille,  couverte  de  bourgeons 
charnus  et  sécrétant  un  pus  de  bonne  nature.  Les  phénomènes  inflamma- 
toires disparaissent,  puis  la  suppuration  diminue  et  la  cicatrisation  s'opère. 
Elle  est  complète  au  bout  d'un  mois  ou  six  semaines.  Ce  terme  ne  peut 
être  considéré  que  comme  une  moyenne  ;  il  est  des  plaies  qui  se  ferment 
beaucoup  plus  vite  que  d'autres  ;  on  en  a  même  vu  se  réunir  par  première 
intention  on  du  moins  après  une  suppuration  insignifiante.  Les  plaies 
linéaires,  celles  qui  sont  peu  profondes  ou  qui  siègent  à  la  face  se  cica- 
trisent plus  vite  que  celles  qui  présentent  de  longs  trajets  sinueux  peu 
favorablement  disposés  pour  l'écoulement  des  fluides.  L'état  de  santé  du 
blessé  influe  également  sur  la  durée  de  la  guérison.  Rapide  chez  les 
hommes  vigoureux  et  bien  portants,  la  cicatrisation  devient  interminable 
chez  les  sujets  affaiblis,  anémiés,  et  surtout  chez  ceux  qui  sont  en  proie 
au  scorbut  ou  à  toute  autre  affection  débilitante.  En  général,  l'ouverture 
de  sortie  se  ferme  la  première. 

Pour  être  certain  qu'une  plaie  d'arme  à  feu  est  exempte  de  complica- 
tions, il  faut  de  tout  nécessité  en  explorer  le  trajet.  Dans  quelques  cas 
rares,  la  vue  et  les  commémoratifs  suffisent  pour  établir  le  diagnostic, 
mais  cette  exception  ne  fait  que  confirmer  la  règle.  Lorsque  la  blessure 
siège  sur  une  partie  encore  recouverte  de  vêtements,  il  faut  les  en- 
lever avec  les  plus  grandes  précautions  et  les  couper  ou  les  fendre,  si 
cela  est  nécessaire.  Pendant  qu'on  déshabille  le  blessé,  il  arrive  souvent 
que  le  projectile  tombe  sur  le  sol,  soit  qu'il  ait  été  arrêté  par  les  vête- 
ments, qu'il  n'ait  pénétré  qu'à  une  petite  profondeur  et  qu'il  ait  été 
chassé  par  les  mouvements  ou  par  les  contractions  musculaires,  soit  enfin 
qu'il  ait  repoussé  devant  lui  la  chemise  du  malade  et  qu'il  s'en  soit  coiffé 
comme  d'un  doigt  de  gant.  Parfois  enfin  la  balle  reste  collée  aux  vête- 


iOSi  PLAIE.    —  p.    PAR   INSTRUMENTS  CONTONDANTS. 

ments  et  ne  se  retrouve  que  plus  lard.  Il  faut  être  prévenu  de  ces  parti- 
cularités, afin  de  se  mettre  en  garde  contre  les  erreurs  de  diagnostic. 
Avant  d'explorer  le  trajet  de  la  plaie,  le  chirurgien  doit  se  faire  rendre 
compte  de  Tattitude  du  blessé  au  moment  où  il  a  été  atteint,  de  la  direc- 
tion dans  laquelle  il  a  reçu  le  coup,  et  le  placer  dans  la  même  position. 
Sans  cette  précaution,  les  rapports  des  parties  sont  changés  et  le  projectile 
peut  échapper  aux  recherches.  Les  explorations  doivent  se  faire  avec  mé- 
nagement, mais  avec  persévérance  ;  la  crainte  de  pénétrer  dans  une  cavité 
naturelle  encore  intacte,  de  provoquer  le  retour  d*une  hémorrhagie 
en  déplaçant  un  caillot,  ou  de  causer  des  douleurs  excessives,  peut  seule 
imposer  des  limites  à  cette  insistance. 

L'indicateur  de  la  main  droite,  lorsque  les  ouvertures  sont  assez  larges 
pour  le  laisser  pénétrer,  ou  Tun  des  autres  doigts  de  la  même  main  dans  le 
cas  contraire,  suffisent  le  plus  souvent  pour  explorer  le  trajet  du  projec- 
tile et  doivent  toujours  être  préférés  aux  instruments,  à  cause  de  la  net- 
teté des  sensations  qu'ils  recueillent.  Les  sondes  et  les  stylets  ne  doivent 
être  employés  que  lorsque  Tétroitesse  de  la  plaie  s'oppose  à  l'introduction 
du  doigt  ou  que  sa  profondeur  ne  permet  pas  d'arriver,  parce  moyen,  i 
en  parcourir  toute  l'étendue.  Ces  instruments  ne  fournissent  jamais  des 
notions  aussi  certaines  et  sont  exposés  à  faire  fausse  route,  à  léser  des 
organes  intacts  et  à  causer  de  nouveaux  accidents. 

Les  plaies  d'armes  à  feu  doivent  être  explorées  aussitôt  que  possible. 
Cette  opération  est  beaucoup  moins  douloureuse  au  moment  de  l'accident, 
alors  que  la  partie  est  encore  engourdie,  quelle  ne  le  serait  plus  tard.  Au 
bout  de  vingt-quatre  heures,  le  gonflement  inflammatoire  a  déjà  rendu 
les  plaies  plus  sensibles  et  l'examen  plus  difficile.  Ces  règles  ont  été 
adoptées  par  tous  les  chirurgiens  d'armée.  Il  faut  toutefois  en  excepter 
Stromeyer,  qui  conseille  d'attendre  qu'on  ait  pu  soumettre  le  malade 
au  chloroforme  et  de  s'abstenir  de  toute  exploration,  lorsqu'il  existe 
une  fracture  à  la  diaphyse  d'un  os  long  et  qu'on  veut  tenter  la  con- 
servation du  membre.  La  présence  du  projectile  ne  suffit  même  pas, 
à  ses  yeux,  pour  autoriser  l'introduction  du  doigt,  parce  que  cette  ma- 
nœuvre déplace  souvent  les  fragments  osseux.  Aucune  des  fractures  par 
coup  de  feu,  que  nous  avons  vues  guérir  à  Floing,  près  Sedan,  ajoute- 
t-il,  n'avait  été  explorée.  (Stromeyer,  Remarques,  in  Mac  Cormac^ 
p.  128.)  Nous  ne  pensons  pas  que  cette  réserve  trouve  beaucoup  d'imi- 
tateurs en  France. 

Loi*sque  le  chirurgien  s'est  assuré  qu'il  n'existe  pas  de  complication, 
il  lui  reste  à  résoudre,  avant  de  procéder  au  pansement,  une  question 
qui  a  été  l'objet  de  bien  des  controverses.  C'est  celle  du  débridement 
préventif.  Cette  opération  consiste  à  inciser  le  trajet  parcouru  par  le 
projectile,  dans  le  but  de  prévenir  l'étranglement  des  parties  qu'il  a  tra- 
versées. Conseillée  par  Ambroise  Paré,  adoptée  par  l'Académie  de  chi*- 
rurgie,  elle  répondait,  d'après  les  idées  de  l'époque,  à  tant  d'indications 
importantes,  qu'on  en  était  arrivé  à  pourfendre  les  membres  dans  tous  les 
sens.  Ravaton  fut  un  des  premiers  à  s'élever  contre  de  pareilles  exagéra- 


PLAIE.    —  p.    PAR   IlfSTRUMEMTS   COMTOIIDAIVTS.  105 

tions;les  chirurgieus  militaires  du  premier  Empire  Timitèrenl  et,  tout  en 
conserrant  une  pratique  qui  cadrait  avec  leur  chirurgie  essentiellement 
actÎTe^  ils  en  tracèrent  les  indications  et  les  contre-indications  d'une  ma- 
nière beaucoup  plus  rationnelle.  Dupuytren  adopta  leurs  principes,  Bégin 
sVn  montra  le  zélé  partisan  ;  mais,  depuis,  le  débridement  a  trouvé  dans 
Baudens  un  adversaire  résolu,  et  la  plupart  des  chirurgiens  de  Paris  se 
sont  ralliés  à  ses  idées,  après  les  événements  de  1849,  imitant  en  cela 
les  chirurgiens  anglais  et  les  allemands,  qui  sont  toujours  restés  fidèles 
aux  doctrine^  de  Hunter  et  qui  traitent  les  plaies  d*armes  à  feu  comme 
les  autres.  Aujourd'hui  le  débridement  a  repris  une  certaine  faveur 
parmi  les  chirurgiens  de  l'armée  française  :  Scrive  et  Lustreman  s*en  sont 
constitués  les  défenseurs  après  la  guerre  d'Orient,  et  Legouest,  dont  l'au- 
torité est  si  grande  en  pareille  matière,  ne  dissimule  pas  la  prédilection 
qu^î\  lui  inspire  :  «  En  résumé,  dit-il,  nous  sommes  plus  partisan  du  débri- 
«  dément  préventif  que  de  l'abstention,  parce  qu'il  rend  l'exploration  plus 
ff  (àeile  et  plus  sûre,  parce  qu'en  chirurgie  il  vaut  mieux  prévenir  un  dan- 
<x  ger  que  de  le  laisser  naître  pour  le  combattre,  parce  que  l'étranglement, 
c  moins  commun  en  effet  qu'on  ne  l'a  dit,  ne  laisse  pas  que  d'être  très-fré- 
c  queni*  enfin,  parce  qu'il  met  à  l'abri  de  préjudiciables  erreurs.  »  En  par- 
tant de  ces  principes,  il  donne  le  conseil  de  débrider  toutes  les  fois  que 
la  plaie  est  profonde,  située  dans  des  régions  dont  les  différentes  couches 
sont  séparées  par  de  fortes   aponévroses  et  exposées  à  l'inflammation, 
lorsque  des  incisions  sont  nécessaires  pour  permettre  d'explorer  complè- 
tement le  trajet  du  projectile,  enfin,  et  à /br/tori  lorsqu'il  s'agit  d'aller 
à  la  recherche  d'un  projectile  ou  de  lier  une  artère  pour  remédier  à  une 
hémorrhagie.  Il  est  vrai  que,  dans  ce  cas,  l'incision  n'a  plus  pour  but  de 
prévenirrétranglement  des  parties  et  ne  peut,  par  conséquent,  plus  porter 
le  nom  de  débridement.  Cette  petite  opération  se  pratique  avec  un  bis- 
touri à  pointe  mousse  conduit  sur  le  doigt  ou  sur  la  sonde  cannelée,  si 
le  doigt  ne  peut  pas  être  introduit,  et,  dans  ce  cas,  il  doit  être  substitué  au 
conducteur  métallique,  aussitôt  que  la  dilatation  de  Touverturc  est  suf- 
fisante. Lorsque  le  bistouri  est  arrivé  à  la  profondeur  convenable,  on  in- 
eise  le  trajet  sur  deux  points  opposés  et  parallèlement  à  l'axe  du  membre. 
S'il  se  rencontre  sur  le  trajet  une  aponévrose  épaisse  et  résistante,  il  est 
préférable  d'y  pratiquer  un  débridement  multiple.  Dans  tous  les  cas,  il  est 
indispensable  d'éviter  la  direction  des  nerfs  et  des  vaisseaux  d'un  certain 
Tohmie,  et  c'est  pour  cela  surtout  que  le  doigt  est  le  meilleur  conducteur. 
CcUe  manière  de  procéder  ne  ressemble  en  aucune.façon  à  celle  qui  a 
été  proposée,  en  1831,  par  un  chirurgien  allemand,  G.  Simon,  et  érigée 
en  méthode  par  Julian  Chisholm,  dans  son  manuel  de  chirurgie  mili- 
taire, à  l'usage  de  l'armée  des  États-Unis.  Cette  méthode  a  pour  but  de 
convertir  les  blessures  par  armes  à  feu  en  plaies  sous-cutanées.  Elle  consiste 
\  cerner  les  deux  ouvertures  par  des  incisions  elliptiques  comprenant  seu- 
lement l'épaisseur  de  la  peau  qu'on  dissèque  ensuite  dans  une  étendue 
suffisante  pour  rapprocher  les  bords  saignants  de  l'ellipse,  et  à  les  réunir 
Y^  la  sature.  Nous  nous  bornerons  à  indiquer,  en  passant,  ce  mode  de 


104  PLAIE.    —   p.    PAR   INSTRUMEfiTS  CONTONDANTS. 

traitement  contre  lequel  protestent  à  la  fois  le  raisonnement  et  Texpé- 
rience. 

Les  plaies  simples  ne  sont  pas  les  plus  communes  sur  les  champs  de 
bataille,  et,  parmi  les  complications  qui  peuvent  se  présenter,  la  plusfr^ 
quente,  celle  qui  doit  tout  d'abord  attirer  TaUention,  est  la  présence  des 
corps  étrangers.  Les  projectiles  sont  ceux  qu'on  doit  s'attendre  à  y  ren- 
contrer le  plus  souvent;  après  eux  viennent  dans  l'ordre  de  fréquence  les 
lambeaux  d'étoffe  détachés  des  vêtements,  les  fragments  de  cuir  ou  de 
métal  provenant  de  l'équipement,  des  objets  contenus  dans  les- poches  du 
blessé,  des  débris  de  bois  ou  de  pierre  que  le  projectile  a  poussés  de- 
vant lui.  Le  diagnostic  de  cette  complication  est  souvent  difficile.  Lors- 
que la  plaie  n'a  qu'une  ouverture,  il  y  a  des  raisons  pour  penser  que 
le  projectile  y  est  contenu  ;  cependant  il  peut  avoir  été  rejeté  au  dehors 
par  un  des  mécanismes  que  nous  avons  indiqués  plus  haut.  U  arrive 
parfois,  au  contraire,  qu'une  plaie  qui  présente  deux  ouvertures  oppo- 
sées n'en  recèle  pas  moins  un  corps  étranger,  parce  que  le  projectile 
s'est  brisé  dans  son  trajet  et  y  a  laissé  un  de  ses  fragments.  Pins  sou- 
vent encore  il  y  a  abandonné  les  lambeaux  d'étoffe  ou  les  autres  corps 
qu*il  avait  poussés  devant  lui.  Le  nombre  des  ouvertures  ne  peut 
donc  fournir  que  des  notions  incertaines,  et  c'est  pour  cela  qu'il  est  indis- 
pensable  d'explorer  toute  plaie  qui  peut  contenir  un  corps  étranger. 
Cette  exploration  se  fait,  comme  nous  l'avons  dit,  à  l'aide  du  doigt.  On  le 
fait  pénétrer  doucement,  par  de  légers  mouvements  de  vrille,  et  après  avoir 
fait  prendre  au  malade  la  position  qu'il  avait  au  moment  de  la  blessure. 
Lorsque  la  plaie  n'est  pas  très-profonde  et  que  son  trajet  est  rectiligne, 
les  projectiles  se  découvrent  assez  facilement.  Ils  se  reconnaissent  à 
leur  forme  et  à  leur  dureté.  Parfois  cependant  la  balle  enveloppée  dans 
le  tissu  cellulaire,  recouverte  de  débris  de  parties  molles,  ne  donne  pas 
la  sensation  d'un  corps  métallique,  mais  plutôt  celle  d'une  portion  d'os 
dans  une  situation  anormale.  Il  est  encore  plus  difficile  de  reconnaître 
au  toucher  et  même  à  la  vue  la  présence  des  lambeaux  d'étoffe.  Ils  ont  la 
consistance  des  tissus  vivants,  ils  y  adhèrent  et  le  sang  dont  ils  sont  teints 
leur  en  donne  la  couleur.  Lorsqu'ils  sont  situés  à  des  profondeurs  qu'on 
ne  *pcut  atteindre  qu'avec  la  sonde,  ils  échappent  souvent  à  l'examen, 
tandis  que  les  projectiles  produisent  sous  le  choc  du  métal  une  sensation 
particulière  sur  laquelle  on  ne  se  mépi^nd  pas  quand  on  l'a  souvent 
éprouvée.  11  est  vrai  que  l'interposition  du  sang,  de  lambeaux  de  tissus  ou 
d'eschares,  empêche  souvent  le  contact  d'être  immédiat  et  ne  permet  pas 
de  recueillir  cette  sensation. 

Il  ne  faut  pas  se  borner  à  explorer  la  plaie  par  son  ouverture.  Souvent 
le  projectile  a  traversé  la  région  d'outre  en  outre  et  a  été  arrêté  par  les 
dernières  couches  de  parties  molles  ou  même  par  la  peau.  Dans  ce  cas, 
on  le  rencontre  en  palpant  avec  précaution  le  point  diamétralement  op» 
posé  à  la  plaie  et  en  pressant  doucement  dans  la  direction  de  Tinstrii» 
ment  explorateur  maintenu  en  place.  Enfm,  ce  que  nous  avons  dit  de  ht 
déviation  des  balles  fait  pressentir  des  difficultés  d'un  autre  oixlre.  C'esttui 


PLAIE.   —   p.  PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS.  103 

commémoratif  et  à  ses  connaissances  en  anatomie  que  le  chirurgien  doit 
faire  appel  pour  découvrir  ou  pour  deviner  le  trajet  flexueux  que  le  pro- 
jectile a  dû  suÎTre.  La  présence  de  ce  dernier  dans  une  région  éloignée  de 
la  blessure  est  parfois  révélée  par  une  ecchymose,  une  tuméfaction  insolite 
ou  un  peu  de  douleur  à  la  palpation. 

Lorsqu'im  projectile  se  trouve  enclavé  dans  un  massif  osseux,  la  sonde 
rencontrant  ce  corps  immobile  ne  parvient  pas  à  le  distinguer  des  saillies 
Toisines,  résistantes  comme  lui.  Il  y  a  quelques  années,  ce  point  de  dia- 
gnostic a  été  l'objet  de  nombreuses  recherches.  C'était  à  l'occasion  de  la 
blessure  reçue  par  le  général  Garibaldi  au  combat  d'Aspromonte.  La  balle, 
après  avoir  fracturé  la  malléole  interne  du  côté  droit  et  ouvert  l'articula- 
lion,  s*était  logée  dans  la  dépression  placée  au  devant  de  la  poulie  de 
Tasiragale  sur  le  col  de  cet  os.  Les  chirurgiens  italiens  réunis  près  du 
b\essé,  Riboli,  de  Negri,  Prandina,  Zanetti,  Rizoli  et  Porta,  avaient  dé- 
claré, d*UD  commun  accord,  que  le  projectile  était  sorti  de  la  plaie.  Néla- 
îon^  appelé  au  cinquante-neuvième  jour  de  la  blessure,  reconnut  la  pré- 
sence de  la  balle  et  en  détermina  la  position.  Arrivé  à  Paris,  il  fit  conFec- 
lionner  un  stylet  terminé  par  une  petite  olive  en  porcelaine  blanche  non 
vernissée  et  l'envoya  à  Zanetti.  Cet  instrument,  après  avoir  été  introduit 
jusqu'au  corps  suspect,  ramena  par  le  frottement  une  tache  noirâtre 
que  l'analyse  fit  reconnaître  pour  du  plomb.  Les  doutes  qui  restaient 
encore  dans  l'esprit  des  chirurgiens  italiens  furent  complètement  dissipés 
et  la  balle  fut  extraite  quelque  temps  après.  Le  stylet  de  Nélaton  est 
resté  dans  la  pratique;  il  est  d'un  emploi  facile,  mais,  une  fois  taché  par 
le  métal,  il  est  très-difficile  à  nettoyer.  Pour  obvier  à  cet  inconvénient, 
Lecomte  t  proposé  de  remplacer  l'olive  du  stylet  explorateur  par  une 
double  curette  à  bords  tranchants.  Cette  pince,  en  rapprochant  ses  mors, 
détache  quelques  parcelles  de  métal  qu'on  peut  ensuite  examinera  loisir. 
A  la  même  époque,  Fabre  eut  l'idée  d'employer  l'électricité  pour  la  re- 
cherche des  projectiles.il  inventa,  dans  ce  but,  un  appareil  que  Trouvé  a 
simplifié  et  dont  Gosselin  s'est  servi  avec  avantage  pour  découvrir  une 
balle  enkystée  qui  séjournait  depuis  quatre  mois  dans  les  tissus.  Cet 
instrument  a  été  adopté  par  la  Société   internationale  de  secours  aux 
blessés.  En  1870,  un  médecin  russe,  Milliot,  proposa  de  se  servir  d'une 
sonde  métallique  vissée  sur  un  électro -aimant  portatif  de  RuhmkoriT. 
Enfin  la  chimie  a  voulu  payer  aussi  son  tribut  à  ce  genre  de  recherches. 
Deoeux  (de  Saint-Calais)  a  soumis,  en  1872,  à  l'Académie  de  médecine, 
\m  moyen  très-simple  pour  déceler  à  la  fois  la  présence  et  la  nature  des 
projectiles.  Il  consiste  à  toucher  le  corps  suspect  avec  un  pinceau  trempé 
dans  un  acide  affaibli.  S'il  s'agit  d'un  métal,  le  pinceau  fournit  les  réac- 
tions qui   lui  sont   propres,  après  quelques  instants  de  contact  ;  si  le 
trajet  est  trop  étroit  pour  laisser  passer  une  tige  exploratrice,  on  la  rem- 
place par  une  injection  acide.  Legouest,  chargé  de  faire  à  l'Académie  de 
médecine  un  rapport  sur  ce  procédé,  reconnut  qu'il  décelait  facilement 
li^  présence  du  plomb,  que  les  résultats  étaient  moins  probants  quand  il 
s'agissait  du  fer  et  presque  nuls  pour  le  zinc,  le  cuivre  et  le  bronze.  En 


106  PLAIE.    —   p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

résumé,  tous  ces  procédés  sont  ingénieux,  mais  ils  nous  paraissent  trop 
délicats  et  trop  incertains  pour  pouvoir  rendre  de  grands  services  dans 
la  chirurgie  d'armée. 

La  recherche  des  projectiles  doit  être  faite  avec  persévérance  ;  cependant 
il  est  des  cas  où  il  faut  savoir  s'arrêter  dans  ces  perquisitions.  Le  chirur- 
gien est  parfois  retenu  par  la  crainte  d'ouvrir,  avec  les  instruments  d'ex- 
ploralion,  une  cavité  splanchnique  que  la  balle  a  respectée  ou  une  articu- 
lation sur  laquelle  elle  a  glissé.  II  doit,  dans  d'autres  cas,  se  résigner  à 
abandonner  le  corps  étranger,  lorsqu'il  faudrait,  pour  le  poursuivre,  tour» 
mentor  les  parties,  multiplier  les  perquisitions  douloureuses  et  causer  des 
désordres  plus  graves  que  ceux  que  son  séjour  peut  faire  redouter.  Nous 
avons  dû  renoncer  ainsi  à  la  recherche  de  deux  balles  de  pistolet,  qu'un 
de  nos  confrères  avait  reçues  de  la  main  d'un  aliéné.  La  première  l'avait 
atteint  au  niveau  du  premier  espace  intercostal  tout  près  du  sternum  ;  la 
plaie  paraissait  se  diriger  directement  d'avant  en  arrière*  mais  il  n'y 
avait  aucun  signe  de  pénétration.  Nous  fîmes  les  débridements  néces- 
saires pour  arriver  jusqu'au  projectile  sans  pouvoir  le  découvrir,  et  nous 
nous  arrêtâmes  au  moment  où  il  était  impossible  d'aller  plus  loin  sans 
entrer  dans  la  poitrine.  La  seconde  balle  était  entrée  dans  le  flanc,  et  se 
déroba,  comme  la  précédente,  à  nos  recherches.  Deçà  côté  aussi  les  signes 
de  pénétration  faisaient  absolument  défaut.  Nélaton,  appelé  deux  jours 
après,  approuva  notre  réserve,  et  le  blessé  guérit  sans  accident,  en  con- 
servant ses  balles.  Cette  tolérance  des  tissus  vivants  pour  les  corps  métal- 
liques et  notamment  pour  les  projectiles  en  plomb  est  depuis  longtemps 
connue,  ainsi  que  les  migrations  qu'ils  opèrent  à  la  longue  sous  l'in- 
fluence de  la  pesanteur  :  il  faut  bien  savoir,  toutefois, *qu s  ce  sont  là  des 
faits  exceptionnels  et  qu'ils  n'autorisent  pas  l'abstention  systématique  que 
certains  chirurgiens  ont  voulu  ériger  en  règle  générale.  Sauf  les  cir- 
constances particulières  que  nous  venons  d'indiquer,  il  faut  rechercher 
les  projectiles  et  les  extraire  aussitôt  qu'on  les  a  reconnus. 

Il  est  rare  que  l'extraction  des  corps  étrangers  puisse  se  faire  à  l'aide 
des  doigts,  le  plus  souvent  il  faut  recourir  à  des  instruments  spéciaux. 
L'arsenal  de  l'ancienne  chirurgie  en  renfermait  un  nombre  considérable, 
mais  on  les  a  complètement  abandonnés,  ils  n'ont  plus  qu'un  intérêt 
historique  et  nous  ne  les  décrirons  pas.  On  ne  se  sert  plus  aujourd'hui 
que  des  pinces  dites  tire-balle.  Elles  ont  la  plus  grande  analogie  avec 
les  pinces  à  polypes  ;  leurs  mors  solides  et  résistants  sont  légèrement 
concaves,  creuses  de  rainures  profondes  et  percés  de  trous  ;  leurs  bran- 
ches très-longues  sont  entre-croisées  de  façon  à  s'écarter  aussi  peu  que 
possible,  afin  de  ne  pas  distendre  le  trajet  de  la  blessure,  tout  en  per- 
mettant aux  mors  de  s'ouvrir  de  la  quantité  nécessaire  pour  embrasser  le 
projectile.  Lorsqu'il  est  saisi,  la  pince  se  maintient  fermée  à  l'aide  d'un 
rivet  dont  l'une  de  ses  branches  est  munie  et  de  deux  trous  qui  sont  prati- 
qués sur  l'autre.  Son  articulation  n'a  pas  d'entablure  et  chacune  des  tiges 
isolées  peut  servir  d'élévatoire. 

Pour  introduire  le  tire-balle,  on  le  fait  glisser  sur  la  face  palmaire 


I 

1 


PLAIE.   —  p.    PAR  mSTRUMElITS   CONTONDANTS.  107 

de  Vîndicateur  gauche  préalablement  porté  jusqu*au  fond  de  la  plaie; 
lorsque  le  bout  de  la  pince  a  touché  le  projectile,  on  écarte  les  mors  en 
les  poussant  légèrement,  et  on  saisit  la  balle  en  les  rapprochant.  Lors- 
qu'eile  est  chargée,  on  retire  le  tout  avec  la  plus  grande  précaution,  de 
bçoQ  à  ne  pas  tirailler  les  fibres  musculaires  ou  aponévrotiques  qu'on 
aurait  pu  saisir  en  même  temps.  On  est  averti  de  cet  incident  par  la  ré- 
sistance qu'on  rencontre  et  par  la  douleur  qu'accuse^le  blessé.  11  faut  alors 
lâcher  le  projectile  et  tâcher  de  le  mieux  saisir  une  seconde  fois.  Il 
anÎTe  souvent  que  la  balle  glisse  et  s'échappe  des  mors  de  la  pince,  soit 
au  moment  ou  on  ferme  celle-ci,  soit  en  traversant  l'ouverture  trop 
étroite  de  quelque  aponévrose  profonde.  Dans  ce  dernier  cas,  avant  de 
saisir  de  nouveau  le  projectile,  il  faut  débrider  sur  le  point  où  la  résis- 
tance s'est  rencontrée.  On  éprouve  parfois  d'assez  grandes  difficultés  à 
élargir  suffisamment  tout  le  trajet  de  la  blessure.  Nous  nous  sottimes 
trouvé  dans  cet  embarras,  chez  un  soldat  d'infanterie  de  marine  qui 
avait  été  blessé  au  combat  de  Bazeilles.  La  balle  avait  pénéti^c  par  le  trou 
sous-pubien  et  était  restée  dans  le  petit  bassin.  Un  long  trajet  fistuleux 
permettait  d'arriver  jusqu'à  elle;  on  la  sentait  mobile,  il  était  facile  de 
la  charger,  mais  elle  était  arrêtée  au  niveau  du  trou  ovale  par  Tétroitesse 
du  trajet,  limité  d'un  côté  par  la  branche  ascendante  de  l'ischion  et  de  l'au- 
tre par  des  brides  cicatricielles.  Pour  élargir  cet  étroit  passage,  il  fallait 
inciser  ces  brides,  au  risque  de  léser  une  artériole,  ou  bien  attaquer  la 
branche  osseuse.  C'est  à  ce  dernier  parti  que  nous  nous  arrêtâmes.  Avec  la 
gouge  et  le  maillet  nous  pratiquâmes  un  échancrure  qui  nous  suffit  pour 
extraire  sans  effort  la  pince  et  le  projectile  qui  séjournait  depuis  six  mois 
dans  la  pbie. 

L'extraction  des  balles  oblongues  n'est  pas  plus  difficile  que  celle  des 
balles  sphériques^  C'est  à  tort  qu'on  a  recommandé  de  les  saisir  par  leur 
plus  grand  diamètre.  Cette  façon  d'agir  nécessiterait  un  écartement  des 
mors  de  la  pince  qui  pourrait  avoir  de  sérieux  inconvénients.  Le  fait  est 
que  dans  la  plupart  des  cas  on  saisit  les  projectiles  et  les  corps  étrangers 
comme  on  peut.  L'essentiel,  conune  le  dit  Legouest,  c'est  de  les  bien  tenir, 
afin  qu'ils  ne  s'échappent  pas  pendant  les  manœuvres  de  l'extraction. 

Lorsque  la  balle  a  traversé  le  membre  presque  de  part  en  part,  ou 
qu'elle  a  subi  des  déviations  telles,  qu'elle  est  fort  éloignée  de  son  ou- 
verture d'entrée,  il  y  a  plus  d'avantages  à  l'extraire  par  une  contr'ouver- 
tnre  que  par  la  voie  qu'elle  a  parcourue.  L'incision  doit  être  pratiquée 
sv  le. point  où  le  projectile  se  fait  le  plus  nettement  sentir.  Le  chirurgien 
diVise  les  tissus  couche  par  couche,  en  s'aidant  de  l'indicateur  gauche 
pour  guider  le  bistouri  et  fait  soutenir  par  un  aide  les  parties  opposées  à 
la  contr'ouverture,  afin  d'empêcher  le  projectile  de  fuir.  11  faut  découvrir 
largement  celui-ci,  inciser  avec  le  plus  grand  soin  le  tissu  cellulaire  et 
les  brides  fibreuses  qui  le  recouvrent,  pour  pouvoir  le  charger  et  l'extraire 
d'\m  seul  coup,  sans  tiraillements  et  sans  violence.  Lorsqu'il  y  a  une 
grande  épaisseur  de  tissu  â  diviser,  on  a  proposé,  pour  frayer  la  route  au 
bistouri,  de  se  servir  de  la  sonde  à  dard,  usitée  dans  la  taille  hypogas- 


108  PLAIE.    —   p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

trique,  ou  d'un  long  trocart  comme  ceux  dont  Chassaignac  se  servait 
pour  le  drainage  ;  ces  moyens,  parfois  dangereux,  ne  sont  indiqués  que 
dans  des  cas  tout  à  fait  exceptionnels. 

Lorsque  les  balles  sont  profondément  engagées  dans  le  tissu  osseux, 
les  pinces  ne  sufQsent  pas  pour  les  extraire.  Il  en  est  de  même  lors- 
qu'elles sont  enclavées  entre  deux  os.  Il  faut  alors  recourir  à  des 
instruments  spéciaux.  Ceux  qui  sont  usités  en  pareil  cas  sont  les 
élévatoires,  le  tire-fond,  le  trépan,  la  gouge  et  le  maillet.  L'éléva- 
toire,  conduit  par  l'indicateur  gauche,  agit  comme  un  leyier,  pour 
ébranler,  soulever  et  déplacer  la  balle,  mais  il  n'a  de  prise  sur  elle  que 
lorsqu'elle  est  peu  profondément  incrustée,  et  qu'elle  a  conservé  une 
certaine  mobilité.  Le  tire-fond,  sorte  de  vrille  terminée  par  un  doublé 
pas  de  vis  tranchant,  est  d'un  usage  encore  plus  restreint.  Legouest,  qui 
l'a  souvent  employé,  n'en  a  jamais  obtenu  de  résultats  satisfaisants,  et, 
parmi  les  nombreux  projectiles  extraits  des  os  qu'il  a  eu  l'occasion  d'exa- 
miner, il  n'en  a  pas  rencontré  un  seul  qui  ait  été  enlevé  avec  le  tire-fond. 
Nous  ne  nous  arrêterons  donc  pas  à  décrire  le  mode  d'emploi  d'un 
instrument  aussi  défectueux.  Le  trépan  s'applique,  soit  en  embrassant 
avec  sa  couronne  la  balle  elle-même  de  manière  à  l'enlever  avec  l'anneau 
osseux  qui  l'entoure,  soit  en  pratiquant  à  côté  d'elle  une  ouverture  qu'on 
agrandit  ensuite  avec  la  gouge  et  le  maillet  et  par  laquelle  se  fait  Tex- 
traction. 

Il  nous  reste  à  parler  maintenant  des  complications  qui  résultent  de  la 
lésion  des  nerfs,  des  vaisseaux  et  des  os,  de  l'ouverture  des  articulations 
ou  des  cavités  splanchniques.  La  lésion  des  troncs  nerveux  s'accompagne 
toujours  de  troubles  immédiats  de  la  sensibilité  et  du  mouvement  ;  leur 
section  complète  entraine  des  paralysies  presque  toujours  incurables, 
parce  que  les  extrémités  contuses  et  déchirées  se  réunissent  isolément  et 
sont  comme  perdues  au  milieu  de  la  cicatrice.  Nous  n'insisterons  pas  sur 
ces  phénomènes,  parce  qu'ils  ont  été  longuement  étudiés  dans  un  autre 
article  (Voij.  Nerfs,  lésions  physiques,  t.  XXIII,  p.  624).  Nous  passe- 
rons rapidement,  et  pour  le  même  motif,  sur  les  conséquences  des  plaies 
d'artères.  Nous  avons  déjà  signalé  la  fréquence  des  hémorrhagies  à  la 
suite  de  leur  blessure,  et  les  dangers  de  celles  qui  se  produisent,  dans  le 
cours  du  traitement,  alors  que  les  eschares  se  détachent,  ou  sous  l'in- 
fluence de  certains  états  diathcsiques,  tels  que  le  scorbut  et  la  pourriture 
d'hôpital.  Dans  ces  circonstances,  on  voit  même  souvent  survenir  des 
hémorrhagies  en  nappe  qui  ne  tiennent  pas  à  la  lésion  des  gros  vaisseaux, 
et,  pendant  le  siège  de  Paris,  la  plupart  des  chirurgiens  ont  remarqué  que 
ces  hémorrhagies  imprévues  étaient  les  signes  avant-coureurs  de  l'infec- 
tion purulente.  Quoi  qu'il  en  soit,  lorsqu'elles  sont  sous  la  dépendance 
d'une  lésion  artérielle  à  laquelle  il  n'a  pas  été  porté  remède  au  moment 
même  de  la  blessure,  il  faut  se  hâter  d'aller  à  la  recherche  des  deux 
bouts  du  vaisseau  qui  donne  et  en  pratiquer  la  ligature.  Cette  règle  a  été 
posée  par  Guthrie  et  sa  doctrine  a  fini  par  l'emporter  sur  celle  de  Dia— 
puylren,  grâce  à  Nélaton,  qui  en  a  démontré  la  supériorité  par  ses  ex 


PLAIE.   —  p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS.  109 

riencessur  les  animaux  et  par  les  succès  de  sa  pratique.  Les  chirurgiens 
militaires  français  en  ont  reconnu  les  avantages  pendant  la  campagne  de 
Crimée;  les  Anglais,  après  quelques  hésitations,  ont  adopté  la  méthode 
de  leur  compatriote  ;  Stromeyer  a  fait  de  même,  et  aujourd'hui  il  n'est 
pas  de  règle  de  chirurgie  d'armée  qui  soit  mieux  établie.  Malheureuse- 
ment, elle  est  quelquefois  inapplicable,  par  suite  de  l'état  d'inflammation, 
de  gonflement,  de  délabrement  des  parties,  ou  en  raison  de  la  position 
inaccessible  de  Tarière  à  l'endroit  où  elle  a  été  lésée.  Nous  nous  sommes 
trouvé  dans  cette  impossibilité  en  présence  d'une  lésion  de  l'artère 
radiale  chez  un  artilleur  qui  s'était  fait  partir  un  marron  d'artifice  dans 
la  paume  de  la  main.  Les  parties  molles  du  premier  espace  interosseux 
avaient  été  détruites  et  l'artère  ouverte  au  moment  où  elle  passe  entre  les 
tctes  des  deux  premiers  métacarpiens.  On  avait  tamponné  cette  plaie 
noire,  anfractueuse,  au  fond  de  laquelle  on  ne  pouvait  songer  à  aller 
chercher  le  vaisseau.  Nous  liâmes  la  radiale  au  lieu  d'élection,  et,  quel- 
ques jours  après,  l'hémorrhagie  reparut.  Il  fallut  lier  successivement  et 
à  amassez  longs  intervalles  la  cubitale  et  l'humérale;  enfin,  cinquante  et 
quelques  jours  après  la  blessure,  nous  vîmes  survenir,  par  le  même  point, 
une  dernière  hcmorrhagic  qui  céda  définitivement  -à  une  forte  application 
de  fer  rouge. 

En  parlant  des  effets  des  projectiles  sur  les  os,  nous  avons  signalé  la 
gravité  des  désordres  qu'ils  occasionnent.  Ces  lésions  participent  tout  à  la 
fois  de  la  fracture  et  de  la  plaie  d'os.  Elles  s'accompagnent  d'une  véritable 
attrition  du  tissu  osseux  sur  le  point  que  le  projectile  a  frappé,  de  lon- 
gues fêlures  qui  s'étendent  en  tout  sens,  d'esquilles  dont  les  unes  sont 
GuUèrement  détachées  de  l'os  et  dont  les  autres  y  tiennent  encore.  Les 
premières  sont  libres  et  complètement  privées  de  vie.  Elles  sont  enfoncées 
au  milieu  des  parties  molles  ou  retenues  dans  le  foyer  de  la  fracture. 
Elles  ont  des  bords  tranchants,  à  cassure  nette,  à  vive  arête,  et  ressemblent 
à  des  morceaux  de  porcelaine  brisée.  Ce  sont  celles  que  Dupuytren  ap- 
pelait   esquilles  primitives,    11  désignait  sous  le  nom  de  secondaires 
celles  qui,  bien  que  mobiles,   adhèrent  encore  à  l'os    par  des  tissus 
fibreux  ou  des  lambeaux  de  périoste,  et  qui  finissent  le  plus  souvent  par 
s'en  séparer  sous  l'influence  du  travail  pathologique.  Enfin,  il  réservait 
le  nom  de  tertiaires  aux  esquilles  qui,   complètement  adhérentes  au 
début  et  n'ayant  subi  aucun  déplacement,  peuvent,  dans  quelques  cas, 
eontÎDuer  à  vivre,  mais  qui  sont  le  plus  souvent  frappées  de  mort  au  bout 
dun  certain  temps  et  deviennent  alors  de  véritables  séquestres.  La  nécrose 
peut  également  s'emparer  de  l'extrémité  des  fragments,  et  cet  accident 
sexplique  par  le  décollement  du  périoste,  qui  s'étend  très-souvent  au 
delà  du  foyer  de  la  fracture,  ainsi  que  de  nombreux  exemples  en  ont  été 
dtés  i  la  Société  de  Chirurgie  et  notamment  dans  la  séance  du  G  dé- 
cembre 1871. 
le  diagnostic  des  lésions  osseuses  produites  par  les  coups  de  feu  est 
niement  difficile.  Indépendamment  des  signes   communs  à  toutes  les 
fraeUires,on  a,  pour  s'éclairer,  l'exploration  directe  à  l'aide  du  doigt.  Elle 


no  PLAIE.   p.    PAR   INSTRUMENTS   CONTONDANTS. 

permet  d'apprécier  l'étendue  des  désordres,  le  nombre,  le  volume  et  le 
degré  de  mobilité  des  esquilles.  Ces  blessures  sont  toujours  d'un  pronostic 
grave.  Pour  les  chirurgiens  militaires  du  commencement  du  siècle,  une 
fracture  par  coup  de  feu  constituait,  le  plus  souvent,  un  cas  d'amputation. 
La  chirurgie  d'armée  est  aujourd'hui  devenue  beaucoup  plus  conservatrice. 
Le  sacrifice  du  membre  est  toujours  considéré  comme  indispensable  dans 
les  fractures  comminutivcs  avec  lésion  des  gros  troncs  vasculaires  ou 
nerveux,  mais,  lorsque  les  désordres  causés  par  les  balles  ne  portent  que 
sur  les  os,  la  conservation  est  la  règle,  et  l'aroputatiion  l'exception.  On 
s'en  abstient  mcme  au  membre  supérieur,  dans  le  cas  de  plaie  artérielle, 
à  moins  que  la  brachiale  n'ait  été  atteinte  au-dessus  de  la  naissance  de 
rhumérale  profonde.  Au  membre  inférieur,  la  règle  est  plus  sévère,  mais 
pour  Texposer  il  faudrait  entrer  dans  la  discussion  des  cas  particuliers, 
et  c'est  ce  qui  a  été  fait  dans  un  autre  article  (Voy.  Amputation,  t.  II,  p.  89). 

Lorsque  la  conservation  du  membre  a  été  décidée,  la  première  indica- 
tion qui  se  présente  consiste  à  extraire  les  esquilles  et  à  pratiquer  pour 
cela  les  incisions  nécessaires,  sans  crainte  de  leur  donner  trop  d'étendue. 
A  l'exception  de  Stromeyer,  dont  nous  avons  déjà  cité  l'opinion,  tous  les 
chirurgiens  sont  d'accord  sur  la  nécessité  d'enlever  sur-le-champ  les 
esquilles  primitives,  mais  les  avis  sont  partagés  en  ce  qui  concerne  les 
esquilles  secondaires.  Percy  et  Larrey  les  laissaient  en  place,  et  Dupuy- 
tren  avait  adopté  cette  pratique,  contre  laquelle  Guthrie  s'était  déjà  élevé. 
Roux,  Bégin  et  Baudens  ont  fait  un  précepte  formel  d'extraire  immé- 
diatement tous  les  fragments  osseux  libres  ou  adhérents.  Les  chirurgiens 
français  et  les  anglais  s'y  sont  conformés  en  Crimée,  et  les  allemands,  a 
l'exception  de  Stromeyer,  ont  fait  de  même  dans  leurs  dernières  guerres. 
Legouest  a  exposé  ce  point  de  pratique  avec  sa  lucidité  habituelle,  et  les 
raisons  qu'il  donne  pour  étayer  le  précepte  de  l'extraction  immédiate 
sont  aussi  convaincantes  que  possible.  11  est  certain  qu'il  faut  renoncer  à 
leur  ablation,  lorsqu'elle  entraine  de  trop  grands  dangers  et  qu'elle  né- 
cessite des  délabrements  trop  considérables,  mais  ce  sont  là  des  cas 
exceptionnels. 

L'extraction  des  esquilles  doit  se  faire  sans  violence  et  avec  les  plus 
grands  ménagements.  11  faut  se  garder  de  les  arracher,  de  déchirer,  de 
tordre  les  parties  molles  qui  les  retiennent  encore  et  qui  doivent  être 
coupées  avec  le  bistouri  ou  les  ciseaux.  Quant  à  ménager  le  périoste,  avec 
l'espoir  de  le  voir  reproduire  un  os  nouveau,  c'est  un  conseil  qu'il  est 
bon  de  suivre,  lorsque  la  fracture  est  superficielle  et  que  les  esquilles 
sont  facilement  accessibles,  mais  c'est  là  le  cas  le  plus  rare,  et  dans  la 
pratique  on  est  le  plus  souvent  obligé  d'y  renoncer,  en  raison  des  difB- 
cultcs  que  présenterait  une  dissection  aussi  délicate  et  de  l'étendue  des 
incisions  qu'elle  nécessiterait,  pour  arriver  le  plus  souvent  à  un  résultat 
négatif.  On  à  donné  le  conseil  de  réséquer  les  extrémités  des  fragments, 
lorsqu'elles  sont  anguleuses  et  dépouillées  de  leur  périoste,  mais  cette 
pratique  est  le  plus  souvent  inutile  et  peut  avoir  des  inconvénients. 

Lorsqu'une  plaie  d'arme  à  feu  avec  lésion  des  os  a  été  débridée,  dé- 


PLAIE).  p.    PAR   llfSTROMENTS   CONTONDANTS.  iH 

barrassée  avec  soin  des  corps  étrangers  et  des  esquilles ,  elle  est  réduite 
à  la  condition  d'une  fracture  comminutive  ordinaire,  avec  pénétration  de 
r air  dans  son  foyer,  et  doit  être  traitée  comme  telle.  Le  premier  soin 
qu'elle  réclame  consiste  dans  l'application  d'un  appareil  capable  d'im- 
mobiliser le  membre  tout  en  permettant  de  surveiller  et  de  panser  la 
plaie.  Cet  appareil  doit  être  appliqué  sur  le  champ  de  bataille  même  et 
avant  le  transport  du  blessé.  La  chirurgie  moderne  possède,  pour  atteindre 
ce  but,  une  grande  variété  de  moyens  qui  ont  été  décrits  et  appréciés  à 
l'article  Faactores,  t.  XV,  p.  466. 

Il  nous  resterait  à  parler  d'un  dernier  ordre  de  complications  immé- 
diates résultant  de  l'ouverture  des  articulations  et  des  cavités  splanchni- 
ques,  mais  ce  sujet  a  été  traité  ou  le  sera  dans  d'autres  articles,  auxquels 
nous  nous  bornons  à  renvoyer  le  lecteur. 

Indépendamment  des  complications  que  nous  venons  de  passer  en  revue 
et  qui  résultent  de  Faction  immédiate  des  projectiles,  les  plaies  d'armes 
à  feu  sont  exposées  à  tous  les  accidents  consécutifs  qui  peuvent  survenir 
dans  le  cours  des  blessures  graves.  Elles  y  sont  même  plus  particulière- 
ment disposées  par  la  violente  contusion  qui  les  accompagne,  par  Tin* 
dammation  et  les  longues  suppurations  qui  en  résultent.  Les  phlegmons 
profonds,   les  fusées  purulentes,  les  trajets  fistulcux  étendus,  sont  la 
conséquence  fréquente  des  désordres  qui  accompagnent  la  lésion  des  os, 
et  dans  toutes  les  plaies  d'armes  à  feu,  même  quand  elles  sont  exemptes 
de  complications,  on  doit  craindre  l'explosion  des  accidents  formidables 
que  font  naître  les  grandes  agglomérations  de  blessés.  Dans  ces  conditions, 
Vérysipèle,  l'angéioleucite,  le  tétanos,  la  pourriture  d'hôpital,  l'infection 
purulenle,  sont  à  l'état  de  menace  permanente  et  constituent  la  princi- 
pale cause  des  revers  que  la  chirurgie  d'armée  a  si  souvent  à  déplorer. 
i\ous  ne  faisons  que  signaler  ces  accidents,  malgré  leur  importance,  parce 
qu'ils  ne  présentent  rien  de  particulier  dans  le  cas  qui  nous  occupe  et 
que  chacun  d'entre  eux  a  sa  place  marquée  et  son  article  spécial  dans  ce 
Dictionnaire. 

Il  nous  reste  peu  de  chose  à  ajouter  à  ce  que  nous  avons  dit  déjà  sur 

le  traitement  des  plaies  d'armes  à  feu.  Lorsqu'on  a  pratiqué  les  débride- 

meots  nécessaires,  arrêté  les  hémorrhagies,  enlevé  les  corps  étrangers  et 

les  esquilles,  il  ne  reste  plus  qu'à  panser  le  malade  et  à  le  placer  dans  les 

meilleures  conditions  hygiéniques  pour  assurer  sa  guérison.  Le  pansement 

doit  être  aussi  simple  que  possible.  On  a  depuis  longtemps  renoncé  aux 

tentes,  aux  sétons,  aux  baumes  et  aux  onguents  si  chers  à  l'ancienne 

>      clûnirgie;  la  plupart  des  chirurgiens  d'armée  n'emploient  plus  d'autre 

^      to^({ue  que  l'eau  froide.  On  la  trouve  partout,  elle  permet  de  mainte- 

^j      nir  la  plaie  dans  un  état  de  propreté  constante,  elle  modère  l'indam- 

^  \     matioD,  et  les  blessés  peuvent  humecter  eux-mêmes  les  pièces  de  leur 

appareil  lorsqu'ils  en  sentent  le  besoin.  L'eau  froide  peut  être  employée 

sans  inconvénient  jusqu'à  la  cicatrisation  complète  ;  il  ne  faut  y  renoncer 

que  lorsque  la  suppuration  est  à  peu  près  tarie  ou  lorsque  la  surface 

traumatiquc  devient  blafarde.  Il  est,  toutefois,  des  circonstances  dans 


[ 
/ 


lis  PLAIE.    p.    PAR   ARnACHEXEMT. 

lesquelles  ce  pansement  si  simple  ne  suffit  pas.  Dans  les  ambulances  et 
dans  les  liôpitaux  encombrés,  lorsque  les  complications  que  nous  aTons 
indiquées  régnent  épidémiquement  au  milieu  des  blessés,  lorsqu*en  un 
mot  on  est  obligé  de  les  traiter  dans  un  milieu  infectieux,  il  est  néces- 
saire de  recourir  aux  pansements  antiseptiques,  et  l'acide  phénique  est 
le  désinfectant  qui  a  donné  jusqu'ici  les  meilleurs  résultats  (Voy.  Pause- 
MENTS,  t.  XXV,  p.  747). 

Les  irrigations  continues,  la  glace  même,  trouvent  aussi  leurs  applica- 
tions dans  quelques  cas  spéciaux  ;  on  en  obtient  de  bons  résultats  dans  les 
plaies  d'armes  à  feu  des  articulations  et  notamment  dans  celles  de  la 
main  et  du  pied,  mais  ce  mode  de  traitement,  qui  demande  une  grande 
surveillance  et  l'emploi  d'appareils  un  peu  compliqués,  ne  peut  être  mis 
en  usage  que  dans  les  hôpitaux  et  ne  saurait,  par  conséquent,  rendre  de 
grands  services  en  chirurgie  d'armée. 

On  a  bien  rarement  l'occasion  de  recourir  aux  émissions  sanguines.  La 
saignée  générale,  dont  les  anciens  faisaient  un  si  large  emploi,  est  tombée 
en  désuétude.  On  n'a  même  presque  jamais  recours  aux  sangsues,  aux- 
quelles Baudens  accordait  encore  une  si  grande  confiance.  La  pratique 
moderne  est  dominée,  ajuste  raison,  par  la  crainte  de  l'anémie  et  deTépui- 
sement,  auxquels  les  blessés  par  les  armes  de  guerre  sont  presque  fata- 
lement voués,  loi*sque  leur  guérison  se  fait  attendre  et  que  leur  séjour 
dans  les  hôpitaux  se  prolonge.  Au  lieu  de  leur  faire  perdre  du  sang,  on 
ne  songe  qu'a  soutenir  leurs  forces,  et,  les  premiers  accidents  dissipés, 
la  fièvre  traumatique  passée,  on  les  soumet  à  un  régime  aussi  fortifiant, 
aussi  réparateur  que  possible.  Une  bonne  alimentation,  un  air  pur,  une 
propreté  minutieuse,  sont,  encffet,  les  premières  conditions  d'une  guérison 
rapide  ;  malheureusement  elles  sont,  le  plus  souvent,  irréalisables,  dans  les 
circonstances  où  ces  blessures  se  produisent. 

IV.  Plaies  par  arrachement.  —  On  désigne  sous  ce  nom  les  solutions 
de  continuité  qui  résultent  de  Tavulsion  d'une  partie  du  corps  produite 
par  une  traction  violente.  Quoique  toutes  les  parties  saillantes  puissent 
être  ainsi  arrachées,  ce  n'est  qu'aux  membres  que  ce  genre  de  blessures 
offre  de  Tintérét.  Elles  ne  sont  pas  fréquentes.  Dans  les  traités  classiques 
leur  histoire  est  tracée  d'après  quelques  observations  qu'on  retrouve 
partout  et  qui  ne  sont  pas  suffisamment  détaillées.  Il  a  été  pourtant 
publié  assez  de  faits,  depuis  quelques  années,  pour  qu'on  puisse  faire  une 
étude  plus  complète  de  ces  lésions. 

Les  plaies  par  arrachement  sont  plus  fréquentes  aux  membres  supérieurs, 
et  ce  sont  les  doigts  qui  en  sont  le  plus  souvent  le  siège.  Dans  le  tome  11 
des  Mémoires  de  r Académie  de  Chirurgie^  on  en  trouve  huit  exemples 
dont  sept  ont  été  réunis  par  Morand.  Nous  eu  avons  recueilli  une  quin- 
zaine d*autres  dans  les  recueils  périodiques  récents,  et  notamment  dans 
les  Bulletins  de  la  Société  de  Chirurgie. 

Dans  l'ordre  de  fréquence,  c'est  la  main  qui  vient  ensuite;  nous  en 
avons  trouvé  quatre  observations  ;  puis  Tépaule,  dont  il  existe  trois 
cas  bien  authentiques,  et  enfin  lavant-bras,  dont  nous  ne  connaissons 


PLAIE.    —   p.    PAR   ARRACHEMENT.  |1{3 

qu'un  exemple.  Au  membre  inférieur,  ce  sont  aussi  les  orteils  qui 
sont  le  plus  souvent  arrachés;  le  pied  vient  après;  nous  n'avons 
trouvé  qu'un  seul  fait  d'arrachement  de  la  jambe,  et  jamais  on  n'a 
observé  l'avulsion  du  membre  inférieur  tout  entier.  Si  nous  avons 
cité  des  chiffres,  ce  n*est  pas  que  nous  ayons  la  prétention  d'avoir 
recueilli  toutes  les  observations,  ni  le  désir  d'établir  une  statistique, 
c'est  seulement  pour  faire  connaître  le  nombre  de  faits  qui  nous  ont  servi 
à  rédiger  ce  travail. 

Les  causes  qui  produisent  l'arrachement  des  membres  agissent  toutes 
d'après  le  même  mécanisme.  Une  violente  traction  s'opère  sur  une  extré- 
mité, le  corps  résiste  par  son  poids  ou  par  Telfort  que  fait  le  blessé,  et  la 
déchirure  s'opère  à  une  distance  plus  ou  moins  grande  du  point  où  la  force 
a  été  appliquée.  Le  plus  souvent,  cette  force  est  celle  d'une  machine  dans 
les  engrenages  ou  dans  la  courroie  de  laquelle  une  partie  du  corps  s'est 
engagée.  Parfois,  c'est  un  nœud  coulant,  une  corde  qui  s'enroule  autour 
d'on  membre,  l'entraîne  et  l'arrache  lorsque  le  corps,   arrêté   par  un 
obstacle  ne  peut  plus  suivre  le  mouvement.  C'est  ainsi  que  fut  emporté 
le  bras  de  Samuel  Wood,  le  meunier,  dont  l'observation,  publiée  en  1738 
dans  \esPhilo8ophical  Transactions^  a  été  reproduite  depuis  partons  les 
taiears.  Nous  connaissons  quelques  exemples  d'arrachement  du  pied 
produit  par  le  même  mécanisme  à  bord  des  navires.  Lorsqu'un  homme 
I  l'imprudence  de  mettre  le  pied  dans  le  cercle  formé  par  une  manœuvre 
roulée  sur  le  pont  et  que  celle-ci  vient  à  se  dérouler  brusquement,  la  spi- 
rale se  resserre,  l'homme,  se  sentant  saisi,  s'accroche  instinctivement 
an  premier  point  résistant  qu'il  rencontre,  et  le  pied  est  emporté.  C'est 
orÂnaîremoit  en  jetant  l'ancre  ou  en  amenant  les  huniers  que  cet  [acci- 
dent se  produit. 

Les  gens  qui  conduisent  des  chevaux  ont  souvent  les  doigts  arrachés 

par  la  bride  de  l'animal,  lorsque  celui-ci  fait  un  écart  brusque.  J.  D.  Larrey 

a  le  premier  signalé  la  fréquence  de  cette  blessure  chez  les  cavaliers  qui 

entortillent  le  bridon  autour  de  leurs  doigts  lorsqu'ils  mènent  leurs  che- 

yauii  l'abreuvoir.  Enfin,  il  existe  dans  la  science  un  fait  d'arrachement  de 

rarant-bras  survenu  dans  les  tentatives  faites  pour  réduire  une  luxation 

de  l'épaule.  Les  tractions  avaient  été  opérées  avec  prudence  par  un  chi- 

mi^'en  d'un  habileté  reconnue,  et  la  facilité  avec  laquelle  le  membre  se 

détacha  ne  peut  s'expliquer  que  par  une  altération  profonde  des  tissus 

qûfut,  du  reste,  constatée  à  l'autopsie. 

Les  plaies  par  arrachement  ne  présentent  pas  l'aspect  hideux  des  bles- 

^i    sure  Élites  par  les  gros  projectiles,  bien  qu'il  y  ait  quelque  analogie 

1^    dans  leur  mode  de  production.  Leur  surface  est  inégale  parce  que  les 

"t   tissus,  n'ayant  pas  la  même  force  de  coiiésion,  ont  cédé  à  des  hauteurs 

I  difTérentcs,  mais  elle  n'est  pas  noire  et  infiltrée  de  sang,  parce  qu'elle  n'a 

1  pas  été  contuse.  La  peau  est  le  plus  souvent  amincie,  frangée  sur  les 

j  bords,  parfois  roulée  sur  sa  surface  saignante  ;  tantôt  elle  dépasse  le  ni- 

j  teau  des  chairs  et  tantôt  elle  les  laisse  à  découvert  dans  une  certaine 

"'^  I  étendue.  Quand  la  lésion  a  été  produite  par  la  constriction  d'un  lien,  les 

I  WWT.  MCT.   UiD.  ET  CHU.  XXVIII   —  8 


114  PLAIE.    —  p.    PAB  ARRACHEIUSNT. 

téguments  sont  quelquefois  coupés  circulairement  et  avec  netteté.  Les 
muscles  cèdent  plus  facilement  dans  leur  masse  charnue  que  dans  leur 
partie  fibreuse,  et  la  portion  du  membre  qui  a  été  détachée  entraine  avec 
elle  de  longs  bouts  de  tendons  accompagnés  parfois  de  quelques  fibres 
musculaires.  Ce  fait  est  constant  lorsqu'il  s'agit  de  la  main,  des  doigts 
ou  des  orteils.  Les  portions  tendineuses  ont,  dans  ce  cas,  de  vingt  à  trente 
centimètres  de  longueur.  Dans  un  fait  rapporté  à  la  Société  de  Chirurgie 
.  par  H.  Larrey ,  le  tendon  fléchisseur  de  l'index  gauche  attenant  à  la  troisième 
phalange  mesurait  trente-trois  centimètres.  Les  nerfs  présentent  souvent 
la  même  disposition.  Huguier  a  rapporté  une  observation  dans  laquelle 
la  main,  arrachée  par  une  machine,  avait  entraîné  vingt  centimètrës  du 
nerf  médian,  mais  la  partie  détachée  allait  s'amincissant  jusqu'à  son 
extrémité  et  ne  contenait  guère  que  du  névrilème.  Dans  le  fait  d*ju^ 
rachement  de  Tavant-bras  que  nous  avons  cité,  tous  les  nerfs  du  pkxvs 
brachial  avaient  été  détachés  à  une  assez  grande  hauteur  au-dessos  du 
plan  général'  de  la  section.  Il  en  est  de  même  des  artères  dont  le  bout  in- 
férieur fait  saillie  à  la  surface  du  tronçon,  tandis  que  le  bout  supérieur  se 
rétracte  fortement  vers  la  racine  du  membre  et  que  son  extrémité  ae 
ferme  de  manière  à  mettre  obstacle  à  l'écoulement  du  sang.  Ce  phéiMh 
mène  remarquable  tient  à  la  manière  dont  les  différentes  tuniques  se 
comportent  lorsquelles  cèdent  à  la  traction.  L'interne  et  la  moyenne^  plp 
fragiles,  se  rompent  les  premières  et  se  recroquevillent  à  l'intérieur  ;dy 
vaisseau  ;  la  celluleuse  s'allonge,  se  distend,  finit  par  céder  en  s'effihud« 
comme  le  fait  un  tube  de  verre  devant  la  lampe  d'émailleur,  et  coiffe  lei 
extrémités  rétractées  des  deux  autres.  Le  sang  qui  vient  se  heurter  coatre 
cet  obstacle  s'arrête,  se  coagule,  le  caillot  ainsi  formé  s'affermit  et  s'op- 
pose d'une  manière  définitive  à  l'hémorrhagie.  Le  même  phénomène  se 
produit,  à  plus  forte  raison,  dans  les  vaisseaux  de  petit  calibre  et  dans  les 
capillaires. 

La  plupart  des  auteurs  et  notamment  ceux  du  Compendium  de  Chi- 
rurgie ont  avancé  que  la  séparation  s'opérait  toujours  dans  une  jointure. 
Le  fait  n'est  pas  complètement  exact.  La  fracture  des  os  est  signalée  daoi 
la  plupart  des  observations  que  nous  avons  consultées.  L'omoplate  était 
rompue  en  travers  chez  Samuel  Wood  ;  la  plupart  des  os  du  carpe  étaient 
brisés,  dans  Tobservation  citée  par  Huguier  ;  chez  la  femme  dont  TavanU 
bras  avait  été  arraché  pendant  les  efforts  de  réduction,  la  partie  supé- 
rieure de  l'olécrane  était  restée  appendue  au  tendon  du  triceps,  tandis  que 
la  moitié  postérieure  du  condyle  de  l'humérus,  l'cpicondyle  et  une  po^  * 
tion  de  l'épitrochlée,  adhéraient  aux  muscles  de  l'avantrbras.  Les  mal*  - 
léolessont  le  plus  souvent  arrachées  avec  le  pied,  et,  lorsqu'il  s'agit  dai  -^ 
doigts,  les  phalanges  sont  souvent  fracturées.  * 

Les  plaies  par  arrachement  ne  sont  pas  douloureuses  :  Samuel  Wood  m  4 
s'aperçut  qu'il  avait  perdu  le  bras  qu'en  le  voyant  passer  dans  la  roue  dl 
son  moulin;  l'enfant  cité  par  Benomont  n'était  préoccupé  que  de  11 
crainte  d'encourir  les  reproches  de  ses  parents  ;  les  cavaliers  qui  ont  kl 
doigts  arrachés  par  la  bride  de  leur  cheval  ne  s'en  aperçoivent  pas  ton* 


PLAIE.   —  p.    BHPOISONNÉBS.  115 

jours  an  premier  moment,  mais,  lorsque  de  longs  bouts  de  tendons  ont 
accompagné  la  phalange,  le  blessé  ressent  souvent  une  douleur  très-vive 
au  point  où  la  séparation  a  eu  lieu.  Ces  blessures  ne  saignent  pas.  Tous 
les  observateurs  en  ont  fait  la  remarque,  et  nous  en  avons  indiqué  les  rai- 
sons. U  ne  faudrait  cependant  pas  croire  à  l'impossibilité  d'une  hémor- 
rhagie,  en  pareille  circonstance.  Dans  une  des  observations  que  nous 
avons  citées,  au  moment  bili  Tavant-bras  se  détacha,  un  flot  de  sang  cou- 
vrit le  chirurgien,  qui  s'empressa  de  lier  l'artère. 

Le  pronostic  des  plaies  par  arrachement  n'est  pas  aussi  redoutable  qu'on 
pourrait  le  croire.  En  général,  elles  guérissent  plus  vite  et  sont  suivies  de 
moins  d'accidents  que  les  amputations  pratiquées  au  même  point.  On 
attribue  cette  bénignité  relative  à  la  rétraction  des  vaisseaux,  qui  empê- 
che réooolement  du  sang  et  son  infiltration  dans  les  tissus  ;  quelques 
chirurgieQS  ont  même  proposé  d'ériger  l'arrachement  en  méthode  opé- 
ratoire et  de  rappliquer  partout  où  la  structure  des  parties  peut  s'y  prêter. 
Noos  n*avoaipas  à  nous  occuper  de  cette  question,  mais,  tout  en  recon- 
naissant que  les  suites  de  ces  blessures  sont  le  plus  souvent  bénignes, 
nous  raf^Uerons  que  Billroth  a  vu  succomber  rapidement  un  garçon  de 
14  ans  qui  avait  eu  le  bras  droit  arraché  par  une  roue  de  machine,  que  la 
femme  dont  Tavant-bras  s'était  détaché  sous  l'effort  de  tractions  chirurgi- 
eales  est  morte,  au  bout  de  douze  jours,  d'infection  purulente,  et  qu'il 
n^est  pas  rare  de  voir  survenir  des  accidents  du  côté  de  l'avant-bras  et  de 
la  main,  chei  les  gens  qui  ont  eu  des  doigts  arrachés  avec  leurs  tendons. 
l'inflammation  remonte  souvent  le  long  des  gaines  vides  et  donne  lieu  à 
des  abcès  qui  retardent  notablement  la  guérison. 

L'indication  que  présentent  ces  blessures  est  simple.  Elle  consiste  à 
r^larîser  la  section  que  la  cause  vulnérante  a  produite.  Si  les  os  sont 
brués  comme  cela  arrive  souvent  aux  phalanges,  on  en  pratique  la  désar- 
ticulation dans  la  jointure  la  plus  voisine.  S'il  s'agit  d'une  extrémité  ar^ 
ticnlaire  qui  dépasse  le  niveau  des  parties  molles,  on  en  fait  la  résection  à 
unehaulair  suffisante  ;  on  coupe  les  bouts  de  tendons  qui  dépassent  et  on 
regolariietjsi  cela  est  nécessaire,  les  lambeaux  cutanés.  Quant  aux  artères, 
il  est  inotile  de  s'en  préoccuper,  puisqu'elles  se  sont  retirées  au  milieu  des 
diairs  el  que  la  disposition  de  leurs  tuniques  s'oppose  à  l'hémorrhagie. 
Cda  fait,  on  procède  au  pansement,  comme  s'il  s'agissait  d'une  ampu- 
titiiHi. 
T.  Plaies  empodoniiées.    —  Nous  désignerons  sous  ce  nom  toutes  les 
'  ^.     plaiai  compliquées  de  l'inoculation  d'un  agent  toxique,   que  ce  soit  un 
^^    Tenta,  un  virus  ou  un  poison.  Ces  blessures  sont  essentiellement  caracté- 
'^      risées  par  ce  fait  que  la  plaie,  en  elle-même,  est  sans  importance,  et 
.^^^   qu'elle  n'a  pas  plus  d'influence  sur  les  accidents  graves  et  souvent  mor- 
tels qui  vont  se  produire  que  la  piqûre  de  l'aiguille  tubulée  dans  une 
injection  h^fpodermique. 
^  ^     Ctt  accidents  diffèrent  suivant  la  nature  de  l'agent  toxique  et  sont  tou- 
^'^    jours  semblables  lorsqu'ils  sont  produits  par  le  même  agent,  quelle  que 
mi  d'ailleurs  l'étendue  de  la  plaie.  Les  blessures  dont  nous  allons  nous 


j:  •-: 


1 


Ii6  PLAIE.    ^  p.    BNPOISOKNÉES. 

occuper  peuvent  donc  se  ranger  dnns  trois  catégories  :  celles  qui  résultent 
de  la  morsure  ou  de  la  piqûre  des  animaux  venimeux,  celles  qui  sont  pro- 
duites par  rinoculatiou  d'un  virus,  celles  qui  sont  faites  par  des  armes 
ou  des  intruments  imprégnés  d'un  poison  proprement  dit.  Nous  n*avoos 
pas  à  parler  ici  des  plaies  appartenant  aux  deux  premières  catégories, 
parce  que  leur  étude  se  rattache  à  celle  des  agents  toxiques  qui  leur  don- 
nent leurs  caractères  spéciaux  (Voy.  Charbon,  Morve»  Râge»  Yipèrb,  etc.). 
Nous  nous  bornerons  à  dire  un  mot  des  plaies  faites  par  les  annes  em- 
poisonnées et  des  blessures  des  anatomistes,  ces  sujets  rentrant  plus  par- 
ticulièrement dans  notre  cadre  et  n'ayant  pas  été  traités  ailleurs. 

A.  Plaies  faites  par  les  armes  empoisonnées,  -^  La  coutume  d*em* 
poisonner  les  armes  de  chasse  ou  de  guerre  a  régné  de  tout  temps  dm 
les  peuples  barbares,  et  de  tout  temps  aussi  cette  coutume  a  été  entoorée 
de  pratiques  superstitieuses  dans  lesquelles  l'imagination  a  toujours  eu  si 
bonne  part.  Dans  un  travail  rempli  d'érudition  qu'il  a  lu,  le  2  novem- 
bre 1877,  à  l'Institut,  Lagneau  a  retracé  l'histoire  de  ce  passé  tozicologî- 
que  depuis  les  temps  préhistoriques  jusqu'à  nos  jours;  nous  ne  le  sui- 
vrons pas  dans  cette  étude  rétrospective  et  nous  nous  bornerons  à  aborder 
la  question  telle  qu'elle  se  présente  aujourd'hui. 

On  ne  trouve  plus  d'armes  empoisonnées  qu'entre  les  mains  de  quel- 
ques peuplades  sauvages.  La  plupart  d'entre  elles  s'entourent,  pour  leur 
préparation,  d'un  mystère  qui  laisse  planer  les  plus  grands  doutes  sur  ia 
nature  des  substances  employées.  C'est  le  plus  souvent  au  suc  de  pbntes 
vénéneuses  qu'elles  ont  recours,  et  beaucoup  de  celles  dont  on  cite  les 
noms  sont  trop  peu  actives  pour  déterminer  la  mort  par  une  inoculation 
de  cette  espèce.  D'autres  font  séjourner  leurs  flèches  dans  des  cadavres 
putréfiés,  ce  qui  ne  peut  avoir  d'autre  effet  que  de  leur  communiquer  les 
propriétés  septiques  de  nos  instruments  d'amphithéâtre  ;  il  en  est  enfin 
qui  ont  recours  au  venin  des  serpents  ou  à  l'exsudation  cutanée  de 
quelques  espèces  de  batraciens.  Si  l'histoire  de  ces  poisons  est  entourée 
d'obscurité,  celle  de  leurs  effets  sur  l'homme  l'est  bien  davantage  encore; 
toutefois,  il  est  bien  démontré,  pour  nous,  que  ces  armes  sont  plus  redou- 
tables par  la  terreur  qu'elles  inspirent  que  par  les  blessures  qu'elles  font. 
Le  fait  est  assez  important  pour  que  nous  n'hésitions  pas  à  entrer  dans 
quelques  détails,  afin  de  le  bien  établir. 

Parmi  les  peuplades  de  l'Afrique  qui  ont  conservé  Thabitude  d'empoi- 
sonner leurs  flèches,  on  cite  les  Boschimans,  les  Ilottentots  et  les  Pahouins. 
Les  premiers  se  servent,  dit-on,  de  la  chair  de  la  Vipère  à  cornes,  qu'ils 
pilent  jusqu'à  en  retirer  un  suc  visqueux  ;  les  seconds,  d'un  liquidées» 
trait  des  bulbes  de  quelques  Amarillidacées  ou  de  certaines  ^tipAo/i6ei; 
les  derniers,  des  graines  de  l'inée  ou  Onaye,  plante  de  la  famille  desiipo* 
cynées.  Des  expériences  physiologiques  ont  été  faites  par  Polaillon  et  Car- 
ville  sur  ce  dernier  poison,  à  l'aide  de  graines  qui  leur  avaient  été 
apportées  du  Gabon  par  le  docteur  Vincent,  médecin  de  premièi*e  classe 
de  la  marine.  Ils  se  sont  servis  de  lextrait  alcoolique  et  ils  ont  déCer-* 
miné  la  mort  chez  les  batraciens,  les  poissons,  les  oiseaux  et  même  chr~ 


PLAIE.  —  p.  EMPoisoifKiEs.  117 

les  petits  mammifères,  à  l'aide  d'injections  contenant  de  5  à  10  milli- 
grammes de  cet  extrait.  Il  est  douteux  qu'en  trempant  la  pointe  de  leurs 
(lèches  dans  le  suc  de  ces  graines  grossièrement  broyées  les  Pahouins 
réussissent  à  leur  communiquer  des  propriétés  vénéneuses  bien  redouta- 
bles, mais  il  est  certain  que,  depuis  plus  de  trente  ans  que  nous  occu- 
pons le  Gabon,  jamais  nos  médecins  n'ont  eu  l'occasion  d'observer 
une  seule  blessure  empoisonnée  de  cette  façon.  Les  Anglais  du  Cap  et  de 
Port-Natal,  qui  ont  souvent  des  engagements  avec  les  Hottentots  et  les 
Boschimans,  n'en  ont  pas  vu  davantage. 

Certains  peuples  de  l'Inde  empoisonnent,  dit-on,  leurs  flèches  avec  le 
suc  d'une  plante  de  la  famille  des  Moracées.  En  Cochinchine,  les  Mois 
trempent  les  leurs  dans  un  extrait  végétal  qu'on  dit  assez  actif,  lorsqu'il  est 
récemment  préparé,  pour  tuer  un  éléphant.  Richaud,  qui  rapporte  ce  fait, 
s'empresse  d'ajouter  que  les  blessures  faites  à  nos  soldats  avec  ces  pré- 
tendues flèches  empoisonnées  fi'ont  amené  aucun  accident  et  ont  guéri 
comme  de  simples  plaies  par  instruments  piquants. 

Les  sauvages  de  l'Océanie  sont  ceux  dont  les  armes  sont  le  plus  redou- 
tées. Les  indigènes  de  Java  et  de  Sumatra,  ceux  des  Nouvelles-Hébrides, 
des  lies  Santa-Cruz  et  Yanikoroo,  ont  à  cet  égard  une  réputation  bien 
établie.  Les  Javanais  emploient  Ttipas  antiar,  qui  provient  de  Vantiaris 
toocicaria^  famille  des  Urticées  ortocarpées,  et  Vupas  tieuté,  fourni  par 
une  espèee  de  strychnos.  La  récolte  de  ces  poisons  a  donné  lieu  à  des 
landes  effrayantes,  mais  les  Hollandais,  qui  ont  eu  de  fréquents  dé- 
mêlés avec  les  Javanais,  n'ont  jamais  observé  de  blessures  empoison- 
nées à  la  suite  de  ces  engagements,  et  on  ne  trouve  pas  un  mot  qui  y 
soit  relatif  dans  les  travaux  publiés  par  leurs  médecins  sur  cette  colonie. 
A  Somatn,  tous  les  habitants  sont  armés  de  poignards  dont  les  lames 
sont  presque  toutes  creusées  de  rainures  longitudinales.  Nous  avons  eu 
l'occasion  d*examiner  sur  les  lieux  un  grand  nombre  de  ces  armes,  et 
nous  n'avons  jamais  trouvé  de  trace  de  poison  au  fond  de  ces  rainures, 
ai  entendu  parler  d'accidents  particuliers  survenus  à  la  suite  des  bles- 
tores  biles  par  ces  poignards.  Enfin,  dans  leur  guerre  contre  Tempire 
d'Atjeh,  où  ils  se  sont  maintes  fois  battus  a  l'arme  blanche  et  où  ils 
ont  eu  plus  de  sept  cents  blessés,  les  Hollandais  n'ont  pas  signalé  un  seul 
cas  de  blessure  empoisonnée. 

Les  flèches  des  indigènes  des  Nouvelles-Hébrides,  de  Santa-Cruz  et  de 
Vmikoroo,  ne  sont  pas  plus  redoutables,  au  dire  du  docteur  A.  U.  Messer, 
midecin  de  la  frégate  anglaise  la  PearL  11  s'est  livré  à  de  longues 
redierches  sur  ce  sujet,  pendant  sa  station  dans  l'Océan  Pacifique,  et  il 
n'avait  pu  se  procurer  aucun  renseignement  de  quelque  intérêt,  lorsque 
les  circonstances  lui  permirent  d'apprécier  par  lui-même  la  valeur  des 
croyances  qui  régnent  à  cet  égard.  Le  commodore  Goodenough,  un  officier 
^  «il  hommes  de  la  Pearl,  lurent  attaqués  à  Santa-Cruz  par  les  naturels 
cl  blessés  par  leurs  flèches.  Tous  les  hommes  de  l'équipage  étaient  con- 
vaincus que  les  plaies  faites  par  ces  armes  étaient  mortelles  et  que  tous 
«eux  qui  en  étaient  atteints  devaient  mourir  du  tétanos.  Le  commodore 


118  PLAIE.   —  p.    EMPOISONNÉES. 

lui-même,  malgré  la  trempe  solide  de  son  caractère,  ne  pouvait  se  sous- 
traire à  l'obsession  de  cette  pensée,  et  Tévénement  parut  lui  donner 
raison,  car  il  fut  atteint  du  tétanos  le  cinquième  jour,  et  mourut  le 
huitième.  Deux  de  ses  marins  eurent  le  même  sort  :  les  accidents  téta- 
niques se  montrèrent  chez  eux  le  sixième  jour.  Ainsi,  sur  huit  blessés, 
trois  succombèrent  à  cette  redoutable  complication,  mais,  ainsi  que  le 
fait  observer  le  docteur  Messer,  elle  est  extrêmement  commune  dans 
VOcéanie,  et  il  est  impossible  d'admettre  que  le  poison  y  soit  pour  quel- 
que chose,  car  il  n'est  pas  de  substance  toxique  dont  les  effets  attendent 
cinq  ou  six  jours  avant  de  se  manifester,  i 

Pour  terminer  cette  rapide  revue,  il  ne  nous  reste  plus  qu*à  parler 
des  peuplades  de  l'Amérique  méridionale  qui  habitent  sur  les  bords  de 
l'Amazone  et  de  l'Orénoque.  C'est  de  là  que  nous  vient  le  curare»  ce 
poison  redoutable  qui  a  été,  de  la  part  de  Claude  Bernard,  l'objet  de  tra- 
vaux si  remarquables  (Voy.  Curare,  t.  X,  p,  548).  A  l'époque  où  Vé- 
minent  physiologiste  poursuivait  ses  recherches,  on  ne  connaissait  pas 
d'une  manière  exacte  la  composition  de  ce  produit.  On  se  demandait 
encore  s'il  ne  devait  pas  son  activité  au  venin  de  quelque  anifnal.  On  est 
aujourd'hui  bien  fixé  sur  ce  point.  Gubler  a  publié  dans  le  Journal  de 
thérapeutique  du  25  avril  1879  un  important  article  dans  lequel  if 
démontre,  à  Taide  de  documents  récents,  que  le  curare  est  un  poison 
végétal,  et  le  docteur  Crevaux,  médecin  de  première  classe  de  la  marine, 
qui  explore,  en  ce  moment,  les  bords  de  l'Amazone,  a  écrit  le  10  mais 
1879  au  gouverneur  de  la  Guyane  qu'il  avait  découvert  le  mode  de  pré- 
paration du  curare  et  le  végétal  auquel  il  doit  ses  propriétés  toxiques  : 
c'est  une  liane  très-élevée  qu'il  a  pu  voir  en  fleur  et  dont  il  a  envoyé 
la  photographie  à  Cayenne.  En  faisant  macérer  l'écorce  de  sa  racine  dans 
l'alcool  et  en  injectant  le  liquide  à  une  poule,  on  la  fait  périr  en  trente 
secondes.  On  comprend  que  des  flèches  imprégnées  d'un  pareil  poison 
puissent  donner  la  mort  à  de  petits  animaux  ;  le  fait  est  d'ailleurs  incon- 
testable. Il  est  logique  d'admettre  qu'il  en  arriverait  autant  chezl'hommer 
s'il  était  atteint  par  un  nombre  suflBsaiitde  ces  flèches  et  que  leurs  pointes 
vinssent  à  se  briser  dans  la'plaie.  Le  fait  est  vraisemblable,  mais  il  n'est 
pas  démontré.  Nous  n'avons  pas  pu,  du  moins,  en  trouver  une  seule  ob* 
servation  concluante,  car  nous  ne  pouvons  pas  donner  ce  nom  à  celles 
qui  ont  été  publiées  par  le  docteur  Ferreira  de  Lemos  (1867).  11  y  est 
question  de  voyageurs  attaqués  sur  les  bords  de  l'Amazone  par  une 
bande  de  sauvages.  Sept  d'entre  eux  furent  blessés  par  leurs  flèches.  L'un 
succomba  au  bout  de  quelques  heures,  mais  il  avait  reçu  trois  blessures 
à  l'abdomen.  Cinq  autres  ne  ressentirent  aucun  symptôme  particulier,  et 
l'auteur  attribue  cette  immunité  à  ce  qu'ils  burent  de  l'eau  salée  et  eft 
lavèrent  leurs  plaies.  Le  dernier  éprouva  des  accidents  bizarres  dans  le 
détail  desquels  nous  ne  pouvons  entrer,  mais  qui  sont  tout  à  fait  diffé- 
rents de  ceux  du  curare,  et  il  finit  par  guérir  après  avoir  subi  l'amputatioik 
de  la  cuisse  nécessitée  par  des  hémorrhagies  incoercibles  dues  à  ce  que- 
l'une  des  flèches  avait  lésé  simultanément  l'artère  tibiale  postérieure  gau— 


PLAIE.  ~-  p.  EMPoisoNiiiES.  119 

che  et  Tune  de  ses  veines  satellites.  Ces  obsenraiions  n'ont  rien  de  con- 
cluant, et  Tautenr  avoue  lui-même  qu'elles  n'ont  pas  toute  la  rigueur 
scientifique  désirable. 

Las  sauvages  du  Choco  empoisonnent  leurs  flèches  avec  le  venin  sé- 
crété parla  peau  d'une  grenouille  particulière  au  pays.  A.  Posada  Arango, 
qui  a  publié,  en  1871,  un  travail  très-savant  sur  ce  sujet,  .la  désigne 
sous  le  nom  de  Phyllobates  Chocœnsis.  Il  a  analysé  le  poison  avec  le 
plus  grand  soin  ;  il  l'a  expérimenté  sur  des  coqs,  des  poules,  des  canards, 
des  chats  et  des  cochons  d'Inde,  et  tous  ceux  qu'il  a  piqués  avec  les  flè- 
cbes  des  Indiens  du  Choco  sont  morts  en  moins  d'un  quart  d'heure.  Ces 
sauvages,  dit-il,  sont  d'un  naturel  essentiellement  pacifique  et  ne  se  ser- 
vent de  leurs  flèches  que  pour  la  chasse  et  pour  se  défendre  contre  les 
ÏMm  féroces,  mais  ils  en  craignent  tellement  les  effets  que,  lorsqu'ils  se 
blesseat  accidentellement,  ils  n'hésitent  pas  à  couper  immédiatement  la 
partie  qui  a  été  atteinte,  quand  cette  opération  est  possible.  Les  informa- 
tions manquent  donc  complètement  de  ce  côté  comme  des  autres. 

Ea  résumé,  nous  sommes  loin  de  révoquer  en  doute  les  effets  que  peu- 
vent produire  sur  l'homme  les  armes  empoisonnées.  Nous  pensons  que 
de  pareilles  blessures  peuvent  occasionner  des  accidents  graves  et  même 
amener  la  mort  ;  mais  toutes  les  recherches  que  nous  avons  pu  faire  pour 
en  trouver  des  observations  sérieuses  et  authentiques  ont  abouti  à  un 
résultat  complètement  négatif.  Les  médecins  des  autres  nations  n'ont  pas 
été  plus  heureux  que  nous,  et  ce  fait  valait  la  peine  d'être  constaté,  parce 
qu'il  est  de  nature  à  diminuer  les  craintes  exagérées  que  les  armes  des 
sauvages  inspirent  à  ceux  qui  sont  exposés  à  en  subir  les  atteintes. 

Le  traitement  à  opposer  à  ces  blessures,  dans  le  cas  où  on  viendrait 
i  en  observer,  est  celui  de  toutes  les  plaies  empoisonnées.  11  consiste  à 
appliquer  immédiatement  une  ligature  entre  le  cœur  et  la  partie  lésée, 
à  inciser  la  plaie  pour  en  mettre  tout  le  trajet  à  découvert,  à  la  laver  à 
grande  eau  et  à  la  cautériser  soit  avec  un  caustique  liquide,  tel  que  le  ni- 
trate acide  de  mercure  ou  l'acide  nitrique,  soit  avec  le  1er  rouge,  suivant 
qu'on  a  l'un  ou  l'autre  de  ces  moyens  à  sa  disposition.  On  peut  aussi 
opérer  la  succion  à  l'aide  de  ventouses,  ce  qui  permet  d'attendre  qu'on 
le  soit  procuré  les  moyens  d'agir  plus  énergiquement.  Il  ne  faut  pas  se 
'.     hâter  d'enlever  la  ligature.  Claude  Bernard  a  donné  à  cet  égard  un  excel- 
I    leat  conseil.  Il  faudra,  dit-il,  relâcher  la  ligature  pendant  un  instant  pour 
'     Il  renouer  aussitôt  qu'apparaîtra  le  premier  symptôme  d'empoisonné- 
i     moi  nouveau,  et  ainsi  de  suite.  La  dose  de  curare  ainsi  fractionnée 
s     pourra  sans  occasionner  la  mort  traverser  toute  l'économie  et  s'éliminer 
ou  le  détruire.  Enfin,  si,  malgré  l'emploi  de  ces  moyens,  l'issue  fatale 
i     semblait  imminente,  il  faut  savoir,  dit  Paul  Bert,  que  le  danger  peut  être 
Ê  !     combittu  par  la  respiration  artificielle  et  par  elle  seule,  mais  il  faut  bien 
2^,     insister  sur  ce  fait  que  cette  pratique  a  besoin  d'être  prolongée  fort  long- 
-|     tonps.  Ces  conseils  n'ont  été  donnés  qu'en  vue  du  curare,  mais  il  ne  pour- 
v|     mit  j  avoir  que  de  l'avantage  à  y  recourir  dans  le  cas  de  blessure  empoi- 
:i\     sonnée  par  une  autre  substance. 


i20  PLAIE.    —   p.    DES   AHAT0MISTE8. 

B.  Plaies  des  Anatomùtes.  —  11  n*est  guère  de  médecin  qui  ne  se  soit 
blessé,  dans  le  cours  de  ses  études  anatomiques,  et  qui  n'ait  éprouvé  quel- 
ques accidents  à  la  suite  de  cette  blessure.  Les  scalpels,  les  érignes,  les 
épingles,  les  ciseaux,  sont  jetés  au  hasard  sur  les  tables  d'amphithéâtre, 
et  ceux  qui  s'en  servent  sont  à  chaque  instant  exposés  à  se  piquer.  Dans 
les  manœuvres  opératoires,  la  scie  s'échappe  parfois  de  sa  voie  étaient 
blesser  le  pouce  de  la  main  gauche  qui  sert  à  la  lui  tracer.  SouTeni  aussi 
c'est  une  esquille  osseuse,  un  fragment  de  côte,  par  exemple,  qui  cause  la 
blessure.  Enfin,  il  arrive  souvent  aux  anatomistes  de  plonger  leurs  mains 
dans  des  liquides  cadavériques,  sans  se  préoccuper  des  plaies  insignifiantes 
qu'elles  peuvent  présenter  et  qui  se  trouvent  ainsi  en  contact  avec  le 
principe  septiquc.  Les  érosions  de  la  peau  sont  plus  souTcnt  suivies  d*ae- 
cidents  que  les  piqûres  nettes  faites  par  la  pointe  des  scalpels.  D'après 
Billroth,  les  petites  écorchures  non  saignantes  sont  plus  dangereuses,  au 
point  de  vue  de  l'infection,  que  les  incisions  profondes,  par  la  raison 
anatomique  que  les  réseaux  de  lymphatiques  dont  le  pouvoir  absoriMnt 
est  le  plus  considérable  se  trouvent  précisément  répandus  dans  la  couche 
la  plus  superficielle  du  derme. 

11  est  à  re  marquer  que  les  cadavres  frais  offrent  plus  de  danger  que 
ceux  qui  sont  en  pleine  putréfaction.  Cette  observation,  que  Colles  (de  Du- 
blin) a  faite  le  premier,  a  depuis  été  vérifiée  par  la  plupart  des  anato- 
mistes. On  prétend  même  que  les  intoxications  les  plus  graves,  celles  qui 
sont  suivies  de  mort  au  bout  de  quelques  jours,  surviennent,  le  plas  sou- 
vent, à  la  suite  des  blessures  faites  en  pratiquant  l'autopsie  de  cadavres 
encore  chauds,  et  Billroth  se  demande  si,  dans  ce  cas,  le  médecin  ne  s'est 
pas  inoculé  une  humeur  pathologique  formée  antérieurement  dans  l'orga- 
nisme vivant,  plutôt  qu'un  virus  cadavérique.  Ce  qui  est  certain,  c'est 
que  les  corps  des  femmes  mortes  de  fièTre  puerpérale,  ceux  des  sujels  qui 
ont  succombé  à  la  suite  d'une  opération  de  hernie  étranglée,  sont  particu- 
lièrement à  redouter.  Il  faut  tenir  compte  aussi  des  prédispositions  in- 
dividuelles. 11  est  des  gens  qui  semblent  jouir  d'une  véritable  immunité  et 
qui  peuvent  impunément  se  blesser,  dans  le  cours  de  leurs  dissections, 
tandis  qu'il  en  est  d'autres  qui  ne  peuvent  se  faire  la  plus  légère  piqûre 
sans  voir  survenir  des  accidents.  Billroth  fait  observer,  avec  raison,  que 
des  infections  répelées  semblent  plutôt  augmenter  que  diminuer  cette  ré- 
ceptivité. 

Les  accidents  qui  se  produisent  à  la  suite  des  plaies  d'amphithéâtre 
diffèrent  essentiellement,  sous  le  rapport  de  la  gravité,  suivant  qu'ils  res- 
tent bornés  à  la  partie  blessée,  qu'ils  s'étendent  aux  membres  tout  entien 
en  suivant  la  chaîne  des  lymphatiques  et  des  glanglions,  ou  que  le  prin- 
cipe toxique  pénètre  d'emblée  dans  le  torrent  circulatoire  et  s'attaque  i 
l'économie  tout  entière.  Dans  le  premier  cas,  tout  se  borne  parfois  au  dé- 
veloppement d'un  bouton  inllammaloire  semblable  à  celui  delà  fausse  vac- 
cine et  qui  se  termine  par  la  guérison,  après  avoir  fourni  une  gouttelette  de 
pus.  Souvent  il  se  forme  une  croûte  sous  laquelle  la  suppuration  s'a- 
masse et  qui  se  renouvelle  aussitôt  qu'on  l'enlève  ;  le  point  blessé  reste 


PLAIE.   —  p.   DES  ÂlfATOMISTBS.  181 

douloureux,  dur,  et  parrois  il  s'y  développe  une  petite  tumeur  que  Follin 
désigne  sous  le  nom  de  tubercule  anatomique.  C'est  une  hypertrophie 
papillairc  du  derme,  Tiolacée,  indolente,  saignant  facilement,  et  quelque- 
fois difisée  en  une  multitude  d*cle?ure8  papuleuses  au  centre  desquelles 
existe  un  ^ide  dont  on  peut  faire  sortir  par  la  pression  une  gouttelette  de 
pus.  Ces  tubercules  sont  très-nombreux  chez  quelques  sujets,  et  cela  s*ob- 
serre  particulièrement  sur  les  garçons  d'amphithéâtre,  qui  ont  les  mains 
constamment  plongées  dans  des  liquides  cadavériques. 

Dans  le  second  des  cas  que  nous  avons  prévus,  la  petite  plaie  ne  présente 
d'abwdrien  de  particulier,  mais,  dans  la  journée  qui  suit  la  blessure,  le 
doigt  M  gonOe  et  devient  douloureux  ;  on  y  sent  de  la  chaleur,  de  la 
tensioo  et  des  battements:  c'est  le  début  d'un  panaris.  Les  accidents  peu- 
vent rester  bornés  à  la  phalange  et  aux  ganglions  axillaires,  qui  deviennent 
toujours  plus  ou  moins  douloureux  en  pareil  cas,  mais  parfois  il  survient 
une  véritable  angéioleucite,  avec  un  mouvement  fébrile  très-accusé  et  une 
tuméfiiction  considérable  des  ganglions  de  Taisselle,  laquelle  se  termine 
souvent  par  un  abcès. 

Dans  le  troisième  cas,  le  plus  grave  de  tous,  mais  heureusement  le  plus 
rare,  les  accidents  généraux  débutent  brusquement,  de  12  à  18  heures 
après  la  blessure.  Le  malade  est  pris  de  frisson,  de  nausées  et  parfois  de 
vomissements  ;  il  accuse  une  céphalalgie  frontale  intense  ;  le  pouls  est  pe- 
tit, concentré  et  fréquent,  l'anxiété  est  extrême  et  le  système  nerveux  pro- 
fondément déprimé.  En  même  temps,  on  voit  se  produire,  sur  le  point  où 
siège  la  piqûre,  une  petite  vésicule  à  bord  très-nets,  qui  prend  bientôt  l'as- 
pect d'une  pustule  remplie  d'un  liquide  trouble.  Il  survient  alors  de  vio- 
lentes douleurs  dans  l'aisselle  et  dans  l'épaule  ;  les  ganglions  axillaires  se 
tuméGent,  ainsi  que  le  tissu  cellulaire  des  régions  sous-scapulaire  et  sous- 
pectorale,  qui  semblent  envahies  par  une  sorte  d'œdème  inflammatoire. 
L'état  général  s'aggrave  rapidement  ;  Tanxiété  respiratoire  augmente  ;  il 
survient  un  délire  fugace  qui  fait  place  à  un  accablement  profond  ;  le 
pouls  se  déprime,  devient  irrégulier,  et  la  mort  arrive  parfois  avant  la  fin 
du  second  jour.  Dans  quelques  cas,  les  accidents  se  montrent  plus  tard  et 
marchent  avec  moins  de  promptitude.  Le  gonflement  général  du  membre 
ne  survient  qu'au  bout  de  quatre  ou  cinq  jiiurs;  il  remonte  rapidement 
jusqu'à  l'épaule  et  jusqu'au  cou,  prend  une  teinte  livide  et  se  termine 
bientôt  par  une  suppuration  gangreneuse  et  des  décollements  étendus. 
En  même  temps,  des  symptômes  ataxiques  se  manifestent,  l'adynamie  se 
prononce  et  la  mort  survient  vers  le  dixième  jour,  avec  tous  les  signes 
d'une  infection  purulente  entée  sur  un  phlegmon  diffus  gangreneux. 

biiis  les  deux  premiers  cas,  il  y  a  lieu  de  croire  que  les  fluides  putréfiés 
ont  porté  leur  action  sur  le  système  lymphatique  seulement  et  qu'elle 
^  '  s'est  traduite  par  de  simples  phénomènes  indammatoires  ;  mais,  dans  le 
\^']  dernier,  il  faut  bien  admettre  une  intoxication  produite  par  un  poison 
^  ..^     aeptique  qui  a  pénétré  dans  le  torrent  circulatoire,  en  un  mot,  une  vérita- 

Ible  omcÉMiE. 
KoQs  n'insisterons  pas  sur  la  marche  et  sur  le  traitement  des  accidents 


f. 


■-r 


^2i  PLAIE.  —  QUESTIONS  ii£digo-l&ales. 

que  nous  menons  de  passer  en  revue,  parce  qu'il  en  a  été  question  dans 
d'autres  articles;  mais  nous  devons  dire  un  mot  des  précautions  à 
Taide  desquelles  on  peut  les  prévenir.  Elles  sont  simples  et,  le  plus 
souvent,  suivies  de  succès.  Le  premier  soin  à  prendre,  lorsqu'on  vient 
de  se  blesser  à  Tamphithéâtre,  consiste  à  faire  saigner  la  petite  plaie 
en  comprimant  le  doigt  de  haut  en  bas  et  à  y  faire  tomber  ea  niéme 
temps  un  filet  d*eau  froide.  On  peut  également  en  opérer  la  suoôon.  D 
faut  continuer  cette  manœuvre  pendant  huit  ou  dix  minutes^  Cela  iiif* 
firait,  dans  la  majorité  des  cas,  pour  atteindre  le  but,  mais  noua  trouvons 
plus  prudent  d'y  joindre  une  cautérisation  légère.  Le  nitrate  d'argttt» 
auquel  on  a  recours  d'habitude,  a  Tinconvénient  de  ne  pouvoir  pénitnr 
jusqu'au  fond  de  la  plaie  :  nous  lui  préférons  les  caustiques  liquidcit 
tels  que  le  nitrate  acide  de  mercure  ou  tout  simplement  l'acide  nitri* 
que  qu'on  a  toujours  sous  la  main,  dans  les  amphithéâtres.  Il  suffit  d'en 
laisser  tomber  une  gouttelette  entre  les  lèvres  de  la  petite  plaie  et  de 
la  replacer  immédiatement  sous  le  jet  d'eau  froide.  Ces  moyens,  d'un  em- 
ploi facile  et  très-peu  douloureux,  réussissent  presque  toujours,  lonqu'on 
y  a  recours  sur-le-champ,  à  prévenir  les  accidents  auxquels  les  anato- 
mistes  sont  exposés.  Jules  Roghard. 

Questions  médico-légales  relatives  aux  plaies.  —  Pour  qu'il  y  ait  plaie,  il 
faut  qu'il  y  ait  solution  de  continuité  des  parties  sous-jacentes  i  la  peau; 
il  y  a  toujours  dans  ce  cas,  plus  ou  moins,  une  effusion  de  sang,  mais 
sans  qu'il  y  ait  nécessairement  hémorrhagie  ;  ce  fait  de  l'effusion  du  sang 
est  expressément  retenu ,  dans  notre  loi,  comme  un  caractère  aggravant 
les  violences  exercées  et  constitutives  du  crime  lui-même  (art.  321  C.  P.). 

Une  plaie  est  une  blessure,  et  l'histoire  des  blessures,  au  point  de  vue 
médico-légal,  a  été  assez  bien  faite,  dans  ce  Dictionnaire»  par  notre  émi- 
nent  et  regretté  maitre,  AmbroiseTardieu,  pour  que  nous  n'ayons  que  peu 
à  ajouter  à  ce  qu'il  a  dit  sur  ce  sujet;  nous  insisterons  seulement  sur 
quelques  considérations  relatives  aux  blessures  en  général,  mais  plus  spécia- 
lement applicables  aux  plaies  et  que  notre  pratique  a  pu  nous  apprendre. 

I.  11  faut  se  préoccuper,  avant  tout,  lorsqu'on  examine  un  blessé  ou 
lorsqu'on  procède  à  l'autopsie  d'un  cadavre,  d'énumérer  et  de  décrire 
les  plaies.  Pour  cela,  nous  ne  saurions  trop  conseiller  de  ne  point  se 
contenter  de  simples  notes  ;  il  est  préférable  de  faire,  en  quelques  coups 
de  crayons ,  un  schéma  représentant  la  partie  du  corps  où  existent  les 
plaies,  puis  de  représenter  ces  plaies  dans  leur  direction,  leurs  dimen- 
sions, que  l'on  mesure  avec  soin  et  que  l'on  reporte  sur  le  dessin.  Des 
renvois  chiffrés  permettent,  pour  telle  ou  telle  plaie,  d'ajouter  une  noU 
complémentaire. 

Depuis  quelques  années .  un  service  photographique  a  été  institué,  i 
la  Préfecture  de  Police,  pour  reproduire,  avant  l'autopsie,  dans  les  cas 
de  mort  violente,  avec  plaies,  la  configuration  extérieure  des  blessures; 
l'intervention  du  médecin  chargé  de  l'autopsie  peut  être  utile  pour 
indiquer  au  photographe  quelles  sont  les  parties  qui  doivent  être  plus 
iq>écialement  reproduites. 


ii-v 


PLAIE.   —   QUESTIONS   MÉDICO-lJCALKS.  125 

U.  Lorsque  les  plaies  ont  été  énumérées  et  décrites,  il  fout  déterminer 
d* abord  de  quelle  façon  ou  avec  quelle  arme  elles  ont  été  produites. 
Mous  n'avons  pas  à  rappeler  ici  les  caractères  généraux  des  plaies  par 
arradiementy  par  monures.  Les  plaies  par  arrachement  (à  l'exception 
de  rarrachement  du  pénis,  mutilation  qui  peut  être  volontaire,  ou  cri- 
mioelle  et  dans  certains  cas  provoquée  par  un  attentat  à  la  pudeur),  s'ob- 
aenrent  dans  les  cas  de  blessures  par  imprudence. 

Ifis  plaies  par  morsures  sont  focilement  reconnaissables;  elles  exis- 
tent aux  doigts,  au  nez,  aux  oreilles  ;  elles  peuvent  être  trouvées  sur  le 
corpa  de  la  victime,  souvent  aussi  sur  le  corps  du  meurtrier  ;  elles  sont 
l'indice  d'une  lutte  ayant  précédé  la  mort.  Pour  n'en  citer  qu'un  exem- 
ple» IVojqpmann,  lorsque  nous  Tavohs  examiné,  avait  sur  le  corps  des 
deatrices  de  morsures,, des  égratignures  au  visage,  des  traces  de  che- 
veux arrachés.  Ces  cicatrices  de  morsures  doivent  être  décrites  et  dessinées 
avec  le  soin  le  plus  minutieux,  car  l'inculpé  cherche  le  plus  souvent  à 
les  expliquer  par  une  tout  autre  cause,  écorchure  ou  brûlure,  etc« 
On  examinera  avec  soin  Tétat  des  dents  de  la  victime,  on  peut  avoir 
occasion,  dans  certaines  circonstances,  de  faire  des  comparaisons  utiles, 
n  faut  savoir  reconnaître  aussi  les  plaies  par  morsures  produites  par 
les  dents  d'un  animal  ;  on  trouve  souvent,  sur  les  cadavres  d'enfonts  sub- 
mergés dans  les  égouts,  des  morsures  de  rats  qui,  dans  certains  cas, 
ont  été  considérées  comme  Tindice  de  violences  criminelles  par  des  mé- 
decins peu  expérimentés. 

Les  plaies  contuses  se  reconnaissent  à  leurs  caractères  spéciaux  : 
attritiona  des  lèvres  de  la  plaie  et  des  tissus  sous-jacents,  irrégularité 
el  largeur  de  la  plaie  correspondant  souvent  à  la   forme  du  corps 
vulnérant,  etc.  Cependant,   il  faut  être  prévenu  que  dans  certains  cas 
la  forme  extérieure  de  la  plaie  peut  être  toute  différente  ;  cela  dépend 
surtout  de  la  conûguration  des  plans  osseux  sous-jacents  ;  nous  avons  vu 
des  plaies  du  cuir  chevelu  faites  avec  un  bâton,  plaies  de  formes  régu- 
lièrement curviligne,  aux  lèvres  écartées,  mais  nettement  divisées,  et 
qu'à  un  examen  superficiel  on  aurait  attribué  à  des  coups  de  couteau. 
Un  corps  contondant  quadragulaire  et  massif  peut  faire  des  plaies  étoilées. 
Les  plaies  par  instrument  piquant  gardent  plus  souvent  l'empreinte 
de  Tanne  spéciale  qui  les  a  produites.  Les  plaies  faites  avec  des  ciseaux 
ont  ce  caractère  spécial  d'êtres  doubles  et  formant  un  lambeau  triangu- 
Uire  dodt  le  sommet  est  souvent  mousse  (Tardieu)  ;  la  plaie  faite  par  un 
compas  est  triangulaire  ;  par  un  fleuret,  anguleuse  et  carrée.  Cepen- 
dant, par  le  fait  de  l'écartement  des  tissus,  de  la  direction  suivie  par 
rinstrument  vulnérant,  la  forme  extérieure  de  la  plaie  peut  varier  :  c'est 
ainsi  qu'un  poinçon  rond  peut  faire  une  plaie  elliptique. 
Lorsque  l'instrument  est  à  la  fois  piquant  et  tranchant,  la  blessure 
^     présente  alors  des  particularités  qu'il  est  bon  de  connaître.  Souvent  la 
■■^    Wgeur  de  la  plaie  extérieure  est  plus  considérable  que  celle  de  l'arme 
'-À     (fia^ard.  Annales  d'hygiène  pubL  et  de  médecine  légale).  Si  la  lame  est 
1    introduite  par  la  pointe,  les  angles  de  la  plaie  varieront  suivant   que 


'"^  PLAIE.   QUESTIONS   MÉDICO-LÉGALES. 

rinstrument  offrira  un  tranchant  simple  on  double.  Au  dos  de  la  lame 
correspondra  un  angle  tronqué,  au  tranchant  un  angle  très-aigu  (Tardieu, 
Étude  médico-légale  sur  les  blessures). 

Dans  les  plaies  par  instrument  tranchant,  les  bords  sont  nets»  les 
angles,  plus  ou  moins  aigus,  se  terminant  parfois  par  un  prolongement 
de  moins  en  moins  profond.  Les  bords  sont  souTent  écartés,  mais  Fécar- 
temcnt  des  lèvres  ne  dépend  pas  de  Tépaisseur  de  la  lame  ;  elle  dépend 
surtout  de  la  profondeur  de  la  plaie,  de  la  direction  des  fibres  des  tissus 
divisés  par  rapport  à  celle  qu*a  suivie  Tinstrument  vulnérant.  Lorsque  la 
blessure  a  été  faite  avec  un  rasoir,  on  peut  reconnaître  en  quel  point 
l'arme  a  élé  enfoncée  par  son  talon  et  dans  quelle  direction  elle  a  été 
ramenée  ensuite,  l'incision  se  terminant  par  une  sorte  de  queue  effilée. 
On  peut  reconnaître  également ,  par  les  entailles  pouvant  exister  sur  les 
lèvres  de  la  plaie  ou  dans  sa  profondeur,  si  l'arme  a  été  ramenée  dans  la 
plaie;  mais  il  faut  ne  pas  perdre  de  vue  ce  fait  que,  dans  les  cas  de  plaie 
profonde,  l'inégale  rétraction  des  tissus  divisés  par  une  seule  incision, 
peut  donner  l'apparence  d'entailles  plus  ou  moins  régulières. 

La  distinction  de  la  nature  de  la  plaie  et  de  l'espèce  de  l'arme  qui 
l'a  produite  n'est  point  des  plus  faciles;  sur  des  parties  du  corps  où  la 
peau  recouvre  des  parties  molles  et  épaisses,  un  instrument  tranchant 
à  lame  mal  affilée,  comme  un  vieux  couteau,  un  sabre,  etc.,  peut 
faire  des  plaies  à  bords  mâchés,  contus  et  à  angles  mousses  analogues 
à  celles  que  produit  d'ordinaire  un  instrument  contondant.  Dans  les 
autopsies  auxquelles  nous  avons  procédé ,  lors  de  l'affaire  Troppmann, 
nous  avons  constaté,  sur  trois  des  victimes,  des  plaies  contuses  semi- 
elliptiques,  et  nous  avons  pu  reconnaître  ce  qu'elles  avaient  été  faites  par 
une  arme  telle  qu'un  couteau  brisé,  agissant  à  la  fois  comme  instru- 
ment tranchant  et  contondant.  » 

Dans  certains  cas,  les  plaies  ont  été  faites  à  l'aide  d'instruments  ser- 
vant à  l'exercice  de  professions  spéciales  ;  et  il  est  nécessaire  de  connaître 
la  forme  et  la  dimension  des  instruments  tranchants  ou  contondants 
utilisés  dans  certaines  professions,  et  qui  peuvent  servir  d'armes  dans 
certaines  conditions. 

La  forme  des  plaies,  en  apprenant  de  quelle  arme  on  s'est  servi,  peut 
donner  des  renseignements  utiles  sur  la  profession  du  meurtrier. 

Le  siège  et  l'étendue  des  blessures  faites  peuvent  donner  également, 
au  point  de  vue  de  la  profession  du  meurtrier,  des  indications  utiles.  Dans 
le  cas  d'un  jeune  garçon  boucher  de  quinze  à  seize  ans,  trouvé,  la  gorge 
coupée,  au  voisinage  de  l'abattoir  de  Saint-Oucn,  la  forme  et  la  situatioo 
de  la  plaie  du  cou  nous  indiquèrent  que  la  victime  avait  été  é«^orgée  par 
le  procédé  dont  on  se  servait,  à  l'abattoir  même,  pour  tueries  moutons; 
et  ce  détail  a  permis  de  retrouver  le  meurtrier  parmi  les  compagnons  de 
travail  du  jeune  apprenti  boucher. 

En  même  temps  que  l'on  est  chargé  d'énumérer  et  de  décrire  les  blés- 
sures,  on  doit  également  examiner  les  armes  saisies  et  que  l'on  croit 
avoir  servi  à  faire  les  blessures.  On  ne  peut  jamais  affirmer  que  telle  arme 


PLAIE.   QUESTIONS  MÉDICO-LÉGALES.  )25 

a  dû  nécessairement  faire  telle  ou  telle  blessure  ;  on  peut  dire  seulement 
que  cette  arme  a  pu  faire  les  blessures  constatées  lors  de  Vexamen 
du  blessé^  de  Vautopsie  du  cadavre;  et  lorsqu'il  s'agit  de  Texamen 
d'un  blessé,  il  faut  tenir  compte,  pour  apprécier  ce  que  devait  être 
la  plaie  primitive,  du  temps  qui  s'est  écoulé  depuis  la  blessure  et  de 
la  déformation  à  laquelle  ont  pu  donner  lieu,  dans  l'aspect  primitif 
de  la  plaie,  la  tuméfaction,  l'infiltration  des  tissus  et  l'inflammation 
consécutive. 

Les  plaies  par  arme  à  feu  doivent  être  spécialement  étudiées,  au  point 
de  vue  de  la  nature  du  projectile  et  de  la  distance  à  laquelle  le  coup  a 
été  tiré.  Depuis  quelques  années,  l'arme  le  plus  souvent  employée  est  le 
revolver.  Gomme  la  cartouche  de  cuivre  du  revolver  ne  contient  que  des 
traces  de  poudre,  les  recherches  faites  précédemment  et  consignées  dans 
les  livres,  sur  la  distance  à  laquelle  se  produisent  les  brûlures  et  Tin- 
crustatioa  des  grains  de  charbon,  n'offrent  plus  grand  intérêt.  Lors  de 
Taffiiire  Godefroy,  nous  avons  dû  chercher  à  déterminer  jusqu'à  quelle 
distance  avaient  pu  se  produire,  dans  un  cas  déterminé,  la  brûlure  et 
l'incrustation  des  grains  ;  les  expériences  ont  été  faites  avec  Varme  elle- 
même  et  avec  des  cartouches  identiques  à  celles  qui  avaient  servi  au 
meurtrier.  Lorsque  celte  question  de  la  distance  du  coup,  très-importante 
au  point  de  Tue  de  la  distinction  enlrc  le  suicide  et  l'homicide,  sera 
soulevée  de  nouveau,  nous  croyons  qu'il  conviendra  de  procéder  de  la 
même  façon  et  de  se  servir,  pour  chaque  cas  particulier,  de  l'arme  et  de 
la  cartouche  qui  se  rapprochent  le  plus  de  celles  qui  ont  servi  à  com- 
mettre le  meurtre.  La  charge  de  fulminate  et  de  poudre  n'est  point  la 
même  dans  les  cartouches  de  différentes  fabrications,  et  ces  conditions 
font  varier  la  distance  à  laquelle  peuvent  se  produire  la  brûlure  et  les 
iocru:!i(ations. 

Dans  les  cas  des  plaies  par  armes  à  feu  autres  que  le  revolver  (fusil  de 
chasse...),  il  faut  recueillir  avec  soin  tous  les  débris  qui  peuvent  se 
trouver  dans  la  plaie  ou  qui  sont  entraînés  par  la  suppuration.  Dans 
certains  cas,  il  a  été  possible  de  recueillir  ainsi  des  débris  de  papier 
ayant  servi  à  la  bourre  et  qui  ont  constitué  ultérieurement  d'importantes 
pièces  à  conviction. 

III.  La  question  du  pronostic  des  plaies  a  été  traitée  à  l'article  :  Blés- 
sures  en  général.  Rappelons  seulement  qu'il  ne  convient  point  de  porter 
\m  pronostic  d'après  une  seule  visite;  ea  eiïet,  on  sait  combien  sont  nom- 
breuses les  complications  des  plaies il  faut  tenir  compte  du  siège  de 

laUessure  (plaies  de  tête,  de  la  racine  du  nez,  etc.),  de  la  constitution 
et  des  habitudes  du  sujet  (ivrognerie,  syphilis,  scrofule),  des  épidémies 
régnantes  (érysipèle,  etc.). 
:  \  km  point  de  vue  de  la  responsabilité  de  l'auteur  des  plaies,  il  faut 
tenir  grand  compte  du  défaut  de  soins  donnés  à  la  victime,  et  surtout 
bâj  rechercher  si  l'on  n'a  point  employé,  pour  panser  les  plaies,  des  pom- 
a  madesou  onguents  fournis  par  des  empiriques.  C'est  ainsi  que,  s'il  sur- 
sn    Tient  nn  phlegmon  diffus,  consécutivement  à  une  plaie  du  dos  de  la 


.^■; 


126  PLAIE.   —  QUESTIONS  lléDICO-LéGALBS. 

main»  pansée  avec  un  onguent  irritant,  la  responsabilité  n'en  saurait  être 
attribuée  à  l'auteur  d'une  blessure  souvent  légère. 

Le  pronostic  des  plaies  par  arme  à  feu,  alors  même  qu'elles  semblent 
insignifiantes,  telles  que  celles  faites  par  quelques  grains  de  plomb,  doit 
toujours  être  réservé  ;  nous  avons  vu,  aux  environs  de  Chartres,  un  indi- 
vidu atteint  au  cou  de  deux  grains  de  plomb,  dans  un  accident  de 
chasse,  chez  lequel  les  deux  petites  plaies  avaient  guéri,  après  quelques 
jours,  et  qui  succombait,  deux  ans  après,  aux  suites  d'un  anévrysme  de 
la  carotide  causé  par  la  blessure  de  l'artère. 

IV.  Il  est  difficile  de  répondre  avec  précision  à  cette  question  : 
A  quelle  époque  la  plaie  Ort-elle  été  faite  ?  La  durée  de  la  cicatrisation 
varie,  en  effet,  suivant  la  profondeur  et  l'étendue  de  la  blessure,  l'inten- 
sité de  l'inflammation,  l'abondance  de  la  suppuration,  etc.  La  plaie  dcÊt- 
trisée,  rouge  ou  yiolacéc  d*abord,  pâlit  ensuite,  puis  devient  tout  à  fait 
blanche,  dure  et  nacrée.  L'étude  des  cicatrices ,  au  point  de  Toe  de 
l'identité,  est  importante  en  médecine  légale,  mais,  lorsque  la  ciea- 
trice  se  forme,  déjà  la  plaie  n'existe  plus,  et  nous  n*avons  point  à  en  parler 
ici. 

Il  est  plus  facile  de  distinguer  les  plaies  faites  pendant  la  vie  des 
déchirures  ou  solutions  de  continuité  faites  après  la  mort;  celles-ci  sont 
pâles  et  livides,  et  leurs  bords,  incomplètement  rétractés,  ne  sont  pts 
infiltrés  de  sang.  Celte  distinction  est  importante  à  faire,  lorsqu'on  eu- 
mine  un  cadavre  de  noyé,  qui  peut  être  mutilé,  sur  lequel  existent  des 
plaies  profondes,  faites  à  l'aide  du  croc,  ou  des  plaies  plus  petites  prove- 
nant de  morsures  d'animaux,  alors  qu'il  ne  s'agit  cependant  que  d'une 
submersion  accidentelle. 

Enfin  on  doit  se  demander  si  les  plaies  proviennent  d'un  aoddenl, 
d'un  suicide  ou  d'un  meurtre.  Nous  n'avons  point  à  répéter  ce  qui  a  été 
dit  à  ce  sujet,  à  propos  des  blessures  en  général  ;  rappelons  srâlement 
que,  dans  la  pratique,  cette  question  est  des  plus  complexes. 

Pour  ne  parler  que  de  l'apparence  extérieure  des  plaies,  la  muUipliciU 
des  coups  portés  est  une  présomption  de  meurtre,  mais  nous  avons  vu, 
dans  des  cas  de  suicide  avéré,  le  corps  criblé  de  blessures. 

Lorsque  plusieurs  armes  ont  été  employées^  il  y  a  également  pré- 
somplion  de  meurtre  ;  cependant  nous  avons  vu,  dans  des  cas  de  sui- 
cide, des  blessures  faites  avec  des  armes  différentes,  rasoir  et  revolvor, 
poinçon  et  couteau,  serpette,  etc. 

L'examen  du  cadavre ,  au  point  de  vue  des  traces  extérieures  de  vio- 
lences indiquant  une  lutte,  l'examen  des  vêtements  surtout,  donneraient, 
dans  cette  difficile  question,  des  cléments  de  conviction.  Souvent,  dans 
les  cas  de  suicide,  l'individu,  avant  de  se  frapper,  écarte  ses  vêtements, 
puis  s'assure  du  point  où  il  veut  frapper  ;  il  n'en  est  pas  de  même,  dans 
les  cas  de  meurtre,  les  vêtements  sont  atteints  par  l'arme.  Lorsqu'il  s'agit 
de  décider  s'il  y  a  suicide  ou  meurtre,  on  attache,  et  avec  raison,  une 
grande  importance  à  la  découverte  de  l'arme  près  du  cadavre.  Il  convient 
de  rappeler  cependant  que  quelquefois  l'arme  peut  être  projetée  à  une 


PLAIE.   — »   QDBSTI01I8   MÉDICO-LÉGALES.  127 

assez  grande  distance  ;  dans  un  cas  de  suicide  par  égorgement,  que  nous 
ayons  eu  occasion  d'observer,  Tarme  n'avait  pu,  malgré  les  recherches  les 
plus  attentives,  être  retrouvée  auprès  du  cadavre  ;  en  fouillant  le  gilet,  on 
trouva  le  couteau  fermé  et  plein  de  sang  dans  une  des  poches  ;  l'indi- 
vido,  après  s'être  ouvert  la  gorge,  avait  pu,  par  une  sorte  de  mouvement 
automatique,  fermer  son  couteau,  et  l'avait  remis  dans  la  poche  où  il  le 
plaçait  d'habitude.  Il  ne  faut  point  oublier  que,  dans  les  blessures  les  plus 
graves,  alors  que  le  cœur  est  percé,  la  gorge  ouverte,  la  mort  n'est  pas 
tooîoon  foudroyante;  l'individu  peut  marcher  quelque  temps  encore. 

En  résumé,  dans  cette  question  de  la  distinction  du  suicide  et  du  meur- 
tre, Tétude  de  la  plaie  en  elle-même  ne  peut,  le  plus  souvent,  que  donner 
des  présomptions  ;  mais  dans  certaines  circonstances,  ces  présomptions 
équivalent  presque  à  la  certitude.  Dans  Taffaire  Godefroy,  l'accusé  préten- 
dait qjiie  sa  victime  s'était  suicidée,  tenant  le  pistolet  à  deux  mains,  par 
conséquQiit  très-rapproché  du  front  (à  moins  de  douze  centimètres).  A 
cette  distance,  il  eut  dû  y  avoir  incrustation  de  grains  de  poudre  et 
brâlure  des  bords  de  la  plaie  ;  les  bords  de  la  plaie  étaient  nets  ;  ils 
n'étaient  oi  brûlés,  ni  noircis  ;  le  coup  avait  été  tiré  à  une  plus  grande 
distance.  On  pouvait  donc  conclure  qu'il  n'y  avait  pas  eu  suicide. 

Georges  Bergeron. 

Pour  la  biUiosraphie,  Voy,  l'art.  Blkssure. 

pAïf  (1.).  lanièrô  de  traiter  les  plaies  Taites  par  arquebuses.  Paris,  1551  ;  —  Œurres,  édit.  Mal- 

ga«Be,  Ptfis,  1840. 
Ratatos  (H.).  Chiruti^e  d'armée,  ou  traité  des  plaies  d'armes  i  feu  et  d'armes  blanches. 

Paris,  i78S. 
loaun.  Pfécia  de  plusieurs  obieryations  sur  des  membres  arrachés,  avec  les  conséquences  que 

FoD  en  pcvl  tirer  (Mémoires  de  V Académie  de  Chirurgie.  Paris,  1769,  t.  II,  p.  ^). 
Tnaum.  Sor  l'eitraclion  des  corps  étrangers  des  plaies  d'armes  i  feu.  Strasbooi-g,  1788. 
Pdci.  MibmI  de  cbirargie  d'armée.  Pari»,  1792. 

ionia».  CfiM|ae  ehinirgieale  des  plaies  faites  par  armes  à  feu.  Lyon,Strasbourfi:  et  Paris,  1804. 
G/nmam  (G.  J.).  On  gonsbot  Y^ounds  of  the  eztremities  requiring  the  différent  opérations  of  «m- 
patatîûB.  Loodoo,  1815.— Commentaries  on  the  Surgery  of  the  War.  Sixth  edit.,  London,  1855. 
PncfetIjkiiBisiT.Art.  Plaies  d'armes  ft  feu  [Dictionnaire  des  Sciences  médicales,  t.XLIII,  1820). 
Laibkt  (D.  J.}.  Mémoire  sur  les  amputations  des  membres  à  la  suite  des  coups  de  feu.  Paris,  1797. 

—  Qmifue  chirurgicale,  t.  I*%  Paris,  1829. 
DuntiiM,  Tmilé  théorique  et  pratique  des  blessures  par  armes  de  guerre,  publié  par  Marx  et 

Paillard.  Paris,  1834. 
Sàtaorn  (L./).  Delà  réunioo  immédiate  des  plaies»  de  ses  avantages  et  de  ses  inconvénients,  thèse 

de  oooeMRS.  Paris,  1834. 
R&cBKsa.  Cliw«pie  des  plaies  d'armes  à  feu.  Paris,  1836. 
DctrvTBtm.  Leçons  orales  de  clinique  chirurgicale.  Paris,  1839. 
Btaia»  (A.).  Diciiomaire  de  Médecine,  article  Maie,  t.  XUV,  1841. 
Hau>  (/.  H.).  Quelques  considérations  sur  les  plaies  d'armes  à  feu.  Cherbourg,  1846. 
Des  plaies  d'armes  i  feu,  communications  faites  i  l'Acad.  de  Méd.  par  Baudens,  Roux,  Malgaigne, 
AbosmI,  Bbndin,  Velpeau,  PioiTy,  Jobert,  Bégin,  ^cthoux^Deier^B  (Bulletin  de  FAcad. 
de  Méi.  Paris,  1848-1849,  et  drage  à  part). 
^        JoKR.  Des  plaies  d'armes  i  feu.  Communication  i  l'Académie  de  Médecine,  séance  du  26  sep- 
£  temfare  1K48  {Bull.  deVAcad.  de  Méd.,  t.  IIV,  p.  64). 

A       Klura.  Mémoires  sur  le  traitement  des  hémorrhagies  artérielles  consécutives  (Bulletin  de 
^         tAeadémie  de  Médecine,  1850,  t.  IV,  p.  960). 

^     Hma.  Méoioire  sur  la  nécessité  d'extraire  immédiatement  les  corps  étrangers  et  les  esquilles 
^        [Wiiimreê  de  r  Académie  de  Médecine.  Paris,  1852,  tome  lYI,  p.  407,  et  tirage  à  part). 


>      iji— m  (L.).  Maximen  d^  Kriegsheilkunst.  Hannover,  1K55. 
"-^    Sam.  Relatioo  médioo-chirurgicale  de  la  campagne  d'Orient.  Paris,  1857. 
cçm    làcuQi.  5otes  on  the  Surgery  of  the  War  in  the  Grimea.  London,  1858. 


128  PLÉTHORE. 

Médical  and  Surgical  History  of  the  British  Army  which  served  in  Turkey  and  the  Crimet  éorin; 

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de  doctorat.  Paris,  1877,  n»  350. 
DiMiTRiRF  (Sophie).  Traitement  des  plaies  sans  pansements;  méthode  d'aération,  tbèse  de  doctont, 

Paris  1878. 
Taroied  (Ambr.)  Étude  médico-légale  sur  les  blessures  comprenant  les  blessures  en  géoéral  al 

les  blessures  par  imprudence,  les  coups  et  rhomicidc  inTolontaires.  Paris,  1870. 

J  R. 
PLANTAIRE.  Mal  peFfopant.  Voy.  Pus. 

PLAQUES  MUQUEUSES.  Voxj.  Syphilis. 

PL.ESS1MÈTRE.  Voy.  Percussion,  t.  XXVI,  p.  326. 

PLÉTHORE.  —  Le  mol  'pléthore  {-ù.rf^xù^x^  plethora)  exprime, 
aussi  bien  par  son  élymologie  (içXiqO-iv,  être  plein)  que  par  le  sens  qu'oi 
y  attache  généralement,  l'idée  de  plénitude,  de  trop-plein,  de  surabon- 
dance, etc.,  et  offre  sous  ce  rapport  une  richesse  synonymique  tout  i  fait 


î 


PLÉTHORE.  —  HISTORIQUE.  129 

concordante,  dans  ces  expressions  :  pleniludoj  repletio,  polyœmia^  copia 
boni  sanguinis^  etc.  Quelles  que  soient  les  applications  spéciales,  ou  plus 
ou  moins  détournées,  qu'on  ait  laites  de  ces  termes  équivalents,  c'est 
toujours  la  même  interprétation,  conforme  au  point  de  départ.  Les  au- 
teurs, sûrs  de  cette  notion  iniiinle,  ont  pu  s'étendre  à  loisir  sur  un  pa- 
reil sujet;  et  admettre  aussi  bien  une  surabondance  des  diverses  hu- 
meurs que  Ton  distingue,  et  même  de  la  vitalité  et  des  forces  intimes, 
<[ue  du  sang  lui-même,  considéré  comme  la  source  de  toute  activité 
biologique.  La  plénitude  fut  aussi  bien  relative  qu'absolue,  partielle  que 
générale,  substantielle  que  virtuelle,  etc.  ;  et  le  remède,  si  simple  à 
trouver^  fut  toujours  la  déplétion,  c'est-à-dire  la  soustraction  de  Thumeur 
vitale  par  excellence,  le  sang.  Aussi  la  facilité  avec  laquelle  on  prodiguait 
la  saignée  impliquait-elle,  d*une  façon  presque  corrélative,  le  règne 
de  la  pléthore.  L'influence  de  cette  affection  est  bien  contestée  de  nos 
jours;  mais,  comme  les  accidents  qu'on  lui  attribuait  n'étaient  pas 
purement  subjectifs,  la  physiologie  moderne  a  pour  devoir  d'interpréter 
rationnellement  la  pléthore  des  âges  antérieurs,  de  montrer  ce  qui  lui 
correspond  aujourd'hui  parmi  les  troubles  morbides  observés,  et  d'indi- 
quer en  même  temps  quels  sont  ]es  moyens  propres  à  y  remédier. 

L  Historique.  —  Dans  un  sujet  qui  a  subi  aussi  profondément  les 
vicissitudes  des  doctrines,  le  point  de  vue  historique  doit  occuper  le 
premier  plan.  Tout  l'intérêt  de  la  «question  est  là  :  c'est  en  vain  qu'on 
voudrait  faire  de  la  pléthore  une  entité  nosologique,  et  en  donner  une 
description  didactique,  comme  s'il  s'agissait  d'un  cas  déûnitivement  ac- 
quis à  la  science,  et  parfaitement  déGni.  Tout  proteste  contre  cette 
manière  de  procéder,  et  nous  impose  certaines  limites.  La  pléthore,  c'est 
i'ezcès  du  bien,  pouvant  seulement  aboutir  parfois  à  quelques  troubles 
fonctionnels,  et  encore  plus  rarement  à  de  véritables  accidents.  Nous 
devons  donc  rechercher  surtout  comment  s'est  établie  la  notion  de  la 
pléthore,  et  comment  cette  conception  s'est  transformée  dans  la  série  des 
âges,  et  jusqu'à  notre  temps,  conformément  aux  doctrines  qui  se  sont 
succédées. 

Nous  voyons  tout  d'abord  que  l'idée  de  la  pléthore  était  déjà  familière 
à  l'époque  d'IIippocrate.  Son  troisième  aphorisme,  interprété  dans  ce 
sens  par  Van  Swieten,  déclare  que  l'excès  même  de  la  santé  est  dange- 
reux; car,  un  équilibre  parfait  étant  impossible,  et  de  même  le  progrès 
vers  le  mieux,  il  est  de  toute  nécessité  de  déchoir.  La  déplétion  peut  être 
dangereuse,  et  non  moins  dangereuse  la  réfection  qui  lui  succède.  Dans 
d'autres  passages,  que  nous  avons  analysés  à  propos  de  la  Dyspepsie  (T.  Xll, 
p.  44),  cette  obligation  de  maintenir  une  juste  proportion  entre  la 
recette  et  la  dépense  est  très-nettement  indiquée,  et  dans  des  termes 
que  ne  renierait  pas  la  doctrine  de  la  corrélation  des  forces  physiques. 
En  somme,  est-il  dit,  c'est  l'harmonie  du  tout  qui  constitue  la  parfaite 
santé 

Les  progrès  de  la  science,  au  temps  de  Galien,  introduisirent  une  plus 
grande  précision  dans  le  sujet.  Galien  lui-même  reconnaît  que  la  pléthore 

MIT.  ncr.  Mi».  iT  cmu  XXVIII  —  9 


150  PLÉTHORE.  —  historique. 

n*cst  pas  l'augmentation  de  toutes  les  humeurf^,  mais  seulement  de  la 
masse  du  sang  normal.  Les  accumulations  de  bile  jaune  on  noire,  de 
pituite,  de  sérosité  n'appartiennent  pas  à  la  pléthore,  mais  à  la  cachexie. 
Il  admet  aussi,  d'après  une  opinion  reçue  de  son  temps,  deux  espèces  de 
pléthore  :  Tune  relative  aux  vaisseaux  (?cpbç  i^eXd)^  et  l'autre  aux  forces 
(icpbç  T^  86va|jLtv).  La  première  implique  une  réplétion  extrême  des  vais* 
seaux,  au   point  d'exposer  à  une  rupture  imminente,   et  de  gêner  le 
jeu  des  fonctions  par  cette  distension  même  ;  la  seconde  ne  consiste  plus 
dans  une  réplétion  trop  grande  du  système  vasculaire,  mais  dans  ce  bit 
que  la  force  vitale  amoindrie  peut  à  peine  mettre  l'humeur  centrale  eo 
mouvement. 

Ces  vues  sur  la  pléthore  restèrent  classiques  tant  que  dura  le  règne  d» 
Galénisme,  c'est-à-dire  jusqu'à  une  époque  assez  rapprochée  de  nous,  et 
se  retrouvent  dans  presque  toute  leur  pureté  première  chez  Boerhaave, 
qui  leur  a  donné  l'appui  de  son  autorité.  C'est  encore  là  qu'on  trouve  It 
description  la  plus  complète  de  la  pléthore,  à  peine  distinguée  comme 
cas  morbide  particulier  par  les  autres  auteurs.  Van  Swieten,  le  com- 
mentateur des  aphorismes,  s'en  prend  à  Van  Helmont,  qui  hésite  à 
compter  la  pléthore  parmi  les  maladies,  n'admettant  pas  que  ce  qui  est 
bon  puisse  pécher  par  excès  ;  et  il  fait  observer  que,  si  la  pléthore  n'est 
pas  encore  la  maladie,  elle  est  une  telle  situation,  que  la  moindre  addi- 
tion d'humeurs,  ou  que  la  raréfaction  de  ces  humeurs  sous  l'influence  do 
calorique,  ne  peut  manquer  de  troubler  les  fonctions. 

Quelque  soit,  du  reste,  le  rôle  qu'on  accordât  à  la  pléthore,  soit  qu'oo 
eût  égard  à  la  surabondance  générale  du  sang,  soit  qu'on  vît  dans  les 
accumulations  partielles  de  cette  humeur,  constituant  les  congestion 
actives  ou  les  fluxions  inflammatoires,  de  véritables  pléthores  locales, 
jamais  plus  grand  emploi  de  la  saignée,  pour  ne  pas  dire  abus,  ne  fut  bit 
que  pendant  le  siècle  dernier,  et  jusqu'à  l'époque  presque  contemporaine, 
finissant  avec  Broussais  et  son  influence.  Ce  n'est  pas  que  cet  abus  justifie 
absolument  l'espèce  d'abandon  où  se  trouvent  à  l'heure  présente  1m 
émissions  sanguines  ;  mais  les  idées  ont  pris  un  autre  cours  :  les  hypéri- 
mies  partielles  ont  reçu  une  interprétation  plus  conforme  à  la  réalité  dei 
choses,  et  sont  combattues  par  des  moyens  non  moins  énergiques,  tout 
en  épargnant  le  sang,  dont  il  ne  semble  pas  qu'on  ait  jamais  une  trop 
grande  proportion.  * 

Durant  cet  intervalle,  des  données  plus  positives  s'étaient  introduitei  " 
dans  l'histoire  de  la  pléthore.  On  avait  cherché  à  déterminer  quelle  de-  ' 
vait  être  la  masse  totale  du  sang  chez  un  homme,  dans  les  conditio»  ^ 
normales,  d'après  certaines  comparaisons  faites  avec  les  animaux  (Alki  ^ 
Moulin).  Mais,  indépendamment  de  l'incertitude  attachée  à  une  pareilb  ^ 
niétiiode,  la  quantité  du  sang  peut  encore  varier  avec  la  taille  de  l'indi*  P 
vidu,  avec  la  capacité  relative  des  vaisseaux,  et  enfin  avec  beaucoup  ^ 
d'autres  circonstances  encore.  La  considération  de  la  pression  exercée  ^ 
par  le  sang  sur  les  parois  vasculaires  ofl'rait  déjà  des  résultats  plus  facil^  r 
ment  appréciables;  mais,  en  raison  de  l'impossibilité  d'obtenir  cette  fe 


PLÉTHORE.  —  HISTORIQUE.  151 

pression  sur  le  vivant  par  des  moyens  directs,  on  en  était  toujours  réduit 
à  Tapprécier  d'après  certains  caractères  du  pouls,  dont  les  rapports  avec 
la  tension  vasculaire  sont  d*une  nature  tout  à  fait  contradictoire. 

Avec  les  conquêtes  de  Thématologie  chimique,  la  question  prit  un  tout 
autre  aspect.  Les  travaux  de  Becquerel  et  Rodier  (1841),  d'Andral  et 
Gavarret  (1842),  et  de  tant  d^autres,  servirent  de  base  à  une  étude  plus 
rigoureuse  de  la  pléthore.  C'est  le  globule  rouge  qui  devint  Tunito  de 
mesure,  comme  étant  l'élément  le  plus  essentiel  du  sang;  mais  il  ne  fut 
d'abord  évalué  qu'en  masse,  et  par  rapport  aux  autres  parties  consti- 
tuantes de  l'humeur  centrale.  Nous  verrons  dans  quelles  limites  oscillent 
les  réjiultats  obtenus,  et  quel  écart  peut  exister  entre  le  plus  et  le  moins, 
entre  la  pléthore  et  l'anémie. 

La  science  moderne  fit  mieux  encore.  Aidée  du  microscope,  elle  chercha 
k  dénombrer  ces  globules  rouges,  principe  de  la  richesse  du  sang,  mal- 
gré les  difficultés  de  l'entreprise,  et  l'énormité  des  chiffres  qu'on  devait 
trouver.  Ndos  aurons  à  fournir  quelques  détails  sur  ce  sujet,  qui  n'a  reçu 
ses  pofectioiinements  pratiques  que  de  nos  jours  (Malassez,  1872; 
Hayem,  1875). 

La  qualité  du  sang  ne  fut  pas  seulement  appréciée  au  moyen  de  la 
numération  des  globules  rouges,  elle  parut  aussi  subordonnée  à  l'inten- 
sité de  sa  coloration,  due  elle-même  à  Vhémoglobinej  substance  intime- 
ment attachée  à  la  constitution  du  globule  rouge.  Le  procédé  de  dosage  de 
l'hémoglobine  est  plus  facile  à  mettre  en  œuvre  que  la  numération  des 
globules  rouges  ;  nous  dirons  sur  quels  faits  il  est  fondé,  et  nous  aurons 
à  juger  de  sa  valeur  réelle.  Il  a  été  imaginé  par  ces  mêmes  auteurs  que 
nous  Tenons  déjà  de  citer  (Malassez,  1874;  Hayem,  1875)  :  comme  on 
le  ^U  il  est  né  d'hier,  pour  ainsi  dire. 

Noos  n'avoUs  pas  voulu  détourner  l'attention  de  la  pléthore  vraie,  clas- 
nque,  pour  parler  de  certaines  acceptions  que  le  mot  a  reçues  chemin 
Taisant  :  nous  réservant  d'y  revenir  en  dernier  lieu,  pour  être  complet. 
C'est  ainsi  que  l'excès  absolu  de  la  masse  du  sang,  nécessitant  une  déri- 
vation de  cette  humeur  vers  certaines  dépendances  du  système  vasculaire, 
où  elle  s'emmagasine,  donne  lieu  à  une  sorte  de  pléthore  partielle,  avec 
dilatation  variqueuse  de  diverses  sections  du  système  veineux.  Parmi  ces 
déterminations  d'un  ordre  si  particulier,  nous  mentionnerons  la  pléthore 
abdominales  dans  ses  rapports  avec  la  disposition  hémorrhoïdaire  et 
toutes  ses  conséquences.  Qui  ne  voit  ici  comme  une  consécration  des 
opinîoas  de  Stahl,  et  comme  le  principe  de  cette  grande  affection  hypo- 
chondriaque,   qui  joue    un  rôle   si   considérable  dans  ses  doctrines? 
La  pléthore  se  révèle,  sous  ce  nouvel  aspect,  avec  son  véritable   sens, 
que  nous  aurons  à  faire  prévaloir  en  temps  opportun,  et  prend  ainsi  une 
consistance    qui  laisse  bien  loin  dans  un  vague  indéterminé  cet  état 
sans  limites  et  sans  attributions,  tel  que  l'on  conçoit  la  pléthore  gé- 
néralement. 

Une  dernière  acception  de  ce  terme  repose  sur  certains  faits  observés, 
d'abord,  dans  le  cours  de  la  grossesse;  alors  qu'il  semble  y  avoir  sura- 


152  PLETHORE.  —  physiologie  pathologique. 

bondance  de  sang,  donnant  lieu  à  quelques  accidents  qui  cèdent  _ 
ment  à  l'emploi  de  la  saignée.  Cette  disposition  paraît  jusIiGée  par  TéUt 
du  pouls,  qui  implique  une  grande  masse  de  sang  en  mouvement;  et  par 
Thyperlrophie  temporaire  du  ventricule  gauche,  reconnue  par  Larcher 
(1828).  Mais  d'autres  circonstances  reproduisent  les  mêmes  phénomcaes  en 
dehoi*s  de  la  grossesse,  toutes  dominées  par  une  certaine  dilution  du  sang. 
L'état  cachectique,  en  un  mot,  se  trouve  mainte  fois  doublé  d'une  sorte 
de  pohjémie  séreuse  (Beau,  1846),  forme  de  pléthore,  qui  ne  simule  la 
véritable  pléthore  que  par  ses  caractères  les  plus  accessoires.  Néanmoim 
nous  aurons  à  tenir  compte  de  celte  assimilation  plus  ou  moins  forcée, 
pour  mieux  en  faire  ressortir  les  oppositions  et  les  apparences  pan- 
doxales. 

Cet  historique  serait  incomplet,  si  nous  ne  signalions  pas  rioDaenee 
de  la  méthode  graphique  sur  les  progrès  de  la  question  qui  nous  occupe 
en  ce  moment.  Les  rapports  réciproques  des  circulations  locales  avec  h 
circulation  générale,  et  l'action  des  mouvements  respiratoires  sur  la  ten- 
sion vasculaire,  sont  nettement  établis  au  moyen  de  tracés  qui  ne  laissent 
guère  de  place  à  Téquivoque.  La  véritable  pléthore  se  trouve  ainsi  déga- 
gée des  simples  troubles  circulatoires,  qui  sont  plus  ou  moins  fugaces,  et 
qui  nécessitent  l'emploi  de  moyens  diftérents,  destinés  à  y  remédier.  On 
peut  donc  affirmer,  sans  crainte  d'être  contredit,  que  la  question  de  la 
plétiiore,  longtemps  stationnaire,  a  reçu  de  la  science  contemporaine  des 
éclaircissements  qui  vont  nous  permettre  de  décider  ce  qu'il  y  a  à  prendre 
ou  à  laisser  de  cet  état  qu'on  ose  à  peine  appeler  morbide. 

II.  Physiologie  patholog^ique.  —  La  notion  de  la  pléthore,  au 
point  de  vue  objectif,  est  relative  aux  diverses  circonstances  suivantes  : 
1"^  à  la  masse  totale  du  sang;  ^r  au  degré  de  pression  que  ce  sang 
exerce  sur  les  parois  vasculaires  ;  5®  à  sa  richesse,  soit  en  globules 
rouges,  soit  en  hémoglobine;  i""  enfin  à  quelques  autres  particularités 
secondaires.  Nous  allons  examiner  la  question  sous  chacun  de  ces  dilfi- 
renis  aspects,  laissant  à  la  clinique  le  soin  de  coordonner  ces  élémeutset  ^ 
de  conclure  sous  le  rapport  nosologiquc.  P 

1**  On  ne  peut  arriver  à  la  connaissance  de  la  masse  totale  du  sang,  p 
chez  l'homme  vivant,  que  par  des  voies  détournées  et  d'une  façon  toot  P 
approximative.  Partant,  il  est  encore  plus  difficile  de  dire  à  quel  point  ^ 
précis  commence  la  pléthore  par  surabondance  de  la  masse  sanguine;  ' 
car,  à  Tabsince  de  moyens  certains  pour  évaluer  la  quantité  de  sang  que  *^ 
l'on  possède,  s'ajoutent  les  incertitudes  provenant  des  écarts  consilià^  ^ 
bics  dans  les  résultats  obtenus  tant  bien  que  mal,  sans  sortir  des  limites  "^ 
plly^iologi(|ues.  C'est  ainsi  que,  d'après  Cl.  Bernard,  et  suivant  qu'un  ■■ 
animal  ei>t  n  jeun  ou  en  pleine  digestion,  la  masse  totale  du  sang  peut  }^- 
varier  du  simple  au  double.  Dans  ces  teimcs,  on  conçoit  quelles  pertu^^ 
bâtions  apportent  à  la  solution  du  problème  les  actes  les  plus  simples  de  -^s 
la  vie,  qui  tantôt  ajoutent  et  tantôt  enlèvent  à  la  masse  de  nos  humeufi.  ^ 
On  avait  bien  songé  à  appliquer  la  méthode  de  numération  dcâglo-j%â 
bulcs  rouges  à  l'évaluation  de  la  quantité  moyenne  du  sang  ;  et  Vicrurdtf  11 


PLÉTHORE.    **  PHYSIOLOGIE   PATHOLOGIQUE.  153 

le  premier  (1852-54),  avait  proposé  un  procédé  qui  serait,  à  la  rifnicur, 
praticable  chez  rhomme  vivant.  MaisMalassez  (1874),  tout  en  indiquant 
quatre  antres  moyens  de  dosage  fondes  sur  le  même  fait,  est  oblii^é  de 
reconnaître  que  les  résultats  obtenus  sont  loin  d'être  absolus;  et  ifail- 
leurs  on  ne  peut  opérer  que  sur  des  animaux,  puisqu'il  faut  les  sacri- 
fier. Cet  auteur  a  néanmoins  énoncé  un  principe  qui  peut,  par  extension, 
recevoir  son  application  chez  Thomme  et  éclairer  la  question  qui  nous 
occupe  :  c'est  le  principe  de  la  capacité  globulaire  ;  à  savoir,  le  rap- 
port qui  existe  entre  le  nombre  des  globules  rouges  et  l'unité  de  poids 
de  Vanimal,  en  supposant  le  sang  distribué  avec  égalité  dans  tous  les 
tissus.  Il  ne  faut  pas  confondre  la  capacité  globulaire  avec  la  richesse 
globulaire^  qui  n'est  que  le  nombre  absolu  des  globules  rouges  par  mil- 
Umètrc  cube  de  sang.  Voici  maintenant  quelques  faits  qui,  sans  exiger  la 
connaissance  de  la  masse  du  sang,  peuvent  être  utiles  à  savoir  : 

RèlaUvement  à  Tâge,  il  semble,  du  moins  dans  les  premières  périodes 
de  la  vie,  que  la  capacité  et  la  richesse  globulaires  vont  d'abord  en  aug- 
mentant, tandis  que  le  volume  total  du  sang  diminue. 

L'influence  du  régime,  produisant  Tengraissement  de  Tanimal,  amène 
une  diminution  de  la  capacité  globulaire  et  du  volume  du  sang;  mais  la 
richesse  en  globules  augmente.  Il  s'ensuit  que  l'embonpoint  se  développe 
plus  rapidement  que  le  sang. 

Dans  l'amaigrissement,  au  contraire,  le  volume  proportionnel  du  sang 
augmente  ;  et  la  capacité  globulaire  et  la  richesse  globulaire  diminuent  : 
il  y  a  hydrémie. 

Dans  l'inanition,  il  y  a  à  la  fois  diminution  de  la  capacité  et  de  la 
richesse  globulaire  et  du  volume  du  sang  :  le  sang  parait  plus  vite  affecté 
que  toNt  autre  tissu. 

Chez  un  inanitié,  Malassez  évalue  la  réduction  de  la  masse  du  sang  au 
soixante-dixième  du  poids  du  corps;  tandis  que,  chez  un  individu  sain, 
dont  le  sang  était  destiné  à  être  transfusé  au  précédent,  la  proportion 
était  environ  du  neuvième. 

De  ces  faits,  qui  ne  nous  dispenseront  pas  de  revenir  sur  la  numéra- 
tion absolue  des  globules  ronges  dans  ses  rapports  avec  la  pléthore,  nous 
pouvons  conclure  que  cet  état  du  sang  est  indépendant  de  ce  qui  est 
la  marque  extérieure  de  la  force  et  de  la  santé,  l'embonpoint  et  Texubé- 
rancc  des  masses  musculaires  :  il  serait  plutôt  en  opposition  avec  ces 
apparences. 

C'est  qu'en  effet,  la  surabondance  de  sang  doit  se  traduire  par  cer- 
tains phénomènes,  qui  impliquent  une  prédominance  du  liquide  sur  le 
solide,  dont  on  chercherait  en  vain  les  attributs  sur  les  individus  san- 
guins qu'on  qualifie  trop  volontiers  de  pléthoriques.  Il  y  a  là  une  erreur 
qui  a  longtemps  -subsisté,  et  dont  il  faut  revenir.  Si  à  l'homme  d'un 
tempérament  sanguin,  on  oppose  un  homme  à  tempérament  bilieux, 
on  remarquera,  entre  autres  caractères,  chez  ce  dernier,  un  développe- 
ment exagéré  des  veines  sous-cutances,  souvent  une  tendance  à  Tétut  vari- 
queux de   ces  veines;  les  veines  hémorrhoïdaires  sont  également  vari- 


134  PLÉTHORE.  —  physiologie  pathologique. 

queuses  ;  tout  annonce  une  sorte  de  pléthore  abdomincUe^  qui  se  trahit 
par  des  malaises  propres  aux  hypochondriaques,  et  qui  se  juge,  soit  par 
des  épisiaxis,  soit  surtout  par  des  fliur  hémorrhoîdaux.  Cet  ensemble 
annonce  une  surabondance  de  sang,  un  trop-plein,  qui  tend  à  refluer 
dans  le  système  veineux,  et  à  y  constituer  de  véritables  réserres  :  tel  est 
le  sens  général  de  TafTection  hémorrhoïdaire ,  chez  l'homme  prindpale- 
ment.  Pour  ce  qui  est  de  la  femme,  il  y  a  une  circonstance,  la  gnmnse^ 
qui  entraine  une  sorte  de  pléthore,  s'annonçant  par  des  varices  des  mem- 
bres inférieurs,  et  indirectement  par  Thypertrophie  du  ventricule  gauche 
(Larcher,  1828).  L'origine  d'un  pareil  état  est  moins  dans  la  présence 
d'un  fœtus,  qui  gène  la  circulation,  que  dans  le  fait  de  la  suppressioo 
des  règles  qui,  chaque  mois,  enlevaient  le  trop-plein  du  système  vasco- 
laire.  Si*  on  voulait  nier  le  rôle  et  l'utilité  de  ces  réserves  de  sang,  il  suffi- 
rait de  citer  le  cas  de  cette  servante  qui,  à  chaque  grossesse,  se  faisait 
avorter  en  comprimant  les  varices  qu'elle  portait  aux  membres  infé- 
rieurs. 

Cette  forme  de  pléthore  est  bien  la  pléthore  ad  vasa ,  par  excellence  ;  l'ex- 
pansion de  la  masse  sanguine,  sous  l'influence  de  la  chaleur,  ou  delt  pres- 
sion atmosphérique  diminuée,  donne  lieu  à  la  variété  de  pléthore  dite  ad 
volumen;  tandis  que  la  réduction  du  champ  circulatoire,  par  le  fait  d'une 
amputation,  par  exemple,  constitue  la  variété  ad  spatium-.  Ces  distinc- 
tions ont  leur  importance,  puisqu'elles  spécifient  telle  ou  telle  condi- 
tion étiologique  particulière;  elles  font,  jusqu'à  un  certain  point,  indé- 
pendantes de  la  qualité  du  sang,  c'est-à-dire  de  sa  richesse  en  globules 
rouges,  de  sa  consistance  et  de  sa  densité.  Aussi  a-t-on  admis  une  autre 
espèce  de  cet  état  qui  mérite  les  noms  de  pléthore  ou  de  polyémit 
séreuse.  La  pléthore  de  la  grossesse  est  en  grande  partie  de  cette  nature; 
des  accoucheurs  célèbres  (Désormeaux,  P.  Ménière,  1828)  ont  mis  sur 
son  compte  bon  nombre  des  accidents  de  la  grossesse,  et  ont  ainsi  jus- 
tifié l'emploi  de  la  saignée,  si  largement  fait,  même  à  simple  titre  pré- 
ventif. 

Le  même  ensemble  symptomatique  a  conduit  certains  observateurs 
(Beau,  1845-56)  à  admettre  une  sorte  de  pléthore  de  cachexie,  compre- 
nant à  la  fois  une  plus  ou  moins  grande  hydratetion  du  sang,  et  une 
surabondance  apparente  de  l'humeur  en  circulation.  L'hydratation  se 
traduit,  en  pareil  cas,  par  une  transsudation  du  sérum  hors  des  vais- 
seaux, et  par  un  affaiblissement  de  la  coloration  rouge  du  sang;  tandis 
que  la  soi-disant  pléthore  serait  accusée  par  une  réplétion  extrême  des 
vaisseaux,  par  des  congestions  viscérales  et  par  des  bruits  de  soufOe. 
Mais,  dans  ce  tableau  si  habilement  tracé,  les  apparences  jouent  un  plus 
grand  rôle  que  la  réalité  ;  et  nous  aurons  à  décider  jusqu'à  quel  point, 
dans  la  pléthore,  la  quantité  du  sang  peut  se  séparer  de  sa  qualité. 

2^  La  pression  que  le  sang  exerce  sur  les  parois  vasculaires,  est  aussi 
un  élément  important  de  la  question.  11  peut  toujours  y  avoir  phlétore 
relative^  du  moment  que  la  tension  inlravasculaire  dépasse  un  certain 
degré.  Les  caractères  de  la  forte  tension  sont  précisément  ceux  de  la 


PLETHORE.  —  PHYSIOLOGIE  pathologique.  1o5 

irabondance  de  la  masse  sanguine,  et  ont  servi  de  point  de  départ  à  une 
iriété  de  pléthore,  ad  vires^  qui  s*est  introduite  tout  empiriquement 
uns  la  science.  Ces  caractères  sont  :  la  petitesse  et  la  dureté  du  pouls , 
\  ralentissement  des  pulsations  cardiaques ,  et,  dans  les  tracés  sphyg- 
lographiques,  le  peu  d'amplitude  de  la  courbe  et  le  défaut  de  dici^o- 
ime.  En  même  temps,  on  observe,  dans  les  cas  extrêmes,  tous  les  acci- 
ial8  propres  à  la  concentration  des  forces  (oppressio  virium) ,  et 
8qu*à  Yalgiditë  cholériforme  la  plus  inquiétante.  Un  pareil  état  reçoit 

solution ,  soit  d'une  émission  sanguine  faite  à  propos ,  ou  de  toute 
lire  dëplétion;  et,  corrélativement,  du  relâchement  du  réseau  capil- 
ire  de  la  périphérie,  dans  cette  phase  de  réaction  qui  suit  si  avanta- 
îQsemeni  la  période  de  frisson  et  d'algidité. 

Cette  forme  de  pléthore  se  rencontre  dans  un  grand  nombre  de  cir- 
iiutances,  dont  quelques-unes  s'écartent  à  peine  de  l'état  physiologique. 
n  Tobserfe  dans  le  simple  frissonnement  du  froid  et  de  la  terreur,  et 
us  le  degré  le  plus  avancé  de  Talgidité  cholérique  et  de  l'étranglement 
itesfioal.  Elle  suppose  une  énorme  concentration  de  sang  dans  les  or- 
mes intérieurs,  où  la  vie  semble  se  réfugier,  et  y  constitue  une  pléthore 
I  vasa  réelle,  quoique  temporaire  et  fugace.  Il  existe  momentanément 
le  coDgcstion  des  grosses  veines  afTérentes  du  cœur,  et  une  dilatation 
m  cavités  droites,  en  rapport  avec  l'état  asphyxique  et  l'angoisse  où  se 
oove  le  malade.  Des  transsudations,  telles  que  Yentérorrhée  choléri- 
Wf  compensent  à  peine  cette  tension  extrême,  qui  ne  saurait  durer  sans 
ingw,  et  qui  ne  se  trouve  efficacement  levée  que  par  la  relaxation  du 
seau  capillaire  périphérique.  Alors,  à  la  forte  tension  succède  la  faible 
osioii,  ï  la  petitesse  et  à  la  lenteur  du  pouls,  Pampleur  et  la  vitesse,  au 
iiroidissement  le  réchauffement,  à  la  suspension  momentanée  de  la  vie 
:(érîéiire  l'expansion  de  toutes  les  activités  fonctionnelles,  à  Voppressio 
rntifi  la  réaction.  C'est  alors  la  fièvre  dans  ses  manifestations  les  plus 
apies.  Le  système  vasculaire  est  le  théâtre  de  ces  mouvements  antago- 
sles,  qui  sont  liés  entre  eux  par  des  lois,  inscrites  automatiquement 
ir  les  procédés  graphiques  (Marey,  1863;  S.  Tschirjew,  1877). 

Les  Avers  actes  de  la  vie  nutritive,  les  congestions  actives  ou  passives, 
résidant  aux  phlegmasies  ou  aux  hémorrhagies,  constituent  autant  de 
ts  de  pléthore  relative,  et  entretiennent  les  mêmes  alternatives  entre  la 
osion  vasculaire  profonde  et  la  périphérique. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  la  quantité  de  sang  que  Ton  possède,  le  système 
rttriel  s'accommode  toujours  pour  conserver  un  certain  état  de  pression, 
ooi  lequel  s'accomplissent  les  divers  actes  de  la  vie,  et  qui  donne  en 
iitie  la  mesure  de  l'énergie  vitale,  comme  le  manomètre  du  générateur 
le  vapeur.  Cette  pression,  qu'on  a  pu  déterminer  chez  les  animaux,  n'est 
•as  exactement  connue  pour  l'homme  :  elle  est  d'ailleurs  incessamment 
ariable.  11  y  a  pourtant  des  sections  du  système  artériel,  où  l'adaptation 
he  se  (ait  plus  aussi  strictement,  lorsque  la  tension  intra-vasculaire  vient 
ï  s'abaisser  au-dessous  de  certaines  limites,  par  suite  d'anémie  surtout. 
C*esldans  l'aorte,  où  l'absence  de  l'élément  contractile  ne  permet  pas  de 


136  PLÉTHORE.  —  physiologie  pathologique. 

régler  le  calibre  du  vaisseau  suivant  la  masse  du  sang  qui  le  traverse.  Il 
en  résulte  des  écarts  considérables  cnlre  le  maximum  et  le  minimum  de 
tension,  et  une  excursion  des  parois,  qui  donne  naissance  aux  baiiemenU 
aortiques  (voy.  t.  II,  p.  79:^).  En  tlicsc  générale,  on  sera  d'autant  plus 
voisin  de  Tétat  pléthorique,  dans  les  conditions  ordinaires  de  la  vie,  que 
la  tension  vasculaire  sera  plus  près  de  sa  limite  supérieure,  sans  pouvoir 
s'abaisser  beaucoup  au-dessous  :  l'exploration  du  pouls  servira  de  mesure 
dans  ce  cas. 

C'est  encore  sous  l'influence  de  la  pression  atmosphérique,  que  ces 
accommodations  auront  le  plus  lieu  de  s'exercer.  La  tension  intra-vascu* 
laire  ne  vaut  que  par  son  écart  au-dessus  de  la  pression  extérieure.  On 
sait  ce  qui  se  passe  dans  les  ascensions  en  ballon,  et  réciproquement 
dans  la  cloche  du  plongeur;  et  par  le  jeu  alternatif  de  ces  deux  conditions 
extrêmes,  on  peut  en  quelques  secondes  accroître  la  pression  vasculaire 
jusqu'aux  ruptures  hémorrhagiques,  ou  lui  faire  équilibre  jusqu'à  l'an- 
nuler pour  ainsi  dire.  On  se  rend  ainsi  compte  enfin  du  rôle  de  la  près- 
sion  barométrique  dans  un  grand  nombre  de  troubles  fonctionnek  aussi 
mobiles  qu'elle,  et  souvent  inexplicables. 

3^  Mais  c'est  la  qualité  du  sang  qu'il  s'agit  surtout  d'apprécier. 
Qu'importe  que  ce  sang  remplisse  outre  mesure  le  système  circulatoire, et 
que  ce  système  soit  monté  au  degré  de  la  forte  tension,  si  le  liquide  en 
mouvement  est  dépourvu  de  vertus  vivifiantes.  Il  est  donc  nécessaire  que 
le  sang  ait  une  certaine  densité,  qu'il  soit  sufSsamment  riche  en  globules 
rouges,  que  ces  globules  eux-mêmes  soient  en  état  d'accomplir  énergique- 
ment  leur  tâche  intime,  et  qu'enfin  dans  toutes  leurs  proportions,  les 
éléments  constituants  de  l'humeur  centrale  soient  tels  que  le  comporte  te 
type  moyen  de  la  vie.  La  pléthore  ne  commencera  que  lorsque  l'un  ou 
l'autre  de  ces  principes  constitutifs,  ou  tous  à  la  fois,  dépasseront  une 
limite  déterminée. 

Parmi  les  parties  intégrantes  du  sang,  les  globules  rouges  occupent  le 
premier  rang  par  l'importance.  Il  y  a  donc  lieu  de  les  apprécier  eux- 
mêmes,  et  pour  la  proportion  que  le  sang  en  renferme.  Ce  dernier  point 
nous  occupera  d'abord. 

Dans  les  premiers  essais  rigoureux  d'hématologie,  on  s'est  surtout  in- 
quiété de  mesurer  en  masse  ces  globules  rouges,  et  d'en  donner  le  poids 
absolu  pour  lUOO  parties  de  sang.  Mais  les  résultats  ne  sont  pas  constants; 
ils  varient  avec  les  observateurs,  et  même  d'un  instant  à  l'autre  chez  le 
même  individu.  (Voy.  art.  Sakg.)  Afin  de  fixer  les  idées,  nous  indiquerons 
le  chiffre  de  127  pour  1000,  adopté  par  Andral  et  Gavarret,  et  qui  a 
plutôt  servi  à  marquer  une  limite  supérieure  pour  les  anémies,  et  surtout 
la  chlorose,  qu'à  édifier  les  esprits  à  l'égard  de  la  pléthore.  Cependant 
nous  voyons  la  propoilion  de  131,  de  154  (moyenne  141)  pour  1000, 
dans  des  cas  se  rapportant  ai  ce  dernier  état  morbide. 

Ces  résultats  ont  beaucoup  perdu  de  leur  importance  depuis  qu'on  a 
entrepris  de  compter  ces  globules  rouges  eux-mêmes.  Les  principes  de 
cette  numération  sont  indiqués  d'autre  pai    (art.  Samg),  et  nous  n'avons  i 


PLÉTHORE.    —   PHTSIOLOGIE   PATHOLOGIQUE.  137 

lUS  occuper  ni  des  moyens,  ni  des  faits  qui  n'intéressent  pas  directement 
lire  sujet.  Cependant  nous  indiquerons  la  méthode  de  Ilayem  (1875), 
(mme  la  plus  simple  et  la  plus  facile,  pour  arriver  à  connaître  le 
Mobre  des  globules  rouges  par  millimètre  cube  de  sang.  Maintenant  à 
lel  chiffre  pourra-t-on  dire  qu'il  y  a  pléthore?  Est-ce  à  quatre  millions? 
iîx  millions?  etc.  Il  est  bien  difficile  de  se  poser  des  bornes  fixes  à  cet 
ard,  car  une  multitude  d'influences  font  varier  ces  proportions.  C'est 
isi  que,  pour  ne  citer  qu'un  exemple,  Brouardel  (1876)  a  vu  une  pur- 
tioii  élever  le  chiffre  habituel  des  globules  rouges  d*un  million  par 
illimètre  cube,  et  quelquefois  de  deux  millions.  Il  est  vitii  que  le  pre- 
ier  rapport  ne  tardait  pas  à  se  rétablir,  à  la  suite.  De  même,  chez  un 
anitié,  il  a  compté  4  849  395  globules  rouges,  chiffre  relativement 
^BsidéTable,  qui  a  permis  à  notre  ingénieux  observateur  d'émettre  ce 
indoxc  :  c  Voulez-vous  rendre  un  homme  pléthorique?  mettez-le  à  la 
ète,  et  pui^ez-le.  »  Il  n'est  pas  besoin  de  dire  que  la  réciproque  est 
lalement  rraie;  et  qu'un  repas  copieux,  délayant  le  sang,  le  rend  plus 
lurrc  en  globules.  Mais  nous  savons  aussi  que  la  solution  du  problème 
t  la  pléthore  ne  dépend  pas  que  d'un  seul  facteur. 
Le  globule  rouge  étant  considéré  comme  l'élément  essentiel  du  sang, 
,  ainsi  que  Malassez  le  désigne,  comme  la  monnaie  respiratoire,  il  ne 
iffitpas  d'en  connaître  le  nombre  exact,  mais  aussi  quelle  est  sa  charge 
n  hémoglobine.  L'hémoglobine,  à  quelque  titre  que  ce  soit,  est  le  prin- 
ipequi  fixe  l'oxygène  de  l'air  dans  l'acte  de  la  respiration,  et  sert  à  le 
lèpcDser  dans  tous  les  pomts  de  l'organisme.  Un  globule,  quoique  volu- 
oÙDeux,  comme  dans  la  chlorose,  peut  être  pauvre  en  hémoglobine;  et  sa 
ridiesse  en  cette  substance  est  le  vrai  mobile  de  son  utilité  et  de  son 
éiMfgîe.  Il  est  donc  important  d'en  opérer  le  dosage,  pour  juger  de  la 
râleur  d'un  certain  sang.  Ce  dosage  est,  en  général,  fondé  sur  l'intensité 
ieli  coloration  du  sang  donné,  en  rapportant  la  nuance  observée  à  un 
rhiffire  connu  de  globules  rouges.  (Voy.  art.  Sang.)  Il  arrive  ainsi 
(p'mc  moins  de  globules  rouges,  et  avec  des  globules  plus  petits,  un 
sang  peut  être  plus  riche  en  hémoglobine,  et  par  conséquent  plus  vrai- 
neot  pléthorique,  qu*un  autre  sang  dont  il  faut  plus  de  globules  rouges 
loar  obtenir  la  môme  teinte,  et  le  même  pouvoir  respiratoire,  par  con- 
équeot. 

l'hémoglobine,  à  son  tour,  parait  devoir  ses  vertus  dynamiques  au  fer 
[o'dle  contient.  D'après  les  évaluations  les  plus  récentes,  elle  ne  renfer- 
oerait  pas  moins  de  0.42  pour  100  de  ce  métal.  D'un  autre  côté,  l'action 
la  fer,  chez  les  chlorotiques,  se  traduit  par  une  augmentation  rapide  de 
1  richesse  globulaire,  et  parallèlement  de  la  charge  en  hémoglobine.  Ces 
lits,  observés  à  l'occasion  des  anémies  et  de  la  chlorose,  servent  par 
itension  à  concevoir  Tétat  pléthorique,  sans  qu'aucun  terme  précis 
ennctte  de  dire  où  finit  l'anémie,  où  commence  la  pléthore. 

4*  Il  n'est  pas,  d'ailleurs,  un  seul  des  éléments  du  sang  que  la  chimie 
1  distingués  et  dosés,  qui  n'apporte  son  contingent  au  sujet  qui  nous 
locupe.  On  peut  même  poser  en  fait  que  la  pléthore  est  une  sorte  de 


158  PLÉTHORE.  —  appligatio.^s  cluiioobs. 

résultante  de  toutes  les  activités  intimes  de  Thumeur  centrale»  8*exerçaat 
avec  harmonie,  mais  à  la  limite  supérieure  même  de  ces  énergies.  De 
sorte  qu'avec  un  degré  de  plus  la  désunion  commence,  et  les  troubles 
fonctionnels  en  même  temps.  Il  en  résulte  qu'on  doit  rencontrer  une 
juste  proportion  de  fibrine,  ou  mieux  de  plasma,  pour  servir  de  milieu 
à  Vhématie;  et  des  principaux  sels  :  chloinire  de  sodium,  phosphate  de 
soude,  etc.,  qui  favorisent  les  réactions  propres  à  la  respiration  et  à  la 
nutrition. 

Il  est  si  vrai  que  cet  ensemble  de  richesse  globulaire  et  en  hémo- 
globine constitue  le  point  culminant  de  la  vie  physiologique,  oi\  pléthore, 
que,  dès  le  premier  pas  de  l'état  morbide,  Téquilibre  est  rompu.  On  sait 
avec  quelle  vitesse  se  consomment  les  globules  rouges  dans  les  inflao^ 
mations,  les  pyrexies,  les  dégénérescences,  et  surtout  les  hémorriui- 
gies,  etc.  Un  des  points  les  plus  remarquables  de  cette  destruction,  c'est 
le  défaut  d'emploi  de  la  Gbrine  qui  sert,  pour  ainsi  dire,  d'atmosphère 
au  globule  rouge,  et  qui  dès  lors  se  précipite  avec  tant  de  facilité,  mit 
dans  le  vase  de  la  saignée,  soit  dans  les  parties  qui  sont  le  nége  de  la 
détermination  morbide.  Cette  prépondérance  de  la  fibrine  se  retrouYO 
dans  le  cours  de  la  plupart  des  cachexies,  et  même  dans  la  chlorose,  i 
l'exception  peut-être  des  affections  scorbutiques.  Un  nouvel  équilibre 
tend  à  s'établir  par  un  appel  surabondant  de  l'élément  aqueux  ;  la  tensioa 
intra-vasculaire  remonte  ;  une  autre  forme  de  plénitude  ou  pléthore  ap* 
parait  :  c'est  notre  pléthore  ou  polyémie  séreuse. 

Il  faut  encore  tenir  compte  de  la  qualité  du  sang,  et  surtout  de  sa  deih 
site  dans  leurs  rapports  avec  les  mouvements  circulatoires.  Nous  noos 
contenterons  de  rappeler  ici  que  le  sang  circule  d'autant  plus  facilement 
qu'il  est  moins  dense  (art.  Cirgolation,  t.  VU,  p.  720);  et  que  la  dispo- 
sition à  produire  des  bruits  de  souffle  est  en  raison  inverse  de  cette  den- 
sité (art.  AusGULTATioM,  t.  IV,  p.  190).  Renversez  les  termes  de  ces  deux 
propositions,  et  vous  en  aurez  fait  l'application  à  la  pléthore.  D'un  autre    ■ 
côté,  les  recherches  de  Malassez  (1873)    nous  montrent  l'inégale  ri- 
chesse du  sang  en  globules  rouges,  suivant  les  différentes  parties  de    • 
l'arbre  circulatoire,  et  une  foule  d'autres  circonstances  accessoires;  cela 
implique  une  grande  diversité  parmi  les  circulations  locales,  qui  sont   : 
d'autant  plus  entravées  que,  d'après  l'expression  vulgaire,  le  sang  est 
plus  épais. 

Il  nous  reste,  à  présent,  à  transporter  ces  données  de  physiologie  pa- 
thologique sur  le  terrain  de  la  clinique,  pour  y  recevoir  leur  véritabll  . 
signification,  et  y  trouver  leur  utilité  pratique. 

111.  —  Applications  cliniques.  —  Nous  avons  déjà  fait  pressentir 
combien  il  serait  difficile  de  réunir  dans  un  même  cadre  tous  les  phéne-  i 
mènes  propres  à  la  pléthore,  pour  en  conclure  à  une  unité  nosologiqu^  i 
bien  définie.  Nous  pensons,  au  contraire,  qu'il  y  a  lieu  de  former  plu- 
sieurs groupes  parmi  les  symptômes  que  l'analyse  précédente  nous  a  révé- 
lés, et  de  rattacher  chacun  d  eux  à  sa  série  naturelle,  d'après  ses  affinités. 
C'est  ainsi  que  nous  distinguerons,  d'abord,  trois  grands  cas  principaux 


PLÉTHORE.  —  APPLICATIONS  CLINIQUES.  159 

ur  la  pléthore  proprement  dite  :  V  lun  relatif  à  la  surabondance  du 
ng;  2*  le  second,  sous  la  dépendance  de  la  pression  intravasculaire  ; 
3*  le  troisième  caractérisé  par  la  richesse  du  sang  en  globules  rouges 

en  hémoglobine.  Puis,  nous  admettrons  un  quatrième  et  dernier  cas, 
»iir  la  pléthore  fausse  ou  paradoxale, 

V  PléUiore  par  surabondance  de  la  masse  sanguine.  —  C'est  la 
éthore  Traie  ou  classique  par  excellence,  la  pléthore  ad  vasa  des  au- 
irs  anciens.  Elle  n'est  pas  une  maladie,  mais  une  prédisposition  ex- 
Une  à  ces  troubles  morbides  qu'engendre  le  trop-plein,  ou  Texcès  dans 
bien.  Elle  résulte  d'une  accumulation  des  produits  de  la  digestion,  que 
or  sonbondance,  ou  que  l'allanguissement  des  fonctions  laisse  sans 
npbi.  Elle  est  l'attribut  des  gros  mangeurs,  des  gens  sédentaires,  et  ne 
t  montre  guère  que  durant  l'âge  mûr.  Elle  appartient  encore  à  ceux  qui 
it  sobi  l'amputation  d'un  ou  plusieurs  membres,  et  qui,  ayant  la  même 
lisaance  digestive,  n'oilrent  plus  une  capacité  vasculaire  sufRsante.  La 
nune,  après  l'âge  de  retour,  se  reirouve  dans  le  même  cas,  étant  privée 
on  flux  sanguin  périodique,  devenu  une  nécessité.  Durant  la  grossesse, 
i  pareil  état  peut  être  observé;  mais  il  se  complique  d'une  sorte  de 
fthore  anomale,  que  nous  signalerons  par  la  suite. 
Cette  forme  de  pléthore  se  traduit  par  le  signe  physique  le  moins  équi- 
iC{iie,une  aropliation  du  système  veineux, qui  offire  en  différents  points  du 
trps  des  dilatations,  des  sinuosités,  constituant  les  varices^  les  tumeurs 
iriqueuses^  et  plus  spécialement  le  varicocèle^  les  hémorrhoîdes,  etc. 
Il  ne  saurait  douter  de  la  signification  de  ces  états  anatomiques, 
Band  on  voit  des  hémorrhagies  périodiques  et  critiques  prendre  une 
lelle  voie  comme  si  elles  n'en  étaient  que  l'aboutissant  obligé  et  naturel; 
t  lorsque  les  malaises,  propres  à  la  période  préparatoire,  disparaissent 
vec  la  crise  qui  leur  succède.  Ces  malaises  sont  ceux  de  V affection  hypo- 
lumdriaque^  conçue  selon  les  idées  de  Stahl,  et  correspondant  à  ce  que 
es  allemands  appellent  la  vénosité.  C'est  un  sentiment  d'angoisse,  de 
l^spoée,  de  tension  des  hypochondres,  avec  dispositions  aux  vésanies 
ivÂeh,  etc.  :  le  tout  aboutissant  parfois  à  une  épistaxis,  ou  mieux  à  une 
poussée  hémorrhoïdaire,  avec  ténesme  et  enfin  flux  hémorrhagique.  Si 
liénorrhagie  donne  la  solution  d'un  tel  état  morbide,  on  ne  manque  pas 
k  le  voir  reparaître  au  bout  d'un  certain  temps,  lorsqu'une  nouvelle 
nnbondancc  du  sang  sans  emploi  se  fait  sentir.  On  ne  peut  mieux 
Miparer  cette  situation  qu'à  celle  de  la  menstruation  chez  la  femme  : 
zhipB  période  cataménialc  est  une  nécessité  physiologique  ;  et  lorsqu'une 
nreoutance  quelconque,  telle  que  la  gi*ossesse  ou  le  retour  d'âge,  vient 
i  supprimer  une  pareille  habitude,  nous  savons  déjà  que  les  mêmes 
ïiiàioaiënes  d'ampliation  veineuse  et  de  flux  supplémentaire  ne  tardent 
las  à  se  montrer. 

Sans  insister  davantage  sur  des  faits  qui  n'ont  peut-être  pas  encore 
eça  l'interprétation  que  nous  en  donnons,  mais  qui  la  méritent  bien, 
ous  ferons  remarquer  que  la  pléthore,  envisagée  à  ce  point  de  vue,  cor- 
ispond  plutôt  à  l'ensemble  du  tempérament  bilieux  qu'à  celui  du  tem- 


140  PLÉTHORE.  —  applications  cliniques. 

jiérament  sanguin.  Avec  les  mêmes  attributs,  elle  expose  aux  mêmes 
complications  morbides.  La  surabondance  du  sang  Tcmporte  sur  sa  ri- 
chesse globulaire,  et  la  tendance  aux  hcmorrhagies  conduit  même  peu  à 
peu  certains  malades  à  Tanémie,  ou  à  la  polycmic  séreuse.  La  ^tagnatioo 
du  sang  dans  les  dilatations  veineuses  implique  un  certain  ralentisse- 
ment du   mouvement  circulatoire,  particulier,  du  reste,  aux  tempéra- 
ments bilieux.  Le  contact  prolongé  de  Thumeur  centrale  avec  les  tissus 
fait  qu'il  se  surcharge  de  principes  uratiques;  et,  de  là  à  la  goutte  eta 
la  gravelle,  il  n'y  a  qu*un  pas.  Enfin  le  fait  même  de  Texcès  de  la  masse 
sanguine  donne  au  pouls  les  caractères  de  la  forte  tension  :  circoastanca 
qui   prédispose  d'autant  plus  aux  hémorrhagies  que  le  sujet  est  plus 
avancé  en  âge,  et  que  ses  vaisseaux  sont  plus  athéromateux.  Parmi  les 
hémorrhagies  dues  à  cette  cause,  V apoplexie  cérébrale  est  une  des  plus 
fréquentes  et  des  plus  redoutables. 

On  d(*vra  compléter  cet  exposé  par  Tétude  des  varices^  en  général,  et 
de  Vaffection  hémorrhoïdaire,  en  particulier. 

Le  traitement,  non  pas  de  cette  forme  de  pléthore  elle-même,  mais  des 
accidents  auxquels  elle  donne  lieu,  est  tout  indiqué.  Si  la  nature  ne 
provoque  pas  un  soulagement  prompt  par  une  hémorrhagie  spontanée 
critique,  il  faut  Taider  dans  ses  efforts,  et,  par  des  émissions  sanguiaes 
générales,  ou  mieux  locales,  opérer  la  spoliation  nécessaire  au  retpur  de 
Tordre  et  du  bien-être.  Un  devra  autant  que  possible  déterminer  Vhér 
morrhagie  là  où  elle  tendait  à  se  faire  :  appliquer,  par  exemple,  des 
sangsues  à  Tanus  chez  un  hémorrhoïdaire.  Cependant,  tenant  compte  des 
Yoies  détournées  qu'utilise  la  dérivation  (voy.T.  XI,  p.  192),  onallègers 
une  tension  sanguine  des  parties  supérieures  trop  forte,  par  celte  même 
émission  hémorrhoïdaire,  spontanée  ou  provoquée. 

Aucun  autre  moyen  ne  vaudra  celui  que  nous  mettons  en  ayant;  et  si 
Ton  préconise  parfois  certains  purgatifs  drastiques,  c'est  dans  le  but  de 
porter  le  molimen  hémorrhoïdaire  à  son  plus  haut  degré,  et  d'amener  la 
rupture  par  excès  de  pression. 

Mais  il  y  aura  lieu  également  de  combattre  la  disposition  à  un  pareil 
état  par  des  moyens  hygiéniques  convenables  :  faire  par  exemple  succéder 
à  une  vie  trop  sédentaire  des  occupations  qui  nécessitent  l'emploi  des 
forces  physiques,  et  accroissent  la  dépense  des  substances  qu'accumule  la 
nutrition;  ou  bien  alors  diminuer  la  recette,  et  la  proportionnera  l'acti- 
vité que  Ton  développe.  Il  faut,  en  outre,  combattre  la  constipation  habi- 
tuelle en  pareil  cas;  et  peut-être,  en  assurant  des  évacuations  régulières 
et  abondantes,  prévenir  une  plénitude  trop  imminente.  C'est  à  ce  titre 
que  certaines  eaux  minérales,  comme  celles  de  Niederbronn,  de  Uom- 
bourg,  de  Biermcnstorff,  etc.,  conviennent  si  bien  aux  pléthoriques  hjpo* 
chondriaques.  Peu  importe  le  mode  de  déplétion,  pourvu  que  le  but  soit 
atteint,  et  surtout  qu'il  le  soit  à  moindres  frais  pour  l'organisme.  Sous 
ce  rapport,  les  évacuations  alvines  ont  un  avantage  marqué,  surtout  cbfls 
les  pléthoriques  qui  ont  déjà  passé  l'âge  moyen  de  la  vie,  chez  les  hom» 
mes  obèses  et  chez  les  goutteux. 


PLÉTHORE.  APPLICATIONS   CLIHIQDES.  {4| 

Uaiténuation  de  la  masse  sanguine  peut  encore  être  obtenue,  dans 
ïfuelques  cas,  par  raction  des  eaux  minérales  alcalines,  et  particuliè- 
rement des  eaux  de  Vichy  et  congénères.  Il  est  de  tradition,  en  effet,  que 
les  hommes  à  tempérament  bilieux,  et  voués  aux  conséquences  de  la  plé- 
thore abdominale  et  de  la  vénosité,  se  trouvent  bien  d*un  pareil  traite- 
ment. 

2*  Pléthore  par  excès  de  pression  intravasculaire.  —  Nous  avons 
va  plus  haut  quelles  étaient  les  conditions  physiologiques  de  cette  forme 
de  pléthore,  et  comment,  par  une  adaptation  particulière  du  système 
waiGiilaire,  les  apparences  .du  trop-plein  se  reproduisaient  exactement, 
de  même  que  dans  le  cas  précédent.  C*cst  une  pléthore  essentiellement 
relative,  que,  par  rapport  à  la  pléthore  ad  vasa^  on  qualifiait  de  pléthore 
ad  virety  comme  si  la  gène  de  la  circulation  ne  provenait  plus  de  la  sur- 
«bondance  du  liquide  à  mouvoir,  mais  seulement  de  TinsuHisance  dans 
rimpalàoD. 

Celte  pléthore  est  plus  souvent  partielle  que  générale.  Cependant  il 
existe  telles  circonstances  presque  physiologiques  qui  nous  mettent  en 
prtsencc  d^u&  état  de  cette  nature,  étendu  à  Tuniversalité  du  corps  :  c*est, 
d'une  pari,  lorsqu*il  y  a  plénitude  vraie  du  système  circulatoire,  et  que 
par  conséquent  la  tension  vasculairc  reste  toujours  voisine  d'un  point  maxi- 
rnnin,  et  limite  les  excursions  des  parois  des  vaisseaux;  et,  d'autre  part, 
dans  les  cas  de  pression  atmosphérique  forte,  soit  libre,  soit  artificielle. 
Id  encore  les  oscillations  du  ressort  vasculaire  sont  nécessairement  bor- 
nées. De  toute  façon  les  explorations  sphygmographiques,  ou  simplement 
tKittes,  indiquent  ce  qu'il  en  est,  par  les  signes  de  la  forte  tension,  qu'il 
eil  inutile  de  reproduire  en  ce  moment. 

On  connaît  mieux  les  troubles  qui  résultent  d'une  rupture  brusque 
d'équilibre  entre  la  pression  atmosphérique  et  la  pression  intravascu- 
laire, lorsque  la  première  vient  subitement  à  baisser,  comme  dans  les  as* 
censious  de  montagnes  ou  en  aérostat,  que  les  phénomènes  inverses. 
Cependant,  il  est  admis  qu'une  forte  pression  à  l'extérieur,  dans  la  cloche 
ài  plongeur  ou  dans  les  appareils  à  air  comprimé,  est  plutôt  accompagnée 
de  bieo-étre  général,  d'une  respiration  plus  libre  et  d'un  allégement  de 
Ions  les  mouvements  :  au  point  que  l'art  s'est  emparé  de  ce  fait,  et  l'ex- 
ploite au  grand  avantage  de  certains  malades,  parmi  lesquels  on  range 
précisément  les  asthmatiques  et  les  anémiques. 

Mais  les  pléthores  partielles,  de  la  nature  de  celles  qui  nous  occupent. 
Importent  un  bien  plus  grand  trouble  fonctionnel  que  les  précédentes,  et 
nous  placent  définitivement  sur  le  terrain  morbide.  Nous  distinguerons, 
à  cet  égard,  le  groupe  de  ïalgidilé,  celui  de  Voppressio  virium,  et  enfin 
celai  des  congestions  proprement  dites.  Nous  avons  établi  les  données  de 
phpiulogic  pathologique  qui  correspondent  à  ces  formes  exceptionnelles 
de  pléthore;  il  nous  rosle  à  les  présenter  au  point  de  vue  clinique. 

Le  groupe  de  Valgidité  est  bien  connu  ;  c'est  cet  état  dans  lequel  tout 
le  sang  semble  s'être  réfugié  à  l'intérieur  des  principaux  viscères,  tandis 
que  la  chaleur  et  la  vie  ont  en  quelque  sorte  abandonné  la  périphérie.  On 


142  PLÉTHORE.  —  applications  cliniques. 

ne  peut  douter  qu*il  n'en  soit  ainsi,  lorsqu'on  voit  tout  le  réseau  vascalaire 
extérieur  vide  de  sang,  et  comme  un  ratatinement  de  l*enveloppe  géné- 
rale du  corps  qui  est,  dans  les  conditions  ordinaires  de  la  vie,  dans  une 
sorte  d'érection  physiologique.  Il  faut  bien  admettre  dès  lors  qu'il  y  a 
trop-plein  ou    pléthore  des  cavités  viscérales,  y  compris  les  oi^oes 
qu'elles  recèlent.  Nous  n'avons  pas  à  entrer  dans  les  détails  d'une  pa- 
reille situation  ;  il  nous  suffira  de  renvoyer  aux  cas  qui  y  correspondenl 
cliniquement  :  à  Talgidité  cholérique,  au  frisson  de  la  fièvre,  aux  nu- 
laises  de  la  nausée,  de  la  migraine,  aux  accidents  de  l'iléus  et  do 
péritonisme,  à  la  colique  hépatique,  néphrétique,  etc.  Lorsque  cet  étal 
est  porté  à  l'extrême,  on  peut  observer  des  ruptures  hémorrhagiqoes, 
des  transsudations  séro-sanguines,  et  des  mouvements  coUiquatifo  dont  le 
flux  cholérique  donne  une  idée  exacte.  Il  ne  s'agit  là  que  des  aeddeob 
purement  mécaniques,  qui  ne  jugent  pas  la  maladie;  celle-ci  n'a  d'antre 
fin  que  la  cessation  même  du  spasme,  le  relâchement  du  réseau  capillaire 
périphérique,  et  le  retour  du  sang  dans  les  parties  qu'il  avait  quittées  : 
c'est,  en  un  mot,  la  réaction.  Cet  événement  est  l'issue  habituelle  d'un 
état  fort  grave,  qui  à  lui  seul  est  dans  le  cas  de  compromettre  l'existenee, 
si  la  nature  ou  l'art  n'interviennent  pas  promptement.  Dans  cette  dernière 
circonstance,  on  a  recours  au  réchauffement  artificiel  du  malade,  lu 
frictions,  et  à  certaines  substances,  données  à  Tintérieiir,  qui  opèrent 
dans  le  même  sens,  tel  que  Topium  ou  la  morphine,  et  en  général  toute 
la  classe  des  excitants  diffusibles. 

Le  groupe  de  Voppressio  virium  offre  beaucoup  d'analogies  avec  ie 
précédent.  Il  n'en  diffère  que  parce  qu'il  correspond  à  une  détermination 
morbide  définie,  qu'il  n*est  pas  fugace  à  la  façon  de  l'algidité,  et  qu'il 
fait  souvent  illusion  sur  sa  véritable  signification.  On  l'observe  à  la  suite 
des  grands  traumatismes^  des  brûlures  étendues^  dans  le  coon  d*im- 
portantes  phlegmasies  viscérales,  comme  la  pneumonie^  par  exemple, 
dans  certains  an/Arox  de  mauvaise  nature,  etc.  La  présente  circonstôiee 
est  remarquable  surtout  par  une  extrême  prostration  des  forces,  et  ptr 
cet  état  qualifié  d'adynamie.  Malgré  la  gravité  de  sa  situation,  le  malade, 
frappé  de  stupeur,  demeure  indifférent  à  ses  souffrances  et  à  tout  ce  qui 
l'entoure.  C'est  sous  l'empire  d'une  sensation  excessive,  que  se  fait  cette 
sorte  de  concentration  des  forces;  il  y  a  comme  une  compression  des 
centres  nerveux  par  Tafflux  du  sang,  qui  cesse  pour  ainsi  dire  de  circuler: 
du  moins  il  y  a  la  plus  grande  analogie  entre  cet  état  et  les  signes  de 
la  compression  cérébrale.  Cette  plénitude  des  vaisseaux  de  l'encéphak 
et  du  canal  médullaire  cesse  comme  par  enchantement,  et  les  désordres 
qu'il  entraine,  par  une  dérivation  puissante  qui  appelle  le  sang  loin  des 
régions  où  il  est  accumulé,  et  notamment  par  l'emploi  de  la  saignée 
générale.  A  la  suite  de  l'émission  sanguine,  il  semble  qu'un  obstacle 
soit  écarté;  et  que,  l'humeur  centrale  recommençant  à  circuler,  les 
fonctions  se  raniment  et  la  vie  se  réveille.  D'autre  part,  Taffection 
morbide,  qui  commande  une  pareille  situation,  ne  peut  entrer  en  réso- 
lution qu'à  ce  prix.  11  faut  encore  remarquer  que  tout  moyen  capable 


PLÉTHORE.  —  APPLICATION»  CLINIQUES.  445 

raiténuer  les  impressions  excessives,  qui  oppriment  ainsi  le  jeu  des 
l'onctionSf  pourrait  être  mis  en  usage  au  même  titre  :  sous  ce  rapport, 
les  ÎDJections  hypodermiques  de  morpliine  et  les  inhalations  de  chloro- 
Forme  donneraient  le  même  résultat,  à  moindres  frais. 

Enfin  le  groupe  des  congestions  proprement  dites  y  congestions  actives, 
songeslions  passives,  congestions  hémorrhagiques,  inflammatoires,  tro- 
ihiques,  congestions  par  paralysie  et  par  rétention,  etc.  ,  nous  placent 
lins  un  cas  tout  à  fait  analogue  :  une  pléthore  locale  excessive  rompt 
'èqaililve  de  la  circulation  générale,  et  a  pour  conséquence  une  déshar- 
nome  deTensemble  physiologique.  Des  accidents  nombreux  résultent 
le  cet  appel  fait  au  profit  de  la  partie  malade,  et  sont  en  rapport  avec 
Texcès  de  tension  d'un  côté,  et  avec  son  insuffisance  de  l'autre.  C'est 
réoonomie  tout  entière  se  prêtant  à  une  accommodation  vicieuse,  il  est 
mi,  mais  inévitable.  Parmi  les  formes  multiples  que  prend  la  pléthore 
par  eongoition,  nous  signalerons  particulièrement  l'ensemble  de  phéno- 
mènes toachant  à  l'état  morbide,  et  qui  sont  le  produit  de  reffort.  Pour 
le  reste,  nous  renvoyons  à  l'article  congestion  (T.  IX,  p.  15)  qui  donnera 
la  dé  de  bien  des  difficultés  inhérentes  au  sujet  actuel,  et  qui  le  complé- 
tera toat  naturellement. 

5*  PlMore  par  richesse  en  globules  rouges  et  en  hémoglobine.  —  Ici, 
noms  nous  éloignons  plus  que  jamais  de  Tétat  morbide  :  c'est  au  contraire 
l'idéal  de  la  santé,  sans  qu'on  puisse  dire  à  quel  point  précis  commence 
tt  pléthore.  Un  pareil  état  se  revêt  des  attributs  du  tempérament  sanguin 
(loyeiTkiipCRAMENTs),  et  n'a  guère  d'autres  inconvénients  que  d'exposer 
eeoi  qui  le  présentent  aux  affections  inflammatoires  franches,  à  la  pneu- 
monie principalement  ;  et  l'indication  thérapeutique  toute  trouvée,  c'est 
h lugniée faite /ar^d  manu.  L'extrême  densité  du  sang,  unie  à  une  plasti- 
cité non  équivoque,  amène,  surtout  au  voisinage  des  déterminations  mor- 
Mes,  des  stases,  des  ralentissements  du  mouvement  circulatoire,  con- 
dûiant  assez  facilement  à  Voppressio  virium.  Il  faut  enfin  savoir  que 
cette  richesse  en  globules,  en  hémoglobine,  en  monnaie  respiratoire, 
comme  l'appelle  Malassez,  n'est  pas  nécessairement  liée  à  la  surabon- 
daoee  de  la  masse  du  sang  :  sous  ce  rapport,  il  existe  un  certain  anta- 
gonisme entre  cette  forme  de  pléthore  et  la  première  que  nous  ayons 
Andiée;  il  est  le  même  que  celui  qui  apparaît  entre   le  tempérament 
Uieux  ou  hémorrhoîdaire,  et  le  tempérament  sanguin  qui  a  un  tonus 
mcularis  plus  énergiquement  constitué,  et  se  prête  par  conséquent 
moins  facilement  à  l'ampliation  variqueuse. 

Si  h  pléthore  par  excès  de  richesse  n'est  pas  un  mal,  il  y  a  néanmoins, 
dans  cet  état  bien  et  dûment  constaté,  comme  un  critérium  ou  un  étalon 
pour  la  santé;  et  lorsqu'on  aura  reconnu,  chez  un  individu,  une  certaine 
exubérance  globulaire,  comme  cinq  à  six  millions,  par  exemple,  avec  une 
intensité  de  coloration  proportionnelle  en  hémoglobine,  et  cela  d'une 
bsfixi  moyenne  et  habituelle,  tout  abaissement  notable  et  persistant  dans 
ces  résultats  indiquera  qu'il  y  a  déchéance  organique  et  menace  pour 
la  sanlè.  La  vitesse  de  la  chute  sera  mesurée  par  la  diminution  plus  ou 


144  PLÉTHORE.  —  applications  cliniques. 

moins  rapide  du  nombre  des  globules  rouges,  sachant  que  Tétai  morbide 
les  consomme  avec  une  extrême  avidité.  A  ce  titre,  la  numération  des 
hématies  et  le  dosage  de  Thémoglobine  sont  de  précieuses  conquêtes 
pour  la  science  du  pronostic. 

Jusqu'à  présent,  nous  avons  envisagé  les  différents  aspects  sous  le»> 
quels  apparaît  la  pléthore,  comme  autant  de  formes  distinctes  dans  cet 
état  plus  ou  moins  morbide  ;  or,  il  peut  se  faire  que  ces  distinctions  quel- 
que peu  arbitraires  soient,  au  fond,  les  éléments  d'un  même  tout,  et  que 
la  vraie  pléthore  soit  précisément  constituée  par   leur   réunion.  Rieo 
n'empêche,  en  effet,  que  Ton  ol)serve  tout  à  la  fois  chez  le  même  sojet 
la  surabondance  absolue  du  sang,  un  état  de  tension  circulatoire  éleré, 
et  une  grande  richesse  en  globules  et  en  hémoglobine  :  ces  diverses  ci^ 
consUinces  vont  parfaitement  ensemble  ;  mais  on  peut  aflirmer  que  leur 
concours  harmonique  constituerait  un  idéal  de  la  santé  qui  est  rarement 
atteint.  Nous  pensons  que  la  vérité  se  trouve  sur  le  tcrnin  analytique; 
d'autant  plus  que,  loin  de  poursuivre  une  entité  chimériquef  nousoom 
sommes  tenu  dîans  les  limites  d'une  simple  étude  de  physiologie  patholo- 
gique. 

4**  Pléthores  fausses  ou  paradoxales.  —  Il  nous  reste  à  dire  quelques 
mots  de  certains  états  qui  simulent  la  pléthore,  et  que  nous  avons  d^ 
entrevus  dans  ce  qui  précède.  C'est  principalement  au  lit  du  malade  que 
doit  s'agiter  une  pareille  question,  particulièrement  liée  à  des  apparences. 
La  masse  du  sang  semble  surtout  surabondante  ;  mais  on  ne  peut  nier 
que  la  charge  en  hémoglobine  ne  soit  toujours  faible,  le  nombre  des  g^ 
bules  rouges  fût-il  môme  assez  considérable.  Quoiqu'il  en  soit  de  ces  dé- 
tails, il  importe  avant  tout  de  se  placer  en  face  de  cas  particuliers. 

C'est  à  l'occasion  de  la  grossesse  que  Tidéc  de  cette  pléthore  a  été 
principalement  soulevée;  et  la  plupart  des  accidents  propres  icet  état 
ont  été  mis  sur  le  compte  d'un  excès  de  sang.  Certains  phénomènes  justi* 
fiaient  cette  manière  de  voir,  et  notamment  la  dilatation  variqueuse  des 
veines  des  membres  inférieurs,  lu  bouffissure  et  Pamplialion  du  corps 
tout  entier,  et  jusqu'au  développement  hypertrophique   du  ventricule 
gauche  du  cœur,  signalé  par  Larcher,  impliquant  une  plus  forte  ondée 
sanguine  mise  en  mouvement,  etc.  Enfin  les  bons  résultais  de  la  saignée, 
si  largement  employée  autrefois,  venaient  donner  leur  appui  à  celte  opi- 
nion. On  ne  saurait  du  reste,  sans  Taccepter  dans  sa  totalité,  méconnaître 
la  surabondance  de  la  masse  sanguine  prouvée  par  tant  de  faits,  et  même 
par  la  nécessité  de  la  situation  ;  mais  ce  sang  est  relativement  pauvre  :  les 
globules  rouges  ont  diminué  de  nombre,  leur  charge  en  hémoglobine  eA 
faible;  il  a  gagné  en  fibrine, et  il  est  plus  hydraté. Cet  état  est  qualifié  de 
polyéuiic  séreuse,  et  se  retrouve  dans  d'autres  circonstances  que  la  gros- 
sesse. 

On  l'observe  tout  d'abord  dans  la  chlorose^  qui  présente  les  mêmes 
signes  extérieurs  de  pléthore,  dans  la  boulfissure  du  visage,  dans  les  ?e^ 
tiges,  la  céphalalgie,  les  pulsations  cardiaquc^s,  les  bruils  de  soufflet  qv 
semblent  annoncer  qu'une  forte  ondée  parcourt  rapidement  le  système 


PLÉTHOHE.  : —  APPLICATIONS   CLINIQUES.  445 

trtériel.  Enfin  il  n'est  pas  jusqu'à  une  certaine  coloration  du  visage  {chlo- 
y>8is  florida)  qui  ne  puisse  faire  illusion. 

Tout  cet  ensemble  appartient  à  la  plupart  des  états  cachectiques,  et  la 
piépondérance  de  tel  symptdme,  comme  la  tuméfaction  légère  des  tissus, 
indépendamment  des  véritables  suffusions  hydropiques,  va  jusqu'à  mas- 
quer, pendant  un  certain  temps,  l'amaigrissement  du  sujet  et  trompe 
sur  rétendue  des  ressources  qui  lui  restent. 

Les  mêmes  objections  peuvent  s*adresser  à  ces  différents  cas,  assez 
semblables  dans  la  forme  ;  et  voici  en  quoi  elles  consistent  :  si  ce  sang 
parait  abondant,  sous  le  rapport  du  volume,  il  est  réellement  pauvre  de 
ce  qui  constitue  sa  véritable  valeur,  c'est-à-dire  en  globules  rouges.  Et 
quand  même  ceux-ci  n'auraient  pas  trop  perdu  de  leur  nombre ,  ils 
oCTrent  un  faible  degré  d'hémoglobine  ;  car,  ainsi  que  Malassez  l'a  con- 
staté,  il  n'y  a  pas  de  rapport  nécessaire  entre  ces  deux  facteurs.  Enfin  il 
n'est  pas  jusqu'au  volume  de  ces  hématies,  qui  ne  puisse  être  augmenté 
dans  la  chlorose,  par  exemple.  Ensuite,  il  faut  bien  savoir  que  la  facilité 
à  produire  des  bruits  vasculaires,  prouve  moins  en  faveur  de  la  quantité 
que  de  la  faible  densité  du  sang  ;  et  cela  conformément  à  des  principes 
parfaitement  connus  (Voy.  Auscultation,  t.  IV,  p.  193)  ;  et,  qui  plus 
est,  la  faible  tension  du  système  artériel  entraîne,  de  la  part  du  cœur, 
un  surcroit  de  travail  qui  amène  assez  promptement  son  hypertrophie  ; 
et,  comme  il  est  mal  nourri,  sa  dégénérescence  granulo-graisseuse.  Enfin, 
tout  en  admettant  un  trop-plein  de  sang  hydraté ,  l'excès  de  pression 
intra-Tasculaire ,  et  toutes  les  conditions  hydrostatiques  perverties,  ont 
pour  résultat  la  transsudation  séreuse  au  travers  des  parois  du  vaisseau, 
et  déchargent  le  système  circulatoire  au  profit  du  tissu  cellulaire  com- 
mun, des  cavités  séreuses  et  des  émonctoircs.  Telle  est  l'issue  d'un  état 
qui  ne  comporte  aucun  équilibre  ni  aucune  persistance.  Mais  ce  sont,  en 
général,  les  caractères  de  la  faible  tension,  que  présente  le  pouls  dans  les 
cachexies,  de  même  que  pendant  la  fièvre  ;  et  l'anasarque  doit  reconnaî- 
tre pour  cause  presque  exclusive  les  troubles  survenus  dans  la  constitu- 
tion du  sang,  surtout  son  hydratation. 

Quelques  affections  cardiaques  spéciales,  comme  V insuffisance  aor- 
iiquef  et  un  état  cachectique  très-intéressant,  le  goitre  exophthalmique^ 
se  prêteraient  à  une  analyse  du  même  genre,  et  nous  conduiraient  à  un 
résultat  analogue,  pour  ce  qui  est  de  la  pléthore;  mais  il  est  inutile  d'in- 
sister davantage  sur  une  question  jugée. 

De  cette  discussion,  il  est  donc  permis  de  conclure,  que  les  fausses  plé- 
thores ne  conservent,  avec  la  pléthore  vraie,  qu'une  ressemblance  très- 
éloignée,  pour  ne  pas  dire  plus  ;  et  que,  ainsi  que  nous  avons  cru  devoir 
les  désigner,  elles  sont,  à  tous  les  points  de  vue,  paradoxales. 

Hola.  —  Consultez   la  bibliographie  des   articles  :    Aqsgdltatio!!  ,    Cosobstion,    D6irfATi05, 

Sâyç,  etc. 
fliftocRATc,  Aphorifdncs,  soet.  I,  aph.  3.  Édit.  f  Jltr6.  Paris,  1844,  t.  IV,  p.  461. 
Gaues,  De  pienitudinc,  cap.  lU,  chartes,  t.  VII,  p.  326. 
UotmiAAfB  (H.),  Apborisniet;  eommealaires  par  G.  Van  Swiéten,  t.  I,  p.  156.  Paris,  1769. 

flovT.  Dicr.  m£d.  it  cm.  XXVUI.  —  10 


146  PLEURÉSIE. 

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pendant  et  après  l'accouchement  {Areh.  gén.  de  méd.^  V  série,  t.  XVI,  p.  4€0.  1828). 

RocHOci,  Dict.  de  médecine ,  art.  Pléthore,  2*édit.,  t.  XX Y,  p.  1.  1842. 

Mox5BRET  (Ed.)  et  Fleurt  (L.),  Gompcndium  de  médecine,  art.  PlCthore.  Paris,  1845,  t.  YI 
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expérimental  et  clinique  d'auscultation.  Paris,  1856,  p.  614. 

Valleix  (F.  L.  J.),  Guide  du  médecin  praticien,  t.  II,  2*  édit.  Paris.  1850,  p.  151. 

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les  poissons  (Comptée  rendus  de  V Académie  de$  icietwes,  t.  LXXY,  n**  23.  1873),  —  De  la 
numération  des  globules  rouges  du  sang.  Des  méthodes  de  numération  de  la  ricbesie  du  sang 
en  globules  rouges  dans  les  diflérentes  parties  de  l'arbre  circulatoire,  thèse  de  Paris,  1873.  — 
KouTeaux  procédés  pour  apprécier  la  masse  totale  du  sang  (Archives  de  phyêioio^ie  nm^ 
maie  et  pathologique.  1874).  —  Recherches  sur  quelques  variations  que  présente  b  iMnt 
totale  du  sang  (Archives  de  physiologie  normale  el  pathologique.  1875,  n*'  2  et  3).  — 'Roo- 
veau  colorimètre  destiné  â  la  mesure  du  pouvoir  colorant  du  sang  (Buil,  de  la  Soe.  de  bio- 
logie, 28  o<*tobre  1876).  —  Sur  la  richesse  des  globules  rouges  en  hémoglobine  {Comptes  rat' 
dus  deVAcad.  des  sciences,  1877). 

Hatbh  (G.),  De  la  numération  des  globules  du  sang.  Leçon  faite  â  l'hôpital  de  la  Charité  [Ga%. 
hebd,  de  méd.  et  de  chir.  1875,  p.  291).  —  Note  sur  l'action  du  fer  dans  l'anéaie  (Giiiit/^/!» 
rendus  de  V Académie  des  sciences.  1876). 

Hatbk  [G.)  ET  Nacbet  (A.),  Sur  un  nouveau  procédé  pour  compter   les   gbbulei  du  sang 
Comptes  rendus  de  F  Académie  des  sciences.  1875). 

I.EssER  (de  Leipzig),  De  la  circulation  du  sang  ;  travail  basé  sur  de  nonvcllet  expérieaeeB  sur  b 
masse  et  la  distribution  du  sang.  1875. 

KouASsiER  (Augel),  De  la  numération  des  globules  du  sang  dans  les  suites  de  couches  phjsiob- 
giques  et  dans  la  lymphangite  utérine.  Paris,  1876. 

Brodardel,  De  l'influence  des  purgations  et  de  l'inanition  sur  la  proportion  des  globolee  raagtft 
contenus  dans  le  sang  (Soc,  médicale  des  hôpitaux  et  Union  médicale,  n*  1 10.  1876). 

Tkhirjew  (S.),  Uber  der  Einflûss  der  Blutdruckschwankungen  auf  den  Herzrhylhmnt  {Arck 
f.  Anat.  und  Phys,,  Band  I,  p.?116-195.  1877). 

Alfred  Lltok. 

PLEURÉSIE.  —  La  pleurésie  est  l*inflammation  de  la  pierre.  Une 
des  plus  communes  parmi  les  maladies  de  l'appareil  respiratoire,  rile  se 
montre  sous  des  formes  très-diverses,  et  les  nombreuses  yariétés  qu'elle 
présente  se  rattachent,  d'une  part  aux  causes  multiples  qui  peuvent  kiî 
donner  naissance,  d'autre  part  aux  dilTérences  des  lésions  qui  en  sont  la 
conséquei^ce.  Pour  caractériser  ces  nombreuses  variétés,  on  a  coutome 
d'employer  des  dénominations  destinées  à  mettre  en  relief  les  caractèret 
les  plus  saillants  de  chacune  d'elles  ;  mais  ces  caractères  sont  tantAt  rela- 
tifs aux  causes  de  la  maladie  (pleurésie  à  frigore,  traumatique,  tubercu- 
leuse, etc.),  tantôt  subordonnés  aux  lésions  anatomiques  (pleuréne  sèche 
ou  avec  épanchement,  générale  ou  partielle,  enkystée,  multiloculaire, 
purulente,  hémorrhagique,  etc.).  Parmi  toutes  ces  formes,  il  serait  sans 
doute  très-difficile,  sinon  impossible,  d'établir  une  classification  réga- 
lière,  basée  sur  la  considération  d'un  caractère  dominant  tous  les  autres, 
et  si  l'on  prenait  pour  point  de  départ  unique,  soit  les  causes ,  soit  les 
lésions,  on  serait  exposé  à  reléguer  au  second  plan  des  caractères  qui  oo(^ 
en  mainte  circonstimce,  une  importance  majeure  au  point  de  vue  pn* 
tique. 

En  présence  de  ces  difficultés,  il  nous  a  paru  préférable,  sans  cher- 


PLEURÉSIE.    —   p.   ÀIGUÊ   PRIMITIVE.    ^   CAUSES.       ^  147 

cher  à  présenter  une  classification  méthodique  des  pleurésies,  de  suivre 
un  ordre  qui  nous  permit  d'étudier  successivement  et  séparément  les 
types  cliniques  les  plus  communs  et  les  plus  importants.  Nous  sépare- 
rons d'abord  les  pleurésies  aiguës  et  les  pleurésies  chroniques.  Chacun 
de  ces  groupes  comprendra  des  formes  primitives  et  des  formes  secon- 
dav^s;  dans  cette  division,  ce  sera  la  considération  des  causes  différentes 
qui  servira  de  base  fondamentale  et  qui  permettra,  à  la  suite  des  pleuré- 
sies simples  et  franches,  d'étudier  certains  types  spéciaux  de  pleurésies 
secondaires,  comme  la  pleurésie  rhumatismale,  la  pleurésie  tuberculeuse 
et  d'autres.  Puis,  suivant  la  nature  des  lésions,  nous  séparerons ,  pour  les 
étudier  à  part,  les  pleurésies  purulentes  et  hémorrhagiques,  dont  This- 
toire  ne  saurait  être  réunie  à  celle  de  la  pleurésie  à  épanchement  séro-fi- 
brineux  qui  appartient  toute  entière  à  la  forme  aiguë  franche  et  primi- 
tÎTe.  L'étude  des  pleurésies  partielles  (interlobaire,  diaphmgmatique, 
médUasiîne)  sera  faite  à  propos  des  autres  groupes  dans  lesquels  elles 
rentrent  comme  de  simples  variétés. 

Pk.Ei7RÉsiE  AiGUE  PRIMITIVE.  —  La  plcurésio  aiguë  primitive,  pleurésie 
franche,  séro-fibrineuse ,  est  la  forme  la  plus  commune  des  pleurésies  ; 
c'est  celle  où  les  caractères  propres  de  la  maladie  se  dégagent  le  plus  net- 
tement. Aussi  nous  la  prendrons  comme  type  principal,  et  c'est  à  propos 
d'elle  que  nous  étudierons,  avec  les  développements  nécessaires,  les 
caractères  communs  à  toutes  les  pleurésies. 

CSaosea.  —  La  cause  la  plus  fréquente  de  la  pleurésie  aiguë  est  le 
reGroidissement  :  le  plus  souvent  c*est  un  refroidissement  de  toute  la  sur- 
face du  corps,  et  cette  cause  est  d'autant  plus  efficace,  que  le  corps  était 
au  préalable  échauffé  ou  en  sueur;  d'autres  fois,  c'est  un  refroidissement 
partiel  agissant  sur  une  partie  du  corps  et  notamment  sur  la  poitrine,  ou 
résolCant  de  l'ingestion  de  boissons  froides.  Celte  cause  est  aussi  celle 
qui  détermiae  le  développement  de  la  pneumonie  et  de  la  bronchite,  et 
souvent  on  ne  peut  invoquer  autre  chose  que  les  dispositions  indivi- 
dnelles,  pour  expliquer  comment,  à  une  même  cause  apparente,  corres- 
pondent des  effets  différents.  Nous  nous  contenterons  de  remarquer  ici 
que  la  pleurésie  semble  survenir  de  préférence  chez  les  individus  dont  la 
constitution  est  plus  ou  moins  débilitée,  tandis  que  la  pneumonie  sur- 
vient plutôt  chez  les  personnes  plus  robustes.  L'âge  intervient  aussi  dans 
cette  détermination  morbide  :  le  refroidissement  produit,  peut-être  chez 
Ici  «niants,  certainement  chez  les  vieillards,  beaucoup  plus  souvent  la 
poomionie  que  la  pleurésie. 

Comment  agit  le  refroidissement  pour  produire  la  pleurésie?  On  a  invo- 
qué une  action  réflexe,  et  c'est  à  ce  mécanisme  que  Marcovilz  s'est  ratta- 
ché dans  sa  thèse  :  d'après  cette  manière  de  voir,  le  froid  impressionne- 
rait les  extrémités  phériphériques  des  nerfs  sensitifs,  et  agirait  par  action 
réflexe  sur  les  nerfs  vaso-moteurs  qui  se  rendent  aux  ûrganes,  produisant, 
saimit  les  susceptibiUtés  individuelles,  ici  une  angine,  là  une  pneumo- 
nie, là  encore  une  pleurésie.  Peut-être  pourrait-on  admettre  aussi  bien 
une  action  directe  du  froid  sur  les  nerfs  qui  se  rendent  aux  organes 


148  PÛIURÉSIË  —  p.    AIGUfi   PRIMITIVE.    —  LÉSIONS   ANÂTOinQUBS. 

amenant  Tirrilation  de  ces  nerfs  ou  leur  inflammation  et,  par  suite,  i 
titre  de  troubles  trophiques,  des  lésions  inflammatoires  de  la  gorge,  du 
poumon  ou  des  plèvres.  Mais  ce  ne  sont  là  encore  que  des  hypothèses  sur 
lesquelles  il  n*y  a  pas  lieu  ici  d*insister  plus  longuement. 

La  pleurésie  aiguë  est  encore  quelquefois  causée  par  des  traumatismes, 
tels  que  les  plaies  ou  les  contusions  du  thorax,  les  fractures  de  côtes. 
Ces  pit  urcsies  traumatiques ,  subordonnées ,  pour  leur  siège  et  leurs 
caractères  anatomiques,  à  la  cause  qui  les  a  produites,  différent  notable- 
ment des  pleurésies  simples  ordinaires,  dont  le  refroidissement  est,  eo 
quelque  sorte,  la  cause  univoque. 

Comme  toutes  les  autres  maladies,  celle  qui  nous  occupe  a  ses  conditioitt 
d^opportunité,  qu'il  est  intéressant  de  connaître  :  peu  fréquente  dans  les 
premières  années  de  la  vie,  elle  se  montre  assez  commune  après  l'âge  de 
cinq  ans;  dans  Tàge  adulte,  elle  devient  très-fréquente,  surtout  entre 
vingt  et  trente  ans,  puis  devient  moins  commune  avec  le  progrès  des 
années  el  est  enfin  presque  rare  dans  la  vieillesse.  Quant  au  sexe,  il  semble 
sans  influence  réelle  sur  le  développement  de  la  maladie;  mais  il  n'en  est 
pas  de  même  de  l'état  antérieur  de  la  santé  :  la  pleurésie  est  fréquente 
dans  la  convalescence  de  diverses  maladies;  sans  cesser  pour  cela  d^étre 
primitive,  elle  se  développe  souvent  à  la  suite  d'un  refroidissement, 
même  léger,  auquel  les  convalescents  sont  plus  sensibles  en  raison  de 
leur  étal  de  faiblesse.  Enfin  la  pleurésie  à  frigore  est  encore  assez  M» 
quente  ddus  le  cours  de  certaines  maladies,  et  notamment  des  néphrites 
chroniques  et,  dans  ce  cas,  elle  peut  être  influencée  dans  sa  marche  par 
la  maladie  antérieure  qu'elle  est  venue  compliquer. 

Lésions  anatomiqaes.  —  Toutes  les  pleurésies  sont  caractérisées 
anatomiquement  par  une  lésion  de  nutrition  occupant  le  tissu  même 
de  la  plèvre  (hypcrémie,  hyperplasie  du  tissu  séreux),  et  par  une  ecm- 
dation  qui  se  fait  dans  la  cavité  séreuse  (épanchement  liquide,  pseudo- 
membranes). 

Dans  la  pleurésie  simple,  les  premières  de  ces  lésions  sont  ordinaire- 
ment peu  marquées  ;  les  secondes,  au  contraire,  ont  une  grande  impor- 
tance par  le  développement  qu'elles  acquièrent  et  par  les  conséquences 
quVIlrs  peuvent  entraîner;  nous  les  étudierons  successivement. 

a.  Lésions  parencliymateuses,  —  Au  début  de  la  pleurésie,  la  plèvre 
est  le  siège  d'une  rougeur  qui  se  présente  sous  la  forme  d'arborisations 
ducs  h  l'injection  des  petits  vaisseaux  ;  quelquefois  il  y  a  par  places  des 
ecchymoses,  résultant  de  la  distension  exces>ive  et  de  la  rupture  de  quel- 
ques-uns de  ces  vaisseaux.  La  plèvre  est  un  peu  épaissie;  souvent  elle i 
perdu  une  partie  de  sa  transparence  et  présente  un  aspect  louche  ;  sasm^  ; 
face  est  moins  lisse,  elle  est  hérissée  de  granulations  ordinairement  très  . 
peu  saillantes.  ^ 

Sur  des  coupes  de  la  membrane  séreuse  examinées  au  microscope,  os  [. 
constate  que  les  cellules  épithéliales  sont  gonflées ,  qu'elles  se  sont  malli> 
pliées  p.'tr  prolifération  et  se  sont  détachées  en  grand  nombre  ;  aussi  ai 
trouvp-t-on  de  petits  îlots  entre  la  surface  de  la  plèvre  et  Texsudat  fibri- 


PLEURÉSIE.    p.    AIGUË    PRIUITIVB.    —   LÉSlOnS   ANATOMIQUES.  i\9 

neux.  Le  tissu  coDJonctif  sous-jacent  est  gorgé  de  liquide  dans  lequel  on 
IrouTe  en  plus  grande  quantité  qu'à  l'état  normal  des  eellules  ayant  les 
caractères  des  globules  blancs  du  sang.  Il  se  forme,  en  outre,  à  la  sur- 
face de  la  plèvre  un  tissu  de  granulation  composé  de  cellules  embryon- 
naireSy  qui  proviennent  de  la  prolifération  des  éléments  conjonctirs  ;  dans 
dans  ce  tissu  de  nouvelle  formation,  on  peut  voir  des  vaisseaux  nouveaux 
qui  proviennent  des  vaisseaux  contenus  dans  le  tissu  bous-séreux  et 
8*a¥ancent,  en  bourgeonnant,  jusqu'à  la  surface  libre  des  granulations; 
ces  vaisseaux  ont  des  parois  minces  et  friables:  aussi  se  rompent-ils  quel- 
quefois et  donnent  lieu,  soit  à  des  ecchymoses  de  la  plèvre  ou  des  fausses 
membranes  ûbrineuses,  soit  à  des  épanchements  de  sang  qui  se  mêlent  à 
la  sérosité  accumulée  dans  la  cavité  pleurale  (pleurésie  hémorrhagique). 
Ce  tissu  nouveau  est  susceptible  de  s'organiser  et  de  se  transformer  pro- 
gresnvement  en  un  tissu  analogue  au  tissu  de  cicatrice  :  telle  est  l'origine 
des  néomembranes  organisées  qui  se  forment  à  la  surface  de  la  plèvre; 
c'est  encore  à  ce  tissu  de  granulation  que  sont  dues  les  adhérences  qui 
unissent  la  plèvre  pariétale  et  la  plèvre  viscérale,  et  qui  sont  produites 
par  le  contact  et  le  fusionnement  de  végétations  ou  de  néomembranes 
déTeloppées  sur  les  deux  feuillets  opposés  de  la  plèvre.  Ces  adhérences 
scmt  d'ailleurs  plus  ou  moins  développées,  tantôt  formant  des  brides 
filamenteuses  tenues,  tantôt  amenant  la  soudure  de  portions  très  étendues 
du  sac  séreux. 

Mais,  nous  le  répétons,  ces  dernières  lésions  sont  d'ordinaire  très-peu 
marquées,  et  en  quelque  sorte  à  l'état  rudimentaire,  dans  la  pleurésie  aiguë 
firanche  ;  nous  les  retrouverons ,  avec  leur  entier  développement ,  dans 
la  pleurésie  purulente  et  surtout  dans  la  pleurésie  chronique. 

b.  Exsudât.  —  La  principale  lésion  de  la  pleurésie  aiguë  consiste 
dans  un  épanchement  séro-fibrineux ,  qui  se  fait  dans  la  cavité  de  la 
plèvre. 

Quelquefois  la  partie  séreuse  de  l'exsudat  est  très-peu  abondante  et 
lesaîtôt  résorbée;  la  partie  fibrineuse  se  dépose  sur  les  parois  de  la  plèvre, 
tous  forme  d'une  fausse  membrane  plus  ou  moins  épaisse.  C'est  la  pleu- 
résie sèchej  qui  est  rarement  primitive. 

Presque  toujours  Tépanchement  liquide  existe  en  quantité  notable. 
Dams  le  liquide  sont  suspendus,  très-habituellement  des  flocons  fibin- 
neux,  et  à  la  surface  de  la  plèvre  on  Irouve  des  fausses  membranes. 
Ces  lé$>ions  si  importantes  doivent  être  étudiées  avec  quelques  détails. 

Les  caractères  de  V épanchement  pleurélique  sont  surtout  bien  connus 
depuis  que  la  pratique  de  la  thoracenlèse  a  fourni  des  occasions  fré- 
quentes de  les  déterminer  dans  toutes  les  particularités  qu'ils  présentent. 

La  quantité  de  liquide  épanché  est  très-variable,  depuis  quelques 
grammes  jusqu'à  plusieurs  litres  :  suivant  l'abondance  du  liquide  épan- 
ché, on  dit  que  Tépanchement  est  faible,  moyen  ou  abondant.  La  valeur 
de  ces  expressions  n'a  rien  d'absolu  ;  cependant ,  en  se  conformant  à 
Tusage,  on  peut  appeler  faible  un  épanchement  de  1/2  littre,  moyen  un 
épanchement  de  1  litre  à  1   litre  1/2,  abondant  un  épanchement  de 


i50       PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  lésioks  ahâtouqubs. 

2  litres   à  2  litres  1/2,   très  abondant  un   épanchement  qui   dépâi 

3  litres  (Bouilly).    . 

Le  liquide  est  transparent,  de  couleur  ambrée  ou  jaunâtre  plus  ou 
moins  foncée  ;  les  épanchemcnts  anciens  ont  habituellement  une  colora- 
tion plus  intense  que  les  épanchements  récents,  et  leur  couleur  peut  res- 
sembler à  celle  du  bouillon  ;  quelquefois  on  observe  une  teinte  rosée, 
quand  le  liquide  contient  une  assez  grande  quantité  de  globules  rouges 
du  sang,  ou  une  teinte  louche  quand  il  renferme  une  forte  proportion  de 
leucocytes.  La  présence  de  quelques  globules  rouges  dans  la  sérosité  pleu- 
rale ne  suffit  cependant  pas  pour  faire  croire  à  une  pleurésie  hémorrba- 
gique,  pas  plus  que  Texistcnce  de  quelques  leucocytes  nMndique  une 
pleurésie  purulente  :  Texamen  microscopique  montre  en  effet  que  tout 
les  liquides  pleurctiques  contiennent  quelques-uns  de  ces  éléments  du 
sang.  La  pleurésie  ne  mérite  vraiment  le  nom  d*bémorrhagique  ou  de  puru- 
lente que  quand  ces  éléments  sont  très-abondants;  nous  reviendrons  ail- 
leurs sur  ces  caractères. 

Les  caractères  chimiques  des  épanchements  pleuraux  ont  été  surtout 
bien  étudiés  par  Méhu,  qui  a  en  même  temps  montré  les  indications  qu*on 
en  pouvait  tirer  pour  le  diagnostic  et  le  pronostic.  Relativement  à  sa 
composition,  le  liquide  pleurétique  se  rapproche  du  sérum  du  sang; 
cela  d'ailleurs  ne  doit  pas  surprendre,  si  Ton  observe  que  Texsudat  de  là 
pleurésie,  comme  tous  les  exsudats  inflammatoires,  a  son  origine  dans 
le  sang  et  résulte  de  la  transsudation  exagérée  du  sérum  sanguin  à  la 
surface  de  la  plèvre.  On  trouve  donc  dans  ce  liquide  les  mêmes  élémoits 
constituants  que  dans  ce  sérum,  à  savoir  de  Teau,  de  Talbumine,  de  k 
matière  fibrinogène,  des  sels;  on  y  trouve  même,  comme  nous  venons  de 
le  voir,  des  éléments  figurés  du  sang,  globules  rouges  et  leucocytes.  Ma»  la 
proportion  de  ces  principes  constituants  du  sang  est  très-modifiée  dans 
Texsudat  pleurétique  :  la  quantité  d*eau  est  toujours  augmentée,  la 
quantité  des  principes  en  dissolution  est  au  contraire  toujours  diminuée; 
Texsudat  est  donc,  en  quelque  sorte,  du  plasma  sanguin  plus  ou  moins 
dilué,  dans  lequel  d'ailleurs  la  proportion  relative  des  éléments  consti- 
tuants varie  beaucoup  suivant  l'intensité  et  d'autres  caractères  de  Tin- 
flammation.  Comme  le  plasma  sanguin,  le  liquide  pleurétique  est  coagu- 
lable  spontanément  et  par  le  battage;  il  présente  en  outi*e  la  même 
réaction  alcaline  au  papier  de  tournesol  et  les  mêmes  réactions  chimi- 
ques, ainsi  que  nous  allons  le  voir. 

Le  liquide  pleurétique  extrait  de  la  poitrine  par  une  ponction  est  spon- 
tanément coagulable,  caractère  important  à  examiner  en  raison  des 
déductions  qu'on  en  peut  tirer  (Méhu)  :  quand,  après  avoir  pratiqué  la 
thoracentèse,  on  abandonne  le  liquide  de  ï'épanchement  dans  un  rase,  il 
se  prend  bientôt  en  une  masse  transparente  qui  présente  les  apparences 
d'une  gelée.  Cette  coagulation  est  due  à  la  fibrine  qni  était  en  dissolution 
dans  la  sérosité  et  qui  se  concrète  au  contact  de  l'air  ;  elle  se  produit 
dans  un  laps  de  temps  qui  varie  suivant  la  quantité  de  fibrine  contenue 
dans  le  liquide;  quand  la  fibrine  est  abondante,  la  coagulation  commence 


PLEURÉSIE.  —  p.  AIGUË  PRiilinvE.  —  lésions  anatomiques.        i51 

• 

très  Tile,  et  au  bout  de  quatre  à  cinq  heures  le  coagulum  est  assez  ferme 
pour  qu'on  éprouve  quelque  difOcuIté  à  le  diviser  avec  une  baguettç  de 
verre;  dans  d'autres  circonstances,  la  coagulation  se  fait  plus  lentement, 
mais  ordinairement  la  fibrine  est  à  peu  près  complètement  déposée  au 
bout  de  douze  à  vingl-quatre  heures.  Cependant,  malgré  celte  rapidité 
relative  de  la  coagulation,  la  quantité  de  fibrine  contenue  dans  le  liquide 
pleuréiique  est  faible,  elle  ne  dépasse  ordinairement  pas  la  moitié  de 
celle  que  contient  un  poids  égal  de  sérum  sanguin  et  lui  est  souvent  très- 
inférieuro  :  ainsi,  sur  trente  analyses,  Méhu  a  trouvé  que  la  quantité 
moyenne  de  fibrine  était  de  0',423  par  kilogramme  de  liquide,  au  maxi- 
mum 1S276,  au  minimum  0',073. 

Les  matières  albumineuses  contenues  dans  Texsudat  font  que  ce  liquide 
est  ooagulable  par  la  chaleur,  parTacide  nitrique,  etc.,  et  que,  traité  par 
l'un  de  ces  procédés,  il  se  prend  en  une  masse  plus  ou  moins  compacte. 
La  richesse  en  albumine  des  liquides  pleurétiques  est  d'aillleurs  très-iné- 
gale; elle  peut  varier  de  10  grammes  à  150  grammes  et  au  delà  par 
kilogramme  de  sérosité  (Méhu) . 

Enfin,  outre  la  fibrine  et  Talbumine,  on  trouve  dans  Tépanchement  les 
mêmes  matières  minérales  que  dans  le  plasma  du  sang,  mais  en  quan- 
tité moindre.  La  quantité  de  résidu  sec  par  kilogramme  de  liquide  (non 
compris  la  fibrine)  a,  dans  30  analyses,  varié  de  58^,06  à  79^,80,  com- 
prenant :  matières  organiques  50^,01  à  71',33,  matières  minérales  7',20 
a  9^01  ;  en  sorte  que,  suivant  une  proposition  formulée  par  Méhu,  c'est 
à  peine  si  les  liquides  pleurétiques  les  plus  riches  en  matières  solides  en 
renferment  autant  que  le  sérum  sanguin  le  plus  pauvre. 

En  rèsomé,  comme  le  dit  Méhu,  le  liquide  de  la  pleurésie  aiguë  res- 
sembie  tellement  au  plasma  sanguin ,  qu^on  serait  fort  embarrassé  de 
distinguer  ces  deux  liquides  autrement  que  par  les  proportions  des  élé- 
ments qui  entrent  dans  leur  composition  :  même  coagulation  spontanée 
et  par  le  battage ,  mêmes  réactions  chimiques.  Mais  les  éléments  con- 
tenus dans  le  liquide  pleurétique  sont  beaucoup  moins  abondants  que 
ceux  que  contient  le  sérum  du  sang. 

L'inloisité  de  l'inflammation  lait  varier,  dans  des  proportions  très- 
étendues,  la  composition  de  Texsudat  :  plus  l'inflammation  est  aiguë , 
plus  est  abondante  la  quantité  d'albumine  et  de  matière  fibrinogène  ;  et, 
inversement,  moins  intense  est  le  caractère  inflammatoire,  plus  Texsudat 
est  dilué  et  pauvre  en  matières  coagulables.  Il  n'est  pas  question  ici,  bien 
eotendu,  de  la  pleurésie  purulente,  dans  laquelle  Tépanchement  pré- 
seoie  des  caractères  particuliers  qui  seront  étudiés  ailleurs. 

Li  matière  fibrinogène  contenue  dans  Tcxsudat  ne  se  coagule  pas 
seulement  au  contact  de  l'air  :  une  partie  se  concrète  pendant  la  vie  au 
sein  même  de  l'organisme  ;  de  là  les  floœns  fibrineux  qui  flottent  dans 
le  liquide  et  les  fausses  membranes  qui  se  déposent  à  la  surface  de  la 
plèvre  enflanunée.  Cette  coagulation  a  lieu  suivant  un  mode  analogue  à 
celui  de  la  coagulation  de  la  fibrine  dans  une  goutelette  de  sang  (Ran- 
jier)  :  on  voit  partir  d*un  centre,  sorte  Ae  centre  de  cristallisation,  des 


152        PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  •»  lésions  ahâtomiquis. 

rayons  qui  s'cncheyêtrent  et  constituent  un  réseau  semblable  à  une  toile 
d'araignée.  Agglomérés  en  masses  plus  ou  moins  volumineuses,  ees 
dépôts  constituent  les  flocons  fibrineux;  étalés  en  membranes  et  superpo- 
sés par  couches  successives,  ils  constituent  les  fausses  membranes.  Les 
flocons  fibrineux,  dont  Texistence  même  eut  inconstante,  sont  quelquefois 
très  abondants  dans  le  liquide  pleurétique  ;  ils  se  présentent  tantôt  sous 
la  forme  de  filaments  tenus,  tantôt  sous  l'apparence  de  grumeaux  ordi- 
nairement peu  volumineux.  Souvent,  pendant  l'opération  de  la  thoracen- 
tèse,  ils  s'engagent  dans  le  trocart  cl  en  obstruent  la  lumière. 

Les  fausses  membranes  déposées  à  la  surface  de  la  plèvre  sont  à  pea 
près  constantes  dans  la  pleurésie  aiguë,  mais  leur  développement  est  tris- 
variable.   Quelquefois  elles  forment  une  couche  mince  et  i  peine  appa- 
rente sur  la  membrane  séreuse;  pour  démonirer  leur  existeuce,  il  peut 
être  nécessaire  de  racler  avec  Tongle  la  surface  de  la  plèvre,  et  on  en 
détache  ainsi  un  mince  lambeau  semi-transparent,  mou  et  friable.  Quand 
l'inflammation  est  plus  intense  ou  a  duré  plus  longtemps,  on  peut  trou- 
ver de  grandes  fausses  membranes  plus  ou  moins  épaisses,  qu'on  peut 
quelquefois  partager  en  plusieurs  feuillets  stratifiés;  ces  dif^renles  cou- 
ches correspondent  sans  doute  à  des  dépôts  successifs  de  fibrine.  Les 
fausses  membranes  se  montrent  très-souvent  dans  toute  l'étendue  de  la 
partie  enflammée  de  la  plèvre,  occupant  les  deux  feuillets  opposés  de  la 
membrane  séreuse,  et  accolées  l'une  à  l'autre  sur  les  limites  de  la  partie 
malade:  elles  forment  alors  autour  de  l'épanchement  une  enveloppe  con- 
tinue, un  sorte  de  kyste  contenu  dans  la  cavité  de  la  plèvre;  d'autres  fois 
ces  fausses  membranes  établissent  des  adhérences  rarement  très-nom- 
breuses qui  cloisonnent  la  cavité  de  la  plèvre  et  la  partagent  en  un  certaia 
nombre  de  loges  contenant  du  liquide  {pleurésies  aréolaires)  ;  dans  d'an- 
tres cas  encore,  elles  ne    se  montrent   que  par  places  sous  forme  de 
plaques  plus  ou  moins  étendues.  Leur  surface  libre  est  inégale,  irrégu- 
lière,  hérissée  de  saillies  sous  forme  de  mamelons  ou  de  villosités.  Leur 
couleur  est  blanchâtre,  opaline  et  demi-transparente  quand  elles  sont 
jeunes,  opaque  à  une  époque  éloignée  de  leur  foimation,  Leur  cousis» 
tance  varie  aussi  avec  l'âge  de  la  maladie  :  au  début  elles  sont   molles, 
imprégnées  de  liquide,  faciles  à  écraser  et  à  rompre  ;  plus  tard  elles 
deviennent  résistantes  et  presque  sèches. 

Dans  ces  fausses  membranes  plus  ou  moins  denses,  l'examen  mii^rosp 
copique  fait  à  peine  reconnaître  la  disposition  réticulée  qu'on  observe  peo 
de  temps  après  la  coagulation  de  la  fibrine  :  on  retrouve  cependant  par 
places  des  tractus  fibrillaires,  et  dans  leurs  intervalles  on  distingue  çà  et 
là  des  cellules,  dont  les  unes  sont  des  globules  blancs  du  sang,  dont  les 
autres,  quelquefois  très-volumineuses,  procèdent  sans  doute  des  cellules 
épithéliales  de  la  membrane  séreuse  gonflées,  proliférées  et  détachées 
(Cornil  et  Ranvier). 

Quand  Tinllammation  pleurale  est  terminée,  l'exsudat  est  destiné  s 
disparaître.  Le  plus  habituellement  la  guérison  arrive  par  résorption  dei 
produits  épanchés  :  la  partie  liquide  de  l'exsudat,  c'est-à-dire  la  sérosité^ 


PLEURÉSIE.  p.    AIGUS   PRIMITIVE.    —  LÉSIONS  AIIATOHIQUES.  153 

est  absorbée  par  les  lymphatiques  qu*0Q  voit  souvent  dilatés  et  dont  quel- 
ques-uns sont  remplis  par  des  coagulations  fibrineuses  cl  par  des  leuco- 
cytes; les  parties  solides,  fausses  membranes,  fibrine  concrctée,  cellules, 
disparaissent  plus  difficilement  :  ne  pouvant  être  directement  résorbées, 
elles  subissent  la  métamorphose  granulo-graisseuse  et  ainsi,  sous  forme 
de  détritus  granulo-graisseux,  elles  sont,  comme  les  parties  liquides, 
reprises  par  les  lymphatiques. 

Pendant  longtemps  on  a  cru  que  les  fausses  membranes  fibrineuses 
étaient  susceptibles  de  s'organiser,  qu'il  pouvait  s'y  déveioper  des  vais- 
seaux, et  que  souvent  elles  persistaient  comme  trace  indélébile  d'une 
pleurésie  antérieure  sous  forme  de  brides  réunissant  les  deux  feuillets  de 
la  plèvre,  ou  sous  forme  de  plaques  capables  même  de  subir  diverses 
transformations.  Mais  contrairement  à  cette  manière  do  voir,  il  est  établi 
aujourd'hui  que  les  exsudats  sont  inaptes  à  l'organisation  ;  il  n'y  a  que 
les  néomembranes  formées  par  la  prolifération  des  éléments  de  la  plèvre 
qui  soient  oi^nisées  ou  organisables  ;  ce  sont  elles  qui  forment  les  bri- 
des ou  les  (aux  ligaments  qui  attachent  le  poumon  à  la  paroi  thoracique  ; 
ce  sont  elles  aussi  qui  sont  susceptibles  de  se  transformer  en  cartilages, 
en  os  même,  ainsi  que  nous  le  verrons  à  propos  de  la  pleurésie  chro- 
nique. 

Après  avoir  étudié  les  lésions  de  la  pleurésie  aiguë  en  elles-mêmes, 
nous  devons  examiner  maintenant  les  particularités  qu'elles  présentent 
dans  leurs  dispositions  générales,  et  Tinflaence  que  ces  lésions  exercent 
sur  les  organes  voisins. 

La  disposition  que  les  épanchements  pleurétiqucs  présentent  dans  le 
thorax  a  une  grande  importance,  parce  que  leur  situation  et  leur  forme 
foomissent  des  données  précieuses  au  diagnostic.  Au  début  de  la  maladie, 
les  produits  épanchés  paraissent  former  d'abord  une  couche  mince,  une 
UMffe  interposée  entre  le  poumon  et  la  partie  thoracique  ;  plus  tard,  à 
mesure  que  la  quantité  en  est  plus  grande,    ils    obéissent  à  riiifluence 
de  la  pesanteur  et  s'accumulent  dans  les  parties  déclives  de  la  cavité  pleu- 
rale, puis  ils  s'élèvent  graduellement  de  bas  en  haut  jusqu'à  atteindre, 
dans  les  épanchements  considérables,  les  parties  supérieures  du  thorax. 
Une  fois  formés,  ces  épanchements  seraient  mobiles  et  se  déplaceraient 
librement  suivant  la  position  du  sujet,  si  leur  consistance  visqueuse  et 
surtout  les  fausses  membranes  qui  les  enveloppent  ne  les  maintenaient 
dm  la  situation  où  ils  se  sont  primitivement  déposés.  En  fait,  tandis  que 
lei  épanchements  snreux  de  l' hydrothorax  sont  libres  dans   la  plèvre  et 
oceapent  toujours  la  partie  déclive  dans  toutes  les  positions  du  thorax,  les 
épaBchements  de  la  pleurésie  sont,  au  contraire,  habituellement  immobiles 
dans  la  place  qu'ils  occupent,  maintenus  et  emprisonnés  dans  la  situation 
qu'ils  ont  prise  par  des  fausses  membranes  qui  leur  forment  un  kyste 
Aies  limitent  de  toutes  parts. 

La  disposition  et  la  forme  qu'affectent  les  épanchements  dans  la  pleu- 
résie ont  été  parfaitement  établies  par  Damoiseau.  Pour  s'en  rendre  compte, 
il  suffit  d'avoir  présentes  à  l'esprit,  pendant  la  formation  de  Tépanche- 


I 


i54        PLEURÉSIE.  —  p.  aiguS  primitive.  —  lésions  AHATonamn. 

ment,  ces  trois  données.:  la  forme  irrégulièrement  conique  de  la  catité 
pleurale,  Faction  de  la  pesanteur,  enfin  la  position  habituelle  du  malade 
dans  son  lit.  Si  Ton  observe  que  les  pleurétiques  au  début  sont  couchés 
d'ordinaire  sur  le  dos,  le  thorax  étant  soulevé  et  plus  ou  moins  incliné  à 
rhorizon,  on  comprendra  facilement  que  les  épanchements  doivent  s'ac- 
cumuler d*abord  en  arrière  dans  la  partie  la  plus  déclive  de  la  gonUière 
costo-vertébrale,  au-dessous  de  l'angle  inférieur  de  l'omoplate;  puis,  à 
mesure  qu'ils  augmentent,  leur  surface  en  s'élevant  coupe  obliquement  la 
cavité  conoïde  qui  les  renferme  et  dessine  à  sa  surface  des  courbes  dn 
genre  des  sections  coniques  obliques  (Damoiseau).  Dans  leurs  différentes 
phases  d'accroissement  et  de  décroissance,  les  épanchements  décrivent 
des  courbes  emboîtées  ,dont  l'axe  vertical  correspond  toujours  aux  partiel 
les  plus  déclives  de  la  gouttière  costale,  et  dont  la  moitié  antérieure  et  la 
moitié  postérieure  sont  très-inégales,  la  moitié  antérieure  étant  très*lon- 
gue  jusqu'à  atteindre  le  sternum  plus  ou  moins  haut  et  la  moitié  posté- 
rieure très-courte  se  terminant  à  la  colonne  vertébrale.  Ils  sont  fixés  et 
maintenus  dans  cette  position,  comme  nous  l'avons  dit,  par  leur  consi* 
stance  et  le  kyste  pseudo-inembraneux  qui  les  enveloppe  ;  dès  lors  ib  sont 
soustraits  à  la  pesanteur,  et,  quelle  que  soit  la  posilion  du  thorax,  ils 
conservent  la  forme  d'une  section  de  cône,  et  leur  niveau  supérieur  coupe 
le  thorax  selon  un  plan  dirigé  de  haut  en  bas  et  d'arrière  en  avant  rela- 
tivement à  l'axe  vertical  de  cette  cavité. 

Quelle  que  soit  l'abondance  de  l'épanchement,  sa  disposition  reste 
toujours  telle  que  nous  venons  de  l'indiquer;  les  parties  anléro-«ipé- 
rieurcs  de  la  poitrine  sont  donc  les  dernières  à  être  envahies  par  Tépan- 
chement,  et  elles  ne  le  sont  que  quand  ce  dernier  remplit  toute  la  cavité 
la  plèvre. 

A  ces  indications  fournies  par  Damoiseau,  Peter  a  récemment  i^jouté 
quelques  particularités  relatives  surtout  à  la  nature  du  liquide  épanché; 
nous  aurons  à  y  revenir  à  propos  du  diagnostic. 

Telle  est  la  disposition  la  plus  ordinaire  et  la  plus  fréquente  dans  h 
pleurésie  aigué  primitive.  Cependant  il  existe  quelques  variétés  de  la  ma» 
ladie  dans  lesquelles  la  situation  et  la  forme  des  lésions  offrent  des  carac- 
tères différents  :  ainsi  dans  la  pleurésie  diaphragmatique,  répanchement 
se  fait  entre  la  face  supérieure  du  diaphragme  et  la  base  du  poumon,  repré- 
sentant un  kyste  élalé  entre  ces  deux  organes  ;  dans  la  pleurésie  inuârlo* 
baire,  qui  est  à  la  vérité  rarement  primitive,  il  présente  une  disposition 
analogue,  le  liquide  s'accumulant  et  s'enkystant  entre  deux  lobes  dn 
poumon  ;  de  même  dans  la  pleurésie  médiastine,  où  le  liquide  s'épancha 
entre  la  face  interne  du  poumon  et  le  médiastin.  D'autre  part,  quani 
l'inflanmiation  se  développe  dans  une  plèvre  antérieurement  bridée  m 
cloisonnée  par  des  adhérences,  l'épanchement  se  produit  dans  une  partis 
quelconque  de  la  cavité  pleurale,  et  sa  forme  très  variable  est  subordonnés 
aux  adhérences  qui  le  limitent. 

Les  lésions  de  voisinage  que  détermine  la  pleurésie  sont  de  deoi 
ordres  :  en  tant  qu'inflammation,  elle  produit  dans  les  organes  adjaooili 


PLEURÉSIE.  —  p.  AiGui  pbimititBo  —  lésions  an  atomiques.        455 

des  lésions  inflammatoires;  en  outre,  par  i*épanchement  auquel  elle 
donne  lieo,  elle  entraine  des  déformations  ou  des  déplacements  des  parois 
thoraciques  et  des  viscères  avec  lesquels  la  plèvre  est  en  rapport. 

L'inflammation  de  la  plèvre  pulmonaire  se  propage  aux  couches  les 
plus  superficielles  du  poumon  et,  ainsi  que  Brouardel  Ta  démontré,  on 
trouvet  dans  la  zone  corticale  du  parenchyme  pulmonaire  contigu  aux 
lésions  pleurétiques,  les  altérations  de  la  pneumonie  interstitielle  ;  ces 
altérations  survivent  même  à  la  pleurésie  qui  leur  a  donné  naisisance  et 
expliquent  certains  phénomènes  d'auscultation  qui  persistent  souvent 
pendant  un  très  long  temps  après  la  guérison  de  la  pleurésie.  Dans  la 
paroi  Ihonieique  on  trouve  aussi  des  lésions  inflammatoires  des  organes  sous- 
jacents  k  la  plèvre  :  ainsi  le  tissu  cellulaire  peut  présenter  les  altérations 
du  phlegmon  aigu  ou  subaigu  (Leplat),  le  périoste  des  côtes  lui-même  peut 
être  aUirâil  ptr  l'inflammation  ;  enfln  les  nerfs  intercostaux  présentent  des 
caractères  de  névrite,  ainsi  que  Ta  signalé  Beau  :  «  Ces  nerfs,  dit-il,  sont 
plus  ou  moins  enflammés  dans  tous  les  cas  d'inflammation  de  la  plèvre, 
soit  simple,  soit  compliquée  de  pneumonie.  L'inflammation  occupe  ordi- 
nairement toute  la  portion  du  nerf  qui  touche  la  plèvre*  mais  ne  s'étend 
pas  au  delà.  Elle  est  caractérisée  par  une  injection  souvent  intense,  non- 
seulement  du  névrilème,  mais  du  nerf  lui-même,  qui  est  augmenté  de 
volume,  sans  être  pour  cela  ni  plus  mou  ni  plus  friable  qu'un  nerf  sain. 
Quelquefois  il  adhère  légèrement  à  la  portion  de  plèvre  contiguê.  » 

Mais  les  altérations  les  plus  importantes  que  détermine  la  pleurésie 
dans  les  organes  voisins,  sont  sans  contredit  celles  qui  résultent  de  la 
compression  exercée  par  l'épanchement;  ce  sont  elles  qui  font  en  grande 
partie  la  gravité  de  la  maladie,  en  sorte  que  le  danger  de  la  pleurésie 
réside  moins  dans  l'inflammation  elle-même  que  dans  l'abondance  de 
1  epanchemeot  auquel  elle  donne  lieu  et  dans  les  troubles  mécaniques 
qui  en  sont  la  conséquence.  La  compression  que  lepanchement  exerce 
sur  les  organes  adjacents  à  la  plèvre,  le  refoulement,  la  déformation  et  les 
déplacements  de  ces  organes  résultent  en  grande  partie  de  la  tension  à 
laqudle  est  soumis  le  liquide  dans  les  épanchcments  pleurétiques  ;  nous 
nous  arrêterons  un  instant  d'abord  à  cette  importante  question  des  ten- 
sions înira-iboraciques,  sur  laquelle  Peyrot  a  récemment  publié  une  étude 
très  remarquable, , et  nous  résumerons  ici  les  intéressantes  recherches 
qu'il  a  publiées. 

Lonqu*il  existe  un  épanchement  un  peu  abondant,  soit  liquide,  soit 

gaxeu,  dans  une  des  cavités  pleurales  et  à  plus  forte  raison  dans  les 

:      deux,  les  tensions  intra-thoraciques  subissent  des  modifications  impor- 

K     tantei.  A  l'état  normal,  en  raison  de  l'élasticité  pulmonaire,  la  surface 

interne  des  parois  thoraciques  et  les  organes  creux  contenus  dans  le  mé- 

ifT    diastin  sont  soumis  à  une  pression  négative  ;  mais  lorsqu'il  se  produit 

xm   ^  épanchement  qui  permet  au  poumon  de  revenir  sur  lui-même,  cette 

ienrion  négative  tend  à  disparaître,  et  quand  l'épanchement  devient  con- 

3^  <idénble,  elle  peut  être  remplacée  par  une  tension  positive.  Ordinaire- 

^nt  les  épanchements  ne  se  bornent  pas  à  tenir  sans  effort  dans  la  loge 


156        PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primititb.  —  lésions  ahatohiqubs. 

où  ils  tonibcnl  ;  ils  tendent  à  écarter  et  à  refouler  les  parois  qui  les  limi- 
tent; mais  celles-ci  réagissent  par  leur  élasticité  et  entretiennent  dans  le 
milieu  liquide  ou  gazeux  qui  les  presse  une  tension  variable.  Il  n'est  pas 
besoin  d'un  é|»anchement  très-abondant  pour  que  cette  pression  poisse 
être  supérieure  à  la  pression  atmosphérique.  Veut- on  la  preuve  expéri» 
mentale  de  cet  excès  de  tension?  Quand,  chez  un  sujet  mort  avec  ni 
épanchement  pleural,  on  fait  une  ponction  en  un  point  quelconque  di 
thorai,  on  voit  le  liquide  sortir  par  l'ouverture  et  non  l'air  pénétrer  dans 
la  poitrine  (Peyrot).  Si,  chez  des  sujets  morts  de  même  avec  des  épaa- 
chements  pleurétiques,  on  adapte  un  manomètre  à  la  trachée  et  qu'on 
fasse  ensuite  Touverturede  la  poitrine,  alors  l'eau  du  manomètre,  anlÎM 
d'être  refoulée  et  de  s'élever  dans  le  tube,  comme  dans  l'état  nonnait 
par  l'effet  de  l'élasticité  pulmonaire,  est  au  contraire  aspirée  et  s'abaifli 
dans  le  tube  :  dans  un  cas,  l'abaissement  de  la  colonne  liquide  fut  de 
4  centimètres,  dans  un  autre  cas  de  10  centimètres  (Mocquot  et  Roia- 
pelly). 

Aussi  tout  épanchement  un  peu  abondant  se  trouve  soumis  à  une  pres- 
sion plus  ou  moins  considérable.  Sur  le  vivant,  cette  pression  varie  dans 
chaque  mouvement  respiratoire  ;  et  dans  les  cas  d'épanchement  peu  co-  f . 
pieux,  les  grandes  inspirations  peuvent  sans  aucun  doute  ramener  dam  f 
la  plèvre  une  tension  négative.  Dans  un  cas,  Peyrot  a  mesuré  la  tensioi 
pleurale  sur  le  vivant  à  Taide  d'un  manomètre  à  mercure  ;  chex  un  mih 
lade  atteint  d'un  pyo-pneumothorax  la  tension  était,  au  moment  de  h 
ponction,  de  +3  centimètres  de  mercure  ;  après  la  soustraction  d'un  litn 
et  demi  de  liquide,  elle  n'était  plus  que  de  12  millimètres;  on  suq>eDdil 
alors  l'aspiration  :  à  ce  moment,  les  mouvements  respiratoires  se  tradai- 
saient  par  des  oscillations  de  la  colonne  liquide. 

On  a  du  reste  souvent  la  preuve  d'une  grande  tension  intra-pkarak, 
quand  on  fait  la  thoracentèse  avec  le  trocart  ordinaire  :  le  liquide  jaillit 
à  une  certaine  distance  pendant  un  certain  temps  ;  ce  n'est  pas  alors  qoi  : 
la  baudruche  est  nécessaire,  mais  seulement  à  la  fin  de  l'opération,  alon 
que  la  plèvre  est  presque  vide  et  que  Tinfluence  des  mouvements  respiia- 
toires  peut  s'y  faire  sentir  (Peyrot). 

Quelques  autres  auleurs  se  sont  aussi  occupés  de  déterminer  quelle  eà 
la  tension  intra-thoracique  dans  les  épanchements  pleuraux.  Ainsi,  ea 
Allemagne,  Quincke  et  Leyden  (cités  par  Homolle)  ont,  dans  ungrani 
nombre  de  cas,  mesuré  cette  tension  à  l'aide  du  manomètre,  pendaal  i 
l'opération  de  la  thoracentèse,  à  divei^  moments  de  l'écoulement  ds  > 
liquide.  Tout  récemment  enfin,  llomolle  a  publié,  dans  un  très-inténih  |b 
sant  mémoire,  les  nombreuses  recherches  que  Potain  a  faites  sur  ce  AfÉl 
important,  en  se  servant  surtout  d'un  petit  manomètre  matalliquefâ 
s'adapte,  sans  difficulté,  aux  appareils  aspirateurs.  Voici  les  princtpihi^ 
conclusions  auxquelles  Potain  et  Homolle  ont  été  conduits  :  La 
initiale,  au  début  de  la  thoracentèse,  est  presque  toujours  positive; 
s'élève  parfois  jusqu'à  20  et  50  millimètres  de  mercure;  elle  peut,  p«l^ 
exception,  s'abaisser  à  0  ou  à  — 2.  11  est  impossible  d'établir  un  rapp(MEt|= 


m 


^ 


PLEURÉSIE.  p.   AIGUË  PRIMITIVE.   —  LÉSIONS  ànatomiqi/es.  157 

proportionnel  entre  le  degré  de  pression  positive  ou  négative  et  la  pré- 
sence d'une  quantité  déterminée  de  liquide  dans  la  plèvre.  Les  hautes 
tensions  s'observent  avec  les  grands  épanchements,  surtout  lorsqu'ils  sont 
franchement  inflammatoires  et  récents,  chez  les  sujets  jeunes  et  vigou- 
reux, dont  les  parois  thoraciques  sont  fortes  et  élastiques,  enfin  lorsque 
le  poumon  hyperémié  ou  enflammé  conserve,  sous  la  pression  du  liquide, 
un  volume  notable.  Les  basses  pressions  initiales  se  montrent  dans  les 
conditions  opposées  (vieil  épanchemcnt,  sujet  cachectique,  poumon 
affaissé,  etc.).  Les  grandes  décompressions  finales  succèdent  à  la  sous- 
traction de  quantités  considérables  de  liquide ,  quand  les  parois  sont 
rigides,  quand  le  poumon  est  peu  susceptible  d'expansion,  qu'il  est  bridé 
par  la  plèvre  épaissie,  hyperémié  on  atélectasié  depuis  longtemps.  Une 
décompression  brusque  et  forte  est  une  des  causes  les  plus  certaines  et 
les  plus  importantes  des  divers  accidents  qui  s'observent,  soit  après,  soit 
même  pendant  l'évacuation  des  épanchcmcnts  pleuraux  par  la  thoracen- 
tese  (toux,  douleur,  expectoration  albumineuse,  congestion  ou  œdème 
aigu,  peut-être  même  pneumothorax),  f^  manomètre  permet  d*apprécietr 
la  rapidité  avec  laquelle  se  produit  l'abaissement  de  tension  et  le  degré  de 
l'aspiration;  il  peut  donc  servir  de  guide  pour  faire  apprécier  le  moment 
où  il  convient  d'interrompre  Técoulement  du  liquide.  Tant  que  la  décom- 
pression est  lente  et  graduelle,  on  peut,  en  général,  continuer  l'extrac- 
tion ;  il  est  bon  de  la  suspendre  quand,  après  un  abaisSement  progressif, 
on  constate  une  diminution  brusque  et  notable  de  la  pression. 

Voyons  maintenant  les  effets  de  compression  que  l'épanchement  exerce 
sur  les  organes  voisins. 

Le  poumon  est  naturellement  le  premier  organe  comprimé,  et  c'est  sur 
lui  qac  les  effets  de  la  compression  sont  le  plus  accusés.  Au  début  de  l'é- 
pancfaemeni,  il  revient  d'abord  sur  lui-même  en  vertu  de  son  élasticité  ; 
plus  tard,  à  mesure  que  le  liquide  augmente,  il  se  vide  graduellement  de 
l'air  qu'il  contient,  son  parenchyme  s'afl'aisse,  devient  de  plus  en  plus 
compacte,  et  présente  les  caractères  qu'on  a  décrits  sous  le  nom  de  splé- 
nisalion;  il  ne  crépite  plus  sous  le  doigt  et  surnage  à  peine  dans  le  li- 
quide où  on  le  plonge.  Les  bronches  elles-mêmes  n'échappent  pas  à  la 
compression  :  les  extrémités  bronchiques  et  même  les  bronches  d'un  cer- 
tain calibre,  quand  l'exsudatest  très-abondant,  sont  aplaties  et  imperméa- 
bles à  l'air.  Si  l'épanchement  est  demeuré  limité  en  arrière  et  sur  les 
c6tés,  comme  cela  est  très-ordinaire,  c'est  surtout  dans  les  parties  posté- 
rieores  du  poumon  qu'on  trouvera  les  altérations  précédentes  ;   mais 
quand  l'épanchement  très-considérable  a  envahi  la  totalité  de  la  cavité 
pleurale,  le  poumon  se  retire  vers  son  hile  sur  le  côté  de  la  colonne  ver- 
tébrale, c'est  là  qu'on  le  retrouve  sous  la  forme  d'une  petite  masse  grisâ- 
tre, exsangue,  souvent  enveloppée  de  fausses  membranes  épaisses.  Lorsque 
k  liquide  épanché  est  résorbé  et  que  la  pression  cesse,  le  poumon  peut 
quelquefois  reprendre  ses  caractères  normaux;  mais  ce  retour  à  l'état  nor- 
mal ût  toujours  très-lent  à  se  produire,  et  le  plus  souvent  même  il  reste 
,  quelques  traces  de  la  maladie.  Si  une  partie  plus  ou  moins  considérable 


158        PLEURÉSIE.  —  p«  aigcH  primitive.  —  lésioks  anatoiiiqubs. 

du  poumon  est  enveloppée  de  ncomembranes  inextensibles^  le  piren- 
chyme  pulmonaire,  ainsi  emprisonné,  reste  aifaissé  et  inapte  i  remplir 
ses  fonctions. 

Le  refoulement  des  parois  tlioraciques  et  des  organes  adjacents  est 
étroitement  lié  à  la  tension  de  l'épanehement  ;  ce  sont  des  phénomèiies 
connexes,  si  bien  que  les  déformations  du  thorax  et  les  déplacemeats  des 
viscères  peuvent,  dans  une  certaine  mesure,  servir  à  apprécier  l'augmen- 
tation de  la  tension  intrathoracique. 

Les  différentes  parois  de  la  loge  pulmonaire  subissent  à  des  degrés  fa- 
riables  l'influence  du  refoulement.  La  paroi  costale  éprouve,  du  côté  de 
l'épanehement,  un  changement  d'aspect  qui  saute  aux  yeux,  elle  tend  i 
devenir  globuleuse  ;  cette  déformation  est  due  à  ce  que  les  côtes,  repo»* 
sées  en  dehors  par  le  liquide,  exécutent  un  mouvement  de  rotation  aotov 
d'une  ligne  fictive  passant  par  leurs  deux  extrémités  ;  dans  ce  moufoneat 
toute  la  partie  convexe  de  l'arc  costal  se  trouve  écartée  de  Taxe  Terticd 
du  thorax,  et  par  suite  le  périmètre  de  la  poitrine  est  agrandi.  Oependasà^ 
ainsi  que  l'a  montré  Peyrot,  l'agrandissement  du  côté  malade  n'est  pas 
surtout  formé  par  le  développement  de  la  moitié  du  thorax  oè  siège  l'é- 
panehement, l'autre  côté  conservant  sa  forme  normale  ;  il  est  plntM  le 
résultat  d'un  mouvement  subi  à  la  fois  par  les  deux  côtés  de  la  cage  tho- 
racique  qui  se  portent  d'ensemble  dans  le  sens  du  mamelon  qni  oonea- 
pond  à  l'épanchenfent.  Le  côté  malade  se  dilate  donc  surtout  aux  d^wm 
du  côté  sain,  qui  se  trouve  entraîné  vers  lui  par  l'effort  que  répanefaa- 
ment  exerce  sur  une  partie  de  la  paroi  thoracique,  et  il  en  résulte  mw 
déformation  de  la  poitrine  qui  amène  la  production  d'une  sorte  de  liko- 
rax  oblique  ovalaire  (Peyrot).  Des  expériences  cadavériques  ont  dé> 
montré  à  Peyrot  la  réalité  de  cette  déformation  générale  de  la  poitrine;  il 
a  vu  que,  dans  le  cas  d'épanchcment  considérable,  le  sternum  se  d^etle  . 
vers  le  côté  malade  jusqu'à  se  transporter  tout  entier  de  ce  cMé;  en  I 
même  temps,  la  portion  cartilagineuse  des  côtes  bombe  et  s'arrondit  do  j 
côté  malade,  tandis  que  de  l'autre  côté  elle  s'aplatit  de  plus  en  plus  à 
mesure  que  le  sternum  s'éloigne  davantage  de  la  ligne  médiane.  Danses 
mouvement  général  du  thorax  sous  l'effort  de  l'épanehement,  ce  sont  sur* 
tout  les  parties  antérieures  qui  cèdent  en  raison  de  leur  mobilité,  tandis 
que  les  parties  postérieures  résistent  et  opposent  un  obstacle  efficace  ao 
déplacement.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces  déformations  de  la  paroi  do  thorax 
produisent,  en  même  temps  que  le  soulèvement  des  côtes,  une  asymétrie 
très-marquée  que  rœil  et  la  main  peuvent  apprécier  facilement.  ! 

Le  refoulement  du  diaplirngme  est  très-commun,  et  concurrenunent  os  i 
observe  le  déplacement  du  foie  ou  de  la  rate.  Ces  déplacements  sont  quel-  , 
quefois  très-considérables  ;  ainsi  Damoiseau  rapporte  que,  dans  un  cas  d'é- 
panchcment purulent  du  côté  droit,  le  foie  avait  subi  un  mouvement  di 
bascule  tel  que  sa  face  inférieure  était  devenue  verticale  et  que  son  boid 
inférieur  touchait  le  ligament  de  Fallope  ;  le  diaphragme  présentait  dan 
l'abdomen  une  convexité  au  moins  égale  à  celle  qu'il  forme  ordinaircmeÉl 
dans  la  poitrine.  L'abaissement  de  la  rate  dans  les  épanchements  du  côli 


PLEURÉSIE.  —  p.  AiGUi  primitive.  Lésions  axatomiques.  159 

gauche,  signalé  par  Stoll,  a  moins  d'importance  et  est  plus  difficile  à 
apprécier. 

Le  refoulement  du  mcdiastin,  admis  par  la  plupart  des  auteurs,  a  cepen- 
dant été  contesté  par  Richerand,  qui,  s'a|)puyant  sur  des  expériences  cada- 
vériques, déclare  que  le  médiastin  est  assez  solidement  fixé  en  avant  et 
en  arrière  du  thorax  et  présente  une  résistance  suffisante  pour  s'opposer 
an  refoulement  même  dans  les  épanchements  les  plus  considérables.  Mais 
Pejrot,  qui  a  fait  aussi  des  expériences  sur  le  cadavre,  affirme  que  le  dé- 
placement du  médiastin  existe  et  est  même  considérable  dans  les  grands 
épanchements.  On  apprécie  surtout  ce  refoulement  par  le  déplacement 
ou  la  compression  des  organes  contenus  dans  le  médiastin.  Ledéplacement 
du  cœur  est  souvent  très-accusé  dans  les  épanchements  de  la  plèvre  gau- 
che; il  est  fréquent  de  voir  le  cœur  dépasser  le  bord  droit  du  sternum,  et 
il  n'est  pas  très-rare  de  le  voir  atteindre  le  niveau  du  mamelon  droit.  La 
trachée  et  la  crosse  de  Taorte  peuvent  encore  être  comprimées  dan3  le  mé- 
diastin antérieur.  Les  organes  contenus  dans  le  médiastin  postérieur  sem- 
blent moins  subir  les  effets  de  refoulement;  cependant  Damoiseau  a  ob- 
servé, dans  on  cas  de  pleurésie,  une  dysphagie  qui  ne  peut  guère  être 
attribuée  qu'à  la  compression  de  l'œsophage.  11  faut  tenir  compte  aussi  des 
modifications  que  la  compression  du  médiastin  apporte  à  la  circulation 
dans  les  grosses  veines  qui  sont  contenues  dans  cet  espace  :  la  compres- 
sion que  subissent  ces  vaisseaux  peut  être  invoquée  pour  expliquer  la  gêne 
extrême  de  la  circulation  et  de  la  respiration  qu'on  observe  souvent,  cer 
tains  œdèmes  qui  surviennent  dans  le  cours  de  la  pleurésie,  enfin  les  coagu- 
lations sanguines  qui  peuvent  se  former  dans  le  cœuroulesgros  vaisseaux 
et  entratner  de  redoutables  accidents  (Peyrot). 

Les  déplacements  du  cœur,  du  foie,  de  la  rate,  que  nous  venons  d'indi- 
quer sont  très-réels;  mais  nous  pensons  qu'ils  sont  moins  étendus  en  réalité 
qu'ils  ne  le  paraissent.  En  effet,  dans  l'appréciation  de  ces  déplacements, 
on  prend  pour  point  de  repère  la  paroi  thoracique  ;  or  celle-ci,  ainsi  que 
nouafavons  vu,  ne  reste  pas  immobile  dans  sa  position  normale  :  elle  se  dé- 
place aussi,  et  ses  déplacements  viennent  s'ajouter  à  ceux  des  organes  et  les 
exagèrenten  apparence.  Ainsi,  dans  le  cas  d'épanchement  considérable  dans 
la  plèvre  gauche,  le  cœur  est  refoulé  à  droite  sous  le  sternum  et  même  au  delà 
de  cet  os;  il  ^  a  Ik  un  déplaceinenl  réel  du  cœur;  mais  en  même  temps  le 
sternum  est  entraîné  vers  la  gauche  et  glisse  au-devant  du  cœur,  qui  dès 
lors  parait  plus  entrainé  vers  la  droite  qu'il  n'est  en  réalité  ;  il  y  a  donc 
un  déplacement  relatif  du  cœur  par  rapport  au  sternum  qu'on  prend  pour 
point  de  repère.  Cette  manière  nouvelle  d'interpréter  les  déplacements  du 
I     cœur  a  été  très-nettement  formulée  par  un  de  nos  élèves,  M.  Defontaine, 
;     à  propos  d'un  malade  atteint  de  pleurésie  purulente  et  traité  par  les  ponc- 
tions successives,  chez  lequel  nous  avions  fait  un  grand  nombre  de  men- 
..    sarations  du  thorax  dans  le  but  d'apprécier  les  déformations  de  la  poitrine 
^   elles  déplacements  des  organes.  Nous  la  croyons  pour  notre  part  très- 
^g  exacte,  et  l'un  de  nous  en  a  fait  l'objet  d'un  petit  mémoire  ;  mais  il  reste- 
-^  rait  à  indiquer  des  moyens  pratiques  pour  distinguer  les  déplacements  re- 


160  PLEURÉSIE.  —  p.  aigoë  primitive.  —  stmptAhbs. 

latifs  des  déplacements  réels  ou  faire  la  part  qui  revieut  à  chacun  d'eux 
dans  chaque  cas  particulier  ;  c'est  ce  que  nous  n'avons  encore  pu  réaliser. 

Ce  qui  vient  d'être  dit  des  déplacements  du  cœur  est  également  appli- 
cable aux  déplacements  du  foie  et  de  la  rate  :  sans  doute  l'abaissemeoi 
du  diaphragme  repoussé  par  Tcpanchement  refoule  le  foie,  maisen  même 
temps  le  mouvement  des  côtes  qui  se  relèvent  tend  à  laisser  le  foie  plut 
à  découvert  dans  l'abdomen,  et  si  on  veut  apprécier  le  déplacement  do 
foie  par  l'étendue  dont  cet  organe  déborde  les  fausses  côtes,  on  réunit  dam 
cette  appréciation  et  te  refoulement  en  bas  du  foie  par  répanchement 
(déplacement  réel)  et  le  mouvement  en  haut  de  la  paroi  thoracique,  qui 
change  tes  rapports  du  foie  avec  les  dernières  fausses  côtes  (déplacement 
relatif).  En  résumé,  nous  croyons  que,  contrairement  à  ce  qui  a  été  Eût 
jusqu'ici,  il  faut  tenir  compte,  dans  l'appréciation  des  déplacements  des 
viscères  dans  les  grands  épanchements  pleuraux,  des  déformatioiuetdei 
déplacements  que  subit  la  paroi  thoracique  elle-même,  et  savoir  que  les 
changements  de  rapports  des  viscères  avec  le  sternum  ou  les  côtes»  consi- 
dérés à  tort  comme  fixes,  ne  donnent  pas  la  mesure  exacte  des  déplace- 
ments de  ces  viscères;  mais  qu'ils  sont  la  somme  de  deux  facteurs*  d'une 
part  le  refoulement  vrai  des  organes,  d'autre  part  le  glissement  en  sens 
inverse  de  la  paroi  thoracique. 

Symptômeai.  —  Le  début  de  la  pleurésie  aiguë  est  très-variable  : 
le  plus  souvent  il  est  brusque,  marqué  par  un  mouvement  fébrile^  accooH 
pagné  de  point  de  côté,  de  toux  et  de  gêne  respiratoire  ;  quelquefois  ii 
est  insidieux,  caractérisé  seulement  par  du  malaise  et  une  sensation  pat 
accusée  de  gêne  dans  la  poitrine,  en  sorte  que  le  malade  continue  i 
vaquer  à  ses  occupations  jusqu'à  ce  qu'il  soit  arrêté  par  la  difficulté  de  h 
respiration,  et  il  arrive  quelquefois  qu'on  trouve,  dès  la  première  fois 
qu'on  examine  la  poitrine,  un  abondant  épanchement.  La  fièvre,  la  dou- 
leur de  côté,  la  toux  et  la  dyspnée,  tels  sont  les  symptômes  qui  indiquent 
rinvasion  de  la  maladie,  mais  ces  symptômes  ne  sont  pas  constants,  ils 
sont  suivant  les  cas  plus  ou  moins  développés,  ou  encore  diversement 
associés  entre  eux  ;  de  là  des  variétés  nombreuses  dans  le  mode  de  début 
de  la  pleurésie  qui,  dès  le  commencement  comme  durant  son  cours,  pri» 
sente  plus  d'irrégularités  et  d'imprévu  que  la  plupart  des  autres  maladies 
aiguës. 

Quel  qu'ait  été  son  début,  la  pleurésie  ne  tarde  pas  en  général  â  être 
caractérisée  par  la  persistance  d&s  troubles  fonctionnels,  spécialement  de  ^^y, 
l'oppression  et  de  la  toux,  et  surtout  par  l'apparition  de  signes  physiques 
qui  permettent  en  général  de  suivre  la  maladie  dans  toutes  ses  phases  d  [ 
de  reconnaître  avec  précision  la  plupart  des  particularités  qui  s'y  ratta- 
chent :  ainsi  avec  Tinspection,  la  palpation,  la  mensuration,  la  perçus-  i 
sion  et  l'auscultation,  il  est  le  plus  souvent  possible  de  déterminer  avec    ] 
exactitude,  s'il  existe  ou  non  un  épanchement  dans  la  plèvre;  quand  t'épti*  : 
chcment  existe,  quel  siège  il  occupe,  quelle  est  sa  forme,  quels  sont  u 
limites,  son  épaisseur  ;  d'apprécier  ainsi  dans  une  certaine  mesure  qudk. 
est  sa  quantité,  quelle  est  sa  composition,  s'il  est  libre  ou  enkysté  daai 


;5 


PLEURESIE.    p.    AIGUË    PRIMITIVE.    —   SYMPTÔMES.  i6i 

la  caYiié  pleurale,  de  le  suivre  dans  ses  diverses  périodes  d'accroisse- 
ment, d*état  et  de  déclin  ;  de  reconnaître  les  cffels  mécaniques  qu'il 
exerce  sur  les  viscères  adjacents;  toutes  questions  capitales  pour  le 
pronostic  et  pour  le  traitement. 

Enfin,  quand  l'inOammation  pleurale  est  éteinte,  elle  laisse  souvent 
après  elle  des  reliquats  qui  dépendent  de  la  persistance  de  quelques- 
unes  des  lésions  de  la  plèvre  et  de  la  com[)ression  que  Tépanchement  a 
exercée  sur  les  organes  voisins.  Tous  ces  symptômes  et  ces  signes  méri- 
tent une  étude  attentive. 

Symptômes  gé.néraux  et  fonctionnels.  —  La  fiè\)Te  de  la  pleurésie  est  le 
plus  souvent  modérée,  elle  s'établit  graduellement  et  se  montre  sous  le 
type  rémittent.  Elle  n'a  ni  la  brusquerie  du  début,  ni  l'intensité,  ni  la 
marehc  typique  qu'on  trouve  par  exemple  dans  la  pneumonie;  mais  elle 
présente  pourtant  quelques  caractères  qui  ont  une  réelle  importance. 

Au  début  de  la  pleurésie  aiguë  franche,  la  fièvre  peut  être  regardée 
comme  presque  constante,  et  il  est  de  règle  qu'il  y  ait  un  mouvement 
fébrile  dans  les  premiers  jours  de  l'invasion  de  la  maladie.  Le  plus  sou- 
vent il  y  a  des  frissons  durant  un  jour  ou  deux  :  on  ne  trouve  pas  le  gros 
firisson  intense,  unique  et  prolongé  du  début  de  la  pneumonie,  mais  de 
petits  frissons  qui  reviennent  à  intervalles  irréguliers.  Cette  différence 
parait  due  à  ce  que  la  fièvre,  au  lieu  de  s'élever  rapidement  et  d'attein- 
dre son  apogée  en  quelques  heures  comme  dans  la  pneumonie,  s'accroit 
an  contraire  lentement  et  met  deux  ou  trois  jours  pour  arriver  à  son 
maximum  qui  est  lui-même  relativement  peu  élevé.  La  température,  en 
rfCel,  monte  habituellement  aux  chiffres  de  58^,  58<>  5,  et  même  39  de- 
grès  ;  rarement  elle  dépasse  beaucoup  ce  chiffre  ou,  si  elle  atteint 
40  degrés,  ce  n'est  que  d*une  façon  passagère.  Le  pouls  est  accéléré,  et 
txlùe  accélération  est  souvent  hors  de  proportion  avec  Télévation  de  la 
température  :  ainsi,  on  compte  souvent  100,  120  pulsations  par  minute 
et  même  davantage  :  ce  Dans  la  pleurésie,  dit  Lorain,  la  circulation  est 
plus  accélérée  que  la  température  n'est  élevée.  Il  y  a  une  gcne  mécanique 
de  la  respiration  qui  entraîne  la  circulation.  »  En  même  temps  qu'il  est 
accéléré,  le  pouls  est  souvent  dur  et  résistant. 

Après  avoir  augmenté  pendant  deux  ou  trois  jours,  la  fièvre  reste  ordi- 
nairement stationnaire  pendant  le  temps  que  dure  la  formation  et  l'ac- 
croissement de  l'épanchement,  c'est-à  dire  pendant  une  à  deux  semaines 
environ.  Pendant  ce  temps  qu'on  peut  considérer  comme  la  période 
d'état  de  la  maladie,  la  température  oscille  entre  58  et  59  degrés,  pré- 
sentant un  écart  de  1  degré  à  peu  près  entre  la  température  du  matin  et 
celle  du  soir,  et  le  pouls  varie  entre  90  et  120  ou  150  pulsations. 
Cependantil  n'est  pas  rare  que,  dès  le  commencement  de  cette  période,  la 
fièvre  tombe  au  moment  oùlépancliementse  forme  ou  pendant  qu'il  aug- 
mente. La  durée  de  la  période  fébrile  dans  la  pleurésie  est  donc  très-varia- 
ble; elle  peut  n'être  que  de  trois  ou  quatre  jours,  elle  peut  se  prolonger 
ju  delà  de  deux  semaines.  En  général  la  persistance  delà  fièvre  doit  faire 
craindre  et  rechercher  l'existence  de  quelque  complication  ou  la  transl'or- 

■Ogr.  DICT.  MiD.   BT  CHIR.  XXVIII  —  11 


162  PLEURÉSIE.  —  p.  aigué  primitive.  —  symptômes. 

mation  purulente  de  répanchemenl;  nous  reviendrons  ailleurs  sur  ce 

point. 

Quand  la  pleurésie  se  termine  par. résolution,  comme  c'est  le  cas  le 
plus  fréquent,  la  période  de  terminaison  qui  commence  en  moyenne  vers 
le  vinglième  jour,  est  ordinairement  apyrctique  :  pendant  tout  le  temps 
que  dure  la  résorption  progressive  ne  Tépanchement,  il  n'y  a  pas  de  fièvre; 
mais  le  pouls  conserve  assez  souvent  un  peu  de  fréquence,  imputable 
sans  doute  à  la  gêne  respiratoire.  Quelquefois  durant  cette  période,  on 
voit  des  retours  passagers  de  fièvre  qui  coïncident  avec  un  arrêt  dans  la 
résorption  ou  même  avec  un  retour  de  Tépanchement. 

Bien  que  les  phénomènes  fébriles,  appréciés  surtout  par  la  tempéra- 
tare,  présentent  en  général  les  caractères  que  nous  venons  d'indiquer,  il 
n'est  pas  rare  d'observer  des  exceptions  :  ainsi  Woillez  remarque,  d'après 
plusieurs  faits  qu'il  rapporte,  que  la  thermométrie  fournit  des  données 
trè9-variables  suivant  les  individus  et  que  parfois  même  les  signes  en 
sont  négatifs  ;  en  outre  que,  les  premiers  jours  passés,  la  température 
n'est  nullement  en  rapport  avec  les  progrès  de  Tépanchement. 

Indépendamment  de  Tobservalion  de  ia  température  générale  recher- 
chée dans  Faisselle  ou  dans  le  rectum,  Peter  s'est  préoccupé  des  varia- 
tions delà  température  locale  dans  la  pleurésie  (thermométrie  pleurale): 
pour  apprécier  la  température  de  la  paroi  thoraciquc  du  côté  sain  et  du 
o6té  malade,  ainsi  que  ses  rapports  avec  la  température  moyenne  du 
malade,  il  place  successivement  le  même  thermomètre  dans  le  même 
espace  intercostal,  le  sixième  par  exemple,  du  côté  malade  et  du 
côté  sain,  puis  enfin  dans  l'aiselle  du  côté  sain.  Voici  quelques- 
uns  des  résultats  intéressants  auxquels  il  a  été  conduit  :  Du 
côté  de  la  pleurésie,  la  température  pariétale  est  toujours  plus 
élevée  que  la  température  pariétale  moyenne  (qui  est  de  35*, 8)  ;  la  suré- 
lévation morbide  ou  hyperthermie  locale  est  de  5  dixièmes  de  degré  à  2*,5 
et  même  davantage;  —  l'élévation  de  la  température  augmente  comme 
répanchement,  cVst-à-dire  avec  la  période  d'activité  sécrétoire  de  la 
plèvre;  elle  décroît  dans  la  période  d'état  de  l'épanchement,  bien  qu'elle 
reste  encore  plus  élevée  que  du  côté  sain  ;  —  la  pleurésie  n'élève  pas 
seulement  la  température  pariétale  du  côté  où  elle  siège,  elle  l'élève 
également  du  côté  opposé;  mais  la  température  pariétale  du  côté  malade 
est  toujours  plus  élevée  (de  quelques  dixièmes  de  degré  à  1*  et  même 
davantage)  que  la  température  pariétale  du  côté  sain;  —  la  température 
pariétale  s'abaisse  peu  à  peu  quand  l'épanchement  se  résorbe  spontané- 
ment, tout  en  restant  supérieure  (en  général  de  plusieurs  dixièmes  de 
degré)  h  la  température  pariétale  du  côté  sain;  celte  pcrsislance  tempo- 
raire de  riiyperthcrmie  locale  explique  la  possibibtc  de  la  récidive  par  la 
persistance  des  conditions  anatomiques  qui  président  à  la  formation  de 
l'épanchement.  —  Un  fait  des  plus  intéressants,  c'est  que  TélévatioD 
absolue  de  la  température  locale,  du  côté  malade,  est  plus  considérabh 
que  l'élévation  absolue  de  la  température  axillaire,  bien  que  le  chif&v 
thermique  axillaire  puisse  être  plus  fort  que  le  chiflre  thermique  pariétal 


PLEURÉSIE.   p.    AIGOË   PRIUITIVE.    STVPTÔMES.  163 

Cette  hyperlhermie  locale  précède  rhyperthennie  axillaire.  Deux  choses 
qui  démontrent  Tinfluence  dominatrice  du  travail  morbide  plcurétique  sur 
l'état  général  ou  tout  au  moins  sur  la  température  générale.  —  Si  on 
Tient  à  évacuer  le  liquide  épanché,  c*csl-àdirc  à  vider  la  cavité  de  la 
plèvre,  la  température  pariétale  s'élève  du  côté  ponctionné;  cette  sarélé- 
valion  de  la  température  ne  persiste  pas  si  répanchement  ne  doit  pas  se 
reproduire,  elle  persiste  si  l'épanchement  se  reproduit.  Peter  a  établi  que 
cette  hypertliermie  consécutive  à  la  ponction  est  due  à  Thypcrémie  pro- 
voquée par  révacuation  du  liquide,  que  cette  hyperémie  a  vacuo 
Rajoute  à  Thyperémie  phlegniasique  antérieure  et  qu'ainsi  on  comprend 
comment  la  ponction  pratiquée  intempestivcment  pendant  la  période 
d'activité  inflammatoire  peut  aider  à  la  transformation  purulente  de 
répanchement  .Nous sommes  obligés  de  nous  borner  à  ce  court  résumé  des 
recherches  de  Peter  ;  on  voit  pourtant  les  applications  qu'on  en  peut 
faire  au  pronostic  et  au  traitement. 

La  douleur  de  côté  est  un  des  symptômes  les  plus  constants  du 
début  de  ia  pleurésie  aiguë.  Elle  a  souvent  son  siège  sou:s  le  mamelon 
du  côté  niaiade,  dans  une  partie  limitée  du  cinquième  ou  du  sixième 
espace  intercostal  ;  elle  mérite  alors  le  nom  de  point  de  côté  :  c'est  une 
douleur  aiguë,  analogue  à  celle  que  donnerait  un  instrument  piquant 
enfoncé  sous  la  peau;  elle  entrave  la  respiration,  qui   devient  courte, 
saccadée,  entrecoupée.  D'autres  fois  la  douleur  est  plus  étalée,  et  alors 
elle  occupe  fréquemment  une  certaine  étendue  de  la  base  du  thorax  vers 
h  partie  externe  ;  elle  s'irradie  dans  quebjues  cas  vers  l'épaule,  vers  la 
partie  postérieure  de  la  poitrine  et  même  vers  le  flanc  du  côté  correspon- 
dant; elle  présente  ordinairement  moins  d'intensité  quand  elle  est  ainsi 
diffuse  que  lorsqu'elle  est  bornée  à  un  point  peu  étendu.  Tantôt  elle  est 
(ontinue,  s'exagéraut  dans  les  mouvements  respiratoires  ou  dans  les 
lecousses  de  la  toux;  tantôt  elle  ne  se  montre  que  par  intervalles,  pro- 
Toquôe  seulement  par  la  toux  ou  par  les  grandes  inspirations.  La  douleur 
de  côté  ne  dure  pas  en  général  plus  de  quelques  jours  :  ordinairement 
elle   s'amoindrit  ou    disparait  quand    l'épanchement  se  produit;   elle 
revient  quelquefois  lorsqu'il  survient  des  exacerbations  dans  le  cours  de  la 
maladie.  A  quoi  est  due  cette  douleur?  Non  pas  sans  doute  à  Tinflamma- 
tioo  de  la  plèvre  elle-même,  puisque  la  sensibilité  propre  de  celte  mem- 
l>FSuie  est  douteuse,  mais  à  l'irritation  des  nerfs  adjacents,  c'est-à-dire  des 
Tierfs  intercostaux.  Bouillaud  considérait  le  point  de  côté  de  la  pleurésie 
comme  Tespression  d'une  névralgie  intercostale;  il  semble  plus  légitime 
'^éà  rapporter  cette  douleur  à  l'inflammation  des  nerfs  intercostaux,  dont 
i  fieau,  a  démontré  Icxistence  dans  la  pleurésie,  ainsi  que  nous  lavons  vu 
^  ^iréccJcmmcnt  :  la  douleur  de  cette  névrite  est  rapportée  aux  expansions 
crminales  des  nerfs  atteints,  aus:ïi  le  malaile  n*accuse-t-il  souvent  qu'un 
Mut  douloureux  sous  le  mamelon  ;  mais  il  est  facile  de  se  convaincre  que 
pression  est  douloureuse  sur  tout  le  trajet  d'un  ou  de  plusieurs  espaces 
itercostaux,  qu'elle  est  le  plus  pénible  en  des  foyers  qui  sont  les  points 
émco^oce  des  rameaux  nerveux,  enGn  qu'elle  éveille  de  la  souffrance 


164  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  stmptôxbs. 

au  sommet  des  apophyses  épineuses  des  espaces  correspondants  (Beau^ 
Peter). 

Im  toux  peut  manquer  dans  la  pleurésie,  mais  le  plus  souvent  elle  se 
montre  par  intervalles,  surtout  quand  le  malade  veut  parler,  ou  qu'il 
cherche  à  faire  une  profonde  inspiration  ou  encore  quand  il  change  de 
position  dans  son  lit.  Elle  présente  comme  caractères  dans  la  pleurésie 
d'être  brève,  quelquefois  quinteuse,  toujours  sèche  :  à  peine,  en  effet,  le 
malade  rejette-t-il  après  les  quintes  quelque  peu  prolongées  une  petite 
quantité  de  mucosités  semblables  à  de  la  salive  ;  quand  il  y  a  une  expec- 
toration dilTérente,   c*est  que  la  pleurésie  est  compliquée  d*uae  autre 
maladie,  une  bronchite  ou  une  pneumonie  par  exemple.  Peter  a  très- 
habilement  recherché   la  pathogénie   de  la  toux  dans  la  pleurésie;  il 
Tattribue  dans  tous  les  cas  à  l'excitation  des  filets  terminaux  du  nerf 
vague,  mais  celle-ci  se  produit  de  façons  différentes  aux  diverses  phases 
de  la  maladie  :  au  début,  Texcitation  du  pneumogastrique  a  lieu  par 
transmission  de  Tinflammation  de  la  plèvre  viscérale  aux  couches  adja- 
centes du  poumon  et  aux  ramuscules  bronchiques  contigus;  plus  tard 
quand  Tépanchement  s'est  produit  en  quantité  peu  considérable,  la  toux 
se  manifeste  lorsque  le  malade  se  déplace,  parceque  l'exsudat,  en  se 
déplaçant  lui-même  par  les  mouvements  du  thorax  vient  irriter  de  nou- 
velles portions  du  pneumogastrique;  elle  diminue  souvent  quand  Tépan- 
chemcnt  augmente,  et  cesse  mon le  quand  il  est  considérable  et  que  le 
poumon  est  enveloppé  de  fausses  membranes  et  de  liquide,  parce  qu'il  n'y 
a  plus  alors  de  nouvelle  surface  irritable  parles  déplacements  du  liquide. 
La  toux  sèche,  quinteuse,  qui  survient  chez  un  malade  dans  les  change- 
ments de  position,  acquiert  ainsi  une   valeur  diagnostique  :  elle  e&t    \ 
l'indice  d*unc  pleurésie  et  d'une  pleurésie  avec  épanchement  peu  abofh 
dant  (Peler). 

V oppression  se  montre  dans  la  pleurésie  à  toutes  les  périodes  de  la 
maladie;  elle  est  quelquefois  peu  marquée  quand  le  malade  est  au  repos 
et  surtout  au  lit  ;  il  est  rare  pourtant  qu'elle  ne  se  montre  pas  quand  il 
veut  faire  un  effort,  marcher,  monter  un  escalier.  Souvent  le  malade  n*eo 
a  pas  conscience,  mais  elle  est  ordinairement  très-appréciable  pour  le 
médecin  :  on  constate  en  effet,  le  plus  souvent,  une  accéléi*ationdes  mou- 
vements respiratoires,  dont  le  chiffre  s'élève  à  30,  40,  60  respiration» 
par  minute  et  même  davantage,  au  lieu  de  18  ou  20  comme  à  l'état  nor- 
mal ;  on  observe  en  même  temps  que  les  mouvements  de  la  partie  supé- 
rieure du  thorax  sont  exagérés  et  que  les  muscles  accessoires  de  la  respi- 
ration entrent  en  jeu.  Quand  la  dyspnée  devient  excessive,  elle  est 
accompagnée  de  tous  les  caractères  habituels  de  Tasphyxie.  Au  début  de 
la  pleurésie,  l'oppression  est  souvent  due  au  point  de  côté  et  à  riimnobi- 
lisalion  instinctive  du  thorax  qui  en  est  la  conséquence,  la  respiration 
courte,  comme  contenue,  et  précipitée  ;  plus  tard,  à  la  période  d'é^ 
chement,  elle  est  habituellement  en  rapport  avec  la  quantité  du  liqîiidi 
épanché  et  résulte  de  la  diminution  de  la  surface  respiratoire  ;  iniiL- 
même  dans  ces  conditions,  elle  est  très-variable,  surtout  suivant  la  ra|^ 


PLEURESIE.  —   p.  AIGUË   PRIMITIVE.   —   SIGKES   PHYSIQUES.  165 

dite  aTCC  laquelle  rcpaDchcment  s'est  développe  :  il  est  peu  de  maladies 
où  Ton  rencontre  plus  que  dans  la  pleurésie  raccoutumance  aux  lésions 
lentement  formées  ;  c'est  ainsi  que,  dans  les  pleurésies  subaigucs,  on 
troinre  quelquerois  des  épanchcments  considérables,  remplissant  tout  un 
côté  du  thorax,  chez  des  malades  qui  n'ont  presque  pas  ressenti  de  trou- 
bles fonctionnels. 

Pendant  le  cours  de  la  pleurésie,  les  malades  restent  souvent  couchés 
sur  le  dos  ;  quant  au  décubitus  latéral,  il  a  lieu  tantôt  d'un  côté,  tantôt 
de  Vautre  suivant  la  période  de  la  maladie  :  au  début,  pendant  la  durée 
du  point  de  côté,  le  décubitus  a  lieu  quelquefois  sur  le  côté  sain,  mais 
jamais  sur  le  côté  malade  dont  la  pression  du  corps  raviverait  les  dou- 
leurs ;  plus  tard,  quand  il  y  a  un  épanchement  capable  de  gêner  la  res- 
piration, le  décubitus  latéral  ne  peut,  au  contraire,  avoir  lieu  que  sur  le 
côlé  malade,  parce  que,  dans  cette  position,  le  côte  sain  peut  se  dévelop- 
per librement  pour  les  besoins  de  la  respiration  et  que  du  côté  malade 
lai-méme  le  poumon  est  le  moins  possible  comprimé  par  l'épanchement. 
Dans  le  cas  d'un  épanchement  considérable,  la  position  du  malade  debout 
et  sa  démarche  ne  seraient  pas,  d'après  Peter,  moins  particulières  :  «  Le 
malade,  dit-il,  se  tient  alors  légèrement  penché  de  côté,  l'épaule  un  peu 
abaissée»  Pavant-bras  fléchi,  la  main  rapprochée  de  la  ceinture,  et  c'est 
dans  cette  position  qu'il  marche  lentement  et  avec  prudence.  » 

Le  faciès  est  habituellement  pâle;  les  forces  sont  un  peu  diminuées  et 
le  travail  est  rendu  impossible  surtout  par  la  gcne  respiratoire.  En- 
fin, comme  dans  toutes  les  maladies  inflammatoires  et  suivant  le  degré 
de  la  fièvre,  on  observe,  principalement  au  début,  de  l'inappétence,  un 
peu  de  constipation,  des  urines  moins  abondantes  et  plus  chargées  de  prin- 
cipes minéralisateurs. 

Tous  les  troubles  généraux  et  fonctionnels  qui  précèdent  ont  une  réelle 
importance  dans  l'étude  de  la  pleurésie  aiguë  :  mais,  en  raison  de  leur 
grande  variabilité,  ils  ont  une  valeur  diagnostique  bien  inférieure  à  celle 
des  ûgnes  physiques  qui  permettent  de  suivre  dans  leurs  diverses  phases 
toutes  les  lésions  dont  la  plèvre  est  le  ^iége  et  d'apprécier  toutes  les  parti- 
cularités qu'elles  présentent  dans  leur  évolution. 

Sif^eai  physiques.  —  Nous  avons,  sous  ce  litre,  à  étudier  successi- 
vement les  signes  fournis  par  l'inspection,  la  percussion,  l'auscultation,  la 
plpation  et  la  mensuration.  Ces  signes  sont  tous  en  rapport  avec  deux 
coiiditions  fondamentales  qu'on  observe  dans  toutes  les  pleurésies,  à  sa- 
voir d'une  part  la  présence  d'un  exsudât  composé  de  fausses  membranes 
et  d'un  liquide  séro-fibrineux,  d'autre  part  les  troubles  apportés  aux 
mouvements  du  thorax,  aux  phénomènes  mécaniques  de  la  respiration. 

Impection,  —  La  vue  permet  de  conslaler  :  1"  la  voussure  d'un  côté  de 
la  poitrine  dans  les  parties  correspondantes  à  un  épanchement  considéra- 
ble; 2*  le  retrait  de  la  poitrine  qui  arrive,  au  contraire,   après  la  résorp- 
tion de  Tépanchement;   3^  la  diminution  des  mouvements  d'ampliation 
dulkrax:  4"  le  déplacement  de  certains  viscères. 
L'ampliation  du  thorax  est  assez  exactement  en  rappoi*t  avec  l'abondance 


166  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  signes  physiques, 

de  Texsudat  liquide.  Elle  ne  se  montre  pas  dès  le  début  de  la  période 
d'épanchemcnt  :  en  effet,  tant  que  Télasticité  pulmonaire  n*est  pas  satis- 
faite, le  liquide  épanché  dans  la  cavité  pleurale  prend  la  place  du  pou- 
mon qui  se  retire  et  n'exerce  aucun  effort  sur  la  paroi  thoracique  ;  mais, 
plus  tard,  les  quantités  nouvelles  qui  s'accumulent,  refoutent  dans  tou» 
les  sens  les  parois  qui  limitent  Tépanchement;  de  là  la  formatioo  de 
voussures  partielles  ou  générales.  Dans  les  épanchements  moyens,  qui 
n'occupent,  par  exemple,  que  la  moitié  inférieure  du  thorai,  ta  voussure 
est  .imitée  à  cette  partie  et  n'atteint  pas  la  partie  supérieure  du  tborai. 
Quand,  au  contraire,  l'épanchement  envahit  et  distend  toute  la  cavité  de 
la  plèvre,  la  voussure  occupe  tout  un  côté  de  la  poitrine  qui  tead  à  proi* 
dre  la  forme  globuleuse.  Quelle  que  soit  l'étendue  de  ces  voussures,  elles 
-  résultent  toujours  d'un  mouvement  des  côtes  autour  d'un  axe  fictif  qui 
passerait  par  leurs  deux  extrémités,  mouvement  qui  a  pour  effet  de  rele- 
ver les  côtes  et  de  les  écarter  de  l'axe  antéro-postérieur  du  thorà  ;  en 
même  temps  l'extrémité  antérieure  des  côtes  est  repoussée  en  avant.  Ces 
déplacements  des  côtes  ont  pour  efTet  d'sigrandir,  du  côté  de  répanche- 
ment,  le  diamètre  transversal  et  le  diamètre  antéro-postérieur  du  thorax; 
mais  ils  amèneraient  un  raccourcissement  du  diamètre  vertical,  s'il  ne 
se  produisait  concurremment  un  abaissement  et  un  refoulement  du  dia- 
phragme qui  compense  cet  effet.  On  dit,  en  général,  que  les  voussures 
du  thorax,  dans  la  pleurésie,  se  forment  surtout  dans  les  parties  [»osté- 
Heures  et  latérales;  je  crois,  au  contraire,  que  c'est  surtout  la  partie  anté- 
rieure des  côtes,  qui  du  reste  est  la  plus  mobile,  qui  se  laisse  relouler 
par  Tépanchcment  :  il  suffit  d'ailleurs  d'examiner  quelques  tracés  cyrto- 
métriques,  dans  des  cas  d*épanchements  pleuraux,  pour  se  convaincre 
que  c'est  principalement  en  avant  et  sur  les  côtés  que  l'ampliation  du 
thorax  se  fait,  et  que  c'est  en  ces  points  que  les  voussures  sont  le  plus 
développées.  On  peut  contrôler  les  résultais  donnés  par  la  vue,  en  embras- 
sant avec  les  deux  mains  les  deux  cotes  du  thorax  successivement  :  on 
constate  alois,  sans  difliculté,  que  le  côté  de  répanchement  présente  une 
bien  plus  grande  épaisseur  que  le  côté  opposé,  et  que  sa  surface  est  plus 
régulièrement  arrondie.  Au  niveau  des  parties  dilatées  du  thorax,  ou 
constate  en  même  temps  l'effacement  des  espaces  intercostaux  ;  cet  effa- 
cement est  dû  en  partie  à  la  pression  du  liquide,  mais  surtout  à  la  para- 
lysie des  muscles  intercostaux  qui  participent  à  l'inflammation  de  la  plèîe 
sous-jacente. 

L'ampliation  du  thorax  suit  les  variations  de  l'épanchement  et  elle  dis- 
parait avec  lui;  plus  tard,  dans  la  convalescence  de  la  pleurésie,  on  peut 
même  observer  un  phénomène  inverse,  c'est-à-dire  une  dépression  des 
parois  de  la  poitrine,  un  rétrécissement  de  Tun  des  côtés  du  thorax. 
Laëunec,  qui  a  le  premier  appelé  l'attention  sur  cette  conséquence  possi- 
ble de  la  pleurésie,  en  a  parfaitement"  indiqué  les  caractères  et  le  méca- 
nisme :  «  Les  sujets  qui  présentent  ce  rétrécissement  sont,  dit-il,  très- 
reconnaissableSy  même  à  leur  conformation  extérieure  et  à  leur  déma^ 
'''■').  Ils  ont  l'air  d'être  penchés  sur  le  côté  affecté ,  lors  même  qu'ils 


PLEURÉSIE.   —  p.    AIGUË    PRIMITIVE.   —   SI6RBS   PHYSIQUES.  167 

cherchent  à  se  tenir  droits.  La  poitrine  est  manifestement  plus  étroite  de 
ce  côté;  et  si  on  la  mesure  avec  un  cordon,  on  trouve  souvent  plus  d'un 
centimètre  de  différence  entre  son  contour  et  celui  du  côté  sain.  Son 
étendue  en  longueur  est  également  diminuée  ;  les  côtes  sont  plus  rap- 
prochées les  unes  des  autres;  Tépaule  est  plus  basse  que  du  côté  op- 
posé; les  muscles,  et  particulièrement  le  grand  pectoral,  présentent  un 
volume  de  moitié  moindre  que  ceux  du  côté  opposé.  La  difTérence  des 
deux  côtés  est  si  frappante,  qu*au  premier  coup  d'œil  on  la  croirait  beau- 
coup  plus  considérable  qu'on  ne  la  trouve  en  la  mesurant.  La  colonne 
vertébrale  conserve  ordinairement  sa  rectitude  :  cependant  elle  flédbît 
quelquefois  un  peu  à  la  longue,  par  Thabitude  que  prend  te  malade  de 
se  pencher  toujours  du  côté  afTecté.  x>  Ces  caractères  si  tranchés  ne  se 
présentent  guère  que  dans  les  pleurésies  qui  ont  amené  la  formation  d'un 
épanchement  considérable ,  avec  fausses  membranes  épaisses,  et  qui  eat 
duré  trèsJongtemps,  notamment  dans  les  pleurésies  chroniques;  ils  se 
montrent  pourtant,  sous  une  forme  atténuée,  à  la  suite  d'un  grand  nom- 
bre de  pleurésies  aiguës,  surtout  chez  les  enfants.  Laénnec  pensait  ^pie 
ce  rétrécissement,  une  fois  produit,  persistait  indéGniment;  mais  il  est 
établi  que  la  déformation  peut  disparaître  à  la  longue;  c'est  encore  ches 
les  enfants  qu'on  observe  souvent  ce  retour  à  la  conformation  normale  de  la 
poitrine,  même  après  des  pleurésies  qui  ont  entraîné  des  déformations 
considérables.  Outre  ces  rétrécissements  généraux  de  tout  un  côté  de  la 
poitrine,  Woillez  a  montré  qn*il  s'opérait  aussi  des  rétrécissements  par- 
tiels du  côté  affecté,  à  la  suite  de  la  pleurésie,  et  que  ces  rétrécissements 
limités  se  développaient  de  préférence  au  niveau  des  régions  où  s'obser- 
vent habituellement  les  dépressions  relatives  des  saillies  physiologiques, 
c'est-i-dire  de  préférence  en  arrière  du  côté  gauche,  et  en  avant  du  côté 
droit. 

Quant  au  mode  de  formation  de  ces  dépressions  du  thorax,  tous  les 
auteurs,  depuis  Laénnec,  Tinterprètent  de  la  façon  suivante  :  Lors  de  la 
guérison  de  la  pleurésie,  le  poumon  rétracté  et  emprisonné  dans  les 
fausses  membranes  résistantes,  ne  peut  se  dilater  ou  du  moins  il  ne  se 
dilate  que  partiellement  ;  à  mesure  que  l'cpanchement  est  résorbé,  il 
Haut  que  le  vide  virtuel  qui  en  résulte  soit  comble  et  dès  lors,  à  défaut  4u 
poumon  qui  a  perdu  son  expansibilité,  ce  sont  les  côtes  et  les  parois  tho- 
raeiques  qui  se  laissent  déprimer  par  la  pression  atmosphérique.  A  «cette 
première  cause  d'affaissement  des  côtes  s'ajoute  dans  une  certaine  me- 
sure la  traction  exercée  sur  elles  par  les  adhérences  costo-pulmonaires  qui 
se  sont  formées  au  cours  de  la  pleurésie  :  ces  adhérences  agissent  à  la  ibis 
sur  les  côtes  et  sur  le  poumon,  sur  les  côtes  qu'elles  entraînent  en  dedans 
Ters  Taxe  de  la  poitrine,  sur  le  poumon  qu'elles  forcent  dans  une  cer- 
taine mesure  à  se  développer,  mais  en  déterminant  souvent  une  dilatation 
des  bronches  (Barth).  Ainsi  d'après  cette  théorie,  ce  serait  surtout  la  pres- 
sion atmosphérique  s'exerçant  sur  la  paroi  thoracique  lors  de  la  résorption 
de  répanchement  et  accessoirement  la  rétractilité  des  fausses  membranefVi 
qui  amèneraient  la  dépression  du  thorax  à  la  suite  de  la  pleurésie.  Cepen- 


168  PLEURÉSIE.  —  p.  aigoé  primiti?e.  —  signes  phtsiqobs. 

dant  Urouardel  a  conteste,  dans  la  production  de  cette  déformation,  Tin- 
fluence  de  la  pression  atmosphérique,  sous  prétexte  que  la  difTérence  de 
tension  à  la  surface  thoracique  et  à  la  surface  bronchique  était  très-faible 
dans  l'inspiration  (un  ou  deux  centimètres  de  mercure)  et  que  d'ailleurs 
pendant  l'expiration  la  difTérence  était  en  sens  inverse  ;  d'après  lai  li 
véritable  cause  des  déformations  thoraciques  après  la  pleurésie,  réside 
dans  le  travail  physiologiço-pathologiquc  des  fausses  membranes  et  dans 
leur  tendance  rétractile. 

L'inspection  permet  encore  de  constater  la  diminution  des  mouvementi 
du  thorax  du  côté  correspondant  à  la  pleurésie  :  souvent  il  semble  qu'une 
moitié  de  la  poitrine  soit  presque  immobile  ;  tout  au  moins  les  excursiooi 
respiratoires  de  la  paroi  thoracique  sont  extrêmement  limitées  du  côté 
malade,  tandis  que  du  côté  sain  elles  conservent  leur  amplitude  normale 
ou  paraissent  même  exagérées.  Rien  n'est  plus  facile  que  de  constater 
cette  diflérence  dans  les  mouvements  respiratoires  des  deux  côtés  quand 
le  malade  est  couché  sur  le  dos  et  qu'on  examine  de  face  la  poitrine  dé- 
couverte :  déjà  très-appréciable  dans  les  respirations  ordinaires,  elle 
devient  beaucoup  |ilus  apparente  dans  les  respirations  profondes.  Ce  n'est 
pas  seulement  la  respiration  costale  qui  est  ainsi  modifiée,  c'est  encore  h 
respiration  diaphragmatique  :  par  suite  de  l'immobilité  du  diaphragme 
du  côté  malade,  l'hypochondre  et  la  moitié  de  l'épigastre  restent  immo- 
biles dans  les  deux  temps  de  la  respiration,  tandis  qu'on  les  voit  du  côté 
sain  soulevés  pendant  l'inspiration  et  déprimés  pendant  l'expiration.  Ces 
phénomènes  peuvent  se  montrer  aux  diverses  périodes  de  la  pleurésie, 
mais  ils  paraissent  dépendre  de  conditions  pathogéniques  dilTérentes  : 
au  début  le  côté  malade  parait  immobilisé  instinctivement  par  la  dou- 
leur ;  plus  tard  on  peut  invoquer  la  paralysie  des  muscles  intercostaux  et 
du  diaphragme  par  voisinage  avec  la  plèvre  enflammée  ;  quand  l'épan- 
chement  est  forme  et  qu'il  est  abondant,  la  paroi  du  thorax  et  le  dit- 
phragme  sont  maintenus  immobiles  dans  la  situation  qui  con-espond  i  li 
plus  grande  ampliation  de  la  cavité  thoracique  ;  enfin  après  la  résorption  de 
répanchement,  ces  mêmes  parties  sont  fixées  par  les  adhérences  et  parle 
dciaut  d'cxpansibilité  du  poumon,  dans  la  position  qui  correspond  à  la 
plus  grande  rétraction  du  thorax. 

L'iufpection  permet  enfin  de  constater  le  déplacement  du  coBor  et  en 
fournit  un  des  meilleurs  signes,  à  savoir  les  battements  de  la  pointe  qui, 
dans  la  plcuré>ic  gauche  sont  visibles  plus  ou  moins  loin  du  point  où 
elle  bat  habituellement  :  tantôt  à  gauche  dans  le  voisinage  du  stemam, 
tantôt  à  Tépignstre,  ou  bien  à  droite  de  la  ligne  médiane,  dans  les  espaces 
intercostaux  du  côté  droit,  le  long  du  bord  du  sternum.  Moins  souvent, 
dans  les  pleurésies  droites,  on  voit  la  pointe  du  cœur  refoulé  vers  la 
gauche,  battre  plus  ou  moins  loin  en  dehors  et  au-dessous  du  mam- 
melon. 

Percussion.  —  Les  signes  fournis  par  la  percussion  sont  avec  ceux, 
que  donne  l'auscultation  d'une  importance  décisive  dans  le  diagnostic  de 
la  pleurésie.  Par  la  percussion,  on  trouve  du  côté  malade  soit  une  dimi— 


PLEURESIE.  —   p.    AIGUS   PRIMITIVE.    SIGNES   PHYSIQUES.  169 

nution  de  résonnance  appréciable,  soit  une  inatité  plus  ou  moins  com- 
plète; en  même  temps  que  les  qualités  du  son  ont  varié,  les  sensations 
tactiles  perçues  par  le  doigt  qui  percute  se  sont  modifiées  :  il  existe  une 
résistance  au  doigt  dans  les  parties  occupées  par  répnnchcment  (Piorry), 
résistance  qui  contraste  avec  la  sensation  de  souplesse  qu'on  trouve  dans 
les  parties  saines. 

Pour  que  le  son  soit  obscurci,  il  faut  que  le  liquide  ait  au  moins  de 
un  à  trois  centimètres  d'épaisseur.  Si  Tépanchement  est  minime,  il  reste 
disposé  sous  forme  d'une  lame  mince  interposée  aux  deux  feuillets  de  la 
plèvre,  et  donne  lieu  alors  à  une  légère  diminution  de  résonnance.  Dès 
que  le  liquide  augmente,  sous  Tinfluence  de  la  pesanteur  il  s'accumuJA 
dans  les  parties  les  plus  déclives  de  la  cavité  pleurale»  c'est-à-dire,  en 
raison  du  décubitus  dorsal  habituel  aux  malades,  à  la  partie  postéro-in- 
férieure  do  thorax.  Nous  avons  vu  plus  haut  que  Fintersection  du  plan 
de  la  face  supérieure  du  liquide  et  du  cône  figuré  par  le  thorax,  donne 
une  courbe  parabolique,  à  laquelle  succèdent,  avec  les  progrès  de  Tcx- 
sudat,  une  série  de  courbes  concentriques  de  même  ordre.  La  percussion, 
en  donnant  les  limites  de  Tépanchement,  permet  de  retracer  ces  disposi- 
tions de  la  surrace  du  liquide.  Nous  verrons  plus  loin  quel  parti  l'on  peut 
tirer  de  la  forme  de  ces  courbes,  pour  le  diagnostic  et  le  pronostic  de  la 
pleurésie. 

A  mesure  que  le  liquide  augmente  la  matité  s'étend,  et  le  son,  com- 
plètement mat  à  la  partie  inférieure,  devient  en  remontant  simplement 
obscur.  La  matité  envahit  bientôt  les  parties  latérales  de  la  poitrine, 
mais  ce  n'est  que  dans  les  cas  d'épanchement  très-abondant,  qu'on  la 
▼oit  s'étendre  aux  parties  antérieures  du  thorax.  Le  niveau  supérieur  du 
liquide  permet,  par  son  ascension  graduelle,  d'apprécier  les  progrès  de 
l'exsudat  ;  il  peut  arriver  néanmoins  que  le  liquide  augmente  sans  varia- 
tions appréciables  de  son  niveau,  et  sans  que  la  limite  de  la  matité  se 
rapproche  de  plus  en  plus  du  sommet  du  thorax.  Ce  phénomène  est  du 
au  déplacement  du  cœur,  au  refoulement  des  médiastins,  à  l'abaissement 
du  diaphragme,  du  foie,  de  la  rate  et  à  la  dilatation  du  thorax  qui  ré- 
sistant d'abord,   cède  ensuite  plus  ou  moins  rapidement  et  se  laisse 
I      distendre. 

[         Le  degré  de  la  matité  varie  comme  son  étendue  avec  l'abondance  du 

t      Uquide  :  au  début,  alors  que  l'exsudat  est  étalé  en  lame  jusqu'à  une  cer- 

tûne  hauteur,  il  no  donne  que  de  la  submalité,  et  une  percussion  un 

\       pea  énergique  évoque  toujours  la  résonnance  des  parties  profondes.  Une 

%      percussion  plus  ou  moins  forte  peut  donc,  dans  de  certaines  limites, 

-'       faire  apprécier  l'épaisseur  du  liquide.  Ce  n'est  que  lorsque  celle-ci  est 

considérable  que  la  résonnance  profonde  fait  entièrement  défaut,  et  que 

::       la  matité  est  complète,  absolue,  sans  vibrations  du  thorax  ;  elle  est  alors 

bien  plus  prononcée  que  dans  la  pneumonie,  et  devient  identique  au  son 

^       que  donne  la  percussion  d'épaisses  masses  musculaires  :  tanquam  per- 

;,::       cmii  femoris.  La  résistance  au  doigt  qui  percute,  et  Tabsence  d'élas- 

:i      licite  sont    aussi  bien  plus  marquées.   Ces  caractères  plcssimétriques 


170        PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  signes  physiques. 

peuvent  s'étendre  à  tout  un  côté  du  thorax,  mais  les  parties  anlèro- 
supérieures»  envahies  les  dernières,  ne  donnent  de  matité  que  lorsque  le 
liquide  est  assez  abondant  pour  occuper  toute  la  poitrine.  Dans  ces  cas, 
le  poumon  refoulé,  comprimé,  est  réduit  quelquefois  à  une  sorte  de  moi- 
gnon presque  exsangue.  On  peut  encore  néanmoins,  par  une  percussion 
minutieuse,  le  retrouver  dans  un  point  de  la  poitrine  où,  retenu  par  son 
hile,  il  surnage  au-dessus  de  Tépanchemènt.  11  est  alors  en  haut  en  avant 
et  en  dedans  du  médiaslin,  dans  le  sinus  formé  par  le  bord  du  sternum 
et  l'extrémité  interne  de  la  clavicule;  c'est  là  la  dernière  partie  sonore 
du  thorax. 

Avenbrugger  avait  donné  comme  un  des  caractères  de  la  matité  pieu- 
rétique,  la  mobilité  de  son  niveau  dans  les  changements  d'attitude  im- 
posés au  malade.  Le  fait  est  loin  d'être  constant,  il  parait  même 
exceptionnel  dans  la  pleurésie  franche.  Deux  conditions  s'opposent  au 
déplacement  de  l'exsudat  :  sa  consistance,  quand  il  contient  une  forte 
proportion  de  fibrine,  ce  qui  est  le  cas  ordinaire  dans  la  pleurésie 
franchement  inflammatoire  ;  la  limitation  du  liquide  par  des  fausses 
membranes  qui  Tenkystent  constitue  encore  un  obstacle  à  sa  mobilité» 
Néanmoins  lorsque,  procédant  d'une  phlegmasie  moins  franche,  l'épan- 
chement  est  plus  fluide,  ou  que  l'enkystement  est  moins  complet,  comme 
cela  arrive  dans  certaines  pleurésies  secondaires,  on  peut  en  changeant 
la  posture  du  malade,  faire  varier  la  ligne  de  niveau,  et  trouver  deift 
résonnance  dans  des  points  précédemment  mats. 

La  percussion  ne  donne  pas  seulement  de  la  matité,  elle  permet  ausô 
d'étudier  les  changements  de  résonnance  des  points  de  la  poitrine  aver 
lesquels  le  poumon  reste  encore  en  contact.  Quand  répanchement,  même 
très-abondant,  laisse  libre  le  sommet  de  la  poitrine,  on  observe  i  ee* 
niveau  une  exagération  de  sonorité  à  laquelle  Skoda  a  attaché  son  nom  : 
bruit  skodique.  Cette  partie  du  poumon,  un  peu  rétractée,  est  moios 
tendue,  elle  vibre  plus  complètement,  et  donne,  au-dessous  de  la  clavi- 
cule, une  résonnance  tympanique  qui  tranche  sur  la  matité  absolue  des 
parties  inférieures.  Par  un  mécanisme  analogue,  c'est-à-dire  une  légère 
rétraction  du  poumon,   un  son  clair  ou  même  tympanique  se  montre  aa 
niveau  de  Tépanchement,  tout  à  fait  au  début  de  la  pleurésie,  dans  des 
points  où  le  liquide  est  encore  très-peu  considérable  et  où  Ton  trouvera,, 
un  peu  plus  tard  de  la  matité.  Ce  fait,  établi  par  Skoda,  a  été  confirmé 
par  Barth  et  Gueneau  de  Mussy.  Quand  Tépanchement  occupe  toute  la^ 
cavité  de  la  poitrine  d*un  côté,  la  matité  sous-claviculaire  est  absolue. 
Quelquefois  en  ce  point  le  son  est  encore  tympanique,  mais  avec  un  bruit 
de  pot  fêlé  ou  une  résonnance  métallique  ;  cela  tient  à  ce  que  la  compres- 
sion du  poumon  étant  alors  complète,  permet  au  doigt  de  faire  vibrer 
directement  la  colonne  d'air  de  la  trachée  et  des  grosses  broncher. 

Le  degré  de  la  malité  n'est  pas  toujours  l'expression  absolue  de  l'abon- 
dance et  de  Tcpaisseur  de  la  couche  liquide  :   Skoda  a  fait  voir  que, 
lorsqu'une  paroi  vibrante  est  très-tendue,  la  tonalité  du  son  s'élève  et  la* 
résonnance  diminue;  la  pneumatose  abdominale,  l'emphysème  pulmo*- 


PLEURESIE.  —    p.    AIGUË    PRIMITIVE.    —   SIGNES  PHYSIQUES.  171 

nairc  peuvent,  avec  une  tension  clevce,  donner  une  résonnancc  moindre 
qu'à  Tétat  normal  ;  il  en  est  de  même,  comme  Ta  fait  remarquer  Laënnec, 
d*un  épanchcment  moyen  ou  même  peu  abondant,  s'il  se  forme  rapide- 
ment et  surprend  le  poumon,  qui  ne  se  laisse  pas  refouler  d'abord,  et  la 
paroi  costale  qui  résiste;  la  tension  de  la  paroi  thoracique  peut  alors  être 
telle,  qu'il  y  ait  absence  plus  ou  moins  complète  de  vibrations,  et  matité 
presque  absolue. 

Auscultation,  Les  données  diagnostiques  fournies  par  l'application  de 
roreille  se  tirent  surtout  de  Texamen  du  côté  malade,  néanmoins,  il 
n'est  pas  sans  intérêt  d'ausculter  le  côté  sain.  Ces  signes  d'auscultation 
consistent  tantôt  en  une  simple  modiGcation  des  bruits  normaux,  tantôt 
dans  l'apparition  de  bruit  insolites. 

Le  signe  stéthoscopique  le  plus  commun,  celui  que  l'on  rencontre  à 
divers  degrés  dans  tous  les  cas  de  pleurésie  avec  exsudât,  c'est  l'affai- 
blissement du  bruit  respiratoire  ;  toutefois,  ce  n'est  pas  toujours  le  pre* 
mier  indice  que  donne  l'auscultation  :  tout  à  fait  au  début  de  la  phleg- 
masie  pleurale,  alors qu*il  n'existe  pas  encore  dépanchement,  il  n'est  pas 
rare  de  percevoir  un  léger  bruit  de  frottement  dû  à  la  locomotion  du 
poumon,  qui  fait  frotter  Tune  contre  Tautre  les  deux  plèvres  engluées 
de  fibrine  granuleuse  ;  ce  frottement  est  extrêmement  doux.  C'est  là  un 
phénomène  tout  à  fait  fugace,  et  promptement  on  voit  s'affaiblir  ou  dispa- 
raître complètement  le  murmure  respiratoire;  ce  bruit,  d'abord  plus  faible 
a  la  base,  cesse  bientôt  complètement  à  ce  niveau,  en  même  temps  qu'il 
commence  à  s'affaiblir  plus  haut,  pour  reparaître  avec  son  intensité  nor- 
male à  la  limite  supérieure  de  Tépanchement.  Quand  le  liquide  est  très- 
abondant,  le  silence  peut  être  absolu  dans  toute  la  hauteur  de  la  poitrine 
en  arrière  ;  chez  reniant,  toutefois,  il  est  rare  que  la  respiration  soit  tout  à 
fait  abolie,  si  ce  n'est  à  une  époque  éloignée. Dans  les  cas  d'épanchements 
moyens,  le  bruit  respiratoire  complètement  nul  ou  très  atténué  en  arrière, 
est  simplement  afiaibli  sur  les  côtés  et  en  avant,  ce  qui  résulte  de  la 
disposition  du  liquide  que  nous  avons  déjà  signalée.  Au  sommet  de  la 
poitrine,  surtout  en  avant,  il  n'est  pas  rare  de  trouver  au  contraire  un 
knnt  fort,  exagéré,  presque  soufflant,  semblable  à  la  respiration  puérile 
qa'on  perçoit  dans  le  poumon  du  côté  opposé.  Cette  exagération  du  mur- 
mure vésiculaire,  serait  due,  pour  Woillez,  à  un  léger  refoulement  en 
haut  du  poumon  par  le  liquide. 

L'affaiblissement  de  la  respiration  est  d'autant  plus  prononcé  que 
Texsudat  est  plus  considérable.  Néanmoins  Guéneau  de  Mussy  fait  remar- 
quer qu'il  ne  lui  est  pas  toujours  proportionnel  :  comme  l'avait  vu 
Laennec,  ce  si^ne  peut  être  plus  accusé  au  début  qu'il  ne  le  sera  plus 
tard,  alors  que  le  liquide  aura  augmenté  d'abondance.  Ce  désaccord  appa- 
rent entre  le  symptôme  et  sa  condition  physique  s'explique,  pour  l'émi- 
nent  médecin  de  l'IIôtcl-Dieu,  par  une  tension  moindre  de  la  paroi 
Ihoncique  ;  nous  pensons  qu'il  est  dû  aussi  en  partie  à  l'immobilisalion 
y    instinclive  du  côté  malade  qui  résulte  de  la  douleur  de  côté. 

11  faut  se  garder,  quand  on  ausculte  le  côté  malade,  de  prendre  pour 


iW 


lu^ 


172  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguS  primitive.  —  sigres  physiques. 

un  bruit  vcsiculaire  produit  sur  place,  le  retentissement  du  murmure 
respiratoire  du  poumon  opposé.  Nous  verrons,  à  propos  de  TauscultatioD 
du  côté  sain,  que  la  respiration  y  esttrès-développée  et  prend  le  caractère 
puéril,  et  ce  bruit  intense  se  propage  aisément  au  poumon  malade.  On 
reconnaîtra  Terreur,  en  auscultant  sur  une  ligne  horizontale  des  points 
de  plus  en  plus  distants  du  rachis,  le  bruit  transmis  allant  alors  en 
s'éteignanl. 

L'aflaiblissement  du  bruit  normal,  dû  à  la  présence  du  liquide,  pe^ 
siste  néanmoins  à  un  certain  degré  après  sa  dispariûon,  ce  qu'il  bot 
attribuer  pour  une  part  à  Texistence  de  fausses  membranes,  mais  aussi 
à  ce  que  Texpansion  pulmonaire  reste  amoindrie  pendant  des  mois  et 
même  des  années,  et  peimet  de  reconnaître,  bien  longtemps  après  h 
guérison,  quel  a  été  le  côté  atteint. 

L'affaiblissement  ou  la  disparition  plus  ou  moins  complète  do  bruit 
respiratoire  peut  être  le  seul  signe  que  donne  l'auscultation,  mais  il  est 
fréquent  d'observer,  avec  les  progrès  de  Tépanchement,  de  la  respÎNtion 
bronchique  ou  souffle  bronchique.  Le  souffle,  à  son  moindre  degré,  n'est 
guère  qu'un  bruit  d'expiration  prolongée,  et  même  alors  qu'il  est  très 
développé,  il  a  un  caractère  de  douceur  et  d'acuité  qui  diflere  de  la 
rudesse  à  timbre  métallique  du  soulfle  de  la  pneumonie  ;  il  est  loilé, 
lointain,  en  général  plus  marqué  durant  rexpiration,mais  se  produi- 
sant  aux  deux  temps  de  la  respiration  ;  toutefois,  il  peut  ne  se  montrer 
que  dans  les  inspirations  profondes,  alors  que  l'on  fait  tousser  le  ma- 
lade, ou  bien  à  l'expiration  seulement.  Souvent  avant  de  s^e  faire  entendre 
aux  deux  temps,  il  se  montre  d'abord  à  l'expiration,  et  quand  il  est 
sur  le  point  de  disparaître,  c'est  encore  par  l'expiration  qu'il  finit.  Le 
souffle  bronchique  existe  très-fréquemment  au  début  de  la  pleurésie  cbei 
les  enfants. 

Si  le  liquide  est  très-copieux,  le  souffle  peut  disparaître,  pour  devenir 
de  nouveau  appréciable  lorsque  l'épanchcment  diminue.  11  occupe  rare- 
ment tout  le  côté  malade,  quelque  étendue  que  soit  la  matité,  quelque   : 
complet  que  soit  le  silence  respiratoire  :  tantôt  borné  aux  parties  hier 
raies  du  rachis,  là  où  le  poumon  est  refoulé  par  Texsudat,  d'autres  ^ 
fois,  il  est  limité  à  la  partie  moyenne  de  la  poitrine  en   arrière,  dans 
le  voisinage  de  l'angle   inférieur  de   Tomoplate.  On   le  trouve  dans  J 
les  points  où  rêpanchcment  offre  peu  dVpaisseur,  et  où  les  modifications   ^ 
de  la  voix  sont  plus  accentuées  ;  ce  sont  deux  phénomènes  connexes.    ^ 
L*existence  d'adhérences  dues  à  une  pleurésie  antérieure  peut  modifier 
la  situation  qu*il  occupe  habituellement,  quand  aucun  obstacle  n'cmpécbe 
le  liquide  d*obéir  à  faction  de  la  pesanteur. 

Existe4-il  un  rapport  constant  entre  la  quantité  de  Tépanchement  el 
Texistonce  du   soulfle  bronchique  ?  On  est  loin  d'être  d'accord  sur  ce 
point,  et  tandis  que  Monnerot^  llirtz.  Gueneau  de  Mussy,  Jaccoud,  Gutli* 
manu  admettent  que  le  souffle  apparaît  avec  une  collection  liquide  pei^ 
abondante.  Fournct.  Landouzy,  >etter,  pensent  qu'un  épanchement  volim.— 
eux  est  la  condition  nécessaire  de  sa  production.  D  après  Guttmaisjv 


PLEURÉSIE.  —  p.   AIGUg   PRIMITIVE.  —  SIGîfES   PHYSIQUES.  173 

le  soufDe  se  produirait  quand  le  liquide,  d'abondance  moyenne,  est  sufG, 
sant  pour  comprimer  les  cellules  pulmonaires  et  les  petites  bronches, 
sans  aplatir  les  gros  tuyaux  bronchiques.  Les  épanchenicnts  faibles,  n'ame- 
nant pas  l'imperméabilité  du  poumon,  ne  le  déterminent  pas,  non  plus 
que  les  collections  volumineuses  qui  aplatissent  les  grosses  bronches,  et 
empêchent  ainsi  la  plus  grande  partie  des  yibrations  laryngées  de  retentir 
jusqu'au  poumon.  L'opinion  de  Woillez  sur  le  souffle  bronchique,  se 
rapproche  de  celle  que  nous  venons  de  rapporter  :  «  La  cause  immédiate 
du  souffle  bronchique  dans  la  pleurésie,  dit-il,  doit  être  cherchée  dans  des 
conditions  physiques  du  poumon  encore  difficiles  à  déterminer.  Une  seule 
nous  parait  évidente,  c'est  l'imperméabilité  complète  ou  incomplète  des 
vacuoles  pulmonaires,  par  le  fait  du  retour  du  poumon  sur  lui-même, 
ou  de  sa  compression,  imperméabilité  d'où  résulte  la  résonnance  bron- 
chique de  Tair  en  mouvement  dans  les  conduits  respiratoires.  »  L'abon- 
dance médiocre  du  liquide  et  sa  faible  densité  sont  favorables  à  l'appari- 
tion du  soufDe.  Pour  Jaccoud,  il  serait  produit  par  le  bruit  vésiculaire 
renforcéet  prolongé  par  une  couche  mince  de  liquide  faisant  office  d'anche 
membraneuse.  11  convient  d'ajouter  que  la  présence  du  liquide  ne  parait 
pas  indispensable  à  sa  production,  puisque  Woillez  et  Landouzy  ont  signalé 
sa  persistance  après  la  disparition  complète  du  liquide  et  alors  que  la 
résorption  de  l'épanchemcnt  n'était  pas  douteuse. 

Quelquefois  le  souffle  pleurétique  prend  le  caractère  caverneux  ou 
amphorique,   et  peut  s'accompagner   de    gargouillement,    comme   s'il 
existait  une  caverne  vaste  et  superGcielle,  ou  bien  un  hydropneumo- 
thorax;  Azam,  Béhicr,   Lamlouzy,  Rilliet   et  Barthez  en  ont  cité  des 
obserrations.   Ces  caractères  ont  été  rencontrés  surtout  au  niveau  de 
l'épine  de  l'omoplate,  dans  le  voisinage  des  grosses  bronches  et  de  la 
trachée.  Ces  phénomènes  regardés  comme  exceptionnels  chez  l'adulte, 
sont  relativement  fréquents  dans  la  pleurésie  des  enfants.  Ils  seraient 
dus  à  la  compression  du  poumon  par  l'épanchement,  et  à  la  transmis- 
àoQ  à  la  paroi  thoracique  des  bruits  trachéaux  et  bronchiques  par  le  tissu 
pulmonaire  refoulé  et  induré.  Mais  on  a  expliqué  de  la  même  façon  le 
simple  souffle  bronchique,  il  semble  donc  évident  que  dans  les  cas  de 
soofDe  caverneux  et  amphorique,  il  doive  y  avoir  autre  chose.   Il  est 
probable  que  la  transmission  du  bruit  trachéal  est  ici  rendue  plus  com- 
plète et  plus  facile  par  l'existence  d'un  certain  degré  de  congestion  pul- 
monaire. On  a  encore  explique  les  phénomènes  cavitaires  par  l'existence 
d'adhérences  qui  retiennent  le  poumon  appliqué  contre  la  paroi  costale  au 
oiieau  de  laquelle  on  perçoit  les  bruits  amphoriques.  Barthez  et  Rilliet 
ont  noté  comme  conditions  favorables  à  ces  modifications  du  souffle  plcu- 
rélique  les  indurations  du  poumon,  les  tumeurs  situées  au  voisinage  des 
gros  tuyaux  bronchiques,  comme  un  anévrysme  de  l'aorte,  une  tumeur 
fibreuse,  etc. 

Si  la  pleurésie  se  complique  d'une  bronchite,  les  râles  que  celle-ci  déter- 
mine prennent  souvent,  dans  les  points  où  s'entend  le  souffle,  un  carac- 
tèreédatant,  un  timbre  métallique,  véritable  gargouillement  bronchique. 


— * 


i74  PLEURESIE).  —  p.  aiguë  priiiitive.  —  signes  phtsiqdbs. 

On  a,  dans  ces  cas,  beaucoup  de  peine  à  se  défendre  de  croire  à  l'existence 
d'une  caverne  pulmonaire. 

Pendant  qu'on  ausculte  le  malade,  il  est  important  de  le  faire  parler. 
La  voix  peut  conserver  ses  carnctères  ordinaires,  à  l'intensiié  près  ;  elle 
est  alors  plus  faible  que  du  côte  sain,  comme  éloignée,  etraffaiblissemcnt 
s'accroît  de  haut  en  bas,  ainsi  que  cela  arrive  pour  le  bruit  pulmonaire. 
Quand  Tépanchement  est  considérable,  et  le  son  de  percussion  complète- 
ment mat,  la  voix  cesse  d'être  perceptible  ;  plus  rarement  le  murmure  Yocal 
est  exagéré  et  constitue  une  sorte  de  bourdonnement.  Un  signe  autrement 
significatif  est  ïégophoniCy  mais  elle  est  loin  d'être  constante,  et  ses 
caractères  varient  avec  ceux  de  la  voix  normale  et  la  quantité  de  Tex- 
sudat.  Si  la  collection  étant  d'abondance  moyenne,  la  voix  n'est  pas 
trop  aiguë,  elle  prend  à  l'auscultation  un  caractère  aigre,  elle  est  trem- 
blotante, comme  bredouillante,  saccadée  ;  elle  rappelle  le  bêlement  de  la 
chèvre,  ou  bien  elle  à  un  timbre  nasillard  comme  celui  que  l'on  produit 
lorsqu'on  parle  en  se  pinçant  les  narines  ;  ailleurs  c'est  un  bruit  criard 
comme  la  voix  de  polichinelle,  semblable  au  son  du  mirliton,  ou  strident 
comme  la  vibration  d'un  jeton  sur  les  dents. 

L'égophonie  ne  s'entend  ni  dans  un  espace  étendu,  ni  d'ordinaire  pen- 
dant longtemps  :  le  plus  souvent,  on  la  perçoit  au  pourtour  de  l'angle 
inférieur  de  l'omoplate  entre  la  ligne  axillaire  et  le  rachis,  et  habituelle- 
ment vers  la  limite  supérieure  de  l'épanchement.  Sa  production,  souvent 
transitoire  et  fugace,  semble  être  liée  à  une  hauteur  donnée  du  liquide, 
en  deçà  et  au  delà  de  laquelle  elle  n'existe  pas.  Très-commune  dans  les 
épanchements  médiocres  qui  atteignent  la  partie  moyenne  de  la  poitrine 
elle  parait  résulter  de  la  résonnance  de  la  voix  à  travers  une  mince  lame 
de  liquide  infiltré  dans  des  fausses  membranes  ou  interposé  à  la  paroi 
thoracique  et  au  poumon.  Lorsque  l'épanchement  devient  très-abondant 
elle  disparaît,  pour  revenir  dans  le  détours  de  la  maladie,  mais  elle  est 
alors  bien  moins  nette  que  l'égophonie  du  début,  ce  cpii  parait  tenir  i 
l'existence  des  fausses  membranes  dont  la  présence  entrave  sa  production. 
Dans  quelques  cas,  au  lieu  d'égophonie,  on  perçoit  une  bronchophonie 
semblable  par  ses  caractères  à  celle  de  la  pneumonie,  ou  bien  le  retentis- 
sement vocal  a  un  caractère  rriixte  qui  participe  à  la  fois  de  l'une  et  de 
Tautrc,  c'est  la  broncho-égoplionie.  Enfin,  il  n'est  pas  rare  de  trouver  en 
même  temps,  dans  des  points  différents  d'une  part  de  l'égophonie,  de 
l'autre  de  la  bronchophonie. 

La  recherche  de  la  pecloriloquie  aphone  donne  encore  des  caractères 
diagnostiques  importants  :  Baccolli  (de  Rome)  apjiclle  ainsi  le  phénomène 
qui  se  produit  lorsqu'on  fait  parler  à  voix  basse,  pendant  qu'on  l'ausculte, 
un  malade  atteint  d'épanchcment  plcurétiquc.  Lorsque  la  transmission 
vocale  se  fait  bien,  il  semhle  que  le  malade  chuchote  directement  dans 
l'oreille  de  l'observateur.  D'après  Baccelli,  les  licjuidcs  homogènes,  peu 
denses,  trcs-iluides  transmettent  très-nettement  la  voix  chuchutéc  ;  mais 
si  le  liquide  épanché  s'écarte  de  la  consistance  et  de  la  composition  du 
sérum,  s'il  est  épais,  chargé  de  flocons  d'exsudat,  s'il  tient  en  suspension 


PLEURÉSIE.   —   p.   \IGUE    PRIMITIVE.    SIGNES    PHYSIQUES.  i75 

des  éléments  histologiques,  des  leucocytes,  des  hématies,  les  vibrations 
ne  se  feront  plus  sentir.  Les  signes  tirés  de  ce  mode  d'exploralion,  appor- 
teraient, si  sa  valeur  était  confirmée,  un  sérieux  appoint  au  diagnostic  de 
la  nature  des  épanchemcnts,  et  éclaireraient  singulièrement  le  diagnostic 
de  la  pleurésie  purulente  et  des  hémorrliagies  pleurales. 

Tous  ces  signes  d'auscultation,  le  souffle,  Tégophonie,  la  bronchopho- 
nie,  peuvent  faire  défaut,  et  Ton  ne  trouve  d'autres  signes  que  la  matité 
et  Tabsence  du  murmure  vésiculaire. 

Le  frottement  pleural  que  nous  verrons  être  le  seul  signe  physique 
de  la  pleurésie  sèche  se  rencontre  quelquefois  au  début,  et  très-souvent  à 
la  fin  de  la  pleurésie  avec  épancherocnt.  C'est  surtout  au-dessous  de 
Faisselle  qu'il  offre  son  maximun  d'intensité,  en  raison  de  Tamplitude 
plus  grande  du  glissement  pulmonaire  à  ce  niveau.  Suivant  son  degré,  il 
a  des  caractères  bien  différents:  quelquefois  très-léger,  il  constitue  un 
simple  frottement,  semblable  au  froissement  de  la  soie,  au  bruit  des 
feuilles  mortes  que  Ton  foule  aux  pieds.  Quand  il  est  plus  fort,  si  ses 
saccades  sont  nombreuses  et  régulières,  elles  peuvent  simuler  les  râles 
sous-crépi tants,  c^est  là  le  frottement  râle  de  Damoiseau.  Quelquefois,  les 
frôlements  sont  assez  multipliés  et  assez  fins  pour  faire  croire  à  un  véri- 
table raie  crépitant,  fausse  crépitation  que  Trousseau  considérait  comme 
bien  réelle,  et  qu'il  rapportait  à  une  phlegmasie  superficielle  du  poumon 
développée  par  contiguïté  avec  la  plèvre  enflammée.  11  y  aurait  Ih  quelque 
chose  d'analogue  à  ce  qui  arrive  dans  l'érysipèle  pour  le  tissu  cellulaire 
sous-cutané  qui  s'infiltre  de  fibrine.  Cette  variété  de  frottement  s'entend 
tout  à  bit  au  début,  pendant  les  quelques  heures  qui  précèdent  la  forma- 
tion de  Vépanchement.  On  a  d'ailleurs  bien  rarement  l'occasion  de  la 
constater,  car  on  ne  voit  guère  les  malades  tout  à  fait  au  début,  et 
quelques  heures  suffisent  pour  amener  la  production  du  liquide.  Nous 
Ferrons  à  propos  du  diagnostic  que  des  raies  crépitants  existent  réelle- 
ment dans  d'autres  cas,  et  reconnaissent  pour  cause,  soit  une  congestion 
pulmonaire,  soit,  lorsque  l'épanchement  s'est  rapidement  résorbé,  le 
déplîttement  pulmonaire. 

Quand  le  frottement  est  plus  marqué,  c'est  un  bruit  intense  ressem- 
blant au  froissement  de  la  neige,  et  même  à  la  crépitation  osseuse;  il  peut 
être  alors  perçu  par  l'oreille  placée  à  une  petite  distance  de  la  poitrine, 
il  devient  appréciable  par  le  palper,  et  le  malade,  qui  en  a  conscience, 
peut  en  être  incommodé.  La  toux,  l'expectoration  ne  le  modifient  pas,  ce 
qui  le  distingue  des  bruits  bronchiqtics.  11  est  superficiel,  on  peut  1  obser- 
ver aux  deux  temps,  mais  il  est  plus  marqué  à  l'inspiration  qui  peut 
être  le  seul  moment  où  on  le  perçoive.  Les  saccades  sèches  et  inégales 
du  frottement  moyen  ou  intense, en  font  un  signe  d'une  grande  valeur;  il 
s'entend  dans  la  plupart  des  cas  lors  de  la  résolution  de  répanchcment; 
quand  on  l'observe  tout  à  fait  à  la  base  du  poumon,  il  indique  très  net- 
tement la  disparition  complète  du  liquide. 

Due  variété  de  pleurésie  sur  laquelle  nous  aurons  à  revenir  à  propos 
des  pleurésies  secondaires,  la  pleurésie  sèche,  n'a  pas  d'autre  signe  phy- 


{76  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  signes  phtsiquis. 

siquc  que  le  frottement.  Lorsque  l'exsudat  liquide  manque,  on  qu'il  est 
très-peu  abondant,  l'exsudat  fibrincux  qui  revêt  la  plèvre  au  niveau  du 
point  enflammé,  donne  lieu  à  du  frottement  pleural.  Ce  signe,  qui  persiste 
pendant  toute  la  durée  de  l'affection,  en  constitue,  avec  une  légère  dou- 
leur siégeant  au  niveau  du  point  malade,  toute  la  symptomatologie.  La 
pleurésie  sèche  est  bien  rarement  primitive,  elle  est  d'ordinaire  sjmp- 
tomatique  de  la  tuberculose.  On  en  a  néanmoins  signalé  quelques  cas, 
chez  des  sujets  bien  portants  d'ailleurs  et  non  diathésiques. 

Tels  sont  les  signes  stéthoscopiques  que  donne  l'application  de  Foreille 
sur  le  côté  malade.  Il  est  de  quelque  importance  d'examiner  égalemeot 
le  côté  sain  :  dans  les  cas  ou  lepanchement  est  très-peu  abondant,  U 
comparaison  du  côté  malade  au  côté  sain  fera  mieux  saisir  un  léger  aflai- 
blisseinent  du  bruit  respiratoire  qui  aurait  pu  échapper  sans  cela.  Si 
l'épanchemcnt  est  faible  ou  médiocre,  le  murmure  vésiculaire  reste  nor- 
mal du  côté  opposé,  mais  quand  le  liquide  est  très-abondant,  et  le  pou- 
mon fortement  comprimé,  on  perçoit  dans  le  côté  sain  une  respiration 
exagérée,  puérile.  Par  suite  de  la  suppression  plus  ou  moins  complète 
des  fonctions  d'un  des  poumons  qui  cesse  de  pouvoir  se  dilater,  toute 
la  colonne  d'air  trachéale  passe  dans  le  poumon  sain  ;  il  est  d^ailleuis 
probable  que  le  malade  s^efforce  instinctivement  d'augmenter  Tampli- 
tude  de  la  dilatation  du  poumon  sain,  pour  suppléer  son  congénère  diMit 
l'inaction  rend  Thématose  insuffisante. 

Il  faut  se  garder,  quand  on  ausculte  le  côté  sain,  de  prendre  pour  du 
souifle  un  bruit  de  propagation  venant  du  côté  malade.  Le  souflGle  tran^ 
mis,  qui  est  à  son  maximum  au  voisinage  de  la  gouttière  vertébrale,  di- 
minue à  mesure  que  l'oreille  s'éloigne  vers  l'aisselle,  où  l'on  percevra  la 
respiration  exagérée,  mais  sans  mélange  de  bruits  morbides. 

L^auscultation  du  poumon  resté  libre  servira  encore  à  reconnaître 
Texisteiice  de  la  congestion  pulmonaire  très-fréquente  du  côté  sain,  quand 
l'épanchement  est  considérable. 

Enfin,  les  déplacements  du  cœur  souvent  appréciables  à  la  Tue  ou  an 
palper  quand  les  battements  de  la  pointe  sont  superficiels  et  suffisamment 
énergiques,  seront  aisément  suivis  dans  leur  marche  à  l'aide  de  l'oreille 
qui  trouvera  aisément  le  maximum  qui  répond  à  la  pointe  de  l'organe. 

Palpation.  —  L'application  de  la  main  sur  la  paroi  thoracique  ne 
fournit  aucun  signe  qui  lui  soit  propre  et  que  l'auscultation  ou  la  vue  ne 
puisse  donner;  clic  permet  néanmoins  de  contrôler  les  autres  méthodes 
d'exploration,  et  a  son  aide,  certains  signes  sont  appréciés  d'une  façoB 
plus  complète;  tels  sont  le  frémissement  vocal  des  parois  thoraciques,  k 
frottement  pleurétiquc,  l'existence  et  le  siège  d'un  point  de  côté  nos 
appréciable  spontanément,  l'amplitude  de  la  dilatation  du  côté  de  Pépan* 
chemcnt. 

Le  frémissement  thoraciquc,  connu  de  longue  date  par  le  travail  de 
Raynaud,  qui  l'a  le  premier  signilé  (1824)  et  par  la  clinique  d'Andral, 
a  été  surtout  vulgarisé  par  Mormeret  qui  a  insisté  sur  sa  valeur  et  a 
signification  dans  un  certain  nombre  de  maladies,  et  notamment  dans  il 


PLEURÉSIE.  —  (.    AIGUfi   PRIMITIVE.    —  SIGNES  PHYSIQUES.  177 

pleurésie.  L'intensité  des  vibrations  Ihoraciques  varie  avec  des  conditions 
multiples  :  elle  est  d'autant  plus  grande  que  la  voix  est  plus  forte  et  plus 
grave,  la  paroi  costale  plus  mince,  et  le  point  exploré  plus  rapproché  du 
larynx.  Si,  au  contraire,  la  voix  est  grêle  et  aiguë,  la  couche  musculo- 
adipeuse  très-épaisse,  les  vibrations  laryngées,  plus  nombreuses  mais 
moios  éteodues,  feront  à  peine  vibrer  la  paroi  costale  ;  le  frémissement 
pourra  même  être  nul,  ainsi  que  cela  arrive  souvent  chez  les  femmes.  Ce 
signe  n'a  donc  pas  une  valeur  absolue  ;  on  peut  trouver  des  vibrations  à 
peine  perceptibles  sur  un  sujet  sain,  alors  qu'elles  conserveront  une  cer- 
taine intensité  dans  des  cas  d'épanchement  pleural  ;  il  faudra  toujours 
procéder  par  comparaison. 

Lorsque  le  poumon  et  la  paroi  costale  sont  écartés  l'un  de  l'autre  par 
l'interposition  d'un  liquide,  le  frémissement  diminue;  il  disparait  presque 
complètement  quand  le  liquide  occupe  toute  la  cavité  pleurale  et  comprime 
fortement  le  poumon.  Dans  ces  cas  les  vibrations,  faiblement  transmises 
par  les  bronches  comprimées  et  aplaties,  s'atténuent  en  traversant  le 
Ûquide  et  n'arrivent  pas  à  la  paroi  thoracique.  La  diminution  des  vibra- 
tions thoraciques  caractérise  plus  sûrement  la  présence  de  Tépanchement 
que  la  matité  ou  l'obscurité  du  son;  celle-ci  peut  être  donnée  par  des 
busses  membranes  épaisses,  tandis  que  Taffaiblissementdu  frémissement 
vocal  est  bien  le  fait  de  la  présence  d'un  liquide. 

WoiUei  a  établi,  à  l'aide  d'un  nombre  relativement  considérable  d'ob- 
servations, que  dans  la  pleurésie  avec  épanchement  le  simple  affaiblisse- 
ment des  vibrations  thoraciques  est  la  règle,  et  leur  abolition  complète 
l'exception.Dans  les  épanchements  très-abondants,  si  les  vibrations  vocales 
naguère  complètement  supprimées  se  montrent  de  nouveau,  on  peut  annon- 
cer la  diminution  du  liquide,  quand  même,  son  niveau  restant  stationnaire 
et  son  ^MÛsseur  seule  diminuant,  la  percussion  n'indiquerait  rien.  Le 
(rémissement  thoracique  laisse  donc  suivre  avec  quelque  exactitude  la 
narche  du  liquide.  L'absence  de  vibrations  thoraciques  à  la  ^se  de  la 
poitrine,  permet  sans  le  secours  de  l'oreille,  d'affirmer  la  présence  en  ce 
point  d'un  épanchement;  dans  quelques  cas,  chez  les  vieillards  par 
exemple,  dont  la  pneumonie  même  étendue  éveille  si  peu  de  retentisse- 
ment général,  et  présente  des  signes  physiques  si  incomplets,  l'absence 
dn  frémissement  vocal  sera  souvent  le  seul  moyen  de  décider  entre  la 
pleurésie  et  la  pneumonie,  les  vibrations  étant  toujours  accrues  dans  cette 
denière  maladie. 

Par  le  palper  thoracique,  on  reconnaît  encore  l'existence  du  frottement 
pleural,  mais  seulement  quand  il  est  assez  intense;  il  donne  alors  à  la 
main  nne  sensation  analogue  au  froissement  du  cuir  neuf,  ou  à   celle 
que  l'on  éprouve  en  marchant  sur  la  neige  gelée  ;  on  peut  enfin  ne  per- 
cevoir qu'une  sorte  de  grattement  ou  de  frôlement.  Le  frottement  peut  être 
«enti  dans  tous  les  points  de  la  poitrine,  plus  rarement  toutefois  au 
sommet,  ou  les  exsudats  sont  exceptionnels,  et  les  mouvements  de  lo- 
comotion du  poumon  fort  limités  ;  par  une  raison  inverse,   c'est  au- 
dessous  de  la  région  axillaire  qu'on  le  perçoit  le  mieux  ;  on  le  trouve 

HOCT.  WCT.   M<D.  IT  CiUR.  XX VI II  -*  12 


178  PLEURESIE.  —  p.  aiguë  primitive,  -t  8i6!fES  phtsiques. 

quelquefois  aux  deux  temps,  mais  plus  souvent  à  rinspiration,  surtout  à 
la  fin. 

La  pression  du  doigt  sur  différents  points  de  la  poitrine  peut  servir 
soit  à  éveiller  une  sensibilité  qui  ne  se  manifestent  pas  spontément,  soit 
à  exagérer  un  point  de  côté  peu  marqué. 

La  palpation  fait  encore  estimer  d'une  fagon  prompte  et  nétmnoinii 
assez  exacte,  le  degré  d^ampliation  anormale  de  la  poitrine,  surtout 
dans  le  sens  antéro-postérieur  :  en  appliquant  une  main  à  plat  sur  le  de- 
Tant  de  la  poitrine,  et  Fautre  en  arrière,  on  constate  Taugmentation  de 
volume  du  côté  malade,  comme  à  l'aide  d'une  sorte  de  compas  d'é- 
paisseur. Ce  procédé,  assez  grossier  en  apparence,  est  réellement  trèi» 
utile. 

Par  la  palpation  on  déterminera  aussi,  le  plus  souvent,  le  déplacement 
du  cœur  et  le  lieu  où  bat  sa  pointe. 

Signalons  enfin,  pour  mémoire,  la  fluctuation  intercostale,  que  Cor- 
Tisart  avait  indiquée  pour  la  péricardite,  et  que  depuis  on  a  donnée 
comme  un  signe  d'épanchement  pleural.  Trousseau  l'avait  fréquemment 
constatée  et  la  percevait  à  Taide  d'un  doigt  appliqué  dans  un  espace  in- 
tercostal pendant  qu'il  exerçait  une  percussion  légère  dans  un  espace 
Yoisin;  pour  lui  elle  n'est  pas  l'objet  d'un  doute.  Difficile  A  peitevoir 
quand  le  liquide  n'est  pas  très-abondant  et  les  espaces  intercostaux  Irâh 
dilatés.  elle  ne  se  montre  guère  que  dans  des  cas  ou  sa  présence  n'ajoute 
rien  au  diagnostic. 

Mensuration.  —  On  tire  de  la  mensuration  de  la  poitrine  des  risul- 
tats  assez  précis.  Il  faut  savoir  d'abord  que  le  périmètre  du  thorax  n'eit 
pas  égal  des  deux  côtés  :  le  droit  est  plus  étendu  que  le  gauche  de  1  i 
3  centimètres  ;  quelquefois  ils  sont  égaux,  trèsr-arement  le  rapport  est 
inverse,  et  le  côté  gauche  l'emporte  sur  le  droit.  Cet  excès,  A  Tarantage 
du  côté  droit,  tient  au  développement  plus  marqué  des  muscles  oorrespoo- 
dants  sous  l'influence  du  travail  qui  les  met  plus  souvent  en  jen.  Woillet, 
mesurant  le  thorax  chez  4i  sujets  bien  conformes,  a  trouvé  le  côté  droil 
plus  développé  chez  56,  les  deux  côtés  égaux  chez  5.  Pour  comparer  le 
périmètre  du  côté  malade  à  celui  du  côté  sain,  le  ruban  métrique  soiBl, 
et  l'on  peut  ainsi  trouver  des  différences  assez  marquées,  et  atteinunt 
6  et  môme  7  centimètres. 

Dans  le  même  but,  on  peut  encore  se  servir  du  cyrtomètre.  Fow.  t.X, 
art.  Cyrtomètre,  par  Rigal.  Il  donne  en  outre  des  indications  sur  la  fona» 
et  les  diamètres  de  la  poitrine.  Les  dimensions  circonférentioUes  ne  na- 
raient  augmenter  très-notablement,  et  le  côté  malade  ne  l'emporte  janMs 
sur  l'autre  que  de  quelques  centimètres.  Mais  lorsque  la  cavité  plemia 
est  distendue  par  un  épanchcment  assez  considérable,  son  diamètre  sa» 
téro-postérieur  augmente  et  la  cage  thoracique  tend  à  devenir  cylindri» 
que,  d'aplatie  qu'elle  était,  ce  qui  augmente  sa  contenance,  les  caviUi 
sphériqucs  ayant,  à  périmètre  égal  la  capacité  la  plus  grande.  Le  cjib- 
mètre  rend  ici  de  grands  services  en  donnant  les  diamètres  vertéM* 
mammaii*e  et  vertébro-stemal  et  en  indiquant  leur  accroissement.  La 


PLEURÉSIE.  —  p.  ÀiGuë  PRIMITIVE.  —  yariétés.  179 

suration  permet  aussi  d'apprécier  le  retrait  du  thorax  après  la  résorption 
de  répanchemeQt. 

Tmriétéa.  —  Un  certain  nombre  de  pleurésies,  par  «eur  limi- 
Utian  a  un  siège  spécial,  ou  au  contraire  par  leur  généralisation, 
présentent  des  symptômes  particuliers,  mais  elles  ne  difTèrent  pas  par 
leur  nature  de  la  pleurésie  commune  à  laquelle  leur  description  doit  être 
rattachée.  Ce  sont  :  la  pleurésie  double ^  les  pleurésies  diaphragmatique , 
interlobaireeimédiastine.  D*autres  pleurésies  aiguës  se  distinguent  de  la 
foTmeooinmune  par  certaines  particularités  anatomiques,  notamment  par 
le  mode  d*enkystement  du  liquide  épanché  et  par  le  cloisonnement  de  la 
caTÎté  kystique  {pleurésie  multiloculairey  pleurésie  aréolaire).  Nous  en 
dirons  aussi  quelques  mots. 

Pleurésie  double.  —  La  pleurésie  peut  être  étendue  aux  deux  côtés  de 
la  poitrine.  Elle  n'envahit  pas  alors  en  même  temps  les  deux  plèvres  ; 
plusieun  jours  d'intervalle  séparent  souvent  les  deux  poussées  inflamma- 
toirea;  ce  sont,  le  plus  souvent,  comme  deux  pleurésies  se  développant 
isolément  et  n'ayant  pas  une  évolution  parallèle.  Tantôt  chaque  pleurésie 
donne  lien  pour  son  propre  compte  à  une  douleur  de  côté,  ou  bien  il  n'y 
.a  qa'ua  seul  point  douolureux,  ou  enfin  ce  phénomène  fait  complète- 
ment défaut;  ce  dernier  cas  est  même  plus  commun  que  dans  la  pleurésie 
unilatérale.  La  dyspnée  est  bientôt  considérable,  et  Tanxiété  très-marquée  ; 
les  symptômes  généraux  ont  une  grande  intensité,   la  violence  de  la 
-phlegmaaie    peut   développer   une    réaction  fébrile  assez    intense    et 
pour  Hooneret  la  mort  pourrait  même  survenir  avant  la  formation  d'un 
double  ^anchemcnt.  La  percussion  et  Tauscultation  donnent  les  mêmes 
résultats  que  dans  la  pleurésie  unilatérale,  mais  elles  demandent  plus  d'at- 
(entioo  et  de  soin  à  cause  de  Tabscnce  de  terme  de  comparaison.  L'épan^ 
.    chement  n'est  jamais  égal  des  deux  côtés.  La  marche  de  la  maladie  est 
plus  rapide,  elle  aboutit  plus  vite  au  dénoûment  presque  constamment 
fcmesle.  Lorsque  les  malades  guérissent,  ils  gardent,  probablement  par 
le  fait  d'adhérences,  des  troubles  souvent  très -profonds  dans  le  jeu  de 
l'appareil  respiratoire. 
La  plupart  des  pleurésies  doubles  sont  secondaires  et  se  montrent  soit 

t'  diez  le»  rhumatisants,  soit  chez  les  tuberculeux. 
Pleurésie  diaphragmatique,  —  La  plus  nette  des  pleurésies  partielles 
«  est  celle  qui  atteint  le  diaphragme  ;  elle  p^ut  coïncider  avec  l'inflamma- 
^i  tioa  de  la  séreuse  costo-pulmonaire,  dont  elle  ne  constitue  alors  qu'un 
„  -  épÎBide;  mais,  quand  la  phlegmasie  est  limitée  au  diaphragme,  les  signes 
■s  habitnels  de  la  pleurésie  font  défaut,  et  le  diagnostic  n'est  basé  que  sur 
.^  l'eiistence  des  troubles  fonctionnels  et  Tintervention  de  quelques  ^ymp- 
-y  ttmes  spéciaux. 

^^  Il  ciiste  un  mouvement  fébrile  et  les  symptômes  généraux  d'une  pieu- 
' .--  rUe  dont  aucun  signe  physique  ne  vient  révéler  le  siège  :  de  la  toux, 
g  une  dyspnée  intense  et  qui  va  jusqu'à  l'orthopnée  et  l'angoisse  respira- 
^  Iwre;  U  re^iration  est  saccadée,  convulsive  et  entrecoupée.  Les  malades 
2j{  «U  une  attitude  spécialci  ils  sont  assis  sur  leur  lit,  le  tronc  inclina  e;it 


IMO  PLFX'RÉSIE.  —  i-.  auxl  fRiviTiTc.  —  variétés. 

nvniit  ;  unn  douleur  f ife  et  ftobite  é«rlale  spontanément  dans  une  des 
triions  hypochondriaques,  s'étend  suivant  la  ligne  de  jonction  des  caiti- 
Inges  costaux,  remonte  souvent  jusqu  a  l'épaule  et  descend  Ters  le  côté 
correspondant  de  Tabdomcn  ;  elle  s*aggraTe  par  les  inspirations  profondes, 
la  toux,  les  eflorts  de  vomissement,  mais  surtout  par  la  pression  exercée 
au-dessous  du  rebord  des  fausses  côtes,  de  façon  A  refouler  en  haut  l'hy- 
pocliondrc.  La  percussion  et  Tauscultalion  sont  d'un  médiocre  secours  : 
quand  le  liquide  est  très-abondant,  il  s'accumule  au-dessus  du  diaphragme 
et  dans  le  sillon  costo-diaphragmatiqne,  à  la  base  du  poumon  adhèrest 
par  son  pourtour,  et  dont  les  parties  centrales  sont  refoulées  en  haut; 
peut-être  alors  la  percussion  pourrait-elle  limiter  une  matité  relativeéteih 
due  transversalement  à  la  base  du  thorax,  et  très-courte  dans  le  seni 
vertical,  avec  une  sonorité  exagérée  au-dessus;  mais  ce  cas  est  rare,  d*o^ 
dinaire  les  résultats  de  la  percussion  sont  nuls.  Si  l'afTeclion  siège  i 
droite,  on  peut  quelquefois  reconnaître  uu  abaissement  du  foie;  si  elle 
est  a  gauche,  la  rate  peut  être  refoulée  en  bas,  mais  c^est  là  un  fiiit 
difOcile  à  constater.  A  l'auscultation,  on  trouve  vers  la  base  de  la  poitrine 
une  diminution  du  murmure  vésiculaire  ou  un  silence  complet,  le  malade 
retenant  instinctivement  son  souffle  pour  éviter  la  douleur;  quelipiefois  on 
perçoit  vers  la  limite  inférieure  du  poumon,  un  peu  de  râle  sous-cripitanl 
dû  sans  doute  à  de  la  congestion  pulmonaire  au  voisinage  de  la  plèvn 
enflammée.  En  observant  les  mouvements  respiratoires  k  la  base  de  k 
poitrine,  on  constate  l'immobilité  plus  ou  moins  complète  de  cette  ré- 
gion ;  les  deux  mouvements  produits  par  la  contraction  du  diaphragme, 
élévation  des  dernières  côtes  et  soulèvement  de  l'épigastre  k  l'inspintioB 
n'existent  plus,  ce  qui  est  caractéristique  de  l'inertie  du  diapiuagme. 
Celle-ci  est  due  en  partie  à  l'influence  du  liquide  interposé  entre  ce 
muscle  et  la  base  du  poumon,  mais  surtout  au  trouble  vital  survenu,  sui- 
vant la  loi  de  Stokes,  dans  l'activité  fonctionnelle  de  la  fibre  contractile  : 
il  y  a  une  véritable  paralysie  du  muscle,  consécutive  à  la  phlegmasie  de  la 
séreuse  qui  le  revêt. 

N.  Guéneau  de  Mussya  appelé  Tattention  sur  quelques  signes  qui  ont  une 
grande  valeur  :  le  nerf  phrénique  est  douloureux  à  la  pression  pratiquée 
sur  les  points  accessibles  de  son  trajet,  entre  les  deux  faisceaux  inférieurs 
du  sterno-mastoïdum,  à  la  base  du  cou.  Il  y  a,  de  plus,  des  irradiations 
douloureuses  dans  le  domaine  du  plexus  cervical,  au-dessus  de  la  clavi* 
cule,  dans  la  région  scapulaire,  dans  le  moignon  de  l'épaule.  La  pressim 
dans  un  point  circonscrit  de  la  région  épigaslrique  éveille  une  douleor 
vive  et  une  angoisse  très-accusée.  Ce  point  siège  à  l'intersection  de  deu 
lignes  qui  prolongent  l'une  le  bord  eiteme  du  sternum,  l'autre  la  partie 
osseuse  de  la  dixième  côte.  Guéneau  de  Mussy  a  nommé  boiUon  diaphrê' 
gmalique  ce  point  si  nettement  limité,  dont  la  pression  fait  à  Yolonté  jaillir 
en  quelque  sorte  la  douleur.  On  trouve  quelquefois  aussi  un  point  doa- 
loureux  uu  voisinage  des  vertèbres  dorsales,  à  la  hauteur  du  dernier  espaee 
intercostal.  Un  autre  signe  des  épanchements  sus-diaphragmatique  vX 
l'abaissement,  du  côté  malade,  de  la  dernière  côte  qu'entraîne  en  bas  Ift 


j" 


PLEURÉSIE.  —  p.  AiGug  PBmiTivE.  -«  variétés.  i8i 

diaphragme  refoulé  par  le  liquide  ;  c*est  là  un  fait  habituel,  mais  non 
constant.  On  a  signalé  également  le  hoquet,  les  nausées,  les  vomisse- 
ments qui  sont  exceptionnels,  Tictère  qui  est  plus  rare  encore.  Quant 
aux  accidents  nerveux,  au  délire,  au  rire  sardonique  mentionnés  par 
les  anciens,  ils  sont  à  peine  connus  des  cliniciens  modernes. 

Les  diCférents  symptômes  que  nous  venons  d'indiquer  peuvent  faire 
complètement  défaut,  et  la  pleurésie  diaphragmalique  ne  se  trahit  alors 
par  aucun  signe.  Une  de  ses  terminaisons  possibles  est  l'ouverture  de  la 
collection  circonscrite  dans  la  grande  cavité  séreuse  ;  cette  solution  favo- 
rable, mais  trop  rare,  amène  un  soulagement  rapide  et  profond,  qui  con- 
traste d*une  façon  en  apparence  irrationnelle  avec  l'extension  de  la  pleu- 
résie. Plus  souvent  que  la  pleurésie  ordinaire,  la  pleurésie  diaphragma- 
tique  peut  entraîner  la  mort,  soit  par  ouverture  dans  la  cavité  périto- 
néale,  soît  par  les  troubles  fonctionnels  qui  se  produisent. 

.  Pleurétie  interlobaire,  médiastine.  —  Dans  la  pleurésie  interlobaire, 
ripancbement,  limité  par  des  adhérences  de  la  périphérie  des  deux  lobes 
cool^us,  les  écarte  Tun  de  Tautre  et  se  creuse  un  lit  à  leurs  dépens.  La 
pleurésie  médiastine  siège  sur  le  feuillet  pleural  qui  limite  les  médias- 
tins  et  sur  la  partie  adjacente  de  la  séreuse  pulmonaire.  Ces  deux  formes 
de  pleurésie  circonscrite,  très-rares  d'ailleurs,  ne  donnent  lieu  qu'à  des 
sjmptômes  locaux  obscurs  et  peu  tranchés.  La  pleurésie  interlobaire  peut 
ttre  quelquefois  reconnue  par  l'existence  d'une  zone  mate  et  non  vibrante 
d^geant  i  la  hauteur  de  la  scissure  du  poumon,  et  ayant  la  même  di- 
raction  qpi*elle.  Dans  la  pleurésie  médiastine,  il  existe  une  douleur  pro- 
iofode,  perçue  au  niveau  du  sternum,  et  qu'exaspèrent  fortement  les  mou- 
vemeots  respiratoires.  Toutes  les  deux  s'accompagnent  de  fièvre,  d'op- 
pression qui»  avec  la  douleur  localisée,  peuvent  les  faire  soupçonner  par 
aclusion,  lorsque  l'examen  du  péricarde  et  de  la  plèvre  n'y  accusent 
lucun  désordre.  Dans  ces  sortes  de  pleurésies  limitées,  la  pleurésie 
interlobaire  surtout,  on  voit  fréquemment  le  liquide  se  frayer  une  issue 
lu  dehors  à  travers  le  parenchyme  pulmonaire  et  être  rendu  par  expec- 
toration.  Un  bon  nombre  de  prétendus  abcès  pulmonaires  et  de  vomiques 
l'ont  pas  d'autre  origine,  et  sont  dus  à  des  pleurésies  interlobaires. 

Pleurésie  multiloculaire  aréolaire.  —  La  pleurésie   multiloculaire 
•a  pleurésie  enkystée  multiloculaire,  est  due  à  la  présence  de  cloisons 
pseado-membraneuses  qui  divisent  la  cavité  pleurale  en  grands  compar- 
timents. Cette  variété  n'est  pas  rare,  et  souvent,  après  l'évacuation  par 
l'aspirateur  d'un  épanchement  notable  ,  on  voit  la  résonnance  et  le  bruit 
véaculaire  reparaître  à  la  partie  inférieure  de  la  plèvre,  et  la  matité  per- 
sister au-dessus,  ce  qui  indique  évidemment  un  épanchement  divisé  en 
plusieurs  loges.  Les  pleurésies  cloisonnées  surviennent  chez  des  sujets 
lUeinls  antérieurement  de  pleurésies  sèches  et  adhésives  ;  celles-ci  étant 
d'ailleurs  souvent  diathésiques,  il  en  résulte  que  la  pleurésie  cloisonnée 
qûleur  succède,  a  un  pronostic  plus  sérieux  que  la  pleurésie  commune. 
5      Quant  aux  signes  de  cette  variété,  ils  sont  encore   incomplètement 
r    connus. 


182  PLEURÉSIE.  —  p,  aigoë  primitive.  —  VAUérâi. 

Le  professeur  Jaccoud,  dans  une  récente  communication  à  l'Aca- 
démie, a  signalé  deux  types  de  pleurésie  multiloculaire  »  dont  il  s'crt 
•efforcé  de  donner  les  caractères  cliniques.  Dans  une  première  forme,  on 
reconnut  à  l'aide  des  signes  ordinaires  l'existence  d'un  épaiichement 
total  ;  mais  les  vibrations  vocales,  anéanties  dans  tout  le  cBté,  persis- 
taient suivant  une  bandelette  antéro -postérieure ,  qui  décrivait  sur  la 
paroi   un   trajet  demi -circulaire.    L'éminent  observateur  diflgnorticpia 
l'existence,  entre  le  poumon  refoulé  par  l'épanchement  et  la  [Miroi  tho- 
racique,  d'une  cloison  tendue  et  transmettant  à  celle-ci  les  vibrations 
vocales.  En  vidant  séparément  les  deux  loges,  dont  le  contenu,  séreux 
dans  l'une,  était  purulent  dans  l'autre,  la  thoracentèse  vérifiée  confirma 
le  diagnostic  plus  tard  par  l'autopsie. 

Dans  un  second  type,  dont  il  a  observé  plusieurs  cas,  l'épanchement 

était  accusé  par  une  matité  de  pierre,  du  soufQe  bronchique,  de  la  bron- 

chophonie,  le  déplacement  des  organes  voisins,  l'absence  de  bmit  skodi- 

•que,  et  la  conservation  des  vibrations  vocales.  A  l'autopsie,  cloison 

transversale  complète  divisant  la  plèvre  en  deux  loges  indépendantes, 

comme  dans  la  première  forme,  et  de  plus,  brides  nombreuses  tendues 

entre  le  poumon  et  la  paroi  thoracique,  mais  ne  cloisonnant  pas  les 

loges.  Pour  Jaccoud,  ces  dispositions  anatomiqucs  expliquent  l'ensemble 

des  symptômes  :  l'épanchement  abondant  refoule  le  poumon  autant  que 

le  permet  la  présence  de  la  cloison  et  des  brides  fibreuses;  eh  raison  de 

leur  tension,  celles-ci  vibrent  facilement,  et  transmettent  à  la  paroi  les 

bruits  bronchiques,  souffle  et  voix;  elles  communiquent  au  thorax  leur 

frémissement,  et  comme  elles  sont  nombreuses,  toute  la  paroi  vibre,  d'où 

fremitus  vocal  conservé.  Comme  les  adhérences  occupent  le  poumon  da 

haut  en  bas,  le  lobe  supérieur  ne  peut  être  refoulé  au  contact  du  thonur 

en  avant,  ce  qui  explique  l'absence  de  bruit  skodique.  Dans  la  diseoSBion 

provoquée  par  cette  communication   si   intéressante,    Houtard-Mutin, 

Maurice  Raynaud  et  Woillez,  ont  contesté  la  légitimité  de  ces  condo- 

sions  fort  ingénieuses,  mais  qui  attendent  des  faits  une  confirmation  ploi 

complète. 

Un  troisième  type  de  pleurésie  cloisonnée  a  été  indiqué  par  Moutard- 
Martin  :  avec  tous  les  signes  d'un  épanchement  abondant  qui  efface  les 
espaces  intercostaux  et  fait  bomber  le  côté  malade  dans  toute  son  éten- 
due, l'attention  est  appelée  sur  une  saillie  considérable  de  la  région  anté- 
rieure du  thorax,  avec  matité  absolue  sous  la  clavicule  ;  ces  signes  per- 
mettent de  reconnaître  une  pleurésie  enkystée ,  et  la  thoracentèse 
appUquée  à  la  partie  inférieure  de  la  poitrine,  en  isolant  le  kyste  supé- 
rieur, complète  le  diagnostic. 

Dans  la  pleurésie  aréolaire,  beaucoup  plus  rare,  le  liquide  est  empri- 
sonné dans  des  vacuoles  séparées  par  des  cloisons  fibrineuses  ;  l'examen 
anatomique  montre  la  poitrine  remplie  d'une  sorte  de  gelée  transparente 
(pleurésie  gélatiniforme),  constituée  par  un  nombre  infini  de  vacuolei 
pleines  de  sérosité  fluide.  L'exsudat  ressemble  alors  au  tissu  cellulaire 
largement  infiltré  de  liquide.  Un  épanchement  inflammatoire  infiltré  an 


PLEURÉSIE.  —  p.  AIGUË  PBmiTivE.  —  marche.  i83 

nssea  membranes  anciennes,  dues  à  une  pleurésie  antérieurei 
tir  le  même  aspect. 

signe  clinique  ne  caractérise  la  pleurésie  aréolaire  ;  on  peut 
l  la  reconnaître  par  la  thoracentèse,  qui  ne  fournit  qu'une 
[aanlité  de  liquide.  Si  Ton  fait  alors  varier  la  position  de  la 
oit  en  l'enfonçant)  soit  en  lui  imprimant  des  mouvements  de 
,  on  voit  reparaître  quelques  gouttes  de  sérosité,  et  l'on  perçoit 
une  sorte  de  crépitation  fine  due  à  la  rupture  des  cloisons. 
lostic  de  la  pleurésie  aréolaire  est  un  peu  plus  sérieux  que  celui 
irésie  commune,  parce  que  sa  thérapeutique  n'a  rien  à  espérer 
oi  de  la  thoracentèse,  qui  reste  sans  résultats, 
he,  tenninaiBÔns,  complicsatioiis.  —  L'évolution  de  la 
comprend  trois  phases  distinctes  :  la  période  de  début,  celle 
4'épnchement,  celle  de  résorption. 

ut  est  nettement  établi  par  l'apparition  des  symptômes  généraux  et 
iflsfonctionnels,  par  les  petits  frissons  répétés,  la  fièvre,  la  toux,  la 
5t  la  douleur  de  côté.  Ces  diverses  manifestations  sont  d'ordinaire 
im  ;  quelquefois  les  signes  locaux  précèdent  de  quelques  heures 
D  fébrile.  Plus  rarement  les  troubles  fonctionnels  font  défaut,  la 
•t  seulement  annoncée  par  une  fièvre  légère  ;  souvent  même  chez 
rds,  il  n'y  a  qu'un  lé^cr  délire  et  de  la  sécheresse  de  la  langue. 
ot  l'exploration  à  Taide  des  signes  physiques  reste  complètement 
ily  a  bien,  à  i*orcille,  un  peu  de  faiblesse  du  bruit  respiratoire, 
elle  tient  seulement  à  ce  que,  pour  éviter  la  douleur,  le  malade 
istioctivement  sa  respiration.  La  durée  de  cette  période  initiale 
mirte  ;  bientôt,  en  même  temps  que  persistent  les  symptômes 
L*  et  les  troubles  fonctionnels,  Texistence  de  l'épanchement 
Use.  Quelquefois,  nous  Tavons  vu,  on  perçoit  avant  son  appa- 
léger  frottement  dû  au  glissement  des  deux  plèvres  dépolies  par 
t  exsudât  fibrineux.  Si  Ton  peut  surprendre  à  son  début  Tappari- 
i  matité,  on  la  trouve  d'abord,  le  malade  étant  assis,  à  la  partie 
B  de  la  gouttière  vertébrale,  au-dessus  de  la  douzième  côte; 
bis  à  la  partie  latérale  du  thorax.  Dans  ce  point,  indiqué  par  Da- 
il  y  a  d'abord,  en  bas  et  en  arrière,  de  l'obscurité  du  son  qui  re- 
a  à  peu,  et  devient  en  bas  de  la  véritable  matité.  A  ce  niveau, 
ions  vocales  sont  diminuées;  le  liquide  s'élève  graduellement,  et 
de  la  matité,  son  degré,  la  résistance  au  doigt  qui  percute,  permet- 
■acer  assez  nettement  la  marche  de  Tépanchement.  Cependant,  le 
I  vésiculaire  a  disparu  pour  faire  place  à  de  Texpiration  prolongée, 
rOe  doux  et  voilé,  il  y  a  de  Tégophonie.  Les  progrès  du  liquide 
ilors  s'arrêter  et  les  signes  physiques  persistent,  ou  bien  il  aug- 
icore,  ces  bruils  cessent  à  leur  tour,  et  quand  l'épanchement  de- 
habondant,  la  matilé  est  complète  du  haut  en  bas,  les  vibrations 
lulles,  le  silence  absolu.  La  durée  de  la  période  d'épanchement, 
1  moment  où  le  liquide  apparaît  jusqu'à  celui  où  il  commence  à 
,  est  de  quinze  à  vingt-cinq  jours. 


184  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  iubghb. 

Arrivé  à  son  point  culminant,  le  liquide  reste  stationnaire  paidant 
plusieurs  jours.  Woillez  serait  arrivé,  par  l'emploi  de  la  mensuration,  A  recon- 
naître que  la  phase  stationnaire  de  l'épancbement  est  rare,  et  que  sa 
durée,  quand  elle  existe,  n'excède  pas  un  à  deux  jours. 

Néanmoins  ce  n'est  guère  qu'au  bout  de  trois  semaines  an  moins  que 
l'auscultation  et  la  percussion  signalent  la  diminution  du  liquida.  La  ré- 
solution, d'abord  assez  rapide,  parait  se  ralentir  beaucoup  à  mesure  qu'on 
se  rapproche  des  couches  inférieures  de  l'exsudat  qui  contiennent  une 
plus  forte  proportion  de  fibrine,  et  dans  certains  cas,  elle  s'arrête  com- 
plètement, et  cesse  pendant  plusieurs  jours  de  faire  des  progrès.  A  mesure 
que  l'épancbement  baisse,  la  sonorité  et  le  murmure  v^iculaire  réparai»* 
sent  du  haut  en  bas.  On  trouve  souvent  alors,  nous  l'avons  tu,  une  apho- 
nie de  retour,  beaucoup  moins  nette  que  celle  du  début.  On  perçoit  alors 
aussi  le  frottement  qui  répond  à  des  points  où  le  liquide  a  complètement 
disparu.  La  résolution  de  la  pleurésie  a  une  durée  qui  Tarie  entre  trois 
et  six  semaines.  Chez  les  enfants,  la  marche  est  rapide,  la  guérison 
prompte,  et  la  durée  totale  de  la  maladie  est  de  7  à  15  jours. 

Telle  est  la  marche  habituelle  de  la  pleurésie  ;  on  en  suiTra  aisément 
les  phases  en  obserrant  attentivement  les  signes  physiques.  Les  troubles 
fonctionnels  seront  d'un  moindre  secours,  car  ils  ne  sont  pas  toujours  soli- 
daires de  l'état  local;  la  fièvre  notamment  est  loin  d'avoir  une  érolutîoD 
parallèle  à  celle  de  la  phlegmasie  pleurale.  La  pleurésie  n'a  pas,  comme  h 
pneumonie,  une  marche  cyclique  ;  dans  celle-ci,  on  sait  à  peu  près  A  qad 
moment  la  fièvre  doit  tomber,  et  quand  elle  baisse  on  en  conclut  légiti- 
mement à  la  résolution  de  la  phlegmasie  lobaire  ;  dans  la  pleurésie,  la 
défervescence  est  irrégulièro  :  elle  peut  se  produire  longtemps  aTsnt  que 
l'épancbement  ait  cessé  de  croître,  souvent  même,  dans  certaines  pûu» 
résies  latentes^  l'épancbement  devient  considérable,  sans  que  la  moindrs 
réaction  fébrile  vienne  donner  l'éveil,  et  inversement  la  résorption  peut 
commencer  alors  que  la  fièvre  est  encore  très  intense.  La  déferTeseenoe 
peut  s'accompagner  de  quelques  phénomènes  critiques,  sueurs  abondantes, 
émission  d'urines  copieuses ,  mais  ces  cas  sont  exceptionnels.  Les  signes 
physiques  ont  une  bien  autre  Taleur.  Dans  quelques  cas,  néanmoins,  ni 
l'auscultation  ni  la  percussion  ne  peuvent  éclairer  sur  la  marche  de  l'épui- 
chement:  la  ligne  de  niveau  peut  baisser  alors  que  le  liquide  a  réellement 
augmenté,  elle  peut  paraître  fixe  tandis  qu'il  diminue.  Hirtz  a  signale  l'as- 
cension du  poumon  d'abord  plongé  dans  le  liquide,  puis  émergeant  à  la 
partie  supérieure,  et  donnant  lieu  à  un  abaissement  apparent  de  la  matilé. 
On  pourra  alors  tirer  quelque  parti  du  déplacement  des  viscères  ;  dans  U 
pleurésie  gauche,  si  le  cœur  déplacé  continue  à  marcher  vers  la  droite,  s'il 
s'arrête  dans  sa  migration  ou  revient  graduellement  vers  sa  place  normale, 
on  saura  que  le  liquide  augmente,  qu'il  reste  stationnaire  ou  qu'il  dimi- 
nue. Pour  la  pleuréiiie  droite,  Damoiseau  avait  voulu  faire  du  bord  înié- 
rieur  du  foie  un  point  de  repère  propre  à  indiquer  les  variations  duliquide,^ 
suivant  que  l'organe  descend  vers  l'abdomen  ou  remonte  vers  le  thorax; 
mais  ces  déplacements  n'ont  rien  de  constant  ni  de  régulier. 


PLEURÉSIE.  —  p.  AiGui  primitive.  — >  tebminaisons.  185 

En  faisant  appel  à  tous  les  modes  d'exploration,  en  observant  attenti- 
vement les  phénomènes  généraux  et  locaux,  il  sera  d'ordinaire  aisé  de 
suivre  la  marche  de  l'exsudat.  Il  se  présente  néanmoins  des  cas  très  dif- 
ficiles, où  le  médecin  est  dans  l'impossibilité  presque  absolue  de  recon- 
naître dans  quel  sens  marche  Tépanchement;  lorsque,  par  exemple,  le 
oooche  liquide,  complètement  enkystée,  varie  seulement  d'épaisseur,  ou 
bien  quand  la  matité  complète  et  absolue  occupe  toute  la  cavité  pleurale. 
Dans  ces  cas,  il  est  évident  que  la  percussion  et  l'auscultation  seront 
muettes,  et  que  le  liquide  pourra  augmenter,  sans  que  les  signes  physiques 
entrahissenirien.  Woillez  recommande  en  pareil  cas  la  mensuration  à  l'aide 
du  cyiiomètre.  Ce  moyen  de  diagnostic  est  quelquefois  utile,  mais  il  est 
souvent  impuissant  comme  les  autres  ;  il  exige  d'ailleurs  une  habileté 
de  main  qu'on  ne  peut  acquérir  qu^après  une  longue  pratique,  pour  prix 
de  laquelle  on  n* obtient  souvent  que  des  résultats  peu  certains.  Néanmoins, 
1* emploi  du  cyrtomètre,  en  signalant  l'accroissement  des  diamètres  antéro- 
poelérieors  du  thorax  (diamètres  vertébro-sternal  et  vertébro-mammaire) 
indiquera  souvent  une  augmentation  du  liquide  absolument  inappréciable 
par  d'autres  moyens.  L'emploi  du  simple  ruban  gradué  rendra  aussi, 
quelques  services  en  pareil  cas. 

La  pleurésie  aigûe  peut  se  terminer  par  la  guérison  ;  elle  peut  aboutir  à 
Tétai  chronique,  ou  entraîner  la  mort. 

La  pleurésie  franche  développée  chez  un  sujet  sain  et  robuste  se  termine 
communément  par  la  guérison.  La  résorption  peut  être  alors  complète,  et 
l'on  voit  reparaître  la  sonorité  et  le  murmure  vésiculaire  du  haut  en  bas 
jusqu'à  la  limite  inférieure  du  poumon.  Quelquefois,  mais  rarement,  la 
guérison  est  précédée  de  phénomènes  critiques,  sueurs,  diarrhées,  urines 
abondantes  ;  on  a  même  signalé  des  métrorrhagies.  Quand  la  maladie  a 
été  très-intense,  ou  que  la  résolution  se  fait  moins  activement,  il  reste  à 
la  base  de  la  poitrine,  en  arrière,  un  peu  de  submatité  et  d'obscurité  du 
murmure  vésiculaire,  et  ces  modifications  peuvent  persister  durant  des 
moia  et  même  des  années.  Quelques  malades  gardent,  durant  leur  vie 
entière,  des  signes  manifestes  de  l'affection  pleurale.  Souvent,  après  la 
guérison,  ils  conservent  des  douleurs  dans  le  côté  autrefois  atteint,  ils  ne 
peuvent  faire  une  inspiration  profonde,  ni  se  livrer  à  aucun  effort.  Ces 
troubles,  qui  les  inquiètent  beaucoup,  sont  dus  à  la  présence  de  fausses 
membranes,  ou  d'adhérences  celiuleuses  qui  gênent  l'expansion  du  pou- 
mon, déjà  mal  disposé  à  se  dilater,  par  le  fait  de  la  compression  qu'il  a 


La  pleurésie  aiguë  peut  se  terminer  par  la  suppuration  et  le  passage  à 
rétat  chronique  :  c'est  là  un  dénoùment  exceptionnel  qui  se  montre  sur- 
tout dans  les  pleurésies  secondaires,  lesquelles  même  sont  quelquefois 
chroniques  d'emblée.  Après  la  chute  de  la  fièvre  et  la  résolution  de  la 
phlegmasie,  le  liquide  peut  persister  sans  aucun  autre  trouble,  consti- 
tuant ainsi  un  véritable  hydrothorax  facilement  curable  par  la  simple 
évacuation  du  liquide. 

La  mort  est  peu  commune  dans  la  forme  aiguë,  elle  peut  être  graduelle 


186  PLEURÉSIE.  —  p.  AiGufi  primitive.  —  €0]ipligatioh&. 

et  résulter  de  la  gène  progressive  de  rhéinatose,  lorsque  répanchemeot 
devient  considérable.  II  peut  se  faire  alors  que  la  paroi  thoracique»  dit» 
tendue  par  le  liquide,  ait  presque  atteint  la  limite  de  sa  dilatation  exirSinei. 
et  que  l'expansion  inspiratrice  soit  à  peine  sensible.  Une  congestion  da 
poumon  libre,  sorte  de  fluiion  collatérale,  peut  venir  augmenter  les  trou-. 
blés  de  l'hématose.  La  mort  survient  alors  par  le  fait  d^accès  d'orthopoés 
et  d'oppression  vive,  avec  anxiété  extrême.  La  quantité  de  liquide  oéoss- 
sairepour  amener  Tissue  fatale  est  très  variable  ;  on  a  rarement  yu»  toute- 
fois, la  mort  être  causée  par  un  épancbement  inférieur  à  2000  grammes* 
La  pleurésie  double,  quand  les  épanchements  remontent  très-baut,  domis 
lieu  à  ces  désordres  et  peut  aboutira  l'asphyxie  ;  il  en  est  de  même  de 
la  pleurésie  diaphragmatique, 

La  mort  peut  arriver  subitement,  même  dans  le  cours  d'une  pleurésie 
d'apparence  bénigne  :  tantôt  la  quantité  du  liquide  a  augmenté  subite- 
ment jusqu'à  produire  l'asphyxie  ;  plus  souvent  l'issue  funeste  est  due  à. 
une  déplacement  extrême  et  à  la  compression  du  coeur  et  des  gros  vais»: 
seaux.  En  pareil  cas,  on  a  expliqué  la  mort  par  une  syncope,  ee  qui  est 
exceptionnel,  et  Ton  a  exagéré  l'influence  du  déplacement  du  cœur  sur 
la  production  de  la  syncope. 

Ce  déplacement  du  cœur  agit  surtout  par  les  troubles  de  circulation 
qu'il  entraîne  :  les  gros  vaisseaux  de  la  base  subiraient  une  certaine 
torsion  ;  Chomel  a  insisté  sur  cette  torsion  des  gros  vaisseau,  dont  il 
d  tout  au  moins  exagéré  l'importance;  le  cœur  est  gêné  dans  ses  mou- 
vements, il  en  résulte  la  formation  de  caillots  ventriculaires,  ces  caiUels 
peuvent  se  prolonger  dans  l'artère  pulmonaire,  et  entraver  l'hématoss,: 
ou  bien,  détachés,  ils  donnent  lieu  à  des  embolies  pulmonaires  prcmiple- 
ment  mortelles.  C'est  principalement  dans  la  pleurésie  gauche,  aTec  torle 
projection  du  cœur  à  droite,  qu'on  voit  se  former  ces  caillots.  Les  mêmes 
désordres  peuvent  être  l'effet  de  la  pleurésie  droite.  Blachez  a  démoutré 
la  coagulation  du  sang  dans  la  branche  de  l'artère  pulmonaire  deisev*- 
vant  le  poumon  comprimé,  coagulation  probablement  due  à  la  la  gtee  ds: 
la  circulation  dans  ce  viscère.  Cette  thrombose  d'une  branche  de  rartin* 
pnlmonaire  peut  s'étendre  au  tronc  principal  et  de  là  à  la  branche  nffo^ 
sée.  On  a  signalé,  mais  plus  rarement,  des  caillots  des  cavités  gauches  Âmf. 
nant  lieu  à  des  embolies  cérébrales.  La  formation  des  caillots  cardiafoes 
peut  être  diagnostiquée  chez  les  enfants  à  l'aide  des  troubles  de  la  eûreu* 
lation,  de  l'irrégularité  du  pouls,  de  la  dyspnée,  de  la  jactitation,  qu'ils 
déterminent  (Labric).  Maurice  Raynaud  a  signalé  comme  cause  de  mort 
subite  dans  les  pleurésies  à  exsudât  abondant,  la  dégénérescence  graisseuse 
du  cœur.  La  péricardite  est  une  complication  funeste,  et  qui  semble  d^ 
terminer  la  mort  plus  hâtivement  que  toutes  les  autres.  La  mort  subits 
peut  encore  être  TelTet  de  l'évacuation  spontanée  ou  curative  de  répan<' 
chement:  quand  il  est  expulsé  sous  forme  de  vomique,  ce  qui  du  reris 
est  l'exception  dans  les  formes  aiguës,  et  arrive  surtout  dans  la  pleuréni 
purulente,  le  liquide  peut  envahir  les  voies  aériennes  avec  une  telle  alMNk 
dance  qu'il  entraine  une  prompte  suffocation.   D'autre  part,  dans  11 


PLEURÉSIE.   —   p.    AIGOÉ   PRIMITIVE.    —  DUGNOSTIC.  187 

thoracentèse  comme  nous  le  verrons  plus  loin,  on  peut  voir  se  produire 
des  congestions  et  des  apoplexies  pulmonaires  par  le  fait  de  la  soustraction 
trop  rapide  et  trop  complète  du  liquide  épanche. 

Noos  Tenons  de  signaler,  à  propos  des  terminaisons,  un  certain  nom- 
bre de  complications  redoutables,  pouvant  amener  la  mort  :  syn- 
cope, caillots  cardiaques,  dégénérescences  graisseuses  du  myocarde, 
embolies  veineuses,  etc.  En  dehors  de  ces  accidents,  heureusement  rares, 
h  pleurésie  franche  s'accompagne  rarement  de  complications  impor- 
tentes.  Cependant  Potain  a  insisté  sur  la  fréquence  de  la  congestion  pul- 
monaire, non-seulement  du  côté  sain,  mais  dans  le  poumon  malade.  La 
pneumonie  consécutive  à  la  phlegmasie  pleurale  est  une  maladie  très- 
rare,  et  bien  distincte  de  la  pleuro-pneumonie  où  la  pneumonie  est  l'af- 
feclîon  primitive. 

La  pleurésie  gauche  se  complique  quelquefois  de  péricardite,  accident 
grave  en  pareil  cas,  puisqu'il  a,  dans  quelques  exemples,  entraîné  là 
mort.  Mais,  quand  les  deux  affections  coïncident,  elles  sont  bien  plus  sou- 
vent l'expression  commune  de  la  diathèse  rhumatismale. 

La  pleurésie  est  une  complication  très-fréquente  de  la  tuberculose,  le 
rapport  inverse,  s'il  est  possible,  est  bien  difficile  à  démontrer.  A  peine 
peut-on  regarder  comme  une  complication,  la  douleur  qui,  chez  certains 
malades,  persiste  dans  le  côté  affecté  longtemps  après  la  guérison.  Cette 
douleur  que  la  pression  n'augmente  pas,  parait  profonde,  et  serait  due, 
d'après  Woillez,  à  l'existence  d'adhérences  pleurales.  Une  complication 
bien  lointaine  de  la  pleurésie,  indiquée  par  Barth,  est  la  dilatation  des 
bronches,  qui  coïncide  trop  fréquemment  avec  les  adhérences  pleurales 
pour  qa*il  n*y  ait  pas  là  un  rapport  de  cause  à  effet. 

Afai^aostle.  —  Nous  avons  insisté  sufQsamment  pour  n'avoir  pas  à 
y  revenir,  sur  les  signes  qui  distinguent  la  pleurésie. 

Au  début,  on  n'observe  que  des  symptômes  fonctionnels,  lesquels, 
pour  si  complets  et  si  accusés  qu'on  les  suppose,  n'ont  rien  qui  carac- 
térise spédalement  une  pleurésie  et  peuvent  tout  aussi  bien  signaler 
l'invasion  d'une  pneumonie  ou  d'une  congestion  pulmonaire.  Le  frotte- 
ment prémonitoire  qui  précède  l'apparition  du  liquide  aurait  plus  de 
valeur,  mais  il  n'existe  que  rarement  et  l'on  devra,  pour  se  prononcer, 
attendre  la  formation  de  Tépanchement.  Celui-ci  est  particulièrement 
indiqué  par  la  matité,  l'absence  de  vibrations  vocales,  dans  quelques  cas 
par  le  déplacement  du  liquide  appréciable  à  la  percussion,  par  la  fai- 
blesse oa  l'absence  du  murmure  vésiculaire  avec  ou  sans  souffle  bron- 
chique, par  les  modifications  de  la  résonnance  vocale,  egophonie  ou 
broncho-egophonie.  Aucun  de  ces  signes  n'est  pathognomonique,  aucun 
n'est  absolument  propre  à  la  pleurésie,  leur  ensemble  seul  permet  d'être 
affirmatif,  et  comme  ils  sont  loin  d'être  toujours  réunis,  le  diagnostic 
est  quelquefois  embarrassant.  Toutefois  deux  signes  ont  une  valeur 
presque  décisive  ce  sont  l'egophonie  et  l'absence  des  vibrations  vocales. 
Certaines  pleurésies  restent  absolument  latentes,  et  malgré  la  présence 
d'un  épanchement  abondant,  le  son  de  percussion  reste  clair  et  l'auscul- 


188  PLEURÉSIE.  —  p.  aigué  primitive.  —  dugrostic. 

talion  fait  entendre  le  bruit  respiratoire.  Choroel  expliquait  cette  ano- 
malie en  invoquant  la  transmission  des  bruits  pulmonaires  par  le  liqmdc 
épanché.  Woillez  qui  en  a  rapporté  six  observations,  explique  les  anoma- 
lies de  l'exploration  physique  par  une  condition  anatomique  commune  à 
tous  ces  cas  :  condensation  du  poumon  refoulé  par  le  liquide  épanché  et 
adhérence  de  Torgane  aux  parois  thoraciques  dans  une  étendue  variable. 
Ces  cas  sont  des  raretés  pathologiques  et  d'ordinaire  on  arrive  plus  ou 
moins  facilement  à  reconnaître  la  présence  du  liquide. 

La  pleurésie  étant  reconnue,  il  importe  d'être  fixé  sur  la  proportion  du 
liquide;  on  aura  égard  alors  à  l'étendue  de  la  matité,  à  la  nature  des 
signes  stéthoscopiques,  egophonie,  souffle,  au  degré  de  la  dyspnée,  au 
déplacement  plus  ou  moins  marqué  des  viscères,  aux  données  fournies 
par  la  mensuration  simple  et  par  la  crytométrie.  Nous  avons  vu  que 
l'étendue  de  la  matité  est  loin  d'avoir  une  valeur  absolue  pour  indiquer 
l'abondance  de  Tépanchement,  une  petite  quantité  de  liquide  disposée 
sous  forme  de  lame  entre  les  feuillets  pleuraux  pouvant  simuler  un 
épanchement  volumineux,  alors  que  le  liquide  accumulé  en  grande 
quantité  à  la  base  du  poumon  qu'il  a  refoulée  donnera  une  matité  res- 
treinte. 

Le  diagnostic  des  pleurésies  partielles  interlobaires  et  médiastines  est  le 
plus  souvent  impossible  ;  quant  à  la  pleurésie  diaphragmatique  elle  sera 
soupçonnée  bien  moins  à  l'aide  des  signes  physiques  dont  la  signification 
est  assez  vague,  que  d'après  les  caractères  de  la  douleur  et  la  grayité  des 
troubles  généraux  et  fonctionnels. 

La  pleurésie  et  la  pneumonie  ont  en  commun  de  nombreux  traits  de 
ressemblance,  et  la  confusion,  presque  nécessaire  avant  l'emploi  de  la 
percussion  et  de  l'auscultation,  alors  que  le  médecin   n'avait  d'autre 
guide  que  l'étude  des  troubles  fonctionnels   et  de   l'état  général,  est 
aujourd'hui  encore  quelquefois  difficile  à  éviter.  Sans  doute,  en  comparant 
l'un  à  l'autre  des  cas  bien  nets  de  pleurésie  et  de  pneumonie,  on  ne 
trouvera  pas  l'hésitation  possible,  et  il  suffira  d'observer,  d'une  part 
'egophonieet  l'absence  de  frémissement  vocal,  de  l'autre  les  râles  crépi- 
tants et  les  crachats  rouilles  pour  prononcer  à  coup  sûr.  Mais  si  les  signes 
importants  font  défaut  de  part  et  d'autre,  on  peut  se  trouver  en  présence 
d'une  affection  caractérisée  seulement  par  de  la  matité  et  du  souffle,  signes 
communs  à  l'épanchemenl  et  à  l'hépatisation.  En  pareil  cas  l'on  dem 
analyser  avec  soin  les  différents  signes  généraux  et  locaux;  les  symptômes 
communs  aux  deux  maladies  n'ont  pas  des  caractères  identiques,  ils  sort  ■; 
séparés  par  des  dissemblances  marquées,  ou  tout  au  moins   par  des  1) 
nuances.  La  matité,  absolue,  sans  élasticité  dans  la  pleurésie,  est  bien  || 
moins  complète  au  niveau  d'une  hépatisation.  Les  qualités  du  souffle  sont 
différentes  dans  les  deux  cas  :  voilé  doux  et  lointain  dans  la  pleurésie,  il 
est  rude,  tubaire,  sous  l'oreille  dans  la  pneumonie  ;  on  le  rencontre  bien  plus 
fréquemment  dans  celle-ci  que  dans  la  première,  ou  l'on  ne  trouve  souvcri 
que  du  silence  respiratoire,  de  sorte  que  l'absence  de  souffle  au  nivem  |* 
d'un  foyer  de  matité  est  une  présomption  en  faveur  de  l'épanchement.  U 


PLEURÉSIE.   p.    AIGUfi    PRIMITIVE.    —    DIAGNOSTIC.  189 

toux,  rare  dans  la  pleurésie,  est  fréquente  et  pénible  dans  la  pneumonie  ; 
dans  cette  dernière  le  frisson  initial  est  unique  et  d'une  grande  violence, 
au  début  de  la  pleurésie,  il  n'y  a  d'ordinaire  que  de  petits  frissons  peu 
intenses  et  qui  reyiennent  à  plusieurs  reprises;  passé  les  premiers  jours, 
ia  fièTre  est  légère,  l'état  général  peu  ébranlé,  le  faciès  à  peine  altéré 
cha  les  pleurétiques,  dans  la  phlegmasie  pulmonaire  la  température 
élevée  au  début  persiste,  le  pouls  reste  fréquent,  les  traits  sont  altérés, 
ils  portent  l'empreinte  d'une  anxiété  quelquefois  assez  vive.  Les  phéno- 
mènes sympathiques,  rares  dans  la  pleurésie,  sont  très-communs  dans  la 
pneumonie.  On  devra  aussi  tenir  compte  de  l'étendue  de  la  lésion 
oompaiée  à  l'état  général  :  un  soufDe  étendu  coïncidant  avec  un  état 
général  peu  sérieux  est  favorable  à  l'hypothèse  d'une  pleurésie,  une  hépa- 
tisation  aases  considérable  n'étant  guère  admissible  sans  un  retentisse- 
ment marqué  sur  l'économie.  Si  avec  ce  soufDe  étendu  on  ne  trouve  pas 
des  râles  on  sera  porté  à  croire  à  une  pleurésie,  car  une  hépatisationpul- 
inonaire  d'une  certaine  importance  ne  peut  guère  être  au  même  degré 
dans  tous  ses  points . 

Dans  quelques  cas  de  pleurésie  non  enkystée,  le  niveau  du  liquide 
varie  a^ec  la  position  donnée  au  malade.  Enfin  une  matité  limitée  à  sa 
partie  supérieure  par  une  courbe  parabolique  indique  un  épanchement, 
la  matité  pneumonique  ne  pouvant  rien  offrir  d'analogue.  Il  n'est  pas 
jusqu'à  ri^e  du  malade  qui  ne  vienne  aider  au  diagnostic,  la  pneu- 
monie étant  très-commune  chez  les  vieillards,  et  la  pleurésie,  au  contraire, 


Qnekpiefois  les  deux  affections  sont  réunies  :  dans  le  cas  le  plus  commun 
il  8*agit  d'une  pneumonie  plus  ou  moins  considérable  qui  atteint  la  surface 
du  poumon,  et  donne  lieu  alors,  tantôt  à  une  pleurésie  sèche,  tantôt,  et 
c'est  le  cas  ordinaire,  à  un  léger  épanchement;  la  pneumonie  reste  alors 
TafTeetion  principale  et  la  pleuro-pneumonie  est  presque  toujours  une 
pneumonie  avec  pleurésie  accessoire  et  d'une  importance  secondaire.  Ce- 
pendant on  rencontre  des  cas  mixtes  où  pleurésie  et  pneumonie  ont  une 
Taleur  sensiblement  égale  ;  si  la  pneumonie  occupe  la  partie  supérieure, 
le  diagnostic  n'offrira  aucune  difficulté,  on  trouvera  à  la  base  les  signes 
de  répanchement,  et  au-dessus  ceux  de  Thépatisation.  Loraque  la  lésion 
pleurale  wm  au  même  niveau  que  l'induration  pulmonaire,  les  râles  cré- 
pituto  seront  masqués  par  l'épanchement ,  les  vibrations  thoraciques 
milles,  le  retentissement  vocal  aura,  il  est  vrai,  le  timbre  broncho-ego- 
phonique,  le  soufOe  sera  peut-être  plus  rude  et  plus  intense  que  dans 
«me  simple  jpleurésie,  mais  en  l'absence  des  crachats  rouilles,  on  n'en 
sora  pas  moins  dans  un  grand  embarras. 

Woillez  signale  une  cause  d'erreur  dont  nous  avons  constaté  récem- 
ment rexistence  :  on  peut  trouver  sous  la  clavicule  une  respiration 
Inuyante,  du  souffle  véritable,  de  la  bronchophonie,  et  croire  à  l'existence 
en  ce  point  d'un  noyau  d'hépatisation  ;  souvent  la  percussion  donne  à  ce 
niyeaa  de  la  submatité.  L'absence  de  râles  crépitants,  même  en  faisant 
tousser  le  malade,  la  rareté  de  la  toux  qui  est  sèche  ou  savfô  ex^^^Vû- 


190  PLEURESIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  diagnostic. 

ration  caractéristique,  l'absence  d^un  état  fébrile  en  rapport  avec  une 
hépatisation,  exclueront  la  pneumonie.  Woillez  attribue  ces  phéno- 
mènes au  refoulement  du  poumon  vers  le  sommet  de  la  poitrine,  par 
répanchement. 

Quand  Tépanchement  est  compliqué  de  bronchite  on  pourrait  prendre 
les  râles  que  l'on  perçoit  obscurément  à  travers  le  liquide  et  quelquefois 
avec  du  souille,  pour  une  pneumonie  mal  caractérisée,  mais  on  recon- 
naîtra que  les  râles  existent  des  deux  côtés,  et  d'ailleurs  il  n'y  aura  pa» 
de  crachats  rouilles. 

La  congestion  pulmonaire  simple,  ou  celle  qui  accompagne  le  début 
des  fièvres  éruptives  pourront  prêter  à  la  confusion.  Dans  ces  cas»  en  effet, 
on  trouve  un  point  de  côté,  de  la  toux,  de  l'obscurité  du  son  de  percussion, 
de  la  faiblesse  du  bruit  vésiculaire,  de  l'expiration  prolongée  ou  même 
du  souffle  ;  mais  dans  l'hyperémie,  la  sonorité  est  diminuée  sans  être  abolie, 
a  matité  est  moins  étendue,  elle  est  fixe  et  ne  se  déplace  jamais  dim 
les  changements  d'attitude  imposés  au  malade,  ainsi  qu'il  arrive  par- 
fois dans  la  pleurésie  ;  les  vibrations  thoraciques  sont  ici  parfois  légèremeot 
atténuées,  d'ordinaire  elles  sont  augmentées,  tandis  qu'elles  sont  nulles 
dans  répanchement  pleural.  A  l'oreille,  le  murmure  vésiculaire  est  faible, 
l'expiration  prolongée;  quelquefois  il  existe  du  souffle  inspiratoire  sur- 
tout au  niveau  de  la  racine  des  bronches,  ce  souffle  est  doux  et  grave,  y 
est  plus  précoce  que  celui  de  la  pleurésie.  11  n'est  pas  rare  de  peroeioir 
des  râles  fins  qu'on  peut  prendre  pour  du  frottement.  Il  n'y  a  pas  d*ego- 
phonie,  mais  un  retentissement  léger  de  la  voix.  Ces  signes  peuvent  reitef 
stationnaires,  puis  tout  à  coup,  soit  spontanément,  soit  par  le  fiut  do 
traitement,  ils  disparaissent  en  quelques  heures.  Dans  la  congestion,  li 
toux  s'accompagne  d'une  expectoration  qui  ressemble  à  une  solutûn  de 
gomme  ;  elle  est  sèche  et  sans  crachats  dans  la  pleurésie. 

La  bronchite  ne  pourra  guère  être  prise  pour  une  pleurésie,  maigri  li 
fièvre,  la  toux,  et  la  pleuroJynie  que  lorsqu'elle  sera  précédée  de  conges- 
tion pulmonaire. 

L'hydrothorax  donne  les  mêmes  signes  physiques  que  répanchement 
inflammatoire,  mais  il  est  d'ordinaire  double  et  coïncide  avec  d'auUet 
hydropisies  qui  reconnaissent  la  même  origine  que  celle  du  thorax;  l'h}- 
dropisie  pleurale  est  mobile  et  son  niveau  varie  quand  le  malade  change 
d'atitude.  D'ailleurs  l'hydrothorax  est  toujours  secondaire,  en  remontant 
dans  les  antécédents  du  malade  on  n'y  retrouve  pas  les  symptômes  du 
début  brusque  de  la  pleurésie,  et  en  l'examinant,  on  rencontre,  soit  une 
affection  du  cœur,  soit  un  mal  de  Bright,  soit  une  altération  du  sang 
qui  explique  Tépanchemcnt  pleural. 

Les  tumeurs  de  la  cavité  thoracique  ont  une  marche  chronique  qui  ne 
permet  guère  d'hésiter  ;  cependant  une  ncoplasie  lentement  développée 
peut  se  trahir  tout  d'un  coup  avec  éclat  par  des  symptômes  aigus  qui 
appellent  l'examen  de  la  poitrine,  l'erreur  sera  alors  quelquefois  di£Sale 
à  éviter.  Mais  la  tumeur  n'a  pas  des  contours  réguliers,  et  la  matité  qn 
Ini  correspond  n'est  pas  limitée  supérieurement  par  une  ligne  de  oiven 


PLEURÉSIE.    —  p.    AIGUg  PRIUITPE.    —  DIAGNOSTIC.  191 

horizontale  ou  par  une  courbe,  elle  reste  fixe  malgré  les  mouvements 
imprimés  au  thorax.  La  sonorité  et  le  murmure  yésiculaire,  qui  manquent 
au  nWeau  de  la  tumeur  peuvent  se  retrouver  dans  les  parties  déclives 
à  la  base  du  poumon.  Aucun  de  ces  signes  n'est  absolu,  car  des 
adhérences  peuvent  limiter  le  liquide  aux  parties  supérieures  en  laissant 
libres  les  points  déclives,  mais  les  vibrations  thoraciques  sont  alors 
perdues  au  niveau  du  liquide,  elles  sont  au  contraire  normales  ou 
accrues  dans  les  cas  d  une  tumeur;  celle-ci,  en  refoulant  les  organes 
thoraciques,  en  amène  le  déplacement  ou  la  compression,  et  Ton  trouve 
des  ectopies  du  cœur,  des  signes  de  compression  des  troncs  veineux  ou 
artériels,  des  bronches,  des  différents  cordons  nerveux. 

Ces  tmneurs  peuvent  prendre  naissance  en  dehors  du  la  poitrine  et 
venir,  en  se  développant,  faire  saillie  dans  sa  cavité,  ainsi  que  cela  arrive 
ponr  les  tomenrs  du  foie,  son  hypertrophie  et  surtout  les  kystes  hydati- 
qoes.  Le  kyste  peut  alors  être  fortement  refoulé  dans  la  cage  thoracique, 
et  remonter  très-haut  jusqu'à  la  quatrième,  la  troisième  côte,  ou  même 
jusqu'à  la  clavicule,  en  repoussant  le  poumon  ;  la  compression  peut 
détruire  ^dnellement  les  fibres  du  diaphragme  dont  la  perforation 
livre  passage  à  la  tumeur.  On  trouve  alors  à  l'auscultation  et  à  la  percus- 
sion les  signes  physiques  d'un  épanchement  pleural.  Mais  en  pareil  cas, 
les  accidents  ont  d'abord  été  purement  abdominaux,  leur  marche  est  très- 
lente,  Télat  général  a  été  longtemps  indemne.  La  matité  thoracique  a  une 
forme  spéciale  à  limite  supérieure  fortement  convexe  en  haut,  de  telle 
sorte  qa*à  ses  parties  supérieures  et  latérales  on  retrouve  la  résonnance 
pDlmonaire.  La  matité  peut  être  complète  au  voisinage  du  rachis,  et 
cesser  sor  les  parties  latérales  du  côté  droit,  ou  bien  au  contraire  occupant 
ce  denier  jpoint,  disparaître  au  voisinage  de  la  colonne  vertébrale,  près 
de  laquelle  on  retrouvera  la  sonorité  et  le  bruit  respiratoire;  son  niveau 
est  immobile  et  ne  varie  pas  en  inclinant  le  thorax  en  divers  sens  ;  ces 
caractèresplessimétriques peuvent,  on  le  conçoit,  appartenir  à unepleurésie 
enkystée,  mais  ce  cas  est  peu  fréquent  ;  d'ailleurs  dans  les  kystes  hydati- 
ques  la  matité  se  continue  inférieurement  et  sans  ligne  de  démarcation 
apprééiable  avec  celle  du  foie,  lequel  est  très-abaissé .  La  partie  inférieure 
de  lar  paroi  thoracique,  au  niveau  des  fausses  côtes  est  refoulée  en  dehors, 
et  U  poitrine  prend  dans  cette  région  une  forme  globuleuse.  Quelquefois 
on  peut,  au-dessous  du  rebord  costal  percevoir  une  fluctuation  obscure. 
Le  fiémissement  hydatique  serait  caractéristique,  mais  il  est  bien 
rare;  on  aura  enfin  la  ressource  décisive  d'une  ponction  explora- 
trice, et  l'on  trouvera  au  liquide  tous  les  caractères  de  celui  des  kystes 
hydatif(|ues  :  absence  d'albumine,  coloration  claire,  présence  de  cro- 
chets, etc. 

Dans  les  cas  d'infiltration  tuberculeuse  générale  d'un  poumon,  la 
maUté  dure  et  absolue  qui  existe  en  pareil  cas,  et  l'absence  plus  ou  moins 
complète  du  bruit  respiratoire,  peuvent  faire  songer  à  un  épanchement 
pleural.  Cette  erreur,  possible  chez  l'adulte,  se  produit  surtout  chez  les 
enfiint8;Barthez  a  rapporté  dea  cas  de  ce  genre,  ou  l'erreur  était  ^bso- 


i92  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguS  primitive.  —  PROiiosnc. 

lument  inévitable  :  dans  Tun,  le  diagnostic  ne  fut  fait  qu'à  Tautopsie  ; 
dans  un  autre,  une  ponction  fut  pratiquée,  qui  n'amena  rien. 

Par  une  erreur  inverse,  on  peut  croire  à  une  tuberculisation  avancée 
qui  n'existe  pas,  comme  dans  ces  cas  signalés  par  Barthez  et  Rilliet,  par 
Béhier;  le  poumon  adhère  alors  en  haut  à  la  paroi  thoracique,  et  il  eiîste 
dans  ce  point  un  véritable  souffle  caverneux  amphorique,  quelquefois  avec 
gargouillement.  L'évolution  de  la  maladie,  l'état  général  non  en  rapport 
avec  une  tuberculose  avancée,  et  surtout  la  présence  de  l'épanchemeot 
suffiront  pour  faire  rejeter  l'existence  d'une  caverne. 

La  péricardite  qui  cause  un  point  de  côte,  de  la  dyspnée,  et  amène  une 
collection  séreuse  quelquefois  assez  abondante  à  la  partie  antéro-inférieiin 
du  côté  gauche  pourrait  faire  croire  à  un  épanchement  pleural,  mais  on 
observerait  l'absence  de  matité  dans  la  ligne  axillaire  et  en  arri&re,  lacon- 
servation  des  vibrations  thoraciques,  la  persistance  du  murmure  respi- 
ratoire, l'absence  de  souffle  ;  le  choc  de  la  pointe  du  cœur  sera  d'ailleun 
impossible  à  percevoir,  et  ses  bruits  éloignés. 

L'impulsion  du  cœur  qui  vient  battre  contre  une  plèvre  revêtue  de 
fausses  membranes,  pourra  simuler  un  bruit  de  frottement  isochrone  aux 
mouvements  du  cœur,  et  dA  à  une  péricardite  ;  mais  on  trouvera  dans 
quelque  point  du  même  côté  un  bruit  de  frottement  de  même  timbre  que 
le  précédent,  et  coïncidant  avec  les  mouvements  respiratoires. 

La  pleurodynie  ou  rhumatisme  des  parois  thoraciques  donne  lieo  i 
un  point  de  côté  violent,  et  le  malade  pour  éviter  les  douleurs  provo- 
quées par  les  contractions  des  muscles  thoraciques ,  retient  instindife- 
ment  son  souffle;  il  en  résulte  un  peu  d'affaiblissement  du  murmure 
pulmonaire.  On  ne  pourrait  la  confondre  qu'avee  la  pleurésie  com- 
mençante, car  la  pleurodynie  ne  donne  lieu  à  aucune  matité.  La  dooiear 
du  côté  plus  vive,  plus  étendue  que  dans  la  pleurésie  augmente  plus 
que  celle-ci  sous  l'influence  de  la  pression,  de  la  toux,  des  mouvements 
respiratoires. 

Quant  à  la  névralgie  intercostale  qu'il  est  d'usage  de  faire  figurer  dans 
le  diagnostic  différentiel  de  la  pleurésie,  elle  n'a  avec  celle-ci  qu'un  point 
de  contact  :  la  douleur  de  côté,  mais  celle-ci  allongée  sur  le  trajet  d'un 
ou  plusieurs  nerfs  intercostaux  présente  des  points  douloureux,  suriont 
au  niveau  des  vertèbres  ;  c'est  du  reste  là  tout,  aucun  signe  physique, 
pas  de  phénomènes  généraux. 

ProncMaitio.  —  La  pleurésie  franche,  développée  chez  un  sujet  sain, 
se  termine  d'ordinaire  par  la  guérison,  son  pronostic  est  donc  en  général 
favorable,  ce  qui  n'empêche  pas  qu'elle  ne  soit  une  maladie  sérieuse,  et 
dont  les  irrégularités  fréquentes  doivent  toujours  inspirer  quelque 
inquiétude. 

Les  éléments  du  pronostic  se  tirent  de  considérations  multiples,  ks 
unes  empruntées  directement  à  la  maladie  elle-même,  telles  que  le 
siège  et  l'étendue  de  la  pleurésie,  l'abondance  de  l'épanchement,  l'intae 
site  de  la  fièvre,  la  dyspnée,  la  marche  de  la  maladie,  ses  complicatiois, 
etc .  ;  les  autres  ayant  trait  au  terrain  sur  lequel  se  développe  la  pieu- 


- 


PLEORÉSIE.   —   p.   AIGUÊ   PRIMITIVE.    —  PR0*10STIC.  195 

résie,  Tâge  du  malade,  sa  constitution,  1  existence  ou  l'absence  chez  lui 
de  maladies  diathésiques,  son  état  général. 

La  quantité  de  répanchement  a  une  certaine  importance  pronostique, 
et,  si  Ton  voit  le  plus  souvent  guérir  des  pleurésies  avec  liquide  abon- 
dant, il  n'en  est  pas  moins  vrai  qu'un  épanchement  volumineux  est  plus 
grave  qu'un  moyen.  C'est  surtout  avec  les  grandes  collections  séreuses 
qu'on  voit  le  refoulement  du  cœur  être  accompagné  d'accidents  inquié- 
tants ou  graves,  de  syncopes  quelquefois  mortelles,  de  coagulations  car- 
diaques ou  pulmonaires  qui  amènent  des  complications  redoutables,  d'une 
distension  exagérée  du  thorax  qui  produit  l'asphyxie.  D'autre  part, 
quand  le  liquide  est  en  quantité  considérable,  il  entrave  l'hématose,  qui 
ue  se  fiait'  plus  que  par  un  seul  poumon,  souvent  comprimé  jusqu'à  un 
certain  point;  la  circulation  est  elle-même  gênée,  d'où  déchéance  de 
réconomie  et  dangers  de  tuberculose.  Peter  tire  de  l'existence  de  la 
courbe  de  Damoiseau  des  données  pronostiques  :  pour  lui,  quand  elle 
existe,  l*épanchement  est  fibrincux  et  se  résorbera  promptement  ;  si  au 
contraire  le  liquide  est  limité  par  une  ligne  de  niveau,  l'cxsudat  est 
séreux,  et  toutes  choses  égales  d'ailleurs,  la  résorption  sera  plus  longue. 
La  pleurésie  gauche  qui  entraîne  le  déplacement  du  cœur  vers  la  droite 
est  aussi  celle  qui  se  complique  le  plus  souvent  de  péricardite,  et  nous 
avons  vu  que  la  pleurésie  diaphragmatique  se  termine  quelquefois  par 

la  mort. 

Les  complications  aggravent  nécessairement  le  pronostic:  la  péricardite, 
à  moins  qu'elle  ne  soit  rhumatismale  comme  la  pleurésie  qu'elle  accom- 
pagne, est  un  épisode  sérieux  ;  le  développement  d'un  épanchement  dans  la 
plèvre  restée  saine  est  iâcheux  sans  être  absolument  grave;  certaines 
syncopes,  ducs  à  des  concrétions  sanguines  cardiaques  ou  vasculaires, 
peuvent  être  considérées  comme  fatales. 

La  marche  de  la  maladie,  la  date  à  laquelle  elle  remonte,  sont  utiles  à 
considérer  :  quand  le  liquide  continue  à  monter  au  delà  de  la  durée 
habituelle  de  la  période  d'accroissement,  c'est-à-dire  après  trois  semaines, 
il  faut  craindre  qu'il  n'atteigne  des  proportions  anormales;  si  l'augracn- 
iatiou  persiste  après  vingt-cinq  à  trente  jours,  on  doit  prévoir  l'issue  fu- 
neste. Lorsque  la  résolution  commence,  si  elle  marche  régulièrement,  le 
pronostic  est  favorable. 

La  persistance  prolongée  d'un   épanchement,  même  moyen,  est   une 

fâcheuse  condition;  elle   constitue  dans  l'évolution  de  la  maladie  une 

irrégularité  de  mauvais  augure,  et  annonce  souvent    le  passage  de  la 

phlegmasie  franche  à  un  processus  purement  passif,   l'hydropisie.  Les 

'   conditions  anatomiques  de  la  plèvre  malade  et  du  poumon  refoulé  par 

^  t'épanchement  aggravent  le  pronostic  :  si  la  cavité  pleurale  cjit  tapissée 

bar  une  fausse  membrane  épaisse,  celle-ci  substituée  à    la  plèvre  est 

^  &<Dpuissanle  à  résorber  l'épanchement  ;  le  poumon  coiffé  par  des  fausses 

*  Xkiembranes,  bridé  par  des  adhérences,  ne  peut  se  dilater,  et  si  le  li(|uide 

""«lisparait,  l'expansion  du  poumon  étant  impossible,  il  en  résulte,  comme 

>*^;àous  l'avons  vu,  une  exagération  de  la  pression  négative  normale  qui 

F  «uof   oicT.  MÉD.  n  cauu  XXYIU.  —  13 


494  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguë  primitive.  —  traitemert. 

active  et  perpétue  Texlialation  séreuse.  La  guérison  n'est  pourtant  pas 
impossible,  alors  les  organes  voisins  se  rapprochent,  la  paroi  thoracique 
se  déprime  et  le  vide  est  à  peu  près  comblé. 

La  notion  du  terrain  sur  lequel  la  maladie  s'est  développée  joue  un 
rôle  important  dans  le  pronostic,  et  Ton  devra  tenir  compte  des  conditions 
d'âge,  de  constitution,  d'état  général,  etc.  La  pleurésie  primitive  simple 
chez  un  enfant  âgé  de  plus  de  six  ans  est  d'ordinaire  bénigne,  et,  si  sa^ 
marche  est  très-aiguë,  la  guérison  est  assurée;  chez  l'enfant,  touterois,  i^ 
faudra  tenir  compte  de  la  fréquence  plus  grande  des  compIication& . 
Quant  aux  pleurésies  primitives  chez  les  trcs-jeuncs  enfants,  les  observa^ 
tiens  en  sont  trop  rares  pour  qu'il  soit  possible  d'établir  des  règles. 

Dans  la  vieillesse,  où  elle  est  aussi  rare  que  la  pneumonie  est  fréquente, 
la  maladie  tend  à  passer  à  l'état  chronique.  Il  en  est  de  même  chez  leg 
malades  qui  ont  un  état  général  mauvais,  dont  la  constitution  est  appao- 
vrie  par  la  misère  et  les  excès,  chez  les  sujets  anémiques  ou  en  puissance 
d'une  diathèse,  la  goutte,  la  tuberculose,  le  rhumatisme.  A  ce  propos,  on 
ne  devra  pas  confondre  la  pleurésie  développée  pendant  le  cours  du 
rhumatisme,  laquelle  est,  comme  nous  le  verrons,  une  affection  bénij^me, 
avec  celle  qui  survient  chez  un  sujet  rhumatisant  en  dehors  d'une  attaque 
aiguë.  Celle-ci  pâtit  en  quelque  façon  du  milieu  où  elle  a  pris  naissance, 
et  le  rhumatisant  qui  contracte  une  pleurésie  l'a  volontiers  mauvaise. 

Traitement.  —  On  doit  tenir  compte   de   deux  faits  essentiels: 
1^  L'acte  morbide  qui  constitue  la  phlegmasie  pleurale.  2^  L'épanchement    \ 
qui  en  est  le  produit.  De  là  deux  indications  importantes  :  enrayer  on    I 
modérer  l'inflammation  de  la  membrane  séreuse  ;  faciliter  la  résorption  de    ' 
l'épanchement  à  l'aide  des  moyens  médicaux,  ou  en  provoquer  Tissueau 
dehors  par  l'intervention  chirurgicale.  i 

Traitement  médical .  Au  premier  rang  des  agents  antiphlogisliques 
destinés  à  combattre  l'élément  inflammatoire,  se  placent  les  émissions 
sanguines  générales  et  locales,  elles  sont  surtout  indiquées  quand  h 
fièvre  est  très-vive,  l'oppression  intense,  la  douleur  du  côté  très-aiguë. 
Les  saignées  générales  ne  sont  guère  pratiquées  aujourd'hui  dans  h 
pleurésie  ;  les  médecins  en  jugeaient  autrement  dans  la  première  moitié 
de  ce  siècle,  et  la  saignée  générale  tenait  alors  une  grande  place  dans  la 
thérapeutique.  Les  faits  tirés  de  la  pratique  d'Andral,  de  Bouillaud,  de 
Cruveilhier,  de  Chomel,  de  Louis,  témoignent  de  la  haute  valeur  de  cette 
médication.  Entre  les  mains  de  ces  maîtres  éminents,  on  voyait,  grâce 
aux  émissions  sanguines,  des  pleurésies  tourner  court  rapidement,  sou- 
vent en  cinq  ou  six  jours,  quelquefois  même  avant  la  formation  de 
l'épanchement.  Depuis  de  longues  années,  une  réaction  excessive,  comme 
toujours,  s'est  opérée  contre  la  saignée,  et  l'on  est  passé,  sur  ce  point, 
d'un  engouement  extrême  à  une  indifférence  complète.  Dans  sa  traduction 
de  Walshe,  Fonssagrives  se  plaint  que  les  émissions  sanguines  n'occupent 
plus  dans  le  traitement  de  la  pleurésie  la  place  qui  leur  est  due  ;  le 
professeur  Peter  insiste  énergiquement  sur  les  conséquences,  d'après  lui 
désastreuses, de  ce  mépris  des  saignées  générales.  Il  attribue  àrabandonde 


PLEURÉSIE.    —   p.    AIGOÊ    PRIUITIVE.    —   TRAITEMENT.  195 

cette  pratique  ancienne  la  formation  si  commune  aujourd'hui,  et  naguère 
inconnue,  de  ces  vastes  épanchements  dont  la  résorption  est  impossible, 
et  dont  on  n'arrive  à  débarrasser  les  malades  qu'à  l'aide  de  la  thoracentèse. 
«  Jele  dis  bien  haut  :  de  nos  joui^,  à  Paris,  on  abandonne  trop  volontiers 
le  pleurétique  à  lui-même,  on  laisse  trop  platoniquement  l'épanchement 
s'opérer,  on  néglige  trop  les  émissions  sanguines.  Si,  pour  les  citadins, 
dont  l'organisme  n'a  pas  la  vigueur  ni  le  sang,  la  richesse  de  ceux  des 
campagnards,  on  ne  peut  pas  toujours  avoir  recours  à  la  saignée  générale, 
au  moins  doit-on  commencer  le  traitement  par  une  application  de  ven- 
touses scarifiées  ou  de  sangsues,  en  nombre  proportionné  à  la  force  du 
malade  et  à  l'intensité  de  la  douleur  comme  de  la  fièvre  (à  l'intensité 
de  la  douleur  surtout),  application  que  l'on  renouvelle  ou  non,  suivant  le 
besoin  (Peter).  » 

L'emploi  des  saignées  générales  n'est  pas  toujours  indiqué  ;  évidem- 
ment, chez  un  malade  vigoureux,  pléthorique,  quand  le  début  est  violent 
et  impétueux,  si  le  point  de  côté  est  très-douloureux,  l'oppression  très- 
vive,  et  qu'on  assiste  à  l'explosion  de  la  maladie,  il  sera  très-sage  de 
pratiquer  une  saignée,  laquelle  donnera  sur-le-champ  une  amélioration 
incontestable.  Mais,  si  la  pleurésie  a  des  allures  moins  bruyantes,  si  elle 
frapi)e  un  sujet  de  complexion  médiocre  que  l'on  n'est  pas  appelé  à  traiter 
dès  les  premiers  jours,  on  s'abstiendra  des  émissions  sanguines  générales, 
et  l'on  donnera  la  préférence  aux  ventouses  scarifiées  qui  agissent  en 
même  temps  comme  révulsifs.  Indépendamment  de  leur  action  antiphlo- 
gistique,  elles  ont  un  effet  évident  sur  le  point  de  côté,  assez  violent 
quelquefois  pour  exiger  une  intervention  spéciale  :  elles  font  cesser  la 
névrite  qui  en  est  la  cause. 

Les  Allemands  et  les  Anglais  emploient  les  mercuriaux  comme  anti- 
phlogistiques  et  altérants;  ils  prescrivent  le  calomel  à  dose  fractionnée 
et  les  frictions  d'onguent  napolitain  jusqu'à  saturation  et  sialorrhéc. 
Cette  méthode  populaire  chez  les  Anglais,  dans  la  pleurésie  et  dans  la 
péricardite,  est  à  peu  près  inconnue  chez  nous.  La  digitale,  qui  par  ses 
propriétés  antipyrétiques  modère  les  combustions,  peut  être  donnée  au 
début  en  infusion  ou  macération  comme  antifébrile,  en  attendant  que 
son  action  diurétique  trouve  son  emploi  dans  l'élimination  de  l'épan- 
chement. On  pourrait  donner  l'émétique  comme  contro-stimulant,  mais 
les  vomissements  et  la  diarrhée  qu'il  peut  provoquer  ne  seraient  pas  sans 
inconvénients  chez  les  sujets  débiles.  Pour  enrayer  la  marche  de  la  phleg- 
masie,  on  tirera  encore  un  bon  parti  de  l'application  de  larges  vésica- 
toires.  Tous  ces  moyens  s'adressent  à  l'inflammation  pleurale,  et  doivent 
être  appliqués  dans  la  période  initiale;  il  fout  les  choisir  avec  discerne- 
ment et  en  proportionner  Temploi  à  la  gravité  des  symptômes. 

Quand  la  pleurésie  est  simple,  franchement  inflammatoire,  on  s'en  tient 
à  ces  agents  thérapeutiques.  S'il  existe  un  état  bilieux  ou  saburral,  on  aura 
recours  à  un  éméto-cathartique  ;  lorsqu'il  y  a  de  Tadynamie,  on  emploie  les 
toniques.  Quelquefois  la  fièvre  est  nettement  rémittente,  sans  être  liée  à  un 
'état  gastrique;  on  se  trouvera  bien  alors  de  l'emploi  du  sulfate  de  quinine. 


196 


PLEURÉSIE.    p.    AIGUË   PRIMITIVE.   TltAITEMEKT. 


Quand  ia  réaction  fébrile  est  peu  marquée,  la  douleur  de  côté  médioere, 
l'oppression  peu  accusée,  il  conviendra  de  laisser  de  côté  la  médication 
antiphlogistique,  pour  ne  recourir  qu'aux  agents  qui  s'adressent  plus  spé- 
cialement à  répanchement,  c'est-à-dire  aux  révulsifs,  ventouses,  vésica- 
toires,  badigeonnages  iodés;  aux  dérivatifs  intestinaux,  drastiques  prin- 
cipalement; aux  diurétiques,  digitale,  diète  lactée,  nitrate  de  potasse;  aux 
gudorifiques,  jaborandi.  Avant  d'intervenir  trop  activement,  on  fera  bien 
d'observer  le  marche  du  liquide  :  il  est  des  cas  où  la  résolution,  irès« 
précoce,  commence  du  sixième  au  dixième  jour,  mais  c'est  surtout  dit 
quinzième  au  vingtième  qu'elle  débute.  Tant  qu'on  la  voit  se  continuer 
régulièrement,  il  est  inutile  d*agir,  et  l'on  pourra  ne  faire  de  médication 
que  si  le  liquide  cesse  de  diminuer.  Toutefois,  il  ne  faut  pas  oublier 
que,  même  chez  les  sujets  vigoureux  et  robustes,  la  pleurésie  n'a  jamais 
une  allure  aussi  aiguë,  aussi  franchement  inQammatoire,  une  tendance 
aussi  nette  vers  la  résolution  que  la  pneumonie.  On  ne  perdra  pas  de  vue 
(|u'il  faut  au  malade  un  certain  degré  de  vigueur  pour  résoudre  sa  phleg- 
masie,  et,  lorsque  l'on  sera  en  présence  de  sujets  anémiques  ou  bibles, 
on  ne  devra  pas  abandonner  la  résolution  aux  seules  forces  de  l'orga- 
nisme. En  pareil  cas,  une  fois  la  fièvre  tombée,  l'inilammation  languit, 
elle  traîne  en  longueur,  le  liquide  reste  stationnaire,  puis  tous  les  phéno- 
mènes  phlegmasiques  disparaissent,  et  à  la  pleurésie  se   substitue  un 
hydrolhorax,  une  véritable  hydropisie  de  poitrine  qui  n'a  aucune  tendance 
à  la  résolution,  ou  bien,  ce  qui  est  autrement  grave,  la  pleurésie  devient 
purulente  ou  passe  à  l'état  chronique. 

Woillez,  surveillant  à  l'aide  des  tracés  cyrlomctriques  la  marche  du 
li(iuide,  a  noté  relfet  des  diverses  médications  sur  sa  résolution;  il  a 
obtenu  le  tableau  suivant  qui  résume  en  centièmes,  pour  chaque  médi- 
cation, la  proportion  des  effets  favorables  ou  nuls,  et  dans  lequel  on  trouve 
des  résultats  inattendus.  Ces  données  n'expriment,  bien  entendu,  que  l'in- 
fluence de  la  médication  sur  répancliement  seul  ;  on  n'y  trouve  pas  noté 
l'effet  des  diurétiques,  dont  l'emploi  continu  amène  des  modifications 
graduelles  non  susceptibles  d'être  saisies  jiar  les  tracés  de  mensuration. 


MEDICATIO.NS 


EFFETS   POURCE^T. 


Favorablt'S. 


Didslii^ucs 

Éinétiquc  à  hautes  (io^os. 

Ventouses 

baijjnées  ou  sangsues  .    . 
Voniitifs 


L 


Purpfalifs  simples. 
Vésicatoiies  .    .    , 


0.07 
0.57 
0.4:» 
0.3.'. 
0.25 
0.1« 
0.10 


Kui». 


0  55 
0.45 
0.55 
O.tiO 
0.75 
0  Xi 
0.90 


La  médication  révulsive  et  dérivative,  qui  a  d'excellents  résultats  pen- 
dant la  période  aiguë  de  la  pleurésie,  devient  impuissante  et  inutile, 
fiinon  nuisible,  quand  la  lièvre  est  tombée.  Comme  le  fait  si  judicieuse- 


PLEURÉSIE.    —   p.    ÀIGUÔ   PRIMITIVE.    —  TRAITEXENT.  197 

ment  observer  Peter,  on  ne  peut  avoir  la  prétention  éle  faire  absorber  le 
liquide  par  la  plèvre  dans  l'état  où  elle  se  trouve:  la  plèvre  pulmonaire, 
qui  a  suivi  dans  sa  rétraction  le  poumon  plus  ou  moins  ratatiné,  est 
réduite  à  presque  rien,  elle  est  d'ailleurs  recouverte  de  fausses  mem- 
branes; la  séreuse  pariétale  qui  a  gardé  sa  disposition  normale,  est  aussi 
•evêtue  de  néomembranes  et  tout  aussi  impropre  à  l'absorption.  La 
révulsion  d'ailleurs  n'est  eificace  qu'en  substituant  une  hyperémie  arti- 
Bcielle  et  thérapeutique  à  la  congestion  pleurale  qui  est  le  fait  de  l'inOam- 
mation,  elle  sera  donc  de  nul  effet,  une  fois  celle-ci  guérie.  Les  sudorifi- 
ques,  les  diurétiques,  les  purgatifs,  ont  le  même  mode  d'action;  quand  ils 
sontefGcaces,  c'est  bien  plutôt  par  l'hyperémie  dérivatrice  que  par  une 
spoliation  qu'il  faudrait  supposer  énorme  pour  qu'elle  activât  sérieuse- 
ment l'absorption  à  la  surface  de  la  plèvre.  Passé  donc  la  période  inflam- 
matoire, la  médication  révulsive  etdérivative  sera  sans  résultats  salutaires, 
elle  augmentera  la  faiblesse  du  malade,  et  cette  débilitation  deviendra 
elle-même  une  condition  fâcheuse  pour  la  résolution  de  Texsudat. 

Lorsque,  par  le  fait  de  l'insuffisance  du  traitement  ou  des  conditions 
iéfavorables  dans  lesquelles  se  trouve  le  mnlade,  on  voit  la  résolution 
de  répanchement,  tarder  au  delà  de  28  ou  50  jours,  il  faut  renoncer  à 
l'espoir  d'en  avoir  raison  par  un  traitement  purement  médical,  et  recourir 
à  la  thoracentèse. 

Le  point  de  côté  de  la  pleurésie  commune  et  la  douleur  si  pénible  de  la 
pleurésie  diaphragmatiquc  exigeront  l'emploi  d'une  médication  pallia- 
tive, piqûres  de  morphine,  frictions  belladonces,  opium  en  pilules,  etc. 

Thoracentèse.  L'indication  de  la  thoracentèse  est  tout  entière  dans  ces 
deux  circonstances  :  abondance  extrême  de  l'épanchernent;  sa  résistance 
à  l'absorption. 

Quand  le  liquide  est  très-abondant,  surtout  si  la  pleurésie  siège  à  gau- 
che et  déplace  le  cœur,  on  sait  qu'il  peut  amener  des  accidents  graves  : 
la  dyspnée  considérable  qui  entrave  l'hématose  et  la  mort  subite  par 
syncope,  par  asphyxie.  C'est  dans  ces  cas  que  l'on  est  appelé  à  pratiquer 
la  thoracentèse  d'urgence;  analogue  par  les  conditions  où  l'on  opère  à  la 
trachéotomie,  constituant  comme  elle  un  traitement  palliatif,  elle  pare  au 
plus  pressé  et  n'est  pas  toujours  curative.  Si  la  fièvre  persiste,  si  la  phleg- 
masie  pleurale  n'est  pas  éteinte,  la  séreuse  continuera  à  sécréter  un 
liquide  pathologique  et  elle  reproduira  l'épanchement.  11  est  néanmoins 
des  cas  oii  il  suffit  de  soustraire  une  minime  quantité  de  liquide  pour 
voir  le  reste  se  résorber  rapidement;  cela  s'explique  par  l'état  des  vais- 
seaux qui,  comprimés  par  le  liquide,  sont  hors  d'état  de  fonctionner,  et 
dans  lesquels  la  diminution  de  pression  rétablit  la  circulation. 

Par  la  thoracentèse  pratiquée  d*urgence,  on  gagne  du  temps,  et,  la 
maladie  se  retrouvant  dans  les  mêmes  conditions  qu'avant  l'épanchement. 
on  a  le  loisir  d'agir  sur  elle  par  le  traitement  médical.  C'est  le  seul  cas 
où  il  n*y  ait  pas  lieu  de  s'arrêter  à  la  persistance  de  l'état  fébrile  et  nous 
verrons  plus  loin  que,  hormis  le  cas  d'urgence,  il  est  tout  au  moins  irra- 
tionnel d'opérer  malgré  la  fièvre. 


198  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguS  primitive.  —  TRAirsiiBifT. 

Pour  décider  Tifrgence  de  la  thoracentèse,  il  est  impossible  de  8*en 
tenir  à  un  seul  indice  :  il  faut  évidemment  tenir  compte  à  la  fois  et  des 
troubles  fonctionnels  et  de  la  quantité  de  Tépanchement.  La  dyspnée^  à 
elle  seule,  ne  saurait  rien  décider  ;  on  voit  souvent  des  collections  énor- 
mes de  liquide  ne  provoquer  que  peu  de  gène  respiratoire  et  permettra 
aux  malades  de  travailler  et  de  vaquer  sans  défiance  à  leurs  occupations^ 
D'autre  part,  il  y  a  parfois,  au  début  de  la  maladie,  des  dyspnées  suffocante^ 
avec  des  lipothymies  alarmantes,    qui  ne  sont  pas  justiciables   de  l| 
thoracentèsc,  mais  des  stimulants  dilTusibles  et  des  toniques.  La  dyspnée 
excessive  n*est  donc  une  indication  qu'autant  que  répanchemeni  seni 
reconnu  abondant.  A  quelle  quantité  de  liquide  aura-t-on  à  redouter  des 
accidents  graves?  D'après  G.  Dieulafoy,  hormis  le  cas  de  Blachez,  où  li 
plèvre  ne  contenait  que  1500  grammes,  jamais  la  mort  n'a  été  provoquée 
par  une  collection  inférieure  à  2000  grammes.  U  faudra  donc  prononcer 
l'urgence,  lorsque  chez  un  sujet  robuste  et  vigoureusement  organisé  le 
liquide  atteindra  de  1800  à  2000  grammes.  On  arrive  à  évaluer  la  pro- 
portion de  l'épanchement  par  l'élévation  de  son  niveau,  par  la  mensu- 
ration, par  le  déplacement  des  viscères  et  notamment  du  cœur.  Quaad 
on  trouve  à  l'auscultation,  un  silence  absolu  sans  cgophonie  ni  souffle,  ou 
bien  un  souffle  caverneux  ou  amphorique,  lorsque  la  matité  absolue 
remonte  en  arrière  jusqu'à  Tépine  de  Tomoplate  et  supprime  en  avant 
la  sonorité  skodique  qui  existait  au-dessous  de  la  clavicule,  et,  dans  les 
eas  de  pleurésie  gauche,  quand  le  cœur  est  déplacé,  et  que  sa  pointe 
vient  battre  à  droite  du  sternum,  on  peut  admettre  que  l'épanchement, 
chez  un  adulte  bien  constitué,  varie  de  1800  à  2000  grammes  (G.  Dieu- 
lafoy). La  thoracentèse  est  alors  urgente,  il  n*y  a  pas  à  s'inquiéter  de  la 
fièvre,  il  faut  agir,  et  promptement,  sous  peine  d'accidents.    Sur  cette 
thoracentèse  d'urgence,  tout  le  monde  est  d'accord.  Les  complications  de 
la  pleurésie,  en  tant  qu'elles  augmentent  la  dyspnée  ou  entravent  la 
circulation  pulmonaire,  sont  une  raison  de  plus  d'opérer. 

La  résistance  de  l'épanchement  à  la  résorption  est  encore  une  source 
d'indications  pour  la  thoracentèse  ;  mais  ici  l'évidence  ne  s'impose  plus 
et  l'opportunité  de  la  ponction  est  discutée.  Lorsque  répancliement  est 
d'abondance  moyenne,  pendant  la  période  fébrile,  et  alors  que  la 
pleurite  n'est  pas  encore  guérie,  il  faut  traiter  le  malade  médicalement: 
tant  que  dure  la  phlegmasie,  une  ponction  n'avancerait  en  rien  la 
guérison,  le  liquide  se  reproduisant  immédiatement.  Mais,  dès  que  la 
défervescence  s'est  produite,  il  se  peut  faire  que  la  chute  thermométrique, 
d'abord  franche  et  rapide,  s'arrête  tout  à  coup,  et  cesse  de  faire  aucoa 
progrès  ;  la  pleurésie  est  guérie,  et  le  liquide  ne  constitue  plus  qu'un 
corps  étranger,  une  épine  menaçante,  reliquat  de  la  maladie,  qu'il  est 
inquiétant  d'abandonner  à  lui-même.  Tout  d'abord,  et  même  avec  un 
épanchement  médiocre,  on  n'est  pas  complètement  exempt  du  souci  de 
mort  subite,  et  l'on  a  vu,  en  pareil  cas,  plus  d'un  exemple  de  terminaiaoo 
funeste.  D'ailleurs,  la  seule  présence  du  liquide  produit  le  déplacement 
des  organes,  qui  finissent  par  contracter  des  adhérences,  et  gardent  leur 


PLEURÉSIE.   —  p.    AIGUË   PRIMITIVE.    —  TRAITEMEMT.  199 

situation  anormale.  Le  poumon  comprimé  s'affaisse,  perd  sa  souplesse  et 
prend  une  sorte  de  rigidité  qui  s'oppose  à  Tentrée  de  l'air,  il  respire  mal, 
et  de  ce  trouble  de  la  circulation  et  de  Thématose  résulte  une  certaine 
déchéance  de  l'économie  qui  constitue  une  chance  de  plus  pour  que  la 
pleurésie  devienne  chronique  ou  purulente.  Il  y  a  donc  intérêt  évident  à 
extraire  promptement  ces  épanchements ,  qui  sont  par  eux-mêmes  une 
cause  de  persistance  par  les  troubles  mécaniques  et  nutritifs  qu'ils 
déterminent  dans  le  poumon  refoulé .  La  thoracentèse  peut  abréger  de 
pluâeurs  semaines  la  durée  de  la  maladie,  et  hâter  la  convalescence. 

Autrefois,  alors  qu'on  ne  connaissait  que  le  trocart  de  Reybard,  la 
thoracentèse  d'urgence  était  seule  pratiquée,  et  constituait  un  trauma- 
tisme auquel  on  n'osait  exposer  le  malade  sans  nécessité  absolue. 

De  Tannée  1850,  où  Trousseau  fit  entrer  la  ponction  de  la  poitrine  dans 
la  pratique  médicale,  jusqu'en  1870,  oùG.Dieulafoy  appliqua  pour  la  pre- 
mière fois  l'aspiration  au  traitement  de  la  pleurésie,  la  méthode  de  Rey- 
bard fut  seule  en  usage,  et  Ton  peut  dire  que,  dans  maintes  circonstances 
où  son  emploi  eût  été  salutaire,  le  médecin  reculait  devant  la  crainte  de 
pratiquer  une  opération  véritable.  Depuis  \t  jour  où  G.  Diculafoy,  forçant  le 
liquide  à  traverser  une  aiguille  capillaire,  a  réduit  l'opération  aux  pro- 
portions inolfensives  d'une  simple  piqûre  d'épingle,  on  n'hésite  plus,  des 
que  la  résorption  se  fait  attendre,  à  pratiquer  Taspiratiop.  Comme  le  fait 
remarquer  Potaiu,  Tavantage  de  la  méthode  aspiratrice  n'est  pas  d'obtenir 
une  évrtcuation  des  épanchements  pleuraux  plus  rapide  ou  plus  complète 
qu^oQ  ne  le  faisait  avec  la  canule  autrefois  en  usage,  et  de  l'orcer,  par  un 
moyen  puissant,  l'issue  d'un  liquide  qui  ne  sortirait  pas  de  son  propre 
poids;  le  mérite  de  l'aspiration  est  d'évacuer  l'épanchcment  en  produi- 
sant le  moins  de  traumatisme  possible,  et  le  vide  ne  sert  qu'à  obliger  le 
liquide  à  traverser,  dans  un  temps  assez  court,  un  tube  très-fin  dont 
rmiroduction  pusse  presque  inaperçue.  Le  traumatisme  est  nul,  et  la 
douleur  est  si  peu  de  chose  que  les  malades  la  redoutent  moins  que  celle 
d'un  vésicaloire  ;  l'opération  est  comparable  par  son  innocuité  à  une 
injection  hypodermique  faite  avec  la  seringue  de  Pravaz. 

Nous  n'avons  pas  à  décrire  ici  l'aspiration,  ni  les  nombreux  instru- 
ments qu'on  a  proposés  pour  la  pratiquer  {Voy.  art.  PoiTAmE,  thora- 
centèse). Les  deux  seuls  en  usage  aujourd'hui  sont  l'aspirateur  de  G.  Dieu- 
lafoy  et  celui  de  Potain  qui,  avec  des  mérites  différents,  ont  des  avantages 
à  peu  près  égaux. 

La  iboracenlèse  donne  lieu  à  un  petit  nombre  d'accidents  que  nous  allons 
passer  en  revue.  Lorsque  Tévacuatiou  est  faite  trop  rapidement,  comme 
cela  arrivait  quelquefois  avec  la  canule  de  Reybard,  le  malade  est  pris 
à  la  fin  de  l'opération  de  quintes  de  toux  opiniâtres  et  extrêmement  fati- 
gantes. C'est  là  un  inconvénient  que  l'on  évite  d'ordinaire  en  se  servant 
de  l'aspirateur,  mais  en  se  gardant  de  procéder  trop  brusquement .  La 
pénétration  trop  soudaine  de  l'air  dans  le  poumon  rapidement  déplissé  est 
la  Cluse  probable  de  ce  petit  accident  qui  n'a  d'autre  effet  que  de  fatiguer 
le  patient. 


200  PLEURÉSIE.   —   p.    AIGDE  PRIMITIVE.   TRAITEMBOT. 

Nous  ne  parlons  ici  que  pour  mémoire  de  la  lésion  de  Tarière  inter- 
costale, que  Ton  produisait  quelquefois  avec  le  gros  trocari;  elle  est 
inconnue  aujourd'hui.  La  seule  hémorrhagie,  toujours  sans  importance, 
que  Ton  observe  par  les  procédés  actuellement  en  usage,  est  due  à  la 
déchirure  des  vaisseaux  qui  parcourent  les  néo  membranes. 

,  Un  accident  plus  sérieux  est  Toedème  aigu  et  la  congestion  du  poumon, 
avec  expectoration  albumineuse.  A  la  fin  de  l'opération,  ou  pendant  les 
instants  qui  la  suivent,  le  patient  est  pris  d*unc  toux  quinteuse  et  opi- 
niâtre, il  se  produit  de  la  dyspnée,  ou  même  une  sensation  d'étouflement 
quiva  jusqu'à  Tangoisse.  Le  malade  rejette  alors  par  la  toux,  tantôt  des 
mucosités  spumeuses,  quelquefois  teintées  de  sang,  tantôt  un  liquide 
glaireux,  Glant,  semblable  à  du  blanc  d'œuf,  qui,  trailé  par  la  chaleur  oa 
Tacidc  nitrique,  donne  un  dépôt  abondant  d'albumine.  La  quantité  de 
cette  expectoration  varie  de  50  à  500  grammes,  elle  peut  s'élever  à  ud 
et  même  deux  litres.  La  toux  vient  par  quintes  à  la  suite  de  chacune  des- 
quelles le  liquide  sort  par  gorgées.  La  dyspnée  est  d'ordinaire  en  rapport 
avec  la  quantité  et  l'état  mousseux  du  liquide  battu  par  l'air  dans  les 
tuyaux  bronchiques.  Si  Ton  ausculte  la  poitrine  dès  le  début  de  l'acci- 
dent, on  entend  des  râles  sous-crépitants  fins  d'œdcme  pulmonaire,  su^ 
tout  très-abondants  vers  la  base  du  poumon. 

Cet  état  persiste  sans  modifications  pendant  plusieurs  heures;  il  peut 
durer  une  journée  entière,  puis,  si  Thyperémie  est  peu  marquée,  si  le 
liquide  qui  transsude  dans  l'arbre  aérien  n'est  pas  très-abondant,  les 
accidents  de  suffocation  cessent,  la  respiration  devient  plus  facile,  le 
crachement  diminue  graduellement,  puis  disparait,  et  le  malade  revient 
à  l'état  normal.  Dans  quelques  cas  graves,  l'opéré,  d'abord  soulagé  par 
la  ponction,  sent  rapidement  revenir  la  dyspnée,  la  poitrine  s'embarrasse 
l'anxiété  devient  extrême  et  l'arbre  aérien  est  bientôt  envahi  par  un 
liquide  spumeux  ;  il  y  a  alors  des  symptômes  d'asphyxie,  de  la  cyanose 
de  la  face,  et  la  mort  peut  survenir  très-rapidement.  Dans  une  thèse  fort 
bien  faite  où  il  a  rapporté  21  observations  de  thoracentèse  suivie  d'expec- 
toration albumineuse,  Terrillon  rapporte  un  cas  mortel  observé  dans  le 
service  de  Gombault,  et  où  vingt  minutes  après  la  thoracentèse]  l'aspbyxie 
commençait.  Les  cas  de  ce  genre  sont  exceptionnels,  et  Ton  ne  connait 
guère  que  six  faits  où  la  terminaison  ait  été  fatale,  ce  qui  donne, 
néanmoins,  pour  les  cas  d'expectoration  albumineuse,  une  mortalité  asseï 
élevée  et  oblige  à  considérer  comme  très-sérieuse  cette  complication  de 
la  thoracentèse. 

Quelle  est  l'explication  de  ces  faits?  On  a  accusé  la  piqûre  du  poumoD 
par  le  trocart;  mais  Tabscnce  habituelle  de  sang  dans  le  proiduit  de 
l'expectoration,  et  dans  le  liquide  obtenu  par  la  thoracentèse,  l'absence 
des  signes  d'auscultation  qui  ne  manqueraient  pas  d'iiccuser  un  hydropnea- 
mothorax  dans  le  cas  où  le  poumon  aurait  été  lésé,  permettent  de  rejeter 
cette  explication.  Ilérard  a  établi  que  l'expectoration  albumineuse  estdoe 
à  la  congestion  brusque,  à  Tœdème  aigu  du  poumon,  qui  sont  la  consé- 
quence de  la  thoracentèse  pratiquée  d'une  certaine  façon  :  on  a  remarqué 


PLEURÉSIE.    p.    AIGUË   PRIMITINE.    TRAITEMENT.  201 

que  les  accidents  coïncident  souvent  avec  Tévacnation  très-rapide  et  com- 
plète d'un  épanchement  abondant  ;  ils  s'expliquent  d'une  façon  très-satis- 
faisante par  l'afflux  presque  foudroyant  du  sang  dans  le  poumon  com- 
primé par  une  collection  volumineuse,  puis  très-brusquement  dilaté.  Sous 
l'influence  de  cette  poussée  subite,  il  se  produit  une  congestion  et  un 
œdème  pulmonaire  aigus,  et  la  partie  la  plus  fluide  du  sang,  le  sérum, 
transsude  au  travers  des  parois  vasculaires  et  vient  pleuvoir  dans  les 
petites  bronches  et  dans  les  alvéoles  pulmonaires.  On  a  accusé  Taspira- 
tion  d'abaisser  brusquement  la  tension  pleurale  en  évacuant  le  liquide 
trop  rapidement,  mais  Dieulafoy  fait  remarquer  que  sur  seize  cas  de 
tboracentèse  avec  expectoration  albumineuse,  où  le  manuel  opératoire 
est  indiqué,  douze  fois  l'opération  avait  été  faite  avec  le  trocart  ordi- 
naire, et  sur  les  six  cas  connus  d'accidents  mortels  l'aspiration  n'avait 
été  employée  que  trois  fois.  11  convient  d'ajouter  que,  dans  la  plupart  des 
cas  d' œdème  aigu  avec  crachements  albumineux,  il  y  avait  avec  la 
pleurésie  une  complication  plus  ou  moins  grave;  et  dans  les  rares  obser- 
vations où  la  maladie  était  absolument  simple  on  avait  tiré  en  une  fois 
une  trop  grande  quantité  de  liquide  (2,2  litres,  et  même  5  litres),  «  de 
sorte  que  les  accidents  bénins,  graves  ou  mortels,  d'œdème  pulmonaire 
et  d'expectoration  albumineuse,  suite  de  tboracentèse,  ont  toujours  été 
€U$ociéSy  soit  à  des  complications  de  la  pleurésie  (maladies  du  cœur, 
bronchite,  tuberculose,  adhérences  nombreuses  ou  anciennes,  pleurésie 
double),  soit  à  l'issue  immédiate  d'une  trop  grande  quantité  de  liquide,  et 
le  plus  souvent  à  ces  deux  causes  réunies  »  (G.  Ditulafoy).  D'où  le  pré- 
cepte de  ne  pas  tirer  en  une  fois  plus  de  1000  à  1200  grammes  de  liquide, 
surtout  lorsqu'on  a  affaire  à  une  pleurésie  ancienne  ou  compliquée.  Le 
poumon  peut  alors,  après  avoir  été  réduit  àun  très-petit  volume,  se  dilater 
graduellement  et  s'habituer  peu  à  peu  aux  fonctions  qu'il  n'accomplissait 
plus. 

On  a  encore  signalé,  après  la  tboracentèse,  des  accidents  qui  ne  parais- 
sent avoir  avec  elle  que  des  rapports  de  coïncidence.  La  syncope  ou  l'as- 
phyxie, qui  surviennent  en  pareil  cas,  sont  dues  à  des  lésions  préexistantes, 
caillots  cardiaques,  embolies  cérébrales,  thromboses  et  embolies  des 
vaisseaux  pulmonaires,  dégénérescence  graisseuse  du  cœur,  etc.  La  tbo- 
racentèse n'est  aucunement  responsable  de  ces  accidents. 

Enfln  la  tboracentèse  a  été  aussi  accusée  de  transformer  une  pleurésie 
séreuse  en  pleurésie  purulente.  Cet  accident,  si  tant  est  qu'il  soit  réel,  est 
infiniment  plus  rare  qu'on  ne  l'a  dit.  Lorsque  l'on  trouve  à  une  deuxième 
ponction  un  liquide  purulent,  alors  qu'il  était  séreux  à  la  première,  le 
plus  souvent  on  a  affaire  à  une  pleurésie  qui  fut  devenue  purulente  quand 
même.  Le  liquide  extrait  d'abord  était  déjà  purulent  à  un  faible  degré, 
mais  trop  peu  pour  que  cela  fut  appréciable  sans  l'aide  du  microscope, 
et  de  cet  examen  incomplet  on  conclut  à  une  transformation  de  l'épan- 
chement,  alors  qu'il  n'y  a  qu'un  degré  plus  avancé  dans  l'évolution  d'une 
pleurésie  primitivement  purulente.  Dans  ces  dernières  annéeos,  des  statis- 
tiques nombreuses  de  tboracentèse  par  aspiration  ont  établi  l'innocuité 


202  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguës  secondaires. 

du  procédé,  lorsqu'il  est  pratiqué  avec  toutes  les  précautions  youlues. 
Parmi  ces  précautions  figure  au  premier  rang,  la  propreté  des  instru- 
ments employés  et  Temploi  d'un  trocart  ou  d'une  aiguille  incomplètement 
nettoyés  et  qui  auraient  servi  antérieurement  à  vider  quelque  collection 
purulente  pourrait  faire  accuser  la  thoracentèse  de  méfaits  qui,  en 
bonne  justice,  lui  sont  étrangers. 

En  somme,  la  thoracentèse  par  aspiration  est  uue  excellente  opération 
qui  n'a  pas  les  dangers  qu'on  lui  reproche,  et  lorsqu'elle  est  bien  faite  elle 
soulage  les  malades,  sans  leur  faire  courir  de  risques,  sans  ajouter  m 
mal  une  complication.  Elle  permet  de  multiplier  une  intervention  dont  on 
s'abstenait  par  timidité  et  d'éviter  la  temporisation  qui  laisse  passer  à 
l'état  chronique  ou  à  la  purulence  une  pleurésie  destinée  4  guérir 
promptemcnl  par  une  ponction  opportune. 

Pij:urésies  aiguës  secondaires.  —  Un  bon  nombre  de  pleurésies  aigoéi 
se  sdéveloppenl  secondairement  dans  le  cours  d'une  maladie  générale,  on 
sous  l'influence  d'une  aiîection  de  voisinage. 

Les  maladies  générales  passibles  de  complications  du  côté  delà  plèvre 
sont  :  les  fièvres  éruptives,  et  au  premier  rang  la  scarlatine,  la  variolct 
puis  la  rougeole  ;  certaines  fièvres  graves,  la  fièvre  typhoïde,  la  fièvre 
puerpérale,  Tinfcction  purulente,  le  rhumatisme  articulaire  aigu;  des 
affections  dyscrasiques,  comme  la  maladie  de  Bright,  ou  celles  qui,  comme 
les  affections  du  cœur,  troublent  la  circulation  et  provoquent  le  déve- 
loppement d'une  sorte  de  pleurésie  bâtarde,  voisine  de  l'hydroUiorax. 

Les  affections  des  viscères  thoraciques,  du  poumon,  du  cœur  ou  de 
la  membrane  qui  l'enveloppe,  sont  fréquemment  le  point  de  départ  d'une 
pleurésie  :  la  pneumonie  superficielle  se  complique  souvent  de  pleurésie 
chez  l'adulte,  et  presque  constamment  chez  l'enfant  ;  c'est  là  la  pleu- 
ropneumonie  ;  la  rupture  d'une  caverne  tuberculeuse,  l'ouverture  d'un 
foyer  gangreneux  dans  la  cavité  séreuse,  entraînent  une  pleurésie  sur- 
aiguë, souvent  avec  pneumothorax  ;  les  abcès  du  poumon  ont  ce  même 
résultat  par  un  mécanisme  identique. 

Dans  l'enfance,  la  pleurésie  est  rarement  primitive  et  simple,  elle  in- 
tervient dans  le  cours  de  la  pneumonie,  de  la  coqueluche,  du  croup,  de 
la  tuberculose  pulmonaire  ou  méningée,  des  fièvres  éruptives,  etc. 

Chez  les   vieillards,  des  noyaux  superficiels  d'apoplexie  pulmonaire 
donnent  lieu  à  un  frottement  pleural  dû  au  développement  d'une  pleu- 
résie sèche.  La  phthisie  pulmonaire  a  le  même  effet,  mais  la  lésion  est  ; 
alors  chronique.  Les  phlegniasies  du  péricarde  se  propagent  quelquefois 
par  contiguïté  à  la  plèvre  adjacente. 

Citons  encore  les  affections  traumatiques  ou  spontanées  de  la  paroi 
thoracique  les  fractures  de  côtes ,  les  plaies  de  poitrine,  la  carie  costale, 
les  hydatides  et  les  tubercules  de  la  plèvre,  la  granulie  pleurale  et  enfin  ua 
certain  nombre  d'affections  des  organes  voisins  dont  les  désordres  peuveal 
retentir  jusqu'aux  plèvres  :  abcès  des  médiastins,  adénopathie  bronchiqv 
suppuréei  scrofuleuse  ou  tuberculeuse,  avec  ouverture  du  foyer  dans  la  poi- 
trine ;  perforations  spontanées  ou  traumatiques  de  Tœsophage,  hépatite, 


PLEURESIE.  —  p.  AIGUËS  secondaires.  205 

abcès,  kystes  hydaiiqucs  du  foie  ou  cancer  de  restomac  ayant  perforé  le 
diaphragme  et  la  plèvre,  abcès  périnéphriqucs,  etc. 

Ces  causes  Yariées  donnent  lieu  à  des  pleurésies  parfois  séreuses,  le 
plus  souvent  purulentes.  La  fièvre  puerpérale,  la  scarlatine,  la  pyohémie, 
les  abcès  de  voisinage  et  toutes  les  affections  qui  donnent  lieu  au  passage 
dans  la  plèvre  de  liquides  pathologiques  provoquent  des  pleurésies 
suppurées. 

hà  symptomatologie  des  pleurésies  aiguës  secondaires  ne  diffère  guère 
de  celle  des  pleurésies  primitives  que  par  le  mode  de  début  lié  à  la  cause 
dont  elles  procèdent.  En  raison  des  conditions  défavorables  où  se  trouvent 
les  malades,  raffection  se  prolonge  souvent  jusqu*à  devenir  chronique. 
Le  pronostic  est  d'ordinaire  fâcheux,  cependant  il  est  des  pleurésies 
secondaires  qui  ont  une  solution  favorable:  telles  sont  la  pleurésie  rhuma- 
tismale et  certaines  pleurésies  chez  les  tuberculeux  • 

Nous  ne  pouvons  donner  ici  un  tableau  d'ensemble  des  pleurésies 
secondaires;  la  seule  forme  qui,  en  raison  de  sa  physionomie  à  part, 
mérite  une  description  spéciale,  est  la  pleurésie  rhumatismale. 

Pleurésie  rhumatismale,  —  Moins  fréquente  que  rendocardite  et  la 
pérîcardite  rhumatismale,  elle  constitue  comme  elles  une  détermination 
locale  du  rhumatisme.  Elle  se  produit  d'ordinaire  au  cours  d'un  rhuma- 
Lisine  articulaire  aigu  ;  d'autres  fois,  mais  rarement,  elle  coïncide  avec 
un  rhumatisme  musculaire.  Ce  qui  la  caractérise  et  lui  donne  une  allure 
distincte,  c'est  la  mobilité  qui  e^i  le  propre  des  fluxions  rhumatismales. 

Elle  s'annonce  d'ordinaire  par  une  certaine  recrudescence  de  la  fièvre. 
une  douleur  assez  vive  dans  un  des  côtés  de  la  poitrine,  sans  toux  ni  expec- 
toration. D'après  le  professeur  Lasègue,  qui  a  publié  sur  ce  sujet  des  re- 
cherches tr^intéressantes,  la  douleur  de  côté  aurait  quelques  traits 
spéciaux  :  au  lieu  d'être,  comme  dans  la  pleurésie  commune,  limitée  en 
un  point,  elle  représenterait  une  zone  douloureuse^  due  à  ce  que  le 
rfaumatii^me   occupe  le  tissu  aponévrotique  qui  forme  la  charpente  des 
muscles  intercostaux  ;  de  plus  cette  douleur  ne  cède  pas  prompteineut, 
comme  dans  la  pleurésie  ordinaire,  elle  persiste  pendant  toute  la  durée 
de  la  fluxion  pleurale,  avec  des  recrudescences  qui  semblent  indiquer 
l'envahissement  d'espaces  intercostaux  jusque-là  respectés.  La  dyspnée  est 
souvent  ici  très-vive,  ce  qui  parait  dû  à  la  participation  du  diaphragme 
et  surtout  de  son  centre  aponévrotique.  En  raison  de  la  rapidité  de  la 
fluxion  pleurale,  cette  douleur  accompagne  la  pleurésie  bien  plus  souvent 
qu'elle  ne  la  précède.   Mais  c'est  principalement  dans   l'évolution   de 
répanchement  que  l'on  trouve  les  traits  caractéristiques  de  la  pleurésie 
rhumatismale  :  tandis  que,  dans  la  forme  commune,  Tépanchement, 
précédé  de  prodromes,   peut  tarder  plusieurs  jours,  ici  son  apparition 
peut  être  absolument  soudaine,  et  une  collection  liquide  même  considé- 
nble  peut  en  quelques  heures  envahir  la  plèvre.  Les  signes  physiques  de 
la  pleurésie  rhumatismale  n'ont  rien  de  spécial,  à  cela  près  que,  les  fausses 
membranes  étant  assez  peu  communes,  on  observe  rarement  le  frottement, 
et  que,  la  présence  du  liquide  étant  de  règle,  on  ne  trouvera  qu'exception- 


204  PLEURÉSIE.  —  p.  aiguës  secondaires. 

nellement  les  caractères  de  la  pleurésie  sèche.  L'opanchemenl  est  praque 
toujours  d'abondance  moyenne,  il  peut  être  limité  à  un  seul  côté,  cl  tprës 
être  resté  à  peu  près  stationnaire  pendant  trois  ou  quatre  jours,  dis- 
paraître avec  une  rapidité  égale  à  celle  de  son  début,  sans  que  la  fluxion 
atteigne  la  plèvre  opposée.  Mais  ce  n'est  pas  là  la  règle,  et  il  est  cominni 
de  voir  la  résolution  brusque  du  liquide  être  le  signal  d'une  poussée  vcn 
la  plèvre  voisine;  celle-ci,  évoluant  absolument  comme  la  première, 
pourra  se  terminer  soudainement  et  sans  retour,  ou  bien  faire  place  i 
la  réapparition  d'un  épanchemont  du  coté  opposé.  11  y  a  ainsi  une  sorts 
de  balancement  entre  les  deux  plèvres,  et  ces  alternatives  sont  analogue! 
à  celles  que  l'on  observe  pour  les  fluxions  articulaires.  Seux  (de  Mv-  j 
seille)  a  récemment  encore  insisté  sur  ces  caractères  particuliers  de  la  plea- 
résie  rhumatismale  et  en  a  rapporté  plusieurs  observations  intéressantes. 

La  guérison  de  la  pleurésie  rhumatismale  est  le  plus  souvent  très-rapide; 
outre  la  disparition  des  signes  d'épanchemcnt,  une  défervescence  très- 
prompte  en  marque  le  début.  Toutefois  il  n'eu  est  pas  toujours  aîosî  :  il 
peut  se  faire  que  le  rhumatisme,  ayant  épuisé  son  action,  n'ait  plus  sur  la 
résorption  du  liquide  Tinfluence  qu'il  a  eue  sur  sa  genèse,  répanchemcnt 
rentre  alors  dans  les  conditions  de  Texsudat  pleurétiqne  ordinaire,  et  la 
résolution  tarde  plus  ou  moins. 

La  pleurésie  rhumatismale  a  parfois  une  marche  silencieuse,  alors  eils 
n'est  signalée  ni  par  la  douleur,  ni  par  la  toux,  ni  par  l'oppression;! 
existe  bien  de  la  fièvre,  mais  on  l'attribue  au  rhumatisme  articulaire,  et, 
comme  il  est  dit'Hcile  de  faire  asseoir  les  malades  pour  les  ausculter,  on 
peut  laisser  passer  inaperçue  la  complication  pleurais.  II  en  est  d'ail- 
leurs ainsi  des  déterminations  cardiaques  du  rhumatisme  :  elles  veulent 
être  cherchées,  et  Chomel  imposait  au  médecin  la  règle  absolue  d'auscul- 
ter, au  moins  tous  les  deux  jours,  les  rhumatisants. 

Nous  avons  vu  que  la  pleurésie  rhumatismale  peut  exister  en  dehors 
du  rhumatisme  articulaire  et  coïncider  avec  un  simple  rhumatisme  mw- 
culaire;  ce  n'est  pas  tout,  elle  peut  encore  se  produire  en  dehors  de  toute 
espèce  de  manifestation  de  cette  nature,  comme  l'endopéricardite  rhu- 
matismale peut  apparaître  d'emblée  sans  arthropathies  ;  mais  ces  dcm 
circonstances  sont  également  rares.  En  pareil  cas,  pour  assigner  à  b 
pleurésie  sa  véritable  nature,  il  faudra  tenir  compte  des  antécëdenti  \ 
personnels  et  héréditaires  du  malade,  des  caractères  de  la  douleur  de; 
côté,  de  la  mobilité  de  l'affection,  de  la  violence,  de  la  ûèvre  et  de  a 
chute  rapide,  de  Texistence  de  sueurs  profuscs. 

La  guérison  complète  et  rapide  est  de  rè^'le,  et  la  suppuration  aussi 
rare  que  dans  les  autres  localisations  du  rhumatisme.  La  pleurésie  riiu- 
matismalc  est  souvent  compliquée  d'endoporicardite,  et  II.  Roger  a  signili 
chez  l'enfant  une  relation  étroite  entre  les  deux  affections,  déserte  que, 
dans  le  rhumatisme,  quand  l'endocardite  existe,  on  pourrait,  presque  1 
coup  sûr,  prédire  la  pleurésie.  Celle-ci  est  alors  fréquemment  double,  d 
débute  plus  souvent  dans  le  deuxième  septénaire  que  dans  le  premier  oi 
le  troisième. 


PLEURÉSIE.  —   p.    PURULEKTE.   àTlOLOGIE.  205 

Le  pronostic  de  la  pleurésie  rhumatismale  est  sérieux,  non  pas  comme 
pleuréfrie,  mais  parce  que  rafi'ection  est  une  uianifestatiou  viscérale  du 
rhumatisme,  de  toutes  la  plus  bénigne,  il  est  vrai,  mais  fâcheuse  néanmoins 
parce  qu'elle  dénoie  chez  le  malade  une  tendance  inquiétante  aux  compli- 
eatious  viscérales,  et  qu'elle  peut  faire  place  au  rhumatisme  cérébral.  Ce- 
pendant considérée  en  soi,  la  pleurésie  rhumatismale  est  moins  sérieuse 
qne  la  pleurésie  commune,  qui  peut  ne  guérir  que  lentement,  ou  bien 
passer  à  la  suppuration  et  à  Tétat  chronique. 

Eu  raison  de  ses  allures  rapides,  de  sa  résolution  prompte  et  spontanée, 
elle  ne  réclame  pas  une  thérapeutique  bien  active;  il  n'est  pas  bon, 
d'ailleurs,  d'attaquer  trop  vigoureusement  la  fluxion  rhumatismale,  de 
peur  de  s'exposer  à  des  déplacements  graves. 

La  thoracentèse  n'est  guère  indiquée  dans  la  pleurésie  secondaire  au 
rhumatisme  que  si  l'inflammation  est  double  et  compliquée  de  pcricar- 
dite,  si  elle  amène  de  la  dyspnée,  une  anxiété  notable  et  la  menace  d'acci- 
dents sérieux.  On  pourra  encore  y  recourir  lorsque,  le  rhumatisme  ayant 
ifuisé  son  action,  l'épanchement  n'a  plus  de  tendance  à  se  résoudre. 

Pleobésie  purulente.  —  Mal  connue  avant  la  vulgarisation  de  la  thora- 
»ntèse,  la  pleurésie  purulente  a  été  mieux  étudiée  depuis  ;  elle  est  de 
lotion  vulgaire  aujourd'hui,  grâce  à  la  facilité  des  ponctions  exploratrices, 
|ui  permettent  de  suivre,  pour  ainsi  dire  jour  par  jour,  les  modifi- 
allions  du  liquide.  Nous  emprunterons  un  bon  nombre  des  détails  qui 
ont  suivre  aux  travaux  si  complets  et  si  intéressants  que  Moutard-Martin  ' 
.  publiés  sur  ce  sujet.  Lorsque  répanchcment,  au  lieu  d'être  séreux  ou 
éro-tibrineux,  est  mélan<(é  de  pus,  on  dit  que  la  pleurésie  est  purulente  ; 
listologiquement  la  pleurésie  est  toujours  purulente,  et  Laboulbène  a 
tabii  que  l'exsudat  de  la  pleurésie  simple  contient  des  globules  de  pus 
lès  les  premiers  jours  :  il  n'y  aurait  donc  là  qu^une  question  de  degré, 
nais  l'observation  chnique  ne  permet  pas  d'admettre  celte  confusion,  et 
t  simple  vue  suffît  à  distinguer  le  liquide  d'une  pleurésie  purulente 
le  celui  de  la  pleurésie  aiguë  franche.  La  première  peut,  il  est  vrai,  suc- 
éder  à  la  phlegmasie  simple  de  la  plèvre;  mais,  dans  la  majorité  des  cas, 
es  deux  affections  procèdent  de  causes  distinctes  et  il  y  a  entre  elles 
les  diflërences  de  nature  et  d'évolution  qui  les  séparent  nettement  ;  l'épan- 
ibement  est  d'ailleurs  purulent  d'emblée  sous  Tinlluence  de  certaines 
,  et,  dans  la  pleurésie  qui  complique  la  lièvre  puerpérale  et  la  pyohc- 

,  le  premier  liquide  sécrété  est  du  pus  en  nature. 
Stiol€ii^ie.  —  Parmi  les  causes  de  la  pleurésie  purulente,  les  unes  lo- 
cales, sont  des  lésions  d'ori<zine  traumatique  ou  des  affections  de  voisi- 
nage, ce  sont  les  mieux  connues  ;  fréquemment,  elles  donnent  lieu  à  la 
production  d'un  exsudât  ])urulent  d'emblée;  les  autres  sont  des  alfeclions 
générales  dont  le  mode  d'action  n'est  pas  clairement  établi.  Les  premières, 
fuselles  soient  traumati(|ues  ou  spontanées,  ont  une  action  évidente  et 
incontestable,  telles  sont  :  les  plaies  de  poitrine,  les  fractures  de  côtes, 
les  caries  costales,  Térysipèle  phlegmoneux  des  parois  thoraciques,  les 
ibcés  de  voisinage  ouverts  dans  la  plèvre  (abcès  de  la  paroi  cosiaie,  de 


206  PLEURÉSIE.  —  p.  purulente.  —  étiologie* 

l'aisselle,  du  médiasiin,  de  la  rate,  du  rein,  du  foie),  les  épanchements 
d'air,  de  sang,  de  liquides  pathologiques,  les  corps  étrangers,  pénétrant 
dans  la  poitrine  par  l'œsophage  ou  la  trachée,  la  pneumonie  suppurée* 
la  rupture  d'un  foyer  d'apoplexie  pulmonaire.  La  gangrène  pulmonaire 
peut  être  le  point  de  départ  d'une  pleurésie  suppurée,  mais  cette  relation 
n'est  pas  constante  ;  Rendu  et  Debove  ont  signalé  des  cas  où  la  gangrène 
pulmonaire  était  consécutive  à  la  pleurésie  purulente  dont  elle  était  une 
complication..  La  tuberculose  peut  donner  lieu  à  la  formation  d*unem- 
pyème  par  des  mécanismes  différents  :  par  la  rupture  d'une  caverne  tu- 
berculeuse, par  le  développement  de  granulations  tuberculeuses  sur  h 
séreuse  elle-même.  En  dehors  de  ces  deux  modes,  la  phthisie  provoque 
tantôt   des  pleurésies  sèches,   tantôt  des  pleurésies  séreuses.  Dans  h 
forme  commune  de  la  tuberculose,  l'épanchemcnt  pleurétique,  quand  il 
existe,  est  le  plus  souvent  séreux,  et  lorsqu'il  est  purulent,  c'est  moîot 
par  une  action  locale  de  la  tuberculose  que  par  le  fait  de  l'état  de  cacheiift 
du  sujet,  qui  prédispose  aux  phlegmasies  suppuratives.  Nous  avons  m 
qu'on  avait  incriminé  la  ihoracentcse  ;  Trousseau  se  refusait  déjà  à  admettre 
celte  influence  fâcheuse  de  la  ponction,  qui  est  bien  plus  douteuse  encore  ' 
depuis  que  le  traumatisme  est  devenu,  par  les  méthodes  nouvelles,  ab- 
solument insignifiant.  Quant  à  l'introduction  de  l'air  dans  la  plèvre,  soo 
influence  nuisible  est  admise  par  la  plupart  des  observateurs,  et  les  rarei 
expériences  qui  ont  été  tentées  impunément  pour  en  établir  l'innocaité 
n'ont  pas  entraîné  la  conviction  et  n'ont  pas  trouvé  d'imitateurs. 

Parmi  les  causes  générales,  les  mieux  connues  sont  :  les  fièvres  émp> 
tives,  la  variole,  la  rougeole  et  surtout  la  scarlatine,  qui  est,  à  ce  poiât 
de  vue,  la  plus  dangereuse  de  toutes  ;  la  coqueluche,  l'état  puerpéral, 
la  pyohémie,  la  morve,  la  méningite  cérébro-spinale,  la  fièvre  urineuse, 
les  grands  traumatismes,  les  amputations;  1  influence  de  la  scrofule 
a  été  signalée,  mais  n'est  pas  clairement  établie;  on  a  rapporté  enfin  i^ 
quelques  cas  très-rares  de  pleurésie  suppurée  survenus  dans  la  conva- 
lescence de  la  fièvre  typhoïde. 

Certaines  conditions  favorisent  la  suppuration  des  pleurésies  et  jouent  ' 
le  rôle  de  causes  prédisposantes  :  l'enfance  ou  Tâge  adulte,  le  seie  mas- 
culin :  il  y  a,  à  cet  égard,  une  proportion  considérable  en  faveur  de 
l'homme  ;  puis  viennent  des  conditions  générales  mal  déterminées,  tout» 
les  causes  d'affaiblissement,  toutes  les  influences  qui  portent  atteinte  aux  jZ 
fonctions  d'assimilation  et  de  désassimilation  :  insuffisance  alimentaire, 
famine,  affections  typhiques,  etc.  ;  on  voit  encore  suppurer  la  pleurési 
chez  les  ivrognes,  chez  les  sujets  surmenés  ou  convalescents  d'om 
maladie  grave. 

«  Quel  que  soit,  dit  Lancereaux,  le  point  de  départ  de  la  pleurite 
purative,  la  condition  pathogénique  de  cette  affection  est,  pour  ainsi  dii^ 
toujours  la  même,  à  savoir  :  la  présence  dans  les  liquides  organiques  «i^ 
encore  dans  les  tissus  du  voisinage  de  la  plèvre,  d'un  principe  sepV^^^ 
purulent.  C'est  donc  le  pus  ou  une  substance  renfermant  des  élét^wjjj 
semblables,  sinon  de  même  nature,  qui  engendre  la  pleurésie  puriiX  ^* 


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PLEURÉSIE.  p.    PURULENTE.    —  ANATOMIE    PATHOLOGIQUE.  207 

aTec  plus  ou  moins  de  facilité  suivant  les  conditions  individuelles,  et  cela 
par  un  mécanisme  peu  différent  de  celui  qui  consisterait  à  déposer  quel- 
ques gouttes  de  pus  sur  une  plèvre  saine.  » 

Dans  certains  cas,  néanmoins,  on  ne  peut  invoquer  aucune  condition 
ni  locale  ni  générale,  et  la  transformation  purulente  s'opère  dans  les  con- 
ditions en  apparence  les  moins  propres  à  la  provoquer. 

AnAtomie  patholog^ique.  —  Lésions  parenchymateuses.  Si  la 
pleurésie  purulente,  succédant  à  une  fièvre  puerpérale  ou  à  la  pyohémie, 
a  produit  en  quelques  heures,  comme  cela  arrive  en  pareil  cas,  un  épan- 
chement  séro-purulent  considérable,  on  trouve  alors  la  plèvre  intacte, 
sans  rougeur  et  sans  ecchymoses  ;  la  membrane  est  un  peu  plus  terne 
qu'à  l'état  sain,  mais  il  n^y  a  pas  apparence  d'inflammation. 

Quand  la  pleurésie  purulente  a  succédé  à  Tétat  aigu,  la  séreuse  est  plus 
rosée  qu'à  l'état  uormal,  ou  même  rouge  et  injectée  ;  sa  surface  est  moins 
lisse,  comme  dépolie  ;  si  la  phlegmasie  a  été  prolongée,  la  membrane  est 
infiltrée  de  pus,  inégale,  chagrinée  et  rugueuse;  on  y  trouve  à  un  degré 
de  développement  très-marqué  le  tissu  de  granulation  et  les  néo  mem- 
branes qui  résultent  de  son  organisation  ;  l'endothélium  modifié,  granu- 
leux desquamé,  par  son  mélange  avec  la  fibrine  et  les  globules  de 
pus,  constitue  des  fausses  membranes  molles,  jaunâtres,  et  il  entre  dans 
la  composition  des  flocons  solides  qui  nagent  dans  le  liquide.  La  plèvre 
est  couverte  de  petites  ecchymoses  ;  à  la  suite  d'une  pleurésie  purulente 
chronique,  elle  est  souvent  épaissie,  indurée,  comme  cartilagineuse. 
Les  néo  membranes  peuvent  s'incruster  de  sels  calcaires  et  produire  des 
sortes  d'ossifications  que  Ton  trouve  sur  la  paroi  costale  (Voyez  Pleurésie 
chronique).  Dans  quelques  cas,  elle  peut  s'infiltrer  de  leucocytes,  se 
détruire  par  places  et  présenter  des  ulcérations,  comme  Vigla  Va  signalé 
dans  un  cas  de  pleurésie  purulente  consécutive  à  la  morve  aiguë.  Ces 
altérations  peuvent  être  limitées  à  la  grande  cavité  pleurale,  ou  bien  à 
une  partie  seulement  ;  elles  peuvent  affecter  la  plèvre  diaphragmatique, 
ou  celle  qui  revêt  les  scissures  intcrlobaires. 

Ex9udat.  Le  liquide  épanché  est  purulent,  c'est-à-dire  r[u'il  contient 
des  leuoocytes  en  quantité  suffisante  pour  être  facilement  appréciables  à 
l'œil  nu  ;  au  lieu  d*étre  clair  et  limpide  comme  dans  la  pleurésie  franche, 
il  est  louche  avec  tous  les  intermédiaires  entre  répanchement  séro-puru- 
knt  et  le  pus  phlegmoneux  pur.  Souvent  le  premier  degré  de  la  pleuré- 
lîe  purulente  est  à  peine  appréciable  par  la  simple  apparence,  et  s'il  s'agit 
d'un  liquide  obtenu  par  la  ponction,  ce  n'est  qu'à  la  fin  de  l'opération 
f^esortune  sérosité  légèrement  voilée  d'une  faible  teinte  opaline,  et  lais- 
sant déposer  par  le  repos  des  globules  blancs  en  quantité  notable.   L'ex- 
fiudai  peut  être  plus  épais,  de  couleur  jaune-verdàtre,  ou  vert  pistache  ; 
'  tfautiês  fois,  et  lorsqu'il  est  souillé  de  sang,  il  prend  une  teinte  brune 
S  ^^ck  f^^^  ^^  moins  foncée.  Il  peut  être  homogène,  bien  lié,  de  consistance 
g^^  ^  owncuse,  ou  floconneux  et  chargé  de  grumeaux  ;  le  plus  souvent,  il  n'a 
kC^^   trt^  pas  une  consistance  égale  à  celle  du  pus  phlegmoneux,  excepté  dans  les 
r^;  cas  de  pleurésies  partielles,  enkystées,  alors  que  les  parties  séreuses  ont 


208         PLEURÉSIE.  —  p.  pcrulente.  —  amatomie  pathologique. 

été  résorbées.  Il  pread  alors  l'aspect  d'une  masse  jaune,  caséeuse,  de 
consistance  de  mastic.  Au  microscope,  on  y  trouve  des  leucocytes  en 
nombre  considérable,  quelques  globules  colorés,  et  des  cellules  granu- 
leuses et  volumineuses  dues  à  la  transformation  des  globules  de  pus.  11  y 
a,  de  plus,  des  cristaux  d'acides  gras  et  des  paillettes  de  choiestérine. 

Le  liquide,  quelquefois  inodore,  a  d'ordinaire  une  odeur  fade,  souTeai 
forte  et  alliacée,  parfois  fétide  ;  ce  qui  peut  s'expliquer  parla  présence  de 
l'air  dans  la  cavité  purulente,  ou  par  son  voisinage  immédiat,  ou  bien 
pai*  l'existence  au  milieu  de  Tépanchement  de  lambeaux  pulmonaires 
sphacélés.  La  quantité  du  liquide  varie  de  1  à  4  ou  5  et  même  6  litres. 

Fausses  membranes.  Leur  existence  est  presque  constante  :  tantôt  elles 
sont  appliquées  contre  la  plèvre,  tantôt  elles  nagent  dans  le  liquide  purs- 
lent.  Quand  elles  n'occupent  qu'une  partie  de  la  plèvre,  elles  sont  pluUl 
limitées  à  la  paroi  viscérale  ou  au  diaphragme.  Fréquemment  la  fausse 
membrane,  partout  continue  à  elle-même,  forme  une  poche  sans  ouveiiors 
incluse  dans  la  cavité  normale,  c'est  le  kyste  pseudo-pleural.  Dans  Ja 
pleurésie  purulente  aiguë,  les  fausses  membranes  sont  peu  adhérentes  à 
la  plèvre,  elles  forment  une  couche  mince,  villeuse,  molle  etblanehàtre; 
quand  la  maladie  est  ancienne,  elles  ont  Ane  épaisseur  assez  grande  et 
c|ui  peut  atteindre  7  à  8  millimètres  ;  elles  sont  plus  denses,  comme  fi- 
breuses, et  leur  adhérence  est  telle,  qu'elles  ne  peuvent  être  béparéesde 
la  séreuse,  et  qu'on  ne  peut  même  distinguer  la  limite  enti'e  la  mem- 
brane normale  et  les  produits  pathologiques.  On  y  peut  reconnaître  plu- 
sieurs couches  dont  les  superliciellcs  sont  toiuenteuses  et  peu  résistantes, 
tandis  que  les  profondes,  d'une  organisation  plus  avancée,  out  une  coo- 
bistance  plus  grande  et  sont  quelquefois  iibreuses,  d'une  dureté  compa- 
rable à  celle    du  cartilage.   Elles  sont   souvent  iortement  injectées,  et 
olïrent  même  dans  leur  épaisseur  des  extravasations  sanguines;  leur  colo- 
ration n'est  pas  unil'orme,  leur  surface  est  inégale,  anfractueuse  ;  quel- 
quel'ois  de  teinte  rosée,  elles  ont  l'aspect  de  bourgeons  charnus. 

D'autres  fausses  membranes,  libres  d'adhérences,  Uottent  dans  le  liquide 
purulent  ;  leur  volume  varie  depuis  celui  de  flocons  ténus  qui  peuvent 
encore  traverser  une  canule  un  peu  grosse,  jusqu'à  des  masses  du  vo- 
lume d'un  ^ros  œuf.  Ces  concrétions  (ibrineuses,  communes  surtout  dans 
les  cas  de  listules  pulmonaires  ou  thoraciques,  sortes  d'épongés  impré- 
gnées de  liquide  putride,  s'altérant  comme  le  milieu  dans  lequel  elles  , 
baignent,  sont  un  réceptacle  d'une  horrible  fétidité  ;  c'est  là  une  des  causes  ] 
de  i'incurabilité  ordinaire  des  pleurésies  purulentes  par  les  procédés 
habituels. 

Outre  les  fausses  membranes,  on  a  trouvé  dans  le  liquide  des  débris 
de  poches  hydatiques  et  des  hydatides  plus  ou  moins  altérées,  venues. 
soit  du  foie,  soit  de  la  plèvre  elle-même  ;  on  a  vu,  eniin,  le  liquide  contenir 
des  débris  de  plèvre  et  de  poumon  sphacélés.  Avec  les  produits  patholo- 
giques que  nous  venons  d'énumérer,  la  plèvre  malade  peut  contenir  de 
l'air,  lorsqu'il^existe  une  fistule  pleuro-bronchique  ou  une  ouverture  de 
la  paroi   thoracique.  Des  gaz  peuvent-ils  se  développer  spontanément    i 


PLEURÉSIE.    —   p.    PURULENTE.  —  ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.  209 

dans  la  cavité  pleurale,  et  peut-on  y  trouver  des  fluides  aériformes  sans 
perfomtion?  Cette  question  est  encore  à  l'étude  :  des  observateurs  très- 
distingués,  Hérardf  Jaccoud,  ont  publié  des  faits  qui  semblent  favora- 
bles à  l'affirmative;  dans  quelques  cas  qui  ne  paraissent  pas  discuta- 
bles, à  la  suite  de  fièvres  typhoïdes  ou  puerpérales,  on  a  trouvé  dans  la 
plèvre  des  gaz  contenant  de  Thydrogène  sulfuré  et  d'une  odeur  fétide. 
Ces  fluides  paraissaient  bien  manifestement  dus,  en  Tabsenee  de  Tair, 
à  la  décompositiou  putride  du  pus.  Les  recherches  les  plus  complètes  et 
les  plus  minutieuses  pour  établir  dans  ces  cas  l'existence  d'une  fistule 
pleuro-pulmonaire  sont  restées  sans  résultats;   cependant,  le  fait  du 
développement  spontané  des  gaz  dans  la  plèvre  est  bien  malaisé  à  prou- 
ver d'une  façon  péremptoire,  et  les  fistules  pleurales  sont  souvent  si  dilfi- 
ciles  a  découvrir,  alors  même  que  Ton  est  sûr  de  leur  existence,  qu'il 
planera  longtemps  encore  des  doutes  sur  la  possibilté  du  phénomène. 
Quelquefois,  chez  des  sujets  morts  de  maladies   intercurrentes,  on  a 
trouvé  à  l'autopsie,  dans  la  poitrine,  le  kyste  pseudo-pleural  en  voie  de 
cicatrisation;  le  kyste  se  présente  alors  sous  forme  de  cavité  plus  ou 
moins  grande,  ou  de  tube  à  parois  épaisses,  denses  et  comme  cartilagi- 
neuses ;  cette  poche,  qui  peut  être  adhérente  à  la  plèvre,  contient  un  pro- 
duit purulent,  épaissi  ou  caséiforme,  parfois  de   la   cholestérine   qui 
résulte  de  la  transformation  du  contenu  purulent  du  kyste.  D'après  les 
observations  de  Guéneau  de  Mussy,  dans  quelques  cas  d'épanchements 
anciens,  les  leucocytes  disparaissent,  ils  subissent  une  dégénérescence 
granulo-graisseuse,  et  s'émulsionnent  dans  la  sérosité  qui  les  porte  et 
avec  laquelle  ils  sont  résorbés. 

ÉtcU  du  poumon  et  des  parties  voisines.  —  La  disposition  du  pou- 
mon, dans  la  pleurésie  purulente  généralisée,  est  très-analogue  à  ce 
qu'elle  est  dans  la  pleurésie  commune  :  refoulé  en  haut,  aplati  et 
collé  au  médiastin,  le  poumon  est  plus  efTacé  en  bas  qu'en  haut  ;  quel- 
quefois, par  suite  d'adhérences,  il  est  appliqué  contre  le  rachis,  ou 
refoulé  en  avant  contre  la  paroi  costale  ou  le  médiastin.  Les  fausses 
membranes  l'enveloppent  rarement  de  toutes  parts,  souvent  elles  passent 
sur  une  de  ses  faces,  et  l'appliquent  à  la  paroi  :  il  est  ainsi  complètement 
«1  dehors  du  kyste  pleural.  Une  disposition  bien  importante  au  point  de 
vue  du  traitement,  c'est  la  présence  d'adhérences  anciennes  unissant  le 
poumon  et  la  paroi  thoracique,  et  cloisonnant  ainsi  la  plèvre  en  plusieurs 
loges  qui  ne  communiquent  pas  entre  elles;  dans  ces  cas,  le  pus  n'a  pas 
d'écoulement,  les  lavages  ne  sont  que  partiels  et  la  guérison  est  impos- 
sible. 

Si  le  processus  est  très-aigu  et  répanchement  rapide,  le  poumon  est 
Ubre  d'adhérences  et  sa  disposition  est  la  même  que  dans  la  pleurésie 
séro-fibruneuse. 

=x  L'état  du  parenchyme  pulmonaire  varie  avec  la  durée  et  le  degré  de  la 
£^  compression  :  tantôt  souple,  peu  altéré,  crépitant  surtout  en  haut,  il 
'  -:  est  encore  insufDable  et  surnage  l'eau  ;  d'autres  fois,  il  est  flasque, 
:^.  atélectasié,   et  se  précipite  au  fond  du  vase.  Brouardel  a  signalé  une 

IICrtJT.  DiCT.  UÉD,    ET  CHIR.  WNIAI  \4 


210  PLEURÉSIE.  —  p.  purulente.  —  anatomie  pathologique. 

nitéralion  du  poumon  qui  résulterait  de  la  propagation  au  tissu  cellu- 
laire de  Torgane  du  processus  inflammatoire.  Elle  aurait  pour  effet 
de  condenser  ce  tissu,  d^aniener  sa  rétraction  qui  contribuerait,  pour 
une  bonne  part,  à  Tinextensibililé  du  poumon,  d'où  afTaissement  ie  la 
paroi  thoracique  et  rétrécissement  du  côté  malade.  Il  faut  admettre  alor^ 
que  cette  sorte  de  sclérose  pulmonaire  disparait  plus  ou  moins  plus  tard, 
autrement  il  serait  impossible  d'expliquer  ce  qu'il  est  commun  d'obser- 
ver à  la  suite  de  ces  rétrécissements,  la  poitrine  rétrécie  se  dilatant  peu 
à  peu  et  revenant  à  des  dimensions  voisines  de  l'état  normal. 

Le  poumon  peut  contenir  des  tubercules  ;  la  fréquence  relative  de  cette 
complication  dans  la  pleurésie  purulente  n'est  pas  bien  établie  ;  d'après 
Atlimont  elle  serait  rare,  puisque  sur  130  malades  80  guérirent,  et  que 
lu  tuberculose  ne  l'ut  constatée  que  9  fois  dans  les  autres  cas. 

Les  parois  thoraciques  peuvent  être  atteintes  d'altérations  nombreoses: 
les  parties  molles  peuvent  s'enflammer  par  contiguïté  et  devenir  le  siège 
d'abcès  ;  les  muscles  intercostaux  s'atropbient  et  deviennent  graisseux  i 
la  suite  des  pleurésies  purulentes  prolong^'cs,  et  le  degré  de  ces  altéra- 
tions est  en  rapport  avec  la  durée  et  l'intensité  de  la  maladie.  Les  côtes 
subissent  des   modifications  de  structure  très-appréciables,  lorsque  la 
maladie  persiste  longtemps,  et  surtout  dans  les  formes  chroniques  ;  le 
travail  irritatii  se  propage  à  leur  face  interne,  il  y  développe  un^  ostéo- 
périostite  végétante,  d'où  résulte  en  ces  points  la  formation  d'ostéophytes 
costaux.  Parise  et  Lebert  ont  signalé,  surtout  chez  les  jeunes  enfants, 
l'existence  de  ces  productions  qui  prennent  l'aspect  d'une  côte  surajoutée. 
Enfin,  la  paroi  thoracique  du  côté  malade,  après  avoir  présenté  au  début 
une  ampliation  proportioimée  à  la    quantité  de  l'épaiichement,  subit, 
lorsqu'il  se  résorbe,  une  réti  action  progressive  due  à  ce  que  le  poumon, 
longtemps  comprimé  et  bridé  par  des  fausses  membranes,  ayant  perdu 
son  extensibilité,  la  paroi  costale,  pour  combler  le  vide,  se  déprime  peu  à 
peu  et  souvent  jusqu'à  reifacement  de  la  convexité  normale. 

L'cxsudat  purulent  exerce  sur  les  tissus  une  action  destructive  qui 
devient  manifeste,  surtout  lorsque  la  pleurésie  purulente  est  chronique; 
le  liquide  peut  alors  ulcérer  les  parois  de  la  poche  pseudo-membraneuse 
qui  le  contient,  perforer  la  plèvre  et  se  faire  jour  au  dehors,  soil  à  traven 
le  parenchyme  pulmonaire,  soit  en  perforant  la  paroi  thoracique.  Dans 
quelques  cas  l'ouverture  pulmonaire  a  lieu  en  sens  inverse,  des  poumons 
vers  la  plèvre,  comme  il  arrive  par  la  rupture  d'une  caverne  tuberculeuse; 
mais  la  perforation  précède  alors  Tépanchement  purulent  dont  elle  pro- 
voque la  formation  en  versant  dans  la  plèvre  le  contenu  de  la  caverne; 
cette  dernière  perforation  siège  toujours  au  sommet  du  poumon. 

Dans  le  cas  où  la  perforation  est  duc  à  la  tendance  ulcéreuse  du  pus, 
et  se  produit  de  dehors  en  dedans  par  rapport  au  poumon,  elle  peutsiêger 
dans  un  point  quelconque  de  la  plèvre  pulmonaire,  très-souvent  entre  les 
lobes  du  poumon,  car  ces  perforations  spontanées  sont  surtout  très-caoh 
munes  dans  la  pleurésie  interlobaire. 

La  disposition  de  l'onfice  est  vav'able    comme  sa  cause  :  la  rupture 


PLEURESIE.    —  p.    PLRULENTK  SÏMl'TQMES.  211 

d*uiie  caverne  consiste  en  un  simple  pertuis,  en  une  ouverture  qui  l'ait 
communiquer  la  cavité  |)luurale  avec  une  caverne  de  petites  dimensions  : 
rorifice,  souvent  très-étroit,  est  recouvert  par  des  fausses  membranes,  et 
diflicile  à  reconnaître.  Dans  les  cas  d'ouverture  vers  le  poumon,  la  (i^tule 
est  plus  longue,  quelquefois  large,  souvent  étroite,  tapissée  par  une 
membrane  d'aspect  muqucux  ;  étroite  ou  large,  la  fistule  est  toujours 
très-difGcile  à  trouver,  cachée  qu'elle  est  par  des  fausses  membranes  ;  on 
ne  parvient  souvent  à  la  découvrir  qu*en  insufQant  pour  la  trachée  le  pou- 
mon plongé  dans  un  vase  plein  ^d'eau.  Le  trajet  listuleux  communique 
avec  une  bronche  de  calibre  variable.  La  disposition  des  fausses  mem- 
branes qui  masquent  la  fistule  est  quelquefois  lelle,  qu*elle  joue  le  rôle 
de  soupape  et  permet  l'entrée  de  Tair  dans  la  plèvre  sans  le  laisser 
échapper. 

L'abcès  pleural  peut  s'ouvrir  spontanément  à  Textérieur  du  thorax  ; 
c  est  là  une  terminaison  moins  fréquente  que  l'autre.  Cette  perforation 
si^'e  habituellement  en  avant,  dans  les  premiers  espaces  intercostaux 
qui,  au  voisinage  du  sternum,  sont  plus  larges  et  dépourvus  du  muscle 
intercostal  externe;  le  plus  souvent,  elle  a  lieu  dans  le  cinquième  espace. 
L*orifice  {>eut  être  unique,  ou  bien  il  y  en  a  plusieurs,  plus  ou  moins 
distants  et  quelquefois  très-éloignés  les  uns  des  autres  ;  tantôt  le  pus 
ulcère  les  fausses  membranes  et  marche  de  dedans  en  dehors,  quelquefois 
un  abcès  des  parois  thoraciques  s^ouvrant  dans  la  poitrine  prépare  la  fis- 
tule pariétale;  enfin,  dans  des  cas  a^sez  rares,  la  fistule  est  mixte,  le  pus 
se  fait  jour  à  la  fois  par  la  paroi  thoracique  et  par  les  bronches. 

Dans  le  cas  d'ouverture  intercostale,  lorsqu'on  peut  examiner  les 
parties  avant  la  rupture  des  téguments,  leur  disposition  est  la  suivantes 
au  niveau  d'un  espace  intercostal  on  trouve  à  la  plèvre  un  pertius  plus 
ou  moins  large,  dépassant  rarement  un  centimètre,  et  qui  fait  communi- 
quer la  cavité  pleurale  avec  une  .poche  extérieure  à  la  cage  tlioracique, 
étalée  soit  en  longueur  dans  Tespace  intercostal,  soit  en  largeur  et 
recouvrant  une  ou  plusieurs  côtes.  Une  fois  la  collection  vidée,  la  poche 
peut  se  recoller  à  la  façon  d'un  abcès,  mais  la  fistule  persiste  plus  ou 
moins  large,  souvent  irrégulière,  sinueuse,  et  ne  laissant  que  difficile- 
ment échapper  le  pus.  Un  dernier  mode  d'évacuation  du  liquide  est  la  per- 
foration du  diaphragme  de  la  poitrine  vers  l'abdomen  ;  ce  dénouement, 
assez  rare,  est  précédé  d'une  péritonite  circonscrite  qui  crée  des  adhé- 
rences et  prévient  répatichement  du  pus  dans  le  péritoine.  On  a  vu  encore, 
mais  bien  plus  rarement,  le  Uquide  suivre  une  autre-voie,  et  passer  soit 
dans  le  péricarde,  soit  dans  le  médiastin,  soit  dans  la  plèvre  saine  ;  on 
Ta  vu  fuser  dans  la  gaine  du  psoas  jusqu'à  la  fosse  iliaque,  ou  en  arrière 
despihers  du  diaphragme  jusqu'à  la  région  lombaire. 

Symptômes.  —  Lorsque  la  pleurésie  purulente  com|)lique  la  pyo- 
hémie  ou  la  fièvre  puerpérale,  son  début,  latent  et  insidieux,  n'est 
marqué  par  aucun  trouble  fonctionnel  qui  éveille  l'attention  :  il  n'y  a 
ni  douleur  de  côté,  ni  oppression,  et  on  ne  reconnait  la  maladie  que 
si  i*on  songe  à  pratiquer  l'exploration  physique  de  la  poitrine. 


212  PLEURÉSIE.  —  p.  purulente.  —  symptômes. 

La  pleurésie  purulente  qui  succède  à  une  pleurésie  franche  se  coa- 
iond  à  l'origine  avec  celle-ci,  et  la  purulence  s'établit  sans  changements 
notables  dans  les  symptômes  :  on  observe  donc  un  frisson  initial  Yiolent, 
ou  de  petits  frissons  répétés,  une  fièvre  vive,  un  point  de  côté,  de  la  toux« 
de  la  dyspnée  ;  aucun  de  ces  troubles  fonctionnels  ne  présente  rien  de 
spécial  ni  de  caractéristique,  rien  qui  puisse  servir  à  baser  une  présomp- 
tion. Jusque-là,  il  y  a  identité  complète  avec  la  pleurésie  franche,  mais, 
tandis  que  dans  celle-ci  la  défervescence  a  lieu  au  bout  de  quelques  temps, 
ici  la  fièvre  persiste,  et  Texsudat  augmente  d'une  manière  continue, 
quelque  soit  le  traitement.  Il  existe  des  sueurs  profuses  pendant  la  nuit, 
les  frissons  se  reproduisent  irrégulièrement,  la  température  reste  élevée, 
et  d'après  Ziemssen,  quand  elle  atteint  de  39'',5  à  40^,2,  elle  aurait  une 
certaine  valeur  pour  dénoter  la  suppuration.  La  peau  est  chaude  et  sèche, 
Tappétit  est  perdu,  la  face  e>t  pâle  et  décolorée,  plus  tard  elle  prend 
une  teinte  terreuse  spéciale,  presque  caractéristique  des  états  où  se  forme 
le  pus.  Bientôt  les  fonctions  de  nutrition  s'altèrent,  ramaigrisseroenf 
s*accuse,  il  y  a  des  diarrhées  fétides,  il  survient  de  Tœdème  des  extrémités, 
et  les  malades,  plus  ou  moins  cachectiques,  marchent  vers  la  terminaison 
fatale. 

Ce  sont  là  les  signes  généraux  de  la  pleurésie  purulente  à  marche 
aiguë.  Ils  sont  un  peu  différents  dans  la  forme  chronique  :  celle-ci  peut 
débuter  comme  la  pleurésie  aiguë,  puis  la  fièvre  tombe  sans  cesser  com- 
plètement, elle  reparait  après  les  repas,  ou  vers  le  soir.  L'épanchemeot 
s'accroît  très -lentement  et  peut  demeurer  longtemps  stationnaire.  L'ap- 
pétit reste  intact,  les  fonctions  de  nutrition  sont  moins  promptement 
atteintes  que  dans  la  forme  aiguë.  Cette  situation  se  prolonge  pendant 
des  mois  puis,  l'état  général  s'aggrave,  l'appétit  se  perd,  la  pâleur 
devient  extrême,  les  forces  s'anéantissent,  il  survient  les  mêmes  signes 
de  cachexie  que  dans  la  forme  aiguë,  et  quelquefois  un  œdème  considé- 
rable sans  albuminurie. 

Que  la  pleurésie  purulente  soit  aiguë  ou  chronique,  les  signes  physi- 
quei<  sont  les  mêmes  que  dans  la  pleurésie  commune  :  ce  sont  les  signes 
de  tous  les  épanchements  liquides  de  la  plèvre.  Plusieurs  d'entre  eu 
présentent  toutefois  certaines  particularités  qui  les  distinguent  ;  il  existe 
en  outre  quelques  symptômes  propres  à  la  pleurésie  purulente. 

Comme  dans  la  pleurésie  commune,  il  y  a  de  la  voussure  de  la  pacoi 
costale,  mais  les  dilatations  partielles  sont  ici  beaucoup  plus  communes; 
on  voit  souvent  la  poitrine  présenter  à  sa  base  une  saillie  duc  au  refou- 
lement des  côtes  et  au  niveau  de  laquelle  la  main  promenée  sur  la  paroi 
thuracique  rencontre  un  brusque  ressaut  ;  au-dessus,  la  paroi  costale 
décrit  un  angle  rentrant  plus  ou  moins  marqué.  Cette  saillie  de  la  base 
de  la  poitrine  est  caractéristique  d'un  épanchement  emprisonné  par  des 
adhérences  et  qui,  ne  pouvant  s'étendre  en  hauteur,  refoule  la  paroi  cos- 
tale en  dehors,  le  diaphragme  en  bas,  et  se  creuse  une  loge  dans  le  pou- 
mon qu'il  comprime.  Ces  collections,  lorsqu'on  les  évacue  par  la  thora- 
centèse,  donnent  issue  à  une  quantité  de  pus  tout  à  fait  imprévue,  en 


PLEURÉSIE.   —  PDKULEME.    —  STMTÔMES.  213 

raison  de  Téiendue  restreinte  de  la  matité.  Les  dilatations  limitées  à  la 
base  du  thorax  peuvent  faire  croire  a  des  tumeurs  du  foie  refoulant  en 
haut  le  diaphragme,  et  rejetant  les  cotes  en  dehors,  ainsi  que  cela  arrive 
pour  les  kystes  hydatiques  volumineux  siégeant  à  la  face  convexe  du  foie. 
Les  espaces  intercostaux  sont  effaces  et  refoulés  par  le  pus,  ce  que  Stokcs 
attribue  à  la  paralysie  des  muscles  qui  les  remplissent. 

Un  signe  de  grande  valeur,  mais  qui  manque  souvent,  c*est  l'œdème 
de  la  paroi  thoracique  du  côté  malade  :  on  le  trouve,  soit  au-dessous  du 
creux  de  Taisselle,  soit  plus  en  arrière,  sur  le  prolongement  de  la  ligne 
axillaire  posicrieure.  Ce  signe  est  presque  caractéristique  de  la  présence 
du  pus  dans  la  poitrine,  mais  on  ne  l'observe  que  tardivement,  et  alors 
que  le  pus  de  l'cpanchement  commence  à  faire  saillie  derrière  les  cou- 
ches musculaires*  Sa  signification  du  reste  n*est  pas  absolue,  on  Ta 
rencontré  quelquefois  dans  la  pleurésie  séreuse,  et  chez  des  sujets  cachec- 
tiques, du  côté  où  avait  lieu  le  décubitus.  A  une  période  avancée  de  la 
maladie,  on  verra  souvent  saillir  sous  la  peau  une  tumeur  fluctuante, 
laquelle  constituerait  également  un  bon  indice,  si  elle  ne  survenait  à 
une  époque  où  le  diagnostic  est  déjà  moins  douteux. 

La  mensuration  et  la  percussion  ne  donnent  aucun  caractère  spécial  de 
quelque  importance.  L'épanchemcnt  purulent  étant  plus  fréquemment  en- 
kysté que  Texsudat  séreux,  la  ligne  de  niveau  se  déplace  plus  rarement 
encore  que  dans  la  pleurésie  commune  par  les  changements  d^attitude  du 
malade. 

A  Tauscultation,  on  trouve  des  modifications  du  bruit  respiratoire  qui 
est  diminué  ou  aboli,  ou  bien  des  bruits  anormaux,  comme  le  souffle  tu- 
baire.  Les  bruits  cavitaires,  déjà  signalés  dans  la  pleurésie  commune, 
sont  plus  fréquents  lorsque  le  liquide  est  purulent  :  ce  sont  le  souffle 
amphorique  et  le  gargouillement.  Ces  bruits  pseudo-cavitaires  paraissent 
dus  à  un  tassement,  à  un  refoulement  du  poumon  sur  les  gros  tuyaux  aé- 
riens ;  ils  sont  surtout  le  fait  des  épanchemcnts-  chroniques,  et  ne  sont 
ainsi  liés  à  la  pleurésie  purulente  qu'indirectement,  et  parce  que  la  suppu- 
ration est  plus  commune  dans  les  cas  chroniques. 

Le  retentissement  de  la  voix  peut  être  le  même  que  dans  Tépanchement 
séreux,  toutefois  l'égophonie  est  plus  rare  et  se  montre  seulementavec  les 
épanchemcnts  séro-purulents  ;  quand  le  liquide  est  purulent  et  épais,  la  voix 
ne  retentit  plus,  ou,  si  on  la  perçoit  encore,  elle  parait  sourde  et  éloignée. 

Le  signe  de  Baccelli,  la  non-transmission  à  l'oreille  de  la  voix  chu- 
chotée,  aurait  ici  une  signification  importante,  si  sa  valeur  était  confir- 
mée et  si,  transmises  à  l'oreille  d'abord,  les  vibrations  diminuaient  gra- 
duellement pour  disparaître  enfin;  on  pourrait,  en  quelque  façon,  suivre 
ainsi  la  transformation  purulente  de  l'exsudat;  mais  l'opinion  n'est  pas 
faite  encore  sur  la  portée  de  ce  signe. 

Les  pleurésies  enkystées,  interlobaires  et  médiastines,  qui  sont  plus 
communes  encore  sous  la  forme  purulente  que  sous  la  forme  aiguë  fran- 
che, ne  donnent  lieu  à  aucun  signe  physique  et  ne  se  révèlent  que  par 
quelques  troubles  fonctionnels  :  fièvre,  frisson,  dyspnée. 


2U  PLEURÉSIE,  —p.  purulente.  —  symtômis. 

Malgré  rcxislence  des  symptômes  généraux  et  des  quelques  signes  spé- 
ciaux que  nous  venons  d'indiquer,  le  diagnostic  reste  incerlain  jusqu'à  la 
Ihoracenlèse  exploratrice  ou  Tou^erture  spontanée. 

Que  la  pleurésie  purulente  soit  aiguë  ou  chronique,  le  pus  tend  à  se 
faire  jour  au  dehors,  et  il  s'ouvre  une  voie  tantôt  par  les  poumons  et  les 
bronches,  t.mlôt  à  travers  la  paroi  thoracique.  Dans  le  premier  cas,  qui 
est  le  plus  fréquent,  il  se  produit  une  fistule  pleuro-bronchique,  dont 
l'apparition  précoce  ou  tardive  a  lieu,  d'après  les  observations  de  Woillei, 
entre  les  deux  limites  extrêmes  de  28  et  80  jours.  D'après  Trousseau,  chei 
les  enfants,  la  vomique  peut  se  faire  au  bout  d'un  temps  assez  court, 
du  15''  au  20*  jour;  chez  l'adulte,  les  vomiques  précoces  n'ont  guère  lieo 
que  dans  la  fièvre  puerpérale,  qui  donne  lieu  si  promptement  à  la  forma- 
tion du  pus. 

Rien  n'annonce  habituellement  l'apparition  d'une  vomique  ;  le  malade, 
au  milieu  d'un  accès  de  toux,  rend  brusquement  par  la  bouche  un  liquide 
purulent  en  quantité  variable,  et  qui  peut  aller  jusqu'à  plusieurs  litres. 
Le  contact  du  liquide  avec  l'arrière-gorge  provoque  des  efforts  de  vomis- 
sement qui  ont  valu  à  l'accident  ce  nom  de  vomique. 

L'abondance  du  liquide  ainsi  rejeté  est  subordonnée  aux  dimensions  de 
la  fistule,  elle  peut  être  telle  qu'elle  amène  un  accès  de  suffocation;  le 
malade  peut  tomber  en  syncope,  la  peau  se  couvre  d'une  sueur  froide, 
les  traits  sont  altérés  et  l'asphyxie  subite  amène  une  mort  rapide.  C'est  li 
un  cas  exceptionnel,  d'ordinaire  les  bronches  se.  débarrassent  du  liquide 
qui  les  encombre,  et  la  suffocation  disparait.  L'expectoration  purulente 
se  poursuit  tantôt  sans  inteiTuplion,  plus  souvent  par  intervalles.  De  loin 
en  loin,  un  effort  de  toux,  un  changement  d'attitude  ramène  le  crache- 
ment de  pus,  qui  peut  même  n'avoir  lieu  qu'à  plusieurs  jours  de  dis- 
tance. 

A  partir  du  moment  où  le  pus  a  commencé  à  être  rejeté  au  dehors,  les 
symptômes  observés  varient  suivant  qu'il  s'agit  d'une  pleurésie  enkystée 
(médiastiiie,  interlohaire,  diuphragmatique)  ou  d'un  épancliement  de  h 
grande  cavité  pleurale,  et  selon  que  l'air  pénètre  ou  non  dans  le  foyer  en 
partie  vidé.  Lorsque  la  disposition  de  la  fistule  est  telle,  qu'elle  periaet 
l'issue  du  liquide  sans  laisser  pénétrer  l'air  dans  la  cavité  pleurale,  ou 
lorsque  le  liquide  est  enkysté  entre  les  lobes  pulmonaires,  le  foyerse  vide 
peu  à  peu,  il  revient  sur  lui-même,  la  voussure  diminue  ou  dispiratLla 
matité  est  moins  étendue  et  moins  complète,  la  respiration  reparait  dans 
des  points  où  elle  n'était  pluo  perdue,  et  Ton  peut  entendre  à  l'ausculta- 
tion de  gros  râles  voisins  du  gargouillement,  dus  au  conflit  de  l'air  avec 
le  liquide  purulent  qui  s'écoule  par  les  bronches.  Le  crachement  de  pus 
continue,  celui-ci  est  inodore,  ou,  s'il  a  une  odeur  prononcée,  elle  est  due 
à  son  altération  au  contact  de  l'air  dans  les  bronches. 

Lorsqu'elle  accompagne  une  pleurésie  interlohaire,  souvent  la  vomique 
vient  donner  la  clef  de  troubles  jusque-là  vagues  et  obscurs  :  douleur 
profonde,  dyspnée,  symptômes  généraux  de  pleurésie,  dont  aucun  signe 
physique  ne  révélait  le  siège. 


PLEURÉSIE.    p.     PLRUI.EME.  SYMPTOMES.  ^215 

Quand  la  fistule  pleuro- bronchique  permet  l'accès  de  Pair  dans  la  ca- 
vité morbide,  la  voussure  ne  diminue  pas,  l'nir  venant  remplacer  le 
liquide  évacue  ;  quelquefois  même  elle  augmente  par  une  disposition 
particulière  des  fausses  membranes  qui  font  clapet  et  laissent  entrer 
l*air  à  chaque  inspiration  sans  le  laisser  sortir  ;  la  dyspnée  peut  devenir 
alors  extrême.  Le  pus,  d'abord  inodore,  se  putréfie  nu  voisinage  de  l'air; 
il  prend  quelquefois  une  odeur  insupportable,  alliacée  ou  d'une  horrible 
fétidité. 

L'entrée  de  l'air  dans  la  plèvre  donne  lieu  à  de  nouveaux  signes  de 
percussion  et  d'auscultation  qui  sont  ceux  de  l'hydropueumothorax.  Ce 
sont  la  résonnance  exagérée  et  tympanique  de  la  poitrine  du  côté  malade, 
faisant  place  à  la  matilé  absolue  au  niveau  de  l'épanchcment,  l'abaisse- 
ment du  foie  et  l'immobilité  du  diaphra^^me  du  même  côté;  le  souflïo 
amphorique,  le  tintement  métallique  qui  est  pathognomonique  do  la 
fistule  pleurale,  le  bruit  de  succussion  hippocratique,  le  bruit  d'airain 
perçu  par  l'oreille  appliquée  sur  le  thorax,  pendant  que,  dans  un  point 
opposé, on  percute  l'un  contre  l'autre  deux  corps  durs  ou  métalliques  dont 
l'un  est  appliqué  sur  la  paroi  costale.  N'insistons  pas  sur  ces  signes,  ils 
sont  de  notion  vulgaire  et  n'appartiennent  pas  en  propre  à  la  pleurésie 
purulente  iVoy.  pkkvke  (liydropneumothorax),  bornons-nous  à  rappeler 
qu'ils  ne  sont  pas  constants;  le  tintement  métallique  fait  très  souvent 
défaulet  Ton  ne  trouve  parfois  que  le  bruit  de  flot  hippocratique. 

L'évacuation  du  pus  par  la  paroi  costale  peut  se  faire  à  une  époque  plus 
ou  moins  éloignée  du  début  ;  une  douleur  se  montre  d'abord  dans  un 
point  limité  de  la  poitrine,  quelquefois  dans  plusieurs  points  situés  au 
oiveau  d'un  espace  intercostal  ;  on  trouve  là  une  saillie  rénitente,  peu 
^nsible  au  toucher,  cette  saillie  augmente  bientôt,  elle  peut  être  ar- 
rondie» allongée  dans  le  sens  d'un  espace  intercostal,  ou  occuper  deux 
espaces  voisins  en  franchissant  la  côte  intermédiaire;  la  tumeur  est 
indolente,  molle,  fluctuante,  elle  est  réductible  par  la  pression,  et 
augmente  au  contraire  dans  les  efforts  de  toux  ou  d'expiration.  Elle 
persiste  sans  modifications  pendant  un  temps  variable,  puis  la  peau  s'a- 
mincit, devient  violacée,  elle  cède  spontanément  ou  dans  un  effort  de 
toux,  et  rorifice  livre  passage  à  une  quantité  de  pus  considérable  et  hors 
de  proportion  avec  le  volume  apparent  du  foyer.  L'orifice  persiste  et 
reste  fistuleux;  il  peut,  suivant  sa  disposition,  ses  dimensions  et  son 
obliquité,  permettre  l'entrée  de  l'air  ou  l'empêcher.  S'il  n'existe  pus  une 
fistule  pleuro-bronchique  en  même  temps  que  roriiice  thoracique,  le  pus 
reste  inodore  ;  il  devient  au  contraire  fétide,  s'il  est  en  contact  avec  l'air. 
L'expulsion  du  pus  par  la  fistule  est  suivie  de  modifications  des  signes 
physiques  analo<;ucs  à  celles  que  détermine  la  fistule  pleuro-bronchique. 
Si  l'air  a  pénétré  dans  la  plèvre,  il  y  a  du  tympanisme  et  du  bruit  de  flot. 
Le  niveau  de  la  matité  a  baissé,  mais  l'épanchemenl  se  vide  ici  moins  com- 
plètement que  par  la  fistule  bronchique,  et  l'écoulement  plus  ou  moins 
facile  du  pus  est  subordonné  à  la  position  de  la  fistule.  Quelquefois  l'ap- 
parition de  l'orifice  thoracique  est  annoncée  par  plusieurs  tumeurs  sié- 


216  PLEURÉSIE.  —  p.  purdlekte.  —  TERiiiiiAisorc. 

géant  dans  des  espaces  intercostaux  diiïérents,  Touverture  de  Tune  d'elles 
entraîne  raffaissement  des  autres,  à  moins  que  rorifice  ne  soit  placé 
très-haut  et  que  le  foyer  ne  se  vide  mal,  une  deuxième  fistule  peut  alors 
s'ouvrir  dans  un  point  plus  déclive. 

La  marche  de  la  fistule  thoracique  est  très-variable  ;  parfois»  elle  se 
ferme  pendant  quelque  temps  pour  se  rouvrir  ensuite,  mais  ToriBce  ne 
ferme  jamais  complètement  qu'à  sa  guérison. 

Dans  certains  cas,  et  lorsque  la  tumeur  siège  dans  le  voisinage  da 
cœur,  elle  est  le  siège  de  battements  isochrones  à  la  systole  ;  on  donne  i 
ces  cas  le  nom  d*empyème  pulsatile. 

L'existence  d'une  fistule  thoracique  n'empêche  pas  la  formation  d'une 
fistule  pleuro-bronchique,  et  réciproquement,  le  pus  peut  se  faire  jour 
au  dehors,  bien  qu'il  ait  commencé  à  s'évacuer  par  les  bronches.  Quant 
à  l'ouverture  dans  le  médiastin,  ou  parle  diaphragme,  elle  est  tout  à  iait 
rare. 

Terminaison.  —  La  pleurésie  purulente  peut  aboutir  à  la  gué- 
rison ou  à  la  mort.  Elle  peut  se  terminer  par  la  guérison  spontanée 
et  sans  évacuation  du  pus  au  dehors  ;  ces  cas  sont  rares,  mais  les  faits 
dans  lesquels,  après  la  mort  due  à  une  autre  cause,  on  a  trouvé  des  kystes 
purulents  en  voie  de  cicatrisation,  ne  laissent  aucun  doute.  Moutard- 
Martin  a  rapporté  une  observation  de  guérison  spontanée  d'une  pleurésie 
purulente  dont  le  diagnotic  avait  été  contrôlé  par  une  ponction  explo> 
ratrice  ;  c'est  là  un  fait  exceptionnel.  La  guérison  est  plus  commune  dans 
les  cas  où  l'épanchement  s'est  frayé  une  voie  vers  l'extérieur.  La  solution 
favorable  a  surtout  été  observée  dans  les  cas  de  vomique,  et  principale- 
ment dans  les  pleurésies  interlobaires,  où  les  parois  i*evenant  aisément  sur 
elles-mêmes  ne  permettent  pas  l'entrée  de  l'air  et  la  putréfaction  du  pus. 
La  guérison  est  possible  également  quand  le  pus  occupe  la  grande  plèvre* 
mais  si  la  fistule  ne  permet  pas  Taccès  de  l'air.  Après  la  vomique,  le 
foyer  diminue  d'étendue,  l'expectoration  devient  moins  abondante,  le 
kyste  revient  sur  lui-même,  les  symptômes  généraux  s'amendent,  la  fièvre 
tombe,  l'appétit  renaît,  et  peu  à  peu  le  malade  recouvre  la  santé  ;  mais 
ce  résultat  est  très  tardif,  et  peut  se  faire  attendre  un  an  et  davantage. 

Les  cas  de  fistules  thoraciques  sont  généralement  moins  heureux,  soit 
que  l'orifice  admette  l'air  et  qu'il  se  développe  des  accidents  de  putridîfé, 
soit  que  l'ouverture  mal  située  ne  permette  qu'une  évacuation  incom- 
plète. 

La  mort  est  une  terminaison  fréquente  de  la  pleurésie  purulente;  elle 
parait  inévitable  lorsque,  l'épanchement  n'ayant  pas  de  tendance  à  se 
porter  au  dehors,  le  médecin  n'intervient  pas  pour  lui  ouvrir  une  voie. 

La  terminaison  fatale  est  précoce  ou  tardive  suivant  les  cas  ;  dans  h 
pleurésie  suppurée  aiguë  des  fièvres  graves,  scarlatine,  fièvre  typhoïde, 
fièvre  puerpérale,  la  mort  peut  arriver  au  bout  d'un  mois.  Dans 'la  forme 
chronique,  au  bout  de  peu  de  temps  la  fièvre  cesse,  l'appétit  revient,  les 
malades  sont  pâles  et  faibles,  mais  ne  sont  pas  réduits  à  garder  le  lit  ;  ik 
n'ont  souvent  qu'un  léger  accès  fébrile  vers  le  soir  ou  à  la  suite  des  repas, 


PLEURÉSIE.     —    p.  PURULKMTE.    DIA61I0STIC.  217 

et  la  maladie  peut  se  prolonger  ainsi  pendant  des  mois,  une  année  et 
même  deux. 

Que  la  maladie  soit  aigué  ou  chronique,  au  bout  d'un  temps  variable 
les  accidents  de  fièvre  hectique  surviennent  ;  il  se  produit  des  frissons  irrc- 
gulîers,  des  sueurs  nocturnes,  le  malade  pâlit  de  plus  en  plus,  il  a  du 
dégoât  pour  les  aliments,  des  diarrhées  fétides,  de  Tœdème  des  extré- 
mités inférieures,  et  il  finit  par  succomber  dans  le  dernier  degré  du  ma- 
rasme. 

A  la  suite  des  fistules  pulmonaires  ou  thoraciques,  la  mort  survient 
encore,  si  le  pus,  en  rapport  avec  l'air,  subit  l'altération  putride.  Le  ma- 
lade épuisé  par  la  suppuration,  empoisonné  par  la  résorption  des  pro- 
duits sqitiques  que  contient  sa  plèvre,  succombe  à  la  fièvre  hectique. 

l^tesBostio.  —  La  pleurésie  purulente  n'a  pas  de  signe  pathogno- 
monique ,  aucun  de  ses  symptômes  ne  lui  est  absolument  propre,  et  sa 
physionomie  est  variable  comme  ses  causes  :  aussi  le  diagnostic  en  est-il 
parfois  très-difficile,  et  de  nature  à  embarrasser  les  plus  expérimentés. 
Tantôt  les  caractères  de  Tépanchement  purulent  sont  manifestes,  tantôt 
on  ne  peut  affirmer  que  Fexistencc  du  liquide ,  sans  rien  présumer  de 
sa  nature;  d'autres  fois  enfin,  l'existence  même  de  la  pleurésie  est 
méconnue,  le  début  a  été  insidieux,  et  toute  la  plèvre  est  prise  sans 
qu'aucun  indice  soit  venu  donner  Téveil. 

C'est  vers  le  début  de  la  forme  aiguë  que  l'embarras  sera  le  plus  grand  : 
dans  ces  conditions,  en  effet,  rien  ne  distingue  la  maladie  de  la  pleuré- 
sie simple.  Ce  n'est  qu'en  observant  la  marche  des  symptômes,  en 
notant  que  la  résorption  tarde  «nu  delà  des  limites  habituelles  ,  que  l'on 
commeneera  à  soupçonner  la  suppuration.  Plus  tard,  il  est  vrai,  la  face 
pâlira  et  prendra  la  teinte  terreuse  spéciale;  on  verra  paraître  cet  œdème 
de  J«  paroi  costale  qui  permet  d'affirmer,  avec  une  presque  certitude,  la 
purulence;  mais  ces  signes,  dont  la  valeur  est  grande,  sont  malheureu- 
sement inconstants  et  tardifs. 

A  défaut  des  caractères  significatifs  de  la  suppuration,  il  faudra  obser- 
ver avec  soin  l'état  général,  et  tenir  grand  compte  des  modifications  qui 
décèleront  un  empoisonnement  de  l'organisme.  Parfois  on  notera  une 
discordance  singulière  entre  l'état  plus  ou  moins  grave  de  l'économie  et 
le  peu  d'importance  de  lepanchement  ;  souvent  il  surviendra  des  fris- 
ions répétés,  des  sueurs,  une  fièvre  continue  avec  exacerbations  vespé- 
rales ou  des  accès  fébriles  existant  seulement  le  soir,  de  Tanorexie ,  de 
la  diarrhée,  un  peu  d'œdème  des  jambes. 

Uétiologie  devra  venir  en  aide  au  diagnostic,  la  pleurésie  suppuréc 
étant  presque  toujours  secondaire,  et  venant  souvent  compliquer  cer- 
taines affections  bien  connues,  les  circonstances  dans  lesquelles  la  ma- 
ladie est  survenue  constitueront  les  probabilités  les  plus  grandes  en 
faveur  de  la  nature  du  liquide:  ainsi,  certaines  maladies  étant  données, 
la  pleurésie  qui  vient  les  compliquer  est  presque  à  coup  sûr  purulente  ; 
il  en  est  ainsi  pour  la  fièvre  puerpérale,  la  scarlatine  grave,  la  pyohémic, 
la  morve,  la  fièvre  typhoïde. 


"•lis  PLEURÉSIE. p.    PURULENTE.    —   PRONOSTIC. 

• 

Le  terrain  sur  lequel  évolue  une  pleurésie  est  également  à  considé- 
rer :  il  en  est  tout  autrement  d'une  pleurésie  développée  chez  un  sujet 
jeune,  vigoureux  et  sain,  ou  de  celle  qui  frappe  un  organisme  usé  par 
l'âge,  la  misère  ou  les  excès.  L'existence  de  certaines  diathèses  et  sur- 
tout de  la  tuberculose  devra  être  notée,  bien  que  la  pleurésie,  dans  ce 
cas,  ne  soit  pas  nécessairement  purulente. 

La  marche  de  la  pleurésie  a  son  importance  pour  diagnostiquer  la 
nature  du  liquide,  et,  si  Ton  en  excepte  les  épanchements  de  la  pyohémie 
et  de  la  fièvre  puerpérale,  la  pleurésie  purulente  a  presque  toujours  une 
allure  chronique.  D'après  Verliac,  toute  collection  chronique  devient 
purulente  chez  l'enfant. 

La  pleurésie  purulente  peut  être  confondue  avec  les  maladies  à  marche 
chronique,  et  notamment  avec  celles  qui,  à  la  longue,  amènent  de  h 
fièvre  hectique  et  du  dépérissement.  La  tuberculisation  étendue  d'un  pou- 
mon, outre  ces  symptômes  généraux,  offre  des  signes  locaux  qui  rendent 
la  méprise  plus  facile.  Entre  les  troubles  généraux  de  la  tuberculose 
fièvre  hectique,  diarrhée,  cachexie,  et  ceux  de  la  pleurésie  suppurée,  il 
n'y  a  que  des  nuances  insuffisantes  à  motiver  un  choix  raisonné;  on 
trouvera  |»lns  de  ressources  dans  l'examen  physique  :  une  matité  très- 
étendue  d'un  coté,  avec  intégrité  absolue  ou  presque  complète  du  pou- 
mon opposé,  exclura  presque  Tidée  d'une  tuberculose  avec  laquelle  les 
vibrations  vocales  seraient  en  outre  normales  ou  exagérées,  tandis  qu'elles 
sont  faibles  ou  nulles  dans  la  pleurésie. 

La  méprise  est  plus  facile  à  éviter  dans  le  cas  de  tumeurs  du  poumon, 
de  la  plèvre  ou  du  médiastin.  Les  symptômes  communs  sont  la  voussure 
du  thorax,  la  matité,  le  silence  respiratoire,  la  broncho-égophonie,  mais 
les  vibrations  vocales  sont  exagérées  par  le  fait  d'une  tumeur,  et  celk^i» 
gênant  la  circulation  centrale,  amène  le  développement  du  réseaa  feneux 
sous-cutané;  il  y  a  quelquefois  un  œdème  thoracique  distinct  par  son 
étendue  de  Tinfiltralion  circonscrite  de  la  pleurésie  suppurée.  Enfin, 
quand  le  poumon  ou  le  médiastin  sont  envahis  par  le  cancer,  on  trouve 
des  masses  ganglionnaires  dans  l'aisselle,  ou  d:ms  le  creux  sus-clavicff- 
laire. 

Les  hypertrophies  du  foie,  et  surtout  les  kystes  de  sa  face  convos. 
amènent  des  déformations,  de  la  voussure  et  de  la  matité  de  la  basedi 
thorax;  il  y  a,  dans  ce  point,  absence  du  bruit  vésiculaiic  et  des  vihrt- 
tions  vocales;  mais  la  limite  supérieure  de  la  matité  est  convexe  en  hiwt 
dans  les  tumeurs  du  foie,  concave  dans  le  môme  sens  ou  sinueuse  du» 
les  collections  pleurales,  où  elle  remonte  souvent  très-haut,  en  roèaie 
temps  que  l'on  trouve  du  souflle  et  de  I.i  matité;  dans  les  tumeurs  à 
foie,  le  bord  cartilagineux  des  côtes  est  souvent  comme  rebroussé  ei 
dehors,  circonstance  qui  fait  défaut  dans  la  pleurésie;  enfin  rélude  d* 
commémora'ifs,  l'existence  dans  le  passé  d'un  ictère,  de  coliques  héft 
tiques,  le  mode  de  début,  la  marche  de  la  maladie,  achèveront  de  (^ 
écarter  la  pleurésie.  L^ 

ProïKMstic.  —  La  pleurésie  suppurée  est  d'une  façon  générale  ud»|  j^ 


y 


PLEURESIE.  p.  PUROLEiNTK.   TRAITEMEIIT.  "219 

maladie  d'une  extrême  gravité,  et,  dans  la  intijorité  des  faits,  elle  tnc 
eeox  qu'elle  frappe  ;  mais  en  présence  des  cas  particuliers  il  convient  de 
tenir  compte,  pour  établir  le  pronostic,  de  conditions  multiples.  La  gra- 
vité varie  av«)c  les  causes  de  la  maladie,  avec  Tctal  général  des  malades, 
arec  leur  âge.  On  peut  espérer  une  terminaison  favorable,  lorsque  la  sup- 
puration survient  à  la  suite  d'une  pleurésie  simple,  ou  par  le  fait  d'un 
Iraumatisme  chez  un  enfant  jeune  et  vigoureux.  Quand  elle  atteint  un 
«vganismc  débilité  par  Tàge,  par  une  maladie  antérieure,  ou  par  une 
diathèse,  et  surtout  lorsqu'elle  est  secondaire  et  se  montre  dans  le  cours 
de  certaines  maladies,  la  fièvre  puerpérale,  la  pyoliérnie,  certaines  scar- 
latines, la  pleurésie  purulente  est  à  peu  près  constamment  n^ortelle. 

Tndtemeiit.  — Dans  la  pleurésie  séro-fibrineuse,  dès  que  la  plilegmn- 
sie  est  éteinte,  il  est  commun  de  voir  la  séreuse  cesser  de  produire  du 
liquide;  Tépanchement  se  résorbe  alors  spontanément  ou  avec  Taide  du 
Iraitement  médical  ;  s'il  tarde  à  disparaître,  une  simple  ponction  le  sup- 
prime^  et  le  plus  souvent  sans  retour.  Il  n'en  est  pas  ainsi  de  la  |)leuré- 
sie  suppurée  :  ici  le  kyste  pseudo-pleural  qui  s'est  substitué  à  la  plèvre 
est  prêt  à  verser  incessamment  sa  sécrétion  pathologique,  et  n^a  que  peu 
de  tendance  à  la  résorber.  Moutard-Martin  a  cependant  rapporté  un  cas 
de  pleurésie  purulente  guérie  spontanément  sans  tistule  et  sans  thoraccn- 
lèse;  mais  c^est  là  une  rareté,  et  la  guérison  ne  peut  guère  être  obtenue 
sans  que  le  pus  ait  été  évacué  au  dehors,  soit  spontanément  par  la  forma- 
tion d^une  listule,  soit  artificiellement  par  l'un  des  procédés  que  nous 
allons  indiquer.  Le  traitement  est  donc  avant  tout  chirurgical,  il  com- 
prend l'emploi  des  moyens  suivants  :  thoracentèse  simple  ou  accompagnée 
de  lavages  et  d'injections  modificatrices;  évacuation  continue  avec  lavages 
quotidiens  et  répétés,  par  l'emploi  des  canules  à  demeure,  du  drainage  et 
èi  siphon  de  Potain  ;  opération  de  l'empyème. 

Dans  le  cas  où  le  malade  atteint  de  pleurésie  purulente  est  tubcrcu- 
leuXy  il  faut  s'abstenir  de  toute  opération*  La  guérison,  déjà  douteuse  dans 
les  cas  simples,  devient  tout  à  fait  improbable  quand  la  pleurésie  suppu- 
rée compHque  la  tuberculose.  Néanmoins  Roger  conseille,  chez  les 
eofants,  une  conduite  opposée,  en  faisant  observer  que  le  diagnostic  posi- 
tif de  la  tuberculose  est  souvent,  chez  l'enfant,  tout  à  fait  impossible,  et 
que,  dans  le  doute,  il  ne  faut  pas  laisser  échapper  une  chance  de  guéri- 
ion,  si  faible  qu'elle  soit. 

L'ouverture  spontanée  de  l'abcès  pleural  par  la  paroi  thoracique  ou 
par  les  bronches  s'accompagne,  le  plus  ordinairement,  de  la  pénétration 
parla  fistule  externe  ou  interne  de  l'air,  dont  le  contact  détermine  l'alté- 
ration  putride  de  l'épanchement  ;  il  y  aura  avantage  à  prévenir  la  sortie 
du  pus,  cette  issue  au  dehors  ékint  d'ailleurs  plus  ou  moins  tnrdive,  et  à 
hirela  ponction  aussitôt  que  l'on  soupçonnera  la  suppuration.  La  thora- 
centèse sera  pratiquée  avec  le  trocart  ordinaire  ou  mieux  à  l'aide  d'un 
aspirateur,  dans  le  point  le  plus  déclive  de  la  poitrine,  de  lacon  à  éviter 
la  stagnation  du  pus. 
^        La  ponction  a  quelquefois  amené  la  guérison  par  simple  évacuation  du 


220  PLEURÉSIE.  —  p.  porulente.  —  TRAiTiiiraiT. 

liquide,  el  des  exemples  de  cure  radicale,  même  à  la  suite  d'une teoie 
thoraccnthèse,  ont  été  rapportés  par  Moutard-Martin ,  Hérard,  Bourdoo, 
Noèl  Guéneau  de  Mussy  et  d'autres.  C'est  surtout  dans  les  cas  aigu  et 
récents  que  Ton  arrive,  par  des  ponctions  successives,  à  tarir  la  aécrétioB. 
A  mesure  que  lo  kyste  revient  sur  lui-même,  le  trocart  aspirateur  ne  m- 
contre  plus  que  des  quantités  de  liquide  de  plus  en  plus  faibles.  BouduU 
et  G.  Dieulaiby  ont  relaté  des  exemples  où  Tépuisement  graduel  de  Ti- 
panchement  aboutissait  ainsi  à  la  guérison.  Ces  succès  ont  été  sutUmI 
observes  chez  des  enfants. 

Souvent,  à  la  suite  de  plusieurs  thoracentèses,  il  s'établit  un  trajet  b 
tuleux  par  l'un  des  trous  d'entrée  du  trocart,  le  pus  s'écoule  alors  peii 
peu  et  l'on  a  vu  cette  évacuation  graduelle  du  pus  amener  la  guérisoa; 
cet  accident  ne  se  produit  que  dans  les  ponctions  pratiquées  avec  le  tn> 
cart  ordinaire,  on  ne  l'observe  pas  quand  on  emploie  l'aspirateur. 

Mais,  comme  le  fait  remarquer  Peter,  la  guérison  ne  peut  pas  toujoun 
être  atteinte  par  la  simple  soustraction  du  liquide,  il  faut  s'opposo'ia 
reproduction  et  modifier  les  parois  du  kyste  suppurant,  en  attendant  que 
Ton  détermine  sa  cicatrisation  par  l'accolement  des  plèvres  riscénie  et 
pariétale.  Dans  les  cas  chroniques,  cette  dernière  condition  est  bien  diffi- 
cile à  obtenir  :  le  poumon  emprisonné  par  les  fausses  membranes  qoi  le 
brident  ne  peut,  si  elles  sont  épaisses  et  anciennes,  se  dilater  pour  s'aj^ 
pliquer  à  la  paroi  costale,  et  celle-ci  n'est  fias  toujours  asseï  dépreesiUi 
pour  aller  à  la  rencontre  du  poumon;  elle  ne  cède  guère  d'une  fatea 
efficace  que  chez  les  jeunes  sujets. 

La  thoracentèse  simple  est  donc  bien  souvent  insuffisante;  pour  aboi- 
tir  à  un  résultat,  elle  doit  être  réitérée  pendant  un  temps  quelquelbis 
très-long,  et  cette  sécrétion,  qui  se  répète  aussitôt  la  plèvre  vidée  ^  s'ac- 
compagne de  fièvre,  épuise  le  malade.  11  importe  donc  de  laver  le  kyste 
suppurant  et  d'en  modifier  la  surface  par  des  injections  d'eau  alcoolisée, 
phéniquée,  ou  d*une  solution  de  teinture  d'iode  iodurée.  Il  n'est  pas  me 
alors  de  voir  la  plourésie  guérir  après  un  petit  nombre  d*injectioiii 
iodées.  Mais  souvent  l'air  a  pénétré  dans  le  kyste  par  une  fistule  pleure* 
bronchique,  le  pus  s'altère,  et  il  devient  nécessaire  de  répéter  la  thon- 
centèse  à  des  intervalles  très-rapprochés  pour  éviter  la  stagnation  da 
liquide  putride  ;  on  doit  revenir  aux  lavages  plusieurs  fois  par  jour,  et, 
relTet  de  la  thoracentèse  devenant  insuilisant ,  il  faut  établir  on  des 
appareils  qui  permettent  l'écoulement  continu.  Mais,  l'emploi  de  ces  pro- 
cédés obligeant  à  un  traumatisme  qui  est  loin  d'être  inoffensif  comoM 
celui  de  l'aspiration,  il  est  évident  qu'on  n'y  doit  recourir  que  lorsque 
l'état  du  malade  est  assez  grave  pour  motiver  les  risques  que  l'on  va  lui 
faire  courir. 

Canules  à  demeure.  —  Elles  consistent  en  tubes  de  métal  ou  de 
caoutchouc.  Woillez  a  fait  construire  un  trocart  courbé  sur  le  plat,  qu'il 
introduit  entre  deux  côtes  et  dont  la  canule  plonge  par  son  extrémité  à 
la  partie  inférieure  de  la  plèvre  ;  une  baudruche  empêche  la  pénétratfOQ 
de  l'air  et  sert  à  faire  des  lavages.  G.  Dieulafoy  a  imaginé  un  trocart  (Le 


PLEURÉSIE.   p.    PURULENTE.   —   TRAITEMENT.  221 

^petit  diamètre,  dont  la  canule,  une  fois  on  place,  est  presque  paral- 
lèle i  la  paroi  interne  de  la  poitrine,  et  ne  peut  léser  le  poumon.  Cette 
eumle  porte  à  son  extrémité  externe  un  petit  disque  de  métal  ou  bou- 
clier, que  Ton  6xe  à  Taide  de  rubans  de  fil  passés  dans  les  fentes  qu'il 
«rie,  et  collés  à  plat  sur  la  peau  au  moyen  du  collodion.  Aussitôt  le 
veut  retiré ,  on  TÎsse  sur  la  canule  un  ajutage  à  robinet  qui  s'adapte 
l'aspirateur,  on  extrait  alors  le  liquide  et  l'on  pratique  des  lavages  et 
»  injections  médicamenteuses  ;  puis,  l'ajutage  étant  enlevé ,  on  ferme 
tube  avec  un  bouchon  à  vis  ou  obturateur.  On  peut  ainsi  réjjéter  Taspi- 
ition  et  les  lavages  aussi  souvent  qu'il  est  nécessaire 
Sbutard-Martin  donne  la  préférence  aux  canules  en  caoutchouc,  aux- 
ielles  il  trouve  l'avantage  de  ne  pas  blesser  le  poumon,  d'être  bien  tolé- 
«5  par  les  tissus  qu'elles  traversent,  sans  causer  aux  malades  de  dou- 
ars dans  les  mouvements.  Pour  les  appliquer,  on  emploie  un  trocart 
9  moyea  calibre,  dans  la  canule  duquel  le  tube  que  l'on  a  choisi  doit 
isser  facilement.  Avant  d'introduire  le  trocart,  on  glisse  à  la  base  de  la 
iDole  un  petit  disque  de  caoutchouc  percé  à  Temporte-pièce  d*un  ori- 
ce  central.  Le  trocart  étant  retiré,  on  glisse  le  tube  de  caoutchouc  dans 
t  canule,  pais  on  enlève  celle-ci,  en  maintenant  le  tube  dans  la  plèvre  et  la 
laqoe  de  caoutchouc  contre  la  paroi  thoracique.  Le  tube  étant  alors  retenu 
a  place  par  le  disque  de  caoutchouc  qui  le  serre  légèrement,  celui-ci  est 
xé  à  la  peau  par  une  petite  lame  de  baudruche  fixée  avec  le  collodion. 
Les  canules  métalliques  et  celles  de  caoutchouc  finissent  souvent  par 
âner  pénétrer  l'air,  soit  par  la  canule  elle-même,  soit  sur  ses  côtés  par 
largissement  de  l'orifice  d'entrée.  Aran  a  signalé  un  accident  difficile  à 
iqpliqoer  et  paraissant  déterminé  par  l'emploi  des  canules  métalliques, 
'ôl  le  développement  de  péritonites  surtout  lorsque  la  canule  est  à 
aoche. 

Drainage.  —  C'est  l'application  aux  abcès  de  la  plèvre  de  la  précieuse 
létiiode  vulgarisée  par  Chassaignac.  A  l'aide  d'un  long  trocart  courbe,  on 
éaèirei  la  partie  la  plus  déclive  du  thorax  dans  un  espace  intercostal, 
t  ronfaît  ressortir  la  pointe  de  l'instrument  à  une  certaine  distance,  soit 
iDS  le  même  espace,  soit  entre  deux  côtes  voisines.  Puis,  le  poinçon  étant 
Aire  et  la  canule  laissée  en  place,  on  y  mtroduit  un  drain,  c'est-à-dire 
e  tube  de  caoutchouc,  si  employé  en  chirurgie ,  qui  est  fenêtre  dans 
Mie  sa  longueur  ;  le  drain  étant  ressorti  par  Textrémitc  de  la  canule,  on 
élire  celle-ci,  en  maintenant  en  place  le  tube  en  caoutchouc  ,  dont  on 
èunitles  deux  chefs  par  un  fil.  Le  pus  s'écoule  alors  peu  à  peu  et  cesse 
le  n'accumuler  dans  la  poitrine.  Le  tube  à  drainage  permet  d'effectuer 
les  lavages,  mais  non  sans  difficultés,  le  liquide  sortant  souvent  par  les 
cMésdutubc  extérieur  au  thorax  ;  il  a  en  outre  l'inconvénient  de  laisser 
pénétrer  l'air  dans  la  plèvre,  et,  s'il  permet  l'évacuation  constante  et 
iMÀle  du  foyer,  il  finit  souvent  par  être  obstrué,  en  raison  du  petit  diamè- 
tre de  ses  orifices,  par  les  particules  solides  qui  flottent  dans  Tépanche- 
menl.  Le  manuel  opératoire  n'est  d'ailleurs  pas  toujours  des  plus  aisés, 
ei  il  est  quelquefois  difficile  de  faire  ressortir  la  pointe  du  trocart. 


ti22  PLEUHÉSIK.  —  p.  purulente,  —  taaitbxbkt. 

Siphon  de  Pofain,  —  Cet  appareil,  des  plus  ingénieux,  a  réalisé  un 
«rrnud  progrès   dans  le  traitement  de  la  pleurésie  purulente.  Pour  le 
construire  et  l'appliquer,  il  faut  introduire   dans  la  partie  déclife  de 
la  plèvre  un  tube  en  caoutchouc  de  trente  centimètres,  dont  les  deu 
tiers  environ  doivent  pénétrer  dans  la  poitrine,  Le  mode  d'introduction 
est  le  même  que  pour  les  canules  à  demeure  en  caoutchouc,  et  comme 
pour  celles-ci  l'extrémité  du  tube  est  engagée  et  légèrement  serrée  dtm 
i'oritice  central,  un  peu  étroit  pour  elle,  d'une  petite  plaque  de  caoot- 
cliouc  tixée  à  la  peau  à  Faide  de  la  baudruche  et  du  collodion.  Une  foii 
cette  canule  introduite,  le  pus  s'échappe  et  empêche  l'air  de  pénétrer 
dans  la  poitrine.  On  emploie  alors  un  tube  de  caoutchouc  bifurqué  en  Y, 
et  dont  la  branche  impaire  se  termine  par  un  petit  cylindre  de  verre  mi 
peu  eftilé  et  destiné  à  être  introduit  à  frottement  dans  l'extrémité  libn 
de  la  canule  thoracique.  Chacune  des  deux  branches  paires  se  relie  pareil* 
lement,  par  l'intermédiaire  d'un  petit  tube  de  verre,  à  des  tuyaux  de 
caoutchouc  longs  d'un  mètre  environ.  L*un  de  ces  tubes  plonge  dans  un 
vase  rempli  du  liquide  destiné  aux  lavages  et  placé  à  une  certaine  hau- 
teur au-dessus  du  lit  ;  l'autre  descend  dans  un  vase  destiné  à  recevoir  les 
liquides  qui  sortent  de  la  poitrine.  Tout  le  système  du  tube  en  Y  et  de 
ses  deux  longs  ajutages  ayant  été  préalablement  rempli  d'eau  et  fermé 
à  ses  trois  extrémités  à  l'aide  de  serres-fines,  on  introduit  dans  la  canule 
thoracique  le  tube  de  verre  qui  termine  la  branche  impaire.   Puis,  U 
pince  qui  ferme  celle-ci  étant  enlevée,  l'appareil  est  prêt  à  fonctionner, 
il  suflit  d'ouvrir  le  tube  inférieur,  en  ôtant  la  serre  fine,  pour  que  le  pus, 
sollicité  par  le  poids  de  la   colonne  d'eau,  s'écoule  rapidement.  Quasd 
Técoulement  a  cessé,  on  ferme  le  tube  inférieur,  on  ouvre  le  supérieur, 
et  le  liquide  destiné  aux  lavages  se  précipite  dans  la  plèvre  avec  une 
vitesse  qui  varie  suivant  qu'on  élève  plus  ou  moins  le  réservoir  supé- 
rieur. Pour  les  lavages,  on  emploie  de  l'eau  tiède,  purgée  d'air  par  Tébul- 
lition.  Lorsque  la  plèvre  est  remplie  de  liquide,  on  ferme  le  tube  supé? 
rieur  et  l'on  ouvre  le  tube  d'écoulement  ;  après  avoir  répété  plusieurs 
fois  cette  manœuvre,  et  lorsque  l'eau  qui  a  lavé  la  plèvre  en  sort  trao^ 
parente  et  limpide,  on  remplace,  dans  le  réservoir  supérieur,  Feau  par 
un  liquide  modificateur  ou  antiputride  :  eau  alcoolisée,  eau  phéniquée  oa 
teinture  d'iode  très-diluée;  celle-ci  a  malheureusement  l'inconvénientd'al^ 
téier  très-vite  les* appareils  de  caoutchouc,  ce  qui  peut  amener  la  rupture 
et  le  morcellement  du  tube  à  demeure  dans  le  thorax. 

Quel  (]ue  soit  l'appareil  employé,  il  arrive  un  moment  où  il  devient 
inutile  :  lorsque  la  cavité  purulenle  est  cicatrisée,  lorsque  les  parois  de 
la  poche  se  sont  accolées,  il  convient  d'enlever  l'instrument  qui  a  serri 
aux  lavages  et  a  donné  issue  au  pus.  On  reconnaîtra  que  la  guérisonest 
complète  loi*sque  l'orifice  de  la  canule  ou  du  drain  ne  laissera  plus  sortir 
que  quelques  gouttes  de  pus,  ou  lorsque  l'eau  des  lavages  ne  pénélnmi 
plus  qu'en  minime  quantité  dans  la  poitrine  et  ressortira  claire  et  sim 
être  troublée  par  le  pus.  Si  l'appareil  est  retiré  trop  tôt,  alors  qu'il  existe 
encore  une  cavité,  il  peut  se  faire  que  l'orifice  cutané  se  ferme  provisoi- 


PLtiURÉSIE.    —   p.    PIRULENTE.    TRAITEMENT.  22 


II* 


'»»  : 


i-cment  et  que,  le  pus  s*acciimulant  peu  à  peu  dans  la  pclile  poche  qui 
persiste,  de  nouveaux  accidents  se  reproduisent.  Quelles  que  soient  les 
précautions  prises,  il  reste  souvent  une  petite  fistule  qui  donne  à 
peine  quelques  gouttes  de  pus,  mais  dont  on  ne  peut  débarrasser  les 
malades. 

Moutard-Martin  établissant,  avec  l'incontestable  autorité  qu'on  lui  con- 
naît sur  ces  matières,  la  valeur  comparative  des  diftérents  modes  de  trai- 
tement que  nous  venons  d'indiquer,  donne  la  préférence  au  siphon  de 
Potain,  qui  vide  la  plèvre  à  fond,  et  permet  de  la  laver  aussi  complète- 
ment que  possible,  tout  en  s'opposant  à  Tentrée  de  Tair.  Il  place  ensuite 
à  peu  près  au  même  rang  le  drain  de  Chassaignac,  qui  évacue  complète- 
ment la  plèvre,  mais  ouvre  à  l'air  un  libre  accès  et  rend  les  lavages  diffi- 
ciles, et  les  canules  métalliques  ou  élastiques,  qui  facilitent  les  injections, 
mais  ne  vident  pas  toujours  très-bien  la  plèvre  et  finissent  par  laisser 
pénétrer  l'air. 

Nous  avons  vu,  à  propos  de  Tanatomie  pathologique ,  qu'il  est  des 
variétés  de  pleurésie  purulente  qui  sont  rebelles  à  tous  les  traitements  : 
ce  sont  les  pleurésies  sup|mrées  multiloculaires,  dans  lesquelles  la  tho- 
racentèse  ouvre  une  ou  plusieurs  loges,  sans  que  la  communication  soit 
facile  entre  les  divers  compartiments,  de  sorte  que  les  lavages  n'ont  (ju^un 
effet  incomplet  et  ne  sauraient  empêcher  Taltération  putride  du  piis  dans 
les  cavités  soustraites  à  son  action. 

L'emploi  de  la  thoracentèse  et  des  appareils  à  écoulement  contiim 
est  d'ordinaire  suivi  d'une  amélioration  persistante  ou  passagère  :  l'état 
général  s'amende  rapidement,  les  sueurs  nocturnes  disparaissent,  Pappé- 
tii  renaît,  la  diarrhée  cesse,  la  lièvre  tombe,  le  pus,  s'il  étiit  fétide,  sort 
inodore,  il  diminue  d'abondance  et  devient  plus  fluide.  Si  la  modifica- 
tion favorable  se  maintient,  la  guérison  survient,  et  après  un  délai  quel- 
quefois IrÂs-long  la  suppuration  se  tarit,  le  kyste  pleural  est  revenu  sur 
lui-même  et  la  plaie  extérieure  se  ferme  ou  laisse  une  fistule  qui  fournit 
à  peine  quelques  gouttes  de  pus. 

Mail,  trop  souvent,  cette  amélioration  est  éphémère,  et  tous  les  traite- 
ments que  nous  avons  passés  en  revue  sont  rendus  inutiles  par  la  com- 
position du  liquide  qui,  nous  le  savons,  n'est  pas  homogène  et  constitué 
exclusivement  par  du  pus,  mais  tient  en  suspension  des  flocons  tibrineux, 
des  lambeaux  de  pseudo-membranes,  des  hydatides,  parfois  même  des 
paquets  gangreneux  dus  au  sphacèle  des  couches  superficielles  du  pou- 
mon. Ces  débris  infiltrés  de  pus  pouvant,  nous  l'avons  vu,  se  putréfier 
et  amener  des  accidents  d'infection  putride,  il  importe  de  leur  ouvrir  une 
bsue  qu'ils  ne  peuvent  se  frayer  à  travers  des  tubes  plus  ou  moins  étroits, 
lors  donc  que,  malgré  l'emploi  des  canules  à  demeure,  du  drainage,  du 
siphon  de  Potain,  on  verra  se  reproduire  des  symptômes  fâcheux  de  putri- 
dite»  lorsque  le  pus,  redevenu  fétide,  sortira  chargé  de  grumeaux,  de 
<iélritus  plus  ou  moins  volumineux,  ou  bien  lorsque,  par  un  inconvénient 
Commun  à  ces  divers  appareils,  ils  seront  obstrués  par  les  produits  plas- 
tiques qui  nagent  dans  le  pus,  et,  refusant  tout  service,  exposeront  le 


224  PLEURÉSIE.  —  p.  porulente.  —  tràitbmeut. 

malade  aux  graves  accidents  de  la  résorption  putride,  il  faudra  sooffer 
alors  à  pratiquer  rempyème. 

Empyème.  —  L'opération  de  l'empyènrie  consiste  à  faire  entro  deu 
côtesy  à  la  partie  inférieure  de  la  poitrine,  une  large  ouverture  qui  per* 
mette  au  contenu  de  la  plèvre  de  s'échapper  facilement,  et  aux  iojee- 
tions  modilicatrices  ou  antiputrides  d'être  aisément  faites  et  réfè\ia 
à  volonté.  Moutard-Martin,  qui  a  tiré  de  ce  mode  de  traitement  des  résul- 
tats remarquables,  conseille  de  pratiquer  l'opération  comme  il  suit  :  on 
choisit  l'espace  intercostal  sur  lequel  portera  l'incision ,  c'est  générale- 
ment le  huitième,  mais  il  n'y  a  là  rien  d'absolu,  et  on  ne  peut  être  fixé  qm 
par  l'examen  du  malade,  d'après  la  forme  de  la  poitrine  et  la  directm 
plus  ou  moins  oblique  des  côtes.  On  trace  à  l'encre,  suivant  le  bord  sup^ 
rieur  de  la  côte,  une  ligne  longue  d'environ  six  centimètres  et  dépassânl 
en  arrière  la  ligne  axillaire  postérieure ,  puis  ou  attire  la  peau  un  pei 
en  haut,  et  on  l'incise  à  trois  ou  quatre  millimètres  au-dessous  du  trait 
marqué.  Ce  relèvement  de  la  peau  a  pour  but  de  rendre  l'incisioo  cuta- 
née un  peu  déclive  par  rapport  à  la  plaie  des  parties  profondes,  de  façon 
que  les  liquides  venant  de  la  plèvre  n'aient  pas  de  tendance  à  s'infil- 
trer dans  le  tissu  cellulaire  sous-cutané.  On  sectionne  ensuite  les  parties 
molles  jusqu'à  la  côte,  puis,  faisant  glisser  le  bistouri  à  plat  sur  son  bord 
supérieur,  on  incise  les  parties  profondes  jusqu'à  la  plèvre,  après  avoir 
introduit  dans  la  plaie  Tindex  gauche  qui  doit  guider  Tinslrument,  le 
débridement  de  la  plèvre  ne  devant  être  opéré  qu'après  qu*on  a  bico 
reconnu  avec  le  doigt  dans  quel  sens  on  peut  le  diriger  sans  courir  de 
risques  de  léser  un  organe  profond.  On  devra  prendre  soin  de  donner 
plus  d'étendue  à  la  plaie  extérieure  qu'à  l'incision  profonde,  de  telle  sorte 
que,  la  section  allant  en  s'évasant  du  fond  à  la  surface,  l'air  ne  puisses'in- 
fdtrer  dans  les  tissus  par  le  fait  des  mouvements  respiratoires.  Une  fois 
la  plèvre  incisée,  le  pus  s'écoule;  on  fait  alors  des  lavages  à  grande  eau, 
pour  enlever  ce  qui  peut  rester  de  pus.  La  plaie  doit  être  maintenue 
béante,  à  l'aide  d'une  lame  mince  de  caoutchouc  découpée  en  lanières  et 
mtroduite  dans  la  plaie,  pendant  que  l'extrémité  libre  est  collée  à  la  peau 
avec  de  la  bautiruche.  Toute  tentative  pour  s'opposer  à  l'entrée  de  l'air 
est  vaine  et  va  à  l'encontre  du  but  que  l'on  se  propose,  de  laver  aisément 
la  plèvre  et  de  laisser  une  grande  facilité  à  l'issue  du  pus. 

Pour  faire  les  lavages ,  Moutard-Martin  fait  coucher  le  malade  sur  le 
coté  sain,  et  après  avoir  mis  en  place  la  canule  thoracique  du  siphon  de 
Potain,  appareil  au(|uel  il  donne  ajuste  titre  la  préférence,  il  remplit  h 
plèvre  d'eau  légèrement  iodée,  qu'il  évacue  ensuite  par  la  branche  infé- 
rieure du  siphon.  Ce  système  a  l'avantage  de  mettre  toute  la  surfaoe 
malade  en  contact  avec  le  liquide  modificateur,  et  de  ne  pas  agir  avec 
violence,  ce  qui  romprait  les  adhérences. 

A  l'aide  de  cette  opération  combinée  avec  l'emploi  du  siphon  dePotain,^ 
Moutard-Martin  a   obtenu   douze  guérisons  sur  dix-sept  cas.  Des  cin(| 
malades  qui  succombèrent,  l'un  avait  des  cavernes,  un  autre  était  suspect 
de  tuberculose,  un  troisième  avait  une  pleurésie  à  plusieurs  loges,  doti| 


PLEURÉSIE.   —  TBAITBMENT.  225 

les  lavages  ne  pouvaient  modifier  qu'un  petit  nombre,  le  pus  s'altéraut 
dans  les  autres  et  amenant  Tinfection  putride.  Il  convient  d'ajouter  que 
la  proportion  des  guérisons  n'est  pas  toujours  aussi  considérable,  et  que» 
depuis  la  publication  de  Texcellent  travail  du  médecin  de  l'Ilôtel-Dicu» 
on  a  rapporté  un  certain  nombre  de  cas  de  mort. 

L'opération  de  l'empyème  est  souvent  préférable  à  tous  les  autres  pro- 
cédés, non-seulement,  à  cause  de  l'issue  continuelle  du  pus,  de  la  faci- 
lité des  injections  et  des  lavages,  mais  surtout  parce  que  seule  elle  permet 
la  sortie  de  tous  les  produits  solides  contenus  dans  la  cavité  pleurale, 
quels  qu'en  soient  le  volume  et  la  nature. 

La  gaérison  de  la  pleurésie  purulente  est  souvent  très-longue  à  se  pro- 
duire k  la  suite  de  l'empyème  ;  après  l'opération,  il  survient  d'ordinaire 
une  amélioration  marquée,  puis  la  suppuration  reprend  de  l'odeur,  des 
signes  d'infection  putride  surviennent  ;  mais  sous  l'influence  de  lavages 
plus  multipliés,  d'une  alimentation  plus  réparatrice,  les  accidents  tom- 
bent: peu  à  peu  la  cavité  pleurale  diminue  de  capacité,  ce  que  l'on  recon- 
naît à  la  quantité  de  liquide  de  moins  en  moins  grande  qu'elle  admet 
lors  des  lavages  ;  puis  au  bout  d'un  temps  assez  long,  variant  de  quel- 
ques semaines  à  plusieurs  mois,  la  cavité  se  comble  complètement,  les 
iniections  ne   pénètrent  plus  et,  dans  l'intervalle  des  pansements,  il 
s'écoule  seulement  quelques  gouttes  d'un  liquide  à  peine  louche.  Quel- 
quefois la  guérison  du  kyste  pleural  est  semée  d*épisodes  inquiétants,  et 
d'alternatives  où  l'on  voit  reparaître  les  symptômes  de  putridité.  Comme  à 
la  suite  des  autres  opérations,  on  voit  ici  des  fistules  persister  après  la  gué- 
rison, et  résister  à  tous  les  efforts  du  médecin.  Enfin,  dans  un  certain  nom- 
bre de  eaSy  la  suppuration  est  intarissable,  le  kyste  n'a  aucune  tendance 
à  la  cicatrisation  et  les  malades  meurent  épuisés  par  la  fièvre  hectique. 
Malgré  ses  avantages,  Tempyème  impose  aux  malades  une  opération 
grave  à  laquelle  il  ne  faudra  jamais  recourir  que  lorsque  des  accidents 
sérieux  mettront  la  vie  en  danger  :  il  sera  donc  sage  de  n'en  venir  à  cette 
extrémité  qu'après  avoir  essayé  des  procédés  exigeant  un  traumatisme 
moindre  :  la  thoracentèse  avec  injections,  le  trocart  de  Dieulafoy,   le 
siphon  de  Potain  (Voy.  art.  Poitrine,  thoracentèse). 
^        Le  traitement  médical  n'a,  dans  la  guérison  de  la  pleurésie  suppurée, 
^p'onc  influence  secondaire  qu'il  sera  bon,  néanmoins,  de  ne  pas  négli- 
*     ^.  Les  malades  chez  lesquels  on  est  amené  à  pratiquer  l'ouverture  de 
'^  '  la  plèvre  sont  souvent  dans  un  état  de  cachexie  et  de  dépérissement 
'P*  «8861  marqués;  on  devra  faire  appel  à  tous  les  agents  thérapeutiques  de 
'  'l  sature  à  relever  les  forces  et  à  favoriser  l'effort  qui  s'opère  vei^s  la  guéri- 
^^^ ^OD  :  alimentation  réparatrice  et  de  facile  digestion,  viande  crue,  vin  pur 
'"^^   ^alcool  en  petite  quantité,  quinquina,  arséniate  de  soude,  etc.  Duboué 
p    C^Pau)  a  conseillé  l'usage  du  tannin  à  haute  dose,  dont  il  aurait  éprouvé 
/^es  bom  résultats  pour  tarir  la  suppuration.  La  diarrhée,  si  elle  se  pro- 
^^^t,  devra  être  combattue  par  les  agents  spéciaux  qu'elle  indique  ;  mais 
:,^vent  cette  diarrhée  est  liée  à  l'odeur  fétide  du  pus  :  elle  est  un  symp- 
'  '  ^ine  de  putridité  et  elle  disparait  quand  le  pus  cesse  de  s'altérer. 

■ocT.  Mcr.  Ni».  R  cm.  IXYUI  — 15 


226         PLEURÉSIE.  —  p.  hémorrhagique.  —  causes.  PÂTHOcâiiB 

On  fera  bien,  comme  le  Fecommande  Moutard-Martio,  de  multiplier 
les  lavages,  dont  l'insufGsance  est  souvent  la  seule  cause  des  échecs,  et  de 
placer  les  malades  de  façon  que  Touverture  pleurale  soit  à  la  partie  b 
plus  déclive,  ce  qui  rendra  l'écoulement  facile. 

Pleurésie  hémorrhagique.  —  L'épanchement  de  la  pleurésie  simple  est 
chargé,  nous  l'avons  vu,  d'un  grand  nombre  de  leucocytes,  il  contient 
aussi  une  quantité  considérable  de  globules  rouges,  et  ces  demien  ae 
font  pas  plus  la  pleurésie  hémorrhagique  que  les  premiers  ne  conrti- 
tuent  la  pleurésie  purulente.  Dans  la  pleurésie. franche,  le  liquide  potf 
renfermer  de  600  à  5  ou  4,000  globules  rouges  sans  que  sa  coloratioi 
en  soit  troublée  ;  le  liquide  est  alors  histologiquement  hémorrhagique, 
comme  l'appelle  G.  Dieulafoy,  et  pour  lui  cette  richesse  de  l'épanché* 
ment  en  globules  rouges  constituerait  une  phase  spéciale  de  la  pleurésie 
qui  doit  devenir  purulente,  phase  analogue  à  la  période  d'engouement, 
de  congestion,  de  la  pneumonie  et  des  autres  phlegmasies. 

Pour  qu'un  épanchement  mérite  la  qualification  d'hémorrhagîque  il 
faut  qu'il  renferme  des  hématies  en  telle  proportion  que  la  coloration 
rosée  ou  rouge  du  liquide  en  trahisse  la  présence. 

Causes,  pathos^énie.  —  Sous  rinflucnce  des  idées  de  Trousseau  et 
de  Barth,  on  est  accoutumé  à  considérer  la  pleurésie  hémorrhagique 
comme  étant  presque  toujoui^s  d'origine  cancéreuse  ;  il  est  certain  que 
Yhémoihorax  est  fréquemment  lié  au  cancer  du  poumon  et  de  la  pierre, 
mais  il  y  a  une  grande  exagération  à  regarder  les  deux  termes  comme 
synonymes.  D'une  pnrt,  en  effet,  un  bon  nombre  de  pleurésies  hémor- 
rhngiques  ne  relèvent  pas  du  cancer,  et  d'ailleurs  l'épanchement  dû  au 
cancer  est  loin  d'être  toujours  hémorrhagique. 

La  pleurésie  hémorrhagique  peut  être  simple  et  indépendante  d'une 
affection  organique,  l'hcmorrhagie  est  alors  purement  la  conséqueDoe  de 
la  phleginasic  ;  elle  peut  être  liée  à  la  tuberculose  miliairc  pleuro-pulmo- 
nairc,  au  cancer  du  poumon  ou  de  la  plèvre  ;  on  l'observe  encore,  mail 
plus  rarement  dans  les  fièvres  graves,  dans  la  rougeole,  le  purpura,  le 
scorbut,  et  enfin  dans  certaines  affections  dyscrasiques  dues  à  des  lésions 
rénales,  hépatiques,  ou  même  spléniques.  L'épanchement  hématique  est 
fréquent  lorsque  la  phlegmasie  est  la  conséquence  d'un  traumatisme; 
enfin  le  liquide  devient  sanglant  à  la  suite  d'une  aspiration  trop  éner- 

Quand  l'hémothorax  est  simple  il  est  tantôt  lié  à  la  pleurésie  séro4ibri- 
neuse  commune,  et  tantôt  résulte  de  la  présence  des  néomembraoes. 
Dans  le  premier  cas,  Théniorrhagie  est  due  à  la  violence  du  processus 
phleginasique  :  les  petits  vaisseaux  de  la  plèvre  subissent  une  dilatatioa 
anormale,  la  poussée  fluxionnaire  peut  être  assez  forte  pour  les  rompre, 
il  en  résulte  une  hémorrhagic  plus  ou  moins  abondante;  celle-ci  alieii 
soit  par  rupture  des  vaisseaux  de  la  plèvre,  soit  par  diapédése  ;  elle  est 
contemporaine  de  l'exsudation  fibrineuse  et  due  à  l'intensité  de  la  pUeg- 
masie  qui  l'a  produite. 

jL'ciutrc  forme  d'hémothorax  inflammatoire  simple  est  analogue  pour  le 


■■A.-J 

21 


PLEURESIE.   —  p.   UéMORRHAGIQUE.   —  DIAGNOSTIC.    PRONOSTIC.  227 

mécanisme  à  la  pachyméningite,  à  la  péricardite  et  à  la  péritonite  hé- 
morrfaagique,  à  ï'hématocèle  de  la  vaginale;  c'est  un  véritable  héma- 
tome pleural  ou  pleurésie  néo-membraneu«e.  La  pseudo-membrane  fibri- 
neuse  est  envahie  à  une  période  plus  ou  moins  avancée  de  la  maladie 
par  le  tissu  embryonnaire,  qui  forme  bientôt  des  néomembranes  orga- 
nisées et  parcourues  par  des  vaisseaux  nouveaux  à  parois  minces  et 
fragiles.  La  persistance  de  l'inflammation  ou  de  nouvelles  poussées 
phlegmasiques  peuvent  congestionner  ces  vaisseaux  et  en  provoquer  la 
rupture  :  il  se  produit  alors  dans  le  kyste  néo-membraneux  une  hé- 
morrhagie  exactement  semblable  par  son  mécanisme  à  l'hématome  de 
la  dure-mère.  L'épanchement  sanguin  offre  de  nombreuses  variétés  de 
couleur  et  de  quantité  :  ordinairement  il  est  rougcàtre,  quelquefois  san- 
glant, contenant  ou  non  des  caillots  ;  il  peut  être  assez  abondant,  et  Ton 
a  pu  extraire  par  la  ponction  jusqu'à  4  litres  de  liquide  scro-fibrineux 
inflammatoire,  ou  purement  séro-sanguin. 

L'hémothorax  peut  accompagner  la  pleurésie  tuberculeuse.  D'après  les 
recherches  de  R.  Moutard-Martin,  c'est  seulement  dans  la  tuberculose 
miliaire  pulmonaire  ou  pleuro-pulmonairc  que  l'on  rencontre  un  épan- 
cheraeot  hémorrhagique.  Les  granulations  tuberculeuses  siègent  soit  dans 
la  plèvre  elle-même,  soit  dans  le  parenchyme  du  poumon  au  voisinage 
de  la  surface,  soit  entin,  et  c'est  là  leur  disposition  la  plus  fréquente, 
dans  Tépaisseur  des  fausses  membranes  organisées  dues  à  l'inflammation 
pleurale  ;  c'est  la  rupture  de  leurs  vaisseaux  qui  fait  suinter  le  sang  dans 
la  cavité  pleurale.  L'épanchement,  de  teinte  plus  ou  moins  foncée,  est 
ici  peu  abondant,  il  dépasse  rarement  un  litre. 

Dans  l'hémothorax  cancéreux  le  snng  peut  être  versé  par  les  vaisseaux 
de  produits  inflammatoires  développés  sur  la  plèvre  au  voisinage  du 
néoplasme,  mais  il  peut  venir  aussi  soit  des  vaisseaux  de  la  tumeur  elle- 
même,  soit  de  ceux  que  le  produit  nouveau  rencontre  dans  sa  marche,  et 
dont  il  détermine  l'ulcération.  Le  premier  cas  seulement  constitue  la 
pleurésie  hémorrhagique  cancéreuse.  Le  siège  primitif  du  cancer  est  ra- 
rement dans  la  plèvre,  quelquefois  il  est  dans  le  poumon,  mais  il  est 
bien  plus  commun  que  ce  dernier  organe  ne  soit  pris  que  secondaire- 
ment, souvent  le  point  de  départ  du  mal  est  dans  les  ganglions  du 
,      nédiastin.  R.  Moutard-Martin  signale  la  disposition  multiloculaire  des 

fausses  membranes  qui  accompagnent  la  pleurésie  cancéreuse. 
^^  La  présence  du  sang  dans  le  liquide  pleurétique  extrait  par  la  thora- 
^l^  cenkèse  peut  être  encore  due  à  une  aspiration  trop  rapide  et  trop  complète  ; 
^r  ^  arrive  alors  que  les  vaisseaux  des  fausses  membranes  se  rompent  soit 
]U'  P^^  une  expansion  trop  brusque  du  poumon  déchirant  les  néomem- 
xii  Crânes  qui  le  brident,  soit  par  un  afflux  trop  précipité  du  sang  dans  les 
Cl     ^aisseaux  longtemps  comprimés,  lors  de  la  disparition  subite  de  l'épan- 

t:   ornent. 
j  [■       Diaipiostic.  Pronostic. — La  pleurésie  hémorrhagique,  quelle  qu'en 

^it  l'origine,  n'a  pas  de  symptômes  spéciaux;  une  fois  l'épanchcmcnt  con« 

j^  ^té,  à  l'aide  des  signes  physiques  ordinaires,  on  n'a  aucun  moyen  d'en 


228       PLEURÉSIE.  —  p.  hémorbhagiqvb.  —  diagnostic.  pROHotnc. 

reconnaître  la  nature.  Tout  au  plus  pourrait-on  soupçonner  que  le  liquide 
est  hématique,  s'il  existait  des  signes  de  tuberculose  miliaire,  pleuro-pnl- 
monaire,  ou  des  symptômes  de  tumeur  cancéreuse  thoracique,  et  qu'en 
même  temps  on  trouvât  à  l'auscultation  le  signe  de  Baccelli  indiquant 
que  le  liquide  n'est  pas  purement  séreux.  Dans  le  cas  de  cancer  pleuro- 
pulmonaire,  on  n'aurait  encore  qu'une  présomption  sur  l'existence  d'un 
épanchement  hémorrhagique,  car  les  recherches  de  R.  Moutard-Martin 
établissent  que  dans  le  cancer  thoracique  l'épanchement,  qui  n'existe 
que  trois  fois  sur  huit,  n'est  hémorrhagique  qu'une  fois  sur  trois. 

Presque  toujours  il  en  faudrsr  venir  à  la  thoracentèse  pour  être  éclairé  sur 
la  nature  du  liquide.  Lorsque  la  ponction  ne  sera  pas  simplement  explo- 
ratrice, mais  imposée  par  l'abondance  de  l'épanchement,  on  sera  prcsqiiè 
en  droit  d'exclure  Thypothèse  d'une  tuberculose,  le  liquide  étantdansce 
cas  rarement  assez  copieux  pour  exiger  la  thoracentèse.  L'examen  bisioio- 
giqiie  de  l'épanchement  pourra,  dans  quelques  cas,  fixer  le  diagnostic  en 
établissant  la  présence  d'éléments  qui  permettront  d'affirmer  l'origine 
cancéreuse  du  liquide. 

L'épanchement  hémorrhagique  étant  donné,  le  diagnostic  se  réduira  à 
en  connaître  la  cause  :  on  devra  songer  d'abord  au  cancer  dont  il  faudra 
chercher  la  trace  dans  les  antécédents  héréditaires  et  personnels  du  ma- 
lade. On  reviendra  sur  l'examen  de  la  poitrine,  qui  apprendra,  il  est  vrai, 
peu  de  choses,  lorsque  le  néoplasme  existera  à  l'état  d'infiltration,  mais, 
s'il  est  sous  forme  de  masses,  où  s*il  s'agit  d*une  tumeur  du  médiastin, 
on  pourra  constater  des  signes  de  compression   intra-thoracique  dus  a 
la  présence  d'une  tumeur,  et  une  adénopathie  bronchique  qui  se  répétera 
pour  les  ganglions  sus-claviculaires.  Un  œdème  de  la  paroi  thoracique 
plus  étendu  que  celui  de  la  pleurésie  purulente,  dû  à  la  gène  de  h  cir- 
culation  veineuse  et  limité  à  la  partie  sus-diaphragmatique  du  corps;  la 
dyspnée  et  le  cornage  par  compression  des  bronches  ou  de  la  trachée;  la 
toux  coqueluchoïde  ou  une  névralgie  intercostale  fixe  et  opiniâtre  par 
compression  des  cordons  nerveux,  auront  encore  une  grande  signification 
au  point  de  vue  du  cancer  ;  enfin  la  phlegmatia  et  les  signes  de  la  ca- 
chexie cancéreuse  ne  laisseront  aucun  doute.  Ajoutons  que,  en  pareil  cas, 
la  thomc.entèse,  après  avoir  évacué  un  épanchement  souvent  très-abondant, 
n'apporte  aucun  soulagement,  ne  modifie  en  rien  les  symptômes,  et  que 
la  plèvre  se  remplit  rapidement. 

La  pleurésie  hémorrhagique  simple,  bien  moins  rare  que  l'hémothorax 
tuberculeux,  est  la  seule  que  Ton  ait  intérêt  à  distinguer  promptement  de 
la  pleurésie  cancéreuse.  Le  diagnostic  est  aisé,  d'ordinaire  la  pleurésie 
hémorrhagique  simple  a  débuté  par  une  pleurésie  franche,  sans  antécé- 
dents d'aucun  genre;  la  ponction  modifie  rapidement  les  signes  locaux  et 
le  liquide  ne  se  reproduit  pas. 

On  reconnaîtra  la  pleurésie  tuberculeuse  à  la  minime-  quantité  du  li- 
quide et  aux  signes  insidieux  de  la  tuberculose  miliaire  pleuro-pulmo-    i^ 
nairc.  |£ 

Le  pronostic  de  la  pleurésie  hémorrhagique  est  subordonné  à  la  lésion 


PLEURÉSIE.   —  p.    CHRONIQUE.   —  ÉTIOLOGIE.    ANATOXIB  PATHOLOGIQUE.     229 

qui  lui  a  donné  naissance  ;  absolument  grave  dans  les  pleurésies  cancé- 
reuse et  tuberculeuse,  il  est  en  général  favorable  dans  la  pleurésie  hémor- 
rhagique  simple  pour  laquelle  la  première  ponction  est  d'ordinaire  cura- 
trice. Nous  avons  vu  quelle  valeur  G.  Dieulafoy  accorde  à  la  pleurésie 
histologiquement  hémorrhdgiquey  qui  serait  toujours  destinée  à  devenir 
purulente  ;  il  n'en  est  pas  de  même  de  la  pleurésie  franchement  hémorrha- 
gique  qui,  alors  même  qu'elle  ne  guérit  pas  dès  la  première  ponction  et  en 
exige  plusieurs,  persiste  à  l'état  hémorrhagique  et  ne  passe  pas  à  la  suppu- 
ration. Cependant  nous  avons  observé  à  rUôpital  Temporaire  un  cas  de 
pleurésie  hémorrhagique  simple,  dans  lequel  l'épanchement  assez  abon- 
dant et  composé  de  sang  presque  pur  résista  à  plusieurs  thorncenlèses 
après  chacune  desquelles  il  se  reproduisit  en  se  modifiant  graduellement, 
jusqu'à  devenir  franchement  purulent.  G.  Dieulafoy  a  cité  deux  faits  ana- 
logues, mais  ce  sont  là  des  exceptions,  et  d'ordinaire  la  pleurésie  hémor- 
rhagique simple  se  termine  rapidement  par  la  guérison. 

Pleubésib  chronique.  —  Lorsque  la  durée  de  la  pleurésie  dépasse  six 
semaines  ou  deux  mois  sans  tendance  à  la  guérison,  ou  lorsque,  dès 
le  début,  sa  marche  est  lente  et  silencieuse,  la  maladie  est  chronique. 

Elle  peut  succéder  à  la  forme  aiguë  franche,  ou  être  d'emblée  chro- 
nique; elle  peut  être  primitive  ou  simple,  ou  bien  secondaire  et  diathé- 
siqae. 

Étiolo§^ie«  —  Les  causes  de  la  pleurésie  chronique  simple  sont  celles 
de  la  pleurésie  franche  auxquelles  se  joint  l'influence  de  l'état  général;  il 
but  un  certain  degré  de  vigueur  pour  résoudre  une  phlegmasie  :  chez  les 
sujets  de  constitution  originairement  débile,  ou  qui  momentanément  sont 
alfaiblis,  chez  les  anémiques,  les  alcooliques,  l'inflammation  séreuse, 
n'ayant  pas  la  même  acuité  que  chez  les  individus  sains,  passera  facile- 
ment à  l'état  chronique  ;  un  traitement  irrationnel  ou  trop  peu  énergique 
aura  le  même  effet. 

Quant  à  la  pleurésie  secondaire,  souvent  chronique  dès  son  début,  elle 
est  d'ordinaire  liée  à  quelque  diathèse,  à  la  scrofule  et  surtout  à  la  tuber^ 
culose;  «  une  maladie  chronique  d'emblée  »,  dit  Peter,  «  est  une  maladie 
constitutionnelle  ».  La  pleurésie  chronique  est  donc,  le  plus  souvent,  une 
maladie  en  quelque  sorte  diathésique  chez  des  individus  entachés  de 
dispositions  morbides  innées  ou  acquises. 

La  maladie  peut  tenir  aussi  à  une  lésion  locale,  soit  des  parois  thora* 
tiques  (carie  costale,  tumeurs  du  sein),  soit  du  poumon  (cancer,  tuber- 
culose, etc.). 

inatomie  patholog^ique.  —  Les  détails  dans  lesquels  nous  sommes 
entré  à  propos  des  lésions  de  la  pleurésie  purulente  nous  permettront 
de  passer  rapidement  sur  les  caractères  nécroscopiques  de  la  pleurésie 
chronique. 

Ces  lésions  sont  très-analogues  à  celles  de  la  pleurésie  aiguë,  mais  avec 

un  développement  bien  plus  marque.  Les  néomembranes  dues  à  la  proli- 

fératioQ  des  éléments  conjonctifs  de  la  plèvre  sont  épaisses,  denees,  ré- 

antes  et  fortement  organisées;  elles  prennent  un  aspect  fibreux,  et 


250         PLEURÉSIE.  —  p.  chroniqub.  —  anâtomib  pathologique. 

peuvent  même  s'infiltrer  de  sels  calcaires .  et  former  des  plaques  osn- 
formes.  Le  travail  inflammatoire  peut  se  propager  de  la  plèvre  costale  au 
périoste  sous-jacent,  il  en  résulte  la  formation  à  la  face  interne  de  la 
côte,  entre  le  périoste  et  l'os,  d'une  concrétion  osseuse,  sorte  de  eôte 
surajoutée,  concentrique  à  la  première,  et  qui  donne  à  la  section  de  l'os 
une  figure  triangulaire  (Parise).  En  se  réunissant  d'une  face  à  l'autre,  les 
néomembranes  peuvent  former  des  adhérences  plus  ou  moins  étendues, 
ou  des  brides  allant  du  poumon  à  la  paroi  costale. 

Les  fausses  membranes,  adhérentes  à  la  paroi  ou  libres  dans  le  liquide, 
sont  assez  semblables  à  celles  de  la  pleurésie  aiguë,  mais  plus  épaisses, 
disposées  souvent  sous  forme  de  couches  stratifiées  d'âges  différents;  elles 
sont  devenues  très-résistantes,  fibroïdes  ou  même  cartilagineuses.  Elles 
peuvent  revêtir  toute  la  plèvre  en  formant  une  sorte  de  sac  ou  de  cavité 
close  incluse  dans  la  séreuse  :  c'est  le  kyste  pseudo-pleural  bien  décrit 
par  Oulmont.  Ce  kyste,  souvent  très- épais,  isole  complètement  l'épan- 
cheroent,  ce  qui  implique  Tinanité  des  moyens  employés  pour  activer  la 
résorption,  celle-ci  étant  diminuée,  sinon  complètement  supprimée  par 
l'épais  revêtement  pseudo-membraneux  qui  couvre  la  plèvre. 

Dans  la  pleurésie  tuberculeuse,  les  adhérences  du  poumon  aux  plèvres 
sont  communes.  Elles  sont  denses,  serrées,  résistantes,  et  sont  d'autant 
plus  dures  et  solides  que  le  point  du  poumon  auquel  elles  répondent  est 
plus  altéré;  au  sommet,  on  ne  peut  extraire  le  lobe  supQrieur  que  par 
lambeaux.  Les  fausses  membranes  dans  les  quatre  cinquièmes  des  autopsies 
sont  infiltrées  de  tubercules  rarement  à  l'état  de  granulations  miliaires, 
mais  sous  forme  de  plaques  caséiformes. 

Le  liquide  épanché  peut  être  limpide  et  citrin,  plus  souvent  il  est  troublé 
par  la  présence  de  flocons  fibrincux  et  de  globules  de  pus.  Il  peut  être 
épais,  jaune  verdàtre,  entièrement  purulent  ou  bien  d'une  couleur  plus 
ou  moins  foncée  due  à  la  présence  du  sang.  Quelquefois  les  parties  les 
plus  fluides  de  l'épanchement  peuvent  être  résorbées,  l'exsudat  prend 
alors  un  aspect  caséeux.  Les  flocons  pseudo-membraneux  et  les  leucocytes 
flottant  dans  répanchcment  peuvent,  quoique  rarement,  subir  la  méta- 
morphose granulo-graisscuse  et  former  avec  le  liquide  une  sorte  d'émnl- 
sion  reprise  par  les  lymphatiques  (N.  Gucneau  de  Mussy).  Quelquefois 
le  kyste,  revenu  sur  lui-même,  constitue  une  sorte  de  long  tube  cartila- 
gineux à  contenu  caséilorme  et  concret. 

Le  poumon,  refoulé  et  condensé,  est  réduit  à  un  petit  volume  :  il  peut 
avoir  à  peine  un  à  deux  centimètres  d^épaisseur.  Son  tissu  dense,  rou- 
geâtre,  camifié,  ne  crépite  plus  et  rappelle  l'état  fœtal  ;  il  peut  être  sain, 
mais  très-souvent  il  est  criblé  de  tubercules  plus  ou  moins  avancés.  Coiffé 
par  des  fausses  membranes  épaisses,  il  est  comprimé  contre  le  médiastin 
ou  le  rachis,  et  repoussé  vers  la  partie  supérieure  de  la  poitrine.  Débar- 
rassé des  fausses  membranes  qui  le  brident,  il  ne  reprend  plus  par  Tin- 
sufflation  son  volume  initial. 

Comme  nous  le  verrons  plus  loin,  lorsque  le  liquide  s'est  résorbé  en 
partie,  la  paroi  thoracique  subit  des  déformations  caractéristiques. 


PLEURÉSIE.    —  p.    CHRONIQUE.    —  SYMPTÔMES.  231 

La  pleurésie  chronique  est  très-souvent  partielle,  et  limitée  aux  parties 
dcclives;  elle  peut  être  sèche  même  dans  la  forme  simple,  mais  bien 
plus  fréquemment  chez  les  tuberculeux;  alors  aussi  elle  est  partielle, 
mais  localisée  au  voisinage  du  sommet. 

Sjflaptômc».  —  La  pleurésie  chronique  peut  commencer  par  l'état 
aigo  dont  elle  est  un  mode  de  terminaison,  ou  bien  être  primitivement 
chronique;  ces  deux  formes  ne  diffèrent  qu'au  début,  une  fois  l'épan- 
chement  formé,  elles  se  confondent  dans  une  symptomatologie  commune. 
Lorsque  la  pleurésie  aiguë  aboutit  à  l'état  chronique,  la  transition  est 
quelquefois  marquée  par  la  disparition  complète  de  la  fièvre  et  de  la  dou- 
leur avec  persistance  des  signes  physiques  ;  mais  souvent  elle  est  difficile 
à  saisir,  et  l'on  ne  peut  s'aider,  pour  juger  le  début  de  l'état  chronique, 
de  la  durée  de  la  maladie,  une  pleurésie  aiguë  pouvant  devenir  chro- 
nique après  quinze  ou  vingt  jours;  dans  tous  les  cas,  une  durée  de  six  se- 
maines ou  deux  mois  implique  la  chronicité. 

Dans  la  forme  chronique  d'emblée,  le  début  est  très-insidieux,  et  ce 
D'est  qu'au  bout  d*un  temps  souvent  fort  long  qu'elle  se  caractérise.  11 
n'existe  pas  de  douleur  de  côté,  mais  une  simple  sensation  de  gêne  ;  la 
fièvre  est  nulle  ou  ne  parait  que  vers  le  soir;  la  toux  est  rare  et  sèche; 
ladppnée  à  peine  marquée  au  repos  ne  s'accuse  que  dans  les  mouvements 
TÎolents,  elle  ne  devient  notable  que  lorsque  Tépanchement  se  développe. 
Cet  état  de  simple  malaise,  qui  contraste  avec  la  gravité  de  l'affection, 
peut  se  prolonger  durant  des  semaines  et  même  au  delà.  Les  signes  phy- 
siques établissent  alors  la  présence  d'un  épanchement  peu  abondant  de  la 
plèvre. 

Quel  que  soit  le  mode  de  début,  à  yn  moment  donné  les  symptômes 
sootles  mêmes;  ils  sont  surtout  en  rapport  avec  l'existence  d'un  cpan- 
ciiement  considérable. 

Les  signes  physiques  sont  ceux  de  la  pleurésie  aiguë  :  néanmoins  le 
souffle  tubaire  et  les  bruits  pseudo-cavitaircs,  souffle  caverneux  ou  ampho- 
rique,  gargouillement,  sont  plus  fréquents  dans  la  forme  chronique 
qui  détermine  la  condensation  graduelle  du  poumon  et  le  refoulement 
de  son  tissu  sur  les  gros  tuyaux  bronchiques.  L'égophonie  est  ici  beau- 
coap  plus  rare  que  dans  la  pleurésie  commune;  exceptionnelle  au  début, 
elle  est  absolument  inconnue  dans  la  période  de  retour.  L'épanchement, 
souvent  si  considérable  dans  la  pleurésie  chronique,  entraîne  le  dé- 
placement des  viscères,  du  foie,  du  cœur,  de  la  rate  et  même  de  l'esto- 
mac. Il  y  a  alors  dilatation  de  la  poitrine  d  un  côté,  et  écartement  des 
espaces  intercostaux. 

Lorsque  la  pleurésie  est  sèche,  elle  est  caractérisée  par  des  frottements 
râpeux  le  plus  souvent  limites  au  sommet. 

La  marche  de  la  maladie  est  lente,  souvent  semée  d'exacerbations  avec 
accroissement  du  liquide;  celles-ci  indiquent  un  état  plus  aigu,  et  parfois 
à  la  suite  de  ces  poussées  inflammatoires  survient  une  amélioration. 

La  durée  de  la  pleurésie  chronique  est  illimitée  :  elle  peut  n'être  que 
de  trois  ou  quatre  mois,  ou  se  prolonger  pendant  six  mois,  un  an  et  plus. 


232  PLEVRËSIE.  —  p.  chronique  secondaire. 

C'est  surtout  dans  les  cas  d'épanchement  séreux  que  la  maladie  dure  très- 
longtemps. 

La  pleurésie  chronique  aboutit  à  la  guérison,  ou  se  termine  par  la  mort. 
Lorsque  la  maladie  doit  guérir,  l'état  général  s'améliore  longtemps 
avant  que  les  signes  physiques  en  disent  rien.  Bientôt  lamatiié  diminue 
d'étendue  et  d'intensité,  l'expansion  pulmonaire  revient  un  peu,  mais  le 
poumon  ne  reprend  jamais  son  volume  primitif;  le  thorax  dilaté  ne  réduit 
peu  à  peu,  la  paroi  suivant  le  retrait  du  liquide.  Cette  modification  n^est 
pas  toujours  sensible  à  la  simple  vue,  et  l'on  fera  bien  de  pratiquer  b 
mensuration  ;  l'emploi  du  ruban  métrique  fera  suivre  avec  précision  h 
marche  du  liquide  et  permettra  d'éviter  une  ponction  inutile,  à  une  pé- 
riode où,  le  liquide  étant  résorbé,  des  fausses  membranes  épaisses  don- 
neraient encore  de  la  matité  et  laisseraient  croire  à  la  persistance  di 
l'épanchement. 

La  guérison  complète  se  fait  attendre  très- longtemps  :  elle  n'est  obteoue 
qu'au  prix  d'un  rétrécissement  du  côté  malade;  il  peut  y  avoir  ainsi  une 
différence  de  quatre  ou  cinq  centimètres  d'un  côté  à  l'autre.  L'épaule  do 
côté  atteint  est  abaissée,  le  mamelon  est  situé  plus  bas  et  le  côté  ma- 
lade plus  court  que  le  côté  sain.  Le  rachis  finit  par  décrire  une  courbure 
dont  la  concavité  est  tournée  vers  la  lésion,  et  les  malades  semblent  s'in- 
cliner de  ce  côté,  ce  qui  donne  à  leur  allure  quelque  chose  de  la  claudi- 
cation. A  un  degré  moindre,  le  rétrécissement  est  partiel  et  borné  a  li 
partie  inférieure  du  thorax. 

La  terminaison  favorable  peut  succéder  à  l'établissement  d'une  fistnie 
pleuro-bronchique  ou  pleuro-cutanéc,  ce  qui  est  commun  dans  la  pleu- 
résie chronique  à  épanchement  purulent.  , 

Longtemps  même  après  la  disparition  de  l'épanchement,  la  respiration 
reste  incomplète;  le  côté  malade  conserve  toujours  une  élasticité  moindre, 
de  la  matité  et  de  la  faiblesse  du  murmure  respiratoire.  Les  malades  ne 
retrouvent  jamais  leur  état  primitif;  ne  respirant  presque  qu'avec  un 
seul  poumon ,  ils  conservent  une  tendance  à  la  dyspnée  et  s'essoufflentan 
moindre  mouvement. 

Quand  Tissue  est  fatale,  elle  arrive  lentement;  elle  est  annoncée  par 
un  dépérissement  graduel,  la  fièvre  hectique,  la  pâleur,  l'œdème  qui,  des 
parois  costales,  gagne  le  reste  du  corps  ;  il  y  a  des  sueurs,  de  la  perte  de 
l'appétit  et  des  forces,  une  diarrhée  fétide  et  l'état  cachectique.  Souvent 
une  double  perforation  pulmonaire  et  thoraciquc,  en  entraînant  l'altéra- 
tion putride  du  contenu  de  la  plèvre,  donne  le  signal  de  ces  fâcheux  acci- 
dents, qui  n'arrivent  guère  que  dans  la  forme  purulente.  La  mort  peut 
être  due  encore,  dans  les  cas  surtout  où  Tépanchement  est  séreux  et 
très-abondant,  à  une  suffocation  brusque,  à  une  syncope,  tous  accidents 
que  nous  avons  indiqués  dans  la  pleurésie  aiguë. 

Pleurésie  cimoNiQUE  secondaire.  —  Nous  avons  vu  qu'elle  peut  tenir 
à  des  lésions  locales  des  parois  thoraciques  ou  du  poumon,  mais  dans  h 
grande  majorité  des  cas  elle  dépend  de  la  tuberculose  ;  les  symptômes  da 
cette  variété  sont  les  mêmes  que  ceux  de  la  pleurésie  chronique  simple, 


PLEURÉSIE.  —   p.    CHRONIQUE   SECONDAIRE.  233 

mais  ils  empruntent  souvent  une  physionomie  spéciale  au  développement 
simultané  de  laphtliisie,  à  Tétude  de  laquelle  ils  se  rattachent  (Foy.  Phthisie 
puuiOMAiRE,  t.  XXVII,  p.  215).  Nous  nous  bornerons  à  passer  ici  en  revue 
les  différentes  formes  de  pleurésie  qui  sont  liées  à  la  tuberculose;  ce 
sont  :  1*  la  pleurésie  sèche ^  qui  siège  d'ordinaire  au  sommet  ;  elle  est 
due  à  de  petites  phlegmasies  partielles  déterminées  par  Tapparition  de 
granulations  sur  la  membrane  séreuse.  Ces  poussées  s'accompagnent  de 
la  formation  de  fausses  membranes  et  d'adhérences;  elles  donnent  lieu 
à  des  douleurs  thoraciques  spontanées  ou  provoquées.  Toutefois,  lorsque 
les  fausses  membranes  qu'elle  développe  sont  très-épaisses,  la  pleurésie 
sèche  peut  donner  un  peu  d'obscurité  du  son  de  percussion,  mais  on  la 
reconnaît  surtout  par  les  craquements  secs  et  les  frottements  que  per- 
çoit Foreille.  L'existence  d'une  pleurésie  sèche  du  sommet  est  très- 
signîGcative  :  elle  indique  d'une  façon  presque  certaine  la  présence  de 
tubercules  pulmonaires. 

2*  Tuberculose  pleurale.  Le  développement  de  granulations  tubercu- 
leuses sur  les  plèvres  peut  être  aigu  ou  chronique.  Dans  le  premier  cas, 
la  détermination  pleurale  est  une  des  manifestations  de  la  phthisie  aiguë; 
elle  est  souvent  accompagnée  de  tuberculose  séreuse  généralisée.  Elle  peut 
être  sèche,  mais,  le  plus  souvent,  elle  provoque  la  formation  d'un  épanche- 
ment,  et,  comme  la  poussée  granulique,  atteint  les  deux  plèvres,  l'épan- 
chement  est  double.  En  même  temps  on  observe  des  manifestations  abdo- 
minales. Le  diagnostic  de  cette  forme  de  pleurésie  est  facile  :  dissémination 
des  lésions,  6èvre  rémittente  avec  oscillations  très-marquées  de  la  courbe 
thermique,  état  typhoïde,  etc.  (Voy.  Phthisie  aiguë,  t.  XXVIl,  p.  321.) 

Lorsque  la  tuberculose  pleurale  est  chronique,  les  granulations  ont  leur 
évolution  ordinaire,  elles  se  développent  sur  les  plèvres  et  plus  souvent  en- 
core sur  les  néomembrancs,  où  on  les  trouve  sous  forme  de  plaques,  de 
masses  caséeuses.  L'épanchcmcnt  est  tantôt  séreux,  tantôt  il  est  séro-puru- 
lent;  la  nature  purulente  du  liquide  est  d'ailleurs  loin  d*étre  aussi  inti- 
mement liée  qu'on  l'avait  cru  à  la  tuberculose,  et  il  est  fréquent  de  trouver 
à  rautopsie  un  épanchement  purement  séreux  chez  des  sujets  morts  avec 
^       une  pleurésie,  à  une  période  avancée  de  la  phthisie,  tandis  que  dans  cer- 
^      tains  cas  de  pleurésie  purulente  on  ne  trouve  pas  traces  de  tubercules. 
^     Souvent  l'épanchement  est  double  et  prend  alors  une  valeun  diagnostique 
^      iorlaquelle  Louis  a  beaucoup  insisté  :  sur  cent  cinquante  pleurétiques, 
1  ^     il  n^avait  tu  d'épanchemenis  doubles,  en  dehors  du  rhumatisme,  que 
^     dans  la  gangrène  ou  dans  la  tuberculose.  L'apparition  d'un  épanche- 
^     ^ent  double  chez  un  sujet  sain  en  apparence  est  donc  une  présomption 
^^  de  tuberculose. 

^^       3*  Pleurésies  accidentelles.  Il  est  enfin  une  dernière  variété  de  pleu- 
''ésics  liées  à  la  phymatose,  ce  sont  celles  qui  se  produisent  accidentelle-* 
IJ  ■   ïïicnl  chez  un  tuberculeux  ou  chez  un  sujet  que  ses  antécédents  héréditaires 


tae 


exposent  à  le  devenir.  Il  est  probable  qu'il  faut  singulièrement  restreindre 
Je  nombre  de  ces  pleurésies,  qui  seraient  purement  fortuites  et  n'auraient 
Pas  pour  origine  une  lésion  antérieure  de  la  plèvre.  Nous  croyons,  avec 


234    PLEURÉSIE.  —  p.  chrokique  secondaire.  —  tràitemeh t. — bibuogramiie. 

Hcrard  et  Cornil,  que  dans  la  majorité  des  cas  les  pleurésies  qui  se  moo- 
treut  chez  les  tuberculeux  sont  dues  au  développement  des  granulationt 
dans  la  plèvre.  Dans  les  cas  où  une  pleurésie  développée  chez  un  sujet  saia 
en  apparence  a  été  suivie  à  plus  ou  moins  longue  échéance  de  Tapparitioa 
des  symptômes  de  la  phthisic  pulmonaire,  on  a  souvent  accusé  rafTectioo 
pleurale  d'avoir  provoqué  l'éclosion  des  tubercules  dans  le  poumon  ;  c'était 
l'opinion  de  Trousseau  et  celle  de  Grisolle.  Il  est  probable  que  la  lésîoQ 
suit  une  marche  inverse;  il  y  a  d'abord  des  granulations  limitées  à  la 
plèvre  qui  déterminent  une  pleurésie  qui  peut  guérir  et  reparaître  à  pia* 
sieurs  reprises;  tant  que  les  tubercules  sont  limités  à  la  séreuse,  la  saiiii 
peut  se  maintenir,  et  ce  n'est  que  lorsque  les  lésions  spécifiques  enva- 
hissent le  poumon  que  Ton  reconnaît  la  tuberculose.  La  marche  dei 
pleurésies  accidentelles  chez  les  tuberculeux  est  chronique  ou  subaiguê, 
Tépanchement  est  quelquefois  purulent  ou  séro-purulent,  bien  souveal 
aussi  il  est  séreux. 

Aran  avait  supposé  que  la  pleurésie  droite  était  plus  spécialement  en 
rapport  avec  le  développement  de  la  phthisie,  et  qu'un  épanchement  i 
droite  était  un  fâcheux  indice  et  une  menace  pour  l'avenir.  L'expérience 
basée  sur  un  grand  nombre  d'observations  n'a  pas  confirmé  ces  idées,  qui 
étaient  sans  doute  l'effet  d'une  généralisation  trop  prompte,  et  Ton  voit 
indifféremment  des  pleurésies  droites  ou  gauches  arriver  à  la  guérison, 
ou  être  suivies  de  symptômes  de  tuberculose. 

Traitement.  —  Lorsque  la  maladie  n'est  pas  trop  ancienne,  et  que 
le  processus  inflammatoire  n'est  pas  complètement  éteint,  on  pourra  toer 
quelques  avantages  de  l'emploi  des  révulsifs  cutanés,  vésicatoires,  tein- 
ture d'iode,  et  des  émissions  sanguines  locales  sous  forme  de  ventouses 
scarifiées,  si  l'état  des  forces  le  permet.  Quand  l'épanchement,  par  son 
abondance,  sera  un  danger  pour  le  malade,  si  le  cœur  est  déplacé,  s'il  y 
a  imminence  de  suffocation,  de  syncope  ou  d'accidents  graves,  on  poom 
otre  amené  à  pratiquer  la  thoracentèse  d'urgence. 

Si  enfin,  la  maladie  n'étant  pas  trop  ancienne,  on  peut  espérer  que  les 
fausses  membranes  qui  brident  le  poumon  pourront  encore  céder  et  lui 
permettre  de  reprendre  sa  place,  on  devra  tenter  l'aspiration  suivie 
d'injections  iodées.  Mais,  quand  la  pleurésie  date  de  loin,  on  doit  re» 
noncer  à  l'espoir  de  voir  les  deux  feuillets  de  la  plèvre  se  rapprocher  et 
venir  au  contact.  En  présence  d'une  pleurésie  tuberculeuse,  il  conviendra 
d'être  réservé  dans  l'emploi  de  la  thoracentèse,  et  de  ne  la  pratiquer  que 
pour  parer  à  des  accidents  sérieux  ;  en  dehors  de  cette  indication,  il  con- 
viendra de  s'abstenir  d'une  intervention  qui  n'aurait  aucune  espèce  de 
chances  curatives  et  amènerait  à  peine  un  soulagement  éphémère. 

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Ch.  Fernet  et  Elg.  d'Heillt. 

PliEURODYIVIE.  —  La  pleurodynic  (icXeupou  ^Suvr^,  douleur  de 
coté)  est  le  rhumatisme  musculaire  des  parois  thoraciques  ;  c'est  une  des 
espèces  les  'plus  fréquentes.  Rare  dans  Tenfance,  elle  est  plus  comnraoe 
chez  Tadulte  et  le  vieillard  ;  on  l'observe  aussi  plus  souvent  chez  les  gens 
adonnés  aux  afTections  manuelles  et  obligés  à  des  eiTorts  violents. 

On  a  rarement  l'occasion  de  pratiquer  l'examen  nécroscopique  des 
muscles  atteints,  et  lorsqu'une  maladie  intercurrente  entraine  la  mort, 
on  n'observe  guère  que  des  résultats  négatifs.  Il  n'existe  aucune  inodiG- 
cation  dans  la  couleur,  le  volume  ou  la  consistance  des  muscles,  et  si 
quelquefois  on  a  trouvé  de  la  suppuration,  c'est  qu'on  a  pris  pour  le 
rhumatisme  musculaire  un  phlegmon  sous-aponévrotique  ou  un  abeès 
mctastatiquc.  Si  raffection  est  chronique  et  ancienne,  il  peut  cepeodânl 
y  avoir  décoloration  et  atrophie  du  tissu  musculaire,  mais  c'est  là  une 
lésion  consécutive.  Parfois  on  trouve  des  altérations  plus  profondes,  et  h 
plèvre  est  intéressée.  La  phlegmasie  rhumatismale  portant  sur  les  mus- 
cles pectoraux  et  grands  dentilés  peut,  surtout  quand  elle  est  violente, 
s'étendre  aux  muscles  intercostaux,  à  leur  aponévrose  profonda  et  i  h 
plèvre  pariétale;  on  trouve  alors  à  l'aulopsie  un  exsudât  fibrineui 
limité  à  la  plèvre  costale  et  qui  est  le  vestige  d'une  pleurésie  sèche.  L'in- 
flammation rhumatismale  peut  même  aller  plus  loin,  et  donner  lieu  i 
l'exsudation  d'un  épanchement  liquide  en  faible  quantité. 

Symptômes.  —  C'est  une  affection  le  plus  souvent  purement  locale, 
sans  réaction  fébrile,  ou  provoquant  à  peine  un  peu  de  malaise  géoénL 
Plus  rarement  le  début  est  marqué  par  du  frisson,  de  la  fièvre,  de  la  cou^ 
bature,  de  l'insomnie,  mais  le  mouvement  fébrile  tombe  rapidemeuL 
Une  fois  déclarée,  et  quel  que  soit  son  mode  de  début,  la  pleurodynic  se 


: 


\ 


PLEURODYNIE.  —  symptômes.  239 

tradait  par  deux  symptômes  essentiels  :  la  douleur  et  la  gène  des  mou- 
Temeots  musculaires. 

La  douleur  est  lancinante,  vive,  plus  forte  que  celle  de  la  pleurésie, 
s^exispérant  par  la  toux  et  les  grandes  inspirations,  qui  restent  limitées 
eifflcomplètes.  Au  lieu  d'être  vive,  la  douleur  peut  être  sourde  et  obtuse; 
iitts  les  cas  intenses  la  pression  Texaspère  d'une  façon  bien  marquée. 
Quelquefois  limitée  à  un  point  restreint,  et  surtout  au  voisinage  du  ma- 
melon, d'autres  fois  elle  est  diffuse,  répartie  sur  une  large  surface  et  non 
bornée  à  un  foyer  circonscrit.  Elle  peut  atteindre  les  deux  côtés  de  la 
poitrine,  mais  elle  est  plus  commune  à  gauche,  son  siège  varie  d'ailleurs 
a?ee  les  muscles  atteints.  Elle  occupe  souvent  le  grand  pectoral,  soit 
ians  une  grande  partie  de  son  étendue,  soit  seulement  au  niveau  de  ses 
nsertions  costales  ;  on  la  voit   aussi  affecter  les  digitations  du  muscle 
^nd  dentelé.  Moins  fréquemment  elle  répond  aux  insertions  acromiales 
lu  deltoïde,  aux  fibres  du  trapèze  et  du  grand  dorsal.  Elle  peut,  en  ré- 
umé,  occuper  tous  les  muscles  superficiels  ou  profonds  de  la  paroi  tho- 
acique.  Dans  les  cas  légers  la  pression  est  indifférente,  ou  même  elle 
aime  la  souffrance;  mais,  quand  Taffeclion  est  intense,  si  Ton  saisit  à 
leines  mains  les   masses  charnues,  la   douleur   devient   très-vive.    Il 
'existe  pas  de  points  douloureux,   et  le  doigt  promené  dans  Tespace 
Qtercostal  ne  provoque  nulle  part  d'exacerbations. 
Les  mouvements,  aussi  bien  ceux  qu'exige  la  respiration  et  les  se- 
Misses  de  la  toux,  de  l'élernument,  qiie  ceux  qui  consistent  à  fléchir  ou 
étendre  le  tronc,  sont  difficiles  et  pénibles.  Pour  restreindre  la  con- 
netioa  musculaire,  les  malades  osent  à  peine  respirer,  et  s'ils  viennent 
.  s'onUier  et  à  faire  une  inspiration  profonde,   ils  s'arrêtent  brusque- 
lent  el  poussent  un  gémissement;  l'excursion  de  la  paroi  costale  est 
imîouée  du  côté  atteint,  el  le  bruit  vésiculaire  y  est  moins  prononcé. 
ans  les  cas  très-violents,  il  peut  exister  une  véritable  dyspnée,  et  si  la 
Uegmasie  s'est  propagée  à  la  plèvre,  il  y  a  de  la  toux  et   même  des 
ignés  d'auscultation  :  tantôt  du  frottement,  si  la  pleurésie  est  sèche, 
omme  c'est  le  cas  le  plus  ordinaire,  tantôt  du  souffle  et  de  l'égophonie, 
îf  j  a  épanchemcnt  séreux. 

L'aspect  extérieur  des  parties  n'est  nullement  modifié,  il  n'y  a  ni  clian- 
ment  de  coloration  de  la  peau,  ni  tuméfaction  appréciable. 
A  part  la  fièvre  qui  signale  quelquefois  le  début,  il  n'existe  pas  de 
mptômes  généraux.  Comme  dans  toutes  les  manifestations  du  rhuroa- 
me,  les  malades  ont  souvent  une  grande  tendance  aux  transpirations 
codantes. 

La  durée  du  rhumatisme  thoracique  est  variable,  il  peut  être  éphémère 
persister  durant  de  longs  mois  ;  il  peut,  tout  en  restant  localisé  au 
>rai,  abandonner  son  siège  initial  pour  envahir  d'autres  points,  ou 
m,  obéissant  aux  tendances  propres  au  rhumatisme,  il  quitte  les 
jsdes  atteints  pour  aller  frapper  d'autres  parties  du  système  muscu- 
re  plus  ou  moins  éloignées  ;  on  a  même  vu,  quoique  le  fait  soit  rare, 
Ite  forme  de  rhumatisme  aboutir  à  des  poussées  articulaires  qui  consti- 


240  PLEURODYNIE.  —  DiAcnosnc.  —  traitemeht. 

tuaient  en  quelque  façon  la  signature  de  la  diathèse  rhumatinak; 
Comme  toutes  les  manifestations  du  même  ordre,  le  mal  est  voué  «a 
récidives  provoquées  tantôt  par  les  fatigues  professionnelles,  tantôt  pir 
Taction  du  froid  humide. 

En  dehors  de  la  pleurésie  circonscrite,  déjà  peu  commune,  il  est  rare 
de  rencontrer  des  complications  dans  la  plcurodynie;  on  observe  quel- 
quefois  concurremment  une  bronchite  catarrhale  qu'on  a  considéiie 
alors  comme  un  rhumatisme  des  muscles  bronchiques.  Quant  à  Fendoeu^ 
dite,  à  la  péricardite,  à  la  pneumonie,  elles  sont  absolument  rares  et  ezecp 

tionnelles. 

Diagnostic.  —  La  pleurodynic  est  difficile  à  méconnaître;  ilon 
même  qu'elle  est  très-intense,  elle  n'a  guère  de  commun  avec  les  phleg- 
masies  des  viscères  thoraciques  que  les  quelques  phénomènes  fébrilei 
du  début,  la  douleur  de  côté  et  parfois  une  dyspnée  légère  ;  il  n'exbte  ni 
toux,  ni  crachats,  ni  signes  positifs  d'auscultation;  à  peine,  quand  k 
douleur  est  très-vive,  le  bruit  vésiculaire  est-il  un  peu  affaibli,  maison  ne 
perçoit  ni  râles,  ni  souffle,  ni  égophonie,  et  les  bruits  de  percussioa  sont 
normaux. 

Danslapéricarditc  la  douleur  de  côté  peut  faire  songer  à  la  pleurodjnie, 
mais  la  réaction  fébrile  intense,  la  dyspnée,  les  signes  de  percussion  et 
d'auscultation,  ne  permettront  pas  d'hésiter. 

La  douleur  de  la  névralgie  intercostale  est  plus  aiguë,  elle  8*accom* 
pagne  d'élancements  et  correspond  au  trajet  d'un  nerf  intercostal;  eUe 
est  localisée,  tandis  que  celle  de  la  pleurodynie  est  étendue  en  nappe; 
les  contractions  des  muscles  de  la  région  restent  sans  influence  sur  elle 
et  ne  l'exaspèrent  pas,  et  de  plus  la  pression  provoque  des  exacerbatiou 
douloureuses  dans  un  certain  nombre  de  points  assez  bien  détennioés, 
dont  le  plus  constant  siège  à  l'extrémité  postérieure  de  l'espace  inter- 
costal atteint,  au  niveau  de  la  gouttière  vertébrale.  Jamais  dans  la  pieu-  | 
rodynie  on  ne  cotistate  une  douleur  siégeant  uniquement  dans  deoi 
points  situés  à  une  grande  distance  l'un  de  l'autre,  comme  cela  arrive 
dans  la  névralgie  intercostale  ;  celle-ci  est  d'ailleurs  une  maladie  fré- 
quente, tandis  que  le  rhumatisme  des  parois  thoraciques  est  une  affe^ 
tion  rare,  et  bien  souvent,  d'après  Valleix,  on  a  dû  prendre  une  né- 
vralgie intercostale  pour  une  pleurodynie. 

Le  pronostic  de  la  plcurodynie  est  favorable,  elle  ne  devient  ftcheose 
que  par  sa  persistance,  ou  bien  lorsque,  très-violente,  l'inflammatioa 
musculaire  se  propage  à  la  plèvre.  Dans  ces  cas,  d'ailleurs  assez  rares,  k 
pleurésie  est  toujours  très-liniitée  et  le  plus  souvent  sèche. 

Traitement.  —  Dans  les  cas  légers  on  pourra  se  contenter  de 
l'application  locale  de  quelques  agents  narcotiques,  ou  de  Temploi 
de  révulsifs  légei^s  :  castaplasnies  laudanisés,  frictions  avec  le  baonn 
tranquille,  badigconnages  avec  un  mélange  à  parties  égales  de' 
teinture  d'iode  et  de  laudanum ,  application  d'un  sinapisme,  frictioni 
sèches  ou  avec  un  Uniment  irritant.  On  se  trouvera  bien  encore 
de  remploi   de   sachets  de  sable  chaud,    de    Tusage   de   compreseei 


PLÈVRE.  —  PATHOLOGIE.  241 

imbibées  de  chloroforme,  qui  agissent  bien  moins  comme  calmant  qu'à 

titre  de  réfulsif . 
La  position  du  corps  est  ici  très-favorable  à  Tapaisement  des' douleurs» 
I    et  Tattitade  qui  met  dans  le  relâchement  les  muscles  affectés  amène 
'    toojoars  un  grand  soulagement. 

Sk  douleur  est  très-violente,  on  devra  recourir  aux  émissions  san- 
juaes  locales,  aux  sangsues  et  surtout  aux  ventouses  scarifiées.  Les 
léNcatoires  morphines  donnent  aussi  de  bons  résultats;  on  pourra  re- 
coorir  encore,  pour  amener  une  sédation,  aux  bains  tièdes,  aux  bains 
nuses,  et  surtout  aux  bains  de  vapeur,  dont  Teffet  est  de  provoquer 
une  forte  diaphorèse. 

Si  l'aiTection  tend  à  devenir  chronique,  on  fera  bien  de  prescrire  Tusage 
dei  douches  chaudes  avec  des  eaux  sulfureuses  ou  salines  ;  dans  ce  but 
«  devra  envoyer  les  malades  à  Luchon,  à  Baréges,  à  Aix  en  Savoie,  ou 
Inen  tu  Ihmt-Dore,  à  Néris,  à  Bourbonne.  On  pourra  recourir  enfin  à 
remploi  de  Félectricité  sous  forme  de  courants  constants. 

Pèor  prévenir  les  récidives,  on  devra,  après  la  guérison  prémunir  les 
rhoinaUsants  contre  Faction  du  froid  et  de  Thumidité,  et  leur  imposer 
fuage  de  la  flanelle.  Ils  devront  éviter  les  efforts  musculaires  violents 
et  répétés,  et  renoncer,  s'il  est  possible,  aux  professions  qui  les  exigent. 

Cmhbl  el  IlEQnsr.  Leçons  de  clinique  médicale,  Paris,  1834. 

CiBtiT.  Recherches  sar  le  rhumatisme  des  parois  Uioraciques  {Gazette  méd.,  12  a?ril  1854). 

^hnw.  Art.  Rhumatisme,  Dict.  de  méd.,  p.  578,  2*  édition. 

Tium.  De  k  né^nlgie  dorsale  ou  inlercostale,  Paris,  1840. —  Traité  des  névralgies  ou  affections 
taihwreuiei  des  nerfs,  Paris,  1841.  —  Guide  du  médecin  praticien,  5*  édition,  revue  par 
LtnÎB,  avec  le  concours  de  Fcrnet,  1. 1,  p.  342.  1867.  —  Etude  sur  le  rhumatisme  musculaire 
{BtOkim  ée  thérap.,  1848). 
Invr.  fniU  du  rhumatisme,  Paris,  1864. 

,  Pnn   De9  points  de  côté,  Clinique  de  la  PMié  et  J.eçons  de  clinique  médicale,  Paris.  1873. 

Ëug.  d^Heilly. 
PIJSUROSTHOTOIVOS.  Voy.  Tétai^os. 


Anatomie.  Voy.  art.  Poitrine. 

le.  —  Il  convient  de  distinguer  dans  les  maladies  des 
Relies  deux  groupes  bien  distincts  :  les  unes  sont  primitives,  affectant 
h  membrane  séreuse  exclusivement,  ou  du  moins  ne  développant  dans  les 
MMies  adjacentes  que  des  altérations  subordonnées  à  celles  de  la  plèvre 
ne-même  ;  les  autres  sont  secondaires  et  résultent,  soit  de  la  propaga- 
ion  de  maladies  des  organes  contigus  à  la  plèvre,  soit  même  de  maladies 
Torganes  éloignés  ou  de  maladies  générales. 

Parmi  les  maladies  primitives,  il  n'y  a  de  très-commune  et  de  vraiment 
■iportante  que  la  pleurésie  ;  la  plupart  des  autres  sont  des  raretés  patho- 
■laques  :  la  gangrène,  si  tant  est  même  qu'elle  puisse  affecter  la  plèvre 
■hb  intéresser  d'abord  au  moins  les  couches  superficielles  du  poumon, 
iB  tubercules,  le  cancer,  les  hydatides  et  d'autres  productions  morbides, 
■  montrent  quelquefois  dans  la  plèvre  à  l'exclusion  de  toute  autre  déter- 
iûuition  dans  d'autres  organes,  mais  il  est  bien  plus  fréquent  que  co^ 

50CT.   WCT.  MtD.  ET  CHIB.  WSIW  —  V^ 


24^2  PLÈVRE.   —  pathologie.   GARGRftHE. 

afTections  de  la  plèvre  résultent  de  Texteasion  de  maladies  anik 
occupant  le  poumon ,  le  mcdiastin  ou  d'autres  organes  ToisinSy  oo 
qu'elles  ne  soient,  comme  pour  le  tubercule  ou  le  cancer,  qu'oiu 
déterminations  locales  d'une  maladie  générale  qui  intéresse  en  n 
temps  les  autres  membranes  séreuses  ou  d'autres  parties  de  l'écono 
Quoi  qu'il  en  soit,  nous  dirons  quelques  mots  de  chacune  de  ces  mli 
pour  indiquer  ce  qu'elles  présentent  de  particulier  quand  elles  ooeD| 
les  plèvres. 

Les  maladies  secondaires  des  plèvres  sont  bien  plus  fréquentes  qa 
maladies  primitives,  bien  entendu,  si  l'on  excepte  la  pleurésie.  En  c 
outre  les  affections  que  nous  venons  d'énumérer  (cancer,  tubercules,  e 
elles  comprennent  encore  tous  les  épanchements  non  inflammiti 
qu'on  peut  observer  dans  les  plèvres,  notamment  les  épanchements  se 
qui  constituent  l'hydrothorax  et  les  épanchements  gazeux  qu'on  ri 
sous  la  dénomination  de  pneumothorax.  Bien  que  ces  deux  lérions  m 
habituellement  décrites  dans  les  livres  de  pathologie  interne  comiqc 
maladies  distinctes,  ce  ne  sont  pas,  à  vrai  dire,  des  maladies  de  lipié 
ce  sont  des  accidents  qui  viennent  compliquer  les  maladies  d^org; 
divers,  et  la  plèvre  n'est  que  le  réceptable  de  ces  épanchemoits, 
entrer  par  elle-même  pour  la  moindre  part  dans  leur  formation.  Ce 
dant,  sous  ces  réserves,  nous  devrons  étudier  l'hydrothorax  etlepnei 
thorax  dans  cet  article,  parce  que  ces  accidents  ou  épiphénomènes» 
fois  développés,  entraînent  des  troubles  et  des  conséquences  qui»  ii|i 
de  vue  pratique,  les  rapprochent  surtout  des  maladies  des  plèvres. 

Nous  observerons,  dans  l'exposé  rapide  qui  va  suivre,  l'ordre  quel 
venons  d'indiquer;  nous  dirons  d'abord  et  à  part  quelques  moti 
lésions  congénitales  ou  vices  de  conformation  des  plèvres. 

A.  Vices  de  conformation.  —  Les  lésions  congénitales  de  la  plèvre  i 
très-rares.  On  a  vu  quelquefois  ce  sac  séreux  manquer  dans  quelqi 
unes  des  parties  qu'il  occupe  à  l'état  normal  :  ainsi  Laboulbène  dits 
vu,  sur  un  poumon  droit,  les  incisures  des  lobes  très-peu  marquées  < 
j)lèvrc  ne  s'y  prolongeant  que  de  2  centimètres;  il  n'existait  poinl 
pleurésie  ayant  réuni  les  feuillets  opposés.  Plus  souvent,  on  rencoialn 
dépressions  de  la  plèvre  en  certains  points  de  la  paroi  thoracique  on 
diaphragme;  l'étude  de  ce  vice  de  conformation  rentre  plutôt  dans  e 
des  bernies  du  poumon.  Enfin  la  plèvre  manque,  bien  entendu,  au  ni? 
des  orifices  anormaux  qui,  dans  quelques  cas  exceptionnels,  font  a 
muni(|uer  le  thorax  avec  l'abdomen  à  ti*avers  le  diaphragme,  et  peu 
lent  aux  viscères  abdominaux  de  faire  hernie  dans  la  poitrine. 

B.  Maladies  pRiMmvEs.  —  V  Inflammation.  Voy.  Pleurésie. 

2^  G.iNGRÈNE.  —  Laennec  a  consacré  un  article  spécial  à  la  gsiy) 
de  la  plèvre  qu'il  donne  d*ailleurs  comme  une  altération  très-rare;! 
eonsidère  comme  rarement  primitive,  et  déclare  qu'il  n'a  vu  aueoil 
(Ihiis  lequel  elle  parût  être  un  effet  d'une  inflammation  aiguë;  le  fi 
souvent  elle  serait  la  suite  de  la  rupture  dans  la  plèvre  d'un  abcès  fl 
gréneux  du  poumon  ;  ou  bien  encore  elle  surviendrait  dans  les  plearM 


PLÈVRE.   GAA6RÈ.VE.  ^243 

purulentes  chroniques  sous  la  forme  d'une  esehare  limitée  de  la  plèvre 
quif  en  se  détachant,  permettrait  au  pus  de  se  frayer  une  voie  au  dehors, 
et  ee  serait  là  nn  des  moyens  que  la  nature  emploie  pour  amener  Téva- 
cuation  du  liquide  épanché. 

Jusque  dans  ces  derniers  t«nps,  la  question  de  la  gangrène  de  la  plèvre 
I  été  presque  complètement  négligée.  En  1875,  à  l'occasion  d'une  inté- 
ressante observation  communiquée  par  E.  Besnier,  Bucquoy  a  lu,  à  la 
Société  médicale  des  hôpitaux,  un  important  mémoire  dans  lequel  il  a 
comblé  cette  lacune.  D'après  l'analyse  d'un  certain  nombre  d'observations 
épanes  çà  et  là  et  de  trois  observations  personnelles,  Bucquoy  est  amené 
à  conclure  que,  dans  l'état  actuel  de  la  science,  aucun  fait  positif  ne 
pennet  encore  d'affirmer  l'existence  de  la  pleurésie  gangreneuse  aiguë 
primitive,  c'est-à-dire  indépendante  de  toute  lésion  gangreneuse  du  pou- 
mon. Cette  proposition  parait  exacte,  au  moins  pour  la  très-grande  géné- 
ralité des  cas.  Cependant  tout  récemment  (25  juillet  1879)  Rendu  a  pré- 
senté à  la  Société  médicale  des  hôpitaux  une  observation  qu'il  considère 
comme  démonstrative  de  la  gangrène  primitive  de  la  plèvre  :  dans  ce  cas, 
l'autopsie  a  montré  qu'il  existait  à  la  base  de  la  plèvre  gauche,  au  voisi- 
nage du  diaphragme,  une  cavité  remplie  d'un  liquide  horriblement 
fétide,  d'odeur  et  d'aspect  gangreneux  ;  cette  cavité  était  tapissée  par  des 
fausses  membranes  épaisses,  en  un  point  elle  était  noirâtre  et  ulcérée  sur 
une  certaine  étendue;  à  ce  niveau,  le  poumon  était  perforé,  mais  autour 
de  la  perforation  on  ne  trouvait  aucun  indice  de  gangrène  pulmonaire. 
XToccasion  de  ce  fait,  Debove  a  communiqué  un  cas  analogue,  avec  cette 
dilTèrence  qu'il  n'y  avait  pas  de  perforation  pulmonaire  :  dans  l'intérieur 
de  la  plèvre  qui  contenait  un  liquide  horriblement  fétide,  d'une  couleur 
jus  de  tabac,  on  trouva  sept  masses  d'une  fétidité  horrible,  ressemblant 
à  des  matières  fécales,  et  dans  lesquelles  Texamen  microscopique  fil 
reconnaître  des  cristaux  d'acides  gras  enchevêtrés  dans  tous  les  sens. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  ces  faits  au  moins  exceptionnels,  on  peut  admettre 
avec  Bucquoy  que,  dans  l'immense  majorité  des  cas,  la  gangrène  de  la 
plèvre  n'est  pas  primitive.  En  effet,  dans  toutes  les  observations  coni- 
[pfétes  et  suivies  d'autopsies  que  Bucquoy  a  rassemblées  et  où  Ton  a 
trouvé  des  altérations  gangreneuses  de  la  plèvre,  on  a  rencontré  en  même 
temps,  soit  des  foyers  de  gangrène  pulmonaire  circonscrite  contigus  à  la 
plèvre  ou  même  ouverts  dans  sa  cavité,  soit  un  sphacèle  étendu  des 
^eouches  superficielles  du  poumon  intéressant  en  même  temps  la  mem- 
èrane  pleurale.  C'est  à  cette  dernière  forme  qu'appartiennent  les  cas 
décrits  depuis  longtemps  déjà  par  Corbin  dans  son  mémoire  sur  la  gan- 
p^ne superficielle  du  poumon;  du  même  ordre  aussi  sont  sans  doute  une 
observation  présentée  par  llaycm  à  la  Société  anatomique  (1874),  celle 
léjà  citée  de  E.  Besnier,  celles  de  Bucquoy  et  d'autres  encore;  c'est,  sui- 
vant toute  vraisemblance,  une  maladie  du  même  genre  qu'a  présentée  le 
'rofesseur  D.,  et  dont  Millard  a  communiqué  à  la  Société  des  hôpitaux 
1  si  intéressante  relation. 
Pour  bien  marquer  la  distinction  qui  existe  entre  les  cas  où  U  %^\\- 


244  PLÈVRE.  —  gangrèke. 

grène  pulmonaire  occupe  les  parties  centrales  du  parenchyme  pulmonaire, 
donnant  lieu  à  tous  les  signes  ordinaires  de  cette  maladie,  et  ceux  où  elle 
intéresse  seulement  les  couches  superficielles  du  poumon  et  en  même 
temps  la  plèvre,  cas  dans  lesquels  les  signes  de  la  gangrène  sont  très- 
souvent  masqués,  Bucquoy  a  proposé  de  reconnaître  deux  formes  à  la 
gangrène  pulmonaire  aiguë  :  la  forme  pneumonique  et  la  forme  plearé- 
tique,  la  première  répondant  à  la  gangrène  profonde,  la  seconde  à  la  gan- 
grène superficielle. 

Cette  dernière  forme,  la  seule  que  nous  ayons  ici  en  vue,  est  la  gan- 
grène corticale,  la  gangrène  pleurchpulmonaire,  qui  comprend  l'immense 
majorité  des  cas,  sinon  tous  les  cas  attribués  à  la  gangrène  de  la  plèvre. 

Ses  caractères  cliniques  diffèrent  souvent  de  ceux  qu'on  rencontre  dans 
la  gangrène  des  parties  profondes  du  poumon  :  d'abord  la  fétidité  de  l'ha- 
leine et  des  crachats,  qui  a  une  si  grande  valeur  diagnostique  dans  les 
maladies  gangreneuses  du  poumon,  fait  souvent  défaut  dans  la  forme  qui 
nous  occupe,  parce  que  le  foyer  gangreneux  est  ordinairement  sans  com- 
munication avec  les  bronches,  et  même  sans  rapports  avec  elles  ;  en  outre, 
les  signes  de  l'affection  pulmonaire  sont  habituellement  masqués  par 
ceux  de  la  pleurésie  concomitante.  Cette  pleurésie  est  purulente  et  pré- 
sente les  symptômes  propres  à  cette  forme,  qui  ont  déjà  été  étudiés  ail- 
leurs ;  souvent  il  s'y  ajoute  un  pneumothorax  par  rupture  du  foyer  gan- 
greneux du  poumon  dans  la  plèvre  et  dans  les  bronches;  mais  on  ne 
reconnaît  que  ce  pyo-pneumothorax  dépend  d'une  gangrène  pleuro-pul- 
monaire  que  lorsque,  ayant  pratiqué  la  thoracentèse  ou  l'empyème,  on 
est  frappé  de  l'odeur  gangreneuse  du  liquide  évacué,  ou  mieux  encore 
lorsqu'il  y  a  évacuation  au  dehors  de  lambeaux  sphacélés  du  poumon, 
comme  cela  a  eu  lieu  chez  le  professeur  D.,  ou  lorsque  survient  la  fétidité 
de  l'haleine  et  des  crachats. 

Ce  n'est  pas  cependant  que  certains  signes  ne  permettent,  en  dehors 
même  de  ces  circonstances,  d'arriver  au  diagnostic  :  au  premier  rang  de 
ces  signes  se  place,  dès  le  commencement,  une  douleur  de  côté  intense 
et  prolongée,  d'une  violence  et  d'une  persistance  inusitées  dans  la  pleu- 
résie ordinaire  (Stokes,  Barih,  Bucquoy)  ;  outi*e  cette  douleur,  on  note  un 
frisson  intense  et  prolongé  au  début  delà  maladie,  suivi  d'une  fièvre  ordi- 
nairement plus  développée  que  dans  la  pleurésie  simple,  de  la  dyspnée, 
une  toux  pénible,  presque  incessante,  sans  expectoration  ou  quelquefois 
accompagnée  d'hémoptysies.  Bientôt  apparaissent  les  signes  physiques 
d'un  épanchement  purulent  dans  la  plèvre.  Enfin  de  bonne  heure,  et  ce 
signe  a  une  grande  importance,  l'état  général  est  mauvais  ;  on  observe 
une  profonde  dépression  des  forces  et  une  inappétence  invincible. 

La  réunion  des  caractères  précédents  permet  de  soupçonner  l'existeDce 
de  la  gangrène  pleuro-pulmonairc,  mais  encore  ce  diagnostic  ne  peut  être 
affirmé  que  si  l'on  voit  apparaître  la  fétidité  particulière  de  l'haleine  et 
des  crachats,  indiquant  la  communication  du  foyer  gangreneux  avec  les 
bronches,  ou  si  une  ponction  de  la  plèvre  amène  au  dehors  un  liquide 
d'odeur  franchement  gangreneuse. 


PLÈVRE.   —  TUBERCULOSE.  245 

Les  caractères  anatoroiques  de  la  gangrène  de  la  plèvre  ont  été  parfai- 
temeiit  tracés  par  Laennec.  A  la  surface  de  la  membrane  séreuse,  on 
troufe  des  taches  verdàtres  ou  noirâtres,  de  forme  arrondie  ou  plus  ou 
moins  irrégulière.  Les  parties  atteintes  sont  ramollies  et  tombent  facile- 
ment en  détritus  ;  elles  exhalent  Todeur  infecte  et  toute  spéciale  de  la 
gangrène.  L'étendue  de  ces  liions  est  très-variable  :  tantôt  elles  sont  cir- 
conscrites comme  le  foyer  de  gangrène  pulmonaire  auquel  elles  corres- 
pondent, tantôt  elles  peuvent  occuper  toute  la  surface  d*un  lobe  pulmo- 
naire ou  même  davantage  ;  quelquefois  la  plèvre  est  décollée  dans  une 
grande  étendue  et  séparée  du  tissu  du  poumon  par  une  nappe  de  détritus 
gangrené  (pneumonie  disséquante  gangreneuse).  Au-dessous  de  la  plèvre 
ainsi  altérée,  on  trouve  le  tissu  sous-séreux  œdématié  et  infiltré  d'une 
sanie  infecte,  puis  le  parenchyme  pulmonaire  gangrené  lui-même  à  une 
plus  ou  moins  grande  profondeur;  quand  la  plèvre  pariétale  est  aussi 
ttlmite,  on  trouve  au-dessous  d'elle  les  espaces  intercostaux  infiltrés  de 
produits  putrides  et  noirâtres,  les  côtes  dénudées  et  altérées.  Dans  la  cavité 
de  la  plèvre  elle-même  est  un  épanchemenl  purulent  et  sanieux,  de  cou- 
leur grisâtre  ou  verdâtre,  d'odeur  gangreneuse,  dans  lequel  nagent  des 
masses  pseudo-membraneuses  noirâtres  et  infectes,  et  souvent  aussi  des 
débris  de  parenchyme  pulmonaire  mortifié. 

Les  causes  de  la  gangrène  de  la  plèvre  sont  les  mêmes  que  celles  de  la 
gangrène  du  poumon,  dont  la  première  est  une  dépendance.  Quant  à  ces 
gangrènes  pleuro-pulmonaires  aiguës  dont  nous  venons  de  parler,  elles 
ëont  produites  surtout  par  deux  causes,  qui  sont  Texposition  du  corps  à  un 
liroid  prolongé  et  intense  et  une  violente  contusion  du  thorax;  la  pre- 
mière de  ces  causes  s'est  montrée  d'une  façon  très-évidente  dans  plusieurs 
des  observations  rapportées  par  Bucquoy,  la  seconde  parait  très-probable 
dans  un  fait  cité  par  Jackson  et  dans  l'observation  déjà  mentionnée  de 
Hayem. 

La  gangrène  pleuro-pulmonaire  a  souvent  une  marche  suraiguc  qui  la 
rend  promptemcnt  mortelle,  et  toute  intervention  thérapeutique  reste 
impuissante.  Mais  quelquefois  les  accidents  ont  une  évolution  plus  lente, 
et  alors  se  présente  une  indication  formelle  :  il  faut  pratiquer  l'opération 
de  Tempyème,  qui  permettra  de  faire  de  grands  lavages  et  d'entraîner  au 
dehors  les  parties  sphacélées  de  la  plèvre  et  du  poumon.  Cette  conduite  a 
dt^,  dans  mainte  circonstance,  donné  de  remarquables  résultats  :  la  gué- 
rison  du  professeur  D.  peut  être  citée  comme  un  des  exemples  les  plus 
convaincants  des  avantages  qu'elle  offre. 

Nous  n'insisterons  pas  davantage  sur  ce  sujet  :  la  gangrène  de  la  plèvre 
étant,  comme  nous  venons  de  le  voir,  presque  toujours,  sinon  toujours, 
subordonnée  à  la  gangrène  pulmonaire,  nous  devons  renvoyer  pour  de 
plus  amples  détails  à  l'article  où  il  sera  traité  de  cette  maladie  [Voy.  Pou- 
mon (gangrène  du)]  ;  notre  objet  a  été  seulement  de  faire  voir  quelle  était 
la  part  de  la  plèvre  et  de  ses  altérations  dans  les  gangrènes  superficielles 
ou  corticales  du  parenchyme  pulmonaire. 

3'  Tuberculose.  —  Les  maladies  des  plèvres  sont  des  plus  communes 


^vl 


2<6  PLhVRE.    —  TUBERCULOSE. 

dans  la  tuberculose.  Ces  altérations  sont  de  deux  sortes  :  les  unes,  ayant 
le  caractère  plus  ou  moins  franchement  inflammatoire»  se  montrent  à 
titre  de  complications  ou  d'épiphénomènes  dans  la  phthisie  pulmonaire  ; 
les  autres  sont  des  manifestations  directes  de  la  tuberculose,  indépen- 
dantes de  lésions  des  poumons. 

Parmi  les  premières,  nous  trouvons  les  pleurésies  sèches  du  sommet  et 
les  pleurésies  accidentelles  développées  chez  les  tuberculeux. 

Les  pleurésies  sèches  du  sommet  sont  à  peu  près  constantes  dans  la 
tuberculose  du  poumon,  à  ce  point  que  leur  existence  bien  constatée  con- 
stitue une  présomption  puissante  de  phthisie  pulmonaire,  alors  même 
que  celle-ci  ne  se  traduit  pas  encore  par  des  signes  évidents  :  quand,  en 
effet,  une  pleurésie  se  montre  ainsi  partielle,  limitée  à  une  petite  étendue 
de  la  membrane  séreuse,  on  sait  qu'elle  est  presque  toujours  symptoma- 
tique  d'une  altération  des  parties  sous-jacentes  du  poumon,  et  quand 
cette  pleurésie  partielle  a  son  siège  à  la  partie  supérieure  du  thorax,  lieu 
d'élection  du  développement  des  tubercules,  elle  acquiert  une  valeur  dia- 
gnostique considérable  et  permet  d'admettre  l'existence  très-probable 
(l'une  tuberculisation  pulmonaire. 

Les  pleurésies  accidentelles  sont  au«si  très-communes  chez  les  individus 
tuberculeux  ou  disposés  à  le  devenir  :  survenant  dans  ces  conditions  sous 
l'influence  des  causes  les  plus  légères,  et  même  quelquefois  sans  cause 
bien  appréciable,  elles  se  distinguent  des  pleurésies  franches  p^r  plusieurs 
caractères  :  leur  début  est  souvent  insidieux,  le  point  de  côté  peu  intense 
ou  nul,  la  fièvre  inappréciable;  la  dyspnée  seule  appelle  l'attention  sur 
l'appareil  respiratoire  et  la  recherche  des  signes  physiques  fait  alors 
reconnaître  l'existence  d'un  épanchement;  cet  épanchement  est  souvent 
presque  séreux  ou  à  peine  fibrineux,  quelquefois  scro-purulent,  il  ac- 
quiert dans  mainte  circonstance  une  abondance  considérable  ;  la  marche 
de  la  maladie  est  lente  et  la  résolution  très-difficile  à  obtenir.  Ces  pleuré- 
sies subaiguës  ou  chroniques,  que  Ion  a  encore  appelées  latentes  en  rai- 
son du  peu  de  développement  des  phénomènes  réactionnels,  se  rattachent 
très-fréquemment  à  la  tuberculose  :  tantôt  on  trouve,  chez  les  malades 
qui  les  présentent,  des  signes  déjà  évidents  de  phthisie  pulmonaire,  tantôt 
elles  sont  suivies,  à  échéance  plus  ou  moins  éloignée,  de  l'apparition  de 
maladies  manifestement  tuberculeuses,  et  il  est  vraisemblable  que  dans 
la  plupart  des  cas  elles  sont  elles-mêmes  une  première  manifestation  de 
la  maladie  tuberculeuse  dont  l'évolution  ne  se  continuera  quelquefois  que 
beaucoup  plus  tard. 

Il  n'y  a  pas  lieu  d'insister  ici  davantage  sur  ces  pleurésies  dont  il  a  déjà 
été  question  à  l'article  Phthisie  et  à  l'article  Pleurésie;  arrivons  mainte- 
nant à  la  tuberculose  pleurale  proprement  dite.  Celle-ci  se  montre  dans 
plusieurs  conditions  bien  distinctes  :  tantôt  elle  accompagne  la  phthisie 
pulmonaire  dont  elle  constitue  une  lésion  accessoire,  tantôt  elle  se 
montre  comme  détermination  locale  d'une  tuberculose  qui  affecte  primi- 
tivement les  membranes  séreuses  et,  dans  ce  cas,  elle  évolue  sous  la 
forme  aiguë  ou  sous  la  forme  chronique. 


PLÈVRE.  —  TUBEUCULQSK.  217 

La  première  des  formes  de  tuberculisation  pleurale  que  nous  venons 
d'indiquer  accompagne  la  phthisie  pulmonaire  et  parait  lui  être  étroite- 
ment subordonnée,  ainsi  queVillemain  et  Lépine  Tout  parfaitement  établi  : 
dans  les  parties  de  la  plèvre  correspondantes  à  des  lésions  tuberculeuses 
du  poumon,  on  trouve  d'abord  des  granulations  tuberculeuses  sur  le 
feuillet  yiscéraU  mais  en  outre  on  observe  sur  le  feuillet  pariétal  des  gra- 
nulations grises  répondant  exactement  aux  lésions  du  feuillet  opposé; 
enfin,  on  en  rencontre  encore  qui  sont  disséminées  en  d'autres  points, 
notamment  au  pourtour  du  foliole  fibreux  du  diaphragme,  véritable  lieu 
d'élection  pour  ces  productions  secondaires  (Lépine).  Cette  disposi  tion  des 
lésions  tuberculeuses  de  la  plèvre  est  un  des  exemples  les  plus  frappants 
de  oe  qu'on  a  appelé  l'infection  de  voisinage  et  un  des  arguments  les  plus 
puissants  en  faveur  de  la  propriété  infectieuse  des  produits  tuberculeux 
qui,  d'un  foyer  initial,  se  propageraient  ainsi  de  proche  en  proche.  Nous 
n'insisterons  pas  davantage  sur  cette  question  qui  a  déjà  été  complète- 
ment exposée  ailleurs  (Voy.  art.  Phthisie,  t.  XXYII,  p.  274). 

La  tuberculose  aiguë  de  la  plèvre  est  une  des  manifestations  les  plus 
communes  de  la  phthisie  aiguë  ;  parmi  les  différentes  formes  que  peut 
revêtir  cette  dernière  maladie,  et  qui  ont  été  si  bien  décrites  et  reliées 
entre  elles  par  Empis,  une  des  plus  fréquentes  est  celle  qui  afTecte  les 
membranes  séreuses,  notamment  les  plèvres  et  le  péritoine  :  tantôt  ces 
deux  membranes  sont  prises  isolément,  tantôt,  et  plus  souvent  peut-être, 
elles  sont  affectées  simultanément,  et  quelquefois  les  méninges  avec  elles  : 
de  là  un  complexus  morbide  très-spécial  et  très-caractéristique,  dans 
lequel,  aux  phénomènes  généraux  communs  à  toutes  les  formes  de 
phUdsie  aiguë,  se  joignent  les  caractères  propres  d'une  péritonite  et  ceux 
d'une  pleurésie  ordinairement  double,  quelquefois  aussi  ceux  d'une  mé- 
ningite. L'étude  de  cette  forme  importante  a  été  aussi  faite  avec  détails 
dans  l'article  Phthisie  (Voy.  Phthisie  aiguë  pleurale,  t.  XXVII,  p.  355), 
nous  ne  pouvons  qu*y  renvoyer  le  lecteur,  et  il  ne  nous  reste  à  étudier 
que  la  forme  chronique  de  la  maladie. 

La  tuberculisation  chronique  des  plèvres,  phthisie  pleurale  de  quelques 
auteurs,  a  été  indiquée  par  Laennec  dans  ses  traits  les  plus  généraux  ; 
elle  semble,  depuis,  avoir  été  presque  nc'gligée  par  la  plupart  des  patho- 
logistes;  mais  elle  a  été  parfaitement  décrite  par  Barthez  et  Rilliet  qui, 
dans  leur  excellent  traité  des  maladies  des  enfants,  lui  ont  consacré  un 
important  article  auquel  nous  emprunterons  la  plupart  des  détails  qui 
vont  suivre. 

Beaucoup  plus  commune  chez  les  enfants  que  chez  les  adultes,  la 
phthisie  pleurale  se  montre  avec  ses  caractères  les  plus  accusés  chez  les 
enfants  de  trois  à  dix  ans. 

Les  tubercules  peuvent  se  développer  sur  la  face  interne  de  la  plèvre 
{i.  intra- séreux)  ou  sur  sa  face  externe  (t.  extra-séreux).  Les  tubercules 
intra-séreux,  qu'on  observe  presque  toujours  dans  cette  forme  chronique 
de  la  tuberculose  à  l'état  de  granulation  jaune,  sont  ordinairement  accom- 
pagnés de  dépôts  pseudo-membraneux  inflammatoires  qui  les  entourent 


248  PLÈVRE.  —  tuberculose. 

et  les  réunissent  entre  eux.  Souvent  on  voit  à  la  surface  de  la  plèvre  une 
fausse  membrane  stratifiée  ayant  jusqu'à  2  ou  5  millimètres  d'épaisseur; 
chaque  couche  contient  un  plus  ou  moins  grand  nombre  de  granula- 
tions, et  celles-ci  forment,  en  outre,  une  couche  adhérente  à  la  plèvre.  La 
membrane  séreuse  elle-même,  au-dessous  de  ces  granulations,  est  ordi- 
nairement peu  altérée  ou  ne  présente  que  les  caractères  d'une  inflamma- 
tion peu  intense. 

On  s'est  demandé  si  l'inflammation  était  secondaire  au  développemen 
du  tubercule,  ou  si,  au  contraire,  celui-ci  se  produisait  consécutivement 
dans  les  fausses  membranes  :  on  doit  admettre,  avec  Barthez  et  Rilliet, 
que  le  plus  souvent  les  tubercules  précèdent  les  fausses  membranes  et 
paraissent  provoquer  leur  développement  par  l'inflammation  qu'ils  déter- 
minent ;  en  effet,  on  trouve  souvent  des  granulations  tuberculeuses  sans 
produits  inflammatoires,  et,  d'autre  part,  nous  venons  de  voir  que,  sous 
les  fausses  membranes,  dans  les  parties  immédiatement  adjacentes  à  la 
plèvre,  et  par  conséquent  les  plus  récemment  formées,  on  trouve  une 
couche  de  granulations  adhérente  à  la  plèvre  et  non  englobée  de  fausses 
membranes.  D'autres  fois,  les  tubercules  semblent  se  développer,  non  pas 
dans  des  fausses  membranes,  mais  dans  des  néo-membranes  vascularisèes 
résultant  d'une  pleurésie  antérieure. 

Souvent  la  plèvre  est  occupée  par  de  larges  plaques  tuberculeuses  qui 
tapissent  une  grande  partie  de  son  étendue;  ces  plaques  occupent  ordi- 
nairement la  partie  postérieure,  quelquefois  elles  enveloppent  tout  le  pou- 
mon et  lui  forment  une  espèce  de  coque  ;  leur  épaisseur  varie  de  1  à  4 
millimètres,  quelquefois  jusqu'à  7  millimètres. 

Ces  tubercules  ou  les  plaques  qu'ils  forment  subissent  rapidement, 
comme  tous  les  produits  tuberculeux,  la  dégénération  graisseuse,  et  le 
plus  souvent  on  les  observe  à  l'état  caséeux,  mais  ayant  conservé  presque 
toujours  une  consistance  ferme  :  Barthez  et  Rilliet,  comme  Laennec, 
déclarent  qu'ils  ne  les  ont  jamais  vus  ramollis  ni  ayant  formé  des  cavernes 
dans  rintcrieur  de  la  plèvre,  ni  accompagnés  de  perforation  de  la  mem- 
brane séreuse. 

Quant  aux  tubercules  extra-pleuraux  (il  n'est  question  ici  que  de  ceux 
qui  se  développent  sous  la  plèvre  costale,  ceux  qui  sont  sous  la  plèvre 
viscérale  étant  en  réalité  des  tubercules  pulmonaires),  ils  sont  tantôt 
isolés,  tantôt  agglomérés,  pouvant  former  aussi  des  plaques  ordinaire- 
ment moins  étendues  que  celles  qui  se  développent  à  la  face  interne  delà 
plèvre.  Ces  produits  suivent  une  évolution  analogue  à  celle  des  tubercules 
pulmonaires  :  après  avoir  subi  la  dégénération  casécuse,  ils  se  ramollis- 
sent et  sont  quelquefois  évacués  par  les  bronches  à  travers  les  deux  feuil- 
lets de  la  plèvre  et  le  poumon  perforés.  Bailhez  et  Rilliet  ont  vu  les 
cavernes  résultant  de  la  fonte  de  tubercules  sous-pleuraux  communiquer 
)vec  des  cavernes  pulmonaires  par  de  larges  perforations  de  la  plèvre; 
colle-ci  est  dans  ces  cas  le  siège  d'adhérences  qui  empêchent  les  détritus 
caséeux  de  tomber  dans  sa  cavité.  Les  mêmes  auteurs  ont  vu  les  ganglions 
bronchiques  devenus  tuberculeux  s'unir  aux  masses  pulmonaires   qui, 


PLÈVRE.  —  TUBERCOLOSt.  249 

de  Taotre  côté,  conOnaient  aux  tuberculeux   pleuraux  ou   extra-pleu- 
raox. 

La  {dithisie  pleurale  a  ordiuairement  un  début  insidieux  et  obscur;  elle 
ne  peut  guère  être  reconnue  a^ant  que  les  tubercules  agglomérés  ne  for- 
ment des  plaques  étendues,  et  encore  les  symptômes  auxquels  elle  donne 
lieu  aont-ils  souvent  masqués  ou  modifiés  par  ceux  d'une  tuberculose  pul- 
monaire concomitante.  La  maladie  est  caractérisée  surtout  par  des  signes 
physiques  qui  permettent  de  déterminer  le  siège  particulier  des  lésions 
dans  la  plèvre;  voici  ceux  que  Rilliet  et  Barthez  ont  spécialement  relevés 
dans  les  cas  où  la  maladie  était  simple»  dégagée  de  lésions  du  poumon. 
La  percussion  fait  constater  une  diminution  du  son  sans  matité  absolue  ; 
a  Taiiscaltation,  on  perçoit  une  faiblesse  du  bruit  respiratoire,  pas  de 
souffle  bronchique»  quelquefois  du  retentissement  de  la  voix  sans  égo- 
phonie;  ces  symptômes  sont  toujours  plus  prononcés  en  arrière  qu'en 
avant  et  ne  se  modifient  pas  dans  les  changements  de  position  du  malade. 
Les  vibrations  thoraciques  sont  affaiblies  ou  complètement  supprimées. 
L'inspection  de  la  poitrine  et  la  mensuration  dénotent  une  dépression 
du  côté  malade,  quelquefois  précédée  d'une  augmentation.  A  ces  signes 
physiques  s'ajoutent  quelques  troubles  fonctionnels,  une  dyspnée  ordi- 
nairement peu  intense,  peu  de  douleurs  dans  la  paroi  thoracique,  une 
toux  sans  expectoration  ;  dans  un  cas,  Barthez  et  Rilliet  ont  observé  une 
vomique  due  à  l'ouverture  dans  les  bronches  d'une  caverne  extra-pleurale. 
Les  symptômes  généraux  sont  ceux  des  maladies  tuberculeuses  :  amai- 
grissement» fièvre  rémittente  moins  développée  que  dans  la  phthibie 
pulmonaire,  sueurs  nocturnes. 

La  marche  de  la  maladie  est  habituellement  lente  et  progressive,  à 
moins  qu'elle  ne  soit  accélérée  par  le  développement  d'autres  maladies 
tuberculeuses  ou  par  quelque  complication  aiguë  ;  comme  la  plupart  des 
tuberculeux,  les  malades  atteints  de  phthisic  pleurale  finissent  par  suc- 
comber dans  la  fièvre  hectique  et  le  marasme. 

Le  diagnostic  de  la  tuberculose  pleurale  présente  souvent  les  plus 
grandes  difficultés,  et  l'on  est  particulièrement  exposé  à  la  confondre  avec 
la  pleurésie  chronique  et  avec  la  pleurésie  purulente,  surtout  si  celles-ci 
se  sont  développées  chez  un  sujet  tuberculeux.  On  trouve,  par  exemple, 
dans  l'excellente  thèse  de  Yerliac,  plusieurs  observations  prises  dans  le 
service  de  Barthez  où  l'on  voit  que  les  examens  les  plus  minutieux  n'ont 
pas  permis  de  distinguer  ces  maladies  diverses,  et  que,  dans  maintes  cir- 
constances, les  phénomènes  observés  ne  pouvaient  guère  faire  éviter  les 
erreurs  qui  ont  été  commises.  Les  signes  physiques  peuvent,  en  effet,  être 
les  mêmes  dans  ces  différents  cas,  ils  permettent  bien  d'établir  l'existence 
d'un  épanchement  ou  de  produits  accumulés  dans  la  plèvre,  mais  souvent 
ils  sont  impuissants  à  en  indiquer  la  nature;  quant  aux  phénomènes 
généraux,  amaigrissement,  fièvre  hectique  avec  sueurs  nocturnes  abon- 
dantes dans  le  cas  de  tuberculose,  plutôt  pâleur  et  bouffissure  de  la  face, 
frissons  irréguliers,  inappétence  invincible  dans  le  cas  de  pleurésie  puru- 
lente, tout  en  ayant  une  réelle  valeur  diagnostique,  ils  sont  pourtant 


1250  PLÈVRE.  —  cARcraosE. 

d'ordinaire  insuffisanU  pour  donner  une  certitude,  et  nombreux  sont  les 
cas  où  la  thoracentèse  seule  peut  lever  tous  les  doutes  et  permettre 
d'écarter  le  soupçon  d'un  épanchement  liquide. 

4^  Carcinose.  —  Le  cancer  de  la  plèvre  n'est  pas  très-rare,  mais  il  ré- 
sulte ordinairement  de  Textension  d'un  cancer  du  poumon,  du  médiastin 
ou  même  des  organes  abdominaux,  ou  bien  il  se  rattache  à  une  carcînose 
généralisée  qui,  après  avoir  occupé  un  organe,  Testomac  ou  TintesUn,  par 
exemple,  envahit  ensuite  plusieurs  viscères  ou  les  membranes  séreuses. 
.Dans  ces  conditions,  la  plèvre  n  est  afTectée  que  secondairement  et  souvent 
même  accessoirement. 

Existe-t-il  un  cancer  primitif  de  la  plèvre  ?  La  plupart  des  auteurs  ré- 
pondent par  la  négative:   et  cependant  quelques  observations  récentes, 
semblent  établir  la  réalité  de  cette  affection.  Ainsi  Lépine  a  communiqué, 
en  1869,  à  la  Société  anatomique  un  cas  Irès-curieux  de  carcinome  pri- 
mitif de  la  plèvre  chez  un  enfant  de  dix  ans  :  la  cavité  pleurale  droite 
avait  presque  complètement  disparu  ;  elle  était  occupée  par  une  masse 
d'un  tissu  dur,  blanc,  squirrheux,  étalée  en  plaques,  adhérant  intimement 
à  la  paroi  thoracique.  Celte  masse,  qui  avait  plusieurs  millimètres  d'épûs- 
seur,  fusionnait  ensemble  les  deux  feuillets  pleuraux,  excepté  en  quelques 
points  où  les  deux  feuillets  étaient  séparés  par  une  lame  mince  d'un  tissu 
aréolaire,  et  à  la  base  en  arrière  où  il  existait  une  loge  du  volume  de  deux 
œufs  de  poule  environ,  pleine  d'un  liquide  sanguinolent.  Le  poiunon  était 
réduit  à  un  volume  qui  ne  dépassait  guère  celui  du  poing  d'un  adulte; 
en  divers  endroits,  des  noyaux,  intimement  unis  aux  plaques  squirrheoses 
de  la  plèvre,  pénétraient  dans  le  tissu  pulmonaire;  ils  étaient  mal  cir- 
conscrits et  semblaient  se  propager  le  long  des  cloisons  interlobaires  et 
interlobulaires  de  l'organe.  Dans  la  cavité  pleurale  gauclie  existaient  quel- 
ques noyaux  isolés  de  volume  variable,  n'atteignant  pas  en  général  celui 
d'une  noix  :  la  cavité  elle-même  était  remplie  d'une  sérosité  abondante 
fortement  colorée  en  rouge.  Un  épanchement  semblable  existait  dans  le 
péricarde,  qui  à  droite  était  perforé  par  le  tissu  morbide;  celui-ci  formait 
à  la  surface  du  feuillet  pariétal  de   larges  plaques  végétantes  multiples 
embrassant  les  vaisseaux  de  la  base  du  cœur  et  ayant  même  perforé  la  veine 
cave  supérieure  près  de  son  embouchure  dans  Toreillette.  Les  ganglions 
bronchiques,  surtoutdu  côté  droit,  étaient  dégénérés.  Â  la  face  intérieure  du 
diaphragme  on  remarquait  aussi  quelques  végétations  ayant  perforé  le 
muscle.  «  L'examen  microscopique,  ajoute  Lépine,  a  démontré  dans  le 
tissu  morbide  la  structure  du  carcinome  (alvéoles  très-nets,  renfermant 
des  cellules  de  formes  variables).  Il  s'agit  bien,  dans  ce  cas,  d'un  carcir 
nome  primitif  de  la  plèvre  ;  l'autopsie  faite- minutieusement  permet  d'af- 
firmer qu'il  n'existait  nulle  part  ailleurs  de  cancer.  »  Quant  aux  accidents 
présentés  pendant  la  vie  et  dans  le  détail  desquels  nous  ne  pouvons  en- 
trer, ils  ont  surtout  consisté  en  une  oppression  progressive  avec  toux; 
perte  de  l'appétit  sans  fièvre  ;  l'examen  physique  de  la  poitrine  indiquait  de 
la  malité  à  la  percussion,  à  l'auscultation  abolition  du  murmure  yésiculaire 
de  la  respiration  rude,  légèrement  souffrante  et  à  timbre  un  peu  creux; 


PLÈVRE.  —  CARciKosE.  251 

'V'oussure  et  mobilité  moindre  du  câié  malade.  L'évolution  de  la  maladie 
fut  rapide»  la  mort  arriva  trois  ou  quatre  mois  après  le  début  des  accidents. 

Cette  remarquable  observation  montre  le  cancer  de  la  plèvre  isolé,  in- 
<]Lépendant  de  toute  manifestation  cancéreuse  dans  un  autre  organe  qu'on 
puisse  ccMisidérer  comme  le  point  de  départ  de  Taffection  pleurale. 

Les  Bulletins  de  la  Société  anatomiçize  contiennent  encore  une  observa- 
tion de  Darolles  (1874),  présentée  comme  un  exemple  de  cancer  primitif 
de  la  plèvre  propagé  au  poumon  et  accompagné  de  généralisation;  cette 
observation  est  un  bel  exemple  de  carcinome  pleural,  analogue,  au  point 
de  vue  anatomique,  à  celui  de  Lépiue  ;  mais  Texistence  de  plusieurs 
lésions  cancéreuses  dans  d'autres  parties  du  corps  et  notamment  dans 
tout  un  lobe  du  poumon  ne  semble  pas  permettre  d'afGrmcr  que  le  car- 
cinome pleural  ait  été  primitif. 

D'autres  observations  reproduisent  bien  les  caractères  du  cancer  de  la 
plèvre,  mais  on  trouve  en  même  temps  du  cancer  dans  d'autres  organes, 
ou  bien  on  ne  mentionne  pas  que  ces  organes  étaient  sains  ;  il  en  est  ainsi 
des  observations  rassemblées  par  Arnault  de  la  Ménnrdière  dans  sa 
tbèse  sur  les  manifestations  cancéreuses  de  la  plèvre  et  empruntées  à 
Andral,  à  Vidal,  à  Lebcrt.  Arnault  de  la  Ménardicrc  rapporte  lui-même 
un  cas  Irès-intéressaut,  observé  dans  le  service  de  Desnos,  où  il  s'agit 
d'un  fibrcHfiarcome  de  la  plèvre;  mais  dans  ce  fait  encore  on  trouve 
deux  tumeurs  de  même  nature  développées.  Tune  à  Tépaule,  l'autre  à  la 
cuisse,  et  ces  deux  tumeurs  étaient  certainement  bien  antérieures  dans 
leur  développement  à  Taffection  pleurale. 

Ainsi,  tout  en  admettant  Tcxistence  du  cancer  primitif  de  la  plèvre, 
on  doit  le  tenir  pour  très-exce|)tionnel  ;  il  est  fréquent,  au  contraire,  que 
le  carcinome  pleural  résulte  de  Textcnsion  de  proche  eh  proche,  ou  de 
la  propagation  à  distance  d'un  cancer  du  poumon,  du  médiaslin,  du  sein, 
quelquefois  et  plus  rarement  d'un  cancer  des  organes  abdominaux.  Dans 
ces  cas,  le  carcinome  secondaire  reproduit  les  caractères  nnatomiques  de 
la  lésion  primitive  :  on  y  observe  rencéphaloïde,  le  squirrhe,  le  cancer 
colloïde,  le  mélanique,  ou  encore  le  fibro-sarcome  comme  dans  le  cas  de 
Desnos  mentionné  tout  à  l'heure. 

Lorsque  le  cancer  pleural  résulte  de  l'envahissement  de  la  plèvre 
par  un  cancer  des  organes  voisins,  la  lésion  est  souvent  très-étendue, 
formant  des  masses  dans  lesquelles  il  est  difficile  de  faire  la  part  do  ce 
qui  appartient  à  la  membrane  séreuse.  Plus  souvent,  le  cancer  secondaire 
parait  plus  ou  moins  indépendant  de  la  tumeur  primitive,  et  se  présente 
sous  la  forme  de  noyaux  disséminés  à  la  surface  de  Tun  ou  de  l'autre  des 
deux  feuillets  pleuraux.  Voici,  par  exemple,  la  disposition  qu'on  observe 
le  plus  communément,  dans  les  cas  de  carcinome  pleural  consécutif  au 
cancer  du  sein  :  un  ou  deux  îlots  cancéreux  viennent  faire  saillie  sur  la 
plèvre  costale,  au  niveau  de  la  région  mammaire,  et  un  certain  nombre 
d'ilôts  cancéreux  se  trouvent  disséminés  à  la  surface  de  la  plèvre  pulmo- 
naire, et  cela  sans  adhérences  entre  les  feuillets  des  plèvres.  Il  parait 
démontré  aujourd'hui  que  cette  propagation  à  distance  se  ferait  par  Tin- 


^vl 


252  PLEVRE.  —  carcikose. 

termédiaire  du  système  lymphatique  :  en  effet,  les  vaisseaux  lymphati- 
ques sont  eux-mêmes  envahis  par  la  dégénérescence,  et  on  les  voit,  parti- 
culièrement à  la  surface  de  la  plèvre  pulmonaire ,  sous  Vuspeti  de 
cordons  blanchâtres  disposés  en  réseaux  ;  on  sait,  d^autre  part,  que  les 
cavités  séreuses  sont  elles-mêmes  considérées  aujourd'hui  comme  des 
cavités  lymphatiques  qui  peuvent,  exactement  comme  les  vaisseaux,  ser- 
vir de  voies  de  généralisation  du  cancer  (Yirchow,  Charcot,  Lépine^ 
Debove,  Cornil  etRanvier,  Troisier).  En  somme,  il  s'agirait  là  d'une  pro- 
pagation du  cancer  par  une  infection  de  voisinage  analogue  à  celle  que 
nous  avons  indiquée  plus  haut  pour  la  propagation  de  la  tuberculose. 

Les  caractères  anatomiques  de  l'affection  cancéreuse  de  la  plèvre  dif- 
fèrent suivant  les  diverses  conditions  de  développement  que  nous  venons 
d'indiquer  et  suivant  l'espèce  de  cancer  dont  il  s'agit  :  dans  le  squirrbè, 
ce  sont  ou  bien  des  plaques  étalées,  dures,  d'aspect  lardacé,  ou  bien  des 
noyaux  disséminés,  déchiquetés  sur  leurs  bords  ou  arrondis,  sous  forme 
de  petites  granulations  ou  de  masses  lenticulaires  plus  volumineuses, 
aplaties,  ressemblant  à  des  gouttes  de  cire  enchâssées  dans  la  membrane 
séreuse  ;  dans  l'encéphaloïde,  ce  sont  tantôt  des  sortes  de  champignons 
plus  ou  moins  gros,  formant  des  masses  bombées,  souvent  déprimées 
et  comme  ombiliquées  à  leur  centre,  tantôt  une  matière  pulpeuse 
informe  formée  par  l'agglomération  d'un  grand  nombre  de  végétations 
cancéreuses  et  remplissant  la  totalité  ou  la  plus  grande  partie  de  la  cavité 
pleurale  ;  dans  le  cancer  colloïde,  c'est  une  mdtière  grisâtre  et  gélatîni- 
forme  infiltrant  la  plèvre  ou  sa  cavité  dans  une  plus  ou  moins  grande 
étendue;  dans  le  fibro-sarcôme  enfin,  c'est  un  tissu  d'apparence  fibreuse) 
blanc,  résistant,  ne  se  laissant  pas  déchirer  et  criant  sous  le  scalpel. 

Ces  productions  cancéreuses  sont  en  général  très-vasculaires,  surtout 
dans  l'encéphaloïde  où  les  tumeurs  sont  rougeatres  et  même  violacées; 
les  vaisseaux  de  nouvelle  formation  qui  les  parcourent  sont  très-fragiles, 
ce  qui  explique  la  fréquence  des  hémorrhagies  interstitielles  et  des  épan- 
chements  sanguins.  La  cavité  pleurale,  quand  elle  n'est  pas  remplie  par 
les  masses  cancéreuses,  contient  un  liquide  louche,  très-souvent  sangai- 
noient.  Les  ganglions  bronchiques  participent  à  la  dégcnércsceoce,  et 
quelquefois  celle-ci  s'étend  jusqu'aux  ganglions  cervicaux,  dont  l'altération 
a  une  grande  valeur  au  point  de  vue  du  diagnostic. 

Les  symptômes  du  carcinome  pleural  sont  très-souvent  obscurs.  La 
maladie  passe  inaperçue  et  n'est  reconnue  qu'à  Tautopsic,  quand  elle 
consiste  seulement  en  quelques  noyaux  cancéreux  disséminés  à  la  surface 
de  la  plèvre  et  qu'il  n'y  a  pas  d'épanchement  notable  de  la  plèvre  ;  mais 
elle  peut  quelquefois  èlre  reconnue,  lorsque  des  troubles  respiratoires  et 
des  signes  d'une  affection  de  la  plèvre  surviennent  chez  un  individo 
antérieurement  atteint  d'une  affection  cancéreuse,  notamment  d'oo 
cancer  du  stin,  ou  soupçonné  d'un  cancer  du  poumon.  Les  troubles 
fonctionnels  qui  feront  surtout  soupçonner  l'envahissement  de  la  plèvre 
sont  des  douleui*s  de  côté  fixes  et  persistantes  occupant  quelquefois  pb- 
sieurs  espaces  intercostaux,  douleurs  qui  résultent  de  la  compression  des 


PLÈVRE.  —  CARCiNOSE.  253 

xierfs  iatercostaux  ;  une  toux  plus  ou  moins  fréquente,  sèche  ou  sans 
expectoration  caractéristique  (sauf  le  cas  de  cancer  du  poumon),  et  une 
dyspnée  souvent  progressive.  Les  signes  physiques  pourront  alors  démon- 
trer Texistence  de  lésions  pleurales  :  matité  dans  une  étendue  plus  ou 
moins  considérable,  diminution  ou  abolition  du  bruit  pulmonaire, 
souffle  à  timbre  creux  ou  tubo-caverneux,  frottements  persistants  en 
quelques  points  déterminés,  diminution  des  vibrations  thoraciques, 
voussures,  immobilité  d'un  câté  de  la  poitrine,  etc.,  souvent  signes  con- 
comitants d'un  épanchement  liquide  plus  ou  moins  abondant.  Une 
analyse  attentive  de  ces  divers  signes  permettra  quelquefois  de  recon- 
oaitre  qu'il  ne  s'agit  pas  d'une  pleurésie  ordinaire  ;  mais  ce  sont  surtout 
l'existence  d'une  cachexie  confirmée  et  la  connaissance  des  antécédents, 
de  Texistence  antérieure  d'un  cancer  dans  un  autre  organe,  qui  indique- 
ront la  voie  au  diagnostic.  Si  à  ces  caractères  se  joint  la  présence  bien 
constatée  de  ganglions  malades  dans  la  région  sus-claviculaire  ;  si  une 
ponction  de  la  poitrine  vient  établir  que  l'épanchement  pleural  est 
hémorrfaagique,  on  arrivera  alors  à  de  grandes  probabilités.  Ce  dernier 
phénomène,  épanchement  sanguin,  sans  avoir  la  valeur  absolue  qu'on 
lui  a  quelquefois  attribuée,  n'en  a  pas  moins  une  grande  signification  et 
devra  an  moins  donner  l'éveil  sur  la  possibilité  d'un  cancer  de  la 
plèvre. 

Pourra-t-on  reconnaître  un  cancer  primitif  de  la  plèvre?  Dans  le  cas 
rapporté  par  Darollcs  et  mentionné  plus  haut,  le  diagnostic  a  été  établi 
en  s'appuyant  notamment  sur  l'existence  d'une  toux  sèche  et  quinteuse, 
de  névralgies  intercostales  persistantes  et  rebelles  à  tout  traitement,  sur 
la  constatation  de  tumeurs  ganglionnaires  qui  soulevaient  la  région  sus- 
claviculaire,  sur  des  signes  physiques  qui  dénotaient  une  affection  pleuro- 
pulmonaire,  enfin  sur  les  caractères  manifestes  de  la  cachexie  cancéreuse. 
Mais  il  ne  faut  pas  moins  que  tous  ces  caractères  réunis  pour  conduire 
k  un  diagnostic  qui  devra,  dans  ces  circonstances,  être  toujours  très- 
réservé. 

L'évolution  du  cancer  de  la  plèvre  parait  assez  lente  ;  difficile  à  indi- 
quer pour  les  cancers  secondaires  dont  le  début  est  très-insidieux,  elle 
parait  s'être  accomplie  en  quelques  mois  dans  les  cas  considérés  comme 
des  exemples  de  carcinome  primitif. 

Le  traitement  n'est  malheureusement  que  palliatif;  la  thoracentèse 
pent  être  rendue  nécessaire  par  l'existence  d'un  épanchement  abondant, 
mais  celui-ci  se  reproduit  le  plus  souvent  et  l'on  est  obligé  de  répéter 
l'opération  pour  prolonger  les  jours  du  malade. 

Nous  ne  ferons  que  signaler  ici  la  carcinose  miliaire  aiguë  (Hermann 
Dcmme,  Mettenheimer,  Beyiard,  Charcot  et  Vulpian,  Ilérard  et  Cornil, 
Laporte),  qui  est,  pour  l'affection  cancéreuse,  l'analogue  de  la  tubercu- 
lose granuleuse  aiguë  pour  l'affection  tuberculeuse.  Rarement  primitive, 
le  plus  souvent  secondaire,  survenant  chez  un  individu  déjà  atteint  de 
cancer,  cette  forme  aiguë  deJa  carcinose  est  caractérisée  anatomiquement 
par  la  présence  de  granulations  grisâtres  ou  rougeàtrcs  présentant  le 


254  PLÈVKE.  —  tomeurs. 

plus  souvent  les  attributs  du  cancer  encéphaloide;  ce«  granulations,  dis- 
séminées dans  un  grand  nombre  de  viscères  et  dans  les  membranes 
séreuses,  envahissent  quelquefois  presque  exclusivement  les  plèvres  et  le 
péritoine  (carcinose  miliaire  aiguë  séreuse)  sous  la  forme  d'oae  sorte 
d'éruption  miliaire  plus  ou  moins  abondante,  accompagnée  d*un  épanche- 
ment  séreux  ou  sanguinolent  ;  le  microscope  seul  permet  de  distinguer 
les  granulations  cancéreuses  des  granulations  tuberculeuses.  L'évolution 
clinique  de  cette  affection  est,  comme  les  lésions  anatomiques^  analogue 
à  celle  de  la  tuberculose  aiguë  ;  les  symptômes  sont  les  mêmes,  fièvre, 
prostration,  état  typhoïde;  dyspnée,  signes  d'épanchement  dans  les  deui 
plèvres,  quelquefois  hémoptysies  liées  au  développement  de  granulations 
cancéreuses  dans  les  poumons,  etc.  Les  malades  s'affaiblissent  rapidement 
et  la  mort  arrive  dans  l'état  adynamique  le  plus  prononcé.  Le  diagnostic 
ne  peut  guère  être  établi  que  sur  l'existence  antérieure  d'un  cancer  dans 
quelque  autre  organe  de  l'économie. 

5^  TuMEuns  DIVERSES,  HTDATiDES.  —  La  plèvrc  peut  être  le  siège  de  tu- 
meurs variées  que  nous  ne  ferons  que  mentionner,  d'abord  parce  qtie  ce 
sont  des  raretés  pathologiques,  en  second  lieu  parce  qu'elles  ne  sont  pas 
spéciales  à  la  plèvre  et  qu'on  peut  les  rencontrer  aussi  bien  dans  les  autres 
cavités  séreuses,  enfm  parre  qu'elles  n'ont  guère  de  caractères  cliniques 
qui  permettent  d*en  reconnaître  l'existence  pendant  la  vie  et  qu'on  les 
découvre  seulement  à  l'autopsie  sans  que  le  plus  souvent  on  ait  soupçonné 
lour  présence.  Ainsi  on  a  observé  des  sarcomes^  des  fibro-sarcôineê  dont 
■nous  avons  déjà  signalé  un  exemple  dans  l'article  précédent,  des  épi- 
théliômes^  des  lymphômes  ;  dans  bon  nombre  de  cas  ces  tumeurs  ne  sont 
pas  bornées  à  la  plèvre,  on  en  trouve  en  même  temps  dans  d'autres  or- 
ganes, et  cette  dernière  circonstance  pourrait  peut-être  quelquefois  per- 
mettre un  diagnostic,  si  l'on  reconnaissait,  en  même  temps  que  d'antres 
tumeurs  dont  la  nature  aurait  été  déterminée,  la  présence  dans  la  plèvre 
d'une  tumeur  souvent  accompagnée  d'un  épanchement. 

D'autres  tumeurs  de  la  plèvre  se  rattachent  plus  ou  moins  directement 
à  la  pleurésie  chronique:  tels  sont  les  fibromes  qu'on  rencontre,  soit  sous 
forme  de  noyaux  lenticulaires  aplatis  ou  de  petites  masses  ramifiées,  soit 
en  plaques  plus  ou  moins  étendues,  les  productions  cartilagini formes  on 
ossi formes  qui  ne  sont  pas  très-rares;  ces  dernières  forment  quelquefois 
des  plaques  étalées  et  assez  étendues  au  milieu  de  ncomcnibranes  qui 
couvrent  la  plèvre.  Laboulbène  en  a  cité  un  bel  exemple,  lesBuOeiins  de 
la  Société  anatomique  en  contiennent  plusieurs  observations,  et  j'en  ai 
observé  moi-même  un  cas  remarquable  chez  un  malade  atteint  de  pleu- 
résie chronique  :  la  plèvre  pariétale  était  couverte  de  néomembranes 
épaisses  et  celles-ci  contenaient,  dans  toute  la  hauteur  de  la  gouttière  - 
costo-vertébrale,  une  plaque  ossiformc  dont  les  dimensions,  l'épaisseur  et.j 
la  forme,  représentaient  à  peu  près  un  sternum. 

On  a  rencontré  encore  des  angiomes,  des  lipomes  situés  sur  la  plèvre 
costale  ou  au-dessous  d'elle  (Rokitansky), -enfin  des  kystes  séreux  6:^ 
même  un  kyste  dermoïde  (Buchner,  cité  par  Laboulbène).  Parmi  ces  tu 


PLÈVRE.   —   HTDATIDES.  255 

meurs,  nous  distinguerons  seulement  les  kystes  hydatiques  dont  nous  di- 
rons quelques  mots. 

Les  hydatides  de  la  plèvre  ont  été  étudiées  récemment  encore  par 
Heam  dans  sa  thèse  sur  les  kystes  hydatiques  du  poumon  et  de  la  plèvre, 
mémoire  consciencieux  et  remarquable  qui,  sur  ce  point  particulier,  a 
ajooté  AUX  recherches  antérieures  de  Vigla  et  même  aux  importants  tra- 
vauJL  de  Davaine.  Elles  sont  assurément  rares,  et  plusieurs  auteurs  pen- 
sent que  Ton  a  plusieurs  fois  considéré  comme  des  hydatides  pleurales 
des  kystes  du  poumon  ou  des  hydatides  tombées  du  poumon  dans  la  cavité 
pleônle  (Da vaine.  Trousseau);  cependant  Heam  a  pu  en  rassembler  15- 
exemples  dont  plusieurs  très-probants,  sur  75  cas  de  kystes  intra-thora- 
ciques  dans  lesquels  le  siège  de  la  maladie  est  assez  exactement  indi- 
qué. Elles  sont  situées  tantôt  dans  la  plèvre  elle-même,  tantôt  dans  le 
tissu  sous-séreux,  entre  la  plèvre  pariétale  et  la  paroi  thoracique. 

Les  hydatides  développées  primitivement  dans  la  cavité  pleurale  pré- 
sentent ce  caractère  anatomique  particulier  qu'elles  sont  dépourvues  de 
poche  adventice  (Davaine).  Dans  la  plupart  des  observations  suivies  d'au- 
topsie, on  voit  que  la  tumeur  est  constituée  par  une  poche  volumineuse 
remplissant  souvent  la  plus  grande  partie  ou  même  la  totalité  de  la  cavité 
de  U  plèvre  ;  les  parois  de  cette  poche  sont  formées  par  une  membrane 
transparente  ou  légèrement  opaline  et  blanchâtre,  composée  de  plusieurs 
feuillets  minces  superposés  :  sa  face  externe  est  quelquefois  adhérente  à 
ia  plèvre  pariétale  ou  à  la  plèvre  viscérale,  mais  il  n'est  ordinairement  pas 
difficile  de  l'en  détacher;  sa  face  interne  est  hérissée  de  petites  granula- 
tions sessiles  ou  pédiculées,  qui  sont  des  échinocoques,  ou  de  vésicules 
qui  ne  sont  autre  chose  que  des  hydatides  filles  appendues  à  la  poche 
principale.  Dans  l'intérieur  du  kyste,  on   trouve  un  liquide  limpide, 
hplîn,  quand  la  maladie  est  récente  et  que  les  parasites  qui  la  consti- 
tuent sont  encore  vivants,  plus  tard  louche  et  trouble,  se  transformant  à 
la  longue  en  une  masse  consistante  ressemblant  à  du  mastic  ou  à  du  fro- 
mage, en  même  temps  que  les  parois  deviennent  plus  épaisses  et  prennent 
une  apparence  fibreuse.  Tous  ces  caractères  n'ont  rien  de  spécial  aux 
hydatides  pleurales,  on  les  retrouve  dans  les  tumeurs  hydatiques  de  tous 
les  antres  organes',  mais  ici  la  poche  parasitaire  n'est  pas  entourée  par 
une  membrane  adventice,  ainsi  que  nous  l'avons  dit  tout  à  l'heure  ;  on 
trouve   seulement  autour  d'elle  quelques  traces  de  pleurésie,  souvent 
d'ailleurs  peu  accusées  et  consistant  en   adhérences  qui  réunissent  les 
parois  du  kyste  aux  feuillets  de  la  plèvre,  en  une  petite  quantité  d'exsu- 
dat  gélatineux  ou  en  quelques  fausses  membranes.  Quand  les  kystes  hyda- 
tiques de  la  plèvre  sont  très-volumineux,  ils  produisent  sur  les  organes 
voisins  des  effets  de  compression  tout  à  fait  analogues  à  ceux  que  déter- 
minent les  grands  épanchements  pleurétiques  :  le  poumon  est  refoulé. 
les  côtes  sont  écartées  en  dehors,  le  diaphragme  est  abaissé,  enfin  le 
cœur  et  les  organes  contenus  dans  le  médiastin  peuvent  être  eux-mêmes 
comprimés  et  déplacés  en  divers  sens. 
Le  début  des  kystes  de  la  plèvre  est  souvent  obscur,  ce  qui  s'explique 


256  PLÈVRE.  —  hydatides. 

par  Tabsence  de  troubles  fonctionnels  appréciables,  tant  que  la  tumeur 
n'exerce  pas  encore  de  compression  sensible  sur  les  organes  Toisins,  et 
par  la  tolérance  de  la  plèvre  elle-même  qui  est  à  peine  irritée  par  le 
développement  des  hydatides  dans  son  intérieur.  Quoi  qu*il  en  soit,  les 
symptômes  auxquels  tôt  ou  tard  ces  kystes  donnent  naissance  aoat  la 
douleur,  la  dyspnée  et  la  toux.  La  douleur  occupe  précisément  les  pointa 
où  siège  le  kyste  et  de  là  elle  présente  des  irradiations  diverses  ;  une  fois 
développée,  elle  persiste  avec  ténacité  pendant  toute  la  durée  de  la  mala- 
die :  cette  persistance  de  la  douleur  est  même  un  caractère  important 
dont  il  faut  tenir  grand  compte  dans  le  diagnostic,  et  qui  distingue  les 
kystes  intra-thoraciques  des  épanchements  pleurétiques  enkystés,  dans 
lesquels  la  douleur  est  un  phénomène  initial  et  de  courte  durée  (Vigla). 
La  dyspnée  parait  [subordonnée,  d'une  part,  à  la  douleur  qui  entrave 
instinctivement  les  excursions  thoraciques,  d'autce  part,  à  la  compres- 
sion mécanique  du  poumon  et  à  la  diminution  du  champ  respiratoire  qui 
en  résulte,  aussi  cette  dyspnée  augmente-t-elle  progressivement  «avec  le 
volume  de  la  tumeur.  La  toux  est  quelquefois  signalée,  toutefois  plus 
rarement  que  dans  les  kystes  hydatiques  du  poumon  ;  en  outre,  contrai- 
rement à  ce  qui  a  lieu  dans  ces  derniers,  la  toux  reste  sèche  dans  les 
kystes  de  la  plèvre  et  surtout  il  ne  survient  pas  d'hémoptysies  (Hearn). 
Quant  aux  symptômes  généraux,  ils  sont  habituellement  peu  prononcés  : 
la  maladie  a,  en  somme,  peu  de  retentissement  sur  l'ensemble  de  l'éco- 
nomie, et  les  seuls  troubles  fonctionnels  qu'elle  entraîne  sont  dos  au 
siège  de  la  tumeur  et  aux  effets  qu'elle  exerce  sur  les  organes  do  voi- 
sinage. 

Les  signes  physiques  ont  naturellement  une  grande  valeur  pour  le  dia- 
gnostic d'une  tumeur  liquide  intra-pleurale,  et,  malgré  les  analogies 
nombreuses  qu'ils  ont  avec  ceux  des  épanchements  pleurétiques  enkyirtés, 
et  surtout  avec  ceux  des  hydatides  du  poumon,  ils  offrent  cependant 
quelques  particularités  qui  les  distinguent  et  peuvent  quelquefois  permet- 
tre de  reconnaître  la  nature  de  la  maladie. 

Quand  le  kyste  hydatique  a  acquis  un  certain  volume  et  qu'il  s'accuse 
déjà  par  des  douleurs  et  une  dyspnée  plus  ou  moins  intense,  il  donne 
lieu  quelquefois  à  une  dilatation  du  thorax  et  à  une  voussure  dont  le 
siège  correspond  précisément  à  celui  de  la  tumeur.  Si  cette  voussure 
n'est  pas  constante,  c'est  qu'en  réalité  le  poumon  cède  plus  facilement 
à  la  compression  que  la  paroi  thoracique  ;  mais,  quand  elle  existe,  la 
voussure  devient  un  signe  diagnostique  de  la  plus  grande  valeur  en  rai- 
son de  son  siège  et  de  sa  forme  :  en  effet,  d'une  part  elle  n'occupe  pas 
forcément  la  base  de  la  poitrine,  comme  dans  les  épanchements  pleuré- 
tiques ;  d'autre  part,  elle  peut  encore  se  distinguer  par  sa  forme  globu- 
leuse, ainsi  que  Trousseau  l'a  bien  fait  ressortir  :  lorsque  la  dilatation 
thoracique,  au  lieu  d'être  uniforme  comme  cela  est  ordinaire  dans  la 
pleurésie,  est,  au  contraire,  parfaitement  circonscrite  et  globuleuse,  cette 
forme  particulière  est  plutôt  l'indice  d'un  kyste  que  d'un  épanchement, 
et  Trousseau  rapporte  plusieurs  exemples  dans  lesquels  ce  signe  a  pii 


PLÈVRE.   —   HÎDATIDES.  257 

déterminer  le  diagnostic.  Eu  même  temps  que  la  voussure,  on  constate 
ordinairement  une  immobilité  du  thorax,  ou  au  moins  une  diminution  des 
excursions  respiratoires  du  côté  correspondant  à  la  tumeur. 

Les  TÎbrations  thoraciques  sont  diminuées  ou  même  totalement  abolies 
an  nifeau  du  kyste.  La  percussion  donne  une  matité  souvent  complète, 
absolue  dans  toute  l'étendue  de  la  tumeur.  La  palpation  et  la  percussion 
semblent  donc  fournir  des  résultats  identiques  à  ceux  qu'on  rencontre 
dans  les  épanchements  pleurétiques  enkystés;  cependant,  ici  encore,  l'éten- 
due et  le  siège  dans  lesquels  on  percevra  ces  signes  pourront  éclairer 
le  diagnostic  :  si  l'on  arrive  à  limiter  par  ces  moyens  une  tumeur  enkystée 
nettement  globuleuse,  n'ayant  pas  le  siège  ni  la  forme,  si  bien  détermi- 
nées d'ordinaire,  des  épanchements  pleurétiques,  on  pourra  soupçonner 
l'existence  d'une  maladie  autre  que  la  pleurésie  et  penser  à  un  kyste. 
Quant  à  l'auscultation,  les  signes  qu'elle  fournit,  tels  que  absence  de 
bruit  respiratoire,  souifle  voilé,  quelquefois  souille  pseudo-cavi taire,  ils 
ressemblent  tellement  à  ceux  que  Ton  trouve  dans  la  pleurésie,  que,  saul 
encore  leur  siège  et  leur  forme  dans  quelques  cas  particuliers,  ils  n'ajou- 
tent que  peu  de  renseignements  à  ceux  que  donnent  les  autres  moyens 
d'exploration. 

On  voit^  d'après  ce  qui  précède,  de  quelles  difficultés,  souvent  insur- 
montables, est  entouré  le  diagnostic  des  kystes  hydatiques  des  plèvres, 
difficultés  encore  accrues  lorsque  ces  kystes  sont  accompagnés  d'un  épan- 
chement  pleurétique  concomitant,  ce  qui  est  loin  d'être  rare.  Aussi  ne 
reconnait-on  habituellement  la  maladie  que  lorsque  se  produit  spontané- 
ment l'ouverture  du  kyste  dans  les  bronches  :  on  voit  alors  survenir, 
comme  par  une  sorte  de  vomique,  une  expectoration  abondante;  le  ma- 
lade rend,  dans  des  quintes  de  toux,  un  flot  de  liquide  transparent  et  clair 
ou  déjà  altéré,  d'un  goût  salé  très-prononcé,  dans  lequel  le  microscope 
permet  de  constater  la  présence  d'échinocoqucs  ou  au  moins  de  crochets. 
Cette  expectoration  hydatique  constitue  un  signe  vraiment  pathognomo- 
nique  de  l'existence  d'un  kyste  intra-thoracique;  il  reste  à  déterminer 
quel  est  le  véritable  siège  du  kyste,  si  c'est  la  plèvre,  le  poumon  ou  même 
le  foie;  mais  nous  n'insisterons  pas  davantage  sur  ce  diagnostic,  qui 
trouvera  mieux  sa  place  à  l'occasion  des  hydatides  du  poumon. 

La  marche  des  kystes  hyJatiques  de  la  plèvre  est  le  plus  habituelle- 
ment lente,  leur  durée  se  compte  au  moins  par  plusieurs  mois. 

La  maladie  est  certainement  très-grave  et  comporte  un  pronostic  très- 
sérieux;  cependant  les  kystes  de  la  plèvre  peuvent  être  tenus  pour  beau- 
ooap  moins  graves  que  les  kystes  pulmonaires,  parce  que  leur  situation 
les  dispose  plus  favorablement  à  l'action  thérapeutique  (Uearn).  La  gué- 
risoo  spontanée  ne  parait  pas  d'ailleurs  impossible  :  on  a  vu  des  kystes 
iolra-thoraciques  guérir  après  l'évacuation  spontanée  de  leur  contenu 
par  les  bronches  et  même  par  la  paroi  thoracique.  Mais  il  ne  faudrait  pas 
trop  compter  sur  cette  terminaison  favorable  :  outre  que  l'évacuation  des 
kystes  par  les  bronches  a  plusieurs  fois  amené  l'asphyxie  et  une  mort 
rapide,  résultant  de  l'obstruction  brusque  de  ces  conduits  par  des  débris 

WOT.  UCT.  Mio     ET  CHIl.  XXYlII.  —  17 

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258  PLÈVRE.  —  maladies  secondaires. 

d'hydatidcs,  on  a  vu  plus  souvent  encore  survenir,  dans  ces  condiikms, 
un  pneumothorax,  et  cette  complication  est  elle-même  une  des-  plus  dan- 
gereuses, car  elle  peut  entraîner  aussi  une  mort  rapide  par  a^hyxie 
ou  bien  amener  une  suppuration  de  la  plèvre,  et  par  conséquent  tous 
les  dangers  de  la  pleurésie  purulente.  Les  kystes  de  la  plèvre  ont  quel- 
quefois aussi  causé  la  mort  par  une  asphyxie  progressive,  lorsqae  la  ma- 
ladie abandonnée  à  elle-même  a  acquis  un  développement  considérable 
et  capable  de  supprimer  complètement  les  fonctions  d'un  des  poumons. 

Heureusement  la  thérapeutique  n'est  pas  désarmée  en  face  des  accidents 
si  graves  et  des  complications  qu'entraînent  les  kystes  des  plèvres  :  si  l'on 
reconnaît  la  maladie  avant  l'ouverture  du  kyste  dans  les  bronches,  la 
ponction  capillaire  et  l'aspiration  pourront  être  pratiquées  avec  chances 
de  succès;  Bird,  cité  par  Hearn,  aurait  ainsi  obtenu  plusieurs  guérisons 
par  ce  simple  traitement  dans  des  cas  de  kystes  intrathoraciques,  et  il 
parait  que  cette  pratique  est  fréquemment  employée  par  les  médedns 
d'Australie.  Si  le  kyste  s'est  déjà  ouvert  dans  les  bronches,  on  peut 
attendre  la  guérison  spontanée,  tant  qu'il  ne  survient  pas  d'accidents; 
mais  s'il  arrive  des  complications,  et  surtout  une  suppuration  de  la  plèvre, 
il  faut  recourir  à  Fempyème,  et  les  observations  de  Vigla,  de  Soulhey,  de 
Moutard-Martin  sont  là  pour  témoigner  qu'il  ne  faut  pas  désespérer, 
même  dans  ces  conditions  si  défavorables,  et  que  l'ouverture  de  la  poi- 
trine et  les  lavages  de  la  plèvre  constituent  certainement  alors  la  meil- 
leure ressource  dont  on  puisse  disposer. 

Maladies  se<5ondaire&i.  —  Nous  avons  déjà  vu  combien  souvent 
les  maladies  des  plèvres  sont  subordonnées  à  des  maladies  primitivement 
développées  surtout  dans  les  poumons,  ou  encore  dans  les  médiastins,  dans 
les  parois  thoraciques,  même  dans  le  foie,  en  un  mot  dans  les  difléreots 
organes  adjacents  à  la  plèvre.  A  pi*opos  de  la  pleurésie,  de  la  tuberculose, 
du  cancer,  etc.,  nous  avons  insisté  sur  ce  fait  important  que,  la  pleurésie 
franche  aiguë  mise  à  part,  la  plupart  de  ces  maladies  sont  rarement  pri- 
mitives et  qu^elles  sont,  au  contraire,  habituellement  dépendantes  d'af- 
fections antérieures  des  poumons  ou  des  organes  voisins. 

D'autre  part,  nous  avons  observé  aussi  que,  dans  un  grand  nombre  de 
circonstances,  les  altérations  des  plèvres  ne  sont  qu'une  des  détermina- 
tions locales  d'une  maladie  générale,  comme  la  tuberculose  ou  le  cancer: 
il  s'agit  alors  de  manifestations  diathésiques  qui  envahissent  à  la  fois 
plusieurs  organes  et  dans  lesquelles  la  plèvre  peut  être  intéressée  au 
même  titre  que  les  autres  membranes  séreuses  ou  les  autres  viscères. 

Ces  deux  groupes,  altérations  des  plèvres  par  extension  des  maladie$ 
des  organes  voisins,  altérations  par  lésions  multiples  résultant  d'wu 
affection  diathésique,  comprennent  la  plus  grande  partie  des  maladitf 
secondaires  des  plèvres. 

Nous  n'insisterons  pas  davantage  sur  ces  différentes  maladies  :  pourltf 
pleurésies  secondaires,  comme  pour  la  tuberculose,  le  cancer,  les  d^ 
nérescences  secondaires  des  plèvres,  nous  renverrons  à  ce  que  nous  avons 
déjà  dit  dans  les  pages  précédentes.  Mais  il  est  un  point  que  nous  désirons 


PLÈVRE.   —  MALADIES  §EC0?IDA1RES.  259 

mettre  ici  en  relief,  c'est  la  relation  fréquente  qui  existe  entre  certaines 
maUdies  des  plè^^s  et  les  mêmes  maladies  du  péritoine. 

La  tuberculose  et  la  carcinose  du  péritoine  coïncident  fréquemment  avec 
des  mttadies  semblables  des  plèvres,  et  cette  coïncidence  a  une  grande 
valeur  au  point  de  vue  diagnostique.  En  effet  Texistence  simultanée 
d^une  pleurésie  simple  ou  double  et  d'une  péritonite  imposera  d'une 
façon  presque  absolue  l'idée  d'une  tuberculose  des  membranes  séreuses; 
si  Ton  sait,  d'après  les  recherches  cliniques  d'Empis,  que,  dans  la  tuber- 
culose aiguë  des  séreuses,  il  est  à  peu  près  de  règle  que  les  plèvres  et  le 
péritoine  soient  affectés  en  même  temps,  cela  n'est  pas  moins  vrai  pour 
la  tuberculose  chronique  :  (iodélier,  cité  par  Yillemin,  a  posé  en  loi  que, 
c  quand  il  y  a  tuberculisation  du  péritoine,  il  y  a  toujours  aussi  tuberculi- 
sation  de  l'une  ou  des  deux  plèvres.  y>  On  conçoit  toute  l'importance  cli- 
nique de  cette  loi  :  dans  les  cas  où  une  péritonite  tuberculeuse  ne  se 
traduit  que  par  des  symptômes  douteux,  ou  bien  encore  dans  les  cas  où 
le  diagnostic  est  hésitant  entre  une  péritonite  et  une  autre  affection  de 
TabdomeD,  comme  une  cirrhose  du  foie  par  exemple,  on  devra  rechercher 
immédiatement  s'il  existe  en  même  temps  quelques  signes  de  pleurésie 
chronique,  et  les  résultats  positifs  ou  négatifs  de  cette  recherche  décide- 
ront presque  toujours  à  admettre  ou  à  rejeter  la  tuberculose.  Yillemin 
déclare  que  bien  des  fois  il  a  eu  l'occasion  de  vérifier  l'exactitude  de  cette 
loi  et  qu'il  n'a  jusqu'ici  rencontré  aucun  exemple  qui  s'en  écarte.  Mon 
observation  personnelle  me  permet  d'ajouter  que  souvent  aussi  j'ai  pu 
constater  la  valeur  diagnostique  de  ce  caractère  de  coïncidence. 

Comment  comprendre  cette  relation  si  habituelle  entre  certaines  affec- 
tions des  membranes  séreuses  thoraciques  et  abdominales?  Assurément 
on  peut  admettre  que  les  plèvres  et  le  péritoine  deviennent  malades  au 
même  titre  et  indépendamment  l'une  de   l'autre,   par   le  fait  de  la 
diathèse  tuberculeuse  ou  cancéreuse  ;  il  est  probable  qu'il  en  est  sou- 
vent ainsi,  notamment  dans  les  cas  nombreux  où  l'apparition  des  acci- 
dents semble  se  faire  en  même  temps  dans  plusieurs  membranes  séreuses. 
Mais  on  peut  encore,  dans  certains  cas,  invoquer  un  autre  mécanisme,  à 
savoir  h  propagation  de  proche  en  proche  ou  à  distance  d'une  altération 
développée  primitivement  dans  un  foyer  unique.  Nous  avons  déjà  indi- 
qué,  à  propos  de  la  tuberculose  et  du  cancer  des   plèvres,  que  ces 
affections,  le  plus  souvent  secondaires,  étaient  considérées  aujourd'hui 
comme  résultant  habituellement  d'une  infection  de  voisinage  dont  le 
système  lymphatique  serait  la  voie  de  transmission  la  plus  fréquente  ; 
lestravauxde  Virchow,  Yillemin,  Charcot,  Lépine,  Debove,  Troisier,  que 
Dousavons  mentionnés,  semblent  mettre  ce  mode  pathogénique  au-dessus 
de  toute  contestation.  Suivant  toute  probabilité,  c'est  d'une  façon  ana- 
logae  que    se   propageraient    les  lésions  des  plèvres   au  péritoine  ou 
intersement  :  pour  le  cancer  par  exemple,   Charcot  et  Debove  ont  pu 
suinela  propagation  du  cancer  du  sein  à  la  plèvre  par  les  vaisseaux 
lymphati^pies  eux-mêmes  dégénérés,  ainsi  que  nous  l'avons  déjà  vu  ; 
mais  ce  n'est  pas  tout,  les  mêmes  auteurs  ont  constaté  que  la  dégéné- 


260  PLÈVRE.  —  kpàkchemerts  dans  la  cavité  pleurale* 

rescence  s'étend  souvent  au  diaphragme,  et  que  par  son  intermédiaire, 
elle  peut  envahir  le  péritoine  :  ainsi,  en  même  temps  que  la  plèvre  était 
affectée,  ils  ont  trouvé  des  productions  cancéreuses  à  la  face  supérieure 
et  à  la  face  inférieure  du  diaphragme,  figurant  dans  ce  dernier  siège  des 
masses  blanchâtres  étoilées,  anastomosées  entre  elles,  et  l'examen  faisto- 
logique  a  montré  qu'il  s'agissait  là  de  lymphangite  cancéreuse  (on  sait 
d'ailleurs,  par  les  recherches  des  anatomistes,  que  le  diaphragme  est 
très-riche  en  vaisseaux  lymphathiques,  surtout  au  niveau  du  centre 
phrénique).  Dans  un  certain  nombre  de  cas,  l'altération  se  propageait 
plus  loin  encore,  et  les  organes  enveloppés  par  le  péritoine  étaient  parse- 
més à  leur  surface  de  nodules  cancéreux.  Cette  propagation  d'une  affec- 
tion de  la  plèvre  au  péritoine  ou  inversement,  bien  établie  pour  le 
cancer,  parait  au  moins  probable  de  même  pour  la  tuberculose,  ainsi 
qu'il  résulte  des  recherches  de  Lépine,  peut-être  même  pour  certaines 
inflanunations  purulentes  des  séreuses,  comme  le  feraient  supposer  les 
faits  rapportés  par  Vautrain  et  par  Caillette,  et  déjà  analysés  ailleurs 
(Voy.  art.  Péritonite  ,  t.  XXVI,  p.  716),  faits  qui  semblent  établir  la 
possibilité  d'une  propagation  des  inflammations  de  la  plèvre  au  péritoine 
ou  réciproquement. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  l'interprétation,   le  fait  de  la  coïncidence   des 
affections  de  la  plèvre  et  du  péritoine  n'en  subsiste  pas  moins  parfai- 
tement établi  en  clinique,  et  la  fréquence  de  cette  coïncidence  dans  h 
tuberculose  et  dans  le  cancer  lui  donne  une  valeur  diagnostique  qui  jus 
tifie  les  développements  que  nous  lui  avons  consacrés. 

Pour  terminer  l'étude  des  maladies  secondaires  des  plèvres,  il  nous 
reste  à  parler  des  épanchements  dont  elles  peuvent  être  le  siège.  Comme 
nous  l'avons  dit  au  début  de  cet  article,  ce  sont  plutôt  là  des  accidents, 
des  épiphénomènes  que  des  maladies  proprement  dites  des  plèvres  ; 
mais  au  point  de  vue  pratique,  il  y  a  tout  intérêt  à  les  en  rapprocher  a 
cause  des  symptômes  qu'ils  déterminent  et  des  conséquences  qu'ils  peu- 
vent entraîner. 

Epamcuemekts  dans  la  cavité  pleurale.  —  Ces  épanchements  présentent 
de  très-nombreuses  variétés,  relatives  d'une  part  à  la  nature  des  fluides  qui 
les  constituent,  d'autre  part  aux  conditions  pathologiques  qui  président  à 
leur  développement. 

Nous  ne  ferons  que  mentionner  un  certain  nombre  d'épanchements, 
peu  communs  d'ailleurs,  qui  résultent  de  l'irruption  brusque  dans  la  plèvre, 
de  matières  diverses  provenant  des  parties  voisines  :  ici,  c'est  du  sang 
provenant  de  la  rupture  d'un  anévrysme  de  l'aorte  ou  d'une  hémorrhagie 
pulmonaire  abondante;  là,  c'est  du  pus  provenant  de  l'ouverture  dans  la  c^ 
vite  pleurale  d'un  abcès  formé  dans  le  poumon ,  dans  le  foie ,  ou  même  dans  les 
reins,  dans  le  médiastin,  dans  les  parois  thoraciques  ;  dans  quelques  cas,  ce 
sont  des  matières  gangreneuses  provenant  d'un  foyer  gangreneux  super^ 
liciel  du  poumon;  dans  d'autres  circonstances,  c'est  du  liquide  hydati(|9e 
provenant  d'un  kyste  du  poumon  ou  du  foie;  ailleurs  encore,  ce  sont  des 
matières  alimentaires  qui  ont  passé  par  une  perforation  de  l'oesophage. 


PLÈVRE.    —  HTDROTHORAX.  261 

surtout  dans  le  cas  de  cancer  de  cet  organe.  Tous  ces  faits  ressortisscnt  à 
rhîsloire  des  diverses  maladies  que  nous  venons  d'énumérer,  et  ne  sont 
autre  chose  que  des  complications  de  ces  maladies  ;  nous  ne  devons  pas 
nous  y  arrêter.  Notons  seulement  que,  dans  ces  diverses  circonstances, 
rirmption  brusque  de  matières  étrangères  dans  la  plèvre  s'annonce  en  gé- 
néral par  un  violent  point  de  côté  accompagné  d'une  dyspnée  très-intense 
et  d'accidents  de  suffocation  capables  d'entrainer  la  mort  à  bref  délai  ;  que, 
dans  les  cas  moins  défavorables  et  moins  promptement  funestes,  il  se  dé- 
veloppe une  pleurésie  suraiguë  à  épanchement  presque  toujours  purulent; 
enBnqae  les  signes  physiques  permettent  de  reconnaître  l'accumulation  dans 
la  plèvre  d'un  épanchement  liquide  et  quelquefois  gazeux  en  même  temps. 
Ces  différents  phénomènes  ne  peuvent  d'ailleura  indiquer  autre  chose  que 
l'existence  d'une  perforation  de  la  plèvre  et  d'un  épanchement  dans  sa 
cavité;  quant  au  diagnostic  de  la  nature  du  liquide  épanché  et  de  la  cause 
des  accidents,  il  ne  peut  être  éclairé  que  par  les  commémoratifs  et  par 
la  connaissance  antérieure  de  la  maladie  primitive. 

£n  dehors  de  ces  épanchements  accidentels,  qui  ne  sont  en  réalité  que 
des  complications  des  diverses  maladies  que  nous  avons  énumérées,  la 
plèvre  peut  encore  être  le  siège  de  différents  épanchements  dont  l'étude 
ne  doit  pas  davantage  nous  arrêter  :  ainsi  on  peut  y  rencontrer  des  épan- 
diement^  sanguins  résultant  d'un  traumatisme,  d'une  contusion  du  thorax 
ou  d'une  plaie  pénétrante  de  la  poitrine  (Voy.  art.  Poitrine,  lésions  trau- 
matiquesde  la),  ou  consécutifs  à  certaines  pleurésies;  ces  derniers,  qui 
appartiennent  à  notre  sujet,  ont  déjà  été  étudiés  (Voy.  Pleurésie  hémorrha- 
gique).  On  y  observe  assez  souvent  des  épanchements  purulents,  non  plus 
Tenus  des  parties  voisines  comme  tout  à  Theure,  mais  directement  formés 
dans  la  cavité  pleurale  ;  ces  épanchements  ont  également  été  étudiés  en 
détail  dans  l'article  consacré  à  la  Pleorésie  purulente.  Les  plus  communs 
de  tous  sont  les  épanchements  séro-fibrineux  qui  se  forment  dans  la  pleu- 
résie aiguë  ;  ils  ont  été  aussi  l'objet  d'une  étude  spéciale  (  Voy.  Pleurésie 
aigdë).  Enfin  on  y  trouve  encore  des  épandiements  séreux  ({uq  l'on  décrit 
sous  le  nom  d'hydrothorax,  et  des  épanchements  gazeux  de  composition 
diverse  qu'on  réunit  sous  la  dénomination  de  pneumothorax.  Ces  deux 
dernières  variétés  n'ayant  pas  été  étudiées  encore,  nous  devons  les  exposer 
avec  quelques  détails. 

Htdrothorax.  —  L'hydrothorax  est  l'hydropisie  de  la  plèvre,  en  d'autres 
termes  Tépanchement  dans  la  cavité  pleurale  d'un  liquide  aualogue  au 
fiérum  du  sang. 

Le  liquide  de  l'hydrothorax  se  distingue  du  liquide  de  la  pleurésie  par 
l'absence  de  fibrine;  un  autre  caractère  sépare  encore  ces  deux  maladies, 
c'est  l'absence  de  lésions  anatomiques  dans  la  membrane  séreuse  elle- 
même  lorsqu'il  s'agit  d'une  hydropisie  pleurale,  l'existence  constante  de 
ces  lésions  dans  la  pleurésie.  En  réalité,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  la 
plèvre  n'est  pas,  à  proprement  parler,  malade  dans  l'hydrothorax,  elle 
n'est  que  le  réceptacle  d'un  épanchement  à  la  formation  duquel  elle  est 
complètement  étrangère  ;  et  la  seule  lésion  que  l'on  puisse  constater  dans 


262  PLÈVRE.   —  UTDROTHORAX.   —  CAUSES. 

cette  maladie  consiste  dans  Taccumulation  d'une  quantité  plus  ou  moins 
grande  de  sérosité  dans  la  plèvre. 

Il  n'y  a  pas  d'hydrothorax  idiopathique  ;  l'hydropisie  pleurale  est  toujours 
secondaire,  dépendante  d'une  maladie  qui  a  son  siège,  non  pas  dans  la 
plèvre,  mais  dans  l'appareil  circulatoire  ou  dans  le  sang.  Les  exemples 
qu'on  a  cités  de  prétendu  hydrothorax  idiopathique  peuvent  être  tenus  pour 
des  faits  incomplètement  observés;  il  s'agissait  sans  doute,  ou  de  pleu- 
résies avec  peu  ou  pas  de  fausses  membranes  et  un  épanchement  séreux 
considérable,  ou  de  tuberculoses  pleurales  dont  les  granulations  peu  nom- 
breuses ont  pu  échapper  à  l'observation,  ou  enfin  d'hydrothorax  vrais  dont 
la  cause,  maladie  du  cœur  ou  maladie  de  Bright,  aura  été  méconnue. 

Causes,  —  Les  causes  de  Thydrothorax,  comme  celles  des  autres  hy- 
dropisies  (Voy.  ce  mot),  sont  des  causes  mécaniques  et  des  causes  dyscra- 
siques.  En  tête  des  premières  se  placent  les  conditions  qui  apportent  on 
obstacle  à  la  circulation  veineuse  dans  le  poumon  ou  dans  les  parois 
thoraciques  :  les  plus  fréquentes  sont  les  lésions  mitrales  (rétrécissement 
ou  insuffisance),  dont  un  des  premiers  effets  est  de  gcner  le  cours  du  sang 
dans  les  poumons  et  dans  leur  enveloppe  séreuse  et  par  suite  d'amener 
d'abord  la  congestion  et  l'œdème  du  poumon,  puis  Tépanchement séreux 
dans  les  plèvres  ;  plus  tard,  les  troubles  apportés  à  la  circulation  générale 
pourront  entraîner  le  développement  d'une  anasarque,  mais,  dans  les 
hydropisies  résultant  d'une  maladie  mitrale,  l'œdème  du  pouuion  et 
rhydrothorax  précéderont  toujours  les  autres  œdèmes.  D'autres  maladies 
du  cœur  peuvent  aussi  produire  l'hydrothorax,  notamment  toutes  celles 
qui  sont  accompagnées  d'asystolie,  et  aussi  la  parésie  cardiaque  qui  arrive 
dans  la  période  avancée  des  maladies  graves  ;  mois,  dans  ces  conditions, 
l'hydrothorax  apparaîtra  en  même  temps  que  des  hydropysies  en  d'autres 
parties  du  corps  et  fera  elle-même  partie  d'une  anasarque  généralisée. 
Comme  causes  plus  rares  d'hydrothorax  d'origine  mécanique,  on  peut 
citer  les  compressions  des  veines  pulmonaires  par  des  tumeurs  des  mé- 
diastins  qui,  comme  les  lésions  mitrales,   produisent  en  même  temps 
l'œdème  du  poumon  et  l'hydropisie  pleurale,  et  même  les  compressions 
de  la  veine  cave  sujpérieure  qui  amènent  l'hydrothorax  concurremment 
avec  l'œdème  des  parois  thoraciques,  de  la  tète  et  des  membres  supérieurs. 
Les  causes  discrasiques,  qui  sont  la  maladie  de  Briglit  et  les  cachexies, 
n'ont  rien  de  spécial  à  l'hydrothorax  ;  elles  déterminent  une  anasarque. 
dans  laquelle  l'épanchement  de  la  plèvre  n'apparaît  même  qu'à  une  pé- 
riode assez  avancée  et  n'acquiert  pas  en  général  un  bien  grand  dévelop- 
pement. 

L'hydrothorax  est  presque  toujours  double,  caractère  clinique  impor- 
tant qui  est  un  des  cléments  du  diagnostic  avec  la  pleurésie  simple,  oi 
l'épanchement  est  au  contraire  unilatéral.  Souvent  la  quantité  du  liquide 
est  plus  considérable  d'un  côté  que  de  l'autre,  ce  qui  peut  tenir  à  diverses 
influences  mécaniques,  notamment  au  dccubitus  ;  mais  cela  n'empêche  que 
les  deux  plèvres  sont  affectées  à  la  fois,  ce  qu*on  s'explique  d'ailleurs 
facilement  par  la  nature  des  causes  qui  produisent  l'hydrothorax,  causes 


PLÈVRE.    —   HTDROTHORAX.   —  LÉSIONS  ANATOMIQUES.  263 

qui  agissent  également  sur  les  deux  côtés  de  la  poitrine  ;  on  ne  comprend 
même  la  possibilité  d*un  hydrothorax  unilatéral  que  dans  le  cas,  certai- 
nement exceptionnel,  où  il  y  aurait  une  compression  des  veines  pulm6- 
naires  d'un  seul  côté  par  une  tumeur  du  médiastin,  comme  un  anévrisme 
de  l'aorte  ou  une  adénopathic  trachéo-bronchique. 

La  membrane  séreuse  elle-même  étant  saine  ou  ne  présentant  d'autre 
altération  qu'une  infiltration  légère  par  de  la  sérosité  qui  lui  donne  une 
apparence  comme  macérée,  les  lésions  anatomiques  de  Thydrothorax  se 
réduisent  au  liquide  épanché  dans  la  cavité  de  la  plèvre. 

La  quantité  de  ce  liquide  est  très-variable  :  quelquefois  très-peu  consi- 
dérable» 100  à  200  grammes  à  peine,  elle  peut  atteindre  un  et  même 
plusieurs  litres;  les  épanchemcnts  énormes  appartiennent  plutôt  aux  cas 
où  Fhydropisie  dépend  d'un  obstacle  circulatoire  qu*à  ceux  où  elle  se 
rattache  à  une  altération  de  sang. 

Le  liquide  est  limpide,  de  couleur  légèrement  jaunâtre  et  citrine.  Sa 
composition,  qui  d'ailleurs  est  à  peu  près  la  môme  que  dans  les  autres 
hydropisies,  est  analogue  à  celle  du  sérum  sanguin;  elle  en  diffère  cepen- 
dant en  ce  que  la  sérosité  hydropique  contient  beaucoup  plus  d'eau  et 
moins  d'autres  éléments  constituants  que  le  plasma  du  sang.  Elle  est 
coagulaUe  par  la  chaleur  et  par  l'acide  nitrique»  en  raison  de  la  quantité 
notable  d'albumine  qu'elle  contient.  Voici,  d'après  les  recherches  si 
précises  de  Méhu,  qui  a  analysé  comparativement  un  grand  nombre  de 
liquides  provenant  d'hydrothorax  et  de  liquides  provenant  de  pleurésies, 
obtenus  dans  tous  les  cas  par  la  thoracentèse  ;  voici,  dis-je,  les  principaux 
can^tères  du  liquide  de  l'hydrothorax  :  la  densité  du  liquide  varie  de 
1010  à  1016.  La  quantité  de  résidu  sec,  obtenu  par  évaporation,  est  com- 
prise entre  17  gr..  56  et  47  gr.  76  par  kilogramme  de  liquide;  ce  chiffre 
total  se  décompose  ainsi  : 

Mntières  organiques 8>',91    à  39<%08 

Matières  minérales 8i%36    à    9<^,18 

Fibrine • 0«^,136  à    08',469 

On  voit  donc  que,  si  la  fibrine  se  montre  plus  particulièrement  dans  la 
pleurésie  aiguë,  elle  existe  aussi  dans  les  cas  où  l'épanchement  est  le 
résultat  d'une  gène  de  la  circulation,  mais  alors  elle  est  en  petite  pro- 
portion. Nous  observerons  d'ailleurs  que  la  présence  de  la  ûbrine  dans  le 
liquide  hydropique  semble  distinguer  l'hydrothorax  des  autres  hydro- 
pisies,  où  au  contraire  ce  constituant  fait  défaut  d'une  manière  absolue, 
si  Ton  s'en  rapporte  aux  analyses  de  différents  auteurs.  (Yoy.  art.  Htdro- 
pisiE,  t.  XVIII,  p.  35.)  Répétons  «enfin  que  la  quantité  de  fibrine  est 
minime  dans  l'hydrothorax  comparativement  à  ce  qu'elle  est  dans  la  pleu- 
résie ;  on  peut  donc,  sauf  une  légère  restriction,  maintenir  la  proposition 
classique  que  nous  avons  formulée  après  tous  les  auteurs,  à  savoir  que  le 
Uquide  de  l'hydrothorax  se  distingue  du  liquide  de  la  pleurésie  par  Tab- 
senoe  (il  vaudrait  mieux  dire  la  proportion  moindre)  de  fibrine.  On  pour- 
rait, du  reste,  en  dire  autant  pour  les  autres  éléments  organiques  :  le 
liquide  de  l'hydrothorax  a,  en  effet,  les  mêmes  éléments  que  celui  de  la 


2Ô4  PLÈVRE.   —  HÎDROTHORAX.   — '  STHt^TÔMES. 

pleurésie  aiguë,  mais  la  proportion  des  éléments  organiques  est  considé- 
rablement réduite  ;  Méhu  déclare  que  jamais,  dans  les  nombreux  cas  de 
pleurésie  qu'il  a  examinés,  il  n'a  constaté  un  poids  de  matières  organi- 
ques aussi  faible  que  celui  que  contient  le  plus  riche  des  liquides  épan- 
chés dans  les  cas  d'hydrothorax.  On  comprend,  d'après  ce  qui  précède, 
toute  l'impoilance  que  peut  acquérir  l'analyse  chimique  du  liqnide 
extrait  par  la  thoracentèse,  dans  certains  cas  où  le  diagnostic  est  hésitant 
sur  la  nature  de  la  maladie  qui  a  produit  l'épanchement.  Nous  reprodui- 
rons encore  ici,  sans  autre  commentaire,  quelques  propositions  que  Méhu 
a  déduites  de  ses  recherches  et  dont  nous-mêmes  avons  eu  plusieurs  fois 
l'occasion  de  vérifier  l'exactitude  :  —  Toutes  les  fois  que  le  poids  du 
résidu  sec  n'atteint  pas  50  grammes  par  kilogramme,  il  s'agit  d'un  hydro- 
thorax ;  toutes  les  fois  qu'il  dépasse  5U  grammes  et  que  le  liquide  se  coa- 
gule après  l'opération,  il  s'agit  d'une  pleurésie  aiguë.  —  Tout  liquide 
pleural,  pour  lequel  le  densimèlre  indique  une  densité  inférieure  à  1015, 
à  la  température  de  15°,  est  un  hydrothorax  ;  tout  liquide  pleural,  dont 
la  densité  est  supérieure  à  1018  et  qui  se  coagule  après  la  ponction, 
appartient  à  une  pleurésie  aiguë  franche  ;  tout  liquide  pleural,  dont  la 
densité  est  supérieure  à  1018  et  qui  ne  donne  pas  de  fibrine,  indique  une 
lésion  de  la  plèvre  due  à  la  présence  d'un  produit  hétérologue  (tuber- 
cule, cancer).  Inutile  d'insister  sur  l'importance  de  ces  propositions,  dont 
on  comprend  toute  la  valeur  au  point  de  vue  du  diagnostic. 

Symptômes.  —  Les  symptômes  de  l'hydrothorax  sont  souvent  très- 
peu  marqués  :  quand  l'épanchement  séreux  est  peu  considérable,  ou 
lorsqu'il  survient  dans  le  cours  d'une  maladie  de  cœur  déjà  avancée  oo 
dans  la  période  ultime  d'une  maladie   cachectique,  il  peut  facilement 
passer  inaperçu,  si  l'on  ne  prend  soin  d'en  rechercher  l'existence  par  uo 
examen  attentif  de  la  poitrine.  La  dyspnée  est,  en  réalité,  le  seul  trouble 
fonctionnel  auquel   donne  Heu  l'hydrothorax  ;  il  n'y  a,  en  effet,  dads 
cette  maladie,  ni  fièvre,  ni  point  de  côté,  en  un  mot  aucun  dss  phéno- 
mènes locaux  et  réactionnels  auxquels  donne  lieu  la  pleurésie.  L'hydro- 
pisie  pleurale  semblerait,  en  somme,  un  accident  indifférent,  si,  par  hi 
place  qu'elle  occupe  dans  la  cavité  thoracique,  elle  n'empêchait  d'autant 
la  dilatation  du  poumon  et  n'apportait  ainsi  obstacle  à  l'hématose,  d'où 
la  gêne  de  la  respiration.* La  dyspnée  acquiert  une  intensité  qui  est  en 
rapport  avec  l'abondance  du  double  épanchement  et  arrive  assez  souvent 
jusqu'à  l'orthopnée;  notons  d'ailleurs  que  la  plupart  des  maladies  sous  la 
dépendance  desquelles  se  développe  l'hydrothorax  produisent,  elles  aussi, 
la  dyspnée,  et  qu'il  est  par  suite  difficile  de  faire  la  part  de  ce  qui  appar- 
tient à  la  maladie  primitive  et  à  l'accident  secondaire  ;  on  ne  peut  guère, 
dans  ces  conditions,  rattacher  à  l'hydropisie  pulmonaire  et  pleurale  qœ 
l'aggravation  des  troubles  respiratoires  qu'on  voit  survenir  dans  le  cours 
des  maladies  antécédentes.  La  dyspnée  est  accompagnée  d'une  fréquence 
et  d'une  brièveté  marquées  de  la  respiration  ;  dans  les  degrés  extrêmes, 
on  voit  survenir  de  la  cvanose,  des  sueurs  froides  et  tous  les  caractères  de 
l'asphyxie. 


PLÈVRE. HTDROTHORAX.    —   SYMPTÔMES.  265 

Si  les  syropiômes  de  Thydrothorax  sont  souvent  insuffisants  pour  con- 
duire tu  diagnostic,  il  n'en  est  pas  de  même  des  signes  physiques,  dont 
on  dena  toujours  rechercher  et  dont  on  pourra  le  plus  souvent  constater 
rexistence,  dans  les  circonstances  que  Ton  sait  favorables  au  développe- 
ment  de  répanchcment  séreux.  Ce  n'est  pas  que  ces  signes  soient  bien 
spéciaux  à  l'hydrothorax,  car  ce  sont  ceux  qui  appartiennent  à  peu  près 
à  tous  les  épanchements  liquides  de  la  plèvre  ;  mais  on  trouve  néanmoins, 
dans  quelques-uns  de  ces  signes  et  dans  l'absence  de  quelques  autres, 
des  caradères  qui  suffisent  au  diagnostic. 

L'inspectioD  de  la  poitrine  permet  de  reconnaitre  une  diminution  de 
rétendue  des  excursions  thoraciques  dans  les  mouvements  respiratoires, 
et  en  outre  une  dilatation  générale  des  parois  du  thorax,  quand  Tépan- 
chement  est  très-considérable.  Ces  signes  sont  cependant  beaucoup  moins 
accusés  ici  que  dans  la  pleurésie,  parce  que  Tépanchement  de  Thydro- 
pisie  pleurale  ne  donne  guère  lieu  qu'à  Taffaissement  du  poumon  et  n'a 
pas  une  tension  suffisante  pour  refouler  cnergiquement  les  parois  cos- 
tales. On  n'observe  pas  non  plus,  dans  Thydiothorax,  les  déformations 
et  les  Youssures  partielles  qu'on  rencontre  dans  la  pleurésie,  parce  que 
le  liquide  séreux  est  libre,  et  non  enkysté,  dans  la  cavité  de  la  plèvre. 
Notons  enfin  que  les  caractères  fournis  par  l'inspection  sont,  dans  le  cas 
d'épanchement  séreux,  beaucoup  plus  difficiles  à  apprécier  que  dans  le 
cas  d'épanchement  pleurétique,  parce  qu'ils  existent  des  deux  côtés  de  la 
poitrine  et  qu'on  n'a  pas,  comme  dans  la  pleurésie,  un  côté  sain  et  un 
côté  malade  qu*on  puisse  juger  par  comparaison. 

Comme  l'inspection,  et  pour  les  mêmes  raisons,  la  mensuration  ne 
donne  pas,  dans  l'hydrothorax,  de  résultats  bien  décisifs;  c'est  surtout 
à  la  palpation,  à  la  percussion  et  à  l'auscultation  qu'il  faut  demander  les 
renseignements  de  la  plus  grande  valeur. 

Par  la  palpation,  on  constate  la  diminution  et  même  l'abolition  des 
vibrations  Yocales  dans  les  parties  correspondantes  à  Tépanchement,  et 
l'on  peut  assez  facilement  limiter  par  ce  moyen  le  niveau  auquel  s'élève 
le  liquide.  Cependant  la  palpation  a  aussi,  dans  l'hydrothorax,  moins  de 
valeur  que  dans  la  pleurésie,  parce  que,  outre  qu'on  manque  de  terme 
de  comparaison  puisque  Tépanchement  est  double,  les  parois  thoraciques 
sont  souvent  infiltrées  d'un  œdème  dû  à  la  même  cause  que  Thydropisie 
pleurale  et  que  cet  œdème  peut  supprimer  les  vibrations  thoraciques,  au 
moins  dans  une  certaine  étendue  de  la  base  de  la  poitrine. 

La  percussion  donne  de  la  matité  dans  les  parties  occupées  par  le 
liquide.  Il  arrive  souvent  que  cette  matité  est  peu  accusée  ;  il  faut,  pour 
FobteniTv  ne  pratiquer  qu'une  percussion  légère,  et  encore  n'obtient-on 
quelquefois  que  de  la  submatité  à  tonalité  peu  aiguë  ;  c'est  ce  qui  a  lieu 
(|Qand  l'épanchement  est  peu  abondant  et  étalé  en  nappe.  On  s'explique, 
i'ailleurs,  le  caractère  incomplet  de  la  matité  par  la  faible  tension  du 
licpide  épanché  et  par  l'intégrité  relative  du  poumon  sous-jacent,  qui 
est  seulement  affaissé  et  non  comprimé  ;  dans  ces  conditions,  une  per- 
cussion un  peu  forte  permet  en  partie  d'arriver  à  la  résonnance  pulmo- 


266  PLÈVRE.  —  hydrothorax.  —  symptômes. 

naire.  Quand  répanchcment  est  épais  et  considérable,  la  matité  devient 
absolue.  —  C'est  aussi  la  percussion  qui  fait  i-econnaitre,  mieux  que  tout 
autre  procédé,  la  mobilité  de  l'épanchement,  caractère  clinique  impor« 
tant  qui  est  plus  marqué  dans  Thydrathorax  que  dans  tout  autre  épan* 
chcment  pleural  et  particulièrement  que  dans  la  pleurésie  :  toutes  les  fois 
que  rhydropisie  n'occupe  qu'une  partie  de  la  cavité  de  la  plèvre,  et  c*est 
là  le  cas  le  plus  ordinaire,  le  liquide  s'accumule  dans  les  parties  déclives 
et  se  déplace  suivant  les  différentes  positions  qu'on  imprime  au  malade  ; 
ainsi,  dans  le  décubitus  dorsal,  l'épanchement  s'accumule  en  arrière;  si 
le  malade  reste  assis  ou  debout,  il  s'étale  en  nappe  à  la  base  du  thorax 
et  sur  le  diaphragme  ;  si  le  malade  se  penche  en  avant,  le  liquide  se 
porte  dans  les  parties  antérieures.  II  est  facile  de  suivre,  par  la  percus- 
sion, ces  divers  déplacements  du  liquide  et  de  constater  que  les  parties 
déclives  fournissent  toujours  de  la  matité  jusqu'à  un  certain  niveau, 
que  les  parties  supérieures ,  au  contraire,  donnent  de  la  sonorité,  quel- 
quefois même  une  sonorité  exagérée  ;  nous  observerons  cependant  qu'on 
ne  trouve  pas,  dans  Thydrothorax  à  épanchcment  moyen,  le  tympanisme 
sous-claviculaire  aussi  accusé  qu'il  l'est  dans  la  pleurésie.  . 

Par  Tauscultation,  on  constate  la  diminution  ou  l'abolition  complète 
du  bruit  pulmonaire,  suivant  que  la  quantité  du  liquide  épanché  est 
peu  considérable  ou  très-abondante;  on  perçoit  souvent  aussi,  vers  les 
parties  moyennes  de  la  poitrine  plutôt  qu'à  la  base,  un  soufDe  doux, 
voilé,  moins  intense  encore  que  dans  la  pleurésie,  ce  qui  s'explique  par 
la  compression  du  poumon,  moindre  dans  l'hydrothorax  que  dans  cette 
dernière  maladie.  Si  l'on  ausculte  le  malade  pendant  qu'il  parle  i  haute 
voix,  on  entend  de  l'égophonie,  limitée  en  général  aux  parties  voisines 
du  niveau  supérieur  de  l'épanchement  ;  si  on  ausculte  pendant  que  le 
malade  parle  en  chuchotant,  on  constate  la  transmission  de  la  voixehn- 
chotée  (Baccellij,  phénomène  corrélatif  au  souftle  doux  et  qu^on  perQoit 
dans  les  mêmes  points.  En  même  temps  que  ces  signes  directement  liés 
à  rhydropisie  pleurale,  on  entend  souvent  des  râles  sous-crépitants  dis- 
séminés, dus  à  l'œdème  pulmonaire  qui  accompagne  habituellement 
répanchcment  séreux  de  la  plèvre.  Jamais  on  n'observe  dans  l'hydro- 
thorax de  frottement  pleural,  autre  caractère  à  ajouter  à  tant  d'autres 
pour  distinguer  cette  maladie  de  la  pleurésie. 

Le  diagnostic  de  Thydrothorax  est  en  général  facile,  à  l'aide  des 
signes  que  nous  venons  d'indiquer,  toutes  les  fois  au  moins  que  l'épao- 
chement  offre  une  certaine  abondance.  La  maladie  passe  assez  souvent 
inaperçue,  quand  la  quantité  du  liquide  épanché  est  faible  et  que  les 
symptômes  sont  masques  par  ceux  des  maladies  graves  dont  Thydrotiis* 
rax  dépend  le  plus  souvent.  On  trouve  d'ailleurs  assez  souvent,  dans  ks 
autopsies,  une  certaine  quantité  de  sérosité  dans  les  deux  plèvres,  doit 
aucun  signe  n'avait  révélé  l'existence  pendant  la  vie,  et  qu'on  peut  cûd- 
sidérer  comme  un  accident  ultime,  développé  durant  l'agonie. 

La  pleurésie  est  la  seule  maladie  qu'on  pourrait  confondre  avec  l'Iqf- 
drothorax;  mais,  outre  les  particularités  que  nous  avons  relevées  dans  les 


PLÈVRE.  —  HYDROTHORAX.   —  TRAITEMENT.  267 

signes  communs  à  ces  deux  maladies  et  sur  lesquelles  nous  ne  revien- 
drons pas,  nous  rappellerons  que  Thydropisie  pleurale  est  habituellement 
double,  qu'on  n'y  observe  ni  symptômes  fébriles,  ni  douleur  de  côté,  ni 
frotlements  ;  ces  caractères,  joints  à  l'existence  des  causes  d'une  hydro- 
pisie,  suffisent  ordinairement  pour  faire  reconnaître  la  nature  de  la  ma- 
ladie et  écarter  Thypothèse  d'une  pleurésie. 

Si  le  diagnostic  de  Texistence  de  l'hydrothorax  ne  présente  pas  engé- 
néral  de  grandes  difficultés,  il  n*en  est  pas  de  même  de  la  détermination 
de  la  quantité  du  liquide  épanché.  Au  début  de  la  maladie,  le  liquide 
s*étale  en  nappe  autour  du  poumon,  et  son  niveau  s'élève  plus  ou  moins 
haut  suivant  son  abondance. 

Plus  tard,  suivant  les  observations  de  Hirtz  et  de  Woillez,  au  bout  de 
dix  ou  douze  jours,  le  liquide  gagne  les  parties  inférieures  de  la  poitrine, 
entre  la  base  du  poumon  et  le  diaphragme  :  il  semble  alors,  d'après  les 
signes  physiques,  que  la  quantité  du  liquide  a  diminué,  puisque  son  ni- 
veau s'est  abaissé  ;  il  n'en  est  rien  cependant,  Tépanchement  s'est  seule- 
ment déplacé  par  le  fait  de  la  position  assise  que  garJe  le  malade  ;  il 
peut  même  avoir  augmenté,  mais  il  est  très-difficile  de  déterminer  quelle 
est  la  quantité  du  liquide  ainsi  accumulé  à  la  base  de  la  poitrine.  Dans 
ces  conditions,  on  remarquera  surtout  que,  si  le  bruit  respiratoire  est 
revenu  plus  pur  et  mieux  perceptible  dans  les  parties  moyennes  ou  supé- 
rieures de  la  poitrine,  en  revanche  la  respiration  est  devenue  complète- 
ment silencieuse  dans  les  parties  inférieures  et  la  matité  absolue,  même 
par  une  percussion  forte  ;  ces  caractères  bien  constatés,  auxquels  s'ajou- 
tera la  persistance  ou  même  l'aggravation  de  la  dyspnée,  permettront  de 
ne  pas  se  faire  illusion  sur  la  valeur  des  changements  survenus  dans  les 
signes  physiques. 

Ul  marche  de  l'hvdrothorax  est  entièrement  subordonnée  à  celle  de 
Taffection  qui  en  a  déterminé  le  développement.  Souvent  associée  à 
d'autres  hydropisies  dépendantes  des  mêmes  causes,  Thydropisie  pleurale 
évohie  concurremment  avec  elles,  subissant  des  variations  étroitement 
liées  aux  changements  qui  surviennent  dans  la  maladie  primitive.  Son 
pronostic  est  d'ailleurs  toujoui^s  sérieux  ;  car  elle  vient  embarrasser  en- 
core les  fonctions  pulmonaires  et  entraver  la  respiration  déjà  troublée  par 
la  maladie  du  cœur  ou  la  maladie  de  Bright,  qui  tiennent  tous  les  acci- 
dents sous  leur  dépendance. 

Le  traitement  de  Thydrothorax,  comme  celui  des  autres  hydropisies, 
reste  soumis  à  celui  des  maladies  dans  le  cours  et  sous  l'influence  des- 
quelles il  se  développe  :  la  digitale,  les  purgatifs  drastiques  et  les  diuré- 
tiques en  seront,  suivant  les  circonstances,  les  principaux  agents,  si  d'ail- 
leurs l'emploi  de  l'un  ou  de  l'autre  de  ces  moyens  n'est  contre-indiqué 
pir  les  conditions  de  la  maladie  principale  ou  par  un  état  de  cachexie 
avancée.  Dans  les  cas  où  l'épanchement  est  très-abondant  et  produit  des 

accidents  asphyxiques,  il  ne  faut  pas  hésiter  à  recourir  à  la  thoracentèse  : 

la  ponction  de  la  poitrine  n'est  le  plus  souvent  qu'un  moyen  palliatif,  et 

le  liquide  ne  tarde  pas  à  se  reproduire  si,  comme  c'est  le  cas  le  plus  or- 


268  PLÈVRE.   —  PlfEUMOTHORAX. 

dinairc,  la  cause  de  répanchement  persiste;  mais,  grâce  aux  trocarU  ca- 
pillaires et  aux  appareils  aspirateurs,  l'opération  est  si  facilement  acceptée 
et  si  inofTensive,  qu'on  peut  avec  avantage  y  revenir  toutes  les  fois  que 
les  menaces  d* asphyxie  le  commandent,  et  si  Ton  n'arrive  pas  à  la  guéri- 
son,  on  réussit  du  moins  à  combattre  une  complication  redoutable  et  à 
prolonger  les  jours  du  malade. 

PKEiMOTUonAx.  —  On  désigne  sous  ce  nom  Tépanchement  d*air  ou  de 
gaz  dans  la  cavité  pleurale. 

Le  pneumothorax  est  rarement  pur,  c'est-à-dire  constitué  uniquement 
par  la  présence  de  gaz  dans  la  plèvre  :  s'il  est  vrai  que,  dans  certaines 
circonstances  que  nous  indiquerons  plus  loin,  il  y  ait  d'abord  un  simple 
épanchement  gazeux,  très-souvent  il  se  produit  au  bout  d'un  certain 
temps  une  sécrétion  liquide  de  sérosité  ou  de  pus  qui  résulte  de  Taction 
irritante  des  gaz  épanchés;  d'autre  part,  il  est  très-fréquent  que  la  même 
cause  amène  simultanément  l'exlravasation  dans  la  plèvre  de  gaz  et  de 
matières  liquides  ;  enfin  la  cavité  pleurale  contient  souvent  déjà  des  li- 
quides au  moment  où  se  produit  l'épanchement  du  gaz.  Dans  toutes  ces 
circonstances,  soit  d'emblée,  soit  après  un  temps  plus  ou  moins  long,  la 
plèvre  contient  à  la  fois  des  liquides  et  des  fluides  aériformes  et  on  dit 
alors  qu'il  y  a  hydropneumothorax  ou  pyopneumothorax. 

Presque  toujours  le  pneumothorax  est  unilatéral;  dans  quelques  cas 
tout  à  fait  exceptionnels,  on  l'a  vu  se  développer  à  la  fois  dans  les  deux 
plèvres  (Laenncc,Bricheteau,  Duguet). 

On  a  décrit  trois  espèces  distinctes  d'épanchements  gazeilk  intrapleu- 
raux  :  V  pneumothorax  essentiel,  résultant  de  la  formation  spontanée 
de  gaz  dans  la  cavité  pleurale  ;  2°  pneumothorax  par  décomposition  pu- 
tride de  liquides  épanchés  dans  la  plèvre;  Z"  pneumothorax  par  perfora- 
tion, dû  à  l'irruption  dans  la  plèvre,  par  une  ouverture  accidentelle,  de 
l'air  atmosphérique  ou  de  gaz  contenus  dans  les  cavités  voisines  de  la  ca- 
vité pleurale.  Cette  division,  établie  par  Laennec  et  admise  après  lui  pen- 
dant longtemps,  ne  résiste  pas  à  l'examen  des  faits,  comme  nous  allons 
le  voir. 

Y  a-t-il  un  pneumothorax  essentiel?  Aucun  fait  probant  n'en  établit 
l'existence,  ainsi  que  cela  résulte  de  la  critique  à  laquelle  Bébier,  Jac- 
coud  et  Proust  ont  soumis  les  exemples  qu'on  avait  cités  de  ce  prétendu 
pneumothorax  spontané.  Les  observations  publiées  sous  ce  titre  (Proust 
en  a  réuni  et  contrôlé  vingt-cinq),  sont  susceptibles  d'explications  diver 
ses  :  ce  sont  des  pleurésies  dans  lesquelles  on  s'en  est  laissé  imposer  «par 
l'existence  d'une  sonorité  tympanique  à  la  partie  antéro-supérieure  de  li 
poitrine,  ou  par  l'existence  du  souffle  amphorique  qu'on  rencontre  dans 
certaines  circonstances  ;  ce  sont  des  pneumonies  dans  lesquelles  la  pe^ 
cussion  donnait  un  son  tympanique  ;  ce  sont  même  des  pneumothorax  pir 
perforation  résultant,  soit  d'un  effort,  soit  de  la  rupture  dans  la  plèm 
d'un  foyer  tuberculeux  ou  d'un  kyste  hydatique  du  poumon,  etc.  dm 
des  tuberculeux  par  exemple,  on  a  admis  la  production  spontanée  de  g» 
dans  la  plèvre,  quand  on  ne  trouvait  pas  le  point  où  s'était  faite  la  perfo- 


PLÈVRE.  —  PNEDMOTHORAX.  269 

ration  donl  toutes  les  autres  circonstances  semblaient  indiquer  Texistence  ; 
mais  ne  sait-on  pas,  comme  nous  le  verrons  tout  à  Theure,  que  certaines 
perforations  pulmonaires  sont  très-difficiles  à  trouver,  et  en  outre  que  ces 
perforations  peuvent  se  cicatriser  ou  être  complètement  oblitérées  par 
des  fausses  membranes,  ce  qui  est  loin  d'être  rare  ?  Ainsi  tous  les  faits 
observés  conduisent  à  rejeter  Texistence  du  pneumothorax  essentiel;  on 
peut  même  ajouter  que  les  données  de  la  physiologie  pathologique  ne 
permettent  pas  de  croire  qu'il  soit  possible,  car  rien  n'autorise  à  admettre, 
ni  une  sécrétion  gazeuse  dans  une  membrane  séreuse,  ni  une  exhalation 
des  gaz  du  sang  à  travers  les  capillaires  pleuraux. 

On  a  décrit  comme  une  seconde  espèce  de  pneumothorax  des  épanche- 
ments gazeux  résultant  de  la  décomposition  putride  de  liquides  pleuraux. 
La  réalité  de  ce  pneumothorax  spontané  secondaire  serait  certaine  d'après 
Jaccoud,  qui  propose  de  l'appeler  pneumothorax  pleurélique  pour  indi- 
quer son  origine.  Comme  exemples  de  cette  espèce  particulière,  Jaccoud 
ciïe  des  observations  empruntées  à  Wunderlich,  llughcs  Bennett,  Rosen- 
thal,  Biermer,  Swaync  Little,  Townsend,  etc.  Cependant  quelques-uns  de 
ces  faits  n*ont  pas  paru  absolument  probants  à  Béhier,  qui  pense  que 
dans  plusieurs  d'entre  eux  il  a  pu  exister  une  perforation  pulmonaire 
(obs.  de  Wunderlich,  de  Bennett  et  de  Swaync  Little),  comme  semble- 
rait l'indiquer  la  fétidité  de  l'haleine  qu'on  a  observée  chez  les  malades. 
Deux  observations  communiquées  par  Hérard  à  la  Société  médicale  des 
hôpitaux  (1850  et  1851)  sont  relatives  à  des  pleurésies  purulentes  dans 
le  cours  desquelles  se  serait  développé  un  pneumothorax,  sans  que  Tau- 
topaie  faite  avec  le  plus  grand  soin  permit  de  constater  une  perforation 
du  poumon.  Cependant  ces  faits  ont  aussi  soulevé  des  doutes  de  la  part 
de  plusieurs  membres  de  la  Société  des  hôpitaux,  qui  ne  les  ont  pas 
trouvés  absolument  convaincants. 

Ajoutons  d'ailleurs  que  la  production  de  gaz  par  décomposition  d'un 
liquide  renfermé  dans  une  cavité  close  parait  difficile  à  comprendre, 
puisque,  suivant  la  remarque  de  Béhier,  le  contact  de  l'air  est  générale- 
ment considéré  comme  une  condition  indispensable  pour  que  le  liquide 
pleural  subisse  une  altération  capable  de  permettre  la  formation  d'un 
gaz  (les  recherches  récentes  sur  la  fermentation  putride  semblent  toutes 
confirmer  la  nécessité  absolue  de  cette  condition). 

Quoi  qu'il  en  soit,  si  le  pneumothorax  peut  se  former  ainsi  spontané- 
ment dans  la  plèvre  affectée  de  pleurésie  purulente,  on  est  au  moins  en 
droit  d'affirmer  qu'il  est  exceptionnel. 

Quant  au  pneumothorax  par  perforation,  par  irruption  dans  la  plèvre 
de  gaz  provenant  de  différentes  sources,  celui-là  est  indubitable  et  les 
occasions  de  Tobserver  sont  fréquentes. 

En  résumé,  le  pneumothorax  essentiel  n'existe  pas,  le  pneumothorax 
par  altération  puU^ide  de  liquides  pleurétiques  est  douteux  ou  au  moins 
exceptionnel  ;  le  pneumothorax  par  perforation  subsiste  seul  ou  presque 
seul;  c'est  lui  que  nous  aurons  exclusivement  en  vue  dans  le  cours  de 
cet  article. 


270  PLÈVRE.  —  PNEUHOTiioiux.  —  causes. 

Causes.  —  On  a  déjà  vu  par  ce  qui  précède,  que  le  pneumothcMtt  esl 
toujours  secondaire,  consécutif  à  un  état  pathologique  antérieur.  Dansions 
les  cas,  sauf  peut-être  exceptionnellement  dans  la  pleurésie  pumiente, 
il  résulté  d*une  perforation  qui  met  la  plèvre  en  communication  avec 
Pair  extérieur  ou  avec  une  des  cavités  renfermant  des  gaz  qui  sont  «tuées 
dans  son  voisinage. 

Les  causes  qui  produisent  cet  accident  forment  deux  groupes,  aussi 
distincts  par  les  caractères  et  les  suites  de  la  maladie  que  par  les  condi- 
tions qui  en  ont  amené  le  développement  :  ce  sont  des  causes  trawnati- 
ques  et  des  causes  pathologiques. 

Parmi  les  causes  traumaiiques^  nous  mentionnerons  les  plaies  péné- 
trantes de  poitrine,  les  fractures  de  côtes  compliquées  de  plaies  da  pou- 
mon :  dans  le  premier  cas,  Tair  atmosphérique  pénètre  directement 
dans  la  plèvre  par  la  plaie  de  la  paroi  thoracique  ou  par  une  plaie  do 
poumon;  daus  le  second,  c'est  la  déchirure  du  poumon  par  un  des  firag- 
ments  de  la  côte  fracturée  qui  permet  Tépanchement  gazeux.  Non» 
n'avons  pas  à  insister  sur  cet  ordre  de  causes,  dont  Tétude  appartient  aux 
maladies  chirurgicales  de  la  poitrine. 

On  pourrait  rattacher  encore  aux  causes  traumatiques  certains  cas, 
peu  communs  d'ailleurs,  où  le  pneumothorax  résuite  d*une  rupture 
pulmonaire,  par  suite  d'un  effort  violent  ou  d'une  quinte  de  toux  ;  dans 
ces  conditions,  la  tension  excessive  de  Tair  dans  le  poumon  peut  amener 
la  déchirure  de  quelques  vésicules.  C'est  par  un  mécanisme  analogue 
que  se  développerait  le  pneumothorax  par  rupture  de  quelques  vésiciiles 
emphysémateuses,  fait  assurément  très-rare,  dont  on  cite  seulement 
quelques  exemples  empruntés  à  divers  auteurs. 

Ces  derniers  faits  servent,  en  quelque  sorte,  de  transition  entre  les 
causes  traumatiques  et  les  causes  pathologiques.  Celles-ci,  beaucoup 
plus  communes  que  les  précédentes,  nous  intéressent  particulière- 
ment. 

Le  relevé  suivant,  emprunté  à  Saussier,  montre  la  fréquence  relative 
des  principales  causes  du  pneumothorax  : 

Pneumothorax    avec  phthisie  pulmonaire 81 

—  pleurésie 29 

—  gangrène  pulmonaire 7 

—  emphysème  pulmonaire 5 

—  hydatides  du  poumon 1 

—  apoplexie  pulmonaire 3 

—  cancer  ulcéré  du  poumon 1 

—  hémothorax 1 

—  abcès  pneumonique 1 

—  fistule  hépato-pneumo-pleurale.  .   .       I 

En  tète  des  maladies  dont  le  pneumothorax  est  une  complication  fré- 
quente se  place  la  phthisie  pulmonaire.  11  résulte,  en  effet,  des  statis- 
tiques entreprises  à  ce  sujet  par  Saussier,  par  Béhier,  par  Walshe  el 
d'autres  encore,  que  cette  seule  cause  comprendrait  environ  les  neuf 


PLÈVRE.    PNEUUOTHORAX.    CAUSES.  271 

dîxitoes  des  cas  ;  il  est,  en  outre,  remarquable  que,  dans  ces  conditions, 
le  pneumothorax  siège  plus  souvent  à  gauche  qu'à  droite. 

La  perforation  pulmonaire  et  Tépanchement  gazeux  intrapleural  qui 
en  est  la  conséquence  peuvent  survenir  à  toutes  les  périodes  de  la 
maladie.  Louis  a  cité  un  cas  dans  lequel  la  plèvre  fut  perforée  par  un  petit 
tubercule  placé  immédiatement  au-dessous  d'elle  ;  les  premiers  symp- 
tômes de  la  phtbisie  dataient  de  quinze  jours  environ.  Mais  ce  fait  est 
exceptionnel  :  le  plus  souvent  le  pneumothorax  arrive  dans  la  période 
de  ramollissement  ou  dans  la  période  d'excavation. 

An  moment  où  survient  le  ramollissement  des  foyers  tuberculeux,  il 
n'est  pas  rare  qu'une  masse  ramollie,  située  à  la  surface  du  poumon, 
s'ouvre  à  la  fois  dans  les  bronches  et  dans  la  plèvre  et  permette  l'irrup- 
tion de  Tair  dans  la  cavité  pleurale  ;  ce  fait  est  surtout  assez  fréquent 
quand  l'évolution  de  la  maladie  est  rapide,  notamment  dans  la  forme 
décrite  sous  le  nom  de  phthisie  galopante.  Plus  tard,  le  pneumothorax 
est  produit  par  l'amincissement  et  la  rupture  d'une  caverne  placée 
superficiellement. 

Le  siège  de  la  perforation  pulmonaire  réside  le  plus  ordinairement  dans 
le  lobe  supérieur  du  poumon;  mais,  bien  que  les  lésions  tuberculeuses 
conunencent  presque  toujours  par  le  sommet  de  ce  lobe  et  y  soient  ulté- 
rieurement plus  avancées  qu'ailleurs,  ce  n'est  pas  dans  cette  partie  que 
se  bit  habituellement  la  perforation,  mais  plutôt  vers  la  base  du  lobe 
supérieur,  au  niveau  de  la  troisième  ou  de  la  quatrième  côte,  ce  qui 
tient  sans  doute  à  ce  que  la  plèvre  du  sommet  devient  Irès-facilement, 
dès  le  début  de  la  tuberculose,  le  siège  d'adhérences  qui  unissent  le 
poumon  à  la  paroi  thoracique  et  s'opposent  à  la  perforation,  tandis  que 
ces  adhérences  sont  moins  communes  dans  les  parties  situées  plus  infé- 
rieurement. 

C'est  aussi  dans  la  tuberculose  qu'on  a  observé  le  pneumothorax  double, 
affection  exceptionnelle  dont  on  ne  connaît  guère  que  trois  exemples 
bien  observés,  dus  à  Lacnnec,  à  Bricheteau  et  à  Duguet. 

Les  autres  causes  pathologiques  du  pneumothorax  par  perforation  de 
dehors  en  dedans  sont  assez  rares,  comparativement  à  la  phthisie  pulmo- 
naire, puisque  celle-ci,  comme  nous  l'avons  vu,  produit  environ  les  neuf 
dixièmes  des  cas,  tandis  que  toutes  les  autres  maladies  réunies  n'en  pro- 
duisent à  peine  qu'un  dixième. 

On  a  cité  quelques  exemples  de  pneumothorax  produits  par  la  gangrène 
pulmonaire  :  l'épanchement  gazeux  résultait  de  l'ouverture,  dans  les 
bronches  et  la  plèvre  à  la  fois,  d'un  foyer  gangreneux  ramolli  (Cruveilhier, 
Monneret,  Marais).  Plus  rarement  encore,  c'est  un  abcès  du  poumon 
consécutif  à  une  pneumonie  (Dalmas,  Gunsberg)  ou  un  kyste  hydatique 
(Fouquier,  Mercier,  cités  par  Ilearn)  qui  ont  amené  la  même  complication, 
ou  encore  la  rupture  dans  la  plèvre  d'une  bronche  dilatée  (Mohr,  Taylor, 
cités  par  Jaccoud). 

Outre  les  lésions  du  poumon  que  nous  venons  de  mentionner,  nous 
devons  signaler  certaines  maladies  d'autres  organes  voisins  de  la  plèvre, 


272  PLÈVRE.  —  pneumothorax.  —  causes. 

qui  peuvent  amener  aussi  la  perforation  de  cette  membrjine  et  rimiption 
de  gaz  dans  la  cavité  pleurale.  On  a  vu  des  abcès  des  parois  de  la 
poitrine  s'ouvrir  à  la  fois  dans  la  plèvre  et  à  travers  les  téguments,  formant 
ainsi  une  fistule  pleuro-cutanée  qui  laissait  pénétrer  Tair  dans  la  plèvre; 
on  a  vu  des  abcès  des  ganglions  bronchiques  s'ouvrir  à  la  fois  dans  la 
plèvre  et  dans  les  bronches,  on  a  vu  des  cancers  de  l'œsophage  déterminer 
des  perforations  de  ce  conduit  et  le  faire  communiquer  avec  la  cavité 
pleurale  (Bocrhaavc),  on  a  mémevu,  dans  quelques  cas  malheureux,  celle 
perforation  produite  par  la  sonde  œsophagienne,  comme  Moutard-Martin 
en  a  encore  récemment  cité  un  exemple.  D'autres  fois,  ce  sont  des  abcès, 
des  kystes  suppures  du  foie  (Gros,  Williams)  ou  des  reins  qui  traversent 
le  diaphragme  et  la  plèvre  pour  venir  s'ouvrir  dans  les  bronches  :  si 
alors  la  plèvre  n'est  pas  fermée  par  des  adhérences,  elle  est  envahie  par 
Tair  qui  vient  des  bronches  en  même  temps  que  par  le  pus  qui  vient  de 
l'abcès  (Bchier) .  Enfin  le  cancer  et  l'ulcère  simple  de  Testomac  peuvent  ame- 
ner aussi  la  perforation  du  diaphragme  et  l'épanchcment  dans  la  plèvre  des 
fluides  contenus  dans  la  cavité  stomacale.  Le  pneumothorax  peut  même 
être  consécutif  à  une  perforation  de  l'intestin  :  outre  deux  observations 
empruntées  à  Bouchaud  et  à  Eisenlohr,  Cossy  en  a  rapporté  tout  récem- 
ment deux  exemples  dans  lesquels  une  perforation  du  cœcum  avait  amené 
une  péritonite  partielle  et  un  foyer  purulent  abdominal  ;  celui-ci  avait 
traversé  le  diaphragme  et  permis  au  pus  et  aux  gaz  venus  de  l'intestin  de 
pénétrer  dans  le  thorax  ;  mais  chose  remarquable,  dans  ces  deux  cas,  les 
gaz  n'avaient  pas  pénétré  dans  la  plèvre,  mais  s'étaient  épanchés  entre 
elle  et  la  paroi  thoracique  en  décollant  la  plèvre  pariétale  dans  une  grande 
étendue;  il  s'agissait  donc  là  d'une  sorte  de  pneumothorax  sous-pîeural. 
Toutes  les  causes  qui  précèdent,  à  l'exception  de  la  phlhisie  pulmo- 
naire, sont  exceptionnelles;  mais  il  est  une  autre  cause  de  pneumothorax 
qui  est  assez  fréquente  et  dans  laquelle  c'est  une  maladie  de  la  plèvrequi 
est  la  cause  de  l'épanchement  gazeux  :  nous  voulons  parler  de  la  pleurésie 
purulente  ouverte  dans  les  bronches  ou  à  travers  les  parois  thoraciques. 
ici  la  perforation  pleurale  n'a  plus  lieu  de  dehors  en  dedans,  conmae  pour 
les  causes  déjà  indiquées,  mais  de  dedans  en  dehors.  L'ouverture  des 
collections  jiurulentes  de  la  plèvre  par  une  fistule  pulmonaire  ou  par  une 
fistule  pleuro-cutanée  est  loin  d'être  rare  et,  dans  l'une  comme  dans 
l'autre  de  ces  circonstances,  les  conditions  favorables  à  la  production  du 
pneumothorax  sont  réalisées,  puisqu'il  y  a  communication  entre  la  plèvre 
et  l'air  extérieur.  Il  s'en  faut  cependant  que  la  pénétration  de  l'air  dans 
la  cavité  pleurale  ait  alors  toujours  lieu  :  dans  des  cas  heureusement  très- 
fréquents,  le  trajet  fistuleux  qui  s'étend  de  la  plèvre  aux  bronches  ou  i 
travers  les  téguments  est  sinueux  et  disposé  de  telle  sorte  qu'il  fonnt 
comme  une  valvule  qui  permet  la  sortie  du  pus  et  non  la  pénétration  de 
l'air  ;  la  même  disposition  se  présente  plus  souvent  encore  au  niveau  des 
fausses  membranes  épaisses  que  le  pus    doit    traverser  ;   ces    fausses 
membranes  forment  clapet,  suivant  l'expression  de  Chomel,  et  empê- 
chent l'abord  de  l'air  dans  la  cavité  pleurale.   D'un  autre  côté,   l'air 


PLÈVRE.    —  PNEUMOTHORAX.  —   LÉSIO^IS   ANATOMIQUES.  273 

ne  peut  pas  non  plus  s'introduire  dans  la  plèvre  tant  que  la  tension  de 
lepaochement  liquide  est  supérieure  à  celle  de  Tair  atmosphérique  ;  aussi 
n'estrce  qu'un  certain  temps  après  l'ouverture  du  foyer  purulent  et  après 
révacoation  d'une  certaine  quantité  de  liquide  que  la  pénétration  de  l'air 
peut  avoir  lieu.  Mais  les  conditions  favorables  que  nous  Tenons  d'indi- 
quer n'existent  pas  toujours  ou  peuvent  cesser  d'être  au  bout  d'un  certain 
terops,  aussi  voit-on  assez  souvent  encore  le  pneumothorax  survenir 
comme  complication  de  la  pleurésie  purulente,  après  ouverture  du  foyer 
par  les  bronches  ou  par  les  parois  du  thorax.  Cette  complication  ne  se 
montre  pas  seulement  dans  les  inflammations  purulentes  qui  occupent 
toute  la  cavité  pleurale  ;  on  l'observe  aussi  dans  les  pleurésies  purulentes 
circonacritesy  notamment  dans  les  pleurésies  diaphragmatiques  ou  inter- 
lobaires,  ainsi  que  N.  Guéneau  de  Mussy  en  a  récemment  publié  plusieurs 
exemples  intéressants.  Dans  des  cas  tout  à  fait  exceptionnels,  il  existe  à 
la  fois  une  ouverture  dans  les  bronches  et  une  ouverture  par  les  tégu- 
ments et  la  plèvre  est  en  communication  avec  l'air  extérieur  par  ces  deux 
voies  en  même  temps  (Gairdner).  Les  fistules  qui  mettent  la  plèvre  en 
communication  avec  l'air  extérieur  dans  le  cas  de  pleurésie  purulente 
peuvent  occuper  un  siège  quelconque,  contrairement  h  ce  qui  a  lieu  dans 
la  phthine  pulmonaire.  Elles  offrent  d'ailleurs  des  dispositions  variables 
qui  ont  déjà  été  indiquées  ailleurs  et  sur  lesquelles  nous  n'avons  pas  à 
revenir  (Foy.  art.  Pleurésik  PUAULEKTE,  p.  210).  Le  pneumothorax  qui  en 
résuite  est  tantôt  généralisé  ou  du  moins  libre  dans  la  cavité  pleurale, 
tantôt  circonscrit  lorsque  des  adhérences  antérieures  avaient  enkysté  le 
foyer  pnnileut  et  limité  l'espace  où  l'épanchement  gazeux  peut  se  pro- 
duire. 

On  voit,  en  somme,  que  les  causes  du  pneumothorax,  malgré  leur  appa- 
rente Tariété,  se  réduisent  à  deux  principales  :  en  première  ligne  la  tuber- 
culose pulmonaire,  en  seconde  ligne  la  pleurésie  purulente;  le  mode  de 
production  de  l'épanchement  gazeux  dans  ces  deux  conditions  est  égale- 
ment «mple  et  facile  à  comprendre.  En  dehors  de  ces  deux  causes  et  des 
causes  traomatiques  dont  l'étude  ne  nous  appartient  pas,  toutes  les  autre 
sont  des  raretés  et  même  des  exceptions,  et  plusieurs  de  celles  qu'on  a 
invoquées  attendent  encore  d'être  démontrées. 

Lésions  anatomiques.  — Dans  quelques  cas  simples,  le  pneumothorax 
est  uniquement  constitué  par  l'épanchement  d'air  dans  la  cavité  pleurale, 
et  les  lésions  anatomiques  se  réduisent  à  cet  épanchement;  c'est  ce  qui 
arrive  surtout  dans  les  pneumothorax  vraiment  accidentels,  qui  se  pro- 
duisent &  la  suite  d'un  effort,  de  la  rupture  de  quelques  yésiculeç  emphy- 
sémateuses ou  d'un  traumatisme  peu  grave.  Dans  ces  circonstances  où  la 
plèvre  et  les  organes  adjacents  sont  sains,  la  rupture  ou  la  déchirure  du 
poumon  se  cicatrise  vite,  l'air  atmosphérique  épanché  est  facilement  ré- 
sorbé et  la  guérison  a  lieu  dans  l'espace  de  quelques  jours.  Lorsque  l'épan- 
chement  gazeux  est  abondant,  la  résorption  est  quelquefois  lente  à  se 
(lire,  et  on  a  vu  le  pneumothorax  persister  pendant  des  semaines  et  des 
mois  ;  cependant  si  la  plèvre  est  saine,  il  ne  résulte  de  la  présence  de  l'air 

lOQT.   MCT.  H<D.  R  CUR.  XXVUI.  —    18 


274  PLÈVAE;.  —  PHsmoTiiMAX.  — Léaioas  AXATonoim.' 

dans  soa  inlérieinr  aucune  conséquence  graye;  l^air  atmosphérique  a*es( 
pasiirritani  pour  la  plèvre,  et  q«and  il  est  seul  épanehé  et  quMl  n'catpas 
occonipagnédo  la  péoétraiioadasaBgjetsartout  de|)roéuits  mMrbidefrdMis 
la  cavité  {Rurale,  il  peuA  ne>déternBner  anoaneirniation.  Lea^exesipleB' 
de  iguérisoa  rapide  de  pneunH) thorax,  dans;  les  -condUtians  que  non* 
d*indiquer,  démontrent  l'exactitudodercefait,  qweicmifirmeot  eneont 
taines  expériences  sur  les  animaux;  :  Defflflin}uay''et'Leeonte,  ont  en. effet, 
pratiqué  sur.  des  clûens  des  injections  d'air  dans  la  plèvre  et  les  onti  ré** 
pétéee^inéme  tin  grand  nombre  de.  foie  ebec  4e mène  animal. sans  qui!  en 
résultai  aucun  accident: 

Maïs,  comme  on  pourrait  déjà  le  prévoir  par  la  nature  des  cauaes^i 
produisent  lepneumothorax,  cette  affeetiooisej  présente  bien  rareiaentdMif 
les  condiiions  de  simplicité  qui  précèdent  :  leiphis  souvent,  en  même  lenpe 
qnet  Taîis  d'autres  produits  et  presque  toujours  des  produits  morbides 
tombent  dans  la  plèvre  el  détermine&t  des  lésions  secondaîres;  on:  a  alors 
les  lésions  de  rhydropneumothorax  ou. du  pyopneumotborax.  D'autres 
fois,  la  plèvre  est  déjà  le  siège  de  lésions  graves  quand  l'air  fait  imip* 
tiondans  sa  cavité,  ainsi  que  cek  a  lieu  dans  le  pneumothorax  ooasé* 
cuiif  à  la  :pleurésie  purulente.  Il  ea  i-ésulte  que,  dans  la  grande  migerké 
des  cas,  les  lésions  anaiomiques  consieteot  ài  la  fois^daas  la  présence 
d'air  ou  .de  gaz  dans  la  plèvre  et  d'un  épanchement  liquide  de  conpoi 
sition  variable;   on  trouve  en  outre  les  diverses  lésions  qui  ont  létéla 
cause  du  pneumothorax.  Nouft  avons  à  examiner  rapidement  ces  difiéientes 
allératiûDS.1 

Dans  le  pneumothorax  par  perforation,  le  seul  que  nous  ayons  en  vue, 
le  fluide  épanché  est,  au  moins  dans  le  principe,  de  Tair  plus  ou  moîas 
pur.  Quand  ce  gaz.  séjourne  et  surtout  s'il  devient  enkysté  par  obUléia- 
tioA  de  la  iistule  qui  lui  a  livré  passage,  il  subit  des  modification»  dues 
aux  plîénomènes  d'absorption  ou  d'exhalation  qui  se  passent  dans  la 
plèvre.  Ainsi  que  l'ont  établi  les  :analyses:;de  Demarquay  et  Lcconte^qui. 
concordent  à. peu  près  aveoles  recherches! antérieures  de  Davy,  l'oxygèBSi 
diminue  graduellement,  si  bien  qu'il  peut  finir  par  disparaître  «preafoe* 
complètement  ;  il  est  remplacé  par  une  quantité  approximativemenfeéqîiî^' 
valente  d'acide  carbonique;  razûtet8ubil..égBlenient  une  augmentatk»! 
pluS'Ou  moins,  sensible.  Il  s'est  produit  ninit m»  nouveau  mélange quii est 
plus  absorbaUe  qnele  précédent^.et  ainsi  pent  avoir  Heu  suGoenmment'' 
et  graduellement  la  résopptien>  complète.  L'absorption  se  fait  aussi  sur • 
les  gaz  qui  se  renouvellent,  dans:  la  plèvre  en  cas  de  persistance  de  lali^ 
tule, mais  naturellement  .la  résorption  complète  n'est  pas  possible,:  taÉk> 
que  les  gai  continuent  à  arriver  dans  la  cavité  pleurale. 

La  composition,  des  gaz; épanchés  n^est  plus  la:méme,  quand  In^plèm^ 
contient  eaméme  temps  des r  liquides  altérés  ou  dos  détritus  organiqnsi)' 
il  1  s'y  ajoutO'alurs  d'autres rgaz^  comme: l'hydrogène  sulfuré  ou  le  aiiUi}*' 
drate  d!amnMMuaqiie^  qui  donnent  à  l'épanchemeni  gaseux  une  horriUn 
fétidité.  En  entre,,  tandis  que  l'air/ plus- ou  moins  modifié  était  snn. 
influence  neoivesur  la.plèn*ejet.stti\réconemie,  ces  produits  d'allératiin' 


PLËTRE.   —   P?IEO«OTIIORA\.    LÉîtiOÎIS   A?IAT01IIQCBS;  275 

puti^ide  sont  délétères*  au  plus  haut  degré  et  capables  d'engendrer  dos 
accidents^  de  septicémie. 

La  qaantité  du  gaz  épanché  est  très-variable^  suivant  que  la  perforn- 
lion  qui  lui  livre  passage  est  persistante  ou  passagère,  plus  ou  moins 
large  et  plus  on  moins  perméable,  suivant  que  la  cavité  pleurale  con-^ 
tient  une  quantité  de  liquide  plus  ou  moins  abondante,  suivant  que  la 
plèvre  est  libre  ou  cloisonnée  par  des  adhérences,  etc.  Dans  quelques 
circonstances,  la  disposition  de  la  fistule  pulmonaire  est  telle  que  Tair 
pénètre  sans  difficulté  dans  la  plèvre  et  qu'au  contraire  il  est  empêché 
d*en  sortir  par  une  sorte  de  valvule  qui  ferme  forifiee  pendant  Texpira- 
tion  ;  c'est  alors  que  la  quantité  de  l'épanchement  gazeux  peut  être  le 
plus  considctrable,  refoulant  les  parois  thoraciques,  le  diaphragme  et  le 
mé^astin.  11  est  fréquent  que  la  poitrine  renferme  d*un  demi-litre  à  un* 
litre  de  gaz,  mais  cette  quantité  peut  varier  dans  des  proportions  très- 
élendJes. 

Le  liqaide  épanché  dans  la  plèvre  en  mOmo  temps  que  les  gaz  pré- 
sente une  composition  variable  :  quelquefois  il  est  séreux  (hydropneumo- 
thorax}, très-souvent  il  est  purulent  (pyopneiimothorax).  La  présence 
d*une  certaine  quantité  de  liquide  simplement  séreux,  coïncidant  avec  un 
êpanehement  gazeux  de  la  plèvre,  est  une  nouvelle  preuve  que  Tair  atmos-' 
phérique  n'a  sur  la  plùvre qu*unc  action  bien  faiblement  irritante;  cepen- 
dant  les  exemples  d'bydropneumothorax  avec  cpancliemcnt  purement 
séreux  sont,  en  réalité,  assez  rares':  Saussier  n'en  a  cité  qu'un  exemple 
sur  169  observations  ;  on  pourrait  en  signaler  quelques  autres  (Marais, 
Vieuille,  Peyrot),  et  récemment  encore  Desplats  en  a  publié  un  cas  inté- 
ressant dans  le  Journal  des  Sàicncea  mMicalesile  Lille  (juin  1879).  Pres- 
que  toujours  répanchement  liquide  qui  accompagne  le  pneumothorax 
est  sanieux  ou  purulent,  c'est  un  pyopneumothorax.  Très-souvent  il  pré- 
sente une  horrible  fétidité,  due  sans  doute  à  ce  que  son  contact  avec  l'air 
lui  fait  subir  la  décomposition  putride.  Dans  ce  li([uide  purulent  on 
trouve  fréquemment  des  masses  pseudo-membraneuses,  quelquefois  des 
déirilus  gangreneux  du  poumon.  Les  parois  de  la  plèvre'  elle-même  sont 
tapissées  de  fausses  membranes  infiltrées  de  pus.  Nous  n'avons  pas  à 
insister  sur  toutes  ces  lésions  qui  ne  diffèrent  pas  de  celles  qu'on  observe 
dans  la'  pleurésie  purulente. 

L'épanchement  liquide  et  gazeux  qui  constitue  le  pyopneumothorax 
occupe  le  plus  souvent  toute  la  cavité  pleurale  ;  quelquefois  il  est  en- 
kjs|é,  ainsi  que  cela  a  lieu  surtout  à  la  suite  des  pleurésies  purulentes 
interiobaires  ou  diaphragmatiques  (Cayol,  Moutard-Martin,  N.  (xuéneau  de 
Mussj).  Suivant  l'abondance  de  l'épanchement,  on  observe  des  déj^lace- 
menU  plus  ou  moins  marqués  des  organes  voisins  ;  le  poumon  surtout 
est  ordinairement  aplati,  refoulé,  déformé,  quelquefois  réduit  à  une 
sorte  de  moignon  appliqué  contre  la  colonne  vertébrale  et  à  peine  recon- 
oaissable  sous  la  couche  épaisse  de  fausses  membranes  qui  l'enveloppe, 
d'autres  fois  ayant  conservé  un  certain  volume  et  souvent  relié  par  plaoes 
à  la  paroi  thoracique  par  des  brides  membraneuses. 


276  PLÈVRE.  —  pkrumothorax.  —  stuptômbs  et  har€he. 

La  fistule  qui  a  donné  lieu  au  pneumothorax  n'est  pas  toujours  facile 
à  trouver  au  milieu  de  toutes  ces  lésions.  Assez  souvent  elle  est  petite, 
tortueuse,  comme  perdue  au  milieu  des  inégalités  de  la  surface  des 
fausses  membranes  ;  pour  la  trouver,  on  peut  être  obligé  d*io8uf0er  le 
poumon  sous  l'eau,  et  on  voit  alors  quelques  bulles  d'air  qui  Tiennent 
sourdre  à  sa  surface.  Les  dispositions  et  le  siège  de  ces  fistules  varieut 
d'ailleurs  suivant  les  maladies  auxquelles  elles  se  rattachent  ;  nous  en 
avons  déjà  dit  quelques  mots  a  propos  des  causes,  et  nous  renverrons 
pour  de  plus  amples  détails  à  l'étude  des  diverses  maladies  qui  peuvent 
amener  la  perforation  de  la  plèvre,  et  l'épanchement  d'air  dans  sa  ca- 
vité. Quelquefois  ces  fistules  s'oblitèrent  au  bout  d'un  temps  plus  ou 
moins  long,  soit  par  cicatrisation  de  leurs  parois,  soit  par  un  dépôt  de 
fausses  membranes  qui  obture  leur  lumière,  et  la  plèvre  est  alors  trans- 
formée en  une  sorte  de  kyste  renfermant  des  liquides  et  des  gaz  ;  cette 
oblitération  n'est  souvent  que  momentanée  et  la  fistule  peut  s'ouvrir  et 
se  fermer  par  intervalles,  mais  il  n'est  pas  rare  que  l'occlusion  soit  défi- 
nitive :  alors  les  gaz  épanchés  peuvent  être  résorbés  en  totalité  ou  en 
partie,  et  le  kyste  pleural,  cessant  de  communiquer  avec  Pextérieur,  se 
comporte  comme  les  épanchements  de  la  pleurésie  chronique  :  une  par- 
tie du  liquide  peut  être  résorbée,  le  reste  persiste  indéfiniment  en  subis- 
sant diverses  transformations. 

Symptôtnes  et  marche.  —  Le  mode  de  début  du  pneumothorax 
et  l'évolution  des  accidents  qu'il  entraine  diffèrent  d'une  façon  trèt-sen- 
sible  suivant  la  nature  des  causes  qui  en  ont  provoqué  le  développement; 
il  est  donc  nécessaire  de  distinguer  plusieurs  cas  particuliers,  dont  les 
principaux,  par  ordre  de  fréquence,  ont  trait  :  1®  aux  pneumothorax  qui 
dépendent  d'une  maladie  pulmonaire,  comme  de  la  tuberculose,  des  abcès 
ou  de  la  gangrène  du  poumon  ;  2^  à  ceux  qui  sont  consécutifs  a  la  pleu- 
résie purulente  ;  3*^  enfin  à  ceux  qui  résultent  d'une  simple  déchirure 
du  poumon,  sans  lésion  morbide  antérieure  de  cet  organe  ni  de  la  plèvre. 
Malgré  leur  rareté  relative,  nous  commencerons  par  ces  derniers,  afin  de 
procéder  des  cas  les  plus  simples  aux  cas  les  plus  compliqués. 

Le  pneumothorax  qui  survient,  soit  à  la  suite  d'un  effort  violent  ou 
d'une  quinte  de  toux,  soit  par  la  rupture  de  quelques  vésicules  emphysé- 
mateuses, comme  celui  qui  est  le  fait  d'un  traumatisme,  débute  par  une 
douleur  de  côté  très-vive  et  par  une  dyspnée  subite.  L'intensité  de  cette 
dyspnée  est  toute  entière  subordonnée  à  l'abondance  de  l'épanchement: 
après  avoir  été  toujours  assez  intense  au  moment  de  la  production  do 
pneumothorax,  elle  peut  se  calmer  après  quelques  heures  ou  au  plus 
quelques  jours,  si  la  quantité  de  gaz  est  peu  considérable  ou  si  ce  gaz 
est  déjà  en  partie  résorbé.  11  n'y  a  ni  fièvre  ni  aucun  autre  trouble  géné- 
ral, et  surtout  on  ne  constate  aucun  symptôme  de  pleurésie.  Les  signes 
physiques  dénotent  l'existence  d'un  épanchement  gazeux  dans  la  plèvre  et    ( 
c'est  dans  ces  cas  seulement  que  le  pneumothorax  se  présente  à  rétat  de 
pureté:  on  trouve  une  sonorité  tympanique  à  la  percussion,  du  souflk    |=: 
amphorique  à  l'auscultation,  phénomènes  sur  lesquels  nous  insisterons 


I  — 


PLÈVRE.  —  pWeuuothorax.  —  symptômes  et  marche.  277 

(oui  k  l'heure  ;  assez  souvent  il  s'y  joint  plus  tard  des  signes  qui  indi- 
quent une  certaine  quantité  d*épnnchement  séreux.  Ordinairement  la 
déchirure  du  poumon  se  ferme  peu  de  temps  après  sa  production,  et  alors 
Fair  et  le  liquide  épanché  peuvent  être  résorbés,  au  bout  de  quelques 
jours  ou  de  quelques  semaines  ;  plus  rarement  Tépanchement  persiste 
pendant  des  mois  et  même  pendant  des  années.  J'ai  observé  dans  les 
hôpitaux  un  malade  qui  portait  ainsi  depuis  deux  ou  trois  ans  un  hydro- 
pneumothorax enkysté  sans  en  éprouver  d'ailleurs  de  bien  grands  trou- 
bles :  il  venait  de  temps  en  temps  à  Thôpital  pour  se  reposer,  mais  était 
capable  de  se  livrer  au  travail  pendant  de  longs  intervalles.  Ce  premier 
groupe  de  pneumothorax  comprend  les  cas  les  plus  favorables,  puisque 
la  guérison  n'est  pas  rare  et  même  que  souvent  elle  n'est  pas  longue  à 
venir.  Cette  innocuité  relative  tient  à  ce  que,  au  moment  où  Tépanche- 
ments'est  produit,  le  poumon  et  la  plèvre  étaient  sains  et  que  les  lésions 
se  réduisent  à  Tépanchement  dans  la  cavité  pleurale  d'une  certaine 
quantité  d'air  atmosphérique,  dont  Taction  est,  comme  nous  le  savons, 
hien  faiblement  irritante. 

Dans  le  pneumothorax  consécutif  à  la  pleurésie  purulente,  on  observe 
d'abord  les  symptômes  propres  à  cette  maladie,  puis  ceux  d'une  vomique 
plus  ou  moins  persistante  ;  ce  n'est  qu*après  une  certaine  durée  de  l'ex- 
pectoration purulente  que  surviennent,  et  cela  bien  entendu  dans  quel, 
ques  cas  seulement,  les  symptômes  du  pneumothorax.  Cette  complication  ne 
s'annonce  en  général  par  aucun  trouble  important  qui  indique  le  moment 
précis  où  l'air  est  entré  dans  le  foyer  purulent  :  pas  de  point  de  côté  vio- 
lent ni  de  dyspnée  subite,  dans  quelques  cas  seulement  une  augmenta- 
tion de  l'oppression.  C'est  le  plus  souvent  par  les  signes  physiques  qu'on 
est  conduit  à  reconnaître  que  l'air  a  pénétré  dans  la  plèvre  :  on  trouve, 
en  effet,  de  la  sonorité  dans  les  parties  supérieures  de  la  poilrine  qui 
auparavant  présentaient  une  matité  absolue,  on  entend  du  souffle  ampho- 
rique,  on  perçoit  le  bruit  de  succussion  hippocratique,  etc.  Quelquefois 
aussi  la  fétidité  de  l'haleine  et  des  crachats  peut  mettre  sur  la  voie  du 
diagnostic  :   alors  que,   pendant  un  certain  temps,  le  malade  n'avait 
expectoré  que  du  pus  fluide  sans  odeur  bien  marquée,  on  s'aperçoit  à  un 
moment  que  les  crachats  deviennent  fétides  et  acquièrent  bientôt  une 
odeur  repoussante  ;  c'est  que  l'air  qui  a  pénétré  dans  le  foyer  purulent 
permet  maintenant  la  putréfaction  des  liquides  épanchés.  Presque  tou- 
jours la  production  du  pneumothorax  dans  ces  conditions  aggrave  beau- 
coup la  situation,  déjà  si  sérieuse  :  l'appétit  achève  de  se  perdre,  il  sur- 
vient souvent  de  la  diarrhée,  des  frissons  répétés  suivis  de  sueurs  froides, 
en  un  mot  des  accidents  de  septicémie,  et  la  mort  ne  tarde  pas  à  arriver. 
Cependant  il  n'en  est  heureusement  pas  toujours  ainsi  :  dans  quelques 
circonstances  favorables,  le  foyer  purulent  peut  continuer  à  se  vider  par 
les  bronches,  sans  phénomènes  de  putridité  malgré  la  présence  de  l'air,  et 
la  guérison  spontanée  est  possible,  aussi  bien  que  dans  le  cas  de  pleurésie 
purulente  simple  ouverte  dans  les  bronches  sans  complication  de  pneumo- 
thorax. Enfin  l'abcès  pleural  s'ouvre  quelquefois,  non  plus  dans  les  bron- 


278  PLÈVRE.  -^  PKBVMOTUORAX.  —  sym^iirs  et  JlàBCn. 

ches,  mais  à  travers  la  paroi  thoracique,  et  dans  ce  cas  encore  l'air  peut 
pénétrer  dans  la  cavité,  de  la  iplèvre,  le  pyopneumothorax  est  .«onUÛaé, 
avec  toutes  les  chances  d'altération  putride  de  répancheoient  qna  nous 
indiquions  tout  à  Theure.  Ouand  ces  accidents  de  putriditéappanûeseot, 
une  issue  fatale  est  presque  inévitable,  si  une  large  ouverture^ da  thorax 
pratiquée  artiGciellement  ne  vient  permettre  de  détei^g^  1&  cavité  et 
d'ampécher  la  décomposition  des  produits  qu'elle  contient. 

La  troisième  espèce  de  pneumothorax  que  nous  avons  à. étudier. est 
eelle  dans  laquelle  Tépanchement  d'air  résulte  d'une  perforatioada  pou- 
mon, consécutive  elle-même  à  une  maladie  de  cet  organe.  C'est  de»beau- 
coup  l'espèce  la  plus  oommune,  puisqu'elle  comprend  le  pneumothorax 
qui  survient  dans  la  pbthîsie  pulmonaire,  ou  plus  rarement  i  JavSiiite  de 
la  gangrène  ou  des  abcès  du  poumon  ;  c'est  elle  qui  a  servi  de  ^modèle  à 
la  description  de  tous  les  auteurs. 

.  Le  début  est  brusque,  marqué  par  deux  phénomènes,  le  point  de  côté 
et  la  dyspnée,  dont  la  soudaineté  d'appamtionetia  violence  sont  pra^que 
caractéristiques,  lorsqu'on  les  voit  apparaître  brusquement  ohex  dn j'oili- 
vidus  atteints  de  l'une  des  maladies  que  nous  venons  d'indiquer.  Tout  à 
coup,  pendant  une  quinte  de  toux  ou  sans  cause. déterminantoy  le  malade 
est  pris  d'une  douleur  atroce,  angoissante,  parfois  accompagnée,  d'june 
sensation  dedécliinire  dans. la^  poitrine... En'méme  temps  il  épioweiuie 
dyspnée  terrible  avec  menace  de  suffocation  ;  celte  dyspnée  a'exfdique 
par  l'irruption  brusque  de  l'air  dans  la  plèvre,  qui'  d'emblée  sappnaie 
une  partie  delà  surface  respiratoire  (insuffisance  pulmonaire  aiguë,  tWin- 
trich),  et  aussi  par  le  'point  de  côté,  qui  fait  que<le  malade  inornùbibse 
instinctivement  son  thorax.  L'oppression  arrive  à  .«on  comble,, tquand  la 
perforation  est  disposée  de  telle  sorte  ,que  l'air  entji*e  librement  dans  la 
plèvre  et  ne  peut  en  sortir  ;  l'épanohemeut  remplit  alors  tout  un  cAté  de 
la  poitrine,  tout  le  poumon  correspondant  cesse  de  fonctionner  et  la  mort 
peut  arriver  très-rapidement  avec  les  phénomènes  de  l'asphyxie  aiguë. 
Plus  souvent  les  accidents  du  début  s'atténuent  au  bout  d'un  certain 
temps,  le  point  de  côté  surtout,  mais  la  dyspnée  persiste,  plus  ou  moins 
intense  suivant  l'abondance  de  l'épanjchement.  Dans  les  premiers  temps, 
il  n'y  a  pas  de  fièvre,  du  moins  imputable  à  l'épanchement  d'air;  plus 
tard,  quelquefois  même  rapidement,  les  phénomènes  fébriles  apparais- 
sent, liés  à  la  pleurésie  qui  s'ajoute  au  pneumothorax  et  qui  est  presque 
constante  dans  l'espèce  que  nous  étudions. 

Les  signes  physiques  du  pneumothorax  et  de  l'hydropneumothoni 
sont  très  particuliers  à  cette  maladie  et  en  rendeoti  le  diagnostic  le  plus 
souvent  facile. 

L'inspection  fait  constater  Timmobilisation  d  un  côté  de  la  poitrine  et 
la  dilatation  permanente  de  ce  côté.  On  voit,  en  effet,  que  la  moitiéidu 
thorax  correspondante  à  l'épanchement  gazeux  ne  présente  pas,  dans  Tiis- 
piration  et  dans  l'expiration,  les  alternatives  de  soulèvement  et  de  letrait 
qu'on  observe  du  côté  sain;  cette  immobilité  est  également  évidente»! 
niveau  de  Thypoctiondre  qui  rente  soulevé  et  saillant,  et  ne  s'affaisse  pas 


PLÈVRE. «nmi^THORAx.  —  \nwnàmES  bthiihu.  9?9 

«ommedu  cAté  opposé  f)eiiikntrejqpbatk>n,i|)trce  que  le  ;di«pluragme  est 
abaiiiè  et  niaiotemu  Jana  cette  fetilion;  par  la  pressioade  l'^achtmeiit 
gaiflDi^lde  r-épaachenent  li4|aide  ;  notans^ien  passant,  que  eet  abaisse- 
OBant  permanent  du  diapiuragme;  peut  ^mcere  être*  reoeonu  f)ar  le  vefottle- 
laent  du  foie  ou  de  la  rate,  suivant sque  île  ;  pneumothorax  siège  à  droite 
ou  i  gauche.  Quant  à  la  dilatation,  du  côté  mâisMle,  elle  est  plus,  oppanente 
que  réelle,  et,  en  fait,  il  n'y  a  pas,  dans  le  pneumothorax,  de  Toassure 
giMi&rale  ou  partielle  asalogiie  à  eèllei qu'on  rencontre  daas  iat pleurésie. 
On  a.  prétendu  que  les  gaz;  pouvaient  s'accumuler  en  quantité  considéra- 
b\e9  dans  la  pierre,!  lonsqiieia  disposition  de.  la  fistule  permetiait  l'entrée 
de  l'flirtet  einpâchaitisa «aortse,  et  que  œs  ga^  pouiraient . aUmhaoquérir 
onelenaion  capable  de  refouler  les  parois  thoraetquestet  même  de  dépla- 
cer les  organes  duiinédiastin;  mais  il  yia  là.une  erreur  contre i laquelle 
de  Gaatelnau  et  Béhier  se  sont  élevés  avec  raison,  i  II  est,:  en  .effet,  impos- 
sible qu'une  nouvelle  quantité  d'air  entre  encore  dans  la  cavité  pleurale, 
loraqueiles. gaz  qui  y  sont  contenus  ont: acquis,  pendant  l'agoandiese- 
mentdu  tbonax  dans  l'inspiration,  une;ten«on.  égale  à  la  pression  atmos- 
phérique ;  on  ne  voitpas  quelle  force  les  y  ferait  pénétrer.  Ce  n'est  donc 
pas  aine  distension  ràeUe  qui  existe  .du  côté  malade,  c'est  simplement 
une  absenccide  retrait  i  la  poitrine  ne  revient  pas  sur  elle^oéme^lorside 
renpûntîon,  puisque  l'air  qui  la  remplit  ne  peut  être  chassé,  elle  reste 
dans  la'poBÎtion  qu'ellet  prend  lors  d'unci inspicatk)n  profonde  et  laite  avec 
effort;  aussi» parait-elle  être  dilatée  pendant  l'expiration  par  rapport  au 
c6té  sain, 'mais  cette  «différence  disparaît  à,  peu.  près  complètement  >au 
moBoit  d'une  forte  inspiration  (Béhier) .  Le  plus  souvent,  d'ailleurs,  l'air 
peut  entrer  et  sortir:  sans' difficultés,  ou  bien  il  est  emprisonné  dans  *la 
plèfmaprès  oblitération  de<  la  fistule;  «dans  ces  cas,  l'ampliation  du.oAAé 
mtJado- est  nulle  ou  peu  marquée,  quelquefois  même  on  trouve  unrétré- 
eiaaaneni-dû  à.  des  adhérences  antérieures. 

;Lâ  pepcnasion  donne  «n  son  tympanique:dan&  toutes  les  par  tics,  tocou- 
pèeaipor  l'épanchement  gazeux,  et  le  doigt  qui  percute  éprouve  une  sen- 
sation*'d'élasticité  remarquable;  s'il  y  a  en  même  temps  des  liquides 
accnnulésidaus  la  plèvre,  ils  occupent  aaturellement  les  parties  d^liaes 
et  niera  on  trouve,  on  haut  de  ia/poitrine,  une  sonorité  exagérée,  en  bas, 
une  inaotité  absolue.^ La*  tonaUté^duson  tympanique  varie  soivant  "la.ten- 
sîon*da.gai  contenu  dans  la  poitrine  et  la  tension  corrélative  des:  parois 
thoraciqnes  :  si  cette  tension  est  faible,  la  tonalité  sera  graverai,»  au  cou- 
traire  y  ;olle;«6t  forte,  la.  tonalité  sera,  aiguë  et  le  caractère  tympanique 
pourmiêtro  alors  beaucoup  moins  facile  à  percevoir  ;  il  peut  même* arri- 
va que  la  tonalité  soit  assez  aiguë  pour  qu'on  puisse  croire  à  l'existence 
de  la  .matité  iMon  y  faisant  attention,  on  reconnaîtra  qu'il  n'y  a  pas  de 
nuitité  véiitable ,  mais  un  son  clair  ci  aigu  très-différent  du  son  tympa- 
nique qu'on  trouve  habituellement.  Quelquefois  le  son  fonrni  par  la^per- 
cuBsion  présente  un  timbre  métallique  remarquable  ;  mais,  en.  général, 
pour  bien,  percevoir  ce  caractère,  il  faut  combiner  la  percussion  et  Tau- 
acuknlion  :  si  Ton  applique  l'oreiUc  «sur  la  pûitrâne,  au  niveau  «des  par- 


280  PLÈVRE.   —   PNEUMOTHORAX.    —  SYMPTÔMES   ET  MARCHI. 

lies  correspoDdantcs  au  pneumothorax,  et  qu'en  même  temps  on  percute 
ou  qu'on  fasse  percuter  un  point  quelconque  du  thorax,  soit  avec  les 
doigts,  soit  avec  un  doigt  frappant  sur  une  pièce  de  monnaie,  soit  avec 
une  pièce  de  monnaie  frappant  sur  une  autre  pièce  appliquée  sur  la  poi- 
trine, on  entend  un  bruit  métallique  éclatant  et  prolongé  auquel  Trous- 
seau  a  donné  le  nom  de  bruit  d'airain,  et  qui  a  une  très-grande  Taleur 
diagnostique. 

Les  vibrations  thoraciques  sont  abolies  dans  toute  l'étendue  de  rhjdro- 
pneumothorax,  aussi  bien  dans  la  partie  correspondante  à  l'épanchemeni 
gazeux  que  dans  celle  qui  correspond  à  la  collection  liquide. 

L'auscultation  fournit  une  grande  variété  de  signes,  qui  sont  aussi 
importants  que  caractéristiques.  On  constate  d'abord  la  suppression  abso- 
lue du  bruit  respiratoire  normal  ;  ce  bruit  est  remplacé  par  du   soufBe 
amphorique,  souifle  produit,  soit  par  le  passage  de  l'air  dans  la  cavité 
pleurale  à  travers  l'orifice  étroit  de  la  fistule  et  qui  ressemble  en  effet  a 
celui  qu'on  détermine  en  soufilant  dans  l'ouverture  d'une  cruche  i  large 
ventre  et  à  col  très-rétréci,  soit  par  le  retentissement  du  bruit  bronchi- 
que à  travers  une  cavité  pleine  de  gaz,  dans  le  cas  où  l'orifice  Bstuleux 
est  oblitéré.  L'intensité  de  ce  souffle  est  très-variable  ;  quelquefois  il  est 
très-fort,  d'autres  fois  il  est  si  faible  ou  paraît  si  éloigné  qu'il  faut  une 
grande  attention  pour  le  découvrir  ou  qu'on  le  perçoit  seulement  dans 
les  grandes  inspirations  ;  en  tout  cas,  il  offre  un  timbre  métallique  tout 
particulier.  Le  même  caractère  amphorique  se  retrouve  dans  l'ausculta- 
tion de  la  voix  et  de  la  toux,  qui  sont  souvent  suivies  d'un  écho  mélalli- 
que  plus  ou  moins  retentissant.  L'oreille  appliquée  sur  la  poitrine  per- 
çoit encore,  par  intervalles,  le  tintement  métallique,  petit  bruit  sec, 
sonore,  analogue  à  celui  que  produirait  une  perle  tombant  dans  une 
coupe  de  cristal  ;  ce  phénomène  est  très-inconstant,  il  parait  et  disparaît 
de  temps  en  temps;  quelquefois  il  est  provoqué  par  des  secousses  de  toux 
ou  par  les  mouvements  du  malade,  ou  au  contraire  il  est  supprimé  par 
ces  circonstances.  Tous  ces  phénomènes,  auxquels  on  peut  joindre  le 
bruit  d'airain  de  Trousseau  dont  nous  avons  déjà  parlé,  constituent  un 
ensemble  de  signes  d'auscultation  dont  on  ne  saurait  contester  la  grande 
valeur  diagnostique.  L'interprétation  physiologique  de  ces  divers  signesa 
donné  lieu  à  de  nombreuses  discussions,  notamment  pour  le  tintement 
métallique  ;  cependant  nous  n'ayons  pas  à  entrer  dans  le  détail  des  diver- 
ses théories  qui  ont  été  présentées  et  soutenues,  parce  que  celles-d  ont 
déjà  été  exposées  avec  une  grande  netteté  dans  l'article  auscultation  de 
ce  dictionnaire  {Voy,  t.  IV,  p.  123,  133,  et  144).  Qu'il  nous  suffise  de 
faire  observer  que  la  production  des  divers  bruits  morbides  que  nous  ve- 
nons d'indiqut  r  ne  semble  pas  exiger  la  communication  de  la  cavité  anor 
maie  avec  les  bronches,  mais  que,  suivant  l'opinion  de  Skoda,  de  Moo- 
neret  et  de  Béhier,  ces  bruits  peuvent  aussi  bien  se  produire  dans  les  ctt 
où  la  fistule  broncho-pleurale  est  fermée  que  dans  ceux  où  la  communi- 
cation persiste  entre  les  bronches  et  la  plèvre  :  dans  cette  interprétatioiit 
qui  concorde  avec  un  gi^and  nombre  de  faits  et  d'expériences,  tous  les 


PLÈVRE.   —   PKEUIIOTUORAX.    —   SYMPTÔMES   ET  MARCHE.  îi81 

bruits  qui  arrivent  à  Torcille  dans  l'auscultation  de  la  poitrine»  acquer- 
raientf  en  traversant  la  cavité  pleine  d'air  du  pneumothorax,  le  caractère 
amphorîque  et  le  timbre  métallique,  que  ces  bruits  se  passent  d'ailleurs 
dans  la  cavité  anormale  ou  en  dehors  d'elle  dans  les  bronches,  que  la 
perToFation  pulmonaire  existe  encore  ou  bien  qu'elle  soit  fermée.  c<  Ainsi 
donc,  dit  Bebier»  dans  le  pneumotorax,  la  communication  pleuro-bron- 
cfaique  n*est  nécessaire  que  pour  créer  l'établissement  de  la  collection  ga- 
zeuse qui  joue,  dans  la  production  des  phénomènes,  le  rôle  d'une  caisse 
de  renforcement;  le  maintien  de  cette  communication  est  inutile  pour  la 
production  du  tintement  métallique  et  des  diverses  nuances  de  bruits  mé- 
talliques. Ces  derniers  ne  sont  autres  que  des  bruits  extérieurs  à  la  col- 
lection gazeuse  qui,  en  la  traversant  pour  arriver  à  l'oreille  de  l'observa- 
teur, prennent  le  timbre  particulier  qui  leur  imprime  un  caractère 
spécial  et  une  valeur  diagnostique  particulière.  x> 

Enfin  un  dernier  signe,  encore  aussi  caractéristique  que  les  précé- 
dents, est  fourni  par  la  succussion  hippocratique  :  lorsque  la  plèvre  con- 
tient en  même  temps  des  liquides  et  des  gaz,  les  mouvements  imprimés 
au  malade  déterminent  un  clapotement  du  liquide,  qui  est  perceptible  a 
Toreille  et  quelquefois  même  à  la  main,  et  que  le  malade  ressent  souvent 
de  lui-même  dans  les  mouvements  qu'il  exécute.  Le  bruit  de  flot  est,  dans 
certaines  circonstances,  assez  fort  pour  qu'on  l'entende  à  distance,  d'au- 
tres fois  il  est  nécessaire  d'appliquer  l'oreille  sur  la  poitrine*  En  outre, 
pendant  la  succussion,  la  main  appliquée  sur  le  côté  malade  ressent  quel- 
quefois le  choc  du  liquide  qui  vient  frapper  contre  la  paroi  thoracique. 
Le  bruit  de  succussion  hippocratique,  qu'on  peut  retrouver  dans  d'autres 
circonstances,  par  exemple  lorsque  l'estomac  distendu  contient  des  gaz  et 
des  liquides,  présente  pour  le  diagnostic  une  très-grande  valeur  :  quand 
on  l'a  bien  constaté  et  qu'on  a  bien  déterminé  qu'il  a  son  siège  dans  la 
cavité  pleurale,  il  suflit  à  lui  seul  pour  établir  avec  certitude  l'existence 
de  rhydro-pneumothorax. 

Aux  symptômes  et  aux  signes  précédents  s'ajoutent  fréquemment  des 
phénomèoes  graves  qui  se  rattachent  à  la  purulence  ou  à  la  putridité 
de  répancbement  liquide.  Dans  certains   cas, de  pneumothorax  tuber- 
culeux, l'épanchement  peut,  à  la  vérité,  rester  simplement  séreux,  ainsi 
que  Dous  en  avons  déjà  cite  quelques  exemples,  et  alors  les  phénomènes 
généraux  sont  nuls  ou  presque  nuls,  la  dyspnée  et  les  menaces  d'asphyxie 
constituent  tout  le  danger  de  la  maladie  ;  mais  bien  plus  souvent,  on 
pourrait  dire  presque  toujours,  l'épanchement  est  purulent  et  il  en  est 
constamment  ainsi  dans  les  cas  d'abcès  ou  de   foyers  gangreneux  du 
poumon  ouverts  dans  la  plèvre  :  alors  apparaissent,  quelquefois  de  très- 
bonne  heure,  les  accidents  les  plus  graves  de  la  pleurésie  purulente;  ou 
bien,  par  suite  de  l'altération  putride  que  subit  le  pus,  on  voit  survenir 
des  symptômes  de  putridité  et  de  septicémie,  en  tout  semblables  à  ceux 
que  nous  avons  mentionnés  à  propos  de  la  pleurésie  purulente  compli- 
quée de  pneumothorax. 

On  voit,  d'après  cela,  toute  la  gravité  du  pronostic  dans  les  cas  où  le 


882  PLÈVRE.  —  PHEmorHORAx.  —  bugrdstic. 

pneumothorax  «si  la  conséquence  de  l'ouverture  dans  la  piètre  d^mr  fcyer 
tuberculeux  ou  gangreneux  ou  d'un  abcès  pnenmonique.  ^Outrer  que  «eel 
accident  peut  entraîner  la  mort  à  bref  délai,  par  le  seul  4ait  éê  TaliM- 
dance  de  Tépanchement  et  de  l'asphyxie  qui  en  résulte,  les  tukes  lesplos 
redoutables  sont  à  craindre,  si  le  malade  échappe  à  ce  premier  dniger; 
on  aura  y  en  etfet,  à  compter  avec  le  développement 'd'une  Jpievrésie 
purulente  généralisée  et  le  développement  plus  terrible  •  enewe  'ée^  la 
décomposition  putride  du  liquide  épanché»  avec  toutes  ses  eonsé^Benees- 
Le  pronostic  sera  moins  absolument  grave,  si  le  pneumolhormx -«rttliniîlé 
et  enkysté,  parce  que  quelquefois  'le  foyer  peut  être  évacué  «par  les 
bronches  et  la  guérison  arriver.  Enfin,  dans  des  cas  malbeweusC" 
ment  exceptionnels,  et  lorsque  le  pneumothorax  survient  «a-'débiit  de 
la  tuberculose,  il  peut  arriver  qu'on  ait  simplement  afraira  à:  un  by- 
dropneumothorax,  que  le  gaz  soit  résoribé  après  fermeture. de  la  Bstole, 
et  que  le  liquide  épanché*  disparaisse  à  son  tour  après  un  temps  plus  ou 
moins  long. 

Diagnostic.  —  Les  différentes  espèces  de  pneumothorax  quo  noas  avoiy 
successivement  étudiées  présentent  un  mode  de  début  et^une  éittfaition 
qui  bien  souvent  ne  permettent  pas  de  se  méprendre  sur  leurnatore;  en 
outre,  on  trouve  dans  cette  maladie  des  signes  physiques  fournis  par  la 
percussion,  par  l'auscultation,  parla  succussion,  etc.,  qui,  .même  pris 
isolément,  jont  déjà  une  grande  valeur,  et  qui  par  leur  réunion  aoittti- 
tnent  un  ensemble  plus  capable  de  suffire  au  diagnostic  dans  la  'plupart 
des  autres  maladies.  Très-souvent  donc  le  diagnostic  ne  prteate  pas 
de  difficultés.  Mais  quelquefois  la.  maladie  n'est  caractérisée  que  par 
quelques-uns  de  ses  signes  habitueb,  et  alors  on  peut  la  confondre  atee 
d'autres  maladies  ;  plus  souvent  encore  on  croit  à  Texisienoe  d'oo 
pneumothorax  qui  n'existe  pas,  parce  qu'on  a  attaché  trop  d'importance 
à  certains  signes,  au  souffle  amphorique  par  exemple. 

Le  pneumothorax  généralisé  et  accompagné,  comme  c'est  le  caa  le  ph» 
ordinaire,  d'un  épanchement  liquide  plus  ou  moins  abondant  ne  peut 
guère  être  méconnu   ni   confondu  avec  aucune   autre   maladie;  on  y 
trouve,  en  effet,  à  la  fois  tons  les  signes  physiques^  notamment  le  souffle 
amphorique,  le  bruit  d'airain  et  le  bruit  de  succussion  qui  pemwtknt 
d'affirmer  le  diagnostic.  Mais  l'embarras  est  bien  plus  grand  pour  les 
pneumothorax  circonscrits  et  enkystés:  quand  ceux-ci  sont  conséenlî&i 
une  pleurésie  purulente  interlobaire  ou  diaphragmatique,  on  voit  d^ahoni 
se  produire  les  symptômes  d'une  vomique  qui  n'avait  pas  son  origiae 
dans  un  épanchement  occupant  la  grande  cavité  pleurale,  puis  on  ooo^ale 
l'apparition  de  bruits  amphoriqucs  et  quelquefois  même  le  tintement 
métallique  ;  dans  ces  conditions,  il  est  naturel  de  penser  à  un  pneome- 
thorax,  et  si,  dans  la  suite,  on  voit  l'état  général  s'améliorer  et  les  signes 
cavitaires  s'atténuer  et  disparaître,  on  est  autorisé  à  persister  dans  et 
diagnostic  et  à  écarter  le  soupçon  d'une  caverne  tuberculeuse  (Moutard- 
Martin,  Noël  Guéncau  de  Mussy). 

Certaines  pleurésies  accompagnées  de  souffle  amphorique  et  la  phlhisie 


PLÈVRE.  —   P»  EUMOïHOBAX^ •  TRAITEMENT.  285 

pulmooaire  aTec  cavernes  volumineuses  sont  les' deux: maladies,  qu'on  est 
le  plus  exposé  à  confondre  avec  le  pneumothorax. 

C*«t  surtout  Texistence  du  soufQei  amphorique  qui  peut  faire  croire  à 
un  poeimiothorax  dans  certains  cas  de  pleurésie,  notaromentide  pleurésie 
piinilfliifte;.mais  dans  ces  cas  où  Tépanchement  est  déjà  abondant,  on 
troimra .  de  la  matité  au  lieu  du  tympanisme  à  la  percussion,  on  ne 
neiMMintrera  ni  bruit  d'airain  ni  bruit  de  suocussion,  on  aui*a  d'aiK 
leurs  les  signes  antérieurs  .d'une  pleurésie  purulente;  s'il  s'agissait, 
au  oontraîre,  d'un  pneumothorax  consécutif  à  une  pleurésie  puru- 
Ifinle,-  ta  aurait,  avant  l'épanchemant  gaxeux,  observé  les  symptômes 
d*une  fomique. 

Xes  ^ndes  cavernes  pulmonaires  superficiellement  placées  peuvent 
donner  lieu  à  plusieurs  des  signes  du  pneumothorax,  notamment  aux 
hnûta  amphoriques  et  même  au  tintement  métallique;  mais  on  remar- 
quera que  le  bruit  de  suocussion  y  est  absolument  exceptionnel,  que  la 
percuMion  donne  à  leur  niveau  le  bruit  de  pot  fêlé  en  même  temps. que 
le  tympanisme,  que  les  vibrations  thoraciques  sont  exagérées,  qu'il  y  a 
du  rétrécissement  du  thorax,,  etc.  On  aura  surtout  égard  à  l'évolution 
tente  dilférente  des  phénomènes  dans  les  deux  maladies  :  au  lieu  du 
début  brusque  et  de  l'apparition  presque  soudaine  des  symptàmes  qu'on 
trouve. dans  le  pneumothorax,  on  a  dûns'  la  tuberculose  des  accidents 
suceeaaifsidont  ou  peut-  suivre  les  progrès^ Malgré  tout,  dans,  les  cas  où 
UQ  pneumothorax  circonscrit  vient  compliquer  une  phthisie  pulmonaire 
déjà  avancée,  il  est  certain  que  le  diagnostic  peut  présenter  de  très- 
grandes  difGcultés  et  qu'il  reposera  uniquement  sur  les  signes  physiques 
que  noua  venons  d'indiquer. 

Quant  au  diagnostic  de  la  cause  du  pneumothorax  et  de  la  maladie  à 
laquellû'il  se  rattache,  nous  n'avons  pas  à  y  insister  de  nouveau,  après 
avoir  étudié  séparément  les  principales  espèces  qu'il  nous  a  paru  utile  de 
reconoaitre  parmi  les  épanchemonts  gazeux  intra-pleuraux. 

Traitement.  —  Quand  le  début  du  pneumothorax  est  brusque  et  mar- 
qué par  cette  atroce  douleur  et  cette  terrible  dyspnée  qu'on  observe  dans 
les  circonstances  que  nous  avons  signalées,  il  but  chercher,  sans  retard, 
i remédier  à  ces  accidents.  Pour  calmer  le  point.de  côté,  les  injections 
wna-cutanées  de  morphine  loco  dolenti  sont  le  moyen  le  plus  rapide  et 
le  plus  efficace;  on  pourra  les  répéter  plusieurs  fois,  à  intervalles  conve- 
nables,'jusqu'à  ce  qu'elles  aient  réussi  à  modérer  ce  symptôme  pénible, 
dangereux  même  par  la  nouvelle  entrave  qu'il  apporte  à  la  respiration. 
Contre  la  dyspnée  qui  tient  à  la  brusque  diminution  du  champ  respi- 
ratoire, les  inhalations  d*oxygène  sont  assurément  un  remède  très-^ration- 
nel,  et  elles  peuvent,  en  effet,  compenser  en  quelque  sorte,  dans  une 
certaine  mesure,  l'insuffisance  pulmonaire;  on  pourra  y  revenir  dans  le 
cours  'de  la  maladie  pour  calmer  l'oppression.  On  a  conseillé  aussi  les 
émissions  sanguines,  dans  le  but  de  combattre  la  fluxion  qui  se  produit 
sur  le  poumon  sain;  mais  ce  moyen,  applicable  au  cas  du  pneumothorax 
trauroatjque  ou  aux  cas  qui  s'en  rapprochent,  sera  souvent  contre-indiqué 


284  PLÈVRE.  —  bibliographie. 

par  les  maladies  antécédentes  et  par  Tétat  de  faiblesse  que  ces  maladies 
auront  amené. 

Ultérieurement,  les  indications  thérapeutiques  varient  suivant  Fespëce 
de  pneumothorax  et  les  accidents  que  chacune  dV.lles  peut  entraîner. 

Si  le  pneumothorax  est  pur,  sans  complication  d'épanchement  liquide, 
on  doit  se  borner  à  Texpectation,  puisqu'on  sait  que  Tair  atnoMMpiiérique 
n'a  pas  ou  guères  d'influence  nocive  sur  la  plèvre,  et  que  le  gai  pourra 
être  résorbé  dès  que  la  perforation  qui  en  a  déterminé  l'épandieinent 
sera  fermée.  S'il  y  a  hydro-pneumothorax,  on  peut  employer  quelques 
révulsifs  pour  combattre  la  pleurésie  subait^uë  dont  l'épanchement  séreux 
est  rindice  ;  et,  dans  le  cas  où  la  quantité  du  liquide  serait  aaseï  oonsi* 
dérable  pour  constituer  un  danger,  il  no  faudrait  pas  hésiter  à  recourir 
à  la  thoracentèse  et  à  la  répéter  suivant  les  circonstances. 

Parmi  les  cas  de  pyopneumothorax,  il  faut  distinguer  ceux  où  Ton  est 
en  présence  d'une  pleurésie  purulente  ouverte  dans  les  bronches  ou  par 
la  paroi  thoracique,  et  ceux  où  Ton  a  affaire  à  la  rupture  d'un  foyer  pul- 
monaire dans  la  plèvre. 

Dans  le  cas  de  pleurésie  purulente,  il  ne  faut  pas  trop  se  hâter  de  pra- 
tiquer la  thoracentèse  ou  l'empyème,  puisqu*on  sait  que  ces  cas  peuvent 
quelquefois  guérir  sans  opération,  par  évacuation  successive  du  contenu 
de  Tabcès  pleural.  Mais,  si  la  formation  du  pus  persiste  indéfiniment  et 
surtout  si  l'on  voit  survenir  des  accidents  de  putridité,  il  faut  alors  recou- 
rir à  l'empyème  et  faire  de  grands  lavages  désinfectants  de  la  plèvre. 
L'opération  serait  pourtant  contre-indiquée,  si  le  malade  est  tub^culeux, 
car  elle  n'aurait  alors  aucune  chance  de  succès. 

Enfin,  si  le  pyopneumothorax  résulte  de  la  rupture  dans  la  plèvre 
d'un  foyer  pulmonaire,  les  indications  sont  subordonnées  à  la  nature  de 
la  maladie  initiale  :  si  c'est  une  phthisie  pulmonaire  el  si  c'est  un  foyer 
tuberculeux  ramolli  ou  une  caverne  qui  se  sont  ouverts  dans  la  cavité 
pleurale,  on  devra  s'abstenir.  Mais  s'il  s'agit  d'un  foyer  gangreneux  du 
poumon  ou  d'un  abcès  qui  ont  fait  irruption  dans  la  plèvre,  on  pourra 
trouver  dans  Tempyorne  quelques  chances  de  guérison,  ainsi  que  noos 
Tavons  dit  plus  haut  à  propos  de  la  gangrène  de  la  plèvre. 

Dans  les  circonstances  malheureusement  trop  nombreuses  où  une 
intervention  curative  parait  impossible,  la  thoracentèse  peut  quel- 
quefois rendre  de  grands  services  à  titre  de  moyen  palliatif,  pour  remé- 
dier aux  accidents  produits  par  l'abondance  de  l'épanchement.  Voy.  art. 
PoiTRi?îE  :  thoracentèse. 

Lainkec,  Traité  de  rauscultation  médiate,  3«  éd.,  Paris.  1831,  t.  II,  p.  282-536. 
GflOiiEL,  Art.  Plèvres  (Maladies  des),  in  Dicl,  de  méd,  en  30  toI.,  t.  XXV,  p.  56. 
MoHREBET  et  Flecrt,  Cumpeniiium  de  médecine  pratique,  passim. 
Bulletins  de  la  Société  anatomique  de  Paris,  passim. 
CoR5iL  et  IUnvier,  Manuel  d'histologie  pathologique,  Paris,  1869-1876,  p.  733  et  suiT.  / 

Labodlbème,  ^ouveaux  éléments  d*anatoraic  pathologique,  etc.  Paiis,  1879,  p.  528  et  soir,  ^ 

On  consultera  en  outre  les   Traités  de  pathologie  interne,  notamment  ceux  de  Gusoiu.       ^ 
Uabdt  et  B<miR,  Jaocodd,  etc. 

Gangrène.  > 

Laennec,  loc.  cit,  p.  307.  ^ 

Hatem  et  Graux,  Gangrène  de  la  plèvre,  etc.  {Bull,  delà  Soc.  anatomique,  1874,  p.  313,.        i 


►,  p- 


PLOMB.  285 

BMiletmê  de  la  Société  médieaie  des  hôpitaux,  1875  (Mémoires  de  Bcsnicret  de  Millard]. 
BccQOOT,  La  pleurésie  dans  la  gangrène  pulmonaire  (Hém.  de  la  Soc,  méd.  des  hôpitaux, 
1875.  p.  33). 

Hydatidet. 

TiGLA,  Des  hydatides  intra-thoraciques  (Archives  g/n.  de  méd.,  1855). 
Dawabe,  Tnité  des  eatozoaires  et  des  maladies  vermineuses,  Paris,  1860.  3*  édit.  1877. 
UiAis,  Des  kystes  hydatiques  du   poumon  et  du  foie,  thèse  inaug.,  Paris,  1875  (Indications 
Iiibliogrsphiques] . 

Tuberculose  et  Cancer 
Uomc,  lœ.  cit.,  t.  Il,  p.  523. 

RiLunet  BARTns,  Traité  théor.  et  pratique  des  maladies  des  enfants,  2«  éd.,  1861,  t.  III,  p.  737. 
¥ekluc»  Remarques  sur  le  diagnostic  des  épancliements  pleurétiqucs  etc.,  chez  les  enfants, 

thèse  îmiig.,  Paris,  1865. 
Emhs,  De  la  granulie,  Paris  1865. 

Tucaow,  Pathologie  des  tumeurs,  traduc.  de  P.  Aronssohn,  Paris  1867, 1. 1,  p.  48  et  suiv. 
YiLLEacr,  Études  sur  la  tuberculose,  Paris,  1868. 
LiMSB,  De  la  propagation  du  cancer  et  du  tubercule  k  la  surface  de  la  séreuse  pleurale,  çtc. 

[Compioê  rendus  de  la  Soc.  de  biologie^  août  1869).  —  Carcinome  primitif  de  la  pierre  chez 

vo  eobnft  [Bull,  de  la  Soc.  anal.,  1869,  p.  331).  —  Sur  l'infection  de  Toisinagc  dans  la 

tabovolose  [Archives  de  physiologie,  187U). 
Debote,  Note  sur  les  lymphangites  cancéreuses  {Bull,  delà  Soc.  anat.,  1873,  p.  861). 
Tbo«rb,  Recherches  sur  les  lymphan<(ites  pulmonaires,  thèse  inaug.,  Paris,  1874. 
.\aju0LT  OB  LA  Mé5ARDiftRB,  Étudc  cUnique  sur  les  manifestations   cancéreuses  de  la   plèvre, 

thèse  inaug.,  Paris  1874. 

Bydrothorax.' 
Lacsiiic,  loe.  cit.,  t.  II,  p.  399. 

Habbt  et  BiiiEB,  Traité  de  pathologie  interne,  Paris,  1855  t.  III,  p.  593. 
Htme,  fitudes  sur  les  liquides  épanchés  dans  la  plèvre  (Arch.  gén.  de  médecine,  1872,  t.  L 

p.  641,  et  t.  II,  p.  56).  —  Nouvelles  recherches  sur  les  liquides,  etc.  (Ibid.,  1875,  t.  I, 

p.  17«). 

Pneumothorax. 

Itaro,  Dissertation  sur  le  pneumothorax  ou  les  congestions  gazeuses  qui  se  forment  dans  la  poi- 
trine, thèse  inaug.,  Paris,  1803. 
Laudibc,  iûc.  cit.,  t.  II,  p.  411*. 

I,  Recherches  sur  le  pneumothorax,  thèse  inaug.,  Paris,  1841. 

etFLBORT,  Compend.  de  méd.  prat..  Art.  Pneumothorax,  1846,  t.  VU,  p.  128. 
Conlérences  de  Clinique  médicale  (1861-1862),  Paris,  1864,  p  391. 
PaoevT,  Do  pneumothorax  essentiel  ou  pneumoth.  sans  perforation,  thèse  inaug.,  Paris  1802. 
Jagom»,  Gaîette  hebdomad.,  1861.  —  Traité  de  pathologie  interne,  Paris,  1871,  t.  II,  p.  157. 
DmAiftSAT  et  Leco!iti,  Surlcsgazde  l'hydropneumothorax  de  l'homme  {Gaz.  méd.,  1864,  p.  114). 
DKXABfSAT,  E^sai  de  pneumatologie  médicale,  Paris,  1866,  p.  343. 
BoiasKAV,  Dv  pneumothorax  sans  perforation  {Arch.  gén.  de  méd.,  1868). 
VoPTABP-KAanir,  De  la  pleurésie  purulente,  Paris,  1872. 

Spababo,  Du  pneumothorax  consécutif  à  la  thoracentèse,  thèse  inaug.,  Paris,  1875. 
Tvnux,  De  la  possibilité  du  pneumothorax  sans  suppuration  de  la  plèvre,  thèse  inaug.,  Paris, 

1876. 
DvcotT,  Noie  sur  un  cas  de  pneumothorax  double  {France  médicale,  1878,  n*  49). 
fÉaàa,  Du  pneumothorax  double,  thèse  inaug.,  Paris,  1878. 
Gcimo  DE  HossT  (Noël),  Des  pleurésies  purulentes  diaphragmatiques  et  intcrlobaires,  et  des 

pneumothorax  circonscrits  [Arch.  gén.  de  méd.,  1879,  2*  vol.,  p.  5  et  141). 
CossT,  Sur  le  pneumothorax  engendré  par  des  gai  provenant  du  tube  digestif  [Arch.  gén.  de 
méd.,  novembre  1879,  p.  526). 

Charles  Fernet. 

PLOMB.  —  Ail.  Bleij  angl.  lead^  iia\.  piombo,  esp.  plomo.  Symbole 
Pb.  —  Équivalent  105,3.  Un  corps  dont  l'importance  est  de  premier 
.    ordre  en  hygiène,  en  thérapeutique,  en  toxicologie,  en  pharmacologie, 
}\    elc,  ne  saurait  demeurer    indiiïérent  ou  peu   connu.    Heureusement 


286      PLOMB.  —  cHmiE.  —  état  katorbl.  —  extraction  du  plomb. 

d'ailleurs,  la  monographie  du  plomb  est  Tune  d^phis  sim|)}èis*et'dcs 
moins  chargées  d'hypothèses.  Et  nous  allons  là  résimier  rapidckieiit.* 

Historique  —  La  facilité  avec  laquelle  s'opère  la  réduction  des 
principaux  minerais  (galène>^ou*carbon«te).  explique  a  priori  pourquoi  la 
découverte  du  plomb  se  perd»  diia<r  la  nuitdev  temps^  Elle  a  frntembhi' 
blement  apparu  en  Eiirope,  en  même  temps  que  les  peuplade^  iifc^es, 
auxquelles  est  due  la  connaissance  des  métaux  (âge  de  brome,  etc.). 
Les  anciens  connaissaient  en  effet,  non-seulement  ie  plomb  mélaUUpie 
dont  ils  se  servaient  principalement  pour  la  fabrication  de8'"Condmte 
d'eau,  mais  aussi  le  minium  qu'ils  employaient  comme  nsatiàre  colo- 
rante. Dès  le  temps  des  Romains,  on  n'ignoroit  pas  que  le  plomb  rai-> 
ferme  souvent  de  l'argent. 

Les  mines  principales  étaient,  situées  dans  l'Espagne,  et  .dans^les: 
Gaules.  Elles  fournissaient,  dès  cette  époque  de  la  lithai^^  et'mMie 
de  la  ccruse,  ce  qui  est  l'indice  d'une  industrie  déjà  fort  àvaDcéei  cet 
égard. 

État  naturel. — Rarement  on  rencontre  le  plomb  à  V état' natif  Çlii- 
jerus).  — 11  est  alors  en  lamelles  appartenant  au  système  cubique;  on  Ta 
aussi  observé  sous  forme  de  paillettes  dans  un  échantillon  de  fer  météori- 
que (Gray). 

C'est  presque  toujours  à  l'état  de  sulfure  (galène),  seul  on  mélangé 
aux  sulfures  des  autres  métaux  (argent  et  cuivre  principalement)^  q^e 
l'on  trouve  le  plomb  dans  la  nature. 

Le  carbonate  est  moins  fréquent. 

Quant  aux  molybdate^  tungslate^  chromate,  il  sont  relativeroent'rares, 
et  il  en  est  de  même  des  sulfate,  phosphate,  lellurure  et  séléniure  de 
plomb  naturels. 

Les  seuls  véritables  minerais  de  plomb  sont  donc  la  galène  et  le  car- 
bonate. Ils  sont  assez  souvent  mélangés,  et  le  carbonate  paraitv  daasn 
ce  casv  provenir  de  Taciionv  sur  la  galène,  des  agents  atmof^phérique». 
La  galène  se  présente  en.  amas  ou  en  filons  de  puissance  parfois  très- 
considérable.  On  l'a  trouvée  à  presque  tous  les  étages  géologiques,  depuis) 
les  roches  plutonienncs  jusqu'aux  terrains  tertiaires.  Quand  elle^  consent' 
une  proportion  d'argent  notable,  elle  devient  plus  friable  :  caractère 
précieux  au  point  de  vue  métallurgique. 

Ejctraction  du  plomb.  —  La  métallurgie  du  plomb  est  depuis 
longtemps  tombée  dans  le  domaine  de  l'industrie.  Dans  les  laboratoires,* 
on  se  contente  de  procéder,  quand  il  y  a  lieu,  h  la  purification  de  ce  mélil. 

V*  L'opération  préliminaire  consiste  à  essayer  le  minerai:  Lé  procédf^ 
varie  suivant  qu'il  s'agit  d'une  galène  ou  d'un  minerai  oxydé. 

Sans  entrer  datis  le  détail,  nous  dirons  que  ces  essais  sont  destinée 
ù  fournir  seulement  des  indications  approximatives. 

Tels  qu'on  les  exécute  dans  les  usines,  et  même  dans  les  laboratoires, 
c'est-à-dire  par  voie  sèche,  ces  essais  sont  toujours  entachés  d'erreur  pir 
défaut.  Le  titrage  est  donc  toujours  faible,  ce  qui  est  d'ailleurs  surabon- 
danmient  démontré  par  le  rendement  industriel,  invariablement  supérieur 


PLOMB.    —  BXTB4CTI0M    DU    PLOUBL  287 

à  Ja.  quantité  indîqfuée  par  l'essai  pFéliminaire.  La.  volatilisation  .relati- 
veinaiilkôileidu.plDiDb  et  méfoe  dequelquos-uos  de  ses  composés  binais 
res  rend  compte  trèa^oatureUefflcnt  da  ce  déficit  qui  varie  dei3,5  à  4  do 
cent(Hhrol)v  la. moyenne  étant  comprise -entre:  5  et  10  pour  lOOi 

La.ndKiaft  des  galènes  ivarie  beaucoup  suivant  la  nature  et  l'abondanœ 
de  la  gangue. 

Le  Butture  de  plomb  pur,  contenant  86,6*  100  de  plomb,  on  trouve 
des galaBes-qui. fournissent  30^40,  50  pour  100  de  plnmb  ou  davantage^, 

A  «partir  de  50  pour  100,  une  galène  est  dite. ncAe;  les  plus  riches: 
atteignent  à  peine  85  pour  100. 

Aa^paiiit  de  vue  théorique,  la  métallurgLa  du  plomb  relève  d'un  petit 
nomlmride 'principes  et  peut,  être  représentée  par  des  équations  très-sim^ 
plesi' Noua  supposerons. toujours  la  galène  pure ^nouft  verrons  que  les: 
malièiea  .étrangères  ou  les  impuretéssont  à  cet  égard  sans  importance 
notable;i . 

Le  sulfure  de  plomb  est  fusible  au  rouge.  En  vase  clos,  il  y  a  perte  dei 
soufre  qui  se  sublime  et  production  d*un  sous-sulfure  plus  fusible.  Mais: 
quand  ropération  se  fait  en  présence  de  l'âir,  il  est  possible,  en  ménageant 
Taccèfl'da  Toxy gène^  de  brûler  le  soufre  sans  oxyder  le  plomb. 

Pb  S  +  0'  =^Pb^-f-  S0> 

Gfttèrô.       Oxygène.     Plomb        Acide 

méUUiquc.  sulfunnx. 

Pour  qua  la  réaction  s^opère  bien  nettement,  on  ajoute  ordinairement  un 
peu  da  charbon,  c'est  alors  la  méthode  dite  du  bas  foyer. 

îlabil  arrive  plus  ordinairement. qu'on  ne  cherche  pas.à  régler  de. près 
roxydatîon,  et  la  réaction  précédente  se  complique  un.  peu. 

£c  grillant  la  galène  on  obtient  alors,  suivant  la  température  et  les 
proportionsirelatives  de  minerai  et  d'oxygène»  de  l'oxyde  de  plomb,,  de 
racufe-8ttUureux.et  même  du  sulfate.de  plomba 

l*'  PbS  +  0»==PbQ  +  SO* 

Galèoew'       Oxygène.      Oxfdc  Acide 

de  plomb,    sulfureux. 

2*  PbS  4- 0' =^ SO' 

Galàne.       OxygèiWi      Sulfol« 

de  plomb. 

Mais  en .  élevant  la  température  après,  avoir  amené  par  un  griUa|[;e 
bien  exécuté  (ce  que  l'habitude  apprend  à  connaître),  la  composition  de 
la.masaeides  proportions  convanablas. des.  différents  corps  ci-dessust.  Té- 
quatioo.défioitive  devient, 

(Pb  S)  4-  2  Pb  0  4-  Pb  SO*  =  5  Pb  4-  5  (S0«) 
\     c  est-à-dire,  en  i  somme,  que  la  galène,  l'oxyde  et  le  ^sulfate  de  plomb 
ir^     réagissant  à  haute  température,  et  à  l'abri  du  contact  de  Tair,  se  résol*v 

\     mien  acÂde  sulfureux,,  qui < se  dégage,  et  en  plomb  métallique, 
r^.       Tel  est-le  principe  de  la  méthode  dite  par  réaction. 
^^\       D'autres  méthodes,  dites  par  réduction  au  charbon,  ou  encore par/iré- 
^^^    cipttatioii  au  moyen  d'untautre  métal  tel  que  le  fer  ou  le  zinc,  sont  aussi 


288  PLOMB.  —  RAFPHiAGE  du  plomb. 

employées.  Nous  ne  les  décrirons  pas  en  détail,  non  plus  que  la  méthode 
mixte.  Ces  diverses  méthodes  ne  sont  en  définitive  que  des  modifications 
des  deux  premières  et  le  principe  est  toujours  le  même. 

Il  importe  cependant  de  faire  remarquer  que  dans  la  méthode  par  pré- 
cipitation on  peut  supprimer  le  grillage,  ce  qui  est  important  tootes  les 
fois  que  le  combustible  est  rare. 

On,  est  même  arrivé  à  remplacer,  dans  ce  procédé,  le  fer  métallique  par 
ses-  minerais,  par  des  mettes  ferrugineuses,  ou  encore  des  scoriefl,  qui 
sont  réduites  dans  le  four  lui-même  où  elles  effectuent  ensuite  la  préci- 
pitation du  plomb. 

Toutes  ces  méthodes,  basées  comme  on  vient  de  le  dire  sur  des  opéra- 
tions effectuées  à  haute  température,  s*accompagnent  de  pertes  [considé- 
rables de  jplomb  volatilisé,  inconvénient  doublement  fâcheux  au  point  de 
vue  du  rendement  d'abord,  mais  surtout  au  point  de  vue  hygiénique. 

La  méthode  du  bas  foyer  est  aujourd'hui  presque  abandonnée,  principa- 
lement à  cause  des  graves  et  nombreuses  maladies  dont  elle  a  été  le 
point  de  dépai*t  parmi  les  ouvriers  employés  à  ces  travaux  insalubrea.  En 
outre  la  perte  en  métal  peut  s'élever  à  15  pour  100  et  même  davantage. 
On  s*est  donc  préoccupé  dans  tous  les  procédés  et  appareils  destinés  i  la 
métallurgie  du  plomb,  de  la  condensation  des  fumées,  qui  entraînent  le 
plomb  à  rétat  de  vapeurs,  ou  en  tout  cas,  de  division  extrême. 

Cette  condensation  offre  de  grandes  difficultés.  On  a  essayé  dans  ce  but 
premièrement  des  chambres,  dites  de  condensation,  à  cubage  énorme, 
puis  du  barbottage  des  fumées  dans  de  Teau  présentée  à  l'état  liquide 
ou  même  pulvérisée.  Mais  la  substance  qu'il  s'agit  d'arrêter,  étant  inso- 
luble et  non  susceptible  d'être  mouillée,  Teau,  dans  ce  cas,  est  inef- 
ficace. 

Le  procédé  adopté  dans  les  usines  les  plus  importantes  consiste  à  faire 
passer  les  fumées  plombcuses  dans  des  canaux  à  parois  rugueuses  dont  la 
longueur  est  parfois  très-considérable.  Au  Bleiberg,  en  Belgique,  cette 
longueur  atteint  un  kilomètre.  En  Angleterre,  on  a  même  été  jusqu'à 
5  et  même  4  kilomètres,  comme  à  Allendale.  Et  malgré  tout,  les  pertes 
sont  encore  très-notables. 

2^  RAFFiiHAGE  DU  PLOMB.  —  Le  plomb,  tel  qu'on  l'obtient  par  l'une  des 
méthodes  précédentes,  est  loin  d'être  pur. 

Il  contient  une  certaine  quantité  de  matières  étrangères  (soufire,  arse- 
nic, antimoine,  zinc,  cuivre,  fer,  argent,  etc.). 

Il  doit  donc  être  raffiné  avant  d'être  livré  au  commerce.  Cette  purifica- 
tion doit  être  considérée  à  deux  points  de  vue  bien  distincts,  qui  conduisent 
à  deux  méthodes  radicalement  différentes. 

S'il  s'agit  de  se  débarrasser  du  soufre,  de  l'arsenic,  de  l'antimoine,  du 
xinc,  on  procède  par  oxydation  incomplète  dans  des  fours  à  réverbères. 

Les  impuretés  sont  oxydées  tout  d'abord,  le  plomb  restant  en  dernier 
lieu  à  l'état  presque  pur  désigné  couramment  sous  le  nom  de  plové 
(Vœuvre. 

Si  c'est  seulement  du  cuivre  et  même  du  fer  qu'il  faut  éliminer,  It 


PU)MB.   —  TRAITEMENT  DBS   PLOMBS   ARGENTIFÈRES.  289 

simple  fusion  suffit  pour  purifier  le  métal  par  liquation,  en  ayant  soin 
d'enlever  les  crasses  qui  se  forment. 

S^TiurrEMENT  des  plombs  argentifères.  — Mais  quand  le  plomb  contient 
de  Targent,  et  c'est  le  cas  le  plus  général,  la  matière  étrangère,  loin  d'être 
considérée  comme  une  impureté,  devient  le  but  principal  de  l'opération  et 
la  séparation  du  plomb  d'avec  l'argent,  successivement  perfectionnée, 
permet  actuellement  l'exploitation  avantageuse  de  galènes  relativement 
trè»-pauvres  en  argent. 

1*  Coupellation.  —  Anciennement  on  opérait  uniquement  par  coupel- 
UUion.  Cette  opération,  connue  des  alchimistes,  si  ce  n'est  inventée  par 
eux,  est  basée  sur  Tinoxydabilité  de  l'argent  fondu,  tandis  que  tous 
les  métaux  ordinaires  (non  nobles  comme  on  disait  alors),  le  plomb 
en  particulier,  s*oxydent  facilement  à  cette  température  en  fournissant  la 
litharge  PbO  qui  présente  en  outre  la  propriété  de  dissoudre  en  quantité, 
notable  les  oxvdes  des  autres  métaux. 

L'opération  sVffectue  au  moyen  d'une  coupelle  poreuse  dans  laquelle 
on  chauffe  le  plomb  argentifère,  en  le  soumettant  à  l'action  d'un  cou- 
rant  d*air  réglé  suivant  la  quantité  de  plomb  qu'il  s'agit  d'oxyder. 

La  coupellation  en  grand,  celle  qui  se  pratique  dans  l'industrie,  a  lieu 
dans  de  vastes  coupelles  en  cendre  d'os  et  autres  matières  poreuses, 
comprimées  sur  la  sole  d'un  fourneau,  et  façonnées  de  manière  à  offrir 
une  cavité  peu  profonde  dans  laquelle  on  chauffe  à  la  fois  plusieurs  mil- 
liers de  kilogrammes  d'alliage  argentifère.  Un  couvercle  manœuvré  au 
mojea  d'un  contre-poids  vient  fermer  le  fourneau  et  Fair  arrive  en 
grand  excès  à  la  surface  du  bain  métallique,  au  moyen  de  tuyères. 

Oq  chauffe,  le  plomb  s'oxyde  et  la  litharge  fondue  se  rassemble  dans 
l'espace  compris  entre  la  coupelle  et  le  ménisque  formé  par  la  masse 
métallique.  On  fait  écouler  cette  litharge  fondue  au  fur  et  à  mesure  de 
sa  production,  en  échancrant  la  coupelle  de  manière  à  livrer  passage 
à  l'oxyde  fondu.  Les  premiers  produits  de  Toxydation  sont  gris  ou  même 
noirâtres,  ce  sont  des  litharges  impures  {abzugs  et  abslrichts),  La  li- 
tharge normale  doit  être  brune,  jaune  ou  rougeâtre. 

On  voit  donc  que  la  coupellation  donne  lieu  en  même  temps  et  acces- 
soirement à  la  fabrication  de  la  litharge. 

Lorsque  l'opération  tire  à  sa  fin,  le  bain  d'alliage  offre  de  place  en 
place  des  points  brillants  dont  le  nombre  augmente  sans  cesse,  la  pro- 
daction  de  la  litharge  devient  de  plus  en  plus  difficile,  puis  la  masse 
devient  terne  et  se  voile  bientôt  d'une  couche  irisée  due  à  une  très-mince 
pellicule  d'oxyde  de  plomb  (phénomène  connu  des  physiciens  sous  le 
nom  de  coloration  des  lames  minces).  Presque  aussitôt  cette  pellicule  se 
déchire  et  le  bain  d'argent  apparaît  instantanément  dans  tout  son  éclat. 

C'est  ce  qu'on  appelle  V éclair;  l'opération  est  terminée. 
Pas  complètement  toutefois,  car  si  les  dernières  portions  de  litharge 

sont  absorbées  par  la  coupelle  poreuse,  il  est  bon  de  dire  que  l'argent 
e  5*^   diuout  à  cette  température  une  quantité  notable  d'oxygène,  en  sorte  que 

si  Von  ne  prend  pas  de  précautions  au  moment  du  refroidissement,  cet 

m?.  DICT.  HiO.   ET  CHIR.  (XXVIII  —  10 


A 


290 


-  TtlAirGHEItT  DES  PLOMBS  AnGBNTIFÈUS. 


oxygène  dissous  se  projette  brusquement  au  dehors,  entraînant  arec  lut 
une  portion  du  métal  précieux  (S.  Lucas).  C'est  là  ce  qu'on  désigne  mh» 
le  nom  de  rochage.  On  termine  généralement  par  des  nlTuBions  d'eau 
boutUanto. 

Quoi  qu'il  en  soit,  on  trouve  sur  la  sole  du  fourneau  la  totalité  de  l'ar- 
gent en  un  gâteau  brillant  à  la  face  supérieure,  mat  et  même  un  peu  terne 
sur  la  face  qui  reposait  sur  la  coupelle. 

Cet  argent  d'une  première  coupellation  n'est  pas  toujours  parfaitement 
pur,  et  retient  même  parfois  jusqu'à  un  vingtième  de  matières  étrangères 
dont  il  faut  le  débarrasser  par  une  nouvelle  opération. 

Par  ce  même  terme  de  coupeUation,  on  désigne  également  un  mode 
d'essai  par  la  voie  sèche  des  alliages  des  métaux  précieux.  Le  principe 
est  toujours  le  même,  mais  naturellement  l'opération  et  l'appareil  usités 


diflèrent  sensiblement  de^  fourneaux  industriels.  Il  est  bien  évident  que 
dans  ce  cas  on  ajoute  du  plomb  pur,  c'est-à-dire  exempt  d'argent,  par 
exemple,  du  plomb  pauvre,  en  quantité  suffisante  pour  que  la  lithii^e 
puisse  dissoudre  el  entraîner  la  totalité  des  oxydes  des  métaux  étrangers. 

La  coupelle  absorbe  la  totalité  de  la  litliarge,  on  l'introduit  avec  le 
plomb  dans  le  moufle  du  fourneau  de  coupelle,  et  l'on  chauffe. 

Les  figures  ci-dessus  donnent  une  idée  surneantc  des  diverses  parties 
de  l'appareil  employé. 

On  ajoute  ensuite  la  matière  à  essayer. 

L'opération  se  conduit  sensiblement  comme  la  coupellation  déerila 
plus  haut.  On  doit  surtout  se  tenir  en  garde  contre  le  rochage,  tout  eam    i 
roche  devant  être  rejeté. 

Dans  ces  temps  derniers,  deux  méthodes  de  désargentation  des  plai 


PLOMB.    —   TRAITEMEM   DES    PLOMBS   ARGEMIFÈRES.  29 

remarquables  à  tous  égards,  ont  été  introduites  dans  Tindustrie.  La  pre- 
mière est  connue  sous  le  nom  de  Pattinsonage  h  cause  de  son  inven- 
teur. 

La  seconde,  plus  avantageuse  encore,  est  basée  sur  Temploi  du  zinc. 

Disons  en  quelques  mots  le  principe  de  ces  deux  procédés  : 

i*  Pattinsonage.  —  Un  plomb  argentifère  étant  fondu,  si  on  laisse 
la  température  s'abaisser  lentement,  le  plomb  cristallise  le  premier.  In 
totalité  de  l'argent  restant  dans  Palliage  liquide. 

Tel  est  le  point  de  départ.  Le  procédé  s'effectue  au  moyen  de  grandes 
chaudières,  disposées  en  batterie,  ou  encore  conjuguées,  suivant  le 
mode  d'exploitation.  Ces  chaudières  sont  capables  de  contenir  de  10  à  15 
tonnes  de  plomb. 

Lorsque  dans  la  masse  préalablement  fondue,  la  cristallisation  va  com- 
menoer,  des  ouvriers  armés  d'écumoircs  à  manches  longs  cl  flexibles, 
enlèvent,  en  les  égoutlant,  les  cristaux  qui  se  forment,  et  les  rejettent 
dans  une  chaudière  voisine  qui  se  remplit  dès  lors  de  plomb  relativement 
pauvre,  lequel,  fondu  aussitôt,  est  soumis  à  une  opération  semblable, 
en  sorte  qu'il  arrive  bientôt  à  se  dépouiller  complètement  d'argent. 

Les  produits  de  teneur  semblable  étant  continuellement  réunis,  on  voit 
que  l'opération  répartit  en  quelque  sorte  l'alliage  primitif  en  deux  cou- 
rants inversas.  Le  plomb  d'un  côté,  ralliajçe  argentifère  de  plus  en  plus 
riche  de  l'autre.  Cet  enrichissement  ne  doit  ])as  être  poussé  trop  loin, 
attendu  que  quand  la  teneur  en  argent  atteint  2,25  pour  100,  Talliage 
fond  sensiblement  à  la  même  température  que  le  plomb  pur.  Dans  la 
pratique  on  ne  dépasse  guère  1  ou-1,5  pour  100. 

Ce  plomb  riche  est  ensuite  envoyé  à  la  coupellation  qui  peut  être 
avanUgeusement  et  facilement  effectuée.  Le  plomb  pauvre  est  livré  direc- 
tement au  commerce. 

Pour  donner  une  idée  de  la  valeur  de  ce  procédé,  nous  dirons  qu'il  a 
permis  de  traiter  avec  fruit  des  plombs  argentifères  contenant  seulement 
2  à  5  cent-millièmes  d'argent. 

Les  modiGcations,  connues  Tune  sous  le  nom  de  Pattinsonage  méca- 
nique^ l'autre  sous  celui  de  Pattinsonage  à  la  vapeur,  permettent 
d'appauvrir  le  plomb  davantage  encore,  c'est-à-dire  d'arriver  à  un  et 
deux  cent-millièmes  seulement  d'argent  laissé  dans  le  plomb. 

2*  Désargentation  par  le  zinc,  —  Quels  que  soient  les  avantages 
ofTerU  par  le  Pattinsonage,  ils  sont  dépassés  encore  par  la  nouvelle  mé- 
thode au  moyen  du  zinc.  Le  principe  en  est  dû  à  Karsten,  mais  elle  a  été 
successivement  perfectionnée  par  Parkes  et  surtout  par  Cordurié,  auquel 
est  dû  le  procédé  actuellement  usité  dans  la  majeure  partie  des  usmes  de 
France,  d'Angleterre,  d'Allemagne  et  même  d'Espagne  et  d'Italie. 

En  substance,  le  procédé  consiste  à  ajouter  au  plomb  argentifère  une 
quantité  de  zinc  calculée  de  manière  à  produire  un  alliage  de  zinc  et  d'ar- 
^  se  séparant  par  fusion  à  l'état  d'écume,  entraînant   fort  peu  de 
plomb. 
Ces  écumes  argentifères  sont  distillées  pour  séparer  le  zinc,  et  il  reste 


292         PLOMB.  —  PROPRIÉTÉS  physiques.  —  propriétés  chimiques. 

du  plomb  argentifère,  contenant  la  totalité  de  l'argent  qu'on  retrouve 
par  coupellation. 

Quant  au  plomb  désargenté,  il  suffit  d*y  faire  passer  un  courant  de 
vapeur  d'eau  surchauffée  pour  oxyder  le  zinc  et  les  impuretés,  on  laisse 
refroidir,  on  écume  et  on  coule  le  plomb  d'oeuvre. 

Ce  procédé  présente  en  définitive  une  économie  de  près  de  moitié  sur 
le  Pattinsonage  le  plus  parfait. 

Importance  industrielle  du  plomb.  —  Le  plomb  vient  au  troisième  rang, 
après  le  fer  et  le  cuivre,  comme  importance  métallurgique. 

C'est  l'Angleterre  et  l'Espagne  qui  tiennent  la  tête  au  point  de  vue  de 
la  production.  En  France  où  l'on  n'exploite  plus  les  mines  indigènes,on 
traite  presque  exclusivement  les  minerais  importés  de  l'étranger. 

Propriétés  physiques  —  Le  plomb  est  un  métal  d'un  gris  bleuâtre, 
assez  mou  pour  se  laisser  entamiîr  par  l'ongle  et  marquer  une  trace  grise 
sur  le  papier. 

Sa  lourdeur  est  proverbiale.  Sa  densité,  d'après  les  déterminations  de? 
différents  observateurs,  est  comprise  entre  11,37  et  11,445. 

A  l'état  cristallisé  elle  est  un  peu  plus  faible.  11  fond  vers-f-SoO*  et 
se  réduit  en  vapeurs  à  une  température  relativement  basse  (voisine  du 
rouge).  Sa  ductilité  et  sa  malléabilité  sont  médiocres,  et  dans  l'échelle 
de  la  ténacité,  c'est  lui  qui  occupe  le  dernier  rang. 

Le  plomb  que  l'on  trouve  dans  le  commerce  renferme  généralement 
des  traces  d'autres  métaux,  tels  que  l'argent,  le  cuivre  et  le  fer.  De  là 
les  légères  variations  que  présentent  ses  propriétés  physiques. 

L'arsenic  et  l'antimoine  le  rendent  plus  dur. 

Pour  l'avoir  tout  à  fait  pur,  il  laut  l'engager  dans  une  combinaison 
saline,  telle  que  ^'azotate,  qui  fournit  l'oxyde  pur.  Il  ne  reste  plus  aloi-s 
qu'à  réduire  cet  oxyde  par  le  charbon. 

Propriétés  citimiques  — L'air  et  l'oxygène  attaquent  le  plomb  dès 
la  température  ordinaire,  mais  l'oxyde  produit  forme  à  la  surface  du  métal 
une  couche  protectrice  qui  empêche  l'oxydation  ultérieure.  A  chaud, 
l'oxydation  est  beaucoup  plus  énergique,  et,  si  l'on  a  soin  d'enlever 
l'oxyde  au  fur  et  à  mesure  de  sa  production,  on  peut  rapidement  tran- 
sformer une  grande  masse  de  plomb  en  litharge.  {Voy,  p.  289.) 

L'eau  distillée,  froide  et  purgée  d'air,  est  sans  action  sur  le  ploinh. 
A  Tébullition,  cependant,  il  y  a  un  faible  dégagement  d'hydrogène. 

L'acide  nitrique  attaque  éncrgiquement  ce  métal  et  le  transforme  en 
azotate,  quelle  que  soit  la  concentration. 

L'acide  chlorhydri(|ue  étendu  ne  l'enUiine  pas,  mais  à  la  densité  de 
1,12  Tatlaque  commence,  même  à  froid,  et  s'active  d'autant  plus  que  la 
température  s'élève  davantage. 

L'acide  sulfurique  attaque  fort  peu  le  plomb  à  froid,  mais  à  chaud  l'ac- 
tion commence  d'autant  plus  vite,  que  l'acide  est  plus  concentré  et  que 
le  métal  est  plus  pur.  On  sait  que  cette  limite  a  une  importance  indus- 
trielle assez  grande,  puisque  dans  les  fabriques  on  concentre  l'acide  sul- 
furique dans  des  bacs  en  plomb,  jusqu'à  55  degrés  Baume  environ. 


•  PLOMD.    —   PROPRIÉTÉS  CHIMIQUES.  295 

Quand  le  plomb  contient  un  peu  d'étain  ou  d'antimoine,  on  peut  chauf- 
fer jusqu'à  140**  environ  de  Pacide  à  54°  Baume,  sans  que  l'attaque  se 
produise,  tandis  que  si  le  métal  est  chimiquement  pur,  dès  80^  et 
même  50*»,  il  y  a  formation  de  bulles  d'hydrogène  sulfuré,  mélangé  d'hy- 
drogène libre. 

Quand  il  y  a  mélange  de  différents  agents,  l'attaque  du  plomb  se  fait 
en  général  plus  facilement,  et  cette  question  offre  un  intérêt  tout  spé- 
cial, puisque  les  conduites  d'eau  sont  presque  toutes  formées  par  ce 
métal,  qui  se  trouve  dès  lors  soumis  à  l'action  combinée  de  l'air,  de 
Feau  et  des  diverses  substances  tenues  en  dissolution  par  cette  dernière. 

Déjà  les  eaux  pluviales  (ou  ce  qui  est  la  même  chose,  l'eau  disiillée 
agitée  avec  de  l'air),  dissolvent  des  quantités  notables  de  plomb.  11  est 
plus  exact  de  dire  cependant  qu'il  y  a  attaque  et  non  dissolution  de 
plomb,  puisque,  dans  ce  cas,  une  simple  (iltration  arrête  le  composé 
plombique,  qui  n'est  autre  qu'un  hydro-carbonate  à  texture  cristalline; 
c'est  pourquoi  le  métal  blanchit  en  même  temps  qu'une  partie  du  pro- 
duit oxydé  entre  en  suspension. 

Quand  les  eaux  contiennent  des  matériaux  organiques  azotés,  il  y  a 
formation  de  nitrate  ou  de  nitrites,  qui  se  dissolvent. 

Les  composés  susceptibles  de  fournir  les  produits  nitreux  seraient  donc 
seuls  dangereux  (Medlock).  Toutefois,  les  nitrates  seraient  sans  aciion 
(Kersting). 

Le  sel  ordinaire,  ou  chlorure  de  sodium,  en  solution  étendue,  attaque 
également  le  plomb  en  fournissant  un  mélange  d'hydrate,  de  carbonate  et 
de  chlorure  de  plomb. 

D* après  PattinsunMuir,  les  nitrates  favorisent  la  dissolution  du  plomb, 
mais  les  sulfates  et  même  les  carbonates,  présentent  une  action  inverse 
qui  contrebalance  la  première  s'ils  se  trouvent  en  quantité  suffisante. 
C'est  ainsi  que  Belgrand  et  Le  Blanc  ont  fait  voir  que  les  eaux  de  la 
Seine  contiennent  assez  de  sulfates  et  de  carbonates  pour  qu'on  puisse 
les  distribuer  dans  des  conduits  en  plomb,  qui  ne  tardent  pas,  du  reste, 
à  se  recouvrir  intérieurement  d'une  sorte  d'enduit  blanchâtre,  qui  dimi- 
nue sensiblement  le  contact  de  l'eau  avec  le  métal. 

Toutefois,  des  expériences  plus  récentes,  dues  à  Pappenheim,  semblent 
indiquer  que  ces  résultats  n'ont  rien  d'absolu  et  varient  notamment  avec 
la  pureté  du  métal  et  l'état  des  surfaces. 

Aussi  se  préoccupe-t-on  beaucoup  de  la  recherche  d'un  enduit  protec- 
teur, pour  doubler  les  tuyaux  de  plomb. 

On  a  proposé,  dans  ce  but,  le  sulfure  de  plomb,  Tétamage,  le  caout- 
chouc ,  la  gutta-percha ,  la  paraffine ,  qui  paraîtrait  la  moins  défec- 
tueuse, etc.,  etc. 

Le  plomb  est  facilement  déplacé  de  ses  solutions,  par  les  métaux  plus 
oxydables  que  lui.  Suivant  la  rapidité  de  la  réaction,  le  métal  se  préci- 
pite alors  soit  sous  forme  de  poudre  amorphe,  soit  encore  à  l'état  cristal- 
lisé. L'expérience  classique  de  Varbre  de  Saturne  n'est  pas  autre  chose. 

On  la  réalise  de  la  manière  suivante  : 


294  PLOMB.  —  USAGES.  —  aluages. 

Dans  une  solution  parfaitement  limpide  et  légèrement  acidulée  d'acé- 
tate de  plomb,  on  immerge  un  petit  barreau  de  zinc  portant,  Ters  son 
extrémité,  plusieurs  fils  de  laiton  qui  vont  divergeant  dans  la  liqueur. 
On  bouche  soigneusement,  pour  se  mettre  à  Tabri  de  l'air,  et  bientôt  ou 
voit  un  dépôt  gris  pulvérulent  se  former  sur  le  barreau  de  ziuc  qui  devient 
ainsi  le  tronc  de  Tarbre.  Ensuite,  mais  bien  plus  lentement»  Ton 
voit  se  former,  sur  les  fils  de  laiton,  des  aiguilles  d'abord  fort  minces, 
mais  qui  grossissent,  se  multiplient  et  finissent  par  devenir  de  ma- 
gnifiques lamelles  de  plomb  cristallisé.  Ceci  représente  les  brandie^ 
et,  de  la  sorte,  on  obtient  avec  facilité  le  métal  en  cristaux  parlaiie- 
ment  nets. 

Un  courant  électrique  arrive  au  même  résultat. 

Usaf^es.  —  On  emploie  presque  toujours  le  plomb  sous  forme  de 
tuyaux,  que  Ton  obtient  sans  soudure  en  faisant  passer  le  métal,  demi- 
fondu  et  fortement  comprimé,  à  travers  une  sorte  de  filière. 

La  mollesse  du  plomb  est  précieuse  pour  suivre  sans  difficulté  des 
sinuosités  quelconques  (eau,  gaz,  etc.).  Les  plaques  de  plomb  sont  aussi 
d'un  usage  très  répandu.  Il  en  est  de  même  du  plomb  grenaille  on  grain$ 
de  plomby  qui  servent  pour  la  chasse  d'abord,  mais  aussi ,  malheureu- 
sement, pour  le  nettoyage  des  bouteilles.  Et  la  chose  est  d'autant  plus 
regrettable  que,  dans  le  cas  où  le  vase  est  de  teinte  foncée,  il  reste  trop 
souvent  des  grains  de  plomb  au  fond  des  bouteilles ,  dans  lesquelles  on 
met  ensuite  du  vin ,  de  la  bière,  etc. ,  qui  deviennent  dès  lors  el  tout 
naturellement  des  boissons  dangereuses. 

Il  serait  bien  préférable  de  substituer,  pour  cet  usage,  le  fer  au  plomb, 
ainsi  que  cela  avait  été  proposé  notamment  par  Fordos. 

Le  plomb  sert  encore  pour  Tévaporation  de  l'acide  sulfurique,  ain^i 
qu*on  l'a  vu  plus  haut,  et  l'on  utilise  sa  plasticité  pour  obtenir,  par  com- 
pression, des  jointures  et  des  fermetures  parfaitement  hermétiques,  etc. 

L*emploi  du  plomb  en  thérapeutique  est  très*répandu  ;  on  trouvera 
plus  loin  l'indication  des  principales  formes  pharmaceutiques. 

Alliages.  —  Le  plomb  entre  dans  beaucoup  d'alliages  et  plusieurs 
d'entre  eux  sont  importants. 

Quelques-uns  peuvent  s'effectuer  en  proportions  définies  et  dounenl 
naissance  à  de  véritables  combinaisons  ;  mais  ordinairement  ces  allii^ 
se  forment  en  proportions  quelconques. 

Le  plomb  présente,  en  effet,  une  aptitude  toute  spéciale  à  dissoudre  les 
autres  métaux.  Il  est,  à  cet  égard,  comparable  au  mercure,  et  cette  pro- 
priété, connue  de  toute  antiquité,  est,  selon  toute  vraisemblance,  la  rai- 
son pour  laquelle  le  plomb  avait  été,  par  les  alchimistes,  dédié  à  Saturne, 
ce  dieu  que  la  fable  nous  présente  comme  condamné  à  dévorer  ses 
enfants. 

Les  propriétés  de  ces  alliages  sont  variables;  en  général  le  plomb  leur 
communique  beaucoup  de  fusibilité. 

Leur  densité  s'écarte  parfois  de  la  densité  théorique  (Riche). 

Au  premier  rang  nous  trouvons  les  alliages  de  plomb  et  d'antimoine. 


PLOMB.   COUBlKAISOIfS   DU   PLOMB   AVEC  LES   PRhNClPAUX   ÉLÉMENTS.      295 

Les  carctctères  d'imprimerie  sont  formés  de  80  p.  100  de  plomb , 
18  p.  100  d'entimoine  et  environ  2  p.  100  d'étain. 

Nous  avons  parlé,  à  propos  de  la  métallurgie,  des  alliages  de  plomb  et 
cTai^eni,  plomb  et  cuivre,  plomb  et  fer,  plomb  et  zinc. 

Le  plomb  s'unit  en  toutes  proportions  au  bismuth  et  la  fusibilité  du 
mélange  est  toujours  plus  grande  que  ne  l'indiquerait  la  théorie  (Rud- 
berg.  Riche). 

Il  y  a  en  même  temps  contraction  notable. 

il  en  faut  dire  autant  pour  les  alliages  du  plomb  avec  Tétain  parmi 
lesquels- nous  citerons  les  suivants  : 

Plomb.  Étain. 

Soudure  des  plombiers 06  53 

—         ferblantiers 50  50 

Alliages  )K)ur  TaisscUe  ou  robinets 8  92 

Ce  dernier  alliage  représente,  à  fort  peu  près,  la  limite  qu'il  ne  faut 
jamais  dépasser,  pour  que  les  ustensiles  ne  soient  pas  sensiblement  atta- 
qués parle  vinaigre. 

CombiiiAiBOiis  du  plomb  avéd  les  principaux  éléments.  — 

Nous  venons  de  voir  que  certains  alliages  s'effectuent  en  proportions 
définies  et  doivent  être  considérés  comme  de  véritables  combinaisons 
chimiques. 

Mais  le  plomb  se  combine  aussi  aux  métalloïdes,  pour  donner  nais- 
sance à  des  combinaisons  parfaitement  définies  et  très-importantes. 

Enfin  ces  combinaisons  binaires,  et  principalement  les  oxydes  se  combi- 
nent à  d'autres  corps,  pour  former  des  composés  ternaires  (sels  de  plomb 
principalement),  ou  même  quatetmaires  (sels  doubles,  combinaisons 
organo^métalliques,  etc.). 

Commençons  par  les  composés  binaires, 

1*  Oxydes  de  plomb.  —  L'oxygène  forme  avec  le  plomb  différentes  com- 
binaisons : 

Le  sous-oxyde  Pb'O.  —  Peu  important  ; 

Le  proloxyde  PbO.  —  Massicot  et  litharge; 

Le  peroxyde  Pb  0*.  —  Oxyde  puce  ou  acide  plombique; 

Enfin  le  sesqui-oxyde  (?),  Pb*  0'.  — Peu  connu  encore; 

Et  le  minium,  Pb'0\  —  2  PbO,  PbO*. 
qui  peuvent  servir  de  transition  aux  combinaisons  salines. 

Proloxyde  de  plomb,  PbO.  —  Bien  qu'on  Tait  rencontré  à  Tétat  .natu- 
rel au  Mexique  et  aux  environs  de  Bade,  il  provient  en  général  de  l'oxy- 
dation directe  du  plomb.  Quand  l'oxyde  a  été  fondu,  c'est  la  litharge^ 
sinon  c'est  le  massicot.  Leur  composition  est  la  même  et  répond  à  la 
formule  PbO. 

La  litharge  provient  ordinairement  de  la  coupellation  du  plomb  argen- 
tifère. Sa  couleur  est  variable.  Elle  présente,  comme  l'argent,  la  pro- 
priété de  dissoudre  à  chaud  une  certaine  quantité  d'oxygène ,  qu'elle 
abandonne  ensuite  en  se  solidifiant.  On  s'en  sert  pour  la  fabrication  de 
l'emplâtre  simple.  Le  roassicet  s'obtient  par  oxydation  directe  à  basse 
température,  broyage  et  lévigation  subséquente. 


296      PL03IB.    —   CONBIxNAISOiNS    DO   PLOMB  AVEC  LES   PRINCIPAUX  ÉLiHBKTS. 

Il  sert  à  la  fabrication  de  la  céruse  et  du  minium. 

L'oxyde  de  plomb  est  à  peine  soluble  dans  l'eau,  à  laquelle  il  commu- 
nique cependant  la  réaction  alcaline.  11  est  très-facilement  réduit  par  le 
charbon. 

C'est  une  base  puissante,  formant  des  sels  parfaitement  neutres»  et  pré- 
sentant même  une  tendance  marquée  à  donner  naissance  à  des  sels 
basiques. 

L'oxyde  PbO  se  dissout  aussi  dans  les  liqueurs  alcalines  (potasse, 
soude,  chaux),  où  Ton  admet  qu'il  se  trouve  à  l'état  de  plombiies.  L'un 
d'entre  eux,  le  plombite  de  chaux,  est  quelquefois  employé  pour  la  tein- 
ture des  cheveux. 

Le  protoxyde  de  plomb  peut  enfin  se  présenter  à  l'état  d'hydrate 
PbO.  110. 

Ce  corps  prend  naissance  dans  l'oxydation  directe  du  plomb  en  pré- 
sence de  l'eau.  Il  se  produit  en  même  temps  de  l'eau  oxygénée  (Schœn- 
bien) .  C'est  une  poudre  blanche  à  texture  cristalline. 

Mais  on  se  le  procure  d'ordinaire  en  précipitant  un  sel  de  plomb  par  un 
alcali.  L'ammoniaque  est  employée  de  préférence,  attendu  que  la  potasse 
ou  la  soude  en  excès  redissolvent  le  précipité  d'hydrate  plombique. 

Peroxyde  de  plomb  Pb  0*,  ou  Oocyde  puce,  Acide  plombique,  se 
rencontre  parfois  dans  la  nature,  sous  la  forme  de  prismes  à  six  pans.  Il 
a  été  découvert  par  Scheele. 

On  peut  l'obtenir  directement  dans  plusieui*s  réactions,  et  notamment 
dans  l'électrolyse  des  solutions  de  plomb  traversées  par  un  courant 
faible.  Mais  on  le  prépare  ordinairement  au  moyen  du  minium  chauffé 
avec  de  l'acide  nitrique  étendu.  Tout  le  protoxyde  de  plomb  passe  à 
l'état  de  nitrate  et  le  bioxyde  PbO*  reste  sous  forme  d'une  poudre  brune, 
dont  la  couleur  lui  a  valu  le  nom  d* oxyde  puce. 

Ce  corps  peut  former  un  hydrate  PbO*HO,  L'acide  plombique  se  com- 
bine assez  facilement  aux  alcalis,  mais  on  l'utilise  dans  les  laboratoires 
pour  des  oxydations  ménagées. 

La  réaction  peut  cependant  être  très-énergique,  comme  dans  Texpé- 
riencc  classique  où  le  mélange  d'oxyde  puce  et  de  fleur  de  soufre  s'en- 
flamme par  simple  trituration. 

Il  y  a  aussi  incandescence,  quand  on  soumet  l'oxyde  puce  à  l'influence 
d'un  courant  de  gaz  sulfureux,  et  la  matière  blanchit  par  suite  de  la 
formation  du  sulfate  de  plomb. 

PbO«-^SO*=PbSO*. 

Réaction  intéressante  au  point  de  vue  théorique. 

Sesquioxyde  Pb*0*?  —  Poudre  d'un  jaune  rougeâtre  offrant  peu  d'im- 
portance. Peut-être  n'est-ce  autre  chose  que  la  combinaison  PbOPbO*. 

Minium.  —  C'est  une  combinaison  de  protoxyde  de  plomb  PbO  avec 
le  peroxyde  ou  bioxyde  PbO*  avec  excès  de  protoxyde.  Le  minium  type 
présente  en  effet  la  composition  2(PbO).PbO*,  c'est-à-dire  un  plombait 
basique  de  plomb.  Parfois  aussi  la  proportion  de^  protoxyde  est  un  peu 
plus  for(e. 


PLOBfB.    COUBIMAISOKS    DU   PLOMB   AVEC    LES   PRINCIPAUX   ÉLÉMENTS.      297 

On  prépare  le  minium  en  quantités  considérables,  pour  les  besoins  de 
rindustrie  en  calcinant  d*abord  le  plomb  à  Tair  pour  obtenir  du  massicot, 
ce  massicot  est  ensuite  soumis  à  une  chaleur  moindre  qui  le  transforme 
en  minium. 

Dans  beaucoup  de  fabriques  on  se  sert  de  fourneaux  à  deux  étages. 

L'étage  inférieur,  qui  recjoit  Taction  directe  du  feu,  sert  à  faire  le  mas- 
sicot, et  ce  massicot,  porté  dans  l'étage  supérieur,  passe  à  l'état  de  minium. 
La  transformation  est  surtout  rapide  aux  environs  du  rouge  sombre.  Sou- 
vent on  soumet  le  minium  plusieurs  fois  de  suite  à  l'action  de  la  chaleur. 
Il  prend  ainsi  un  éclat  de  plus  en  plus  vif. 

De  là,  les  dénominations  de  minium  deux  feux,  minium  trois 
feux^  etc. 

Le  minium  se  présente  sous  la  forme  d'une  poudre  d'un  rouge  éclatant 
qui  se  fonce  et  même  vire  au  violet  sous  l'influence  de  la  chaleur. 

On  Ta  rencontré  dans  la  nature  à  l'état  cristallin  et  on  l'a  trouvé 
aussi  quelquefois  en  cristaux  dans  les  fours  à  minium. 

On  l'emploie  comme  matière  colorante  pour  la  peinture  et  la  cire  à 
cacheter. 

On  s'en  sert  aussi   pour  la   fabrication  du  cristal,  du   strass,  et  du 
Qint-glass.  Dans  ce  cas,  il  est  nécessaire  que  le  produit  soit  complétemen 
pur,  si  l'on  veut  obtenir  une  limpidité  parfaite  unie  à  une  forte  réfrin- 
gence. 

Le  minium  du  commerce  est  souvent  mélangé  à  des  matières  de  cou- 
leur Toisine,  comme  le  peroxyde  de  fer  ou  la  brique  pilée. 

On  reconnaît  facilement  la  fraude,  soit  en  calcinant  le  produit,  qui 
doit  jaunir  si  le  composé  ne  contient  que  du  plomb. 

Soit  encore  en  faisant  bouillir  avec  de  l'eau  sucrée  aiguisée  d'acide 
azotique,  dans  laquelle  le  minium  est  entièrement  soluble,  tandis  que 
l'oxyde  de  fer  ou  la  brique  demeurent  comme  résidu  (Fordos  et  Gélis). 

2*  Sulfures  de  plomb.  —  A  côté  des  oxydes  de  plomb,  nous  citerons 
seulement  pour  mémoire  le  sous-sulfure  Pb*S. 

Le  sulfure  de  plomb  PbS  ou  galène  [Voij.  Métallurgie,  p.  286)  qui  cris- 
tallise dans  le  système  cubique.  Sous  le  nom  d'alquifoux  on  remploie 
pour  le  vernissage  des  poteries  communes,  dont  l'usage  n'est  pas  sans 
danger.  En6n  le  séléniure  PbSe,  le  tellurure  PbTc  et  les  sulfures 
doubles,  etc. 

3*  Chlorures.  —  Le  chlore  donne  avec  le  plomb  un  composé  impor- 
tant :  le  chlorure  de  plomb  PbCl  qui  s'obtient  généralement  par  la  préci- 
pitation d'un  sel  soluble  de  plomb  par  un  chlorure  alcalin. 

n  est  peu  soluble  dans  l'eau  froide,  plus  soluble  dans  l'eau  bouillante. 

On  peut  le  faire  cristalliser  par  refroidissement.  Fondu   au  rouge,  il 

porte  le  nom  de  plomb  corné.  Si  l'on  ajoute  au  chlorure  en  fusion  une 

certaine  quantité  d'oxyde  de  plomb,  on  obtient  les  matières  colorantes 

jaanes  connues  sous  le  nom  de  Jaune  minéral,  de  Cassel,  de  Turner, 

de  Vérone,  etc.  Ce  sont  des  oxychlorures  de  plomb. 

—  Le  brome  fournit  des  composés  tout  semblables. 


298  PLOMB.  —  SELS  de  plomb. 

4"^  loDURE  DE  pj.oMB  Pbl.  —  C*est  uii  corps  généralement  pulvérulent  et 
d'un  beau  jaune  citron  qu'on  obtient  par  double  décomposition. 

Mais  on  peut  l'avoir  à  Pétât  cristallin  en  le  faisant  dissoudre  dans  Peau 
bouillante. 

Par  le  refroidissement,  la  liqueur  se  remplit  de  lamelles  hexagonales, 
qui  présentent  Paspect  et  Péclat  de  l'or  métallique.  11  est  facile  de  les 
recueillir  ensuite  sur  des  filtres. 

On  connaît  encore  des  iodures  doubles^  des  chloroiodureseideBaon/ÙH 
dures  de  plomb  parmi  lesquels  on  peut  citer  le  singulier  iodure  de  plomb 
bleu  (décrit  par  Donot,  Filliol  et  d'autres  observateurs),  lequel  n'eat,  en 
définitive,  qu'un  oxyiodure  dont  la  formule  et  la  composition  seraient 
voisines  de  celles  du  chlorure  de  chaux. 

SeLs  de  plomb  —  Azotate  AzO'Pb.  —  Cristallise  en  octaèdres  r^u- 
licrs  anhydres.  Calciné,  il  fournit  d'abord  de  l'acide  hypoazotique,  puis 
de  l'oxyde  de  plomb.  11  forme  aussi  des  sels  doubles  parmi  lesquels  on 
peut  signaler  le  formioazotate  de  plomb  qui  contient  trois  équivalents 
d'acide  formique  pour  un  d'acide  azotique.  L'azotate  de  plomb,  ordinaire 
ou  azotate  neutre,  offre  également,  à  un  degré  très-marqué,  une  tendance 
à  donner  des  sels  basiques. 

On  connaît,  parmi  ces  derniers,  des  azotates  bibasique  et  tribaaique  dtà 
plomb  AzO*2PbO  et  AzO*5PbO  que  l'on  a  envisagés  comme  correspondant 
aux  acides  azotiques  à  trois  et  deux  molécules  d'eau.  L'acide  à  trois  jnoié* 
cules  d'eau  AzO*5110  correspondrait  à  Pacide  phosphorique  ordinaire 
PbO'.ollO  tribasique,  on  lui  a  donné  le  nom  d'acide  orUioazotique.  Il  n'a 
pas  été  isolé  encore. 

Dans  cet  ordre  d'idées,  Pacide  AzO'21IO  devient  l'acide  jî/aroîo^içiie  et 
correspond  à  Pacide  PhO''21IO  ou  pyrophosphorique.  L'acide  ordinaire, 
monobasique,  prendrait  alors  le  nom  d'acide  métazolique  AzO^HO. 

Il  existe  aussi  des  azotates  basiques  (à  quatre,  cinq  et  même  six  molé- 
cules d'oxyde  de  plomb  (AzO\6PbO). 

Carbonate.  —  II  est  isomorphe  avec  le  carbonate  de  chaux  (arra- 
gonite). 

Le  carbonate  de  plomb  offre  un  intérêt  tout  spécial  parce  qu'il  laul 
y  rattacher  la  matière  colorante  blanche  si  fréquemment  employée  par 
les  peintres  en  bâtiment  sous  le  nom  de  ce'rtise  ou  blanc  de  plomb.  Ce 
n'est  autre  chose,  en  effet,  qu'un  carbonate  de  plomb  plus  ou  moins 
mélangé  d'hydrate  plombique,  suivant  le  procédé  de  fabrication  dont  on 
a  fait  usage. 

La  céruse  présente  au  plus  haut  degré  la  pi-opriété  de  couvrir  les  swr 
faces  sur  lesquelles  on  l'étend,  et  c'est  pour  cela  qu'en  dépit  des  inconvé- 
nients si  prononcés  qui  s'attachent  à  son  emploi,  on  continue  toujours  à 
s'en  servir  bien  que  les  émanations  sulfurées  la  noirèissent  assez  rapide- 
ment :  ce  qui  n'arrive  pas  notamment  avec  le  blanc  de  zinc. 

Le  carbonate  de  plomb  PbO.CO'  est  insoluble  dans  l'eau  pure,  mais 
Peau  chargée  d'acide  carbonique  en  dissout  des  proportions  notables. 

Il  est  entièrement  soluble  dans  Pacide  nitrique  étendu. 


PLOMB.  SELS   DE    PLOMB.  299 

ChaufTé  aux  environs  de  oSO"^,  le  carbonate  de  plomb  perd  son  acide 
carbonique  et  se  décompose  en  donnant  comme  résidu  du  massicot. 

La  céruse,  quand  elle  est  pure,  partage  les  propriétés  ci-dessus,  mais 
elle  est  le  plus  oi'dinaii'ement  mélangée  à  d'autres  substances  et  principa- 
lement au  sulfate  de  baryte  ou  blanc  fixe^  lequel,  bien  entendu,  masque 
ou  complique  les  réactions. 

Fabrication  industrielle  de  la  céruse.  —  Plusieurs  méthodes  sont 
employées  et  les  produits  varient  un  peu  suivant  le  procédé  auquel  on 
donne  la  préférence. 

Le  procédé  le  plus  ancien,  connu  sous  le  nom  de  procédé  hollandais, 
est  encore  celui  qui  donne  la  meilleure  céruse;  c'est-à-dire  celle  qui  couvre  le 
mieux»  si  ce  n'est  la  plus  blanche.  Mais  il  est  tellement  insalubre  qu'une 
foule  de  modifications  ont  surgi,  dont  le  but  principal  est  d'éviter  les 
dangers  que  présente,  pour  la  santé  des  ouvriers,  la  fabrication  hollandaise, 
tout  en  se  rapprochant,  autant  que  possible,  du  produit  qu'elle  fournit. 
Donnons  d'abord  une  idée  de  ce  procédé  ancien. 

Procédé  hollandais.  —  En  substance,  il  consiste  à  disposer  au  sein  de 
tas  de  fumier  en  fermentation,  des  séries  dépôts  en  terre  contenant  du  vi- 
naigrée! des  lames  de  plomb. 

Le  fumier  (qui  ne  doit  pas  dégager  d'hydrogène  sulfuré  en  quantité 
notable,  sans  quoi  la  céruse  serait  noircie)  fournit  la  chaleur  et  l'acide 
carbonique  nécessaires  à  la  réaction. 

On  ménage,  d'autre  part,  des  espaces  vides  destinés  à  assurer  l'accès  de 
Tair  en  quantité  convenable. 

En  Angleterre,  on  donne  la  préférence  au  tan  sur  le  fumier,  attendu 
qu'il  n'y  a  pasà  se  préoccuper  de  l'acide  sulfhydrique,  et  que,  si  d'un  côté, 
la  chaleur  dégagée  est  plus  faible,  de  l'autre,  il  est  plus  facile  de  diriger 
Topération. 

Âa  boni  de  six  semaines  environ  on  défait  ces  tas  et  on  retire  des  pots  les 
lames  de  plomb  couvertes  d'un  enduit  de  céruse  qu'il  faut  détacher  du 
plomb  métallique.  Anciennement  on  battait  les  plaques  à  la  main  ou  au 
marteau  et  c'était  Tune  des  manipulations  les  plus  insalubres,  ainsi  qu'il 
est  iacile  de  le  prévoir.  Aujourd'hui,  la  séparation  se  fait  mécaniquement 
dans  une  pièce  hermétiquement  close. 

(kï  obtient  de  la  sorte  un  mélange  d'écaillés  et  de  poudi*e  de  céruse  ; 
on  broie  ensuite  à  la  meule  en  arrosant  d'eau,  on  sèclie  le  produit,  et  on 
le  li?re  au  commerce. 

La  théorie  de  l'opération  est  des  plus  simples.  Sous  l'influence  de  la 
cbaleur,  l'acide  acétique  se  réduit  en  vapeur  et  vient  attaquer  le  plomb 
que  l'accès  de  l'air  humide  oxyde  d'autre  part.  11  y  a  formation  d'acétate 
kiSGque  de  plomb  lequel  est  précipité  lentement  par  l'acide  carbonique 
provenant  du  fumier. 

Le  produit  est  cristallin. 

L'oxyde  de  plomb  n'est  pas  tout  entier  engagé  dans  la  combinaison  avec 
l'acide  carbonique  :  une  partie  échappe  à  la  réaction  en  sorte  que  le  pro- 
duit déGnitif  n'est  pas  le  carbonate  PbO.  CO^mais  bien  un  hydrocarbo- 


500  PLOMB.  SELS    DE    PLOMB. 

nate  mélangé  de  carbonate  de  plomb,  5  (PbO.  CO').    PbO.  HO.  sensi- 
blement. 

Le  procédé  hollandais  a  été  modifié  par  les  fabricants  des  enirirons  de 
Vienne  (Autriche)  où  Ton  obtient  de  très-beaux  produits:  1**  en  employant 
le  plomb  pur  de  Bleiberg  ;  2°  en  substituant  la  chaleur  artificielle  d'éluves 
très-vastes  à  celle  du  fumier  ;  5°  en  se  servant  d'un  mélange  de  vinaigre 
et  de  marcde  raisin  qui  fournit  à  la  fois  Tacide  acétique  et  l'acide  carbo- 
nique. 

Les  céruses  de  Vienne  et  de  la  Carinthie,  préparées  par  ce  procédé, 
sont  remarquables  par  leur  blancheur. 

Procédé  de  Clichy . — La  modification  la  plus  importante  qu'on  ail 
apportée  au  procédé  hollandais  est,  sans  contredit,  la  méthode  inventée 
parThénard,  en  1801,  et  qui  porte  le  nom  de  procédé  de  Clichy. 

On  commence  par  préparer,  au  moyen  d'acide  acétique  et  de  litharge,  une 
solution  d'acétate  tribasique  de  plomb,  à  travers  laquelle  on  dirige  on 
courant  d'acide  carbonique  provenant,  soit  de  la  combustion  du  charbon» 
soit  encore  de  la  calcination  du  carbonate  de  chaux  dans  un  véritable  four 
à  chaux  (Dumas). 

On  obtient  un  précipité  dont  la  composition  est  seulement2  (PbO.CO*) 
+  Pb0110. 

La  liqueur  surnageante  n'est  autre  chose  que  de  l'acétate  neutre  qu'on 
sature  à  nouveau  par  la  litharge  et  l'opération  peut  se  continuer  indéfini- 
ment par  addition  de  litharge  et  production  d'acide  carbonique  sans  perte 
d'acide  acétique,  du  moins  en  théorie. 

Le  dépôt  de  céruse  (qui  n'a  nul  besoin  d'être  broyé)  est  lavé,  séché, 
embarillé  mécaniquement  dans  des  appareils  entièrement  fermés,  ce  qai 
évite  les  accidents  d'intoxication  saturnine. 

Cette  céruse,  dite  par  le  procédé  de  Clichy,  est  très-blanche  et  semé- 
lange  parfaitement  à  l'huile;  mais  en  raison  même  de  son  extrême  ténoitéi 
et  de  la  structure  du  précipité,  elle  couvre  moins  bien  que  la  céruse  ûifc 
par  le  procédé  hollandais,  laquelle  contient  d^ailleurs  plus  de  carboflJi^| 
de  plomb  pour  une  même  quantité  d'hydrate  plombique. 

En  modifiant  le  procédé  au  point  de  vue  des  appareils  et  aussi  de 
production  d'acide  carbonique  qu'on  emploie  à  l'état  pur,    OwHif 
parvenu  à  préparer  industriellement  une  céruse  dont  les  propriéfés  cou- 
vrantes sont  tout  à  fait  comparables  à  celles  des  céruses  de  Hollande. 

Elle  en  a  d'ailleurs  sensiblement  la  composition  puisqu'elle  répondii 
formule  3  (PbO.  CO^).  PbO.  HO. 

Sulfate,  —  S^Pb'O''  —  Le  sulfate  de  plomb   existe  à  l'élal  nit 
c'est  Vanglésite.  Mais  dans  le  commerce,  c'est  un  corps  pulvérulent 
paré  en  attaquant  le  plomb  par  l'acide  sulfurique  concentré  et  bouilbA^ 
encore  par  double  décomposition.  11  est  a  peu  près  insoluble  dans  fc 
soluble  dans  les  acides  surtout  concentrés  et  bouillants. 

Il  se  dissout  aussi  dans  les  sels  ammoniacaux  (surtout  le  tartrate)' 
l'acétate  d'alumine,  dans  l'acétate  de  chaux,  dans  l'hyposulfitc 
soude,  etc.  l '^ 


PLOMB.   —    SELS    DE    PLOMB.  301 

On  a  décrit  éû^alcraent  un  sulfate  acide  et  un  sulfate  basique  de  plomb. 

Chromâtes  de  plomb.  —  En  dehors  du  chromate  neutre,  on  connnaît 
des  chromâtes  basiques  de  plomb  designés  sous  le  nom  de  jaunes  de 
clirome. 

On  les  prépare  par  double  décomposition,  et  leur  nuance  varie  avec  la  con- 
centration, la  température  et  Talcalinité  de  la  liqueur. 

On  connail  aussi  plusieurs  phosphates^  borates  et  silicates  de  plomb, 
curieux  au  point  de  vue  théorique,  mais  nous  nous  contenterons  de  rap- 
peler simplement  ici  le  nom  de  ces  composés,  qui  n'offrent  pour  le  médecin 
qu'une  importance  très-limitée. 

Les  acides  organiques  fournissent  à  leur  tour  des  sels  plombiques  et 
plusieurs  d'entre  eux  sont  importants  à  tous  égards. 

C'est  ainsi  qu'il  arrive  souvent  dans  les  laboratoires,  quand  on  veut 
isoler  à  l'état  de  pureté  un  acide  organique  soluble,  de  l'engager  d'abord 
dans  un  sel  de  plomb  (ils  sont  pour  la  plupart  insolubles)  dont  la  purifi- 
cation devient  facile.  Kt  pour  régénérer  l'acide  à  l'état  libre,  il  suffit  de 
mettre  en  suspension  dans  l'eau  le  précipité  plombique  lavé  avec  soin  et 
d'éliminer  le  plomb  au  moyen  de  l'hydrogène  sulfuré.  C'est  là  une  mé- 
thode générale  en  quelque  sorte. 

Mais,  en  outre,  on  connaît  quelques  sels  de  plomb,  à  acides  organiques, 
d'un  emploi  très-répandu,  soit  dans  l'industrie,  soit  dans  la  thérapeu- 
tique. 

Acétates  de  plomb,  —  11  y  a  plusieurs  acétates  de  plomb  :  Vacétate 
neutre  C*HTbO*,  3II0,  ou  acétate  de  plomb  cristallisé; 

Et  une  série  nombreuse  d'acétates  basiques  que  nous  ne  ferons  que 
nommer  (\o)ez  Extrait  de  Saturne,  t.  XII,  p.  225),  pour  ce  qui  est  re- 
latif i  l'acétate  basique  de  plomb  employé  en  pharmacie. 

La  série  des  acétates  basiques  de  plomb  comprend  : 
l'acétate  bibasique  de  plomb 
—       tribasique       — 
. —       sexbasique     — 
contenant,  deux,  trois,  six  molécules  de  plomb. 

Quant  à  l'acétate  neutre  de  plomb,  c'est  un  beau  sel  aiguillé,  de  saveur 
sucrée  (ce  qui  lui  a  valu  le  nom  de  sucre  de  Saturne  sous  lequel  il  était 
désigné  par  les  alchimistes),  connu  depuis  fort  longtemps,  qui  se  prépare 
actuellement  en  grand  au  moyen  de  la  litharge  et  de  l'acide  pyroligneux. 

Parfois  aussi  on  le  prépare  en  mettant  en  présence  le  sulfate  de  plomb 
et  une  solution  d'acétate  de  chaux.  La  double  décomposition  se  fait  même 
à  froid. 

L'acétate  de  plomb  est  soluble  dans  une  partie  et  demie  d'eau  froide.  Il 
rougit  un  peu  le  tournesol.  Il  fond  à  75°  dans  son  eau  de  cristallisation, 
qu'il  perd  d'ailleurs  assez  facilement,  par  efflorescence,  dès  la  température 
ordinaire. 

Quand  on  le  chaulTe,  il  perd  son  eau  de  cristallisation,  puis  de  l'acide 
acétique  et  passe  à  l'état  de  sel  tribasique,  avant  de  se  décomposer  défini- 
tivement, vers  300°,  en  acétone  et  acide  carboiii(|ue. 


502  PLOMB.    —   CARACTÈRES   DES   COMPOSÉS   PLOMOIQDES. 

On  Tutilise  en  médecine  comme  astringent  et  résolutif. 

Les  sels  des  autres  acides  organiques  sont,  comme  nous  TaTons  dit, 
insolubles  pour  la  plupart. 

Il  en  est  ainsi  pour  le  malate,  succinate,  Toxalate,  tartrati?,  citrate^  etc.  ; 
ces  corps  offrent  peu  d'intérêt  pour  le  médecin. 

Les  stéarate,  margarate,  oléate  de  plomb,  constituent  l'emplâtre  pro- 
prement dit,  ou  emplâtre  simple  (Voy,  art.  Emplâtre,  t.  XII,  p.  146.) 

Combinaisons  organo-métalliques.  —  Avec  les  alliages,  les  sels  Iuloîdes 
du  plomb  cl  autres  combinaisons  binaires,  ainsi  que  les  sels  propremeot 
dits,  nous  n'avons  pas  encore  épuisé  complètement  la  liste  des  combi- 
naisons de  ce  métal. 

On  pst,  en  effet,  parvenu  à  (ixer  sur  le  plomb  un  certain  nombre  de  rési- 
dus alcooliques,  éthyliques  méthyliques,  etc.,  de  manière  à  obtenir  des 
composés  d'ordre  spécial,  qu'on  ne  peut  séparer  des  autres  corps  organo- 
métalliques,  tels  que  les  combinaisons  analogues  du  mercure,  le  zioc 
éthyle,  les  différents  stannéthyles,  etc.,  lesquels,  en  passant  par  les  sti 
bines,  phospbines,  etc.,  conduisent  aux  ammoniaques  composées. 

C'est  donc  un  groupe  de  corps  trcs-important  pour  la  théorie,  que 
celui  auquel  appartient  le  plombéthyle  PbCMP,  le  plorabo  diéthyle  Pb 
(C*ll*)*  (qui  correspond  au  bichlorure  de  plomb  PbCl*  dont  l'existence  est 
admise  par  beaucoup  de  chimistes). 

De  même,  les  composés  mélhylés  du  plomb  PbC*H^  et  Pb  (CD*)».  Nous 
ne  nous  y  arrêterons  pas  plus  longtemps. 

Ces  combinaisons  qu'on  peut  facilement  réduire  en  vapeur,  servent  sur- 
tout à  fixer  la  valeur  de  la  molécule  pondérale,  ou  de  l'équivalent  du 
plomb. 

Reste  à  dire,  eu  deux  mots,  la  place  occupée  par  le  plomb  dans  la  série 
métallique. 

Bien  que,  par  son  importance  et  ses  propriétés  tranchées,  le  plomb 
constitue  un  type  à  part,  on  a  vu  dôjà  qu'il  présente  des  analogies  nom- 
breuses avec  l'argent  d'abord  (les  propriétés  physiques  des  deux  sulfures 
sont  presque  identiques,  ils  sont  presque  toujours  mélangés  à  l'état  natu- 
riel);  avec  le  bismuth  ensuite  :  on  sait  que  les  caractères  chimiques  de 
ces  deux  métaux  sont  assez  voisins  pour  rendre  leur  séparation  ditGcile. 

On  doit  enfin  et  surtout  le  rapprocher  du  groupe  chimique  si  homogène 
qui  comprend  le  calcium,  le  strontium  et  le  baryum.  Le  sulfate  de  plomb, 
en  effet,  présente  un  ensemble  de  propriétés  très- voisines  de  celles  du 
sulfate  de  chaux. 

Les  carbonates  de  chaux  et  de  plomb  sont  isophormcs,  dans  plusieurs 
minéraux  du  groupe  apatite  le  calcium  est  remplacé  par  le  plomb,  etc. 

Dans  une  classification  méthodique,  le  plomb  devrait  donc  figurer  non 
loin  des  métaux  alcalino-terreux. 

Caractères  des  composés  plombiqaes.  —  On  les  reconoaii 
tout  d'abord  à  leur  poids  considérable.  Cet  indice,  qui  n'est  pas  absolu, 
est  cependant  très-précieux  pour  mettre  sur  la  voie. 

Les  combinaisons  insolubles  sont  le  plus  souvent  examinées  par  voie 


PLOMB.    CARACTÈRES   DES   COMPOSES   PLOMBIQUES.  505 

sèche;  ou  transformées  en  sels  solubles  qu'on  peut  analyser  aussi  par 
voie  humide. 

Il  y  a  donc  deux  ordres  do  caractères.  Parlons  d'abord  de  ceux  que 
foumil  la  voie  sèchCy  qui  s'applique  à  tous  les  dérivés  du  plomb  sans 
exception. 

Chauffés  au  chalumeau  sur  le  charbon,  avec  du  carbonate  do  soude  ou 
du  cyanure,  tous  les  composés  plombiques  sont  réduits  et  fournissent  un 
globule  de  plomb  métallique  reconnaissable  à  sa  mollesse,  et  ofl'rant  la 
propriété  de  s* aplatir  sous  le  marteau. 

Ce  caractère  spécifique  s'obtient  en  employant  la  flamme  de  réduction 
ou  flamme  intérieure. 

Avec  la  flamme  extérieure  ou  d'oxydation,  on  voit  se  produire  une  au- 
réole jaune  ou  rougcâlre  d'oxyde  de  plomb. 

On  peut  encore  obtenir  des  enduits  présentant  des  propriétés  assez 
tranchées  pour  devenir  caractéristiques. 

Avec  le  borax  ou  le  sel  de  phosphore,  la  perle  est  incolore  ou  simple- 
ment jaunâtre,  si  la  proportion  de  plomb  est  très-forte. 

On  peut  enfin  doser  le  plomb  par  voie  sèche,  dans  les  combinaisons  in- 
solubles. Nous  renvoyons,  à  cet  égard,  à  ce  que  nous  avons  dit  à  propos 
de  la  galène  et  de  la  métallurgie  (voy.  p.  286  et  287.) 

Voie  humide.  — Les  sels  solubles  de  plomb  ont  une  saveur  douceâtre, 
puis  astringente,  lis  sont  très-vénéneux. 

Généralement  fixes  et  incolores  quand  l'acide  n'est  pas  lui-inéme  coloré, 
ceux  qui  sont  neutres  chimiquement,  rougissent  la  teinture  de  tournesol. 

Cette  propriété  disparaît  naturellement  dans  les  sels  basiques. 

En  solution,  les  sels  de  plomb  présentent  les  réactions  suivantes  : 

4*  Le  /er,  le  zinc,  le  cadmium^  le  déplacent  à  l'état  métallique. 

2*  Lhydrogène  sulfuré  donne  un  précipité  noir  ou  brun  noir,  inso- 
luble à  froid  dans  les  acides,  dans  les  sulfures  alcalins,  les  alcalis  et  le 
cyanure  de  potassium. 

En  liqueur  chlorhydrique  concentrée,  la  couleur  du  précipité  est  d'abord 
d'un  rouge  brun  (chlorosulfure),  qui  ne  devient  tout  à  fait  noir  que  si 
l'on  a  soin  de  diluer  larfrement. 

Ce  sulfure  se  dissout  à  chaud  dans  l'acide  azotique,  mais  le  résultat  varie 
avec  la  concentration  de  l'acide.  S'il  est  étendu,  le  soufre  se  dépose  et  le 
plomb  se  dissout  à  l'état  d'azotate. 

Si  l'acide  est  fumant,  les  deux  éléments  de  sulfure  s'oxydent  simultané- 
ment et  tout  passe  à  l'état  de  sulfate  de  plomb  insoluble. 

Pour  une  concentration  moyenne,  on  obtient  à  la  fois  du  soufre,  de  l'azo- 
tate et  du  sulfate. 

5*  Les  sulfures  alcalins  donnent  le  même  précipité  de  sulfure  noir 
PbS.  insoluble  dans  un  excès. 

4^  La  potasse  et  la  soude  précipitent  en  blanc  les  sels  basiques.  Ce 
précipité  d'hydrate  de  plomb  est  soluble  dans  un  excès  du  réactif.  Et  la 
solution  additionnée  de  chlore  donne  un  précipité  de  peiH)xyde  de  plomb 
PbO\ 


304  PLOMB.    —   SKPABATIO.X    DU   PLOMB   d'aVEC   LES   AUTRES   METAUX. 

5°  V ammoniaque  précipite  aussi  les  sels  de  plomb,  mais  le  précipité 
n*esl  pas  soluble  dans  un  excès.  La  réaction  se  complique  parfois  de  la 
formation  de  sels  basiques  ou  doubles,  qui  se  précipitent  avec  Thydrate. 

6°  Les  carbonates  alcalins  donnent  un  précipité  de  carbooate  basi- 
que (Voy.  Céruse)  très-peu  soluble  dans  un  excès  du  précipitant. 

7**  Vacille  cklorhydrique  et  les  chlorures  solubles  précipitent  les 
sels  de  plomb  en  blanc.  Ce  précipité  soluble  dans  Teau,  surtout  h  chaud* 
ne  change  pas  de  couleur  en  présence  de  l'ammoniaque,  bien  qu*ii  passe 
à  rétatd'oxychlorurePbCI3PbO  +  HO,  lequel  est  moins  soluble  dansTeau 
que  le  chlorure. 

8°  Avec  Tacide  bromhijdrique  et  les  bromures,  précipité  blanc. 

9°  L'acide  iodhydrique  et  les  iodures  solubles  donnent  un  précipité 
d*un  beau  jaune,  légèrement  soluble  dans  Teau  bouillante,  soluble  dans 
un  excès  d*iodure  de  potassium. 

10®  Avec  V acide  sut furiqiie  et  les  sulfates,  on  a  un  précipité  blanc  de 
sulfate  de  plomb,  qui  se  forme  lentement  dans  les  solutions  étendues. 
Sa  séparation  est  facilitée  par  l'addition  d'un  peu  d'acide  sulfuriqae,  ou 
mieux  encore  par  celle  de  l'alcool. 

Ce  précipité  est  soluble  dans  les  acides  concentrés  et  bouillants,  solu- 
ble aussi  dans  la  lessive  de  potasse  et  dans  les  sels  ammoniacaux,  acé- 
tate, tartrate,  etc.). 

11°  Le  chromate  de  potasse  fournit  un  précipité  jaune  de  chromute 
de  plomb,  facilement  soluble  dans  la  potasse,  difGcilement  dans  Facide 
nitrique  faible. 

12°  Le  cyanure  jaune  et  V acide  oxalique  donnent  un  précipité  blanc, 
de  même  que  l'acide  tartrique. 

La  noix  de  galle  un  précipite  jaune  paille,  etc. 

Sont  caractéristiques  pour  les  sels  de  plomb  : 

1°  La  production  au  chalumeau,  sur  le  charbon,  du  globule  métalli- 
que s'aplatissant  sous  le  marteau  ; 

2°  La  réaction  de  l'acide  chlorhydriquc  qui  classe  le  plomb  à  côté  dt* 
l'argent  et  du  mercure.  Mais  la  distinction  s'effectue  facilement  au 
moyen  de  l'ammoniaque,  qui  dissout  le  chlorure  d'argent  et  noircit  lo 
proloch lorure  de  mercure  ; 

5°  Celle  du  sulfure  PbS  ; 

4°  Enfin,  celles  de  l'acide  sulfurique,  des  chromâtes  et  des  iodores. 

Séparation  du  plomb  d'avec  Xen  aatres  métaux  —  îious 
venons  de  voir  comment,  dans  un  essai  qualitatif,  on  distingue  le  plomb 
de  l'argent  et  du  mercure,  précipitables  comme  lui  à  l'état  de  chlo- 
rures. 

Pour  effectuer  la  séparation  du  plomb  et  de  Vargent,  on  étend  la 
liqueur,  additionnée  d'acétate  de  soude,  d'une  quantité  d'eau  suffisante 
pour  que  le  chlorure  de  plomb  reste  en  solution,  puis  on  précipite  l'ar- 
gent par  une  quantité  ménagée  d'acide  chlorhydriquc.  On  filtre,  et  dans 
la  liqueur  l'hydrogène  sulfuré  précipite  le  plomb. 

On  peut  aussi,  en  solution  nitrique,  éliminer  l'argent  à  l'état  de  na- 


PLOMB.  —  DOSAGE.  305 

et  précipiter  par  Tacide  sulfhydrique  le  plomb  resté  dans  la 
nr  filtrée, 
encore,  en  liqueur  neutre,  réduire  à  chaud  Pargent  par  un  for* 
^qoi  laisse  le  plomb  en  solution. 

mercure^  grâce  à  sa  volatilité,  est  facile  à  séparer  du  plomb  qui 
peu  près  fixe. 

peut  également  traiter  par  le  carbonate  et  le  cyanure  de  potassium 
\  douce  chaleur;  par  filtration,  on  sépare  le  carbonate  de  plomb. 
orcure  reste  en  solution  dans  la  liqueur. 

einvre  se  sépare  du  plomb  en  profitant  de  la  solubilité  du  sulfate 
livre  et  de  l'insolubilité  du  sulfate  de  plomb.  Cette  séparation  est 
lette. 

suivante  est  plus  délicate,  bien  que  le  principe  soit  le  même. 
nnb  et  bismuth.  —  Pour  séparer  le  plomb  du  bismuth,  on  peut 
srde  la  manière  suivante  : 

lUitge  est  attaqué  par  de  Tacide  azotique  étendu  de  deux  fois  son 
ne  d'eau  ;  on  ajoute  ensuite  un  léger  excès  d'acide  sulfurique  et  on 
•re  lentement  à  la  capsule.  Quand  la  matière  est  asséchée,  on  cal- 
iégèreroent  de  façon  à  chasser  presque  tout  Tacide  sulfurique. 
i  laisse  refroidir,  puis  on  broie  la  substance  avec  de  Facide  sulfuri- 
aible  (1  dixième  environ  pour  9  dixièmes  d'eau).  On  réitère  ce  trai- 
al  5  ou  6  fois. 

08  ces  conditions,  le  bismuth  seul  est  dissous;  le  sulfate  de  plomb 
sur  le  filtre,  on  lô  recueille  et  on  le  pèse  (Voy.  p.  306). 
séparation  du  plomb  d'avec  le  fer^  leztnc,  le  manganèse^  le  cobalt 
fddcel,  n'offre  aucune  difficulté,  puisque  ces  métaux,  en  solution 
,  ne  sont  pas  précipités  par  l'hydrogène  sulfuré. 
Ile  du  chrome^  un  peu  moins  nette  peut-être,  s'effectue  pourtant 
facilement,  soit  par  l'hydrogène  sulfuré,  soit  par  le  chlorure,  soit 
"e  en  faisant  digérer  avec  de  l'acide  sulfurique  étendu, 
séparation  d'avec  les  métaux  terreux  ou  alcalins  se  fait  très  aisé- 
i  au  moyen  de  l'hydrogène  sulfuré  principalement. 
lant  à  V antimoine,  Varsenic  et  Vétain,  on  les  sépare  du  plomb  en 
ransformant  en  sulfures  qu'on  fait  dissoudre  par  digestion  en  ^ré- 
de  sulfhydrate  d'ammoniaque  jaune.  Le  sulfure  de  plomb  reste 
le  résidu. 

wgpe.  —  Le  plomb  peut  être  dosé  sous  différents  états  :  oxyde, 
re,  chlorure,  sulfate,  chromante.  Suivant  les  circonstances,  on  don- 
la  préférence  à  l'une  ou  l'autre  des  méthodes  : 
On  dose  le  plomb  à  l'étet  d'oxyde  en  précipitant  d'abord  le  plomb 
es  carbonates  ou  les  oxalates,  séchant  le  précipité  soigneusement 
et  calcinant  au  creuset  de  porcelaine.  Le  résidu  est  de  Toxyde 
I  pèse.  L'azotate  le  fournit  directement. 
f  a  toujours  une  perte  légère  dont  on  lient  compte. 
Sulfure.  —  Étant  donné  le  précipité  de  sulfure  de  plomb,  on  le 
ivec  une  dissolution  d'acide  sulfhydrique,  on  le  sèche  à  basse  tem- 

ROCf.  Ncr.  i<».  iT  cm.  XXVHl  —  20 


306  PLOMB*    —   EMPLOI    ET   FORMES   PHARMACEUTIQUES. 

pérature.  On  Tintroduit  ensuite  avec  les  cendres  du  filtre,  et  un  excès  de*-^ 
soufre  dans  un  creuset  de  porcelaine,  puis  on  calcine  jusqu'à  poids  con — . 
stant  ; 

5°  Chlorure.  —  La  liqueur  plombique,  additionnée  d'un  léger  exoi^ 
d'acide  chlorhydrique,  est  évaporée  à  siccité  au  bain-marie.  Le  résidu^ 
épuisé  par  Talcool  éthérc  est  desséché,  puis  calciné  avec  raéoagemeai 
pour  éviter  de  volatiliser  le  chlorure  de  plomb. 

4''  Sulfate.  —  On  dose  assez  facilement  le  plomb  à  Tétai  de  sulfate. 
en  ajoutant  à  la  liqueur  contenant  le  plomb  un  léger  excès  d*icide  su!- 
furique,  puis  un  volume  double  d'alcool.  On  abandonne  au  repos  et  od 
filtre  après  quelques  heures,  on  lave  à  Talcool  faible  et  on  calcine  le 
sulfate  de  plomb. 

Quant  au  filtre,  on  le  traite  à  part  en  ajoutant  de  l'acide  nitrique  au 
résidu  de  la  calcination,  puis  un  peu  d'acide  sulfurique  en  calcinant  de 
nouveau. 

5°  Chromate.  —  Pour  doser  le  plomb  à  l'état  de  chromate,  on  opère 
en  liqueur  légèrement  acidulée  par  la  présence  de  l'acide  acétique,  et  on 
précipite  par  le  bichromate  de  potasse.  On  recueille  le  précipité  sur  un 
filtre  tare,  et  il  suffit  ensuite  de  sécher  à  l'étuve  Gay-Lussac  et  de  peser 
quand  le  poids  est  devenu  invariable  ; 

6^  Différents  procédés  de  dosage  du  plomb  par  la  méthode  volumétri- 
que  ont  élc  également  proposés. 

Us  sont  basés  sur  la  réaction  du  protochlorure  de  fer  en  quantité  connue 
sur  le  chromate  de  plomb,  l'excès  de  sel  ferreux  étant  dosé  parle  per- 
manganate. 

Ou  encore  sur  la  redissolution  du  carbonate  de  plomb  lavé  dans  une 
quantité  donnée  d'acide  nitrique  titré  qu'en  dose  ensuite  alcalimétri- 
quement. 

Emploi  et  formes  pharmaceutiques.  —  Les  préparations  à  base  deploml» 
sont  très  rarement  usitées  à  l'intérieur,  et  les  propriétés  toxiques  du 
métal  en  fournissent  une  explication  plus  que  suffisante. 

On  administre  à  l'intérieur  l'acétate  neutre  de  plomb  directement  en 
solution  ou  sous  forme  de  pilules. 

L'ingestion  du  plomb  à  l'état  métallique  est  aujourd'hui  abandonnée, 
on  peut  dire  par  tous  les  praticiens.  (Voy.  Effets  toxiques). 

En  revanciic,  la  médication  externe  compte  un  très  grand  nombre  de 
formules  où  les  composés  plombiques  figurent  seuls  ou  associés  i  d'autres 
substances. 

Disons,  toutefois,  que  cette  variété  considérable  de  préparations  sator- 
nées  tend  graduellement  vers  une  simplification  rationnelle.  (Voy.  plus 
loin  thérapeutique) . 

Voy.  pour  les  emplâtres  à  base  de  plomb,  tome  XII,  p.  746  et  suif.; 
pour  les  papiers  chimiques,  tome  XXV,  p.  767  et  suivantes. 

Le  plomb  figure  dans  la  forme  de  certaines  préparations  tels  que  lards, 
cosméliques,  tome  IX,  p.  440. 

L.  Prunier. 


. 


PLOMB.  — -  EFFETS  TOXIQUES.    EMPOISOMIEIIE.'VT  AIGO.    ÉTIOLOGIE.  507 

toxiques.  — Le  plomb  est,  sans  contredit,  le  métal  avec 
lequel  Thomme  civilisé  se  trouve  le  plus  en  contact,  par  cette  raison 
que,  outre  les  divers  usages  qui  lui  sont  communs  avec  les  autres  mé- 
tauXt  il  entre  dans  la  composition  de  la  plupart  des  revêtements  des 
objets  environnants  ;  d*ailleurs,  sa  faible  résistance  aux  agents  physiques 
et  chimiques  Êivorise  son  absorption,  et  contribue  par  là  à  lui  assurer 
une  influence  prépondérante  sur  la  santé  publique. 

Ses  effets  sur  l'organisme,  bien  différents  suivant  qu'ils  résultent  de 
Tabsorpiion  en  bloc  et  rapide  d'une  forte  dose  (empoisonnement  aigu), 
ou  de  l'imprégnation  lente  par  de  faibles  doses  réitérées  (intoxication 
chronique),  doivent  être  étudiés  séparément. 

La  forme  aiguë,  assez  rare,  bien  qu'utile  à  connaître  au  point  de  vue 
ioxicologique,  est  loin  de  présenter  le  même  intérêt  que  la  forme  chroni- 
que, extrêmement  fréquente,  par  laquelle  seulement  se  manifeste  toute 
roriginaliié  d'action  du  poison. 

£»oisoN»ENEKT  AIGU.  —  Etiologie.  —  L'empoisonnement  aigu,  ou 
empoisonnement  proprement  dit  par  le  plomb,  consiste  en  accidents 
graves  succédant  rapidement  à  l'absorption,  presque  toujours  par  inges- 
tion en  une,  deux  ou  trois  fois  au  plus,  d'une  haute  dose  de  métal  ou  d'un 
de  ses  sels,  soit  en  nature,  soit  à  l'état  de  mélange.  Tous  les  composés 
saturnins,  y  compris,  contrairement  à  l'opinion  de  Dupasquier,  les  sels 
insolubles  et  le  métal  lui-même  (obs.  de  Ruva),  peuvent  produire,  par 
ingestion,  un  empoisonnement  aigu,  dont  les  symptômes  sont  d'une  pré- 
cocité et  d'une  intensité  directement  proportionnelles  à  la  solubilité  ou  à 
la  facilité  de  décomposition  de  ces  substances  par  les  sucs  digestifs.  Les 
sels  solubles  se  transformeraient  dans  l'estomac  en  chlorures  (Rabuteau) 
et  en  albuminates  peu  solubles  ;  le  plus  dangereux  de  tous  est  le  chlorure, 
dissous  dans  le  chlorure  de  sodium  (Mialilc),  probablement  parce  que, 
sous  cette  forme,  le  plomb  n'a  plus  à  subir  de  transformation. 

La  dose  minimum  nécessaire  à  la  production  d'accidents  sérieux  est 
difficile  à  préciser  ;  souvent,  en  effet,  Tingeslion  de  quantités  relative- 
ment considérables  de  poison  a  été  suivie  de  symptômes  moins  graves 
qu'on  n'était  en  droit  de  le  redouter  ;  et  d'autres  fois  des  doses  même  assez 
fiiibles  ont  eu  des  conséquences  funestes.  Un  jeune  homme  éprouva  des 
accidents  graves  pour  avoir  pris,  en  trois  jours,  15  centigr.  seule- 
moit  d'acétate  de  plomb,  et  un  adulte  mourut  après  avoir  bu  à  peine  un 
demi-verre  de  vin  d'une  bouteille  contenant  des  grains  de  plomb  avec 
lesquels  elle  avait  été  rincée.  Cette  discordance  apparente  résulte  de  ce 
qu'on  connaît  seulement  la  dose  de  poison  ingérée,  et  non  celle  qui  est 
absorbée;  or,  l'absorption  doit  être  entravée  par  la  précipitation  du  sel 
dans  l'estomac,  par  son  astringence  agissant  sur  la  muqueuse  stomacale  ; 
cette  astriclion,  plus  marquée  pour  certains  sels,  sous-acétate  par  exem- 
ple, se  fait  peut-être  moins  sentir  dans  le  cas  d'une  dose  modérée.  Enfin, 
la  proportion  de  métal  dans  chaque  combinaison  saline  (près  de  deux  fois 
plus  forte  dans  les  unes  que  dans  d'autres),  le  degré  de  concentration 
de  la  dissolution  ou  du  mélange,  ne  doivent  pas  être  non  plus  sans  exer- 


508  PLOMB.    —   EMPOISOKNEIIEKT  AIGU.   —   SYMPTÔMES. 

ccr  une  certaine  influence.  D'après  les  expériences  d'Orfila,  de  Gaspirl  et 
de  R.  Moreau,  Tacétate,  injecté  dans  les  veines,  tue  un  chien  rapidement, 
en  24  heures  au  plus,  à  ta  dose  de  30  centigr.,  et  dans  la  huitaine  à  la 
seule  dose  de  20  et  même  10  centigr.  Les  divers  composés  saturnins  ont 
tous  la  même  action,  sauf  le  chromafe  et  Tarséniate,  qui  empruntent  i 
leurs  acides  une  partie  de  leurs  propriétés  spéciales  ;  au  premier,  par 
exemple,  parait  liée  la  prédominance  d'accidents  nerveux. 

Les  circonstances  de  l'empoisonnement  aigu  par  le  plomb  sont  varia- 
bles. Très-rarement  ce  poison  a  été  administré  dans  un  but  criminel 
(acétate  mélangé  aux  aliments  et  aux  boissons)  :  affaire  Ponchon,  1842,  et 
les  deux  cas  en  Anglelerre,  Central  Criminal  Court,  1844,  et  Chelus  Ford, 
Summer  Assises,  1847,  rapportés  par  Taylor.  Quelquefois  c'est  dans  une 
intention  de  suicide  que  le  sel  de  plomb  (ordinairement  une  verrée  ou 
deux  d'extrait  de  saturne)  est  ingéré,  presque  toujours  par  des  femmes. 
Mais  le  plus  souvent,  Tingestion  est  le  résultat  d'une  erreur,  d*une 
imprudence  ou  d'un  accident.  Tantôt  c'est  un  ivrogne  vidant  précipi- 
tamment et  à  la  dérobée  une  fiole  d'eau  de  Goulard  ;  tantôt  un  verre 
d'eau  végéto-minérale  est  pris,  par  une  ressemblance  trompeuse,  pour  du 
sirop  d'orgeat,  ou  bien  du  carbonate  de  plomb  pour  de  la  magnésie  ; 
ailleurs,  c*cst  un  enfant,  qui,  par  ignorance^  avale  soit  de  Textrait  de 
Goulard,  soit  même  une  boulette  de  mastic  à  la  céruse  ;  plus  fréquem- 
ment enfin,  de  l'extrait  de  saturne  est  pris  au  lieu  d'une  potion,  d'un 
purgatif  ou  d'un  vomitif,  par  erreur  de  flacon,  commise  par  le  malade 
et  même  par  le  pharmacien. 

D'ordinaire  l'empoisonnement  a  lieu  par  l'intermédiaire  des  aliments  ou 
des  boissons  (acétate  et  carbonate,  dans  le  vin,  le  cidre,  le  vinaigre, 
oxyde  et  carbonate  dans  l'eau),  soit  que  ces  substances  alimentaires  aient 
été  en  contact  avec  du  plomb  dans  leurs  récipients,  soit  qu'il  y  ait  eu 
falsification  ou  sophistification  ;  il  peut  aussi  être  produit  par  l'ingestion 
de  pains  à  cacheter,  ou  de  couleurs,  comme  sur  les  jouets  d'enfants.  Dtns 
certains  cas,  assez  rares  il  est  vrai,  V empoisonnement  professionnel  ^iga 
a  été  observé. 

Enfin,  les  sels  de  plomb,  principalement  l'acétate,  ont  aussi  donné 
lieu  à  des  accidents  aigus  par  Vemploi  thérapeutique  rationnel  ou  em- 
pirique :  acétate  dans  du  lait  contre  la  diarrhée,  ou  en  pilules  dans  la 
phthisie  (Fouquier,  Léridon),  et  grains  de  plomb  administrés  par  un 
charlatan  contre  la  dyspepsie  (Ruva). 

Expérimentalement,  l'empoisonnement  aigu  a  pu  ctre,  on  l'a  vu,  dé- 
terminé par  l'injection  intra-veineuse  d'acétate  de  plomb.  Pour  ce^ qui 
est  des  accidents  aigus  résultant  de  l'introduction  des  composés  plombi- 
ques  dans  les  voies  respiratoires,  il  est  difficile  de  faire  la  part  du  satur- 
nisme et  de  l'asphyxie  par  obstacle  mécanique  (Moreau). 

Symptômes.  —  Au  moment  de  l'ingestion,  il  y  a  perception  immédiate 
d'une  saveur  douceâtre,  sucrée,  puis  styptique  et  parfois  comme  métalli- 
que ;  souvent,  bientôt  après  se  manifeste  dans  la  bouche  une  sensation 
de  brûlure,  plus  ou  moins  prononcée  dans  l'arrière-gorgc,  et  se  proloo- 


PLOMB.    -^    EMPOlSORREllElfT   AIGD.    TRAITEMENT.  309 

géant  le  long  de  Toesophage  jusqu'à  l'esioinac,  où  est  ordinairement  son 
maximum  ;  d'autres  fois,  i!  y  a  seulement  de  la  pesanteur  au  creux  épi- 
gastrique.  La  langue,  parfois  légèrement  gonflée,  est,  en  général,  blan- 
châtre et  couverte  de  petits  points  blancs  saillants. 

Presque  en  même  temps  apparaissent  des  nausées  et  des  vomissements, 
d'abord  de  liquide  souvent  incolore  et  limpide,  quelquefois  présentant 
l'aspect  de  Peau  blanche,  et  pouvant  contenir  du  plomb  ;  plus  tard,  les 
matières  vomies  deviennent  muqueuses  et  sont  parsemées  de  taches  ou 
de  points  blancs  dus  à  des  sels  de  plomb.  Seul,  le  chromate  donne  lieu 
à  des  vomissements  colorés  en  jaune.  Puis,  coliques  gastro-intestinales 
très-aiguës,  avec  rétraction  et  dureté  ou  quelquefois  ballonnement  de 
l'abdomen,  s'accompagnant  tantôt  de  constipation,  tantôt  de  selles  diar- 
rbéiques  colorées  en  noir  par  du  sulfure  de  plomb.  On  a  vu,  avec  le 
météorisme,  de  la  rétention  d'urine  par  propa$|[ation  de  Pinflammation 
intestinale.  Engourdissement  des  membres  abdominaux,  abattement  gé- 
néral ;  pâleur  du  visage,  lèvres  livides. 

Le  liséré  gingival  bleuâtre  peut  se  faire  longtemps  attendre,  et  même 
manquer  complètement  ;  mais  dans  certains  cas,  il  apparaît  dès  les 
premiers  moments  ;  les  dents  sont  noircies  ;  fétidité  de  Thaleine.  La 
respiration  devient  stertoreuse  ;  il  se  produit  de  l'asphyxie  et  un  hoquet 
pénible  ;  des  vertiges,  des  syncopes,  du  trismus  et  des  convulsions  épi- 
léptiformes  précèdent  un  état  comateux  (véritable  cncéphalopathie),  qui 
se  termine  par  la  mort  après  deux  ou  trois  jours.  Les  facultés  intellec- 
tuelles restent  quelquefois  intactes  jusqu'au  dernier  moment. 

Dans  le  cas  de  gucrison,  après  des  symptômes  d'excitation  et  de  dé- 
pression moins  intenses,  il  se  déclare  de  la  (ièvre.  Des  taches  noirâtres 
de  sulfure  de  plomb  se  développent  sur  la  peau  par  suite  de  l'élimination 
du  poison  ;  la  douleur  épigastriquc  diminue  graduellement,  et  l'amélio- 
ration s'effectue  avec  lenteur.  Il  reste  longtemps  de  l'hébétude,  des 
troubles  digestifs,  de  la  faiblesse,  de  l'anémie  et  même  un  état  cachec- 
iîq;ae. 

Analomie  pathologique.  —  Les  lésions  anatomiques  ne  sont  ni  cons- 
tantes, ni  caractéristiques.  Tout  se  borne  le  plus  souvent  à  une  inflamma- 
tion légère  et  superficielle  de  la  muqueuse  de  Pestomac,  qu'on  a  parfois 
trouvée  épaissie,  grisâtre,  ramollie  et  même  érodée.  Taylor,  contraire- 
ment à  Popinion  qu'on  lui  a  prêtée,  pense  que  Paction  corrosive  appartient 
au  sel  neutre  et  non  au  poison  combiné  avec  un  acide.  Les  traînées  de 
points  blancs,  adhérents  à  la  muqueuse  stomacale,  données  par  Orfila, 
comme  propres  à  Pempoisonnement  par  l'acétate  de  plomb,  ne  sont  pas 
constantes  ou  sont  difficiles  a  reconnaître. 

Dans  deux  cas  où  il  s'était  produit  des  symptômes  cérébraux  graves, 
G.  Bergeron  et  Tardieu  ont  constaté  les  lésions  de  l'encéphalopathie 
saturnine  :  coloration  blanc-mat  du  cerveau,  consistance  dure,  aplatisse- 
ment et  effacement  des  circonvolutions. 

Traitement.  —  S'il  n'y  a  pas  de  vomissements,  on  les  provoquera,  ou 
s'ils  sont  pénibles,  on  les  facilitera  par  des  boissons;  dans  le  cas  de 


510  PLOMB.  —  iKTOxiCATion  chronique. 

parcsie  de  l'estomac,  on  pourrait  recourir  à  Tusage  de  la  pompe  stoma- 
cale. 

Les  antidotes  chimiques  capables  de  neutraliser  le  poison  plombîque 
en  le  rendant  insoluble  sont,  d'une  part,  le  soufre  en  électuaire,  la 
limonade  sulfurique,  l'acide  sulfliydrique,  les  sulfures  solublcs,  et  d'autre 
part  les  sulfates  alcalins,  en  particulier  le  sulfate  de  magnésie,  qui  peu- 
vent continuer  leur  action  jusque  dans  le  torrent  circulatoire.  On  a  encore 
recommandé  les  protosulfure  (Miahle)  et  persulfure  de  fer  hydratés  (Bou- 
chardat),  l'eau  albumincuse  prise  en  très-grande  quantité,  pour  former 
un  albuminate  qui  est  insoluble,  mais  qui  se  redissout  dans  un  excès 
d'albumine.  La  noix  de  galle  a  bien  réussi  entre  les  mains  de  Chansarel. 

Plus  tard,  des  purgatifs  débarrasseront  les  intestins  du  plomb  qu'ils 
pourraient  encore  contenir,  et  l'on  facilitera  l'élimination  du  poison  par 
î'iodure  et  le  bromure  de  potassium. 

Intoxication  chronique.  —  Nous  étudierons  d'abord  les  symptômes 
et  les  lésions  du  saturnisme  avec  leur  pathogcnie  et  leur  étiologie  spé- 
ciales, puis  successivement  l'étiologie  générale,  la  prophylaxie  et  le  trai- 
tement de  cette  intoxication. 

I.  Symptômes  et  lésions;  pathogénie  et  étiologie  spéciales. 

A.  Troubles  digestifs.  —  V  Stomatite.  —  Les  saturnins  présentent 
du  côté  de  la  bouche  de  véritables  lésions  anatomiques,  presque  cons- 
tantes, et  en  tout  cas  caractéristiques,  dont  la  facile  constatation  sur  le 
vivant  fournit  un  des  cléments  diagnostiques  les  plus  importants  ;  nous 
voulons  spécialement  parler  des  colorations  plombiques  de  la  muqueuse 
buccale  :  liséré  gingival  (Burton)  et  plaques  de  la  face  interne  des  lèvres 
et  des  joues. 

Un  liséré  ardoisé,  noirâtre  quand  il  est  intense,  large  de  2  à  3  mil- 
limètres, siège  à  la  sertissure  des  gencives,  particulièrement  des  incisÎTef 
et  des  canines  inférieures.  Il  consiste  en  une  imprégnation  de  la  muqueuse 
par  du  sulfure  de  plomb  formé  en  présence  de  Thydrogène  sulfuré  pro- 
venant, soit  de  la  décomposition  des  parcelles  alimentaires  retenues  entre 
les  dents  (Tanquerel),  soit  des  sulfures  alcalins  de  la  salive  (Schebachj, 
soit  enfin  du  sang  (Gubler).  L'apport  du  plomb  se  fait,  tantôt  directe- 
ment par  dépôt  des  particules  métalliques  à  leur  passage  dans  la  bou- 
che (tatouage)  :  contact  immédiat  ou  intermédiaire  de  l'atmosphère,  des 
instruments  et  des  doigts  souillés  (L.  direct^  primitif)  ;  tantôt  indirecte- 
ment par  les  voies  circulatoires  et  par  élimination  à  travers  les  glandes 
buccales  et  les  gencives.  La  preuve  de  l'existence  de  ce  liséré  secondaire^ 
indirect  y  a  été  établie  en  1869  par  Frank-Smith  :  chez  un  saturnin  para- 
lytique, sans  la  moindre  trace  de  liséré,  il  se  développa,  après  une  ou 
deux  semaines  de  traitement  ioduré,  un  liséré  bleu  bien  marqué,  qui 
persista  six  semaines  environ.  Semblable  observation  a  été  faite  ultérieu- 
rement par  Hilton  Fagge.  Dans  le  cas  de  Schoënljrod  (1873),  le  liséré 
n'apparut  que  quatre  semaines  après  que  le   malade  eut  cessé  de  faire 
«sage  d'un  vinaigre  ploinbifère  qui  lui  avait  occasionné  des  coliques. 

Les  gencives,  quelquefois  boursoufQées  et  saignantes,  s'amincissent 


PLOMB.    —   IMTOXICATlOlf   CHRONIQUE.     TROUBLES   DIGESTIFS.  5il 

<rordiiiaire  et  se  résorbent  à  leur  ourlet  (gingivite),  laissant  les  dents 
déchaussées,  de  teinte  brun-clair,  encroûtées  de  tartre  et  souvent  cariées. 
Sur  50  cas  de  saturnisme  professionnel,  nous  avons  vu  le  liséré  man- 
quer 4  fois  sans  qu'il  parût  avoir  jamais  existé  (Edelmann  vient  de  pu- 
blier un  cas  semblable),  et  une  fois  chez  un  ancien  ouvrier  qui  avait  pu 
€0  être  porteur  antérieurement  ;  il  est  vrai  qu'alors  les  sujets  n'avaient 
pas  un  métier  à  poussières. 

Parfois,  avec  le  liséré,  et  même  en  son  absence,  on  trouve  sur  la  mu- 
queuse, des  lèvres  et  des  joues,  des  plaques  ardoisées  (Gubler),  sous  forme 
d^un  fin  pointillé,  presque  toujours  par  tatouage  au  niveau  d'ulcérations 
correspondant  aux  saillies  des  dents. 

Ces  diverses  colorations  buccales  sont  pathognomoniques  du  satur- 
nisme. Si,  en  effet,  des  lisérés  plus  ou  moins  analogues  peuvent  se  mon- 
trer en  dehors  de  cette  intoxication,  ceux  dus  à  l'imprégnation  profes- 
sionnelle par  le  cuivre,  ou  thérapeutique  par  le  nitrate  d'argent  (Du- 
^uet)  et  par  le  fer,  et  même,  selon  Gublcr  à  l'emploi  prolongé  du  charbon 
poqihyriséy  comme  dentifrice,  ou  à  une  simple  exhalation  scorbutique, 
il  sera  toujours  possible  d'en  distinguer  le  liséré  saturnin  par  des  réac- 
tions chimiques  faciles  à  déterminer.  L'eau  oxygénée,  mise  en  contact 
avec  le  liséré  ou  les  plaques,  donne  naissance  à  une  traînée  blanchâtre 
de  sulfate  de  plomb  (D'Arcet,  Tanquerel  et  Gréhant)  ;  la  solution  d'hydro- 
gène sulfuré  restaure  la  coloration  noire,  plus  intense  même  que  primi- 
tivement. Dans  un  autre  procédé  d'analyse,  on  recueille  le  dépôt  recou- 
vrant le  collet  des  dents,  et  on  le  traite  par  l'acide  nitrique  et  de  l'eau 
distillée,  pour  transformer  le  sel  de  plomb  en  azotate  soluble  ;  le  liquide, 
repris  par  une  solution  d'iodure  de  potassium  au  ~,  donne  la  coloration 
jaune  caractéiisti(jue  de  l'iodurc  de  plomb  (Pauvert).y 

Comme  troubles  fonctionnels  accompagnant  les  colorations  buccales, 
et  légitimant  la  dénomination  de  stomatite  :  outre  la  gingivite,  l'haleine 
est  fétide,  saburrale  ;  la  réaction  de  la  salive  se  montre  extrêmement 
acide;  il  y  a  un  léger  ptyalisme,  et  le  malade  éprouve  une  saveur  per- 
sistante, sucrée  et  styptique  à  la  fois. 

2*  Dyspepsie»  —  Les  sujets  soumis  à  l'action  lente  ej  prolongée  du 
plomb  présentent  bientôt  les  symptômes  d'un  léger  embarras  gastrique 
permanent:  bouche  pâteuse  et  amère,  «  empoisonnée  »,  suivant  l'expres- 
sion même  des  malades,  langue  jamais  nette,  appétit  éinoussé  ou  capri- 
cieuXy  parfois  état  nauséeux  avec  vomissements  pituileux  le  matin. 

  un  degré  un  peu  plus  avancé,  la  langue  devient  blanche  et  sèche, 
Tmappétence  plus  coniplète  ;  il  y  a  même  du  dégoût  pour  les  aliments 
et  quelquefois  des  vomissements  ;  pesanteur  et  sensibilité  à  la  pression 
au  creux  de  l'estomac.  L'intestin  est  aussi  intéressé  dans  une  certaine 
mesure  :  constipation,  dureté  et  sensibilité  morbide  de  l'abdomen  spon- 
tanément et  à  la  pression,  avec  douleurs  lombaires,  et,  par  moments, 
quelques  légci^  élancements  passagers;  fréquemment  alors  on  observe 
CD  même  temps  de  la  céphalalgie. 
Tout  peut  se  borner  à  ces  sortes  de  poussées  subaigués  dans  le  cours 


Mi  PLOMB.   —   INTOXICATION   CHRONIQUE.  TROUBLES  BIOESTIFS. 

de  la  dyspepsie  chronique;  mais  d'ordinaire  celles-ci  se  répètent  plusiears 
lois  avant  l'explosion  d'accidents  plus  graves,  et  leur  série  est  close  par 
un  dernier  accès  bien  caractérisé,  prémonitoire  de  la  colique. 

On  ne  peut  nier  que  ces  troubles  gastro-intestinavx,  préexistant  à  la 
colique,  reconnaissent  dans  certains  cas  une  origine  indirecte,  et  qu'ils 
résultent  alors  d'une  élimination  du  poison  par  la  muqueuse  digestive, 
surtout  par  celle  de  l'estomac,  spécialement  chez  les  alcooliques  où 
celle>ci  sécrète  d'une  manière  exagérée;  d'autre  part  néanmoins,  ils 
peuvent  légitimement  être  considérés  comme  manifestations  d'entrée, 
lorsque  le  métal  est  évidemment  introduit  avec  les  ingesta,  ou  quand  des 
ouvriers  travaillent  dans  une  atmosphère  chargée  de  poussières  toxiques, 
dont  le  transport  jusque  dans  l'estomac  s'efTectue  par  l'intermédiaire  des 
aliments  et  de  la  salive  sans  cesse  déglutie.  Quoi  qu'il  en  soit,  raction 
du  poison  plombique  se  traduit  là  comme  ailleurs  par  de  la  parésie  dou- 
loureuse. 

La  dyspepsie  observée  dans  l'intervalle  des  attaques  de  colique  par- 
ticipe des  caractères  de  la  dyspepsie  préparatoire  et  de  celle  essen- 
tiellement chronique  des  saturnins  cachectiques  que  nous  décrirons 
plus  loin. 

3"^  Colique,  —  Sur  45  ouvriers  saturnins  réclamant  les  soins  de  la 
médecine,  35  étaient  ou  avaient  déjà  été  atteints  de  colique  ;  parmi  les 
10  autres  (plus  d'un  cinquième  des  sujets)  qui  n'en  avaient  jamais 
éprouvé,  5  souffraient  alors  d'embarras  gastro-intestinal  simple. 

La  colique,  qui  ne  se  développe  généralement  chez  les  peintres  qu'après 
un  certain  nombre  d'années,  peut  se  montrer  dans  les  premiers  mois  et 
même  les  premières  semaines  du  travail  chez  les  ouvriers  en  céniseet 
minium. 

Bien  que  susceptible  d'éclater  soudain,  elle  est  ordinairement  anooD- 
cée  par  les  prodromes  dyspeptiques  déjà  connus ,  auxquels  se  joignent 
du  malaise ,  une  expression  de  souffrance  ,  de  Tendolorissement  et  de 
l'engourdissement  des  extrémités ,  et  des  urines  uratiques  ou  albumi- 
neuses.  Alors  se  déclarent  des  douleurs  abdominales,  faibles  d'abord, 
plus  tard  intolérables,  siégeant  au  niveau  de  l'ombilic,  à  l'épigastre, 
aux  flancs  ou  à  l'hypogastre ,  et  s'irradiant  jusque  vers  les  lombes,  la 
vessie,    les  parties   génitales  et   les   cuisses.  Ces   douleurs   continues, 
obtuses  et  gravatives,  affectent,  par  intervalles,  la  forme  d'accès  paroxys- 
tiques avec  élancements  atroces ,  causant  l'insomnie  ;  elles  sont  cshnées 
par  une  pression  lentement  progressive  et  méthodique  sur  une  large 
surface  (Fornel),  étoiles  s'exaspèrent,  au  contraire,  sous  l'influence  dune 
pression  brusque  et  par  soubresauts  avec  l'extrémité  des  doigts.  L'abdo- 
men est  rarement  météorisé;  on  le  trouve,  en  général ,  inégalement  dur 
et  rétracté  par  suite  d'une  contracture  des  muscles  abdominaux,  compri- 
mant et  immobilisant  les  intestins  dont  les  douleurs  sont  ainsi  modérées; 
ces  mêmes  muscles,  surtout  les  droits,  sont  quelquefois  atteints  d'hyper- 
algésie  au  pincement  ou  au  grattage  (Briquet) ,  manœuvres  qui  peut- 
être  aussi  déterminent  des  contractions  désordonnées,  réveillant  les  dou- 


PLOMB.    ~*  IKTOXICATIOK   CHRONIQUE.    TROUBLES    DIGESTIFS.  Si 3 

leurs  intestinales.  A  un   haut  degré   d'intensité,  il  y  a  rétraction  de 
l'ombilic  et  de  l'anus. 

Dans  environ  un  septième  de  nos  cas,  les  coliques  du  début  ont  été 
suiTÎes  d'une  débâcle  diarrhéique;  puis  la  constipation  s'établissait 
désormais  opiniâtre,  comme  elle  Test  d'emblée  chez  la  plupart  des 
malades.  Cette  diarrhée  initiale,  commune  dans  l'intoxication  aiguë  par 
ingestion,  s'observe  plus  particulièrement  sur  les  ouvriers  en  céruse  et 
minimn,  exposés  à  absorber  rapidement  une  grande  quantité  de  poison. 
La  constipation  s'accompagne  d'un  certain  développement  de  gaz  intesti- 
naux; l'inappétence  est  absolue,  la  soif  plus  ou  moins  vive;  vomisse- 
ments firéquents  de  matières  glaireuses  ou  bilieuses,  éructations  et  par- 
fois hoquet.  Chez  quelques  sujets,  un  état  ictérique  ou  seulement 
subictérique  coïncide  avec  une  sensibilité  à  la  pression  et  une  rétraction 
temporaire  du  foie  (Potain),  soit  par  anémie  ou  défaut  d'apport  sanguin, 
soit  plutôt  par  contraction  de  la  tunique  musculaire  des  vaisseaux  (isché- 
mie). Les  troubles  urinaircs  seront  étudiés  en  leur  lieu. 

On  remarque  de  plus  quelques  signes  de  faible  réaction  sur  les  autres 
organes  ;  céphalalgie  fronto-tcmporale,  avec  éblouissements,  tintements 
d'oreilles ,  subdélirium  nocturne  et  prostration  générale  ;  courbature , 
douleurs  et  crampes  dans  les  membres,  constriction  thoracique,  etc. 
L'apyréxie  est  si  fréquente,  que  Grisolle  la  donnait  comme  la  règle; 
dans  certains  cas ,  le  pouls  se  ralentit  jusqu'à  40  pulsations  par  minute, 
et  la  température  s'abaisse  au-dessous  de  la  normale;  mais,  par  contre, 
on  observe  quelquefois,  comme  l'avait  noté  Blache,  pendant  les  premiers 
jours,  une  fièvre  pouvant  se  traduire  par  une  accélération  du  pouls, 
124  pulsations,  et  par  une  élévation  de  la  température  rectale  à  39^,4 
(Lorain).  Le  pouls  est  en  outre  dur  et  vibrant  ;  nous  examinerons  les 
caractères  de  son  tracé  à  propos  des  troubles  circulatoires. 

La  durée  de  l'attaque  de  colique  varie  de  quelques  jours  à  plusieurs 
semaines.  La  guérison  se  fait  par  le  retour  des  selles  et  de  l'appétit;  les 
rèddives  sont  extrêmement  fréquentes,  quelquefois  nombreuses. 

Sans  parler  des  divers  symptômes  d'intoxication  chronique  (troubles 
sensitib  et  moteurs) ,  qui  coexistent  presque  toujours,  même  avec  la 
première  atteinte  de  colique,  à  laquelle  ils  préexistent  souvent,  les  véri- 
tables complications,  telles  que  l'encéphalopathie  et  la  paralysie  confir- 
mée, ne  surviennent  guère  que  dans  le  cours  des  premières  récidives. 

La  dyspepsie  cachectique^  consécutive  à  de  nombreuses  atteintes  de 
colique  ou  d'autres  manifestations  toxiques  graves ,  revêt  différentes 
formes  liées  d'ordinaire  à  un  catarrhe  gastrique  ;  Tanorexie  en  est  le 
principal  symptôme. 

Des  nécropsies  empruntées  à  diverses  sources  et  analysées  parTanquerel, 
et  de  celle  de  Kussmaul  et  Maier,  il  ressort  que  le  plomb,  agissant  dès  le 
début  sur  le  tube  digestif,  y  produit  d'abord  des  lésions  hypertrophiques 
des  éléments  glandulaires  et  musculaires,  mais,  qu'à  la  longue,  son 
action  mène  à  l'atrophie.  Les  lésions  atrophiques  sont  les  suivantes  :  du 
côté  de  la  muqueuse  de  lestoniac  et  de  l'intestin  jusqu'à  la  partie  infé- 


514  PLOMB.    —   INTOXICATION   CHRONIQUE. 

rieure  du  colon,  atrophie  du  stroma  et  des  éléments  glandulaires  frappés 
de  dégénérescence  graisseuse;  la  tunique  celluleuse,  surtout  celle  de 
l'intestin,  offre  un  épaississement  scléreux  rétrécissant  le  calibre  des 
vaisseaux;  dcgénération  graisseuse  de  la  tunique  musculaire,  spéciale* 
ment  au  niveau  du  pylore  et  dans  Tintestin  grêle.  Enfin,  les  ganglions, 
sympathiques ,  dont  la  lésion  avait  déjà  été  signalée  par  Tanquerel  el 
Segond,  sont  indurés,  ischémies,  et  présentent  une  diminution  de  leurs 
cellules  nerveuses  (Kussmaul  et  Maier). 

La  théorie  pathogénique  qui  s'accorde  le  mieux  avec  les  faits  connus 
jusqu'aujourd'hui,  est  celle  dans  laquelle  on  considère  la  coliqce  satur- 
nine comme  résultant  d'une  sorte  de  crampe  douloureuse  avec  parésie  et 
névralgie  intestinales.  Le  plomb  se  fixe  sur  les  éléments  de  l'intestin  dans 
lesquels  il  s'accumule  en  réserve,  sous  forme  d'une  poussière  noirâtre  de 
sulfure  (Gublcr  et  Quévenne),  soit  directement  par  ingestion,  soit  indi- 
rectement par  élimination. 

Les  causes  déterminantes  de  la  colique  sont  diverses  :  ingestion 
d'une  ^^^fisante  quantité  de  plomb  en  un  temps  donné  ;  tendance  active 
à  l'élimination  digestive  du  poison  introduit  par  les  diverses  voies,  et 
suppression  de  son  élimination  rénale  ou  cutanée;  solubilisation,  mise 
en  circulation  et  élimination  digestive  d'une  réserve  métallique  emma- 
gasinée, soit  à  la  surface  du  canal  alimentaire,  soit  dans  le  foie,  soit  enfin 
en  certains  points  de  l'organisme,  par  exemple,  dans  les  extrémités 
atteintes  d'intoxication  locale  par  absorption  cutanée  (Frank-Smith). 

La  soluhilisation  du  plomb  est  facilitée  par  les  acides  (vins  acidulés, 
vinaigre)  et  par  l'iodure  de  potassium.  Les  excès  alcooliques  favorisent  le 
développement  de  la  colique,  non  que  l'alcool  entrave,  par  son  passage  à 
travers  le  rein,  Télimination  régulière  du  métal,  mais  plutôt  parce  que, 
activant  les  échanges  organiques  élémentaires,  il  déplace  le  métal  fixé 
dans  les  tissus  el  le  réintroduit  dans  le  sang  (Rosenthal). 

4*  Ictère.  —  L*iclère  hépatiqxu\  plus  rare  que  ne  le  pensait  Tanqu^ 
rel,  n'est  pas  nécessairement  sous  la  dépendance  de  la  colique,  car  il 
peut  se  rencontrer  chez  des  sujets  qui  n^ont  jamais  eu  de  colique,  et  on 
l'a  vu  disparaître  dans  le  paroxysme  des  douleurs.  11  semble  devoir  être 
rattaché  à  la  sensibilité  morbide  et  à  la  rétraction  du  foie,  qui,  si  ellai 
accompagnent  quelquefois  la  colique,  peuvent  aussi  exister  eu  defaors 
d'elle,  d'une  façon  plus  ou  moins  permanente,  notamment  à  la  période 
cachecti(iue  ;  le  canal  cholédoque  présente  alors  les  lésions  du  catarrhe 
chronique  (Kussmaul  et  Maier).  Dans  un  cas  d'embarras  gastro-intestintl, 
nous  avons  constaté  une  légère  hypertrophie  avec  sensibilité  morbide  da 
foie.  La  cirrhose  hépatique  a  d'ailleurs  été  observée  une  fois  par  Coule- 
not.  Les  recherches  chimiques  d'IIeubel  ont  prouvé  que  le  foie  est  undei 
organes  dans  lesquels  le  plomb  s'accumule  le  plus.  Kiifin ,  ce  métal  s*éli- 
niine  par  la  sécrétion  biliaire  qui  en  contient  des  proportions  faiblei 
(Hermann),  mais  cependant  appréciables.  On  ne  devra  point  confondre 
cet  ictère  vrai  avec  la  teinte  ictéroïde  hématique  de  l'anémie  saturnine. 

Deux  autres  glandes  annexes  de  Tappareil  digestif,  le  pancréas  surtout 


PLOMB.  INTOXICATION   CUROMIQUE.  TROUBLES  CIRCULATOIRES.  315 

et  la  rate^  ne  paraissent  pas  avoir  suffisamment  fixé  l'attention  des 
observateurs.  Pourtant,  Mayençon  et  Bergeret  ont  trouvé  la  rate  impré- 
gnée d'une  forte  proportion  de  plomb  ingéré  ;  et  dans  un  certain  nombre 
de  nécropsies,  en  particulier  dans  celle  due  à  Négrié  et  rapportée  par 
TafTorin,  cet  organe  était  hypertrophié  et  ramolli.  Aussi  n'est-il  pas  éton- 
nant que  plusieurs  fois  nous  ayons  rencontré  de  la  sensibilité  morbide  à 
la  région  splénique. 

B.  Troubles  circulatoires.  —  Quelle  que  soit  sa  voie  d'absorption,  le 
plomb  pénètre  vite  dans  le  sang,  et  consécutivement  agit  sur  les  parois 
du  système  circulatoire,  d'oiî  une  anémie  spéciale  et  des  troubles  cardio- 
vasculaires. 

Le  sang  des  saturnins  renferme  en  permanence,  mais  en  très-petite 
quantité  en  dehors  des  épiphénomènes  aigus,  ce  métal,  à  l'état  libre,  ou 
à  rétat  d*albuminates  (Buckheim,  Clarus,  Lewald)  ;  il  existe  en  moins 
grande  abondance  dans  les  vaisseaux  (Lacnnec),  et  présente  une  légère 
augmentation  de  la  fibrine  (Pope)  ;  ses  globules  ronges  sont  moins  nom- 
breux (Andral  et  Gavarret,  Malasscz),  deux  fois  moins  qu'à  l'état  sain,  et 
Us  ont  subi  une  augmentation  de  volume  ne  compensant  pas  leur  dimi- 
nution de  nombre  ;  ils  sont  devenus  moins  ductiles  et  chimiquement  plus 
fixes  (Béchamp).   L'hypoglobulic,  se  produisant  rapidement,  s'cffaçant 
avec  lenteur,  et  susceptible  de  s'aggraver  après  récartcment  de  la  cause, 
^  semble  par  conséquent  être  un  symptôme  d'empoisonnement  chronique; 
^.  elle  se  montre  en  raison  directe  avec  l'âge  du  sujet,  l'intensité  et  la  durée 
ù  de  rintosÎGaiion  et  la  richesse  du  milieu  professionnel  en  poussières 
^-  plombiqnes.  Il  est  probable  qu'elle  résulte  d'une  diminution  dans  la 
production   des  globules  par  altération   de  leurs  organes   formateurs 
(Malassez). 

Le  plomb  détermine,  d'après  Kussmaul,  de  la  rigidité  spasuiodique  des 

fibres  musculaires  du  cœur,  qui  est  un  peu  plus  gros  que  normalement 

;       (Beau  et  Durozicz)  ;  contrairement  à  cette  hypertrophie,  Leudet  a,  dans 

t      deux  cas,  trouvé  une  véritable  cUrophie  cardiaque.  L'endocardite,  la 

dégénéreêcence  graisseuse  du  myocarde,  et  des  lésions  valvulaires  athé- 

rùmaieusei  ont  été  signalées  par  Duroziez.  Les  artcrioles  de  la  plupart 

des  organes  ont  leur  calibre  diminué  et  leur  tunique  celluleuse  épaissie 

(tttssmaul  et  Maier),  ce  qui  rend  leur  paroi  plus  rigide  (Malassez). 

La  résultante  complexe  de  ces  divers  états  pathologiques  constitue 
ranémie  saturnine,  dont  la  notion  clinique  remonte  à  Stoll  et  à  de  Ilaén. 
Outre  le  ton  grisâtre^  dépendant  d'un  dépôt  de  sulfure  de  plomb  à  la 
soriace  de  la  peau,  les  téguments,  spécialement  à  la  face,  prennent  une 
Uinie  jaune-pâle  fixe,  non  modifiable  par  les  émotions,  en  rapport  non- 
Kalement  avec  l'appauvrissement  du  sang,  mais  encore  avec  la  rigidité  et 
le  rétrécissement  des  arlérioles  cutanées.  Dans  quelques  cas,  la  cploralion 
june  devient  plus  marquée  et  s'étend  aux  conjonctives  oculaires;  très- 
pobablement  produite  par  un  des  dérivés  de  l'hématoïdinesous  Tinfluence 
^    ihromogène  des  sels  biliaires  (J.  Simon),  elle  doit  être  considérée  comme 
"4    ijmptomatique  d'une  profonde  altération  du  sang.  Cette  teinte  icléroïde 


316  PLOMB.   —   INTOXICATION    CHRONIQUE.    TROUBLES  CIRGULÂTOIIIS. 

hématique  est  plus  fauve,  moins  franche  que  dans  Tictère  hépatique, 
dont  elle  diffère  d*ailleurs  par  les  caractères  de  Turine. 

En  dehors  de  la  période  aiguë  de  certains  cas  exceptionnels  de  colique, 
le  pouU^  petit,  mou,  facilement  dépressible,  parfois  irréguiier,  tombe  i 
50  et  40  pulsations  par  minute.  Ce  ralentissement  reconnaît  des  causes 
diverses.  D'une  manière  générale,  Taffaiblissement  de  vitalité  des  élé- 
ments anatomiques  n*est  plus  compatible  avec  une  circulation  active  ; 
d'autre  part,  la  rigidité  des  vaisseaux  apporte  un  retard  au  cours  du  sang, 
car  la  rigidité  des  canaux  diminue  le  débit  d'un  courant  iolermittent 
(Marey).  La  macrocythcmie  elle-même  rend  le  sang  moins  fluide,  par  la 
difficulté  que  les  globules  plus  volumineux  et  moins  malléables  éprouvent 
à  circuler  dans  les  capillaires  (Malassez).  11  n'est  pas  jusqu'à  la  présence  du 
plomb  dans  le  sang  qui  ne  contribue  pour  sa  part  à  ce  ralentissement  do 
pouls,  puisque  Potain  et  Malassez  ont  constaté  que  du  sérum  contenant 
1  millième  d'acétate  de  plomb  passe  plus  lentement  dans  un  tube  capil- 
laire que  du  sérum  pur.  Nous  citerons  enfin  l'ictère  dont  Faction  mode- 
ratricc  du  pouls  est  si  énergique. 

Le  trace  sphygmique  des  saturnins  chroniques  est  pathognomonique 
(Marey,  Bondet,  Lorain).  11  offre  un  plateau  ondulé  par  des  ressauts,  qui 
donnent  à  la  pulsation  un  caractère  tricrote  et  même  polycrote,  dû,  selon 


FiG.  24.  —  Tracé  sphygmiquo.  Colique  au  deuxième  jour  (Obs.  XXIX  de  notre  thèse). 

Marey,  à  une  anomalie  dans  la  contraction  ventriculaire  cardiaque,  li 
ligne  de  descente  est  tremblée  par  une  suite  de  brèves  onduUtioDs 
isochrones,  résultant  d'une  légère  trémulation  musculaire  ordinairemeot 
invisible.  Il  apparaît  constamment  dans  la  période  aiguë  de  la  colique  on 
tracé  analogue,  ayant  une  ligne  ascensionnelle  courte  et  inclinée,  avec 
plateau  à  rebondissements,  mais  dont  la  ligne  de  descente  est  rediligne. 
Teissier  fils,  de  Lyon,  attribue  ces  caractères  du  pouls  à  un  état  spasmo* 
dique  musculaire  des  artères. 

Ilitzig  a  remarqué  sur  les  veines  superficielles  du  dos  des  mains  et  des 
avant-bras,  surtout  aux  points  d'abouchement,  des  zones  de  contraction 
leur  donnant  une  apparence  moniliforme;  cette  contracture  annulaire 
des  fibres  transversales  était  temporaire  et  s'exagérait  par  les  efforts.  Les 
veines  n'étaient  d'ailleurs  ni  variqueuses,  ni  indurées.  Nous  reviendrons 
sur  le  rôle  important  que  cet  auteur  fait  jouer  au  système  circulatoirs, 
surtout  veineux,  dans  la  pathogcnie  de  la  paralysie. 

Les  troubles  cardiaques  manquent  parfois  au  début  ;  mais  on  obserre 
assez  souvent,  en  particulier  dans  la  période  de  cachexie,  des  ptûpUatùnu 
et  un  impulsion  exagérée.  Nous  avons  vu  un  peintre  gaucher,  atteinte 
ti*oubles  sensitifs  de  la  moitié  gauche  du  corps,  surtout  au  membre  sojié- 
rieur,  ressentira  plusieurs  reprises  une  violente  douleur  cardialgipe 


'  PLOMB.    —  IRTOIICATION   CHRONIQUE.   TKOUBLES  RESPIRATOIRES.  517 

s'irradiant  dans  le  bras  et  le  cou  de  ce  côté.  L'auscultation  révèle  en  outre 
des  bruiU  de  souffle  cardiaques  et  vasculaires  de  cause  anémique  el 
même  organique  (Duroziez).  Avec  le  stéthoscope  déprimant  légèrement 
les  gros  vaisseaux  du  cou  et  du  pli  du  coude,  nous  avons  perçu  des  bruits 
de  souffle,  quelquefois  doubles,  môme  en  l'absence  du  souflle  cardiaque; 
il  s'oi  est  parfois  produit  dans  les  vaisseaux  du  pli  du  coude,  sans  qu'il 
y  ea  eût  à  ceux  du  cou.  Bien  plus,  chez  un  peintre  droitier,  paralysé  de 
la  sensibilité  aux  membres  supérieurs,  surtout  à  droite,  présentant  un 
souffle  exclusivement  au  pli  du  coude,  ce  bruit  se  montra  plus  intense  à 
droite,  où  il  était  en  tout  comparable  au  bruit  d'un  générateur  à  vapeur. 
Oa  a  trouvé,  en  dehors  de  rinsuffisance  aortique,  un  double  soufBe 
crunl  artériel,  encore  inexpliqué.  Le  frémissement  des  veines  jugulaires 
se  reocoDtre  rarement.  Le  saturnisme  produit  encore  des  péricardites 
(Andral),  le  plus  souvent  chroniques,  affectant  quelquefois  une  forme 
aiguë. 

Il  est  r^^ttable  qu'on  ne  connaisse  rien  de  l'état  du  système  lympha- 
tique (vaisseaux  et  ganglions);  ses  altérations  que  rend  probables  la  fré- 
quenee  de  l'érysipèle  et  de  la  lymphangite,  seraient  pourtant  très-intéres- 
sanles  à  connaître  au  point  de  vue  pathogënique. 

C.  Troubles  respiratoires.  —  Les  expériences  de  Rosenthal  sur  les 
animaux  ont  prouvé  que  les  particules  de  blanc  de  plomb  pénètrent  par 
^^ialiaiation  jusque  dans  les  petites  bronches.  Chez  des  chevaux  employés 
^Hkss  les  fabriques  de  céruse  et  morts  saturnins,  on  a  constaté,  entre  autres 
^^HiÊerérts  graves  de  l'appareil  respiratoire,  une  atrophie  du  nerf  récurrent 
^^et  une  dégénérescence  graisseuse  des  muscles  dilatateurs  de  la  glotte 
(GùnUier,  Guilt  al  Uertwig).  L'aphonie  s'observe  d'ailleurs  quelquefois 
chez  l'homme  (Pariset,  Tanquerel). 

Les  troubles  respiratoires  se  montrent  sous  deux  foimes  bien  différentes. 
Vasthme  aigu,  de  cause  externe,  est  cliniqiiemenl  caractérisé  par  une 
dyspnée  paroxystique  et  des  quintes  de  toux  pénibles,  avec  rares  crachats 
muqueus,  grisâtres,  et  un  abondant  écoulement  de  mucus  nasal,  cons- 
tamment piombirére;  l'auscultation  fait  percevoir  de  simples  râles 
TÎbranb  de  bronchite.  Cette  forme  dure  de  quelques  heures  à  huitet  douze 
jours  ;  la  l'éacLion  fébrile  est  faible  ou  nulle.  Lcwy  a  trouvé  les  plus  petits 
nmeaux  bronchiques  remplis  et  partiellement  obstrués  de  parcelles 
ntumines.  La  muqueuse  bronchique,  recouverte  d'un  exsudât  grisâtre, 
nsqueux,  plombifère,  est  rouge,  gonflée,  ecchymosée  et  même  parsemée 
de  plaques  blanches  et  grî^^i  ^u  niveau  desquelles  ie  tissu  pulmonaire 
tA  cirrhose.  Sur  les  animaux,  la  muqueuse  des  grosses  bronches  a  pré- 
senté des  ulcérations  arrondies,  isolées,  de  la  dimension  d'une  tête 
d'épingle. 

Vaithme  chronique,  déjà  mentionné  par  Sauvages,  succède  à  de  nom- 
breuses attaques  de  la  forme  aiguë,  ou  apparaît  chez  des  ouvriers  cachec- 
tiques ou  des  convalescents  d'alïections  thoraciques  graves,  qui  ont  repris 
trop  tôt  le  travail  ;  nous  l'avons  rencontré  affectant  des  ouvriers  exposés  à 
l'inspiration  de  poussières  ou  de  vapeurs  plomhiques.  Là,  plus  qu'ailleurs, 


3i8         PLOMB.    —  IlfTOXICATlOIf   chronique,   troubles  GÉHITO-irilIHAIlIt. 

il  est  nécessaire  do  tenir  compte  de  la  prédisposition  indiriduelie.  La 
toux  est  sèche,  par  accès  paroxystiques  prolongés;  expectoration  peu 
abondante  de  mucosités  toujours  plombifères;  oppression  extrême;  les 
hydropisies  surviennent  ;  les  râles  vibrants  du  début  sont  remplacés  par 
de  fines  bulles  humides,  éclatant  à  la  base  des  poumons  oadématiéf .  Cet 
asthme  conduit  à  Vemphysème^  à  la  pneumoconiose  saturnine^  avec 
complication  de  pneumonie  coêéeuse  chronique. 

L'antagonisme  entre  le  saturnisme  et  la  phthisie  tuberculeme,  admis 
par  Tanquerel,  Beau  et  Pidoux,  était  journellement  démenti  par  les  Eaîts, 
lorsque  liirt  démontra  par  sa  statistique  que^  la  tuberculose  est  près  de 
deux  fois  plus  fréquente  chez  les  ouvriers  qui  manient  le  plomb  qae  chei 
ceux  qui  travaillent  le  fer  ou  le  cuivre. 

D.  Troubles  géniio-urinaires.  — 1*"  Troubles  urinairèê.  — Les  reins 
sont  le  principal  émonctoire  du  plomb,  dont  l'analyse  chimique  décèle  la 
présence  dans  les  urines  (Orfila).  L'élimination  de  ce  métal;  Tariableet 
intermittente,  est  favorisée  et  rendue  continue  par  Tadministration  de 
riodure  (Guillot  et  Melsens,  Parkes)  et  peutrétre  du  bromure  de  potassium 
(Rabuteau,  Bucquoy,  Banzolini,  Gueneau  de  Mussy  et  Gubler),  qoi  le 
transforment  en  sel  double  solubie.  Chez  les  albuminuriquei,  le  plomb 
s'éliminerait  à  l'état  d'albuminate  (LewalJ). 

Pendant  la  période  d'anémie  initiale,  l'urine  est  souvent  peu  acide,  et 
dans  certains  cas,  neutre  ou  alcaline  (A.  Robin).  A  un  degré  on  peo  plus 
avancé,  elle  prend  une  couleur  rappelant  celle  du  vieux  via  du  Rhin;  et 
plus  tard,  quand  la  cachexie  est  confirmée,  elle  ressemble  à  Turine  idé- 
rique,  mais  n'a  pas  de  reflet  verdâtre  ;  l'acide  nitrique  lui  donne  une  colo- 
ration acajou,  sans  produire  la  réaction  spectrale  de  la  matière  colorante 
biliaire;  elle  tache  le  linge  en  rose-saumon.  Sa  quantité  diminue;  Tadde 
urique  paraît  souvent  un  peu  augmenté,  probablement  par  concentniîan. 
En  général,  cette  urine  coexiste  avec  l'ictère  héma tique  ;  on  suppose 
qu'elle  doit  alors  sa  teinte  à  un  dérivé  de  i'hématoïdine  en  excès  dm  le 
sang,  par  suite  tout  à  la  fois  d'une  déglobulisation  rapide  et  d'une  insuffi- 
sance hépatique  (urine  hémaphéique  de  Gublcr).  Dans  les  cas  rares  d'ic- 
tère vrai,  Turine  donne  les  réactions  caractéristiques  des  acides  et  de  la 
matière  colorante  de  la  bile. 

Que  la  cachexie  toxique  arrive  à  un  haut  degré,  ou  que  des  épiphéno- 
mènes. variables  (coliques,  accidents  cérébro-spinaux)  viennent  i  se  dé- 
clarer, V albumine  du  sérum,  en  excès  dans  le  sang  par  rapport  aux  glo* 
bules  détruits,  tend  à  s'éliminer  par  les  urines;  et  d'autre  part,  ki 
principes  de  désassimilation,  ne  subissant  plus  une  combustion  snffinnle 
pour  évoluer  en  urée,  s'éliminent  à  l'état  d'acide  urique.  C'est  ainsi  fse 
de  l'albumine  et  des  dépôts  uratiques,  colorés  par  l'acide  rosacique,  d 
ayant  l'aspect  de  la  brique  pilée  ou  du  minium,  apparaissent  dans  l'unie, 
temporairement  pendant  un  épiphénomène  aigu,  définitivement  quanlii 
cachexie  poursuit  sa  marehe  progressive.  Un  de  nos  malades,  en  proieâ 
des  coliques  depuis  huit  jours,  et  émettant  une  urine  uratique  et  flo- 
queuse,  avait  les  reins  trés  douloureux  à  la  pression.  Chez  un  autre,  w 


PLOMB.   —  INTOXICATION  CHRONIQUE.  TROUBLES  GÉRITO-URINAIRES.         5i^ 

septième  jour  d'une  récidive  de  coliques,  nous  avons  trouvé  un  pou  de 
sucre  dans  les  urines,  légèrement  muqueuses,  mais  non  albumineuses; 
la  douleur  au  foie,  ressentie  par  ce  dernier,  pouvait  faire  penser  à  une 
glycosurie  de  cause  hépatique. 

-  EofiD,  les  urines  des  saturnins  arrivés  à  la  période  terminale  de  cachexie 
anémique  sont  pâles,  de  faible  densité,  parfois  alcalines;  elles  se  colorent 
très-peu  sous  rinfluence  de  Tacide  nitrique;  l'albuminurie  se  produit, 
dans  quelques  cas,  avec  des  œdèmes,  et  trahit  alors  une  profonde  altc- 
ralion  rénale. 

-  Le  plomb  se  trouve  en  assez  forte  proportion  dans  le  rein.  Les  lésions 
atn^iqne^  de  cet  organe,  que  Rayer  et  d'autres  avaient  signalées  chez 
les  saturnins,  ont  été  rattachées  par  OUivier  à  l'élimination  urinaire  pro- 
longée du  métal  ;  mais  on  est  aujourd'hui  conduit  à  admettre  que  ces  lé- 
aions,  quand  elles  existent,  sont  seulement  consécutives  à  l'albuminurie 
d'origine  humorale  et  cachectique.  Les  descriptions  de  Gan*od,  Lance- 
reauxy  Graingcr-Stewart,  Dickinson  et  Robert,  ont  été  complétées  par  les 
eonslatations  microscopiques  de  Charcot,  Gombault  et  Kelsch.  Le  rein 
est  petit,  dur  à  la  coupe;  sa  substance  corticale,  réduite  à  une  couche 
mince,  présente  quelquefois  à  sa  surface  des  granulations  jaunâtres  ou 
rosées,  plus  ou  moins  dures.  La  seule  portion  à  peu  près  intacte  est  celle 
•qui  correspond  à  tous  les  tubes  collecteurs.  La  substance  corticale  est 
très-altérée  ;  entre  les  tubes  contournés  et  dans  leur  épithélium  se  mon- 
trent des  cellules  embryonnaires,  qui  plus  tard  s'organisent  par  place  en 
tisso  fibreux.  Modifications  analogues  des  glomérules,  qui,  le  plus  sou- 
dait, subissent  la  transformation  colloïde.  Cette  néphrite  interstitielle 
airophique  s'accompagne  d'une  albuminurie,  avec  lésions  oculaires,  or- 
dinairement non  compliquée  d'œdème,  mais  susceptible  d'exposer  à  l'en- 
eéphalopathie  urémique  (Danjoy). 

Dans  la  colique,  l'émission  des  urines  peut  se  faire  avec  difficulté  et 
même  avec  douleur  (strangurie). 

V  Troubles  génitaux.  —  Le  plomb  fait  sentir  son  action  jusque  sur  la 
^e  de  l'espèce.  D'après  Pallas,  la  cénise  a  souvent  servi,  en  Russie,  à 
rendre  les  filles  stériles.  Le  saturnisme  chronique,  même  du  côté  du  père, 
prédispose  aux  avortements  (C.  Paul).  Le  passage  du  métal  de  la  mère 
dans  les  organes  du  fœtus  a  été  démontré  chimiquement.  La  grande  mor- 
taliié  des  enfants  d'ouvriers  saturnins,  par  maladies  nerveuses^  notée 
d'abord  en  Angleterre  au  sujet  des  potiers  du  Straffordshire,  a  été  con- 
firmée par  la  statistique  de  Roque,  qui  a  montré  de  plus  que  les  survivants 
étaient  fréquomments  atteints  d'idiotie,  àHmbéciÛité  ei'd'épilepsie  (sa- 
turnisme héréditaire). 

Il  eût  été  étrange  qu'agissant  sur  le  produit  de  la  conception,  par  le 

père  et  la  mère,  le  plomb  restât  sans  influence  sur  les  fonctions  génitales. 

comme  l'ont  avancé  les  auteui*s  qui  se  sont  occupés  de  la  question.  Nous 

avons  en  effet  signalé,  dans  notre  thèse  (1875),  chez  deux  peintres  de 

trente- deux  et  trente -quatre  ans  et  un  cérusier  de  vingt-huit  ans,  de 

Ynnaphrodisie,  allant,  pour  le  premier,  jusqu'à  Y  impuissance;  et  der- 


520     PLOMB.  —  INTOXICATlOlf  chronique,  troubles  NUVtUXIT  LOGOionuis. 

nièrement,  l'anaphrodisie  a  éié  observée  sur  la  femme  elle-même  (Ducamp). 
Ainsi  se  trouve  justifié  l'emploi  des  ceintures  antiaphrodisiaques  en  plomb 
chez  les  anciens.  Lieutaud  prescrivait  l'acétate  de  plomb  à  rinlérieor 
contre  la  nymphomanie. 

E.  Troubles  nerveux  et  locomoteurs.  —  1**  EncéphcUopathie.  —  L*en- 
céphalopathie  est  beaucoup  plus  rare  (un  quart  des  cas)  et  plus  tardive 
que  la  colique  ;  elle  n'apparaît  guère  qu'après  dix  et  même  vingt  ans  de 
travail  à  la  peinture,  et  dans  la  première  année,  parfois  dès  le  quatrième 
mois  chez  les  ouvriers  en  céruse  et  minium.  Elle  se  développe  d*ordiiiaire 
à  l'occasion  d'une  violente  récidive  de  colique,  le  plus  souvent  à  titre  de 
complication  initiale  ou  terminale  ;  quelquefois  néanmoins  les  coliques  et 
l'enc^phalopathie  débutent  simultanément,  et  ont  une  importance  à  peo 
près  égale,  de  sorte  qu'elles  doivent  être  considérées  comme  sirnplemeat 
concomitantes;  plus  rarement  enfin,  les  accidents  cérébraux  prédominent, 
et  les  coliques  semblent  en  être  une  complication  ;  mais  celles-ci  ne  font 
presque  jamais  complètement  défaut. 

Dans  la  moitié  des  cas,  Tencéphalopalhie  est  annoncée  par  des  pro- 
dromes, un  jour  ou  quelques  heures  à  l'avance.  Ce  sont  des  symptômes 
cérébraux:  céphalalgie,  vertiges,  assoupissement  pendant  le  jour,  insom- 
nie ou  tout  au  moins  agitation  la  nuit  ;  hébétude  du  regard,  éblouisse- 
mcnts,  diplopie,  strabisme,  modifications  pupillaires,  amblyopie,  altéra- 
tions du  goût,  parfois  dysphagie  ou  sensation  de  constriction  au  pharymr; 
engourdissement,  fourmillements  et  prostration.  On  observe,  en  outre, 
de  l'agitation,  de  la  crainte,  de  la  tristesse,  de  l'inquiétude  ou,  au  con- 
traire, une  indifférence  absolue.  Du  côté  de  l'état  général,  il  y  a  accélé- 
ration du  pouls,  et  l'urine,  on  l'a  vu,  devient  fréquemment  albumineuse 
et  uratique.  Quand  les  coliques  préexistent,  presque  toujours  avec  des 
troubles  cérébraux  concomitants  plus  ou  moins  marqués,  le  pronostic 
de  complication  encéphalopaihique,  beaucoup  plus  difficile,  ne  pourra 
se  baser  que  sur  la  multiplicité  et  l'intensité  croissantes  de  ces  symptômes 
nerveux  centraux,  l'insomnie  absolue,  l'accélération  du  pouls  et  les  alté- 
rations possibles  des  urines.  Chez  les  autres  malades,  le  saturnisme  cé- 
rébral éclate  d'emblée  par  une  attaque  épileptiforme  ou  un  état  comateux 
apoplectique  avec  ou  sans  paralysie. 

L*eRcéphalopathie  revct  des  formes  délirante,  convulsive,  comateuse  et 
paralytique. 

Forme  délirante.  —  Le  délire,  qui  survient  dans  un  quart  des  cas,  est 
irrégulier  et  variable,  partiel  ou  général,  quelquefois  tranquille^  avec 
une  simple  divagation  dans  les  idées,  pouvant  se  traduire  par  des  paroles 
et  des  actes  étranges,  et  se  compliquer  d'hallucinations  de  la  vue  et  de 
l'ouïe  ;  le  plus  souvent,  il  est  d'emblée  ou  devient  agité  et  furieux^  wc 
incohérence  des  idées.  Le  malade  se  croit  malheureux,  rarement  heu- 
reux (variété  raisonnante  de  Grisolle)  ;  mais  toujours  il  y  a  désaccord 
entre  la  nature  du  délire  et  la  physionomie  qui  reste  impassible  (Tanqu^ 
rel).  Chez  les  trois  quarts  des  sujets,  le  délire  est  paroxystique  ou  tpulà 
fait  intermittent.  Il  y  a  parfois  abolition  complète  de  la  sensibilité;  k 


PLOHB.  INTOXICATION  CHRONIQUR.  TfiOUBLKS  ^HERVEUX  BT  LOCOMOTEURS.  321 

pouls  est  constamment  petit.  Quelques  miiladcs  meurent  sidérés  par 
Taggriyation  du  mal  ;  d'autres  se  tuent  dans  un  accès  de  fureur.  Quand 
le  retour  à  la  santé  doit  avoir  lieu,  d'ordinaire,  après  un  ou  deux  jours 
de  durée»  le  calme  survient  ;  le  patient  s'endort  et  se  réveille  guéri,  sans 
se  rappeler  ce  qui  s'est  passé  pendant  l'accès.  En  général,  la  forme  déli- 
rante est  suivie  de  convulsions  ou  de  coma. 

Forme  convuhive.  —  Cette  forme,  la  plus  fréquente  de  toutes,  est 
quelquefois  représentée  seulement  par  des  convulsions  sans  perte  de 
connaissance,  mais  avec  un  certain  degré  de  stupeur.  Celles-ci  sont 
générales,  débutant  alors  ordinairement  par  un  tremblement  généralisé 
(Compendium),  ou  partielles,  siégeant  à  la  face,  dans  un  ou  plusieurs 
membres  ou  dans  un  groupe  de  muscles.  Le  plus  souvent  cloniques,  elles 
peuTent  être  toniques  et  donner  lieu  à  un  état  semi-tétanique  avec 
opisthotonos  (Nivet) . 

A  un  degré  de  plus,  l'encéphalopathie  épileptiforme  consiste,  excep- 
tionnellement, en  un  simple  vertige,  avec  perte  de  connaissance  et  de 
sensibilité,  ou  presque  toujours  en  une  attaque  convulsive  complète, 
comme  dans  l'accès  épileptique  véritable,  dont  elle  diffère  pourtant.  En 
effet,  il  n'y  a  point  d'aura  précurseur  (Grisolle,  Tanquerel),  mais  quel- 
quefois une  sensation  de  tournoiement  et  rarement  un  cri  initial  ;  en 
outre,  le  vertige  simple  se  prolonge  beaucoup  plus  (quelques  heures)  que 
dans  Tépilepsie,  et  la  stupeur  consécutive  est  plus  marquée.  Enfîn,  Tan- 
querel donne  l'intensilé  de  la  raideur  tétanique,  comme  un  caractère 
important  de  l'accès  convulsif  épileptiforme.  Jaccoud  a    observé   dans 
ceUe  forme  des  symptômes  médullaires  :  mouvements  automatiques,  con- 
tractures, parésie  scnsitive  et  motrice  des  membres  inférieurs  et,  moins 
fréquemment,    mouvements    involontaires   de    déglutition  et  rétention 
d'urine;  c'est  afin  de  tenir  compte  de  ces  phénomènes  afférents  à  la 
moelle  que  ce  clinicien  a  proposé  pour  l'encéphalopathie  la  dénomina- 
tion de  saturnisme  cérébro-spinal.  L'attaque  de  convulsion  épileptiforme 
se  Vermine  par  de  la  sterteur,  qui  se  dissipe  peu  à  peu,  ou  parfois  par  un 
état  apoplectique  souvent  fatal  (StoU).   La  mort  survient,  soit  à  la  fin 
d'un  premier  accès,  soit  après  plusieurs  accès  s'étant  succédé  coup  sur 
eoup,  séparés  dans  certains  cas  par  du  délire  furieux,  et  devenant  bien- 
tôt sabintrants.  Les  accès  cataleptiformes  (Tanquerel)  sont  très  rares. 
Lewis  a  observé  à^%  accès  hystériques  chez  de  jeunes  ouvrières.  Selon 
Auguste  Voisin,  Vépilepsie  vraie  serait  une  des  conséquences  éloignées  du 
«afaimisme. 

Les  animaux  :  chiens,  chats,  oiseaux,  qui  hantent  les  ateliers,  meu- 
rent presque  tous  de  convulsions. 

Forme  comateuse.  —  Le  coma  n'existe  guère  à  l'état  isolé  ;  d'ordi- 
naire, il  s'établit  après  un  accès  convulsif  ou  de  délire,  avec  lequel  on 
le  voit  aussi  alterner. 

Fùrme  paralytique.  —  Dans  la  moitié  des  cas,  la  'série  des  accidents 
cérébraux  débute  soudain  par  une  paralysie  absolue,  sensitiveet  motrice, 
rarement  des  deux  membres  supérieurs  ou  inférieurs,  le  plus  souvent 

MIT.  ncT.  HiD.  n  cmu      \  XXVIII.  —  21 


322  PLOHB.  —  INTOXICATION  CHRONIQUE.  TROUBLES  NERVBVX  ET  LOOOIOTBURS. 

hémiplégique,  parfois  limitée  à  une  moitié  de  la  face  et  au  membre 
supérieur  correspondant.  Cette  même  paralysie  peut  n'apparaître  que 
dans  le  cours  ou  au  stade  terminal  de  l'encéphalopathie;  elle  s'asaoeie 
également  bien  au  coma,  au  délire  et  aux  accès  épileptiformes.  Bien 
qu'elle  soit  accompagnée  de  troubles  de  la  parole  et  d'altération  des  sens, 
indices  de  l'atteinte  portée  à  l'encéphale,  elle  offre  néanmoins,  chez  les 
ouvriers  saturnins,  cette  particularité  intéressante  de  siéger  généralement 
sur  la  moitié  à  laquelle  appartient  le  membre  supérieur  le  plus  ea  rap- 
port avec  le  poison  plombique;  ce  qui  semble  indiquer,  parfois  du  moins, 
une  certaine  relation  d'origine  avec  la  paralysie  locale  par  absorption  cuta- 
née, qui  dans  ce  cas  lui  préexiste  probablement  toujours.  En  dehors  de 
toute  explication,  ces  faits  constituent  une  véritable  forme  paralytique  de 
l'encéphalopathie  qui  méritait  d'être  classée  à  part.  Cette  paralysie, 
d'ailleurs  curable,  marchant  même  assez  vite  vers  l'amélioration,  ne 
devra  pas  être  confondue  avec  celle  qui  s'établit  lentement  dans  la  con- 
valescence et  se  montre  progressivement  croissante, 

Vamblyopie  et  Vamaurose  ont  été  observées  dans  les  divers  stades  des 
accidents  cérébraux,  auxquels  elles  peuvent  même  survivre  quelque  temps. 

Les  récidives  de  l'encéphalopathie  sont  fréquentes. 

Enfin,  comme  modalités  rares  du  saturnisme  cérébral,  nous  devons 
encore  mentionner  la  paralysie  générale  (Delasiauve,  Devouges,  Bour- 
desol,  Marcé,  Falret  et  Bucquoy),  et  une  forme  hydrophobique  (Mon- 
tault). 

Lecerveau  des  saturnins  contient  incontestablement  du  plomb  (Devergie^ 
Tanquerel,  Erapis  et  Robinet,  Guillot  et  Melsens,  Vulpian  et  Personne); 
il  est  peu  probable  que  le  dépôt  métallique  se  localise  dans  les  tuniques 
artérielles  (Rosenstein)  à  l'exclusion  de  la  substance  cérébrale,  comme 
on  a  cru  l'avoir  démontré  par  l'analyse  du  cerveau  d'un  malade  mort 
d'encéphalopathie  dans  le  service  de  Moutard-Martin  ;  il  ne  suffisait  pas, 
dans  ce  cas,  de  constater  l'absence  du  plomb  dans  Tencéphale  dépouillé 
de  ses  enveloppes  et  étanche  de  sang  ;  il  eut,  de  plus,  fallu  démontrer 
directement  la  présence  du  métal  dans  les  méninges. 

Chez  les  sujets  ayant  succombé  n  l'encéphalopathie,  le  ccrreau  offre 
un  aspect  caractéristique.  Il  est  ischémie,  d'où  pâleur  de  la  substance 
grise,  et  quelquefois  œdémateux;    souvent  jaunâtre,  ictéroîde,  il  est 
ferme,  résistant,  donnant,  sous  le  doigt  qui  l'écrase,  la  sensation  moUe 
et  collante  de  la  pâte  de  guimauve  (Martin-Solon)  ;  ses  circonvolutions, 
aplaties  et  serrées  les  unes  contre  les  autres,  le  font  paraître  hypertro^   ! 
phié  (Tanquerel  et  Grisolle).  Nous    ne  rcjeterons  pas  absolument  ki 
constatations  anatomiques  de  Thomas,  de  Canuet  et   d^Andral,  rdi- 
tives  à  un  ramollissement  des  centres  nerveux,  car  une  nécropsie  àt 
Négrié  a  montré  un  peu  de  ramollissement,  des  congestions  et  des  noyau 
apoplcctiformes  dans   l'encéphale   d'un   sujet  mort  d'encéphalopitliîe 
mixte  (Tafforin). 

Les  méthodes  histologiques  actuelles  ont  été  jusqu'ici  impuissantes  i 
révéler  aucune  lésion  appréciable. 


PLOMB.  —  i:(TOXICATIOK  CHEONIQIE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  323 

Bien  que  les  accidents  cérébraux  saturnins  aient  pu,  dans  des  cas  excep- 
iionnek»  reconnaître  une  origine  urémique,  ce  qui  ne  parait  pas  rigou 
reusCTient  établi,  on  ne  doit  point  considérer  l'urémie  comme  leur  cause 
générale.  La  théorie  pathogénique  la  plus  communément  acceptée  est 
celle  de  Tanémie  cérébrale  résultant  du  spasme  musculaire  des  petits  vais- 
seaux (Rosenstein),  ou  de  la  compression  par  l'œdème  interstitiel  (lleubel) . 
Nous  rapprochant  plutôt  de  l'opinion  de  Ilermann,  nous  croyons  à  une 
action  primitive  du  plomb  sur  le  système  nerveux  central,  qui  se  mani- 
festerait lorsque  ce  métal  s'y  serait  accumulé  en  quantité  suflisantc. 

2*  Douleurs  rhumatoïdes.  —  Goutte.  —  Ostéo-arthrites.  —  Les  dou- 
leurs  rhumcUoïdes  mobiles,  si  fréquentes  chez  les  saturnins,  siègent 
principalement  dans  les  muscles  (myalgie),  les  articulations  et  les  tissus 
fibreux  et  tendineux  qui  les  avoisinent  (arthralgie),  et  par  exception 
dans  la  substance  même  des  os.  Variables  dans  leur  nature,  elles  affectent 
toutes  les  formes  et  tous  les  degrés,  depuis  les  simples  sensations  de  las- 
situde,  de  courbature  et  de  raideur  pénible,  jusqu'aux  véritables  dou- 
leurs contusives,  constrictives,  lancinantes  et  dilacérantes.  Elles  sont 
tantôt  spontanées,  fréquemment  avec  exacerbations  nocturnes,  tantôt,  et 
plus  rarement,  accrues  ou  provoquées  par  les  mouvements  et  la  pression 
brusque  (endolorii-soment),  bien  qu'il  survienne  d'ordinaire  de  sensibles 
rémissions  sous  riiiQuence  d'une  compression  méthodique  ;  la  chaleur 
les  calme  quelquelois,  les  exaspère  souvent.  Enfin  nous  avons  vu,  dans 
le  cours  de  la  cachexie,  des  cas  rares,  le  hasard  néanmoins  vient  encore 
de  nous  en  fournir  deux,  avec  rougeur  et  gonflement  limités  à  de  grandes 
articulations  rtmcme  diffus,  à  évolution  rapide,  mais  toujours  sans  appa- 
reil fébrile.  Ce  sont  probablement  des  faits  semblables  que  les  anciens 
auteurs»  Sauvages  en  particulier,  entendaient  désigner  sous  le  nom  de 
rhumaiisme  métallique. 

Ces  douleurs  se  font  sentir  à  peu  près  également  dans  les  membres 
supérieurs  et  inférieurs,  avec  une  légère  prédominance  pour  les  derniers. 
Les  muscles  le  plus  souvent  atteints  sont  ceux  du  côté  de  la  flexion  :  aux 
membres  supérieurs,  les  muscles  des  bras,  surtout  le  biceps,  et  aux  inié- 
rieursy  ceux  des  jambes,  spécialement  des  mollets.  Leur  siège  de  prédi- 
lection dans  les  parties  les  plus  rapprochées  du  point  d'abs^orption  cuta- 
née du  plomb,  chez  les  .ouvriers,  doit  souvent  les  faire  classer  parmi  les 
accidents  directs. 

Les  douleurs  rhumatoïdes  peuvent  coïncider  en  une  même  région  avec 

Tinalgésie  proprement  dite  (analgésie  douloureuse)  ;  mais  nous  avons 

prouvé  qu'elles  cessent  de  se  produire  dès  qu'il  y  a  anodynie  (a  priv.,  et 

H^i,  souifrance),  c*est-à-dire  si,  à  la  suite  d'une  brûlure,  par  exemple, 

il  ne  se  développe  pas  ultérieuremnt  de  douleurs  liées  au  processus  in- 

lunmatoire.   Un  membre  analgésie  n'est  donc  susceptible  de  douleurs 

spontanées  qu*autant  qu'il  a  conservé  son  odynie  intacte.  Comme  l'odynie 

m    parait  a?oir  pour  conducteurs  les  filets  nerveux  du  grand  sympathique, 

■J^   ilen  résulte  que  ces  derniers  sont  très  vraisemblablement  le  siège  analo- 

I   miqiie  des  douleurs  rhumatoïdes. 


524  PLOUB.  —  I2IT0XICAT10N  chronique,  troubles  nerveux  et  LOCOMOmiS. 

De  ces  douleurs,  nous  rapprocherons  les  névralgies,  parfois  intercos- 
tales (Rosenthal),  qui  semblent  liées  à  la  dyscrasie  anémique. 

Quant  à  la  gouUe  saturnine,  mentionnée  dès  1752  en  Angleterre  pir 
ilusgrave,  au  sujet  de  la  colique  du  Devonshire,  et  nettement  indiquée 
par  H.  PaiTy  (1808),  sa  notion  fut  introduite  en  France  en  1854,  ivec 
la  traduction  de  Touvrage  de  Garrod,  où  se  trouvait  formulée  la  teudaoee 
des  ouvriers  saturnins  anglais  à  contracter  cette  affection.  En  France,  la 
goutte,  rare  d'ailleurs  dans  la  classe  ouvrière,  s'est  retrouvée,  mais  peu 
fréquente,  chez  les  saturnins.  La  plupart  des  observateurs  n'accordent  i 
l'hitoxication  qu  une  influence  adjuvante  dans  la  production  de  cette 
maladie.  Il  existe  pourtant  des  cas  dans  lesquels,  en  l'absence  de  prédit- 
position  héréditaire  et  avec  un  genre  de  vie  opposé  à  celui  des  goutteux, 
on  ne  découvre  d^autrc  cause  appréciable  que  le  saturnisme  (Chareot, 
Ollivier,  Bailley,  Bucquoy,  Lancereaux,  Brouardel,  Pinel  et  Halmagrand). 
On  a  remarqué  que  la  goutte  provient  en  général  de  l'intoxication  lente 
et  à  petite  dose  ;  les  attaques  alternent  d'ordinaire  avec  les  coliques;  son 
évolution  serait  plus  rapide  que  celle  de  la  goutte  vraie.  Notons  enfin  la 
coexistence  fréquente  des  altérations  rénales,  dites  rein  goutteux  de  Todd, 
rein  contracté,  néphrite  interstitielle,  déjà  étudiées  plus  haut. 

Le  tissu  osseux^  dans  lequel  le  plomb  s'accumule  en  la  plus  grande 
proportion,  2  à  3  p.  100  (Ileubel  et  Léwy),  est  sujet,  dans  la  période 
de  cachexie  ultime,  chez  2  saturnins  p.  100,  à  des  affections  diverses  : 
carieSy  nécroses^  périostites  alvéolaires  avec  carie  dentaire^  siégeant 
à  la  mâchoire  supérieure  dans  plus  de  la  moitié  des  cas  (Léwy,  Binet), 
et  ostéo-arthriles  (\crneuil  et  Sabatier)  ;  leur  pronostic  est  ordinaire- 
ment favorable. 

3*  Crampes  et  contractures, — Tremblement. — Hémichorèe. — At4me, 
—  Les  crampes  douloureuses,  communes  dans  le  saturnisme,  sont  plui 
précoces  chez  les  ouvriers  en  céruse  et  minium  que  chez  les  peintres; 
elles  se  manifestent  surtout  lors  d'une  attaque  de  colique,  ou  dans  li 
première  période  de  la  paralysie  motrice.  Rarement  généralisées,  elki 
siègent  à  peu  près  aussi  fréquemment  aux  membres  inférieurs  qu'au 
supérieurs.  Les  crampes  des  membres  inférieurs,  plus  souvent  liées  i  la 
colique,  seraient  de  cause  générale,  tandis  que  celles  des  membres  snpé- 
rieurs,  compagnes  habituelles  de  la  paralysie,  affectent  de  préféienoe  lei 
parties  les  plus  rapprochées  des  points  de  contact  du  plomb  et  auraient 
plutôt  une  origine  locale  par  absorption  cutanée.  Elles  sont  spontaoéei 
ou  provoquées  par  de  fausses  positions,  par  Textension  forcée  dani  k 
décubitus  au  lit,  pour  les  membres  inférieurs,  et  dans  quelques  casranir 
par  le  moindre  attouchement.  Si  d'ordinaire  les  crampes  sont  espaoéei, 
elles  deviennent  par  exception  presque  continuelles  et  fatiguent  tiofl 
le  patient.  La  douleur  qu'elles  déterminent  est  parfois  très -violente. 

Un  de  nos  malades,  peintre  droitier,  atteint  de  paralysie  prédomiottt 
à  droite,  était  sujet  à  des  spasmes  musculaires  du  globe  oculaire  dece  ^ 
oôté. 

Nous  avons  rencontré,  chez  un  plombier,  de  la  contracture  intermit* 


PLOMB.  <—  IHTOXICATIOIV  CHRONIQUE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  395 

teoie  des  extrémités  inférieures,  tout  à  fait  semblable  à  la  tétanie.  Presque 
chaque  jour,  il  se  produisait,  durant  5  à  10  minutes,  une  contracture 
douloureuse  dans  l'extension  du  pied,  dont  le  gros  orteil,  fléchi  sous  la 
plante,  y  était  recouvert  par  les  autres  orteils  ;  elle  débutait  aux  extré- 
trémités,  et  était  accompagnée  d'engourdissement  et  d'une  coloration 
riolacée  des  téguments.  La  ligature  du  membre  est  restée  impuissante  i 
la  provoquer.  Comme  transition  entre  les  crampes  et  cette  tétanie  satur- 
wine^  un  peintre  paralytique  présentait  de  la  contracture  intermittente 
Mirtidle  des  extrémités  supérieures  dans  la  flexion,  tantôt  à  droite,  tan- 
tAt  à  gauche,  avec  cette  particularité  qu'elle  atteignait  seulement  les  trois 
leniiers  doigts  droits  et  les  deux  premiers  doigts  gauches  ;  la  contracture 
sessaît  par  Textension  forcée. 

Rappelons  que  pendant  les  coliques,  les  muscles  abdominaux  sont 
Bootracturés  (Spring)  ;  cette  contracture  douloureuse  constituerait  même, 
pour  Briquet  et  Giacomini,  un  facteur  important  de  la  colique. 

Tremblement.  —  Loin  d'avoir  dans  le  saturnisme  la  même  impor- 
tance que  dans  rhydrargyrisme,  le  tremblement  existe  néanmoins  sou- 
font  dans  le  cours  de  cette  intoxication,  sans  en  général,  il  est  vrai,  ac- 
quérir une  grande  intensité.  Signalé  par  Arétée,  Paul  d'Egine,  Le  Pois, 
Percivai,  Tanquerel  et  Spring,  il  a  été  étudié  à  part,  dans  ces  dernières 
années,  par  IloIIis,  Lafont  et  Charles  Fernet. 

Presque  tous  les  saturnins  offrent  une  légère  trémtdation  musculaire 
régulière,  révélée  seulement  par  le  tracé  sphygmique.  Sur  les  muscles 
superficiels,  on  constate  queUiuefois  des  contractions  fibrillaires  invo- 
lontaires. 

Le  tremblement  proprement  dit,  à  oscillations  visibles  des  membres, 
augmentant,  à  l'inverse  de  celui  des  alcooliques  (Lafont),  par  la  fatigue 
èt*?era  la  6n  de  la  journée,  apparaît  ordinairement  après  un  travail  de 
quelques  mois  (ouvriers  en  céruse  et  minium  et  compositeurs  typo- 
graphes), ou  de  plusieurs  années  (peintres).  Il  est  souvent  associé  à  un 
ewlain  degré  de  parésie  motrice,  parfois  si  peu  intense  que  celle-ci  n'est 
pas  accusée  spontanément  par  le  malade.  Quelques  sujets  pourtant,  les 
compontcurs  par  exemple,  peuvent  présenter  an  tremblement  avec  inté- 
grité de  la  puissance  motrice  ;  mais  d'autre  part,  nous  avons  exception- 
nellement observe  la  parésie  motrice  sans  tremblement,  de  sorte  que  ces 
deux  troubles  fonctionnels  semblent  concomitants  et  même  corrélatifs  en 
tant  qu'émanant  d'une  même  cause  ;  mais  ils  ne  dépendent  pas  directement 
l'un  de  l'autre.  Tant  que  le  tremblement  ne  s'est  pas  encore  montré,  il 
n'y  a  guère  de  crampes  ni  de  fourmillements;  mais  avant  lui,  se  mani- 
iMle  fréquemment  une'  légère  parésie  sensitive.  Presque  toujours  il  est 
en  rapport  de  siège  et  d'intensité  avec  la  paralysie,  et  d'une  manière 
générale  avec  les  autres  accidents  locaux  ;  c'est  dire  qu'il  siège  le  plus 
souvent  aux  membres  supérieurs,  exclusivement  ou  surtout  à  la  main 
le  plus  en  contact  avec  le  plomb,  la  droite  chez  les  droitiers,  la  gauche 
chez  les  gauchers.  Cette  origine  périphérique  est  de  plus  démontrée  rigou- 
reusement par  ce  fait  que  nous  avons  observé  sur  un  compositeur  d'im- 


526   PLOMB.  INTOXICATIOK  chronique,  troubles  nerveux  et  LOGOMOflim* 

primerie,  un  tremblement  mar<]ué  des  mains,  en  Fabsence  de  liséré  gin> 
gival.  Nous  avons  d'ailleurs  retrouvé  semblable  localisation  de  ce  symptÂme 
au  point  de  contact  du  mercure  chez  un  doreur  sur  métaux.  Le  tremble- 
ment saturnin  peut  aussi,  comme  la  paralysie,  résulter  indirectement  d'un 
empoisonnement  général  par  absorption  digestive  et  respiratoire.  D  doit 
en  être  ainsi  pour  le  tremblement  passager  des  membres,  surtout  des 
supérieurs ,  que  Grisolle  a  noté  immédiatement  après  Taccës  de  T^fige 
épileptiforme.  A  un  léger  degré,  le  tremblement  disparait  fiarfins  assez 
vite  sous  rinfluence  du  repos  et  du  traitement  ;  mais  chez  les  anciens 
ouvriers  qui  ont  subi  une  forte  atteinte,  il  peut  persister  avec  la  paralysie 
plusieurs  années  après  la  cessation  du  travail. 

Le  tremblcmentreste  le  plus  souvent  partiel.  Chez  les  mineurs  de  mine- 
rai plombifère,  outre  les  membres  supérieurs,  il  affecte  Torbiculaire  des 
lèvres  et  les  zygomatiques  ;  il  suit  alors  d'ordinaire  les  grandes  attaques 
de  colique.  Plus  rarement  enfin,  ces  ouvriers  sont  pris  d'un  tremblement 
généralisé,  analogue  à  la  paralysie  agitante  :  trémulation  des  lèvreSy  cla- 
quement des  mâchoires,  branlcment  de  la  tète,  etc. .  Cette  dernière  forme 
ne  résulterait  jamais  que  d'une  intoxication  profonde  (Wilson,  mines  de 
Lead-Hills;  Brockmann,  mines  de  TOber  Harz). 

On  est  en  droit  de  supposer  que  le  tremblement  et  la  paralysie  motrice 
reconnaissent  une  même  cause  anatomo-pathologique. 

A  côté  du  tremblement,  se  placent  :  a  les  soubresauts  inToIontaire- 
de  Vhémichorëe,  étudiée  par  Levais  (1872)  et  Raymond  (1876);  h  une 
forme  peu  fréquente  d'incoordination  des  mouvements  volontaires,  se 
produisant  avec  ou  sans  le  secours  de  la  vue  ;  le  malade  éprouve  de  la  peine 
à  porter  une  cuiller  à  la  bouche,  spécialement  en  tenant  les  yeux  fermés, 
ou  bien  une  gcne  et  presque  une  impossibilité  de  la  marche  et  de  la  sta- 
tion verticale,  par  titubation  plutôt  que  par  parésie.  Cette  ataxie^  dont 
nous  avions  incidemment  rapporté  des  cas  légers  aux  membres  supérieurs, 
dans  notre  thèse  (1873),  peut  se  présenter  à  un  degré  intense,  qui  a  été 
décrit  par  Raymond  (1874),  siégeant  dans  les  membres,  surtout  les  infé- 
rieurs, et  donnant  lieu  à  un  ensemble  analogue  aux  manifestations  locales 
de  Tataxie  locomotrice  ;  mais  elle  se  montre  bénigne  et  passagère.  Elle 
nous  parait  due  à  une  désharmonie  des  antagonistes  et  à  une  désassocia- 
tion  musculaire,  sous  la  dépendance  de  la  paralysie  motrice;  car  les  ma- 
lades continuent  à  se  rendre  compte  de  la  position  occupée  par  leurs 
membres. 

4*  Paralysie  motrice.  —  Tumeur  dorsale  de  la  main,  —  La  paralysie 
motrice  saturnine,  que  Nicandre  avait  mentionnée  dès  le  premier  siècle 
de  notre  ère,  a  été  décrite  assez  complètement  par  Van  Swieten,  et  bica 
observée  par  Tanquerel  ;  enGn  les  recherches  originales  de  Duchemie 
(de  Boulogne),  à  l'aide  de  l'électrisation  localisée,  sont  venues  l'éclainr 
d'un  nouveau  jour. 

La  plupart  des  ouvriers  saturnins  qui  réclament  les  soins  de  la  roéd^ 
cine  sont  atteints  de  paralysie  motrice,  ne  serait-ce  qu'à  un  léger  degré; 
les  rares  sujets  que  nous  en  avons  trouvés  exempts  n'étaient  entrés  à  l'hô- 


PLQHB.  —  IMTOXICATION  CHROKIQCE.  TROIBLES  NERVEUX  ET  LOCOMOTKDaS.    527 

jUJ  que  pour  de  faibles  manifestations  toxiques  :  dyspepsie  gastro- 
ileatinale  ou  légères  coliques  seulement;  ils  présentaient,  comme 
fmplômes  locaux,  de  la  parésie  sensitive,  des  douleurs  et  des  crampes. 
lans  enTÎfon  la  moitié  des  cas,  il  est  vrai,  cette  parésie  motrice,  rare- 
lent  aeeusée  spontanément  par  le  malade  qui  Tignore  ou  n'y  attache 
ue  peu  d'importance,  n'est  pas  Taffection  qui  a  déterminé  Tentrée  à 
hdpital.  Presque  toujours  elle  siège  aux  mains  et  aux  avant-bras,  sur- 
fit et  même  d'une  manière  exclusive  au  membre  le  plus  en  contact  avec 
I  plomb  ;  il  s'agit  là  d'une  fortne  essentiellement  chronique  d'emblée. 
es  ouvriers  non  malades,  encore  au  travail,  et  qui  ne  sont  qu^au  pre- 
lierslade  de  l'intoxication,  conservent  d*ordinaire  leur  puissance  muscu- 
lire  intacte  ;  ils  ne  sont  guère  affectés  que  de  parésie  sensitive,  de  dou- 
nirsv  de  crampes  et  tout  au  plus  d'un  léger  tremblement. 

Dans  un  quart  des  cas,  la  paralysie^  subaigûe^  du  moins  au  début, 
iteint  en  quelques  jours  son  summum,  bien  qu'elle  doive  prendre  une 
Hure  chronique  dans  les  périodes  d'état  et  de  déclin;  ce  sont  encore 
es  membres  supérieurs  qu'elle  frappe  ordinairement.  Elle  est  en  général 
nnoncée  par  des  prodromes  locaux  signiGcatifs,  de  courte  durée  :  lassi- 
ttdes,  sensations  de  fourmillements,  de  pesanteur  et  d'engourdissement, 
rampes  et  tremblement;  enfin  l'apparition  des  symptômes  paralytiques 
»eut  s'accompagner  de  douleurs  représentées  souvent  par  des  élancements 
lUant  de  Tépaule  au  pli  du  coude,  parfois  sur  le  trajet  du  radial,  avec 
(odolorissement  par  les  mouvements  ou  la  pression,  comme  dans  la  né- 
rite.  Il  est  probable  que  la  forme  chronique  lui  préexiste  presque  tou- 
onrs  plus  ou  moins  marquée.  Cette  paralysie  aiîecte  d'abord  les  extré- 
nités  qu'elle  touche  plus  fortement,  et  dans  lesquelles  elle  persiste  en 
iemier  lieu  ;  constamment  sur  les  ouvriers  saturnins,  elle  prédomine  ou 
îëge  uniquement  au  membre  supérieur  le  plus  en  rapport  avec  le  métal. 
ha  un  capsuleur  de  flacons,  la  paralysie  était  strictement  limitée  à  la 
Doitié  interne  de  la  paume  et  aux  deux  derniers  doigts  de  la  main  droite, 
(vee  lesquels  il  lissait  la  calotte  de  plomb  ;  il  n'y  avait  d'ailleurs  jamais 
su  aucun  symptôme  d'intoxication  générale  :  ni  colique,  ni  constipation, 
li  trace  de  liséré  gingival.  D'ordinaire  cependant,  pour  les  cas  intenses, 
a  paralysie  subaiguë  n'est  survenue  qu'après  plusieurs  attaques  de 
îoliquey  compliquées  parfois  d'encéphalopathie.  Elle  apparaît  beaucoup 
pks  tôt  chez  les  céiusiers  que  chez  les  peintres. 

Sur  un  quart  des  sujets,  la  paralysie  frappe  tout-à-coup  une  assez 
grand.e  étendue  du  corps,  dans  le  cours  de  vives  coliques  avec  accidents 
cérâ>ro-spinaux  {paralysie  subite)  :  nous  en  avons  déjà  parlé  à  propos 
de  l'encéphalopathie,  dont  elle  constitue  la  forme  paralytique.  Assez 
diffuse  au  début,  elle  se  limite  ensuite,  ou  prédomine  dans  certaines  par- 
tics,  soit  aux  membres  supérieurs  ou  inférieurs,  soit  dans  une  moitié  du 
corps,  soit  enfin  à  un  membre  supérieur  en  même  temps  qu'à  la  moitié 
correspondante  de  la  face,  simulant  une  paraplégie  (Jaccoud),  une  hémi- 
plégie ou  une  monoplégie  brachiale  et  faciale.  Mais  lors  même  qu'il  pa- 
rait y  avoir  une  véritable  hémiplégie  avec  altération  de  la  parole  et  des 


328  PLOMB.  •—  iNTouGATioii  chronique,  troubles  rkrteux  et  locoboiivis. 

sens,  il  est  toujours  possible  de  constater  :  d'une  part,  qu*elle  prédomine 
au  membre  supérieur,  plus  particulièrement  vers  son  extrémité,  et, 
d'autre]  part  que  la  moitié  du  corps  censée  intacte,  est  en  réalité  plus 
ou  moins  intéressée  elle-même,  de  sorte  que  ce  serait  plutôt  une  forme 
pseudo-hémiplégique;  cette  dernière  peut  exceptionnellement  se  déte- 
lopper  en  dehors  de  tout  autre  épiphénomcne  aigu.  L'hémiplégie  Mtu^ 
nine,  signalée  par  Stoll,  Andral  et  Tanquerel,  a  été  étudiée  à  nouTeau 
dans  notre  thèse  en  1873,  et  Tannée  suivante  par  Vulpian  et  Raymond. 
La  paralysie  atteint  enfin  quelquefois  les  muscles  de  l'œil,  du  larynx 
(aphonie),  et  du  tronc,  voire  même  la  diaphragme. 

La  paralysie  satmmine  est  caractérisée  par  une  perte  ou  une  diminu- 
tion des  contractilités  volontaire  et  électro-musculaire,  inégalement 
répartie  dans  les  régions  affectés,  intéressant  plus  particulièrement  cer- 
tains muscles,  surtout  les  extenseurs  (Stockusen),  respectant  certains 
autres,  et  pouvant  même  se  limiter  à  quelques  faisceaux  musculaires. 

La  prédominance  dans  les  extenseurs  entraine  une  attitude  caractéris- 
tique des  membres  en  flexion,  par  défaut  d'antagonisme;  aux  membres 
supérieurs, il  en  résulte  une  détormation  de  la  main  en  griffe  et  la  chute 
du  poignet.  Les  muscles  du  membre  supérieur  sont  d'ordinaire  succeasi- 
mcnt  affectés  dans  l'ordre  suivant  :  extenseur  commun  des  doigts,  exten- 
seurs propres  de  Tindex   et  du  petit  doigt,  long  extenseur  du  pouce, 
deuxième  et  premier  radiaux,  cubital  postérieur,  long  abducteur  et  court 
extenseur  du  pouce.  Chez  la  plupart  des  peintres,  l'annulaire  et  spéciale- 
ment le  médius  sont  paralysés  les  premiers,  peut-être  parce  qu'ils  n'ont 
point  d'extcnseui*s  propres  pouvant  suppléer  à  la  paralysie  précoce  de 
Textenseur  commun  ;  mais  nous  avons  vu,  surtout  dans  d'autres  profes- 
sions, dilTérenls  doigts  être  primitivement  frappés,  c'étaient  alors  cenx 
qui  se  trouvaient  le  plus  en  contact  avec  le  poison.  Le  long  supinateur  et 
rancoué  sont  généralement  intacts  ;  mais,  pour  le  supinateur  en  parti- 
culier, cette  intégrité, donnée  par  Duclienne  (de  Boulogne),  comme  signe 
diagnostique  dilférentiel  d'avec  la  paralysie  a  frigore^  n'est  pas  cons- 
tante, témoin  les. cas  d'Elgnowski,  de  Piedra  et  de  Proust  ;  dans  raranl- 
dernier,  et  probablement  aussi  dans  le  dernier,  il  s'agissait  d'une  paralysie 
directe,  localisée  aux  membres  supérieurs.  Puis  viennent  les  muscles  de 
la  région  antibrachiale  antérieure,  de  la  paume  de  la  main,  surtout  de 
réminence  thénar,  les  interosseux  palmaires  ;  le  deltoïde  a  parfois  été 
atteint  primitivement  sans  que  les  muscles  du  bras  le  fussent  ;  au  bras, 
le  triceps  est  en  général  plus  intéressé  que  le  biceps. 

Bien  qu'elle  puisse  rester  intacte  (Jaccoud,  Moritz  Meyer),  la  contrao» 
tibilitc  électro-musculaire  se  montre  d'ordinaire  rapidement  affaiblie  ou 
abolie,  tantôt  avant,  tantôt  et  plutôt  après  la  contractilité  volontaire.  Le 
caractère  quasi-expérimental  de  Texploration  de  cette  contractilité 
électrique  rend  l'inégale  distribution  de  celle-ci  plus  évidente  encore 
que  celle  de  la  contractilité  volontaire.  La  recherche  de  l'état  de  la  con- 
tractilité électrique  ne  peut  remplacer  celle  de  la  contractilité  volontaire, 
surtout  au  début  ;  mais  à  une  certaine  époque  elle  devient  très  utile  au 


PLOMB.  —  ^TOXICATIOll  CHRONIQUE.  TROUBLES  MERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  329 

pronostic,  parce  que  Tabolition  de  cette  contractilitc  dénonce  une  tendance 
àTatrophie.  Les  résultats  varient  avec  les  courants  induits  ctcontinus  aux 
différentes  périodes.  Au  début,  les  courants  induits  cessent  les  premiers 
de  birecontracter  les  muscles;  la  contractilité  par  les  courants  continus 
peut  alors  persister  seule,  puis  elle  disparaît  elle-même.  A  une  période 
plas  avancée,  dans  les  formes  graves,  les  muscles  se  contractent  à  nou- 
veau sous  l'influeiice  de  courants  continus,  plus  faibles  même  que  nor- 
malement (Legros  et  Onimus).  Enfin,  les  courants  électriques  continus  et 
induits  passent  très-facilement  des  extenseurs  aux  iléchissseurs  qu'ils  font 
contracteff  ce  qui  ne  se  produit  jamais  à  l'état  normal  (Vulpian  et 
Raymond). 

Quand  la  paralysie  est  intense  ou  de  longue  durée,  il  survient,  dans^ 
les  parties  intéressées,  divers  troubles  circulatoires,  sécrétoires  ot  nutri- 
tifr  :  pâleur,  refroidissement,  sécheresse  et  amincissement  de  la  peau  ; 
souTent  sudorèse  abondante  (Tanquerel),  quelquefois  tumeur  dorsale  de 
la  main,  dont  il  sera  question  plus  loin,  et  enfin  de  l'atrophie. 

La  forme  parétique  clu-onique  des  membres  supérieurs,  à  début  insi- 
dieux,  évolue  avec  lenteur  durant  des  années,  et  reste  généralement 
limitée  aux  extrémités,  n'entravant  guère  le  travail.  La  forme  à  période 
d'augment  subaiguê  s'établit  progressivement  en  quelques  jours,  puis 
reste  stationnaire  de  un  à  plusieurs  mois,  pour  ensuite  décroître  peu  à 
pea.  D  n'en  est  pas  de  même  pour  la  paralysie  subite,  qui  se  montre 
d'emblée  à  son  maximum,  et  va  bientôt  s'améliorant,  quelquefois  assez 
rapidement  en  quelques  mois. 

Les  récidives  sont  fré(|ucntes,  si  le  malade  s'expose  de  nouveau  à  Tac- 
lion  du  poison. 

Rappelons  la  terminaison  possible  par  la  paralysie  générale,  chez  les 
jets  qui  ont  éprouvé  des  attaques  répétées  d'encéphalopathie. 
Lee  lésions  anatomiques  de  la  paralysie  saturnine  sont  encore  assez 
connues. 
Les  muscles  paralysés  présentent  trois  sortes  d  altérations  (Gombault), 
^peuvent  se  rencontrer  associées  :  1®  léger  amincissement;  2**  dimi- 
^  ntt'onieonsidérable  de  volume,  teinte  jaune-brun  et  même  décoloration, 
^  tfMme  dans  le  stade  ultime  de  l'atrophie  ;  3"  ailleurs,  aspect  de  jambon 
^ftBaéy  augmentation  considérable  de  volume,  dureté,  rigidité,  déjà  notée 
"^  *"*"  Knssmaul  et  Maier,  et  sécheresse  ;  développement  et  épaississement 
gaines  des  faisceaux  primitifs.  Sous  le  microscope,  on  trouve  dans 
muscles  décolorés  et  diminués  de  volume,  sauf  la  dégénérescence 
toutes  les  formes  d'atrophie  chronique.  La  dégénéiescence  gra* 
o-graisseuse  proprement  dite  est  rare  (Ollivier  et  Laucereaux).  Il  y  a 
•  plus  souvent  simple  diminution  de  la  substance  contractile,  parfois 
^  ^^  fissure  et  même  excavation  au  centre  ou  à  la  périphérie  du  faisceau 
s^^Hiitif,  plus  rarement,  développement  de  vésicules  adipeuses  entre  les 
^^•«ccaux  primitifs,  d'où  coloration  jaune  et  pâleur.  Dans  les  muscles 
et  épaissis,  la  fibre  musculaire  est  augmentée  de  volume;  le  tissu^ 
^jonctif  interfasciculaire  a  proliféré  ;  les  noyaux  du  sarcolemme  multi- 


330  PLOHB.  —  INTOXICATION  CHRONIQUE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOCOIOfim.  ' 

plies  s'accumulent  en  certains  points,  au  niveau  desquels  ils  refouleni  la 
substance  contractile,  qui  est  ainsi  fragmentée,  et  ils  donnent  à  la  fibre 
un  aspect  moniliforme. 

La  présence  du  plomb  dans  les  muscles  a  été  démontrée  par  Devergie. 
Contrairement  à  Gusserow,  qui  croyait  à  une  accumulation  prépondérante 
de  ce  métal  dans  le  système  musculaire,  Heubel  pense  que  c'est  oe  méraé 
système  qui  en  contient  le  moins. 

D'accord  sur  les  lésions  des  muscles,  les  observateurs  sont  d'avis  diffé- 
rents pour  les  lésions  nerveuses. 

Les  nerfs  périphériques  desservant  les  muscles  paralysés  sont  presque 
constamment  altérés,  quelquefois  à  l'exclusion  de  la  moelle  ei  de  ses 
racines  (Ollivier,  Gombault  et  Westphal),  toujours  d'ailleurs  beaucoup 
plus  que  les  racines  et  à  plus  forte  raison,  que  la  moelle  (Lancereaux), 
mais  relativement  moins  que  les  muscles  correspondants  (Ollivier).  Leur 
altération,  de  plus  en  plus  marquée  vers  la  périphérie,  se  limite  aux  filets 
innervant  les  muscles  atteints  ;  elle  consiste  d'ordinaire  en  une  atrophie 
évidente  du  tronc  nerveux,  avec  pâleur,  amincissement,  dégénérescence 
granuleuse,  plus  tard  graisseuse,  et  même  aplatissement  de  ces  tubes. 
Parfois  le  nerf  paraît  sain  à  l'œil  nu  ;  le  microsco|>e  y  révèle  une  proli- 
fération exagérée  des  noyaux  du  tissu  conjonctif  qui  entoure  les  tubes 
nerveux,  surtout  au  voisinage  des  vaisseaux,  dont  les  parois  sont  épais- 
sies ;  la  myéline,  pour  ainsi  dire  étoufTée,  est  diminuée  de  Tolunie, 
presque  disparue,  révélant  à  peine  le  cylindre  d'axe,  qui  le  plus  souvent 
persiste. 

Quand  la  moelle  est  intéressée,  il  s'agit  soit  d'une  coloration  grisâtre 
sans  altération  microscopique,  soit  d'un  léger  degré  d'atrophie  et  de  ra- 
mollissement au  niveau  des  renflements  cervical  et  lombaire,  plus  spéciale- 
ment à  leur  partie  antéro-exteme.  Les  racines  rachidiennes  correspon- 
dantes, surtout  les  antérieures,  sont  elles-mêmes  un  peu  atrophiées, 
avec  ou  sans  altération  granulo -graisseuse  de  quelques-uns  de  leurs 
tubes. 

Dans  un  seul  cas,  on  a  rencontré  les  nerfs  musculaires  sains,  et  les 
racines  antérieures  offrant  tout  au  plus  une  hyperplasie  du  tissu  con- 
jonctif séparant  leurs  tubes  nerveux  ;  la  région  externe  des  cornes  anté- 
rieures de  la  moelle  cervicale  avait  un  certain  nombre  de  cellules  atro- 
phiées, ratatinées,  dépourvues  de  noyaux  et  de  prolongements,  pigmentées, 
parfois  creusées  de  vacuoles  (Vulpian). 

Le  plomb  se  trouve  dans  la  moelle,  mais  en  moindre  proportion  que 
dans  le  cerveau  (Ileubel)  ;  il  n'a  pas  encore  été  décelé  dans  les  nerfs. 

La  pathogénie  de  la  paralysie  est  encore  très  obscure,  et  nous  ne 
devons  point  nous  dissimuler  l'insuffisance  des  éléments,  jusqu'ici  à  notre 
disposition,  susceptibles  de  l'éclairer.  On  s'accorde  généralement  aujour- 
d'hui à  considérer  cette  paralysie  comme  périphérique;  c'est  en  effet  ce 
que  semblent  prouver  ses  symptômes  :  siège  initial  ex'^lusif  ou  au  moim 
^e  prédominance  aux  extrémités,  abolition  des  mouvements  réflexes; 
perte  rapide  de  la  contractilité  électrique,  amyotrophie,  et  ses  lésions 


PLOMB.  •—  IKTOXICATIOK  CHRONIQUE.   TROUBLES  KERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  351 

(sauf  le  cas  de  Yulpian  et  Raymond)  exclusivement  périphériques  ou  de 
moins  en  moins  marquées  vers  le  centre. 

Gusserow  admettait  une  action  directe  du  plomb  sur  les  muscles,  qu*on 
a  peatrêtre  tort  de  rejeter  complètement,  au  moins  pour  la  forme  paréti- 
que  chronique;  elle  expliquerait  la  perte  rapide  de  la  contractilité  gal- 
vanique, qui,  dans  le  cas  de  lésion  exclusive  des  nerfs,  ne  devrait  périr 
que  lentement  ;  et  d'autre  part,  elle  s'accorderait  avec  la  nécropsie  faite 
par  Ollivier,  dans  laquelle  les  lésions  musculaires  étaient  relativement 
plus  considérables  que  celles  des  nerfs  correspondants.  D'après  une 
ingénieuse  hypothèse  de  Hitzig,  le  plomb  agirait  sur  les  muscles  par  Tin- 
tennédiaire  du  sang  et  des  vaisseaux,  et  l'inégalité  de  distribution  de  la 
paralysie,  notamment  sa  prédominance  dans  les  extenseurs,  résulterait 
de  ce  que,  pendant  la  contraction  des  fléchisseurs,  il  se  formerait  un 
diverliculevasculaire,  surtout  veineux,  du  côté  de  l'extension;  l'imperméa- 
bilité des  artérioles  cutanées  et  la  contractilité  annulaire  des  veines 
favoristfaient  la  stagnation  dans  le  réseau  sanguin  musculaire. 

L'invasion  et  la  marche  de  la  forme  à  début  subaigu,  analogues  à 
celles  de  la  névrite,  l'existence  de  divers  symptômes  prodromiques  et 
concomitants,  en  particulier  de  l'anesthésie,  et  les  constatations  nccropsi- 
ques  plaident  en  faveur  d'une  altération  primitive  des  nerfs  périphéri- 
queSy  des  rameaux  intra-musculaires  (Heubel),  et  d'abord  même,  selon 
nous,  de  leurs  plaques  motrices  terminales,  plutôt  que  de  leur  tronc  lui- 
même  (Westphal  et  Charcot)  ;  car  les  lésions  musculaires  ne  correspon- 
dent pas  à  des  groupes  de  muscles  sous  la  dépendance  d'un  même  nerf, 
et  elles  sont  de  plus  en  plus  prononcées  vers  la  périphérie. 

Cette  paralysie  périphérique  doit  évidemment,  dans  un  certain  nombre 
de  cas,  être  l'effet  d'un  apport  indirect  du  plomb  par  le  sang  dans  les 
voies  circulatoires,  puisqu'on  Ta  observée  chez  des  sujets  ayant  absorbé 
le  métal  uniquement  par  le  tube  digestif. 

Quant  à  la  paralysie  saturnine  professionnelle,  nous  croyons  avoir 
prouvé  par  la  clinique,  qu'elle  est  très  fréquemment  le  résultat  direct 
de  Vabsorption  cutanée  ;  elle  atteint  en  efTct  le  plus  souvent  les  membres 
supérieurs  dans  leurs  derniers  articles,  siégeant  exclusivement  ou  d'une 
façon  prédominante,  du  côté  droit  chez  les  droitiers,  du  côté  gauche  chez 
les  gauchers.  La  preuve  que  cette  prédilection  n'est  pas  due  à  un  apport 
BDiélallique  plus  considérable,  résultant  d'un  afflux  sanguin  dans  les  par- 
ties qui  travaillent  le  plus  (Delannay),  c'est  que  chez  les  ouvriers  droitiers, 
mais  exposant  plus  souvent  leur  main  gauche  à  la  contamination  du 
plomb,  par  le  fait  de  leur  genre  de  travail  (gauchers  professionnels), 
eetle  dernière  main  a  été  le  siège  de  prédilection  de  la  paralysie,  lors 
même  qu'elle  exécutait  un  moindre  travail  musculaire  que  la  droite.  Chez 
quelques  sujets  qui  n'avaient  jamais  éprouvé  aucun  accident  d'intoxica- 
tûm  générale,  et  qui  ne  présentaient  même  pas  de  liséré  gingival,  il  nous 
a  été  possible  d'étudier  dans  toute  sa  pureté  la  paralysie  d'origine 
directe.  Le  métal  est  alors  emmagasiné  àms  le  membre  paralysé  ;  remis 
en  circulation  par  un  traitement  ioduré,  il  peut  donner  lieu  à  un  liséré 


532  PLOMB.  —  INTOXICATION  chronique,  troubles  nerveux  et  LOCOMOnUlS. 

secondaire,  comme  dans  les  cas  de  Frank-Smith  et  de  Fagge,  dont  nous 
avons  déjà  parlé. 

La  paralysie  saturnine  locale  et  directe,  entrevue  par  Pariset  (1820), 
avait  été  signalée  en  Angleterre  par  Frank-Smith,  en  1869.  Nos  premières 
observations  sur  ce  sujet  furent  recueillies,  la  même  année,  quelques  mois 
après  la  publication  du  mémoire  de  Frank-Smith,  dont  nous  ignorions 
l'existence  jusqu'en  1873,  époque  à  laquelle  nousTavons  fait  connaitre  en 
France.  Depuis  lors,  outre  nos  nouvelles  observations  (in  thèse  d'tgrég. 
de  Renaut  et  de  doctorat  de  Drôuet),  il  a  été  publié  des  cas  confirmatUs 
par  Malherbe,  Vulpian,  Piedra,  Proust  et  Edelmann.  Le  D' Dnmet  a  bien 
voulu  se  charger  d*éclairer  la  question  par  l'expérimentation  sur  les  ani* 
maux,  dans  le  laboratoire  et  sous  les  yeux  du  professeur  Vulpian.  Des 
frictions  avec  une  pommade  à  Tacétate  de  plomb  ont,  en  peu  de  temps, 
sufG  à  déterminer  chez  des  lapins,  la  paralysie  de  tel  ou  tel  membre  à 
volonté,  surtout  des  extenseurs,  caractérisée  par  raffaiblissement  deseon» 
tractilités  volontaire  et  électrique,  la  déformation,  la  boiterie  et  l'atro- 
phie. A  la  nécropsie,  les  muscles  étaient  pâles,  mais  encore  sans  altéra- 
tion microscopique  (Déjerîne). 

Les  symptômes  de  la  paralysie  progressive  à  début  subaiga  et  de  la 
forme  subite  ainsi  que  les  lésions  anatomiques  du  système  nerveux,  ten- 
dent à  faire  admettre  qu'il  se  produit,  à  une  certaine  période,  une 
névrite  ascendante,  analogue  à  celle  qui  résulte  de  quelques  lésions  du 
bout  périphérique  des  nerfs.  Quelle  est  la  pathogénie  exacte  de  la  para- 
lysie pseudo-hémiplégique  paraissant  intéresser  plus  particulièrement  une 
moitié  latérale  des  centres  nerveux?  Y  a-t-il  là  un  phénomène  d'irradiation 
nerveuse  réflexe?  Nous  l'ignorons,  mais  nous  pouvons  affirmer  la  saisis- 
sante relation  du  siège  unilatéral  et  de  la  prédominance  périphérique  de 
cette  paralysie  avec  les  points  d'absorption  cutanée  du  poison. 

La  paralysie  peut  elle  être  exceptionnellement  de  cause  médullaire? 
Un  examen  nécropsique  dû  à  Vulpian  et  Raymond,  permet  de  le  croire; 
de  plus,  Vulpian  a  réussi  à  produire  artiCciellemcnt  une  myélite  chez  un 
chien  en  l'empoisonnant  par  le  plomb. 

L'irrégularité  de  distribution  de  la  paralysie  saturnine  constitue  le 
principal  élément  du  diagnostic  différentiel  d'avec  les  paralysies  a  frigore 
et  par  compression  et  la  paralysie  générale  spinale  subaiguê  ;  si,  en^et, 
l'aflaiblissement  de  la  contractilité  électrique,  quand  il  existe,  permet 
d'en  séparer  la  paralysie  radiale  a  frigore^  dans  laquelle  cette  contrac- 
tilité est  conservée,  il  n'en  est  plus  de  même  pour  les  paralysies  par 
compression  ;  et  d'ailleurs  la  contractilité  électrique  peut  rester  intacte 
dans  la  paralysie  saturnine.  On  ne  peut  cependant  se  baser  sur  l'atteinte 
portée  au  long  supinateur  pour  nier  la  nature  saturnine  de  TaffectioB, 
puisque  ce  muscle  n'est  pas  toujours  respecté,  notamment  dans  lei 
cas  de  paralysie  directe,  où  précisément  l'absence  de  liséré  peut  venir 
accroître  encore  la  difficulté  du  diagnostic.  La  coloration  localisée  de 
sulfure  de  plomb  par  un  bain  sulfureux  pourrait  seule  alors  tirer  d'em- 
barras. 


PLOMB. ISTOXICATION  CHRONIQUE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  5^3 

Tumeur  dorsale  de  la  main.  —  On  voit  fréquemment,  chez  les 
saturnins  affectés  de  paralysie  des  extenseurs,  une  tuméfaction  siégeant 
gurle  dos  de  la  main,  au  niveau  du  métacarpe.  Remarquée  dès  1602  par 
PlateTy  et  depuis  lors  étudiée  par  de  Haên  et  les  auteurs  classiques,  la 
tumeur  dorsale  de  la  main  a  été  Tobjet  de  travaux  récents  de  la  part  de 
Gabier,  Hérard,  iSicaise,  Bouchard,  Daviot  et  IIuc-Mazelet.  Il  peut  y  avoir 
an  début  un  œdème  plus  ou  moins  marqué  et  une  douleur  quelquefois 
Tiye  ;  mais  bientôt  la  tumeur  est  constituée  par  une  ou  plusieurs  nodo- 
sités indolentes,  ordinairement  sans  rougeur,  ayant  une  consistance  car- 
tilagineuse, une  forme  allongée,  et  participant  aux  déplacements  qu'on 
imprime  aux  tendons  ;  ces  nodosités  donnent  sous  le  doigt  explo;- 
rateur  la  sensation  de  Tépaississement  des  tendons  extenseurs  ou  de 
leur  synoviale,  et  peuvent  être  compliquées  de  ténositc  crépitante  à 
Fairant-bras.  Elles  sont  rarement  plus  grosses  qu'un  œuf  de  pigeon,  et 
elles  varient  plusieurs  fois  de  volume  dans  une  même  journée.  Anato- 
miquement,  la  tumeur  dorsale  est  caractérisée  à  un  degré  avancé,  par 
un  état  fongueux  des  tendons  et  de  leur  gaine  synoviale,  qui  est  d'ordi- 
naire injectée  (Nicaise,  Charcot).  Elle  se  développe  peu  après  le  début 
de  la  paralysie,  et  disparaît  en  général  avec  elle,  sans  laisser  de  trace. 

Attribuée  par  Tanquerel  à  la  saillie  des  extrémités  osseuses,  ou  ratta- 
chée à  la  goutte  (Mérat),  elle  fut,  avec  raison,  rapportée  à  l'appareil  tcn- 
dino-synovial  par  Plater,  de  llacn.  Desbois,  Pariset.  On  a  cru  devoir  la 
rapprocher  des  artrhopathics  et  des  ténosites  que  le  repos  amène  chez  les 
fracturés  (Gosselin).  Son  siège  spécial  ne  peut  s'expliquer,  comme  le 
veut  Gubler,  par  le  frottement  des  tendons  extenseurs  contre  les  saillies 
osseuses,  résultant  de  la  chute  du  poignet,  car  dans  un  cas  de  Landrieux, 
la  tumeur  existait  sans  paralysie  des  extenseurs.  On  doit  plutôt,  avec 
Charcot,  la  considérer  comme  une  lésion  trophique  consécutive  aux  alté- 
rations du  système  nerveux.  Les  observations  de  Gubler,  Charcot  et 
Vulpian  ont  du  reste  montré  que  la  tumeur  dorsale  se  rencontre  aussi 
en  dehors  du  saturnisme,  dans  les  paralysies  d'origine  cérébrale,  l'atro- 
phie musculaire,  etc. 

5*  Paralysie  sensitive. —  Dans  le  saturnisme  professionnel  la  paralysie 
de  sensibilité  est  un  des  accidents  les  plus  précoces,  qu'on  peut  observer 
longtemps  avant  la  paralysie  motrice,  surtout  chez  les  ouvriers  bien 
portants,  qui  ne  se  doutent  pas  en  être  atteints.  Toujours  elle  coexiste 
avec  la  paralysie  motrice,  qu'elle  dépasse  en  intensité  et  en  étendue  ; 
c'est  seulement  sur  les  ouvriers  ayant  depuis  longtemps  cessé  de  tra- 
vailler, ou  qui  ont  suivi  un  long  traitement,  qu'il  est  possible  de  trouver 
de  la  parésie  motrice  survivant  aux  troubles  sensitifs,  dont  le  siège  super- 
ficiel explique  la  plus  rapide  disparition,  Il  est  présumable  qu'il  n'en  est 
pas  de  même  dans  l'intoxication  ab  ingestis^  mais  les  observations  à  ce 
sujet  laissent  encore  à  désirer.  Nous  avons  vu,  d'une  manière  plus  évi- 
dente encore  que  pour  la  paralysie  motrice,  la  paralysie  sensitive  exister 
exclusivement  ou  prédominer  au  point  de  contact  du  métal  :  chez  les 
cérusiers,  soit  au  pli  du  coude  gauche  sur  lequel  glisse  le  saumon  de 


334  PLOMB.  -—  iMToxiCATiois  chronique.  TROCBLES  NBRYEDX  ST  LOCOBORUmS. 

plomb  pendant  l'enfournement,  soit  à  Textrémité  du  membre  supérieur 
droit  jusqu'au  milieu  de  Tavant-bras,  niveau  d'aifleurement  du  bain  de 
lait  de  ccruse  pendant  les  manipulations;  ou  bien  à  la  main  gauche 
soutenant  la  cuiller  pleine  de  céruse  ;  à  Tépaule  droite  sur  laquelle 
un  gazier  portait  fréquemment  des  tuyaux  de  plomb  enroulés  drculai- 
rement  ;  aux  deux  derniers  doigts  et  à  la  partie  correspondante  de  la 
paume  de  la  main,  servant  à  capsuler  les  flacons;  au  médius  droit 
accolé  au  pinceau  d'un  peintre.  L'influence  des  vêtements,  comme  obs- 
tacle à  la  pénétration  des  particules  métalliques  a  été  mise  en  évidence 
chez  une  poudreuse  de  porcelaine,  dont  les  poignets  et  les  avant-bras 
furent  protégés  par  des  manchettes  de  laine,  ainsi  que  dans  quatre  autres 
observations,  où  les  surfaces  laissées  à  nu  par  le  devant  de  la  chemise 
entr'ouverte  et  au-dessous  des  pans  ou  des  manches  retroussées  plus  ou 
moins  haut ,  ont  été  frappées  de  paralysie  sensitive. 

Des  faits  analogues  avaient  déjà  été  signalés  dubitativement  par 
Ladreit  et  d'une  manière  affirmative  par  Frank-Smith;  après  nous,  ils 
ont  été  confirmés  par  les  observateurs  cités  à  l'occasion  de  la  paralysie 
motrice,  et  dernièrement  ])ar  Proust.  Dans  ses  expériences  sur  les  ani- 
maux, Drouet  a  trouvé  un  affaiblissement  de  la  sensibilité  électrique 
aux  membres  intoxiqués  localement  par  des  frictions  saturnines. 

Si  la  paralysie  de  sensibilité  est  un  des  accidents  directs  qui  se  loca- 
lisent le  mieux,  c'est  aussi  un  de  ceux  qui  se  diffusent  le  plus  vite, 
s'irradiant,  pour  s'atténuer  il  est  vrai,  dans  toute  la  moitié  correspon- 
dante du  corps.   11  s'ensuit  alors  une  apparence  d'hémiancsthésie,  que 
nous  avons  décrite  le  premier  dès  1870,  mais  il  n'y  a  pas,  à  propre- 
ment parler,  hémianesthésie  comparable  à  celle  des  hystériques,  car, 
d'une  part,  on  observe  toujours  dans  l'autre  moitié  du  corps  un  certain 
degré  de  paralysie  sensitive,  parfois  assez  considérable  ;  et  d'autre  part, 
elle  prédomine  constamment  au  point  d'absorption  cutanée,  qui  est  le 
plus  souvent  à  ia  périphérie,  tandis  que  dans  riiémianesthésie,  elle  est 
de  plus  en  plus  prononcée  vers  le  centre,  plus,  par  exemple,  à  la  face 
qu'aux  membres.  Dans  quelques  cas,  nous  avons  rencontré    un  croise- 
ment de  la  paralysie  à  la  face  par  rapport  au  reste  du  corps.  On  trou- 
vera, à  propos  des  altérations  des  sens,  les  curieuses  relations  de  siège 
que  chacune  de  celles-ci  présente  alors  avec  la  paralysie  sensitive  de  la 
face  et  du  reste  du  corps.  Cette  fausse  hémianesthésie  accompagne  tou- 
jours la  pseudo-hémiplégie,  mais  elle  peut  exister  en  dehors  d'elle. 

L'apparence  paraplégique  de  lanesthésie  est  plus  rare;  elle  peut  se 
combiner  avec  la  forme  précédente. 

Dans  les  quelques  cas  où  la  paralysie  sensitive  paraît  généralisée,  on 
la  retrouve  toujours  plus  marquée  dans  ses  sièges  de  prédilection  ordi- 
naires. 

La  prédominance  à  la  face  dorsale  des  mains  et  des  avant-bras  est 
fréquente,  mais  non  absolue  ;  nous  avons  vu  tantôt  précisément  le  con- 
traire, tantôt  sur  le  même  sujet,  la  main  et  lavant-bras  plus  atteints, 
l'une  sur  son  dos  et  l'autre  à  sa  face  palmaire.  Il  n'existe  aucune  i^elation 


PIX>1IB.  —  IHTOXICATIOA  CHROMQCE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOCOMOTEURS.  335 

entre  l*anesthésie  dorsale  et  la  paralysie  des  extenseurs,  puisque  dans 
les  cas  d*anesthésie  prédominant  à  la  face  palmaire,  les  extenseurs 
étaient  beaucoup  plus  atteints  que  leurs  antagonistes, 

La  paralysie  de  sensibilité  est  d'abord  superficielle  ou  tégumentaire,  et 
plus  tard  profonde,  siégeant  dans  les  parties  sous-jacentes,  muscles, 
articulations,  etc. 

La  peau  et  les  muqueuses  sont  frappées  dans  leurs  diverses  espèces  de 
sensibilité. 

D  y  a  rarement  perte  absolue  de  la  sensibilité  tactile  (ancsthésic  pro- 
prement dite),  ou  du  moins  celle-ci  reste  confinée  dans  un  siège  très- 
limité.  En  revanche,  la  diminution  de  cette  sensibilité,  que  nous  avons 
désignée  sous  le  nom  d'hypesthésie,  se  trouve  toujours  plus  ou  moins 
marquée,  quand  la  sensibilité  à  la  douleur  est  aiïaiblie;  de  sorte  que, 
dans  le  saturnisme,  Tanesthésie  n'existe  pas  telle  que  Beau  la  concevait, 
c^est-i-dire  comme  perte  de  la  sensibilité  douloureuse,  avec  conservation 
intégrale  du  tact  ;  c'est  ce  que  l'emploi  de  Taesthcsiomètre  nous  permet 
d'affirmer.  Quand  Thypesthésie  est  légère  et  également  répartie  dans 
chaque  moitié  du  corps,  auquel  cas  il  manque  par  conséquent  un  terme 
de  comparaison,  elle  ne  peut  être  révélée  que  par  l'exploration  aesthésio- 
métrîque.  L'aestliésiomètre  nous  a  servi  à  démontrer  avec  une  précision 
pour  ainsi  dire  mathématique,  le  siège  de  prédilection  de  l'hypesthésie 
d'origine  locale.  Sans  son  aide,  enfin,  nous  n'aurions  pu  discerner 
l'hyperesthésie  (nous  voulons  dire  Texaltation  du  tact  seulement)  d'un 
côté  du  corps  d'avec  l'hypesthésie  du  c6té  opposé;  nous  avons  de  plus 
ainsi  trouvé  dès  1870,  (Arch.  de  physioL,  et  thèse,  1873)  que  souvent 
il  y  a  hyperesthésir,  soit  dans  les  parties  homologues  de  la  moitié  latérale 
du  corps  opposée  aux  parties  hypesthésiées,  soit  sur  la  face  d'un  membre 
opposée  à  sa  face  hypesthcsiée,  soit  enfin  à  la  face  et  aux  membres  infé- 
rieurs dans  le  cas  d'hypesthésie  des  membres  supérieurs,  comme  s'il  y 
aTsit  une  sorte  d'hypéreslhésie  compensatrice^  par  un  mécanisme  ana- 
logue au  curieux  phénomène  du  transfert,  que  les  expériences  métallo- 
thérapiques  ont,  depuis  lors,  fait  découvrir  chez  les  hystériques. 

L'analgésie,  perte  complète  de  la  sensibilité  à  la  douleur,  est  beaucoup 
plus  fréquente  et  plus  étendue  que  Tanesthésie.  L'hypalgésie  serait  aussi 
plus  facile  à  constater  que  l'hypesthésie,  si  l'on  ne  s'aidait  de  l'aesthésio- 
mètre.  La  paralysie  de  la  sensibilité  à  la  brûlure  est  plus  tardive,  moins 
intense  et  d'un  siège  plus  limité  que  celle  de  la  sensibilité  à  la  piqûre  et 
au  pincement.  A  un  premier  degré  d'analgésie  à  la  brûlure,  cette  dernière 
n'est  plus  perçue  que  comme  chaleur,  pour  ne  plus  déterminer  ensuite 
qu*une  sensation  de  contact;  elle  peut  même  ne  plus  être  sentie  du  tout. 
La  sensibilité  électrique  est  abolie  ou  diminuée. 

Parmi  les  saturnins  analgésiques,  un  grand  nombre  éprouvent  des  dou- 
leurs superficitlles  et  profondes,  précisément  dans  les  parties  analgésiées 
(analgéne  douloureuse);  nous  pouvions  impunément  déterminer  sur 
eux  des  brûlures  à  divers  degrés  ;  mais  quelques  heures  plus  tard,  lors  de 
rétablissement  du  travail  inflammatoire,  il  se  développait  sur  place  des 


336  PLOUB.  —  IKTOXICATION  CHRONIQUE.  TROUBLES  NERVEUX  ET  LOGOMOTBQBB. 

douleurs  persistantes,  absolument  comme  s'il  n*y  avait  pas  eu  analgésie; 
et  pourtant  celle-ci  persistait  encore,  ainsi  que  nous  nous  en  sommes  as- 
suré.Des  éruptions  cutanées,  la  plaie  d*un  vésicatoire,  étaient  douloureuses 
sur  une  partie  analgésiée.  Chez  d'autres  sujets  plus  rares,  profondément 
intoxiqués,  les  douleurs  de  la  brûlure  ne  se  sont  jamais  montrées  consécu- 
tivement, malgré  le  développement  du  processus  inflammatoire  aboutis- 
sant à  la  formation  de  fortes  cscharres  ;  or,  il  est  remarquable  qpie  ces 
malades  ne  ressentaient  aucune  douleur  spontanée  dans  les  parties  anaW 
gésiées.  En  somme,  la  brûlure,  non  perçue  en  tant  que  traumatisoie,  peut 
être  ou  ne  pas  élrc  sentie  consécutivement  en  tant  que  processus  patho- 
logique. Ces  faits  nouveaux  et  inattendus,  susceptibles  d'éclairer  la  nature 
même  de  la  sensibilité  à  la  douleur,  ont  été  retrouvés  par  nous  analogues 
dans  d'autres  maladies,  spécialement  dans  la  tétanie.  Aussi  avon^HWHis 
cru  pouvoir  dédoubler  cliniquement  l'analgésie  en  analgésie  proprement 
dite  (a  priv.,  et  àXYO<;,  douleur),  ou  perte  de  la  sensibilité  à  la  douleur 
physiologique,  immédiate,  provoquée,  et  en  anodynie  (a  priv.,  et 
îî6vY],  soufi'rance),  ou  perte  de  la  sensibilité  à  la  douleur  pathologique,  * 
consécutive,  spontanée;  la  première  appartiendrait  à  la  poau  consi- 
dérée comme  organe  du  sens  du  toucher,  tandis  que  la  seconde  serait 
une  propmétc  de  tissu.  Le  paradoxe  de  l'analgésie  douloureuse  s'ex- 
plique par  ce  fait  qu'alors  il  y  a  analgésie  sans  anodynie.  La  raison 
physiologico-patholo^iquc  de  ces  constatations  cliniques  sera  recherchée 
plus  loin. 

Presque  toujours,  à  côté  de  l'analgésie  se  rencontrent  une  diminution 
ou  même  assez  souvent  une  perte  de  la  sensibilité  au  chatouillement 
(hypopallesthcsie  et  apallesthésie),  et  une  diminution  notable  delà  sensi- 
bilité thermique  (hypothermesthésie),  allant  rarement  jusqu'à  une  insen- 
sibilité absolue  (athermesthésie).  La  faculté  de  rapporter  la  sensation 
d'une  impression  au  point  où  l'excitation  a  eu  lieu  (sensibilité  à  la  région) 
est  parfois  affaiblie. 

Dans  certains  cas,  il  y  a  erreur  de  sensation,  de  sorte  qu*un  simple 
contact  donne  lieu  à  une  sensation  douloureuse  ou  à  des  fourmillements 
et  des  picotements;  un  léger  frôlement  n'est  plus  perçu  comme  cha- 
touillement, mais  comme  simple  attouchement;  une  piqûre  est  sentie 
seulement  comme  contact,  un  pincement  comme  pression,  une  brûlure 
comme  chaleur  on  contact. 

La  perception  des  impressions  peut  éprouver  un  retard  d'une  demi- 
minute  à  près  de  cinq  minutes,  au  lieu  du  retard  physiologique  d'ua 
quinzième  à  une  demi-seconde  (Brouardel). 

La  sensibilité  musculaire  des  contractions  volontaire  et  électrique  est 
abolie  ou  diminuée  proportionnellement  à  l'altération  de  la  contractililé 
volontaire  et  de  la  contractilité  électrique.  La  paralysie  de  la  sensibilité 
articulaire,  qui,  en  s'ajoutant  à  celle  des  sensibilités  musculaire  et 
cutanée,  enlève  la  notion  de  la  position  occupée  par  les  dilîérents  articles 
des  membres,  ne  s'observe  que  rarement,  et  dans  les  doigts  seulement. 
On  a  vu  que  l'ataxie  est  due  à  une  incoordination  des  mouvements  volon-      f 


PLOMB.  UTOXICATION   CHRONIQUE.    TROUBLES   NERVEUX   ET  LOCOMOTEURS.      r»57 

taires  par  désliarmonie  des  antagonistes  et  désassociation  musculaire  dé- 
pendant de  la  paralysie  motrice. 

La  paralysie  sensitive  est-elle  sous  la  dépendance  d*une  anémie  de  la 
peau  par  contracture  des  artérioles  du  derme  (Gubler,  Rosenstein, 
Hitzig)?  Il  est  possible  que  cette  sorte  d*anémie  active  soit  intervenue 
jusqa*à  un  certain  point,  comme  cause,  dans  les  cas  où  Ton  aurait  fait 
cesser  temporairement  Fanesthésie  par  la  rubéfaction  de  la  peau  (Gubler)  ; 
mais  il  est  loin  d*en  être  toujours  ainsi.  Nous  la  croyons  généralement 
due,  comme  la  paralysie  motrice,  à  une  altération  des  nerfs  périphériques, 
d'abord  et  plus  particulièrement  à  leurs  extrémités  terminales  :  corpus- 
cules du  tact  et  réseau  nerveux  épidermiqne  de  Langerhans,  avec  ses 
corpuscules  étoiles.  L'heureuse  influence  de  la  sudation  (A.  Robin)  résul- 
terait de  rélimination  du  métal  fixé  sur  cet  appareil  nerveux  superficiel.  Les 
nécropsies  analysées  au  sujet  de  la  paralysie  motrice  montrent  d'ailleurs 
qu'à  une  certaine  période,  les  nerfs  eux-mêmes  sont  gravement  altérés. 

L*aiialgésie  douloureuse,  avec  conservation  de  Todynie,  semble  d'abord 
pouvoir  s'expliquer  par  la  seule  altération  des  extrémités  nerveuses  ter- 
minales périphériques,  qui  ne  peuvent  plus  transmettre  l'impression  dou- 
loureuse de  la  superficie  de  la  peau,  tandis  que  les  filets  nerveux  sous- 
jacents  non  encore  paralysés  participeraient  au  processus  pathologique 
consécutif,  ou  en   subiraient  les  effets   indirects  par  compression,  et 
transmettraient  ainsi  la  douleur  tardive,  ce  qui  n'aurait  plus  lieu  dès 
qu'ils  seraient  atteints  eux-mêmes.  L'examen  attentif  de  cet  ordre  de  faits 
dans  le  saturnisme  et  dans  d'autres  maladies  nous  porte  à  croire  que 
Talgésie  a  pour  conducteurs  les  filets  nerveux  du  système  cérébro-spinal, 
et  Todynie  les  filets  du  grand  sympathique;  ainsi  s'expliqueraient  la 
lente  apparition  des  manifestations  odyniques,  leur  longue  durée,  leur 
coïncidence  avec  les  douleurs  spontanées  des  tissus,  et  enfin  la  paralysie 
tardive  de  Todynie  à  une  période  avancée  de  l'intoxication,  longtemps 
après  la  disparition  de  l'algésie. 

Ce  que  nous  avons  dit  sur  l'origine  de  la  paralysie  motrice  s'applique 
mieux  encore  à  la  paralysie  sensitive;  de  sorte  que,  sans  nier  qu'il  existe 
une  anesthésie  de  cause  indirecte  par  élimination  cutanée,  on  peut  af- 
firmer que,  dans  l'intoxication  professionnelle,  la  paralysie  sensitive  est 
^général  localisée  aux  points  d'absorption  tégumentaire. 

6*  TiH>uble8  des  sens.  —  Vue.  Les  saturnins  présentent  souvent  divers 
troubles  de  la  vision,  qui  sont,  du  côté  du  système  névro-musculaire  : 
laparésie  de  la  paupière  supérieure,  le  nystagmus,  le  strabisme,  la  di- 
plopie  et  la  polyopie,  le  rétrécissement  et  plus  tard  la  dilatation  pupil- 
laire,  et  des  troubles  dans  l'accommodation  (Stelwag)  ;  du  côté  de  la  sen- 
sibilité spéciale,  les  éblouissements,  l'amblyopie  et  même  l'amaurose, 
aTec  djschromatopsie  (Rose  et  Hufner).  Nous  avons  observé  une  fois  le 
tarissement  de  la  sécrétion  lacrymale.  Les  conjonctives  participent 
d'ailleurs  à  la  teinte  subictérique,  et,  ainsi  que  la  cornée,  à  l'insensibilité 
des  téguments.  Les  éblouissements  accompagnent  d'ordinaire  la  céphalal- 
gie. Le  nystagmus  et  le  rétrécissement  de  la  pupille  peuvent  se  manifester 

mxnr.  mot.  mû»,  r  cim.  XXVHI  —  22 


338      PLOMB.  —  IIITOX.   GHRON.   rapports  du   SATURIVISIIB  ATEG  LK  TBÂUVAnSME. 

avant  l'amblyopie.  Il  semble  que  la  dilata  lion  pupillaire  paréiique  dépend 
d'une  amaurose  à  un  degré  plus  avancé. 

L'amblyopie  et  l'amaurose  sont  le  plus  souvent  liées  à  la  paralysie 
de  sensibilité  cutanée;  elles  sont  alors  ordinairement  dues  à  une  névrite 
optique  spéciale  (Hirschicr)  :  injection  et  opajcité  des  papilles,  dont  les 
bords  sont  obscurcis  par  un  voile  rougeâtre  (Schneller).  Â  FinflammatioD 
peut  succéder  l'atrophie  (Hutchinson),  qui  dans  certains  èas  serait  essen- 
tielle et  primitive  (Horner).  Cette  amblyopie  s'établit  lentement,  affec- 
tant, tantôt  les  deux  yeux,  tantôt  plus  particulièrement  ou  même  exclusi- 
vement l'œil  correspondant  à  la  moitié  du  corps  dans  laquelle  la  paralysie 
sensitive  prédomine  on  siège  uniquement  (hémianesthésie).  D'ailleun, 
d'une  manière  générale,  nous  avons  constaté  la  prédominance  des  divers 
troubles  visuels  dans  la   moitié  du  corps  à  laquelle  appartenaient  les 
parties  atteintes  de    saturnisme  direct.  Dans   le   cas  d'hémianosthésie 
croisée  à  la  face  et  au  reste  du  corps,  nous  avons  toujours  vu  Tanesthésie 
/aciale  entraîner  une  altération  de  la  vue  du  même  côté,  tandis  que  la 
surdilé  siégeait  du  côté  de  l'anesthésie  des  membres.  Weiss  avait  déjà 
signalé  l'amblyopie  unilatérale  dans  l'hémiplégie  saturnine.  Noos  rela- 
terons dans  la  thérapeutique  un  cas  de  névrite  optique  locale  et  directe, 
par  absorption  oculaire  médicamenteuse.  A  la  période  hypérémique,  la 
guérison  s'ciïectuc  graduellement  en  un  ou  deux  mois,  ou  même  brusque- 
ment en  quatre  ou  six  jours  ;  le  pronostic  devient  beaucoup  plus  grave, 
quand  il  y  a  atrophie  prononcée  de  la  papille. 

Dans  Tamaurose  qui  précède,  accompagne  ou  plutôt  suit  Tencéphalopa- 
thic,  il  y  a  ordinairement  œdème  de  la  papille,  dépendant  d*un  étrangle- 
ment du  nerf  optique  par  accumulation  de  liquide  dans  l'espace  inter- 
vaginal par  suite  d'une  augmentation  de  pression  intra-cranienne  (Meycr). 
L'atrophie  totale  des  nerfs  optiques  peut  en  être  la  conséquence  ;  d'autres 
fois,  la  vue  est  presque  rétablie  après  plusieurs  semaines. 

Rarement  enfin,  s'observerait  la  cécité  moins  grave,  par  rétinite  albumi- 
nurique  (Danjoy,  Després)  ;  plus  exceptionnelle  encore  est  l'amaurose  urérai- 
que,  passagère,  bénigne,  sans  signe  ophthalmoscopique  notable  (Duplay). 

Ouïe.  —  Les  troubles  de  l'ouïe  se  rencontrent  en  général  associés  aux 
altérations  de  la  vue  :  les  bourdonnements  et  le  tintement  d'oreille,  a\ee 
les  éblouissemcnts,  accompagnent  la  céphalalgie;  et  la  surdité  s  allie  à 
l'amaurose.  Les  altérations  de  l'ouïe  siègent  aussi  uniquement  ou  prédo- 
minent du  côté  le  plus  anesthésié;  mais,  nous  l'avons  dit,  quand  il  y  a 
croisement  de  Thémianesthésie,  la  surdité  siège  du  même  côté  que 
l'anesthésie  des  membres.  La  surdité,  complète  ou  incomplète,  est  tantôt 
passagère,  tantôt,  mais  plus  rarement,  permanente. 

Goût  et  odorat,  —  Outre  la  sensation  sucrée  ou  amère  qu'éprouTCDl 
souvent  les  malades,  on  observe  un  afTaiblissemeiit  et  une  perte  dugodt 
et  de  l'odorat,  sous  la  dépendance  de  l'hémianesthésie. 

F.  Rapports  du  saturnisme  avec  le  traumatisme,  —  Les  plaies  des 
saturnins  se  compliquent  facilement  de  lymphangite  et  îïérysipèk,  qw 
en  compromettent  ou  tout  au  moins  en  retardent  la  guérison. 


^: 


PLOHB.  —   INTOXICATIOK   CHROMIQUE.    ÉUOLOGIE   GÉNÉRALE.  339 

Le  traumatisme  peut  réveiller  et  même  provoquer  pour  la  première 
fois  des  manifestations  toxiques  (coliques,  cncéphalopathie,  albuminurie) 
chezdes  sujets  en  puissance  de  plomb  (Yerneuil  etSabatier). 

n.  Étiologie  générale.  —  Le  plomb  pénètre  par  les  diverses  voies 
cutanée  et  muqueuse,  digestive  et  respiratoire.  L*absorption  par  la  peau, 
même  intacte,  en  quelque  point  que  ce  soit,  a  été  suffisamment  établie, 
à  propos  de  la  paralysie,  pour  que  nous  n'y  revenions  pas  ici;  les  acci- 
dents locaux  résultant  de  ce  mode  d'absorption  ont  été  étudiés  chacun 
en  leur  lieu. 

Les  causes  de  Tintoxication  saturnine  chronique  peuvent  être  groupées 
en  deux  classes,  suivant  qu'elles  sont  accidentelles  ou  professionnelles. 

A  Cause$  accidentelles.  —  Dans  le  premier  cas,  l'absorption  a  lieu 
soit  par  le  tube  digestif,  soit  par  la  surface  tégumentairc,  soit  enfin  par 
les  voies  respiratoires. 

1*  Par  le  tube  digestif,  —  Le  métal  est  dégluti  avec  les  boissons  et  les 
aliments,  avec  les  médicaments  internes  ou  la  salive  souillée  par  divers 
objets  portés  à  la  bouche. 

a)  Boissons.  —  Veau  se  charge  de  plomb  au  contact  des  terrasses, 
des  toitures,  des  gouttières,  des  réservoirs,  des  tuyaux,  des  robinets,  des 
|)ompes  et  des  appareils  distillatoires  (navires  et  pharmacies)  en  plomb, 
en  étaîn  pauvre,  en  fer  ou  cuivre  étamé,  en  zinc  plombifère  soudé  avec  l'al- 
liage d'étain  et  plomb,  ou  en  tôle  galvanisée  avec  du  zinc  plombifère  (char- 
niers des  vaisseaux)  ;  elle  en  dissout  d'autant  plus  qu'elle  est  plus  pure  (eau 
disUUée)  et  plus  aérée,  comme  l'eau  de  pluie  (Bobierre),  et  qu'elle  ren- 
ferme des  matières  organiques  (Medlock)  et  certains  sels  :  azotates,  azo- 
iiles  et  chlorures  (eau  de  mer).  Riche  en  acide  carbonique,  et  surtout  en 
carbonate,  sulfate  et  phosphate  de  chaux,  telle  que  la  plupart  des  eaux 
potables  (Frankland),  l'eau,  en  rapport  avec  le  plomb,  donne  lieu  à  des 
dépôts  insolubles,  nuisibles  quand  elle  est  troubla  (eau  de  Seitz)  mais  sus- 
ceptibles d'être  séparés  par  repos,  décantation  naturelle  ou  fiUration.  Le 
pkmib  se  dissout  mieux  en  présence  d'un  autre  métal  qui  complète  les 
éléments  d'une  pile  galvanique  :  ce  qui  rend  si  dangereux  les  récipients 
faits  de  divers  métaux  plombifères,  de  zinc  par  exemple. 

Dans  le  vm,  le  poison  peut  provenir  des  vases  en  plomb  dans  lesquels 
OQ  les  cuisait  à  la  méthode  antique,  des  pièces  de  plomb  des  pressoirs, 
des  plats  de  plomb  dans  les  tonneaux  contre  la  fermentation  acide,  et 
actuellement  des  grains  de  plomb  restés  dans  les  bouteilles,  ou  du  séjour 
des  égouttures  sur  les  comptoires  en  étain  pauvre  (Leroux)  ;  on  l'a  parfois, 
à  une  certaine    époque,  frelaté  avec  la  litliarge  (colique  végétale  du 

Poitou-Citois). 

Le  cidre  contenu  dans  des  brocs  de  plomb,  adouci  avec  la  litliarge,  ou 
clarifié  avec  l'acétate  et  le  sous-acétate  de  plomb,  a  donné  lieu  aux  co- 
liques végétales  du  Devonshire  (Iluxham)  et  de  Normandie  (Le  Pecq  de  la 
Clôture).  Leudet  a  insisté  sur  la  nocuité  des  égouttures  de  comptoirs  en 

étain  pauvre. 
A  propos  des  coliques  dites  végétales,  il  est  indispensable  d'ajouter 


540  PLOMB.  ^  iMTOxiCATio»  curomque.  étiologie  ckhérau. 

que,  si  la  majorité  d'entre  elles  sont  saturnines,  il  parait  réellement  on 
exister  d'autres,  épidémiques,  ressemblant  beaucoup  à  la  colique  de 
plomb  (constipation,  enc^phalopathie,  paralysie  des  extenseurs),  mais 
reconnaissant  une  cause  toute  différente.  Bouckacrt,  qui  les  a  longuement 
observées  en  Belgique,  dès  1855,  les  attribue  à  une  constitution  morbide 
particulière  (Arch.  méd.  milit.  belges,  t.  XXX);  cette  affection,  très-proba- 
blement la  même  que  la  colique  nerveuse  endémique  des  pays  chauds,  a 
été  rencontrée  aussi  dans  le  Midi  de  la  France  par  Castan,  en  1872  {Mont- 
pellier méd.,  1875). 

Les  autres  boissons  contenant  du  plomb  sont  :  la  bière  clarifiée  |)ar 
Tacétate  et  le  sous-acétate  de  plomb,  falsifiée  avec  la  lilharge  (Hourmann), 
ou  pompée  avec  des  tuyaux  en  plomb  (Gosselet)  ;  —  le  vinaigre  et  Veau 
de  Seltz  en  rapport  avec  des  robinets  d'étain  pauvre  ;  Veau  de  fleurs  d'o- 
ranger en  contact  avec  des  serpentins  en  plomb,  l'élamage  pauvre  des 
estagnons  et  les  plaques  de  plomb  mises  au  fond  des  vases  ;  —  le  rhum 
distillé  dans  des  appareils  plombifères,  ou  contenu  dans  des  vases  vernis; 
—  les  eauX'de-vie  et  les  sirops  de  miel  et  de  raisin,  clarifiés  par  l'acé- 
tate de  plomb  (Cadet-Gassicourt,  Boudct)  ;  —  le  thé  fait  avec  les  déchets 
restés  au  fond  de  boites  doublées  en  plomb  (Potain),  —  et  le  /at/ aspiré 
avec  des  biberons  à  bouts  en  plomb  (Flemming),  en  caoutchouc  vulcanisé 
plombifère  (15,5  p.  100  de  carbonate  de  plomb,  Eulcnberg),  ou  donné 
par  une  nourrice,  sur  les  mamelons  de  laquelle  ont  été  appliquées  de^ 
préparations  plombiques  contre  des  gerçures  (solution  d*acétate  de  plomt» 
de  Mme  Delacour,  cas  de  Bouchut). 

b)  Aliments. —  Le  pain  peut  être  toxique  parce  que  la  farine  a  été,  soi^ 
frauduleusement  additionnée  de  céruse  (Gmelin),  soit  accidentellement 
mélangée  avec  de  Tacétate  de  plomb  (Bancks)  ou  avec  des  parcelles  déta« 
chées  du   plomb  servant  à  boucher  les  éveillures  des  meules,  comme 
dans  les  épidémies  de  Saint-Georges-sur-Eure  (Maunoury  et  Salmon),  de 
Fresnay-le-Gilbert,  de  Laval,  et  dans  celle  observée  par  Brillât-Savarin,  soi( 
enfin  parce  qu'il  a  été  cuit  avec  des  bois  peints  ou  vernis;  la  croûte  est  alors 
presque  exclusivement  toxique  :  épidémies  de  Monlrouge  (Combalusieri, 
de  Marly,  et  récemment  de  Paris,  VU*'  et  XVll®  arrondissements  (Ducamp/. 

Le  beurre  a  été  falsifié  avec  li  litharge  et  la  céruse  (Gaubius),  colon- 
avec  le  chromate  de  plomb  (Poggiale),  ou  enfin  salé  avec  un  mélaiigc 
accidentel  de  sel  et  d'acétate  de  plomb  (G.  Bergeron  et  Lhote). 

Mentionnons  encore  le  sucre  fabriqué  par  le  procédé  de  Scofferu,  ou 
coulé  dans  des  formes  peintes  intérieurement  à  la  céruse  ;  —  les  gâ- 
teaux colorés  avec  le  chromate  de  plomb  (Galippe)  ;  —  les  pastillages  co- 
lorés aux  sels  de  plomb  :  massicot,  minium,  carbonate  et  chromate,  etle> 
bonbons,  soit  colorés  de  la  même  façon,  soit  enveloppés  de  papiers  peinl> 
à  la  céruse  et  au  chromate  (Tanquerel)  ;  —  le  chocolat,  les  fruUs  et  les 
conserves,  entourés  de  papier  d'étain  plombifère,  ou  contenus  dans  de> 
boites  en  fer-blanc  (Armand  Gautier),  —  et  les  jambons  de  Cincinnati 
enveloppés  de  toile  teinte  au  chromate  (Bouchardat). 

D'une  manière  générale,  les  aliments  et  les  boissons  peuvent  s'impré* 


PLOMB.    —   INTOXICATION   CHBONIQUE.   CAUSES  PROFESSIONNELLES.  541 

gner  de  plomb  au  contact  de  leurs  divers  récipients  :  vases  en  plomb, 
saloir  des  charcutiers  par  exemple»  en  étain  pauvre  (plats  et  gobelets), 
ustensiles  mal  étamés,  réparés  avec  un  mastic  à  la  céruse  (Mahier),  pote- 
ries de  terre  vernissées  communes,  rôtissoires  à  gaz  émaillées,  cuillers 
d'étain  à  30,  40,  et  même  50  p.  100  de  plomb,  que  nous  avons  parfois 
mes  entre  les  mains  des  ouvriers. 

c)  Médicaments  internes.  —  On  connaît  l'intoxication  chronique 
causée  par  l'administration  interne  de  médicaments  plombiques  :  carbo- 
nate dans  la  phthisie,  acétate  contre  la  pneumonie  caséeuse,  les 
tueurs  et  les  hémoptysies  des  phthisiques,  les  névralgies,  les  maladies 
de  cœur,  les  fièvres  intermittentes,  les  gonorrhées  et  les  pollutions, 
sous-nitrate  de  bismuth  impur  contenant  de  la  céruse  (Millard),  ca- 
chou de  Bologne  plombiiere  (Gibert),  contre  la  diarrhée,  et  eau  de  gou- 
dron  macérée  dans  des  cruchons  vernissés  à  Toxyde  de  plomb  (Caries). 

d)  Objets  portés  à  la  bouche.  —  Dans  certains  cas  enfin,  le  poison 
a  pour  véhicule  la  salive  souillée  par  divers  objets  portes   à  la   bouche  : 

pains  à  cacheter  colorés  avec  des  sels  plombiques  (Lombard),  grains  de 
plomb  d'encrier  mâchés  par  passe-temps  (Trousseau),  jouets  tels  que 
couleurs  à  Taquarclle  à  base  de  plomb,  trompettes  peintes  avec  la  cé- 
ruse, le  minium  et  le  chromate  fixés  par  un  simple  encollage,  et  non 
vernies  (Chevallier),  poupées  d'Allemagne  à  la  céruse,  et  cartes  de  visites 
ff lacées. 

2*  Par  la  surface  tégumentaire  :  peau  et  muqueuse  voisines  des  ori- 
fices externes,  le  plomb  pénètre,  par  l'intermédiaire  des  médicaments 
externes  :  bandelettes  de  sparadrap  diachylon,  emplâtres  et  cataplasmes 
plombiques  (Boerhaave,  HoebcrI,  Widekind),  eau  de  Goulard  contre  les 
brâlures,  frictions  d'onguent  de  lilharge  contre  la  gale  (Conring),  céruse 
saupoudrée  sur  des  excoriations,  collyres  (voir  notre  observation  à  la 
thérapeutique)  et  injections  vaginales  et  uréthrales  à  Tacétate  de  plomb, 
—  sous  forme  de  topiques  pour  la  toilette  :  fards,  poudre  de  riz  impure 
(Krimer,  Fievée),  litharge  contre  les  rougeurs  du  visage  (Zeller),  eau  de 
Cologne  préparée  avec  essence  de  thym  et  acétate  de  plomb,  cosmétiques 
à  la  litharge  (Brambilla)  et  teintures,  —  par  le  maniement  du  linge  de 
cérusiers  (Depuis)  —  et  par  l'usage  du  tabac  à  priser  contenu  dans  des 
boîtes  de  plomb  ou  des  sacs  doublés  de  ce  métal  (Olto). 

3*  C'est  enfin  à  l'absorption  par  les  voies  respiratoires  qu'il  faut 
rapporter  les  cas  d'intoxication  dus  à  la  combustion  de  cire  à  cacheter 
et  de  bougies  colorées  au  minium  et  de  vieilles  boiseries  peintes^  dans 
les  foyers  (Marmisse  de  Bordeaux),  et  à  l'habitation  à' appartements 
fraîchement  peints. 

B.    Causes  professionnelles.  —   Les    professions    qui    exposent  au 
saturnisme  sont  si  nombreuses,  si  complexes  et  hétérogènes,  que  nous 
avons  cru  plus  profitable  de  les  classer  par  ordre  alphabétique. 
Tablkau  des  professions  qui  exposent  au  saturnisme. 

Acétate  de  P.  (Fabricants  d'). 

Acteurs;  fard  à  la  céruse  (Fiévée). 


«^42  PLOMB.   —  INTOXICATION   CHRONIQUE.   CAUSES  PROPSSSIONIIBLLIS. 

Affineurs  de  métaux  précieux,  par  coupellation  :  1*  du  P.  d'œufre 
argentifère  et  aurifère,  2®  des  balayures  d'or  et  d'argent  provenant  d'aie» 
liers  d'orfèvrerie  et  de  bijouterie,  traitées  par  le  P. 

Ajusteurs  ;  mâchoires  en  P.  pour  assujettir  les  pièces  délicates.  Yoj. 
Monteurs.  • 

Bâches  (Fabric.  de),  rendues  inaltérables  par  le  sulfate  de  P.  (Trous- 
seau). 

Balles  de  P.  {Fabric.  de)   (Proust). 

Bijoutiers^  voy.  Affineurs,  Émailieurs,  Lapidaires. 

Brossiers;  apprctage  des  soies  de  porc  avec  litharge  et  chaux  (Tardieo). 

Broyeurs  de  couleurs  plombiques. 

Câbles  en  fils  de  fer  galvanisés  (Fabric.  de),  avec  zinc  plombifère 
(Rouxeau). 

Cahiers  de  papier  à  cigarettes  (Ouvrières  fabriquant  les  enveloppes 
de),  (Gallard),  voy.  Papiers  peints. 

Camées  (Polisseurs  de),  voy.  Lapidaires. 

Capsuleurs  de  flacon^,  lissant  les  capsules  en  alliage  d'éiain  et  P.  sur 
le  col  des  flacons  (Manouvriez). 

Caractères  d'imprimerie  (Ouvriers  maniant  Valliage  des):V.^l, 
antimoine  25,  étain  5,  cuivre  3. 

Cardeurs  de  crins  colorés  en  noir  par  le  sulfure  de  P.  (Hitzig). 

Carreliers,  vemisseurs  de  carreaux  à  paver  avec  sulfure  de  P.  et  sable 
broyé,  à  parties  égales. 

Carrossiers,  caissiers  ajustant  les  joints  des  panneaux  avec  la  cémse 
(Wiltshire). 

p     ..      I  caries  à  jouer  d'Allemagne. 
L^artiers  \      .       j       ••,       i»      %  *      t 

I  cartes  de  visite   glacées  a  la  céruse. 

Ceinturonniei^s^  voy.  Cuirs  vernis. 

Cérusiers  ;  céruse,  blanc  de  céruse,  blanc  de  P. ,  carbonate  de  P.  hydraté. 

Chaudronniers;  soudure  de  cuivre  (P.  et  zinc). 

Chauffeurs,  voy.  Marins. 

Chemins  de  fer  (Employés  de)  et  douaniers,  plombant  les  'lagons  de 
marchandises  et  portant  à  la  bouche  les  flans  de  P.  (Mannkopff). 

Chromate  de  P.  (Fabric.  de),  jaune  de  chrome. 

Coiffeurs,  voy.  Parfumeurs. 

Coloristes,  portante  la  bouche  les  pinceaux  chargés  de  couleurs  plom- 
biques (Charles  Bernard). 

Compositeurs  d'imprimerie^  voy.  Caractères,  Encre  d'imprimerie. 

Conserve  (Fabric.  débottés  de),  pour  la  marine  (Quesnel). 

Contre-oxydation  du  fer  (Ouvrières  travaillant  à  la)  (Ladreit  de 
la  Charrière),  voy.  Emailieurs. 

Coton  (Tisseurs  de)  apprêté  à  la  céruse  (Aube). 

Couturières,  voy.  Soie. 

Criniers^  voy.  Brossiers,  Cardeurs. 

Cristalleries  (Ouvriers  des);  silicate  double  de  potasse  et  de  P.;  sut- 
lout  tailleurs  et  polisseurs. 


PLOMB.   -^  UfXOIICATlQN   CHRONIQUE.    CAUSES  PROFESSIONNELLES.  545 

Cuillers  {Fondeurs  de)  d'élaia  à50  p.  100  de  P. 

Cuirs  vernis  (Fabric.  de)  à  la  litharge  et  à  la  céruse. 

Dentellières  ;  blanchiment  à  la  céruse»  et  pose  des  fleurs  d'applica- 
tions de  Bruxelles  (Blanchet). 

Dessinateurs  en  broderies  sur  étoffes  noires,  par  décalquage  avec 
poncif  de  céruse  et  résine  (Thibault). 

Dévideuses,  voy.  Laine. 

Diamanteurs  de  fleurs  artificielles  avec  poudre  de  cristal  |)lombifère. 

Doreurs  sur  bois  et  sur  laque;  vernis  préalable  de  céruse,  litharge  et 
térébenthine. 

Douaniers^  voy.  Chemins  de  fer. 

Ébénistes  fabriquant  les  vieux  meubles  ;  ponceurs  et  polisseurs.  En- 
duits plombiques  à  45  p.  100  de  P.,  pour  donner  la  teinte  de  vieux  bois 
(DuMesnil). 

ÈmaiUeurs  d* objets  divers  ;  poteries,  faïences,  porcelaine,  verre  mous- 
seline (flillairet),  étiquettes  sur  flacons  et  bocaux  de  chimie  (Beaugrand), 
feuilles  de  tôle,  poêles,  crochets  de  fils  télégraphiques,  bijoux,  aveô  la 
poudre  d'émaux  plombiiéres,  de  cristal  par  exemple. 

Encre  d'imprimerie  (Fabric,  d')  dans  laquelle  entre  de  la  litharge. 

Êtameurs  de  cuivre  et  de  fer,  avec  étain  allié  à  1/5  ou  1/4  de  P. 

Étiquette^  (ouvriers  vitrifiant  les),  voy.  EmaiUeurs. 

Foienfiiersy  voy.  Ëmailleurs. 

Ferblantiers,  voy.  Êtameurs,  Plombiers. 

Fleuristes;  fleurs  aitificielles  blanches  (céruse),  jaunes  (chromate), 
rouges  (oxyde)  ;  voy.  Diamanteurs. 

Fondeurs  de  P.  ;  —  d'étain  plombifère,  de  8  à  20  p.  100  et  plus, 
?oy.  Cuillers  ;  —  de  caractères  d'imprimerie ,  voy.  ce  mot  ;  —  de  cui- 
vre, de  bronze  et  de  laiton  plombifères. 

Gantiers. 

Glaces  (Fabric.  de) ,  surtout  polisseurs  ;  cristal  plombiquc. 

Glaciers  maniant  des  vases  en  étain  plombifère  [Edelmaiin]. 

Imprimeurs  sur  étoffes;  chromate,  nitrate  et  surtout  acétate  de  P., 
comme  mordants  et  couleurs.  —  Typographes,  voy.  Caractères,  Encre 
d'imprimerie  ;  employés  maniant  les  bandes  de  journal  timbrées  au 
minium  :  colleurs  de  bandes  et  vérificateurs  des  adresses  [Layct]. 

Journalistes  maniant  les  épreuves  sur  papier  humecté  d'eau  plom- 
bifère, ioiprimées  à  Tencre  lythargyrée  et  souillées  par  les  caractères 
JMarmisse).  ' 

Laine  orange  (Dévideuses  de)  apprêtée  au  chromate  de  P.. 

Lapidaires;  particules  àe  détachant  d'une  roue  en  P.,  garnie  d'émeri 
[Requin],  d'un  cylindre  en  P.,  humecté  d'un  mélange  de  tripoli  et  d'eau 
ou  de  vinaigre  pour  le  polissage  des  camées  [Proust]  ;  tirets  en  P.  entre 
lesquels  sont  montés  les  objets  à  travailler. 

Limes  (Tailleurs  de)  ;  enclumes  de  P.  sur  laquelle  est  maintenue  la 
lime  pendant  la  taille  [Frank-Smith]. 

Litharge  et  massicot  (Fabric.  de),  çroioxydes  de  P.  anhydres. 


344  PLOMB.    —   INTOIICàTIOM  chronique,   causes  PR0rE8SI0!IHKU.B8. 

Marins,  surtout  des  bateaux  à  vapeur,  spécialement  mécanicîeiis  et 
chaufTcurs.  Peinture  au  minium  et  à  la  céruse  ;  eau  contaminée  par  le 
P.  entrant  dans  les  diverses  pièces  des  appareils  distillatoires  et  par  l'éta- 
mage  des  syphons  en  fer  des  charniers;  aliments  cuits  dans  les  bottes  a 
conserves  [Lefèvre].  Voy.  Colique  sèche  :  p.  345. 
Marteleurs  de  P.  [Malherbe]. 
Mécaniciens,  voy.  Marins. 

Mèches  à  briquets  (Passementiers  en)  ;  coton  imprégné  de  chromate 
de  P.  ;  surtout  les  dévideurs  préparant  Tàme  des  mèches  [Lfancereaux , 
Chenet]. 

Menuisiers,  marchands  de  vieilles  boiseries  peintes  [Marmisse] . 

Mineurs  de  P.,  mineurs  proprement  dits,  trieurs,  bocardears,  gril- 
leurs  de  galène  ou  sulfure  de  P.  et  de  carbonate  de  P.;  —  de  minerais 
métalliques,  d*or,  d*argent  (anémie  des  mineurs  de  Schemnitz,  ^i  Hod- 
grie),  de  cuivre,  d'étain  et  de  zinc,  plombifères. 

Minium  et  Mine-orange  (Fabric,  de)  ;  oxyde  de  P.  intermédiaire. 

Monteurs  de  machines  à  vapeur;  soudure  de  cuivre  jaune  dans 
laquelle  entre  du  zinc  et  du  P;  mastic  à  la  céruse  et  au  minium  pour 
les  ajutages  de  tuyaux. 

Mouleurs  de  P.,  —  en  cuivre  plombifère^  —  en  fonte  y  maniant  et 
nettoyant  les  modèles  d'ornements  en  alliage  d'étain  et  de  P.  ou  en  P., 
pour  produire  leur  empreinte  en  creux  dans  les  moules  [ManoavriezJ. 

Oxychlorures  de  P.  (Fabric,  d'),  jaune  minerai,  deTurner,  deCassel. 

Pains  à  cacheter  (Fabric.  de)  colorés  par  des  sels  de  P.  [Vernois]. 

Papiers  peints  (Ouvriers  en)  à  fond  blanc  (céruse),  rouge  (minium) 
et  jaune  (chromate,  oxyde,  oxychlorure,  iodure.) 

Parfumeurs;  préparation  et  application  (coiffeurs)  de  fards  et  de 
poudre  do  riz  à  la  céruse,  de  cosmétiques  et  teintures  plombiques,  d'eau 
de  Cologne  avec  essence  de  thym  et  acétate  de  P. 

Passementiers;  voy.  Mèches  à  briquet. 

Peintres  en  bâtiment;  en  équipages,  de  décors,  lettres  et  attributs,  sur 
porcelaine  et  sur  métaux. 

Plomb  de  chasse  (Fabric,  de)  arsenical. 

Plombiers;  P.;  soudure  de  P.  2  et  étain  1. 

Plombeurs,  voy.  Chemins  de  fer,  Potiers  de  terre. 

Fonceurs,  voy.  Ébénistes. 

Polisseurs  de  caractères  d^imprimerie,  de  cristaux,  de  glaces,  voy. 
ces  mots;  —  de  carnées,  voy. Lapidaires;  —  de  vieux  meubles,  voy.  Ébé- 
nistes. 

Porcelainiers,  Poudreuses  de  porcelaine  à  camaïeux  gris,  avec  poudre 
à  la  céruse,  voy.  Émailleurs. 

Potée  d'étain  (Fabric.  de),  alliage  d'étain  et  P. 

Potiers  d'étain  plorabifère;  -  ie  terre  vernissée  ;  plombeurs  saupou- 
drant les  poteries  humides  avec  du  minium  ou  de  Talquifoux,  sulfure 
de  P.  ;  vernisseurs  avec  mélange  d'alquifoux,  de  bouse  de  vache  et  d'eau. 

Poudreuses,  voy.  Porcelainiers. 


PLOMB.    —    INTOXICATION.   COLIQUB   S&CIB.  345 

Soldais  de  P.  (Fabric.  de). 

Soie  (Ouvriers  en)  chargée  aveclilharge  ou  acétate  de  P.  (17  p.  100); 
coulnrières  portant  à  la  bouche  les  (ils  de  cette  soie  [Chevallier], 

Tailleurs  maniant  Talpaga  anglais  apprêté  au  sulfure  de  P.  [Réveil]. 
—  de  crislaïuCy  de  limes,  voy.  ces  mots. 

Teinturiers  employant  l'acétate  de  P. 

Tisserands;  poussières  dues  au  frottement  des  fuseaux  des  métiers  à 
la  Jacquart,  voy.  Coton. 

Toile-Cuir  (Ouvriers  en)  américaine,  pour  couvrir  les  voitures  d'en- 
fante. 

Tuiliers^  vernisseurs  de  tuiles,  voy.  Carreliers. 
Tuyaux  à  gaz  (Poseurs  de).  Maniement  des  tuyaux  ;  soudure  des 
plombiers,  mastic  à  la  céruse;  ramollissement  et  décrassage  des  vieux 
tuyaux  encroûtés  de  mastic  par  le  chauffage  sur  des  fourneaux.  [Ma- 
nouvriei]. 

Valises  (Ouvriers  en)  se  servant  d'un  tissu  lustré  noir  «  overland- 
clofh  »  plombifere  [Johnson]. 

Vernis  (Fabric.  de)  à  la  litharge. 

Vernisseurs  sur  métaux;  vernis  plombique;  —  de  cuirs ,  de  pote- 
ries j  voy.  ces  mots. 

Verriers 9  voy.  Émailleurs. 
Vitriers;  mastic  contenant  de  la  céruse. 
Zingueurs;  zinc  plombifere,  souduro  plombique. 
Colique  sèche.  —  La  colique  sèche,  colique  végétale,   nerveuse,  du 
Poitou,  du  Devonshire,  des  pays  chauds,   de  Cayenne,  du  Gabon,  du 
Surinam,  etc.,  offre,  on  le  sait,  au  point  de  vue  symptomatique,  l'ana- 
logie la  plus  étroite  avec  le  saturnisme.  Comme  dans  celui-ci,  il  y  a 
constipation,  vomissements,  coliques  exacerbantes,  crampes,  subictère  ; 
dans  les  cas  graves,  on  note  le  délire,  les  convulsions,  l'amaurose,  le  coma 
et  autres  phénomènes   encéphalopathiques,  parfois  suivis  de  mort  ;    la 
paralysie  des  extenseurs  du  poignet,  avec  les  caractères  propres  à  la  pa- 
ralysie saturnine,  a  été  maintes  fois  observée. 

La  colique  sèche  des  pays  chauds  s'observe,  ou  plutôt  s'observait  sur- 
tout chez  les  marins  à  bord  des  navires,  presque  exclusivement  des 
bateaux  à  vapeur  (Fonssagrivcs,  Le  Roy  de  Méricourt).  On  connaît  les 
controverses  fameuses  dont  la  véritable  nature  de  cette  maladie  a  été 
l'objet.  Un  grand  nombre  de  médecins  de  marine,  Guépratte  et  Segond 
notamment,  la  considéraient  comme  une  maladie  survenant  sous  l'in- 
fluence de  conditions  climatériqucs  spéciales,  et  surtout  des  brusques 
variations  de  température.  Le  professeur  Fonssagrivcs,  dans  ses  premières 
publications,  l'envisageait  comme  une  sorte  de  maladie  miasmatique;  il 
rapprocha  cette  affection  des  névralgies  larvées  si  fréquentes  dans  les 
contrées  paludéennes  et  se  mit  franchement  à  la  tcte  des  partisans  de  la 
non-identité  de  la  colique  sèche  et  de  la  colique  de  plomb. 

Les  travaux  si  remarquables  d'Amédée  Lefèvre  tranchèrent  la  question 
d'une  façon  décisive.  Dans  son  ouvrage  (Recherches  sur  les  causes  de  la 


546  PLOHB.  —  IHTOXICATION.  prophtlaxic. 

colique  sèche^  Paris,  1859),  d'où  date  une  vcritablc  révolution  dans 
l'hygiène  des  bateaux  à  vapeur,  Leievre  montre  que,  cliniquement,  la 
colique  sèche  des  marins  est  identique  à  la  colique  saturnine.  Ao  point 
de  vue  de  Tctiologie,  il  entreprit  une  enquête  qui  établit  que  le  plomb, 
sous  différentes  formes,  existe  à  profusion  à  bord  des  navires  à  vapeur. 
Il  résulte  de  cette  enquête,  qu'avant  les  améliorations  qu*elle  provo- 
qua, «un  vaisseau  de  90  canons  contenait  15,226  kilogr.  de  plomb, 
sous  forme  de  tuyaux,  de  récipients,  de  lames  servant  au  revêtement 
de  certaines  soutes,  des  écoutilles,  de  la  gattc,  etc....  qu*à  ce  plomb 
architectural,  il  faut  joindre  le  plomb  de  préservation  ou  d^omement 
qui,  sous  forme  de  peinture  au  minium  ou  à  la  céruse,  recouvre  les 
bois  et  le  fer  de  la  machine  ;  le  plomb  qui  sert  aux  joints  et  qui,  pour 
un  moteur  de  600  chevaux,  consomme  860  kilog.  de  ce  métal  sou 
forme  de  minium,  de  litharge,  de  céruse;  le  plomb  qui  est  contenu  dam 
les  vases  et  ustensiles  d'étain,  dans  les  ctamages  à  Tétain  impur,  etc.  » 
{Fonssagrives,  Hyg.  nav.,  p.  22). 

Les  travaux  d'Amédéc  Lefèvre  sont,  ainsi  que  le  fait  remarquer  Le  Itoy 
de  Méricourt,  un  bel  exemple  de  ce  que  peuvent  la  perscvéraooe  et  la 
perspicacité  scientifiques  mises  au  service  de  l'hygiène  prophylactique.  Us 
ont  entraîné  la  conviction  de  tous  les  médecins  compétents,  celle  de 
J.  Rochard,  de  Le  Roy  de  Méricourt,  de  Fonssagrives  lui-même  qui  dans 
ses  nouvelles  publications,  se  montre  partisan  convaincu  de  Tidentité 
du  saturnisme  et  de  la  colique  sèche.  Sous  l'impulsion  des  travaux  de 
Lefèvre,  l'administration  de  la  marine  a  procédé  à  des  réformes  profondes, 
tendant  à  réduire  au  minimum  la  quantité  de  plomb  employée  à  bord 
des  navires  de  l'État;  et  depuis  l'application  de  ces  mesures,  le  nombre 
des  cas  de  colique  signalés  dans  les  rapports  des  médecins  de  marine, 
s'est  singulièrement  restreint;  ces  chiffres  apportent  aussi  une  nouvelle 
preuve,  s'il  en  était  besoin,  de  la  vérité  de  l'opinion  défendue  par  Lefèvre, 
et  de  la  grandeur  du  service  que  ce  savant  a  rendu  à  Thygiènc  navale. 
Existe-t-il  cependant,  dans  les  pays  chauds,  à  Cayenne,  aii  Sénégal,  des 
coliques  sèches  relevant  d'iniluences  uniquement  atmos| ibériques  oo 
telluriques,  sans  l'intcivention  du  saturnisme?  C'est  là  une  question 
encore  litigieuse  (Rufz  de  Lavison,  Le  Roy  de  Méricourt).  Mais  il  est  cet* 
tain  que  dans  l'immense  majorité  dos  cas  décrits  sous  ce  nom,  il  s'agit 
simplement  d^une  intoxication  plombique. 

C.  Circonstances  et  conditions  prédisposantes.  —  La  saison  chaude 
(Tanquerel),  Talcoolisme,  l'abus  du  sel  marin  comme  condiment  et, 
pour  les  ouvriers,  la  malpropreté,  favorisent  le  développement  du  salw^ 
nisme. 

111.  Prophylaxie.  — Le  plomb,  vu  sa  grande  diffusion  autour  de  nous, 
sa  subtilité  insidieuse  et  sa  difficile  élimination,  est  un  poison  si  redou- 
table, qu'il  faut  s'appliquer  à  en  restreindre  l'emploi  le  plus  possible. 
Chaque  fois  qu'on  réussira  à  le  bannir  d'un  produit,  non-seulement  ai  , 
préservera  ainsi  les  consommateurs  et  les  fabricants  de  ce  produit,  mxA 
""•ncore,  en  fermant  par  là  un  des  débouchés  commerciaux  du  uictal,  oo 


PLOMB.   —   INTOXICATIOK.    PROPHTUXIE.  347 

dimiouera  le  nombre  des  ouvriers  exposés  au  saturnisme  pendant  son 
extraction,  son  traitement  métallurgique  et  la  préparation  de  ses  sels. 

n  suffit  de  connaître  les  falsifications  et  les  altérations  des  aliments  el 
des  topiques  de  parfumerie  (t.  IX,  p.  440),  par  addition  volontaire  de 
prépantions  saturnines,  et  l'abus  des  médicaments  à  base  de  plomb 
[t.  Xn,  p.  746  et  suiv.),  pour  les  éviter  ou  les  prohiber. 

Le  plomb  ne  doit  absolument  pas  entrer  dans  la  confection  des  usten- 
tiles  servant  de  récipients  aux  aliments  et  aux  boissons.  L'étain  fin,  ren- 
îermant  seulement  1  à  2  p.  100  de  métaux  étrangers,  est  seul  convenable 
|M>iir  le  papier  métallique  d'enveloppe,  et  pour  Tétamage,  qui  est  aussi 
fadle  â  effectuer  que  celui  à  Tétain  plombifère,  légalement  prohibé  par 
me  circulaire  ministérielle  de  1861  (Girardin,  Rivière  et  Clouet).  La 
raisselle  d'étain  à  5  p.  1 00  de  plomb,  proportion  nécessaire  pour  qu'elle 
loit  d*ime  solidité  suffisante,  est  à  peine  attaquable  par  les  liquides  salés 
5l  par  le  vinaigre  (Roussin)  ;  mais  les  vases  en  porcelaine  et  en  cristal, 
Spais  et  solides,  adoptés  pnr  l'administration  de  la  guerre,  pour  les  hôpi- 
taux de  Paris,  lui  sont  encore  préférables. Dans  les  appareils  distillatoires 
les  navires  et  des  pharmacies,  la  cucurbite  peut  être  en  cuivre  bien 
Hamé,  mais  les  autres  pièces  seront  :  le  chapiteau  tout  en  étain  fin,  et  le 
lerpentin  en  plomb  doublé  de  ce  même  étain.  Les  meilleurs  tuyaux  de 
conduite  pour  l'eau  potable  sont  ceux  en  fonte,  intérieurement  revêtus 
l'un  enduit  vitreux  ;  le  zinc  le  plus  pur  possible,  en  feuilles  ou  recouvrant 
b  tôle  galvanisée, devrait  servir  à  la  confection  des  petits  réservoirs  d'eau 
le  pluie.  On  ne  saurait  trop  blâmer  les  pompes  en  fer,  dont  les  tuyaux 
l'afimentation  généralement  en  plomb,  sont  attaqués  avec  d'autant  plus 
i*faergie,  que  l'accouplement  des  deux  métaux  donne  naissance  à  un 
eoorant  galvanique  ;  il  serait  facile  aux  constructeurs  de  les  remplacer 
pnr  des  tuyaux  en  fonte  analogues  aux  conduites  d'eau,  mais  revêtu  d'un 
fladuit  vitreux  extérieurement  aussi  bien  qu'intérieurement.  Constantin 
(de  Brest)  a  proposé,  pour  les  poteries  communes,  des  vernis  vitreux  non 
plombifëres  :  Tun  incolore  à  base  de  soude  et  de  chaux,  l'autre  brun  et 
très-brillant  à  base  de  soude  et  de  peroxyde  de  manganèse.  (Wurtz, 
Bec.  des  trav,  de  com.  consult,  d'hyg,  pubL^  t.  V,  p.  427).  Delloye- 
Ihsson  (de  Bruxelles)  emploie  un  émail  non  plombifère,  dont  malheu- 
nosement  la  composition  reste  secrète  (de  Freycinet).  Des  émaux  ana- 
^œs  devraient  remplacer  les  émaux  plombifères,  surtout  pour  les 
mtensiles  culinaires,  spécialement  les  rôtissoires  à  gaz  ;  dans  leurs  autres 
applications  industrielles,  l'intérêt  hygiénique  des  ouvriers  les  rendrait 
prïcieax  aussi.  La  gravure  sur  verre  au  moyen  de  l'électricité,  imaginée 
|Mr  Planté,  pourrait  é Ire  substituée  aux  procédés  actuels  de  fabrication 
dn  verre  mousseline. 

La  couche  des  tailleurs  de  limes,  la  roue  à  l'émeri  et  les  tirets  des 
lapidaires  et  des  polizïSeurs  de  camées  seront  aisément  faits  d'un  métal 
intrc  que  le  plomb,  en  cuivre  ou  mieux  en  étain  par  exemple,  li  est  à 
iésirer  que  les  nouveaux  caractères  d'impriinerie  inusables  en  verre 
•paque  répondent  à  l'attente  de  leur  inventeur. 


548  PLOMB.  —  INTOXICATION,  prophtlaxr. 

L'heureux  emploi  en  peinture  de  l'oxyde  de  zinc  (Courtois)  ei  du  sul- 
fate de  baryte  au  lieu  de  céruse,  réalise  déjà  un  immense  pn^iris;  on 
pourrait  y  ajouter  l'oxyde  blanc  d'antimoine  ;  Lcclaire  est  arrÎTé  à  ron- 
placer  dans  les  huiles  siccatives  la  litharge  par  le  manganèse.  En  tein- 
ture, les  couleurs  dérivées  du  goudron  de  houille,  moins  nocives  que  oellei 
de  plomb,  tendent  à  se  généraliser  de  plus  en  plus.  Signalons  encore  les 
couleurs  jaunes  à  base  de  cauline,  principe  retiré  de  certaines  mslvacées 
et  crucifères,  applicables  à  la  teinture  des  papiers  et  étoffes  (GoUinetii  et 
Savigny),  et  les  la(|ucs  rouges,  oranges  et  jaunes,  inoffensives  (combuiti- 
sons  d'éosine  et  de  fluorescine  avec  le  zinc)  récemment  découvertes  par 
Turpin,  et  appliquées  à  la  décoration  des  jouets  en  caoutchouc,  en  place 
du  minium,  de  la  mine  orange  et  du  chromate  de  plomb.  En  tous  cas, 
les  simples  encollages  sont  insuffisants  à  fixer  sur  les  jouets  les  coo- 
leurs  de  plomb  ;  celles-ci  devront  toujours  être  couvertes  d'un  boa 
vernis  à  l'alcool,  ou  mieux  d'un  vernis  gras  (Chevallier).  Dans  Papprét 
du  coton,  le  sulfate  de  baryte  a  été  substitué  à  la  céruse  ;  pour  celui  de 
l'alpnga  anglais,  le  sulfure  de  cuivre  présente  les  mêmes  avantages  que  ie 
sulfure  de  plomb  ;  enfin  la  combustion  du  coton  des  mèches  à  briquet 
serait  à  peu  près  aussi  bien  régularisée  par  le  nitrate  de  potasse  que  par 
le  chromate  de  plomb. 

Dans  les  opérations  industrielles  où  se  manipulent  le  plomb  et  ses 
préparations,  la  prophylaxie  la  plus  efficace  consistera  à  substituer,  le 
plus  possible,  les  machines  à  la  main-d'œuvre. 

On  amoindrira  la  dissémination  des  particules  saturnines  par  les  me- 
sures suivantes  :  emploi  d'appareils  clos,  broyeurs  à  couvercles,  tamis 
clos,  appareils  de  Corduant  pour  h  fabrication  de  la  céruse,  supprimant 
le  broyage  et  le  blutage  ;  large  intervention  d'un  liquide  approprié,  hu- 
inectation  de  la  matière  première  par  l'eau,  l'huile  (broyage  de  lacémse), 
l'eau  seconde  (avant  le  grattage  des  peintures,  Chcvreul);  pluie  intermit- 
tente d'eau  pulvérisée  pour  abattre  la  poussière,  au  moyen  de  pommes 
d'arrosoir  à  trous  périphériques,  comme  ceux  que  nous  avons  fait  in- 
staller avec  avantage  à  la  voûte  des  caves  à  brai  d'Anzin  ;  arrosage  do 
sol  ;  maintien  d'une  température  peu  élevée,  (peinture),  et  établis- 
sement d'une  bonne  ventilation  des  ateliers,  qui  doivent  être  spacieux  ; 
aération  naturelle,  cheminées  à  hottes  pour  l'enlèvement  des  vapeurs, 
bonne  position  de  l'ouvrier,  qui  ne  restera  jamais  sous  le  courant 
d'air  chargé  de  particules  toxiques  après  être  passé  sur  les  matières  ea 
œuvre. 

Les  divers  engins  protecteurs,  appliqués  devant  les  orifices  de  la  bot 
et,  en  raison  de  l'absorption  cutanée,  sur  les  parties  exposées  au  contad 
du  poison,  peuvent  être  utiles,  chacun  dans  certains  cas  spéciaux  :  vêle- 
ments imperméables,  voiles,  masques,  respirateurs,  tampons  d'ouele 
dans  les  oreilles,  contre  les  poussières  et  les  vapeurs,  et  gants  poif 
les  peintres.  L'importance  de  l'absorption  parla  peau  légitime  lesplai 
grands  soins  de  propreté  :  lavages  fréquents  et  minutieux  de  la  face,  do 

•touche  et  des  mains,  avec  une  brosse  pour  les  ongles,  bains  sulh- 


PLOMB.    —    IMTOXICÀTlOlf.    TRAITEÎIEIIT.  349 

IX  et  savonneux,  changement  de  vêtement  après  le  travail  ;  des  ves- 
ret-lavoirs  avec  baignoires  seront  par  conséquent  installés  dans  les 
nqnes  même. 

D  importe  que  les  ouvriers  ne  travaillent  jamais  à  jeun,  et  qu'ils  pren- 
Dt  kurs  repas  hors  de  Tatelier  ;  les  aliments  gras,  tels  que  le  lait, 
krû  (De  Haën,  Christison),  le  sel  comme  condiment   (Melsens),  doi- 

I  entrer  pour  une  large  part  dans  leur  régime  habituel  (  ils  use- 
i  de  laxatifs  de  temps  à  autre.  On  s'efforcera  de  leur  faire  com- 
odre  combien  les  excès  alcooliques  leur  sont  préjudiciables.  L'usage 
tabac  à  fumer  et  à  chiquer  passe  pour  leur  être  avantageux  (llenckel, 
finann). 

jea  femmes  entrant  dans  la  seconde  moitié  de  la  grossesse  doivent  être 
lues  du  travail,  jusque  six  semaines  après  Taccouchement  (Hirt  et 
tiaheiro). 

Sn  tous  cas,  ralternance  des  ouvriers  dans  les  postes  dansfereux  sera 
omeasement  pratiquée,  et  on  leur  interdira  le  travail  dès  l'apparition 
premiers  symptômes  de  saturation. 

V.  Traitement.  —  Le  traitement  de  l'intoxication  saturnine  com- 
nd  un  certain  nombre  d'indications,  dont  Tune  s'adresse  à  l'intoxi- 
ion  chronique  elle-même,  à  la  dyscrasic  et  à  la  cachexie  qu'elle  en- 
idre;  outre  cette  indication  générale,  il  en  est  d'autres  plus  spéciales, 
loi  les  accidents  saturnins  en  particulier,  les  épiphénomènes  aigus  ou 
oniques  :  colique,  constipation ,  encéphalopathie,  paralysie  satur- 
er etc. 

L  Traitement  de  Vintoxication  saturnine  chronique  en  général.  — 
idîcalion  primordiale  a  pour  but  d'éliminer  le  poison  ou  bien  encore, 
iminalion  étant  jugée  impossible  ou  trop  lente,  de  rendre,  à  Taide 
l'administration  de  certains  médicaments,  le  plomb  insoluble,  par- 
t  inoffensif.  De  là  deux  méthodes  principales,  d'une  valeur  bien  dif- 
BBle,  la  méthode  par  élimination  et  celle  par  immobilisation  ou, si  l'on 

II  ainsi  parler,  par  insolubilisa tion. 

MUkodepar  élimination.  —  C'est  la  plus  rationnelle,  celle  d'ailleurs 
i  a'attaque  le  mieux  à  l'intoxication  ;  elle  consiste  à  favoriser  l'élimi- 
ioo  du  plomb  par  les  divers  émonctoires  naturels.  Elle  vient  en  aide  à 
fganisroe  qui  tend  à  se  débarrasser  spontanément  des  poisons  qu'il  ren- 
ne. Le  saturnisme  peut,  en  effet,  guérir  par  les  seules  ressources 

la  nature  ;  Tanquerel  des  Planches  en  rapporte  un  certain  nombre 

semples. 

En  tête  des  moyens  de  cet  ordre  se  place  la  méthode  évacuante ,  soit 

de,  soit  associée  (surtout  pendant  les  crises  de  colique)  à  l'emploi 

B  sédatifs,    des  opiacés  et   de    quelques  boissons  sudorifiques  ;   c'est 

traitement  complexe  qui  forme  la  base  du  fameux  traitement  de  la 
\ariié^  importé  en  France  par  des  religieux  italiens,  en  1602.  Il  se 
mpose  de  formules  très-compliquées,  un  peu  vieillies  aujourd'hui, 
lis  d'une  grande  efficacité,  et  que  quelques  médecins  suivent  encore  à 
•  lettre. 


550  PLOMB.    —   IMTOXICATIOK.   TRAITEHEIIT. 

Voici,  dans  sa  Torme  actuelle,  la  composition  du  traitement  dit  de  la 
Charité,  d'après  Grisolle  : 

Premier  jour.  —  Eau  de  catte  avec  Uê  graine  (décoctioo  de  64  gr.  de  tamrio 
dans  1000  gr.  d'eau,  ajoutes  :  ^métique  0»,15).  Pour  boisson,  tiêane  mâorifique  eimfU 
(décoction  de  gatac).  Le  matin,  un  lavement  purgatif  (infutioa  de  sén^,  8  gr.  pour  509  gr. 
d*eaa;  aaKate  de  soude,  70  gr.;  élcctuaire  diaphœnix,  33  gr.;  jalap  pulTérisé,  1^.  9  deçà- 
grammes).  Le  soir,  lavement  anodin  (huile  de  noix,  125  gr.;  vin  rouge,  314  gr.)  ;  M  emimant 
(Ihériaquel  gr.,  opium,  0«.05). 

Deuxième  jour.  —  Eau  cuite  (eau,  500  gr.;  émétiqiie,  5«,fô)  ;  ti$ane  eudariflqm  mtHpIe  ; 
lavement  purgatif,  pour  le  matin.  Le  soir,  lavement  anodin,  tkériaque  et  ofium^  ni  aaprè. 

Troieième  jour:  ^  Tisane  iudori figue  laxative,  2  Terres  ( infusion  de  séné  et  décoction 
de  gaïac,  parties  égale?,  1000  gr.);  tisane  sudorifique  simple;  lavement  purgatif  ;  Utetnat 
anodin;  bol  calmant,  ut  supra. 

Quatrième  jour,  —  Potion  purgative  des  peintres,  le  matin  (séné  8gr.,  infusé  dausSSOgr. 
d'eau;  électuairc  diaphœnix  et  sirop  de  nerprun,  33  gr.,  de  chaque;  jalap  en  poudre,  l  gr. 
3  déci'^r.)  ;  tisane  sudorifique  simple.  Le  soir,  bol  de  thériaque  et  opium. 

Cinquième  jour.  —  Tiëone  sudorifique  laxative,  2  Terres  :  tisaiie  sudorifique  «ôqrif; 
lavement  purgatif;  le  soir,  lavement  anodin;  thériaque  et  opium. 

Sixième  jour.  —  Potion  purgative,  le  matin  ;  tisane  sudorifique  simple;  lavement  jnct- 
gatif;  lavement  anodin;  bol  calmant. 

Septième  jour.  —  Tisane  sudorifique  laxative;  tisane  sudorifique  êimple;  iavewsemt  pur^ 
galif;  lavement  anodin;  bol  calmant. 

Pendant  le  traitement  de  la  Charité,  les  malades  sont  à  la  diète  ;  en  général,  ou  eommeuce  à 
donner  du  bouillon  le  4*  ou  le  6*  jour;  on  augmente  ensuite  graduellemeot. 

Nous  avons  tenu  à  reproduire  cette  formule,  ne  fût-ce  qu'à  cause  de  soo 
importance  historique.  On  voit  que  ce  traitement  satisfait  à  deux  indications 
principales  :  il  agit  comme  purgatif  et  diaphorétique,  dans  le  but  de  provo- 
quer Télimination  du  toxi({uc  ;  d'aulre  part,  grâce  aux  préparations  opia- 
cées qui  entrent  dans  sa  composition,  il  calme  les  douleurs  si  vives  des  co- 
liques de  plomb. 

Les  purgatifs  salins  (sulfates  de  soude  et  de  magnésie,  eau  de  SedliU) 
peuvent  également  être  employés  ;  mais  la  plupart  des  médecins  recom- 
mandent de  préférence  les  drastiques.  Pendant  la  colique,  l*eau-de-vie 
allemande  à  la  dose  de  30  à  40  gr.,  associée  à  une  même  quantité  de 
sirop  de  nerprun,  est  d*une  administration  utile  (Jaccoud)  ;  Tanquerel  et 
Grisolle  préconisent,  dans  les  cas  de  constipation  opiniàti-e^  ïhuile  de 
croton  à  la  dose  de  2  à  3  gouttes,  en  une  ou  deux  pilules  ou  dans  une 
cuillerée  de  tisane.  Si  Thuile  agit  comme  vomitif,  ou  si  elle  ne  produit  '4 
aucun  résultat  quelques  heures  après  son  ingestion,  on  donnera  une 
nouvelle  pilule  d'une  goutte.  L'usage  de  ce  purgatif  sera  continuépendaot 
deux  ou  trois  jours  de  suite,  même  si  les  coliques  ont  entièrement  cessé;  il 
suflit  alors  le  plus  souvent  de  donner  une  demi-goutte  le  matin,  avec  od 
lavement  purgatif  administré  le  soir  comme  adjuvant.  Mais,  pour  pea 
que  le  soulagement  se  fasse  attendre,  mieux  vaut  «  suivre  à  la  lettre  k 
traitement  si  efficace  de  la  Charité  »  (Grisolle).  Il  ne  faut  pas  craindre» 
d'après  le  même  auteur,  d'insister  sur  les  purgatifs,  surtout  sur  les  dmr 
tiques;  et  Grisolle  signale,avec  raison,  la  singulière  tolérance  que  kv 
saturnms  présentent  à  cet  égard.  «  Ce  n'est  pas  —  fait-il  remarquer - 
un  des  points  les  moins  curieux  de  la  colique  de  plomb,  que  de  voir  les 
malades  qui  succombent  après  avoir  pris  des  doses,  souvent  considénUes, 


PLOMB.   *-   INTOXICATION.  TRAITEMENT.  351 

de  drastiques,  ne  présentant  néanmoins  pas  même  de  la  rougeur  dans  le 
tube  gastro-intestinal.  )» 

On  a  vu  la  part  considérable  que  prennent  les  sudonfiques,  dans  le 
Iraitementde  la  Charité,  l^s  bains  de  vapeur  el  d'étuve,  Tadministration 
du  jaborandi  ou  de  son  alcaloïde,  la  pilocarpine  faYoriscnt  l'élimination 
des  molécules  de  métal.  Les  expériences  d'après  lesquelles  A.  Robin  a  cru 
pouvoir  nier  l'élimination  sudorale  du  plomb,  trop  peu  nombreuses  pour 
élre  concluantes,  sont  du  reste  formellement  contredites  par  ce  fait  d'ob- 
senratioD  que  des  plaques  cutanées  de  sulfure,  de  plomb  se  sont  montrées 
sur  des  sujets  qui  avaient  absorbé  le  poison  parle  tube  digestif  seulement. 
C'est  surtout  comme  diurétique  que  doit  agir  l'eau  administrée  en  abon- 
dance intus  et  extra  (Martin-Solon,  Monneret,  Reisland). 

La  médication  par  Viodui^e  de  potassium  contre  le  saturnisme  chro- 
nique a  été  introduite  dans  la  pratique  par  N.  Guillot  et  Melsens  en 
France,  par  Parkes  et  Williamson  en  Angleterre.  Elle  répond  à  une  indi- 
cation éminemment  rationnelle  :  selon  ces  auteurs,  ce  médicament  aurait 
pour  résultat  de  solubiliser  le  plomb,  qui,  sous  leur  influence,  est  remis 
en  circulation  et  s'élimine  d'une  façon  continue  et  en  plus  grande  abon- 
dance par  les  urines.  11  y  a  lieu  de  croire  que  ce  résultat  est  dû  à  une 
véritable  action  chimique  par  formation  d'un  sel  double  dialysable  (Guillot 
et  Melsens),  plutôt  qu'à  une  siui|)le  surexcitation  de  la  désassimilation 
(Gubler  et  Œttinger).  La  médication  iodurée  est  tellement  efficace  qu'elle 
nécessite  de  grandes  précautions  ;  si,  en  effet,  par  suite  de  l'administra- 
tion d'une  dose  massive  d'iodure,  le  plonib  en  réserve  est  remis  en  cir- 
culation en  trop  grande  quantité  à  la  fois,  il  peut  en  résulter  de  graves 
accidents  :  coliques,  et  surtout  encéphalopathie  ;  d'où  la  nécessité  de  tou- 
jours commencer  par  de  faibles  doses. 

La  dose  de  50  centigr.  à  1  et  rarement  2  gram.  nous  a  toujours 
semblé  bien  suffisante.  L'altération  profonde  du  filtre  rénal  est  une  contre- 
indication  formelle  de  l'iodure.  Melsens  croit  de  plus  que  pour  éviter 
les  iodites  et  les  iodates,  qui  sont  toxiques,  il  est  indispensable  de  calci- 
ner l'iodure  avec  de  la  limaille  de  fer  et  de  le  faire  dissoudre  dans  l'eau, 
en  le  maintenant  au  contact  du  fer;  cette  solution  ferrée,  préparée 
d'avance  en  suffisante  quantité,  serait  ûltrée  au  fur  et  à  mesure  du  be- 
soin. Ajoutons  enfin  que  ce  chimiste  conseille  d'administrer  l'iodure 
pur  comme  condiment  avec  les  aliments. 

L'association  du  bromure  à  l'iodure  de  potassium  a  élé  préconisée  par 
Gubler,  surtout,  comme  nous  le  verrons  plus  loin,  quand  il  y  a  menace 
d'accidents  encéphalopathiques. 

Semmola  a  imaginé  d'appliquer  sur  les  centres  nerveux  ganglion- 
naires un  courant  électrique  continu,  qui,  activant  les  échanges  nutri- 
tifs et  par  suite  la  désassimilution,  déterminerait  l'élimination  du  plomb 
par  la  voie  des  excrétions  naturelles,  surtout  par  les  reins. 

Pour  nettoyer  la  peau,  nous  nous  sommes  bien  trouvé  des  lotions  d'hy- 
pochlorite  de  soude,  donnant  naissance  à  un  chlorure  de  |)lomb  soluble 
dans  l'eau  (Méhu). 


552  PLOMB.    —   LNTOXICATIOK.  TRÂITBIIERT. 

Méthode  par  insolubilisation.  —  Rendre  le  plomb  insolaUe,  par  con- 
séquent inactif  et  inoffensir,  tel  est  le  but  que  se  propose  la  méthode  dii- 
mique  de  traitement  par  insolubilisation  ou  par  neutralisation.  Cette  mé- 
thode compte,  parmi  ses  moyens  d'action,  quelques-uns  de  ceux  dont  i| 
a  déjà  été  fait  mention  au  paragraphe  de  la  prophylaxie;  et  en  effet  le  prin- 
cipe est  le  même  :  neutraliser  le  plomb  à  mesure  qu*il  entre  dans  l^orgudîsme. 
ou  neutraliser  celui  (|ui  est  entré  et  qui  s'est  fixé  dans  réconomîe. 

De  temps  immémorial  le  soufre  a  été  employé  comme  un  antidote  du 
plomb,  sous  forme  de  fleurs  de  soufre  ou  d*eaux  sulfureuses.  Rojer 
l'administrait  sous  forme  de  limonade  hydro-sulfurique,  espérant  fournir 
du  sulfure  de  plomb,  sans  action  sur  l'organisme;  le  médecin  de  laCharilé 
n'a  pas  tardé  à  en  reconnaître  l'inutilité  et  à  l'abandonner  complètement. 

V acide  sulfurique  a  été  administré,  sous  forme  de  limonade  dulfuri- 
que,  par  GendiMn,  dans  le  but  de  former  un  sulfate  de  plomb  ineffensûf. 
En  supposant  même  que  les  réactions  se  passent  dans  l'économie  comme 
elles  se  font  in  vitro,  cette  médication  ne  justifie  pas  les  éloges  que  lui 
décerne  Gcndrin  ;  Natalis  Guillot  et  Melsens  ont  montré,  en  effet,  que 
le  sulfate  de  plomb,  loin  d'être  un  composé  inerte,  est  «  un  poison  lent, 
mais  sûr.  »  Du  reste,  il  est  plus  que  douteux  que  l'acide  sulfurique 
ingéré  par  la  bouche,  soit  absorbe  sous  forme  d'acide  sulfurique,  et  puisse 
aller,  dans  l'intimité  dos  tissus,  se  combiner  avec  les  bases  plombiques. 
Les  bains  sulfureux  transforment  en  sulfure  de  plomb  les  molécules 
plombiques  fixées  à  la  surface  de  la  peau,  ou  éliminées  par  les  couches 
superficielles  de  l'épiderme.  Le  malade  d'ailleurs  se  trouvera  toujours 
bien  de  leur  action  stimulante  générale.  Brémond  pré.<ente  les  douches  de 
vapeur  d'eau  sulfhydrique  comme  beaucoup  plus  efficaces. 

D'une  façon  générale,  la  méthode  par  neutralisation,  appliquée  à  la 
peau  aussi  bien  qu'au  tube  digestif,  peut  rendre  des  Services,  surtout  au 
début,  pourvu  qu'on  lui  associe,  d'une  part,  les  lotions  et  frictions  sa- 
vonneuses et  alcalines,  et  d'autre  part,  les  purgatifs,  afin  d'entraîner 
mécaniquement  le  sulfure  qui,  autrement,  pourrait  se  redissoudre  dam 
les  liquides  sudoraux  ou  digestifs.  Mais  la  méthode  par  insolubilisa- 
tion pro|)rcment  dite,  par  laquelle  on  cherche  à  insolubiliser  le  plooiii 
dans  la  trame  même  des  tissus,  est  inutile  et  même  dangereuse  (Gaîllot 
et  Melsens)  ;  car,  pour  être  insoluble,  le  sulfure  et  le  sulfate  de  plomb 
n'en  sont  pas  moins  toxiques.  Son  seul  résultat  est  de  fixer  le  poison,  et 
par  suite  de  provoquer  le  développement  de  certains  accidents  chroni- 
ques, comme  la  paralysie  ;  c'est  en  effet  ce  qu*on  a  observé. 

Nous  ne  ferons  que  mentionner  le  traitement  par  Valun  (à  la  dose  àt 
8  à  10  gr.),  que  Montanceix  a  voulu  opposer  au  traitement  de  la  Charité 
(sous  le  nom  de  traitement  de  Saint- Antoine) ,  et  qui  n'appartient  pln< 
qu'à  l'histoire  des  erreurs  en  thérapeutique. 

Tels  sont  les  principaux  moyens  dont  nous  disposons  pour  activer  le 
mouvement  de  désassimilation  du  plomb  fixé  dans  les  tissus,  ou  pour  m 
neutraliser,  dans  la  mesure  du  possible,  l'action  délétère.  Mais  cette  action, 


PLOMB     IlfTOXlCATlOM   CUnO.MQUb.    —   TRAlTEMEi*ST.  353' 

est  complexe  ;  elle  aboutit  rapidement  à  la  dcnutrition  du  sujet ,  à  une 
Tériiable  cachexie,  s'accusant  par  la  pâleur  des  téguments,  Tamaigrisse- 
ment»  Tanorexie,  l'albuminurie,  la  céphalalgie,  les  vertiges,  etc.  De  là  des 
indicatioDs  qui,  quoique  ne  ressortissant  pas  à  la  cause  même  du  mal, 
n'en  sont  pas  moins  importantes.  Les  toniques,  les  préparations  martiales, 
les  amers  répareront  les  globules  rouges  usés  et  détruits,  rendront  à  la 
fibre  musculaire  son  ressort  et  combattront  l'anorexie  et  la  dyspesie.  Les 
pratiques  hydrothérapiques  peuvent  aussi  être  employées  avec  fruit  tant 
pour  stimuler  le  système  nerveux,  que  pour  activer  la  circulation  languis- 
sante des  téguments.  Gubler  préconisait  Tusage  interne  de  Topium,  non- 
seiilemei\t  comme  propre  à  endormir  les  douleurs  de  la  colique,  mais 
comme  stimulant  général  et  médicament  vaso-dilatateur. 

B.  Traitement  des  ptnncipaux  accidents  saturnins,  —  Colique.  —  Au 
début,  Télectuaire  de  miel  et  fleurs  de  soufre  à  parties  égales,  puis  les 
purgatifs,  en  particulier  les  drastiques  (eau-de-vie  allemande  de  20  à 
iOgram.  ;  séné,  15  à  20  gram.  ;  huile  de  croton,  3  gouttes  dans  Thuile 
de  riein  15  gram.;  lavements  purgatifs  au  séné  et  au  sulfate  de  soude), 
associés.aux  opiacés  ou  à  la  belladone  (Malherbe),  et  les  boissons  sudori- 
fiques  constituent  la  base  du  traitement  de  la  colique.  Les  cataplasmes 
laudanlsés  sur  le  ventre,  serviront  à  calmer  les  douleurs  extrêmement 
violentes. 

Les  révulsifs,  au  dire  de  Grisolle,  sont  parfois  utiles,  surtout  la  rubé- 
faction vive  de  la  peau  du  ventre,  obtenue  à  Taide  d'un  sinapisme  ou 
bien  avec  du  chloroforme. 

Briquet  recommande  la  faradisalion  de  la  peau  du  ventre  et  des  mus- 
cles droits  de  Tabdomcn  (à  Taidc  de  pinceau  électrique);  au  bout  de  deux 
à  quatre  minutes  d^application,  la  colique  cesse  généralement  pour  un 
temps  variable;   mais    cette    pratique  est    excessivement   douloureuse 
c  plus  vive  que  celle  du  fer  rouge  »  (Grisolle).   «  L'électrisation  cutanée 
—  observe  judicieusement  le  même  auteur  —  guérit  ici  par  révulsion  ; 
eu  effet,  elle  réussit  de  la  même  manière  que  dans  les  autres  névralgies. 
Ce  qui  prouve  d'ailleurs  que  tel  est  son  mode  d'action,  c'est  qu  on  a  pu 
guérir  des  coliques  saturnines  en  portant  le  courant  sur  des  parties 
éloignées,  mais  très-sensibles,  comme  les  doigts,  les  orteils,  le  nez.  Cette 
méthode  a  l'inconvénient  d'être  excessivement   douloureuse,   au  point 
que  des  malades  torturés  par  la  colique  saturnine,  refusent  cependant  de 
s'y  soumettre.  » 

Lorsque  ces  douleurs  sont  trop  violentes ,  il  est  bon  de  recourir  à 
lopium,  avant  d'employer  la  méthode  évacuante  (StoU).  Dans  ce  cas,  il 
faut  l'administrer  larga  manu,  à  la  dose  de  10,  15,  jusqu'à  40  centigr. 
r    dans  les  24  heures.  Parfois,  la  constipation  cède  par  le  fait  seul  de  la 

suppression  de  la  douleur. 

t         Les  injections  hypodermiques  de  chlorhydrate  de  morphine,  à  la  dose 

£    d'un  centigr.,  répétées  plusieurs  fois  par  jour,  constituent  un  moyen 

1    émioemment  commode  et  efficace,  et  dont  l'emploi  tend  de  plus  en  plus 

i^    à  se  substituera  l'administration  de  l'opium  par  la  bouche.  Les  anesthé- 

•  HOBT.  0ICT.  VéD.   ET   CHIR.  IJ XVIII    »-   2«> 


354  PLOMB.  —  EMPLOI  thérapeutique. 

siques  proprement  dits,  le  chloroforme  donné  en  lavement  ou  en  potioi> 
de  50  à  60  gouttes,  jusqu'à  10  ou  12  gram.  dans  les  vingt  quatre  heure?^ 
(Aran),  ou  le  chloral  à  la  dose  de  2  à  4  gram.,  paraissent  d'une  efficacité 
moindre  que  l'emploi  des  opiacés  et  surtout  de  la  morphine  en  injec* 
tiens  sous-cutanées. 

Encéphalopathie.  —  La  saignée  générale  a  été,  avec  raison,  abandon- 
née dans  le  traitement  des  accidents  cérébraux  du  saturnisme;  mais  les 
saignées  locales,  surtout  au  moyen  de  ventouses  scarifiées  a|^Iiquées  à 
la  nuque,  peuvent  être  utiles.  Grisolle  se  loue,  contre  le  coma,  de  Tap- 
plication  d*un  large  vésicatoire  sur  toute  la  surface  du  cuir  chevelu  préa- 
lablement rasé.  Dans  les  formes  convulsives  et  délirantes,  il  l'est  bien 
trouvé  des  aff usions  froides.  Dans  ces  mêmes  cas,  et  spécialement  dans 
la  forme  maniaque,  le  laudanum  administré  à  la  dose  de  15  à  20  gouttes, 
dans  un  quart  de  lavement,  réussit  parfois  à  calmer  l'agitation  et  à  pro- 
curer un  sommeil  tranquille.  Le  bromure  de  potassium  a  été  employé  aver 
succès,  par  Gubler,  contre  Tencéphalopathie  convulsive  ou  déÛninte, 
à  doses  élevées  (6  à  10  gram.)  L'emploi  de  ce  médicament  est  rationnel, 
vu  son  action  dépressive  sur  la  réflectivité  des  centres  nerveux.  Rayer 
et  Tanquerel  recommandaient  Texpectation  pure  et  simple;  mais  cette 
pratique  n'a  guère  trouvé  d'imitateurs. 

Paralysies.  —  Nous  traitons  la  paralysie  d*origine  directe,  ainsi  d  ail- 
leurs que  les  autres  accidents  saturnins  locaux  :  à  Textérieur,  par  des 
bains  sulfureux,  suivis  de  bains  alcalins  ou  savonneux  et,  plus  taré,  par 
des  frictions  locales  avec  la  pommade  à  Tiodure;  et  à  l'intérieur,  par  le 
traitement  ioduré,  sans  préjudice  des  autres  moyens,  spécialement  1  élec- 
tricité, employés  contre  la  paralysie  de  cause  générale. 

Queneau  de  Mussy  regarde  le  phosphure  de  zinc,  de  1  à  5  et  4 
centigr.,  comme  très -actif  contre  la  paralysie  et  le  tremblement.  La 
strychnine,  de  1  à  5  milligr.  au  plus,  a  la  propriété  d'augmenter 
le  pouvoir  excito-moteur  du  centre  spinal,  et  d'agir  plus  particuUère- 
ment  sur  les  extenseurs  du  tronc  et  des  membres  (Martin-Magron  et 
Cayrade).  Les  courants  électriques  induits  sont  ceux  qui,  mettant  le 
moins  enjeu  la  sensibilité  musculaire,  constituent  le  mode  de  traitemeot 
le  plus  rapide  ;  ils  doivent  être  appliqués  localement  de  façon  à  détermi- 
ner des  sensations  douloureuses,  et  par  séances  éloignées. 

L'application  d'un  électro-aimant  a  guéri  presque  complètement  un 
saturnin  hémiplégique  et  hémianesthésique  (Debove). 

L'iodure  de  potassium  intus  et  extra  nous  a  bien  réussi  dans  les  ar- 
thralgies  tenaces  et  localisées,  tandis  que  le  tremblement  passe  pour 
mieux  se  modifier  sous  Tinfluence  du  bromure. 

Emploi  thérapeutique.  —  L'emploi  thérapeutique  du  plomb, 
longtemps  très  répandu,  jusque  dans  le  siècle  dernier,  est,  de  nos  jours, 
considérablement  restreint  et  presque  exclusivement  limité  aux  appli- 
cations externes. 

I.  Usage  interne.  —  A  Tintérieur,  on  a  administré  rarement  le  car- 
bonate et  l'iodure,  et  d'ordinaire  les  acétates,  surtout  le  neutre  ($e 


PLOMB.  —  EMPLOI   TRKRAPEDTIQnE.  355 

de  satume),  à  la  dose  de  5  à  80  centigr.,  et  même  jusqu'à  4  gram.  par 
jour! 

H  peut  paraître  étonnant  qu*on  ait  songé  à  utiliser  la  prétendue  vertu 
sééUâive  du  plomb  contre  les  névralgies,  l'hystérie,  Tépilepsie  (Ruysch), 
la  mélancolie  (Morgagni),  la  toux  couYulsive  (Tachenius)  et  les  névroses 
cardiaques  (Levrat-Perotton),  puisque  la  plupart  de  ces  affections  sont 
susceptibles  de  se  développer  sous  TinQuence  de  ce  métal  ;  mais  celui-ci 
nVt-il  pas  été  prescrit  pour  calmer  la  colique  saturnine  elle-même? 
Dans  la  nymphomanie  (Lieutaud),  la  spermatorrhée  et  les  accidents  can- 
thajridiens,  le  plomb  a  dû  agir  comme  anaphrodUiaque. 

L'action  de  ce  métal  sur  le  système  circulatoire  explique  ses  effets 
contre  les  hémorrhagies  du  poumon  (Léridon,  Sirus-Pirondi)  et  de  Tuté- 
rua  (Reynolds,  Shaw  et  Baker),  la  dysenterie,  Thypertrophie  cardiaque 
(Brachet),  les  anévrysmes  des  grosses  artères  (Koreff,  Dupuytren)  et  les 
diverses  inflammations  parenchymateuses  (Crollius),  en  particulier  la 
mélrite  (Lisfranc)  et  la  pneumonie  aiguë  (Strohl,  Leudet). 

Va  leurs  propriétés  aniicatarrhcUes  et  astringentes,  les  préparations 
saturnines  auraient  été  administrées  avec  un  certain  succès  dans  les 
affectioos  suivantes  :  Turéthrite  (Goulard),  la  blennorrhagie,  la  blennor- 
rhée,  (J.  llunter,  Girtanner,  Michaëlis)  et  la  néphrite  (Hermann);  les 
sueun  profuses,  la  diarrhée  et  le  catarrhe  bronchique,  spécialement  des 
phfthisîques  (Etmûller,  Pringle,  Jahn,  Amelung,  Fouquier)  et  le  choléra 
(Baudin).  On  sait  que  Beau  et  après  luiPidoux,  se  basant  sur  le  prétendu 
antagonisme  entre  le  saturnisme  et  la  phthisie,  ont  même  considéré  le 
plomb  comme  un  spécifique  contre  la  diathèse  tuberculeuse. 

Pour  être  complet,  rappelons  encore  l'emploi  du  plomb  dans  la  lèpre 
et  la  peste  (Galien)  et,  enfin,  les  balles  de  ce  métal  que  les  anciens  fai- 
saient avaler  dans  l'espoir  d'opérer  mécaniquement  le  dénouement  de 
l'invagination  intestinale. 

A  notre  époque,  on  ne  prescrit  guère  plus  l'acétate  neutre  de  plomb 
que  pour  modérer  les  sueurs  coUiquatives  des  phthisiques  (pilules  de 
1  dèogr.  quatre  à  cinq  par  jour)  ;  et  pourtant  le  tannin,  l'agaric  blanc, 
la  macération  de  quinquina  gris,  voire  même  le  sulfate  d'atropine,  lui 
seraient  bien  préférables. 

Comme  d'une  part  les  préparations  saturnines  administrées  à  l'inté- 
rieur ont  souvent  occasionné  de  graves  accidents,  et  que,  d'autre  part 
elles  sont  inutiles,  à  cause  de  leur  inefficacité  ou  de  la  possibilité  de  les 
remplacer  par  des  succédanés  inolfensifs,  il  y  aurait  une  véritable  témé- 
rité, indigne  de  l'art  de  guérir,  à  faire  ingérer  un  tel  poison  à  longue 
portée  et  dont  Télimination  est  si  difficile. 

II.  Usage  exterbe.  —  U  n'y  a  pas  plus  d'un  siècle,  le  plomb  entrait 
dans  la  composition  de  trois  ou  quatre  cérats,  de  trente  sept  onguents  et 
de  quatre-vingt-un  emplâtres  (Murray)  !  De  nos  jours,  les  topiques  à  base 
de  ce  métal  sont  encore  journellement  employés  en  chirurgie  ;  mais  la 
confection  en  est  considérablement  simplifiée  et  leur  application  se  borne 
presque  aux  affections  aiguës.  Leur  usage  externe  est  d'ailleurs  légitimé 


356  PLOMB.  —  EHPLOi  thérapeutique. 

par  les  effets  du  plomb  se  manifestant  non-seulement  sur  les  muqueuses, 
les  points  de  la  peau  dépouillés  de  leur  revêtement  épithélîal,  sur  les 
éruptions  et  les  plaies,  mais  aussi,  ainsi  que  nous  Pavons  prouvé,  à  tra- 
vers la  peau  intacte  elle-même,  jusque  sur  les  parties  sous-jacentes  ;  il  y 
a  alors  imprégnation  locale,  tout  à  la  fois  par  pénétration  interstitielle  et 
par  absorption  intra-élémenlaire  et  intra-vasculaire. 

Le  plomb  est  ou  a  été  utilisé  à  1*  extérieur  comme  astringent  et,  par 
conséquent,  anticatarrhal,  antisudorifique ,  cicatrisant  et  désinfectant, 
comme  résolutif  et  maturatif,  calmant  et  même  anaphrodisiaque. 

Parmi  les  préparations  saturnines,  les  plus  usitées  sont  :  V extrait  de 
satume  ou  sous-acétate  de  plomb  liquide,  solution  aqueuse  concentrée 
d'un  mélange  d*acétate  neutre  et  surtout  de  sous-acétate  et,  en  particu- 
lier, son  dérivé,  Veau  blanche  ou  de  Goulard,  résultant  de  Taddition 
d*un  cinquantième  d'extrait  de  saturae  à  de  Teau  de  rivière  alcoolisée  ; 
c'est  une  solution  aqueuse  d*acétates  basiques  et  neutre  et  même  d*une 
certaine  proportion  de  chlorure,  tenant  en  suspension  du  carbonate,  du 
sulfate  et  un  excès  de  chlorure.  Les  pommades,  onguents,  emplâtres  et 
sparadraps  sont  constitués  par  un  mélange  de  savons  (oléates,  marb- 
râtes, stéarates,  etc.),  d'autres  sels  (acétates,  iodure,  tannate)  et  d'oxydes 
de  plomb. 

L'eau  blanche  est  le  topique  astringent  et  résolutif  généralement 
appliqué,  au  début,  sur  les  contusions  avec  ou  surtout  sans  solution  de 
continuité  à  la  peau,  sur  les  entorses,  les  luxations  réduites,  lesténo- 
sites  et  les  fractures,  soit  qu'on  en  imbibe  des  compresses,  ou  qu*on  en 
arrose  des  cataplasmes  de  farine  de  lin  ;  elle  est  souvent  alors  avantageu- 
sement associée  à  partie  égale  d'alcool  camphré  et  à  une  petite  proportion 
de  teinture  d'arnica.  Les  effets  directs  de  Tapplication  du  plomb,  savoir  : 
l'anémie  active  locale  par  contraction  des  muscles  vasculaires,  Taffaiblis- 
sèment  de  la  vitalité  des  éléments  anatomiqucs  et  l'analgésie,  luttent 
avec  succès  contre  la  congestion,  la  suractivité  fonctionnelle  et  la  douleur 
qui  accompagnent  l'inflammation.  Les  brûlures  peu  étendues  sont  quel- 
quefois aussi  traitées,  à  leur  début,  par  Thuile  et  le  cératsaturné  au  1/iO 
d'extrait  de  saturne,  ou  les  compresses  d'eau  blanche. 

Les  ulcères  chroniques,  atoniques,  scrofulcux,  variqueux  ou  cardiit- 
ques  des  membres  inférieurs,  spécialement  chez  les  vieillards  et  le:» 
alcooliques,  se  dessèchent  et  se  cicatrisent  parfois  assez  rapidement  au 
contact  du  plomb  :  lames  de  métal  (Réveillé-Parise),  céruse  (Dioscoride), 
eau  blanche,  cérat  saturné,  tannate  en  bouillie  (Leclerc),  glycéroléou 
pommade  au  1/6  (Yott,  Van  den  Corput),  sparadrap  diachylon  (Boycr) 
et  emplâtre  de  Canet.  Les  lames  nous  ont  réussi  contre  de  tels  ulcères, 
mais  leur  emploi  a  dû  être  intermittent,  afin  d'éviter  que  l'excitalioo 
déterminée  par  elles  cessât  d'être  curative.  Quant  au  sparadrap  dia- 
chylon, confectionné  avec  Templàti^e  simple,  mélange  de  divers  savons 
plombiques,  nous  avons  vu  dans  un  hôpital  de  Paris,  son  application 
en  cuirasse  sur  un  ulcère  variqueux  de  la  jambe,  chez  un  homine 
âgé,  déterminer  un  érysipèle   gangreneux   mortel;  souvent  d'ailleurs 


PLOMB.   —    EMPLOI   THÉRAPEUTIQUE.  357 

cet  agglutinatif  nous  a  paru  rendre  blafardes  les  parties  des   plaies  en 
rapport  afec  lui. 

Comme  remède  vulgaire,  il  faut  mentionner  Tonguent  de  la  Mère,  à 
base  de  litbarge,  pour  hâter  la  maturation  et  la  suppuration  des  abcès 
froids,  bubons,  panaris  et  furoncles;  sur  ces  derniers  on  applique  fré- 
quemment aussi  une  simple  rondelle  de  sparadrap  diachylon. 

Certaines  éruptions  cutanées^  telles  que  les  érythèmes  des  membres 
inférieurs  œdematiés  chez  les  asystoliques,  sont  heureusement  modifiées 
par Feau  blanche.  L'onguent  nutritum,  au  1/5  de  lilharge,  a  donné  d'ex- 
cellents résultats  aux  anciens  médecins  des  houillères  d'Anzin,  contre  les 
éruptions  (eczéma  et  urticaire  tubéreuse)  spéciales  aux  mineurs  des  fosses 
à  anémie  ;  dernièrement  nous  guérissions  rapidement  par  Teau  blanche 
un  eczéma  bouiller  rebelle  du  dos  de  la  main  chez  un  mineur.  Dans  la 
mentagre,  Bouchardat  recommande  la  crème  à  Tacétate  de  plomb  au  1/6. 

Oo  sait  enfin  que  ce  dernier  sel  entre  dans  la  composition  de  la  plupart 
des  lotions  antéphéliques. 

L*azotate  de  plomb,  en  solution  aqueuse  au  1/100,  a  été  préconisé 
comme  désinfectant  des  plaies  ;  à  ce  propos,  signalons,  pour  qu'on  puisse 
s*eo  méfier,  l'eau  inodore  désinfectante  de  Lcdoyen  au  1/91  et  le  remède 
de  Liebert  contre  les  gerçures  du  sein,  au  1/60  de  ce  sel. 

En  raison  de  ses  puissantes  propriétés  fondantes,  le  plomba  souvent  été 
prescrit  à  l'extérieur  contre  les  tumeurs  enflammées,  les  orchites 
(Etmuller,  Bell),  les  cancers  douloureux  (lames  de  métal),  les  tumeurs 
de  la  mamelle  (emplâtre  au  minium,  pommade  iodurée  au  1/10),  les 
loupes  et  les  anévrysmes  des  grosses  artères  (plaque  agissant  par  com- 
pression et  résolution,  compresses  d'eau  blanche  (Uupuytren). 

Longtemps  on  a  combattu  les  névralgies  faciales  avec  l'onguent  de 
Rhazes  au  1/5  de  ccruse,  et  les  douleurs  des  cancers  par  le  contact  de 
lames  de  plomb;  ce  métal  a  même  été  appliqué,  non  sans  quelque  rai- 
son, par  les  anciens,  en  ceintures  antiaphrodisiaques  chez  les  nympho- 
manes (Avicenne,  Paracelse). 

On  ne  pourrait  trop  blâmer  l'emploi  des  topiques  saturnins  :  céiiise 
(Dioficoride)  et  eau  blanche,  pour  supprimer  les  sueurs  profuses  des 
pieds;  aux  inconvénients  pouvant  résulter  de  la  brusque  suppression 
d'une  sécrétion  habituelle,  viendraient  encore  s^ajouter  les  dangers  d'une 
intoxication  dont  Moênch  a  signalé  des  exemples. 

L*acétate  de  plomb,  neutre  ou  basique,  est  un  puissant  résolutif,  anti- 
catarrhal  des  muqueuses  oculaire,  uréthrale  et  vaginale.  H  est  souvent 
employé  en  injections  au  1/100  dans  la  blennorrnée  et  surtout  au  1/50 
contre  la  leucorrhée  chronique;  son  usage  prolongé  dans  ce  dernier  cas, 
ne  serait  pas  sans  inconvénients.  On  a  espéré  faire  rétrocéder  le  ptérygion 
par  des  applications  d'acétate  neutre  porphyrisé  ;  la  solution  de  ce  sel  au 
1/200  constitue  un  collyre  résolutif  de  la  conjonctivite  catarrbale.  Le 
sous -acétate  liquide  est  également  prescrit  dans  cette  conjonctivite, 
comme  astringent  à  la  dose  de  5  gouttes  pour  100  gram.,  et  résolutif  en 
solution  au  5/100,  mais  surtout  contre  les  granulations  chroni(|ucs,  à 


358  PLOMB.  —  EHPLoi  THéiuPEnnQDB. 

parties  égales  ayec  Teau  (Wecker)  •  Les   oculistes  font  un  assez  firé^iiient 
usage  de  ces  collyres,  ne  formulant  de  conlre-indication  que  pour  les  cas 
compliqués  d'ulcérations  de  la  cornée,  au  niveau  desquelles  on  doit 
redouter  des  taies  par  tatouage  de  carbonate  de  plomb,  biea  autrement 
graves  pourtant  peuvent  être  les  conséquences  de  cette  médication^  Noos 
ayons  en  effet  observé,  en  avril  1878,  un  cas  de  cachexie  saturnine  avec 
vomissements,  coliques,  léger  liséré  et  mouvements  choréiformea  dMone 
petite  fille  de  sept  ans,  qu'un  des  plus  célèbres  oculistes  de  la  capitale  et 
un  bon  spécialiste  de  province  traitaient  depuis  trois  ans  et  demi  par  nu 
collyre  de  sous-acétate  de  plomb  liquide  pour  moitié  et  des  fomentations 
oculaires  d*eau  blanche,   pour  une  conjonctivite  granuleuse  chronique. 
Les  premiers  accidents  toxiques,  dont  Tapparition  remontait  à  environ  dix 
mois,  étaient  ceux  localisés  aux  yeux  et  au  pourtour  de  Torbite  :  troubles 
étranges  de  Taccommodation  nécessitant  des  verres  convexes,  mydriase, 
notable  diminution  de  l'acuité  visuelle,  surtout  du  côté  droit,  par  névrite 
optique  à  la  période  congestive,  constatée  avec  Tophthalmoscope,  aspect 
terne  de  la  cornée,  parcsie  sensitive  des  paupières  (à  la  paupière  mfé- 
rieure  les  deux  pointes  isolantes  en  ivoire  de  notre  sesth^iomètre,  dis- 
tantes de  7  mm.,  n'étaient  plus  perçues  que  comme  une  seule),  ptosis 
des   paupières  supérieures,  manque  d'expression  de   la  physionomie, 
spasmes  convulsifs  du  nez  et  de  la  bouche,  tarissement  des  larmes  et  de 
la  sécrétion  nasale,  céphalalgie  etc..  La  peau  de  la  région  oribitaire,  de 
ton  grisâtre,  put  être  tachée  en  noir  par  une  solution  sulfureuse,  en  jaune 
par  une  solution  d'iodure  de  potassium  ;  le  fond  grisâtre  et  les  taches 
ainsi  déterminées  se  nettoyèrent  sous  l'influence  de  lotions  avec  une 
solution  d  hypochlorite  de  soude  (eau  additionnée  de  1/10  de  liqueur 
de  Labarraque).    Ce    diagnostic    ctiologique  fut  d'ailleurs  confirmé  par 
notre  confrère  de  province.  Aujourd'hui,  après  la  suppression  de  la  mé- 
dication saturnine  et  l'institution  d'un  traitement  par  l'iodure  de  po- 
tassium et  les  bains  sulfureux,  aidé  d'une  hygiène  convenable,  l'enfant, 
à  peu  près  complètement  guérie,  a  repris  un  développement  régulier  et 
a  récupéré  son  jeu  de  physionomie;  sa  vue  est  considérablement  amélio- 
rée et  les  lunettes  sont  devenues  désormais  inutiles. 

Enfin,  le  plomb  métallique,  pour  lequel  l'organisme  montre  une  tolé- 
rance si  grande  que  des  balles  peuvent  parfois  séjourner  longtemps  sans 
danger  dans  les  tissus,  devait  tout  naturellement  servir  à  la  fabrication 
des  instruments  à  demeure  :  bougies,  tubes,  lentes,  pour  maintenir  les 
fistules,  perforations  et  séparations,  a|>rès  les  opérations  de  rhinoplastie 
ou  de  fistule  lacrymale  par  exemple,  et  à  la  confection  des  fils  destinés  à 
opérer  lentement  la  section  des  fistules  à  l'anus  (Foubert,  Desault)  ;  l'argent 
tend  (le  plus  en  plus  à  lui  être  substitué  dans  ces  différents  cas. 

En  somme,  sans  qu'il  soit  nécessaire  de  revenir  sur  les  accidents  dus 
à  lusage  externe  des  diverses  préparations  plombiques,  qui  se  trouvent 
relatés  à  propos  de  l'étiologie,  on  peut  conclure  que,  même  à  l'extérieur, 
le  plomb  doit  être  employé  exclusivement  d'une  manière  temporaire,  par 
conséquent  contre  les  affections  aiguës  seulement,  à  la  période  initiale 


PLOHB.    —  EMPLOI   THÉRAPEOTIQnE.    —   BIBLIOGRAPHIE.  559 

cfesquelles  il  rend  d'incontestables  services,  avec  une  certaine  réserve 
toutefois,  lorsque  le  revêtement  épithéliai  manque  sur  une  assez  grande 
sur&ce,  ou  qu'il  s'agit  de  muqueuses,  spécialement  de  celles  de  Toeil, 
en  raison  de  se8  puissantes  propriétés  d'absorption  et  de  la  grande  sus- 
ceptibilité de  l'important  organe  qu'elle  recouvre. 

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inedicam.  {Gaz,  des  hôp.,  1879,).  —  IIeubel,  Palhogenese  und  Symptôme,  der  chron. 
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Soc.  de  chir.,  27  nov.  1872  et  Gaz.  hôp.,  1872,  p.  1 180).  —  Kusskaul  und  Maier,  Path.  Anat. 
der  chron.  sat.  (Deutsches  Archiv  fur  klin.  Med.  1872).  —  Roque,  Dégénéresc.  h'réd.  par 
Tintoxiciit.  saturnine  lenlc  [Mouvem.  médic.  1872).  —  Boccuard,  Altér.  de  l'urine  chez  les 
«atumins  (Comptes  rendus  de  la  Soc.  biol.,  1873,  5*  série,  t.  V,  p.  227  et  237).  —  Ddputel 
(Maurice),  Consid.  chim.  sur  Tétiol.  de  Tinlox.  saturnine,  thèse  Paris,  1873,  n*  404.  —  Cuar- 
•coT  et.GoMBAULT,  Contribution  à  l'hist.  anat.  Je  l'atrophie  musculaire  saturnine  {Arch.  de 


560  PLOMB.    —   BIBLIOGRAPHIE. 

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1873,    tome  V,  page  356;  mém.  p.  125.  —  Natençoh  et  Bergbbet,  Recb.  '  qualilaChn  de« 
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juin,  1873).  ^  Recherche  du  plomb  dans  les  excrétions  [Lyon  médic,,  1873,  n*  7,  p.  434).  — 
OuLMONT  (Service  de).  Cas  grave  d'intox.  Miturn.,  recueilli  par  Bottentuit  (C7^.  Jiiisrf.,.  1873. 
p.  969.).  —  BaouÂBDEL,  Intoxication  saturnine  (Mouv.  méd,^  1874,  p.  27  et  41).  —  CwArx 
(Jules),  Douie  cas  d'empois,  par  le  plomb  (Gaz,  des  hôp.,  1874,  p.  930).  —  Hoe-IIablbt  (Air.). 
Gonflement  qu'on  observe  sur  le  dos  de  In  main  à  la  suite  de  quelques  parai,  des  eileu. 
des  doigts,  thèse  de  doctorat,  Paris.  1874,  n*  386.  —  Leudkt  (de  Rouen),   Intox,  arism.  et 
chronique  de  la  colique  de  Normandie,  Clin,  médic,  Pari^,  1874,  p.  478.  —  Tmiobb  et  La- 
GRAXGK,  Rech.  du  plomb  dans  l'encéph.  d'un  ouvrier  étamour  (Comptée  rendue  de  Im  Soc.  de 
biolog,  janvier  1874,  et  Gaz.  médic,  de  Paris,  1874.  p.  62).  —  De  Cours  (A.),  HémiaiMSlhéBe 
saturnine,  thèse  de  doctorat,  Paris,  1875,  n*248.  —  Picdra  (Ricardo),  De  U  paralysie  aatomne. 
thèse  de  doctorat,  Paris,  1875.  —  Rehaut  (J.),  Intox,  saturnine  chronique,  thèse  de  eaacouii, 
agrég.  Puris,  1875.  —  Fagge  (Hilton),  Lead-line  on  the  Gums  (liséré  saturnin  rar  tes  gencives) 
[The  Lancet,  1876,  vol.  I,  p.  709).  --  Drouet   (L.  A.),  Recherches  fxpérim.   sur  le  rWe  de 
l'absorption  cutanée  dans  la  parai,  saturnine,  thèse  Paris,  1875,  n*  332.  —  Bczcrfiac  (Léou), 
De<i  lésions  trophiques  des  nerfs  et  des  muscles  dans  la  paralysie  saturnine,  thèse  de  doctorat, 
Pari^,  1876.  Conclut  à  une  névrite  primitive  et  i  une  myosite  5econdaire.  —  Bucqoov,  IdIol 
saturnine  chronique  [Gaz.  hôp.,  1876).  —  Dfbo^-e  et  Renact,  Lésions  des  faiac.  primitifii  dans 
Tatrophic  musc,  progr.  et  la  parai,  aatumine  [[Ccmplcs  rendus  de  la  Soc.  de  hiot.  i870,  t.  VU.) 
—  Halmagrand  (Robert),  Deux  cas  de  goutte  saturnine,  thè<e  Paris,  1876,  n*  36$.  —  lUnNUi 
(F.),  Hémiancsth.  hemichorée  et  tremblom.  symplom.,  Ihèse  de  doct.,  Paris,  1876,  n*  157.  — 
Strech  Dowse,  Aménorrhée  à  la  suite  d'empoisonnem.  par  le  plomb  (Médic.  Time»,  1876,  et 
Arch.  gén.  de  méd.,  6*  série,  t.  XXVIII,  p.  621).  —  Hedgas  (J.  B.),  Contribution  I  Félede  de 
la  paralysie  saturnine  généralisée,  thèse  de  doctorat.  Paris,  1877.  —  Galxxowki»  Troubles 
visuels  dans  l'intoxication  saturnine   [Recueil  d'ophlhalmologie,  juillet  1877,  p.  215).  — 
Bourcebet,  Hurbain,  et  Léger,  Rech.  du  plomb  dans  les  viscèrf>s  et  les  muscles  dsM  un  cis 
d'intoxication  saturnine  [service  de  Yulpian)  (Arch.  de  physiologie^  Paris,  1877,  p:  424).  ~ 
(ÎALURD,  Quelques  particularités  de  l'intox,  saturnine  (Joum.  de  méd.  et  de  ehir.  prûi.^  1877.) 
«-  Labrode  (J.),  Do  la  paralysie  des  extenseurs  de  Tavant-bras  dans   l'intoxication  satir- 
nine.  thèse  de  doctorat,  Paris,  1877,  n*  434.  —  Mator,  Lésions  des  nerfs  intrsmusc  dan  on 
cas  de  paralys,  saturnine  (Comptes  rendus  dr  la  Soc.  de  biologie,  1877,  t.  IV,  p.  213).— 
Pauvf.rt  (G.),  Contribution  à  l'étude  de  la  colique  de  plomb,  thèse  de  doctorjt,  Paris,  1877. 
n*  200.  —  Noers  (A.),  Contribution  an  traitement  et  à  la  prophylaxie  des  intoxications  sator- 
nines   (Vierteljahrschrift  fur  gerichtliche   und  offentl.  Med.  Neue  Folge,  Band  XXTIIi 
Berlin,  juillet  1877).  —  Sabatter,  Rnpports  du  saturnisme  avec  les  affections  chirurg.,  thèse 
de  doctorat,  Paris,  1877.  —  Semxola,  Nouvelle  méthode  de  traitement  du  satnmisme  chro- 
nique (élimination  du  plomb  au  moyen  des  courants  continus).  (Annali  clinici  dello  spedslt 
degli  incurabili,  1877).    —  Axaxiefe  ((Î.),  Contribution  à  l*ctude  de  rhémiancsthésie  salor- 
nine,  thèse  de  doctorat,  Paris,  1878,  n^llS.  —  Edelh\x>  (II.),  Quelques  causes  d'intox,  satur- 
nine, thèse  Paris,  1878,  W  230.  —  Roblot,  Contribution  à  l'étude  des  lésions   de   Pappareil 
cardiovasculaire  dans  le  saturnisme,  thèse  de  doctorat.  Paris,  1878. —  LESPiLLK-Morr^RD,  Dell 
vénrile  optique  dans  l'intoxication  saturnine,  thèse  de  doclornt,  Paris,  1878.  —  Havamt,  Hémii- 
neslh.  sat.,  thèse  Paris,  1879.  —  Hardt,  Gaz.  hop.  1879,  sept. 

Causes  accidentelles  de  Vintozication, 
Combes,  Fabric.  de  la  céruse  en  France,  au  point  de  vue  de  la  santé  des  ouvriers,  Acad.  des  te.. 
1840,  19  nov.,  t.  XXIX,  p.  579)  et  Ann.  d'hyg.,  t.  XLIl!,  p.  199.  —  Guexeau  m  ■»» 
(Henri),  Plusieurs  cas  d'intoxication  snlurn.  observés  au  château  de  Claremont.  .4rcA.  ^.  dr 
Mi'd.,  4'  série,  1849.  t.  XX.  —  Millon  etREisEv,  Annuaire  de  chimie.  1850.  —  Coilier,  Qucslkm 
de  1.1  céruse  et  du  blanc  de  linc  envisagée,  etc.,  Paris,  1852.  —  Chevalliui  (A.),  Danger  (piî 
résulte  de  l'emploi  des  vases  ou  des  tuyaux  de  plomb  dans  la  clarification  [Comptes  rendut  de 
VAcad.  des  se,  5  sept.,  1853.  Annales  d'hygiène  publique  et  de  médecine  légale,  nomhreui 
articles  p&ssim.  Nous  citerons  :  sur  la  nécessité  «le  proscrire  :  1*  les  vases  de  plomh  oo 
d'alliage  de  ce  métal  pour  la  préparation  et  la  conservation  des  matières  alimentiircs  solides 
nu  liquides  ;  2*  de  di^fendre  l'usage  des  tuyaux  de  plomb  pour  la  conduite  des  liquides  destiné» 
à  servir  de  boissons:  3*  d'interdire  la  clarification  des  liquides  destines  à  servir  de  boisson*  pir 
des  sels  de  plomb  (Ann.  d'hyg.  pull. ,  Pari*;.  1853,  t.  L,  p.  314).  —  Mém.  sur  les  accidents 
détt^rminés  par  le  plomb  (Ann.  d'hyg.  publ.  et  de  méd.  lég.,  2*  sîrie,  Paris,  1859,  t.  XI, 
p.  354).  —  Chathi  (Ad.),  Note  sur  les  eaux  gazeuses  rendues  toxiques  par  les  siphon?  He 
plomb  {Monit.deshâp.,  1854,  p.  319).  —  Fiévée  de  Jeumont,  Dangers  du  fard  au  blanc  do 
plomb  (Gaz.  méd.,  Pari».  1855).  —  Lefèvrk  (de  Brest),  Nécessité  d'établir  une  surveillance 
sur  la  fabrication  des  poteries  communes  vernissées  afi  plomb  (Ann.  d'hyg..    1861,  t.  XV, 


PLOMB.    —   BIBLIOGRAPHIE.  $61 

p.  175); — Gu£raro  (Aph.),  Salicoqnes  teintes  au  moyea  du  minium  {Ana,  ^^!V^'  J>wW*i 
i*  série,  1861,  t.  lYI,  p.  360).  —  Tarneu  (Ambr.),  Dict.  hyg.  publ.  et  â«  «Mbr.,  Paris, 
-   \9fSi,  S*  édît . ,  t.  m,  art.  Plomb.  —  Hiluiret,  Intox,  satura,  des  ouTrieirt  qui  irikf'.  à  lu 
(■bric,  da   Terre  mousseline  (Bull,  de  VAcad,  de  méd.^  Paris,  1865,   t.  XU,  p.  485) 
—  mnxoDRY  et  Salmox,  Plombage  des  meules  de  moulins  à  farine  (Gaz,  méd.  de'  Part$, 
1865). —  llAMnssi,  NouT.  sources  d'émanations  plomb.,  Paris,   1866.  — •  PAPPEmiBiM,   Die 
bleiernen  Ustensil.  f.   das  Uausgebraucbswasser,  Berlin,  1868.  —  Latal  (de),  Kécessité  de 
protcrire  les  tuyaux  de  plomb  pour  la  conduite  des  eaux  destinées  aux  usages  alimentaires. 
.   {Comptée  rendue  de  VAcad.  de$  sciences.,  t.  LIXVI,  10  mars  1873  ;■  fô  août,  t.  LIIVII. 
p.  527  ;  1*'  décembre,  p.  1271).  —  Fordos,  Action  de  l'eau  aérée  sur  le  plomb,  considérée  au 
.  point  de  Toe  de  Thygiène  et  de  la  médec.  légale  (Complet  rendu»  de  VAcad.  de$  êciènces, 
tO  DOTJBmbre  1873).  —  Ghampouillo.^,  Emploi  des  tuyaux  de  pi.  pour  la  conduite  et  la  distrib. 
.  âet  eaux  destinées  aax  usages  aliment.  (Comptes  rendue  de  VAdad*  des  sciences ^  1873, 
t.  LXXYII,  p.  1273).  —  Chxvreul,  Expériences  touchant  l'action  des  eaux  de  pluie  et  des  eaux 
-  dnrgées.de  sel  sur  le  plomb  et  le  xinc  (Comptes  rendus  de  VAcad.  dfs  sciences,  17  no- 
.  Tembre  1873).  —  Bobixrrb  (A.),  Des  conditions  dans  lesquelles  le  plomb'  est  attaqué  par 
Veau  \fjompte»  rendus  de  VAcad.des  sciences,  1874,  t.  LIIYII,  p.  317.—  (Belgrand,  p.  318. 
~  BÛROD,  Act.  des  eaux  économiques  ordin.  et  distillées  ainsi  que  de  l'eau  de  mer  distil. 
lar  le  plomb'et  les  réfrigérants  en  étain  (Comptes  rendus  de  VAcad.  des  sciences,  1874, 
t  LllflU,  p.  322). —  Belgrand,  Act.  de  l'eau  sur  les  conduites  en  plomb  (Comptes  rendus 
et  VAcad.  des  sciences  y  1874. 9  février,  t.  LXXVIII,  p.  392).  —  Uotcbixsox,  Cases  in  whichcere- 
bctl  Symptoms  were  produccd  by  the  use  of  white  lead  as  a  cosmclic  (Philadelphia  médical 
TÔRM,  1874).  —  Hatbkçox  et  Bergeret  (de  Saint-Léger],  Action  de  l'eau  douce  sur  le  plomi» 
\Cmptes  rendus  de  VAcad.  des  se,  février  1874,  Àrch.  gén,  de  méd.,  6*  série,  1874. 
t.  XXni,  p.  497).  —  WuRTz,  Rapport  sur  le  vernissage  des  poteries  (Recueil  des  travaux  du 
cmUé  consultatif  d'hyg.  publ,  Paris,  1874.  l.UI,  p.  354;  1876,  t.  V,  426).  —  Gmert.  Accid 
saUnins  par  us.  de  pains  à  cacheter  de  cachou  de  Bologne (Gas.m^c^.,  Paris,  1876).  —  Girardin  , 
RiriÊnet  Clocct,  Recherches  sur  les  étamngcs  et  en  particulier  sur  ceux  destinés  à  la  marine 
\hfm.ihyg.  puhl.  et  de  méd.  lég.,  2"  série,  1876,  t.  XLVF,  p.  45).  —  DacAMP,  Epidémie 
(i'iotaiication  saturnine  ayant  pour  cause  l'usage  par  les  boulangers  de  vieux  bois  de  démolition 
lÀM.fVhgg.publ.,  1877,  t.  XLVlII,p.  377).  —  Gautier  (Ann),  Color.  arlific.  des  alim.  el 
dtsbois.,  et  des  dangers  qui  peuvent  en  résulter  pour  la  santé  publ.  Rapp.  au  Congrès  d'hv- 
phe,  Paris,  1878. 

Causes  professionnelles  de  V intoxication. 

TtBiBc  (A.)  Suppres.  de  la  fabric.  et  de  l'emploi  du  blanc  de  plomb,  rapport  aux  comités  des  arls 

fltmmuÂict.  et  d'hygiène  publ.  (Monit.  hôp.,  1855,  p.  323).  — Tardieo,  Du  plomb,  de  son 

•  inloeoce  »ur  la  santé    (Dictionn.  d'hygiène  et  Arch.  gén.  de  méd.^  5*  série,  1854,  t.  111, 

p.  229).  —  Parseval  (De),  Hyg.  des  usines  à  plomb  argentif,  thèse  Paris,  1853.  —  Tbisault 

(V.),  Kole  sur  le  développement  des  afTections  saturnines  chez  les  dessin .  en  broderies  su  r 

étolEes  et  les  ouvrier:»  en  dentelles,  etc.  (Ann.  d'hyg  ,  2"  série,  1850,  t.  VI,  p.  55).  — Ciieval- 

uu.  Cluses  des  coliq.  saturn.  observ.  chez  les  marins  et  les  personnes  qui  font  des  voyages  de 

loog cours  (Ann.  d'hyg.,  1859,  2"  série,  t.  XI,  p.  95).  Nombreux  articles  in  Annales  d'hygiène 

puiUque,  —  Ladreit  de  la  Grarrière,  Intox,  sat.  par  la  poudre  de  cristal,  chex  des  ouvrièrci: 

im. i  la oontre-oxyd.  du  fer  [Arch.  gén.  méd.,  1859,  t.  XIV,  p.  641).  —  Vbrxois  (Max),  Traité 

d  bjgiéae  industrielle.  Paris,  1860,  t.  Il,  p.  312  a  337).  —  Chevallier,  Accidents  saturnins 

cbei  les  ouvriers  qui  travaillent  â  remaillage  des  crochets  de  fer  destinés  k  supporter  les  fils 

téli^phiqucs  (Ann.  d'hyg.  1861).  —  Du  Mesnil  (0.),  Accid.  sat.  obs.  chez  les  ouvriers  empl. 

i  U  fiibric.  du  verre-mousseline,  thèse  de  doctorat,  Paris,  1864  et  Ann.  d*hyg.,  2*  série, 

1865,  t.  XXII 1,    p.  462).  —  Gallaro  (T.),  Fabricat.  du  verre-mousseline,  dangers  auxquels 

foot  eiposés  les  ouvriers  qui  y  sont  employés   (Ann.  d'hyg.,  2*  eérie,  1866,  t.  XXV,  p.  37). 

—  Lewis,  Employmentof  womcn  in  white  lead  manufact.  (Medlc.  Times  and  Gazette,  1872). 

—  Du  Mbssil  (0.),  Accid.  saturnins  obs.  chez  les  ouvriers  empl.  à  la  fabric.  des  meubles  de 
laque  (Ann.  d'hyg.  pubi.,  2«  série,  1874,  t.  XLI,  p.  335).  —  Paul  (Constanlinl,  Elimination 
du  plomb,  des  vernis  et  des  gla(;ures  à  l'usage  des  poteries  communes  (Comptes  rendus  de  VAcad. 
éet  sciences,  20  juillet  1874.)  —  La^cereaux  (E.),  Intox,  satur.  déterminée  par  la  fabrication 
dn  cordon  briquet  ou  mèches  à  briquet  (Ann.  d  hyg.  publ.,  2«  série,  1875,  t.  XLIV,  p.  339). 

Colique  sèche. 
^^co?ïD,  Essai  sur  la  névralgie  du  Irisplanchnique,  Paris,  1857.  —  Ddtorulac,  Traité  des  mala- 
dies des  Européens  dans  les  pays  chauds,  2*  édit.,  Paris,  1868.  —  Lefêvre  (A.),  Recherches 
sur  les  causes  de  la  colique  sèche  observée  sur  les  navires  de  guerre  français  particulièrement 
dans  les  régions  équatoriales  et  sur  les  moyens  d'en  prévenir  le  développement,  Paris,  1859. 
Nouveaux  documente  concernant  l'étiologie  saturnine  de  la  colique  sèche  [Archives  de  méd. 
^uKale,  1864,  t.  II).  —  Ldzet  (E.  A.).  Cause  et  traitement  de  la  colique  sèche,  thèse,  9tras* 


362        PLOMB.  —   CHIMIE   MÉDICO-liCÂLE.  —  RECHERCHE  TOXICOLOGIQUI. 

boarg,  1801,  u*  573.  ^  Hibscb,  Handbach  der  hUtorisch  gcographlscben  Paibologîe.  Bind  II, 
p.  261.  Endcmischer  Kolik.  —  Yalleix,  Giiide  du  médecin  praiidcn,  5*  édii.  refondue  par 
P.  Lorain,  Paris,  1866,  t.  Y,  art.  Coli({ue  de  pL,  par  Le  Roy  de  Méricourt.  —  Yilletti,  De  rUea- 
tité  de  la  colique  de  plomb  et  de  la  colique  sèche  {Arch.  de  méd,  nav. ,  1866,  t.  Y,  p.  81).  — 
Le  Rot  de  Me&icourt,  Coliques  de  plomb  [Bull,  de  F  Académie  de  méd.,  2  mai  1876).  —  Fa» 
8AGIUTES  (J.  B.),  Traité  d'hygiène  navale,  2*  édil,  complètement  remaniée,  Paris,  1877.  — 
GoLiK  (L.)  Traité  des  maladies  épidémiques  origine,  évolut.  prophylaxie,  Paris,  1879,  p.  888. 

Emploi  thérapeutique, 
MÉRAT  et  Delscs,  Dict.  de  mat.  méd.  et  de  thérap.,  Paris,  1833,  t.  Y,  p.  373.  —  TmiMni  et 
PiDocx,  Thérapeutique.— Yalldx,  Guide  du  mod.  prat.  —  Caziiiâti,  I>tc<.  de  méd.  cnSO  vol., 
Paris,  1842,  t.  XIY,  art.  Plomb.  —  Guillot  et  Melsexs,  Action  Ihérap.  de  Tiodare  èa 
(Acad.  deê  «c,  1849).  —  Babthei  (Fr.),  0e  l'action  du  sous^cétate  de  plomb  en  n 
intestinales  {Actes  de  la  Soc.  méd.  de$  h&pil,  faac.  II,  1852,  p.  50).  —  Biav  (i.  H.), 
sat.  dans  le  trait,  de  la  phthisie  pnlm.  {Gaz  hop.,  1859,  p.  229).  —  Lbcdet  (E.),  Da  Iraili 
de  la  pneumonie  par  Tacétate  de  plomb  i  haute  dose  {Bull,  de  thérap.  1862,  t.  LXIII,  p.  S85).— > 
Notbrâgel  et  Rossbacb,  Nouveaux  éléments  de  thérapeutique,  trad.  par  Jules  Alquer,  Parîa,18llL 

A.  Makovtriez  (de  Valencienues). 

Chimie  médico-léfl^e.  —  Il  reste  à  traiter  les  questions  médico- 
légales  relatiYes  à  la  recherche  chimique  du  poison  plombique,  au  sein  de 
matières  organiques,  animales  ou  végétales,  soit  dans  les  organes  (spécia- 
lement tube  digestif  et  foie)  ou  les  produits  de  sécrétion  et  d'excrétion  de 
la  victime  (matières  des  vomissements,  déjections  et  urine),  soit  dans  les 
aliments  et  les  boissons. 

Recherche  toxigologique.  —  Les  détails  consignés  sur  les  propriétés  et  les 
réactions  du  plomb,  les  effets  toxiques^  les  symptômes  de  f  empoisonne' 
menty  ainsi  que  sur  les  signes  anaiomo-pathologiques  constatés  i  Tau- 
topsie,  nous  permettront  d*ctre  très-brefs. 

La  toxicologie  du  plomb  n'offre  pas  de  difficultés  sérieuses,  grâce  à  la 
fixité  relative  du  métal,  et  à  ses  propriétés  tranchées. 

L'empoisonnement  aigu  par  le  plomb  est  le  cas  exceptionnel.  Il  faut,  en 
effet,  ingérer  une  dose  de  poison  tellement  élevée,  et  sa  saveur,  en  défini- 
tive, est  si  repoussante,  que  c'est  presque  uniquement  à  la  suite  de  mé- 
prise ou  d'accident  que  la  mort  vient  terminer  un  empoisonnement  aign 
par  le  plomb. 

L'empoisonnement  chronique^  au  contraire,  est  d'une  remarquable 
fréquence.  Ce  qui  s'explique  facilement  par  les  usages  domestiques  variés 
de  ce  métal,  usages  déjà  indiqués. 

La  recherche  c  himique  qu'il  s'agit  d'eflcctuer  en  pareil  cas  a  surtout  en 
vue  de  caractériser  le  plomb  lui-même,  sans  trop  prétendre  à  préciser  la 
nature  du  composé  intioduit  dans  Téconomie.  Cette  question  ne  peut  se 
poser  et  se  résoudre  que  dans  le  cas  où  les  recherches  préliminaires  auront 
permis  d'isoler  un  composé  plombique  insoluble,  ou  bien  lorsqu'on  arriie 
à  séparer,  en  même  temps  que  le  plomb,  des  corps  qui  ne  se  rencontrent 
pas  normalement  dans  l'économie,  comme  l'acide  chromique,  l'acide 
iodhydrique,  etc. 

Si  l'expert  assiste  à  l'autopsie,  il  veillera  à  ce  qu'il  n'y  ait  pas  intro- 
duction de  parcelles  de  plomb  provenant  du  cercueil,  ou  de  papiers  ploro- 
bifères,  ou  de  grains  de  plomb  ingérés  avec  le  gibier  par  exemple. 

Il  évitera  encore  l'emploi,  pour  sceller  ou  boucher  les  flacons,  de  cire 
colorée  au  minium  (la  science  a  enregistré  des  erreurs  de  ce  genre). 


;- 


V 


PLOMB.   —   EECHERCHE   T0XIC0L06IQUE.  363 

De  même,  pour  les  flacons  qui  lui  serout  remis  cachetés  avec  une  cire 
suspecte,  il  examinera  au  préalable  sa  composition  et  s'assurera  que  la 
moindre  parcelle  n*a  pu  se  mélanger  aux  produits. 

Examen  préliminaire.  —  Après  quoi  il  procédera  à  l*examen  à  la 
loupe  en  arrosant  les  matières  d*eau  distillée  en  quantité  convenable, 
procédant  par  lévigation,  et  inspectant  soigneusement  les  dépôts. 

Recherche  chimique.  —  On  s'occupe  de  la  destruction  des  matières 
(Hrganiques  auxquelles  la  substance  toxique  se  trouve  mélangée  ou  com- 
binée. 

Les  indications  de  la  physiologie  et  les  analogies  chimiques  guideront 
dans  le  choix  de  la  méthode  à  employer  pour  isoler  le  métal.  On  sait  en 
dtet  que,  comme  pour  le  mercure  et  pour  l'argent,  il  y  a  formation  dans 
Véconomie  de  sels  doubles  de  plomb  et  d'albumine,  de  plomb  et  de  chlo- 
rures, etc.  Pour  la  recherche  du  plomb  comme  pour  celle  de  l'argent,  on 
pourra  donc  se  servir  : 

l*De  la  méthode  par  le  chlorate  et  V acide  chlorhydrique;  2*  de  celle 
(joi  est  basée  sur  V emploi  de  l'acide  azotique;  3^  de  la  méthode  au 
moyen  de  V acide  sulfurique;  4**  de  la  méthode  par  voie  sèche ^  au  car-- 
knale  de  soude;  5*  de  Vêlectrohjse  (proposée  par  Gusserow),  etc.,  pour 
ne  parler  que  des  principales. 

1*  MHhodé  par  le  chlorate  et  Vacide  chlorhydrique.  —  Millon  et 
DuOos,  les  premiers,  ont  indiqué,  en  1838,  le  principe  de  la  méthode  au 
cUorale  de  potasse  qui  fournit  en  présence  de  l'acide  chlorhydrique  une 
loaite  de  chlore  au  moyen  duquel  sont  détruites  les  matières  organiques. 
Perfectionnée  par  différents  auteurs,  l'opération  peut  s'effectuer  ainsi  : 
h  substance,  divisée  mécaniquement  quand  il  y  a  lieu,  est  délayée  dans 
SB  poids  d'acide  chlorhydrique  égal  à  celui  de  la  matière  organique  sup- 
posée sèche.  Quand  le  composé  toxique  n'est  pas  volatil  (ce  qui  est  le  cas 
letoel),  il  y  a  avantage  à  digérer  pendant  quelques  heures  au  bain-marie 
(Abreu).  La  masse  rendue  fluide,  si  besoin  est,  au  moyen  d*eau  distillée 
(on  mieux  encore  des  eaux  de  lavages  résultant  du  traitement  mécanique 
préliminaire)  est  introduite  dans  une  capsule  ou  dans  un  ballon  dont  la 
eonlenanoe  est  telle  qu'il  soit  seulement  à  moitié  rempli. 

On  chauffe  au  bain-marie,  et  de  temps  en  temps  on  ajoute  une  pincée 
^3  grammes  environ)  de  chlorate  de  potasse.  Chaque  fois  il  y  a  production 
^liondante  de  gaz  et  la  matière  mousse  fortement.  C'est  pourquoi  il  est 
néeeseaire  d'employer  des  vases  d'une  capacité  suffisante  pour  que  le 
liquide  ne  déborde  pas. 

I/alcool,  l'amidon,  le  sucre  communiquent  aux  matières  une  grande 
tendance  à  mousser.  Aussi  est-il  avantageux  de  se  débarrasser,  par  une 
distillation  préalable,  de  la  presque  totalité  de  l'alcool. 

A  chaque  addition  de  chlorate  de  potasse  la  liqueur,  sous  l'influence  du 
oblore  naissant,  se  décolore  sensiblement,  mais  elle  se  fonce  de  nouveau 
4cs  que  le  gaz  s'est  échappé.  A  mesure  que  l'attaque  avance,  la  coloration 
de  moins  en  moins  sensible  et  lorsque,  un  quart  d'heure  environ  après 
iddition  de  chlorate,  la  liqueur  chauffée  au  bain-marie  ne  se  colore  plus 


564  PLOMB.   —   RECHERCHE  TOXICOLOGIQUB, 

sensiblement  et  reste  simplement  jaunâtre,  l'opération  est  considérée 
comme  terminée. 

Parfois  il  est  nécessaire  d*ajouter  une  nouvelle  quantité  d'acide  chlorhj- 
drique  pour  arriver  à  ce  résultat.  On  évitera  cependant  un  trop  grand  excès. 

Dans  ces  conditions,  l'attaque  évidemment  n'est  pas  poussÀB  i  fond,  et 
toutes  les  matières  organiques  ne  sont  pas  détruites^  nous  citeroos  en 
particulier  les  graisses,  les  matières  ligneuses,  le  tissu  cellolaire  qui 
résistent  bien.  Cependant  la  désorganisation  est  assez  profonde  pour  que, 
en  filtrant  la  liqueur  bouillante,  il  ne  reste  sur  le  filtre  que  les  substances 
insolubles  mentionnées  pins  haut.  On  les  lave  à  nouveau  à  Feau  bouil- 
lante, et  le  résidu  est  finalement  examiné  à  part  pour  s'assurer  qu'il  eit 
exempt  de  plomb. 

Le  liquide  filtré  renferme  la  totalité  du  chlorure  de  plomb,  soluble  i 
chaud  dans  l'eau,  et  dont  la  dissolution  est  encore  favorisée  par  la  pré> 
sence  de  l'acide  chlorhydrique  et  des  chlorures  alcalins. 

Quand  il  y  a  beaucoup  de  plomb,  le  liquide  peut  cristalliser  par  simple 
refroidissement,  ou  même  par  simple  addition  d'eau  qui  change  la  solubi- 
lité du  chlorure  dans  l'acide  chlorhydrique. 

Dans  tous  les  cas,  la  liqueur  plombique  est  traitée  par  Thydrogèoe 
sulfuré  qui  dénotera  un  cent  millième  ou  même  un  deux  cent  millième 
de  plomb.  On  a  vu  plus  haut  les  caractères  et  les  particularités  de  la 
précipitation  du  sulfure  de  plomb  en  liqueur  chlorhydrique. 

2"  Par  r acide  azotique.  —  Au  lieu  du  chlorate  et  de  l'acide  chlorhy- 
drique, on  peut  employer  la  méthode  d'Orfila,  et  dont  la  base  est  la 
destruction  des  matières  par  l'acide  azotique. 

Les  liquides  et  les  parties  solides  très-divisécs,  sont  soumis,  dans  une 
capsule  de  porcelaine,  à  une  évaporation  ménagée,  au  bain-marie,  jusqu'à 
réduction  en  pulpe.  On  ajoute  alors  peu  à  peu,  et  en  agitant  sans  cesse, 
un  double  volume  d'acide  azotique  concentré,  pur,  et  l'on  chauffe  pro- 
grcssivcmcnt  pour  obtenir  une  cbullition  lente  et  continue,  qu'on  main- 
tient plusieurs  heures  tant  qu'il  se  dégage  des  vapeurs  hypoazotiques.  Le 
liquide,  réduit  par  év.'iporation  en  consistance  sirupeuse,  est  étendu  de 
dix  volumes  d'eau  distillée  tiède.  Après  fillration  et  lavage  du  filtre,  oa 
introduit  la  liqueur  dans  un  flacon  bouché  à  l'émeri,  et  on  y  fait  passer  un 
courant  continu  d'hydrogène  sulfuré  pur  et  lavé,  jusqu'à  saturation.  Le 
lendemain,  quand  le  dépôt  de  sulfure  de  plomb  s'est  complètement  eRiw-  f^ 
tué,  le  liquide  est  décanté  au  siphon  et  on  lave  le  précipité  sur  un  filbv 
de  papier  Berzélius  pour  épuiser  les  matières  solubles.  Le  liltre  est  dfi- 
séché  et  divisé  par  moitié.  On  chauffe  la  première  moitié  dans  une  cap* 
suie  de  porcelaine,  au  bain-marie,  avec  de  l'acide  azotique  coucenb^ 
pur,  jusqu'à  disparition  de  sa  couleur  noire.  Le  liquide  est  étendu  de 
quelques  centimètres  cubes  d'eau  distillée  tiède,  puis  filtré  et  soigneue 
ment  évaporé  à  siccité.  Redissous  dans  quelques  gouttes  d'eau,  le  ré«h 
doit  offrir  les  caractères  du  plomb  indiqués  à  la  partie  chimique  de  l'artide. 

L'autre  moitié  du  filtre,  divisée  en  petits  morceaux,  est  triturée  dios 
un  moHier  d'agate  avec  un  peu  de  carbonate  de  soude  desséché  et  quel- 


PLOMB.    —   RECHERCHE   TOXlCOLOGIQUE.  365 

ques  gouttes  d'eau,  de  façon  à  former  une  pâte  ferme  que  Ton  tasse  dans 
la  cavité  d*un  charbon  léger  de  peuplier  on  de  tilleul.  Après  que  ce  m«^ 
lange  a  été  lentement  desséché  à  la  flamme  du  chalumeau,  on  projette 
d*une  manière  continue,  à  sa  surface,  le  dard  aigu  de  la  flamme  de 
réduction  (cône  intérieur).  Le  sel  plombique  se  réduit  peu  à  peu  ;  la  petite 
masse  entre  en  fusion  et  s'absorbe  dans  les  pores  du  charbon,  laissant  à 
nu  quelques  petits  globules  brillants  épars.  Ces  globules  métalliques, 
soigneusement  recueillis,  sont  triturés  avec  un  peu  d'eau  dans  un  mortier 
d*agate;  par  décantation  on  enlève  les  parcelles  de  charbon  qui  pouvaient 
âdhâ^,  et  le  métal  reste  seul,  reconnaissable  à  sa  couleur  et  sa  malléa- 
bilité, et,  après  dissolution  dans  quelques  gouttes  d'acide  azotique,  à  ses 
caractères  chimiques. 

3*  —  Par  V acide  sulfurique  —  Au  lieu  d'acide  azotique  pour  détruire 
les  matières  organiques,  on  pourrait  se  servir  d*acide  sulfurique,  comme 
dans  le  procédé  général  ;  le  sulfate  de  plomb  imprégnant  le  charbon  qui  en 
îésulterait,  serait  transformé  en  carbonate  par  ébullition  avec  une  solu- 
tion de  carbonate  de  soude  ou  de  potasse,  puis  en  azotate  soluble  par  Teau 
acidulée  d'acide  azotique.  On  traiterait  ensuite  la  liqueur  par  l'hydrogène 
sulfuré,  poursuivant  les  opérations  comme  dans  le  procédé  précédent. 

4*  —  Parla  chaleur^  en  présence  du  carbonate  de  soude  ^  procédé 
avantageux  pour  une  petite  quantité  de  matières,  en  majeure  partie 
solides.  —  Lei  portions  solides,  très  divisées,  sont  intimement  mélangées 
dans  un  mortier  avec  la  moitié  de  leur  poids  de  carbonate  de  soude  pur 
et  sec;  ce  mélange,  préalablement  desséché  au  bain-marie,  est  introduit 
dans  un  creuset  de  porcelaine  à  couvercle,  de  dimensions  telles  qu'il  ne 
soit  qu*à  moitié  rempli.  On  chauffe  alors  dans  un  petit  fourneau  ou  à  la 
kiDpe  deBerzélius,  graduellement,  afin  d'éviter  tout  boursouOement  de 
la  matière,  mais  jusqu'à  une  température  suffisante  pour  fondre  le  car- 
tboate  de  soude.  Dès  que  ce  sel  est  en  fusion  tranquille,  on  laisse  tomber 
fe  ieu,  dans  la  crainte  de  volatiliser  un  peu  de  plomb  réduit.  Le  creuset, 
refroidi  et  essuyé  extérieurement  avec  soin,  est  placé  dans  une  spacieuse 
capsule  de  porcelaine,  contenant  de  l'eau  distillée  bouillante.  On  continue 
réballition  jusqu'à  complète  dissolution  de  la  masse  vitreuse  du  creuset, 
lequel  est  mis  à  sécher  a[)rès  avoir  été  lavé  à  Tintérieur  et  à  l'extérieur, 
i  l'aide  d'une  pissette,  au  dessus  de  la  capsule.  Les  portions  métalliques, 
plus  lourdes,  gagnent  le  fond  et  sont  séparées  des  particules  charbon- 
Beoses  et  salines  en  suspension  par  le  repos  du  liquide  et  plusieurs  décau- 
titions  et  lavages  ;  on  recueille  alors  facilement  les  petits  grains  métalliques 
brillants  qu'on  dessèche  sur  papier  buvard.  On  y  joint  les  quelques  glo- 
Imles  qui  auraient  pu  rester  adhérents  à  l'intérieur  du  creuset  ;  et  si  les 
grains  de  plomb  sont  trop  petits,  on  les  fond  au  chalumeau,  en  présence 
du  carbonate  de  soude  sec,  dans  la  cavité  d'un  charbon,  afin  de  les  ras- 
sembler en  un  ou  deux  globules  caractéristiques.  (Roussin,  p.  855). 
*  5*  Electrolyse.  —  Dans  les  liqueurs  provenant  du  traitement  au  chlo- 
Tale  de  potasse  et  à  Pacide  chlorhydrique,  au  lieu  d'employer  l'hydrogène 
sulfuré  pour  séparer  le  plomb,  Gusserow  a  proposé  de  se  servir  de  l'élec- 


366  PLOMB.   —  RBCHBRCHE   TOXICOLOGIQUE. 

trolyse  qui  Tisole  à  Tétat  métallique.  On  peut  opérer  au  moyen  d*un 
dialyseur  plongeant  dans  de  Feau  acidulée  à  l'acide  sulfurique.  Deux  lames 
de  platine  servent  d'électrodes,  et  la  négative  est  immergée  dans  la  solu- 
tion plombique.  Le  courant  est  fourni  par  une  pile  de  quatre  él&menls  de 
Grove.  Le  dépôt  du  plomb ,  sous  forme  d'enduit  gris  ou  noirâtre,  a  lieu 
lentement  sur  le  pôle  négatif,  et  c'est  seulement  au  bout  de  douze  i 
quinze  heures  que  l'opération  est  terminée. 

Sans  s'arrêter  à  discuter  la  question  du  plomb  normal  que  les  récents 
travaux  de  Barse  et  Chevallier  semblent  avoir  tranchée  dans  le  s&as  de  la 
négative,  il  est  bien  évident  par  ce  qui  précède  que  l'expert  chimiste  n'aura 
guère  à  se  préoccuper  de  la  nature  ni  de  la  provenance  du  composé 
ingéré,  non  plus  que  de  l'intention  criminelle  ou  non  qui  a  présidé  i 
l'administration  du  toxique. 

Il  aura  cependant  à  répondre  fréquemment  à  diverses  questions  rela- 
tives aux  circonstances  accidentelles  qui  peuvent  avoir  produit  l'empoi- 
sonnement. C'est  pourquoi  nous  dirons  quelques  mots  de  l'examen  d'une 
eau,  d'un  vin  ou  d'un  vernis,  d'un  papier  plombifère,  etc. 

Eau.  —  On  essaiera  tout  d*abord  si  cette  eau,  acidulée  par  l'acide  ni- 
trique, se  colore  de  suite  en  présence  de  l'hydrogène  sulfuré.  Une  pareille 
eau  est  évidemment  suspecte.  S'il  y  a  assez  de  métal  pour  fournir  un 
précipité  de  sulfure,  on  le  recueille,  et  sa  nature  est  facile  à  reconnaître. 

L'essai  quantitatif  se  fait  en  évaporant  une  dizaine  de  litres  d'eau  addi- 
tionnés de  20  gouttes  d'acide  nitrique,  de  manière  à  rapprocher  à 
200  centimètres  cubes.  On  transvase  ensuite  dans  une  petite  capsule,  ce 
qui  permet  de  dessécher  la  matière,  qui  brunit  ordinairement  par  suite 
de  la  présence  de  substances  organiques.  On  les  détruit  par  l'acide  azotique 
et  l'azotate  d'ammoniaque.  Le  résidu  blanchâtre  renferme  le  plomb  à  l'étal 
d'azotate  ou  de  sulfate.  On  reprend  par  une  petite  quantité  d'eau  qui 
entraine  l'azotate.  Le  résidu  de  sulfate,  calciné  avec  de  la  soude,  donnera 
un  globule  métallique  reconnaissable  à  sa  malléabilité. 

Vin.  —  Dans  le  vin  on  peut  aussi  parfois  mettre  le  plomb  directemeot 
en  évidence  au  moyen  de  l'hydrogène  sulfuré.  Mais  on  préfère  ordinaire- 
ment évaporer  à  siccité  un  volume  connu  de  vin,  détruire  les  matières 
organiques  et  terminer  l'essai  comme  précédemment. 

Vernis.  —  Un  vernis  plombifère,  traité  par  de  l'eau  acidulée  tu  ving- 
tième environ  par  l'acide  acétique  ou  nitrique  (le  mieux  est  d'opérar  au 
bain-marie),  donnera  une  solution  qu'il  suffit  d'évaporer  à  sec  pour  que 
le  résidu  fournisse  toutes  les  réactions  caractéristique!^  du  plomb. 

L'analyse  d'une  peinture  à  base  de  céruse,  d'une  tenture  colorée  parle 
plomb  (minium,  chromate,  papiers  glacés,  moirés,  etc.),  n'offrirait  aucune 
difficulté. 

A.  Gautier  a  publié  une  méthode  pour  déceler  des  traces  de  plomb 
contenu  par  exemple  dans  des  légumes  de  conserve.  (Congrès  à\ 
giène,  1878). 

Quant  au  dosage,  nous  renvoyons  à  ce  qui  a  été  dit  plus  haut  (p.  305), 


^ 


PLOMBIÈRES.  367 

Uoe  des  choses  auxquelles  on  s'attachera  principalement  consiste  à 
obtenir  une  pièce  à  conviction  aussi  nette  que  possible .  Lo  globule  de 
plomb  malléable  constitue  évidemment  Tune  des  meilleures;  mais  le 
cUonure  cristallisé  déposé  par  refroidissement  ou  encore  le  sulfure  de 
plomb  peuvent  encore  remplir  le  même  objet. 


t,  Dict  de  méd.  et  de  ehir,prai.  1835,  t.  XIII,  art.  Plomb.  —  Plomb  normal  de  l'Eco- 
Bomia  {Comptée  rendus  de  VAcad,  des  êCy  ocl.  1844.  Arch,  gén,  de  méd.,  4*  série,  1844, 
U  YI,  p.  .385).  —  OitnLA,  Empoisomiement  par  les  sels  de  plomb  {Bull,  de  lAcad  .  de  méd., 
Paris,  1838,  t.  m,  p.  161).  —  Dict,  de  méd.  en  30  vol.,  Paria,  1842,  t.  XXV.  —  Empoisonne- 
menl  par  on  eompoeé  de  plomb.  Affaire  Pouchon  {Annalei  d'hygiène  publ.  et  de  méd .  lég.  1844, 
L  XXXI,  p.  131).  —  Babsb,  Plomb  trouvé  dans  le  corps  de  Thomme  {Comptée  rendue  de  VAcad  - 
iee  êciences,  tiArch.  gén.  de  médec.  4*  série,  1843,  t.  III,  p.  113).  —  Flandin  et  Dâxger, 
Sur  Pempoisonnement  par  le  plomb  {Comptée  rendue  de  VAcad.  dee  èciencee,  1844,  et  Arch. 
$én.  de  méd.,  4*  série,  1844,  t.  lY,  p.  236).  —  Empoisonnement  parle  plomb.  Des  expertises 
médico-légales  dans  le.s  cas  d'empoisonnement  (Arch.  gén.  de  méd.,  1844,  4*  série,  t.  IV» 
p.  238).  —  T&TLOR  (A.  S.),  Empoisonnement  par  les  sels  de  plomb  {Gutfi  Hospital  Reportt, 
«•  série,  vol.  lY,  1846,  Arch.  gén.  de  méd.,  4«  série,  1848,  t.  XVI,  p.  512).  —  Chevallier, 
(Alph.)  et  GoTTBREAu,  Essais  historiques  sur  les  métaux  que  l'on  renconti'e  dans  les  corps  orga- 
niiés,  {Ann.  d'hyg.  publ.  et  de  médec,  lég.,iU9,  t.  XLIl,  p.  124).  —  Orfo.!  (Louis), De  l'éli- 
mination des  poisons,  VarU,  1852.  —  Tatlor,  on  Poisons  in  relation  to  med.  Jurispr.  Lon- 
don  1859.  —  Bloxam,  On  the  détection  of  poisons  metals  by  electrolysb  [Quart,  Journ.  of 
tke  chem.  Soc,  London  april,  1860,  n*  49).  —  Gusskrow,  Untarsuchungen  Qber  Bleivergif- 
tang  {Arch.  fur  pathol.  Anatomie,  Berlin,  1861,  Band.  XXI,  p.  443).  —  Otto,  Instruction 
mr  la  recherche  des  poisons,  traduit  par  Strohl,  Paris  1872.  —  Boucher,  Bech.  toxic.  du 
flonb  dans  un  cas  de  suspic.  d*empois.  par  les  sels  de  ce  métal  {Ann.  d'hyg.  publique, 
2*  aérie,  1874.  t.  XLI,  p.  161).  —  Etude  sur  la  présence  du  plomb  dans  le  syst.  nerveux  et  de 
la  recherche  de  ce  métal  dans  les  cas  d'empoisonnement  [Ann.  d'hyg.  publ.  et  de  méd.  lég., 
1875,  t.  XLV.p.  141).  —  Bbrgerox  (G.),  et  Lhote,  Empoisonnement  par  le  plomb  [Comptes 
rendue  de  VAcad.  des  se,  15  juin  1874)  —  Darehrero,  29  juin  1874.  —  Tardieu  (Ambr.), 
et  Aoussix,  Etude  médico-légale  et  clinique  sur  l'empoisonnement,  2*  édit.  Paris,  1875.  — 
HofiAXX,  Médecine  légale,  traduit  par  Emm.  Levy  avec  comment,  par  Brouardcl,  1880. 

L.  Pbunieb. 

PJLOMBIÈRES.  —  Plohbièbes  (Vosges),  à  10  heures  de  Paris  par 
le  chemin  de  fer  de  Mulhouse,  à  4  heures  de  Nancy  ;  région  nord-est  de 
la  France;  appartient  au  groupe  vosgien  riche  en  eaux  minérales. 

Plombières  fut  un  bain  gallo-romain  important,  si  Ton  en  juge  par  les 
restes  des  travaux  de  cette  époque.  Les  Romains  avaient  détourné  le  cours 
du  torrent,  bétonné  la  nappe  d'eaux  minérales,  construit  une  immense 
piscine  et  des  étuves  dont  on  a  retrouvé  les  substructions.  Les  vieilles 
traditions,  quelquefois  interrompues,  n'ont  jamais  été  complètement 
perdues,  et  rhistoire  de  cette  station  est  assez  riche  en  documents  tels  que 
ceux  fournis  parFuchsius,  J.  Gonthier,  médecin  de  François  I",  Dom  Cal- 
met,  etc.  Le  roi  Stanislas,  et  de  nos  jours,  l'empereur  Napoléon  III  ont 
beaucoup  contribué  à  la  prospérité  de  cette  contrée,  si  bien  qu'aujour- 
d*hui  Plombières  a  oublié  les  incendies  et  les  tremblements  de  terre  qui 
lui  ont  été  autrefois  si  funestes.  Peu  de  thermes  en  France  ont  été  Tobjet 
d'aussi  nombreux  travaux  dus  aux  médecins,  aux  géologues,  aux  ingé- 
nieurs {Voy.  plus  bas  les  indications  bibliographiques). 

La  situation  actuelle  de  Plombières  lui  donne  un  rang  très  honorable 
parmi  les  bains  français.  Il  ne  compte  pas  plus  de  2000  baigneurs  par 
saison;  mais  la  haute  société  n'en  a  jamais  désappris  le  chemin. 
L'Etat,  propriétaire,  en  à  donné  la  ferme  à  une  compagnie. 


368  PLOMBIÈRES.  —  climat.  —  géologie. 

La  ville,  proprement  bâiiey  est  resserrée  par  la  configuration  de  hi  Tallée. 
La  rlie  centrale,  rue  Stanislas,  en  suit  le  cours  et  descend  de  l'église  au  bain 
romain.  Quelques  chalets  perchés  sur  les  hauteurs  ornent  le  paysage,  le 
Parc  est  animé  tous  les  jours  par  la  musique  ;  le  Casino  fournit  les  distrac- 
tions du  soir;  les  salons  des  hôtels  lui  font  concurrence  sous  ce  rapport. 

La  région  des  Vosges  est  assez  connue  des  touristes  pour  qu'il  soit  inu- 
tile d'insister  sur  les  excursions  nombreuses  offertes  aux  hôtes  de  Plom- 
bières. Quatre  routes  s^en  détachent  :  celle  d^AilleyiUiers  à  Touest,  celle 
de  Remiremont  à  l'est,  celle  d'Epinal  vers  le  nord,  de  Luxeuil  vers  le 
sud.  Nous  mentionnerons,  entre  autres  buts  de  promenade,  la  fontaine 
Stanislas  perdue  au  milieu  d'épaisses  forêts,  le  val  d'Ajol,  Hérival,  Bains 
et  Luxeuil,  Remiremont  et  le  lac  de  Gérardmer.  Les  chevaux  et  les  voi- 
tures ne  font  point  défaut. 

Climat  —  Plombières  est  à  450  m.  au-dessus  de  la  mer,  50  m.  plus 
élevé  que  Remiremont  (mes  mesures  ne  m*ont  fourni  que  50  m.  de  diffé- 
rence en  prenant  le  niveau  des  grands  hôtels  qui  est  au  bas  de  la  ville). 
D'une  fenêtre  nord,  si  Ton  pointe  la  lunette  vers  le  clocher  de  l'Oise, 
on  voit  que  la  direction  de  la  vallée  est  N.  E.-S.  0.  La  ville  est  dans  une 
gorge  profonde,  comme  Wildbad  en  Wurtemberg;  c'est  le  sort  des  eaux 
chaudes  en  général  ;  cependant  Luxeuil  est  plus  ouvert.  Cette  situation  a 
le  double  inconvénient  d'une  forte  chaleur  les  jours  de  grand  soleil  et 
d'une  certaine  tristesse  les  jours  de  pluie.  Si  les  journées  sont  chaudes, 
les  matinées  et  les  soirées  apportent  de  la  fraîcheur  et  le  contraste  en  est 
quelquefois  saisissant.  La  température  varie  également  d'une  façon  tran- 
chée, après  un  orage  (de  30^  c.  à  15^  par  exemple.)  Avis  aux  rhumatisants 
qni  doivent  prendre  des  précautions.  Pour  jouir  de  l'air  vif  et  pur  de  II 
montagne,  il  suffit  de  gravir  les  pentes  voisines  en  s'élevant  de  quelques 
centaines  de  pieds. 

Les  observations  météorologiques  font  défaut;  les  tables  de  Lhéritier, 
relatives  à  la  température,  ont  été  constmites  dans  un  but  de  comparai- 
son avec  celle  des  sources  et  les  résultats,  chiffrés  une  seule  fois  par  jour, 
sont  insuffisants.  Quant  au  baromètre  il  est  en  général  au  variable,  ce  qui 
s'explique  par  un  assez  grand  nombre  de  jours  pluvieux,  même  dans  les 
beaux  mois.  La  moyenne  des  sources  froides,  8-10^  c.  doit  représenter  la 
moyenne  annuelle  de  température,  plus  basse  que  celle  du  bassin  pari- 
sien où  les  hivers  sont  moins  rudes  et  moins  longs. 

Géologie.  —  Les  observations  des  géologues  sont,  au  contraire, 
nombreuses  et  précises.  Consulter  les  cartes  de  Uogard  et  de  Rilly,  1848 
et  49,  très  développées. 

A  l'ouest  de  la  masse  granitique  des  Vosges  est  un  vaste  plateau  de 
grès  bigarre  que  Ton  traverse  en  partant  de  Plombières  pour  aller  à  Baiw 
ou  à  Luxeuil.  J'ai  vu  sur  ces  routes  plusieurs  carrières  en  exploitatioo. 
Des  vallées  entaillées  dans  ce  plateau  courent  parallèlement  de  N.  E.  a 
S.  0.,  telles  que  la  vallée  de  l'Augronne  qui  nous  occupe,  la  vallée  du 
Coney  avec  le  Baignerot  pour  affluent  (sources  de  Bains),  la  vallée  de  la 
Semeuse  (source  de  la  Chaudeau),  la  vallée  du  Breuchin  (sources  de 


PLOMBIÈRKS.  —  SOURCES.  369 

Luxeail.)  Toutes  ces  vallées  ont  pour  caractères  communs  d'être  recli- 
lignes,  abruptes,  avec  pointements  granitiques  qui  donnent  naissance  à 
des  eaux  thermales.  Des  Failles,  dans  le  même  sens,  coupent  ensuite  le 
département  de  la  Haute-Saône. 

La  vallée  de  TAugronne  doit  nous  occuper  spécialement;  sur  la  route 
de  la  fontaine  Stanislas  se  voient  des  amas  de  rochers  (en  langue  du  pays 
dits  Meurgers),  blocs  de  grès  bigarré  des  hauteurs,  et  de  poudingues 
ijuartzeux  durs  représentant  le  grès  vosgien.  Le  fond  de  la  vallée  laisse  à 
no  le  granité  porphyroïde  qui  se  continue  assez  loin  vers  Aillevillers, 
tandis  qu'en  remontant  vers  Remiremont  il  y  a  du  granité  à  grains  fins. 
Le  granité  porphyroïde  offre  de  gros  cristaux  de  feldspath  rose  et  des 
points  noirs  de  hornblende. 

Les  sources  émergent  de  ce  granité  sur  une  longueur  d'environ  200 
mètres  :  les  plus  chaudes,  du  thalweg  ;  les  tempérées,  au-dessus.  Elles  sont 
m  rapport  avec  les  filons  de  quartz,  de  spath  fluor  et  de  barytine  coupant 
k  granité.  Les  sources  savonneuses  jaillissent  des  parois  de  ces  filons.  Les 
lources  actuelles  contiennent  encore  des  traces  de  fluorures,  mais  les 
Ktians  chimiques  actuelles  ne  sont  pas  à  comparer  à  celles  d'une  autre 
époque  géologique,  dont  on  a  pour  témoins  et  les  filons  et  les  imprégna- 
tions da  terrain  supérieur  (grès  vosgien  et  grès  bigarré).  Le  régime  des 
caax  change  par  les  grandes  commotions  du  sol  ;  les  tremblements  de 
ten% peuvent  nous  le  faire  comprendre;  celui  de  1682  a  rendu  chaude 
ane  source  froide  de  Plombières.  Daubrée  ne  s'est  pas  contenté  de 
Térifier,  à  Plombières,  la  théorie  d'Élie  de  Beaumont  sur  les  relations  des 
sources  thermales  avec  les  filons  ;  il  a  encore  montre  comment  ces  eaux 
ootproduity  au  moyen  de  leurs  silicates,  des  zéolithes  dans  le  béton  romain 
(a^phyllite,  chabasie,  harmotôme),  faits  comparables  aux  formations  épigé- 
vétiques  des  roches  trappéennes.  Ce  travail  de  l'eau  thermale,  offrant  une 
date  certaine  puisqu'on  connaît  à  peu  près  l'âge  du  béton,  a  fourni  à  la 
géologie  des  faits  nouveaux  et  pleins  d'intérêt.  Nous  ne  parlons  que  pour 
mémoire  des  pyrites  cuivreuses  formées  sur  le  robinet  de  bronze  romain. 
Sources.  —  Les  travaux  de  captage  de  Tingénieur  Jutier  ont  donné 
aux  sources  de  Plombières  une  fixité  qui  en  rend  l'étude  plus  netfe.  Ces 
4ra?aux  longs  et  difficiles,  1856-1861,  et  la  belle  disposition  de  l'aqueduc 
do  Thalweg  ont  dévoilé  bien  des  mystères  des  eaux  souterraines.  Les 
sources  anciennes  les  plus  chaudes  ont  été  retrouvées;  au  moment  de  la 
découverte,  le  robinet  romain  montait  de  73  à  74^;  il  est  descendu  à  71 
et  70;  en  1875,  j'ai  noté  72.  On  trouvera,  dans  le  grand  travail  de 
Jutier  et  Jules  Lefort,  de  nombreux  tableaux  sur  la  température  et  le 
débit  des  sources.  27  sources  régulières  donnent  au  delà  de  700  mètres 
oubes  en  24  heures. 

Si  l'on  jette  un  coup  d'oeil  rapide  sur  les  anciennes  analyses  de  Nicolas 

et  Vauquelin,  sur  celles  deO.  Henry  et  Lhéritier,  1855,  de  Lefort,  1860, 

i     onWit  que  les  diverses  sources  ne  forment  qu'un  ensemble,  au  point  de 

<^   tue  chimique.  Leur  faible  minéralisation  est  indiquée  par  la  densité 

IM   ipassaat,  de  quelqeus  dixièmes,  celle  de  l'eau  pure.  Jules  Lefort  n'a  pas 

l  !K)OT.  OICT.    HiD.  ET  CHIR.  XXVHI  —  24 


370  PLOMBIÈRES.  —  sources. 

trouvé  de  réaction  alcaline;  j'ai  vu  la  source  des  Dames  bleuir  légère- 
ment le  papier.  La  proportion  de  gaz  est  peu  considérable  avec  prédomi- 
nance d'azote,  sans  intérêt. 

Les  deux  analyses  modernes  ne  diffèrent  qu'en  un  point.  Ossian  Henry 
et  Lhéritier  considèrent  les  carbonates  comme  résultant  de  la  transfor- 
mation des  silicates,  pendant  Tévaporation  ;  en  conséquence ,  ils  ne  por- 
tent pas  de  carbonates  dans  leur  analyse  hypothétique. 

Les  principaux  éléments  signalés  parLefort  sont:  silicates  0,10;  sulfate 
de  soude  0,10;  bicarbonates  0,05  ;  avec  des  traces  d'arsenic.  Minéralist- 
tion  totale  0,50.  Il  parait  qu'on  a  trouvé  le  même  chiflre  il  y  a  450  ans. 
La  matière  onctueuse,  dite  savon  minéral,  serait  du  silicate  d'alumine. 

Les  chimistes  et  les  hydrologues  ont  été  assez  embarrassés  pour  classor 
ces  eaux  :  l'Annuaire  en  avait  fait  des  bicarbonatées;  à  ce  compte,  il  fau- 
drait nommer  ainsi  toutes  les  eaux  communes.  Les  auteurs  du  Diction- 
naire ont  dit  sulfatées  sodiques,  non  sans  hésitation  et  sans  réserves, 
ayant  le  sentiment  du  peu  de  valeur  des  10  centigrammes  de  sel  de  Glau- 
ber.  Lhéritier  les  intitule  silicatées  et  arsenicales.  Or,  jusqu'ici  personne 
n'a  démontré  que  10  à  12  centigrammes  de  silicates  alcalins  soient  de 
quelque  usage  dans  un  litre  d'eau  minérale.  Bains  et  Luxeuil  pourraient 
se  présenter  avec  le  même  titre,  et  les  eaux   d'Auvergne  renferment 
souvent    deux  fois  plus  de  silice.  L'expérience  de  Lhéritier,  qui  dit 
avoir  obtenu  des  silicates  en  traitant  par  l'eau  chaude  le  granit  pulvérisé, 
n'a  pas  un  intérêt  très-grand.  Des  échantillons  de  ce  granité  ne  m'ont 
donné  que  de  la  matière  organique  par  l'eau  distillée  bouillante.  Quant 
à  l'arsenic,  il  n'y  en  a  que  des  traces  et,  comme  bon  nombre  d'eaux  ont 
fourni  des  traces  de  ce  métalloïde,  je  ne  vois  pas  de  raison  particulière 
de  dénommer  celles-ci  arsenicales,  pas  plus  que  silicatées.  Le  résidu 
fixe  ne  dépassant  pas  le  tiers  d'un  gramme,  elles  sont  moins  minérali- 
sées que  beaucoup  d'eaux  potables  et  n'ont  plus  que  leur  thermalité  pour 
les  distinguer.  En  conséquence,  elles  appartiennent  à  la  classe  des  eaux 
thermales  simples,  vieille  dénomination  encore  préférable  à  toutes  les 
autres.  Hâtons-nous  de  dire  que  les  eaux  thermales  simples  donnent  peut- 
être  aux  médecins  hydrologues  les  plus  brillants  résultats. 

L'étude  de  l'administration  des  eaux  va  nous  conduire  à  quelques 
détails  sur  les  sources  les  plus  importantes.  On  les  emploie  en  boinon,  eo 
bains,  en  douches,  étuves,  etc.,  et  il  est  juste  de  reconnaître  que  les 
applications  sont  aussi  bien  faites  que  Variées.  On  fait  boire  les  sourcei 
chaudes  des  Dames  et  du  Crucifix,  et  la  source  froide  ferrugineuse,  ht 
buvette  de  la  source  des  Dames  est  un  peu  trop  primitive,  sans  abri  m 
temps  de  pluie.  Sa  température  est  assez  stable,  51  à  52''C;  c'est  la  phi 
facile  à  digérer  ;  son  débit,  au  robinet,  m'a  paru  de  25  à  30  M.C.  pv 
24  heures.  —  La  buvette  du  Crucifix  est  sous  des  arcades  qui  abritêot 
suffisamment  les  malades.  Sa   température  parait  moins   fixe,   48-49 
(Lhéritier),  45  (Jutier),  45  (Leclère).  J'ai  trouvé,  au   robinet,  46  « 
1875  et  1877.  J'ai  estimé  son  débit  à  12  ou  15  M.  C.  en  24  heures,  in 
robinet  voisin  coule  la  source  savonneuse,  qui  a  varié  de  2  degrés  de 


PLOMBIÈRES.  —  BAiKs.  371 

1873  à  1877,  époques  où  j'ai  mesuré.  La  source  ferrugineuse  ne  coule 
plus  à  côté. 

Celte  source  ferrugineuse  yient  de  la  partie  supérieure  de  la  ville  (pro- 
menade des  Dames)  ;  elle  a  de  11  à  12®,  dépassant  ainsi  la  moyenne  du 
lien  ;  elle  renferme  environ  1  1/2  centig.  de  bicarbonate  de  fer  très-insta- 
ble. On  la  boit  à  table  dans  des  carafes.  Elle  n'a  pas  la  valeur  qu'on  a 
voulu  lui  attribuer. 

n  est  facile  de  s'apercevoir  que  le  nombre  des  buveurs,  à  Plombières, 
est  fort  restreint.  Plusieurs  d'entre  eux  envoient  chercher  l'eau  et  ne 
paraissent  pomt  aux  buvettes. 

Bairs.  —  Le  bain  est  la  médication  principale  ;  il  est  facile  d'en  juger 
par  le  nombre  et  la  fréquentation  des  établissements  :  plusieurs  sont  d'an- 
cienne date.  Nous  allons  les  suivre  du  haut  en  bas  de  la  ville. 

Bmndes  Dafhes.  —  Reconstruit  avec  14  cabinets  bien  éclairés,  petits, 
itt-dessous  est  le  bain  des  pauvres  ;  deux  petites  piscines  rondes,  34  à 
35*C;  cpielques  baignoires  autour.  L'hôpital,  derrière  l'église,  logeant  une 
centaine  de  malades. 

Bain  Romain.  —  Sur  l'emplacement  des  anciens  thermes  et  de  la 
grande  piscine  ;  sans  apparence  extérieure  à  cause  de  son  enfoncement 
dans  le  sol;  à  l'intérieur,  architecture  italienne  de  bon  goût;  24  cabi- 
aets  n'ayant  qu'un  cube  d'air  de  12  mètres,  un  peu  sombres,  on  a 
Fitsage  de  laisser  la  porte  ouverte  en  se  baignant.  Bains  de  34  à  38^.  La 
amrce,  très-abondante,  approche  de  60®  C. 

Bain  tempéré,  —  Voûtes  à  plein  cintre  ;  4  piscines  en  marbre , 
nodes,  occupant  un  carré  de  6  mètres  de  côté  ;  températui'c  33  à  35^  ; 
8S  baignoires  aux  deux  étages. 

Bain  des  Capucins.  —  Construction  ancienne  à  caractère  ;  piscine 
divisée  en  dieux^  sections,  l'une  à  37^,  l'autre  à  40®,  où  l'on  ne  fait  que 
paaaer.  Là  se  trouve  la  fameuse  source  des  Capucins,  avec  un  siège  pour 
les  dames  qui  en  reçoivent  les  vapeurs.  J'ai  trouvé  dans  le  trou  45®;  mais, 
au  griffon,  il  y  a  au  moins  50®. 

Bain  national.  —  4  belles  piscines  en  marbre  des  Vosges;  35  à  36®; 
me  quarantaine  de  cabinets  trop  petits.  Source  d'Enfer  50  à  60®.  A  côté 
SainM  des  Princes;  2  grandes  baignoires. 

Bain  Napoléon.  —  Beau  monument  ;  les  deux  ailes  pour  l'hôtel  écra- 
'  mtsDX  on  peu  le  centre.  Vaste  couloir  ayant  plus  de  50  mètres  de  long; 
!;  escalier  grandiose;  52  cabinets  contenant  60  baignoires,  les  cabinets 
Y  d*en  bas  avec  un  vestiaire.  Ces  cabinets,  offrant  un  cube  d'air  de  20  à  25 
i,  sont  les  plus  grands  et  les  plus  commodes.  Sur  4  piscines  on  en  a 
if^riroé  2.  Le  sous-sol  et  le  second  étage  restent  sans  emploi.  Hydro- 
complète :  douches  tivoli,  écossaises,  ascendantes,  etc.,  alimen- 
par  des  sources  froides.  Les  sources  chaudes  sont  emmagasinées  dans 
BU  réservoir  sur  la  colline  voisine  et  dans  la  partie  supérieure  du  bâti- 
Tfient.  Le  refroidissement  s'opère  au  moyen  d'un  serpentin  qui  traverse  ia 
fffière. 
On  compte  en  tout  160  cabinets  de  bains  et  près  de  180  baignoires  ; 


572  PLOMBILUKS.  —  effets  des  eadx.  —  i>dications. 

une  dou/ainc  de  piscines,  petites,  mais  bien  établies.  Presque  toutes  les 
maisons  ont  des  douches  varices  ;  les  douches  ascendantes  sont  organi- 
sées à  souhait.  Ajoutez  à  cela  les  anciennes  étuvcs  romaines  rétablies  par 
les  soins  de  M.  Jutier,  avec  masseur  et  masseuses,  les  étuves  d*cnfer,  et 
vous  aurez  une  idée  des  ressources  balnéaires  de  cette  station  intéres- 
sante. Les  étuves  laissent  encore  à  désirer;  ce  sont  des  vapeurs  d'eai 
chaude  naturelle  élevant  de  40  à  45^  la  température  du  milieu.  On  coo« 
serve  encore  ici  l'habitude  des  bains  prolongés  pendant  1  à  2  heures  et 
plus;  autrefois  ils  Tétaient  davantage.  Les  maisons  de  bains  rc&teot 
ouvertes  de  5  heures  du  matin  à  7  heures  du  soir. 

Effets  des  eaux.  —  Ces  eaux  pioduisent  sur  Torganisme  sain  ou  malade 
des  eflets  puissants,  dus  au  liquide  lui-même,  avant  tout  à  la  façon  de 
l'administrer. 

Suivant  quelques  médecins,  Liétard  entre  autres ,  la  boisson  aurait  pea 
d'importance  ;  manière  de  voir  en  désaccord  avec  la  théorie  de  Lhéritier 
sur  l'arsenic,  puisqu'il  suppose  h  cet  agent,  même  à  l'état  de  traces,  une 
action  altérante  sur  le  système  nerveux.  Hutin  a  fait  de  nombreuses  expé- 
riences sur  les  effets  du  bain.  Ses  résultats  sont  conformes  à  ce  qui  a  ëè 
observé  sur  les  bains  froids,  tempérés  et  chauds.  J'ai  constaté,  sur  moi- 
même,  le  sentiment  de  bien-être  éprouvé  au  sortir  du  bain  et  l'absence 
de  la  fatigue  ressentie  après  un  bain  d'eau  commune  de  même  chalenr. 
La  stimulation  exagérée  et  l'agitation  nerveuse  sont  dues,  le  plus  sou- 
vent, à  des  immersions  trop  longues,  trop  fréquentes,  trop  chaudes.  la 
direction  du  médecin  est  donc  indispensable  pour  toutes  ces  nuances. 
D'une  manière  générale,  disons  que  le  traitement  est  à  la  fois  tonique  et 
sédatif,  et  qu'il  relève  les  fonctions  du  tube  intestinal  avec  une  certaine 
tendance  à  la  constipation.  .  j 

Indications.  —  Le  rhumatisme,  d'une  part,  les  maladies  du  système 
nerveux  et  du  tube  digestif  de  l'autre,  représentent  le  fond  de  la  clini- 
que thermale  en  question. 

Le  travail  de  Lhéritier,  sur  le  rhumatisme  chronique,  est  appuyé  d'une 
cinquantaine  d'observations  variées.  Me  permettrai-je  d'avancer  que  lei 
indications  n'y  sont  pas  assez  nettes?  Le  mémoire  de  Leclère  nous  fait 
entrer  plus  avant  dans  la  médication  thermale.  Elle  convient  aux  rhuma-  [^ 
tismes  subaigus  ou  chroniques  musculaires,  articulaires  et  surtout  fis- 
céraux,  mais  à  la  condition  que  la  forme  névropathique  domine,  qu'il  j 
ait  plus  de  phénomènes  douloureux  que  de  lésions  de  tissu.  Elle  defiei  \^ 
un  agent  puissant  pour  Tapaisement  des  crises  douloureuses,  un  véritifaie 
sédatif.  Les  étuves  et  l'hydrothérapie  froide  sont  des  adjuvants  préeieiu. 
Le  nom  de  bain  des  goutteux,  donné  aux  Capucins,  montre  que  cesdtf*  {-= 
niers  ont  aussi  quelque  chose  à  gagner  aux  eaux  de  Plombières.  !  -. 

Les   maladies  du   système  nerveux   se   rencontrent  en   assez  grmi  s^  ^ 
nombre  ;  des  hystéries,  '{uelques  chorées,  des  névralgies  rhumatisnub   g^ 
ou  non,  des  paralysies  de  beaucoup  d'espèces  comme  nous  le  monirek 
mémoire  étendu  de  Lhéritier.  Il  est  à  remarquer,  tout  d'abord,  quel» 
succès  sont  relatifs  à  des  aficctions  d'origine  rhumatismale  ;  un  cbs  iù 


PLOMBIÈRES.  -    INDIC4TI0NS.  377» 

guérison  d'une  anesthésie  de  la  partie  inférieure  du  corps,  duc  au  froid  et 
datant  de  deux  ans,  mérite  de  fixer  notre  attention.  Deux  cas  de  guérison 
de  paraplégie  rhumatismale  sont  dus  à  Martinet.  Dans  les  paralysies 
dépendante»  d'une  lésion  probable  ou  constatée,  ces  guérisons  complètes 
ne  se  montrent  plus.  Les  hémiplégies  disparaissant  en  quelques  semaines, 
lorsque  le  traitement  thermal  suit  de  près  l'accident,  soulèvent  toujours  la 
question  de  l'influence  attribuable  à  la  marche  naturelle  des  choses  dans 
les  foyers  apoplectiques.  Les  névralgies  avec  névrites  demandent  des  mé- 
nagements particuliers. 

La  réputation  de  Plombières  est  parfaitement  établie  dans  les  maladies 
du  système  abdominal,  non-seulement  par  les  nombreux  écrits  des  mé- 
decins, mais  aussi  par  le  courant  des  anciens  clients  qui  vont  répandant 
autour  d'eux  les  vertus  des  sources  bienfaisantes.  Le  fait  est  connu, 
accepté,  non  discuté,  mais  les  indications  ne  sont  pas  encore  tracées  avec 
une  netteté  suffisante. 

La  gastralgie,  qui  est  pourtant  à  la  fois  une  maladie  de  l'estomac  et  une 
névrose,  double  recommandation  pour  Plombières,  nous  offre  un  exemple 
de  cette  hésitation.  Dans  une  note  sur  ce  point  (Annales  d'hydrologie^ 
t  XI),  Lhéritier,  qui  trouve  le  travail  de  Liétard  peu  concluant,  ne  con- 
dut  pas  lur-méme.  Je  suis  loin  de  blâmer  l'esprit  de  réserve  chez  un 
praticien  qui  a  beaucoup  vu  et  qui  doute.  Les  médecins  de  Plombières  no 
sont  pas  désarmés  contre  la  gastralgie.  La  gastro-entéralgie  douloureuse 
knr  a  procuré  de  nombreux  succès.  La  boisson  vient  ici  en  aide  aux  bains. 
Consulter  à  ce  sujet  le  mémoire  de  Bottentuit  sur  les  dyspepsies  flatulentes 
i  forme  douloureuse  (Annales,  t.  XVI). 

Les  diarrhées  chroniques,  désignées  sous  le  nom  de  catarrhes  ou  d'en- 
Imtes,  suivant  leurs  symptômes  et  en  même  temps  suivant  le  système  de 
nomenclature,  sont  peut-être  les  maladies  dominantes  à  Plombières  ;  j'ai 
eonou,  pour  ma  part,  un  grand  nombre  de  ces  maladies  que  la  thérapeu- 
tique avait  peu  soulagés  et  qui  étaient  très-satisfaits  de  cette  cure  ther- 
male. En  présence  de  ces  données,  on  s'étonne  de  trouver  un  mémoire 
du  D' Leclère  sur  le  traitement  de  la  constipation  (Annales  d'hydrologie 
t.  XVI).  11  prescrit  l'eau  des  Dames  en  boisson  à  la  dose  de  1/2  verre  à 
S  verres;  des  bains  tièdes  de  32  à  54^;  des  douches  tivoli  sur  l'abdomen, 
des  douches  ascendantes,  etc.  11  pense,  en  agissant  de  cette  façon,  régler 
l'innervation  abdominale  et  en  même  temps,  la  défécation.  Il  est  vrai 
que  b  constipation,  aussi  bien  que  la  diarrhée,  ne  sont  pas  toujours 
des    maladies,   mais  des  états  dépendant  d'un  équilibre    instable  de 
■    rinnenration  du  grand  sympathique. 

Un  certain  nombre  de  dyspepsies  stomacales  ou  intestinales  avec  irré- 
gularité des  fonctions,  diarrhées,  phénomènes  douloureux  névralgiques, 
ont  été  signalées  comme  relevant  du  traitement  de  Plombières,  lors(|ue  le 
rhumatisme  ou  la  goutte  en  étaient  le  principe.  C'est  là  un  point  délicat, 
0iais  intéressant,  de  l'application  de  l'agent  thermal. 

\^         Les  maladies  des  femmes  ne  sont  pas  rares  à  Plombières;  elles  sont 
înlimement  liées  aux  états  névropntlii(|ucs;  aussi  les  névroses  utérines 


374  PNEUMATOSE. 

fournissent  les  meilleurs  résultats.  Les  bains  tempérés,  suffisamment  pro- 
longés, agissent  comme  sédatifs^  La  sédation  s'exerce  également  sur  Tétat 
douloureux  dépendant  d'un  catarrhe  et  même  d^un  oogorgement.  La 
douche  de  Tapeur  des  capucins,  ayant  pour  résultat  immédiat  de  conges- 
tionner les  organes  génitaux,  doit  être  prescrite  et  maniée  avec  pradenoe 
bien  qu'elle  ne  présente  pas  les  mêmes  dangers  que  le  jet  de  la  Btibefh 
quelle  à  Ems.  Par  ce  bain  de  Tapeur  local  il  est  possible  de  réTeiUer 
l'inertie  de  la  fonction  menstruelle  et  de  ramener  les  régies.  Le  D'  Bot- 
tentuit  m'a  assuré  qu'il  avait  constaté  le  fait  de  la  congestion  de  l'a- 
térus  se  traduisant  par  une  augmentation  notable  de  volume  dans  l'organe. 
La  même  douche  est  un  bon  moyen  de  rappeler  le  flux  hémorrhoidal,  s'il 
y  a  nécessité  de  le  faire.  Je  ne  dis  rien  de  la  question  de  stérilité  que  \m 
médecins  actuels  comprennent  dans  son  sens  véritable. 

Plombières  est  donc  un  bain  de  premier  ordre  par  l'abondance  de  ses 
eaux  thermales,  par  ses  vieilles  traditions,  par  sa  bonne  installation. 
C'est  une  eau  thermale  simple  comme  Néris,  comme  Wildbad,  Tepliti  o« 
Ragatz.  Elle  participe  à  l'action  commune  des  eaux  de  montagne  i  h 
fois  toniques  et  sédatives.  Ces  rapprochements  nous  conduisent  à  corn- 
dérer  les  eaux  à  un  point  de  vue  plus  large  et  plus  philosophique,  et  i  ne 
pas  tomber  dans  les  petites  théories  chimiques  qui  veulent  tout  expliquer 
par  quelques  centigrammes  de  silice,  matière  inerte  par  excellence,  oo 
par  des  traces  d'arsenic.  Il  est  un  raisonnement  bien  simple  à  opposer  i 
ces  théories  ;  beaucoup  d'eaux  thermales  ont  les  vertus  de  Plombières 
sans  renfermer  d'arsenic  et  beaucoup  d'autres  renferment  de  -rarseoic 
sans  avoir  les  vertus  de  Plombières. 

Lbéritieii,  Du  rhumatisme  et  de  son  traitement  par  les  eaux  de  Plombières,  i853.  —  Dei  pin* 

lysies  et  de  leur  traitement  par  les  eaux  de  Plombières,  1854. 
Hkiiey,  Lii<ritibii,  Hydrologie  de  Plombières,  1855. 
DAUBBii,  Mémoire  sur  la  relation  des  sources  thermales  de  Plombières  avec  les  filous  inétalli- 

fères  {Annalei  des  mines ^  1858,  5*  série,  t.  XIII). 
Verjon,  Maladies  chroniques  des  voies  digestives.  —  Clinique  de  l'hôpital  de  Plombières,  1869. 
Lbcl^re,  Des  eaux  de  Plombières  dans  les  maladies  chroniques  du  tube  digestif,  1809.  —  Di 

rhumatisme  et  de  ses  manifestations  diathétiques  par  les  eaux  de  Plombières,  1875. 
BoTTEirruiT,  Guide  des  baigneurs  aux  eaux  de  Plombières,  1873. 
Jdtikr  et  LcpoRT,  Étude  sur  les  eaux  de  Plombières  {Annales  d'hydrologie,  t.  VU,  1860,  el 

tirage  â  part). 

Labat« 
PrVEOniÈTRE.  Voy,  Respiration. 

PNEUMATOSE.  —  Pris  dans  son  acception  la  plus  large,  le  temoe 
de  pneumatese  s'applique  à  tout  état  morbide  produit,  par  la  présence  de 
gaz  ou  d'air  atmosphérique,  soit  dans  des  parties  qui,  normalement,  m 
doivent  point  en  contenir,  soit  dans  des  cavités  qui,  à  l'état  physiologique, 
n'en  renferment  qu'une  quantité  limitée.  On  devine  aisément  toote  J 
rétendue  de  cette  classe  de  maladies,  qui  ne  tendrait  à  rien  moins  qu'à 
englober  la  pathologie  entière,  si  réellement  nous  devions  réserver  le 
nom  de  maladies  à  ces  troubles  divers,  qui  résultent  en  effet  de  Tappa- 
rition  de  gaz  dans  quelques  points  de  l'économie,  mais  qui  sont  loin  Je 


»■ 


PNEUMATOSE.  375 

présenter,  et  la  même  importance,  et  surtout  la  même  gravité.  Aux  yeux 
des  auteurs  du  siècle  dernier,  un  grand  nombre  de  nos  maladies  û*ou- 
Tait  sa  cause  dans  ces  fluides  anormaux  ou  anormalement  distribués.  Les 
ouvrages  de  «pneumato-pathologie»,  les  traités  «  des  maladies  venteuses  d 
écrits  sous  rinspiration  de  ces  idées,  en  sont  le  meilleur  vestige,  et  si 
la  médecine  moderne  a  fait  justice  de  ces  exagérations,  elles  n'en  ont 
pas  moins  survécu  en  partie  dans  les  croyances  populaires. 

Nous  savons  aujourd'hui  que  cette  accumulation  insolite' de  fluides 
élastiques  n*est  jamais  un  fait  spontané,  mais  dérive  elle-même  d'un 
état  moii)ide  antérieur,  ou  d'une  cause  accidentelle.  Ainsi  envisagé,  le 
nom  de  pneumatose  ne  désigne  plus  qu'un  symptôme,  mais  un  symptôme 
essentiellement  variable  quant  à  ses  manifestations  extérieures,  et  surtout 
d'une  importance  très-diverse.  Tantôt  simple  épiphénomène,  pouvant 
passer  presque  inaperçu,  il  domine  ailleurs  toute  la  scène  morbide,  au 
point  de  constituer  presque  toute  la  maladie.  Une  description  générale  ne 
peut  donc  être  donnée,  et  nous  sommes  forcés  de  passer  succinctement 
en  revue  les  pneumatoses  des  principaux  appareils.  Il  va  de  soi  que  cet 
aperçu  devra  être  tout  à  fait  sommaire  :  on  trouvera  dans  les  autres  parties 
de  ce  Dictionnaire,  à  l'article  consacré  spécialement  à  chaque  organe, 
une  étude  plus  complète  de  quelques  points  de  la  question.  (Voir  les  ar- 
ticles Dyspepsie,  Emphysème,  Estomac,  Intestins,  Tybipanitb.) 

Les  pneumatoses  peuvent  être  divisées  en  spontanées  et  traumatiques, 
qu'on  a  encore  appelées  essentielles  ou  symptomatiques.  Pour  les  pre- 
mières, il  s'agit  presque  toujours  d'une  véritable  sécrétion  ou  exhalation 
de  gaz  ;  les  autres  trouvent  leur  explication  habituelle  dans  la  pénétration 
de  Tair  atmosphérique  à  travers  une  plaie. 

Cette  variété  d'origine,  qui  est  vraie  dans  la  grande  majorité  des  faits,  ne 
saurait  cependant  être  généralisée  d'une  façon  absolue.  Certaines  pneu- 
matoses qui  s'observent  après  des  traumatismes  violents,  peuvent  exister 
indépendamment  de  toute  plaie.  D'ailleurs,  tout  ce  qui  se  rapporte  au 
mécanisme  intime  de  la  production  des  gaz,  est  encore  entouré  pour 
certains  cas  d'une  grande  obscurité  :  il  en  est  de  même  de  la  composition 
chimique  de  ces  gaz,  sur  la  nature  desquels  nous  sommes  loin  d'être 
6xés. 

Dans  les  pneumatoses  traumatiques,  c'est  presque  toujours  de  l'air 
atmosphérique  à  peu  près  pur,  que  l'on  a  trouvé  infiltré  dans  les  tissus,  à 
moins  que  ces  tissus  n'aient  subi  eux-mêmes  quelque  altération.  Dans  les 
pneumatoses  spontanées/ au  contraire,  l'air  a  subi  quelques  modifications, 
Toxygène  a  généralement  diminué,  Tazote  et  l'hydrogène  peuvent  être 
augmentés,  et  l'on  trouve  des  fluides  nouveaux,  tels  que  de  l'acide  car- 
bonique, de  rhydrogène  carboné,  ou  de  l'hydrogène  sulfuré,  facilement 
reconnaissable  à  son  odeur. 

Pneumatose  de  Vappareil  cutané.  —  La  présence  de  l'air  dans  le 
tissu  cellulaire  sous-cutané,  autrement  dit  l'emphysème  traumatique,  mé- 
riterait de  nous  arrêter  longuement,  si  cette  question  n'avait  été  l'objet 
d'une  étude  approfondie  dans  un  article  précédent  (Voir  Emphysème).  Ce 


376  PNEUMATOSE. 

que  nous  devons  noter  cependant,  c'est  que  rinfiltration  aérienne  qui 
suit  un  grand  traumatisme,  n'est  pas  toujours  le  résultat  d^une  eniraction 
à  la  peau.  Quel  en  est  le  mécanisme  dans  ces  circonstances?  Jusqu'ici  oo 
a  formulé  beaucoup  d'hypothèses,  mais  une  démonstration  éTidente  reste 
encore  à  donner.  On  a  invoqué  la  perturbation  nerveuse»  la  sidération 
profonde  de  Téronomie,  la  stupeur  organique,  etc.,  mais  on  est  loin 
d'avoir  résolu  le  problème. 

A  côté  de  ces  emphysèmes  traumatiques,  eu  quelque  sorte  spontanés, 
on  peut  ranger  l'emphysème  qui  suit  la  pénétration  de  cerlains  yinis  ou 
venins,  l'emphysème  de  la  gangrène  :  ici  Tinterprétation  du  phénomène 
ne  saurait  être  douteuse,  les  altérations  physiques  et  chimiques  des  tissus 
en  rendent  suflisamment  compte. 

Pneumatose  de  Vappareil  respiratoire,  —  Le  rôle  de  l'appareil  res- 
piratoire où  l'air  extérieur  est  en  rapport  constant  avec  des  tissus  Gne- 
ment  organisés,  pouvait  faire  préjuger  de  la  possibilité  de  certaines 
lésions,  liées  à  ce  conflit  incessant.  Elles  existent  en  effet,  mais  nous 
n*avons  à  nous  occuper  ici  que  de  celle,  généralement  connue  depuis 
Laënnec,  sous  le  nom  d'emphysème  interlobulaire. 

11  s'agit  ici  d'une  véritable  lésion  traumatiquc  :  l'emphysème  interlo- 
bulaire succède  toujours  à  une  rupture  des  voies  aériennes.  Fréquent 
surtout  dans  le  jeune  âge,  il  survient  chez  les  enfants  atteints  de  maladies 
diverses  des  organes  pulmonaires,  pendant  les  quintes  de  toux  violente: 
et  même  en  dehors  de  tout  état  morbide  des  poumons  et  des  bronches,  par 
suite  des  cris  aigus,  d'un  accès  de  colère,  d'une  douleur  vive,  c'est-à-dire 
dans  des  circonstances  où  de  grands  efforts  sont  produits. 

L'air  s'infiltre  dans  le  tissu  cellulaire  intervésiculaire  et  sous-pleural, 
et  forme  à  la  surface  des  poumons  des  saillies  irrégulières,  dont  le  vo- 
lume varie  depuis  celui  d'un  grain  de  chènevis,  jusqu'à  celui  d'une  noii, 
d'un  œuf,  et  plus.  En  pressant  ces  saillies  avec  les  doigts,  on  les  déplace, 
et  l'on  peut  aisément  les  faire  cheminer  sous  la  plèvre.  Le  poumou  ne 
s'affaisse  plus,  il  est  crépitant.  L'infiltration  gazeuse  suit  les  conduits 
bronchiques,  les  gaines  des  vaisseaux,  et  après  avoir  gagné  l'une  et 
l'autre  médiaslin,  peut  envahir  le  cou,  la  face,  et  de  là  s'étendre  à  une 
grande  partie  du  corps.  Il  ne  s'agit  plus  alors  d'un  simple  emphysème 
interlobulaire,  mais  bien  d'un  véritable  emphysème  trauniatique  plus  ou 
moins  généralisé  et  avec  toutes  ses  conséquences. 

L'emphysème  limité  au  tissu  cellulaire  interlobulaii*e  est  assez  difficile 
à  diagnostiquer.  La  voussure  thoracique  n'existe  pas  conmie  dans  l'emphy- 
sème vésiculaire,  la  sonorité  peut  ne  pas  être  augmentée.  Quant  au  râle 
crépitant  à  grosses  bulles,  que  Laënnec  avait  assigné  à  cette  lésion,  il 
n'est  autre   que  le  râle  sous-crépitant  ordinaire,  se  liant  à  une  bron- 
chite  concomitante.  Il  en  est  de  même  du  bîiiit  de  frottement^  io-     ' 
diqué  également  par  Laëimec,   et  qui    est  bien    plus   le   résultat  de 
quelque   fausses   membranes   pleurétiques,   que  celui  de  l'infiltration 
interlobulaire. 

Quand  l'emphysème  se  propage  à  l'extérieur,  il  se  révèle  parles  sigiief 


PNEUMATOSK.  377 

ordinaires  de  rcmphysèmetrauruatique  :  tuméfaction,  crépitation,  etc.,  sur 
lesquels  nous  n'avons  pas  à  insister. 

L'emphysème ,  bien  que  borné  au  tissu  cellulaire  interlobulaire , 
peut  être  une  complication  grave  et  même  mortelle,  si  la  lésion  s'étend 
à  une  grande  partie  du  poumon.  Une  gène  croissante  de  la  respiration 
amène  bientôt  Tasphyxie.  Ailleurs  la  mort  peut  être  plus  prompte,  parfois 
même  subite.  Dans  cos  conditions,  eu  égard  surtout  à  l'incertitude  du  dia- 
gnostic, on  conçoit  que  l'intervention  thérapeutique  soit  à  peu  près  nulle. 

On  a  longtemps  admis  une  autre  forme  de  pneumatose  pulmonaire, 
véritable  exhalation  gazeuse  dans  l'intérieur  de  la  plèvre,  que  Laënncc, 
Graves,  et  Stokes  ont  décrit  sous  le  nom  de  pneumothorax  essentiel. 
Cette  sécrétion  gazeuse  venant  compliquer  des  pleurésies  simples,  en 
dehors  de  toute  altération  de  liquide,  était  toujours  envisagée  comme  un 
Ëiii  rare.  Elle  est  niée  aujourd'hui  par  les  auteurs  les  plus  compétents, 
Béhîer,  Jaccoud,  Proust,  qui  rapportent  les  observations  citées,  soit  à  des 
pleurésies  avec  bruit  skodique  et  souffle  amphorique,  soit  à  des  pneu- 
monies avec  son  tympanique. 

Pneumatose  de  l'appareil  digestif.  —  On  peut  se  demander  à  quel 
moment  la  présence  de  gaz  dans  le  tube  gastro-intestinal  mérite  réellement 
le  nom  de  pneumatose,  car  à  l'état  physiologique,  Testomac,  comme  l'in- 
testin, renferme  une  certaine  quantité  de  gaz,  qui  semblent  nécessaires 
et  sont  destinés  à  favoriser  le  cours  des  matières  alimentaires.  Ces  gaz  vien- 
nent-ils à  augmenter,  le  fonctionnement  régulier  lic  l'appareil  digestif  est 
entravé,  il  y  a  tympanitc.  Sont-ils  simplement  dilatés  ou  retenus  dans  un 
point  du  tube  digestif,  il  y  a  pneumatose  alors  que  la  quantité  n'en  est 
nullement  augmentée. 

Normalement,  et  alors  qu'aucun  élément  pathologique  n'entre  enjeu, 
on  conçoit  que  la  proportion  des  gaz  du  tube  digestif  doive  varier  dans 
des  limites  assez  étendues.  La  déglutition  de  la  salive  amène  constamment 
l'introduction  d'une  certaine  quantité  d'air  dans  l'estomac.  D'autre  part, 
les  métamorphoses  chimiques  des  aliments  s'accompagnent  de  produits 
gazeux  qui  varient  non-seulement  d'après  la  nature  des  aliments,  mais 
encore  d'après  la  qualité  des  sucs  digestifs.  Tout  le  monde  sait  que  cer- 
tains aliments,  les  farineux  par  exemple,  prédisposent  au  développement 
de  gaz.  Enfin  la  membrane  muqueuse  elle-même  peut  produire  une  véri- 
table exhalation  de  gaz.  On  sait  en  effet  que,  si  chez  un  animal  vivant, 
comme  le  fit  Magendie,  on  tire  par  une  plaie  du  ventre  une  anse  intestinale, 
et  si,  après  l'avoir  exactement  vidée  et  l'avoir  comprimée  entre  deux  liga- 
tures, on  la  replace  dans  l'abdomen,  au  bout  de  peu  de  temps  on  la 
trouve  de  nouveau  plus  ou  moins  distendue  par  des  gaz. 

Toute  perturbation  dans  les  fonctions  digestives  peut  s'accompagner 
d'une  augmentation  dans  la  production  des  gaz.  Une  constipation  opiniâtre 
amène  de  la  tympanite,  non-seulement  parce  qu'elle  met  obstacle  au 
départ  d'une  certaine  quantité  de  gaz,  mais  parce  qu'elle  favorise  la  dé- 
composition des  matières.  La  même  chose  arrive  dans  les  cas  d'ictère 
chronique,  quand  la  bile   n'étant  plus  versée  à  la  surface  de  l'intestin, 


578  PNEUMATOSE. 

les  matières  s'altèrent  avant  leur  complète  élaboration.  Nous  pourrions 
nous  appesantir  longuement  sur  toutes  les  causes  qui  entrent  ici  en  jeu, 
ce  serait  sans  intérêt.  Qu'il  nous  suffise  de  dire  que  la  pnenmatose  du  tube 
digestif  peut  être  réalisée  soit  par  une  altération  de  son  contenu,  soit 
par  une  altération  de  Torgane,  et  que  presque  toujours  ces  deux  causes 
viennent  se  surajouter  l'une  à  l'autre.  Ainsi  s'explique  la  pneumatose  qui 
complique  certaines   affections  de  l'estomac,   et  particulièrement  ces 
troubles  fonctionnels,  englobés  sous  le  nom  de  dyspepsies;  ainsi  s'expli- 
quent encore  ces  pneumatoses  intestinales  souvent  énormes,  qui  accom- 
pagnent certaines  indigestions.  Tout  le  monde  connaît  le  météorisme  des 
bétes  à  corne,  qui  suit  dans  certaines  conditions  l'ingestion  trop  abondante 
de  fourrages  verts.  Le  même  phénomène  aurait  été  constaté  pendant  le 
blocus  de  Gènes  et  de  Mayence  chez  des  soldats  qui  avaient  avalé  une 
grande  quantité  de  feuilles  vertes. 

Cependant  il  est  des  cas  où  la  pneumatose  ne  saurait  être  attribuée  à 
aucune  lésion  du  tube  digestif.  Celle  que  Ton  observe  dans  le  cours  des 
névroses,  dans  l'hypocondrie,  et  spécialement  pendant  les  accès  d'hystérie, 
ou  simplement  à  la  suite  d'une  émotion  morale  un  peu  vive,  reconnaît 
évidemment  une  cause  plus  éloignée.  Chez  les  femmes  nerveuses,  on  voit 
souvent  un  accès  de  colère,  une  firayeur  un  peu  vive,  être  suivis  au  bout 
d'un  certain  temps  du  rejet  bruyant  de  gaz  par  la  bouche.  D'autre  fois, 
le  ballonnnement  du  ventre,  après  s'être  montré  pour  ainsi  dire  subite, 
ment,  disparaît  presque  aussitôt,  sans  que  rien  ne  soit  rejeté  au  dehors, 
n  ne  peut  être  question  ici  que  d'une  sécrétion  presque  instantanée,  et 
d'une  résorption  rapide  par  les  mêmes  voies.  Or,  si  nous  songeons  à  la 
suractivité  du  système  nerveux  chez  cette  classe  de  malades,  rien  ne  nous 
répugne  d'admettre  ici  une  action  vaso-motrice  ;  c'est  elle  qui  commande 
les  urines  nerveuses  chez  les  hystériques,  et  nous  croyons  la  comparaison 
légitime  pour  ces  deux  ordres  de  sécrétions. 

C'est  aussi  à  une  influence  du  système  nerveux  que  nous  croyons  devoir 
attribuer  en  grande  partie  la  pneumatose  des  fièvres  graves,  et  principa- 
lement celle  que  l'on  observe  au  début  de  la  fièvre  typhoïde.  L'intestin 
est  à  ce  moment  presque  intact,  et  cependant  le  ballonnement  est  quel- 
quefois plus  prononcé  qu'au  moment  où  les  lésions  se  seront  produites. 
Le  tympanisme  de  la  péritonite  s'explique  tout  naturellement,  si  l'on 
songe  que  les  anses  intestinales  sont  paralysées  dans  leur  élément  mus- 
culaire, et  se  laissent  distendre  outre  mesure. 

La  pneumatose  du  tube  digestif  peut  être  générale  :  elle  est  limitée 
parfois  soit  à  l'estomac,  soit  à  certaines  portions  de  l'intestin,  et  dans  ce 
cas  on  trouve  les  gaz  spécialement  accumulés  dans  le  cœcum,  les  colons 
ascendant  et  transverse,  et  TS  iliaque.  Ils  dilatent  les  organes  dans  les- 
quels ils  sont  accumulés,  et  leur  donnent  parfois  un  volume  monstrueux: 
on  a  vu  le  colon  aussi  gros  que  la  cuisse,  et  Haller  a  rencontré  un  coecum 
aussi  volumineux  que  la  tête  d'un  adulte. 

La  composition  des  gaz  varie  suivant  les  points  où  on  les  recueille.  Dans 
l'estomac,  c'est  de  l'air  atmosphérique  renfermant  seulement  une  plus 


FiNEUMATOSE.  379 

forte  proportion  d'acide  carbonique  ;  dans  l'intestin  grêle,  c'est  un  mé- 
lange d'azote,  d'hydrogène  et  d'acide  carbonique  ;  dans  le  gros  intestin 
on  troaye  encore  de  Phydrogène  sulfuré  ou  carboné  ;  il  n'y  a  jamais 
d'oxygène.  La  proportion  d'acide  carbonique  augmente  toujours  à 
mesure  qu'on  se  rapproche  du  rectum. 

Nous  ne  pouvons  exposer  ici  la  symptomatologie  des  diverses  affections 
qui  se  compliquent  de  pneumatose  du  tube  digestif.  Un  mot  cependant 
sur  ses  conséquences  immédiates.  La  première  et  la  plus  constante,  c'est 
le  malaise  qui  résulte  de  la  distension  gazeuse  :  le  malaise  peut  devenir 
une  véritable  douleur,  une  colique,  si  les  gaz  deviennent  trop  abondants. 
L'estomac  trop  distendu  remplit  l'hypocondre,  soulève  le  cœur  dont  il 
gène  les  mouvements  et  détermine  ainsi  des  palpitations  et  une  dyspnée 
parfois  considérable.  Il  y  a  de  l'anxiété,  des  bâillements;  l'épigastre  est 
tendu  et  sonore.  Tous  ces  symptômes  s'apaisent  sitôt  que  des  gaz  sont 
expulsés  soit  par  la  bouche,  soit  par  l'anus. 

La  distension  de  l'intestin  à  un  certain  degré  amène  la  tympaniteintes- 
iinale.  Le  ventre  acquiert  un  volume  considérable.  Il  est  dur,  très-sonore 
à  la  percussion,  sensible  au  toucher.  Des  bruits  se  font  entendre  quand 
des  gaz  se  déplacent  (borborygmes)  et  des  douleurs  extrêmement  violentes 
peuvent  se  déclarer  (coliques  venteuses) .  Pour  peu  que  la  distension  gazeuse 
acquière  un  certain  volume,  tous  les  organes  abdominaux  sont  gênés  dans 
leur  fonctionnement  :  l'estomac  est  comprimé,  le  diaphragme  est  refoulé, 
il  y  a  de  la  dyspnée  et  quelquefois  des  vomissements.  La  compression  de 
la  vessie  produit  la  dysurie  et  rend  les  excrétions  de  l'urine  plus  fréquentes. 
Si  la  pneumatose  est  limitée  au  cœcum,  ou  n'occupe  qu'une  ou  deux  anses 
intestinales,  on  voit  se  dessiner  à  travers  les  parois  du  ventre  une  tumeur 
arrondie,  sonore,  élastique,  sensible  à  la  pression  et  plus  ou  moins  mobile. 

La  durée  de  ces  phénomènes  est  entièrement  liée  à  la  cause  originelle, 
et  nous  ne  pouvons  rien  en  dire  sans  entrer  dans  le  détail  des  faits,  ce 
que  ne  comporte  point  cet  article. 

Le  diagnostic  du  symptôme  ne  présente  aucune  difficulté  :  la  sonorité 
exagérée  du  ventre  distingue  suffisamment  une  pneumatose  d'une  ascite, 
sans  compter  les  autres  signes.  L'inspection,  aidée  de  la  palpation  et  de  la 
percussion,  permet  de  déterminer  quels  sont  les  points  des  organes 
digestifs  où  les  gaz  se  sont  spécialement  accumulés  ;  et  ce  diagnostic 
topographique  a  sa  grande  importance,  au  point  de  vue  chirurgical  sur- 
tout, quand  dans  un  cas  d'étranglement  ou  d'occlusion  intestinale,  l'indi- 
cation d'une  opération  vient  à  se  présenter. 

La  valeur  séméiologique  des  pneumatoses  du  tube  digestif  est  considé- 
rable, tant  au  point  de  vue  des  alTections  de  l'organe  lui-même,  qu'à 
celui  des  maladies  générales,  fièvres  continues,  etc.  C'est  la  pneumatose 
intestinale  qui  souvent,  au  début  d'un  état  fébrile,  permet  de  distinguer 
une  dothiénentérie  d'un  simple  embarras  gastrique.  C'est  le  ballonnement 
du  ventre  qui,  chez  une  femme  en  couches,  éveille  les  premières  craintes, 
et  fait  redouter  une  aiTection  puerpérale.  Nous  n'avons  pas  besoin  de 
rappeler  toute  l'importance  qu'acquiert  le  symptôme  dans  le  cours  d'une 


380  PNKUMATOSE. 

obstruction  intestinxle,  soit  pour  faire  connaître  la  nature  du  mal,  soit 
pour  permettre  d'en  déterminer  le  siège  précis. 

L'indication  thérapeutique  se  pose  rarement  en  face  du  seul  symptôme 
pneumatose,  à  moins  que  celui-ci  ne  vienne  à  prédominer,  comme  dans 
certaines  formes  de  dyspepsies.  Il  comporte  alors  une  médication  com- 
plexe et  variée,  qui  a  été  exposée  ailleurs  (Voir  Dyspepsies). 

Pneumatose  de  V appareil  circulatoire,  —  Les  auteurs  anciens  jus- 
qu'à Morgagni  et  plus  récemment  encore,  frappés  de  certains  faits  qu'ils 
aviiient  bien  observés,  mais  mal  interprétés,  croyaient  à  la  possibilité 
d'un  dégagement  gazeux  dans  l'intérieur  des  vaisseaux  et  surtout  dans  le 
cœur.  L'observation  semblait  donner  raison  à  leur  manière  de  voir,  car 
dans  un  grand  nombre  d'autopsies,  le  cœur  et  particulièrement  le  ven- 
tricule droit,  renfermaient  en  effet  des  gaz  et  du  sang  écumeux.  Les  chi- 
rurgiens connaissaient  depuis  longtemps  les  dangers  d'une  opération  au 
voisinage  de  gros  troncs  veineux,  et  avaient  justement  attribué  la  mort 
subite  qu'on  peut  observer  en  pareille  circonstance,  à  l'introduction  de 
l'air  dans  les  veines.  La  doctrine  de  l'embolie  est  venue  confirmer  leur 
interprétation,  et  montrer  le  mécanisme  intime  de  ces  accidents.  C'est  eo 
effet  à  titre  de  corps  étranger,  d'embolus  dans  les  vaisseaux  pulmonaires, 
que  l'air  devient  pernicieux  et  non  par  ses  propriétés  particulières;  et 
c'est  toujours  à  la  pénétration  de  l'air  extérieur  qu'il  faut  attribuer  la  pré- 
sence des  fluides  gazeux  dans  les  voies  circulatoires.  Le  dégagement  spon- 
tané de  gaz  ne  saurait  être  admis,  et  c'est  sans  doute  à  une  rupture  pul- 
monaire et  à  une  absorption  par  cette  voie  qu'il  faut  attribuer  ces  faits  où 
Texistence  de  gaz  aurait  été  constatée  en  dehors  d'une  plaie  extérieure. 
C'est  toujours  en  effet  à  la  suite  d'hémoptysies  considérables,  que  les  faits 
cités  ont  été  observés. 

Nous  ne  dirons  rien  de  la  présence  de  l'air  dans  le  péricarde  (pneumo- 
péricarde).  On  n'en  connaît  aucun  exemple  authentique,  en  dehors  des 
cas  où  l'air  a  pénétre  pendant  une  ponction. 

Pneumatose  de  V appareil  génito-urinaire.  — En  raison  de  la  longueur, 
de  l'obliquité  et  de  l'étroitcsse  du  canal  de  l'urèthre  chez  l'homme,  la 
pénétration  de  l'air  extérieur  est  impossible,  en  dehors  du  cathétérisme.  Il 
ne  saurait  être  question  non  plus  d'exhalation  spontanée,  et  la  sortie  de 
gaz  par  l'urèthre  indique  presque  toujours  une  communication  anormale 
de  la  vessie  avec  un  des  organes  abdominaux,  ou  une  décomposition  ra- 
pide des  urines. 

Chez,  la  femme,  il  arrive  quelquefois  que  la  cavité  du  col  étant  obstruée, 
des  portions  de  fœtus  ou  de  délivre,  ou  bien  encore  des  caillots  sanguins, 
retenus  dans  la  matrice,  viennent  à  subir  la  fermentation  putride,  et 
déterminent  une  production  de  gaz  qui  distend  considérablement  l'utérus. 
Cette  affection,  connue  sous  le  nom  de  physométrie,  ou  tympanile  utérine, 
survient  généralement  peu  après  l'accouchement.  L'utérus  forme  une  tu- 
meur volumineuse,  élastique,  sonore  à  la  pei*cussion  :  des  gaz  fétides 
s'échappent  spontanément,  ou  bien  leur  expulsion  peut  être  provoquée 
arliiiciellement.  Il  s'agit  ici  d'une  affection  grave. 


PNEUMOMK  LOBAIRK  AIGUË.  581 

Mais  il  existe  dans  la  science  quelques  cas,  plus  rares  que  les  précédeuls, 
de  piiysométrie  essentielle,  où  les  gaz  semblent  exlinlés  par  les  pntois 
utérines  elles-mêmes,  en  dehors  de  toute  lésion  appréciable.  C'est  généra- 
lement dans  des  utérus  non  fécondés,  chez  des  femmes  hystériques,  que 
cette  sécrétion  a  été  observée.  L'accroissement  progressif  de  l'utérus,  le 
malaise  et  la  pesanteur  que  la  malade  éprouve  en  même  temps  qu'elle 
voit  ses  règles  se  supprimer,  ont  fait  naître  souvent  l'idée  d'une  grossesse, 
jusqu'au  jour  où  le  brusque  départ  d'une  grande  quantité  de  gaz  inodores 
▼ieni  subitement  Taire  disparaître  la  tumeur  utérine. 

Yoy.  la  bibliographie  des  articles  :  Dyspepsie,  Emphysème,  Estomac,  Iih- 

TESTUf,  TtMPA»ITE. 

HiPPOLYTE  HiRTZ. 

PNEUMONIE  L.OBAIRE  AIGUË,  pneumonie  fibrineuse, 
pneumonie  eroupale,  pneumonite,  peripneumonie,  etc.  —  Les 
deux  dernières  dénominations  sont  un  peu  tonibccs  en  désuétude;  la 
troisième  (p.  croupale)  est  vicieuse,  non-seulement  parce  qu'elle  peut, 
t  la  rigueur,  prêter  à  l'équivoque  en  faisant  songer  à 'une  pneumonie 
compliquant  le  croup,  mais  surtout  parce  que  le  processus  anatomique, 
ainsi  que  le  remarque  Virchow,  est  différent  dans  l'ulvcole,  siège  de  la 
pneumonie  fibrineuse,  et  sur  les  muqueuses  atteintes  de  croup  :  sur  ces 
dernières,  Fexsudat  se  complique  d'altérations  épithéliales  et  n'est  jamais 
hémorrhagique,  tandis  que  dans  la  pneumonie  l'épithélium  est  intact  et 
Texsudat  toujours  hémorrhagique  au  début.  —  Quant  aux  deux  prenjières 
dénominations,  on  a  l'habitude  de  les  employer  indifféremment,  bien 
que  l'exsudat  pneumonique,  ainsi  qu'on  le  verra  plus  loin,  ne  soit  pas 
toujours  franchement  fibrineux.  Pour  cetle  raison,  il  y  aurail  avantage 
à  ne  plus  considérer  ces  Jeux  mots  comme  synonymes  :  à  désigner  du 
nom  de  pneumonie  fibrineuse,  seulement  la  pneumonie  franche  et  à 
nommer  pneumonie  lobaire  toutes  les  pneumonies  occupant  un  lobe  ou 
une  partie  notable  d'un  lobe.  En  d'autres  termes,  on  réunirait  sous  cette 
désignation  générique  de  lobaire  et  l'espèce  légitnne  (p.  fibrineuse)  et 
les  espèces  un  peu  bâtardes  de  pneumonie  qui  ne  ressortissent  cepen- 
dant ni  à  la  broncho-pneumonie,  ni  à  la  pneumonie  dite  hypostatique, 
ni  n  la  pneumonie  consécutive  aux  embolies.  Dans  le  cours  de  cet  article 
je  me  conformerai  à  la  termintdogie  que  je  propose. 

Sous  la  dénomination  de  péri  pneumonie,  les  anciens  et  les  médecins  mo- 
dernes, antérieurs  à  Laennec,  confondaient  beaucoup  de  maladies  aiguës 
des  organes  thoraciques.  L'auteur  du  Traité  de  V auscultation  consei^a 
ce  mot  respectable,  puisqu'il  date  du  temps  d'IIippocrate  ;  mais  il  l'ap- 
pliqua strictement  à  Tinflammation  aiguë  du  poumon,  caractérisée  sur  le 
cadavre  par  l'un  des  trois  états  qu'il  apprit  à  bien  distinguer  :  engouement, 
hépatisation  rouge,  hépatisation  grise  ;  —  et  sur  le  vivant,  par  certains 
signes  sthétoscopiqucs  qu'il  eut  la  gloire  de  découvrir.  Sa  description,  tant 
anatomique  que  clinique,  est  faite  de  main  de  maître;  le  temps  l'a  respectée, 
et  ses  successeurs  immédiats,  qui,  grâce  à  un  labeur  immense  guidé  par 


382  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  awatomie  pathologique. 

une  méthode  d'observation  rigoureuse,  ont  jeté  tant  d'éclat  sur  la  méde- 
cine française,  n'y  ont  rien  ajouté  d'essentiel. 

Les  seules  modifications  considérables  qu'on  y  ait  apportées  ontconsisté 
à  disjoindre  la  pneumonie  hypostatique  et  la  broncho-pneumonie  de  la 
pneumonie  ;  l'histoire  de  cçs  découvertes,  auxquelles  les  noms  de  Piorry 
et  des  médecins  de  l'hôpital  des  Enfants  doivent  rester  attachés,  sera 
exposée  par  Balzer  dans  l'article  suivant. 

Plus  tard,  Yirchow,  par  sa  découverte  de  l'embolie,  a  fait  conuaitre  une 
nouvelle  espèce  de  pneumonie. 

Nous  devons  à  Wunderlich  et  à  son  élève  Thomas  l'étude  précise,  i 
l'aide  du  thermomètre,  de  la  marche  cyclique  de  la  fièvre,  dans  la  pneu- 
monie. 

Mais  ces  progrès,  malgré  leur  importance,  n'ont  pas  entamé  l'œuvre 
de  Laennec.  La  base  anatomique  sur  laquelle  elle  repose  demeure  intacte; 
et  à  lire  les  traités  actuels  de  pathologie,  il  ne  semble  pas  qu'elle  doive 
être  de  sitôt  modifiée.  Ses  inconvénients  cependant  ne  peuvent  être  com- 
plètement passés  sous  silence.  Quelle  ressemblance  y  a-t-il  (si  ce  n'est 
peut-être  à  un  point  de  vue  macroscopique  grossier)  entre  la  pneumonie 
primitive  et  certaines  pneumonies  secondaires?  Réunir  des  types  aussi 
divers  sous  la  même  étiquette,  en  constituer  une  espèce  unique,  n'est-ce 
pas  subir,  sans  grand  profit  et  en  pure  perte  pour  la  clinique,  le  jong 
d'une  anatomie  qui  n'est  pas  encore  sûre  d'elle-même  et  dont  les  notions 
imparfaites  ne  sont  rien  moins  que  définitives  ? 

J'en  suis,  pour  ma  part,  si  convaincu,  que  si  j'étais  libre  de  restreindre 
à  mon  gré  mon  cadre,  je  ne  m'occuperais  ici  que  de  la  pneumonie 
iibrineuse,  c'est-à-dire  de  Vespèce  légitime  seule,  mais  je  crois  qu'il  ne 
m'appartient  d'innover  qu'avec  réserve  dans  un  article  de  dictionnaire. 
Je  dois  traiter  et  traiterai  donc  de  la  pneumonie  lobaire  aiguë,  telle  que 
l'anatomie  pathologique  s'est  cru  en  état  de  la  délimiter.  J'essaierai  seu- 
lement de  montrer  que  ce  qu'elle  englobe  n'est  pas  un  tout  bien  homo- 
gène et  peut  déjà  être  subdivisé  en  espèces  distinctes. 

Même  en  me  bornant  aux  modernes,  un  historique  exigerait  des  déve- 
loppements assez  étendus.  Je  crois  devoir  m'en  abstenir,  et  j'y  supplée 
par  la  distribution  méthodique  des  indications  bibliographiques  placées 
à  la  fin  de  cet  article. 

Voici  Tordre  que  je  suivrai  dans  mon  exposition  :  je  commencerai  par 
Tanatomie  pathologique,  puisque  c'est  sur  des  caractères  anatomiques 
qu'est  fondé  le  genre  pneumonie  lobaire;  puis,  j'étudierai  successive- 
ment ïétiologie,  la  marche  générale,  la  symptomatologie  spéciale,  les 
anomalies  que  la  marche  et  les  symptômes  peuvent  présenter,  les  dif- 
férentes espèces  de  pneumonie  lobaire,  la  nature  de  l'espèce  légitime, 
les  complications,  le  diagnostic,  le  pronostic  et  le  traitement. 

Anatomie  pathologique.  —  La  lésion  que  nous  appelons  pneu- 
monie lobaire  peut  se  rencontrer  sur  le  cadavre  sous  trois  aspects  diffé- 
rents bien  décrits  pour  la  première  fois  par  Laennec. 

l'"  degré  (engouement  de  Laennec).  A  ce  degré,  l'inflammation  n'esl 


PNEDHONIE  LUBÂIRG  AIGUË.  - 


PATHOLOGIQDB. 


pas  oettement  caractérisée,  eu  égard  au  moins  à  nos  moyens  d'investiga- 
tioD.  La  surface  du  poumon  est  de  couleur  violacée,  livide,  l'organe  est 
plus  pesant  :  sous  la  pression  du  doigt,  il  crépite  à  peine  et  conserve 
l'impression  comme  une  partie  œdématiéc.  A  la  section,  il  s'écoule  un 
liquide  rougeàtre,  trouble  et  spumeux.  Le  tissu  pulmonaire,  de  couleur 
violacée,  n'est  pas  modifié  en  apparence  dans  sa  texture  ;  mais  il  est  plus 
friable  qu'à  l'état  normal.  Sur  une  coupe  mince,  on  constate,  à  l'aide  du 
microscope,  que  les  capillaires  des  alvéoles  et  des  bronchioles  sont  énor- 
mément dilatés,  et  que  les  alvéoles  sont  en  partie  remplis  par  des  glo- 
bules rouges  et  par  de  grosses  cellules  renfermant  de  un  à  trois  noyaux 
volumineux.  Ces  cellules  sont  évidemment  des  cellules  endothéliales  mo- 
difiées; on  en  voit  quelques-unes  adhérer  encore  à  la  paroi  à  càté  de  cel- 
lules endothéliales  intactes.  Cette  altération  n'est  d'ailleurs  pas  caracté- 
ristique du  proc^sus  inflammatoire  :  ainsi  que  Friedlânder  l'a  bien  indi- 
qué, on  la  rencontre  dans  diverses  conditions  qui  n'ont  rien  à  voir  avec 
lui,  notamment  dans  l'œdème  du  poumon. 

2*  degré  {hépatiscUion  rouge).  —  La  portion  de  poumon  atteinte  d'hé- 
patisation  ne  présente  pas  la  moindre 
crépitation  sous  le  doigt  qui  la  presse  ; 
elle  acquiert  une  certaine  ressemblance 
avec  la  limite  du  foie  quant  à  la  cou- 
leur et  surtout  sous  le  rapport  de  la 
consistance.  Elle  n'est  plus  Rusceptible 
d'être  insufQée,  et  une  parcelle  du  tissu 
malade,  déposée  à  la  surface  de  l'eau, 
se  précipite  au  fond  du  vase.  Ces  carac- 
tères macroscopique»  distinguent  cet 
état  de  la  congestion  ;  mais  ils  ne  suffi- 
raient pas  pour  dilTérencier  la  pneumo- 
nie vraie  de  la  broncho-pneumonie  ;  il      b^3uK«'M™i»^n"'iui  ""Si  ^i- 

faut  y  ajouter  l'homogénéité    de   l'appa-        téolilre».  CrossuMmenl:  ».  {nindDeûchl 

r«ice  de   la  section   sur  une   grande 

suriace  (Charcot)  et  surtout  l'aspect  granuletix.  Cet  aspect  granuleux  se 
distingue  bien  à  contre-jour;  on  le  rend  encore  plus  apparent  quand, 
après  avoir  incisé  superllciellement  une  portion  hépatisée,  on  achève 
de  la  diviser  par  déchirure.  II  est  dû  au  relief  formé  par  les  infundibula 
remplis  de  fibrine,  formant  des  grains  bosselés  de  un  millimètre  environ 
dediamètrechezl'adulte,  beaucoup  plus petitscbez  l'enfant.  En  raclant  la 
surface  de  section,  on  recueille  un  bon  nombre  de  ces  grains  bosselés,  et 
il  est  facile,  en  les  examinant  à  la  loupe,  de  constater  que  chacun  repré- 
sente exactement  le  moule  d'un  infundibulum  avec  ses  alvéoles  (fig.  25). 
Les  bosselures  correspondent  aux  alvéoles.  Ce  sont  elles  qui  constituent 
ce  qu'on  appelle  les  granulations  de  la  pneumonie.  D'après  les  mensu- 
rations de  Damascbino,  elles  ont  :  chez  l'adulte,  de  0°"°,13  à  0""", 17; 
chez  le  vieillard,  elles  atteignent  deO^.âl  i  0°™,27,  et  chez  l'enfant, 
seulement  de  0°",  7  à  O"",!  1 . 


'    ANATOHIE   PATHOLOCIQUE. 


oSi  )'NE[>MOIVIl!;  LUBAlItK  AIGUË. 

Sur  une  section  iinc,  à  un  fort  groseissement,  on  reconnaît  que  ïtt 
alvéoles  sont  remplis  par  un  exsudât  fibrineux  sous  forme  de  Sbrill», 
retenant  dans  leurs  mail- 
les des  globules  ronges, 
des  globules  Uancs  en 
beaucoup     plus     grand 
nombre,  et  souvent  quel- 
ques cellules  plus  gran- 
des, bien  figurées  dan» 
le  Manuel  de  Cornil  d 
.  Ranvier,  et  qui  sont  des 
''  cellules     d'endothélium 
altérées,  plus  ou  moina 
identiques     avec    celles 
que  j'ai  signalées  au  pre- 
mier stade.  A  cause  de 
ce  la ,  leu  r  d  esqu  animation 
ne  peut  être  attribuée  à 
'  l'exsudation    fibiineuse. 
Actuellement    la  plu- 
part   des     histologistes 
sont  d'accord  pour  refuser  à  cet  endothélium  toute  participation  active 
à  l'inflaminatioii  fibrineuse.  Buhl 
a  autrefois  vu  des  globules  blancs 
dnnsune  cellule  endotliélialp(Ki>ch. 
Arch.  Bd.  XVI,  p.  168}  et  en  avait 
conclu  que  ces  globules  y  avaient 
l>ris  naissance  ;  mais  celte  conclu- 
sion n'est  pas  forcée,  attendu  que 
des  globules  blancs  après  leur  sur 
lie   des   vaisseaux ,   peuvent    avoir 
péDCtré  par  effraction  dans  la  rel< 
iule.   Ce  qui  confirme  cette  inttr 
prétation,    c'est    que    l'un  trouie 
parfois  non   des  glubulc^  blancs, 
mais    des    globules    rouges    dans 
l'endothélium;  or,  il  est  contraire 
à   toutes  nos    idées  que    ceux-ci 
■J      puissent  naître  par  formation  en- 
dogène. 
i„„j       De  même  que  l'endotbélium.  In 
des-    ti-avées  alvéolaires  sont  intactes  daus 
la  pneumonie    librineuse,   ou   du 
moins   on  ne    voit  que    quelques 
i^lobules  blancs  dans  les  fentes  lymphatiques. 

3"  degré  (hépatisation  grise).  Atteint  d'hépatisation  grise,  le  poumon 


e  IKTioJr  plus  ■•aucév.  On  te 
ammBiJui)  partielle  de  la  paroi 
wmcTii  :  300.  (Biur]fli-i3rl>) 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  variétés  amatomiqdbs.  585 

est  moio  consistant  que  dans  Tétat  d*hépatisatîon  rouge.  Sur  la  surface 
de  section,  qui  laisse  suinter  un  liquide  purulent,  il  présente  un  aspect 
marbré  qui  tient  à  ce  que  dans  certaines  portions  du  lobe  le  processus 
esl  plus  avancé  que  dans  d'autres.  Il  y  a  des  degrés  de  transition  entre 
rhépalisation  rouge  et  Thépatisation  grise;  le  plus  souvent  ils  présentent 
lue  coloration  jaune,  ce  qui  fait  que  certains  anatomistes  (notamment 
[Undfleisch)  ont  décrit  Thépatisation  jaune  au  même  titre  que  la  rouge  crt 
a  grise.  En  plusieurs  points  la  surface  de  section  a  franchement  Taspect 
mnilent,  et  le  tissu  peut  être  si  friable  qu'il  suffit  de  la  pression  avec  le 
loigt  pour  y  produire  une  petite  cavité  irrégulière  qu'un  observateur  non 
>ré¥enu  prendrait  pour  la  cavité  préexistante  d'un  abcès;  parfois  la  coupe 
I  on  aspect  gris  plutôt  que  purulent,  cela  dépend  de  ,  l'abondance  plus 
lU  moins  grande  du  pigment  pulmonaire,  qui  varie,  comme  on  sait,  avec 
'âge  des  individus. 

A  Texamen  histologique  d'une  coupe  mince,  on'constate  qu'à  la  place 
la  réseau  fibrineux  inter-alvéolaire  il  n'y  a  plus  que  des  globules  blancs 
plus  ou  moins  serrés  les  uns  contre  les  autres,  suivant  l'abondance  de 
la  matière  amorphe  granuleuse  interposée.  On  y  voit  aussi  des  grandes 
Drilules  pleines  de  granulations  graisseuses  et  de  pigment  noir.  Les  vais- 
seaux de  la  paroi  ne  sont  plus  dilatés. 

D'où  proviennent  ces  globules  blancs?  Diaprés  la  théorie  de  Cohnheim, 
ils  sont  sortis  des  vaisseaux,  comme  la  fibrine  exsudée,  dans  le  stade 
précédent  et  comme  les  globules  rouges  et  blancs  (ces  derniers  en  beau- 
eoup  moindre  abondance)  qui  se  trouvent  dans  l'alvéole  au  stade  de 
lliépatisation  rouge.  Tout  le  monde  est  à  peu  près  d*accord  à  cet  égard. 
Cependant  tout  récemment  le  professeur  Buh!  {MiUheilungen  ans  dem 
foih.  Institule  zu  Mûnclien  1878)  a  soutenu  encore  que  les  globules 
Uancs  dans  l'hépatisation  grise,  comme  dans  les  autres  cas  pathologi- 
^cs,  peuvent  provenir  non -seulement  du  sang,  par  le  [mécanisme  que 
Cohnbeim  a  fait  connaître  mais  aussi  de  la  lymphe  et  des  cellules  du 
tissu  conjonctif. 

11  résulte  des  analyses  chimiques  déjà  anciennes  de  Natalis  Guillot  qu*à 
cette^iériode,  ainsi  qu'on  pouvait  s'y  attendre,  le  parenchyme  pulmo- 
naire renferme  beaucoup  de  graisse  (dix  fois  plus  qu'à  l'état  normal). 

Variétés  anàtomiques.  —  Les  lésions  que  je  viens  de  décrire  sont 
celles  qui  s'observent  le  plus  ordinairement;  mais  il  y  a  des  cas,  assez 
nombreux,  où  les  lésions  des  2*^  et  S""  degrés  présentent  quelques  particu- 
larités dignes  d'intérêt  parce  qu'elles  commandent  jusqu'à  un  certain 
point  la  symptomatologie.  Le  professeur  Schûtzenberger  est,  à  ma  connais- 
sance, celui  qui  a  le  plus  insisté  sur  ces  variétés  anatomiques  et  sur  leur 
sorrélation  avec  la  clinique. 

1*  Variété  hétnorrhagique  (héinatotde  de  Schûtzenberger).  Le  pou- 
mon est  rouge  à  la  coupe  qui  peut  être  grenue  comme  dans  la  variété  com- 
mune ;  seulement  les  alvéoles,  au  lieu  de  renfermer  de  petites  masses  de 
Ett>rine,  contiennent  un  petit  caillot  formé  par  des  globules  rouges  pressés 
les  uns  contre  les  autres  sans  interposition  de  Gbrine  visible.  Ces  cas  con- 

KOCV.   DICT.   UiD.  ET  CHIR.  XWllI  —  25 


S86  PNëUMOMF:  LOBâIKE  aiguë.  —  VARiéTés  ahatohiqubs. 

stitucnt  une  sorle  d'intermédiaire  entre  rinflammation  et  la  conges- 
tion. 

2""  Variété  séreuse  (Schûtzenberger) .  Même  pauvreté  en  fibrine  ;  teo- 
lement  c*est  de  la  sérosité  qui  remplit  Talvéole,  et  non  du  sang  :  c'est 
rintermédiaire  entre  l'œdème  et  Tinfilammation  du  poumon.  Je  n'ai  pas 
eu  personnellement  l'occasion  d'observer  de  ces  cas  qui  doivent  étrebôn- 
coup  plus  communs  à  Strasbourg  qu'à  Paris  ou  qu'à  Lyon. 

S^"  Variété  avec  moules  fibrineiux;  des  bronches  {fibrineuse  de  Schût- 
zenberger, épithète  qui  ne  me  parait  pas  suffisamment  désigner  cette  n- 
riété  puisqu'on  l'applique  à  toute  l'espèce  ;  au  degré  extrême,  elle  constitue 
la  pneumonie  massive  de  Grancher) .  Cette  variété  fort  iniéressanle  ai 
point  de  vue  anatomique  et  clinique  a  été,  parait-il,  entrevue  depuis  long* 
temps;  mais  dans  la  plupart  des  cas  anciens,  il  y  a  doute  sur  la  questim 
de  savoir  s'il  s'agit  d'une  pneumonie  ou  d'une  bronchite  fibrineuse.  Cette 
incertitude  n'existe  pas  pour  une  observation  de  Morgagni  (éditîoo  de 
Destouet  et  Desormeaux,  t.  111,  p.  416),  relative  à  un  boucher  âgé  de 
78  ans,  atteint  manifestement  de  pneumonie  et  dont  les  crachats  «  pré> 
sentaient  de  petites  parties  blanches  comme  polypeuses  x>  ;  malheareose- 
-ment,  il  n'est  pas  question  de  l'état  des  bronches  dans  la  relation  de 
l'autopsie.  Dans  Tépicrise  (p.  422),  Morgagni  donne  l'indication  de  pli- 
sieurs  cas  du  même  genre,  mais  également  sans  renseignements  anâto- 
miques. 

Pour  arriver  aux  modernes,  Puchclt  a  vu  de  grosses  bronches  di 
volume  du  doigt  dans  un  cas  de  pneumonie,  remplies  par  un  cylindre 
fibrineux  solide  ;  Lobstein  a  trouvé  la  même  lésion  chez  des  enfants; 
Reynaud,  Nonat  (épidémie  de  grippe  de  1857),  l'ont  aussi  signalée. 
Ilemak  l'a  rencontrée  (mais  en  petit),  à  la  clinique  de  Schônlcin  en  1845 
ainsi  que  plus  tard  Gubler  (1868).  Rokitansky  et  Wyts  {London  met. 
Gazette^  1847)  ont  noté  la  présence  de  cylindres,  pleins  dans  les  petit» 
bronches,  et  creux  dans  les  grosses.  Les  auteurs  anglais  citent  ait» 
Peacock,  mais  sans  fournir  d'indication  exacte.  J'ai  trouvé  dans  le  sixième 
volume  des  Transactions  de  la  Société  pathologique  de  Londres^  plu- 
sieurs cas  de  ce  genre;  les  quatre  premiers  (p.  59)  sont  rapportés  parle 
docteur  Bristowc  :  il  s'agit  dans  le  premier  d'une  femme  de  35  ans 
admise  à  Saint-Thomas,  pas  d'observation  clinique  ;  dans  le  second,  il 
s'agit  d'un  homme  de  28  ans  ;  le  troisième,  d'un  homme  de  35  ans; 
dans  le  quatrième,  d'un  sujet  de  29  ans;  le  cinquième  appartient» 
docteur  Wilks,  il  s'agit  d'un  maçon  de  47  ans  :  le  poumon  droit  offrait  une 
matité  absolue  et  on  n'y  entendait  aucun  bruit  pathologique  ni  respin* 
toire.  A  l'autopsie,  ce  poumon  est  trouvé  en  état  d'hépatisalion  grise  et 
les  bronches  entièrement  remplies  d'une  concrétion  solide  qui  peut  étit 
suivie  jusque  dans  les  petites  divisions  et  au  delà  desquelles  elle  se  conti- 
nuait sans  doute  dans  les  cellules  aériennes  (p.  68). 

Bien  qu'elle  ait  pour  titre  de  la  Bronchite  fibrineuse,  la  thèse  de  Wiet 
mann  (Strasbourg  185  i)  traite  en  partie  de  la  pneumonie  fibrineuse  «t 
renferme  une  bonne  planche,  relative  à  un  cas  du  service  de  Schûtieii- 


PNEUMONIE  LOBAfRE  AIGIË.  —  variétés  anatomiqoes.  587 

berger,  avec  examen  par  Kûss.  Je  dois  encore  citer  la  thèse  de  Cadiot 
inspirée  également  par  Schûlzenberger,  bien  qu'elle  ait  été  soutenue 
a  I^itris,  et  la  thèse  de  Renou  (Paris,  1872)  qui  rapporte  quelques  obser- 
mUons. 

Tout  récemment,  Tattention  a  été  appelée  de  nouveau  sur  cette  question 
par  une  bejle  observation  de  mon  collègue,  Granchcr,  qui,  au  cinquième 
jour  d*une  pneumonie  ayant  présenté  des  symptômes  particuliers  sur 
ieaqueb  j  aurai  à  revenir,  a  trouvé  les  bronches  remplies  jusqu'au  hile, 
d*un  moule  Gbrineux,  de  couleur  jaune  sucre  d'orge,  élastique  et  fibril- 
laire  se  détachant  des  bronches  avec  la  plus  grande  facilité  et  non  mêlée 
de  stries  de  sang.  Sa  surface,  au  niveau  des  grosses  bronches,  garde  Tem- 
preiute  des  plis  longitudinaux  dus  aux  fibres  élastiques  de  la  muqueuse 
bronchique  qui  a  conservé  son  état  lisse,  et  sauf  une  petite  injection, 
parait  normale.  Ce  moule  fibrineux  solide  ne  ressemble  donc  en  rien  aux 
paèodo-membranes   de   la  bronchite   pseudo-membraneuse.   C'est  que 
eelles-ci  sont  constituées  par  du  mucus  concret,  formant  des  productions 
imbuleuses  et  feuilletées  englobant  de  petits  blocs  de  mucus  produit  de 
aéerétion  des  glandes  bronchiques,  et  aux  fausses  membranes  de  la  dipb* 
thérie  sous-fibrino-épithéliale,  celle  des  formes  de  fibrine  à  lobe  fibril* 
lâke  ou  plutôt  granuleux  contenant  des  globules  blancs  et  des  globules 
ronges  de  sang  avec  des  cellules  épithéliales  gonflées.  Dans  le  cas  de 
moule  fibrineux  pneumonique,  l'épithélium  de  la  muqueuse  bronchique 
est  intact  :  de  cela  suit  qu'on  a  pu  y  reconnaître  les  cils  vibratiles  (Russ). 
Diais  le  cas  de  Grancher,  la  fibrine  était  de  couleur  jaune,  mais  lorsque 
b  malade  succombe  plus  tôt  on  peut  trouver  les  moules  de  couleur  blan- 
idie,  ressemblant  à  du  vermicelle  cuit.  Une  coupe  transversale  d'un  gros 
cylindre  offre  quelquefois  des  couches  concentriques  ou  bien  il  ressemble 
k  de  la  moelle  de  sureau,  s'il  est  creusé  de  petites  cavités  pleines  d*air. 
Bn  dit  avoir  trouvé  parfois  la  partie  centrale  rougeàtre  par  suite  de  la 
présence  des  globules  rouges  du  sang. 

Ifaprès  Schûtzenberger,  dans  cette  variété  le  sang  serait  toujours 
remarquablement  couenneux;  parfois  il  a  rencontré  en  même  temps  des 
coagulations  fibrineuscs  dans  l'artère  pulmonaire.  Les  auteurs  que  je 
riens  de  citer  sont  muets  sur  cette  coexistence,  j'ai  moi-même  observé 
les  caillots  multiples  dans  les  petites  veines  pulmonaires;  l'observa- 
ion  en  a  été  publiée  à  la  Société  anatomïque  par  Golay,  alors  mon 
nteme;  dans  ce  cas,  il  n'y  avait  pas  de  moule  fibrineux  dans  les  bron- 
ihes. 

4*  Variété  purulente  tï emblée.  J'ai  pu,  grâce  à  la  bienveillance  du 
■trfesseur  Ranvicr,  examiner  une  préparation  histologique  de  cette  variété, 
nrl  rare  dans  les  conditions  ordinaires,  mais  dont  il  a  rencontré  quelques 
as  pendant  le  siège  de  Paris.  Dans  celui  qu'il  m'a  montré,  la  mort  avait 
n  lieu  au  troisième  jour  de  la  maladie  ;  les  alvéoles  ne  renfermaient  que 
ou  pas  de  fibrine,  et  étaient  exclusivement  remplies  de  globules  de 
La  distribution  de  la  lésion  était  lobaire,  et  les  bronches  étaient 
lines. 


388         l'NF:UMOiNlE  LOBAlRt:  ÂlGUË.  --  localisatio.x  des  Litiom. 

5"*  Variété  plane.  Par  celte  épithète,  je  n'cnteiuis  pas  dire  seuleroentqui' 
la  surface  des  sections  n'est  pas  granuleuse  ;  je  désigne  par  ce  mot  la  variéti^ 
qui  établit  une  transition  entre  la  pneumonie  lobaire  et  la  pneamonic 
lobulaire.  Je  ne  fais  d'ailleurs  que  la  signaler  ici,  dans  la  pensée  qu  elle 
sera  étudiée  complètement  par  mon  collaborateur  Balzer  qui,  ayant 
fait  une  étude  approfondie  de  la  broncho-pneumonie  a  dû  en  rencontrer 
quelques  cas.  Celui  qu'il  a  publié  Tan  dernier  dans  la  Gazette  médicale 
avec  Cadet  de  Gassicourt  ne  me  paraît  pas  rentrer  dans  ce  groupe, 
parce  que  dans  un  des  poumons  malades  les  lésions  étaient  réeilemeDl 
celles  de  la  broncho-pneumonie.  Mais  il  est  des  cas  véritablement  mixtes 
et  il  est  à  noter  que  ce  sont  les  médecins  d'enfants  qui  les  ont  particu- 
lièrement signalés.  Le  professeur  Thomas,  dans  son  remarquable  article  de 
l'encyclopédie  de  Gerhard t,  ]e  docteur  Rautenberg  insistent  tous  deux  sur 
ce  fait  que  souvent  la  pneumonie  fibrineuse  chez  l'enfant  n'est  pas  aussi 
franche  que  chez  Tadulte,  de  sorte  qu'il  est  beaucoup  de  cas  où  l'examen 
microscopique  laisse  en  suspens.  Chez  les  sujets  cachectiques,  on  obserte 
aussi  fort  souvent  une  pneumonie  plane,  bilatérale,  confinant  à  la  pneu- 
monie hypostatique  et  il  ne  faut  pas  s'imaginer  que  l'examen  histologique 
sera  capable,  dans  tous  les  cas,  de  lever  les  doutes.  Mais  ce  n'est  pas  seu- 
lement avec  la  broncho-pneumonie  et  avec  la  pneumonie  hypostatique 
qu'il  y  a  des  degrés  de  transition.  Voici,  par  exemple,  un  cas  bien  observé 
histologiquement  et  qu'il  n'est  pas  facile  de  classer  :  chez  un  sujet  mort 
dans  le  service  du  professeur  Lœbel,  dont  la  maladie,  au  point  de  vue  cli- 
nique, avait  paru  ne  s'écarter  en  rien  du  type  ordinaire  de  la  pneumonie 
franche,  Ileitler  trouva  à  l'autopsie  une  hépatisation  grise,  présentant 
au  point  de  vue  histologique  cette  particularité  que  le  nombre  des 
globules  de  pus  était  relativement  très  peu  considérable  et  que  les 
alvéoles  étaient  presque  remplis  de  cellules  provenant  évidemment  de 
l'endothélium  alvéolaire ,  anguleuses  ou  arrondies  et  renfermant 
deux  à  trois  noyaux.  L'abondance  des  éléments  aurait  justifié  le  nom 
de  pneumonie  desquamative  si  cette  dénomination  n'était  réservée  à  uii 
autre  processus  plus  chronique,  qui  aboutit,  comme  on  sait,  à  la  caséifi- 
cation. 

Je  pourrais  multiplier  ces  exemples;  mais  je  m'arrête  en  faisant  obser- 
ver que  l'anatomie  pathologique,  notre  seule  base  dans  Tétude  de  la 
pneumonie,  n'est  pas  en  état  de  nous  dire  nettement  où  elle  commence  et 
011  elle  finit  :  ce  qui  fait  d'autant  plus  regretter  que  le  caractère  anatomi- 
que  soit  notre  seul  guide. 

Localisation  des  lésio.ns.  —  Le  plus  souvent  on  trouve  un  lobe  prcs- 
qu'entier  hépatisé;  plusieurs  fois  Thépatisation  envahit  un  poumon  dans 
la  plus  grande  partie  de  son  étendue,  toutes  les  statistiques  s'accordent 
sur  la  fréquence  de  l'hépatisation  adroite.  On  a,  par  exemple,  à  cet  égari 
les  résultats  de  la  grande  statistique  que  vient  de  publier  le  docteur  Aloîs 
Uiach  et  qui  porte  sur  plus  de  10,000  pncunDonies  observées  dans  les  trots 
hôpitaux  de  Vienne  de  i86G  à  1876  :  sur  100  pneumonies,  le  poumon 
droit  seul  est  pris  49  à  50  fois;  le  ganclio  seul  5i  ou  55  fois;  les  deux 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AKilK.  —  llsîoxs  coxcomitantes.  589 

ensemble  14  ou  15  fois  ;  dans  quelques  statistiques  moins  considérables 
le  chiflre  des  pneumonies  doubles  est  plus  élevé  encore  ;  chez  l'enfant, 
elles  seraient,  au  contraire,  moins  fréquentes  (d'après  la  statistique  de 
Zienssen).  Quant  à  la  prédilection  qu'elle  manifeste  pour  les  différents 
lobes,  voici  les  résultats  d*une  statistique  des  hôpitaux  de  Vienne,  portant 
»ur  6,666  cas,  je  l'emprunte  à  Jurgcnsen  : 

Lobo  supérieur 1*2,15 

n  I    •.  \    —    moyen i.77 

PouiTion  droit          '            ■  m       „  oo  i  / 

--    -  ,  \    —    inférieur 22. li 

'         *  I    —    supérieur  et  moyeu 2,05 

^    —    inférieur  et  moym 5,04 

,.  ,         i  Le  poumon  en  entier 0,55 

-jj    o2    .  <  Lobe  supérieur 0,i)0 

ù«,  là   lo         ^    _    inférieur 22,75 

/     —     moyen 8,54 

.       .  \  Les  lieux  lobes  supérieurs \X9 

Les  liôux  poiimo::s  ;                            •  /f  •                                                          -  -, 
^    ^r  ^ .  \  —         inférieurs i,.>4 

'  /  Lobes  supérieur  droit  et  inférieur  îr.iucho et  r/fp  i'rf««      1,00 

V  Eic 2,55 

I 

Laennec  a  nié  qu'un  poumon  hépatisé  même  en  entier  fût  plus  volu- 
mineux qu*à  l'état  normal.  —  Cette  assertion  a  été  justement  contestée. 
Un  poumon  hépatisc  est  certainement  plus  volumineux  ;  il  est  surtout 
beaucoup  plus  lourd  :  cette  augmentation  de  poids  tient  pour  une  petite 
part  à  la  congestion  et  pour  la  plus  grande  au  poids  de  Texsudat,  qui  est 
parfois  énorme.  Grisolle  dit  avoir  observé  un  poumon  pesant  2, 500  gram- 
mes; j'ai  vu  moi-même,  dans  un  cas  de  pneumonie  double  chez  une 
vieille  femme,  l'un  des  poumons  peser  1,700  grammes  et  l'autre  plus 
àe  500,  chiffres  considérables,  si  l'on  tient  compte  du  poids  normal 
des  deux  poumons  chez  le  vieillard. 

Dans  le  cas  de  pneumonie  unilatérale  la  différence  de  poids  des  deux 
poumons  nous  fournit  approximativement  une  donnée  importante,  le 
poids  de  l'exsudat,  en  tenant  compte  Hu  fait  qu'à  l'état  physiologique  le 
poumon  droit  pèse  de  60  à  90  grammes  de  plus  que  le  poumon  gauche. 
Dans  le  cas  de  pneumonie  gauche,  il  faut  donc  augmenter  la  différence 
et  la  diminuer  dans  le  cas  de  pneumonie  droite.  Je  sais  bien  qu'on  peut 
objecter  que  le  poumon  hépatisé  renferme  plus  de  sang,  mais  Ham- 
burger remarque  avec  raison  que  d'autre  part  le  poumon  du  côté  opposé 
non  hépatisé,  est  souvent  le  siège  d'une  fluxion  collatérale  et  d'œdème, 
qui  augmente  aussi  son  poids.  On  peut  donc,  je  crois,  ne  pas  s'arrêter  à 
cette  objection  et  apprécier  le  poids  de  l'exsudat,  comme  je  viens  de  le 
dire,  par  la  différence  de  poids  des  deux  poumons. 

Cela  étant,  il  résulte  des  recherches  que  j'ai  autrefois  publiées  et  de 
celles  toutes  récentes  de  Hamburger  à  la  clinique  du  professeur 
Kussmaul,  que  le  poids  de  l'exsudat  a  toujours  été  trouvé  à  l'autopsie 
supérieur  à  400  grammes  (sauf  chez  les  sujets  très  âgés),  qu'il  peut 
dépasser  1,000  à  1,200  grammes,  et  que  la  moyenne  est  supérieure  à 
600  grammes. 

Lésions  concomitantes.    —    La  coexistence   d'un   certain    degré   de 


590  PNEIHONIE  LOBAIRE  AIGLE.  —  lésions  coiccomitahtes. 

• 

pleurésie,  correspondant  a  l'étendue  de  la  portion  hépatisée  est  la  règle: 
«  La  plèvre  viscérale,  disent  Cornil  et  Ranvier,  est  recouverte  d'une 
mince  couche  pseudo-membraneuse,  peu  adhérente,  qui  donne  à  cette 
membrane  un  aspect  chagriné  et  tomentcux.  Cette  membrane  est  com- 
posée de  cellules  de  pus,  de  grandes  cellules  endothéliales  plates  ou  tu- 
méfiées et  proliférées  et  de  fibrine  disposée  en  réseau  ;  les  fausses  raein- 
branes  se  vasculariscnt  très  rapidement,  et  lorsqu'on  les  examine  après 
les  avoir  laissées  macérer  dans  le  liquide  de  MûUer,  on  y  voit  un  réseau 
vasculaire  compliqué.  Très  rarement  on  observe  un  épanchcment  liquide 
notable  dans  la  plèvre  ;  le  peu  d'épaisseur  de  la  plèvre  viscérale  qui  a  à 
peine  0,05  mill.  et  la  circulation  qui  est  sous  la  dépendance  de  celle 
des  alvéoles  contigus  expliquent  parfaitement  cette  complication.  » 

Les  ganglions  bronchiques,  dans  tous  les  cas  où  ils  ont  été  examinés, 
ont  été  trouvés  plus  ou  moins  tuméfiés. 

Parmi  les  organes  plus  éloignés,  mais  susceptibles  d*être  altérés  secon- 
dairement par  le  fait  de  la  pneumonie,  il  faut,  en  première  ligne,  citer 
le  cœur,  d'autant  plus  qu'un  clinicien  fort  recommandable  a  prétendu, 
dans  ces  dernières  années,  q^ie  les  pneumoniques  meurent  par  l'épuise- 
ment du  cœur,  Or,  à  l'autopsie  on  trouve,  comme  dans  beaucoup  d'au* 
très  maladies,  le  cœur  droit  rempli  de  caillots  et  le  ventricule  gauche 
vide.  Quant  au  myocarde,  il  est  bien  rare  qu'on  le  trouve  sensiblement 
altéré.  Je  parle  de  ce  que  nous  voyons  dans  notre  pays  ;  mais  il  n'en  est 
certainement  pas  de  même  dans  certaines  localités,  puisque  le  professeur 
Jurgensen,  chez  19pneumoni(|ues  ayant  succombé  de  mai  i  8  73  à  la  finde 
1875  à  la  policlinique  de  Tubingue,  a  trouvé  19  fois  une  dégénérescence 
du  myocarde  (article  Pneumonie  de  l'encyclopédie  de  Ziemssen,  2*  édit., 
p.  199).  Il  est  vrai  que,  dans  ces  cas,  cette  altération  ne  parait  pas 
secondaire  à  la  pneumonie.  Nous  savons  en  effet  par  le  professeur  Ju^ 
gensen  et  par  son  élève  le  docteur  Mûnziger  (Deutsches  Archiv.  XIX), 
que  la  population  de  Tubingue  est  affectée  de  dégénérescence  du  cœur 
par  suite  de  conditions  particulières  sur  lesquelles  je  n'ai  pas  à  insister 
ici,  qui  ont  héréditairement  développé  cet  état  morbide.  Les  faits  de 
Jurgensen  sont  donc  tout  à  fait  spéciaux.  Le  docteur  Hamburger  qui  a 
récemment,  sous  l'inspiration  du  professeur  Kussmaul,  consacre  une 
partie  de  sa  thèse  à  l'étude  particulière  de  l'état  du  cœur,  dit  Favoir 
trouvé  parfaitement  sain  dans  les  7  cas  qu'il  publie. 

La  rate^  d'après  Grisolle,  serait  toujours  assez  consistante  et  d'un 
volume  peu  considérable  ;  mais  il  est  probable  que  Grisolle  ne  Ta  pas 
examinée  avec  toute  l'attention  désirable  ;  en  tout  cas,  il  ne  serait  pis 
exact  de  croire  qu'elle  n'est  pas  influencée  par  la  pneumonie  ;  souvent 
elle  m'a  paru  manifestement  un  peu  ramollie  ;  probablement  elle  devait 
être  plus  grosse  qu'à  l'état  normal  ;  mais  on  sait  quelle  difficulté  il  y  ai 
affirmer  une  légère  augmentation  de  volume  de  cet  organe. 

Quant  au  foie  et  aux  reins,  il  est  moins  facile  encore  d'y  apprécier 
une  modification  notable. 

D'après  Louis  et  Grisolle,  la  muqueuse  gastrique  et  intestinale  pré- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  causes  prédisposaîïtes.  591 

tenterait  souvent  un  certain  degré  de  ramollissement.  Ces  auteurs  disent 
s'être  assurés  qu'il  ne  devait  pas  être  mis  sur  le  compte  de  la  médication. 
Ces  recherches  n'ont  pas  été  reprises  ;  il  serait  cependant  intéressant  de 
les  vérifier. 

Let  muscles  ont  leur  coloration  normale.  La  maladie  ayant  d'habitude 
une  courte  durée,  il  est  difficile  d*apprécier  une  diminution  quelconque 
de  leur  volume,  qui  cependant  est  certaine. 

Quant  au  peu  que  nous  savons  sur  les  modifications  du  sang,  j'en  par- 
lerai à  la  symptomalologie. 

£tlol€»fl^e.  —  Fréqueisce.  —  Dans  la  plupart  des  grands  hôpitaux 
de  l'Europe,  il  y  a  de  20  à  30  pneumoniques  sur  1,000  admissions.  Ce 
chiffre  peut  sembler  trop  élevé  si  l'on  songe  que  beaucoup  de  maladies 
légères  ne  sont  pas  admises  dans  les  hôpitaux  ;  mais  cette  cause  d'erreur 
est,  dit-on,  plus  que  compensée  par  la  proportion  vraiment  énorme  de 
pneumonies  dans  les  hospices  et  asiles  consacres  à  la  vieillesse. 

Causes  prédisposa?jtes  iktrinsèques.  —  Age.  —  Malgré  Tautorité  de  Cru- 
veilhier  et  de  Grisolle,  je  n'hésite  pas  à  dire  que  la  pneumonie  fibrineuse 
ne  se  rencontre  pas  chez  le  fœtus.  Après  la  naissance,  tous  les  âges  y  sont 
sujets,  quoique  d'une  manière  inégale  :  dans  les  premiers  mois  de  la  vie 
elle  est  tout  à  fait  exceptionnelle  (Trousseau,  Thomas);  après,  elle  devient 
relativement  fréquente.  Toutefois,  maintenant  qu'on  sait  distinguer  la 
broncho-pneumonie  de  la  pneumonie  fibrineuse,  on  est  d'accord  pour  ad- 
mettre que  les  enfants  y  sont  moins  exposés  que  les  adultes  ;  de  com- 
bien est  la  différence  ?  c'est  ce  qu'il  est  difficile  de  dire  vu  le  petit  nombre 
de  statistiques  sérieuses  relatives  aux  maladies  du  jeune  âge. 

D*après  celle  de  II.  v.  Ziemssen  portant  sur  186  pneumonies  fibri- 
oenses  chez  déjeunes  sujets,  cette  affection  serait  plus  commune  chez  les 
en&nts  au-dessous  de  6  ans  que  chez  les  enfants  plus  âgés  :  il  y  en  a  11 7 
pour  les  6  premières  années  de  la  vie  et  69  seulement  pour  les  dix 
années  suivantes.  Le  tableau  suivant  montre  aussi  un  chiffre  très  peu  élevé 
de  pneumonies  entre  11  et  15  ans,  et  surtout  entre  6  et  10  ans.  Mais 
J^ignore  si  ces  chiffres  sont  l'expression  exacte  d'une  loi  générale. 

Les  6  premières  colonnes  de  ce  tableau  sont  empruntées  à  la  thèse  de 
Schapira,  élève  du  professeur  Gerhardt;  j'ai  composé  la  7^  à  Taidc  de  la 
statistique  d'Aloïs  Biach  portant  sur  6,712  pneumoniques  traités  au  grand 
hôpital  de  Vienne  de  1866  à  1876.  Quant  aux  six  colonnes  de  Schapira, 
en  voici  l'explication  : 

A.  Pneumonies  observées  au  grand  hôpital  Julius  de  Wùrzburg  de 
novembre  1872  à  novembre  1876. 

B.  Pneumonies  observées  dans  le  même  hôpital  de  mai  1857  à  mai 
1860  {Slalistique  publiée  par  Roth  :  Beitrag  zur  Statistik  der  Pneu- 
monie. Wùrzburg,  1860). 

C.  Pneumonies  observées  dans  le  même  hôpital  par  le  professeur 
Bamberger  de  mai  1854  à  mai  1857. 

Les  trois  colonnes  suivantes  donnent  la  statistique  du  grand  hôpital  de 
Vienne  pendant  les  années  1856-58. 


592 


PNEUMONIE  LOBAIHE  AIGIË.  —  causes  puéoisposaktes. 


1 

Age 

Wûrzbui^ 

Vienne 

• 

A 

R 

C 

1856 

1857 

1858 

1805-1816 

6-iO 

2 

1 

1 

3 

î 

11-15 

10 

5 

4 

19 

17 

40 

275 

16-20 

61 

20 

10 

101 

70 

148 

1356 

21-25 

50 

46 

29 

61 

83 

124 

1184 

26-30 

23 

35 

33 

61 

57 

83 

iN5 

31-35 

10 

21 

19 

41 

38 

61 

es4 

36-40 

17 

22 

19 

41 

27 

51 

421 

41-45 

14 

15 

15 

45 

32 

35 

418 

46^50 

10 

15 

15 

24 

25 

48 

296 

51-55 

13 

17 

12 

19 

20 

18 

274 

56-60 

13 

17 

11 

18 

16 

37 

280 

61-65 

12 

11 

9 

mm 

15 

13 

29 

169 

66-70 

15 

4 

3 

16 

9 

10 

155 

71-75 

4 

7 

6 

6 

9 

8 

73 

76-80 

4 

3 

4 

2 

5 

51 

au  delà 

1 

2 

6 

• 

Ce  tableau  montre  une  brusque  augmentation  du  nombre  des  pneu- 
monies à  partir  de  11  ans  et  surtout  à  partir  de  IC,  de  telle  sorte  quel» 
période  quinquennale  de  16  à  20  est  la  plus  chargée.  La  statistique 
d'AIoïs  Biach  qui  est  faite  année  par  année,  nous  apprend  qu'à  Tienne  le 
maximum  des  pneumonies  tombe  à  Tage  de  18  ans,  qu'il  y  en  a  encore 
beaucoup  jusqu'à  25  ans  et  qu'ensuite  leur  fréquence  diminue.  Grisolle 
se  fondant  sur  une  statistique  de  quelques  hôpitaux  de  Paris  recule  jus- 
qu'à Kàge  de  30  ans  la  période  où  les  pneumonies  sont  très  communes; 
s'il  en  est  réellement  ainsi,  Paris  diffère,  sous  ce  rapport,  des  autres 
grandes  villes  de  l'Europe. 

A  priori,  la  chose  n'a  rien  d'impossible  :  car  je  suis  frappé  de  voir  qui 
Wiirzburg,  à  Vienne  et  à  Munich,  ce  n'est  pas  au  même  âge  qu'on  ren- 
contre le  plus  de  pneumonies.  Voici  en  effet  une  statistique  récente  de 
l'hôpital  de  Munich,  j'y  vois  que  : 

De  1  à  15  ans  il  y  a 1,57  |ioiir  cent. 

16  à  30  ans      —      ...  48,52      — 

31  à  GO  ans      —       40,92      — 

Au-dossus  de  60  ans      —       8,99      — 

100.00 

Or,  sans  parler  de  la  proportion  par  trop  invraisemblable  des  pneumo- 
nies au-dessous  de  16  ans,  et  qui  ne  peut  s'expliquer  sans  doute  que 
par  des  règlements  hospitaliers  particuliers,  je  trouve  que,  de  16  à  50, 
il  y  a  un  sixième  de  pneumonies  en  plus  que  dans  la  période  de  51  à 
60  ;  or,  si,  je  fais,  à  Taide  des  chiffres  du  grand  tableau  ci-dessus, 
le  même  calcul  pour  Wùrzburg  et  pour  Vienne,  j'obtiens  des  résultats 
bien  différents  :  à  Wiirzburg  (A,  B,  C)  il  y  a  514  pneumonies  de  16  i 
50  ans  et  285  de  51  à  60  ans  :  différence  fô  ;  à  Vienne  (statistique  de 


PNEIMOME  LOBAIRE  AIGLE.  —  causés  prédisposantes.  595 

^chiaipira  1856-1858)  il  y  a  788  pneumonies  de  16  à  30  et  596  de  31  à 
60  :  différence  \  ;  enfin  dans  la  statistique  d'Aloïs  Biach  pour  la  même 
ville,  la  différence  est  encore  plus  forte  :  il  y  a  en  effet  d'un  côté  3,455, 
de  Tautre  2,311.  La  différence  est  de  près  de  |.  Ainsi,  à  Wùrzburg.  il  y  a 
entre  16  et  30  ans,  relativement  beaucoup  plus  de  pneumonies  qu'à 
Vienne. 

Les  tableaux  précédents  ne  peuvent  d'ailleurs  avoir  qu'une  valeur 
limitée  ;  car  pour  apprécier  Tinfluence  de  Tâge  sur  le  développement  de 
la  pneumonie,  il  ne  suffit  pas  de  ces  chiffres  absolus  ;  il  faut  tenir 
compte  du  chiffre  de  la  population  aux  différents  âges.  En  procédant 
ainsi  on  trouve,  ce  que  ne  montre  pas  le  tableau  précédent,  qu'il  y  a  entre 
55  et  60  ans  une  légère  recrudescence  de  la  fréquence  de  la  pneumonie, 
suirie  d'une  nouvelle  rémission  d'ailleurs  fort  légère.  Marc  d'Espine 
prétend  (qu'à  Genève  au  moins)  la  pneumonie  serait  rare  dans  l'ex- 
trême vieillesse;  mais  cette  assertion  aurait  besoin  d'être  confirmée. 

Ce  n'est  pas  tout,  il  faut  avoir  égard  au  fait  que  les  prolétaires  qui 
constituent  la  clientèle  des  hôpitaux  ne  fréquentent  pas  ces  établisse- 
ments également  à  toutes  les  périodes  de  leur  existence  ;  que  de  20  à 
30  ans,  où  ils  n'ont  en  général  pas  de  ménage,  ils  se  font  le  moins 
soigner  en  ville,  que  plus  tard  ils  sont  admis  non  plus  dans  les  hôpitaux 
mais  dans  les  hospices.  Ces  circonstances  et  d'autres  encore  motivent 
la  réserve  avec  laquelle  il  faut  conclure. 

Sexe.  —  La  femme  est  moins  souvent  atteinte  de  pneumonie  que 
l'homme  ;  les  auteurs  sont  entièrement  d'accord  à  cet  égard.  Grisolle 
en  acceptant  le  fait,  pense  que  la  différence  tient  à  la  différence  des 
occupations  dans  l'uu  et  Tautre  sexe,  attendu  que  dans  les  pays  où 
les  deux  sexes  travaillent  de  même,  ils  sont  également  frappés  ;  il  pa- 
rait en  être  de  même  dans  les  prisons.  L'explication  de  Grisolle  est 
donc,  au  moins  en  partie,  fondée.  En  tout  cas,  il  est  peu  probable  que  la 
moindre  prédilection  de  la  pneumonie  pour  le  sexe  féminin  soit  due - 
à  sa  débilité  relative.  • 

Constitution.  —  En  effet,  une  constitution  débile,  ou  bien  détériorée 
par  des  maladies  intérieures,  des  excès,  etc.,  offre  un  terrain  incontesta- 
blement favorable  au  développement  de  la  pneumonie.  Cette  proposition 
est  vraie  pour  tous  les  âges.  D'après  Luzsinsky,  les  enfants  des  parents 
atteints  d'affections  chroniques  de  la  poitrine  (?)  y  seraient  prédisposés. 

Race.  —  Il  serait  fort  intéressant  d'avoir  à  ce  sujet  des  documents 
positifs.  De  la  statistique  citée  par  Grisolle,  il  résulte  de  la  manière  la 
plus  certaine  que  les  soldats  nègres  sont  beaucoup  plus  souvent  atteints 
de  pneumonie  que  les  soldats  blancs  ;  mais,  ainsi  qu'il  le  remarque,  les 
deux  catégories  de  soldats  ne  sont  pas  dans  des  conditions  hygiéniques 
exactement  les  mêmes,  de  sorte  que  l'influence  de  la  race  n'est  pas  seule 
à  agir  ;  néanmoins  la  prédisposition  des  nègres  à  contracter  la  pneumo- 
nie me  parait  incontestable. 

Prédisposition  individuelle.  —  Je  fais  allusion  ici  à  la  prédispo- 
sition organique  naturelle  ou    acquise  que  le  poumon  peut    avoir  à 


394  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  causes  PBéDisposAMn». 

être  afTecté  de  pneumonie.  II  est  incontestable  que  sous  Tinfluence  d'un 
refroidissement   tel    individu   contractera    plutôt  une    pneumonie,  tel 
autre  plutôt  une  angine.  Ce  qui  prouve  mieux  encore  cette  prédispo- 
sition, c'est  le  fait  que  certains  individus  ont  eu  dans  leur  vie  un  nondire 
de  pneumonies  tout  à  fait  insolite.  Rush  parle  d'un  individu  qui  aurait 
été   28  fois  atteint  de  pneumonie.  Chomel  a  soigné  un  malade  affecté 
de  pneumonie  pour  la  dixième  fois.  Un  certain  nombre  des  malades  de 
Grisolle  ont  eu  aussi  plusieurs  pneumonies  (jusqu'à  8).  D'après  Charcot 
«  le  D'  Weil,  sur   78   cas   de  pneumonie  franche  observés   chez  le$ 
enfants  de  1  à  6  ans,  note  51  récidives.  Sur  ces  51  malades,  21  ont  en 
une  pneumonie  antérieure  ;  4  en  ont  eu  2  ;  2  en  ont  eu  4  ;  enfin  4  ea 
ont  eu  un  nombre  plus  grand.  Ziemssen,  sur  204  cas  également  ob- 
servés chez  des  enfants,  relève  dans  19  cas  l'existence  de  pneumonies 
antérieures.  Sur  ces  19  malades,  14  en  ont  eu  2  ;  2  en  ont  eu  ?  ;  2  eo 
ont  eu  4.  Andral  a  constaté  chez  un  sujet  16  pneumonies  en  11  ans,  etc.» 
Il  faut  ici  distinguer  les  cas  où  les  pneumonies  successives  occupent  le 
même  siège  que  la  première  pneumonie  ou  bien  un  siège  différent.  Dans 
le  premier  cas,  la  prédisposition  peut  résulter  de  moditications  orga* 
niques  produites  par  la  prenvièrc  pneumonie,  car  souvent  alors  il  existe 
un  état  pathologique  appréciable  à  l'œil,  un  certain  degré  de  pneumonie 
interstitielle.    Charcot  a  insisté   récemment  sur  les   faits  de  ce  genre. 
Il  a  pu  observer  lui-même  à  la  Salpctrière  deux  malades  dont  Tune  a  eo 
deux  attaques  de  pneumonie  dans  le  lobe  inférieur  gauche.  A  l'autopsie 
on  a  trouvé  dans  ce  lobe  (qui  n'avait  pas  été  le  siège  de  la  pneumonie 
ultime  qui  a  emporté  le  malade)  les  lésions  de  l'induration  rouge.  (Leçon 
recueillie  par  Oulmont.  Progrès  1878.) 

Professions,  — Jusqu^icij'ai  passé  en  revue  les  causes  prédisposantes, 
inhérentes  au  sujet  lui-même.  L'examen  de  l'influence  des  professions 
nous  servira  de  transition  pour  arriver  aux  conditions  extrinsèques. 

C'est  qu'en  effet,  si  l'on  veut  bien  y  réfléchir,  la  profession  agit  à  la  fois 
en  modifiant  le  sujet  lui-même  quand  il  l'a  exercée  un  temps  sufTisanl, 
et  aussi  en  l'exposant  à  certaines  conditions  extérieures  inhérentes  à 
l'exercice  de  cette  profession. 

Malheureusement  cette  analyse  parfois  délicate  n'a  guère  été  faite,  et  c'est 
sans  distinguer  ce  qui  tient  à  l'individu  ou  au  milieu  ambiant,  que 
les  auteurs  traitent  confusément  de  Tinfluence  des  professions  sur  le 
développement  de  la  pneumonie  et  ont  émis  les  assertions  parfois  les 
plus  contradictoires.  Ainsi,  d'après  Stoll,  la  pneumonie  affecte  de  préfé- 
rence les  individus  exerçant  des  professions  sédentaires,  les  tailleurs 
d'habits;  tandis  que  J.  Frank,  qui  combat  l'assertion  de  Stoll,  signale  au 
contraire  les  boulangers,  les  verriers,  les  forgerons,  les  cochers,  les 
courriers,  les  poiiefaix  comme  étant  prédisposés.  Ces  affirmations  op- 
posées s'expliquent  en  partie  par  le  fait  que  les  auteurs  ont  très-peu 
tenu  compte  de  la  statistique  des  professions  et  surtout  de  la  question 
de  savoir  quel  est  le  chiffre  comparatif  des  individus  de  cette  profession 
qui,  devenant  malades  se  sont  soignés  chez  eux  et  de  ceux  qui  vont  ré- 


PNEDHOME  LOBAIRE  AIGUË.  —  causes  prédisposantes.  595 

ciamer  leur  admission  dans  un  hôpital;  les  maçons,  par  exemple,  qui, 
de  tous  les  ouvriers  des  grandes  villes,  sont  ceux  qui  ont  le  :noins  sou- 
Tentune  famille,  se  font  transporter  à  Thôpital  relativement  beaucoup 
plus  que  les  individus  appartenant  à  d'autres  professions. 

D'une  manière  générale  on  peut  cependant  affirmer  que  les  hommes 
exposés  à  rintempérie  des  saisons,  s'ils  sont  alternativement  condamnés  à 
rimmobilité  après  un  exercice  violent,  par  exemple,  les  conducteurs  de 
trains  de  chemins  de  fer  sont  particulièrement  frappés.  On  serait  a  priori 
porté  à  croire  que  les  marins  rentrent  dans  cette  catégorie.  Mais  les  faits 
démentent  cette  supposition.  Il  résulte  d'un  relevé  de  Leroy  de  Méri- 
eourt  qu'un  efTectif  de  24,000  marins  étant  resté  sur  les  côtes  ou  en 
cours  de  navigation  pendant  un  temps  qui  a  varié  de  trois  mois  à  quatre 
ans,  n'a  fourni  que  1 75  cas  de  pneumonie.  En  recherchant,  dit  Grisolle, 
dans  quelles  conditions  ces  pneumonies  se  sont  développées  à  bord,  on 
voit  que  près  de  100  sur  les  175,  survinrent  quand  les  navires  étaient  sur 
rade  on  sur  les  côtes,  »  ce  qui  peut  dépendre  ou  de  ce  que  le  service  des 
hommes  était  alors  plus  pénible,  ou  de  ce  que  les  variations  de  la  tempé- 
rature étaient  plus  prononcées  qu'en  pleine  mer. 

Climats.  Pour  expliquer  l'immunité  dont  paraissent  jouir  a  un  certain 
degré  les  marins,  on  doit  sans  doute  invoquer  le  fait  qu'ils  sont  sin- 
gulièrement endurcis  aux  intempéries;  mais  il  semble  nécessaire  d'a- 
jouter à  cette  cause  l'inQuence  du  climat  maritime,  c'est-à-dire  d'un 
ensemble  de  conditions  météorologiques  dans  lequel  la  constance  rela- 
tive de  la  température  au  large  joue  sans  doute  un  grand  rôle.  11  est  à 
Doter  qu'en  certaines  parties  du  littoral,  même  a  notre  latitude,  la 
pneumonie  parait  aussi  fort  rare  ;  je  puis  citer,  par  exemple,  le  Havre 
sur  lequel  j'ai,  grâce  à  l'obligeance  d'un  médecin  des  plus  distingués 
de  cette  ville,  le  docteur  Gibert,  quelques  renseignements  précis. 

Des  observations  du  docteur  Gibert ,  il  résulte  que  la  pneumonie  franche 
est  très-rare  au  Havre  (sauf  cet  hiver  1878-79),  qu'elle  est  particulière- 
ment exceptionnelle  à  la  côte  d'Ingouville  bien  qu'elle  soit  exposée  aux 
vents  d'ouest  et  du  nord-ouest.  Aux  chantiers  de  construction  de  la 
Seine  qui  occupent  habituellement  300  ouvriers,  le  docteur  Piasecki 
n'a  eu  à  constater  en  12  ans  que  8  cas  de  pneumonie  franche.  Chez  les 
OHvriers  rafGneurs  la  même  immunité  relative  a  été  constatée  par  le 
docteur  Gibert.  La  pleurésie  est  aussi  plus  rarement  observée  au  Havre 
qu'à  Paris  ;  au  contraire  la  hronchopneumonie  y  exerce  de  grands  ravages. 

L'influence  des  climats  est  donc  fort  grande  ;  elle  est  même  toute-puis- 
sante si  l'on  envisage  certains  d'entre  eux  qui  assurent ,  dit-on ,  vis-à-vis 
^  la  pneumonie  une  immunité  absolue  ;  tels  seraient  les  tropiques  et 
le  pôle  et  quelques  autres  encore  ;  malheureusement  des  renseignements 
très-positifs  nous  font  défaut  sur  l'anatomie  pathologique  des  affections 
de  poitrine  dans  les  différentes  parties  du  globe.  Aussi  dans  Tincerlitude 
où  nous  sommes  sur  la  vraie  nature  des  affections  que  l'on  nous  dit  être 
des  fluxions  de  poitrine,  je  crois  prudent  de  m  abstenir  d'en  dire  da- 
vantage. 


7)%  PISEUMOiME  LOBÂIHE  AiGUË.  —  causes  occasiox.-vkllis. 

Saisons,  La  pneumonie  a  sur  le  continent  européen  son  maiimum  de 
fréquence  de  mars  à  mai,  et  son  minimum  de  septembre  à  novembre.  On 
a  noté  que  la  bronchite  est  plus  précoce  :  son  maximum  est  de  janvier  i 
mars,  son  minimum  de  juillet  à  septembre. 

Ces  chiiTrcs  sont  empruntés  à  la  statistique  du  grand  hôpital  de  Vienne 
citée  par  Jurgensen.  A  mon  grand  regret,  je  n'ai  pu  utiliser  les  remar- 
quables statistiques  noscomialcs  publiées  chaque  trimestie  par  E.  Besnier, 
dans  le  Bulletin  de  la  Société  médicale  des  hôpitaux  de  Pariê^  parœ 
que  la  broncho-pneumonie  n'y  est  pas  séparée  de  la  pneumonie. 

J'ai  souligné  le  mot  continent  :  c'est  qu'en  effet  dans  les  climats  voi- 
sins du  littoral,  la  distribution  mensuelle  de  la  pneumonie  est  différente 
et  se  confond  avec  celle  de  la  bronchite.  Cela  s'explique  en  partie  par  le 
fait  que  le  long  des  côtes  la  pneumonie  est  plus  souvent  secondaire  à  une 
bronchite. 

Altitudes.  L'influence  des  altitudes  est  certaine;  à  Chamouny,  il  y  i, 
dit-on,  1  pneumoniquc  sur.  5  malades;  au  Pérou  dans  une  vallée  à  la  hau- 
teur de  12,000  pieds,  Tschudi  indique  aussi  la  fréquence  insolite  des 
pneumonies  ;  même  sous  les  tropiques  la  pneumonie  cesse  d'être  incon- 
nue à  une  certaine  altitude, 

Influence  des  vents,  —  D'après  0.  Slurges,  le  chiffre  des  pneumo- 
nies est  à  son  minimum  quand  le  vent  est  presque  nul,  de  quelque  côté 
qu'il  souffle.  S'il  est  un  peu  intense,  le  chiflre  des  pneumonies  est  sen- 
siblement modifié,  suivant  l'espèce  de  vent  :  avec  un  vent  du  nord  on 
du  nord-est  (pour  l'Angleterre),  les  pneumonies  atteignent  leur  maximuD 
de  fréquence;  elle  est  au  minimuni  avec  les  vents  du  sud-ouest  peu 
intenses ,  alors  même  que  la  température  est  plus  froide. 

Causes  occasionnelles.  —  l"En  première  ligne,  il  faut  mentionner  le 
refroidissement,  qui  était  autrefois  considéré  comme  la  seule  cause  de 
la  pneumonie,  ainsi  que  le  prouve  Tadagc  frigus  unica  pneumonût 
causa  est.  Chomel  et  Grisolle  ont,  ajuste  titre,  combattu  cette  erreur. 
D'après  Chomel,  sur  79  pneumoniques,  14  seulement  avaient  éprouvé  on 
refroidissement  quelconque. 

La  statistique  de  Grisolle  est  plus  étendue  :  elle  porte  sur  205  pneu- 
moniques qu'il  a  interrogés  avec  soin  à  cet  égard.  Or,  dit-il ,  ce  n'est 
que  chez  le  quart  des  malades  qu'on  pourrait  invoquer  un  refinoidisse- 
ment  comme  cause  occasionnelle  évidente  de  la  pneumonie.  Sur 
106  cas  de  pneumonie,  Ziemssen  n'a  pu  que  10  fois  seulement  proufer 
l'existence  d'un  refroidissement.  Celte  proportion  est  déjà  très  faible. 
Mais  elle  est  encore  élevée  en  comparaison  de  celle  qu'indique  Griesinger: 
moins  de  2  pour  cent  (4  fois  sur  212  cas.  Clinique  de  Zurich,  thèse  de 
Bleuler.  Clin.  Beobachtungen  iiher  Pneumonie.  Zurich  1865.) 

C'est  influencé  sans  doute  par  de  pareils  chiffres  que  le  professeur 
Jurgensen  en  arrive  a  dire  que  a  le  refroidissement  n'est  nullement  une 
cause  occasionnelle  fréquente  de  la  pneumonie.  »  Or,  pris  à  la  letUe, 
cette  assertion  me  paraît  légèrement  exagérée.  Aux  chiffres  véritableoieot 
exceptionnels  de  Griesinger,  on  peut  opposer  ceux  du  professeur  Ger- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  causes  occasio.nnelles.  597 

hardi  (thèse  de Schapira)  qui,  surl66pneuinoniques,  en  a  trouvé  33  dont 
la  maladie  ne  reconnaissait  d'autre  cause  occasionnelle  qu*un  refroidis- 
aemenl,  ce  qui  nous  ramène  à  la  proportion  de  Chomel  et  Grisolle.  Mais 
il  y  a  certainement  plus  :  je  mets  en  fait  que  les  malades  que  nous  soi- 
gnons dans  les  hôpitaux  sont  peu  capables  de  nous  renseigner  exacte- 
meiil.  Les  refroidissements  sont  habituels  et  journaliers  chez  la  plupart 
d'entre  eux;  ils  arrivent  à  n'y  pas  prendre  garde,  d'autant  plus  que  sui- 
fant  les  idées  populaires  qui  reproduisent,  comme  un  écho  attardé,  les 
doctrines  médicales^  le  refroidissement  a  perdu  beaucoup  de  l'influence 
nocive  qu*il  passait  pour  exercer  autrefois  ;  d'ailleurs  le  mot  refroidis- 
sèment  est  certainement  mal  compris  par  beaucoup  de  personnes  étran- 
gères à  la  médecine,  qui  se  figurent,  sans  doute,  qu'un  abaissement  sen- 
sible de  la  température  ambiante  est  nécessaire  pour  amener  un 
refroidissement.  Or,  il  est  évident  qu'il  n'en  est  rien  et  que  l'état  du 
sujet  y  contribue  plus  que  le  milieu.  Pour  ma  part,  je  conçois  parfaite- 
meni  que  des  navigateurs  au  pôle,  exposés  à  des  températures  exception- 
neUement  bases,  précisément  par  cette  raison,  ne  se  trouvent  pas,  pen- 
dant de  longs  mois,  dans  les  conditions  favorables  à  la  production  du 
refroidissement.  Au  contraire,  l'observation  journalière  montre  qu'on  se 
refroidit,  même  dans  la  saison  chaude,  si  la  peau  couverte  de  sueur  est 
exposée,  pendant  un  certain  temps,  à  Taction  d'un  air  dont  la  tempéra- 
lure  est  relativement  abaissée,  ou  d'un  courant  d'air,  etc.,  etc. 

Nous  disons  la  peau  et  non  la  muqueuse  bronchique,  car  l'action 
|iathologique  du  froid,  sur  cette  dernière ,  n'est  pas  prouvée  ;  son  inno- 
cuité serait  même  démontrée,  si  l'on  pouvait  appliquer  à  l'homme  les 
résultats  des  expériences  de  B.  Heidenhain,  qui  a  fait  respirer  à  des 
chiens,  alternativement  de  Tair  chaud  et  froid,  sans  provoquer  chez  eux  de 
(meiunonie.  (Virchow's  Archiv.  Bd.  LXX.) 

n  est  vrai  que  l'on  n'a  pas  réussi  davantage  par  d'autres  moyens, 
notamment  par  des  refroidissements  de  la  peau.  Mais,  à  cet  égard,  il  faut 
remarquer  que  le  tégument  externe  du  chien  diffère  beaucoup  de  celui 
de  l'homme.  Le  chien  ne  sue  pas;  il  est  donc  difficile  de  mettre  sa  peau 
dans  des  conditions  d'impressionnabilité  très-favorables. 

D'après  Grisolle,  c'est  aux  deux  extrêmes  de  la  vie  que  le  refroidisse- 
ment produit  le  mieux  ses  effets,  parce  que,  dit-il-:  <c  dans  l'enfance  et 
dans  la  vieillesse  l'homme  produit  moins  de  chaleur  qu'aux  autres 
iges.  »  En  acceptant  le  fait,  il  est  impossible  de  ne  pas  remarquer,  en 
ce  qui  touche  l'enfant,  que,  relativement  au  poids  de  son  corps,  loin  de 
produire  moins  de  chaleur  que  l'adulte,  A  en  produit  davantage,  et  que, 
si  néanmoins  il  se  refroidit,  toutes  choses  égales,  plus  facilement  que 
l'adulte,  c'est  à  cause  de  son  petit  volume. 

Quant  au  mode  d'action  du  refroidissement,  nous  ne  pouvons  faire 
que  des  hypothèses.  Des  médecins  anglais  ont  pensé  qu'antérieurement 
i  la  pneumonie,  il  peut  exister  un  certain  degré  d'hyperinose  (Parkcs). 
Ce  serait  donc  par  suite  de  la  suppression  des  fonctions  de  la  peau  que 
cet  état  dyscrasique  serait  créé.  Mais  jusqu'ici,  c*est  une  hypothèse  sans 


598  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  cavsbs  OGCASioiniBLLBS. 

fondement  scientifique.  Une  action  réflexe  s'exerçantsur  les  Taisseaux  du 
poumon ,  est  assurément  plus  vraisemblable,  dans  Tétat  actael  de  U 
science.  Je  ne  dis  pas  que  cette  seconde  hypothèse  soit  parbitemeot 
satisfaisante,  mais  on  verra  plus  loin  qu*il  y  a  d'autres  faits  qui  peuvent 
lui  prêter  un  certain  appui. 

Le  peu  de  temps  qui  s*écoule  en  général,  entre  le  refroidissement  et  le 
début  de  la  maladie,  plaide  dans  le  même  sens.  Grisolle  Ta  noté  avec  soin 
dans  3  i  observations  et  a  trouvé  que  a  chez  18  sujets, les  sympiômes  locauz 
ou  tout  au  moins  le  malaise,  et  les  autres  troubles  prodromiques  s'étaient 
déclarés  pendant  Timpression  même  du  froid  ou  quelques  minutes  après. 
Chez  1 1 ,  l'effet  nuisible  du  refroidissement  ne  s'est  fait  sentir  qu'apm 
une,  deux  ou  trois  heures.  Enfin,  chez  4  malades,  il  y  a  eu  un  interralk 
de  un  à  deux  jours  entre  l'action   de  la  cause  et  le  début  des  premien 
symptômes.  »  Grisolle  pense  que  chez  ces  derniers,  le  refroidissement  ni 
en  réalité  pas  eu  d'action  et  qu'il  a  dû  y  avoir  simple  coîncidenoe. 
Je  comprends  cette  réserve,  mais  je  dois  faire  remarquer  que  c^est  pré- 
cisément pour  les  cas  de  ce  genre  que  l'hypothèse  des  médecins  anglab 
pourrait  être  soutenue. 

2**  Surmènement,  —  Les  auteurs  ne  me  paraissent  pas  appréciera  si 
valeur  cette  cause  qui.  selon  moi,  agit  non-seulement  comme  prédispo- 
sant mais  encore  comme  occasionnelle.  La  fatigue  jette  l'économie  dans 
des  conditions  non-seulement  d'imminence  morbide,  mais  elle  réalise 
même  un  état  anormal  dans  lequel  l'organe  minoris  reststentix  peut 
être  affecté.  Le  seul  surmènement  dont  parle  Grisolle  c'est  celui  des 
organes  de  la  respiration,  qui,  d'après  lui,  est  sans  importance  patho- 
génique,  ce  que  j'accorde  volontiers. 

3**  Agents  toxiques  et  irritants,  —  Quant  aux  excès  alcooliques,  Cri- 
sollo  est  très  affirmatif  :  <(  Chez  plusieurs  malades  il  était  impossible  de 
trouver  d'autres  causes  occasionnelles  comme  un  refroidissement  par 
exemple,  parce  que  ces  individus  avaient  été  placés  dans  des  conditions 
telles  que  le  froid  n'avait  pu  agir  sur  eux.  Chez  tous,  l'influence  de  la 
cause  s'est  fait  rapidement  sentir.  Chez  deux,  les  symptômes  de  la  pneu- 
monie se  déclarèrent  dans  les  premières  heures  qui  suivirent  l'ivresse.  » 

D'autres  agents  toxiques  peuvent  vraisemblablement  jouer  aussi  le  rôle 
de  cause  occasionnelle  ;  mais  il  est  douteux  que  leur  introduction  por  la 
voie  bronchique  puisse  être  suivie  du  même  résultat  : 

Les  anciens  auteurs,  Van  Swieten  etJ.  Frank  ont  rapporté  l'histoire  de 
plusieurs  individus  qui  furent  affectés  d'hémoptysie  et  de  pneumonie  à 
la  suite  de  Tinhalation  d'ammoniaque, d'acides  chlorhydrique  et  sulfuiYOï. 
Grisolle  objecte,  avec  raison,  qu'il  s'agissait  probablement  chez  eux 
de  bronchite  capillaire  plutôt  que  de  pneumonie.  DinstI  dit  avoir  tu 
plusieurs  fois  et  Eppinger  trois  fois  une  pneumonie  consécutive  à  l'inha- 
lation de  gaz  irritants.  Ils  ne  disent  pas  si  c'est  une  pneumonie  fîbrineiise. 
Je  liens  du  docteur  Foubcrt,  médecin-inspecteur  à  Villers-sur  .Mer, 
(|ue  la  pénétration  de  l'eau  de  mer  dans  les  poumons  peut  être  suivie  de 
'Ugestion  pulmonaire  fébrile,  mais  non  d'une  vi*aie  pneumonie. 


i: 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  causes  occasionnbllks.  399 

4*  Trauniatismes.  —  Au   nombre  des  causes  occasionnelles,   rares 
d'ailleurs,  de  pneumonie,  on  a  aussi  cité  les  causes  traumatiques,  mais  la 
plupart  d'entre  elles  provoquent  une  pneumonie  locale,  différente  au 
point  de  ?ue  de  la  nosologie  de  la  maladie  que  nous  étudions  ici.  Les  plus 
fréquentes  de  ces  causes  sont  les  contusions  du  thorax  compliquées  ou 
non  de  fracture  des  côtes  dont  les  fragments  peuvent  blesser  le  poumon. 
Lieulaud  et  Portai  ont  prétendu  que  la  pneumonie  peut  succéder  à  des 
traumatismes   des  parties   éloignées.  Grisolle  dit  ne  connaître  aucun 
exemple  authentique  qui  prouve  qu'une  pneumonie  ait  jamais  succédé 
à  one  pareille  cause.  Le  fait  suivant,  qui  a  récemment  donné  lieu  en  An- 
gleterre (Lancety  27  avril  1878),  à  une  instance  en  dommages  et  intérêts 
de  la  part  des  héritiers,  pourrait  peut-être  passer  pour  un  cas  de  pneu- 
monie suite  de  shoc.  Il  s'agit  d'un  voyageur  qui  au  moment  d'un  tam- 
ponnement n'éprouva,  dit-il,  aucune  contusion  thoracique  ni  d'un  côté 
ni  deTautre,  mais  ressentit  un  ébranlement  général,  puis  se  sentit  faible 
et  revint  au  bout  de  quelques  heures  chez  lui  ;  il  se  plaignait  de  douleurs 
dans  le  côté  droit  et  dans  le  dos.  Le  médecin  le  même  jour  trouva  la  res- 
piration accélérée.  Le  jour  suivant  il  se  manifesta  des  signes  de  pneu- 
monie du  côté  droit.    Sept  jours  plus  tard  on  constata  de  plus  une  pleu- 
résie du  même  côté.  La  mort  arriva  huit  jours  plus  tard.  L'autopsie  fut 
faite  conjointement  avec  le  docteur  Clitford  Albutt  qui,  ainsi  que  le  mé- 
decin traitant  considéra  la  maladie  comme  consécutive  au  choc.  Malheu- 
reusement l'absence  d'ecchymose  interne  de  la  paroi  thoracique  n'est  pas 
explicitement  affirmée. 

5*  Actions  neigeuses. —  Il  convient  de  rapprocher  des  pneumonies  dues 
au  choc  celles  qui  seraient,  dit-on,  consécutives  à  une  vive  émotion 
morale,  si  tant  est  qu'elles  en  soient  le  résultat  :  Grisolle  en  rapporte  un 
exemple.  Il  s'agit  d'une  femme  qui  «  apprenant  qu'elle  avait  été  victime 
d*un  vol,  éprouva  un  saisissement  violent  qui  fut  promptcment  suivi  d'un 
frisson,  d'un  point  de  côté  et  de  crachats  rouilles.  » 

Les  pneumonies  succédant  à  une  lésion  du  système  nerveux  central 
passent  pour  être  communes. 

On  voit  en  effet  souvent  chez  les  apoplectiques  se  développer  une 
pneumonie  quelques  jours  après  l'attaque,  alors  que  le  malade,  confîné  au 
lit,  ne  peut  guère  avoir  éprouvé  l'influence  d'un  refroidissement  ni  d'au- 
cune autre  cause  occasionnelle  appréciable;  de  plus  cette  pneumonie 
siège  d'ordinaire  du  côté  opposé  à  la  lésion  cérébrale,  c'est-à-dire  du 
même  côté  que  l'hémiplégie  des  membres.  Il  paraissait  donc  extrême- 
ment vraisemblable  de  placer  cette  pneumonie  sous  la  dépendance  de  la 
lésion  encéphalique  au  même  titre  que  les  hémorrhagies  pulmonaires, 
gastriques  ou  autres  qui  surviennent  si  souvent  dans  les  mêmes  condi- 
tions, soit  chez  l'homme,  soit  chez  les  animaux  qui  ont  subi  un  trau- 
matisme de  l'encéphale.  (Voir  Brown  Séquard,  Soc.  de  Biol,,  1870.) 
Mais  il  résulte  des  recherches  de  Charcot  que  ces  pneumonies  n'ont  de 
la  pneumonie  lobaire  que  l'apparence  et  qu'au  fond  elles  ressortisscnt 
aux  broncho-pneumonies.  Ce  sont  des  pneumonies  pseudo-lobaires,   à 


40t)  PxNËUNOME  LOBAIRE  ÂIGUL.  —  causes  occasiohrbllu. 

rapprocher  par  conséquent  des  hroncho-pneumonics  sous  la  dépendance 
de  lésions  du  pncumo-gastrique  qui  depuis  Traube  ont  fait  le  soiet  de 
tant  de  recherches  expérimentales  et  que  l'on  a  parfois  l'occasion  de  ren- 
contrer chez  l'homme  (surtout  sous  la  forme  de  pneumonie  pseudo*lobaire 
dans  diverses  circonstances  où  les  pneumo-gastriques  sont  léaés,  par 
exemple,  dans  le  cas  d'épithéliomc  de  Toesophage. 

Ainsi,  jusqu'à  ce  jour,  nous  ne  connaissons  en  fait  de  pneumonies 
dépendant  manifestement  de  lésions  nerveuses,  que  des  broncho-pneiH 
monies.  Est-ce  là  le  dernier  mot  de  la  science? 

Mon  s«nvant  collègue,  Fernet,  ne  le  pense  point.  D'après  lui,  la  pneu- 
monie franche,  dite  Qbrineuse,  est  le  résultat  d'un  a  trouble  trophiqoe 
placé  sous  la  dépendance  d'une  névrose  du  pneumo-gastrique  ».  A  Tapp» 
de  cette  idée,  il  rapporte  trois  cas  où  il  a  trouvé  du  même  côté  que  b 
pneumonie,  le  pneumo-gastrique  plus  gros  et  injecté;  dans  un  cas  (Ie2*|, 
il  y  avait  en  même  temps  une  pleurésie  avec  épanchement;  le  nerf  phé- 
nique  du  même  côté  différait  aussi  de  celui  du  côté  opposé.  Dans  le  troi- 
sième cas,  la  lésion  du   pneumo-gastrique  du  côté  correspondant  à  b 
pneumonie  «  commençait  nu  quart  inférieur  du  trajet  du  nerf  au  cou  :  à 
ce  niveau  se  montre  une  injection  vasculaire  et  les  (ibres  nerveuses  offreot 
une  teinte   grisâtre   rosée  et  terne  au  lieu  de  la  coloration  blanche  et 
nacrée.  Cette  apparence  se  prolonge  en  bas  jusqu'à  la  division  du  nerf. 
Le  volume  du  nerf  n^est  pas  augmenté.  Dans  deux  cas,  l'examen  histo- 
logique  a  été  fait  avec  soin  et  n'a  rien  révélé  d'anormal.  » 

Quant  à  la  nature  de  la  lésion  pulmonaire  consécutive  à  la  névritf 
(|u'il  admet,  Fernet  pense  que  c'est  un  herftès.  Je  reviendrai  sur  ce 
dernier  point  qu.md  je  discuterai  la  nature  de  la  pneumonie  et  je  me 
bornerai  à  faire  remarquer  ici  que,  vu  les  résultats  négatifs  de  l'examen 
microscopique,  le  terme  de  névrite  n'est  peut-être  pas  sulfi^amment  ju5* 
tiGé.  De  plus,  la  rougeur  du  nerf  était  localisée  dans  sa  partie  inférieure, 
ce  qui  plaiderait  plutôt  en  faveur  d'une  altération  consécutive  à  la  pneu- 
monie. Je  dois  enfin  ajouter  que  j'ai  cette  année  recherché,  dans  quatre 
cas  de  pneumonie,  la  lésion  indiquée  par  Fernet  et  qu'à  l'œil  nu  je 
n'ai  rien  remarqué  d'anormal  dans  le  pneumo-gastrique.  Dans  un  des 
cas,  le  nerf  traité  à  Tétai  frais  par  l'acide  osmique  a  été  examiné  au  mi- 
croscope et  l'examen  contrôlé  par  mon  collègue  Pierret,  dont  la  com- 
pétence en  cette  matière  est  si  grande  ;  or,  le  nerf  a  paru  parfaitement 
sain.  Je  n'ignore  pas  que  des  résultats  négatifs  n'infirment  pas  les  b\\s 
positifs;  aussi  je  me  contenterai  de  dire  que  les  conclusions  de  Fernet 
demandent  à  être  contrôlées  par  de  nouvelles  observations. 

Un  médecin  qui  a  observé  dans  l'Inde  un  bon  nombre  de  cas  de 
coups  de  chaleur,  le  docteur  Jessop,  a  supposé  que  certaines  pneumooiei 
consécutives  à  des  insolations  peuvent  dépendre  d'une  action  reOeit. 
D'après  lui  les  nerfs  sensoriels  optique  et  olfactif,  trop  vivement  impres- 
sionnés, en  seraient  le  point  de  départ.  Cette  hypothèse  ne  peut  s'ap- 
puyer sur  aucune  base  expérimentale;  et  d'ailleurs  dans  le  coup  de 
'^ur  bien  d'autres  intluences  qu'une   influence  réflexe  peuvent,  ce 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIG(jf:.  —  causes  occasioknri.lbs.  401 

semble*  produire  une  pneumonie.  Reste  de  plus  à  savoir  si  ce  sont  des 
pneumonies  (ibrineuses  qu'à  observées  Jessop.  Or,  rien  n*est  plus  douteux. 
6*  Causes  extrinsèques  de  nature  inconnue.  —  Dans  la  majorité  des 
cas,  il  faut  bien  l'avouer,  la  cause  déterminante  de  la  pneumonie  n'est  pas 
Facile  à  trouver  ;  mais  ce  qui  prouve  qu'un  certain  nombre  d'entre  elles 
ont  pour  cause  réelle  une  influence  extrinsèque^  c'est  le  fait  qu'à  certains 
moments  de  l'année,  dans  certaines  localités,  les  pneumonies  deviennent 
beaucoup  plus  nombreuses,  fait  établi  pour  beaucoup  de  localités  et 
constaté  à  Paris  par  nombre  d'observateurs,  notamment  par  le  professeur 
Charcot  qui,  sur  un  même  terrain,  la  Salpêtrière,  voit  le  nombre  des 
pneumonies  lobaires  varier  suivant  les  années.  Au  grand  hôpital  de 
Vienne  en  1856,  il  y  avait  18  pneumonies  sur  1000  malades;  en  1858, 
55.  A  l'hôpital  Julius,  à  Wûraburg,  la  proportion  a  été  tantôt  de  27, 
tantôt  de  47.  Certaines  localités  restent  pendant  des  années  tout  à  fait 
indemnes  de  la  pneumonie  et  sont  ensuite  frappées  d'une  manière  meur- 
trière (Fuckel). 

On  a  accusé  l'ozone  sous  prétexte  que  c'est  lin  gaz  irritant,  mais  je 
croîs  que  c'est  bien  à  tort  :  mieux  vaut  avouer  notre  ignorance. 

Il  serait  possible,  à  la  rigueur,  que  les  pneumonies  dont  on  vient  de 
farler,  résultant  de  constations  médicales  fussent  produites  par  une  cause 
spécifique,  analogue,  mais  atiénuéey  de  celle  qui  engendre  les  pneumonies 
•miasmatique  et  contagieuse.  W.  Ziemssen  a  signalé  un  certain  paralle- 
lisme  entre  les  maxima  et  les  minima  de  la  pneumonie  et  de  la  fièvre 
•typhoïde.  Les  années  ou  la  pneumonie  est  peu  commune  sont  aussi 
-^■trquables  par  le  nombre  de  fièvres  typhoïdes;  et  ce  qu'il  y  a  de  curieux, 
c'est  que  ces  maxima  et  ces  minima  seraient  souvent  les  mêmes  pour 
tout  notre  hémisphère,  c'est  à-dirc  pour  l'Amérique  septentrionale  aussi 
hm  que  pour  TEurope.  Mais  dans  cette  coïncidence,  Ziemssen  voit  la 
fKuve  d'une  cause   simplement  prédisposante  et   non    d'une    cause 

cfliciente. 

7*  Causes  miasmatiques,  —  Un  médecin  belge,  le  docteur  Barella 
donne  de  la  coïncidence  découverte  par  Ziemssen  et  qu'il  a  de  son 
côté  trouvé  exacte  pour  Bruxelles,  une  explication  qui  paraîtra  sans  doute 
entachée  de  paradoxe  :  pour  lui,  beaucoup  de  pneumonies  sont  pro- 
doites  par  le  poison  typhique  lui-même,  et  constituent  une  détermination 
-pilmonaire  de  l'intoxication  typhique.  Je  crois  fermement,  pour  ma  part, 

-  Boo-ceulement  à  la  possibilité,  mais  même  à  l'existence  incontestable  de 
-k  pneumo-typhoïde  (Gerhardt),  c'est-à-dire  d'une  détermination  typhique 
'-Hlaisant  d*emblée  sur  le  poumon,  ainsi  que  l'ont  admis  Dietl,  Griesinger, 
^Gerhardt  et  plusieurs  autres  auteurs  :  des  exemples,  selon  moi,  irréprocha- 

-  lies  en  ont  été  publiés  par  ces  deux  derniers  auteurs  (thèse  de  Garbagni) 

-  |ir  Gauchet  (service  d'Hérard)  par  moi  même,  etc.  Mais  je  diffère  de 

-  Iirella,  quant  à  la  fréquence  de  ces  pneumo-typhoïdes  :  il  les  croit  com- 
'arnnes;  je  les  tiens  pour  rares  dans  notre  pays.  Il  parait  en  être  de 

aéme  eu  Allemagne.  Elles  seraient,  d'après  le  professeur  Gerhardt,  plus 
^mmuues  en  Suède  et  surtout  dans  le  nord  de  l'Amérique.  On  ne  peut 

.  DiCT.  m£d.  bt  cuir.  XXVIIT  —  2« 


402  PNEUMONiE  LOfiÀlRE  ÂiGUË.  —  gaises  occasiouiicllbs. 

mettre  un  doute  qu*il  €xkte  une  grande  analogie  entre  la  cause  de  ces 
pneumonies  nées  seuâ  l'influence  d'une  constitution  médicale  et  le  miasme 
lyphique,  mais  il  n'y  a  pas  je  ci^is  identité. 

C'«st  ici  le  lieu  de  dire  ^elques  mots  des  remarquables  recherches 
qu'a  publiées  récemment  le  professeur  Klebs  et  qui,  venant  d'un  obteru- 
ieur  aussi  conscîenoieiu:,  ne  f»eii?ent  manquer  d'être  prises  en  sérieuse 
ooBsidératioii. 

Sur  des  oadavres  de  pneumoniques,  pendant  la  saison  firoidet  lilA$ 
a  trouvé  d'une  manière  à  peu  près  constante,  non-seulement  dans  k 
liquide  hronchique ,  mais  dans  des  parties  profondes  de  rorganîsme, 
notammeat  dans  la  sérosité  ventriculaire  du  cerveau  et  en  grande  quantité, 
des  oi^nismes  (mcDadines)  dont  il  décrit  longuement  les  caradèics 
diGTérei^iek  d'avec  les  miscrosporines  (autre  groupe  des  schistomycètes), 
lesquelles  s'ebservent  dans  les  affections  septiques,  dans  le  typhus  et 
dans  la  diphtiiéric.  Les  monadines  se  rencontrent  d'ailleurs  d'une  an- 
nière  un  peu  banale  dans  les  voies  aériennes  de  cadavres  d'indiviAi 
ayant  succombé  à  des  maladies  fort  diverses;  mais  ce  n'est  pas,  d*a|H«i 
Klebs,  une  raiseo  suffisante  pour  nier  leur  action  pathogénique  :  elles 
peuvent  exister  dans  tontes  les  parties  accessibles  à  l'air  ;  ce  n'est  qie 
si  elles  pénétrent  dans  l'organisme  qu'elles  déterminent  leurs  eOeli 
Gkheux.  fians  quelques  cas,  Klebs  pense  qu'elles  pénètrent  par  la  foie 
intestinale.  Les  monadines  causent  non-seulement  des  pneumonies,  mail 
des  néphrites,  des  hépatites,  des  endocai*dites,  ainsi  que  semblent  le 
prouver  d'une  part  Tautopsie  de  sujets  chez  lesquels  une  de  ces  mali* 
dies  coexistait  avec  la  pneumonie,  et  d'autre  part  quelques  inoculatiou 
pratiquées  dans  la  chambre  antérieure  de  Toeil  chez  le  lapin.  A  h 
seconde  génération  obtenue  par  culture  dans  le  blanc  d'œuf,  les  monadimi 
ont  une  action  encore  plus  énergique,  de  même  que  les  micrococd  de  la 
septicémie,  ainsi  que  Ta  découvert  Davaine. 

Telle  est  la  séduisante  synthèse  du  professeur  Klebs.  Je  ferai  seulement 
remarquer  que  nos  pn»imonies  diffèrent  de  celles  de  Prague  au  moius 
en  un  peint  :  nous  ne  rencontrons  pas  en  effet  aussi  souvent  qu'on  le  îoit 
dans  œtte  ville,  la  coexistence  de  néphrites,  d'hépatites,  etc. 

En  tous  cas,  les  pneumonies  de  Prague  nous  serviront  de  transition  pour 
parier  des  pneumonies  contagieuses,  dites  zymotiques,  pythogéniqaes,  sur 
lesquelles  on  a  beaucoup  insisté  en  Angleterre  dans  ces  derniers  temps 
et  qui  oottsiituent  de  petits  foyers  très-circonscrits,  de  village  ou  de  mai- 
son (A.  Mttller,  €ourvoÎ8ier,  Uœgler,  Thorensen),  dans  lesquels  la  co&li- 
gîon  peut  être  parfois  sûrement  établie,  ou  de  plus  grandes  épidémiei 
AlpensUch  (Lebert).  Celle  d'Islande,  relatée  par  le  docteur  Hjaltelin,  et 
mainèe  fois  citée,  parait  n'avoir  été  qu'une  épidémie  (Tinfltienza  tm- 
fdiqnès^  pneumonie  :  la  mortalité  a  été  médiocre  puisque  sur  80  pues- 
aMnies  il  n'y  eut  que  3  moiis.  L'épidémie  qui   sévit  sur  le  2T  tifr 
méat  de  JNew^BrunswidL,  rapportée  par  le  docteur  Welsh,  et  celle  ik 
pleurofnanaMnie  qni  régna  en  1860  sur  quelques  vaisseaux  de  la  flotte 
dans  ia  niédilorDanée  furent  plus  sérieuses. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  pneumonies  secondaires.  403 

Le  docteur  Dahl,  à  Christiania,  a  décrit  une  épidémie  de  prison  ;  plus 
récemment,  le  docteur  Rodmann  a  publié  le  relation  de  deux  épidémies 
sunrenues  dans  la  prison  de  Francfort  (Kentucki).  Dans  l'une  d'elles,  sur 
98  malades  il  y  eut  25  morts,  presque  tous  nègres.  La  ville  était,  pen- 
dant ce  temps,  dans  de  bonnes  conditions  de  santé. 

En  1874,  le  docteur  Kuhn  a  observé  dans  la  prison  de  Moringen  une 
épidémie  du  même  genre. 

En  l'absence  d'épidémies,  Schroter,  Ilennig,  Wyutcr  Blyth,  Hardwich 
et  (^omelli  ont  publié  des  cas  où  la  pneumonie  a  paru  manifestement 
|iroduite  par  la  contagion. 

A  cet  égard,  le  fait  rapporté  par  Brunner  est  fort  instructif  : 
On  pratiquait  chez  un  phthisique  Topération  de  la  trachéotomie  eu 
niison  d'accidents  avec  œdème  de  la  glotte  (dû  au  développement  de  gra- 
nulations dans  le  larynx).  Le  médecin,  à  cause  de  sa  myopie,  se  tint 
fart  rapproché  de  la  plaie  trachéale,  pendant  une  heure.  Deux  heures 
«près,  il  eut  un  frisson  qui  dura  vingt  minutes,  se  mit  à  tousser  et  res- 
«êntit  un  point  de  côté.  L'expectoration  était  visqueuse.  Vingt  minutes 
iprèt,  nouveaux  frissons  d'une  durée  encore  plus  grande,  délire.  Le  qua- 
Iriènie  jour,  on  constate  une  liépatisation  de  la  base  droite  qui  se  tend 
IMTOgressivement  et  envahit  tout  le  poumon,  Mort  le  septième  jour. 

A  tautopsie^  hépalisalion  grise  du  poumon  avec  résolution  commen- 
fanl  à  la  base,  dans  le  centre  du  foyer,  de  la  grosseur  d'une  fève  (com- 
.  aenc^ment  d'abcès)  ;  à  gauche,  hépatisation  du  lobe  inférieur.  Augmen- 
C   talion  de  volume  du  foie  et  de  la  rate. 

[       Preuhokies   secondaires.  —  <c  La  pneumonie,  dit    Grisolle,   peut  se 
i:  développer  dans  le  cours  de  toutes  les  maladies  aiguës  et  chroniques  e 
f-  certaines  d'entre  elles  se  compliquent  si  fréquemment  d'inflammation  pul 
ï  monaire  qu'il  est  impossible  de  nier  leur  influence,  soit  comme  causes 
prépondérantes,  soit  même  comme   causes    excitantes  de  la   maladie 
■    intercurrente.»  (Grisolle,  p.  160.) 

En  première  ligne,  Grisolle  cite  la  rougeole;  mais  il  confond  ici  la  pneu- 
monie et  la  broncho-pneumonie.  En  fait,  rien  n'est  plus  rare  que  la 
{Hieumonie  fîbrineuse  rubéolique,  si  tant  est  qu'elle  ait  été  réellement 
observée.  Taube  a  décrit  un  cas  de  pneumonie  qu'il  appelle  croupale, 
L    mm  qui  se  distinguait,  dit-il,  de  la  pneumonie  fibrineuse  par  Tabondance 
^  dm  globules  blancs  dans  les  alvéoles.  De  plus  la  lésion  était  diffuse;  aussi 
1  parait-elle  avoir  beaucoup  de  rapports  avec  la  broncho-pneumonie. 
^      H  en  est  à  peu  près  de  même  pour  la  coqueluche;  la  véritable  pneu- 
Knonie    fibrineuse  y  est  exceptionnelle  si  vraiment  elle  s'y  rencontre. 
P^  Damaschino  dans  sa  thèse  en  rapporte  cependant  un  exemple,  et  je  ne 
F   demanderais  pas  mieux  que  de  l'accepter,  mais  il  le  considère  lui-même 
^    «omme  douteux. 

Parmi  les  maladies  aiguës  autres  que  les  fièvres  éruptivcs,  il  faut,  en 
première  ligne  citer  la  fièvre  typhoïde.  J'ai  mentionné  plus  haut  la  pneu- 
monie primitive,  si  l'on  peut  s'exprimer  ainsi,  de  la  fièvre  typhoïde,  autre- 
ment dit  la  pneumo-typhoïde.  Je  n'y  reviens  pas,  mais  je  dois  marquer  la 


404  P.NEUMOMK  LOBAIRE  AIGUË.  —  pnbuho!(ibs  sbcoxhaikis. 

place  des  pneumonies  du  deuxième  et  du  troisième  septénaires»  s*il  est 
vrai  qu'on  puisse  quelquefois  rencontrer  parmi  elles  des  pneumonies 
fibrincuscs,  et  non  exclusivement  des  pneumonies  pscudo-lobaires  (voir 
la  thèse  de  Dcsiais,  Paris,  1877. 

On  prétend  que  la  pneumonie  fibrineuse  a  aussi  été  observée  dans  le 
typhus,  la  fièvre  récurrente,  la  malaria,  la  méningite  cérébro-spinale, 
la  diphthérie,  etc.,  etc.  Relativement  ù  cette  dernière,  Rilliet  et Barthei 
croient  que  la  pneumonie  y  est  toujours  lobulairc.  Par  contre.  Joies 
Simon  (article  Cuorr,  t.  X  de  ce  Dictionnaire)  et  Sanné  (Traité  de  h 
diphthérie,  1877,  p,  85),  auraient  vu  des  pneumonies  lobaires  dans  it» 
cas  de  croup  ;  mais  c'étaient  peut-être  des  pneumonies  pseudo-lobaires. 

Mon  collègue  et  ami  le  docteur  Straus  a  fait  paraître  l'an  dernier  une 
remarquable  observation  de  pneumonie  érysipélateuse.  J'y  renvoie  le 
lecteur  (Revue  mensuelle  de  Médecine^  1879). 

La  pneumonie  fibrineuse,  en  Angleterre  du  moins,  n'est  pas  rare  dans 
le  rhumatisme  articulaire  aigu  (Fuller,  Latham).  Chez  nous,  e*est  ooe 
complication  beaucoup  plus  rare,  un  peu  moins  rare  cependant  que  ne  le 
pense  Grisolle,  car  j'en  ai  vu  pour  ma  part  quelques  exemples  dans  ces 
dernières  années. 

Parmi  les  affections  chroniques,  ce  sont,  je  crois,  les  affections  rénal» 
qui  donnent  le  plus  souvent  naissance  à  la  pneumonie  fibrineuse. 

Rayer  Ta  rencontrée  dans  un  douzième  des  cas  de  maladies  de  reins. 
Le  professeur  Jaccoud  se  fondant  sur  la  statistique  de  Frerichs  et  de 
Rosenstein,  estime  sa  fréquence  à  12,8  7o-  J^hn  Taylor  va  jusqu'à  24  7,. 
Becquerel  (sur  127  cas)  l'a  vue  dans  la  proportion  de  20  7o- 

Grainger  Stewart  (Bright's  Diseascs  of  the  Kidney)  Ta  rencontrée  dansk 
rapport  suivant  avec  les  différentes  formes  de  maladie  de  Bright. 

Dans  ]a  néphrite  nigur 21  •', 

Dans  le  rein  coiilmclé 7   •• 

Dans  lo  rein  nmvioitic 4*- 

Selon  0.  Stiirges,  la  pneumonie  serait  plus  commune  dans  le  rein 
amyloide  que  dans  les  autres  formes  de  maladies  de  Bright.  Rappelant  l'opi- 
nion de  Dickinson,  il  ajoute  que  dans  la  néphrite  pnrenehymaleu5P,  on 
observerait  des  péricardites  et  des  pleurésies  plutôt  que  des  pncumomVs  et 
que  dans  la  néphrite  interstitielle  il  y  aurait  peu  de  tendance  aux  inflnin-  i 
mations  parenchymateuses.  Ces  assertions  demandent  à  être  contrôlées. 

On  a  dit  (|ue  la  pneumonie  est  commune  dans  les  affections  du  cœur, 
mais  cette  proposition  ne  me  paraît  pas  parfaitement  exacte.  Ce  qu'il  ol 
fréquent  de  trouver  chez  les  cardiaques,  c'est  la  carniOcation;  la  pneu- 
monie elle-même  est  assez  rare. 

Pour  la  tuberculose  la  question  est  controversée   Rernheim.  notao- 
ment  soutient,  à  cet  égard,  l'opinion,  un  peu  absolue,  selon  moi,  qu'mi 
phthisique  ne  peut  être  pris  de  pneumonie  fibrineuse.  (Leçons  de  di-  f 
nique  médicale^  p.  39)  Enfait,  j'avoue  n'en  avoir  pas  observé  moi-m«Df.  j=r 

La  pneumonie  n'est  point  rare  chez  les  diubéliques.  Après  la  phthisie. 


PNEUMONIE  LOBÂlRE  ÂIGUE.  —  tableau  et  marchk  dk  la  maladie.  405 

c'est  la  complication  à  laquelle  ils  succombent  je  croîs  le  plus  souvent. 

Les  cancéreux,  les  cirrhotiques  et  généralement  tous  les  cachectiques 
sont  fort  exposés  à  la  pneumonie.  C'est  chez  un  sixième,  au  moins,  la 
cause  de  la  mort. 

OnTobserve  aussi  à  la  suite  de  brûlures  et  d*autres  alTections  chirurgi- 
cales dans  une  proportion  que  je  ne  suis  pas  en  état  de  déterminer.  J'ai 
déjà  parlé  plus  haut  des  pneumonies  qui  succèdent  au  shoc. 

En  résumé,  les  causes  déterminantes  des  pneumonies  primitives  ou 
aecoodaires  envisagées  d'une  manière  générale,  se  réduisent  à  deux  : 
exirinsèques  ou  intrinsèques,  mais  il  n'est  pas  facile  de  faire  la  part  de 
chacune  d'elles. 

Aux  premières  ressortissent  évidemment  les  pneumonies  contagieuses, 
manifestement  miasmatiques;  et  les  pneumonies  sou3  la  dépendance  d'une 
constitution  médicale,  qu'on  admette  ou  non  pour  elles  une  influence 
miasmatique  mitigée.  Aux  secondes  appartiennent  les  pneumonies  qui 
sont  le  résultat  d'un  trouble  nerveux  ou  d'une  dyscrasie.  Mais  outre  les 
pneumonies  évidemment  de  cause,  soit  extrinsèque,  soit  intrinsèque,  il 
en  reste  un  certain  nombre  dont  la  cause,  probablement  extrinsèque  est 
encore  obscure  et  réclame  la  lumière  de  l'avenir. 

Tablemu  et  marche  de  la  maladie.  —  Née  sous  l'une  quel- 
conque des  influences  que  nous  venons  de  passer  en  revue,  la  pneumonie 
évolue  de  différentes  manières.  Elle  débute  en  tous  les  cas  par  une  con- 
gestion à  laquelle  succède  une  exsudation  intra-alvéolaire  qui,  au  bout 
de  quelque  jours  se  résorbe  si  la  terminaison  doit  être  favorable.  Voilà  le 
processus  de  la  pneumonie.  Mais,  autant  il  est  simple  et  régulier,  autant 
sont  complexes  et  variables  les  phénomènes  par  lesquels  il  se  révèle  : 
tantôt  les  symptômes  de  début  sont  solennels;  tantôt  ils  sont  insidieux; 
tantôt  la  fièvre  est  intense  ;  tantôt,  elle  parait  manquer  ;  tantôt  des 
signes  physiques  d'auscultation  et  une  expectoration  caractéristique 
décèlent  clairement  la  lésion  ;  tantôt  ils  font  défaut  ainsi  que  Texpectora- 
tion;  tantôt  l'affection  pulmonaire  reste  jusqu'à  la  fui  seule  maladie;  tantôt 
elle  se  complique  des  alTections  les  plus  variées  et  les  plus  graves.  Bref,  je 
n'en  finirais  pas  si  je  voulais  rappeler  les  contrastes  qui  abondent  dans 
l'histoire  de  la  pneumonie  et  qui  la  rendent,  de  toutes  les  grandes  mala- 
dies internes,  Tune  des  plus  intéressantes  et  des  plus  difficiles  à  exposer. 

En  décrivant  une  espèce  morbide,  et  afin  que  leur  description  s'appli- 
que bien  à  toute  l'espèce,  les  pathologistes  empruntent  à  chacun  des  dif- 
férents types  dont  elle  se  compose  quelques  particularités,  de  même  que, 
dit-on,  les  statuaires  grecs  copiaient  sur  différents  individus  les  traits  qui 
leur  paraissaient  les  plus  parfaits.  Mais  cette  méthode  n'est  pas  applicable 
quand  l'espèce  est  disparate  ou,  en  d'autres  termes,  quand  les  individus 
qui  la  composent  sont  fort  dissemblables  entre  eux.  Elle  aboutirait  à  pro- 
duire un  tableau  qui  non-seulement  ne  ressemblerait  à  rien  de  réel,  mais 
qui  serait  même  une  véritable  monstruosité.  Voilà  ce  qui  arriverait  si  je 
décrivais  la  pneumonie  en  mélangeant  les  traits  de  ses  différentes  varié- 
tés. Pour  ne  pas  tomber  dans  ce  défaut,  je  retracerai  le  type  commun, 


406  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tableau  et  marche  de  la  SALàiMi. 

régulier,  de  la  pneumonie  primitive,  celui  que  nous  avons  habilueUement 
sous  les  yeux  dans  les  hôpitaux  de  notre  pays  ;  puis  quand  j'aurai  «oeou- 
sivement  passé  en  revue  tous  les  symptômes  dont  le  groupement  constitoe 
ce  type,  je  donnerai  un  aperçu  des  autres  formes,  mais  d'une  manière 
brève,  afin  de  ne  pas  tomber  dans  trop  de  redites. 

Tableau  du  type  commun  régulier.  —  Chez  le  quart  des  malades  il  y 
a  des  prodromes,  consistant,  dit  Grisolle,  en  malaise  général  avec  ou  sans 
perte  de  l'appétit  et  des  forces,  et  sensibilité  au  froid;  puis  survient  an 
frisson  violent,  presque  constant  chez  l'adulte  et  aussi  chez  le  Tieillard 
(Charcot).  Ce  frisson,  dans  les  trois  quarts  (fe«  ca«,  est  le  symptAm» 
initial  de  l'invasion  de  la  pneumonie. 

Après  le  frisson  qui  est  parfois  suivi  d'un  vomissement,  le  malade 
ressent  un  point  douloureux  siégeant  sur  l'un  des  mamelons  ou  latérale- 
ment à  la  base  de  la  poitrine;  puis  il  éprouve  de  l'oppression  et  com- 
mence à  tousser.  En  même  temps  il  se  sent  accablé  et  souffre  de  cépha- 
lalgie ;  beaucoup  éprouvent  le  besoin  immédiat  de  s'aliter. 

C'est  qu'en  effet  le  frissonn'est  que  la  première  manifestation  d'une  fièvre 
intense.  Au  moment  où  il  a  lieu,  la  température  des  cavités  naturelle» 
est  déjà  un  peu  au-dessus  de  la  normale.  A  partir  du  frisson,  elle  s'élève 
très  rapidement.  Chez  une  vieille  femme,  Quinquaud  (thèse  de  Monthus 
Paris  1868)  a  noté  les  chiflres  suivants  :  au  moment  du  frisson  38%3; 
un  quart  d'heure  après  39^,3;  une  heure  après  41^  C.  Ce  dernier 
chiffre  est  à  la  vérité  un  peu  exceptionnel  et  chez  cette  malade  l'asteii- 
sion  thermique  a  été  beaucoup  plus  rapide  que  d'habitude.  La  règle  est 
de  trouver  40^  C.  environ,  quelques  heures  après  le  frisson. 

Un  amendement  momentané  peut  succéder  au  frisson  initial;  U 
température  s'abaisse  quelquefois  de  plus  d'un  de^^é  et  le  malade  éprouve 
un  bien  être  relatif.  Mais  c'est  là  un  calme  trompeur,  et  au  bout  de  quel- 
ques heures,  la  maladie  reprend  sa  marche.  La  température  remonte  à 
40**  et  s'y  maintient  ou  dépasse  ce  chiffre. 

Dès  le  lendemain  divers  signes  physiques  viennent  affirmer  l'existence 
de  la  pneumonie  et  nous  renseigner  sur  son  siège.  C'est  en  premier  lieu 
une  expectoration  spéciale,  caractéristique  et  ce  sont  des  signes  de  percus- 
sion et  d'auscultation,  dont  les  râles  crépitants,  signe  d'engouemefll 
pulmonaire,  sont  les  plus  décisifs. 

Le  surlendemain  du  frisson  et  même  le  jour  suivant,  on  observe  dans  le 
plus  grand  nombre  des  cas  une  extension  de  la  phlegmasie,  à  en  juger  par 
les  signes  physiques  :  les  râles  crépitants  d'abord  concentrés  en  un 
foyer  restreint,  par  exemple  dans  l'aisselle,  occupent  une  plus  large  sur- 
face, tandis  qu'un  nouveau  signe  d'auscultation,  du  souille,  signe  habituel 
de  l'hépatisation  coiifirmée,  occupe  le  point  primitivement  envahi  par 
.es  râles  crépitants.  Pendant  plusieurs  jours  la  pneumonie  peut  s'étendre 

proche  en  proche  ;  parfois,  mais  fort  rarement,  elle  envahit  même  le 
poumon  du  côté  opposé. 

Pendant  ce  temps  la  fièvre  persiste,  continue,  sauf  des  rémissions  sur 
lesquelles  nous  reviendrons  plus  loin,  et  des  exacerbalions  dont  la  cause 


PNEUMONIE  LOBâUŒ  AIGUË.  snnronvreMm  spéciale.  Mf 

parfois  nous  échappe,  mais  le  plus  souvent  peiiil  étfe  importée  à  me 
extension  de  la  phlegmasie.  L*état  général,  It  dépresnon  dts  fercm, 
l*anorexie,  etc.,  vont  en  s'aggrayant  pendant  plusieurs  jours. 

Puis,  à  un  moment  qui  varie  entre  le  sixième  et  le  neuvième  jour; 
a  partir  du  &ébut,  rarement  plus  tôt  ou  plus  tard,  îl  y  a  dans  le  tableao 
sjmptomatique  un  changement  assez  brusque,  dm»  le  cae  oè  la  maladie 
doit  guérir  :  la  (ièvre  tombe  ;  il  se  produit  parfois^  quelques  phénomènes 
dits  critiques  :  des  sueurs,  un  sédiment  nrinaire,  et  chez  le  vieillard,  sou- 
Tent  de  la  diarrhée;  les  signes  locaux  se  modifient,  Thépatisatien  se 
résout,  à  en  juger  par  la  disparition  du  soufOe  et  les  rides  de  retour;  et 
le  malade  entre  en  convalescence. 

Si  la  défervescence  n'a  pas  lieu,  la  suppuration  de  la  partie  hépatisée 
s'établit  ;  la  fièvre  persiste  et  le  malade  meurt  au  bout  d'un  temps  va- 
riable, soit  de  la  pneumonie  elle-même,  soit  parle  fart  d'une  complication. 

Étudions  avec  quelques  détails  les  diflerents  symptômes  : 

Symptomatoloi^e  spéciale.  —  Habitus  extérieur.  —  Bien  qu'il 
ne  soit  nullement  caractéristique,  il  suffît  souvent  à  un  médecin  expéri- 
menté pour  lui  faire  soupçonner  l'existence  d'une  pneumonie  :  la  face  est 
altérée  dans  presque  tous  les  cas  ;  non  qu'elle  présente  cette  animation 
banale  que  l'on  observe  dans  tout  malade  fébrile,  on  qu'elle  soit  uniformé- 
ment rouge  et  vultueuse  :  d'habitude  le  front  et  le  sillon  naso-labial 
sobI  pfties  tandis  que  les  pommettes  sont  fortement  colorées,  surtout  l'une 
d'elles  et  souvent  une  seule  exclusivement  ;  les  yeux  sont  un  peu  in- 
jectés; quelquefois  les  lèvres  sont  légèrement  cyanosées;  puis  le  long  du 
sillon  naso-labial  ou  autour  de  la  bouche,  existent  parfois  quelques  vési- 
cules d'herpès.  Quant  à  son  expression,  le  visage  accuse  la  souffrance, 
Paocablement,  et  surtout  la  dyspnée,  qui,  lorsqu'elle  est  très-prononcée, 
se  manifeste,  surtout  chez  les  enfants  par  des  mouvements  inspiratoires 
des  narines.  S'il  y  a  tendance  à  l'asphyxie,  les  muscles  auxiliaires  du  cou 
entrent  en  action  ;  on  remarque  une  cyanose  générale  des  extrémités  ; 
le  malade  est  anxieux  ;  il  s'assied  à  moitié  sur  son  lit,  la  tête  élevée. 

D'habitude  le  décubitus  se  fait  sur  le  dos  ;  du  côté  malade,  il  est  péni- 
ble et  même  douloureux  si  le  point  de  côté  est  intense  ;  cependant  les 
enfants  choisissent  souvent  ce  côté,  mais  alors  se  tiennent  immobiles,  en 
courbant  instinctivement  la  colonnne  vertébrale  du  côté  sain.  C'est  par 
eet  ensemble  de  symptômes  extérieurs  que  l'attention  du  médecin  est 
attirée  vers  l'appareil  respiratoire. 

SYMPTÔMES  FOURMS  PAR    l'aPPAREIL  RESPIRATOUIE.  —  1"  Poiflt  dt  CÔté.    — 

il  siège  du  côté  de  la  pneumonie,  le  plus  souvent  au  niveau  du  mamelon, 
ou  bien  un  peu  en  bas  et  en  dehors,  exceptionnellement  en  dedans  du 
mamelon  et  plus  rarement  encore  dans  l'aisselle,  dans  le  flanc,  ou  dans  la 
fosse  sous-épineuse. 

La  douleur  est  vive  et  lancinante  chez  la  moitié  des  sujets  ;  quelquefois  elle 
est  fort  peu  accusée  et  il  faut  pour  la  réveiller  un  certain  degré  de  pres- 
âon.  Elle  peut  manquer,  surtout  dans  le  cas  où  la  pneumonie  est  cen- 
trale ;  quant  à  sa  pathogenie,  l'explication  la  plus  satisfaisante  me  parait 


408  '  PNEUMFNIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  oTPUiiB. 

celle  de  Jurgensen  qui,  comparant  la  douleur  du  point  de  cM  k 
celle  du  panaris,  pense  qu'elle  est  le  résultat  de  la  pression  exercée  sur 
la  plèvre  par  le  poumon  augmente  de  volume.  Dans  quelques  cas  tout  à 
fait  exceptionnels,  elle  s'est,  dit-on,  manifestée  du  côté  opposé  au  pou- 
mon malade  (Laennec,  Gerhard t).  Selon  ce  dernier,  cette  anomalie 
s'expliquerait  par  les  anastomoses  qui  existent  entre  les  neris  inlercostanx 
de  l'un  et  de  l'autre  côté. 

2^  Dyspnée.  —  Elle  est  non-seulement  objective,  mais  subjeclife, 
quelques  malades  se  plaignant  soit  d'un  sentiment  de  gène  au  moment  de 
l'entrée  de  Tair  dans  la  poitrine,  soit  éprouvant  le  sentiment  angoisainl 
du  besoin  d'air  ;  mais  c'est  seulement  la  dyspnée  objective  qui  doit  nous 
occuper  ici. 

A.  V accélération  de  la  respiration,  qui  est  le  caractère  principal  de  la 
dyspnée  objective,  est  constante  et  souvent  considérable,  surtout  cheilci 
enfants  en  bas  âge  qni  peuvent  avoir  soixante- dix  à  quatre-vingts  resp- 
rations  par  minute.  Elle  survient  peu  d'heures  après  le  début  de  la  mali- 
die,  quelquefois  tout  à  fait  au  début,  avant  tout  autre  symptôme  physique. 
Non-seulement  le  chiffre  absolu  des  respirations  est  beaucoup  aug- 
menté, mais  ce  qui  a  plus  d'importance  pour  mettre  sur  la  voie  d'une 
affection  thoracique,  le  rapport  entre  la  fréquence  du  pouls  et  de  la  res- 
piration est  notablement  modifié.  Tandis  que  dans  les  maladies  fébriles 
qui  n'intéressent  pas  l'appareil  respiratoire,  il  est  comme  à  Tétat  normal 
représenté  par  les  chiffres  :  2  ::  9,  il  devient  :  4,  5  ou  6  ::  9,  ce  qui 
tient  probablement  à  un  excès  d'acide  carbonique  dans  le  sang. 

Sauf  dans  quelques  cas  de  pneumonies  où  l'on  voit  une  dyspnée 
extrême  duc  selon  toute  vraisemblance  à  une  congestion  concomitante 
du  poumon,  la  dyspnée  n'est  très-grande  en  général  qu'au  bout  de  quel- 
ques jours,  et  alors  elle  se  lie  souvent  à  l'existence  d'une  pneumonie 
très-étendue  ou  bi-latérale. 

Néanmoins  il  est  impossible  de  préjuger  à  l'aide  de  ce  seul  signe  l'éten- 
due de  la  phlegmasie  ;  car  il  y  a  à  cet  égard  de  nombreuses  excep- 
tions :  plusieurs  malades,  au  rapport  de  Grisolle  lui-même,  «  ont  succombé 
a  des  pneumonies  doubles  ou  avec  une  hépatisation  de  tout  un  poumon, 
cl  cependant  chez  eux  Ton  n'avait  jamais  compté  que  24,  28  ou  30  re^ 
rations  ])ar  minute,  tandis  que  chez  d'autres  malades,  qui  n'avaient  que 
des  pneumonies  très-circonscrites,  le  nombre  de  respirations  dépassait 
50  ou  60.  Plusieurs  faits[de  ce  genre  ont  été  vus  par  nous  pendant  l'épi- 
dcmie  de  grippe  qui  régna  à  Paris  en  1837.  Le  plus  ordinairement  il  n'y 
avait  vers  la  plèvre,  le  poumon  et  le  cœur  aucune  complication.  Doit-on 
-ilors  attribuer,  avec  les  pathologislcs  anglais  la  dyspnée  et  Taccélén- 
tion  de  la  respiration  à  une  excitation  inflammatoire  de  tout  le  pou- 
mon? Ce  serait  faire  une  supposition  qu'il  nous  serait  impossible  de 
justifier  par  aucune  preuve  anatomiquc  ou  symptomatique;  il  faut  oe 
voir  ici  que  des  différences  résultant  de  dispositions  individuelles  tenant 
à  une  impressionnabilité  qui  n'est  pas  la  même  chez  tous,  à  une  idiosyn- 
crasie  dont  la  cause  reste  toujours  inexplicable  pour  nous.  » 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  expectobatiok.  409 

Cette  opinion  de  Grisolle  ne  me  parait  juste  qu  en  partie  :  il  est  certain, 
pour  traduire  sa  pensée  dans  le  langage  actuel,  que  la  dyspnée  dépend  du 
degré  d'excitabilité  du  bulbe.  Or,  une  excitabilité  faible  n'est  pas  le  résul- 
tat d'une  idiosyncrasie,  c'est-à-dire  d'une  disposition  individuelle.  Un 
médecin  comme  lui  n'aurait  pas  dû  oublier  que  l'excitabilité  yarie  avec 
l'ëlat  des  malades.  Dans  le  collapsus,  dans  la  période  terminale,  elle  tombe 
au  minimum  ;  dans  la  phase  sthénique  de  la  maladie,  elle  est  exaltée,  de 
sorte  qu'il  suffit  de  transporter  du  poumon  au  bulbe  Vinflammalory  ex- 
eUement  de  Slokes  pour  que  la  vue  du  médecin  anglais  exprime  une 
réalité  au  lieu  d*une  erreur. 

Ce  n'est  pas  seulement  un  sang  anormal  par  sa  température  ou  sa 
Imeur  en  gaz  qui  est  susceptible  d'exciter  le  centre  respiratoire  du 
bulbe  ;  on  sait  qu'on  arrive  encore  au  même  résultat  par  Texcitaton  des 
oerfe.  Tout  porte  à  croire  qu'il  peut  en  être  ainsi  dans  la  pneumonie. 

Bouillaud  croit  que,  to.utes  choses  égales,  la  pneumonie  du  sommet 
dkinne  lieu  à  une  dyspnée  plus  forte  que  la  pneumonie  de  la  base.  Si  le 
fait  est  exact,  Texagération  de  la  dyspnée  s'expliquerait  par  une  action 
réflexe,  car,  ainsi  que  nous  le  verrons  plus  loin,  les  pneumonies  qui  occu- 
pent le  sommet  excitent  certainement  plus  de  troubles  réflexes  que  celle 
de  la  base. 

B.  Le  type  respiratoire   peut  n'éprouver  dans  la  pneumonie,  d'autre 
modification  que  celle  qui  résulte  de  la  douleur  du  côté  affecté  ;  mais  si 
h  dypsoée  est  forte,  les  muscles  accessoires  entrent  en  action.  Chez  Fen- 
fant,  les  contractions  énergiques  du  diaphragme  rétrécissent  la  base  de 
la  poitrine  et  projetfrtit  à  chaque  inspiration  l'épigastre  et  les  viscères 
abdominaux.  Lorsqu'il  y  a  un  état  asphyxique  et  une  accélération  extrême 
ies  mouvements  respiratoires,  ils  sont  naturellement  très-superficiels. 
3*  Toux.  —  La  toux    est  constante,  sauf  exception  des  plus  rares  ; 
Biais  elle  est  beaucoup  moins  intense  que  dans  la  bronchite.  9  fois  sur 
10  elle  débute  dans  les  douze  premières  heures  a  partir  du  frisson.  C'est 
donc  un  symptôme  précoce.  En  général,  le  point  de  côté  et  la  toux  s'ex- 
citent Vun  Tautre.  En  effet  on  conçoit  facilement  que  la  secousse  de  la 
toax  augmente   le  point  de  côté.  Et  quant  à  l'inlluence  inverse,  on   la 
eompreod  aussi  aisément  si  l'on  réfléchit  que  le  malade  éprouvant,  à  cause 
de  la  dyspnée^le  besoin  de  respirer  plus  profondément  est  arrêté   par  la 
dooleur,  ce  qui  augmente  la  sensation  de  dyspnée  et  provoque  immédia- 
tement la  toux. 

On  a  noté  que  lorsque  la  pneumonie  marche  vers  une  issue  fatale,  la 
fréquence  de  la  toux  diminue  ;  chez  les  vieillards  elle  est  en  général  plus 
discrète  que  chez  l'adulte. 

it^  Expectoration— '  Elle  est  caractéristique  dans  la  pneumonie  fran- 

^,  à  cause  de  la  couleur  et  de  la  consistance  spéciales  des  crachats.  On 

Mit   qu'elle  fait  défaut   chez    les  enfants.  Ce  qui    suit  a  donc  exclu- 

flÎTement  trait  aux  pneumonies  franches  primitives  de  l'adulte  et  du 

▼îeillard. 

Dans  le  tiers  des  cas,  les  crachats  sont  sanguinolents  dès  le  premier 


410  PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  BipscTOKinov. 

jour  de  la  maladie;  mais  bien  que  colorés  fortement  par  le  sang,  au 
point  de  présenter  une  coloration  de  brique  pilée,  ils  ne  sont  jamais  alors 
constitués  par  du  sang  pur.  Une  expectoration  exclusivemoit  sanglante 
devrait  faire  supposer  Texistence  de  tubercules;  en  général  d'ailleim 
ils  ne  gardent  pas  longtemps,  quand  ils  le  possèdent,  le  caractère  san- 
guinolent et  ils  prennent  l'apparence  de  gelée  d*abricot,  qui  parfois  sur- 
vient dès  le  début,  ou  même  une  coloration  plus  pâle  encore;  ils  peu- 
vent ensuite,  mais  plus  rarement,  offrir  une  teinte  verdfttre  on  même 
porracée  ;  puis  ils  deviennent  blancs  opaques  ou  bien,  beaucoup  moioi 
fréquemment,  ils  revêtent  la  couleur  du  chocolat  au  lait  ou  du  jus  de 
réglisse,  ce  qui  est  en  général  un  signe  de  mauvais  augure. 

On  sait  que  ces  diverses  colorations  des  crachats  pneumoniques,  sauf 
dans  certains  cas  la  coloration  verte,  sont  simplement  produites  par  b 
matière  colorante  du  sang  épanché  dans  les  voies  aériennes  enproportiai 
variable.  Des  crachats  couleur  brique  doivent  se  rencontrer  dans  le  cm 
où  la  fluxion  est  intense,  des  crachats  gelés  d'abricots,  lorsqu'elle  est 
minime ,  à  moins  que  Tabondance  de  Thémorrhagie  soit  plntAt  en 
rapport  avec  un  degré  de  fragilité  des  capillaires  particulier  à  l'in- 
dividu ;  mais  je  penche  plutôt  pour  la  première  hypothèse,  attend» 
que  Tcxpectoration  rouillée  manque  dans  certaines  épidémies. 

Quant  à  la  coloration  vcrdàtre,  elle  tient  quelquefois  à  la  présence  de 
la  biliverdine,  ainsi  qu'on  peut  s'en  assurer  par  la  réaction  de  Gmelin, 
et  alors,  c'est  une  complication,  sur  laquelle  nous  aurons  occasion  de 
revenir;  mais  dans  un  certain  nombre  de  cas  les  crachats  peuvent  pri> 
senter  une  coloration  parfaitement  verte,  en  Tabsence  de  la  bilive^ 
dine,  ce  qui  peut  s'expliquer,  ainsi  que  me  l'a  fait  remarquer  mon  ami 
Cazeneuve,  si  les  crachats  ont  une  réaction  franchement  alcaline,  pir 
le  dédoublement  de  la  matière  colorante  du  sang  en  matières  albumi* 
noidcs  et  en  hématine,  laquelle  en  présence  des  alcalis  a  une  coloration 
verdàtre.  Quelquefois  enfin  la  coloration  verte  des  crachats  dépend  de 
la  présence  de  productions  parasitaires. 

En  1868,  Cornil  a  montré  à  la  Société  de  biologie  des  «  crachats  rer- 
dâtres  recueillis  dans  un  cas  de  pneumonie  aiguë  très  intense.  »  (H  n'est 
pas  dit  à  quelle  période  de  la  pneumonie).  «A  l'examen  microscopique 
cette  coloration  parait  due  à  la  présence  de  petits  corpuscules  i  doubles 
contours,  offrant  entre  ces  deux  contours  une  couleur  verte  très  brillante,  jj 
Ces  corpuscules  déposés  en  amas  quadrilatères  ressemblent  à  ceux  de  h  | 
sarcine,  mais  sont  d'un  diamètre  beaucoup  moins  grand  que  ces  demitfs.  \ 
On  trouve  de  plus  dans  les  préparations  des  corpuscules  plus  gros,  i  : 
double  contour,  remplis  de  granulations,  ayant  une  couleur  jaune  en 
verte,  et  enfin  des  corps  volumineux  remplis  de  grosses  granulations  de 
la  même  couleur.  Ces  éléments  ne  se  modifient  pas  sous  l'influence  des  ' 
réactifs  tels  que  la  potasse,  l'acide  sulfurique,  qui  agissent  habituelle- 
ment sur  les  matières  organiques.  Cornil  pense  qu'il  s'agit  ici  de  pro- 
ductions végétales.  »  (4*  série,  tome  V,  p.  59). 

En  1875,  sans  connaître  la  découveilc  de  Cornil,  Rosenbacha,  desoff 


PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  expkctoratioii.  411 

côté,  signalé  la  nature  Tégétale  de  crachats  yerts,  mais  il  ne  s'agissait 
pas  dans  son  cas  d'un  pneumonie,  mais  d'un  asthme. 

Après  leur  couleur,  le  caractère  le  plus  frappant  des  crachats  pneu* 
mooiques  est  leur  viscosité,  qui  leur  permet  d'adhérer  fortement  au  fond 
du  Tsse. 

Leur  quantité  diurne  est  variable,  et  il  faut  faire  ici  une  remarque  : 
tous  les  crachats  qu'expectore  une  pneumonique,  ne  sont  pas  néces- 
sairement pneumoniques  ;  tous  ne  sont  pas  visqueux  et  colorés  ;  il  en 
est  de  purement  muqueux  provenant  des  parties  non  enflammées  du  pou- 
mon. Si  l'on  ne  tient  compte  que  des  crachats  vraiment  pneumoni- 
ques, leur  quantité  est  en  général  minime  ;  elle  est  parfois  presque 
Dulle,  ce  que  Buhl  explique  en  disant  que  l'inflammation  est  exactement 
limitée  aux  alvéoles  et  n'a  pas  envahi  les  fines  bronches.  Bien  rarement 
la  quantité  de  70  à  80  grammes  par  jour  est  dépassée.  Dans  un  travail 
de  Riesell-Huppert,  que  j'aurai  plusieurs  fois  l'occasion  de  citer,  il  est 
dit  que  dans  un  cas  de  pneumonie  de  tout  le  poumon  gauche  à  la  pé- 
riode d^élat,  les  crachats  s'élevaient,  au  maximum,  à  67  grammes  par 
jour  ;  le  minimum  était  de  55  grammes.  Dans  le  premier  cas  ils  renfer- 
maient 5  grammes  et  dans  le  second  1,9  de  substance  sèche.  Comme  la 
proportion  de  substance  sèche  était  moindre  à  mesure  que  la  quantité 
totale  diminuait,  il  ne  s'agissait  pas  d'une  simple  concentration,  ainsi 
qu'oo  eut  pu  le  supposer  a  priori.  Il  est  intéi'essant  de  noter  qu'à  la 
période  de  résolution  la  diminution  fut  plus  accusée  encore  :  la  quantité 
des  crachats  ne  dépassa  pas  8,8  par  jour,  avec  un  gramme  seulement  de 
matières  fixes. 

De  tels  faits,  et  ils  constituent  la  règle,  sont  absolument  opposés  à 
Yiàée  de  Rindfleisch,  que  la  masse  principale  de  Texsudat  est  reje- 
lèe  par  l'expectoration,  opinion  qui  paraît  d'ailleurs  peu  vraisemblable, 
quand  on  songe  à  l'étroitesse  des  canalicules  respirateurs  aboutissant 
i  Valvéole  et  à  la  facilité  avec  laquelle  du  sang  injecté  dans  les  voies 
aériennes,  chez  le  lapin,  est  résorbé  par  la  paroi  alvéolaire,  puisqu'au 
bout  de  peu  de  minutes  on  trouve  beaucoup  de  globules  rouges  dans  le 
tissu  interstitiel  (Nothnagel,  Virchow's  Archiv,  Bd.  LXXJ). 

C^est  exceptionnellement  que  l'expectoration  devient  fort  abondante 

Ipn  de  la  résolution  ;  et  encore,  dans  ces  cas,  il  est  possible  qu'il  s'a- 

[-  giae  d'un  flux  bronchique.  Biermer  a  sans  doute  commis  cette  confu- 

■an,  en  évaluant  à  330  grammes  le  poids  journalier  de  l'expectoration, 

i  ee  moment. 

■  * 

f^r  Y  examen  microscopique,  outre  du  mucus,  reconnaissable  à  sa  réac- 
ion  microchimique  et  des  globules  du  sang  rouges  et  blancs,  on  trouve, 
ans  un  bon  nombre  de  cas,  quand  on  prend  la  peine  de  les  rechercher, 
es  petits  cylindres  pleins,  ramifiés,  moules  des  bronches  les  plus  fines. 
iemak,  le  premier,  les  a  découverts,  en  1845,  à  la  clinique  de  Schôn- 
ain,  à  Berlin,  et  les  observa  dans  un  grand  nombre  de  cas  de  pneumo- 
nie (50).  Il  y  avait  alors  une  constitution  médicale  particulière.  Rcmak 
les  considéra  comme  un  produit  d'exsudation  ;  Gubler ,  qui  étudia  avec 


4i2  PNEUMONIE  L0BA1RE  AIGUË.  —  mrnsuratioh. 

soin,  quelques  années  après,  des  concrétions  semblables  dii^  qu*à  Vexa- 
incn  inicroscopique,  il  a  retrouvé  à  leur  surface  des  cellules  h  cils  vibn- 
tiles,  et  la  même  observation  a  été  faite  par  le  professeur  Kûss.  GaUer 
et  Grisolle  ont  tiré  de  ce  fait  la  conclusion  que  la  concrétion  fibrineuse 
ne  peut  être  due  qu^à  la  fibrine  du  sang  ;  mais  cette  conclusion  n*est  pas 
justifiée,  car  un  exsudât  peut  se  faire  à  la  surface  de  répiihélium,  sans 
enti*ainer  sa  chute. 

On  doit  à  Renk  Tanalyse  chimique  de  Texpectoration  dans  deux  cas 
de  pneumonie,  (le  second  était  compliqué  de  bronchite).  Dans  le  premier, 
voici  la  moyenne  de  11  jours  (en  grammes). 


Quantité'. 

Eau. 

Mucus. 

Albumine. 

r.rais»e. 

Sels. 

26 

25,e6 

0,32 

0,8 

0,013 

0,17 

Dans  le  second ,  je  rapporte  les  analyses  de  trois  jours.  La  seeoiide 
ligne  correspond  au  jour  de  la  défervescencc  qui  est  arrivée  le  cinquième 
jour. 


Quant  i  te. 

Eau. 

Mucus. 

Graisse. 

Sels. 

45 

43,7 

0,56 

0,009 

0,57 

143 

139 

1,31 

0,028 

1.41 

153 

147 

1,68 

0,036 

1,3» 

^ 

3- 

3-2,8 

20,67 

18 

12,6 

Ici  Talbumine  n*a  pas  été  dosée. 

Le  chlorure  de  sodium  constitue  la  moitié  environ  des  sels.  Beale,  dans 
trois  cas,  a  trouvé  : 

Dans  KM)  parties  de  matières  solides.  1" 

Sels  fixes 24,78 

Chlorure  de  sodium 10 

D'après  Bamberger,  les  sels  des  crachats  pneumoniques,  comparés  à 
ceux  des  crachats  de  bronchite,  présentent  les  particularités  suivantes  :    j 

1^  Ils  ne  renferment  pas  de  phosphates  alcalins,  tandis  que  les  sels  des 
crachats  de  bronchite  en  contiennent  10  à  14  pour  cent  ; 

2^  Ils  sont  plus  riches  en  soude  qu'en  potasse,  contrairement  à  ce  qui 
a  lieu  pour  les  crachats  de  bronchite  ; 

5**  Ils  renferment  8  pour  cent  d'acide  sulFurique,  tandis  que  les  crachat^ 
de  bronchite  n'en  ont  que  3  pour  cent. 

Au  moment  de  la  résolution,  la  composition  chimique  des  crachais 
pneumoniques  se  rapproche  de  celle  des  crachats  de  bronchite,  et  la 
proportion  de  graisse  y  est  plus  élevée. 

Ajoutons  enfin  que  le  sucre  y  a  été  signalé  par  Walshe  et  par  Bcaleet 
la  tyrosine  par  Griesinger,  dans  un  cas  où  il  n'y  avait  pas  d'ictère  et  qui 
se  termina  par  la  guérison  (thèse  déjà  citée  de  Bleuler). 

5*  Inspection  et  mensuration  de  la  poitrine,  —  J'ai  déjà  signale  que, 
parle  fait  de  la  douleur,  le  côté  malade  peut  se  dilater  un  peu  moins 
que  le  côté  sain.  Parfois  l'inspection  a  révélé,  dans  des  cas  de  pneumonie 
très-étendue,  une  légère  voussure  sous-claviculaire,  indépendante  de 
toute  pleurésie  et  ne  durant  que  pendant  la  période  la  plus  aiguë  de  h 
maladie. 


PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  tkacussion.  415 

D^une  manière  générale,  dit  Woillez,  «  la  mensuration,  employée 
dans  le  cours  de  la  pneumonie,  révèle  une  ampliation  et  une  rétrocession 

en  rapport  avec  les  progrès  croissants  et  décroissants  de  la  maladie 

La  ligne  de  descente  correspondant  à  la  résolution  de  la  pneumonie,  n'est 
pas  aussi  accusée  que  dans  Thypérémie  simple  et  se  prolonge  plus  tardive- 
ment...  Cela  se  comprend  par  Texislence  de  Thépatisation.  Ces  données 
n'ont  pas  de  valeur  diagnostique ,  mais  elles  jettent  un  jour  nouveau 
sur  la  marche  et  le  traitement  de  la  pneumonie ,  en  y  montrant  la  part 
respective  de  l'inflammalion  et  de  la  congestion.  »  Wintrich  et  Ziemssen 
qui  ont,  au  lieu  de  mesurer,  comme  Woillez,  la  périphérie  générale 
du  thorax,  pratiqué  la  mensuration  comparative  de  chacune  de  ses 
moitiés,  ont  aussi  trouvé  une  augmentation  de  volume  du  côté  malade  ; 
mais  vu  les  différences  individuelles  qui  existent,  comme  on  sait,  entre 
les  deux  moitiés  du  thorax,  les  résultats  acquis  par  la  mensuration  n'ont 
de  valeur  que  si  on  peut  continuer  celle-ci  après  la  guérison  de  la 
maladie. 

6®  Percussion.  —  Elle  fournit  des  signes  d'une  toute  autre  valeur  ; 
cependant  il  ne  faut  pas  croire  qu'ils  soient  toujours  positifs.  Ainsi  on 
eût  pu  s'imaginer  a  priori  qu'il  doit  exister  toujours  de  la  matité  dès 
que  rhépatisation  a  envahi  la  surface  du  poumon  dans  une  certaine  éten- 
due. Or,  chez  les  emphysmatcux  la  matité  fait  généralement  défaut. 
Cependant,  par  une  percussion  extrêmement  Aiible,  on  peut  éviter  Ter- 
reur résultant  de  la  consonnance  des  parties  emphysémateuses;  mais  une 
percussion  légère  ne  donne  des  résultats  positifs  que  si  le  sujet  n'est  pas 
chargé  d'embonpoint. 

Laissant  de  côté  le  cas  particulier  des  sujets  emphysémateux,  voyons 
ce  que,  dans  les  conditions  ordinaires,  la  percussion  nous  révèle. 

kydans  le  premier  stade  de  la  pneumonie  y  on  a  quelquefois  l'occasion 
de  constater  du  tympanisme  au  niveau  même  des  parties  qui  seront  ulté- 
rieuremcut  atteintes  d'hépatisation.  Ce  fait  a  été  bien  établi  par 
Woillez  et  Wintrich.  Ce  dernier  assure  que  l'élévation  de  la  tonalité  n'est 
pas  modifiée,  que  la  bouche  soit  ouverte  ou  fermée. 

B,  à  la  période  d'hépatisation^  si  celle-ci  est  superficielle,  comme 
c'e^t  la  règle,  elle  est  décelée  par  une  matité  qui  varie  de  la  sub-matité 
à  la  matité  presque  absolue. 

En  même  temps,  cest  à  dire  à  la  période  dliépalisation,  on  rencon- 
tre dans  un  assez  grand  nombre  de  pneumonies,  une  exagération  de 
l'intensité  de  la  sonorité  qui  a  beaucoup  frappé  les  premiers  cliniciens 
qui  la  constatèrent,  lludson.  Graves,  Williams  etc.,  et  les  induisît  en 
erreur.  On  sait  aujoud'hui  qu'elle  ne  doit  pas  être  rapportée  à  un 
pneumothorax,  mais  à  la  congestion  pulmonaire  concomitante.  C'est 
un  symptôme  commun  qui  s'observe,  si  on  le  cherche  suffisamment, 
dans  plus  de  la  moitié  des  cas. 

Thomas  fait  d'ailleurs  remarquer  avec  justesse  qu'au  niveau  même 
de  la  matité,  le  son  est  toujours  à  un  certain  degré  tympanique,  sur- 
tout chez  l'enfant,  et  qu'il  est  modifié  par  l'ouverture  et  la  fermeture  de 


414  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  aoscultâtior. 

la  bouche  :  ce  qui  prouve  la  consonnance  de  l'air  contenu  dans  les  grosses 
bronches. 

Exceptionnellement,  la  percussion  fait  constater  un  bruit  de  pot  fêlé, 
ce  qui  n'est  d'ailleurs  pas  fort  extraordinaire,  puisqu'on  le  faroofe, 
comme  on  sait,  à  l'état  normal,  de  chaque  côté  du  sternum  chez  un  c^ 
tain  nombre  d'enfants,  surtout  du  côté  gauche.  On  peut  donc  le  consi- 
dérer dans  la  pneumonie  comme  une  exagération  du  son  trachéal  de 
Williams,  autrement  dit,  comme  une  variété  de  son  tympanique.  (Test 
aussi  l'opinion  de  Woillez  qui,  a  toujours  vu  le  bruit  de  pot  fêlé  poemno- 
nique  coïncider  avec  le  tympanisme. 

Quatre  fois  sur  six  il  s'agissait  de  pneumonies  droites;  le  bruit  de  pot 
fêlé  a  été  perçu  dans  la  région  susclaviculaire,  au  niveau  des  deusème 
et  troisième  côtes  et  des  espaces  intercostaux  voisins,  l'hépatisation  occq- 
pant  la  base  du  poumon.  Dans  ces  quatre  pneumonies  droites,  il  a  oftot 
cette  particularité  qu'il  n*a  été  constaté  qu'un  seul  jour,  du  5*  au  10*  de 
la  maladie,  au  moment  où  elle  était  dans  sa  plus  grande  acuité.  Dans  oœ 
pneumonie  gauche,  ce  symptôme  insolite  a  duré  jusqu'au  26*  jour. 

Il  importe  d'ajouter,  ce  qui  n'est  pas  indifférent  au  point  de  vue  de  la 
théorie  de  sa  production,  qu'il  est  influencé  à  un  haut  degré  par  l'ouver- 
ture ou  la  fermeture  de  la  bouche. 

C.  Si  la  résolution  de  la  pneumonie  a  lieu,  elle  se  manifeste,  d'après  le 
professeur  Thomas  par  un  caractère  un  peu  tympanique  de  la  matité; 
puis  le  lendemain  et  les  jours  suivants  la  matité  diminue  progressive- 
ment. 

Si,  au  contraire,  la  pneumonie  passe  à  Fhépatisation  gi*isc  il  n'y  a  pas 
de  signe  de  percussion  particulier. 

V  Auscultation  de  la    respiration  :  A.  Dans  le  1*'  stade.  —  On 
sait,  depuis  la  découverte  de  Laênncc,  qu'au  premier  stade,   la  pneu- 
monie se  révèle  par  des  râles  crépitants.  Au  dire  de  Stokes,  une  respi- 
ration puérile  précéderait  la  crépitation  d'une  ou  de  plusieurs  heures. 
Grisolle,  qui  n'a  ce  jamais  constaté  la  respiration  puérile  comme  signe    I 
initial  ou  précurseur  de  la  crépitation  »,  dit  que  celle-ci  peut  être  piv-    * 
cédée,  pendant  un  temps  plus  ou  moins  long,  par  un  affaiblissement  du 
bruit  respiratoire,  qui  souvent  aussi  avait  perdu  sa  pureté  et  son  moel- 
leux ;  ces  symptômes  seraient  sous  la  dépendance  de  la  fluxion  sanguine. 
Plus  récemment,  Stephenson  Smith,  chez  l'enfant  (Edinb,  med,  Joum. 
1866,  nov.)  et  Waters  de  Livcrpool  (Brilish  med.  Joum.  1876)  ont  de   | 
nouveau  insisté  sur  l'exagération  du  murmure,  comme  symptôme  initial, 
qu'ils  expliquent,  comme  Stokes,  par  une  congestion  avec  sécheresse  du 
tissu  pulmonaire.    Il  est  assez  curieux  que  les  auteurs  anglais  soient 
les  seuls  à   parler  de  ce  symptôme. 

Le  râle  crépitant  n'a  pas  d'ailleurs  la  valeur  pathognomonique  que  lui 
avait  attribuée  Laënnec  ;  malgré  cela,  c'est  un  signe  si  important  que  l'on 
peut  dire  sans  exagération  avec  Grisolle  que  «  lorsque  la  pneumonie  se 
révèle  par  quelques  signes  slhétoscopiques,  la  crépitation  en  est  le  pbéno- 

^oe  le  plus  constant.  »  (page  233.) 


■ 
■ 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUÈ.  —  aoscoltatiok.  415 

C'est  une  erreur  de  dire  que  les  râles  crépiiauts  sont  égaux  entre  eux; 
le  plus  souvent  on  perçoit  une  bouffée  de  bulles  nombreuses  et  fines, 
parmi  lesquelles  une  auscultation  attentive  permet  de  reconnaître  des 
bulles  plus  grosses.  Un  caractère  fort  important  est  qu'on  les  perçoit 
ddosivement  pendant  IHnspiration. 

Quoi  qu'en  ait  dit  Laênnec,  les  râles  crépitants  ne  sont  pas  constants 
au  début  de  la  pneumonie.  Grisolle  a  vu  quatre  pneumonies  a  dans  les- 
quelles il  est  certain  que  le  râle  crépitant  n'a  existé  à  aucune  époque  de  la 
maladie,  b  De  son  côté,  Woillez  dit  avoir  constaté  que  sur  soixante- 
Ireîie  pneumonies,  dix-huit-fois,  c'est-â-dire  dans  le  quart  des  cas,  le  râle 
crépitant  n'a  été  perçu  que  tardivement,  c'est-à-dire  un  certain  temps 
après  que  dans  d'autres  points  Vhépatisaiion  était  franchement  déclarée. 
Sur  oes  dix-huit  cas,  il  en  compte  quatre  dans  lesquels  il  n'y  a  pas  eu 
trace  de  râle  humide  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie,  et  trois  au- 
trea  dans  lesquels  le  râle  crépitant,  survenu  après  le  soufQe  et  la  bron- 
diophonie,  n'apparaissait  que  par  la  toux.  Chez  tous  les  autres,  le  râle 
crq>itant  n'est  survenu  qu'après  les  autres  signes  de  la  pneumonie,  et 
chez  quelques-uns  bien  tardivement,  puisqu'il  n*est  apparu  que  le  trei- 
lîème,  le  seizième  et  le  dix-septième  jour. 

B  Dans  le  2'  stade.  —  L'hépatisation  se  manifeste  à  l'auscultation 
par  la  respiration  ou  souffle  bronchique  et  tubaire^  qui  consiste,  comme 
on  sait,  en  ce  que  le  murmure  normal  est  remplacé  par  un  bruit  soufflant 
at  rude.  A  son  degré  le  plus  faible,  il  s'entend  seulement  à  l'expiration, 
A  à  son  degré  le  plus  accentué,  ressemble,  soit  pendant  l'inspiration, 
•oit  pendant  l'expiration,  au  bruit  que  Ton  produirait  en  soulHant  avec 
force  dans  un  tube  de  métal.  Entre  les  deux  degrés  extrêmes,  il  existe 
tous  les  intermédiaires  possibles.  Cependant  il  y  a,  et  au  point  de  vue 
acoustique  et  au  point  de  vue  spécial  qui  nous  intéresse  ici  particuliè- 
lemeoty  c'est-à-dire  au  point  de  vue  de  la  séméiotique  de  la  pneumonie, 
une  ai  grande  différence  entre  la  respiration  bronchique  faible,  unique- 
ment ou  presque  uniquement  expiratrice,  et  le  souffle  tubaire,  métallique 
à  rinapiration  et  à  l'expiration,  qu'il  est  nécessaire  de  les  distinguer  par 
un  nom  différent.  Afin  de  ne  pas  faire  de  néologisme,  j'ai  l'habitude, 
dans  mon  enseignement,  de  me  servir  seulement  des  épithètes  bron- 
chique  et  tubaire^  mais  en  prévenant  que  je  ne  les  fais  pas  synonymes  : 
j'appelle  respiration  ou  souffle  bronchique  la  respiration  peu  modifiée 
on  à  peine  modifiée  à  l'inspiration,  rude  à  l'expiration,  et  dont  le  type 
est  le  souffle  pleurétique  quand  il  n'est  pas  aigre;  je  réserve  le  nom  de 
tnbaire  à  la  respiration  qui  est  métallique  même  à  l'inspiration. 

La  respiration  bronchique  et  la  respiration  tubaire,  définies  comme 
je  viens  de  le  faire,  peuvent  toutes  deux  s'entendre  dans  la  pneumonie  à 
la  période  de  l'hépatisation.  S'il  existe,  je  suppose,  une  hépatisation 
limitée  au  lobe  inférieur  du  poumon  droit,  on  pourra  entendre  de  la  respi- 
ration tubaire  à  la  base  de  ce  poumon  dans  une  étendue  variable,  puis 
plus  haut,  dans  une  étendue  également  variable,  la  respiration  aura  sim- 
plement le  timbre  bronchique.  Quelquefois  c'est  cette  dernière  qu'on 


M6  PiNEUMOMK  LOBAIRE  AIGUK.  —  vibbatios». 

entend  seule  au  niveau  de  la  porlion  hépatisée,  à  l'exclusion  de  la  respi- 
ration tubaire. 

Souvent,  je  suppose  toujours  qu'il  existe  une  pneumonie  limitée  ik 
base  droite,  outre  le  souffle  bronchique  qui  y  est  perçu,  on  entend,  ■ 
niveau  de  la  racine  de  la  bronche  droite,  un  souffle  bronchique;  cenfli 
pas  qu'il  existe  à  ce  niveau  un  autre  point  d'hépatisation  ;  ce  signe  ot 
symploniatique  d'une  congestion  pulmonaire  concomitante. 

Ainsi  la  respiration  bronchique,  même  dans  le  ca»  où  existe  m 
pneumonie,  n'est  pas  nécessairement  produite  par  l'hépaiisation.  J'ajeii 
qu'une  hépatisation,  même  étendue,  n'est  pas  nécessairement  actomp 
gnée  de  souffle.  Je  reviendrai  plus  loin  sur  ce  fait  si  important  poirii 
diagnostic. 

A  la  période  de  résolution  de  la  pneumonie,  le  souffle  diminue  f»., 
gressivement.  On  entend  beaucoup  de  raies  humides  fins  et  gros, 
premiers,  on  a  donné  le  nom  de  râles  crépitants  de  retour,  dénomiiuÉiJ 
impropre,  car  ces  râles  n'ont  de  commun  avec  le  vrai  râle  crépitant  fs| 
le  nom.  Outre  les  râles  bullaires,  il  existe  en  quantité  variable  des 
vibrants. 

Si  la  pneumonie  passe  a  Thépatisation  grise,  le  souffle  persiste, 
il  est  quelquefois  passagèrement  masqué  par  de  gros  râles  vibrants. k 
plus  on  entend  beaucoup  de  râles  bullaires  assez  semblables  à  ceux  lij 
la  résolution. 

8"  Auscultation  de  la  voix.  —  En  général,  la  bronchophonie  cfltj 
à-dire  la  résonnance  exagérée  diffuse  et  soufflante  de  la  voix  est  ennf 
port  avec  Tintensilé  de  la  respiration  bronchique  et  tubaire.  On  compRi^^ 
cependant  qu'il  n'en  soit  pas  toujours  ainsi,  j'aurai  occasion  de  rcietf 
sur  ce  point.  (Voy,  le  chapitre  formes  de  «a  pneumonie). 

9**  Vibrations  thoraciques.  — D'après  Monneret  qui  a  attaché  le  pli 
d'importance  à  ce  symptôme  comme  signe  de  solidification  du  tissu  pil-l 
monaire,  elles  sont  toujours  augmentées  ;  mais  cette  opinion,  forteidt' 
sive,  a  été  avec  raison  contredite  par  les  meilleurs  observateurs.  GnsoUi 
dit  n'avoir  remarqué  une  augmentation  des  vibrations  au  niveaadfl^ 
partie  hépatisée  que  dans  sept  cas  sur  seize  ;  chez  cinq  malades  il  Wi 
dit-il,  incontestable  que  les  vibrations  étaient  diminuées;  dans  les  iflti^ 
autre  cas,  il  n'existait  entre  les  <leux  côtés  aucune  différence  sedU^ 
Woillez  arrive  presque  à  la  même  conclusion.  Les  résultats  di 
observation  personnelle  s'écartent  un  peu  moins  de  ceux  de  HooiMfftl 
Néanmoins  on  comprend  que  l'augmentation  des  vibrations  thoraciqiK»ii| 
puisse  avoir  dans  la  séméiologie  de  la  pneumonie  l'importance  da  soak 
tubaire    ou   de   la  bronchophonie ,    puisqu'elle  manque   fort  sointAj 
alors  même  que  ces  deux  symptômes  existent.  La  plupart  des  clinid0 
sont,  en  pareil  cas,  dis|)Osés  à  admettre  la  coexistence  d'une  cerf*" 
quantité  de  liquide  dans  la  plèvre.  Mais  cette  conclusion  n^est  pas 
jours  exacte,  car  une  mince  couche  de  liquide  n'arrête  pas  les  vibratî 
thoraciques.  Le  plus  ou  moins  de  perméabilité  des  grosses  brooclivl 
beaucoup  plus  d'importance  à  cet  égard  (Voy.  le  chapitre  Forinea). 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  vexMilation  pulmonaire.         447 

""  Ventilation  pulmonaire  ;  température  de  Vair  expiré. — C'est  un 
à  peine  ébauché,  bien  qu'on  ait  depuis  longtemps  songé  à  l'explorer. 
.  Nysten  et  Hervier  Saint-Léger  ont  trouvé  la  proportion  d*aeide  car- 
]ue  diminuée  dans  Tair  expiré;  mais  comme  ils  n'ont  pas  tenu 
iCe  de  la  quantité  d'air  qui  a  passé  par  les  voies  aériennes  pendant  un 
s  donné,  ce  résultat  n*a  qu'une  valeur  médiocre.  Tout  récemment, 
Regnard  a,  sur  trois  pneumoniques,  mesuré  la  quantité  absolue 
'gène  absorbé  et  diacide  carbonique  exhalé  en  .une  heure  ;  il  a 
ré  d'une  manière  générale  une  grande  augmentation  de  la  quantité 
rgène  absorbé  et  une  faible  augmentation  de  la  quantité  d'acide 
mique  exhalé,  par  rapport  à  Tétat  physiologique  ;  d'où  il  âuit  que 
ces  malades,  il  y  a  une  quantité  d'oxygène  beaucoup  plus  grande 
i'état  normal,  servant  à  faire  autre  chose  que  de  l'acide  carbonique, 
l'homme  sain,  on  retrouve  dans  l'acide  carbonique  expiré  les  9/10 
oxygène  absorbé  ;  c'est  ce  qu'on  exprime  en  physiologie  en  disant  que 

ipport  -^=z=0,9.  Or,  dans  beaucoup  d'états  pathologiques,  et  c'est 

s  pour  la  pneumonie,  ce  rapport  est  plus  ou  moins  diminué. 
)ici  les  résultats  de  Regnard  : 
Homme  de  25  ans  pesant  62  kilogrammes,  double  pneumonie. 
59%8. 

Oxygène  absorlié  |>ar  heure 50"**,4 

Âciile  carbonique  exlialé 18 

Uapp'jrl—  =  0,59, 

Chez  ce  malade,  l'nir  expiré  renfcnniil  une  forte  proportion  d'oxygène  (18,4}. 

'Homme  de  35  ans,  pneumonie  gauche  aiguë.  T=39<',8. 

Oxygène  absorbé  par  heure 29-'", 87 

Acide  carbonique  exhalé  par  iicure 21     ,56 

CO-  • 

Rapport  --  ■=  0,72.  (Uognard  écrit  0,73  par  erreur.) 

Teneur  en  oxy<;ènc  de  l'air  cxpirj , 17     ,7 

*  Homme  de  40  ans,  40  kilogrammes,  pneumonie  gauche  au  troisième 

.  T=40\ 

Oxygène  absorbé  par  lieurc  .*.*«•- 29'*** 

Acide  cari)onique  exhalé  par  heure    •.••.••.•..•••     18    ,24 

Rapport  -jr  =  0,63. 

Teneur  en  oxygène  de  Tair  expiré 17    ,2 

y  aurait  lieu  de  poursuivre  ces  recherches  qui  sont  tout  à  fait  au 
lit.  Il  serait  fort  important  d'y  joindre  l'élude  de  la  température  de 

•  expiré,  que  l'on  dit  avoir  trouvé  abaissée.  Connaissant  la  quantité 
r  expiré,  on  en  déduirait  la  proportion  de  chaleur  dégagée  par  les 
mens. 

Hotov.  bicT.  Béb.  ET  cHiH.  XXYIII  —  27 


Ai»  PNKIIMONIK  LOBAIUE  AIGUË.  —  pièvhe. 

FiÈvBE.  —  La  lièvre  de  la  pneumonie  fibrineuse  est  continue.  Ce 
caractère  thermique  distingue  nettement  celle-ci  de  la  broncbo-poeu- 
monic  où  la  fièvre  a  un  type  rémittent  ti*ès-marqué.  Ce  n'est  pu  k  dire 
cependant  que  dans  la  pneumonie  fibrineuse  il  n'y  ail  nulle  rémution  le 
matin  ;  ce  serait  une  eireur,  mais  la  rémission  matutinale  n'est  pas,  en 
général,  considérable;  elle  ne  dépasse  guère  chez  Tadulte  quatre  doiëmes 
de  degré,  et  elle  n'est  pas  régulière. 

C'est  chez  Tenfant  surtout  qu'on  a  signalé  la  possibilité  de  nteiiwins 
survcpant  surtout  le  matin,  irrégulièrement  d'ailleurs,  et  lellaiieat 
prononcées  que  lorsqu'une  d'elles  survient  le  matin  du  quatrième  oo  du 
cinquième  jour,  par  exemple,  on  peut  croire  à  une  défervesceaoe  précoce. 
On  leur  a  donné  le  nom  de  rémissions  pseudo-critiques. 

Habituellement  la  température  (dans  le  rectum)  est  comprise  entre 
39**,8  et  40"4  centigrades.  Une  température  constamment  au-desaos  de 
40*^,5  est  rare  et  ne  s'observe  que  dans  les  cas  très-graves. 

Je  viens  de  parler  de  rémissions,  mais  il  y  a  aussi  des  exaoeriiAtîoi» 
qui  reconnaissent  souvent  pour  cause  une  extension  de  la  lésion  pulmo- 
naire. Cela  est  surtout  manifeste  quand  la  pneumonie  envahit  Fautre 
poumon;  il  y  a  aussi  des  exacerbations  dont  la  cause  échappe;  ou  en  a 
signalé  une  de  ce  genre  le  jour  qui  précède  la  crise  (perturbatio  prwcn- 
tien)  (Wunderlich). 

Chez  le  vieillard  on  pourrait,  si  l'on  n'y  prenait  garde,  mccoDiiaitre  J 
l'existence  d'une  fièvre  même  intense,  tant  ses  caractères  extérieon  soni  \ 
parfois  peu  marqués.  Charcot  a   insisté  sur  les  faits  de    ce  genre  d 
mc^ntré  qu'il  ne  sufiit  pas  de  compter  le  pouls  et  d'explorer  la  tempéra- 
ture de  l;i  peau  ;  il  faut  avoir  recours  à  la  thermométrie  et  à  la  thômi»- 
niétrie  dans  une  cavité  naturelle,  telle  que  le  rectum,  plutôt  qœ  dans 
Taisselle  :  souvent  alors  on  est  étonné  de  lire  une  température  de  40^oeih 
tigrades,  alors  que  la  peau  ne  parait  pas  chaude  et  que  les  extrémitèi 
sont  froides.  Ce  phénomène,  si  bizarre  en  apparence,  est,  en  réalité,  bien 
simple  à  expliquer.  En  général,  les  vieillards  ne  peuvent  produire  que 
très-peu  de  chaleur.  Ils  ne  sont  donc  en  état  d'élever  leur  tempénturo 
centrale  au  degré  fébrile  qu'en  limitant  au  minimum  leur  dépense  vu 
calorique,  tandis  (|ue  l'enfant  et  l'adulte,  qui  sont  capables  de  produire 
surabondanmiont  de  la  chaleur,  en  perdent,  sauf  à  certains  momeials  (par 
exemple  pondant  le  frisson),  beaucoup  par  la  peau,  ainsi  que  k  prouve 
la  chaleur  périphéri(|ue  exagérée  qu'ils  présentent.  On  voit  par  U  Tin-    / 
térét  de  l'étude  exacte  do  la  température  des  parties  périphériques;  ellf    ï 
nous  permet  d'ap[)récier  /M.sY/*/'à  un  certain  point  l'énergie  delipni- 
duclion  de  chaleur.  Le  traité  de  diagnostic  de  Piorry   (t.  111)  renfennc 
quelques  mensurations  de  température  périphérique  diins  la  pneuraonif. 
Un  a  ensuite  compléteiïient  abandonné  ces  recherches  dont  on  a  niécooiiu 
la  portée;  elles  n'ont  été  reprises  que  tout  récemment  (Lorain, Coutj, 
Torio,  Schûlein). 

Le  fait  qui  s'en  dégage,  c'est  la  haute  température  de  la  périphériti, 
dans  la  pneumonie:  d'après  Schûlein  (Virch.  Arch.  IH.  LXVl,  p.  liW,    ,_. 


PNEUMONIE  LOBAIRË  AIGUË.  —  ptivu.  419 

1876),  la  pneumonie,  ainsi  que  ta  scirlatlne  et  peut-être  la  rougeole  se 


(ligne  mOTenm),  » 


-  CouHwj  Je  la  teupjnlura  du  rfcdin  (ligne  silpjnpurc),  de  I 
«  d*  I*  tréqueoce  du  ponli  (IlEne  inférieure),  cbet  un  hammo  de  M  ini  oiieini  na  pneumonie 
Main  droite,  *nlri  1  l'UpiUl  le  Iroitièmo  jour  de  m  milidie  {6  jaillel)-  Le  1  et  lurlout  le  S, 
rtaiiiiod  nututinile  pnrlanl  lur  lei  3  «onrbai  ;  déleneMCiKe  lo  lî.  (Lokiji.  De  la  (emp^rilnre  du 
mq»  bomiiD.  L,  II,  Bg.  M.) 

listingueraît  de  la  dolhienentérte,  du  rbumatiame  articulaire,  de  l'éry" 


420  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  fièvre. 

sipèle,  etc.,  en  ce  que  la  courbe  de  la  température  des  extrémités  (me- 
surce  tous  les  quarts  d'heure)  est  parallèle  à  la  courbe  de  Taisselle.  Ainsi 
nou-seulement  le  pneumonique  perd  relativement  beaucoup  de  chaleur 
par  la  peau,  mais  il  la  perd  d*une  manière  égale  et  uniforme,  ce  qui  ifa 
pas  lieu  avec  autant  de  régularité  dans  d'autres  maladies  fébriles.  Cette  as- 
sertion fort  intéressante  demanderait  à  être  vériGée,  car  les  recherches 
de  Schûlein  ont  été  fort  peu  multipliées.  Elle  n*est,  en  tous  cas,  pa« 
d'accord  avec  les  résultats  antérieurs  de  Jacobson  ;  mais  ce  dernier 
(Virch.  Arch.  LXV,  520),  n'a  examiné  qu'un  seul  cas  de  pneumonie  et 
(p.  524)  2  jours  seulement  avant  la  crise;  encore  le  premier  de  ces 
deux  jours  plusieurs  des  résultais  sont  douteux  d'après  lui-même  :  (ce 
jour  il  aurait  trouvé  une  différence  de  8  degrés  entre  Faisselle  et  la  pauuie 
de  la  main  ;  plus  tard,  après  la  crise,  il  n'y  avait  plus  qu'une  différence 
de  1  degré  à  2,  9  entre  l'aisselle  et  les  divers  points  de  la  peau.  Ce 
sont  donc  des  recherches  à  poursuivre,  et  encore,  pour  quelles  aient  une 
portée  incontestable,  il  faudra  y  joindre  la  mesure  de  la  chaleur  dégagée 
par  l'air  expiré,  étude  pleine  de  difiiculté,  attendu  qu'elle  réclame  qu'on 
mesure  le  volume  de  Tair  expiré  en  24  heures.  Ce  n'est  donc  pas  de 
sitôt  que  seront  recueillies  et  coordonnées  toutes  ces  données  indispen- 
sables pour  établir  le  bilan  de  la  chaleur  produite  dans  la  pneumonie. 

En  attendant  nous  savons  déjà  que  la  pneumonie  est,  en  général  plus. 
pyrétique  que  d'autres  maladies,  par  exemple  que  la  pleurésie  ;  qu'elle 
Test  moins  que  la  fièvre  typhoïde,  non  que  la  moyenne  des  chiffres  de 
température  relevés  chez  un  pneumonique  n'égale  ou  ne  puisse  même 
dépasser  celle  que  Ton  obtiendrait  chez  un  typhique  à  la  deuxième  se- 
maine, mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  chez  ce  dernier  la  période  fébrile 
est  beaucoup  plus  longue  ;  de  plus  il  est  un  autre  élément  de  comp;)- 
raison  fort  important  que  signale  Jurgenseii,  c'est  que  Ton  pourrait  beau- 
coup plus  facilement  abaisser  la  température  d'un  pneumonique  que  celle 
d'un  typhique  fioii  au  moyen  de  la  quinine,  soit  par  les  bains  froids,  la 
température  des  deux  malades  étant  supposée  la  même. 

Nous  avons  vu  plus  haut  que  dans  presque  tous  les  cas  qui  se  termi- 
nent d'une  manière  favorable,  il  se  fait  au  bout  de  quelques  jours  une  dé- 
fervescence  plus  ou  moins  critique.  Les  chiffres  suivants  nous  renseignent 
exactement  sur  la  date  précise  de  cette  défervescence  : 

D'après  la  statistique  de  Jurgonsen  comprenant  721  observations  ther- 
mométriques empruntées  à  Griesinger,  Lebert,  Naunyn.  Thomas,  Wun- 
dcrlich  et  Zicmssen,  ce  serait  : 


Au  bout  do  2  jours  4  fois. 

—  o  —  oi  — 
_  \  _  oO  — 

—  5  —  VIO  — 

—  0  —  87  — 

—  7  —  165  — 

—  8  —  ÎM  — 

—  9  —  VI 


Au  bout  (le  10  jours  tK)  fois. 

_  Il  ^  55  — 

_  12  --  10  - 

_  15  —  10  — 

—  14  -  4  - 

__  15  _  r>  — 

—  u\  —  r>  — 


—  I 


La  défervescence  commence  d'habitude  dans  la  nuit,  au  moment  de 


PNEUMONIE  LOBAIHE  AIGUË.  *-  podu.  m 

la  rémissioD  matuUnale,  très- rarement  au  milieu  du  jour.  En  quelques 
heures,  la  température  tombe  à  la  normale  ou  au-dessous.  D'après  U  sta* 
tîsque  de  Lebert  ce  résultat  a  été  obtenu  : 

En  iSheurst      45  foli.  1  En  4S  h«urei      li  toi*. 

—  84—  Î5—  —  00—  3    — 

_  M-         40—1  -  7Η  i    — 

En  résumé,  on  peut  dire  que,  dans  les  deux  tiers  des  cas,  la  ûene  tombe 
entre  le  cinquième  et  le  sixèmejour,  et  que  sept  Fois,  sur  buit,  elle 
a  lieu  par  crise  et  non  par  Ijsis. 

Les  joms  qui  suÏTent  la  défer- 
Tescence,  on  peut  observer  de  pe- 
tites élévations  de  température  sur- 
«oant  sous  des  influences  variées. 
Je  faDuve  dans  le  Médical  Times 
and  Gazette  (12  mars  1877,)  un 
cas  on  à  la  suite  d'une  pneumonie 
du  sommet  il  y  eut  pendant  plu- 
ùeurs  jours  une  élévation  de  tem- 
,    pérature,  et  il  est  dit  que  selon 
;    Binger,  dans  le  service  duquel  se 
^    trouvait  le  malade,  à  Vniversity 
CoUege,  cette  âèvre  devait  recon- 
nitre  pour  cause  une  résorption 
des  produits   inflammatoires .  J'i- 
gnore si  Ringer  accepta  la  respon- 
nbilité  de  cette  assertion,   qui  ne    | 
paraît  guère  fondée  vu  l'extrême  ) 
nreté  de  cette  Hèvre  à  laquelle  je 
^     BB  vois  point  d'analogue,  si    ce 
;      n'est   la   fièvre    post-tjphoïde   sur 
liqnelle  a  beaucoup  insisté  le  pro- 
^     Teneur  Bernheim    [Clinique   mé- 
:_     iiealet  p.   319  et  suivantes). 
■         Dans  le  cas  de  terminaison  i'atale,  on  peut  (mais  pas  d'une  manière 
Béeessaire)  observer  l'une  des  deux  alternatives  :  ou  bien  la  température 
l'élève  au-dessus  de  40*  a,  et  dans  le  stade  prasagonal,  au-dessus  de 
41*,5  (Wunderlicli  a  observé  45°  C),  ou  bien  la  mort  arrive  dans  le  col- 
bpsus,  la  température  tombant  à  un  degré  sub-fébrile.  Ce  dernier  cas 
s'observe,  de  préférence,  chez  les  vieillards,  les  sujets  alTaiblis  et  présen- 
tant des  lésions  cardiaques;  mais  il  ne  faut  pas  oublier  que  la  termi- 
naison par  le  coUapsus  est  de  beaucoup  plus  rare. 

Je  dois  me  borner  ici  aux  faits  précédents,  mais  on  trouvera  aux 
chapitres  diagnostic  et  pronostic  quelques  autres  indications  sur  la 
température  fébrile  dans  la  pneumonie. 

Pouls.  —  Il  doit  être  examiné  :  1°  quant  à  sa  Iréquence  ;  2°  quant  à  sa 
Corme. 


10.  i9. 

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;.  II.  a; 

.  ira). 

432  PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  pouls. 

1**  Dans  les  maladies  aiguës,  la  fréquence  du  pouls  peut  être  étudiée 
absolument,  et  dans  ses  rapports  avec  le  degré  de  température  et  la  fré- 
quence de  la  respiration.  La  fréquence  absolue  du  pouls  augmente  beau- 
coup dans  la  pneumonie.  Sur  108  pneumnniques  ayant  guéri.  Grisolle  a 
trouvé  que,  chez  près  des  trois  quarts,  le  pouls  avait  dépassé  100  ;  chez 
plus  de  la  moitié,  il  a  varié  de  lOOà  IIG;  il  ne  s'est  élevé  au  delà  de  116 
que  chez  moins  du  cinquième.  Dans  une  autre  série  de  pneumoniques  dont 
la  maladie  a  eu  une  issue  funeste,  le  pouls  a  présenté  en  moyenne  10  pul- 
sations de  plus.  11  est  donc  vrai  de  dire  que  la  fréquence  du  ponls  est, 
d*une  manière  générale,  en  rapport  avec  la  gravité  de  la  maladie. 

Les  séries  précédentes  ne  comprennent  que  des  adultes  —  et  aussi*  sans 
doute,  quelques  sujets  un  peu  avancés  en  âge.  Chez  Tenfiint»  les  diiffres 
moyens  sont  tout  difi'érents  :  de  1  à  2  ans,  on  constate  souvent  170  ft  100, 
quelquefois  200,  presque  jamais  moins  de  160  pulsations.  Ce  n'est  que 
dans  la  deuxième  enfance  que  l'on  en  compte  que  120  à  140. 

Il  existe,  comme  on  sait,  une  certaine  relation  entre  le  pouls  et  la  tem- 
pérature dans  toutes  les  maladies  aiguës  consistant  d*abord  dans  le  fait 
bien  connu  que  les  courbes  de  la  température  et  de  la  Iréquence  du 
pouls  chez  le  même  sujet  sont  sensiblement  parallèles  ;  mais  il  y  a  en- 
core entre  elles  un  autre  rapport,  moins  étroit  à  la  vérité  mais  plus 
remarquable  et  en  vertu  duquel  à  une  température  de  40*  G.,  par  exem- 
ple, correspondra  chez  deux  pneumoniques,  du  même  ftge,  à  peu  près  le 
même  chiflre  de  pulsations.  Or  ce  chiffre  est  toujours  p/iia  devé  que  si 
les  sujets  ayant  40**  étaient  atteints  de  fièvre  typhoïde. 

Quant  au  rapport  de  la  fréquence  du  pouls  gi  de  la  respiration,  j*en 
ai  traité  au  paragraphe  dyspnée. 

2°  Passons  à  l'examen  des  principales  qualités  du  pouls;  (a)  la  forme; 
(b)  Tamplitude  ;  (c)  la  force. 

a)  Règle  générale  :  dans  la  pneumonie,  comme  dans  toute  affection  fé- 
brile, le  pouls  est  plus  ou  moins  dicrote  ;  ainsi  que  l'a  bien  dit  Woliï. 
c'est  principalement  la  température  qui  influe  sur  l'intensité  du  dicrotisme; 
mais  elle  n'est  pas  le  facteur  exclusif,  car  mes  observations  per^^on- 
nelles  me  permettent  d'afhrmer  (]u'à  température  égale,  le  puuls  est 
moins  dicrote  dans  la  pneumonie  franche  que  dans  la  iièvre  typhoïde. 
J'ai  été  heureux  de  trouver  la  même  opinion  exprimée  par  Galabin  qui 
ajoute,  relativement  au  pouls  de  la  pneumonie  franche  comparé  à  celui 
de  la  dothiéiientérie  les  deux  caractères  suivants  :  1*"  «  Il  supporU*  sans 
être  déformé  une  plus  forte  pression  au  moins  dans  les  premiers  jours  de 
la  maladie;  2<>  les  angles  sont  plus  aigus  et  le  sommet  plus  vertical.  »  Je 
puis  aussi  confirmer  Texactitude  de  cette  dernière  remarque.  EnfiD 
Galabin  pense  que  des  deux  causes  de  dicrotisme,  la  faible  tension  et  la 
brusquerie  de  Fondée  lancée  par  le  cœur,  la  dernière  joue  dans  la  pneu- 
monie un  plus  ^rand  rôle  que  dans  la  (icvrc  typhoïde,  de  sorte  que  le 
pouls  a  plutôt  le  type  dicrote  sthénique. 

Fendant  le  cours  de  la  maladie,  la  forme  du  pouls  subit  do  profondes 
modiiications.  Les  tracés  suivants  que  j'emprunte  à  Lorain,   le  montrent 


PSEUMONIE  LOBAIRR  AIGUË.  —  pools.  823 

d'unfl  manière  saissiesante  fig.  30.  Dans  un  cas  d'efferyescence  il  a  eu  lieu 
enlre  lo  4*  et  le  5'  tracé. 

b)  Quant  à  l'amplitude,  on  ea  juge,  soit  par  la  palpalion,  soit  mieux 
encore  par  le  tracé  sphygmographique.  On  sait  qu'elle  n'est  pas  en  relaiion 
avec  la  force,  et  qu'un  pouls  ample  peut  être  en  même  temps  très  mou 


*». 


u  doule  i»  U  fïlbluu  pUiignnde 


I.  T.  R.  Î9».T,  pmili  fiibl». 

l-net,  3  lorll.  T.  n.  39*^,  1<  pi)uL< priiinla  Is)  mAiiKi  < 

»  lf*e<  (I*  landenuin  d«  l>  déferioKcnw).  T.  » .  37°.i,  U  do 

~feeiu  joun  aprèi  11  coniilncence  tuai  iUblir,  plilei 

fintute  du  corpi  humiiii,  l.ll,  (ig.  137). 


an  doigt,  c'est-à-dire  présenter  peu  de  tension.  Ce  n'est  pas  rare  dans  la 
poeumonie. 

c)  La  force  ou  la  dureté  du  pouls  indique  l'état  de  la  tension  artérielle. 
La  sphjgmographie  ne  permet  pas  de  l'apprécier.  Avec  de  l'habitude,  le 
duigt  donne  des  indications  assez  sûres.  Mieus  vaudrait  sans  doute  un  ins- 
trumenl  récemmenl  invenlé  par  le  proresseur  Marey  (Comptes  rendus 
1878,  2'  semestre)  mais  qui  n'a  point  encore,  à  ma  connaissance,  été 
utilisé  dans  la  clinique  des  maladies  fébriles. 


42i  PNEUMONIE  LOBAIRE  AlGlJft.  •  sasg. 

D'après  le  professeur  Jaccoud,  le  pbcnomènc  de  la  récurrence  palmaire 
peut  fournir  d^utiles  indications  sur  l'état  de  la  tension  aitéricUe. 
«  A  Tétat  de  santé,  dit- il,  lorsqu'aprcs  nvoir  comprimé  Tarière  radiale, 
l'on  appuie  dessus  avec  un  doigt  de  l'autre  main,  on  constate  que  U 
pulsation  rétrograde  apparaît^  pour  ainsi  dire,  instantanément,  et 
qu'elle  a  les  mêmes  qualités  de  force  et  d'amplitude  que  le  battement 
normal.  11  n'en  est  plus  ainsi  dans  la  maladie.  Dès  que  la  puissance 
contractile  du  cœur  faiblit,  la  pulsation  récurrente  palmaire  retarde  dans» 
son  apparition,  et  elle  est  notablement  moins  forte  que  la  pulsation  nor- 
male directe  ;  à  mesure  que  l'impulsion  cardiaque  diminue,  le  battement 
se  ralentit  notablement,  jusqu'à  ce  qu*il  ne  soit  plus  perceptible  qu*à 
de  rares  intervalles,  ce  qui  est  de  fâcheux  augure.  )» 

Pouls  paradoxal.  —  On  sait  qu'à  l'état  physiologique  pendant  une 
inspiration  modérée,  la  tension  artérielle  augmente,  ainsi  qu'on  en  peut 
facilement  juger  par  une  légère  ascension  d^s  maxima  des  pulsations,  sur 
un  tracé  sphygmographique.  Au  contraire,  quand  un  sujet  vigoureux,  ayant 
des  muscles  inspirateurs  puissants,  fait  une  inspiration  énergique  en  fer- 
mant la  bouche  et  en  pinçant  le  nez,  la  tension  artérielle  baisse,  à  cau^f 
de  la  tension  négative  qui  se  produit  dans  le  thorax.  C*est  ce  qu'on  appelle 
le  pouls  paradoxal.  On  l'observe  parfois  dans  la  pneumonie,  alors  que 
le  malade,  loin  de  mettre  obstacle  à  Tentrée  de  Tair  de  la  poitrine, 
dilate  ses  narines  à  chaque  ciTort  inspiratoire.  Cela  tient- il  à  ce  que  le 
poumon,  solidifié  dans  une  grande  étendue,  n*augmcnte  pas  assez  de 
volume  au  moment  de  Tinspiration  pour  combler  le  vide  produit  par  la 
dilatation  du  thorax?  Est-il  un  signe  d'affaiblissement  du  cœur?  Je  ne 
puis  faire  autre  chose  que  signaler  ces  interprétations. 

Irrégularités  du  pouls.  —  On  a  parfois  Toccasioii  de  constater 
des  irrégularités  du  pouls  dans  la  pneumonie.  Tantôt  ce  symptôme  se 
présente  chex  un  malade  âgé,  athéromateux,  ou  chez  un  sujet  dont  les 
battements  cardiaques  sont  sourds  et  précipités;  il  s'agit  alors  évidem- 
ment d'un  trouble  grave  de  Tinnervation  cardiaque;  tantôt  le  malade 
ne  présente  jusque-là  rien  d'anormal  du  côté  du  cœur;  l'état  général  est 
bon  et  la  pneumonie  est  arrivée  au  sixième  ou  septième  jour.  Dans  ce 
cas,  l'irrégularité  du  cœur,  si  elle  survient,  ce  qui  est  d'ailleurs  peu 
eouunun  (Nothnagel),  a  une  toute  autre  signification  :  c*cst  un  signe  de 
crise  prochaine,  par  conséquent  de  terminaison  favorable  (Grisolle,  Jur- 
gcnsen). 

Sang.  —  C'est  au  moyen  de  saignées,  de  ventouses  ou  de  piqûres  au 
doigt  qu'on  peut  l'étudier.  Mais  ce  sont  seulement  les  saignées  copieuses 
qui  en  fournissent  une  (|uanlité  sufiisante  pour  l'analyse  chimique.  C'est 
ainsi  qu'Andral  et  Gavariet  ont  pu  établir  quelques  laits  importants. 
Malheureusement,  il  n'existe  pas  de  méthode  pour  apprécier  la  modili- 
cation  cipitale  qu'éprouve  le  sang:  la  diminution  de  sa  niasse. 

Globules  rouges.  —  Nous  avons  cependant  un  moyen  de  la  démon- 
trer, sinon  d'apprécier  à  combien  elle  s'élève  :  en  effet,  la  matière  colo- 
rante de  l'urine  éliminée  dans  les  vingt-quatre  heures  est,  dit-on,  en  quan- 


PNEUMOiNIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  sang.  i25 

tité  quadruple  de  ce  qu'elle  est  à  Tétat  normal.  Or,  la  proportion  des  glo- 
bales rouges  diminue,  mais  pas  de  moitié,  ainsi  que  le  montre  la  mé- 
thode de  la  numération,  et  les  analyses  d'Andral  et  Gavarret.  D'après  ces 
auteurs  le  poids  des  globules  secs  s'abaisse  dans  l'espace  de  trois  à  cinq 
jours  jours  de  moins  d'un  quart  ;  encore  faut-il  remarquer  que  les  sujets 
d*Andral  et  Gavarret  avaient  subi  l'influence  de  deux  ou  trois  saignées 
qui  avaient  dû  contribuer  à  Thypoglobulie.  Nous  sommes,  par  consé- 
quent, en  droit  de  conclure  que  la  proportion  des  globules  rouges  ne  di- 
minue pas  de  la  moitié.  Si  cependant  la  matière  colorante  de  l'urine  est 
en  quantité  quadruple  ou  même  seulement  double,  n'est-ce  pas  un  motif 
pour  admettre  une  diminution  de  la  masse  totale? 

Je  ne  donne  d'ailleurs  cette  preuve  que  pour  ce  qu'elle  vaut,  et  ne  me 
bis  pas  d'illusion  sur  sa  rigueur.  Heureusement,  il  y  a  d'autres  preuves 
également  indirectes,  par  exemple  la  diminution  de  la  tension  arté- 
rielle, etc.,  qui  plaident  dans  le  même  sens. 

Au  moment  de  la  crise  il  peut  se  produire,  si  les  sueurs  sont  très  abon- 
dantes, une  concentration  passagère  du  sang  bientôt  suivie  d'un  état  in- 
verse, si  le  malade  boit  beaucoup. 

D'après  une  analyse  faite  par  P.  Regnard,  le  pouvoir  qu'a  le  sang 
d'absorber  de  l'oxygène  ne  serait  pas  diminué  dans  la  pneumonie.  Malheu- 
reusement P.  Regnard  n'a  fait  qu'une  seule  fois  cette  recherche  : 

<  Dn  homme  de  quarante-cinq  ans,  très-fort,  est  pris  de  pneumonie 

sur  presque  tout  le  poumon  gauche.   Il  meurt  avec  une  température 

éleTéc  de  41°,  4,  le  quatrième  jour,  sans  autre  complication.   La  capa- 

^  cité  respective  du  sang  recueilli  après  la  mort  est  de  27  p.  100;  c'est, 

dit  Regnard,  le  chiffre  normal.  » 

Si  cet  intéressant  résultat  était  confirmé,  il  serait  une  nouvelle  preuve 

i  l'appui  de  ce  que  je  disais  tout  à  l'heure,  à  savoir  que  l'hémoglobine 

t'est  certainement  pas  (dans  une  quantité  donnée  de  sang)  diminuée  de 

noilié.Donc  la  pneumonie — et  cela  est  d'accord  avec  l'observation  clinique 

iounialière  —  n'est  pas  une  maladie  qui  détermine  l'hypoglobulie  autant 

911e  le  rhumatisme  articulaire  aigu.  Cette  conclusion  est  d'autant  plus 

lemarquable  que,  dans  la  pneumonie,  il  y  a  un  exsudât  considérable  de 

AOO  grammes.  (Voy.  plus  haut). 

Globules  blancs.  —  La  numération  des  globules  blancs,  parallèlement 
à  celle  des  globules  rouges,  est  une  recherche  qui  me  parait  avoir 
l^aucoup  d'utilité  dans  certain  cas.  J'y  reviendrai  plus  loin.  (Voy.  ter- 
minaisons et  diagnostic). 

Fibrine.  —  On  doit  sur  ce  sujet  de  précieux  documents  à  Andral 
'M  Gavarret  :  «  Sur  quatre-vingt-quatre  saignées  pratiquées  dans  le  cours 
^  pneumonies  non  caractérisées,  il  y  en  eut  sept  seulement  011  le  chiffre 
de  la  fibrine  oscilla  entre  4  et  5  (c'est-à-dire  fut  peu  augmenté)  ;  dans  les 
*oixante-dix  autres,  il  dépassa  ce  dernier  chiffre,  se  maintenant  onze 
ft>îs  entre  5  et  6  ;  dix-neuf  fois  entre  6  et  7,  quinze  fois  entre  7  et  8;  dix- 
•ept  fois  entre  8  et  9,  neuf  Ibis  entre  9  et  10  ou  dépassant  même  un  peu 
dernier  chiffre.  »  D'où  il  suit  que,  d'après  ces  auteurs,  l'augmentation 


426  PNEUMONrE  LOBAIRE  AIGUË.  —  urine. 

de  la  fibrine  est  un  fait  constant  et  que  la  pneumonie  est  une  des  phleg- 
masies  où  ce  caractère  est  le  plus  accusé. 

Je  n'insisterais  pas  sur  ^importance  de  ces  résultats,  si,  yu  leur 
date  déjà  éloignée  de  nous,  ils  n'étaient  un  peu  trop  oubliés  aujourdlioi 
par  les  auteurs  qui  veulent  distraire  la  pneumonie  de  la  classe  des 
phlegmasies.  Je  reviendrai  d'ailleurs  sur  ce  point. 

Matériatix  solides  du  sérum.  —  Voici  comment  se  comportent,  dans 
les  sept  cas  d'Andral  et  Gavarret,  les  matériaux  solides  du  sérum  :  une  fois 
état  stationnairc  avec  oscillations,  une  fois  abaissement  insignifiant  de 
84  à  80  ;  une  fois  ils  tombent  de  85  à  75  ;  trois  fois  ils  s'élèvent,  à  savoir: 
de  67  à  73,  de  85  à  91  et  de  83  à  91.  On  voit  donc  qu'en  somme,  le 
chiffre  des  matériaux  solides  du  sérum  ne  s'abaisse  pas,  comme  on  aurait 
pu  le  croire,  au-dessous  du  chiffre  normal,  malgré  l'énorme  soustracttoo 
que  fait  au  sang  l'exsudat  pneumonique.  Ceci  me  parait  prouver  qu'en 
définitive,  les  matériaux  de  Texsudat  sont  fournis  pour  la  majeure  part, 
non  par  le  sang  lui-même,  mais  par  les  tissus  de  l'économie,  le  sang  ne 
jouant  que  le  rôle  de  véhicule. 

Des  sels  du  sérum.  —  Les  matériaux  sont  très  peu  nombreux  sur  celte 
question.  Je  ne  connais  que  les  analyses  de  Jarisch  qui,  dans  un  cas 
de  pneumonie,  a  trouvé  :  1°  une  forte  augmentation  de  l'acide  suKu- 
rique  (11  gr.  4,  au  lieu  de  7);  2°  une  légère  augmentation  de  la  soude 
(26  gr.  au  lieu  de  24);  ô^  par  contre  une  légère  diminution  de  l'acide  *j 
phosphorique,  du  chlore,  de  la  potasse  et  dufeT.(Med.Jahrb.lS71^p.  60). 

On  a  parfois  noté  un  aspect  laiteux  du  sérum,  dû  à  des  granulations  de 
graisse. 

Chez  plusieurs  malades  de  mon  service,  j'ai  remarqué  que  le  sang  re- 
tiré au  moyen  de  ventouses  et  traité  par  le  procédé  de  Cl.  Bernard,  rédui- 
sait une  quantité  de  liqueur  de  Fehling  beaucoup  plus  abondante  qu'à 
l'état  normal.  D'après  Cazeneuve  qui  a  poursuivi  ces  recherches,  la 
réduction  ne  saurait  être  rapportée  uniquement  à  de  la  glycose,  car  elle 
ne  se  produit  pas  de  la  même  manière  que  lorsqu'on  opère  avec  de  h 
glycose,  et  il  est  Irès-difficile  de  bien  apprécier  la  limite  de  la  réduction. 

UuiNE.  1"  pendant  la  période  fébrile.  —  La  quantité  est  en  général, 
notablement  diminuée,  et  peut  ne  pas  dépasser  500  et  même  300  dans 
les  vingt-quatre  heures. 

La  densité  est  plus  élevée  que  d'habitude  ;  la  coloration  beaucoup  plus 
prononcée  qu'à  Fctat  normal.  D'après  Vogel,  on  pourrait  approxiniatife- 
ment  évaluer  la  proportion  de  matière  colorante  au  quadruple  de  l'état 
physiologique. 

L'urine  pneumonique  est  presque  toujours  très-acide;  si  l'on  s'en  t^ 
nait  à  cette  vue  superficielle,  on  en  conclurait  que  le  pneumonique  excrète 
plus  d'acide  par  le  rein  que  l'homme  sain.  En  fait,  cette  supposition  ne 
parait  pas  exacte,  car  il  faut  tenir  compte  de  la  diminution  de  la  quantité 
d'urine. 

Les  matériaux  fixes  de  l'urine  sont  notablement  augmentés  dans  la  pé- 
riode fébrile  de  la  pneumonie.  Sur  ce  point,  il  n'y  a  pas  de  contestalioD» 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  urine,  427 

mais  à  quel  moment  cette  augmentation  est-elle  la  plus  considérable? 
A  cet  égard,  les  auteurs  sont  divisés  :  lesunsTauraient  constatée  au  com- 
mencement, les  autres  à  la  fin  ;  j'avoue  que  je  doute  fort  de  l'exactitude 
de  cette  dernière  assertion.  Au  bout  de  plusieurs  jours  de  diète,  le  pneu- 
monique  se  trouve  dans  un  état  assez  semblable  à  Tanimal  à  l'inanition. 
Or,  chez  celui-ci,  les  matériaux  fixes,  à  partir  du  premier  jour  de  l'ina- 
nitiGOy  diminuent  chaque  jour  fort  rapidement;  en  d'autres  termes,  leur 
courbe  se  rapproche  beaucoup  de  la  verticale,  puis,  au  bout  de  quelques 
jours,  ils  ne  diminuent  plus,  il  est  vrai,  pendant  une  période  d'une  cer- 
taine durée,  mais  jamais  ils  ne  remontent  au  niveau  primitif.  Je  ne  nié- 
eonnais  pas  les  différences  profondes  qu'il  y  a  entre  un  fcbricitnnt  à  la 
dièle  et  un  animal  à  Tinanition,  et  je  suis  loin  de  nier  qu'une  poussée 
l&brile  intense,  au  deuxième  ou  au  troisième  jour,  ne  puisse  produire 
une  quantité  de  déchets  supérieure  à  celle  du  premier  jour  ;  mais  je  crois 
cependant  qu'au  bout  de  quelques  jours  de  consomption  fébrile,  l'éco- 
nomie est  assez  appauvrie  pour  ne  pouvoir  dépenser  autant  que  les  pre- 
miers jours.  Les  auteurs  qui  ont  cru  le  contraire  "se  sont  trompés  :  ou  bien 
parce  qu'ils  n'ont  pas  assisté  au  premier  jour  de  la  fièvre,  et  qu'ils  ont 
comparé,  par  exemple,  le  sixième  jour  et  le  troisième  ;  ou  bien  parce 
qu'ils  ont  confondu  la  fin  de  la  période  fébrile  avec  le  commencement  de 
h  période  critique,  où  il  peut  y  avoir,  en  effet,  une  excrétion  momenta- 
aément  fort  exagérée,  comme  nous  allons  voir. 

Mais  étudions  en  particulier  quelques-uns  des  matériaux  solides  de 
l'urine. 

Urée.  —  La  quantité  journalière  d'urée  est  le  plus  souvent  beaucoup 
au-dessus  de  la  normale,  surtout  les  deux  ou  trois  premiers  jours;  puis 
die  décroit,  malgré  la  persistance  de  la  fièvre,  à  cause  de  la  diminution 
progressive  de  «  l'albumine  de  circulation.  »  D'après  les  auteurs,  l'urée 
pourrait  s'élever  au  quintuple  de  l'état  normal  et  même  au-dessus  (Parkes), 
fiintité  qui  me  semble  fort  étrange,  et  qui  est,  en  tous  cas,  fort  au-dessus 
fie  ce  que  j'ai  personnellement  observé.  Dans  l'impossibilité  où  je  suis  de 
eritiqner  de  telles  assertions,  je  me  borne  à  les  mentionner. 

Vacide  urique,  dans  l'urine  pneumonique,  est  en  proportion  beaucoup 
plus  considérable  qu'à  l'état  normal  ;  mais  il  ne  faut  pas  en  juger  par  les 
dépôts,  car  la  formation  d'un  dépôt  est  en  rapport,  non  avec  la  quantité 
d'acide  urique  excrété  dans  les  vingt-quatre  heures,  mais  avec  la  propor- 
tion rdative  de  l'acide  urique  dans  l'urine,  autrement  dit  avec  la  concen- 
tration de  celle-ci  et  surtout  avec  sa  teneur  en  phosphate  acide  de  soude. 
Ii'adde  urique  semble  aussi  augmenté  par  rapport  à  l'urée,  mais  d'une 
Quantité  qu'il  est  difficile  de  fixer,  vu  l'incertitude  où  l'on  est  sur  les  li- 
Hiites  du  rapport  normal  entre  l'acide  urique  et  l'urée.  D'après  Scheube, 
ks  premiers  jours,  il  serait,  dans  le  rapport  de  1  à  60  (ce  qui  ne  con- 
stituerait pas  une  bien  grande  augmentation).   Les  jours  suivants,  il 
y  aurait  relativement  un  peu  plus  d'acide  urique;  le  rapport  serait  : 
\  à  52,  et  même  1  à  32  (moyenne  des  8%  9*  et  10^  jours  chez  un  jeune 
bomme).   Je  n'ai  pas,  je  l'avoue,  une  bien  grande  confiance  à  ces 


428  PiNEUHONIF:  LOBÂIRE  aiguë.  —  URINB. 

moyennes,  vu  les  variétés  individuelles  et  le  petit  nombre  de  cas  qu'a  étu- 
diés M.  Schcube  (4  cas).  Ce  qui  justifie  mes  doutes,  c*est  que  sa  troisième 
observation  prouverait  précisément  le  contraire  de  ce  qu*il  avance.  Voici, 
en  effet,  ses  chiffres  : 

5*  jour,  rapport 1  :  41 

?•    —        —        i  :  .53,8 

H'    -         —        1  :  50,8 

9-    —        —        1  :  58.8 

10*    —        —        1  :  65,3 

Ainsi,  dans  ce  cas,  c'est  précisément  les  derniers  jours  qu'il  y  a  pro- 
portionnellement moins  d'acide  urique. 

Je  le  répète,  il  y  a  de  très-grandes  différences  individuelles,  ainsi  que 
le  montrent  les  chiffres  publiés  par  d'autres  auteurs.  Si  je  consulte,  par 
exemple  à  cet  égard,  les  thèses  de  Charvot  et  d'Uœpffner,  je  trouve  qu'au 
moment  de  l'élimination  critique  qui  suit  d'un  jour  ou  deux  la  défer- 
vesccnce,  le  rapport  de  l'acide  urique  à  Purée,  comparé  à  ce  qu'il  était 
pendant  Tacmé,  tantôt  diminue  et  tantôt  augmente.  La  seule  conclusion 
que  je  serais  porté  à  tirer  de  l'ensemble  des  travaux  relatifs  à  cette  ques- 
tion, c'est  que  les  jours  qui  suivent  l'élimination  critique,  c'est-à-dire  les 
premiers  jours  de  la  convalescence,  le  rapport  de  l'acide  urique  à  Purée 
tombe  bas. 

Dans  l'étude  du  rapport  de  Pacide  urique  de  Purée,  il  faut  tenir  compte 
non-seulement  des  différences  individuelles  qui  sont  considérables,  mais 
surtout  du  procédé  employé  pour  le  dosage  de  l'acide  uriqnc.  Ainsi  Charvot 
et  Hœpffner  ont  trouvé,  en  général,  beaucoup  moins  d'acide  urique  que  les 
auteurs  allemands,  de  sorte  que  ce  n'est  qu'avec  la  plus  grande  réserve 
qu'on  peut  comparer  les  résultats  d'un  observateur  à  ceux  d'un  autre. 

Acide  hippurique.  —  Ce  principe  n'a  malheureusement  pas  encore 
été  le  sujet  de  recherches  sulïisaiites.  Weissmann  dit  l'avoir  trouvé  di- 
minué dans  un  cas  de  pneumonie  ;  mais  il  est  fort  possible  qu'il  soit, 
au  contraire,  augmenté  dans  certains  cas.  C'est  une  recherche  à  pour- 
suivre. 

Matières  extractives.  —  Nos  connaissances  sur  ce  sujet  si  obscur  sont 
presque  nulles.  Il  semble  toutefois  résulter  de  quelques  analyses  d'Hœpff- 
ner  qu'elles  sont  parfois  notablement  augmentées  dans  la  pneumonie,  et 
que  d'autres  fois  elles  ne  présentent  pas  de  modification  sensible.  En  tous 
cas,  elles  ne  marchent  point  parallèment  avec  Purée. 

Quelle  est,  en  somme,  la  quantité  d'azote  excrétée  par  l'urine  (qui  est, 
comme  on  sait,  la  voie  presque  unique  de  l'excrétion  de  Pazote)  pendant 
a  période  fébrile  de  la  pneumonie?  Il  est  difficile  de  le  dire,  vu  le  pëil 
nombre  d'analyses  d'azote  total  qui  ont  été  faites  et  les  différences 
énormes  (du  simple  au  quadruple)  que  présentent  les  différents  malades. 
Dans  un  cas  malheureusement  unique  jusqu'ici,  où  les  excréta^  ainsi  que  { 
les  ingesta^  ont  été  chez  un  pneumonique  déterminés  avec  la  plus  minu-  j 
lieuse  attention,  à  partir  de  la  quarantième  heure  après  le  frisson,  pen- 
dant vingt-huit  jours  consécutifs,  le  malade  a  excrété  pendant  la  période 


PNEUMONIE  LOBAÏRE  AIGUË.  —  urine.  429 

d'acmé,  qui  a  été  de  cinq  jours  (en  ne  tenant  pas  compte  des  quarante 
premières  heures),  plus  de  83  grammes  d'azote  correspondant  à  2  kilo- 
grammes et  demi  environ  de  muscles  (environ  la  dixième  partie  de  la 
quantité  de  chair  musculaire  qu'il  possédait  au  moment  de  sa  maladie 
(Riesell  et  Huppert,  Archiv  der  Heïlkunde,  1869). 

V acide phosphorique  total  n*est,  en  général,  pas  sensiblement  aug- 
menté. Cependant,  d'après  J.  Vogel,  on  en  aurait  trouvé  jusqu'à  8'', 4 
dans  un  cas  de  pneumonie;  mais  nous  ignorons  dans  quelles  conditions. 
n  n'est  même  pas  explicitement  dit  si  ce  chiffre  indique  la  quantité  des 
vingt-quatre  heures  ou  la  quantité  pour  1000,  auquel  cas  il  n'aurait  rien 
d*extraordinaire.  En  tous  cas  *et  eu  égard  à  Tétat  normal,  on  le  trouve 
diminué  par  rapport  à  l'azote,  ainsi  que  dans  toutes  les  maladies  fébriles 
(Zuelzer,  Lépine  et  Jacquin).  Nous  avons  trouvé  que  c'est  suilout 
Tacide  phosphorique  combiné  aux  terres  qui  est  diminué,  ainsi  que  l'ont 
vn  Beneke  et  Schulte  pour  d'autres  maladies  aiguës  (Schulle,  Dissertât, 
Marboui^  1823)  ;  ce  qui,  comme  le  fait  très-bien  remarquer  Beneke,  est 
en  rapport  avec  l'augmentation  de  la  potasse  signalée  par  Salkowski. 

Quant  à  Vacide  sulfurique,  il  a  été  trouvé  fort  augmenté  dans  la  pneu- 
monie (2*', 9,  3*%1,  5*', 7  par  jour;  J.  Vogel).  C'est  près  de  dix  fois  la 
quantité  que  cet  auteur  a  trouvée  dans  d'autres  maladies  aiguës.  Il  y  a  donc 
là  une  augmentation  remarquable,  résultat  conforme  à  celui  de  Parkes. 

Le  chlorure  de  sodium  diminue  brusquemenJ  à  partir  du   premier 
jour  de  la  fièvre,  de  telle  sorte  que,  dès  le  deuxième  ou  le  troisième 
jour,  il  n'y  en  a  plus  que  des  traces  dans  l'urine  ;  puis  il  disparait  plus 
00  moins  complètement.  Ce  fait  remarquable,  signalé  par  Redlcnbacher, 
a  beaucoup  préoccupé  les  médecins  de  la  Grande-Bretagne,  Bennett  (d'E- 
dimbourg) et  surtout  Beale  qui  a  fondé  sur  lui  beaucoup  de  spéculations. 
Cette  disparition  plus  ou  moins  complète  du  chlorure  de  sodium  de 
l'urine  se  rencontre  d'ailleurs,  à  peu  près  au  même  degré,  ainsi  que  Ta 
démontré  J.  Vogel,  dans  les  autres  états  fébriles.  Elle  s'explique  alors 
parle  manque  d'alimentation.  Pour  le  cas  particulier  de  la  pneumonie, 
il  convient  d'ajouter  pour  une  part  l'élimination  d'un  peu  de  ce  sel  par 
.les  crachats   et  son  emmagasinement  dans  l'exsudat.  Les  expériences 
d'flowitz,  à  supposer  qu'elles  soient  exactes,  prouveraient  que  les  deux 
dernières  causes  que  j'ai  indiquées  ne  sont  pas  sans  influence.  En  effet, 
il  prétend  que  du  chlorure  de  sodium  administré  à  un  pneumonique  n'ap- 
parait  pas  dans  l'urine  ;   d'autre  part.  Bigler  aurait  également  trouvé 
que  riodure  de  potassium  administré  à  un  pneumonique,  est  retenu  pen- 
dant Tacmé  et  n'est  excrété  qu'au  moment  de  la  résolution.  Ces  expé- 
lîences  mériteraient  d'être  reprises.  En  tous  cas,  il  ne  faut  pas  exagérer  la 
quantité  de  chlorure  de  sodium  que  l'exsudat  peut  emmagasiner.  Iloppe- 
Seyler  a  fait  la  remarque  très  juste,  qu'il  faudrait  un  exsudât  quotidien 
de  700  grammes  pour  absorber  le  chlorure  de  sodium  {Deutsche  Klinik^ 
d854).  Or,  nous  avons  vu  précédemment  que  le  poids  moyen  de  l'exsudat, 
qui  d'ailleurs  met  plusieurs  jours  à  se  faire,  n'atteint  pas  ce  chiffre. 
Potoêse  et  soudé,  —  Les  seuls  travaux  sur  cette  question  sont  ceux 


430  PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  uhhb. 

de  Salkowski,  qui  a  publié,  il  y  a  quelques  années,  an  mémoire 
mination  de  ces  bases  dans  les  maladie.^  fébriles.  Ce  mémoire  ren'«^ 
Tanalyse  de  Tiirine  à  ce  point  de  vue  dans  quatre  cas  de  pneumonie^^ 
heureusement  sans   observations  cliniques,  ce  qui  enlève  à  ses 
beaucoup  d'importauce,  puisque   nous  ne  pouvons  les   interprc^^ 
connaissance  de  cause  ;  j'y  remar(|ue  quant  à  la  soude,  sa  d'^^^^JS* 


?i 


pendant  la  fièvre  et  son  accroissement  tellement  rapide  à  partir»     „^  ^ 
fervescence,  que,  dans  Tespacc  de  deux  jours,  celle  base  peut*       .g^iï 
et  morne  décupler;  quant  à  la  potasse,  elle  augmente  notabler-^^^g^' 
dant   la  période   fébrile,   de  telle  sorte  que,  pendant  cette  p^rma^ii^'^'^ 
rapport  de  ces  deux  bases  entre  elles  est  beaucoup  modifié  à 
de  la  potasse  ;  elle  diminue  pendant  la  défervescence.  M:^>uvt 

Éléments  étrangers.  —  Je  n'ai  parlé  jusqu'ici  que  des  firiili*ife*pî'  *^* 
quantitatives  des  matériaux  normaux  de  Furine;  mais  il  faut  safoir^w^'ii^  ^^^ 
présence  de  Talbumine  dans  l'urine  de  la  période  fébrile  de  la  pneflNÉ^t^vi  yy 
n'est  rien  moins  que  rare.  On  peut  même  dire  que  celle-ci  est  uttl 
maladies  aiguës  qui  fournit  le  plus  grand  nombi'c  de  ces  albui 
spéciales  à  la  période  fébrile.  D'après  Parkes,  on  la  rencontrerait tt 
pour  100.  Becquerel  donne  un  chifTre  analogue  :  42  pour  100.  Dtfi 
hôpitaux  de  Vienne,  on  a  trouvé  45  pour  100.  Sauf  complication, T 
mine  est  toujours  en  petite  quantité  dans  l'urine,  et  elle  disparatti 
près  au  moment  de  la  résolution  de  la  pneumonie,  conlrairemeÉli 
qu'avaient  pensé  Martin-Solon,  Begbie  et  Abeille,  qui  attribuaient  fi 
minurie  à  l'élimination  des  produits  albumineux  résorbés.  Si  par 
elle  persiste  à  la  résolution,  elle  cesse  avec  l'établissement  de  la 
lescence. 

La  cause  de  cette  albuminurie  fébrile  est  obscure.  On  a  fait  reflM^|f^  *'' 
avec  raison  qu'elle  pouvait  être  produite  par  les  vésicatoires;  mais 
explication,  à  supposer  qu'elle  soit  exacte  pour  quelques  cas,  netf^B  i  d 
être  généralisée  ;   car  dans  la  pleurésie,  où  on  les  prodigue  daiarii^érnj 
l'albuminurie  est  rare. 

La  leucine  et  la  tyrosine  n'ont  jamais  élo  rencontrées  dans  t 
pncumoniquc  ;  je  parlerai  plus  loin  de  la  matière  colorante  deUbik-  ^'i: 

2**  Urine  critique  —  L'urine  de  la  défervescence,  si  celle-ci  saW 
cinse,  comme  c'est  le  cas  le  plus  commun,  présente  des  caraclèiti 
culiers  :  sa  quantité  augmente  au  point  de  dépasser  notablemen^il^ 
maie  (polyuric  temporaire)  ;  en  même  lemps,  fait  fort  remarqoabki^rjo  d 
densité  reste  élevée  au  moins  au  début  ;  de  plus,  il  se  dépose  preKp 
jours  un  sédiment  plus  ou  moins  abondant,  de  couleur  rosée  ( 
soude  et  acide  rosaeique),  ce  qui,  comme  nous  l'avons   dit  plus  tJ^Q«;«r 
prouve  qu'au  début  de  la  crise  l'urine  est  fortement  acide  à  can;* 
présence  d'une  grande  quantité  de  phosphate  acide  de  80ude«  ^^1f^^  ^ 
renferme  en  même  (emps,  dans  certains  cas,  beaucoup  d'acide 
Quant  au  chlorure  de  sodium,  il  est  toujours  en  quantité  insigoi 
Quelle  est  la  cause  de  cette  élimination  critique  ? 
Comme  au  moment  où  elle  a  lieu,  le  pneumonique  est  encore  à  la 


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PNEUMONIE  LOBâIRË  AIGUË.  —  urimb.  451 

il  n'y  a  pas  à  songer  à  l'influence  de  ralimentation;  d'ailleurs,  après  quel- 
ques jours  de  fièvre,  l'organisme  conserve  pour  se  réparer,  la  plus  grande 
pari  des  matériaux  de  la  première  alimentation.  Mais  cette  considération 
n'a  même  pas  besoin  d'être  invoquée,  puisque,  je  le  répète,  le  pneumoni- 
que,  au  moment  de  l'excrétion  critique  n'a  pas  encore  pris  d'aliments. 

La  plupart  des  auteurs  ont  pensé  que  cette  élimination  était  due  à  la 
combustion  des  matériaux  provenant  de  la  résorption  de  l'exsudat.  Seule- 
ment il  faut  bien  savoir  qu'au  moment  de  la  crise,  en  général,  la  résolu- 
tion est  encore  peu  avancée,  et  la  résorption  certainement  fort  incomplète. 
De  plus,  Scheube,  raisonnant  comme  si  la  composition  de  l'exsudat  était 
identique  avec  celle  des  crachats,  calr.ule  qu'il  faudrait  un  exsudât  de 
5  kîlog.  pour  suffire  à  l'élimination  critique.  Or,  nous  avons  vu  qu'il  ne 
dépasse  pas  600  grammes  en  moyenne.  J'avoue  que  l'on  peut  contester  la 
rigueur  du  calcul  de  Scheube  ;  mais  l'argument  chronologique  que  j'ai 
indiqué  en  premier  lieu  conserve  toute  sa  valeur  :  la  résorption  de  l'exsu- 
dat n'est  qu'au  début  au  moment  de  l'excrétion  critique. 

Uuppert  a  pensé  que,  pendant  la  période  fébrile,  l'albumine  est  dédou- 
blée, que  les  produits  non  azotôs  de  ce  dédoublement  sont  brûlés  tout  de 
suite,  tandis  que  les  produiLs  azotés  ne  le  sont  qu'à  la  crise. 

Cette  vue,  d'ailleurs  hypothétique,  se  rapproche  de  l'opinion  soutenue 
par  plusieurs  pathologistes  (Riesenfeld,  Naunyn,  Unruh,)  qui,  sans  ad- 
mettre la  sélection  dont  je  viens  de  parler,  pensent  qu'il  y  a  une  rétention 
des  matériaux  de  déchet  pendant  la  fièvre,  rétention  qui  ne  cesse  qu'au 
moment  de  la  crise.  Dans  un  récent  travail,  Frânkel  a  beaucoup 
insisté  sur  cette  idée  et  a  essayé  d'étayer  l'hypothèse  de  la  rétention  en 
faisant  remarquer  que  l'excrétion  critique  est  plus  abondante  quand  il  y 
a  eu,  pendant  l'acmé,  de  l'albuminurie.  D'après  lui,  cette  albuminiurc 
prouverait  l'existence  d'une  lésion  rénale  temporaire,  capable  de  retenir 
las  matériaux  de  déchet  tant  qu'elle  dure,  c'est-à-dire  tant  que  persiste 
l'albuminurie,  et  qui  cesserait  avec  cette  dernière  au  moment  de  la  crise. 

Cette  vue  d'ailleurs  ingénieuse  n'a  pas  été  généralement  adoptée.  Selon 
moi,  il  est  peu  probable  qu'une  albuminurie  fébrile  soit  syinptomatique 
d'une  lésion  rénale,  suffisante  pour  mettre  obstacle  à  l'excrétion  des 
matériaux  de  déchet.  En  supposant  qu'il  en  existe  une,  ce  doit  être  une 
lésion  fort  minime  des  glomeruli;  or,  il  semble  qu'une  lésion  plus  pro- 
fonde soit  nécessaire  pour  empêcher  l'excrétion  de  ces  matériaux.  La 
niaon  de  l'élimination  critique  est  donc  encore  à  l'étude. 

Dans  les  cas  où  il  y  a  une  excrétion  relativement  considérable  d'acide 
urique  (par  rapport  à  l'urée),  au  moment  de  la  crise,  Bartels  l'explique 
en  disant  que  pendant  la  période  fébrile,  l'urée  et  l'acide  urique,  aug- 
mentés tous  deux  sont,  à  peu  près,  dans  leur  rapport  normal,  parce 
que  la  circulation  et  la  respiration  se  sont  activées,  pour  se  mettre  au 
niveau  de  leur  tâche.  Mais  lorsque  la  période  fébrile  cesse  brusquement, 
la  circulation  et  la  respiration  revenues  au  taux  normal  ne  suffisent  plus  à 
oxyder  complètement  la  grande  quantité  de  matériaux  de  déchet  ;  d'où 
rexcès  relatif  d'acide  urique.  Je  donne  cette  explication  pour  ce  qu'elle 


432  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  état  dbs  forces. 

vaut,  en  faisant  remarquer  qu'en  réalité  nous  connaissons  bien  moins 
que  ne  le  croyait  Bartels  les  conditions  de  formation  de  l'acide  nriqoe. 

La  période  d*élimination  critique  n*est  pas  nécessairement  limitée  à  un 
jour,  comme  on  pourrait  croire  :  il  y  a  des  crises  moins  brusques  qii 
durent  deux  ou  trois  jours.  J'ai  déjà  dit  que  quand  il  n'y  a  pas  crâe 
mais  lysiSy  l'élimination  exagérée  dont  il  vient  d'être  question  n'a  pis 
lieu  et  c'est  progressivement  et  par  transition  que  l'urine  de  la  période 
fébrile  prend  le  caractère  de  l'urine  de  la  convalescence. 

En  tous  cas  il  y  a  avantage  pour  l'analyse  des  conditions  physiologiquei 
où  on  trouve  le  malade  à  étendre  la  durée  de  la  période  critique  jusqn'aa 
commencement  de  la  convalescence. 

Dans  le  cas  de  Rie^ell  et  Huppert,  dont  j'ai  cité  plus  haut  les  résultats 
pour  la  période  fébrile,  le  malade  a  absorbé  43  grammes  d'azote,  et  en  a 
perdu  135  pendant  cette  période  critique  qu'ils  ont  fait  durer  6  jours,  soit 
un  déficit  de  92  grammes.  En  somme,  pendant  ces  deux  périodes  réunies, 
ce  malade  a  perdu  85  H-  92  =175  gr.  d'azote,  correspondant  au  cin- 
quième peut-être  de  la  quantité  d'albumine  qu'il  possédait  au  début  de  la 
maladie. 

Urine  de  la  convalescence.  —  La  polyurie  diminue  ou  disparaît  ;  l'u- 
rine est  plutôt  pâle  ;  sa  densité  est  diminuée  et  les  matériaux  solides  y  sont 
à  un  chiffre  plus  ou  moins  bas,  sauf  le  chlorure  de  sodium  dont  l'excrô- 
tion  redevient  assez  promptcmeut  presque  aussi  abondante  qu'à  l'étal 
normal. 

Pour  terminer  avec  le  cas  d'Huppertet  Ricsell,  je  dirai  que  pendant  les 
7  premiers  jours  de  la  convalescence,  l'organisme  a  encore  perdu  15  gram- 
mes d'azote.  Pour  les  7  jours  suivants  (les derniers  de  l'observation),  ili 
au  contraire  regagné  3  grammes. 

État  DES  forces.  —  Les  forces  sont  constamment  diminuées  dans  la 
pneumonie  et,  en  général,  elles  sont  très-promptoment  abattues  à  partir 
du  début  de  la  maladie.  Cependant  bon  nombre  de  pneumoniques  viennent 
à  pied  se  présenter  au  bureau  d'admission  des  hôpitaux,  alors  que 
l'altération  des  traits  dénote  la  gravité  de  l'affection  dont  ils  sont  atteints: 
d'après  Grisolle,  il  n'y  aurait  guère  qu'un  quinzième  des  sujets  qui  serait 
dans  l'incapacité  de  marcher.  Ce  chiffre,  on  le  voit,  me  parait  un  peu 
faible. 

Il  est  naturel  que  chez  les  vieillards  la  prostration  des  forces  soit,  toutes 
choses  égaies,  plus  accentuée.  Et  cependant,  par  exception  à  cette  règle, 
on  voit  des  vieillards  dont  les  forces  paraissent  davantage  conservées  que 
ce  n'est  l'habitude  chez  l'adulte.  Ainsi  il  n'est  pas  très-rare  de  voir,  à  b 
Salpêlrière,  de  vieilles  femmes  rester  dans  leur  dortoir,  assises  près  de 
leur  lit  plusieurs  jours  après  le  début  de  la  maladie  et  résister  énergiqiK- 
ment  si  on  les  veut  transporter  à  l'infirmerie.  On  ne  pourrait  objecter  quB 
y  a  erreur  sur  le  début  de  leur  pneumonie.  Mais  cette  objection  tombe i 
l'examen  de  la  marche  de  la  maladie  et  en  présence  des  résultats  de  l'ii- 
topsie.  Pour  être  extraordinaires,  les  faits  dont  je  parle  sont  cepcndiot 
uthentiques. 


4 


PxNEDMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tboubles  merveox.     '        433 

PiRTE  DB  POIDS.  —  Ce  sujet  a  été  malheureusement  peu  exploré,  vu  la 
difficulté  qu'il  y  a  à  peser  des  fébricitants  qui  ne  peuvent  quitter  le  lit. 
Le  sujet  de  Riesell  et  Uup|)ert,  pendant  la  première  période  d'observation 
(de  k  41''  heure  de  maladie  à  la  crise),  a  perdu  680  gr.  en  cinq  jours. 
Pendant  la  2*"  période  (critique)  qu'ils  ont  fixée  à  6  jours,  le  malade  a 
perdu  1500  grammes;  pendant  les  7  premiers  jours  de  la  convalescence, 
900  grammes.  Pendant  les  sept  jours  suivants,  il  a  au  contraire  gagné 
570  grammes.  Le  docteur  Thaon,  quia  fait  sur  des  enfants  pneumoniques 
une  série  de  recherches,  a  constaté  aussi  qu'ils  perdent  encore  pendant  le 
conunencement  de  la  convalescence.  Mais  je  ne  crains  pas  de  dire  que  ce 
r  n'est  pas  un  résultat  constant,  au  moins  chez  l'adulte,  ainsi  que  le  prouve 
£  la  première  des  trois  observations  suivantes  de  pneumonie  recueillies 
iL  cette  année  dans  mon  service,  où  les  malades  ont  été  pesés  dès  le  jour 
n    de  la  défervescence.  Voici  les  résultats  : 

n       Obs.  I.  —  Ilomme  de  40  ans.  Pneumonie  bilieuse  ;  commencement  de 
1^   la  défervescence  le  20  (T.  39'',4 C.)  ;  défervescence  achevée  le  23  seulement 
«i^  (T.37*C.). 

-       Ce  jour  le  malade  pèse  55'',960;  le  surlendemain  56^,300;   le   26, 
^  56\500;  le  27,  5CS700;  le  28,  56S800. 
^'      Qa'on  construise  la  courbe  et  on  verra  que  l'ascension  a  été  fort  rcgu- 

ç  lîère,  en  forme  de  parabole,  à  partir  de  la  défervescence  achevée. 
-J      Obs.  IL  —  Ilomme  de  35  ans.  Pneumonie  franche;  défervescence  com- 
/  menoée  le  8,  achevée  le  9.  Le  poids  est  pris  pour  la  première  fois  le  12  et 
est  de  72  kilos  ;  le  lendemain  le  malade  avait  perdu  300  grammes  ;  mais 
le  surlendemain  il  était  remonté  à  72'',500  et  le  26,  il  atteignait  près  de 
74  kilos.  C'est  là  une  augmentation  de  poids  vraiment  extraordinaire. 
Obs.  m.  —  Homme  de  33  ans.  Pneumonie  franche,  la  défervescence  a 
1    0a  lieu  le  10.  Depuis  lors  le  poids,  suivi  jour  par  jour,  a  montré  une  dimi- 
I  aution  fort  régulière  de  2  kilos  en  10  jours;  puis  une  augmentation  de 
1  1300  grammes  également  très-régulière  pendant  les  dix  jours  suivants, 
f        On  voit  combien  il  y  a  de  variétés  individuelles  quant  à  l'accroisse- 
I  ment  da  poids  pendant  la  convalescence. 

Tboubles  merveux.  —  La  céphalalgie  est  presque  constante  ;  d*après 
Grisolle,  Louis,  etc.,  elle  ne  manque  pas  dans  un  sixième  des  cas;  c'est 
ain  symptôme  du  début;  elle  est  habituellement  frontale  et  consiste 
en  élancements  ou  en  un  sentiment  de  constriction  pénible;  elle  est 
aggravée  par  la  toux. 

L'insomnie  est  en  rapport  avec  l'état  fébrile  ;  jamais  elle  n'est  complète. 

Troubles  sensoriels.  —  Ils  sont  peu  notables;  ce  n'est  que  rarement 

^ne  les  malades  accusent  des  éblouissemcnts,  que  Ton  a  attribués  à  une 

congestion  rétinienne  (Siebel  père,   Seidel).  —  Mais  il  y  a  aussi  des 

phénomènes  manifestement  réilexes  :  Galezowski  a  noté  que  la  congés- 

iion  des  veines  rétiniennes  peut  être  plus  accusée  d'un  côté.  Roques  a 

Mg^alé  l'inégalité  des  pupilles;  j'ai  indiqué  autrefois  que  des   injections 

ixTÎtantes,  faites  dans  un  des  poumons,  sont  suivies  de  phénomènes  du 

dWé  de  l'œil,  chez  des  chiens  ou  des  cobayes. 

X0IJ7.  BIGT.  MiO.  BT  ciim.  IIVUI— 28 


434  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  troubles  Nki?iux. 

Je  me  borne  à  ces  indications  fort  sommaires,  vu  le  peu  d'importance 
des  phénomènes  en  question  ;  quant  aux  troubles  plus  graves,  l'ambljopie 
la  surdité,  etc.,  j'en  traiterai  au  chapitre  Complicationê. 

Vépislaxh  n'est  pas  un  symptôme  très-commun  ;  elle  apparaît  dans  le 
premier  septénaire,  chez  un  huitième  à  peine  des  malades  âgés  de  moîm 
de  trente  ans  (Grisolle) . 

Généralement  Thémorrhagie  a  lieu  par  la  narine,  du  cAté  cormpon- 
dant  à  la  pneumonie  (Perroud),  ce  qui  est  d'accord  avec  la  prédilection 
pour  le  même  côté  des  troubles  oculaires  et  des  trouble  vano-moteiurs 
cutanés  dont  je  vais  maintenant  parler. 

Troubles  vaso-moteurs,— Le  plus  anciennement  connu  est  la  rougeur  de 
l'une  des  pommettes.  Andral  ayant  soutenu  qu'elle  était  un  pur  effet  du 
décubitus,  ce  symptôme  avait  perdu  pi-esque  toute  valeur,  quand  Gubkr 
vint  rappeler  l'attention  sur  lui,  en  l'interprétant  d'une  manière  scienli- 
fique.  D'a|)rès  Gubler,  il  s'agit  d'une  con«>estton  active,  d'origine  réflexe. 
et  qui  s'accompagne  d'une  notable  élévation  de  la  température,  lail  par- 
faitement exact  et  souvent  confirmé  depuis.  Dans  le  plus  grand  nombre 
de  cas,  clic  occupe  le  côté  correspondant  à  la  pneumonie;  mais  il  y  a  des 
exceptions  qui  ne  sont  pas  fort  rares.  Quelquefois  cette  exception  peut 
s'expliquer  par  l'influence  du  décubitus  :  un  malade  peut,  en  restant  cou- 
ché plusieurs  heures  sur  le  visage,  du  côté  opposé  à  la  pneumonie,  le 
congestionner  la  joue  qui  repose  sur  l'oreiller  ;  mais,  le  plus  souveot, 
cette  explication  ne  peut  être  invoquée,  par  exemple  dans  le  fait  soivaiiL 
dont  le  professeur  Jaccoud  a  été  lui-même  le  sujet  et  le  narrateur  : 

<c  11  y  a  deux  ans,  dit-il,  j'ai  été  moi-même  atteint  d'une  pneumonie 
franche  :  elle  siégeait  à  droite,  et,  durant  les  deux  premiers  jours,  la  rou- 
geur de  ma  joue  gauche  a  contrasté,  d^une  manière  choquante,  avec  la 
coloration  Je  la  droite  ;  de  plus,  cette  rougeur  coïncidait  avec  une  senah 
tion  désagréable  de  chaleur  dans  tout  le  côté  gauche  de  la  face  ;  mais  ce 
n'est  pas  tout  :  cette  pneumonie  m'a  saisi  brusquement,  brutalemeot; 
j'étais  venu  bien  portant  au  service,  lorsqu'au  quatrième  ou  cinquième 
lit  de  ma  première  salle,  je  suis  pris  d'un  frisson  des  plus  intenses,  aiec 
tremblement  et  claquement  de  dents;  ce  frisson  dura  jusqu'au  milieu  do 
jour;  alors  seulement  je  ressentis  le  point  de  côté.  Or,  la  veille  de  ce  jour, 
le  dimanche,  vers  le  soir,  occupée  travailler,  j'avais  ressenti  une  chaleor 
insolite  dans  le  côté  gauche  de  la  figure.  Impatienté,  j'y  regardais  ai 
bout  de  quelque  temps  :  j'avais  la  joue  d'un  rouge  vif.  Ce  phénomèoe  po^ 
sista  jusqu'à  la  fin  de  la  journée  ;  il  durait  encore  quand  je  me  mis  ai 
lit,  et  le  lendemain  seulement  j'en  eus  l'explication.  Mais,  tandis  que,  ei 
raison  du  siège  de  ce  symptôme ,  j'attendais  une  pneumonie  à  gaueki 
l'inflammation  pulmonaire  était  à  droite.  La  rougeur  de  la  pommette,  )■ 
est  évidemment  le  résultat  de  la  perturbation  des  nerfs  vasculairei|i 
donc  précédé  de  quinze  heures  le  frisson  révélateur  de  la  phlegmasie,  et 
celui-ci  a  devancé  de  dix  heures  la  douleur  thôracique.  » 

Cette  observation  est  peut-être  la  seule  où  la  précocité  du  trouble  n»- 
moteur  ait  été  aussi  nettement  observée.  Mais  en  raison  même  de  ce  tt 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  sthptombs  cutanés.  455 

que  la  rougeur  malaire,  dans  ce  cas,  a  précédé  toute  localisation  pulmo- 
naire appréciable,  en  peut  se  demander  si  dès  ce  moment,  c'est-à-dire 
dès  le  dimanche,  il  ne  s'était  pas  fait  déjà,  à  l'insu  du  malade,  une 
pWHBde  congestive  au  poumon  gauche^  laquelle  s'est  évanouie  le  lende- 
main et  s'est  définitivement  fixée  sur  le  poumon  droit.  Dans  cette  hypo- 
tbàBe«  le  trouble  vaso-moteur  se  serait  produit  non  du  côté  opposé,  mais 
du  côté  correspondant  à  Thyperhémie  pulmonaire. 

Je  crois  devoir  signaler  cette  objection,  mais  je  ne  la  crois  pas  très- 
valable,  et  je  suis  loin  de  contester  la  réalité  des  exceptions  à  la  loi  formulée 
parGubler.  J'y  crois  d'autant  plus  que  j'ai  moi-même  constaté  expérimen- 
talement que  l'excitation  des  bronches  peut  produire,  exceptionnelle- 
menif  il  est  vrai,  une  action  réflexe  sur  Fœil  du  côté  opposé  {y 2ii  cité  ce 
fait  dans  ma  thèse,  p.  26).  Vraisemblablement  cette  anomalie  trouve  son 
explication,  ainsi  que  l'indique  Jaccoud,  dans  la  décussation  variable  des 
filets  nerveux  qui  entrent  dans  la  composition  du  plexus  pulmonaire. 

D'après  Bouillaud,  la  rougeur  et  la  chaleur  des  pommettes  sont,  toutes 
choses  égales  d'ailleurs,  plus  prononcées  dans  la  pneumonie  du  sommet 
que  dans  celles  des  lobes  inférieurs;  cette  opinion  est  confirmée  par 
:    Grisolle. 

i  Non-seulement  les  pommettes,  mais  les  membres,  surtout  le  membre 
i  supérieur  du  côté  correspondant  à  la  pneumonie,  ainsi  que  la  paroi  tho- 
i  lacique  du  même  côté,  peuvent  présenter  un  excès  de  chaleur  mani- 
\i  faste.  C'est  à  la  partie  interne  du  bras  que  la  différence  de  température 
I    est,  en  général,  le  plus  accusée.  Exceptionnellement  ce  n'est  pas  un  excès 

Îda  dialeur,  mais  au  contraire  un  refroidissement  relatif  que  l'on  observe. 
Je  n'insiste  pas  sur  ces  détails,  que  j'ai  longuement  étudiés  autrefois  et 
k!  (|a*a  confirmes  récemment  Hamburger,  auteur  d'un  bon  travail  inspiré 
4  ptr  le  professeur  Kussmaul. 

»j  Auireê  symptômes  cutanés,  —  Outre  les  troubles  vaso-moteurs  de  la 
l|  pommette  et  des  membres,  je  dois  mentionner  les  sueurs  qui  se  ren- 
1^  eoatreat  souvent  ehez  les  jeunes  sujets  à  jla  période  fébrile,  et  qui 
donnent  lieu  parfois  à  diverses  éruptions  sudorales,  dont  l'importance 
n'est  pas  fort  grande.  Les  sueurs  profuses  qui  s'observent  au  moment 
de  la  défervescence  sont  beaucoup  plus  intéressantes,  parce  qu'elles 
paavent  être  considérées  comme  un  phénomène  critique.  A  coup  sui* 
fUea  ont  au  moins  pour  résultat  de  contribuer  à  l'abaissemenl  de  la  tem- 
féntare,  qui,  comme  on  Ta  vu,  peut  alors  tomber  fort  au-dessous  de 
i«  normale. 

On  a  aussi  considéré  comme  critiques  certaines  éruptions  cutanées  ; 
inaie  c'est  peut-être  sans  fondement  suffisant,  aussi  ne  nous  y  arrêtons- 
^ùvm  pas.  Nous  n'examinerons  ici  que  l'herpès  qui,  comme  on  sait, 
mal  assex  commun  dans  la  pneumonie  et  survient  avant  la  crise . 
-  L*herpès  se  montre  surtout  au  visage  :  autour  des  lèvi'es  ou  des  ailes 
du  nés,  aux  paupières,  aux  oreilles;  parfois  il  a  un  siège  insolite  et 
peu  apparent,  de  telle  sorte  que.  vu  sa  quasi-indolence,  on  est  exposé  à 
méconnaître  l'existence.  C'est  ainsi  qu'on  l'a  trouvé  à  l'anus  (Thomas) , 


436  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  ?AB|iTCs. 

et  à  ce  même  siège  dans  plusieurs  attaques  de  pneumonie  chei  le  même 
enfant.  Sa  fréquence  est  estimée  différemment  par  les  auteurs  :  Diealer 
Ta  en  effet  noté  45  fois  sur  100.  Son  relevé  porte  sur  421  obsennUons 
du  service  de  Wunderlich;  d'autres  auteurs  ont  été  beaucoup  moins  favo- 
risés :  Lcbcrt  ne  Ta  rencontré  que  15  fois  sur  100  i  Brcslau,  et  moîai 
souTcnt  à  Zurich.  Si  je  me  fiais  à  mes  souvenirs,  je  dirais  que  je  DeTai 
pas  rencontré  plus  souvent  queLebert. 

Les  chiffres  précédents  se  rapportent  à  Tadulte.  Diaprés  Ziemaseo,  oo 
Tobserverait  chez  Tcnfant  dans  la  moitié  des  cas.  Thomas  croit  an  eon- 
traire  que,  malgré  la  fréquence  de  l'herpès  chez  Tenfiint,  il  est  plus  rare 
dans  la  pneumonie  de  Tenfant  que  dans  celle  de  Tadulte  ;  il  serait  sur- 
tout rare  chez  les  tout  jeunes  enfants. 

J'ai  dit  tout  à  Theure  que  l'apparition  de  l'herpès  est  toujours  anté- 
rieure à  la  crise.  Exceptionnellement,  cependaAt,  on  l'a  vu  survenir  ao 
moment  de  la  défervescence  et  même,  dans  un  cas,  six  jours  après  elle 
(Thomas). 

Troubles  digestifs. —  1**  Vomissemenl.  —  Nous  avons  déjà  vu  que  c'est 
un  symptôme  de  début  commun  chez  l'enfant  (dans  la  moitié  des  cas,  dit- 
on),  plus  rare  chez  le  vieillard  et  surtout  chez  l'adulte.  Magnus  Huas  le 
rapporte  à  une  excitation  du  pneumogastrique,  ce  qui  n'est  pas  impossible; 
mais  il  faut  se  rappeler  qu'il  survient  d'habitude  dans  toutes  les  maladies 
où  l'élévation  de  la  température  est  brusque,  dans  la  scarlatine,  par  eiem. 
pie.  Si  elle  surprend  le  malade  dont  l'estomac  est  plein,  l'indigestion  est 
inévitable. 

Dans  le  cours  de  la  pneumonie,  le  vomissement  est  rare  ;  il  peut  re- 
connaître des  causes  diverses  que  Jurgeosen  a  bien  analysées  : 

a)  Vomissement  cérébral,  particulier  en  quelque  sorte  à  la  pneumo- 
nie du  sommet  ;  il  peut  se  prolonger  plusieurs  jours  sans  aggraver  l'état 
du  malade. 

b)  Vomissement  sollicité  par  la  toux,  par  le  mucus  qui  recouvre  l'épi- 
glotto,  par  la  tuméfaction  de  la  luette. 

c)  Vomissement  par  action  médicamenteuse. 
2"*  La  constipation  est  la  règle  pour  les  malades  chez  lesquels  on  ne 

provoque  pas  de  diarrhée  et  qui  ne  sont  pas  soumis  à  une  influence  lliéra- 
peutique.  11  y  a  cependant  des  pneumoniques  qui,  en  dehors  de  cette  in- 
fluence, présentent  non  au  début,  mais  au  bout  de  quelques  jouis,  de  II 
diarrhée  dépendant  sans  doute  d'un  catarrhe  intestinal.  Cette  diarrhée 
serait  plus  commune  dans  certains  pays  :  à  Breslau,  par  exemple.  Lebert 
Ta  rencontrée  chez  le  tiers  des  pneumoniques  de  l'hôpital. 

La  langue  prend  un  enduit  blanchâtre  chez  presque  tous  les  sujed, 
mais  sans  jamais  offrir  rien  de  spécial  ;  rarement  elle  est  sèche  ehei 
l'adulte,  tandis  que  chez  le  vieillard  elle  est  presque  toujours  sèche  ri- 
peusc  et  couverte  d*un  enduit  brunâtre.  Chez  l'enéint,  au  contraire,  li 
langue  reste  presque  toujours  humide. 

L'inappétence  en  tous  cas  est  coustante. 

riétés  de  marohe  et  variétés  •ymptoflaatiq«oi.  —  iiM 


nfEDHONIE  LOBAffiE  AIGUË.  —  variétés  anormales  par  la  marche.  437 

que  je  Tai  dit  plus  haut,  la  pneumonie  est  une  maladie  Tort  variable 
dans  ses  aspects.  On  pourrait  donc  multiplier  beaucoup, ses  variétés;  mais 
je  me  bornerai  au  nécessaire.  Je  décrirai  d*abord  les  anomalies  que  peut 
présenter  sa  marche  ;  elles  sont  importantes,  car  la  pneumonie  est  une 
mtladie  aussi  caractérisée,  sinon  plus,  par  sa  marche  que  par  ses  sym- 
pUmes. 

I.  Yaiuêiés  anormales  par  la  marche.  —  J'étudierai  :  1®  celles  qui  présen- 
tent une  durée  exceptionnellement  courte  ;  2®  celles  dont  la  durée  est 
longne;  5®  celles  dont  la  marche  est  périodique;  4*  celles  dont  la  mar-* 
cbê  eet  alternante. 

1*  Pneumonie  à  durée  courte  :  A.  Pneumonies  ahortives.  —  Ce  sont 
dee  pneumonies  qui  évoluent  en  moins  de  cinq  joui*s.  Elles  peuvent  se 
rencontrer  à  tout  âge.  Charcot  les  a  signalées  chez  lei  vieillards  (Comp^e^ 
rendue  de  la  Société  des  Hôpitaux^  1864).  Chez  Tadulte,  elles  ont  été 
étudiées  par  Wunderlich,  Woillez,  Lebert,  Leube,  Bcrnheim,  etc.  Une 
des  observations  que  Marrottc  a  publiées  sous  le  nom  de  synoque  péri- 
pneumonique  ressortit  à  cette  variété. 

Wunderlich  leur  distingue  deux  modes  de  début  :  Tun,  brusque,  ne 
différant  en  rien  de  celui  de  la  pneumonie  commune  ;  l'autre,  plus  lent  : 
la  température  fébrile  monte  progressivement  jusqu'au  troisième  jour  ; 
mais  à  peine  a-t-elle  atteint  4U®  qu'elle  redescend.  Cette  dernière  variété 
parait  d'ailleurs  fort  rare. 

La  défervescence  ne  s'accompagne  pas  d'une  crise  aussi  accentuée  qu'on 
la  voit  dans  la  pneumonie  commune. 

Quant  aux  symptômes  physiques,  on  observe  des  crachats  visqueux 
blancs  ou  tout  au  plus  safranés,  mais*' jamais  rouilles;  il  y  a  de  la  sub- 
matité,  mais  pas  d'augmentation  des  vibrations  thoraciques;  à  l'ausculta- 
Uon  on  entend  des  râles  crépitants  ou  sous-crépitants  plus  ou  moins  fins 
et  un  souffle  doux,  ayant  son  maximum  à  la  racine  des  bronches,  ce  qui 
prouve  qu'il  est  symptomatique  d'une  congestion  pulmonaire  et  non 
d'une  bépatisation.  En  fait,  ces  pneumonies  ne  paraissent  pas  aboutir  à 
un  bépatisation  véritable  ;  anatomiquement,  ce  sont  surtout  des  pneu- 
monies congestives. 

B.  Pneumonies  à  marche  foudroyante.  —  Outre  la  pneumonie  dont 
la  durée  est  abrégée  par  la  bénignité  de  l'affection,  il  en  est  d'autres  chez 
lesquelles  l'issue  fatale  survient  d'une  manière  tellement  rapide  que  Tépi- 
thàîe  de  foudroyante  ne  me  parait  pas  exagérée.  11  en  est  de  plusieurs 
espèces  et  je  ne  prétends  pas  les  indiquer  toutes. 

a)  Une  d'elles  se  rencontre  chez  les  diabétiques.  J'ai,  pour  ma  part, 
'VU,  avec  mon  collègue  le  docteur  Rigal,  un  diabétique  jeune  encore,  non 
arrivé  à  la  période  consomptive,  car  il  était  resté  fort  obèse,  et  chez  lequel 
la  pneumonie  ne  parait  pas  avoir  duré  plus  de  36  heures.  L'autopsie 
n'a  pas  été  faite  et  l'on  peut  sans  doute  se  demander  si  le  début  brusque, 
ta  fièvre,  les  râles  crépitants  que  nous  avons  constatés  prouvent  sutiisam- 
ment  l'existence  d'une  pneumonie;  nous  l'avons  cru,  et  malgré  l'absence 
de  vérification,  le  diagnostic  me  semble  encore  dans  ce  cas  avoir  été  bien 


458  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  vABiÉris  ahorhàlbs  pae  ul 

établi.  —  Bien  que  mal  connue,  la  pneumonie  foudroyante  des  diabétiquei 
n'est  pas  absoluipent  ignorée  des  praticiens.  11  serait  à  désirer  que 
chacun  publiât  les  Taits  de  ce  genre  qu'il  a  pu  observer. 

b)  Sous  le  nom  de  pneumonie  séreuse^  Traubc  rapporte  deux  obser* 
vations,  d'ailleurs  tort  incomplètes,  qui  peuvent  être  citées  ici  :  dans  la 
première,  il  s*agit  d'un  malade  atteint  d'une  insuffisance  aortîque  trëi- 
prononcée  et  qui  fut  pris  d'une  fièvre  typhoïde.  Pendant  le  cours  de  celle-ci, 
— Traube  ne  dit  pas  à  quelle  période  —  il  se  développa  des  symptàmes  pnl* 
monaires  qui,  au  bout  de  24  heures,  revêtirent  un  caractère  tràs-séneoi. 
L'expectoration  consistait  en  uii  liquide  visqueux  et  spumeux,  rouge  bma, 
transparent  en  couche  mince,  et  ne  coagulant  pas.  La  mort  arriva  36  beurei 
après  le  début  des  accidents  pulmonaires.  Le  second  malade  était  an 
homme  de  40  ans,  atteint  de  fièvre  récurrente.  Pendant  la  rémission,  U 
température  tomba  à  55^,4.  Tout  à  coup,  il  fut  pris  de  dyspnée  avec 
sterteur.  On  constata  de  la  matité  et  des  râles  crépitants  dans  la  moitié 
inférieure  droite  de  la  poitrine  ;  la  toux  était  rare  et  courte  ;  la  tempéra- 
ture, ZT,b  ;  les  extrémités  froides.  Mort  quinze  heures  après  TapparitioD 
des  symptômes  pulmonaires. 

Il  ne  s'agit  pas  là  d'une  pneumonie  compliquée  d'œdème  pulmonaire, 
mais  d'un  processus  rapide,  pouvant  ou  non  s'accompagner  d'une  expec- 
toration spéciale.  A  vrai  dire,  je  doute  beaucoup  que  ces  cas  ressortissent 
à  la  pneumonie  lobnire.  L'autopsie  du  premier  malade  n'est  rien  moins 
que  démonstrative,  car  il  est  question  de  plusieurs  foyers,  et  il  n'y  a  pas 
en  d'autopsie  pour  le  second.  Ce  n'est  pas  une  raison  pour  contester 
l'existence  de  la  pneumonie  lobaire  séreuse  dont  j'ai  parlé  à  propos  de 
ranatomie  pathologique,  d'après  Séhiitzenberger.  Mais,  bien  que  ce  der- 
nier n'en  rapporte  point  d'observation,  il  me  parait  certain  que  les  laits 
qu'il  a  désignés  du  nom  de  pneumonie  séreuse  sont  essentiellement  dif- 
lérents  de  ceux  de  Traube. 

c)  Il  est  des  cas  où  l'on  trouve  à  l'autopsie  un  lobe  entier  à  l'état 
dliépatisation  grise  non  douteuse,  quoique  le  début  de  la  pneumonie  ne 
date  que  de  très-peu  de  jours.  11  faut  donc  admettre,  ou  bien  qu'elle  a 
évolue  avec  une  rapidité  extraordinaire,  ou  bien  qu'elle  a  été  purulente 
d'emblée,  sans  passer  par  le  slade  d'hépatisation  rouge,  ce  qui  me  panit 
plus  vraisemblable.  J'en  ai  déjà  dit  un  mot  au  chapitre  de  l'anatomte  pa- 
thologique d'après  un  cas  de  Ranvier;  j'en  marque  aussi  la  place  ici, 
mais  je  ne  peux  faire  plus,  car  leur  symptomatologie  m'est  inconnue.  Je 
sais  seulement  que,  dans  les  cas  observés  par  Ranvier,  la  maladie  n'a  duré 
que  trois  jours  :  il  s'agissait  de  jeunes  soldats  non  habitues  aux  fati- 
gues, aux  privations  et  au  froid  et  qui  abusaient  peut-être  de  l'alcool. 

En  somme,  toutes  ces  pneumonies  à  marche  plus  ou  moins  foudroyan- 
te se  développent  sur  un  mauvais  terrain,  soit  que  le  sujet  soit  alTecté 
depuis  longtemps  d'une  maladie  chronique,  soit  qu'il  soit  placé  dans  les 
conditions  toutes  spéciales  de  non-résistance  que  réalisent  les  fatiguei 
excessives,  le  shoc,  etc. 

2'  Pneumonies  à  durée  prolongée.  — y sl\  dit  plus  haut  (Voy.  Hardie) 


PNËOMOME  LOBAIRE  AIGUË.  —  variétés  anormales  par  la  marche.  439 

ue  la  défenrescence  a  lieu  entre  le  6^  et  le  9^  jour,  mais  exception- 
dlement  elle  peut  se  faire  attendre  jusqu'au  1 4'  jour  et  même  au  delà 
inêquerhépaiisation  grise  soit  nécessairement  établie.  La  cause  la  plus 
rdioairede  cette  durée  insolite  de  la  maladie  est  dans  l'envahissement 
e  l'autre  poumon,  ou  bien  dans  la  formation  successive  de  plusieurs 
lyers  isolés  (forme  particulière  de  pneumonie  à  laquelle  on  donne  le 
MD  de  pneumonie  migratrice).  Étudions  d'abord  la  pneumonie  double, 
iii  est  beaucoup  moins  rare. 

k. Pneumonie  double.-^  Elle  s'observerait,  d'après  Grisolle,  1  fois  sur 
S  chez  l'adulte  ;  chez  l'enfant,  elle  est  peut-être  plus  commune.  Jamais 
le  ne  débute  à  la  fois  dans  les  deux  poumons.  C'est  entre  le  4^  et  le 
>*  jour  (Grisolle),  en  moyenne  le  Séjour,  que  le  second  poumon  est 
mhi.  Grisolle  en  conclut  «  que,  si  une  pneumonie  devient  double,  cela 
i  dépend  pas  d'une  même  cause  qui  aurait  agi  à  la  fois  sur  les  deux  pou- 
ODS,  puisqu'il  y  a  eu  un  trop  long  intervalle  entre  la  provocation  et 
aplosion  de  la  deuxième  pneumonie  ;  il  faut  plutôt  admettre  une  in- 
lence  pathologique  qu'exerce  le  poumon  primitivement  malade  sur  son 
Dgénère  resté  sain,  en  vertu  de  cette  loi  de  souffrance  mutuelle  et 
ciproque  des  organes  pairs  dont  on  trouve  de  si  fréquents  exemples 
ins  la  pratique.  » 

En  d'autres  termes,  et  pour  traduii*e  sa  pensée  en  langage  moderne, 
rifolle  admet  une  action  réflexe  du  poumon  malade  sur  le  poumon  sain, 
li  se  prendrait  au  même  titre  que  le  second  œil  dans  le  cas  d'ophthal- 
lie  sympathique.  Je  laisse  à  Grisolle  la  responsabilité  de  cette  théorie 
ailleurs  ingénieuse,  qui  est  applicable  à  certains  cas,  mais  non  à  ceux 
I  le  second  poumon  parait  s'enflammer  par  suite  de  la  continuation  de 
iction  de  la  cause,  comme  dans  les  cas  de  pneumonie  migratrice  dont 
vais  parler  tout  à  l'heure  et  qui  expliqueront  suffisamment  ma  pensée 
«ir  qu'il  soit  inutile  de  la  développer  ici. 

L'envahissement  du  second  poumon  est  accompagné  d'une  recrudes- 
nce  de  la  lièvre,  presque  toujours,  et  non  dans  un  dixième  des  cas  seu- 
meni,  comme  le  prétend  Grisolle,  qui,  privé  du  thermomètre,  a  pu 
cîlement  la  méconnaître.  Mais  il  est  tout  à  fait  exceptionnel  qu'il  soit 
arqué  par  un  nouveau  frisson  et  par  l'ensemble  symptomatique 
08  ou  moins  solennel  qui  caractérise  le  début  de  la  maladie.  Cela 
t  tout  naturel  si  Ton  admet,  comme  je  viens  de  le  dire,  qu'une  pneu- 
onie  double  n'équivaut  pas  à  deux  pneumonies,  et  qu'il  s'agit  seule- 
ent  d'une  recrudescence  delà  maladie.  Grisolle,  qui  s'étonne  du  début 
us  ou  moins  latent  de  ce  qu'il  appelle  la  seconde  pneumonie,  se  Tox- 
ique cependant  par  les  deux  raisons  suivantes  qui  ont  bien  leur  valeur 
.  dont  il  faut  par  conséquent  tenir  compte  :  1®  parce  que,  dit-il,  elle  se 
Mare  à  l'époque  où  la  première  continue  encore  à  s'aggraver  ou  bien 
«qu'elle  est  parvenue  à  la  période  la  plus  aiguë  ;  —  2^  parce  que  le 
immon  affecté  en  dernier  lieu  l'est  à  un  degré  moindre  que  le  premier  et 
ans  une  étendue  moius  considérable, 
n  résulte  de  cette  quasi-latence  que,  si  une  élévation  de  la  température 


440  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGLE.  —  variétés  ahorvales  fib  tk  HAicn. 

peut  Taire  présumer  renvahissement  de  l'autre  poumon,  c'est  raoscolta- 
tion  seule  qui  peut  donner  une  certitude. 

H.  Pneumonie  à  foyers  successifs.  *—  Il  est  une  forme  de  pneu- 
monie dont  peu  d'exemples  ont  été  publiés,  mais  sur  laquelle  il  importe 
de  fixer  l'attention,  vu  son  allure  tout  étrange.  Voyons  en  quoi  elle 

consiste. 

On  a  dit,  mais  à  tort,  qu'elle  sévit  particulièrement  sur  les  femmes.  Il 
y  a  un  frisson  initial,  une  fièvre  d'intensité  moyenne,  d'une  durée  très- 
courte,  ou  qui  fort  rarement  atteint  la  durée  ordinaire;  puis  la  déCerm- 
ccnce.  —  Jusqu'ici  on  a  donc  Timage  de  la  pneumonie  abortive;  —  mais 
après  une  période  d'apyrexie  de  quelques  heures  à  un  ou  deux  jours,  il  se 
développe  un  nouveau  foyer  dans  le  mémo  poumon  ou  plus  rarement  dans 
le  poumon  du  côté  oppose.  Dans  un  cas  il  y  eut  dix  foyers  successifs;  dam 
chacun  d'eux  la  pneumonie  ne  parut  pas  dépasser  la  période  d'engoué» 
ment.  11  paraîtrait  que  la  durée  totale  de  la  maladie  pourrait  atteindre 
deux  mois!  Dans  le  cas  de  Kelemen,  il  y  eut  quatre  foyers  :  le  premier 
dura  quatre  jours  et  atteignit  rhépatisation;  les  deuxième  et  troisième  ne 
durèrent  qu'un  jour  et  ne  présentèrent  que  les  signes  de  Tengouement,  le 
premier  persista  pendant  leur  durée;  le  quatrième, à  l'autopsie, fut troofé 
à  Tétat  d'hépatisation.  Quand  un  nouveau  foyer  se  déclare  avant  que  le 
jpréccdent  ait  achevé  son  évolution,  il  n'y  a  pas  de  période  d'apyrexie. 
Si  les  foyers  ne  dépassent  pas  la  période  d  engouement,  il  n'y  a  psi 
d'expectoration  colorée. 

Dans  le  cas  de  Kelemen,  la  pneumonie  s'est  développée  dans  le  coun 
d'un  typhus  ;  mais  dans  les  cas  précédemment  publiés  par  Waldenboif 
et  FischK  la  maladie  parait  avoir  été  primitive.  Quant  au  cas  de  Weigand, 
il  est  douteux  qu*il  se  rapporte  à  une  pneumonie  fibrineuse. 

En  terminant  le  peu  que  j'avais  à  dire  sur  cette  forme,  je  tiens  à  dégager 
ma  responsabilité.  Je  Tai  décrite  d'après  des  observations  en  fort  petit 
nombre,  qui  ne  sont  d'ailleurs  pas  irréprochables  en  tous  points;  aussi 
m'ont-cllcs  laisse  dans  le  doute  à  quelques  égards.  Une  particularité  cu- 
rieuse, c*est  l'apparition  tardive  des  râles  crépitants  dans  les  faits  jusqu'ici 
publiés  :  ainsi  dans  deux  cas  (Waldenburg,  Weigand),  on  ne  perçût  de 
raies  crépitants  qu'au  cinquième  jour  de  la  maladie,  et  dans  Tautiteis 
d(  Weigand,  quau  quatorzième  jour  !  Plusieurs  foyers  n*ont  donc  été 
airactérisés  que  par  de  la  matiié,  et  par  un  souffle  (de  congestion?). 

C.  Pneumonie  migratrice,  — La  variété  que  je  viens  d'indiquer  sous 
la  rubrique  de  Pneumonie  à  foyers  successifs  est  désignée  en  Allemagne 
par  l'épithète  de  migratrice  ou  érysipélateuse.  Cette  dernière  dénomi- 
nation est  parfaitement  impropre  et  ne  peut  se  défendre  ;  car  elle  parait 
sous-entendre  une  relation  êtiologique  avec  rérysi|)èle  qui,  en  supposant 
qu'elle  fût  vraie  pour  quelques  cas,  ainsi  que  le  pense  Friedreich  (die 
acute  Milzlumor),  n'est  certainement  pas  exacte  pour  la  plupart  desds 
jusqu'ici  connus.  La  pneumonie  de  nature  vraiment  érysipélateuse,  dont 
mon  collègue  Straus  vient  de  publier  une  remarquable  observation,  o'aF- 
cette  marche  ;  en  tous  cas  elle  ne  s'est  pas  présentée  ainsi  dans 


raEUHONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  variétés  anormales  par  la  marche.   441 

son  obseiration,  qiii  est  certainement  la  plus  régulière  de  toutes  celles 
qai  ont  été  publiées  sous  le  nom  d*érysipèle  du  poumon. 

Quant  à  l'épithète  de  migratrice,  elle  me  parait  ne  bien  s^appliquer 
qn*à  la  Tariété  que  je  vais  maintenant  faire  connaître,  et  qui  établit  en 
qudque  soi^  une  transition  entre  la  Tariété  précédente  et  la  forme  com- 
ffione. 

Dans  cette  variété,  la  maladie  n'évolue  pas  par  étapes  comme  dans  la 
variété  précédente.  Ce  qui  la  dislingue  seulement  de  la  forme  commune 
de  la  pneumonie,  c'est  que  les  parties  primitivement  atteintes  entrent 
déjà  en  résolution  au  moment  où  de  nouvelles  portions  sont  atteintesi. 
Fis^chl  a  défini  la  pneumonie  migratrice  en  disant  que  c'est  une  pneumo- 
nie qui  envahit  Id  plus  grande  partie  de  l'un  ou  des  deux  poumons  et 
qai  dure  longtemps;  mais  cette  définition  est  trop  large:  car  on  englobe- 
'  nit  ainsi,  et  bien  à  tort,  parmi  les  pneumonies  migratrices  toutes  les 
pneumonies  extensives,  c'est-à-dire  celles  dos  pneumonies  communes  qui 
'  8*g»^nt  du  terrain  pendant  quelques  jours,  mais  sans  quitter  le  foyer 
primitif,  c'est-à-dire  sans  émigrer. 

Tout  récemment,  le  docteur  Hamburger  a  publié  plusieurs  cas  de  pneu- 
monie migratrice  recueillis  à  la  clinique  du  professeur  Kussmaul  ;  dans 
la  plupart  des  cas  la  maladie  devait  envahir  les  deux  poumons  ;  malgré 
cela,  la  gravite  de  ces  cas  n^élait  pas  fort  grande,  presque  tous  se  sont 
terminés  par  la  guérison  dans  un  espace  de  temps  variant  entre  dix  et 
dix-sept  jours.  Il  semble  donc  que  la  marche  migratrice  d'une  pneumo- 
nie indique  une  lésion  pulmonaire  plus  superficielle  et  par  conséquent 
moins  grave. 

5*  Pneumonie  périodique. —  Les  seules  pneumonies  dont  l'évolution  se 
fasse  d'une  manière  périodique  sont  les  pneumonies  développées  sous 
rinfluence  de  l'intoxication  paludéenne;  je  n'ai  que  peu  à  dire  de  nouveau 
mr cette  question,  qui  a  été  magistralement  traitée  par  Grisolle. 

11  décrit  une  forme  intermittente  et  une  forme  rémittente;  la  première 
est  de  beaucoup  la  plus  intéressante. 

Comme  la  plupart  des  accidents  pernicieux,  la  pneumonie  peut  ne  se 
développer  que  consécutivement  à  un  ou  plusieurs  accès  de  fièvre  inter- 
mittente simple  ;  mais,  dans  la  plupart  des  cas,  il  y  a  dès  le  premier  accès 
fébrile  quelques  symptômes  thoraciques,  par  exemple  une  douleur  au  côté, 
puis,  aux  accès  suivants,  la  maladie  se  caractérise. 

Le  frisson  par  lequel  débute  l'accèsestplusviolentet  plus  long  que  celui 
de  la  pneumonie  ordinaire  ;  tout  aussitôt  surviennent  un  point  de  côté  et  de 
l'oppression  ;  bientôt  les  malades  rejettent  une  expectoration  caractéris- 
tique, et  l'auscultation  fait  entendre  une  crépitation  fine  et  sèche,  mêlée 
parfois  h  du  souffle.  Quanta  la  fièvre,  elle  a  l'allure  de  la  fièvre  intermit- 
tente :  au  frisson  succède  une  chaleur  ardente  et  après  six  à  douze  heures 
une  détente  complète  avec  diaphorèse.  Les  accidents  thoraciques  dimi- 
nuent  parallèlement  à  la  fièvre.  L'intermission  peut  être  complète  du 
côté  du  thorax  pendant  rintermission  fébrile;  d'autres  fois  il  reste  une  cré- 
pitation grasse,  humide,  de  la  faiblesse  ou  de  la  rudesse  du  murmure. 


4i2  PNEUMONIE  LOBAIHE  AIGUK.  —  variétés  ahormales  pae  làmaiciii. 

ou  bien  des  symptômes  plus  accentués,  si  la  lésion  pulmonaire  est  plus 
avancée.  Dans  une  des  observations  de  Catteloup,  la  fièvre  cessa  deux 
jours  ;  pendant  ce  temps,  il  persista  du  souffle  bronchique  et  de  la  malité 
dans  les  deux  tiers  inférieurs  de  la  poitrine  à  gauche ,  sympiomaliques 
d'une  hépatisation  rouge  prouvée  par  l'autopsie. 

En  général  la  fièvre  pernicieuse  pneumonique  revêt  le  type  tierce  ou 
quotidien  ;  en  se  renouvelant,  les  accès  deviennent  plus  graves  et  plus 
longs,  et  rintermission  est  d'autant  plus  courte  et  moins  complète  que  les 
accès  se  reproduisent  un  plus  grand  nombre  de  fois  :  la  paeiimonie  de- 
vient alors  rémittente.  En  l'absence  de  traitement,  la  lésion  pulmonaire 
s'aggrave  ;  souvent  les  deux  poumons  sont  pris,  il  se  joint  des  troubles 
cérébraux,  et  les  malades  succombent. 

Grisolle  fait  particulièrement  remarquer  :  1^  le  défaut  de  proportion 
lors  du  premier  accès  entre  la  fièvre  et  la  lésion  locale,  encore  jninime  et 
qui  grandit  rapidement  à  chaque  accès  ;  2*"  le  caractère  mou  et  dépres- 
sible  et  la  fréquence  extrême  du  {)Ouls,  même  chez  les  sujets  robustes; 
puis  il  insiste  beaucoup  sur  Tinlerprétation  qu'il  convient  de  donner  aux 
faits  dont  il  vient  de  présenter  l'analyse  «  et  qui  prouvent,  dil-il,  sura- 
bondamment que  la  pneumonie  inteimittente  n'est  pas  une  phlegmasie 
pulmonaire  compliquée  d'une  fièvre  d'accès,  mais  deux  états  connexes 
liés  intimement  l'un  à  Tautrc  et  procédant  de  la  même  cause  miasma- 
tique. )»  Cette  manière  de  voir  est  d'autant  plus  importante  à  enregistrer, 
que  réducation  médicale  de  Grisolle  ne  le  portait  pas  certainement  de  ce 
côté  :  elle  s'est  imposée  à  lui,  comme  s'impose  la  vérité  à  tout  esprit 
droit. 

Postérieurement  à  la  2'*  édition  de  Grisolle,  le  docteur  Ârmaingaud  a 
publié  deux  observations  de  pneumonie  'ntcrmittente  à  type  tierce  qu'il  a 
recueillies  lui-même  dans  le  canton  de  Saint-Ciers-Lalande,  localité  palu- 
iléenne.  Il  y  a  joint  les  tracés  thermiques.  Nous  y  voyons  pour  le  pre- 
mier malade,  âgé  de  oO  ans,  que  le  premier  jour  la  température  était  a 
.lO**,!)  le  malin  et  59**, 8  le  soir  ;  le  lendemain  à  57%8  et  le  surlendemain 
au  même  degré  que  le  premier  jour.  Guérison  après  ces  deux  accès  par 
le  sulfate  de  quinine.  La  pneumonie  était  caractérisée  par  un  point  de 
côté,  des  crachats  sanglants,  de  la  matité  et  des  râles  crépitants.  — Bans 
son  second  cas,  qui  concerne  un  jeune  homme  de  28  ans,  la  température 
était  à  W  le  premier  et  le  troisième  jour,  et  à  56*,9,  le  deuxième.  Mêmes 
symptômes  locaux.  Guérison  par  la  quinine. 

Un  médecin  militaire  allemand  a  aussi  publié  un  cas  de  pneumonie 
inlerniittentc  avec  température.  Voici  quelques  traits  de  son  observation 
(Dniiarlic  mc<L  Wochenschrifl,  1876,  n**  49). 

Il  s'agit  diifi  soldat  qui,  le  15  soir,  est  pris  de  fièvre  :  température  59*,5, 
respiration  24.  A  la  base  droite,  râles  crépitants  dans  une  étendue  de 
\  reutimètres  carrés,  crachats  muqueux  rouilles;  pas  de  matité,  mais  il 
rxirite  un  point  douloureux. 

^  '        'M,  T.  57**,5:  pas  de  toux,  même  au  moment  des  respirations 
la  de  point  de  côte. 


PNEDMWnE  LOBAIRE  AIGUË/  --  vARiÉrfe  akormalbs  par  la  marche.   443 

A  3  heures,  frisson  ;  le  soir,  T.  W,b  ;  crachats  rouilles  ;  coloration 
ietérique  des  conjonctives  ;  respiration  56,  ràlcs  crépitants. 

15  matin,  57^,5,  état  général  bon,  mais  crachats  rouilles,  mêlés  à  du 
mncos  purulent  ;  pas  de  raies  crépitants  ;  à  1 1  heures,  quinine  2  gram- 
mes; le  soir  pas  d'accès. 

16  matin,  56^,5;  guérison  ultérieure. 

Dana  la  forme  rémittente,  le  mouvement  fébrile,  une  fois  établi,  con- 
itinae  sans  interruption,  mais  en  éprouvant  de  temps  en  tcm|>s,  et  h  des 
linlerTaUes  réguliers,  des  cxacerbations  et  des  rémissions  :  je  nn  crois  pas 
fésiVDir  entrer  dans  aucun  détail.  Grisolle  avouant  lui-même  qu*on  a  réuni 
'^WÊt  ce  nom  des  faits  disparates. 

4*  Pneumonie  à  marche  alternante.  —  Je  désire  faire  entendre  par 

^e  dénomination,  peu  claire  je  Tavoue  et  que  je  suis  prêt  à  changer  pour 

^  pe meilleure,  la  pneumonie  dont  l'évolution  est.  momentanément  sus- 

^pndae  par  le  développement  d'autres  accidents,  conformément  à  Tapho- 

^  ^iÊOmduobus  laboribus  ;  puis  qui  reprend  quand  ces  accidents  diminuent 

^léeiproquement;  bref,  la  pneumonie  dans  laquelle  on  observe  un  6a- 

jÊKÊOtment  entre  la  lésion  pulmonaire  et  une  autre  lésion.  C'est  à  peu 

,^avts  exclusivement  dans  le  cours  du  rhumatisme  articulaire  aigu  qu'on 

j^daenré  cette  marche  singulière  de  pneumonie;  néanmoins  je  me  suis 

êde  désigner  ce  paragraphe  du  nom  de  pneumonie  rhumatismale  : 

il  l'en  faut  que  toute  pneumonie  née  sous  l'inQucnce  du  rhumatisme 

te  cette  marche,  qui  est  fort  rare.  D'ailleurs,  je  ne  traite  pas  daus 

pitre  des  espèces  de  pneumonie,  mais  uniquement  des  anomalies 

t<o  iBircbe,  quelle  que  soit  la  nature  de  la  pneumonie.  Je  ne  devais 

N'Oe  pai  employer  la  désignation  de  rhumatismale,  bien  que  les  cas  que 

*>  vos  soient  en  effet  sous  la  dépendance  du  rhumatisme. 

Z*^^  ne  trouve  cette  forme  suffisamment  décrite  dans  aucun  auteur  clas- 

•   Grisolle,  qui  met  les  pneumonies  rhumatismales  sur   le   même 

que  les  pneumonies  vermineuses,  ce  qui  n'est  pas,  je  pense,  leur 

beaucoup  d'honneur,  dit  que  ces  pneumonies,    qu'il  lient  pour 

^**Uiemenl  rares,  «  peuvent,  une  fois  déclarées,  ne  pas  différer  par  leur 

de  celles  qui  ont  une  autre  origine  ;  n  mais,  continue-t-il,  «  le 

ire  peut  avoir  lieu  x>,  et  il  cite,  à  l'appui  de  son  dire,  un  cas  fort 

i^NUquable  qu'il  a  observé  avec  Louis,  et  qui  est  un  exemple  de  pncu- 

^^^ie  i  marche  alternante  ;  Grisolle  a  été  plus  frappé  par  le  peu  de 

^7^  des  symptômes  physiques  de  la  pneumonie  que  par  leur  alternance 

les  douleurs  articulaires  ;  cependant  il  la  signale.    «  Du  malin  au 

9  dii-il,  on  voyait  le  souffle  être  remplacé  par  la  crépitation  et  réci- 

^^^{vieraent;  jamais  poui*tant  dans  l'intervalle  de  ces  sortes  de  crises  le 

Qion  ne  recouvrait  sa  perméabilité  :  il  restait  toujours  un  son  obscur 

<il  bruit  respiratoire  affaibli  ;  mais  de  temps  en  temps,  et  presque 

Ours   pendant  une  recrudescence  des  douleurs  articulaires,  on 

jP^it  le  lobe  inférieur  se  prendre  à  son  tour.  C'était  d'abord  une  cré- 

^^on  fine;  puis  au  bout  de  quelques  heures  survenait  du  souffle  et  do 

^^^nchophonie.  Ces  crises,  qui  duraient  chaque  fois  trois  à  quatre  jours, 


4i4    PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  FORyis;  vARiiTis  sfMPMUi 

se  sont  reproduites  en  trois  mois  dix  à  douze  fois.  A  aucune  des  crises  il 
n*y  eut  d*expectoration  caractéristique.  » 

La  thèse  de  mon  collègue  Femet  sur  le  rhumatisme  aigu,  (Psrô*  iM5) 
renferme  une  observation  d^alternance  remarquable  entre  la  pneumooîe 
et  les  douleurs  articulaires,  communiquée  par  Besnier  (p.  69). 

Le  docteur  Kobryner  vient  de  publier  dans  le  Bulletin  de  thérapeatifiie 
Inobservation  d'un  enfant  de  11  ans  qui,  le  8  décembre,  eut  deip^ts 
frissons  erratiques  et  de  la  fièvre  le  soir  ;  a  partir  du  12,  la  fièvre  fat 
continue  «  avec  de  forts  redoublements  de  3  à  4  heures  de  durée,  a  Ea 
même  temps  les  signes  locaux  (râles  crépitants  et  soufOe)  deneoneai 
percepliblcs  et  la  douleur  de  côté  intolérable. 

A  partir  du  14  décembre,  douleurs  articulaires  dans  les  genoux,  ki 
hanches,  et  pendant  la  durée  de  ces  douleurs  le  point  de  côté,  roppro- 
sion  et  les  signes  stéthoscopjques  disparurent  complètement.  —  Une  bn- 
cule  en  sens  inverse  éclaira  définitivement  le  médecin,  puis  une  autre. ~ 
Bref,  la  pneumonie  l'emporta  le  18  et  ne  cessa  que  le  24,  époque  i  la- 
quelle l'application  de  sinapismes  aux  genoux  ramena  la  fluxion  m 
membres  inférieui*s  pendant  5  jours;  à  partir  de  ce  moment  le  malade 
fut  guéri. 

Voilà  bien  un  type  de  la  forme  alternante.  Encore  une  fois,  el  j'j 
reviendrai  plus  loin,  quand  je  traiterai  des  espèces  de  pneumonie,  toute 
pneumonie  rhumatismale  n'évolue  pas  de  cette  manière,  tant  s'en  bot. 
Cette  forme  est  d'une  excessive  rareté. 

Je  crois  avoir  terminé  ce  que  Ton  peut  dire  des  anomalies  de  niardie. 
Je  passe  maintenant  aux  variétés  symptomatiques  de  la  pneumonie. 

II.  Formes;  variétés  symptomatiques.  —  Je  traiterai  d'abord  desvariétà 
qui  se  distinguent  surtout  par  un  état  général  dépendant  du  génie  de 
la  maladie  ou  du  sujet  lui-même;  ces  variétés  sont  désignées  d'halntade 
sous  le  nom  de  formes.  Viendront  ensuite  celles  qui  tiennent  è  des 
conditions  anntomiques  particulières  delà  pneumonie. 

A.  Forme  inflammatoire  ou  sthénique.  —  En  1862,  Gairdner  (d'Edin- 
burg)  écrivait  :  «  Les  pneumonies  observées  autrefois  dans  cette  villepir 
Cullen  et  Gregory  sont  devenues  excessivement  rares;  les  pneumonies 
actuellement  ne  réclament  qu'un  traitement  antiphlogistique  peu  éner- 
gique et  même  guérissent  sans  traitement.  x>  Sauf  le  dernier  membre  de 
phrase,  je  crois  qu'il  n'est  guère  de  médecins  de  grande  ville  qui  ne 
partagent  Topinion  de  Gairdner;  il  est  certain  que  la  forme  sthénique,  la 
forme  qui,  parait-il,  était  la  plus  commune  au  commencement  de  noire 
siocle,  a  dis))nru.  Je  n'ai  pas  les  éléments  pour  la  décrire;  son  étude  n'a 
d'ailleurs  pas  actuellement  un  grand  intérêt  pratique  ;  je  devais  au  moiai 
rappeler  son  existence. 

B.  Pneumonie  bilieuse.  —  Cette  forme  parait  avoir  été  observée  par 
Sydenham  en  1675,  par  Baglivi  en  1691,  parlluxham  en  1733  et  1737, 
par  Zimmermann  et  par  Tissot  (1753),  la  même  année  par  Sauvages,  et 
en  1765-68  par  Lepecq  de  la  Clôture.  En  1773,  elle  sévit  dans  plosiean 

trées  de  TEurope.  Quelques  années  plus  tard,  elle  fut  décrite  parStoU. 


PNEUMœiIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  formes;  vARiérés  sYUPTOMAnQims.    445 

Grâce  à  ces  médecins  illustres,  la  pneumonie  bilieuse  a  joui  d*une 
grande  célébrité.  Aujourd'hui  son  importance  est  bien  diminuée.  Elle 
oilt  sous  rinflucnce  de  constitutions  épidémiquesy  so\i  temporaire,  d'où 
sa  fréquence  à  certaines  époques,  sa  rareté  dans  d'autres,  soit  surtout 
stoHonnaire,  c'est  pourquoi  elle  est  relativement  commune  dans  le  midi 
de  TEurope.  Je  n'en  ai  jamais,  pour  ma  part,  observe  que  deux  cas,  encore 
anl  caractérisés.  Aussi  j'en  emprunte  la  description  aux  médecins  de 
Montpellier  et  à  Grisolle  : 

Je  rappelle  ici  que  Fétat  bilieux,  dans  le  sens  traditionnel,  n'a  rien  de 
MNDunon  avec  l'ictère,  ou  du  moins  que  l'ictère  n'en  est  pas  un  des  élé- 
ments essentiels  :  souvent  il  manque  absolument  ;  il  n*y  a  pas  de  bile 
dans  Turine,  pas  de  ralentissement  du  pouls,  pas  de  coloration  jaune 
uéeessaire  de  la  peau  ou  des  muqueuses.  Dès  loi*s  il  serait  préférable  de 
dénommer  par  une  autre  épithète  l'état  que,  depuis  Stoll,  on  appelle 
réiat  bilieux.  Celle  de  gastrique  mériterait  la  préférence. 

Ed  effet,  dans  l'état  dit  bilieux  il  existe  une  céphalalgie  gravative  ;  les 
amlades  éprouvent  souvent  de  la  douleur  à  Pépigastrc  et  y  rapportent  un 
MOtiment  de  plénitude.  Ils  ressentent  une  saveur  le  plus  souvent 
imère,  un  dégoût  pour  tous  les  aliments:  ils  ont  des  envies  de  vomir.  La 
langue  est  très-sale. 

Or,  c*est  là  ce  que  nous  appelons  aujourd'hui  l'état  gastrique. 

La  pneumonie  dite  bilieuse  survient  souvent  après  des  prodromes  de 
gastricité,  à  l'occasion  d'un  excès,  d'une  fatigue  quelconque,  quelquefois 
après  un  refroidissement  que  Grisolle  dit  avoir  noté  chez  les  trois  quarts 
db  ces  malades  ;  mais  en  cela  il  n'est  pas  d'accord  avec  les  observateurs 
de  Montpellier.  Son  début  n'est  pas  solennel  :  quelquefois  il  ne  parait 
cionstilué  que  par  une  aggravation  des  prodromes  ;  le  plus  souvent  il  est 
Hunrqué  par  une  série  de  petits  frissons.  La  température  est  élevée  au 
éébui  et  va  en  s'abaissant  les  jours  suivants;  la  peau  sèche  et  parfois 
mordicante,  le  pouls  faible  et  dépressible,  fréquent,  parfois  irrégulier  ; 
dies  un  tiers  des  sujets,  il  y  a  de  l'accablement  et  de  la  prostration 
qui  n'est  pas  en  rapport  avec  l'étendue  et  le  degré  de  la  phlegmasie  pul- 
monaire; de  la  constipation  chez  les  trois  quarts  des  malades  ou  bien  des 
adles  verdàtres,  rarement  des  vomissements  bilieux,  mais  presque  tou- 
jours de  la  douleur  épigastrique  ;  bref  tous  les  symptômes  do  l'état  gastri- 
que auxquels  il  faut  joindre  des  symptômes  nerveux  plus  accentués  que 
dans  le  simple  état  gastrique  :  une  céphalalgie  souvent  déchirante  et  des 
élourdissements,  des  éblouissements,  des  vertiges,  le  tout  avec  exacerba- 
lion  le  soir.  Les  symptômes  thoraciques  ne  diffèrent  de  ceux  de  la  pneu- 
monie franche  que  par  quelques  nuances  :  un  point  de  côté  moins  intense, 
des  crachats  diffluents,  séreux,  jaunâtres,  dans  lesquels  nagent  des 
crachats  rouilles.  Le  sang,  dit-on,  n'est  pas  couenneux  ;  l'urine  ne  ren- 
Cenne  pas  nécessairement  des  pigments  biliaires;  le  visage  et  en  parti- 
ealier  les  conjonctives  ne  présentent  qu'exceptionnellement  une  colora- 
tion ictérique.  Ce  qui,  d'après  les  auteurs,  caractérise  la  pneumonie 
bilirase,  plus  encore  que  les  symptômes   précédents,  c'est  l'efficacité 


446    PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  formes  ;  vAni£ris  STiinoiunQiiBS. 

«  merveilleuse  »  de  la  médication  évacuante.  Si  cette  indication  n'est  pas 
saisie,  la  maladie,  disent-ils,  suit  sa  marche,  et  même  des  accidents 
sérieux  se  déclarent,  n  Chez  deux  malades,  dit  Grisolle,  des  symptAmes 
typhoïdes  graves  succédèrent  aux  phénomènes  bilieux,  parce  qu'on  aftit 
négligé  le  traitement  rationnel.  »  A  cet  égard  le  tableau  n*est-il  pu  un 
peu  assombri? 

C.  Pneumonie  asthénique,  —  dite  aussi  pestilentielle,  nerr^uey 
putride  ataxique,  adynamique,  maligne,  érysipélateuse,  typhoïde.  Toalei 
ces  épithètes  laissent  beaucoup  à  désirer  ;  la  dernière  prête  à  l'équÎToqoe. 
Je  préfère  celle  A'asihénique.  Pour  prévenir  toute  erreur,  je  rappeDa 
qu'il  s*agit  seulement  de  pneumonies  primilives,  et  non  pas  de  poflfr* 
monies  secondaires  développées  dans  le  cours  de  maladies  graves,  d*aM 
dothiénentérie,  par  exemple.  Ce  qui  constitue  la  forme  de  pneurnooie 
dont  je  vais  rappeler  les  principaux  caractères,  ce  n'est  donc  pas  seule- 
ment l'apparence  plus  ou  moins  typhoïde,  asthénique  ou  adynamique; 
il  y  faut  joindre  la  condition  essentielle  que  la  maladie  s'est  dévdop- 
pée  comme  affection  primitive.  C'est  ainsi  que  l'ont  comprise  Grisolle  el, 
plus  récemment,  Leichtenstem,  dont  je  vais  résumer  les  descriplioDi. 

Ainsi  comprises,  les  pneumonies  asthéniques  se  rencontrent  à  l'élal 
sporadiquc  et  épidcmique.  Cette  dernière  circonstance  révèle  l'indivi* 
dualité  de  cette  variété  de  pneumonie  et  lui  donne  son  cachet  :  elle  nous 
montre,  en  effet,  qu'elle  ne  dépend  pas  tant  des  prédispositions  indivi- 
duelles mauvaises  que  d'une  influence  générale  frappant,  à  un  momei^ 
et  dans  un  même  lieu,  des  individus  dans  des  conditions  les  plus  oppo- 
sés, jeunes  et  vieux,  faibles  et  forts,  etc. 

Née  sous  rinfluence  de  causes  générales,  l'anection  ne  se  révèle  pas 
tout  d'abord  par  les  signes  locaux  de  la  pneumonie  ;  le  plus  souvent,  il 
y  a  des  prodromes  bien  accusés  pendant  plusieurs  jours.  Grisolle,  chez 
plus  des  deux  tiers  de  ses  malades,  a  noté  «  de  la  céphalalgie,  un  malaise 
généi*al,  surtout  un  anéantissement  des  forces.  »  D'après  lui,  la  6èvre 
était  nulle  ou  psu  considérable ,  assertion  qui  ne  mérite ,  d'ailleon, 
qu'une  créance  limitée,  en  l'absence  d'observations  thermométriques 
régulières  ;  parfois  il  y  avait  des  épistaxis  et  de  la  diarrhée  ;  mais  alon 
même  que  ces  symptômes,  d'ailleurs  rares,  faisaient  défaut,  on  était  teolé 
de  soupçonner  le  début  d'une  fièvre  typhoïde.  Dans  l'épidémie  qu'a 
décrite  Torchet,  il  y  avait  en  outre  de  la  céphalalgie  sus-orbitaire. 

Relativement  aux  symptômes  locaux,  le  point  de  côté  est  plus  difliiset 
moins  violent  que  dans  la  pneumonie  franche  ;  le»  signes  physiques 
locaux  moins  précoces  et  moins  nets  que  dans  cette  dernière.  Souvent  oi 
ne  perçoit  qu'un  affaiblissement  du  murmure  vésiculaire;  ou  bien  les  râbi 
crépitants  sont  plus  gros  ;  parlois  il  semble  que  l'hépatisation  reste  tout 
d'abord  centrale;  en  tout  cas,  elle  est  lente  à  se  manifester;  au  contraire, 
le  passage  de  l'hépatisation  rouge  à  l'hépatisation  grise  est  rapide.  QiuË 
à  la  portion  du  poumon  où  siège  l'affection,  dans  quelques  épidémies  f'i 
été  de  préférence  le  sommet  plutôt  que  la  base,  contrairement  à  ce  qui i 
lieu  dans  le  cas  de  pneumonie  primitive,  et  plutôt  le  sommet  droit  que  le 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  formes  ;  variétés  symptomatiques.     ii7 

gauche,  quelquefois  les  deux  sommets,  raffcction  étant  beaucoup  plus 
souvent  bilatérale  que  cela  n'a  lieu  dans  le  cas  de  pneumonie  franche. 
L'oppression  est  en  général  fort  marquée.  Le  plus  souvent,  la  pneumonie 
esl  compliquée  d*épanchement  pleurétique ,  d'où  la  fréquence  de  la 
rétraction  thoracique  consécutive,  signalée  par  Slokes,  dans  les  cas  où 
le  malade  guérit,  ce  qui  est  rare;  car  le  plus  souvent  Tépanchement  tho- 
racique  est  purulent. 

Quant  aux  symptômes  généraux,  il  faut  distinguer  deux  sortes  de 
variétés  :  !•  la  forme  aiaxique,  avec  délire  précoce,  soit  violent,  soit 
paisible,  ou  simplement  subdélirium,  soubresaut  des  tendons,  et  par- 
fois raideur  tétanique  des  membres  ; 

2*  La  forme  adijnamiquey  plus  fré(iuente,  dans  laquelle  radynamie 
survient,  ou  bien  avant  l'apparition  de  signes  physiques  locaux,  ou  quel- 
ques jours  après  eux  :  «  la  face  porle  l'empreinte  de  la  stupeur;  les 
malades  restent  constamment  couchés  sur  le  dos.  leur  faiblesse  est 
extrême,  la  contractilité  musculaire  tellement  altérée  qu'ils  ne  peuvent 
rester  assis,  à  moûis  d'être  soutenus  par  des  aides;  si  on  les  abandonne 
i  eux-mêmes,  ils  perdent  aussitôt  l'équilibre  et  retombent  sur  leur  oreil- 
ler comme  une  masse  inerte.  Le  ventre  n'est  pas  ballonné,  mais  il  existe 
parfois,  dès  le  début,  une  diarrhée  fétide  sans  coliques.  » 

La  température  est  habituellement  fort  élevée  ;  cependant  ce  caractère 
n*e8t  pas  constant,  au  contraire,  la  tuméfaction  de  la  rate  ne  manque 
point;  parfois  elle  est  fort  prononcée;  il  peut  s'y  joindre  la  tuméfaction 
du  foie.  L^albuminurie  est  aussi  la  règle.  L'ictère  n*est  pas  une  comph'ca- 
lion  rare,  le  sang  a  été  trouvé  sirupeux  (Kodmann)  ;  en  tout  cas,  il  ne 
renfisnne  pas,  à  beaucoup  près,  la  proportion  de  Obrine  que  l'on  y  ren- 
contre dans  la  pneumonie  franche. 

Les  pneumonies  miasmatiques,  dont  on  a  tant  parlé  dans  ces  dernières 
années,  revêtent  presque  toutes  la  forme  asthénique. 

D. Pneumonie  de  starvation,  —  Voilà  une  forme  qui  pourrait  bien  aussi 
s'appeler  asthénique, si  cette  épithète  n'avait  déjà  son  emploi:  car  l'asthénie 
y  esl  profonde  ;  seulement  au  lieu  d'un  état  général  fébrile,  c*cst  pendant 
presque  toute  la  durée  de  la  maladie  Vapifrexie  ou  un  état  à  peu  près 
apjrétique  qui  accompagne  cette  forme  de  pneumonie  particulière  aux 
individus  profondément  cachectiques,  notamment  aux  cancéreux  arrivés 
à  la  période  ultime.  Elle  peut  débuter  insidieusement,  sans  symptômes 
capables  d'éveiller  l'attention  et  avoir  une  durée  plus  longue  que  celle  de 
la  pneumonie  ordinaire. 

Wunderlich  a  rapporté  Inobservation  d'une  pneumonie  chez  un  lié- 
mophilique  ;  pendant  tout  son  cours,  la  température  est  restée  sub- 
fébrile. 

Dans  quelques  cas,  que  j'ai  eu  l'occasion  d'observer,  Tapyrexie  n'a  |)ns 
été  complète  :  la  température  centrale  s'est  élevée  à  ZS**  et  momentané- 
ment à  quelques  dixièmes  au-dessus,  élévation  d'ailleurs  tout  à  fait 
insuffisante  pour  faire  à  elle  seule  soupçonner  une  pneumonie. 

La  pneumonie   que  j'indique   ici   est,  comme  je  viens  de  le  dire,  au 


448    PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  formes  ;  YJMÉns  sTMPnHunom. 

premier  chef  une  pneumoaîe  sccondairo,  la  pneumonie  des  cachectiques. 
II  est,  je  crois,  assez  légitime  de  faire  rentrer  dans  cette  forme  les  pneu- 
monies plus  ou  moins  latentes ,  mais  primitives,  qui  se  rencontrent  par- 
fois dans  les  hospices  consacrés  à  la  vieillesse.  Grisolle  parle  d'individus 
qui  <x  après  quelques  jours  de  simple  maladie,  d^ui  peu  d'inappétence, 
s'affaissent  tout  à  coup,  et  meurent  subitement;  à  Touvcrturc  du  cadavre 
on  est  étonné  de  trouver  une  hépalisation  grise  d*un  ou  de  plusieurs 
lobes.  »  Prus  a  même  vu  à  Bicétre  <x  un  vieillard  que  Von  ne  croyait  pas 
malade  et  qui  tomba  mort  dans  la  cour.  »  A  Tautopsie,  on  .recoomit 
qu*il  n'existait  plus  qu'un  quart  des  poumons  qui  fut  perméable;  tootk 
reste  était  frappé  d*hépatisation  grise. 

Quoique  la  fièvre  n'ait  pas  été  constatée  chez  les  malades,  il  ne  m*est 
pas  démontré  qu'elle  n'ait  pas  existé,  au  moins  au  début  de  la  maladie» 
Ce  que  j*ai  vu  à  la  Salpétrière,  lorsque  j'avais  l'honneur  d'être  interne 
du  professeur  Charcot.  me  porte  à  le  croire.  Ainsi  que  je  l'ai  rappelé  plai 
haut,  en  traitant  de  la  fièvre  et  particulièrement  de  la  température  péri- 
phérique, les  apparences  de  la  fièvre  sont  parfois  absentes  chez  un  vieil- 
lard ;  il  faut,  pour  avoir  une  certitude  à  cet  égard,  prendre  la  température 
centrale. 

Dans  la  véritable  pneumonie  de  starvation,  au  contraire,  —  et  c*est  ce  qui 
la  distingue  des  pneumonies  séniles  dont  je  viens  de  parler,  — -  non-seu- 
lement les  apparences  de  la  fièvre  manquent,  mais  même  l'élévation  de 
la  température  centrale  parait  faire  défaut  pendant  la  plus  grande  partie 
de  la  durée  de  la  maladie.  Cette  anomalie  tient  peut-être  à  ce  que  la  pnh 
duction  de  chaleur  chez  les  sujets  profondément  cachectiques,  est  trop 
minime,  ou  bien  à  ce  que  la  pneumonie  est  chez  eux  d'une  nature  didè- 
rente,  d*unc  essence  moins  fébrile. 

E.  Pneumonie  entée  sur  une  bronchite.  —  Je  n'entends  ici  ni  U 
broncho-pneumonie  ni  la  pneumonie  fibrineuse  ordinaire  compliquée  de 
bronchite  ;  je  veux  parler  de  la  pneumonie  entée  sur  une  bronchite 
antérieure,  et  qui  est  une  complication  de  cette  bronchite,  loin  d'être 
compliquée  par  elle.  11  est  donc  question  ici  d'une  pneumonie  secon* 
daire,  qui  reste  au  second  plan  derrière  la  bronchite  qui  domine  la 
scène.  Voilà  l'affection  que  j'ai  en  vue.  C'est  une  forme  symptomatifue 
un  peu  bâtarde,  qui,  à  certains  égards,  établit  une  transition  entre  la 
pneumonie  fibrineuse  ordinaire  et  la  broncho-pneumonie^  en  se  rappro- 
chant assez  de  cette  dernière  au  point  de  vue  des  symptômes,  puisque 
beaucoup  de  praticiens  la  confondent  avec  la  vraie  broncho-pneumonie, 
en  raison  de  la  similitude  des  symptômes  physiques,  et  aussi,  jusqu'à  un 
certain  point,  des  symptômes  généraux. 

Cette  forme  est  plus  commune  chez  les  enfants  que  chez  U*s  adultes; 
chez  ces  derniers  on  l'observe  dans  certaines  contrées  du  midi  de  la 
France,  dans  les  lieux  bas  et  humides,  tandis  que  la  pneumonie  à  fomie 
franche  sévit  sur  les  hauteurs  voisines.  On  la  rencontre  aussi  sur 
quelques  parties  du  littoral  (c'est  particulièrement  la  pneumonie  desgeni 
des  côtes),  enfin  dans  certaines  constitutions  médicales.  Ainsi  les  pncuaio- 


îDMONlB  LOBÀIRE  AIGUË.  —  formes,  variétés  stmptomatiqubs.    4M 

ow^t.    compliqué  répidémie  de  grippe  de  1837  ont,  je  crois,  révélu 
ci*  symptomalique. 

^    li^i  donne  sa  physionomie,  c'est  la  subordination  des  signes 
^  Ici   pneumonie  vis-à-vis  de  ceux  de  la  bronchite  généralisée  :  les 
iLonts  sont  masqués  parles  râles  sous^^répitants  ou  sibilants,  le 
de  gros  râles  ronflants,  Texpectoration  caractéristique  peut  faire 
elle  est  habituellement  dans  ce  cas  simplement  visqueuse  et 
colorée  ;  en  tous  cas,  elle  peut  passer  inaperçue,  à  cause  de 
de  Texpectoration  bronchique.  La  dyspnée  est  intense. 
^our   les   symptômes  locaux  de  la  période  d*état.  Quant  aux 
du  début,  le  point  de  côté  est  moindre,  mais  ri  existe;  il  y  a 
bref,  bien  que  ce  soit  une  pneumonie  secondaire,  le  début 
tout  à  fait  insidieux.  Uourmann  et  Dechambre  ont  dans  cer- 
^^  noté  un  fait  paradoxal  en  apparence,  et  qui  cependant  s'explique  : 
-^^lards  catarrheux  ont  cessé,  disent-ils,  de  tousser  au  moment  où 
^  ^té  pris  de  pneumonie.  Evidemment  la  toux  ne  s'est  pas  arrêtée 
^^nière  durable,  mais  elle  a  été  momentanément  suspendue  parce 
iPour  un  temps,  les  symptômes  du  catarrhe  ont  cédé  le  pas  à  ceux 
^   Nouvelle  phlegmasie  plus  grave  qui  entrait  en  scène,  conformé- 
i  Fadage  :  duobus  laboribus^  etc. 
^  cette  forme,  les  symptômes  généraux,  plus  encore  que  les  signes 
^1  éprouvent  d'importantes  modifications  :  la  température  est  moins 
^«  1^  exacerbations  vespérales  plus  marquées,  et  il  y  a,  mais  moins 
^Hiis  la  broncho-pneumonie,  une  tendance  à  la  rémittence.  Alors 
^  que  la  pneumonie  s'accompagnant  de  bronchite  est  franchement 
^H^iney'dit  Jurgensen,  elle  perd  sa  marche  cyclique  au  moment  de  la 
^  :  ao  lieu  de  l'apyrexie,  il  y  a  une  simple  rémission,  commencement 
^  période  amphibole  de  durée  indéterminée.  La  résolution  du  foyer 
l'IllODiqQe  est  traînante  ;  les  forces  sont  lentes  à  revenir  ;  parfois  même 
Clablii  une  fièvre  hectique  dont  la  terminaison  est  fatale.  D'autres 
imtout  chez  les  emphysémateux,  la  mort  arrive  par  insuffisance 
^ftf|iie,  complication  qui  sera  étudiée  plus  loin. 
y  me  borne  à  ces  indications  fort  sommaires.  Pour  une  description 
l^ète  de  cette  forme  de  pneumonie  que  je  n'ai  fait  qu'indiquer  ici  je 
^ie  aux  remarquables  publications  des  médecins  de  Montpellier  qui, 
ftiYorisésque  nous  à  cet  égard,  ont  eu  souvent  l'occasion  de  l'observer, 
ttitt  80U8  sa  forme  bénigne,  et  l'ont  englobée  parmi  les  fluxions  de 
^Hne  de  nature  catarrhcUe,  lesquelles  comprennent  aussi  les  cas 
jTti  iodiqués  plus  haut  sous  le  nom  de  pneumonie  aborlive. 
^' passe  aux  variétés  dépendant  des  conditions  anatomiques  de   la 
looie.  Après  celles  qui  tiennent  à  son  siège  (p.  du  sommet,  p.  cen- 
je  me  bornerai  à  en  signaler  une  seule,  où  avec  une  matité  absolue 
— -  signe  d'auscultation  est  le  silence  respiratoire,  soit  en  raison  de 
Qce  de  moules  fibrineux  dans  les  bronches,  soitfpar  un  méca- 
^indiquéparStoke8.Parabréviation,on  pourrait  désigner  du  nom  de 
^ikiSpleurétique  la  singulière  anomalie  symptomatique  qui  en  résulte . 

^^.  MCT.  H<D.  IT  CBUl.  XXVIII  —  20 


^A 


4^0    PNEUMONIK  LOBÂIRE  AIGUË.  —  formes.  VARiiriB  STHnoMATiQn^^^ 

A.  Pneumonie  du  sommet.  —  Ce  n*cst  pas  constamment,  taate^ 
que  la  pneumonie  siégeant  au  sommet  du  poumon  prend  uneph»*^^^^^ 
particulière  :  aussi  plusieurs  auteurs,  et  des  plus  autorisés,  se  ^^^^  ~ 
considérer  comme  une  variété  à  part.  Je  n'y  contredirais  poiv«_ 
un  bon  nombre  de  cas,  surtout  chez  i*enfant,  elle  ne  présenfap^  ^ 
ticularités  symptomatiques  intéressantes  et  presque  toujours 
un  peu  plus  lente  que  les  pneumonies  de  la  partie  moyenr:, 
base  du  poumon. 

Indépendamment  de  toute  action  causale,  et  par  cela  seu^ 
monie  occupe  le  sonmiet  du  poumon,  elle  a  une  tendance  à 
tage  les  sympathies,  ou,  pour  parler  le  langage  moderne»  i 
actions  morbides  réflexes  plus  facilement  que  celle  qui  a  unta^f^ 
Chez  l'enfant  notamment,  où  ces  actions  sentie  plus  facilement aiv* 
jeu,  la. pneumonie  dite  cérébrale,  que  nous  étudierons  queifiai 
plus  loin  au  chapitre  des  complications,  est  le  plus  souvent  W 
monie  du  sommet. 

On  a  cru  remarquer  que  la  température  est  généralement  ]ibi 
dans  la  pneumonie  du  sommet.  Si  le  fait  est  exact,  on  s'enrendnit 
de  même  en  disant  que  Tirritation  du  sommet  du  poumon  amètt 
centres  nerveux  qui  président  à  la  régulation  de  la  chaleur  v 
turbation  plus  profonde  que  ne  le  font  les  excitations  d'autres 
cet  organe.  Cette  explication  serait  aussi  valable  pour  i'exagéntioi 
rougeur  malaire  dans  la  pneumonie  du  sommet. 

C'est  certainement  à  une  action  réflexe  qu'est  due  l 'intensM 
dyspnée  dans  cette  variété  de  pneumonie  (Bouiliaud,  Andral, 
et  Dechambre.  —  D'après  ces  deux  derniers  elle  est  surtout 
quand  la  pneumonie  occupe  le  sommet  gauche).  On  ne  peut  1* 
autrement,  car  dans  l'acte  respiratoire    le  sommet,  recevant  pi 
sert  relativement  peu  à  l'échange  des  gaz. 

Voilà  pour  les  particularités  qui  reconnaissent  pour  cause  Vkusf 
actions  réflexes.  Les  suivantes  ne  sonl  plus  du  même  ordre,  foà 
tiennent  toujours  à  la  localisation  de  la  pneumonie. 

Beaucoup  plus  souvent  que  dans  les  pneumonies  ayant  unaabe 
l'expectoration  est  presque  nulle,  dit  le  professeur  Bouiliaud,  i  cM 
peu  de  prise  que  les  mouvements  d'expiration  et  les  secousses  A  l> 
exercent  sur  le  sommet  du  poumon.  Cette  interprétation  me  ft^^ 
faitement  exacte  et  n'est  certainement  pas  ébranlée  par  l'objectioah 
solle,  qui  prétend  que  les  mucosités  devraient  être  entraînées  par b 
teur  (!)  et  que  toute  secousse  de  toux  agit  sur  la  totalité  du  pem 
solle  oublie  que  In  pression  exercée  par  le  thorax  doit  s*excrcer 
lement  là  où  la  mobilité  de  la  paroi  thoracique  est  le  plus 

Est-ce  la  même  cause  qui  peut  rendre  compte  de  la  lenteur  de  il 
lutionde  la  pneumonie  du  sonnnet  signalée  par  plusieurs  outeurs, 
ment  par  M.  Moutard -Martin  ?  J*avoue  que  je  doute  qu'une  raison 
mécanique  en  soit  la  cause,  d'autant  plus  que  ce  n'est  pas  sévi 
résolution  qui  est  lenU\  mais  le  processus  entier.  Les  signc5 


di 

m 

ihvent  é^* 
>  quv  n 
•M  rou'iUt 
ttt  ï» 

,le  l'jvis  le 

^^-*.   penJ*ii 

y  pneuiii 
^^lomalie  a 

rffcî^il*'** 
.r^î».  on  îi 

■^ril  félirilf 

ig.ga.T'^i^ts    eu 
\^^    Upi^OUÏJOI 

0^x  [iii»i  or 

{ -^   f  »ueiiiiio 

,2  ^li  {'jCijolo 
_  }  >i\i\n] 
'    :.  M  .'Mieux. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  formes,  variétés  syhptovatiquès.    $51 

sont  plus  lents  à  apparaître,  les  raies  crépitants,  le  souffle,  retardent  en 
moyenne  de  plusieurs  heures  et  même  d'un  jour.   Tandis  que  dans  les 
pneumonies  des  lobes  inférieurs  la  ciîse  a  lieu  dans  la  seconde  moitié  de 
'     la  première  semaine,  elle  n'arrive  dans  celles  des  lobes  supérieurs  qu'à 
^>  là  fin  de   la  première  semaine  ou  au  commencement  de  la  seconde 
\     (lliomas).  Tout  est  donc  en  retard  quand  c'est  le  sommet  qui  est  le  siège 
^     de  la  pneumonie,  dtt  telle  sorte  que  je  serais  tenté  d'admettre  avec  le 
profeaseur  Peter  que  cette  partie  du  poumon  est  douée  d'une  vitalité 
^:    itioiodreque  les  autres  parties  plus  expansibles.  Ce  qui  me  porterait  aussi 
*,    k  crbire  que  dans  le  Idse  supérieur  les  conditions  organiques  sont  reel- 
^   leoieot  on  peu  différentes,  c'est  que  la  pneumonie  parait  s'y  terminer  plus 
*    nooYent  par  abcès,  ainsi  que  j'aurai  l'occasion  de  le  dire  plus  loin. 
-*       Pneumonie  centrale.  —  «  La  pneumonie  est  latente,  dit  Grisolle, 
loraque  les  symptômes  propres  à  déceler  la  maladie  ^ènt  tellement  obscurs 
qa'ils  peuvent  échapper  à  l'attention  du  médecin.  Avant  Laennec,  toute 
^  ;   pneumonie  qui  ne  provoquait  ni  douleur  de  côté  ni  expectoration  sangai- 
^   Mlenteou  ronillée  était  regardée  comma  latente:  elle  était  donc  presque 
^   iffeesdaifement  méconnue.   Aujourd'hui,   pour  qu'une  pneumonie  soit 
■"f  ^féritablement  latente,  il  faut  non-seulement  que  la  douleur  et  que  lés 
^-  caractères  de  l'expectoration  manquent,  mais  il  doit  y  avoir  aussi  absence 
^.  eoAaplèle  de  tous  les  symptômes  fournis  par  l'auscultation  et  par  la  per- 
if  cnasion.  » 

Cela  étant,  il  est  fort  rare  qu'une  pneumonie,  pourvu  qu'elle  soit 

sediercfaée  avec  soin,  reste  latente  pendant  toute  sa  durée,  mais  elle 

'Fêtre  pendant  quelques  jours.  A  l'appui  de  cette  proposition,  je 

citer  la  pneumonie  centrale.  On  nomme  ainsi  une  pneumonie  qui, 

nne  anomalie  assez  rare,  naît  dans  une  portion  centrale  du  pneu- 

■hOD,  inaccessible  par  conséquent  à  l'auscultation  la  plus  minutieuse. 

j    Dans  ce  cas,  on  a  un  début  plus  ou  moins  brusque  avec  frisson  et 

V*~llB  appareil  fébrile  exactement  semblable  à  celui  de  la  pneumonie  com- 

■['"iiftane;  seulement,  il  n'y  a  jamais  de  point  de  côté  les  premiers  jours, 

tant  qae  la  pneumonie  n'a  pas  gagné  la  partie  superficielle  de  l'organe. 

'  Si  les  crachats  caractéristiques  font  défaut,  ce  qui  arrive  parfois,  il 

^-éeiH  impossible  d'affirmer  l'existence  d'une  pneumonie  ;  on  ne  pourra 

•V^œ  la  soupçonner,  et  souvent,  pour  une  raison  ou  une  autre,  le  dia- 

ipiostic  s'égare  pendant  quelques  jours  ;  mais  que  l'on  continue  néaa- 

ins'  à  eïplorer  chaque  jour  la  poitrine  du  malade,  et  il  viendra  un 

ent  (avant  le  cinquième  ou  le  sixième  jour  de  la  maladie)  oii  l'on 

ra  par  l'auscultation  les  signes  caractéristiques  de  la  pneumonie. 

'affection  n'a  donc  été  latente  que  pendant  un  temps  limité. 

C.    Variété  pseudo-pleurétique,  —  Elle  se  rencontre  surtout  dans  la 

'ariété  de  pneumonie  (|ue  mon  collègue  Grancher  a  proposé  de  nom- 

er  fnassive  et  que  j'ai  déjà  eu  l'occasion   d'mdiquer  à  propos  de 

inatomie  pathologique.  Dans  cette  variété,  ainsi  qu'on  l'a  vu,  les 

rohchés,  y  compris  les  gros  tuyaux,  sont  oblitérées  complètement  par 

m  moule  Gbrineux.  H  en  résulté  une  modification  essentielle  de&  signes 


452    PNEUMONIE  LOBAIKE  AIGCË.  —  roniiE».  vauMs  snnoution^^ 

(l'auscultation:  absence  complète  de  la  respiration,  ni  rftlea,  ni      j.  ^ 
dans  toute  la  portion  du  poumon  correspondant  à  la  distributio'^ 


■4at 


bronche  oblitérée;  déplus,  absence  de  la  bronchophonie  et  deaTi^'^^j 
tlioraciques  dans  la  même  étendue.   Quant  à  PexpectoratioD,  e^        ^ 
aToir  existé  avec  ses  caractères  les  premiers  Jours  ;   mais,  pa»^^  ^  .#-^'^■8^ 
période  d'oblitération  des  bronches,  elle  est  naturellempot  f^^      j^^a 
puis,  à  un  moment  donne,   il  peut  arriver  que  le  malade .^^      "*^-^<^^ 
une  partie  du  moule  ;  si  un  Tragmcnt  suflîsant  est  expulsé,  'L,/^^^?^  ' 
immédiat  des   signes  ordinaires  d'auscultation.  Une    Tois,  ^*^^A 

avoir  entendu  un  bruit  de  drapeau  produit  sans  doute  par    \ ^^^^Jt*"'"' ■ 
du  bouchon  dans  la  bronche  (?),  Enfin,  il  y  a  eu  dans  ^u^i^jf^,,  ' 
de  pneumonie  massive  une  dyspnée  intense,  que  l'on  a  e     " 
supposant  que  le  moule  oblitérant  avait  remonté  jusqu'i 
principale  et  enlevait  ainsi  tout  un  poumon  à  la  respiration.  £i. 
de  la  thèse  de  Wiedmann  que  j'ai  citée  à  propos  de  l'anabuDie  fdtéj 
gique  représente  un  cas  de  ce  genre. 

Tels  sont  les  signes  de  la  pneumonie  massive  dans  Uquelli,^ 
certaine  période,  les  signes  physiques  de  la  pneumonie  font 
C'est  donc  aussi  une  pneumonie  temporairement  latente. 

Il  est   des  cas  où   l'autopsie  a  montré   une  vaste  tiépadiiâi 
oblitération  des  bronches,  et  dans  lesquels  cependant  le  bruit  dt 
tubaire  avait  été  constaté  pendant  la  vie.  La  raison  de  ce  hilf 
dit  Grisolle,  est  souvent  fort  difficile  à  donner.   Stokes  a  dili 
qu'il  se  produise  du  souffle  il  faut  qu'il  y  ait  au  moins  un  pe 
sion  pulmonaire,  et  que,  si  tout  le  poumon  est  hépatisé,  l'air 
pas  dans  les  tuyaux  bronchiques.  Grisolle  oppose  à  l'intof 
Stokes  une  double  série  de  fuils,  l'une  comprenant  cinq  casJI 
lion  complète  de  tout  un  poumon,  avec  persistance  du  soulfle^ 
mort;  l'autre  de  neuf  malades  tous  alTeclés  d'une  hcpatisatioa 
un  seul  lobe  on  bornée  à  un  espace  encore  plus  petit,  et  cha' 
cependant  l'auscultation   n'a  fuit  entendre  pendant  plusienn  ^ 
crépitation,  ni  souffle,  ni  aucune  espèce  de  bruit  pathologiqiH ' 
mal.  A  l'autopsie,  les  bronches  fendues  a  dans  toutes  les 
oii  des  ciseaux  délies  ont  pu  pénétrer  n'ont  montré  aucuM, 

tion >  J'ai   vu  moi-même   autrefois  un   fait  semblable  à  iiB 

deuxième  série  de  Grisolle. 

On  ne  peut  se  rendre  compte  de  l'anomalie  qu'en  admetlarf* 
défaut  de  dilatation  des  parties  correspondantes  du  thorax,  ce  q»  I 
en  somme  à  l'interprétation  de  Stokes,  —  soit  une  accnmulatioa'-^     ^        ,, 
raire  de  crachats   dans  les  liroiiches  suivie  de   leur  expulsionM  ~'    . 

mort.  ^«J" 

L'inteif rétatton  de  Stokes  est-elle  légitime ,   en  d'autres 
coufile  qui.   comme  on  sait,  est  produit  à  la   glotte  (Beau, 
peut-il  ne  pas  se  projiiiger  d-nns   un  lol)e  pulmonaire  dont  lea  !■     '  '''"J 
sont  perméables,  parce  qu'il  e^t  tout  à  fait  inexpansibic ?  —  Af 
cela  eA  peu  problabic,  mais  c'est  h  l'observation  clinîquedrn 


mbU  >< 


^rjt  lopnii' 

J.I.IJUL-.- 

.^Diiiph'P" 
.1  int 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  esp^bs.  453 

x^tte  question,  et  voici,  je  crois,  de  quelle  manière  elle  pourra  y 
irriver  : 

Dans  le  cas  où,  les  bronches  étant  perméables,  la  respiration  bronr 
i^hique  fait  défaut,  il  semblé  évident  qu'il  doit  exister  de  la  bronchopho- 
oie  éL  qu'on  doit  percevoir  par  l'application  de  la  main  les  vibrations 
focales.  L'absence  de  ces  deux  symptômes  serait  en  effet  incompréhen- 
nUe  :  on  conçoit,  à  la  rigueur,  le  silence  de  la  respiration  dans  un  pou- 
tiMminexpansible,  mais,  que  le  poumon  se  dilate  ou  non,  les  vibrations 
roicales  doivent  se  transmettre,  pourvu  que  les  bronches  soient  perméables. 
D  y  aura  donc  à  étudier  soigneusement  désormais  les  cas  de  ce  genre. 

Telles  sont  les  principales  variétés  de  la  peumonie  lobaire.  Il  eût  été 
facile  d'en  augmenter  beaucoup  le  nombre,  mais  alors  elles  se  seraient 
Doofondues  les  unes  dans  les  autres,  inconvénient  que  je  n'ai  d'ailleurs 
^  complètement  éviter,  malgré  le  nombre  restreint  auquel  je  me  suis 
irrite.  Par  exemple,  la  pneumonie  massive  est  souvent  une  pneumonie 
ilhénique.  Les  variétés  précédentes  ne  sont  donc  pas  rigoureusement 
SKclusives  les  unes  des  autres. 

Bapècses.  —  Nature  de  la  pneumonie  lé^^time.  —  I.  Déter- 
miATiOK  DE  PLUSIEURS  ESPÈCES.  —  J*ai  déjà  laissé  pressentir  au  début  de 
set  article  qu'il  était  impossible  de  considérer  comme  formant  une  seule 
ispèee  toute  les  variétés  de  pneumonies  actuellement  comprises  sous  le 
MMm  de  pneumonie  lobaire.  Le  moment  est  venu  de  justiGer  cette  pro- 


'D  est  malheureusement  difficile,  dans  l'état  confus  de  la  pathologie 
({etoelle,  de  savoir  ce  qu'il  faut  entendre  par  espèce.  Si  l'on  était  resté 
ilUe  au  principe  qui  a  inspiré  les  fondateurs  de  la  nosologie  moderne 
|jê|Niis  Laennec,  l'analomie  pathologique  aurait  continué  à  en  être  la 
exclusive,  mais  il  a  bientôt  fallu  admettre  Tétiologie,  concurremment 
Tanatomie  pathologique,  à  constituer  des  espèces.  Ce  n'est  pas  tout  : 
en  a  fait  d'exclusivement  symptomatiques  :  un  groupe  de  symptômes 
liens  anatomiques  connus,  sans  étiologie  particulière^  a  été  mainte 
b&  érigé  en  espèce. 

11  suit  de  là  que  si,  une  espèce  nosologique  possède  à  la  fois  une  étiologie 
ipédalè,  des  caractères  anatomiques  particuliers  et  une  marche  ou  un 
MMhpIexus  symptomatique  propres,  sa  légitimité  sera  hors  de  contestation. 
fbyons  à  Taide  de  ce  cnlerium  si,  parmi  les  variétés  de  pneumonie  con- 
bndues  aujourd'hui  en  une  espèce  unique,  il  y  a  en  réalité  plusieurs  espèces 
ibosivément  méconnues. 

n  semble  tout  d'abord  que  la  pneumonie péinodique  soit  dans  ce  cas  :  sa 
ïaii8eestspécifique,samarchetoutà  fait  spéciale  et  ses  lésions  anatomiques 
ïiertainemenl  fort  différentes  de  celles  de  la  pneumonie  commune  :  car, 
linsî  que  les  esprits  les  moins  prévenus  l'ont  parfaitement  reconnu  (voir 
ilus  haut  Topinion  de  Grisolle),  il  ne  s'agit  pas  là  d*une  fièvre  inlermit 
ente  compliquée  de  pneumonie,  ou,  ce  qui  revient  au  même,  d*une  pneu- 
nonie  compliquée  d'accès  intermittents,  mais  d'une  pneumonie  dont  le 
TTOcessus  est  intermittent^  puisque  dans  l'intervalle  des  accès  il  s'arrête 


454  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  b8p£cbs. 

ou  rétrograde,  et  reprend  périodiquement  son  aclivité.  L'admission  d'une 
pneumonie  périodique  est  donc  aussi  légitime  que  celle  de  la  fièvre  inter- 
mittente. 

J'en  dirai  à  peu  près  autant  de  la  pneumonie  altemani  avec  mieaitiiro- 
pathie  rhumatismale.  Ici  aussi  la  cause  est  spéciale.  La  pneumoDÎe  n'est 
pas  périodique,  mais,  comme  elle  cesse  brusquement  quand  se  iéveloppi 
une  arthropathie,  pour  reprendre  quand  cette  dernière  s'est  amendÂî, 
elle  est,  bien  que  sans  régularité,  intermittente  au  même  titre  ^  la 
pneumonie  périodique.  Il  y  a  donc,  pour  faire  de  la  pneuromiie  rinma- 
tismale  alternante  une  espèce^  les  mêmes  raisons  que  celles  qui  nom  ont 
déterminé  à  l'égard  de  la  pneumonie  périodique  paludéenne. 

Parfois  Talternance,  loin  d'être  complète,  est  à  peine  ébauchée;  elle 
manque  même  complètement  lorsque  la  pneumonie  et  les  arthropathio 
coexistent  ensemble  sans  s'influencer  réciproquement.  Dans   ce  cas  h 
pneumonie  a  bien  une  étiologie  spéciale  :  elle  est  née  chez  un  sujet  ei 
puissance  de  rhumatisme  aigu,  de  même  que  la  péricardite  ou  l'asdecar* 
dite,  dont  personne  ne  conteste  en  ce  cas  la  nature  rhumatismale.  Die 
a  même  souvent  une  marche  particulière.  Ainsi,  d'apirès  M.  0.  Starges, 
brusquement,  sans  que  l'engouement  ait  été  nettement  caractérisé  par  dtt 
râles  crépitants,  une  hépatisation  plus  ou  moins  étendue  envahit  un,  pds 
les  deux  poumons.  —  Je  ne  dis  pas  que  ce  soit  la  règle  :  car  les  cas  de 
pneumonie  rhumatismale  que  j'ai  observés  n'ont  pas  présenté  cette  allnre; 
mais  il  suffit  qu'un  médecin  aussi  sérieux  que  M.  0.  Sturgesla  décrive 
pour  que  je  sois  tenu  de  la  relater  à  mon  tour.  Ce  n'est  pas  tout  :  cette 
pneumonie  double  se  distingue  par  sa  bénignité;  il  semble  que  le  pro- 
cessus d'hépatisation  soit  superficiel,  ainsi  que  tend  à  le  montrer  ^expe^ 
toration,  qui  n'est  que  peu  colorée  ou  même  simplement  visqueuse,  stm 
coloration  jaune  ;  sa  résolution  est  remarquablement  rapide.  Bref,  certaines 
pneumonies  rhumatismales,   même  en  l'absence  de  toute  marche  alie^ 
nante,  ont  encore  un  cachet  spécial.  Je  ne  vois  donc  aucune  bonne  raisoo 
pour  ne  pas  les  réunir  aux  autres  dont  la  marche  est  alternante,  de  mi- 
nière à  constituer  une  espèce  :  la  pneumonie  rhumatismale  :  car  il  me 
paraîtrait  puéril  de  fonder  une  distinction  absolue  sur  un  caractère  au$«î 
peu  important  et  le  plus  souvent  mal  tranché.  L'étiologie  et  la  bénigDité 
relative  de  la  pneumonie  du  rhumatisme  me  paraissent  des  carKtères 
plus  décisifs  qu'un  balancement  plus  ou  moins  accusé  entre  l'ailection 
pulmonaire  et  les  arthropathics. 

Je  ne  crois  pas  qu'on  puisse  non  plus  refuser  le  titre  d'espèce  à  h 
pneumo-typhoïde.  On  sait  que  par  cette  dénomination  on  entend  non 
toute  pneumonie  survenue  pendant  le  cours  d'une  dothiénentérie,  nuis 
seulement  les  pneumonies,  d'ailleurs  rares,  qui  marquent  le  début  de  h 
fièvre  et  dont  les  symptômes  dépassent  le  plus  souvent  en  intensité  les 
symptômes  gastro-intestinaux,  si  bien  que  la  détermination  principale  ée 
la  fièvre  semble  se  faire  d'emblée  sur  le  poumon  plutôt  que  sur  le  tube 
intestinal.  J'en  ai  cité  quelques  cas  au  chapitre  de  YEtiologie^  et  on  en 
trouve  plusieurs  autres  dans  la  littérature. 


[ 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  espIces.  455 

,  Parfois  les  symptômes  de  la  dothiénentérie  et  ceux  de  la  pneumonie 
COexÂstept.  Ainsi,  dans  le  casd'Hérard  publié  par  Gauchet,  il  y  a  eu  plu^ 
sieurs  épistaxis,  une  céphalalgie  très-intense  et  continue,  un  pouls  très- 
4vrot^>  des  vertiges  dans  les  tentatives  de  station  assise,  de  la  stupeur, 
UDP  langue  rôtie,  de  ladiarrhée,  des  taches  rosées,  de  la  sensibilité  du  ven- 
te?» fjhl  gargouillement  et  une  augmentation  du  volume  de  la  rate;  déplus, 
lev.  .-figues  locaux  de  la  pneumonie.  La  terminaison  fut  brusquement  mor- 
dnHa»  A  ïautopsie  :  hépatisation  des  deux  tiers  inférieurs  du  poumon  droit 
augmentation  du  volume  de  la  rate  ;  intestin  (y  compris  les  plaques  de 
FeyepJ  aain  ;  gaoglions  mésentériques  normaux.  (Union  méd.,  1860.) 

D'ordinaire  les  symptômes  delà  dothiénentérie  sont  tout  à  fait  sur  l'ar- 
rière-plim.  Ils  peuvent  même  être  assez  équivoques  pour  que  la  véritable 
aiPwe .  de  la  maladie  soit  méconnue.  Cela  est  arrivé  souvent,  par 
Viuniple,  dans  deux  cas  publiés  par  Lorain  sous  la  rubrique  Pneumonie 
(Wfr^  cité,  t.  II,  p.  412-416).  L'erreur  est  parfaitement  excusable,  car  le 
Incé -thermique  est  bien  celui  de  la  pneumonie;  mais  il  est  facile  de 
rpetifier  le  diagnostic,  quand  on  lit  que  les  deux  malades  ont  présenté 
tout  Tensemble  symptoma  tique  de  la  fièvre  typhoïde  (à  l'exception  seule- 
aa^nt  des  taches  rosées),  phénomène  qui  manque  le  plus  souvent,  vu  le 
pm  d*inteii^ité  des  lésions  abdominales,  dans  la  pncumo-typhoïde. 

;  Qu^i}  y  ait  ou  non  immixtion  de  symptômes  de  dothiénentérie,  la  pneu- 
moiiie  typhoïde  est  bien  une  espèce  distincte  de  la  pneumonie  franche, 
fV.son  étiologie  spéciale  et  vraisemblablement  aussi  par  les  lésions  pul- 
im|liaires  intimes.  C'est]du  moins  l'opinion  du  professeur  fiuhl,  qui  croit 
4|0^oir  •  les.  rattacher  à  celles  qui  caractérisent  sa  pneumonie  desquama- 
tif|$*  J'avoue  cependant  que  je  n'accepte  pas  sans  plus  ample  informé 
tl^t0  manière  de  voir,  contre  laquelle  plaide  la  clinique  :  la  pneumonie 
^jl^^d^,  en  effet,  ne  se  résout  pas  moins  vite  que  la  pneumonie  franche 
Mlîmire,  Comment  comprendre  une  telle  résolution,  si  la  lésion  intra- 
a|t&>laire  était  identique  avec  celle  de  la  pneumonie  desquamative? 
.^^.le  lie  prétends  pas  d'ailleurs  que  les  lésions  pulmonaires  de  la  pneu- 
monie typhoïde  soient  identiques  avec  celles  de  la  pneumonie  franche  ;  je 
me  oonteote  de  dire  que  j'ignore  ce  qu'elles  sont. 

On  peut  aussi  chercher  dans  le  sang  une  différence  d'ordre  anatomique 
BQtre  la  pneumo-typhoïde  et  la  pneumonie  commune.  Il  me  parait  infini- 
moit  probable  que  l'augmentation  de  la  fibrine  ne  doit  pas  être  aussi 
oonaidérable  que  dans  la  pneumonie  franche.  La  tuméfaction  de  la  rate,  etc. , 
indique  trop  l'existence  de  la  dyscrasie  typhoïde  pour  que  cette  hypothèse 
ae  mérite  pas  d'être  prise  en  considération. 

Ce  que  je  viens  de  dire  de  la  pneumo-typhoîde,  je  pourrais  le  répéter 
pour  les  divers  pneumo-typhus,  c'est-à-dire  pour  les  pneumonies  primi- 
tires  des  fièvres  :  en  supposant  même  que  leurs  caractères  anatomiques 
Miientles  mêmes  que  ceux  de  la  pneumonie  légitime, —  et  il  y  a  de  fortes 
aiaons  pour  en  douter,  —  elles  en  sont  cependant  essentiellement  dis- 
inctes,  en  raison  de  leur  cause  spécifique,  au  même  titre  que  la  pneu- 
ii€>-typho]de. 


456  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  espèces. 

Il  faol  aussi  faire  une  espèce  des  pneumonies  miasmatiques  doot  j'ai 
parlé  à  propos  de  Tétiologie.  Quelle  est  la  nature  du  miasme  ?  On  Fignoie, 
à  moins  qu*il  soit  constitué  par  les  monadineSf  de  Klebs.  En  tous  cas, 
il  parait  avoir  beaucoup  d'analogie  avec  ceux  de  la  fièvre  typhoïde  on  du 
typhus,  qu*on  ne  connaît  également  que  par  leurs  effets.  Comme  eux  il 
produit  la  tuméfaction  de  la  rate,  la  coloration  feuille  morte  du  myocarde 
et  la  dégénération  vitreuse  des  muscles  droits  de  l'abdomen,  les  plaques 
dcPeyer  étant  d'ailleurs  saines  (G.  Banti).  Quant  aux  lésions  pofaiiMiaires, 
à  en  juger  par  les  descriptions,  elles  diffèrent  beaucoup  de  celles  de  la 
pneumonie  commune.  Pour  la  pneumo-typhoïde  j'émettais  un  doiile  ;  id 
c*est  une  certitude  :  il  s'agit  certainement  de  lésions  bâtardes.  Le  docteur 
Banti,  qui  les  a  récemment  étudiées  avec  soin,  a  une  prolifénitioD  des 
cellules  de  revêtement  de  l'alvéole  ainsi  que  des  cellules  de  tissu  eon- 
jonctifdes  espaces  interalvéolaires  et  interlobulaires.  La  coexistence  d'one 
pleurésie  purulente  est  très-fréquente. (iSp^nmen/oie,  Luglio,  1879).ApRS 
cela,  personne,  je  pense,  ne  mettra  en  doute  que  ces  pneumonies  miaiiiii* 
tiques  ne  constituent  une  espèce  particulière. 

On  voit  qu'il  n'est  pas  difficile  de  dégager  un  certain  nombre  d'espèces 
incontestables  du  genre j  évidemment  très-compréhensif,  qui  porte  le  nom 
de  pneumonie  lobaire  .  On  est  parvenu  à  distinguer  de  la  manière  la  pb» 
tranchée  la  broncho-pneumonie  de  ce  qu'on  appelait  la  pneumonie.  Dtrat 
maintenant  faire  un  pas  analogue,  et  ne  pas  hésitera  séparer  de  iapm- 
monie  fibrineuse,  légitime,  toutes  les  pneumonies  qui  lui  resseflDÎblefil 
plus  ou  moins,  au  point  de  vue  macroscopique,  mais  qu'une  saine  nosologie 
doit  en  écarter,  vu  les  différences  étiologiques,  cliniques,  et  sans  doute 
histologîqucs,  qui  les  distinguent. 

En  cherchant  à  établir  la  légitimité  des  espèces  que  j'ai  admises,  je 
suis,  je  crois,  resté  plutôt  en  deçà  que  je  n'ai  été  au  delà  de  la  réalité;  j*ii 
montré  la  voie,  mais  n'ai  point  voulu  la  poursuivre,  laissant  à  chiciio 
le  soin  d'y  cheminer  à  son  gré,  et  dans  la  mesure  où  l'y  invitent  ses  con- 
victions médicales.  II  est  certain  que,  vu  l'ignorance  où  nous  sommes  de 
la  cause  de  certaines  pneumonies,  le  champ  de  la  dispute  est  ouvert,  et 
que  si  l'on  veut  à  toute  force  prendre  parti,  on  n'échappera  pas  facilement 
à  rarbitrairo.  Voici,  par  exemple,  la  pneumonie  bilieuse  :  est-elle  une 
espèce  ? 

Je  me  sens,  je  l'avoue,  incapable  de  répondre  à  une  pareille  question  : 
car  je  ne  me  fais  pas  une  idée  fort  nette  de  sa  pathogénie.  L'état  gastri- 
que tantôt  parait  être  contemporain  do  la  pneumonie;  tantôt  il  survient 
manifestement  le  premier.  Dans  ce  cas,  est-ce  lui  qui  est  la  cause  deb 
pneumonie  ,  soit,  comme  le  croyait  Stoll,  en  agissant  directement  sur  le 
poumon  par  une  action  humorale  irritante,  soit  en  le  prédisposant  sim- 
plement à  s*enflammer  sous  une  influence  occasionnelle  minime  ?  Que  si* 
vons-nous  de  précis  à  cet  égaixl?  et  combien  les  meilleurs  esprits  ont 
raison  de  douter  et  d'hésiter  à  conclure  !  C'est  ce  que  fait  Grisolle  qui, 
après  avoir  dit  que  Tétat  bilieux  n'est  peut-être  qu'une  complication, 
ajoute  qu*en  «  considérant  les  résultats  heureux  et,  pour  ainsi  dire,  met- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  natom.  457 

teîUenx'de  la  méthode  évacuante,  il  semblerait  naturel  de  supposer  qu-il 
existe  un  rapport  plus  intime  entre  Tétat  bilieux  et  la  phlegmasie  du 
poumon.  » 

II.  Nature  de  la  pneumonie  légitme.  —  Après  avoir  déblayé  le  terrain 
en  éeartant  les  espèces  étrangères  à  la  pneumonie  commune  ou  légitime, 
és8«3pns  de  pénétrer,  s'il  se  peut,  sa  nature. 

Pour  les  médecins  de  TÉcole  de  Paris,  la  pneumonie  est  le  type  des  in- 
flammations franches  :  tous  ses  symptômes,  y  compris  les  symptômes 
généraux,  sont  sous  la  dépendance  exclusive  de  la  phlegmasie  pulmonaire. 
An  contraire,  d'après  une  doctrine  médicale  plus  ancienne,  soutenue  par- 
tieulièrement  par  Huxham  et  par  Fr.  HofTmann,  dont  la  tradition  a  été 
fidèlement  gardée  par  TËcole  de  Montpellier,  l'essence  de  la  maladie  con- 
sislé  en  une  fièvre  qui  se  localise  sur  le  poumon. 

Plusieurs  pathologistes  fort  autorisés  de  l'École  allemande  moderne, 
Cohnheim,  Jurgensen,  Klebs,  se  sont  récemment  prononcés  contre  la 
doctrine  organicienne.  Les  arguments  qu'ils  lui  opposent  ont  été  résumés 
par  Jurgensen  de  la  manière  suivante  : 

1^'  «  La  pneumonie  croupale  (fibrineuse)  et  la  bronchite  ont  une 
distribution  géographique  tout  à  fait  difTérente.  La  première  échappe  aux 
lois  qui  règlent  le  développement  de  la  seconde  ; 

8*  n  y  a,  dans  les  différentes  saisons  de  l'année,  de  frappantes 
diOérences  entre  la  fréquence  de  la  pneumonie,  d'une  part,  et  celle  de 
la  (deurésie  et  de  la  bronchite,  d'autre  part  ; 

5^  Si  l'on  compare  la  courbe  de  la  mortalité  par  maladies  inflam- 
matoires  (péricardite,  pleurésie,  laryngite,  céphalite,  hépatite,  péritonite, 
gastrite,  entérite),  celle  de  la  mortalité  par  maladies  des  organes  respi- 
ratoires (à  l'exception  de  la  pneumonie,  de  la  tuberculose,  de  la  coque- 
loche  et  du  croup),  et  celle  de  la  mortalité  par  pneumonie  dans  une  série 
d*amiées  —  (ce  travail  a  été  fait  pour  Londres,  années  1340-1856),  — 
rà  ne  trouve  pas  de  parallélisme  entre  ces  courbes,  surtout  entre  celle 
de$  jMegmasies  et  celle  de  la  pneumonie  ; 

4*  Les  agents  extérieurs,  et  particulièrement  le  froid,  ne  peuvent  être 
regardés  que  si  rarement  comme  la  cause  de  la  pneumonie,  qu'il  est 
impossible  de  les  considérer  comme  causes  déterminantes  (veranlas- 
êende  Ursache)  ; 

5*  Les  irritants  ordinaires,  faibles  ou  forts,  sont  dans  l'impuissance  de 
produire  une  pneumonie;  il  faut,  de  même  que  pour  la  Gèvre  typhoïde, 
an  agent  doué  de  propriétés  spéciales; 

(T  Pendant  toute  la  durée  de  la  pneumonie  il  n'y  a  aucun  rapport 
constant  entre  les  symptômes  locaux  et  h  fièvre:  par  conséquent, 
celle-ci  ne  peut  dépendre  de  l'état  local  ; 

7^  Aucune  maladie  locale  ne  présente,  à  un  aussi  haut  degré  que  la 
pneumonie,  une  marche  typique.  » 

Si  l'on  se  bornait  à  dire  que  la  pneumonie  lobaire  légitime  est  une 
inflanunation  sui  generis,  je  n'aurais  garde  d*y  contredire,  car  cela 
me  parait  évident  ;  mais  je  demande  à  examiner  les  arguments  sur  les- 


158  PiNEUHONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  nATOBs. 

quels  Jurgensen  se  fonde  pour  la  considérer  comme  une  fièvre  à  loca- 
lisation pulmonaire. 

Parmi  eux,  il  en  est  un,  le  troisième,  dont  je  ne  parviens  paa  à  suiir 
la  portée.  Le  premier,  le  deuxième  et  le  quatrième,  n'ont  pas  la  prétention 
de  témoigner  en  faveur  de  Tessentialité  de  la  pneumonie  ;  ils  pnovent 
seulement  Topinion,  que  je  partage  pleinement^  à  savoir  que  cette  affec- 
tion n'a  pas  la  même  étiologie  que  d  autres  phlegmasies.  Pour  h  qua- 
trième, il  renferme  une  exagération  et  une  inexactitude  ;  je  renvoie  av 
chapitre  étiologie. 

Arrivons  aux  arguments  qui  tendent  à  démontrer  que  la  pneomonie 
est  une  fièvre  : 

A  cet  égard,  l'argument  5  n'est  pas  si  décisif  qu'on  pourrait  le  croire  « 
premier  abord  :  il  y  a  nombre  de  maladies  inflammatoires  spécifiques  on 
non,  que  nous  sommes  dans  l'impossibilité  de  provoquer  expérimentale- 
ment, telles  que  les  réalise  la  nature  :  par  exemple,  parmi  ces  dernières, 
le  zona  et  la  pleurésie  elle-même  ;  car  il  n'est  point  vrai  qu'(Mi  pro- 
dirise  chez  l'animal  une  pleurésie  semblable  à  la  pleurésie  fibrineuse 
de  l'homme;  ce  que  l'on  fait  chez  lui,  c'est  surtout  une  pleurésie  pu- 
rulente. 

Quant  à  l'argument  7,  il  me  parait  plus  spécieux  que  solide.  Noos  ne 
connaissons  pas,  il  est  vrai,  de  phlegmasie  franche,  à  marche  aussi 
cyclique  que  la  pneumonie,  mais  pourquoi  le  poumon  n'auraii-il  psB 
le  privilège,  en  raison  de  conditions  anatomiques  particulières,  de  ti^ 
la  marche  de  sa  phlegmasie  et  de  la  faire  évoluer  en  6-8  jours?  Cette 
supposition  trouve  un  appui  dans  le  fait  que  la  pneumonie  a  une  dorée 
plus  longue  quand  elle  siège  au  sommet  ;  que  non-seulement  dans  ce  cas 
la  résolution  est  plus  lenle^  mais  que  la  défervescence  se  fait  attendre. 
Rien  ne  prouve  d'ailleurs  que  la  marche  cyclique  de  la  fièvre  ty|rfioide 
tienne  à  l'essence  de  la  fièvre  et  non  à  sa  localisation  anatomique  habi- 
tuelle, car  la  pneumo-typhoïdc  ne  dure  pas  21  jours,  mais  8  jours, 
comme  la  pneumonie  franche. 

L'argument  6  me  parait  plus  considérable.  Selon  moi,  c*e$t  le  véri- 
table  cheval  de  bataille  de  l'essentialité  de  la  pneumonie  :  aussi  je  vais, 
pour  cette  raison,  le  discuter  plus  longuement.  Seulement,  loin  que  je 
me  permette  de  trancher  une  question  aussi  délicate,  et  qui  pirfa^ra 
longtemps,  sans  doute,  les  médecins  les  plus  éclairés,  je  me  contenterai 
de  présenter  quelques  remarques  dont  le  seul  but  est  de  montrer  la 
difficulté  extrême  du  sujet  : 

<(  Pendant  toute  la  durée  de  la  fièvre,  il  n'y  a  aucun  rapport  constant 
entre  la  fièvre  et  l'état  local.  »  Telle  est  la  proposition  de  Jurgensen. 
Voyons  si  elle  est  rigoureusement  exacte  dans  les  divers  stades  de  U 
maladie  : 

A  la  période  initiale,  je  ne  vois  rien  d'irrationnel  à  supposer  que  la 
fièvre  est  indépendante  du  processus  local.  On  peut  parfaitement  conce 
voir  qu'elle  précède  toute  localisation  morbide.  Cette  hypothèse  trouve* 
rait  même  une  base  solide,  s'il  était  exact,  comme  l'ont  cru  quelques 


PMEUMOME  LOBAIRË  AIGUË.  _  natorr.  459 

lédecins  anglais,  qu'un  état  d'hypérinose  précède  toute  pneumonie, 
alheureusement  pour  la  théorie,  ce  fait  si  important  n'est  pas  prouvé. 
Les  symptômes  prodromiques  que  l'on  observe  dans  un  certain  nombre 
s  ttts  de  pneumonies  primitives   peuvent  être  considérés  comme   la 
lanifestation  d'une  maladie  générale  non  encore  localisée.  C'est  du 
toÎDS  de  cette  manière  que  Grisolle  les  interprète.  Voici  comment  il 
exprime  k  son  article  prodromes  ;  a  Dans   quelques  cas,  j'observai 
sadant  quatre  jours  un  mouvement  fébrile  intense,  sans  que  j'aie  pu 
^couvrir  du  côté  d'aucun  organe,  et  surtout  du  côté  des  poumons,  une 
flkm  capable  de  l'expliquer.  Ce  ne  fut  qu'à  la  fin  de  plusieurs  jours 
Ei'an  point  de  côté  survint;  la  toux  lui  succéda,  et  je  constatai  bientôt 
8  crachats  et  les  phénomènes  d'auscultation  caractéristiques  de  la  pneu- 
lonie.  Andral  a  observé  plusieurs  cas  semblables  :  il  n'y  a  alors,  dit-il, 
icon  travail  inflammatoire  local  bien  dessiné,  mais  partout  il  y  a  ten- 
■Dce  à  sa  production  et,  pour  peu  que  cet  état  se  prolonge,  on  verra 
aitrt  diverses  phlegmasies  suivant  les  prédispositions  individuelles  et  la 
laceptibitité  variable  des  organes.  11  est  donc  vrai  de  dire  que  dans 
nelques  cas,  fort  rares  d'ailleurs,  la  fièvre  précède  d'un  ou  de  plusieurs 
^urs  la  phlegmasie  locale,  comme  si  celle-ci  n*en  était  que  la  consé^- 
nence  9  {Pneumonie,  1864,  p.  187).  Au  lieu  d'admettre  que  pendant 
M- prodromes  les  sujets  étaient  sous  le  coup  d'une  maladie  pyrétique 
emandant  à  se  localiser,  on  pourrait  supposer  qu'ils  présentaient  sim* 
Icment  un  état  d'indisposition  pendant  lequel,  étant  plus  susceptibles, 
■  avaient  contracté  une  pneumonie  ;  mais  Grisolle,  comme  prévoyant 
Bile  objection,  ajoute  plus  loin  :  a  Ces  pneumonies  avec  prodromes  se 
idarent  peu   à  peu  et,  dans  la  presque  totalité  des  cas,  sans  qu'on 
iliase  saisir  aucune  cause  déterminante  appréciable.  » 
^'J'accepte  donc  entièrement  l'interprétation  de  Grisolle  et  d'Andral; 
BÉdement,  il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  que   ces  cas,  avec  prodromes 
'une  certaine  durée,  sont  une  exception  :   aussi  ne  peuvent-ils  pas,  je 
lense,  servir  à  édifier  une  doctrine  générale. 

L'indépendance  de  la  fièvre  initiale  trouve  plutôt  un  appui  dans  le  fait 
[n'elle  est  d'emblée  très-intense.  Quelques  heures  après  que  la  cause  oc- 
Bsioffinelle  a  agi,  la  température,  avons-nous  dit,  peut  déjà  atteindre  40^ 
entigrades.  Or,  à  ce  moment,  il  n'y  a  qu'une  hyperémie  pulmonaire  que 
oofent  même  nous  ne  sommes  pas  en  état  de  reconnaître  avec  certitude 
ar  le  vivant.  Ne  serait-il  pas  étrange  que  cette  hyperémie  donnât  nais- 
meeà  une  fièvre  aussi  vive  qu'une  lésion  plus  avancée? 

Ces  divers  arguments  ne  sont  pas  irréfutables.  Ainsi,  loin  que  la  fièvre  ap- 
«raisae  toujours  avant  qu'aucune  lésion  du  poumon  se  manifeste,  il  y  a  des 
aa  o&  elle  n'est  venue  que  postérieurement  (Kaulich  de  Prague)  ;  et  quand 
m  songe  à  la  difficulté  extrême  qu'il  y  a  à  s'assurer  de  l'existence  de  l'en- 
(ouement  pulmonaire,  il  ne  faut  pas  être  surpris  que  ces  cas  ne  soient  pas 
AnB  nombreux.  11  y  aurait  peut  être  aussi  quelques  réserves  à  faire  sur  Pin- 
enaité  de  la  fièvre  dès  le  début.  Néanmoins  j'accepte  en  bloc  l'argument, 
it  j*admet8  que  la  fièvre  initiale  de  la  pneumonie  est  probablement,  dans 


460  PNEUMONIE  LOBAIRË  AIGUË.  —  hatuu. 

une  certaine  mesure,  tout  à  fait  indépendante  du  processus  local.  Eit-ce  à 
dire  qu'il  en  soit  de  même  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie  ? 

Dans  beaucoup  de  cas,  on  peut  constater  pendant  sa  durée  que  les  eu- 
cerbations  de  la  fièvre  sont  manifestement  liées  à  une  exteDaîon  de  la 
lésion.  Il  est  vrai  qu'on  pourrait  soutenir  que  œs  poussées  du  pioeesms 
local  sont  elles-mêmes  sous  la  dépendance  de  la  fièvre  essentieik  ;  mais 
rien  n'est  en  faveur  d'une  interprétation  aussi  risquée,  et  le  cai  de  la 
pneumonie  du  sommet  que  j'ai  cité  plus  haut  en  prouve  l'invraiiembVince. 

Gomment,  en  effet,  se  rendre  compte  de  la  plus  longue  durée  de  la  fièvre 
dans  ce  cas,  si  ce  n'est  parce  que  les  actes  organiques  sont  plus  lents  ta 
sommet?  Toute  autre  interprétation  nepourra  satisfaire  un  esprit  nonpn- 
venu.  De  même,  la  longue  durée  de  la  fièvre,  lorsque  les  deux  poomoQS 
sont  pris,  ne  me  paraît  s'expliquer  d'une  manière  naturelle  que  parce 
qu'elle  est  entretenue  par  la  phlegmasie  locale. 

Si  la  défervescence  ne  coïncidait  en  aucune  façon  avec  la  terminaisoa 
de  la  phlegmasie,  ce  serait  uu  argument  en  faveur  de  ressentialilé  de 
la  fièvre.  Mais  il  y  a  au  contraire,  entre  ces  deux  phénomènes,  unecoto- 
cidence  remarquable,  du  moins  autant  que  nous  pouvons  en  juger;  car 
nous  n'avons  pas  de  signe  qui  nous  permette  d'affirmer  que  le  procemis 
inflammatoire  est  éteint,  sauf,  peut-être,  la  diminution  de  la  chaleur  de 
la  paroi  thoracique  au  niveau  du  foyer.  Ge  que  nous  pouvons  seolemeat 
apprécier  par  la  percussion  et  l'auscultation,  c'est  la  résolution;  or  edje- 
ci  est  sans  doute  séparée  de  la  terminaison  de  la  phlegmasie  par  oa  cer- 
tain laps  de  temps  (?). 

Quant  au  rapport  de  la  résolution  et  de  la  défervescence,  Grisolle  dit 
que,  c(  sur  192  malades,  94  fois  une  diminution  considérable  de  l'appareil 
fébrile  a  coïncide  avec  une  amélioration  du  côté  ces  phénomènes  stétho- 
scopiques;  l'amendement  de  ces  deux  ordres  de  symptômes  a  para  être 
dans  ces  cas  tout  à  fait  simultané.  Ghez  72  malades,  une  diminutîoo 
notable  dans  l'appareil  fébrile  a  précédé  de  un  ou  plusieurs  jours.  Enfin, 
chez  26  malades,  les  phénomènes  d'auscultation  se  sont  amendés  d'une 
manière  sensible,  tandis  que  la  fièvre  conservait  à  peu  près  toute  son 
intensité  ».  (Grisolle,  Traité  de  la  Pneumonie.) 

Malgré  le  talent  d'observation  que  possédait  Grisolle  à  un  si  hâui 
degré,  ses  résultats  ne  pouvaient  être  acceptés  que  sous  bénéfice  d'in- 
ventaire, car  il  ne  voyait  ses  malades  que  le  matin,  et  n'avait  pas  comme 
nous  la  possibilité,  à  l'aide  de  mensurations  tliermomé triques,  faites 
plusieurs  fois  dans  la  journée,  de  connaître  l'instant  exact  où  la  déte^ 
vescence  débute.  Mais,  bien  qu'obtenus  dans  des  conditions  relativement 
défavorables,  ils  sont  confirmés  par  les  observateurs  modernes,  qui  ont 
apporté  à  l'étude  de  cette  question  tout  le  soin  qu'elle  mérite.  Je  m'en  sais 
moi-même  particulièrement  préoccupé  et  je  puis  dire  à  cet  égard  que, 
dans  là  grande  majorité  des  cas,  la  défervescence  précède  très  nettement 
les  signes  positifs  de  la  résolution,  mais  que,  chez  plusieurs  malades,  j'ai 
pu  annoncer  celle-ci  quelques  heures  avant  que  le  thermomètre  eût  décelé 
la  défervescence. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  natore.  461 

n  est  probable  que,  sinous  disposions  de  moyens  délicats  pour  apprécier 
l'état  physique  du  poumon,  nous  ne  croirions  pas  si  souvent  que  la  réso- 
lution retarde  sur  la  défervescence.  Pour  juger  le  degré  de  la  fièvre, 
nous  possédons  un  instrument  d'une  finesse  exquise,  le  thermomètre. 
Mais  quel  moyen  avons-nous  de  déterminer  si  le  travail  de  désagrégation 
de  Texsudat  commence?  Evidemment  Fauscultation  n'est  ici  d'aucune 
resfloarce;  elle  ne  peut  rendre  de  services  qu'au  moment  où  la  liquéfac- 
lioti  de  l'exsudat  est  assez  avancée  pour  que  l'infundibulum  renferme  à 
la  fins  de  l'air  et  du  liquide.  Or  il  est  facile  de  comprendre  que  plu- 
sieors  heures,  à  la  rigueur  peut-être  plusieurs  jours  auparavant,  sa  désagré- 
gation a  pu  commencer.  A  priori^  et  bien  que  je  n'ignore  pas  que  nous 
ne  devons  avoir  dans  les  résultats  fournis  par  la  percussion  qu'une  con- 
fiance limitée,  je  suppose  qu'elle  peut  mieux  nous  renseigner  sur  le 
dAui  de  la  résolution.  A  Tappui  de  cette  idée,  j'invoquerais  volontiers 
Panlorité  du  professeur  Thomas  qui,  après  avoir  dit  qu'il  n'est  pas  très- 
rare  de  voir  la  réëolution  précéder  la  crise,  ajoute  que,  dans  ce  cas  la 
feiUe  de  la  défervescence  la  matité  prend  un  caractère  tympanique.  Tel 
esl«  pour  lui,  le  premier  signe  de  la  résolution. 

En  tenant  compte  de  l'incertitude  où  nous  sommes  touchant  la  fin  du 
travail  phlegmasique  et  le  début  de  la  résolution,  on  voit  qu'il  est  impos- 
able dB  dire  qu'à  cette  période  la  fièvre  est  indépendante  de  l'état  local. 
Si  Ton  admet  au  contraire  qu'elle  y  est  subordonnée,  on  s'explique  d'une 
flBânière  naturelle  tous  les  phénomènes  de  cette  période,  même  Texacer- 
bation  praecritique.  En  effet,  au  lieu  de  l'attribuer,  comme  fait  la  théorie 
lîtalîste,  à  un  effort  de  la  nature  avant  la  crise,  je  serais  plutôt  tenté  d'y 
Teir  simplement  le  résultat  de  la  résorption  commençante  de  l'exsudat, 
e*est-à-dire  le  premier  effet  général  de  la  résolution  à  son  début. 
^Miâs  toute  pneumonie  n'a  pas  une  terminaison  critique;  c'est  cequ'ou- 
bfiimt  trop  peut-être  les  partisans  de  l'essentialité  de  la  fièvre.  Quand  il 
n'y  a  pas  de  crise,  la  persistance  de  la  fièvre  tient  évidemment  à  la  per- 
i^anoe  de  la  phlegmasie  locale  et  li*ouve  une  cause  amplement  suffi- 
sante dans  le  travail  de  la .  suppuration.  A  ce  moment,  et  sous  le  rap- 
port de  son  retentissement  sur  l'économie,  la  pneumonie  est  semblable 
à  tout  vaste  phlegmon. 

En  résumé,  et  sans  prétendre  rien  affirmer  en  des  matières  aussi  déli- 
isaleSy  je  suis  porté  à  croire  que  la  fièvre  de  la  pneumonie  est  fort  coni- 
|A«Le.  Au  début  j'admets,  comme  pour  beaucoup  d'autres  phlegma9ie8, 
•pour  l'angine,  la  pleurésie,  etc.,  que  la  fièvre  est  produite  par  un  trouble 
du  système  nerveux  qui  peut  être  indépendant  de  l'état  local;  mais  dans 
le  cours  de  la  maladie  et  surtout  à  la  fin  je  vois  de  plus  en  plus  s'accuser 
rinfluence  de  l'état  phlegmasique,  influence  directe  ou  éloignée  :  directe 
quand  l'accroissement  du  foyer  phlegmasique  ou  sa  suppuration  détermine 
nn  accroissement  de  la  fièvre,  —  indirecte  quand  la  résorption  des  maté- 
riaux exsudés  entretient  à  son  tour  l'état  pyrétique.  Ces  explications,  bien 
que  théoriques,  satisfont  plus  mon  esprit  que  ne  le  font  les  hypothèses 
vitalistes. 


462  PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  hatuie. 

Ces  lignes  étaient  écrites  quand  a  paru  une  Revue  critique  (ori  intéres- 
sante de  mon  collègue  Ilallopeau  sur  la  doctrine  de  la  fièvre  pneumo- 
nique.  J'ai  été  fort  heureux  de  me  trouver  en*  commanauté  d'idées  arec 
lui  sur  la  plupart  des  points  et  j'aurais  beaucoup  i  empronte  i  na  re- 
marquable travail,  mais  je  préfère  y  renvoyer  le  lecteur.  Cemnw  loi,  je 
suis  d'avis  qu'il  faut  entièrement  séparer  la  pneumonie    légîliiie  des 
pneumonies  miasmatiques  et  contagieuses.  Gomme  lui  aussi  je  rsttKhe 
la  pneumonie  non  aux  fièvres^  mais  aux  phlegmasies,  parce  qae  e*est 
avec  cette  classe  de  maladies  qu'elle  a  le  plus  d* affinités  natordltt,  t\ 
parce  qu'il  n'y  a,  jusqu'à  présent,  pas  de  motif  pour  rayer  4*an  trait  de 
plume  la  distinction  entre   les  fièvres  et  les  phlegmasies  établie  par 
Andral  et  Gavarret.  Je  ne  diffère  d'opinion  avec  mon  savant  ami  que  9B 
des  points  secondaires  :  je  crois  que  la  pneumonie  est  une  phlegmasie  spé- 
ciale et  j'admets  dans  une  certaine  mesui*e  Tessentialité  de  la  Bivie  ilo 
début. 

J'ai  dit  plus  baul  que,  d'après  Fernct,  la  phlegmasie  palnoumatfe  est 
sous  la  dépendance  d'une  névrite  du  pneumogastrique.  Laissons  le  moi 
névrite,  qui  n'est  pas  suffisamment  justifié  pour  le  moment  par  Fanato- 
mie  pathologique,  et  mettons  à  la  place  troMe  fonctionnel^  du  gimre  de 
celui  qui  dans  un  nerf  produit  le  zona.  C'est  assurément  une  hypothèse 
tort  séduisante  que  de  faire  de  la  pneumonie  le  zona  du  poumon  ;  mal- 
heureusement, ce  n'est  qu'une  hypothèse.  Toutes  les  inflammations  sont, 
dans  une  certaine  mesure,  sous  la  dépendance  d'un  trouble  des  nerfs  qaise 
rendent  à  la  partie  qui  s'enflamme.  Dans  le  zona,  il  y  a  quelque  Ghoiede 
plus:  il  y  a  un  trouble  primordial  et  d'ordre  spécial  dans  le  nerf.  —En 
est-il  ainsi  pour  la  pneumonie?  Nous  l'ignorons,  mais  à  coup  sûr  la  ques- 
tion méritait  d'être  posée. 

Quant  aux  faits  eux-mêmes  de  Fernet,  j'ai  déjà  dit,  à  propos  de  Yâio- 
logie,  qu'ils  ne  permettent  pas  de  formuler  une  loi  générale  :  de  plus, 
en  supposant  que  la  pneumonie  soit  réellement  ce  que.  par  abréviation, 
j'appelle  un  zona  du  poumon,  il  n'est  pas  certain  que  les  nerfs  malades 
soient  nécessairement  les  pneumogastriques. 

Mais  Fernet  va  encore  plus  loin  :  il  n'hésite  pas  à  considérer,  avec  \^ 
professeur  Parrot  et  La^^out,  la  pneumonie  en  général  comme  un  herpè$ 
du  pouiuou  :  «  La  cause  habituelle  de  la  pneumonie,  dit-il,  conune  celle 
de  la  lièvre  lierpéticpie  non  locali»ée  au  poumon,  c'est  le  refroidisse- 
ment; les  signes  généraux  sont  les  mêmes.  Les  signes  physiques  delà 
pneumonie  précédent,  il  est  vrai,  réniption  labiale,  mais,  ainsi  que  l'a 
déjà  fait  renian|uer  Lagout,  cela  ne  saurait  nous  surprendre,  car  le:: 
lésions  des  muqueuses  sont  plus  précoces  que  celles  de  la  peau. 

En  admettant  que  l'herpès  pneumonique  prouve,  comme  le  pensent 
ces  pathologistes  distingués,  qu'il  y  a  identité  d'origine  entre  la  fiènc 
herpétique  et  certaines  pneumonies,  il  me  semble  évident  qu'on  ne  pour- 
rait étendre  cette  coiulusionà  toutes  les  pneumonies  légitimes,  car  nous 
avons  vu  que  l'herpè.s  ne  se  rencontre  que  dans  la  minorité  des  cas. 
L'étiologie  d'ailleui^  proteste  contre  l'origine  exclusivement  à  frigoïc 


PNEUMONIE  LOBAIIŒ  AIGUË.  —  tbeminaisons.  463 

de  U  pneumonie  commune.  Mais  il  y  a  plus  :  on  pourrait  à  la  rigueur 
contester  la  valeur  de  la  preuve  même  pour  les  cas  de  pneumonie  avec 
herpès  et  rappeler  que  l'herpès,  loin  d'être  exdusivement  Tapanage  des 
aBèÎBtions  à  frigore^  est  un  symptôme  commun  dans  la  méningite  céré- 
bnhspinale,  et  qu'il  n'est  pas  très-rare  dans  certaines  épidémies  de  fièvre 
tophôide;  àBâle,  par  exemple,  sur  1420  cas  de  dothiénentérie  on  Ta 
wierré  56  fois,  soit  4  p.  100;  çt,  ce  qui  montre  que  la  gravité  de  la 
nudadie  ne  fut  pas  très-atténuée,  sur  ces  56  cas  il  y  eut  10  mprts,  soit 
18  p.  100. 

Cependant  je  n'élèverai  pas  cette  objection;  j'accepte  que  Therpès  dans 
la  pneumonie  donne  la  signature  de  son  origine  à  frigore^  ce  qui  est 
dl*aiUeur8  d'accord  avec  la  bénignité  relative  des  pneumonies  accompa- 
gnées d'herpès  (voir  le  pronostic)  ;  mais  je  demande  qu'on  ne  généralise 
pas  outre  mesure  et  qu^on  ne  prétende  pas  que  toutes  les  pneumonies 
mit  identiques  quant  à  leur  nature. 

T«rminalnonfii.  —  La  pneumonie  peut  se  terminer  : 

1*  par  résolution  franche. 

2*  —         lente  (rare). 

—  id.     avec  passage  à  la  pneumonie  chronique  inter- 

stitielle (très-rare. . 

3*  par  la  mort  à  la  période  d'hépatisation  rouge. 
'    4*  par  Thépatisation  grise,  se  terminant  elle-même  : 

(A)  par  la  mort. 

(B)  par  guériscm  (très  rare). 

(C)  par  formation  d'abcès  pulmonaire  (très-rare). 
5*  par  gangrène  (très  rare). 

Je  terminerai  ce  chapitre  par  quelques  mots  sur  les  rechutes  et  sur  les 
maladies  consécutives. 

1*  Rksolution  franche.  —  On  appelle  ainsi  la  résolution  qui  coïncide  à 
peu  près  avec  le  moment  de  la  défervescence. 

La  révolution  se  fait  avec  la  plus  grande  facilité  pour  les  pneumonies 
qui  ne  dépassent  pas  la  première  période  (engouement) ;  lauscuUation 
aemble  nous  indiquer  qu'en  moins  d'un  jour  cet  état  peut  disparaître  et 
faire  place  à  un  état  du  poumon  très-voisin  de  l'état  normal.  Il  n'en  est  pas 
de  même,  on  le  comprend,  s'il  existe  une  hépatisation  ;  il  faut  que  les 
alvéoles  se  débarrassent  de  l'exsudat  qui  les  oblitère  :  un  certain  temps  est 
indispensable. 

•  Le  premier  phénomène  doit  être  évidemment  le  ramollissement  et  la 
désagrégation  de  l'exsudat,  car  pour  disparaître  de  l'alvéole  il  n'a  que 
deux  voies  :  la  voie  lymphatique  et  la  voie  bronchique.  Même  en  admettant 
que  l'évacuation  se  fasse  par  cette  dernière,  sa  désagrégation  préalable  est 
nécessaire,  vu  le  faible  diamètre  du  canalicule  respirateur  qui  fait  communi- 
quer rinfundibulum  avec  la  bronchiole;  mais,  ainsi  que  j'ai  eu  précédem- 
ment l'occasion  de  le  dire,  selon  toute  vraisemblance,  la  majeure  partie 
du  contenu  de  l'alvéole  est  résorbée  par  les  lymphatiques  :  or,  pour  pé- 
nétrer dans  les  fentes  étroites  des  lymphatiques,  il  ne  suffit  pas  d'une 


464  PiNEUMONIE  LOBAIIŒ  AIGUË.  —  teuihaisohs. 

désagrégation  partielle  :  il  faut  sans  doute  qu'elle  aille  jusqu'à  U  quasi- 
liquéfaction  de  Texsudat. 

Tel  est,  autant  que  nous  pouvons  le  supposer,  le  processus.  J*ai  dqà 
indiqué  par  quels  symptômes  il  se  manifeste;  j'en  rappelle  quelques-aw: 
La  matité  prend,  d'après  Thomas,  un  caractère  plus  tympanifoey  la 
respiration  bronchique  perd  peu  à  peu  son  caractère  métallique  peudaut 
rinspiration  et  ne  se  perçoit  plus  que  pendant  l'expiration  ;  la  ciyipîtalion 
reparait,  mais  grosse  et  humide  ;  les  bulles  ne  s'enteodeat  d'abord  qae 
dans  les  grandes  inspirations,  mais  un  peu  plus  tard,  le  lendemam,  far 
exemple,  lorsquelles  sont  devenues  plus  abondantes,  ellen  soot  pergmi 
dans  toutes  les  inspirations  et  dans  quelques-unes  des  expirations.  D'après 
Grisolle,  le  râle-  crépitant  de  retour  pourrait  quelquefois  ^ire  «  plus  fin  • 
que  la  crépitation  qui  avait  existé  dans  le  premier  degré  de  la  maladie. 
J'avoue  que  je  n'ai  jamais  rien  observé  de  semblable. 

La  résolution  ne  s'opère  pas  en  même  temps  ei  avec  une  égale  rapi- 
dité sur  tous  les  points  affectés.  Laennec  a  fort  bien  remarqué  que  les 
parties  prises  les  dernières  sont  généralement  celles  dans  lesqueUes  la 
résolution  se  fait  tout  d*abord.  Ce  serait,  d'après  Grisolle,  la  règle  seuleaMot 
pour  les  deux  tiers  des  cas;  de  même  dans  la  pneumonie  double  la  réso- 
lution commence  presque  toujours  par  le  poumon  envahi  le  dernier. 

La  résolution  de  la  pneumonie  demande  un  certain  nombre  de  jours, 
un  peu  moins  chez  Tenfant  que  chez  Tadulte.  Exceptionnellement,  ooe 
pneumonie  au  deuxième  degré  parait  avoir  très-brusquement  rétrocédé 
sous  l'influence  d'une  afTection  grave  intercurrente.  Andral  a  rapporté  dan» 
sa  clinique  un  cas  de  ce  genre,  et  Graves  en  a  publié  un  autre.  L'aifectioa 
intercurrente  a  été,  dans  le  premier  cas,  une  variole,  et,  dans  le  second, 
une  attaque  de  choléra  indien. 

'2**  Résolution  LENTE.  A.  Complète,  Dans  quelques  cas,  alors  queladéfer- 
vesccnce  s'est  faite  d'une  manière  légitime,  et  à  son  jour  normal,  la  réso- 
lution ne  s'effectue  que  d*unc  manière  fort  imparfaite  :  dans  une  portioo 
du  poumon,  la  matité  reste  absolue,  et  pendant  des  semaines  on  perçoit,  au 
moins  dans  une  petite  étendue,  du  souffle  et  des  râles.  Pour  être  peu 
communs,  de  tels  faits  ont  été  remarques  par  tous  les  cliniciens,  et  j'en  ai 
vu  moi-même  plusieurs  exemples.  A  un  degré  moindre,  la  résolution  im- 
parfaite n'est  point  rare  ;  je  veux  dire  qu'un  certain  degré  de  maillé  ei 
des  râles  sans  souffle  s'observent  fort  souvent.  «  Ce  sont,  dit  Grisolle,  des 
reliquats  ayant  en  général  peu  d'importance,  qui  disparaissent  peu  a 
peu  et  spontanément....  Souvent  les  malades  ne  toussent  plus,  et  on 
croirait  que  l'organe  est  revenu  à  l'état  le  plus  physiologique,  si  l'explo- 
ration par  les  moyens  physiques  ne  révélait  pas  qu'il  existe  encore  une 
modification  dans  In  perméabilité  du  tissu.  » 

Grisolle,  sur  103  cas,  a  noté  66  fois  cette  résolution  lente  du  vingtième 
au  cinquante-cinquième  jour.  Fox,  sur  26  cas.  Ta  vue  cinq  fois  du  ving- 
tième au  vingt-cinquième  jour  et  dans  un  cas  au  trentième;  le  professeur 
E;  Wagner  a  rapporté  récemment  un  cas  de  pneumonie  grave  du  lobe 
supérieur  du  poumon  gauche  dans  lequel  après  la  déforvescence  survf^nut* 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  teuiuiaisoiis.  465 

au  neuYÎème  jour,  les  râles  crépitants  de  retour  durèrent  six  semaines, 
d'après  lui,  il  j  eut^éme  ratatinement  de  volume  de  ce  sommet  et  em- 
phjième  compensateur  du  poumon  droit.  Ce  n'est  que  quatre  semaines 
plus  tard  que  le  sommet  gauche,  à  en  juger  par  les  signes  physiques 
de  percussion  et  d'auscultation ,  revint  à  Tctat  normal.  La  résolution 
bute  peut  être  observée  non-seulement  chez  le  vieillard  et  Taduite,  mais 
itt^y  quoique  plus  rarement,  chez  l'enfant.  E.  Barthez  dit  que  les  pneu- 
nooies  occupant  tout  un  poumon  et  que  les  pneumonies  doubles  ont  en 
{éaéral  une  résolution  lente.  Damaschino  rapporte  Tobservation  d*un 
uifiuU  de  7  ans  et  demi  chez  lequel  la  résolution  ne  se  fit  que  six  se- 
naines  après  la  défervescence  ;  la  gucrison  fut  complète. 

Ainsi  que  l'ont  fait  remarquer  Grisolle  et  Charcot  (thèse  (Vagrég.)  ces 
cas  ne  ressortisscnt  pas  à  la  pneumonie  chronique,  car  si  l'exsudat  per- 
liate,  en  raison  de  conditions  encore  mal  connues,  rien  ne  prouve  qu'il  y 
lit  coexistence  d'un  travail  de  pneumonie  interstitielle.  Voici  comment 
s'exprime  Charcot  (De  la  pneumonie  chronique,  p.  33). 

«  La  persistance  des  phénomènes  locaux,  qui  révèle  l'existence  d'une 
induration  pulmonaire  après  la  disparition  plus  ou  moins  absolue  des 
symptômes  rationnels,  se  trouve  signalée  dans  des  observations  de  pneu- 
monie chronique  où  l'on  a  pu  assister  aux  débuts  de  l'ulTection.  Biais  ce 
ne  serait  pas  là  un  caractère  d'une  valeur  absolue  et  propre  à  faire  pré- 
sager que  la  pneumonie  menace  de  se  continuer  à  l'état  chronique.  L'on 
sait  en  effet  par  les  observations  du  professeur  Grisolle  qu'un  lent  re- 
tour des  poumons  à  l'état  normal  est  un  (ait  commun  à  la  suite  des 
pneumonies  les  mieux  guéries.  La  faiblesse  des  mouvements  respiratoires, 
Ude  respiration  rude  mêlée  de  raies  sous-crépitants,  tels  sont  les  seuls 
îndioes  de  celte  résolution  imparfîute.  Mais  on  a  vu  cependant  des  cas  où 
le  souffle  tubaire,  la  bronchophonie  et  une  matité  des  plus  prononcées  ont 
pu  persister  pendant  deux  ou  trois  mois  après  la  guérison  complète  d'une 
pneumonie  sans  qu'il  y  eût  pour  cela  la  moindre  tendance  à  la  récidive.  » 
On  trouve  des  cas  de  ce  genre  dans  la  thèse  de  Raimond  (Paris,  1842);  un 
aalre  est  rapporté  par  Rayer  (Gaz.  méd,  ,1846). 

Plus  récemment,  Achard  (th.  Paris,  1873),  dans  une  thèse  faite  sous 
l'inspiration  de  Charcot,  a  l'apporté  quatre  faits  analogues  :  pendant  six 
semaines  à  deux  mois  on  a  noté  la  persistance  du  souffle  bronchique. 

Aehard  pense  que  c'est  un  état  de  misère  physiologique  qui  est  la 
cause  de  la  lenteur  de  la  résolution.  Je  n'y  contredis  pas  pour  certain  cas, 
au  contraire,  mais  il  est  probable  que  les  conditions  de  cette  résolution 
lente  sont  complexes.  S*il  est  vrai,  comme  je  le  pense,  que  la  résorption 
de  l'exsudat  se  fasse  en  majeure  partie  par  les  lymphatiques,  la  parfaite 
perméabilité  de  ceux-ci  est  une  condition  sine  qua  non  de  rapide  résolu- 
tion. Or,  il  se  peut  qu'ils  aient  subi  une  oblitération  partielle.  Voilà  donc 
une  condition  locale,  indépendante  de  l'état  général,  qui  doit  exercer  une 
influence  considérable.  Il  en  est  certainement  bien  d'autres  parmi  les- 
quelles le  professeur  Leyden,  qui  a  récemment  publié  plusieurs  cas  de  réso- 
lution lente,  place  la  densité  (Derbheit)  de  Thépatisation,  et  c'est  parce 

BOUT.  MCT.  BiD.  BT  GUIU  IIYIII  —  30 


466  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tbhmihâisohs. 

» 

qu'une  hépatisation  de  ce  genre  n'est,  dit-il,  pas  très-rare  chez  lesjeunes 
sujets  qu*on  observe  chez  ceux-ci  la  résolution  lente.  Je  ne  sais  si  je 
m^abusc,  mais  il  me  semble  que  les  cas  de  résolution  lente  seraioitplus 
communs  parmi  les  pneumonies  non  traitées. 

B.  Avec  passage  à  la  pneumonie  interstitielle.  —  Dans  certains  eai, 
cette  résolution  lente,  au  lieu  de  se  terminer  par  la  restitulio  ad  iMlegrum 
aboutit  à  une  modification  indélébile  du  poumon  qui,  suivant  Tépoque 
à  laquelle  on  est  appelé  à  la  constater  de  visu^  se  présente  sous  TMpeet 
d*induration  rouge  ou  d'induration  ardoisée.  Dans  Tinduration  ronge^dont 
j*ai  vu  récemment  un  remarquable  exemple  qui  a  été  examiné  histologiqiie- 
ment  par  le  professeur  Rcnaut  et  sera  prochainement  publié,  «  le  tm 
pulmonaire,  d'après  Cbarcot,  est  rouge,  compact,  dur,  mais  plus  friaUe 
qu'à  Tétat  normal.  Sur  une  coupe,  les  granulations  pneumoniques  appi- 
raissent  encoi'e,  mais  plus  petites  que  dans  Tétat  aigu.  Le  microscope 
révèle  un  cpaississement  des  parois  alvéolaires,  qui  sont  le  siège  d'niK 
ncoplasie  embryonnaire,  tandis  que  les  cavités  alvéolaires  contiennent  des 
éléments  en  voie  de  métamorphose  graisseuse.  »  Dans  notre  cas,  lei  cavi- 
tés alvéolaires  étaient  en  grande  partie  comblées  par  un  bourgeonnemoit 
du  tissu  embryonnaire. 

Quant  à  Tinduration  ardoisée,  je  n'ai  pas  à  m*en  occuper  ici.  (Toys 
Pneumonie  chronique  par  Balzer). 

Les  symptômes  par  lesquels  se  révèle  Tinduration  rouge  sont  locaux  e( 
généraux.  Les  premiers  sont  les  mêmes  qu'à  la  période  d'hépatisilioa  : 
matité,  souffle,  bronchophonie,  et,  s*il  n'y  a  pas  de  pleurésie,  exagé- 
ration des  vibrations  thoraciques.  Quant  aux  caractères  de  Texpedm* 
tion,  ils  dépendent  de  la  bronchite  concomitante. 

Les  symptômes  généraux  consistent  en  une  fièvre  variable  qui  prend 
bientôt  le  caractère  de  la  fièvre  hecti(|ue  ;  à  la  fin  il  se  développe  des 
eschares  ;  d'autres  fois,  on  observe  le  complexus  symptomatique  de  la 
phthisic. 

ô"*  Mort  a  la  péiuode  d*hépatisation  rouge.  La  mort  peut  survenir  à  cette 
période  soit  par  le  fait  d'une  des  complications  dont  je  traiterai  daos  le 
chapitre  suivant  et  que  par  conséquent  je  passe  ici  sous  silence,  soit  sans 
complication^  et  par  le  fait  de  la  pneumonie  elle-même,  ce  qui  est 
rare  dans  certaines  séries,  dépendant  d*une  même  constitutioo  mé- 
dicale, et  beaucoup  moins  rare  dans  d'autres.  Favorisé  sans  doute 
par  les  circonstances,  depuis  que  je  suis  chef  de  service,  il  ne  m'est 
pas  encore  arrivé  de  voir  succomber  un  de  mes  pneumoniques  à  cette 
période  j*entonds  naturellement  ;  parler  des  pneumonies  primitives,  sans 
complications. 

Quand  Thépatisation  rouge  occupe  un  poumon  presque  entier,  on  com- 
prend qu'elle  détermine  la  mort  par  asphyxie.  Mais  si  elle  est  peu  étendue 
et  (|ue  les  poumons  ne  présentent  pas  de  lésion  chronique  (par  exemple 
de  l'emphysème),  les  résultats  de  I^autopsie  n'éclairent  pas  suflisammeot 
sur  la  cause  de  la  mort.  A  défaut  des  lésions,  les  troubles  observés  pen* 
dant  la  vie  permettent  généralement  de  se  rendre  compte  du  mécam'sme 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  terminaisons.  467 

la  mort;  l'asphyxie  par  exemple  peut  encore  Aire  mise  en  cause,  si  Ton 
onstaté  les  signes  d'une  congestion  pulmonaire  généralisée. 
I*  HfiPATisATioR  GRISE.  —  Le  procossus  qui  y  conduit  n'est  pas  foncièrement 
rérait  de  celui  qui  n'aboutit  qu'à  Thépatisation  rouge  puisque,  dans  toute 
palisation  rouge,  l'alvéole  renferme  un  certain  nombre  de  globules  blancs  ; 
AfMitisation  grise  est  simplement  un  degré  plus  avancé  du  processus  in- 
nmaloire  évoluant  sur  un  terrain  favorable,  c'est-à-dire  chez  des  sujets 
18  de  mauvaises  conditions  (débilité,  âge  avancé,  etc.)  ;  elle  est  à  l'hé- 
isation  rouge  ce  qu^est  la  vésicule  de  variololdc  à  la  pustule  de  variole. 
I..  Hépatisation  grise  suivie  de  mort.  —  Mais  dans  l'alvéole  pulmo- 
re  plus  encore  qu'à  la  peau,  la  suppuration,  pour  être  simplement  un 
Se  plus  avancé  de  la  phlegmasie,  n'en  est  pas  moins  la  source  de  dan- 
V  très  grands  dépendant  soit  de  la  fièvre  de  suppuration,  soit  plus 
A  de  la  résorption  du  pus.  La  mort  est  la  règle  dans  toute  hépatisa- 
IK  grbe  étendue. 

HEtbitaellement  elle  survient  rapidement,  pendant  le  travail  même  de 
Boppuration  :  «  Chez  tous  les  individus  qui  ont  présenté  à  l'autopsie 
e  hépatisation  grise,  dit  Grisolle,  le  début  de  la  maladie  datait  de  8  à 
jours,  terme  moyen  12  jours,  tandis  que  ceux  dont  la  pneumonie  n'avait 
s  encore  franchi  le  deuxième  degré,  quand  ils  ont  succombe,  étaient 
ilades  depuis  5  à  17  jours,  terme  moyen  9  jours.  Enfin,  chez  ceux  qui 
l  oflert  un  mélange  des  deuxième  et  troisième  degrés,  la  maladie  datait 
7  à  19  jours,  terme  moyen  10  jours.  »  On  sait  que  Téconomie  sup- 
rie  beaucoup  plus  longtemps  une  pleurésie  purulente. 
Les  globules  blancs  seraient-ils  plus  facilement  résorbés  s'ils  se  trouvent 
Dt  les  alvéoles  que  s'ils  sont  accumulés  dans  la  plèvre?  La  chose  est 
irible  ;  elle  est  même  probable  ;  mais  il  n'est  pas  pas  facile  d'en  don- 
r  un  commencement  de  démonstration  ;  car  il  ne  suffirait  pas  de  prali 
ler  i  plusieurs  reprises,  pendant  la  durée  d'une  pneumonie  suppurée 
numération  comparée  des  globules  blancs  et  des  globules  rouges  ;  il 
idnit  avoir  un  moyen  de  distinguer  la  leucocytose  primitive,  corres- 
ndant  à  l'époque  de  la  suppuration,  de  la  leucocytose  secondaire  ou  de 
iorplion.  Or  cela  me  parait  impossible. 

D'après  Grisolle,  la  pneumonie  du  sommet  passerait  plus  vite  à  l'hépa- 
■lioo  grise.  Ce  serait  une  exception  à  la  règle  que  j'ai  précédemment 
fiquée,  et  d'après  laquelle  les  actes  morbides  sont  plus  lents  dans  le 
be  supérieur  du  poumon.  En  tous  cas,  ce  n'est  pas  un  indice  de  vitalité 
■s  active  puisque  la  même  précocité  relative  de  l'hépatisation  grise 
ibaerve,  d'après  Grisolle,  chez  les  sujets  faibles  et  âgés. 
Si  l'hépatisation  n'est  pas  trop  étendue,  ou  si  le  sujet  est  doué  d'une 
Hstance  particulière,  la  lièvre  peut  diminuer,  une  fois  que  le  travail  de 
ppnration  est  accompli,  et  ce  n'est  qu'au  bout  d'un  certain  nombre  de 
un  que  le  malade  succombe  par  épuisement.  Cette  prolongation  de  la 
e  est  d'ailleurs  assez  rare. 

^.  Hépatisation  grise  suivie  de  guérison.  — La  guérison  passe  pour 
^infiniment  plus  rare;  mais  il  se  pourrait  que  l'opinion  classique  fût 


468  PiNEDHONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tbimuaisobs. 

sur  ce  point  un  peu  exagérée  dans  le  sens  pessimiste  et  qu'an  certain 
nombre  d*hépatisations  grises,  naturellement  peu  étendues,  fussent  sucep- 
tibles  deguérison.  Grisolle,  qui  sous  ce  rapport  n'est  pas  suspect  de  t*ètre 
abandonné  à  des  illusions,  dit  avoir  vu  trois  malades  chez  lesquels  il  a 
diagnostique  le  5"  degré  de  la  pneumonie  et  qui  ont  guéri  apiÀ  on  lent 
travail  de  résolution  pendant  lequel  le  souffle  tubaire  a  fait  place,  sans 
intermédiaire,  à  une  crépitation  humide  et  grasse  qui  a  persisté  phnieun 
semaines.  D*ailleurs,  ainsi  que  nous  allons  le  voir,  les  abcès  polmonairei 
peuvent  guérir.  Cela  démontre  la  possibilité  de  la  guérison  d*ane  hèpiti- 
sation  grise.  La  seule  question  est  de  savoirs'il  faut  nécessairement  quelle 
soit  préalablement  collectée;  or,  c*est  une  question  accessoire. 

C.  Terminaison  de  rhépatisation  grise  par  abcès,  —  Dans  ce  tt%, 
suivant  la  remarque  du  professeur  Jaccoud,  il  ne  s'agit  plus  d'une  simple 
altération  de  surface  :  il  y  a  destruction  partielle  du  parenchyme  pul» 
naire:  cnr  le  pus  ne  peut  se  réunir  en  foyer  qu'après  la  disparitioado 
cloisons.  Celle-ci  n'a  pas  lieu  par  suite  d'un  travail  ulcératif,  mais  pintàl 
par  un  processus  nécrobroti(|UC  suivi  d'élimination  des  parties  mortifiées. 
Ce  qui  le  prouve,  c'est  que  dans  les  crachats,  ainsi  que  Traube  la  montré, 
on  trouve  de  petits  lambeaux  de  parenchyme",  pulmonaire  parfaitement 
rcconnaissabics  au  microscope. 

Très  rares  chez  Tenfant,  rares  chez  les  jeunes  gens,  moins  rares  piaé 
l'âge  de  50  ans,  les  abcès  ne  se  produisent  jamais  chez  des  individus aiité» 
rieurement  bien  portants  ;  d'autre  part  si  les  sujets  sont  fort  afiaiUis,  ik 
succombent  avant  que  le  pus  soit  collecté.  —  J'ai  dôjà  eu  occasion  de  dire 
que  les  abcès  sont  plus  communs  dans  la  pneumonie  du  sommet. 

Les  abcès  pulmonaires  —  je  nj  parle  naturellement  que  de  ceux  qui 
sont  consécutifs  à  la  pneumonie  fibrineuse  —  ofi'rent  eiitie  eux  de  grandes 
différences  sur  le  rapport  du  siège,  de  l'étendue,  etc.  Dans  les  trois  qnarts 
des  cas,  ils  sont  superficiels. 

S'ils  sont  multiples,  ils  peuvent  être  forts  petits.  Les  petites  collectio» 
(dequel(|ucsmillimètres  de  diamètre)  seraient,  d'après  Grisolle  plus  oon- 
munes  chez  le  vieillard.  Habituellement  les  abcès  sont  plus  volumineoi 
et  présentent  deux  ou  trois  centimètres  de  surface  à  la  coupe.  On  en  a  cité 
de  beaucoup  plus  considérables. 

La  cavité  do  Tabcès  est  anfractueuse,  parfois  sillonnée  par  des  brides 
flottant  dans  Tintérieur  du  foyer.  D'autres  fois,  on  a  trouvé  la  surface 
interne  tapissée  d'une  fausse  membrane  grisâtre  qui,  si  l'on  en  juge  pr 
quelques  observations,  pourrait  se  produire  en  peu  de  jours.  Beaucoup  pitf 
rarement  on  a  constaté  une  mortiiication  des  parois  de  l'abcès,  qui  soit 
formées  par  un  détritus  noir  ou  brun,  exhalant  Todeur  propre  à  la  gifi- 
grène  pulmonaire. 

La  nature  du  pus  varie.  Dans  la  moitié  des  cas  on  a  signalé  quek 
pus  était  blanc,  épais,  inodore  ;  on  le  trouve  aussi  gris  rougeàtre  et  fétiè; 
parfois  un  des  lambeaux  ou  même  une  masse  volumineuse,  fragment  di 
parenchyme  pulmonaire  mortifié,  ont  été  rencontrés  dans  le  cooten 
^^*  la  caverne. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  TBamiiAisoNs.  469 

La  symptomatologie  de  l'abcès  pulmonaire  est  obscure;  il  ne  faut 
mnpter  sur  aucun  signe  physique  tant  que  son  contenu  n'est  pas  en 
Aire  communication  avec  une  branche  d'un  certain  calibre.  Alors,  il  y  a 
ieox  ordres  de  signes  :  1"  les  signes  stéthoscopiques  qui  prouvent  l'exis- 
mée  d'âne  cavité  (souffle  caverneux  et  gargouillement)  ;  2^  les  signes  bien 
mlnment  précis  tirés  du  caractère  de  l'expectoration,  à  savoir  l'apparition 
ifas  on  moins  brusque  d'une  quantité  plus  abondante  de  pus  et  surtout 
"aamen  microscopique  de  ce  pus  dans  lequel  on  rencontre  des  lambeaux 
lé  tiira  pulmonaire  (Traube). 

Quant  aux  signes  généraux,  ils  sont  fort  équivoques  :  il  ne  faut  pas 
tnp  compter  sur  les  frissons,  sur  l'exacerbation  de  la  fièvre,  ceUe-ci  peut 
ilAna  manquer. 

'Malgré  sa  gravité,  cette  terminaison  n'est  pas  fatalement  mortelle  :  on 
iite  un  assez  grand  nombre  de  cas  de  guérison  ;  mais  je  n'ai  pas  à  traiter  ici 
itf  mode  suivant  lequel  elle  peut  survenir  (résorption,  ouverture  dans  les 
lÉtniches,  dans  la  plèvre  ou  au  dehors,  dans  le  péricarde  etc.  Voy.  : 
Éiicle  Poumon  (abcès) . 

5*  Gaisgrène.  —  C'est  une  suite  tellement  insolite  de  la  pneumonie 
lirevise,  qu'on  a  même  nié  quelle  en  fût  une  tei^minaison  dans  le 
lèna  propre  du  mot.  Pour  moi,  je  serais  assez  de  cet  avis  et  la  consi- 
lérerais  plutôt  comme  un  accident  ou  une  complication  :  c'est  pour  me 
BDoformcr  à  l'usage  que  j'en  parle  ici. 

'  'Dans  l'Inde,  sur  la  côte  de  Coromandel,  sur  celle  de  Malabar,  la  gan- 
{îrèile  est  une  suite  commune  de  la  pneumonie,  mais  de  quelle  pneumonie 
ragil^il? 

'  Les  pneumonies  du  lobe  supérieur,  celles  qui  surviennent  chez  les 
friîridus  à  constitution  détériorée  y  seraient  prédisposées,  (IIuss)  ;  mais 
Mte  dernière  opinion  n'est  pas  généralement  partagée.  Bien  plus  impor- 
antes  que  ces  causes  prédisposantes,  à  supposer  même  qu'elles  soient 
telles,  sont  les  causes  accidentelles  inconnues. 

La  gangrène  consécutive  à  la  pneumonie  est  chez  nous  si  rare  que 
rrisoUe,  sur  plus  de  douze  cents  pneumonies  qu'il  aurait  observées  (!), 
irélend  ne  l'avoir  jamais  rencontrée.  Cependant  Andral  en  a  cité  trois 
as;  Monneretun,  terminé  par  pneumothorax (ilrcAive^,  1851)  etBéhier 
n  rapporte  deux  dans  sa  Clinique. 

La  gangrène  serait-elle  plus  commune  en  Angleterre?  on  serait  tenté 
B  le  croire  si  l'on  se  fiait  au  dire  de  Hughes  qui  sur  200  autopsies 
la  pneumoniques  aurait  trouvé  28  cas  de  gangrène.  De  ce  résultat  un  peu 
ixprenant  il  faut  au  moins  retenir  que  plusieiurs  de  ces  cas  sont  sur- 
sniis  pendant  une  épidémie  de  grippe,  (six  notamment  en  une  seule 
emaine:  Guys  Hospit,  Reports,  1848.) 

En  dehors  de  toute  influence  épidémique,  le  professeur  Leyden  tient 
nasi  pour  réelle  la  terminaison  de  la  pneumonie  par  gangrène  ;  tDut  récem- 
Bent  il  vient  d'en  publier  une  nouvelle  observation  (Berl.  kl.  Wochens. 
1879  n*  20j  il  s'agit  d'un  homme  de  quarante-sept  ans  entré  à  l'hôpital 
lu  cinquième  jour  d'une  pneumonie  caractérisée  par  un  point  de  côté, 


470  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGLE.  —  TniinAua». 

des  râles  sous-crépitants  à  fines  bulles  ;  les  jours  suivants  rhéptUation 
envahit  presque  tout  le  poumon  gauche,  expectoration  rouillée  cindcris- 
tique.  Du  sixième  au  septième  jour  la  fièvre  commença  à  tomber,  mais 
sans  crise  régulière  ;  les  jours  suivants  elle  eut  des  retours,  accompagnés 
d'expectoration  rouillée  et  le  malade  s^afTaiblit  de  plus  en  plus,  fti  trei- 
zième au  quatorzième  jour,  apyréxie,  coUapsus;  puis  rexpectorMioo  prend 
une  couleur  de  chocolat  sale  ;  au  quinzième  jour  on  trouve  dinles  cra- 
chats de  petits  débris  de  parenchyme  pulmonaire  ;  leur  odeur  deiint  fé- 
tide; la  température  remonte  à  40^,  retombe  et  remonte  :  mort  an  nngt. 
troisième  jour.  A  Tautopsie  le  lobe  supérieur  du  poumon  était  atteint  de 
gangrène  diffuse  dans  toute  son  étendue  ;  dans  le  lobe  inférieur  en  état 
d'hépatisation  grise  il  j  avait  des  points  présentant  une  coloration  janne 
et  évidemment  motifiés,  mais  non  véritablement  atteints  de  gangrène: 
c'en  était  probablement  le  premier  stade. 

Naturellement  je  renvoie,  pour  Tanatomie  pathologique,  à  l'artide 
POUMON  (gangrène).  Je  rappellerai  seulement  ici  que  la  gangrène  qui,  daos 
nos  pays,  se  rcncon  tre  à  la  suite  d*une  pneumonie  est  le  plus  souvent 
circonscrite. 

Les  symptômes  du  développement  de  la  gangrène  sont  fort  insidieux.  Ce 
n*est  que  lorsqu'elle  est  bien  déclarée  qu'ils  peuvent  donner  la  certitude. 
L'odeur  de  l'haleine  et  de  l'expectoration,  au  contraire,  qui  est  presque 
pathognomoniquc,  est  de  beaucoup  le  principal  signe.  Les  crachalssoot 
de  couleur  variable  :  jamais  ils  ne  sont  constitués  par  du  sang  pu:  ils 
sont  gris  pâle,  brun  ou  vcnlàtre  (sans  matières  colorant  de  U  bile). 
Traubc  a  surtout  insisté  sur  celte  dernière  espèce  de  crachats  dont  la 
coloration  tient  peut-être  à  la  présence  du  parasite  découvert  par  Comilet 
dont  il  a  été  question  plus  haut. 

Les  signes  stéthocospiques  sont  peu  importants,  parce  qu'en  général 
les  malades  succombent  avant  qu'une  excavation  se  soit  produite.  Quant 
aux  symptômes  généraux  ce  sont  ceux  de  la  gangrène  :  la  face  est  altérée, 
les  joues  sont  prostrées,  le  pouls  fréquent,  déprcssible,  il  y  a  une  diarrhée 
fétide,  colliquativc.  D'après  Grisolle  ces  symptômes  ne  se  rencontrent  que 
lorsque  Taltération  occupe  une  assez  grande  étendue  du  poumon. 

U^nut  ù  la  terminaison  de  la  pneumonie  fibrineuse  par  caséification, 
on  sait  quelle  a  été,  dans  ces  dernières  années,  fort  discutée.  C'est  une 
question  qui  n'est  peut-être  pas  entièrement  tranchée.  Le  fait  que  cer- 
taines pneumonies  peuvent  se  résoudre  incomplètement  et  laisser  un  \\\A 
caséeux  n'est  pas  niable  et  je  renvoie  à  l'observation  1'*  de  ma  thèse  d'a- 
grégation (De  la  pneumonie  caséeuse^  p.  24)  qui  en  offre  un  exemple.  Ce 
qui  est  seulement  discutable,  c'est  la  nature  de  la  pneumonie  susceptible 
d'une  telle  terminaison.  D'après  Buhl,  elle  ressortirait  nécessairement i 
sa  pneumonie  desquamalive.  A  cela  je  n'ai  rien  à  dire,  sinon  que  difli* 
quement  rien  ne  le  prouve;  c'est  une  question  à  débattre  entre  les  liistob- 
gistcs.  Or  non-seulement  il  n'y  a  pas  unanimité  entre  eux,  mais  fopinioa 
de  Buhl  ne  me  parait  pas  réunir  la  majorité  des  suffrages.  Je  renvoie  à  ce 
sujet  à  un  travail  récent  du  docteur  Lévy  (Arch.  fur  Heilkunde,  1877),qui 


PNEUMONIE  LOB  AIRE  AIGUË.  —  complications.  471 

MMilientque  toute  pneumonie,  dans  certaines  circonstances,  peut  devenir 
^aséeuse. 

Rechute.  —  Thomas  désigne  sous  le  nom  de  récidive  «  une  nouvelle 
pneumonie  commençant  avant  que  la  première  ait  atteint  la  fin  de  sa  réso- 
lation  normale.  y>  C'est  ce  que  nous  appelons  rediule;  aussi,  pour  ne  pas 
ialroduire  de  confusion  dans  notrelangage  habituel  j'emploierai  seulement 
Bette  dernière  dénomination.  Pour  que  Ton  puisse  admettre  qu'il  y  a 
réellement  rechute  et  non  simple  aggravation  d'une  pneumonie,  il  faut 
]ue  la  défervesccnce  se  soit  faite  depuis  un  laps  de  temps  tel  qu'on  puisse 
sxclure  à  coup  sur  une  pseudo-crise;  il  faut  de  plus  que  les  signes  d'ans- 
sultaiion  prouvent  que  la  résolution  avait  réellement  commencé  ;  autre- 
nenl,  on  a  affaire  à  une  de  ces  pneumonies  qui  accomplissent  leur  évolu- 
ion  en  plusieurs  actes. 

Binz  a  publié  le  cas  d'un  enfant  de  3  ans  qui  eut  ;  dans  l'espace  de 
14  jours,  deux  pneumonies  du  lobe  inférieur  droit.  Mais  je  ne  connais  pas 
l'une  manière  suffisante  les  détails  de  ce  fait.  —  Jurgenseu  (2^  Aufl., 
I.  i54)  a  rapporté  le  cas  suivant  : 

Uomme  de  59  ans  ;  pneumonie  de  la  base  droite.  Malgré  une  tempé- 
rature de  41°,  il  supporte  bien  sa  maladie  ;  crise  au  7*^  jour  ;  chute  delà 
mnpérature  à  38%5.  Pendant  les  cinq  jours  suivants,  il  y  a  encore  un  peu 
le  fièvre  et  la  résolution  ne  se  fait  que  d'une  manière  fort  incomplète. 
lu  i 2*  jour,  (à  partir  du  début),  nouveau  frisson  ;  température  à  40^,9. 
Localement  rien  d'appréciable  à  Tauscultation  ;  mais  l'expectoration  qui 
itaît  muco-purulenle  depuis  le  7^  jour,  redevient  visqueuse  et  colorée. 
Entre  ia  40'  et  la  60^  heure  à  partir  du  nouveau  frisson,  la  température 
retooibe  à  37^ 

Friedleben,\Vittich,  llenoch  et  Tordœus  ont  aussi  rapporté  des  obser- 
ratioos  de  prétendue  rechute.  Mais  le  professeur  Thomas  croit  qu'il  s'agis- 
ndt  de  nouvelles  pneumonies,  cequenousappellerionsreadit;^^.  Dans  les 
casd'Henoch  et  de  Wittichune  autre  partie  de  poumon  fut  prise  le  2"  jour. 
ftana  celui  de  Tordœus,  c'a  été  deux  fois  la  même.  Quant  aux  récidives. 
l'eu  ai  dit  quelque  mots  au  chapitre 'de  l'étiologie. 

Maladies  colnsécutives.  —  Sauf  la  pneumonie  elle-même,  je  ne  vois  pas 
ie  maladies  qu'un  pneumonique  convalescent  ou  guéri  soit  spécialement 
prédisposé  à  contracter.  Mais  il  est  certain  qu'il  garde,  pendant  plusieurs 
mois,  une  disposition  aux  récidives. 

J*ai  vu  récemment  un  cas  de  thrombose  de  la  fémorale  pendant  la 
couYalescence  d'une  pneumonie  fibrineuse.  Ledien  a  cité  un  cas  de  throm- 
bwe  de  la  veine  porte.  On  a  cité  des  exemples  de  noma  chez  l'enfant 
[peut-être  en  partie  à  cause  du  traitement  mercuriel).  On  a  aussi  rap- 
p^^rté  certains  cas  de  paralysie  infantile  à  une  pneumonie  antérieure. 
Beaucoup  de  maladies  du  système  nerveux  central  peuvent  sans  doute 
«foir  la  même  cause  occasionnelle.  L'ébranlement  qu'une  maladie  aussi 
gra^e  cause  à  l'organisme  l'explique  amplement. 

Complications.  —  La  formation  d'abcès ,  le  développement  d'une 
gangrène,  peuvent  être  considérés  non-seulement  comme  une  terminaison. 


Al  2  PNEUMONIE  LOB  AIRE  AIGUË.  —  cospucATion. 

mais  aussi,  à  la  rigueur, comme  une  complication  de  la  pneumoDÎe.  Ibis 
ce  ne  sont  pas  les  seules,  ce  ne  sont  même  pas  les  plus  fréquentes. 

CoMPLicATioMs  THORACiQUES.  —  Pleuvësie.  —  Nous  avons  vu,  au  duptre 
de  Tanatomie  pathologique,  que  Thopatisation  de  la  surface  du  poumon 
s'accompagne  nécessairement  de  la  production  d'une  fausse  nMmbmie 
molle  qui  peut  sécréter  (]uelques  cuillerées  d'un  liquide  séro-pamleot. 
Ce  n'est  pas  là  ce  qu'on  doit  appeler  en  clinique  une  pleuro-pneunoDie. 
Pour  qu'on  dise  que  la  pneumonie  est  compliqua  dune  plenrèiie,  il 
faut  que  l'cpanchement  soit  assez  considérable  pour  modifier  les  ijm- 
ptômcs  de  la  maladie  principale. 

D'après  tous  les  auteurs,  la  pleurésie,  entendue  comme  nous  venons 
de  le  faire,  c'est-à-dire  ayant  causé  un  épanchement  notable,  est,  de  tonte 
les  complications  de  la  pneumonie,  la  plus  commune;  mais  les  statis- 
tiques varient  sur  le  chiffre  de  sa  fréquence.  Fismer  (à  Bâie)  la  porte  i 
15  pour  100,  tandis  que  la  plupart  des  autres  donnent  un  chiffre  moim 
élevé.  Grisolle  se  rapproche  d'ailleurs  singulièrement  de  Fismer,  car, 
dit-il,  a  sur  247  malades,  51  ont  offert  j^enJait/ /a  vie  les  signes  évidents 
d'un  épanchement  plus  ou  moins  considérable...  En  général,  la  quantité 
de  liquide  était  en  raison  inverse  de  la  pneumonie  et  du  degré  anqnd 
celle-ci  était  parvenue  ;  je  n'ai  trouvé  qu'une  exception  :  c'était  dans  no 
cas  où  tout  le  poumon  droit  était  envahi  ;  les  lobes  supérieurs  et  moyens 
étaient  frappés  d'hépatisation  rouge  et  grise,  tandis  que  le  lobe  inEnienr 
ne  présentait  que  de  l'engouement  et  un  commencement  d'indnntion 
ronge  ;  et  cependant,  malgré  une  lésion  si  étendue  et  si  profonde  du 
parenchyme  pulmonaire,  il  s'était  formé  dans  la  plèvre  un  épanchement 
de  4  à  500  gr.  environ.  Dans  les  pneumonies  qui  occupent  l'organe  en 
totalité  ou  dans  sa  plus  grande  étendue,  surtout  si  la  phlcgrnasie,  ayant 
d'abord  envahi  le  centre  du  poumon,  s'étend  ensuite  à  la  périphérie,  on 
voit  que  répanchement  est  presque  toujours  peu  considérable  et  qu'il 
n'est,  en  général,  formé  que  de  fausses  membranes.  » 

D'après  le  même  auteur,  l'cpanchement  occuperait  toujours  'la  partie 
déclive  de  la  cavité  pleurale.  Cette  assertion  me  parait  trop  absolue  ;  car, 
quelques  observations,  entre  autres  une  de  Woillez,  la  contredisent  for- 
mellement. Dans  le  cas  rapporté  par  ce  dernier,  il  y  avait  une  pleurésie 
purulente  partielle  circonscrite  par  des  adhérences  en  avant,  en  haut  et 
à  droite;  le  lobe  supérieur  du  poumon  droit  était  hépatisé  etc.  (Traité 
des  maladies  aiguës  des  voies  respiratoires ^  p.  238). 

Dans  le  quart  des  cas  de  pleuro-pneumonie  observés  par  Grisolle, 
répanchement  et  la  pneumonie  occupaient  des  parties  de  la  poitrine 
éloignées  l'une  de  l'autre,  la  pneumonie  siégeant  au  sommet  ou  à  b 
partie  moyenne.  F^es  symptômes  propres  à  chacune  des  maladies  se  mon- 
trent alors,  dit-il,  dans  leur  étendue  respective,  et  leur  diagnostic  ne 
présente  aucune  dilTiculté.  Je  ne  saurais,  pour  ma  part,  souscrire  à  cette 
dernière  proposition,  car,  ainsi  que  nous  l'avons  vu,  l'abolition  des  vibra- 
tions thoraciques,  l'absence  de  bronchophonie  et  du  murmure  respiratoire 
'  se  rencontrer  dans  la  pneumonie  exempte  de  tout  épanchement; 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  cohplications.  473 

le  telle  sorte  que  si,  chez  un  malade  présentant  au  sommet  les  signes  com- 
plets de  la  pneumonie,  on  trouve  à  la  base  de  la  matité,  du  silence  respi- 
atoire  et  l'abolition  des  vibrations  thoraciques,  on  n'est  pas  en  droit 
Taffirmer  par  cela  seul  l'existence  d'une  pleurésie  à  la  base,  à  Texcep- 
ion  d'une  hépatisation  pseudo-pleurétiquc.  Il  n'y  a,  selon  moi,  que  les 
igÊÈPts  suivants  qui,  en  pareil  cas,  si  on  les  rencontre,  permettront  d'af- 
irmer  l'existence  d'un  épanchement  ;  ce  sont  : 

1*  L'égophonie  quand  elle  bien  caractérisée;  2*^  le  déplacement  des 
irganes,  du  cœur  notamment  si  l'épanchement  siège  à  gauche  ;  S"*  les  mo- 
lificalions  apportées  aux  signes  physiques  par  les  changements  de  position 
lu  malade.  En  Tabsence  de  ces  signes,  qui  témoignent  d'une  manière 
H^itive  en  faveur  de  l'épanchement,  il  faut  savoir  rester  sur  la  réserve. 

Lorsque  la  pneumonie  et  l'épanchement  siègent  tous  deux  à  la  base, 
les  phénomènes  d'auscultation  peuvent  être  modifiés  de  deux  manié- 
es différenles  :  ou  bien  les  bruits  respiratoires  sont  très  affaiblis  et  on 
te  perçoit  de  la  crépitation  et  du  soufQe  tubaire  qu'en  faisant  tousser  ou 
espirer  très  fortement  le  malade,  ou  bien  l'épanchement  renforce  les 
mils  bronchiques  et  leur  donne  un  timbre  amphorique.  Cette  dernière 
lodiGcation  peut  induire  en  erreur  et  faire  croire  à  la  production  d'une 
KCSYStion  ;  on  l'évitera  cependant  en  tenant  compte  des  vibrations,  qui 
ont  nécessairement  diminuées  tandis  qu'elles  seraient  plutôt  exagérées 
ans  le  cas  d'excavation  véritable.  —  Quant  au  premier  cas,  celui  où  les 
mits  sont  affaiblis,  il  peut  aussi  être  fort  embarrassant.  Mais  la  coexis- 
mce  d'un  épanchement  sera  prouvée  si  l'on  a  l'un  des  trois  signes  que 
ri  précédemment  indiqués.  Grisolle  cite  des  cas  de  ce  genre  où  il  a  fait 
esser  toute  incertitude  en  faisant  incliner  les  malades  sur  le  côté  sain 
D  mieux  q  en  les  plaçant  à  quatre  pattes  »  afin  de  forcer  l'épanchement 
s'élaler  sur  une  plus  large  surface. 

Tantôt  l'épanchement  disparaît  de  bonne  heure  et  semble  n'être  qu'un 
piphénomène,  tantôt  il  reste  plus  ou  moins  stationnaire  et  ne  diminue 
ue  lorsque  la  résolution  de  la  pneumonie  est  plus  ou  moins  avancée, 
ini&t  enGn  il  survit  à  la  pneumonie  ,  devient  purulent  et  nécessite  uile 
ntervention  particulière.  Woillcz  qui  a  appelé  l'attention  sur  ces  derniers 
lits  et  leur  consacre  un  chapitre  de  son  ouvrage  les  désigne  sous  le 
om  de  pneumo-pleurésie. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  de  la  première  catégorie,  puisque,  vu 
m  peu  de  durée,  la  pleurésie  ne  peut  évidemment  exercer  sur  la  pneu- 
lonîe  une  influence  fâcheuse.  Bien  plus,  d'après  Laennec,  son  action 
)rait  même  favorable  :  la  compression  exercée  sur  le  poumon  devant, 
it-il,  modérer  l'orgasme  inflammatoire  et  empêcher  le  passage  de  la 
neumonic  au  troisième  degré.  Grisolle  contredit  assez  vivement  Laennec 
cet  égard.  Quant  aux  pleurésies  de  la  deuxième  catégorie,  celles  qui 
ersistent  après  le  commencement  de  la  résolution,  elles  exercent  d'après 
aennec  une  influence  fâcheuse  sur  cette  deniière:  il  dit  avoir  observé  la 
«rsistance  d'un  certain  degré  d'induration  du  parenchyme  après  plus  de 
leux  mois.  Mais,  ainsi  que  nous  l'avons  vu  plus  haut,  il  y  a  des  pneumo- 


474  PNEUMONIE  LOBAFRE  AIGUË.  —  coiiPLiCATioirs. 

nies  dégagées  de  toutes  complications  d'épanchement  qui  sont  très-lentes 
à  se  résoudre,  de  sorte  que  l'affirmation  de  Laennec  me  semble  avoir 
besoin  d'être  étayée  par  de  ncuvelles  preuves. 

Les  pneumO'pleurésies,  pour  employer  la  terminologie  de  ^VoiIkz. 
se  distinguent,  en  général,  par  leur  gravité,  parce  que  répanchement  est 
purulent,  au  moins  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas.  On  trouve  dans  h 
littérature  quelques  faits  de  ce  genre  et  j*en  ai  aussi  observé. 

Bronchite^  Congestion  pulmonaire.  —  J*ai  traité  plus  haut  de  la 
pneumonie  qui  survient  chez  un  malade  atteint  préalablement  de  bron- 
chite; il  me  faudrait  ici  parler  de  la  bronchite  consécutive  à  une  pneu- 
monie ;  mais  le  cas  est  si  rai'e  que  je  ne  possède  pas  les  Tnatfriwai  raffi- 
sants  pour  en  parler.  , . 

Quanta  la  congestion  pulmonaireenvisagée comme  compliea|MQ, c'est, 
ainsi  que  je  Tai  déjà  dit,  la  cause  probable  de  la  mort  dans  wi  ceriaio 
nombre  d*hépatisations  rouges.  Relativement  aux  signes  par  kM|HJbellc 
se  révèle,  soit  dans  les  parties  non  hépatisées  du  poumon  maladey(|Nl  dans 
le  poumon  sain,  je  ne  crois  pouvoir  mieux  faire  que  de  roivufiîi  Tar- 
liclc  de  Woillez,  (Traité  cité  p.  221  et  suivantes). 

Appaiieil  ciRcuLATomE.  — PMcardUe.  —  Bouillaud  la  croit KOpHiune 
dans  la  pneumonie  grave.  Grisolle  conteste  cette  assertion.  ItiLibiU  à 
Vienne,  dans  une  statistique  portant  sur  près  de  6,000  pnennapili*  on 
no  l'a  notée  qu'une  fois  sur  200.  A  Stockholm,  sur  près  do  3,000.  fiHiiio- 
nies,  elle  a  été  près  de  deux  fois  plus  fréquente  qu'à  Vienne.  A  ||l||f  clic 
a  été  beaucoup  plus  commune*  car  elle  y  a  été  observée  près  .4M '''^'^ 
sur  100.  Je  suis  porté  à  croire  qu'elle  est  moins  rare  que  ne  rinApent 
les  deux  premières  statistiques,  car  n'étant  pas  facile  à  reoonni|be  sur 
le  vivant,  elle  doit  passer  souvent  inaperçue. 

Il  importe  de  distinguer  les  péricardites  assez  accentuées  ponr .donner 
lieu  à  dos  symptômes  et  constituer  une  complication  de  celles  qui  ne 
s'accompagut'nt  pas  d'épanchement  et  ne  sont  par  conséquent  qn'on  in- 
cident de  peu  d'importance  pendant  révolution  de  la  pneumonie.  Je  ne 
dirai  rien  des  dernières.  Quant  aux  premières,  véritable  compUcilioa, 
et  dos  plus  graves,  elles  agissent  en  mettant  obstacle  a  l'activité  cardiaque. 
Leur  effet  le  plus  facilement  appréciable  est  rabaissement  de  la  ten^péri- 
ture  du  malade.  Naturellement  le  pouls  devient  faible  et  petit;  man  j'in- 
siste surtout  sur  l'abaissement  de  la  température,  car  n'étant  pas  um* 
conséquence  aussi  directe  de  l'affaiblissement  du  cœur  que  la  fiaiblessc  du 
pouls,  on  est  a  priori  moins  disposé,  si  l'on  n'est  pas  prévenu,  à  lui  attri- 
buer sa  véritable  signilication.  Voici  un  exemple  de  péricardite  avec 
abaissement  de  la  température,  je  l'emprunte  à  Lorain  (ouv.  cil,  p.  408- 
411).  Il  s'agit  d'un  jeune  homme  de  17  ans  atteint  de  plcuro-pueunionie. 
dont  la  température,  après  une  élévation  assez  forte  au  début,  subit,  cinq 
jours  après  l'entrée  du  malade  à  l'hôpital,  et  13  jours  après  les  premieK 
symptômes  en  même  temps  qu'on  percevait  desJrotteraents  pcricardique^, 
un  abaissement  considérable  et  se  maintint  dès  loi*s  constamment  à  ôi'S. 
sauf  le-  dernier  jour  que  la  température  remonta  d'un  degré.  Le  pouk 


PMUUONIE  LOB.URE  AIGUË.  —  complicxtiohs. 


475 


régulier  reste  pendant  ce  temps  entre  80  et  90*.  sauf  le  dernier  jour  où  i) 
ranoDle  brusquement  à  1 00°.  Le  péricarde,  à  l'autopsie,  renfermait  600  gr. 
de  liquide  sanguinolent. 

Sauf  dans  le  cas  où  existe,  en  même  temps  que  la  pneumonie,  une 
plenrésie  qui  se  propage  au  péricarde  —  tout  récemment  le  docteur  Colrat 
m'a  montré  ptutiieurs  cas  de  cette  propagation  — ,  les  rapport»  de  la  péri- 
cardite  avec  la  pneumonie  ne  sont  pas  toujours  trcs-facilcs  à  expliquer: 


ll»»EMiai«1M11 

HUM 

IHHj 

HHHHI 

ihhI 

HBUI 

ihhI 

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BBBBI 

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■■■■1 

IbbI 

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HHHHj 

IBB 

HHHHI 

IHB 

'■■H! 

iBb 

[BbI 

quelquefois  le  rhumatisme  parait  être  leur  lien  étiologique  commun. 
Dans  la  pneumonie  des  buveurs  et  des  CrightiqUes.  la  péricarditc  c^t 
aussi  plus  commune. 

Endocardite.  —  Elle  est  beaucoup  plus  rare  que  la  péricardite.  ù  moins 
que  l'on  considère  les  soufOes  passagers  qu'on  rencontre  si  fréquemment 
an  cœur  pendant  le  cours  d'une  pneumonie,  comme  symplomatiques  do 
cette  complication,  ce  que,  depuis  les  travaux  du  professeur  Putain,  l'on 
ne  peut  admettre. 


476  PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  complications. 

Les  embolies  qui  surviennent  parfois  dans  le  cours  de  la  pneumonie  ne 
sont  pas  une  preuve  pcremptoire  de  Texistence  d'une  endocardite;  caries 
coagulations  peuvent  s'être  faites  dans  les  veines  pulmonaires*  ainsi  que 
j*en  ai  vu  trois  exemples  dont  l'un  a  été  cité  à  propos  de  VAnatomiepa- 
thologique  :  h  la  vérité,  elles  sont  plus  rares,  je  croîs,  que  les  concrétions 
intra- cardiaques. 

Concrétions  sanguines.  —  Si  elles  siègent  dans  le  cœur,  elles  peuvent 
géncr  plus  ou  moins  la  circulation.  Si  elles  sont  projetées  dans  les  artères, 
elles  causent  des  infarctus^  complication  d'ailleurs  rare,  sauf  dans  les 
relevés  de  Thôpital  de  Bâle. 

Insuffisance  cardiaque  (asystolie)  avec  ou  sans  altération  du  myo- 
carde. —  J'ai  déjà  dit  un  mot  de  la  complication  dont  je  yeux  parler  ici 
en  parlant  de  la  péricardite.  C'est  en  effet  le  propre  de  cette  maladie, 
lorsqu'elle  atteint  une  certaine  intensité,  d'altérer  plus  ou  moins  grave, 
ment  les  fonctions  du  cœur.  Ce  que  fait  la  péricardite,  la  fièvre  seule 
peut  parfois  le  réaliser  :  on  sait  que  dans  les  fièvres  graves  il  se  déve- 
loppe une  altération  du  myocarde.  Théoriquement,  on  eût  donc  pu 
supposer  que  dans  les  pneumonies  graves  se  terminant  par  suppuration, 
où  la  Sèvre  dure  plus  d'un  septénaire,  il  se  produit  aussi  une  dégéné- 
rescence aiguë  du  moycarde;  mais  nous  avons  vu,  au  chapitre  de  i'ana- 
tomie  pathologique,  que  les  faits  ne  confirment  pas  cette  supposition  et 
qu'il  est  extrêmement  rare  de  trouver,  i  l'autopsie  d'une  pneumonie,  une 
altération  quelconque  récente  du  myocarde.  L'insuffisance  cardiaque  dont 
je  vais  parler  ici  résulte  des  circonstances  particulières  où  se  trouve  le 
cœur,  par  s'.iite  de  Taffection  pulmonaire,  du  travail  exagéré  qu'il  est 
obligé  d'effectuer;  elle  peut  se  développer  d'une  manière  aiguë  dans  un 
cœur  prédisposé,  alors  même  que  le  myocaixie  est  paîfaitement  sain; 
mais  naturellement  elle  survient  plus  facilement  encore  dans  un  cœur 
préalablement  altéré  soit  par  suite  de  la  sénilité,  soit  par  une  inOucnce  hé- 
réditaire. Il  est  des  pays,  notamment  Tubingue,  où  cette  dernière  circon- 
stance se  rencontre  communément  :  de  là  vient  que  le  professeur  Jur- 
gensen  a  tant  insisté  sur  cette  complication  et  la  considère  comme  h 
cause  principale  de  la  mort  chez  les  pneumoniques. 

A  priori  on  ne  voit  pas  que  le  ventricule  gauche  soit  particulièrensenl 
affecté  par  le  fait  de  la  pneumonie.  Il  doit  se  trouver  dans  les  mêmes 
conditions  que  dans  toute  fièvre.  Il  n'en  est  pas  de  nicnic  du  ventricule, 
droit  ;  car  une  quantité  de  sang  tout  à  fait  insolite  est  accumulce  dans 
les  poumons;  il  doit  donc  développer  plus  de  force,  et  ce  qui  prouve  que 
la  circulation  pulmonaire  se  fait  moins  facilement  qu*à  l'état  normal,  c'est 
qu'on  a  observé  parfois  pendant  la  vie,  la  dilatation  du  cœur  droit,  et  ce 
qui  est  d'une  constatation  plus  facile,  la  réplétion  exagérée  des  veines 
du  cou.  On  pourrait,  au  pïemier  abord,  s'en  étonner  en  songeant  que, 
d'après  les  expériences  de  Liclitheim,  les  voies  de  communication  à 
travei's  le  poumon  sont  d'un  calibre  surabondant,  puisqu'il  a  pu  obstruer 
les  trois  quarts  des  branches  artérielles  pulmonaires  sans  amener  de 
troubles  dans  la  tension  artérielle  générale.  Mais  je  ferai  remarquer 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË. —  cûmplicatioks»  477 

que  les  expériences  de  cet  auteur  ont  été  faites  seulement  chez  le  chien, 
animal  disposé  pour  la  course  et  chez  lequel,  par  conséquent,  la  circula- 
tion pulmonaire  doit  disposer  de  voies  très-larges.  Rien  ne  prouve  qu'il 
en  soit  absolument  de  même  chez  Thomme. 

Chez  Tcufant,  le  cœur  droit  a  une  musculature  relativement  beaucoup 
plus  puissante  que  chez  Tadulte.  Il  résulte  en  effet  des  recherches  bien 
connues  de  Bizot  que  la  musculature  à  la  base  des  ventricules  gauche 
et  droit  chez  les  enfants  de  1  à  4  ans  a  une  épaisseur  moyenne  de  6,5 
et  de  6,2  millimètres;  c'est-à-dire  qu'elle  est  à  peu  près  la  même, 
tandift  que,  comme  on  sait,  elle  diffère  du  simple  au  double  chez  Ta- 
duite.  L'enfant,  toutes  choses  égales,  serait  donc  moins  exposé  à  i'insuRi- 
sance  du  cœur  droit.  Cette  particularité,  pour  le  professeur  Thomas, 
expliquerait  en  partie  la  léthalité  moindre  de  la  pneumonie  lobairc  dans 
le  jeune  âge. 

Je  n*ai  pas  besoin,  je  pense,  de  rappeler  longuement  à  quels  signes 
on  reconnail  Tasystolie  :  la  petitesse  et  l'irrégularité  du  pouls,  rabaisse- 
ment de  la  température  centrale  et  périphérique,  la  cyanose,  la  dilatation 
des  veines  jugulaires,  etc. 

Outre  la  petitesse  du  pouls  et  son  irrégularité,  Bardcnhcwer,  assistant 
de  Rie^el,  dit  avoir,  dans  quelques  cas,  observé  un  caractère  sphygmo- 
graphique  fort  rare  dans  les  états  fébriles,  à  savoir  un  pouls  monocrote. 

lîorain  Ta  signalé  dans  la  variole.  Dans  ce  cas  le  monocrotisme  était 
le  résultat  d'une  accélération  extrême  du  cœur  ;  les  pulsations  artérielles 
se  succédaient  si  rapidement  qu'il  y  en  avait  une  nouvelle  avant  que  le 
dicrotisme  de  la  pi'écédcnte  eût  eu  le  temps  de  se  produire.  Au  contraire 
dans  le  cas  de  Bardeiihcwer,  il  n'est  pas  dit  que  le  cœur  fût  accéléré  ; 
c'était  une  pneumonie  à  dérervescence  tardive  ;  la  faiblesse  du  cœur  était 
extrême;  telle  est  selon  lui  la  cause  du  phénomène  qu'il  a  observé  (£er/. 
kL  Wochenschrifl  1875).  D'après  M.  Gahibin,  chez  un  sujet  ayant  dé- 
passé la  jeunesse,  l'absence  de  dicrotisme  pourrait  tenir  non  à  l'état  du 
cœur,  mais  à  la  dégénérescence  du  système  artériel.  J'ai  déjà  mentionné 
plus  haut  l'abaissement  nécessaire  de  la  température  centrale  dans  les 
cas  d*iusuflisancc  cardiaque.  Je  n'y  reviens  pas.  Quant  au  diagnostic  sur 
le  vivant  de  la  dilatation  des  cavités  droites  du  cœur,  au  moyen  de  la 
percussion,  on  ne  saurait  être  trop  réservé  avant  de  Taitirmer. 

Complications  cérébrales.  —  Délire.  —  Méningite.  De  toutes  les  com- 
plications cérébrales,  le  délire  est  la  plus  commune.  D'après  Grisolle  il  se 
rencontre  une  fois  sur  deux  ;  d'après  Louis  et  Andral,  une  fois  sur  cinq, 
proportion  qui  dépasse  de  beaucoup  ce  que  j'ai  moi-même  observé.  Très- 
rare  chez  les  jeunes  sujets,  il  est  assez  fréquent  chez  les  hommes  dans  un 
âge  un  peu  avancé,  mais  non  chez  les  femmes,  ce  qui  montre  l'influence 
de  l'alcoolisme  qui  est,  dit-on,  avéré  chez  le  tiers  des  délirante). 

Le  délire  peut  consister  seulement  en  un  peu  de  divagation  le  soir  ; 
mais  le  plus  souvent  les  malades  sont  véritablement  agités  et  veulent  se 
lever.  A  un  degré  de  plus,  ils  crient  et  repoussent  les  personnes  qui  les 
entourent;  enUn  le  délire  peut  présenter  tous  les  caractères  symptoma- 


478 


PNEUMOME  LOBAIRE  AIGUË - 


C0VPLIUTIO:i!t. 


tiques  du  vérïlabte  deltrium  Iremens  ;  mais  cola  est  fort  fsre  ea  mire 
pays. 

C'est  qu'en  effet  —  Grisolle  le  remarque  fort  justement  —  tous  m 
délii'es  i|ui  éclatent  chez  des  sujets  ayant  abuse  de  l'alcool  ne  sont  pu 
des  deliriuni  tremcns  ;  chex  la  plupart  d'cnU-e  eux  l'intoxication  ffcoo- 
liquc  n*agit  qu'à  titre  de  cause  prédisposante,  et  le  délire  n'a  rien  de 
spécifique. 

On  sait  d'itilteurs  qu'il  y  a  bien  d'autres  formes  de  délire  alcoolîqK 
que  le  dulirium  Irenieiis.  Je  renvoie,  à  cet  égard,  A  l'intéressaotniéDoiR 
publié  en  18t)9dans  ictArdmn 
de  médecine  par    le    professenr 
Lasè^ue. 

Chez  un  alcoolique  confirmé, 
une  pneumonie  provoque  presque 
fatalement  du  délire,  mata  il  cil 
non  moins  exact  de  dire  qM  <t 
dernier  à  son  tour  influence  li 
marche  de  la  pneumonie,  fia- 
rais  pu,  à  propoi:  des  forma  de 
~t  pneumonie,  consacrer  uu  pi- 
ra^^raphc  spécial  à  l<i  marche  de 
la  maladie  chez  les  alcooliques: 
il  m'a  paru  mieux  à  sa  place  ki. 
puisque  c'est  une  coniplicitioii, 
le  délire,  qui  domine  la  scène. 

Une  particularité  imiHHlaiile 
de  ces  pneumunies,  c'est  la  faible 
élévation  de  la  température.  Rien 
n'est  commun  comiiio  de  voir 
chez  u:i  alcoolique  délirant  la 
pneumonie  n'élever  la  tempéra- 
ture que  d'uu  degi*c  ou  un  dej^é 
:  et  demi,  nlors  mrmt;  que  le  pout.' 
'  est  très-fréquent.  Lorainavaitd^i 
remarqué  la  discordance  en  pa- 
reil cas  du  ]>ouls  et  de  U  tem- 
[léralure  et  il  croyail,  si  je  ne  me  trompe,  que  le  délire  était  une  cause 
d'abaissement  du  la  température,  ou  plutôt  qu'il  y  avait  une  surte  d'équi- 
valence entre  te  délire  et  lu  production  de  chaleur. 

Une  autre  particularité  de  ces  pneumonies,  c'est  la  tendance  quVIIes 
ont  à  se  lermidcr  par  suppuration. 

Unu  troisième  particularité,  mais  non  constante,  c'est  l'irrégularilé  dr 

leur  marche,  oscillanLu  comme  le  délire  lui-même,  dont  l'intensité,  d'uni- 

manière  générale,  au^menti:  parallèlement  au\  poussées  de  la  pneumonie. 

Le  délire  dans  la  pneumonie,  d'origine  alcoolique  ou  non,  survient  dan* 

l'acmé,  quelquefois  dès  le  début;  s'il  a  une  grande  intensité,  il  dure 


jiui|ii*i  IWpululloi 


PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  compucàtioiis.  479 

rarement  plus  de  quatre  ou  cinq  jours  ;  au  bout  de  ce  temps,  il  est  rem- 
placé par  le  retour  au  moins  partiel  de  rintelligencc,  ou  par  le  coma,  pré- 
sage d'une  terminaison  fatale. 

A  Fautopsie,  Grisolle  dit  n^avoir  pas  trouvé  de  lésion  appréciable  dans 
les  deux  tiers  des  cas  (comprenant  la  presque  totalité  des  alcooliques,) 
maïs  chez  un  tiers  il  a  constaté  les  caractères  d'une  méningite  purulente 
de  la  convexité.  —  Comme  presque  toujours  la  pneumonie  est  déjà 
i  une  période  avancée  quand  se  développe  la  méningite,  le  professeur 
Hugenin  suppose  qu'elle  peut  être  le  résultat  de  petits  caillots  emboli- 
qves  purulents  nés  dans  les  veines  pulmonaires.  Mais  si  cette  pathogénie 
était  commune,  il  devrait  coexister  souvent  des  abcès  dans  d'autres 
organes,  car  il  est  impossible  d'admettre  que  les  méninges  aient  le  pri- 
vilège de  recevoir  des  embolies.  Or,  je  ne  sache  pas  qu'il  en  soit  ainsi. 

En  fait,  la  patliogénie  de  la  méningite  cérébrale  ainsi  que  celle  de  la 
méningite  cérébro-spinale  sporadique  que  je  mentionne  plus  bas,  est  fort 
obscure. 

Estril  possible,  chez  un  pneumonique  délirant,  de  diagnostiquer  celte 
complication,  en  d'autres  termes  de  reconnaître  qu'il  ne  s'agit  pas  d'un 
délire  sans  lésions  ?  Les  signes  tirés  de  la  température  sont  ici  de  peu  de 
valeur.  Il  faut  se  baser  sur  les  symptômes  propres  de  la  méningite, 
notamment  sur  la  raideur  du  cou  qui  a  été  signalée  dans  plusieurs  obser- 
vations récentes,  (obs.  1  2  et  3  de  Barth  et  Poulin  et  obs.  de  Savart.)  Le 
caractère  du  pouls,  les  troubles  pupillaires,  la  complication  possible 
d'aphasie,  (obs.  1  de  Barth  et  Poulin,)  constitueront  aussi  de  très-fortes 
présomptions  en  faveur  d'une  méningite. 

Parfois  la  méningite  purulente  développée  dans  le  cours  de  la  pneu- 
monie s'accompagne  d'hémiplégie  comme  peut  le  faire  toute  méningite. 
J*en  ai  observé  un  cas.  Le  cerveau  coupé  en  tranches  très-fines  m'a  paru 
toat  à  fait  sain.  Je  trouve  aussi  dans  la  Lancet^  relaté  brièvement,  un  cas 
de  pneumonie  avec  hémiplégie,  observé  dans  le  service  du  professeur 
Jaoeond.  A  l'autopsie,  on  a  constaté  une  pleurésie  purulente  et  une 
méningite  purulente  (6  juin  1878). 

La  pneumonie  se  complique  de  méningite  cérébro-spinale  suppurée 
tantôt  pendant  le  rogne  d'un  épidémie  de  méningite  —  l'on  a  expliqué 
Tassociation  des  deux  maladies  en  disant  que  les  pneumoniques  opposent 
moins  de  résistance  à  l'inrection  —  tantôt  indépendamment  de  toute  épi- 
démie ;  c'est  alors  à  une  méningite  cérébro-spinale  sporadique  que  l'on 
I  affaire.  Oudin  en  a  récemment  publié  une  observation  inléressante. 

Accidents  cérébraux  de  la  pneumonie  chez  l'enfant.  —  Ils  revêtent 
ieux  formes  particulières  bien  décrites  par  Rilliet  et  Barthez  sous  le 
nom  de  pneumonie  cérébrale  y  l'une  éclamptique^  l'autre  méningée 
(comateuse  ou  délirante) .  La  première  est  spéciale  aux  tout  jeunes 
enfants,  surtout  à  ceux  qui  ont  une  dentition  laborieuse;  la  seconde  se 
voit  de  2  à  5  ans  (la  pneumonie  déhrante,  au-dessus  de  cinq  ans).  C'est 
presque  toujours  dans  la  pneumonie  du  sommet  que  Ton  observe  les 
symptômes  convulsifs  ou  comateux. 


480  PiNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  cohpligâtiom. 

A.  Forme  éclampiique.  —  Les  convulsioQS  accompagnées  ou  pRcédées 
d'une  rapide  élévalion  de  la  température  marquent  souvent  le  débat  ; 
tantôt  elles  sont  épileptiformes,  tantôt  partielles,  et  dans  ce  cas  elles  nr- 
Tiennent  plus  fréquemment  dans  le  courant  de  la  journée. 

B.  Dans  la  forme  méningée,  Tassoupissement,  le  délire,  la  céphalalgie, 
les  vomissements  et  même  la  constipation  peuvent  se  rencontrer  eiueiuble, 
complexus  d'autant  plus  trompeur  que  parfois  l'œil  est  affecté  it  itra- 
bismc.  Cependant  Rilliet  et  Barthez  remarquent  que  la  somnolence  a'est 
jamais  aussi  caractérisée  que  celle  des  maladies  encéphaliques  et  qu'dîe 
n'est  pas  accompagnée  de  cris  automatiques,  de  grincements  de  dents  et 
de  changements  fréquents  de  coloration  de  la  peau  du  visage. 

Les  symptômes  cérébraux,  par  leur  intensité,  effacent  ceux  de  la  pneu- 
monie; mais  la  température,  qui  est  plus  élevée  et  plus  constante  dans  ii 
pneumonie  que  dans  la  méningite  (Ziemsseu).  Taccclération  delà  respi- 
ration et  les  signes  d'auscultation  (au  moins  au  bout  de  quelques  joun) 
servent  au  diagnostic. 

La  pathogénie  des  accidents  que  je  viens  de  relater  est  encore  mal 
connue  :  on  a  supposé  que  les  gros  troncs  veineux,  à  la  base  du  cou,  pou- 
vaient être  comprimés  par  le  sommet  du  poumon  hépatisé.  CeU  ne 
me  paraît  pas  soutenable.  — On  a  aussi  admis  une  hypérémie  active;  pour 
certains  cas,  on  a  accusé  la  haute  température  du  sang,  et  son  état  dyscn- 
sique.  11  est  probable  qu^il  s'agit  souvent  de  symptômes  réflexes.  Eufia  il 
est  des  cas  où  l'on  trouve  à  l'autopsie  des  lésions  des  méninges (dedème, 
hémorrhagies),  avec  des  apoplexies  capillaires  du  cerveau  ou  une  véri- 
table méningite) .  Dans  ce  dernier  cas,  les  symptômes  sont  généralemeol 
plus  accusés  :  la  céphalalgie  est  plus  intense,  ainsi  que  la  photophobie,  etc.; 
il  y  a  des  paralysies  sensorielles,  de  Topisthotonos,  du  trismus  ;  les  pupilia 
sont  larges  et  inégales,  et  à  l'examen  ophthalmoscopique  on  trouve  les 
signes  d'un  névrite  optique,  etc.,  bref,  tous  les  signes  de  la  méningite 
que  je  n'ai  pas  à  décrire  ici.  Seulement  il  est  bon  de  savoir,  que  chez  les/rvi- 
jeunes  enîmiiSy  tous  ces  signes  peuvent  manquer  et  qu'on  peut  même  trouver 
à  Tautopsieun  méningite  survenue  comme  complication  d'une  pneumonie 
sans  qu'il  y  ait  eu  de  symptômes  cérébraux. 

Forme  apopleclique  de  la  pneumonie  des  vieillards  ^  coma  et  hémi- 
plégie. —  Ouelques  vieillards  atteints  de  pneumonie,  après  un  état  d  ob- 
nubilation  des  idées,  ou  bien  d'emblée,  tombent  plus  ou  moins  brusque- 
ment dans  un  état  comateux  qui  revêt  le  plus  souvent  l'apparence  d'une 
apoplexie  dépendant  de  lésions  de  l'encéphale  :  la  perte  de  connaiisance 
est  complète  ;  il  y  a  quelquefois  de  la  i*otationde  la  tète  et  delà  déviation 
conjuguée  des  yeux  ;  les  membres,  d'un  côté,  sont  le  siège  d'un  excès  de 
chaleur  et  pcixlent  la  motilité  volontaire  plus  ou  moins  complètement  : 
au  bout  de  quelques  jours,  pendant  lesquels  cet  état  apoplectique  peat 
offrir  de  grandes  oscillations  dans  son  intensité,  la  mort  arrive,  et  à 
l'autopsie  il  est  possible  que  par  l'exploration  la  plus  minutieuse  et  la  pbb 
méthodique  on  ne  trouve  pas  de  lésions  qui  expliquent  les  accidenU 
hémiplégiques  des  derniers  jours;  tel  est  le  complexus  symptouiatique 


I 


l 


PNEUMONIE  LCiBÂiRE  AIGUË.  —  coxplicatiors.  481 

|UJ  a  fixé  souvent  l*aUentioQ  des  médecins  des  asiles  consacrés  à  la 
ietllesse. 

Oa  désigne  ordinairement  sous  ce  nom  d'hémiplégie  pneumonique  les 
as  dont  je  yiens  d'esquisser  le  tableau,  et  c'est  ce  terme  qu'à  l'exemple 
lu  professeur  Charcot  j'ai  cru  autrefois  devoir  employer;  mais  il  faut 
»ien  se  rappeler  que  celte  expression  indique  simplement  que  l'hé- 
niplégie  est  survenue  pendant  le  cours  d'une  pneumonie.  J'ai  en  effet 
il  d'une  manière  fort  explicite,  dans  ma  thèse,  que  les  hémiplégies 
•oeomoniques  ne  constituaient  pas  un  groupe  de  faits  homogènes. 

Un  petit  nombre  d'entre  elles  résultent  du  ramollissement  du  cerveau. 
*elle  est  la  quatrième  des  observations  que  j'ai  publiées  dans  ma  thèse 
naugurale;  telle  est  encore  la  belle  observation  de  mon  collègue  et  ami 
traus  (Revue  mensuelle  1877).  Si  le  nombre  des  hémiplégies  pneumo- 
iqneSy  dues  à  un  ramollissement,  n'est  pas  considérable,  cela  tient 
raisemblablement  à  ce  que  les  pneumoniques  succombent  avant  que 
'ischémie  artérielle,  première  étape  du  ramollissement,  ait  abouti  au 
usoliissement  lui-mcme.  Diverses  autres  lésions  peuvent  encore  produire 
ne  hémiplégie  pneumonique. 

Quant  aux  cas  où  Ton  ne  trouve  rien  qui  rende  compte  de  l'hémiplégie, 
s  ne  suis  pas  porté  à  les  expliquer  par  une  action  réflexe,  parce  que, 
ans  le»  cas  au  moins  qu'il  m'a  été  donné  de  voir,  la  physionomie  de 
'hémiplégje  n'était  pas  la  même  que  daus  les  hémiplégies  incontcstable- 
HHit  réflexes,  d'origine  pleurétique,  que  j'ai  observées  (Mém.de  la  Société 
^hôpitaux  de  Paris  1876). 

Macario  a  rapporté  deux  cas  de  pneumonie  pendant  la  convalescence 
eequelles  on  observa  de  la  faiblesse  musculaire  et  des  fourmillements 
yant  débuté  par  la  paume  des  mains  et  la  plante  des  pieds.  Puis  survint 
as  paralysie  du  mouvement,  complète  dans  les  membres  inférieurs,  in- 
MDplète  dans  les  membres  supérieurs.  L'intelligence  était  intacte.  Un 
M  malades  guérit,  Tautre  mourut,  mais  l'autopsie  ne  fut  pas  faite. 

GOUPUGATIOKS    DU   COTÉ   DES  ORGANES  DES   SENS.    —    EUcS  Ue  SOUt  paS  fort 

npcnrtanies.  —  Appareil  de  la  vision.  —  On  a  noté  parfois  de  l'exoph- 
li^mîe;  probablement  elle  dépendait  d'un  méningite  concomitante. 

Seidel  à  observé  chez  un  garçon  de  treize  ans,  au  premier  jour  d'une 
neumonie  du  sommet  gauche,  de  Tamblyopie.  Le  malade  appréciait  les 
Mileurs  d'une  manière  inexacte  et  ne  pouvait  voir  à  une  certaine  distance, 
es  globes  oculaires  étaient  douloureux,  les  pupilles  étaient  très-dilatées, 
i  |Ripille  des  deux  côU'^s  rouge  et  mal  limitée;  les  veines  rétiniennes  étaient 
À  dilatées,  les  artères  peu.  Les  symptômes  disparurent  en  l'espace  de 
oatre  à  cinq  semaines.  Siebel  père  avait,  comme  on  sait,  déjà  insisté 
ir  la  dilatation  par  stase  des  veines  rétiniennes. 

V.  Grsefe  et  Uenoch  ont  aussi  noté  des  troubles  visuels  transitoires,  sur- 
enant  surtout  dans  la  convalescence,  et  les  ont  rapportés  à  une  anémie 
Hinienne. 

Appareil  de  l'ouïe,  —  ilillier  a  publié  un  cas  où  existait  de  la  surdité. 

Steîner  a  observé  chez  seize  enfants  atteints  de  pneumonie  du  sommet 

lOOV.    WCT.  MÉD.   IT   CHIR.  XXVlIf  —  ^>1 


482  PjNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  comylic^tio!». 

des  symptômes  cérébraux  graves,  à  savoir  :  vomissements,  altenaUves 
de  somnolence  et  d'agitation,  céphalalgie,  délirv^  et  perte  de  Gonaauwiee, 
qui  reconnaissaient  pour  cause  une  otite  purulente.  Ces  symptAmes  dis^- 
parurent  lorsque  Técoulement  se  fît  au  dehors.  Ces  enfants,  ftgét  de  cinq 
à  dix  ans,  n'étaient  pas  scrofuleux  et  n'avaient  jamais  eu  de  maux  d*o- 
reilles.  Dix  fois  Totite  était  unilatérale,  et  surtout  à  droite. 

L*otite  passa  à  Tétat  chronique  dans  la  plupart  des  cas  et  abwlit  à  la 
surdité  et  à  la  carie  du  rocher. 

Steincr  pense  qu'elle  a  été,  comme  la  pneumonie  et  au  même  tilre 
qu'elle,  TeiTet  d'un  refroidissement  et  qu'elle  n'était  pas  soos  sa  dé- 
pendance. 

CoMPLlCilTIONS  DU  CÔTÉ  DU  TUBE  DIGESTIF  ET  DE  SES  AN?(£XES. A.  CoiOrHie 

aigu  de  Vintesiin.  —  C'est  une  complication  qui,  sur  l'adulte,  ne  se 
rencontre  guère  que  dans  certaines  locaUtés,  à  Breslau^  par  exemple 
(Leberl).  On  ne  peut  donc  la  mettre  au  compte  de  la  pneumonie. 

Chez  les  jeunes  enfants  on  a  vu  parfois-  les  symptômes  d'un  cat«rriie 
gastro-intestinal  survenir  dès  le  début  d'une  pneumonie.  Quand  les  vomis- 
sements, la  diarrhée,  la  douleur  de  ventre,  ont  une  grande  intensité,  ils 
masquent  les  signes  de  la  phlegmasie  pulmonaire  :  non  seulement  un 
catarrhe  gastro-intestinal  est  capable  de  modifier  la  fièvre  et  de  retarder 
la  défervescence,  mais  il  peut  même  entraîner  la  mort. 

Ulcérations  du  gros  intestin.  —  Le  docteur  Bristovre  est,  à  ma  coooais- 
sance,  le  seul  qui  ait  insisté  sur  cette  complication  qu'il  parait  avoir  ren- 
contrée assez  souvent  :  ce  qui  est  assez  surprenant,  vu  le  silence  des  aaties 
médecins  anglais  à  ce  sujet. 

Bristowe  se  défend  de  la  supposition  qu'elles  puissent  être  le  résultat 
du  traitement.  11  croit  même  qu'elles  ne  sont  pas  secondaires  à  la  pneu- 
monie, car,  dit-il,  il  n'y  a  pas  de  sympathies  entre  le  poumon  et  legro^ 
intestin,  —  ce  qui  n'est  d'ailleurs  pas  une  preuve,  —  mais  qu'elles  sont 
une  conséquence  de  la  même  cause  que  la  pneumonie  (froid*  etc.).  11  y 
aurait  entre  celle-ci  et  elles  la  même  relation  qu'entre  la  pneumonie  A 
l'herpès  labial,  ou  bien  qu'entre  la  pneumonie  est  l'ictèi^e  (je  dois  faire 
remarquer  que  Bristowe  est  seul  de  son  avis  en  admettant  que  l'ictèni» 
pneumoniquc  ait  la  même  cause  que  la  pneumonie). 

J'ai  rapporté  ces  idées,  bien  qu'elles  soient  de  nature  à  nous  élaïuier  ; 
j'ajouterai  seuleirient  qu'en  France  du  moins  on  ne  voit  jamais  de  sym- 
ptômes de  dysenterie  coexister  avec  la  pneumonie. 

Ictère.  —  D'après  Grisolle,  l'ictère  à  un  degré  plus  ou  moins  pronoïKé 
se  rencontrerait  dans  la  proportion  de  7  pour  100  pneumoniques.  Mais  ce 
chiffre  ne  saurait  être  considéré  que  comme  exprimant  la  fréquence 
moyenne  de  Tictère  à  Paris  :  ailleurs  les  statistiques  ont  fourni  des  résnl- 
tats  bien  différents.  Chwostek  a  trouvé  plus  de  21  pour  100  sur  147  cis: 
Fismer  à  Bâle  28  pour  100,  tandis  que  les  statistiques  de  Roth,  dugntnd 
hôpital  de  Vienne  et  de  Stockholm,  les  deux  dernières  portant  sur  plo$ 
de  8,000  pneumonies,  ne  fournissent  pas  une  proportion  de  1  pour  IW. 
La  jtatistique  qui  se  rapproche  le  plus  de  celle  de  Grisolle  sous  ce  rap 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  complications.  485 

port  est  celle  du  professeur  Gerhardt  de  Wûrzburg  (thèse  de  Schapira),  qui 
iodique  5,  7  pour  i 00  pour  Tictère  vrai. 

Uictère  est  excessivement  rare  chez  les  enfants.  Il  parait  plus  commun 
dans  les  pneumonies  du  cAté  droit  et  peut-être  dans  celles  de  la  base 
droite. 

C'est  dans  les  premiers  jours  de  la  pneumonie  que  se  manifeste  généra- 
leroenl  Tictère.  La  coloration  jaune  se  montre  d'abord  aux  conjonctives» 
ou  bien  c'est  la  coloration  des  crachats  qui  révèle  Tictère;  ce  peut  être 
enfin  la  réaction  de  la  matière  colorante  de  la  bile  dans  Turine  additionnée 
d'MÎde  nitrique  qui  en  est  la  première  manifestation.  Puis  Tictère  se  des- 
aine les  jours  suivants  et  parfois  acquiert  une  grande  intensité.  Alors 
même  qu'il  reste  modéré,  il  est  la  source  d'accidents  qui  sont  générale- 
ment attribués  à  Tintoxication  du  sang  par  les  acides  biliaires  et  qui 
•ont  en  première  ligne  des  symptômes  nerveux,  savoir  une  remarquable 
tendance  au  collapsuset  du  météorisme,  contribuant,  à  cause  de  la  gcne 
•de  la  respiration,  à  la  terminaison  fatale. 

La  patbogénie  de  l'ictère  dans  la  pneumonie  est  multiple  :  il  peut 
tenir  à  la  propagation  aux  canaux  biliaires  d'un  catarrhe  du  duodénum  : 
Si  l'ictère  pneumonique  est  à  Stockholm  beaucoup  plus  commun,  cela  ne 
aerail-il  pas  dû  au  fait  que  le  catarrhe  gastro-duodénal,  d'origine  alcooli- 
que, y  est  beaucoup  plus  fréquent  que  dans  la  plupart  des  autres  grandes 
nliis  du  continent? 

D'ailleurs,  il  y  a  des  résultats  précis  d'autopsies  qui  no  peuvent  à  ce 
«qel  laisser  de  doute  ;  j'ai  vu  moi-même  plusieurs  fois  chez  des  pneu- 
moniques  ictériques  de  la  rougeur  avec  gonflement  de  la  muqueuse  du 
éaodénum  et  de  la  rougeur  des  gros  canaux  biliaires.  J'ai  observé  récem- 
inent  un  fait  remarquable  sous  ce  rapport  :  la  muqueuse  du  cholédoque  et 
mrtoui  celle  de  la  vésicule  biliaire  étaient  d'un  rouge  vif.  11  est  vrai  que 
je  n*ai  pu  découvrir  dans  les  gros  conduits  biliaires  aucun  bouchon  mu- 
^pieux  ;  mais  l'étude  histologique  de  ce  cas,  faite  à  mon  instigation  par 
Bennet  l Revue  mensuelle^  1878),  a  révélé  un  catarrhe  des  plus  fuis  ca- 
fuAÎGQles  biliaires.  Je  crois  donc  que,  même  loi*squc  le  catarrhe  des  canaux 
biliaires  ne  semble  pas  fort  apparent  à  l'autopsie,  l'examen  histologique 
des  fins  canaux  ne  doit  pas  être  négligé. 

Mais  l'obstruction  des  voies  biliaires  ne  peut  expliquer,  tant  s'en  faut, 
loua  les  cas  d'ictère  dans  la  pneumonie,  d'autant  plus  qu'elle  s'accorde- 
rait mal  avec  un  fait  clinique  parfois  constaté,  à  savoir:  la  persistance  de 
là  coloration  normale  des  selles.  Bouillaud  a  soutenu  que,  dans  les  cas 
où  la  pneumonie  occupe  la  base  du  poumon  droit,  Pinflammation  |)eut 
se  propager  par  contiguïté  de  tissu  à  travers  le  diaphragme  et  le  péritoine 
jusqu'au  foie.  Mais  cette  opinion  n'est  étayée  jusqu'ici  par  aucune 
autopsie,  bien  qu'on  ait  beaucoup,  sourtout  dans  ces  derniers  temps,  re- 
cherché la  propagation  de  diverses  lésions  à  travers  le  diaphragme.  Si 
la  propagation  de  l'inflammation  pulmonaire  au  péritoine  était  chose  fré- 
quente, elle  aurait  été  sans  doute  explicitement  signalée. 

D*ailleurs,  qu'on  le  remarque  bien,  cette  propagation  rendrait  bien 


484  PNEUMOME  LOBAIRË  AIGUË.  —  coicPLiCàTioHS. 

compte  d*une  périhépatite,  mais  elle  n'expliquerait  pas  facilement  Tidère. 
Enfin,  et  ce  dernier  argument  est  sans  réplique,  fictère  est  presque  aussi 
fréquent,  dit-on,  quand  la  pneumonie  occupe  le  sommet,  que  lorsqo'dle 
siège  à  la  base  droite. 

Je  trouve  dans  la  thèse  de  Schapira  une  théorie  qui  peut  être  fixie  en 
partie,  mais  à  laquelle  il  me  paraît  faire  jouer  un  rôle  un  peu  eugéré  : 
se  fondant  sur  les  expériences  des  physiologistes  qui  ont  démontré  que  h 
bile  s'écoule  sous  une  pression  très  faible,  il  pense  que,  si  lacomprenioodu 
foie  pendant  l'inspiration  devient  moindre  qu'à  l'état  normal,  celte  di- 
minution d'un  des  principaux  facteurs  de  l'excrétion  biliaire  peut  suffire 
pour  amener  l'ictère,  non  qu'il  y  ait  obstruction  des  voies  biliaires,  mais 
simplement  parce  qu'il  s'y  fait  une  stase.  Or,  dit-il,  le  pneumonique 
respire  superficiellement  à  cause  de  la  douleur.  Je  n'ai  à  ceci  qu'une 
chose  à  répondre,  c'est  que,  si  cette  explication  était  exacte,  Tictère  ne 
devrait  jamais  faire  défaut  dans  la  pleurésie  diaphragmatique  droite. 
,0r,  on  sait  que  l'ictère  ne  figure  pas  parmi  ses  symptômes. 

Murchison,  tout  en  restant  sur  la  réserve,  semble  attribuer  certains  cas 
d*ictère  à  une  congestion  hépatique  réfiexe  qui  aurait  pour  cause  l'irritab- 
tion  du  poumon.  Cette  action  réfiexe  serait  la  réciproque  de  celle  que 
il.  le  professeur  Potain,  qui  se  fonde  sur  des  faits  cliniques  inconsestables, 
croit  exister  entre  le  foie  et  l'appareil  cardio-pulmonaire. 

On  sait  que  pour  Bence  Jones  Tictère  de  la  pneumonie  serait  le  résultit 
d'un  arrêt  de  l'oxydation  de  la  bile  dans  le  sang.  Murchison,  qui  rapporte 
celte  opinion  et  qui  semble  la  partager,  reconnaît  toutefois  qudle  ne 
saurait  s'appliquer  à  tous  les  cas. 

Parotidite.  —  Cette  complication  est  fort  rare.  Sans  être  spéciale  à  b 
pneumonie  du  vieillard,  dit  Grisolle,  elle  se  rencontre  surtout  après 
>oixante  ans  ;  dans  l'enfance  et  la  jeunesse,  elle  est  à  peu  près  incoooue. 
C'est  souvent  lorsque  la  maladie  est  déjà  entrée  en  résolution  qu'elle  se 
déclare.  Presque  jamais  la  parotidite  n'est  double  ;  son  évolution  est  fort 
rapide  :  en  moins  de  deux  jours,  elle  atteint  le  volume  du  poing  et  si 
terminaison  habituelle  est  la  suppuration,  rarement  la  gangrène.  Elle  est 
à  juste  titre  considérée  comme  une  complication  des  plus  graves  et 
entraînant  très-souvent  la  mort. 

Complications  du  coté  de  i/appareil  raiNAïuK.  — 11  ne  s*agit  pas  id  de 
l'albuminurie  si  commune  dans  l'acmé  de  la  maladie.  Ce  n'est  que  lors- 
({u'ellc  est  persistante  ou  s*accompagne  d'hématurie  qu'on  peut  songer 
à  la  complication  d'une  néphrite  parenchymatcuse.  En  fait,  le  développe- 
ment de  celte  dernière,  comme  afTeclion  secondaire  de  la  pneumonie,  est 
fort  rare  ;  il  n  en  serait  plus  de  même,  si  l'on  envisageait  la  coexistence  des 
deux   aiTections  :  néphrite  et  pneumonie,  cette  dernière  étant  raffectioD 
secondaire.  Bartels  a  vu  chez  un  oificier  une  néphrite  aiguë  dans  le  coo^^ 
d'une  pneumonie:  il  y  eut  une  hydropisie  considérable  et  guérison  en  deux 
mois;  le  docteur  Giovannlen  a  publié  trois  cas,  mais  dont  je  ne  connais  pas 
les  détails. 

AuTitEs  COMPLICATIONS.  —  Ou  a  sigualé  {'infection  purulente  dans  le 


I 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  diagnostic.  485 

cours  d'une  pneumonie  suppurée.  Bœckel  en  a  vu  un  cas  à  la  clinique  du 
professeur  Schûtzenberger,  et  il  y  en  a  quelques  autres  dans  la  litté- 
rature. 

Une  pneumonie  peut  solliciter  le  retour  d'accès  intermitteiils  chez  un 
sujet  ayant  eu  antérieurement  des  accès  de  fièvre:  j'en  ai  vu  un  cas  cette 
année,  et  l'observation  lxxxi  de  la  clinique  de  Vulpian  en  ofTre  un 
exemple. 

mïiii^cMBitio.  —  Il  comprend  la  solution  de  plusieurs  questions  que 
j^examinerai  successivement  : 

ExDTE-T-iL  UKE  PNEUMONIE?  —  Lo  plus  souvcut»  il  est  très  aisé  de  ré- 
pondre à  cette  question,  mais  il  est  des  circonstances  où  elle  présente  des 
difficultés  très  sérieuses. 

I.  —  11  est  rare  qu'on  soit  tenté  de  diagnostiquer  une  pneumonie  qui 
n'existe  point.  Cela  peut  cependant  arriver  dans  quelques  cas  : 

A.  —  Le  plus  commun  est  celui  où  existe  un  des  symptômes  réputés 
patbognomoniques  et  qui,  en  réalité,  ne  méritent  pas  la  confiance  que 
lear  accordent  encore  ceilains  auteurs  classiques.  Je  n'ai  pas  à  m'arréter 
id  sur  cette  question  ;  je  renvoie  aux  traités  récents  de  séméiologie,  on  y 
Tonra  que  ni  les  râles  crépitants  ni  même  les  crachats  rouilles  ne  sont 
Traiment  patbognomoniques,  et  que  le  diagnostic  de  la  pneumonie,  comme 
celui  de  toutes  les  maladies,  ne  peut  être  basé  que  sur  la  réunion  de  plu- 
sieurs symptômes.  Pour  la  pneumonie  en  particulier,  la  coexistence  de 
symptômes  généraux  et  locaux  est  à  peu  près  indispensable. 

Or,  même  dans  le  cas  où  plusieurs  sont  réunis,  une  erreur  est  possible 
chez  les  jeunes  enfants  surtout  :  car  cbez  eux  le  nombre  des  signes  de  la 
pneumonie  est  beaucoup  plus  restreint  :  par  conséquent,  il  suffit  de 
86  tromper  sur  la  signification  de  deux  ou  trois  symptômes  pour  qu'on 
tombe  dans  Terreur. 

Par  exemple,  chez  un  jeune  enfant,  une  péritonite  a  pu  être  prise  pour 
une^pneumonie,  dans  des  cas  où  elle  s'accompagnait  de  fièvre  intense 
a^ec  respiration  fréquente  et  douloureuse.  L'erreur  est  venue  de  ces 
deux  derniers  symptômes.  On  eût  pu  sans  doute  Téviter,  si  l'on  avait  tenu 
daTantage  compte  des  signes  de  la  péritonite,  du  tympanisme,  et  de  Tag- 
gravation  de  la  douleur  par  la  pression  abdominale,  du  refoulement  du 
diaphragme  en  haut,  du  decubitus  du  petit  malade  qui  met  les  muscles 
abdominaux  dans  le  relâchement  et  les  cuisses  fléchies,  de  l'intégrité  du 
cri,  la  respiration  étant  seule  gênée,  enfin  de  l'absence  des  signes  de  la 
pneumonie. 

Yoici  un  autre  cas  où  Terreur  peut  provenir  de  la  prétendue  constata- 
tion de  symptômes  d'auscultation  :  qu'un  enfant  soit  pris  de  fièvre, 
laquelle  entraine  nécessairement  Taccélération  de  la  respiration,  un 
médecin  peu  familiarisé  avecTétendue  de  la  respiration  bronchique  qui, 
comme  on  sait,  existe  normalement  à  la  racine  des  bronches,  et  qui 
s^exagère  encore,  si  la  respiration,  pour  une  raison  quelconque,  est 
accélérée,  pourra  admettre  un  souffle  de  pneumonie,  surtout  si,  eu  même 
temps,  il  s'imagine  percevoir  un  peu  de  matité  :  une  attitude  vicieuse  de 


486  PNtiUMONIE  LOBAI[\£  ÂlGUË.  —  dugrostr:. 

l'enfant  peut  en  donner  Fapparence  -^  et  il  tombera  dans  une  méprise 
qui  ne  lui  apparaîtra  que  par  la  marche  ultérieure  de  la  maladie. 

Chez  Tadulte  et  chez  le  vieillard,  une  erreur  du  même  genre  paii 
aussi,  bien  que  moins  facilement,  être  commise  ;  car  ce  n'est  pas  seule- 
ment chez  Tenfant  qu'il  existe,  à  la  racine  des  bronches,  une  zone  où  Ton 
entend  normalement  de  la  respiration  bronchique  ;  mais  la  rac|inie,  à 
cause  de  diverses  circonstances,  est  moins  facile  que  chez  Tenfant.  Pour 
qu'on  admette  chez  un  adulte  une  pneumonie  absente,  il  faut  en  géoénl 
le  concours  de  conditions  particulières  :  il  faut,  par  exemple,  qu'un 
sujet  qui  devient  fébricitant  à  l'occasion  de  quelque  rcfroidiiMinent 
soit  atteint  d'une  lésion  pulmonaire  chronique  dont  les  symptômes  de 
percussion  et  d'auscultation  soient  capables  de  simuler  ceux  d'uoe  pneu* 
raonie.  Encore  est-il  impossible  que  la  discordance  entre  les  phénomènes 
locaux  et  généraux,  la  marche  de  la  maladie,  etc.,  ne  redressent  pas 
promptemenl  l'erreur. 

De  toutes  les  maladies  de  l'adulte,  celle  qui  peut  le  mieux  eu  impo- 
ser pour  une  pneumonie  franche,  c'est  la  pneumonie  caséense,  ce  qui 
n'est  d'ailleurs  pas  étonnant,  car  celle-ci  ne  se  distingue  de  la  première 
que  par  des  nuances  : 

Un  homme  jeune  prend  une  pneumonie  du  sommet  :  la  maladie  mit 
son  cours  sans  allure  inquiétante  ;  on  croit  à  une  pneumonie  franche. 
Cependant  la  défervescence  n'a  pas  lieu  et  l'évolution  ultérieure  praaie 
qu'on  avait  affaire  à  une  pneumonie  caséeuse.  Était-il  possible  ds  b 
soupçonner  dès  les  premiers  jours?  Dans  quelques  cas,  la  chose  est  poisi- 
ble  :  si  le  sujet  a  des  antécédents  héréditaires  suspects,  si,  au  lieu  d'oo 
frisson  unique,  il  y  a  eu  une  série  de  petits  frissons,  si  rcxpectoratiou 
a  été  plus  hémoploïque  que  ce  n'est  l'habitude,  il  y  aura  de  fortes  pré- 
somptions en  faveur  de  la  pneumonie  tuberculeuse.  D'après  Louis,  il 
faudrait  conclure  de  même,  si  la  pneumonie  du  sommet  siégeait  exclusive- 
ment en  avant. 

IL  —  Il  est  beaucoup  plus  ordinaire  de  méconnaître  une  pneumonie  que 
d'admettre  à  tort  son  existence  ;  Terreur  peut  provenir  de  ce  que  soit  les 
symptômes  généraux,  soit  les  symptômes  locaux,  manquent  ou  ne  sont  pas 
constatés.  —  Voyons  d'abord  le  cas  où  ce  sont  ces  derniers  qui,  i  tortoii 
à  raison,  paraissent  faire  défaut. 

A.  Pneumonie  centrale.  —  Un  malade  est  pris  de  fièvre,  d'oppression 
médiocre,  mais  il  n'a  pas  de  point  de  côté  et  on  n'entend  aucun  signe 
d'auscultation;  c'est  à  peine  si,  dans  quelques  cas,  on  perçoit  par  h 
percussion  quelques  légères  différences  dans  la  sonorité.  Si  les  crachats 
manquent,  peut-on  affirmer  Texistence  d'une  pneumonie? 

Evidemment  cela  est  impossible  ;  et  même,  vu  la  rareté  de  tel»  laits, 
on  pensera  de  préférence  à  toute  autre  affection  fébrile,  telle  qu'une 
fièvre  éruptive,  une  phthisie  ciguë,  etc.,  suivant  que  l'âge  ou  quelque 
épiphénomène  rendra  telle  ou  telle  affection  plus  vraisemblable.  U 
lumière  ne  se  fera  que  lorsque  la  partie  superficielle  du  poumon  5en 
envahie. 


PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  oiagmostic.  4»7 

Je  Tiens  de  supposer  le  cas  où  les  signes  physiques  locaux  manquent  et 
où  il  n'existe  que  des  symptômes  généraux,  lesquels  permettent  de  soup- 
çoiuier,mais  non  d'affirmer  l'existence  d'une  pneumonie.  Une  autre  éventua- 
lité est  celle-ci  :  par  le  fait  d'une  complication  ou  d'une  maladie  préexis- 
lanie,  les  symptômes  généraux  trouvent  une  explication  satisfaisante  ; 
l'eiploration  de  la  poitrine  est  négligée  ou  faite  d'une  manière  insuffi- 
lanle  ;  on  ne  prend  pas  garde  à  Texpectoration  :  la  pneumonie  est 
méconnue.  Tel  malade  est  envoyé  dans  un  asile  comme  atteint  dedelirium 
iremens  et  qui  a  en  outre  une  pneumonie.  Comme  ledelirium  tremens 
est  fébrile  dans  les  cas  graves,  il  n'y  a  que  les  signes  locaux  qui  peuvent 
foire  trouver  la  pneumonie.  Or,  l'expectoration  peut  passer  inaperçue, 
Fiuscultation  et  la  percussion  rendues  fort  difficiles,  vu  l'agitation  du 
malade.  Il  n'y  a  que  l'oppression,  si  elle  existe,  qui  puisse  facile- 
ment  mettre  sur  la  voie  :  chez  un  enfant,  on  diagnostique  une  méningite, 
c'est  une  pneumonie  centrale  ;  chez  un  vieillard  on  croit  à  un  ramol- 
lîss^nent  :  à  l'autopsie,  on  trouve  ou  non  des  lésions  de  l'encéphale, 
mais  on  const;^te  une  pneumonie. 

Corament  éviter  des  erreurs  si  regrettables  ?  En  explorant  avec  soin 
tous  les  points  de  la  surface  thoracique  à  l'aide  de  la  percussion  et  de 
rauscultation,  et  aussi  en  tenant  compte  des  données  thermométriques. 
G*esi  surtout  dans  le  dernier  cas  que  j'ai  supposé  que  l'exploration  ther- 
jnQmétrique  donnerait  un  résultat  décisif  en  décelant  ipso  facto  la  pneu- 
monie. Dans  le  second,  elle  serait  aussi  fort  utile,  car  la  méningite  soit 
de  la  base,  soit  de  la  convexité,  soit  cérébro-rachidienne ,  ne  s'accompa- 
f^e  point  de  la  fièvre  continue  de  la  pneumonie. 

.  B.  Dans  les  cas  que  je  viens  de  supposer,  l'erreur  provient  de  ce  que  des 
symptômes  surajoutés  détournent,  par  leur  gravité,  l'attention  de  l'obser- 
vateur, et  comme  ils  rendent  suffisamment  compte  des  symptômes  géné- 
raux, on  n'a  pas  la  pensée  de  chercher  d'un  autre  côté.  Une  pneumonie 
peut  aussi  être  méconnue  parce  que  la  fièvre  semble  manquer.  Tel  est  le 
cas  pour  beaucoup  de  pneumonies  séniles;  elle  sera  évitée,  si,  ne  se  fiant 
pas  aux  apparences,  on  a  recours  à  la  thermométrie  des  cavités  centrales. 
La  constatation  de  la  fièvre  met  sur  la  voie,  car  la  pneumonie  est  une 
des  rares  affections  fébriles  du  vieillard.  Si  l'emphysème  ou  la  bronchite 
masquent  en  partie  les  signes  locaux,  la  constatation  d'une  fièvre  intense 
suffit  souvent  pour  fixer  le  diagnostic. 

Il  est  des  cas  de  pneumonie  de  starvation  où  c'est  non  seulement  la 
température  périphérique  qui  est  basse,  mais  même  la  température  cen- 
traie,  où  la  fièvre,  en  un  mot,  fait  défaut,  au  moins  à  une  certaine  période. 
J'en  ai  vu,  celle  année  même,  un  exemple  chez  un  individu  profondé- 
ment anémique.  Dans  ce  cas,  il  ne  reste  que  les  symptômes  locaux.  Or, 
en  l'absence  de  l'expectoration,  ils  peuvent  paraître  fort  équivoques. 
Grisolle  pense  que,  si  l'on  examine  la  poitrine,  a  on  ne  peut  méconnaître 
l'affection  »,  affirmation  téméraire  et  qui  étonne,  venant  d'un  clinicien 
aussi  expérimenté. 

Le  plus  souvent,  quand  on  méconnaît  une  pneumonie,  les  symptômes 


488  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  ^  m*«iiomc. 

généraux  et  plusieurs  des  symptômes  locaux  de  la  pneumonie  ne  man- 
quent cependant  pas,  mais  il  est  des  cas  où  on  hésite  à  conclure,  parce 
que  le  tableau  symptomatique  n'est  pas  complet  ou  présente  qodipe 
particularité  insolite.  C'est  surtout  ce  qui  a  lieu  quand  la  pneumonie  ot 
compliquée  d'une  autre  affection  de  poitrine  :  d'une  bronchite,  d'une 
pleurésie,  etc.  —  Il  est  donc  utile  de  consacrer  quelques  dé¥elo|i|ienient9 
au  diagnostic  différentiel  de  la  pneumonie  d'avec  tes  affections  quipeaTeot 
la  faire  méconnaître. 

Pleurésie.  —  Dans  la  pneumonie  et  dans  la  pleurésie,  il  y  t  de  la 
fièvre,  un  point  de  côté,  de  l'oppression  et  de  la  toux,  et  quelques  fymp> 
tomes  physiques  communs  :  de  la  matité  au  point  malade,  du  souflleon 
des  bruits  secs  dont  le  lieu  de  production  à  la  surface  de  la  plèvre  on  i 
Torigine  des  infundibula  est  souvent  difficile  à  établir.  Cette  restem» 
blance  symptomatique  rend  la  confusion  possible  dans  les  cas  oii  man* 
qucnt  les  signes  propres  de  chacune  :  l'expectointion  rouillée,  d*intt 
part:  Tcgophonie,  d'autre  part. 

Pour  se  guider,  on  aura  égard  aux  préceptes  suivants  :  La  fièvre  de  h 
pneumonie  débute,  en  général,  d'une  manière  plus  brusque  ou^eomme 
on  Ta  dit,  plus  solennelle,  par  un  frisson  avec  claquement  dedenlKet 
quelquefois  par  un  vomissement.  Elle  s'accompagne  d'un  sentimeflt  de 
malaise  plus  profond  ;  la  température  centrale  est  plus  élevée  et  le» 
rémissions  plus  rares  ;  les  phénomènes  sympathiques  sont  plus  pronooeà. 
Quant  aux  signes  physiques,  les  premiers  jours,  une  large  zone  tympani- 
que  à  la  base  remplacée,  les  jours  suivants,  par  un  son  de  plusenpks 
mat;  la  conservation  habituelle  de  l'espace  semi-lunaire  (Traubea  cepeo- 
dant  rapporté  un  fait  contraire),  un  souffle  tubaire,  ayant  son  maximniD 
dans  Taisseile,  sont  des  signes  de  pneumonie. 

Au  contraire,  une  zone  de  matité  à  la  base  surmontée  d'une  zone  de 
son  tympanique,  la  première  augmentant  en  hauteur  les  jours  suîymU^ 
et  reloulantpar  son  progrès  la  zone  tympanique,  est  un  bon  caractère  de 
pleurésie  ;  plus  tard  :  une  matité  complète,  avec  disparition  de  l'espace 
semi-Iunairc,  l'abolition  de  tout  bruit  respiratoire  et  l'absence  de  vibra- 
tions Ihoraciques,  l'expectoration  simplement  muqueuse,  sont  des  signes 
de  pleurésie  ;  ce  n'est  que  dans  des  conditions  exceptionnelles  (pneumo- 
nie massive)  que  ces  symptômes  existent  dans  les  pneumonies.  Dans  ce 
cas,  il  n'y  a,  pour  éviter  l'erreur,  indépendamment  de  la  ponction  avec  le 
trocarl  capillaire,  que  les  symptômes  généraux  et  la  marche  de  la  mala- 
die. Comme  elle  est  beaucoup  plus  lente  dans  la  pleurésie,  il  serait  fort 
extraordinaire  que  les  signes  physiques  que  je  viens  de  rappeler  existas- 
sent déjà  dans  les  premiers  jours  d'une  pleurésie. 

Dans  certains  cas,  on  a  ces  mêmes  symptômes  physiques,  mais,  «k 
plus,  des  crachats  rouilles;  l'existence  d'une  pneumonie  est  certaine  et  la 
question  réside  dans  l'alternative  suivante  :  ou  bien  une  pleurésie  abon- 
dante compliquée  d'un  petit  foyer  de  pneumonie,  ou  bien  une  pneumonie 
sans  pleurésie.  En  réalité,  c'est  le  diagnostic  de  la  pleurésie  qu'il  y  ai 
poser,  non  celui  de  la  pneumonie:  aussi,  je  renvoie  à  l'article  Pleurésie  de 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  oiagnostic.  489 

ce  Dictionnaire  et  au  paragraphe  complications  du  présent  article  on  j'ai 
déjà  dit  un  mot  du  diagnostic  de  la  pleuro-pneumonie. 

ie  reviens  au  diagnostic  diiïérentiel  de  la  pneumonie  non  massive  et 
de  k  pleurésie  dans  le  cas  où  il  n'y  a  pas  d'expectoration  et  où  les  signes  , 
génimux  ne  sont  pas  suffisamment  tranchés  pour  qu'on  puisse  conclure 
i  la  pneumonie.  C'est  avec  la  pleurésie  s'accompagnant  de  congestion  pul- 
aonaire  que  l'erreur  peut  être  faite.  En  effet,  dans  cette  variété  de  pleu- 
résie il  n'y  a  pas  de  matité  absolue,  mais  une  submatité  occupant  d'un  côté 
les  deux  tiers  inférieurs  de  la  poitrine  ;  pas  d'abolition,  ni  même  de  dimi- 
nution appréciable  des  vibrations  thoraciques  dans  la  plus  grande  partie  de 
YespsLce  correspondant  à  la  submatité;  on  enlend  un  souffle  dans  une 
^;    grande  étendue,  jusqu'à  la  base  du  poumon,  et  souvent  des  râles  sous-cré- 
;    pîtaots  fins  et  même  crépitants,  symptomatiques,  comme  le  souMe,  de  la 
^   congestion  pulmonaire.  Voilà  bien  des  signes  communs  avec  la  pieu- 

Voici  maintenant  les  caractères  physiques  distinctifs  :  la  submatité  sou- 
^  Venise  déplace,  elle  devient  presque  nulle  latéralement  quand  on  fait 
"'  eevcher  le  malade  sur  le  côté  opposé  ;  de  plus,  dans  le  cas  de  pleurésie,  il 
'   y  a  toujours^  à  la  base,  une  petite  zone  de  matité  véritable  —  difficile  à 
^    distinguer  de  la  matité  hépatique,  si  Taffection  siège  à  droite,  mais  fa- 
cile àreconnaître,  s'il  s'agit  d'une  pleurésie  gauche  —  le  souffle  est  doux  ; 
il  a  son  maximum  d'intensité  au  niveau  de  la  racine  des  bronches  —  il 
est  ipeu  étendu  ;  par  conséquent  il  ne  peut  être  symptomatique  d'une 
imenmonie,  car  un  souffle  pneumonique  si  étendu  aurait  quelque  part,  en 
-  dehors  de  la  racine  des  bronches,  un  caractère  tubaire  et  métallique  que 
ee  soufile  ne  présente  point:  de  plus,  en  cherchant  avec  soin,  on  trouvera 
toujours  un  peu  d'égophonie  vers  la  partie  supérieure  de  la  submatité, 
.  signe  qui  manque  dans  la  pneumonie. 

La  pleurésie  diaphragmatique  peut  aussi  causer  quelque  embarras. 
-Grisolle  remarque  judicieusement  qu'une  dyspnée  extrême,  une  toux 
Aéquente  et  pénible,  comme  on  les  voit  dans  cette  maladie,  ne  pourraient 
appartenir  qu'à  une  pneumonie  assez  étendue  pour  se  révéler  par  des 
signes  physiques  fort  nets.  J'ai  >ii  cependant  un  cas  de  ce  genre  où  le 
diagnostic  dut  rester  en  suspens.  Le  lendemain,  la  pneumonie,  qui 
probablement  était  localisée  à  la  face  inférieure  du  lobe  ioférieur,  gagna 
la  partie  postérieure  et  put  dès  lors  être  affirmée. 

Je  pourrais  m' étendre  davantage,  mais  je  crois  devoir  pour  plus  de  dé- 
tails renvoyer  à  l'article  Pleurésie  de  ce  Dictionnaire. 

Broncho-pneumonie.  —  Elle  est  rarement  unilatérale;  elle  occupe  de 

préférence  les  basesetlaisseintactes  les  parties  moyeime  et  surtout  supérieu- 

mes  des  poumons.  Dans  les  cas  où  existe  une  pneumonie  fibrineusc  des  doux 

-bases  avec  bronchite,  on  se  fondera,  pour  établir  la  diagnostic,  sur  la 

xnarche  de  la  maladie,  particulièrement  sur  la  fièvre,  qui   offre  dans  la 

-broncho-pneumonie  des  rémissions  matutinales  et  des  exacerbations  vespé- 

>*^]es  très  prononcées.  Ce  n'est  que  dans  les  cas  de  transition  que  le  dia- 

£7iostic  sera  impossible,  par  exemple,  dans   un  cas   analogue  à  celui 


490  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  DiiGirosnc. 

dllenocli,  qui  dit  avoir  trouve  de  la  pneumonie  fibrineuseà  TunedeibafKs 
et  de  la  broncho-pneumonie  à  l'autre. 

L'expectoration  dans  la  broncho-pneumonie  n'est  pas  caracténsl^ne 
comme  dans  la  pneumonie.  Malheureusement,  ce  dernier  canctère  peut 
bien  rarement  être  utilisé,  vu  l'absence  de  toute  expectoration  diez  les 
très  jeunes  enfants. 

Phthisie  pulmonaire.  —  Ce  n'est  pas  pendant  la  période  i'woaaé  de 
la  pneumonie,  c'est  lorsqu'on  voit  pour  la  première  fois  le  malade  i^s 
la  défervescense,  que  l'erreur  peut  être  commise.  Elle  Test  même  iski 
fréquemment  dans  les  hôpitaux,  parce  que  souvent  les  malades  ranici» 
gnent  mal  sur  les  symptômes  qu'ils  ont  éprouvés  avant  leur  entrieî 
l'hôpital.  On  sait  que  le  lendemain  de  la  défervescence  le  pneumoniqie 
est  fort  abattu  et  que  souvent  le  faciès  présente  quelque  analogie  vtt 
celui  qu'il  offre  dans  les  maladies  chroniques.  Or,  si  la  percussion  el 
l'auscultation  décèlent  l'existence  d'une  induration  de  l'un  des  sommeli 
et  que  le  malade  ne  soit  pas  assez  intelligent  pour  raconter  qu'il  a  eu 
pendant  plusieurs  jours  une  fièvre  intense,  on  commet  fort  natureUemeot 
la  méprise  de  considérer  cette  induration  comme  symplomatiqoe  d'aae 
phthisie.  L'erreur  peut  à  la  rigueur  se  prolonger  deux  ou  trois  jours,  car 
on  sait  que  la  résolution  est  plus  lente  dans  la  pneumonie  du  sommet 
Cependant,  si  les  signes  de  la  convalescence  s'établissent  franchement. 
alors  même  que  l'induration  persiste,  on  pourra  reconnaître  la  vérité,  qai 
deviendra  tout  à  fait  évidente  à  mesure  que  la  résolution  s'accomplira. 

J'ai  dit,  à  propos  de  l'expectoration,  qu'une  hémoptysie,  au  débat  de  la 
pneumonie,  doit  faire  craindre  le  début  d'une  pneumonie  caséeuse.  Telle 
est  la  règle.  Mais  elle  n'est  pas  sans  exceptions,  comme  le  prouve  l'obser- 
vation Lxxxi  do  la  clinique  de  Vulpian.  Il  s'agit  d'un  homme  de  37  an» 
qui  cinq  joui's  après  une  chute  sur  le  côté  gauche  dans  un  escalier,  taD|b 
pendant  lequel  il  ne  ressentit  aucun  effet  de  la  chute,  eut  un  frisson  intense 
avec  point  de  côté  à  droite;  le  lendemain,  il  se  mit  à  tousser,  et  le  même 
jour  il  eut  une  hémoptysie.  Il  rendit  un  crachoir  de  sang  environ.  A  son 
entrée  le  lendemain,  on  constata  les  signes  classiques  d'une  pleuro-pnen- 
monie.  Le  mois  suivant  le  malade  sortit  parfaitement  guéri. 

Méninyite.  —  Il  n'est  pas  rare  que  chez  un  enfant  on  méconnaisse  une 
pneumonie  cérébrale.  C'est  une  erreur  fort  regrettable,  car  elle  entraîne 
un  pronostic  fatal  qui  est  démenti  par  l'événement.  Il  est  donc  de  la  plus 
grande  importance  de  rechercher  avec  soin  s'il  n'y  a  pas  de  pneoroonie 
du  sommet  chez  un  enfant  atteint  d'accidents  cérébraux.  On  sait  que  le$ 
signes  physiques  de  cette  pneumonie  sont  plus  lents  à  paraître  :  il  faudn 
donc  ne  pas  se  contenter  d^un  seul  examen. 

Après  les  symptômes  locaux,  la  température  est  le  critérium  le  plw 
important:  les  accidents  cérébraux  non  symptomatiques  de  lésions  méois- 
gées se  produisent  presque  toujours danslecas  où  la  pneumonieest  accoopa- 
gnée  d'une  haute  température.  Or,  dans  la  méningite,  la  température  net 
pas  fort  élevée:  elle  atteint  rarement  40*"  Cet,  en  admettant  qu'elleil- 
teigne  ce  chiffre  quelques  heures,  elle  ne  s'y  maintient  jamais. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  diagnostic.  491 

poalsdonneaussi  des  renseignements  utiles  :  le  pouls  de  la  pneumonie 
tile  est  fréquent  et  régulier;  dans  la  méningite^  il  peut  devenir  peu 
ent  et  il  présente  des  irrégularités. 

us  celle-ci,  il  y  a  des  contractures  ou  des  paralysies  de  certains 
les  ;  ces  symptômes  ne  se  rencontrent  jamais  parmi  les  accidents 
faux  de  la  pneumonie,  sauf  peut-être  la  raideur  de  la  nuque  (Da-: 
hino),  mais,  encore  une  fois,  les  signes  les  plus  importants  sont  natu- 
D6nt  les  signes  locaux  de  la  pneumonie. 

diagnostic  de  la  pneumonie  une  fois  bien  établi,  reste  la  grave  ques- 
to  savoir  si  elle  est  ou  non  compliquée  de  méningite  ;  mais,  à  cet 
i,  je  n'ai  qu'à  renvoyer  au  paragraphe  complications  cérébrales,  et 
«t  à  l'article  Ménogite,  t.  XXII. 

ètnre  typhoïde,  —  Il  est  assez  rare  qu'un  clinicien  tant  soit  peu  expé- 
nté»  en  présence  d'une  pneumonie ,  la  méconnaisse  et  suppose  une 
I  typhoïde  qui  n'existe  pas.  Cette  éventualité  n'est  cependant  pas 
asible,  s'il  s'agit  de  la  forme  de  pneumonie  que  j'ai  indiquée  plus 
i^aous  le  nom  de  pneumonie  asthénique.  Dans  cette  forme^  en  effet. 
dd  du  malade  est  celui  d'un  typhique  :  la  prostration,  l'indifférence 
nde,  les  fuliginosités  de  la  bouche,  la  céphalalgie,  les  vertiges,  les 
axis,  font  penser  à  la  dothiénenterie,  d'autant  plus  que  souvent  la 
■ée  est  peu  marquée  et  que  le  malade,  ne  se  plaignant  pas  de  point 
Mé|  n'attire  pas  l'attention  sur  l'appareil  thoracique;  mais  on*évi- 
l'erreuren  pratiquant  l'examen  de  l'appareil  respiratoire:  on  décou- 
4Hiisi  la  pneumonie,  qui  se  révélera  par  ses  symptômes  physiques, 
m'aura  plus  alors  qu'une  question  à  trancher,  celle  de  savoir  s'il 
t  d'une  pneumonie  développée  secondairement  à  une  fièvre 
lûde  ou  d'une  pneumo-typhoïde  primitive  ;  en  d'autres  termes,  ce 
.  plus  Texistence  de  la  pneumonie  qui  est  en  question,  mais  la  signi- 
uon  de  cette  pneumonie. 

àOROSTiG  DU  SIÈGE  ET  DE  l'étendue  DE  LA  PNEUMONIE.  —  Il  cst  bien  rare 
a  faisant  le  diagnostic  d'une  pneumonie  on  reste  dans  le  doute  sur 
liège.  Cela  peut  arriver  cependant,  si,  en  même  temps  qu'existent  les 
ptômes  généraux  et  les  crachats  caractéristiques,  les  signes  physiques 
Bssont  masqués.  Quant  au  diagnostic  de  l'étendue  de  la  portion  en- 
Bv  il  est  fort  difficile  dans  quelques  cas,  surtout  si  la  pneumonie  est 
pliquée  de  pleurésie  ;  il  a  cependant  son  utilité,  si  l'on  veut  appré- 
en  parfaite  connaissance  de  cause  la  marche  de  la  pneumonie.  C'est 
une  analyse  attentive  des  divers  signes  physiques  locaux  qu'on  par- 
dra  à  l'établir. 

neumonie  double.  —  Le  diagnostic  de  l'envahissement  de  l'autre 
non  a  une  certaine  importance  pronostique  :  il  est  donc  indispensable 
e  faire  d'une  manière  exacte.  Or,  cela  présente  souvent  des  diffi- 
h.  On  sait  qu'il  n'y  a  pas  un  second  point  de  côté,  et  que  c'est  d'une 
ière  en  général  fort  insidieuse  que  le  second  poumon  se  prend.  De 
latité,  quelques  râles  crépitants,  même  l'apparition  d'un  souffle  du 
opposé  à  la  pneumonie,  s'il  siège  à  la  racine  des. bronches,  ne  suf- 


492  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  diagkostig. 

fisent  pas  pour  affirmer  rexistcnce  d'un  nouveau  foyer  ;  car  ces  symptiknesK 
peuvent  dépendre. d'une  simple  congestion  de  l'autre  poumon,  ëd  Tab- 
sence  de  cette  dernière,  un  souille  d'intensité  moyenne,  s'étendaiii  le 
long  de  la  colonne  vertébrale,  du  côté  ppposé  à  une  pneumonie,  prai 
être  un  pur  retentissement  du  souffle  produit  dans  la  partie  hépatiaée,  à 
ce  dernier  souffle  se  propage  lui-même  jusqu*à  la  ligne  médiuie.  An 
contraire,  l'apparition  d'un  second  souffle  séparé  du  premier  par  une 
zone  où  Ton  perçoit  le  murmure  permet,  en  général,  d'affirmer  qn^ilest 
né  sur  place. 

Outre  la  recrudescence  de  la  fièvre  et  les  signes  physiques  d*auacullatioQ 
et  de  percussion,  on  a  encore,  pour  porter  son  jugement*  un  signe  local 
qui,  dans  certains  cas,  sera  fort  utile,  à  savoir  :  Télévation  de  la  tempcn- 
ture  locale  (du  côté  opposé  au  poumon  primitivement  envahi)  sur  la  pmî 
thoracique  ou  dans  Taissellc  (Landrieux).  Je  crois  que  ce  symptôme,  sd 
point  de  vue  du  diagnostic  de  la  pneumonie  double,  a  une  vtknr 
très  supérieure  à  celle  de  la  rougeur  de  la  seconde  pommette. 

Diagnostic  du  degré  dp:  la  pneumonie.  —  Vers  le  dixième  jour,  s'il  n'y 
a  pas  eu  de  dcfervescence,  ce  diagnostic  a  une  importance  capitale,  car 
il  entraîne  presque  nécessairement  le  pronostic;  mais,  avant  cette  date,  il 
peut  déj^  présenter  un  grand  intérêt. 

J'ai  dit,  à  propos  de  la  fièvre,  qu*il  y  a  parfois  des  rémissions  qei 
simulent  la  crise;  il  faut  savoir  les  distinguer  de  celle-ci ,  afin  de  nep» 
ofHrmer  à  tort  la  terminaison  prématurée  de  la  maladie. 

En  premier  lieu,  on  se  fondera  sur  la  température.  II.  est  dilBcile 
d'admettre  qu*une  pseudo-crise  donne  un  abaissement  de  trois  degrés, 
à  moins  d'influence  médicamenteuse  particulièrement  énergique,  telle  que 
serait,  par  exemple,  celle  du  tartre  stibié. 

En  deuxième  lieu,  on  tiendra  compte  de  la  date  de  la  i*éinission  fébrile 
et  de  sa  corrélation  avec  l'état  local.  Soit,  par  exemple,  dans  un  cas  où  la 
pneumonie  est  fort  étendue,  une  rémission  le  matin  du  quatrième  jour, 
il  est  bien  peu  probable  qu'elle  soit  le  début  de  la  crise  ;  car,  en  généni, 
il  n'y  a  que  les  pneumonies  pou  étendues  qui  entrent  sitôt  en  dcfer- 
vescence. 

L'expectoration,  en  pareil  cas,  a  aussi  sa  signification  :  Trnul)e  rapporte 
{Gesammeite  Abhandl.yi,  III,  p.  281)  qu'un  jeune  homme,  au  quatrième 
jour  d'une  |)ncuinonic,  eut  une  rémission  qui  Ht  tomber  la  température 
à  la  normale.  Néanmoins  il  ne  crut  pas  à  une  crise  véritable  ,  parce  que 
le  malade,  après  cette  pseudo-crise,  commença  à  expectorer  des  crachats 
couleur  brique.  Or,  si  une  semblable  expectoration  peut  continuer  aprè$ 
h  crise,  il  est  impossible,  dit  Traube,  qu'elle  débute  postérieurement  i 
celle-ci.  Telle  est  la  raison  qui  a  motivé  son  diagnostic. 

Vei's  le  sixième  ou  septième  jour,  survient,  dans  bon  nombre  de  cas, 
Y(\racerbation  prœcrUique  qui  peut  singulièi-ement  tromper  un  médecis 
peu  expérimenté,  en  lui  faisant  croire,  à  tort,  à  l'imminence  de  la  suppv-    I 
ration.  Il  n'y  a  malheureusement  pas  de  signe  positif  qui  pennette  d'afli^ 
nier  à  laquelle  des  deux  ulternativcs  on  a  affaire,  et  pour  asseoir  ce  dû- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  diagkostic.  493 

noBiic  si  important  il  n'y  a  guère  que  des  probabilités  :  l*àge  du  sujet, 
»  conditions  générales  dans  lesquelles  il  se  trouvait,  la  gravité  de  la 
yJadie  jusqu'à  ce  moment,  etc.  —  En  tous  cas,  il  est  prudent,  même 
Mraque  les  chances  ne  paraissent  pas  favorables ,  de  ne  pas  affirmer  un 
roiMMiic  funeste;  car  on  voit  assez  souvent  la  défervescence  se  faire 
&giilièrement  chez  des  sujets  dont  l'état,  la  veille,  excitait  les  craintes 
Si  plus  vives  et  en  apparence  les  mieux  justifiées. 
J'ai  dit  précédemment  que,  chez  les  vieillards,  une  terminaison  funeste 
tr  coUapsus  est  beaucoup  moins  rare  que  chez  l'adulte.  Il  importe  de 
e  pas  se  méprendre  sur  la  signification  d'un  abaissement  de  tempéra- 
uequi  survient  chez  un  vieillard  vers  le  septième  ou  le  huitième  jour. 
,jDel  égard,  le  professeur  Charcot  nous  fournit,  en  quelques,  traits,  les 
léments  du  diagnostic  :  «  Si  le  coUapsus,  dit-il,  n'est  que  l'exagération 
aa  symptômes  ordinaires  d'une  défervescence  rapide  de  bon  aloi,  en 
lême  temps  que  la  température  centrale  s'abaisse ,  les  mouvements  de 
L  respiration  et  les  pulsations  artérielles  se  ralentissent.  Le  pronostic  est 
ttorable  en  pareil  cas,  alors  même  qu'il  serait  survenu  quelque  symp- 
MBe  inquiétant,  tel  qu'un  délire  intense.  Si,  au  contraire,  la  tempéra- 
m  centrale  s'abaissant,  la  fréquence  du  pouls  et  des  mouvements 
spiratoires  persiste  ou  même  s'accroit ,  la  situation  est  des  plus 
V¥es.  Bientôt,  quoi  qu'on  fasse,  l'agonie  va  s'établir.  Et,  tandis  que 
ul  i  rheure  nous  avons  été  conduits  à  porter  un  pronostic  favorable, 
algré  l'apparition  d'un  délire  violent,  ici  nous  devons  maintenir  le 
Oiooatie  le  plus  grave,  alors  même  que  la  défervescence  aurait  produit 
n  le  malade  un  sentiment  de  bien-être.  » 

yXfm  le  dixième  jour,  si  la  défervescence  n'a  pas  encore  lieu,  les  chancei> 
11I9  au  contraire,  pour  le  passage  au  troisième  degré;  mais,  si  l'on  veut 
pjer  de  faire  autre  chose  qu'un  diagnostic  de  probabilités,  et  le  foncier 
r  des  signes  positifs,  on  éprouve  souvent  un  grand  embarras. 
-Les  crachats  puriformes  ou  couleur  jm  de  pruneaux  n'ont  pas,  quoi 
l'on  ait  dit,  la  signification  absolue  qu'on  a  voulu  leur  accorder,  et  un 
iaicien  prudent  ne  fondera  jamais  sur  ce  signe  seul  le  diagnostic  d'une 
^patisation  grise.  Inversement  leur  absence  et  la  persistance  des  cra- 
mta  visqueux  et  rouilles,  pouvant  s'expliquer  par  la  persistance,  en 
rCalns  points,  d'une  hépatisation  rouge,  ne  sauraient  exclura  la  possibi- 
é.d'une  hépatisation  grise  limitée. 
Les  signes  d'auscultation  sont  aussi  sans  valeur. 
,J1  n'en  est  pas  de  même  des  symptômes  généraux  :  Au  dixième  jour, 
liiération  des  traits  de  la  face,  le  subdélirium,  l'état  typhoïde,  sont  des 
pies  qui,  par  leur  réunion,  doivent  faire  penser  à  la  suppuration,  surtout, 
t  Grisolle,  s'ils  se  déclarent  brusquement,  auquel  cas  ils  ont  une  plus 
ande  valeur.  Une  série  de  petits  frissons  est  aussi  très-significative,  soit 
fil  s'en  produise  un  chaque  jour  pendant  plusieurs  joui^  consécutifs, 
il  qu'ils  se  répètent  seulement  deux  ou  trois  fois  dans  l'espace  de 
lelques  jours.  Chaque  frisson  est  suivi  d'une  élévation  plus  ou  moins 
•ande  de  la  température;  dans  l'intervalle,  celle-ci  n'est  pas,  en  gêné- 


491  PNEUMONIE  LOBAIIIE  AK.UË.  —  prosiostic. 

rai,  trtîs-cicvée.  Quant  à  Toppression,  quelquefois  elle  auj^mnte,  mais 
on  la  voit  diminuer,  en  mémo  temps  que  la  toux  devient  moins  fatigante, 
ou  même  cesser  tout  à  fait.  Il  y  a  comme  une  sorte  de  détente  de  coliiiis 
symptômes  ;  et  cependant  l'état  général  devient  plus  mauvais  ;  les  forces 
subissent  une  atteinte  grave  ;  il  y  a  entre  Tétat  local  et  Pétai  général  ime 
discordance  bien  frappante  sur  laquelle  on  ne  saurait  trop  attirer  {at- 
tention. 

L'examen  du  sang  jusqu'ici  si  négligé  me  parait,  en  pareil  cas,  utile;  on 
sait  depuis  quelques  années,  surtout  depuis  les  travaux  de  Bronaidel, 
qu'il  y  a  dans  le  sang  un  excès  relatif  de  globales  blancs  au  moment  de  h 
suppuration,  résultat  d'ailleurs  en  harmonie  avec  la  doctrine  de  Cohnheiai 
sur  l'origine  hématique  des  globules  du  pus.  Ce  fait,qui  paraît  établi  pooritf 
suppurations  en  général,  je  le  crois  également  vrai  dans  le'cas  de  snppii- 
ration  du  poumon  ;  cela  me  semble  du  moins  résulter  de  quelques  obsera- 
tions.  Si  cela  est  confirmé,  on  pourra,  grâce  à  la  numération  des  doimks 
blancs  du  sang  faite  jour  par  jour,  prévoir  dés  le  septième  on  le  hnîtîéDie 
jour  rimmincnce  de  la  suppuration.  Seulement,  pour  avoir  des  multats 
de  quelque  valeur,  il  ne  suffit  pas  de  compter  séparément  les  globiiles 
blancs  :  il  est  nécessaire  de  faire  parallèlement  la  numération  des  globales 
rouges.  Car  c*est  la  courbe  du  rapport  surtout  qui  a  de  la  valeur.  Si  ellr 
baisse,  il  me  parait  certain  qu'on  n'a  pas  à  redouter  le  passage  de  b  pneu- 
monie à  la  suppuration  ;  si  elle  s'élève  biusquement,  cette  terminaison  me 
semble  au  contraire  presque  forcée. 

Je  n'ai  pas  à  faire  ici  le  diagnostic  de  l*abcès  du  poumon.  J'en  ai  indi- 
qué plus  haut  les  signes,  par  son  diagnostic  différentiel  d^avec  la  pkniv- 
sie  purulente.  Je  renvoie  à  l'article  Poumon;  de  iiicnje  pour  le  diagnostir 
de  la  terminaison  par  gangrène. 

Pour  être  complet,  il  me  faudrait  encore  traiter  du  diagnostic  des /bnvuv 
de  la  pneumonie  et  de  ses  complications;  mais  je  ne  pourrais  parier  df> 
premières  sans  tomber  dans  quelques  redites;  et  des  secondes,  san5laire 
double  emploi  avec  les  divcTs  ailiclesdc  ce  Dictionnaire,  consacrés  spécia- 
lement aux  aiTections  qui  peuvent  compliquer  la  pneninoiiie.  Je  crois  doih 
devoir  m'abstenir. 

ProiM^Mtic.  —  11  est  des  ciiToiistiUices  où  le  diagnostic  cotnpief  d'um 
|)neumonie  entraîne  avec  lui  le  pronostic,  de   telle  sorte  que  le  mé- 
decin. <iu  lit  du  malade,  n*a  guère  d*etTort  à  faire  pour  déterminer  h 
gravité  du  cas  qui  lui  est  soumis  :  par  exemple,  si  cliez  un  pneomonique- 
il  a  pu  se  convaincre  de  Texistencc  d*une  hépatisation   grise  ou  d'iinc 
méningite,  il  sait,  par  cela  même,  que,  dans  le  premier  cas,  le  malade  i    ^ 
fort  peu  de  cbanccs  de  vie  et  qu'il  n*en  a  |)resque  point  dans  le  secoiri. 
Ici  le  pronostic  est  aisé  ;  toute  la  difTicultV'  résidait  dans  le  diagnostic.  Mik 
dans  le  plus  grand  nombre  des  cas  il  n'en  est  pas  ainsi.  Surtout  au  it- 
but  d'une  pneumonie,  le  médecin  a  besoin,  pour  apprécier  les  chancesdf 
survie  du  malade,  de  peser  toutes  les  conditions  dans  lesquelles  il  se  Iroun: 
intrinsèques  et  extrinsèques.  Il  lui  est  alors  utile  de  connaître  les  résuitit? 
bruts  de  la  statistique  relativement  à  la  gi'avité  de  chacune  d  elles,  (is 


r 


( 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  pnoxosnc. 


wri 


renseignements  n'ont  assurément  pour  lui  qu'une  valeur  de  second  ordre 
ptrce  qu'ils  ne  sont  que  des  moyennes,  et  qu'en  pareille  matière  il  y  a 
bemcoup  d'écart  entre  les  cas  extrêmes.  Néanmoins,  je  le  répète»  ces 
doimées  statistiques,  quelque  générales  qu'elles  soient,  ne  doiTent  pas 
être  D^ligées,  parce  que,  dans  un  certain  nombre  de  cas,  en  l'absence 
d^élènents  particuliers  tirés  de  l'examen  du  malade  lui-même,  elles  seront 
la  seule  base  sur  laquelle  le  médecin  pourra  établir  un  pronostic  provisoire  : 
celte  considération  justifie  les  chiffres  que  je  vais  maintenant  citer. 

•  Influence  de  l'âge.  —  De  la  naissance  à  la  puberté,  la  mortalité  est,  dit- 
on«  pteique  nulle  pour  les  enfants  jouissant  d'une  bonne  santé  jusqu'au 
%  BMment  où  ils  ont  été  pris  de  pneumonie.  Les  médecins  attachés  aux  liô- 
i.  piteux  d'enfants  sont  à  peu  près  unanimes  à  cet  égard.  On  a  cependant 
i.  t^malvk  excepter  de  ce  pronostic  favorable  les  enfants  à  la  mamelle,  mais, 
1^  -;dSi|irè8  le  professeur  Thomas,  ce  serait  à  tort  :  ceux-ci  guériraient  presque 
/ifcime  les  autres,  à  moins  qu'ils  niaient  en  même  temps  du  coryza. 


\  ^euqael  cas  ils  ont  à  supporter  à  la  fois  la  pneumonie  et  l'inanition. 
i-r  De  la  puberté  à  l'âge  do  20  ans,  la  pneumonie  franche  n'est  pas  une 
%  ^inlidie  fort  grave.  En  prenant  tous  les  cas  en  bloc,  sans  en  excepter  les 
é  1  complications,  la  mortalité  ne  s'élève.guère  au-dessus  de  9  pour  100  ;  de 
lî  -  aO  ik  30,  la  mortalité  est  inférieure  à  14  pour  100.  Entre  30  et  40,  elle 
f(  aUéiiit  20  pour  100.  Entre  40  et  50,  elle  dépasse  25  pour  100,  et  entre 
tf   SO  d  60,  30  pour  100.  Au-dessus  de  70  ans,  la  mortalité  est  de  80 

pour  100  environ. 
iH  ■     On  Yoit  donc  qu'à  lui  seul  l'âge  est  un  élément  fort  important  du  pro- 
'4-BiMlic.  Seulement,  pour  qu'il  eût  toute  sa  valeur,  il  faudrait  avoir  une 


irAfinliqiir  pour  chaque  ville  ou  au  moins  pour  chaque  région,  où  les  dif- 
\  lérenoes  importantes  résultent  des  influences  de  race,  habitudes  hygiéni- 
i^î^fDMS^  etc.  Ainsi  les  chiffres  précédents  ne  sont  que  des  moyennes  que 
^.^^û  4ibienues  en  combinant  ensemble  les  résultats  de  différentes  statis- 
W-tupies  de  la  France  et  de  l'Allemagne:  dans  certaines  localités,  ainsi 
(  'Hpfwk  pouvait  s'y  attendre,  la  sénilité,  quant  à  la  pneumonie,  si  je  puis 
i    ni'eaDprmier  ainsi,  est  plus  précoce  :  à  Bàle  et  à  Vienne,  par  exemple. 

A  l'appui  de  ce  que  j'avance,  voici  les  chiflres  de  la  mortalité  pour  1 00 
^  dans  les  trois  hôpitaux  de  Vienne,  publiés  par  A.  Biach.  Cette  steitistique 
pmrte  sur  plus  de  6000  pneumoniques  ;  j'ai  marqué  du  signe  X  les  chif- 
fres qui  dépassent  notablement  la  moyenne  générale  : 


A«K. 

HÔPITAL   GÉNÉRAL. 

UÔrnAL    RCDOLT. 

HÔriTAL  DE  WIEOSM. 

1.                  '        . 

10-20 

0 

9,0 

9,6 

20-30 

13,4 

13,8 

12,6 

30-40 

23 

25,6 

21.4 

•40-50 

X32,9 

X3i,2 

X30,9 

50-60 

X4I,7 

32 

X39,8 

00-70 

48,0 

55 

55 

•/O— 80 

57,5 

51,5 

60,8 

80^-00 

77,7 

100 

100 

496  PiNElMOME  LOBAIRE  AIGUË.  —  prokostic. 

A  Greifswald,  au  contraire,  la  période  décennale  de  40  à  àO  n'es! 
pas  plus  grave  que  Test  ailleurs  celle  de  50  à  40.  A  Paris  (statistique  de 
Grisolle),  la  mortalité  est  aussi  beaucoup  moindre,  de  30  à  60,  qu'elle 
n'est  indiquée  dans  le  tableau  précédent. 

Influence  du  sexe,  —  Toutes  choses  égales,  la  mortalité  est  notable- 
ment plus  forte  chez  la  femme  que  chez  l'homme;  elle  serait  comme  3 
est  à  2  par  rapport  à  celle  du  sexe  masculin,  si  l'on  s* en  rappoitait  aux 
grandes  statistiques  de  Vienne  et  de  Stockholm,  et  à  celle  de  la  potidini- 
que  de  Breslau.  Elle  a  même  été  comme  2  est  à  i  à  Wùrzburg  («loliili- 
que  de  Bamberger  de  1854  à  1857).  C'est  là  une  différence  tout  à  fait 
exceptionnelle  que  les  autres  statistiques  ne  confirment  point.  Franqoe, 
dans  la  même  \ille,  pendant  une  période  de  quinze  ans,  a  trouvé  une  nu»>- 
talité  de  17  pour  100  pour  les  hommes  et  de  23  pour  100  pour  les 
femmes  ;  Lebert,  à  Zurich,  de  16  pour  100  pour  les  hommes  et  de  21,S 
pour  100  pour  les  femmes.  Ce  sont  à  peu  près  les  mêmes  chitlresqiie 
ceux  de  la  statistique  décennale  de  l'hôpital  de  Munich  :  16,6  pour  100 
pour  les  hommes  et  23  pour  100  pour  les  femmes. 

Grossesse.  —  Uétat  de  grossesse  aggrave  notablement  le  pronostic. 
Il  résulte,  en  ciTet,  des  observations  réunies  par  Châtelain»  au  nom- 
bre de  39,  que  10  fois  la  femme  a  avorté,  9  fois  on  a  pratiqué  raceouche- 
ment  prématuré  (sur  ces  19  femmes,  10  sont  mortes),  et  que  les  10 
autres  sont  mortes.  Ce  qui  fait,  en  somme,  une  mortalité  de  près  demoî- 
tié.  Si  on  songe  à  l'âge  de  ces  femmes,  on  voit,  comme  on  pouvait  s*t 
attendre,  que  la  pneumonie  est  plus  grave  dans  l'état  de  grossesse. 

Nationalités, —  Un  médecin  militaire  autrichien,  Chwostek,  bien  placé 
pour  apprécier  celte  influence,  a  donné  des  chiffres  qui  ditTèrent  beau- 
coup les  uns  des  autres.  Je  crois  inutile  de  les  reproduire,  mais  je  si- 
gnale rinfluence  de  la  race,  comme  fort  intéressante  à  étudier;  ce  doit 
être  un  sujet  de  recherches  pour  les  médecins  qui  dans  un  même  lieu 
peuvent  observer  dos  individus  dans  les  mêmes  conditions  et  dont  la  race 
seule  diffère. 

Influence  de  Vétat  de  santé  antérieur.  —  11  y  aurait  beaucoup  à  dire 
sur  ce  sujet,  mais  il  est  clair  qu'il  est  en  dehors  de  la  question  spéciale 
de  la  pneumonie,  et  qu'il  pourrait  être  abordé  à  propos  de  ch|ique  ma- 
lade en  particulier.  Cependant  je  n'hésiterais  pas  à  en  traiter  un  peu 
longuement,  vu  son  importance,  si  je  n'étais  arrêté  par  le  manque  de 
données  positives;  même  pour  Talcoolisme,  il  y  a  peu  de  chiffres  à  citer  : 
Grisolle,  clieîc  17  hommes  âgés  de  24  à  59  ans,  a  noté  une  mortalité  de 
près  du  quart;  ce  résultat  est  médiocrement  probant,  vu  Tàge  trop  dis- 
parate des  sujets.  Cependant,  i!  est  corroboré  par  le  chiffre  de  11uî>>. 
qui  est  exactement  le  même.  La  pneumonie,  chez  les  alcooliques  dt- 
Stockholm,  compliquée  ou  non  de  délirium  tremens,  a  donné  une  mor- 
talité de  20  à  25  pour  100. 

Dans  la  même  stylistique  de  Huss,  je  vois  que  la  pneumonie,  chez  ]e> 
emphysémateux,  a  une  mortalité  de  23  pour  lUO.  C'est  peu,  si  on  soij^'e 
que  généralement  les  emphysémateux  ne  sont  pas  jeunes;  cette  béni- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  prokosto.  497 

goilé  relative  de  la  pneumonie  chez  les  emphysémateux  a  été  récemment 
confirmée  par  Dusol  (thèse  de  Paris^  1876). 

Les  chlorotiques,  qui  sont  de  jeunes  sujets,  ont  une  mortalité  à  peu 
près  égale  :  20  pour  100.  C'est  assez  pour  montrer  T  influence  fâcheuse 
de  Tanémie  chlorotique.  Les  pneumonies  qui  affectent  les  sujets  atteints 
de  maladie  valvulaire  du  cœur  ont  une  mortalité  de  30  pour  100;  chez 
les  brightiques  elle  est  de  50  pour  100. 

Influence  des  constitutions  médicales.  —  Leur  action  est  loin  d'être 
tams  importance,  car  dans  un  même  lieu,  suivant  les  années,  la  mortalité 
•  peut  varier  beaucoup.  A  l'hôpital  de  Munich  la  mortalité  a  été  de  14  0/0 
•  en  1875  et  de  25  0/0  en  1868;  à  l'hôpital  de  Stockholm,  elle  a  été  en 
ft  1851.de  9,8  0/0,  de  16  en  1849  et  en  1851  et  de  18  en  1845.  A  Vienne, 
i^  je  vois  dans  la  statistique  décennale  d'Alois  Biach,  déjà  citée,  qu'il  y 
^  a, .suivant  les  années,  des  variations  du  chiiïre  de  la  mortalité,  allant 


£  prtêque  du  simple  au  double.  On  pourrait  objecter  que,  certaines  années, 

*ns  rationnelle  a  pu  exercer  une  certaine  in 
par  Texpectation,   on  a  eu  d'abord  7  0/0  et 


1^  thérapeutique  plus  ou  moins  rationnelle  a  pu  exercer  une  certaine  in- 
;:  Huence;  mais  à  Vienne,  par  Texpectation,   ( 


j  plus  tard  20  0/0  de  mortalité.  Brandes  (de  Copenhague)  prétend  qu'elle 
^.  a  été.  de  5  à  31  0^0,  suivant  les  années,  alors  qu'il  employait  tou- 
^.  jours  la  même  thérapeutique.  Je  n'ai  pas  lu  le  travail  original  de  cet 
^  auteur;  j'ignore  en  quoielle  consistait.  A  vrai  dire,  de  telles  oscilla- 
^.  tioos  dans  la  gravité  de  lapneumonie,  eu  un  même  lieu,  me  semblent 
1^  :eztraordinaires. 

^       Tandis  que  les  variations  annuelles  de  la  léthalité  de  la  pneumonie  sont 
,    irrégulières,  celles  qu'amènent  les  saisons  sont  remarquables  par  leur 
'  '  eoQStance  :  d'une  manière  générale,  c'est  dans  les  mois  où  les  pneumo- 
;  nies  sont  le  plus  abondantes  que  leur  gravité  est  la  plus  grande,  mais  cette 
:  règle  est  sujette  à  de  fort  nombreuses  exceptions.  Elle  n'est  qu^à  demi 
confirmée  par  la  statistique  des  hôpitaux  de  Paris,  publiée  chaque  tri- 
mestre par  E.  Besnier;   il  est  vrai  que  dans  cette  statistique  les  bron- 
cho-pneumonies  ne  sont  malheureusement  pas   distinguées  des  pneu- 
monies lobaires  ;  c*est  ce  qui  m^a  empêché  d'y  avoir  recours  autant  que 
*  Je  Teusse  désiré.  Quoi  qu'il  en  soit,  voici  la  moyenne  (basée  sur  une  sta- 
tistique de  8  à  10  ans)  des  pneumonies  observées  pendant  les  quatre  tri- 
mestres d'une  année  avec  la  mortalité  pour  chaque  trimestre  : 

Mortalilé  «/o 

Janvier — Mars 580  36 

Avril— Juin GJHJ  31 

Juillet— Septembre 422  30 

Octobre— Décembre 411  40 

On  remarquera  sans  doute  que  la  mortalité  générale  est  fort  élevée  ; 

cela   tient  en  partie  à  l'admission  des  broncho-pneumonies  dans  cette 

statistique;  mais  cela  dépend  encore,  ainsi  que  le  remarque  E.  Besnier» 

€  de  ce  que  la  population  uosocomiale  de  Paris,  affaiblie  par  l'alcoolisme 

et  par  mille  autres  causes,  résiste  mal  aux  phlegmasies  pulmonaires,  et 

làussi  de  ce  que  cette  statistique  est  surchargée  par  le  fait  d'un  grand 

.  wwf .  DicT.  mta,  iT  cmm.  XXYllI  —  32 


498  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  peosostig. 

nombre  de  vieillards  atteints  d*afrections  diverses,  au  cours  desquelles 
survient  une  pneumonie  ultime,  et  qui  ne  sont  apportés  à  Tliôpital 
que  pour  y  mourir.  Il  faut  savoir  cnfm  que,  si  un  malade  atteint  d^une 
affection  ehroni(]ue,  même  mortelle,  succombe  à  une  pneumonie,  il  sera 
compté  dans  les  relevés  non  à  raffection  chronique,  mais  à  laffectioo 
intercurrente  qui  a  été  la  cause  directe  de  la  mort.  »  Pour  Imites  ces 
raisons,  Ernest  Besnier  estime  que  la  mortalité  générale  dans  les hdpitaui 
est  d*un  tiers  au-dessus  de  la  mortalité  réelle  de  la  pneumonie. 

Influence  de  retendue  et  du  siège  de  la  pneumonie.  —  L*étendiie  de 
la  phlogmasie,  mais  surtout  renvahisscment  des  deux  poumons,  aggra- 
vent singulièrement  le  pronostic. 

Quant  au  siège  de  la  maladie,  la  plupart  des  auteurs  considènul 
comme  plus  grave  la  pneumonie  du  sommet.  Cette  opinion  est  conGmiée 
par  Grisolle,  qui  chez  des  sujets  ayant  un  âge  moyen  de  36  à  38  ans  a 
trouvé  une  mortalité  d*un  cinquième  chez  ceux  dont  la  pneumonie  sié- 
geait au  sommet  et  d*un  huitième  seulement  chez  les  autres. 

Gravité  de  la  pneumonie  suivant  Vépoque  à  laquelle  le  traitement 
a  été  commencé.  —  On  a  poussé  si  loin,  il  y  a  quelques  années,  le  scep- 
ticisme relativement  à  rutililé  de  la  thérapeutique  dans  les  maladiei 
aiguës  et  dans  la  pneumonie  en  particulier,  qu'il  n'est  peut-être  pas  inutile 
de  montrer  par  des  chiffres  que  la  mortalité  est  jusqu'à  un  certain 
point  en  raison  directe  de  l'entrée  ^tardive  du  malade  à  rhôpital.  J'em- 
prunte à  Grisolle  le  tableau  suivant.  Malheureusement,  il  ne  dit  pas  de 
combien  de  malades  il  s'est  servi  pour  le  composer  : 

Mortalil«s. 
Malades  en  1res  les  deux  premiers  jour» un  treiiièmc. 

—  le  troisième  jour ,   .    .   .  id. 

—  le  quatrième  jour un  huitiêinc. 

—  le  cinquième  Jour un  sixième. 

—  le  sixième  jour un  quart. 

—  le  septième  jour un  tiers. 

—  te  hnitièmc  jour la    moitié. 

—  le  neuvième  Jour un  tien. 

—  le  dixième  jour un  tiers. 

Si  ce  tableau  n'est  pas  composé  avec  des  chiffres  trop  restreints,  jufuel 
cas  il  perd  beaucoup  de  sa  valeur,  je  suis  très-frappé  de  la  différence  de 
la  mortalité  suivant  que  les  malades  sont  entrés  les  trois  premiers  joun 
ou  seulement  les  quatrième,  cinquième  et  sixième  jours.  Pissé  cette 
date,  les  résultats  n'ont  rien  d'extraordinaire  :  il  est  clair  que  des  pneo- 
moniques  qui  ne  sont  pas  encore  convalescents  au  dixième  jour  n'ont  en 
leur  faveur  que  la  minorité  de  chances,  mais,  à  moins  d'admettre  que, 
par  un  caprice  du  hasard,  ce  sont  justement  les  pneumonies  bénignes  qm 
sont  arrivées  de  bonne  heure  à  l'hôpital,  il  faut  reconnaître  la  puissance 
de  la  thérapeutique  faite  les  premiers  jours  ;  Tintervention  niédiak 
hâtive  est  donc  un  élément  important  du  pronostic. 

Indications  pronostiques  tirées  des  symptômes.  —  Au  premier  nof 
il  faut  placer  le  degré  de  la  fièvre.  Si  la  température  dépasse  il •C.,i/* 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGIÊ.  —  pronostic.  W3 

{[raTité  est  extrême.  Il  parait  cependant  que  des  pneumoniqucs  ont  guéri 
^pres  avoir  eu  41**  4  c.  (Thomas),  42*  c.  (Lcbert  et  Jurgenscn).  Ce  sont  là 
«des  exceptions  à  peu  près  uniques. 

Les  indications  fournies  par  le  pouls  ne  sont  pas  non  plus  à  négliger  : 
BeloD  Grisolle  et  Griesinger,  parmi  les  pneumoniques  adultes  qui  ont  plus 
<d0  120  pulsations  par  minute,  il  en  meurt  un  tiers;  parmi  ceux  qui  ont 
•de  iSO  à  140,  il  en  meurt  la  moitié. 

Lorain  a  fait  la  remarque  très-juste  (ouvr.  cité,  p.  404)  que  parfois  le 
çouls  marque  seul  le  progrès  ascendant  de  la  maladie.  A  Tappui  de  cette 
proposition,  il  donne  les  deux  courbes  de  la  température  et  du  pouls  chez 
«in  homme  mort  le  O"*  jour  de  sa  maladie  (entré  à  Thôpital  le  3**  jour).  La 
' .  lempérature  n*a  oscillé  qu'entre  40,1  et  40,6.  Le  pouls,  qui  était  le  pre- 
oiier  jour  à  50,  est  monté  à  100,  puis  à  120.  A  ce  moment,  la  tempéra- 
ture était  à  40,1  et  elle  ne  s*est  pas  augmentée  notablement  jusqu'à  la 
mort  survenue  le  lendemain.  Pareille  remarque  peut  être  faite  à  propos 
de  la  courbe  que  j'ai  reproduite  plus  haut  et  qui  a  trait  au  délire  alcoo- 
lique. Pendant  qu'en  3  jours  le  pouls  montait  de  100  à  140,  les  tempéra- 
f  tares  du  soir  restaient  identiques  ;  seules,  celles  du  matin  montraient  une 
«émission  moindre. 

Plus  récemment   Belugou  a   aussi  publié  quelques   observations  ou 
l'on  Yoit  la  température  s'abaisser,  tandis  que  la  persistance  de  la  fré- 
•quenee  du  pouls  montrait  qu'il  ne  s'agissait  que  d'une  pseudo-rémission 
.4e  k  maladie. 

Je  rappelle  ici  qu'il  ne  faut  pas  considérer  comme  un  symptôme  fâcheux 
les  irrégîdarités  prœcritiques  du  pouls.  Mais,  si  la  défervescence  n'est  pas 
«liière  à  l'époque  ordinaire,  elles  ont,  au  contraire,  une  signification 
grave,  mais  ce  sont  surtout  les  lipothymies  qui  indiquent  l'insuffisance 
cardiaque. 

Quant  au  chiffre  de  la  respiration,  il  n'a  pas  une  valeur  absolue  :  des 
.  malades  ont  guéri  après  avoir  présenté  80  respirations. 

Les  caractères  tirés  de  la  couleur  des  crachats  ne  servent  qu'indirecte- 
ment au  pronostic.  Je  renvoie  à  ce  que  j'en  ai  dit  à  l'un  des  paragraphes 
précédents  où  j'ai  traité  du  diagnostic  du  degré  de  la  pneumonie. 
'    L'absence  d'expectoration  est-elle  un  symptôme  défavorable  ?  Andral  et 
CIrisolle  ne  le  pensent  pas.   On  comprend  que  cette  conclusion  puisse 
.découler  d'une  statistique  un  peu  étendue,  mais  il  n'est  pas  douteux 
[''  rqa'en  certaines  circonstances  ce  symptôme  ne  soit  grave,  par  exemple, 
«*il  coïncide  avec  les  autres  signes  d'une  pneumonie  massive,  ou  bien 
si  Tabsence  d'expectoration  tient  à  la  faiblesse  extrême  du  malade  qui 
lÊjlie  peut  vider  ses  bronches.  Par  contre,  une  pneumonie  très-bénigne  et 
^mns  bronchite  concomitante  peut  très-bien  ne  pas  donner  lieu  à  une 
^^expectoration  notable,  tant  il  est  vrai  qu'un  symptôme  isolé  est  suscep- 
tible de  bien  des  interprétations  différentes  et  ne  vaut   que  par  son 
association  à  d'autres  symptômes. 

L'herpès  a  été  regardé  comme  relativement  plus  commun  dans  les 
pneumonies  peu  graves  ;  mais  ce  n'est  pas  une  opinion  universellement 


500  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  pbosostic. 

acceptée.  Pour  Broadhent,  l'herpès  dans  une  pneumonie  indiqQenît 
simplcmcnl  qu'il  y  a  eu  un  frisson.  Max  Waller  a  rencontré  llierpès 
59  fois  sur  81  cas,  c'est-à-dire  47,  6  0/0  :  or,  aucun  des  cas  où  Therpès 
a  existé  ne  s'est  terminé  d'une  manière  fatale.  Le  professeur  Sée  exprime 
une  opinion  assez  communément  acceptée  en  France  en  disant  goe  sa 
valeur  pronostique  est  plutôt  favorable  ;  la  mortalité  serait  seQÏemeot 
de  9  0/0  pour  les  pneumonies  où  existe  un  herpès  ;  elle  dépasserait  fô  0/0 
pour  celles  qui  n'en  sont  pas  accompagnées. 

Le  docteur  Draschc  (de  Vienne)  dit  que,  si  l'on  prend  seulement  ks 
pneumonies  sans  complication,  on  a,  pour  celles  s'accompagnant  d'her- 
pès, une  mortalité  de  5  0/0  seulement,  et  de  19  0/0  pour  celles  qui  n'en 
sont  pas  accompagnées.  Cette  différence  est  bien  plus  prononcée  que 
celle  que  nous  observons  en  France  :  car,  il  ne  faut  pas  l'oublier,  ce 
n'est  pas  tout  le  monde,  sans  exception,  qui  chez  nous  croit  à  la  béni- 
gnité relative  des  pneumonies  avec  herpès.  Pour  ne  citer  qu'un  exemple, 
le  professeur  Hardy  (Gazelle  des  llôpilaux,  1878,  29  juin),  je  ne  sais 
pourquoi,  le  considère  comme  un  signe  de  mauvais  augure. 

Importance  de  la  forme  de  la  pneumonie.  —  Le  diagnostic  de  la 
forme  fournit  une  indication  pronostique  d'une  tout  autre  valeur  qu'on 
symptôme  isolé  qui,  je  le  répète,  ne  peut  presque  rien  signifier  à  lui 
seul.  Ainsi  les  pneumonies  bilieuses  sont  habituellement  bénignes,  les 
pneumonies  asthéniqucs  d'une  extrême  gravité. 

Infltience  des  complications.  —  Plusieurs  des  maladies  qui  compli- 
quent éventuellement  la  pneumonie  ayant  une  mortalité  fort  supérieure  à 
celle  de  cette  maladie,  il  ne  s'ensuit  pas  que  ce  sont  celles-là  qui,  seules, 
dictent  le  pronostic.  Ainsi  en  est-il  de  la  méningite.  D'autres,  au  contraire, 
n'aggravent  pas  tant  qu'on  aurait  pu  le  croire  le  pronostic  de  la  pneumo- 
nie :  ainsi  la  pneumonie  compliquée  de  pleurésie,  dans  la  statistique  de 
M.  IIuss,  n'a  qu'une  léthalité  de  11,5  0/0,  ce  qui  est  bien  peu;  dans 
d'autres  statistiques  on  trouve  32  0/0.  La  pneumonie  avec  ictère 
n'aurait  présenté  qu'une  morlalité  de  8,6.  Ici,  nous  avons  certainement 
affaire  à  une  série  fort  exceptionnelle  ;  la  pneumonie  compliquée  de 
pcricardite  une  mortalité  de  5  i  0/0,  sans  doute  à  cause  de  TinsuRisancc 
cardiaque.  Quant  à  rinflucncc  de  l'endocardite  sur  la  mortalité  de  h 
pneumonie,  les  chiffres  sont  fort  différents,  ce  qui  dépend  cvidemnient  des 
embolies  :  lIuss  a  trouvé  une  mortalité  énorme  de  75  0/0;  Chwostek,  seule- 
ment 28  0/0.  Mais  je  renonce  à  une  plus  longue  énumération  de  chilfres 
qui  diffèrent  beaucoup  suivant  les  statistiques  et  qui,  par  conséquent,  né 
peuvent  pas  donner  au  praticien  un  clément  sérieux  de  jugement. 

Pronostic  des  récidives,  —  Toutes  choses  égales,  et  contrairement  î 
ce  (fu'on  eût  pu  supposer,  les  récidives  de  pneumonie  paraissent  plutôt 
moins  graves  (Leudet,  Fox);  ce  fait  peut  cependant  s'expliquer  quand  oo 
réfléchit  que,  s'il  y  a  une  prédisposition  locale  morbide,  une  cause 
légère  amène  une  pneumonie  qui  autrement  ne  serait  pas  survenue,  «t 
qui  reste  relativement  bénigne,  eu  égnrd  au  peu  d'intensité  de  li 
cause. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  traitemeht.  501 

Traitement.  —  Si  j^avais  eu  à  écrire  une  monographie  de  la  pneu- 
mpnie,  j'aurais,  en  abordant  le  chapitre  du  traitement  de  cette  affection, 
d*abord  fait  connaiti^e  les  divers  agents  dont,  à  diverses  époques,  on  a 
osé  et  abusé  dans  la  cure  de  cette  maladie;  et  c'est  seulement  après  avoir 
successivement  passé  en  revue  ces  agents  thérapeutiques  et  m'être  pro- 
noncé sur  leur  valeur  intrinsèque  que,  reprenant  les  diverses  espèces  ou 
Tariétés  de  pneumonie,  j'aurais  choisi  parmi  eux  les  mieux  appropriés 
au  traitement  de  chacun  d'elles  ;  mais  aux  articles  Dicftale,  ÉMÉnouE, 
Saignée,  etc.,  etc.,  de  ce  Dictionnaire,  il  est  déjà  traité  de  l'action 
àe  ces  divers  agents,  non-seulement  dans  les  maladies  aiguës  en  général, 
mais  aussi  dans  la  pneumonie.  Pour  éviter  les  doubles  emplois,  je  ne 
dois  donc  m'occuper  ici  que  de  leur  valeur  relative  dans  les  différentes 
Tariétés  de  la  pneumonie.  On  ne  trouvera  donc  point  dans  les  brèves 
indications  qui  suivent  l'exposition  complète  de  la  thérapeutique  à  laquelle 
on  a  actuellement  recours  et  encore  moins  l'historique  si  curieux  du  trai- 
tement de  cette  maladie. 

TRAlTEMEm*  DE  LA  PNEUMONIE  FRAICHE  COMMUNE.  —  On  Sait  qUC  dcpuis  UUC 

vingtaine  d'années  le  traitement  de  la  pneumonie  commune  a  subi  de 
profondes  modifications  :  on  a  abandonné  presque  universellement  les 
méthodes  énergiques  —  pour  ne  pas  dire  plus,  —  jadis  presque  exclusi- 
vement en  usage.  Cette  révolution  dans  la  thérapeutique  a  été  sans  doute 
encouragée  dans  une  certaine  mesure  par  la  notion  nouvelle  de  la  marche 
cyclique  de  la  pneumonie,  mise  en  lumière  par  les  travaux  de  l'Ëcole  de 
Leipzig;  mais  elle  ne  s'est  accomplie  que  par  suite  des  résultats  relative- 
ment favorables  obtenus  en  Allemagne  et  surtout  à  Vienne,  à  l'aide  de 
Texpectation  pure,  systématiquement  employée  par  Skoda,  qui  d'ailleurs 
avait  été  précédé  dans  cette  voie  par  Biett  et  par  Magendie.  Par  expec» 
laiton,  — je  me  hâte  de  le  dire  pour  éviter  toute  équivoque,  —  je  n'entends 
pas  abstention  thérapeutique,  mais  plutôt  traitement  diététique^  puisque 
le  médecin  ne  laisse  pas  le  malade  absolument  sans  traitement,  mais  lui 
accorde  au  moins  le  bénéfice  d'une  hygiène  bien  entendue.  Examinons  donc 
si  Texpectation  peut  être,  d'une  manière  générale,  appliquée  à  la  pneu- 
monie commune. 

Expectation.  On  pourrait  peut-être,  quelque  paradoxale  que  soit  cette 
conclusion,  répondre  à  la  question  précédente  par  l'affirmative,  si  le 
tndtement  expectant  avait  fourni  toujours  des  résultats  aussi  favorables 
que  ceux  que  publia  Diell  (élève  de  Skoda)  en  1849  :  tandis  que  chez 
380  malades  la  saignée  avait  donné  une  mortalité  de  20  0/0,  et  le  tartre 
stibié  chez  106  exactement  autant,  la  mortalité  chez  les  189  malades 
soumis  à  Texpectation  ne  fut  que  de  7,4  0/0. 

Il  faut  bien  croire  que  dans  cette  dernière  série  Skoda  avait  eu  affaire 
à  une  constitution  médicale  particulièrement  bénigne,  car,  en  1852,  la 
mortalité  s'éleva  à  9  0/0,  et  en  1834  à  20.7  0/0  (d'après  le  rapport 
officiel),  bien  que  l'expectalion  ait  continué  à  être  exclusivement  em- 
ployée dans  son  service.  D'autres  médecins  eurent  une  mortalité  encore 
plus  élevée.  Ainsi  Wunderlich  accuse  le  chiffre  de  27,5,  et  Leudet  celui 


502  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  traitbmekt. 

de  23  à  28  0/0.  Néanmoins  la  conclusion  qui  découla  des  lenUliTes 
d'expectation  qui  se  firent  de  divers  côtes,  c'est  que  la  pneumonie  éUii, 
plus  souvent  qu'on  ne  le  croyait  jusqu'alors,  susceptible  de  guérir  sins 
traitement,  et  que  ce  dernier  n'abrégeait  pas  sensiblement  la  durée  de  la 

maladie. 

Mais  de  ces  deux  propositions,  et  particulièrement  de  la  dernière,  on  ne 
peut  sans  un  singulier  vice  de  raisonnement  déduire  comme  coroUaire 
rexccllence  de  l'expectation,  car  l'observation  des  médecins  les  (his 
éclairés  et  les  moins  systématiques  porte  h  conclure  qu'abandonnées  ï 
elles-mêmes  les  pneumonies  se  terminent  moins  souvent  par  crise  et  pins 
souvent  par  suppuration. 

Elle  semble  même  montrer  l'utilité  de  commencer  le  traitement  dè$  le 
début.  Entre  autres  statistiques  à  Tappui^je  puis  citer  celle  de  Grisolle 
que  j'ai  rapportée  au  chapitre  du  pronostic^  où  Ton  voit  que  la  mor- 
talité a  été,  pour  les  malades  entrés  à  Thôpital  les  trois  premiers  jours, 
moitié  moindre  que  pour  ceux  qui  n'y  ont  été  admis  que  les  trois  jours 
suivants.  Or,  la  thérapeutique  de  Grisolle  était,  comme  on  sait,  fort  adiré; 
presque  tous  ses  malades  étaient  traités  par  le  tartre  stibic,  précédé  le 
plus  souvent  d'une  saignée. 

Quand  on  y  réfléchit,  on  n'est  pas  surpris  de  l'utilité  d'une  thérapeu- 
tique énergique  et  hâtive  :  beaucoup  de  pneumonies,  même  de  celles 
ressortissant  à  la  pneumonie  commune,  tendent  à  la  suppuration,  et 
elles  y  tendent  jusqu'à  un  certain  point  en  raison  directe  de  l'intensité 
de  la  phlegmasie  :  de  là  l'utilité  des  agents  antiphlogistiques. 

Émissions  sanguines  générales.  —  Depuis  longtemps  la  saignée,  dont 
on  a  fait  d'ailleurs  un  déplorable  abus,  a  passé  pour  exercer  sur  les 
phlegmasics  pulmonaires  une  action  modératrice  incontestable.  En  effet, 
après  une  saignée  un  peu  copieuse,  la  température  s'abaisse  ;  il  y  a  une 
détente,  une  sensation  de  mieux  être  que  le  malade  accuse  spontanément. 
Le  point  de  côté,  si  pénible  pour  lui,  a  disparu;  l'oppression  a  diminué; 
et  ce  n'est  pas  seulement  au  point  de  vue  des  sensations  subjectives  que 
l'on  peut  considérer  Teffet  de  la  saignée  comme  analogue  aux  phéno- 
mènes d'une  crise  :  Turine  en  effet  renferme  en  proportion  exagérée  de 
Turée  (Bauer)  et  surtout  de  l'acide  phosphorique  (Lépine)  :  elle  prend 
donc  le  caractère  de  Turine  critique. 

En  tous  cas,  il  ne  s'agit  que  d'une  pseudo-crise^  car  la  rémission 
n'est  que  momentanée,  loin  de  devenir,  comme  dans  la  crise  véritable, 
le  prélude  d'une  guérison  définitive  :  au  bout  de  quelques  heures,  la 
température  remonte  à  un  degré  égal  ou  supérieur  à  celui  qu'elle  attei- 
gnait avant  la  saignée.  Si  l'on  voulait  éviter  cette  rechute,  il  faudrait, 
a  l'exemple  du  professeur  Bouillaud,  employer  coup  sur  coup  les  émissions 
sanguines,  c'est-à-dire  les  rapprocher  assez  pour  que  la  recrudescence 
n'ait  pas  le  temps  de  se  produire,  méthode  logique,  mais  d'une  logique 
trop  implacable,  et  qui,  comme  on  l'a  fortjbien  dit,  ne  vient  à  bout  de  la 
maladie  qu'en  épuisant  le  malade. 

La  méthode  des  saignées  coup  sur  coup  n'a  plus,  pour  cela,  qu'une 


PNEUMONIE  LOBÂIRE  AIGUË.  —  traitemeht.  503 

râleur  historique»  et  ne  semble  pas  devoir  se  relever  jamais  du  discrédit 
>ù  elle  est  tombée.  Mais,  sans  imiter  les  excès  fâcheux  dont  elle  s'est 
nodue  coupable,  ne  doit-on  pas  pratiquer  au  moins  une  émission  san- 
{uine  générale  à  un  pneumonique,  si  on  est  appelé  à  le  traiter  dès  le 
lébut  de  sa  maladie?  Les  adversaires  systématiques  de  la  saignée  accor- 
ient  qu'elle  n*est  pas  sans  utilité  lanl  que  Vexsudal  n'est  pas  formé 
[Benuett).  Or,  Texsudat  d'une  pneumonie  ne  se  fait  pas  tout  d*un  coup  ;  une 
raste  hépatisation  ne  s'opère  pas  tout  d*un  bloc,  mais  par  poussées:  donc 
iOfi  saignée  faite  le  troisième,  et  quelquefois  même  le  quatrième  jour, 
l'aniverait  pas  trop  tardivement  pour  exercer  une  influence  sur  le  pro- 
:essus  de  l'exsudation.  Malgré  l'avantage  probable  qui,  à  cet  égard,  serait 
le  résultat  de  cette  pratique^  la  plupart  des  praticiens  ne  saignent  pas 
leluelleroent  les  pneumoniques,  alors  même  qu'ils  sont  appelés  au  début 
le  la  maladie.  On  fait  valoir  en  faveur  de  l'abstention  des  émissions 
HUiguines  qu'elles  ont  le  défaut  d'appauvrir  le  sang  d'une  manière  irré- 
■lédiabte,  non-seulement  en  matériaux  plastiques,  ce  qui,  dil-on,  nuit  à 
la  oonyalescence,  mais  en  hémoglobine,  laquelle  est,  comme  on  sait, 
le  porteur  d'oxygène,  ce  qui,  prétend-on,  accroît  la  menace  d'asphyxie  et 
augmente  le  surmènement  du  cœur. 

Je  ne  suis  touché,  je  Tavoue,  que  dans  une  certaine  mesure,  par  l'ar- 
gument  qu'on  tire  de  l'appauvrissement  du  sang  en  matériaux  plas- 
tiques; car,  avant  d'avoir  souci  de  la  convalescence,  il  faut  songera  la 
cure  ;  et,  quant  au  prétendu  surmènement  du  cœur  qui  doit  être  la  consé- 
quence de  la  diminution  de  l'oxygène  du  sang,  je  fais  quelques  réserves, 
car  rien  ne  démontre  qu'après  une  saignée  amenant  la  détente  dont  je 
pariais  tout  à  l'heure,  les  tissus  réclament  la  même  quantité  d'oxygène 
ipe  pendant  la  fièvre.  —  Quant  à  la  diminution  de  l'oxygène  du  sang, 
après  une  saignée  copieuse,  je  la  crois  incontestable  ;  elle  est  démontrée 
directement  par  l'expérience  suivante  de  Jurgensen  et  Hûfner  ;  ils  en- 
lèrent  par  la  fémorale  à  un  chien  à  jeun  le  quart  de  son  sang.  100  vo- 
lumes de  ce  sang  renrermaient  24  volumes  d'oxygène.  72  heures  après, 
pendant  lesquelles  le  chien  avait  continué  de  jeûner,  ils  font  à  l'animal 
une  deuxième  saignée.  100  volumes  de  sang  ne  renferment  alors  que 
12,8  d'oxygène.  Mais  c'est  gratuitement  qu'on  suppose  qu'une  soustrac- 
tion d'oxygène  est  pernicieuse  à  un  fébricitant.  Rien  ne  le  démontre,  et 
même  des  idées  nouvelles  de  Pasteur,  que  je  lis  au  moment  où  l'on  im-' 
prime  cet  article,  autorisent  à  en  douter.  Les  belles  recherches  de 
P.  Bert  ont  déjà  prouvé  que  l'oxygène  est  loin  d'être  un  agent  inolfensif, 
puisque  des  accidents  d'intoxication  terribles  surviennent  chez  un  animal 
en  santé  à  un  certain  degré  de  sursaturation  du  sang.  Aussi  l'idée  qu'une 
certaine  soustraction  d'oxygène,  dans  le  cas  de  phlegmasie,  agisse  d'une 
manière  favorable,  comme  antiphlogistique,  ne  me  paraît  avoir,  à  priori^ 
Tien  d'irrationnel. 

Ce  qui  me  touche,  au  contraire,  c'est  l'argument  parfaitement  exposé 
fK[itiCco\id(Clin.méd.deLariboisière)  à  savoir  qu'une  profonde  atteinte 
é^  l'organisme  du  pncumonique  augmente  les  chances  qu'a  la  phlegmasie 


504  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tbaitbiieiit. 

de  passer  à  Tctat  d*liépatisation  grise.  S^il  en  est  ainsi  chez  h  plupart 
des  sujets,  la  saignée  va  contre  le  but  qu'on  se  propose. 

Ainsi  la  saignée  est  une  arme  à  deux  tranchants  et  qui  blesse  mortel, 
lement,  si  elle  n*est  pas  bien  maniée.  Elle  ne  peut  donc  être  cooiidèrée 
comme  méthode  générale  de  traitement  de  la  pneumonie  commone,  mais 
Seulement  comme  un  moyen  de  nécessité  et  dont  rindicaiion  principale 
est  la  congestion  pulmonaire.  Je  renvoie,  à  ce  sujet,  à  la  clinique  médi- 
cale de  Jaccoud,  où  cette  indication  est  posée  d'une  manière  ma^tole. 
Pour  ma  part,  j*ai  eu  deux  fois,  dans  ma  pratique,  ToccasioD  de  sai- 
gner des  pneumonies  suffocantes  au  troisième  jour  ;  dans  un  cas,  j'ai 
fait  retirer  plus  de  600  grammes  de  sang.  L'effet  a  été  merveilleux;  dans 
les  deux  cas,  la  température  est  restée  abaissée  trente-six  heures,  pais  die 
est  remontée  pour  tomber  de  nouveau  par  crise  légitime,  le  septième  jour. 

Ventouses  scarifiées,  —  Si  la  saignée  ne  peut  être  considérée  que 
comme  une  méthode  d'exception,  il  n'en  est  pas  de  même  des  veotooies 
scarifiées,  dont  l'inllucnce  sur  le  point  de  côté  est  généralement  des  plus 
favorables.  Un  fait  que  j*ai  observé  récemment  avec  soin  me  permet 
mémo  d'affirmer  qu'une  application  de  quelques  ventouses  exerce  une 
action  positive  sur  la  phlcgmasie  du  poumon.  En  effet,  dans  le  cas  auquel 
je  fais  allusion,  chacune  des  applications  de  ventouses  qui  oot  été 
répétées  à  plusieurs  reprises  soit  le  matin,  soit  le  soir,  a  amené  une  dimi- 
nution de  la  température  (dans  le  rectum)  d'un  degré  environ.  Le 
même  résultat  s'est  reproduit  constamment  chaque  fois  :  aussi  ne  peut-il 
y  avoir  aucun  doute  sur  l'action  des  ventouses  scarifiées  dans  ce  cas. 

Vésicaloircs,  —  Des  ventouses  scariGées  je  rapproche  les  vésicatoires, 
bien  que  leur  action  soit  un  peu  différente.  Ils  agissent  moins  bien 
contre  la  congestion,  mais  peut-être  mieux  contre  la  phlegmasie.  Aussi 
suis-je  porté  à  les  employer  d'une  manière  générale. 

Tartre  stibié.  —  C'était,  comme  on  sait,  pour  les  cliniciens,  il  y  a 
une  vingtaine  d'années,  l'agent  thérapeutique  par  excellence,  dans  le 
traitement  de  la  pneumonie.  D'après  Trousseau  et  Pidoux,  il  et  rattaqoe 
plus  au  fond  que  ne  le  fait  la  saignée.  »  Cette  manière  de  voir  parait  fondée 
sur  une  saine  observation  :  le  tartre  stibié  a  réellement  une  aclioo 
résolutive  puissante  sur  la  pneumonie.  Si  cela  est  exact,  comme  je  le 
pense,  on  conçoit  qu'il  ait  pour  cette  raison  une  indication  spéciale:  soit, 
par  exemple,  une  de  ces  pneumonies  à  rechute  qui  ne  se  résolvent  jamais 
complètement  et  qui  laissent,  après  chaque  attaque,  une  sorte  d'épine, 
noyau  de  la  poussée  future,  je  crois  que  le  tartre  stibié  est  indiqué;  il 
me  paraît  l'être,  au  même  titre,  dans  le  cas  où  on  redoute  qu*une  pneu- 
monie passe  à  l'état  subaigu.  Je  sais  bien  que,  d'après  Buhl,  il  n'y  a  rien 
de  commun  entre  la  pneumonie  dcsquamative  et  la  pneumonie  fibrineuse 
et  que,  par  conséquent,  si  une  pneumonie  ne  naît  pas  dcsquamative,  il 
n'y  a  pas  à  craindre  la  cnséification.  Mais,  ainsi  que  je  l'ai  dit  plus  haut, 
les  idées  de  Buhl  sont  probablement  trop  absolues,  et  il  est  fort  possible 
qu'il  y  ait  là,  comme  partout  dans  la  nature,  des  degrés  de  transition. 
Or,  la  pratique  doit  compter  avec  eux. 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  traitement.  505 

U  est  donc  des  cas  où  le  tartre  stibié  doit  être  employé,  mais  ils  ne 
constituent  pas  la  majorité.  Chez  les  gens  un  peu  avancés  en  âge  ou  débi- 
lités pour  une  cause  quelconque,  il  est  formellement  contre-indiquc  ; 
même  chez  les  adultes  forts  il  ne  doit  être  employé  qu'avec  une  certaine 
dîsGrétion,  car  il  agit  comme  on  sait,  d'une  manière  fâcheuse  sur  le  coeur 
€^  sur  le  système  nerveux,  de  manière  à  produire  ce  qu'on  a  nommé 
Vadynamie  slibiëe,  dont  le  plus  haut  degré  est  un  collapsus  des  plus  graves 
qui  a  été  maintes  fois  mis  sur  le  compte  de  la  pneumonie.  La  médication 
slibiée  est  une  méthode  fort  énergique  qui  doit  être  maniée  avec  pru- 
dence. La  méconnaissance  de  ce  précepte  est  cause  qu'à  côté  de  ses  nom- 
incux  services  elle  a  grossi,  presque  autant  que  l'abus  de  la  saignée,  le 
iiécroioge  de  la  pneumonie. 

Il  est  à  peine  besoin  de  rappeler,  tant  ils  sont  connus,  les  accidents 
locaux  pharyngés  et  œsophagiens  dus  à  l'administration  d'émétique  non 
■effisamment  dilué.  Cet  accident  peut  toujours  être  conjuré,  si  l'on  a  le 
amn  de  faire  boire  un  peu  de  liquide  après  chaque  cuillerée  de  la  potion, 
afin  de  tempérer  par  la  dilution  l'action  irritante  locale  du  tartre  stibié. 

Les  moyens  dont  je  vais  m^occuper  maintenant  n'ont  pas  la  prétention 
de  combattre  le  processus  pneumonique  ;  ils  ne  s'adressent  qu'à  l'élément 
C6brile.  Les  plus  importants  d'entre  eux  sont  les  bains  froids,  la  digitale, 
la  vératrine,  et  surtout  la  quinine,  qui  mérite  une  place  à  part. 

Le  bain  froid  dans  la  pneumonie  n'a  pas  encore  été  employé  chez  nous 
d'une  manière  suffisante  pour  qu'il  soit  possible  de  l'apprécier.  Ce  n'est 
que  d'après  les  auteurs  allemands  que  j'en  parle  ici. 
f  Liebermeîster  est  d'avis  que  le  bain  froid  n'est  contrc-indiqué  à  aucun 
lge«  même  dans  l'âge  avancé.  Chez  l'enfant,  d'après  Thomas,  il  est  pru- 
dent, vu  les  susceptibilités  réflexes  si  développées  à  cet  âge,  d'employer 
le  bain  graduellement  refroidi  de  Ziemssen.  Thomas  ne  veut  pas  qu'on 
descende  chez  eux  au-dessous  de  Sd""  C.  Mais  Jurgenscn  est  beaucoup  plus 
hardi,  ainsi  qu'on  en  va  juger  : 

«Ilya  plusieurs  années,  dit-il,  ma  fille,  âgée  alorsde  19  mois,fut atteinte 
pour  la  troisième  fois  d'une  pneumonie  grave.  La  température  s'élevait 
au  delà  de  41''  C,  et  revenait  si  promptement  à  ce  chiffre  après  un  bain 
à  16%  que  je  me  vis  forcé  d'abaisser  la  température  du  bain  à  S-ô""  C,  et 
de  le  faire  durer  10  minutes;  mon  enfant  guérit.  —  Or,  à  aucune  de  ces 
énormes  soustractions  de  chaleur,  qui  ont  été  renouvelées  plusieurs 
fois  dans  la  journée,  il  ne  s'est  produit  la  moindre  tendance  au  collapsus. 
J'ai  eu,  depuis,  plusieurs  fois  l'occasion  do  traiter  de  même  d'autres  ma- 
lades, et  je  n'ai  jamais  eu  à  le  regretter.  » 

Ceci  suffit,  je  pense,  à  prouver  que  M.  Jurgensen  n'est  pas  à  demi  con- 
vaincu de  l'utilité  des  bains  froids  dans  le  traitement  de  la  pneumonie. 
n  ne  se  dissimule  pas,  d'ailleurs,  les  objections  théoriques  que  l'on  peut 
lui  faire.  «  Il  est,  dit-il,  légitime  d'admettre  qu'un  des  effets  du  refroi- 
dissement périphérique  sera  de  refouler  le  sang  dans  le  thorax  et  d'aug- 
menter le  travail  du  cœur  ;  l'excès  de  production  de  chaleur  demande 
aussi  d'autre  part  que  le  cœur  et  les  muscles  respiratoires  travaillent  da- 


) 


506  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  THmEMBHT. 

Tantage.  Nonobstant,  TcfTet,  dit-il,  est  favorable,  pourvu  qu'on  fourniiBe 
au  cœur  le  stimulant  (alcool)  dont  il  a  besoin,  avant  et  après  le  bain,  et 
ce  stimulant  doit  être  proportionné  à  la  durée  du  bain  et  à  rabaissemoit 
de  température  de  Teau.  x) 

Thomas  est  beaucoup  plus  modéré  :  non-seulement,  comme  je  viens  de  le 
dire,  il  ne  refroidit  pas  beaucoup  le  bain,  mais  il  n'y  laisse  le  malade  que 
cinq  minutes.  Le  refroidissement  immédiat  n'est  pas  considérable,  maïs 
il  y  a  un  refroidissement  consécutif,  une  demi-heure  après  le  bun. 
D'ailleurs  il  le  renouvelle  aussi  souvent  qu'il  est  nécessaire  :  dès  que  h 
température  est  à  SO^'S,  et  encore  dans  l'intervalle,  alors  même  que  la 
température  n'atteint  pas  39",  il  conseille  l'emploi  de  compresses  froides 
«  pour  retarder  la  marche  ascendante  de  la  température  ». 

D'après  lui,  chez  l'enfant,  le  bain  froid  est  le  meilleur  des  antipr- 
rétiques,  mais  il  est  loin  de  croire  cependant  qu'il  puisse  convenir  à  tous 
les  cas. 

Pour  ma  part,  et  quoique  l'expérience  me  fasse  totalement  début, 
je  suis  porté  à  douter  que  les  bains  froids  dans  la  pneumonie  des  adultes 
réussissent  aussi  bien  que  chez  l'enfant  ;  j'invoquerais  à  l'appui  de  cette  idée 
l'énergie  relativement  plus  grande  du  ventricule  droit  dont  j'ai  déjà  parlé 
(à  propos  du  pronostic)  aussi  chez  l'adulte.  Je  leur  préférerais  les  vesues 
déglace  sur  le  thorax,  qui,  d'après  ce  qu'on  dit,  n'augmenteraient  pas 
commeles  bains  froids,  la  dyspnée  et  le  cyanose,  ce  que  l'on  comprend 
très-bien,  car,  ne  reproduisant  qu'une  très-minime  portion  de  la  suiiace 
cutanée,  elles  ne  peuvent  pas  faire  refluer  le  sang  dans  le  poumon;  tool 
porte  àcroire  au  contraire  qu'elles  y  amènent  une  anémie  relative.  Je 
n'ai  pas  jusqu'ici  eu  recours  dans  la  pneumonie  aux  applications  glacées 
sur  le  thorax,  mais  j'ai  dans  la  iièvre  typhoïde  employé  assez  souvent  ks 
vessies  de  glace  sur  l'abdomen  pour  pouvoir  apprécier  à  leur  valeur  les 
applications  réfrigérantes  locales. 

Digitale. —  Vératrine,  —  Je  serai  bref  quant  à  ces  deux  médicaments; 
pour  le  premier  je  renvoie  à  l'article  Digitale  de  ce  Dictionnaire,  XI,  p.  550 
et  551 ,  en  prévenant  toutefois  que  je  suis  moins  enthousiaste  de  la  digitale 
que  Tautiîur  de  cet  article,  et  que,  je  l'emploie  non  comme  méthode 
générale,  mais  seulement  dans  le  cas  où  le  pouls  est  particulièrcmeot 
fréquent  j  quant  à  la  vératrine,  je  n'en  vois  pas  les  avantages  :  elle  aflti- 
blit  le  cœur  d'une  manière  fâcheuse  ;  sur  la  fièvre,  son  action  n'est  rien 
moins  que  sûre  ;  enfin  elle  amène  presque  toujours  des  vomissements.  Je 
crois  inutile  d'en  dire  davantage. 

Quinine.  —  Comme  les  médecins  allemands,  je  crois  la  quinine  fort 
utile  dans  le  traitement  de  la  pneumonie.  Je  l'ai  beaucoup  employée,  et 
le  plus  souvent  avec  un  bénéfice  bien  marqué. 

C'est  surtout  comme  antipyrétique  qu'on  recommande  la  quinine,  mais 
il  est  possible  qu'elle  agisse  aussi  d'une  autre  manière,  et  qu'elle  mette 
dans  une  certaine  mesure  obstacle  à  la  tendance  à  la  suppuration  qui 
existe,  ainsi  que  je  l'ai  dit,  chez  beaucoup  de  pneumonies  même  com- 
munes.  Si  cette  action  était  bien  démontrée,  elle  donnerait  à  la  qui- 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  traitemekt.  507 

ninc  ODQ  valeur  qu'on  ne  saurait  estimer  trop  haut.  Mon  expérience  ac- 
tuelle me  porte  à  Tadroettre  comme  vraisemblable.  Aussi  je  l'administre 
trè»-souvent  dans  la  pneumonie. 

Dans  le  même  but,  on  a  conseillé  la  térébenthine,  dont  reflicacitc  ne 
xn*est  pas  bien  démontrée^ 

Alcool.  —  Pour  Todd,  Talcool  est  utile  dans  toute  pneumonie.  Les 
snédecins  français  ne  partagent  pas  pour  la  plupart  un  précepte  aussi 
absolu.  Selon  moi,  son  emploi  doit  être  réservé  aux  cas  suivants  bien  for- 
xnulés  par  JoITroy  : 

l'*  Chaque  fois  qu'il  se  montre  des  symptômes  graves  d'ataxie  ou  d'ady- 
namie; 

2*  Lorsque  la  température  est  très-élevée  ; 

3^  Lorsque  les  sujets  sont  affaiblis  par  une  maladie  antérieure  ou  sont 
^oooliques. 

Encore,  pour  la  seconde  indication,  ferai-je  des  réserves,  non  que  je 
que  l'alcool  dans  ce  cas  puisse  augmenter  la  fièvre,  mais  parce  que 
action  antipyrétique  est  inGniment  moins  certaine  que  celle  d'autres 
4Vgenls,  de  la  quinine,  par  exemple. 

En  somme,  l'expérience  de  ces  dernières  années  a  été  favorable  k- 

l^emploi  de  Palcool  dans  les  maladies  aiguës,  bien  qu'il  faille  beaucoup 

battre  de  l'enthousiasme  avec  lequel  la  méthode  de  Todd  a  été  en 

'nince  acceptée  par  quelques  médecins,  notamment  par  Béhier,  et  qu'on 

maintes  fois  abusé  de  l'alcool  faute  d'avoir  assez  tenu  compte  de  la 

différence  de  race  et  d'habitudes  qui  distingue  si  profondément  le  Fran- 

de  l'Anglais. 

Salicylate  de  soude.  —  Aconit.  —  Ergot  de  seigle^  etc.  —  Je  n'ai  pas 

eipérience  de  ces  médicaments  dont,  on  a  récemment  préconisé  l'em- 

K^ploi  dans  la  pneumonie.  Restent  encore  un  certain  nombre  d'agents 

^Hjoiiid'hui  tombés  dans  l'oubli  ;  je  ne  vois  pas  d'avantage  à  les  en 


En  résumé,  sauf  les  ventouses  scarifiées,  les  vésicatoires  et  la  quinine,  il 

[M*j  a  pas  d'agents  thérapeutiques  (parmi  les  agents  énergiques)  dont 

'""eniploi  puisse  être  recommandé  d'une  manière  générale  et  étendu  à  tous 

cas  de  pneumonie  commune  ;  ce  n'est  pas  à  dire  que  beaucoup  de 

i  que  je  viens  d'énumérer  ne  sont  pas  susceptibles  de  rendre  d'utiles 

^Bcnrices;  au  contraire  :  ils  répondent  à  des  indications  déterminées  que 

^*aî  indiquées  en  partie  chemin  faisant.  Il  importe  donc  de  se  pénétrer  de 

et  axiome  thérapeutique  qu'il  n'y  a  pas  de  traitement  équivoque  de  la 

meomonie,  attendu  que  même  l'espèce  commune  est  encore  très-mul» 

et  susceptible  de  fournir,  suivant  les  cas^et  suivant  les  périodes  d'un 

e  cas,  un  grand  nombre  d'indications  relatives,  soit  à  l'asphyxie, 

it  à  l'affaiblissement  du  cœur,  etc. 

Cette  même  pensée  doit  guider  dans  le  traitement  des  variétés,  dont  il 
B  reste  à  dire  quelques  mots  : 

TiurrEHEfrr  des  prikgipales  variétés.  —  Pneumonies  abortives.  —  En 
ipposant  qu'on  soit  assez  habile  pour  reconnaître  qu'une  pneumonie 


508  PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  tbaitbmeht. 

sera  abortive,  la  seule  chose  à  faire  est  de  s'abstenir  Ad  tout  tnîiefflenl 

actif. 
Au  contraire,  les  pneumonies  d  marche  foudroyante  récUmaiit  une 

thérapeutique  extrêmement  énergique;  encore  est-elle  bien  rarement 
efficace. 

Eu  égard  au  terrain  sur  lequel  se  développent  le  plus  soQfent  ces 
pneumonies  on  ne  peut  songer  à  recourir  à  la  méthode  antiphlogistique. 
C'est  aux  révulsifs  et  aux  stimulants  diflusibles  qu'il  faut  excluaimDcot 
s'adresser  ;  un  vésicatoire  étendu  à  la  plus  grande  partie  du  thom,  de 
fortes  doses  d'alcool,  sont  pleinement  justifiés.  Dans  quelques  cas,  Tad- 
jonction  du  sulfate  de  quinine  sera  utile. 

Dans  beaucoup  de  pneumonies  à  durée  prolongée^  un  traitement  au- 
logue  sera  indiqué  :  il  ne  faut  pas  en  être  surpris,  car  c'est  pour  la 
plus  grande  part  affaire  de  terrain,  si  la  phlegmasie  pulmonaire  se  pro- 
longe. Plus  souvent  encore  que  dans  les  pneumonies  à  marche  foudroyante 
le  sulfate  de  quinine  à  très-hautes  doses  sera  indiqué,  à  cause  de  son 
action  antipyogénique. 

Dans  la  pneumonie  périodique  ce  médicament  sera  l'agent  enentiel 
du  traitement  ;  l'expérience  a  prouvé  que  dans  le  cas  de  phlegmasie 
pulmonaire  son  efficacité  n'est  pas  moindre  que  dans  les  cas  de  simple 
accès  fébrile. 

Les  pneumonies  rhumatismales^  à  marche  alternante  ou  non,  seront 
traitées  par  la  médication  générale  du  rhumatisme  aigu  et  parlesrérul- 
sifs  (vésicatoires)  sur  la  paroi  thoracique.  Il  est  rare  que  ces  pneomxmies 
généralement  bénignes  exigent  une  thérapeutique  plus  active.  Si  cepen- 
dant on  se  trouvait  en  présence  d'une  congestion  fort  intense  de» 
poumons,  avec  tendance  à  Tasphyxie,  il  ne  faudrait  pas  reculer  deraot 
l'emploi  de  la  saignée.  S'il  y  avait  des  raisons  particulières  pour  seo 
abstenir,  on  devrait  recourir  à  une  large  application  de  ventouses  sur  le 
thorax.  La  ventouse  de  Junod  pourrait  être  aussi  fort  utile. 

Je  ne  crois  pas  que  la  forme  sthénique  des  pneumonies  doive  être 
traitée  par  une  médication  univoque.  Selon  les  cas  et  les  sujets  il 
faudra  recourir  aux  saignées,  au  tartre  stibié  et,  plus  rarement,  i  la  di- 
gitale. Si  l'exsudation  phlegmasique  est  assez  abondante  pour  obstruer  les 
bronches,  Scliùtzenberger  recommande  particulièrement  le  mercure, 
comme  antiplastique. 

La  pneumonie  bilieuse  est  traitée  par  les  vomitifs,  principalement  par 
ripéca,  auquel  on  peut  joindre  un  peu  de  tartre  stibié,  s'il  n'y  a  pas  de 
tendance  à  Tadynamie.  On  sait  que  l'expérience  condamne  dans  cette 
forme  les  émissions  sanguines  :  il  faudra  donc  s'en  abstenir  absolument 
L'alcool  est  la  médication  la  mieux  appropriée  à  la  pneumonie  astbe 
nique;  souvent  on  se  trouvera  bien  d'y  associer  la  quinine  et  le  muscles 
vésicatoires  ont  aussi  leur  utilité,  mais  il  conviendra  de  surveiller  h 
plaie  qui  en  est  le  résultat. 

Dans  la  pneumonie  de  starvatiotiy  c'est  aux  mêmes  moyens  que  l'on 
devra  recourir,  avec  cette  particularité  que  le  sulfate  de  quinine  ne  dem 


PNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  bibliocbaprie.  509 

être  administré  qu'à  dose  tonique  (10  centigrammes  par  jour,  par 
exemple) . 

Dans  la  pneumonie  entée  sur  une  bronchite^  le  kermès  trouve  son 
emploi  rationnel  ;  il  conviendra  souvent  d'y  joindre  Falcool  etles  révulsifs, 
puis,  à  la  période  de  résolution,  la  térébenthine. 

Pour  le  traitement  des  complications,  je  renvoie  aux  articles  corres- 
pondants de  ce  Dictionnaire. 

MdmGAcm,  Recherches  anatomiqiies  sur  le  siège  et  les  causes  des  maladies,  XI*  lett.,  traduc- 
tion Desonneaux-Deslouet,  1821,  t.  III. 
PnsL,  Kosographie  philosophique,  6«  édition,  1818,  t.  II,  p.  466. 
FBâRK  (Jos.),  Patholo^e  hiternc,  t.  IV,  p.  159. 

:,  Traité  de  l'auscultation  médiate,  édition  de  la  Faculté  de  médecine,  1879,  p.  260. 
L,  Clinique  médicale,  t.  III. 

LOD,  Clinique  de  Thôpitil  de  la  Charité,  Paris,  1837,  t.  III  ;  —  art.  Pneumonie  du  Dict, 
ée  Méd,  en  15  vol.,  1835. 
I,  Diseasesof  Ihe  Chest,  1837. 

.,  Dictionnaire  en  30  ▼ol.,  art.  Pneumonie.  —  Clinique  médicale,  1841. 
E,  Tmilé  de  la  pneumonie,  1'*  édition,  1841  ;  2*  édition,  1864. 
WvHDERLicn,  Handbuch  dcr  Pathologie  und  Thérapie,  Band  JII. 
WnjjAMS,  Art.  Pneumouia.  Cyclopedia  of  Pract.  Modicine,  London,  yoI.  IU,  p.  406. 
iBBsscr  (II.  Ton),  Pleuritis  u.  Pneumonie  in  Kindesalter,  Berlin,  1862. 
Mêmui,  Conférences  de  clinique  médicale,  Paris,  1864. 
HâHâsanso,  Des  dinércntcs  formes  de  la  pneumonie  aiguS  chez  les  enfants,  thèse  de  doctorat, 

Puis,  1867. 
GkàBeoT,  Leçons  sur  les  maladies  des  Tieillards,   Paris,  1868. 

Tbèse  de  Georges  Bergerox,  Paris,  1867. 
WmK  (W.),  In  System  of  medidne,  edited  by  Russell  Reynolds,  volume  III,  London,  1871. 
I,  Traité  clinique  des  maladies  aiguës  des  organes  respiratoires,  Paris,  1872. 
IT,  Klinik  von  Brustkrankheitcn,  Band  1, 1874. 
»,  On  Pneumonia,  London,  1876. 

bi!f,  Croupocse  Pneumonie,  m  Ziemssen's  Handbuch^  Band  Y.  l***  édition,  1874  ;  2"  cdit., 
1877. 

i.  In  Handbuch  der  Kinderhrankeiten^  herausgegeben  von  Gerhardt,  1878. 
ÇMmiUer  de  plus  :  les  traités  de  Pathologie  de  B£hier  et  Habot,  Valleiz,  Niemeter,  Jaccoid, 
RiLLUT  et  Babthez,  D'EspiME  et  Picot. 

Les  indications  qui  suivent  correspondent  aux  différents  chapitres  de  mon  article  et  sont 
disposées  dam  Vordre  de  mon  texte;  naturellement  je  n'ai  pas  répété,  aRn  de  ne  pas  faire  dou- 
ble  eoaploi,  celles  qui  sont  déjà  données   d'une  manière  suffisante.  Ces  indications   portent 
presque  exclusivement  sur  des  Iravaur  que  j*ai  consultés  :   elles  ne  doivent  donc  pas  être  coDsi- 
.  dérées  comme  constituant  une  bibliographie  complète  des  travaux  publiés  sur  la  pneumonie. 

AlfATOMIE    PATHOLOGIQUE. 

Voir  la  Bibliographie  de  Forster,  Handbuch  derpath.  Anatomie. 

BmiTANSST,  Handbuch  der  patholog.  Anatomie,  Wien,  1842-46. 

LcoBusciiEB,  Deutsche  Klinik,  1855. 11  soutient  l'opinion  fort  juste  que  l'hépatisation  rouge  n'est 

pss  un  degré  de  transition  nécessaire  entre  U  congestion  et  i'hépatisation  grise. 
Bastbez,  Soc.  méd.  des  hôpitaux,  1851. 

SceCTZEjiBCRGER,  Compte  rendu  de  la  Clinique  de  Strasbourg,  Gaz.  méd,  de  Strasbourg^  1856 
EnnrLiiscH,  Traité  d'histologie  pathologique,  trad.  franc,  par  Fr.  Gross,  1873. 
Gdboil,  Gaz,  des  Hôpitaux,  1865. 

Goe5iL  et  Ra!ïvier,  Manuel  d'histologie  pathologique,  1869. 
0.  Bâter,  Archiv  der  Heitkunde,  1868. 
BssL,  Lungenentzundunp:,  Tuberculose  u.  Schwindsucht,  Hûnchen,  1872.  —  Hittheilungcn  aus 

dem  path.  Institut  zu  Mûnchen,  1878. 
GoiAT,  Coagulât,  dans  les  veinules  pulmonaires  {Bulletin  de  la  Soc,  anat.,  1876). 
Goulot  (Natalis),  Comptes  rendus  de  TAcad,  des  sciences ^  1847. 
IlnTLER,  Medizinische  Jahrbûcher,  1874. 
UifvcBBiCBT  (élève  de  Cohnheim),  Inaug.  Dissert.,  Breslau,  1877. 
Hahbubgbr  (élève  de  Kûssmaul),  id.,  Strasburg,  1879. 


1)10  PiNEUMONIE  LOBAIRE  AIGUË.  —  buUogbahiii. 

Pathologie  expérimentale, 

\iRcnow,  Gesammcllc  Abhandl.,  p.  6C0. 

Wkoer,  (0.)  Pilha  u,  Billroth,  Chirurgie,  t.  I,  p.  610. 

liiLLnoTii,  Arch.  f,  kl.  Chirurgie,  t.  VI. 

PopoFF,  Med,  Jahrbiijlier,  1871. 

lIoHENHAusEN  (pn.  scplîqiie),  Deutsche  Zeitschri/Ï  f.  Chirurgie,  1875,  t  V. 

Dbeschfbld,  Ijoncet,  1870. 

Ktiologik  g£iiérali. 

Tbacbe,  Zur  Aetiolojjie  der  Pneumonie  {Alfg.  vied.  Centralzeilung,  1855}. 

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PNEUMONIE  LQBAIRE  ÂlGUË.  —  biblio€1uphie.  515 

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t.  II,  p.  591. 

Indications  statistiques  sur  ;;/M«>iir«  points  de  V histoire  delà  pneutnonie,  particutièrtmai. 

sur  la  valeur  comparée  des  médications. 

FiiANQUE,  Stalistische  Zusamnicnslellung  ûber  das  Yorkoinmen  der  Pneumonie  in  deo  i»- 
chinleiien  Lebensiilk-rn  uiid  Jahrcszeitcn  mit  Beriirksiclilinunjî  der  Seitc  der  Krknnkaf 
und  der  Sturbliclikeil  luaiig.  Abhandl.  NVûrzburg,  1855  (1790  cas  observés  à  la  pohcbafK 
(;l  à  l'hôpital  Julius). 

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Outre  un  certain  nombre  des  travaux  précédents,  voir  pourei  contre  la  saignée  : 
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Trousseau,  Thèse  de  concours,  in-8*,  1833. 
Dubois  (d'Amiens),  VExpérience,  1838,  p.  305,  356,  518. 

Stern ,  De  sanguinis  missione  quid  veteres  medici  censuerint.  Dissert.,  Bcrolini,  1811     , 
DiETL,  D.  Aderlass  in  d.  Lungencntzundung,  Wien,  1849. 
Bordes  (de),  Nederl.  Weekbl  voor  (ieneeskundigen,  juny  1855;  Constat f  s  Jâkmkadi 

1856,  Wurzburg.  1857,  t.  III,  p.  159. 
)Wun>ERUCH,  Arch.  f.  physiolog.  lleilkund,  1856. 
WiLsoM  (Ch.),  Edinb,  med  Journal,  1856. 
Alison,  id, 

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CflAMBERs,  British  and  foreign  medico^hir.  Review,  1858. 
KoRLHARDT,  Dissert.,  Berolini,  1859. 
Beau,  Gaz.  des  hôpit.,  1859. 

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520  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  défuhtioii. 

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BBONCVO-PNEUMONIE.  —  DÉFINITION.  —  St/Ttonymie.  —  Le  nom  de 
l)ronehio-pneumonie  parait  avoir  été  employé  pour  la  première  fois  par 
Seifert  (1858).  Avant  lui,  on  désignait  cette  maladie  sous  les  doids  de 
péripneumonie  péripneumonia  notha,  pcripneumonie  latente,  de  catarrhe 
suffocant  (Laënnec),  de  catarrhe  suffocant  des  enfants  (Gardien,  Ettmûller, 
Chambon,  Capuron),  de  pneumonie  des  enfants  (Fischer,  Léger,  La 
noix,  etc.),  de  pneumonie  lobulairc  (Rurnct,  de  la  Berge),  pneumonie ca- 
tarrhale,  etc..  Le  terme  de  broncho-pneumonie  employé  par  plusieurs 
auteurs,  et  notamment  par  Roger,  n'a  point  passé  dans  Tusagc  journalier. 
Peut-être  est-ce  avec  raison,  car  rinflaiumation  en  envahissant  les  petites 
bronches  et  le  lobule,  ne  cesse  point  pour  cela  dans  les  bronches  degroset 
de  moyen  calibre.  Trop  souvent,  au  contraire,  comme  nous  aurons  occasioo 
de  le  remarquer*  ces  dernières  sont  le  siège,  principalemeal  dans  les  ca» 


WHEDMONIE.  —  brohcho-pneuhonib.  —  DépiNinoif.  521 

subaigua^  de  lésions  profondes  indélébiles,  qui  aboutissent  à  la  destruction 
partielle  ou  totale  des  éléments  de  leur  paroi.  Bien  plus, non  seulement  le 
système  bronchique  et  les  lobules,  mais  même  le  tissu  conjonclif  qui  les 
environne,  les  vaisseaux  sanguins  et  lymphatiques  participent  aux  lésions  : 
le  terme  broncho-pneumonie  exprime,  par  conséquent,  la  réalité  des  choses. 

Les  noms  dé  pneumonie  lobulaire,  secondaire,  catarrhale,  ont  une  signi- 
fication trop  vague.  Si,  comme  rétablit  le  professeur  Jaccoud,  l'absence 
d'exsudat  fibrineux  est  le  caractère  fondamental  de  la  pneumonie  ca- 
tarrhale, on  peut  se  convaincre ,  par  l'examen  des  diverses  parties  con- 
siitoantes  des  lobules  atteints  de  broncho-pneumonie,  que  la  dénomina- 
tion de  lésions  catarrhales  ne  peut  pas  être  appliquée  aux  altérations 
profondes,  parenchymateuses  que  Ton  rencontre  et  qui  se  rapprochent  sou- 
vent de  celles  qu'on  observe  dans  la  pneumonie  franche.  On  peut  repro- 
cher la  même  insuffisance  au  terme  de  bronchite  capillaire  qui  a  éga- 
lement l'inconvénient  de  ne  désigner  qu'un  élément  ou  qu'une  forme  de 
la  maladie,  et  qui  n'a  d'ailleurs  été  adopté  que  par  les  médecins  qui 
ont  observé  chez  les  adultes.  Le  nom  de  pneumonie  lobulaire  a  un 
aens  trop  large;  il  y  a  des  pneumonies  lobulaires  qui  ne  sont  pas  des 
broncho-pneumonies.  En  effet,  l'irrigation  sanguine  du  lobule  se  fait  par 
Tartère  bronchique  et  par  l'artère  pulmonaire.  Primitivement,  la  première 
est  seule  intéressée,  dans  la  broncho-pneumonie  ;  la  seconde  peut  être 
aussi  le  point  de  départ  immédiat  de  la  pneumonie  lobulairci  par  exemple 
dans  les  pneumonies  lobulaires  métastatiques  consécutives  aux  embolies 
simples  ou  pyémiques. 

Ce  qu'on  doit  tout  d'abord  établir,  c'est  que  des  deux  éléments  inflam- 
matoires bronchique  et  puImonaii*e  dont  la  réunion  constitue  la  broncho- 
pneumonie, l'un  est  toujours  secondaire  à  l'autre  :  sans  lésion  bronchi- 
que, pas  de  broncho-pneumonie.  La  bronchite  se  propage  jusqu'aux  lo- 
bules, dont  les  diverses  portions  sont  envahies  en  totalité  ou  seulement 
en  partie  par  l'inflammation. 

Rejetant  l'ancienne  hypothèse  des  auteurs  qui  admettaient  que  cette 
inflammation  du  lobule  est  produite  par  la  pénétration  de§  mucosités 
bronchiques,  nous  croyons  maintenant  qu'elle  est  due  à  la  propagation  de 
l'inflammation  des  bronches  extra-lobulaires  aux  bronches  intra-lobulaires 
et  de  celles-ci  aux  parties  constituantes  du  lobule.  La  bronchite  est  le  point 
de  départ  de  tout  le  processus  :  la  pneumonie  n'évolue  pas  spontanément. 

n  ne  faut  donc  pas  envisager,  comme  on  l'a  fait  souvent,  la  pneumonie 
lobulaire  avec  des  périodes  de  congestion,  d'hépatisation,  etc.,  comme  la 
pneumonie  franche  dans  le  lobe.  Au  moins  à  son  début,  la  pneumonie  lobu- 
laire reste  toujours  plus  ou  moins  liée  à  la  bronchite,  fait  démontré  par  la 
nature  des  lésions,  par  leur  siège  autour  de  la  bronche  et  dans  le  tissu 
eonjonctif  intra-lobulaireet  périlobulaire,  et  par  la  marche  qu'elles  affec- 
tent. C'est  en  réalité,  comme  on  l'a  dit,  une  bronchite  vésiculaire.  Mais 
une  fois  la  lésion  constituée,  il  peut  arriver  que  l'un  ou  l'autre  élément, 
bronchique  ou  pulmonaire,  prédomine,  et  il  en  résulte  l'existence  de  formes 
cKniquea  et  anatomiques  distinctes  se  rapprochant  plus  ou  moins  soit  de  la 


522  PNEUMONIE.  —  brorcho-preumoiiie.  —  histobiqub. 

bronchite,  soit  de  la  pneumonie.  En  résumant  donc  ces  principaux  traits, 
nous  dirons  que  la  broncho-pneumonie  est  une  inflammation  occupant 
en  totalité  ou  partiellement  les  divers  éléments  des  brandies  et  des  (d- 
bules^  toujours  secondaire  à  une  phlegmasie  bronchique  qui  envahit 
successivement  les  lobules  isolément  oupar  groupes^  et  caraciérisée  par 
une  évolution  anatomique  et  clinique  en  rapport  avec  la  prédomifuuice 
des  altérations  dans  les  bronches  ou  dans  les  lobules. 

Historiqae. —  Sous  les  noms  de  péripneumonie  latente,  4e  pàipiMB- 
monia  notha,  Boerhaavc,  Sydenham,  Van  Swiéten,  Sauyages,  Morgagm, 
Baglivi,  Lieutaud,  etc..  décrivaient  des  inflammations  bâtardes,  lyint 
des  caractères  cliniques  et  anatomiques  mal  déBnis.  BoerhaaTe  avait  dît 
cependant  qu'il  existait  deux  espèces  de  péripneumonies  :  Tune,  se  déie- 
loppant  dans  le  territoire  de  Tartère  bronchique;  Tautre,  dans  celui  de 
Tartère  pulmonaire.  CuUen  rejeta  cette  division  comme  trop  théorique. 
Sous  le  nom  de  catarrhe  suffocant,  Laênnec  décrivait  une  phlegmasie 
généralisée  à  tous  les  tuyaux  bronchiques,  et  Andral  montra  que  de 
Tcxtension  aux  petites  bronches  résultait  la  gravité  de  la  maladie. 

En  1825,  Léger  montra,  le  premier,  la  fréquence  de  ces  pneumoiûei 
chez  les  enfants,  les  sépara  nettement  des  pneumonies  ordinaires,  en 
montrant  que  leurs  caractères  cliniques  principaux  étaient  d'être  doB- 
bles,  d'affecter  une  marche  latente  aiguë  ou  chronique,  tandis  qu'elles 
modifiaient  anatomiquement  le  tissu  du  poumon,  de  manière  i  le 
faire  ressembler  au  tissu  de  la  rate  (splénisation).  Lanoix  décrit  dus 
cette  pneumonie  des  granulations  siégeant  dans  les  vésicules,  et  donnant 
au  poumon  un  aspect  mamelonné.  En  1828,  Berton  montre  que  ces  lésions 
affectent  une  disposition  lobulaire  :  il  substitue  au  mot  splénisation  le 
terme  de  rénification  et  montre  la  pneumonie  lobulaire  ou  partidle 
passant  par  les  périodes  d'engouement,  d'hépatisation  et  aboutissant  parfois 
à  l'infiltration  purulente  et  à  la  formation  d'abcès.  Il  en  montre  les  trois 
formes  aiguë,  subaiguë  et  chronique. 

Ces  auteurs  ont  nettement  indiqué  que  la  muqueuse  des  bronches  sert  de 
point  de  départ  à  l'inflammation  qui,  de  là,  envahit  le  tissu  vésicnlaire  des 
poumons,  mais  ils  n*ont  pas  compris  la  nécessité  de  cette  succession  dans  les 
phénomènes  morbides.  Pour  eux,  la  pneumonie  pouvait  se  développer  d'une 
manière  indépendante  dans  le  coursde  certaines  affections,  le  plus  souvent 
pendant  les  fièvres  éruplivcs. 

Dans  deux  monographies  parues  en  1852  et  en  1855,  JoBrg  décrivit 
une  lésion  qu'il  considérait  comme  spéciale  aux  nouveau-nés  et  ca- 
ractérisée par  Taffaissement,  la  congestion  et  la  condensation  do 
tissu  pulmonaire  qui  plonge  au  fond  de  l'eau.  Jœrg  montra  que  cette 
altération  toute  passive  est  le  résultat  de  la  persistance  de  l'accolement 
des  alvéoles  dans  les  parties  des  poumons  qui  n'ont  pas  respiré.  Elle  ap» 
parait  lorsque  l'enfant  est  trop  faible  pour  respirer  largeipent  ou  lorsqa'il 
existe  des  obstacles  à  la  respiration,  soit  à  Fentrée,  soit  dans  rinténenr 
des  voies  aériennes. 

C'est  dans  les  travaux  de  Burnet  (1833)  et  surtout  de  de  la  Berge  ipe 


PNEUMONIE.  —  BEONCHO-PNEUMOMIE.  —  HISTORIQUE.  525 

Ton  trouve  nettement  affirmée  la  subordination  de  la  pneumonie  à  la 
bronchite.  De  la  Berge  décrit  deux  périodes  :  la  première  sthénique,  in- 
diquant remploi  des  antiphlogistiques  ;  |a  seconde  asthcnique,  plus  lon- 
gue que  ia  première,  et  réclamant  au  contraire  un  traitement  tonique. 
Parmi  les  travaux  de  cette  époque,  il  faut  citer  ceux  de  Gerhard  et  de  Rufz, 
qui  ont  surtout  étudié  la  pneumonie  franche,  la  thèse  de  Bazin  (1854), 
la  clinique  de  Yalleix  sur  les  maladies  des  nouveau-nés  (1838)  ;  à  l'é- 
tranger, les  travaux  de  Seifert  et  de  Succow.  C'est  à  cette  époque  égale- 
ment que  Ilourmann  et  Dechambre  ont  donné  la  première  bonne  descrip- 
tion de  ia  broncho-pneumonie  des  vieillards  (1856). 

En  1858,  RiUiet  et  Barthez  (Traité  des  Maladies  des  enfants)  dé- 
montrent chez  Tcnfant  l'existence  de  deux  pneumonies,  l'une  lobaire 
primitive,  Tautre  lobulaire  secondaire.  Ils  séparent  nettement  ces  deux 
affections  souvent  confondues  avant  eux  et  montrent  qu'elles  différent 
par  leurs  causes  et  leurs  symptômes  et  qu'elles  appellent  chacune  un  trai- 
tement spécial.  Toutefois,  ils  ne  détruisent  pas  complètement  la  confusion 
qui  existait  à  ce  sujet  :  c'est  ainsi  qu'ils  reconnaissent  des  pneumonies 
Jobaires  secondaires,  de  nature  catarrhale  comme  les  pneumonies  lobu- 
laireSf  et  plus  loin  ils  disent  que  ces  pneumonies  lobaires  secondaires 
sont  presque  toujours  des  broncho-pneumonies.  C'est  à  ces  deux  auteurs 
cependant  que  l'on  doit  les  recherches  les  plus  importantes  sur  la  broncho- 
pneumonie  ;  tous  les  travaux  parus  depuis  n'ont  fait  que  compléter  leurs 
descriptions  et  confirmer  la  plupart  des  opinions  qu'ils  avaient  émises. 

Barrier  accentue  davantage  les  différences  qui  séparent  les  pneumonies 
lobaires  et  lobulaires.  Il  divise  celles-ci  en  trois  variétés  :  lobulaire  dissé- 
minée, lobulaire  généralisée,  pseudo-lobaire.  Cette  dernière  présente  des 
caractères  macroscopiques  qui  la  rapprochent  des  pneumonies  lobaires  : 
c'est  la  généralisation  rapide  et  Funiformilé  d'aspect,  laquelle  n'est  ce- 
pendant pas  complète,  ce  qui,  joint  à  la  présence  de  l'élément  bronchi- 
que, permet  de  faire  la  différence.  Barrier  insiste  sur  les  terminaisons  de 
la  pneumonie  lobulaire  et  sur  la  suppuration  du  lobule.  Il  reconnaît 
Teaustence  des  abcès  décrits  par  RiUiet  et  Barthez,  mais  il  les  distingue 
d'une  autre  altération  à  peu  près  analogue  et  confondue  par  ces  deux  au- 
teurs avec  l'abcès  et  les  dilatations  des  bronches  terminales,  et  qui  est 
due  à  la  fonte  purulente  du  lobule  transformé  en  une  cavité  pleine  de  pus 
qu'il  désigne  du  nom  de  vacuole. 

Les  lésions  bronchiques  furent  étudiées  par  Fauvel,  dans  sa  thèse 
inaugurale  (1840),  travail  qui  marque  une  époque  importante  dans  This- 
loire  des  lésions  inflammatoires  du  lobule  pulmonaire.  Fauvel  les  dé- 
signe sous  le  nom  de  grainsjaunes.il  les  considère  comme  formées  par  la 
pénétration  mécanique  du  contenu  purulent  des  bronches  dans  les  cavités 
des  vésicules.  Cette  opinion  a  été  exagérée  depuis  par  plusieurs  auteurs 
qui,  refusant  le  nom  de  pneumonie  aux  lésions  du  lobule,  les  ont  exclu- 
sivement attribuées  à  cette  pénétration  des  produits  de  l'inflammation 
des  bronches.  Pour  Fauvel ,  la  doctrine  de  la  pneumonie  lobulaire  reste 
intacte  ;  il  la  montre  existant  souvent  en  même  temps  que  la  bronchite 


524  PNEUMONIE.  —  broncho-pubumohie.  —  HtsTOiiiQDR. 

capillaire,  entourant  les  grains  jaunes,  soit  à  l'état  de  congestion,  «oit  i 
Tétat  d*hépatisation.  11  décrit  les  différents  aspects  que  peut  présenter  le 
parenchyme  pulmonaire,  rappelant  fréquemment  celui  de  la  cirrhose  do 
foie,  tandis  que  le  toucher  donne  la  sensation  de  grains  dans  le  pam- 
chyme  pulmonaire. 

Cependant  la  thèse  de  Fauvel  servit  de  base  à  rétablissement  fmie 
doctrine  nouvelle  ;  le  siège  des  lésions  fut  décidément  placé  dam  les 
bronches  :  on  nia  la  broncho-pneumonie  pour  n'admettre  que  des  bron- 
chites capillaires.  Ce  mouvement  d'opinion  s'ac:entua  surtout  après  h 
publication  des  travaux  de  Legendre  et  Bailly. 

Pour  Legendre  et  Bailly  (1844),  Thépatisation  lobulaire  dans  le  sens 
rigoureux  du  mot  n'existe  pas  ;  il  est  nécessaire  d'établir  une  sépara 
tion  complète  entre  la  pneumonie  lobulaire  {partielle  et  mamelonnée)^ 
la  pneumonie  catarrhalc  (pneumonie  lobulaire  généralisée  et  bronchite 
capillaire  des  auteurs).  L'hépatisation  partielle  est  une  variété  de  k 
pneumonie  franche  légitime^  dont  elle  ne  diffère  anatomiquement  que 
par  son  étendue  et  son  siège  ;  c'est  une  lésion  très-rare,  en  comparaison 
de  la  pneumonie  catarrhale  et  des  lésions  congestives.  Parmi  ces  der 
nières,  Legendre  et  Bailly  ont  justement  donné  une  place  très-importante 
à  l'affaissement  des  poumons  avec  congestion,  si  fréquent  dans  la  bron- 
cho-pneumonie. Cette  lésion  avait  été  bien  vue  avant  eux,  en  particoh'er 
par  Rufz,  mais  elle  avait  été  mal  distinguée  de  la  splénisation  et  de  la 
congestion  simple.  Legendre  et  Bailly  ont  donné  à  cette  lésion  le  nom 
d'état  fœtal;  ils  en  ont  bien  montré  la  signification  et  en  ont  donné  une 
description  à  laquelle  on  n'a  rien  ajouté  depuis.  Ils  ont  été  moins  heureux 
dans  leur  description  de  la  congestion  lobulaire  disséminée  ou  généra- 
lisée, qu'ils  ont  voulu  séparer  de  la  pneumonie  lobulaire,  en  se  basant 
principalement  sur  les  résultats  de  l'insuillation  qui  rend  leur  aspect 
normal  aux  parties  congestionnées,  tandis  qu'elle  ne  peut  modifier  les 
parties  hépatisées.  De  même  ils  décrivent  isolément  la  pneumonie  ca- 
tarrhalc, dont  ils  font  une  maladie  tantôt  indépendante,  tantôt  se  déve- 
loppant dans  les  parties  déjà  atteintes  d*état  fœtal  ou  de  congestion  lobu- 
laire généralisée.  Elle  correspond  pour  eux,  dans  ce  dernier  cas,  i  la 
pneumonie  pseudo-lobaire  de  Barrier.  Les  symptômes  sont  tantôt  ceux  de 
la  bronchite  capillaire  de  Fauvel,  tantôt  ceux  de  la  pneumonie  lobulaire 
généralisée  que  Legendre  et  Bailly  décrivent  sous  le  nom  de  forme  lente 
eongestive.  Comme  nous  le  verrons,  on  doit  encore  à  ces  auteurs  une 
bonne  description  des  lésions  de  la  broncho-pneumonie  chronique  qu'ils 
ont  désignée  sous  le  nom  de  carnisation. 

En  résumé,  Legendre  et  Bailly,  frappés  de  la  mobilité  des  lésions  dans 
certains  cas,  et  surtout  des  résultats  de  Vinsufflation,  attribuèrent  une  trop 
grande  part  aux  lésions  congestives  ;  ils  se  refusèrent  à  voir  de  Tinflamma- 
tion  dans  la  pneumonie  ratarrhale,  et  conséquents  avec  eux-ménjes, 
firent  de  l'hépatisation  partielle  une  pneumonie  spéciale,  évoluant  dans  le 
lobule  comme  la  pneumonie  franche  dans  le  lobe.  Pour  eux,  TinsufRation 
mtrait  infailliblement  la  nature  des  altérations  ;  si  le  poumon  ri* 


PNEUMONIE.  —  BRONCHO-PNEUMONIE.  —  HISTORIQUE.  525 

sistait,  il  y  avait  hépatisaiion,  s'il  se  distendait,  c'était  de  l'état  fœtal  ou 
de  la  congestion,  accompagnée  ou  non  de  granulations  jaunes  dues  à 
la  pénétration  mécanique  dû  pus  bronchique  dans  le  lobule.  Eu  vain 
Bouchut  (1845)  fit  voir  que  l'iiépatisation  elle-même  pouvait  souvent 
se.  laisser  insuffler,  les  auteurs  confiants  dans  ce  mode  d'investigation, 
en  arrivèrent  de  plus  en  plus  à  considérer  les  bronches  comme  siège 
eiclusif  de  la  maladie.  Pour  Foureau  de  Beauregard  (1851),  chez  Ten- 
faat  comme  chez  le  vieillard,  il  n'y  a  pas  pneumonie,  mais  simplement 
bronchite  avec  altération  mécanique  du  poumon. 

Eo  1850,  Gairdner  donne  la  pathogénie  de  l'état  fœtal  qu'il  met  en- 
tièrement sur  le  compte  de  l'obstruction  bronchique.  L'air  introduit  par 
l'inspiration  ne  peut  traverser  le  bouchon  muco-purulent  qu'il  pousse 
au  contraire  vers  le  lobule.  Celui-ci,  n'étant  plus  soumis  à  la  pression 
atmosphérique  s'affaisse,  et  il  se  produit  en  même  temps  autour  des  ré- 
gions en  collapsus  un  emphysème  supplémentaire  appelé  à  combler  le 
¥ide  qui  s'est  produit  dans  la  plèvre. 

Trousseau  et  Laségue  (1851)  mettent  bien  en  relief  la  bénignité  du 
pronostic  de  la  pneumonie  franche  de  l'enfant,  opposé  à  la  gravité  de  la 
pneumonie  catarrhale.  Les  thèses  de  Roccas  et  de  Beauvais  (1850),  le 
Traité  de  la  Pneumonie  de  Grisolle,  l'ouvrage  de  Durand-Fardel  sur  les 
maladies  des  vieillards  (1851^.  les  recherches  de  Lebert  (1855),  celles  de 
Robin  et  Isambert  (1855),  sur  là  carnification  congestive  doivent  être 
mentionnés  parmi  les  travaux  de  cette  époque.  Non  seulement  on  discu- 
tait alors  sur  le  siège  des  lésions,  mais  encore  sur  leur  nature.  Beaucoup 
d'auteurs  se  refusaient  à  les  considérer  comme  inflammatoires,  en  montrant 
le  peu  de  friabilité  des  tissus,  Pabsence  de  granulations,  l'inconstance  ou 
le. peu  d'importance  des  lésions  pleurales,  l'état  du  sang  dans  lequel  la 
fibrine  n'est  pas  augmentée,  la  prédominance  de  la  congestion,  enfin  le 
si^e  même  de  l'exsudation  qui,  dans  ces  cas,  serait  extra-vésiculaire  au 
lien  d'être  intra-vésiculaire  comme  dans  l'inflammation  vraie.  A  côté  des 
partisans  de  la  bronchite  capillaire,  il  y  avait  ceux  de  la  pneumonie  lo- 
bulaire,  et  après  Rilliet  et  Barthez,  après  les  auteurs  du  Compendium  de 
médecine,  après  Traube  (1856),  Lebert,  etc....  il  faut  citer  Yulpian  qui 
caractérisa  nettement  sa  nature  inflammatoire  dans  sa  thèse  d'agrégation 
sur  les  pneumonies  secondaires  (1860).  Les  pneumonies  lobulaires  et  la 
splénisation,  dit-il,  sont  des  hypérémies  phlegmasiques  pouvant  subir,  dans 
de  certaines  limites,  Pinfluence  de  la  pesanteur  relativement  à  leur  dé- 
veloppement et  à  leur  disposition  et  participant  ainsi  de  quelques-uns 
des  caractères  de  l'hypostase.  Ces  lésions  sont  constamment  unies  à  un 
état  phlegmasique  ou  catarrhal  des  bronches  et  paraissent  retenues  à  l'é- 
tat congestionnel  par  l'espèce  de  révulsion  continue  qu'opèrent  l'inflam- 
matioa  ou  la  sécrétion  bronchiques. 

En  Allemagne,  Bartcls  (1860)  étudie  la  broncho-pneumonie  moibil- 
leuse  au  point  de  vue  de  l'anatomie  pathologique,  de  la  symptomatologie 
et  du  traitement.  Ziemssen  dans  deux  travaux  publiés  en  1862  et  en 
1863  fait  d'importantes  recherches  sur  la  température  et  montre  les  carac- 


526  PNEUMONIE.  —  bromcho-p.neuiiomu.  —  UtttoftiQOK. 

tcres  cliniques  qui  séparent  les  pneumonies  croupales  et  catairhales.  Nous 
rappellerons  plus  loin  les  théories  de  ces  auteurs  au  sujet  de  ia  patho- 
génie  de  la  broncho-pneumonie,  et  les  innovations  qu'ils  ont  apportées 
dans  son  traitement. 

Les  raisons  qui  faisaient  refuser  aux  lésions  lobulaires  le  nom  de  poeu* 
roonie  ont  été  surtout  soutenues  avec  la  plus  grande  vigueur  par  Béhîcr 
et  Hardy  (  Traité  de  pathologie  interne,  t.  Il,  1864)  et  plus  tard  enooR  par 
Bébier  seul  (Clinique  de  rUôtel-Dieu).  Repoussant  Topinion  deRîiyiiet 
Barthez,  Barrier,  Legendre  et  Bailly,  qui  admettent  l'origine  aulodrtkaoe 
de  la  granulation  purulente,  Béhier  revint  k  l'opinion  de  Fauyel  et  eouir 
déra  la  granulation  comme  formée  par  raccumulation  du  pus  broDehkpe 
dans  le  lobule.  Quant  aux  lésions  qui  l'entourent,  elles  ne  doivent  pu 
recevoir  le  nom  de  pneumonie,  car  elles  ne  sont  pas  constituées  par  lu» 
hépatisation  véritable.  Appuyé  sur  les  notions  alors  acceptées  sur  h 
structure  du  poumon  (Robin,  Soc.  de  Biol.,  1858),  il  place  le  siège  di 
l'hépatisation  dans  le  tissu  conjonctif  périlobulaire,  d'où  il  conclut  qu'elle 
doit  s'étendre  à  tout  un  lobe,  comme  le  phlegmon  s'étend  à  tout  on 
membre.  Il  ne  peut  pas  exister  de  limites  assez  bien  circonscrites  das 
l'inflammation  pulmonaire,  pour  qu'elle  conserve  la  forme  circonscrite 
au  lobule,  il  faut  qu'elle  procède  de  l'élément  anatomique  distribué  par 
lobules:  cet  élément,  ce  sont  les  bronches.  L'inflammation  reste  limitce 
à  leurs  divisions  :  c'est  de  la  bronchite  capillaire  et  non  de  la  pneiunooie. 
Cette  inflammation  des  petites  bronches  amène  une  congestion  passive  des 
vaisseaux  périlobulaires,  mais  le  tissu  conjonctif  et  les  vésicules  ne  soolk 
siège  d'aucune  phlegmasic  ;  la  preuve  directe  en  est  fournie  parrinsuiTlatioD. 

Béhier  a  donc  été  plus  absolu  que  Legendre  et  Bailly  dan»  ses  opinions 
au  sujet  des  phlegmasies  broncho-pulmonaires.  Mais  il  faut  remarquer 
que  sa  description  a  surtout  été  faite  d'après  des  observations  recueillies 
chez  l'adulte,  chez  lequel,  en  eflèt,  l'inflammation  lobulaire  est  loin 
d'être  aussi  nettement  accusée  que  chez  l'enfant,  au  moins  à  l'état  ma- 
croscopique. Legendre  et  Bailly,  qui  ont  observé  la  broncho-pneumonie 
des  enfants,  malgré  leurs  réticences  à  l'endroit  de  la  pneumonie,  malgré 
leur  tendance  à  restreindre  son  importance,  en  ont  cependant  montré  les 
ra()ports  avec  les  autres  lésions  de  lu  pneumonie  et  notamment  avec 
l'état  fœtal. 

Aussi,  en  1867,  Damaschino,  dans  sa  thèse  sur  les  différentes  formes 
de  la  pneumonie  des  enfants,  est-il  revenu  franchement  sur  le  terrain  de 
la  broncho-pneumonie.  Son  travail  est  avant  tout,  un  parallèle  entre  le? 
deux  formes  primitive  et  secondaire  de  la  pneumonie  chez  les  enfants.  Il 
conserve  pour  la  broncho-pneumonie,  la  division  en  périodes  adoptée 
pour  la  pneumonie  franche;  période  de  congestion,  d' hépatisation  rouge 
etd'hrpatisaliou  grise,  mais  tout  en  montrant  bien  que  ces  périodes  noni 
une  oxistence  réelle  (|u'aulanl  qu'on  considère  individuellement  chaque 
noyau  de  pneumonie  lobulaire.  Avec  Damaschino,  Tintervention  du  mi- 
croscope fait  entrer  Tétudede  la  broncho-pneumonie  dan:^:  une  phase  nou- 
velle. Damaschino,  en  résumant  ses  opinions  sur  la  nature  de  la  malidie. 


PNEUMONIE.  BRONCHO-PNEUMONIE.  —  HISTORIQUE.  527 

iaf  considère  comme  constituée  par  trois  éléments  :  i^  la  bronchite  capil- 
laire; 2*  la  congestion  pulmonaire;  3*^  Tinflammation  du  lobule.  L'embar- 
ras ne  peut  exister  qu'en  ce  qui  concerne  Tinlerprétation  de  ces  deux 
derniers  éléments.  La  congestion  est-elle  simplement  passive  ?  est-elle  le 
premier  stade  d'une  phlegmasie  réelle  ?  La  marche  de  la  maladie  dans 
les  cas  à  évolution  lente,  force  à  accepter  la  seconde  hypothèse.  On 
leconnait,  en  efTet,  qu'alors  les  lésions  du  lobule  sont  constituées  par 
ime  proliférati(Hi  considérable  des  épithéliums,  par  une  production  de 
gloiioles  de  pus  et,  dans  quelques  cas  exceptionnels ^  par  une  véritable 
exsadation  fibrino-purulenle.  D'ailleurs,  ces  produits  inflammatoires  va- 
rient suivant  la  forme  de  la  maladie,  et  c'est  ainsi  que  M.  Damaschino, 
maintenant  la  distinction  entre  les  inflammations  vraies  et  le  catarrhe, 
déBnit  la  forme  pseudo-labaire  une  inflammation  pulmonaire  avec 
tendance  au  catarrhe.  La  forme  mamelonnée  ne  conserve  plus  les  ca- 
nctères  d'une  véritable  phlegmasie  :  ces  lésions  sont  celles  d'une  phle- 
gmasie ordinairement  catarrhale.  La  conclusion  est  que  la  broncho- 
pDeomonie  est  bien  réellement  une  phlegmasie,  mais  dissimulée  en  partie 
par  la  piésence  de  la  bronchite  et  de  l'hypérémie  pulmonaire,  et  qui  de 
plus  affecte  souvent  les  caractères  des  phlegmasies  catarrhales. 

Roger  (art.  Broncho-Pneumonie,  Dict.  ency cl.  des  Sciences  méd.) 
Itdmet  plus  catégoriquement  la  nature  phlegmasique  de  la  broncho- 
pneumonie,  en  se  basant  surtout  sur  la  marche  des  lésions.  La  congestion 
dn  début,  en  rapport  avec  l'état  fœtal  et  avec  les  lésions  bronchiques,  lui 
parait  devoir  être  rapprochée  de  la  congestion  qui  marque  le  début  de  la 
pneomonie  franche.  Ce  qui  le  démontre,  c'est  bien  moins  l'examen  des 
lésions  histologiques  à  cette  période  que  la  succession  ultérieure  des 
périodes  d'induration  et  de  ramollissement  purulent,  ainsi  que  l'étude 
des  causes  et  de  la  marche  des  symptômes. 

Un  grand  nombre  de  travaux  ont  paru  dans  ces  dernières  années  sur 
là  broncho-pneumonie  envisagée  d^ne  manière  générale  ou  dans  les  ma- 
ladies qn'elle  vient  compliquer.  Nous  mentionnerons  les  recherches 
anatomo -pathologiques  de  Colberg,  Buhl,  de  Rindfleisch,  de  Ranvier  et 
Gomily  de  Yirchov?  qui,  de  même  que  Damaschino,  a  reconnu  la  pré- 
sence des  exsudats  fibrineux  dans  la  broncho-pneumonie.  Koéster  (1877), 
dont  le  travail  renferme  une  bonne  description  de  l'état  fœtal,  est  allé 
pins  loin  en  montrant  que  les  lésions  inflammatoires  ont  la  bronche  poui 
point  de  départ  ;  mais  il  n'a  pas  su  bien  montrer  les  rapports  qu'elles  affec- 
tent avec  elle  et  il  a  eu  tort  d'attribuer  à  la  pneumonie  lobulaire  une 
évolution  semblable  à  celle  de  la  pneumonie  lobaire.  Du  reste,  cette  con- 
statation des  exsudats  (ibrineux  dans  la  broncho-pneumonie  a  évidemment 
troublé  pendant  quelque  temps  les  observateurs  ;  les  uns  ont  admis  la 
possibilité  de  la  coïncidence  des  deux  pneumonies  fibrincuse  et  catarrhale  ; 
d'autres  ont  cru  que,  dans  quelques  cas,  la  broncho-pneumonie,  en  se 
généralisant,  pouvait  atteindre  un  degré  supérieur  et  aboutir  à  la  pneu- 
BMttiie  lobaire  fibrineuse.  Rautenberg  de  Saint-Pétersbourg  (1874)  est 
même  allé  jusqu'à  rejeter  la  division  fondamentale  des  deux  pneumonies 


528  PNEUMONIE.  —  broncho-pnbumonie.  —  historique* 

fibriiieuse  et  catarrhalc  dans  le  jeune  âge.,  La  (ibrine,  d'après  lui,  ne 
serait  nullement  caractéristique  et  les  pneumonies  ne  pourraient  être  dilTé- 
rencices  que  par  leurs  causes  ;  les  unes  sont  primitives,  les  autres  feooa- 
daires.  C'est  là  le  meilleur  caractère  distinctif,  la  nature  du  siège  dans  le 
lobule  ou  dans  le  lobe  doit,  selon  lui,  être  rejetée  comme  insuffisante. 

Parmi  les  travaux  cliniques  de  ces  dernières  années,  nous  rappellenmi 
surtout  les  recherches  de  U.  Roger  sur  la  marche  de  la  température  dans 
la  broncho-pneumonie ,  les  descriptions  contenues  dans  les  travaux  de 
StefTen  (1865  et  1875)  et  dans  les  traités  classiques  de  Steiner,  Gerhardi, 
d'Ëspine  et  Picot,  les  travaux  de  Peter  et  Sanné  sur  la  broiicho-pneuinooie 
dans  la  diphthérie,  ceux  dePérier,  Laveran,  Léon  Colin,  sur  les  bronchites 
capillaires  épidémiques,  etc.,  etc.  Plus  tard,  nous  citerons  à  propos  de  h 
pathogénie,  les  importants  travaux  qui  ont  été  produits  sur  les  broncho- 
pneumonies expérimentales. 

Charcot,  dans  son  cours  professé  à  la  Faculté  de  Paris  en  1877,  a 
donné  une  description  qui  permet  de  mieux  se  rendre  compte  du  déve- 
loppement et  du  véritable  siège  de  Tinflammation  lobulaire  dans  b 
broncho-pneumonie.  Sur  une  coupe  horizontale  d  un  lobule  pulmonaire, 
il  est  facile  de  reconnaître  des  espaces  ou  travées  de  tissu  conjonctif  limi- 
tant le  lobule,  et  se  subdivisant  pour  circonscrire  chacun  des  acini  qui 
le  composent.  Si  la  coupe  comprend  la  partie  centrale  du  lobule,  on  voit 
en  outre,  au  milieu  des  acini,  des  espaces  arrondis  dans  lesqueb  se 
trouvent  la  bronche  acineuse  avec  ses  vaisseaux  satellites,  pulmonaires  ei 
bronchiques.  Le  tissu  compris  entre  ces  divers  espaces  représente  la  section 
des  canaux  alvéolaires  et  des  alvéoles.  Sur  un  poumon  atteint  de  broncho- 
pneumonie récente,  il  existe  autour  des  espaces  centraux  un  nodule  in- 
ilainmatoire,  nodule  péribronchique^  offrant  le  plus  souvent  une  compo. 
sition  élémentaire  analogue  à  celle  de  la  pneumonie  franche,  leucocytes  et 
fibrine  (hépatisation  péribronchique).Dans  le  reste  du  lobule,  on  trouve  les 
lésions  caractéristiques  de  la  pneumonie  catarrhale  :  globulesblancs  et  cel- 
lules épithéliales  en  prolifération  ;  ces  lésions  sont  surtout  abondantes  dans 
les  parties  violacées,  lisses  sur  la  coupe ,  présentant  l'aspect  décrit  sous  le 
nom  de  splénisation.  Charcot,  constatant  cette  lésion  non  seulement  dans 
ces  cas,  mais  môme  dans  les  noyaux  de  pneumonie  isolés,  donne  un  sem 
plus  général  à  cette  expression  en  l'appliquant  à  ces  lésions  catarrhaJes  ; 
il  les  oppose  ainsi,  sous  le  nom  de  splénisation  ;  à  Thépatisation  péribron- 
ehiquc.  Enfm,  il  décrit  dans  les  espaces  péri-lobulaires  et  périacineux 
]es  lésions  interstitielles  contemporaines  des  lésions  parenchymateuses, 
infiltration  de  cellules  embryonnaires,  lymphangites,  etc...  Nous  ne 
faisons  ici  qu'esquisser  à  grands  traits  la  description  si  claire  et  si  sai- 
sissante que  Charcot  a  donnée  des  lésions  broncho-pneumoniques,  en 
s'appuyant  sur  une  compréhension  nouvelle  de  la  topographie  du  lobule 
qui  lui  a  permis  de  mieux  montrer  la  distribution  exacte  des  lésions  dans 
ses  différentes  parties.  Ces  notions  nouvelles  que  nous  avons  exposées  lon- 
guement dans  notre  thèse  inaugurale  (Contribution  à  l'étude  de  la  broncho- 
pneumonie,  1878), faite  sous  l'inspiration  de  ce  maître  éminent,  serviront 


PNEUMONIE.    BEONCHO-PNKaMONIE.    —  ANATOMfB   PATHOLOGIQUE.       529 

de  base  à  la  description  qui  sera  donnée  dans  le  chapitre  relatif  à  Tana- 
tomie  pathologique.  Nous  aurons  aussi  plusieurs  fois  Toccasion  de  citer 
un  travail  important  de  VVyss  sur  la  pneumonie  calarrhale,  qui  résume 
k»  travaux  allemands  parus  dans  ces  dernières  années,  et  enfin  Tou- 
Trage  actuellement  encours  de  publication  de  notre  excellent  maître  Cadet 
de  Gassicourt. 

Aiiatoinie  pathologique.  —  L'anatomie  pathologique  de  la 
bitMicbo-pneumonie  comprend  l'étude  des  deux  éléments  fondamentaux 
qai  la  constituent,  savoir  :  les  lésions  inflammatoires  bronchiques  et  lo- 
iulaires.  On  peut  leur  rattacher  immédiatement  les  lésions  pulmonaires 
concomitantes  et  les  lésions  de  voisinage^  qui  portent  sur  la  plèvre  et  sur 
ka  ganglions  bronchiques.  Nous  décrirons  ensuite  les  complications  et 
an  quelques  roots  les  lésions  des  organes  qui  se  développent  sous  Tin- 
loencede  la  broncho-pneumonie,  ou  qui  s'y  rattachent  indirectement  par 
one  étiologie  commune.  Nous  suivrons  donc,  dans  cet  exposé,  l'ordre 
qai  nous  semble  indiqué  par  la  marche  même  des  lésions. 

A.  Lésions  fondamentales.  — i'* Bronchite.  —  Il  faut  distinguer,  quand 
9  a*agit  de  la  broncho-pneumonie,  deux  périodes  dans  l'évolution  de 
k  lironchite.  Une  première  période  où  «cette  lésion  génératrice  existe 
■auk^  à  l'état  indépendant;  nous  n'avons  pas  à  nous  en  occuper  ici. 
Notre  description  des  lésions  bronchiques  ne  devrait  commencer  qu'au 
BBoment  où  l'ensemble  de  la  maladie  se  trouve  constitué,  c'est-à-dire  au 
IMment  où  la  bronche  malade  a,  en  quelque  sorte,  porté  l'altération  jus- 
4p*au  lobule.  Mais  dans  certains  cas  1  inflammation  du  lobule  se  produit 
aoe  rapidité  telle  qu'il  est  difficile  de  savoir  s'il  y  a  eu  réellement 
ion  dans  la  marche  des  lésions.  Nous  voulons  parler  de  ces  alté- 
broncho-pneumoniques  qui  surviennent  d'une  manière  fou- 
inyante»  par  exemple,  à  la  suite  de  brûlures  étendues  à  une  grande 
partie  de  la  surface  du  corps.  Le  mode  de  succession  ordinaire  des  deux 
éliments  bronchique  et  pulmonaire  est  difficile  à  saisir  dans  ces  cas  où 
ka  troubles  de  rinner\'ation  jouent  un  rôle  important. 

n  résulte  de  cette  rapidité  dans  la  marche  du  processus  qu'on  a 
louyent  Toccasion  de  voir  des  broncho-pneumonies  dans  lesquelles  l'in- 
lammation  des  bronches  en  est  encore  à  sa  première  période  ;  la  mu- 
qpieiiae  est  congestionnée,  recouverte  d'un  mucus  clair  et  aéré.  La  con- 
gaalîon  peut  cependant  manquer  dans  des  cas  où  l'inflammation  ne  peut 
■ra  mise  en  doute.  Bientôt  le  liquide  contenu  dans  les  bronches  se  trans- 
krme  en  un  muco-pus  abondant  que  la  pression  peut  faire  sourdre  des 
|liii  petits  canaux  aériens.  Ce  muco-pus,  dans  lequel  l'examen  micro- 
paopique  démontre  la  présence  de  nombreux  leucocytes  et  de  cellules 
iiyUndriques,  peut  souvent  se  condenser  de  manière  à  revêtir  l'aspect  de 
jWTiiifn  membranes  qui  tapissent  les  voies  aériennes.  S'il  s'agit  d'une 
wftODcbo-pneumonie  consécutive  à  l'invasion  de  la  diphthérie,  les  bronches 
■■mt  tapissées  de  fausses  membranes  d'épaisseur  variable  qui  peuvent  s'é- 

idre  jusqu'aux  plus  fines  ramifications  bronchiques,  et  au-dessous  des- 
quelles la  muqueuse  apparaît  tantôt  congestionnée,  tantôt  avec  sa  cou- 

XOOT.  DICT.  MfO.    IT  CHIR.  XXVUI  —  34 


530     PNEUMONIE.  —  broncho-pnedmonie.  —  ànatomie  pathologiqui. 

leur  normale.  Parfois,  àl^cxamen  microscopique,  on  peut  trouver  l'épilhé* 
lium  cylindrique  encore  intact. 

Dans  les  périodes  plus  avancées  de  la  bronchite,  Panalyse  hislologiqne 
montre  une  infiltration  de  leucocytes  dans  la  couche  conjonctife  de  b 
bronche,  infiltration  souvent  assez  abondante  pour  qu'on  puisse  distûiguer 
avec  peine  les  fibres  de  Tanneau  musculaire.  Le  processus  se  temaineparli 
destruction  de  cet  anneau  à  laquelle  se  lie  évidemment  la  dilaiatkm  des 
bronches  (Trojanowsky).  Tant  que  cet  anneau  subsiste,  les  lésion  lont 
encore  réparables  et  ne  survivent  pas  à  la  guérison  de  la  broncho- 
pneumonie.  Outre  ces  dilatations  bronchiques,  on  peut  encore  trouer 
des  ulcérations  de  la  muqueuse  qui  ont  été  décrites  autrefois  par  Fatrel 
dans  plusieurs  cas.  De  toutes  ces  lésions  bronchiques  la  plus  intéremote 
est,  sans  contredit,  la  dilatation,  sur  laquelle  nous  aurons  occasioD  de 
revenir  en  suivant  l'évolution  des  processus  broncho-pneu moniques,  dans 
les  formes  subaiguës  et  chroniques  de  TafFection. 

2*^  Pneumonie  lobulaire.  —  Lorsqu'on  examine  un  poumon  atteint 
de  broncho-pneumonie,  on  est  tout  d'abord  frappé  en  voyant  que  les 
lésions,  malgré  leur  diffusion  inégale  et  leurs  aspects  divers,  se  répifti»- 
sent  cependant  suivant  un  mode  assez  régulier,  dont  la  raison  se  troofe 
dans  la  prédominance  des  lésions  bronchiques  dans  les  parties  postérieures 
du  poumon.  Bartels  a  montré  qu'il  existe,  en  réalité,  deux  systèipes  broo* 
chiques,  l'un  antérieur,  l'autre  postérieur,  et  influencés  tous  deux  d*uiie 
manière  différente  dans  la  broncho-pneumonie.  Le  système  antérieur^ 
constitué  par  les  bronches  descendante  et  ascendante  antérieures,  pré- 
sente des  lésions  peu  intenses.  Le  système  des  bronches  ascendante  et 
surtout  descendante  postérieures  est  rempli  de  sécrétions  muco-purulentes 
et  les  parois  bronchiques  présentent  des  lésions  beaucoup  plus  accentuées 
et  plus  profondes.  Cette  répartition  des  lésions  bronchiques  est  nettement 
en  rapport  avec  le  siège  des  lésions  pulmonaires. 

En  effet,  à  l'autopsie  d'un  individu  mort  de  broncho-pneumonie,  on 
remarque  des  différences  d'aspect  très-nettes,  entre  les  lésions  de  la  partie 
antérieure   et  celles    de  la  partie  postérieure    des  poumons.  Ceux-ci. 
d'une  manière  générale,  paraissent  augmentés  de  volume,  mais  leur  sur- 
face est  irrégulière,  bosselée  et  présentant  aussi  bien  à  la  partie  aolérieure 
qu'à  la  partie  postérieure,  à  côté  des  portions  tuméfiées  et  saillantes,  des 
espaces  où  le  poumon  est  affaissé  et  amoindri.  C'est  ainsi  que  dans  les 
parties  antérieures  on  voit,  à  coté  de  lobules  distendus  et  gonflés  par  Tair 
qui  les  remplit,  d'autres  lobules  isoles  ou  agglomérés,    qui,  malgré  la 
congestion  dont  ils  paraissent  être  le  siège,  sont  diminués  de  volume  et 
situés  beaucoup  au-dessous  du  niveau,  non-seulement  des  parties  disten* 
dues,  mais  même  au-dessous  des  portions  saines  du  poumon.  Ces  devi 
lésions,  bien  distinctes,  se  trouvent  presque  toujours  situées  dans  le  do- 
maine  du  système    bronchique    antérieur.   La    première    n'est   wtn 
que  l'emphysème  qui  se  montre  avec  ses  formes  diverses  :  la  seconde, 
d'une  nature  plus  ohscure  et  plus  complexe,  porte  les  noms  dV/fl/  /Wfl' 
ou  d'atéleciasie. 


PNEUMONIE.  —  BaoïNCHO-p.NEUMOifiB.  —  anàtomie  pathologique.     55i 

Dans  les  parties  postérieures  ou  mieux  postéro-Iatérales  et  inférieures, 
m  retrouve  encore,  mais  avec  des  caractères  dilTérents,  la  même  irrégula- 
rité de  surface.  Le  poumon  est  beaucoup  plus  congestionné  qu'à  la  partie 
intérieure.  On  trouve  aussi  des  bosselures  et  des  dépressions,  au  niveau 
lesquelles  la  congestion  est  tantôt  diminuée,  tantôt  exagérée.  Souvent  ces 
bosselures  ne  sont  pas  appréciables  à  la  vue,  mais  en  palpant  le  poumon 
Dosent  des  noyaux  durs  et  plus  ou  moins  volumineux  qui  sont  tantôt  en 
DODtact  immédiat  avec  la  plèvre,  tantôt  en  sont  séparés  par  une  mince 
couche  de  tissu  crépitant.  Ces  noyaux  d'induration  peuvent  être  limités  à 
retendue  d'un  seul  lobule  ou  en  comprendre  plusieui*s.  Ils  sont  tantôt 
disséminés  dans  une  vaste  surface,  et  forment  des  mamelons  isolés,  ou 
bien  ils  sont  confluents  de  manière  à  occuper  la  plus  grande  partie  d'un 
lobe.  Mais,  même  dans  ce  cas,  on  est  frappé  de  la  netteté  avec  laquelle 
se  détachent  les  contours  des  lobules.  Chacun  d'eux  est  évidemment  lésé 
d*une  manière  qui  lui  est  propre  ;  des  altérations  semblables  se  produisent 
dans  ceux  qui  l'entourent  sans  qu'il  cesse  d'être  affecté  d'une  manière  in- 
dépendante. La  lésion  est  donc  lobulaire  ;  de  plus,  l'induration  du  tissu, 
Fépaississementdcs  cloisons  conjonctives  interlobulaires,  la  présence  fré- 
qoente  de  fausses  membranes  à  la  surface  de  la  plèvre,  la  coloration  rouge, 
'violacée,  et  parfois  grisâtre  ou  jaune,  tout  semble  indiquer  que  cette  lé- 
sionlobulaire  est  de  nature  inflammatoire^  qu'il  s'agit,  en  un  mot,  d'une 
pneumonie  lobulaire. 

Cette  pneumonie  lobulaire,  ordinairement  double,  se  développe  donc 
de  préférence  dans  les  parties  déclives.  Quand  elle  se  montre  dans  les 
parties  antérieures,  elle  envahit  d'abord  le  lobe  moyen  du  poumon  droit. 
'La  pneumonie  peut  rester  localisée  dans  des  lobules  isolés,  ou  bien 
s'étendre  à  plusieurs  et  même  occuper  rapidement  la  plus  grande  partie 
d'un  lobe  ou  même  d'un  poumon.  Dans  le  premier  cas,  la  pneumonie 
lobulaire  est  disséminée;  dans  le  second,  elle  est  généralisée.  Si  Ton 
examine  séparément  des  lobules  atteints  de  pneumonie,  on  peut  leur 
Irouver  différents  aspects  suivant  l'ancienneté  des  altérations.  Ils  peuvent 
être  jaunes,  ou  grisâtres,  ou  même  paraître  entièrement  purulents. 

Êljésiewts  de  cette  PKEUMONiE.  —  1*^  Splénisation.  —  Au  début,  la  conges- 
tion domine,  c'est  ce  qu'on  apprécie  très-bien,  surtout  lorsqu'un  certain 
nombre  de  lobules  altérés  forment  une  seule  masse  :  le  poumon  présente 
i  ce  niveau  une  couleur  bleuâtre,  plus  ou  moins  foncée  suivant  l'intensité 
de  la   congestion;  il  est   aussi  plus  ferme  et  plus  lourd  qu'au  niveau 
des  parties  saines.  Sur   la  coupe,  on  trouve   une  surface  plane,  lisse, 
aans granulations,  peu  friable,  d'une  couleur  noirâtre  à  cause  de  l'intcn- 
aité  de  la  congestion;   de  cette  surface  s'écoule  un  liquide  brunâtre,  et 
elle  se  recouvre  rapidement  du  sang  qui  sort  des  vaisseaux.    En  outre, 
^  Ton  insuffle  le  poumon,  la  lésion  disparait  en  partie.  Mais,  malgré 
cette  diffusion  apparente   des   lésions  qui  pourrait  les  faire  confondre 
.avec  une  congestion  œdémateuse  simple,  on  peut  encore  le  plus  souvent 
retrouver  leur  distribution   lobulaire.   Si   Ton  regarde  avec    attention 
dans  Taxe  du  lobule,  on  aperçoit  un  certain  nombre  de  points  grisâtres 


552     PNEUMOiNIE.  —  brongho-pneumonib.  —  ahàtomie  pathoumiqoi. 

plus  ou  moins  saillants,  friables  et  présentant  un  aspect  légèrementgrenu. 
Ces  points  sont  quelquefois  réunis  de  façon  à  former  une  petite  grappe 
qui  occupe  une  étendue  plus  ou  moins  considérable  dans  le  lobule. 
L'ensemble  de  la  lésion  a  reçu  le  nom  de  splénisaiion  (Sarco)  et 
correspond,  suivant  Charcot,  à  la  pneumonie  planiforme  de  Dechambre, 
à  la  pneumonie-pseudo-lobairedeBarricr,  à  la  congestion-lobulaîre  géné- 
ralisée de  Rilliet  etBarthez,  à  Thépatisation  rouge  broncho-poeurooiiique 
de  Damaschino.  On  a  voulu  pendant  longtemps  faire  de  cet  état  qudcpe 
chose  de  distinct  de  la  pneumonie  lobulaire.  Mais  Taspect  nuaneé  qae 
nous  avons  décrit,  et  sur  lequel  avaient  insisté  Bazin  et  Gairdoer,  aviit 
frappé  Barrier,  qui  Tavait  décrit  sous  le  nom  de  broncho-pneumonie 
pseudo-lobaire,  et  Vulpian,  qui  Favait  rattaché  également  aux  pneumo- 
nies lobulaires.  Enfin,  dans  ces  derniers  temps,  l'analyse  hîstologique i 
tranché  la  question  d'une  manière  définitive.  (Charcot) 

2^  Nodule  péribronchique.  —  Sur  le  fond  rouf^e,  violacé,  de  cettespléoi- 
sation.  on  dislingue,  avons-nous  dit,  le  second  élément  de  la  lésion.  Dans 
Taxe  des  lobules,  il  existe  des  points  saillants,  grisâtres,  denses,  légère» 
ment  granuleux,  laissant  suinter  un  liquide  puriforme  :  c'est  le  naduU 
péribronchique  de  Charcot,  qui  correspond,  au  début,  à  rhépatisatioD 
lobulaire  partielle  de  Rilliet  et  Barthez,  à  Thépatisation  grise  partielle 
de  Damaschino.  Ces  nodules  péribronchiques  sont  peu  friables  ;  ils  résistent 
à  l'insufllation  ;  un  petit  fragment  détaché  gagne  le  fond  de  Feau.  Ib 
peuvent  augmenter  considérablement  de  volume,  devenir  confluentsetfiire 
disparaître  les  parties  violacées  de  la  splénisation  ;  c'est  l'hépatisatîon  grise 
des  auteurs,  Tliépatisation  grise  lobulaire  généralisée  de  Rilliet  et  Bartbei. 

En  résumé,  dans  les  lobules  atteints  de  pneumonie,  on  peut  distîogoer 
deux  altérations  principales  ;  1"  la  splénisation,  caractérisée  par  un  aspect 
lisse  et  congestionné  occupant  plus  spécialement  la  périphérie  du  lobule; 
2^  rinflammation  péribronchique,  caractérisée  par  un  aspect  grisâtre, 
grenu,  par  une  induration  plus  marquée  et  circonscrite  habituellement 
dans  le  voisinage  de  la  bronche.  L'examen  microscopique  a  prouvé  la 
constance  de  ces  lésions  fondamentales,  à  des  degrés  divers,  dans  toutes  les 
broncho-pneumonies,  quelle  que  soit  leur  forme  ;  elles  varient  seulement 
dans  leur  composition  élémentaire ,  dans  les  proportions  qu'elles  prè- 
sentent  l'une  par  rapport  à  l'autre.  Le  plus  souvent,  au  début,  la  splénisa- 
tion domine,  le  foyer  de  pneumonie  est  violet  ou  brunâtre,  sa  surface  de 
section  est  foncée,  dense,  sans  grsinuhiions  (période  de  congestion^  d'en- 
gouement ^  dliépalisation  rouge  des  auteurs).  V\\x%iàvà^  à  mesure  que  le 
contenu  des  alvéoles  augmente,  Tliyperémie  diminue,  le  foyer  prend  une 
coloration  grise  ou  jaunâtre  et  sa  consistance  paraît,  diminuer  (période 
dliépatisalion  grise  des  auteurs)  ;  le  processus  aboutit  au  ramollisse- 
ment et  à  la  suppuration  du  lobule,  dans  quelques  cas,  à  l'induration  et 
à  la  cirrhose. 

Âpres  avoir  défini  et  montré  macroscopiquement  les  lésions  du  lobule, 
nous  devons  maintenant  montrer  comment  elles  constituent  les  trois 
formes  principales  de  broncho-pneumonie  admises  par  les  auteurs. 


PNEDHONIE.    —   BRONCHO-PNEDMOKIK.    —   ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.        555 

Foimes  anatomiques  delà  pneumonie  lobnlaire,  —  1"  Il  y  a,  d'abord, 
la  pneumonie  lobulaire  disséminée  ou  mamelonnée  (lobulaire  discrète 
de  Bouchut),  désignée  encore  sous  les  noms  de  congestion ,  hépatisa- 
tion  lobulaire,  splénisatioR  par  lobules.  Elle  se  montre  le  plus  souvent  à 
la  partie  postérieure,  quel(|uefois  dans  les  languettes  et  les  bords  du 
poumon  (pneumonie  marginale  ou  corticale).  Le  nombre  des  noyaux  de 
pneumonie  est  variable  :  ils  sont  saillants,  variant  depuis  le  volume  d*un 
pois  à  celui  d'un  œuf  de  pigeon,  d'une  couleur  rouge  violacée  ou  bru- 
nâtre, durs  et  résistant  à  la  pression  ou  à  la  dilacéralion,  ayant  sou- 
Tentune  forme  losangique  due  à  leur  limitation  par  les  travées  interlobu- 
laires.  Quelquefois,  au  lieu  d'être  congestionnés,  les  noyaux  sont  grisâtres, 
pâles,  et  ne  tranchent  que  par  leur  saillie  et  leur  induration  sur  Jes 
lobules  sains  qui  les  entourent.  Souvent,  la  coupe  présente  une  surface 
grenue.  Le  noyau  subit  d'ailleurs  ultérieurement  des  transformations  qui 
peuvent  modifier  son  aspect;  il  peut  être  envahi  parla  suppuration  et 
présenter  un  petit  foyer  ramolli  à  son  centre.  Les  travées  de  tissu  con- 
jonctif  qui  l'entourent  sont  souvent  épaissies. 

2^  Lorsque  ces  transformations  s'effectuent,  il  est  rare  que  les  noyaux 
restent  disséminés,  les  lésions  s'étendent,  les  noyaux  deviennent  con- 
flnents,  tout  en  restant  distincts,  et  peuvent  occuper  presque  tout  un 
lobe.  Us  sont  le  siège  d'altérations  diverses  ;  les  uns  sont  hépatisés  ou  sim- 
plement congestionnés,  d'autres  sont  grisâtres  ou  purulents.  La  masse 
présente  des  aspects  variés,  sur  lesquels  tranchent  les  travées  intorlobu- 
laires  épaissies.  Souvent  les  parties  atteintes  donnent  au  doigt,  grâce  au 
mélange  des  parties  molles  et  dures,  une  consistance  spéciale  qui  a  été 
comparée  à  celle  du  pancréas.  On  la  remarque  surtout  dans  les  lan- 
guettes et  dans  le  lobe  moyen.  Cette  forme,  due  à  Tenvahissement  suc- 
cessif d'un  grand  nombre  de  lobules,  prend  le  nom  de  forme  lobulaire 
généralisée  (lobulaire  confluente  de  Bouchut). 

3*  Cette  inégalité  d'aspect  ne  se  retrouve  plus  dans  la  forme  pseudo- 
lobaire  (Barrier);  comme  son  nom  l'indique,  elle  simule  la  pneumonie 
lobaire.  Les  lobules  ne  sont  plus  distincts^  et,  au  lieu  de  présenter  une 
surface  marbrée,  inégale,  sillonnée  de  travées  intcrlobulaires,  ils  offrent 
une  surface  plane^  lisse,  sans  granulations,  peu  friable  ;  si  la  pneumonie 
est  récente,  la  splénisation  domine  (1'"  variété)  :  le  tissu  est  violacé  ou 
brunâtre,  et  la  coupe  est  rapidement  imbibée  par  le  «^ang  qui  sort  des 
vaisseaux.  La  nature  de  Taltération  est  difficile  à  reconnaître,  et  il  faut 
souvent  un  examen  attentif  pour  reconnaître  dans  l'axe  du  lobule  la  pe- 
tite zone  grisâtre  qui  représente  le  nodule  péribronchique.  Celui-ci  est 
noyé  en  quelque  sorte  dans  l'altération  diffuse  qui  l'entoure.  Dans  une 
seconde  variété,  les  nodules  péribronchiques  devenus  plus  volumineux 
font  disparaître,  en  se  soudant  les  uns  aux  autres,  les  zones  de  spléni- 
sation. Lorsqu'elle  envahit  ainsi  simultanément  des  lobules  entiers,  de  ma- 
nière à  donner  sur  la  coupe  une  surface  unie  et  grisâtre,  la  lésion  porte 
encore  le  nom  de  pseudo-lobaire,  lequel  est  rései-vé,  en  somme,  aux  pneu- 
monies lobu  laires  qui  simulent,  par  leur  étendue  et  leur  uniformité  d'aspect, 


■r>4     P.NKI'MuMK.  —  Hii(><>CHO-r>Ë(:iiusiE. 


•  AXATOIIB   PATHOLOGIQIII. 


les  lésions  de  la  pneumonie  franche.  C'est  surtout  celte  notion  d'uniromiilé 
dans  le?  lésions  qui  sépare,  suivant  nous,  la  pneumonie  pacudo-lobtire 
de  In  pneumonie  lohuiaire  généralisée,  formes  souvent  confondoei  dut»  le 
langage  médical.  11  est  toujours  possiblejde  distinguer  cette  lésion  de  U 
pneumonie  lobaire.Rilliet  etBartiiez  ont  fait  remarquer  que  les  vtriatiom 


A.  Coupo  IniB..rrJ 

de  l.p:.roi  A-UDt  hronrhc  de  mn.ïB  olilm.  On 

1i|K>.  Onroin-n  frl> 

-Dupc  det  glin.l»*  inflimniéei  ;  B.B,  irjv*«  mnjonr 

ce  cwpc  a»  ntsxau 

K«ruln  i>éribroKhii|i 

,de  couleurdans  cette  dernière  affectent  l'apparence  de  zones  conccntriijue*. 
le  centre  étant  toujours  pins  gris  que  la  périphérie,  qui  est  HahituellenHUl 
rougeâtre.  De  plus,  il  y  a  dans  la  broncho-pneumonie  psendo-lobaire  àes 
altérations  concomitantes  qni  éclairent  le  diagnostic;  les  lésions  browAi- 


PNEUMONIB. 


-   BnOflCUI>-PNEUX0.<<IE.    —  AHATOirE   FlTUOLOelQUB.        535 


qnes  d'abord,  puis  l'état  fœtal,  l'emphysème  et  souvent  desnojauxde 
pneumonie  dissémines  dans  les  deux  poumons. 

En  eflet,  les  diverses  formes  peuvent  se  rencontrer  isolées  ou  rûunies  ; 
i\  est  très-commun  de  trouver  ctiez  un  même  individu  de  la  pneumonie 
pseudo-lobaire,  en  même  temps  que  de  la  pneumonie  disséminée  ou  gé- 
Déralisée  suit  dans  le  même  poumon,  soit  dans  le  poumon  du  côté  opposé. 

Analyse  hixlologique .  —  Nous  étudierons  successivement  :  1°  les 
travées  interlobulaires  qui  circonscrivent  le  lobule  ;  2°  les  iluta  centraux, 
on  nadidet  péribronckique» ,  entourant  les  bronches  lobulaîres  ou  aci- 
«leuses  et  leurs  artères  satellites  (hépatisation  lobutairc)  ;  5*  lesparltet 


tpténisées  qui  occupent  le  reste  du  lobule  et  forment  le  fond  commun, 
la  lésion  diffuse  sur  laquelle  se  détachent  les  nodules  et  les  travées  péri- 
lobulaires  et  périactneuses  (fig.  35). 

Les  travées  conjonctives  interlobulaires  sont  épaissies  ;  leurs  vaisseaux 
sont  congés!  ionnés,  on  trouve  fréquemment  dans  leur  épaisseur  des  leu- 
cocytes et  des  exsudais  fîbrineux  ;  les  lymphatiques  qu'elles  renferment 
peuvent  être  i-eniplis  des  mêmes  éléments,  et  'quelquefois  de  globules 
sanguins,  lorsque  la  congestion  est  très-intense.  Les  travées  périacineuses 
présentent  les  mêmes  lésions. 

Dans  le  voisinage  de  la  bronche  dont  l'épithélium  peut  être  conservé 
mais  dont  la  paroi  est  infîlttée  de  Icucocylos,  ainsi  que  la  gaine  adventice 
de  l'artère  qui  l'avoisine,  on  voit  une  ceinture  d'alvéoles  c(  de  conduits 
alvéolaires  distendus  par  des  exsudais  inflammatoires.  Cette  ceinture  est 
liabiluellement  incomplète,  du   côté  de  l'artériole  qui  semble  préser^'er 


536  PNEUMONIE.  —  brokcho-pneomonie.  —  anatomie  patiiouwiqoi. 
les  alvéoles  qui  Tavoisinent  de  l'extension  de  la  phlcgmasie  bronchique. 
Cependant  dans  les  cas  intenses,  rinHainmation  alvéolaire  péribronchique 
enveloppe  aussi  Tarière.  Tel  est  le  nodule  péribronchique  (fig.  Si)  dont 
le  volume  varie  suivant  les  cas  :  tantôt  borné  à  une  seule  rangée  d'alvéoles 
(rinsufflation  est  alors  possible),  tantôt  occupant  la  plus  grande  partie 
du  lobule  de  manière  à  se  confo'ndre  avec  les  nodules  voisins.  Les  exsa- 
dats  inflammatoires  qui  remplissent  les  alvéoles  présentent  deux  variétés  : 
ils  peuvent  être  composés  à  peu  près  exclusivement  de  leucocytes.  Cest 
là  le  cas  le  plus  habituel  chez  le  vieillard.  Plus  fréquemment,  les  ^. 
bules  blancs  et  les  cellules  épithéliales  sont  enveloppés  dans  un  té- 
seau  fibrineux  aussi  remarquable  que  celui  de  la  pneumonie  tranche. 
C'est  une  véritable  pneumonie  péribronchique,  et,  comme  l'a  fait  remar- 
quer Charcot,  la  présence  de  cet  exsudât,  qu'on  rencontre  parfois  à  qq 
degré  vraiment  extraordinaire,  montre  bien  que  la  présence  de  lailbrineoe 
peut  cire  considérée  comme  caractéristique  absolue  de  la  pneumonie 
franche.  On  la  retrouve  dans  la  rougeole,  la  coqueluche,  la  fièvre 
typhoïde,  la  diphlhérie,  etc..  Comme  nous  l'avons  vu,  cette  exsudation 
se  retrouve  quelquefois  aussi  à  la  périphérie  du  lobule  dans  les  espaces 
lymphatiques,  et  autour  des  vaisseaux.  Quelle  que  soit  la  nature  de  l'ex- 
sudat,  le  nodule  péribronchique  est  toujours  nettement  caractérisé  par 
sa  forme  et  son  siège  constant  autour  de  la  bronche.  Quelquefois  cepen- 
dant celle-ci  ne  se  retrouve  pas  à  son  centre,  le  nodule  paraît  indépen- 
dant (nodule  erratique  de  Charcot)  ;  cette  disposition  se  rencontre  lorsque 
la  coupe  est  irrégulière,  car  ces  nodules  se  sont  développés  également 
autour  des  bronches. 

Autour  des  nodules  péribronchiques  se  voient  des  lésions  de  nature 
très-diiïérente,  et  qui  constituent  la  splénisation.  Les  parois  des  alvéoles 
sont  Irès-congcstionnées  ;  souvent  elles  ont  subi  un  commencement  d'in- 
filtration par  les  cellules  embryonnaires,  s'il  s'agit  d'un  cas  déjà  ancien. 
Dans  l'intérieur  des  alvéoles,  la  masse  contenue  est  formée  de  cellules 
épithéliales  volumineuses  et  de  leucocytes.  Dans  les  cas  anciens,  on 
trouve  encore  des  corps  granuleux.  C'est  l'épilhclium  alvéolaire  qui  est 
surtout  atteint  ;  très-susceptible,  il  se  multiplie,  se  gonfle,  et  se  des- 
quame sous  l'influence  des  moindres  incitations.  La  lésion  est  donc 
avant  tout  superflcielle,  épithélialc,  de  nature  inflammatoire  ou  plutôt 
irritalivc  :  c'est  la  pneumonie  catarrhale,  desquamative  et  épithé- 
lialc. C'est  la  congestion  et  la  prolifération  épithéliale  qui  dominent  dans 
les  parties  splénisécs;  au  contraire,  ce  sont  les  lésions  exsudatives  \ribrmc 
et  leucocytes)  qui  dominent  dans  les  travées  interlobulaireset  dans  le  no- 
dule péribronchique.  Ce  sont  lu  les  deux  points  fondamentaux  de  l'élude 
de  la  pneumonie  lobulaire.  II  faut  y  ajouter  les  lésions  do  la  bronche, 
qui  tiennent  toutes  les  autres  dans  leur  dépendance.  Ce  qui  les  caracté- 
rise, c'est  l'inHItration  de  leurs  parois  par  des  cellules  embryonnaires, 
infiltration  qui  s'étend  plus  tard  au  tissu  périvasculaire  ;  quand  la  lésion 
est  plus  ancienne,  il  y  a  même  endartérile.  Déplus,  les  espaces  lympha- 
tiques péribronchiques  et  périarlériels  montrent  les  mêmes  lésions  que 


PNEUMONIE.   —    BRONCHO-PNEDMOMIE.    —  AFCATOMIE   PATHOLOGIQUE.        537 

nous  avons  signalées  déjà  dans  les  espaces  périlobulaires.  Il  y  a  dans  le 
siège  et  la  marche  des  lésions  une  tendance  à  la  fixité,  au  passage  à  l'état 
chronique  et  au  développement  de  la  cirrhose  pulmonaire. 

Comme  on  voit  par  cet  exposé,  Tinflammation  atteint  le  lobule  par 
Pintermédiaire  des  bronches;  elle  se  propage  par  voie  de  continuité,  ga- 
gnant successivement  les  bronches  lobulaires,  acineuses,les  conduits  alvéo- 
laires et  les  alvéoles.  Elle  se  traduit  d'abord  par  des  altérations  superfi- 
cielles, atteignant  surtout  Tépithélium  qui  se  gonfle,  tombe,  se  multiplie: 
c*esiunc  lésion  épithéliale  ou  mieux  catarrhale,  pour  employer  l'expres- 
sion la  plus  répandue,  c'est  le  processus  qui  parait  dominer  principale- 
ment dans  les  zones  splénisées  du  lobule. Mais, d'autre  part,  les  exsudations 
se  produisent  dans  l'épaisseur  de  la  paroi  bronchique,  dont  Finflamma- 
lion,  d'abord  superficielle,  est  devenue  parenchymateuse.  De  la  fibrine, 
des  leucocytes  sont  exsudes  par  les  vaisseaux  congestionnés,  et  se  dé- 
posent dans  le  tissu  conjonctif  de  la  bronche  et  des  vaisseaux  bron- 
chiques. La  distribution  de  leurs  ramuscules  terminaux  dans  le  lobule 
peut  nous  expliquer  facilement  la  circonscription  des  lésions  exsudatives 
autour  de  la  bronche  et  la  formation  du  nodule  péribronchique.  L'ar- 
tère bronchique  se  perd,  en  effet,  dans  le  lobule,  sous  la  forme  d'une 
espèce  de  pinceau  vasculairc  compris  dans  l'épaisseur  des  canaux  alvéo- 
laires et  des  alvéoles  péribronchiques.  Le  nodule  péribronchique  se 
forme,  par  conséquent,  dans  une  portion  du  lobule  émanant  directement 
de  la  bronche,  et  dont  les  lésions  sont,  par  cela  même,  plus  intenses  et 
plus  profondes. 

Enfin,  le  système  lymphatique  du  lobule  est  atteint  également  ;  les 
Taisseaux  eflërenls  qui  forment  les  gaines  périvasculaires  et  péribronchiques 
participent  de  bonne  heure  à  Tinflammation  des  bronches,  la  stase  lym- 
phatique vient  adjoindre  ses  efforts  à  ceux  de  la  stase  sanguine.  Les  exsu- 
dais fibrineux  se  forment  dans  les  espaces  lymphatiques,  et  autour  des 
▼aisseaux  sanguins  situés  dans  les  travées  conjonctives  périlobulaires  et  pé- 
riacineuses.  Bronchite  et  inflammation  alvéolaire  péribronchique,  pneu- 
monie desquamalive,  inflammation  de  l'enveloppe  conjonctive  du  lobule 
et  des  vais:»eaux,  lymphangites,  telles  sont  les  lésions  du  lobule  dans  la 
broncho-pneumonie;  elles  représentent,  comme  oïl  le  voit,  toutes  les 
formes  de  l'inflammation  dans  le  poumon. 

Il  nous  reste  à  apprécier  la  valeur  de  ces  diverses  lésions,  à  préciser 
leur  signification  dans  le  processus  complexe  qui  constitue  la  broncho- 
pneumonie.  La  splénisation  est  évidemment  la  lésion  la  plus  répandue, 
c'est  l'irritation  épithéliale,  la  pneumonie  desquamative  ou  catarrhale 
qui  domine  l'évolution  de  la  broncho-|meumonie,  au  moins  à  son  début. 
Mais  cette  lésion  si  importante  peut  se  retrouver  à  un  moindre  degré, 
il  est  vrai,  dans  les  congestions  simples,  actives  on  passives,  elle  ne  ca- 
ractérise pas  absolument  la  broncho-pneumonie.  Le  trait  principal  de 
eelle  ci  réside  dans  la  présence  du  nodule  péribronchique,  dont  la  com- 
position élémentaire  en  fibrine  et  en  leucocytes  peut  varier,  mais  qui 
le  retrouve  toujours  chaque  fois  que  la  bronche  a,  pour  ainsi  dire,  porté 


558     PNEUMONIE.  —  broncho-piseumonie.  —  anatoiiib  patholouqui. 

l'inflammation  jusqu'au  lobule.  Sa  signification  pronostique  est  également 
plus  grave  que  celle  de  la  splcnisation,  car  il  indique  une  lésion  pro- 
fonde pnrenchymateuse  dont  la  résolution  sera  difficile. 

En  résumé,  dans  le  processus  de  la  pneumonie  lobulaire,  on  peot 
distinguer  trois  phases  :  l**  bronchile  capillaire  intra-lobtUaire  arec  con- 
gestion du  lobule  plus  ou  moins  intense,  suivant  l'absence  ou  reiîsleooe 
de  l'état  fœtal  ;  2**  en  même  temps,  inflammation  caiarrhale  desdvéoles 
ei  inflammation  exsudative  péribronchique  et  interstitielle  ;  ù*  j^asit 
terminale,  exsudation  purulente  de  plus  eti  plus  abotidaniCf  résorp- 
tion^ ou  organisation  des  exsudats  et  passage  à  rétal  subaigu,  Noos 
ne  suivrons  pas  pour  le  moment  toute  cette  évolution  des  lésions^  nous 
nous  bornons  à  étudier  leur  marche  à  l'état  aigu. 

Évolution  et  terminaison  de  la  broncho-pneumonie  :  1**  Résolution; 
2"  Suppuration  du  lobule  [granulation  purulente)  ;  Dilatation  àe% 
bironches;  vacuoles;  abcès,  —  Broncho-pneumonie  subaiguë  et  chro- 
nique, —  Caséification. 

Que  vont  devenir  les  deux  éléments  inflammatoires  bronchique  et 
pulmonaire  dont  la  réunion  constitue  la  broncho-pneumonie?  Lorsque 
la  résolution  a  lieu,  elle  se  produit  lentement,  les  exsudats  subissent  h 
transformation  granulo-graisseuse,  se  désagrègent,  se  transforment  eo 
une  sorte  d'émulsion  qui  est  éliminée  ou  disparait  ultérieurement  par 
voie  d'absorption. 

Dans  les  cas  où  la  maladie  n'a  pas  pris  une  allure  suraiguê,  le  maUde 
survit  aux  premiers  accidents,  les  lésions  suivent  leur  cours  et  aboutissent 
à  la  suppuration.  Quelquefois  un  lobule  se  remplit  d'une  agglomération 
considérable  de  leucocytes  qui  se  multiplient  à  la  fois  dans  le  nodule 
péribronchique  et  dans  les  zones  splénisées,  il  proémine  à  la  surface  du 
poumon  sous  l'aspect  d'une  masse  jaunâtre  (granulation  purulente).  U 
peut  y  avoir  destruction  des  parois  alvéolaires  et  des  travées  des  acini;  h 
granulation  purulente  prend  alors  le  nom  de  vacuole.  Toutefois  ce  pro- 
cessus destructif  ne  paraît  pas  le  plus  commun  et  ne  se  voit  guère  que 
dans  la  broncho-pneumonie  qui  passe  à  l'état  subaigu.  Les  parois  des 
bronches  sont  envahies  dans  cette  seconde  période  par  une  production  de 
leucocytes  qui  infiltrent  les  couches  de  la  bronche,  compriment  sesê/é- 
mcnts  et  finissent  par  amener  la  destruction  de  l'anneau  musculaire.  Alors 
la  bronche  se  déforme  et  se  dilate  en  refoulant  autour  d'elle  les  alvéoles 
voisins,  dont  les  parois,  également  envahies  p.ïr  l'infiltration  embryon- 
naire, se  laissent  ulcérer  ou  renforcent  la  bronche  dilatée  dont  elles 
semblent  faire  partie.  S'il  s'agit  d'une  bronchiole  terminale,  son  extré- 
mité ainsi  dilatée  présente  la  forme  d'une  ampoule  à  parois  épaisses  qui 
se  remplit  de  pus.  Sur  la  coupe  du  poumon,  ces  dilatations  apparaissent 
sous  forme  de  foyers  purulents  qui  existent  dans  une  partie  d*un  lobe  ou 
dans  un  lobe  tout  entier,  souvent  contigus  et  séparés  seulement  par  des 
travées  d'épaisseur  variable  (abcès  bronchiaux  de  Gairdner).  Un  examen 
attentif  fait  reconnaître  que  ces  foyers  sont  formés  par  les  bronches  dila- 
tées, dont  les  parois  se  sont  souvent  rompues  de  manière  à  former  des 


PNEUMONIE.    RRONCHO-PMEUMONIE.   ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.        559 

CdiDinuiiications  anormales.  Au  reste,  les  auteurs  ont  décrit  sous  ce  nom 
de  vacuole  des  lésions  très-différentes.  Suivant  les  uns,  comme  nous  ve- 
nons de  le  voir,  elle  serait  consécutive  à  la  suppuration  du  lobule,  au  dé- 
veloppement considérable  de  la  granulation  jaune  (Barrier,  Damaschino). 
Suivant  nous  cette  forme  est  rare  :  chaque  fois  que  nous  avons  voulu  cxa- 
tniiier  un  foyer  purulent  dans  la  broncho-pneumonie,  nous  avons  toujours 
vu,  à  Taidede  la  potasse  et  de  la  soude  caustique  qui  détruisent  les  globu- 
les blancs  en  respectant  le  squelette  élastique  de  Talvéole,  que  celui-ci 
«lait  intact,  et  que  la  fonte  purulente  n'était  qu'apparente.  On  conçoit 
cependant  à  la  rigueur  ce  mécanisme  de  la  formation  des  vacuoles. 

Nous  nous  rattachons  pour  notre  part  à  Topinion  de  ceux  qui  pensent 
4(06  les  vacuoles  sont  dues  à  la  dilatation  des  bronches.  Celles-ci  forment  à 
leur  extrémité  terminale  des  ampoules,  qui  refoulent  le  tissu  pulmo- 
niire  et  viennent  se  mettre  en  contact  avec  la  plèvre.  Sur  la  coupe  elles 
ont  Taspect  de  cavités  irrégulières,  pleines  de  pus.  Nous  n'avons  pas  à  re- 
Tenir  sur  la  description  qui  a  été  donnée  déjà  ;  nous  voulons  seulement  si- 
4{naler  à  propos  des  vacuoles  périphériques  l'opinion  de  Hardy  et  Béhier  et 
de  Léon  Le  Fort.  Pénétrés  de  Tidéc  que  le  pus  contenu  dans  le  lobule  pro- 
venait des  bronches,  ces  auteurs  ont  admis  qu'il  finissait  par  dilater  le  lo- 
bule, par  refouler  les  parois  alvéolaires,  puis  de  proche  en  proche  les  parois 
Ae  la  bronche  lobulaire  elle-même,  qui  finissait  par  constituer  la  paroi 
de  la  vacuole.  A  part  ce  mécanisme  qui  ne  peut  plus  être  admis  aujour- 
d'hui, ces  auteurs  avaient  donc  rattaché  la  vacuole  à  sa  véritable  cause, 
h  dilatation  des  bronches. 

Enfin,  d'après  un  antre  mécanisme,  la  vacuole  se  formerait  suivant 
«n  processus  aigu,  se  rapprochant  un  peu  de  celui  qui  préside  à  la  for- 
mation des  bulles  d'emphysème.  La  bronche  acineusc  enflammée,  et 
fortoul  les  conduits  alvéolaires  cèdent  à  la  pression  des  exsudats  ou  bien 
ae  dilatent  par  suite  de  l'inflammation  de  leurs  parois,  qui  deviennent 
liaaes;  la  même  dilatation  se  produit  en  même  temps  dans  la  cavité  de 
Taciniis  qui  est  rapidement  envahi  par  le  pus.  Ce  mécanisme  explique 
éridemment  d'une  manière  très-rationnelle  la  formation,  d'ailleurs  très- 
rare,  des  vacuoles  dans  les  cas  aigus  de  courte  durée.  11  n'a  pas  encore 
subi  le  contrôle  de  l'analyse  histologique.  Legendre  et  Bailly  admettent 
encore  que  la  dilatation  du  lobule  par  le  pus  détermine  la  rupture  des 
vésicules.  La  vacuole  n'est  plus  limitée  que  par  la  plèvre.  On  voit,  en 
lésumé,  que  le  nom  de  vacuole  a  été  donné  à  toute  collection  purulente 
un  peu  abondante,  formée  dans  les  bronches  dilatées,  ou  dans  le  paren- 
^yme  du  lobule.  Nous  devons  même  ajouter  que  leur  description  se 
rapproche  beaucoup  de  celle  que  les  auteurs  ont  donnée  des  abcès  de  la 
broncho-pneumonie.  Ils  n'établissent  entre  ces  deux  lésions  qu'un  seul 
caractère  différentiel,  l'existence  ou  Tabsence  de  communication  avec  les 
bronches.  Billiet  et  Barthez  n'admettent  même  pas  cette  différence  :  ils 
ont  vu  les  bronches  tantôt  contournant  les  abcès,  tantôt  s'ouvrant  direc- 
tement dans  leur  cavité.  Us  emploient  le  nom  de  vacuole  dans  leur  de- 
leription  des  abcès  qu'ils  considèrent  comme  la  même  lésion  à  des  degrés 


540      PNEUMONIE.  —  brokcho-pneumoisik.  —  anatohe  patholociqqi. 

différents.  Dans  un  cas  d'abcès  sous-pleural  du  Yolume  d*un  œuf  de  pi- 
geon situé  au  milieu  d'un  tissu  inclure,  et  paraissant  communiqué  arec 
une  bronche,  nous  avons  trouvé  la  cavité  tapissée  par  une  membnuie 
lisse  et  épaisse,  que  l'examen  microscopique  montra  formée  par  Jo 
tissu  conjonctif  fibrillaire.  La  plèvre  épaissie,  recouverte  de  fibrine  était 
immédiatement  en  contact  avec  la  cavité.  Les  travées  interlobubîres  et 
interacineuses  voisines  étaient  très-épaissies.  Le  tissu  pulmonaire  montrait 
les  lésions  de  la  pneumonie  chronique,  infiltration  embryonnaire  des 
parois  alvéolaires,  dont  les  cavités  étaient  remplies  de  cellules  en  voie  At 
dégénérescence  graisseuse  et  de  cristaux  d'acides  gras.Ces  cavernes  d'ori- 
gine inflammatoire  sont  très-rares.  Barrier  a  vu  dans  deux  cas  les  abcès 
de  la  broncho-pneumonie  s'ouvrir  dans  la  plèvre  et  donner  lieu  au  pyo- 
pneumothorax.  Stcffena  vu  aussi  cette  terminaison  dans  un  casa  la  saile 
de  la  rougeole.  Nous  avons  déjà  dit  que  ces  diverses  lésions  s'observeot 
plutôt  quand  la  broncho-pneumonie  devient  subaiguc.  Cette  forme  soo- 
cède  tantôt  à  la  broncho-pneumonie  aiguë,  de  môme  que  la  broncho-poeo- 
monie  chronique,  tantôt  elle  revêt  ses  caractères  propres  dès  le  début 
de  la  maladie. 

L'établissement  de  ces  lésions  à  évolution  lente  est,  suivant  nous,  on 
des  meilleurs  arguments  qu'on  puisse  opposer  à  ceux  qui  admettent,  avec 
Ziemssen,  Bartels,  Steiner,  Roger,  Wyss,  etc.,  la  caséification  comme 
mode  de  terminaison  de  la  broncho-pneumonie.  Cette  caséification  n  ap- 
partient qu'aux  broncho-pneumonies  tuberculeuses.  Elle  débute  aussi 
dans  le  nodule  péribronchique  ;  mais  l'étude  récente  de  ces  broncho- 
pneumonies tuberculeuses  à  marche  rapide  a  démontré  que  le  nodule 
présente  dès  le  début  une  constitution  élémentaire  spéciale,  différente  de 
celle  du  nodule  inflammatoire.  Ce  n'est  plus  une  agglomération  résultant 
de  la  desquamation  des  cellules  épithélialcs,  de  l'exsudation  de  la  fibrine 
et  des  leucocytes;  c'est  une  véritable  néoplasie  embryonnaire,  dont  les 
éléments  subissent  une  série  d'évolutions  régressives  aboutissant  à  lad^é- 
néresccnce  caséeuse  [Voy,  article  Piithisie,  tome  XXVll,  p.  252  et  sui- 
vantes). Suivant  Charcot,  la  caséification  fait  défaut  même  dans  les  pneu- 
monies aiguës  «survenues  chez  les  individus  tuberculeux  ou  disposés  à  le 
devenir;  si  la  maladie  se  prolonge,  elle  aboutit  à  la  cirrhose  du  poumon. 
Un  fait  que  nous  avons  observé  à  l'hôpital  Sainte-Eugénie  confirme  bien 
celte  manière  de  voir  :  une  petite  fille  de  trois  ans  succomba  dans  le 
service  de  Triboulet  à  une  broncho-pneumonie  datant  de  trois  mois  et 
consécutive  à  la  rougeole.  A  l'autopsie  on  trouva  l'un  des  poumons  car- 
nisé,  mais  sans  dégénérescence  caséeuse,  fait  d'autant  plus  à  noter  qu'on 
voyait  des  granulations  tuberculeuses  récentes  à  la  surface  des  séreuses 
et  principalement  de  la  plèvre  (Thèse  iuaug.,  p.  73).  Nous  croyons  ce- 
pendant qu'il  faut  considérer  comme  rares,  même  ces  tuberculose* 
secondaires,  indépendantes  de  l'évolution  de  la  broncho-pneumonie. 

B.  Lésions  concomitantes.  —  Nous  rangeons  sous  cette  dénominî- 
tion  diverses  lésions  d'inégale  importance  :  quelques-unes  sont  ét^oi(^ 
ment  liées  à  l'évolution  de  la  broncho-pneumonie,  comme  la  congestion. 


PNEUMONIE.    —   BRONCHO-rNEUMOHIB.   —  ANATOMIE   PATH0L06IQUE.        541 

qui  existe  déjà  en  tant  qu'élément  de  Tinflammation  broncho-pulmo- 
naire. D'autres,  moins  constantes,  doivent  être  «considérées  comme  ac- 
cessoires et  comme  consécutives;  ce  sont  les  congestions  passives^ 
Ytedème^  Yétat  fœtale  Vemphysème,  qui  résultent  de  la  stagnation  des 
mucosités  bronchiques  et  des  troubles  apportés  dans  le  mécanisme  de  la 
respiration.  D'autres,  enfin,  n'oiïrent  rien  de  spécial  à  la  broncho- 
pneumonie  :  ce  sont  les  lésions  de  voisinage  atteignant  la  plèvre  et  les 
ganglions  bronchiques  et  les  lésions  des  organes. 

Congestion  pulmonaire.  —  La  congestion  occupe  une  grande  place 
dans  les  lésions  de  la  broncho-pneumonie  :  nous  l'avons  vue  inséparable 
de  deux  des  plus  importantes,  la  splénisation  et  l'état  fœtal.  Ce  n'est 
guère  qu'à  l'occasion  de  ce  dernier  qu'elle  se  développe  isolément  et  sans 
lésion  du  lobule  ;  elle  s'accompagne  ailleurs  de  la  desquamation  épithé- 
liale,  et  ce  n'est  que  dans  les  parties  périphériques  du  lobule  qu'on  peut 
la  rencontrer  encore  à  l'état  isolé.  Nous  l'avons  trouvée  plus  constante 
dans  le  système  bronchique,  où  l'on  voit  nettement  se  dessiner  à  l'exa- 
men microscopique  la  double  couronne  des  vaisseaux,  formée  à  la  partie 
externe  par  les  gros  troncs  parallèles  à  la  bronche,  et  à  la  partie  interne 
par  les  rameaux  qui  en  émergent  pour  se  rendre  dans  les  replis  de  la 
muqueuse  bronchique.  De  même  on  observe  dans  certains  cas  l'injection 
des  iraisseaux  alvéolaires   périacineux  et  périlobulaires. 

Ses  causes  sont  très-nombreuses  ;  nous  signalerons  d'abord  les  poussées 
eongeslives  qui  accompagnent  le  développement  de  la  broncho-pneumo- 
nie et  qui  modifient  si  fréquemrnent  les  signes  fournis  par  l'exploration 
physique.  Ces  congestions  actives  sont  difficilement  appréciables  à  l'au- 
topsie; mais  leur  mobilité,  si  grande  pendant  la  vie  et  dépendant  sans 
doute  des  troubles  de  l'innervation  vaso-motrice,  fait  comprendre  pourquoi 
tù  ne  la  retrouve  plus  après  la  mort  dans  des  points  où  elle  avait  du 
'Certainement  se  produire.  La  congestion  siège  surtout  aux  parties  posté- 
rieures des  poumons,  de  même  que  les  lésions  inflammatoires  ;  nous  ver- 
rons que  ce  siège  constant  est  en  rapport  avec  le  rôle  important  joué  par 
les  influences  mécaniques  dans  le  développement  de  la  broncho- 
pneumonie.  Cette  congestion  est  donc,  en  grande  partie,  passive,  et 
subordonnée  à  l'hypostase.  11  faut  cependant  tenir  compte  ici  d'une 
cause  importante  d'erreur  fournie  par  la  situation  que  l'on  donne 
habituellement  aux  cadavres,  et  par  suite  de  laquelle  les  parties  antérieu- 
res du  poumon  se  décongestionnent  au  profit  des  parties  postérieures. 
Due  autre  forme  de  congestion  passive  s'observe  dans  l'état  fœtal,  et  est 
causée  par  l'abaissement  de  la  pression  de  l'air  dans  les  alvéoles  qui  ré- 
sulte de  l'obturation  bronchique. 

L'œdème  pulmonaire  accompagne  ces  congestions  à  des  degrés  divers  ; 
l'exsudation  séreuse  distend  les  alvéoles  et  contribue  à  donner  à  la  coupe 
du  poumon  cette  surface  plane  lisse,  caractéristique  de  la  splénisation.  Il 
est  rare  d'observer  l'œdème  à  l'état  isolé. 

Etal  fœtcd.  —  Cette  lésion,  comme  nous  Tavons  vu,  se  produit  sur- 
tout dans  le  système  bronchique  antérieur  ;  elle  occupe  aussi  une  place 


542     PNEUMONIE,  —  brokciio-pmeumonib.  —  amàtomie  pathoukiqoe. 

importante  dans  les  lésions  du  système  postérieur;  mais  là  elle  se  trouve 
mélangée  aux  lésions  inflammatoires.  Elle  a  reçu  aussi  les  noms  de 
carîiification  (Rufz,  RillietetBarthez),  à' cUélectasiej  de  pneumonie  mar- 
gitialej  de  collapsus  pulmonaire,  d'apneumatosis.  Le  nom  d*étal  toelaK 
donné  par  Logendre  et  Bailly,  a  prévalu ,  comme  exprimant  le  mieux  les 
analogies  qui  existent  entre  cette  lésion  et  l'état  du  poumoD  ches  les 
fœtus  qui  n*ont  pas  encore  respiré.  La  lésion  peut  être  limitée  îim  seul 
lobule  ou  bien  elle  peut  en  occuper  plusieurs,  s'étendre  à  la  plot  gnnde 
partie  d'un  lobe,  ou  même  à  un  lobe  tout  entier.  Souvent  le  pounum  du 
côté  opposé  est  affecté  de  la  même  manière  symétriquement.  Elle  se 
montre  surtout  sur  les  bords  tranchants  sans  s'étendre  beaucoup  dans  b 
profondeur  du  poumon  (pneumonie  marginale  de  de  la  Berge).  Les  lo- 
bules atteints  sont  exactement  limités  par  les  espaces  interlobulaires  et 
sont  fortement  déprimés  au-dessous  du  niveau  général.  La  consistanoe 
rappelle  celle  de  la  chair  musculaire,  d'où  le  nom  de  camificatieD.  c  ht 
tissu  privé  d'air  ne  crépite  plus  à  la  pression.  11  est  charnu,  compact, 
mais  souple,  flasque,  d'une  pesanteur  spécifique  plus  grande  que  celle  de 
l'eau,  ce  qui  le  fait  plonger  au  fond  de  ce  liquide.  On  distingue  très  bien 
à  sa  surface  les  interstices  celluleux  qui  séparent  les  lobules.  Sa  couleur 
est  en  général  d'un  rouge  violet  ;  mais  elle  peut  devenir  noirâtre,  quand 
le  sang  qui  l'engorge  est  en  plus  grande  abondance.  La  coupe  est  lisse, 
uniforme,  nette.  On  distingue  parfaitement  la  texture  organique  et  les  > 
différents  éléments  qui  entrent  dans  la  composition  du  tissu.  Enfin,  Tin-  I 
sufflation  fait  pénétrer  l'air  dans  toutes  tes  vésicules  et  rend  facilement  à 
l'organe  ses  caractères  physiologiques.  »  Les  bronches  sont  remplies  parle 
muco-pus  ou  parles  fausses  membrancs.Tcls sont  les  principaux  traits  de 
la  description  que  Lcgcndre  etliailly  ont  donnée  de  cette  lésion,  desirip- 
tion  à  laquelle  on  a  peu  ajouté  et  qui  est  restée  classique.  Laennec,  in- 
dral,  Louis,  Dugès,  Kufz,  etc.,  l'avaient  signalée  plus  ou  moins  nettement, 
sans  en  comprendre  la  nature. 

Deux  autres  états  du  poumon,  dont  l'un  peut  se  rencontrer  dans  la 
broncho-pneumonie,  doivent  être  immédiatement  rapprochés  de  Tétat 
fœtal  :  c'est,  d'une  part,  Tatélectasie  des  nouveau-nés,  d*aulre  part,  le  col- 
lapsus  pulmonaire  qui  succède  à  la  compression  du  poumon. 

L'atélectasie  des  nouveau-nés,  décrite  en   1852   par  Jœrg,  peut  être 
comparée  de  tous  points  a  la  lésion  qu'ont  fait  connaître  Legcndre  et  Bailly  : 
par  ses  caractères  physiques,  par  sa  nature,  par  ses  causes  mêmes,  elle  prt'- 
sente  avec  elle  la  plus  grande  analogie.  C'est  l'obstruction  bronchique  qui    J 
la  détermine  également ,  mais  le  catarrhe  bronchique  n'agil  ici,  joint  à  la    ] 
faiblesse  des  mouvements   du  thorax,  qu'en  maintenant    TaiTaissemeat    j 
des  alvéoles  pulmonaires  qui  existe  avant  la  naissance.  On  peut,  à  l'aiiie    J 
de  rinsufllation,  vaincre  l'obstacle  qui  s'oppose  à  la  respiration,  produira   / 
le  déplissement  des  alvéoles  et,  par  conséquent,  faire  cesser  l'atélectasie.   / 
Celle-ci  représente  donc,  en  réalité,  un  état  congénital  dont  la  nécessité  j 
de  riiématose  fait  une  lésion  au  moment  des  premiers  elTorts  respiratoires.   | 

La  compression  des  poumons,  par  un  épanchement,  par  des  turueun»,  i 


PNEUMONIE.    —  BROKCUO-PNBUMOMIE.    —  AMATOMIE   PATHOLOGIQUE.        545 

etc.,  amène  aussi  un  état  du  poumon  qui  présente  de  grandes  analogies  avec 
rétat  fœtai.  Elle  détermine  l'aplatissement  des  alvéoles,  le  resserrement 
du  parenchyme  qui  augmente  de  densité  et  de  consistance.  Mais  là  s'ar- 
rêtent les  analogies  en  ce  qui  concerne  Taspect  extérieur  :  car  la  congestion, 
fi  remarquable  dans  Tatélectasie  des  nouveau-nés  et  dans  l'état  fœtal, 
manque  habituellement  dans  le  collapsus  pulmonaire  qui  succède  à  la 
compression.  Le  poumon  peut  conserver  parfois  une  teinte  rouge  lorsque 
la  compression  n'est  pas  très-forte  ;  sinon  il  est  exsangue,  sec,  aminci, 
soofent  semblable  à  un  morceau  de  cuir.  Il  y  a  cependant  un  caractère 
qui  rapproche  le  collapsus  pulmonaire  de  Tétat  fœtal,  et  qui  montre  que 
ces  deux  lésions  ne  diflèrent  que  par  la  congestion  :  c'est  le  rôle  indifférent 
qu'ils  jouent  par  rapport  aux  inflammations  du  parenchyme  pulmonaire. 
Celles-ci  ne  paraissent  nullement  influencées  dans  leur  marche  dans  les 
cas  de  compression  du  poumon.  El  quant  à  l'état  fœtal,  nous  verrons  plus 
loin,  à  propos  des  discussions  soulevées  au  sujet  de  la  pathogénie  des 
lésions  broncho-pneumoniques,  qu'il  doit  être  considéré  comme  restant 
sans  influence  marquée  sur  leur  développement. 

L'analyse  histologique  donne  ici  fort  peu  de  résultats,  l'état  fœtal  n'é- 
tant qu'un  simple  affaissement  du  poumon.  Le  microscope  montre  les 
bronches  obstruées  par  des  leucocytes,  tandis  que  leurs  parois  sont  éga- 
lement infiltrées  par  les  mêmes  éléments.  Les  alvéoles  présentent  habi- 
toellenient  un  tassement  remarquable,  surtout  au-dessous  de  la  plèvre,  où 
il  est  maintenu  et  exagéré  par  la  rétraction  de  cette  membrane.  Les  vais- 
seaux des  parois  alvéolaires  sont  distendus  par  le  sang  ;  on  ne  trouve  dans 
les  alvéoles  que  quelques  cellules  épithéliales  déformées  et  parfois  quelques 
leucocytes.'  Il  y  a  certain  degré  d'œdèmc  ;  on  a  trouvé  dans  plusieurs  cas 
des  exsudats  albumineux  tantôt  dans  les  alvéoles,  tantôt  sous  ia  plèvre 
et  dans  le  tissu  conjouctif  périlobulairc  (Gombault,  Balzcr).  Dans  les  al- 
Téoles,  Kôester  a  vu  les  cellules  de  revêtement  modifiées  de  façon  à  prendre 
la  forme  cubique,  altération  qu'il  explique  par  la  compression  que  les  cel- 
lules subissent  par  suite  du  tassement  qui  déforme  le  protoplasma  et  le 
fait  refluer  vers  le  centre.  Il  faut  noter  aussi  l'état  des  espaces  lymphati- 
ques périlobulaires  et  périacincux,  qu'on  trouve  presque  toujours  dilatés 
et  remplis  de  leucocytes.  Cet  état  s'explique  d'ailleui*s  par  les  lésions  in- 
flammatoires des  bronches  lobulaires  acineuses,  dont  les  gaines  lymphati- 
ques présentent  les  mômes  lésions. 

Comme  on  le  voit,  l'état  fœlal  diffère  notablement  de  la  splénisation. 
En  réalité,  il  n'y  a  pas  d'altération  du  parenchyme  pulmonaire  dans  l'état 
fcetal.Dans  la  splénisation,  l'accumulation  des  cellules  épithéliales  et  des 
leucocytes,  la  congestion,  se  produisent  en  vertu  d'un  processus  réelle- 
ment actif  :  elles  sont  dues  à  l'irritation  propagée  dans  toute  l'étendue 
de  l'arbre  bronchique,  et  qui  gagne  les  alvéoles  ;  l'état  fœtal,  au  contraire, 
est  une  lésion  passive,  qui  se  développe  sous  des  influences  mécaniques, 
nettement  démontrées  par  l'expérimentation,  et  auxquelles  sont  liés 
Taflaissement  pulmonaire,  la  congestion,  et  les  légères  altérations  alvéo- 
laires que  nous  avons  décrites. 


544     PNEUMONIE.  —  broncho-pneuiionie.  —  ahàtomie  pàtholociqub. 

Ce  sont  ces  influences  d'ordres  divers  quenous  devons  maintenant  étudier, 
ainsi  que  leur  mode  d*action.  Le  principal  facteur,  qui,  à  lui  seul,  déter- 
mine la  production  de  Tétat  fœtal,  c'est  l'obstruction  bronchique; 
l'inflammation  de  la  bronche,  la  production  d'un  bouchon  formé  par 
les  produits  inflammatoires,  sont  les  conditions  nécessaires  du  déve- 
loppement de  rétat  fœtal.  Ce  fait  a  été  d'ailleurs  démontré  par  l'eipéri- 
mentation,  qui  a  prouvé  que  le  collapsus  pulmonaire  succède  à 
l'oblitération  des  bronches  par  des  corps  étrangers  (Roulettes  de  nb* 
stances  diverses).  Mendeissohn  et  Traube  ont  ainsi  montré  l'impor 
tance  capitale  de  l'obstruction  bronchique  et  amoindri  le  rôle  des  autres 
éléments  pathogéniques  sur  le  jeu  desquels  est  basée  la  théorie  de 
Gairdncr.  Cet  auteur  a  le  premier  expliqué  l'état  fœtal  par  Taltératiou 
des  bronches,  mais  il  a  invoqué  de  plus  le  concours  d'un  autre  facteur  im- 
portant. Les  forces  expiratrices  l'emportent  d'un  tiers  environ  sur  les  forées 
inspiratrices  (Mendeissohn,  Ilutchinson).  L'inspiration  refoule  les  muco- 
sités bronchiques  ;  celles-ci  forment  un  bouchon  qui,  repoussé  dans  des 
conduits  de  plus  en  plus  étroits,  en  amène  bientôt  Tobturation  complète. 
L'expiration,  au  contraire,  déplace  le  bouchon  de  façon  à  permettre  le 
passage  de  l'air  inspiré.  Sa  sortie  est  facilitée  encore  par  les  efforts  de  toux, 
et  peu  à  peu  les  alvéoles  reviennent  sur  eux-mêmes,  l'air  étant  expulsé 
et  non  remplacé. 

La  théorie  de  Gairdner  a  été  acceptée  par  tous  les  auteurs  ;  des  réserves 
ont  été  faites  cependant  au  sujet  de  la  manière  dont  le  poumon  se  vide 
d'air  derrière  le  bouchon.  Les  déplacements  successifs  de  celui-ci  à  cha- 
que mouvement  respiratoire  sont  difflciles  à  admettre,  et  on  a  pensé 
qu'une  fois  l'obturation  produite  l'air  emprisonné  pourrait  bien  être 
absorbé  par  le  poumon  (Yirchow,  Fuchs).  Nous  avons  admis  (th.  de  doc- 
torat, p.  45)  que  l'expulsion  de  l'air  contenu  dans  Tarbre  bronchique 
devait  être  progressive  comme  la  réplction  de  celui-ci  par  les  produits  in- 
flammatoires. A  mesure  que  ceux-ci  deviennent  plus  abondants,  Tair  se 
raréfie  dans  le  lobule,  dont  les  alvéoles  ne  tardent  pas  à  s'affaisser. 
Cette  marche  est  évident  surtout  dans  la  diphthérie  bronchique,  où  les 
mouvements  respiratoires  sont  évidemment  sans  influence,  à  cause  de 
rimmoliilitcdes  fausses  membranes  ;  le  vide  se  produit  dans  les  alvéoles,  à 
mesure  (|ue  celles-ci  s'épaississent,  ou  progressent  dans  les  ramifications 
bronchiques. 

Dans  les  faits  cliniques,  il  faut  aussi  tenir  compte  des  troubles  de  la 
mécanique  respiratoire,  et  l'on  peut,  sous  ce  rapport,  rapprocher  l'atclec- 
tasie  de  la  broncho-pneumonie  ([e  celle  des  nouveau-nés  ;  elle  se  produit 
chez  ceux-ci  parce  que  le  jeu  des  mouvements  thoraciques  n*est  pas  a$sez 
puissant  pour  arriver  à  obtenir  le  déplissement  des  alvéoles  pulmonaires. 

L'enfantatteint  de  broncho-pneumonie  se  trouve  placé  dans  des  conditions 
un  peu  analogues;  chez  lui,  le  jeu  du  thorax  est  exagéré,  mais  il  ne  s  ef- 
fectue qu'au  bénélice  des  mouvements  d'inspiration  ;  en  réalité,  l'amplitude     j 
des  mouvements  thoraciques  est  diminuée,  et  leur  action  est  insuffisante,      j 
malgré  leur  apparente  énergie.  La  paralysie  des  muscles  trachéo-bronclii- 


PNEUMONIE.    —   BRONCHO-PNEDMONIE.    —  AMÂTOMIB   PATHOLOGIQUE.       545 

ques,  la  présence  des  produits  inflammaloires  à  la  surface  des  bronches, 
contribuent  encore  à  rendre  moins  active  la  circulation  de  l'air  dans 
le  poumon.  L'influence  de  ces  causes  secondaires  est  encore  favorisée  par 
les  conditions  spéciales  dans  lesquelles  s'effectue  normalement  la  respira- 
tion chez  l'enfant.  Suivant  Bartels,  les  côtes  et  les  cartilages  costaux,  plus 
fleiibles  à  cet  âge,  se  dépriment  au  moment  de  l'inspiration,  surtout  quand 
il  y  a  dyspnée.  Au-dessous  de  la  cinquième  côte,  la  partie  inférieure  du 
ilemum  et  les  cartAges  costaux  cèdent,  et  la  base  du  thorax  se  rétrécit. 
-    A  cette  dilatation  partielle  de>  la  poitrine  correspond  une  dilatation  par- 
«   lielle  du  poumon,  dont  la  partie  supérieure  seule  peut  prendre  de  Tex- 
^  tension.  En  conséquence,  l'inaction  relative  des  parties  postérieures  et 
^  inférieures  favorise  l'affaissement  pulmonaire  et  concourt  aux  effets  de 
^  robstruction  bronchique. 

T?.  Les  éléments  divers  que  nous  venons  de  signaler  ne  jouent  qu  un  rôle 
^  secondaire  dans  la  pathogénie  de  l'état  fœtal  ;  c'est,  comme  nous  l'avons 
^  >  dfity  l'obturation  bronchique  qui  en  est  le  facteur  indispensable,  et  les 
^  SQtres  causes  ne  font  qu'en  favoriser  le  développement  et  le  mode  d'ac- 
"^  tion.  Cependant,  à  propos  de  l'étude  des  phénomènes  consécutifs  à  l'ob- 
"^  toraiion  bronchique,  nous  devons  signaler  l'opinion  admise  par  Rilliet  et 
'^  Bsrthez,  soutenue  plus  récemment  par  Damaschino,  et  en  vertu  de  la- 
.  quelle  on  a  voulu  expliquer  la  production  de  certaines  atélectasies  par  la 
congestion  pulmonaire.  Celle-ci,  en  se  répétant,  rétrécirait  peu  à  peu 
^  les  cavités  alvéolaires  et  fmirait  par  en  chasser  l'air  en  amenant  l'acco- 
kment  de  leurs  parois.  Nous  ferons  remarquer,  tout  d'abord,  qu'en  l'ab- 
srace  d'obstruction  bronchique  l'état  fœtal  ne  se  produit  pas  dans  les 
t  congestions  simples,  si  intenses  qu'elles  soient.  Malgré  les  expériences  in- 
voquées à  l'appui,  cette  théorie  n'est  rien  moins  que  démontrée  ;  de  plus, 
r3  but  remarquer  qu'elle  s'adresse  aux  lésions  des  parties  déclives,  dans 
(lesquelles  il  est  le  plus  difficile  de  déterminer  la  part  qui  doit  être  attri- 
^  kiée  à  l'atélectasie,  à  l'hypostase  et  à  la  splénisation.  Malgré  les  analogies 
■iii  que  présente  l'aspect  extérieur,  l'état  fœtal  pur  est  rare  à  la  partie 
■M  postérieure  des  poumons  ;  pour  notre  part,  nous  avons  toujours  vu  que 
a^  les  lésions  qui  le  simulaient  devaient  être  rapportées  à  la  splénisation. 
Parmi  les  phénomènes  qui  accompagnent  l'obturation  bronchique,  la 
congestion  pulmonaire  doit  donc  être  considérée  comme  effet  et  non 
comme  cause.  Très-marquée  surtout  lorsque  l'atélectasie  est  très-étendue, 
elle  masque  le  retrait  du  parenchyme  pulmonaire  consécutif  à  l'affaisse- 
ment des  alvéoles,  et  s'oppose  ainsi,  dans  une  certaine  mesure,  à  l'amoin- 
[drissement  du  poumon.  Puissamment  attiré  dans  la  poitrine  par  le 
tide  qui  résulte  de  l'affaissement  des  alvéoles,  le  sang  vient  distendre 
kg  raisseaux  et  prendre  la  place  de  l'air  expulsé.  Cet  afflux  sanguin  est 
rfi^ii'autantplus  énergique,  que  la  cavité  thoracique  a  atteint  son  maximum 
jr  li'ampliation. 

m  Cette  congestion  atteint  son  maximum  d'intensité  dans  les  cas  d'até- 
r  idctasie  lobaire  qui  peuvent  s'observer  dans  la  diphthérie.  Lorsque  l'até- 
ne  porte  que  sur  quelques  lobules  marginaux,  les  parties  affais- 

VOUY.   OIGT.  M<D.  BT  CHIR.  XÏVIII  —  35 


546     PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  anatomib  PATBOMQiqaaw. 

secs  présentent  simplement  une  coloration  lie  de  TÎn  ;  le  retrait  du 
poumon  est  alors  beaucoup  plus  marqué,  les  deux  feuillets  opposés  de 
Tenveloppe  pleurale  du  lobule  semblent  en  contact.  Souvent,  dansoes  cas, 
Temphysème  des  lobules  voisins  comble  en  partie  le  vide  causé  par  Taf- 
faissement  du  poumon.  Si  donc  nous  revenons  à  la  comparaison  qoe 
nous  faisions  plus  haut  entre  le  collapsus  pulmonaire,  l'atélectasie  des 
nouveau-nés  et  Tctat  fœtal,  nous  voyons  qu'il  y  a  analogie  à  paa  près 
complète  entre  ces  deux  derniers  états.  Le  collapsi#  seul  ue  se  produit 
pas  par  un  retrait  en  quelque  sorte  spontané  du  poumon»  mais  parce 
qu'un  épanchement  ou  une  cause  de  compression  quelconque  vient  aplatir 
les  alvéoles  et  déterminer  leur  accolement,  le  poumon  est  dès  lors  le  plu? 
souvent  anémie.  Mais  qu'on  vienne  à  le  décomprimer  subitement  i  Taide 
d'une  thoracenlèse,  par  exemple,  si  l'air  ne  vient  pas  remplir  prompte- 
ment  les  alvéoles,  on  verra  aussitôt  se  produire  un  appel  considérable  de 
sang  dans  les  parties  décomprimées.  L'analogie  du  phénomène  est  ici 
complète,  avec  cette  différence  que  cette  congestion  trop  soudaine,  trop 
étendue,  amène  parfois  des  désordres  plus  considérables.  Au  lieu  d'une  lé- 
gère exsudation  albumineuse  occuptint  quelques  alvéoles,  il  se  produit  une 
diffusion  énorme  de  liquide  albumineux  qui  remplit  bientôt  les  bronches 
et  s'élimine  par  l'expectoration.  C'est  par  ces  congestions  brusques  qu'on 
a  expliqué  la  syncope  et  la  mort  subite  qui  arrivent  dans  quelques  cas 
après  la  thoracentèse.  Chez  l'enfant,  lorsque  le  contenu  brooduqne 
obture  tout  à  coup  une  grosse  bronche,  les  troubles  subits  de  rhématose 
et  de  la  circulation  qui  en  résultent  peuvent  être  suivis  des  mêmes  acci- 
dents. Ilutinel  nous  a  dit  avoir  observé  plusieurs  fois  ces  morts  subites 
chez  les  nouveau-nés. 

Pour  terminer  l'étude  de  l'état  fœtal,  il  nous  reste  à  examiner  le  rôle 
de  celte  lésion  dans  l'évolution  de  la  broncho-pneumonie.  Pour  Legendre 
et  Bailly,  son  importance  est  prépondérante  :  s'ils  n'osent  pas  encore 
rejeter  tout  à  fait  la  pneumonie  lobulaire,  l'état  fœtal  n'en  est  pas  moins 
pour  eux  presque  toute  la  broncho-pneumonie,  et  ils  tendent  ainsi  à  sup- 
primer celle-ci  en  donnant  le  pas  à  l'élément  mécanique  sur  Télémenl  in- 
flammatoire. Gnirdner,  Béhier,  adoptent  les  mêmes  opinions  et  les  exagè- 
rent encore.    Ziemsscn  et  Bartels,  adoptant  une  opinion   mixte,   fen- 
dent à  établir  une  filiation  directe  entre  l'atélectasie  et  la  broDcbo-pneu- 
monie.  Celle-ci  ne  serait  que  le  second  degré  d'un  processus  qui  aurait 
débuté  par  l'état  fœtal,  lequel  cesserait,  par  conséquent,    d'être  une  lé- 
sion purement  mécanique  et  rentrerait  dans  le  cadre  des  inflammations. 
Pour  eux,  tout  dépend   de  l'obturation  bronchique  ;  à  celle-ci  succède 
la  congestion  du  lobule,  ])uis  consécutivement  son  inflammation,  Tétat 
fœtal  remplaçant  en  quelque  sorte  l'engouement  pulmonaire.  Mais  li 
faut  remarquer  que  la  marche  de  la  pneumonie  dans  le  lobule  est  eo 
contradiction  avec   cette  manière  de  voir.  D'abord   la  pneumonie  est 
loin  d'atteindre  toutes  les  parties  du  lobule  atélectasié  ;  le  plus  souT«8t  ^^ 
elle  se  localise  autour  de  la  bronche;  elle  offre  des  caractères  ditfémU  /^ 
suivant  qu'on  examine  le  centre  ou  la  périphérie  du  lobule,  ce  n'est  poidl  t  *^ 


PNEUMONIE.   —   BRONCHO-PNEUMONIE.    —  ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.        547 

tine  hépatisation  compacte,  uniforme,  comparable  dans  le  lobule  à  celle 
•qui  succède  dans  le  lobe  à  l'engouement  de  la  pneumonie  franche. 
La  théorie  de  Ziemssen  et  Bartels  est  ruinée  par  ce  seul  examen  des  lé- 
sions de  la  pneumonie  lobulaire  :  elles  sont  circonscrites,  elles  suivent  le 
trajet  des  bronches,  elles  ne  diffusent  dans  le  lobule  entier  que  dans  des 
•conditions  déterminées  par  Tenvahissement  progressif  des  bronchioles.  En 
un  mot,  l'inflammation  du  lobule  se  comporte  au  milieu  des  parties  até- 
lectasiées  comme  dans  les  autres  régions  du  poumon*  L'état  fœtal  ne  se 
vévèle  alors  que  par  la  congestion,  par  un  certain  degré  de  tassement  du 
tissiiy  quelquefois  par  sa  persistance  à  l'état  isolé  dans  les  parties  voisines. 
En  somme,  si  son  rôle  est  un  peu  effacé  dans  l'évolution  générale  de 
h  broncho-pneumonie  proprement  dite,  il  constitue  cependant  une  des 
lésions  accessoires  les  plus  graves.  Il  est  funeste  en  supprimant  Taccès  de 
Tair  dans  des  portions  souvent  très-étendues  du  poumon.  Il  concourt 
ainsi  au  développement  rapide  de  l'asphyxie,  en  rétrécissant  plus  ou 
ttoins  brusquement  le  champ  deThématose. 

Quant  à  sa  terminaison  ultérieure,  elle  peut  varier  de  deux  façons  diffé? 

Mates  :  l*"  l'inflammation   progresse  dans  les  bronches  et  envahit  les 

ti^otis  affaissées,  la  broncho-pneumonie  se  substitue  à  l'état  fœtal  ;  2^  la 

tr^itutio  ad  intcgrum  s*opère,  vraisemblablement  de  la  même  manière 

]    <faé  dans  l'atélectasie  des  nouveau-nés  par  la  désobstruction  des  bronches, 

\   «t  la  libre  rentrée  de  l'air  qui  vient  remplir  les  alvéoles  et  les  déconges- 

^  timmer. 

^  Emphysème.  —  A  côté  de  l'état  fœtal,  la  lésion  mécanique  la  plus 
^  importante  est  l'emphysème,  lequel  est  même  beaucoup  plus  fréquent 
^le  rétat  fœtal,  car  sa  présence  est  la  règle  dans  toutes  les  autopsies.  Il 
a*observe  sous  plusieurs  formes  isolées  ou  réunies,  et  dont  la  pathogénie 
aiMnble  aujourd'hui  élucidée.  On  trouve  d'abord  l'emphysème  vésiculaire 
î  Simple»  caractérisé  par  une  distension  générale  du  poumon  ressemblant 
^o  â  une  espèce  de  vessie  insufflée  qui  conserve  son  aspect  à  l'ouverture  de 
;'  là  poitrine.  Le  poumon  a  perdu  son  élasticité,  il  présente  une  couleur 
h  ^gns  rosé,  avec  la  légèreté  et  la  mollesse  caractéristiques.  Comme  nous 
^  TaTOns  dit,  cette  lésion,  ainsi  que  l'état  fœtal,  siège  surtout  aux  lobes 
^  mpérieurs  et  aux  bords  antérieurs.  Elle  succède  évidemment  à  la  dypsnée, 
ànx  efforts  violents  et  répétés  qui  accompagnent  la  respiration.  La  disten- 
«ioii  est  d'autant  plus  marquée  que  les  lésions  broncho-pneumoniqucs 
decuptot  une  plus  grande  étendue  du  parenchyme.  La  pression  de  l'air 
^  t*6zerçânt  sur  une  plus  petite  surface  tend  nécessairement  à  l'agrandir, 
;%t  la  dilatation  des  acini  se  trouve  bientôt  constituée.  L'emphysème  peut 
Hors  être  dit  supplémentaire,  mais  ce  qualificatif  ne  doit  viser  que  l'aug- 
■tlnientation  de  la  surface  et  la  capacité  des  alvéoles,  sans  faire  sous-entendre 
■i^iine  amélioration  de  l'hématose,  car  il  est  loin  d'être  prouvé  que  le  pou- 
^  fnon  ainsi  dilaté  respire  mieux  que  dans  son  expansion  normale. 

Un  autre  emphysème  vésiculaire  beaucoup  moins  étendu  s'observe  aussi 
aiatour  des  noyaux  de  pneumonie  lobulaire  et  des  lobules  atélectasiés.  Il 
ti^est  pas  rare  surtout  dans  ces  derniers  cas  de  voir  les  lobules  malades 


548     PNEUMONIE.  —  bronciio-pnedmonie.  —  aratomie  pathologique. 

surmontés  par  une  couronne  de  vésicules  pulmonaires  semblables  k  de 
petites  bulles  prêtes  à  se  rompre.  Le  mode  de  formation  de  cet  emphy- 
sème circonscrit  s'explique  par  le  mécanisme  que  nous  avons  indiqué,  et 
de  plus  par  la  nécessité  de  combler  le  vide  causé  par  raflaissemeol  des 
lobules  (Gairdner). 

Très-souvent  ces  deux  variétés  d'emphysème  s'accompagnent  encore  de 
l'emphysème  interlobulaire.  De  grosses  bulles  soulèvent  la  plèvre  viscé- 
rale, écartent  les  lobules  et  dissèquent  ainsi  le  poumon  dans  une  asex 
grande  étendue.  Elles  forment  le  plus  souvent  des  traînées  qui,  partant 
des  bords  antérieurs,  où  elles  sont  le  plus  larges,  vont  se  terminer  en 
s^amincissant  vers  la  partie  externe  du  poumon.  Elles  présentent  parfois 
plus  d'un  centimètre  de  largeur,  et  peuvent  s'étendre  en  profondeor 
d'une  surface  d'un  poumon  à  l'autre.  L'écartement  des  lobules  est  surtout 
marqué  aux  points  où  ces  traînées  emphysémateuses  forment  deseon- 
fluents.  Des  vaisseaux  et  des  tractus  de  tissu  conjonctif  sillonnent  h 
plèvre  soulevée  en  donnant  une  apparence  de  bulles  de  savon  agglomérées. 
On  peut  suivre  quelquerois  des  traînées  de  petites  bulles  qui  aboutissent 
à  une  couronne  de  vésicules  dilatées  circonscrivant  un  lobule  atélectasié 
ou  hépatisé.»  Cet  emphysème  interlobulaire  s'observe  dans  toutes  les 
broncho-pneumonies,  mais  surtout  dans  celles  qui  succèdent  à  la 
diphthèrie  des  voies  aériennes  dont  elles  dépendent  beaucoup  plus  que 
des  lésions  pulmonaires. 

Lorsque  la  guérison  a  lieu,  il  est  probable  que  la  distension  desalféoles 
cède  assez  rapidement  et  que  le  poumon  reprend  son  volume  normal. 
On  peut  supposer  aussi  que  dans  les  cas  heureux  elles  n'atteignent  pas 
ces  proportions  énormes  et  que  l'élasticité  du  tissu  pulmonaire  n'est  pas 
complètement  détruite. 

Mais  dans  le  cas  contraire,  si  l'on  songe  à  la  ténacité  si  remarquable 
des  lésions  broncho-pneumoniques,  on  trouverait  sans  doute,  en  obserrant 
les  malades  pendant  un  certain  temps,  des  traces  de  cette  distension 
excessive.  Les  travaux  micrographiques  les  plus  récents  sur  l'emphysème 
démontrent  l'existence  de  lésions  assez  profondes  pour  qu'on  puisse  sup- 
poser que  leur  réparation  s'effectue  avec  difficulté. 

Pleurésie.  —  Du  côté  de  la  plèvre,  les  lésions  sont  peu  intenses,  â  moins 
de  complication  spéciale,  et  les  épanchements  abondants  sont  rares,  /'emphy- 
sème est  exceptionnel.  Dans  les  broncho-pneumonies  étendues  ou  de  date 
ancienne,  la  plèvre  se  recouvre  de  fausses  membranes  épaisses,  fibrino- 
purulentes,  qui  peuvent  envelopper  une  grande  partie  du  poumon  touteo 
s'étendant  sur  la  plèvre  pariétale.  Le  plus  souvent  on  ne  trouve  les  traces 
d'une  inflammation  qu'au  niveau  des  points  où  le  poumon  est  lui-méroc 
phlegmasié.  La  fausse  membrane  est  très-ténue,  se  détache  avec  facilitf, 
souvent  tout  se  borne  à  un  léger  dépolissement  de  la  plèvre.  Cellc<i 
cependant  peut  être  atteinte  assez  profondément  dans  ces  cas  légers.  li 
phlegmasié  est  peu  intense  dans  la  couche  la  plus  superficielle  de  b 
plèvre,  mais  le  tissu  conjonctif  sous-pleural  qui  se  continue  direciemeoi 
avec  les  travées  périlobulaires  et  périacineuses  et  forme  avec  elles  lenre 


PNEUMONIE.    —  BRONCHO-PNEUMONIE.    —   ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.        549 

loppe  conjonctive  du  lobule  participe  aux  mêmes  altérations,  congestion 
des  vaisseaux,  exsudais  fibrino-purulents  dans  le  tissu  conjonctif  et  surtout 
dans  les  vaisseaux  lymphatiques.  Consécutivement,  la  couche  la  plus 
superficielle  de  la  plèvre  s'altère,  son  épithélium  disparait,  une  exsuda- 
tion de  fibrine  et  de  globules  blancs  se  produit  à  sa  surface  et  dans  son 
épaisseur. 

Âdénopathie  trachéo-bronchique.  —  Les  lésions  des  ganglions  bron- 
chiques sont  très-variables  ;  tantôt  elles  sont  caractérisées  par  une  simple 
congestion,  tantôt  par  une  augmentation  de  volume  assez  considérable. 
La  suppuration  peut  être  considérée  comme  assez  rare.  On  a  dit  aussi 
que  ces  lésions  des  ganglions  bronchiques  pouvaient  persister  et  devenir 
le  point  de  départ  d'adénopathies  à  marche  chronique. 

Sàhg.  —  Organes.  —  Les  altérations  du  sang  dans  la  broncho-pneu- 
monie sont  admises  par  la  plupart  des  auteurs,  mais  elles  ont  été  peu 
étudiées  à  Taide  des  méthodes  scientifiques  nouvelles.  Les  plus  constantes 
relèvent  de  Tasphyxie.  D'autres  sont  en  rapport  avec  les  causes  premières 
de  la  maladie  et  paraissent  jouer  un  rôle  important  dans  la  production  des 
hémorrhagies.  C'est  dans  la  rougeole  et  surtout  dans  la  diphthérie  qu'on 
peut  le  mieux  reconnaître  leur  influence. 

A  l'autopsie  des  sujets  morts  de  broncho-pneumonie,  on  trouve  en 
outre  le  cœur  et  principalement  le  cœur  droit  et  les  gros  troncs  veineux 
distendus  tantôt  par  des  caillots,  tantôt  par  un  sang  noir  et  liquide.  Il  est 
firéquent  d'observer  dans  le  cœur  droit  des  caillots  blancs,  polypiformes, 
très-adhérents,  qui  se  continuent  parfois  très-loin  dans  l'artère  pulmo- 
naire.  Le  foie,  la  rate,  les  reins,  les  méninges  et  le  cerveau,  sont  con- 
gestionnés. 

Mais  à  part  cette  congestion  qui  résulte  de  l'asphyxie,  les  lésions  qu'on 
peut  rencontrer  dans  les  organes  (péricardites,  otites,  méningites,  etc...) 
ne  sont  point  habituellement  sous  la  dépendance  de  la  broncho-pneu- 
monie. Elles  sont  plus  souvent  consécutives  à  la  rougeole,  à  la  coque- 
luche, à  la  diphthérie,  etc.,  qui  ont  précédé  leur  développement.  Il  est 
cependant  assez  fréquent  de  la  voir  s'accompagner  d'entérite  pour  qu'on 
puisse  considérer  cette  complication  comme  liée  à  son  évolution  ordinaire. 

CoxpLicATioNs.  —  Outre  les  abcès,  la  tuberculose  pulmonaire,  la 
pleurésie,  l'entérite,  Tentéro-colitc,  que  nous  avons  déjà  signalés,  il  nous 
teste  à  étudier  deux  complications  spéciales  importantes  :  la  gangrène 
pulmonaire  et  les  hémorrhagies  pulmonaires. 

La  gangrène  pulmonaire  est  rare  chez  l'enfant,  elle  est  toujours  secon- 
daire, et  la  broncho-pneumonie  est  considérée  comme  une  de  ses  causes  les 
plus  fréquentes  (Boudet,Rilliet et  Barthez,  Barrier,  Damaschino,  Steiner). 
C'est  dans  la  rougeole  et  dans  la  fièvre  typhoïde  qu'elle  se  développe  le 
plus  fréquemment.  Suivant  Rilliet  et  Barthez  et  Steiner,  les  foyers  sont 
plus  souvent  centraux  que  périphériques  ;  nous  avons  pu  vérifier  cette 
assertion  dans  un  cas  qui  nous  a  été  communiqué  par  Carrié,  alors 
interne  de  Bergeron.  La  gangrène  s'était  déclarée  à  la  suite  d'un 
noma  développé  chez  une  petite  fille  convalescente  de  rougeole.  Dans  la 


550     PNEUMONIE.  —  broncho-pnedmomie,  —  ahâtomie  pATHOLMiQinK. 

inaioritc  des  cas,  les  choses  se  passent  ainsi  ;  plus  rarement  la  broneho- 
pneumonie  se  complique  spontanément  de  gangrène.  RiUiet  et  Barthez, 
Damaschino,  en  ont  signalé  cependant  des  cas  à  la  suite  de  la  rougeole. 
Boudet  pense  qu'il  faut  incriminer  les  causes  générales,  l'afTaiblisBement, 
Taltération  du  sang,  etc.  C'est,  en  effet,  à  la  suite  de  la  rougeole  et  de  b 
fièvre  typhoïde  que  la  broncho-pneumonie  se  complique  ordinairement  de 
gangrène.  Mais  il  faut  remarquer,  et  les  observations  de  Boudet  à  cel  égird 
sont  bien  démonstratives,  que  la  gangrène  pulmonaire  est  souTent  consé- 
cutive à  une  autre  gangrène  soit  de  la  bouche,  soit  du  pharynx.  Des  dé- 
tritus gangreneux  sont  entraînés  par  la  respiration  dans  les  Toies  aérien- 
nes et  vont  déterminer  la  production  de  nouveaux  foyers  de  sphacèle  an 
centre  des  noyaux  de  broncho-pneumonie.  La  gangrène  se  présente  alon 
sous  Taspect  de  zones  verdàtres  ou  noirâtres,  enloumant  les  bronches 
dilatées.  A  un  degré  plus  avancé,  il  peut  se  former  dans  le  Toisinage  in 
foyers  de  suppuration,  et  plus  tard  une  excavation  gangreneuse  (Rilliet 
et  Barthez,  Wyss).  La  rupture  de  la  plèvre  et  la  formation  d^un  pyopneo- 
mo-thorax  ont  été  observées.  Il  n'est  pas  rare  de  voirdas  foyers  hémorrha- 
giques  dans  le  voisinage  des  lobules  sphacélés.  Il  faut  ajouter  qne  la 
gangrène  peut  compliquer  également  la  broncho-pneumonie  chez  le  nos» 
veau-né  et  chez  le  vieillard. 

Les  hémorrhagies  pulmonaires  sont  assez  fréquentes  dans  la  broncho- 
pneumonie,  et  surtout  dans  celle  qui  complique  la  diphthérie  larpgo- 
bronchique.   Millard,  Peter,   les    ont   signalées;    Bouchut   et  Laliadie 
Lagrave  les  ont  rattachées  aux  apoplexies  pulmonaires  d*origine  cmboli- 
que,  en  les  considérant  comme  causées  par  l'endocardite  diphthéritique. 
Sanné  les  a  observées  dix-huit  fois  et  les  attribue  à  Tasphpie  et  à  l'infedion, 
celle-ci  étant  admise  à  titre  de  cause  prédisposante  et    favorisant  les 
hémorrhagies  dans  le  poumon,  au  même  titre  que  dans  les  autres  paAies 
de  Torganisme,  parles  modifications  de  la  composition  du  sang.  Nous  ea 
avons  signalé  neuf  cas  dans  notre  travail  sur  les  hémorrhagies  pulmonaires 
dans  la  broncho-pneumonie  {BulL  de  la  Soc.  an.,  1878,  p.  269).  Parrot 
signale  30  cas  d'hcmorrhagies  sous-plcurales  dans  la  rougeole,  14  dans 
la  diphthérie,  6  dans  la  syphilis  héréditaire.  Ces  hémorrhagies  siègent 
presque  toujours  aux  parties  postérieures  et  inférieures  des  pouffloos, 
où  les  noyaux  recouverts  par  la  plèvre  ont  Taspect  d'une  masse  noire  ei 
indurée.  Leur  nombre  est  variable  ;  on  peut  n'en  trouver  qu'un  scuK 
mais  quelquefois  le   parenchyme  pulmonaire  en  est,  pour  ainsi  dire, 
criblé.  Tantôt  les  noyaux  hémorrhagiques  sont  bien  limités  et  simulent 
tout  à  fait  l'infarctus  d'origine  embolique  ;   tantôt  le  sang  se  répand 
dans  les  lobules  voisins  d'une  manière  irrégulière  (apoplexies  lobulaires 
corticales).  Sur  la  coupe  des  noyaux,  on  distingue  fréquemment  des 
traînées  grisâtres  qui  se  détachent  sur  le  fond  noir  de  l'épanchemeot 
sanguin.  Dans  ces  foyers  hémorrhagiques,  l'examen  histologique  montre 
une  disposition  toute  spéciale  du  sang  épanché  ;  il  circonscrit  les  nodute 
péribronchiques,  les  déforme,  sans  jamais  les  pénétrer  entièrement.  Au 
contraire,  il  se  répand  à  la  périphérie,  dans  la  zone  de  splénisatioOi  d 


PNEUMONIE.   —  BRONGHO-PMEUMOAlB.    —    ÂNATOMIE   PATHOLOGIQUE.      551 

pénètre  parfois  jusque  dans  les  espaces  lymphatiques  quelquefois  remplis 
de  globules  sanguins.  Ainsi  le  nodule  péribronchique  et  par  suite  la 
bronche  ne  sont  pas  envahis  par  le  sang,  fait  qui  établit  une  différence 
importante  entre  ces  hémorrhagies  et  celles  qui  succèdent  aux  embolies. 
n  en  résulte  que  ces  hémorrhagies,  malgré  leur  étendue  parfois  assez 
considérable,  ne  se  traduisent  par  aucun  phénomène  appréciable.  Sanné 
n'a  jamais  constaté  d'autres  symptômes  que  la  dyspnée  et  les  râles  do 
la  broncho-pneumonie;  il  n'y  a  jamais  d'expectoration  sanguinolente. 

Cette  forme  d'hémorrhagie  est  la  plus  importante,  mais  non  la  plus 
commune  :  les  petits  foyers  sous-pleuraux  s'observent,  pour  ainsi  dire, 
dans  tous  les  cas  de  broncho-pneumonie  aiguë,  ils  sont  produits  tantôt 
par  la  rupture  des  vaisseaux  propres  de  la  plèvre,  tantôt  par  celle  des 
alvéoles  voisins.  Le  sang  se  répand  sous  la  plèvre,  en  dissociant  le  tissu 
conjonctivo-élastique,  et  forme  ainsi  des  amas  ordinairement  peu  étendus. 
Ajoutons  enfin  que  bon  nombre  d'hémorrhagies  intra-pulmonaires  peu 
étendues  passent  inaperçues  aux  autopsies;  il  est  souvent  très-difficile  de 
distinguer  un  noyau  très- congestionné  de  pneumonie-lobulaire  d*un  foyer 
apoplectique.  L'examen  microscopique  révèle  souvent  l'existence  de  petits 
épanchements  qui  avaient  passé  inaperçus  à  l'examen  microscopique.  La 
pathogénie  des  hémorrhagies  en  foyer  nous  parait  liée  à  l'évolution  même 
de  la  broncho-pneumonie.  Comme  nous  1  avons  vu,  la  bronche  et  les 
canaux  alvéolaires  sont  obstrués  par  les  produits  inflammatoires  ;  il  se  pro- 
duit une  congestion  très-vive  des  parties  splénisées,  résultat  de  l'absence 
d*air  dans  les  alvéoles.  Dans  les  broncho-pneumonies  catarrhales,  dans  la 
rougeole,  ces  congestions  sont  souvent  assez  intenses  pour  causer  à  elles 
seules  l'hémorrhagie.  Celle-ci  se  produit  encore  d'une  façon  plus  sûre  et 
{dus  fréquente  dans  les  broncho-pneumonies  diphthéritiqucs,  où  la  lésion 
piilinonaire  présente  une  plus  grande  gravité,  non-seulement  à  cause  des 
efforts  que  nécessite  la  gène  respiratoire,  mais  aussi  à  cause  des  modifi- 
cations du  sang  qui  succèdent  à  l'infection  générale.  Il  faut  ajouter  à  cela 
l'influence  prépondérante  de  Thypostase  démontrée  par  ce  fait  que  les 
hémorrhagies  se  font  presque  toujours  dans  le  système  bronchique  posté- 
rieur» Que  deviennent  ces  foyers  hémorrhagiques?  Si  le  malade  survit 
quelque  temps  à  la  production  de  cet  accident,  l'inflammation  lobulaire 
continue  son  évolution,  lé  nodule  péribronchique  s'accroît,  le  centre  du 
noyau  devient  grisâtre,  purulent,  comme  l'ont  observé  Bouchut,  d'Espine 
et  Picot.  Cet  état  qu'ils  ont  attribué  à  la  suppuration  du  foyer  n'est  que  la 
suite  de  l'évolution  ordinaire  du  nodule  péribronchique.  C'est  le  seul  mode 
de  terminaison  que  nous  connaissions  pour  ces  foyers  hémorrhagiques  ; 
ils  se  développent  toujours  dans  des  circonstances  tellement  graves  qu'on 
ne  peut  avoir  l'occasion  de  savoir  les  transformations  régressives  qu'ils 
peuvent  subir,  mais  qu'on  est  en  droit  de  croire  semblables  à  celles  qui 
8* observent  dans  les  autres  hémorrhagies  pulmonaires. 

Formes  de  la  broncho-pneumonie.  —  Nous  avons  déjà  vu  que  la  bron- 
ebo-pneumonie  reçoit  des  appellations  spéciales  en  rapport  avec  le  siège, 
le  nombre,  la  composition  élémentaire  des  noyaux  de  pneumonie  (lobulaire, 


552        PNEUMONIE.   —  BROMCHO-PNEUMONIE-    —  ANATOMIS  PATH0i4WIQDI. 

disséminée,  lobulaire  généralisée,  pseudo-lobaire).  Certaines  lésions 
peuvent  prédominer  dans  les  formes  aiguës  :  ainsi  la  congestion  polmo- 
naire  et  la  bronchite  tiennent  la  plus  grande  place  dans  les  cas  qû  cor- 
respondent au  type  désigné  par  les  auteurs  sous  le  nom  de  catarrhe  m/'- 
focant  et  bronchite  capillaire. 

Dans  d'autres  cas,  ce  sont  les  lésions  du  tissu  conjonctif  et  sortoat 
celles  des  lymphatiques  qui  sont  exagérées  au  point  que  les  lobules  sont 
séparés  par  de  larges  lignes  d'un  blanc  verdâtre  ou  gélatinifonne  (Rind- 
fleisch).  Les  lobules  présentent  diverses  lésions  :  ils  sont  rouges,  jaunes, 
quelquefois  légèrement  granuleux  ;  les  alvéoles  peuvent  être  remplis  4e 
fibrine  (Charcot).  On  est  surlout  frappé  de  la  présence  de  longs  filaments 
blanchâtres  que  Ton  peut  extraire  des  travées  conjonctives  interlobnlaires 
et  qui  sont  constitués  par  de  la  fibrine  et  des  globules  blancs.  An  reste, 
Taccumulation  de  ces  éléments  se  produit  en  même  temps  dans  le  tisa 
conjonctif  au  milieu  duquel  sont  plongés  les  lymphatiques.  Un  exemple 
remarquable  de  cette  lésion  est  figuré  dans  Tatlas  de  Lebert;  Chaitot 
en  cite  un  autre  cas,  observé  par  Ilanot  dans  le  service  de  Lasègue,  chez 
un  malade  atteint  de  fièvre  typhoïde.  Cette  maladie  parait  favoriser 
tout  spécialement  le  développement  de  cette  forme  de  broncho-pneumonie 
qui  parait  appartenir  habituellement  au  groupe  pseudo-lobaire.  Quelqaelbis 
une  véritable  suppuration  interlobulaire  se  produit.  Cette  forme  a  été 
décrite  sous  les  divers  noms  de  pneumonie  ulcéreuse^  nécrose  ou  gan- 
grène sèche  du  poumon,  pneumonie  disséquante  (Lebert,  Rayer,  Gri- 
solle). Plusieurs  cas  en  ont  été  publiés  par  Stokes,  Uodgkin,  Rokilanskj. 
Cette  pneumonie  disséquante  ressemble  par  beaucoup  de  traits  à  la  pneu- 
monie épizootique  du  gros  bétail,  dans  laquelle  il  est  fréquent  de  voir 
aussi  les  lobules  disséqués  flottants  dans  le  pus.  11  faut  reconnaitre  cepen- 
dant que  parmi  les  faits  qui  ont  été  cités  tous  ne  peuvent  pas  être  ntla- 
chésà  la  broncho-pneumonie.  Quelquefois,  en  effet,  ces  pneumonies  dissé- 
quantes se  produisent  autour  de  foyers  caséeux,  d^ilôts  de  pneumonie 
interstitielle  chronique,  d^infarctus  ou  de  noyaux  de  gangrène  circonscrite. 
Dans  d'autres  cas  l'évolution  insidieuse  des  accidents  et  les  caractères  des 
altérations  anatomiques  autorisent  à  conclure  plutôt  à  une  broncho-pneu- 
monie (Obs.  de  Pitres,  in  thèse  de  Massonnié,  1876).  Ils  s'obscrrenl 
le  plus  habituellement  chez  les  individus  âgés,  débilités  par  Palcoolisme, 
par  des  travaux  excessifs  ou  des  maladies  chroniques.  Le  diagnostic  est 
toujours  fort  obscur  et  le  pronostic  très-grave. 

La  marche  de  la  broncho-pneumonie  modifie  d'une  manière  bien  autre 
ment  importante  le  développement  des  lésions.  Nous  les  avons  étudiées 
dans  la  broncho-pneumonie  aiguë  où  elles  sont  surtout  caractérisées  par 
l'exsudation  et  par  l'irritation  épithéliale.  Dans  la  forme  subaiguë,  Texsuda- 
tion  est  remplacée  par  Tinfiltration  de  cellules  embryonnaires  qui  amène 
des  lésions  destructives,  la  dilatation  des  bronches,  les  vacuoles,  etc.  I^ 
lésions  du  parenchyme  lobulaire    sont    également   modiBées,   le  tisso 
s'indure,  change  de  coloration,  prend   l'aspect  désigné  sous  le  nom  (fe 
carnisationj  à  cause  de  son  analogie  avec  la  chair  musculaire.  Enfin,  lorsque 


PNEUMONIE.    —  BRONCHO'PNEUMOKIE.    —   ANATOMIE   PATHOLOGIQUE.       553 

la  maladie  passe  à  Tétai  chronique^  la  sclérose  s'établit  et  aboutit  à  la 
rétraction  cicatricielle  etàTatrophie  du  poumon. 

Nous  insistons  plus  loin  à  propos  de  l'étude  des  causes  sur  la  manière 
dont  elles  peuvent  modifier  la  forme  et  la  marche  de  la  broncho-pneumo- 
nie. Après  l'avoir  envisagée  d'une  façon  plus  spéciale  chez  l'enfant,  il 
nous  reste  à  étudier  ici  les  aspects  qu'elle  présente  aux  autres  âges  :  chez 
le  nouveau-né,  Fadulte  et  le  vieillard. 

Les  auteurs  sont  en  désaccord  au  sujet  de  la  pneumonie  des  nouveau- 
né$.  Billard  la  considérait  comme  lobulaire  et  Bouchut  a  émis  la 
même  opinion.  Au  contraire,  Dugès,  Barrier,  Trousseau,  Yalleix, 
décrivent  une  pneumonie  lobaire.  Mais  il  faut  reconnaître  que  cette 
interprétation  ne  résulte  pas  des  caractères  qu'ils  ont  attribués  à  cette 
pneumonie.  C'est  ainsi  que  Valleix  dit  que  Vaspect  du  tissu  n'est  pas 
granulé;  il  est  lisse,  ressemble  à  du  marbre  poli,  présente  une  couleur 
lie  de  vin,  est  peu  friable.  Sur  128  cas  qu'il  a  observés,  la  pneumonie 
était  double  111  fois,  20  fois  seulement  au  sommet  ;  dans  les  autres  cas, 
les  foyers  étaient  disséminés  dans  toute  l'étendue  des  poumons.  Ne  sont- 
ee  pas  là  les  principaux  caractères  de  la  broncho-pneumonie?  Elle  revêt 
le  plus  souvent  la  forme  pseudo-lobaire  et  s'accompagne  très-fréquem- 
ment d'atélectasie,  bien  décrite  chez  les  nouveau-nés  par  Dugès.  Sur 
65  enfants  âgés  de  moins  d'un  an,  Steffen  a  constaté  que  la  pneu- 
monie affecte  ordinairement  la  forme  d'une  bande  (Streifenpneu- 
monie),  indurée  et  congestionnée,  qui  occupe  la  face  postérieure  des  pou- 
mons, tantôt  seulement  dans  le  lobe  inférieur,  tantôt  depuis  le  sommet 
jusqu'à  la  base.  Cette  pneumonie  s'accompagne  de  bronchite  et  de  péri- 
bronchite,  d'atélectasie,  d'emphysème,  de  lésions  intestitielles  qui 
ont  abouti  à  la  cirrhose  dans  quelques  cas  rares.  D'après  Parrot, 
que  nous  avons  consulté  sur  ce  sujet ,  bon  nombre  de  cas  diffèrent  de  la 
broncho-pneumonie  et  de  la  pneumonie  ordinaires,  par  leur  marche 
iupide,  par  leur  tendance  aux  hémorrhagies,  à  la  formation  de  foyers  de 
suppuration  et  de  ramollissement  dans  le  poumon.  D'autres  cas  sont 
mal  caractérisés  à  cause  de  leur  mélange  avec  les  lésions  de  la  tubercu- 
lose et  même  de  la  syphilis  congénitale  qui  intervient  assez  fréquem- 
ment (Steffen,  7  cas).  Ces  catégories  diverses  doivent  être  mieux  cou- 
nues  et  mieux  séparées  de  la  broncho-pneumonie  avant  qu'on  puisse 
faire  son  histoire  complète  chez  les  nouveau-nés.  Quelques  examens  mi- 
croscopiques ont  été  faits  cependant  dans  le  laboratoire  de  Charcot  et 
ont  révélé  l'existence  de  lésions  semblables  à  celles  que  nous  avons  décrites 
chez  les  enfants  plus  Agés. 

Lorsqu'on  lit  les  descriptions  de  la  bronchite  capillaire  chez  Vadulte^ 
faites  par  Fauvel,  Valleix,  Hardy  et  Béhier,  Gintrac,  Blachez,  etc.,  il 
devient  évident  qu'on  n'a  pas  pu  établir  une  distinction  entre  cette  mala- 
die et  la  broncho-pneumonie.  Les  observations  de  Fauvel,  Valleix,  Cham- 
berl,  Colin,  etc.,  montrent  que  les  lésions  intra-lobulaires  se  produisent 
toujours  quand  l'inflammation  atteint  les  bronchioles  intra-lobulaires. 
L'absence  de  granulations  purulentes,  de  vacuoles,  donnée  par  Blachez 


554     PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  ànatomie  pjLTHOfjociQVE. 

comme  un  caractère  distinctif,  ne  peut  avoir  cette  signification  «  car  elles 
appartiennent  à  la  broncho-pneumonie  déjà  ancienne.   Avant  qu^dles 
apparaissent,  les  lésions  péribronchiques  et  la  splénisation  existent  d^is 
longtemps,  et  plusieurs  fois  chez  l'enfant,  Texamen  microscopique  nom» 
les  a  montrées  daiH  des  points  où  Texamen  à  l'œil  nu  ne  révélait  qu'un 
peu  de  congestion.  Les  lésions  macroscopiques  sont  ordinairement  moins 
accentuées  chez  l'adulte  que  chez  l'enfant,  l'atélectasie  se  prodût  plus 
rarement,  les  congestions  sont  moins^intenses  dans  le  parenchyme  pohiio- 
naire,  la  pneumonie  lobulaire  en  partie  masquée  par  Temphyseme  oonh 
pensateur  est  moins  apparente.  De  là,  dans  certains  cas,  une  incertitude 
que  les  analyses  histologiques  ne  tarderont  pas  à  faire  cesser.  La  brondio- 
pneumonie  d'ailleurs  est  rare  chez  l'adulte  et  nous  n'avons  pas  pu  troufcr 
l'occasion  d'en  faire  l'examen  microscopique.  Nous  nous  bornerons  i 
rappeler  qu'elle  apparaît  en  dehors  des  épidémies,  surtout  chez  les  indi- 
vidus  atteints  de  bronchites  chroniques,  d'emphysème.  Elle  peut  aussi 
reconnaître  les  mêmes  causes  que  chez  l'enfant;  la  débilitation  générale, 
la  perte  de  la  tonicité  des  muscles  bronchiques,  amènent  la  stagnation  des 
sécrétions  bronchiques  et  jouent  un  trcs-gr<ind  rôle  dans  sa  productioo. 

La  broncho-pneumonie  des  vieillards  a  été  également  confondue  dans 
les  descriptions  des  auteurs  avec  la  pneumonie  lobaire.  Sous  les  ooo» 
d'hépatisation  non  granulée,  de  pneumonie  intervésiculaire^  Hoannann 
et  Dechambre  l'ont  opposée  à  la  pneumonie  vésiculaire  et  granulée;  ils 
lui  donnent  aussi  le  nom  àc pneumonie plani forme  correspondant  à  hiflé- 
nisation  que  nous  avons  décrite.  Le  parenchyme  pulmonaire,  disent-ils, 
est  élastique,  d'une  couleur  foncée,  souvent  d'un  bleu  d'azur  ou  parfois 
noirâtre  ;  il  oiTre  une  coupe  homogène  d'un  poli  remarquable,  à  la  sur- 
face de  laquelle  on  distingue  des  traînées  grisâtres.  Le  poumon  se 
laisse  insuffler  (Roccas).  Il  présente  souvent  un  aspect  granitique,  et, 
quant  on  fait  couler  un  filet  d'eau  à  la  surface  de  la  coupe,  on  distingue 
mieux  encore  l'isolement  et  la  dissémination  des  noyaux  de  pneumonie 
(Charlton).  Les  bronches  sont  rouges^  épaissies  et  boursouflées  (Hour- 
mann,  Dechambre,  Prus,  Durand  FardeU  etc.).  Les  examens  microsco- 
piques ont  montré  les  mêmes  lésions  que  dans  les  broncho-pneumonies 
des  enfants  (Charcot).  Cependant  la  présence  de  la  fibrine  a  paru  moins 
constante  dans  le  nodule  péribronchique  ;  c'est  Texsudation  leucocytifue 
qui  prédomine.  L'atélectasie  fait  défaut;  mais  les  autres  lésions  acces- 
soires, la  congestion  hypostatique  (pneumonie  œdémateuse  de  Cruveilhîer, 
hypo statique  de  Durand-Fardel),  l'emphysème,  se  rencontrent  à  un 
haut  degré.  Quelquefois  il  y  a  des  noyaux  d'apoplexie  pulmonaire  (Prus). 
Ces  dans  ces  broncho-pneumonies  des  vieillards  qu'il  est  fréquent  de  voir 
des  vacuoles  volumineuses  produites  par  Taccumulation  du  pus  dans  les 
alvéoles  emphysémateux.  La  broncho-pneumonie  peutsuivre  d'ailleurs  son 
évolution  ordinaire,  aboutir  dans  les  cas  subaigus  à  la  suppuration  et  i 
la  destruction  des  lobules  avec  ulcération  et  dilatation  des  bronches, 
et  épaississement  considérable  des  travées  conjonctives. 

Nous  croyons  avec  notre  excellent  maître,  le  professeur  Lépine.  qu'il 


PNEUMONIE.    —   BRONCHO-PNEUMONIE.   —   STMPTOMÀTOLOGIE.  555 

existe  des  pneumonies  qu'on  ne  peut  classer  ni  dans  les  pneumonies 
fibrineuses  ni  dans  les  broncho-pneumonies.  C'est  une  variété  qu'il  fau- 
drait étudier  à  part,  et  qui  se  rapproche  surtout  par  ses  caractères  ma- 
croscopiques  des   formes    pseudo-lobaires   de   la  broncho-pneumonie. 
Celles-ci,  croyons-nous,  pourront  toujours  en  être  distinguées  à  la  pré- 
dominance des  lésions  inflammatoires  autour  de  la  bronche.  Le  cas  rap- 
porté à  la  page  68  de  notre  thèse  inaugurale  nous  parait  devoir  être  rap- 
proché de  celui  de  Liébel  et  Heiller  auquel  Lépine  fait  allusion.    Un 
jeune  homme  épuisé  par  des  travaux  excessifs  entra  dans  le  service  de 
Grancher  avec  tous  les  signes  d'une  pneumonie  droite  datant  déjà  de 
quatre  ou  cinq  jours.  Il  succomba  avec  des  signes  d'asphyxie  progressive, 
bien  que  tous  les  symptômes  de  la  pneumonie  eussent  disparu.  En  effet, 
i  Tautopsie  le  poumon  droit  était  simplement  congestionné,  souple  et 
crépitant,  mais  le  poumon  gauche  était  envahi  par  une  pneumonie  secon- 
daire occupant  toute  la  base,  remarquable  par  sa  coloi^tion  bleuâtre  à 
Textérieur,  et  sa  surface  lisse  sur  la  coupe.  L'examen  microscopique 
montra  que  les  lésions  inflammatoires  étaient  dispersées  dans  tout  le 
lobule  sans   localisation   spéciale.  On   ne  voyait  guère   qu'une  légère 
desquamation  épithéliale  dans  les  alvéoles  et  surtout  une  congestion 
intense.  Evidemment  c'est  là  une  forme  de  pneumonie  spéciale^  indépen- 
dante de  la  pneumonie  lobaire  commune  et  de  la  broncho-pneumonie  et 
qui,  suivant  Grancher,  devait  vraisemblablement  ce  caractère  à  Tépui- 
sement  complet  du  malade  chez  lequel  elle  s'était  développée.  Ces  types 
intermédiaires  doivent  être  classés  à  part,  si  l'on  veut  éviter  la  confusion. 
Syaiptomatolofi^ie.  —  Tous  les  auteurs  s'accordent  pour  faire  re- 
marquer l'obscurité  qui  entoure  le  début  de  la  broncho-pneumonie  chez 
l'enfant.  D'une  manière  générale,  celle-ci  se  développe  insidieusement,  et 
0*061  souvent  par  des  troubles  fonctionnels  et  par  les  symptômes  généraux 
qpie  Ton  est  averti  de  son  apparition  plutôt  que  par  les  renseignements 
fournis  par  l'exploration  de  la  poitrine.  Dans  la  majorité  des  cas,  la 
propagation  de  l'inflammation  des  bronches  au  lobule  se  fait  en  plusieurs 
points  disséminés  dans  les  deux  poumons  :  les  symptômes  spéciaux  qui 
accompagnent  cette  extension  modifient  peu  le  tableau  de  la  bronchite 
généralisée,  dont  les  symptômes  locaux  et  généraux  dominent  la  situation. 
D  est  impossible,  en  un  mot,  de  saisir  d'une  façon  certaine  le  moment 
où  la  bronchite  atteint  le  lobule  et  devient  la  broncho-pneumonie.  C'est, 
le  plus  ordinairement,  par  l'exaspération  des  symptômes  antérieurs  que 
s'accuse  le  début  de  l'affection  nouvelle.  La  dyspnée  augmente  d'intensité 
(50  ou  80  R.)  et  s'accompagne  d'efforts  plus  considérables,  la  toux  aug- 
mente de  fréquence,  devient  sèche,  douloureuse.  On  est  souvent  averti 
du  début  par  la  manière  dont  se  font  les  mouvements  respiratoires,  sur- 
tout par    l'expiration   forcée  et  prolongée  (Bouchut).  A  cela  se  joint 
Tbabitus  particulier  des  malades,  le  facie,  animé  ou   cyanose,  livide, 
tuméfié,  les  pupilles  dilatées,  l'agitation,  la  station  assise.  A  l'examen  de 
la  poitrine  on  peut  n'entendre  que  les  râles  plus  ou  moins  fins  de  la 
t)ronchite  ;  mais  parfois  Poreille  saisit  des  bouffées  de  râles  sous-crépitants 


556  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  sTHProiiATOLOGn. 

remarquables  par  leur  finesse  et  leur  fugacité.  Enfin  le  plus  souvent,  et 
c'est  là  un  des  meilleurs  signes  du  début,  ces  symptômes  s*accompagnent 
d'une  exagération  dans  la  fréquence  du  pouls  (130  à  160)  el  d'une  élé- 
vation de  la  température  (39*^  ou  40°)  d'autant  plus  accentuée  que  le  début 
de  la  broncho-pneumonie  est  plus  brusque  ou  se  fait  dans  un  état  de 
santé  plus  satisfaisant,  chez  un  enfant  vigoureux. 

La  broncho-pneumonie  s'annonce  quelquefois  par  les  modifications 
importantes  qu'elle  apporte  à  la  symptomatologie  des  maladies  qa'elle 
vient  compliquer.  Au  début  d'une  rougeole,  elle  retarde  ou  aflaSilîiU 
sortie  de  l'éruption  ;  plus  tard,  l'éruption  pâlit  ou  disparait  tout  à  faît 
lorsqu'elle  se  développe.  Dans  la  coqueluche,  les  quintes  cessent  el  la 
toux  ne  s'accompagne  plus  de  ses  reprises  caractéristiques.  Toutefeb,  si 
le  début  de  la  broncho-pneumonie  peut  ainsi  faire  cesser  certains  spannes, 
dans  d'autres  cas  il  peut  s'accompagner  de  convulsions  comme  dam  la 
pneumonie  franche.  C'est  surtout  dans  la  rougeole  que  ces  conniisioiis 
ont  été  observées.  La  soudaineté  *et  la  violence  des  symptômes  du  éihvX 
peuvent  d'ailleurs  varier  suivant  les  circonstances  dans  lesqudks  se 
montre  la  broncho-pneumonie.  Ils  passeront  plus  facilement  inaperçus, 
si  elle  se  développe  dans  le  cours  d'une  maladie  fébrile  accompagnée 
d'un  catarrhe  bronchique  intense  :  ils  se  déclareront  parfois  avec  plus  de 
netteté,  si  elle  survient  comme  complication  pendant  la  convalescence  oo 
même  pendant  la  période  de  déclin  de  ces  mêmes  maladies. 

Nous  l'avons  dit,  la  broncho-pneumonie  est  toujours  secondaire;  mais 
il  y  a  des  cas  où  la  succession  de  l'inflammation  pulmonaire  &  rinOam- 
mation  bronchique  est  à  peine  marquée  et  même  inappréciable.  Il  se  peut 
alors  que  la  broncho-pneumonie  ait  un  début  brusque  et  violent  qui  rap- 
pelle celui  de  la  pneumonie  franche  par  la  manifestation  soudaine  de  la 
lièvre,  et  parfois  par  la  fixation  rapide  des  symptômes  locaux.  La  tempé- 
rature atteint  bientôt  une  élévation  considérable,  40*^  ou  40'*,5,  avec  une 
augmentation  correspondante  dans  le  chiffre  des  respirations  et  des  bat- 
tements du  pouls.  Comme  nous  le  verrons,  ce  mode  de  début  s'obserre 
principalement  dans  les  cas  où  l'élément  pulmonaire  l'emporte  sur  l'élé- 
ment bronchique,  et  la  maladie  peut  quelquefois  conserver  pendant  toute 
sa  durée  cette  physionomie  voisine  de  celle  de  la  pneumonie  franche. 

La  douleur  de  côté  n'est  point  un  signe  de  début  de  la  bronchof  neu- 
monie.  Elle  manque  le  plus  souvent  et  ne  s'observe  guère  que  chez  les  en- 
fants de  six  à  quinze  ans  (Barrier)  ;  et  alors,  suivant  Damaschino,  il 
faut  se  tenir  en  garde  et  songer  à  Texistence  possible  d'une  pleurésie 
concomitante.  Les  enfants  éprouvent  cependant  des  douleurs  dans  la 
broncho-pneumonie,  mais  elles  sont  en  rapport  avec  la  dyspnée,  et  se  font 
sentir  au  creux  épi  gastrique  ou  dans  les  h^pochondres.  La  broncho-pneu- 
monie  à  la  période  d'état  est  surtout  caractérisée  par  les  troubles  fonc- 
tionnels. La  dyspnée,  comme  nous  l'avons  vu,  arrive  promptemcnl  jus- 
qu'à l'orthopnée  :  c'est  un  des  symptômes  les  plus  accusés,  et  rapidemenl 
on  peut  observer  30,  40,  50  et  quelquefois  80  respirations  chez  les  jeun» 
sujets.  La  physionomie  et  l'attitude  des  malades  témoignent  alors  deli 


PNEUMONIE.   —   BRONCHO-PNEUMOKIE.    —   STMPTOMÀTOLOGIE.  557 

difficulté  que  la  respiration  éprouve  à  s'accomplir  :  ils  sont  assis  dans 
leur  lit,  le  corps  penché  en  avant;  souvent  les  enfants  étendent  leurs  bras 
et  prennent  un  point  d'appui  aux  barreaux  de  leur  lit  pour  mieux  res- 
pirer. La  figure,  livide,  aune  expression  d*anxiété,  les  yeux  sont  saillants, 
les  ailes  du  nez  se  dilatent  largement,  la  bouche  est  entr'ouverte  et  les 
commissures  labiales  abaissées.  Tous  les  muscles  de  la  respiration  sont  en 
jeu  :  la  saillie  des  stemo-mastoïdiens  est  très  marquée  ;  les  épaules  se  soulè- 
Yeai  à  chaque  mouvement  de  respiration,  le  diaphragme  se  contracte  avec 
force  et  attire  les  cartilages  costaux  en  formant  ainsi  un  sillon  chondro- 
costal  d'autant  plus  marqué  que  Tenfant  est  plus  jeune.  Suivant  Bartels, 
la  dilatation  de  la  poitrine  se  trouve  ainsi  limitée  aux  cinq  côtes  supé- 
rieures. L'expiration  elle-même  nécessite  de  grands  efforts  et  les  muscles 
abdominaux  se  contractent  avec  violence  en  déprimant  les  viscères.  Ce 
type  de  dyspnée  a  été  bien  décrit  par  Bouchut,  sous  le  nom  de  respi- 
ration expiratrice  :  le  rhythme  des  mouvements  respiratoires  se  trouve 
diangé  quand  la  dyspnée  est  poussée  à  Textréme.  Dans  ces  cas,  dit  Da- 
maschino,  la  série  des  mouvements  parait  commencer  par  l'expiration 
qui  se   fait  brusquement  et  pendant  laquelle  les  viscères  abdominaux 
semblent  rentrer  dans  le  thorax  ;  puis  à  cette  violente  expiration  succède 
brusquement  une  inspiration  puissante  et  brève,  pendant  laquelle  le  dia- 
phragme se  contracte  énergiquement  et  chasse  de  nouveau  les  viscères 
abdominaux,  en  même  temps  qu'il  détermine  un  profond  sillon  costal. 
L'air  qui  a  pénétré  ainsi  reste  emprisonné  pendant  un  temps  relativement 
assea  long,  puis  on  voit  se  reproduire  la  brusque  série  des  mouvements 
«piratoires  et  inspiratoires  que  nous  venons  de  décrire.  On  perçoit,  dit  le 
néme  auteur,  à  chaque  respiration  une  sorte  de  heu  très-sec  et  strident 
qui  permet  parfois  de  faire  à  distance  le  diagnostic  de  la  broncho-pneu- 
monie. Les  tracés  pneumographiques  témoignent  de  cette  gène  de  la 
leapiration.  Mocquot  a  constaté  que  l'amplilude  des  mouvements  thora- 
cîques  est  considérablement  diminuée.  Les  tracés  abdominaux  montrent 
ipie  l'inspiration  est  allongée  et  gênée.  Ces  efforts  de  respiration  s'ac- 
compagnent d'une  angoisse  très-grande.  Les  enfants  ressentent  souvent 
dans  la  région  du  diaphragme  des  souffrances  dues  à  la  toux^  qui  de- 
TÎent  de  plus  en  plus  brève  et  fréquente.  Elle  s'observe  dans  tous  les 
cas,  avec  plus  ou  moins  d'intensité  :  elle  est  pénible,  douloureuse  ;  il  y  a 
souvent  des  quintes  assez  vives,   sans  raucité  de  la  voix,  sauf  dans  le 
croup,  pendant  et  après  lesquelles  la  face  prend  une  teinte  violacée. 

V expectoration  est  nulle  ou  rare  et  ne  se  produit  qu'à  l'occasion  de 

secousses  violentes.  Le  plus  souvent,  les  enfants  avalent  les  crachats  lors- 

qn*ik  pénètrent  jusque  dans  la  bouche.  C'est  surtout  dans  la  coqueluche 

qu'on  a  occasion  de  les  observer  :  ce  sont  des  mucosités  purulentes  épaisses, 

tenaces,  jaunâtres,  quelquefois  striées  de  sang.  Les  crachats  n'ont,  en 

somme,  aucun  rapport  avec  ceux  de  la  pneumonie  et  ne  diffèrent  pas  de 

ceux  de  la  bronchite.  Quelquefois,  mais  rarement,  il  y  a  expectoration  de 

fausses  membranes  dans  les  cas  de  broncho-pneumonies  diphthéritiques. 

A  propos  des  troubles  fonctionnels  nous  avons  déjà  vu  que  Vinspection 


558  PNEUMONIE.  —  broscuo-pneomonie.  —  stmptoiiatologii. 

de  la  poitrine,  l'étude  de  la  manière  dont  se  fait  la  respiration,  révèlent  des 
signes  physiques  importants.  La  percussion  doit  être  faite  légèrement 
avec  un  seul  doigt  sur  la  phalange  moyenne  du  médius  ou  sur  Toiigle 
(Roger).  Au  début,  et  dans  un  assez  grand  nombre  de  cas,  le  ion  pul- 
monaire est  normal  et  ne  présente  que  des  modificatious  insigiiifi&Dtes. 
Aux  bases  et  en  arrière,  le  son  peut  être  diminué  ou  assourdi,  pirfois 
tympanique,  suivant  Pétendue  plus  ou  moins  considérable  occupée  par  la 
splénisation  ou  par  l'emphysème.  L'hépatisation  lobulaire  dinémiiiée 
dans  le  parenchyme  pulmonaire  échappe  à  la  percussion,  à  cause  de 
Temphysème  supplémentaire  qui  se  développe  autour  des  noyaux.  Ce  n'est 
guère  que  dans  les  cas  où  la  pneumonie  est  généralisée  et  surtout  pseiido- 
lobaire  que  l'on  perçoit  une  matité  réelle,  siégeant  habituellement  i  la 
>base  en  arrière,  quelquefois  à  la  partie  moyenne  de  la  poitrine,  rarement 
bien  limitée  et  plus  ou  moins  complète  suivant  la  prédominance  dans  les 
lobules  atteints  de  la  splénisation  ou  de  l'inflammation  alvéolaire  péri- 
bronchique.  On  ne  perçoit  guère  la  matité  avant  le  deuxième  jour^  elle 
présente  rarement  la  même  étendue  dans  les  deux  côtés  de  la  poitrine, 
la  percussion  des  parties  antérieures  du  thorax  donne  habituellement 
une  sonorité  plus  marquée  suffisamment  expliquée  par  l'emphysème  pul- 
monaire. Dans  d'autres  cas,  l'obscurité  et  la  diminution  du  son  poommt 
quelquefois  faire  soupçonner  l'existence  de  l'état  fœtal.  La  palpatkm  ne 
donne  pas  de  résultats  bien  caractéristiques,  surtout  chez  les  eofiints 
très-jeunes  ;  tantôt  les  vibrations  thoraciques  sont  exagérées,  quelquefois 
leur  abolition  peut  être  attribuée  à  la  réplétion  de  l'arbre  bronchique  p» 
les  mucosités  ou  par  les  fausses  membranes.  Dans  ces  cas,  les  i^es  et 
le  souffle  cessent  d'être  perçus  dans  la  région  correspondante  ;  les  mêmes 
causes  produisent  ici  les  mêmes  effets  que  dans  la  pneumonie  massive 
de  Grancher. 

A  V auscultation^  comme  nous  l'avons  vu,  les  signes  ne  diffèrent  pas 
d'abord  de  ceux  de  la  bronchite  :  des  deux  côtés,  on  entend  des  râles 
sous-crépitants  moyens  et  6ns,  quelquefois  des  bouffées  de  râles  crépi- 
tants, au  moment  des  efforts  ou  pendant  la  toux.  Ces  divers  râles  s'accom- 
pagnent de  ronchus  sibilants  et  ronflants  qui  ont  pour  siège  les  bronchai 
^e  gros  et  de  moyen  calibre.  C'est  le  râle  sous-crépitant  fin  qui  a  iâ  h 
plus  grande  valeur  scméiologique,  carie  râle  crépitant  est  trop  difficile  à 
obtenir  chez  les  enfants,  trop  rare  et  jamais  bien  pur. 

Au  contraire,  le  râle  sous-crépitant  à  bulles  fines  a  plus  d'importance  ; 
mais,  d'autre  part,  il  ne  faut  pas  oublier  qu'il  ne  devient  caractéristique, 
suivant  Trousseau,  qu'autant  qu'il  se  maintient  pendant  au  moins  vingt- 
<[uatre  heures.  Au  bout  de  ce  temps,  il  est  rare  que  les  troubles  fonction- 
nels et  les  symptômes  généraux  ne  soient  pas  assez  accusés  pour  permettre 
d'affirmer  le  diagnostic.  Dans  la  forme  suffocante  ou  bronchite  capil- 
laire, le  râle  sous-crépitant  est,  avec  les  ronchus  qui  ont  pour  siège  les 
grosses  bronches,  le  seul  signe  stéthoscopique  pendant  toute  la  durée  de 
la  maladie.  L'hépatisation  lobulaire  étant  disséminée,  il  n'y  a  pas  de 
souffle  ni  de  bronchophonie,  et  la  diminution  ou  l'absence  du  murmure 


PNEUMONIE.    —  BRO>CHO-PIfEUMONIE.    —  S¥MPT01UT0L0GIE.  559 

isiculaire  qui  pourraient  la  caractériser  sont  plus  souvent  sous  la  dépen- 
aace  de  l'obstruction  des  bronches  par  les  mucosités.  Dans  d'autres  cas, 
1  contraire  la  condensation  du  tissu  pulmonaire  s'afGrme  par  du  soufDe 
ronchique  d'abord  faible,  voilé  par  les  râles,  plus  étendu  ensuite  et  plus 
iteose,  identique  à  celui  de  la  pneumonie  lobaire.  Quelquefois  ce  soufDe 
st  précédé  par  de  la  respiration  soufQante  ;  il  peut  paraître  brusquement 
t  disparaître  de  même  ;  il  peut  être  mobile  ou,  au  contraire,  se  Gxer  au  même 
oint  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie.  Il  peut  s'accompagner  de 
ronchophonie  plus  ou  moins  marquée  à  l'occasion  des  paroles  ou  des  cris. 
les  signes  d'induration  pulmonaire  se  perçoivent  plus  souvent  aux  bases 
t  en  arrière  qu'aux  parties  supérieures  et  antérieures  de  la  poitrine,  où 
oœinent  les  râles  de  bronchite  :  là  aussi  quelquefois  la  diminution  ou 
absence  totale  du  murmure  vésiculaire  doit  être  rapportée  au  développe-^ 
aent  de  l'état  fœtal. 

Ces  divers  signes  physiques  présentent  deux  caractères  spéciaux  : 
*  On  les  perçoit  des  deux  côtés  de  la  poitrine,  mais  rarement  d'une 
nanière  absolument  identique  ;  ils  ont  presque  toujours  une  prédomi- 
lance  plus  ou  moins  marquée  dans  l'un  des  poumons.  2^  Ils  sont  d'une 
tobilité  extrême  ;  non-seulement  les  râle;:  peuvent,  pour  ainsi  dire  d'un 
Qoment  à  l'autre,  changer  de  caractère,  de  nombre  et  de  siège,  mais  le 
oufQe  même,  dont  l'existence  est  en  rapport  avec  des  lésions  parenchyma- 
euses,  peut  présenter  des  variations  analogues. 

Dans  les  cas  où  l'induration  s'étend  à  tout  un  lobe  ou  à  la  plus  grande 
laitie  d'un  lobe,  comme  dans  la  forme  lobulaire  généralisée,  et  dans 
a  forme  pseudo-lobaire,  surtout  quand  Fhépatisation  l'emporte  sur  la 
plénisation  dans  les  lobules  atteints,  les  signes  physiques  sont  plus 
ixes.  Les  râles  sous-crépitants  sont  plus  nombreux  dans  l'inspiration. 
Is  prédominent  nettement  dans  l'un  des  côtés.  Au  bout  d'un  temps 
rès-court,  le  souffle  bronchique  apparaît  avec  une  intensité  qui  varie 
i¥ec  le  nombre  des  râles,  le  siège  et  l'étendue  des  parties  hépatisées,  mais 
|oi  persiste  généralement  jusqu'à  la  Gn  de  la  maladie  ;  le  souffle  s'ac- 
^mpagne  d'une  matité  plus  ou  moins  complète  et  d'une  exagération 
ies  vibrations  thoraciques  quand  l'enfant  parle  ou  pousse  des  cris.  Ce 
iigoe  ne  se  constate  guère  dans  la  forme  lobulaire  disséminée  ;  il  n  ap- 
Murtient  qu'aux  formes  où  l'induration  se  fait  en  masse  dans  une  étendue 
>lus  ou  moins  grande  des  poumons. 

La  fièvre  varie  au  début,  suivant  la  soudaineté  et  la  violence  de  l'inva- 
ion;  quelquefois  elle  est  d'abord  peu  vive,  mais  le  thermomètre  ne  tarde 
MIS  à  indiquer  une  élévation  considérable  de  la  température,  59^  ou  40*^  ; 
e  pouls  est  d'une  fréquence  extrême,  il  bat  120, 150, 180  fois  par  minute. 
ja  peau,  d'abord  un  peu  sèche,  ne  tarde  pas  à  devenir  moite;  chez  les 
•ujets  affaiblis  il  y  a  quelquefois  des  sueurs  abondantes.  Le  faciès  est 
mimé,  puis  il  est  envahi  par  la  pâleur,  avec  une  teinte  cyanique  des 
nuqueuses.  La  fièvre  est  surtout  intense  dans  la  soirée,  depuis  3  heures 
[e  l'après-midi  jusqu'à  6  ou  7  heures  du  soir  ;  il  n'est  pas  rare  de  voir 
a  température  plus  élevée  le  matin  que  le  soir.  Le  tracé  thermométrique 


560  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  stmptohatologib. 

ne  présente  donc  pas  une  marche  régulière  :  les  températures  du  malin 
et  du  soir  ne  diffèrent  que  de  quelques  dixièmes  de  degrés»  mais  il  est 
commun  d'observer  des  ascensions  brusques  qui  détruisent  la  régularité 
du  tracé  et  sont  en  rapport  avec  l'apparition  de  nouveaux  nopox  de 
broncho-pneumonie.  Après  une  rémission  de  quelques  jours,  une  exacer- 
bation  nouvelle  se  produit,  la  pneumonie  recommence  en  quelque  lorte, 
avec  les  symptômes  généraux  et  locaax  du  début  ;  une  courbe  brisée, 
irrégulière,  est  le  résultat  de  celte  série  d'inflammations  partielles  (Roger). 

Quelquefois,  dans  les  formes  rapidement  généralisées  ou  dans  II  forme 
pseudo-lobaire,  la  fièvre  conserve  pendant  plusieurs  jours  une  iotensité 
égale.  La  température  se  maintient  vers  40^,  les  rémissions  matinales 
sont  à  peine  accusées  ou  nulles.  Le  pouls  est  fréquent  et  vibrant  ;  le  faciei 
est  animé,  un  peu  vultueux,  assez  analogue  à  celui  de  la  pneumonie.  La 
fièvre  peut  ainsi  persister  pendant  quelquefois  deux  semaines,  la  courbe 
thermométrique  oscillant  entre 39*^  et  39^5  (U.  Roger).  Ordinairement, 
quand  la  fièvre  n'est  pas  rémittente  dès  le  début,  elle  le  devient  vers  le  qua- 
trième ou  cinquième  jour.  En  résumé,  la  température  reste  élevée  plus 
longtemps  que  dans  la  pneumonie  franche,  mais  avec  des  rémissions  et 
des  exacerbations  successives  ;  c'est  là  le  fait  caractéristique  ;  elle  est 
plus  élevée  dans  la  broncho-pneumonie,  où  elle  atteint  entre  39*  et  41% 
que  dans  la  bronchite  simple,  où  elle  reste  entre  38*^  et  39^  0  but 
aussi  remarquer  que  Fintcnsité  de  la  fièvre  n'est  pas  toujours  en  rapport 
avec  rétendue  de  la  pneumonie.  La  défervescence  est  lente  ;  vers  la  fin 
de  la  maladie  la  température  s'abaisse  jusqu'à  38''5  et  décroît  d'une 
façon  à  peu  près  régulière.  Dans  les  cas  où  la  maladie  se  termine  parla 
mort,  il  y  a  aussi  un  abaissement  de  la  température,  mais  beaucoup 
moins  marqué.  Le  tracé  du  pouls,  sauf  quelques  petites  différences,  est 
à  peu  près  en  rapport  avec  celui  de  la  température  (H.  Roger). 

Tantôt  les  malades  sont  tristes,  affaissés,  tantôt  il  y  a  une  grande  agita- 
tion; les  enfants  se  remuent  sans  cesse,  se  découvi*ent,  poussent  des  cris. 
La  céphalalgie  existe  quelquefois  dans  les  broncho-pneumonies  raorbiK 
leuses.  Le  soir,  ces  phénomènes  nerveux  augmentent  d'acuïté;  en  même 
temps  que  la  fièvre  et  la  dyspnée,  il  peut  y  avoir  du  délire.  Les  convul- 
sions sont  exceptionnelles  :  on  peut  cependant  les  observer  à  la  suite  de 
quintes  de  toux  dans  la  broncho-pneumonie  secondaire  à  la  coqueluche, 
à  laquelle  elles  paraissent  d'ailleui^s  se  rapporter  (Damascliino).  L'affais- 
sement prédomine,  chez  les  enfants  très-jeunes,  l'agitation  que  nous 
venons  de  décrire  est  remplacée  par  un  état  de  somnolence  et  d'abatte- 
ment progressifs.  Les  enfants  restent  couchés  sur  le  dos,  endormis  ou 
plongés  dans  un  demi-coma.  Cet  état  s'observe  également  chez  les  sujets 
plus  âgés,  mais  seulement  dans  la  période  terminale. 

Les  troubles  digestifs  n'ont  rien  de  spécial  et  sont  en  rapport  avec 
l'intensité  de  la  fièvre.  L'inappétence  est  absolue,  la  soif  est  vive,  la  bou- 
che souvent  sèche,  croùteuse,  la  constipation  est  habituelle.  On  peut 
quelquefois  observer  des  troubles  en  rapport  avec  l'affection  primitive, 
des  vomissements,  si  la  bronche -pneumonie  s'est  développée  dans  le 


PNEUMONIE.   BRONCHO-PNEUMONIE.    —   FORMES.  561 

:ouraiit  d'une  coqueluche,  de  la  diarrhée  symptomatique  du  catarrhe 
ntestinal  de  la  rougeole  ou  de  l'entérite  de  la  fièvre  typhoïde.  Pendant 
a  con?alesceRce,  les  enfants  vomissent  fréquemment  à  la  suite  des 
[uintes  de  toux. 

Les  U7nnes  présentent  des  modifications  en  rapport  avec  les  mêmes 
élises;  elles  sont  riches  en  sels,  très-foncées,  peu  abondantes,  surtout 
fiiand  il  y  a  des  sueurs,  à  tel  point  qu'on  pourrait  se  demander  s'il  y  a 
suppression,  si  l'on  ne  savait  que  la  sécrétion  urinaire  peut  être  suspendues 
^hes  les  trèâ-jeunes  sujets  fébricitants,  pendant  douze  ou  même  vingt- 
{uafre  heures  (Roger). 

L'albumine  ne  se  rencontre  guère  que  dans  les  cas  de  bronche- 
pneumonie  diphthéritique.  Quant  à  la  glycosurie,  elle  doit  être  con- 
lidérée  comme  tout  à  fait  exceptionnelle  et  sans  nul  rapport  avec  la 
(oaladie. 

Formes.  —  Nous  avons  déjà  insisté  sur  la  manière  dont  se  déctare  la 
broncho-pneumonie,   tantôt  insidieusement,  plus  rarement  d'une  façon 
brusque^  selon  les  circonstances  dans  lesquelles  elle  se   développe  et 
selon  la  forme  qu'elle  revêt  tout  d'abord.  Dans  certains  cas,  les  ronchus 
de  la  bronchite  sont  suivis  plus  ou  moins  promptement  par  des  râles 
Bous-crépitants  ;   les  troubles  fonctionnels  et  les  symptômes  généraux 
B*aggravent  proportionnellement;  les  signes  d'asphyxie  ne  tardent  pas  à 
paraître.  La  symptomatologie  peut  se  borner  là,  les  râles  sous-crépitants  à 
bulles  plus  ou  moins  fines  se  généralisent  dans  les  deux  poumons,  sur- 
tout à  leur  partie  postérieure;  la  dyspnée   devient  continue,  s'exagère 
progressivement,  entrecoupée  de  quintes  de  toux.  Le  pouls  est  très-fré- 
quent, petit,  inégal,  la  température  très-élevée;  la  sufTocation  et  l'as- 
phyxie se  prononcent  de  plus  en  plus.  La  maladie,  en  somme,  est  carac- 
térisée par  la  prédominance  de  l'élément  bronchique,   c'est  la  forme 
êuffocante^  la  bronchite  capillaire,  dont  les  symptômes  sont  avant  tout 
BOUS  la  dépendance  de  l'engouement  et  de  l'obstruction  bronchiques. 
*    L'élément  pulmonaire  est  habituellement  insaisissable  ;  le  souflle  est 
rare  et  sans  intensité,  car  les  noyaux  de  broncho-pneumonie  sont  peu 
développés  et  disséminés  dans  le  parenchyme  pulmonaire,  c'est  l'hypcré- 
mie  qui  constitue  la  lésion  dominante. 

Dans  d'autres  cas,  au  contraire*  l'envahissement  du  lobule,  la  pneu- 
monie lobulaire,  se  révèlent,  comme  nous  l'avons  vu,  par  de  la  matité,  du 
souffle,  etc.  Ces  signes  apparaissent  ordinairement  après  les  râles,  au 
bout  de  deux,  trois  ou  quatre  jours;  ils  s'étendent  progressivement  de 
bas  en  haut  avec  prédominance  à  la  base  et  dans  un  seul  côté  :  ils  sont 
quelquefois  cependant  plus  disséminés  ou  présentent,  comme  nous 
l'avons  dit,  des  variations  fréquentes  en  rapport  avec  l'éclosion  de  nou- 
velles poussées.  Les  deux  poumons  finissent  par  être  envahis  dans  une 
Bmex  grande  étendue  et  le  souffle  l'emporte  sur  les  râles  :  Télcment 
pAlrnonaire  domine,  la  maladie  mérite  le  nom  de  pneumonie  lobulav^e 
généralisée.  La  fièvre  est  intense;  les  rémittences,  peu  marquées  d'abord, 
s'accusent  plus  tard  davantage,  mais  la  courbe  thermique  subit  de  temps 

HOUT.  DiCT.  m£d.  et  cbir.  XXVHI  —  36 


562  PNEUMONIE.  —  brokcho-pkedmome.  —  ronui. 

en  temps  de  nouvelles  ascensions.  La  dyspnée  est  moins  forte  fv^^ 
forme  précédente  et  ne  présente  pas  le  cachet  ortliopnéique  :  ili'if  |^ 
rare  de  voir  les  enfants  pouvoir  reprendre  leurs  jeux  (RÛliet  ci  |||d 
Le  nombre    des   respirations  dépasse   rarement  40  ou  50  faites 
période  d'état.  La  face  est  rouge  et  témoigne  de  rintensitédej|||^ 
plutôt  que  de  la  suffocation. 

Dans  d'autres  cas  plus  rares,  la  maladie  peut  débuter  brosfiHf tf 
les  symptômes  d'induralion  pulmonaire  se  révèlent  d'une  ] 
soudaine  et  aussi  intense  que  dans  la  pneumonie  franche.  Itl 
pneumonie  semble  de  môme  se  fixer  dans  un  lobe  et  y  pwNrirji 
évolution,  d'où  le  nom  de  broucho-pnrumonie  pseudo-lobm,  tvii 
intensité  et  sa  constance,  la  fièvre  se  rapproche  de  celle  de  li 
nie.  Les  autres  troubles  réactionnels  et  en  particulier  les  troHUeiAi^ 
tifs  sont  plus  accusés  que  dans  les  autres  formes  ;  les  signes  pm^ 
rester  fixés  d'un  seul  côté  ou  s'étendre  du  côté  opposé  ou  dattki 
poumon.  Comme  dans  la  forme  précédente,  les  symptômes  de 
accompagnent  toujours  les  symptômes  de  pneumonie,  mais  imvÊt 
différence  que  ces  derniers  apparaissent  en  même  temps  qu'eux  il  i 
blent  prédominer. 

Mais  il  faut  reconnaître  que  ces  cas  types  dans  lesquels  les 
et  la  marche  de  la  maladie  sont  en  rapport  avec  une  forme 
des  lésions  ne  sont  pas  les  plus  communs.  Fréquemment,  la  fo 
cante  reste  telle  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie,  mais  «  fat 
aussi  la  voir  se  modifier  par  Tapparilion  des  symptômes  pulaNWÉis»ë 
aboutir  finalement  à  une  pneumonie  lobulairc  généralisée  oa  pali» 
lobaire.  Non-seulement  la  transformation  des  formes  aoatomiqoui'dt 
pas  rare,  mais  on  voit  souvent  chez  un  même  malade  et  parfuisdasil 
mémo  poumon  les  diverses  formes  exister  ensemble  et  se  traduire  fMl- 
quefois  par  les  symptômes  physiques  qui  leur  sont  propres. 

Il  résulte  également  de  ce  mélange  des  diverses  formes,  dehbc* 
irrcgulière  et  désordonnée  dont  elles  se  produisent,  que  TévolotieBdeli 
maladie  n'est  pas  en  rapport  avec  celle  des  lésions  primitives. Qim|» 
noyau  ou  chaque  groupe  de  noyaux  de  pneumonie  parcourt  des  pched» 
définies  dont  le  dernier  terme  est  la  suppuration  ou  la  rcsolulioB,  ffliiili 
symplomatologie  régulière  qui  devrait  résulter  de  celte  èTolitiHest 
bouleversée  par  l'apparition  de  nouvelles  poussées  que  traduisentl'iiKnsiM 
du  thermomètre,  Texaspération  de  la  dyspnée  et  de  la  toux,  ellesù|Dtt 
d'induration  dans  des  points  respectés  jusque-là.  Aux  symplôtnesdeli 
période  d'état  viennent  s'ajouter  les  symptômes  de  la  période  d'inmi» 
correspondant  au  développement  de  ces  nouveaux  noyaux.  De  là  c* 
marche  essentiellement  irrégulicre,  entrecoupée  de  rémissions  el  fe» 
cerbations  brusques  et  beaucoup  moins  en  rapport  avec  révolulioaèl 
noyaux  de  pneumonie  qu'avec  la  marche  capricieuse  de  la  bronchile,fi 
progresse  d'une  façon  inégale  vers  les  lobules,  et  est  d'ailleurs  suscepAk 
d'exacerbations  et  d'améliorations  beaucoup  plus  brusques. 
Le  tableau  de  la  maladie,  chez  V adulte^  présente  à  peu  près  les  iMii 


PNEUMONIE.    BRONCHO-PNBOMOMK.    —    FORMES.  563 

[icz  l'enfant,  et  il  est  à  remarquer,  d'ailleurs,  que  les  médecins 
it  sur  la  bronchite  capillaire  Font  toujours  envisagée  chez  ce 
si  bien  que  chez  l'adulte,  dans  leurs  descriptions  (Voy.  Bron- 
aire).  Nous  nous  bornerons  seulement  à  rappeler  que  ce  sont 
formes  suffocantes  avec  prédominance  de  Télémcnt  bron- 
Ton  observe  chez  Tadulte  ;  les  formes  parenchymateuses  sont 

nouveau-néy  la  broncho-pneumonie  a  souvent  un  début  insi- 
)lable  à  celui  d'un  catarrhe  bronchique;  l'enfant  est  abattu  et 
in,  il  a  de  la  fièvre,  de  la  dyspnée,  etcrie  fréquemment.  Au  bout 
latre  à  quarante-huit  heures,  l'anxiété  respiratoire  augmente,  les 
es  labiales  sont  tirées  en  arrière,  les  ailes  du  nez  battent  rapi- 

base  du  thorax  est  resserrée,  la  dépression  sternale  contraste 
îllie  de  l'abdomen,   le  mouvement  d'expiration  est  prolongé 

On  n'entend  pas  de  râles  crépitants,  mais  plutôt  des  râles 
tants  fins,  variables,  quant  à  leur  nombre  et  à  leur  siège, 
*fois  brusquement  lorsque  l'obstruction  bronchique  se  produit, 
le  bronchique  est  également  très-variable  ;  il  y  a  des  cas  où  il 
.  011  l'auscultation  ne  perçoit  qu'un  affaiblissement  marqué  du 
respiratoire.  Trousseau  et  Bouchut  ont  noté  la  grande  fréquence 
[ui  bat  140  ou  160  fois  par  minute;  tantôt  il  se  ralentit,  tantôt 
re  encore  aux  approches  de  la  mort.  La  fièvre  est  rémittente, 
nations  ont  lieu  le  soir  ;  il  y  a  de  temps  en  temps  des  poussées 

rapport  avec  le  développement  de  nouveaux  foyers  de  pneumo- 
|uefois  la  maladie  est  apyrétique  ou  s'accompagne  même  d'un 
it  de  la  température.  Les  enfants  sont  agités,  crient,  il  y  a 
(  convulsions  (Billard,  Bouchut).  La  durée  de  la  maladie  est 
lentdc  trois  à  six  jours,  mais  il  n'est  pas  rare  de  lavoir  évoluer 
mteur  remarquable,  de  voir  la  fièvre  et  le  souffle  bronchique 
3ndant  trois  semaines  et  quelquefois  même  davantage  (Parrot, 
id  terminaison  à  peu  près  constante  est  la  mort;  quelquefois 
moncée  par  l'apparition  de  l'œdème  du  tissu  cellulaire,  du 
i^ec  diarrhée  et  vomissements.  Le  diagnostic  reste  souvent 
cause  des  difficultés  de  l'exploration  physique;  il  se  base 
nent  sur  la  présence  du  souffle  bronchique,  sur  la  marche  de 
ît   la  forme   de   la   dyspnée. 

vieillard,  la  broncho-pneumonie  débute  ordinairement  d'une 
ieuse,  lente,  sans  point  de  côté,  sans  frissons  ou  avec  quelques 
m  intenses.  Parfois,  le  début  est  assez  brusque,  la  bronchite  se 
et  atteint  rapidement  les  lobules.  La  toux  ne  diffère  point  de 
i  bronchite;  il  en  est  de  même  de  l'expectoration.  La  dyspnée 
coup  d'intensité  suivant  les  cas  ;  lorsque  l'adynamie  e^l  très- 
la  toux  est  faible  et  l'expectoration  nulle.  A  l'auscultation,  on 
fnurmure  respiratoire  très  affaibli,  il  n'y  a  pas  de  râles  crépi- 
s  des  raies  sous-crépilanls  plus  ou  moins  fins.  Comme  chei 
i  souffle  peut  manquer  :  il  est  souvent  peu  intense,  fugace. 


562  PNEUMONIE.  —  brokcho-pkeumokie,  —  pormbs. 

en  temps  de  nouvelles  ascensions.  La  dyspnée  est  moins  forte  que  dans  b 
forme  précédente  et  ne  présente  pas  le  cachet  orthopnéique  :  il  n'est  pas- 
rare  de  voir  les  enfanls  pouvoir  reprendre  leurs  jeux  (Rilliet  et  Barthez). 
Le  nombre  des  respirations  dépasse  rarement  40  ou  50  pendant  la 
période  d'état.  La  face  est  rouge  et  témoigne  de  Tintensité  de  la  fièvre 
plutôt  que  de  la  suffocation. 

Dans  d'autres  cas  plus  rares,  la  maladie  peut  débuter  bniaqnemeol  et 
les  symptômes  d'induralion  pulmonaire  se  révèlent  d'une  maaière  aossi 
soudaine  et  aussi  intense  que  dans  la  pneumonie  franche.  La  bronciia- 
pneumonie  semblc.de  même  se  fixer  dans  un  lobe  et  y  parcourir  soa 
évolution,  d'où  le  nom  de  broncho-pneumonie  pseudo-Zofratre.  ParaoQ 
intensité  et  sa  constance,  la  fièvre  se  rapproche  de  celle  de  la  pneumo- 
nie. Les  autres  troubles  réactionnels  et  en  particulier  les  troubles  digo- 
tifs  sont  plus  accusés  que  dans  les  autres  formes;  les  signes  peufeat 
rester  fixés  d'un  seul  côte  ou  s'étendre  du  côté  opposé  ou  dans  le  même 
poumon.  Comme  dans  la  forme  précédente,  les  symptômes  de  brooeUe 
accompagnent  toujours  les  symptômes  de  pneumonie,  mais  avec  cette 
différence  que  ces  derniers  apparaissent  en  même  temps  qu'eux  et  sem- 
blent prédominer. 

Mais  il  faut  reconnaître  que  ces  cas  types  dans  lesquels  les  symptdmei 
et  la  marche  de  la  maladie  sont  en  rapport  avec  une  forme  déimiiDée 
des  lésions  ne  sont  pas  les  plus  communs.  Fréquemment,  la  forme  soRb- 
cante  reste  telle  pendant  toute  la  durée  de  la  maladie,  mais  on  peut 
aussi  la  voir  se  modifier  par  Tapparition  des  symptômes  pulmonaires,  ci 
aboutir  finalement  à  une  pneumonie  lobulaire  généralisée  ou  pseudo- 
lobaire.  Non-seulement  la  transformation  des  formes  anatomiques  n'est 
pas  rare,  mais  on  voit  souvent  chez  un  même  malade  et  parfois  dans  le 
même  poumon  les  diverses  formes  exister  ensemble  et  se  traduire  quel- 
quefois par  les  symptômes  physiques^  qui  leur  sont  propres. 

II  résulte  également  de  ce  mélange  des  diverses  formes,  de  la  bçaa 
irrcgulière  et  désordonnée  dont  elles  se  produisent,  que  révolution  de  la 
maladie  n'est  pas  en  rapport  avec  celle  des  lésions  primitives.  Chaque 
noyau  ou  chaque  groupe  de  noyaux  de  pneumonie  parcourt  des  pcriodei 
définies  dont  le  dernier  terme  est  la  suppuration  ou  la  résolution,  nuis  II 
symplomatologie  régulière  qui  devrait  résulter  de  cette  évolatÛNi  est 
bouleversée  par  l'apparition  de  nouvelles  poussées  que  traduisentlascensioa  I 
du  thermomètre,  l'exaspération  de  la  dyspnée  cl  de  la  toux,  et  des  signes 
d'induration  dans  des  points  respectés  jusque-là.  Aux  symptômes  de  It 
période  d'état  viennent  s'ajouter  les  symptômes  de  la  période  d'invasiei 
correspondant  au  développement  de  ces  nouveaux  noyaux.  De  là  celte 
marche  essentiellement  irrégulicre,  entrecoupée  de  rémissions  et  d'eu* 
cerbations  brusques  et  beaucoup  moins  en  rapport  avec  l'évolution  dtf 
noyaux  de  pneumonie  qu'avec  la  marche  capricieuse  de  la  bronchite,  qii 
progresse  d'une  façon  inégale  vers  les  lobules,  et  est  d'ailleurs  susccptiklr 
d'exacerbations  et  d'améliorations  beaucoup  plus  brusques. 

Le  tableau  de  la  maladie,  chez  Vadulle^  présente  à  peu  près  les  mémei 


PNEUMOME.    BROKCHO-PNEUMOME.    —    FORMES.  563 

traits  que  chez  lenfant,  et  il  est  à  remarquer,  d'ailleurs,  que  les  médecins 
qui  ont  écrit  sur  la  bronchite  capillaire  l'ont  toujours  envisagée  chez  ce 
dernier  aussi  bien  que  chez  l'adulte,  dans  leurs  descriptions  (Voy.  Bron- 
CHm  CAPaLAiRs).  Nous  uous  bornerons  seulement  à  rappeler  que  ce  sont 
surtout  les  formes  suffocantes  avec  prédominance  de  rélémcnt  bron- 
ehique  que  Ton  observe  chez  Tadulte  ;  les  formes  parenchymaleuses  sont 
plas  rares. 

Chez  le  nouveau-né^  la  broncho-pneumonie  a  souvent  un  début  insi- 
dieux semblable  à  celui  d'un  catarrhe  bronchique;  Tenfant  est  abattu  et 
refuse  le  sein,  il  a  de  la  fièvre,  de  la  dyspnée,  et  crie  fréquemment.  Au  bout 
de  Tingt^quatre  à  quarante-huit  heures,  l'anxiétc  respiratoire  augmente,  les 
commissures  labiales  sont  tirées  en  arrière,  les  ailes  du  nez  battent  rapi- 
dement, la  base  du  thorax  est  resserrée,  la  dépression  sternale  contraste 
arec  la  saillie  de  Tabdomen,   le  mouvement  d'expiration  est  prolongé 
.  (Bouchut).  On  n'entend  pas  de  râles  crépitants,  mais  plutôt  des  râles 
-amis-crépitants  fins,  variables,  quant  à  leur  nombre  et  à  leur  siège, 
cessant  parfois  brusquement  lorsque  l'obstruction  bronchique  se  produit. 
Le  soufQe  bronchique  est  également  très-variable  ;  il  y  a  des  cas  oiî  il 
manque  et  où  l'auscultation  ne  perçoit  qu'un  affaiblissement  marqué  du 
marmure  respiratoire.  Trousseau  et  Bouchut  ont  noté  la  grande  fréquence 
da  pouls, qui  bat  140  ou  160  fois  par  minute;  lantôt  il  se  ralentit,  tantôt 
il  s^accélcre  encore  aux  approches  de  la  mort.  La  fièvre  est  rémittente, 
les  exacerbations  ont  lieu  le  soir  ;  il  y  a  de  temps  en  temps  des  poussées 
fihri|es  en  rapport  avec  le  développement  de  nouveaux  foyers  de  pneumo- 
L  Quelquefois  la  maladie  est  apyrétique  ou  s'accompagne  même  d'un 
lent  de  la  température.  Les  enfants   sont  agités,  crient,  il  y  a 
ifarCDis  des  convulsions  (Billard,  Bouchut).  La  durée  de    la  maladie  est 
■âgdinairement  de  trois  à  six  jours,  mais  il  n'est  pas  rare  de  la  voir  évoluer 
une  lenteur  remarquable,  de  voir  la  fièvre  et  le  souffle  bronchique 
lister  pendant  trois  semaines  et  quelquefois  même  davantage  (Parrot, 
fen).  La  terminaison  à  peu  près  constante  est  la  mort;  quelquefois 
esl  annoncée  par  l'apparition  de  l'œdème  du  tissu  cellulaire,  du 
iguel  avec  diarrhée   et  vomissements.   Le  diagnostic  reste  souvent 
leiiain  à  cause  des  difficultés  de  l'exploration  physique;   il  se  base 
incipalement  sur  la  présence  du  souffle  bronchique,  sur  la  marche  de 
6èm  et  la  forme   de   la   dyspnée. 

Chez  le  vieillard^  la  broncho-pneumonie  débute  ordinairement  d'une 
^n  insidieuse,  lente,  sans  point  de  côté,  sans  frissons  ou  avec  quelques 
is  peu  intenses.  Parfois,  le  début  est  assez  brusque,  la  bronchite  se 
néralise  et  atteint  rapidement  les  lobules.  La  toux  ne  diffère  point  de 
Ile  de  la  bronchite;  il  en  est  de  même  de  l'expectoration.  La  dyspnée 
rie  beaucoup  d'intensité  suivant  les  cas  ;  lorsque  l'adynamie  ei>t  très- 
arquée,  la  toux  est  faible  et  l'expectoration  nulle.  A  l'auscultation,  on 
ju\e  le  murmure  respiratoire  très  affaibli,  il  n'y  a  pas  de  râles  crépi- 
^p«»nis,  mais  des  raies  sous-crépitants  plus  ou  moins  fins.  Comme  chex 
.^^anfant,  le  souffle  peut  manquer  :  il  est  souvent  peu  intense,  fugace, 


564    PNEUMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  marche,  durée.  TBRMiRÀisosif. 

intermittent,  alternatives  que  Charlton  a  judicieusement  expliquées  :  Ie5 
bronches  sont  tantôt  vides,  tantôt  remplies  par  la  séci*étioii  moco-pum- 
lente.  Il  est  commun  de  percevoir  le  chevrotement  delà  voix,  une  Téritable 
broncho-égophonie.  La  percusion  donne  quelquefois  de  la  matité,  quel- 
quefois un  son  normal.   La  marche  de  la  fièvre  est  caractéristique  :  la 
température  peut  atteindre  40%  elle  présente  des  oscillations  journalières 
fortement  accusées,  de  1  degré  et  demi  ou  davantage  ;  rascensioo  a  lieu 
progressivement  et,  dans  le  cas  de  guérison,  la  défervcscence  s^aoeomplit 
par  degrés  successifs  dans  Tespace  de  trois  ou  quatre  jours  (Charooi).  La 
peau  est  ordinairement  sèche,  ainsi  que  la  langue  fréquemment  recouverte 
d*un  enduit  noirâtre.  Il  y  a  quelquefois  du  délire,  plus  souvent  de  rabat- 
tement, de  l'hébétude.  L'adynamic  augmente  surtout  dans  les  demièrB 
périodes;  quelquefois  on  voit  apparaître  de  la  diarrhée.  Dans  les  forma 
suraiguës  Tasphyxie  termine  rapidement  la  scène,  par  suite  de  Taccn- 
mulation  des  mucosités  dans  les  bronches.  Dans  les  formes  subaiguêti 
lente  (Durand-Fardel),  la  broncho-pneumonie  peut  rester  latente:  il  y 
a  peu  de  dyspnée,  peu  de  râles,  pas  de  crachats,  la  réaction  géoérale  est 
presque  nulle.  Pinis  et  Beau  ont  signalé  les  poussées  de  pneumonie  d 
les  améliorations  successives  qui  peuvent  avoir  lieu  deux  ou  trois  fois 
dans  le  cours  de  la  maladie  et  qui  rendent  sa  durée  très-variable.  Elk 
est  ordinairement  d'une  à  deux  semaines. 

Marche.  —  Durée.  —  Terminaisoiifii.  —  Chez  Fenfant,  dans  b 
forme  suffocante,  la  maladie  marche  plus  ou  moins  rapidement  vers  la  t^- 
minaison  fatale.  Les  accidents  suivent  quelquefois  une  marche  foudrcyanU, 
les  bronches  se  remplissent  de  mucosités  abondantes  et  les  râles  tracbéo- 
bronchiques  s'entendent  de  bonne  heure  ;  la  suffocation,  la  cyanose  el 
l'uspliyxie  sont  de  plus  en  plus  marquées,  l'enfant  succombe  eo  deux  ou 
trois  jours.  Dans  d'autres  cas,  la  dyspnée  laisse  à  l'enfant  quelques  mo- 
ments de  calme  dans  la  journée,  mais  le  soir  la  fièvre  et  la  suffocatioo 
recommencent.  Bientôt  l'enfant  n'a  plus  la  force  de  lutter,  et  il  tombe 
dans  la  somnolence  d'où  il  ne  sort  plus  que  pour  faire  de  temps  à  autre  de 
violents  efforts  respiratoires.  Bientôt  la  toux  cesse,  la  voix  s'affaiblit,  les 
respirations  perdent  peu  à  peu  leur  ampleur,  le  pouls  devient  d'une 
fréquence  et  d'une  petitesse  extrême,  les  signes  de  l'asphyxie  s'accen- 
tuent graduellement.  L'enfant  succombe  dans  le  coma  ou  dans  une  at- 
taque de  convulsions  ;  quelquefois  il  conserve  sa  connaissance  jusqu^ao 
dernier  moment.  Il  est  rare  que  les  accidents  durent  dans  ces  cas  plus 
de  huit  jours. 

Dans  les  formes  parenchymateuses  (lobulaire  disséminée,  généralisée 
ou  pseudo-lobaire),  après  les  phénomènes  violents  du  début,  on  obser^ 
des  rémissions  dans  les  symptômes  généraux:  la  température  s'abaisse, 
surtout  le  matin,  la  dyspnée  et  les  autres  troubles  fonctionnels  diminueil  J 
d'intensité.  Mais  les  signes  d'induration  pulmonaire  persistent  :  au  bout  A 
quelques  jours  la  température  s'élève  de  nouveau,  la  pneumonie  s'élii' 
ou  de  nouveaux  foyers  se  développent.  Plusieurs  poussées  suivies  de  ré- 
missions incomplètes  peuvent  ainsi  s'observer  :  bientôt  les  petits  malades  j^- 


Cr 


PNEUMONIE.   —  BROXCMO-PXEDMONIE.  —  MARCHE.   DURÉE.  TERMINAISONS.     563 

s'affaiblissent,  l'engouement  bronchique  augmente,  ils  succombent  par  les 

progrès  de  l'asphyxie.  D'une  manière  générale,  on  peut  distinguer  dans 

»      la  broncho-pneumonie  trois  périodes  :  une  période  de  début  ordinaire- 

!     ment  insidieuse  et  mal  dessinée,  plus  rarement  violente  et  soudaine, 

]     caractérisée  surtout  par  l'aggravation  de  la  bronchite  et  l'élévation  de  la 

s     température;  dans  la  période  dV/a^  se  montrent  les  signes  d'induration 

pulmonaire,  et  des  oscillations  remarquables  dans  les  phénomènes  géné- 

S    faux  et  locaux;  une  période  de  déclin  ordinairement  longue  et  conservant 

m    encore  quelques-uns  des  caractères  de  la  période  d'état. 

■        En  résumé,  comme  le  dit  Barrier,  on  peut  admettre  trois  variétés  de 

st  cas  au  point  de  vue  de  la  marche  de  la  broncho-pneumonie  :  1^  les  cas 

^   dans  lesquels  la  maladie  offre  une  intensité  toujours  croissante  dans  les 

T.  S3fmptômes  généraux  et  locaux;  2^  les  cas  où  les  symptômes  s'amendent 

V.  d'une  manière  définitive  et  dans  lesquels  la  guérison  se  produit  ;  5"*  les  cas 

1^    1  marche  irrégulière  où  des  exacerbations  dans  les  symptômes  locaux  et 

i    généraux  succèdent  à  des  rémissions  trompeuses.  Ces  derniers  peuvent  être 

oonsidérés  comme  établissant  une  transition  entre  la  broncho-pneumonie 

aiguë  et  la  broncho-pneumonie  subaiguë  que  nous  étudierons  dans  le  cha- 

fHtre  suivant. 

Lia  durée  de  la  broncho-pneumonie  est  plus  longue  que  celle  de  la 
pneumonie  lobaire.  Elle  varie  à  l'infini  suivant  les  causes  et  suivant  les 
formes  de  la  maladie,  de  sorte  qu'il  est  difficile  d'en  déterminer  les  termes 
précis.  Comme  le  fait  observer  Barrier,  la  plus  longue  durée  de  la  bron- 
cho-pneumonie aiguë  s'observe  surtout  dans  les  cas  de  guérison.  Il  n'est 
ï^  ^pB8  rafe  de  voir  persister  la  toux,  la  dyspnée  et  même  les  signes  physi- 
[    qpes  pendant  un  mois  et  davantage.  D'une  façon  générale,  dans  les  cas 
-    qni  se  terminent  fatalement,  la  brièveté  de  la  maladie  est  en  raison  di- 
>   jracte  de  l'étendue  des  lésions,  quel  que  soit  le  lieu  où  elles  prédominent, 
'^y  dbtns  les  bronches  ou  dans  le  parenchyme  :  c'est  dans  les  catarrhes  suffo- 
;!:  cmts  les  plus  intenses  et  dans  les  pneumonies  les  plus  étendues  que  la 
-  mort  arrive  le  plus  rapidement  par  les  progrès  continus  de  l'asphyxie, 
V  oiielquefois  en  deux  ou  trois  jours  (Rilliet  et  Barthez,  Damaschino).  La 
durée  moyenne  est  de  cinq  à  six  jours.  La  maladie  est  plus  longue  dans 
les  cas  où  elle  procède  par  des  poussées  suivies  de  rémissions.  Elle  peut 
.  atteindre  alors  deux  ou  trois  semaines,  mais  déjà  au  bout  de  ce  temps, 
comme  nous  le  verrons,  les  poumons  présentent  les  lésions  caractéristiques 
de  la  forme  subaiguê. 

La  terminaison  de  la  broncho-pneumonie  est  beaucoup  plus  souvent 

^.fimeste  que  celle  de  la  pneumonie  lobaire.  Dans  les  cas  bénins  à  début 

rusque,  la  guérison  s'obtient  quelquefois  assez  rapidement.  Rilliet  et 

mrthez  l'ont  vue  se  produire  dans  l'espace  de  huit  à  dix  jours.  Ordinai- 

smeni  l'amélioration  est  graduelle  :  la  fièvre  diminue  en  même  temps 

ne  la  dyspnée  ;  les  sueurs  et  les  urines  sont  plus  abondantes;  la  tempéra- 

ire  du  soir  est  moins  élevée,  le  chiffre  des  pulsations  s'abaisse  et  peut 

oniber  à  60,  56,  52  (Cadet  de  Gassicourt).  Le  visage  devient  meilleur, 

l'enfant  tousse  avec  plus  d'énergie,  l'expectoration  est  plus  abondante. 


566  PNKUliK^iME.  BHONCIlO-rKEUMOME.   COMPLICATIOSS. 

jaunâtre,  muco-piirulentc,  les  ràlcs  plus  gros,  plus  humides,  Tappétit  et 
les  forces  se  raniment.   La  convalescence  est  toujours  plus  6o  moins 
longue  ;  Tauscultation  fait  constater  des  râles  sous-crépitants  pendant  plu- 
sieurs semaines  ;  le  souffle  persiste  également  pendant  quelques  jours  : 
aussi  les  rechutes  sont  communes  et  on  doit  les  redouter  tant  qa*il  reste 
un  peu  de  fièvre  ou  que  les  signes  locaux  n'ont  pas  cntièremeat  dîsparo. 
Longtemps  Tenfànt  reste  faible  et  amaigri,  apathique  et  irritable,  ayant 
la  peau  sèche  et  écailleuse  et  présentant  des  doubles  digestifs;  comme  le 
disent  Rillietet  Bartliez,  la  lutte  entre  la  santé  et  la  maladie  sepoumit 
encore  assez  longtemps  et  il  se  passe  souvent  une  ou  plusieurs  semaines 
avant  que  les  enfants  aient  repris  bonne  apparence. 

Il  faut  redouter  h  passage  à  V état  chronique  lorsque  Ton  Toitia  fièvre, 
la  dyspnée  et  la  toux  reparaître  après  des  intervalles  d'amélioration  plus 
ou  moins  marquée. 

La  mort  y  comme  nous  J'avons  vu,  arrive  par  les  progrès  de  la  suffocation 
et  de  Tasphyxie,  tantôt  d*une  façon  très-rapide  en  deux  ou  trois  joon, 
tantôt  plus  lentement  au  bout  d'une  semaine  ou  deux.  La  cyanose  ou  la 
lividité  de  la  face,  la  fréquence  du  pouls,  la  respiration  suspirieuse avec 
des  intervalles  d'apnée,  la  cessation  de  la  toux,  le  râle  trachéal ,  les  con- 
vulsions des  muscles  moteurs  de  l'œil  et  de  la  face,  quelquefois  les  con- 
vulsions générales,  annoncent  la  mort  prochaine  ;  -ordinairement  l'enlant 
succombe  dans  le  coma. 

Complicsations.  —  La  plupart  doivent  être  le  plus  souvent  rapporiées 
aux  maladies  qui  ont  été  l'occasion  de  la  broncho-pneumonie.  Ventérite, 
VentérO'Colite,  sont  très-communes;  le  muguet  apparaît  parfois  chez  les 
enfants  cachectiques,  ou  loi^squc  la  broncho-pneumonie  est  déjà  ancienne. 
Il  en  est  de  même  des  eschares  au  sacrum,  des  éruptions  d'ecthyma  à 
la  face,  au  pourtour  de  la  bouche  et  du  nez,  souvent  transformées  par  le 
grattage  en  ulcérations  très-tenaces. 

Du  côté  des  voies  respiratoires,  nous  avons  déjà  insisté  sur  les  hémor- 
rhagies  pulmonaires,  sur  les  abcès  et  la  gangrène  pulmonaires,  com- 
plications qui  peuvent  rester  latentes,  si  les  foyers  ne  communiquent  |)» 
avec  les  bronches.  Ls pleurésie  ne  devient  une  complication  que  lorsqu'il 
se  produit  un  épanchement:  celui-ci  peut  devenir  purzi/era/,  nous  9vons 
vu  cette  terminaison  se  produire  dans  un  cas  de  broncho-pneumonie 
subaiguë.  Le  pneumothorax,  Yemphyshne  généralisé^  s'observent  rare- 
ment et  sont  rapidement  suivis  de  mort.  Vadénopathie  bronchique  ne 
prend  pas  des  proportions  assez  graves  pour  qu'on  puisse  la  constater 
cliniquement  (Cadet  de  Gassicourl).  Plusieurs  auteurs,  llenoch,  Damas- 
chino,  Roger,  admettent  que  la  pneumonie  lobaire  vient  parfois  compli- 
quer la  broncho-pneumonie  ;  nous  ne  nions  pas  le  fait,  mais  nous  croyons 
qu'il  s'agit  souvent  dans  ces  cas  de  broncho-pneumonie  pseudo-lobaire. 

Les  convulsions  peuvent  se  montrer  dès  le  début  de  la  broncho-pneu- 
monie (dans  la  rougeole  et  la  co(|ueluche).  Elles  sont  beaucoup  moins 
fréquentes  que  dans  la  pneumonie  lobaire.  Elles  n'affectent  pas  non  plus 
ordinairement  le  même  caractère  de  gravité  :  la  tenninaison  fatale  est 


PNEUMONIE.  —  BRONCHO-PNEUMONIE.  —  DIÂGKOSnC.  567 

^Bsseï  rare,  nous  Tavons  observée  cependant  dans  un  cas  de  broncho-pneu- 
fnonic  psoudo-lobaire  où  les  convulsions  compliquées  encore  de  contrac- 
ture amenèrent  rapidement  la  mort  (Cadet  de  Gassicourt  et  Balzer).  Nous 
cappellerons  que  dans  ce  cas  les  symptômes  et  la  marche  de  la  broncho« 
pneumonie  avaient  été  tels  qu^on  avait  cru  qu'il  s'agissait  d'une 
pneumonie  à  forme  méringée. 

Diafl^ostio.  —  Nous  avons  déjà  sufGsamment  insisté  sur  l'obscurité 
<du  début  de  la  broncho-pneumonie  et  sur  les  difTicultés  qui  entourent  le 
^agnostic  à  cette  période.  Quelquefois  l'enfant  est  dans  un  état  d'abatte- 
ment et  de  prostration  qui  pourrait  en  imposer  et  faire  penser  à  une 
fièmre  typhoïde.  Mais  celle-ci  n'est  jamais  secondaire  ;  elle  peut,  il  est 
Trai,  se  compliquer  de  broncho-pneumonie,  mais  ce  n'est  guère  que 
dans  le  courant  du  second  septénaire,  au  moment  où  les  signes  de  la 
bronchite  sonl  le  plus  marqués. 

Comme  nous  l'avons  dit,  les  meilleurs  signes  delà  broncho-pneumonie 
«ont  fournis  par  les  troubles  fonctionnels,  la  dypsnée,  Tasphyxic,  l'cxacer- 
bation  de  la  Gèvre,  etc.  Mais  dans  certaines  circonstances  ces  signes,  aussi 
bien  que  ceux  que  révèle  l'exploration  physique,  peuvent  être  méconnus 
<m  trop  peu  accusés,  surtout  chez  les  vieillards,  chez  les  enfants  épuisés 
par  une  affection  antérieure,  et  en  proie  à  la  fièvre  hectique  ;  ces  broncho- 
pneumonies  cachectiques  sont  plutôt  soupçonnées  que  réellement  dia- 
gnostiquées. De  même,  pendant  la  convalescence  elle  déclin  des  maladies, 
la  broncho-pneumonie  peut  se  développer  sans  donner  lieu  à  des 
symptômes  sérieux;  on  croit  n'avoir  affaire  qu'à  une  bronchite  persistante, 
ei  ce  n'est  que  plus  tard  que  les  signes  de  broncho-pneumonie  s'accusent 
nettement.  Dans  la  diphthérie,  la  difficulté  avec  laquelle  se  fait  la  respira- 
tion, la  prédominance  des  symptômes  laryngés,  font  que  souvent  le  dia- 
ipoostic  de  la  bronchi>pneumonie  ne  peut  être  affirmé  qu'à  cause  de  la 
Iréquence  de  cette  complication. 

Cependant,  le  diagnostic  est  facile  dans  la  grande  majorité  des  cas,  la 
marche  de  la  température,  la  dyspnée  spéciale,  la  marche  des  signes 
physiques,  peuvent  être  considérées  comme  caractéristiques,  et  les  com- 
mémoratifs  mettent  encore  sur  la  voie. 

H  est  plus  difficile  d'approfondir  le  diagnostic  et  de  se  rendre  un  compte 
-esact  de  l'état  du  poumon  et  de  la  forme  des  lésions  dont  il  est  le  siège. 
Dans  la  forme  suffocante,  les  lésions  lobulaires  sont  disséminées,  l'auscul- 
tation ne  révèle  que  des  râles  sous-crépitants  plus  ou  moins  fins,  habi« 
tuelleraent  pas  de  souffle.  Ces  symptômes,  joints  aux  troubles  fonctionnels 
•et  à  une  fièvre  intense,  sont  ceux  de  la  bronchite  capillaire.  Nous  n'in- 
sisterons donc  point  sur  des  caractères  différentiels  qui  n'existent  point 
pour  nous,  attendu  que  l'inflammation  ne  peut  atteindre  les  bronches 
lobulaires  sans  qu'il  y  ait  en  même  temps  inflammation  du  lobule. 

Dans  les  cas  de  pneumonie  lobulaire  généralisée,  le  souffle  peut  n'être 
pas  perçu  à  cause  de  l'abondance  des  râles,  mais,  comme  nous  l'avons 
▼u,  son  absence  n*est  que  transitoire,  et  bientôt  la  matité,  le  souffle, 
la  bronchophonie,  révèlent  l'existence  d'une  induration  pulmonaire  qui 


568  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumokik.  —  DUOKosm. 

s'étend  peu  à  peu.  Barrier  fait  cependant  remarquer  que,  dans  quelques 
cas,  celle-ci  peut  exister  dans  des  points  où  elle  ne  se  trahit  par  aucun 
signe  (face  médiastine  et  diaphragmatique  du  poumon,  bords,  etc.). 

Dans  la  forme  pseudo-lobaire,   les  signes  d'induration    apparaissent 
d'une  manière  plus  évidente  et  plus  brusque,  et  c'est  surtout  cette  forme 
qu'on  peut  confondre  avec  la  pneumonie  franche.  Celle-ci  cepeodiol  est 
rarement  précédée  de  bronchite  et  s'accompagne  d'une  réaction  habituel- 
lement plus  vive.  La  dyspnée  est  plus  forte  dans  la  broncho-pnemnoiiie 
pseudo-Iobaire,  mais  il  n'y  a  pas  de  frisson  initial  ni  le  point  de  côli; 
tes  râles  sont  fms,  mais  s'entendent  dans  les  deux  temps  de  la  respiration. 
Dans  l'immense  majorité  des  cas,  on  trouvera,  du  côté  opposé,  des  signes 
se  rapportant  à  une  forme  quelconque  de  broncho-pneumonie.  Dans  quel- 
ques cas  assez  rares,  le  diagnostic  est  entouré  de  difficultés  presque  insor- 
moniables  ;  la  réserve  est  commandée  quand  une  bronchite  a  précédé 
l'apparition  d'une  pneumonie  franche.  De  plus,  celle-ci  peut  être  double, 
mais  alors  elle  occupe  habituellement  les  deux  sommets,  tandis  que  la 
broncho-pneumonie  siège  plutôt  aux  bases.  Toutefois,   nous  le  répétons, 
l'erreur  est  quelquefois  inévitable  et  la  broncho-pneumonie  pseudo-Iobaire 
peut  se  présenter  avec  des  symptômes  locaux  et  généraux  qui  simulent 
absolument  la  pneumonie  franche.  On  ne  pourra  être  mis  en  garde  que 
par  la  gravité  insolite  des  symptômes,  la  pneumonie  lobn ire  étant  généra- 
lement une  maladie  bénigne  dans  Tenfance. 

Le  diagnostic  du  degré  des  lésions  présente  également  de  grandes 
difficultés,  mais  il  n'offre  pas  le  même  intérêt  et  ne  peut  être  formulé 
d'une  façon  absolue.  En  effet,  l'âge  des  lésions  varie  dans  la  broncho- 
pneumonie  suivant  Textension  de  la  bronchite,  et  un  groupe  de 
lobules  où  domine  la  splénisation  peut  se  trouver  dans  le  voisinage  d*un 
autre  où  l'inflammation  péribroncliique  est  très-élendue  et  sur  le  point 
d'aboutir  à  la  suppuration.  On  ne  peut  donc  guère  arriver,  pour  lesra> 
aigus,  qu'à  distinguer  les  cas  où  prédomine  l'élément  bronchique  et  ceui 
où  prédomine  Télcment  parenchymateux.  La  suppuration,  la  dilatation  de» 
bronches,  les  vacuoles,  appartiennent  aux  cas  subaigus,  et  souvent  ce  sout 
beaucoup  moins  les  signes  physiques  qui  conduisent  au  diagnostic  de  ces 
lésions  que  l'étude  attentive  des  symptômes  généraux,  la  persistance  de 
la  toux  et  des  accès  de  fièvre,  la  faiblesse  et  l'amaigrissement  progressifs: 
le  passage  à  l'élat  subaigu  doit  toujours  être  redouté  lorsqu'une  amélio- 
ration franche  ne  se  produit  pas  une  quinzaine  de  jours  après  le  début 
des  accidents. 

La  congestion  pulmonaire  passive  qui  se  développe  principalement  dans 
le  cours  des  fièvres  à  forme  adynamique  ne  s'accompagne  pas  de  phéno- 
mènes généraux  et  locaux  aussi  marqués.  Le  plus  souvent  il  n'y  a  ni 
dyspnée,  ni  toux  ni  expectoration  exagérées;  il  n'y  a  pas  non  plus  d'accé- 
lération nouvelle  dans  le  pouls,  ni  de  redoublement  fébrile.  Mais  il  ne 
faut  pas  oublier  que  cette  congestion  est  bien  souvent  voisine  de  la  phleg- 
masie,  et  dans  certains  cas,  notamment  dans  la  fièvre  typhoïde,  elle  finit 
par  s'accompagner  de  lésions  broncho-pneumoniques  véritables.  Quant  i 


PNEUMONIE.  —  BRONCHO-PNEUMOKIE.  —  PRONOSTIC.  569 

la  congestion  aiguë  du  poumon,  elle  diffère  totalement  de  la  broncho- 
pneumonie  par  l'existence  du  point  de  côté,  par  l'absence  ou  le  peu 
d'abondance  de  l'expectoration,  par  le  siège  peu  étendu  des  râles  et  du 
soufDe,  enfin  par  la  bénignité  ordinaire  des  accidents. 

Dans  les  maladies  qui  se  compliquent  de  broncho-pneumonie,  on  voit 
fréquemment  naitre  la  tuberculose  pulmonaire  ;  de  grandes  analogies  dans 
les  symptômes  se  joignent  à  cette  conformité  d'origine  et  contribuent  à 
rendre  le  diagnostic  différentiel  extrêmement  difficile,  quand  la  tubercu- 
lose prend  elle-même  la  forme  broncho-pneumonique. 

En  effet,  la  tuberculose  miliaire  aiguë  ou  phthisie  granulique  res- 
semble peu  à  la  broncho-pneumonie  aiguë,  et  s'en  distingue  surtout  par 
Tabsence  ou  l'intensité  des  symptômes  stétboscopiques,  en  contracdiction 
avec  la  violence  de  la  dyspnée  et  la  gravité  des  phénomènes  généraux. 
Ce  n'est  que  dans  la  forme  catarrhale  de  la  phthisie  granulique  que  les 
difficultés  sont  grandes  pour  le  diagnostic  et  parfois  même  insurmontables 
{Voy.  art.  Phthisie,  t.  XXVII  p.  349). 

Quand  la  tuberculose  pulmonaire  revêt  la  forme  broncho-pneumonique, 
il  peut  arriver  dans  les  cas  suraigus  qu'elle  tue  rapidement  avant  d'avoir 
déterminé  la  formation  de  cavernes.  Le  diagnostic  est  impossible  d'après 
l'examen  des  symptômes  locaux,  car,  comme  l'a  démontré  Charcot,  il 
existe  ici  une  véritable  broncho-pneumonie  avec  exsudats  fibrineux  et 
desquamation  épithéliale  qui  entoure  les  nodules  tuberculeux  péribron- 
chiques.  Les  lésions,  à  part  ces  nodules,  sont  absolument  identiques,  et 
par  suite  les  signes  physiques  sont  semblables.  Il  faut  noter  cependant, 
suiTant  Charcot,  que  les  symptômes  généraux  ne  sont  pas  toujours  en 
rapport  avec  l'étendue  des  lésions.  On  observe  un  abattement,  un  état  ty- 
phoïde, qui  sontsous  la  dépendance  de  l'évolution  des  tubercules.  La  maladie 
re?ét  une  allure  spéciale  qui  tient  de  la  tuberculose  miliaire  aiguë  et  de 
la  broncho-pneumonie.  De  plus,  ces  phthisies  pneumoniques  suraiguês  si- 
mulent aussi  bien  la  pneumonie  lobaire  que  la  broncho-pneumonie  (cas  de 
liaygrier).  Quand  elles  ressemblent  à  cette  dernière,  nous  verrons  que 
c'est  surtout  à  la  forme  subaiguë  qu'il  faut  les  comparer,  car  ces  phthisies 
pneumoniques  mettent  toujours  au  moins  deux  septénaires,  quelquefois 
un  mois,  à  parcourir  leur  évolution. 

Nous  ne  ferons  que  rappeler  ici  qu'il  est  quelquefois  difficile  de  décou- 
Trir  la  cause  de  la  broncho-pneumonie.  Au  début  d'une  coqueluche,  dans 
la  rougeole  dont  l'exanthème  a  été  peu  marqué  ou  fugace,  dans  les  diph- 
thérios  graves  et  insidieuses,  on  rencontre  des  exemples  de  broncho-pneu- 
monies attribuées  quelquefois  à  tort  à  un  refroidissement  et  à  une 
bronchite  simple.  Dans  quelques  cas,  le  diagnostic  peut  rester  impossible; 
dans  d'autres  cas,  la  maladie  primitive  peut  s'affirmer  par  des  manifesta- 
tions nouvelles  ou  par  des  complications  spéciales  qui  permettent  de  la 
reconnaître. 

Pronostic.  —  Chez  Tenfant,  la  terminaison  par  guérison  peut  être 
considérée  comme  la  règle  pour  la  pneumonie  lobaire,  à  très-peu  d'ex- 
ceptions près.  Pour  la  broncho-pneumonie,  au  contraire,  la  mort  est  la 


570  PNEUMONIE.  —  brokcho-pkbomowie.  —  prohostic. 

terminaison  la  plus  fréquente.  Sur  199  cas,  Roger  ne  note  que  52  guéri- 
sons  :  la  morlalitc  atteindraildonc  les  trois  quarts  des  malades.  Le  proDos- 
tic  varie  d*ailleurs9,  suivant  les  causes  et  les  formes  de  la  maladie,  soiTant 
Tétat  des  forces  et  suivant  Tàge.  La  broncho-pneumonie  qui  suecède  à  la 
bronchite  à  frigore  est  redoutable  surtout  chez  les  nouveaunnés.  Elle 
est  rare  chez  les  enfants  plus  âgés,  mais  presque  toujours  très-grave, 
comme  nous  Tavons  vu.  Ce  sont  les  broncho-pneumonies  qui  suc- 
cèdent aux  maladies  infectieuses  ou  épidémiques  qui  présentent  le  plus 
<le  dangers. 

Dans  la  coqueluche,  la  mortalité  serait  de  50  pour  cent,  dans  la  rou- 
geole de  33  pour  cent  suivant  Ziemssen.  Le  pronostic  s'assombrit  encore 
lorsque  plusieurs  de  ces  maladies  existent  en  même  temps,  lorsqu'une 
coqueluche  se  complique  de  rougeole,  et  dans  les  cas  de  diphthérie  se^ 
condaire.  Le  croup  est  d'ailleurs  une  des  maladies  dans  lesquelles  li 
broncho-pneumonie  cause  le  plus  de  décès.  La  gravité  des  accidents  varie 
avec  les  épidémies,  avec  les  conditions  hygiéniques  ;  en  ville,  suivant  toes 
les  auteurs,  on  obtient  beaucoup  plus  de  guérisons  qu'à  l'hôpital,  où  la 
mauvaise  aération  et  Tencombrement,  la  présence  d'autres  maladies  con- 
tagieuses, multiplient  les  dangers.  Suivant  Rilliet  et  Barthez,  les  deux  tiers 
des  malades  guérissent  en  ville. 

La  forme  suffocante,  à  part  les  cas  suraigus  et  foudroyants,  est  celle 
qui  se  termine  le  plus  souvent  par  la  guérison.  Comme  nous  l'avons  vu, 
les  lésions  sont,  en  effet,  très-étendues,  mais  peu  profondes,  et  la  résolu- 
tion a  beaucoup  plus  de  chancQ  de  s'opérer  que  dans  les  formes  parenchy- 
mateuses  lobulaire  généralisée  ou  pseudo-lobaire,  ou  même  disséminée, 
quand  les  noyaux  sont  nombreux.  Nous  n'insisterons  pas  sur  la  gravité  des 
broncho-pneumonies  cachectiques,  qui  sont  presque  toujours  une  compli- 
cation ultime  des  maladies  chroniques. 

Parmi  les  symptômes  graves,  il  faut  noter  l'intensité  de  la  fièvre,  une 
température  de  40  à  41  degrés,  jointe  à  une  fréquence  exagérée  du  pouls 
et  de  la  respiration  ;  dans  d'autres  cas,  au  contraire,  la  cessation  de  la 
toux,  le  ralentissement  notable  de  la  respiration,  l'abaissement  de  la 
température  (SleineretWyss),  le?  phénomènes  nerveux,  éclampsie,  délire, 
le  signes  d'asphyxie  progressive,  principalement  dans  la  forme  suObcaote, 
la  teinte  cyanique  des  extrémités.  Souvent,  lorsque  la  mort  arrive,  ia  toux 
cesse,  on  entend  bientôt  le  râle  trachéal,  l'enfant  déjà  somnolent  ne  tend 
pas  à  tomber  dans  le  coma.  Rilliet  et  Barthez  ont  considéré  également  la 
suspension  momentanée  de  la  respiration  comme  un  symptôme  très-grave. 
Cette  apnée  dure  quelques  secondes  à  une,  deux  minutes  et  plus,  et  se 
répète  plusieurs  fois  avec  une  intensité  croissante,  à  tel  point  qu'on  a  pu 
croire  l'enfant  mort  (phénomène  de  Sheynes-Stokes).  D'après  Jœrg,  ce 
phénomène  se  rencontrerait  surtout  dans  Tatélectasie  des  nouveau-nés. 
L'état  des  forces  influe  beaucoup  sur  la  gravité  du  pronostic,  et  l'on  doit 
tenir  compte  du  moment  où  se  produit  la  complication  broncho-pulmo- 
naire, au  début  ou  à  la  fin  de  la  maladie  primitive. 

Chez  les  nouveau-nés,  la  broncho-pneumonie  est  mortelle  :  Valleix,  sur 


PNEUMONIE.  —  BROIfCHO-PNEUMOISlE.  —  ÉTIOLOGIE.  571 

i28  cas  de  pneumonies  et  broncho-pneumonies,  signale  127  décès.  Bartels 
a  perdu  tous  les  malades  âges  de  moins  d'un  an. 

A  partir  de  trois  ans,  la  mortalité  est  beaucoup  moindre.  Dans  la  statis- 
tique de  Roger,  au-dessous  de  trois  ans»  la  mortalité  a  été  des  trois 
quarts;  au-dessus  de  six  ans,  d  un  sixième  des  malades.  Ces  chiffres  sont 
un  peu  plus  forts  que  ceux  des  auteurs  allemands,  qui  attribuent  cette  dif- 
férence aux  méthodes  de  traitement  qu'ils  emploient,  principalement  à 
rhydrothérapie.  Les  diverses  statistiques  sont  d'ailleurs  loin  d'être  abso- 
lument  rigoureuses  :  on  n'a  pas  assez  tenu  compte  des  circonstances  dans 
lesquelles  la  maladie  s'est  développée,  et  surtout  on  a  souvent  confondu 
des  broncho-pneumonies  tuberculeuses  ou  des  lésions  syphilitiques  du 
poumon  avec  la  broncho-pneumonie.  Malgré  la  sévérité  de  ce  pronostic, 
il  ne  faut  jamais  oublier  que  des  guérisons  absolument  inespérées  se 
produisent  parfois  (Rilliet  et  Barthcz).  Chez  Tadulte,  le  pronostic  de  la 
broncho-pneumonie  est  également  très-grave,  mais  les  guérisons  sont 
plus  fréquentes.  Chez  le  vieillard,  elle  est  à  peu  près  constamment  mor- 
telle. 

Êtiolo§^ie.  —  La  bronchite  repi*ésentant  la  cause  déterminante  de 
rinflammation  du  lobule,  il  ne  nous  reste  qu'à  montrer  dans  quelles  cir- 
constances elle  va  gagner  celui-ci  et  quelles  sont  les  conditions  qui  favo- 
risent cette  propagation  :  à  rechercher,  en  un  mot,  les  causes  prédispo^ 
sanles  de  la  maladie. 

Nous  pouvons  dire,  dès  à  présent,  que  leur  mode  d'action  ^so  résume 
dans  les  propositions  suivantes  :  1^  La  bronchite  donne  naissance  à  la 
broncho-pneumonie  quand  la  respiration  se  fait  mal,  soit  que  l'action  de 
là  mécanique  respiratoire  soit  compromise,  soit  que  l'air  introduit  soit 
impur  ou  vicié  ;  2°  il  faut  que  là  bronchite  se  soit  elle-même  développée 
dans  des  conditions  morbides  spéciales,  déterminées  soit  par  une  mabidie 
en  cours  d'évolution,  soit  par  des  maladies  antérieures. 

La  démonstration  de  la  première  proposition  découlera  de  Tétude  des 
divers  états  dans  lesquels  Tacte  de  la  respiration  devient  facilement 
insuffisant  ou  défectueux.  L'âge  exerce  une  influence  sur  laquelle  ont 
insisté  tous  les  auteurs  ;  la  broncho-pneumonie  est  surtout  une  maladie 
des  cinq  premières  années  de  la  vie,  et  c'est  entre  la  deuxième  et  la  qua- 
trième année  qu'elle  présente  son  maximum  de  fréquence.  Elle  devient 
rare  à  partir  de  l'âge  de  6  ans;  on  ne  l'observe  guère  chez  les  adultes 
que  pendant  les  épidémies  de  grippe  ou  de  rougeole.  Enfin,  elle  se 
retrouve  chez  les  vieillards  avec  une  assez  grande  fréquence  ;  c'est  avant 
tout  une  maladie  des  âges  extrêmes,  et  cette  rareté  dans  les  âges  moyens 
montre  bien  la  grosse  part  que  doivent  réclamer  les  influences  méca- 
niques dans  son  étiologie.  D'une  part,  en  efiet,  les  mouvements  de  la  res- 
piration se  troublent  ou  s'affaiblissent  facilement;  d'autre  part,  la  sensi- 
bilité réflexe  e^t  obtuse,  les  mucosités  s'accumulent  dans  les  bronches, 
Pcxpectoraliori  est  nulle  ou  presque  nulle.  La  résistance  des  tissus  est 
moindre  ;  l'inflammation  se  développe  et  s'étend  plus  facilement.  La  pres- 
que totalité  des  enfants  nouveau-nés  succombent  avec  des  lésions  bronche- 


572  PNEUMONIE.  —  broî«cho-pkeciiokib.  —  étiologie. 

pneumoniques.  Chez  les  yieillards,  la  broncho-pneumonie  reconnaît  le 
plus  souvent  pour  causes  la  bronchite  chronique,  les  maladies  du  copur, 
le  décubitus  prolongé.  Hourmann  et  Dechambre,  CniTeilhier,  ont  insisté 
sur  rinfluence  du  froid.  Durand-Fardcl  en  a  observé  de  nombreux  cas 
pendant  l'épidémie  de  grippe  de  Thiver  de  i852-1853. 

On  a  dit  aussi  que  la  broncho-pneumonie  était  plus  fréquente  chez  les 
petits  garçons  que  chez  les  petites  filles,  mais  ce  fait  n'est  ri^i  moins 
que  démontré  et  les  stastistiques  sont  contradictoires  (Roger). 

Nous  ne  ferons  que  signaler  ici  le  décubitus  dorsal^  sur  lequel  noi» 
avons  insisté  à  plusieurs  reprises  ;  Tinfluence  de  la  stase  sanguine  est 
suffisamment  prouvée  par  la  localisation  des  lésions  dans  les  partie» 
postérieures  des  poumons.  Le  sang  tend  à  s'y  accumuler,  non-seulement 
parce  que  ces  parties  sont  les  plus  déclives,  mais  encore  parce  qu  elles 
sont  inactives  et  immobiles,  tandis  que  les  parties  antérieures  se  dilatent 
et  servent  seules  à  l'hématose.  Le  défaut  de  soins  peut  donc  être  con- 
sidéré comme  une  cause  importante  de  broncho-pneumonie.  Cette  roahidie, 
si  commune  dans  les  hôpitaux,  est  beaucoup  moins  souvent  observée  en 
ville.  Sur  72  malades,  Steffen  signale  18  enfants  bien  nourris,  8  assez 
bien  nourris,  et  46  vivant  dans  la  misère. 

La  faiblesse  des  mouvements  respiratoires  peut  être  en  outre  liée  à  un 
affaiblissement  général  chez  les  enfants  d'une  constitution  chétive,  sou- 
mis à  une  hygiène  défectueuse,  ou  affaiblis  par  des  maladies  aiguâou 
chroniques. 

La  broncho-pneumonie  succède  facilement,  pour  les  mémos  raisons, 
aux  bronchites  qui  se  développent  chez  les  enfants  atteints  de  déforma- 
tions rachitiques  du  thorax.  La  gène  de  la  circulation  cardio-pulmonaire 
favorise  le  développement  d'une  broncho-pneumonie  le  plus  souvent 
mortelle. 

Les  influences  de  milieu  jouent  également  un  rôle  important  dans 
l'étiologie  de  la  broncho-pneumonie.  Lorsque  les  malades  respirent  un 
air  impur  ou  vicié,  la  maladie  se  déclare  parfois  avec  une  fréquence  telle 
que  certains  auteurs  l'ont  considérée  comme  pouvant  devenir  contagieuse 
dans  certaines  circonstances  (Guersant,  Rilliet  et  Barthez).  Vencom- 
brement  et  la  viciation  dé  Vair  qui  en  résulte  multiplient  certainement 
les  cas  de  broncho-pneumonie  dans  les  hôpitaux  d'enfants.  Si  l'idée  de  la 
contagion  ne  peut  être  acceptée,  on  est  forcé  de  reconnaître  que  les 
influences  de  milieu  peuvent  créer  des  prédispositions  spéciales  en  vertu 
desquelles  la  maladie  paraît  quelquefois  épidémique.  Ces  influences,  il 
faut  le  dire,  ne  semblent  s'exercer  que  dans  les  maladies  épidémiques 
qui  sont  elles-mêmes  la  cause,  l'occasion  la  plus  fréquente  de  la  broncho- 
pneumonie. Celle-ci  apparaît  alors  comme  complication,  et  modifie  à  ce 
point  l'aspect  de  la  maladie  primitive  qu'on  a  décrit  ce  nouveau  com- 
plexus  pathologique  comme  une  affection  mixte  sous  les  noms  de  bron- 
chite capillaire  épidémique^  épidémie  de  catarrhe  suffocant^  épidé- 
mie de  concrétions  fibrineuses  polypiformes  du  cceur,  bronchite  ca- 
pillaire morbilleuse  (L.  Colin).  Sydenham  et  Ettmûller  ont  rapporté  Vbh- 


PNEUMONIE.  —  BRORCHO-PNEUVONIE.  —  ÉTiOLOGIE.  573 

toire  d'une  épidémie  de  fièvre  catarrhalc  dans  laquelle  les  vieillards 
surtout  succombaient  à  un  catarrhe  suffocant.  Huxham  (1751-1742), 
GrivelH,  en  Italie  (1733),  Lepcq  de  la  Clôture,  ont  publié  des  relations  de 
ces  épidémies  dans  le  dernier  siècle.  Ces  accidents  se  déclarent  habituel- 
lement à  l'occasion  d'un  froid  intense,  quand  une  fièvre  éruptive  se 
déclare  dans  un  corps  de  troupes  formé  principalement  de  recrues  ou  de 
jeunes  soldats.  Mahot,  Bonamy,  Marcé  et  MalheHbe,  ont  publié  à 
Nantes  la  relation  d'une  épidémie  de  bronchite  capillaire  de  ce  genre 
(1840-1841.)  Des  faits  analogues  ont  été  observés  à  Lyon,  par  Armand, 
a  Saint-Omer,  à  Paris  et  à  Boulogne,  par  J.  Périer.  Bartels  a  insisté  sur 
les  dangers  de  l'encombrement;  MM.  Lévy,  Laveran,  Léon  Colin,  etc.,  les 
ont  également  démontrés  dans  divers  travaux.  11  suffit  de  lire  les  obser- 
vations de  ces  bronchites  capillaires  pour  reconnaître  qu'il  s'agit  bien  de 
véritables  broncho-pneumonies  avec  réplétion  de  tout  l'arbre  respiratoire 
par  une  grande  quantité  de  muco-pus,  et  dans  quelques  cas  par  de  vastes 
hépatisations  non  granulées  et  doubles.  Dans  les  épidémies  de  Nantes  et 
de  Lyon  et  dans  celle  de  Bicétre  en  1870,  les  observateurs  ont  noté  la 
fréquence,  dans  les  cavités  droites  du  cœur,  de  caillots  blancs,  tenaces, 
avec  prolongement  dans  les  divisions  de  l'artère  pulmonaire  ;  ces  caillots 
paraissent  avoir  joué  un  rôle  important  dans  les  terminaisons  par  mort 
subite  (péripneumonie  maligne  polypeuse). 

Les  saisons  ne  paraissent  pas  toujours  exercer  une  influence  très- 
marquée  sur  la  broncho-pneumonie.  Elle  se  montre  beaucoup  au  prin- 
temps et  à  l'automne,  mais  uniquement  parce  que  c'est  à  ces  époques 
qu'on  observe  le  plus  de  fièvres  éruptives  (De  la  Berge).  Roger  fait  re- 
marquer que  c'est  en  hiver  qu'on  observe  le  plus  grand  nombre  de 
pneumonies  lobulaires  qui  succèdent  à  la  bronchite  simple.  Les  change- 
ments subits  de  température,  le  refroidissement  dans  le  bain,  ont  été 
parfois  des  causes  occasionnelles  de  la  maladie  chez  les  enfants  (Cadet 
de  Gassicourt). 

'  11  semble  résulter  des  expériences  que  Heidenhain  a  faites  sur  les  ani- 
maux que  les  inspirations  d'air  sec  très-chaud  ou  très-froid  n'ont  pas 
one  influence  très-nuisible  sur  les  poumons.  L'air  humide  et  froid,  au 
contraire,  conserve  dans  les  voies  aériennes  la  température  qu'il  ava'it 
aviint  l'inspiration,  et  son  inhalation  détermine  des  bronchites  et  des 
pneumonies  lobulaires  disséminées,  jamais  de  pneumonies  lobaires. 

Causes  déterminantes,  —  11  faut,  pour  que  les  causes  prédisposantes 
que  nous  venons  d'énumérer  exercent  leur  action,  qu'une  bronchite  née 
datfsdes  conditions  spéciales  vienne  jouer  le  rôle  de  cause  déterminante. 
€es  conditions  se  rencontrent  dans  toutes  les  affections  de  l'enfance  qui 
présentent  des  manifestations  fluxionnaires  et  inflammatoires  du  côté  des 
muqueuses  des  voies  respiratoires.  En  première  ligne  doivent  se  placer  les 
fièvres  éruptives,  la  coqueluche,  la  diphthérie,  la  grippe,  la  fièvre  ty- 
phoïde, etc...  Après  ces  maladies  aiguës,  nous  passerons  en  revue  les 
affections  chroniques  dans  lesquelles  la  broncho-pneumonie  apparaît 
souvent  comme  complication  ultime. 


574  PNEUMOMK.  —  broxcho-pxeomorib.  —  ÉnoLOGu. 

La  broncho-pneumonie  se  développe  plus  fréquemment  dans  la  rtnige^le 
que  dans  les  autres  pyrexics.  Parmi  les  fièvres  éruptives,  c'est eaelfel celle 
dans  laquelle  Texanlhème  affecte  de  préférence  la  muqueuse  des  lii» 
respiratoires.  Les  auteurs  ont  émis  diverses  opinions  au  sujet  des  cir- 
constances qui  provoquent  Tapparition  de  cette  complication;  Biliiekei 
Barthez  admettent  dans  quelques  cas  Tinfluenced^un  rcfroidissenieiitflbit, 
opinion  rejetée  par  Dauiaschino.  Nous  devons  plutôt  croire,  avec  Roger,  que 
dans  une  première  série  de  cas  la  complication  est  due  à  la  dilTuan^ 
rexanlhème  qui  s'étend  jusqu'aux  petites  bronches.  Simple  fluxioo  \à^ 
mobile  de  la  muqueuse  des  grosses  bronches,  il  donne  lieu  à  deslcw» 
plus  profondes  et  plus  tenaces  lorsqu'il  atteint  les  éléments  beaucoup  piv 
susceptibles  qui  constitueut  le  parenchyme  du  lobule.  C*cst  au  plus  foii 
de  l'éruption,  du  deuxième  au  quatrième  jour,  que  cette  propafptin 
est  la  plus  fréquente  (Becquerel,  Rilliet  et  Barthez,  II.  Roger).  La  Dam 
bronchique,  de  même  que  celle  des  muqueuses  nasales  et  oculaires,  pé- 
cède  l'apparition  de  l'exanthème,  et  il  peut  arriver  que  la  broocho-pMB- 
monie  se  déclare  pendant  cette  période  prodromiquc  (Rilliet  et  BartbOr 
II.  Roger)  ;  généralement  alors  la  rougeole  sort  malj  et  certains  auteaniit 
pris  à  tort  cet  eflet  pour  la  cause  véritable.  Ajoutons  que  suivant  S]- 
denham  et  Trousseau  la  broncho- pneumonie  se  déclarerait  le  plussoovat 
vers  le  huitième  jour  de  la  rougeole  :  dans  les  faits  obscnrés  parDuBB- 
chino,  elle  s'est  déclarée  du  troisième  au  huitième  jour»  pendant  l'esu- 
thèmc;  mais  soit  qu'elle  le  précède,  ce  qui  est  rare,  soit  qu'elle  ifp- 
raisse  pendant  son  évolution,  la  broncho-pneumonie  résulte  de  la  dihnoa 
de  la  bronchite  morbilleuse.  11  n*en  est  plus  de  même   lorsqu'elle  ft 
déclare  pendant  la  convalescence  ou  après  la  disparition  de  réropûoB, 
lorsque  le  catarrhe  du  début  est  passé  à  l'état  chronique  ;   le  refroidie 
sèment  peut  être  alors  la  cause  occasionnelle  du  développemeotdeh 
complication.  La  fréquence  et  la  gravité  de  ces  broncho-pneumonies  ti» 
bilieuses  sont  variables  avec  les  différentes  épidémies,  et,  comme  nov 
l'avons  vu,  avec  les  saisons  dans  lesquelles  elles  se  montrent,  etavecle» 
conditions  dans  lesquelles  sont  traités  les  malades.  Barrier,  sur  Sôbrood» 
pneumonies,  en  compte  16  consécutives  à  la   rougeole.  Roger,  sur  ÎW 
cas,  en  compte  45.  Lorsque  la  rougeole  se  complique  de  gangrène  df  b 
bouche,  on  trouve  ordinairement  des  lésions  broncho-pneumoniquespii^ 
ou  moins  étendues.  Il  est  possible  qu'elles  soient  dues  à  une  cxaccrWioD 
de  la  bronchite  morbilleuse,   favorisée  par  la  faiblesse  généi*ale  éesSM- 
ladcs.  Quelquefois  les  noyaux  de  broncho-pneumonie  devicuneat  eui- 
mêmes  gangreneux,  et  il  est  probable  que  cette  terminaison  est  duc  àb 
pénétration  dans  la  trachée  de  particules  provenant  de  la   bouche.  S«r 
20  cas  de  gangrène  de  la  bouche,  Rilliet  et  Barthez  ont  vu  16  fois  b 
broncho-pneumonie  survenir,  lourdes  la  oWrvée  58  fois  sur  68  » 
L'évolution  de  la  broncho-pneumonie  dans  la  rougeole   ne  présentent 
de  spécial;  son  début  est  d'aulant  plus  accentué  que  la  période  d'érup- 
tion est  plus  avancée  et  que  la  température  est  plus  basse.  Elle  seltf^ 
mine  le  plus  souvent  par  la  mort,  surtout  si  l'enfant  est  jeune  et  débile.! 


PNEUMONIE.  BROlfCHO-PlIEUMOME.  ÉTIOLOGIfc.  575 

Tautopsic,  on  trouve  isolées  ou  réunies  les  diverses  formes  de  pneumonie 
lobulaire  que  nous  avons  décrites,  avec  des  lésions  bronchiques  plus  ou 
moins  profondes  suivant  la  durée  de  la  maladie.  La  forme  subaignë  et  le 
passage  à  Tétat  chronique  ont  été  observes  plusieurs  fois  à  la  s^uite  de 
la  rougeole. 

La  scarlatine  se  complique  moins  fréquemment  do  bronchite  que  la 
rougeole.  Aussi,  les  auteurs  sont  en  désaccord  au  sujet  de  savoir  si  les 
broncho-pneumonies  qui  ont  été  observées  ne  doivent  pas  être  rapportées 
à  une  diphthérie  pharyngiennne  étendue  à  Tarbre  bronchique  (Damas- 
chino). 

Dans  la  variole^  la  broncho-pneumonie  peut  être  encore  considérée 
comme  peu  fréquente.  Cependant,  plusieurs  exemples  en  ont  été  publiés 
(Becquerel)  chez  Tcnfant  et  Tadiilte. 

La  broncho-pneumonie  complique  fréquemment  la  coqueluche  chez  les 
sujets,  jeunes  à  tel  point  que  Dc^rucllcs  la  considérait  comme  devant  sur- 
venir d'une  façon  certaine  chez  les  enfants  de  trois  à  quatre  ans.  Les 
statistiques  sont  cependant  trcs-variablcs  à  cet  égard.  Séc  Ta  observée  chez 
un  tiers  des  malades;  II.  Roger,  chez  un  cinquième;  Jacquart,  sur  45  cas  de 
coqueluche,  a  vu  17  broncho-pneumonies,  dans  lesquelles  11  furent  mor- 
telles. Le  catarrhe  bronchique,  qui  forme  Tun  des  éléments  de  la  coque- 
luche, peut  donner  lieu  à  la  broncho-pneumonie  dès  le  début  de  la  ma- 
ladie, avant  l'apparition  des  accès  de  toux  convulsive  ;  le  diagnostic  est 
d'autant  plus  difficile  dans  ce  cas,  que,  comme  nous  Tavons  dit,  souvent 
la  broncho-pneumonie  fait  cesser  les  spasmes.  Trousseau  cependant  estallé 
trop  loin  en  disant  que  cette  influence  se  produisait  régulièrement,  car  il 
est  possible  quelquefois  de  reconnaître  que  ces  complications  broncho- 
pncumoniques  précoces  doivent  être  rapportées  à  la  coqueluche,  lorsqu'on 
voit  apparaître  dans  leur  cours  quelques  accès  de  toux  caractéristiques. 
La  broncho-pneumonie  diminue  les  quintes,  mais  ne  les  fait  pas  entière- 
meut  cesser.  Le  plus  souvent,  elle  se  déclare  pendant  ou  vers  la  fui  de  la 
période  convulsive.  Suivant  Damaschino,  la  broncho-pneumonie  de  la 
coqueluche  se  localiserait  de  préférence  dans  un  des  poumons  ou  dans  un 
lobe.  Une  bronchite  d'une  nature  spéciale  est  ici,  comme  dans  la  rou- 
geole, la  cause  déterminante  de  la  maladie,  et  Ton  conçoit  qu'elle  doive 
apparaître  facilement,  si  l'on  se  souvient  de  la  lenteur  de  révolution  de 
la  coqueluche,  de  l'épuisement  qui  résulte  des  quintes  et  des  vomisse- 
ments, de  la  difficulté  avec  laquelle  sont  expectorées  les  mucosités  bron- 
chiques plus  visqueuses  et  plus  adhérentes  que  dans  toute  autre  maladie. 
Outre  ces  conditions  qui  favorisent  l'extension  du  catarrhe  aux  petites 
bronches,  il  faut  tenir  compte  de  l'élément  nerveux  de  la  maladie.  II  Roger 
considère  comme  une  cause  adjuvante  les  troubles  de  la  circulation 
pulmonaire  en  rapport  avec  les  attaques;  et  nous  rappellerons  à  ce  propos 
que  Guéneau  de  Mussy  croit  que  la  toux  spasmodique  de  la  coqueluche 
est  due  à  la  compression  et  à  Tirritalion  des  nerfs  du  bile  du  poumon 
par  les  ganglions  bronchiques  hypertrophiés.  Si  celte  opinion  était  dé- 
montrée, il  faudrait  rapporter  peut-être  à  des  désordres  de  l'innervation 


576  PNEUMONIE.  —  brokcho-pkeomokib.  —  étiologii. 

vaso-motrice  les  congestions  qui  jouent  un  si  grand  rAle  dans  la  broncho- 
pneumonie. 

La  grippe  revêt  un  caractère  de  gravité  extrême  chez  l'enfant,  i  cause 
de  la  fréquence  de  la  broncho-pneumonie.  Celle-ci  se  développe  surtout 
chez  les  jeunes  enfants,  chez  les  vieillards  et  quelquefois  même  ebei 
l'adulte,  dans  certaines  épidémies  (épidémie  de  grippe  apshyxiinte  de 

Londres,  en  1835). 

Les  relevés  de  Peter  et  Sanné  montrent  que  la  diphthérie  est  une 
des  affections  qui  se  compliquent  le  plus  fréquemment  de  broncho-pnett- 
monie.  Le  croup  est,  de  toutes  ses  manifestations,  celle  qui  en  cause  k 
plus  de  cas  ;  Gerhardt  Ta  observée  chez  les  trois  quarts  des  individos 
atteints:  sur  121  cas  de  broncho-pneumonie  diphthéritiquev  119  avaient 
eu  pour  origine  des  laryngites  pseudo-membraneuses  ;  dans  21  de  ces 
cas,  la  trachéotomie  n'avait  pas  été  faite.  L'angine  et  le  coryza  couenneoi, 
même  isolés,  se  compliquent  parfois  également  de  broncho-pneumonie 
(Sanné).  L'apparition  des  accidents  est  le  plus  souvent  précoce,  du  troi- 
sième au  sixième  jour  (Peter,  Sanné).  Les  fausses  membranes  se  pro- 
pagent du  larynx  aux  bronches^; /assez  souvent,  cependant,  les  signes 
laryngés  sont  peu  ms^Ués,  et  il  '^semble  que  l'infection  se  développe 
primitivement  dans  les  bronches.  La  bronchite  diphthéritique,  par  son 
extension  plus  ou  moins  rapide  aux  petites  bronches,  peut  déterminer 
seule  la  formation  des  noyaux  de  pneumonie  lobulaire.  Mais  il  ne  faut  pas 
oublier  qu'une  bronchite  catarrhale,  parfois  très-intense,  complique  sou- 
vent la  diphthérie  laryngée  et  bronchique,  même  avant  la  trachéotomie: 
c'est  elle  qui  doit  être  seule  mise  en  cause  dans  les  cas  de  cronp  peu 
étendus.  Fréquemment,  la  broncho  pneumonie  a  déjà  débuté  lorsqu*oo 
fait  la  trachéotomie  (Peter,  Sanné)  ;  mais  il  faut  reconnaître  que  cette 
opération  doit  entrer  pour  une  part  importante,  sinon  dans  le  développe- 
ment, au  moins  dans  l'aggravation  des  accidents.  Le  traumatisme,  b 
présence  de  la  canule,  l'introduction  d'un  air  froid  et  sec,  contribuent  à 
augmenter  l'irritation  des  bronches;  nous  avons  vu,  de  plus,  à  laide 
de  l'examen  microscopique,  que  le  poumon,  malgré  la  cravate  et  l'en- 
tretien de  la  canule,  était  parfois  rempli  de  poussières  et  de  petits  corps 
étrangers  (Soc.  anat.,  janvier  1878).  La  broncho-pneumonie  apparaît  quei- 
quefois,  comme  complication  tardive,  du  huitième  au  dixième  ou  quin- 
zième jour  ou  même  beaucoup  plus  tard.  Elle  est  due  alors  à  la  persis- 
tance de  la  bronchite,  quelquefois  à  de  nouvelles  poussées  de  diphthérie. 
Au  point  de  vue  clinique,  la  broncho-pneumonie  diphthéritique  est 
surtout  remarquable  par  Tobscurité  de  ses  symptômes,  mais  elle  est 
d'une  telle  fréquence  qu'on  peut,  à  peu  près  à  coup  sur,  afGrmer  son 
existence  chez  un  enfant  atteint  de  croup  grave.  Un  des  meilleurs  signe* 
est  fourni  par  l'élévation  de  la  température,  (|ui  peut  atteindre  59  et 
même  40  degrés.  Le  sifflement  laryngo-trachéal,  les  bruits  canulaires 
chez  les  enfants  opérés,  rendent  l'auscultation  très-difficile;  ces  derniers 
peuvent  être  confondus  avec  le  souffle  bronchique  (Sannéi.  Un  des  meil- 
leurs signes  aussi,  d*aprè.s  Millard,  est  la  fréquence  de  la  respiration: 


PNEUMONIE.  —  BROMCHO-PNEDMONIE.  —  ÉTIOLOGIE.  577 

a  majorité  des  cas,  la  broncho-pneumonie  serait  à  peu  près  certaine 
le  le  chiffre  des  respirations  dépasse  50.  Les  lésions  de  la  broncho- 
nonie  diphthérilique  présentent  les  caractères  fondamentaux  sur 
els  nous  n'avons  pas  besoin  de  revenir  :  souvent  cependant,  la  pré- 
aance  des  congestions  est  remarquable  surtout  dans  les  cas  fou- 
nts.  II  n'est  pas  rare  non  plus  de  trouver  des  atélectasies  très- 
ues ,  occupant  quelquefois  un  lobe  entier  lorsque  des  fausses 
i)ranes  épaisses  obturent  les  grosses  bronches.  Les  lésions  mécaniques 

en  général,  très-marquées,  Temphysème  intra  ou  extra-vésiculaire 
lonstant  et  parfois  énorme.  Les  efforts  violents,  le  rétrécissement 
dérable  du  champ  de  Thématose  par  suite  de  l'obstruction  brou- 
te, rendent  facilement  compte  de  la  genèse  de  ces  lésions  méca- 
».  C'est  aux  congestions  et  aux  eflorts  que  l'on  doit  également  rap- 
r  en  partie  les  hémorrhagies  sous-pleurales  et  intralobulaires,  si  frè- 
tes dans  la  broncho-pneumonie  diphthéritique,  que  H.  Roger  en  fait 
bnne  spéciale,  la  formn  hémorrhagique  de  la  broncho-pneumonie, 
le  rencontre  dans  les  maladies  infectieuses,  dans  la  rougeole  et  dans 
^hthérie,  et  reconnaît  pour  cause  principale  l'infection  du  sang.  —  Les 
ses  formes  anatomiques  se  rencontrent  dans  la  diphthérie  :  la  forme 
lo-lobaire  n'est  pas  rare.  Il  est  souvent  remarquable  de  voir  avec 
e  régularité  se  développent  les  noyaux  de  broncho-pneumonie  dans 
le  territoire  qui  dépend  d*une  grosse  bronche  envahie  par  les 
es  membranes.  Après  la  trachéotomie  ou  quand  la  bronchite  est 
ut  catarrhale,  les  lésions  n^ont  pas  les  mêmes  dispositions  régulières 
disséminent  dans  le  poumon.  La  mort  est  presque  toujours  trop 
ipte  pour  que  les  lésions  aient  le  temps  de  parcourir  leur  évolution, 
juefois  cependant  la  hroncho-pneumonie  prend  la  forme  subaiguë  : 
évolue  avec  lenteur,  le  tissu  conjonctif  s'épaissit  et  s'infiltre  de 
les  embryonnaires,  les  bronches  se  remplissent  de  pus  et  deviennent 
ige  de  dilatations  vasculaires.  Cette  forme  peut  s'observer  à  la  suite 

trachéotomie:  quelquefois  même  la  plaie  du  cou,  déjà  cicatrisée,  se 
*e  et  livre  de  nouveau  passage  aux  mucosités  et  à  la  suppuration.  — 
ires  lésions  telles  que  l'œdème,  la  gangrène  pulmonaire,  la  pleurésie 
\nU  peuvent  encore  venir  compliquer  la  broncho-pneumonie  diphthé- 
le  (Sanné).  Ajoutons  que  quelquefois  la  diphthérie  elle-même  s'est 
loppée  secondairement  dans  le  cours  des  broncho-pneumonies  de 
queluche,  de  la  rougeole. 

loique  la  fièvre  typhoïde  s'accompagne  fréquemment,  dans  l'enfance, 
(idents  thoraciques  plus  ou  moins  graves,  il  est  rare  qu'elle  se  com- 
te de  broncho-pneumonie.  Mon  maître,  Cadet  de  Gassicourt,  n'en 
de  que  deux  cas  sur  cent  cinquante  observations.  Celle-ci  cependant 
ï  plusieurs  fois  observée  et  il  n'est  pas  juste  de  dire  que  les  lésions 
duisent  à  une  congestion  hypostatique  plus  ou  moins  intense  (Damas- 
i).  H.  Roger  qui  est  pourtant  partisan  de  cette  opinion,  fait  lui-même 
irquer  qu'on  trouve  des  congestions  et  des  indurations  partielles 
laires  dans  les  lobes  inférieurs.  Les  lésions  peuvent  revêtir  une  forme 

iidBT.  DicT.  m£d.  et  caiB.  XXVIII  —  37 


578  PNFICMONIE.  —  broncho-pneumonie.  —  inoLoc». 

plus  grave  et  nous  avons  déjà  signalé  ces  broncho-pnenmonies  remar- 
quables par  leur  prédominance  dans  le  tissu  périlobulaiFC  et  périacmeux 
où  Ton  observe  des  lymphangites  plus  intenses  que  dans  les  autres  formes 
et  qui  sont  peut*ètre  en  rapport  avec  la  tendance  spéciale  de  la  maladie  a 
porter  principalement  sur  le  système  lymphatique.  Cette  forme  de 
bronche-pneumonie  s'observe  également  chez  l'adulte.  La  brondiajHiea- 
monie  peut  se  développer  pendant  les  divers  stades  de  la  fièvre  typhoïde, 
quelquefois  pendant  la  convalescence.  Comme  nous  le  Tenram,  elle 
peut  revêtir  la  forme  subaiguê,  et  aboutir  à  la  sclérose  et  à  la  diUtalton 
des  bronches. 

Les  diverses  maladies  que  nous  venons  de  passer  en  revue  influent  d*aae 
manière  prépondérante  sur  le  développement  de  la  broncho-pneumoaie, 
en  donnant  à  Tinflammation  bronchique  une  gravité  et  quelquefois  uoe 
forme  toutes  spéciales.  Beaucoup  plus  rarement  dans  la  bronchite  ûmfile 
causée  par  un  refroidissement,  on  peut  voir  Tinflammation  gagner  peu  a 
peu  les  bronches  lobulaires  et  le  lobule.  Habituellement,   cette  marthe 
s'observe  dans  les  bronchites  qui  présentent  de  bonne  heure  des  caraclèrei 
de  gravité,  et  quelquefois  même  révolution  se  fait  avec  une  extrémerapî- 
ditc,  tellement  qu'il  semble  que  les  deux  phlegmasies  bronchiques  ^  pulmo- 
naires se  soient  développées  en  même  temps  et  que  la  broncho-p 
nie  se  soit  constituée  primitivement.  Ces  cas  s'observent  à  la  suite  d'i 
perturbation  de  la  circulation  et  de  l'innervation,  froid  prolongé,  brâlum 
très-étendues,  etc..  Cette  marche  foudroyante,  (Wilks,   Ba  lier)  peut  éga- 
lement s'observer  dans  les  maladies  que  nous  avons  citées,  notammârt 
dans  la  diphthéric  et  dans  la  rougeole.  Mais,  même  dans  ce  cas  où  b 
phlegmasie  semble  s'étendre  d'emblée  à  toute  la  surface  des  voies  respi- 
ratoires, l'examen  des  lésions  montre  que  leur  filiation  existe  toujours,  et 
que  leur  succession,  pour  être  plus  rapide,  n'en  est  pas  moins  réelle.  C'est 
surtout,  en  effet,  la  lésion  épithéliale  qui  progresse  avec  cette  rapidité  ;  le 
parenchyme  est  noirâtre,  gorgé  de  sang,  en  sorteqiie,  avant  l'interveotioa 
du  microscope,  ces  lésions  étaient  considérées  comme  de  simples  congés 
tiens.  Mais  l'analyse  histologique  démontre  l'existence  d'une  pneuroooie 
desquamative  plus  ou  moins  intense  clans  tous  les  points  congeslioooéset 
de  plus,  dans  les  lobules  qui  ont  été  atteints  les  premiers,  des  lésiooi 
parcnchymateuses  variables  en  étendue  et  dont  la  localisation  autour  de  II 
bronche  prouve   bien  que   celle-ci  est  le  point  de  départ  de  rinflamnuh 
tion. 

Parmi  les  maladies  chroniques  qui  se  compliquent  de  broncho-pnea- 
monie,  il  faut  citer  surtout  les  maladies  du  cœur  et  des  reins.  Les  maladifli 
du    cœur  se  compliquent  assez  fréquemment  de   broncho-pneumonie, 
principalement  chez  le  vieillard.  Rayer  l'a  observée  plusieurs  fois  dansk 
mal  de  Bright,  et  le  récent  travail  de  Lasègue  sur  les  bronchites  albumi- 
nuriques  donne  à  penser  que  cette  complication  ne  doit  pas  être  trcs-nrii 
Nous  nous  bornerons  à  signaler  V impaludisme  chronique  qui  a  ogalemeÉ 
paru,  dans  plusieurs  cas,  se  compliquer  de  broncho-pneumonie. 

La  luberculose  n'est  pas,  en  réalité,  une  cause  de  broncho-poeumoBÎe; 


f\ 


PNEUMONIE.  —  BROHCHO-PNBUXOIVIE.  —  ÉnOLOGIB.  579 

Me-ci  ne  se  développe  que  lorsqu'une  bronchite  coïncide  avec  elle.  Le  fait 
eut  se  produire  pendant  une  tuberculose  pulmonaire  en  voie  d*évolution 
t  les  noyaux  de  broncho-pneumonie  se  montrent  le  plus  aux  bases  des 
BOX  poumons.  Il  est  rare  qu'on  ne  trouve  pas,  à  Tautopsie  des  enfants 
iberculeux,  des  noyaux  de  pneumonie  développés  pendant  la  période 
mninale. 

Chez  les  enfants  mal  nourris,  épuisés  par  de  longues  maladies,  on  voit 
MiYeni  survenir  des  broncho-pneumonies  qualifiées  par  les  auteurs  de 
Viche^iques  et  qui  apparaissent  surtout  dans  les  derniers  jours  de  la  vie. 
a  cachexie  et  Tanémie  qui  résultent  des  maladies  constitutionnelles,  scro- 
lie,  tuberculose,  rachitisme,  diabète  (Steiner),favorisent  le  développement 
i  ces  accidents.  Il  en  est  de  même  des  affeclions  chroniques  de  longue 
iprée  pendant  lesquelles  les  malades  restent  trop]  constamment  dans  le 
i^cubitus  dorsal  (coxalgie,  mal  de  Pott ,  etc.),  La  dysenterie,  Tentéritc 
I  coryza  simple  ou  syphilitique,  le  sclérème  des  nouveau-nés,  présentent 
ipTcqt  cette  complication  ultime.  C'est  l'affaiblissement,  la  cachexie  qui 
pITeot  surtout  être  mis  en  cause,  le  catarrhe  bronchique  serait  sans 
Ifirf îté  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas.  La  stagnation  du  sang  et  des 
ppMoeitésdans  les  parties  déclives  du  poumon  provoque  ces  bronche -pneu- 
IQiiies  cachectiques  qui  ne  s*accompagnent  que  d'une  réaction  peu  mar- 
née; la  loux,   la  dyspnée,  les  signes   physiques,  sont  également  peu 
cernés  et  la  complication  reste  le  plus  souvent  latente. 
^«JlPfttlioséiiie.  —  Comme  nous  l'avons  vu,  on  admettait  autrefois  que 
PHtas  les  lésions  de  la  broncho-pneumonie  devaient  être   rapportées  à 
iepigération  des  sécrétions  bronchiques.  Les  grains  jaunes ,   d'après 
flîlfel^  Béhier,  etc.,  seraient  dus  uniquement  à  la  pénétration  du  pus 
|ine.  le  lobule,  lequel  en  réalité  ne  participerait  pas  à  la  production  des 
|p|anB  :  c'est  la  théorie  dite  de  la  bronchite  capillaire. 
•  l^après  une  autre  théorie,  soutenue  surtout  parZiemssen  et  Barlels,  le 
Piqe^pus  formant  bouchon  commence  par  obturer  les  bronches  et  par 
liÉnniner  l'affaissement  et  la  congestion  du  lobule.  Cette  congestion 
Ifietitue  le  premier  degré  de  la  pneumonie  lobulaire,  consécutivement 
[l^iptisalion  ne  tarde  pas  à  paraître.  Nous  avons  déjà  discuté  et  rejeté 
ritte  théorie  qui  tend  à  créer  une  pneumonie  lobulaire  indépendante  de  la 
(Wichîie  (Voyez  page  546).  Elle  est  également  détruite  par  ce  fait,  qu*il 
1^  firéquent  de  voir  des  noyaux  de  broncho-pneumonie  se  développer  dans 
)s  .portions  de  poumon  non  envahies  par  l'état  fœtal.  Celui-ci  favorise 
HMidant  d'une  manière  évidente  la  marche  des  lésions  dans  le  lobule  ; 
Ifongestion  des  zones  splénisées  doit  lui  être  rapportée  en  grande  par- 
j^  ainsi  que  l'œdème  et  l'exsudation  qui  lui  succèdent. 
^]btk  somme,  le  problème  à  résoudre  est  le  suivant  :  est-ce  l'inflammation 
•même  qui  se  propage,  de  proche  en  proche,  des  bronches  jusqu'aux 
lies?  Paut-il  admettre  que  les  produits  de  sécrétion,  en  pénétrant  dans 
MTonches  lobulairesetacineuses,  déterminent  l'inflammation  du  lobule 
,  agissant  comme  les  corps  étrangers? 
yezpérimentation  sur  les  animaux  confirme,  jusqu'à  un  certain  point, 


i^ 


580  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumohie.  —  ériouxa, 

cette  dernière  manière  de  voir.  A  Taidc  d'injections  de  liqaiiaimtiA 
dans  les  bronches  :  térébenthine  (Trasbot  el  Comil),  nitrate  tufoi 
chlore,  ammoniaque  (Jûrgensen),  les  expérimentateurs  ont  pnttdei 
bronchites  rapidement  suivies  de  pneumonies  lobulaires  snn^b 
mêmes  lésions  résultant  également  de  l'irritation  directe  prodeh^b 
corps  étrangers,  ont  été  obtenues  à  l'aide  de  méthodes  moinsinhkli 
section  des  pneumogastriques  faite  par  Traube  (1846)  produit  falnwi 
trop  intenses,  trop  rapidement  suivies  de  mort  pour  que  les  analogÎBMl 
complètes.  Avant  Traube,  Reid  (1839)  et  Longet  (1840)aTaieitiii|K 
lement  ces  lésions,  mais  ils  les  avaient  considérées  comme  despM- 
nies;  Magendie  (1816)  pensait  qu'elles  succédaient  à  l'accanrolitiaw 
mucosités  dans  les  bronches  dont  la  muqueuse  avait  perdu  sa  sosUl^j 
Legallois,  SchifT,  Wundl,  ont  simplement  vu  des  troubles  de  l'inna 
vaso-motrice.  Arnspcrger  (1856)  croit  qu'il  s*agit  seulement d'in< 
sus;  Boddaêrt  (1862)  adopte  une  opinion  mixte,  reliant  les  opiniwi 
gentes.  Friedlaënder,  renonçant  à   la  section  des  pneumo-gastrifHkJ 
imaginé  de  faire  chez  le  lapin  la  section  du  récurrent,  qui  permeta 
vie  beaucoup  plus  longue  pouvant  atteindre  vingt  jours,  et  cause  desl 
comparables  à  celles  qu'on  obtient  par  la  section  des  pneumogasli 
Les  expériences  de  Frcy    ont  confirmé  les  résultats  obtenus  par  H 
laênder;  l'eiamcn  microscopique  a  prouvé  qu'il  s'agit  bien  dWfi 
monie  lobulairc  aiguë.  Ces  expériences,  répétées  par   ChanAÛ 
démontré  l'évolution  d'un  processus  semblable  à  celui  de  la  broi 
monie  :  hypersécrétion  bronchique,  d'abord  muqueuse,  puisn 
lente,  lésions  pulmonaires  principalement  dans  les  lobes  supàien 
sentant  l'aspect  de  Thépalisation  et  de  la  splénisation.  Au  mieRH, 
on  retrouve    les    lésions    caractéristiques    de    la    splénisation  d 
nodules   péribronchiques.  Chez  les  chiens  surtout,  les  lésions  «i 
prêchent  beaucoup  de  celles  qu'on  observe  chez  l'homme;  il  yam 
la  fibrine  dans  les  exsudats.   Charcot  fait  remarquer  un  point 
tant,  c'est  qu'il  n'y  a  point  d'atéleclasie.  Si  l'animal  survit  pendanti, 
temps,  on  voit  les  lésions  envahir  progressivement  tout  le  Icbole, 
plèvre  participer  à  l'inflammation.  L'accumulation  des  Ieucocjttt«ti 
cellules  épithéliales  fait  peu  à  peu  disparaître  les  zones  splènisfe  ' 
éléments,  vers  la  troisième  semaine,  subissent  la  dégénérescence! 
graisseuse,  le  tissu  conjonclif  qui  entoure  la  bronche  et  les  aci» 
et  s'épaissit,  le  processus;  devient  chronique.  Évidemment  la  or 
ces  lésions  se  rapproche  beaucoup  de  celles  qu'on  observe  chei  H 
les  auteurs  allemands  vont  même  jusqu'à    admettre   identité  co 
(Wyss)  ;  la  pathogénie  de  ces  lésions  s'explique  par  la  pénélnl 
corps  étrangers  dans  les  voies  aériennes,  liquide  buccal,  parcelles  J 
laires,  résultant  de  la  paralysie  des  nerfs  laryngés  et  de  l'occlusion  il 
plète  de  la  glotte.  Chez  ,1e  lapin,  on  observe,  après  la  section  deJi 
laryngés,  des  troubles  considérables  delà  respiration  et  du  cornage.' 
ces  désordres  s'apaisent  bientôt  et  ils  ne  peuvent  être  expliqués  ft\ 
troubles  de  l'innervation  vaso-motrice  du  poumon,  les  nerfs  laryngér 


PNEUMONIE.   —  BRONCHO-PNEDMOME.  —  PATHOGÉHIE.  581 

'dation  avec  cet  organe.  Après  la  section  du  pneumogastrique,  les 
»  effets  se  produisent,  mais  plus  accentués  ;  par  suite  de  la  paralysie 
rynx,  les  matières  accumulées  dans  la  bronche  pénètrent  en  grande 
iié  dans  les  bronches  où  leur  introduction  est  encore  facilite  par  les 
rations  profondes  qui  succèdent  à  la  section  du  pneumogastrique, 
oimaux  succombent  bientôt  à  une  pneumonie  suraiguë.  A  part  la 
fsie  des  vaso-moteurs  qui,  dans  ce  dernier  cas,  aggrave  encore  les 
snts,  ceux-ci  résultent  aussi  de  Faction  irritante,  traumatique,  exercée 
»  corps  étrangers  à  la  surface  interne  des  bronches  et  amenant  consé- 
dinent  une  inflammation  plus  ou  moins  intense.  Dans  plusieurs  expé- 
es,  rintroduction  directe  des  mucosités  dans  les  bronches,  sans  sec- 
les  nerfs  vagues,  a  donné  des  résultats  positifs  ;  d*après  les  auteurs 
auds,  ces  mucosités  buccales  sont  plus  irritantes  que  les  autres 
très  qui  pénètrent  dans  les  bronches.  Ils  attribuent  aussi  un  rôletrès- 
rtani  à  la  présence  de  parasites,  de  micrococcus  formant  des  agglomé^ 
isplus  ou  moins  considérables  qui  ont  été  vues  dans  les  bronches,  les 
les,  les  vaisseaux,  les  lymphatiques.  Bulh,  Éberth,  Ivanowsky, 
«les  ont  trouvés  dans  la  diphthérie,  la  grippe,  la  rougeole,  la  variole, 
vre  typhoïde.  On  les  trouve  surtout  dans  les  broncho-pneumonies 
^but  ;  mais  leur  présence  dans  des  broncho-pneumonies  d'origines 
erses,  nous  semble  en  contradiction  avec  le  rôle  important  qu'on 
leur  faire  jouer. 

e  première  catégorie  de  broncho-pneumonies  correspond  directement 
luroncho-pneumonies  expérimentales  ;  ce  sont  celles  qui  se  produisent 
les  cas  d*apoplexie  par  lésions  cérébrales  accompagnés  de  parésie 
mgienne,  par  suite  de  la  pénétration  dans  les  voies  aériennes  des 
sites  buccales,  des  matières  alimentaires  et  des  boissons,  celles  qui 
srvent  chez  les  aliénés  (Calmeil,  Guislain),  dans  les  paralysies  du 
fnx  et  de  Tœsophage,  chez  les  individus  cachectiques;  de  même 
roncho-pneumonies  aiguës  qu'on  observe  à  la  suite  de  la  carie  dn 
ïT^  du  cancer  de  la  langue,  du  noma,  des  abcès  retro-pharyngiens, 
li  s'accompagnent  habituellement  de  gangrène.  Au  contraire,  celles 
uccèdent  à  l'introduction  de  corps  étrangers  non  irritants  donnent 
k  des  broncho-pneumonies  chroniques  (Pneumonokonioses). 
lis  dans  les  cas  les  plus  nombreux  de  broncho-pneumonies,  il  n'y  a 
pénétration  de  corps  étrangers  dans  les  voies  aériennes;  dans  ces  cas, 
ico-pus  non  rejeté  par  l'expectoration  et  séjournant  dans  les  bronches, 
en  partie  le  même  rôle  (Charcot)  ;  entraîné  par  la  pesanteur,  il  vient 
ar  la  muqueuse  des  petites  bronches  dans  lesquelles  il  pénétre  (Bùhl), 
BÎlite  ainsi  la  propagation  de  l'inflammation.  Celle-ci  finit  par  attein- 
e  lobule  et  la  pneumonie  lobulaire  ne  tarde  pas  à  se  développer  ;  le 
>pus  peut  même  pénétrer  jusque  dans  les  bronches  lobulaires  et  par- 
er ainsi  à  la  fonfnation  des  grains  jaunes  ou  nodules  péribron- 
ues.  Cependant,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  ce  fait  de  la  péné- 
on  du  pus  est  secondaire,  son  rôle  se  borne  à  entretenir  et  à  exagérer 
tation.  Les  lésions  éloignées,  comme  l'a  fait  remarquer  Charcot, 


582  PNEUMONIE.  —  brokcho-pnbumonie.  —  pathocéiiu. 

telles  que   la  Fplénisation  dont  le  caractère  anatomique  est  h  pneu- 
monie desquamative,  ne  peuvent  en  dériver.  La  splénisation  ne  peut 
être  considérée  davantage   comme  le   résultat  d'une   action  irritalive 
exercée  à  distance  par  les  noyaux  d'hépatisation  péribronchiquc,  car 
souvent  elle  les  précède.  Il  se  produit  là  de  proche  en  proche  des  lésions- 
irritalivcs  semblables  à  celles  qui  succèdent  dans  les  acini  des  glandes 
aux    lésions   de  leurs   canaux   excréteurs.    Ces   lésions    sont  siuiont 
remarquables  à  la  suite  de  la  ligature  du  canal. cholédoque  et  teten- 
tissent  jusque  dans  les  canaux  biliaires  les  plus  profonds.  L'épithëVuini 
alvéolaire  en  continuité  avec  1  epithélium  bronchique  et   originellenienl 
de  même  nature,  subit  les  mêmes  influences  imtatives  et  participe  aux 
mêmes  altérations.  11  y  a  donc  desquamation  alvéolaire  et  si  rirrilation» 
continue   et  devient  chronique,  il  y   aura  formation  d'un  revétemoit 
épithélial  cubique,  semblable  à  celui  des  petites  bronches  ;  rirritatk» 
•pithéliale,  dit  Charcot,  serait  le  fait  le  plus  général,  la  pénétration  des 
produits  muco-purulents  dans  la  cavité  alvéolaire  serait  en  quelque  sorie 
accidentelle  et  ne  jouerait  qu'un  rôle  adjuvant.  La  formation  des  nodules 
péribronchiques  serait  subordonnée  à  l'existence  de   la  périhrônchite. 
Comme  on  le  voit,  c'est  le  processus  dont  nous  avons  donné  le  résumé  i 
la  fin  du  chapitre  de  Tanatomie  pathologique  ;  favorisée  par  l'action  da 
la  pesanteur,  par  la  persistance  de  Tliypostasc  et  la  progression  du  muoo» 
pus,  la  bronchite  gagne  les  conduits  lobulaires.  Si  elle  est  peu  profonde, 
catarrhale,  c'est  la  pneumonie  desquamalive  ou  splénisation  qui  en  sen 
le  premier  effet  ;  si  elle  comprend  toute  l'épaisseur  de  la  bronche,  si  elle 
est  parenchyniateusc,  en  un  mot,  des  lésions  du  même  ordre  se  produiront 
dans  les  portions  du  parenchyme  lobulaire  voisines  de  la  bronche  et  daos 
lesquelles  viennent  se  perdre  les  ramuscules  terminaux  de  Tartèrc  broo- 
chi(|ue.  La  notion  des  espaces  interlobulaires  et  intralobulaires  établie 
d'une  manière  si  ingénieuse  par  Cliarcot,  montre  d'une  manière  saisis- 
sante la  marche  de  ce  processus    (Voy.  art.  Putdisie,  t.  xxvn,  p.  696.) 
Dans  la  structure  du  poumon,  on  peut  distinguer,  d'une  part,  le  tisso 
pulmonaire  proprement  dit,  représenté  par  les  lobules  et  les  acini,  et 
d'autre  part,  le  tissu  conjonctif  des  espaces  interlobulaires  et  interacincui. 
Or,  ces  espaces  forment  naturellement  deux  grandes  classes  :  A,  les  grands 
espaces  interlobulaires  où  se  trouvent  les  bronches  cartilagineuses  avec 
les  artères,  les  lymphatiques  péribronchiques,  les  veines  pulmonaires  et 
bronchiques  ;   B,  les  petits  espaces  intralobulaires  avec  la  bronche  lobu- 
laire et  Tartère  bronchique,  les  vaisseaux  lymphatiques  et  le  tissu  coo- 
jonclif  qui  les  unit,  et  les  petits  espaces  interlobulaires  et  interacineox 
composés  surtout  de  tissu  conjonctif,  et  renfermant  de  nombreux  lymphe 
tiques  et  les  veines  pulmonaires  (Charcot).  Il  est  aisé  de  se  rendre  compte, 
d'après  ces  notions  d'anatomie,  du  véritable  siège  de  la  broncho-pneurnooie; 
c'est  avant  tout  une  maladie  des  espaces,  et  ce  caractère  s^aflirme  d'aultfl 
plus  qu'elle  présente  une  durée  plus  considérable. 

L'inflammation  atteignant  à  la  fois  les  divers  éléments  de  la  brondie, 
les  parois  des  vaisseaux,  les  lymphatiques  et  le  tissu  conjoo.nif  de  VespHt, 


PNEUMONIE.  —  BKOMCHO-PNEDMONIB.  —  PATHOGiMIB.  585 

û\e  donnera  lieu  dans  le  lobule  aux  mêmes  lésions  de  Tespace  intralobu- 
laire.  Celles-ci  sont  rapidement  propagées  au  tissu  pulmonaire  voisin  pour 
RNiDcr  le  nodule  péribronchique,  et  aux  espaces  périacineux  et  périlo- 
balaires  dont  les  vaisseaux  sanguins  sont  tributaires  des  vaisseaux  situés 
ians  les  espaces  intralobulaires  et  inlerlobulaires  avec  lesquels  ils  se 
Doniinuent  directement. 

Ces  notions  sont  importantes  à  connaître:  elles  expliquent  les  ano- 
nalies  qui  se  rencontrent  dans  les  diverses  variéléâ  de  broncho-pncumo- 
lies.  La  forme  suffocante,  si  dangereuse  à  cause  de  rhypersccrétion  consi- 
lérable  qui  raccompagne  et  qui  produit  Temphysème  par  obstruction 
iroochique,  est  celle  qui  guérit  le  plus  rapidement,  parce  que  les  lésions 
i^occupent  que  la  surface  des  voies  aériennes.  Les  formes  parencliyma- 
enses,  au  contraire,  sont  graves  et  se  résolvent  difficilement,  parce  que 
'inflammation  est  en  même  temps  superficielle  et  interstitielle,  et  comme 
die,  présente  la  tendance  à  la  chronicité  qui  caractérise  toutes  les  pnleg^ 
Dasîes  interstitielles. 

La  pneumonie  franche,  au  contraire,  a  pour  siège  le  tissu  intermédiaire 
lUX  espaces  ou  tissu  propre  du  poumon.  D'abord  limitée,  mais  sans  loca- 
lisation spéciale  par  rapport  aux  bronches,  elle  s'étend  rapidement  à  tout 
m  lobe,  en  envahissant  des  zones  étendues  de  tissu  pulmonaire.  L'exôudat 
composé  de  fibrine  et  de  globules  blancs  est  libre  dans  Tintérieur  des  al- 
réoles;  les  espaces  sont  respectés.  Il  y  a  tendance  naturelle  à  la  résolution 
lui  résulte  à  la  fois  du  siège  et  de  la  nature  de  Texsudat. 

L'examen  de  ces  diverses  lésions  et  de  lelir  pathogénie  peut  déjà  nous 
Sttre  prévoir  que  les  phénomènes  cliniques  qui  les  accompagneront  se- 
Bout  surtout  ceux  d*une  bronchite  généralisée,  engouement  bronchique 
IW€  dypsnée  et  toux,  conduisant  à  une  asphyxie  rapide  dans  la  (orme 
ttiffocante,  plus  ordinairement  lente  dans  les  formes  parenchymateuses. 
bViccumulation  des  mucosités  peut  être  assez  considérable  pour  empêcher 
le  percevoir  par  Tauscultation  les  signes  de  l'induration  pulmonaire,  soit 
|a*clle  empêche  la  pénétration  de  l'air  dans  les  bronches,  soit  que  les 
Bftlcs  soient  trop  nombreux  et  couvrent  le  souffle  bronchique.  Celui-ci  re- 
paraît lorsque  les  mucosités  se  déplacent.  Ces  variations  dans  les  symp- 
lAmes  physi(|ues  ne  doivent  être  rapportées  qu'aux  deux  éléments  capables 
par  leur  mobilité  d'apporter  des  modiûcations  dans  l'état  des  poumons, 
■voir  :  les  mucosités  et  le  sang.  11  faut  écarter,  en  effet,  dans  les  causes  de 
Huriations  des  signes  physiques,  la  mobilité  d'envahissement,  celle  qui 
lèpend  de  la  formation  de  nouveaux  noyaux  de  pneumonie.  D'autre  part, 
la  que  nous  savons  sur  la  fixité  des  lésions  du  lobule,  ne  nous  permet  pas 
la  penser  à  une  résolution  rapide.  La  mobilité  des  signes  physi(|ues  tient 
lone  aux  déplacements  de  la  masse  sanguine  en  rapport  avec  l'état  fœtal, 
laa  poussées  inflammatoires,  les  troubles  de  Tinnervation  vaso-motrice,  et 
iax  déplacements  des  mucosités  par  suite  d'efforts,  de  spasmes  des  bron- 
ebes,  etc.  Mon  excellent  maître.  Cadet  de  Gassicourt,  attribue  un  grand 
iftle  aux  congestions  dans  la  physiologie  pathologique  de  la  broncho-pneu- 
monie; elles  s'accompagnent  de  submatité,  de  souffle,  d'une  augmenta- 


584  PNEUMONIE.  —  bronciio-pheumonie.  —  traitbiebiit. 

tion  de  la  dypsnée,  signes  qui  peuvent  durer  24  heures,  2  ou  3  jours,  puis 
cesser  complètement.  Il  montre  qu*à  côté  du  processus  inflanmuiUHre,  il 
y  a  des  poussées  congcstives  révélées  par  Texamen  clinique  et  par  le  tracé 
thermométrique  et  qui  modifient  beaucoup  la  physionomie  de  la  maladie, 
surtout  son  début.  Cadet  de  Gassicourt  établit  Texistence  de  deux  va- 
riétés cliniques  sur  cette  mobilité  des  congestions.  Tune  à  sympidines  stc- 
thoscopiques  variables,  Tautre  à  symptômes  stéthoscopiques  6xe8. 

Une  réaction  fébrile  plus  ou  moins  vive  avec  des  exacerbations  emclé- 
ristiques  accompagne  l'évolution  de  la  broncho-pneumonie.  Le  rétrédiie- 
ment  du  champ  de  Thémalose  par  suite  de  l'obstruction  des  bronches,  et 
de  la  formation  des  foyers  de  pneumonie  lobulaire,  entraîne  le  dévelop- 
pement de  l'emphysème  supplémentaire.  Si  le  malade  n'est  pastuépir 
les  progrès  de  Tasphyxie  ou  par  une  réaction  trop  violente,  il  y  aura  fou- 
jours  à  redouter  une  résolution  incomplète,  à  cause  des  lésions  intersti- 
tielles. 

Traitement.  —  L'étude  des  causes  nous  impose  immédiatement  on 
certain  nombre  d'indications  prophylactiques  importantes.  Conune  nous 
l'avons  vu,  la  broncho-pneumonie  se  présente  avec  une  fréquence  et  une 
gravité  toutes  spéciales  dans  certaines  épidémies  de  fièvres  éniptives.  On 
devra  autant  que  possible  dans  ces  circonstances  établir  une  bonne  aéra- 
tion des  salles,  éviter  l'encombrement  des  malades,  en  un  mot,  mettre 
sévèrement  en  pratique  toutes  les  règles  de  l'hygiène  des  épidémies. 

Une  source  d'indications  découle  aussi  de  la  faiblesse  et  de  la  débilité  des 
malades  en  rapport  soit  avec  leur  âge,  soit  avec  des  affections  antérieures. 
Lorsqu'une  bronchite  intense  et  généralisée  se  déclare  chez  un  enfant, 
chez  un  vieillard,  ou  chez  un  individu  affaibli,  il  faut  s'efforcer  d'éviter  les 
conséquences  redoutables  qui  résultent  de  l'influence  d'un  décubitus  dor- 
sal trop  prolongé.  II  est  indiqué  de  forcer  les  malades  à  s'asseoir  dans  leur 
lit,  de  les  faire  changer  fréquemment  de  position,  de  les  promener  dans 
la  chambre  si  cela  est  possible.  Vaileix  conseille  le  décubitus  abdominal 
pour  faciliter  l'expectoration,  et  d'enlever  directement  avec  le  doigt  les 
mucosités  qui  s'accumulent  dans  le  pharynx.  Ce  traitement  préventif  ne 
s'applique  évidemment  qu'aux  bronchites  simples;  il  ne  faut  guère 
compter  sur  lui,  non  plus  que  sur  les  agents  thérapeutiques,  s'il  sagit 
d'une  bronchite  diphtliéritique. 

Au  début,  on  doit  régler  tout  d'abord  l'emploi  des  moyens  hygiéniques  ; 
la  chambre  est  maintenue  à  une  température  de  15  degrés  et  le  malade 
chaudement  vêtu  d'une  camisole.  On  favorise  ainsi  la  diaphorèse;  on  doit 
éviter  cependant  que  l'air  soit  trop  chaud  et  surtout  trop  sec  et  il  est 
utile  de  faire  autour  du  malade  des  pulvérisations  ou  des  fumigations 
émollientes.  L'air  doit  être  renouvelé  fréquemment  avec  les  précau- 
tions voulues  en  pareil  cas;  le  calme,  le  repos  sont  nécessaires.  La 
plupart  des  auteurs,  frappés  des  tendances  adynamiques  de  la  maladie, 
proscrivent  la  diète  absolue.  Le  régime  peut  être  réglé  souvent  d'après 
les  désirs  de  l'enfant  ;  le  bouillon,  le  chocolat,  le  lait,  les  œufs,  le  lailJf 
poule,  le  vin  coupé,  etc.,  sont  les  aliments  le  plus  facilement  acceptés. 


PNEUMONIE.   —  BROKCUO-PNEUMONIE.  —  TRAITEMENT.  585 

Pour  Rilliet  et  Barthez,  les  indications  doivent  être  tirées  principalement 
de  la  nature  de  la  maladie  :  appartenant  aux  afTections  catarrhales,  elle 
doit  être  combattue  par  les  indications  spéciales  qu'elles  réclament.  Ce 
sont  les  évacuants  beaucoup  plus  que  les  antiphlogistiques,  qui  rendront 
les  meilleurs  services. 

Les  émissions  sanguines  sont  considérées  aujourdMiui  comme  inutiles 
et  même  dangereuses  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas.  La  broncho- 
pneumonie, maladie  secondaire,  survenant  le  plus  souvent  chez  des  en- 
fants déjà  affaiblis  par  une  autre  affection,  causée  fréquemment  par  cet 
affaiblissement  même,  ne  peut  être  favorablement  modifiée  dans  sa  mar- 
che par  une  médication  aussi  énergiquement  spoliatrice.  A  ce  titre,  Dama- 
schino,  d*Espine  et  Picot  les  repoussent  complètement;  nous  ne  les  avons 
jamais  vues  mises  en  usage  pendant  notre  internat  à  l'hôpital  Sainte- 
Eugénie.  Hervieux,  Rilliet  et  Barthez  conseillent,  dans  certains  cas, 
remploi  des  émissions  sanguines  locales  (sangsues  à  l'anus,  ou  à  la  base 
du  thorax,  ventouses  scarifiées).  Roger  croit  aussi  qu'une  émission  san- 
guine peut  être  d'une  utilité  réelle,  chez  les  sujets  âgés  *de  plus  de  quatre 
ans,  quand  il  s'agit  de  cas  suraigus,  à  forme  suffocante,  dans  lesquels  la 
phlegmasie  s'étend  rapidement  à  tout  l'arbre  aérien.  11  conseille  égale- 
ment les  ventouses  scarifiées,  les  sangsues  et  même  la  saignée  du  bras 
(100  à  200  grammes),  dans  le  but  de  diminuer  l'intensité  du  mouve- 
ment fébrile  et  l'hypérémic  des  bronchioles. 

n  est  possible  que  cette  perturbation  énergique  exerce  une  heureuse 
influence  sur  le  mouvement  fluxionnaire  intense  qui  se  produit  dans  le 
système  broncho-pulmonaire.  Cependant  cette  médication  ne  peut  être 
appliquée  qu'à  un  très-petit  nombre  de  cas,  et  on  peut  en  dire  presque 
autant  de  celle  qui  consiste  a  employer  les  contro-stimulants,  L'émctique 
à  doses  fractionnées  (5  à  15  centigr.),  de  manière  à  obtenir  la  tolérance, 
Toxyde  blanc  d'antimoine  (de  5  à  5  décagr.  à  1  gramme),  et  surtout  le 
kermès  minéral  (de  5  à  10  centigrammes)  ont  été  vantés  par  Rilliet  et 
Barthez,  par  Legendre,  etc.  Les  préparations  antimoniales  combattent 
Télément  congestif  de  la  maladie,  mais  elles  ont  l'inconvénient  de  dépri- 
mer les  forces  ;  aussi  leur  emploi  méthodique  et  continu  s'est-il  fort  res- 
treint depuis  quelques  années. 

On  a  prescrit  comme  exerçant  une  action  antiphlogistique  plus  modé- 
rée, l'aconit,  à  la  dose  de  15  à  50  gouttes  (Rilliet  et  Barthez).  La 
digitale  est  considérée  par  H.  Roger  comme  diminuant  l'intensité  de  la 
fièvre  ;  il  a  vu  la  température  s'abaisser,  le  pouls  tomber  de  150  à  120  et 
même  à  110.  Ces  diverses  préparations  peuvent  être  prescrites  seules  ou 
associées  au  kermès  (extrait  de  digitale  et  kermès,  3  à  5  centigr.  de  cha- 
cun dans  un  julep  gommeux  ou  un  looch  blanc)  ;  leur  action  sur  le  cœur 
doit  toujours  être  surveillée  avec  la  plus  grande  attention. 

Les  préparations  antimoniales,  et  principalement  l'émélique,  ont  un 
rôle  plus  important  à  jouer,  lorsque  les  signes  d'obstruction  bronchique 
indiquent  impérieusement  la  nécessité  de  l'expulsion  des  produits  de 
sécrétion  accumulés  dans  les  bronches.  Cependant,  paimi  les  vomitifs^ 


586  PNEUMONIE.  —  broncho-pneumokib.  »  tiaitsmext. 

ripécacuanba  est  celui  qu'on  emploie  de  préférence,  car  on  peut  le  répé- 
ter plusieurs  fois,  sans  crainte  de  le  voir  affaiblir  les  malades,  ou  exercer 
une  action  nuisible  sur  le  tube   digestif.  Laënnec,  Fauvcl,  Rilliet  et 
Barthez  ont  souvent  insisté  sur  les  avantages  qu*on  retire  des  vomitib 
répétés  coup  sur  coup.  L'acte  même  du  vomissement  est  utile,  par  les 
secousses  qu*il  produit,  par  Thypersécrétion  fluide  et  prompte  qu*il  déter- 
mine. L'ipécacuanha  peut  élre  infidèle  dans  quelques  cas,  soit  à  cause 
d'une  tolérance  spéciale,  soit  à  cause  de  Tatonie  du  tube  digestif,  ou  de 
la  dépression  causée  par  Tasphyxie.  Rilliet  et  Barthez  conseillent  d'abord 
de  faire  précéder  son  administration  de  stimulants  énergiques  (siiia- 
pismes  aux  jambes,  bains  de  pied  sinapisés),  à  la  suite  desquels  on  voit 
parfois  les   efforts  de  vomissement  se  reproduire  avec  assez  de  force 
pour  expulser  le  contenu  des  bronches.  Dans  d*aulres  cas,  il  faut  recourir 
au  tartre  stibié  qui  agit  parfois  plus  sûrement.  Ce  sel  peut  même  être 
préféré  dans  les  cas  où  Ton  veut  provoquer  en  même  temps  des  évacua- 
tions stomacales  et  intestinales  (IL  Roger).  Le  sulfate  de  cuivre  produil 
également  ce  double  effet,  mais  parfois  d'une  manière  beaucoup  trop 
intense.  11  est  d'ailleurs  peu  employé,  ainsi  que  Taponiorpliine  qui  pour- 
rait cependant  être  prescrite  aux  enfants  qui  refusent  obstinément  tous  les 
médicaments.  Dans  ces  derniers  temps,  les  médecins  ont  restreint  l'em- 
ploi des  vomitifs  ;  évidemment  très-utiles  au  début,  alors  que  la  bron- 
chite prédomine,  ils  sont  moins  avantageux  ou  même  inutiles  lorsque 
rinliltralion  des  lobules  est  effectuée,  il  est  préférable  de  recourir  i  ce 
moment  aux  autres  moyens  thérapeutiques. 

Après  les  vomitifs  qui  agissent  surtout  comme  expectorants,  nous 
devons  signaler  les  autres  médications  qui  modifient  la  sécrétion  bron- 
chique ;  le  kermès,  Tipéca  à  dose  nauséeuse  (0,25  cenligr.  en  potion  ou 
en  infusion)  sont  encore  employés  dans  ce  but,  ainsi  que  la  poudre  de 
Dower  dont  l'action  sédative  répond  en  outre  à  d'aulrcs  indications.  Ib 
peuvent  rendre  la  sécrétion  plus  abondante,  en  même  temps  plus  fluide, 
et  faciliter  ainsi  son  évacuation.  Les  balsamiques,  la  gomme  ammoniaque, 
la  décoction  de  baies  de  genièvre  ou  de  bourgeons  de  sapin,  les  sirops 
de  Tolu,  de  térébenthine,  etc.,  rendent  plutôt  des  services  dans  la 
période  de  déclin  de  la  maladie,  ou  lorsqu'elle  présente  de  la  tendance 
à  la  chronicité.  11  en  est  de  même  du  sirop  de  ratanhia  et  de  tannin,  des 
préparations  de  soufre,  et  en  particulier  des  eaux  sulfureuses. 

Les  médications  que  nous  venons  de  passer  en  revue  répondent  à  des 
indications  diverses;  elles  agissent  sur  l'état  général  et  combattent  Vêle- 
ment inflammatoire  de  la  maladie,  soit  en  agissant  sur  la  turgescence  du 
système  vasculaire  des  bronches  et  des  poumons,  soit  en  empêchant  l'ac- 
cumulation des  produits  sécrétés  dans  l'arbre  aérien.  Les  révulsifs,  el 
principalement  les  vésicatoires  volants,  empêchent  également  l'extension 
de  la  fluxion  sanguine  broncho-pulmonaire.  Repoussés  par  'irousseau, 
par  Legendre,  Becquerel,  qui  redoutaient  la  production  d'ulcérations 
rebelles  ou  d'accidents  plus  graves  (érysipèle,  diplithérie,  gangrène),  iL^ 
ont  été  au  contraire  préconisés  par  Rilliet  et  Barthez  et  la  plupart  à^ 


PNËUMONIK.    —  BROKCHO-PIIEUMOKIE.  —  TRAITBMKRT.  587 

auteurs.  Il  est  seulement  recommandé  de  les  faire  peu  étendus,  de  limiter 
leur  temps  d'application  à  cinq  ou  six  heures  tout  au  plus  et  de  les  panser 
avec  le  plus  grand  soin,  de  manière  à  éviter  le  contact  de  l'air  et  les  frot- 
tements. L'apparition  de  la  matité  ou  de  la  submatilé,  du  souffle  ou  des 
râles  sous-crcpitants  fins,  annonce  la  production  de  poussées  inflamma- 
toires, et  détermine  ainsi  le  point  où  ils  doivent  être  placés  ;  le  plus  sou- 
Tent,  c'est  aux  parties  postérieures  et  inférieures  de  la  poitrine,  ou  au- 
dessous  de  Tomoplate,  et  dans  la  direction  des  côtes.  Dans  beaucoup  de 
cas,  ils  ont  paru  exercer  une  action  très-manifeste  sur  la  marche  de  la 
maladie,  en  empêchant  l'extension  des  foyers  de  pneumonie,  en  dimi- 
nuant la  fluxion  des  voies  respiratoires,  et  dans  les  dernières  périodes,  en 
hâtant  la  résolution.  A  ce  moment,  d'autres  révulsifs,  huile  de  croton 
sur  le  dos  (Legcndre),  sinapismes,  emplâtres  de  thapsia,  teinture  d'iode 
peuvent  être  employés  également;  mais  il  faut  leur  préférer  les  vésica- 
.toires  pendant  la  période  des  poussées  ai^cs  du  côté  des  bronches  ou  des 
obules  pulmonaires.  L'enveloppement  des  membres  inférieurs  dans  la 
ouate  simple  ou  légèrement  sinapisée  est  un  excellent  moyen  adjuvant. 

II  y  a  moins  à  compter  sur  les  agents  de  la  révulsion  intestinale.  Les 
purgatifs  sont  employés  pour  hâter  la  résolution  dans  la  période  ter- 
minale, et  quand  il  se  présente  des  indications  spéciales  du  côté  du 
tube  digestif.  On  prescrit  surtout  les  laxatirs  doux,  la  manne,  le  sirop  de 
rhubarbe,  Thuile  de  ricin,  le  sirop  de  chicorée  et  de  fleurs  de  pêcher. 
Les  médecins  anglais  se  servent  aussi  du  calomcl  à  dose  purgative  ou 
à  dose  altérante,  et  dans  ce  dernier  cas,  l'associent  parfois  aux  antimo- 
niaux  (West).  Les  mêmes  indications  spéciales  s'appliquent  aux  diuré- 
tiques (sous-carbonate  de  potasse,  oxymel  scillitique,  etc.). 

Les  sédatifs  répondent  à  plusieurs  indications  symptomatiques  ;  sans 
parler  du  délire,  des  convulsions  qui  constituent  une  véritable  complica- 
tion, on  a  souvent  à  calmer  une  agitation  très-vive  qui  s'empare  du  ma- 
lade  et  s'accompagne  d'une  sorte  d'éréthisme  douloureux.  Les  quintes  de 
toux,  la  dyspnée,  l'insomnie  sont  exagérées  dans  ces  circonstances.  Les 
narcotiques  peuvent  être  prescrits,  même  le  laudanum  (goutte  par  goutte) 
et  le  chloral  (0,25  centigr.,  à  1  gramme);  mais  ces  agents  doivent  être 
maniés  avec  précaution  et  réserves  autant  que  possible  pour  les  cas  très- 
graves.  On  leur  préfère  l'eau  distillée  de  laurier-cerise  (4  à  10  grammes), 
la  belladone  (extrait,  1  à  3  centigrammes),  le  datura,  la  jusquiame,  le 
bromure  de  potassium,  les  préparations  de  ciguë,  de  phellandrie,  l'éther, 
le  sirop  de  valériane,  etc.  L'alcoolature  d'aconit  est  également  prescrit 
(Rilliel  et  Barthez,  II.  Roger)  et  paraît  exercer  une  action  antiphlogistique 
modérée.  Lorsque  la  fièvre  est  vive,  quand  la  température  atteint  39°,5 
ou  40**,  et  qu'il  existe  en  même  temps  des  phénomènes  nerveux  alar- 
mants, Rilliet  et  Barthez  conseillent  l'usage  des  bains  de  son,  à  34*, 
ou  35*,  d'une  durée  de  dix  minutes  et  répétés  au  besoin  deux  ou  trois 
(bis  dans  les  vingt-quatre  heures.  Ces  bains  sont  suivis  d'une  sédation 
marquée,  l'agitation  cesse,  et  le  malade  retrouve  parfois  le  sommeil. 
Dans  quelques  cas,  ce  moyen  rend  une  plus  grande  énergie  aux  efforts 


588  PNEUMONIE.  —  broxcuo-pnecmonie.  —  traitemeht. 

de  toux,  suivis  d'expectorations  qui  débarrassent  les  bronches.  Gner- 
sant,  Blache,  II.  Roger,  etc..  et  la  plupart  des  auteurs  ont  recomiu 
également  que  les  bains  ticdes  dans  la  broncho-pneumonie  exercent  une 
action  à  la  fois  sédative  et  stimulante,  Ils  s*accordent  à  dire  cependant 
qu'on  ne  doit  pas  les  prescrire  dans  le  cas  de  trop  grande  prostration. 
Nous  insisterons  un  peu  sur  d*autres  moyens  hydrothérapiquesy  peu  em- 
ployés en  France  jusqu'ici,  mais  qui,  au  dire  des  médecins  étrangers 
qui  les  préconisent,  rendent  des  services  éclatants  dans  le  traitement  de 
la  broncho-pneumonie. 

Hildenbrand  et  Campagnano  ont,  les  premiers,  conseillé  l'emploi  des 
lotions  et  des  affusions  froides  dans  les  pneumonies.  Ghisi  obtint,  au 
moyen  des  bains  froids,  la  guérison  d'un  enfant  de  13  ans,  arrivé  à  la  pé- 
riode asphyxique  de  la  broncho-pneumonie.  Ziemssen  recommande  i*appU- 
cation  de  compresses  d'eau  fraîche  sur  le  thorax,  renouvelées  toutes  les 
dix  minutes.  Il  a  réussi  par  ce  moyen  à  calmer  les  malades,  à  diminuer  la 
dyspnée,  à  abaisser  le  chiffre  de  la  température  et  des  respirations.  Jur- 
gensen,  dans  les  cas  très-graves,  où  la  dyspnée  et  la  cyanose  sont  extrêmes, 
fait  prendre  aux  malades  un  bain  tiède  de  20  à  25  minules,  après  lequel 
il  donne  une  douche  d*eau  froide  en  jet  sur  la  nuque.  Steffen  a  aussi 
employé  cette  méthode  chez  les  jeunes  enfants  ;  cependant  sa  statistique 
n'est  pas  encourageante,  4  cas  de  guérison  seulement  sur  97  cas. 

Bohn,  dans  TEncyclopédie  de  Gerhardt,  conseille  Tenveloppement  dans 
le  drap  mouillé  pendant  plusieurs  heures  jusqu'à  ce  qu'on  ait  obtenu  un 
abaissement  suffisant  de  la  température,  la  cessation  de  l'agitation  et  de 
la  dyspnée.  Cette  pratique  est  recommandée  aussi  par  Liebermeister,Sche- 
del,  Jûrgensen,  Cohn.  Bartels  n'a  pas  craint,  dans  les  cas  très-graves,  de 
continuer  l'emploi  des  enveloppements  pendant  plusieurs  jours  et  plu- 
sieurs nuits  sans  interruption.  ÎVyss  va  jusqu'à  dire  que  ces  enveloppe- 
ments doivent  être  préférés  à  tous  les  autres  moyens  thérapeutiques. 
Voici  comment  ils  doivent  être  employés  :  un  drap  ou  une  couverture  de 
laine  sont  trempés  dans  de  l'eau  froide  et  tordus  fortement  ;  après  avoir 
été  plié  plusieurs  fois,  le  drap  est  étendu  sur  une  couverture  de 
laine  qui  le  dépasse  dans  tous  les  sens.  L'enfant  est  d'abord  emmaiilotté 
jusqu'aux  aisselles  dans  le  drap,  puis  dans  la  couverture  sèche,  laquelle 
est  fixée  au  moyen  de  fortes  épingles.  Les  bras  doivent  rester  libres,  et 
après  l'enveloppement,  la  chemise  de  l'enfant  qu'on  avait  eu  soin  de  re- 
lever au-dessus  des  épaules  est  ramenée  sur  la  couverture  de  laine.  L'en- 
veloppement dure  deux  heures;  on  laisse  Tenfant  sec  pendant  une  demi- 
heure  ou  une  heure  et  l'on  recommence.  Les  enveloppements  doivent 
être  faits  jour  et  nuit  à  intervalles  plus  moins  éloignés  suivant  l'intensité 
de  la  fièvre.  On  emploie  de  Teau  plus  ou  moins  froide,  ou  simplement 
de  l'eau  à  la  température  delà  chambre.  Après  chaque  enveloppement, 
il  est  bon  de  faire  prendre  à  l'enfant  une  cuillerée  d'un  vin  généreux  dans 
un  peu  d'eau.  Il  faut  veiller  à  ce  qu'il  ne  se  produise  pas  de  refroidis- 
sement des  extrémités.  Lorsque  ces  enveloppements  sont  commencés,  on 
constate  bientôt  que  l'enfant  respire  mieux,  il  tousse  moins;  l'état  gêné- 


PNEUMONIE.  —  BROKCHO-PNEUMONIE.  TRàlTEMKMT.  589 

ral  et  local  se  trouvent  améliorés  ;  Fenfant  dort  paisiblement  dans  Tin- 
tenralle  des  enveloppements.  Ces  intervalles  deviennent  de  plus  en  plus 
grands  à  mesure  que  la  température  tombe  ;  à  ZQ""  ils  sont  de  deux  heures  ; 
à  SS'^yS,  de  trois  heures.  A  cette  température,  on  les  cesse  le  soir  si  la 
température  du  matin  est  normale  ;  il  est  bon  cependant  de  les  continuer 
encore  une  ou  deux  fois  par  jour. 

Nous  avons  vu  que  la  diaphorèsc  obtenue  à  Taide  des  antimoniaux  ne 
peut  être  recherchée  longtemps,  à  cause  des  contre-indications  spéciales 
fournies  par  Vëtat  des  forces.  Depuis  longtemps  les  médecins  ont  reconnu 
que  Tasthénie  est  le  trait  dominant  dans  les  diverses  formes  de  la 
broncho-pneumonie  (de  la  Berge,  Legendre,  etc.).  On  s'adresse  surtout  aux 
stimulants^  pour  la  combattre  :  parmi  les  stimulants  externes  on  prescrit 
surtout  les  onctions  chaudes  (axongc,  huile,  beurre  de  cacao),  les  for- 
mentations  vinaigrées,  les  sinapismes.  Le  marteau  de  Mayor,  l'inhalation 
de  vapeui*s  d'ammoniaque,  sont  réservés  pour  les  cas  où  il  y  a  menace  de 
suffocation  et  d'asphyxie.  Les  sudorifiques,  la  chaleur,  les  boissons  chaudes 
aromatiques,  le  thé,  le  café,  seraient  d'une  grande  utilité,  mais  les  enfants 
ne  les  acceptent  souvent  qu'avec  les  plus  grandes  difficultés.  Les  sels  d'am- 
moniaque (chlorhydrate  ou  carbonate  d'ammoniaque,  20  centigr.  h  50 
centig. ,  acétate  d'ammoniaque)  répondent  à  une  double  indication,  en  modi- 
fiant les  sécrétions  bronchiques,  et  en  stimulant  l'énergie  des  malades.  On 
emploie  dans  le  même  but  l'acide  benzoïque,  (20  à  40  centigr.),  l'infusion 
de  polygala  sencga  (1  à  3  grammes)  ;  le  musc  (20  à  40  centigr.  dans  un 
looch). 

Mais  parmi  les  agents  de  la  médication  stimulante,  les  alcooliques  sont 
ceux  dont  paraissent  résulter  les  meilleurs  effets  ;  la  potion  cordiale  du  Co- 
dex, les  vins  de  Malaga,  de  Xérès,  Bagnols,  Porto  (50  à  100  grammes  par 
jour)  sont  de  puissants  excitants  dans  les  cas  de  débilitation  profonde.  L'al- 
cool, le  rhum  (10  à  30  grammes, dans  une  infusion  aromatique),  le  punch 
léger,  l'élixir  de  Garus,  remplissent  les  mêmes  indications  et  combattent 
Tasphyxie  en  augmentant  l'énergie  des  efforts  respiratoires  :  il  en  est  de 
même  des  préparations  alcooliques,  du  quinquina  (teinture  de  quinquina, 
20  grammes).  Dans  les  cas  de  gangrène^  outre  les  stimulants,  on  prescrit 
encore  les  désinfectants  et  les  antiseptiques  (eau  de  Labarraque,  acide 
phénique,  eucalyptus,  térébenthine,  etc.,  etc.). 

Les  divers  alcooliques  répondent  à  la  nécessité  de  combattre  la  pro- 
stration qui  survient  si  fréquemment  dans  le  cours  de  la  broncho-pneu- 
monie. On  leur  adjoindra,  si  cela  est  possible,  une  alimentation  tonique, 
lait  de  vache  ou  d'ânesse,  bouillon  américain,  jus  de  viande,  jaunes 
d'œufs,  boissons  vineuses,  etc..  L'inappétence  absolue  des  enfants  ap- 
porte souvent  un  obstacle  invincible  à  l'ingestion  des  aliments;  les  alcoo- 
liques, les  préparations  de  quinquina,  sont  alors  les  ressources  les  plus 
puissantes  dont  nous  disposions  contre  la  débilitation. 

Pendant  la  convalescence,  on  a  encore  à  combattre  le  catarrhe  bron- 
chique qui  persiste  plus  ou  moins  longtemps  ;  les  expectorants,  le  tannin, 
les  balsamiques,  les  eaux  sulfureuses  naturelles  (Bonnes,  Cauterets,  etc.). 


590  PNEUMONIE.  —  broncuo-p.^bdmomib.  —  TiAirBMsn. 

<^oupés  avec  le  lait,  peuvent  rendre  de  grands  services.  Une  surveillance 
attentive  est  nécessaire  pour  prévenir  le  retour  des  rechutes  :  un  bog 
séjour  à  la  chambre  (deux  à  quatre  semaines)  doit  être  impose  aux  en- 
fants. Pour  le  lever,  pour  raliraenlation,  il  est  souvent  sage  de  s'en  rap- 
porter à  leur  instinct  (IL  Roger).  On  ne  tardera  pas  à  leur  donner  une 
alimentation  de  plus  en  plus  fortiGante  (potages,  œufs,  viandes).  L'emploi 
de  riiuile  de  foie  de  morue,  de  Tiodure  de  fer,  du  phosphate  de  chaax, 
les  cures  de  lait  de  chèvre,  sont  souvent  nécessaires  pour  combattre  Va- 
ncmie.  Le  rétablissement  des  forces  peut  être  complété  et  avancé  par  un 
séjour  à  la  campagne,  dans  les  montagnes  ou  dans  une  station  maritime 
ou  thermale  convenablement  choisie. 

Nous  ne  pouvons  entrer  ici  dans  de  longs  détails  sur  les  indications 
spéciales  :  le  traitement  doit  être  modifié  suivant  les  causes,  les  formes, 
les  périodes  de  la  maladie,  suivant  Tàge  des  sujets,  Pétat  des  forces, 
suivant  les  complications  (convulsions,  emphysème,  pleurésie,  gan- 
grène, etc.),  la  prédominance  de  certains  symptômes,  etc.,  etc...  Toutei; 
ces  indications  thérapeutiques,  variables  avec  chaque  malade,  sont  do  res- 
sort de  la  clinique  et  ne  peuvent  être  développées  dans  le  cadre  que  nous 
sommes  forcés  d'adopter  ici.  Nulle  ou  à  peu  près  dans  les  broncho-pneu 
monies  consécutives  au  croup,  la  thérapeutique  est  également  desarmée 
dans  celles  qui  sont  le  résultat  d'une  cachexie  profonde.  Los  ioniques, 
les  stimulants,  sont  les  seules  ressources  qui  nous  restent  contre  le$ 
effets  de  la  maladie.  Dans  les  fièvres  éruptives,  dans  le  noma,  dans  la 
fièvre  typhoïde,  dans  la  coqueluche,  des  modifications  spéciales  sont 
nécessitées  dans  le  traitement  par  PalTection  primitive.  Mais  les  indications 
principales  sur  lesquelles  nous  avons  msisté  dominent  toujours  ;  on  doit 
toujours  s'opposer  aux  congestions  actives  et  passives  et  à  l'accumulatioD 
des  sécrétions  bronchiques,  en  agissant  soit  mécaniquement  au  moyen 
des  vomitifs,  soit  indirectement  par  les  stimulants,  les  révulsifs,  etc. 
Quelle  que  soit  la  maladie  primitive,  la  broncho-pneumonie  qui  vient  la 
compliquer  présente,  en  effet,  des  indications  constantes  tirées  de  la  forme 
qu'elle  revêt,  de  la  prédominance  de  Télément  bronchique  ou  de  lelé- 
ment  parenchymateux.  Dans  la  forme  suffocante,  bronchite  capillaire,  les 
vomitifs,  les  sédatifs,  les  révulsifs  cutanés  (ventouses,  sinapismes)  sont 
employés  surtout  pour  combattre  la  dyspnée, et  l'engouement  des  bronches. 
Dans  les  formes  parenchymateuses,  on  peut  parfois,  au  début,  essayer  des 
antiphlogistiques  ;  mais  les  révulsifs  éner<;iques  (vésicatoires),  les  stimu- 
lants et  les  toniques  font  ordinairement  la  base  du  traitement. 

En  résumé,  au  début,  quand  prédomine  l'engouement  bronchique, 
on  peut  commencer  le  traitement  par  un  ou  deux  vomitifs  ;  puis  tout  en 
excitant  une  révulsion  cutanée  énergique  (sinapismes,  ventouses,  pédi- 
luves,  enveloppements  ouatés,  vésicatoires),  on  prescrira  les  modificateurs 
des  sécrétions  bronchiques  (kermès),  les  antiphlogistiques  et  les  modifica- 
teurs de  la  circulation  (digitale,  aconit,  etc.).  A  la  période  d'état,  lorsque 
le  parenchyme  pulmonaire  est  envahi,  les  révulsifs  doivent  encore  être 
prescrits,  et  de  plus,  les  toniques,  l'alcool,  le  quinquina,  etc....  Pendant 


PNEUMONIE.  —  BROZtCHO-PNBUllONIE.  —  BIBUOGRAPHIB.  59i 

la  période  de  déclin,  les  toniques,  une  alimentation  plus  substantielle, 
les  balsamiques  et  les  sulfureux  sont  spécialement  indiciués. 

Consulter  les  trailés  de  maladies  des  enfants,  Rilliet  el  Barthez,  Barbier,  Bouchot,  Wrst,  d'Es- 

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«ow.  DicT.  hId.  et  chir.  XXVIII  —  36 


594  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique. 

PNEOioiviE  CHRONIQL^E.  —  Nous  ne  pouvons  nous  occuper,  dans  cet 
article,  que  des  aiTections  inflammatoires  chroniques  du  poumon  consé- 
cutives a  des  affections  aiguës  de  même  ordre  en  quelque  sorte  sponta- 
nées. Nous  rejetons  de  notre  cadre  les  pneumonies  chroniques  partidles 
consécutives  à  des  lésions  de  natures  diverses  des  bronches  et  du  paren- 
chyme pulmonaire.  Ainsi,  on  trouve  presque  constamment  autour  des 
foyers  apoplectiques,  des  kystes    hydatiques  et  des  diverses  tumeurs  du 
poumon»  des  lésions  inflammatoires  plus  ou  moins  étendues,  et  aboutis- 
sant à  la  formation  d*un  tissu  scléreux,  ardoisé  ou  fortement  pigmenté. 
Des  lésions  d'apparence  semblable  se  produisent  autour  des  tubercules 
et  des  cavernes.  Primitivement,  ces  pneumonies  pérituberculeuses  ne  pré- 
sentent rien  qui  leur  appartienne  essentiellement  en  propre  ;  elles  ne  dif- 
fèrent point  de  celles  qui  caractérisent  la  broncho-pneumonie  (Charcot), 
et  aboutissent  dans  les  formes  chroniques  à  la  même  sclérose  du  tissu 
conjonclif,  aux  mêmes  transformations  granulo-graisseuses  des  épithéliums 
(Voyez  pour  la  discussion  de  la  pneumonie  caséeuse  l'article  Pethisk, 
ta  XXVII,  p.  277).  Les  pneumonies  consécutives  à  TintroductiondespouiS- 
sières  dans  les  voies  aériennes  (pneumonokonioses)  sont  aussi  des  bron- 
cho-pneumonies. Nous  nous  bornons  à  les  rappeler  ici,  ainsi  que  la  pneu- 
monie syphilitique  :  leur  description  viendra  aux  articles  PROF£ssro5  et 
SYpmus. 

La  gangrène  et  les  abcès  du  poumon  peuvent  être  aussi  l'origioe  de 
pneumonies  chroniques.  Le  processus  inflammatoire,  qui  se  développe 
à  leur  périphérie  et  qui  amène  la  cicatrisation  du  foyer,  s'étend  parfois 
au  poumon  tout  entier.  Nous  ne  donnerons  pas  de  ces  cas  une  description 
à  part;  ils  rentrent  le  plus  souvent  dans  les  variétés   communes,  sur 
lesquelles  nous  allons  maintenant  insister.  Les  pneumonies  chroniques 
peuvent  être  aujourd'hui  classées  en  un  certain  nombre  de  variétés  bien 
distinctes.  Nous  devons  dire  dès  à  présent  que,  dans  ses  leçons  professées 
à   la  Faculté  de  médecine  en  1877-1878,    Charcot  a  plus  nettement 
encore  caractérisé  ces  divisions,  en  montrant  que  les  diverses  formes  de 
lésions  chroniques  peuvent  succéder  aux  affections  inflammatoires  aiguës 
des  bronches  et  du  parenchyme  pulmonaire.  Ces  lésions  ont  reçu  des 
auteurs  les  noms  de  cirrhose,  squirrhe  du  poumon^  pneumonie  in- 
lersliiielle ,  induration  pulmonaire,  sclérose  du  poumon ^  phlhisie 
fibroïde.   etc.   Ces  dénominations,   comme  on  le  voit,   s'appliquent  à 
tous  les  cas  et  doivent  être  remplacées  par  des  termes  plus  caractéris- 
tiques. Nous  adopterons  ici  les  genres  décrits  par  Charcot,  et  qui  sont 
fondés  sur  l'étude  du  sicge  primitif  et  de  la  marche  des  lésions.  Dne  pre- 
mière variété,  représentant  à  l'état  chronique  la  pneumonie  lobaire  aigué, 
évolue  dans  le  parenchyme  pulmonaire  proprement  dit,  dans  les  alvéoles; 
deux  autres  variétés  sont  consécutives  aux  inflammations  des  bronches  et 
de  la  plèvre:  ce  sont  les  broncho-pneumonies  chroniques  et  les  pneu- 
monies  chroniques  pleurogènes.  Il  faut  ajouter  qu'il  est  fréquent  de  voir 
coexister  les  lésions  de  ces  diverses  formes  ;  presque  toujours,  dans  les 
dernières  périodes,  le  parenchyme  pulmonaire,  la  plèvre  et  les  bronches. 


PNEUMONIE.    PN.  CHRONIQUE.  —  p.   LOBAIRE  CHRONIQUE.  595 

participent  en  même  temps  aux  altérations.  Les  signes  sont  alors  ceux 
de  l'atrophie  sclércuse  et  de  la  rétraction  du  poumon,  affaissement  du 
thorax,  déplacement  des  viscères  thoraciques  et  abdominaux,  dilatation 
du  cœur,  etc.  C'est  surtout  par  Texamen  des  commémoratifs  et  de  la 
marche  de  la  maladie  que  Ton  peut  arriver  à  préciser  la  nature  de  l'af- 
fection. 

A.  Pneumonie  lobaire  chronique.  —  Cette  forme  de  pneumonie  chro- 
nique a  été  étudiée  surtout  en  France  ;  il  faut  citer  notamment  les  travaux 
d'Andral,  Grisolle,  Hardy  et  Béhier,  la  thèse  d'agrégation  et  les  leçons 
de  Charcot.  Chez  les  auteurs  allemands,  nous  ne  trouvons  que  quelques 
passages  dans  les  leçons  de  Traube,  un  travail  assez   complet  publié 
par  Heschl  en  1856.  Les  travaux  anglais  publiés  ^ur  la  pneumonie  chro- 
nique sont  plus  nombreux,  mais  visent  surtout  la  forme  broncho-pneu- 
fnonique.  Le  nombre  des  observations  de  pneumonie  lobaire   chronique 
véritablement  digne  de  ce   nom  est  donc  peu  considérable,  lorsqu'on  a 
^a  d'éliminer,  comme  on  doit  le  faire,  les  pneumonies  aiguës  qui  af- 
fectent un  certain  caractère  de  chronicité  par  la  lenteur  de  leur  marche 
ou  de  leur  résolution.  La  persistance  des  exsudais  pneumoniques  dans 
les  alvéoles  se  manifeste  parfois  par  des  signes  physiques,  longtemps 
après  la  défervescence  et  le  retour  complet  à  la  santé.  Mais  ces  exsudats 
non  résorbés  persistent  ainsi  au  sein  du  parenchyme  pulmonaire,  sans 
qu'il  y  ait  coexistence  d'un  travail  inflammatoire  (Charcot).  Grisolle  a  vu 
ainsi  la  restitutio  ad  integrum  n'être  complète  que  du  20"*  au  55*  jour, 
66  fois  sur  103  cas.  Sur  26  cas  observés  par  Fox  à  ce  point  de  vue,  5  cas 
m  se  terminèrent  qu'entre  le  20*  et  le  25*  jour,  1  cas  entre  le  25*  et  le 
30*  jour.  Andral  (cité  par  Fox,  p.  755)   a  vu  cette  prolongation  durer 
qoal^  mois.  Des  faits  analogues  ont  été  publiés  par  Rayer  (Gaz.  rnëdic, 
1846),  par    Raymond,    Aran,  Ilérard,   etc.    Ce   sont  là  des  exemples 
de  résolution  lente  ;  lorsqu'à  la  persistance  des  exsudats  vienf  se  joindre 
«n  processus  inflammatoire  du  côté  des  parois  alvéolaires  qui  les  con- 
tiennent, la  pneumonie  chronique  se  trouve  constituée,  et  à  cette  exten- 
sion nouvelle  du  processus  correspondent  des  phénomènes  pathologiques 
nouveaux  absents,  dans  la  résolution  lente,  laquelle  peut  s'opérer  avec 
tontes  les  apparences  de  la  santé  la  plus  parfaite  (Grisolle). 

Dans  les  cas  moins  heureux,  le  parenchyme  pulmonaire  devient  le  siège 
d'altérations  plus  ou  moins  profondes,  aboutissant  à  la  sclérose  du  pou- 
mon. Celle-ci  peut  se  produire  de  deux  manières  différentes  :  1**  par  un 
processus  à  marche  continue,  progressive,  régulière,  succédant  à  une  pre- 
mière attaque  de  pneumonie  aiguë;  2"*  par  un  processus  à  phases  suc- 
cessives, à  évolution  interrompue,  qui  s'établit  à  la  suite  d'un  certain 
nombre  de  récidives  de  la  pneumonie  aiguë  dans  le  même  point.  Mais, 
que  les  phénomènes  inflammatoires  se  déroulent  d'une  manière  conti- 
nue, ou  qu'ils  se  succèdent,  pour  ainsi  dire,  en  plusieurs  actes,  les  lésions 
qui  en  résultent  sont  identiques  dans  les  deux  formes.  Celles-ci  présen- 
tent, en  réalité,  plus  d'intérêt  au  point  de  vue  clinique  qu'au  point  de 
vue  anatomo-pathologique. 


596  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  anatomie  pathologiqve. 

Anatomie  patholo^que.  —  avant  d'étudier  les  types  variés  d'al- 
térations qu'on  observe  dans  la  pneumonie  lobaire  chronique,  il  importe 
de  bien  distinguer  les  lésions  qui  succèdent  à  la  résolution  lente  de  la 
pneumonie  aiguë.  Elles  sont  également  peu  connues  :  dans  un  cas  où  b 
mort  était  survenue  trente-cinq  jours  après  la  défervescence,  Texamen 
microscopique  montra  les  alvéoles  remplis  de  masses  muqueuses  englo- 
bant des  corps  granuleux,  des  leucocytes,  des  cellules  épitbéliales  et  des 
granulations  graisseuses  libres.  Les  parois  alvéolaires  ne  présentaient 
aucune  modification  de  texture  appréciable  (Charcot).  Dans  un  autre  cas, 
d'une  durée  à  peu  près  égale,  observé  dans  le  service  deDuguet,  l'examen 
microscopique  fait  par  Pitres  révéla  également  la  présence  d'éléments 
granuleux  dans  les  cavités  alvéolaires  dont  les  parois  étaient  saines. 

Tout  porte  à  croire  que  ces  produits  inflammatoires  disparaissent  lors- 
que la  survie  est  assez  longue. 

Lorsque  le  processus  inflammatoire  envahit  la  paroi  alvéolaire  restée 
intacte  jusque-là,  une  nouvelle  série  d'altérations  se  produit,  présentant 
des  caractères  anatomo-pathologiques  variables  suivant  leur  degré  d*an- 
cienneté.  C'est  un  processus  nouveau  qui  commence  et  qui  se  manifeste 
cliniquement  d'une  manière  spéciale. 

Induration  rouge.  —  Lorsque  le  malade  succombe  peu  de  temps 
après  le  passage  de  la  pneumonie  à  l'état  chronique,  l'aspect  du  poumon 
présente  un  ensemble  de  caractères  qui  se  rapprochent  de  ceux  de  Télat 
aigu  et  qui  ont  valu  à  la  lésion  les  noms  dHnduralion  rouge  (Andral, 
Ilope,  Fôrster,  Charcot)  ou  d'hépatisation  indurée  (Lebert).  Le  lobe  qu'elle 
occupe  a  augmenté  de  volume  et  de  poids  :  son  tissu  est  rouge,  compacte, 
homogène,  non  crépitant,  granuleux  sur  la  coupe,  mais  moins  manifes- 
tement qu'à  l'état  aigu.  Le  parenchyme  est  devenu  plus  ferme,  plus  con- 
densé, plus  sec  que  dans  l'hépatisation  rouge  ;  il  est  aussi  plus  anémié 
et  plus  pâle.  Le  cloisonnement  intcrlobulaire  est  peu  marqué  ou  nul. 

De  plus,  il  existe  un  épaississement  de  la  plèvre,  au  niveau  des  parties 
indurées  ;  enfln,  signalons  un  trait  particulier,  sur  lequel  a  insisté  tout 
spécialement  Charcot  :  c'est  Vabsence  dedilalation  des  bronches. 

Les  recherches  histologiques  faites  autrefois  par  Lebert,  Fôrster  et 
lleschls  ont  été  complétées  dans  ces  derniers  temps  par  Charcot.  Dans 
tous  les  cas,  les  parois  alvéolaires  sont  épaissies  et  infiltrées  d'éléments 
jaunes,  ronds  et  fusiformes;  les  fibres  élastiques  restent  intactes.  Dans 
quelques  cas  le  contenu  fibrineux  persiste  encore  pendant  un  temps  asscx 
long  (Gouguenheim  et  Balzer)  :  ordinairement,  les  alvéoles  sont  rétrécis  et 
renferment  des  cellules  épitbéliales  englobées  dans  un  magma  granulo- 
graisseux.  11  existe  souvent  des  corps  granuleux.  Les  cellules  épitbéliales 
qui  persistent  sont  larges,  polygonales  ;  elles  contiennent  souvent  des 
cristaux  de  margarine.  11  n'y  a  pas  d'épithéliums  cubiques  (Charcot). 

Ces  diverses  altérations  se  rencontrent  chez  les  individus  qui  succombeni 
environ  un  mois  ou  six  semaines  après  le  début  de  la  pneumonie  chro- 
nique. Dans  quelques  cas  plus  rares,  l'aspect  macroscopique  de  la  lésion 
revêt  des  caractères  différents  qui   lui  ont  fait  donner  le  nom  d'indu- 


! 

l 


PNKUMONIE.  —  PN.  CHROXIQRE.  —  ANATOMIE  PATHOLOGIQUE.  597 

ration  jautie.  Celle-ci,  à  la  vériU';,  ne  parait  différer  de  rinduration  rouge 
que  par  la  couleur,  et  peut-être  aussi  par  l'abondance  des  exsudats,  qui  eu 
connprimant  les  vaisseaux  anémient  le  parenchyme  induré  et  lui  donnent 
son  aspect  spécial.  L'analyse  histologique  retrouve,  en  effet,  dans  ces 
cas,  les  mêmes  lésions  du  côté  des  alvéoles  que  dans  Tinduration  rouge. 
•  Induration  grise.  —  Lorsque  la  pneumonie  chronique  atteint  une 
durée  qui  dépasse  plusieurs  mois,  les  altérations  du  parenchyme  pulmo- 
naire aboutissent  à  la  sclérose.  Mais  le  processus  présente  d'abord  une 
phase  intermédiaire  dans  laquelle  les  caractères  de  l'induration  rouge 
persistent  encore,  mêlés  à  ceux  de  l'induration  grise.  Au  bout  de  deux  ou 
trois  mois,  le  poumon  présente  encore  des  granulations,  mais  déjà  beau- 
coup plus  petites  :  sa  colorsition  est  brune  avec  des  plaques  ardoisées  ;  les 
travées  interlobulaires  se  dessinent  nettement.  Le  tissu  présente  à  la  coupe 
une  surface  plus  ferme,  plus  sèche  ;  les  bronches  ne  sont  pas  dilatées,  et 
pourtant  déjà  Thyperplasie  du  tissu  conjonctifest  assez  considérable  pour 
produire  la  rétraction  et  une  diminution  de  volume  du  poumon. 

Ces  divers  effets  sont  beaucoup  plus  accentués  lorsque  la  lésion  arrive 
à  la  deuxième  phase  de  l'induration  grise.  Le  tissu  pulmonaire  a  subi 
alors  véritablement  Taltération  que  Cruveilhier  désigne  sous  le  nom  de 
métamorphose  fibreuse.  Il  faut  quatre,  cinq  mois,  une  année  ou  davan- 
tage, pour  que  le  tissu  fibreux  de  nouvelle  formation  envahisse  ainsi  tout 
Tancien  foyer  de  pneumonie.  A  Tautopsie,  le  poumon  présente  une  con- 
«istince  telle  que  le  doigt  ne  peut  le  pénétrer;  son  tissu  crie  sous  le 
scalpel.  Le  plus  souvent  il  ne  crépite  plus,  reste  imperméable  et  va  au 
fond  de  Teau  ;  quelquefois  il  est  légèrement  spongieux.  Sa  surface  est 
lisse,  sans  granulations;  elle  présente  habituellement  une  coloration  ar- 
doisée ou  d'un  gris  cendré.  Mais  elle  peut  aussi  être  sillonnée  de  mar- 
brures violacées,  verdàtres  ou  noires.  Les  travées  de  tissu  conjonctif  sont 
vaguement  dessinées  sur  la  coupe  qui  est  plane,  sèche,  ou  laisse  seulement 
sourdre  un  peu  de  sérosité  sanguinolente.  La  plèvre  est  épaissie  et  forme 
une  véritable  coque  fibreuse.  A  cette  période  ultime,  le  poumon  est  peu 
Tasculaire,  il  est  rétracté,  ratatiné,  globuleux,  réduit  aux  deux  tiers,  à  la 
moitié,  ou  même  au  tiers  de  son  volume.  Mais  notons  toujours  que,  malgré 
ce  développement  considérable  du  tissu  conjonctif,  il  n'y  a  pas  de  dila- 
icUion  bronchique. 

L*étude  histologique  montre  les  alvéoles  envahis  par  le  tissu  fibreux 
à  tel  point  que  leur  nombre  a  considérablement  diminué  ;  on  voit,  dans 
quelques-uns,  des  productions  fibreuses  proéminer  sous  la  forme  de 
polypes  au  milieu  de  leur  cavité. 

Celle-ci  est  quelquefois  remplie  d'épithéliums  polygonaux  ou  renferme 
des  corj)s  granuleux.  On  n'aporçoit  nulle  part  les  traces  d'un  travail 
de  caséification.  Les  alvéoles  renferment  en  outre  des  cristaux  aciculés 
nombreux. 

Il  se  produit  cependant  un  travail  de  dégénération  spéciale;  cardans 
plusieurs  cas  on  a  noté  l'existence  d'excavations,  sculptées  au  sein  du 
parenchyme  pulmonaire.  Charcot  les  désigne  sous  le  nom  d'ulcères  du 


598  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  symptômes. 

poumon  pour  les  distinguer  des  cavités  qui  succèdent  aux  abcès  de  la 
pneumonie  aiguë,  ou  des  cavernes  tuberculeuses.  Ces  excavations  sont 
tapissées  d'un  revêtement  membraneux  :  elles  présentent  les  mêmes 
caractères  que  celles  qu'on  observe  dans  la  pneumonie  anthracosique. 

Symptômes.  —  Comme  nous  l'avons  déjà  vu,  l'évolution  clinique 
de  la  maladie  présente  deux  grandes  variétés,  suivant  son  mode  de  début 
et  sa  marche.  Dans  une  première  série  de  cas  se  rangent  les  pneornooies 
chroniques  qui  succèdent  à  courte  échéance  à  la  pneumonie  lobaire  aiguë. 

Les  accidents  nouveaux  s'annoncent  souvent  de  la  manière  suivante  :  la 
pneumonie  a  évolué  régulièrement,  la  défervcscence  et  l'amendement  des 
symptômes  se  sont  produits  à  l'époque  ordinaire,  et  ont  été  suivis  du 
retour  de  l'appétit  et  d'une  amélioration  dans  le  fonctionnement  des  divers 
appareils.  Mais  les  changements  dans  Tétat  local  ne  correspondent  pas  à 
cette  disparition  des  phénomènes  généraux.  La  percussion  constate  une 
matité  d'une  certaine  étendue,  et  à  l'auscultation  on  rencontre  la  respiration 
bronchique,  la  bronchophonie  avec  des  râles  sous-crépitants  et  muqueux 
(Grisolle).  Jusqu'ici  rien  de  spécial  :  ces  symptômes  s'observent  égale- 
ment dans  la  résolution  lente.  Mais  au  bout  d'un  temps  plus  ou  moins 
long  la  fièvre  reparaît,  et  le  plus  souvent  revêt  d'emblée  le  caractère 
hectique,  avec  redoublements  vespéraux,  suivis  de  sueurs.  Souvent  alors 
l'ensemble  des  phénomènes  pathologiques  pourrait  faire  croire  à  l'évolu- 
tion d'une  phthisie  galopante  (Charcot,  obs.  de  Monneret).  Outre  la  toux, 
la  dyspnée  et  la  fièvre  hectique  avec  sueurs,  on  constate,  eu  efTel,  on 
dépérissement  général,  une  cachexie  rapide,  accompagnée  dans  quelques 
cas  d'œdème  des  membres  inférieurs,  de  diarrhée.  Dans  d'autres  cas,  on 
voit  reparaître,  surtout  chez  les  vieillards,  les  symptômes  d*adynamie, 
l'état  typhoïde,  qui  sont  inséparables  chez  eux  de  révolution  de  la  pneu- 
monie. La  terminaison  fatale  peut  même  être  précédée  de  la  formation 
d'cschares. 

Les  symptômes  locaux  ne  sont  pas  tranchés  comme  dans  la  pneumonie 
lobaire  aiguë.  Le  point  de  côté,  la  dyspnée,  la  toux,  peuvent  manquer  ou 
être  très-peu  prononcés,  surtout  si  la  maladie  ne  revêt  pas  les  allures  de 
la  phthisie  galopante.  Les  crachats  sont  muqueux  ou  muco-punileoU, 
comme  dans  la  bronchite.  L'exploration  physique  donne  des  signes  variable^ 
suivant  l'ancienneté  de  la  maladie,  mais  qui  n'ont  rien  de  pathognomo- 
nique.  Dans  les  premières  périodes,  ce  sont  purement  et  simplement  ceux 
de  l'induration  pulmonaire  ;  vibrations  thoraci(|ue8  exagérées,  matité  abso- 
lue à  la  percussion,  râles  muqueux,  souffle  bronchique  et  bronchophonie. 
Quelquefois,  lorsque  l'induration  est  extrême,  le  souffle  devient  caverneux, 
et  les  râles  peuvent  prendre  un  timbre  métallique.  Enfin,  dans  quelques 
cas,  Tauscultation  a  pu  ne  donner  que  des  signes  négatifs,  absence  de 
souffle  et  de  râles,  tenant  sans  doute  à  Tobturation  momentanée  des 
bronches  par  les  produits  de  sécrétion  (Grisolle,  Charcot)  plus  ou  wo\m 
concrets. 

Lorsque  la  maladie  a  été  de  longue  durée,  ou  dans  certains  cas  à  fornie 
ulcéreuse,  des  symptômes  cavitaires  peuvent  être  constatés  :  oulre  le 


PNEUMONIE.  —  PN.  CURONIQOE.  —  SYMPTÔMES.  599 

souffle  et  les  râles  caverneux,  on  trouve  à  la  percussion  un  son  tympa- 
nique,  et  dans  quelques  cas  un  bruit  de  pot  fêlé.  Ces  phénomènes  n'exis- 
tent que  dans  les  cas  où  l'excavation  est  superGcielle  et  assez  considérable. 
Coninie  on  le  voit,  les  symptômes  de  la  pneumonie  chronique  peuvent 
être  résumés  de  la  façon  suivante  :  symptômes  généraux,  hecticité,  con- 
somption, état  typhoïde;  symptômes  physiques,  ceux  de  Tinduration  pul- 
monaire, dans  quelques  cas,  avec  phénomènes  cavitaires. 

Mais  il  existe  une  autre  catégorie  de  cas  qui  ne  présentent  pas  la  même 
marche  continue  et  régulière.  Au  lieu  de  succéder  à  courte  échéance  à  la 
pneumonie  aiguë  et  d^évoluer  ensuite  sans  interruption  marquée,  l'indu- 
ration pneumoniqne  ne  s'établit  qu'après  le  retour  d'un  certain  nombre 
d'attaques  de  pneumonie  aiguë  se  répétant  sur  le  même  poumon  et  dans 
le  même  point.  Le  nombre  de  ces  récurrences  tluxionnaires  peuC  être  plus 
ou  moins  considérable,  et  il  ne  faut  pas  oublier  que  la  pneumonie  chro- 
nique n'en  est  pas  toujours  fatalement  la  conséquence.  Dans  la  pneumonie 
chronique  récurrente,  la  reslitutio  ad  integrum  n'est  pas  complète  après 
chaque  récidive  :  un  certain  degré  d'induration  persiste  dans  l'intervalle 
des  accès  qui  se  reproduisent  jusqu'à  ce  que  Tinduralion  et  la  sclérose  du 
poumon  soient  telles  que  l'exsudation  intra-alvéolaire  devienne  impos- 
sible. Quelquefois  alors,  la  maladie  se  termine  par  une  dernière  poussée 
de  pneumonie  aiguë  qui  atteint  l'autre  poumon.  Deux  cas  de  pneumonie 
lobaire  récurrente  ont  été  observés  à  la  Salpêtrière  par  Charcot  :  le  pre- 
mier,  chez  une  femme  morte  à  l'âge  de  soixante-seize  ans,  qui  eut  sa 
première  pneumonie  à  gauche  en  1861,  et  qui  mourut  en  1867,  après 
avoir  eu  sept  attaques  du  même  côté.  Elle  succom))a  à  la  huitième,  qui 
eut  lieu  du  côté  droit.  Ces  diverses  récidives  furent  régulières  et  s'accompa- 
gnèrent des  signes  stéthoscopiques  et  des  crachats  rouilles  caractéris- 
tiques. Les  dernières  attaques  diminuaient  graduellement  d'intensité;  la 
résolution  était  toujours  très-lente,  une  respiration  rude  avec  râles  sous- 
crépitants  persistait  du  côté  affecté,  en  même  temps  qu'un  peu  de  toux  et 
d'oppression. 

Toici  l'histoire  résumée  de  la  seconde  malade,  qui  succomba  à  Tàge 
de  quatre-vingt-un  ans  : 

Poumon  droit.  Sommet. 

18S3.  Novembre.  —  Première  attaque  connue  ;  courbe  régulière  avec  défer?c8cence,  sortie 
trois  nooM  après,  conservant  au  sommet  du  souffle  et  des  râles  sous-crcpitants. 

1864.  Novembre.  —  Deuxième  attaque,  môme  siège;  courbe  régulière  avec  défervescence, 
•ortie  un  mois  après,  ayant  toujours  du  soufllc. 

4865.  —  Ti'oisième  attaque  au  sommet  gauchj.  — Décembre.  Sortie  un  mois  après,  ayiml 
eneore  du  souffle.  On  ignore  si  elle  avait  déjà  une  pneumonie  de  ce  côté. 

1866.  —  Quatrième  attaque  avec  complication  de  pleurésie  enkystée  à  droite  qui  cause  h 
mort. —  Autopsie.  —  Induration  ardoisée  du  sommet  droit.  —  Pleurésie  enkystée  du  niôme 
Mé  iu  niveau  du  lobe  inférieur.  —  Induration  fibreuse  du  sommet  du  poumon  gauche. 

Lorsque,  dans  les  cas  de  cette  nature,  l'induration  pulmonaire  se  trouve 
établie,  elle  présente  des  signes  semblables  à  ceux  que  nous  avons  déjà 
signalés.  L'évolution  et  la  marche  ne  diffèrent  que  dans  la  phase  en 
quelque  sorte  préparatoire  de  la  pneumonie  chronique. 


600  PNEUMONIE.  —  pn.  chromque.  —  symptômes. 

Parmi  les  symptômes  rares  qu'elle  peut  présenter,  il  faut  citer  le  rétré- 
cissement thoracique  sur  lequel  ont  insisté  Stokes,  Wunderlich,  etc.,  et  qui 
est  naturellement  expliqué  par  la  sclérose  atrophique  du  poumoo.  Mais 
ce  signe  très-rationnel  ne  parait  pas  avoir  été  observé  d'une  façon  aussi 
accusée  que  dans  les  autres  formes  de  pneumonie  chronique. 

L'expectoration,  dans  quelques  cas,  redevient  jaunâtre,  rouillée,  lors- 
qu'il se  produit  une  extension  nouvelle  du  travail  phlegmasique  aux  parties 
jusque-là  restées  saines.  Des  hémoptysies  se  sont  montrées  dans  plusieurs 
cas. 

La  durée  de  la  maladie  est  très-variable  :  indéterminée  dans  la  forme 
récurrente,  où  elle  est  subordonnée  au  nombre  et  à  Tiritensité  des  poi^ 
sées  aiguës,  elle  est  plus  courte  lorsque  Tinduraiion  succède  à  courte 
échéance  à  la  pneumonie  aiguë.  Elle  peut  durer,  dans  ces  cas,  de  deux  a 
cinq  mois;  quelquefois  cependant  la  maladie  se  prolonge  pendant  plus 
d'une  année.  L'évolution  clinique  de  la  maladie  présente  trois  phases 
dans  la  forme  commune  :  1°  une  phase  intermédiaire  succédant  à  b 
pneumonie  aiguë,  dans  laquelle,  la  fièvre  étant  tombée,  le  malade  semble 
devoir  guérir  complètement,  quelques  signes  locaux  seuls  persistent; 
T  une  phase  d'activité  pendant  laquelle  le  processus  inflammatoire,  un 
moment  interrompu,  reprend  sa  marche  :  la  fièvre  reparait,  des  râles  mu- 
queux  se  font  entendre  dans  la  poitrine,  des  signes  d'excavation  pulmo- 
naire peuvent  être  perçus;  3°  ces  phénomènes  s'accentuent  dans  h  phase 
terminale  caractérisée  par  la  cachexie  et  Tépuisement  des  forces,  et  dans 
laquelle  la  diarrhée,  les  sueurs  profuses,  se  déclarent  :  le  malade  suceombe 
en  général  dans  le  dernier  degré  du  marasme.  Quelques  cas  de  guérison 
ont  été  signalés  par  les  auteurs,  mais  on  peut  supposer  qu'ils  ont  eu 
affaire  à  des  résolutions  lentes  plutôt  qu'à  des  pneumonies  chroniques 
bien  avérées. 

La  terminaison  fatale  peut  être  parfois  précipitée  par  le  développement 
de  certaines  complications  y  notamment  les  abcès  ou  la  gangrène  pulmo- 
naire. 

La  formation  d'abcès  est  annoncée  par  l'expectoration  soudaine  d*une 
quantité  plus  ou  moins  considérable  de  pus.  Les  phénomènes  généraui 
qui  précèdent  la  collection  purulente  sont  peu  connus  :  on  a  remarqué 
cependant  que  dans  quelques  cas  la  majadie  avait  évolué  avec  une  tempé- 
rature peu  élevée  (Traube,  Charcot).  Le  pus  est  couleur  lie  de  vin  ou  fran- 
chement phlegmoneux  :  il  peut  renfermer  des  débris  villcux,  dans  lesquels 
le  microscope  démontre  Texislence  de  fibres  élastiques.  Quelquefois  aussi 
les  crachats  offrent  une  couleur  vert  d'herbe  rappelant  les  crachats  colorés 
par  la  bile  (Traube),  dont  4'aspect  serait  dû  à  une  matière  colorante  iiarti- 
cnlière  de  provenance  hémalique.  Du  reste,  ces  crachats  n'appartiennent 
pas  exclusivement  aux  abcès  pulmonaires  :  Charcot  les  a  retrouvés  éga- 
lement dans  deux  cas  de  pneumonie  caséeuse  aiguë. 

La  gangrène  est  une  complication  beaucoup  plus  rare  encore,  cl  lc> 
quelques  observations  qu'on  possède  n'établissent  pas  nettement  si  elle 
est  primitive  ou  consécutive  à  la  pneumonie.  C'est  encore  l'expectoralion 


PNEUMONIE.  —  PN.  CHROiMQUE.  —  ÉTI0L0G1E.  DIAGNOSTIC.  601 

qui  en  décèle  le  développement,  par  la  couleur  et  l'odeur  caractéristiques; 
il  peut  y  avoir  des  hémoptysies.  Enfin,  on  observe  en  même  temps  les 
symptômes  graves,  consécutifs  à  Tinfection  putride  par  résorption  des 
débris  sphacélés. 

Étiolofl^e.  —  L'influence  pathogénique  la  plus  importante  est,  sans 
contredit,  la  faiblesse  des  sujets,  quelle  qu'en  soit  d'ailleurs  la  cause.  Très- 
rare  dans  l'enfance,  c'est  dans  l'âge  moyen  de  la  vie  et  dans  la  vieillesse 
qu'on  observe  habituellement  la  pneumonie  chronique.  Les  maladies  qui 
amènent  un  dépérissement  profond  ou  la  cachexie  ont  une  certaine 
influence  sur  son  développement  :  telles  sont  l'intoxication  palustre 
(HeschI,  à  Cracovie),  l'albuminurie  (Bright).  Une  cause  plus  importante 
est  l'alcoolisme,  déjà  signalé  par  Magnus  Uuss. 

Les  maladies  organiques  du  cœur  ont  été  également  incriminées,  mais 
sans  preuves  suffisantes. 

U  en  est  de  même  pour  la  syphilis;  les  lésions  scléreuses  qui  ont  été 
notées  dans  le  poumon  par  les  auteurs  ne  peuvent  être  rapportées  avec 
certitude  à  la  pneumonie  lobaire  chronique. 

Enfin,  comme  nous  l'avons  vu,  il  faut  tenir  grand  compte  du  nombre 
des  pneumonies  antérieures.  Lorsque  la  pneumonie  lobaire  se  résout  len- 
tement, elle  laisse  après  elle  une  lésion  permanente  des  parois  alvéo- 
laires. U  s'établit  ainsi  une  prédisposition  aux  récurrences  ou  tout  au 
moins  une  cause  d'appel  propre  à  déterminer  leur  siège.  Des  phéno- 
mènes analogues  se  passent  dans  le  cas  de  néo-membranes  pleurales,  ren- 
fermant des  vaisseaux  à  parois  embryonnaires,  et  qui  deviennent  facile- 
ment le  siège  de  phlegmasies  à  répétition,  pouvant  se  traduire  chaque  fois 
parla  formation  d'un  nouvel  exsudât  séro-flbrineux  (Paget,  Charcot). 

De  plus,  les  cliniciens  ont  depuis  longtemps  remarqué  que  quelques 
personnes  sont  sujettes  à  des  attaques  répétées  de  pneumonie  aiguë 
(W.  Fox),  comme  s'il  existait  chez  elles  une  véritable  disposition  consti- 
Intionnelle.  Le  même  poumon,  les  mêmes  parties  de  ce  poumon,  sont  le 
siège  de  ces  récurrences  fluxionnaires.  Sur  35  cas  de  pneumonie,  Grisolle 
a  TU  25  fois  la  maladie  se  reproduire  sur  le  poumon  d'abord  affecté. 
Andral  a  vu  un  malade  avoir  15  attaques  de  pneumonie  dans  l'espace  de 
il  ans;  Chomel  a  cité  10  récidives,  Franck,  11,  Ruih,  28.  Un  entant 
observé  pai*  Ziemssen  a  éprouvé  en  5  ans  4  attaques  de  pneumonie  ayant 
pomr  siège  le  lobe  inférieur  gauche,  et  une  cinquième  occupant  le  lobe 
iopérieur  droit.  Les  intervalles  des  récurrences  peuvent  être  plus  ou  moins 
longs  :  suivant  W.  Fox,  leur  durée  moyenne  serait  de  3  à  5  ans.  Les  atta- 
ques se  succèdent  plus  rapidement  à  mesure  qu'elles  deviennent  plus 
ncmibreuses.  Suivant  Charcot,  leur  fréciuence  paraîtrait  encore  plus 
grande,  si  les  malades  n'étaient  pas  perdus  de  vue  :  l'observation  en  ville 
et  dans  les  hospices  est  plus  instructive,  à  cet  égard,  que  celle  des  hôpi- 
taux. 

Hiaf^ostic.  —  Le  diagnostic  repose  principalement  sur  l'étude  des 
eommémoratifs.  En  effet,  les  symptômes  physiques  n'oiîrent  rien  de  par- 
ticulier; la  matité,  la  résonnance  thoracique,  le  souffle  tubaire  ou  caver- 


602  PNEUMONIE.  —  pn.  chromqdk.  —  diagrostic. 

neux,  appartiennent  à  toutes  es  indurations  pulmonaires.  De  roéme,  le» 
symptômes  généraux  :  amaigrissement,  fièvre  hectique,  sueurs,  diar- 
rhée, etc.,  se  retrouvent  dans  toutes  les  afTections  pulmonaires  qui  con- 
duisent à  la  cachexie. 

C'est  surtout  avec  la  phthisie  que  la  confusion  est  facile  :  cependant 
la  pneumonie  siège  plutôt  dans  les  lobes  inférieurs;  elle  est  localisée 
dans  un  seul  côté,  et  dans  un  point  limité.  La  tuberculose,  bien  qu'il  ne 
soit  pas  rare  de  la  voir  prédominer  aux  bases  ou  d*un  seul  côté,  s'ob- 
serve plus  régulièrement  aux  sommets,  et  se  dissémine  dans  les  deai 
poumons.  Les  symptômes  généraux  et  révolution  de  la  maladie  ne  peu- 
vent servir  à  guider  le  clinicien  :  la  phthisie  lente  comme  la  phthine 
rapide  peuvent  être  simulées  par  la  pneumonie  chronique  ulcéreuse.  Le 
diagnostic  devient  impossible,  lorsque  celle-ci  siège  au  sommet. 

Le  carcinome  primitif  et  unilatéral  du  poumon ,  surtout  quand  b 
cachexie  n'est  pas  très-marquée  et  quand  Tinfection  ganglionnaire  fait 
défaut,  ne  peut  guère  être  distingué  de  la  pneumonie  chronique.  Cael- 
ques  signes  ont  une  certaine  valeur  :  Tintensité  de  la  douleur  et  de  b 
dyspnée,  de  la  toux,  les  crachats  sanguinolents,  les  symptômes  de  com- 
pression, témoignent  quelquefois  de  Texistence  du  carcinome.  Mais  ce> 
symptômes  peuvent  manquer  également,  et  Ton  ne  peut  plus  guère  se 
baser  que  sur  les  antécédents  et  sur  la  fréquence  relative  des  deux  aflec- 
tions.  Dans  quelques  cas,  le  ramollissement  et  la  formation  de  cavemes 
dans  la  tumeur  viennent  encore  rendre  le  diagnostic  plus  obscur.  Ajou- 
tons que,  d'après  quelques  auteurs,  le  carcinome  primitif  s'obserrenit 
surtout  dans  Tage  moyen,  à  partir  de  25  ans  (Carswell). 

C'est  surtout  à  Taide  des  commémoratifs  que  la  pneumonie  lobaire 
chronique  pourra  être  distinguée  des  autres  indurations  chroniques 
d'origine  inflammatoire.  Cependant  celles-ci  présentent  une  physionomie 
et  une  marche  spéciale,  et  Ton  pourra,  dans  certains  cas,  arriver  pr 
exclusion  au  diagnostic,  lorsque  celui-ci  n'a  plus  à  compter  qu'entre  le* 
diverses  variétés  de  pneumonie  chronique.  Bornons-nous  à  dire  que  la 
pneumonie  diffère  de  la  broncho-pneumonie  chronique  par  son  origine, 
elle  reconnaît  toujours  pour  cau^e  une  pneumonie  lobaire,  tandis  que  la 
broncho-pneumonie  chronique  a  succ«?dé  à  une  broncho-pneumonie  aiguë 
ou  subaiguë  provoquée  par  diverses  maladies  générales  (rougeole,  coque- 
luche, fièvre  typhoïde,  etc.).  Au  point  de  vue  symptomatique,  si  elle  s'en 
rap|)roche  par  les  symptômes  généraux,  elle  s'en  éloigne  parles  signes 
locaux  :  la  dilatation  bronchique,  qui  est  presque  la  règle  dans  la  bron- 
cho-pneumonie chronique,  fait  constamment  défaut  dans  la  pneumonie 
lobaire  chronique.  Il  est  vrai  que  celle-ci  s'accompagne  parfois  d'abcès, 
d'excavations  ulcéreuses  dont  les  signes  ressemblent  beaucoup  à  ceux  de 
la  dilatation  des  bronches.  C'est,  en  somme,  comme  nous  l'avons  dit, 
l'examen  des  commémoratifs  qui  peut  fixer  le  diagnostic,  car  l'induralion 
broucho-pneumonique  prédomine  habituellement  d'un  seul  côté,  commf 
la  pneumonie  lobaire,  et,  d'autre  part,  celle-ci  s'accompagne  .souvent  (te 
signes  d'une  bronchite  généralisée.  Nous  verrons  cependant  que  la  brou-    L 


PNEUMONIE.  PN.  CHRONIQUE.  —  DIAGNOSTIC.  PRONOSTIC.  605 

cho-pneumonie  chronique  s'accompagne,  mais  seulement  vers  la  fin, 
d'une  atrophie  du  poumon,  d'une  déformation  de  la  poitrine  et  d'un 
déplacement  des  organes  thoraciques  et  abdominaux,  qui  n'ont  pas  été 
signalés  au  même  degré  dans  la  pneumonie  lobaire  chronique. 

Le  diagnostic  peut  présenter  les  mêmes  difficultés,  lorsqu'il  s'agit  de 

dilatations  des  bronches  survenues  à  la  suile  de  bronchites  répétées. 

Dans  la  majorité  des  cas,  Tétat  satisfaisant  des  forces  et  de  l'embonpoint, 

l'expectoration  spéciale  (vomîque  bronchique),   les   commémora  tifs,  ne 

laissent  pas  place  au  doute.  Mais,  quand  la  fièvre  hectique  se  déclare, 

^piand  il  existe  une  induration  pulmonaire  étendue  autour  des  bronches 

dilatées,  une  eneur  peut  être  commise,  en  l'absence  des  commémora- 

t     tifs,  surtout  si  en  même  temps  les  symptômes  physiques  de  l'induration 

.     pulmonaire  et  de  la  dilatation  bronchique  prédominent  d'un  seul  côté. 

t         Nous  n'insisterons  pas  sur  les  difficultés  que  peut  présenter  le  dia- 

I  .  gnostic  différentiel  de  la  pneumonie  clironique  et  de  la  pleurésie  chro- 

I  .Atgue  partielle.  Lamatité,  l'absence  du  bruit  respiratoire,  se  rencontrent 

I     dans  les  deux  cas,  mais  dans  la  pneumonie  chronique  les  vibrations  tho- 

I    raciques  sont  conservées  ou  exagérées,  et  il  y  a  habituellement  du  souflle 

•     et  de  la  bronchophonie.  Dans  les  cas  d'abcès,  la  nature  et  la  quantité  de 

r  .  l'expectoration  serviront  à  établir  une  distinction  entre  la  vomique  pieu- 

4    raie  et  la  vomique  pulmonaire. 

I  De  plus,  comme  le  fait  remarquer  Charcot,  les  symptômes  généraux 
K  <Mit,  dans  la  pneumonie  chronique,  une  importance  et  un  caractère  de 
^  .granité  tout  autres  que  dans  la  pleurésie  partielle. 

Mais,  si  le  diagnostic  peut  être  fait  dans  la  pleurésie  chronique  simple, 
B  il  rencontre  des  difficultés  presque  insurmontables,  lorsque  celle-ci  se 
1^  .  complique  d'inflammation  chronique  du  parenchyme  pulmonaire  (pneu- 
■  monie  chronique  pleurogène).  La  pneumonie  lobaire  pouvant,  de  son 
m  téléf  se  compliquer  d'épaississement  de  la  plèvre,  le  diagnostic  devient 
^   UDp<t8sible  en  l'absence  des  commémoratifs. 

■I  Les  renseignements  sur  les  antécédents  du  malade,  sur  sa  profession, 
it  anffisent  pour  faire  éliminer  les  indurations  chroniques  qui  se  dévelop- 
0  pent  à  la  suite  de  l'introduction  de  poussières  de  natures  diverses  dans  le 
■I  pomnon. 

Piponostic.  —  Toujours  très-grave,  d'autant  plus  que  la  pneumonie 
chronique  n'évolue  que  chez  les  individus  faibles  ou  épuisés  par  des  ma- 
ladies antérieures.  Le  pronostic  varie  donc  suivant  le  degré  de  conserva- 
tiim  des  forces  et  suivant  la  forme  de  la  maladie.  Le  type  à  marche  continue 
S'péaente  évidemment  la  plus  grande  gravité,  tandis  que  la  pneumonie 
récurrente  ne  tue  qu'au  bout  d'un  certain  nombre  d'années.  Le  pronostic 
l'assombrit  encore  dans  le  cas  où  la  fièvre  hectique  se  déclare  de  bonne 
bore,  et  que  la  cachexie  s'établit,  et  de  même  lorsqu'on  voit  apparaître 
Jm   signes  d'ulcération,  de  suppuration  ou  de  gangrène  du  poumon. 
D'après  la  plupart  des  auteurs,  la  pneumonie  chronique  se  termine  régu- 
p.    iiérement  par  la  mort,  et  les  guérisons  citées  doivent  être  considérées 
comme  des  cas  de  résolution  lente. 


604  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  tràitexb5T. 

Traitement.  — Il  ne  peut  être  question  d'un  traitementcunitif  pour 
la  pneumonie  chronique.  Les  révulsifs  sont  impuissants  contre  la  sclérose. 
Ils  sont,  au  contraire,  tout  à  fait  indiqués  dans  la  phase  intermédiaire, 
qui  suit  la  pneumonie  aiguë,  et  l'on  doit  s'efforcer  de  hâter  la  résolutioa 
quand  il  s'agit  d'un  sujet  affaibli.  Les  larges  vésicatoires  doivent  alors  être 
appliqués  sur  le  côté  affecté.  On  pourrait  aussi  donner  le  tartre  stibié, 
mais  avec  ménagement ,  et  tout  en  insistant  sur  une  médicatioa  tonique 
et  reconstituante. 

La  prophylaxie  aura  également  un  rôle  important  à  jouer  chei  les  indi- 
vidus qui  ont  éprouvé  déjà  plusieurs  attaques  de  pneumonie.  Des  précau- 
tions hygiéniques  pourront  alors  avoir  les  meilleurs  effets,  en  prëfenant 
Tapparition  de  nouveaux  accidents. 

Mais,  lorsque  l'état  chronique  est  constitué,  il  ne  reste  plus  à  remplir 
que  des  indications  symptomatiques,  et  il  faut  avant  tout  se  préoccuper 
de  soutenir  les  forces  du  malade  et  de  combattre  la  cachexie.  Les  révul- 
sifs sont  cependant  encore  indiqués  à  cette  période  ;  lorsque  des  pous- 
sées congestives  se  déclarent,  l'usage  des  cautères,  du  séton,  pourri  être 
de  quelque  utilité.  On  pourra  aussi  essayer  contre  la  fièvre  l'emploi  du 
sulfate  de  quinine. 

Un  traitement  spécifique  sera  tenté,  lorsque  la  syphilis  aura  paru  in- 
fluencer la  maladie. 

EnOn  des  moyens  appropriés  seront  employés  pour  combattre  lescom- 
plicalions  qui  peuvent  survenir,  notamment  les  abcès  et  la  gangrène. 

B.  Bboncuo-pneumome  subaiguê  et  chronique.  —  Maladie  toujours  se- 
condaire, retentissant  dès  son  début  sur  le  tissu  conjonctif  du  poumon, 
la  broncho-pneumonie  présente  pour  ces  deux  raisons  une  tendance 
marquée  à  la  chronicité.  Aussi,  comme  nous  l'avons  vu,  il  n'est  pas  rare 
de  trouver  à  l'autopsie  d'enfants  qui  sont  morts  au  bout  de  quinze  à  vingt 
jours  de  maladie  des  lésions  profondes,  interstitielles,  qui  résultent  de 
l'organisation  des  exsudats.  Ces  lésions  se  rencontrent  même  dans  les  cas 
aigus  d'une  certaine  durée:  aussi  est-il  dirficile  d'établir  un  classeraenl 
rigoureux  et  précis  des  broncho-pneumonies,  dédire,  par  exemple  où  liait 
la  broncho-pneumonie  aiguë  et  où  commence  la  broncho-pneumonie 
subaiguë.  A  cet  égard,  cependant,  la  distinction  est  plus  facile  en  analo- 
mie  pathologique  qu'en  clinique;  le  travail  exsudatif  correspond  évidem- 
ment aux  formes  aiguës,  le  travail  d^or^^^anisation  aux  formes  subaigués 
et  chroniques.  Celles-ci  constituent  une  des  formes  de  la  cirrhose  du  jwu- 
mon,  dont  la  phase  embryonnaire  représente  la  forme  subaiguê  de  la  bron- 
cho-pneumonie, et  dont  la  phase  atrophique  correspond  à  la  broncho- 
pneumonie  décidément  chronique. 

Ces  deux  dernières  formes  seules  seront  décrites  dans  ce  chapitre,  mai< 
pour  la  broncho-pneumonie  subaiguê  nous  ferons  dès  à  présent  remar- 
quer que  nous  insisterons  spécialement  sur  la  forme  pulmonaire,  dans  i^ 
quelle  domine  la  lésion  désignée  sous  le  nom  de  camisation.  Rienqoe 
des  lésions  analogues  puissent  être  rencontrées  dans  la  forme  bronchique 
de  la  broncho-pneumonie  subaiguë,  c'est  la  suppuration  et  la  dilatation 


a 


PNEUMONIE.  —  P.N.  CHRONIQUE.  —   HISTORIQUE.  605 

Tacuolaire  des  bronches  qui  tiennent  la  plus  grande  place  dans  son  évo- 
lution, et  nous  avons  eu  occasion  d'insister  sur  ces  lésions  à  propos  des 
terminaisons  de  la  broncho-pneumonie  aiguë. 

Historique.  —  L'existence  des  formes  lentes  de  la  broncho-pneumonie 
a  été  reconnue  de  bonne  heure  :  Léger  décrit  dans  sa  thèse  sur  la  pneu- 
monie des  enfants  une  forme  latente  chronique  dont  il  ne  donne  pas  nette- 
ment les  caractères anatomiques  (1823).  Berton  rapporte  dans  son  traité 
mie  intéressante  observation  de  broncho-pneumonie  datant  de  deux  ans, 
recueillie  dans  le  service  de  Guersant,  lequel  avait  parfaitement  reconnu 
la  filiation  des  accidents  survenus  à  la  suite  de  la  rougeole.  Cependant  la 
première  bonne  description  appartient  à  Legendre  et  Bailly  (1844),  qui 
donnèrent  aux  lésions  pulmonaires  le  nom  de  camisation.  De  nouveaux 
bais  furent  publiés  bientôt  après  pai  Rilliet  et  Barthez.  Les  auteurs  anglais 
ont  publié  aussi  sur  ce  sujet  des  travaux  importants. 

En  1838,  Corrigan  a  nettement  indiqué  les  traits  principaux  de  la  car- 
nisation  avancée  dans  son  célèbre  travail  sur  la  cirrhose  du  poumon.  Sutton 
(1865),Wilson  Fox  et  Cliarlton  Bastian  (1871),  ont  rassemblé  dans  leurs 
mémoires  des  observations  nombreuses,  mais  disparates,  concernant 
tantôt  la  pneumonie  lobairc,  tantôt  la  pneumonie  lobulaire  chronique, 
souvent  la  tuberculose  pulmonaire.  Ces  deux  derniers  auteurs  croient,  en 
outre,  que  l'altération  des  alvéoles  qui  aboutit  à  la  cirrhose  est  indépen- 
dante de  l'inflammation.  Bastian  donne  au  processus  le  nom  de  substi- 
tution fibroïde. 

Parmi  les  travaux  allemands  les  plus  importants,    nous  citerons  ceux 
de  Ziemssen,  Bartels,  Jùrgensen,  dont   les  observations  ont   démontré 
l'existence  d'une  broncho-pneumonie  subaiguë,  qui  dès  son  origine  tend 
àla  chronicité,  ceux  de  Traube,  de  Biermer  et  de  Trojanowsky,  dont  le  nom 
f  a  été  déjà  signalé  à  propos  de  la  dilatation  des  bronches. 

Tous  ces  divers  travaux  renferment  des  observations  et  des  recherches 
intéressantes,  mais  n'établissent  pas  de  démarcation  bien  nette  entre  les 
diverses  variétés  de  cirrhose  pulmonaire.  Dans  ses  leçons  de  1877,  ré- 
5    «umces  dans  notre  thèse   inaugurale  et  dans  la  Revue  mensuelle,  Char- 
j,    .«ot  a  dégagé  d'une  manière  précise  cette  variété  de  pneumonie  chronique, 
dont  un  des  principaux  caractères  est  la  dilatation  des  bronches.  L'examen 
nûcroscopique   a   montré  l'êpaississement  des  travées    conjonctives,    la 
sclérose  des  parois  alvéolaires,    la  prédominance  des  lésions  dans  le  voi- 
sinage   de  la  bronche.    Charcot  a  pu  montrer  ainsi  les  relations    qui 
~i    existent  entre  les  broncho-pneumonies  aiguë,  subaiguè  et  chronique;  des 
'"    lésions  pulmonaires  datant  de  plusieurs  années  ont  pu  de  cette  façon 
être  rapportées  à  une  broncho-pneumonie  survenue  dans  le  jeune  âge. 
•    Cette  interprétation  s'applique  à  un  certain  nombre  d'observations  publiées 
*~    dans  divers  ouvrages  sous  le  nom  de  dilatation  des  bronches  (Laennec, 
-      Cayol,  Barth,  Fauvel,  Bucquoy,  etc.).  On  trouve  encore  dans  les  Bulletins 
^     de  la  Société  anatomique  deux  observations  intéressantes,  Tune  de  Rendu 
(1872),  l'autre  de  Nélaton  (1878),  concernant  une  broncho-pneumonie 
subaiguë  chez  l'adulte  et  dont  nous  avons  fait  l'examen  microscopique. 


606  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  akatomib  pathologique. 

Anatomie  pathologique. — Dans  hbroncho-pneumonie  svbaiguëj 
les  lésions  se  localisent  dans  les  points  où  siège  la  splénisation»  c'est-i-dire 
à  la  partie  postérieure  des  lobes  supérieurs  et  inférieurs.  On  retrouve  la 
même  symétrie,  mais  la  lésion  a  une  tendance  remarquable  à  se  fixer  sur 
un  seul  lobe,  sous  la  forme  pscudo-lobaire.  Une  coloration  rose  ou  TÎoIacée 
remplace  la  couleur  acajou  ou  bleu  violet  de  Tétat  aigu.  La  consistaoee  au 
toucher  et  à  la  coupe  justifie  jusqu'à  un  certain  point  le  nom  de  carni- 
sation  de  Legendre  et  Bailly,  et  la  comparaison  avec  la  chair  musculaire. 
Le  tissu  est  dense,  lisse  sur  la  coupe,  sec,  sans  granulaiions^  et  il 
sV'coule  à  peine  un  peu  de  sérosité  grisâtre.  Cet  aspect  uniforme  et  homo- 
gène contraste  avec  l'aspect  marbré  de  la  broncho-pneumonie  aiguë.  L» 
bronches  sont  plus  ou  moins  dilatées,  surtout  dans  les  lobes  inférieurs. 
Quelquefois  on  observe  un  aspect  aréolaire  qu'on  a  comparé  à  la  coupe 
d'un  fromage  de  Gruyère.  La  dilatation  est  fusiforme  ou  saccîforme,  les 
cavités  contiennent  un  muco-pus  plus  ou  moins  liquide  ou  caséeux.  La 
structure  lobulaire  du  poumon  est  très-accentuée,  grâce  à  répaississement 
du  tissu  conjontif.  Cet  épaississement  est  surtout  marqué  autour  des 
bronches  et  des  artères.  Par  suite  de  ce  développement  du  tissu  conjonctif, 
le  cloisonnement  interlobulaire,  surtout  chez  l'enfant»  se  trouve  aussi 
marqué  dans  la  broncho-pneumonie  que  dans  les  pneumonies  pleurogènes 
ou  dans  la  phthisic  fibroïde,  que  Charcot  considère  également  comme 
une  broncho-pneumonie.  Enfin,  malgré  l'aspect  planiforme  de  la  coupe, 
on  retrouve  autour  des  bronchioles  les  nodules  de  la  broncho-pneumonie 
aiguë,  qui  apparaissent  à  l'œil  nu  ou  armé  d'une  loupe  sous  la  forme  de 
grains  agglomérés,  parfois  saillants,  de  grappes  présentant  une  coloration 
grise  ou  jaunâtre,  et  qui  se  détachent  sur  le  fond  rosé  de  la  c^upe.  Le 
plus  souvent,  la  bronchiole  se  dislingue  facilement  au  centre  du  nodule. 
Comme  on  le  voit,  les  principaux  traits  de  la  forme  aiguc  se  retrouvent 
ici;  mais,  autour  du  nodule,  le  fond  rosé  ou  violacé  qui  caractérise  la 
carnisation  a  remplacé  la  coloration  plus  foncée  de  la  splénisalion.  La 
plèvre  est  habituollcment  épaisse,  recouverte  de  fausses  membranes  ;  il  y 
a  de  Temphysème  des  parties  non  atteintes  et  les  ganglions  bronchiques 
sont  tuméfias.  Ajoutons  que  dans  cette  période  il  n'y  a  pas  encon* 
d'atrophie  du  poumon  et  que  Tinsufflation  est  très-incomplète. 

L'analyse  histologique  de  ces  cas  subaigus  a  été  faite  par  le  professeur 
Charcot.  Elle  démontre  l'existence  d'une  cirrhose  commençante  :  toutes 
les  parties  du  lobule  subissent  une  infiltration  de  cellules  embryonnaires, 
tandis  que  les  exsudats  intra-alvéolaires  aboutissent  à  la  dôsintègralion 
granulo-graisseuse. 

i»  Bronches  et  nodules  péribvonchiques.  —  Les  bronches  contiennent 
du  muco-pus,  leur  épithélium  est  conservé,  mais  tuméfié.  Leurs  parois 
sont  infiltrées  de  cellules  rondes  et  fusiformes,qui  détruisent  les  tuniques 
musculaire  et  élastiquiB  (Trojanowsky).  Consécutivement  la  bronche  se 
déforme,  se  dilate  à  cause  de  la  destruction  de  l'anneau  musculaire,  (le 
fait  primitif,  antérieur  à  l'atrophie  du  poumon,  réduit  à  néant  la  théorie 
deCorrigan,  qui  explique  la  dilatation  bronchique  par  Tatrophie  du  pou- 


PNEUMONIE.  PK.  CHROMQUE.  —  ANATOMIE  PATHOLOGIQUE.  607 

mon  et  la  rétraction  du  tissu  conjonctif.  Celle-ci  est  impuissante  à  produire 
cette  dilatation  lorsque  les  bronches  sont  intactes  :  Charcot  en  donne 
comme  preuve  la  sclérose  pulmonaire  qui  succède  à  la  pneumonie  lobaire 
chronique  et  dans  laquelle  les  bronches  conservent  leur  calibre  normal, 
malgré  la  rétractilité  du  tissu  fibreux  de  nouvelle  formation. 

L'artère  voisine  de  la  bronche  est  également  épaissie  par  suite  de  l'in- 
filiration  de  sa  couche  externe  par  les  cellules  embryonnaires.  Celles-ci 
envahissent  de  même  les  cloisons  interlobulaires  et  interacineuses.  Le 
nodule  péribronchique  est  plus  ou  moins  nettement  reconnaissable  : 
habituellement  les  alvéoles  sont  encore  remplis  d'exsudafs  fibrineux  en- 
globant des  cellules  épithéliales  et  quelques  leucocytes.  Dans  les  cas  plus 
anciens,  les  lésions  des  alvéoles  sont  moins  nettement  distinctes  et  res- 
semblent beaucoup  à  celles  des  points  carnisés  du  lobule. 

imparties  carnisées.  —  Dans  les  parties  lisses  et  roses,  correspondant 
à  la  splénisation  de  Tétat  aigu,  on  trouve  encore   de   la   pneumonie 
desquamative,  mais  avec  des  caractères  spéciaux  différents  :  les  alvéoles 
aoni  aplatis,  déformés,  ainsi  que  les  conduits  alvéolaires,  et  leurs  parois 
renferment  de  nombreux   éléments  arrondis.  Leur  contenu  subit  plu- 
'     sieurs  phases  de  transformation  :  les  cellules  épithéliales  sont  d'abord 
^     gonflées,  très-granuleuses;  plus   tard,   elles  se   fondent  en  un  magma 
i     granule-graisseux,  il  y  a  des  gouttelettes  de  graisse  libre,  ou  bien  il  se 
t     produit  des  cristaux  disposés  en  éventail,  qui  sont  libres  ou  renfermés 
'     dans  les  cellules  et  offrent  les  réactions  caractéristiques  de  la  margarine. 
*     Tout  le  contenu  alvéolaire  peut  avoir  subi  à  divers  degrés  cette  dégéné- 
i    rescence  graisseuse.  Enfin  dans  les  points  où  la  lésion  est  le  plus  avancée 
I    la  paroi  alvéolaire  est  revêtue  par  un  épilhélium  cubique. 
I        Ces  lésions  offrent  d'ailleurs  les  mêmes  variantes  que  dans  la  broncho- 
pneumonie  aiguë.  Tantôt  le  nodule  péribronchique  est  nettement  circon- 
serit»  tantôt  il  se  confond  entièrement  avec  la  zone  de  carnisation  (hépa- 
tisation  lobulaire  généralisée).  Ënfm,   la   composition  élémentaire  du 
contenu  des  alvéoles  en  fibrine,  globules  blancs,  cellules  épithéliales,  est 
également  très  variable  suivant  les  cas,  suivant  leur  ancienneté,  suivant 
la  nature  de  la  bronchite  génératrice.  Deux  grandes  classes  peuvent  être 
établies  :  1^  les  cas  dans  lesquels  prédominent  les  lésions  bronchiques, 
caractérisés  par  Taspect  alvéolaire  sur  lequel  Corrigan  a  insisté;  2^  les 
cas  dans  lesquels  prédominent  les  lésions  du  parenchyme  pulmonaire, 
caractérisés  principalement  par  la  carnisation.  Nous  avons  rapporté  dans 
notre  thèse  deux  exemples  remarquables  de  cette  dernière  variété  (p.  71). 
Comme  Ta  fait  voir    Charcot,  Tétude  de  ces  cas  subaigus  permet  de 
mieux  interpréter  les  lésions  quand  il  s'agit  des  broncho-pneumonies 
ironiques.    Nous   savons  déjà    que    toutes    les    broncho-pneumonies 
tendent  à  la  chronicité  à  cause  de  leur  siège  de  prédilection  dans  le  tissu 
conjonctif.    Les  exsudations  diverses  dominent  dans  la  période   aiguë  ; 
la  période  subaigue   est  caractérisée  par  l'infiltration  de  celiules  em- 
bryonnaires avec  tendance  à  l'organisation  ;  enfin,  lorsque  l'état  chro- 
nique s'est  établi,  les  lésions   aboutissent   à  la   sclérose.    Charcot    a 


608  PNEUMONIE.  —  pn.  chromqde.  —  anatomie  pathologique. 

constaté  la  succession  de  ces  lésions  dans  un  certain  nombre  de  cas 
considérés  à  des  époques  plus  ou  moins  éloignées  du  début  de  la  maladie 
primitive.  H  est  quelquefois  possible  d*en  retrouver  la  série  complite 
dans  un  seul  cas  ;  la  lésion  la  plus  marquée  existe  alors  dans  les  lobes 
inférieurs,  tandis  qu'elle  est  encore  à  l'élat  subaigu  dans  les  parties 
supérieures  du  poumon. 

Tels  sont  les  cas  de  Rendu  (Bull,  de  la  Soc.  anat.^  1872,  p.  209), 
et  de  Ollivier,  cités  dans  les  leçons  de  Charcot.  Dans  ce  dernier  cas,  le 
début  des  accidents  remontait  à  un  an  :  le  lobe  supérieur  encore  Toloim- 
neux  renfermait  des  nodules  distincts  et  des  bronches  peu  dilatées 
(2'"*'  degré  des  lésions,  état  subaigu)  ;  les  lobes  inférieur  et  moyen 
confondus  étaient  atrophiés,  les  bronches  considérablement  dilatées, 
simulant  des  cavernes.  C'est  la  lésion  décrite  par  Corrigan,  avec  le  doi- 
sonnemcnl  interlobulaire,  Tépaississemcnt  de  la  coque  fibreuse  pleurale, 
et  un  certain  degré  d'atrophie  du  poumon.  Cependant,  dit  Charoot, 
malgré  la  date  déjà  plus  ancienne  des  lésions,  les  caractères  histolo- 
giques  sont,  dans  ce  cas,  les  mêmes  que  dans  la  broncho-pneumonie 
suhaiguë,  avec  quelques  variantes  de  peu  d'importance. 

Enfin  l'évolution  chronique  se  termine  par  la  cirrhose  et  l'atrophie dn 
poumon.  11  peut  être  réduit  au  volume  du  poing;  son  tissu  dur,  criant 
sous  le  scalpel,  est  comme  cartilagineux;  la  teinte  violacée  ou  rosée  de 
la  carnisation  est  remplacée  par  une  coloration  ardoisée  verdàtre;  la 
surface  est  sèche,  lisse,  les  nodules  sont  effacés.  L'épaisseur  de  la  coque 
pleurale,  le  cloisonnement  du  poumon,  sont  de  plus  en  plus  accusés. 
Les  alvéoles  sont  affaissés  et  ont  subi  euv-mèmes  l'induration  fibreuse. 
Enfin,  il  y  a  dilatation  des  bronches^  toujours  plus  ou  moins  prononcée, 
caractère  important  qui  manque  dans  l'induration  grise  ardoisée  qui 
constitue  la  période  ultime  de  la  pneumonie  lobaire  chronique.  Ces 
lésions  ont  été  rencontrées  dans  les  cas  d'ancienne  date  comme  celui  de 
Jùrgensen. 

L'atrophie  scicrcuse  et  la  rétraction  du  poumon  sont  suivies  de  lésions 
spéciales  du  côté  du  thorax  et  des  organes  intra-thoraciques.  Le  cœur 
est  entraîné  du  coté  du  poumon  rétracté,  à  gauche  vers  la  région  sous- 
claviculaire,  à  droite  et  en   haut  au  niveau  de  la  quatrième  côte  à  droite 
du  sternum.  En  même  temps,  le  ventricule  droit  se  dilate  et  s'hypertro- 
phie  (dix  lois  sur  trente,  Bastian),  d'où  résultentdes  hydropisies  notées 
dans  un  certain  nombre  d'observations,  l'œdème  des  membres  inférieurs, 
l'ascite.  Le  diaphragme  et  les  organes  abdominaux  sont  attirés  vers  la 
partie  supérieure  de  la  poitrine  (Traube).  Le  thorax  subit  la  déformation 
décrite  par  Lacnnec  et  consécutive  à  l'atrophie  pulmonaire  qui  suit  la 
pleurésie  chronique  :  aplatissement  dans  tous  les  sens,  rétrécissement 
des    espaces    intercostaux,  épaule  et   pointe   de   l'omoplate   abaissées. 
Comme  nous  le  verrons,  ces  déformations  sont  plus  accentuées  encore 
lorsque  la  plèvre  prend  une  part  importante  aux  altérations.  Nous  n'in- 
sistons pas  sur  les  lésions  des  autres  organes  qui  sont  évidemment  eo 
rapport  avec  la  durée  de  la  maladie  et  avec  la  marche  qu'elle  a  suivie. 


PNEUMONIE.  —  PN.  CHRONIQUE.  —  SYMPTÔMES.  609 

Nous  signalerons  seulement  une  complication  constatée  quatre  fois  par 
Bienner  :  les  abcès  du  cerveau,  qui  dans  deux  cas  parurent  de  nature 
gangreneuse. 

Symptômes.  —  La  maladie  confirmée  présente  toujours  à  peu  près  le 
même  tableau  :  elle  varie  seulement  à  son  début,  suivant  qu'elle  succède 
à  la  forme  aiguë  ou  qu'elle  se  montre  dès  Torigine  avec  son  caractère 
particulier.  Lesaufeurs  ont  insisté  sur  les  rémissions  qu'on  peut  observer 
dans  les  cas  aigus  de  broncho-pneumonie,  principalement  quand  la  ma- 
ladie présente  une  certaine  durée.  Ces  rémissions  apparentes  sont  encore 
plus  marquées  loi*sque  la   broncho-pneumonie  passe  à  l'état  subaigu. 
L*état  général  s'améliore,  la  soif  est  moins  vive,  l'appétit  reparait,  quelque- 
fois même  exagéré  (Legendre),  la  fièvre  se  modère  et  peut  même  cesser 
r    pendant  la  plus  grande  partie  de  la  journée.  La  respiration  est  plus  facile  ; 
j    la  toux  et  l'oppression  diminuent.  Mais  ce  bien-être  ne  dure  pas  :   le 
.    mouvement  fébri|e  reparait  dans  la  soirée,  les  pommettes  des  joues  devien- 
g    nent  rouges,  la  température  s'élève,  le  pouls  remonte  à  150  ou  140,  la 
dyspnée  et  la  toux  s'accentuent  de  nouveau.  L'accès  fébrile  est  suivi  de 
^    soeurs  abondantes.  Si  l'on  ajoute  à  ce  tableau  la  faiblesse  et  l'amaigris- 
^    sèment  qui  se  prononcent  de  plus  en  plus,  on  voit  que  la  maladie  revêt 
.   à  s*y  méprendre  les  allures  de  la  phthisie. 

^  Dans  les  cas  qui  prennent  dès  le  début  la  marche  subaiguë,  la  maladie 
se  comporte  à  peu  près  de  la  même  manière.  L'appareil  fébrile  est  piiu  in- 
tense (38,5  à  39^),  irrégulier,  sans  type.  Les  oscillations  de  la  courbe 
^  Uiermique  sont  très-prononcées  ;  la  fièvre  peut  manquer  chez  les  enfants 
^  très-faibles.  La  toux  et  la  dyspnée  augmentent  progressivement,  ainsi  que  la 
^  fciblesse  et  l'apathie;  les  malades  présentent  bientôt  l'habitusphthisique. 
^  Le  faciès  est  amaigri,  pâle  ou  légèrement  cyanose,  souvent  avec  un  teinte 
^  cachectique.  L'amaigrissement  augmente  rapidement,  la  peau  est  flasque, 

ridée;  l'appétit  nul,  quelquefois  exagéré  pendant  les  rémissions. 
^      Dans  les  premiers  temps,  les  symptômes  locaux  et  fonctionnels  sont 
-^  ceux  de  la  bronchite.  Habituellement  la  douleur  thoracique  manque,  ou 
^    o'a  rien  de  fixe  :  la  toux,  la  dyspnée,  sont  variables  suivant  l'intensité  de  la 
bronchite  génératrice.  Elles  sont  quelquefois  nulles  ou  peu  marquées  lors- 
__  ^e  les  lésions  pulmonaires  s'établissent  lentement  dans  le  cours  d'une 
bronchite  chronique.  Elles  s'accentuent  davantage  dans  les  cas  où  la  ma- 
ladie évolue  plus  rapidement.  L'expectoration  peut  être  nulle,  ou  très-abon- 
dante, quelquefois  même  dès  les  commencements  de  la  maladie  (Legendre)  ; 
i  la  suite  d'efforts,  de  secousses  violentes,  de  quintes  douloureuses,  une 
grande  quantité  de  liquide  muco-purulent  quelquefois  fétide  est  expec- 
torée. Dans  quelques  observations  l'expectoration  est  accompagnée  de 
vomissements.  Quelquefois  elle  est  simplement  muqueuse. 

L*examen  de  la  poitrine  donne  des  signes  en  rapport  avec  l'ancienneté 

et  la  forme  de  la  maladie.  Si  elle  succède  à  une  broncho-pneumonie  aiguë 

ik    forme  parenchymateuse ,  les  signes  de  l'induration  pulmonaire  per- 

n«tent  à  la  percussion  et  à  l'auscultation.  Dans  les  formes  subaiguës  d'em- 

Ailée,  la  percussion  ne  révèle  d'abord  rien  d'anormal  ;  à  l'auscultation  les 

MOT.  «ÉD.    ET  CHIB.  XXVIII  —  59 


640  PNEUMONIE.  —  pn.  cHRONions.  —  sthptômbs. 

râles  de  bronchite  sont  disséminés  dans  les  deux  côtés  de  la  poitrine. 
Longtemps  eet  état  local  reste  stationnaire;  peu  à  peu  les  signet  iendeni 
à  prédominer  d'un  seul  côté,  quelquefois  au  sommet,  plus  souvent  à  la 
base.  L'exploration  peut  alors  révéler  quelquefois  un  ensemble  de  signes 
propres  à  faire  soupçonner  le  passage  à  la  carnisation  (Legendre);  c'est 
d'abord  une  malité  plus  grande,  un  souffle  plus  intense,  comme  caTemenx, 
accompagné  de  gros  râles  muqueux  ou  même  de  véritables  gargouiUaneati. 
Ces  divers  signes,  comme  on  le  voit,  sont  en  rapport  avec  Finduratioa  do 
tissu  pulmonaire  et  la  dilatation  des  bronches.  Mais  ces  lésions  sont  quel- 
quefois très-accusées,  sans  que  cependant  l'examen  les  fasse  nettemeoi 
coimaitre. 

Les  symptômes  généraux  sont  ceux  de  la  fièvre  hectique,  surtout  dm 
les  dernières  périodes  de  la  maladie.  Le  contenu  punileni  el  fétide  des 
bronches  est  résorbé  et  donne  lieu  à  la  production  d'accès  fébriles  pseudo- 
intermittents.  Des  suem*s  abondantes  affaiblissent  les  malades,  dont  h 
nutrition  ne  tarde  pas  à  souffrir.  L'amaigrissement  esf  de  plus  eo  pins 
accentué,  les  malades  ont  tout  à  fait  l'aspect  des  phthisiques,  h  iiMe 
chez  les  enfants  devient  ridée,  ils  ressemblent  à  de  petits  vieillards; 
quelquefois  elle  est  bouffie,  des  œdèmes  cachectiques  apparaissent  aux 
pieds  et  aux  mains;  la  peau  sèche,  rugueuse,  se  recouvre  de  pustules 
d'ccthyma  en  différents  points  du  corps.  Quelquefois  les  enfants  en  se 
grattant  transforment  cette  éruption  insignifiante  en  ulcérations  rebelles 
qui  siègent  autour  du  nez  et  de  la  bouche  (Ziemssen).  Souvent  il  survient 
une  diarrhée  abondante  et  les  malades  finissent  par  s'éteindre,  parfois 
sans  agonie,  dans  le  dernier  degré  du  marasme. 

Dans  la  broncho-pneumonie  chronique  avec  cirrhose  et  atrophie  du 
poumon,  les  signes  fournis  par  l'auscultation  sont  ceux  de  la  ddatatioo 
des  bronches,  affaiblissement  ou  suppression  du  murmure  vésiculaire, 
souffle  rude,  caverneux,  gros  râles  humides,  gargouillements,  broncho- 
phonie  etc.  Mais,  tandis  que  dans  la  dilatation  qui  succède  aux  bron- 
chites chroniques  les  signes  fournis  par  la  percussion  se  réduisent  a  un 
peu  d'obscurité  ou  de  diminution  du  son  au  niveau  des  dilatations,  dus 
celle  qui  résulte  de  la  broncho-pneumonie  chronique  on  trouve  1^  signes 
d'une  induration  plus  ou  moins  étendue,  matité,  exagération  des  vibfft- 
tiens  thoraciques. 

Les  signes  d'induration  sont  plus  accusés  quand  la  maladie  remonte  a 
plusieurs  années,  quand  le  poumon  sclérosé  a  subi  une  atrophie  plus  o 
moins  considérable.  Dans  cette  période  terminale,  la  lésion  broncho* 
piieumonique  s'accompagne  de  troubles  de  voisinage  qui  peuvent  senriri  ^ 
la  caractériser  au  point  de  vue  clinique.  L'atrophie  du  poumon  est  accom- 
pagnée de  gène  dans  la  circulation  cardio-pulmonaire,  et  de  Hij-pertio- 
phie  avec  dilatation  du  ventricule  droit  qui  entraine  l'œdème  dcsmeuibra 
inférieurs  et  l'ascite. 

Le  cœur  se  dévie  plus  ou  moins  du  côté  de  la  lésion  pulmonaire  :  i 
gauche,  vers  la  région  sous-claviculaire  ;  à  droite  et  en  haut,  au  oiîem 
de  la  quatrième  côte  à  droite  du  sternum^  Dans  ces  cas,  le  cœur  bat  et 


PNEUMONIE.  —  PN.  CHRONIQUE.  —  STMPTÔMBS.  61 1 

pielque  sorte  à  nu  sous  la  paroi  thoracique,  et  rimpulsion  peut  être  seri- 
ie  depuis  la  deuxième  jusqu'à  la  quatrième  côte  du  côté  de  l'aisselle 
Péacock,  Reynold's  System).  Le  retrait  du  poumon  entraine  en  même 
MBps  la  déformation  de  la  poitrine,  son  aplatissement  dans  tous  les  sens, 
e  rétrécissement  des  espaces  intercostaux  (Nothna^el);  Tépaule  et  la 
loiûte  de  Tomoplate  sont  abaissées  ;  enfin  le  diaphragme  subit  la  même 
ittraciion  et  peut  remonter  jusqu'à  la  quatrième  côte  (Traube). 

Les  symptômes  rationnels  présentent  la  plus  grande  analogie  avec  ceux 
le  la  dilatation  des  bronches  :  dyspnée  exagérée  par  les  mouvements 
il  les  efforts,  toux  fréquente  venant  par  accès  suivis  d'une  expectoration 
rès-abondante,  même  chez  les  jeunes  enfants,  muco-purulente  et  fétide. 

Les hémoptysies  ne  sont  pas  rares;  elles  ont  été  notées  seize  fois  sur 
nnle-neuf  cas.  La  maladie  peut  être  fort  longue,  grâce  à  des  améliora 
ifma  plus  ou  moins  marquées.  Cependant  elle  évolue  plus  rapidement 
pie  dans  la  dilatation  des  bronches  consécutive  à  la  bronchite  chronique 
it  les  symptômes  généraux  sont  d'ailleurs  plus  accusés.  Il  y  a  des  accès 
le  fièvre  le  soir,  des  sueurs,  de  l'amaigrissement,  l'habitus  extérieur  est 
akii  de  la  phthisie  chronique  que  la  broncho-pneumonie  chronique  si- 
Bille  à  s'y  méprendre. 

.  Marohe,  durée,  terminaison.  —  La  marche  de  la  maladie  pré- 
MUte  les  mêmes  caractères  dans  les  deux  formes  subaiguë  et  chronique,  et 
iediflereque  par  la  rapidité  ou  la  lenteur  de  son  évolution.  A  la  suited'une 
htoncho-pneumonie  survenue  pendant  la  rougeole,  la  coqueluche,  etc. , 
m  même  à  la  suite  d'une  bronchite  simple  intense  (Legcndre),  on  voit 
les  symptômes  de  catarrhe  bronchique  persister  et  s'éterniser  avec  des 
lilwes  binantes,  quelquefois  avec  des  améliorations  plus  ou  moins  Ion- 
ises. Le  malade  tousse,  oxpeclore  abondamment,  s'amaigrit,  a  des  sueurs 
IMeiiimes;  en  un  mot,  il  ne  tarde  pas  à  prendre  l'aspect  d'un  phlhsique 
ihei  lequel  la  maladie  revêt  tantôt  la  forme  galopante,  tantôt  la  forme 
Ivronique. 

Dans  le  premier  cas,  la  durée  de  la  maladie  peut  être  de  un,  deux  ou 
pops  mois  ;  les  rémissions  sont  moins  nombreuses  et  de  courte  durée,  la 
Mhexîe  terminale  s'établit  progressivement  malgré  l'intégrité  des  fo0<*. 
ieiis  digestives.  L'amaigrissement  est  extrême,  les  doigts  deviennent  hip- 
leeratiques;  la  peau,  habituellement  sèche,  écailleuse,  se  couvre  de 
■eurs  à  la  suite  des  accès  fébriles  du  soir  ;  une  diarrhée  persistante  ap« 
linUl.et  se  continue  jusqu'à  la  mort.  La  cachexie  se  traduit  encore  parle 
Ulveloppement  de  certaines  complications,  telles  que  la  formation  d'es- 
lÉires  au  sacrum,  la  gangrène  de  la  bouche  (Legendrc). 

Dans  la  forme  chronique,  la  durée  de  la  maladie  est  beaucoup  plus  lon- 
|ie;  la  terminaison  fatale  peut  n'arriver  qu'au  bout  d'une  année  ou 
•éme  de  plusieurs  années^  L'origine  de  la  maladie  est  plus  obscure  que 
bus  la  forme  subaiguë,  et,  si  Ton  peut  dans  quelques  cas  la  rattacher  n 
me  ancienne  phlegmasie  broncho-pulmonaire,  souvent  aussi  cette 
imière  s'est  présent«^e  avec  des  caractères  assez  peu  tranchés  pour 
ichapper  aux  investigations  du  médecin. 


642  PNEUMONIE.  —  ph.  chrowiqde.  —  £noL06iE. 

Dans  ces  circonstances  c'est  à  une  bronchite  intense,  |iersistante,  lerenant 
tous  les  hivers,  que  l'on  attribue  le  développement  de  la  dilatation  des  bron- 
ches et  Talrophie  du  poumon.  Dans  ces  cas  à  évolution  extrêmement  lente, 
les  commémoratils  manquent  de  précision,  mais  Barlh  fait  remarqnerqut* 
le  plus  souvent  on  peut  cependant  s*assurer  que  ce  catarrhe  pnlmooaire 
est  rarement  idiopathique  et  persiste  comme  i*eliquat  d'un  étatpblej- 
inasique  du  poumon  et  de  la  p/èt;re.*Dans  les  premiers  temps,  les  amé- 
liorations sont  de  longue  durée,  surtout  pendant  la  belle  saison;  plus 
tard,  la  maladie,  qui  peut  rester  stationnaire  pendant  des  années  entières, 
ne  présente  plus  que  des  rémissions  sans  importance. 

Elle  se  complique  de  Temphysème  des  parties  saines  du  poumon,  de  b 
dilatation  du  cœur  droit. 

Dans  quelques  observations  la  mort  a  été  causée  par  un  retour  k  l'état 
oigu,  par  une  nouvelle  broncho-pneumonie  avec  noyaux  de  pneumonie 
lobulaire,  splénisation  et  congestion  plus  ou  moins  étendue.  Dans  d'ntres 
cas,  la  pneumonie  a  été  lobaire.  Le  plus  souvent,  la  mort  arrive  par  Its 
progrès  de  Tépuisement  et  de  la  cachexie  :  l'expectoration  purulente  c 
ïetide  devient  tous  les  jours  plus  abondante,  s'accompagnant  parfois  d^hél 
moptysies.  La  physionomie  s'altère  et  l'amaigrissement  fait  des  progrès 
rapides.  Les  fonctions  digestives  se  troublent;  l'appétit  disparaît,  une 
diarrhée  abondante  achève  d'épuiser  le  malade,  la  respiration  devient  de 
plus  en  plus  pénible  et  embarrassée.  Il  succombe  avec  de  l'œdème  des 
extrémités,  quelquefois  des  eschares  au  sacrum. 

Êtiolog^ie.  —  La  broncho-pneumonie  subaiguë  et  la  broncho-pneumonie 
chronique  ont  les  mêmes  origines  que  la  broncho-pneumonie  aiguë.  Elles 
peuvent  se  présenter  après  un  catarrhe  aigu  ou  chronique;  Bartelslesa 
observées  plusieurs  fois  dans  la  rougeole,  mais  c'est  surtout  la  coqueluche 
qui  les  détermine  le  plus  souvent  (Zicmssen).  Elles  ont  été  observées 
également  pendant  la  lièvre  typhoïde,  à  la  suite  des  affections  cardiaques. 
On  a  peu  signalé  la  forme  subaiguc  chez  les  nouveau-nés  ;  elle  se 
développe  plutôt  chez  les  enfants  qui  ont  dépassé  l'âge  de  trois  ans. 

Elle  est  puissamment  favorisée  par  toutes  les  causes  de  débilitation  : 
alimentation  vicieuse,  encombrement  et  viciation  de  Tair,  par  l'aflaiblis- 
sèment  qui  résulte  de  maladies  antérieures,  de  diarrhées  chroniques,  du 
rachitisme,  du  décubilus  dorsal  prolongé.  Dans  deux  cas,  nous  l'avons 
vue  survenir  à  la  suite  de  la  diphthérie,  chez  des  enfants  qui  avaient  subi 
l'opération  de  la  trachéotomie.  La  forme  subaiguë  avec  camisation  peut 
également  se  montrer  pendant  l'adolescence  :  elle  devient  rare  après 
Tâgc  de  vingt  ans,  et  c'est  plutôt  les  formes  chroniques  avec  sclérose  et 
atrophie  qu'on  observe. 

Chez  Tadulte  et  le  vieillard,  la  dilatation  bronchique  succède  aux  bron- 
chites simples  répétées,  souvent  de  nature  diathésique.  Nous  n'avons  pis 
à  insister  ici  sur  ces  cas  qui  se  rattachent  à  l'histoire  de  la  dilatation  des 
bronches.  Nous  ne  nous  occupons  que  des  cas  qui  reconnaissent  pour 
origine  une  phle^masie  broncho-pulmonaire.  Nous  croyons  néanmoinsqoe 
co  sont  là  les  faits  les  plus  nombreux.  11  est  diflicile,  à  cause  de  Tinsufli- 


PNEUMONIE.  —  PN.    CHRONipUK.    —   DIAGNOSTIC.  tJl5 

sance  des  commémoratifs  ou  de  rancienneté  de  la  maladie,  de  remonter 
à  leur  véritable  origine,  d'autant  plus  que  des  rémissions  parfois  très- 
prolongées  ont  pu  faire  croire  à  la  guérison  complète  de  la  broncho- 
pneumonie  primitive.  Mais  les  données  de  l'anatomie  pathologique  et 
même  de  la  clinique  ne  permettent  pas  de  méconnaître  cette  cause  dans 
on  grand  nombre  de  cas.  Enfin,  il  ne  faut  pas  oublier  qu'il  existe  tou- 
jours un  certain  degré  de  sclérose  pulmonaire,  même  dans  les  cas  où  le 
catarrhe  chronique  simple  parait  devoir  être  reconnu  comme  étant  la 
seule  cause  de  la  dilatation  bronchique. 

Diai^cMstic.  —  Pour  comprendre  les  difficultés  qui  entourent  le  dia- 
gnostic de  la  broncho -pneumonie  subaiguë,  il  suffit  de  grouper  ses  prin- 
cipaux symptômes  locaux  et  généraux.  Les  premiers  se  rapportent  à  l'in- 
duration  pulmonaire,  à  Tinflammation  des  bronches  avec  dilatation.  Les 
sjmptâmes  de  ces  deux  lésions  se  rencontrent  dans  toutes  les  maladies 
4ii  poumon  qui  s'accompagnent  d'une  condensation  et  d'une  destruction 
partielle  de  son  tissu,  d'oià  résulte  la  formation  de  cavités  communiquant 
lYOC  les  bronches.  Les  symptômes  généraux  ne  sont  pas  plus  caractéris- 
tiques, ils  sont  entièrement  liés  aux  progrès  de  la  consomption  et  de  la 
cachexie.  Aussi,  dans  la  grande  majorité  des  cas,  le  diagnostic  est-il  im- 
possible entre  la  broncho-pneumonie  subaiguë  et  les  formes  rapides  de 
la  tuberculose  pulmonaire.  Elles  naissent  dans  les  mêmes  circonstances, 
i  la  suite  de  la  rougeole,  de  la  coqueluche,  chez  des  enfants  affaiblis  par 
diverses  maladies.  L'une  et  l'autre  peuvent  présenter  un  début  aigu,  ou 
tn  coutraire  se  développer  lentement  avec  les  signes  d'un  catarrhe  bron- 
diique  et  d'un  dépérissement  progressif.  On  pourra  cependant  incliner 
de  préférence  vers  la  broncho-pneumonie  simple,  si  elle  est  survenue  à  la 
fuite  d*une  fièvre  typhoïde,  ou  même  d'une  diphthérie,  ou  au  contraire 
isers  la  broncho-pneumonie  tuberculeuseï  si  la  tuberculose  est  héréditaire 
dans  la  famille  de  l'enfant,  ou  s*il  existe  des  symptômes  concomitants  de 
scrofule.  L'examen  de  la  poitrine  donne  des  renseignements  importants, 
mais  non  caractéristiques  :  la  broncho-pneumonie  siège  plus  habituelle- 
ment à  la  base  el  d'un  seul  côté,  la  tuberculose  aux  deux  sommets.  Mais 
cette  disposition  n'est  pas  constante,  et  la  tuberculose  peut  avoir  les 
mêmes  localisations  que  la  broncho-pneumonie,  surtout  chez  l'enfant.  La 
palpation,  la  percussion,  l'auscultation,  révèlent  dans  les  deux  maladies 
l'existence  de  la  bronchite  et  de  l'induration  pulmonaire.  D'autre  part,  la 
dyspnée,  la  toux,  n'ont  rien  de  spécial  :  l'expectoration,  quand  elle  existe, 
pourrait  avoir  de  l'importance  en  révélant  la  présence  ou  l'absence  des 
fibres  élastiques  :  ce  signe  même  ne  serait  pas  pathognomonique,  car  il 
pourrait  se  rencontrer  dans  les  cas  d'abcès,  dans  la  broncho-pneumonie. 

Quant  aux  symptômes  généraux,  la  fièvre,  les  sueurs,  l'amaigrissement, 
quant  au  faciès,  à  l'habitus  des  malades,  ils  sont  identiques  dans  les 
deux  maladies.  H  en  est  de  même  de  la  diarrhée,  des  œdèmes,  etc.  Nous  ne 
trouvons  pas  davantage  de  caractère  différentiel  important  dans  la  marche 
et  la  durée  des  deux  affections.  Quelquefois  la  tuberculose  concomitante 
des  organes  abdominaux  ou  des  méninges  vient  aider  au  diagnostic  ;  mais 


614  PNEUMONIE.  —  px.  chroniqoe. —  diagnostic. 

ces  complications  peuvent  rester  latentes,  et  d'ailleurs  ne  se  produisent 
habituellement  que  dans  les  périodes  ultimes.  En  somme,  c'est  surtout 
sur  la  considération  des  antécédents  que  se  base  le  diagnostic,  etTolMeu- 
rité  dont  il  est  enveloppé  ne  doit  pas  étonner,  si  Ton  songe  qu'il  s'agît,  en 
réalité,  de  deux  maladies  qui  ne  diffèrent  que  par  la  nature  du  temin 
sur  lequel  elles  évoluent,  de  deux  broncho-pneumonies  qui  doiveat 
l'analogie  de  leurs  allures  aux  mêmes  causes  produisant  les  mêmes 
effets,  savoir  des  lésions  des  bronches  et  du  lobule  aboutissant  dtot  les 
deux  cas  à  la  destruction  de  leurs  éléments  par  ramollissement  oopir 
suppuration,  et  la  stagnation  des  produits  putrides  au  milieu  du  paren- 
chyme pulmonaire. 

La  pneumonie  cAronîVywe  présente,  comme  nous  l'avons  tu,  les  mémos 
ressemblances  avec  la  phthisie  pulmonaire,  surtout  quand  elle  évolue 
rapidement.  Mais  les  considérations  tirées  du  début  des  accideuts,  de 
Tàge  des  malades,  empêcheront  toute  confusion  avec  la  broncho-pnea- 
monie  chronique.  De  même,  pour  les  scléroses  pulmonaires  qui  succèdent 
à  l'introduction  dos  poussières,  l'examen  de  la  profession  met  p^Dmpt^ 
ment  sur  la  voie. 

Le  diagnostic,  en  ce  qui  concerne  les  pneumonies  interstitielles  pleo- 
rogënes,  peut  offrir  quelques  difficultés,  mais  seulement  dans  les 
dernières  périodes  de  la  maladie.  Les  commémoratifs  seront  alors 
d*une  grande  utilité,  car  la  déformation  de  la  poitrine,  les  signes  d'alro- 
phie  pulmonaire,  peuvent  être  les  mêmes  que  dans  la  sclérose  terminale  de 
la  broncho-pneumonie  chronique.  Il  faut  ajouter  que  celle-ci  s'accom- 
pagne des  symptômes  de  la  dilatation  des  bronches,  et  particulièreraenl 
de  rexpecloration  caractéristique  qui  manquent  dans  la  pneumonie  inter- 
stitielle pleurogène.  Mais  il  faut  reconnaître  que  les  difficultés  seraient 
insurmontables  dans  le  cas  où  il  existerait  une  vomiquc  pleurale  en 
même  temps  que  cette  dernière.  N'oublions  pas  enfin  que  la  plèvre  par- 
ticipe aux  lésions  du  tissu  pulmonaire  et  s'épaissit  considérablement  dans 
la  broncho-pneumonie  chronique. 

En  résumé,  les  diverses  scléroses  du  poumon  présentent  un  ensemble 
symptomatique  qui  leur  est  commun  à  toutes,  et  qui,  pour  les  symptômes 
locaux,  est  sous  la  dépendance  de  l'induration  et  de  Tatropliie  du  poumon  : 
pour  les  symptômes  généraux,  de  l'asphyxie  et  de  la  cachexie  progressives. 
Le  diagnostic  se  basera  donc  moins  sur  les  renseignements  fournis  par 
l'examen  du  malade  que  sur  les  considérations  tirées  de  Tàge,  de  la  pro- 
fession, des  causes,  et  surtout  du  début  et  de  la  marche  de  la  maladie.  La 
cirrhose  du  poumon  est  le  résultat  auquel  aboutissent  des  processus  in- 
flammatoires qui  ont  eu  pour  lieu  d'origine  les  bronches,  la  plèvre,  le  pa- 
renchyme pulmonaire;  c'est  par  l'étude  attentive  de  leur  marche  et  à  l'aide 
des  renseignements  commémoratifs  que  le  diagnostic  pourra  être  établi. 

La  broncho-pneumonie  chronique  et  la  bronchite  chronique  avec  dUa- 
talion  des  bronches  seront  distinguées  de  la  même  manière.  Mais  il  nf 
faut  pas  oublier  (jue  le  plus  grand  nombre  des  cas  de  dilatation  bron- 
chique se  rattachent  par  leur  origine  à  la  broncho-pneumonie,  et  que  le 


PNEUMONIE.  —  PK.  CHRONIQUE.  —  pROROsnc.  615 

tissu  pulmonaire  finit  généralement  par  s'indurer,  même  dans  la  dilata- 
tion bronchique  simple,  qui  peut  être  alors,  en  réalité,  considérée  comme 
une  véritable  broncho-pneumonie  chronique  limitée  aux  grands  espaces. 

Celte  dernière  diffère  cependant,  au  point  de  vue  clinique,  de  la  broncho- 
pneumonie  chronique,  par  Tabsence  des  signes  de  cirrhose  et  d'atrophie 
pnLoiionaire  que  nous  avons  mentionnés,  et  surtout  par  la  conservation 
des  forces  et  de  Tembonpoint. 

Dans  quelques  cas  cependant,  cette  forme  conduit  également  à  la  con- 
aemption,  et  le  diagnostic  ne  peut  plus  guère  être  basé  que  sur  l'âge  des 
laalades  et  Tancienneté  des  accidents,  la  broncho-pneumonie  chronique 
étant  plutôt  une  maladie  des  jeunes  sujets,  qui  présente  rarement  la  longue 
durée  de  la  dilatation  simple  des  bronches. 

Nous  n'insisterons  pas  sur  le  diagnostic  différentiel  de  la  broncho-pneu- 
monie chronique  et  de  la  phthisie  chronique.  Les  mêmes  difficultés 
presque  insurmontables  que  nous  avons  signalées  pour  la  broncho-pneu- 
nonie  subaiguê  et  la  phthisie  galopante  se  rencontrent  ici  de  nouveau.  Il 
ae  suffit  pas  de  pouvoir  rapporter  la  maladie  à  une  broncho-pneumonie 
survenue  autrefois  dans  le  cours  d'une  rougeole  ou  d'une  coqueluche,  car 
c'est  souvent  à  la  suite  de  ces  maladies  que  la  phthisie  apparaît.  On  se 
basera  surtout  sur  Tabondance  des  crachats  muco-purulents,  sur  les 
signes  de  l'induration  habituellement  moins  accentués  dans  la  phthisie 
el  siégeant  plus  souvent  aux  deux  sommets,  et  non  à  la  base  et  d'un  seul 
iiMé«  La  rétraction  du  poumon  et  la  déformation  de  la  poitrine  sont 
eneore  de  bons  signes  de  la  broncho-pneumonie  chronique,  ainsi  que 
Phypertrophie  et  la  dilatation  du  cœur  droit.  Mais  le  diagnostic  devient 
impossible  lorsque  la  lésion  siège  au  sommet;  et  les  mêmes  difficultés  se 
rencontrent  parfois  d'ailleurs  dans  les  cas  de  dilatation  simple  des 
faironches  :  il  peut  y  avoir,  comme  nous  l'avons  vu,  identité  absolue  des 
symptômes  locaux  et  des  symptômes  généraux.  Lebert  signale  comme  un 
bon  signe  l'absence  de  raucité  de  la  voix  dans  la  sclérose  broncho-pulmo- 


ProncMstic.  —  Pour  mettre  en  évidence  toute  la  gravité  du  pronostic, 
il  suffit  de  rappeler  que  la  broncho-pneumonie  subaiguê  s'accompagne  de 
lésions  destructives  qui  compromettent  ou  anéantissent  la  contractilité 
des  muscles  bronchiques.  11  en  résulte  la  dilatation  des  bronches  et  la  sta- 
gnation dans  leur  cavité  de  la  sécrétion  muco-purulente.  L'abondance  et  la 
ffitidiié  des  crachats  sont  deux  signes  de  cette  lésion  dont  l'importance 
pronostique  ne  doit  point  échapper  chez  les  sujets  débiles,  rachitiques, 
affaiblis  par  un  décubitus  dorsal  prolongé,  ou  par  une  maladie  aiguë 
antérieure  (rougeole,  coqueluche,  etc.).  La  fièvre  hectique  avec  exacer- 
bations  irrégulières,  les  sueurs,  l'amaigrissement,  les  hémoptysies,  l'ap- 
parition de  la  cachexie  (diarrhée,  ecthyma,  gangrènes  locales),  avertis- 
sent également  de  la  gravité  du  mal,  et  sont  déjà  les  indices  d'une  mort 
prochaine. 

Dans  les  cas  chroniques,  il  y  a  des  rémissions  plus  ou  moins  longues, 
mais  la  restituiio  ad  integi^m  ne  peut  plus  se  produire,  le  tissu  em- 


016  PNKL'MONIE.  —  pk.  chroniqde.  —  traitemekt. 

bryonnaire  qui  a  infiltré  les  bronches^  le  tissu  conjonciif  et  les  parois  des 
alvéoles,  s'organise  lentement.  Les  signes  de  la  dilatation  des  brooebes  et 
de  la  sclérose  du  poumon  sont  de  plus  en  plus  accusés  ;  l'organisane,  après 
avoir  longtemps  lutté,  finit  par  être  affaibli  par  suite  des  exacerbations  de 
plus  en  plus  rapprochées  qui  se  produisent  dans  la  marche  de  la  maladie. 
Le  pronostic,  réservé  jusque-là,  s'assombrit  à  mesure  que  Taroaignsse- 
ment  et  la  cachexie  font  des  progrès. 

Traitement.  —  Faire  une  bonne  aération  dans  les  cbaiiibrcs  des 
malades,  éviter  Tencombrcmenl,  le  décubitus  trop  prolongé,  leUaa  lonl 
les  mesures  prophylactiques  qu'il  est  urgent  de  ne  pas  négliger  et  qui 
ne  diffèrent  pas  de  celles  qu'on  doit  prendre  contre  la  brundio-poeiimo- 
nie  aiguë.  Il  faut  se  méfier  chez  les  enfants  débiles,  rachitiques  ou  con- 
valescents d'une  maladie  aiguë,  de  ces  bronchites  insidieuses,  qui  con- 
duisent à  un  engorgement  progressif  des  bronches  :  les  vomitib,  le 
kermès,  les  stimulants  diffusibles,  devront  être  prescrits  dans  ces  cas. 

Au  début,  il  est  le  plus  souvent  impossible  de  prévoir  à  quelle  bmt 
de  broncho-pneumonie  l'on  aura  affaire;  nous  n'insisterons  pas  sar  le 
traitement  dans  cette  phase  où  il  ne  se  présente  pas  d'indications  diOe- 
rentes  de  celles  de  la  broncho-pneumonie  aiguë. 

Plus  tard,  il  y  a  des  rémissions  plus  ou  moins  longues,  la  fièvre  tombe, 
l'appétit  renaît  :   la  médication  tonique  est  alors  indiquée,  et  l'on  doit 
insister  sur  Temploi  d'un  régime  fortifiant,  bouillons,  viande  crue  oa 
rôtie,  vins  généreux,  alcool  au  besoin,  changement  de  résidence  et  séjoor 
à  la  campagne,  si  Tétat  des  forces  permet  un  déplacement.  Les  vomitib 
administrés  de  temps  à  autre  sont  utiles  pour  combattre  la  suffocation 
et  la  stagnation  du  muco-pus  dans  les  bronches.  C'est  dans  le  même  bot 
que  l'on  prescrit  le  kermès  à  doses  modérées,  les  résineux,  les  balsa- 
miques, qui  facilitent  et  modifient  l'expectoration.  Gerhardt  recommande 
dans  ce  but  la  compression  méthodique  du  thorax.  Les  stimulants  diffu- 
sibles, le  chlorhydrate  et  le  carbonate  d'ammoniaque,  agissent  dans  le 
même  scns*et  de  plus   combattent  l'apathie  et  la  dépression.  Les  bains 
tièdes,  sulfureux  ou  aromatiques,  les  sinapismes,  les  fomentations  vinai- 
grées, répondent  aux  mêmes  indications.  11  faut  ajouter  à  ces  stimulants 
l'alcool,  qui  est  le  plus  puissant  de  tous  et  qu'on  prescrit  en  potion  de 
Todd,  ou  sous  forme  de  rhum  ou  de  vin  de  Porto. 

Les  révulsifs  et  spécialement  les  vésicatoires  doivent  être  réservés  aux 
premières  phases  de  la  maladie.  Plus  tard,  lorsque  les  forces  ont  diminué, 
la  vitalité  de  la  peau  s'amoindrit  et  leur  emploi  pourrait  présenter  plus 
d'inconvénients  que  d'avantages. 

Dans  quelques  cas,  la  fièvre  procède  par  accès  pseudo-intermittents 
contre  lesquels  on  pourra  employer  le  sulfate  de  quinine  à  l'exemple  de 
Rilliet  et  Barthez  qui  le  prescrivent  en  lavements.  Enfin  dans  les  der- 
nières périodes  de  la  maladie,  lorsque  la  cachexie  survient,  il  ne  reste 
plus  qu'à  prévenir  la  formation  des  eschares,  à  combattre  la  diarrhée, 
à  soutenir  les  forces  par  une  alimentation  convenable  à  Taide  du  laiU 
des  toniques  divers,  de  l'alcool,  etci 


PNEUMONIE.  —  PK.  CHftoifiQOE.  — pn.  chronique  pleurogènr.  617 

Dans  la  broncho-pneumonie  chronique  nous  rétrouvons  des  indica- 
tions analogues  à  celles  que  nous  venons  de  passer  en  revue  dans  la 
broncho-pneumonie  subaiguë  1  La  prophylaxie  consiste  à  combattre  les 
catarrhes  bronchiques  rebelles,  les  broncho-pneumonies  aiguës  dont  la 
résolution  se  fait  péniblement.  Nous  n'insisterons  pas  sur  le  traitement 
de  la  première  période  de  la  maladie,  celle  dans  laquelle  les  lésions 
sont  encore  à  Tétat  embryonnaire  et  qui  correspond,  par  conséquent,  à  la 
broncho-pneumonie  subaiguë.  Plus  tard,  la  dilatation  des  bronches  et  la 
sclérose  du  poumon  avec  atrophie  sont  les  deux  lésions  dont  il  s'agit  de 
combattre  les  conséquences  et  les  progrès.  Pour  agir  sur  Télément  bron- 
chique on  prescrira  les  vomitifs,  le  kermès,  qui  faciliteront  Texpectora- 
lion  et  combattront  l'engorgement  des  bronches.  Aux  efforts  de  toux  qui 
aggravent  la  situation  du  malade  en  le  fatiguant,  en  Tempéchant  de 
dormir,  et  qui  favorisent  dans  une  certaine  mesure  la  formation  des 
eclasics  bronchiques,  on  opposera  les  opiacés,  le  chloral,  les  antispas- 
modiques divers,  etc.  On  devra  surtout  s'adresser  aux  agents  modifi- 
cateurs de  la  muqueuse  et  des  sécrétions  bronchiques,  aux  balsamiques, 
à  la  térébenthine,  au  goudron,  etc.  Le  traitement  sullureux  en  boissons, 
en  pulvérisations,  en  inhalations,  pourra  rendre  dans  ces  cas  de  grands 
services. 

Les  mêmes  moyens  agissent  indirectement  sur  l'élément  pulmonaire, 
contre  lequel  on  peut  prescrire  les  révulsifs,  les  frictions  d'huile  de 
eroton  et  surtout  les  vésicatoires. 

Enfin  l'état  des  forces  doit  être  incessamment  surveillé  et  entretenu 
à  l'aide  des  toniques,  d'une  alimentation  fortifiante.  Les  mesures  hygié- 
niques que  commande  la  susceptibilité  extrême  des  bronches  et  le^danger 
des  poussées  aiguës  ne  doivent  pas  être  négligées  :  le  malade  portera  de 
la  flanelle,  évitera  le  froid,  la  poussière,  toutes  les  causes  d'irritation 
des  voies  aériennes.  Le  séjour  à  la  campagne  dans  un  endroit  bien  abrité, 
rémigration  dans  le  Midi  pendant  l'hiver,  devront  être  recommandés 
antaint  que  possible. 

Les  autres  indications  sont  purement  symptomatiques  ;  elles  se  rap- 
portent à  la  fièvre,  qui  sera  avantageusement  combattue  par  le  sulfate  de 
quinine  quand  elle  prend  le  caractère  rémittent  :  aux  hémoptysies,  à  la 
dilatation  cardiaque,  aux  complications  diverses  auxquelles  on  opposera 
des  moyens  appropriés.  Enfin  les  accidents  terminaux  sont  habituelle- 
ment sous  la  dépendance  de  la  cachexie  et  ne  réclament  plus  que  le 
traitement  palliatif  sur  lequel  nous  n'avons  pas  besoin  d'insister  de 
nouveau. 

C.  Pneumonie  chronique  pleurogène.  —  Les  lésions  du  poumon  s'étendent 
souvent  à  la  plèvre  à  cause  des  connexions  vasculaires  qui  les  unissent. 
L'artère  pulmonaire  fournit  le  réseau  capillaire  des  acini  et  en  même 
temps  des  rameaux  qui  se  rendent  dans  l'épaisseur  de  la  plèvre 
(Reissessen,  Kôlliker,  RindQeisch).  Celle-ci  reçoit  en  outre  des  vaisseaux 
issus  des  artères  bronchiques,  en  sorte  que  les  altérations  des  bronches 
et  du  poumon  retentissent  facilement  sur  elle: 


618      PNEUMONIK.  —  pn.  chroniqdk.  —  pu.  chroniqvb  punrnoolBnu 

Inversement,  les  lésions  de  la  plèvre  retentissent  sur  le  poumon,  el, 
d'après  Rindfleisch,  il  est  commun  de  voir,  dans  la  pleurésie  séro-fibri- 
neuse,  les  alvéoles  superficiels  se  remplir  d'exsudat  fibrineux. 

Les  lésions  de  la  plèvre  peuvent  encore  retentir  sur  le  poumon  parla 
voie  des  lymphatiques.  L'inflammation  reste  en  général  confinée  dans  le 
lymphatique,  mais  elle  peut  se  propager  au  tissu  conjonctif  voisin  inter- 
lobulaire  ou  sous-pleural. 

Certaines  pleurésies,  en  général  de  mauvaise  nature,  et  sur  lesquelles 
Moxon  a  Tun  des  premiers  appelé  l'attention,  s'accompagnent  d'une 
angioleucite  pulmonaire  généralisée.  Il  en  est  de  même  pour  les  pleurésies 
puerpérales  (Heiberg,  Quinquaud,  Longuet),  pour  le  carcinome  pulmo- 
naire consécutif  au  carcinome  du  sein  et  de  la  plèvre  (Charcot  et  Debove). 
Enfin,  Texpérimcntation  a  également  montré  ces  relations  (angioleucite 
pulmonaire  consécutive  à  l'injection  de  produits  tuberculeux  dans  U 
plèvre),  et  il  résulte  des  recherches  histologiques  de  Kanvier  et  deDjb- 
kowsky,  précédés  dans  cette  voie  par  Bichat,  qu'il  existe  des  oriSces 
réservés  entre  les  cellules  épithéliales,  et  qui  font  communiquer  directe- 
ment la  cavité  séreuse  avec  les  réseaux  lymphatiques  superficiels  en  cer- 
tains points,  orifices  qu'on  retrouve  chez  l'homme  aussi  bien  que  chez  les 
animaux  (Wagner,  Arch,  der  Oeilkunde,  1870) .  Cet  auteur  a  même  vu  dans 
la  pleurésie  fibrineuse  aiguë  ou  chronique  les  lymphatiques  superficiels 
contenir  de  la  fibrine  se  continuant  immédiatement  avec  le  dépôt  fibri- 
neux de  la  fausse  membrane.  Cornil  et  Ranvier  ont  vu  les  lymphatiques 
superficiels  distendus  par  l'exsudat  fibrineux.  Ces  auteurs  ont  fait  leurs 
observations  sur  la  plèvre  pariétale,  mais  elles  ont  été  répétées  depuis 
par  Klein  sur  la  plèvre  pulmonaire,  et  Troisier  a  vu  les  injections  de 
carmin  faites  dans  la  plèvre  pénétrer  jusque  dans  les  lymphatiques  sous- 
pleuraux. 

Moxon  a  montré  que  la  pleurésie  purulente  peut  être  suivie  de  véri- 
tables pneumonies  interstitielles  aiguës.  Une  véritable  suppuration  inter- 
lolmlaire  se  produit  en  pareil  cas.  Rindfleisch,  Hayem,  ont  cité  des  faits 
analogues  à  propos  de  la  pneumonie  disséquante  dans  laquelle  un  ou 
plusieurs  lobules  se  trouvent  comme  séquestrés,  séparés  du  reste  de 
rorgane.  Mais  il  s'agit  là  d'une  phase  aiguë  sur  laquelle  nous  n'avons  pas 
à  insister. 

L'extension  du  processus  par  la  voie  des  lymphatiques  peut  conduire  à 
la  formation  d'une  pneumonie  fibroïde  cloisonnée.  On  peut  désigner 
sous  le  nom  de  pleurogènes  ces  pneumonies  interlobulaires  chroniques 
consécutives  à  la  pleurésie.  Divers  auteurs  les  ont  signalées,  en  particu- 
lier W.  Fox  (Reynold' s  System j  art.  Pneumonie  chronique)  et  Brouardel 
(Bull,  de  la  Soc.  des  hôpitaux,  1872,  p.  168),  Charcot  en  rapporte 
dans  ses  leçons  deux  observations  qui  lui  ont  été  communiquées  par 
Tapret,  alors  interne  de  Oulmont.  Les  faits,  comme  on  le  voit,  sont  encore 
trop  peu  nombreux  pour  qu'on  puisse  faire  une  description  complète 
de  cette  foi-me.  Nous  devons  ajouter  que  cette  pénurie  d'observation? 
m\  doit  pas  nous  sur|)rendre,  car  le  plus  souvent  les  bronches  et  le  pa- 


PNEUMONIE.  —  PN.  CHRONIQUE.  —   PN.    CHROIHIQUE   PLRUROGÈNE.  619 

rcnchyme  pulmonaire  d'emblée  participent  au  processus  ;  dès  le  début, 
ce  sont  des  pleuro-pneumonies  ou  des  broncho-pucumonies  (Ko//,  les 
observations  de  Bartli).  Les  congestions  pulmonaires,  si  fréquentes  dans 
la  pleurésie,  favorisent  aussi  sans  doute  le  développement  de  ces  lésions 
interstitielles. 

A  Tautopsie  des  individus  qui  succombent  à  ces  pneumonies  pleuro- 
gènes  on  trouve,  ordinairement  d'un  seul  côté,  la  plèvre  entièrement 
épaissie,  formant  une  véritable  coque  fibreuse  qui  coiffe  tout  le  poumon 
qu'on  ne  peut  détaclier'de  la  paroi  costale  qu'avec  les  plus  grandes  diffi- 
cultés. Des  adhérences  interlobaires  existent  en  même  temps  que  cette 
coque,  qui  présente  habituellement  à  leur  niveau  et  au  sommet  du  pou- 
mon sa  plus  grande  épaisseur.  Le  poumon  est  traversé  par  des  cloisons 
interlobulaires  d'épaisseur  variable,  constituées  par  du  tissu  conjonctif 
embryonnaire,  ou  déjà  fibreux.  Le  parenchyme  des  lobules  peut  participer 
aux  lésions;  il  a  été  trouvé  à  peine  altéré  dans  les  deux  observations  de 
Tapret.  Il  faut  noter  que  ce  travail  s'accomplit  parfois  avec  une  grande 
rapidité;  en  quelques  semaines,  les  néo-membranes  s'organisent,  devien- 
nent fibreuses  et  rétractiles,  et  le  poumon,  dont  les  espaces  interlobulaires 
participent  au  même  processus,  devient  incapable  de  se  dilater.  Les 
bronches  sont  saines  ou  présentent  une  dilatation  cylindrique  peu  mar- 
quée. Nous  croyons  que  cette  dilatation  ne  devient  plus  considérable  que 
lorsque  la  maladie  se  complique,  comme  c'est  souvent  le  cas,  d'une  bron- 
chite chronique.  L'altération  de  la  paroi  bronchique  permet  alors  à  la 
rétraction  inodulaire  du  tissu  inflammatoire  de  produire  sa  déformation. 
Les  lésions  concomitantes  sont  en  rapport  avec  la  sclérose  et  la  rétraction 
du  poumon  :  déformation  spéciale  de  la  paroi  thoracique  correspondante, 
laquelle  est  déprimée  et  affaissée  ;  emphysème  compensateur  de  l'autre 
poumon;  hypertrophie  avec  dilatation  du  cœur  droit;  congestion  des 
viscères. 

Au  point  de  vue  clinique,  les  choses  se  passent  habituellen^ent  de  la 
façon  suivante  :  Un  individu  atteint  de  pleurésie  chronique  conserve, 
après  la  disparition  de  Fépanchement,  de  la  dyspnée  et  de  l'oppression, 
souvent  aussi  des  douleurs  de  côté  plus  ou  moins  intenses.  H  y  a  parfois 
des  accès  de  fièvre  qu'on  attribue  à  tort  à  la  reproduction  de  l'épanche- 
ment.  Bientôt  la  poitrine  se  déforme,  les  côtes  s'aflaissent  et  s'immobili- 
sent dans  une  moitié  du  thorax,  l'épaule  du  même  côté  s'abaisse  ;  la  colonne 
vertébrale  subit  une  incurvation  plus  ou  moins  marquée,  le  grand  pectoral 
s'atrophie,  l'angle  inférieur  de  l'omoplate  s'écarte  de  la  paroi  costale 
(Stokes).  A  l'inspection  età  la  mensuration,  il  existe  une  notable  différence 
entre  les  deux  moitiés  de  la  poitrine;  les  viscères  abdominaux  tendent 
à  se  déplacer  par  suite  de  l'élévation  du  diaphragme.  A  l'auscultation,  la 
respiration  est  soufflante  ;  il  peut  y  avoir  aussi  du  souffle  bronchique 
ou  caverneux  ;  fréquemment,  on  entend  des  râles  muqueux  en  rapport 
avec  la  bronchite  concomitante.  L'oppression  est  constante,  mais  elle 
se  produit  aussi  parfois  sous  forme  d'accès,  s'accompagnant  de  palpita- 
tions, surtout  dans  les  dernières  périodes  de  la  maladie.  Les  signes  de  la 


620  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  bibliographie. 

dilatation  et  de  l'insuifisance  du  cœur  droit  ne  tardent  pas  alors  à  se 
montrer.  Le  deuxième  bruit  du  cœur  est  accentué;  suivant  Traube,  par 
suite  du  déplacement  du  cœur  à  droite  dans  certains  cas,  on  peut  peree- 
ccvoir  dans  le  deuxième  espace  intercostal  un  soulèvement  systoliquedù 
à  la  dilatation  de  la  portion  initiale  de  Tartère  pulmonaire,  et  un  soulè- 
vement diastolique  consécutif  correspondant  à  rocclusion  des  valToles 
sigmoïdes  de  ce  vaisseau  ;  ces  phénomènes  sont  en  rapport  avec  Vnf- 
mentation  de  la  pression  dans  Tartère  pulmonaire  et  avec  la  rétractiooèi 
tissu  qui  recouvre  Tarière  à  Tétat  normal.  L'œdème,  commençant  au 
membres  inférieurs,  se  généralise.  Les  malades  succombent  aux  progrès 
de  l'asphyxie.  Dans  une  observation  de  Tapret,  la  mort  fut  déterminée 
par  une  pneumonie  survenue  dans  le  poumon  opposé.  Le  prono$lictA 
grave,  d'autant  plus  que  les  cas  publiés  jusqu'à  ce  jour  ont  présenté  ok 
marche  assez  rapide  (Brouardei,  Tapret,  Nothnagel). 

Le  traitement  comporte  d'abord  des  indications  prophylactiques  is- 
portantes  :  Brouardei  recommande  de  vider  la  plèvre  de  bonne  heure, 
alors  que  le  poumon  peut  reprendre  son  volume  normal  avant  que  fe 
fausses  membranes  et  les  cloisons  conjonctives  ne  soient  épaissies  d 
rétractées.  Plus  tard,  les  révulsifs  (teinture  d'iode,  huile  de  croton,  feo- 
touses,  vésicatoires)  doivent  être  prescrits  pour  empêcher  les  progrès 
des  lésions.  Ces  divers  moyens,  ainsi  que  la  dérivation  intestinale,  sont 
surtout  utiles  lorsque  des  poussées  congestives  se  produisent  du  celé  da 
poumon.  Il  faut,  en  outre,  faire  fonctionner  le  poumon,  dont  le  pat&- 
chyme  est  peu  altéré  :  l'aérothérapie,  l'exercice  modéré,  le  séjour  à  h 
campagne,  répondent  à  cette  indication.  L'attention  doit  être  toujovs 
portée  sur  l'état  des  forces,  qu'il  faut  améliorer  autant  que  possible;  des 
mesures  hygiéniques  rigoureuses  doivent  être  prises  pour  éviter  les  refroi- 
dissements et  les  bronchites  qui  en  sont  souvent  la  suite  et  constituent 
une  des  complications  les  plus  dangereuses.  Enfin,  dans  la  dernière 
période,  on  devra  recourir  à  la  digitale  et  aux  divers  moyens  qui  peuîest 
relever  l'action  du  cœur. 

Traités  d'Anatomie  pathologique   de  Basse,  Rokitanskt,  Lebrrt,  in-folio,  t.  1,  Fôbstu,  Carviii- 

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PNEUMOTHORAX.  Voy.  Plèvbe. 

POIGNET.  Voy.  Main,  l.  XXI,  p.  239. 

POISONI&.  Voy.  Empoisonnement,  t.  XII,  p.  749. 

POITRINE  (pectus,  Owpa^  ail.  Brust,  angl.  breast,  it.  pecto,  esp. 
pecho).  —  Anatomîe.  —  On  désigne  ainsi  non-seulement  la  cavité 
viscérale  limitée  en  haut  par  le  cou,  en  bas  par  l'abdomen,  qui  ren- 
ferme les  organes  centraux  de  la  respiration  et  de  !a  circulation,  mais 


622  POITRINE.  —  ahatomie.  thorax  osseux. 

encore  les  parois  qui  la  constituent.  L'expression  de  thorax,  par  laquelle 
on  désigne  quelquefois  la  cage  osseuse  de  la  poitrine,  est  le  plus  soa^Hil 
employée  comme  synonyme  de  ce  dernier  mot;  le  nom  de  cavité tàoni- 
cique  s'applique,  avec  plus  de  précision,  à  la  cavité  viscérale,  absIrxKk» 
faite  de  ses  parois. 

Envisagée  à  ce  dernier  point  de  vue,  la  poitrine  forme  une  desdiri- 
sions  naturelles  du  corps,  chez  l'homme  comme  chez  tous  les  maniflu- 
fëres.  Ses  limites  extérieures  sont,  au  contraire,  plus  difficiles  a  étiUr. 
La  ligne  de  démarcation  entre  les  parois  thoraciques  proprement  dilesd 
la  paroi  abdominable,  dans  la  région  des  hypochoiidres,  est  puremeol 
fictive.  11  en  est  de  même  au  voisinage  de  l'épaule,  où  les  attaches  di 
membre  supérieur  se  superposent  à  la  paroi  latérale  de  la  poitrine  êtes 
modifient  la  partie  supérieure.  Enfin  la  paroi  thoracique  postérieure  « 
confond,  en  grande  partie,  avec  la  portion  dorsale  des  régions  ndi- 
diennes,  dont  l'ensemble  forme  une  division  naturelle,  étudiée  sépsc- 
ment  dans  la  plupart  des  traités  d'anatomie  chirurgicale. 

11  n'est  donc  pas  facile  d'établir  extérieurement  les  limites  exactesdes 
régions  thoraciques,  et  il  en  résulte,  comme  nous  le  verrons  plus  loio, 
quelques  inconvénients  au  point  de  vue  des  déductions  pratiques. 

Cette  difficulté  n'existe  pas  quand  on  considère  le  squelette,  où  letboru 
forme  une  sorte  de  cage  osseuse,  constituée  en  avant  par  le  steramn, 
en  arrière  par  l'ensemble  des  vertèbres  dorsales,  de  chaque  côté  pir  h 
série  des  douze  côtes.  Si,  par  la  pensée,  on  revêt  ces  pièces  osseuses  des 
parties  molles  qui  y  adhèrent  directement  en  dedans  et  en  dehois,  e' 
qu'on  introduise  la  voûte  du  diaphragme  dans  l'espace  circonscrit  pir  h 
circonférence  inférieure,  on  a  une  idée  assez  exacte  de  la  cavité  et  de  se 
parois  propres. 

Au  lieu  donc  de  procéder,  dans  la  description  de  la  poitrine,  de  Feilé- 
rieur  vers  l'intérieur,  comme  pour  les  autres  régions,  il  nous  sembk 
préférable  de  suivre  l'ordre  inverse,  c'est-à-dire,  d'étudier  successiw- 
ment  :  1**  Le  thorax  osseux.  2°  Les  diverses  couches  de  parties  moite 
qui  revêtent  ou  complètent  les  parois  osseuses.  3°  La  cavité  qui  en  résulte. 

1.  Thorax  osseux.  —  Il  représente  un  tronc  de  cône  droit  constitac 
par  : 

1**  Une  partie  postérieure,  médiane  et  fixe,  qui  soutient  les  autres,  o^ 
lonne  dorsale  ; 

2°  Deux  parties  latérales  représentant  chacune,  suivant  une  expresâofl 
heureuse  de  Sappey,  un  large  éventail  dont  les  pièces  se  rapprochent e* 
s'éloignent  alternativement,  ce  sont  les  cotes; 

S'*  \}nQ  colonne  antérieure,  sternum,  à  laquelle  les  pièces  précédentes 
viennent  se  fixer  et  qui  les  suit  dans  leurs  mouvements. 

Les  éléments  constituants  de  la  cage  osseuse  thoracique  ont  été  déjàoi) 
seront  décrits  séparément  dans  d'autres  parties  du  Dictionnaire  (Toy 
Côte,  Rachis,  Sternum).  Nous  devons  donc  nous  borner  à  l'envisager  io 
dans  son  ensemble. 

Bien  qu'on  ait  l'habitude  de  la  comparer  à  un  cône  droit,  doot  fc 


POITRINE.   ANATQMIE.    THORAX   OSSBDX.  625 

sommet  serait  tronqué,  elle  est  loin  de  présenter  la  régularité  d'une 
figure  de  géométrie.  Ainsi  la  paroi  postérieure  forme  une  courbe  à  con- 
cavité antérieure  ;  la  paroi  antérieure,  qui  est  plane,  est  oblique  en  bas 
et  en  avant  ;  chacune  des  moitiés  latérales  forme  une  surface  convexe 
oblique  de  haut  en  bas  et  de  dedans  en  dehors  ;  mais  Taccroissement  qui 
en  résulte  pour  les  divers  diamètres  transverses  de  la  cavité  manque  de 
régularité.  Ainsi,  le  cône  s'élargit  rapidement  de  la  1"'  côte  à  laS*"  ou  A"^ 
puis  lentement  et  progressivement  de  celle-ci  à  la  S""  ou  O"",  et  se  ré- 
trécît ensuite,  mais  d'une  manière  insensible,  au  niveau  des  dernières 
côtes. 

La  paroi  antérieure  est  constituée  par  le  sternum,  la  série  des  articu- 
lations chondro-sternales,  les  cartilages  costaux,  les  articulations  des 
cartilages  et  des  côtes,  et  enfin  l'extrémité  antérieure  de  ces  dernières. 
La  ceinture  osseuse  de  l'épaule  prend  son  point  d'appui  sur  l'extrémité 
supérieure  de  la  paroi  (articulation  stemo-claviculaire,  ligament  costo- 
claviculaire). 

Vue  à  l'extérieur,  la  paroi  postérieure  présente,  sur  la  ligne  médiane, 
les  apophyses  épineuses  des  vertèbres  dorsales,  de  chaque  côté,  la  gout- 
tière Yerlébrale,  la  série  des  apophyses  transverses  qui  limitent  cette 
gouttière  en  dehors,  le  col  et  la  tubérosité  des  côtes,  leur  partie  dorsale 
et  leur  angle,  qui  sépare  la  région  postérieure  des  régions  latérales. 

Du  côté  de  la  cavité,  Taspect  est  un  peu  différent.  La  colonne  dorsale 
forme,  en  effet,  dans  l'intérieur  de  cette  cavité,  une  colonne  proémi- 
nente, concave  de  haut  en  bas,  convexe  transversalement,  qui  constitue 
de  chaque  côté,  avec  la  partie  initiale  des  côtes,  une  gouttière  profonde 
où  est  reçu  le  bord  postérieur  du  poumon. 

Les  parois  latérales  sont  formées  uniquement  par  la  partie  moyenne 
des  côtes,  toutes  obliques  de  haut  en  bas  et  à  peu  près  parallèles,  mais 
séparées  par  des  espaces  inégaux  (espaces  intercostaux)  qui  vont  en 
diminuant  du  1<"  au  8%  et  s'accroissent  ensuite  progressivement  à  partir 
de  ce  dernier,  de  telle  sorte  que  les  moyens,  qui  sont  les  plus  petits,  ont 
environ  12**^.  L'obliquité  des  côtes  et  des  espaces  intercostaux  est  telle 
que  leur  extrémité  antérieure  s'abaisse,  en  moyenne,  de  trois  vertèbres 
au-dessous  de  leur  extrémité  postérieure. 

Vues  en  dedans,  les  parois  latérales  présentent  une  concavité  corres- 
pondant à  la  convexité  de  leur  surface  externe  ;  elles  répondent  à  la  face 
externe  des  poumons,  dont  elles  sont  séparées  par  la  plèvre  pariétale. 

La  circonférence  de  la  base  du  thorax  osseux  est  formée,  en  avant, 
par  l'appendice  xiphoïde,  en  arrière  par  le  bord  inférieur  des  douzièmes 
côtes,  de  chaque  côté  par  les  rebords  cartilagineux  résultant  de  la  super- 
position des  7",  8%  9"  et  10®  cartilages  costaux.  Ce  contour  se  trouve 
interrompu  au  niveau  des  deux  dernières  côtes  (côtes  ilottantcs). 

Le  sommet  du  thorax  se  présente  sous  la  forme  d'un  orifice  elliptique, 
circonscrit  en  avant  par  l'extrémité  supérieure  du  sternum,  eu  arrière 
par  le  corps  de  la  première  vertèbre  dorsale,  sur  les  côtés  par  les  pre- 
mières côtes.  Le  grand  axe  de  l'ellipse  est  transversal  ;  le  plan  de  l'ori- 


624  POITRINE    —  anatomie.  thobax  ossbui. 

ficc  se  dirige  en  bas  et  en  avant,  Textrémité  du  steroum  répondant  to 
corps  de  la  2*  vertèbre  dorsale. 

Les  dimensions  du  thorax  osseux  ont  une  importance  réelle,  car  elles 
correspondent  assez  exactement,  sauf  les  modifications  qu'y  apporte  la 
présence  des  parties  molles,  aux  dimensions  intérieures  de  la  cavité 
thoracique.  Elles  présentent,  d'ailleurs,  même  à  l'état  physiologique,  des 
différences  individuelles  nombreuses,  sans  compter  les  variations  impor- 
tantes qui  résultent  de  certains  états  pathologiques.  Aum  les  évaluatioBs 
fournies  par  les  anatomistes  offrent-elles  des  divergences  sensibles.  Nous 
nous  bornerons  donc  ici  à  signaler  les  chiffres  moyens  généralemeot 
admis,  renvoyant  à  la  description  de  la  cavité  thoracique  (Fbjf.  p.  655) 
les  détails  complémentaires  qui  y  trouveront  mieux  leur  place,  et  ao 
chapitre  des  Anomalies  les  variations  qui  ont  un  caractère  patholo- 
gique. 

Les  mensurations  pratiquées  sur  la  cage  thoracique  ont  pour  but  la 
détermination  des  trois  diamètres  vertical,  transverse  et  antàro-po§- 
térieur. 

Or,  le  diamètre  vertical  ne  peut  être  apprécié  d'une  manière  satislii- 
sante  que  lorsque  la  cage  osseuse  est  complétée  par  le  diaphragme  qui 
en  obture  l'orifice  inférieur  et  par  la  plèvre  qui  se  réfléchit  de  la  paroi 
costale  sur  les  bords  du  muscle  en  formant  le  sinus  costo-diaphragma- 
tique.  Les  dimensions  du  thorax  osseux  n'ont  donc,  à  ce  point  de  fue, 
qu'une  valeur  relative.  La  paroi  antérieure  représentée  par  toute  la  lon- 
gueur du  sternum  a  environ  O^'ySO  ;  mais,  comme  cet  os  forme  avec 
Thorizon  un  angle  d'environ  70°,  et  qu'en  outre  le  diaphragme  s'insère 
à  la  base  de  l'appendice  xiphoïde,  le  diamètre  vertical  correspondant  se 
réduit  à  0",15  ou  0'",16.  La  paroi  postérieure,  formée  par  la  colonne  do^ 
sale,  a  une  hauteur  verticale  moyenne  de  O'^fSS.  Enfin,  la  distance  qui 
sépare  le  bord  interne  de  la  1"  côte  du  bord  inférieur  de  la  12*  sur  une 
ligne  passant  par  le  mamelon  mesure  en  moyenne  0'",29. 

Les  diamètres  transverse  et  anléro-postérieur  ont  plus  de  valeur  parce 
qu'ils  répondent  d'une  manière  plus  précise  à  ceux  de  la  cavité  vis- 
cérale. 

Nous  savons  déjà  que  le  diamètre  transverse  va  en  augmentant  de  haot 
en  bas  jusque  vers  la  8"  ou  la  9*  côte,  et  qu'il  diminue  ensuite  I^ére- 
mcnt.  Chez  un  adulte  de  taille  moyenne  et  bien  constitué,  il  présente 
les  chiffres  moyens  suivants  :  O"",!!  au  niveau  de  l'orifice  supérieur, 
O^Se  au  niveau  des  8*  et  9*  côtes,  0",22  au  niveau  de  la  12^.  Chez  la 
femme,  les  deux  dernières  moyennes  doivent  être  abaissées  de  plusieurs 
centimètres.  La  prédominance  du  diamètre  transverse  est  généralement 
en  rapport  avec  la  vigueur  de  la  constitution  et  le  développement  de 
l'appareil  respiratoire.  Nous  verrons  plus  loin  qu'il  augmente  et  diminue 
alternativement  sous  Finfluence  des  mouvements  que  la  respiration 
imprime  aux  parois  thoraciques. 

Le  diamètre  anléro-postérieur  augmente  également  de  haut  en  ba.< 
à  cause  de  l'obliquité  du  sternum.  Sur  le  plan  médian  où  ses  dimensions 


POITRLNE..  —  ANATUMit:.  —  p.vniiBs  molles  des  parois.  625 

sont  réduites  par  la  saillie  du  corps  des  vertèbres,  il  s*accroît  progressi- 
vement depuis  0'°,045  (au  niveau  de  la  fourchette  sternale)  jusqu'à  O^^^HS 
(an  niveau  de  l'appendice  xiphoïde).  Mesuré  sur  les  côtés,  c'est-à-dire, 
du  sternum  aux  gouttières  costales,  il  ac/|uiert  environ  0'",025  de  plus. 
Il  subit,  par  le  fait  de  la  respiration,  des  variations  moins  étendues  que 
celles  des  diamètres  tranverse  et  vertical. 

n.  Parties  molles  des  parois.  —  Le  cône  formé  par  la  cage  thoracique 
est  tapissé  à  sa  surface  intérieure  par  une  membrane  séreuse,  la  plèvre, 
qui  facilite  le  glissement  des  organes  qu'il  contient. 

Le  vide  des  espaces  intercostaux  est  comblé  par  deux  plans  musculaires 
et  aponévrotiques,  muscles  intercostaux^  auxquels  s'ajoutent,  sur  cer- 
tains points,  des  faisceaux  accessoires  (muscle  triangulaire  du  sternum^ 
sur-costaux  et  sous-costaux). 

Enfin,  sur  tout  le  pourtour  intérieur  de  la  circonférence  inférieure  du 
thorax  s'insère  une  lame  musculaire  qui  s'élève  à  la  manière  d'une 
voûte  et  forme,  à  la  fois,  la  paroi  inférieure  de  la  cavité  thoracique  et  la 
paroi  supérieure  de  l'abdomen. 

Telles  sont,  à  proprement  parler,  les  parties  molles  intrinsèques  des 
parois  thoraciques.  Si  la  peau,  doublée  de  sa  couche  conjonctive,  s'ap- 
pliquait immédiatement  sur  elles,  la  forme  des  régions  extérieures  de  la 
poitrine  reproduirait  exactement  celle  du  thorax  osseux.  Mais  il  n'en  est 
pas  ainsi.  A  ces  parties  essentielles  se  superposent  des  muscles,  des  os, 
et,  chez  la  femme,  un  organe  glandulaire,  qui  modifient  profondément 
Taspect  et  la  composition  des  parois.  Ce  sont,  pour  ainsi  dire,  les  parties 
extrinsèques. 

La  superposition  de  ces  éléments  extrinsèques  aux  parois  thoracique::, 
proprement  dites,  entraine  les  conséquences  suivantes  : 

1*  Au  point  de  vue  de  la  forme.  —  Tandis  que  le  cône  représenté  par 
le  thorax  osseux  a  son  sommet  en  haut,  la  poitrine  revêtue  de  ses  parties 
molles,  le  bras  étant  supposé  détaché  au  niveaude  l'articulation  scapulo- 
humérale,  présente  ses  plus  grandes  dimensions  en  haut  et  forme  un 
Gdne  à  base  supérieure. 

V  Au  point  de  vue  do  la  protection  des  organes  thoraciques.  —  L'iné- 
galité d'épaisseur  et  de  composition  des  parois  produit  des  différences 
considérables  relativement  au  degré  de  vulnérabilité  de  telle  ou  telle 
partie. 

3^  Au  point  de  vue  fonctionnel.  —  Par  suite  de  la  solidarité  des  mou- 
vements du  sternum  et  des  côtes,  tous  les  faisceaux  musculaires  qu 
viennent  se  fixer  à  l'un  de  ces  os  exercent,  soit  dans  l'état  ordinaire, 
soit  d'une  manière  exceptionnelle,  leur  influence  sur  les  mouvements 
des  parois  thoraciques,  lorsqu'ils  prennent  leur  point  fixe  sur  l'insertion 
opposée.  Inversement,  lorsque  la  poitrine  est  dilatée,  et  que  l'air  con- 
tenu dans  l'appareil  respiratoire  y  est  maintenu  par  l'occlusion  de  la 
glotte,  tous  les  muscles  extrinsèques  des  parois  thoraciques  prenant  alors 
leur  point  fixe,  soit  sur  le  sternum,  soit  sur  les  côtes^  peuvent  concourir 
aux  actions  les  plus  varices 

ROC? .   DIGT.   UÙ>,  ET   CHIR.  XXYin  —  40 


626  POiTHINE.  —  ànatomie.  —  parties  molles  des  paiois. 

Pour  nous  conformer  à  Tordre  que  nous  avons  adopté,  nous  décrirons 
d'abord  les  muscles  intrinsèques,  qui  complètent  et  ferment  le  thorax 
osseux;  nous  énumérerons  ensuite  les  diverses  couches  qui  se  surajoulenl 
aux  parois  antérieure,  postérieure  et  latérale  de  ce  dernier. 

a.  Muscles  intrinsèques  des  parois  thoraciques. 

Intercostaux,  —  Comme  leur  nom  l'indique,  les  muscles  intercostaux 
remplissent  les  espaces  qui  séparent  les  côtes.  Au  nombre  de  deux  pour 
chaque  espace,  ils  sont  désignés  par  les  noms  d'externes  et  d^tnfemei. 
Ils  représentent  deux  lames  musculaires  minces,  superposées  dans  la  plo^ 
grande  partie  de  leur  étendue,  qui  mesurent  exactement  la  largeur  des 
espaces  auxquels  elles  correspondent.  Elles  en  mesurent  aussi  la  lon- 
gueur, avec  cette  restriction,  toutefois,  que  les  intercostaux  externes 
sont  étendus  depuis  les  articulations  costo-vertébrales  en  arrière  jus- 
qu'au niveau  de  l'union  des  cartilages  et  des  côtes  en  avant,  tandis  que 
les  intercostaux  internes  ne  commencent,  en  arrière,  qu'aux  angles  des 
côtes  et  finissent,  en  avant,  au  sternum.  Dans  la  partie,  soit  antérieure, 
soit  postérieure,  de  l'espace  intercostal,  où  l'un  des  deux  plans  muscu- 
laires fait  défaut,  il  est  remplacé  par  une  lame  aponévrotique  résistante. 
Insérés  par  de  courtes  fibres  aponévrotiques  aux  bords  opposés  des  deux 
côtes  correspondantes,  l'un  à  la  lèvre  externe,  l'autre  à  la  lèvre  interne 
de  ces  bords,  les  muscles  intercostaux  ont  une  direction  oblique,  mais 
croisée,  Tintercoslal  externe  se  dirigeant  en  bas  et  en  avant,  Tinteme, 
en  bas  et  en  arrière,  de  telle  sorte  que  cet  entrecroisement,  d'une  pari, 
et  l'abondance  des  fibres  aponévrotiques,  de  l'autre,  donnent  à  ces  deux 
plans  si  minces  une  grande  force  de  résistance. 

Vers  l'extrémité  postérieure  des  espaces  intercostaux,  la  couche  précé- 
dente est  renforcée  par  des  faisceaux  accessoires  qui  portent  le  nom  de 
sous-costaux  et  sur-costaux. 

Muscles  sous-costaux.  —  Ce  sont  de  petites  languettes  musculaire^ 
et  aponévrotiques,  variables  pour  le  nombre  et  la  longueur,  étendues  de 
la  face  interne  de  la  côte  qui  est  au-dessus  à  la  face  interne  de  celle  qui 
est  au-dessous,  et,  quelquefois,  des  deux  suivantes.  Ces  languettes  pré- 
sentent, le  plus  souvent,  une  obliquité  analogue  à  celle  des  intercostaux 
internes  dont  elles  peuvent  être  considérées  comme  une  dépendance. 

Muscles  sur-costaux,  —  Ceux-ci,  au  contraire,  situés  à  l'extérieur  du 
thorax,  représentent  de  petits  muscles  triangulaires,  insérés,  d'une  pari, 
au  sommet  de  l'apophyse  transverse  d'une  vertèbre  dorsale,  et,  deTautre 
part,  au  bord  supérieur  et  à  la  face  externe  de  la  côte  qui  est  au-dessous. 
Les  fibres  de  ces  muscles  ont  la  même  obliquité  que  celles  des  inter- 
costaux externes,  dont  ils  peuvent  être  considérés  comme  des  dépeo- 
dances. 

Triangulaire  du  sternum.  —  A  la  partie  antérieure  des  espaces  inlcr 
costaux,  le  plan  des  intercostaux  internes  est  renforcé  par  des  languettes 
musculaires,  dont  la  direction  rappelle  celle  des  sur-costaux,  tandis  que 
leur  situation  à  l'intérieur  du  thorax  rappelle  celle  des  sous-costaux. 
L'insertion  fixe  de  ces  languettes  a  lieu  sur  les  parties  latérales  de  la  face 


POlTttLNE.    —   ANATOMIE.  —   PARTIES   MOLLES    DES   PAROIS.  627 

stérieure  du  sternum,  au  Yoisinage  de  Tunion  de  Tappendice  xiphoïdc 
des  cartilages  costaux  correspondants.  Le  faisceau  rayonné  qui  en  ré- 
;t6  (muscle  triangulaire  du  sternum) ^  s'attache  par  de  petites  digita- 
us,  à  la  face  postérieure  et  aux  bords  des  cartilages  des  côtes,  depuis 
6*  jusqu'à  la  3%  et,  quelquefois,  jusqu'à  la  2^ 
Diaphragme.  —  Ce  muscle  ayant  déjà  fait,  dans  ce  dictionnaire,  l'objet 
in  article  spécial  {Voy.  t.  XI,  p.  341),  nous  nous  bornerons  à  rappeler 
e  la  voûte  aponévrotique  et  musculaire  qu'il  représente,  indépendam- 
3Dt  des  deux  piliers  volumineux  qui  prennent  leur  point  d'appui  sur  les 
rps  et  les  disques  de  la  2^^  de  la  3*"  et  souvent  de  la  4^  vertèbre  lom- 
ire,  s'insère,  par  son  pourtour,  à  la  face  postérieure  du  sternum,  au 
ireau  de  la  base  de  l'appendice  xiphoïdc,  à  la  face  postérieure  et  au  bord 
périeur  des  cartilages  des  six  dernières  côtes  et  à  la  portion  osseuse  à 
|uelle  les  cartilages  font  suite. 

b.  Couches  extrinsèques  des  parois  thoraciqucs.  —  Nous  consei*ve- 
(18  ici  la  division,  l'ordre  et  les  délimitations  précédemment  adoptés 
lur  la  description  des  parois  osseuses  du  thorax  ;  nous  étudierons  donc 
ccessivement  la  région  antérieure,  la  région  postérieure  et  les  régions 
.^les. 

Région  antérieure  ou  slernale,  —  Limitée,  en  haut,  par  le  bord  supé- 
)iir  du  sternum,  la  clavicule  et  la  première  côte,  elle  se  termine,  en 
s,  sur  la  ligne  médiane,  à  Tappendice  xiphoïdc,  sur  les  côtés,  au  relief 
s  busses  côtes  et  aux  insertions  costales  du  diaphragme.  Ses  limites 
létales,  forcément  arbitraires,  peuvent  être  représentées  par  une  ligne 
rticale  menée,  de  chaque  côté,  immédiatement  en  dehors  de  la  ma- 
ille. 

La  peau,  plus  dense  et  moins  mobile  sur  le  sternum  que  sur  les  parties 
orales,  présente,  chez  la  femme,  une  finesse  excessive  au  niveau  de  la 
amelle,  dont  le  relief  convertit  en  une  sorte  de  gouttière  la  portion 
6diane  de  la  région.  Chez  l'homme,  la  profondeur  de  cette  gouttière 
t  déterminée  par  la  saillie  plus  ou  moins  accusée  des  muscles  grands 
ctoraux. 

La  peau  est  doublée  d'une  couche  de  tissu  conjonctif  graisseux,  d'une 
aisseur  très-variable  suivant  les  sujets,  mais  toujours  moindre  sur  la 
pue  médiane  que  sur  les  côtés. 

Le  fascia  superficialis  forme,  chez  l'homme,  une  couche  simple,  con- 
lue  avec  celle  des  régions  voisines  ;  chez  la  femme,  il  se  dédouble  et 
•mprend  entre  ses  deux  feuillets  la  glande  mammaire  et  l'atmosphère 
aisseuse  qui  l'entoure.  Cette  glande  qui  reste,  chez  l'homme,  à  l'état 
idimentaire  pendant  toute  la  vie,  et  qui  Test  également  chez  la  femme 
squ'à  la  puberté,  acquiert,  à  partir  de  cette  époque,  une  importance 
lysiologique  et  pathologique  telle  qu'elle  mérite  d'être  étudiée  à  part. 
)U8  renverrons  donc,  pour  tout  ce  qui  s'y  rattache,  à  Tarticle  Mamelle. 
XXI,  p.  517. 

Au-dessous,  on  rencontre  l'aponévrose  du  grand  pectoral,  qui  s'insère 
i  haut  au  bord  inférieur  de  la  clavicule,  se  continue  en  bas  avec  la 


« 


618      PNEUMONIE.  —  pn.  chrokiqdb.  —  ph.  chronique  pusuioân. 

Inversement,  les  lésions  de  la  plèvre  retentissent  sur  le  poumoo,  et, 
d'après  Rindfleisch,  il  est  commun  de  voir,  dans  la  pleurésie  sCTo4brJ- 
neuse,  les  alvéoles  superficiels  se  remplir  d*exsudat  fibrineux. 

Les  lésions  de  la  plèvre  peuvent  encore  retentir  sur  le  pouiDonpvh 
voie  des  lymphatiques.  L'inflammation  reste  en  général  confinée  dans  le 
lymphatique,  mais  elle  peut  se  propager  au  tissu  conjonctif  voisin  ioter- 
lobulaire  ou  sous-pleural. 

Certaines  pleurésies,  en  général  de  mauvaise  nature^  et  sur  lesqodb 
Moxon  a  l'un  des  premiers  appelé  l'attention,  s'accompagnent  d'oR 
angioleucite  pulmonaire  généralisée.  Il  en  est  de  même  pour  les  pleorésies 
puerpérales  (Ileiberg,  Quinquaud,  Longuet),  pour  le  carcinome  pubn»> 
naire  consécutif  au  carcinome  du  sein  et  de  la  plèvre  (Charcot  et  Debove). 
Enfin,  l'expérimentation  a  également  montré  ces  relations  (angioleadle 
pulmonaire  consécutive  à  l'injection  de  produits  tuberculeux  dans  h 
plèvre),  et  il  résulte  des  recherches  histologiques  de  Hanvier  etdeDjk- 
kowsky,  précédés  dans  cette  voie  par  Bichat,  qu'il  existe  des  orifieei 
réservés  entre  les  cellules  épithéliales,  et  qui  font  communiquer  directe- 
ment la  cavité  séreuse  avec  les  réseaux  lymphatiques  superficiels  enee^ 
tains  points,  orifices  qu'on  retrouve  chez  l'homme  aussi  bien  que  cheile 
animaux  (Wagner,  Arch.  der  lleilkunde,  1870).  Cet  auteur  a  même  vu  due 
la  pleurésie  fibrineuse  aiguë  ou  chronique  les  lymphatiques  superûcUs 
contenir  de  la  fibrine  se  continuant  immédiatement  avec  le  dépôt  fibri- 
neux  de  la  fausse  membrane.  Cornil  et  Ranvier  ont  tu  les  lymphatiqaes 
superiicicls  distendus  par  l'exsudat  fibrineux.  Ces  auteurs  ont  fait  leffs 
observations  sur  la  plèvre  pariétale,  mais  elles  ont  été  répétées  depuis 
par  Klein  sur  la  plèvre  pulmonaire,  et  Troisier  a  vu  les  injections  de 
carmin  faites  dans  la  plèvre  pénétrer  jusque  dans  les  lymphatiques  sois- 
pleuraux. 

Moxon  a  montre  que  la  pleurésie  purulente  peut  être  suivie  de  Tffi- 
tables  pneumonies  interstitielles  aiguës.  Une  véritable  suppuration  iotff- 
lobulaire  se  produit  en  pareil  cas.  Rindfleiseh,  Hayera,  ont  cité  des  faits 
analogues  à  propos  de  la  pneumonie  disséquante  dans  laquelle  un  on 
plusieurs  lobules  se  trouvent  comme  séquestrés,  séparés  du  reste  de 
Torgane.  Mais  il  s'agit  là  d'une  phase  aiguë  sur  laquelle  nous  n'avons  ptf 
à  insister. 

L'extension  du  processus  parla  voie  des  lymphatiques  peut  condiûrt* 
la  formation  d'une  pneumonie  fibroïde  cloisonnée.  On  peut  désiptf 
sous  le  nom  de  pleurogènes  ces  pneumonies  interlobulaires  chroniqn» 
consécutives  à  la  pleurésie.  Divers  auteurs  les  ont  signalées,  en  partico- 
lier  W.  Fox  {Reynold's  System,  art.  Pneumonie  chronique)  et  Brouardc! 
(Bull,  de  la  Soc.  des  hôpitaux,  1872,  p.  168),  Charcot  en  rapports 
dans  ses  leçons  deux  observations  qui  lui  ont  été  communiquées  ptf 
Tapret,  alors  interne  de  Oulmont.  Les  faits,  comme  on  le  voit,  sont  encore 
trop  peu  nombreux  pour  qu'on  puisse  faire  une  description  complète 
de  cette  forme.  Nous  devons  ajouter  que  cette  pénurie  d'observation 
ne  doit  pas  nous  surprendre,  car  le  plus  souvent  les  bronches  et  le  j«- 


-  PARTIES   HOLLBS  I 


petit  pectoral  dans  son  dédoulilemont  gL  va  s'implanter  sur  la  face  pro- 
fonde de  la  peau  de  l'aisselle,  en  bas,  les  insertions  supérieures  du  grand 
droit  de  l'abdomen,  enfin,  sur  les  limites  de  la  région,  celles  du  grand 


1,  muKie  3(crno-cl£ido-iuai 

lu  Iriccps  brtchÏBl:  13,  iwrt  da  Inp^i  li, 
pnliim  «upirïîures  ;    10,    hrandw»  pMWrieuK»  de 
ncrft  cÏKonDfUs  ;  IB.  Iiumtnle  proronlcvl^,  irifr»  du 
leï  DiDKlea  prijfuud<  diu  gouKièri!]  tirtébrnles  (Avr.in). 


dentelé  et  du  grand  oblique,  qui  se  rattnclient  bien  mieux  nux  régions 
latérales  (fig.  35). 

Les  artères  superficielles  de  la  région  antérieure  proviennent  de  plu- 
sieurs sources.  La  tborarique  supérieure,  brandie  de  l'axillaire,  loumit 
en  haut  quelques     rameaux;    sur   les  cùlés   du    sternum,    de  petites 


620  PNEUMONIE.  —  pn.  chronique.  —  bibliographie. 

dilatation  et  de  l'insuifisance  du  cœur  droit  ne  tardent  pas  alors  à  se 
montrer.  Le  deuxième  bruit  du  cœur  est  accentué;  suivant  Traube,  par 
suite  du  déplacement  du  cœur  à  droite  dans  certains  cas,  on  peut  po^ 
ccvoir  dans  le  deuxième  espace  intercostal  un  soulèvement  systolique  dû 
à  la  dilatation  de  la  portion  initiale  de  Tartère  pulmonaire,  et  un  soulè- 
vement diaslolique  consécutif  correspondant  à  Tocclusion  des  Takoles 
sigmoïdes  de  ce  vaisseau  ;  ces  phénomènes  sont  en  rapport  avec  l'aug- 
mentation de  la  pression  dans  l'artère  pulmonaire  et  avec  la  rétractioaîi 
tissu  qui  recouvre  l'artère  à  Tétat  normal.  L'œdème,  commençant  m 
membres  inférieurs,  se  généralise.  Les  malades  succombent  aux  progrè 
de  Tasphyxie.  Dans  une  observation  de  Tapret,  la  mort  fut  déterminée 
par  une  pneumonie  survenue  dans  le  poumon  opposé.  Le  prona$lk  est 
grave,  d'autant  plus  que  les  cas  publiés  jusqu'à  ce  jour  ont  présenté  uae 
marche  assez  rapide  (Brouardel,  Tapret,  Nothnagel). 

Le  traitement  comporte  d'abord  des  indications  prophylactiques  ish 
portantes  :  Brouardel  recommande  de  vider  la  plèvre  de  bonne  heore, 
alors  que  le  poumon  peut  reprendre  son  volume  normal  avant  que  les 
fausses  membranes  et  les  cloisons  conjonclives  ne  soient  épaissies  d 
rétractées.  Plus  tard,  les  révulsifs  (teinture  d'iode,  huile  de  croton,  ven- 
touses, vésicatoires)  doivent  être  prescrits  pour  empêcher  les  progrès 
des  lésions.  Ces  divers  moyens,  ainsi  que  la  dérivation  intestinale,  soot 
surtout  utiles  lorsque  des  poussées  congestives  se  produisent  du  côté  da 
poumon.  Il  faut,  en  outre,  faire  fonctionner  le  poumon,  dont  le  puce- 
chyme  est  peu  altéré  :  l'aérothérapie,  l'exercice  modéré,  le  séjour  i  h 
campagne,  répondent  à  cette  indication.  L'attention  doit  être  toujouis 
portée  sur  l'état  des  forces,  qu'il  faut  améliorer  autant  que  possible;  des 
mesures  hygiéniques  rigoureuses  doivent  être  prises  pour  éviter  les  refroi- 
dissements et  les  bronchites  qui  en  sont  souvent  la  suite  et  constituent 
une  des  complications  les  plus  dangereuses.  Enfin,  dans  la  danièR 
période,  on  devra  recourir  à  la  digitale  et  aux  divers  moyens  qui  peuvent 
relever  l'action  du  cœur. 

Traités  d'Anatomie  pathologique   de  Basse,  Roeitanskt,  Lebebt,  in-folio,  t.  1,  Fôssm,  Cnva- 

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I  POITRINE.  —  ANATOMIE.  621 

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,  F.  Balzer. 

h' 

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PIVEUMOTHORAX.  Voij.  Plèvbe. 

POIGNET.  Voy.  Main,  t.  XXI,  p.  259. 

POISOIVI^.  Voy.  Empoisonnement,  l.  XII,  p.  749. 

■^     POITRINE  (pectus,  ewpa;,  ail.  Brust,  angl.  breast,  it.  pecto,  esp. 
i^pecho).  —  Anatomîe.  —  On  désigne  ainsi  non-seulement  la  cavité 
^  viscérale  limitée  en  haut    par  le  cou,   en  bas  par  l'abdomen,  qui  ren- 
ferme les  organes  centraux  de  la  respiration  et  de  )a  circulation,  mais 


622  POITRINE.  —  àmatoiiik.  thorax  osseux. 

encore  les  parois  qui  la  constituent.  L'expression  de  thorax,  par  laquelle 
on  désigne  quelquefois  la  cage  osseuse  de  la  poitrine,  est  le  plus  sooTent 
employée  comme  synonyme  de  ce  dernier  mot  ;  le  nom  de  cavité  th&ra" 
cique  s'applique,  avec  plus  de  précision,  à  la  cavité  viscérale,  abstradion 
faite  de  ses  parois. 

Envisagée  à  ce  dernier  point  de  vue,  la  poitrine  forme  une  des  difi- 
sions  naturelles  du  corps,  chez  l'homme  comme  chez  tous  les  mainiDi- 
fères.  Ses  limites  extérieures  sont,  au  contraire,  plus  difiiciles  à  établir. 
La  ligne  de  démarcation  entre  les  parois  thoraciques  proprement  dites  d 
la  paroi  abdominable,  dans  la  région  des  hypochondres,  est  purement 
fictive.  Il  en  est  de  même  au  voisinage  de  l'épaule,  où  les  attaches  di 
membre  supérieur  se  superposent  à  la  paroi  latérale  de  la  poitrine  et  m 
modifient  la  partie  supérieure.  Enfin  la  paroi  thoracique  postérieure  se 
confond,  en  grande  partie,  avec  la  portion  dorsale  des  régions  racki- 
diennes,  dont  l'ensemble  forme  une  division  naturelle,  étudiée  séparé- 
ment dans  la  plupart  des  traités  d'anatomie  chirurgicale. 

Il  n'est  donc  pas  facile  d'établir  extérieurement  les  limites  exactes  des 
régions  thoraciques,  et  il  en  résulte,  comme  nous  le  verrons  plusloiflt 
quelques  inconvénients  au  point  de  vue  des  déductions  pratiques. 

Cette  difficulté  n'existe  pas  quand  on  considère  le  squelette,  où  le  thonx 
forme  une  sorte  de  cage  osseuse,  constituée  en  avant  par  le  steroim, 
en  arrière  par  l'ensemble  des  vertèbres  dorsales,  de  chaque  côté  par  k 
série  des  douze  côtes.  Si,  par  la  pensée,  on  revêt  ces  pièces  osseuses  des 
parties  molles  qui  y  adhèrent  directement  en  dedans  et  en  dehors,  e' 
qu'on  introduise  la  voûte  du  diaphragme  dans  l'espace  circonscrit  parla 
circonférence  inférieure,  on  a  une  idée  assez  exacte  de  la  cavité  et  de  ses 
parois  propres. 

Au  lieu  donc  de  procéder,  dans  la  description  de  la  poitrine,  de  l'exté- 
rieur vers  l'intérieur,  comme  pour  les  autres  régions,  il  nous  semble 
préférable  de  suivre  l'ordre  inverse ,  c'est-à-dire ,  d'étudier  succe9sif^ 
ment  :  1°  Le  thorax  osseux.  2°  Les  diverses  couches  de  parties  inoBei 
qui  revêtent  ou  complètent  les  parois  osseuses.  3**  La  cavité  qui  en  résulte. 

I.  Thorax  osseux.  —  Il  représente  un  tronc  de  cône  droit  constitué 
par  : 

1°  Une  partie  postérieure,  médiane  et  fixe,  qui  soutient  les  autres,  co- 
lonne dorsale  ; 

2°  Deux  parties  latérales  représentant  chacune,  suivant  une  expresâeo 
heureuse  de  Sappey,  un  large  éventail  dont  les  pièces  se  rapprochent  e*. 
s'éloignent  alternativement,  ce  sont  les  eûtes; 

3°  Une  colonne  antérieure,  sternum,  à  laquelle  les  pièces  précédentes 
viennent  se  fixer  et  qui  les  suit  dans  leurs  mouvements. 

Les  éléments  constituants  de  la  cage  osseuse  thoracique  ont  été  déjào» 
seront  décrits  séparément  dans  d'autres  parties  du  Dictionnaire  {Vo^ 
Côte,  Rachis,  Sterkum).  Nous  devons  donc  nous  bornera  l'envisager  io 
dans  son  ensemble. 

Bien  qu'on  ait  l'habitude  de  la  comparer  à  un  cône  droit,  dont  k 


I«, 


POITRINE.   ANATQIIIE.    THORAX   OSSEUX.  625 

SQmmet  serait  tronqué,  elle  est  loin  de  présenter  la  régularité  d'une 
figure  de  géométrie.  Ainsi  la  paroi  postérieure  forme  une  courbe  à  con- 
cavité antérieure  ;  la  paroi  antérieure,  qui  est  plane,  est  oblique  en  bas 
et  en  avant  ;  chacune  des  moitiés  latérales  forme  une  surface  convexe 
oblique  de  haut  en  bas  et  de  dedans  en  dehors  ;  mais  Taccroissement  qui 
en  résulte  pour  les  divers  diamètres  transverses  de  la  cavité  manque  de 
régularité.  Ainsi,  le  cône  s'élargit  rapidement  de  la  l"""  côte  à  la  5'  ou  4", 
puis  lentement  et  progressivement  de  celle-ci  à  la  8^  ou  9%  et  se  ré- 
trécit ensuite,  mais  d'une  manière  insensible,  au  niveau  des  dernières 
côtes. 

La  paroi  antérieure  est  constituée  par  le  sternum,  la  série  des  ai*ticu- 
lations  chondro-sternalcs,  les  cartilages  costaux,  les  articulations  des 
cartilages  et  des  côtes,  et  enfin  l'extrémité  antérieure  de  ces  dernières. 
La  ceinture  osseuse  de  l'épaule  prend  son  point  d'appui  sur  l'extrémité 
supérieure  de  la  paroi  (articulation  stemo-claviculaire,  ligament  costo- 
claviculaire). 

Vue  à  l'extérieur,  la  paroi  postérieure  présente,  sur  la  ligne  médiane, 
les  apophyses  épineuses  des  vertèbres  dorsales,  de  chaque  côté,  la  gout- 
tière vertébrale,  la  série  des  apophyses  transverses  qui  limitent  cette 
gouttière  en  dehors,  le  col  et  la  tubérosité  des  côtes,  leur  partie  dorsale 
et  leur  angle,  qui  sépare  la  région  postérieure  des  régions  latérales. 

Du  côté  de  la  cavité,  l'aspect  est  un  peu  diflérent.  La  colonne  dorsale 
forme,  en  effet,  dans  l'intérieur  de  cette  cavité,  une  colonne  proémi- 
nente, concave  de  haut  en  bas,  convexe  transversalement,  qui  constitue 
de  chaque  côté,  avec  la  partie  initiale  des  côtes,  une  gouttière  profonde 
où  est  reçu  le  bord  postérieur  du  poumon. 

Les  parois  latérales  sont  formées  uniquement  par  la  partie  moyenne 
des  côtes,  toutes  obliques  de  haut  en  bas  et  à  peu  près  parallèles,  mais 
séparées  par  des  espaces  inégaux  (espaces  intercostaux)  qui  vont  en 
diminuant  du  l*"'  au  8%  et  s'accroissent  ensuite  progressivement  à  partir 
de  ce  dernier,  de  telle  sorte  que  les  moyens,  qui  sont  les  plus  petits,  ont 
environ  IS"***.  L'obliquité  des  côtes  et  des  espaces  intercostaux  est  telle 
que  leur  extrémité  antérieure  s'abaisse,  en  moyenne,  de  trois  vertèbres 
au-dessous  de  leur  extrémité  postérieure. 

Vues  en  dedans,  les  parois  latérales  présentent  une  concavité  corres- 
pondant à  la  convexité  de  leur  surface  externe  ;  elles  répondent  à  la  face 
externe  des  poumons,  dont  elles  sont  séparées  par  la  plèvre  pariétale. 

La  circonférence  de  la  base  du  thorax  osseux  est  formée,  en  avant, 
par  l'appendice  xiphoïde,  en  arrière  par  le  bord  inférieur  des  douzièmes 
côtes,  de  chaque  côté  par  les  rebords  cartilagineux  résultant  de  la  super- 
position des  7%  8%  9"  et  lO*"  cartilaj2;es  costaux.  Ce  contour  se  trouve 
interrompu  au  niveau  des  deux  dernières  côtes  (côtes  tlottanlcs). 

Le  sommet  du  thorax  se  présente  sous  la  forme  d'un  orifice  elliptique, 
circonscrit  en  avant  par  Textréinité  supérieure  du  sternum,  en  arrière 
par  le  corps  de  la  première  vertèbre  dorsale,  sur  les  côtés  par  les  pre- 
mières côtes.  Le  grand  axe  de  lellipse  est  transversal  ;  le  plan  de  l'ori- 


f     » 


624  POITRINE    —  anatomie.  thorax  osseux. 

fice  se  dirige  en  bas  et  en  ayant,  rextrémitc  du  stemam  ii|idii 
corps  de  la  2*  vertèbre  dorsale. 

Les  dimensions  du  thorax  osseux  ont  une  importance 
correspondent  assez  exactement,  sauf  les  modifications  qa*y 
présence  des  parties  molles,  aux  dimensions   intérieur»  de  h 
thoracique.  Elles  présentent,  d'ailleurs,  même  à  Fétat  pb 
différences  individuelles  nombreuses,  sans  compter  les  variMioa 
tantes  qui  résultent  de  certains  états  pathologiques.  Aussi  les  i 
fournies  par  les  anatomistes  offrent-elles  des  divergences 
nous  bornerons  donc   ici  à  signaler  les  chiffres  moyens 
admis,  renvoyant  à  la  description  de  la  cavité  thoracique  IVaif.  f> 
les  détails  complémentaires  qui  y  trouveront  mieux  leur  plaee, 
chapitre  des  Anomalies  les  variations  qui  ont  un  caractère 
gique. 

Les  mensurations  pratiquées  sur  la  cage  thoracique  ont  pov 
détermination  des   trois  diamètres   vertical,   transverse  et 
térieur. 

Or,  le  diamètre  vertical  ne  peut  être  apprécié  d'une  manière 
santé  que  lorsque  la  cage  osseuse  est  complétée  par  le  diap 
en  obture  rorifice  inférieur  et  par  la  plèvre  qui  se  réfléchit  de  h 
costale  sur  les  bords  du  muscle  en  formant  le  sinus  costo-dia 
tique.  Les  dimensions  du  thorax  osseux  n'ont  donc,  à  ce  pointé 
qu'une  valeur  relative.  La  paroi  antérieure  représentée  par  toute  k 
gueur  du  sternum  a  environ  0'°,20  ;  mais,  comme  cet  os  form 
l'horizon  un  angle  d'environ  70°,  et  qu'en  outre  le  diaphragme  s 
à  la  base  de  l'appendice  xiphoïde,  le  diamètre  vertical  correspoodii^ 
réduit  à  O^jlS  ou  O^tlô.  La  paroi  postérieure,  formée  par  la  colonne 
sale,  a  une  hauteur  verticale  moyenne  de  0'°,25.  Enfin,  la  distaneif| 
sépare  le  bord  interne  de  la  l'*"  côte  du  bord  inférieur  de  la  12*8ar 
ligne  passant  par  le  mamelon  mesure  en  moyenne  0"',29. 

Les  diamètres  transverse  et  anléro-postérieur  ont  plus  de  valeor 
qu'ils  répondent  d'une  manière  plus  précise  à  ceux  de  la  avA 
cérale. 

Nous  savons  déjà  que  le  diamètre  transverse  va  en  augmentant  de  W 
en  bas  jusque  vers  la  8*  ou  la  9*  côte,  et  qu'il  diminue  ensuite  1^ 
ment.  Chez  un  adulte  de  taille  moyenne  et  bien  constitué,  il  priiA 
les  chiffres  moyens  suivants  :  O"",!!  au  niveau  de  Torifice  supèrili* 
O^Se  au  niveau  des  8*  et  9'  côtes,  0™,22  au  niveau  de  la  IS'.Cte* 
femme,  les  deux  dernières  moyennes  doivent  être  abaissées  de  plnsieit 
centimètres.  La  prédominance  du  diamètre  transverse  est  généraleoi'j 
en  rapport  avec  la  vigueur  de  la  constitution  et  le  développemenl  * 
l'appareil  respiratoire.  Nous  verrons  plus  loin  qu'il  augmente  eldinÙB* 
alternativement  sous  l'influence  des  mouvements  que  la  respinb^* 
imprime  aux  parois  thoraciques. 

Le  diamètre  antéro-poslérieur  augmente  également  de  haut  en  ki^ 
à  cause  de  l'obliquité  du  sternum.  Sur  le  plan  médian  où  ses  diinemi(« 


POITRLNE..  —  ANATOMIt.  —  PARTIES   MOLLES    DES    PAHOIS.  625 

éduites  par  la  saillie  du  corps  des  vertèbres,  il  s'accroît  progressif 

it  depuis  0'°,045  (au  niveau  de  la  fourchette  sternale)  jusqu'à  0'°,115 

iyeau  de  l'appendice  xiphoide).  Mesuré  sur  les  côtés,  c'est-à-dire, 

sroum  aux  gouttières  costales,  il  acfjuiert  environ  O^^yOâS  de  plus. 

\tj  par  le  fait  de  la  respiration,  des  variations  moins  étendues  que 

des  diamètres  tranverse  et  vertical. 

^ARTiEs  MOLLES  DES  PAROIS.  —  Le  cône  formé  par  la  cage  thoracique 

issé  à  sa  surface  intérieure  par  une  membrane  séreuse,  la  plèvre, 

îlite  le  glissement  des  organes  qu'il  contient. 

ide  des  espaces  intercostaux  est  comblé  par  deux  plans  musculaires 

névrotiques,  muscles  intercostaux^  auxquels  s'ajoutent,  sur  cer- 

oints,  <les  faisceaux  accessoires  (muscle  triangulaire  du  sternum^ 

9iaux  et  sous-costaux). 

Q ,  sur  tout  le  pourtour  intérieur  de  la  circonférence  inférieure  du 

s'insère  une  lame  musculaire  qui  s'élève  à  la  manière  d'une 
it  forme,  à  la  fois,  la  paroi  inférieure  de  la  cavité  thoracique  et  la 
supérieure  de  l'abdomen. 

es  sont,  à  proprement  parler,  les  parties  molles  intrinsèques  des 
thoraciques.  Si  la  peau,  doublée  de  sa  couche  conjonctive,  s'ap- 
lit  immédiatement  sur  elles,  la  forme  des  régions  extérieures  de  la 
ae  reproduirait  exactement  cellç  du  thorax  osseux.  Mais  il  n'en  est 
nsi.  A  ces  parties  essentielles  se  superposent  des  muscles,  des  os, 
ez  la  femme,  un  organe  glandulaire,  qui  modi6ent  profondément 
et  et  la  composition  des  parois.  Ce  sont,  pour  ainsi  dire,  les  parties 
tsèques. 

superposition  de  ces  éléments  extrinsèques  aux  parois  thoraciquci:, 
^ment  dites,  entraine  les  conséquences  suivantes  : 
iu  point  de  vue  de  la  forme.  —  Tandis  que  le  cône  représenté  par 
rax  osseux  a  son  sommet  en  haut,  la  poitrine  revêtue  de  ses  parties 
),  le  bras  étant  supposé  détaché  au  niveau  de  l'articulation  scapulo- 
raie,  présente  ses  plus  grandes  dimensions  en  haut  et  forme  un 
I  base  supérieure. 
Lu  point  de  vue  do  la  protection  des  organes  thoraciques.  —  L'iué- 

d'épaisseur  et  de  composition  des  parois  produit  des  différences 
lérables  relativement  au  degré  de  vulnérabilité  de  telle  ou  telle 

• 

Lu  point  de  vue  fonctionnel.  —  Par  suite  de  la  solidarité  des  moû- 
ts du  sternum  et  des  côtes,  tous  les  faisceaux  musculaires  qu 
int  se  fixer  à  l'un  de  ces  os  exercent,  soit  dans  l'état  ordinaire, 
'une  manière  exceptionnelle,  leur  influence  sur  les  mouvements 
rois  thoraciques,  lorsqu'ils  prennent  leur  point  fixe  sur  l'insertion 
!e.  Inversement,  lorsque  la  poitrine  est  dilatée,  et  que  l'air  con- 
lans  l'appareil  respiratoire  y  est  maintenu  par  l'occlusion  de  la 
tous  les  muscles  extrinsèques  des  parois  thoraciques  prenant  alors 
oint  fixe,  soit  sur  le  sternum,  soit  sur  les  côtes^  peuvent  concourir 
tiens  les  plus  variées 

Cf.  DicT.  m£o.  et  chir.  XXVin  —  40 


62tt  POITRINE.    —   ANATOMIE.  —  PARTIES    MOLLES    DES   PAIOB. 

Pour  nous  conformer  à  Tordre  que  nous  avons  adopté,  doqs 
d'abord  les  muscles  intrinsèques,  qui  complètent  et  ferment  kki 
osseux;  nous  énumérerons  ensuite  les  diverses  couches  qui  sennjM 
aux  parois  antérieure,  postérieure  et  latérale  de  ce  dernier. 

a.  Muscles  intrinsèques  des  parois  thoraciques. 

Intercostaux.  —  Comme  leur  nom  Tindique,  les  muscles  inteniÉi 
remplissent  les  espaces  qui  séparent  les  côtes.  Au  nombre  de  àet^ 
chaque  espace,  ils  sont  désignés  par  les  noms  d'externes  etd'i 
Ils  représentent  deux  lames  musculaires  minces,  superposées  dauli 
grande  partie  de  leur  étendue,  qui  mesurent  exactement  la  Itigei 
espaces  auxquels  elles  correspondent.  Elles  en  mesurent  aussi  k 
gueur,  avec  cette  restriction,   toutefois,   que  les   intercostaux 
sont  étendus  depuis  les  articulations  costo-vertébrales   en  anièR 
qu'au  niveau  de  Tunion  des  cartilages  et  des  côtes  en  avant,  tanii 
les  intercostaux  internes  ne  commencent,  en  arrière,  qu'aux  angb 
côtes  et  finissent,  en  avant,  au  sternum.  Dans  la  partie,  soit 
soit  postérieure,  de  l'espace  intercostal,  où  l'un  des  deux  plans 
laires  fait  défaut,  il  est  remplacé  par  une  lame  aponévrotique 
Insérés  par  de  courtes  fibres  aponévrotiques  aux  bords  opposés  dtiiJ 
côtes  correspondantes,  l'un  à  la  lèvre  externe,  l'autre  à  la  lemi 
de  ces  bords,  les  muscles  intercostaux  ont  une  direction  oblitpe, 
croisée,  Fintercostal  externe  se  dirigeant  en  bas  et  en  avant,  Va 
en  bas  et  en  arrière,  de  telle  sorte  que  cet  entrecroisement,  d'iae 
et  l'abondance  des  fibres  aponévrotiques,  de  l'autre,  donnent  à  os 
plans  si  minces  une  grande  force  de  résistance. 

Vers  l'extrémité  postérieure  des  espaces  intercostaux,-  la  couche  p^ 
dente  est  renforcée  par  des  faisceaux  accessoires  qui  portent  le  nsti 
sous-costaux  et  sur-costaux. 

Muscles  sous-costaux.  —  Ce  sont  de  petites  languettes  musaàP 
et  aponévrotiques,  variables  pour  le  nombre  et  la  longueur,  étendad» 
la  face  interne  de  la  côte  qui  est  au-dessus  à  la  face  interne  de  tékf 
est  au-dessous,  et,  quelquefois,  des  deux  suivantes.  Ces  languettes  p 
sentent,  le  plus  souvent,  une  obliquité  analogue  à  celle  des  iotercs^ 
internes  dont  elles  peuvent  être  considérées  comme  une  dépendaooe. 

Muscles  sur-costaux.  —  Ceux-ci,  au  contraire,  situés  à  l'exlérii'* 
thorax,  représentent  de  petits  muscles  triangulaires,  insérés,  d'unel"*» 
au  sommet  de  l'apophyse  transverse  d'une  vertèbre  dorsale,  el^def* 
part,  au  bord  supérieur  et  à  la  face  externe  de  la  côte  qui  est  au-dc** 
Les  fibres  de  ces  muscles  ont  la  même  obliquité  que  celles  des  ifli^! 
costaux  externes,  dont  ils  peuvent  être  considérés  comme  des  Hf^ 
dances. 

Triangulaire  du  sternum.  —  A  la  partie  antérieure  des  espaces i# 
costaux,  le  plan  des  intercostaux  internes  est  renforcé  par  des  langac^i 
musculaires,  dont  la  direction  rappelle  celle  des  sur-costaux,  tandis  f 
leur  situation  à  l'intérieur  du  thorax  rappelle  celle  des  sous-cosU"' 
L'insertion  fixe  de  ces  languettes  a  lieu  sur  les  parties  latérales  de  bki 


POlTttLNE.    —   ANATOMIE.  —   PARTIES   MOLLES    DES   PAROIS.  627 

trieure  du  sternum,  au  voisinage  de  Tunion  de  l'appendice  xiphoïde 

ts  cartilages  costaux  correspondants.  Le  faisceau  rayonné  qui  en  ré- 

{muscle  triangulaire  du  sternum),  s'attache  par  de  petites  digita- 

,  à  la  face  postérieure  et  aux  bords  des  cartilages  des  côtes,  depuis 

jusqu'à  la  3%  et,  quelquefois,  jusqu'à  la  2^ 

'aphragme.  —  Ce  muscle  ayant  déjà  fait,  dans  ce  dictionnaire,  l'objet 

article  spécial  (Voy.  t.  XI,  p.  341),  nous  nous  bornerons  à  rappeler 

La  voûte  aponévrotique  et  musculaire  qu'il  représente,  indépendam- 

.  des  deux  piliers  volumineux  qui  prennent  leur  point  d'appui  sur  les 

1  et  les  disques  de  la  2"^,  de  la  3''  et  souvent  de  la  4^  vertèbre  lom- 

,  s'insère,  par  son  pourtour,  à  la  face  postérieure  du  sternum,  au 

hu  de  la  base  de  l'appendice  xiphoïde,  à  la  face  postérieure  et  au  bord 

Heur  des  cartilages  des  six  dernières  côtes  et  à  la  portion  osseuse  à 

dlle  les  cartilages  font  suite. 

Couches  extrinsèques  des  parois  thoraciques.  —  Nous  conserve- 
ici  la  division,  l'ordre  et  les  délimitations  précédemment  adoptés 
la  description  des  parois  osseuses  du  thorax  ;  nous  étudierons  donc 
dssivement  la  région  antérieure,  la  région  postérieure  et  les  régions 
aies. 

fgion  antérieure  ou  slernale,  —  Limitée,  en  haut,  par  le  bord  supé- 
du  sternum,  la  clavicule  et  la  première  côte,  elle  se  termine,  en 
■ur  la  ligne  médiane,  à  l'appendice  xiphoïde,  sur  les  côtés,  au  relief 
pusses  côtes  et  aux  insertions  costales  du  diaphragme.  Ses  limites 
■les,  forcément  arbitraires,  peuvent  être  représentées  par  une  ligne 
cale  menée,  de  chaque  côté,  immédiatement  en  dehors  de  la  ma- 
s« 

peau,  plus  dense  et  moins  mobile  sur  le  sternum  que  sur  les  parties 
aies,  présente,  chez  la  femme,  une  finesse  excessive  au  niveau  de  la 
L«lle,  dont  le  relief  convertit  en  une  sorte  de  gouttière  la  portion 
âne  de  la  région.  Chez  l'homme,  la  profondeur  de  celte  gouttière 
.^terminée  par  la  saillie  plus  ou  moins  accusée  des  muscles  grands 
fe»raux. 

peau  est  doublée  d'une  couche  de  tissu  conjonctif  graisseux,  d'une 
^seur  très-variable  suivant  les  sujets,  mais  toujours  moindre  sur  la 
t  médiane  que  sur  les  côtés. 

»  fascia  superficialis  forme,  chez  l'homme,  une  couche  simple,  con- 
^  avec  celle  des  régions  voisines  ;  chez  la  femme,  il  se  dédouble  et 
^rend  entre  ses  deux  feuillets  la  glande  mammaire  et  l'atmosphère 
^seuse  qui  l'entoure.  Cette  glande  qui  reste,  chez  l'homme,  à  l'état 
tnentaire  pendant  toute  la  vie,  et  qui  Test  également  chez  la  femme 
u'à  la  puberté,  acquiert,  à  partir  de  cette  époque,  une  importance 
iologique  et  pathologique  telle  qu'elle  mérite  d'être  étudiée  à  part. 
I  renverrons  donc,  pour  tout  ce  qui  s'y  rattache,  à  l'article  Mabielle, 
XI,  p.  517. 

ii-dessous,  on  rencontre  l'aponévrose  du  grand  pectoral,  qui  s'insère 
laut  au  bord  inférieur  de  la  clavicule,  se  continue  en  bas  avec  la 


838  POITRINE.  —  anatomir.  —  parties  holles  des  i 

gaine  du  grand  droit  de  rahJonicii,  ot,  en  dehors,  avec  les  a 
deltoïdienne  et  bradiiale,  tandis  nuen  dedans  elle  se  confond»» le 
périoste  du  sternum. 

Le  muacle  volumineux  et  puissant  qui  est  siluc  au-dessous,  narnn 
la  presque  totalité  de   la  région,  cauf  en  dedans   ol  en  bas;  le  ll^ 


Kîg   M.  - 


B,  Irapiie  ;  F,  gnnile  corna 
lin  ÎDlfrne  ;  I).  «>rp*  Ibjrotdt 
ipnpbju  concifidci  N,  t^li    ' 


éventail  qu'il  i-cpréscute  ss  détaclie,  en  deliors,  de  la  paroi  costahf' 
l'ormer  la  paroi  antérieure  de  l'aisselle. 

Le  petit  pectoral  n'appartient  à  la  région  que  par  ses  îiisertioDi 
talcB.  Le  corps  du  muscle  se  rattaclie  plutiH  â  la  région  de  Tii» 
Signalons,  pour  mémoire,   la  clavicule  et  son  muscle  sous-clavitf^ 
surmontent  la  région  et  recouvrent  la  première  cote,  l'aponévnue  f 
fonde  (clavi-axillaire)  qui  part  de  la  gaine  du  sous-clavier,  embruft* 


-  Af*T0«1F    —  PAIiTIES 


petit  pectoi  jl  dani  son  dedouliiemcnt  et  va  >«  implanlei  sur  la  face  pro 
-  fonde  de  la  peau  de  1  iieteile  en  bas  les  inserti  >n<4  supéi  leui  es  du  grand 
K  droit  de  I  abdomen    enlin,  sur  les  lrn]ite«  de  la  région,  celles  du  grand 


lo-cltido-niHtDlilicii;'  i,  tpKuhu;  3.  angulilre  da  l'omoiilalc  ; 
Ë,  um^^fiatai:  8,  inpèu  ;  9i  tnati  donil  ;  10,  paUt  rand  i 
>s  brscLiili  IS,  Dsrf  da  tripiu;  11,  arlirei  certicalu  Inoilf 
IMS;  IS,  brinch*)  poMérieurci  de  li  oeriit«lc  lndi«rM]  17,  arWrfc,  winM  ei 
:  IB.  bnmJraLe  protondo  r  19.  irljr»  du  gniid  Jinlplé;  SO,  aponivroie  qui  rccouire 
profoiidi  des  eouKièr»  T»rifl>tale»  |JI<ciiO- 

iQleiitelé  et  du  grand  oblique,  qui  se  rattnclient  bien  mieux  nux  régions 
Jtàlérales  (fig.  35). 

^'  Les  artères  superficielles  de  la  région  antérieure  proviennent  de  plu- 
hftKurs  sources.  La  Uioracique  supérieure,  branche  de  Texillaire,  fournit 
Qtt  haut   quelques     rameaux;    sur   les   côtés   du    sternum,    de   petites 


630  POITRINE.  —  anatomie.  —  parties  molles  des  paiois. 

branches  de  la  mammaire  interne  se  dirigent  de  dedans  en  ddiors;oB 
trouve,  enfin,  sur  toute  la  surface  de  la  région  des  rameaux  soperibek 
venus  des  intercostales.  Dans  la  couche  moyenne,  nous  devons  apikr 
le  tronc  plus  important  de  la  thoracique  supérieure  qui  chemine  entre 
le  grand  et  le  petit  pectoral.  Dans  le  plan   profond,  on  rencoDtrf  b 
mammaire  interne  qui  a  une  importance  réelle.  Née  de  la  sousHJanèit, 
un  peu  au-dessus  de  l'orifice  supérieur  du  thorax,  elle  se  porte  «i«> 
derrière  la  clavicule,  puis  derrière  le  premier  cartilage  costal  et  descend 
verticalement  le  long  du  bord  du  sternum  contre  lequel  elle  s'spp&fK, 
en  haut,  tandis  qu'en  bas,  elle  en  est  séparée  par  un  intervalle  de 8  oo 
10  millimètres.  Elle  fournit,  eu  dehors,  des  rameaux  qui  vonts'inasb- 
moscr  avec  les  intercostales,  et  s'anastomose  elle-même,  par  sa  bmck 
terminale  interne  avec  les  rameaux  de  l'épigastrique  dans  répaisseorè 
muscle  grand  droit  de  l'abdomen.  Sa  situation  profonde  derrière  kser 
tilages  costaux  la  soustrait,  en  partie,   à  l'action  des  violences  fût 
rieures;  mais,  dans  les  espaces  intercostaux,  où  elle  n*est  reconerie 
que  par  une  faible  épaisseur  de  parties  molles,  elle  est  susceptible fébt 
lésée  et  de  fournir,  vu  son    calibre,  une  hémorrhagie  grave,  i^ 
omettons  à  dessein  l'énumération  des  veines,  des  lymphatiques  et  de^ 
nerfs  de  la  région  qui  ne  peuvent  donner  lieu  i  aucune  déduction  pn- 
tique  intéressante.) 

Région  postérieure  ou  rachidienne.  —  Elle  s'étend  verticalemeot  df 
la  V  vertèbre  dorsale  à  la  1'"  vertèbre  lombaire  ;  de  chaque  côlé,  elle 
est  limitée  profondément  par  l'angle  postérieur  des  côtes.  Cheikssqet^ 
doués  d'un  certain  embonpoint,  cette  limite  latérale  est  assez  dificile 
à  déterminer  ;  de  plus,  à  la  partie  supérieure,  le  bord  spinal  de  Toib*- 
plate  empiète  sur  la  région  postérieure  et  la  recouvre  en  partie. 

La  ligne  médiane  présente  un  sillon  vertical,  plus  ou  moins  probi' 
suivant  le  degré  de  i^aillie  des  muscles  spinaux,  au  fond  duquel  oQtpff-  . 
çoit,  chez  les  sujets  maigres,  une  crête  festonnée  formée  par  lasérie,<k>| 
apophyses  épineuses.  Les  faillies  latérales  comprises  entre  ces  émiocoers 
et  Tangle  postérieur  des  côtes  sont  masquées  par  les  divers  plans  bb^ 
culaires  que  nous  énumérerons  plus  loin. 

La  peau  de  la  région,  dense,  épaisse,  est  douée  d'une  certaine  noiii' 
lité  sur  les  côtés,  mais  elle  est  fixée,  sur  la  ligne  médiane,  furde^ 
lamelles  fibreuses  qui,  de  la  face  profonde  du  denne,  vont  s'insérer  aux 
apophyses  épineuses. 

Le  tissu  adipeux  est  quelquefois  très  abondant  sur  les  côtés;  il  «>* 
toujours  moins  épais  au  milieu. 

Le  fascia  superficialis  et  l'aponévrose  d'enveloppe  qui  se  confondeii 
sur  plusieurs  points,  adhèrent,  sur  la  ligne  médiane,  aux  apophp^ 
épineuses  et  se  continuent,  sur  les  côtés,  avec  les  couches  analogues  if 
];i  région  voisine. 

Le  plan  musculaire  superficiel  est  constitué  par  le  trapèze  etlegn*' 
dorsal  qui  occupent  toute  la  hauteur  de  la  région  (fig.  36). 

Au-dessous  du  trapèze,   on  rencontre   le  rhomboïde,  qui  affedel* 


POITRINE.    —    ANATOMIE.    —    PARTIKS   MOLLES    DES    PAROIS.  631 

foime  d'un  parallélogramme,  obliquement  étendu  de  l'épine  dorsale  au 
bord  spinal  de  Tomoplate,  Texlrémité  inférieure  du  splénius  et  le  petit 
dentelé  supérieur  ;  au-dessous  du  grand  dorsal ,  le  petit  dentelé 
inférieur. 

La  couche  musculaire  profonde  est  formée  par  les  muscles  des  gout- 
tières vertébrales  (fig.  36),  ainsi  nommés  parce  qu'ils  sont  situés  dans 
une  loge  fermée  en  avant  par  les  lames  vertébrales,  les  apophyses  trans- 
verses et  les  articulations  costo-vertébrales,  en  arrière  par  une  forte 
aponévrose  fixée,  d'une  part,  aux  apophyses  épineuses,  d'autre  part, 
à  l'angle  des  côtes.  Ces  deux  loges  ne  communiquent  pas  entre  elles; 
elles  sont  séparées  par  les  apophyses  épineuses  et  les  ligaments  inter- 
épineux. 

Les  vaisseaux  superficiels  de  la  région  ne  présentent  que  peu  d'in- 
térêt, au  point  de  vue  chirurgical  ;  ce  sont  des  rameaux  de  la  scapulaire 
postérieure,  de  la  scapulaire  inférieure  et  de  la  branche  dorso-spinale 
des  intercostales  aortiques,  dont  la  lésion  serait  sans  gravité.  Là  branche 
terminale  de  la  scapulaire  postérieure,  qui  a  un  volume  assez  considé- 
rable, est  protégée  par  le  bord  spinal  de  l'omoplate.  Profondément,  dans 
la  partie  des  espaces  intercostaux  comprise  entre  les  corps  vertébraux  et 
l'angle  postérieur  des  côtes,  on  rencontre  le  tronc  lui-même  des  intercos- 
tales, qui  n'est  pas  protégé,  comme  il  le  sera  plus  loin,  par  la  gouttière 
du  bord  inférieur  des  côtes,  et  dont  la  présence  contre-indique  le  choix 
de  cette  région  pour  la  pratique  de  l'opération  de  l'empyème. 

Régions  latérales  ou  costales.  —  Elles  correspondent  à  toute  cette 
partie  des  parois  thoraciques  qui  est  comprise  entre  les  deux  régions 
précédentes  ;  la  limite  supérieure  en  est  masquée  par  les  régions  de 
l'épaule;  la  limite  inférieure  est  représentée  par  une  ligne  courbe 
étendue  de  l'appendice  xiphoïde  à  la  12*  vertèbre  dorsale  et  correspondant 
à  la  série  des  insertions  costales  du  diaphragme. 

La  clavicule,  l'omoplate  et  la  tête  de  l'humérus,  les  muscles  de  l'é- 
paule, ceux  qui  se  rendent  des  régions  thoraciques  antérieure  et  posté- 
rieure à  la  racine  du  membre  supérieur  forment  une  masse  épaisse  et 
résistante,  qui,  dans  la  position  normale  de  ce  membre  supérieur,  re- 
couvre et  protège  la  partie  supérieure  de  la  région  thoracique  latérale. 
Celle-ci  forme  la  paroi  interne  du  creux  de  l'aisselle.  Lorsque  le  bras  est 
relevé  horizontalement,  elle  devient  accessible  aux  agents  vulnérants, 
dans  l'iiUervalle  compris  entre  les  deux  reliefs  puissants  formés  par  le 
grand  pectoral  et  le  grand  dorsal.  Dans  la  partie  inférieure  de  la  région, 
la  paroi  costale  devient  superficielle. 

Au-dessous  de  la  peau,  doublée  d'une  couche  graisseuse  d'épaisseur 
variable  et  d'un  fascia  superficialis  lamelleux  qui  facilite  son  glissement, 
la  couche  musculaire  superficielle  est  constituée,  en  haut  par  le  grand 
dentelé,  dont  les  faisceaux  divergents  s'étendent  du  bord  spinal  de  l'omo- 
plate à  la  face  externe  des  9  ou  10  premières  côtes,  en  bas  par  le  grand 
oblique  de  l'abdomen,  dont  les  digitations  s'entre-croisent  sur  la  face 
externe  des  8  dernières  côtes  avec  celles  du  grand  dorsal  et  du  grand 


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POITRINE.    —   ANATOMIE.    CAVITÉ   THORACIQUE.  655 

dentelé,  et  enGn  par  les  insertions  costales  du  petit  dentelé  postérieur  et 
inférieur  (fig.  37). 

Le  troisième  plan  est  formé  par  tes  côtes  et  les  muscles  intercostaux 
précédemment  décrits. 

Bien  que  le  faisceau  vasculo-ner?eux  qui  traverse  le  creux  axillaire  soit 
en  rapport  avec  les  deux  premières  côtes,  nous  ne  le  signalerons  ici  que 
pour  mémoire,  car  il  n^appartient  pas  à  la  région  costale,  avec  laquelle  il 
n'a  que  des  rapports  de  voisinage  peu  étendus. 

Les  artères  superGcielles  de  la  région  sont,  la  plupart,  des  branches 
peu  importantes  de  la  thoracique  supérieure,  des  intercostales,  et  de  la 
scapulaire  inférieure  ;  le  tronc  de  celte  dernière  est  protégé  par  le  bord 
axillaire  de  l'omoplate  ;  mais  il  n*en  est  pas  de  même  de  la  thoracique 
longue  ou  mammaire  externe  qui  dercend  verticalement  sur  les  parties 
latérales  du  thorax,  appliquée  sur  le  grand  dentelé,  et  qui,  recouverte  en 
haut  par  le  grand  pectoral,  devient  assez  superiicielle  au-dessous  de  ce 
muscle. 

Les  artères  propres  de  la  région  sont  les  intercostcdes.  Ces  artères 
proviennent,  les  unes,  de  la  sous-clavière,  le  plus  grand  nombre  de 
Taorte  thoracique;  Tintercostale  supérieure  fournit  aux  deux  ou  trois 
premiers  espaces,  et  les  intercostales  aortiques,  à  tous  les  autres.  A  par- 
tir de  Tangle  postérieur  des  côtes,  l'artère  que  nous  avons  vue  occuper 
jusque-là  le  milieu  de  l'espace  intercostal,  se  loge  dans  la  gouttière 
longitudinale  que  présente  le  bord  inférieur  de  la  côte  supérieure  et  la 
parcourt  jusqu'au  niveau  de  l'angle  intérieur  où  elle  se  replace  à  égale 
distance  des  deux  côtes  pour  se  terminer  en  s'anastomosant  avec  les  bran- 
ches externes  de  la  mammaire  interne.  Les  artères  intercostales  sont 
accompagnées  d'une  ou  deux  veines  collatérales,  et  des  nerfs  intercostaux 
que  nous  devons  signaler  à  cause  des  névralgies  si  douloureuses  dont  ils 
sont  parfois  le  siège. 

L'étude  de  la  paroi  thoracique  inférieure  et  des  parties  molles  qui 
reniplissent  l'orifice  supérieur  du  thorax  nous  paraît  se  rattacher  de  pré- 
férence à  la  description  de  la  cavité. 

in.  Cavité  thoracique.  —  Vue  à  l'intérieur,  la  cavité  thoracique  repré- 
sente un  tronc  de  cône  droit,  légèrement  aplati  dans  le  sens  antéro-pos- 
térieur,  dont  le  sommet  communique  avec  la  région  cervicale,  dont  la 
base  est  formée  par  la  surface  courbe  musculo-aponévrotique  du  dia- 
phragme. Mous  savons  déjà  qu'à  l'intérieur  du  cône  thoracique  proémine 
la  saillie  des  corps  vertébraux,  ce  qui  donne  aux  coupes  transversales  de 
la  cavité  la  forme  d'un  cœur  de  carte  à  jouer. 

La  paroi  inférieure  ou  base  y  proémine  aussi,  mais  d'une  manière  iné- 
gale, plus  à  droite  qu'à  gauche,  par  suite  de  la  position  du  foie. 

Mous  avons  signalé  plus  haut  les  insertions  du  diaphragme  à  la  circon- 
férence de  la  base  du  thorax;  la  ligne  courbe  qu'elles  décrivent  est  donc 
oblique  en  bas  et  en  arrière,  sa  partie  antérieure  correspondant  à  l'ap- 
pendice xiphoïde,  tandis  que  son  extrémité  postérieure  répond  à  la  12* 
vertèbre  dorsale. 


634  POITRINE.    —    ANATOMIE.  —  CAVITÉ  TUORACIQCE. 

II  suit  de  là  que,  sur  son  pourtour  inférieur,  la  cavité  thoracîque  est 
séparée  de  Tabdomen  par  une  rigole  circulaire  très-peu  accusée  ea  ifaot, 
mais  assez  profonde  sur  les  côtés  et  un  peu  en  arrière.  Sauf  cette  ioégilité 
de  profondeur,  on  a  pu  comparer  cette  disposition  à  celle  de  la  partie  in- 
férieure des  bouteilles  dont  le  fond  est  refoulé  à  Tintérieur.  Les  deux 
cavités  thoracique  et  abdominale  se  pénètrent  donc  réciproquement  en 
arrière  et  sur  les  côtés. 

La  face  supérieure  du  diaphragme  est  en  rapport,  au  milieu  et  nn  peu 
à  gauche,  par  sa  portion  aponévrotique  ou  centre  phrénique»  avec  le  péri- 
carde qui  y  adhère  intimement,  sur  les  côtés  avec  la  plèvre  pariétale 
qui,  à  l'état  sain,  peut  s'en  détacher  au  contraire  assez  facilement. 

La  partie  périphérique  du  muscle  s'applique  aux  parois  correupondanle» 
du  thorax,  de  telle  sorte  que  la  cavité  pleurale  se  trouve  effacée  à  droite 
et  à  gauche  dans  une  hauteur  de  plusieurs  centimètres.  Il  en  résulte^ 
ainsi  que  nous  le  verrons  plus  loin,  que  ce  n'est  que  dans  les  grandes 
inspirations  qu'on  voit  les  poumons  séparer  cette  partie  périphérique  des 
parois  latérales  et  postérieures  du  thorax  en  s'insinuant  entre  le  moscle 
et  les  côtes.  Il  en  résulte  aussi  que  les  parois  extérieures  de  la  poitrine 
sont  loin  de  correspondre  dans  toute  leur  hauteur  aux  organes  thoraciqoes. 
et  que,  dans  la  région  des  hypochondres,  une  partie  des  viscères  de  l'abdo- 
men, le  foie,  l'estomac,  la  rate,  le  colon  transverse,  le  pancréas,  le 
duodénum  sont  cachés  sous  le  thorax. 

Derrière  l'appendice  xiphoïde,  une  petite  portion  du  muscle  nest 
recouverte  ni  par  la  péricarde  ni  par  la  plèvre,  et  se  trouve  immédiate- 
ment en  rapport  avec  le  tissu  cellulaire  du  médiastin.  D'autre  part,  il 
existe,  presque  toujours,  dans  un  écartement  des  fibres  qui  s'insèrent  au 
sternum  et  au  cartilage  de  la  1^  côte,  un  petit  intervalle  celluleux,  par 
lequel  le  tissu  conjonctif  du  médiastin  communique  avec  le  tissu  cod- 
jonctif  sous-péritoncal.  C'est  par  cetle  voie  que  certains  abcès  du  médias- 
lin  ont  pu  venir  s'ouvrir  à  la  face  antérieure  de  l'abdomen. 

Le  diaphragme  est  percé  de  plusieurs  ouvertures  destinées  à  donner 
passage  aux  organes  qui  se  portent  de  la  cavité  thoracique  à  la  cavité  ab- 
dominale, veine  cave  inférieure,  aorte,  canal  thoracique,  veine  azygos, 
œsophage,  nerfs  pneumo-gastriques.  (Voy.  Diaphragme,  t.  XI,  p.  5Î1  el 
%  20.)  ^ 

La  cavité  lhoraci(]ue  n'a  pas  de  paroi  supérieure;  son  orifice  supérieur 
n'est  obturé  par  aucun  plan  fibreux  ni  musculaire;  il  existe  donc  une 
libre  communication  entre  le  tissu  conjonctif  de  la  base  du  cou  et  celui 
du  médiastin,  autour  des  organes  qui  traversent  cet  orifice.  Ces  organes 
sont  :  en  avant  la  trachée,  en  arrière  l'œsophage,  sur  les  côtés  les 
troncs  artériels  et  veineux  de  la  tête  et  du  membre  supérieur.  Enfin,  le 
sommet  des  poumons  et  des  plèvres  déborde  la  première  côte  d'un  tra- 
vers de  doigt  environ.  Toutes  ces  parties  sont  séparées  de  Textérieur,  en 
avant  et  sur  les  côtés,  par  les  diverses  couches  qu'on  rencontre  à  la  base 
des  régions  sous-hyoïdienne  et  sus-claviculaire  qui  ne  leur  fournissent, 
d'ailleurs,  qu'une  protection  fort  incomplète.  (l'oy.  Cou,  t.  IX,  p.  657.) 


POITRINE.    —    AiNATOillE.   —   CAVITÉ   TUORACIQOE.  65^ 

Les  dimensions  aniéro-postérieures  et  transversales  de  la  cavité  thora- 
cique  nous  sont  déjà  connues.  Elles  sont  sensiblement  les  mêmes  que  les 
dimensions  intérieures  du  thorax  osseux.  {Voy.  p.  624.)  Elles  présentent. 
par  suite,  des  différences  individuelles  très-étendues  et  subissent,  en 
outre»  dans  l'acte  de  la  respiration,  des  variations  alternatives  qui  se  rat- 
tachent à  Tétude  des  phénomènes  mécaniques  de  cette  fonction.  (Voy,  Res- 

PntATION.) 

Le  diamètre  vertical  ou  mieux  les  divers  diamètres  verticaux  présentent 
des  variations  bien  plus  considérables  encore.  lien  est  un  pourtant  qui^ 
sur  le  même  individu,  présente  une  fixité  relative  ;  c'est  celui  qui  passe 
par  le  centre]  phrénique,  lequel,  occupant  le  sommet  de  la  voûte  dia- 
phragmatique,  et  étant  maintenu  par  le  péricarde  auquel  il  adhère,  jouit 
d^une  sorte  d'immobilité.  Le  nombre  moyen  de  0",15  ou  0",16  que  nous 
avons  adopté,  comme  représentant  le  diamètre  vertical  antérieur  du  tho- 
rax, correspond  assez  bien  à  ce  point.  Sur  les  côtés  et  en  arrière,  au  con- 
traire, le  diamètre  vertical  varie  à  chaque  instant.  Ainsi,  tandis  qu'il  aug- 
mente pendant  l'inspiration,  par  suite  de  l'abaissement  du  diaphragme, 
il  diminue  pendant  l'expiration,  le  muscle  remontant  alors  jusqu'à  la 
6*  côte,  et  même  quelquefois,  du  côté  droit,  jusqu'à  la  4®.  La  différence 
de  niveau  entre  le  maximum  d'élévation  et  le  maximum  d'abaissement 
peut  aller  jusqu'à  0™,15  d'après  J.  Cloquet  et  Malgaigne,  jusqu'à  0",07 
seulement,  d'après  Sappey.  11  est  vrai  que  les  diamètres  de  la  cavité  pleu- 
rale, mesurés  du  cul-de-sac  supérieur  de  cette  membrane  aux  divers  points 
du  cul-de-sac  inférieur  ne  présentent  pas  de  pareilles  oscillations;  mais, 
comme  les  poumons  ne  descendent  jamais  jusqu'au  fond  du  cul-de-sac  in- 
férieur, la  détermination  exacte  des  diamètres  verticaux  de  la  cavité  Iho- 
i*acique  présente,  comme  on  voit,  de  sérieuses  difficultés.  Nous  y  revien- 
drons plus  loin,  à  l'occasion  de  la  description  de  la  plèvre. 

La  cavité  thoracique  ne  représente  pas  une  cavité  simple,  uniloculaire: 
elle  est  cloisonnée  par  la  plèvre  qui  la  divise  en  trois  parties  principales, 
savoir,  deux  cavités  latérales  ou  pleuro-pulmonaireset  une  cavité  moyenne 
ou  médiastin  qu'on  divise,  pour  la  commodité  de  la  description,  soit  en 
loges  supérieure  et  inférieure,  soit  en  loges  antérieure  et  postérieure. 

La  plèvre^  comme  foutes  les  membranes  séreuses,  enveloppe  les  pou- 
mons sans  les  contenir  dans  sa  cavité;  un  de  ses  feuillets  s'applique  sur 
ces  organes,  tandis  que  l'autre  revêt,  presque  en  totalité,  les  parois  tho- 
raciques. 

Pour  se  rendre  un  compte  exact  de  la  disposition  de  ces  deux  feuillets, 
il  faut,  sur  une  série  de  coupes  verticales  et  transversales  de  la  poitrine, 
suivre  le  trajet  de  la  plèvre  dans  les  divers  points  de  son  étendue. 

On  voit  ainsi,  d'abord,  qu'elle  recouvre  toute  la  paroi  latérale  du  tho- 
rax sur  la  face  profonde  des  côtes  et  des  espaces  intercostaux  (feuillet 
pariétal).  En  bas,  où  elle  rencontre  les  insertions costîiles  du  diaphragme, 
elle  se  réfléchit  sur  ce  muscle  et  coiffe,  en  quelque  sorte,  sa  face  supérieure, 
à  l'exception,  toutefois,  du  centre  phrénique  qui  adhère  au  péricarde  et 
au  niveau  duquel  la  plèvre  diaphragmatique  se  réfléchit  de  bas  en  haut 


fl36  rOITRIISE.    —  A>*T01ÉIE.    —   CAVITE   THORACM 

pour  se  conlinuw  avec  la  plèvre  médiastine.  Au  niveau  de  l'ouwrturt  «!• 
ipérieiire  du  Ihoras.  la  plèvre  se  moule  sur  le  sommet  de  cha<ioe|»«wD 
■cl  Tonne  ainsi    deux  cids-de-sacs  séparés  qui  déhordenl  la  premièfetfK 


D  élé  opéri^  du  telle  fason  r|iir  I 


A.   IKIIIKI 

K,  cloliau  miencuiricuioiri'j  u 
riml  Uiortdqtiei  F,  r'inf  niygi 
S,  L,  irt^na  minuDiirci'  inlcme 
Ju  gnnd  peetonl  dtait  ei  giudit 
ijDucliE  parlent  kiir  niiinéro   d'oi 
Irnnlri  de  peitrliit.  ilific  d'ngrii 


Il  «niliss  da  la    traUt„u  («t 
lurTin  de  wdion  birine  us  |fei' 
|U*  {iroiluinit  un  iniBUanl  iw^AI 

ic  la  rtppail  dM  srginci  Mit  Hiai  itcc  hclluj  et  hib  d «pliceumi. 
B,  ginuiiioii  gauclte  ;  C,  OTlIé  du  •entriculc  giuchu  ;  D.  caiiii 

■        ■        - :   I.Dmllette  droite;  B,  mo 

mm  i  H,  tiuu  «lluliire  ilu  u 

jX.l.tDupe  du  grand  dora);  ii,a.anèreiiiitera»i>l«;  Llf 

,,  ^„n  g,  ^„ç[„.  i«j4,„** 

la  douiièDw  ttsui,  PMc  1* 


1,  coape  du  grand  di 


d'un  travers  de  doigt  environ.  En  avant  et  en  orrièrc,  au  niveau  da  sW 
num  et  de  la  colonne  vertébrale,  le  feuillet  pnriétal  qui  a  lapifsé  U  p" 
latérale,  abandonne  cette  paroi,  seréni'cliitens'écnrtfinl  desoncong^ 


rOlTRlKE.    —   ANATOUIE.    CAVITÉ   THORACIQOE.  657 

et  se  dirige,  d'avant  en  arrière  ou  d'arrière  en  avant,  vers  la  racine  du 
poumon  correspondant,  pour  s'appliquer  ensuite  sur  cet  organe  et  lui  for- 
mer une  enveloppe  immédiate  qui  adhère  intimement  à  sa  surface  ex- 
térieure et  pénètre  dans  les  scissures .  intcrlobaires  dont  elle  revêt  tout  le 
pourtour  (feuiliet  viscéral).  (Voy.  fig.  38.)  Il  existe,  donc,  en  réalité^ 
deux  plèvres  et  deux  sacs  pleuro-pulmonaires.  L'intervalle  qui  les  sépare 
en  avant  et  en  arrière,  au-dessus  et  au-dessous  du  pédicule  pulmonaire, 
constitue,  dans  l'intérieur  du  thorax,  une  cavité  intermédiaire  qui  n'est 
autre  que  le  médiaslin. 

Telle  est  l'idée  d'ensemble  qu'on  peut  se  faire  de  la  configuration  de 
la  plèvre.  Nous  devons,  maintenant,  entrer  dans  quelques  détails  pour 
ilidiquer  les  particularités  qu^elle  présente  sur  divers  points  de  son  éten- 

9  et  spécialement  au  niveau  de  ses  lieux  de  réflexion. 
i  Faisons  remarquer  d'abord  que  l'expression,  communément  employée, 

isavité  pleurale,  s'applique  h  Tespace  virtuel  compris  entre  le  feuillet 
tal  et  le  feuillet  viscéral  de  la  plèvre.  A  l'état  normal,  il  n'y  a  pas  de 

ilé  proprement  dite;  les  deux  feuillets  sont  accolés  l'un  à  l'autre,  et 
même  la  cause  pour  laquelle  le  poumon,  malgré  sa  rétractilité,  suit 

mouvements  d'ampliation  de  la  cage  thoracique;  il  ne  se  forme  de  ca- 
réello  que  lorsqu'un  épanchement  gazeux  ou  liquide  s'interpose 
entre  les  deux  feuillets. 

Les  rapports  de  la  plèvre  pariétale  avec  les  diverses  parties  de  la  ca- 
vité thoracique,  l'ont  fait  diviser  en  trois  portions  :  costale,  diaphragma- 
tique,  médiastine. 

La  première,  qui  offre  le  plus  d'intérêt  au  point  de  vue  chirurgical, 
est  remarquable  par  son  épaisseur  et  son  peu  d'adhérence  aux  parties  sous- 
jacentes.  Au-dessous  d'elle  existe  une  couche  de  tissu  cellule-graisseux 
(tissu  conjonctif  sous-pleural).  Enfin,  entre  cette  couche  et  les  intercostaux 
internes,  on  trouve  une  lame  de  tissu  fibreux  qui  semble  la  continuation 
du  périoste  de  la  face  interne  des  côtes. 

Un  point  important  à  signaler,  c'est  Tintervalle  triangulaire,  à  base  su- 
périeure, qui  sépare  la  paroi  costale  de  la  face  externe  et  supérieure  du 
diaphragme  et  qui  a  reçu  le  nom  de  sinus  costo-diaphragmalique.  Ce  cul- 
de-sac  part  de  la  base  de  Tappendice  xiphoïde  et  suit,  à  partir  de  ce  point, 
comme  les  insertions  costales  du  diaphragme,  un  trajet  oblique  en  bas 
et  en  arrière  jusqu'à  la  12^  côte.  C*est  lui  qui  ferme  en  bas  la  cavité  tho- 
racique et  en  forme  la  limite  réelle.  II  est  tapissé  dans  toute  son  étendue 
par  le  feuillet  pariétal  de  la  plèvre  qui,  de  la  paroi  costale,  se  réfléchit  sur 
le  diaphragme.  La  distance  verticale  qui  sépare  le  fond  du  cul-de-sac  in- 
férieur du  sommet  du  sac  pleural,  correspond  au  diamètre  vertical  maxi- 
mum de  la  cavité  thoracique;  elle  est,  en  moyenne,  de  O'^.^Q. 

11  faut  remarquer,  toutefois,  que  le  poumon  n'occupe  jamais  la  tota- 
lité du  cul-de-sac  en  question,  de  sorte  que  les  plèvres  costale  et  dia- 
phragmatique  sont  en  contact  dans  une  certaine  hauteur  qui  varie  aux 
divers  moments  de  Pacte  respiratoire.  Ainsi,  pendant  l'inspiration,  à 
mesure  que  le  diaphragme  s'abaisse,  le  poumon  descend  d'une  certaine 


(Î58  POITRINE.  —  uiTOMiE.  —  cavité  thoiucique. 

i(uanlilé  ;  pendant  l'expiration,  le  poumon  remoDlc,  à  mesure  qw 
le  diaphragme  s'élève  ;  le  sinus  devient  vide  et  les  deui  pfere 
frottent  l'une  coalre  l'autre.  La  hauteur  maximum  à  laquelle,  dan.- 
une  expiration  forcée,  le  poumon  peut  remonter  au-dessus  du  point  dr 
réflexion,  varie,  suivant  les  évaluations  des  divers  auteurs,  de  0*,lli 
a  0-.  13. 

Sappey,  qui  a  adopté  le  premier  de  ces  deux  cliifTres  el  qui  Iram 
Se  deuxième  beaucoup  trop  élevé,  a  conclu  de  ses  recherches  :  l' ip. 
dans  l'expiration,  les  poumons  ne  remontent  pas  en  arrière  au  deliji 
bord  inférieur  de  la  10*  cAte,  et  en  avant,  au  delà  du  bord  inféricuidi: 
la  5'  à  droite,  et  du  bord  supérieur  de  la  6'  k  gauche  ;  2*  que,  dans  l'iie- 
piration,  il  descend  au-dessous  de  cette  limite  extrême,  d'one  qutulilr 
variable,  mais  encore  mal  déterminée. 

Il  résulte  de  celte  disposition  qu'une  plaie  pénétrante  de  la  poitriDe.qii 
a  son  siège  dans  les  cinq  derniers  espaces  intercostaux,  peut,  soinri 
(]ue  la  blessure  a  coïncidé  avec  le  moment  de  l'inspiration  ou  de  l'op- 
ration,  perforer  la  cavité  pleurale  et  le  diaphragme,  atteindre  a  m 
plusieurs  des  viscères  abdominaux  avec  ou  sans  lésion  concoDÎtaBte  h 
poumon. 

Nous  avons  vu,  plus  haut,  qu'au  niveau  de  l'orifice  supérietir<b 
thorax,  le  sommet  du  sac  pleural  et  du  poumon  déborde  li'-gèremoil  I'' 
plan  de  la  {"cale  et  de  l'orifice.  Cette  disposition  doit  être  prfMt;  i 
l'esprit  du  chirurgien  qui  pratique  la  ligature  de  la  sous-clafiii*  ^' 
dehors  des  scalèncs.  Dans  le  dernier  temps  de  l'opcration,  les  recbtrch^ 
doivent  être  dirigées  sans  abandonner  la  surface  de  la  prcmicct  rôU. 
si  on  ne  veut  pas  s'exposer  à  déchirer  la  plèvre  et  a  ouvrir  liant' 
pleurale. 

Pour  compléter  la  description  des  rapports  de  la  plèvre  avec  lespnr 
du  thorax,  il  nous  resterait  encore  à  examiner  la  situation  reUliM'' 
cul-de-sac  antérieur  des  plèvres  droite  et  gauche,  c'est-à-dire  do  biria 
niveau  duquel  la  plèvre  pariétale  se  réfléchit  pour  se  continaer  inf  b 
plèvre  médiastine.  Celte  élude  ayant  été  déjà  faite  d'une  manière  Irb- 
coniplèlc  dans  l'article  Péhicarde  {Voy.  t.  \XVI,  p.  568),  nous  neponne 
qu'y  renvoyer  le  lecteur. 

La  région  du  médiastin,  eu  égard  aux  organes  qu'elle  renlinK. 
offrirait,  au  point  de  vue  chirurgical,  un  intérêt  bien  supérieur  iu^v 
des  régions  pleuro-pulmonaires,  si  elle  n'était  protégée,  en  arrièr»  Jff 
la  colonne  vertébrale,  en  avant  par  le  sternum,  sur  les  côtés  parloolt 
l'épaisseur  des  poumons. 

Cette  région  ayant  déjà  fait  l'objet  d'un  article  spécial  (Voy.  Mëdusuj- 
t.  XXII,  p.  i),  nous  ne  ferons  que  rappeler  succinctement  les  orgJiie 
qu'elle  contient.  Ce  sont  : 

l'Daus  la  loge  antérieure,  limitée  en  avant  par  le  sternum,  en  arhcR 
par  un  plan  vertical  qui  passerait  par  le  liile  des  deux  poumons,  le  fio- 
carde  et  le  cœur,  les  neifs  phréuiques,  l'artère  pulmonaire,  la  crosse^ 
l'aorte,  la  veine  cave  supérieure.  Pendant  la  vie  intra-utérine  ei  p* 


I.  mut  ;  !,  iiuuiDOnt ,  3.  piricanJc  ouvert;  1,'irirrc  |iiiJinctiiBirï  ;  S,  aurte;  li.  miDs  ci 
ï,  treiif  bncliio-ctplialiqnf  ;  8.  earoliile  primilïip  gnuche;  9,  >aui-clivliri'  giucbs  ; 
ÏDlETiic  couple;  11,  diaphngnuliqu?  supiirieim;  13,  CDrooiirs  urdiiquD  ■Dl4irlcunt 
«rdlaque  poUérlcnrc  ;  li,  oeif  phrùiiqui'  ;  llî,  ntrf  paeutuogatlriqua  (Bumii  el  Bqccuiib). 


640  POiTRiNE.  —  anatomie.  —  cavité  tuoracique. 

dant  les  premières  années  qui  suivent  la  naissance,  il  faut  y  joindre  le 
thymus  (fig.  59). 

2*^  Dans  le  plan  vertical  mentionné  ci-dessus,  le  pédicule  des  poumcos, 
formé  par  la  terminaison  de  la  trachée,  les  bronches»  les  artères  elb 
veines  pulmonaires. 

5*"  Dans  la  loge  postérieure  comprise  entre  le  même  plan  et  la  colonne 
vertébrale,  Faorte  thoracique,  Tcesophage,  les  veines  azygos,  le  ctoal 
thoracique,  du  tissu  conjonctif,  des  ganglions  lymphatiques,  des  n- 
meaux  du  grand  sympathique  et  les  nerfs  pneumo-gastriques. 

Tous  ces  organes  sont  plongés,  le  cœur  excepté,  dans  un  tissu  conjoDdit 
aréolaire,  dont  la  présence  assure  à  certains  d'entre  eux,  tels  que  la 
trachée  et  l'œsophage,  la  mobilité  dont  ils  avaient  besoin  pour  Taccoflo- 
plissementde  leurs  fonctions.  Ce  tissu  conjonctif  se  continue  avec  celui  «fa 
cou,  de  sorte  que  l'inflammation  peut  se  propager  facilement  de  la  ré- 
gion cervicale  à  toute  la  hauteur  du  médiastin  et,  ra$me,  se  commuoi- 
quer  au  tissu  cellulaire  sous-péritonéal  par  Touverture  signalée  plus  but 
derrière  l'appendice  xiphoïde.  Si  cette  communication  est  possible  a 
avant,  elle  est  encore  plus  facile  en  arrière,  où  le  tissu  conjonctif  qui 
entoure  Tœsophage  se  continue  en  bas  avec  celui  de  rabdomcn  pv 
Torifice  aortique  du  diaphragme,  latéralement  avec  celui  des  espice^ 
intercostaux  par  la  gaine  celluleuse  qui  entoure  les 'artères  et  veines  io- 
tercostales,  d'où  les  abcès  par  congestion  qui  se  forment  quelgoev 
fois  sur  les  parois  latérales  du  thorax  à  la  suite  de  la  carie  du  corps  d'une 
vertèbre  dorsale. 

De  même,  il  est  peu  de  régions  qui  présentent  une  aussi  gnode 
quantité  de  ganglions  lymphatiques.  Ils  se  groupent  autour  de  la  nm 
des  bronches,  de  l'œsophage  et  des  gros  vaisseaux.  Lorsque  ces  ganglioa^ 
se  tuméGent,  soit  primitivement,  soit  par  suite  de  maladies  des  organe:^ 
voisins,  ils  déterminent  des  compressions  redoutables  et  quelqiN6i^ 
mortelles. 

Les  auteurs  d'anatomie  descriptive  et  d'anatomie  topographiqui^  ^c 
sont  attachés,  avec  un  soin  que  justiGc  l'importance  des  déductions  pn- 
tiqucs  qui  en  découlent,  à  établir,  d'une  manière  précise,  les  rapports  des 
organes  du  médiastin  avec  la  paroi  thoracique.  Le  but  poursuivi  coosisf^ 
comme  l'a  fait  Sappey,  à  chercher  la  solution  des  deux  problèmes  sol- 
vants, dont  la  connexion  est  évidente  :  1^  étant  donné  un  poiot  quel- 
conque de  la  paroi  antérieure  du  thorax,  indiquer  l'organe  qui  lui  corres- 
pond ;  2®  étant  données  une  plaie  pénétrante  du  médiastin  antérieur  et 
la  direction  suivie  par  l'instrument  vulnérant,  indiquer  l'organe  qui' 
été  lésé. 

Pour  éviter  des  répétitions  inutiles,  nous  ne  referons  pas  rénuaxn* 
tion  de  ces  rapports  qui  ont  été  groupés  dans  l'article  Médiàstct  (Vtf* 
t.  XXII,  p.  2),  et  qui  ont,  en  outre,  leur  place  marquée  dans  les  artidi 
spéciaux  consacrés  aux  divers  organes.  La  fig.  40,  empruntée  aux  ^^ 
veaux  éléments  d'anatomie  descriptive  de  Beaunis  et  Bouchard,  ^ 
donne  une  idée  très-exacte.  "^ 


1.  W-  —  Ripporli  de  Id  rigion  miiliailiiH  ivsc  1»  lutrei  rtfiODi  UiarKiqiH»  (I  cillei  d«  ribdomca. 
1,  lilnilion  de  roriSce  pulmouiirs  ;  1,  oriflce  <la  l'iort*  ;  3,  ariflce  luriculD-Tentrieiiliira  (inchf  ; 
orilca  ■Driculo-TeDiriniliirc  droit  i  6,  pilon  ;  B,  poiilion  du  cardia;  7,  Diabilici  8.  nainelcaii  tl. 
Isa  Iliaque  an  léri«ure  Et  lupérieure  ;  10,  sjmphfie  du  pubis;  ll.oraillcUg  draile;  il,  luriculB  droite, 
'■,  bord  droit  du  c«ur;  11,  iwrd  gauche  du  eceur;  IS,  ■urieule  giuctaa  ;  13,  uUre  pulniODalre  ;  17, 
ina  an  auptrieure  ;  IS,  tronc  Te ineui  brachio-cfphalique  droit  i  19.  [rooc  leineui  bnchio-ctpliii- 
■■•  fÊUcbt:  ÏU,  11.  aorte aK«Ddaiile  ;  tî.  aorte  deacepdaote  ;C  crosse  de  l'aorte;  31,  earolida  pri- 
itli*  droite  ;  S5,  anire  soiu-tlaiiêre  droite  ;  IS,  limite  tnpérioura  du  diaphragme  à  gauebe  dani  l'é- 
I  feipintion  complète  ;  17,  aa  limite  1  droite  i  Î8,  CDl-de-uc  aupArisur  gaucbe  de  la  pierre  ;  1»,  li- 
lu  illeiole  par  le  bord  aolirienr  et  le  bord  iotéripur  du  poumon  gaoche  dam  l'eipinlioa  tooipliir  ; 
I,  proloiigement  cardiaque  du  poumon  gaucbe  ;  31,  cul  de  >ac  aupirieur  du  poulfaon  droit  ;  SI,  limiti- 
Uiste  par  le  poumon  droit  d*n>  l'Inipirtlion  complète  i  33,  limite  a'tteinle  par  le  poumon  geoche  din» 
«DUT.  mer.  ■b.  R  cm.  IXVIII  —  41 


642  POITRINE.    —    DÉVELOPPBIIfc\^T. 

l'inspiration  ;  5i,  limite  atteinte  i>ar  le  poumon  droit  dans  l'inspiralioD  ;  53,  36,  37,  limites^ h  plèvrv 
^^luchc  ;  58,  59,  limites  de  la  plèvre  droite;  40,  grande  courbure  de  Testomac  ;  il.  petite roarijw^;  ii, 
duodénum  ;  45,  terminaison  do  1  intestin  grêle  ;  44,  cœcum  ;  lo,  côlon  a; cendant  ;  1 46,  côlon iransTfrw  ;  47, 
c(Mon  descendant  ;  48,  siliaque;  19,  rectum  ;  50,  foie;  51,  bord  antérieur  du  foie  ;  Si,  vt^sicale  biliaire  ; 
T,Z,  pancréas  ;  54,  limite  inférieure  de  la  rate  ;  55,  limite  inférieure  du  rein  ;  56,  vesaiie.  —  Noté.  LV- 
pace  compris  entre  19  et  5Ï  à  gauche,  et  52  et  54  à  droite,  espace  rempli  par  des  lignes  oblique»  ci  bi< 
el  à  droite,  indique  l'étendue  dans  laquelle  !>e  fait  la  locomotion  du  poumon  entre  reipiration  et  Tta»- 
piration  forcées  ;  l'espace  noir  compris  entre  55  et  55  2^  gauche,  et  54  et  38  à  droite  indique  fe^wf 
occupé  par  la  plèvre,  mais  dans  lequel  n'arrivent  pas  les  poumons,  même  dans  l'inspiraûra  tian*t. 
(Beac!iis  et  Bouchard.  Nouveaux  élémcntê  (Tanatomie  descriptive  et  itembryoloçie,  Ir  «ifiii<« 
Paris,  1880). 

Développement.  —  La  cage  ihoracique  se  forme,  chez  Fembryon,  par 
le  (Icyeloppemcnt  d'appendices  membraneux  qui  partent  de  la  colaoïie 
vertébrale  et  passent,  vers  le  deuxième  mois,  à  l'état  cartilagineux.  Ces 
appendices,  qui  sont  les  premiers  rudiments  des  cotes,  s'accroissent, 
peu  à  peu,  dans  les  parois  ventrales  et  circonscrivent  une  cavité  vice- 
raie  commune,  thoraco-abdominale.  A  la  Gn  du  premier  mois,  la  partie 
supérieure  de  la  cavité,  où  sont  contenus  le  cœur,  l'œsophage  et  les  deoi 
petits  sacs  pyriformes,  qui  seront  plus  tard  les  poumons,  se  sépare  des 
corps  de  Wolff,  du  foie  et  de  l'estomac,  par  une  mince  membrane,  ébauche 
du  diaphragme.  D'après  des  travaux  récents,  celui-ci  serait  formé  primi- 
tivement d'une  substance  glutineuse  répandue  autour  des  conduits  qui 
le  traverseront  plus  tard  ;  il  s'étale,  ensuite,  sous  la  forme  de  deux  demi- 
éventails  triangulaires  dont  le  sommet  est  placé  au  pilier  correspoodaot, 
dont  la  base,  tournée  en  avant,  se  développe  progressivement  du  steroom 
à  la  dernière  côte  et  finit  par  constituer  la  cloison  thoraco-abdominale. 
En  même  temps,  les  deux  poumons,  situés  primitivement  au-dessous  du 
cœur,  remontent   peu  à   peu,  s'entourent   J*un  sac    pleural,   distinct 
pour  chacun  d'eux,  et  acquièrent  bientôt  leur  forme  et  leur  position 
normales. 

Pendant  que  l'évolution  précédente  s'accomplit  à  l'intérieur  de  la  ca- 
vité, les  côtes  cartilagineuses  s'accroissent  dans  les  parois  ventrales  df 
l'embryon.  Les  six  premières,  dont  le  développement  est  plus  rapide,  se 
réunissent  par  leur  extrémité  antérieure,  avant  d'atteindre  la  ligne  roé- 
diane;  la  lame  verticale,  qui  résulte  de  cette  soudure,  constitue  une  moi- 
tié du  sternum  cartilagineux  ;  ces  deux  moitiés,  d'abord  séparées  par  une 
tissure  verticale  médiane,  se  soudent  bientôt  entre  elles,  de  haut  en  bas, 
pour  former  le  sternum. 

Les  côtes  s'ossifient  par  un  seul  point  d'ossiGcation  primitif,  qui  parait 
du  40*  au  45*  jour  et  par  deux  pbints  épiphysaires  (tête  et  tubérosité), 
qui  n'apparaissent  que  très-tard,  vers  l'âge  de  16  à  17  ans.  Lossifica- 
tion  n'est  complète  qu'à  l'âge  de  22  à  25  ans. 

Au  6*  mois,  le  sternum  présente  un  premier  point  d'ossiGcation,  à 
l'extrémité  supérieure.  Le  corps  se  développe  plus  tard  soit  par  4,  soil 
par  8  points  d'ossiGcation  (disposés,  dans  ce  dernier  cas,  par  paires),  d'où 
résultent  les  4  pièces  osseuses  qui  le  constituent  et  dont  la  soudure  >e 
fait  tardivement,  de  25  à  30  ans.  La  réunion  de  la  poignée  à  la  pn^ 
mière  pièce  du  corps  de  l'os  n'a  lieu  que  dans  la  vieillesse. 

Le  thorax  du  fœtus  présente  un  ensemble  de  caractères  qui  sont  dm  à 


POITRINE.    —   DÉVELOPPEMENT.  C4o 

i^ctat  d*affaisscment  des  poumons,  au  développement  rapide  du  cœur  et 
du  thymus,  au  volume  considérable  du  foie.  Si  on  y  pratique  une  coupe 
transversale,  cette  coupe  présente  la  forme  d'une  surface  quadrangulairc 
dont  la  moitié  antérieure  a  plus  de  largeur  que  la  moitié  postérieure. 
Les  cartilages  costaux  des  côtes  sternales  ont  une  direction  presque  hori- 
zontale et  une  forme  aplatie.  Les  côtes  présentent  une  très-faible  cour 
bure,  les  gouttières  costo- vertébrales  font  défaut,  d'où  Tabsence  de  sail- 
lies latérales  et  la  proéminence,  à  l'extérieur,  de  la  colonne  vertébrale, 
qui  rappelle  la  disposition  du  thorax  des  mammifères.  Le  diamètre  ver- 
tical est  court  sur  les  parties  latérales,  le  diamètre  antéro-postérieur 
remporte  sur  le  diamètre  transverse  ;  la  base  s'évase  largement  au  niveau 
des  viscères  abdominaux. 

Après  la  naissance,  il  se  fait  une  ampliation  subite  dans  Tétendue  de 
la  poitrine,  parce  que  Taccès  de  l'air  augmente  du  double  ou  du  triple 
le  volume  des  poumons  jusque-là  resserrés  sur  eux-mêmes.  Ces  organes 
qui  étaient  débordés  et  masqués  par  le  cœur,  se  développent,  des  deux 
côtés,  d'arrière  en  avant,  et  finissent  par  le  déborder  à  leur  tour.  Par 
suite  de  ce  mouvement  d'expansion  latéral,  les  parois  antérieure  et  pos- 
térieure de  la  cavité  thoracique  s'élargissent  et  se  rapprochent  ;  la  poi- 
trine, primitivement  aplatie  d'un  côté  à  l'autre,  s'arrondit  d'abord, 
devient  cylindrique,  puis  s'aplatit  un  peu  plus  tard  dans  le  sens  diamé 
iralement  opposé  ;  en  même  temps,  l'angle  des  côtes  se  forme,  les  gout- 
tières postérieures  se  dessinent  et  la  colonne  dorsale,  rectiligne  chez  le 
fœtus,  conmience  à  s'infléchir.  Toutes  les  modifications  qui  précèdent 
sont  rendues  faciles  par  l'extrême  flexibilité  des  côtes  et  l'état  presque 
entièrement  cartilagineux  du  sternum. 

Un  accroissement  rapide  du  thorax  se  produit  à  l'époque  de  la  puberté  ; 
c'est  aussi  à  ce  moment  de  la  vie  que  se  manifestent,  le  plus  souvent,  les 
déformations  de  la  cavité. 

Vers  15  ou  18  ans,  la  poitrine  qui  s'est  rétrécie  peu  à  peu  à  sa  base, 
acquiert  sa  forme  définitive  ;  mais  sa  capacité  continue  à  croître  jusqu'à 
22  ou  25  ans  chez  la  femme,  jusqu'à  30  ou  35  chez  l'homme. 

Dans  l'âge  adulte,  les  parties  constituantes  du  sternum  se  soudent 
enite  elles;  la  poignée  et  le  corps  de  l'os  restent  seuls  indépendants;  les 
articulations  chondro-sternales  commencent  à  se  souder  et  perdent  de  leur 
mobilité  primitive. 

Pendant  la  vieillesse,  les  cartilages  costaux  deviennent  jaunâtres,  plus 
épais,  plus  rigides,  et  finissent  par  s'ossifier,  en  même  temps  qu'ils  se 
soudent  définitivement  au  sternum,  les  côtes  et  le  sternum  finissent  par 
se  mouvoir  sur  le  rachis  comme  une  seule  pièce,  et  dans  une  étendue  de 
plus  en  plus  limitée,  à  cause  de  la  rigidité  qu'acquièrent  les  articulations 
costo-vertébrales.  Les  parois  thoraciques  perdant  progressivement  leur 
élasticité,  la  cavité  devient  de  moins  en  moins  dilatable  dans  ses  dia- 
mètres antéro-postérieur  et  transverse,  et  la  respiration  tend  à  devenir, 
peu  à  peu,  presque  exclusivement  diaphragmatique. 

ANOMALIES   ET   VICES  DE    CONFORMATION.  —  NoUS  UC  dcVOUS  UOUS  OCCUpcr 


644  POITRINE.  —  anomalies  et  vices  de  cokformatioa. 

ici  que  des  anomalies  qui  peuvent  s'observer  dans  les  parois  du  thorax, 
celles  qui  portent  sur  les  organes  intra-thoraciques  se  rattachaat  natu- 
rellement à  Tétude  particulière  de  chacun  de  ces  organes. 

Le  nombre  des  côtes  peut  varier  en  plus  ou  en  moins,  et  dans  ce  as, 
il  existe  généralement  une  anomalie  concordante  clans  le  nombre  des  Ter- 
tèbres  dorsales.  Il  n*en  est  pourtant  pas  toujours  ainsi.  Quand  il  n'existe 
que  onze  paires  de  côtes,  c'est  toujours  la  dernière  côte  flottante  qui  bii 
défaut.  D'autres  fois,  au  contraire,  on  trouve  une  treizième  côte  qai  se 
(ixe  tantôt  à  la  première  vertèbre  lombaire,  tantôt  à  la  dernière  iwlèhrc 
cervicale.  Dans  le  premier  cas,  la  côte  surnuméraire  est  libre  et  floUinle 
comme  une  fausse  côte;  dans  le  deuxième  cas,  elle  s*unit  ordinairement 
«i  la  première  côte  dorsale,  vers  son  extrémité  antérieure,  ou  se  fixe  sur 
le  premier  cartilage  sternal. 

Les  anomalies  numériques  qui  portent  sur  les  côtes  intermédiaire 
sont  beaucoup  plus  rares;  on  a  pourtant  observé  exceptionnellement (k 
(as  dans  lesquels  il  y  avait  augmentation  du  nombre  des  côtes  arec  in- 
sertion de  plusieurs  de  ces  os  sur  une  même  vertèbre  dorsale. 

On  sait  qu'à  la  suite  de  lésions  traumatiques  ou  spontanées,  la  paroi 
thoracique  peut  présenter  des  brèches  plus  ou  moins  larges,  dans  les- 
quelles la  plèvre  ou  le  péricarde  s'engage  et  n'est  séparé  de  Teilérirtr 
que  par  la  peau.  On  rencontre  quelquefois  des  dispositions  congénitate 
analogues.  Elles  s'observent  rarement  au  niveau  des  côtes;  elles  sont 
plus  fréquentes  au  niveau  du  sternum,  où  elles  doivent  être  rattadiéesà 
des  arrêts  de  développement.  La  scissure  est  par  conséquent  médiane, 
raremement  complète,  le  plus  souvent  partielle.  La  bifidité  infèriewr 
est  la  plus  fréquente;  elle  s'accompagne,  ou  non,  de  hernie  du  cœur. 

Pour  compléter  ce  qui  a  rapport  aux  anomalies  des  parois  thoraciques 
il  nous  reste  à  dire  un  mot  des  hernies  diaphragmatiques  conc^nitales. 
qui  paraissent  dues  également  à  un  arrêt  de  développement.  Nous  ait» 
\u  plus  haut  comment,  d'après  les  travaux  récents,  se  forme  le  &■ 
phragme  et  comment  se  complète  la  cloison  de  séparation  des  canV» 
tiioracique  et  abdominale.  Qu'une  cause  quelconque  arrête,  à  un  momeot 
donné,  le  développement  centrifuge  du  muscle,  le  cloisonnement  sV- 
rète  aussi  et  ne  s'achève  pas.  Alors  devient  permanent  un  état  qui  o'étaA 
que  transitoire,  mais  normal,  chez  le  fœtus;  il  persiste,  dans  unpoiatde 
ï^on  étendue,  une  perforation  par  laquelle  les  intestins,  le  foie,  la  nte 
peuvent  pénétrer  dans  la  cavité  thoracique.  Les  anomalies  de  cette  v- 
turc  sont  généralement  incompatibles  avec  la  vie,  par  suite  de  la  cmb- 
pression  que  les  viscères  de  l'abdomen  exercent  sur  le  cœur  et  les  pom- 
mons. (Voy.  pour  les  détails  [Diaphragmatiques]  Hernies,  t.  XI.p.  365)- 
Nous  laisserons  de  côté,  comme  dépourvues  de  tout  intérêt  pratifi^j 
les  anomalies  plus  graves,  plus  étendues,  qui  coïncident  avccdaitii^j 
déviations  organiques  d'un  caractère  général  et  se  rattachent  aui  •'^i 
struosité$.  {Voy.  ce  moi  t.  XXlll,  p.  8}. 

11  nous  reste  à  parler  d'un  dernier  ordre  de  faits  dont  la  connaisse* 
présente^  au  contraire,  une  importance  réelle,  au  point  de  vue  desaff"" 


'U 


'IVJ 


POITRIN;:.    —   ANOMALIES   ET   VICES   DE   COMFORMATlOiN.  645 

cations  pratiques.  Ce  sont  les  altérations  complexes  et  variables  de  la 
forme,  des  diamètres  et,  par  suite,  de  la  capacité  du  thorax,  qui  consti- 
tuent les  vices  de  conformation  proprement  dits.  Rarement  congéni- 
taux, le  plus  souvent  acquis,  tantôt  ils  sont  sans  influence  appréciable 
sur  l'état  de  santé  de  l'individu,  tantôt  ils  sont  la  manifestation  de  trou- 
bles pathologiques  divers ,  ou  représentent  les  stigmates  indélébiles  de 
maladies  antérieures  locales  ou  générales.  Dans  les  deux  cas,  leur  étude 
€st  étroitement  liée  à  la  séinéiologie  générale  et  particulière  des  affections 
thoraciques.  (Voy,  Poitrine,  Séinéiologie). 

Ce  qu'il  importe,  avant  tout,  de  connaître,  pour  se  rendre  un  compte 
«xact  de  ces  variations  tant  physiologiques  que  pathologiques,  ce  sont  les 
caraclères  essentiels  d'une  bonne  conformation  du  thorax.  L'énumération 
de  ces  caractères  appartient ,  en  réalité,  à  la  description  anatomique,  et, 
à  ce  titre,  aurait  dû  être  déjà  faite  ;  il  nous  a  semblé,  néanmoins,  qu'il 
était  plus  utile  de  la  rapprocher  de  Tétude  des  déformations  qui  sont 
compatibles  avec  Tétat  de  santé  ou  qui  se  rattachent  aux  diverses 
maladies. 

Un  thorax  d'adulte  bien  conformé  remplit  les  conditions  suivantes  : 

i^  II  présente  la  forme  d'un  cône  dont  le  sommet  est  en  haut,  si  Von 
(ait  abstraction  de  ce  qui  appartient  aux  membres  supérieurs  ; 

2^  Il  est  un  peu  aplati  d'avant  en  arrière,  de  telle  sorte  que  le  diamè- 
tre transverse  l'emporte  sur  le  diamètre  antéro-postérieur  ; 

3^  Quand  on  pratique  la  mensuration  circonférentielle  suivant  un  plan 
horizontal  qui  passe  par  les  mamelons,  on  obtient  un  périmètre  moyen 
qui  dépasse  de  plusieurs  centimètres  la  demi-taille  de  l'individu  (d'après 
Walshe,  le  chiffre  de  0'",858  peut  être  considéré  comme  une  assez  bonne 
moyenne  pour  l'âge  adulte). 

Dans  les  circonstances  ordinaires,  la  constatation  de  ces  divers  carac- 
tères peut  se  faire  avec  des  moyens  très-simples,  un  compas  d'épaisseur 
pour  la  mesure  des  diamètres  de  la  partie  supérieure,  un  ruban  métrique 
pour  les  mensurations  circonférentiellcs  pratiquées  au-dessous  des  ais- 
selles. On  conçoit,  en  effet,  que  les  mensurations  circonférentiellcs  sont 
impraticables  dans  la  partie  supérieure,  où  le  relief  des  épaules  donne  au 
sommet  du  thorax  une  forme  absolument  opposée  à  celle  qu'il  a  en  réa- 
lité. Avec  le  compas  d'épaisseur  qui  permet  de  faire  abstraction  des  mem- 
bres supérieurs,  notamment  quand  on  l'applique  contre  la  paroi  interne 
des  aisselles,  on  reconnaît  que  les  diamètres  supérieurs  d'un  thorax  bien 
conformé,  sont  toujours  moindres  que  les  diamètres  inférieurs.  Cette 
supériorité  des  diamètres  inférieurs  du  thorax  sur  les  supérieurs  existe 
chez  tous  les  sujets;  mais  elle  est  d'autant  plus  marquée  que  les 
individus  sont  plus  robustes,  et  coïncide  ainsi  avec  le  développement 
plus  ou  moins  grand  qu'acquiert  la  base  des  poumons.  Il  semble, 
au  premier  abord,  difficile  de  concilier  ce  faJt  avec  cetle  proposition  vul- 
gaire également  vraie,  à  savoir  que  le  développement  de  la  poitrine  se 
révèle  par  la  largeur  des  épaules.  La  contradiction  n'est  pourtant 
qu'apparente,  ainsi  que  le  fait  justement  remarquer  Richet.  Il  suffit^ 


646  POITRINE.  —  anomalies  et  vices  de  coNPORMAnox. 

pour  s'en  rendre  compte,  de  réfléchir  à  ce  fait  bien  connu  que  Tampli- 
tude  de  la  respiration  s^accompagne  toujours  d'un  développement  propor- 
tionnel du  système  musculaire;  or,  comme  la  partie  supérieure  des 
membres  thoraciques  y  participe  a  l'égal  des  autres  régions,  il  s'ensuit 
que  le  diamètre  bi-acromial  doit  présenter,  chez  les  sujets  Tigoureux  et 
bien  musclés,  un  élargissement  proportionnel,  d'autant  plus  notable  qoe 
la  base  du  thorax,  recouverte  d*une  mince  couche  musculaire,  ne  subit 
jamais,  sous  ce  rapport,  de  grands  changements. 

Le  compas  de  Baudelocque  et  le  ruban  métrique  ne  suffisent  pas,  dans 
certains  cas  pathologiques  où  il  est  nécessaire  d'opérer  des  menson- 
tions  précises  ;  il  faut  recourir  alors  aux  méthodes  et  aux  instruments 
perfectionnés  dont  il  sera  question  dans  l'étude  séméiologique  de  la 
poitrine. 

Aux  caractères  essentiels,  énumérés  ci-dessus,  qui  représentent  les  con* 
ditions  fondamentales  d'une  conformation  normale  de  la  poitrine,  Wakhe 
en  joint  certains  autres,  qui,  bien  qu'étant  d'une  importance  moindre, 
n'en  sont  pas  moins  intéressants  à  connaître.  Réunis  chez  le  même  indi- 
vidu, ils  constituent  ridéal,  rarement  réalisé,  d'une  conformation  absolu- 
ment régulière.  Dans  les  cas  de  ce  genre,  les  deux  côtés  de  la  poitrine 
sont  symétriques  dans  leur  ensemble  et  dans  leurs  diverses  régions;  les 
régions  sous-claviculajres  présentent  une  légère  convexité  ;  la  région  ster- 
nale  inférieure  est  creuse  dans  une  mesure  qui  varie  avec  la  vigueur  indi- 
viduelle; les  angles  formés  par  l'union  des  fausses  côtes  à  Taxe  antérieur 
sont  sensiblement  égaux;  les  plans  latéraux  sont  à  égale  distance  de  Taxe 
médian  vertical;  les  mamelons  sont  à  la  même  hauteur,  c'est-à-dire  au 
niveau  de  la  quatrième  côte  ou  du  quatrième  espace  intercostal.  Si  Ton 
examine  la  poitrine  par  derrière,  on  constate  que  les  épaules  sont  sur  le 
même  niveau;  la  colonne  vertébrale  est  parfaitement  droite  ou  offre,  vers 
son  milieu,  une  légère  inclinaison  vers  le  côté  droit;  enfin  le  sillon  verté- 
bral est  modérément  concave  de  haut  en  bas,  et  il  est  plus  ou  moins  creux 
suivant  que  l'individu  est  maigre  ou  chargé  d'embonpoint. 

Comme  Jious  l'avons  dit  plus  haut,  il  est  assez  rare  de  trouver  une 
poitrine  qui  réunisse  tous  ces  caractères.  L'absence  de  quelques-uns  de 
ceux  que  nous  venons  d'énumcrer  ne  constitue  pas  un  vice  de  conformation 
proprement  dit.  Aussi  n'est-il  pas  facile  de  déterminer  exactement  le  point 
où  celui-ci  commence.  Pour  les  un?,  c'est  une  question  de  degré,  tandis  que 
les  autres  invoquent  la  présence  ou  l'absence  de  troubles  concomitants  de 
la  santé.  Ainsi,  dès  1838,  Woillez  qui, l'un  des  premiers,  avait  approfondi 
la  question,  divisait  les  hétéromorphies  de  la  poitrine  en  physiologiqun 
et  pathologiques  ;  les  premières  étant,  pour  lui,  de  simples  particularités 
de  conformation  qui  rendent  la  poitrine  insymétrique  sans  compromettre 
en  rien  la  santé,  les  autres  se  rattachant,  au  contraire,  manifestement  à 
l'état  morbide.  L'importance  pratique  d'une  pareille  distinction  est  incon- 
testable ;  mais,  quand  on  voit  que  des  déformations  thoraciques  considé- 
rables, consécutives  à  des  déviations  vertébrales,  par  exemple,  coïncident 
souvent  avec  une  santé  générale  satisfaisante,  on  est  obligé  de  reconnaître 


POITHINK.    —   ANOMALIES    ET    VICES    DE    CONFORVATION.  647 

que  la  pathologie  fournit  ici  une  base  peu  solide  aux  classiGcations  anato- 
miques. 

Considérées  en  elles-mêmes,  et  abstraction  faite  de  leur  valeur  séméio- 
tique,  les  déformations  du  thorax  présentent  une  infînie  variété.  Tantôt 
on  remarque  une  dilatation  générale  de  l'un  des  côtés  ou  une  saillie 
plus  ou  moins  prononcée  d'une  région  circonscrite.  Tantôt  on  observe  des 
étals  entièrement  opposés  aux  précédents  :  rétraction  plus  ou  moins 
étendue  d'une  moitié  ou  dépression  partielle.  D'autres  fois,  on  ne  cons- 
tate qu'une  élévation  ou  un  abaissement  anormal  de  l'omoplate,  de  cer 
taÎDes  côtes  ou  du. mamelon.  Les  changements  de  courbures  et,  à  (or 
tioriy  les  distorsions  constituent  un  groupe  de  déviations  beaucoup  plus 
accusées.  Enfin,  certaines  altérations  communes  ont  reçu  des  noms  par- 
ticuliers; telles  sont,  par  exemple,  les  poitrines  dites  de  poulet,  de  pig  eon 
on  en  bréchet,  caractérisées  par  un  aplatissement  des  deux  plans  la  té- 
raux  avec  saillie  prononcée  du  sternum  en  avant. 

11  est  bien  rare  que  les  altérations  de  la  forme  du  thorax  soient  c  ongé- 
nitales;  elles  peuvent  apparaître  à  toutes  les  époques  de  Texistente; 
mais,  en  dehors  de  l'état  de  maladie,  elles  se  produisent  surtout  pendant 
la  période  du  développement  où  les  parties  osseuses  subissent  si  fa  cile- 
ment  des  modifications  de  tout  genre.  En  dehors  du  contingent  qu'y 
apportent  les  maladies,  bien  d'autres  causes  entrent  en  action  ;  les  habi- 
tudes ordinaires  de  la  vie,  les  vêtements,  les  professions,  les  attitudes 
vicieuses,  etc.,  tels  sont,  pour  la  production  des  déformations  thoraci- 
ques,  les  facteurs  multiples  dont  les  effets  souvent  combinés  semblent, 
dans  beaucoup  de  cas,  compatibles  avec  l'intégrité  au  moins  apparente  de 
la  santé. 

Ainsi,  la  prépondérance  d'usage  du  membre  supérieur  droit  coïncide 
avec  une  prédominance  très-fréquente  du  développement  du  côté  corres- 
pondant du  thorax.  Cette  asymétrie,  sur  laquelle  Woillez  a,  le  premier, 
attiré  l'attention,  se  rencontre  si  souvent  qu'on  a  fini  par  la  considérer 
comme  l'état  normal.  Il  en  résulte  que,  dans  l'état  de  maladie,  si  l'on 
compare  les  deux  moitiés  du  périmètre  thoracique,  une  différence  de 
quelques  centimètres  constatée  en  faveur  du  côté  droit  aura  (sauf  le  cas 
où  l'individu  serait  gaucher),  une  valeur  diagnostique  infiniment  moindre 
qu'une  différence,  même  très-peu  accusée,  en  faveur  du  côté  gauche. 

Les  pressions  variées,  qui,  dans  certaines  professions,  s'exercent  sur 
tel  ou  tel  point  des  parois  thoraciques,  y  impriment,  en  quelque  sorte, 
leurs  traces  ;  de  là  des  déformations  particulières  qui  peuvent  fournir 
quelques  données  à  la  médecine  légale. 

Chez  la  femme,  il  n'est,  peut-être,  pas  de  cause  qui  joue  un  rôle  aussi 
important  que  l'usage  abusif  d'un  corset  trop  serré.  Cette  partie  du  vête- 
ment semble  avoir  pour  but  de  lutter  contre  la  forme  naturelle  du  tho- 
rax. Disposé  et  serré  de  manière  à  arrondir  la  taille  et  à  la  faire  aussi  fine 
que  possible,  le  corset  tend,  en  effet,  à  rendre  le  diamètre  transverse  de 
la  poitrine  égal  au  diamètre  antéro-postérieur  et  à  réduire  sa  partie 
naturellement  la  plus  évasée.  Les  entraves  qu'il  apporte  au  jeu  régulier 


648  POITRINE.  —  physiologie. 

des  agents  mécaniques  de  la  respiration  peuvent  rester  longtemps  inaper- 
çues; il  n'en  résulte  pas  moins  une  altération  lente  et  peu  à  peu  pernu 
nente  de  la  forme  des  parois  et  des  organes  eux-mêmes,  et  souvent,  des 
troubles  réels  des  fonctions  de  circulation  et  de  respiration  dont  il  faut 
tenir  compte. 

Les  déformations  d'origine  pathologique  constituent  deux  groupes 
principaux. 

Les  unes  proviennent  d'affections  propres  des  organes  thoraciques  ou 
des  parois.  A  ce  groupe  appartiennent  la  voussure  précordîale,  cantclém- 
tique  de  certaines  affections  du  péricarde  ou  du  cœur;  les  voussures  par 
usure  ou  perforation  de  la  paroi,  dues  au  développement  d'un  anévrjsme 
de  l'aorte  tlioracique  ou  du  tronc  brachio-céphalique  ;  la  dilatation  géné- 
rale du  thorax  progressivement  amenée  par  remphysèmc  vésiculaire; 
l'ampliation  de  Tune  des  cavités  pleurales  par  les  épanchements  de  toute 
sorte  et  la  rétraction  caractéristique  qui  peut  en  cire  la  conséquence,  etc., 
etc.  On  peut  y  ranger  encore  les  tumeurs  de  toute  nature,  solides  et  li- 
quides qui  ont  leur  siège  dans  les  parois,  les  saillies  que  viennent  laire,â 
l'extérieur,  les  tumeurs  du  médiastin,  sans  compter  les  affections  propre 
de  la  mamelle  qui  constituent  une  catégorie  à  part. 

On  peut  faire  un  deuxième  groupe  des  déformations  thoraciques,  d*uo 
caractère  plus  général,  qui  ont  leur  point  de  départ  soit  dans  les  dévia- 
tions de  la  colonne  vertébrale,  soit  dans  l'une  de  ces  diathèses  dont  riu- 
fluence  s'exerce  sur  l'ensemble  du  système  osseux.  (Voy.  Ostéomiucie, 
RACHrrisNE,  R\chis.) 

Nous  devons  nous  borner  ici  à  une  simple  énumératiou.  La  de$cn|>- 
tion  des  divers  ordres  d'hétéromorpliics  que  nous  venons  de  men- 
tionner appartient  soit  à  la  séméiologie  de  la  poitrine,  soit  aux  articles 
spéciaux  consacrés  à  certaines  maladies  ou  à  la  pathologie  de  chaque 
organe. 

Physiolofi^ie.  —  Le  thorax  a  des  usages  multiples  :  l""  il  protège 
contre  les  violences  extérieures  les  organes  contenus  dans  sa  cavité; 
2*^  il  est  le  siège  des  mouvements  alternatifs  de  dilatation  et  de  resserre- 
ment qui  produisent  le  renouvellement  incessant  de  Tair  dans  les  pou- 
mons; 3°  il  sert  de  point  d'appui,  lorsqu'il  réalise  certaines  conditions 
de  fixité  relative,  à  des  groupes  musculaires  nombreux  qui  concourent  à 
des  mouvements  très-variés  mais  régis  par  un  mécanisme  commun,  qu'on 
désigne  sous  le  nom  d'effort. 

Les  deux  derniers  ordres  de  faits  ont  un  point  de  contact;  ils  se  rat- 
tachent, les  uns  et  les  autres,  à  la  fonction  de  la  respiration.  Les  mou- 
vements de  dilatation  et  de  retrait  du  thorax  appartiennent  aux  phéno- 
mènes mécaniques  de  la  respiration,  et  seront  naturellement  étudiés 
avec  cette  fonction  envisagée  dans  son  ensemble,  (loi/.  RESpnuiiOii).  Les 
mouvements  extiinsèques  auxquels  concourent  les  muscles  qui  prennent 
leur  point  fixe  sur  le  thorax,  exigent,  comme  condition  initiale,  une  mo- 
dification spéciale  des  mouvements  respiratoires,  et  c'est  ainsi  qu'ils  se 
rattachent  à  ces  derniers.  11  en  résulte  qye,  tout  en  prenant  part  à  des 


POITUINE.  —  PHYSIOLOGIE.  649 

fonctions  très- variées ,    ils  présentent  des  caractères   communs,   dont 
Tétude  a  fait  Tolrjet  d'un  article  spécial  [Voy.  Effout,  t.  XII,  p.  425.) 

Nous  n'avons  donc,  ici,  à  examiner  le  thorax  qu'au  point  de  vue  de  la 
()rotection  qu'il  fournit  aux  organes  contenus  dans  sa  cavité,  c'est-à-dire, 
dans  ses  conditions  de  résistance  aux  agents  vulnérants.  Les  condi- 
tions varient  suivant  la  nature  de  ces  derniers.  S'il  s'agit  d'instru- 
ments piquants  ou  tranchants,  doués  d'une  faible  quantité  de  mou- 
irement,  ils  rencontrent  dans  le  sternum,  les  côtes  et  surtout  les  vertèbres 
dorsales,  une  résistance  suffisante  pour  prévenir  leur  pénétration  dans  la 
cavité;  les  espaces  intercostaux,  au  contraire,  leur  ouvrent  une  voie  fa- 
cile. Lorsque  la  quantité  de  mouvement  joue  le  rôle  prépondérant,  soit 
qu'il  s'agisse  d'un  choc  ou  d'une  chute,  le  thorax  oppose,  par  la  multi- 
plicité des  pièces  qui  le  composent,  par  leur  élasticité,  par  leur  dispo- 
sition arciforme,  et  grâce  enfin  au  voisinage  des  membres  supérieurs, 
des  conditions  de  résistance  et  de  solidité  qui  varient,  d'ailleurs,  dans  ses 
diverses  parois.  11  est,  à  peine,  besoin  d'insister  sur  les  éléments  de  pro- 
tection que  nous  venons  d'énumérer.  La  multiplicité  des  pièces  osseuses 
ei  de  leurs  articulations  décompose  les  chocs  subis  par  les  parois  et  en 
affaiblit  l'intensité  ;  l'élasticité  des  parties  leur  permet  de  céder  dans 
une  certaine  mesure  sans  se  rompre  ;  leur  disposition  arciforme  les  fait 
résister,  à  la  manière  des  voûtes;  la  clavicule  garantit  le  sommet  du  tho- 
rax en  avant;  Tomoplate  et  les  masses  musculaires  voisines  protègent  le 
plan  postérieur  ;  le  bras,  dans  la  position  verticale,  couvre  une  pailie 
du  plan  latéral,  l'avant-bras  demi-fléchi,  une  partie  du  plan  antérieur; 
enfin,  dans  certains  cas,  le  membre  tout  entier  entre  en  action  pour  dé- 
tourner les  agents  vuliiérants. 

Il  suit  nécessairement  de  là  que  les  divers  points  des  parois  thora- 
ciques  offriront  des  degrés  de  résistance  inégaux,  dus  à  leurs  différences 
de  structure.  Ainsi,  la  paroi  postérieure  l'emporte  sur  les  autres,  grâce 
à  la  présence  des  vertèbres,  à  la  solidité  des  articulations  costo-verté- 
braies  et  enfin  à  la  protection  fournie  par  l'omoplate  et  les  muscles  de  la 
région.  En  avant,  le  sternum  résiste  aux  pressions  extérieures,  à  la  ma- 
nière d'une  voûte  soutenue  par  quatorzç  arcs-boutants  représentés  par 
les  côtes  slernales  et  les  cartilages  correspondants.  Les  parois  latérales 
agissent  par  le  même  mécanisme.  Elles  forment  aussi  une  sorte  de  voûte 
dont  toutes  les  pièces  s'appuient  en  arrière  sur  le  rachis,  en  avant  sur 
le  sternum.  Tout  choc  qui  porte  sur  une  certaine  étendue  de  la  paroi 
latérale  y  rencontre  donc  une  résistance  équivalente  à  celle  que  lui  op- 
poserait la  paroi  sternale;  mais,  si  l'effort  se  concentre  sur  un  petit 
nombre  d'arcades,  et,  à  plus  forte  raison,  sur  une  seule,  il  produit  un 
redressement  brusque  de  la  courbure  des  côtes,  et,  lorsque  la  limite 
d'élasticité  de  ces  dernières  est  dépassée,  il  en  résulte  une  fracture.  Les 
pressions  qui  s'exercent  sur  le  sternum  se  répartissent  généralement,  au 
contraire,  sur  l'ensemble  des  piliers  de  la  voûte  dont  il  peut  être  consi- 
déré comme  la  clef.  Dans  l'un  comme  dans  l'autre  cas,  l'inclinaison  des 
côtes  et  leur  mobilité  constituent  deux  conditions  défavorables  à  l'éner- 


650  POITHLNK.  —  skméiologie. 

gic  de  la  résistance  ;  pour  que  celle-ci  soit  efficace,  il  faut  que  les  arcs^ 
osseux  soient  relevés  et  maintenus  fixes.  Ce  rôle  appartient  aux  muscles 
inspirateurs  que,  pour  ce  motif,  on  a  considérés  comme  des  arcs-bou- 
tants  actifs.  Il  suffit,  pour  vérifier  le  fait,  de  s'observer  soi-même  et  de 
remarquer  Tattitude  instinctive  que  nous  donnons  aux  parois  thoraci- 
ques  lorsqu'une  violence  extérieure  les  menace. 

L.  Merlin. 

Séméiolog^e.  —  La  poitrine  olfre  un  intérêt  exceptionnel  sons  le 
rapport  séméiologique.  C'est  pour  la  poitrine  qu'on  a  imaginé  une  foule 
de  procédés  d'exploration,  tels  que  V auscultation^  la  percussion,  b 
spirométrie^  la  cardiographie  y  etc.,  etc.  (Voy.  ces  mots,  t.  IV,  VI  et 
XXVI),  qui  jouent  un  si  grand  rôle  dans  la  clinique  de  notre  temps.  Nous 
diviserons,  d'ailleurs,  notre  sujet  de  la  manière  suivante  :  1"  des  règle» 
à  suivre  dans  l'examen  clinique  de  la  poitrine;  2^  de  l'examen  clinique 
de  la  poitrine  considéré  en  lui-même  ;  3®  revue  séméiologique  des  affec- 
tions de  la  poitrine. 

I.  Des  règles  a  suivre  dans  l'examen  clinique  de  la  poitrine.  —  Il 
existe  des  règles  qui  sont  applicables  à  toutes  les  méthodes  d'exploration 
de  la  poitrine,  et  d'autres  pour  chacune  d'elles  en  particulier  :  les  pre- 
mières vont  seules  nous  occuper,  les  secondes  étant  mieux  à  leur  place 
dans  le  cas  échéant. 

L'attention  du  médecin  étant  ordinairement  appelée  du  côté  de  la  poi- 
trine par  quelque  sensation  douloureuse  qu'accuse  le  malade,  son  pre- 
mier soin  sera  de  bien  préciser  le  siège  de  la  douleur  :  c'est  là  un  com- 
mencement de  localisation,  idée  qui  devra  dominer  tout  l'examen  clinique 
de  la  région.  Nous  ferons  la  part  de  cet  élément  dans  nos  recherches  ulté- 
rieures. 

Le  précepte  suivant  conduit  à  Y  inspection  de  la  poitrine,  qui  exige  la  mise 
à  nu  de  la  partie,  pour  l'explorer  dans  son  ensemble  et  dans  ses  détaik, 
pour  déterminer  les  rapports  de  ses  divisions  topographiques,  pour  ana- 
lyser [ses  mouvements  normaux  ou  anormaux,  etc.  Cette  nécessité  s'im- 
pose, non-seulement  pour  la  simple  inspection  en  elle-même,  mais  encore 
pour  la  palpation,  la  mensuration,  la  percussion,  et  même  Tauscultation. 
Si  quelque  concession  peut  être  faite  à  cet  égard,  c'est  uniquement  en 
faveur  de  certaines  répugnances  individuelles,  parmi  lesquelles  il  faut 
surtout  citer  celle  de  Laennec,  qui  fut  si  opiniâtre;  pour  pratiquer 
l'examen  du  malade  plutôt  que  les  convenances,  malgré  l'interposition 
d'un  vêlement.  La  dignité  du  médecin  et  la  pureté  de  ses  intention 
devront  faire  taire  les  objections  de  la  pudeur  dans  les  cas  où  celle-ci 
suscite  quelque  résistance. 

Maintenant  le  problème  à  résoudre  consiste  à  lire  au  travers  des  parois 
de  la  poitrine,  et  à  rapporter  la  lésion  probable  de  l'organe  inclus  à 
quelque  point  de  repère  choisi  sur  la  surface  extérieure.  Cette  préoccu- 
pation topographique  a  exercé  dès  longtemps  certains  esprits.  Il  faut  voir 
dans  les  lignes  plessimélinques  de  Piorry  une  première  tentative  de  Cf 


POITRINE.  —  stMÉiOLOGiE.  651 

^nre  de  localisation,  et  Tune  des  plus  rigoureuses,  puisque  ce  sont  des  sail- 
ics  peu  susceptibles  de  variations  de  siège  qui  sei'vent  de  base  au  système 
>rganographique  de  notre  auteur.  Il  n*est  pas  jusqu'aux  dénominations 
idoptées  pour  désigner  ces  lignes,  qui  ne  puissent  nous  servir,  car  elles 
(Ont  exprimées  par  les  points  extrêmes  entre  lesquels  elles  sont  tirées. 
)r,  toute  localisation  se  trouve  définie  par  ses  rapports  avec  deux  de  ces 
ignés,  susceptibles  de  s'entrecroiser,  Tune  comme  ordonnée,  et  l'autre 
:onime  abscisse.  Nous  verrons  comment  ce  procédé  a  été  utilisé. 

On  a  également  recherché  quels  étaient,  dans  les  conditions  normales, 
es  rapports  des  organes  thoraciques  avec  les  parois  de  la  cavité  qui  les 
'enferme,  afin  de  mieux  se  rendre  compte  du  point  affecté  dans  Tétat 
norbide.  Francis  Sibson  (1848)  a  établi  avec  le  plus  grand  soin  cette 
xipographie  de  la  poitrine  et  des  viscères  qu'elle  recouvre.  11  note  d'abord 
es  saillies  et  les  dépressions  qui  se  voient  chez  un  homme  robuste  et 
>ien  portant;  puis  il  recherche  comment  ces  saillies  et  ces  dépressions 
>euvent  guider  dans  la  détermination  des  organes  qui  sont  au-dessous. 
t^oicî  quelques-uns  des  résultats  qui  lui  paraissent  acquis  : 

«  Le  sternum  est  la  clef  de  la  position  des  poumons  et  du  cœur;  il  est 
le  centre  vers  lequel  convergent  les  principales  côtes. 

«  Si  Ton  place  le  doigt  sur  l'extrémité  inférieure  du  sternum,  on  se 
trouve  exactement  au-dessus  du  bord  inférieur  du  poumon  droit  et  des 
limites  inférieures  du  cœur. 

«  Si  l'on  tire  une  ligne  perpendiculaire  sur  le  milieu  du  sternum, 
eette  ligne  laisse,  à  droite,  le  poumon  droit  tout  entier,  et  à  gauche,  lo 
poumon  gauche  et  la  portion  du  cœur  qui  n*est  pas  couverte  par  ce 
poumon. 

«  Enfin,  si  l'on  place  le  doigt  sur  le  quatrième  cartilage  du  côté 
B^auche,  le  poumon  gauche  est  au-dessus  du  doigt  et  la  portion  du  cœur 
doo  recouverte  par  le  poumon  au-dessous. 

«  Étant  donnée  l'extrémité  inférieure  du  sternum,  le  poumon  droit  est 
lu-dessus  et  à  droite;  le  cœur,  au-dessus  et  à  gauche  de  ce  point,  pendant 
ifue  le  foie  est  au-dessous  et  à  droite,  et  au-dessous  et  à  gauche,  mais  à 
une  plus  grande  profondeur,  l'orifice  cardiaque  de  l'estomac.  »  (Sibson^ 
London  médical  Gazette,  1848,  new  séries,  vol.  VI,  p.  558.) 

Ce  même  auteur,  que  nous  ne  suivrons  pas  dans  tous  les  détails  d'ana- 
tomie  topographique  qu'il  aborde,  propose  une  nouvelle  classification  des 
régions  de  la  poitrine^  basée  précisément  sur  les  rapports  des  organes 
intérieurs  avec  les  parois.  Il  admet  trois  régions  simples  et  cinq  régions 
composées.  Les  régions  simples  comprennent  les  deux  régions  pulmo- 
naires et  la  région  cardiaque.  Les  régions  composées  sont  celles  dans 
lesquelles  les  organes  sont  superposés;  ce  sont  :  la  région  pulmo-hépa- 
tique,  la  région  pulmo^astrique,  les  deux  régions  pulmo-cardiaques, 
droite  et  gauche,  et  la  région  pulmo-vasculaire,  où  les  gros  vaisseaux 
sont  cachés  par  le  poumon.  Nous  n'avons  pas  à  donner  les  limites  exactes 
et  les  rapports  de  ces  diverses  régions  :  Tanatomie  nous  les  enseigne  à 
Tétat  normal  ;  et,  si  la  maladie  est  susceptible  d'en  modifier  les  conditions 


652  POITRINE.  —  séméiologie. 

dans  une  certaine  mesure,  on  ne  doit  pas  perdre  de  vue  ce  qui  est  acquis 
chez  rhorame  sain,  pour  se  diriger  au  lit  du  malade. 

La  forme  et  les  dimensions  de  la  poitrine  ont  été  appréciées  par  la 
plupart  des  observateurs  qui  ont  écrit  sur  les  affections  des  oignes  tho- 
raciques.  Parmi  eux  nous  citerons  tout  particulièrement  Walter  H.  Walshe 
(1870),  qui  a  étudié  le  sujet  parallèlement  dans  Tétat  de  santé  et  dans 
Tétat  de  pialadie  ;  puis  suivant  les  âges,  les  sexes,  les  professions,  etc. 
Les  résultats  sont  acquis  avec  les  divers  modes  d'exploration  en  mage  : 
la  palpation,  la  percussion,  Tauscultation,  la  mensuration^  etc.;  et  aussi 
en  se  mettant  au  point  de  vue  du  jeu  de  la  respiration,  dont  il  analpe  le 
rhythme  et  la  force.  Nous  aurons  à  utiliser  ces  faits. 

Le  complément  naturel  de  ces  données  anatomiques  et  physiologiques 
se  trouve  dans  une  méthode  plus  ou  moins  rigoureuse  de  localisation  des 
lésions  et  des  phénomènes  tlioraciques,  qui  nous  est  fournie  par  Â.  Rao- 
some  (1876),  et  qui  sert  de  base  à  tout  un  ensemble  de  recherches  stétho- 
métriques.  Ce  n'est  pas  la  première  fois,  dit  Fauteur,  qu'on  a  tenté  de 
rapporter  les  diverses  particularités,  relevées  dans  Texamen  de  la  poitrine, 
à  certains  points  de  repère  ou  de  convention  visibles  à  Textérieur  de  celte 
cavité  ;  et  tout  le  premier,  il  indique  le  diagram-figure  de  Fairbank, 
comme  pouvant  recevoir  cette  application.  L'instrument  consiste  eo  une 
petite  plaque  de  cuivre  découpée  de  façon  à  ligurer  le  tronc,  et  qui  permet 
d'en  reproduire  la  figure  sur  le  papier  en  suivant  ses  contours  avec  un 
crayon.  On  obtient  ainsi  une  sorte  de  schéma  sur  lequel  on  insent,  au 
double  point  de  vue  du  siège  et  de  Tétendue,  le  détail  séméiologique, 
dont  on  peut  ensuite  contrôler  les  transformations  en  plus  ou  en  moini. 

L'instrument  de  A.  Ransome  s'appelle  le  Chest-rule  (règle  de  poitrinei. 
11  consiste  en  un  fil  d'acier  mince  et  étroit,  disposé  en  parallélogranuiie 
rectangulaire,  de  6  pouces  de  long  sur  3  de  large  (mesure  anglaise),  et 
divisé  en  18  carrés  ayant  juste  1  pouce  de  côté.  En  raison  de  sa  Oeiibililé, 
on  peut  facilement  l'appliquer  et  le  mouler  sur  la  surface  de  la  poitrine. 
Comme  point  de  repère,  dans  le  sens  transversal,  on  prend,  en  avant,  1^ 
ligne  médiane  du  sternum,  cl,  en  arrière,  la  colonne  vertébrale;  tandis 
que,  de  haut  en  bas,  on  l'applique  successivement  autant  de  fois  que  cela 
est  nécessaire.  Quant  au  phénomène  à  noter,  on  le  rapporte  à  tel  ou  tel 
carré  désigné  par  un  numéro;  ou  bien  à  Tintersection  de  deux  lignes, 
horizontale  et  verticale,  correspondantes.  Le  chest-rule  paraît  surtout 
utile  pour  fixer  le  siège  des  bruits  du  cœur  et  les  points  où  on  les  entend 
à  leur  maximum.  11  sert  aussi  à  déterminer  le  point  de  départ  des  ané 
vrysmes  thoraciques,  les  limites  des  signes  physiques  dans  la  phlhisie. 
dans  la  pleurésie,  etc. 

On  doit  également  à  Lasègue  (1876)  un  procédé  de  topographie  pour 
l'auscultation  de  la  poitrine,  et  qui  peut  aussi  servir  à  fixer  les  autres 
détails  d'exploration.  Ce  sont  deux  ligures  schématiques  tracées  par 
Vigroux,  et  représentant,  l'une  la  partie  antérieure,  l'autre  la  partie  po»- 
térieure  du  thorax.  Les  points  de  repère  essentiels  y  sont  indiqués,  et 
l'origine  des  côtes  est  marquée  de  manière  à  pouvoir  en  faire  le  décompte. 


1»0ITHL\E.  —  sÉMÉioLOGiE.  653 

Les  phénomènes  d'auscullalion  et  de  percussion  seront  notés,  les  premiers 
avec  le  crayon  bleu,  les  seconds  avec  le  crayon  rouge.  Lasègue  compare 
avec  raison  ces  figures  à  des  caries  muettes  sur  lesquelles  on  doit  non- 
seulement  inscrire  par  un  signe  le  point  maximum  des  bruits  anormaux; 
mais,  à  Taide  de  teintes  plus  ou  moins  foncées,  en  rappeler  retendue  et 
la  décroissance  ou  la  brusque  cessation. 

On  conçoit  d* autres  systèmes  de  localisation  thoracique  ;  et  chacun  peut 
à  cet  égard  s'en  créer  quelqu'un  qui  soit  conforme  à  ses  habitudes.  Pour 
notre  part,  celui  que  nous  avons  adopté,  et  qui  nous  semble  le  plus  com- 
mode, n'est  autre  que  celui  des  divisions  'superficielles,  qui  partagent 
extérieurement  la  poitrine  en  autant  de  régions  distinctes,  et  qui  se 
trouvent  énumérées  dans  la  partie  anatomique  de  cet  article.  Et  Ton  peut 
toujours  être  compris,  lorsqu'on  dit  que  tel  bruit  se  fait  entendre  sous  la 
clavicule,  dans  Tune  des  fosses  sus  ou  sous-épineuses,  dans  Pespace 
scapulo-vertébral,  dans  le  creux  axilaire,  sous  le  mamelon  droit  ou 
gauche,  etc.  Quant  à  la  topographie  du  cœur,  elle  ne  saurait  cire  établie 
dans  ses  détails  qu'après  avoir  préalablement  déterminé  les  rapports  géné- 
raux de  l'organe;  alors  les  bruits  normaux  et  anormaux  sont  rattachés 
soit  à  la  pointe,  soit  à  la  base,  et  ne  reçoivent  de  signification  précise  que 
lorsqu'on  est  parvenu  à  reconnaître  ces  relations. 

Il  est  facile  de  comprendre  que  Vattilude  du  sujet  joue  un  certain  rôle 
dans  l'exploration  que  l'on  fait  de  sa  poitrine,  et  que  Ton  peut  par  ce 
moyen  aider  au  résultat  cherché.  Pour  ce  qui  est  des  poumons,  on  doit  à 
J.-M.  Corson  (1859)  un  travail  sur  les  diverses  positions  qu'il  est  bon  de 
donner  aux  épaules  pour  faciliter  Texamen.  Voici  les  cinq  positions  prin- 
cipales qu'il  distingue  : 

Première  position.  —  L'un  des  avant-bras  est  porté  sur  le  dos,  l'autre 
pendant  le  long  du  corps.  Dans  ces  conditions,  le  son  de  percussion  est 
augmenté  sous  la  clavicule  du  côté  qui  est  tendu  antérieurement. 

Deuxième  position,  —  Le  poignet  gauche  est  tenu  de  la  main  droite 
derrière  les  reins.  La  résonnance  à  la  percussion  est  augmentée  dans 
toute  la  partie  antérieure  de  la  poitrine. 

Troisième  position.  —  Les  bras  sont  portés  derrière  la  tête,  les  mains 
les  saisissant  près  des  coudes.  Les  omoplates  sont  élevées  de  cette  façon, 
et  les  muscles  sont  amincis.  On  reconnaîtrait  ainsi  plus  facilement  une 
pleurésie  diaphragmatique. 

Quatrième  position.  — On  croise  les  bras  en  avant,  on  se  penche  légè- 
rement en  avant  ;  on  accroche  les  mains  près  des  fausses  côtes,  et  on  fait 
un  effort  pour  élever  les  côtes.  Les  épaules  s'écartent  en  arrière,  les 
muscles  s'amincissent,  et  Poreille  entend  mieux  ce  qui  se  passe  au  sommet 

du  ponmon.  « 

Cinquième  position.  —  On  croise  ses  bras  en  avant,  et  on  saisit  de 
chaque  main  le  moignon  de  Pépaule  du  côté  opposé  pour  le  tirer  forte- 
ment en  avant.  L'intensité  des  bruits  respiratoires  normaux  se  trouverait 
augmentée  du  double. 

Les  conditions  d'attitude  pour  l'exploration  du  cœur  sont  assez  con- 


65i  POITRINE.  —  sÉMÉioLociE. 

nues.  Il  suffit  de  consulter  à  cet  égard  les  articles  d'auscultatioo  et  de 
percussion;  et  de  bien  se  pénétrer  de  ce  fait,  que  le  cœur  se  porte  (bo; 
le  sens  vers  lequel  on  se  penche.  Pour  la  pal  potion,  comme  pour  Fiiiscnl- 
tation,  la  position  la  plus  favorable  est  celle  dans  laquelle  le  malade^ 
sur  son  séant,  légèrement  penché  en  avant.  Le  décubitus  dorsal  est  iné- 
vitable pour  pratiquer  la  percussion  du  cœur;  et  ce  n'est  pas  rooe  de^ 
raisons  les  moins  importantes,  qui  enlève  à  ce  genre  d'examen  pwr  le 
cas  actuel  toute  précision  et  toute  valeur.  (Voy.  Percussion,  p.  557.) 

Dans  ce  qui  [)récède*,  l'exploration  de  la  poitrine  est  faite  an  pointée 
vue  statique;  mais  il  y  a  lieu  également  de  voir  ce  qui  se  passe,  lorsque 
les  fonctions  sont  en  jeu,  et  que  la  cage  thoracique  est  en  mouveiiieot;et 
comment  on  doit  s'y  prendre  pour  apprécier  les  phénomènes  dyiuimifia 
propres  à  cette  région. 

Tantôt,  en  effet,  on  se  contente  d'observer  passivement  les  actes  ne 
caniques  dont  on  est  témoin  ;  et  tantôt  on  intervient  pour  les  varier,  b 
mesurer,  ou  les  inscrire,  etc. 

Dans  le  premier  cas,  par  exemple,  on  analyse  les  mouvements  respin- 
toires,  on  les  compte,  on  détermine  leur  rhythme,  on  apprécie  kor 
ampleur.  On  peut  même,  appliquant  l'oreille  sur  la  poitrine,  enteodrelei 
bruits  qui  les  accompagnent,  sans  sortir  de  l'état  de  passivité  :  c'est  to 
de  l'auscultation.  De  même,  pour  le  cœur,  on  reconnaît  Timpulsion  qa'il 
communique  autour  de  lui,  par  la  vue,  le  toucher  el  l'ouïe  ;  onmesorele 
rhythme  de  ses  battements  et  la  fréquence  de  leur  retour  ;  ou  entend  \xè 
bruits  normaux,  et  aussi  les  bruits  anormaux  qui  couvrent  parfois  les 
premiers  ou  les  remplacent. 

Dans  l'autre  cas,  on  fait  acte  d'intervention,  lorsqu'on  dit  au  malade 
d'accélérer  sa  respiration,  d'en  accoître  la  profondeur,  pour  amplifia 
certains  phénomènes  morbides;  et  même  quand  on  la  fait  suspeodret 
pour  que  ses  bruits  ne  viennent  plus  masquer  d'autres  bruits  :  ceaidi 
cœur,  par  exemple.  De  même  on  est  actif,  dans  le  fait  de  changer  la  sifaii- 
tion  du  malade  pour  voir  si  le  niveau  d'un  épanchement  pleurétiqoe  se 
déplace  en  même  temps  :  surtout  lorsqu'on  pratique  la  succussion  Ûpfo- 
cratique  ;  et  encore,  lorsqu'on  opère  la  mensuration  circonférentidie  d< 
la  poitrine,  qu'on  mesure  la  quantité  de  l'air  en  circulation,  la  force  aii^ 
laquelle  il  se  meut;  et  enfin  quand  on  enregistre  avec  un  appareil  aikoc 
les  mouvements  thoraciques,  ou  ceux  de  la  colonne  d'air  inspiré  et  expiré- 

On  mesure  et  on  enregistre  de  même  les  mouvements  apparents  du 
cœur,  soit  presque  immédiatement  (cardiographie) ^  soit  médiatemenl  ptr 
l'étude  de  la  pulsation  artérielle  (sphygmographie).  Mais  il  faut,  cbei 
l'homme  du  moins,  renoncer  à  recueillir  les  mouvements  du  saDgdao^ 
les  cavités  où  il  circule.  On  doit  en  juger  par  une  analyse  minutieuse  de;' 
trac^  obtenus  à  l'aide  de  quelqu'un  des  procédés  mentionnés  ci-dessos. 

Nous  compléterons  ce  sujet  en  disant  que  les  conditions  de  l'cxplon- 
tion  de  la  poitrine  ont  été  réalisées  schématiquement  par  des  appareils 
tels  que  le  Pnewnonoscope  de  Collongues,  par  exemple  :  sorte  de  manaf- 
quin  destiné  à  faciliter  aux  élèves  l'étude  de  l'auscultation,  dont  il  (^ 


POlTUtVE.  —  sÉMÉioLOGiE.  655 

reproduire  les  principaux  phénomènes,  toul  en  en  révélant  le  mécanisme. 

II.  De  l*ex\men  clinique  de  la  poitri>e  considéré  en  lui-même.  —  Cet 
examen  est  basé  sur  un  certain  nombre  en  méthodes  d'exploration  qu'on 
met  successivement  en  usage,  et  dont  Ténumération  doit  être  notre  pre- 
mier soin.  11  comprend  :  l'appréciation  de  la  douleur  Ihoracique^  de  la 
loux^  de  V  expectoration  y  \  inspection  de  la  poitrine^  la  palpation^  la 
percussion^  la  succussion^  V auscultation ^  la  mensuration  circonféren- 
liellCy  XdiSpirométrie^  et  enfin  l'emploi  des  procédés  graphiques,  imaginés 
surtout  au  point  de  vue  actuel. 

Parmi  ces  procédés  séméiologiques,  il  en  est  qui  appartiennent  à  des 
articles  distincts,  comme  V auscultation,  la  percussion,  la  cardiographie ^ 
l'examen  des  crachats,  Y  expectoration,  etc.  (Voy.  ces  mots),  et  dont  la 
description  se  trouve  Faite  par  conséquent  ;  nous  n'aurons  à  y  faire  que 
ile  rapides  allusions.  Quant  à  ceux  qui  ne  doivent  pas  être  Tobjet  d'une 
étude  séparée,  ils  vont  recevoir  les  développements  que  nécessite  leur  plus 
ou  moins  d*importance. 

1*  De  la  douleur  thoracique,  ou  point  de  côté,  —  La  douleur,  loca- 
lisée sur  une  partie  quelconque  de  la  paroi  thoracique,  est  l'un  des  sym- 
ptômes les  plus  fréquents  de  la  pathologie  ;  sa  signification  est  des  plus 
variées  ;  et  enfin  elle  n'est  pas  sans  avoir  par  elle-même  une  importance 
assezgrande  eu  raison  des  troubles  fonctionnels  qu'elle  détermine.  Exami- 
aoii&-la  dans  ses  causes,  dans  son  expression  et  dans  ses  résultats. 

Le  point  de  côté  se  montre  ilonseulement  dans  les  maladies  propres 
de  la  poitrine,  mais  encore  dans  certaines  affections  étrangères  à  cette 
région.  En  premier  lieu,  il  appartient  aux  contusions  du  thorax,  aux 
fractures  de  côtes,  à  la  névralgie  intercostale,  au  rhumatisme  musculaire 
{pleurodynie),  au  zona,  à  la  pleurésie  ;  à  la  pneumonie,  à  la  péricardite, 
à  l'angine  de  poitrine,  aux  anévrysmes  de  l'aorte,  aux  diverses  dégéné- 
rescences soit  des  parois,  soit  des  organes  inclus,  etc.  Pour  ce  qui  est  des 
faits  de  la  seconde  catégorie,  mentionnons  les  douleurs  pariétales  de  la 
gastralgie,  de  l'ulcère  simple  de  l'estomac,  de  la  gastrite,  de  la  colique 
hépatique,  du  cancer  épigaslrique,  des  péritonites  localisées  de  la  partie 
supérieure  de  Tabdomen,  etc.  Il  est  tout  naturel,  en  effet,  que  par  suite 
de  leur  proximité  les  viscères  thoraciques  et  abdominaux  confondent  sur 
les  mêmes  points  les  sensations  douloureuses  qu'éveillent  leurs  maladies  : 
de  là  résultent  des  difficultés  diagnostiques  que  nous  aurons  à  résoudre 
par  la  suite. 

Quant  à  l'expression  de  point  de  côté,  elle  n'implique  pas  forcément  que 
la  douleur  soit  latérale,  bien  que  ce  soit  le  cas  le  plus  ordinaire  de  beau- 
coup ;  elle  peut  aussi  se  faire  sentir  en  avant,  comme  le  point  épigas- 
lrique, par  exemple  ;  et  en  arrière,  sur  les  masses  musculaires  des 
gouttières  vertébrales,  et  sur  le  sommet  même  des  apophyses  épineuses. 
Mais,  il  faut  bien  le  dire,  la  douleur  ainsi  localisée  prend  ordinairement 
une  signification  précise;  et  le  vrai  point  de  côté  persiste  dans  sa  physio- 
nomie un  peu  banale  que  lui  valent  son  siège  réellement  latéralisé  et  son 
extrême  fréquence. 


656  POITRINE.  —  séméiologie. 

La  douleur  de  côté  apparaît  à  des  hauteurs  variables  sur  les  parois  de 
la  poitrine,  depuis  le  creux  sous-claviculaire  et  le  creux  axiliaire,  eo 
haut,  jusque  dans  Tépaisseur  des  parois  abdominales,  qui  ne  soot,  en 
somme,  que  le  prolongement  des  premières  par  tous  les  éléments  dont 
elles  sont  formées.  Elle  se  définit  ordinairement  par  le  rang  de  Tespia 
intercostal  auquel  on  peut  la  rapporter,  et  appartient  plutôt  au  sèment 
antérieur  qu'au  segment  postérieur  du  thorax.  Du  reste  elle  peut  être 
multiple,  et  former  plusieurs  foyers  soit  dans  le  sens  yertical,  soit  sur  k 
trajet  intercostal.  Tantôt  le  mal  est  d'origine  musculaire,  comme  dans  b 
pleurodynie  proprement  dite;  tantôt  il  réside  dans  un  nerf,  qu  il  y  lit 
névrite  ou  névralgie.  Dans  le  premier  cas,  la  douleur  occupe  des  limites 
mal  définies  et  n'a  point  de  siège  fixe  ;  les  mouvements  et  la  pression  b 
rendent  intolérable.  Dans  la  névralgie,  au  contraire,  la  douleur  suit  îm- 
cément  le  trajet  déterminé  du  nerf  intercostal,  et  forme  certains  foyen 
connus,  l'un  en  arrière,  l'autre  latéral  et  le  troisième  en  avant.  Sur  ce 
points  seuls,  la  pression  exaspère  le  mal,  sans  que  les  mouvements  re^ 
piratoiresy  aient  aucune  part. 

Il  est  tout  naturel  qu'à  toute  affection  locale  des  parois,  corresponde 
une  douleur  fixée  au  même  niveau.  Il  faut  savoir  cependant  que,  lon- 
qu*il  s'agit  d'un  cordon  nerveux  pris  dans  un  foyer  inflammatoire  on  de 
dégénérescence  organique,  la  douleur  se  fait  d*abord  sentir  en  cette  par- 
tie, et  aussi  sur  quelques  points  définis  de  son  parcours  et  notamoieo- 
vers  sa  terminaison.  Telle  est  l'explication  du  point  de  côté  dans  la  pks- 
résie,  que  Beau,  entre  autres,  a  mis  survie  compte  d'une  névrite  intercostale 
sous-pleurale,  et  qui  apparaît  surtout  en  avant,  bien  que  le  nerf  luiwme 
ne  puisse  être  affecté  et  participer  à  l'inflammation  de  la  plèvre,  que  dtu 
sa  partie  postérieure,  et  sur  un  plan  toujours  plus  élevé  que  le  lieu  des» 
épanouissement.  Le  point  de  côté  de  la  pneumonie  dépend  bien  plotài 
d*une  pleurésie  partielle  concomitante  que  du  poumon  lui-même,  dontb 
sensibilité  à  la  douleur  est  peu  développée,  et  reçoit  par  conséquent  nae 
interprétation  analogue. 

Si  l'on  cherche  a  classer  la  douleur  de  côté  ou  thoracique  en  génenl, 
d'après  ses  origines,  on  trouve,  d'abord,  le  point  de  côté  sympfomatique^ 
qui  est  en  rapport  direct  avec  tout  mal  localisé:  son  type  serait  daosb 
iracture  de  côte.  Ensuite  vient  le  point  de'càté  sympathique,  qui  rvvêlr 
une  affection  plus  ou  moins  éloignée  de  l'endroit  où  il  se  fait  sesitf. 
Exemple  :  le  point  de  côté  de  la  pleurésie  et  aussi  ces  nombreux  poiib 
pariétaux  provoqués  par  les  diverses  maladies  des  viscères  thoraciqoeset 
abdominaux,  et  qui  annoncent  longtemps  à  Favance  l'origine  obscure  et 
le  développement  insidieux  des  dégénérescences  organiques.  L'interpi^ 
tation  clinique  de  ces  points  est  l'un  des  problèmes  les  plus  délicats  de  b 
séméiologie.  Enfin  une  troisième  catégorie   comprend    certains  poM 
spéciaux,  sur  lesquels  nous  allons  donner  quelques  détails. 

L'un  d'eux  est  le  point  sus-claviculaire  qu  on  localise,  avec  plus <* 
moins  de  raison,  sur  le  trajet  du  nerf  phrénique,  vers  la  racine  du  coo,«l 
qu'on  rapporte  par  voie  sympathique  ascendante  à  la  pleurésie  diaphntf- 


POITRINE.  —  sÉMÉioLOGiE.  657 

inatique.  Ici  le  m.nl  est  puisé  à  la  périphérie,  et  vient  affecter  le  nerf  dans 
sa  continuité.  Ce  point  phrénique  doit  ordinairement  être  recherclic;  il 
se  montre  indépendamment  du  véritable  point  de  côté  qui,  dans  la  ma- 
ladie actuelle,  prend  une  intensité  toute  particulière,  et  provoque  à 
chaque  inspiration  de  Tanxiété,  des  sanglots,  d^".  Tagitation  :  c'est  la 
phrénésie  des  anciens. 

Un  autre  point,  occupant  vaguement  la  'région  de  Tépaule  droile  et 
difGcile  à  préciser,  est  le  point  scapulaire^  qu'on  rattache  volontiers  à 
TafTection  calculeuse  du  foie  et  aux  différentes  maladies  de  cet  organe.  Il 
parait  être  une  irradiation  des  coliques  dites  hépatiques  y  et  il  résul- 
terait des  anastomoses  ascendantes  du  pneumogastrique  avec  le  ^spinal, 
qui  d'autre  part  envoie  des  ramifications  à  certains  muscles  de  l'épaule. 
La  valeur  sémciologique  de  ce  symptôme  n'est  pas  à  dédaigner. 

Le  point  apophysaire  peut  recevoir  diverses  interprétations;  tantôt 
il  représente  le  point  postérieur  ou  récurrent  de  la  névralgie  intercostale  ; 
tantôt  il  est  en  rapport  avec  le  point  épigastrique  de  Tulcère  simple  de 
l'estomac;  tantôt  encore  il  appartient  à  cette  affection  mal  définie  que  les 
Anglais  appellent  Yirritation  spinale,  et  qui  est  de  l'ordre  des  maladies 
d'épuisement;  tantôt  enfin  il  rentre  dans  la  catégorie  de  ces  points  verté- 
braux sur  lesquels  Cruveilhier  a  appelé  l'attention,  et  qui  occupent  tou- 
jours une  sittiation  dominante  par  rapport  aux  organes  affectés  des  diffé- 
rentes cavités,  viscérales  du  tronc  et  du  bassin.  Le  siège  du  point 
apophysaire  est  donc  assez  variable  ;  d'autre  part,  il  n'est  souvent  reconnu 
que  par  la  recherche  qu'on  en  fait,  et  par  la  pression  qu'on  exerce  sur  le 
sommet  même  de  l'apophyse  épineuse  à  laquelle  il  appartient. 

Nous  devons,  ri  ce  propos,  rappeler  que  nous  avons  signalé  le  point 
apophysaire  cervical  comme  un  indice  assez  précoce  de  la  phthisie  pul- 
monaire (1879). 

Le  dernier  jpom^  à  mentionner  est  celui  de  V angine  de  poitrine,  re- 
marquable par  son  siège  vers  la  région  cardiaque,  par  ses  irradiations  au 
côté  gauche  du  cou  et  au  bras  gauche,  et  enfin  par  l'angoisse  qu'il  déter- 
mine. Il  n'est  pas  constant,  mais  revient  périodiquement,  et  par  son  in- 
tensité seule  il  peut  amener  une  mort  rapide.  On  connaît  assez  bien 
aujourd'hui  les  conditions  étiologiques  de  l'angine  de  poitrine  [Voy.  ce 
mol),  dont  toute  la  symptomatologie  est  comprise  dans  les  phénomènes 
que  nous  venons  de  rapporter.  L'innervation  du  cœur  et  les  anastomoses 
que  les  propres  nerfs  cardiaques  affectent  avec  les  nerfs  intercostaux 
expliquent  d'ailleurs  la  nature  de  ces  phénomènes,  et  la  prompte  issue 
qu'ils  peuvent  recevoir.  Nous  n'avons  pas  à  y  insister. 

Le  point  de  côté,  envisagé  dans  les  effets  qu'il  est  susceptible  de  pro- 
duire, agit  comme  toute  douleur  intense;  mais  par  son  siège  il  peut  avoir 
des  inconvénients  spéciaux.  En  réalité,  la  douleur  qui  résulte  des  mouve- 
ments respiratoires  tend  à  ralentir  et  à  supprimer  ces  mouvements  du 
côté  où  elle  existe.  Tantôt  ce  sont  les  côtes  qui  s'immobilisent,  tantôt  le 
diaphragme  :  d'où  gêne  respiratoire,  dyspnée,  etc.  L'auscultation  prouve 
bien  que  l'air  ne  pénètre  pas  jusqu'aux  vésicules  pulmonaires,  car  il  v  a 

50UV,   DICT.    M  ÉD.  ET   CUIR.  WN\\\  —    VI 


058  POITRINE.  —  sbiiéiolmie. 

absence  plus  ou  moins  complète  du  murmure  vésiculaire»  De  plus,  le 
malade  affecte  un  décubitus  en  rapport  avec  la  souiCraace  qu'il  éprouve. 
Il  évite  autant  que  possible  de  se  coucher  du  côté  où  est  le  point  doulou 
reux;  mais,  d'autre  part,  comme  il  ne  doit  pas  entraver  le  jeu  de  la  respi- 
ration  dans  la  moitié  saine  du  thorax,  il  ne  tarde  pas  à  se  reporter  ven 
le  premier  coté,  dès  que  le  mal  devient  tolérable.  C'est  ce  qui  se  voit  daos 
la  pleurésie,  et  successivement  dans  les  deux  périodes  de  douleur  prédo- 
minante et  d'épanchement  accompli.  Enfin,  comme  dernier  résultat  du 
point  de  côté,  nous  signalerons  les  relations  existant  entre  la  nérroljiV 
intercostale  et  Téruption  du  zona\  entre  la  douleur  térébrante  de  U 
paroi  thoracique  et  Tapparition  extérieure  d'un  anévrysme  de  l'aorte 
pectorale,  etc. 

2°  De  la  touXj  de  V expectoration  et  des  crachats.  —  Les  affections 
des  organes  renfermés  dans  le  thorax,  indépendamment  de  leurs  signes 
directs,  se  traduisent  par  certains  phénomènes  extrinsèques  qui  n*oat  pis 
une  valeur  moindre.  C'est  ainsi  que  Ton  peut  juger  d'une  maladie  do 
cœur  par  le  trouble  de  la  circulation  périphérique,  et  notamment  pir 
l'étude  du  pouls.  De  même  les  lésions  pulmonaires  s'annoncent  àVei- 
térieur  par  les  produits  de  l'expectoration  et  par  la  toux  qui  la  précède. 
L'examen  approfondi  de  cette  toux,  de  V expectoration  et  des  crackats 
jouait  un  grand  rôle  autrefois  en  séméiologie;  mais  la  découverte  de  la 
percussion  et  de  Tauscultation,  en  somme  toute  moderne,  a  reloué  ces 
symptômes  sur  le  second  plan.  Ce  serait  cependant  ici  le  lieu  de  bous  en 
occuper,  si  leur  histoire  n'appartenait  pas  à  des  articles  séparés.  Nous 
renvoyons  donc  le  lecteur  au  mot  Crachats  (t.  X,  1869),  traité  par  notre 
collaborateur  L.  Martineau,  et  qui  comprend  en  même  temps  le  mot  Ex- 
pectoration. Quant  au  mot  Torx,  il  sera  Tobjet  d'une  description  ulté- 
rieure. 

5°  De  rinspection  de  la  poitrine.  —  Lorsque  l'attention  est  attirée  du 
côté  du  thorax  par  quelque  circonstance  qui  peut  faire  croire  à  un  ét^t 
pathologique  de  cette  région,  il  faut  procédera  une  inspection  immédiate, 
après  s'être  mis  dans  les  conditions  les  meilleures  pour  un  examen  effi- 
cace, et  notamment  en  plaçant  le  malade  dans  une  attitude  parfaitement 
symétrique,  assis  sur  son  séant,  et  à  découvert.  La  connaissance  préa- 
lable de  la  conformation  normale  de  la  poitrine  est  de  rigueur  eo  tenant 
compte  aussi  des  irrégularités  qui  ne  sortent  pas  de  l'état  physiolc^ique. 
et  qui  dépendent  de  Tage,  de  certaines  professions  ou  habitudes. 

Parmi  les  auteurs  qui  ont  le  plus  approfondi  le  sujet,  nous  devons  ci- 
ter E.  J.  AVoillez  (1835-1879),  dont  toute  la  vie  scientiGque,  on  peut  le 
dire,  a  été  consacrée  aux  questions  se  rapportant  à  la  séméiologie  de  h 
poitrine,  et  qui  vient  de  la  couronner  par  la  publication  d'un  Traité  com- 
plet d'auscultation  et  de  percussion.  H  distingue  naturellement  les  fiits 
physiologiques  et  les  faits  pathologiques.  En  premier  lieu,  il  faut  recon- 
naître qu'une  conformation  parfaite  de  la  poitrine  est  rare.  Sur  197  su- 
jets sains,  examinés  à  ce  point  de  vue,  il  n'y  en  a  que  41  qui  puisMl 
être  considérés  comme  régulièrement  conformés;  les  152  autres  préan- 


POITilLNE.  —  sÉMÉioLOGiE.  659 

lent  toujours  quelques  dépressions  ou  saillies.  Chez  les  41  sujets  normaux, 
il  y  a  encore  à  distinguer  :  56  fois  le  côté  droit  remporte  en  déveioppc- 
inent  sur  le  côté  gauclie,  de  1  à  5  centimètres;  cela  paraît  être  la  règle  ; 
Undis  que  chez  les  cinq  derniers^  il  y  a  égalité  entre  ics  deux  côtés.  Dans 
tous  les  cas,  la  ligne  des  mamelons  correspond  à  la  quatrième  côte.  Les 
irrégularités  observées  sur  les  132  individus  mis  à  part  consisteot  dans 
Les  cas  suivants  :  saillie  sternaire  transversale,  à  Tunion  des  deuK  pièces 
aopérieures;  dépression  sternaire  inférieure,  par  renfonceinent  de  Tap- 
peiidiee  liphoïde;  voussure  cardiaque  norm<ile  (26  ibis  sur  100)  ;  saillie 
postérieure  à  droite,  formant  la  contre -partie  de  la  voussure  antérieure 
gauche  (29  fois  sur  100).  La  mensuration  viendra  plus  tard  compléter 
cette  étude. 

Les  faits  pathologiques  sont  ainsi  exposés  :  Dans  la  bronchite  algue,  on 
n'observe  rien  de  particulier  à  Tinspection;  dans  '*liépatisation  les  résul- 
tats sont  douteux;  Temphysème  se  signale  par  une  voussure  des  espaces 
intercostaux;  T hypertrophie  du  cœur  n*est  pas  apparente  àTextérienr; 
.  celle  du  foie  donne  lieu  à  une  ampliation  de  Thypochondre  correspon- 
dant; celle  de  la  rate  n'est  appréciable  qu'à  la  mensuration;  le  météorisme 
de  la  partie  supérieure  de  l'abdomen  provoque  une  dilatation  de  la  base 
du  thorax,  qui  apparaît  rapidement  et  disparait  de  même. 

Nous  compléterons  cette  revue  par  Texameo  particulier  de  quelques  cas 
offirant  une  certaine  importance. 

Dans  la  pleurésie  avec  épancliement,  l'inspection  simple  de  la  |>oitrine 
apporte  un  contingent  notable  au  diagnostic.  Sous  l'influence  du  point 
de  côté,  la  partie  correspondante  du  thorax  reste  à  peu  près  immobile  : 
ce  qui  contraste  avec  la  mobilité  de  la  partie  opposée.  Si  répanchement 
est  formé,  et  s'il  est  considérable,  on  voit  les  espaces  intercostaux  élargis, 
eflacésy  les  côtes  relevées  de  leur  inclinaison  à  l'état  de  repos  ;  en  un  mot, 
tont  le  côté  malade  est  ampliGé  et  sans  mouvement.  Plus  tard  encore, 
lonque  l'épanchement  est  en  voie  de  résolution,  et  qu'il  a  tout  à  fait 
disparu,  la  paroi  thoracique  parait  suivre  ce  retrait,  comme  pour  aller  à 
la  rencontre  du  poumon.  Et  enfin,  ^lorsque  des  adhérences  ont  rendu  ce 
OMitact  déûnilif,  la  rétraction  ne  cesse  pas  pour  cela  :  on  reconnaît  tou- 
jours le  côté  qui  a  été  aiTecté  de  pleurésie,  par  son  affaissement,  en  oppo- 
sition avec  la  dilatation  normale  du  côté  sain.  Ce  fait  de  la  rétraction  de 
la  paroi  thoracique,  dans  ses  rapports  avec  une  maladie  du  poumon  ov  de 
la  plèvre  plus  ou  moins  guérie,  peut  être  érigé  en  loi.  Dans  ce  cas^  la  poi 
trine  obéit  à  une  sorte  de  force,  que  Woillez  qualifie  de  force  concen- 
trique^ et  qui  l'associe  aux  mouvements  organiques  des  parties  qu'elle  re- 
couvre. Le  retrait  est,  du  reste,  quelquefois  partiel,  comme  lorsqu'il 
s'agit  d'une  pleurésie  locale  enkystée,  ou  dans  le  cas  d'une  caverne  pul- 
monaire évacuée  et  tendant  à  la  cicatrisation. 

Il  existe  un  genre  de  rétraction  totale  de  la  poitrine,  dont  la  cause  est 
en  dehors  de  cette  cavité  :  c'est  celle  qui  se  montre  à  la  suite  de  l'hyper- 
trophie chronique  des  amygdales.  Dupuytren  le  premier  (1828)  a  si- 
gnalé cette  coïncidence,  en  reconnaissant,  d'une  part,  la  dépression  plus 


660  POITRINE.  —  séméiologie. 

ou  moins  grande  des  côtés  de  la  poitrine,  avec  une  saillie  proportionnelie 
du  sternum  et  du  ventre,  en  avant,  et  de  la  colonne  vertébrale,  en  ar- 
rière; et,  d*autre  part  un  gonflement  notable  des  amygdales.  Ces  faits 
ont  été  confirmés  par  J.  Nason  Warin  (de  Boston,  1 859),  qni  a  publié  m 
mémoire  sur  Thypertrophie  des  amygdales  accompagnée  de  certaines  dif- 
formités de  h  poitrine.  Il  s'agit  ordinairement  de  très-jeunes  entuits. 
Les  symptômes  sont  :  l'haleine  courte,  la  difBcuUé  à  teter,  la  boodie 
tenue  béante,  la  respiration  bruyante,  des  songes  effrayants,  des  cris,Hc. 
Le  mécanisme  de  la  dépression  thoracique  s'explique  facilement,  parle 
peu  de  résistance  de  la  cage  chondro-costale,  qui  cède  sous  la  pression  li- 
mosphérique,  lorsque  Tair  ne  pénètre  pas  largement  par  ses  voies  n^ 
relies.  L'indication  principale  consiste  dans  l'ablation  des  amygdales. 

Aux  rétractions  partielles  de  la  poitrine,  il  faut  opposer  les  saillies  « 
voussures  également  localisées.  Comme  exemple,  citons  la  voussure  à 
la  péricardite,  sur  laquelle  Fr.  Sibson  (1849)  a  donné  des  détails  précs: 
((  Elle  s'étend,  dit-il,  à  la  moitié  ou  aux  deux  tiers  inférieurs  dusteniflii. 
aux  cartilages  sterno-costaux  gauches,  à  partir  du  second,  et  avec  distes- 
sion  des  espaces  intercostaux,  aux  cartilages  costaux  situés  à  droite  (k 
l'extrémité  inférieure  du  sternum,  aux  côtes  gauches,  dans  le  voisinage! 
en  dehors  du  mamelon,  depuis  la  cinquième  ou  la  sixième  jusqu'à  b 
septième  ou  la  huitième,  enfin  au  cartilage  xiphoïde,  à  Tépigastre et am 
cartilages  costaux  des  septième  et  huitième  côtes.  »  C'est  là  la  cause  b 
mieux  démontrée  des  voussures  précordiales;  après  quoi  on  ue trouve 
plus  guère,  mais  avec  des  limites  moins  bien  définies  et  un  siège  plusva* 
riable,  que  les  saillies  ducs  aux  anévrysme  de  la  crosse  de  Taortequi  se 
portent  vers  l'extérieur.  On  signale  encore  les  voussures  partielles  dues  i 
la  pleurésie  enkystée  (liouilly,  1876).  Enfin,  pour  ce  quiesldel'»-  1 
physème  vésiculaire  du  poumon,  il  faut  savoir  que  les  voussures  locak  1 
sont  très-contcstées  dans  cette  maladie  :  on  a  dû  les  confondre  plnsd'i*^  I 
fois  avec  les  saillies  normales  dont  nous  avons  parlé  plus  haut.  Eorn*  I 
lité,  dans  l'emphysème,  on  observe  plutôt  une  ampliation  générale  dfb  I 
cage  thoracique,  qui  prend  une  forftie  globuleuse  très-remarquablft»  1 
point  que  le  malade  semble  affecté  d'une  gibbosité  antérieure  di^Jk 
gibbosité  postérieure.  Les  autres  signes  de  cette  maladie  sont  daiih*^/', 
peu  équivoques.  1 

Parmi  les  déformations  que  révèle  l'inspection  de  la  poitrine,  nousd^l  i. 
vous  encore  mentionner,  chez  les  sujets  maigres  et  déjà  en  proie  à  1*1  i^-, 
phthisic,  l'écartement  des  omoplates,  qui  semblent  se  détacher  des  M  au 
rois  thoraciques  comme  des  ailes  (Scapulœ  alatœ).  Cette  appareort*'!  ^a 
pend  non-seulement  de  l'amaigrissement  du  sujet,  mais  aussi  têiDetfi^|  n^^ 
d'une  rétraction  déjà  très-notable  du  sommet  du  cône  thoracique.  O^N  >ii 
à  ce  retrait  en  lui-même,  il  est  très-réel  ;  il  se  manifeste  dès  les  pie*fl  4" 
temps  de  la  phthisie  pulmonaire,  en  raison  de  ce  que  l'air  cessedqi"i  it^ 
pénétrer  vers  le  sommet  du  poumon.  Il  en  résulte  un  signe  précoce ffl  loi 
cette  maladie,  à  savoir  l'abaissement  de  l'extrémité  externe  de  la  f^  tin 
cule  et  la  chute  des  épaules  (Aufrecht-Haenish,  1878).  Onsaitqu'àr*!  <^'^ 


POITRINE.  —  sÉMÉiOLOGiE.  66i 

normal  rextrémité  externe  de  la  clavicule  est  sur  un  plan  supérieur  àTex- 
tréraité  interne.  Lorsque  le  lobe  supérieur  du  poumon,  envahi  par  les  gra- 
nulations tuberculeuses,  ne  se  dilate  plus  autant,  rextrémité  externe  de  la 
clavicule  s'abaisse  d'abord  au  niveau  de  Tinterne,  puis  bientôt  elle  tombe 
encore  plus  bas  :  d'où  les  apparences  signalées  plus  haut,  et  que  complète 
le  fait  des  omoplates  ailées. 

En  résumé,  l'inspection  de  la  poitrine  montre,  comme  faits  séméiolo- 
giques  principaux,,  indépendamment  de  la  coloration  et  des  manifesta- 
tions cutanées,  des  déformations  consistant  en  saillies  ou  en  dépressions; 
tantôt  ces  déformations  sont  totales,  tantôt  elles  sont  partielles.  Les  unes 
sont  physiologiques,  d'autres  pathologiques.  Chacune  d'elles  présente 
quelque  particularité  qui  la  distingue  des  autres,  et  l'élève  à  la  hauteur 
d'un  signe  diagnostique.  Enfin,  on  constate  certains  autres  phénomènes 
qui  ne  peuvent  se  classer  parmi  les  déformations  précédentes;  tels  sont  : 
l'abaissement  das  clavicules  en  dehors,  la  chute  des  épaules,  les  scapulœ 
alatœ,  et,  pour  être  complet,  les  tumeurs  formées  par  le  poumon  hernie, 
par  un  abcès  migrateur,  par  un  anévrysme  diffus,  par  l'emphysème  cel- 
lulaire :  mise  à  part  la  région  mammaire. 

Au  point  de  vue  dynamique,  l'inspection  de  la  poitrine  est  utile  pour 
apprécier  la  fréquence  et  le  rhythme  des  mouvements  respiratoires,  les 
battements  du  cœur,  le  tirage  de  l'épigastre  en  cas  de  dyspnée  laryn- 
gée, le  retrait  des  côtes  par  les  adhérences  costo-diaphragmatiques  (Jac- 
coud,  1879),  etc.  L'étude  de  la  plupart  de  ces  symptômes  appartient  sur- 
tout à  l'auscultation,  qui  en  rend  mieux  compte  d'ailleurs  (Voy,  ce  mot). 

4*  Palpation.  —  L'apposition  de  la  main  sur  la  poitrine  éveille  cer- 
taines sensations  qui  sont  spéciales  au  toucher^  et  qui  peuvent  se  traduire 
en  signes  cliniques.  Passons  rapidement  sur  ce  qui  se  rapporte  :  à  la 
température  de  la  peau,  qui  n'est  autre,  en  général,  que  celle  du  reste 
du  corps,  (réserves  faites  pour  les  recherches  de  Péter  sur  les  tempéra* 
tares  locales,  1878)  ;  à  la  cre]pi7a/ion  d'une  fracture  de  côte,  d'une  bosse 
sanguine,  de  l'emphysème  cellulaire,  du  poumon  hernie  ;  à  la  fluctuation 
d'un  abcès  pariétal  ;  à  Vinégale  résistance  des  parties  molles  et  des  par- 
ties dures,  à  la  détermination  d'un  fotjer  douloureux,  etc.  ;  pour  arriver 
aux  faits  qui  doivent  plus  particulièrement  nous  intéresser. 

Du  côté  de  l'appareil  respiratoire,  on  observe  par  le  palper  de  la  paroi 
thoracique,  chez  un  individu  qui  parle,  à  l'état  normal,  un  léger  frémis- 
sement vibratoire^  dont  les  modifications,  à  l'état  pathologique,  acquièrent 
une  certaine  valeur  séméiologique.  Ces  vibrations  tactiles  sont  peu 
dusceptibles  d'augmentation  ;  cependant  par  le  fait  des  indurations  pulmo- 
naires, hépatlsation,  tumeurs,  etc.,  cette  sensation  devient  plus  vive, 
surtout  par  comparaison,  en  se  reportant  au  côté  sain.  Par  contre,  un 
épanchement  pleural,  qui  efface  les  vésicules  pulmonaires  et  qui  par  sa 
nature  est  peu  apte  à  vibrer,  diminue  et  supprime,  suivant  son  épaisseur, 
toute  vibration  au  toucher.  C'est  l'un  «tes  signes  les  plus  utiles  pour  dis- 
tinguer une  pneumonie  d'une  pleurésie  dans  les  cas  douteux  (Voy,  Per- 
cussion, p.  555). 


662  1»01TRLNK.  —  séméioi^gie. 

L'analvsc  de  ce  phénomène  a  été  portée  encore  plus  loin,  et  a  pennis  à 
Jaccoud  (1879)  de  reconnaître  les  épancheinents  pleurétiques  mullikMMi- 
laires,  en  suivant,  pour  ainsi  dire,  et  d'après  la  co&servalion  de«  l'ihn- 
tionsthoraciques,  les  cloisonnements  de  la  cavité  pleurale.  On  peutsawr« 
ainsi,  en  quels  points  la  tboracentèse  doit  être  pratiquée,  et  s*il  fsHit  bitt 
une  ou  plusieurs  ponctions. 

Le  palper  fait  encore  reconnaître  le  frotlement  pleural ^  soit  on  début 
de  la  pleurésie,  soit  dans  la  période  de  retour  de  cette  maladie;  mais 
c'est  un  phénomène  qui  appartient  plutôt  à  Fauseultation.  (Voy.  et  mol, 
p.  142.)  De  méme^  se  révèle  au  toucher  un  râle  vibrant  (Laëimec),  k 
gargouillement  d'une  caverne  tuberculeuse,  les  bruits  humides  et  serrés 
du  catarrhe  suffocant,  et  enfin  la  fluctuation  ihoracique  de  Thydr»- 
pneuino-péricarde,  etc.  Ces  différents  signes  sont  tellement  nets  par  em* 
mêmes,  ils  concordent  avec  d'autres  symptômes  si  peu  équiToqves,  qu  il 
est  superflu  de  nous  appesantir  à  leur  propos. 

Au  niveau  de  la  région  précordiale,  le  palper  fait  sentir  les  beittemenU 
de  cœurj  dont  il  peut  apprécier  le  siège,  l'énergie,  l'étendue,  le  rfaythmc. 
les  altérations  pathologiques,  etc.  Ce  genre  d'exploration  a  presque  la 
même  importance  que  Texamen  du  pouls  ;  il  comporte  autant  4e  délaib 
et  de  délicatesse;  on  aurait  bien  tort  de  le  négliger.  Il  n'est  pas  jusqv'an 
bruits  anormaux,  soufiks  rudes,  bruits  musicaux,  qui  ne  se  traduisent 
au  toucher  par  la  sensation  du  frémissement  cataire,  sascq|)tiMe 
d'une  déteimination  aussi  précise  que  les  phénomènes  auditifs  de  l'ass- 
cultation,  sous  le  rapport  du  si^e  et  de  l'interprétation  clinique.  Cepe»- 
d^mt  il  sera  toujours  nécessaire  de  chercher  en  auscultant  la  confirmation 
d'une  idée  éveillée  par  la  simple  et  rapide  apposition  de  la  main  sur  la 
région  du  cœur  :  celle-ci  eût-elle  des  résultats  négatifs  ;  car  on  sait  que  les 
souilles  doux  cardiaques,  pas  plus  que  le  souffle  glotti(]ue  de  la  respira- 
tiMi,  ne  se  disper;^ent  au  loin  sous  lorme  de  vibrations  t«ictil<es.  Il  ns  a 
que  la  voix  laryngée,  et  que  les  bruits  rudes  ou  musicaux  du  cœur,  qui 
donnent  naissance  à  ces  frémissements  de  voisinage.  Les  bruits  produits 
au  niveau  des  anëvrysmes  thoraciques  sont  dans  le  même  cas;  et  le  fré- 
missement cataire,  uni  à  la  pulsation  anévrtfsmale,  suppose  un  souffle 
rude  engendré  à  Torifice  d'entrée  de  l'anévrysme.  Ces  phénomènrs  liés  à 
la  systole  ventriculaire  en  reproduisent  rintermrllence  et  la  périodidié. 
Quant  à  l'anévrysme  artérioso-veineux,  le  susurrus  perçu  f)ar  lorfille  cl 
le  irémissement  senli  au  toucher  qui  l'accompagne,  affectent  un  autre 
rhytlime(roy.  Aorte,  p.  lS9.)Enbn,  meaivonnonsV liydro- pneu ffwhpéri- 
carde,  qui  sous  la  main  fait  éprouver  des  mouvements  de  clapotement, 
de  remous^  de  roue  de  moulin,  bien  en  rapport  avec  les  bnnts  singuliers 
que  Tauscultalion  nous  révèle  (Voy.  ce  mot,  p.  185). 

5°  Succussion  hippocratique.  —  Il  s'agit  ici  d'un  procédé  bien 
anciennement  connu,  puisqu'on  voit  à  qui  on  peut  en  reporter  l'origine, 
et  destiné  à  agiter,  par  une  brusque  secousse,  des  gaa  et  des  liquides 
contenus  daiis  une  même  cavité  tiioracique.  Vhydir)'pneumO'thorax 
réahse  en  clinique  les  conditions  matérielles  du   phénomène.  Souvent 


€*est  le  malade  lui-même  qui  s'aperçoit  des  mouvements  et  des  bruits 
résultant  des  diverses  attitudes  qu'il  prend;  mais  le  médecin  prévenu 
peut  reproduire  les  mêmes  effets,  en  saisissant  le  malade  par  les  épaules 
ei  en  le  remuant  brusquement.  On  sent  à  la  main  et  on  entend  surtout 
avec  l'oreille  appliquée  sur  la  poitrine  des  glous-glous,  des  gargouille- 
menlSy  analogues  à  ceux  qu'on  obtient  en  agitant  une  carafe  à  demi- 
remplie.  11  se  passe  quelque  chose  de  semblable  dans  l'estomac  presqu'à 
Tétat  normal,  mais  principalement  dans  la  dyspepsie  dite  flatulente.  On 
ne  confondra  pas  au  lit  du  malade  cette  dernière  affection  avec  l'hydro- 
pneumo-thorax  ;  car  toutes  les  circonstances  étiologiques,  topogra- 
pbiques,  sont  diflcrentes  dans  les  deux  cas.  Terminons  en  disant  qu'une 
caverne  spacieuse  pourrait  exceptionnellement  reproduire  les  conditions 
physiques  de  la  fluctuation  Uioracique,  déterminée  elle-même  par  la 
succusston  hippocratique.  On  voit  alors  la  sensation  de  gargouillement 
sous  la  main  atteindre  le  degré  des  phénomènes  que  nous  venons  de 
décrire  (Voy.  Aisciltation,  p.  144). 

6*  Percussion,  —  Par  la  percussion  de  la  poitrine,  on  obtient  la 
perception  simultanée  d'impressions  tactiles  et  auditives,  conformément 
aux  principes  que  nous  avons  largement  exposés  d'autre  part  (Voy.  Per* 
cussion;  p.  551).  C'est  une  véritable  transition  de  la  palpation  à  Taus- 
cnltation  ;  et  les  résultats  de  ce  genre  d'exploration  sont  aussi  considé- 
rables que  ceux  des  deux  autres.  Nous  retavoyons  tout  naturellement 
h  r»rtiele  indiqué  ;  et  cela  d'autant  mieux  que  nous  en  sommes  l'auteur. 
Comme  fait  général  se  dégageant  de  cette  étude,  nous  voyons  que  si, 
pour  l'abdomen,  la  percussion  unie  à  la  palpation  affecte  une  suprématie 
marquée  sur  l'auscultation,  elle  lui  cède  en  importance  à  son  tour  lors- 
qu'il s!agit  de  l'examen  clinique  de  la  poitrine. 

7*  Auscultation,  —   L'auscultation  est  h)    méthode   par  excellence 
pour  l'exploration  de  la  poitrine  ;  car  c'est  là,  en  effet,  que  se  présentent 
surtout  les  phénomènes  sonorrs  que  l'oreille  doit  recueillir.  C'est  pour 
la  poitrine  principalement  que  Laënnec  a  créé  ce  genre  d'exau^n  qui 
immortalisera  son  nom;   et  l'instrument  qu'il  a  imaginé  à  ce  propos, 
le  stéthoscope^  rappelle  celle  de  ses  applications  qui  efface  pour  ainsi 
dire  toutes  les  autres.  Insister  sur  ces  détails  serait  superOu  ;  et  nous 
defons  plutôt  renvoyer  le  lecteur  à  l'article  Auscumatio>  (t.  IV,  186«i). 
Nous  avons  par-dessus  tout  cherché  à  mettre  la  question  au  courant  de 
kl  science,  sous  le  double  rapport  de  l'érudition  et  des    explications 
techniques.  Nous  avons,  en  outre,  introduit  une  classiPication  des  phé- 
ncmènes  propres  à  l'auscultation,  qui  en  simplifie  l'étude,  en  dispensant 
de  répétitions  fastidieuses  et  inutiles.  Ën&n  nous  revendiquons  le  faible 
mérite  d'avoir  sauvé  l'école  française  du  reproche  de  s'être  immobilisée 
dans.ses  premiers  succès,  en  restant  étrangère  aux  progrès  que  compor- 
tait la  découverte  de  Laënnec.  Depuis  l'année  1865,  époque  de  l'appari" 
tien  de  notre  travail,  il  ne  s'est  produit  aucun  fait  important,  en  ce  qui 
concerne  l'auscultation  de  la  poitrine  :  cœur,  vaisseaux  et  poumons. 
Aucune  théorie  nouvelle,  relative  à  l'origine  des  bruits  Ihoraciques,  n'a 


664  POITRINE.  —  séméiologie. 

été  proposée  ;  et  la  séméiologie  dans  ce  sens  ne  s'est  perfectionnée  que 
par  quelques  points  de  détail,  trop  spéciaux  pour  que  nous  y  insistions 
en  ce  moment. 

Nous  voulons,  cependant,  poser  un  principe  qui  réduise  à  leurs  justes 
proportions  des  procédés  d*cxploration  sur  lesquels  on  parait  un  peu 
trop  compter.  Que  Ton  sache  donc  qu'il  ne  faut  qu'une  certaine  porûoo 
déterminée  de  parenchyme  pulmonaire  pour  éteindre  ou  amortir  uo 
bruit  quelconque,  local  ou  transmis.  De  sorte  que  Tauscultalion  et  la 
percussion  ne  donnent  jamais  de.certitude  absolue  sur  l'clat  matériel  du 
poumon  ;  et  qu'une  lésion  notable  peut  exister,  sans  qu'aucun  signe 
physique  Tait  encore  révélée.  Il  est  positif  que  certains  troubles  fonc- 
tionnels sont  plus  précoces,  pour  annoncer  la  phthisie,  que  les  manifes- 
tations auditives;  lorsque  celles-ci  apparaissent  à  leur  tour,  le  mal  est 
déjà  irréparable.  Voilà  qui  atténue  quelque  peu  la  valeur  pratique  des 
méthodes  dont  nous  venons  de  parler. 

8"*  Mensuration.  —  L'idée  de  mesure  (jJiiTpovj  se  présente  en  séméiolo- 
gie thoracique  sous  plusieurs  aspects  différents,  et  comporte  toujours 
la  précision  et  la  comparaison.  On  peut,  d'abord,  apprécier  les  mouTe- 
ments  du  cœur  et  de  la  respiration  dans  leur  nombre  absolu  pendant 
l'unité  de  temps,  daus  leur  étendue  et  leur  intensité,  et  dans  les  rap- 
ports qu'affectent  entre  eux  les  mouvements  alternatifs  de  systole  et  de 
diastole,  d'inspiration  et  d'expiration.  Ensuite,  il  y  a  lieu  dé  mesurer 
circonférentiellement  la  poitrine,  pour  en  avoir  premièrement  le  péri- 
mètre total,  et  aussi  pour  comparer  entre  elles  les  deux  moitiés  dont  la 
symétrie  n'est  souvent  qu'apparente.  On  détermine  encore,  par  la  per- 
cussion, ou  par  tout  autre  moyen  exact,  les  dimensions  linéaires  de> 
organes  intrathoraciques  ;  c'est  ainsi  que  l'on  obtient  le  diamètre  du 
cœur,  et  qu'on  juge  de  son  volume.  Les  lignes  plessimétriques  de  Piorn 
et  son  plessimètre  gradué  avaient  surtout  pour  but  de  créer  une  organo- 
graphie  de  précision.  Enfm,  il  exisie  des  procédés  qui  donnent  la  capa- 
cité pulmonaire,  qui  mesurent  la  force  de  la  colonne  d'air  en  circulation, 
et  montrent  les  rapports  de  quantité  entre  l'air  inspiré  et  l'air  expiré. 
Pour  le  cœur,  il  n'est  pas  possible  d'établir  de  données  manométriques: 
mais,  par  l'étude  du  pouls,  par  l'emploi  des  procédés  cardiographiques, 
on  arrive  à  des  résultats  tout  aussi  exacts  que  si  Ton  avait  eu  recours 
à  l'exploration  directe. 

Nous  n'insisterons  pas  ici  sur  les  questions  de  nombre,  de  rhylhme, 
d'intensité,  etc.,  en  ce  qui  concerne  la  respiration  et  la  circulation  cen- 
trale. Ces  recherches  appartiennent  à  l'auscultation  ;  du  moins  elles  ont 
été  traitées  à  cette  occasion.  Nous  laisserons  également  de  côté  la  pies- 
simétrie  organographique,  qui  se  trouve  ex[)Osée  à  propos  de  la  percus- 
sion. Quant  à  l'emploi  des  procédés  graphiques,  qui  doivent  remplacer 
la  mensuration  directe  pour  l'appareil  central  de  la  circulation,  il  eu 
sera  fait  mention  tout  à  l'heure.  Nous  allons  donc  nous  borner  à  fétude 
de  la  mensuration  circonférentielle  et  diamétrale  de  la  poitrine  et  de 
la  spirométrie,  qui  n'ont  pas  de  description  séparée  dans  ce  Dictionnaire. 


POITRhNE.  —  sÉMÉioLOGiE.  665 

a.  Mensuration  circonféreniielle  et  diamétrale.  On  peut  juger  du 
volume  de  la  poitrine,  soit  en  mesurant  son  périmètre  à  différents 
niveaux,  soit  en  déterminant  ses  diamètres  à  Taide  d'instruments  appro- 
priés. Les  données  que  Ton  obtient  ainsi  conduisent  à  plusieurs  résul- 
tats :  tantôt  il  s*agit  de  connaître,  d'après  le  développement  du  thorax, 
quelle  est  la  force  de  la  constitution  du  sujet;  tantôt  on  trouve,  dans  le 
retrait  de  certaines  parties  de  la  poitrine,  surtout  du  sommet,  un  signe 
précoce  de  plitiiisie  pulmonaire;  tantôt  enfin  on  compare  Tune  à  Tautre 
les  deux  moitiés  de  la  cage  tboracique,  qui  à  Tétat  normal  sont  sensible- 
ment symétriques. 

Le  procédé  le  plus  usuel,  pour  apprécier  le  périmètre  de  la  poitrine, 
e^t  celui  du  ruban,  que  Laënnec  mettait  déjà  en  pratique,  tout  en  lui 
reconnaissant  peu  d*utilité.  On  en  comprend  facilement  l'application  : 
Un  cordon  métrique  est  passé  tout  autour  du  thorax,  suivant  un  plan 
horizontal,  à  différentes  hauteurs,  et  donne  immédiatement  la  mesure 
circonférentielle  de  la  section  au  niveau  de  laquelle  on  opère.  Pour 
terme  de  comparaivson,  d'un  individu  à  Tautrc,  on  peut  adopter,  chez 
rhomme,  la  ligne  des  mamelons  ;  ou  bien,  dans  les  deux  sexes,  la  ligne 
sous-mammaire,  ou  encore  le  bord  inférieur  de  Taisselle,  qui  est  le 
point  le  plus  élevé  qu'on  saurait  atteindre. 

L;emploi  le  plus  direct  de  jce  procédé  de  mensuration  est  pour 
Texamen  des  conscrits.  D'après  une  instruction  ministérielle  du  3  avril 
d875,  le  périmètre  tboracique  doit  atteindre  au  minimum  0'",784. 
Or,  sur  400  jeunes  gens  de  la  classe  1874,  le  périmètre  moyen 
fut  trouvé  de  0™,857.  La  taille  moyenne  étant  de  1™,692,  avec  1",540 
pour  mini-  mum,  le  périmètre  moyen  dépasse  donc  de  O*",!!  la  demi- 
taille  moyenne.  Cependant  ces  données  n'ont  pas  para  définitives,  et 
elles  sont  aujourd'hui  infirmées  par  la  pratique  (J.  Arnould  ,  1874). 
Ce  genre  de  recherches  est  beaucoup  suivi  en  Allemagne;  et  nous  cite- 
rons à  ce  propos  les  études  de  C.  Told  (1875)  sur  l'anatomie  lopogra- 
phique  de  la  poitrine,  et  sur  sa  mensuration  au  point  de  vue  du  recru- 
tement. 

Nous  indiquerons  ensuite,  comme  fait  d'application  de  la  méthode 
du  ruban  en  pathologie,  le  retrait  du  sommet  de  la  poitrine  dès  le  début 
de  la  phthisie  pulmonaire,  qui  a  pour  corrélatif  l'abaissement  de  l'extré- 
mité externe  de  la  clavicule,  dont  il  a  été  question  plus  haut  (Haenish, 
i878).  On  sait  qu'à  l'état  normal  la  circonférence  de  la  partie  supé- 
rieure de  la  poitrine  l'emporte  sensiblement  sur  celle  de  la  base  ;  mais, 
par  le  retrait  progressif  du  sommet  du  thorax,  elle  perd  peu  à  peu  de 
sa  prépondérance,  et  les  rapports  entre  les  deux  périmètres  finissent  par 
être  intervertis. 

Le  même  ruban  divisé  peut  encore  convenir  dans  les  épancheinents 
pleurétiques,  pour  en  indiquer  soit  l'accroissement,  soit  la  rétrocession. 
Pour  cela,  après  avoir  entouré  la  poitrine  avec  le  ruban,  sur  un  niveau 
déterminé,  on  marque  sur  le  cordon,  en  avant  et  en  arrière,  un  point 
qui  corresponde  au  milieu  apparent  de  chacune  des  deux  faces  :  l'apo- 


666  POITRINE.  —  séméiologib. 

physe  épineuse  en  arrière  et  la  partie  médiane  du  siernum  en  a^ant. 
Puis,  comparant  l'une  à  l'autre  les  deux  pcfiions  de  rubans  séparées 
par  les  traits  qu'on  y  a  imprimés,  on  juge  des  différences  nirconféren- 
tielles  entre  les  deux  côtés  du  thorax  :  on  voit  la  {prédominance  du  côté 
où  existe  Fépanchement  se  transformer,  après  la  guérison,  en  uae  rétrac- 
tion qui  ne  s'efface  jamais. 

Ces  mesures  sont  prises  avec  plus  de  précision  encore,  grâce  au 
cyrlomèire.  Voy.  t.  X,  p.  656. 

La  détermination  du  diamètre  antéro-postérieur  de  la  poitrine  a  été 
faite  à  un  autre  point  de  vue,  et  par  un  procédé  différent.  Dès  18i8. 
Francis  Sibson  a  imaginé  un  instrument  Irès-ingénicnx,  le  Ckest  mefuurtr, 
(fig,  42),  comme  moyen  de  mensuration  tout  partieulier.  C'est  une  sorte 
de  compas  d'épaisseur,  analogue  à  Tun  de  ces  instruments  cfui  servent 
à  relever  les  diamètres  du  basûn,  et  dont  l'une  des  branches  est  mobile; 
on  index  et  un  cadran,  fixés  à  cette  braïkche,  accusent  les  moindres 
changements  survenus  dans  ce  diamètre  antéropostérieur  de  la  poitrine. 
Voici  maintenant  à  quels  résultats  pratiques  conduit  ce  mode  de  mensu- 
ration. En  somme,  il  ne  peut  constater  que  l'écart  entre  le  temps  d'ins- 
piration et  le  temps  d'expiration  ;  et,  de  tous  les  faits  observés,  Walshe 
<légagc  la  loi  suivante  :  a  Quand  l'amplitude  du  jeu  respiratoire  n*atteint 
pas  O'^fO^S,  l'existence  d'une  maladie  gênant  la  respiration  est  très-pro- 
bable ;  et,  lorsque  l'amplitude  obtenue  égale  ou  dépasse  celle  qui  convieat 
à  la  santé,  si  les  deux  côtés  ne  se  la  partagent  pas  par  parties  égales, 
c'est  qu'il  existe  une  maladie  qui  entrave  l'action  respiratoire  d*ua  coté 
et  l'exagère  de  l'autre,  »  (Walshe,  traduit  par  Fonssagrives,  page  32.) 

D'autres  procédés  de  mensuration  périmétrique  ont  encore  été 
employés;  mais,  en  raison  des  mouvements  qu'ils  doivent  en  roèiue 
temps  recueillir,  ils  se  rattachent  plutôt  à  la  méthode  graphique,  qui 
nous  occupera  par  la  suite.  Citons,  par  exemple,  le  three  plane  slelho- 
meter  d'Arthur  Ransome,  le  stéthographe  de  Gibbon,  etc. 

b.  Spiromélrie.  —  La  mesure  extérieure  du  thorax,  tout  en  se  recom- 
mandant par  la  facilité  de  son  application,  ne  saurait  avoir  la  précision 
des  moyens  manométriques,  qui  permettent  de  déterminer  directement 
la  quantité  d'aitr  mise  en  mouvement  par  la  respiration,  la  force  avec 
laquelle  se  ment  la  colonne  fluide,  et  jusqu'aux  rapports  existant  entre 
les  deux  temps  de  l'inspiration  et  de  l'expiration.  Ces  nouvelles  recher- 
ches constituent  la  spirométrie ,  dont  la  mise  en  œuvre  est  de  date 
récente. 

Les  premiers  travaux  sur  ee  sujet  sont  dus  à  Herbst  (de  Gœttingue),.^ 
remontent  à  l'année  1828.  Cet  observateur  prétendait  déterminer  la  capa- 
cité des  pou  nous  dans  l'état  de  santé  et  de  maladie,  en  se  servant,  à  cet 
effet,  du  pneumonomètre  de  Kentish.  L'instrument  était  des  plus  skn- 
ples,  et  consistait  en  une  cloche  de  verre  graduée,  renversée  sur  l'eau; 
une  embouchure  tubulée  et  munie  d'un  robinet  permettait  l'entrée  et  la 
sortie  des  gaz  à  mesui^er.  Lorsqu'on  voulait  apprécier  la  quantité  d'air 
prise  à  chaque  inspiration,  on  notait  à  quelle  hauteur  Teau  s'était  élevée 


POITRINE.  —  SÉIIÉI0I.0S1E. 


6M 


kù 


■  '  i'âVJSiàm-é 


Fi6.  41  et  4%.  —  Chest-Measurer  de  Sibaoa. 

Cei  iiKtruiBanl  est  deàliaé  k  apprécier  retendue  des  mouvemeuti  aatéro-po&tëriears  de  la  poitrine. 
Il  se  compose  d'une  li^e  (graduée  ronde  B  (fig.  41;  divisée  en  pouces  et  en  dixièmes  de  pouce.  A  Textré- 
mfté  mférieufe  de  cette  tige  est  articulée,  pouvant  s'ouvrir  jusqu'à  Tangle  droit,  une  plsMjue  de  laiton 
recouverte  de  !K)i&  A.  Sur  celle  lige  graduée  se  meut  &  frottement  un  curseur  C  qui  peut  aussi  tourner 
autour  d'elle.  Ce  curseur  est  muni  d'une  branche  horizontale  CU  pouvant  s'allonf^er  ou  se  raccourcir,  à 
ratrésaité  de  latiMcdle  est  nn  cadran  graihié  à  aiguille  que  eommande  une  erématUère  verticale  û. 

1  l'état  de  repo»  de  ritistrumcnt,  l'aiguille  est  au  zéro  du  cadran  et  la  crémaillère  abaii>s^-e  jusqu'à 
son  dernier  cran  an-dessous  du  centre  du  cadran,  position  dans  laquelle  efle  est  maînteone  pur  un  res* 
soct  très-doux.  Un  tour  coni|/let  da  cadran  currc»i»ond  à  un  pouce  (0*0253^)  de  mouvement  exécuté  par 
la  poitrine.  Chaque  divifrion  c>t  d'un  centième  de  pouce  (0"  00025). 

Ou  applique  cet  iu&truiMene  sur  le  malade  dan»  le  cfêcubilus  horizouCal  et  dépouille  de  tous  vêtements 
(ê^  42V:  ofi  glisse  sous  son  dos  U  plaque  de  lailou  ;  on  ordonne  une  expiration  forcée  ou  naturelle.  A 
la  fin  de  cette  expiration,  on  abaisse  le  curseur  jusqu'au  contact  de  l'extrémité  inférieure  de  la  crénail- 
lèiuavee  la  peau  dn  malude  et  de  lelL*  façûn  que  l'aiguille  ne  dévie  pus  du  aéru.  Ou  ordonne  ITinspisa- 
tîon  et  on  lit  suc  le  cadran  le  degré  le  plus  élevé  qu'y  uucint  l'aitiuilie.  Ce  degré  indique  l'amplitude 
du  mouvement.  (Sibson,  Médico-chirurgical,  Trant action»,  vol.  XXXI,  p.  51  et  52. 


668  POITRINE.  —  séméiolo€ik. 

dans  la  cloche,  à  la  suite  d'une  inspiration  pratiquée  au  travers  de  la 
tubulure;  et,  dans  le  cas  contraire,  on  faisait  d'abord  monter  Teau  dans 
la  cloche  jusqu'à  un  certain  niveau ,  et  l'on  voyait  de  combien  de  divi- 
sions elle  s'abaissait  pendant  l'expiration  poussée  dans  rintérieur  de 
ladite  cloche.  Voici  quelques  résultats  obtenus  à  l'aide  de  cet  ap- 
pareil. 

l""  La  quantité  d'air  inspirée  et  expirée  dans  la  respiration  calme  et 
naturelle,  chez  un  homme  adulte  de  taille  ordinaire,  est  de  20  i  35 
pouces  cubes;  tandis  qu'elle  s'abaisse  à  18  et  16  pouces  cubes  chez  Tin- 
vidu  de  petite  taille. 

2^  La  capacité  des  poumons  chez  Thomme  sain  est  nécessairement 
variable,  suivant  certaines  circonstances.  Elle  s'apprécie  par  la  quantité 
d'air  que  les  poumons  peuvent  admettre  après  une  expiration  aussi  forte 
que  possible,  et  par  la  quantité  qu'ils  peuvent  expulser  après  une  inspi- 
i*ation  profonde.  Cette  épreuve  donne  jusqu'à  un  certain  point  la  mesure 
de  la  constitution  du  sujet  ;  mais  il  faut  tenir  compte  de  sa  taille,  de 
son  âge,  de  son  sexe,  de  ses  habitudes,  de  sa  profession,  etc.  Un  vête- 
ment serré  gène  la  respiration  et  diminue  considérablement  la  capacité 
des  poumons.  Les  personnes  replètes  offrent  une  capacité  moindre  qu'on 
n'en  peut  juger  par  l'apparence.  La  capacité  des  poumons  est  beaucoup 
plus  faible  comparativement  chez  les  enfants  que  chez  les  adultes.  Il  en 
est  de  même  pour  la  femme  opposée  à  l'homme.  Enfm,  chez  les  animaux, 
la  capacité  pulmonaire  est  plus  grande  que  chez  Thomme,  eu  égard  au 
poids  du  corps. 

Quant  à  l'état  maladif,  il  s'accuse  presque  toujours  par  une  différence 
en  moins  de  la  capacité  respiratoire,  surtout  quand  c'est  le  poumon  lui- 
même  qui  est  affecté.  Herbst  cite  des  exemples  relatifs  à  ta  phthisie  pul- 
monaire, à  l'angine  de  poitrine,  etc.  :  mais  c'est  surtout  pour  le  diagnostic 
et  le  pronostic  de  la  première  de  ces  maladies,  que  la  méthode  actuelle 
peut  rendre  des  services.  Nous  la  verrons  bientôt  appliquée  sous  une 
forme  plus  exacle. 

Comme  conclusion  générale,  Herbst  admet  que  la  capacité  totale  des 
poumons  chez  l'homme  adulte,  de  force  moyenne,  varie  entre  220  et  280 
pouces  cubes;  moyenne  :  250  pouces  cubes,  tout  en  tenant  compte  des 
40  pouces  cubes  qui  restent  toujours  dans  l'arbre  aérien,  même  aprcs  la 
plus  forte  expiration  (Davy). 

Les  recherches  du  docteur  John  Hulchinson  (1846),  sur  la  spirométrie, 
sont  encore  plus  importantes,  et  ont  acquis  plus  de  notoriété.  11  dis- 
tingue entre  la  capacité  respiratoire  et  la  puissance  respiratoire,  La 
première,  qu'il  qualifie  encore  de  capacité  vitale,  donne  l'écart  depuis 
l'expiration  la  plus  profonde  jusqu'à  l'inspiration  la  plus  complète.  Elle 
s'apprécie  à  l'aide  d'un  simple  gazomètre^  dans  lequel  l'individu  en  expé- 
rience chasse  l'air  de  trois  expirations  qui  ont  succédé  à  trois  grandes 
inspirations.  Quant  à  la  puissance  respiratoire,  elle  se  mesure  avec  un 
tube  barométrique  pourvu  d'une  planchette  graduée.  Ce  tube  baromé- 
trique est  recourbé  de  façon  à  pouvoir  s'adapter  par  sa  courte  branche  à 


POITRINE.  —  SÉMÉI0L06IE.  669 

l'une  des  narines,  l'autre  demeurant  fermée.  Il  n*y  a  plus  dès  lors  qu'à 
constater  de  combien  de  divisions  le  mercure  s'élève  ou  sabafsse  à  chacun 
des  deux  mouvements  respiratoires.  Les  observations  de  J.  llutchinson 
portent  sur  2130  sujets  différents  par  la  taille,  le  poids,  Tàge,  etc.,  et 
forment  des  tableaux  comparatifs,  faciles  à  consulter.  Il  note  encore  Tin- 
fluence  du  type  respiratoire,  de  la  profession,  de  la  volonté,  etc.  Une  de 
ses  conclusions  les  plus  importantes  est  celle-ci  :  le  volume  de  la  poitrine 
et  la  quantité  d'air  qu'un  homme  peut  introduire  dans  ses  poumons  ne 
sont  nullement  en  relation  l'un  avec  l'autre.  Il  ajoute  aussi  :  la  circonfé- 
rence de  la  poitrine  n'a  non  plus  aucune  relation  avec  la  capacité  vitale; 
mais  elle  est  en  rapport  exact  avec  le  poids  de  Tindividu;  elle  augmente 
de  1  pouce  cube  pour  lU  livres. 

Dans  Tordre  pathologique,  J.  llutchinson  admet  en  principe  que  toutes 
les  fois  qu'il  y  a  dans  le  poumon  une  altération  organique,  quelle  qu'on 
soit  d'ailleurs  la  nature,  mettant  obstacle  à  la  pénétration  deTair  dans  les 
yésicules  aériennes,  il  doit  y  avoir  une  diminution  dans  la  capacité  vitale 
ou  respiratoire.  Les  applications  les  plus  larges  de  la  méthode  sont  pour 
la  phthisie  pulmonaire,  dont  l'étendue  est  pour  ainsi  dire  mesurée  pas  à 
pas  de  cette  façon.  Voici  un  exemple  :  Un  géant  américain,  venu  en  An- 
gleterre en  1842,  paraissait  alors  en  plein  état  de  santé;  capacité  vitale, 
434  pouces  cubes  ;  taille,  6  pieds  11  pouces  un  quart;  poids  271  livres; 
circonférence  de  la  poitrine,  47  pouces;  puissance  inspiratoirc,  5  pouces  ; 
puissance  expiratrice,  6,5  pouces.  Deux  ans  après,  en  1844,  la  capacité 
vitale  était  descendue  à  390  pouces  cubes,  et  même  bientôt  après  à  340  ; 
diminution  de  20  pour  100.  La  puissance  respiratoire  avait  décru  de 
1  cinquième  et  son  poids  de  28  livres.  Rien  à  ce  moment  n'indiquait 
encore  de  maladie  organique  chez  cet  homme.  Un  an  après  il  succombait 
avec  tous  les  signes  de  la  phthisie  confirmée;  il  ne  pesait  plus  que  140 
livres;  sa  taille  même  avait  diminué. 

Parmi  les  travaux  parus  depuis  loi*s  sur  la  spirométrie,  nous  signale- 
rons ceux  de  Wintrich  (1854),  de  Schneevogt  (1854)  et  de  llecht 
(1855),  qui  ont  été  mentionnés  et  analysés  par  Ch.  Lasègue  (1856),  dans 
les  Archives  «générales  de  médecine.  Ils  confirment  la  plupart  des  résul- 
tats acquis,  et  entre  autres  conclusions  nouvelles,  nous  citerons  les  sui- 
vantes :  «  La  spirométrie  est  d'un  secours  utile  pour  diagnostiquer  les  affec- 
tions organiques  du  poumon  à  leur  début,  et  devrait  être  employée  par  les 
conseils  de  révision,  les  Sociétés  d'assurances  sur  la  vie,  etc.  —  Elle  découvre 
la  tuberculisation  à  une  époque  où  aucun  autre  procédé  de  diagnostic  ne 
la  révèle.  —  Klle  assure  le  diagnostic  de  la  phthisie  confirmée,  elle  sert 
à  en  mesurer  l'étendue,  la  marche,  les  progrès,  l'amélioration.  —  La  spi- 
rométrie rend  un  signalé  service  quand  elle  dissipe  la  crainte  d'une  tu- 
berculisation commençante.  »  Mais  il  faut  savoir  que  ces  affirmations  sont 
sujettes  à  contestation,  et  Ch.  Lasègue  et  P.  Guttmann  ont  à  ce  propos 
conseillé  de  faire  certaines  réserves,  dictées  par  des  données  contradic- 
toires. Dans  tous  les  cas,  si  l'on  voulait  mettre  à  Tépreuve  la  méthode 
présente,  il  faudrait  pour  un  sujet  déterminé,  consulter  les  tableaux  dres- 


670  POITRINE.  —  sémêiolocie. 

ses  par  les  observateurs  que  nous  avons  oonmés,  et  y  chercher  les  tenues 
de  comparaison  voulus. 

La  mesure  de  la  pression  respiratoire  semblerait  en  dernier  lieu  cm- 
duire  à  des  résultats  plus  précis,  et  la  pneumatmuèéùrie  est  devenue 
entre  les  mains  de  Waldenburg  (cité  par  P.  Ottfctmann),  un  mayen  sérien 
de  diagnostic.  L'instrument,  mis  en  usage,  est  toojeurs  plus  ou  omnos 
imité  des  manomètres,  et  il  fait  reconnaître  une  pression  eajnraloùre 
positive  et  une  pression  inspiratoire  positive.  La  valeur  nawnqK 
correspondant  à  une  inspiration  profonde,  chez  un  komme  adulte  et  Usd 
|K)rtant,  oscille  entre  70  et  100  millimètres;  pour  uoe  expintion  pro- 
fonde, elle  est  de  80  à  120  millimètres.  Chez  la  femoae,  rinspintM 
profonde  donne  de  50  à  80  millimètres,  et  Texpiration  40  à  90  milli- 
métrés. L'avantage  est  toujours  à  l'expiration,  et  même,  dans  une  respi- 
ration calme,  elle  l'emporte  de  5  à  50  millimètres.  Il  n'y  a  aucun  rapport 
entre  les  résultats  de  la  spirométrie  et  ceux  de  la  pneumomélrîe  ;  lc^ 
valeurs  données  par  celle-ci  étant  relativement  élevées  quand  la  capadlé 
pulmonaire  est  faible,  et  réciproquement.  Les  faits  pathologiques,  coaaU- 
tés  par  Waldenburg  et  confirmés  parEichborst  (1875),  se  résumeat  ainsi  : 
a  La  pression  expiratoire  est  toujours  diminuée  dans  l'emphysème  pul- 
monaire, dans  le  catarrhe  chronique  des  bronches,  dans  l'asthme  bronchi- 
que, dans  la  grossesse,  et  les  tumeurs  et  les  exsudats  de  la  cavité  abda- 
minale.  —  Dans  la  phthisie,  il  y  a  insuffisance  de  l'inspiration  au  début, 
insuffisance  de  l'expiration  plus  tard;  dans  la  pneumonie  et  la  pleurésie. 
il  y  a  insuffisance  à  la  fois  de  Tinspiration  et  de  l'expiration  »  (P.  Gutt- 
mann). 

Nous  allons  retrouver  ce  même  ordre  de   recherches  conqdélé,  et 
jusqu'à  un  certain  point  perfectionné,  par  la  méthode  graphique. 

9*"  Emploi  des  procédés  graphiques.  —  Avec  ces  moyens,  dont  It- 
principe  a  été  emprunté  aux  sciences  physiques,  a  commencé  une  ère 
nouvelle  pour  la  physiologie  et  la  sémciologie,  et  la  précision  en 
quelque  sorte  automatique  s'est  substituée  aux  incertitudes  et  aux  appn^ 
ximations  des  observateurs.  Un  sait  comment  la  métliode  s'est  introduite 
dans  la  médecine,  et  comment  grâce  aux  efforts  de  J.  Marey  elle  a  pris 
une  forme  pratique,  et  est  devenue  accessible  à  tous.  Les  travaux  de 
Marey  ont  eu  un  retentissement  universel,  et  nous  |>ouvons  d'autant  mieux 
le  proclamer  que  nous  en  avons  fait  nous-mêmes  une  large  application 
dans  nos  articles  Ausciltation,  Circulation!,  Cœur.  De  son  coté,  le  regret- 
table Lorain  s'est  fait  le  prosélyte  ardent  de  ces  études,  soit  au  mot  Car- 
diographie de  ce  Dictionnaire,  soit  dans  une  publication  distincte  {1878). 
qui  a  précédé  sa  mort  de  très-peu,  et  qui  a  été  comme  le  couronnement 
d'une  carrière  brillamment  parcourue  et  trop  tôt  brisée.  Nous  ne  revien- 
drons pas  sur  la  cardiographie,  que  complétera  un  article  sur  le  pouls, 
et  nous  nous  bornerons  aux  recherches  graphiques  £aites  en  vue  de 
l'appareil  respiratoire. 

Les  tracés  expriment  toujours  un  mouvement;  ce  sont  donc  les  mouve- 
ments de  la  respiration  qu'il  y  a  à  enregistrer,  soit  les  mouvenieat5 


POITRINE.  —  sÉMiïOLOGiE.  671 

eilérieurs  du  thorax,  soit  ceux  de  la  colonne  d'air  inspiré  et  expiré.  Les 
appareils  destinés  à  recueillir  le  premier  genre  de  mouvements  sont  de 
beaucoup  les  plus  nombreux;  ils  nous  occuperont  d'abord. 

D'après  P.  Guttmann,  Vierordt  et  Ludwig  se  servaient  d'un  levier  coudé, 
dont  le  plus  petit  bras  reposait  par  son  extrémité  sur  la  face  abdominale 
du  diaphragme,  tandis  que  le  long  bras  inscrivait  au  moyen  d'un  pinceau 
sur  un  papier  en  mouvement  les  excursions  du  diaphragme.  La  plupart 
des  autres  instruments  enregistreurs  des  mouvements  extrinsèques  de  la 
respiration  sont  fondés  sur  le  même  principe  ;  tels  sont  :  le  phénographe 
de  Rosenthal,  le  Btéthographe  de  (îerhardt,  le  stéthographe  double  de 
Rîégel,  le  titrée  plane  slethometer  de  Ransome.  Le  pneumographe  de 
Marey  (1865)  ^st  tout  diflérent;  c'est  une  ceinture  qui  s'applique  au- 
tour de  la  poitrine,  et  qui  est  interrompue  sur  une  partie  de  sa  longueur 
par  un  cylindre  élastique  rempli  d'air.  Ce  cylindre,  rigoureusement  appli- 
qué sur  la  paroi  thoracique,  subit  différentes  déformations  en  longueur 
et  en  diamètre,  sous  Tinfluence  des  mouvements  de  la  cage  thoracique. 
Pendant  l'inspiration,  Tair  contenu  dans  le  cylindre  éprouve  une  tension 
plus  forte,  par  la  diminution  de  capacité  de  ce  réservoir  ;  le  contraire  a 
Heu  durant  l'expiration.  Ces  variations  de  pression  sont  transmises  par 
un  tube  à  l'ampoule  de  l'appareil  enregistreur,  et  s'inscrivent  sur  le 
papier  du  polygraphe. 

On  peut  aussi,  avons-nous  dit,  recueillir  les  oscillations  de  l'fiir  inspiré 
et  expiré.  Marey  avait  eu  déjà  l'idée  de  respirer  dans  un  grand  réservoir 
de  300  à  400  litres,  et  de  noter  à  l'aide  de  la  méthode  graphique 
les  variations  de  pression  que  déterminent  dans  cet  espace  les  mouve- 
ments alternatifs  d'inspiration  et  d'expiration.  Il  est  assez  remarquable 
qu'on  obtienne  dans  cette  expérience  un  tracé  tout  à  fait  comparable  à 
celui  que  donne  le  cylindre  élastique  du  pneumographe.  Nous  signalerons 
encore  un  autre  appareil  imaginé  par  Marey,  et  qu'il  appelle  un  tube 
branché.  Il  consiste  en  un  tube  assez  large,  dans  lequel  on  peut  respirer 
librement  ;  ce  tube  porte  sur  un  point  un  tube  beaucoup  plus  (in  qui 
aboutit  d'autre  part  au  tambour  de  l'enregistreur.  Il  résulte  de  cette  dis- 
position que,  sans  que  la  respiration  soit  en  rien  gênée,  les  moindres 
variation  de  pi*ession  peuvent  néanmoins  se  faire  sentir  dans  le  tambour 
de  Tenregislreur  et  s'inscrire  sur  le  polygraphe.  De  son  côté,  Chauveau 
a  recueilli  chez  le  cheval  des  tracés  respiratoires,  en  introduisant,  à  l'aide 
d'une  incision,  dans  la  trachée  de  cet  animal,  l'ampoule  du  cardiographe 
qui  se  trouvait  ainsi  soumise  aux  pressions  de  l'air  en  circulation.  Enfin, 
sur  ces  données  et  sur  une  connaissance  approfondie  du  sphygmographe, 
Bergeon  et  Kaslus  (1869)  ont  établi  Vanapnographe,  qui  semble  avoir 
une  valeur  clinique  aussi  grande,  et  sur  lequel  nous  allons  nous  arrêter 
un  moment,  en  posant  à  cette  occasion  des  conclusions  qui  résumeront 

toute  cette  étude. 

L'anapnographe  (diva-iuvoY),  respiration),  dont  nous  ne  prétendons  donner 
ici  qu'une  idée  générale,  consiste  essentiellement  en  une  sorte  de  trachée 
artificielle,  assez  large»  et  qui  porte  à  l'intérieur  une  valve  mobile  autour 


672  POITRINE.  —  séméïologib. 

d'un  axe  horizontal.  Cette  valve,  mise  en  iDouvement  sons  Taction  da 
courant  respiratoire,  tantôt  dans  un  sens,  tantôt  dans  l'autre,  Iransmet 
ses  oscillations  à  un  levier  léger  qui,  d'autre  part,  va  les  inscrire,  à  Tiide 
d'une  plume,  sur  un  papier  qu'un  mécanisme  d'horlogerie  déplace 
devant  lui.  Sans  nous  appesantir  sur  les  détails  de  la  construction  de  cet 
appareil,  nous  analyserons  le  tracé  qu'on  obtient  grâce  à  lui. 

Ce  tracé,  comme  celui  du  pouls,  représente  une  courbe  sinueuse,  dont 
les  éléments  se  groupent  au-dessus  et  au-dessous  d'une  ligne  neutre, 
qu'on  qualifie  de  ligne  des  zéros.  L'anse  négative  correspond  au  tempi 
d'inspiration,  et  l'anse  positive  à  celui  d'expiration.  Dans  sa  continuité, 
la  courbe  offre  une  partie  ascendante  plus  ou  moins  oblique,  un  platées 
assez  étendu  et  légèrement  incliné,  et  enfin  une  portion  descendait, 
brusque  d'abord,  puis  plus  allongée,  et  pourvue  comme  les  autres  sections 
de  soubresauts  secondaires.  Voici  maintenant  l'interprétation  de  ces  don- 
nées graphiques  : 

1^  La  distance  horizontale,  parcourue  sur  la  ligne  des  zéros  peodant 
l'unité  de  temps,  indique  la  vitesse  ou  la  fréquence  de  la  respiration.  En 
comparant  la  longueur  de  chacun  des  deux  temps  respiratoires,  on  ob- 
tient leur  valeur  proportionnelle,  c'est-à-dire  le  rhythme  de  la  respi- 
ration. 

2^  La  distance  verticale^  entre  le  point  le  plus  élevé  de  la  courbe  et  le 
point  le  plus  inférieur,  par  rapporta  la  ligne  des  zcros,  donne  la  mesure 
des  puissances  inspiratrice  et  expiratrice^  dans  leurs  degrés  extrêmes. 
A  cet  effet,  on  dispose  l'appareil  de  sorte  que  la  résistance  de  la  valve  soit 
augmentée,  et  que  le  tracé  ne  dépasse  pas  les  limites  de  la  bande  de 
papier.  On  n'obtient  ainsi  qu'un  rapport,  et  non  pas  des  chiffres  absolus. 
l)e  plus,  ces  maxima  et  ces  minima  ne  correspondent  qu'à  la  respiration 
par  le  nez,  qui  est,  il  est  vrai,  l'état  normal;  avec  la  bouche,  ils  seraient 
différents  :  les  excursions  étant  plus  étendues. 

3**  La  surface  inscrite  dans  la  courbe  est  proportionnelle  aux  volumes 
d  air  déplacés.  Cette  proposition  résulte  d'une  certaine  conformation  de 
l'instrumept,  par  laquelle  le  débit  de  l'air  respiré  est  uniforme,  c'est-i- 
dire  toujours  le  même  pour  le  même  temps.  On  sait,  par  expérience, 
que  dans  les  limites  de  la  respiration  naturelle  seize  carrés  du  papier  gra- 
phique représentent  un  demi-litre  d'air.  L'anapnographe  se  trouve  ^imi 
transformé  en  un  véritable  spiromètre, 

4°  Les  ondulations  secondaires^  apparentes  principalement  sur  Tanse 
expiratoire,  traduisent  Vinfluence  des  battements  du  cœur^  qui  se  fait 
sentir  sur  la  colonne  d'air  en  mouvement.  On  peut  voir  réciproquement, 
sur  un  tracé  sphygmographique  assez  long,  l'action  de  la  respiration  par 
laquelle  la  ligne  du  pouls  ondule  largement.  Ces  effets  alternatifs  sont 
plus  marqués  dans  le  second  cas  que  dans  le  premier,  et  nous  les  avons 
étudiés,  d'après  Potain,  à  l'article  (Cœlr,  t.  VIII,  p.  299). 

Les  recherches  de  Bergeon,  faites  à  l'aide  de  l'anapnographe,  n'ont  pa5 
encore  été  étendues  dans  le  domaine  de  la  pathologie;  mais  les  résultats 
d'ordre  physiologique  étant  acquis,  on  peut  prévoir  dès  à  présent  l'utilité 


POITRINE.  —  séMÉiOLOGiE.  675 

de  cet  instrument  pour  la  clinique  ;  'et  désormais  les  questions  de  fré- 
quence  et  de  rhythme  pour  les  mouvements  respiratoires,  de  quantité  ei 
de  /brce  pour  Tair  mis  en  jeu  dans  Pacte  de  la  respiration,  pourront  être 
aussi  facilement  appréciés,  au  lit  des  malades,  avec  ranapnop[raphe,  que 
les  détails  relatifs  au  pouls,  grâce  au  sphygmographe.  La  démonstration 
de  ces  avantages  est  à  faire,  sans  doute;  mais  elle  mérite  d'être  entreprise, 
car  on  manquait  d*un  instrument  de  précision,  commode  et  usuel,  pour 
aborder  avec  chance  de  succès  le  problème  si  compliqué  des  maladies  de 
poitrine  ;  tandis  que  maintenant  on  peut  en  6xer  les  signes  matériels 
d*une  manière  frappante  et  durable,  et  baser  sur  eux  un  diagnostic  certain 
et  un  traitement  approprié. 

10"  Signes  extrinsèques.  —  Les  affections  thoraciques  ne  se  manifes- 
tent pas  seulement  par  des  signes  locaux  ou  intrinsèques  ;  mais  aussi  par 
certains  autres  phénomènes  éloignés  ou  extrinsèques^  sur  lesquels  nous 
allons  dire  quelques  mots. 

Pour  ce  qui  est  du  cœur,  on  comprend  tout  de  suite  comment  il  ti*a« 
duit  son  état  de  souffrance  par  les  perturbations  du  pouls,  par  le  reflux  du 
sang  dans  le  système  veineux  (pouls  veineux),  par  des  bruits  de  souffle 
vasculairéSy  par  des  congestions  viscérales  y  de  V  œdème,  des  épanche- 
ments  séreux,  par  le  goitre  exophthalmique  (maladie  de  Basedow),  par 
V albuminurie,  par  la  cachexie  dite  cardiaque,  etc. 

Un  anévrysme  de  la  crosse  de  Vaorte  déterminera,  en  comprimant  le 
nerf  récurrent,  de  Vaphonie;  la  branche  ascendante  du  grand  sympa- 
thique, la  contraction  permanente  de  Vune  des  pupilles  [Voy.  Aorte, 
p.  769),  etc. 

Quant  aux  maladies  de  Vappareil  respiratoire,  elles  s'annoncent  assez 
souvent,  indépendamment  de  la  dyspnée  et  des  signes  propres  à  Vas- 
phyxie,  par  quelques  caractères  spéciaux,  tels  que  la  rougeur  des  pom- 
mettes (A.  Gubler,  1857),  les  doigts  hippocratiques,  etc.  Parlerons-nous 
de  Vherpès  labialis,  qui  se  montre  du  quatrième  au  cinquième  jour  de 
la  pneumonie  franche,  à  titre  de  phénomène  critique,  et  qui,  apparais- 
sant quelquefois  seul,  accompagné  ou  non  de  fièvre  et  de  point  de  côté, 
fait  songer  aux  cas  frustes  de  cette  affection?  Est-il  nécessaire  de  men- 
tionner les  sueurs  nocturnes  des  phthisiques? 

Inversement  ne  voyons-nous  pas  s'éveiller  l'idée  d^  certaines  affections 
thoraciques,  alors  que  le  foyer  primitif  du  mal  est  ailleurs  qu'à  la  poi- 
trine? Telle  est  la  signification  de  la  toux  gastrique,  de  la  toux  vermi- 
neuse,  de  la  phthisie  secondaire  dans  l'ulcère  simple  de  l'estomac,  à  la 
suite  des  tumeurs  blanches  suppurées,  etc.  Enfin,  n'existe-tril  pas  un  acci- 
dent de  la  plus  extrême  fréquence,  qui  se  montre  comme  fait  terminal 
dans  la  plupart  des  maladies  auxquelles  l'homme  succombe?  Nous  vou- 
lons dire  le  catarrhe  suffocant ^  sur  lequel  nous  avons,  d'autre  part,  donné 
tous  les  détails  désirables  (Voy,  t.  Y,  p.  553). 

Nous  n'abandonnerons  pas  ce  sujet  sans  mentionner  les  rapports  qui 
peuvent  s'établir  entre  le  larynx^et  le  reste  des  voies  respiratoires  et  par 
là  on  comprend  comment  l'emploi  du  laryngoscope  est  utile  çoui:  élv\$:v 

«OOT.  DICT.  MÉD.   ET   CHIH.  V}w^^^^    ^    '^^^ 


674  POITRINE.  —  siniiouMaB. 

der  le  diagoostic  de  certaines  afleptions  thoraciquei.  U  niantre«  par  la 
paralysie  de  Tune  ou  de  Tautre  des  cordes  vocales,  a*il  y  a  eompretiion 
du  nerf  récurrent  correspondant;  ou  bien  si  les  lésions  du  larynx  aont  de 
nature  à  faire  redouter  quelque  complication  du  côté  du  pareodiynie  pil* 
monaire  :  c'est  ce  qui  a  lieu,  en  effet,  pour  certains  caa  de  phthisie  lukr- 
culeuse,  qui  débutent  par  la  phthisie  laryngée. 

m.  Rf^O^  SÉM^lOLOGIQIIE  ]>ES  AFrSGTIQKS  DE  LA  POITRIW.  -r^  L^  diffénols 

signes  d'ordre  pathologique  que  nous  venons  d'étudier,  se  groapeot  en 
plus  ou  moins  grand  nombre  et  de  di?ersea  manières,  pour  constitaer  Félat 
morbide  ^es  organes  tboraciques.  Sans  prétendre  expoatr  ici  loule  la 
symptomatologie  de  cette  région  compliquée  qu'on  appelle  la  poitrine, 
nous  allons,  d'un  coup  d'œil  rapide,  parcourir  les  principaux  groupes 
symptomatiques  fournis  par  les  méthodes  dont  il  a  été  question  plus  haït, 
et  tels  qu'ils  se  manifestent  au  lit  des  malades. 

Laissant  de  côté  les  affections  rares  qui  peuvent  atteindre  les  organei 
secondaires  contenus  dans  le  thorax,  tels  que  Toesophage,  le  canal  thon- 
cique,  les  vaisseaux  et  les  nerfs,  qui  ne  font,  du  reste,  que  le  traverser, 
nous  aurons  surtout  égard  aux  deux  grands  appareils  de  la  circulation  et 
de  la  respiratiop. 

Le  premier  de  ces  appareils  comprend  lui-^méme  le  cœur  et  les  gros 
vaisseaux  qui  y  aboutissent  :  d'où  une  division  importante  à  établir. 

Les  maladie$  du  centre  circulatoire  ont  des'  caractères  qui  leur  seot 
communs,  et  d'autres  qui  les  distinguent  les  unes  des  autres.  Au  groupe 
des  signes  communs  se  rattachent  :  l'impulsion  précordiale,  qvi  fixe  les 
idées  sur  le  véritable  siège  du  cœur,  cette  impulsion  étant  d'aiikurs aug- 
mentée ou  diminuée  suivant  le  cas.  L'inspection  de  la  région  cardiaque 
fait  voir  s'il  existe  ou  non  une  voussure  précordiale.  Une  matilé  à  la  per 
cussion  lui  correspond,  et  montre  si  le  volume  de  l'organe  est  au-desios 
ou  au-dessous  de  l'état  normal.  L'application  de  la  main  permet  de  sentir 
s'il  y  a  ou  non  du  frémissement  cataire  ;  et  les  rapports  de  ce  frémisse- 
ment, quand  il  se  produit,  avec  la  systole  ou  la  diastole,  éclairent  déjà  la 
question  des  lésions  d'orifices  et  de  valvules.  L'auscultation  vient  à  son 
tour  donner  de  la  précision  à  ce  premier  soupçon,  ou  bien  révèle  d'em- 
^  blée  l'existence  des  bruits  anormaux,  leurs  maxima,  leurs  relations  avec 
tel  ou  tel  temps  de  la  révolution  du  cœur,  leur  force,  leur  prolonge 
ment,  etc.;  mais  déjà  elle  avait  indiqué  les  altérations  des  bruits  normaux, 
dans  leur  netteté,  dans  leur  intensité,  dans  leur  fréquence  et  dans  leur 
rhythme.  Enfin  les  signes  extrinsèques,  exceptionnellement  important» 
ici,  résultent  de  l'auscultation  des  vaisseaux,  de  l'examen  du  pouls  par  le 
doigt  ou  avec  le  sphygmographe.  Puis  tout  cela  aboutit  à  une  perturba- 
tion complète  de  la  fonction  cardiaque,  à  Vasystolie,  groupe  des  phéno- 
mènes ultimes  par  lesquels  s'achèvent  les  maladies  du  cœur,  en  général. 
Au  milieu  de  tous  ces  désordres,  il  Importe  asseï  peu  de  savoir  à  quelle 
lésion  d'orifice  ou  de  valvule  on  a  affaire.  En  dehors  de  telle  ou  telle  pu^ 
tieularité  acccessoirë,  il  existe  une  maladie  type  du  cosur  qui  lea  résaaie 
toutes  ;  et  ce  qu'il  importe  avant  tout  de  savoir  au  point  de  me  Ihénpiih 


POITRINE.  —  8ém6iologib.  675 

tique,  et  cela  d*apn^s  Stokes  principalement^  c'est  l'état  de  la  libi^e  muscu- 
laire cardiaque,  le  degré  de  son  épuisement  et  la  nature  de  son  altération. 
Parmi  les  cas  spéciaux  de  Taffection  cardiaque,  on  voit  se  dégager  deux 
affections  :  la  péricardite  et  Tinsuffisance  aortique.  Elles  seules  sont  assez 
caractérisées  pour  mériter  un  diagnostic  à  part,  et  comportent  des  indica- 
tions particulières.  La  première  se  reconnaît  à  la  vaste  étendue  de  la  ma- 
itté  précordiale,  à  la  voussure  qui  y  correspond;  en  même  temps  que  les 
bruits  du  cœur  s'éloignent  et  s'éteignent.  Quant  à  la  seconde,  qui  entraine 
aussi  un  certain  degré  de  voussure,. elle  est  suffisamment  spécifiée  par  le 
flouf&e  diastolique  et  le  double  souffle  intermittent  crural,  en  rapport 
assez  naturel  avec  la  qualité  du  pouls  constatée.  Mais  les  détails  cliniques 
de. ces  deux  maladies  seront  mieux  à  leur  place  dans  les  articles  où  l'on 
traite  des  maladies  du  cœur,  et  on  devra  les  y  rechercher. 

Les  affections  les  plus  remarquables  des  gros  vaisseatuc  sont  les  ané- 
viyames  de  l'aorte  thoracique.  Bornons«nous  au  tableau  symptomatique 
de  ce  genre  de  lésion  :  il  nous  servira  de  type.  On  sent  dans  la  poitrine 
comme  un  second  cœur  (Stokes),  c'estrà-dire  qu'il  y  existe  un  autre  centre 
d'impulsion  que  le  cœur.  A  ce  niveau,  tumeur  délimitée  par  la  perçus* 
aion,  frémissement  cataire,  souffle  systolique;  puis  voussure  par  perfora* 
lion  de  la  paroi  thoracique,  précédée  ordinairement  do  phénomènes  de 
compression  sur  les  organes  circonvoisins,  acquérant  parfois  une  signi- 
fication très^-précise,  et  éclairant  ie  diagnostic  d'un  jour  tout  nouveau 
{Voy.  Aorte,  p.  757).  Puis  arrivent  les  différents  cas  de  rupture,  parmi 
loMpieb  le  plus  remarquable  amène  la  formation  d*un  anévrysme  arté- 
rioMHveineux  (Aorte,  p.  776).  Enfin  nous  ne  serions  pas  complet  si, 
aux  anévrysmes  de  l'aorte,  nous  n'opposions  pas  ceux  du  tronc  brachio- 
céphalique  artériel  :  ce  qui  constitue  un  cas  de  diagnostic  très-intéressant 
(toc.  cit.,  p.  780). 

L'appareil  respiratoire  se  partage  en  trois  départements  bien  distincts, 
ayant  leurs  maladies  propres;  à  savoir  :  les  bronches,  le  parenchyme 
pulmonaire  et  la  plèvre. 

Les  affections  des  bronches  se  caractérisent  par  la  conservation  du 
Burmure  vésiculaire  et  de  la  sonorité  thoracique  à  la  percussion,  phéno- 
mènes  négatifs;  et,  comme  phénomènes  positifs,  par  des  bruits  tout  à 
fait  anormaux,  qu'on  appelle  des  râles ^  qui  sont  secs  ou  humides,  qui 
sont  gros,  moyens  ou  fins,  qui  sont  confluents  ou  discrets  [Voy,  Ausgul- 
TATioif,  p.  135)  ;  par  de  la  toux,  par  une  expectoration  successivement 
mo^euse,  muco-purulente,  ou  bien  séreuse,  ou  bien  hémoptotque,  etc.; 
par  une  dyspnée  modérée,  sauf  dans  ce  degré  extrême  qui  constitue  le 
catarrhe  suffocant  (Voy.  ce  mot,  p.  554).  Ces  signes  se  rapportent  sur- 
tout à  la  catégorie  si  nombreuse  des  bronchites;  ils  se  compliquent 
bientôt  de  ceux  qui  annoncent  une  altération  plus  avancée  des  conduits 
aériens;  tels  que  la  dilatation,  l'emphysème  vésiculaire,  etc.  On  constate 
ahMTS  des  phénomènes  qui  sont  en  rapport  avec  l'existence,  au  sein  du  pou- 
iBoni  de  cavités  plus  ou  moins,  spacieuses  (cavernes)  ;  ou  avec  la  perte  de 
l^élaslîcîié  des  Inponcbioles  et  des  cellules  pulmonaires  (am^U%iv(^Tv  4\y 


070  POITKINE.  —  sÉMéioLuGiE. 

thorax,  expiration  prolongée,  etc.).  L'expectoration  se  modifie  suivant  les 
circonstances,  et  la  respiration  s'aifecte  jusqu'à  revêtir  les  apparences  de 
V  asthme. 

Pour  le  parenchyme  propre  du  poumon^  il  se  présente  comme  lésion 
deux  cas  principaux  :  Vengquement  et  Vinduration. 

Vengouementj  ou  hypérémie  pulmonaire,  se  montre  au  début  du  pro- 
cessus intlammatoire  (pneumonie),  autour  des  noyaux  apoplectiques  et 
néoplastiques,  dans  la  fluxion  oadémateuse,  et  dans  Tétat  dit  hyposta- 
tique.  Un  signe  décisif  le  caractérise,  le  râle  crépitant^  plus  ou  moins 
tin  et  humide.  Au  même  moment,  la  percussion  ne  fournit  encore  qoe 
des  résultats  négatifs. 

UindurcUion  s'appelle  hépatisation  dans  la  pneumonie;  dans  les 
autres  cas,  elle  est  constituée  par  des  néoplasmes  variés.  Ses  caractères 
sont  :  la  suppression  du  bruit  normal  de  la  respiration,  son  remplacemeot 
par  du  souffle  tubaire;  de  même  le  retentissement  habituel  de  la  voix  tbo- 
racique  devient  de  la  bronchophonie  ;  la  percussion  donne  ordinairemenl 
de  la  raatité,  mais  avec  persistance  d'une  certaine  élasticité  sous  le  doigt; 
les  vibrations  tboraciqucs  sont  plutôt  augmentées.  L'expectoration  varie  : 
dans  la  pneumonie,  elle  est  pathognomoniquc.  Exceptionnellement,  au 
niveau  de  certains  noyaux  d'induration  placés  près  de  la  surface  du  pou- 
mon, et  établissant  la  continuité  entre  les  bronches  encore  béantes  et  la 
paroi  pectorale,  on  entend  les  bruits  d'auscultation  et  de  percussion 
propres  aux  excavations  et  même  à  Tamphorisme  (Voy.  Auscultatioîï, 
p.  125,  et  Percussion,  p.  559  et  564).  Les  phénomènes  extrinsèques  sont 
trop  inconstants  pour  qu'on  puisse  les  mentionner  dans  une  étude  géné- 
rale. 

Au  milieu  de  ces  affections  de  parenchyme  se  distingue  la  tuberculose. 
remarquable  par  les  deux  phases  qu'elle  présente  dans  son  évolutiou  :  se 
manifestant  par  les  signes  de  Tinduralion  durant  la  première,  et  par  ceux 
des  excavations  dans  la  période  suivante.  De  plus,  les  troubles  de  Ten- 
semble  de  l'organisme  acquièrent  ici  leur  maximum  d'intensité. 

Pour  la  plèvre  y  il  se  rencontre  deux  cas,  suivant  que  le  mal  aboutit  à  un 
épanchement  liquide,  ou  bien  à  un  épanchement  gazeux.  Ajoutons  i  cela 
<|ue  les  deux  sortes  d'épanchement  peuvent  se  montrer  réunis.  En  dehors 
de  ces  circonstances,  où  un  fluide  amène  l'écartement  des  feuillets  pleu- 
raux, les  lésions  de  la  séreuse  s'annoncent  par  un  frottement  perœptible 
au  toucher  et  à  Pouïe  :  tel  est  le  frottement  qu'on  remarque  au  début  et 
à  la  fin  de  la  pleurc;«ie  aiguë,  et  qui  se  termine  par  une  adhérence  déti- 
nitive  entre  les  deux  surfaces  adjacentes. 

L' épanchement  liquide  a  pour  caractères  :  l'extinction  progressive  du 
murmure  respiratoire,  l'apparition  dans  l'expiration  d^abord  d'un  bruit 
de  souffle  doux,  le  retentissement  égoplione  de  la  voix  thonicique  sur 
une  limite  variable,  en  attendant  qu'elle  se  supprime  tout  à  fait;  une 
matité  décisive  sans  élasticité  à  la  percussion  ;  la  disparition  des  vibra- 
tions de  la  voix  thoracique  ;  Pampliation  de  la  cavité  pleurale  correspon- 
dante, l'écartement  des  espaces  intercostaux,  l'accroissement  du  périmètre 


POITRINE.  —  sÉMÉioLociK.  677 

de  la  poitrine  à  la  mensuration  ;  puis  comme  signes  accessoires  :  le  point 
de  côté  intense,  le  décubitus  latéral,  et  successivement  sur  le  côté  8;iin 
et  sur  le  côté  malade.  A  la  période  de  progrès  de  raffection  succède  une 
période  de  retour,  marquée  par  la  résorption  de  Tépanchement,  la  réap- 
pcirition  du  frottement  pleural,  et  défmitivement  la  rétraction  de  tout  le 
côté  alfecté,  qui  rçste  comme  une  marque  indélébile  du  mal  primitif, 
et  compromet  à  jamais  Tintéf^rité  de  la  fonction.  Exceptionnellement 
encore  apparaissent,  dans  certains  épanchements  qui  n'ont  pas  tout  à  fait 
effacé  les  cavités  bronchiques,  les  souffles  pseudo-caverneux  et  pseudo- 
ampborique,  et  surtout  le  bruit  de  pot  fêlé  (bruit  de  Skoda),  vers  les 
parties  où  le  poumon  est  en  quelque  sorte  réfugié. 

La  distinction  entre  les  divers  épanchements  liquides,  séreux,  séro- 
purulents,  purulents  et  hémorrhagiques,  rentre  dans  le  cadre  des  traités 
spéciaux  de  pathologie. 

Quant  aux  épanchements  gazeux,  ils  sont  habituellement  mixtes, 
liquides  et  gazeux,  et  ont  leur  type  dans  V hydropneumothorax  par  fistule 
broncho-pleurale.  Ici  se  font  entendre  les  bruits  les  plus  intenses  de 
Tauscultation  et  de  la  percussion,  remarquables  surtout  par  leur  timbre 
métallique  :  souflle,  voix,  toux,  râles,  bruits  du  cœur,  bruits  de  déglu- 
tition, choc  à  la  percussion,  etc.,  tout  retentit  amphoriquement,  avec  un 
écho  argentin;  et  le  phénomène  apparaît  plus  éclatant  encore,  si  c'est 
possible,  par  la  succussion  hippocratique^  qui  suscite  tout  un  flot  de 
vibrations  sonores,  dont  la  perception  au  sein  de  l'organisme  semble  tou- 
jours si  singulière. 

A  la  suite  de  ces  affections  d'un  organe  déterminé  de  la  poitrine,  il 
nous  reste  à  mentionner  certains  groupes  symptomatiques  dont  le  point 
de  départ  et  le  siège  ne  sont  plus  aussi  bien  définis.  Mous  citerons  parti- 
culièrement :  la  pleurodynie^  Vasthme,  Yangine  de  poitrine,  et  enfin 
les  tumeurs  du  médiaslin. 

La  pleurodynie  parait  au  premier  abord  un  cas  assez  distinct,  en  tant 
que  douleur  de  côté  et  manifestation  rhumatismale  sur  les  muscles  inter- 
costaux. De  plus,  elle  fait  souvent  partie  d'un  groupe  symptomalique, 
assez  remarquable  par  sa  physionomie  et  par  sa  fréquence  :  fièvre,  pleu- 
rodynie ou  point  de  côté,  herpès  labialis;  n'est-ce  pas  là  une  petite 
maladie  de  tous  les  joui^s,  qui  laisse  peu  de  place  à  l'inconnu?  Cependant, 
en  allant  au  fond  des  choses,  on  trouverait  peut-être  un  autre  sens  à  cetfe 
expression  morbide.  Sans  compter  les  cas  frustes  de  pneumonie  franche  qui 
afTectent  une  pareille  allure,  il  faut  encore  songer  à  la  possibilité  de  petites 
pleurésies  partielles,  simplement  adhésives;  à  des  péricardites  également 
limitées  et  fugaces,  et  même  à  des  endocardites  entièrement  latentes  et 
méconnues.  C'est  ainsi  que  Cruveilhier  rendait  compte  de  ces  adhérences 
multiples,  qu'on  rencontre  dans  mainte  autopsie  d'individus  qui  sem- 
blaient n'avoir  eu  aucune  pleurésie  dans  le  coui's  de  leur  existence.  On 
comprend  aussi  pourquoi  n  y  a  si  peu  de  cœurs  qui  ne  présentent  pas 
à  leur  surface  des  plaques  laiteuses,  comme  traces  d'anciennes  péricar- 
dites ;  et  comment,  en  un  mot,  il  est  si  rare  d'observer  un  centre  circula- 


678  POITRINE.  —  séméiolooik. 

toire  tout  à  fait  intact  chez  rhomme  qui  a  dépassé  l'âge  mojen  de  la  vie, 
et  même  plus  jeune  encore.  De  telle  sorte  que  la  pins  l^ère  affection 
a  frigore,  accusée  par  du  frisson,  du  malaise,  de  la  conrbature,  aree 
douleur  sous-costale  ou  préeordiale,  et  suivie  ou  non  d'une  crise  appi* 
rente,  correspondrait  toujours  à  quelque  pleurésie  ou  endo-péricarditê, 
si  insignifiante  qu'on  voudra  lo  supposer,  mais  d'une  réalité  indiscutable. 
Le  pronostic  de  ces  petites  indispositions,  qui  se  montrent  et  disparaissent 
si  vite,  change  donc  du  tout  au  tout ,  et  engage  l'avenir  plus  qu'on  ne  le 
croit. 

Vaslhme  est  également  une  de  ces  affections  dont  le  sens  est  multiple 
(Voy.  ce  mot).  Caractérisé  par  une  dyspnée  d'une  grande  yioleneeel 
intermittente,  il  apparaît  aussi  bien  comme  l'expression  d'un  trouble  oir- 
diaque  qu'à  titre  de  maladie  des  voies  respiratoires.  Du  reste,  au  point  de 
vue  pathogénique,  il  est  tantôt  primitif  et  tantôt  secondaire,  par  rapport 
à  chacune  de  ces  deux  grandes  fonctions  qu'on  appelle  la  respiration  et  la 
circulation.  D'une  part,  la  gène  à  la  circulation  intra-cardiaque,  dans  lee 
lésions  de  valvules  et  d'orifices,  provoque  le  désordre  convulsif  des  mon- 
vements  respiratoires  ;  et,  d'autre  part,  la  perversion  de  l'acte  de  la  res- 
piration entraine  réciproquement  des  modifications  graves  dans  le  fonction- 
nement du  cœur.  De  toute  façon,  ce  sont  les  dérangements  de  l'appareil 
pulmonaire  qui  dominent  dans  l'asthme  ;  ce  trouble,  simplement  physio- 
logique d'abord,  aboutit  en  dernier  lieu  au  relâchement  et  à  l'ampliatioo 
des  conduits  de  l'air  et  des  vésicules  qui  les  terminent,  et  s'accompagne 
bientôt  d'un  catarrhe  soit  sec,  soit  pituiteux.  Sous  d'autres  noms,  c*est  la 
l'emphysème  pulmonaire  et  la  bronchite  à  râles  vibrants  ou  humides, 
suivant  le  cas  ou  la  période  de  la  maladie.  Si  le  mal  s'était  plus  particu- 
lièrement fixé  sur  le  cœur,  nous  aurions  eu  Thypertrophie  comme  pre- 
mier terme,  et  l'asystolie  pour  aboutissant.  Inutile  d'ailleurs  d'insister 
sur  la  symptomatologie  de  l'asthme  ;  il  a  son  histoire  particulière  à  l'en» 
droit  indiqué. 

De  même  V angine  de  poitrine  n'a  point  tout  d'abord  de  siège  anatomi- 
que  parfaitement  déterminé.  Simple  trouble  fonctionnel  au  départ,  elle 
apparaît  à  l'arrivée  comme  expression  symptomatique  des  lésions  du  cen- 
tre circulatoire  les  plus  évidentes  et  les  plus  graves  :  dégénérescenoe  de 
la  fibre  cardiaque,  opacités  et  indurations  valvulaires,  dilatations  et  athé- 
romes  de  l'aorte  à  son  origine,  adhérences  partielles  des  deux  feuillets  dn 
péricarde,  etc.  :  tout  est  possible,  sans  être  inévitable  au  fond,  puisqu'il 
y  a  des  angines  de  poitrine  en  dehors  de  toute  altération  matérielle  re- 
connue. La  révélation  clinique  de  la  maladie  est  tout  entière  dans  le 
siège,  l'intensité  et  la  nature  d'une  certaine  douleur,  dans  ses  irradiations 
définies,  dans  la  dyspnée  et  l'angoisse  qui  s'ensuivent,  et  dans  une 
brusque  terminaison  par  la  mort  {Voy.  Angine  de  poitrine). 

Les  tumeurs  du  médiastin  méritent  de  nous  occuper,  moins  par  elles- 
mêmes  que  par  les  causes  d'erreur  qu'elles  'provoquent,  en  donnant 
l'idée  de  certaines  maladies  thoraciques  qu'elles  simulent  et  qui  n'exis- 
tent pas.  Tantôt,]  sous  la  forme  d'adénopathie  péri-bronchique,  elles  dé- 


POITRINE.  —  sâiiioLoeiE.  679 

teiininent  des  phénomènes  de  compression  sur  les  bronches  elles-mém^s, 
sur  les  nerfs  qui  les  avoisinent,  sur  les  gros  ti^oncs  veineux  qui  se  rendent 
au  cœur,  etc.,  et  font  croire  à  des  anéyrysmes  de  la  crosse  de  Taorte  et 
de  Taorte  descendante.  Tantôt,  i  titre  d*encéphaIoîde  du  médiastin  an- 
térieur, agissant  sur  la  paroi  thoracique  et  lui  transmettant  les  battements 
du  cœur,  elles  éveillent  l'idée  d'affections  cardiaques  propres  et  encore 
d'anévrysmes  aortiques.  Les  abcès  rétro-sternaux  rentrent  dans  le  même 
cas,  et  apportent  aussi  leur  contingent  de  difGcultés.  Mais  le  diagnostic 
est  à  peu  près  assuré,  par  cela  même  que  l'attention  est  fixée  sur  ce  point, 
les  caractères  différentiels  étant  suffisamment  tranchés  entre  tous  ces  cas. 

Nous  ne  serions  pas  complet,  si  nous  ne  tenions  pas  compte  d'affec- 
tions d'organes  extra-thoraciques,  qui  retentissent  secondairement  sur  les 
fonctions  intra-thoraciques.  Ainsi,  les  maladies  du  larynx^  surtout  les 
occlusions  de  la  glotte,  altèrent  le  murmure  vésiculaire  jusqu'à  le  sup«> 
primer  :  l'aphonie  ne  permettant  pas  non  plus  de  reconnaitro  certains 
iNTuits  d'auscultation  fournis  par  la  voix  propagée  au  travers  de  la  poi* 
trine,  etc.  {Voy.  Auscultation,  p.  148).  Du  côté  de  l'abdomen,  nous 
Toyons  le  tympanisme  poussé  à  l'extrême,  les  épanchements  périto^ 
néaux  considérables,  les  vastes  tumeurs  émanées  du  bas^-ventre,  etc., 
refouler  le  diaphragme  vers  le  haut,  et  troubler  l'action  du  cœur  et  des 
poumons.  Le  fait  le  plus  constant  est  une  dyspnée,  qui  est  souvent  exces- 
sive et  même  parfois  mortelle.  Le  rhythme  des  mouvements  respiratoires 
est  également  influencé  ;  l'expiration  perd  peu  à  peu  de  sa  prédominance, 
et  il  arrive  même  que  dans  la  péritonite  elle  devient  plus  courte  que 
l'inspiration  (Fr.  Sibson,  1848).  Cette  dyspnée  abdominale  est  de  nature 
a  susciter  des  indications  urgentes,  lorsque  l'on  voit,  par  exemple,  chex 
les  animaux  herbivores,  le  météorisme  amener  des  accidents  si  fréquents 
et  si  graves.  Pour  ce  qui  est  de  l'homme,  il  y  a  lieu,  dans  le  cours  de 
certaines  fièvres  typhoïdes,  de  conjurer  un  danger  du  même  ordre,  et  par 
le  moyen  très-simple  de  la  ponction  capillaire  :  nous  parlons  ici  d'après 
notre  expérience  personnelle. 

Enfin,  et  d'une  façon  bien  plus  indirecte  encore,  il  existe  des  maladies 
qui  provoquent  des  troubles  fâcheux,  soit  de  la  circulation,  soit  de  la  res- 
piration, par  la  voie  nerveuse.  C'est  ainsi  que  se  produit  parfois  la  syn- 
cope^ et  que  dans  d'autres  circonstances  le  rhythme  respiratoire  se  trouvé 
entièrement  bouleversé  :  le  rapport  entre  Tinspiration  et  l'expiration  se 
renversant  de  5  :  1  dans  Vhystériey  et  même  de  0  :  1  dans  la  chorée  ; 
lorsqu'on  sait  qu'à  l'état  normal  ce  rapport  est  de  1  :  4,  et  que  dans  la 
pneumonie  il  ne  s'abaisse  pas  au-dessous  de  1  :  1,25  (W.  Walshe,  1870). 

Mais,  à  cette  limite,  nous  touchons  aux  détails  de  la  pathologie  spéciale, 
et  nous  devons  nous  arrêter  là  où  finissent  les  généralités  de  notre  sujet. 

Nota.  —  Consultei  la  bibliographie  des  articles  :  AoRfE,  AcscDLtATioir/  CardimiupIIie,  Gasulit 
Cjucbats,  Perçu ôsioMf  pLEunisiE,  PLivREs,  Pouvons,  etc. 
M.  G.,  Dictionnaire  des  science»  médicales.  Article:  PoitRiRE,  t.  XLIV,  1830. 
D«#uTTBE!f,  lémoire  sur  la  dépression  eobgénitale  latérale  delà  poitrine  et  son  tndteinent ( ii|if|»tfr- 

toirt  général  d*anatomie,  de  1827,  tt  Arch.  gén.  de  méd.,  i"  série,  t.  XTI,  4888,  p.  556). 


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POITRINE.   —   LÉSIONS   TRAUMATIQDES.  681 

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À.    LUTON. 

PaÉhol€>§^ie  chipupg^icnile.  —  Les  afleclions  chirurgicales  des  or- 
ganes contenus  dans  la  cavité  thoracique  (poumons,  cœur,  aorte,  œso- 
phage) appartiennent  à  la  pathologie  spéciale  de  ces  organes  ;  elles  sont 
décrites,  par  suite,  dans  les  articles  consacrés  à  chacun  d*eux,  à  côté  des 
maladies  qui  sont  du  domaine  de  la  pathologie  médicale.  Il  en  est  de 
même  de  celles  qui  ont  leur  siège  dans  le  diaphragme,  le  sternum,  les 
côtes  et  les  mamelles.  Nous  nous  bornerons  donc  ici  à  envisager  les  lé- 
sions Iraumatiques  et  les  maladies  chirurgicales  de  la  poitrine  au  point 
de  vue  de  leurs  caractères  généraux  et  des  principales  variétés  cliniques 
qpi' elles  peuvent  offrir,  en  insistant  uniquement  sur  les  détails  qui  n'ont 
pu  trouver  leur  place  dans  l'étude  particulière  des  organes. 

L  Lésions  traumatiqces.  —  Ce  qui  donne  aux  lésions  traumaliques  des 
parois  de  la  poitrine  leur  physionomie  propre,  c'est  la  nature  des  organes 
qne  ces  parois  abritent.  Il  en  est  tellement  ainsi  que  les  plaies  non  péné- 
tirantes  ne  diffèrent  des  plaies  des  autres  régions  que  par  un  petit  nombre 
de  caractères  d'une  importance  restreinte.  Le  fait  seul  de  la  pénétration 
entraîne,  au  contraire,  des  conséquences  dont  la  moindre  présente  une 
gnTité  incontestable.  Un  épanchement  d'air  ou  de  sang  dans  la  cavité 
pleurale,  dans  le  péricarde  ou  dans  le  médiastin,  la  blessure,  ordinaire-  * 
ment  concomitante,  du  poumon  ou  du  cœur,  la  lésion  de  l'œsophage 
ou  de  l'un  des  gros  troncs  vasculaires,  constituent  des  complications  tou- 
jours sérieuses,  quelques-unes  promptemenl  mortelles.  De  même,  sans 
qu'il  y  ait  plaie  extérieure,  une  fracture  de  côte  présentera  plus  ou  moins 
de  gravité  suivant  que  la  plèvre  sera  ou  non  déchirée. 

Cette  distinction  fondamentale  qui  établit  une  sorte  de  dualisme  entre 
les  lésions  traumatiques  de  la  poitrine,  doit  toujours  être  présente  à 
Tesprit,  même  lorsqu'il  s'agit  d'une  simple  contusion.  Le  hasard  a  mis 
récemment  sous  nos  yeux  un  fait  exceptionnel  qui  nous  semble  traduire 
cette  distinction  d'une  manière  saisissante.  Un  soldat  du  28**  régiment  du 
train  d'artillerie,  qui  conduisait  une  prolonge  lourdement  chargée,  dont 
le  poids  dépassait  un  millier  de  kilogrammes,  ayant  voulu  serrer  le  frein, 
avait  glissé  sur  le  sol,  et,  dans  sa  chute,  avait  eu  la  poitrine  engagée  sous 
une  des  roues  de  l'avant-train.  La  trace  de  la  roue  qui  avait  pris  le  tronc 
en|ccharpe  était  indiquée  par  une  traînée  rouge  qui  s'étendait  de  la  partie 
latérale  gauche  du  thorax,  un  peu  au-dessous  de  l'aisselle,  à  Thypo- 

^  .7 


68:2  POITRINE.  —  lisions  TiuriiÂTiQURs.  coïfTusdON. 

chondre  droit.  A  priori,  on  pouvait  admettre,  comme  TraisemblaUefi, 
malgré  le  peu  de  gravité  de  la  blessure  extérieure,  les  diverses  lé- 
sions des  organes  internes  qui  ont  été  signalées  dans  des  cas  analogues; 
la  notion  seule  de  la  cause  vulnérante  était  suffisante  pour  justifier  no 
pronostic  très-grave.  Il  n'en  fut  rien  néanmoins.  Le  blessé  éprouva,  ps&. 
dant  quelques  jours,  des  douleurs  assez  vives  localisées  dans  la  piim 
thoracique,  et  exaspérées  par  les  mouvements  respiratoires.  Ces  dooleors 
s'amendèrent  progressivement  ;  l'ecchymose,  qui  était  trèa-étendoe,  se 
termina  par  résolution,  et,  après  une  dizaine  de  jours  de  traitement,  le 
malade  quittait  Thôpital  dans  un  état  satisfaisant.  La  contusion  de  la  piroi 
thoracique  n'avait  pas  été  pénétrante^  s'il  nous  est  permis  d^étendreaioa 
l'acception  ordinaire  de  ce  mot. 

Dans  la  pratique,  le  problème  qui  se  pose,  en  présence  d*une  blessure 
de  la  poitrine,  peut  donc  se  formuler  de  la  manière  suivante  :  étant  dooDé 
le  siège  de  la  blessure,  étant  supposés  connus  la  nature  et  le  degré  de 
puissance  de  l'agent  vulnéi*ant,  ainsi  que  la  direction  suivant  laquelle  il 
a  agi,  déterminer:  1®  les  lésions  qu'il  a  produites  dans  les  parties  moOes 
de  la  paroi,  dans  le  thorax  osseux,  dans  les  organes  de  la  cavité;  8* les 
conséquences  probables  qui  peuvent  en  résulter;  3^  la  conduite  i  tenir. 

Lésions  des  parties  molles  des  régions  thoraciques,  lésions  du  thom 
osseux,  lésions  des  organes  de  la  cavité,  tels  sont,  en  résumé,  les  Iraii 
groupes  de  faits  dont  les  combinaisons  multiples  constituent  les  variétés 
cliniques  des  blessures  de  la  poitrine. 

Les  nécessités  de  l'ordre  alphabétique  ne  permettent  pas,  dans  un  dic- 
tionnaire, d'embrasser  tous  ces  faits  dans  une  description  d'ensemble, 
comme  peut  le  faire  un  traité  didactique;  ils  sont,  au  contraire,  par  li 
force  des  choses,  disséminés  dans  un  grand  nombre  d'articles  spéciaux. 
Il  nous  reste  donc  uniquement  à  montrer  le  lion  qui  les  unit,  a  en  pré- 
senter une  sorte  de  tableau  synthétique,  en  prenant  comme  point  de  dé- 
part les  lésions  des  parties  molles  des  parois,  dont  la  description  trouve 
ici  naturellement  sa  place,  et  en  y  rattachant,  à  titre  de  complicatians, 
les  divers  ordres  de  lésions  dont  le  lectenr  trouvera  la  description  séparée 
dans  les  articles  suivants:  Aorte,  t.  II;  Cœur,  t.  YIII  ;  Côtgs,  t.  IX  ; 
Diaphragme,  t.  XI;  Emphysème,  t.  XII;  Médiastin,  t.  XXII;  Œsopsagc. 
t.  XXIV;  Péricarde,  t.  XXVII:  Plèvre,  t.  XXVIll  ;  Pocmon,  Snitiini. 

A.  Contusion.  —  Ce  terme  général  s'applique  à  des  lésions  très- 
variées  qui  peuvent  offrir  tous  les  degrés  de  gravité,  depuis  la  simple 
ecchymose  des  parties  molles  jusqu'à  la  désorganisation  profonde  et 
presque  instantanément  mortelle  des  organes  thoraciques. 

Tantôt,  en  effet,  l'action  de  la  cause  vulnérante  s'épuise  sur  les  parties 
molles  extérieures  ;  tantôt  elle  produit,  en  même  temps,  des  fractures  el 
plus  rarement  des  luxations  des  pièces  osseuses;  d'autres  fois,  en6n, 
alors  que  les  parois  restent  intactes,  le  cœur,  les  poumons/  le  diaphragme 
peuvent  être  déchirés,  rompus,  broyés,  et  la  vie  s'éteint,  soît  par  la  ces- 
sation de  leur  action,  soit  par  suite  de  la  production  d'une  hémorrfaapîe 
interne  et  d'un  vaste  épanchement. 


POITRINE.    — '   LESIONS  TRAUMAnQDES.    CONTUSIOIT.  685 

Les  causes  si  variées  qui  peuvent  produire  ces  effets  ont  deux  modes 

d'action  principaux:  elles  agissent  par  cAoc  ou  par  compression.  Au  pre* 

mîer  de  ces  deux  modes  se  rattachent  les  projectiles  de  tout  genre,  et, 

d'une  manière  généi^ale,  les  objets  extérieurs  animés  d'une  certaine  vitesse, 

la  propulsion  de  notre  propre  corps  contre  ces  objets,  les  chutes  d'un  lieu 

|dus  ou  moins  élevé,  etc.  Dans  le  deuxième  se  rangent  les  éboulemcnts  de 

terrain,  le  passage  d'une  roue  de  voiture,  les  écrasements  au  milieu  des 

foules,  le  rapprochement  de  deux  wagons,  etc.  11  est  facile  de  se  rendre 

I     compte  de  la  puissance  d'action  de  quelques-unes  de  ces  causes  et  des 

conséquences  si  graves  qu'elles  produisent.  Ce  qu'il  est  moins  aisé  de 

k     comprendre,  c'est  que  certaines  lésions  profondes  puissent  coïncider  avec 

l'intégrité,  au  moins  apparente,  des  parties  molles  extérieures  et  des  par- 

I    ties  osseuses  sous-jacentes.  Les  faits  de  ce  genre,  qui  présentent  la  plus 

;|    grande  analogie  avec   ce  qui  se  passe  parfois  du  côté  de  l'abdomen, 

r^    avaient  frappé  les  anciens  qui,  dans  l'impossibilité  d'en  donner  une  expli* 

tf    cation  satisfaisante,  avaient  édi6é  là-dessus  la  théorie  si  connue  du  vent 

n    du  boulet.  On  sait  que  les  nécropsies  ont  mis  à  néant  cette  hypothèse 

qi    spécieuse  et  que,  d'ailleurs,  les  observations  recueillies  en  dehors  de  It. 

^    chirurgie  d'armée  ont  rendu  à  tous  les  faits  du  même  genre  leur  véritable 

^    ioterprétation.  La  seule  explication  qu'on  puisse  en  donner  repose  tout 

n    entière  sur  Textréme  élasticité  de  la  peau  et  des  parois  osseuses  du  thorax, 

gf    qjoi  se  dérobent,  pour  ainsi  dire,  en  cédant  à  la  pression  du  corps  vul* 

«éranl,  et  la  transmettent  aux  parties  profondes. 

^       Il  existe  enfin  une  dernière  catégorie  de  faits  dont  l'interprétation 

^1   laisse  encore  plus  à  désirer  ;  ce  sont  ceux  dans  lesquels  on  observe  une 

^    disproportion  énorme  entre  l'énergie  de  la  cause  vulnérante  et  Tinsigni* 

^    fiance  des  lésions  produites.  Nous  en  avons  cité  plus  haut  un  cas  remar 

^    quable;  certains  exemples  de  chutes  faites  d'une  assez  grande  hauteur, 

«fns  être  suivies  d'accidents  graves,  ont  donné  lieu  à  des  observations 

^    analogues.  Dans  le  cas  spécial  d'une  voiture  à  quatre  roues  dont  l'une 

^    passe  impunément,  pour  ainsi  dire,  sur  la  poitrine  d'un  individu  couché 

,    à  terre,  il  semblerait  que,  dans  certaines  conditions  (d'égalité  du  sol 

?    peut-être),  la  charge  tout  entière  se  répartit  sur  les  trois  autres  roues, 

_;    (suffisantes  pour  maintenir  la  voiture  en  équilibre),  de  façon  que  la  qua- 

^    trième  roue,  soulevée  par  la  résistance  du  corps  qu'elle  rencontre,  n'agit 

I    pluasur  ce  dernier  que  par  son  propre  poids.  A  l'appui  de  cette  hypothèse, 

nous  pourrions  invoquer  le  cas  d'un  autre  blessé,  qui  avait  été  renversé 

*    par  un  omnibus,  et  sur  le  bras  duquel  une  des  roues  avait  passé,  en  y 

J   produisant  une  violente  contusion  des  parties  molles  sans  fracture. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  conclusion  qui  ressort  de  ces  divers  faits,  c'est 
^  qu'il  est  impossible,  à  priori^  d'établir  une  relation  exacte  entre  l'inten- 
iiiéde  la  cause  vulnérante  et  les  lésions  produites.  La  notion  de  la  cause, 
^^  quelle  qu'elle  soit,  ne  peut  fournir  que  des  présomptions;  l'observation 
^  des  symptômes  locaux  et  généraux,  la  marche  ultérieure  de  la  blessure 
^  sont,  en  définitive,  les  vrais  éléments  du  diagnostic. 
^      A  l'état  simple,  la  contusion  des  parties  molles  du  thorax  préseutA 


684  IHHTIUNE.  —  LÉsIo^s  traumatiques.  contustoh. 

peu  d'inténH.  Elle  ne  se  distinf^e  de»  lésions  analo^îues  des  autres 
régions  (}uc  par  un  certain  degré  de  gène  respiratoire  et  par  unedon- 
Icur  constante,  plus  ou  moins  vive,  qu'exaspèrent  toujours  les  mome- 
ments  du  thorax.  Cette  douleur  peut,  dans  certains  cas,  rendre  le  &- 
gnostic  incertain;  elle  éveille  Tidée,  soit  d'une  lésion  interne,  8oitd*iioe 
fracture  de  côte,  dont  la  constatation  n'est  pas  toujours  facile,  chei  la 
sujets  chargés  d'embonpoint,  par  exemple.  L'incertitude  n'est  pourtari 
pas  de  longue  durée  ;  la  douleur  qui  reconnaît  pour  cause  unique  b 
contusion  s'amende  promptement  sous  l'influence  du  traitement,  oq 
parce  que  le  blessé  s'habitue  peu  à  peu  à  immobiliser  d'instinct  la  paroi 
thoracique. 
/  L'ecchymose,  primitivement  localisée  à  la  région  blessée,  s^étead 
■  généralement  au  delà,  par  suite  de  la  disposition  lamelleuse  des  partio 
molles  du  thorax.  Elle  se  termine  ordinairement  par  résolution;  excep- 
tionnellement, elle  peut  être  le  point  de  départ  d'un  phlegmon;  mais 
presque  toujours,  dans  ce  cas,  il  existe  une  lésion  concomitante  de  h 
paroi  osseuse,  une  périostite  ou  une  ostéite,  dont  l'évolution  se  fait  avec 
lenteur. 

Les  indications  thérapeutiques  se  résument  dans  l'emploi  des  résolih 

.  tifs,  des  émoliients  et,  quelquefois,  des  antiphlogistiques  locaux,  mais 

/  surtout  dans  le  repos,  aidé  d'une  légère  compression  et  de  l'immobili- 

'    sation  du  thorax.  Un  des  moyens  les  plus  pratiques  d'obtenir  cette  immo- 

'     bilisation  consiste  dans  l'application  de  larges  bandelettes  de  diachylum 

assez   longues  pour  faire  plusieurs  fois  le  tour  de  la  poitrine,  qu'on 

enroule  autour  de  la  partie  contusionnée  et  qu'on  fixe  à  leur  extrémité 

terminale  par  des  épingles,  comme  on  le  ferait  d'une  bande  ordinaire. 

On  peut,   en  outre,  soutenir  ce  pansement  par  quelques  tours  de  bande 

dextrinée  ou  silicatée.  Ce  moyen  a  l'avantage  de  convenir    également 

dans  le  cas  où  l'on  soupçonnerait  une  fracture  de  côte  simple,  dont  V 

diagnostic  n'aurait  pu  être  établi  d'une  manière  certaine. 

Lorsqu'il  y  a  une  fracture  manifeste  d'une  ou  de  plusieurs  côtes  ou 
du  sternum,  la  contusion  du  thorax  devient  l'élément  accessoire,  et  son 
traitement  se  confond  avec  celui  de  la  fracture  et  des  complications  que 
celle-ci  peut  entraîner.  {Voy,  Côtes,  fractures)^  t.  IX,  pages  556,  et 
Sternom). 

Il  en  est  de  même,  à  fortiori^  lorsque  la  nature  de  la  cause  trauma- 
tique  et  surtout  l'apparition  de  certains  symptômes  (emphysème,  hémo- 
ptysie, collapsus  général,  dyspnée  intense,  etc.)  font  soupçonner  l'exis- 
tence d'une  de  ces  lésions  internes  si  graves  dont  nous  avons  parlé  plu< 
haut.  La  contusion  des  parties  molles  s'efface  alors,  d'une  manière 
absolue,  devant  la  lésion  principale;  c'est  celle-ci  qu'il  s'agit  de  recon- 
naître d'abord,  dans  les  cas  qui  ne  sont  pas  promptement  mortels;  c'e<t 
elle  également  qui  devient  la  source  des  indications  thérapeutiques 
(Voy.  Cœur,  ruptures,  t.  VIII,  p.  542;  Diaphragme,  déchirures,  t.  M- 
p.  362,  et  Poumons,  pathologie  chirurgicale). 
y      II  est  néanmoins  une  remarque  à  faire  à  ce  sujet.  Certains  individu.^. 


POITRINE.    —    PLAIES   KON    PÉNÉTRAUTES.  685 

prédisposés  à  la  syncope,  peuvent^  dans  un  cas  de  simple  contusion  du^ 
thorax,  sous  l'influence  du  choc  reçu  et  de  Témotion,  présenter,  au 
moment  même  de  l'accident,  des  symptômes  (pâleur,  petitesse  du  pouls, 
refroidissement,  perte  de  connaissance)  susceptibles  d'en  imposer  et  dc[ 
faire  croire  à  Texistence  d'une  lésion  grave.  Il  sufGt  d*étre  prévenu  de  la 
possibilité  d'une  contusion  de  ce  genre  pour  l'éviter.  D'ailleurs,  les  phé- 
nomènes de  syncope  s'amendent  rapidement  sous  Tinfluence  des  moyens 
communément  usités,  tandis  que  les  accidents  dus  aux  lésions  internes 
ifont  généralement  s*aggravant  et  se  caractérisant  de  plus  en  plus. 

B.  Plaies  mon  pénétrantes.  —  Le  plus  ordinairement,  ces  plaies  ont 
un  caractère  de  simplicité  qui  exclurait  presque  la  pensée  d'une  des- 
cription particulière  ;  d'autres  fois,  cependant,  elles  présentent  certaines 
complications  ou,  tout  au  moins,  quelques  phénomènes  particuliers  qui 
méritent  d'être  signalés. 

Pour  s'en  rendre  compte,  il  est  utile  d'avoir  présentes  à  l'esprit  cer-  ( 
laines  notions  relatives  à  la  constitution  anatomique  et  aux  usages  des 
parois  de  la  poitrine.  Ainsi  la  forme  convexe  des  surfaces  explique  la  ) 
facilité  avec  laquelle  les  corps  vulnérants,  dirigés  obliquement,  glissent 
dans  l'épaisseur  des  parois  ;  de  là  résultent  des  plaies  d'une  gravité  rela- 
tive moindre,  qui  gagnent  en  surface  ce  qu'elles  perdent  en  profondeur. 
La  disposition  lamelleuse  des  couches  molles  permet  la  diffusion  du  sang 
épanché  et  des  produits  de  l'inflammation.  La  situation  superficielle  du 
squelette  sur  une  assez  grande  étendue  rend  compte  de  la  fréquence  des 
liions  osseuses  concomitantes.  La  mobilité  des  parois,  enfln,  indépen- 
damment du  retard  qu'elle  apporte  souvent  à  la  marche  de  la  cicatrisa- 
tion, peut  être  la  source  de  quelques  complications  susceptibles 
d'embarrasser  le  diagnostic  (douleurs  exagérées,  défaut  du  parallélisme 
des  diverses  couches,  emphysème,  etc.); 

Les  plaies  cutanées  ressemblent  le  plus  souvent  à  celles  des  autres 
régions  et  ne  méritent  pas  de  mention  particulière. 

Quand  la  solution  de  continuité,  tout  en  restant  superficielle,  atteint 
en  même  temps  une  certaine  épaisseur  des  muscles  si  puissants  qui 
s'attachent  au  membre  supérieur,  il  en  résulte  un  écartement  notable  de 
ses  bords,  la  difficulté  de  maintenir  une  réunion  convenable,  l'éventualité 
d'une  suppuration  prolongée  et  d'une  cicatrice  adhérente  qui  peut  devenir 
une  cause  de  gêne  dans  les  mouvements. 

Lorsqu'un  instrument  piquant  ou  un  projectile  aiTondi  frappe  oblique- 
ment la  paroi,  il  glisse  fréquemment  soit  sous  la  peau,  soit  sous  les 
muscles,  et  produit  une  plaie  dite  en  selon,  dont  les  ouvertures  d'entrée 
et  de  sortie  peuvent  être  séparées  par  un  intervalle  considérable.  Ces 
sortes  de  plaies  n'ont  pas  de  disposition  à  se  réunir  par  première  inten- 
tion; ici  la  suppuration  est  la  règle  et  la  cicatrisation  s'opère  généralement 
avec  une  extrême  lenteur. 

Les  plaies  par  instruments  piquants,  même  celles  qui  s'accompagnent 
d'un  écoulement  de  sang  médiocre,  donnent  souvent  lieu,  par  suite  de  la 
mobilité  des  parois  et  du  défaut  de  parallélisme  consécutif,  ù  un  thrombus 


686  POITRINE.  ~  puibs  «on  péniruims. 

que  facilite  la  disposition  lamelleuse  des  parties  raoUes.  Dmt  kl  ai 
ordinaires,  l'épanchement  sanguin  se  résorbe  peu  à  peu;  aui»,  dm 
certaines  conditions  défavorables,  il  peut  être  le  point  de  départ  d*iMi 
phlegmon  simple  ou  diffus  qui  exige  une  prompte  interventiou  cUrar» 
gicale. 

L'inflammation  phlegmoneuse  est  encore  plus  à  craindre  quiad  i 
s'agit  de  plaies  contuses  et  surtout  de  plaies  par  armes  à  feu.  Si  l'on  ne 
se  bâte  d'en  limiter  la  propagsition  par  les  moyens  qne  noue  undiqinraM 
plus  loin,  il  en  résulte  des  fusées  purulentes  et  des  décoUemeala  éieoèu 
qui  constituent  des  accidents  sérieux. 

Les  phénomènes  que  nous  venons  de  signaler  représentent  les  conpih 
cations  consécutives  qui  peuvent  entraver  la  marche  régulière  de  la  pfase 
la  plus  simple  en  apparence.  Il  est,  en  outre,  des  compHcatious  pn^ 
mitives  qui  peuvent,  ainsi  que  leur  nom  l'indique,  être  observées  dès  k 
début. 

Nous  ne  mentionnerons  que  pour  mémoire  la  douleur,  dont  il  a  étédéji 
question  ;  car  elle  est  un  accident  commun  à  la  plupart  des  lésions  tiaa- 
matiques  du  thorax,  et  n'a  pas,  en  conséquence,  à  moins  de  présenta*  ane 
intensité  excessive,  la  valeur  diagnostique  qu'on  serait  tenté  de  lui  atUi* 
huer  relativement  à  la  profondeur  de  la  lésion. 

1*"  L'emphysème  a  été  signalé  par  la  plupart  des  auteurs  qui,  dèpou 
J.-L.  Petit,  l'attribuent  à  l'infillration  de  l'air  extérieur  aspiré,  en  quelque 
sorte,  par  les  bords  de  la  plaie  dans  les  mouvements  qu'exécute  la 
thorax.  Quelques-uns,  cependant,  ont  nié  la  possibilité  de  sa  prododioa 
dans  les  plaies  non  pénétrantes,  et  paraissent  admettre  plus  volontiers, 
dans  ces  cas,  une  erreur  de  diagnostic.  Il  est  évident  que  l'emphysème  ne 
se^  produit  ordinairement  pas  dans  les  plaies  non  pénétrantes  largemsat 
ouvertes  ;  mais  l'explication  de  J.-L.  Petit  est  parfaitement  satisfaisante, 
lorsque  l'ouverture  est  étroite,  soit  primitivement,  soit  par  le  fait  du 
gonflement  inflammatoire,  et  que  le  trajet  est  oblique  ou  sinueux.  A  chaque 
inspiration,  les  muscles  superficiels  s'écartent  des  côtes,  et  il  en  résulte 
une  sorte  de  vide  qui  attire  l'air  extérieur  si  l'ouverture  est  restée  béante. 
L'expiration  qui  suit  tend  à  l'expulser;  mais  si  l'étroitc^sse  de  la  plaie, 
Tobliquitc  du  trajet  et  le  défaut  de  parallélisme  s'opposent  à  la  sortie  de  Tiir, 
celui-ci  s'infiltre  de  proche  en  proche  dans  le  tissu  conjonctif,  si  facile- 
ment perméable  aux  liquides  et  aux  gaz,  qui  remplit  les  espaces  intennus* 
culaires.  Il  suffit,  d'ailleurs,  pour  en  arrêter  h  propagation,  d'exercer 
une  certaine  compression  aux  environs  de  la  plaie,  ou  même  de  fermer 
celle-ci.  L'emphysème  n'en  constitue  pas  moins  une  complication  sérieuse, 
moins  par  lui-même,  car  il  est  généralement  dénué  de  gravité,  que  par 
les  doutes  qu'il  inspire  au  sujet  de  la  non-pénétration  de  la  plaie. 

2**  Lhémorrhagie  atteint  rarement  des  proportions  inquiétantes,  sauf 
dans  les  plaies  qui  avoisinent  l'aisselle.  Il  faut  distinguer,  d'ailleiir?, 
entre  la  cavité  proprement  dite  et  les  régions  environnantes  ;  car,  bien  que 
les  vaisseaux  axillaires  et  les  troncs  d'origine  de  quelques-unes  des 
branches  qui  en  émanent  soient  en  rapport  avec  les  premiers  espao» 


POITRINE.  —  pLAies  non  péMÉnAiiTEs.  687 

intercostaux,  leurs  lésions  font  partie  de  la  pathologie  chirurgicale  de 
Kaiiaelle  el  ne  sauraient  rentrer  dans  notre  cadre.  Quelques  rameaux  des 
branches  thoraciques  et  scapulaires  peuvent  seuls  être  considérés  comme 
appartenant  aux  parois  de  la  poitrine.  Or,  dans  le  voisinage  de  l'aisselle, 
plusieurs  de  ces  rameaux  ont  encore  un  calibre  assez  important.  Il  faut  y 
ajouter  le  tronc  lui-même  de  l'artère  thoracique  longue  ou  mammaire 
externe,  qui  appartient  à  la  région  latérale,  et  qui  serait  susceptible  do 
fournir  une  bémorrhagie  sérieuse. 

Eb  dehors  de  la  perte  sanguine,  les  lésions  de  ce  genre  prédisposent, 
pour  les  motifs  déjà  signalés,  aux  anévrysmes  diffus  et  à  toutes  leurs 
oanaéquences. 

Quant  aux  artères  intercostales,  on  conçoit  théoriquement  qu'elles 
puissent  être  lésées,  dans  la  région  dorsale,  par  exemple,  sans  ouverture 
de  la  cavité  pleurale.  Mais,  comme  elles  sont  immédiatement  adjacentes 
à  la  plèvre  et  qu'en  outre,  dans  la  plus  grande  partie  de  leur  trajet^  elles 
ne  peuvent  guère  être  atteintes  sans  qu'il  y  ait  fracture  do  la  côte  qui  les 
protège,  ce  qui  entraine  presque  fatalement  la  déchirure  de  la  séreuse, 
leur  lésion  se  rattache  plus  naturellement  à  l'étude  des  plaies  péné- 
trantes. 

3*^  Des  lésions  osseuses  diverses  peuvent  encore  compliquer  les  plaies 
non  pénétrantes.  Ainsi,  le  sternum,  les  cartilages  costaux,  les  côtes  peu- 
vent être  atteints  soit  dans  leurs  parties  superficielles,  soit  dans  toute  leur 
épaisseur.  De  là  des  ostéites  et  des  périostifes  qui  sont  une  des  causes  les 
plus  fréquentes  des  abcès  des  parois  thoraciques  et  des  fistules  qui  leur 
succèdent.  La  plaie  peut  s'ulcérer  et  devenir  fîstuleuse,  même  sans  qu'il 
y  ait  eu  abcès.  Toutes  ces  inflammations  osseuses  ont  une  évolution  très- 
lente;  les  plaies  qui  intéressent  les  cartilages,  moins  graves  en  apparence 
que  les  plaies  compliquées  de  lésion  osseuse,  mettent  généralement  plus 
de  temps  encore  à  se  cicatriser.  Enfin  les  conditions  s'aggravent  naturel- 
lement quand  il  existe  une  fracture  ;  mais  celle-ci,  dans  le  cas  de  plaie 
extérieure,  est  rarement  simple  et  s'accompagne,  le  plus  ordinairement, 
d'ouverture  de  la  cavité  pleurale.  Quant  aux  fractures  du  sternum,  nous 
verrons  plus  loin  qu'elles  sont  fréquemment  le  point  de  départ  d'un 
abeès  du  médiastin. 

4*  H  n'est  pas  rare  de  voir  les  plaies  non  pénétrantes  compliquées  de 
la  présence  de  oorps  étrangers,  tels  que  :  aiguilles  implantées  ou  perdues 
dans  les  chairs,  pointes  d'instruments  piquants  qui  se  sont  brisés  contre 
lee  08,  projectiles  ayant  contourné  une  partie  de  la  paroi  ou  enclavés  soit 
dans  le  sternum,  soit  entre  deux  côtes,  débris  de  vêtements  repoussés 
par  ces  derniers,  sans  compter,  enfin,  les  esquilles  osseuses  qui  jouent  le 
rôle  de  véritables  corps  étrangers.  Ils  sont,  comme  dans  toute  autre  ré- 
gion, plus  ou  moins  mal  tolérés,  suivant  leur  nature  et  leur  forme,  par 
les  tissus  où  ils  se  sont  arrêtés  ;  les  indications  que  leur  présence  en- 
traîne sont  les  mêmes  que  partout  ailleurs  ;  nous  n'aurions  donc*  rien  de 
particulier  à  ajouter  ici  si  nous  n'avions  à  signaler  une  fois  de  plus  le 
long  trajet  que  des  projectiles  arrondis  peuvent  suivre,  en  contournant 


688  POITRINE.  —  plaibs  non  pÉNéTiuiiTBS. 

les  parois,  et  les  difficultés  qui  en  résultent  soit  pour  les  recherches ,  soit 
pour  l'extraction,  surtout  dans  les  cas  où  le  corps  étranger  vient  se  loger 
entre  Tomoplate  et  la  paroi  thoracique. 

5*"  Enfin,  pour  rendre  aussi  complet  que  possible  cet  exposé  flommaire 
des  diverses  variétés  que  peuvent  présenter  les  plaies  non  pénétrantes  de 
la  poitrine,  nous  mentionnerons,  pour  mémoire,  les  lésions  d*organes 
internes.  Il  est  évident,  en  effet,  qu'une  plaie  contuse  pourra,  sans  ait 
pénétrante,  oifrir  à  ce  point  de  vue  les  caractères  de  simplicité  oa  de 
complication  que  nous  avons  signalés  à  l'occasion  des  contusions  di 
thorax. 

Le  diagnostic,  le  pronostic,  les  indications  et  le  traitement  des 
non  pénétrantes  découlent,  en  grande  partie,  des  considérations  que 
venons  d'exposer.  La  première  question  qui  se  pose  estévidemment  celle-ci: 
La  plaie  est-elle  pénétrante  ou  non?  Comme  nous  aurons  à  étudier  plos 
loin  les  caractères  plus  ou  moins  nets,  plus  ou  moins  obscurs,  suivant 
les  cas,  de  la  pénétration,  nous  supposerons,  pour  le  moment,  la  question 
résolue  dans  le  sens  négatif.  Faisons  remarquer,  d'ailleurs,  que  dans  les 
cas  où  il  y  a  doute,  ce  point  spécial  n'a  pas  une  importance  pratique  con- 
sidérable,  puisqu'il  est  généralement  prescrit  d'agir  comme  si  la  plaie 
était  pénétrante. 

Ce  qu'il  est  plus  intéressant  d'établir,  après  cette  première  constati- 
tion  sommaire,  c'est  l'état  de  simplicité  ou  de  complication  de  la  pUif. 
L'arrêt  de  l'hémorrbagie,  la  recherche  et  l'extraction  des  corps  étrangen 
fournissent,  comme  dans  toute  lésion  ti'aumatique,  les  indications  les 
plus  urgentes. 

Le  sang  |)eut  s'écouler  à  l'extérieur  ou  s'épancher  entre  les  couches 
musculaires,  soit  d'emblée,  soit  à  la  suite  d'une  compression  provisoire 
qui  a  obturé  l'ouverture  de  la  plaie.  Lorsque  le  siège  de  la  blessure,  la 
quantité  de  sang  qui  s'écoule  ou  le  peu  de  volume  de  Tépanchement  et 
la  lenteur  avec  laquelle  il  s'est  produit,  permettent  de  croire  que  le  vais- 
seau lésé  est  peu  considérable,  on  peut  se  borner  à  établir  une  compres- 
sion sur  la  plaie.  Dans  le  cas  contraire,  il  faut  lier  les  deux  bouts  du 
vaisseau,  après  avoir  élargi  et  débridé  la  plaie,  s'il  est  nécessaire. 

La  situation  devient  plus  grave  lorsque  la  blessure  siège  au  voisinage 
de  l'aisselle.  D'une  part,  les  hémorrhagies  y  sont  plus  abondantes,  et  d'autre 
part,  la  recherche  et  la  ligature  du  vaisseau  lésé  y  présentent  de  sérieuses 
difficultés.  Pour  obvier  au  danger  immédiat  que  court  le  blessé,  on  est 
souvent  réduit  à  suspendre  le  cours  du  sang  par  la  compression  de  la 
sous-clavière  sur  la  première  côte,  en  arrière  de  la  clavicule,  et  à  limiter 
par  la  compression  exercée  en  même  temps  aux  environs  de  la  plaie, 
sans  pouvoir  Tempêcher  totalement,  la  formation  d'un  anévi*ysme  diffus, 
dont  les  conséquences,  toujoui*s  graves,  se  développeront  ultérieurement. 

La  recherche  et  l'extraction  des  corps  étrangers  rencontrent  souvent 
aussi  de  «sérieuses  difficultés.  Les  cas  sont  trop  variés  pour  qu*on  puisse 
songer  à  poser  des  rèf^'Ies  de  conduite  précises  ;  tout  au  plus  est-il  possible 
d'en  signaler  un  certain  nombre  à  titre  d'exemples. 


POITRINE.  —  PLAIES  no:î  péivëtrantes.  689 

Ainsi,  il  est  un  genre  d'accident  qui  se  produit  assez  Tréquemment, 
surtout  chez  les  femmes  et  les  enfants  ;  c'est  l'implantation  d'une  aiguille 
à  coudre  dans  la  paroi  thoracique.  Dans  les  premiers  moments  qui  suivent 
la  blessure,  le  corps  étranger,  môme  lorsqu'il  a  totalement  disparu, 
fait  sous  les  téguments  une  saillie  suffisante  pour  que  l'extraction  pui^^se 
en  être  opérée  sans  trop  de  difficulté  ;  mais  lorsqu'il  s'est  écoulé  un 
certain  temps,  ce  qui  est  le  cas  ordinaire,  et  surtout  lorsqu'on  s'est  déjà 
livré  il  des  tentatives  infructueuses,  il  n'en  est  plus  ainsi.  L'aiguille,  dans 
ce  cas,  a  subi  le  plus  souvent  un  mouvement  de  bascule  et  s'est  perdue 
dans  Tépaisscur  des  parties  molles.  L'exploration  la  plus  minutieuse  ne 
fournit  alors  que  des  présomptions  incertaines  sur  sa  situation  exacte,  et 
si  on  veut  l'extraire,  on  est  conduit  à  pratiquer  une  véritable  dissection 
des  tissus  qui  exige  l'emploi  du  chloroforme.  Le  plus  souvent,  en  pa- 
reille circonstance,  l'abstention  est  imposée  au  chirurgien  ;  elle  ne  pré- 
sente pas,  généralement,  d'inconvénients  sérieux.  Tantôt  le  corps  étranger 
est  toléré  indéfiniment  par  les  tissus  où  il  subit  une  sorte  d'enkystement  ; 
tantôt  il  se  déplace  peu  à  peu  et,  après  avoir  suivi  un  de  ces  longs  trajets 
dont  on  a  signalé  des  exemples  bizarres,  il  finit,  au  bout  d'un  temps  va- 
riable, par  soulever  la  peau  dans  une  région  plus  ou  moins  éloignée. 

Les  pointes  d'instruments  piquants  qui  se  sont  brisés  dans  un  os  de  la 
paroi  thoraciqtie  n'offrent  généralement  pas  de  prise  à  l'extérieur.  Lors- 
qu'il s'agit  da  sternum,  où  la  trépanation  est  facile  à  pratiquer  et  n'offre 
pas  plus  d'inconvénient  que  le  séjour  prolongé  du  corps  étranger  lui- 
même,  on  conseille  généralement  d'enlever  ce  dernier  avec  la  virole 
osseuse  dans  laquelle  il  est  implanté  On  peut  hésiter,  au  contraire, 
quand  il  s'agit  d'une  côte,  et  il  est  peut-être  préférable,  d'attendre,  en 
maintenant  la  plaie  ouverte,  que  le  corps  ait  été  mobilisé  par  suite  de 
Tostéite  que  provoque  sa  |)résence.  .. 

Ce  sont  surtout  les  plaies  par  armes  à  feu  qui  sont  compliquées  de  la 
présence  de  corps  étrangers.  Il  faut  donc  ici  se  livrer  à  une  exploration 
d'autant  plus  minutieuse  que  le  trajet  parcouru  par  le  projectile  ou  par 
les  autres  corps  qu'il  a  entraînés  est  souvent  très  étendu.  Dans  ce  cas, 
il  n'existe  ordinairement  qu'une  seule  plaie,  et  il  est  nécessaire  de  pra- 
tiquer une  contre-ouverture  sur  le  point  où  la  palpation,  combinée 
avec  l'exploration  par  la  plaie,  révèle  la  présence  du  corps  étranger. 

Un  fait  spécial  à  la  région  thoracique,  c'est  l'enclavement  possible 
d'une  balle  entre  deux  côtes.  Pour  en  pratiquer  l'extraction,  il  faut 
choisir  le  moment  d'une  forte  inspiration  qui  agrandit  l'espace  intercos- 
tal. On  se  sert  d'un  élévatoire  ou  de  l'extrémité  forte  d'une  spatule  qu'on 
introduit  avec  précaution  en  arrière  du  projectile  de  manière  à  ne  pas 
s'exposer  à  léser  la  plèvre.  Quelquefois  les  projectiles  sont  perdus  dans 
Ice  muscles  du  dos,  ou  sous  l'omoplate^  ou  enfin  dans  la  profondeur  de 
l'aisselle.  Dans  ces  divers  cas,  les  recherches  et  les  manœuvres  d'extrac- 
tion deviennent  encore  plus  laborieuses,  et,  lorsqu'il  s'agit  de  l'aisselle, 
on  doit  redoubler  de  prudence,  afin  de  ménager  les  organes  si  importants 
de  cette  région.  Deux  faits  relatés  par  Legouest,  à  titre  exceptionnel^  il 

ffonv.  DicT.  M<D.  rr  chir.  'VkWW  —  WV 


690  POITRINE.    —    PLAIES   PÉMÉTRAlfTES. 

est  vrai,  montrent  bien  avec  quelle  facilité  des  corps  d'un  médiocre  volume 
peuvent  se  loger  dans  ces  parties  :  dans  Tun,  il  s'agit  d'un  fra;^nient  de 
Lombe  pesant  2  kilog,  700,  qui  s'était  fixé  entre  la  colonne  vertébrale 
et  l'omoplate  ;  dans  l'autre,  un  petit  boulet,  qui  avait  pénétré  au-dessous 
de  la  clavicule,  s^était  logé  tout  entier  dans  la  profondeur  de  l'aisselie 
(Legouest,  Chirurgie  d^arméeip.  225.) 

Lorsque  la  plaie  est  primitivement  simple  ou  que  les  complicatioos 
ont  été  écartées,  il  faut  procéder  au  pansement.  Le  précepte  qui  domine 
ici,  c'est  l'occlusion  de  la  plaie;  seuls,  les  modes  d'application  varient 
suivant  les  cas. 

Dans  les  plaies  par  instruments  piquants^  un  morceau  de  baudruche 
collodionnée  est  suffisant. 

Dans  les  plaies  par  instruments  tranchants,  les  bords  doivent  être 
affrontés  au  contact,  soit  au  moyen  des  agglutinatifs,  soit  par  les  diver« 
procédés  de  suture  sèche  ou  sanglante.  On  a  reproché  à  la  suture  de 
produire  des  tiraillements  pénibles  par  suite  des  mouvements  incessants 
du  thorax.  On  peut  obvier  à  cet  inconvénient  en  immobilisant  le  thorax 
à  l'aide  d'un  bandage  compressif  qui  est,  en  même  temps,  le  meilleur 
moyen  de  combattre  la  douleur. 

La  suture  est  encore  plus  indiquée  quand  on  a  alTaire  à  une  [daie  à 
lambeau  ou  quand  la  solution  de  continuité  intéresse  des  libres  muscu- 
laires; elle  doit  être  profonde,  dans  ce  dernier  cas,  et  affronter  les  por- 
tions de  muscle  divisées. 

Dans  les  plaies  très-contuses  où  la  réunion  par  première  intention  doit 
fatalement  échouer,  les  bords  doivent  être,  non  pas  amenés  au  contact, 
mais  rapprochés.  On  exerce,  en  même  temps,  une  légère  compression 
dans  les  environs  de  la  plaie  pour  en  réduire  Tétendue  et  empêcher  la 
pénétration  de  Tair.  Un  pansement  simple  exactement  appliqué  complète 
i'occlusion,  surtout  dans  le  cas  ou  Von  ne  serait  pas  entièrement  fixé  sur 
le  fait  de  la  non-pénétration. 

Lorsque  la  plaie  suppure,  s'ulcère  ou  devient  fistuleuse,  ou  qu'il  se 
forme  un  abcès,  la  lésion  première  n'a  plus  alors  qu'une  valeur  étiolo- 
gique,  et  l'on  a  affaire  à  une  de  ces  affections  chirurgicales  des  parois 
thoraciqucs  dont  il  sera  question  plus  loin. 

C.  Plaies  pénétrantes. —  Une  plaie  de  poitrine  csipénélranle  lorsqu'elle 
intéresse  toute  l'épaisseur  d'un  |)oint  quelconque  des  parois  thoraciquos. 
et  qu'elle  établit  une  communication  accidentelle  entre  l'extérieur  et  la 
cavité.  A  peine  est-il  besoin  d'ajouter  qu'on  a  renoncé  à  faire  de  l'ouver- 
ture de  la  cavité  pleurale  la  condition  essentielle  de  la  pénétration,  et  à 
considérer  comme  plaie  non  pénétrante  celle  que  ferait,  par  exemple, 
une  épée  qui,  perforant  un  espace  intercostal  le  long  du  sternum,  tra- 
verserait toute  laprolondeur  du  médiastin  jusqu'à  la  colonne  vertébrale.  Ce 
p'i  est  vrai,  c'est  que  l'ouverture  de  la  cavité  pleurale  est  à  la  fois  le  fait 
le  plus  fréquent  et  une  source  de  complications  sérieuses  dans  les  plaies 
pénétrantes  de  la  poitrine  ;  mais,  d'autre  part,  les  plaies  du  médiastin 
présentent  très-souvent  une  gravité  qui  ne  le  cède  en  rien  aux  accidents 


POITRINK.  PLAIES    PÉNÉTRANTES.    DIAG>OSTIC.  691 

dont  la  perforation  de  la  plèvre  est  le  point  de  départ. 

Ainsiy  d*une  manière  générale,  le  fait  seul  de  la  pénétration  constitue, 
pour  les  plaies  de  poitrine,  une  condition  essentiellement  aggravante,  et 
bien  qu'on  ait  pu  observer  quelques  rares  exemples  de  plaies  pénétrantes 
simples,  l'existence  d'une  ou  de  plusieurs  complications  forme  la  règle. 

Dans  l'exposé  qui  va  suivre  nous  nous  occuperons  donc  successive  . 
ment  :  V  du  diagnostic  de  la  pénétration,  2^  des  caractères  et  du  traite- 1 
ment  des  plaies  pénétrantes  simples, 

3^  des  complications. 

Diagnostic.  —  Il  est  des  cas  dans  lesquels  le  fait  de  la  pénétration  est  i 
évident  :  ce  sont  ceux  dans  lesquels  il  existe  une  plaie  large,  directe,  que 
l'œil  et  le  doigt  peuvent  explorer,  ou  bien  ceux  dans  lesquels  on  constate 
à  chaque  mouvement  respiratoire  l'entrée  et  l'issue  alternatives  de  l'air 
qui  s'accompagnent  même  Tréquemment  d'un  sifflement  caractéristique. 
Il  en  est  d'autres  dans  lesquels  la  pénétration  est  probable  sans  être 
absolument  certaine  :  c'est  lorsque,  avec  une  plaie  étroite  et  sinueuse, 
où  les  caractères  précédents  font  défaut,  on  observe  une  dyspnée  exces- 
sive, de  l'emphysème  sous-cutané,  de  l'hémoptysie,  une  hémorrhagic 
extérieure  abondante  ou  les  signes  rationnels  d'une  hémorrhagie  interne. 
Il  en  est  d'autres  enfm  où  le  fait  est  absolument  douteux,  c'est  lorsque 
la  plupart  des  accidents  précédents  manquent  ou  présentent  une  très-  ) 
fail)le  intensité. 

C'est  pour  ces  derniers  cas  que  les  anciens  chirurgiens,  attachant  une 
importance  exagérée  à  établir  un  diagnostic  précis,  avaient  proposé  divers  ^ 
moyens  d'exploration  :  ainsi,  ils  inti^oduisaient  des  sondes  dans  le  trajet  / 
delà  plaie,  ils  pratiquaient  des  injections  d'eau,  ou  bien  encore,  fermant  ' 
la  bouche  et  le  nez  du  blessé,  ils  l'engageaient  à  faire  une  forte  expiration,  > 
afin  de  voir  si  une  certaine  quantité  d'air  était  expulsée  au  dehors. 
Ona  renoncé,  d'une  manière  générale,  à  toutes  ces  pratiques  qui  n'étaient 
pas  sans  danger,  et  l'exploration  directe  de  la  blessure  est  réservée  pour  | 
les  cas  où  il  s'agit  d'aller  à  la  recherche  d'un  corps  étranger.  Sauf  cette 
circonstance,  on  cherche  les  éléments  du  diagnostic  dans  la  relation  des 
circonstances  au  milieu  desquelles  la  blessure  s'est  produite,  dans  l'exa- 
men du  corps  vulnérant,  s*il  y  a  lieu,  du  siège  et  de  la  direction  de  la 
plaie,  et  surtout  dans  l'interprétation  des  signes  extérieurs  ou  rationnels 
susceptibles  d'être  rapportés  à  telle  ou  telle  complication  prévue.  Enlin 
lorsque,  malgré  tout,  le  doute  subsiste,  on  se  conduit  comme  si  la  plaie 
était  pénétrante. 

Plaies  pénélranles  simples,  —  Les  exemples  de  ce  genre  de  plaies 
sont  excessivement  rares,  et  il  est  facile  de  le  comprendre  en  réfléchis- 
sant aux  rapports  intimes  de  la  face  interne  des  parois  thoraciques  avec 
les  organes  contenus  dans  la  cavité.  11  existe,  néanmoins,  au  niveau  du 
médiastin,  dans  l'espace  compris  entre  les  deuv  sacs  pleuraux  antérieurs, 
derrière  le  sternum,  une  couche  de  tissu  conjonctif  d'épaisseur  variable 
(}ui  sépare  cet  os  des  organes  sous-jacents.  On  peut  donc  admettre,  à  la 
rigueur,  que  la  cause  vulnéraute  épuise  son  action  sur  le  sternum,  le 


592  POITRINE.  —  PLAIES   pénétrantes.  bUCKOSTtC. 

fracture  dans  toute  son  épaisseur,  et  respecte  les  parties  situées  en 
'arrière.  Si  Taccident  ne  s^accompagne  pas  d*liéinorrhagie,  s'il  ne  se  fait 
pas  un  épanchcment  sanguin  dans  le  tissu  conjonctif  rétro-sternal,  la 
plaie  pourra  être  dite  simple  ;  elle  aura  la  plus  grande  analogie  avec  les 
opérations  de  trépanation  du  sternum.  Et  néanmoins  la  simplicité  n*est 
ici  qu'apparente;  les  accidents  ne  sont  pas  immédiats,  il  est  vrai,  mais 
rinQummation  consécutive  du  tissu  conjonctif  est  imminente,  et  le  blessé 
est  expose  à  tous  les  dangers  qu'entraînent  les  suppurations  du  médiasUn. 
C'est  la  marche  qu'ont  suivie,  d'ailleurs,  les  faits  de  ce  genre  qui  ont  été 
signalés. 

Il  est  encore  plus  difficile  de  concevoir  qu'un  corps  vulnérant  puisse 
perforer  le  feuillet  pariétal  de   la  plèvre  sans  atteindre,  soit  le  poumon 
dont  il  n'est  séparé  que  par  un  intervalle  virtuel,  soit  le  diaphragme  qui 
lui  est  également  accolé  au  niveau  du  sinus  costo-diaphragmatique.  La 
thoracentèse  représente  le  type  d'une  plaie  pénétrante  simple  de  la  cavité 
pleurale  ;  mais  il  faut  remarquer  que  cette  opération  se  pratique  dans  des 
conditions  toutes  spéciales,  savoir  :  l**  l'interposition  d'une  couche  liquide 
entre  la  plèvre  et  le  poumon,  2^  le  soin  extrême  avec  lequel  on  s'elTorcc 
de  prévenir  la  pénétration  de  l'air  dans  la  cavité.  Le  hasard  peut  réaliser, 
dans  un  cas  de  blessure,  des  conditions  à  peu  près  semblables,  c'est-à-dire, 
d'un  côté  l'existence  de  fausses  membranes  éprisses,  résistantes,  liées  à 
une  pleurésie  chronique,  affection  qui  est  loin  d'être  rare;  de  l'autre  une 
plaie  étroite,  sinueuse,  qui  ne  dépasse  pas  la  profondeur  de  cette  couche. 
Cette  réunion  de  circonstances  spéciales  ne  peut  évidemment  se  produire 
que  d'une  manière  exceptionnelle;  aussi  est-il  absolument  rare   de   voir 
signaler  une  plaie  pénétrante  de  la  plèvre  qui  ne  soit  pas  accompagnée 
d'un  pneumothorax,  d*un  épanchemcnt  sanguin,  ou  d'une  lésion  soit  du 
poumon,  soit  du  diaphragme  et  en  même  temps  de  l'un  des  viscères  abdo- 
minaux. Le  seul  fait  cité  par  Larrey  d'une  |)laie  de  ce  genre  produite  par 
un  fleuret  dcmouchelé  (Journal  complément,  juillet  1820.)    a  été    con- 
testé quant  au  diagnostic.   Les   mêmes  doutes  ont  été  émis  au  sujet  du 
blessé  de  Lelenneur,  qui  n'a  guéri  qu'après  une  longue  série  d'accidents. 
Par  le  seul  fait,  en   effet,  que  le  caractère  essentiel  des  plaies   péné- 
trantes simples  est  de  n'offrir  aucune  complication  immédiate,  on  conçoit 
combien  le  diagnostic  doit  en  être  difficile  à  établir,  sans  avoir   recours 
aux  divers  procédés  d'exploration  directe  qui  sont  aujourd'hui  universel- 
lement rejetés.  Le  diagnostic  ne  peut  donc  se  faire  que  par  exclusion, 
c'est-à-dire  qu'on  est  amené  à  admettre  que  la  plaie  est  probablement 
simple,  parce  qu'on  ne  constate  aucun  symptôme  actuel  se  rapportant  à 
Tune  des  lésions  possibles.   Mais  les  organes   du  ^nédiastin  peuvent,  de 
même  que  le  poumon  et  le  diaphragme,  être  atteints  sans  que  leur  lésion 
se  manifeste   par  aucun  signe  immédiat.    De  là  résultent  deux  cpnsé- 
quences:  la  première,  c'est  qu'on  est  lente  de  croire,  dans  1^  cas  de  ce 
genre,  qu'on  a  peut-être  affaire  à  une  plaie  non  pénétrante;  la  deuxième, 
q^'il  faut  apporter  une  grande  réserve  dans  son  appréciation. 
La  même  réserve  doit  être  observée  au  point  de  vue  du  pronostic.  Nous 


POITRINE.    —  PLAIES   PÉNÉTRANTES.  COMPLICriTIOKS.  695 

ayons  signalé  déjà  les  accidents  ultérieurs  qui  peuvent  se  déycloppcr  à  la 
suite  des  plaies  du  médiastin.  Dans  les  plaies  pleurales,  il  faut  tenir 
compte  à  la  fois  de  la  possibilité  d'une  lésion  pulmonaire  latente  et  de 
la  pleurésie  traumatique  qui  est  imminente. 

Le  traitement  ne  saurait  être  douteux.  Il  consiste  à  pratiquer,  le  plus  1 
tôt  possible,  Tocclusion  exacte  de  la  plaie,  à  surveiller  Tapparition  des 
accidents,  à  prévenir  ou  modérer  par  un  régime  et  des  soins  appropriés 
l'inflammation  qui  peut  survenir.  .^ 

Complications  en  général,  —  Comme  nous  l'avons  dit  précédemment, 
il  est  rare  (|u'une  plaie  pénétrante  de  la  poitrine  ne  présente  pas  de 
complication,  et  c'est  à  cette  circonstance  qu'est  due  l'extrême  gravité 
qu'offre  le  plus  souvent  ce  genre  de  blessures.  La  pratique  civile  ne 
fouiiiit,  sur  ce  point,  que  des  données  fort  restreintes  ;  mais  les  résultats 
empruntés  à  la  chirurgie  des  armées  y  suppléent  largement.  Sans 
remonter  bien  loin  dans  cet  ordre  de  recherches,  il  suffit  de  jeter  un  coup 
d'œil  sur  les  statistiques  auxquelles  ont  donné  lieu  les  guerres  contempo- 
raines. Ainsi,  sur  474  cas  de  plaies  de  la  poitrine  qui  ont  été  observés 
dans  l'armée  française  pendant  la  guerre  de  Crimée  et  qui  ont  fourni 
135  décès,  164  ont  été  compliquées  de  lésion  du  poumon  et  ont  donné 
130  décès.  Les  1052  cas  de  blessures  de  tout  genre  'du  thorax  relevés 
par  Chenu  dans  sa  statistique  de  la  guerre  d'Italie  ont  fourni  199  décès. 
Il  est  à  remarquer,  en  outre,  que  dans  ces  chiffres  ne  sont  pas  compris 
les  hommes  tués  sur  le  champ  de  bataille;  or,  il  est  admis  que,  pour 
ces  derniers,  les  plaies  de  poitrine  figurent  pour  un  tiers  suivant  les  uns, 
pour  moitié  suivant  d'autres^  dans  le  total  des  blessures  constatées. 
Signalons  enfin,  à  cause  de  leur  extrême  importance,  les  chiffres  suivants 
empruntes  à  la  relation  chirurgicale  de  la  guerre  de  la  Sécession.  Les 
lésions  traumatiques  du  thorax  y  ont  atteint  le  chiffre  considérable  de 
20607,  dont  5404  décès.  Sur  ce  nombre  total,  les  plaies  pénétrantes 
par  armes  à  feu  figurent  pour  le  chiffre  de  8715  et  ont  fourni  5200 
décès.  Les  moyennes  signalées  dans  les  relations  partielles  qui  ont  été 
publiées  à  la  suite  de  la  dernière  guerre  franco-allemande  concordent 
avec  les  données  précédentes. 

En  résumé,  il  résulte  de  toutes  les  statistiques  recueillies  par  la  chi- 
rurgie contemporaine,  que  la  fréquence  relative  des  blessures  de  la 
poitrine  dans  le  nombre  total  des  blessures  de  guerre  est  de  un  douzième 
«nviron,  soit  8,3  pour  100,  et  que  le  chiffre  de  la  mortalité  des  plaies 
pénétrantes  de  poitrine  est  d'environ  60  pour  100. 

Parmi  les  complications  qui  produisent  de  pareils  désastres,  les  unes 
sont  immédiates  ou  primitives,  les  autres  secondaires  ou  consécutives;  les 
unes  sont  particulières  à  tel  ou  tel  organe,  les  autres  ont  un  caractère  plus 
général. 

Nous  laisserons  de  côté  les  cas  dans  lesquels  un  projectile  emporte 
une  partie  plus  ou  moins  considérable  de  la  poitrine.  Les  plaies  de  ce 
genre  rentrent  dans  la  catégorie  des  mutilations  irrégulières  ou  broiements 
suivis  de  mort  presque  instantanée. 


694  POITRINE.  —  plaies  pénétrahtks.  compucatious. 

En  dehors  de  ces  blessures  qui  échappent  à  rintervention  chirurgicale, 
la  clinique  nous  apprend  que  les  blessés  atteints  de  plaie  pénétrante 
succombent  le  plus  souvent  à  Thémorrhagie.  C'est  d'abord  la  cause  de 
mort  la  plus  fréquente  sur  le  champ  de  bataille:  c*est.  en  outre,  an 
accident  menaçant  chez  les  blessés  qui  ont  pu  être  relevés.  Ainsi,  sur 
les  8715  cas  de  plaies  pénétrantes  de  la  poitrine  signalés  pendant  la 
guerre  de  la  Sécession,  on  cite  546  cas  d'hémorrhagie  grave,  dont  i37  sui- 
vis de  mort.  Tantôt  Thémorrhagie  se  fait  à  l'extérieur,  par  la  plaie  ou 
par  les  voies  broncho-pulmonaires  (hémoptysie),  tantôt  elle  est  iotemeet 
s'accompagne  alors  d*un  épanchement  sai^guin. 

Lorsque  la  mort  n'est  pas  immédiate,  l'air  pénètre  le  plus  souvent 
dans  la  cavité  et  y  forme  un  épanchement  (pneumo-tborax,  pneumo-péri- 
carde)  ous'inGItre  dans  le  tissu  cellulaire  soit  des  parois,  soit  du  médiastio 
(emphysème  sous-cutané,  emphysème  du  médiaslin). 

D'autres  fois  au  contraire,  mais  plus  rarement,  le  poumon  s'engage 
dans  la  plaie  et  forme  une  hernie  qui  en  obture  l'orifice  (pneumocèle). 
Loi^squc  la  plaie  siège  dans  les  espaces  intercostaux  inférieurs  et  que  le 
diaphra-^me  est  lésé,  on  a  observé,  quoique  d'une  manière  exceptionnelle, 
l'issue  de  l'cpiploon  (épiplocèle). 

EnOn,  tantôt  l'instrument  vulnérant  ou  le  projectile  est  sorti  de  la 
plaie,  tantôt  il  demeure  dans  la  profondeur  des  tissus,  et  la  plaie  se  com- 
plique de  la  présence  d'un  corps  étranger. 

Quand  le  blessé  a  échappé  aux  premiers  accidents,  il  est  encore  exposé 
h  tous  les  dan-^ers  que  lui  font  courir  les  hémorrhagies  secondaires,  les 
phlegmasies  du  poumon,  de  la  plèvre,  du  péricarde,  du  cœur,  du  tissu 
conjonctif  du  médiastin,  les  épanchements  purulents,  les  phlegnaons  aigus 
ou  chroniques,  etc. 

Tel  est  l'ensemble  des  complications  que  peuvent  offrir  les  plaies 
pénétrantes  de  la  poitrine  envisagées  en  général.  Ce  tableau  serait  incom- 
plet si  nous  ne  signalions,  au  moins  pour  mémoire,  les  lésions  des  organes 
qui  sont  elles-mêmes  l'origine  de  la  plupart  des  accidents  que  nous  venons 
d'énumcrcr. 

11  est  rare,  en  effet,  que  Tagent  vulnérant,  après  avoir  traversé  la 
paroi,  ne  lèse  pas  un  des  organes.  Ces  lésions  atteignent,  par  ordre  de 
fréquence  :  les  poumons,  le  péricarde  et  le  cœur,  l'aorte  et  les  autres 
troncs  vasculaires  importants,  le  diaphragme  et  les  viscères  abdominaux, 
et  enlin  Tœsophage  et  le  canal  thoracique.  Bien  qu'elles  jouent  le  rôle 
prépondérant  dans  la  symptomatologie  générale  des  plaies  de  poitrine, 
dans  la  genèse  des  accidents  signalés  plus  haut,  dans  la  marche  et  la 
terminaison  de  la  blessure,  nous  nous  abstiendrons  de  les  .décrire  isolé- 
ment pour  ne  pas  tomber  dans  des  redites  oiseuses,  et  nous  n'en  parlerons 
ici  qu'au  point  de  vue  de  leurs  relations  avec  les  complications  générales 
primitives.  (Voy.,  pour  les  détails,  la  pathologie  chirurgicale  des  articles 
Aorte,  Cœlr,  Diaphragme,  Œsophage,  Péricarde,  Poumon.) 

Nous  nous  bornerons  donc  à  une  étude  sommaire  de  ces  compIicatioD^ 
primitives  en  suivant  l'ordre  dans  lequel  elles  ont  été  énumérées  : 


POITRINE.  —  PLAIES   piNÉTRANTES.  COMPLICATIOKS.  695 

1*  Hémorrhagie  cl  épanchcments  sanguins; 

2**  Accidents  dus  à  la  pénétration  de  Tair; 

5**  Hernies  du  poumon  et  de  l*épiploon  ; 

4*  Corps  étningers. 

Quant  aux  complications  secondaires,  les  unes,  telles  que  les  phlegma- 
sies  viscérales  et  les  épanchements  purulents  qui  les  accompagnent 
souvent,  relèvent  de  la  pathologie  interne,  les  autres,  telles  que  les  abcès, 
appartiennent  aux  affections  chirurgicales  du  thorax  dont  nous  nous 
occuperons  plus  loin. 

Hémorrhagie.  —  Il  est  facile  de  comprendre  que  les  plaies  d'une 
cavité  qui  contient  le  cœur  et  les  gros  vaisseaux  qui  en  partent  ou  qui  s^y 
rendent  (aorte,  artère  et  veines  pulmonaires,  veines  caves),  ainsi  que  des 
organes  vasculaires,  comme  les  poumons,  soient  fréquemment  compli- 
quées d'hémorrhagie.  Notons,  en  outre,  qu'à  ces  sources  importantes 
d'hémorrhagie  viennent  se  joindre  les  lésions  des  vaisseaux  des  parois. 

Trois  cas  peuvent  se  présenter  :  1**  Thémorrhagie  se  fait  tpule  à  Texlé- 
rieur,  c'est  le  cas  le  plus  rare  quand  il  s'agit  d'une  plaie  pénétrante; 
2"*  riiémorrhagie  est  purement  interne;  5®  elle  se  fait  à  la  fois  à  l'intérieur 
et  à  Textérieur,  c'est  le  cas  le  plus  fréquent. 

Cette  complication  compromet  les  jours  du  blessé  de  plusieurs  manières  : 
immédiatement,  par  le  fait  même  de  la  perte  de  sang  ou  par  les  effets 
de  compression  qu'entraîne  l'accumulation  de  ce  liquide  dans  l'intérieur 
de  la  cavité,  consécutivement;  par  les  accidents  qu'amènent  le  séjour  et 
l'altération  du  liquide  épanché. 

La  première  indication  que  présente  une  plaie  pénétrante  de  la  poitrine 
consiste  donc  à  rechercher  s'il  y  a  hémorrhagie  et  quelle  en  est  la  source. 

Lorsque  l'écoulement  du  sang  se  fait  à  l'extérieur  par  un  jet  isochrone 
aux  battements  du  pouls  et  que  le  sang  a  l'aspect  rutilant  du  sang  ai*té- 
riel,  il  est  probable  qu'on  a  affaire  à  une  lésion  des  vaisseaux  superGciels 
de  la  paroi.  Ce  cas,  assez  rare  du  reste,  rentre  dans  celui  des  plaies  non 
pénétrantes. 

Lorsque,  à  la  suite  d'une  plaie  étroite  et  qu'on  peut  supposer  profonde, 
il  ne  se  produit  pas  d'hémorrhagie  extérieure,  on  doit  rechercher  avec 
soin  les  signes  qui  indiquent  l'accumulation  de  ce  liquide  dans  la  cavité. 
Ces  signes  sont  de  deux  sortes  :  les  uns  se  rattachent  à  la  perte  sanguine 
(pâleur,  refroidissement  des  extrémités,  petitesse  du  pouls,  tendance  à  la 
syncope),  les  autres  sont  dus  à  la  compression  que  le  liquide  épanché 
exerce  sur  les  organes  thoraciques  et  représentent  tous  les  degrés  possibles 
de  dyspnée  ;  c'est  donc  à  la  percussion  et  à  l'auscultation  de  vérifier  les 
présomptions  que  peuvent  fournir,  sous  ce  rapport,  la  nature  et  le  siège 
de  la  blessure.  Lorsqu'aux  signes  précédents  se  joint  l'hémoptysie,  on 
doit  songer  soit  à  une  lésion  pulmonaire,  soit  à  l'ouverture  d'un  gros 
vaisseau  dans  les  bronches. 

Le  cas  le  plus  fréquent  est,  avons-nous  dit,  la  coexistence  d'un  écou- 
lement sanguin  extérieur  avec  les  signes  plus  ou  moins  accusés  de  Thé- 
morrhagie  interne.  La  question  qui  se  pose  alors  est  d'une  extrême  impor- 


696  POITRINE.    plaies    PtNKTRAKTKS,  COMPLrCATlOKS. 

lanco.  Il  s'agit  de  savoir,  en  effet,  si  récouleraent  extérieur  est  unique- 
ment  le  résultat  d'une  sorte  de  trop-plein  de  la  cavité,  ou  bien  si  Thémor- 
rliagie  a  sa  source  dans  la  lésion  d'un  vaisseau  profond  de  la  paroi  dont 
le  sang  se  déverse  à  la  fois  à  l'intérieur  et  à  Textérieur.  Les  lésions  de  ce 
genre  sont  une  source  d'indications  immédiates  et  méritent,  par  consé- 
quent, de  nous  arrêter  tout  d'abord. 

On  peut,  suivant  le  siège  de  la  blessure,  avoir  affaire  à  la  lésion  de 
Tune  des  intercostales  ou  de  la  mammaire  interne. 

Il  a  été  longuement  discuté  sur  le  plus  ou  moins  de  fréquence  de  la 
blessure  des  intercostales,  et  c'i  st  devenu  un  lieu  commun  dans  les  traités 
de  chirurgie,  de  répéter  que  les  procédés  inventes  pour  combattre  cette 
complication  étaient  plus  nombreux  que  les  cas  où  l'on  avait  eu  l'occasion 
de  l'observer.  Il  y  a  là,  tout  au  moins,  une  exagération  ;  Martin,  dans  sa 
dissertation  inaugurale,  publiée  en  1855,  a  pu  en  réunir  28  cas,  et  Abus 
V Histoire  de  la  guerre  de  Sécession  cette  lésion  a  été  signalée  15  lois. 
Sa  rareté  relative  provient  de  la  protection  que  l'artère  intercostale  trouve 
dans  la  gouttière  de  la  côte,  là  où  précisément  elle  a  un  calibre  sufQsant 
pour  produire  une  bémorrhagie  sérieuse  ;  la  lésion  du  vaisseau  dans  ce 
point  est  donc  ordinairement  liée  à  la  fracture  de  la  côte,  sans  que  cftte 
dernière  en  soit  cependant  une  condition  nécessaire,  dans  les  plaies  très 
obliques,  par  exemple. 

Les  conditions  changent  dans  le  tiers  antérieur  et  vers  Textrémité  po^ 
térieure  de  l'espace  intercostaU  où  l'artère  occupe  le  milieu  de  l'espace. 
Une  plaie  pénétrante,  dans  ces  deux  points,  un  coup  d'épée  par  exemple, 
peut  être  suivie  d'hémorrhagie.  En  avant,  il  est  vrai,  l'artère  a  un  si  mince 
volume  que  sa  blessure  offrirait  bien  peu  de  gravité  ;  il  n'en  ei^t  pas  de 
même  eu  arrière  où  elle  pourrait  fournir  une  bémorrhagie  abondante. 
Mais  ici  surgit  une  grave  difficulté;  l'épaisseur  des  parties  molles  est 
considérable,  l'artère  est  donc  profondément  située,  l'écoulement  du  sang 
se  fait  en  bavant  et  non  par  un  jet  saccadé,  ce  liquide  est  ordinairement 
mélangé  de  bulles  d'air  par  suite  du  pneumo-thorax  ou  de  la  lésion  pul- 
monaire concomitante,  et  le  plus  souvent  il  est  très-difficile  de  distinguer 
si  l'hémorrhagie  provient  de  l'artère,  du  poumon  ou  de  l'un  des  vaisseaux 
du  médiastin  postérieur.  Il  n'y  a  d'exception  que  pour  le  cas  où  la  bles- 
sure est  assez  large  et  où,  en  déblayant  les  caillots,  on  peut  voir  battre 
dans  le  fond  de  la  plaie  l'orifice  ouvert,  sur  lecjuel  on  doit  s'empresser, 
dans  ce  cas,  de  jeter  une  ligature  ou  de  pratiquer  la  torsion.  Si  l'une  et 
l'autre  de  ces  opérations  sont  impossibles  et  si  la  blessure  e>t,  sinon  cer- 
taine, au  moins  probable,  c'est  à  un  tamponnement  méthodique  pratiqué 
comme  il  sera  dit  plus  loin,  qu'il  faudra  recourir;  on  remplira  ainsi  la 
double  indication  d'obturer  la  plaie  de  la  paroi  et  de  tarir  la  source  de 
l'hémorrhagie. 

Lorsque  l'artère  a  pu  être  lésée  dans  la  partie  moyerme  de  son  trajet, 
on  a  proposé  pour  vérifier  les  présomptions  tirées  du  siège  de  la  blessure, 
si  la  largeur  de  la  plaie  le  permet,  l'exploration  digitale  et  le  procédé 
dit  de  la  carte.  Le  doigt  étant  porté  dans  la  plaie,  sa  face  palmaire 


POITRINE.   —   PLAIES   PÉNÉTRANTES.  COMPLICATIONS.  697 

• 

tournée  en  haut  et  appliquée  contre  la  gouttière  costale  recevra  le 
choc  d'une  colonne  de  liquide  chaud,  si  le  sang  provient  réellement 
de  la  lésion  de  Tintcrcostale  et  suspendra  Thémorrhagie  en  exerçant  une 
légère  compression  sur  le  fond  de  la  gouttière.  Quant  au  procédé  de  la 
carte,  il  consiste  à  introduire  dans  la  plaie  une  carte  plice  en  forme  de 
gouttière  et  regardant  par  sa  concavité  la  côte  supérieure  ;  si  le  sang  coule 
dans  cette  gouttière,  il  est  à  présumer  qu  il  vient  de  l'intercostale;  s^il 
s* échappe  au-dessous  de  la  carte,  c'est  qu'il  vient  du  poumon  ou  de  la 
plèvre.  Tous  ces  moyens  de  diagnostic  peuvent  être  utilisés  ;  ils  sont  mal- 
heureusement impraticables,  dans  les  cas  où  précisément  le  diagnostic  est 
le  plus  difficile,  c'est-à-dire  lorsqu'il  s'agit  d'une  plaie  étroite,  oblique  ou 
anfractueuse,  dans  laquelle  l'inspection  visuelle  fait  défaut. 

La  ligature'est  évidemment,  quand  elle  est  possible,  le  mode  de  traite- 
ment le  plus  rationnel  et  le  plus  sur  à  opposer  aux  plaies  de  l'intercos- 
tale; mais  elle  présente  plus  d'une  difficulté.  En  premier  lieu,  non-seule- 
ment l'artère  est  située  profondément,  mais  encore  elle  est  cachée  dans  la 
gouttière  de  la  côte.  L'opération  peut  nécessiter,  en  outre,  des  débride- 
ments  plus  ou  moins  étendus  qui  augmentent  les  chances  d'introduction 
de  l'air  dans  le  thorax.  Enfin,  comme  il  est  le  plus  souvent  nécessaire  de 
lier  les  deux  bouts  du  vaisseau,  on  peut  être  obligé  de  laisser  l'opération 
inachevée.  On  a  donc  conseillé  des  procédés  et  des  insliniments  particu- 
liers ;  parmi  ces  derniers,  nous  ne  mentionnerons  que  l'aiguille-crochet 
articulée  de  Reybard  destinée  à  contourner  l'artère,  sans  embrasser  la 
côte,  à  l'opposé  des  procédés  de  Gérard  et  de  Goulard  qui  tiennent  au 
moins  autant  de  la  compression  que  de  la  ligature. 

Les  moyens  de  compression  qui  ont  été  appliqués  ou  proposés  sont  très 
variés.  Nous  ne  ferons  que  citer  le  jeton  deQuesnay,  la  plaque  de  Lotteri, 
l'appareil  de  Bellocq.  Les  [irocédés  modernes  sont  plus  pratiques  et  plus 
laciles  à  improviser  ;  ils  peuvent  d'ailleurs  se  résumer  en  ceci  qu'ils  con- 
sistent à  pratiquer  un  tamponnement  régulier  de  la  plaie.  C'est  ainsi  que 
Dupuytren,  adoptant  le  mode  qui  avait  été  conseillé  par  Desault,  intro- 
duisit d'abord  dans  la  plaie  une  pièce  de  toile  déprimée  en  cul-de-sac,  la 
bourra  de  charpie,  puis  la  relira  à  lui  de  façon  à  exercer  une  compression 
de  dedans  en  dehors.  Le  procédé  de  Sabatier  consiste  à  introduire  jusque 
dans  la  cavité  pleurale  un  gros  bourdonnet  de  charpie,  muni  d'un  fil 
double,  qu'on  amène  ensuite  et  qu'on  maintient  au  contact  de  l'orifice 
interne  de  la  plaie,  en  nouant  les  deux  chefs  du  fil  double  autour  d'un 
rouleau  de  diachyluin  placé  à  l'extérieur.  A  ces  moyens,  très-efficaces  sans 
doute,  mais  qui  présentent  certains  inconvénients,  on  préfère  avec  raison, 
de  nos  jours,  les  compresseurs  à  air  ou  même  un  simple  sac  de  baudruche 
qu'on  introduirait  vide  et  qu'on  gonflerait  ensuite. 

La  lésion  de  la  mammaire  interne  offre,  au  moins,  autant  de  gravité 
que  celle  d'une  intercostale.  Ici  encore,  la  situation  profonde  du  vaisseau 
entraine,  le  plus  souvent,  une  hémorrhagie  à  la  fois  interne  et  externe,  et, 
comme  conséquence,  la  production  d'un  épanchement  sanguin  qui  se 
fera  dans  la  plèvre  correspondante  ou  dans  le  médiastin,  suivant  la  hau- 


698  POITRINE.  -   plaies  pénétrartes.  complications. 

leur  à  laquelle  le  vaisseau  aura  été  divisé.  Le  diagnostic  préseniçra  doir 
encore  certaines  difficultés,  d'autant  plus  que  la  blessure  de  Vartcre 
coïncide  souvent  avec  des  lésions  profondes  encore  plus  graTe:^:  néan- 
moins, les  rapports  bien  connus  de  l'artère  avec  le  bord  du  stennm 
fournissent  un  point  de  repère  d'une  assez  grande  précision. 

Le  meilleur  procédé  à  suivre,  pour  arrêter  une  hémorrhagie  de  et 
genre,  consiste,  quand  la  chose  est  possible,  à  lier  dans  la  plaie  lesboob 
du  vaissefiu  divisé;  on  se  met  ainsi  en  garde  contre  le  retour  de  rbémor- 
rhagie  par  le  bout  inférieur,  accident  auquel  expose  ranastomose  de  b 
mammaire  et  de  l'épigastrique.  Mais  cette  règle,  excellente  en  principe, 
présente  parfois  dans  l'application  des  difficultés  insurmontables,  sqiImI 
si  le  sang  a  séjourné  quelque  temps  dans  le  tissu  conjonctif  qui  eiiTiroDV 
Tartère.  On  peut  alors  recourir  soit  aux  divers  modes  de  tampoDoeoNil  I 
que  nous  avons  signalés  pour  les  intercostales,  soit  à  la  ligature  pratiquée  I 
au-dessus  de  la  lésion.  Le  lieu  d'élection  est  au  2*  ou  5*  espace  iote^  I 
costal,  parce  que  ces  deux  espaces  présentent  plus  de  largeur  qae  tai^  1 
les  autres.  L'incision  sera  dirigée  horizontalement,  de  façon  qucsoDmibi 
corresponde  à  8  ou  10  millimètres  du  bord  du  sternum.  On  diTisn 
successivement  la  peau,  le  grand  pectoral,  l'aponévrose  qui  failsuilein 
intercostaux   externes.  Le  plan  charnu  des  intercostaux  internes  sen 
ensuite  sectionné  sur  la  sonde  cannelée  afin  de  ménager  la  plcne  et  ^ 
vaisseau  lui-même.  Ce  dernier  sera  enfin  dégagé  du  tissu  conjaortifi 
l'aide  de  l'extrémité  mousse  du  même  instrument. 

Nous  avons  dit  plus  haut  que,  lorsque  l'hémorrhagie  se  fait  à  fintmaf 
du  thorax,  elle  donne  lieu  à  deux  ordres  d'accidents  :  1**  ceux  quiréail- 
tent  de  la  perte  sanguine  elle-même,  et  qu'il  faut  ne  pas  confondre  aicc 
les  phénomènes  purement  syncopaux  qui  accompagnent  beaucoup  t 
lésions  du  thorax;  2"  ceux  qui  sont  dus  a  l'accumulation  du  liquide dtfs 
l'une  des  parties  de  la  cavité.  Ce  sont  ces  derniers  qu'il  nous  rcsiei 
décrire. 

Épanchements  sanguins  intra-thoraciques,  —  Qu'il  soit  dû  il' 
lésion  d'un  organe  ou  de  l'un  des  vaisseaux  soit  de  la  paroi,  soit  d^l* 
cavité,  l'épanchement  peut  se  faire  : 

Dans  le  tissu  cellulaire  du  médiaslin. 

Dans  la  cavité  du  péricarde. 

Ou  dans  la  cavité  pleurale  (c'est  à  cette  dernière  variété,  la  plus  f'*" 
quente  de  toutes,  que  s'applique,  dans  la  pratique,  l'expression  ^ 
hémolhorax) . 

L'épanchement  traumalique  de  sang  dans  le  médiastm,  qui  coiofi* 
souvent  du  reste  avec  un  épanchement  péricardique,  ne  peut  guèreéln 
que  soupçonne,  lorsque  les  données  tirées  du  siège  de  la  blessure  co» 
cordent  avec  les  signes  de  l'hémorrhagie  interne  et  avec  une  dyspnée  |te 
ou  moins  intense,  accompagnée  d'une  petite  toux  sèche  et  surtout dB* 
sensation  particulière  de  pesanteur  en  arrière  du  sternum.  La  percuss«i 
et  l'auscultation  fournissent  aussi,  naturellement,  leur  contingent  de  pf^ 
habilités. 


POITRINE.  —    riAIES    rÉHKTBAKTES.   C0MPUCATI0R8.  '         699 

Si  répanchement  n'est  pas  assez  abondant  pour  entraîner  une  mort 
promple,  il  se  produit  assez  fréquemment,  dans  les  jours  qui  suivent  Id 
blessure,  une  rémission  notable  due  à  une  sorte  d'assuétude  des  organes 
à  la  compression  qu'ils  subissent. 

Cette  rémission  s'accentue  de  plus  en  plus  si  Tépanchement  se  termine 
par  résolution;  elle  représente  au  contraire  un  état  passager,  si,  ce  qui 
est  le  cas  le  plus  fréquent,  le  sang  épanché  devient  le  point  de  départ 
d'un  abcès  du  médiastin.  Il  faut  être  prévenu  de  ce  fait  pour  ne  pas  se 
livrer  trop  tôt  aux  illusions  d'une  fausse  sécurité,  que  les  événements 
viendraient  démentir.  On  voit,  en  effet,  après  quelques  jours  d'amélio- 
ration, se  développer  des  accidents  inflammatoires  qui  aboutissent  géné- 
ralement à  la  suppuration.  Les  fractures  ou  même  les  simples  contusions 
du  sternum,  la  présence  d'esr(uilles  osseuses  ou  de  corps  étrangers,  la 
simple  pénétration  de  l'air  dans  le  foyer  sanguin,  sont  les  causes  détermi- 
nantes de  cotte  inflammation. 

Quelle  est  la  conduite  à  tenir  en  présence  d'un  épanchement  sanguin 
du  médiastin?  Faut-il,  comme  on  l'a  conseillé,  favoriser  l'issue  du  sang 
pour  prévenir  les  effets  de  son  accumulation?  Faut-il,  au  contraire, 
lorsqu'on  s'est  assuré  que  l'Iiémorrhagie  ne  provient  pas  d'un  vaisseau 
de  la  paroi,  obturer  la  plaie?  C'est  cette  dernière  pratique  qui  est  géné- 
ralement adoptée  ;  c'est  cçlle,  en  effet,  qui  donne  les  meilleures  chances 
de  voir  l'hémorrhagie  s'arréler  par  le  fait  même  de  l'accumulation  du 
liquide  épanché  ;  elle  offre,  en  outre,  l'avantage  d'intercepter  la  com- 
munication entre  Tépanchement  sanguin  et  l'air  extérieur  qui  est  une 
cause  d'inflammation.  Après  avoir  pratiqué  l'occlusion  de  la  plaie,  on  fait 
des  applications  réfrigérantes  sur  la  région  et,  si  les  symptômes  généraux 
l'indiquent,  on  recourt  aux  moyens  employés  d'ordinaire  contre  les 
hémorrhagies  internes.  Nous  verrons  plus  loin  le  traitement  que  l'on 
devra  instituer  lorsque  l'inflammation  s'empare  du  foyer  sanguin. 

L'épanchement  sanguin  du  péricarde  ou  hémo-péricarde  est  une  com- 
plication très-fréquente  des  plaies  du  cœur,  dont  le  degré  d'importance 
varie  suivant  qu'il  s'agit  d'une  plaie  pénétrante  de  cet  organe,  d'une 
plaie  non  pénétrante  ou  d'une  rupture.  Dans  le  premier  cas,  il  constitue 
un  simple  épiphénomène  dont  les  symptômes  et  les  indications  se  confon- 
dent avec  ceux  de  la  lésion  principale.  Dans  les  deux  derniers  cas,  au 
contraire,  il  devient  un  accident  primitif  de  premier  ordre  ;  mais  néan- 
moins son  histoire  ne  saurait  être  séparée  de  celle  des  lésions  traumati- 
ques  du  cœur.  (Voy.  Cœur,  plaies,  t.  VIII,  p.  525.) 

Lhémothorax  traumatique  ou  épanchement  sanguin  de  la  plèvre  pré- 
sente une  fréquence  et  une  gravité  en  rapport  avec  l'étendue  du  dévelop- 
*  pemcnt  de  cette  séreuse  sur  les  parois  du  thorax.  Il  peut  être  la  consé- 
quence de  lésions  très-variées  (plaies  du  poumon,  plaies  du  cœur,  ouverture 
des  gros  vaisseaux,  lésion  des  artères  profondes  de  la  paroi).  Variable  en 
abondance  et  en  rapidité  selon  le  volume  et  le  nombre  des  vaisseaux 
lésés,  suivant  qu'il  se  fait  dans  une  plèvre  libre  d'adhérences  ou  dans 
une  partie  de  cette  séreuse  circonscrite  par  des  adhérences  anciennes, 


POITRINE.  FUIES  PÉKÉTRAKTES  .COMPLICATIONS.  701 

lumière  non-seulement  par  les  autopsies,  mais  encore  par  les  expériences 
de  Trousseau  et  Leblanc  sur  les  chevaux.  On  est  assez  d'accord  aujour- 
d'hui pour  attribuer  cette  rapidité  exceptionnelle  de  coagulation  à  Tin- 
fluence  exercée  sur  le  sang  épanché  par  la  sérosité  qui  lubrifie  normale- 
ment la  surface  interne  de  la  plèvre.  Quoi  qu'il  en  soit,  au  bout  de  peu 
de  temps,  cette  coagulation  est  suivie  de  la  mise  en  liberté  de  la  sérosité 
emprisonnée  dans  les  mailles  du  coagulum  sanguin,  laquelle  surnage  en 
entraînant  avec  elle  un  grand  nombre  de  globules.  A  celte  sérosité  se  mêle 
celle  qui  est  sécrétée  par  la  plèvre,  sous  Tintluence  de  Tirrilation  que 
produisent  le  traumatisme  et  la  présence  des  caillots  jouant  le  rôle  de 
corps  étrangers.  Le  mélange  des  deux  liquides  qui  concourent  tous  deux  à 
dissoudi^e  le  caillot,  augmente,  dans  des  proportions  notables,  le  volume 
de  la  collection  primitivement  formée.  C'est  le  liquide  ainsi  coloré  qui 
s'échappe  de  la  plaie  dans  les  mouvements  d'expiration,  lorsqu'il  n'existe 
pas  de  lésion  vasculaire  de  la  paroi  et  que  l'hémorrhagie,  de  source 
interne^  s'est  effectuée  lentement. 

'  La  marche  de  l'épanchement  varie  dans  les  divers  cas.  S'il  est  peu  con- 
sidérable et  si,  en  même  temps,  il  y  a  peu  d'air  dans  la  cavité,  la  résorption 
graduelle  du  sang  peut  s'effectuer  au  bout  d'un  temps  plus  ou  moins  long. 
Il  en  est  souvent  de  même  lorsqu'il  se  trouve  circonscrit  dans  un  espace 
limité  par  des  adhérences  anciennes  de  la  plèvre.  Par  contre,  la  présence 
d'une  grande  quantité  de  sang,  surtout  lorsqu'elle  est  accompagnée  d'air, 
détermine  une  inOammation  violente  de  la  séreuse  qui  s'accompagne 
d*une  fièvre  intense  et  détermine  la  décomposition  putride  du  liquide. 
L'épanchement  devient  purulent,  et  Ton  se  trouve  en  présence  de  tous 
les  accidents  qu'entraînent  les  collections  de  cette  nature,  quelle  qu'en 
soit  la  cause  déterminante,  accidents  aggravés  de  plus  ici  par  la  libre  com- 
munication qui  existe  entre  la  cavité  et  l'air  extérieur. 

Lorsque  l'hémorrhagie  n'a  pu  être  arrêtée  et  que  Tépanchcment  san- 
guin est  en  voie  de  formation,  quelle  est  la  conduite  à  tenir  ?  La  réponse 
à  cette  question  est  d'autant  plus  embarrassante  qu'on  se  trouve  en  pré- 
sence de  deux  écueils  :  la  persistance  de  l'hémorrhagie  si  l'on  ne  ferme 
pas  la  plaie,  ou,  si  l'on  pratique  l'occlusion  de  cette  dernière,  l'asphyxie 
qui  peut  résulter  de  l'accumulation  du  sang. 

Néanmoins,  comme  les  ressources  thérapeutiques  sont  bien  précaires 
en  présence  d'une  hémorrhagie  interne  un  peu  abondante  ;  comme  le 
blessé  court,  de  ce  chef,  un  danger  immédiat  qu'on  peut  espérer  conjurer 
par  la  compression  qu'exerce  le  liquide  épanché,  l'occlusion  de  la  plaie 
est  aujourd'hui  généralement  pass€|^  dans  la  pratique.  C'est  donc,  d'une 
manière  générale,  la  première  indication  qu'où  remplit,  concurremment 
avec  l'emploi  des  ipoyens  usités  contre  l'hémorrhagie  interne  :  révulsifs 
cutanés,  ligai|ire  des  membres,  élévation  du  tronc,  ingestion  de  petits 
fragments  de  glace,  potions  astringentes,  applications  réfrigérantes  sur  le 
lieu  de  la  blessure,  etc.  Cela  fait,  on  surveille  attentivement  les  svm- 
ptdmes  ultérieurs. 

Si  l'hémorrhagie  interne  s'arrête,  il  se  produit  une  amélioration  légère, 


i02  POITRINK.  —  PLAIES  PÉNÉTRANTES.  COMPLICATIONS. 

au  moins  dans  Tétai  général  (relèvement  du  pouls  et  retour  de  la  cha- 
leur). Les  premiers  accidents  sont  conjurés  et  Ton  n'a  plus  à  s'occuper 
que  de  la  marche  ultérieure  de  Tépanchement.  Si,  au  coatrairef  Thé- 
morrhagie  continue,  Tépanchement  augmente,  et  aux  symptômes  précé- 
demment signalés  se  joignent  bientôt  les  signes  d'une  asphyxie  immi- 
nente. La  pratique  conseillée  par  Legouest  dans  les  cas  de  ce  genre  est  b 
suivante  :  il  faut  rouvrir  la  plaie,  si  elle  est  large  et  si  elle  a  été  réuDie, 
l'agrandir,  si  elle  est  étroite,  et  chercher  à  débarrasser  la  poitrine.  Si 
l'écoulement  du  sang  par  la  plaie  ne  soulage  pas  le  blessé  et  oe  bit 
qu'augmenter  la  faiblesse,  on  tente  de  nouveau  l'occlusion.  Lorsque,  ao 
contraire,  l'écoulement  du  sang  amène  du  soulagement  tout  en  proilui- 
sant  un  accroissement  de  faiblesse,  on  referme  et  Ton  rouTre  alternative- 
ment la  blessure  ;  on  insiste  sur  les  révulsifs  cutanés  les  plus  énergiques 
et  les  applications  locales  réfrigérantes;  on  fait  coucher  le  malade  sur  le 
côté  affecté,  on  modère  les  mouvements  de  la  respiration  et  surtout  l'élé- 
iration  des  côtes  par  un  bandage  de  corps  serré  ;  on  cherche,  en  un  mol, 
à  gagner  du  temps  et  à  éloigner  le  danger  le  plus  pressant. 

Lorsque  les  eÏTorts  précédents  ont  été  couronnés  de  succès  et  les  pre- 
miers accidents  conjurés,  on  se  trouve  en  présence  d'un  épanchement 
sanguin  déOnitivement  accompli,  et  la  conduite  à  tenir,  dans  les  jours 
qui  suivent  la  blessure,  présente  encore  de  nombreuses  didicultés.  Le 
faut  à  poursuivre  est  évidemment  d'obtenir,  s'il  est  possible,  la  résor- 
ption du  sang  épanché  et  de  prévenir,  par  un  traitement  approprié,  les 
complications  inflammatoires.  Mais  cette  heureuse  solution  ne  peut  être 
obtenue  que  dans  deux  conditions  qui  sont  rarement  réalisées  :  un  épan- 
chement de  médiocre  abondance,  l'absence  à  peu  près  complèle  de 
pneumo-thorax.  Dans  le  cas  contraire,  le  blessé  se  trouve  fatalement  sous 
l'imminence  d'une  pleurésie  et  de  la  transformation  de  répanchement 
sanguin  en  épanchement  séro-purulent. 

C'est  encore  à  Legouest  que  nous  emprunterons  les  préceptes  à  suivre 
dans  le  but  de  modérer,  sinon  de  prévenir  les  accidents  qui  mcnaceot 
ultérieurement  la  vie  du  blessé. 

Lorsque  la  plaie  est  encore  béante,  qu'elle  a  été  rouverte  ou  qu'elle 
n'est  pas  encore  cicatrisée,  elle  peut  donner  issue  au  sang  épanché  :  il 
convient  alors  de  favoriser  cette  évacuation,  en  donnant  à  la  partie  une 
position  convenable. 

Si  la  plaie  est  trop  étroite  ou  située  de  telle  sorte  qu'elle  ne  puisse  per- 
mettre la  sortie  du  sang,  il  faut,  dans  le  cas  d'épanchement  abondant, 
dès  qu'on  peut  être  sûr  que  Thémorrhagie  interne  est  arrêtée,  pratiquer 
une  contre-ouverture  à  la  partie  la  plus  déclive  du  foyer.  Ici  encore,  deu\ 
cas  se  présentent.  Si  l'auscultation  démontre  qu'il  existe,  en  même  temps 
que  répanchement  sanguin,  un  épanchement  notable  d'air,  il  faut  ouvrir 
la  poitrine  par  une  incision^  sans  se  préoccuper  de  Tintroduction  d'une 
nouvelle  quantité  d  air  dans  la  plèvre  ;  une  mèche  de  linge  eflilé  est  mise 
entre  les  lèvres  de  la  plaie,  pour  en  empêcher  la  réunion,  et  le  malade 
est  placé  dans  une  position  propre  à  faciliter  la  sortie  du  sang  épanchi'. 


POITRINE.  —  PLAIES   PÉNÉTRANTES.  COMPLICATIONS  705 

Lorsqu'au  contraire,  il  y  a  doule  au  sujet  de  la  quantité  d*air  épanché,  on 
peut  tenter  d'abord  la  pondions  soit  à  Taide  d'un  trocart  garni  de  bau- 
druche, soit  au  moyen  d'un  appareil  aspirateur.  Si  le  liquide  se  repro- 
duit, on  a  recours  à  de  nouvelles  ponctions  ;  mais  il  est  rare  que  le 
liquide  extrait  conserve  longtemps  les  qualités  du  sang;  il  prend  peu  h 
peu  Taspect  d'un  liquide  roussàtre,  mêlé  à  une  certaine  quantité  de  pus, 
et,  plus  tard,  d'un  pus  séreux  où  flottent  des  fausses  membranes.  On  se 
trouve  en  présence  d'un  épanchement  purulent  de  la  plèvre  qui  entraine 
de  nouvelles  indications  dont  nous  n'avons  pas  à  nous  occuper  ici  (Voy. 
Pleurésie). 

Accidents  dus  à  la  pénétration  de  Vair.  —  Les  phénomènes  qui  ré- 
sultent de  l'épanchement  ou  de  l'infiltration  de  l'air  soit  dans  la  cavité 
thoracique,  soit  dans  ses  parois,  offrent  une  extrême  variété.  L'air  peut, 
en  effet,  provenir  de  deux  sources  :  de  l'extérieur  ou  des  voies  respira- 
toires ;  lorsque  l'accès  lui  est  ouvert,  il  peut  se  propager  suivant  des  voies 
diiïérentes  :  dans  la  cavité  pleurale,  dans  le  péricarde,  dans  le  tissu  con- 
jonctif  sous-cutané  ou  dans  celui  du  médiastin.  Ces  diverses  variétés 
peuvent  se  combiner  entre  elles  et  donner  lieu  à  des  phénomènes  com- 
plexes dont  l'analyse  physiologique  présente  de  réelles  difficultés. 

Pneumo-tliora^jc.  —  Le  cas  le  plus  important  est  celui  dans  lequel  il 
^e  fait  une  accumulation  d'air  dans  la  cavité  pleurale,  un  pneumo-thorax 
traumatique.  Le  fait  peut  se  produire  dans  les  trois  conditions  principales 
suivantes  : 

V  Dans  le  cas  de  plaie  pénétrante  simple  sans  lésion  du  poumon.  — 
C'est  là  une  variété  plutôt  théorique  que  réellement  clinique,  vu  l'extrême 
rareté  de  ce  genre  de  plaie;  nous  verrons  même  plus  loin  qu'il  peut  se 
produire,  dans  ce  cas,  un  phénomène  absolument  inverse  à  celui  de  l'en- 
trée de  l'air,  c'est-à-dire  l'issue  extérieure,  la  hernie  du  poumon.  Mais, 
s'il  est  rare  dans  la  pratique,  le  cas  sus-énoncé  a  été  produit  expérimen- 
talement un  très-grand  nombre  de  fois  chez  les  animaux  et  a  permis  d'ob- 
server ce  qui  se  passe  alors  du  côté  du  poumon  et  dans  la  cavité.  Lorsque 
la  plaie  est  large  et  directe,  l'air  extérieur  est  attiré,  au  moment  de  Vin- 
spiration^  dans  la  cavité  pleurale  par  suite  de  son  excès  de  pression  sur 
l'air  que  contient  le  sac  pulmonaire  et  de  la  rétractilité  de  l'organe,  qui 
ne  parvient  jamais  à  se  satisfaire  dans  les  conditions  normales  de  la  res- 
piration. L'air  extérieur  pénètre  donc  dans  la  poitrine  avec  un  sifflement 
caractéristique  ;  l'expiration  qui  suit  chasse  une  partie  du  gaz  au  dehors  ; 
une  autre  inspiration  appelle  une  nouvelle  quantité  d'air,  et  ainsi  de 
suite.  C'est  là  le  phénomène  réellement  pathognomonique  des  pbies  pé- 
nétrantes, celui  qu'on  désigne  sous  le  nom  de  traumatopnée.  Au  bout 
de  quelque  temps,  une  sorte  d'équilibre  s'établit  entre  l'air  extérieur  et 
celui  de  la  cavité  ;  le  poumon  reste  aiïaissé  contre  la  colonne  vertébrale, 
et  l'air  épanché  prend  sa  place  dans  la  cavité.  Dans  les  cas  plus  ou  moins 
analogues  au  fait  expérimental  précédent,  l'étroitesse  et  l'obliquité  de  la 
plaie  extérieure,  le  défaut  de  parallélisme,  l'interposition  d'une  certaine  . 
quantité  de  sang,  le  gonflement  des  parties  apportent  à  la  marche  des 


704  POITRINE.   —  plaies   PÊ^£TRAKTES.   COMPLICATIOKS. 

phénomènes  une  foule  de  modificalions  qui  ne  présentent  pas  un  intérêt 
pratique  suffisant  pour  y  insister. 

2*^  Dans  le  cas  d'une  plaie  extérieure  largement  ouverte^  avec\é%m 
concomitante  du  poumon.  —  Dans  ce  cas,  l'excès  de  pression  de  Taireili- 
rieur  et  la  rétraction  pulmonaire  appellent  l'air  dans  la  plèvre  à  la  te 
par  la  plaie  extérieure  et  par  la  solution  de  continuité  des  conduits  aériens. 
L'air  qui  arrive  des  deux  côtés  à  la  fois  et  qui  n'eçt  expulsé  que  partiflfc- 
ment  pendant  l'expiration ,  finit  par  occuper  la  cavité  à  la  place  è 
pouHKin  rétracté. 

3°  Dans  le  cas  d'une  plaie  extérieure  étroite  ou  très-oblique,  em 
lésion  pulmonaire,  —  Si  la  plaie  pariétale  est  telle  que  l'air  ne  puisseh 
traverser  de  dehors  en  dedans  (étroitesse,  obliquité,  perte  du  panllé^ 
lisme),  la  plaie  pulmonaire  est  alors  la  source  unique  du  pneumo4honL 
On  a  vu  une  simple  piqûre  du  poumon,  difficile  même  quelquefois  à 
retrouver  dans  l'examen  [nécropsique,  donner  lieu  à  un  épanchemol 
gazeux  considérable.  L'air  est,  en  effet,  versé  dans  la  cavité  aussi  bien  pei- 
dant  l'expiration  qu'au  moment  de  l'inspiration  «  l'air  de  l'in^intitt 
venant  du  dehors,  l'air  de  l'expiration  passant  du  poumon  sain  dao^k 
poumon  affaissé.  La  disposition  de  la  plaie  extérieure  ne  permettant  p 
l'issue  facile  de  ce  fluide  au  dehors,  il  s'épanche  dans  la  cavité  pleurale; 
mais,  pendant  l'expiration,  une  certaine  quantité  s'engage  entre  leslèrre 
de  la  plaie  et  s'infiltre  dans  le  tissu  conjonctif  circonvoisin  (emphTsène 
sous-cutané).  Le  pneumo-lhorax  et  l'emphysème,  surtout  ce  deroier,  oob- 
tinueraient  à  s'accroître  indéfiniment,  s'il  ne  se  produisait  assez  promp- 
tement  des  modifications  favorables  dans  l'état  de  la  plaie  pulmonaire: 
celle-ciy  à  moins  qu'elle  n'ait  des  dimensions  considérables,  s'oblilôt 
sous  l'influence  de  la  rétraclilité  propre  de  l'organe  et  de  la  compressoB 
produite  par  l'épanchement  sanguin  concomitant,  de  sorte  que  lepneuin^ 
thorax  et  l'emphysème  finissent  par  se  limiter. 

4®  Une  quatrième  variélé  de  pneumo-thorax  traumatique  est  celle  qœ 
est  la  conséquence  d'une  lésion  du  poumon  par  suite  d^une  fracture  Je 
côte  ou  d'une  violente  contusion  de  la  paroi  sans  plaie  extérieure;  nw 
ne  la  rappelons  que  pour  mémoire,  car  elle  n'appartient  pas  à  noire 
cadre.  (Vay.  Poumon,  lésions  traumatiques). 

Des  adhérences  pleurales  anciennes  ont  pour  effet  d'empêcher,  dans 
certains  cas,  ou  au  moins  d'entraver  la  formation  du  pneumo-thorai,  es 
s'opposant  au  retrait  du  poumon  après  l'ouverture  de  la  poitrine;  silî< 
produit  un  épanchement  d'air,  dans  ces  circonstances,  il  est  qu  moi» 
très-circonscrit,  mais  le  mécanisme  reste  le  même. 

Quelles  que  soient  les  conditions  dans  lesquelles  le  pncumo-thorax  tm* 
matique  s'est  produit,  une  fois  constitué,  il  offre,  dans  ses  symptômes* 
dans  sa  marche,  dans  les  indications  qu'il  fait  naître,  la  plus  i^rande  ana- 
logie avec  le  pneumo-thorax  d'origine  interne.  Nous  ne  pouvons  don* 
que  renvoyer  le  lecteur  à  ce  qui  a  été  dit  précédemment  à  ce  sutet.  (Toy 
art.  VLty}\E,pn£umO'thorax,  p.  268.) 

Il  est  cependant  une  distinction  importante  à  faire  entre  les  deux  e$- 


POITHINË.  —  PLAIES   PÉffKTRAlITES.   COMPLICATIONS.  705 

pèces  d'accidents  ;  elle  porte  sur  les  points  suivants  :  1*  dans  le  pneu- 
mo-thorax  d'origine  interne,  l'air  provient  d'une  seule  source;  dans  le 
pneumo-thorax  Iraumatique,  il  en  a  souvent  deux  :  le  poumon  et  Texté- 
rieur.  De  ces  deux  sources,  une  seule  est  accessible  à  nos  moyens  d'action  ; 
il  y  a  donc  tout  avantage  à  la  supprimer,  et  c'est  ce  que  Ton  fait  en  pra- 
tiquant, à  moins  de  contre-indication  spéciale,-  Focclusion  de  la  plaie  par 
Tun  des  moyens  précédemment  indiqués.  En  même  temps,  on  exerce  une 
compression  méthodique  tout  autour  pour  empêcher  Textension  de  Tem- 
physème;  2^  dans  le  pneumo-thorax  traumatique,  Tair  occupe  rarement 
seul  la  cavité  pleurale.  Il  s'épanche  très-fréquemment  une  certaine  quan- 
tité de  sang  qui  provient  des  couches  profondes  de  la  paroi  et  surtout  de  la 
lésion  pulmonaire;  il  y  a  hémo-pneumothorax.  Si  l'air  se  renouvelle  au 
contact  d'un  liquide  aussi  altérable  que  le  sang,  la  pleurésie  purulente 
est  imminente,  et  c'est  encore,  pour  essayer  de  prévenir  cette  complica- 
tion, l'occlusion  de  la  plaie  extérieure  qui  donne  les  meilleurs  résultats, 
quand  Thémorrhagie  ne  provient  pas  exclusivement  d'un  vaisseau  de  la 
paroi,  qu'il  faudrait  oblitérer  avant  tout. 

Pneumo-péricarde.  —  Nous  ne  ferons  que  mentionner  ici  cette  com- 
plication, relativement  secondaire,  des  plaies  du  cœur  et  du  péricarde  qui 
a  déjà  fait  l'objet  d'une  description  spéciale.  (Voy.  Péricarde,  pneumo' 
péricarde,  t.  XXVI,  p.  670.) 

Nous  devons  signaler  néanmoins,  à  ce  sujet,  pour  les  cas  d'épanché- 
ments  à  la  fois  liquides  et  gazeux  (ce  qui  <!st  la  règle  à  la  suite  du 
traumatisme),  un  travail  récent  dans  lequel  les  données  de  l'auscultation 
ont  été  étudiées  avec  une  nouvelle  précision.  II  s'agit  du  bruit  de  moulin^ 
indiqué  déjà  par  Morel  Lavallée,  quelque  peu  oublié  depuis,  et  dont  l'im- 
portance, au  point  de  vue  du  diagnostic  et  du  pronostic,  vient  d'être 
remise  en  lumière  dans  la  thèse  inaugurale  de  Reynier  (1880).  Ce  sym- 
ptôme qui,  comme  son  nom  l'indique,  rappelle  le  bruit  produit  par  le 
clapotement  de  l'eau  avec  une  palette,  est  indé  lendant  des  mouvements 
respiratoires  ;  il  coïncide  avec  la  systole  cardiaque  et  parait  dû  au  choc 
du  cœur  contre  un  épanchement  aéro-liquide,  soit  du  péricarde,  soit  du 
tissu  conjonctif  environnant.  D'une  signification  pronostique  grave  dans 
le  premier  cas,  il  serait,  dans  le  second,  l'indice  d'une  lésion  relative- 
ment bénigne. 

Emphysème  sous-cutané.  —  Nous  en'dirons  autant  pour  l'emphysème 
sous-cutané  dont  nous  venons  de  signaler  l'une  des  causes  les  plus  fré- 
quentes et  qui  a  été  Tobjct  d'un  article  spécial  dans  ce  Dictionnaire.  (Voy. 
Emphysème  traumatique,  t.  XII,  p.  725.)  Nous  dirons  seulement  ici  que, 
sans  avoir  la  valeur  pathognomonique  de  la  traumatopnée,  l'emphysème 
est  généralement  un  signe  de  la  pénétration  de  la  plaie. 

Emphysème  du  médiastin,  —  On  yoit  quelquefois,  à  la  suite  d'une 
plaie  pénétrante  de  la  poitrine,  apparaître  dans  le  tissu  conjonctif  de 
la  base  du  cou,  loin  par  conséquent  du  siège  de  la  blessure,  un  gon- 
flement emphysémateux  qui  s'étend  dans  les  parties  voisines  et  peut 
atteindre  des  proportions  considérables.  Cette   complication  est  généra- 

NOUV.  DICT.  MtO.    RT  CHIIl.  XWIU  — 45 


706  ^  POITRINE.  —  plaies  pénétrahtes.  complications. 

,  leraent  la  conséquence  d'une  lésion  pulmonaire  qui  siège  dans  le  Toisi- 
nage  du  hile  de  Torgane.  L'air  qui  s'échappe  des  lobules  divisés  peul 
s'infiltrer  dans  le  tissu  conjonctif  qui  les  entoure  et  parvenir  ainsi,  de 
proche  en  proche,  jusqu'au  tissu  cellulaire  du  médiastin  d'où  il  gagne 
la  base  du  cou.  L'extension  considérable  que  prend  quelquefois  Tem- 
physème  dans  ces  cas  provient  de  ce  fait,  déjà  signalé  à  l'occasion  d'une 
des  variétés  du  pneumo-thorax  traumatique,  que  l'air  est  déversé  dans  le 
tissu  conjonctif  aussi  bien  pendant  l'expiration  que  pendant  l'inspiratioD, 
jusqu'à  ce  que  la  solution  de  continuité  du  poumon  s'oblitère. 

L'infiltration  aérienne  peut  être  également  la  conséquence  d'une  plaie 
pénétrante  simple  du  médiastin.  L'air  extérieur  est  attiré  dans  le  mé- 
diastin parles  mouvements  d'expansion  du  thorax,  et  si,  lorsque  l'expi- 
ration tend  à  l'expulser  au  dehors,  il  ne  trouve  pas  une  issue  facile,  il 
s'infiltre  dans  le  tissu  conjonctif  qui  entoure  le  cœur  et  les  gros  vaisseaux. 
Théoriquement,  il  pourrait,  comme  dans  le  cas  précédent,  gagner  la  base 
du  cou  et  s'étendre  plus  loin;  mais  ici,  la  source  de  l'air  étant  extérieure, 
si  la  sortie  du  gaz  est  entravée  par  la  disposition  de  la  plaie,  il  est  pro- 
bable que  sa  pénétration  le  sera  également  dans  une  certaine  mesure; 
l'infiltration  reste  donc,  en  général,  très-limitée  et  ne  donne  lieu  à 
aucun  symptôme  spécial. 

Hernie  traumatique  du  poumon.  —  Les  plaies  pénétrantes  de  la 
poitrine  peuvent  s'accompagner  d'un  accident,  assez  rare  du  reste,  qui 
est  pour  ainsi  dire  l'opposé  de  ceux  que  nous  venons  de  décrire  ;  c'est 
l'issue  d'une  portion  plus  ou  moins  considérable  du  poumon  à  travers  la 
plaie  pariétale.  Il  résulte,  en  effet,  des  considérations  précédemment 
exposées  qu'un  pareil  accident  est  théoriquement  imposible,  dès  qu'une 
certaine  quantité  d'air  s'est  épanchée  dans  la  cavité  pleurale  et  a  produit 
un  certain  degré  d'affaissement  du  poumon.  Les  observations  recueillies 
sont  d'accord  avec  la  théorie;  elles  montrent  que  la  hernie  du  poumon  a 
lieu  le  plus  souvent  immédiatement  après  la  blessure,  comme  si  Torgane 
suivait  la  retraite  de  Tinstrumcnt  vulnérant  à  travers  la  plaie  extérieure. 
La  condition  essentielle  de  la  production  du  phénomène  parait  résider 
dans  la  coïncidence  d'une  expiration  brusque  et  énergique  due  à  relTort 
instinctif  que  fait  le  blessé  pour  se  soustraire  à  la  cause  vulncrante  ;  à  ce 
moment,  en  effet,  le  poumon  se  trouve  fortement  appliqué  contre  la 
paroi  costale.  Dans  quelques  cas  cependant  l'issue  du  poumon  semble 
avoir  eu  lieu  quelque  temps  après  l'accident  (Tulpius,  Larrey).  Le  fait 
ne  paraît  possible  qu'en  admettant,  au  moins  pour  les  cas  de  ce  genre, 
le  mécanisme  suivant  proposé  par  Malgaigne  :  «  Si,  dit-il,  une  cavité 
pleurale  a  été  ouverte  sans  lésion  du  poumon,  et  celui-ci  affaissé  par  la 
pénétration  de  l'air,  l'expiration  tendra  à  chasser  l'air  contenu  dans  le 
poumon  resté  sain  :  si  cet  air  rencontre  un  obstacle  du  côte  de  la  glotte, 
dans  un  effort  par  exemple,  il  refluera  dans  le  poumon  vide,  et  Foo 
aura  le  singulier  phénomène  que  le  poumon  sain  se  videra  et  que  celui 
du  coté  blessé  se  remplira.  Cela  aurait  lieu,  même  quand  celui-ci 
aurait  été  compris  dans  la  blessure  ;  en  effet  l'air  qui  y  pénètre  par  les 


POITRINE.   —  PLAIES   PÉNÉTRANTES.    COMPLICATIONS.  707 

bronches  se  répand  également  dans  tous  leurs  rameaux,  tandis  que  la 
plaie  ne  saurait  en  intéresser  que  quelques-uns.  Si  l'expiration  est 
brusque,  saccadée,  Texpansion  du  poumon  blessé  se  fera  aussi  brus- 
quement et  par  saccades  ;  c'est  alors  qu'on  le  voit  sauter  pour  ainsi 
dire  dans  la  poitrine,  se  présenter  à  la  plaie,  enûn  faire  hernie  au  travers  : 
et  telle  est  la  théorie  des  hernies  pulmonaires  qu'il  est  facile  de  pro- 
duire chez  les  animaux  vivants  par   des  expériences  directes.  » 

Ainsi,  même  lorsque  la  hernie  du  poumon  n'est  pas  immédiate,  c'est 
toujours  un  effort  subit,  une  expiration  brusque  et  énergique  qui  en  est 
la  cause  déterminante.  Dans  le  cas  de  Larrey  le  viscère  se  hernia  quelques 
heures  après  l'accident,  lors  d'une  chute  que  fit  le  blessé  pendant  qu'on 
le  conduisait  à  l'ambulance.  De  même,  l'observation  a  démontré  que 
l'existence  d'une  plaie  du  poumon  n'est  pas  un  obstacle  à  la  production 
d'une  hernie  de  l'organe,  à  la  condition  cependant  que  la  plaie  pulmo- 
naire ne  soit  pas  assez  considérable  pour  permettre  la  formation  brusque 
d'un  pneumo-thorax  abondant  et  par  suite  la  rétraction  complète  du 
viscère. 

La  hernie  traumatique  du  poumon  se  présente  sous  l'aspect  d'une 
tumeur  li>se,  de  grosseur  variable,  étranglée  et  pédiculée  par  les  bords 
de  la  plaie  qui  lui  a  donné  issue.  Sa  coloration,  qui  est  d'abord  celle  de 
l'état  Doripal^  se  modifie  peu  à  peu  à  mesure  qu'on  s'éloigne  du  moment 
de  la  blessure;  elle  devient  promptement  livide  et  gangreneuse  sous 
l'influence  de  la  constriction  subie  par  le  pédicule.  La  couleur  ardoisée 
n'est  cependant  pas  toujours  le  signe  d'une  gangrène  véritable  ;  pour 
que  celle-ci  soit  certaine,  il  faut  un  autre  caractère,  la  flétrissure  de  la 
partie  herniée. 

Nous  verrons  plus  loin  à  quels  signes  on  peut  distinguer  une  hernie 
^pulmonaire  de  la  seule  complication  avec  laquelle  on  pourrait  la  con- 
fondre, c'est-à-dire  de  la  hernie  de  l'épiploon. 

Tant  que  le  poumon  hernie  est  sain,  on  conseille  d'en  pratiquer  la 
réduction,  en  débridant  la  plaie,  s'il  est  nécessaire.  Il  faut,  dans  ce  cas, 
immédiatement  après  la  rentrée  de  l'organe,  obturer  la  plaie  avec  les 
doigts  pour  prévenir  la  formation  d'un  pneumo-thorax,  puis  en  faire 
l'occlusion  exacte.  Lorsque  la  tumeur  est  sphacélée,  on  peut  soit  en 
abandonner  l'élimination  aux  ressources  de  la  nature,  soit  l'exciser  après 
avoir  jeté  une  ligature  sur  le  pédicule.  On  songe  ensuite  à  prévenir  ou 
combattre  l'inflammation;  celle-ci  est  d'ailleurs,  le  plus  souvent,  modérée, 
car  la  plupart  des  cas  qui  ont  été  publiés  ont  été  suivis  de  guérison. 

Hernie  de  Vépiploon,  —  Il  est  un  autre  genre  de  complication,  encore 
plus  rare,  que  nous  croyons  devoir  rapprocher  du  précédent,  parce  qu'on 
les  a  confondus  quelquefois  l'un  avec  l'autre*  et  qu'ils  présentent  plus 
d'une  analogie;  c'est  la  hernie  de  l'épiploon,  laquelle  peut  être  le  ré- 
sultat d'une  lésion  atteignant  à  là  fois  la  paroi  thoracique  et  le  dia 
phragme. 

Pour  se  rendre  compte  de  ce  qui  se  passe  dans  ce  cas,  il  faut  avoir 
présents  à  l'esprit  les  rapports  qui  existent  entre  les  parties  latérales  du 


708  POITRlNiil.  —  plaies  penétrahtes.  gomplicàtioiis. 

diaphragme  et  la  paroi  costale.  Nous  avons  vu  (page  638)  que,  pendanl  le 
mouvement  d'expiration,  et  surtout  dans  une  expiration  forcée,  les  deux  sur- 
faces sont  adossées  dans  une  hauteur  qui  peut  s'étendre  jusqu'à  la  y  côte  à 
droite  et  jusqu'à  la  B""  à  gauche,  tandis  que,  pendant  rinspiration,le  pou* 
mon  s'interpose  entreelles,  dans  une  étendue  variable,  sans  jamais  atteindre 
néanmoins  le  fond  du  sinus  costo-diaphragmatique.  La  paroi  thoraciqueet 
le  diaphragme  se  confondant,  pour  ainsi  dire,  pendant  un  mouvement  d'ex- 
piration énergique,  tel  que  celui  qui  accompagne  l'effort,  un  instriunent 
vulnérant  pénétrant  à  ce  moment  par  l'un  des  5  ou  6  derniers  espaces 
intercostaux  arrivera*  directement  dans  la  cavité  abdominale.  Or  les 
parois  de  l'abdomen  se  trouvent  par  le  fait  des  mêmes  circonstances 
/effort)  dans  un  état  de  tension  exagérée,  d'où  résulte  une  pression  éne^ 
gique  sur  les  viscères  qu'il  contient,  et  une  prédisposition  lavorable  à  la 
formation  d'une  hernie.  11  pourra  donc  se  faire  que,  sous  rinfluence  de 
la  pression  à  laquelle  il  est  soumis,  l'épiploon  suive  le  retrait  de  Tinstru- 
ment  et  se  fasse  jour  au  dehors  à  travers  rorifice  pratique  par  ce  dernier. 
Ici,  plus  encore  que  dans  la  production  d'une  hernie  du  poumon,  on 
retrouve,  dans  les  observations  recueillies,  le  fait  essentiel  de  la  simulta- 
néité dems  la  sortie  de  l'instrument  vulnérant  et  de  l'organe  hernie.  Hn 
peut  concevoir  théoriquement  qu'une  anse  intestinale  qui  se  trouverait 
dans  la  sphère  d'action  de  l'instrument,  s'engageât  également  dans  la 
plaie  extérieure,  mais  le  fait  n'a  pas  été  signalé,  à  notre  connaissance; 
quant  aux  autres  organes  abdominaux,  tels  que  le  foie,  la  rate  et  l'esto- 
mac, dont  la  lésion  accompagne  souvent  les  blessures  du  diaphragme, 
comme  ils  sont  doués  d'une  mobilité  infiniment  moindre,  ils  peuvent  bien 
sortir  de  l'abdomen,  mais  leur  hernie  se  fait  dans  la  cavité  Ihoracique,  et 
c'est  là  le  cas  ordinaire  des  hernies  diaphragmatïqucs.  (Voy.  t.  XI. 
p.  565.)  On  trouve  néanmoins  signalé  dans  Vllistoire  de  la  guerrede 
sécession  un  l'ait  très-remarquable  de  hernie  sinmitanée  du  foie,  de 
l'épiploon  et  du  poumon,  suivi  de  guéri«"^n. 

La  conséquence  des  rapports  anatomiques  rappelés  ci-dessus  c'est  que, 
suivant  le  degré  d'énergie  du  mouvement  expiratoire  qui  aura  coïncidé 
avec  le  moment  de  la  blessure,  une  plaie  pénétrante  du  5*",  du  G*  ou 
du  T*"  espace  intercostal  pourra  être  compliquée  soit  de  hernie  pulmonaire, 
soit  de  hernie  épiploïque.  De  là,  entre  les  deux  espèces  d'accident  une 
confusion  possible  dont  on  trouve  un  exemple  parmi  les  faits  rassemblés 
dans  la  thèse  de  Veyron -Lacroix. 

L'épiplocèle  traumatique  forme,  au  début,  une  tumeur  irrégulière, 
bosselée,  molle,  graisseuse,  rougeàtre,  ne  donnant  pas  de  sensation  de 
crépitation  sous  la  pression  des  doigts.  Elle  est  irréductible  et  éti-anglée 
à  sa  base  par  les  bords  de  la  plaie;  il  en  résulte  promptcment  un  état 
de  congestion  prononcé  et  une  tendance  à  la  gangrène.  Le  blessé  éprouve 
au  niveau  du  point  lésé  un  sentiment  de  tension  et  de  gène,  de  plus  en 
plus  douloureux,  qui  s'irradie  dans  tout  l'hypochondre.  Ces  phénomènes 
locaux  s'accompagnent  ordinairement  de  syniptômes  généraux  d'un  ca- 
ractère dépressif  (pâleur,  concentration  du  pouls,   sueurs  froides,  elc). 


POITRINE.  —  PLAIES   PÉNÉTRANTES.   COMPLICATIONS.  709 

La  marche  des  symptômes  ultérieurs  est  généralement  lente.  Lorsqu'on 
abandonne  aux  seuls  efforts  de  la  nature  Télimination  de  la  tumeur,  celle- 
ci  s'engorge  de  plus  en  plus  et  prend  quelquefois  la  forme  d'une  énorme 
fongosité  qui  rappelle  l'aspect  d'un  fragment  de  placenta.  Puis,  l'inllam- 
mation  suppurative  s'établit;  la  tumeur  diminue  peu  à  peu,  se  couvre  de 
bourgeons  charnus,  et  après  une  suppuration  plus  ou  moins  prolongée 
il  s'établit  dans  les  cas  heureux  une  cicatrice  adhérente  qui  se  confond 
avec  celle  des  téguments.  Aux  phénomènes  précédents  s'ajoutent  néces- 
sairement les  signes  et  les  effets  d'une  péritonite  localisée  qui  joue  son 
rôle  dans  la  production  des  adhérence  finales. 

Si,  au  lieu  de  marcher  vers  la  guérison,  la  maladie  tend  vers  une  issue 
fatale,  on  voit  se  développer  les  accidents  d'une  péritonite  généralisée 
ou  des  complications  qui  se  sont  produites  dans  la  cavité  pleurale. 

11  semble,  au  premier  abord,  que  le  diagnostic  d*une  pareille  lésion  ne 
doive  présenter  aucune  incertitude,  et  cependant,  comme  nous  l'avons 
déjà  dit,  on  peut  hésiter,  dans  certains  cas  douteux,  entre  une  hernie 
pulmonaire  et  une  épiplocèle.  Dans  les. moments  qui  suivent  la  bles- 
sure, il  est  un  signe  pathognomonique  de  la  hernie  du  poumon  qui  per- 
mettra d'éviter  l'erreur,  c'est  la  crépitation  sous  la  pression  des  doigis  ; 
mais,  au  bout  de  quelque  temps,  ce  signe  peut  manquer,  dans  le  cas  par 
exemple  où  la  partie  herniée  est  le  siège  d'une  plaie  qui  a  pu  laisser 
échapper  l'air  contenu,  et,  alors  on  sera  réduit  à  se  laisser  guider  par  un 
ensemble  symptômatique  qui,  dans  les  premiers  jours,  présente,  des  deux 
côtés,  assez  d'analogie.  Plus  tard,  la  marche  des  accidents  rend  le  dia- 
gnostic plus  facile. 

Le  pronostic,  malgré  les  résultais  favorables  de  quelques  faits  connus, 
est  nécessairement  grave,  les  complications  pouvant  venir  soit  de  la  poi- 
trine, soit  de  Fabdomen,  soit  des  deux  simultanément. 

Le  traitement  général  est  subordonné  à  l'intensité  des  phénomènes 
inflammatoires.  Quant  au  traitement  local,  l'excision,  la  ligature,  la  cau- 
térisation ont  été  tour  à  tour  conseillées.  Lorsque  la  tumeur  est  de  petit 
volume  et  les  accidents  locaux  peu  intenses,  on  peut  abandonnera  la  na- 
ture le  soin  du  travail  éliminatoire.  Les  heureux  résultats  qu'a  fournis 
souvent  cette  pratique  dans  les  cas  de  plaies  abdominales  compliquées 
d'épiplocole,  autorisent  à  essayer  également  l'expectation  quand  il  s'agit 
d'épiplocèles  thoraciques.  Toute  tentative  de  réduction  doit  être,  au 
contraire,  proscrite,  vu  l'impossibilité  de  faire  rentrer  l'épiploon  dans 
Tabdomen  par  l'ouverture  diaphragmatique  et  les  inconvénients  graves 
de  son  séjour  dans  la  cavité  pleurale. 

Corps  étrangers,  —  Les  plaies  pénétrantes  de  la  poitrine  peuvent  être 
compliquées  de  la  présence  des  diverses  sortes  de  corps  étrangers  dont 
nous  avons  fait  l'énumération  à  l'occasion  des  plaies  non-pénétrantes.  Ce 
sont  encore  les  plaies  par  armes  à  feu  qui  présentent  le  plus  souvent 
cette  complication.  11  n'est  pas  un  des  points  de  la  cavité  où  ces  corps  ne 
puissent  être  rencontrés;  quelquefois  un  seul  organe  est  atteint;  d'autres 
fois,  au  contraire,   plusieurs  organes  sont  lésés  en  même  temps  par  le 


7-10  POITRINE.  —  PLAIES   PÉNÉTRAHTKS.   COMPLICATIONS. 

corps  vulnérant  et  les  accidents  qui  en  résultent  présentent  une  complexité 
embarrassante. 

Leur  siège  le  plus  fréquent  est  dans  le  cœur  et  les  poumons;  à  ce 
litre,  leur  étude  se  rattache  à  celle  des  lésions  traumatiqucs  de  ces  or- 
ganes et  ne  doit  nous  occuper  qu'incidemment.  Mais  on  les  rencontre 
aussi  dans  les  cavités  pleurales  ou  dans  le  médiastin,  et  c'est  par  la  que 
leur  histoire  appartient  aussi  à  Tétude  générale  des  plaies  pénétrantes  da 

thorax. 

Quelle  que  soit  leur  variété,  on  peut  les  grouper  en  deux  catégories  : 
V  les  instruments  piquants  ou  à  la  fois  piquants  et  tranchants  (aiguilles, 
couteaux,  épées,  baïonnettes,  poignards,  etc.);  2^  les  projectiles  lancés 
par  les  armes  à  feu  et  les  éclats  ou  débris  de  toute  sorte  qu'ils  entraî- 
nent avec  eux. 

Cette  division  est  surtout  fondée  sur  les  indications  et  les  manœuvres 
opératoires  que  comportent  les  deux  espèces  de  corps  précédents.  Tandis 
que  les  corps  étrangers  de  la  première  catégorie,  après  avoir  pénétré 
plus  ou  moins  profondément,  restent  souvent  implaniés  dans  la  paroi,  en 
s'y  brisant  quelquefois,  ceux  de  la  deuxième  sont  généralement  perdus 
dans  la  cavité  et  rien  à  Textérieur  ne  trahit  leur  présence.  De  même,  la 
perforation  d'un  gros  tronc  vasculaire  par  une  épée  qui  se  brise  dans  la 
plaie  et  forme  une  sorte  de  bouchon  aux  parties  divisées,  produira  des 
accidents  immédiats  moins  graves  qu'une  lésion  du  même  genre  résul- 
tant d'un  coup  de  feu.  A  ces  divers  points  de  vue,  il  y  a  donc  un  in- 
térêt pratique  à  ne  pas  confondre  les  deux  espèces  de  corps. 

1°  Instruments  piquants,  —  Les  traités  classiques  et  les  mémoires 
originaux  renferment  des  exemples  bien  remarqnables  de  blessures  compli- 
quées delà  présence  de  fragments  de  ces  instruments,  à  la  suite  desquelles 
le  blessé  a  pu  survivre  plus  ou  moins  longtemps.  L'un  des  plus  curieux 
est  celui  du  forçat  décédé  à  l'hôpital  de  Rochcfort,  dont  robservalion 
relatée  parVelpeau  a  été,  plus  tard,  reprise  et  rectidée  par  Berchon  (Gaz. 
hebd,  1861.)  Cet  homme,  qui  avait  été  blessé  quinze  ans  auparavant, 
portait  dans  son  thorax,  sans  que  rien,  avant  l'autopsie,  en  eût  fait 
soupçonner  la  présence,  un  fragment  de  fleuret  d'une  longueur  de 
85  millimètres,  fixé  en  haut  à  la  face  inférieure  de  la  première  côte  par 
des  ostéophytes  et  en  bas  à  l'apophyse  transverse  de  la  quatrième  ver- 
ti'brc  dorsale.  La  partie  moyenne  de  l'instrument,  logée  dans  le  poumon, 
était  entourée  de  concrétions  calcaires.  Un  autre  fait,  du  même  genre,  dans 
lequel  la  blessure  remontait  également  à  une  quinzaine  d'années  environ, 
a  été  signalé  par  Manec  à  la  Société  anatomique  (1829)  ;  une  lame  de 
fer  traversait  le  poumon  dans  toute  sa  hauteur  ;  le  tissu  de  l'organe  était 
sain  et  formait  au  corps  étranger  une  sorte  de  canal  à  parois  lisses.  Néan- 
moins, ces  exemples  de  survie  prolongée  sont  rares  et,  en  général,  les 
blessés  succombent,  soit  immédiatement,  soit  au  bout  de  peu  de  jours. 
Tel  fut  le  cas  de  cet  officier  de  la  garde  nationale  de  Paris,  à  l'occasion 
duquel  Velpeau  fit  construire  par  Charrière  un  instrument  d'extraction  spé- 
cial qu'on  trouve  aujourd'hui  dans  la  plupart  des  arsenaux  de  chirurgie. 


POITRINE.  —  PLAIES   PÉNÉTRANTES.    COMPLICATIONS*  7ii 

Cet  officier,  étant  à  Texerciee,  avait  eu  la  poitrine  traversée  d'arrière  en 
avant  par  une  baguette  de  fusil,  qui  restait  saillante  à  l'extérieur  et  qui  ré- 
sista à  des  tractions  énergiques  faites  par  plusieurs  personnes  vigoureuses. 
Le  blessé  succomba  le  quatrième  jour,  avant  qu'on  eût  pu  appliquer  le 
nouvel  instrument  ;  l'autopsie  démontra  que  la  baguette  avait  traversé  une 
des  vertèbres  dorsales  à  une  ligne  en  avant  du  canal  rachidien,  puis,  qu'en 
rasant  la  veine  cave  inférieure  et  passant  sous  la  base  du  cœur,  elle  était 
venue  embrocher  le  poumon  pour  arriver  entre  les  côtes  sous  la  mamelle 
droite  où  elle  était  encore.  Les  gros  vaisseaux  et  le  cœur  étaient  intacts  ; 
le  poumon,  légèrement  engoué,  n'était  pas  encore  enflammé  ;  la  mort  fut 
attribuée  à  Tépanchement  d'une  certaine  quantité  de  satig  dans  les  bron- 
ches ouvertes  sur  le  trajet  de  la  baguette.  Paulet  a  signalé,  dans  son 
Traité  d'anatomie  topographique ^  un  cas  extrêmement  curieux  à  cause 
du  trajet  suivi  par  l'instrument  vulnérant.  Dans  un  duel,  un  homme, 
ivre  de  fureur,  s'était  précipité  tête  baissée  sur  son  adversaire  et  lui  avait 
enfoncé  de  toute  sa  force  un  fleuret  dans  la  poitrine.  Le  blessé  n'était 
pas  en  garde,  il  ne  prévoyait  pas  l'attaque  et  se  présentait  complètement 
de  face  ;  il  tomba  et  mourut  immédiatement  sans  pousser  un  cri.  Voici 
ce  qu'on  trouva  à  l'autopsie  :  le  fleuret  avait  pénétré  dans  le  manche  du 
sternum,  et  sa  pointe,  après  avoir  traversé  la  poitrine,  s'était  solidement 
fixée  dans  la  quatrième  vertèbre  ;  la  lame  s'était  brisée  au  niveau  de  la 
peau,  et  l'on  ne  voyait  en  ce  point  qu'une  petite  tache  ecchymotique. 
Mais  ce  qu'il  y  avait  surtout  de  remarquable,  c'est  que  la  tige  d'acier 
restée  dans  le  thorax  occupait  juste  la  ligne  médiane  et  divisait  la  cavité 
de  la  poitrine  en  deux  moitiés  parfaitement  symétriques;  l'arme  avait 
embroché  d'avant  en  arrière  le  tronc  veineux  brachio-céphalique  gauche, 
le  tronc  innominé,  la  trachée,  l'œsophage,  le  corps  de  la  quatrième  ver- 
tèbre dorsale  ;  elle  avait  ensuite  pénétré  dans  le  canal  rachidien,  traversé 
la  moelle,  et  sa  pointe  était  restée  implantée  dans  l'angle  de  réunion  des 
lames  vertébrales,  à  l'origine  de  l'apophyse  épineuse. 

Dans  la  pratique,  on  se  trouve  donc  en  présence  de  l'un  ou  de  l'autre 
des  deux  cas  suivants  :  ou  l'arme  restée  dans  la  plaie  fait  saillie  à  l'exté- 
rieur ;  dans  ce  cas  le  diagnostic  se  fait  de  lui-même  et  il  est,  en  outre, 
possible  de  déterminer  d'une  façon  exactement  mathématique  les  diverses 
couches  qui  ont  été  traversées;  ou  bien,  l'instrument  s'est  brisé  au  ras  de 
la  plaie  et,  pour  peu  que  le  parallélisme  des  couches  superficielles  se  soit 
détruit  ou  qu'il  y  ait  déjà  du  gonflement,  on  peut  avoir  des  doutes  sur  la 
présence  du  corps  étranger.  Dans  ce  dernier  cas,  les  symptômes  rationnels, 
tels  que  la  douleur,  la  toux,  la  tuméfaction  du  voisinage  de  la  plaie,  etc., 
ne  peuvent  fournir  que  des  présomptions;  les  renseignements  procu- 
rés par  les  assistants  et  surtout  l'examen  de  la  partie  restante  de  l'ins- 
trument, quand  il  est  possible,  sont  des  données  plus  sûres  et  d'après 
lesquelles  on  ferme  la  plaie,  si  elles  sont  négatives,  on  la  dilate  au 
contraire,  si  elles  sont  affirmatives,  pour  aller  à  la  recherche  du  corps 
étranger. 

La  présence  de  l'instrument  une  fois  constatée,  l'indication  générale 


712  POITRINE.  —  PLAIES  pknktraktks.  complicatioiis. 

est  (le  rcxlrairc.  11  est  un  cas  cependant  où  Thcsitation  est  permise,  c'e?l 
lorsqu'il  s'agit  de  ces  corps  étrangers  de  forme  allongée  qui  traversent  la 
poitrine  de  part  en  part  et  sont  parfois  solidement  implantés  dans  le 
squelette,  comme  dans  les  exemples  que  nous  venons  de  citer.  D'une 
part,  comme  nous  Tavons  vu,  il  existe  des  faits  remarquables  de  tolérance 
de  la  part  de  l'organisme,  vis-à-vis  de  semblables  lésions,  et  d'autre  part, 
on  peut  se  demander  si  l'extraction  de  Tarme,  qui  fait  provisoirement 
office  de  bouchon,  n'entraînera  pas  une  hémorrhagie  immédiate  mortelle. 
Aussi  les  auteurs  ne  sont-ils  pas  d'accord  sur  la  conduite  à  tenir  dans  ce 
cas,  de  sorte  qu'il  est  impossible  de  tracer  des  règles  absolues  à  ce  sujet. 
La  base  du  jugement  à  établir  repose  presque  tout  entière  sur  la  connais- 
sance anatomique  parfaite  des  parties  traversées  ;  on  doit  s^inspirer,  en 
outre,  de  l'examen  des  accidents  immédiats  observés  ;  on  pèse  enfin  les 
conséquences  diverses  que  peuvent  entraîner  pour  le  blessé,  d'un  côté 
l'expectation,  de  l'autre,  une  prompte  intervention  chirurgicale. 

En  dehors  de  ces  faits  exceptionnels,  l'extraction  immédiate  doit  être 
la  règle.  Elle  est  facile  à  pratiquer,  quand  il  s'agit  de  portions  d'instru- 
ments engagées  dans  les  parties  molles  et  susceptibles  d'être  saisies  avec 
les  doigts  ou  des  pinces;  si  la  saillie  est  insuffisante,  on  peut  y  obvier 
par  un  débridement.  Si  le  corps  étranger  est  engagé  dans  un  os  et  fait 
encore  saillie  à  l'extérieur,  l'extraction  peut  se  faire  avec  de  fortes  pinces 
à  longues  branches  et  à  mors  très  courts  qu'on  garnirait,  au  besoin,  d  un 
ruban  de  fil  pour  les  empêcher  de  glisser  sur  le    métal,   ou   avec  des 
tenailles,  un  étau  à  main  et  tout  autre  instrument  analogue.   Lorsque  le 
corps  étranger  a  été  brisé  au  ras  d'une  surface  osseuse,   les  difticultt's 
augmentent  ;  s'il  s'agit  du  sternum,  dont  le  tissu  est  facile  à  entamer,  on 
pourra  le  dégager  d'abord  avec  une  ^ouge,  et  au  besoin,  à  l'aide  d'une 
application  de  trépan;  si  la  pointe  d'une  épée  ou  d*un  fleuret  se  brisait 
contre  une  vertèbre   et  restait   profondément  cachée  dans   la   poitrine, 
Legouest  conseille  d'aller  à  sa  recherche  par  une  incision  et   d'en   faire 
l'extraction,  à  l'imitation  de  Percy  ;  enfin,  si  l'instrument  était  implanté 
dans  une  côte,  on  se  souviendrait  du  procédé  ingénieux  de  Gérard  (1715) 
qui  a  donné  lieu   à  tant   de   controverses.  Ce  chirurgien,    ne  pouvant 
faire  usage  de  ses  pinces  pour  extraire  un  bout  de  lame  de  couteau,  qui, 
brisé  au  milieu  et  presque  au  niveau  de  la  face  externe  d'une  côte,  la 
dépassait  d'un  pouce  à  l'intérieur  de  la  cavité,   eut  l'idée  d'armer  son 
doigt  d'un  dé  à  coudre  pour  repousser  la  lame  de  dedans  en  dehors,  en 
pressant  avec  force  sur  la  pointe  ;  celte  opération  eut  un  plein  succès. 
On  a  reproché  avec  raison  à  ce  procédé  son  extrême  difficulté  et  Tobli- 
gation  qu'il   impose  d'ouvrir  un    espace  intercostal  ;   mais   ces    incon- 
vénients sont  encore  moindres  que  l'abandon  du  corps  étranger,  pour  peu 
qu'il  fasse  saillie  à  l'intérieur;    on   pourrait,   d'ailleurs,  au    préalnhle, 
ainsi  que  le  conseille  Legouest,  tenter  de  pratiquer  une  abrasion  de  la 
face  externe  de  la  côte  au  voisinage  de  l'extrémité  brisée  de  l'arme  qui,  se 
trouvant  ainsi  assez  dégagée,    serait  ensuite  saisie   par    un  instrument 
approprié.  (Legouest,  Chirurgie  d'armée,  p.  556.) 


POITRINE.   —  PLAIES   PÉNÉinANTES.     COMPLICATIONS.  715 

S*'  Projectiles.  Une  des  différences  essentielles,  avons-nous  dit  plus  haut, 
qui  distingue  cette  catégorie  de  corps  étrangers  des  précédents  est  que, 
d'une  manière  générale,  ils  ne  font  aucune  saillie  extérieure  et  qu'ils 
sont  totalement  perdus  dans  la  cavité  même. 

Le  cas  le  plus  simple  est  celui  où  ils  se  logent  dans  les  couches  super- 
ficielles du  poumon  ;  Texploration  directe  avec  le  doigt  ou  la  sonde  dite 
de  poitrine  permet  de  les  reconnaître,  et  leur  extraction  se  fait  avec  des 
pinces  ordinaires». 

Mais  les  balles  cylindro-coniques  des  nouvelles  armes  à  feu,  qui  ont 
une  puissance  de  pénétration  supérieure  aux  anciennes  balles  rondes, 
s'arrêtent  rarement  à  ce  niveau.  Quand  elles  rencontrent  le  poumon,  elle^ 
le  traversent  souvent  de  part  en  part  ou  bien  s'y  plongent  profondément, 
et  la,  tantôt  sont  tolérées  et  s'enkystent,  ce  qui  est  rare,  tantôt  au  con- 
traire^ donnent  lieu  aux  accidents  de  la  pneumonie  traumatique,  ce  qui 
est  le  cas  ordinaire. 

On  peut  les  rencontrer  dans  le  cul  de  sac  inférieur  de  la  plèvre  ;  d'au- 
tres fois,  elles  se  logent  dans  le  cœur,  ou  produisent  des  désordres 
promptement  mortels  soit  dans  l'œsophage,  soit  surtout  dans  les  gros 
vaisseaux  de  h  cavité  ;  dans  des  cas  rares,  onHn,  elles  peuvent  respecter 
la  plèvre,  le  péricarde,  les  troncs  vasculaires,  et  se  perdre  dans  le  tissu 
cellulaire  du  médiastin. 

Laissant  de  côté  ce  qui  a  trait  aux  corps  étrangers  du  poumon  et  du 
cœur,  dont  on  trouvera  la  description  à  la  place  appropriée,  nous  nous 
bornerons  à  examiner  ici  ce  qui  concerne  les  corps  étrangère  de  la  plèvre 
et  du  médiastin. 

Les  projectiles  et  autres  corps  étrangers  qu'on  rencontre  dans  la  plèvre 
peuvent  y  parvenir  de  diverses  manières  :  tantôt,  mais  rarement,  après 
avoir  franchi  la  paroi,  ils  ont  perdu  leur  impulsion  primitive,  et  comme 
le  poumon  cède  devant  eux  dans  une  certaine  mesure  en  vertu  de  son 
élasticité,  ils  tombent  dans  la  cavité  pleurale  correspondante;  tantôt, 
après  avoir  traversé  le  poumon,  ils  vont  s'arrêter  dans  la  cavité  opposée 
au  lieu  de  leur  pénétration;  d'autres  fois  enfin,  après  avoir  séjourné 
quelque  temps  dans  le  poumon,  ils  sont  mobilisés  par  la  suppuration  que 
détermine  leur  présence  et  tombent  dans  la  plèvre  par  leur  propre  poids. 

Lorsqu'il  a  pénétré  dans  la  cavité  pleurale,  le  corps  étranger  a  une 
tendance  naturelle  à  gagner  la  partie  la  plus  déclive  de  cette  cavité,  c'est- 
à-dire  la  partie  du  sinus  costo-diaphragmatique  voisine  de  la  colonne 
vertébrale.  Il  en  est  ainsi  surtout  pour  les  corps  de  petit  volume,  lourds 
et  arrondis ,  comme  les  balles,  et  lorsque  la  plèvre  est  libre  d'adhérences 
anciennes  ;  le  contraire  a  lieu  naturellement  dans  les  conditions  opposées. 
Quel  que  soit,  d'ailleurs,  le  point  où  le  corps  s'est  fixé,  les  phénomènes 
consécutifs  sont  variables.  Ainsi,  il  est  rare  qu'une  balle  reste  libre  et 
mobile  dans  la  cavité  sans  y  déterminer  d'accident,  malgré  les  exemples 
invoqués  parPercy.  Dans  certains  cas  heureux,  il  se  produit  une  pleurésie 
localisée  et,  à  la  suite,  une  sorte  d'enkystement  du  projectile  par  des 
fausses  membranes.  Le  plus  souvent,  la  pleurésie  s'accompagne  d'épan- 


714  POITRINE.  —  PLAIES  pénétrantes,  compucations. 

chement  purulent,  et  alors,  tantôt  il  se  forme  un  abcès  pariétal  qui  donne 
issue  au  corps  étranger  ou  facilite  les  recherches  ultérieures,  tantM 
l'affection  prend  une  allure  chronique,  et  il  s'établit  une  ouverture  fista- 
Icuse  qui  fournit  un  suintement  permanent. 

Le  diagnostic  est  souvent  difficile  à  établir  d'une  manière  exacte.  Les 
commémoratifs  n'ont  généralement  ici  qu'une  importance  secondaire,  et 
c'est  à  un  examen  minutieux  de  la  blessure  qu'il  s'agit  de  procéder  avant 
tout,  en  ayant  présent  à  l'esprit  ce  fait  important,  que  la  plaie  peut  ren- 
fermer non-seulement  un   projectile  mais  encore  des  débris  de  loole 
nature  entraînés  par  ce  dernier.  Le  premier  point  qu'il  faut  vériGercst  à 
bavoir  si  la  plaie  a  un  ou  deux  orifices.  Dans  le  cas  d'une  plaie  pénétrante 
par  coup  de  feu  avec  une  seule  ouverture,  la  présence  du  corps  étranger 
dans  la   cavité  thoracique   est  évidemment  la  règle  la  plus  générale; 
pour  que  le  contraire   ait  lieu,  il  faut  un  concours  de  circonstances 
assez  exceptionnel  ;    il  faut,  par  exemple,  que  les  vêtements  aient  été 
refoulés  en  doigt  de  gant  par  la  balle  sans  être  perforés,  et  que  le  fait  de 
la  pénétration  de  la  plaie   soit  le  résultat  d'une  fracture  osseuse  avec 
esquilles  et  non  de  l'action  directe  du  corps  vulnérant.  Il  suffit,  du  reste, 
que  la  chose  soit  possible,  pour  qu'il  soit  toujours  prudent  d'examiner 
les  vêtements  qui  recouvraient  le  lieu  de  la  blessure. 

L'existence  de  deux  ouvertures  faites  à  la  poitrine  par  une  balle  donne 
de  grandes  présomptions  pour  croire  que  le  projectile  est  sorti  ;  mais  la 
balle  a  pu  se  diviser  et  laisser  un  de  ses  fragments  dans  la  plaie,  ou  bien 
des  portions  de  vêtement  ou  des  esquilles  osseuses  ont  pu  être  entraînées 
et  abandonnées  dans  le  trajet.  En  résumé,  Texamen  de  visu  est  générale- 
ment insuffisant,  il  doit  être  complété  par  Y  exploration  directe  de  la 
blessure,  toutes  les  fois  du  moins  que  l'état  général  du  blesse  le  permet. 

Contrairement  à  l'opinion  de  Dupuytren  qui  condamnait  forraellemenl 
ce  genre  d'examen,  la  plupart  des  chirurgiens  d'armée  en  font  une 
obligation  ;  la  recherche  d'un  corps  étranger  est  même  pour  eux  la  cir- 
constance à  peu  près  unique  qui  autorise  le  cathétérisme  d'une  plaie  de 
poitrine.  Toutes  les  fois  que  cette  exploration  pourra  être  pratiquée  avec 
le  doigt,  on  devra  employer  ce  mode  d'investigation  comme  étant  le  plus 
inoffensif  et  le  plus  propre  à  fournir  des  renseignements  précis.  Dans  le 
cas  contraire,  on  se  sei'vira  d'abord  d'instruments  flexibles,  de  sondes  en 
gomme,  qui  prennent  d'elles-mêmes  toutes  les  courbures  nécessaires  et  qui 
présentent  encore  l'avantage  d'une  innocuité  suffisante,  mais  ont  souvent, 
par  contre,  l'inconvénient  de  fournir  des  données  inceilaines  ;  on  peut  v 
remédier,  du  reste,  en  les  garnissant,  à  l'extrémilo,  d'un  petit  boulon 
métallique  ou  d'une  olive  de  porcelaine  non  émaillée,  à  l'imitation  du 
stylet  de  Nélatou.  Les  sondes  rigides  seront  réservées  pour  des  cas  parti- 
culiers; on  peut,  d'ailleurs,  en  atténuer  les  inconvénients  en  employant 
les  sondes  de  Béniquié  qu'on  peut  courber  à  volonté  dans  tous  les  sens. 

Les  recherches  doivent  être  dirigées,  soit  vers  les  points  où  le  malade 
accuse  de  la  douleur,  soit  vers  la  partie  postérieure  du  sinus  costo-dia- 
phragmatique  où  les  projectiles  vont  souvent  se  loger.  Lorsque  i'explo- 


POITRINE.  —  PLAIES  PÉNÉTRANTES.    COMPLICATIONS.  715 

ration  rcstp  infructueuse,  on  recoinmande  de  coucher  le  blessé  sur  le 
côté  niain'dc,  dans  l'ospoir  que  cette  situation,  si  la  balle  est  flottante, 
l'amènera  vers  l'ouverture.  Cette  pratique  peut  réussir  dans  quelques  cas 
et  permettre  à  la  fois  la  reconnaissance  et  Textraclion  du  projectile  ;  mais 
elle  ne  peut  être  d'aucune  utilité  si  la  balle  n'est  pas  libre  dans  le  côté 
blessé  ou  si  elle  est  passée  soit  dans  le  côté  opposé,  soit  dans  le  médiastin. 

11  résulte  évidemment  de  tout  ce  qui  précède  que  les  circonstances  qui 
accompagnent  l'entrée  d'un  corps  étranger  dans  la  cavité  thoracique  peu- 
vent varier  à  l'infini,  et  qu'il  est  impossible  de  tracer  des  règles  absolues 
au  sujet  de  la  conduite  à  tenir  en  présence  de  cette  camplication.  On  peut 
dire  cependant,  d'une  manière  générale,  qu'à  notre  époque  l'opinion  pré- 
dominante des  chirurgiens  est  favorable  à  l'extraction  du  projectile, 
toutes  les  fois  qu'elle  est  possible,  avec  cette  réserve  que  le  moment  de 
l'opération  sera  plus  ou  moins  différé,  suivant  le  cas. 

Ainsi,  dans  les  instants  qui  suivent  la  blessure,  l'expectation  sera  indi- 
quée dans  les  cas  suivants  :  1**  s'il  existe  en  même  temps  une  autre 
complication  d'une  gravité  immédiate,  telle  que  l'hémorrhagie;  2®  si  l'ex- 
ploration demeure  infructueuse  et  que  l'on  conserve  des  doutes  sur  la  pré- 
sence même  du  corps  étranger  ;  3*  si  la  plaie  siège  dans  les  régions  supé- 
rieures du  thorax  et  que  le  corps  étranger  n'ait  pas  été  retenu  dans  le 
voisinage  par  des  circonstances  fortuites,  telles  que  des  adhérences 
anciennes. 

Lorsque  la  plaie  a  son  siège  à  la  partie  inférieure  du  thorax  ou  au 
niveau  d'une  cavité  accidentelle  de  la  plèvre,  circonscrite  par  des  adhé- 
rences, et  que  la  présence  du  corps  a  été  constatée,  l'extraction  est 
aujourd'hui  la  règle.  La  plaie  ayant  été  débridée,  s'il  est  nécessaire,  on 
cherchera  à  introduire  le  doigt  d'abord,  puis  sur  ce  dernier,  les  pinces 
destinées  à  saisir  le  corps. 

Si  l'extraction  directe  est  impossible,  on  pratique  une  contre-ouverture, 
soit  au  lieu  de  nécessité^  s'il  s'agit  d'une  loge  pleurale  accidentelle,  soit 
au  lieu  d'élection,  c'est-à-dire  dans  le  onzième  espace  intercostal,  quand  la 
cavité  pleurale  est  lihrc. 

Lorsqu'on  a  dû  différer  les  tentatives  d'extraction,  s'il  se  forme  un 
abcès  pariétal  ou  im  épanchement  purulent  de  la  plèvre,  l'ouverture  de 
la  collection  purulente  devient  le  premier  temps  de  l'opération;  la  recher- 
che à  fond  du  corps  étranger  et  son  extraction  viennent  ensuite. 

Quand  on  ouvre  le  onzième  espace  intercostal,  la  mobilité  des  côtes  qui 
le  forment  est  assez  grande  pour  qu'il  soit  en  général  possible  de  les 
maintenir  écartées  et  de  se  ménager  ainsi  une  ouverture  suffisante  pour 
l'introduction  du  doigt  et  des  pinces.  C'est  là  un  avantage  qui  s'ajoute  à 
ceux  qui  résnllent  de  la  déclivité  de  la  plaie.  Quand  on  pratique  une 
contre-ouverture  au  lieu  de  nécessité,  ou  lorsqu'on  a  ouvert  un  abcès 
pariétal,  on  peut,  après  avoir  saisi  le  corps  étranger,  se  trouver  arrêté  par 
l'impossibihlé  de  lui  faire  franchir  l'espace  intercostal.  On  essaie  d'abord, 
dans  ce  cas,  d'agrandir  Tintervalle  en  faisant  fléchir  le  tronc  vers  le  côté 
opposé  à  la  blessure,  puis  en  agissant  directement  sur  les  deux  côtes  voi- 


7i6  POITRINE.  — PLAIES  péhétrantes.  complicatio^is. 

sines  à  l'aide  d'écarteurs  ou  d'un  coin  mousse  ;  sî  ces  moyens  échouent, on 
peut  être  conduit  soit  à  échancrer  le  bord  supérieur  de  la  côte  inférieure 
avec  un  couteau  lenticulaire  (Larrey],  soit  à  pratiquer  une  résectionpar- 
tielle  de  l'une  des  côtes  au  moyen  de  la  scie  à  chaîne.  (Legouest,  p.  3ii8.| 

Les  manœuvres  nécessitées  par  la  recherche  et  rexlraclion  d'un  corps 
étranger  rendent  généralement  illusoires  les  tentatives  d'occlusion  ulté- 
rieure de  la  plaie.  Néanmoins,  si  l'extraction  a  pu  être  opérée  avant  que  la 
pleurésie  ait  eu  le  temps  de  se  déclarer  ou  de  passer  à  l'état  purulent,  ou 
fera  tout  ce  qu'il  est  possible  pour  empêcher  la  pénétration  ultérieure  de 
l'air.  Lorsque,  au  contraire,  la  suppuration  est  établie,  on  devra  maintenir 
la  plaie  béante,  en  y  fixant  à  demeure  une  sonde  molle,  afin  d'assurer 
Técoulement  continu  des  liquides  pleuraux  et  de  pouvoir  pratiquer  des 
injections  délersives  dans  la  cavité. 

Il  arrive  enfin  des  cas  où  Ton  est  à  peu  près  certain  qu'il  existe  un 
corps  étranger,  et  où  ce  corps  est,  néanmoins,  absolument  introuTnble. 
11  se  forme  généralement,  dans  ce  cas,  un  abcès  pariétal  dont  l'ouveriurf 
devient  fistuleuse.  Si  de  nouvelles  recherches  pratiquées  à  ce  momeol 
n'amènent  pas  la  découverte  du  corps,  la  fistule  résiste  à  tous  les  moyeib 
chirurgicaux  mis  en  œuvre  pour  en  obtenir  la  guérison.  Il  y  a  même  plus; 
si  elle  s'obture  temporairement,  il  se  produit  bientôt  une  poussée  inDam- 
matoire  et  des  accidents  divers  qui  ne  cessent  que  quand  l'ouverture  se 
reforme;  delà,  l'obligation  delà  maintenir  constamment  béante.  Moyefl- 
nant  cette  précaution,  les  sujets  atteints  d'une  pareille  infirmité  peuvent 
prolonger  pendant  longtemps  une  existence  passable. 

Il  peut  se  faire,  comme  nous  l'avons  dit  au  début  de  ces  considéral'wns 
sur  les  corps  étrangers  de  la  poitrine,  qu'une  plaie  pénétrante  du  môdia<- 
tin  soit  compliquée  de  la  présence  d'un  corps  étranger,  sans  être  accom- 
pagnée en  même  temps  de  ces  lésions  viscérales  ou  vasculaires  dont  l'eï- 
trême  gravité  rend  toute  intervention  chirurgicale  inutile. 

Le  cas  le  plus  favorable,  et  le  plus  rare  aussi,  est  celui  dans  lequelle 
corps  étranger  est  toléré  par  le  tissu  conjonctif, y  subit  une  sorte  denky.- 
tement  et  demeure  indéfiniment  inoffensif. 

Le  cas  ordinaire  est  la  formation  d'un  abcès  rélro-stcrnal  avec  toutes  se> 
conséquences  dont  il  sei^a  question  plus  loin. 

Accidentellement,  il  peut  se  former,  en  outre,  une  péricardite  ou  une 
pleurésie  de  voisinage  ;  rinflammalion  ulcérative  peut  gagner  égalemcul 
un  des  vaisseaux  voisins  et  devenir,  comme  dans  le  cas  observé  par 
Huguier,  le  point  de  départ  d'un  anévrysme. 

Lorsqu'il  existe  quelque  présomption  pouvant  faire  croire  à  la  présence 
d'un  corps  étranger,  dans  le  médiastin,  la  conduite  à  tenir  sera  diffêi-enle 
suivant  qu'il  existera,  ou  non,  des  accidents  graves.  Ainsi,  dans  le  ca> 
d'hémorrhagie,  on  s'abstiendra  provisoirement  de  toute  recherche.  En 
l'absence,  au  contraire,  de  phénomènes  primitifs  inquiétants,  mieux  vaut 
procéder  immédiatement  à  la  recherche  et  à  l'extraction  du  corps  étran- 
ger, afin  de  prévenir  les  conséquences  de  son  séjour.  A  cet  elTel,  la  pbie 
sera  explorée  avec  les  précautions  précédemment  indiquées  au  sujet  de 


POITIUNK,    —    ABCÈS.    DES    PAROIS    THORACIQOBS.  717 

la  cavité  pleurale  ;  on  dilatera  l'ouverture  autant  qu'il  sera  nécessaire  par 
une  incision,  et  au  besoin  on  appliquera  une  couronne  de  trépan.  Quand 
la  présence  et  la  position  du  corps  ont  été  constatées,  on  doit  redoubler  de 
prudence  au  moment  où  on  le  saisit  avec  les  pinces,  dans  la  crainte  de 
renfoncer  davantage.  Si  les  premières  tentatives  échouent,  on  a  même 
conseillé  d'y  renoncer  provisoirement,  dans  l'espoir  que  Télablissenient 
de  la  suppuration  mobilisera  le  corps  peu  à  peu,  qu'il  se  présentera  de 
lui-même  au  bout  de  quelques  jours  à  l'ouverture  de  la  plaie,  ainsi  que  le 
fait  a  été  constaté,  ou  qu'on  se  trouvera  dans  de  meilleures  conditions 
pour  reprendre  les  manœuvres  d'extraction. 

Lorsque  le  corps  étranger  séjourne  dans  le  médiastin  et  donne  lieu  à  la 
formation  d'un  abcès  rétro-sternal,  on  se  trouve  dans  le  même  cas  que 
pour  les  abcès  pariétaux  de  la  paroi  costale.  Il  est  formellement  indiqué, 
après  l'ouverture  de  l'abcès,  si  le  corps  étranger  ne  se  présente  pas  de 
lui-même,  d'aller  à  sa  recherche  et  de  l'extraire. 

II.  Abcès.  —  Les  collections  purulentes  de  la  poitrine  appartiennent  à 
deux  catégories  distinctes  :  les  unes  ont  leur  siège  dans  les  cavités 
séreuses  de  la  plèvre  et  du  péricarde,  et  portent  le  nom  d'épancliements; 
elles  ont  été  décrites  à  la  suite  des  maladies  qui  leur  donnent  naissance. 
{Voy.  Péricarde,  Pleurésie,  Plèvres)  ;  les  autres  se  développent  soit  dans 
les  parties  molles  des  parois,  soit  dans  le  tissu  conjonctif  du  médiastin,  et 
sont  désignées  sous  le  nom  générique  d'abcès  ;  ce  sont  les  seules  dont 
nous  ayons  à  nous  occuper. 

La  distinction  entre  les  deux  espèces  de  collections  est  généralement 
nette  et  facile,  et  cependant  il  est  des  cas  particuliers  dans  lesquels  elles 
ont  d'abord  des  rapports  étroits  de  voisinage,  entrent  ensuite  en  commu- 
nication, et  enfin  paraissent  se  confondre.  Dans  le  cas,  par  exemple,  où 
un  épancliement  purulent  de  la  plèvre  est  le  point  de  départ  d'un  abcès 
de  voisinage  dans  le  tissu  conjonctif  sous-pleural,  les  deux  collections 
peuvent  rester  longtemps  distinctes,  grâce  à  la  barrière  représentée  par 
les  fausses  membranes  qui  les  séparent;  mais  il  peut  se  faire  qu'une  com- 
munication s'établisse  entre  elles,  qu'elles  s'ouvrent,  en  outre,  toutes 
deux  à  l'extérieur,  et  alors,  la  ligne  de  démarcation  devient,  en  quelque 
sorte,  fictive.  Mais,  il  faut  bien  le  dire,  ce  sont  là  des  cas  exceptionnels 
qui  n'infirment  en  rien  la  valeur  de  la  classification  adoptée. 

Les  abcès  des  parois  thoraciques  et  ceux  du  médiastin  constituent  eux- 
mêmes  deux  groupes  distincts,  parce  qu'au  milieu  de  caractères  communs 
qui  appartiennent  aux  inflammations  suppuratives  du  tissu  conjonctif  en 
général,  ils  présentent  certains  caractères  particuliers  qui  méritent  une 
description  séparée. 

Abcès  des  parois  tuoraciques.  —  Ce  premier  groupe  renferme  toutes 
les  variétés  d'abcès  qu'on  peut  rencontrer  dans  les  autres  régions  de  l'or- 
ganisme ;  les  uns  à  marche  aiguë,  tels  que  le  phlegmon  simple,  le  phlegmon 
diffus,  Térysipèle  phlegmoneux;  les  auties,  au  contraire,  à  marche 
chronique,  abcès  froids,  abcès  ostéopathiques,  abcès  par  congestion. 
Chacune  de  ces  variétés  se  trouvant  déjà  décrite  dans  des  articles  spéciaux 


/  (JAL^^^*-^  f   ^«-7**^^ 


718  POITRINE.  —  ABCÈS,  des  paeois  thoracioves. 

de  l'ouvrage,  nous  nous  bornerons  à  signaler  ce  qu'elle  offre  de  particulier 
au  point  de  vue  de  Tétiologie,  de  la  marche,  des  complications  et  du  trai- 
tement quand  elle  se  développe  dans  Tcpaisseur  des  parois  tlioraciqœs. 
Phlegmon  simple  ou  circonscrit.  —  Nous  retrouvons  ici  Tétiologie 
banale  signalée  pour  les  autres  régions  (contusions  et  épanchemeDtssao 
guins,  plaies  ayant  subi  une  cause  quelconque  d'irritation ,  corps  étranger?, 
convalescence  des  Bèvres  éruplives  et  des  fièvres  graves,  etc.).  Lorsque 
Tabcès  est  sous-cutané,  il  ne  présente  rien  qui  soit  spécial  à  la  régioQ; 
tandis  que  les  phlegmons,  même  circonscrits,  qui  ont  leur  siège  soit  soos 
les  muscles  pectoraux,  soit  dans  le  tissu  conjonctif  sous-pleural,  ont  toujoors 
un  certain  caractère  de  gravité.  Ils  méritent  par  conséquent  de  dou5 
arrêter. 

La  présence  de  l'aponévrose  clavi-coraco-axillaire  exerce  une  influoitt 
bien  connue  sur  la  marche  des  abcès  qui  siègent  sous  les  muscles  pecto- 
raux. Ceux  qui  se  forment  entre  le  grand  et  le  petit  pectoral  fontsiillie 
en  avant,  soulèvent  le  grand  pectoral  et  viennent  s'ouvrir  soit  en  ba?, 
soit  dans  le  sillon  qui  sépare  ce  muscle  du  deltoïde;  mais  lorsque  labctf 
est  en  arrière  du  petit  pectoral,  le  pus  bridé  par  Taponévrose  n*a  pas  de 
tendance  à  se  porter  en  avant  ;  il  envahit  la  masse  cellulo-grnisseuse,  qat 
entoure  le  paquet  vasculo-nerveux  e/décolle  la  paroi  thoraci(|ue  au  niTeM 
des  premiers  espaces  intercostaux.  Il  peut  survenir  alors  une  pleurésie 
purulente,  par  voisinage  ou  par  perforation,  et  les  deux  foyers,  Iob 
pleural,  l'autre  extra-thoracique  peuvent,  dans  certains  cas,  communi- 
quer entre  eux.  On  conçoit  aisément  pourquoi  ces  abcès  sont  presque 
toujours  mortels,  surtout  si  de  larges  ouvertures  n*ont  pas  été  pratiquées 
de  bonne  heure.  Nous  n'insisterons  pas  davantage  sur  cette  question  qui 
appartient  plus  spécialement  à  la  pathologie  de  T Aisselle.  (Toy.  1. 1 
p.  488.) 

Quant  aux  abcès  sous-pleuraux^  ils  affectent  généralement  une  marche 
chronique,  ainsi  que  nous  le  verrons  plus  loin  ;  néanmoins,  dans  quel- 
ques cas,  rinflammatiou  du  tissu  conjonctif  sous-pleural  prend  un  cartf- 
tère  aigu  et  se  propage  vers  l'extérieur  de  la  paroi,  à  la  manière  d'an 
véritable  phlegmon.  Boyer  avait,  le  premier,  signalé  ce  fait;  maisilaéti' 
remis  en  lumière,  à  notre  époque,  par  les  recherches  de  Leplat,  Windff- 
lich,  Billroth,  et,  plus  récemment  encore,  de  Bartels.  Faut-il  admettre, 
dans  certains  cas,  avec  quelques-uns  de  ces  observateurs,  une  périptev- 
ri7e  aiguë  spontanée,  essentielle?  Ou  bien  faut-il  toujours,  ainsi  quv 
Leplat  s'est  attaché  à  le  démontrer,  rapporter  l'origine  de  ces  abcè<â 
une  pleurésie  aiguë  ou  même  chronique?  La  question  ne  semble  pâ? 
encore  défmilivement  tranchée  ;  toujours  est-il  qu'à  Tautopsie  on  a 
souvent  relevé,  dans  ces  cas,  la  présence  d'un  épanchement  pleurétiqu^ 
concomitant,  et  c'est  là  le  fait  qui,  en  dehors  de  toute  interprétation 
doctrinale,  justifie  la  gravité  du  pronostic  attaché  à  cette  variété  de^ 
phlegmons  des  parois  thoraciqucs. 

Phlegmon  diffus  et  érysipèle  phlegmoneux.  —  Nous  sommes  oblip 
de  réunir  ces  deux  dénominations,  parce  que  la  ligne  de  démarcation  éuMir 


POITRINE.    —   ABCÈS.   DES    PAROIS   THORACIQUES.  719 

-primitivement  entre  les  deux  ordres  d'états  morbides  qu'elles  étaient 
destinées  à  représenter,  s'efface  de  plus  en  plus  et  qu'il  existe  une  ten- 
dance fâcheuse  à  confondre  sous  l'expression  générale  de  phlegmon 
diffus  des  faits  de  nature  dissemblable.  Dans  les  uns,  en  effet,  l'affection, 
tout  en  se  propageant  loin  de  son  foyer  primitif,  conserve  un  caractère 
franchement  inflammatoire;  dans  d'autres,  au  contraire,  elle  a  un  carac- 
tère infectieux  qui  lui  donne  un  cachet  de  gravité  exceptionnelle. 

En  ce  qui  touche  au  fait  général  de  la  diffusion  ou  de  la  propaga* 
tion  à  distance  de  l'inflammation  suppurative,  les  parois  thoraciques 
présentent,  dans  leur  disposition  anatomique,  des  conditions  malheureu- 
sement favorables.  Un  fascia  superficialis  presque  partout  lamelleux,  de 
larges  muscles  étalés  sur  de  grandes  surfaces,  des  aponévroses,  tantôt 
engainantes  dans  une  longue  étendue,  tantôt  simpleoient  celluleuses,  et 
enfin  la  déclivité  naturelle  des  parties  dans  la  position  assise  ou  demi- 
assise  qu'un  certain  degré  de  gène  respiratoire  impose  souvent  au  ma- 
lade, telles  sont  les  principales  circonstances  qui  rendent  compte  de  la 
marche  souvent  envahissante  de  l'inflammation.  Tantôt  le  phlegmon 
demeure  sous-cutané;  tantôt  il  franchit  la  faible  barrière  que  lui  oppose 
l'aponévrose  superficielle,  et  alors,  le  pus,  arrivé  au  contact  de  larges 
couches  musculaires,  peut  fuser  jusqu'à  leurs  attaches  au  squelette.  Lors- 
que le  pus  se  forme  primitivement  ou  pénètre,  à  un  moment  donné,  au 
milieu  du  tissu  conjonctif  lâche  qui  remplit  les  espaces  intermusculaires, 
l'inflammation  se  propage  parfois  à  des  distances  considérables.  On  a  vu 
le  grand  dorsal,  le  grand  dentelé,  le  rhomboïde  complètement  décollés 
par  d'énormes  collections  purulentes.  D'autres  fois,  ce  sont  des  suppura- 
lions  profondes  du  cou  qui,  fusant  au-dessous  de  la  clavicule,  envahis- 
sent l'aisselle,  s'étalent  sur  la  face  externe  du  grand  dentelé,  ou  même, 
suivant  le  bord  supérieur  de  ce  muscle,  s'étendent,  sous  le  trapèze  et  le 
rhomboïde,  jusqu'à  l'angle  de  l'omoplate. 

Le  traitement  chirurgical  à  opposer  à  cette  marche  envahissante  ne 
saurait  être  hésitant.  11  faut  non-seulement  inciser  de  bonne  heure  et 
inciser  largement  pour  ouvrir  une  voie  facile  à  l'écoulement  du  pus, 
mais  encore  poursuivre  les  décollements  un  à  un  et  établir  autant  de 
contre-ouvertures  qu'il  peut  être  nécessaire.  Lorsque  la  suppuration  s'est 
limitée,  le  drainage,  les  injections  détersives  et  modificatrices,  la  com- 
pression, en  dernier  lieu,  viennent  en  aide  au  travail  de  la  réparation. 

En  dehors  du  traumatisme,  il  est  souvent  difficile  d'assigner  une  ori- 
gine rationnelle  à  ces  phlegmons  étendus.  On  est  obligé  d'invoquer  alors 
une  influence  générale  représentée  par  cet  ensemble  de  conditions  hygié- 
niques défectueuses  qui  amène  l'état  désigné  communément  sous  le  nom 
de  misère  physiologique.  Les  faits  de  ce  genre,  qui  semblent  avoir  long- 
temps passé  inaperçus,  ont  éveillé  l'attention  dans  ces  dernières  années  ; 
on  en  trouve  des  exemples  remarquables  dans  les  thèses  récentes  de 
Demartial  et  de  Serez.  Les  symptômes  initiaux  sont  tout  à  la  fois  graves 
et  insidieux;  ce  sont  ceux  qui  annoncent  d'ordinaire  le  début  d'un  état 
typhoïde;  au  bout  de  quelques  jours,  il  se  manifeste  sur  un  des  points 


720  POITRINE.  —  abcès,  des  parois  thoraciques. 

du  thorax  une  douleur  vive  qui  a  été  rapportée,  dans  plusieurs  cas,  i 
l'invasion  d'une  phlegmasie  viscérale;  l'examen  de  la  poitrine,  pratiqué 
justement  dans  le  but  de  vérifier  le  diagnostic  précédent,  met  nécessaire- 
ment sur  la  voie,  en  montrant  qu'il  existe  sur  une  partie  de  la  paroi  un 
empâtement  douloureux  accompagné  d'une  coloration  caractéristique. 
Dans  la  plupart  des  observations  relevées,  le  phlegmon  ou  mieux  Té- 
rvsipèle  phlegmoneux  occupait  la  paroi  latérale,  s'étendant  progressive- 
ment de  l'aisselle  à  la  base  du  thorax  et  même  au  delà.  L'incision  des 
parties  donne  rarement  issue  à  du  pus  phlegmoneux  colligé  ou  en  nappe; 
c'est  plutôt  cette  infiltration  louche,  grisâtre,  qui  précède  la  morlification 
du  tissu  conjonctif.  Quoi  qu'on  fasse,  le  sphacèle  se  produit,  en  même 
temps  que  les  symptômes  généraux  s'aggravent,  et  on  assiste  à  la  suc- 
cession des  phénomènes  qui  caractérisent  l'évolution  du  phlegmon  diffus 
le  plus  grave.  (Voy.  Phlegmon,  t.  XXVII,  p.  158.) 

Comme  dans  tous  les  cas  de  ce  genre,  il  faut  intervenir  avec  énei^ie 
et  promptement.  Dès  que  le  diagnostic  est  certain,  on  pratique  desdéhri- 
déments  multiples  qui  doivent  comprendre  toute  l'épaisseur  de  la  peau  et 
du  fascia  jusqu'à  l'aponévrose  exclusivement.  Le  butest  h  la  fois  de  donner 
issue  aux  produits  altérés  dont  le  tissu  conjonctif  est  engorgé  à  la  manière 
d'une  éponge,  et  d'entraver,  s'il  est  possible,  la  marche  envahissante  de 
l'affeclion.  Quelques  chirurgiens  font  précéder  les  incisions  de  larges  et 
profondes  applications  de  caustique  de  Yienne  qui  semblent,  dans  certains 
cas,  contribuer  à  la  délimitation  du  processus  gangreneux.  On  doit  insti- 
tuer en  même  temps  un  traitement  interne  aussi  tonique  que  possible  et 
prescrire  une  alimentation  substantielle,  à  cause  du  fond  adynamiquc  des 
accidents.  Une  fois  les  escharres  éliminées  et  la  suppuration  établie,  on  se 
conduit  comme  pour  les  phlegmons  étendus. 

Abcès  froids  des  parties  molles.  —  Nous  rangeons  dans  cette  caté- 
gorie tous  les  abcès  à  marche  chronique  qui  ont  leur  siège  soit  dans  les 
parties  molles  extérieures,  soit  dans  le  tissu  conjonctif  sous-pleural  et 
qui  ne  se  rattachent  pas  à  une  lésion  primitive  du  périoste  ou  des  os. 
Ceux  qui  se  forment  d'emblée  à  l'extérieur  de  la  paroi  costale  ne  présen- 
tent rien  de  particulier  qui  les  distingue  des  abcès  froids  des  autres 
régions.  Ceux,  au  contraire,  qui  se  développent  primitivement  dans  le 
tissu  conjonctif  sous-pleural  ont  quelques  caractères  propres  qui  ont 
fixé  l'attention  des  observateurs  contemporains. 

Ces  abcès  se  montrent  sous  deux  aspects  différents  :  tantôt  ils  forment 
une  poche  unique,  irrégulière,  anfractueuse,  qui  répond  d'une  part  à  la 
plèvre  généralement  épaissie  et  altérée,  d'autre  part  à  la  face  interne 
des  côtes  ;  tantôt  ils  se  composent  de  deux  loges,  l'une  sous-costale, 
l'autre  sus-costiUe,  communiquant  ensemble  par  une  ou  plusieurs  ouver- 
tures qui  traversent  un  espace  intercostal.  Du  côté  de  la  plèvi-e  et  du 
poumon,  on  rencontre  généralement  des  lésions  diverses  plus  ou  moins 
graves.  Ce  sont  tantôt  des  tubercules  pulmonaires,  tantôt  les  lésions 
propres  de  la  pleurésie  aiguë  ou  chronique  ;  parfois  c'est  le  poumon  lui- 
même,    doublé   de  fausses  membranes  épaisses,  qui  constitue  la  paroi 


POITRINE.  —  ABcis.  721 

interae  de  l'abcès.  Le  tissu  osseux,  proprement  dit,  des  côtes  voisines  de 
l'abcès,  est  généralement  sain;  par  contre,  le  périoste  est  souvent  épaissi 
et  fongueux,  mais  seulement  dans  ses  couches  superficielles  ;  lorsque  la 
maladie  se  prolonge  longtemps,  ces  lésions  gagnent  en  profondeur  ;  on 
trouve,  dans  certains  cas,  le  périoste  ramolli,  décollé  ;  Tos  sous-jacent 
est  injecté,  moins  résistant  qu'à  l'état  normal  ;  mais  toutes  ces  altéra- 
tions qui  n'aboutisient  d'ordinaire  ni  à  la  carie,  ni  à  la  nécrose,  conser- 
vent les  caractères  de  lésions  consécutives. 

Tant  que  Tabcès  demeure  sous-cosUd  et  qu'il  conserve  un  petit 
volume,  il  n'apporte  par  lui-même  aucun  surcroit  de  gêne  dans  l'accom- 
plissement des  phénomènes  mécaniques  de  la  respiration,  et,  s'il  existe 
en  même  temps,  comme  c'est  le  cas  ordinaire,  une  affection  chronique  de 
la  plèvre  ou  du  poumon,  les  signes  qui  pourraient  faire  soupçonner  la 
présence  d'une  collection  purulente  s'effacent  sous  ceux  de  l'affection 
principale.  Ce  n'est  donc  qu'à  l'autopsie  qu'on  rencontre  généralement 
cette  variété  d'abcès. 

Lorsque  la  maladie  se  prolonge,  la  collection  purulente  augmente  de 
volume  et  tend  à  se  frayer  une  issue.  Si  elle  est  en  contact  avec  le  pou- 
mon, par  suite  de  l'adhérence  des  feuillets  pariétal  et  viscéral  de  la 
plèvre,  et  que  ces  feuillets  n'aient  pas  acquis  une  trop  grande  résistance 
par  le  développement  de  fausses  memb^iies  épaisses,  elle  pourra  se  vider 
par  les  bronches. 

Lorsque,  au  contraire,  la  plèvre  est  le  siège  d'une  inflammation  chro- 
nique qui  a  amené  le  dépôt  de  couches  successives  de  fausses  membranes^ 
l'abcès  a  une  tendance  très-prononcée  à  se  porter  vers  Textérieur.  Deux 
cas  peuvent  alors  se  présenter  :  Si  la  collection  primitive  s'est  formée  en 
arrière,  dans  le  tissu  sous- séreux  de  la  gouttière  vertébrale,  le  pus  s'en- 
gage entre  les  deux  plans  des  muscles  intercostaux,  suit  le  trajet  des 
vaisseaux  et  des  nerfs,  et  vient  former  une  tumeur  sur  un  point  quelcon- 
que de  la  circonférence  du  thorax  ;  mais,  si  l'abcès  a  pris  naissance  vers 
la  partie  moyenne  de  l'espace  intercostal,  comme  il  se  trouve  com- 
pris entre  deux  barrières  résistantes,  les  fausses  membranes  pleurales 
d'un  côté,  le  plan  musculaire  et  aponévrotique  des  intercostaux  de  l'autre, 
il  est  plus  difficile  de  comprendre  pourquoi  il  est  arrêté  par  la  première, 
tandis  qu'il  parvient  à  franchir  la  seconde.  D'après  certains  faits  observés 
par  Lcplat,  cette  évolution  vei*s  l'extérieur  se  ferait  en  deux  temps  :  dans 
une  première  période,  le  pus  étalé  entre  la  plèvre  et  la  face  interne  des 
côtes  déterminerait  peu  à  peu  par  son  contact  une  inflammation  subai- 
gué  du  périoste  costal,  et  ce  serait  là  l'origine  des  lésions  secondaires  de 
cette  membrane  qu'on  retrouve  à  Tautopsie;  dans  une  deuxième  période, 
le  périoste  enflammé  et  épaissi  sur  toute  sa  circonférence  deviendrait  à 
son  tour  un  centre  de  rayonnement  et  le  point  de  départ  de  la  formation 
d'un  abcès  extérieur,  dont  la  communication  avec  l'abcès  primitif  ne 
S'établirait  qu'ultérieurement.  C'est  ainsi  que  se  formeraient  souvent  cer- 
tains phlegmons  sous-musculaires  dont  l'origine  est  parfois  si  obscure, 
ces  collections  purulentes  étendues  qui  prennent  naissance,  sans  cause 

MOT.   DICT.  ><0.   KT  CHUU  XXYllI  —  40 


722  .  POITRINE.   -  AKJb. 

appréciable,  sous  leâ  pectoraux,  le  grand  dentelé,  le  grand  dorsal,  le  tra- 
pèze, le  rhomboïde,  etc.,  et  qui,  avant  d'arriver  sous  la  peau,  ont  encore 
une  dernière  étape  à  franchir,  celle  de  Taponévrose  superficielle,  qu'elles 
usent  et  perforent  à  la  longue. 

Enfin,  dans  une  dernière  catégorie  de  faits,  la  moins  fréquente,  il  est 
vrai,  il  peut  y  avoir  communication  entre  un  épanchement  purulent  de 
la  plèvre  et  un  abcès  de  la  paroi  qui  s'ouvrent  ensuite  tous  deux,  soit  i 
Textérieur,  soit  à  la  fois  dans  les  bronches  et  au  dehors  de  la  cavité 
(Voy.  Pleurésie,  p.  211). 

Tels  sont  les  faits  qui  ont  été  observés  à  notre  époque;  ils  jettent  on 
jour  nouveau  sur  la  pathogénie  d'un  certain  nombre  d'abcès  froids  des 
parois  thoraciques  qu'on  rapportait  autrefois,  d'une  manière  banale,  à  des 
affections  osseuses* dont  l'existence  n^était  pas  toujours  démontrée.  Le 
seul  point  qui  n'ait  pas  encore  été  éclairci  d'une  manière  bien  satisfaisante, 
c'est  la  question  d'origine.  Sans  doute,  Leplat  a  fait  faire  un  grand  pas 
à  la  question  en  démontrant  que,  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  les 
abcès  froids  des  parois  thoraciques  sont  le  résultat  d'une  pleurésie  anté- 
rieuFC.  Cette  interprétation  s'est  substituée  avantageusen^ent  aux  explici- 
tions fort  hypothétiques  proposées  soit  par  Larrey  et  Sédillot  pour  les 
jeunes  soldats,  soit,  dans  un  autre  ordre  d'idées,  par  Ménière,  et  qui 
avaient  en  outre  l'inconvénient  dp  ne  s'appliquer  qu'à  certains  cas  parti- 
culiers. Mais,  même  après  les  travaux  de  Leplat,  de  Billroth,  de  Bartek, 
etc.,  il  reste  encore  une  catégorie  de  faits  dont  l'interprétation  est  obscure]; 
ce  sont  ceux  dans  lesquels  un  abcès  froid  se  développe  chez  un  sujet 
n'ayant  jamais  eu  de  pleurésie  et  ne  portant  aucune  trace  de  lésion  pleu- 
rale.—  Duplay  et  Choné,  qui  en  ont  observé  des  exemples  incontestables, 
admettent,  comme  cause  initiale  probable,  l'existence  d'une  inflammation 
spontanée  de  la  lame  externe  du  périoste,  qui  se  développerait  lentement 
chez  les  sujets  jeûnes,  anémiques,  affaiblis  par  les  fatigues,  la  misère  ou 
les  maladies,  et  qui  se  manifesterait  ensuite  accidentellement  à  Textérieur, 
soit  sous  une  forme  aiguë,  soit  sous  une  forme  chronique,  sous  TinOuence 
de  causes  externes  quelquefois  légères.  Pour  consacrer  ce  mode  particulier 
d'origine,  on  donnerait  à  cette  catégorie  d'abcès  le  nom  d'abcès  périos- 
tiques. 

Quel  que  soit  le  point  de  départ  de  la  maladie,  lorsque  l'abccs  est 
développé  dans  la  paroi  thoracique,  le  diagnostic  absolu  en  est  généra- 
lement facile,  grâce  à  l'apparition  rapide  de  la  fluctuation.  Ce  qui  laisàe 
des  doutes,  souvent  prolongés,  c'est  la  détermination  de  la  variété  à 
laquelle  on  a  aflairc.  On  peut  bien,  après  un  examen  attentif,  écarter 
l'hypothèse  d'un  abcès  ossifluent  venu  soit  de  la  colonne  vertébrale,  soit 
d'un  point  plus  ou  moins  éloigné  de  la  paroi  costale  ;  mais,  faute  de 
caractères  distinctirs  suffisamment  nets,  on  peut  hésiter  longtemps  entre 
un  simple  abcès  froid  du  tissu  cellulaire,  un  abcès  périostii]ue,  un  abcès 
symptomatique  d'une  lésion  osseuse  ou  enfin  un  abcès  du  tissu  sous- 
pleural.  Ce  n'est,  le  plus  souvent,  qu'après  l'ouverture  de  la  collection 
purulente,  que  l'exploration  pratiquée  à  l'aide  du  doigt  ou  des  instrumcats 


POITRINE,  —  ABCÈS.  723" 

a})propriés  permettra  d'établir  un  diagnostic  définitif.  Le  pronostic  est 
lié  à  l'état  de  gravité  plus  ou  moins  avancé  des  complications  pleuro- 
pulmonaires  qui  coexistent  si  fréquemment.  Il  est,  par  suite,  infiniment 
moins  sévère  dans  la  variété  désignée  plus  haut  sous  le  nom  d'abcès 
périostiques.  Mais,  même  dans  les  cas  les  plu«  favorables,  il  faut  s'attendre 
à  une  évolution  d'une  extrême  lenteur  et  à  la  formation  de  fistules  per- 
sistantes. Le  traitement  doit  être  à  la  fois  interne  et  chirurgical.  Nous 
<;royons  inutile  d'entrer  dans  le  détail  des  indications  particulières  qui 
ressortent  d'elles-mêmes  de  la  série  des  faits  que  nous  venons  d*exposer. 

Abcès  ostéopathiques,  —  Ces  abcès,  qu'on  désigne  aussi  quelquefois 
simplement  du  nom  d'abcès  symptomcUiques,  sont  liés  à  une  affection 
osseuse  des  côtes  ou  du  sternum.  Ils  constituent  donc  un  groupe  bien 
distinct,  dont  le  diagnostic  cependant  ne  peut,  souvent,  être  définitive- 
ment établi  que  par  une  exploration  directe,  après  l'ouverture  spontanée 
ou  chirurgicale  de  la  collection  purulente.  Us  naissent  sous  l'influence  de 
trois  causes  principales  :  le  traumatisme,  la  diathèse  scrofuleuse,  la 
syphilis.  Nous  n'entrerons  dans  aucun  détail  à  leur  sujet  ;  leur  histoire 
se  rattache  tout  entière  à  la  pathologie  des  Côtes  et  du  Sternum  [Voy. 
ces  mots). 

Abcès  ossifluents,  migrateurs^  par  congestion.  —  A  côté  des  abcès 
précédents  se  placent,  sans  se  confondre  avec  eux,  ceux  qui  ont  pour 
point  de  départ  une  affection  soit  des  vertèbres  cemcales  ou  dorsales, 
soit  des  côtes  elles-mêmes,  et  qui  viennent  faire  saillie  sur  un  point  de  la 
paroi  thoracique  plus  ou  moins  éloigné  de  leur  lieu  d'origine.  Il  ne  nous 
appartient  pas  non  plus  d'en  faire  la  description  ;  nous  nous  bornerons 
à  signaler  une  particularité  de  leur  histoire  qui  rentre  dans  notre 
sujet. 

Nous  voulons  parler  du  trajet  que  suivent  les  abcès  venus  du  rachis 
avant  de  proéminer  sur  la  paroi  thoracique.  Us  longent  d'abord  la  face 
antérieure  de  la  colonne  vertébrale  et  traversent  une  étendue  plus  ou 
moins  grande  du  médiastin  postérieur,  constituant  ainsi  une  des  variétés 
de  collections  purulentes  de  cette  cavité.  Puis,  au  lieu  de  franchir  les 
ouvertures  du  diaphragme  et  de  pénétrer  dans  la  cavité  abdominale, 
comme  il  arrive  fréquemment,  ils  peuvent  être  arrêtés  par  un  obstacle 
quelconque,  se  dévier  et  suivre  un  des  espaces  intercostaïu.  Là  ils  rencon- 
trent le  tissu  conjonctif  délicat  interposé  aux  deux  muscles  intercostaux, 
<\u\  n'oppose  aucune  résistance  à  leur  progression,  et  c'est  ainsi  que, 
longeant  l'espace  intercostal  dans  une  étendue  plus  ou  moins  grande,  ils 
viennent  se  frayer  une  issue  sur  un  point  quelconque  à  travers  le  muscle 
intercostal  externe. 

C'est  également  la  voie  que  peuvent  suivre  les  abcès  qui  proviennent 
d'une  carie  de  la  partie  postérieure  des  côtes.  La  conséquence  qui  en 
découle,  c'est  qu'après  l'ouverture  d'un  abcès  froid  de  la  paroi  il  ne  faut 
pas  se  hâter  de  conclure  du  résultat  négatif  des  premières  explorations 
que  l'abcès  n'a  pas  une  origine  osseuse.  Il  faut,  au  contraire,  explorer 
dans  tous  les  sens  les  décollements  que  peut  présenter  la  cavité  de  l'abcès 


U' 


724  POITRINE.  —  ABcès. 

une  fois  ouvert,  combiner  ces  recherches  avec  Texamen  extérieur  des 
divers  points  de  la  paroi,  et  c'est  ainsi  qu'on  arrivera  à  établir  le  véri- 
table point  de  départ  de  la  maladie. 

Abcès  du  médiastim.  —  Nous  avons  eu,  diverses  fois,  dans  le  cours  de 
cet  article,  l'occasion  de  signaler  les  causes  traumatiques  qui  peuvent 
amener  TinGiammation  suppurativc  du  tissu  conjonctif  du  médiastin.  Tels 
sont,  entre  autres,  les  épanchements  sanguins,  surtout  lorsqu'ils  sont 
compliqués  de  pénétration  de  l'air  extérieur,  les  esquilles  osseuses  pro- 
venant d'une  fracture  des  côtes  ou  du  sternum,  les  corps  étrangers,  pro- 
jectiles et  autres  venus  du  dehors,  etc.  On  peut  y  joindre,  comme  pré- 
sentant avec  les  cas  précédents  une  grande  analogie,  les  déchirures  de 
l'œsophage  suivies  du  passage  dans  le  médiastin  postérieur  des  matières 
alimentaires  ou  des  corps  étrangers  venus  par  ce  conduit. 

Les  abcès  du  médiastin  reconnaissent,  en  outre,  d'autres  causes,  dont 
les  unes  ont  été  démontrées  par  l'observation,  tandis  que  les  autres  pré- 
sentent un  caractère  encore  hypothétique.  Parmi  les  premières,  celles  qui 
agissent  le  plus  fréquemment  sont,  sans  contredit,  les  affections  des  côtes 
ou  du  sternum,  soit  que  les  lésions  osseuses  résultent  d'un  traumatisme, 
soit  qu'elles  se  développent  sous  l'influence  d'une  diathèse  (scrofule  ou 
syphilis). 

Viennent  ensuite  les  collections  purulentes  qui,  provenant  de  régions 
^ou  d'organes  voisins,  envahissent  le  médiastin,  et  provoquent,  à  leur  tour, 
par  leur  présence,  l'inflammation  du  tissu  conjonctif  de  cette  cavité.  Nous 
avons  vu  plus  haut  que  les  abcès  ossifluents  d'origine  rachidienne  occu- 
pent fréquemment  le  médiastin  postérieur.  Il  est  très-rare,  au  contraire, 
de  voir  des  abcès  profonds  du  cou,  situés  en  avant  de  Taponévrose  cervi- 
cale profonde,  se  porter  en  arrière  et  suivre  l'œsophage.  Le  pus,  dans  ce 
cas,  longe  ordinairement  la  gaine  des  vaisseaux  ou  la  trachée,  et  se  trouve 
ainsi  conduit  en  avant  dans  une  loge  dont  les  expansions  terminales  de 
l'aponévrose  cervicale  profonde  et  le  péricarde  forment  la  paroi  posté- 
rieure, et  dont  la  paroi  antérieure  est  constituée  par  le  sternum.  A  côté  de 
ces  cas  se  placent  ceux  dans  lesquels  le  pus  provient  d'un  épanchement 
de  la  plèvre  ou  d'un  abcès  du  poumon.  Bien  que  le  mémoire  de  Lamarti- 
nière  renferme  trois  observations  de  ce  genre,  le  fait  doit  être  assez  rare, 
à  cause  de  la  résistance  opposée  par  les  fausses  membranes  pleurales. 
Enfm,  les  adénopathies,  tuberculeuses  et  autres,  des  nombreux  ganglions 
qui  occupent  le  médiastin,  peuvent  provoquer  l'inflammation  suppurative 
du  tissu  conjonctif  circonvoisin. 

Parmi  les  causes  obscures  ou  contestées  des  abcès  du  médiastin,  il 
faut  placer  en  première  ligne  la  médiaslinite  essentielle,  spontanée, 
dont  Daudé  s'est  efforcé  de  démontrer  l'existence,  en  s'appuyant  sur  ses 
propres  observations  et  surtout  sur  celles  qu'il  a  empruntées  à  Guntner, 
ainsi  que  certains  faits  de  métastase  rhumatismale  dont  le  premier  de 
ces  deux  observateurs  a  publié  un  cas  intéressant. 

Quel  que  soit  le  point  de  départ  des  accidents  inflammatoires  qui  pré- 
cèdent la  formation  de  l'abcès,  les  symptômes  du  début  présentent  une 


POITRINE.  —  ABCÈS.  728 

• 

obscurité  facile  à  comprendre.  Après  avoir  éprouvé,  pendant  quelques 
jours,  du  malaise,  de  la  courbature,  les  malades  sont  pris  d'une  fièvre 
plus  ou  moins  intense  ;  en  même  temps,  ils  accusent  derrière  le  sternum 
«  une  douleur  fixe,  profonde,  généralement  sourde,  continue,  rarement 
lancinante,  exceptionnellement  très-aigue;  parfois  elle  traverse  la  poi-  ; 
trine  de  part  en  part  du  sternum  à  la  colonne  vertébrale  »  (Duplay). 

En  même  temps  se  développent,  avec  une  intensité  naturellement  très- 
variable  suivant  les  cas,  les  divers  signes  physiques  ou  rationnels  com- 
muns à  la  plupart  des  affections  dont  le  médiastin  peut  être  le  siège  et  qui 
ne  sont  au  fond  que  les  manifestations  variées  d'un  fait  primordial,  la 
compression.  Le  tableau  en  a  été  tracé  dans  un  autre  article,  à  l'occa- 
sion de  la  pathologie  générale  du  médiastin  (Voy.  Médiastin,  t.  XXII, 
p.  4).  Nous  nous  contenterons  donc  de  reproduire  ici  le  résumé  qui  le 
termine  : 

1^  Voussure  et  déformation  de  la  région  sternale  (symptôme  rare  dans 
les  cas  d* abcès; 

2^  Compression  des  vaisseaux,  surtout  de  la  veine  cave  supérieure,  et 
consécutivement  circulation  complémentaire,  œdème  de  la  face  et  des 
parties  supérieures  du  tronc; 

3^  Compression  de  la  trachée  et  des  bronches,  et  consécutivement 
dyspnée,  comage  inspiratoire,  diminution  du  murmure  vésiculaire,  em- 
physème ; 

4°  Compression  ou  irritation  des  nerfs  pneumo-gastriques,  récurrents, 
phréniques,  grands  sympathiques,  etc. ,  et  consécutivement  toux,  dysp- 
née, intermittences  particulières,  altérations  de  la  voix,  spasmes  de  la 
glotte,  inégalités  des  pupilles,  névralgies  multiples; 

5^  Compression  de  l'œsophage  et  dysphagie. 

n  est  à  peine  besoin  d'ajouter  que  l'apparition  de  ces  divers  groupes  de 
symptômes  est  liée  au  siège  particulier  de  l'inflammation,  que  certains 
d'entre  eux  peuvent  manquer  ou  passer  inaperçus,  que,  dans  les  cas 
notamment  où  l'affection  a  une  marche  chronique,  comme  dans  certains 
abcès  symptomatiques  de  la  carie  du  sternum,  son  développement  peut- 
être  absolument  insidieux. 

Dans  tous  les  cas,  quelles  que  soient  la  violence  et  la  soudaineté  des  ac- 
cidents, il  n'est  pas  un  des  symptômes  énumérés  ci-dessus,  y  compris  la 
douleur,  qui  soit  pathognomonique  de  la  formation  d'un  abcès  du  mé- 
diastin, et  le  diagnostic  reste  forcément  incertain  jusqu'au  moment  de 
l'apparition  d'une  tumeur  à  l'extérieur. 

Cette  tumeur  se  montre  presque  subitement,  plus  ou  moins  longtemps  /  - 
après  l'invasion  des  premiers  symptômes,  soit  au  niveau  de  la  fourchette 
sternale,   soit  près  de  l'appendice  xiphoïde,  soit  au  milieu  du  sternum  I 
(dans  les  cas  d'affection  primitive  de  cet  os),  soit  enfin  le  plus  souvent  l 
sur  ses  bords  et  particulièrement  le  long  du  bord  gauche,  vers  le  deuxième 
ou  troisième  espace  intercostal  (Guntner). 

Dès  qu'elle  a  franchi  la  paroi  thoracique,  la  tumeur  prend  de  l'exten- 
sion ;  elle  est  molle,  fluctuante,  réductible  par  la  compression,  tendue  au 


I 


726  POITRINE.  —  tohecrs  des  pakois  trobaciqcbs. 

contraire  dans  les  efforts  de  la  toux,  quelquefois  animée  de  mouvements 
communiqués  par  les  vaisseaux  sous-jacents,  mais  ne  donnant  aucnn  bruit 
particulier  à  Tauscultation. 

/  Abandonnée  à  elle-même,  la  poche  s'amincit  progressivement^  puis 
3*ouyre  et  livre  passage  à  une  masse  de  pus  généralement  dispropor- 
tionnée avec  son  volume.  Si  le  diagnostic  n'a  pu  être  fait  jusque-là  d'une 
manière  complète,  il  est  facile  alors  de  s'assurer  que  le  pus  Tient  de  Tin- 
térieur  de  la  cavité.  Lorsque  la  suppuration  est  établie,  elle  se  proWiige 
longtemps,  comme  dans  tous  les  trajets  anfractuoux,  irrégoliers,  àclii- 
piers  sinueux;  il  est  difficile  que,  dans  de  pareilles  conditions,  le 
travail  de  réparation  s'accomplisse  d'une  manière  satisfaisante:  aosn  la 
guérison,  ou  mieux  une  guérison  relative,  n'est-elle  souvent  obtenue 
qu'au  prix  d'une  fistule  permanente.  Quant  à  la  terminaison  fatale,  qui 
est  loin  d'être  rare,  elle  est  due  soit  à  Tabondance  de  la  suppuration  et 
au  développement  d'une  fièvre  hectique,  soit  à  des  accidents  de  septicé- 
mie aiguë. 

Le  traitement  doit  avoir  pour  but  :  1^  de  modérer  les  accidents  pri- 
mitifs qui  accompagnent  la  formation  de  l'abcès,  2*  d'ouvrir  une  lar;ge 
voie  à  l'écoulement  du  pus,  5*^  d'en  tarir  la  source,  s'il  est  possible. 

Pour  remplir  la  première  indication,  les  antiphlogistiques,  les  sédstifs, 
les  révulsifs,  doivent  être  employés  avec  une  énergie  proportionnée  à  l'in- 
tensité des  symptômes. 

Lorsque  l'abcès  se^montre  à  l'extérieur,  il  faut  l'ouvrir  largement  et  de 
bonne  heure,  recourir  ensuite  aux  injections  antiseptiques  pour  prévenir 
ou  combattre  l'altération  du  liquide  morbide. 

Si  l'ouverture  est  trop  élevée,  si  le  pus  s'écoule  mal,  et  que  des  accidents 
de  septicémie  se  manifestent,  il  peut  être  nécessaire  de  pratiquer  une 
contre-ouverture,  à  travers  le  sternum  lui-même,  au  point  le  plus  décliTe 
du  foyer.  Depuis  La  Martinière,  qui  l'a  préconisée,  la  trépanation  du  ster- 
num a  été  pratiquée  plusieurs  fois  pour  remédier  à  des  accidents  de  ce 
genre.  L'opération  est  simple  et  inoffensive,  si  l'on  se  met  à  l'abri  des 
inconvénients  qui  pourraient  résulter  de  l'ouverture  de  la  plèvre  ou  de  la 
lésion  de  la  mammaire  interne;  il  suffit  pour  cela  de  se  tenir  sur  la  ligne 
médiane. 

Si  la  formation  de  l'abcès  tient  à  la  présence  d'un  corps  éti^anger,  il 
faut  s'efforcer  de  l'extraire  (Voy.  p.  717). 

Lorsqu'il  s'agit  d'ostéite,  de  carie,  de  nécrose  du  sternum,  l'interven- 
tion chirurgicale  doit,  par  les  moyens  usités,  s'attaquer  à  la  cause  initiale 
de  l'abcès.  {Voy.  Sterîsdm). 

IH.  Tumeurs.  —  Les  tumeurs  de  la  poitrine  se  divisent,  comme  les 
abcès,  en  deux  grandes  catégories  :  1®  celles  qui  se  développent  primiti. 
vement  dans  les  parois  thoraciques,  2°  celles  qui  ont  leur  siège  dans  le 
médiastin. 

Tumeurs  des  parois  thoraciques.  —  Elles  forment  elles-mêmes  trois 
groupes  distincts  :  1*  tumeurs  du  sein,  2**  tumeurs  dépendant  des  autres 
parties  molles,  3°  tumeurs  dépendant  du  squelette.  Les  tumeurs  du  sein 


POITRINE.  —  TUMEURS  ou  véDiÀsn!!.  727 

confiiituent  une  classe  à  part  dont  la  description  a  été  faite  à  Tariicle 
Mamelles  (Voy.  ce  mot,  t.  XXI,  p.  540).  Pour  les  tumeurs  qui  dépendent 
du  squelette  (fibromes,  enchondromes,  exostoses,  cancer),  voir  les  ar- 
ticles Côtes  (t.  IX,  p.  581)  et  Stecikum.  Restent  les  tumeurs  du  deuxième 
^oupe,  qui  n'ont  qu'une  importance  très-secondaire,  sauf  le  lipdme,  qui 
se  développe  assez  fréquemment  dans  la  région  dorsale  et  peut  y  acquérir 
des  proportions  considérables.  La  plaie  qui  résulte  de  Tablation  de  ces 
tumeurs  volumineuses  a  peu  de  tendance  à  se  cicatriser  promptement  ; 
les  conditions  anatomiques  dont  il  a  été  déjà  question  la  prédisposent, 
au  contraire,  aux  décollements,  aux  fusées  purulentes  et,  par  suite,  aux 
suppurations  prolongées.  Viennent  ensuite  les  tumeurs  ërectUes,  qui 
n'offrent  aucune  particularité  à  signaler,  puis  les  kystes  de  toute  nature, 
sébacés,  mélicériques,  séreux,  hydatiques.  Ces  derniers  ont  quelquefois 
pour  siège  le  tissu  conjonctif  sous-pleural  et  forment,  à  la  longue,  des 
tumeurs  qui  font  saillie  à  la  fois  à  l'intérieur  et  à  l'extérieur  du  thorax. 

11  est  une  variété  de  tumeur  thoracique  qui  doit  être  entièrement  dis- 
tinguée des  précédentes  parce  qu'elle  constitue  une  sorte  de  Noli  me  tan- 
gère  qui  ne  comporte  que  l'emploi  de  moyens  purement  palliatifs.  C'est 
la  pneumocèley  qui  diffère  autant  de  la  hernie  traumatique  du  poumon 
décrite  plus  haut  (page  706)  qu'une  hernie  abdominale  diffère  d'une  éven- 
tration  par  suite  de  traumatisme.  Sa  mollesse  élastique,  sa  sonorité,  et 
enfin  les  signes  stéthoscopiques  qu'elle  fournit,  la  différencient  suffi- 
samment des  tumeurs  liquides  avec  lesquelles  un  examen  superficiel 
pourrait  la  faire  confondre  (Voy.  Poumon,  pathologie). 

Tumeurs  du  méuustus.  —  Au  premier  rang  des  tumeurs  intra-thora-  i 
ciques  se  placent  les  anévrysmes  de  Taorte,  qui  forment  une  sorte  de  J 
transition  entre  les.  tumeurs  de  la  paroi  et  celles  de  la  cavité,  par  suite 
.  de  leur  tendance  à  faire  saillie  au  dehors,  après  avoir  usé  lentement  les 
parois  thoraciques.  Ils  ne  sauraient,  néanmoins,  rentrer  dans  le  cadre  de 
cet  article,  l'étude  en  ayant  été  faite  complètement  ailleurs  {Voy.  Aorte, 
anévrysmes ,  t.  II,  p.  752).  Il  en  est  de  même  des  tumeurs  et  des  dé- 
générescences dont  l'œsophage  peut  être  le  siège  (Voy.  Œsophage,  t.  XXIV, 
p.  381),  à  fortiori  des  anévrysmes.et  des  hypertrophies  du  Cœur  (Voy. 
t.  VIII,  p.  475),  et  enfin  des  tumeurs  diverses  qui,  ayant  pris  naissance 
dans  la  Plèvre  ou  dans  le  Poumon,  envahissent  ultérieurement  la  cavité 
du  médiastin.  Pour  délimiter  exactement  notre  sujet,  nous  devrions  y 
comprendre  uniquement,  les  tumeurs  qui  se  développent  primitivement 
dans  le  tissu  conjonctif  du  médiastin,  et  en  exclure  toutes  celles  qui  se 
localisent  d'abord  dans  les  organes  qu'il  entoure.  11  est  cependant  une 
exception  que  commande  l'état  actuel  de  la  science  sur  un  point  spécial 
de  la  question  ;  il  s'agit  de  la  relation  intime  qui,  d'après  certaines  don- 
nées nouvelles,  rattacherait  à  la   dégénérescence  des  ganglions  lympha- 
tiques, si  nombreux  dans  cette  région,  un  grand  nombre  de  tumeurs  mé- 
diastines  dont  la  pathogénie  avait  échappé  jusqu'ici  à  une  explication 
satisfaisante.  Ce  n'est  pas  qu'on  ait  méconnu,  avant  notre  époque,  l'in- 
fluence incontestable  que  les  affections  des  ganglions  thoraciques  devaient 


728  POITRINE.  —  tumbora  du  néDusToi. 

avoir  sur  le  tissu  conjonctif  environnant;  tous  les  auteurs  TaTaient,  aa 
contraire,  signalée  et  Texpression  de  périadénite^  prise  dans  son  sens  le 
plus  général,  est  employée  depuis  longtemps  pour  traduire  cette  idée  de 
propagation.  Or,  du  moment  que  le  fait  était  reconnu  dans  les  cas  d*adé- 
ni  te,  d'hyperlrophie  ou  de  dégénérescence  tuberculeuse,  il  éUii  à  for- 
tiori naturel  de  Kadmettre  pour  les  néoplasies  à  marche  envahissante  qui 
trouvent  dans  le  tissu  conjonctif  un  terrain  si  favorable  à  leur  dé? eloppe- 
ment.  Ce  n*était  là  néanmoins  qu'une  conception  théorique  qui  ne  s'ap- 
puyait que  sur  un  petit  nombre  de  faits  douteux  ;  l'examen  histologiqiie 
est  venu  lui  donner  sa  consécration  définitive,  en  démontrant  que  boa 
nombre  de  tumeurs  cancéreuses  du  médiastin  sont  en  réalité  deslympha- 
dénomes,  et,  comme  la  distinction  clinique  entre  les  deux  espèces  de 
tumeurs  est  à  peu  près  impossible  à  établir,  on  est  réduit  à  les  confondre 
dans  la  description. 

11  y  a  peu  d'années  encore,  la  littérature  médicale  était  assez  pauvre 
en  ce  qui  concerne  les  tumeurs  du  médiastin,  et  le  court  chapitre  qu'y  a 
consacré  Nélaton  représentait  à  peu  près  le  bilan  de  nos  connaissances 
sur  ce  sujet.  Les  observations  se  sont  multipliées  à  notre  époque,  des 
communications  intéressantes  ont  été  adressées  aux  sociétés  scientiGques, 
des  mémoires  originaux  et  des  travaux  analytiques  auxquels  s'attachent 
les  noms  de  Bennet,  Daudé,  Siebert,  Eger,  Rendu,  etc.,  ont  été  publiés, 
et,  si  la  thérapeutique  continue  à  rester  fatalement  désarmée,  les  ques- 
tions du  diagnostic  et  du  pronostic  commencent  au  moins  à  sortir  de  leur 
ancienne  obscurité. 

En  dehors  des  tumeurs  malignes  qui  sont  de  beaucoup  celles  qui  ont 
été  observées  le  plus  souvent,  on  rencontre  dans  les  auteurs  quelques 
exemples  de  tumeurs  d'autre  nature.  Ainsi,  on  trouve  citée  partout  lob- 
servation,  recueillie  par  le  docteur  Gordon,  d'une  tumeur  éyigénélique, 
contenant  de  la  matière  sébacée,  des  poils,  un  fragment  d^os  ressemblant 
à  un  maxillaire  et  sept  dents.  Daudé  a  rassemblé  plusieurs  cas  de  tumeurs 
graisseuses^  qui  étaient  épars  dans  diverses  publications,  et  qui,  consta- 
tés seulement  à  Tautopsie,  auraient  été  caractérisés  pendant  la  vie  par 
des  accidents  d'asthme,  de  dyspnée,  d'angine  de  poitrine.  Il  fait  remar- 
quer, avec  raison,  que  de  pareilles  tumeurs  s'accompagnant  d'habitude 
d'une  surcharge  graisseuse  du  péricarde,  du  cœur  et  d'autres  organes, 
c'est  aux  lésions  concomitantes,  plutôt  qu'à  la  tumeur  elle-même,  qu'il 
faut  attribuer  la  plus  grande  part  dans  les  symptômes  observes  et  dans  la 
terminaison  fatale. 

On  a  signalé  aussi  dans  le  médiastin  des  kystes  de  diverse  nature 
qui  s'étaient  formés  soit  sur  les  parois  de  cette  cavité,  soit  dans  la  cavité 
elle-même.  C'est  pour  des  cas  de  ce  genre  que  Desault  et  Larrey  ouvrirent 
la  poitrine,  croyant  ponctionner  un  épanchement  du  péricarde  ;  le  dic- 
tionnaire en  60  volumes  renferme  l'observation  remarquable  d'un  sujet 
chez  lequel  on  trouva,  à  l'autopsie,  deux  vastes  kystes  hydatiques  placés 
de  chaque  côté  de  la  poitrine,  depuis  son  sonunet  jusqu'au  diaphragme, 
repoussant  le  cœur  en  bas  jusqu'à  l'épigastre,  comprimant  les  poumons, 


POITRINE.    —  TUMEUBS   DU   XÉDIÂSTIII.  119 

qui  se  trouvaient  réduits  à  un  feuillet  très-mince,  aplatis  et  relégués  à  la 
partie  antérieure  de  la  poitrine,  sous  les  cartilages  des  côtes. 

Daudé  a  relevé  dans  les  Essais  et  observations  de  la  Société  de  méde- 
cine d'Edimbotirg  le  cas  d'un  énorme  kyste  à  parois  fibreuses  occupant 
une  grande  partie  de  la  cavité  de  la  poitrine,  passant  avec  l'œsophage 
au  travers  du  diaphragme,  et  se  prolongeant  le  long  de  la  petite  courbure 
de  Testomac  ;  la  tumeur  renfermait,  dans  des  loges  séparées,  des  matières 
méiicériques,  stéatomateuses,  athéromateuses  et  purulentes. 

Daniel  Mollière,  faisant  Tautopsie  d*un  sujet  inconnu,  a  trouvé  égale- 
ment, dans  le  médiastin,  un  kyste  à  échinococques.  D'autres  observa- 
tions ont  été  publiées  ;  ce  sont  des  analyses  exactes,  souvent  minu- 
tieuses, de  faits  extrêmement  curieux;  mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai 
qu'une  histoire  synthétique  des  kystes  du  médiastin  est  entièrement  à 
faire,  surtout  au  point  de  vue  clinique. 

Nous  signalerons  enfin,  pour  mémoire,  les  cas  de  tumeurs  formées  par 
des  ganglions  lymphatiques  atteints  d'hypertrophie  ou  d'infiltration 
tuberculeuse.  Ces  lésions  des  ganglions,  qui  acquièrent  parfois  une  telle 
importance  qu'on  a  créé,  pour  en  désigner  l'évolution,  l'expression  de 
phthisie  ganglionaire,  se  trouvent  décrites  ailleurs  dans  le  Dictionnaire 
{Voy.  Lymphatique  (système),  altérations  bénignes^  t.  XXI,  p.  81,  néo- 
plasmes, p.  88  ;  Voy.  aussi  Phthisie,  adénopathie  trachéo -bronchique ^ 
t.  XXVU,  p.  290et452). 

Après  ces  éliminations  successives,  il  ne  nous  reste  plus  à  nous  occu- 
per que  des  tumeurs  malignes,  qui  sont  celles  qui  ont,  de  tout  temps, 
plus  spécialement  fixé  l'attention. 

En  parcourant  les  diverses  observations  recueillies,  on  trouve  signalés, 
d'une  manière  un  peu  vague,  il  est  vrai,  et  le  plus  souvent  sans  la  ga- 
rantie de  l'examen  histologique,  des  tumeurs  colloïdes,  des  fibromes,  des 
sarcomes,  des  carcinomes.  Jusqu'ici  c'était  la  forme  encéphaloïde  qui 
était  considérée  comme  prédominante  ;  dans  ces  dernières  années,  des  \ 
observations  microscopiques  plus  exactes  ont  semblé  démontrer  que  le  j 
plus  grand  nombre  des  tumeurs  malignes  du  médiastin  ne  sont  en  réa-  / 
lité  que  des  lymphadénomes.  Cette  manière  de  voir  se  concilie  parfaite- 
ment avec  un  fait  depuis  longtemps  signalé,  mais  dont  Rendu  a,  le  pre- 
mier, fait  ressortir  l'importance.  Tandis,  en  effet,  que  dans  les  autres 
régions  le  cancer  ne  se  manifeste  généralement  qu'à  un  âge  avancé  de  la 
vie,  les  tumeurs  du  médiastin  apparaissent  de  bien  meilleure  heure.  C'est 
chez  des  personnes  jeunes,  en  pleine  santé ,  la  plupart  du  temps  sans  an- 
técédents héréditaires  et  sans  causes  provocatrices,  que  la  maladie  éclate; 
la  plupart  des  sujets  ont  de  vingt-cinq  à  trente-cinq  ans,  quelques-uns 
n'ont  pas  encore  atteint  cet  âge,  aucun  n'a  dépassé  soixante  ans.  Or  les 
lympliadénomes  affectent  de  préférence  les  sujets  encore  jeunes  ;  les  gan- 
glions, dans  cette  forme  de  cancer,  sont  souvent  seuls  affectés,  et  presque 
toujours  ils  le  sont  primitivement,  à  Tinverse  de  ce  qui  a  lieu  pour  les 
autres  néoplasies  malignes;  enfin,  les  relations  qui  existent  souvent  entre 
les  tumeurs  du  médiastin  et  des  lésions  concomitantes  analogues  du  sys- 


750  POITRINE.  —  tumeurs  du  médiàstih. 

ième  lymphatique  général  constituent  une  présoinpiioo  de  plus  en  fa- 
yeur  de  leur  structure  lymphoïde.  La  conclusion  de  ces  nouvelles  donaéet, 
qui  reposent  à  la  fois  sur  la  question  de  Tâge,  sur  les  caractères  exlérieors 
et  sur  l'examen  hislologique,  conduit  à  considérer  un  grand  nombre,  aa 
moins,  des  tumeurs  du  médiastin,  comme  ayant  leur  point  de  départ  dans 
les  ganglions  intra-tlioraciques.  On  est  donc  loin  aujourd'hui  de  I  opi- 
nion, émise  autrefois,  qui  tendait  à  ne  voir  dans  ces  tumeurs  que  des  af- 
fections secondaires  liées  à  Taltération  primitive  des  organes  voisîiis,  opi- 
nion réfutée  du  reste  par  des  faits  bien  établis  dans  lesquels  les  organes 
thoraciques  ont  été  trouvés  parfaitement  sains,  malgré  la  présence  d'un 
cancer  dans  le  médiastin.  Le  plus  souvent,  il  est  vrai,  raffeclion  franchit 
ses  premières  limites,  et  on  trouve  mentionnée  "simultanémoat,  dans  la 
plupart  des  observations,  la  dégénérescence  de  la  plèvre,  du  poumon  ou 
du  péricarde,  ce  qui  devient,  pour  le  diagnostic,  une  source  de  confu- 
sion facile  à  comprendre. 

Après  avoir  pris  naissance  dans  le  médiastin,  la  tumeur  8*aocroit  dans 
tous  les  sens  et  surtout  suivant  Taxe  vertical  de  la  poitrine  ;  elle  amène 
quelquefois  des  déformations  et  des  voussures  de  la  paroi,  mais  plus 
souvent  elle  refoule  le  cœur  en  arrière  et  s'insinue  dans  le  tissu  conjooetif 
des  espaces  intervasculaires. 

Lorsqu'elle  a  acquis  un  certain  volume,  le  poumon,  les  bronches,  la 
trachée,  le  cœur,  se  trouvent  comprimés  et  gênés  dans  leurs  fonctions.  Oo 
a  trouvé  le  cœur  atrophié,  ses  parois  flasques  et  aroîncies  ;  presque 
toujours  une  partie  plus  ou  moins  grande  du  poumon  est  aplatie,  indurée, 
imperméable  à  l'air.  Enfin,  dans  d'autres  cas,  Tœsophage,  le  pneumo-gas- 
trique,  le  grand  sympathique,  se  trouvent  englobés  dans  le  tissu  morbide, 
et  le  fait  de  leur  compression  devient  la  source  d'accidents  caractéris- 
tiques. 

La  masse  cancéreuse  continuant  à  s'accroître  tend  enCn  à  s'échapper 
hors  de  la  poitrine  ;  le  plus  souvent  elle  passe  à  travers  les  espaces  iuter- 
'  costaux  et  vient  faire  saillie  sous  les  insertions  du  grand  pectoral  qu'elle 
/  repousse  en  avant;  d'autres  fois,  elle  sort  de  la  poitrine  par  sa  partie  supé- 
rieure et  vient  se  porter  au-dessus  de  la  fourchette  sternale  à  la  partie 
inférieure  du  cou. 

Un  fait  remarquable  et  bien  des  fois  signalé,  c'est  la  manière  différente 
dont  les  deux  ordres  de  vaisseaux  sanguins  de  la  cavité  thoracique  su- 
bissent Faction  du  tissu  morbide  qui  les  enserre.  Les  parois  des  artères 
résistent  à  la  destruction  ;  la  masse  cancéreuse  semble  se  mouler  sur  elles 
/  et  leur  fournit  une  sorte  de  canal  proportionné  à  leur  calibre,  de  telle 
sorte  que  ces  vaisseaux  paraissent  échapper  à  la  compression.  Les  veines, 
au  contraire,  sont  souvent  détruites  dans  une  partie  de  leur  étendue,  et 
laissent  passer  dans  leur  intérieur  le  tissu  morbide  qui  est  en  contact 
immédiat  avec  le  courant  sanguin.  La  production  cancéreuse  semble  alors 
se  propager  avec  facilité  dans  la  cavité  veineuse,  et  on  l'a  vue  s'étendre 
jusque  dans  l'oreillette  droite,  ou  remonter  vers  le  cou  jusque  dans  les 
veines  sous-clavière  et  jugulaire  interne. 


JPOITRINË.   —  TUMEURS  DU  lÉDIASTIK.  731 

C'est  sans  doute  par  la  Toie  des  veines  que  se  dissémine  l'élément  ^ 
cancéreux  dans  un  certain  nombre  des  cas,  assez  rares  d'ailleurs,  où  Ion 
voit  raffection,  au  lieu  de  rester  confinée  dans  le  thorax,  se  généraliser 
à  la  façon  des  tumeurs  les  plus  malignes.  Ainsi,  dans  certaines  obser- 
vations d'Eger  et  de  Bcnnett,  on  a  trouvé  des  noyaux  cancéreux  répandus 
dans  le  foie  et  dans  les  reins,  sans  que  les  ganglions  des  régions  corres- 
pondantes  fussent  intéressés.  D'autres  fois,  au  contraire,  ce  sont  les 
lymphatiques  qui  semblent  avoir  été  la  voie  de  transmision  :  tel  est, 
par  exemple,  le  fait  recueilli  par  Mauriac,  où  les  ganglions  sus-clavicu- 
laires,  cervicaux,  axillaires  et  mésentériques,  étaient  envahis  à  l'exclusion 
de  tout  autre  organe. 

Avant  de  se  manifester  par  des  accidents  sérieux,  le  développement  . 
d'une  tumeur  du  médiastin  s'accomplit  le  plus  souvent  d'une  manière  ' 
insidieuse,  et  au  milieu  de  simples  prodromes  susceptibles  d'égarer  i 
l'attention.  Ainsi,  pendant  des  mois,  les  malades  se  plaignent  d'une  ' 
oppression  légère  et  dé  quelques  palpitations;  on  songe  à  une  affection  du 
poumon  ou  à  des  troubles  cardiaques,  et  rien  ne  mettrait,  à  ce  moment,  | 
sur  la  voie  de  la  vérité,  s'il  n'apparaissait  bien  souvent  en  même  temps  i 
une  douleur  fixe,  continue,  bien  limitée,  plutôt  constrictive  que  lanci- 
nante, qui  a  son  siège,  d'ordinaire,  en  arrière  du  sternum,  vers  son  tiers 
supérieur.  Lorsqu'on  est  prévenu,  cette  douleur  doit  éveiller  l'idée  soit 
d'une  affection  de  l'os,  soit  de  la  formation  d'un  abcès,  d'un  anévrysme 
ou  d'une  tumeur  quelconque. 

Si  l'affection  retentit  rapidement  sur  les  ganglions  des  régions  voisines, 
avec  engorgement  des  veines  du  cou  et  œdème  de  la  face,  l'ensemble  des 
symptômes  est  plus  caractéristique. 

D'autres  fois,  c'est  l'oppression  qui  fait  des  progrès  rapides,  sans  que 
l'auscultation  du  .poumon  et  du  cœur  rende  suffisamment  compte  de 
l'intensité  des  accidents. 

Enfin,  après  des  prodromes  plus  ou  moins  vagues,  la  maladie  peut, 
dans  certains  cas,  se  manifester  tout  d'un  coup  par  des  douleurs  intercos- 
tales et  brachiales  lancinantes,  qui  tiennent  tantôt  à  des  irradiations  né- 
vralgiques, tantôt  à  une  invasion  subite  de  la  plèvre  par  le  néoplasme. 

En  résumé,  rien  n'est  plus  variable  que  le  mode  d'invasion  des  acci- 
dents, et  l'on  n'a  pas  lieu  d'être  surpris  des  erreurs  de  diagnostic  qui  ont 
été  si  souvent  commises. 

Il  arrive  enfin  un  moment  où  se  manifestent,  du  côté  des  organes  et 
des  appareils  en  contact  avec  la  tumeur,  ces  phénomènes  si  variés  de 
compression  dont  le  tableau  d'ensemble  a  été  tracé  dans  l'article  auquel 
nous  avons  déjà  renvoyé  à  l'occasion  des  abcès  delà  région  (Voy,  Médias- 
tin, t.  XXII,  p.  4).  Les  gros  troncs  veineux,  les  bronches,  la  trachée,  les 
nerfs  phrénique,  pneumo-gastrique ,  grand  sympathique ,  l'œsophage, 
peuvent  ensemble  ou  isolément  être  comprimés,  irrités,  altérés  :  de  là 
des  troubles  fonctionnels  variables  dont  l'interprétation  fournit  des 
données  précieuses  sur  le  siège  et  le  volume  de  la  tumeur.  La  percussion 
et  l'auscultation  apportent,  de  leur  côté,  leur  contingent  de  signes  phy- 


732  rOITRlNE.  —  tumeubs  du  hédustin. 

siques  ;  toutefois  il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  Texistence  si  fréqueoie  des 
lésions  concomitantes  de  la  plèvre,  du  poumon,  du  péricarde,  ni  rapporter 
à  la  tumeur  elle-même  ce  qui  est  le  fait  de  ces  complications.  Le  diagnostic 
de  chaque  cas  pris  en  particulier  devient  ainsi  une  sorte  de  problème 
très-complexe  dont  la  solution  présente  souvent  les  plus  grandes  diffi- 
cultés. 

Les  troubles  circulatoires  résultant  de  la  compression  et  de  l'oblité- 
ration partielle  ou  totale  de  certains  vaisseaux  sont  ceux  qui  se  montrent 
d'ordinaire  les  premiers  et  qui  ont  le  plus  frappé  Pesprit  des  obsem- 
teurs.  L'œdème  de  la  partie  supérieure  du  corps,  le  développement  d'âne 
circulation  collatérale  complémentaire,  la  cyanose  enfin,  peuvoit  s'expli- 
quer ainsi  d'une  manière  assez  rationnelle.  Mais  il  est  une  autre  catégorie 
d'accidents,  à  forme  souvent  paroxystique,  qu'il  est  plus  difficile  d'inter- 
préter en  admettant  banalement,  comme  on  l'a  fait  jusqu'ici,  une  seule 
cause  pathogénique,  la  compression  :  tek  sont  les  accès  de  dyspnée  qui 
vont  jusqu'à  produire  le  phénomène  du  comage^  les  irrégularités  qui  se 
manifestent  dans  la  circulation  cardiaque,  les  syncopes,  les  phénomène; 
oculo-pupillaires  et  enfin  la  dysphagie.  Dans  un  travail  de  revue  critiçoe 
récemment  paru  et  qui  représente  fidèlement  l'état  actuel  de  U 
science.  Rendu  a  fait  ressortir  le  caractère  nerveux  de  la  plupart  de  ces 
phénomènes  et  l'impossibilité  de  les  rattacher  au  fait  unique  de  U 
compression.  L'interprétation  de  cet  ordre  de  faits  laisse  encore  à 
désirer  et  appelle  de  nouvelles  recherches  pour  lesquelles  devront  être 
utilisées,  concurremment  avec  les  données  d'une  analyse  physiologique 
rigoureuse  des  symptômes  observés,  les  connaissances  récemment  acqui- 
ses sur  l'innervation  du  cœur  et  du  poumon,  sur  le  rôle  du  pneumo-gas- 
trique  et  du  grand  sympathique.  Ce  qui  semble  acquis  dès  à  présent, 
c'est  que,  dans  le  plus  grand  nombre  des  cas,  l'invasion  des  troubles 
nerveux  correspond  à  une  période  déjà  avancée  de  la  maladie,  qu'elle  a 
une  signification  pronostique  ti*ès-grave,  et  doit  faire  craindre  l'immi- 
nence d'une  terminaison  subite. 

;     Comparée  à  la  marche  des  affections  cancéreuses  des  autres  régions, 
celle   des  tumeurs  du  médiastin  est  généralement  assez  rapide,  et  Ifê 
sujets  sont  enlevés  avant  d'atteindre  la  période  où  la  cachexie  se  mani- 
feste. Il  n'est  pas  rare  de  voir  les  malades  succomber  trois  ou  quatre 
mois  après  l'apparition  des  premiers  accidents  ;  une  durée  de  vingt  mois 
")   est  un  maximum  qui  n'a  été  constaté  jusqu'ici  qu'une  seule  fois. 
/      La  terminaison  nécessairement  fatale  peut  se  produire  de  deux  manié- 
.    res  :  tantôt  par  asphyxie  lente,  tantôt  dans  un  accès  de  suffocation  ou  dans 
.    une  syncope.  Le  premier  mode  de  terminaison  est  le  mode  ordinaire, 
quand  la  tumeur  siège  sous  le  sternum  et  comprime  graduellement  les 
vaisseaux  du  médiastin.  Le  malade  s'asphyxie  peu   à  peu  :  Thématose 
faisant  de  plus  en  plus  défaut,  la  cyanose  augmente  graduellement,  la  sen- 
sibilité des  bronches  s'émousse ,  les  mucosités  s'y  accumulent  et  la  mort 
survient  lentement,   sans  accès    de    suffocation.   Lorsque   la  tumeur 
comprime  la  trachée ,  ou  qu'il  se  forme  rapidement  un  épanchemeot 


POITRINE.   —  BIBLIOGRAPHIB.  733 

dans  le  péricarde  ou  dans  la  plèvre,  les  accès  de  suffocation  se  répètent 
à  des  intenralles  de  plus  en  plus  rapprochés,  et  le  malade  succombe 
dans  un  de  ces  accès.  Quelques-uns  meurent  subitement  sans  que  l'autop- 
sie puisse  toujours  expliquer  d'une  manière  satisfaisante  celte  cessation 
brusque  de  Texistence  ;  on  invoque  aloi's  la  syncope  qu'on  attribue  soit  à 
la  formation  d'une  embolie,  soit  à  une  perturbation  fonctionnelle  des 
nerfs  cardiaques,  d'autant  mieux  que  dans  un  certain  nombre  de  ces  cas 
on  a  trouvé  à  Tautopsie  le  pneumo-gastrique  et  le  grand  sympathique 
englobés  dans  la  tumeur.  EnGn,  mais  d'une  manière  exceptionnelle, 
lorsque  la  tumeur  a  fait  issue  au  dehors,  le  malade  peut  mourir  épuisé 
par  la  douleur,  les  hémorrhagies  externes  et  les  pertes  sanieuses  qu'en- 
traîne un  ulcère  cancéreux. 

Il  est  à  peine  besoin  d'ajouter  que  l'art  chirurgical  reste  absolument 
impuissant  en  présence  de  pareilles  affections.  L'exemple  de  Richerand 
n'a  pas  trouvé  d'imitateurs  ;  l'incertitude  où  l'on  est  toujours  sur  les  li- 
mites profondes  de  la  dégénérescence  constitue,  pour  les  opérateurs  même 
les  plus  hardis,  une  contre-indication  formelle. 

Les  considérations  qui  précèdent  s'appliquent  aux  tumeurs  malignes  du 
médiastin,  les  seules  qui  généralement  aient  été  soupçonnées  ou  reconnues 
pendant  la  vie. 

Les  autres  sont  d'ordinaire  ignorées,  et  c'est  l'autopsie  seule  qui  les  fait 
découvrir  ;  il  est  évident  néanmoins  que^  si  un  kyste  venait  faire  saillie 
au-dessus  de  la  fourchette  sternale  et  que  le  diagnostic  pût  en  être  établi 
d'une  manière  convenable,  rien  ne  s'opposerait  à  ce  qu'il  fût  traité  par 
la  ponction  et  les  injections  iodées,  grâce  surtout  aux  conditions  de 
sécurité  que  présentent  les   appareils  aspirateurs. 


Indépendamment  des  traites  généraux  d*anatomie  topograghique  et  de  pathologie  chirurgicale , 

consulter  la  bibliographie  particulière  des  articles  :  Aorte,  Cœur,  Côtes,  Diaphragme,  Expht- 

sÊiiG,  Mamelles,  Méoiastist,  Œsophage,  PiniCAROE,  Plèvre,  Podmox,  Stibmom. 
Consulter,  en  outre,  pour  la  période  antérieure  à  1842,  Tart.  Poitrise  (t.  XXY,  p.  530),  du 

Dictionnaire  de  médecine  en  30  toI. 
SiBsoN  (Fr.)t  Recherches  sur  la  situation  des  organes  intérieurs,  et  en  particulier  des  organes 

thoraciques,  considérés  dans  leurs  rapports  entre  eux  et  a?ec  les  parois  des  cavités  Tiscé- 

raies,   suivies  de  quelques  applications  à  la  pathologie  et  au   diagnostic  (ÏAmdon  medicttl 

Gazette^  mars,  avril,  mai  1848). 
Martin,  Des  lésions  des  artères  intercostales,  th&^  de  Paris,  1855. 
\etro:<-Lacroix,  Plaies  de  poitrine  avec  hernie  de  l'épiploon,  thèse  de  Montpellier,  1858. 
Fraser,  Trcatise  upon  penetrating  wounds  of  the  Chest,  London,  1859. 
GOntner,  Sur  les  abcès  du  médiastin  {Œêterreich.  Zeitschrifl  fûr]prakt,  Eeilkunde^  1859). 
Dolbeau,  De  l'Emphysème  traumatique,  thèse  de  concours,  Paris,  1860. 
Troossead,  Épanchements  Iraumatiques  de  sang  dans  la  plèvre,  tu  Clinique  médicale  de  l'Hôtel- 

Dieu,  t.  I,  p.  692,  1"  édition,  Paris,  1861.  5«  édition  1877,  t.  I. 
Bbrcbon,   Un  chapitre  des  lacunes,  erreurs  et  imperfections  de  la  littérature  médicale  (Gaz, 

hebdom.,  1861). 
Woillez  (E.  J.),  Article  Poitrine,  in  Dictionnaire  du  diagnostic  médical ,  Paris,    1862.  —  Traité 

de  percussion  et  d'auscultation,  Paris,  1879. 
Legodest,  Traité  de  chirurgie  d'armée,  Paris,  1863.  —  2*  édition,  1872. 
Morel  La  VALLEE,  Rupture  du  péricarde,  bruit  de  roue  hydraulique,  bruit  de  moulin  (Gaz»  méd. 

de  Paris,  1864). 
Maxade,  Observation  de  pleurésie  avec  épanchement  et  abcès  phlegmoneux  des  parois  de  la  poi- 
.  trine  (Bulletin  de  thérap.,  1865,  t.  XXIX,  p.  130). 


734  POITRINE.  —  thoracbmt&sb. 

LsPLAT,  Des  abcès  de  voisinage  dans  la  pleurésie,  patkogéme  et  étude  clinique  des  abeès  àa 

parois  thoraciques  (Arch,  gén.  de  tnéd.,  1865»  6*  série,  t.  V,  p.  403). 
Akgeh  (Bcnj.},  Dos  plaies  pénétrantes  de  poitrine,  thèse  de  concours,  Paris,  1860. 
Smith,  Du  collapsus  ou  de  l'absence  de  coliapsus  pulmonaire  dans  les  plaies  pénétrantes  de  poi- 
trine, (Med.  Record,  1869,  analysé  in  Gaz.  hebd.  de  méd,  et  de  chir.,  1870,  2*  série,  t  TI1« 

p.  60. 
RisDOif  Bennett,  Lumleian  Lectures  on  the  natural  history  and  diagnosis  of  iatrathoraeie  caorer 

{DritUh  med,  Joum,,  1870). 
Waishb  (H.  \Y.),  Traité  clinique  des  maladies  de  la  poitrine,  trad.  et  ann.    par  Fonssigrives, 

Paris,  1870. 
DacdA  (J.),  Essai  pratique  sur  les  afîections  du  médiastin  (Montpellier  médical,  1871,  1.  IIYI 

cl  XXYil). 
SiÉBEAT,  Quelques  comidérations  sur  les  tumeurs  du  médiastin,  thèse  de  Paris,'  1872. 
Eger,  Zur  pathologie  der  mediastinal  Tumoren,  Breslau,  1872.  —  Ud^er  mediastinal  Tàmom 

(Arch,  fur  kliniicke  Chirurgie^  1875). 
Ghoké,  Étude  sur  une  variété  d'abcès  froids  thoraciques,  thèse  de  Paris,  1873. 
DdLAC,  De  la  blessure  des  artères  intercostales  dans  les  plaies  de  poitrine,  et  particuUèremeDt 

dans  la  paracentèse,  thèse  de  Paris,  1874. 
Lasèque  et  Dcput,  La  guerre  de  sécession  aux  États-Unis  au  point  de  vue  médical  et  Ghimr- 

gical  (Arch,  gén.  de  médecine^  1874,  6*  série,  t.  XXIH,  p.  98). 
Babtels  (de  Riel],  Étude  sur  les  abcès  péripleuraux  (Gaz.  hehd.  de  méd,  et  de  chir,,  1874, 

2*  série,  t.  XI,  p.  317). 
Arxoold  (J.),  Considérations  sur  le  degré  d'aptitude  physique  du  recrutement  de  l'Ecole  spéciale 

militaire  pour  l'année  1874-75  [Rec.  de  mém,  de  méd.  mil,,  t.  XXXI,  p.  1). 
Dexartial,  Contribution  à  l'étude  des  abcès  des  parois  latérales  du  thorax,  thèse  de  Paris,  1875. 
Serez,  Quelques  considérations  sur  trois  cas  de  phlegmon  diiTus  des  parois  du  thorax ,  thèse  4e 

Paris,  1875. 
UE5on  (H.),  Des  tumeurs  malignes  du  médiastin  (Arch.  gén,  de  méd.,  6*  série,  t.  XXTI,  p.  U5 

et  715).    ^ 
LEGRA.1D,  Des  abcès  des  parois  du  thorax,  causes  ou  conséquences  de  lésicMis  des  organes  thora- 
ciques, tbèse  de  Paris,  1876. 
DuPLAT,  Des  abcès  chroniques  des  parois  thoraciques  (Progrès  médical,  1876). 
GcTTiiARN  (P.),  Traité  du  diagnostic  des  maladies  des  organes  thorariques  et  abdomiMnx,  trad. 

sur  la  deuxième  édition  par  Uahx,  Paris,  1877. 
Rey>-ier,  Recherches  cliniques  et  expérimentales  sur  le  bruit  de  moulin  dans  les  traunuttsmes 

de  la  poitrine,  thèse  de  Paris,  1880. 

L.  Mehld;: 

01ȃIIATI0NS  QUI  SE  PRATIQUENT  SUR  LA  POITRIKE. 

Thoracentèse.  —  La  thoracentèse  ou  Ihoracocenlèse  est  \a  ponc- 
tion de  la  poitrine.  Je  ne  crois  pas  utile  de  revenir  ici  sur  Vhistoriqw^ 
de  cette  question,  historique  qui  a  été  retracé  en  détail  par  Bricheteau 
dans  son  rapport  à  l'Académie  en  1847,  par  Trousseau  dans  ses  levons 
cliniques,  par  Bouchut  dans  un  intéressant  mémoire  publié  en  1872. 

Je  reprends  la  question  en  1843  et  1844,  époque  à  laquelle  Trousseau 
fit  ses  premières  communications  à  l'Académie  de  médecine  sur  Toppor- 
tunité  de  la  thoracentèse  dans  la  pleurésie  aiguë. 

Trousseau,  il  faut  le  dire,  rencontra  pendant  plusieurs  années  une 
vive  résistance,  mais,  persévérant  et  convaincu,  il  dota  définitivement  la 
médecine  de  Topération  de  la  thoracentèse. 

Avant  lui,  en  effet,  la  ponction  de  la  poitrine,  si  souvent  reprise  et 
délaissée  depuis  Ilippocrate,  ne  s'était,  pour  ainsi  dire,  adressée  qu  aux 
épanchements  purulents,  et,  d'autre  part,  les  travaux  contradictoires  de 
Schuh  et  de  Hope  avaient  à  peine  ébauché,  sans  la  résoudre,  la  question 
des  épanchements  séreux  ;  de  sorte  que  la  thoracentèse  abandonnée, 
discréditée,   sévèrement  blâmée  par  la  plupart,  serait  peut-être   encore 


POITRINE.   THOnAGBMTÈSE.  INDICATIONS.  755' 

dans  l'oubli,  si  Trousseau  ne  Tavait  patronnée  de  sa  puissante  autorité,  et, 
pour  ainsi  dire,  imposée  par  ses  succès. 

Dans  cette  grande  question  de  la  thoracentèse  nous  aurons  trois  points 
à  étudier  : 

1®  Les  indications  de  V opération  ; 

2®  Le  manuel  opératoire  ; 

3**  Les  accidents  consécutifs. 

1^  Indicatioi!<ïs  de  la  thoracentèse.  —  Ici  plusieurs  questions  se  pré- 
sentent :  Peut-on  opérer  malgré  la  fièvre,  ou  attendre  la  déferves- 
cence?  faut-il  appliquer  la  thoracentèse  aux  épanchements  moyens  ou 
l'appliquer  seulement  aux  épanchements  considérables  ?  dans  quelle 
mesure  enfin  doit-on  se  préoccuper  des  complications  qui  peuvent  accom- 
pagner l'opération? 

Toutes  ces  questions  souvent  débattues  et  diversement  jugées  se  résu- 
ment, il  me  semble,  à  la  proposition  suivante  :  Etant  donné  une  pieu 
résie  avec  épanchement,  deux  cas  peuvent  se  présenter  :  dans  Vun  la 
thoracentèse  est  urgente,  dans  Vautre  elle  est  discutable.  Quand  est-elle 
urgente  et  quand  est-elle  discutable?  tel  est  le  terrain  sur  lequel  doit 
s'engager  la  discussion. 

L'urgence  de  la  thoracentèse  ne  peut  et  ne  doit  être  basée  que  sur 
l'évaluation  de  la  quantité  du  liquide  épanché.  Que  le  malade  ait  la 
fièvre  ou  ne  Tait  pas,  qu'il  soit  ou  ne  soit  pas  oppressé^  ce  sont  là  des 
considérations  de  second  ordre,  il  faut  avant  tout  consulter  la  quantité 
du  liquide  épanché. 

Il  faut  bien  se  garder  de  s'en  rapporter  à  la  dyspnée  ;  car  la  dyspnée  est 
un  guide  infidèle  et  trompeur  ;  on  voit  souvent  des  épanchements  consi- 
dérables'qui  sont  associés  à  une  oppression  insignifiante  ;  et  je  pourrais 
citer  une  quantité  de  faits  qui  prouveraient  que  bien  des  malades  mar- 
chent et  se  promènent  avec  deux  et  trois  litres  de  liquide  dans  leur  plèvre 
sans  que  leur  respiration  soit  notablement  compromise.  Telle  était  la 
malade  dont  parle  Trousseau,  qui  vint  à  pied,  portant  son  enfant  avec 
elle,  de  la  pointe  Saint-Eustache  à  l'hôpital  Necker,  malgré  un  épanche- 
meut  si  considérable  que  la  thoracentèse  pratiquée  séance  tenante  donna 
issue  à  deux  litres  et  demi  de  liquide.  Andral,  Landouzy,  et  beaucoup 
d'autres  observateurs,  citent  des  faits  analogues  ;  j'en  ai  souvent  observé, 
et  j'ai  pratiqué  la  thoracentèse  il  y  a  deux  ans  chez  un  étudiant  de  mon 
service,  qui  venait  régulièrement  à  l'hôpital  et  qui  n'éprouvait  qu'une 
gène  insignifiante,  malgré  les  deux  litres  de  liquide  qu'il  avait  dans  sa 
plèvre.  Je  crois  inutile  de  multiplier  ces  exemples,  la  dyspnée  est  un 
guide  si  trompeur,  qu'attendre  pour  évacuer  un  épanchement  que  le 
pleurétique  soit  atteint  de  dyspnée,  c'est  attendre  que  l'épanchement  ait 
pris  de  telles  proportions  que  la  vie  du  malade  est  depuis  longtemps  en 
danger  quand  on  arrive  à  cette  décision. 

Si  on  connaissait,  si  on  publiait  tous  les  cas  de  morts  subites  ou  de 
morts  rapides  provoques  par  les  grands  épanchements,  on  serait  peut- 
être  moins  sévère  pour  la  thoracentèse.  Trousseau  en  rapporte    trois 


756  POrriUNE.   —  TH0RACENTÈ8E.  INDICATIONS. 

observations  ;  dans  Tune  d'elles,  le  malade  était  si  peu  oppressé  que 
l'opération  fut  renvoyée  au  lendemain,  mais  le  lendemain  le  malade 
expirait.  C'est  dans  un  cas  analogue  que  Lasègue  voyait  mourir  sous  ses 
yeux  un  jeune  médecin  atteint  de  pleurésie,  au  moment  même  où  il  se 
préparait  à  ponctionner  la  plèvre. 

La  mort  subite  et  la  mort  rapide  reconnaissent  des  causes  multiples  ; 
tantôt  ce  sont  des  caillots  (thrombose  ou  embolie)  qui  se  forment  dûis  le 
cœur,  dans  les  gros  vaisseaux,  ou  dans  le  parenchyme  même  du  poumon. 
Ces  caillots  deviennent  la  cause  d'accidents  divers.  Si  le  caillot  se  forme 
dans  les  grosses  veines  pulmonaires,  ou  dans  le  cœur  gauche,  il  déter- 
mine une  embolie  souvent  cérébrale  avec  toutes  ses  conséquences  :  l'apo- 
plexie, l'hémiplégie,  l'aphasie  (Vallin,  Potain).  Si  le  caillot  se  forme 
dans  le  cœur  droit  ou  dans  l'artère  pulmonaire,  il  peut  produire  l'as- 
phyxie rapide  et  la  mort  (Paget,  Smith,  Blachez). 

Louis  s'était  donc  mépris  en  disant  que  la  pleurésie  n'entraîne  pas  la 
mort  immédiate.  On  peut  mourir  subitement  par  le  fait  d'un  épan- 
chement  pleurétique  ;  la  mort  est  imputable  à  la  quantité  de  l'épan- 
chemeut:  c'est  donc  je  le  répète,  la  quantité  du  liquide  épanché  qui 
seule  doit  régler  l'urgence  de  la  thoracentèse. 

Je  prévois  la  question.  On  demandera  à  quel  moment  s'impose  l'ur- 
gence; est-ce  quand  l'épanchement  atteint  un,  deux  ou  trois  litres?  et 
d'ailleurs  comment  pourra-t-on  évaluer  la  quantité  du  liquide  épanché, 
comment  savoir  qu'il  y  en  a  1,500  grammes  ou  deux  litres  et  demi  ? 

D'abord,  pour  ce  qui  est  de  savoir  à  quel  moment  le  liquide,  par  sa 
quantité,  devient  une  indication  pressante  de  thoracentèse,  je  dirai  que, 
d'après  les  travaux  que  j'ai  consultés,  la  mort  n'a  jamais  été  provoquée 
par  un  épanchement  inférieur  à  deux  litres  ;  une  fois  seulement  (Blachez) 
la  plèvre  contenait  1,500  grammes  de  sérosité.  Ce  cas  exceptionnel  ne 
doit  pas  nous  servir  de  base,  et  j'estime  que  dans  les  pleurésies  simples 
et  chez  un  adulte  bien  conforme,  c'est  lorsque  l'épanchement  atteint 
deux  litres  environ  que  l'urgence  de  la  thoracentèse  doit  être  déclarée. 

Mais  alors  se  présente  cette  autre  question  :  Comment  évaluer,  à 
quelques  cents  grammes  près,  la  quantité  du  liquide  épanché  ;  d'après 
quels  signes  et  quels  symptômes  ?  J  avais  dressé,  à  ce  sujet,  une  sorte  de 
table  comparative  des  épanchements  pleuraux,  afin  de  graduer  à  peu 
près  la  cavité  thoracique,  me  disant,  par  exemple,  que,  si  un  épan- 
chement qui  atteint  le  sixième  espace  intercostal  correspond  à  1,200  gr. 
de  liquide  ,  un  autre  qui  atteindrait  le  troisième  espace  devrait  être 
évalué  à  2,000  grammes,  et  ainsi  de  suite.  Mais  il  était  à  prévoir  qu'on 
rencontrerait  des  écarts  considérables  dans  l'évaluation  du  liquide 
épanché,  car  il  faut  tenir  compte  de  la  taille  et  du  sexe  du  malade,  de 
la  conformation  de  son  thorax,  du  déplacement  des  organes  voisins,  du 
refoulement  du  cœur,  de  l'abaissement  du  diaphragme,  ce  qui  revient 
à  dire  que  l'évaluation  du  liquide  épanché  varie  avec  chaque  cas  par- 
ticulier. 

Comment  alors  arriver  à  cette  évaluation?   Dans   les  petits  épan- 


POITRINE.  —  thoaàcemt&sb.  737 

chements  le  souffle  est  voilé  et  limité  à  l'expiration  ;  dans  les  épanclie- 
mcnts  moyens  (1,000  à  1,500  grammes),  le  souffle  prend  un  timbre 
bronchique  et  s'entend  aux  deux  temps  de  la  respiration  ;  dans  les  forts 
épanchements  (2  à  3  litres  et  au  delà),  les  bruits  normaux  et  anormaux 
disparaissent  ou  bien  font  place  à  un  souffle  caverneux  et  amphoriquc  ; 
tout  cela  est  vrai,  mais  ces  données  de  l'auscultation  sont  variables, 
et  par  conséquent  insuffisantes  pour  évaluer  la  quantité  du  liquide 
épanché.  J'en  dirai  autant  de  la  mensuration  de  la  poitrine  au  cyrto- 
mètrc  (Woillez),  moyen  parfois  excellent,  mais  souvent  en  défaut. 
Force  est  donc  d'associer  les  signes  précédents  à  d'autres  signes  plus 
certains  qui  sont  fournis  par  l'étendue  de  la  matité,  par  le  déplace- 
ment des  organes  et  notamment  par  la  déviation  du  cœur  dans  la  pleu- 
résie gauche. 

Ainsi,  lorsque  la  matité  remonte  en  arrière  jusqu'à  l'épine  de  l'omo- 
plate et  que  l'obscurité  du  son  remplace  dans  la  région  claviculaire  la 
tonalité  élevée  de  son  skodique,  lorsque  enfin,  la  pleurésie  siégeant 
à  gauche,  la  pointe  du  cœur  vient  battre  entre  le  sternum  et  le  sein 
droit,  bien  qu'à  ce  moment  la  cavité  pleurale  ne  soit  pas  remplie  au 
maximum,  de  tels  signes  chez  un  adulte  dénotent  que  l'épanchement 
atteint  deux  litres  :  il  faut  opérer,  et  ne  pas  oublier  que  renvoyer 
au  lendemain  est  une  formule  malheureuse,  qui  coûte  la  vie  aux  ma- 
lades. 

Jusqu'ici  la  discussion  sur  l'opportunité  de  la  thoracentcse  n'a  visé 
que  la  pleurésie  simple  ;  mais  les  mêmes  préceptes  sont  applicables  aux 
pleurésies  compliquées.  Les  complications  directes  ou  indirectes  de  la 
pleurésie,  adhérences  anciennes,  altérations  valvulaires  du  cœur, 
péricardite,  pneumonie,  en  un  mot,  toutes  les  lésions  qui  entravent  la 
circulation  pulmonaire  ou  qui  rétrécissent  le  champ  de  l'hcmatosc,  ne 
sont  pas  une  contre-indication  de  la  thoracentèse  ;  elles  l'imposent  au 
contraire  dès  que  la  quantité  du  liquide  épanché  atteint  de  fortes  pro- 
poilions  :  seulement  Tévacuation  du  liquide  exige  en  pareil  cas  des  pré- 
cautions qui  seront  indiquées  plus  loin. 

Telle  est  la  thoracentèse  d^urgence  dont  le  guide  le  plus  certain  est, 
je  le  répète,  la  quantité  du  liquide  épanché.  En  toute  autre  circonstance, 
la  thoracentèse  est  discutable:  les  uns  l'admettent,  les  autres  la  rejettent, 
et  certains  la  considèrent  même  comme  nuisible.  Discutons  ces  diverses 
opinions.  Tant  que  la  température  du  malade  est  élevée,  c'est-à-dire  tant 
que  la  phase  aïgue  de  la  pleurésie  n'est  pas  terminée,  il  vaut  mieux  ne 
prendre  une  décision  qu'après  la  défervescence. 

Si  la  décroissance  de  Tépanchemcnt  se  fait  naturellement,  et  si  sa 
résorption  parait  devoir  être  rapide,  il  est  inutile  d'intervenir.  Mais,  si  le 
liquide  épanché  reste  stationnaire,  ou  si  sa  résorption  paraît  devoir  être 
lente,  il  faut  opérer.  Ce  n'est  pas  impunément  qu'un  liquide  séjourne 
longtemps  dans  la  plèvre;  les  organes  déplacés  s'immobilisent,  le  poumon 
respire  mal,  deux  des  principales  fonctions  de  l'économie,  l'hématose  et 
la  respiration,  sont  compromises^    sans   compter,   chez  les  individus 

KOCV.   DICT.   MÊD.  ET  CfllR.  XXVUI  —  47 


738  POITRINE.  —  TaotACBSTiss. 

prédisposés,  le  passage  de  la  pleurésie  à  la  chronicité  et  à  la  pu- 
rulence (Trousseau).  La  thoracentèse  pratiquée  au  moment  youIu  peut 
faire  tomber  le  reliquat  de  fièvre  qui  accompagne  souvent  les  épan- 
chements,  elle  peut  abréger  de  plusieurs  semaines  la  durée  de  la  ma- 
ladie. 

2®  Manuel  opératoire  de  la  thoracentèse.  —  Jusqu'en  1869  no  seul 
procédé  était  en  usage,  c'est  celui  que  Trousseau  nous  a  légué.  Troussean 
pratiquait  la  ponction  dans  le  sixième  ou  le  septième  espace  intercostal 
en  comptant  de  haut  en  bas,  à  4  ou  5  centimètres  du  bord  exterae  do 
muscle  grand  pectoral,  c'est-à-dire  dans  la  région  axillaire.  Il  faisait  dV 
bord  une  petite  incision  à  la  peau  afin  de  frayer  la  route  au  trocart,  pub, 
par  un  coup  sec,  il  pénétrait  dans  la  poitrine  au  moyen  du  trocart  de 
Reybard.  Le  pavillon  de  ce  trocart  était  armé  d'une  baudruche  qui,  par 
son  rôle  de  soupape,  s'opposait  à  l'entrée  de  l*air  dans  la  poitrine  au 
moment  de  l'inspiration.  Le  liquide  pleural  s'échappait  de  la  poitrine 
d'abord  par  saccades  puis  en  bavant,  et  au  cours  de  l'opération  le  malade 
était  généralement  pris  d'une  toux  quinteuse  pénible,  parfois  a  violente, 
invincible,  très-douloureuse  »,  que  Trousseau  considérait  comme  utile poar 
favoriser  l'issue  du  liquide  au  dehors  et  qui  chez  certains  malades  se  pro- 
longeait une  partie  de  la  journée.  Ajoutons  qu'il  n'était  pas  rare,  vers  la 
fin  de  l'opération,  que  le  liquide  fût  coloré  en  rouge  par  sou  méJange 
avec  le  sang. 

Ainsi  faite,  la  thoracentèse  de  la  poitrine,  sans  être  une  opération 
bien  difficile,  demandait  quelque  habileté  de  la  part  du  chirurgien  et 
quelque  résignation  de  la  part  du  malade  :  aussi  était-elle  réservée  pour 
les  cas  urgents  et  pratiquée  par  un  nombre  relativement  restreint  de 
médecins. 

Lorsque  j'appliquai  la  méthode  d'aspiration  aux  épanchements 
pleuraux,  le  trocart,  la  baudruche  et  l'incision  préalable  furent  rem- 
placés par  une  piqûre  d'aiguille  si  ingnifiante  que,  l'opération  ter- 
minée, il  n'en  restait,  pour  ainsi  dire,  pas  vestige.  Voici  comment  je 
procède  : 

Le  malade  est  assis  sur  son  lit,  les  deux  bras  tendus  en  avant;  et  Ton 
marque  sur  la  peau  le  point  où  doit  porter  la  piqûre.  Ce  point  est  le 
huitième  espace  intercostal,  sur  le  prolongement  de  Tangle  inférieur  de 
l'omoplate. 

La  thoracentèse  doit  être  faite  avec  l'aiguille  n®  2  et  non  pas  avec  uue 
aiguille  ou  un  trocart  d'un  diamètre  supérieur.  On  met  l'aiguille  en 
communication  avec  l'aspirateur  au  moyen  du  tube  de  caoutchouc,  le 
vide  préalable  est  fait  dans  l'appareil,  et  on  pratique  la  ponction.  Pour 
cela,  l'opérateur  recherche  avec  l'index  de  la  main  gauche  l'espace  inter- 
costal de  manière  à  limiter  la  côte  de  dessus  avec  le  rebord  supérieur  de 
l'index  et  la  côte  de  dessous  avec  son  rebord  inférieur.  L'aiguille  introduite 
dans  l'espace  intercostal  est  poussée  à  deux  ou  trois  centimètres  de  pro- 
fondeur, le  robinet  correspondant  de  l'aspirateur  est  ouvert,  et  le  liquide 
traversant  l'index  en  cristal  jaillit  dans  l'appareil. 


POITRINB.  THORÂCBirTiSE.    UNDEL   OPÉUTOIRB. 


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740  POITRINE.  —  thobàcbktèse.  muidel  w^utoirb. 

L'aspirateur  une  fois  rempli,  on  le  TÏde,  et  cet  arrêt  de  quelques  io- 
sUnts  dans  l'aspiration  du  liquide  est  un  bienfait  pour  le  poumon,  qui 
n'est  pas  sollicité  à  se  déplisser  trop  rapidement.  On  recommence  celle 
manœuvre  plusieurs  fois  suivant  la  capacité  de  l'aspirateur,  en  ayant  soin 
de  ne  jamais  retirer  plus  d'un  litre  en  une  séance. 

Quand  l'opération  est  mclhodiqueinent  faite,  le  malade  ne  doit  épreo- 
ver  ni  quinte  de  toux,  ni  douleur,  ni  malaise.  Si  le  malade  accuse  pel^ 


Fie.41.- 

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terme  1 

le   roUiOfl  1 

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roliinet    R'.  < 

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p.  *7S]. 

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LTrelerelriilde. 

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!l  u  marelle,!! 

iiTraiti  de  foijnral 

dant  l'opération  une  sensation  de  douleur  et  de  déchirement  à  l'intérieur 
de  la  poitrine,  il  faut  aussitôt  suspendre  l'écoulement. 

Si  l'épanchement  est  très-considérable,  on  retire  le  lendemain  ou  le 
surleiidûmaiu  un  nouveau  litre  de  liquide,  et  ainsi  de  suite  jusqu'à  épui- 
sement complet  de  la  pleurésie. 

Certains  médecins  vident  répancliemcnt  jusqu'à  la  dernière  goutte,  ce 
qui  détermine  quelquefois  une  coloration  rosée  du  liquide  et    de  vio- 


POITRINE.   —  THORAGEIIT&SE.   MÀIIUBL  OPiRATOIRB.  741 

lentes  quintes  de  toux.  Cette  pratique  est  inutile  et  mauyaise; 
lorsqu'on  voit  que  l'écoulement  tire  à  sa  fin,  on  arrête  l'opération, 
sans  se  soucier  des  150  à  200  grammes  qui  peuvent  rester  dans  la  cavité 
pleurale. 

Pour  pratiquer  la  thoracentèse,  le  choix  de  l'aspirateur  est  indifférent; 
ce  qui  importe,  c'est  le  choix  de  l'aiguille,  et  je  recommande  exclusi- 
vement l'aiguille  n"*  2,  dont  le  calibre  ne  mesure  que  1°^°',2  de  diamètre. 


Fi6.  45.  —  Aspirateur  de  M.  Potain. 

Dans  le  goulot  d'un  rase  quelconque  Tient  s'adapter  un  bouchon  en  caoutchouc,  trayersé  au  centre 
par  une  tige  creuse  métallique  &  double  conduit  communiquant  a>ec  le  récipient.  A  sa  partie  supérieure, 
elle  se  bifurque  en  deux  branches  munies  chacune  d'un  robinet  E  et  D  qni,  suivant  la  direction  qu'on  leur 
donne,  permettent  à  l'air  d'être  extrait  par  la  pompe  A,  et  au  liquide  d'entrer  dans  le  récipient  par  le 
robinet  B,  qui  communique  avec  le  trocart  au  moyen  d'un  tube  en  caoutchouc  dont  l'extrémité  est 
munie  d'un  ajoutage  de  verre  F  qui  permet  de  reconnaître  la  nature  du  liquide  aspiré.  Le  trocart  pré-' 
sente  quelques  particularités  à  noter.  —  L'extrémité  de  la  canule  est  séparée  en  deux  parties  égales 
formant  ressort,  et  comme  le  poinçon  est  muni  d'une  petite  encoche  en  arrière  de  la  pointe,  il  ^'ensuit 
que  lorsque  l'on  fait  p^inétrer  le  trocart  dans  son  fourreau,  le  bout  de  la  canule,  formant  pince,  sa 
place  dans  la  partie  déprimée  du  poinçon,  en  sorte  que  la  canule  ne  fait  aucune  '  saillie  et  présente 
avec  la  pointe  du  trocart  un  calibre  uniforme.  —  En  outre  la  partie  inférieure  est  munie  d'un  petit  tube 
latéral  qui  s'ajuste  avec  le  tube  F  et  d'un  robinet  qui  intercepte  l'entrée  de  l'air  et  permet  de  débou- 
cher la  canule  lorsqu'elle  est  obstruée,  sans  que  l'air  extérieur  puisse  y  pénétrer. 

Manuel  opératoire.  —  1*  L'appareil  monté  comme  le  représente  la  figure,  on  ferme  le  robinet  E  et 
l'on  ouvre  le  robinet  D;  2*  On  fait  fonctionner  la  pompe  A  plus  ou  moins,  selon  la  force  qu'on  veut 
donner  au  vide  pratiqué  de  celte  manière  dans  le  flacon  F;  3* Une  fois  le  vide  opéré,  on  ferme  le  robinet 
D,  on  pratique  la  ponction  avec  le  trocart,  on  retire  le  poinçon,  on  ferme  le  robinet  du  trocart  * 
on  ouvre  le  robinet  E,  et  le  liquide  se  précipite  dans  le  flacon. 

Pendant  que  l'aspiration  a  lieu,  on  peut  augmenter  la  force  du  vide  en  faisant  fonctionner  la  pompe, 
après  avoir  ouvert  le  robinet  D. 

Plusieurs  objections  ont  été  faites  à  cette  aiguille  :  on  a  dit  qu'elle  ne 
permet  qu'un  lent  écoulement  du  liquide  ;  tant  mieux  !  car  la  lenteur  de 
Técoulement  permet  au  poumon  de  se  déplisser  sans  secousses  et  sans 
quintes  de  toux.  On  a  prétendu  que  le  poumon  peut,  dans  son  mouvement 
d'expansion,  rencontrer  la  pointe  de  l'aiguille,  et,  pour  parer  à  cet  incon- 
vénient, Castiaux  a  imaginé  un  trocart  à  pointe  cachée. 
Je  n'ai  jamais  vu  pareil  accident,  et,  du  reste,  il  y  a  une  petite manœu- 


742  POITRINE.  —  thoracentêsb.  agciderts  coHtfeimn 

vre  qui  met  à  Tabri  de  toute  éyentualité  ;  il  suffit  de  retirer  graduellement 
Taiguille  à  mesure  que  le  liquide  s'écoule  et  de  la  faire  basculer  de  iaç<m 
à  la  rendre  parallèle  à  la  paroi  intercostale. 

5**  ACCIDENTS  CONSÉCUTIFS  A  LA  THORACEKTÊSE.  —  Cougestion  ct  œdème  pul- 
monaire,  expectoration  albumincuse,  asphyxie  lente  ou  brusque,  syneope, 
hémiplégie,  apoplexie,  mort  plus  ou  moins  rapide,  transformalion  puni- 
lente  de  répanchement,  tels  sont  les  accidents  qui  ont  été  obsenrés  i  la 
suite  de  la  thoraccntèse  ct  qui  ont  été  mis  sur  le  compte,  soit  de  Taspirt- 
tion,  soit  de  Topération  par  le  trocart  de  Reybard.  Analysons  ces  accidents 
et  discutons-en  la  valeur. 

Â.  Expectoration  albumineuse^  asphyxie.  —  Dans  un  premier  groupe 

je  réunis  les  accidents  dyspnéiques  ct  asphyxiques  qui  peuvent  succéder 

à  la  thoracentèse.  Aussitôt  ou  peu  après  la  ponction,  le  malade  est  pris 


Laboulbène  •  modifié  Taitpinieiir 
de  Potain  en  faisant  mettre  mr  le» 
deux  branches  du  boucboa,  àma,  ro- 
binets de  formes  diflérenles  :  Twi  ert 
carré,  placé  du  côté  du  malade  et  ea 
^^  rapport  ayec  le  trocnrt;  Tantre  roki- 

net   est  arrondi    et    coman»i4i«aBt 
avec  la  pompe  i  air.  U  est  impo»»iUe 
de  la  sorte,  de   faire  mw  Cmsm  au- 
nœavre  et  d'envoyer  de  J'tir  dau  b 
poitrine  do  malade. 

De  plus,  Laboulbène  a  modifié 
reitrémité  de  la  gaine  on  canal(>  é  a 
trocart.  Cette  canule  n'est  pourme 
que  d'une  seule  fente,  mais  présen- 
tant des  yeux  latéraux  qui  permet- 
tent toujours  l'écoulement  facile  da 
liquide  pleural. 

Fie.  iB.  —  Aspirateur  modifié  de  Laboulbène. 

«  En  haut  est  le  trocart  ou  lamo,  muni  à  la  base  de  i^a  bollc  h  cuir  où  glisse  à  f^ottem^nt  le  trocart, 
et  terminé  par  la  pointe  suivie  du  renflement.  Au-dessous,  le  trocart  est  dans  sa  gaine  ou  canule;  on  Toii. 
à  gauche,  la  pointe  qui  déborde  et  la  fente  latérale  pourvue  d'yeux,  placée  à  l'extrémité  de  la  canule. 
En  bas,  se  trouve  le  bouchon  à  deux  robinets  :  celui  qui  est  carré  eî^t  toujours  du  cMé  du  aialade, 
celui  qui  est  arrondi  communique  avec  la  pompe  à  air.  {Bull,  de  Ihérapeutiqite,  187H). 

de  toux,  d'oppression,  d'expectoration  albumineusc,  et  on  entend  à  Taus- 

cultation  des  râles  fins  d'œdèmc  pulmonaire;  puis,  graduellement,  la 

toux  cesse,  la  respiration  se  rétablit,  et  l'accident  est  terminé.  Dans 

d'autres  cas,  l'intensité  de  la  dyspnée,  la  durée  et  la  quantité  de  Teipec- 

toration,  sont  plus  fortes,  et  ce  n'est  qu'après  une  demi-journée  ou  une 

journée  que  le  malade  revient  à  son  état  normal.  Enfin,  dans  quelques 

circonstances ,   heureusement   exceptionnelles ,   ces    accidents    ont  été 
mortels. 

Les  accidents  dyspnéiques  et  l'expectoration  albumineuse  ont  été 
diversement  interprétés.  Je  me  rallie  à  l'opinion  de  Ilérard,  qui  les 
attribue  à  une  congestion  pulmonaire  rapide,  à  un  œdème  aigu  du 
poumon. 

Reste  à  expliquer  la  cause  de  cet  œdème  aigu.  On  a  accusé  la  méthode 
aspiratrice,  bien  à  tort,  car  en  analysant  les  observations  de  la  thèse  de 


i 

\ 


POITBINE.  —  thoracbntIse.  accidents  coNSécunps.  743 

"^  • 

j     Terrillon   on   voit  précisément   que  sur  16  cas  d'expectoration  albu- 

mineuse  la  thoracentèse  avait  été  faite  douze  fois  avec  le   trocart  et  la 

baudruche  sans  aspiration  et  quatre  fois  seulement  par  aspiration.  Sur 

6  cas  qui  se  sont  terminés  par  la  mort,  l'aspiration  n'avait  été  employée 

que  trois  fois.  Les  accidents  n'ont,  par  conséquent,  rien  à  voir  avec  le 

procédé  opératoire  ;  et  en  analysant  les  observations  on  voit  qu'ils  ont 

toujours  été  associés  soit  à  l'issue  immédiate  d'une  grande  quantité  de 

liquide,  soit  à  des  complications  de  la  pleurésie  et,  le  plus  souvent^  à  ces 

deux  causes  réunies. 

Néanmoins,  il  y  a  dans  l'aspiration  mal  dirigée  un  inconvénient  réel, 
mais  ce  n'est  pas  affaire  de  qualité  du  vide,  c'est  affaire  de  quantité.  Ce 
n'est  pas  parce  que  l'on  aura  tiré  1,000  grammes  de  liquide  avec  un 
vide  bien  fait  que  les  accidents  pourront  survenir,  mais  c'est  parce  que 
l'on  en  aura  retiré  3,000  même  avec  un  vide  incomplet,  même  sans 
vide  du  tout. 

Ce  qui  est  mauvais,  qu'on  le  sache  bien,  ce  n'est  pas  l'aspiration, 
mais  c'est  la  façon  dont  on  en  fait  usage,  c'est  l'aspiration  prolongée 
outre  mesure,  c'est  l'emploi  de  trocarts  trop  volumineux,  c'est,  en  un 
mot,  la  manœuvre  mal  comprise,  qui,  sans  tenir  un  compte  suffisant  de 
la  nature  de  la  pleurésie,  de  son  ancienneté,  de  ses  complications,  per- 
met à  un  épanchement  considérable  de  sortir  complètement  et  trop  rapi- 
dement de  la  cavité  thoracique. 

B.  Syncope  précoce  ou  tardive.  —  Dans  quelques  cas  les  malades 
opérés  sont  morts  le  jour  même,  le  lendemain  ou  le  surlendemain,  à  la 
suite  de  syncope.  L'analyse  de  ces  observations  montre  que  les  acci- 
dents ont  été  produits  par  des  causes  diverses,  et  dans  tous  les  cas 
indépendantes  de  la  thoracentèse  :  caillot  cardiaque  (Yergely),  caillot 
pulmonaire  (Guyot),  phlébite  et  trombose  (Chailloude|Toumy,  Gaz.  des 
hôp.,  1872),  gangrène  pleurale  (Ernest  Bcsnier). 

C.  Transformation  purulente.  —  On  a  prétendu  que  la  thoracentèse 
peut  transformer  la  pleurésie  simple  en  pleurésie  purulente.  Cette  accusa- 
tion ne  me  parait  pas  fondée.  Je  ne  parle  pas  des  cas,  et  il  en  existe,  où 
la  ponction  a  été  faite  avec  des  aiguilles  sales  ayant  servi  à  vider  quelque 
temps  auparavant  quelques  collections  purulentes,  mais  je  parle  de  la  tho- 
racentèse pratiquée  dans^dc  bonnes  conditions,  et  celle-là,  je  le  crois,  est 
absolument  innocente  de  la  transformation  purulente  des  liquides  pleu- 
raux. Des  observations  souvent  répétées  m^ont  permis  de  croire  que  telle 
pleurésie  qui  sera  plus  tard  purulente  commence  par  être  une  pleurésie 
histologiquement  hémorrhagique.  On  trouve  au  microscope  plusieurs 
milliers  de  globules  rouges  par  millimètre  cube.  Et,  si  on  n'a  pas  eu  soin 
de  pratiquer  l'étude  histologique  du  liquide  (qui  à  simple  vue  me  parait 
un  liquide  de  bonne  nature),  on  croit  avoir  transformé  une  pleurésie  sim- 
ple en  pleurésie  purulente,  alors  qu'on  a  seulement  ponctionné  la  pleu- 
résie aux  deux  phases  de  son  évolution. 

Quant  à  la  pleurésie  purulente,  qui  nécessite  une  application  spéciale 
•de  la  thoracentèse,  voyez  p.  220. 


744  POIVRE.  —  RÉCOLTE.  —  cohpositior  chimique. 

On  consultera  la  bibliographie  de  l'article  Pleurésie,  p.  234  i  339. 

Je  rappellerai  seulement  mon  mémoire  sur  la  thoracentèse  par  aspiration  dans  la  plearae 
aiguë,  Paris,  1878,  et  j'ajouterai  les  indications  suivantes  : 

HéBARD,  Thoracenthèse  {Bull,  de  rAcad.dêméd.,  30  arril,  4  jain  i87Set  50  jml1et187i). 
Yebgelt,  Bordeaux  médical,  1873  — Pleuro-pneumonie ;  épaneh.  pur.,  thoracoœntàe;  afxt 

subite  [Gaz,  hebd  ,  1877,  p.  377). 
Bksnier  (Èm.),  Cas  de  mort  subite   pendant  la  thoracentèse  (Bull,  et  Mém.  Soc.  wtéd.  ia 

hâp.,  25  juin  1875,  2«  série,  t.  XII,  p.  24). 
Batjiacd  (Maurice],  Des  morts  inopinées  pendant  ou  après  la  thoracentèse,   et  des  CBsralsioos 

épilepti formes  i  la  suite  des  injections  pleurales  (Bull,  et  Mém,  Soc,  tnéd.  de$kâp^\ti%t 

2«  aérie,  t.  YI,  p.  96). 
Vallih  (E.),  Convulsions  éclamptiques  à  la  suite  de  la  thoracentèse  [Union  m^ioslr,  197^  H 

Bull,  de  la  Soc.  tnéd.  des  hâp,,  2*  série,  t.  YI,  p.  115j. 
YViDAL,  Étude   clinique  sur   le   traitement   des    épanchements    plenrétiques  par  la  pooctia 

aspiratrice,  Paris,  1876. 
Tboossaixt,    De    la     thoracentèse  dans    la    pleurésie   franche,    thèse     de    doctorat.   Puis. 

26  mars  1878,  n*  109. 
Châtelain  (Ch.),  Étude  clinique  sur   la  thoracentèse  dans  les   pleurésies  séreuses,  thèse  M 

doctorat,  Parb,  1880. 

Paracenthèse  du  pépicsarde,  Voy.  Péricarde ,  t.  XXYI,  p.  635. 

Georges  Dieclafot. 

POrVRE.  — Piper  nigrum  L.,  Famille  des  Pipéritées  ou  Pipéracée?. 

Le  poivrier  est  un  arbuste  vivace,  sa  tige  volubile  est  articulée,  et  te 
nœuds  produisent  des  racines  adventives  qui  servent  à  Gxer  le  t^'- 
Les  fleurs  sont  disposées  en  épis  pédoncules,  longs  de  8  à  12  ceotimètres 
environ.  Les  fruits  sont  charnus  et  sessiles. 

Il  est  originaire  de  la  côte  de  Malabar  (Travancore) ,  d'où  ileslpesé 
dans  Tarchipel  malais,  à  Siam  et  aux  Philippines. 

La  partie  commerciale  ou  poivre  en  grains  est  le  fruit  de  Varbuste. 
C'est  Tune  des  espèces  dont  Tusagc  remonte  à  la  plus  haute  antiquité,  et 
le  poivre  a  été  longtemps  le  principal  et  presque  le  seul  objet  d'échange 
existant  entre  ce  qui  est  devenu  l'Europe  et  l'Inde  ancienne. 

Aussi  Théophrasle,  quatre  siècles  avant  Jésus-Christ,  connaît-il  déjà  deux 
sortes  de  poivre.  Dioscoride  et  Pline  le  décrivent  longuement,  et  à  celle 
époque  les  navires  allaient  le  prendre  au  port  de  Baraké,  situé  au  Mabbar* 
entre  Mangalore  et  Calicut. 

Au  moyen  âge,  le  poivre,  toujours  très-recherché,  était  surtout  importe 
en  Europe  par  les  Génois  elles  Vénitiens,  il  servait  môme  parfois  d'étalon 
monétaire,  et  parmi  les  redevances  que  les  tenanciers  étaient  tenus  de 
fournira  leur  seigneur  on  voit  fréquemment  figurer  une  livre  de  poin« 

Récolte.  —  La  récolte  se  fait  en  juin-juillet,  dès  que  les  baies  de  b 
partie  inférieure  de  Tépi  se  colorent  en  rouge;  au  bout  de  quelques  jours 
elles  se  détachent  de  Tépi,  et  il  n'y  a  plus  qu'à  faire  sécher  le  produit, 
qui  est  devenu  brun  ou  noir. 

Par  suite  de  la  dessiccation,  la  couche  moyenne  du  péricarpe  se  con- 
tracte et  produit  les  rides  bien  connues  de  la  surface  du  grain  depoivw, 
qui  reste  marqué  d'une  tache  peu  apparente  correspondant  à  rinsertion 
du  pédoncule. 

Composition  ehimiqae.  —  Tout  le  monde  connaît  l'odeur  etb 
saveur  du  poivre. 


POIVRE.  —  coMPosinoif  chimique.  745 

La  saveur  est  due  principalement  à  une  substance  résineuse  qui  existe 
dans  le  produit  ;  quant  à  l'odeur,  il  faut  Tattribuer  à  une  huile  essentielle 
lévogyre  (Fluckiger  et  Hanbury)  dont  la  composition  et  le  point  d'ébulli- 
tion  sont  voisins  de  ceux  de  l'essence  de  térébenthine.  La  quantité  de 
cette  essence  varie  de  1,5  à  2  pour  100. 

Pipérine  ou  Pipérin.  —  Mais  la  substance  la  plus  intéressante  et  la 
mieux  connue  qui  se  rencontre  dans  le  poivre  est  celle  qui  a  été  décou- 
verte en  1819  par  Œrsted,  la  pipérine,  qu'on  désigne  également  sous  le 
nom  de  pipérin. 

On  l'obtient  par  des  traitements  alcooliques  répétés. 

C'est  un  corps  nettement  cristallisé,  insoluble  dans  Feau  froide,  peu 
soluble  dans  Téther,  soluble  dans  l'alcool,  surtout  bouillant.  Sa  for- 
mule C^H^'AzO'  en  fait  un  isomère  de  la  morphine,  ce  qui  est  déjà  curieux. 
Mais  la  suite  montrera  qu'il  n'y  a  là  rien  autre  chose  qu'une  composition 
équivalente  au  point  de  vue  centésimal. 

C'est  un  alcaloïde  (?)  bien  faible,  ne  bleuissant  pas  le  tournesol. 

Les  sels  de  pipérine  sont  généralement  instables,  décomposables  par 
l'eau  ;  l'acide  sulfurique  concentré  la  colore  en  rouge  de  sang. 

Ces  caractères  la  rapprochent  de  la  narcotine  et  des  substances  sem- 
blables, et  les  analogies  sont  encore  plus  frappantes  quand  on  considère 
le  mode  de  dédoublement.  Sous  l'inOiience  de  la  potasse  alcoolique,  la 
pipérine  se  dédouble  en  acide  pipérique  et  pipéridine  (Babo,  Keller  et 
Strecker^  • 

C"ir'AzO'  -4-KH0«  =  CH'-Az  +  C"H'KO« 

Pipérine.  Potasse.  Pipéridine.      Pip^rate  de  potasse. 

De  même  que  la  narcotine  se  dédouble  en  hydrocotarnine  et  acide 
opianique  (Wright  et  Beckett)   : 

C"H»A/0^*  -h  IPO^  ==  C"IPUzO^  -H  C'W'O'' 

^arcotlDe.  Eau.  Hydrocotarnine.      Acide  opianique. 

Le  parallèle  se  poursuit  encore  plus  loin,  car  on  sait  que  l'acide  opia- 
nique et  la  méconine  se  rattachent  à  l'acide  protocatéchique,  dont  ils 
représentent  des  dérivés  mcthylés. 

Vacide  pipérique  C"H*W  est  dans  le  même  cas,  et  même  il  n'est  pas 
besoin  de  recourir  à  la  potasse  fondante  pour  remonter  à  l'acide  protoca- 
téchique. 

Par  simple  oxydation  de  l'acide  pipérique  (Fitlig,  Remsen,  Mielch),  on 
obtient  en  effet  Valdéhyde  pipéronylique  C"H*0%  Vacide  pipéronylique 
C*WOS  et  par  hydrogénation  ra/coo//}iperonj//igrMe  C"H'0%  tous  dérivés 
mcthylés  de  l'acide  protocatéchique. 

La  synthèse  de  l'acide  pipéronylique  a  même  été  réalisée  en  chauffant 
ensemble  de  l'acide  protocatéchique,  de  l'éther  iodhydrique  et  de  la 
potasse  (Fittig). 

Pipéridine,  —  Venons  maintenant  à  l'examen  de  la  seconde  portion  du 
dédoublement  de  la  pipérine,  à  savoir  :  l'alcali  exempt  d'oxygène,  la 
pipéridine  C*"II"Az. 


746  POIVRE.   —   USAGES.    FALSIFICànOllS, 

La  majeure  partie  de  son  histoire  chimique  a  été  faite  par  Cahoors. 

On  l'obtient  en  distillant  de  la  pipérine  en  présence  de  la  chaux  polas- 
sée.  Le  produit  contient  deux  alcaloïdes  Yolatils,  qu'on  sépare  en  trans- 
formant en  chlorhydrates,  et  reprenant  par  l'alcool  absolu,  qui  ne  disaovt 
que  le  sel  de  pipéridine. 

C'est  un  corps  liquide,  caustique,  très-alcalin,  bouillant  à  +-  106\ 

Au  point  de  vue  théorique,  elle  doit  être  considérée  comme  une  anûie 
secondaire,  puisqu'il  est  possible  de  fixer  sur  elle  deux  molécules  aleo^ 
liques  au  moyen  des  éthers  iodhydriques.  Sa  formule  serait  : 

(C'»H»<»)'JHAz  (Cahours). 

Les  propriétés  se  rapprochent  beaucoup  de  celles  de  l'ammoniaque. 

On  connaît  enfin  différents  sels  de  pipéridine,  une  nitrosylpipéri- 
dine  (Wertheim),  une  pipérylnrée^  ainsi  qu'une  méthylpipéridme^  one 
éthylpipéridinej  une  amylpipéridihey  etc. 

Usages.  —  Considéré  comme  épice,  l'usage  du  poivre  est  très-répando 
et  la  consommation  annuelle  en  Europe  atteint  environ  12  à  15  millions 
de  kilogrammes. 

En  thérapeutique,  on  n'emploie  guère  le  poivre  directement  et  à  l'état 
isolé.  On  peut  noter  cependant  le  cataplasme  rubéfiant  et  les  applications 
de  poivre  en  poudre,  préconisées  contre  la  teigne. 

11  entre  dans  la  composition  des  pilules  asiatiques.  Les  Arabes  s^en  ser- 
vent comme  aphrodisiaque,  etc. 

Falsifications.  —  Le  poivre  en  grains  ne  peut  pour  ainsi  dire  pas 
c'ire  falsifié,  tandis  que  le  poivre  en  poudre  est  presque  constamment  mé- 
langé avec  des  résidus  de  fécules  (pommes  de  terre,  céréales,  sagou,  etc.). 
poudre  de  moutarde,  de  lin,  de  piment,  fraudes  que  ne  parviennent  pas  à 
empêcher  les  amendes  très-clevées  dont  sont  frappés  les  vendeurs  de 
poivre  falsifié,  en  Angleterre,  par  exemple,  où  l'amende  atteint  2,50<^fr. 
(100  livres  sterling). 

La  fraude  est  facile  à  reconnaître  au  microscope,  mais  pour  la  préveoir 
le  mieux  serait  évidemment  de  propager  l'habitude  déjà  très-répandue  de 
pulvériser  soi-même  le  poivre  en  grains  au  moyen  de  petits  moulins  ap- 
propriés. 

Poivre  blanc.  —  Ce  n'est  autre  chose  que  le  poivre  noir  dépouillé  de  son 
écorce  noirâtre,  ce  qui  lui  enlève  une  partie  de  sa  saveur  brûlante.  Sur  les 
lieux  de  production,  quand  on  veut  avoir  du  poivre  blanc,  ou  laisse  mûrir 
les  fruits  au  lieu  de  les  recueillir  prématurément.  On  fait  sécher  les 
grappes  pendant  quelques  jours,  et  il  suffit  alors  de  les  frotter  entre  les 
mains  pour  enlever  la  couche  noire  extérieure  du  péricarpe.  Les  grains 
sont  naturellement  un  peu  plus  gros  que  la  partie  blanche  du  poivre 
ordinaire  qui  a  été  récolté  avant  maturité. 

Les  Chinois  consomment  presque  exclusivement  le  poivre  blanc.  Les 
Européens  préfèrent  le  poivre  noir. 

La  dénomination  de  poivre  est  un  terme  générique  qui  comprend  un 


POIVRE.  —  ACnOH   PHTSIOLOCIQUE.    USAGES.  747 

grand  nombre  d'espèces  employées  le  plus  souvent  comme  condi- 
ments. 

Nous  citerons  seulement  : 

Le  Bétel  (Piper  bétel),  dont  les  feuilles  sont  employées  comme  masti* 
catoire  en  Orient. 

Le  bétel  sert  à  colorer  les  dents  en  rose,  embaume  Thaleine  et  stimule 
Tappétit. 

Le  poivre  long  (Piper  longum)^  moins  aromatique  que  le  Piper 
nigrum,  mais  dont  la  composition  chimique  est  très-voisine. 

Le  poivre  Cubèbe  (Voy.  ce  mot,  t.  X,  p.  437). 

Le  Matico  (Voy.  ce  mot,  t.  XXI,  p.  772). 

Le  poivre  Lowong.  —  Le  piper  Libesioïdes,  etc. 

Enfin  le  poivre  enivrant,  Piper  methysticum^  dans  lequel  Cuzent  a 
découvert  la  Kawaine^  principe  analogue  à  la  pipérine  que  Morson,  puis 
Gobley,  ont  successivement  étudié  depuis  sous  le  nom  de  méthysticine. 

L.  Prunier. 

Action  physiolofl^que.  —  Le  poivre  noir,  dont  nous  nous  occupe- 
rons presque  exclusivement  ici,  exerce  sur  nos  tissus  une  action  topique 
irritante,  plus  ou  moins  énergique  suivant  la  quantité  employée  et  la 
durée  de  l'application.  A  la  peau,  il  détermine  de  la  chaleur,  de  la  rubé- 
faction et  même  des  phlyctènes  comme  le  fait  un  emplâtre  vésicant.  In-  * 
troduit  dans  la  bouche  et  avalé  en  petite  quantité,  il  donne  lieu  à  une 
impression  gustative  acre  en  même  temps  qu'aromatique,  accompagnée 
d'une  sensation  de  chaleur  qui  se  ressent  jusque  dans  l'estomac,  et  il 
imprime  aux  glandes  de  ces  organes  une  activité  sécrétoirc  favorable  à' 
la  digestion.  Si  la  dose  ingérée,  en  une  seule  ou  en  plusieurs  fois,  a  été 
forte,  les  effets  se  montrent  plus  intenses  :  la  chaleur  devient  brûlante, 
une  soif  vive  s'allume,  la  circulation  s'accélère  et  il  peut  se  produire  une 
véritable  gastrite. 

Les  effets  généraux  sont  stimulants  :  ils  se  traduisent  par  l'accroisse- 
ment déjà  température,  par  la  fréquence  du  pouls  et  la  sueur,  c'est-à-dire 
par  de  la  fièvre  ;  et  cette  fièvre  s'accompagne  de  phénomènes  dénotant 
l'irritation  de  l'appareil  uro-génital,  tels  que  douleurs  lombaires,  urines 
ardentes,  probablement  d'albuminurie  et  d'hématurie,  dit  Gubler,  et  par- 
fois d'inflammation  des  voies  génito-urinaires.  Les  principes  actifs  du 
poivre  s'éliminent  aussi  par  d'autres  émonctoires  :  du  côté  de  la  peau, 
cette  élimination  peut  amener  des  éruptions  exanthématiques,  comme  le 
font  le  cubèbe  et  surtout  le  copahu. 

Usaf^es.  —  On  sait  les  qualités  du  poivre  comme  condiment.  Son 
emploi  à  ce  titre,  justifié  par  l'impression  qu'en  reçoit  l'appareil  digestif, 
était  déjà  connu  dans  les  temps  anciens,  et  l'on  y  a  recours  sous  toutes 
les  latitudes.  Mais,  tandis  que  dans  les  contrées  équatoriales,  où  l'excès 
de  la  température  entraine  la  débilité  des  forces  digestives,  on  en  fait  un 
usage  qui  très-souvent  va  jusqu'à  l'abus,  dans  nos  climats  on  en  use  avec 
plus  de  modération.  Il  est  surtout  indiqué  pour  assaisonner  les  aliments. 


748  POIVRE.  —  USAGES. 

tels  que  les  Tiandes  grasses  comme  celle  du  porc,  les  végétaux  (roiè, 
aqueux,  peu  sapides,  afin  d'en  relever  la  saveur  et  d'en  rendre  b 
digestion  plus  facile.  Il  Test  encore  toutes  les  fois  que,  soit  par  le  fait  des 
conditions  extérieures,  soit  en  raison  du  tempérament  et  de  la  coostits- 
tion,  les  fonctions  gastriques  sont  en  quelque  sorte  paresseuses,  cbez  les 
sujets  mous,  lymphatiques,  chez  certains  convalescents.  Au  cootnire,  il 
ne  convient  pas  aux  personnes  d'un  tempérament  irritable  et  dont  les  or- 
ganes digestifs  sont  sujets  à  TinOammation. 

Au  point  de  vue  de  la  thérapeutique,  ce  que  nous  avons  i  dire  de  ses 
usages  doit  se  réduire  presque  à  un  simple  historique,  le  poirrc 
n'étant  plus  guère  employé  de  nos  jours  dans  le  traitement  des  ma- 
ladies. 

A  rintérieur,  il  a  été  administré  dès  Tantiquité  contre  TaDorexie,  les 
flatuosités,  la  pituite,  la  migraine,  et,  en  tant  que  ces  afTections  peuvent 
se  trouver  liées  à  un  état  atonique  des  voies  digestives,  les  boas  effets 
qu'on  lui  a  attribués  dans  ces  sortes  de  cas  pourraient  s'expIiqoerptrse« 
vertus  condimentaires.  On  y  a  eu  recours  aussi  dans  les  cas  d^helmiotbiase 
intestinale,  dans  les  écoulements  uréthraux  ;  les  peuples  orientaux  rem- 
ploient comme  aphrodisiaque.  Mais  son  application  la  plus  importante 
est  celle  qui  a  été  faite  dans  le  traitement  des  fièvres  iniemiUenUs. 
Dioscoride  dit  que  le  poivre  est  bon  «  aux  fièvres  qui  ne  sont  pas  coati- 
nues.  »  Celse  a  exprimé  une  opinion  semblable,  et,  à  leur  tour,  MoUer, 
Rivière,  Bartholin,  ont  confirmé  cette  propriété,  tandis  que  VanSirieten, 
Murray  et  d'autres,  se  sont  élevés  contre  une  telle  pratique  eo  raison 
d'accidents  inflammatoires  graves  dont  ils  avaient  été  témoins.  Ploi'  f^ 
de  nous,  cet  emploi  du  poivre  a  été  repris  et  préconisé  par  Louis  Franck, 
ainsi  que  par  d'autres  médecins  étrangers  à  son  exemple,  et  les  faits  nom- 
breux qu'ils  ont  rapportés  ne  permettent  pas  de  douter  de  Fefficacitédf 
cet  agent  dans  les  fièvres  d'accès.  Depuis  la  découverte  d'ŒrsIed.  on  a 
proposé  de  remplacer  le  poivre,  pour  le  traitement  de  ces  fièvres,  parli 
pipérine,  qui  en  renferme  les  principes  actifs  :  Meli,  à  Ravenne,  Gonlini. 
à  Livourne,  et  d'autres  médecins  italiens,  se  sont  loués  des  effets  qu'ii* 
avaient  ainsi  obtenus.  Cependant,  malgré  les  succès  proclamés  par  ctt\. 
leur  exemple  n'a  pas  été  suivi  et  le  quinquina  est  resté,  aux  veuîdet^»o5. 
le  médicament  par  excellence  à  opposer  à  la  maladie  en  question.  W^î'Qn 
en  terminant,  qu'elle  n'est  pas  la  seule  contre  laquelle  on  ait  voulu  em- 
ployer la  pipérine  :  Magendie  a  proposé  de  substituer  cette  substance  i^ 
poivre  cuhèbe  dans  le  traitement  de  la  blennorrhagie. 

A  l'extérieur,  on  s'est  servi  et  l'on  peut  se  servir  de  la  poudit  i^ 
poivre  noir  pour  saupoudrer  les  cataplasmes,  afin  de  les  rendre  rubéfiant 
ou  l'appliquer  seule  à  la  manière  d'un  sinapisme,  mais  en  prenant  soi" 
de  ne  pas  prolonger  aussi  longtemps  l'application,  à  cause  de  son  actiuli 
plus  grande.  On  en  a  mis  dans  les  cheveux  pour  tuer  les  poux;  oneu- 
rempli  des  cavités  dentaires  suite  de  carie,  afin  d'engourdir  la  douleur 
On  l'a  employée  pour  obtenir  des  effets  astrictifs  sur  la  luette  relicht^ 
etc.,  etc. 


POIX.  749 

Le  poivre  long^  dont  les  effets  physiologiques  sont  analogues  à  ceux  du 
poivre  noir,  mais  moins  énergiques,  peut  servir  aux  mêmes  usages.  En 
Europe,  il  n'est  employé  que  comme  condiment,  mais  dans  Tlnde  on  y 
recourt  aussi  pour  des  usages  médicinaux.  Nous  ne  croyons  devoir 
entrer  dans  aucun  détail  à  cet  égard.  A.  Gaucbet. 

POIX.  —  Le  Codex  fait  mention  de  trois  espèces  de  poix  qui  servent 
en  pharmacie  à  confectionner  un  assez  grand  nombre  de  masses  em- 
plasliques  dont  Temploi  devient  de  plus  en  plus  restreint.  Ce  sont  :  la 
poix  jaune  dite  poix  de  Bourgogne,  la  poix  noire  et  la  poix  résine. 

Poix  de  Bourgogne.  —  La  Poix  jaune  est  une  véritable  térébenthine 
qui  découle  d*incisions  faites  au  tronc  de  VAbies  excelsa  (D.  C),  vulgaire- 
ment nommé  Pesse,  Epicéa,  Faux  Sapin^  et  que  Linné  appelait  à  tort 
Pinus  abies.  Ce  bel  arbre  atteint  jusqu'à  50  mètres  de  hauteur  :  on  le 
rencontre  abondamment  dans  les  régions  montagneuses  du  Centre  de 
l'Europe  et  surtout  dans  les  forêts  du  Nord.  Il  est  principalement  exploité 
en  Finlande,  .en  Suisse,  en  Autriche  et  dans  la  Forêt-Noire.  On  le  trouve 
aussi  en  Bourgogne,  mais  cette  province  n'a  jamais  fourni  de  poix,  et  il  est 
probable  que  ce  nom  a  été  donné  à  la  poix  jaune  Ioi*squ*elle  arrivait  d'Al- 
sace par  la  voie' de  la  Franche-Comté  ou  Comté  de  Bourgogne.  On  la  ré- 
colte en  faisant  au  tronc  de  grandes  entailles  longitudinales,  mais  peu 
profondes  (2  à  4  centimètres),  car,  contrairement  à  ce  qui  existe  chez  le 
Pinus  silvestrisy  les  canaux  sécréteurs  de  F  Abies  sont  surtout  répandus 
dans  le  parenchyme  cortical,  tandis  que  leliber  et  le  bois  n'en  contiennent 
pas.  La  résine  qui  s'écoule  est  recueillie  sur  l'arbre  au  moyen  d'uninstru- 
ment  spécial,  on  la  purifie  grossièrement  en  la  fondant  avec  de  l'eau  dans 
une  chaudière,  ou  bien  au  contact  de  la  vapeur  d'eau,  puis  en  la  soumet- 
tant à  la  presse. 

La  véritable  poix  de  Bourgogne  est  d'un  jaune  foncé,  solide  et  cassante 
à  froid;  malgré  sa  dureté  elle  se  moule  dans  les  vases  qui  la  contiennent; 
elle  possède  une  odeur  aromatique  particulière  et  agréable  qui  se  déve- 
loppe par  la  chaleur,  et  une  saveur  douce,  parfumée,  non  amère 
(Guibourg).  Elle  est  incomplètement  soluble  dans  l'alcool  à  86^  avec 
lequel  elle  donne  une  solution  rougeâtrc  et  amère  ;  elle  se  dissout  plus 
facilement  dans  l'alcool  absolu,  l'acétone  et  l'acide  acétique  crisialli- 
sable. 

Elle  retient  une  quantité  plus  ou  moins  grande  d'huile  essentielle 
formée  par  un  carbure  d'hydrogène  C*^I1"  qui  est  accompagné  d'une 
petite  proportion  d'un  corps  oxygéné  analogue  au  camphre.  La  partie 
solide  est  constituée  par  une  résine  amorphe  qui  donne  par  hydratation 
de  l'acide  abiétique  comme  toutes  les  résines  des  conifères. 

La  plupart  du  temp^  on  substitue  à  la  poix  de  Bourgogne  naturelle  un 
produit  artificiel,  désigné  sous  le  nom  de  poix  blanche,  obtenu  en  fon- 
dant  et  brassant  sous  Teau  un  mélange  de  galipot  et  de  térébenthine,  ou 
en  battant  avec  de  l'eau  de  la  colophane  fondue  et  de  l'huile  de  palme. 
L'eau  interposée  rend  le  mélange  opaque;  cette  poix  factice  est  livrée  au 


750  POIX. 

commerce  dans  des  Tessies.  Elle  a  une  saveur  amère  et  une  odeur  de 
térébenthine  ;  elle  est  moins  active  que  la  véritable. 

La  poix  de  Bourgogne  adhère  fortement  à  la  peau  ;  en  couche  un  peu 
épaisse  elle  s* étend  en  dehors  du  point  d'application  ;  ce  défaut  disparaît 
quand  on  Tadditionne  d'un  quart  de  son  poids  de  cire  jaune.  C'est  ce  mé- 
lange qui  constitue  Vemplâtre  de  poix  de  Bourgogne.  Cette  masse  em- 
plastique  étendue  sur  une  peau  ou  sur  du  sparadrap  est  souvent  em- 
ployce  dans  la  médecine  populaire  contre  les  douleurs  rhumatismales 
musculaires;  elle  n'agit  qu'avec  lenteur,  mais  finit  par  provoquer  ée 
vives  démangeaisons  et  finalement  une  légère  éruption  vésicuieuse.  Od 
obtient  un  révulsif  énergique  qui  n'est  même  pas  sans  danger,  i  can$« 
des  cicatrices  qu'il  peut  laisser,  en  recouvrant  sa  surface  d*une  quantité 
de  poudi*e  d'émétique  qui  varie  de  0,50  à  1  gramme  suivant  la  gran- 
deur; c'est  là  l'emplâtre  de  poix  de  Bourgogne  stibié.  Dans  sa  prépara- 
tion il  est  important  de  fixer  la  poudre  à  la  surface  de  l'emplâtre  en 
ramollissant  la  surface  de  celui-ci  avec  quelques  gouttes  d'essence  de 
térébenthine  dans  laquelle  on  a  délayé  l'émétique,  ou  bien  en  y  passant 
une  légère  couche  d'axonge. 

La  poix  jaune  entre  dans  la  confection  des  emplâtres  agglutinatif ^ 
di  acétate  de  cuivre,  céroëncy  de  ciguë  et  de  diachylon  gommé. 

Poix  noire.  —  Lorsqu'on  brûle  incomplètement,  dans  un  fonr  spé- 
cial non  ventilé,  la  paille  qui  a  servi  à  filtrer  et  à  purifier  la  ièrêben- 
thine  et  le  galipot,  ou,  d'une  façon  générale,  tous  les  résidus  de  la  fabri- 
cation de  l'essence  de  térébenthine,  on  obtient  un  goudron  épais  qui« 
abandonné  à  lui-même,  se  sépare  en  deux  couches  :  la  supérieure,  liquide, 
constitue  l'huile  de  poix  ;  l'autre,  presque  solide,  est  portée  à  rébiillitiun 
jusqu'à  ce  qu'elle  devienne  cassante  après  refroidissement  ;  c*esl  cette 
dernière  matière  qui  constitue  la  poix  noire. 

Dans  la  Finlande  et  le  nord  de  la  Russie  on  soumet  maintenant  le> 
racines  et  les  parties  inférieures  du  tronc  des  Pins  à  une  distillation  sèc\\e 
dans  d'énormes  alambics  en  tôle  épaisse.  Celte  opération  fournit  une 
grande  quantité  d'essence  de  térébenthine,  d'acide  pyroligneui  et  de 
goudron  végétal.  Ce  dernier  donne  à  la  distillation  de  Tliuile  de  goudron 
et  un  résidu  de  poix  noire,  La  poix  noire  est  donc  chiniiqucment  consti- 
tuée par  les  produits  les  moins  volatils  du  goudron  ;  soumise  elle-nièrne 
à  la  distillation  sèche,  elle  donne  de  la  naphtaline,  de  l'authracène  et  de 
la  paraifine. 

Elle  possède  une  odeur  particulière  et  désagréable,  très-différente  de 
celle  du  goudron  ;  sa  saveur  est  à  peu  près  nulle  ;  elle  se  dissout  dans  les 
alcalis  caustiques  et  dans  l'alcool  en  donnant  avec  ce  dernier  une  solu- 
tion foncée  qui  rougit  franchement  le  papier  de  tournesol.  Cette  réactiuiï 
acide  ne  permet  pas  de  la  confondre  avec  le  brîii  retiré  du  goudron  de 
houille.  Nous  ne  croyons  pas  du  reste  à  la  possibilité  de  substituer  com- 
mercialement cette  sorte  à  la  poix  noire  véritable. 

Cette  poix  entre  dans  la  formule  de  V onguent  basilicuviy  de  Vemplâtre 
céroëne  et  de  Vonguent  brun,  vulgairement  appelé  onguent  de  la  mère. 


POIX.  751 

PoiX'résine.  —  La  térébenthine  distillée  à  feu  nu  donne  de  l'essence 
et  laisse  comme  résidu  de  la  colophane.  Si,  au  lieu  de  soutirer  simple- 
ment celle-ciy  on  la  brasse  fortement  avec  de  Teau,  on  obtient  un  pro- 
duit opaque  d'une  couleur  jaune  sale  qui  porte  le  nom  de  poix-résine 
ou  résine  jaune.  Une  autre  sorte  de  poix-résine  se  prépare  en  fondant 
ensemble  trois  parties  de  galipot  et  une  de  colophane. 

La  résine  jaune  fait  partie  des  substances  qui  servent  à  préparer  Y  onguent 
d'AUhaeay  V emplâtre  de  gomme  ammoniaque  et  V emplâtre  de  Vigo. 

Toutes  ces  résines  doivent  être  purifiées  pour  l'usage  pharmaceutique. 
Le  Codex  prescrit  de  le  faire  en  les  fondant  à  une  douce  chaleur  et  pas- 
sant avec  expression  à  travers  une  toile.  E.  Villejean. 


FIN  DU  TOME  VISGT-lICITIÈME 


TABLE  DES  AUTEURS 

AVEC  INDICATION  DES  ARTiaES  CONTENUS  DANS  LE  TOME  VINGT-HUmtIL 


BALZER  (F.)  ....    PnEimonE,     broncho-pneumonie,   ;  520-593;    pneumonie    chrooi^ 

594-621. 

BERGERON  (G.).   .  .     Plaie,  questions  médico-légales  relatives  aux  pages  122-127. 

DESPRÉS PiKCKS,  25-30. 

D*HEILLY  (E.).  .   .    .     Pledrodtkie,  238-241. 

DIEULAFOY(G.).  .   •     PoiTBiKE,  thoraccntèse,  734. 

FERNET Plkvbe,  pathologie.  241  ;  vices  de  conformation,  242  ;  gangrène,  242  ; 

tuberculose,  245;  carcinose,  250;  tumeurs  diverses,  liydatides,  254  ; 
maladies  secondaires,  258  ;  épauchements  dans  la  cavité  pleurale, 
200;  hydrothorax,  261  ;  pneumothorax,  268-285. 

FERNET  ET  D'HEILLY.    Pleurésie,  146;  p.  ai^uê  primitive,  147;  p.   aiguës  secondaires,  20i  : 

p  rhumatismale,  203;  p.  purulente,  2U5;p.  héuiorrbagique,  ±20; 
p.  chronique,   229  ;  p.  chronique  secondaire,  232. 

QAUCHET Poivre,  action  physiologique,  usages,  emploi  thérapeutique,  747. 

HARDY  (A.) PiTïRUsis.  30-42. 

HlRTZ(Hipp.].   .   .    .     PicEUMATOSE,  374-381. 

LABAT Plombières,  367-374. 

LÉPINE  (R.)  ....     P.NEDNOME  lobaike  aigce,  381  ;   anatomic    pathologique,   382  :  variéié^ 

aualoiniques,  585;  localisation  des  lésions,  388;  lésions  concomitante», 
389  ;  étiologie,  391  ;  pneumonies  secondaires,  403  ;  (abJeau  et  marche 
de  la  maladie,  405  ;  symptomatologie  spéciale,  407-436  ;  variété  de 
marclio  et  variétés  symptomatiques,  436-453;  espèces,  laiuK, 
453-403;  terminaisons,  463  ;  complications,  471;  diagnostic,  485; 
pronostic  494;  traitement,  501. 

LUTON Plétuore,  128;  physiologie  pathologique,  132;  applications  cliniquesJ38. 

—  PoiTRixE,  séméiologie,  650-681. 

MANOUVRIEZ  (A.).   •     Plomb,   etlets  toxiques,  empoisonnement  9\^u,    307-310:   intoxication 

chronique,  310-345  ;  colique  sèche,  345-346;  prophylaxie  du  >atur- 
nisme,  346-349;  traitement,  54U-3ij4  .Emploi  thérapeutique,  554-3ri9. 

MARCHAL  (E.).  .   .   .     Placenta,  anatomie,  43-54;  physiologie,   ^4-57;   palhologie.  57;  am*- 

malie  de  développement,  59;  inflammation,  01  ;  lix)uliles  de  circula- 
tion, 63  ;  dégénérescences,  67  ;  lésions  syphilitiques,  75. 

MERLIN  (L.)  ....  PuiTRiNE,  anatomie,  621-648;  phy>iolo^'if>,  64X-6ÔO  ;  patliuloçie  chirur- 
gicale, 681  ;  lésions  Iraumatiques,  681  ;  contusion,  084  ;  plaies  non 
pénétrantes,    685-690  ;  plaies  pénétrantes,  690-717  ;  abcès,  717. 

DRY  (E.) Pileux  (Système),  1-iO;   —  Pilocarmne  (jalwrandi).  10-21. 

PRtJNIER  (L.).  .   .    .     Plomb,  état    naturel,   extraction,    propriétés    physiques    et  chimiques, 

usages,  combinaisons,  sels,  caractères,  séparations  d'avec  d'auln-s  mé- 
taux, dosage,  28r>-506  ;  cliimie  médico-légale,  362-367. —  I'oivrc,  744. 

ROCHARD  (J.).  .  .  .  Plaie,  77  ;  p.  par  instruments  tranchants,  77;  p.  par  instruments  pi- 
quants, 80;  p.  par  instruments  conlondAUs ,  87  ;  p.  par  arrachement, 
ll2;  p.  laites  parles  armes  emj)oi»onuées,  110;  p.  des  analoiui^tesj 
120-122. 

VILLEJEAN Pilules,  21-23.  —  Pimemt,  23-24.  —  Poix,  748. 


21236.  —  Typographie  A.  Lahure,  rue  de  Fleuius,  9,  à  Paria.